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Jugement de la Chambre de première instance III dans l'affaire "Kordic & Cerkez".

Communiqué de presse
 CHAMBRES
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
 

La Haye, 26 février 2001
CC/S.I.P./567-f


Jugement de la Chambre de première instance III dans l'affaire "Kordic & Cerkez".

 

DARIO KORDIC CONDAMNÉ à 25 ANS D’EMPRISONNEMENT
MARIO CERKEZ CONDAMNÉ à 15 ANS D’EMPRISONNEMENT

L’intervention de la Croatie dans le conflit armé en Bosnie centrale établie. Des attaques du HVO "participaient d’un dessein ou d’un plan commun… afin de procéder au nettoyage ethnique des Musulmans dans la vallée de la Lasva". Dario Kordic était “un dirigeant régional et s’est rallié avec enthousiasme c cette campagne en planifiant, en préparant et en ordonnant des actes de persécution qui relevaient de son autorité".
Mario Cerkez “en tant que commandant de la Brigade Viteska, a participé aux attaques contre Vitez, Stari Vitez et Veceriska…et n’a pas pris les mesures nécessaires pour empccher que ces attaques ne soient commises et n’a pas puni les personnes qui en étaient responsables".

Veuillez trouver ci-dessous le texte intégral du résumé du jugement tel que lu par le Président May à l’audience de ce jour

La Chambre de première instance rend aujourd’hui son jugement. Il s’agit de la cinquième affaire dont le Tribunal a eu à connaître concernant les événements qui se sont produits en 1992 et 1993 dans la vallée de la Lasva.

Cette affaire s’inscrit dans le cadre du conflit qui a opposé à l’époque les Musulmans de Bosnie aux Croates de Bosnie en Bosnie centrale. Les accusés ont tous deux joué un rôle éminent dans ce conflit. Dario Kordic était un homme politique, décrit comme le plus important de la région. Mario Cerkez était un militaire et il commandait une brigade des forces armées croates de Bosnie. Les accusations portées contre eux découlent des événements qui se sont produits pendant le conflit.

L’acte d’accusation renferme 44 chefs ; il retient, à l’encontre de chacun des accusés, huit infractions graves aux Conventions de Genève, dix violations des lois ou coutumes de la guerre et quatre crimes contre l’humanité. Les deux premiers chefs d’accusation reprochent aux accusés des persécutions, un crime contre l’humanité. Les autres chefs portent sur des infractions telles que les meurtres, les traitements inhumains, les mises en détention et les destructions. Il est allégué dans l’acte d’accusation que les accusés ont participé à une campagne généralisée ou systématique de persécution contre les Musulmans de Bosnie de cette région, campagne qui a culminé avec la série d’attaques dont des villes et villages de la vallée de la Lasva et des environs ont été la cible pendant deux ans. De nombreux civils musulmans ont été tués, gravement blessés ou placés en détention. Dans le même temps, leurs maisons étaient incendiées, leurs villes, villages et lieux de culte détruits et leurs biens pillés.

La défense des deux accusés a consisté à nier purement et simplement les accusations portées contre eux. Ils ont non seulement décliné toute responsabilité dans les crimes qui leur sont reprochés mais ils ont même nié que les crimes aient été commis. En conséquence, la Chambre de première instance a dû déterminer si ces crimes ont été commis et, le cas échéant, si les accusés sont coupables de ceux qui leur sont reprochés.

Il s’en est suivi un procès extrêmement long, qui a duré 20 mois et au cours duquel de très nombreux éléments de preuve ont été soumis à la Chambre. Au total, 241 témoins ont déposé, et 4 500 pièces à conviction ont été produites. Le compte rendu d’audience compte 28 000 pages.

Ce qui suit est un résumé du Jugement écrit, mais n’en fait pas partie. Ce Jugement est disponible aujourd’hui.

Tout d’abord, quelques points de droit. La Chambre de première instance conclut qu’à l’époque visée, il existait en Bosnie centrale un état général de conflit armé. Elle conclut également qu’il y a manifestement un lien entre ce conflit et les crimes recensés dans l’acte d’accusation. La Chambre de première instance conclut qu’en raison de l’intervention de la République de Croatie, ce conflit était international.

La Chambre de première instance estime également que peuvent être qualifiés de persécution des actes qui ne sont pas explicitement énumérés en tant que crimes contre l’humanité à l’article 5 du Statut du Tribunal international. Cependant, ces actes doivent présenter le même degré de gravité que ceux énumérés dans l’article. La Chambre de première instance conclut que deux actes allégués en l’espèce ne présentent pas ce degré de gravité, à savoir les persécutions prenant la forme d’incitation à la haine par la propagande et d’autres moyens et les persécutions dans le travail.

S’agissant maintenant des faits. L’histoire qui nous intéresse commence avec la création en 1990 d’un parti politique croate de Bosnie, l’Union démocratique croate de Bosnie-Herzégovine, ou «HDZ-BiH», qui est une émanation d’une organisation créée en Croatie, le parti nationaliste HDZ. Fin 1991, le HDZ-BiH a instauré en Bosnie une communauté croate distincte, la HZ H-B, dont la Chambre de première instance conclut qu’elle a été créée dans l’intention de l’intégrer, en temps opportun, à la République de Croatie. À son tour, la HZ H-B a créé un autre organe, le Conseil de défense croate, ou «HVO», qui constituait l’instance exécutive et de défense de la communauté croate de Bosnie. Des HVO municipaux ont alors été créés pour exercer le pouvoir exécutif et militaire à l’échelon local.

Pendant ce temps, Dario Kordic a rapidement gravi les échelons du parti politique HDZ-BiH : il est devenu président de ce parti dans sa ville, Busovaca, président de sa communauté régionale et vice-président de la HZ H-B. De son côté, Mario Cerkez a participé c la fondation du HVO à Vitez et il commandait sa brigade locale, la Brigade Viteska.

En 1992, le HVO a commencé à prendre le pouvoir dans toutes les municipalités de Bosnie centrale, en particulier à Busovaca, Vitez et Kiseljak. Il n’a rencontré qu’une faible résistance armée, sauf à Novi Travnik et dans le village d’Ahmici. Lors de ces incidents, Dario Kordic a fait la preuve de son pouvoir tant politique que militaire. La Chambre de premicre instance conclut que fin 1992, à la veille du conflit, Dario Kordic détenait ces deux pouvoirs. Son pouvoir militaire ne tenait pas à un grade formel mais à une position à laquelle il s’était hissé de lui-même. Partant, on ne peut lui attribuer de position précise dans la chaîne de commandement ; il n’est pas suggéré qu’il détenait le pouvoir de mettre au pas ou de sanctionner les soldats, et la Chambre de première instance conclut que sa responsabilité n’est pas engagée en tant que supérieur hiérarchique aux termes de l’article 7 3) du Statut.

Venons-en maintenant à 1993, l’année la plus importante du conflit. Elle s’est ouverte par des négociations de paix et le Plan Vance-Owen. Cependant, la situation a rapidement dégénéré en conflit, d’abord à Gornji Vakuf puis à Busovaca. Le HVO a attaqué cette dernière municipalité en janvier 1993, utilisant l’artillerie et l’infanterie contre des cibles civiles et inaugurant une ligne de conduite pour les attaques ultérieurement lancées contre les villes et les villages. Les preuves produites montrent que Dario Kordic était impliqué dans cette attaque. En avril 1993, Vitez et les villages musulmans de la vallée de la Lasva ont, c leur tour, été attaqués. La Chambre de première instance conclut que les preuves indiquent que ces lieux ont été la cible d’une attaque bien organisée et planifiée, en particulier celle d’Ahmici qui, c l’aube du 16 avril, a conduit au massacre de plus de 100 personnes, dont 32 femmes et 11 enfants, et à la destruction du village. Des attaques similaires ont été menées contre les villages de toute la vallée de la Lasva et la ville de Vitez. La Chambre de première instance conclut que ces attaques participaient d’un dessein ou plan commun conçu et exécuté par les dirigeants croates de Bosnie afin de procéder au nettoyage ethnique des Musulmans de la vallée.

Dario Kordic, en tant que dirigeant politique local, a été partie prenante c ce dessein ou plan, son principal rôle étant celui de planificateur et d’instigateur. En outre, la Chambre de première instance conclut que Dario Kordic était présent le 15 avril lors d’une réunion d’hommes politiques au quartier général du colonel Blaskic, lorsqu’ont été autorisées les attaques d’Ahmici et des autres villages ; elle conclut que Mario Cerkez était présent c une réunion militaire ultérieure lorsqu’ont été élaborés les plans ; et elle conclut également que Dario Kordic avait partie liée avec l’ordre donné par le colonel Blaskic de tuer tous les hommes en âge de porter les armes, d’expulser les civils et d’incendier les maisons d’Ahmici.

Quant au rôle joué par Mario Cerkez le 16 avril, la Chambre de première instance conclut qu’à cette période, la Brigade Viteska était au cśur des combats et que Mario Cerkez la commandait. En tant que commandant, il a participé aux attaques de Vitez, Stari Vitez et Veceriska. Cependant, en dépit de sa présence lors de la réunion militaire du 15 avril, la Chambre de première instance n’est pas convaincue au-delà de tout doute raisonnable qu’il ait une quelconque responsabilité dans l’attaque d’Ahmici. Cette attaque a été le fait du 4e Bataillon de police militaire, qui n’était pas placé sous son commandement.

Les combats autour de Vitez se sont poursuivis après le 16 avril. Le 18 avril, un camion piégé a explosé près de la mosquée de Stari Vitez, tuant au moins 6 personnes et faisant 50 blessés. La Chambre de première instance conclut qu’il s’agissait d’un acte de terrorisme pur et simple, commis par des éléments du HVO de Vitez, mais qu’aucune preuve ne permet d’établir un lien entre cette action et l’un ou l’autre des accusés.

Le 18 avril, le HVO a attaqué les villages de la municipalité de Kiseljak. Ces attaques faisaient partie de l’offensive générale lancée par le HVO contre les Musulmans de cette région et Dario Kordic, en tant que dirigeant politique, était impliqué dans ces attaques.

Le 19 avril, la place du marché de Zenica a été bombardée, faisant ainsi quinze morts et de nombreux blessés. La Chambre de première instance conclut que le HVO était responsable de ces bombardements mais que ceux-ci ne s’inscrivaient pas dans le droit fil des autres attaques, non plus que dans le cadre du plan ou du dessein commun. Aucun lien politique n’a été établi et la Chambre de première instance ne saurait donc conclure à l’implication de Dario Kordic dans cette attaque illégale.

À la fin du mois d’avril, un cessez-le-feu était mis en place, mais, en juin, les combats ont repris en Bosnie centrale. Le HVO a lancé une autre série d’attaques, cette fois-ci contre les villages de la Municipalité de Kiseljak, notamment sur le village de Tulica qui a été détruit et où 12 personnes ont trouvé la mort. La Chambre de première instance conclut que ces offensives étaient une nouvelle concrétisation du plan du HVO visant à assujettir les Musulmans de Bosnie centrale. S’agissant des offensives menées contre les villages au cours du mois d’avril, la Chambre de première instance conclut que les attaques n’auraient pas été lancées sans l’autorisation de la direction politique locale, à savoir Dario Kordic.

En octobre 1993, les événements se sont étendus à la Municipalité de Vares. Le village de Stupni Do se trouve environ à un kilomètre au sud de la ville de Vares. Le 23 octobre, le village a été attaqué et 38 personnes ont trouvé la mort. La responsabilité d’Ivica Rajic et de ses troupes de Kiseljak dans le massacre n’a pas été contestée. Le village a opposé une certaine résistance, mais rien ne saurait justifier ce qui s’est passé. Cependant, la Chambre de première instance conclut que l’influence et l’autorité de Dario Kordic, qui s’exerçaient avant tout dans la vallée de la Lasva, ne s’étendait pas jusqu’à Stupni Do. Ce village ne se trouvait donc pas dans sa sphère de responsabilité et l’attaque ne s’inscrivait dans le cadre d’aucun plan ou dessein commun auquel il a participé.

Lors des offensives lancées par le HVO, des centaines de civils musulmans de Bosnie ont été rassemblés et détenus dans des camps improvisés où les conditions étaient certes variables, mais de manière générale inhumaines. La Chambre de première instance conclut que ces détentions étaient arbitraires et illégales (ce qui s’inscrivait dans le cadre du plan ou dessein commun). En outre, les détenus étaient contraints, sans raison, de creuser des tranchées, ils étaient utilisés comme otages et comme boucliers humains. La Chambre de première instance conclut également qu’en tant que commandant de la brigade de Vitez, Mario Cerkez était responsable de la détention illégale et du traitement inhumain des personnes détenues dans les centres de détention de Vitez, et que Dario Kordic était responsable de la détention illégale de personnes dans les secteurs relevant de sa responsabilité. Cependant, les camps étaient dirigés par l’armée et l’on ne saurait déduire des éléments de preuve produits que Dario Kordic était responsable de la façon dont les détenus étaient traités, ou que ce traitement faisait partie du plan ou du dessein commun.

La Chambre de première instance conclut qu’on retrouve les mêmes destructions et pillages dans tous les endroits attaqués par le HVO. Celui-ci prenait délibérément pour cible les mosquées et autres édifices religieux et scolaires. Ces actes s’inscrivaient dans le cadre du plan commun et les accusés sont impliqués dans ces infractions commises là où ils sont reconnus responsables des attaques.

S’agissant des persécutions, la Chambre de première instance conclut, sur la base de nombreux éléments de preuve, que tout au long de la période couverte dans l’Acte d’accusation, les Musulmans de Bosnie ont été victimes d’une campagne de persécutions en Bosnie centrale. Ces persécutions ont revêtu les formes les plus extrêmes : il s’agit de l’attaque de villes et de villages, accompagnées de destructions, de pillages, de meurtres, de sévices et de détentions. Cette campagne visait à assujettir la population musulmane de Bosnie.

En conséquence, la Chambre de première instance décide de rejeter l’argument de la Défense selon lequel les événements en cause se sont produits dans le cadre d’une guerre civile, que les Croates de Bosnie se défendaient et qu’ils étaient eux-mêmes victimes d’actes de persécution. Le fait que les Croates de Bosnie aient été victimes d’atrocités à titre individuel n’est pas pertinent en l’espèce, même s’il est possible que ces crimes fassent l’objet d’autres poursuites pénales.

S’agissant de la participation des accusés à la campagne de persécution, la Chambre de première instance rend les conclusions suivantes. Quelle que soit la position qu’il ait pu occuper, les éléments de preuve ne permettent pas d’établir que Dario Kordic faisait partie des plus hautes instances dirigeantes des Croates de Bosnie ou qu’il a conçu la campagne de persécution. Dario Kordic était un dirigeant régional et s’est rallié avec enthousiasme au but commun de cette campagne en planifiant, en préparant et en ordonnant les actes de persécution qui relevaient de son autorité.

Nous l’avons dit, la Chambre a conclu que Mario Cerkez, en tant que commandant de la Brigade de Vitez, a participé aux attaques contre Vitez, Stari Vitez et Veceriska. Ces attaques ont marqué l’un des points culminants de la campagne de persécution. L’accusé a pris part à cette campagne en commandant les troupes impliquées dans certains incidents lors de ces attaques ; en tant que tel, l’accusé était coauteur de ces actes.

Venons-en maintenant aux allégations selon lesquelles la responsabilité des accusés, en tant que supérieurs hiérarchiques, serait engagée parce qu’ils n’auraient pas empêché les crimes en cause et puni leurs auteurs. La Chambre de première instance fait remarquer que des civils peuvent être ainsi mis en cause s’il est établi qu’ils avaient l’autorité nécessaire pour empêcher que des crimes ne soient commis et en punir les auteurs. Cependant, comme il a déjà été indiqué, la Chambre de première instance a conclu que Dario Kordic n’avait pas le pouvoir de prévenir ces crimes ou d’en punir les auteurs et qu’en conséquence, sa responsabilité ne pouvait être engagée en vertu de l’article 7 3) du Statut. En revanche, Mario Cerkez avait connaissance des attaques menaçant Vitez, Stari Vitez et Veceriska, menées par les troupes placées sous son commandement. Il n’a pas pris les mesures nécessaires pour empêcher que ces attaques ne soient commises et n’a pas puni les personnes qui en étaient responsables ; par conséquent, il est responsable des infractions commises dans le cadre des attaques contre ces trois localités, en vertu de l’article 7 3) du Règlement.

En dernier lieu, la Chambre de première instance décide de suivre la pratique récemment dégagée par la Chambre d’appel concernant le cumul de déclarations de culpabilité. Partant, les accusés seront acquittés des chefs d’accusation pour lesquels un cumul des déclarations de culpabilité n’est pas envisageable.

La Chambre de première instance se prononce comme suit sur les chefs de l’acte d’accusation :

Chefs d’accusation 1 et 2 : crimes contre l’humanité : persécutions

Chef 1 : Dario Kordic - COUPABLE
Chef 2 : Mario Cerkez - COUPABLE

Chefs d’accusation 3 à 6 : violations des lois ou coutumes de la guerre (attaque illicite de civils).

Chefs 3 et 4 : Dario Kordic - COUPABLE
Chefs 5 et 6 : Mario Cerkez - COUPABLE

Chefs d’accusation 7 à 20 : crimes contre l’humanité, infractions graves aux Conventions de Genève et violations des lois et coutumes de la guerre (meurtre, homicide intentionnel, actes inhumains, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves, traitements inhumains).

Dario Kordic :
Chefs 7, 8, 10 et 12 : - COUPABLE
Chefs 9, 11, 13 : - NON COUPABLE
Mario Cerkez :
Chefs 14, 15, 17 et 19 : - COUPABLE
Chefs 16, 18 et 20 : - NON COUPABLE

Chefs d’accusation 21 et 22 : crime contre l’humanité et infractions grave aux Conventions de Genève (emprisonnement, détention illégale de civils).

Dario Kordic - COUPABLE

Chefs d’accusation 23 à 28 : infractions graves aux Conventions de Genève et violations des lois ou coutumes de la guerre (traitements inhumains, utilisation de boucliers humains et prise d’otages).

Dario Kordic - NON COUPABLE

Chefs d’accusation 29 à 31 : crime contre l’humanité et infractions graves aux Conventions de Genève (emprisonnement, détention illégale de civils, traitements inhumains).

Mario Cerkez - COUPABLE

Chefs d’accusation 32 à 36 :violations des lois ou coutumes de la guerre et infractions graves aux Conventions de Genève (traitements cruels, prise d’otage, traitements inhumains).

Mario Cerkez :
Chefs 32, 34 et 36 : - NON COUPABLE
Chefs 33 et 35 : - COUPABLE

Chefs d’accusation 37 à 42 : infractions graves aux Conventions de Genève, violations des lois ou coutumes de la guerre (destructions de biens à grande échelle, destruction sans motif, pillage).

Chef 37 : Dario Kordic - NON COUPABLE
Chef 38 et 39 : Dario Kordic - COUPABLE
Chef 40 : Mario Cerkez - NON COUPABLE
Chef 41 et 42 : Mario Cerkez - COUPABLE

Chefs 43 et 44 : violations des lois et coutumes de la guerre (destruction ou endommagement d’édifices consacrés à la religion ou à l’enseignement).

Chef 43 : Dario Kordic - COUPABLE
Chef 44 : Mario Cerkez - COUPABLE

S’agissant maintenant de la peine, la Chambre de première instance souhaite faire plusieurs remarques d’ordre général. Elle déterminera les peines appropriées pour chacun des accusés en soulignant que celles-ci tiennent compte des éléments de preuve en l’espèce et du rôle de ces accusés tel que la Chambre a pu l’établir. Les deux accusés ont été reconnus coupables de nombreux crimes qui participent tous du même dessein commun qui a abouti à la persécution et au «nettoyage ethnique» des Musulmans de Bosnie de la vallée de la Lasva et de ses environs. La campagne soutenue qui en est résultée a comporté une série d’attaques aveugles et sauvages contre des villages et des villes, durant lesquelles aucune différence n’était faite entre les victimes : jeunes et vieux étaient tués ou expulsés et leurs maisons brûlées. Il est possible qu’on ne connaisse jamais le nombre exact de morts, mais ils se comptent de toute façon par centaines et celui des expulsés, par milliers. On ne peut imaginer crimes d’une plus grande barbarie. Ceux qui y ont participé doivent s’attendre à des peines d’une sévérité proportionnée à l’outrage ressenti par la communauté internationale.

Dario Kordic : Vous avez joué un rôle important dans les crimes commis. En tant que dirigeant politique régional en Bosnie centrale, investi d’une autorité particulière dans la vallée de la Lasva, vous étiez commandant politique de facto dans la zone où la plupart des crimes ont été commis. Nous l’avons déjà fait observer, la Chambre de première instance n’a pas accepté les dossiers de l’Accusation dans son ensemble et a conclu que vous ne faisiez pas partie des principaux dirigeants de la campagne de persécution. De même, vous avez été acquitté de certaines des infractions qui trouvent leur origine dans des actes individuels de terreur et dans le massacre de Stupni Do. C’est pourquoi, vous n’êtes pas condamné pour avoir orchestré la campagne ni pour en avoir été l’instigateur. Toutefois, vous vous êtes associé à la campagne avec enthousiasme et avez largement contribué aux offensives lancées dans la vallée de la Lasva en 1993, notamment aux ordres donnés d’attaquer Ahmici et les autres villages en avril 1993. Pour la part que vous avez prise à ce terrible épisode, vous méritez un châtiment approprié. Le fait que vous étiez un homme politique et que vous n’avez aucunement participé en fait à l’exécution des crimes ne fait aucune différence. Vous y avez aussi sûrement participé que les hommes qui ont fait feu. Le fait que vous étiez un dirigeant rend même les crimes plus graves. Vous n’avez présenté aucune circonstance atténuante et il n’en existe pas. La Chambre considère que l’ensemble de votre comportement criminel est mieux pris en compte par une peine unique. Dario Kordic, vous ctes condamné à 25 années d’emprisonnement.

Mario Cerkez : Votre situation est différente de celle de votre coaccusé. Vous étiez un soldat et un commandant de rang intermédiaire du HVO. La Chambre de première instance prend note du fait que vous n’aviez aucune expérience préalable du commandement et que rien dans votre vie antérieure ne vous y préparait. Toutefois, vous étiez le Commandant de la brigade Viteska durant les terribles événements qui se sont déroulés dans la vallée de la Lasva, et vous avez mené les assauts qui ont provoqués la mort de civils et la destruction de biens appartenant à ceux-ci. La Chambre de première instance a conclu que vos troupes n’ont pas participé au massacre d’Ahmici, mais vous avez joué un rôle, aggravé du fait de votre position de commandant, dans la campagne de persécutions. Les témoignages favorables concernant votre moralité et votre personnalité, présentés comme circonstances atténuantes, ne peuvent être retenus comme telles dans le cadre de ces crimes internationaux. La Chambre de première instance considère que l’ensemble de votre comportement criminel est mieux pris en compte par une peine unique. Mario Cerkez, vous êtes condamné à 15 années d’emprisonnement.

Le temps que les accusés ont passé sous la garde du Tribunal international, à savoir du 6 octobre 1997 à la date du présent Jugement, sera déduit de la durée des peines à purger.


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