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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-14-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
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5 Mardi 17 mars 1998
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9 L'audience est ouverte à 14 heures 35.
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11 (Audience à huis clos) [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]
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14 M. le Président - Monsieur le greffier, veuillez introduire
15 l'accusé. Monsieur Harmon, vous avez la parole. La semaine sera chargée.
16 Nous avons beaucoup de motions. Nous essaierons de faire une conférence de
17 mise en état. Vous-même avez une préoccupation de calendrier. Nous
18 essaierons de faire tout ce que nous pouvons. La Chambre a également
19 d'autres affaires.
20 Nous aurons demain, avec M. le Juge Riad, une conférence de mise
21 en état dans l'affaire Kordic. Il y a des motions qui ont été déposées par
22 la défense, dont il ne convient pas de parler ici, qu'il faudra examiner
23 rapidement. Cela nous incite à accélérer, lorsque l'on peut, le passage
24 des dépositions des témoins ; bien sûr sans préjudice des droits de
25 l'accusation ni des droits de la défense.
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1 Monsieur Harmon, vous avez la parole pour la poursuite du
2 témoignage de M. Mesic.
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5 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Si
6 M. Mesic peut entrer dans le prétoire, je commencerai immédiatement la
7 poursuite de mon interrogatoire principal.
8 M. le Président - Veuillez faire introduire M. Mesic par
9 l'huissier. C'est en cours ? Très bien.
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11 (Le témoin, M. Mesic, est introduit dans la salle d'audience.)
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13 M. le Président - Monsieur Mesic, bonjour. Vous êtes reposé,
14 vous êtes en forme ?
15 M. Mesic (interprétation). - Je vais très bien, je vous
16 remercie.
17 M. le Président - Maître Harmon.
18 M. Harmon (interprétation). - Bonjour, monsieur Mesic.
19 M. Mesic (interprétation). - Bonjour.
20 M. Harmon (interprétation). - Tout d'abord, pourriez-vous dire
21 aux Juges la date de votre rencontre avec M. Franjo Tudjman et pourriez-
22 vous nous décrire la nature de vos relations avec lui, à la fois vos
23 relations sociales et professionnelles ?
24 M. Mesic (interprétation). - J'ai eu l'honneur de rencontrer
25 Franjo Tudjman en 1970, ou même avant 1970 peut-être. Cela s'est passé à
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1 Matica Hrvatska Nous ne nous sommes connus que très brièvement à cette
2 époque-là. J'ai eu l'occasion de mieux le connaître au cours de la
3 création du Printemps croate et même, par la suite, nous avons eu des
4 rapports plus proches lors de notre retour de prison.
5 Nous nous retrouvions dans des cercles de discussions et, en
6 fait, lors de réunions, parfois à la célébration d'anniversaires ou dans
7 le cadre d'autres faits. Ce n'était pas du tout des réunions politiques,
8 mais nous avons eu l'occasion de nous retrouver à de nombreuses reprises.
9 Nous étions tous des dirigeants du mouvement du Printemps croate.
10 Puis, certains généraux ont pris leur retraite, des généraux de
11 la JNA, du fait de la prise d'importance du nationalisme croate et, dans
12 ce cadre de célébration du départ à la retraite de ces généraux, je
13 pouvais rencontrer Franjo Tudjman.
14 Je ne sais pas si vous voulez que je vous donne d'autres
15 détails. Je ne sais que vous dire d'autre quant à la nature de nos
16 rencontres.
17 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, dans le cadre du
18 gouvernement de
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21 la République socialiste fédérative de Yougoslavie, et dans le cadre du
22 gouvernement de la République de Yougoslavie, avez-vous eu l'occasion
23 d'avoir des contacts avec Franjo Tudjman. Si tel est le cas, veuillez nous
24 décrire la nature de ces contacts.
25 M. Mesic (interprétation). - Lorsque nous nous rencontrions dans
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1 de telles occasions, nous discutions des sujets d'actualité. Nous tentions
2 d'analyser la situation à la fois en ex-Yougoslavie et en Croatie, nous
3 essayions de suivre l'évolution des événements dans le monde d'une façon
4 générale et de prévoir l'évolution de la situation, de savoir dans quelle
5 direction les événements se dirigeaient, et voir notre influence sur
6 l'évolution des événements et notre intervention au vu de ces événements.
7 Il faut également que je précise que Franjo Tudjman prenait
8 toujours part à ces discussions, mais ce n'était pas un homme d'un abord
9 facile. Il était difficile de lui parler parce qu'il tolérait mal les
10 divergences d'opinion. Ce n'était pas vraiment un interlocuteur facile. Il
11 avait des positions extrêmement tranchées, extrêmement fermes.
12 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, au cours de vos
13 rencontres avec le Président Tudjman, a-t-il jamais fait part de ses
14 opinions vis-à-vis de la Bosnie, et le cas échéant, pouvez-vous dire aux
15 juges quelle était la nature de ses opinions ?
16 M. Mesic (interprétation). - Je crois que l'on peut trouver la
17 réponse à votre question dans les livres qu'il a rédigés. Pour résumer un
18 peu les choses, je dirai qu'au cours de ses discussions, et dans d'autres
19 cadres, lorsqu'il parlait en public, il adoptait la position suivante :
20 après la seconde guerre mondiale, il considérait que c'était un grande
21 erreur d'avoir fait de la Bosnie une République.
22 Il pensait que la Bosnie n'aurait pas dû être structurée de
23 cette façon en tant que République autonome, jouissant d'un statut de
24 République distincte. Il pensait qu'il aurait fallu donner à la Bosnie le
25 même statut qui a été donné au Kosovo et à la Voïvodine qui ont été
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1 annexés à la Serbie. Il pensait que la meilleure façon de procéder vis-à-
2 vis des bosniaques, au vu
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5 de leur origine, puisqu'ils avaient pour la plupart des origines croates,
6 était de les annexer à la Croatie. Il aurait voulu que quelque chose soit
7 fait dans ce sens pour que la Bosnie soit associée d'une façon quelconque
8 à la Croatie.
9 M. Harmon (interprétation). - Les opinions dont il vous a fait
10 part quant à l’annexion de la Bosnie à la Croatie, étaient-ce des opinions
11 passées ou récentes ?
12 M. Mesic (interprétation). - Je crois qu'au départ il était très
13 critique vis-à-vis de la direction communiste, parce que les communistes
14 avaient accepté le fait que la Bosnie devienne une entité distincte, un
15 élément constitutif de la Yougoslavie. Donc, au départ, lorsque nous
16 parlions de cela, il n'apparaissait pas qu'il était sur le point de
17 changer d'avis. Même lorsque la Croatie est devenue indépendante, cette
18 idée de la restructuration de la Bosnie-Herzegovine n'a pas été avancée.
19 On pouvait deviner, au vu de certaines déclarations qui avaient
20 été faites, et relatives à la forme très particulière de la Croatie, -vous
21 savez que la Croatie ressemble un peu à un croissant- il apparaissait donc
22 au vu de cette forme, lors de certaines déclarations, que certaines
23 parties de la Croatie manquaient, mais il n'y a eu aucune discussion
24 vraiment sérieuse où il était avancé qu'il fallait changer le statut de la
25 Bosnie.
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1 Mais au fur et à mesure de l'évolution des événements, il est
2 apparu que la Yougoslavie allait peut-être disparaître, étant donné que
3 c'était un Etat multinational, la question s'est posée de savoir comment
4 la Bosnie allait survivre en tant qu'Etat multinational lui aussi.
5 Il semblait qu’il allait être très difficile de maintenir la
6 Bosnie en vie. Telles étaient les opinions exprimées publiquement, mais
7 également au sein de cercles plus restreints.
8 M. Harmon (interprétation). - Et bien, à la fois publiquement et
9 au sein de ces entretiens plus privés, a-t-il émis une opinion selon
10 laquelle certaines régions de la Bosnie appartenaient historiquement à la
11 Croatie.
12 M. Mesic (interprétation). - Je crois que la position de Tudjman
13 était la suivante :
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16 d'après lui, la meilleure chose à faire pour la Croatie et pour l'ensemble
17 de la région, c'était de revenir à la solution de 1983. Il fallait que la
18 Voïvodine, dont les frontières ont été définies à cette époque-là.... En
19 fait, à cette époque-là, les frontières avaient été délimitées. Du fait de
20 la guerre, cela n'avait pas pris forme sur le territoire. Le processus
21 avait été interrompu par la guerre. Bien évidemment, maintenant la
22 Voïvodine fait partie intégrante de la Bosnie-Herzégovine
23 M. Président - C’est 1938 ou 1983 ?
24 L’Interprète - 1938. Il y a eu une erreur en croate.
25 M. Mesic (interprétation). - Oui. C'est à cette époque-là, en
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1 1938, que la Voïvodine a été créée. Comme je l’ai dit, la seconde guerre
2 mondiale a éclaté et la Voïvodine n'a jamais été…, ou les mesures qui
3 avaient été prises relatives à cette région n’ont jamais été appliquées.
4 Suite à la seconde guerre mondiale, la Yougoslavie a été recréée et ce
5 n'était plus un Etat unitaire mais fédéral qui comprenait la Serbie, la
6 Croatie, la Macédoine, le Monténégro, la Slovénie, etc.
7 M. Harmon (interprétation). - Donc, Monsieur Mesic, l'opinion à
8 l'époque était que la Voïvodine devait faire partie de la Croatie, devait
9 être annexée à la Croatie. Est-ce bien cela que vous voulez dire ?
10 M. Mesic (interprétation). - Oui, sa position était que c'était
11 une évolution logique des choses. Cela aurait permis d'éviter un certain
12 nombre de conflits.
13 M. Harmon (interprétation). - Mais vous a-t-il jamais, dans le
14 cadre de vos entretiens ou dans le cadre de rapports professionnels, fait
15 part de ses opinions vis-à-vis des Musulmans en Bosnie ?
16 M. Mesic (interprétation). – Je crois que ses positions en la
17 matière sont bien connues. Il pensait que les Musulmans de Bosnie étaient
18 des Croates à l'origine, des Croates qui s'étaient convertis à l'Islam au
19 cours de l'occupation turque. Cela dit, au fur et à mesure de
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22 l'évolution de la situation, après la déclaration d'indépendance de la
23 Croatie, je crois qu'il y a eu certains points qui ont été mal éclaircis
24 parce que, s’il s'agissait bien de Croates d'origine, nous aurions dû
25 coopérer de façon plus étroite avec eux. Nous avons été en fin de compte
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1 les victimes du même type d'agression.
2 Par la suite, un conflit a éclaté entre les Croates et les
3 Musulmans. Ce conflit a eu des conséquences terribles.
4 M. Harmon (interprétation). - Vous a-t-il jamais fait part de
5 ses opinions à l'égard de Alija Izetbegovic ?
6 M. Mesic (interprétation). – Je connais Alija Izetbegovic. Nous
7 étions sur le même Conseil de la défense dans le cadre de l'ancien
8 système. C'est un homme sage, très avisé, mais ce n'est pas une
9 personnalité dominante. En fait, Izetbegovic a été poussé à entrer dans le
10 monde politique. Je ne crois pas qu'au départ, il y serait allé de sa
11 propre initiative. Franjo Tudjman, je crois, savait cela.
12 Vous savez, M. Tudjman est un général après tout.
13 Peut-être est-ce qui explique le fait qu'il l'ait traité de
14 façon peut-être inappropriée, inadéquate. Il se comportait à son égard
15 comme si M. Izetbegovic ne connaissait rien à la politique. Il avait une
16 attitude condescendante vis-à-vis de lui.
17 M. Harmon (interprétation). - Donc, en fait le général
18 Tudjman... Non, excusez-moi je vais reformuler ma question. Monsieur
19 Mesic, le Président Tudjman était précédemment un général au sein de la
20 JNA, n'est-ce pas ?
21 M. Mesic (interprétation). - Oui.
22 M. Harmon (interprétation). - Vous êtes en train de dire que
23 cela a eu une influence sur la nature de ses rapports avec
24 M. Izetbegovic ?
25 M. Mesic (interprétation). - Il n'avait pas de vue modérée à
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1 l'égard de M. Izetbegovic. Loin de là. Il l'a sous-estimé. Izetbegovic
2 n'était pas à ses yeux un homme
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5 politique. Mais Izetbegovic était un homme très intelligent. Il s'est
6 retrouvé dans un situation où il a été obligé d'agir comme il l'a fait. Il
7 a été élu à la présidence de la Bosnie-Herzegovine à cette époque-là, au
8 moment où le conflit et l'agression à l'encontre de la Bosnie-Herzegovine
9 atteignaient un point culminant.
10 Il n'avait aucun moyen de défense à sa disposition. Peut-être a-
11 t-il pris des mesures incompréhensibles aux yeux de Tudjman. D'un autre
12 côté, la situation dans laquelle se trouvait Izetbegovic était une
13 situation extrêmement complexe, du moins à mes yeux. C'était une situation
14 dans laquelle il était presque impossible de sortir de façon aisée.
15 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous décrire une
16 rencontre qui a eu lieu entre M. Tudjman et M. Milosevic, en 1991, à
17 Karadordjevo ? Pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé lors de cette
18 rencontre et quelles ont été ses conséquences, à la fois vis-à-vis de la
19 politique Croate à l'égard de la Bosnie et d'autres types d'évolution qui
20 se sont faits jour par la suite ?
21 M. Mesic (interprétation). - Je crois que cette rencontre de
22 Karadordjevo a marqué un tournant. Au départ, on pensait qu'il ne pourrait
23 pas y avoir de Bosnie sans Croatie et inversement. Après cette réunion, la
24 chose a un peu évolué.
25 Lors de cette réunion, on a pris acte des premiers succès de la
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1 Serbie. Au départ, cela a été tout à fait toléré par les entités
2 européennes. Je crois que les observateurs externes ont pensé que cela en
3 était fini de la Bosnie et que son sort était scellé. Je crois que c'est
4 de cette situation-là que Tudjman a tiré les conclusions qu'il a tirées
5 par la suite.
6 Pour ce qui est de la rencontre de Karadordjevo plus
7 précisément, j'étais à l’époque membre de la présidence de la Yougoslavie.
8 Au cours d'entretiens avec Bora Jovic, représentant serbe de la présidence
9 de la Yougoslavie, j'ai déclaré qu'en Croatie, nous obtenions des
10 informations selon lesquelles les villages serbes, à savoir les villages
11 en fait à majorité serbe, étaient en train de recevoir des armes et que
12 c'était la JNA qui distribuait ses armes. Ces villages
13
14
15 affirmaient, de plus en plus, leur identité serbe. La JNA, elle aussi,
16 devenait de plus en plus pro-serbe.
17 Il faut se rappeler que la Yougoslavie jouissait de trois
18 facteurs qui avaient favorisé l'intégration de la Yougoslavie : Tito, la
19 JNA et le parti communiste. Tant que ces trois éléments ont été en
20 présence, la Yougoslavie pouvait continuer à fonctionner de façon à peu
21 près satisfaisante. D'abord Tito a disparu de la scène, puis Milosevic a
22 éliminé le parti communiste. C'était un parti yougoslave, mais dominé par
23 les Serbes. Milosevic a non seulement mis un terme à l'existence du parti
24 communiste, mais il a également pris le contrôle de la JNA.
25 Dès ce moment-là, la JNA s'est mise entre les mains de
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1 Milosevic. La JNA se servait dans ses dépôts d'armes pour armer la
2 population serbe. J'ai dit à Bora Jovic que nous avions reçu ces
3 informations et que, d'après nous, c'était une politique suicidaire que
4 menaient les Serbes de Croatie, ainsi que les Serbes de façon générale.
5 J'ai dit que non seulement c'était une politique suicidaire,
6 mais que c'était eux qui allaient perdre le plus au cours des conflits à
7 venir parce qu'une population serbe de 10% ne peut pas résister aux 90%
8 qui se trouvaient en face d’elle. Parce qu’il était évident que les
9 Croates allaient s'armer, eux aussi, et que la situation allait dégénérer
10 jusqu'à la catastrophe. C'étaient les Serbes qui allaient le plus souffrir
11 de la situation.
12 Je lui ai demandé ce qu'il voulait. Il a dit qu'il n'était pas
13 intéressé par les Serbes de Croatie, que nous pouvions faire ce que nous
14 voulions d’eux. Il a également déclaré qu'il n'était pas non plus
15 intéressé par les territoires croates, à savoir les territoires composant
16 l'Etat croate. J’ai dit alors : "Mais qu'est-ce que qui vous intéresse
17 alors" ? Il m'a répondu : "C'est la Serbie qui nous intéresse et c’est 66%
18 de la Bosnie qui nous intéresse, des territoires qui étaient serbes et qui
19 doivent rester serbes."
20 Comme les territoires de la Croatie ne les intéressaient pas ni
21 les Serbes de Croatie, j'ai dit : "Asseyons-nous, essayons d'éviter la
22 guerre. On est en train d'armer la population,
23
24
25 tout peut exploser d'un moment à l'autre. Pourquoi verser du sang si on
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1 peut s'asseoir autour de la table et essayer de négocier une solution ?"
2 Il a dit qu'il était d'accord, mais qu'il fallait d'abord qu'il
3 s'entretienne avec Slobodan Milosevic.
4 J'ai dit que j'allais essayer de contacter Tudjman et je lui ai
5 proposé que, tous les quatre, nous nous réunissions autour d'une table et
6 que nous essayions de voir quels étaient les problèmes des Serbes en
7 Croatie. Cela nous permettrait peut-être d’apporter une solution au
8 problème qui se posait sans avoir recours à un conflit armé. Je savais que
9 nous avions la possibilité de faire cela parce qu'en 1990, en tant que
10 Premier ministre, j'avais essayé d'entrer en contact avec les
11 représentants des municipalités à population majoritairement serbe.
12 A cette époque-là, tous ces représentants des municipalités, à
13 l'exception de Milan Babic, le président de la municipalité de Knin, qui,
14 lui, était directement en contact avec Belgrade et il avait
15 personnellement interdit qu'il y ait des contacts avec moi. Mais pour le
16 reste, je voyais bien que les autres représentants voulaient trouver une
17 solution pacifique aux problèmes qui se posaient.
18 J'ai également dit qu'il fallait trouver une solution au
19 problème bosniaque au niveau international. Ce problème pouvait être
20 résolu par les Nations Unies. D’autre part, j'ai dit que nous aussi, nous
21 devions faire tout ce qui était en notre pouvoir pour éviter la guerre.
22 Etant donné que Slobodan Milosevic a dit qu'il était d'accord pour que
23 nous nous rencontrions, étant donné qu’il a dit que nous pouvions nous
24 rencontrer où nous le voulions, que ce soit dans l’Etat ou à l'extérieur,
25 en un autre endroit, je suis allé à Zagreb.
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1 J'ai parlé à Franjo Tudjman et je lui ai dit que nos deux autres
2 interlocuteurs étaient d'accord et je lui ai demandé s’il voulait lui
3 aussi prendre part à ces discussions. Il a dit qu'il était d'accord.
4 Ensuite, j'ai essayé de savoir comment nous pourrions organiser cette
5 réunion. Mais Tudjman, à un certain moment, nous a dit qu'il allait se
6 rendre à Karadordjevo tout seul.
7 Cela s'est passé le 30 mars 1991. Il a dit qu'il voulait voir
8 par lui-même ce qu'il
9
10
11 voulait. Moi, je n'étais pas d'accord pour cette réunion de Karadordjevo
12 parce que la vingt-et-unième session du congrès s'était tenue à
13 Karadordjevo sous Tito. C’est à ce moment-là que le Printemps Croate
14 s’était vu interdit. Je lui ai dit alors « n'allons pas là-bas, c'est un
15 lieu marqué par des souvenirs désagréables ». Il m’a dit que le lieu de la
16 rencontre avait peu d’importance. L’important était de savoir ce qu’ils
17 veulent.
18 Tudjman est revenu de Karadordjevo ce même jour et nous a dit
19 que l’armée n'allait pas nous attaquer, qu'il avait obtenu des garanties
20 de Veljko Kadijevic, le chef de l'état-major ; qu’il avait obtenu
21 également des garanties de Milosevic. Il a dit aussi qu’il serait très
22 difficile pour la Bosnie de survivre. Il a dit que nous pouvions obtenir
23 des avancées en matière d'obtention de territoires de la Banovine et
24 Tudjman a également dit que Milosevic, dans un geste de grande générosité,
25 avait dit que la Croatie pouvait prendre Cazin Kladusa et Bihac parce
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1 qu’il s’agissait en fait de la « Croatie turque », comme on l’appelait, et
2 que les Serbes n'en avaient pas besoin.
3 J’ai pensé que Milosevic était en train de disposer à son gré de
4 territoires qui ne lui appartenaient pas et j’ai manifesté mon désaccord.
5 C’est la raison pour laquelle, par la suite, j'ai vécu des situations
6 extrêmement désagréables. Je me suis retrouvé dans des situations
7 extrêmement pénibles.
8 A cette époque-là, j'ai aussi dit qu'il y aurait sans doute une
9 guerre assez brève en Slovénie, une guerre plus prolongée en Croatie et
10 que la Bosnie serait plongée dans un véritable bain de sang.
11 Malheureusement, j'ai eu raison sur chacun de ces points.
12 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, à partir de ce
13 jour-là, la politique de la Croatie vis-à-vis de la Bosnie a-t-elle
14 changé ?
15 M. Mesic (interprétation). - La politique de la Croatie partait
16 toujours du principe que la Bosnie était un Etat, qu’elle était une entité
17 et que la Croatie a été la première à reconnaître la Bosnie-Herzégovine.
18
19
20 Mais dans la réalité, objectivement, suite à ce qui s'est
21 produit par la suite, lorsque Milosevic a créé la Republika Srpska sur le
22 territoire de la Bosnie-Herzégovine, la Croatie a créé l'entité croate
23 d’Herceg-Bosna, puis la République, il est clair que cela n'a pas renforcé
24 la Bosnie-Herzégovine. Au contraire, cela a porté atteinte à la Bosnie-
25 Herzégovine. Surtout après l'apparition de Fikret Abdic, après un certain
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1 temps, qui a proclamé l'autonomie de la Bosnie occidentale, c'est-à-dire
2 précisément cette partie de Cazin, Kladusa et Bihac.
3 D’une part, officiellement, on a affirmé la volonté Croate de
4 défendre une Bosnie unifiée et, en fin de compte, nous avons subi la
5 politique de Milosevic car nous avons agi de même que lui. Cela a été
6 fatal pour la Croatie. En effet, 850 000 Croates ont été exilés. A ce
7 jour, restent 350 000 Croates en Bosnie.
8 M. Harmon (interprétation). - Après le retour du Président
9 Tudjman de cette réunion à Karadordjevo avec le Président Kljujic, il vous
10 a dit que la Bosnie allait être divisée entre la Croatie et la Serbie.
11 Est-ce exact ?
12 M. Mesic (interprétation). - Son compte rendu m'a fait
13 comprendre que la Bosnie ne pouvait être maintenue, que nous allions
14 obtenir les frontières de la Banovine, plus Cazin, Kladusa et Bihac. Je
15 pense que c’est ainsi que l'on pouvait interpréter ses dires. Il n'a pas
16 dit qu'il y avait un document écrit, un accord écrit. Il n'en a pas parlé.
17 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, pouvez-vous dire
18 aux Juges si des commissions ont été envoyées pour se mettre d'accord sur
19 les frontières de la Bosnie divisée ?
20 M. Mesic (interprétation). - A l’époque, me semble-t-il, on
21 n’avait pas encore parlé des territoires serbes et croates en Bosnie-
22 Herzégovine. Aucune décision n’était prise encore. Mais il est sûr que des
23 événements ont commencé, événements qui n'étaient pas publics. En d'autres
24 termes, nous étions en guerre avec la Serbie et il n'était pas normal,
25 pour moi, de voir des délégations serbes et croates tenir des négociations
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1 pour négocier sur un troisième territoire, c'est-à-dire la Bosnie-
2 Herzégovine.
3
4
5 J’ai reçu des informations selon lesquelles certains
6 responsables devaient résoudre ce problème des cartes géographiques pour
7 déterminer les territoires des trois entités. Du côté croate, plusieurs
8 personnes ont participé. Mais après plusieurs mois, ces personnes-là
9 quittaient toujours ces fonctions. Elles étaient insatisfaites et
10 pensaient que cela n'était tout simplement pas faisable.
11 Le professeur Nerotic, le professeur Dusan Bilandzic, toutes ces
12 personnes ont abandonné leurs fonctions au sein de ces négociations car
13 elles estimaient que c’était impossible à réaliser. La Bosnie-Herzégovine
14 était comme une peau de léopard et les peuples étaient dispersés dans
15 l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine. Il n’y avait donc pas un seul endroit
16 qui soit entièrement pur sur le plan ethnique, à part une partie de
17 l’Herzegovine, la partie la plus croate qui se situait à cet endroit.
18 Peut-être n’existe-t-il pas d’endroit aussi pur ethniquement en Croatie
19 même que c’est le cas en Herzegovine occidentale.
20 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, pouvez-vous nous
21 parler d'une réunion qui s'est tenue à Graz entre Mate Boban et Radovan
22 Karadzic, une réunion qui s'est tenue le 6 mai 1992 ? Pouvez-vous dire aux
23 juges ce qui s'est passé lors de cette réunion et ce que M. Boban vous a
24 dit suite à cette réunion ?
25 M. Mesic (interprétation). - A l'époque, j'étais président du
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1 Comité exécutif de l'Union démocratique croate. Je n'ai pas été informé de
2 cette réunion. Je n'étais pas au courant que cette réunion allait se tenir
3 avant qu’elle ne se tienne. Ce n’est que tout à fait par hasard qu'une
4 telle réunion avait eu lieu. Pour moi, c'était une surprise totale. En
5 effet, les Croates en Bosnie étaient en conflit avec Karadzic car il n’est
6 que l'agent de Slobodan Milosevic. Nous étions donc en conflit et j'ai été
7 surpris de voir qu'une telle réunion se soit tenue à Graz.
8 Après un certain temps, j'en ai entendu parlé. Je me suis
9 renseigné. J'ai demandé à Mate Boban ce qu'il pouvait me dire de
10 cette réunion. Il m'a répondu : « Je ne peux pas te dire énormément
11 de choses. Nous n'avons pas signé grand-chose, mais en
12
13
14 tout cas une chose est claire maintenant, les Croates et les Serbes
15 ont éclairci tous les points en suspend, toutes les controverses, et
16 il ne reste plus un seul point qui ne soit pas clair. Il n'y a plus
17 aucune raison de conflit entre les Serbes et les Croates en Bosnie-
18 Herzégovine."
19 Après un certain temps, je me suis trouvé par hasard chez
20 le président Tudjman. Il m'a demandé de rester à déjeuner. Au cours
21 de ce déjeuner, j'ai également rencontré, avec les représentants de
22 la Bosnie-Herzégovine, Nikola Koljevic qui était vice-président de la
23 République serbe. Le hasard a fait qu'il était assis à côté de moi.
24 Nous avons parlé de la Bosnie. Il était spécialiste de Shakespeare,
25 dont nous avons parlé. Les gens étaient en train de mourir en Bosnie-
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1 Herzégovine, et il a parlé avec moi de Shakespeare.
2 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, après la
3 réunion de Karadordjevo et après la réunion de Graz, avez-vous
4 entendu parler d'une coopération entre les Serbes et les Croates en
5 Bosnie ? Par exemple, avez-vous entendu parler du blocage des
6 approvisionnements en armes lors du siège de Sarajevo et avez-vous
7 entendu parler de fourniture en gaz de Fikret Abdic qu'il aurait
8 transmise aux Serbes ? Avez-vous entendu parler d'autres éléments qui
9 auraient fait état d'une coopération accrue entre les Croates et les
10 Serbes en Bosnie ?
11 M. Mesic (interprétation). - Dès le début des affrontements
12 entre les Bosniens, d'une part, et les Croates, d'autre part, on a
13 assisté à des obstacles à l'aide à l'armée de Bosnie-Herzégovine car
14 l'aide pouvait venir de Croatie. Au départ, la coopération était
15 satisfaisante, mais elle était de plus en plus difficile. Elle s'est
16 détériorée et, concrètement, enfin...
17 "Matica Hrvatska" - je ne sais pas exactement comment il
18 s'appelle -, Sefko Omerbacic est venu avec un groupe de Musulmans. Il
19 m'a dit qu'ils avaient ramassé
20
21
22 des armes, qu'ils avaient envoyé des armes, accompagnés par l'armée
23 croate vers Sarajevo, mais que ces armes n'étaient pas parvenues à
24 Sarajevo car elles étaient retenues à Busovaca. Elles étaient
25 retenues encore plus loin, même les soldats étaient restés à
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1 Busovaca. Que tout cela était l'oeuvre de Dario Kordic.
2 J'ai appelé Mate Boban et lui ai demandé d'intervenir, de
3 laisser passer cela, car j'ai bien compris que si Sarajevo n'était
4 pas défendu, la Bosnie allait tomber. La question était de savoir si
5 la Croatie pouvait subsister. Mate Boban m'a répondu qu'il ne pouvait
6 intervenir auprès de Dario Kordic si ce dernier ne souhaitait pas le
7 faire. J'ai essayé. J'ai plaisanté. Il m'a dit : «Mais que dois-je
8 faire ? ». Je lui ai dit : « Mais tu n'as qu'à le tuer ».
9 De cette plaisanterie précisément, après un certain temps,
10 Tudjman m'a appelé et m'a dit : « Apparemment, tu aurais donné
11 l'ordre de tuer Kordic ? ». J'ai dit : «Non, je plaisantais. Je lui
12 ai dit tout simplement qu'il fallait exercer une pression sur lui. »
13 Car ils appartenaient tous les deux au HDZ, au même parti. C'était
14 son subordonné. Donc, le problème pouvait être résolu. Comment a-t-on
15 résolu ce problème, concrètement ? Je l'ignore.
16 Pour ce qui est de l'essence, Fikret Abdic travaillait sur
17 deux voies. Premièrement, les rapports avec la Croatie et là, il ne
18 pouvait obtenir que des marchandises achetées à l'étranger et
19 l'essence. Ce qu'il achetait, il ne pouvait pas l'utiliser lui-même
20 -cela va sans dire-, mais en même temps, il collaborait également
21 avec Belgrade. Il allait donc à la fois à Zagreb et à Belgrade. En
22 fin de compte, il a entamé une coopération avec Karadzic.
23 Avec son armée, il a attaqué Bihac à une époque où, je dois
24 bien l'avouer, se posait le problème de la survie de Bihac, c'est-à-
25 dire de la survie d'une partie de la Bosnie.
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1 Je pense que la Croatie, à cet égard, a joué un rôle
2 positif et que cette partie
3
4
5 de la Bosnie a été sauvée.
6 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, pouvez-vous dire
7 aux juges quelle était l'opinion du Président Tudjman et de Slobodan
8 Milosevic quant aux déplacements de population et quant à l'impact de cela
9 sur la division de la Bosnie ?
10 M. Mesic (interprétation). - Etant donné que j'étais à Belgrade,
11 étant donné que j'ai rencontré plusieurs fois Slobodan Milosevic, je crois
12 pouvoir dire objectivement que j'ai compris sa politique de manière
13 générale. J'ai compris quelles étaient ses intentions. Lorsqu'il a fait
14 entrave à l'autonomie du Kosovo et de la Voïvodine, il partait du principe
15 que la Serbie devait être une, qu'elle devait se composer de trois
16 parties, et par là même il a détruit également la Yougoslavie. Car comme
17 je l'ai dit hier, il n'était pas intéressé par Yougoslavie, qu'elle soit
18 fédérale ou confédérée.
19 En Croatie et en Slovénie, nous avons proposé un modèle de
20 confédération qui devait s'étaler sur trois ou cinq ans. Ensuite, nous
21 verrions comment les choses évoluaient et si nous pouvions rester ensemble
22 ou sinon nous séparer. Mais cela ce serait réglé de la même manière contre
23 les Tchèques et les Slovaques.
24 Manifestement, les intentions de Milosevic étaient autres. Nous
25 voyons maintenant quels sont les résultats de sa politique. Il souhaitait
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1 une grande Serbie. Il souhaitait élargir les frontières et profiter de la
2 destruction de la Yougoslavie pour élargir les frontières de la Serbie.
3 Mais dans un tel modèle, il a inclus le génocide dans le calcul.
4 Il souhaitait non seulement une grande Serbie, mais une Serbie
5 ethniquement pure. C'est pourquoi ses escadrons de la mort ont détruit
6 tout ce qui se trouvait sur leur passage. Ils ont détruit des églises
7 catholiques, des mosquées musulmanes. Il souhaitait tout simplement
8 effacer toutes possibilités de mémoire sur les endroits traversés par son
9 armée, toute possibilité de voir que d'autres peuples y avaient vécu.
10 Le monde était relativement tolérant vis-à-vis de cette
11 politique de Milosevic. Je
12
13
14 pense que Tudjman en a tiré la conclusion que le monde souhaitait le
15 partage de la Bosnie-Herzegovine. J'imagine qu'il a joué la carte de
16 l'élargissement de ses frontières car plusieurs fois, il a déclaré que ce
17 que nous défendions par les armes, c'est-à-dire les territoires que nous
18 avions, seraient à nous une fois la guerre finie.
19 Il était décidé. Il ne m'a pas dit que cela serait la Croatie.
20 Il m'a dit : « Cela serait à nous ». On pouvait l'interpréter de deux
21 façons : soit que cela allait être la Croatie, soit que cela serait un
22 territoire croate sur lequel les Croates auraient un certain nombre de
23 prérogatives.
24 Maintenant, nous ne pouvons que spéculer car je dois l'avouer,
25 il n'a pas été entièrement clair et décidé sur ce point. On voit plus ou
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1 moins quelle était l'intention. Sefko Omerbacic, qui était le chef de
2 cabinet du Président Tudjman, a déclaré publiquement qu'à treize reprises
3 il a participé à des pourparlers avec M. Milosevic, qu'il s'est rendu à
4 Belgrade à une époque où nous étions engagés dans une guerre de vie ou de
5 mort et il a affirmé que la Serbie devait sortir de la guerre comme une
6 petite grande Serbie.
7 En d'autres termes, des revendications maximalistes de la Serbie
8 ne seraient pas réalisées, mais que l'on pouvait s'attendre
9 raisonnablement à ce que la Serbie tire profit sur le plan territorial de
10 la guerre. En d'autres termes, si l'on accepte le principe selon lequel la
11 Serbie allait se renforcer aux dépens de la Bosnie-Herzegovine, d'une
12 tierce partie, alors on pouvait estimer que cette destruction de la
13 Bosnie-Herzegovine allait également laisser quelques miettes pour la
14 Croatie.
15 M. Harmon (interprétation). - Franjo Tudjman estimait également
16 qu'en déplaçant des populations, suite à la réunion de Karadordjevo, cela
17 allait être bénéfique pour la Croatie par le biais de la division de la
18 Bosnie-Herzegovine ?
19 M. Mesic (interprétation). - Comme je vous l'ai dit, étant donné
20 que la Bosnie-Herzegovine est une peau de léopard, il était difficile, à
21 part quelques petites enclaves d'y établir des territoires ethniquement
22 purs.
23
24
25 C'est probablement pour cela que la politique de génocide de
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1 Milosevic visait à nettoyer des territoires et la population a suivi
2 lorsque les villages étaient détruits, pillés. Des centaines de milliers
3 de personnes ont fui, ont été tuées. Cela a entraîné la peur, même chez
4 ceux qui n'étaient pas encore directement concernés par la guerre.
5 Après le plan Vance Owen, lorsque ce plan a dessiné les contours
6 des cantons en Bosnie-Herzégovine, à cette époque-là, on a commencé à
7 accepter l'expression ou le terme de déplacement de population, de
8 déplacement humain et on a accepté ce principe.
9 On attendait de voir quels allaient être les centres de
10 population, Sarajevo, Mostar, Banja Luka. Mais vu sous cette perspective,
11 vu ce qui s'est passé, il n'y a pas de déplacement humain. Ce terme de
12 déplacement humain n'est qu'une façon plus atténuée de parler de génocide.
13 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous parlé des déplacements
14 humanitaires de population, personnellement ? Avez-vous entendu cette
15 expression de la bouche du président Tudjman dans des discussions avec
16 Dario Kordic, avec Mate Boban, Ante Valenta, Ignac Kostroman et d'autres
17 de l'Herceg-Bosna ?
18 M. Mesic (interprétation). - Oui. Lorsque M. Tudjman, avec les
19 gens que vous venez de mentionner, parlait de "déplacement humain de
20 population", il disait que c'était pour éviter les souffrances, pour
21 éviter les massacres, pour que la population ait la possibilité de
22 résoudre elle-même son problème, pour que les gens puissent échanger les
23 maisons les uns avec les autres, pour que la guerre en fait s'arrête. Or,
24 cela amenait au partage.
25 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, j'aimerais attirer
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1 votre attention maintenant sur la création de l'Herceg-Bosna, le
2 18 novembre 1991.
3 Avez-vous eu l'occasion de voir des extraits du Narodni List et
4 autres décisions de l'Herceg-Bosna qui ont donné le pouvoir exécutif au
5 HVO dans les municipalités où il se trouvait ?
6 M. Mesic (interprétation). - Oui. J'ai eu connaissance des
7 décisions dont vous venez de parler. Ces décisions étaient formulées d'une
8 manière qui faisait que les autorités légales, qui avaient été choisies
9 lors des élections précédentes dans les municipalités, étaient remplacées
10 par des représentants du HVO. J'ai demandé à Mate Boban, qui était un haut
11 responsable en Bosnie-Herzégovine pour la Croatie à l'époque, je lui ai
12 demandé si cela était légitime, légal. Je lui ai dit que le HVO ne pouvait
13 remplacer des organes légalement élus, mais qu'éventuellement ces organes-
14 là pourraient créer des institutions qui pourraient renforcer la défense
15 de la Bosnie-Herzégovine.
16 Bien entendu, dans ces décisions-là on ne parlait jamais de
17 Bosnie-Herzégovine, on parlait de territoire croate. Je lui ai demandé
18 pourquoi on était arrivé à de telles décisions, des décisions qui ne sont
19 pas légales ni légitimes. Il m'a répondu : "Mais, écoute, ce sont les
20 juristes les plus éminents qui se sont attelés à la tâche. Vice Vukojevic
21 y a participé, Smiljko Sokol également. Pour ce qui est de la formulation,
22 pour ce qui est des fondements juridiques, tout a été fait dans les règles
23 de l'art. N'aie crainte, nous n'allons commettre aucune erreur."
24 Etant donné que cette réponse ne m'a pas satisfait, j'ai demandé
25 au président Tudjman s'il avait vu les décisions qui avaient été prises
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1 là-bas en Herzegovine. Il m'a répondu qu'il en avait été informé. Je lui
2 ai redit où se situait le problème. Le problème, c'est que des organes
3 illégaux allaient remplacer des organes légalement élus. Il m'a dit qu'il
4 était d'accord avec moi. J'ai essayé de savoir ensuite, étant donné qu'il
5 était d'accord avec moi, s'il y allait y avoir des changements. Mais les
6 changements ne sont jamais intervenus, certes en raison d'un certain
7 nombre d'actions qui partaient du représentant de Vice Vukojevic qui était
8 au Parlement avec moi.
9 Plusieurs fois, j'ai insisté pour que son statut soit réglé. En
10 effet, il était l'un de ces médiateurs en Bosnie-Herzégovine. Tudjman m'a
11 dit : "Ecoute, pour ce qui est de la Bosnie, laisse toutes ces tâches
12 civiles à Vice Vukojevic et Gojko Susak s'occupe de tous les aspects
13
14
15 militaires".
16 M. Harmon (interprétation). - Suite à ces décisions dont vous
17 avez pris connaissance, Monsieur Mesic, qu'est-il arrivé à la frontière
18 entre la Bosnie et la Croatie ? Cette frontière existait-elle ou a-t-elle
19 cessé d'exister ?
20 M. Mesic (interprétation). - J'ignore si cette frontière, même
21 maintenant, est définie de manière efficace. A une certaine époque, elle
22 n'existait pas, il s'agissait d'une frontière ouverte. Sur le plan
23 économique, cela a été un préjudice pour nous. Mais dans les parties
24 contrôlées par le HVO, le conseil croate de défense, notre monnaie a été
25 imposée ainsi que le système juridique. Il s'agissait d'une copie du
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1 système juridique de Croatie. On pouvait donc traverser la frontière à cet
2 endroit-là sans aucune formalité. Cette frontière n'existait pas. Si,
3 selon ce qu'on m'a dit, elle existe maintenant, mais je ne sais pas
4 exactement ce qu'il en est.
5 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, lorsque vous avez
6 parlé à M. Boban du putsch, comme vous l'avez dit, M. Tudjman était-il
7 d'accord pour que les représentants du HVO aient autorité sur les
8 représentants élus ?
9 M. Mesic (interprétation). - Je dois dire que le président
10 Tudjman était de mon avis. Il a dit que j'avais raison, mais que je ne
11 devais plus m'occuper des questions liées à la Bosnie, que d'autres
12 personnes allaient s'en occuper.
13 M. Harmon (interprétation). - Pourrait-on dire que vous estimez,
14 Monsieur Mesic, que les dirigeants d'Herceg-Bosna prenaient leurs ordres
15 politiques de la direction de la Croatie ?
16 M. Mesic (interprétation). - Je crois pouvoir affirmer avec
17 certitude que l'Union démocratique croate de la Bosnie-Herzégovine était
18 sous la domination totale de la direction du HDZ, à Zagreb. En effet,
19 toutes les décisions qui étaient prises par le HDZ en Bosnie devaient être
20 approuvées par Zagreb auparavant. Quiconque a regardé la télévision croate
21 à l'époque a pu constater que, de temps en temps, on voyait les
22 représentants voyager d'un endroit à un autre,
23
24
25 puis lorsque la... C'étaient les mêmes personnes qui effectuaient ces
Page 7206
1 visites.
2 Maintenant qu'il n'y a plus la République d'Herceg-Bosna
3 officiellement, ce sont les représentants du peuple croate de Bosnie-
4 Herzégovine qui se rendent à Zagreb pour prendre leurs instructions.
5 Au cours de ces pourparlers, il y a peut-être des divergences de
6 vue, certes, mais étant donné que je n'y participe pas, étant donné que je
7 sais quelle était la situation avant, j'imagine que ces personnes-là
8 viennent uniquement pour recevoir leurs instructions.
9 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, j'aimerais vous
10 demander de revenir à l'époque où l'Herceg-Bosna existait, à l'origine, en
11 Bosnie. Selon votre déposition, vous avez rencontré des représentants de
12 cette entité, Mate Boban, Dario Kordic, Valenta, Kostroman et d'autres.
13 Vous avez dit qu'ils étaient venus en Croatie, qu'ils ont rencontré le
14 président Tudjman. Où l'ont-ils rencontré ?
15 M. Mesic (interprétation). - Eh bien, tous ceux qui venaient à
16 Zagreb voir le président Tudjman le rencontrent dans son palais
17 présidentiel. Cela se passe toujours de la même manière.
18 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que les rencontres qui ont
19 eu lieu entre le président Tudjman et les hommes dont je viens de citer
20 les noms, Boban, Kostroman, Valenta, Kordic, et d'autres,
21 Est-ce que ces rencontres faisaient l'objet d'une prise de notes
22 et donc figurent dans le registre des rendez-vous du palais Présidentiel ?
23 M. Mesic (interprétation). – Je connais bien ce genre de
24 réunions, toutes sont enregistrées. La date de la réunion est inscrite
25 dans l'agenda du Président et puis les réunions sont enregistrées sur
Page 7207
1 cassette. Quant au Président Tudjman, il prend lui aussi des notes au
2 sujet de ce qui se dit dans les réunions les plus importantes.
3 Nous étions toujours avertis que les interventions seraient
4 enregistrées. On nous
5
6
7 demandait, si nous souhaitions prendre la parole, de nous présenter au
8 préalable de façon que la personne chargée de prendre le compte-rendu de
9 la réunion puisse savoir qui était en train de parler.
10 M. Harmon (interprétation). Avez-vous entendu, au cours de
11 l’une de ces réunions ou au cours de plusieurs de ces réunions, le
12 Président Tudjman déclarer que « ce que nous saisirions par les armes
13 serait à nous » ?
14 M. Mesic (interprétation). - Oui. J'ai déjà dit que lors de
15 plusieurs de ces réunions, il a été question des territoires sur lesquels
16 étaient déployées les forces croates. Maintenant, est-ce que le Président
17 pensait que ces territoires faisaient partie de la Croatie ou qu’il
18 s’agirait de territoires croates en Bosnie-Herzégovine ? Je ne puis pas le
19 dire car il n'y a pas eu d'analyse détaillée à ce sujet.
20 Il a simplement constaté que ces territoires seraient à nous. Ce
21 qu'il voulait exactement dire par ces mots, je ne le sais pas précisément.
22 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous entendu le Président
23 Tudjman dire ces mots au dirigeant de l'Herceg-Bosna dans le contexte du
24 plan de paix Vance Owen ?
25 M. Mesic (interprétation). - C’est à cette époque-là que ce
Page 7208
1 genre de débats avaient lieu. C'est à ce moment-là qu'il a été question de
2 frontières. La proposition de la partie croate consistait à proposer une
3 mise en oeuvre aussi rapide que possible de cet accord, de ce plan Vance
4 Owen. Car apparemment, ce plan convenait aux Croates, mais il n'a pas été
5 signé par la partie croate à ce moment-là ni plus tard. Ou plutôt il a été
6 signé, mais il n'a pas été entériné par l'assemblée croate. Donc, il n'a
7 pas été appliqué.
8 En revanche, chez les Croates de Bosnie-Herzegovine, des efforts
9 ont été faits pour mettre en oeuvre ce plan.
10 M. Harmon (interprétation). - J'aimerais, Monsieur Mesic, vous
11 demandez si à votre avis il est permis de dire que les dirigeants
12 d'Herceg-Bosna, c’est-à-dire Mate Boban,
13
14
15 Dario Kordic, Valenta Kosterman et les dirigeants militaires de cette même
16 entité de l’Herceg-Bosna sont devenus les instruments de la mise en oeuvre
17 de la politique de Franjo Tudjman en Bosnie, notamment de sa politique de
18 division de la Bosnie ?
19 M. Hayman (interprétation). - C'est une question composée et
20 vague. Des termes plus clairs pourraient-ils être utilisés ? Nous avons
21 entendu parler de dirigeants politiques jusqu'à présent et maintenant
22 l'accusation semble vouloir faire un tout de tous les dirigeants
23 militaires de l'Herceg-Bosna en les plaçant dans un seul et même groupe.
24 J'aimerais que la question soit divisée en plusieurs parties et que la
25 réponse du témoin puisse de ce fait être plus complète.
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1 M. Président - Objection accordée. Cette question est très
2 large. On voit très bien où vous voulez en venir, mais essayez de faire
3 cela autrement, s'il vous plaît, Monsieur le Procureur.
4 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, je vais vous poser
5 la question suivante. A votre avis, est-il permis de dire que les
6 dirigeants politiques dont je viens de citer les noms, c'est-à-dire Boban,
7 Kordic, Ante Valenta, Kostroman et d’autres, sont devenus les instruments
8 de l'application de la politique du Président Tudjman qui consistait à
9 diviser la Bosnie.
10 M. Mesic (interprétation). – C'est au sujet de la politique
11 applicable à la Bosnie que finalement je me suis séparé, écarté des avis,
12 des opinions de Franjo Tudjman. Il est vrai que j'avais d'autres
13 objections au sujet d'autres éléments de la centralisation, au sujet des
14 finances, de la structure de la société et des organes représentants de la
15 société. Tous ces éléments constituaient des éléments qui ont été à la
16 base de ma séparation de Franjo Tudjman sur le plan politique.
17 L'élément le plus important me semble-t-il, la cause principale
18 de mon abandon de cette politique, c'était la Bosnie, car je considérais
19 qu'il était impossible de scinder la Bosnie. Mais l'insistance pour créer
20 la Herceg-Bosna, l'insistance pour le nettoyage ethnique en faveur
21
22
23 des Croates en Bosnie, l’insistance pour créer des mouvements de
24 population, des départs de population de Musulmans dans certains
25 territoires de Bosnie, tous ces éléments faisaient partie d’une politique
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1 erronée.
2 Ceux qui ont appliqué cette politique en Bosnie-Herzégovine ont
3 été les instruments d'une politique bosniaque erronée.
4 M. Harmon (interprétation). - Pensiez-vous que Kordic, Valenta,
5 Boban et Kostroman ont été les instruments de la mise en oeuvre de cette
6 politique en Bosnie-Herzégovine ?
7 M. Président. - C’est une question différente, Monsieur Harmon?
8 M. Harmon (interprétation). - Oui.
9 M. Président - C'est une question différente, d'accord.
10 M. Mesic (interprétation). - Dans un certain sens, j'avais
11 d'assez bonnes relations avec Mate Boban, mais pas avec les autres hommes
12 dont vous venez de citer les noms. D'ailleurs, je ne les rencontrais pas
13 lors de réunions officielles. Mate Boban, chaque fois que je le mettais en
14 garde contre cette politique à l'égard des Musulmans, et je le faisais car
15 je considérais que nous avions un seul et même agresseur en Bosnie-
16 Herzégovine, et que nous n'obtiendrions le soutien de la communauté
17 internationale que si cette dernière estimait qu'il n'existait qu'un seul
18 et unique agresseur, à savoir la Serbie et qu’elle considérait qu'il n'y
19 avait pas de guerre civile, alors que par la suite, la guerre en Bosnie-
20 Herzégovine n'a servi que les intérêts de la politique serbe ou plutôt de
21 la politique de Slobodan Milosevic.
22 J'ai donc demandé à Boban quelle était sa politique? Il m'a
23 répondu qu'il n'avait pas de politique particulière, qu'il se contentait
24 de mettre en oeuvre la politique de Zagreb et qu’il n’avait confiance et
25 n'avait foi qu’en Franjo Tudjman.
Page 7211
1 M. Harmon (interprétation). - Mate Boban était le commandant en
2 chef des forces armées d’Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?
3 M. Mesic (interprétation). - Oui, c'est cela, d'après les textes
4 en vigueur en Herceg-Bosna.
5 M. Harmon (interprétation). - La politique de Mate Boban était
6 appliquée en Herceg-Bosna par recours à la force armée, n'est-ce pas ?
7 M. Hayman (interprétation). - Pourrait-on nous donner une base
8 juridique à l'appui de cette question ? Comment le témoin peut-il le
9 savoir ? A-t-il été informé ? Pourrait-on nous donner un fondement et une
10 spécificité, eu égard à la Bosnie centrale par comparaison à l’ensemble de
11 la Bosnie-Herzégovine ?
12 M. Président - Nous n'allons pas commencer, sur chaque question,
13 à demander des fondements juridiques. Je voudrais que Maître Harmon
14 précise bien sa question. Pouvez-vous formuler bien votre question,
15 Maître Harmon, s'il vous plaît ?
16 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que la politique de Mate
17 Boban a été mise en œuvre par recours à la force militaire, à la force
18 armée ?
19 M. Mesic (interprétation). - Compte tenu du fait que Mate Boban
20 était Président de la République d'Herceg-Bosna, tous les pouvoirs
21 politiques étaient réunis sur sa personne, c'est-à-dire qu'il représentait
22 l'Herceg-Bosna et bien entendu, il était responsable du fonctionnement de
23 tous les mécanismes mis en place en Herceg-Bosna. Donc sans doute
24 également de la composante militaire.
25 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous jamais entendu parler
Page 7212
1 d'un dirigeant militaire du HVO qui aurait émis des objections par rapport
2 au principe et à la politique défendue par Mate Boban ?
3 M. Mesic (interprétation). – Je ne rencontrais pas ces hommes ou
4 plutôt, si je les rencontrais, cela se passait lors de réunion conjointe.
5 Mais je n'ai jamais eu avec eux de conversation personnelle, à l'exception
6 de ceux qui partaient de l'armée de Croatie pour se rendre en Bosnie-
7 Herzégovine ou plus précisément en Herceg-Bosna. J'ai eu des
8 conversations
9
10
11 avec Slobodan Praljak.
12 Bien entendu, nous ne sommes jamais parvenus à nous mettre
13 d'accord sur ce point tout à fait essentiel de la division, parce qu’il
14 estimait, lui, qu'il était impossible de coexister avec les Musulmans et
15 que par conséquent, il fallait une séparation des différents peuples.
16 J'ai eu des conversations avec d'autres hommes également,
17 d'autres hommes qui partaient de l'armée croate pour se rendre en Herceg-
18 Bosna. Mais c'étaient des conversations, des rencontres en passant qui
19 n'étaient pas officiellement prévues. Je n'avais pas de rapports officiels
20 avec ces hommes.
21 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, j'aimerais attirer
22 votre attention sur le problème de la double citoyenneté, sur la situation
23 de ceux qui étaient ressortissants de Bosnie-Herzegovine, et qui pouvaient
24 faire partie du Sabor, du Parlement Croate. Pouvez-vous expliquer aux
25 juges le contenu des lois dont nous venons de parler, quand ont-elles été
Page 7213
1 promulguées, quelle était leur teneur, leur influence, leur incidence sur
2 la souveraineté de la Bosnie-Herzegovine ?
3 M. Mesic (interprétation). - En tout état de cause, je faisais
4 partie des membres de l'opposition croate qui étaient opposés à l'adoption
5 de lois concernant des citoyens tiers. Je considérais que dans la diaspora
6 ne pouvaient se prononcer que les citoyens qui se trouvaient à l'étranger,
7 par hasard. Mais cette loi a eu une incidence sur une autre loi, c'est-à-
8 dire la loi sur la nationalité.
9 En effet, une loi existe qui autorise tous les ressortissants de
10 Croatie a voté pour les élections parlementaires. Une autre loi autorise
11 tous les Croates ethniques à bénéficier de la nationalité croate, à
12 condition que soient satisfaites un certain nombre de conditions qui
13 n'étaient pas difficiles à satisfaire.
14 C'est cette loi qui a permis aux Croates de Bosnie de voter pour
15 les élections parlementaires de la Croatie. Il y avait douze députés du
16 Parlement croate concernés par cette
17
18
19 loi, c'est-à-dire 10 % en fait, des députés, des membres du Parlement.
20 Il est tout à fait clair que ces Croates, vivant hors de
21 Croatie, ne payaient pas d'impôts en Croatie, n'avaient aucun rapport avec
22 la Croatie. l’Union démocratique croate avait très peu d'influence sur ces
23 Croates vivant à l'extérieur de la Croatie. Ce texte était donc une
24 parodie. Il permettait un mauvais usage des élections. Car dès avant les
25 élections, cela permettait à certains de se voir garantir 10 % des mandats
Page 7214
1 de député. Cela bien sûr allait à l'encontre des intérêts de l'opposition.
2 Nous l'avons fait savoir très clairement. Compte tenu que le HDZ
3 avait le monopole et l'avantage, cette loi a été votée. Elle a eu une
4 influence destructrice sur la Bosnie-Herzegovine. En effet, elle a orienté
5 les Croates de Bosnie-Herzegovine vers la Croatie plutôt que de les
6 inciter à chercher leur bonheur et leur satisfaction en Bosnie-
7 Herzegovine, c'est-à-dire au sein de l'Etat sur le territoire duquel ils
8 étaient nés et où ils eussent dû rechercher la possibilité d'une
9 coexistence avec les autres peuples de Bosnie-Herzegovine.
10 J'ai aussi discuté avec des représentants de députés de Bosnie-
11 Herzegovine à Sarajevo, où je me suis rendu à plusieurs reprises. Ces
12 députés m'ont dit qu'ils ne souhaitaient pas mettre l'accent sur ces
13 problèmes, car ils recevaient toute l'aide par l'intermédiaire de la
14 Croatie et ne souhaitaient donc pas nuire à cette réalité.
15 M. Harmon (interprétation). - Suite au vote de cette loi qui
16 autorisait des ressortissants de l'extérieur a être élus et à voter pour
17 le Parlement croate, est-ce que des députés du Sabor ont participé au
18 combat en Bosnie-Herzegovine et ont donc été des officiers du HVO ?
19 M. Mesic (interprétation). - Je crois qu'un certain nombre des
20 membres très éminents du HDZ, qui participaient à l'exercice du pouvoir au
21 niveau de la fédération de la Bosnie-Herzegovine de l'Etat de Bosnie-
22 Herzegovine, étaient légalement membres du Parlement croate. Ils étaient
23 donc à la fois membres du Parlement croate et du Parlement de Bosnie-
24
25
Page 7215
1 Herzegovine.
2 Quant à savoir quel a été leur nombre en tant que participants a
3 des événements déterminés, il m'est difficile aujourd'hui de me prononcer
4 sur ce point.
5 M. le Président. - Nous allons peut-être procéder à une pause de
6 20 minutes, puis nous reprendrons à 16 heures 10.
7
8 L’audience, suspendue à 15 heures 50, est reprise à 16 heures 20.
9
10 M. le Président - L'audience est reprise. Introduisez
11 l'accusé. Monsieur Harmon, jusqu'à 17 heures 30.
12 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
13 (L’accusé, M. Blaskic, est introduit dans la salle
14 d’audience.)
15 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, vous étiez
16 président du Sabor, c'est-à-dire du Parlement croate à partir de la
17 fin 1992 et tout au long de l'année 1980. C'est bien cela ?
18 M. Mesic (interprétation). - C'est exact.
19 M. Harmon (interprétation). - Alors que vous étiez
20 président du Sabor, des députés du Sabor provenant de Bosnie-
21 Herzégovine appartenaient-ils en même temps au HVO et à la Herceg-
22 Bosna ?
23 M. Mesic (interprétation). - En fait, aucun représentant ne
24 m'a officiellement dit être membre du HVO, mais à la télévision, j'ai
25 vu certains de mes députés qui portaient l'uniforme du HVO.
Page 7216
1 Vice Vukojevic, Ivan Tolj et il y avait aussi un médecin qui, je
2 pense, ne se consacrait qu'à sa tâche de médecin.
3 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous décrire
4 une conversation que vous avez eue avec Vice Vukojevic ?
5 M. Mesic (interprétation). - Ce qui m'intéressait, c'était
6 les événements en Bosnie-Herzégovine parce que, finalement, la
7 défense de la Croatie dépendait quelque peu des événements en Bosnie-
8 Herzégovine. J'ai donc appelé Vice Vukojevic qui était né en
9 Herzegovine et était député. Je lui ai demandé ce qui se passait
10 effectivement en Bosnie-Herzégovine. Je pensais qu'il serait en
11 mesure de me dire comment s'organisait la défense conjointe.
12 A ma grande surprise, il m'a répondu qu'il était impossible
13 de collaborer avec les Musulmans, qu'à Prozor des heurts avaient eu
14 lieu et qu'il avait été très difficile de charger des Musulmans dans
15 les camions. Je lui ai demandé combien de Croates avaient été
16 blessés. Il m'a dit « Pas un ». Je lui ai demandé combien étaient
17 morts ; il m'a répondu « Pas un ». Je lui ai dit « Cela signifie que
18 vous avez tué des innocents ». Je l'ai chassé de mon cabinet et ne
19 l'ai plus jamais rencontré par la suite.
20 M. Harmon (interprétation). - Vice Vukojevic s'est-il
21 présenté à vous comme membre du HVO, ou l'avez-vous jamais vu porter
22 un uniforme du HVO alors qu'il était député du Sabor ?
23 M. Mesic (interprétation). - C'est seulement à la
24 télévision que je l'ai vu en uniforme. Il a déclaré publiquement
25 qu'il était brigadier du HVO. Je ne sais pas qui l'a nommé à ce
Page 7217
1 poste, mais il est resté membre du Parlement croate pendant cette
2 période. Il n'a jamais déclaré qu'il devrait quitter le Parlement
3 croate parce qu'il avait d'autre mission dans un autre Etat.
4 M. Harmon (interprétation). - Qui était Ivan Tolj, Monsieur
5 Mesic ? Quel rang vous a-t-il dit détenir au sein du HVO ?
6 M. Mesic (interprétation). - Je ne sais pas quel était son
7 rang au sein du HVO, mais il était général de l'armée croate. Il
8 était chef du département politique de l'armée croate. Il m'a dit que
9 c'était à peu près le même travail qu'il accomplissait au sein
10
11
12 du HVO. Il était membre également du Parlement croate. Il était donc
13 député et membre de la Chambre des représentants du Parlement croate.
14 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, quelle est
15 votre conclusion eu égard au fait que cette participation au
16 parlement, au Sabor croate pouvait avoir un effet éventuellement sur
17 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine ?
18 M. Mesic (interprétation). - Je pense que c'était une forme
19 de destruction car, à l'évidence, si les Croates cherchaient leur
20 place en Croatie, ils n'allaient pas défendre la Bosnie-Herzégovine
21 et n'allaient pas s'engager en faveur de l'unité de la Bosnie-
22 Herzégovine.
23 Je considérais que cette politique était nuisible, sans
24 aucun doute pour la Bosnie-Herzégovine, mais nuisible également -en
25 dernière analyse- pour la Croatie.
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1 C’était ma conviction très ferme à l'époque -et cela l'est
2 toujours aujourd'hui-, à savoir que si la division de la
3 Bosnie-Herzegovine avait été menée à son terme ultime, c'est-à-dire s'il
4 n'y avait pas eu l'accord de Washington et de Dayton, il était permis de
5 se demander si la Croatie pouvait continuer à exister en cas de
6 destruction de la Bosnie-Herzegovine.
7 M. Harmon (interprétation). - Pendant que vous étiez au Sabor,
8 avez-vous envoyé une commission à Mostar chargée d'enquêter sur les
9 événements et les tensions qui apparaissaient entre les Croates et les
10 Musulmans de Bosnie ?
11 M. Mesic (interprétation). - Eh bien, j'entendais des nouvelles
12 très diverses quant aux événements en cours en Bosnie-Herzegovine et plus
13 précisément à Mostar. Donc, pour vérifier l'authenticité de ces
14 informations, j'ai envoyé une délégation de notre Parlement en Bosnie-
15 Herzegovine, délégation qui était chargée de se rendre plus précisément à
16 Mostar pour voir ce qui s'y passait. C'est Drago Krpina qui dirigeait
17 cette délégation.
18 A leur retour, les délégués étaient très déçus, très
19 démoralisés. Ils parlaient d'un risque d'explosion en Bosnie-Herzegovine.
20 Ils déclaraient qu'un grand nombre de Musulmans,
21
22
23 habitant dans les villages situés aux alentours de Mostar, avaient quitté
24 ces villages. C'étaient en fait des musulmans qui ont fui sous l'effet de
25 la terreur serbe et qui ont fui en direction de Mostar. Cela a fini par
Page 7219
1 modifier la composition ethnique de Mostar.
2 Ils ont déclaré que c'étaient là des événements qui perturbaient
3 les dirigeants du HVO, plus précisément de la Herceg-Bosna parce que cela
4 pouvait constituer un risque pour les intérêts croates, si un grand nombre
5 de Musulmans de ce type continuait à vivre à Mostar. Les délégués m'ont
6 dit qu'ils craignaient une explosion, un conflit. Pis, par la suite, j'ai
7 vu à la télévision que certains quittaient Mostar. La télévision nous
8 montrait des colonnes de personnes qui quittaient Mostar pour aller je ne
9 sais pas où, certains partaient en camions et je ne sais pas non plus où
10 ils étaient emmenés.
11 J'ai demandé à Drago Krpina d'informer le Président Tudjman de
12 ces événements qui se déroulaient dans la région de Mostar. Maintenant,
13 qu’a décidé le Président Tudjman en la matière ? Je l’ignore.
14 M. Harmon (interprétation). - Un conflit a-t-il éclaté entre les
15 Musulmans et les Croates de Bosnie ?
16 M. Mesic (interprétation). - Oui. Un conflit sanglant a éclaté
17 dans des conditions tout à fait atroces. Les destructions ont été
18 gigantesques, si bien qu'une partie de Mostar ressemble aujourd'hui à
19 Hiroshima et que la ville a été scindée en deux. Il est vrai qu'il y a des
20 destructions des deux côtés de la ville, mais la ville a été en principe
21 divisée de façon équitable et des efforts très importants ont été déployés
22 pour tenter de créer une entité homogène, c'est-à-dire que les habitants
23 puissent se convaincre qu'ils sont des habitants de Mostar indépendamment
24 de leur origine ethnique aujourd'hui. Un pont a même été détruit à Mostar.
25 C'est un pont très ancien qui était le symbole de Mostar. Il
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1 avait été construit à l'époque du régime turc ottoman. C'était aussi, il
2 faut le rappeler, un pont qui symbolisait l'union des habitants et pas
3 seulement un lien entre deux parties de la ville. Les ingénieurs turcs
4 sont à
5
6
7 l'origine du projet de ce pont. Mais ce sont des travailleurs Croates qui
8 ont construit ce pont en utilisant de la pierre qui venait de Croatie. Cet
9 élément était également symbolique.
10 La destruction de ce pont, qui n'avait absolument aucune
11 importance stratégique -or l'excuse a été qu'il avait été détruit pour des
12 raisons stratégiques-, me semble signifier que la politique appliquée
13 était désireuse de détruire tous les ponts entre les peuples vivant en
14 Bosnie-Herzégovine ; l'objectif étant de les détruire et de les séparer le
15 plus rapidement possible.
16 M. Harmon (interprétation). - Quelle est la partie belligérante,
17 la partie au conflit, qui a détruit le pont de Mostar ?
18 M. Mesic (interprétation). - Il m'est difficile de vous dire qui
19 a détruit le pont parce que personnellement, je ne le sais pas.
20 Simplement, j'ai reçu des informations selon lesquelles la destruction du
21 pont avait été planifiée par la partie croate. Mais qui a donné l'ordre ?
22 Des avis très divers ont été donnés dans les médias. L'enquête ne s'est
23 jamais achevée. Cela étant, sur un plan objectif, la destruction de ce
24 pont était moins utile à la partie bosnienne.
25 Qui a donné l'ordre ? En temps de guerre, tout peut arriver. Il
Page 7221
1 peut y avoir des provocations. Une enquête menée objectivement eut sans
2 doute été en mesure d'aboutir à des résultats.
3 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, à votre avis,
4 était-il logique pour les Musulmans d'entamer, de commencer, d'initier le
5 conflit entre les Croates et les Musulmans de Bosnie ?
6 M. Mesic (interprétation). - Puisque moi aussi je suis, paraît-
7 il, général de l'armée croate, bien que pour dire la vérité cela fait déjà
8 longtemps que j'ai fait l'école militaire réservée aux officiers de
9 réserve, en cette qualité je ne vois pas où se situe la logique.
10 Les Bosniens étaient inférieurs, dans leur confrontation, à
11 notre ennemi commun, à savoir les Serbes. A l'époque où plusieurs milliers
12 de personnes ont trouvé la mort parmi eux, je ne vois pas pourquoi ils
13 auraient ouvert un front supplémentaire, ni pourquoi ils auraient encore
14
15
16 réduit l'espace sur lequel ils pouvaient circuler, sachant que c'est par
17 la Croatie que la logistique leur parvenait. S'ils ouvraient un nouveau
18 front, ils perdaient toute l'aide à laquelle ils avaient accès et toute
19 possibilité, toute chance, de sauver la Bosnie.
20 C'est la raison pour laquelle, à mes yeux, l'affirmation selon
21 laquelle les Musulmans ont suscité cette guerre est invraisemblable et
22 dépourvue de fondement. Ce conflit a été nuisible à nous et aux Bosniens
23 et c’est une chance que l’accord de Washington et de Dayton ait fini par
24 être signé, accord qui a mis un terme à cette guerre.
25 Guérir les conséquences de cette guerre va prendre encore pas
Page 7222
1 mal de temps.
2 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, au cours de cette
3 guerre, la Croatie a-t-elle fourni une aide, un soutien, au HVO ?
4 M. Mesic (interprétation). - La politique était que le HVO
5 défendait les intérêts de la Croatie et les territoires croates en Bosnie-
6 Herzégovine, car il faut bien écouter les déclarations qui ont été faites
7 à ce moment-là par les dirigeants de l’Herceg-Bosna. Ils parlaient
8 toujours des territoires croates, jamais des territoires de la Bosnie-
9 Herzégovine ; c'était quelque chose qui me perturbait beaucoup.
10 Manifestement, la Croatie a effectivement apporté une aide
11 matérielle au HVO, ce n'était pas un secret.
12 Le secret est de savoir comment cette aide a été organisée.
13 J'étais au Parlement et je sais bien comment est votée et fonctionne le
14 budget croate. Jamais il n'y a eu une enveloppe budgétaire destinée à
15 l'aide fournie à l’Herceg-Bosna. Jamais il n'y a eu de référence faite à
16 une telle aide.
17 Ismo Vanovic, qui a abandonné le HDZ en même temps que moi et
18 qui était chargé de tous les services de renseignements en Croatie, a
19 déclaré publiquement (alors qu'il s'adressait à l'opinion publique
20 internationale et interne, ainsi qu’à moi-même) que la Croatie avait
21 dépensé un million de DM par jour pour apporter une aide à toutes les
22 structures de l’Herceg-Bosna ;
23
24
25 cela comprend bien évidemment le HVO.
Page 7223
1 Vers qui le HVO aurait-il pu se tourner pour obtenir une aide
2 logistique, si ce n'est la Croatie ? Il n'y a aucun secret quant à cela.
3 Je suppose que c'est le ministère de la Défense qui fournissait l’aide au
4 ministère de la Défense de l’Herceg-Bosna, et que le ministère de
5 l'Intérieur aidait le ministère de l’Intérieur de l’Herceg-Bosna ; c’est
6 sans doute ainsi que cette aide a été apportée. Mais je ne peux pas
7 explicitement dire comment cette aide a été organisée ou combien de fonds
8 y ont été consacrés.
9 M. Harmon (interprétation). - D'après vous, Monsieur Mesic, est-
10 ce que les ministères dont vous avez parlé ont gardé des archives, des
11 traces, de l'aide qui a été apportée par eux au HVO ?
12 M. Mesic (interprétation). - Je n'ai jamais vu de tels
13 documents, mais toute personne contrôlant les cordons de la bourse ou les
14 fonds doit avoir un certain mécanisme de contrôle qui régit la façon dont
15 ces fonds sont attribués. Il doit bien y avoir une trace quelque part,
16 dans un de ces ministères, même au ministère de l'Intérieur et au
17 ministère de la Défense.
18 Tout ce que je sais, c'est qu'il y a eu un audit comptable mené
19 à bien dans la plupart des ministères, sauf dans les départements les plus
20 sensibles où cet audit n'a pas eu lieu. Ni l'opinion publique, ni le
21 Parlement n'ont reçu d'information très complète quant aux audits qui ont
22 été effectués et qui portaient sur les opérations du ministère de la
23 Défense, du ministère de l'Intérieur et du ministère des Affaires
24 étrangères.
25 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, entre 1992 et 1994
Page 7224
1 est-ce que les troupes croates et les membres de la police croates sont
2 allés en Bosnie ?
3 M. Mesic (interprétation). - Je peux affirmer -en toute
4 certitude- que l'armée croate ne pouvait pas légalement se rendre en
5 Bosnie-Herzégovine. Tout simplement parce que toute utilisation extérieure
6 de l'armée hors des frontières de la Croatie dépendait d'une décision
7 prise par le Sabor croate et aucune décision de ce type n’a été prise. Si
8 cela avait été le cas j'en aurais
9
10
11 eu connaissance.
12 De là à dire si une unité quelconque a été utilisée en Bosnie-
13 Herzégovine, c'est quelque chose d’un peu différent. Un accord a été passé
14 entre Tudjman et Izetbegovic lors de l'attaque serbe sur certaines parties
15 de Dubrovnik et d’autres secteurs. Selon cet accord, une partie de l'armée
16 croate était chargée de défendre l'arrière-pays de Dubrovnik et de ce fait
17 est entrée sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, mais cela a fait
18 l'objet d'un accord passé avec le Président de Bosnie.
19 Cela dit, grâce au poste que j'occupais, j'ai eu souvent
20 l'occasion de parler dans les médias, ou à la télévision, à la radio.
21 On m'a posé beaucoup de questions relatives au fait de savoir si
22 nos troupes s'étaient rendues en.Bosnie-Herzegovine et j'ai répondu que
23 j'avais exigé que le ministère de la défense établisse un rapport sur la
24 question. J'ai également précisé que la réponse que j'avais reçue était
25 qu'aucune troupe Croate ne s'était rendue sur des territoires extérieurs
Page 7225
1 quels qu'ils soient, y compris les territoires de Bosnie-Herzegovine. Mais
2 il faut ajouter que des soldats qui avaient été démis de leurs fonctions
3 sont venus me voir. Ils avaient été démis de leurs fonctions parce qu'ils
4 ne voulaient pas se rendre en Bosnie-Herzegovine. J'ai également reçu la
5 visite de leurs parents. Officiellement, on m'a toujours dit que, s'il y
6 avait eu effectivement passage d'un soldat en Bosnie-Herzegovine, il
7 l'avait fait à titre personnel et de sa propre initiative.
8 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, votre réponse à la
9 question est-elle qu'il y a eu des troupes croates en Bosnie-Herzegovine
10 entre 1992 et 1994 ou pas ?
11 M. Mesic (interprétation). - Je pense qu'il y en a eu, mais si
12 c'est le cas, elle ne se sont pas rendues dans un cadre légal.
13 M. Harmon (interprétation). - Ces troupes ont-elles pris part au
14 conflit opposant les Musulmans de Bosnie aux Croates de Bosnie ?
15 M. Mesic (interprétation). - Etant donné qu'au moment de
16 l'éclatement du conflit
17
18
19 entre les Croates d'un côté et les Musulmans de l'autre un certain
20 rééquilibrage des forces s'est fait au détriment des Croates, j'ai reçu
21 des informations selon lesquelles une aide était apportée sous la forme de
22 volontaires, qui visait à mettre un terme à l'avancée bosnienne.
23 S'agissait-il de volontaires réels ? De quelle unité parle-t-on ? C'est
24 quelque chose sur quoi je ne me suis jamais penché. Je ne sais pas.
25 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, les membres de
Page 7226
1 l'armée croate qui se sont trouvés en Bosnie ont-ils compté parmi leurs
2 rangs des victimes ? Le cas échéant, y a-t-il eu des documents établis
3 faisant état du nombre de victimes ?
4 M. Mesic (interprétation). - Comme dans toute administration qui
5 se respecte, il devrait y avoir trace de ce qui s'est passé, notamment
6 s'il y a eu des victimes. Si des soldats croates sont morts sur place, il
7 doit bien y avoir quelque part un document qui relate les faits, parce
8 qu'il faut que les familles prennent certaines dispositions ; et, si des
9 soldats ont été blessés, il faut qu'ils puissent recevoir leur allocation
10 d'invalidité. Tout cela doit se préparer sur la base de certains
11 documents.Mais c'est un fait que dans nos quotidiens, dans nos médias, un
12 certain flou planait sur la question. Dès que quelqu'un était tué, le
13 rapport précisait le lieu de l'événement. Mais pour un certain nombre
14 d'autres victimes, il était précisé que le soldat était mort pour la
15 patrie. On m'a dit que cette phrase parlait des soldats qui étaient tombés
16 en Bosnie. Je n'ai jamais essayé d'obtenir plus de détails sur la
17 question.
18 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, est-ce que l'un
19 quelconque des soldats qui est venu vous voir directement vous a informé
20 du fait que, pendant qu'il servait en Bosnie, il portait des insignes
21 indiquant HV ? Vous a-t-il dit qu'on leur avait demandé de remplacer ces
22 insignes HV par des insignes indiquant qu'ils étaient membres du HVO ?
23 M. Mesic (interprétation). - Oui. Un certain nombre de personnes
24 m'ont dit cela. Ils m'ont dit que toutes les personnes qui se rendaient en
25 Bosnie devaient retirer l'insigne de l'armée Croate, de la HV.
Page 7227
1
2
3 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous expliquer aux Juges
4 ce que vous savez quant au commandement conjoint, à savoir des
5 commandements entre les Musulmans de Bosnie et les Croates de Bosnie ?
6 Pouvez-vous nous dire également quelle était la position de Zagreb sur ce
7 point ?
8 M. Mesic (interprétation). - Au début du conflit, toute la JNA
9 s'est rangée du côté des Serbes, avec tout son équipement logistique
10 notamment. C'est Karadzic qui contrôlait tout cela. En fait, il était
11 simplement un instrument, parce que celui qui avait tout planifié, qui
12 contrôlait toute la situation, c'était Slobodan Milosevic. Pour ce qui est
13 de l'armée de Bosnie, elle était en fait constituée de Bosniaques, parce
14 que 13 % des membres étaient Serbes. Il y avait également des Croates qui
15 provenaient d'autres régions de la. Bosnie-Herzegovine, notamment de
16 Sarajevo. Ils étaient entrés dans cette armée. On sait également qu'au
17 sein même du HVO, il y avait des Musulmans et, dans certaines unités qui
18 se trouvaient dans le secteur d'une rivière qui coulait dans la région, il
19 y avait des membres des forces qui étaient à prédominance musulmane, alors
20 même qu'ils travaillaient et étaient dans les rangs du HVO.
21 On se demande en fait s'il est possible de mener une guerre
22 contre un agresseur s'il n'y a pas de commandement unifié. Les Bosniaques
23 ont insisté sur le fait qu'il devait y avoir un commandement conjoint qui
24 était la seule façon de mener des opérations militaires de façon efficace,
25 tant au point de vue tactique qu'opérationnel. La partie croate au conflit
Page 7228
1 s'est mise d'accord sur le fait qu'un commandement conjoint pouvait être
2 créé. Cela signifiait que le HVO et l'armée de Bosnie seraient représentés
3 au sein de ce commandement conjoint et que leur participation au
4 commandement conjoint reflèterait la répartition de la population. Mais le
5 terme "commandement unifié" n'a jamais été utilisé. Dans un tel cas, il
6 est impossible de déterminer à qui revient une victoire militaire.
7 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, quelle était la
8 nature des rapports entre l'armée croate et les officiers qui occupaient
9 des postes de commandement au sein du
10
11
12 HVO ? Pouvez-vous expliquer aux Juges si des membres de l'armée croate
13 sont entrés dans le HVO pour occuper des postes de commandement et s'ils
14 sont ensuite revenus dans les rangs de l'armée croate ? Pouvez-vous
15 également nous donner le nom de ces personnes ?
16 M. Mesic (interprétation). - D'un point de vue professionnel,
17 cela ne faisait pas partie de mes compétences. J'étais un membre du
18 parlement parmi d'autres. Mais il est bien vrai que je disposais de plus
19 d'informations que d'autres personnes. Il m'était possible d'avoir accès à
20 des informations plus détaillées que d'autres personnes. Le public pouvait
21 également avoir accès à ces informations. Milivoj Petrovik, Ante Roso,
22 Slobodan Pralja, le Général Tolj, toutes ces personnes sont allées pendant
23 un temps au sein du HVO avant de revenir au sein de l'armée Croate. A
24 chaque fois, ont-ils officialisé la nature de leurs rapports ? Ont-ils
25 fait savoir qu'ils se rendaient dans une entité ou dans l'autre ? Je ne le
Page 7229
1 sais pas et je n'ai pas essayé de le savoir. Au cours d'une période de
2 temps, ils ont changé de poste, parfois dans le HVO et ensuite dans
3 l'armée croate. Comment cela a-t-il été régulé ? Je n'en ai aucune idée.
4 M. Harmon (interprétation). - J'en reviens à la question du
5 commandement conjoint. Un de mes collègues me demande de vous demander
6 d'apporter quelques éclaircissements sur ce point. Est-ce que Zagreb a
7 rejeté l'idée d'un commandement conjoint ou au contraire l'a-t-il
8 accepté ?
9 M. Mesic (interprétation). - Zagreb était pour la création d'un
10 commandement conjoint mais elle n'était pas d'accord pour la création d'un
11 commandement unifié.
12 M. Harmon (interprétation). - J’en viens maintenant à la
13 question et aux événements d’Ahmici, je vais vous demander, Monsieur
14 Mesic, si vous avez entendu parler des événements d'Ahmici en avril 1993.
15 Si oui, avez-vous, à l’époque, essayé de savoir si oui ou non une enquête
16 avait été menée visant à savoir quelles avaient été les circonstances du
17 massacre à Ahmici ?
18 M. Mesic (interprétation). - A cette époque là, à l'époque à
19 laquelle vous faites
20
21
22 référence, j'étais en train de faire un voyage officiel. J'étais membre
23 d'une délégation parlementaire croate. C'est au cours de ce voyage
24 officiel que j'ai appris ce qui s'était passé à Ahmici. Lorsque je suis
25 rentré de mission, j'ai eu connaissance des actes particulièrement
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1 brutaux, des atrocités qui avaient été commises à Ahmici, crimes dont ont
2 été victimes des femmes et des enfants également.
3 Bien sûr, en tant que Croate, j'étais malheureux de voir des
4 Croates commettre des crimes et au fin fond de moi-même, j'avais l'espoir
5 que des Croates n'avaient pas agi ainsi. J'ai demandé à Mate Boban, que
6 j'ai rencontré très peu de temps après, s'il savait quoi que ce soit à ce
7 sujet. Il m'a dit que tous ces événements avaient été provoqués par un
8 officier britannique et qu'il avait réussi à déterminer un certain nombre
9 de choses, mais qu'il ne disposait pas d'informations suffisantes sur ce
10 qui s'était passé.
11 Je lui ai demandé ce qu'il avait appris, s'il savait qui avait
12 commis ce crime. Il m'a dit qu'il y avait des informations selon
13 lesquelles c'étaient des personnes revêtues d'un uniforme noir qui avaient
14 commis ces crimes. Je lui ai dit : « Tu ne me comprends pas bien Mate, je
15 ne te demande pas quelle était la couleur des uniformes des personnes qui
16 ont agi sur place, je demande qui portait ces uniformes ». Il a répondu :
17 « Nous ne le savons pas, nous ne l'avons pas déterminé. Ce pourrait être
18 des Serbes ». Moi, comme je connaissais bien cette partie du pays, je
19 savais bien qu'il n'était pas possible que des Serbes s'y trouvent.
20 Il était évident que soit Mate Boban lui-même ne savait pas ce
21 qui s'était passé, soit qu'il ne disait pas la vérité.
22 M. Harmon (interprétation). - Depuis cette époque,
23 Monsieur Mesic, avez-vous entendu dire si une quelconque personne avait
24 été poursuivie par les autorités Croates de Bosnie pour ce qui s'est passé
25 à Ahmici ?
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1 M. Mesic (interprétation). - Non, je n'ai rien entendu de tel.
2 M. Harmon (interprétation). - Savez-vous si une quelconque
3 personne a fait l'objet
4
5
6 de sanctions disciplinaires au sein du HVO pour les crimes de guerre qui
7 ont été commis à Ahmici ?
8 M. Mesic (interprétation). - Mon poste à l'époque était tel que
9 je n'avais aucune chance d'obtenir un tel rapport par les voies
10 officielles. De toute façon, je n'ai rien appris sur ce sujet par
11 quelqu’autre voie que ce soit.
12 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Mesic, je vous remercie
13 beaucoup. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.
14 Monsieur le Président, j'en ai terminé de mon interrogatoire
15 principal.
16 M. le Président (interprétation). - Merci Monsieur le
17 Procureur. Je me tourne vers les bancs de la défense. Je ne sais pas quel
18 est l'avocat... Je crois que c'est Maître Nobilo. Nous en avions parlé
19 hier...
20 M. Nobilo (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
21 Bonjour, Monsieur Mesic. Au cours de l'interrogatoire principal,
22 nous vous avons entendu expliquer certaines de vos opinions et certains
23 des postes que vous avez occupés, notamment membre de la présidence de la
24 RSFY, Premier ministre de la Croatie, représentant au Parlement,
25 Secrétaire-général du Parti. Après avoir quitté le HDZ, avez-vous pris
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1 part aux élections dans le cadre d'un autre Parti ?
2 M. Mesic (interprétation). - Oui, après avoir quitté le HDZ,
3 j'ai participé à la création du parti des Démocrates indépendants de
4 Croatie. Onze anciens membres du HDZ ont rejoint les rangs de ce nouveau
5 Parti.
6 Après un certain temps, au cours duquel nous sommes restés
7 membres de ce Parti, nous avons rejoint les rangs du HNS. A l'heure
8 actuelle, je suis vice-Président du HNS. Mais du fait de certaines
9 circonstances, le HND existe toujours. Il a un nouveau président à sa
10 tête. Je ne sais plus qui en sont les membres.
11 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous étiez membre du HND,
12 avez-vous pris
13
14
15 part à des élections quelconques, que ce soit au plan individuel ou en
16 tant que représentant d'un Parti sur une liste ?
17 M. Mesic (interprétation). - Oui, j'ai été élu à l'Assemblée
18 municipale de Zagreb.
19 M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous essayé de devenir membre
20 du Parlement ou à un autre poste ?
21 M. Mesic (interprétation). - Non.
22 M. Nobilo (interprétation). - Votre parti s'est-il porté
23 candidat aux élections parlementaires ?
24 M. Mesic (interprétation). - Oui, et nous avons gagné un siège.
25 M. Nobilo (interprétation). - Quelle a été la part de
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1 l'électorat qui a voté pour vous ?
2 M. Mesic (interprétation). - Je ne sais pas.
3 M. Nobilo (interprétation). - Vous dites que le HDZ est un
4 obstacle sur la voie de la démocratie et qu'il n'y a pas de prise de
5 décision démocratique au sein de ce Parti, que c'est un Parti qui prône
6 l'unipartisme, qu'ils ont pillé des biens, des propriétés. Vous dites que
7 ce sont des nationalistes, etc. Pourriez-vous me dire quand le HDZ a
8 commencé à se distinguer par de telles caractéristiques ?
9 M. Mesic (interprétation). - Je crois que cela a commencé à se
10 produire après l'accord passé à Karadordjevo. C'est à ce moment-là que
11 cette politique destructrice a commencé à être appliquée.
12 M. Nobilo (interprétation). - Quand cela a-t-il eu lieu ?
13 M. Mesic (interprétation). - Le 30 mars 1991.
14 M. Nobilo (interprétation). - Donc, ce parti a un certain nombre
15 de caractéristiques négatives et ce depuis 1991. C'est cela ? Quand avez-
16 vous quitté ce parti ?
17 M. Mesic (interprétation). - Je l'ai quitté en 1993. C'est
18 Franjo Tudjman qui m'a
19
20
21 demandé de me retirer du Parlement parce qu'il n'arrivait pas à parvenir à
22 un accord avec Slobodan Milosevic, parce qu'à un certain moment, j'avais
23 dit que c'était les Serbes eux-mêmes qui allaient le pendre sur la place
24 principale de Belgrade.
25 A cette époque-là, j'étais déjà en conflit ouvert avec les
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1 politiques officielles qui étaient menées, moi et les autres membres de ma
2 formation qui ont quitté le Parti en même temps que moi. Comme vous le
3 savez, en politique on n'agit pas sans bonne raison. Il faut attendre une
4 certaine réunion de circonstances pour agir. C'est la raison pour laquelle
5 je n'ai pas quitté le HDZ de façon soudaine.
6 Je l'ai quitté lorsque j'ai pensé que j'avais la possibilité de
7 m'attirer un plus grand public, de convaincre une plus grande partie du
8 public. Je ne voulais pas quitter le Parti comme cela et mettre un terme à
9 ma carrière, sans avoir rien accompli.
10 M. Nobilo (interprétation). - Quand avez-vous quitté le Parti
11 pour créer le HND ?
12 M. Mesic (interprétation). - En avril 1994. Mais les discussions
13 qui ont précédé mon départ du HDZ ont duré bien longtemps.
14 M. Nobilo (interprétation). - Combien de temps ont-elles duré ?
15 M. Mesic (interprétation). - Depuis l'entretien de Karadordjevo.
16 M. Nobilo (interprétation). - Entre-temps, vous avez occupé les
17 postes les plus importants au sein du HDZ. Ne vous considérez-vous pas en
18 partie responsable de l'évolution du parti, de ce qu'il a fait en
19 Croatie ?
20 M. Mesic (interprétation). - C'est vrai, je suis en partie
21 responsable de ce qui s'est passé. Je dois admettre, comme le public le
22 sait bien, je dois admettre qu'à ce moment-là j'étais partisan d'une
23 politique qui visait à l'unification de la Bosnie-Herzégovine. Je me suis
24 battu pour qu'il y ait le plus haut degré de démocratie possible en
25 Croatie.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Hormis le remplacement de Kljujic,
2 avez-vous jamais pris part au travail d'une quelconque des composantes du
3 HDZ pour la Bosnie-Herzégovine ?
4 M. Mesic (interprétation). - J'ai participé à une rencontre à
5 Sarajevo, lorsque la question de l'élection de Kljujic s'est posée, après
6 la démission de M. Perinovic. Mais je ne me souviens pas de la date
7 exacte.
8 M. Nobilo (interprétation). - Vous souvenez-vous quand Kljujic a
9 été remplacé ?
10 M. Mesic (interprétation). - En 1992, parce que c'est à cette
11 époque-là que j'étais président du comité exécutif du HDZ.
12 M. Nobilo (interprétation). - Au cours du premier semestre
13 de 1992 ? Quand exactement ?
14 M. Mesic (interprétation). - C'est peut-être le cas, peut-être.
15 M. Nobilo (interprétation). - N'hésitez pas à me corriger si je
16 ne vous ai pas bien compris, Monsieur Mesic. Au cours du second semestre
17 de 1992 et après le remplacement de M. Kljujic, vous n'avez pas participé
18 activement au travail des composants du HDZ en Bosnie-Herzégovine, n'est-
19 ce pas ?
20 M. Mesic (interprétation). - Non, je n'ai jamais pris part au
21 travail de ces entités, de ces organes. Je ne pouvais que suivre ce qui se
22 passait là-bas, dans la mesure du possible.
23 M. Nobilo (interprétation). - Fort bien, alors je vais me
24 corriger moi-même. Après le remplacement de Kljujic, vous n'avez plus
25 travaillé directement pour l'un des organes du HDZ en Bosnie-Herzégovine ?
Page 7236
1 M. Mesic (interprétation). - Je suivais ce qui s'y faisait. Je
2 n'y ai pas pris part. Bien sûr que je suivais ce qui s'y faisait parce que
3 j'occupais un certain poste à Zagreb, j'étais membre de la présidence du
4 HDZ. Le HDZ de Bosnie-Herzégovine était officiellement un parti séparé,
5 mais toutes les décisions étaient prises par la direction du HDZ à Zagreb.
6 C'est le HDZ de Zagreb qui prenait toutes les décisions sur qu'il fallait
7 faire en Bosnie-Herzégovine.
8 M. Nobilo (interprétation). - Mais avez-vous assisté aux
9 réunions des organes du HDZ de Bosnie-Herzégovine ? Y êtes-vous allé ?
10 M. Mesic (interprétation). - Non, ce sont eux qui venaient
11 jusqu'à Zagreb. Tout le HDZ de Bosnie-Herzégovine s'est déplacé jusqu'à
12 Zagreb.
13 M. Nobilo (interprétation). - Pour ce qui est justement de ces
14 visites à Zagreb, à quels entretiens de M. Tudjman et des représentants du
15 HDZ de Bosnie-Herzégovine avez-vous assisté ?
16 M. Mesic (interprétation). - C'est difficile à dire, je ne sais
17 pas combien de fois nous nous sommes rencontrés. Après que j'aie fait part
18 de mon opposition sur la politique croate vis-à-vis de la Bosnie-
19 Herzégovine, je n'ai plus été convié à participer à ces réunions. Mais
20 s'il arrivait que je me trouve auprès du président Tudjman lorsque des
21 gens de l'Herceg-Bosna, de Bosnie-Herzégovine viennent, alors je restais
22 et je prenais part à ces réunions.
23 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous donner un exemple
24 de cela, une réunion, une date de réunion, quels étaient les participants
25 à cette réunion, les sujets de discussion lors de cette réunion ?
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1 M. Mesic (interprétation). - Nous regardions notamment la
2 télévision et les communiqués de presse et il y avait au moins une réunion
3 par mois.
4 M. Nobilo (interprétation). - Je vous pose la question à vous-
5 mêmes. Quels sont les réunions auxquelles vous, vous avez participé ?
6 Quand ces réunions ont-elles eu lieu ? Quelles étaient les personnes
7 présentes ?
8 M. Mesic (interprétation). - Il y avait des représentants de
9 l'Herceg-Bosna ou du HDZ de Bosnie-Herzégovine. Ils venaient fréquemment
10 en délégation et il y avait Mate Boban, Lasic, Boras, Kostroman,
11 Dario Kordic, tous ces membres étaient présents.
12 Je ne connais pas tous les noms. Ils venaient tous. Ils
13 espéraient recevoir des conseils, des instructions du palais
14 présidentiel.
15 M. Nobilo (interprétation). - Vous ne répondez pas à ma
16 question. Je comprends bien que ces personnes sont venues jusqu'à
17 Zagreb. Ma question est la
18
19
20 suivante. Vous-même, avez-vous participé à l'une quelconque de ces
21 réunions ? Le cas échéant, pourriez-vous nous décrire les
22 circonstances qui ont présidé à cette réunion ? Quand cette réunion
23 a-t-elle eu lieu ? Quels étaient les sujets abordés ? Je vous parle
24 des réunions auxquelles vous-même avez participé.
25 M. Mesic (interprétation). - Si vous m'aviez posé cette
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1 question plus tôt, j'aurais consulté mes notes personnelles. Cela
2 m'aurait permis de vous dire à quelle réunion j'ai assisté. Dès lors
3 que je me trouvais au palais présidentiel et qu'il y avait une
4 réunion, j'y assistais, que j'y sois invité ou pas. Parfois j'étais
5 invité et parfois j'y ai assisté simplement parce que je me trouvais
6 sur place au moment où elle avait lieu.
7 M. Nobilo (interprétation). - Pourriez-vous décrire l'une
8 quelconque de ces réunions, nous la situer dans le temps ?
9 M. Mesic (interprétation). - Je ne sais pas combien de fois
10 il faut que je vous le répète, mais ces réunions étaient organisées
11 au moins une fois par mois.
12 M. Nobilo (interprétation). - Etiez-vous présent à chacune
13 d'entre-elles ?
14 M. Mesic (interprétation). - J'ai déjà répondu à la
15 question.
16 M. le Président - Monsieur Mesic, M. Nobilo a été très
17 clair. Vous répondez comme vous voulez, bien sûr mais, dès lors que
18 vous avez dit que vous participiez à ces réunions, il vous demandait
19 un exemple d'une de ces réunions et ce qui s'y passait. Vous pouvez
20 ou pas, vous voulez ou pas. Vous ne pouvez pas dire "J'ai déjà
21 répondu à la question". A mon sens, vous n'avez pas répondu à la
22 question. Vous ne le pouvez peut-être pas d'ailleurs, mais ce n'est
23 pas mon problème.
24 M. Mesic (interprétation). - Je peux répondre à cette
25 question, absolument. Je crois que j'ai été clair. Le HDZ de Bosnie-
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1 Herzégovine, la direction politique venait assister à des réunions
2 avec la direction du HDZ de Croatie. Au cours de ces réunions, il y
3 avait les participants que j'ai énumérés et des membres de la
4 direction du HDZ de Croatie. Je n'ai pas noté exactement quels jours
5 ces réunions ont été tenues mais, de quoi y était-il question ?
6 Premièrement, lorsqu'on parlait d'un référendum... Si vous
7 voulez des exemples, je vais vous en donner. Lorsqu'on parlait du
8 référendum en Bosnie-Herzégovine, à l'époque où il fallait décider si
9 les Croates devaient se prononcer en faveur d'une Bosnie-Herzégovine
10 indépendante ou s'il fallait ne pas tenir ce référendum car les
11 Serbes avaient décidé qu'ils ne participeraient pas à un tel
12 référendum. Je dois dire que les représentants du HDZ de Bosnie-
13 Herzégovine étaient contre la participation des Croates à ce
14 référendum et cette décision était soutenue également par le
15 président Tudjman, ainsi que par une majorité du HDZ à Zagreb, c'est-
16 à-dire du HDZ de Croatie.
17 J'ai eu du mal à convaincre Tudjman et les membres du HDZ
18 du fait que, si les Croates et les Serbes ne participaient pas au
19 référendum, ce référendum n'allait pas réussir et la Bosnie-
20 Herzégovine resterait dans la Yougoslavie.
21 A quelle réunion cela a-t-il eu lieu ? Je ne peux vous le
22 dire exactement. Mais, à chaque fois qu'une décision importante a été
23 prise, à chaque fois, avant cela, une réunion du HDZ de la Croatie et
24 de la Bosnie-Herzégovine a eu lieu.
25 Lorsque le plan Vance Owen a dû être mis en oeuvre, même
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1 s'il n'avait pas été signé par la partie serbe, même s'il n'avait pas
2 été adopté par leur assemblée, au cours d'une telle réunion on a
3 décidé de mettre en oeuvre immédiatement le plan Vance Owen, car
4 c'était dans l'intérêt de la Croatie, car le territoire croate était
5 délimité.
6 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez cité un exemple
7 lorsqu'il s'agissait du référendum. Lorsqu'on parlait du plan vous-
8 même Vance Owen, y avez-vous assisté ?
9 M. Mesic (interprétation). - Oui, pour l'un et pour
10 l'autre.
11 M. Nobilo (interprétation). - Jusqu'à quand, dans le temps,
12 avez-vous été convié à ces réunions ? Pouvez-vous nous préciser le
13 cadre temporel ?
14 M. Mesic (interprétation). - On m'y a invité de moins en
15 moins mais, souvent, j'ai vu à la télévision également qu'une réunion
16 s'était tenue. Je dirai que c'était jusqu'à la fin de 1993.
17 M. Nobilo (interprétation). - Après cela, vous n'y avez
18 plus été convié ?
19 M. Mesic (interprétation). - Non.
20 M. Nobilo (interprétation). - Donc, vous avez été convié
21 pendant la guerre croato-musulmane. Au cours de ces réunions, a-t-on
22 pris une décision de mener une guerre contre les Musulmans ?
23 M. Mesic (interprétation). - Si une telle décision
24 officielle, formelle, n'a jamais été prise.
25 M. Nobilo (interprétation). - Mais, de manière non
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1 formelle, avez-vous été présent ?
2 M. Mesic (interprétation). - Une telle décision formelle
3 n'a jamais été prise mais a-t-elle été appliquée ? Je pense que c'est
4 clair pour tout le monde.
5 M. Nobilo (interprétation). - Je vous parle d'une décision
6 de commencer la guerre. Que la guerre ait eu lieu, c'est clair pour
7 tous. Mais, sur le plan non formel, officieux, une telle décision a-
8 t-elle été prise aux réunions auxquelles vous avez participé ?
9 M. Mesic (interprétation). - Non.
10 M. Nobilo (interprétation). - Donc, vous étiez à la
11 direction du HDZ à l'époque de la guerre croato-musulmane.
12 Officiellement ou officieusement, une décision a-t-elle était prise
13 de procéder à un nettoyage ethnique de la population musulmane dans
14 les provinces contrôlées par la Croatie ou par le HVO ?
15 M. Mesic (interprétation). - Je dois dire qu'on a parlé au
16 cours de ces réunions de la situation dans les différentes
17 municipalités, de ce qui s'y passait. Au cours
18
19
20 d'un tel entretien, j'étais assis à côté de Pero Markovic qui est
21 maire de Capljina. Je lui ai demandé quelle était la situation chez
22 lui, entre les Musulmans et les Croates. Il m'a répondu : «Chez nous,
23 il n'y a aucune situation car il n'y a plus de Musulmans. Nous avons
24 tout nettoyé».
25 M. Nobilo (interprétation). - Il vous a dit cela pour
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1 Capljina ? Mais, une décision a-t-elle été prise au cours de ces
2 réunions de commencer le nettoyage ethnique des Musulmans, de brûler
3 leur maison et chasser les Musulmans des provinces ?
4 Une telle décision a-t-elle été prise ?
5 M. Mesic (interprétation). - Une telle décision a été mise en
6 oeuvre et si vous vous en souvenez bien, au Sabor croate, un représentant
7 s'est exprimé. Il avait visité ces zones contrôlées par l'armée Croate, ou
8 plutôt le HVO. Il a dit qu'il avait été surpris de constater que l'opinion
9 publique n'était pas informée, que par exemple on avait mis le feu à la
10 mosquée de Livno.
11 Il disait qu'il s'était rendu dans cette mosquée, qu’elle
12 n’avait pas brûlé et qu’il venait d'en chasser des chèvres, des vaches qui
13 s'y trouvaient. Si des vaches et des chèvres pouvaient entrer dans la
14 mosquée, j'en déduis que des personnes, des êtres humains n'y allaient
15 pas.
16 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur Mesic, j'aimerais que
17 vous répondiez directement à mes questions, non pas en racontant des
18 anecdotes, mais directement. Je vous ai posé une question. Lors des
19 réunion de la direction du HDZ, quand des gens du HDZ de Bosnie-
20 Herzégovine venaient assister à ces réunions, a-t-on décidé de procéder au
21 nettoyage ethnique des populations musulmanes des territoires contrôlés
22 par le HVO ? Une telle décision a-t-elle été prise ? En avez-vous entendu
23 parler ? Avez-vous assisté à une telle réunion au cours de laquelle ce
24 type de décision a été prise ?
25 M. Mesic (interprétation). - Non. Cette décision n'a pas été
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1 prise.
2 M. Nobilo (interprétation). - L'interprétation anglaise dit
3 qu'une telle décision n'a pas été prise formellement. Mais sur le plan
4 informel, officieux, au cours de ces réunions auxquelles vous avez
5 participé, une telle décision a-t-elle été prise ?
6 M. Mesic (interprétation). - Etant donné que participer à ces
7 réunions des représentants de différente partie de la Bosnie-Herzégovine,
8 où manifestement il y avait eu déplacement de populations musulmanes, sans
9 parler de ce qui se passait à Mostar, il était clair pour moi que la
10 politique se menait par des voies détournées, mais ce n'était pas la
11 politique officielle. La politique officielle était toujours une Bosnie
12 unifiée avec trois peuples constitutifs.
13 M. Nobilo (interprétation). - Ces réunions n'étaient pas
14 publiques. Il s’agissait de réunions internes. Il n'y avait donc pas de
15 compte rendu à part quelque chose de très précis. Je vous demande si
16 Tudjman l’a ordonnée, si quelqu'un d'autre l’a ordonnée. S'il a ordonné,
17 par exemple, que l'on nettoie les Musulmans de la province de Travnik ?
18 Avez-vous entendu dire ou parler de telles déclarations ?
19 M. Mesic (interprétation). - Non.
20 M. Nobilo (interprétation). - Des dirigeants musulmans se
21 rendaient-ils souvent à Zagreb ?
22 M. Mesic (interprétation). - Oui. Ce n'est que par Zagreg qu'ils
23 pouvaient se rendre dans le monde.
24 M. Nobilo (interprétation). - Vous les voyiez donc souvent à
25 Zagreb ?
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1 M. Mesic (interprétation). - Oui.
2 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez décrit M. Perinovic,
3 M. Kljujic comme des personnes pour une Bosnie-Herzégovine unifiée.
4 Comment expliquer alors que Tudjman -et vous nous avez dit qu’il avait une
5 influence prépondérante en Bosine- ait permis que ces personnes-là soient
6 désignées comme présidents du HDZ de Bosnie-Herzégovine ? Pouvez-vous nous
7 expliquer cela ?
8 M. Mesic (interprétation). - Je pense qu'ils ne voulaient pas
9 mener la politique qu'on leur demandait de mener. Tout d’abord, Kljujic a
10 été mis en cause. Perinovic, lui, étant donné qu'il était marié à une
11 musulmane, a été rejeté car il n'allait pas oeuvrer dans l'intérêt de la
12 Croatie. Pour ce qui est de M. Miljenko Brkic, il ne répondait pas aux
13 critères parce qu'il était trop modéré et parce qu'il n'était pas
14 favorable à l'application de la politique Croate en Bosnie-Herzégovine.
15 Puis, on est arrivé à Mate Boban. Le Président Tudjman disait de
16 lui qu’il était le seul à comprendre sa politique en Bosnie-Herzégovine.
17 M. Nobilo (interprétation). - Il s’agit là de raisons pour
18 remplacer ces personnes. Mais je vous parlais des raisons invoquées pour
19 mettre ces personnes-là à ces postes. Comment se fait-il que ces trois
20 personnes, qui étaient pour l'unité de la Bosnie-Herzégovine, aient occupé
21 ces fonctions ?
22 M. Mesic (interprétation). - J'ai essayé d'expliquer dans ma
23 déclaration que la politique de Tudjman vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine
24 a changé. A l’époque, lui aussi était pour une Bosnie-Herzégovine unifiée.
25 Puis, les choses ont changé à Karadordjevo. Après Karadordjevo sa position
Page 7245
1 a évolué car il était persuadé que Milosevic allait désintégrer la Bosnie.
2 C’est pourquoi il a modifié l'équipe avec laquelle il travaillait.
3 M. Nobilo (interprétation). - Nous passons maintenant au
4 remplacement de Kljujic. Vous avez dit, dans l'interrogatoire principal,
5 que vous étiez responsable de remplacer Kljujic. S'il n'avait pas
6 démissionné, auriez-vous pu, au cours de cette réunion-là, faire quelque
7 chose sans qu’il soit d’accord ?
8 M20*jonction OK
9 M. Mesic (interprétation). - Je crois que non, car à l'époque la
10 tendance de maintenir l'unité du HVO l’emportait au sein du HDZ.
11 M. Nobilo (interprétation). - Vous dites que vous avez remplacé
12 Kljujic.
13 Je demanderai maintenant à la technique de nous passer une
14 première vidéo, courte, s'il vous plaît. Je demanderai aux interprètes,
15 s'ils sont en mesure d'interpréter, de le faire. Sinon nous pourrons vous
16 montrer cette vidéo deux fois, elle est brève.
17 Traduction de la vidéo :
18 «Question. - Monsieur Mesic, on parle tout le temps de partage
19 de la Bosnie-Herzégovine. Si je ne m’abuse, vous pensez que la Bosnie-
20 Herzégovine doit rester unifiée car il s'agit d'une exigence
21 internationale et parce que cela est dans l'intérêt des Croates de Bosnie-
22 Herzégovine, mais également de la nation de Croatie.
23 M. Mesic. - Nous menons une politique selon laquelle les
24 frontières sont garanties et ne peuvent être modifiées par la force. Si
25 c’est valable pour la Croatie, ça l’est pour les autres également. Je dois
Page 7246
1 dire que la direction de la Bosnie-Herzégovine a attendu trop longtemps.
2 Si, si elle avait pris la décision au même moment que la
3 Croatie, parce qu’on pensait que c'était le meilleur moyen de protéger ses
4 intérêts, au moment où on a vu que la Serbie n'était pas en faveur du
5 concept de confédération préconisé par la Croatie et la Slovénie pour tous
6 les habitants de l'ancienne Yougoslavie. Jje pense que la Bosnie a pris sa
7 décision trop tard, car la direction du SDA estimait que la Bosnie
8 pourrait s’en tirer, se sortir des pressions et qu’il n’y aurait pas de
9 guerre en Bosnie-Herzégovine.
10 Maintenant, il apparaît que la Bosnie-Herzégovine est occupée,
11 que sur le territoire de Bosnie-Herzégovine (en Europe) il y a énormément
12 de soldats et qui ont un pouvoir de tuer énorme. Il est très difficile
13 maintenant pour la Bosnie-Herzégovine de faire ce que la Croatie et la
14 Slovénie ont mis en application. Je pense que ce référendum intervient
15 trop tard, mais, comme on dit, mieux vaut tard que jamais.
16 Il est quand même bon qu'il ait lieu maintenant et que la
17 Bosnie-Herzégovine devienne indépendante, que l'armée serbe quitte le
18 territoire de la Bosnie-Herzégovine et qu'à
19
20
21 l'avenir la Bosnie-Herzégovine mène une politique indépendante. Dans ce
22 cas, ces rapports avec la Croatie seront plus manifestes».
23 Je vous prie de montrer la deuxième vidéo.
24 M. le Président. - Monsieur le Procureur ?
25 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai une
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1 demande. Le conseil pourrait-il nous faire part de la date de ces vidéos,
2 cela serait très utile pour moi-même, le Tribunal et le témoin ?
3 M. le Président. - Je pense que Me Nobilo donnera tous les
4 éléments permettant au témoin d'identifier notamment cette pièce, s'il
5 veut la déposer, n’est-ce pas ?
6 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons essayer de le demander
7 à M. Mesic. Cela a été tourné après votre retour de chez Loko Behed, après
8 le remplacement de Kljujic. Vous en souvenez-vous ?
9 M. Mesic (interprétation). - Oui, je m'en souviens, mais plus de
10 la date.
11 M. Nobilo (interprétation). - Reconnaissez-vous que c'était
12 directement après le remplacement de Kljujic ?
13 M. Mesic (interprétation). - Je me souviens de cette émission,
14 mais plus de la date.
15 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous me dire quand Kljujic
16 a été remplacé ?
17 M. Mesic (interprétation). - Je ne sais plus.
18 M. Nobilo (interprétation). - Malheureusement, Monsieur le
19 Président, nous ne pouvons vous fournir maintenant et avec exactitude la
20 date. Il s'agit du jour qui a suivi le remplacement de Kljujic à
21 Siroki Brijeg. Peut-être serons-nous en mesure de vous fournir cette date
22 ultérieurement.
23 Vidéo suivante, je vous prie :
24 «La souveraineté du peuple en que tant que peuple, mais
25 également la souveraineté du territoire où il habite.
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1 Si le SDS affirme que le territoire serbe est aussi celui habité
2 par seulement 5 % des Serbes, nous voyons qu'il s'agit d'une politique
3 dictée par Slobadan Milosevic et Karadzic n’est que l'instrument de cette
4 politique. Le peuple croate ne peut répondre aux provocations externes. Il
5 doit éclaircir sa position dans toute la Bosnie-Herzégovine et dans le
6 reste du territoire.
7 Question. - Pour ce qui est des rapports entre Milosevic et
8 Karadzic est-il possible également de parler d'une relation semblable
9 entre la direction croate et M. Kljujic ? Est-ce parce qu'il n'a pas
10 écouté les instructions qu'il a du quitter son poste ?
11 M. Mesic. - Non. Personne n'a demandé qu'il donne sa démission.
12 Je dirai que vers la fin des discussions il a donné sa démission, mais
13 personne n'a demandé sa démission. Mais le HDZ est une union démocratique
14 croate. Nous sommes démocratiques».
15 M. Nobilo (interprétation). - Pour ce qui est du premier
16 extrait, est-ce que vous exprimiez la position du HDZ ?
17 M. Mesic (interprétation). - Oui.
18 M. Nobilo (interprétation). - Il ne s'agissait pas simplement de
19 votre avis personnel mais de l’avis de votre parti ?
20 M. Mesic (interprétation). - Oui.
21 M. Nobilo (interprétation). - Vous nous avez dit que votre tâche
22 était de remplacer Kljujic. Or, maintenant, à la télévision croate vous
23 dites que personne ne l'avait évincé ni remplacé. Il y a donc une certaine
24 différence ?
25 M. Mesic (interprétation). - Il n'y a pas de différence. Vous
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1 n'avez pas compris de quoi il s'agit. Personne au cours dans assemblée n'a
2 demandé qu'on remplace Kljujic pendant cette réunion-là. Moi, je suis
3 arrivé avec la demande de le remplacer de Tudjman.
4 M. Nobilo (interprétation). - Quelqu’un a bien demandé son
5 remplacement ?
6 M. Mesic (interprétation). - Non, au cours de cette assemblée,
7 personne ne l’a
8
9
10 demandé, mais moi j’avais l’ordre de Tudjman de le remplacer. Croyez-vous
11 qu’à ce moment-là je pouvais dire que Tudjman m’avait demandé d’évincer
12 Kljujic ? Soyez raisonnable.
13 M. Nobilo (interprétation). - Alors vous ne dites pas toujours
14 la vérité ?
15 M. Mesic (interprétation). - Non, mais à l'époque, je ne pouvais
16 pas dire qui avait donné l'ordre. Les conditions politiques ne me le
17 permettaient pas. Je dis toujours la vérité mais, si la pression est
18 telle... C'était le cas à l'époque, je ne pouvais pas entrer dans les
19 détails, car la politique ne me le permettait pas. Je n'ai pas donné ces
20 détails.
21 M. Nobilo (interprétation). - Si j'ai bien compris -veuillez me
22 corriger si je me trompe-, le fait que vous donniez tous les détails ou
23 pas dépend des conditions politiques ?
24 M. Mesic (interprétation). - A l'époque, en tant que Secrétaire
25 exécutif du Parti, je ne pouvais dire publiquement que le
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1 Président Tudjman demandait que Kljujic soit remplacé. J'ai dit cela à
2 Kljujic en tête-à-tête. Je lui ai dit : "Ecoute, j'ai des ordres de te
3 remplacer. Tout d'abord, j'ai la tâche de te demander de donner ta
4 démission". Il m'a dit : "Est-ce que Tudjman le demande expressément ?"
5 J'ai dit : "Oui, expressément". Je lui ai dit : "J'ai vu qu'ici on te
6 soutient, que l'on ne peut pas te remplacer. Peut-être qu'un tiers serait
7 pour. Alors, je vais rentrer à Zagreb et je vais dire que tu bénéficiais
8 du soutien de l'assemblée. On verra ce qui se passera après".
9 Mais après cela, il a commencé par dire que Tudjman pourrait
10 faire de même et il est parti à Sarajevo.
11 M. Nobilo (interprétation). - Une question m'intéresse encore.
12 Si les circonstances politiques, si la politique avait une incidence sur
13 le fait de dire la vérité ou non, est-ce que votre situation politique
14 aujourd'hui a une influence sur votre déposition ?
15 M. Mesic (interprétation). - Vous faites erreur ici. Il ne
16 s'agissait pas de vérité. J'ai dit la vérité. Personne là-bas, dans cette
17 assemblée, je répète que personne là-bas -je suis extrêmement précis-, à
18 cet endroit-là, n'a demandé la démission de Kljujic. Mais personne ne m'a
19
20
21 demandé si Tudjman l'avait demandé. Par conséquent, mon devoir n'était pas
22 d'éclaircir ce point.
23 M. Nobilo (interprétation). - En tout état de cause, ces deux
24 extraits que nous venons de voir sont-ils une interview que vous avez
25 donnée ? Est-ce vraiment ce que vous avez dit ?
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1 M. Mesic (interprétation). - Vous voulez dire "Etait-ce moi ?"
2 M. Nobilo (interprétation). - Oui. Est-ce que c'est vous, est-ce
3 que ce sont vos mots ?
4 M. Mesic (interprétation). - Je peux quand même me reconnaître,
5 non ?
6 M. Nobilo (interprétation). - Nous devons identifier ces
7 documents.
8 M. Mesic (interprétation). - Je me suis reconnu dans les
9 extraits que vous avez montrés.
10 M. Nobilo (interprétation). - Je demanderai au Greffier de bien
11 vouloir faire un compte rendu de ces textes. Bien entendu, il s'agit d'un
12 élément de preuve de la défense. Nous souhaitons donc obtenir un numéro.
13 M. le Président. - Maître Harmon, nous considérons donc que ces
14 extraits sont identifiés par le témoin ?
15 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Mais
16 la date de ces vidéo doit nous être fournie. Par ailleurs, j'aimerais
17 demander que la transcription complète en anglais soit fournie au Bureau
18 du Procureur avant que M. Mesic ne se retire. S'il y a des différences
19 entre la traduction et la vidéo, je pourrai poser des questions à
20 M. Mesic. Je ne comprends pas ces vidéos. Je repose sur l'interprétation.
21 J'aimerais avoir une copie par écrit pour éventuellement en discuter avec
22 M. Mesic, si cela est nécessaire.
23 M. le Président. - Maître Nobilo...
24 M. Nobilo (interprétation). - Nous n'avons pas d'objection si
25 M. Mesic doit passer plus de temps ici. Mais si cela n'est pas possible à
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1 très court terme pour le Greffier, à ce
2
3
4 moment-là il faudra peut-être rappeler le témoin.
5 M. le Président. - Demain matin, il n'y a pas d'audience. Peut-
6 être peut-on le faire traduire. C'est relativement long. Il me paraît
7 légitime de la part du Procureur de pouvoir éventuellement, dans son droit
8 de réplique, compléter, encore que nous remercions beaucoup les
9 interprètes de ce qu'ils ont fait. Sur le plan judiciaire, il faut avoir
10 une version anglaise ; je n'ose pas dire une version française, cela
11 pourrait être abusif, mais au moins une version anglaise.
12 M. le Greffier. - Oui, nous essaierons de fournir une traduction
13 pour demain dans l'après-midi.
14 M. le Président. - Nous allons interrompre. Demain, nous
15 reprendrons à 15 heures l'audience, puisqu'à 14 h 30 nous avons une
16 conférence de mise en état dans une autre affaire.
17 Je vois que Me Harmon a encore une question.
18 Pour l'identification, nous sommes d'accord. Cela ne pourra être
19 totalement identifié que lorsque nous saurons à quel moment cette
20 interview a été donnée.
21 M. le Greffier. - Il s'agit de la pièce D 98.
22 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai une
23 autre requête. Si le conseil compte utiliser des documents en langue
24 croate et me les donner par la suite, ils ne me sont pas très utiles car
25 je ne comprends pas. S'il a l'intention de montrer des documents au témoin
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1 pendant son contre-interrogatoire, je lui demanderai de les transmettre au
2 département de traduction pour qu'ils puissent être traduits en anglais
3 pour que, lorsqu'il m'en fournit une copie, je puisse lire la traduction
4 et vraiment en prendre connaissance.
5 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, nous en
6 avons parlé bien des fois déjà. Nous avons énormément de documents.
7 Monsieur Mesic est un personnage public. Il a déjà parlé de tous les
8 éléments qu'il a mentionnés aujourd'hui. Nous sommes d'accord. A ce
9 moment-là, il faut interrompre le contre-interrogatoire avant la
10 traduction, puis convoquer M. Mesic ou, pour gagner du temps, il faut
11 procéder comme on l'a fait jusqu'ici.
12 Je ne vais citer que de traits brefs passages des articles de
13 journaux. A ce moment-là, on aurait terminé plus vite.
14 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, je ne
15 prétends pas dire à la défense comment elle doit procéder. Le témoignage
16 de Monsieur Mesic est à leur disposition depuis le 6 mai. Ils ont préparé
17 leur interrogatoire en rassemblant des documents pertinents. Je ne demande
18 pas au Tribunal de suspendre le témoignage de M. Mesic mais, peut-être
19 pourrait-on envisager à ce stade tardif de les transmettre au département
20 de traduction pour que ce dernier me fournisse ces documents.
21 Ils savent clairement quels documents ils ont l'intention
22 d'utiliser pour contester le témoignage récusé, pardon, le témoignage de
23 M. Mesic. Si on ne dispose pas de traduction anglaise pour l'instant, je
24 demande que l'on soumette les documents que la défense a l'intention
25 d'utiliser comme des pièces dans le contre-interrogatoire de M. Mesic, les
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1 soumettre au département de traduction pour que ce dernier fasse tout ce
2 qui est en son pouvoir pour nous fournir des traductions en anglais.
3 J'ajouterai que le Bureau du Procureur essaie également de
4 fournir à la fois au Tribunal et à la défense des traductions en français
5 et en anglais à l'avance, avant l'utilisation de ces documents.
6 M. Hayman (interprétation). - Si vous me le permettez,
7 Monsieur le Président, je m'exprimerai au nom de mon collègue. Nous avons
8 des objections sérieuses à voir l'accusation nous dicter comment nous
9 devrions définir nos priorités.Et ex parte, nous dirons au Tribunal
10 combien de documents nous avons transmis à la traduction et dont nous
11 attendons la traduction.
12 Mais je dirai que M. Nobilo a rassemblé ces pièces, y compris
13 pendant la déposition. Il était en train de faire des photocopies encore
14 avant la déposition. Nous réagissons, nous rassemblons des informations.
15 Cela n'est pas la prérogative de l'accusation. Il peut traduire ce qu'il
16 veut, il peut faire revenir le témoin, mais il n'est pas en mesure de nous
17 imposer
18
19
20 unilatéralement de tels fardeaux.
21 M. le Président - On n'impose rien unilatéralement, comme la
22 défense n'impose rien unilatéralement à l'accusation. C'est le Tribunal
23 qui décide. Pour l'instant, nous allons tranché sur la vidéo. Je vous
24 demande, dans le cas de votre contre-interrogatoire, si vous avez d'autres
25 documents, de les fournir au service de la traduction.
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1 Nous nous contenterons de la traduction par les interprètes qui
2 sont assermentés. Au cas où tous les documents ne seraient pas traduits,
3 vous ferez votre droit de réplique en fonction de ce que vous avez
4 entendu. Si, par hasard, cela n'était pas suffisant, M. Mesic serait amené
5 à revenir à un autre moment. Ne faisons pas d'incident là où il ne peut
6 pas y en avoir.
7 Je me permets de vous rappeler que si votre Président, que vous
8 respectez particulièrement, devait interrompre le procès chaque fois qu'il
9 n'a pas une traduction en français, nous serions bien souvent interrompus.
10 Tout le monde doit y mettre du sien. L'audience est suspendue. Elle
11 reprendra à 15 heures demain.
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13 L’audience est levée à 17 heures 30.
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