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2 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T
3 POUR LEX-YOUGOSLAVIE
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5 LE PROCUREUR
6 c/
7 Tihomir BLASKIC
8 Lundi 16 novembre 1998
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10 Laudience est ouverte à 15 heures 30.
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13 M. le Président. - Veuillez vous asseoir. Faites entrer
14 l'accusé, Monsieur le Greffier.
15 (L'accusé est introduit dans le prétoire. )
16 La Chambre vous doit quelque excuse. C'est une journée un peu
17 particulière aujourd'hui, mais peut-être que je pourrais vous dire que le
18 retard que nous prenons aujourd'hui devrait être compensé par le fait
19 qu'il est dû par l'arrivée de nouveaux Juges, mesure prise par le Conseil
20 de sécurité pour essayer d'accélérer nos procédures.
21 Je salue d'abord les interprètes.
22 Mme l'interprète. - Bonjour, Monsieur le Président.
23 M. le Président. - Je vérifie qu'ils m'entendent. Je salue les
24 conseils de l'accusation, les conseils de la défense, je salue l'accusé.
25 Nous pouvons ainsi reprendre. Monsieur le Greffier, nous étions à
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1 introduire le témoin qui n'était pas protégé, c'est M. Mladen Holman, je
2 crois.
3 M. Dubuisson. - Oui, c'est bien cela, Monsieur le Juge, le
4 témoin Mladen Holman.
5 M. le Président. - C'est Me Nobilo qui assurait l'interrogatoire
6 principal, n'est-ce pas ?
7 M. Dubuisson. - Oui, tout à fait.
8 M. le Président. - Bien, alors, nous introduisons le témoin.
9 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)
10 Monsieur Mladen Holman, vous m'entendez ?
11 M. Holman (interprétation). - Oui, je vous entends.
12 M. le Président. - Asseyez-vous. Nous allons reprendre votre
13 interrogatoire principal par la défense. Je vous rappelle que vous êtes
14 toujours sous serment.
15 M. Nobilo (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.
16 Merci, Monsieur le Président.
17 Monsieur Holman, avant de poursuivre, nous allons nous mettre
18 d'accord, si vous le voulez bien, de ne pas parler trop vite pour que les
19 interprètes puissent véritablement nous suivre de très près et traduire
20 tout ce que nous souhaitons que les Juges entendent.
21 La dernière fois, nous avons parlé du HOS. Si vous voulez bien,
22 nous allons répéter en quelques phrases tout simplement ce qui a été dit,
23 pour rappeler en mémoire ce qui a été dit il y a dix jours. Le HOS, à
24 Zenica, faisait partie de l'armée de Bosnie-Herzégovine au cours de 1992
25 jusqu'au 04/1993, avril 1993 ?
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1 M. Holman (interprétation). - Oui.
2 M. Nobilo (interprétation). - Quand est-ce que vous avez pris la
3 décision de sortir de l'unité du HOS et de rejoindre le HVO ?
4 M. Holman (interprétation). - Après une série d'incidents en
5 Bosnie centrale avec les unités musulmanes, nous avons pu comprendre que
6 des conflits se produiraient entre les Croates et les Musulmans, par
7 conséquent, ces deux composantes de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du
8 HVO. Il y avait un certain nombre d'incidents qui se sont produits en
9 Bosnie centrale. Le point culminant s'est produit à la fin du mois de
10 janvier 1993, au moment où il y a eu le massacre contre les Croates de la
11 Bosnie centrale, à Ducina.
12 A cette époque-là, nous avons commencé à réfléchir très
13 sérieusement pour transformer le HOS en HVO. Sur le terrain, nous avons
14 compris que notre peuple se trouvait dans une situation de plus en plus
15 délicate, qu'il était en danger, en grand danger. Et c'étaient les raisons
16 principales pour lesquelles nous avons pensé qu'il était indispensable,
17 par conséquent, de créer le HVO. Ou pour simplifier, chez nous, dans le
18 peuple, on dit que chaque oiseau doit rejoindre les oiseaux de son groupe.
19 Par conséquent, nous avons fait pareil.
20 M. Nobilo (interprétation). - Cela veut dire quoi ?
21 M. Holman (interprétation). - Cela voulait tout simplement dire
22 qu'il fallait rejoindre notre peuple, qu'il n'y avait pas un autre choix à
23 faire.
24 M. Nobilo (interprétation). - Je m'excuse une fois de plus. Je
25 vous répète qu'il faut peut-être attendre un peu et, surtout, faire des
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1 intervalles entre les deux interprétations pour que les interprètes
2 puissent traduire.
3 Quand est-ce que la décision a été apportée et quand le HOS de
4 Zenica s'est joint-il au HVO ?
5 M. Holman (interprétation). - C'est le 5 avril 93 que la
6 décision a été prise. Le 10 avril 93, cinq jours plus tard, c'est à la
7 télévision de Zeta et la télévision de Bosnie-Herzégovine également, avait
8 publié que le HOS a rejoint le HVO et s'est donc mis sous
9 l'autorité du HVO.
10 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous dire si vous avez
11 informé sur le transfert de votre unité le quartier général du HOS à
12 Zagreb, le Président également. M. Paraga, vous l'avez informé ?
13 M. Holman (interprétation). - Oui, nous l'avons informé. Nous
14 avons aussi envoyé un certain nombre de rapports sur la situation
15 extrêmement difficile dans laquelle se trouvaient les côtes, les incidents
16 qui se sont produits également. Nous avons informé M. Paraga qui avait
17 difficilement accepté ces rapports et moi, j'étais obligé également
18 d'emmener avec moi le coordonnateur de ce parti qui était chargé avec moi,
19 dans notre unité, de ce parti croate de droit et de lui parler, devant
20 Dobroca Paraga, de toutes ces difficultés que nous avons rencontrées. Je
21 me suis rendu chez lui et ils n'ont pas tout de suite accepté ce que nous
22 avons dit, mais à la fin de compte, nous avons dit qu'effectivement les
23 gens venaient sur le terrain, qu'ils se plaignaient.
24 M. Nobilo (interprétation). - Le 10 avril 1993, vous avez publié
25 que vous alliez par conséquent rejoindre le HVO. C'est le 16 avril que les
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1 conflits ont commencé entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO en
2 Bosnie centrale.
3 Est-ce qu'au cours de ces 5 jours, vous avez réussi à vous
4 intégrer dans une des brigades du HVO ? Est-ce que vous avez réussi
5 également à faire ces transformations et devenir partie intégrante du
6 HVO ?
7 M. Holman (interprétation). - En ce qui me concerne, j'avais
8 pour tâche de coordonner le HVO à Zenica. Nous n'avons pas réussi à faire
9 grand-chose. Il y avait un certain nombre de réflexions dans lesquelles
10 nous nous sommes lancés ; nous avons pensé à plein de choses mais nous
11 n'avons pas réussi véritablement à restructurer notre unité.
12 M. Nobilo (interprétation). - Vous voulez dire que vous n'avez
13 pas réussi à transformer votre unité et faire partie intégrante d'une des
14 brigades du HVO ?
15 M. Holman (interprétation). - Nous n'avons pas eu le temps et
16 nous ne nous sommes pas pressés non plus. Nous ne pensions pas que les
17 forces musulmanes allaient pouvoir attaquer aussi vite, en 5 jours, sur
18 nous. Car nous avons publié comme je l'ai dit, 5 jours auparavant que nous
19 allions rejoindre le HVO.
20 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons essayer de
21 reconstruire un certain nombre de vos souvenirs.
22 Le 15 avril 93 jusqu'au 18 avril, cette période au moment où
23 vous avez été arrêté et vous avez été emprisonné dans Zenica. Est-ce que
24 vous vous rappelez comment se sont déroulés les événements dans cette
25 période entre le 15 avril 93 et 18 avril 1993.
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1 Le 15 avril 93, qu'est-ce qui s'est passé tout
2 particulièrement ?
3 M. Holman (interprétation). - Le 15 avril 93, j'ai passé la nuit
4 dans les alentours de la ville. C'est un village dans la banlieue de
5 Zenica. J'ai passé la nuit dans ma famille car je ne me sentais par sûr,
6 en sécurité, à Zenica. J'ai entendu les coups sur la porte. Je me suis
7 préparé pour aller au siège du commandement, là où se trouvait le
8 commandement. Mon épouse est sortie. Il y avait un jeune de 25 ans à peu
9 près, en civil, qui était à la porte. Il a dit qu'il était descendu du bus
10 et qu'il y avait le commandant de la Brigade, Zivko Totic qui a été
11 emprisonné. Tous ses collaborateurs également ont été tués.
12 M. Nobilo (interprétation). - Une fois que vous avez reçu cette
13 information, -nous ne sommes pas pressés je vous en prie- sur
14 l'emprisonnement de Totic, ainsi que le fait que ceux qui l'accompagnaient
15 ont été tués, est-ce que vous êtes allé sur-le-champ, est-ce que vous vous
16 êtes rendu dans cet endroit ?
17 M. Holman (interprétation). - J'ai pris ma voiture que j'ai
18 utilisée. Je suis allé sur place. C'était le matin, 8 heures à peu près.
19 Je ne peux pas vous dire exactement quelle heure. Autour de 8 heures du
20 matin, ça, je me souviens. J'ai pu voir la voiture. C'était une image qui
21 était terrible, un cadavre devant moi, un homme qui n'avait plus un il.
22 On voyait qu'on avait tiré de très près et qu'on avait utilisé
23 les fusille automatique. J'ai vu également les deux observateurs des
24 Nations Unies qui étaient sur place. J'ai pu remarquer également deux
25 juges de district qui étaient venus du côté du Procureur militaire de
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1 Zenica. Il y avait des personnes qui m'accompagnaient également, qui
2 étaient avec moi. Ils ont appris la même chose que moi. Ils savaient que
3 j'avais passé la nuit dans la banlieue de Zenica, comme je l'ai dit tout à
4 l'heure.
5 M. Nobilo (interprétation). Pouvez-vous me dire quelle est
6 l'autre information dont vous pouvez nous parler et qui avait attiré votre
7 attention sur des choses qui se sont produites le 15 avril 1993 ?
8 M. Holman (interprétation). - Je suis parti avec mes
9 accompagnateurs. Je suis allé à la Faculté de Science mécaniques. Il y
10 avait également notre caserne là-bas qui portait le nom d'Eugène
11 Kuaternik. Je me suis rendu là-bas et ceux de la sécurité m'ont informé
12 tout de suite qu'il y avait eu un accident avec une camionnette et que cet
13 accident s'était produit le 12 avril, que quelque chose d'assez bizarre
14 s'était produit parce que le camion était rentré dans une pharmacie. Mais
15 de toute façon, c'était sur une route et ils n'ont pas réagi tout de
16 suite, d'après ce qu'ils m'avaient dit.
17 En ce qui me concerne, j'ai supposé de quoi il pouvait s'agir.
18 Je pensais également que le commandant Zivko Totic s'y trouvait. Je suis
19 parti dans mon bureau. C'est dans mon bureau, après que j'ai eu un certain
20 nombre de conversations téléphoniques, vers midi, il y avait un monsieur
21 qui s'est présenté comme Kristo, il ne m'a pas donné le nom de sa famille,
22 il ne voulait pas le dire. Il a dit qu'il appelait de Gornja Zenica, de
23 Bilivode, à peu près de cette région-là. Il m'a dit qu'ils avaient été
24 attaqués par MOS qui était de la grandeur d'une compagnie à peu près et
25 qu'il voulait m'en informer.
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1 M. Nobilo (interprétation). Pouvez-vous me dire qui était le
2 commandant de cette compagnie du MOS qui se déplaçait, qui se dirigeait
3 vers la personne qui vous avait appelé, qui vous a téléphoné ?
4 M. Holman (interprétation). Kristo a été probablement membre
5 du HOS, du MOS (se corrige l'interprète), il a dû reconnaître Kahriman et
6 il avait, par conséquent, vu qu'il déplaçait cette compagnie vers la
7 7ème Brigade musulmane. C'est à ce moment-là qu'il m'avait dit à peu près
8 ce qui s'était passé. Ils ont rejoint la 7ème unité musulmane.
9 M. Nobilo (interprétation). - Après cette information, c'est
10 Tihomir Blaskic qui vous a appelé de Vitez ?
11 M. Holman (interprétation). Oui, monsieur le colonel à cette
12 époque-là, il était colonel- m'avait appelé.
13 M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce qu'il vous a demandé ?
14 Quel était l'entretien que vous avez eu avec Kristo ?
15 M. Holman (interprétation). Monsieur Blaskic m'avait demandé
16 ce qui s'était passé. Il m'avait qu'il avait une série d'informations
17 également, qu'on le bombardait en quelque sorte par ces informations et
18 qu'il voulait savoir de quoi il s'agissait véritablement sur le terrain.
19 Il voulait savoir de quoi il s'agissait véritablement sur le terrain.
20 Personnellement, je lui ai dit que le commandant de la brigade a été
21 emprisonné et que personnellement j'ai été sur place et que j'ai pu voir
22 tout ce qui s'était passé, et que j'étais informé également que les forces
23 musulmanes s'étaient dirigées vers Gornja Zenica. J'avais tout simplement
24 informé le colonel Blaskic de ce dont Kristo m'avait parlé.
25 Monsieur Blaskic, là-dessus, m'avait dit que je devais envoyer
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1 tous les effectifs que j'avais à la disposition dans la direction de
2 Kuber. J'ai dit qu'évidemment j'allais exécuter l'ordre, mais que je
3 n'avais pas beaucoup de personnes à ma disposition.
4 M. Nobilo (interprétation). - Au moment où le colonel Blaskic
5 vous a demandé d'envoyer les gens de Zenica vers Kuber, d'abord voulez-
6 vous expliquer aux Juges ce que c'est Kuber, et ensuite d'expliquer aux
7 Juges pourquoi il vous a demandé de sortir les effectifs vers Kuber ?
8 M. Holman (interprétation). Monsieur le Président, messieurs
9 les Juges, en ce qui nous concerne nous, à Zenica, nous n'étions pas très
10 forts, nous étions très faibles par rapport aux forces musulmanes.
11 Monsieur Blaskic le savait, c'était un stratège. Il savait pertinemment
12 que celui qui s'emparerait de Kuber allait dominer également l'ensemble de
13 l'espace. Automatiquement sur le plan stratégique, ce serait important
14 pour ces forces.
15 M. Nobilo (interprétation). Qu'est-ce que Kuber ?
16 M. Holman (interprétation). - C'est une colline, une montagne,
17 c'est un mont, si vous voulez qui est prédominant et c'est une côte.
18 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que Kuber est en direction
19 de Vitez ?
20 M. Holman (interprétation). - Oui, c'est la direction de Vitez
21 et de Busovaca. Vitez est à droite, et Zenica est à gauche.
22 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous êtes d'accord avec
23 moi que Kuber était important pour protéger Vitez s'il y avait une attaque
24 en provenance de Zenica ?
25 M. Holman (interprétation). - Oui. Celui qui s'était emparé de
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1 cette côte ne pouvait que dominer, du point de vue stratégique avait un
2 avantage, une priorité.
3 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez envoyé combien
4 d'effectifs à Kuber à ce moment-là pour exécuter l'ordre du
5 colonel Blaskic ?
6 M. Holman (interprétation). - Je voulais envoyer le plus grand
7 nombre possible. Au moment où il m'avait appelé, il y avait des personnes
8 qui avaient des vestes déchirées, des emblèmes qui s'étaient enlevés, ils
9 se sont quand même joints à notre caserne, aux autres effectifs. Ils nous
10 ont dit que des unités musulmanes leur prenaient les armes, déchiraient
11 leur veste, retireraient les emblèmes, etc.
12 A ce moment-là, je ne pouvais pas avoir plus qu'un peloton. Je
13 ne pouvais pas avoir de moyens de transport. J'avais envoyé les
14 15 personnes la première fois et ensuite 12 personnes, 27 au total, même
15 pas un peloton.
16 M. Nobilo (interprétation). - Tout cela s'est passé le
17 15 avril 1993 ?
18 M. Holman (interprétation). - Oui, le 15 avril 1993.
19 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez me préciser
20 une chose.
21 Vous avez dit que les gens venaient avec des vestes, des
22 emblèmes déchirés, qui l'avait fait ?
23 M. Holman (interprétation). - C'étaient les membres des unités
24 de l'armée de Bosnie-Herzégovine que le faisaient parce qu'il s'agissait
25 des emblèmes croates, ce n'étaient pas les emblèmes du HVO, mais du HOS.
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1 Il y avait également des armoiries croates. C'est pourquoi ils avaient
2 retiré ces insignes.
3 M. Nobilo (interprétation). - Dans la ville, il y avait des
4 déplacements de l'armée de Bosnie-Herzégovine ? Un certain nombre de
5 nouveaux points ? Comment Zenica était-elle le 15 avril 1993 ? Quelle
6 était la situation à Zenica ce jour-là ?
7 M. Holman (interprétation). - D'après les informations, comme je
8 l'ai dit, des soldats et des personnes étaient venus m'informer
9 directement sur place ou par téléphone. Il y avait des nouveaux points de
10 contrôle. La 7ème Unité musulmane avait contrôlé le pont sur la rivière
11 Bosna. Il y avait des unités également qui contrôlaient l'autre pont de
12 Zenica. Il était risqué de se déplacer car on ne savait absolument pas où
13 l'on pouvait éventuellement se faire massacrer et se faire tuer. C'est la
14 raison pour laquelle on ne se déplaçait pas beaucoup dans la ville.
15 M. Nobilo (interprétation). - Une fois que vous avez remarqué
16 que l'armée de Bosnie-Herzégovine avait mis un certain nombre de points de
17 contrôle, dans certains points stratégiques, qu'il y avait également la
18 police musulmane, qu'est-ce que vous avez fait ?
19 Avez-vous organisé, vous aussi, un certain nombre de points de
20 contrôle ?
21 M. Holman (interprétation). - Je sais qu'à côté du cinéma, il y
22 avait un point de contrôle, un point de police militaire. Nous avions un
23 point de contrôle dans la rue désignée "douzième avril". C'est là que nous
24 nous sommes trouvés.
25 M. Nobilo (interprétation). - A quelques reprises, vous avez
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1 parlé de caserne. Vous avez dit qu'elle portait le nom de
2 Eugène Kuaternik.
3 Est-ce que c'est là où se trouvaient les soldats, ou bien vous
4 avez utilisé cette caserne à d'autres fins ?
5 M. Holman (interprétation). - C'était la Faculté de Sciences
6 mécaniques qui a été utilisée comme caserne. Ensuite, une partie a été
7 utilisée comme siège d'administration. Sinon, on ne pouvait mettre à peu
8 près qu'un peloton. Il y avait une grande cour où l'on pouvait organiser
9 les passages en revue. Mais on ne pouvait jamais véritablement mettre plus
10 qu'un peloton.
11 M. Nobilo (interprétation). - Un peloton se compose de combien
12 de personnes ?
13 M. Holman (interprétation). - De 30 personnes.
14 M. Nobilo (interprétation). - Le 15 avril 1993, dans la soirée,
15 vous avez liquidé le point de contrôle que vous aviez dressé. Pourquoi ?
16 Pourquoi l'avez-vous fait ?
17 M. Holman (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs
18 les Juges, les représentants du peuple croate et les représentants du
19 peuple musulman de Zenica et des observateurs des Nations Unies.
20 Il y avait un accord auquel nous sommes parvenus. On nous a
21 prévenus qu'il était indispensable de retirer vers 20 heures ces points de
22 contrôle, qu'il y avait un accord auquel on était parvenu, à savoir
23 d'atténuer les tensions entre les Croates et les Musulmans, c'était la
24 raison pour laquelle il fallait enlever les points de contrôle.
25 J'ai parlé avec Mirko Barisic et Vinko Barisic. Quand je l'ai eu
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1 au téléphone, je lui ai dit : "Je vais exécuter cet ordre", mais - de
2 toute façon, notre peuple, en ce qui concerne cette partie de Zenica qui
3 s'appelle Zenica... enfin, la partie haute de Zenica- que j'avais remarqué
4 des colonnes de réfugiés qui se déplaçaient vers Vitez, vers Cajdras, et
5 qu'ils nous avaient attaqués. Indépendamment de ce que je lui avais dit,
6 Vinko m'avait dit de démanteler les points de contrôle. Comme Vinko était
7 quelqu'un qui m'était supérieur, je lui ai obéi.
8 M. Nobilo (interprétation). - Eh bien, tout ceci s'est passé le
9 15 avril 1993 ?
10 M. Holman (interprétation). - Oui.
11 M. Nobilo (interprétation). - Nous sommes donc à la fin de la
12 journée du 15 avril 1993. Vous avez enlevé les points de contrôle. Comment
13 cela s'est passé, la nuit ?
14 M. Holman (interprétation). - Après cette dernière information,
15 après 20 heures du soir, je suis resté une demi-heure à peu près dans le
16 siège du commandement. Il y avait les deux officiers ; il y avait un
17 officier croate et un autre, musulman. J'ai demandé à ces deux officiers
18 de se relayer au niveau de la patrouille. Moi, j'étais quelque peu
19 fatigué, j'ai donné le numéro de téléphone et j'ai dit que je ne serai pas
20 trop loin. C'est pour des raisons de sécurité que je n'ai pas précisé
21 exactement où mais, de toute façon, qu'il fallait qu'ils m'en informent
22 pour me dire si jamais il y avait des choses qui se passaient.
23 M. Nobilo (interprétation). - Nous en avons terminé avec cette
24 journée. Au moment où vous avez vu la colonne des réfugiés, des civils,
25 qu'est-ce que vous avez conclus ? Ils sont arrivés en quelle provenance ?
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1 M. Holman (interprétation). - A partir du moment où je voyais
2 cela, à partir de la caserne, quand je me suis déplacé, donc, pour
3 vérifier un peu ce qui s'était passé sur le terrain, j'ai pu remarquer
4 qu'à côté, du gauche par rapport à la caserne, il y avait des colonnes,
5 des réfugiés qui se déplaçaient dans la direction de Cajdras et de Vitez.
6 C'était sous un angle de 45 degrés, à peu près.
7 M. Nobilo (interprétation). - Quelle a été votre conclusion,
8 alors ?
9 M. Holman (interprétation). - Je pense qu'il venait de Gornja
10 Zenica et des villages qui étaient dans la banlieue de Zenica.
11 M. Nobilo (interprétation). - Passons à la date du
12 16 avril 1993. Vous-même, à la date du 16 avril, vous arrivez de nouveau
13 rue du 12 Avril, c'est là qu'était situé votre commandement. Qu'avez-vous
14 vu à cet endroit ?
15 M. Holman (interprétation). - Donc, je suis revenu au sein du
16 commandement, à l'endroit où la rue de Travnik rejoint la rue du 12 Avril.
17 J'ai pu remarqué des abris qui venaient d'être constitués avec des
18 protections qui ont été constituées avec des rails qui étaient jadis
19 utilisés pour les chemins de fer, des rails, des barres de fer. Et là, je
20 me suis dit qu'apparemment l'accord n'était pas mis en place comme cela
21 aurait dû être et comme j'en avais été informé.
22 Ce que nous avons fait, c'est enlever ces points de barrage de
23 la rue du 12 Avril alors que, eux, ils venaient de renforcer leurs points
24 de contrôle.
25 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous dites "eux" et "leur",
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1 vous pensez à l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
2 M. Holman (interprétation). - Oui, je pense à l'armée de Bosnie-
3 Herzégovine. C'est exact que la 314e Brigade mécanisée venait d'installer
4 ceci. Elle ne se trouvait pas loin de nous.
5 M. Nobilo (interprétation). - Vous rentriez quand même dans les
6 bureaux de votre commandement. Pouvez-vous expliquer à la Chambre ce que
7 vous avez pu observer pendant la matinée en regardant par les fenêtres de
8 ce bâtiment où se trouvait votre commandement ?
9 M. Holman (interprétation). - Nous n'avions plus nos points de
10 contrôle dans la rue, eux les avaient. J'ai dit à mes hommes qui
11 assuraient la sécurité qu'il fallait regarder un peu, jeter un coup d'oeil
12 d'en haut du bâtiment, essayer de voir ce qui se passait dehors. Moi-même,
13 je suis monté, j'ai vu par une fenêtre qui donnait sur la cour, derrière
14 la faculté des sciences économiques et en direction de l'endroit où était
15 située la brigade 314e mécanisée, j'ai pu voir des soldats traverser en
16 courant cette cour. C'était en direction de la Faculté des Sciences
17 économiques. J'en ai déduit qu'ils cherchaient à nous encercler. Alors,
18 j'ai dit à mes deux officiers, qui étaient donc dans les unités du HOS, je
19 leur ai dit cela : "Nous risquons d'être encerclés". Et moi, j'allais
20 tenter de sortir avec les hommes qui m'accompagnaient, que j'allais
21 essayer de sortir. Je leur ai dit que s'ils pouvaient remarquer que le
22 cerceau se resserrait, qu'il fallait contempler la possibilité d'une rue
23 secondaire. Ces deux rues dont j'ai parlé se trouvent à la périphérie de
24 la ville, à la sortie de la ville de Zenica.
25 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'à un moment quelconque,
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1 à la date du 16 avril, vous êtes sortis de votre commandement ensemble
2 avec les hommes qui vous accompagnaient ?
3 Pouvez-vous nous décrire ce que vous avez remarqué à ce moment-
4 là ?
5 M. Holman (interprétation). - Je me suis engagé dans la rue du
6 12 avril. Nous étions partis avec deux camions. Nous roulions très
7 lentement parce que nous voyons déjà à ces points de contrôle des membres
8 de la 314ème Brigade mécanisée de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Ils
9 pointaient leurs armes en notre direction. Mes accompagnateurs pointaient
10 également leurs fusils en leur direction. Nous avancions lentement. Tout
11 mouvement brusque aurait pu déclencher un tir, ce qui aurait entraîné des
12 victimes de notre côté ou du leur, plutôt du nôtre parce que nous n'étions
13 pas abrités comme eux.
14 Dans cette situation de tension, nous avancions très lentement
15 comme je le disais, nous sommes arrivés à l'endroit où on rejoint la rue
16 de Travnik. Cette situation est très tendue, nous avons l'impression que
17 le temps s'est arrêté, mais nous avons quand même réussi à sortir de là.
18 Je me suis dirigé vers des endroits à la périphérie de la ville. On parle
19 du côté ouest et sud-ouest de la ville. Je voulais savoir ce qu'il en
20 était des unités du HVO. Je les avais appelés mais je n'ai reçu aucune
21 réponse de ces unités qui auraient dû assurer mes arrières. Il n'y avait
22 aucune réponse au téléphone, je ne pouvais pas établir le contact, alors
23 que je devais savoir ce qui se passait derrière mon dos. Est-ce qu'on peut
24 me suivre ? Est-ce que je parle trop rapidement ?
25 M. Nobilo (interprétation). - Oui, oui, s'il vous plaît un peu
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1 plus lentement, notamment, faites des poses entre vos phrases.
2 Nous avons compris que vous n'avez pas pu établir le contact
3 avec les unités du HVO. Saviez-vous à ce moment-là que l'armée de
4 Bosnie-Herzégovine avait pris pratiquement le contrôle de la ville ?
5 M. Holman (interprétation). - En cherchant les unités du HVO de
6 Zenica, j'ai eu du mal à trouver des unités. Elles ne se trouvaient même
7 pas à des positions de réserve où elles auraient dû être d'après nos
8 accords antérieurs. En marchant dans ces villages, hameaux, et collines en
9 périphérie de la ville, je croisais tantôt 5, tantôt 8, jamais plus de 10
10 soldats. J'ai compris qu'il y avait vraiment un problème sérieux, que cela
11 n'allait vraiment pas.
12 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous dites 3 voire 5
13 soldats, vous pensez aux soldats du HVO ?
14 M. Holman (interprétation). - Oui, aux soldats du HVO. D'après
15 ce que j'en ai déduit à ce moment-là, ils n'étaient pas organisés, ces
16 soldats.
17 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre si
18 pendant que vous cherchiez le HVO vos mouvements étaient-ils libres ou
19 bien étiez-vous obligé de vous mettre à l'abri ?
20 M. Holman (interprétation). - J'ai toujours été obligé d'être
21 très prudent, parce qu'à aucun moment je ne savais où je pouvais tomber
22 sur une unité de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Ou bien des personnes
23 auraient pu tirer sur moi depuis des maisons.
24 Pendant que je marchais comme cela dans les rues adjacentes,
25 dans les petites rues, je suis revenu en empruntant la rue de Travnik, je
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1 suis revenu rue du 12 avril. Je pense que les tirs venaient de la faculté
2 des études, des sciences mécaniques. Je pense que c'est de là qu'on a tiré
3 sur nous.
4 La nuit tombait, j'ai dit à mes accompagnateurs que l'un
5 resterait avec moi, qu'il était vraiment temps de s'arrêter, que nous
6 n'allions plus bouger la nuit parce que nous ne savions pas sur quoi nous
7 pouvions tomber.
8 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons passer à l'avant-
9 dernière journée, avant l'arrestation, avant que le HVO ne se rende.
10 Pouvez-vous dire à la Chambre ce qui vous est arrivé ?
11 Avez-vous pu opérer une jonction, un contact avec une unité du
12 HVO ? Si oui, à quel moment cela s'est produit ? Est-ce à un moment où
13 vous avez pu trouver une concentration plus importante de soldats du HVO ?
14 M. Holman (interprétation). - Le 17 au matin, je m'engageais du
15 côté droit, en direction du commandement de la sixième unité. Je pensais
16 que j'allais trouver quelqu'un là-bas, mais je n'ai trouvé personne.
17 Alors, je suis revenu rue du 12 avril. C'est là qu'étaient situés le
18 commandement de la sixième unité et la police militaire. Il y avait une
19 école et un terrain de sport pour les élèves de cette école. C'est là que
20 nous avons garé nos voitures. La situation n'était pas suffisamment sûre.
21 Nous voulions être capables de nous enfuir rapidement si besoin était.
22 Que s'est-il passé ? La même chose qu'avant, mais cette fois-ci,
23 ils ont mieux visé, au moment où nous descendions des véhicules, une
24 balle, plusieurs balles ont été tirées, mais j'ai vu une balle qui a
25 touché l'asphalte à côté de mon pied.
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1 M. le Président. - Vous pouvez aller plus doucement. C'est très
2 rapide. Merci. Poursuivez.
3 M. Nobilo (interprétation). - Parlez très doucement. Je sais
4 que le tempérament y est, mais essayez de ralentir, doucement, en faisant
5 des pauses entre les phrases. Faites une petite pause après la fin de ma
6 question.
7 M. Holman (interprétation). - Monsieur le Juge, en descendant du
8 véhicule, une balle a frappé l'asphalte à côté de mon pied, alors j'ai pu
9 comprendre qu'on nous tirait dessus depuis la faculté des sciences
10 mécaniques. Cette balle descendait vers le bas.
11 M. Nobilo (interprétation). - Nos n'allons pas revoir en détail
12 toute cette journée, mais je vous demanderai de nous dire à quel moment
13 vous avez pu prendre contact avec Vinko Barisic, le commandant, et avec
14 l'unité du HVO ?
15 Où se trouvaient cet homme et cette unité ?
16 M. Holman (interprétation). - Grâce à toutes sortes de
17 manoeuvres et de ruses, vers la soirée, j'ai réussi à atteindre le
18 commandement de la brigade Francetic, et c'est là que j'ai pu trouver son
19 commandement Vinko Barisic.
20 M. Nobilo (interprétation). Cette brigade est-elle une unité
21 du HVO ? Où se trouvait son commandement ?
22 M. Holman (interprétation). - J'ai atteint un village Podbrdje
23 qui se trouve en périphérie. Il y a là une usine Vatrostalna et c'est là
24 que se trouvait le commandement de cette brigade Jure Francetic.
25 M. Nobilo (interprétation). - En l'absence de Zivko Totic qui
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1 avait été kidnappé, le commandant était M. Baretic. Comment vous a-t-il
2 décrit la situation ?
3 M. Holman (interprétation). Quand je suis arrivé, Vinko m'a
4 dit qu'il ne pouvait pas prendre contact avec des unités. Que les unités
5 ne répondaient pas, qu'il avait dit à certaines unités d'établir des
6 lignes de défense, mais qu'il n'avait pas de réponse.
7 Je voudrais essayer de le dire clairement, en quelques mots. Il
8 m'a dit que notre suggestion était très mauvaise, qu'on ne pouvait pas
9 agir et que la défense ne pouvait pas être organisée.
10 M. Nobilo (interprétation). - On parle de la défense assurée par
11 le HVO à Zenica. Peut-on dire que la situation était chaotique ?
12 M. Holman (interprétation). Oui, c'est ce que j'ai dit à Vinko
13 et d'après les renseignement que j'ai apporté et conformément à ce que
14 Vinko a essayé de faire et qu'il a échoué, nous avons pu conclure que
15 notre situation était chaotique.
16 M. Nobilo (interprétation). - A ce moment-là, on vous a dit que
17 des hommes venus de votre commandement cherchaient à vous appeler ?
18 M. Holman (interprétation). Oui, au sein du commandement de
19 la Brigade Francetic, suite à cet entretien, on m'a dit que pendant toute
20 cette journée du 17 avril, il y avait eu des coups de fil qui venaient du
21 commandement de la caserne de Kuaternik. On cherchait donc à m'appeler, à
22 prendre contact avec moi en me disant qu'eux étaient encerclés et qu'on
23 leur proposait de se rendre.
24 Alors, moi, par téléphone, je les ai appelés et ils me l'ont
25 confirmé.
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1 M. Nobilo (interprétation). Et qu'ont-ils dit ? Ils étaient
2 encerclés par qui ?
3 M. Holman (interprétation). - Très précisément, ils ont dit
4 qu'ils étaient encerclés par le MOS, par la 7ème Brigade de Bosnie-
5 Herzégovine et des parties de la 314ème Brigade, autrement dit l'unité de
6 la Légion verte.
7 M. Nobilo (interprétation). - Légion verte et 7ème Brigade
8 musulmane, étaient-ce les parties les plus extrêmes, les plus extrémistes
9 des forces armées musulmanes ?
10 M. Holman (interprétation). Oui, ces deux unités étaient sans
11 aucun doute les parties les plus extrémistes de l'armée de Bosnie-
12 Herzégovine.
13 M. Nobilo (interprétation). - Vu cette situation, qu'avez-vous
14 fait ?
15 M. Holman (interprétation). - J'ai dû emprunter toutes sortes de
16 chemins cachés. En allant vers cette caserne, j'ai vu des forces
17 importantes de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Qu'ai-je décidé ?
18 J'ai décidé de m'emparer, de capturer l'un de ces soldats. Je
19 suis parti de la caserne avec cette intention-là, d'en capturer quelques-
20 uns pour réussir à gagner les meilleures conditions pour mes hommes à moi
21 qui avaient été capturés.
22 M. Nobilo (interprétation). - Vous employez le terme "forces de
23 la police militaire". S'agit-il vraiment de la police militaire ou de la
24 police civile ?
25 Lesquels de ces deux soldats vouliez-vous capturer ?
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1 M. Holman (interprétation). Je connaissais ces unités à
2 l'époque où nous étions ensemble, à l'époque où il n'y avait pas encore de
3 conflit entre les Croates et les Musulmans. Ils faisaient partie du
4 ministère de l'Intérieur, du MUP, mais ils se rendaient également sur les
5 lignes de défense.
6 M. Nobilo (interprétation). Mais, du point de vue de leur
7 organisation, ils étaient considérés comme police civile ?
8 M. Holman (interprétation). - Oui.
9 M. Nobilo (interprétation). Dites-nous concrètement ce que
10 vous avez fait par la suite ?
11 M. Holman (interprétation). - Une patrouille est venue, comme
12 cela, à ma rencontre par hasard. C'étaient des forces de police et moi, je
13 les ai capturés. J'avais l'intention d'en capturer plusieurs, mais il y
14 avait que deux membres de cette police militaire sur place. Puisque je ne
15 n'avais pas beaucoup de temps, je voulais éviter qu'il ait des victimes
16 dans mes rangs à moi. Je me suis dit que même avec ces deux soldats,
17 j'allais pouvoir obtenir de meilleures conditions pour mes hommes
18 encerclés.
19 M. Nobilo (interprétation). - Qui avez-vous appelé et quelles
20 ont été les conditions convenues ?
21 M. Holman (interprétation). - J'ai appelé le chef des services
22 de sécurité, M. Asim Fazlic et j'ai appelé le chef du MUP, Jaganjac Fanl.
23 Je leur ai dit que j'avais capturé certains de leurs hommes et qu'il
24 fallait qu'ils fassent en sorte que les membres de mon unité ne soient pas
25 mis en danger et qu'ainsi, leurs policiers non plus n'allaient courir
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1 aucun danger, ceux qui étaient capturés par moi.
2 M. Nobilo (interprétation). Qu'avez-vous proposé ?
3 M. Holman (interprétation). Si j'avais eu davantage de
4 prisonniers, j'aurais proposé un échange, à savoir de libérer tous ces
5 soldats. Mais j'en avais peu. Ils en avaient vingt à trente, avec le
6 personnel d'administration de mes hommes.
7 Donc, ce que j'ai proposé, c'est que les hommes du MUP
8 reprennent en leurs mains mes hommes parce que j'avais peur qu'ils tombent
9 entre les mains de cette Légion verte et de la 7ème Brigade musulmane
10 puisque c'étaient, comme je l'ai déjà dit, les unités les plus extrémistes
11 et j'avais peur qu'il ne leur arrive quelque chose de vraiment méchant.
12 Ils m'ont dit qu'il ne fallait pas se précipiter et qu'ils
13 allaient faire en sorte que mes hommes ne courent aucun danger. Je leur ai
14 dit qu'il y avait et des Croates et des Musulmans du HOS qui avaient été
15 capturés.
16 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons voir plus tard
17 l'appartenance ethnique de ces hommes. Mais dites-nous : cette reddition
18 s'est bien passée ? Il n'y a pas eu de victimes dans votre unité ?
19 M. Holman (interprétation). - C'est exact. Ils se sont rendus
20 aux unités du MUP. Messieurs Fazlic et Jaganjac ont correctement réagi. La
21 reddition s'est faite au MUP et non pas au MOS et Légion verte. J'avais un
22 véhicule. J'ai pu circuler. J'ai rendu mes deux hommes et je leur ai
23 promis de leur rendre le reste des fusils que je n'avais pas encore rendu
24 le lendemain. Plus tard, on devait se revoir au moment où j'ai été jugé en
25 tant que prisonnier.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Vous les avez complètement
2 libérés ?
3 M. Holman (interprétation). Oui, tout à fait.
4 M. Nobilo (interprétation). - En parallèle ou peu après, il y a
5 une proposition qui visait la reddition de l'ensemble des unités du HVO,
6 le même jour, le 17.
7 M. Holman (interprétation). - Oui. C'est venu du commandement de
8 la 314ème Brigade mécanisée. Ils ont demandé de me parler au téléphone. Ils
9 ont discuté avec Vinko, mais ils m'ont demandé en personne de venir
10 répondre au téléphone. Ils nous ont demandé de nous rendre. Là-dessus,
11 j'ai dit : "Je ne vois pas pourquoi on se rendrait ? Nous, on ne vous a
12 pas attaqué. C'est vous qui nous avez attaqués. Je suis au sein de mon
13 commandement. Je ne suis pas venu chez vous."
14 M. Nobilo (interprétation). - Cependant le lendemain, le
15 18 avril, le dernier jour que vous avez passé en liberté, à 5 heures 40,
16 vous vous êtes réveillé subitement. Que s'est-il passé ?
17 M. Holman (interprétation). - Je me suis couché très tard, à
18 minuit et puis, à 5 heures 30, il y avait cette prière du matin, ce hodja
19 comme on l'appelle. Avec cette prière du matin, à 5 heures 30, le
20 pilonnage a commencé. Des obus ont commencé à tomber autour du
21 commandement de la brigade Francetic.
22 M. Nobilo (interprétation). - Cette unité, vers où se replie-t-
23 elle ?
24 M. Holman (interprétation). - Vinko Barisic qui est donc le
25 commandant à ce moment, donne l'ordre de se replier vers les positions de
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1 commandement de réserve sur le mont de Zmajevac.
2 M. Nobilo (interprétation). - Avant ce retrait, est-ce que la
3 jonction a pu être opérée avec leurs fantassins ? A-t-on entendu des tirs,
4 des cris de guerre ?
5 M. Holman (interprétation). - Après ce pilonnage, il y a eu une
6 attaque d'infanterie. Vinko s'est rendu là-haut sur le mont Zmajevac avec
7 son commandement. Moi, je suis resté en bas avec environ cinq hommes qui
8 étaient dans ma suite et quelques membres du HVO. En tout, une trentaine
9 d'hommes, un peloton. Nous devons protéger les civils. Mais, dès les
10 premières maisons, à côté de cette usine de fer, nous avons pu entendre
11 des cris "Alahu Ekber".
12 M. Nobilo (interprétation). - Que s'est-il passé avec ces mille
13 civils qui étaient avec vous à Podbrdje ?
14 M. Holman (interprétation). - Il y avait environ mille civils.
15 Ils s'enfuyaient de Podbrdje. Ils avaient peur. Ils s'enfuyaient de ce
16 côté-là, en direction du mont de Zmajevac. Moi-même, à la fin, je suis
17 sorti avec ces hommes-là. Nous sommes restés parmi les derniers et nous
18 sommes montés vers Zmajevac. Ces gens-là ont continué en direction de
19 Cajdras alors que moi, j'ai retrouvé Vinko Barisic et je suis resté sur ce
20 mont Zmajevac.
21 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, est-ce
22 qu'on poursuivra sans pose ou avez-vous prévu de faire autre chose ?
23 M. le Président. - Nous avons encore des réunions avec les
24 Juges. Nous avons prévu de poursuivre jusqu'à 16 heures 45. Nous
25 arrêterons pour cette après-midi. Nous reprendrons demain. Vous pouvez
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1 donc continuer environ 10 minutes, un quart d'heure.
2 M. Nobilo (interprétation). - Merci Monsieur le Président. A
3 Cajdras, vous avez dit que c'est de Podbrdje via Zmajevac en direction de
4 Cajdras que environ mille civils sont partis avec vous. A Cajdras, avez-
5 vous remarqué combien de Croates se sont concentrés sur un espace assez
6 réduit ?
7 M. Holman (interprétation). - Nous devions donc descendre de
8 Zmajevac selon les ordres de Barisic en direction de Cajdras. C'est là que
9 nous voyons affluer en grand nombre les réfugiés croates en direction du
10 village de Cajdras ?
11 J'ai pu évaluer à environ cinq mille le nombre de ces civils.
12 M. Nobilo (interprétation). - En tout, à Cajdras, d'après vous,
13 il y a eu cinq mille civils ?
14 M. Holman (interprétation). - Oui.
15 M. Nobilo (interprétation). - A un moment quelconque, dans cette
16 masse de civils, est-ce que les véhicules de l'ONU sont arrivés ?
17 M. Holman (interprétation). - Oui, dès que nous sommes arrivés,
18 nous avons vu apparaître des véhicules, des observateurs. Ils ont reconnu
19 Vinko, le colonel Stuart était sur place. C'est du moins comme cela que
20 Vinko s'adressait à lui. Le colonel Stuart ou l'interprète ont dit, je ne
21 me souviens plus qui, mais je me souviens précisément qu'ils ont demandé
22 s'ils étaient tous des Croates. La réponse a été affirmative. A cela, le
23 colonel Stewart a dit qu'il s'agissait de la purification ethnique.
24 M. Nobilo (interprétation). - Le 18 avril 1993, à Cajdras, il y
25 a eu un contact entre Dzemo Mrdan et Vinko Barisic. Dzemo Mrdan était à la
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1 tête du 3ème Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Pouvez-vous nous dire
2 de quoi il s'est agi durant cet entretien ?
3 M. Holman (interprétation). - Il y a eu un entretien entre Vinko
4 Barisic et le commandant du 3ème Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine.
5 La nuit commençait à tomber et Vinko Barisic a demandé que l'on
6 mette fin aux attaques menées par le 3ème Corps de l'armée BH. Il a dit que
7 la nuit allait tomber, que nous avions un afflux considérable de réfugiés,
8 de civils, et il a demandé à Dzemo Mrdan de mettre fin aux attaques du
9 3ème Corps, des attaques menées contre nous.
10 Cependant, Mrdan lui a répondu : "Si vous ne vous rendez pas
11 sans condition, vous allez perdre, nous allons vous battre". Mais Vinko a
12 donc pris quand même la décision de nous rendre. Ce soir même, vers
13 20 heures, 21 heures, nous nous sommes rendus.
14 M. Nobilo (interprétation). - Le HVO de Zenica se rend le
15 18 avril 1993, à 21 heures. Vous-même, vous avez été emmené dans cette
16 prison bien connue de Zenica. Dites-nous, avez-vous été traité comme
17 prisonnier de guerre ou est-ce qu'une procédure pénale a été engagée
18 contre vous ?
19 M. Holman (interprétation). - Je dois dire que nous avions
20 vraiment eu la chance de nous rendre à ces forces de la police militaire.
21 J'ai été d'abord emmené à l'endroit où se trouvait le MUP, puis à cette
22 prison. Au début, j'ai été traité comme prisonnier de guerre. Après, ils
23 ont abandonné. Après, ils se sont dit que j'étais un soldat ennemi, qu'il
24 y avait un article qui prévoyait cet état-là, ce statut-là.
25 Après, ils se sont dit que je ne pouvais pas être un soldat
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1 ennemi mais qu'ils allaient me poursuivre comme commandant pour avoir
2 capturé leurs policiers.
3 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit : "Composantes HVO
4 de l'armée de Bosnie-Herzégovine". Vous vouliez dire des forces armées de
5 l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
6 M. Holman (interprétation). Oui, oui, le HVO faisait partie de
7 l'armée de Bosnie-Herzégovine.
8 M. Nobilo (interprétation). Est-il exact qu'il y a eu une
9 enquête menée contre vous pour rébellion armée, mais qu'enfin vous avez
10 été condamné pour avoir attaqué le policier qui était en train d'effectuer
11 son service ? Est-ce exact ?
12 M. Holman (interprétation). - Oui.
13 M. Nobilo (interprétation). - Quelle a été la peine qui a été
14 prononcée contre vous ? Combien de temps êtes-vous resté en prison à
15 purger votre peine ?
16 M. Holman (interprétation). - J'ai été condamné à un an et
17 quatre mois de prison. Je n'y suis resté qu'un an et cinq jours, au bout
18 de cette période, j'ai été échangé.
19 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que vous avez été
20 emprisonné et que vous étiez dans cette fameuse prison de Zenica ?
21 Pouvez-vous nous décrire les conditions dans cette prison et
22 pouvez-vous nous dire si vous avez entrepris quelque chose afin de
23 modifier les conditions qui régnaient dans cette prison ?
24 M. Holman (interprétation). - Les conditions étaient très
25 mauvaises. Nous n'avions aucun droit. Ils n'arrêtaient pas de battre les
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1 gens. La nuit, j'entendais des cris de toutes sortes. Je sais qu'ils ont
2 beaucoup battu Vidovic Vinko. Une fois, c'était même en ma présence, ils
3 lui ont même cassé les côtes. Moi, personnellement, souvent je me suis
4 retrouvé dans l'isolement total. Un matin, ils m'ont envoyé le gaz
5 lacrymogène à la figure.
6 Après, ils m'ont bien tabassé. La nourriture, quant à elle,
7 était très mauvaise. J'ai passé des mois à ne manger que du riz cuit à
8 l'eau. Parfois, il y avait un peu de farine dedans. En hiver, on ne
9 mangeait que du choux. Quand je marchais, j'avais vraiment mal aux
10 articulations à cause de cette nourriture très faible. Il n'y avait pas
11 assez de graisse. Parfois, nous avions aussi des haricots secs. Lorsque
12 nous avions cela, c'était un peu fête pour nous.
13 De temps en temps, dans cette partie où l'isolement était plus
14 grand, dans cette partie de la prison, on nous amenait des prisonniers
15 croates qui nous disaient que, dans le camp, il y avait toujours environ
16 500 personnes qui étaient passées à tabac, qu'on essayait de les mobiliser
17 de force. J'ai connu les frères Cobanovic en prison. Ils m'ont dit qu'ils
18 avaient été énormément battus parce qu'ils ne voulaient pas signer leur
19 adhésion dans les rangs de l'armée de Bosnie-Herzégovine.
20 M. Nobilo (interprétation). - La Croix-Rouge est-elle venue
21 dresser la liste des prisonniers ?
22 M. Holman (interprétation). - A cause de ces mauvaises
23 conditions, nous avons fait une grève de la faim. Par trois fois, les
24 membres de la Croix-Rouge sont venus nous rendre visite. Je me souviens
25 que Mme Béatrice était à la tête de cette équipe de la Croix-Rouge qui est
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1 venue nous voir.
2 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons voir un document.
3 Vous allez nous dire s'il s'agit bien d'un certificat, d'une
4 attestation. Nous n'avons probablement plus le temps de faire autre chose.
5 M. Dubuisson. - Document D 436.
6 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous dire s'il s'agit
7 d'un document qui peut confirmer, qui confirme votre statut là-bas ?
8 Avons-nous reçu ce document de vos mains ?
9 M. Holman (interprétation). - Oui, c'est bien ce document.
10 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, nous
11 pouvons couvrir le domaine qui nous reste demain.
12 M. le Président. - Tout demain, Maître Nobilo, ou rien que la
13 matinée, seulement la matinée ? Non ? Tout demain ?
14 M. Nobilo (interprétation). - Avec ce témoin, nous n'en n'avons
15 plus que pour une vingtaine de minutes avec ce témoin. Demain, nous aurons
16 peut-être une vingtaine de minutes d'interrogatoire avec ce témoin.
17 M. le Président. - Je vais consulter mes collègues.
18 (Les Juges se consultent sur le siège.)
19 Nous ajournons à demain matin. Nous reprendrons l'audience à
20 10 heures demain matin.
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22 L'audience est levée à 16 heures 45.
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