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Déclaration du Procureur concernant la requête aux fins de réexamen déposée par l’Accusation dans l’affaire Perišić

BUREAU DU PROCUREUR
DECLARATION
(Destiné exclusivement à l’usage des médias. Document non officiel.)
La Haye, 3 février 2014

Déclaration du Procureur concernant la requête aux fins de réexamen déposée par l’Accusation dans l’affaire Perišić

Le Bureau du Procureur a déposé aujourd’hui devant la Chambre d’appel du TPIY une requête par laquelle il demande à cette dernière de réexaminer sa décision d’acquitter Momčilo Perišić, ancien chef d’état‑major de l’armée yougoslave, qui était accusé d’avoir aidé et encouragé des crimes commis à Sarajevo et à Srebrenica entre 1993 et 1995.

Dans notre requête, nous faisons valoir que les déclarations de culpabilité et la peine de 27 ans d’emprisonnement prononcées à juste titre contre Momčilo Perišić ont été annulées à tort et que cette erreur doit être corrigée afin de réparer l’injustice grave faite non seulement aux dizaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont été tués ou blessés à Sarajevo et à Srebrenica, mais aussi à leurs familles.

Le dépôt, après mûre réflexion, de cette requête est une conséquence directe de l’Arrêt Šainović, prononcé le 23 janvier 2014, dans lequel la Chambre d’appel du TPIY a, sans équivoque, pris le contre-pied de la conclusion erronée tirée dans l’Arrêt Perišić selon laquelle le fait que l’aide apportée vise précisément à faciliter les crimes est un élément de l’aide et l’encouragement. C’est sur le fondement de cette conclusion que les déclarations de culpabilité pour aide et encouragement prononcées par la Chambre de première instance ont été infirmées en appel et que Momčilo Perišić a été, à tort, acquitté.

Depuis que l’Arrêt Perišić a été rendu en février 2013, mon Bureau a soutenu avec constance et vigueur que la conclusion voulant que l’aide apportée vise précisément à faciliter les crimes est erronée et qu’elle devrait être infirmée. Devant la Chambre d’appel saisie de l’affaire Šainović, nous avons maintenu que cette conclusion n’a aucun fondement en droit international coutumier, est contraire à la jurisprudence constante du Tribunal, n’est pas un principe juridique rigoureusement appliqué et met à mal le respect du droit international humanitaire.

La Chambre d’appel du TPIY saisie de l’affaire Šainović a accepté nos arguments et conclu que l’Arrêt Perišić « s’oppose directement et essentiellement » à la jurisprudence actuelle et au droit international coutumier. La même conclusion a été tirée par la Chambre d’appel du Tribunal spécial pour la Sierra Leone dans l’Arrêt Taylor.

En infirmant la conclusion erronée de l’Arrêt Perišić, la Chambre d’appel a démontré son indépendance, son impartialité et sa capacité de mener une réflexion critique, renforçant ainsi le système de justice internationale et l’état de droit. Mon Bureau demande à la Chambre d’appel d’entreprendre ce qui doit l’être en vue de corriger l’erreur à présent confirmée en réexaminant l’Arrêt Perišić et en se prononçant sur la responsabilité pénale de Momčilo Perišić pour avoir aidé et encouragé les crimes commis à Sarajevo et à Srebrenica, en appliquant le critère juridique qui convient.

Nous reconnaissons que le réexamen est une mesure extraordinaire. Mais nous n’avons d’autre choix que de le demander. Mon Bureau reste déterminé à user de tous les mécanismes juridiques permettant que soient rendues des décisions équitables reflétant comme il convient la culpabilité des accusés traduits devant le Tribunal. Nous partageons l’avis du Juge Shahabuddeen qui écrivait, dans une affaire antérieure portée devant le TPIY : « [I]l faut prévoir la possibilité de corriger une erreur judiciaire manifeste, dans une institution qui a pour mission de faire triompher la justice pénale internationale dans une région qui en a bien besoin. » Réexaminer l’Arrêt Perišić contribuera à ce que justice soit rendue aux victimes, ce qui est l’objectif fondamental du Bureau du Procureur, du Tribunal et de la justice pénale internationale dans son ensemble.