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La Chambre d’appel confirme partiellement les déclarations de culpabilité prononcées contre Dragomir Milošević et réduit sa peine à 29 ans d’emprisonnement

Communiqué de presse
CHAMBRE D'APPEL
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
 

La Haye, 12 novembre 2009
NJ/MOW/1338f


La Chambre d’appel confirme partiellement les déclarations de culpabilité prononcées contre
Dragomir Milošević et réduit sa peine à 29 ans d’emprisonnement

 

Dragomir Milošević

La Chambre d’appel a partiellement confirmé aujourd’hui les conclusions rendues par la Chambre de première instance dans l’affaire Dragomir Milošević. Cet ancien général de l’armée des Serbes de Bosnie avait été reconnu coupable de crimes perpétrés contre la population civile de Sarajevo lors de la seconde partie du siège de la capitale de Bosnie-Herzégovine (siège qui a duré de 1992 à 1995).

La Chambre d’appel a également partiellement accueilli les moyens d’appel soulevés par Dragomir Milošević et ramené la peine de 33 ans d’emprisonnement infligée par la Chambre de première instance à 29 ans d’emprisonnement. Le seul moyen d’appel de  l’Accusation qui demandait que Dragomir Milošević soit condamné à la réclusion à perpétuité, a été rejeté dans son intégralité.

Dragomir Milošević était commandant du corps Sarajevo-Romanija (SRK) de l’armée des Serbes de Bosnie (VRS) qui a encerclé Sarajevo et maintenu ses habitants prisonniers pendant les trois ans et demi qu’a duré le conflit. Dragomir Milošević a succédé à son ancien supérieur Stanislav Galić à la tête du SRK en août 1994, poste qu’il a occupé pendant 15 mois, jusqu’à la fin du conflit en novembre 1995.

La Chambre de première instance avait déclaré Dragomir Milošević coupable de crimes contre l’humanité et de violations des lois ou coutumes de la guerre. Elle l’avait reconnu coupable de cinq chefs de terrorisation, de meurtre et d'actes inhumains. Ces crimes ont été perpétrés lors d’une campagne de tirs isolés et de bombardements ayant causé la mort d’un nombre considérable de civils dans la capitale de Bosnie, assiégée par les forces serbes. Dans le jugement rendu en décembre 2007, la Chambre de première instance avait déclaré Dragomir Milošević non coupable de deux chefs d’attaque illégale contre la population civile, estimant que le cumul de ces chefs était impossible, car les éléments du crime que constitue l’attaque illégale contre des civils sont entièrement compris dans le crime de terrorisation. Après avoir corrigé les erreurs de droit qu’a commises la Chambre de première instance concernant les éléments du crime de terrorisation, la Chambre d’appel a conclu que l’accusé pouvait être déclaré coupable des deux crimes. Toutefois, elle n’a pas poursuivi son analyse, l’Accusation n’ayant pas interjeté appel concernant le cumul de déclarations de culpabilité.

La Chambre d’appel a remplacé les déclarations de culpabilité prononcées contre Dragomir Milošević pour avoir planifié et ordonné des tirs isolés contre la population civile par des déclarations de culpabilité prononcées chacune sur la base de l’article 7 3) du Statut. La Chambre d’appel a jugé que, si les moyens de preuve retenus par la Chambre de première instance ne permettaient pas de conclure que Dragomir Milošević avait planifié et ordonné les tirs isolés, sa responsabilité de supérieur hiérarchique pour ne pas avoir empêché la commission de ces crimes par ses subordonnés et n’en avoir pas puni les auteurs était établie au-delà de tout doute raisonnable.

La Chambre d’appel a confirmé la majorité des déclarations de culpabilité rendues par la Chambre de première instance pour avoir ordonné le bombardement, pendant 15 mois, de la population civile de Sarajevo, à l’exception de celles prononcées pour le bombardement du marché aux puces de Baščaršija survenu le 22 décembre 1994, celui de l’immeuble BITAS le 22 août 1995 et celui du marché de Markale le 28 août 1995. La Chambre a en outre conclu que les déclarations de culpabilité prononcées contre Dragomir Milošević pour avoir ordonné les bombardements rendaient compte de la totalité de son comportement criminel et qu’il ne convenait pas dès lors de le déclarer coupable pour avoir planifié ces mêmes crimes.

S’agissant du bombardement du marché aux puces de Baščaršija, la Chambre d’appel a conclu que les deux obus qui ont explosé au marché avaient été tirés du sud-est. Toutefois, seul un témoin, dont l’avis se fondait uniquement sur le son d’un obus au moment où il avait été tiré, a pu déterminer avec précision l’origine de ces tirs. Sachant que l’ABiH et le SRK avaient des positions dans le secteur d’où provenait l’obus, la Chambre d’appel a été d’avis qu’une analyse de la charge aurait pu permettre de déterminer, avec une plus grande précision, l’origine du tir. La Chambre de première instance n’a pas pris en compte les failles dans les éléments de preuve pertinents et n’a pas exposé clairement les motifs qui l’avaient conduit à écarter d’autres conclusions possibles sur l’origine des tirs. Par conséquent, la Chambre d’appel a estimé que « alors que les éléments de preuve en l’espèce auraient pu conduire une Chambre de première instance raisonnable à conclure qu’il était plus que vraisemblable que les obus qui avaient frappé le marché aux puces le 22 décembre 1994 avaient été tirés à partir d’un territoire détenu par le SRK, ils ne suffisaient pas pour étayer une telle conclusion au-delà de tout doute raisonnable. »

S’agissant du bombardement de l’immeuble BITAS et du marché de Markale, qui a eu lieu alors que Dragomir Milošević était hospitalisé à Belgrade entre le 6 août et le 10 septembre 1995, la Chambre d’appel a noté que pendant cette période, c’était son chef d’état-major, Čedomir Sladoje, qui était chargé du commandement du SRK à Sarajevo et donnait les ordres à la place du commandant. La Chambre d’appel a conclu dès lors que, même si Dragomir Milošević avait officiellement conservé son grade et ses fonctions, l’autorité sur le terrain était exercée par son remplaçant. En outre, la Chambre d’appel a jugé « déraisonnable la déduction de la Chambre de première instance selon laquelle Dragomir Milošević a ordonné ces deux bombardements au motif que ces bombardements étaient similaires à ceux survenus en sa présence ».

Le Président de la Chambre d’appel a précisé que « en raison des acquittements prononcés pour le bombardement, le 22 août 1995, de l’immeuble BITAS et le bombardement, le 28 août 1995, du marché de Markale, la Chambre d’appel n’a pas à examiner les griefs présentés par Dragomir Milošević à propos des victimes de ces bombardements et de la participation du SRK à ceux-ci. A cet égard, les conclusions de la Chambre de première instance à ce sujet demeurent inchangées ».
La Chambre d’appel a rejeté l’argument de Dragomir Milošević selon lequel Vojničko Polje, Alipašino Polje, Dobrinja, Sedrenik, Hrasnica et Martin Dvor étaient des secteurs militaires dans la ville de Sarajevo. La Chambre a également rejeté son argument selon lequel les tramways n’étaient pas délibérément pris pour cibles par les tireurs isolés du SRK. Dragomir Milošević n’est pas parvenu à démontrer que la Chambre de première instance avait commis une erreur en concluant que le SRK avait bombardé la rue Livanjska le 8 novembre 1994. La Chambre d’appel a en outre rejeté les arguments de Dragomir Milošević concernant le statut de civil des victimes d’un certain nombre de bombardements et de tirs isolés.

La Chambre d’appel a rejeté les neuvième, dixième et onzième moyens d’appel de Dragomir Milošević relatifs à la possession et à l’utilisation de bombes aériennes modifiées  au cours de la période visée par l’acte d’accusation, y compris dans le cas du bombardement du bâtiment de la télévision le 28 juin 1995. La Chambre de première instance avait qualifié ces bombes de « totalement inappropriées et extrêmement puissantes ».

La Chambre d’appel a rejeté les appels interjetés par Dragomir Milošević et par l’Accusation contre la peine infligée par la Chambre de première instance. Elle a conclu d’office que la Chambre de première instance avait commis une erreur en retenant les mêmes éléments pour apprécier la gravité des crimes et les circonstances aggravantes en l’espèce. La Chambre d’appel a toutefois estimé que cela n’avait aucune incidence sur la peine.

S’agissant de l’incidence des autres conclusions tirées par la Chambre d’appel, notamment concernant les modes de participation de Dragomir Milošević au crime, le Juge Fausto Pocar, Président de la Chambre, a déclaré : « Dragomir Milošević, qui était le commandant, ne s’est pas contenté de tolérer que ces crimes soient commis. En maintenant et en intensifiant la campagne dirigée contre la population civile de Sarajevo pendant toute la période couverte par l’acte d’accusation, il a continué d’encourager ses subordonnés à commettre ces crimes contre des civils. Ceci ne justifie dès lors aucune réduction de peine. » La Chambre d’appel a cependant estimé que l’annulation des déclarations de culpabilité de l’accusé s’agissant de trois bombardements, dont celui du marché de Markale, avait une incidence, fût-elle limitée, sur la culpabilité générale de Dragomir Milošević. La Chambre d’appel a par conséquent réduit sa peine à 29 ans d’emprisonnement.

Le Juge Liu Daqun a joint une opinion partiellement dissidente s’agissant du crime de terrorisation, formulant également un certain nombre de considérations relatives à la peine.

La période que Dragomir Milošević a passée en détention préventive au quartier pénitentiaire sera déduite de la durée totale de sa peine. Il restera au quartier pénitentiaire jusqu’à ce que le Président ait choisi l’État dans lequel il purgera le reste de sa peine. Dragomir Milošević s’est rendu le 3 décembre 2004. Son procès s’est ouvert le 10 janvier 2007 et a pris fin au mois d’octobre de la même année.

Le prédécesseur de Dragomir Milošević à la tête du SRK, Stanislav Galić, a été condamné à la réclusion à perpétuité par la Chambre d’appel en novembre 2006. Depuis sa création, il y a seize ans, le Tribunal a mis en accusation 161 personnes pour des crimes de guerre perpétrés sur le territoire de l’ex-Yougoslavie. Les procédures à l’encontre de 121 d’entre elles ont pris fin.

Les procédures concernant 41 accusés sont actuellement en cours. Vingt-quatre personnes sont actuellement jugées en première instance, sept autres attendent le prononcé du jugement et 14 sont en appel. Zdravko Tolimir est le seul accusé placé sous la garde du Tribunal dont l'affaire est encore au stade de la mise en état. Deux accusés, Ratko Mladić et Goran Hadžić, sont en fuite et doivent être arrêtés et transférés devant le Tribunal à La Haye.

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La version intégrale du résumé de l’arrêt peut être consultée à partir du lien suivant:

http://www.icty.org/x/cases/dragomir_milosevic/acjug/fr/091112_summary_fr.pdf

 

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