Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL                    AFFAIRE N° IT-95-14-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3   Mercredi 05 mai 1999

  4  

  5   Le Procureur c/ Tihomir Blaskic

  6   L'audience est ouverte à 10 h 05.

  7   M. le Président. - Veuillez demander au témoin de rentrer s'il

  8   vous plaît

  9   Je salue les interprètes, les transcripteurs, les sténotypistes,

 10   les conseils de l'accusation et les conseils de la défense. Je salue le

 11   témoin, le Général Blaskic.

 12   Monsieur le Greffier, attendons que le témoin soit installé et

 13   qu'il ait ses écouteurs. Je le salue. Monsieur le Greffier, je voudrais

 14   vous demander de tenir compte du temps du contre-interrogatoire.

 15   M. Abtahi. - Oui, monsieur le Président. J'essaie de tenir à

 16   jour dans la mesure du possible.

 17   M. le Président. - Il faut qu'à la fin de chaque semaine, le

 18   vendredi, vous le donniez. Cela permet aux conseils de l'accusation de

 19   pouvoir mieux régler leurs activités. N'est-ce pas ?

 20   M. Abtahi. - Oui, monsieur le Président.

 21   M. le Président. - A cet égard, nous avions fait paraître un

 22   calendrier prévisionnel. Nous en parlerons. J'espère que tout le monde en

 23   a pris connaissance pour essayer d'achever nos travaux à la fin du mois de

 24   juillet.

 25   Monsieur le Procureur, c'est à vous.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Oui. Merci, monsieur le Président,

  2   messieurs les Juges, conseils de la défense. Bonjour Général.

  3   M. Blaskic (interprétation). - Bonjour, monsieur le Procureur.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Hier, nous avons discuté de la

  5   pièce 400/6. Il s'agit d'un document rédigé par Mate Boban et

  6   Dario Kordic. Il s'agit de la proclamation de la Banovina croate.

  7   Général, pouvez-vous expliquer à la Chambre ce qu'est la

  8   Banovina croate.

  9   M. Blaskic (interprétation). - Eh bien, je peux essayer de le

 10   préciser. A ma connaissance, c'était un espace. Il était convenu que cet

 11   espace soit aménagé et cela était prévu entre des représentants politiques

 12   croates et serbes. Et ceci afin d'éviter tout conflit au sujet de

 13   l'organisation politique de l'ex-Yougoslavie. Cette unité administrative,

 14   ou cet ensemble administratif, s'appelait ainsi.

 15   M. Kehoe (interprétation). - Essayons d'être un peu plus précis.

 16   Je voudrais qu'on retire la pièce 16, la pièce de l'accusation, s'il vous

 17   plaît, et qu'on la place sur le rétroprojecteur.

 18   Oui, c'est cela merci.

 19   Général, c'est la carte de la Banovina croate dont M. Donja a

 20   parlé. Il s'agit d'un accord qui a été signé en 1939. Parfois, on appelle

 21   cet accord l'accord Cvetkovic-Macek. Quoiqu'il en soit, pouvez-vous, s'il

 22   vous plaît, consulter cette carte qui date de 1939. En vert, d'après la

 23   déposition de M. Donja, nous avons la Banovina.

 24   Général, vous serez d'accord avec moi pour dire que cette carte

 25   comprend des portions très importantes de ce qui est aujourd'hui la


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  1   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas à quelle carte

  3   vous faites référence. Je vois deux cartes ici. L'une des deux, pour

  4   autant que je le sache monsieur le Président, messieurs les Juges, je dois

  5   dire que je ne suis pas un historien et je n'ai pas de compétences

  6   nécessaires pour l'interpréter. Mais à mon sens, cette carte représente la

  7   Yougoslavie telle que la Yougoslavie devait être organisée par Banovina,

  8   donc Vardavska, Moravska,. Je n'énumère pas les autres.

  9   L'autre carte…

 10   M. Kehoe (interprétation). – Montrez-nous, s'il vous plaît,

 11   cette carte. Effectivement, cette carte est un peu plus grande avec un

 12   espace en vert qui représente la Banovina. Vous pouvez prendre cette carte

 13   si vous voulez la consulter de plus près. Donc cette Banovina croate

 14   englobe des portions importantes de ce qui est la Bosnie-Herzégovine

 15   aujourd'hui.

 16   M. Blaskic (interprétation). – Il faudrait que je l'examine de

 17   plus près. Que signifie de grandes portions pour vous ? Il faudrait que je

 18   la consulte.

 19   M. Kehoe (interprétation). – Oui, oui regardez-là de plus près.

 20   M. Blaskic (interprétation). – Oui, il ressort de cette carte

 21   que cette carte englobe également les territoires de Bosnie-Herzégovine,

 22   la ville de Derventa notamment, puis Gradacac, Brcko. Au sud, Livno,

 23   Tomislavgrad, Konjic, Mostar, Ljubuski, Prozor, Fojnica, Travnik.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Sur la base de cette carte, vous

 25   voyez ….


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  1   M. le Président. - Les Juges n'ont plus la carte sous les yeux.

  2   Pourrait-elle être placée sur le rétroprojecteur ?

  3   Merci.

  4   M. Kehoe (interprétation). - C'est très bien ainsi merci.

  5   Général, pouvez-vous nous montrer Travnik sur cette carte pour que la

  6   Chambre puisse repérer sur la carte ?

  7   (Le témoin montre Travnik.)

  8   M. Kehoe (interprétation). - Nous avons maintenant la zone de

  9   Travnik ici. Est-ce bien la vallée de la Lasva ? La zone autour de

 10   Travnik ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Oui, Travnik fait partie d'une

 12   région que la population locale appelle " la vallée de la Lasva ", donc la

 13   région par laquelle passe la rivière qui s'appelle la Lasva.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Une fois de plus, pour se repérer

 15   sur cette carte, Zenica se trouve hors la Banovina croate, n'est-ce pas ?

 16   Pouvez-vous montrer Zenica, la ville de Zencia ?

 17   C'est donc sur la partie qui est en blanc, c'est à l'extérieur

 18   de la Banovina.

 19   M. Blaskic (interprétation). – Oui, Zenica, Zepce, Maglaj,

 20   Teslic que je peux voir également. Toute la région de Zepce aussi bien

 21   Kiseljak, Kresevo, Kakanj, vraisemblablement Vares.

 22   M. Kehoe (interprétation). - Général, je voudrais maintenant que

 23   vous consultiez la carte qui est la pièce 17. Il s'agit d'une carte qui

 24   date de 1941. Il s'agit de l'Etat indépendant de Croatie en cette année-

 25   là.


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  1   Général, pouvez-vous examiner cette carte ? Cette carte doit

  2   être prise en compte par rapport à la déposition de M. Donja. Nous avons

  3   donc ici, en jaune, tout ce qui est la Croatie, l'Etat indépendant de

  4   Croatie. C'est plus large que la région qui correspondait à la Banovina,

  5   n'est-ce pas ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est plus grand, oui, sur

  7   cette carte. C'est ainsi que le montre cette carte.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Passons maintenant de 1939 par 1941

  9   au présent, et au début des années 1990. Je souhaite vous présenter un

 10   article en particulier.

 11   Je pense que les documents… excusez-moi.

 12   Monsieur le Président, messieurs les Juges, il s'agit de la

 13   pièce 38 maintenant. Une pièce qui doit montrer que c'est le

 14   18 novembre 1991 qu'a été créé la communauté croate de Herceg-Bosna.

 15   Excusez-moi.

 16   M. Abtahi. – Il s'agit de la pièce 624 et 624 a) pour la version

 17   en anglais.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, monsieur le Greffier

 19   pour cette interruption.

 20   Ces documents montreront que la communauté croate de Herceg-

 21   Bosna a été créée le 18 novembre 1991. Il s'agit d'une interview accordée

 22   par Mate Boban à Mostar à la date du 19 novembre 1991, l'article a été

 23   publié dans le journal " Oslobodjenje " de Sarajevo.

 24   Général, je vais me polariser sur le premier paragraphe de cet

 25   article où M. Boban dit, et je vais citer. Pourriez-vous placer cela sur


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  1   le rétroprojecteur, s'il vous plaît ?

  2   Je vais donc me diriger vers le paragraphe qui commence par :

  3   dans une situation.

  4   Il s'agit donc d'une interview avec Mate Boban qui dit : " Dans

  5   une situation où la Bosnie-Herzégovine se décompose, une situation à

  6   laquelle a contribué avant tout le peuple serbe et sa Direction, le peuple

  7   croate a le droit d'exprimer ses intérêts et ses points de vue sur la base

  8   de son identité. Ceci n'est pas une réponse au plébiscite du peuple serbe,

  9   mais une continuation d'une politique qui a été articulée par l'Union

 10   démocratique croate, le HDZ.

 11   La communauté croate d'Herceg-Bosnie représente un ensemble

 12   géopolitique culturel et économique et découle entièrement -dans le texte,

 13   il est dit historiquement-, des précédentes Banovine qui étaient des

 14   divisions administratives dans la période entre les deux guerres en

 15   Yougoslavie avec, à l'intérieur de ses frontières, le peuple croate vivait

 16   au moment où a éclaté la deuxième guerre mondiale. Tant que le

 17   gouvernement légal, légitime et démocratique de Bosnie-Herzégovine existe,

 18   notre communauté respectera entièrement cette République. Cependant, si

 19   son autorité disparaissait, il n'y aurait pas d'alternative pour nous. "

 20   Général, en tenant compte de cet article, je voudrais maintenant

 21   que vous consultiez la pièce suivante, la pièce 22 de l'accusation.

 22   M. Blaskic (interprétation). – Je demande à lire ce document.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Oui, bien entendu.

 24   Général, nous avons maintenant sur le rétroprojecteur la pièce

 25   de l'accusation 22. Nous voyons ici les frontières des municipalités qui


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  1   constituent la communauté croate d'Herceg-Bosnie. Il est clair, n'est-ce

  2   pas Général, que la communauté croate d'Herceg-Bosnie ainsi que ses

  3   frontières reposent, d'après la déclaration de M. Boban, sur la précédente

  4   Banovina ? N'est-ce pas exact ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Je ne peux pas vous répondre avec

  6   certitude pour dire si oui ou non c'est exact. Ce que je peux faire, c'est

  7   commenter ces événements sur la base de ce que je vois dans cette

  8   interview. Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, je n'étais pas sur place à

  9   l'époque. Je me trouvais en Autriche. Je n'étais pas présent et je ne me

 10   suis pas entretenu avec l'auteur de cette interview.

 11   Pour autant que je le sache, il y avait effectivement la

 12   communauté croate d'Herceg-Bosnie ainsi que la communauté de Posavina,

 13   mais aussi celle d'Usora que l'on ne voit pas sur cette carte. Il y avait

 14   en plus la communauté croate de Tuzla, Soli que nous ne voyons pas non

 15   plus sur cette carte.

 16   Puis quand on lit cette interview, il est dit, je cite : " Nous

 17   n'acceptons aucune Yougoslavie ni la précédente, ni une future puisque

 18   pendant sept décennies, elle a été la prison du peuple croate. " Mais nous

 19   voyons ici une déclaration de la direction municipale du SDS de Mostar où

 20   ils disent qu'ils ont été à l'unanimité favorables à la Yougoslavie. C'est

 21   une période où l'agression commence et ce qui ressort d'ici, c'est que

 22   c'était un moment très délicat politiquement. Ici, je ne vois pas figurer

 23   la communauté croate de Soli qui se trouvait ici, Tuzla, Soli, et on ne

 24   voit pas non plus la communauté croate d'Usora qui se trouvait dans la

 25   zone de Tesajn qui a été constituée -je ne sais pas exactement à quelle


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  1   date- mais qui existait. Elle ne figure pas non plus sur cette carte.

  2   M. Kehoe (interprétation). – Général, ces municipalités que nous

  3   voyons figurer

  4   ici, ce sont les municipalités qui figurent dans la législation qui crée

  5   la communauté croate d'Herceg-Bosnie. Monsieur le Président, messieurs les

  6   Juges, il s'agit de la pièce de l'accusation 38, page 1.

  7   Je voudrais que cela soit consigné au procès-verbal.

  8   M. Blaskic (interprétation). – Oui, permettez-moi d'apporter un

  9   commentaire. C'est possible, je ne peux ni affirmer ni nier cela, je ne

 10   suis pas juriste, je n'ai pas étudié la législation, mais ce que je peux

 11   dire à la Chambre, c'est que le 18 novembre 1991, je n'ai pas pris part à

 12   ces événements. Je n'avais pas d'informations directes à l'époque et tous

 13   mes commentaires qui concernent l'existence d'autres communautés croates

 14   reposent sur des informations que j'ai pu recueillir ultérieurement.

 15   M. Kehoe (interprétation). – Et sur la base des informations que

 16   vous avez pu recueillir ultérieurement et que vous avez maintenant, vous

 17   savez que la communauté croate d'Herceg-Bosnie était basée sur la Banovina

 18   croate de 1939, n'est-ce pas ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – C'est justement ce que je cherche

 20   à dire. Peut-être que je ne le comprends pas bien, mais j'étais à Usora.

 21   C'est là que se trouvait la 110ème brigade du HVO. Dans la région de Zepce

 22   se trouvait le 3ème groupe opérationnel et la 111ème brigade XP, le HVO

 23   était à Maglaj également. C'est là aussi que se trouvaient les unités du

 24   HVO et un peu à Teslic et dans la région de Tuzla. Il y avait la

 25   communauté croate de Tuzla qui n'est pas mentionnée ici. Il y avait la


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  1   107ème brigade du HVO à Gradacac, la 108ème à Brcko. Aujourd'hui, cette

  2   brigade existe en tant que régiment de Domobrani.

  3   Puis il y avait la 115ème brigade du HVO de Tuzla. A d'autres

  4   endroits, dans d'autres régions, il y avait aussi cela et pas comme cela

  5   est indiqué uniquement sur cette carte.

  6   M. Kehoe (interprétation). – Passons à la pièce de

  7   l'accusation 18, si vous le voulez bien. Nous avons une version française,

  8   monsieur le Président, de cette pièce. Malheureusement, il me faudra lire

  9   certains passages puisque nous n'avons pas d'exemplaire en

 10   BCS, pour autant que je le sache.

 11   Il s'agit d'un extrait d'un livre qui a été rédigé par le

 12   Dr Franjo Tudjman qui, à l'époque, n'était pas Président d'un Etat et ce

 13   passage date de 1981. Nous allons lire des passages qui ont été distribués

 14   au préalable aux interprètes. C'est la page 113.

 15   (La cabine française demande la version française, si possible.)

 16   M. Kehoe (interprétation). - Merci. Il y avait bien une version

 17   française, n'est-ce pas ?

 18   M. Abtahi. – oui.

 19   M. Kehoe (interprétation). - Il s'agit d'un texte du

 20   Dr Franjo Tudjman qui affirme que la Bosnie-Herzégovine devrait faire

 21   partie de la République de Croatie. Il affirme que la Bosnie-Herzégovine

 22   devrait faire partie de la République de Croatie. La Bosnie-Herzégovine a

 23   été déclarée une République à part.

 24   (sans traduction)

 25   M. le Président. – Je n'ai pas de traduction. Je le lis notée


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  1   mais c'est simplement pour savoir sur le plan technique... J'ai

  2   l'impression que la cabine n'a pas encore le texte sous les yeux.

  3   C'est quelle page ?

  4   M. Kehoe (interprétation). – Page 113 dans le texte anglais.

  5   J'ai une autre copie du texte anglais ici.

  6   M. le Président. – Nous reprenons.

  7   M. Kehoe (interprétation). - En affirmant que la Bosnie-

  8   Herzégovine devrait faire partie de la Croatie, il est dit et je cite :

  9   " Il existe nombre d'éléments qui montrent que les mêmes critères logiques

 10   n'ont pas été appliqués dans le cas de la Bosnie-Herzégovine qui, pour les

 11   mêmes raisons, aurait du être intégrée à l'entité fédérale croate. La

 12   Bosnie-Herzégovine fut déclarée République fédérale distincte dans le

 13   cadre des frontières établies sous l'occupation

 14   turque, mais de larges secteurs de la Croatie avaient été incorporés à la

 15   Bosnie par les Turcs. En outre, la Bosnie-Herzégovine était historiquement

 16   liée à la Croatie, et ensemble elle forme une entité géographique et

 17   économique indivisible.

 18   La Bosnie-Herzégovine est au centre de cet ensemble séparant la

 19   partie méridionale dalmate et septentrionale panionnienne de la Croatie.

 20   La création d'une Bosnie-Herzégovine distincte rend la situation

 21   territoriale et géographique de la Croatie extrêmement anormale du point

 22   de vue économique et par conséquent, dans un sens national et politique

 23   plus large, elle est très peu favorable pour la vie et le développement.

 24   Dans un sens administratif plus étroit elle est désavantageuse et

 25   inadaptée. Ces éléments expliquent largement la raison pour laquelle


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  1   l'accord de 1939 entre Belgrade, le Prince Paul et le gouvernement

  2   Cvetkovic-Macek représentant la Croatie rattachaient les régions de Bosnie

  3   suivantes dans la Banovina croate. Toute la Herzégovine occidentale,

  4   Mostar et les districts bosniaques dans lesquels les Croates étaient

  5   clairement majoritaires ; Bugojno, Fojnica, Travnik, Deventa, Gradacac et

  6   Brcko. "

  7   Général, cette Banovina dont parle le Président Tudjman et qui,

  8   selon lui, devrait… donc la Banovina de 1939 dont parle le Président

  9   Tudjman, est-ce bien la même Banovina qui a été discutée par Boban et

 10   Kordic dans les documents que nous avons déjà examinés ici ? Est la même

 11   Banovian qui figure sur la carte que vous avez examinée ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Je suppose qu'il en est ainsi.

 13   Quant à moi-même, je l'ai déjà dit, je n'ai pas pris part à ce genre de

 14   conversation.

 15   M. le Président. – Il faut progresser là. Vous répondez aux

 16   questions. Il ne s'agit pas pour vous d'être incriminé en quoi que ce

 17   soit. Pour l'instant, il s'agit de faits historiques. Il faut laisser le

 18   raisonnement se poursuivre. On n'a pas parlé de vous pour l'instant.Allez-

 19   y poursuivez monsieur le Procureur dans votre raisonnement. Bien entendu,

 20   le témoin fera tous les commentaires qu'il lui est souhaitable de faire.

 21   M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, j'aimerais

 22   lire une petite partie d'un compte rendu qui a été pris au cours d'une

 23   audience à huis clos. Donc, je vous demanderai, si vous le voulez bien, de

 24   passer brièvement quelques instants à huis clos partiel pour que je pose

 25   quelques questions à ce sujet au témoin.


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  1   Audience à huis clos partiel

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 12   Pages 19897 – 19918 expurgées en audience à huis clos partiel

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  1   (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   (expurgée)

  5   (expurgée)

  6   (La séance suspendue à 11 h 20 est reprise à 11 h 50.)

  7   M. le Président. - Nous sommes revenus en session publique et

  8   nous continuons. Monsieur le Procureur, c'est à vous.

  9   M. Kehoe (interprétation). - Merci monsieur le Président.

 10   Général, je voudrais parler avec vous très brièvement de

 11   Mate Boban, Président de

 12   la communauté croate d'Herzeg-Bosna -et votre commandant en chef- et de

 13   votre rapport avec lui lorsque vous vous trouviez dans la zone

 14   opérationnelle de Bosnie centrale. Et je voudrais parler de sa relation

 15   avec le Président Tudjman.

 16   Je voudrais vous montrer un article de " Bojovnic " de

 17   novembre 1992, si vous me le permettez.

 18   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président,

 19   messieurs les Juges, il s'agit d'un sujet différent. J'ai consulté mes

 20   notes et je voudrais simplement ajouter que le film, qui a été tourné sur

 21   le moment où l'usine a été minée par la chaîne ITN, a été diffusé le

 22   16 novembre 1993, aux environs en tout cas ; donc vers le 16 novembre.

 23   C'est à ce moment-là en fait que l'équipe de télévision s'est

 24   trouvée sur les lieux.

 25   M. le Président. - Nous en prenons acte car la date est


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  1   notablement différente de celle de janvier 1994. C'est ce que vous vouliez

  2   nous expliquer, je suppose, Général Blaskic ?

  3   M. Blaskic (interprétation). -  Oui, monsieur le Président.

  4   Merci.

  5   M. le Président. - C'est noté.

  6   M. Abtahi. – La présente pièce est la pièce d'accusation 627

  7   et 627 a) pour la version en anglais.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Général, nous avons sous les yeux

  9   un article d'un entretien avec le Président Mate Boban de novembre 1992.

 10   Cet article a été publié dans le numéro de novembre 1992 de " Bojovnic "

 11   ou de Voïnik. De quoi s'agit-il exactement, pouvez-vous nous dire quelle

 12   est cette publication ?

 13   M. Blaskic (interprétation). – C'est un magazine local publié

 14   par le HVO de Zenica. Je ne sais pas si c'étaient les autorités

 15   municipales ou la branche militaire du HVO qui l'a fait, mais " Bojovnic "

 16   était le titre de ce magazine. Cela veut dire soldat en croate et je crois

 17   qu'en fait c'était un journal local du HVO de Zenica.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Lorsque vous étiez commandant de la

 19   zone opérationnelle de Bosnie centrale, vous connaissiez sans doute

 20   l'existence de ce magazine, n'est-ce pas ?

 21   M. Blaskic (interprétation). – Ce magazine n'a été publié que

 22   pendant une période assez limitée, parce que le HVO à été expulsé de

 23   Zenica par l'armée de Bosnie-Herzégovine en avril 1993. Mais en 1992 ce

 24   magazine a été publié.

 25   Je connaissais l'existence de ce magazine mais je ne m'y


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  1   intéressais pas particulièrement car c'était une publication locale au

  2   niveau de la municipalité.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Lisons certains articles ou

  4   certains extraits de ce document. Je voudrais que vous lisiez notamment le

  5   premier paragraphe de la page 2. Il s'agit en fait d'une question qui est

  6   posée dans le contexte d'une réunion avec Radovan Karadzic. Il s'agit de

  7   la deuxième page. Vous voyez cela ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je vois cette première

  9   partie. Oui, même si je n'ai pas eu l'occasion de lire auparavant cet

 10   entretien. Mais je vois effectivement la première partie.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Nous allons simplement nous

 12   intéresser à quelques extraits. Je suis sûr que vous pourrez avoir

 13   l'occasion de vous réexprimer sur l'ensemble de ce document au cours des

 14   questions supplémentaires posées par la défense.

 15   Je lis donc la chose suivante. Dans le cadre d'une question qui

 16   a été posée, qui avait trait à votre réunion avec Radovan Karadzic, vous

 17   avez dit que vous ne faisiez rien sans en informer le Président de Croatie

 18   Franjo Tudjman auparavant.

 19   Dans quelle mesure la politique des Croates d'Herceg-Bosna est-

 20   elle autonome ? On a l'impression, au moins, dans l'opinion publique de la

 21   Croatie qu'il y a des contacts fréquents, les compatriotes de Croatie

 22   semblent ne pas comprendre les Croates de Bosnie-Herzégovine.

 23   M. Blaskic (interprétation). – La dernière partie de votre

 24   question peut s'appliquer à ceux qui n'ont jamais été en contact avec les

 25   Croates de Bosnie-Herzégovine, ce qui veut dire les partis d'opposition de


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  1   Croatie qui ont perdu leur course à la démocratie lorsqu'ils ont proposé,

  2   ou exposé, quelle était leur notion des valeurs de l'Etat de Croatie. La

  3   population a voté pour d'autres valeurs. Il n'y a jamais eu de manque de

  4   compréhension de la part du HDZ, l’Union démocratique croate.

  5   Le HDZ de la Bosnie-Herzégovine fait partie du HDZ dans son

  6   ensemble qui est un mouvement du peuple croate visant à obtenir la liberté

  7   et l'indépendance. La politique croate, une fois pour toutes, devrait être

  8   éditée d'un seul endroit et d'une seule source.

  9   M. Kehoe (interprétation). – Général, en novembre 1992, Franjo

 10   Tudjman était bien dirigeant du HDZ ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Effectivement, en novembre 1992

 12   Franjo Tudjman était président du HDZ.

 13   M. Kehoe (interprétation). – Passons maintenant à un autre

 14   extrait de ce document. Deux autres. Non, excusez-moi, le suivant est :

 15   estimez-vous que le déroulement de la guerre... Vous voyez ? Trois

 16   questions plus bas, même page. Voyez-vous cela ? Vous voyez, deux

 17   paragraphes sous ce que nous venons de lire, cela commence par : estimez-

 18   vous que le déroulement de la guerre jusqu'ici a sapé certaines...

 19   Vous avez trouvé cela, Général ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – Oui, effectivement, j'ai trouvé

 21   cela. Mais cela ne commence pas par estimez-vous mais par pensez-vous.

 22   M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est cela. Cette question dit

 23   la chose suivante : " Pensez-vous ou estimez-vous que le déroulement de la

 24   guerre jusqu'ici a effectivement sapé certaines thèses nostalgiques

 25   politiques de la Croatie allant jusqu'à la rivière Drina et des Musulmans


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  1   tout comme des Croates de réserve ?

  2   Réponse : La plus grande valeur de la politique du HDZ et de son

  3   Président, le Dr Franjo Tudjman, réside dans le rejet de mythes et

  4   d'illusions et réside dans l'adoption de notions objectives et réalistes

  5   de droits revenant aux Croates. Cette valeur a créé l'Etat indépendant de

  6   Croatie et il permet d'assurer aux Croates de Bosnie-Herzégovine leurs

  7   droits à une nation libre, constitutionnelle et égale. "

  8   A partir de ces extraits particuliers, Général, seriez-vous

  9   d'accord pour dire que Boban a dit que le HDZ de la Bosnie-Herzégovine

 10   répond ou est lié au HDZ qui est contrôlé ou dirigé par Franjo Tudjman ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je suppose

 12   que les interprètes n'ont pas reçu le texte de cet article, et

 13   l'interprétation que j'ai reçue n'est pas exacte. Je pense que nous

 14   devrions lire cet extrait jusqu'au bout parce qu’il est dit ici que les

 15   Croates en Bosnie-Herzégovine assurent au peuple de Bosnie-Herzégovine un

 16   certain droit à être une des parties constituantes, égales et libres. Je

 17   comprends qu'il s'agit-là du peuple croate de Bosnie-Herzégovine qui

 18   dispose des mêmes droits et qui peut être considéré comme étant une nation

 19   constituante, comme les autres nations de la Bosnie-Herzégovine. Alors, je

 20   ne sais pas. Peut-être y a-t-il eu une mauvaise lecture qui m'a été faite

 21   de ce passage ?

 22   M. Kehoe (interprétation). – Mais résumons. A partir de ces

 23   extraits, peut-on en conclure que les politiques du HDZ et de Mate Boban

 24   en Bosnie-Herzégovine sont liées par la politique du HDZ et de Franjo

 25   Tudjman en Croatie ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Je n'étais pas actif dans la vie

  2   politique. Ce que je peux en déduire et ce que je peux dire en

  3   commentaires, ce n'est que ce que je vois dans ces extraits. Dans le

  4   premier paragraphe que vous m'avez lu, monsieur le Procureur, il est dit

  5   que le HDZ de Bosnie-Herzégovine fait partie intégrante de l'ensemble du

  6   HDZ. Quand je comprends le terme sastavnica, partie intégrante, comme un

  7   terme désignant une partie du HDZ. Donc, quel genre de collaboration, de

  8   communication avaient-ils ? Quelles étaient les responsabilités, les

  9   pouvoirs ? Je ne peux pas le dire. Je ne participais pas à la vie

 10   politique et je n'ai pas d'informations de première main là-dessus. Peut-

 11   être était-ce vrai ? Peut-être non ?

 12   M. Kehoe (interprétation). – Permettez-moi de vous lire un

 13   extrait très bref de votre déposition. Je souhaite qu'on passe à huis clos

 14   partiel s'il vous plaît. Un instant seulement avec l'autorisation de la

 15   Chambre.

 16   M. le Président. - La défense a-t-elle une objection à ce huis

 17   clos ?

 18   M. Hayman (interprétation). – Nous ne savons pas sur quoi porte

 19   cette déposition. Nous devons attendre pour voir, mais le greffier devrait

 20   nous annoncer à quel moment on ferme et à quel moment on rouvre

 21   l'audience. La dernière fois, je n'ai pas entendu à quel moment on a

 22   terminé le huis clos partiel. Donc, j'aimerais qu'on respecte la

 23   confidentialité, mais aussi qu'on nous informe du déroulement.

 24   M. le Président. - Il me semble que, quand on a repris

 25   l'audience, j'ai annoncé que nous reprenions en audience publique. Je n'ai


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  1   peut-être pas très bien annoncé. C'est vrai. J'ai dit : Nous sommes en

  2   audience publique.

  3   Excusez-moi Maître Hayman, je l'annoncerai plus clairement.

  4   Maintenant, il y a une demande du Procureur. Je suis comme vous,

  5   mais il me semble que c'est peut-être par protection de votre client -me

  6   semble-t-il. N'est-ce pas, monsieur le Procureur ? Pour protéger le témoin

  7   ou sa famille ? C’est une raison pour laquelle vous demandez le huis

  8   clos ?

  9   M. Kehoe (interprétation). – C'est un témoin qui a déposé à huis

 10   clos.

 11   M. le Président. - Ah oui, d'accord. Je comprends mieux. Alors

 12   l'interprétation, je ne l’avais pas bien comprise. C’est un témoin qui

 13   avait déposé à huis clos, alors nous faisons comme tout à l'heure, nous

 14   repassons très brièvement à huis clos pour pouvoir lire cette déclaration.

 15   Bien sûr.

 16   D'accord ? Allons-y.

 17   M. Abtahi. - Nous sommes à huis clos partiel.

 18   Audience à huis clos partiel

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 12   M. le Président. - Bien nous sommes à nouveau en audience

 13   publique. Monsieur le Procureur.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Oui monsieur le Président.

 15   J'attends qu'on reprenne ces photographies.

 16   Vous pouvez utiliser mes exemplaires, si vous le voulez.

 17   C'est dans l'angle droit en haut que figurent les références.

 18   Général, je voudrais que nous commencions par l'examen de la

 19   première photo. Il s'agit de la pièce 80/7. De gauche à droite, nous

 20   voyons Kostroman, Kordic, Valenta. Qui est l'homme qui porte la chemise

 21   blanche, si vous le savez ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Je sais, monsieur le Président,

 23   messieurs les Juges, que son nom de famille est Spaic, mais je ne suis pas

 24   tout à fait sûr que cela est Spaic. Je connais cet homme, mais je n'arrive

 25   pas à me rappeler bien son nom et son prénom.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Très bien, nous passons à la

  2   photographie suivante. Ici, encore une fois, devant, nous voyons

  3   Anto Valenta. Est-ce exact ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Oui c'est cela.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Pouvez-vous montrer M. Valenta et

  6   M. Santic, le maire de Vitez présent aussi également ? N'est-ce pas ?

  7   Ainsi que Pero Skopljak. Qui est l'homme au milieu avec une barbe, entre

  8   Skopljak et …

  9   M. Blaskic (interprétation). - C'est M. Zoran Maric.

 10   M. Kehoe (interprétation). - Et Zoran Maric était le Président

 11   du HVO de Busovaca ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 13   M. Kehoe (interprétation). - Vous êtes ici au fond. Pouvez-vous

 14   montrer l'endroit

 15   où l'on vous voit ?

 16   Merci. Passons à la photographie suivante, s'il vous plaît.

 17   Vous figurez, une fois de plus, sur cette photo. Pouvez-vous

 18   montrer ? A gauche, par rapport à vous, au fond est Dario Kordic. Pouvez-

 19   vous montrer Kordic ? Merci.

 20   (Le témoin montre.)

 21   M. Kehoe (interprétation). – Dernière photographie s'il vous

 22   plaît. Au centre, nous voyons une fois de plus Kostroman, Kordic et

 23   Valenta.

 24   (Le témoin les montre.)

 25   M. Kehoe (interprétation). – Général, ces photos ont été prises


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  1   par un officier du Bataillon britannique, le capitaine Withworth. C'était

  2   quand ?

  3   M. Blaskic (interprétation). – Je ne peux pas vous l'affirmer

  4   avec certitude. Ces photographies concernent un événement. Toutes les

  5   photographies concernent un seul événement. Si vous pouviez me donner la

  6   date, cela m'aiderait. Mais ce que je suppose et ce que je crois, c’est

  7   qu'il s'agit du départ des parlementaires qui se rendent à une réunion,

  8   peut-être à Livno ou bien à Grude. Il me semble que c'était vers la fin du

  9   mois de 1993, le mois d'août peut-être. Je ne sais pas exactement de quoi

 10   il s'agissait. C'était une réunion des responsables politiques. Ils sont

 11   partis, transportés par les véhicules de la Forpronu. C'est la Forpronu

 12   qui a organisé le transport, l'escorte pour qu'ils puissent se rendre à

 13   cette réunion.

 14   M. Kehoe (interprétation). – Général, vous aussi, vous avez été

 15   transporté, n'est-ce pas ?

 16   M. Blaskic (interprétation). – Pour autant que je m’en

 17   souvienne, non. Pourriez-vous me donner une date approximative ? Je

 18   pourrais vous le confirmer.

 19   Withworth dispose peut-être de documents à ce sujet. Je n'étais

 20   pas présent à la réunion de Livno. Je n'étais pas présent en août non plus

 21   au moment de la proclamation de la République croate de Herceg-Bosna.

 22   Donc, je ne sais pas de quelle réunion vous parlez.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Donc, Général, là, il s'agit de

 24   véhicules de la Forpronu. Vous marchez avec ce groupe. Vous allez vers ces

 25   véhicules du Bataillon britannique, n'est-ce pas ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Pouvez-vous me rappeler la date ?

  2   Le plus souvent, je ne pouvais être transporté que par ces véhicules du

  3   Bataillon britannique, mais s'il s'agit bien de la réunion de Livno ou de

  4   la réunion du mois d'août 1993. Je ne m'y suis pas rendu. Je n'ai pas

  5   assisté à cette réunion. Il est possible que je sois simplement dehors

  6   parce que je raccompagne ces gens, ces responsables.

  7   Je ne sais pas de quelle réunion ni de quel événement il s'agit.

  8   M. Kehoe (interprétation). – Vous n'avez aucune idée des

  9   circonstances. Vous ne savez pas si vous allez quelque part ou si vous

 10   revenez ? De quoi il s'agit ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Non, j'ai été clair. Je suppose

 12   qu'il s'agit du départ des hommes qui se rendent à cette réunion à Livno

 13   ou bien de la réunion de Grude. L’une de ces réunions s'est tenue en

 14   août 1993 et l'autre un peu plus tard. Quant à moi-même, je n'ai pas

 15   assisté à ces réunions. Donc, si ce groupe qui figure sur ces photos se

 16   rend à ces réunions, je dois dire que moi-même, je ne me rendais pas à

 17   cette réunion et je n'ai pas participé à cette réunion.

 18   Quant à la Forpronu, c'est elle qui garantissait la sécurité.

 19   C'est la Forpronu qui disposait de la liste précise des participants à

 20   cette réunion. Donc, c'est l'ONU qui sait qui elle a transporté.

 21   M. Kehoe (interprétation). – Les responsables politiques de

 22   Bosnie centrale que nous avons vus ici sur ces photographies étaient

 23   Anto Valenta, Kostroman et Dario Kordic. Nous vous voyons ici sur ces

 24   photos en leur présence.

 25   M. Blaskic (interprétation). – Oui, parce que l'endroit où


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  1   devaient embarquer ces responsables politiques dans les véhicules de

  2   l'ONU, ces endroits étaient déterminés par l'ONU.

  3   Moi-même, je n'étais pas en position d'indiquer à l'ONU, d'imposer à l'ONU

  4   l'endroit où ils allaient rencontrer et prendre ces responsables

  5   politiques. C'est l'ONU qui décidait des modalités de transport. C'est le

  6   Bataillon britannique qui le faisait.

  7   Ce que j'ai dit, je ne sais pas si c'est la réunion de Livno ou

  8   de Grude, mais ce dont je suis sûr, c'est que je n'étais pas à ces

  9   réunions.

 10   M. Kehoe (interprétation). – Je vais vous montrer une bande,

 11   Général. Il s'agit d'une bande qui est référencée, qui a été versée au

 12   dossier. C'est la pièce 234.

 13   Monsieur le Président, messieurs les Juges, c'est un témoin

 14   protégé qui a déposé au sujet de cette bande, mais la bande elle-même

 15   n'est pas protégée. Donc, on peut la diffuser publiquement et si des

 16   exemplaires du texte sont nécessaires, je peux les distribuer aux cabines.

 17   Mais je pense que cela n'est pas nécessaire car le témoin comprend le BCS.

 18   Si la Chambre le souhaite, je peux vous distribuer les versions anglaise

 19   et française.

 20   M. le Président. – Oui, si vous les avez, distribuez-les. Bien

 21   sûr.

 22   M. Kehoe (interprétation). – Oui, je les ai. Il s'agit de deux

 23   extraits. Il s'agit d'un événement qui s'est produit le 16 janvier 1992.

 24   Je vais montrer le premier extrait s'il vous plaît.

 25   M. le Président. - Allez-y.


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  1   (Diffusion d’une cassette.)

  2   M. Kehoe (interprétation). – Revenez, s’il vous plaît. On

  3   voudrait entendre le son. Pouvez-vous reprendre à partir du début ?

  4   Monsieur le Président, c'est une bande que nous avons déjà

  5   visionnée et il y avait le son, la fois où nous l'avons écoutée. Peut-être

  6   pourrions-nous faire une petite pause pour régler les problèmes

  7   techniques.

  8   M. le Président. - D'accord. Il faut 5 mn peut-être ?

  9   M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est un document, une bande

 10   que nous avons

 11   déjà visionnée. Il y a juste un petit problème technique.

 12   M. le Président. - Vous pensez que cela va être très long,

 13   monsieur le Greffier ?

 14   M. Abtahi. - On n'arrive pas à localiser le son. Mais dans la

 15   cabine vidéo, ils m'ont demandé quelques secondes, voire minutes pour

 16   essayer de voir quel est le problème.

 17   M. le Président. - Nous allons suspendre quelques minutes et

 18   vous viendrez nous chercher.

 19   M. Abtahi (interprétation) – Oui, monsieur le Président.

 20   (La séance suspendue à 12 h 25 est reprise à 12 h 39.)

 21   M. le Président. - Est-ce que M. Kordic a retrouvé sa voix,

 22   monsieur le Procureur ?

 23   M. Kehoe (interprétation). - Je pense. Je parle sous l'autorité

 24   de monsieur le Greffier qui me dit que c'est le cas en effet. Donc, je

 25   pense que nous pourrions peut-être baisser les lumières et visionner cette


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  1   vidéo.

  2   (Passage de la cassette vidéo.)

  3   M. Kehoe (interprétation). - Avant de diffuser la séquence

  4   suivante, nous pourrions revenir à la date de 1846… pardon…à la cote 1846

  5   sur le film, sur la vidéo. Peut-on repasser les images une minute

  6   environ ?

  7   M. Abtahi. - Est-il possible que la cabine vidéo revienne en

  8   arrière sur les images et que Maître Kehoe désigne l'endroit où il faut

  9   que le technicien s'arrête ? Car apparemment, ils ne sont pas en train

 10   d'utiliser le même système, donc ils n'ont pas les mêmes références que

 11   vous.

 12   M. Kehoe (interprétation). - Très bien. Repassons les images et

 13   je leur dirai quand il faut arrêter.

 14   Arrêtez là. Peut-on baisser les lumières ?

 15   Général, qui est cet homme qui porte une barbe qui se trouve au

 16   premier plan sur

 17   l'image ici ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – C'est M. Ante Sliskovic que je ne

 19   connaissais pas ce jour-là, le 16 janvier 1992.

 20   M. Kehoe (interprétation). - C'est bien le chef du SIS, du

 21   service de sécurité et d'information de Bosnie centrale à qui vous avez

 22   demandé d'enquêter sur les événements d'Ahmici ?

 23   M. Blaskic (interprétation). – Oui.

 24   M. Kehoe (interprétation). – Peut-on rallumer les lumières, car

 25   avant de passer l'extrait suivant, j'aurais quelques questions à vous


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  1   poser au sujet du discours posé par M. Kordic.

  2   Général, au début de son discours, Kordic fait remarquer, je

  3   cite : " Je nous souhaite à tous ce qu'il y a de mieux avec l'Etat

  4   indépendant de Croatie. " Fin de citation. L'Etat indépendant de Croatie

  5   était la dénomination employée par le régime oustachi de 1941 à 1945,

  6   n'est-ce pas ?

  7   M. Blaskic (interprétation). – Oui, cet Etat indépendant de

  8   Croatie avait effectivement ce nom sous l'état fasciste qui a duré de 1941

  9   à 1945, comme vous venez de l'affirmer.

 10   Mais, j'aimerais indiquer, monsieur le Président, messieurs les

 11   Juges, que c'est la première fois, ici, que j'ai vu les images qui

 12   viennent d'être montrées, pas aujourd'hui d'ailleurs, mais à une date un

 13   peu antérieure. En tout cas, je n'avais pas vu ces images avant de les

 14   voir au Tribunal. C'est la première fois que je discute de ces éléments et

 15   je n'ai pas eu la possibilité de parler de ces éléments avec les

 16   participants ou ceux qui ont pris la parole à ce meeting. J'étais en

 17   Autriche à l'époque et je ne connaissais pas ces hommes.

 18   Et d'ailleurs, ce rassemblement a eu lieu, je crois, à

 19   l'occasion de la proclamation de l'indépendance et de la souveraineté de

 20   l'Etat croate et de sa reconnaissance.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Aujourd'hui enfin, l'Etat

 22   indépendant de Croatie, c'était une Croatie qui oeuvrait aux côtés de

 23   l'Allemagne nazie qui a infligé de lourdes souffrances au peuple de l'ex-

 24   Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est un fait certain.


Page 19937

  1   Entre 1941 et 1945 le fascisme a apporté de très grandes souffrances à

  2   tous les pays civilisés, à tous les peuples civilisés et créé une

  3   véritable tragédie.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que vous reconnaissez

  5   l'endroit où se tenait ce rassemblement que nous avons vu sur les images ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas quel est le

  7   bâtiment, mais je connais la ville. Il s'agit de Busovaca, puisque ceux

  8   qui s'expriment parlent de Busovaca. Maintenant l'endroit exact, je ne

  9   sais pas, mais à en juger par la date du 16 janvier 1992 et à en juger par

 10   le contenu des interventions, je vois qu'il s'agit de célébrer la

 11   reconnaissance internationale de l'indépendance de la République de

 12   Croatie. Mais je répète encore une fois que je n'ai pas parlé de ces

 13   éléments avec l'un quelconque des participants à ce rassemblement,

 14   puisqu'à l'époque je me trouvais en Autriche.

 15   M. Kehoe (interprétation). - Général, dans son allocution,

 16   Kordic dit à Busovaca : " Cet endroit fait partie des territoires

 17   croates ", n'est-ce pas ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Je n'ai pas retenu exactement. Il

 19   est possible que ce soit ce qu'il a dit. Je n'ai pas pris de notes par

 20   écrit de ce que Kordic a dit, mais à en juger par le sens des propos que

 21   j'ai entendus, Kordic parle assez nerveusement, d'ailleurs avec beaucoup

 22   d'émotion, de la reconnaissance de l'indépendance de la souveraineté. Ce

 23   sont les mots qu'il emploie de l'Etat de Croatie.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Et dans cette période, au moment où

 25   vous êtes arrivé en Bosnie centrale, quelle était approximativement la


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  1   répartition de la population dans la région de Busovaca entre les Croates,

  2   les Musulmans et les Serbes ?

  3   M. Blaskic (interprétation). – Je ne connais pas les chiffres

  4   exacts parce que je n'avais jamais séjourné à Busovaca jusqu'à cette date.

  5   Moi je suis né à Kiseljak et en 1975, alors que j'avais quatorze ans et

  6   demi, je suis parti faire mes études à Zagreb, Belgrade, Sarajevo et j'ai

  7   fait mon service en Slovénie. Mais tout ce que je sais, c'est que le

  8   rapport était à peu près de 50/50 entre les Croates et les Musulmans,

  9   alors que les Serbes étaient très peu nombreux à Busovaca. Mais

 10   jusqu'en 1992, je n'ai pas eu l'occasion de me rendre, pour une raison ou

 11   pour une autre, dans cet endroit, dans cette localité parce que ma vie me

 12   dirigeait ailleurs.

 13   M. Kehoe (interprétation). - A la fin de son allocution, Kordic

 14   dit : " Dieu et les Croates et puisse l'Etat indépendant de Croatie vivre

 15   pour l'éternité. " Alors cette expression Bog i hrvati, (Dieu et les

 16   Croates) est bien une expression oustachi utilisée au cours de la seconde

 17   guerre mondiale ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas si c'est une

 19   expression oustachi utilisée au cours de la seconde guerre mondiale, mais

 20   je sais qu'en croate le terme bog qui se dit familièrement est une façon

 21   de se saluer au quotidien ; familièrement, cela veut dire salut.

 22   C'est une expression très répandue parmi les Croates -en tout

 23   cas de ma génération- et ce n'est plus associé à une expression oustachi.

 24   Peut-être que c'était un salut oustachi, mais je ne sais pas ce qu'il en

 25   est aujourd'hui. En tout cas, bog est une façon tout à fait courante de se


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  1   saluer chez les Croates de Dalmatie et de Bosnie et chez tous les Croates.

  2   M. Kehoe (interprétation). – Passons à l'extrait suivant qui

  3   concerne Kostroman. Je demanderai qu'on baisse un peu les lumières.

  4   Peut-on remonter un peu la bande, pour entendre le début de

  5   cette allocution ?

  6   M. Kehoe (interprétation). - J'ai une série de questions à poser

  7   au sujet de ces séquences. Si vous m'y autorisez, je les entamerai après

  8   le déjeuner.

  9   M. le Président. - Nous reprendrons à 14 h 30.

 10   (L'audience suspendue à 13 h 07 est reprise à 14 h 35.)

 11   M. le Président. – Je vous rappelle que nous sommes en session

 12   publique. Monsieur le Procureur. C'est à vous.

 13   M. Kehoe (interprétation). - Merci monsieur le Président,

 14   messieurs les Juges. Rebonjour Général.

 15   M. Blaskic (interprétation). – Rebonjour, monsieur le Procureur.

 16   M. Kehoe (interprétation). - Je voudrais vous poser un certain

 17   nombre de questions relatives au discours prononcé par Ignac Kostroman.

 18   Lorsqu'il débute ce discours, il utilise les termes " chers

 19   citoyens de l'Etat de Croatie ". Comme vous l'avez fait remarquer

 20   d'emblée, il s'agissait-là d'un rassemblement visant à célébrer la

 21   reconnaissance de la République de Croatie. L'avez-vous entendu dire

 22   cela ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Oui effectivement, je l'ai

 24   entendu sur la cassette.

 25   M. Kehoe (interprétation). - Il semble qu'il s'adresse à des


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  1   personnes alors qu'il se trouvait dans la ville de Busovaca qui se trouve

  2   dans la République de Bosnie-Herzégovine. C'est bien exact ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - A ce moment-là, messieurs les

  4   Juges, Busovaca était dans la république socialiste de Bosnie-Herzégovine

  5   -à ma connaissance- et au sein de la RSFY, le 16 janvier 1992.

  6   M. Kehoe (interprétation). - Il continue, n'est-ce pas, de

  7   prononcer son discours et il parle de la concrétisation d'un rêve

  8   historique ?

  9   De quoi parle-t-il, lorsqu'il fait référence à ce rêve

 10   historique ? Comment avez-vous interprété ses propos ? Comment l'avez-vous

 11   compris, d'après le ton et les mots qu'il a employés ?

 12   M. Blaskic (interprétation). – Messieurs les Juges, une fois de

 13   plus, je tiens à souligner que je ne participais pas à ce rassemblement et

 14   que je n'ai pas non plus parlé de ce rassemblement avec M. Kostroman.

 15   Parce qu'au cours de son discours, il dit à plusieurs reprises :

 16   j'affirme, j'affirme.

 17   Si vous souhaitez, je peux vous donner certaines informations

 18   quant à mon opinion sur ce qu'il aurait dit, sur ce qu'il a dit. Mais je

 19   dois réaffirmer que je n'ai jamais abordé avec lui les événements auxquels

 20   il fait référence.

 21   Lorsqu'il parle de la concrétisation d'un rêve historique, je

 22   suppose qu'il parlait du rêve de création d'un Etat croate et de la

 23   proclamation d'un Etat croate reconnu internationalement par la Communauté

 24   internationale et les pays européens. Je dis " je suppose " parce que je

 25   n'en ai jamais parlé de ce rassemblement avec Kostroman, en personne.


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  1   M. Kehoe (interprétation). – Supposez-vous également que lorsque

  2   Kostroman dit : nous serons une partie intégrante de notre cher Etat

  3   croate par tous les moyens, il dit que la région de Bosnie centrale, et

  4   notamment Busovaca, sera une partie intégrante de la République de

  5   Croatie, quels que soient les moyens à utiliser ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, oui, c'était là

  7   l'opinion qu'exprimait un individu, lui en l'occurrence, et si je me

  8   souviens bien de ce que j'ai vu dans la vidéo, il affirme que la

  9   communauté croate d'Herceg-Bosna est une partie intégrante de la

 10   République de Croatie. Mais j'ai assisté à une réunion quelques mois plus

 11   tard, en 1992, avec M. Jadranko Prlic. A cette occasion il a dit de façon

 12   officielle, devant toutes les autorités présentes, que le sens même de la

 13   création de la communauté d'Herceg-Bosna était de maintenir la Bosnie-

 14   Herzégovine.

 15   Il y a eu différentes déclarations émanant de différentes

 16   politiques à ce moment-là. Mais ce que je dirai, en tant que soldat, c'est

 17   que ce genre de déclaration ne me liait en rien. Moi, ce que je devais

 18   respecter, c'étaient les ordres et les décisions de mes supérieurs

 19   hiérarchiques, du chef d'état-major et de personnes occupant des positions

 20   officielles. Là, il s'agit simplement d'une opinion d'un individu. Il

 21   dit : j'affirme.

 22   M. Kehoe (interprétation). – Mais vous étiez également tenu de

 23   respecter les décisions de Mate Boban, votre commandant en chef, n'est-ce

 24   pas ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Oui, bien sûr ! Les décisions


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  1   officielles devenaient des ordres qui étaient donnés par le chef d'état-

  2   major. Je devais respecter des ordres officiels de mon chef d'état-major

  3   et j'agissais en conséquence.

  4   M. Kehoe (interprétation). – Passons maintenant au moment où

  5   Kostroman dit : " Nous ferons tout par le biais de négociations pour

  6   devenir partie intégrante de l'Etat de Croatie et il est très probable que

  7   les frontières de cet Etat se trouveront dans cette région. "

  8   Vous supposez donc que Kostroman voit les frontières de la

  9   République de Croatie à Busovaca ou dans les environs de Busovaca, n'est-

 10   ce pas ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Une fois de plus, je vais tenter

 12   de me prononcer sur l'opinion qu'essayait d'exprimer Kostroman. Je pense,

 13   qu'effectivement, c'était son opinion à l'époque. Mais je le répète, il

 14   s'agissait d'un individu qui s'exprimait sur son opinion personnelle.

 15   Cependant, ce genre de déclaration issue d'individus -déclaration

 16   personnelle- ne me contraignait en rien et je n'étais absolument pas lié

 17   et tenu de m'y conformer.

 18   M. Kehoe (interprétation). – Général, passons à autre chose. Il

 19   dit : " Je voudrais demander à tous les citoyens de l'Etat de Croatie de

 20   ne pas causer d'incident ou de ne pas s'engager dans des actes de

 21   provocation au cours de cette période transitoire. "

 22   Quand vous avez entendu cela, avez-vous supposé que cette

 23   période transitoire est la période précédant le rattachement de Busovaca

 24   et d'autres municipalités de la Bosnie centrale à la République de

 25   Croatie ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, je ne sais pas. Je ne

  2   sais pas s'il y a eu une période telle au cours de laquelle finalement,

  3   Busovaca a été rattachée à la République de Croatie ainsi que d'autres

  4   municipalités de Bosnie centrale. Je l'ai dit. Je crois que j'ai été assez

  5   clair. Nous étions encerclés par une population à majorité musulmane.

  6   Alors, que voulait dire l'orateur lorsqu'il a parlé de cela ?

  7   Peut-être qu'il parlait d'une période au cours de laquelle il y aurait

  8   proclamation de la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine ? Parce que la

  9   population croate a voté au cours du référendum en faveur de la

 10   souveraineté de la Bosnie-Herzégovine. C'est un fait de notoriété

 11   publique. Je ne sais pas, par conséquent, s'il s'agissait-là de sa

 12   position à l'époque. En tout cas, il se peut que cela soit sa position

 13   personnelle.

 14   M. Kehoe (interprétation). – Continuons avec M. Kostroman qui

 15   était toujours une haute personnalité politique lorsque vous étiez le

 16   militaire le plus haut placé dans la région.

 17   Il dit : " Pour ce qui est du reste de la population dans nos

 18   régions, la question reste posée. Qu'en est-il des Musulmans ? Qu’en est-

 19   il des Serbes ? Qu’en est-il des autres ? Nous pouvons leur répondre la

 20   chose suivante : ne vous inquiétez de rien ! Permettons-leur de vivre dans

 21   notre Etat de Croatie et nous ne toucherons pas au moindre cheveux de

 22   leurs têtes s'ils nous acceptent comme frères et s'ils acceptent le fait

 23   qu'ils seront citoyens de l'Etat de Croatie. " Fin de citation.

 24   Alors, à votre avis, quelle a été la réaction des Musulmans lorsqu'ils se

 25   sont rendus compte qu’une des personnes les plus haut placées dans le HDZ


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  1   et puis dans le HVO, leur dit à Busovaca -une ville dont vous dites

  2   qu'elle était composée à peu près de 50 % de Croates et 50 % de Musulmans-

  3   leur dit donc qu'ils devront accepter d’être citoyens de l'Etat de

  4   Croatie ? A votre avis, comment ont-ils réagi ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Permettez-moi de dire que je peux

  6   supposer que leur réaction a été une réaction de désaccord, et je conviens

  7   tout à fait que certains individus aient pu condamner ce type de

  8   déclaration. Mais là encore, il faut replacer cet événement dans le

  9   contexte de la période au cours de laquelle il s’est déroulé, c'est-à-dire

 10   au moment où la JNA, ainsi que la Défense territoriale étaient les forces

 11   armées légitimes et légales de la République socialiste de la Bosnie-

 12   Herzégovine, qui était elle-même une partie intégrante de la Yougoslavie.

 13   Et je pense qu'au sein des trois peuples constituant la Bosnie-

 14   Herzégovine, ce type de déclaration a dû être prononcée.

 15   Et même la partie la plus tolérante de la population -je parle

 16   notamment des Musulmans et des Serbes- ont dû ressentir une certaine

 17   anxiété, même s’il s'agissait-là, je le répète, de l'expression d'une

 18   opinion personnelle. Parce que, ce faisant, il nie à deux nationalités

 19   leurs droits. Mais c'était une période chaotique, une période transitoire.

 20   A ce moment-là, la Bosnie-Herzégovine et les dirigeants de la Bosnie-

 21   Herzégovine ont décidé de travailler vers leur indépendance et leur

 22   autonomie.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Pour suivre sur ce que vous venez

 24   de dire, vous venez de dire que certaines personnes ont dû condamner ce

 25   type de déclaration. Avez-vous jamais vu qui que ce soit le faire ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Lorsque j'ai parlé de cela,

  2   c'était en réponse à votre question, à savoir : quelle avait été la

  3   réaction des Musulmans de Bosnie lorsqu'ils ont appris qu'une telle

  4   déclaration avait été prononcée ? Et moi, j'ai répondu qu'au minimum, ils

  5   devaient se sentir assez anxieux et que c'était une déclaration qui devait

  6   être condamnée.

  7   Mais à ce moment-là, je le répète, je ne participais pas à la

  8   réunion et je n'ai jamais eu la possibilité de parler de ce que nous avons

  9   vu sur la bande vidéo avec l'orateur. C'est la première fois ici dans

 10   cette salle que j'ai eu vent de l'événement qui a été filmé sur cette

 11   cassette.

 12   Je pense que la pièce a été versée par le biais du témoignage

 13   d'une autre personne qui est venue s'exprimer ici.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Mais Général, laissons ce détail,

 15   cette déclaration de côté et parlons de la substance, de l'essence même de

 16   ce que l'on voit sur la cassette et de la déclaration. Dites-vous bien,

 17   devant cette Chambre, que chaque fois que vous avez rencontré

 18   Ignac Kostroman ou Dario Kordic, jamais ils ne vous ont dit qu'ils

 19   souhaitaient rattacher la

 20   communauté croate d'Herceg-Bosna à la République de Croatie. C'est bien ce

 21   que vous dites ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Dans un certain sens, ils ont

 23   présenté leur opinion peut-être de façon officielle. Mais je tiens à

 24   ajouter devant cette Chambre… mais je n'ai jamais considéré que leur

 25   opinion, leur position me contraignaient en quoique ce soit. Il


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  1   s'agissait-là de positions exprimées en qualité de dirigeants, prononcées

  2   dans un contexte officiel, et je considérais qu'ils devaient répondre

  3   devant leur supérieurs, devant leurs dirigeants.

  4   Moi, ce qui m'intéressait c'étaient les informations officielles

  5   que je recevais du chef du grand état-major du HVO.

  6   M. Kehoe (interprétation). - Très bien. Parlons maintenant de

  7   Dario Kordic. Que vous a-t-il dit de son opinion à lui ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais plus très bien ce

  9   qu'il m'a dit, je ne sais pas très bien quelle était sa position. Et puis

 10   de quelle période l'on parle ? Nous avons dit, hier, que la politique

 11   s'était modifiée, qu'il y avait plusieurs objectifs au cours de

 12   différentes périodes.

 13   Par conséquent, il ne m'a pas parlé d'une opinion personnelle

 14   spécifique. Il me demandait parfois s'il y avait certaines tâches

 15   militaires à accomplir et, dans ce cas-là, s'il y en avait, nous en

 16   parlions. Mais je ne m'intéressais pas à grand-chose d'autre. Et puis

 17   Kordic ne faisait pas partie de mon commandement dans la zone

 18   opérationnelle.

 19   M. Kehoe (interprétation). - Je crois que vous avez dit que,

 20   peut-être, qu'effectivement, ils se sont exprimés, ils ont exprimé leur

 21   opinion. Mais c'était exactement ma question ; je voulais vous demander

 22   quelle opinion avait donné Dario Kordic ? De quoi parliez-vous ?

 23   Que voulez vous dire lorsque vous dites : peut-être qu'ils se

 24   sont exprimés ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - De quelles périodes parlez-vous ?


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  1   M. Kehoe (interprétation). - N'importe laquelle !

  2   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, il est arrivé qu'il

  3   exprime son opinion qui reflétait également l'opinion de la communauté

  4   démocratique croate en Bosnie-Herzégovine, et de ses représentants.

  5   Et à certaines reprises, il parlait de formation militaire ; il

  6   parlait aussi de ce que pensaient les représentants officiels. Cela

  7   dépendait. Il exprimait parfois différentes opinions. Parfois certaines

  8   opinions étaient assez modérés, parfois un peu plus enflammées. Mais je ne

  9   devais jamais me conformer à son opinion et à ses déclarations. Je ne les

 10   ai jamais entendues ainsi d'ailleurs.

 11   Moi, c'étaient les informations que je recevais du chef d'état-

 12   major, du grand état-major, qui me semblaient pertinentes et auxquelles je

 13   devais me conformer.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Mais ces déclarations de Kordic

 15   faisaient-elles état d'un souhait visant à voir le Herceg-Bosna annexé à

 16   la République de Croatie ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Peut-être, peut-être pas. Je n'ai

 18   jamais cherché dans mes notes, dans mon journal pour voir quels étaient

 19   les propos prononcés par l'un ou l'autre représentant politique local.

 20   Sans doute pas, mais nous étions en temps de guerre et il y avait

 21   différents hommes politiques locaux s'exprimant de façons différentes.

 22   Par exemple, si un plan international était d'actualité à telle

 23   ou telle période, eh bien il tentait d'adopter une certaine position sur

 24   ce plan, de s'exprimer également, mais je n'ai pas gardé de trace de tout

 25   cela.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Général, vous avez dit : peut-être,

  2   peut-être pas. Mais Dario Kordic défendait-il l'idée de séparer certaines

  3   régions de la Bosnie-Herzégovine -notamment l'Herceg-Bosna- afin qu'elle

  4   soit fusionnée avec la République de Croatie ? L'a-t-il dit ou ne l'a-t-il

  5   pas dit ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Je n'étais pas membre du parti de

  7   Dario Kordic. Au cours des réunions officielles auxquelles j'ai participé,

  8   je n'ai jamais entendu ce type d'information directement. Je peux dire à

  9   la Chambre ce que je sais, les informations dont je dispose. Alors je

 10   dis : peut-être oui, peut-être qu'il la dit mais peut-être qu'il ne l'a

 11   pas dit.

 12   Moi j'étais responsable de questions militaires et je

 13   fonctionnais en écoutant les instructions, les ordres donnés par le chef

 14   de l'état-major principal.

 15   M. Kehoe (interprétation). - Mais lorsque vous avez dit peut-

 16   être qu'effectivement il s'est exprimé, qu'il a exprimé ses opinions, de

 17   quoi parliez-vous, Général ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, je pensais au fait que

 19   tous les 15 jours il y avait des réunions regroupant des représentants des

 20   autorités civiles dans la région de Bosnie centrale, tous les 15 jours

 21   donc. Il y avait des réunions du parti. Nous avons vu, il y a un instant,

 22   une photographie où il y à un moment une photographie où l'on voit que des

 23   membres d'un parti, les représentants officiels d'un parti se rendent à

 24   une réunion. Mais je ne sais pas de quelle réunion il s'agit et je ne sais

 25   pas quelle type de discussion était engagée au cours de ces réunions.


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  1   Je sais que les positions et les décisions officielles étaient

  2   rendues publiques par le biais du journal officiel, et d'autres documents

  3   également. Mais je n'ai pas participé moi-même au travail du parti et

  4   ainsi je ne peux pas m'exprimer.

  5   M. le Président. – Je comprends bien la façon dont vous nous

  6   répondez Général. Mais quelque chose m'échappe un peu. Est-ce qu'il vous

  7   apparaît, au vu de ces documents, certain que la tendance politique

  8   Kostroman, Kordic était une tendance séparative ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Lorsque j'ai écouté ce qu'a dit

 10   M. Kostroman, je l'ai fait avec grande attention et il me semble qu'à

 11   cette date, le 16 janvier 1992, c'était le cas. Mais je souhaiterais

 12   ajouter qu'il est possible qu'au cours de périodes différentes, des

 13   déclarations différentes aient été données en Bosnie-Herzégovine même.

 14   M. le Président. – Je comprends très bien votre réponse, mais je

 15   voulais m'assurer que quand même nous ne rêvions pas et que quand même ces

 16   documents et cette vidéo

 17   montraient qu'à ce moment-là, dans cette atmosphère certainement

 18   euphorique, la tendance politique représentée par Kostroman, Boban, Kordic

 19   était une tendance séparative -si on se met du côté de la Bosnie-

 20   Herzégovine- ou, au contraire, agrégative si on se met du côté du nouvel

 21   Etat croate.

 22   Ma deuxième question est : est-ce que soit à l'époque, soit

 23   maintenant, vous trouvez que ces propos étaient excessifs ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Je considère que ces propos que

 25   j'ai entendus aujourd'hui étaient excessifs parce qu'à ma connaissance,


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  1   toutes les négociations ont été tenues afin d'assurer la structuration

  2   interne de la Bosnie-Herzégovine.

  3   Et l'interview que nous avons vue de M. Boban, je crois est

  4   intitulée une " Bosnie-Herzégovine libre et indépendante ". J'ai eu le

  5   sentiment que le problème ne résidait que dans l'organisation interne de

  6   la Bosnie-Herzégovine à laquelle auraient dû parvenir les trois groupes

  7   qui constituaient la Bosnie-Herzégovine. Alors y a-t-il eu quelque chose

  8   qui n'était pas officiel ? Je ne sais pas.

  9   M. le Président. - Est-ce que vous, en tant que Croate même,

 10   habitant en Bosnie, est-ce que vous partagez cette opinion qu'un jour la

 11   Bosnie centrale et sa majorité de Croates devraient faire partie d'un

 12   grand Etat de Croatie ? Est-ce que vous, vous partagez cette opinion ?

 13   Est-ce que c'était votre rêve à vous ?

 14   M. Blaskic (interprétation). – Non et j'ai prononcé plusieurs

 15   déclarations. Lorsqu'on m'a posé cette question, je répondais toujours que

 16   nous nous battions pour une Bosnie-Herzégovine libre et souveraine qui

 17   était également notre patrie et dans laquelle les Croates jouiraient de

 18   droits équivalents aux droits des autres, parce que je savais que c'était

 19   impossible.

 20   Les Croates étaient une minorité dans la région. Alors

 21   qu'allait-on faire avec les Musulmans de Konjic, de Gornji Vakuf et les

 22   Musulmans vivants dans ces différentes régions ?

 23   Et peut-être que la situation en 1938 était différente de celles des

 24   années 90 ?

 25   M. le Président. - Quatrième question : est-ce que vous avez le


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  1   sentiment que votre nomination à la tête de la zone opérationnelle émane

  2   plutôt de cette tendance politique que d'une autre tendance politique plus

  3   modérée ?

  4   Vous avez compris ma question ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je vais

  6   tenter d'y répondre. Je crois l'avoir comprise en tout cas.

  7   Je pense qu'étant donné la situation militaire existant en

  8   Bosnie centrale à l'époque, que cela a été la nomination la moins

  9   populaire, le poste le moins populaire, celui de responsable de la zone

 10   opérationnelle. Et moi, on m'a nommé commandant de la zone opérationnelle,

 11   étant donné mon expérience, mes qualités professionnelles et militaires.

 12   M. le Président. - Je ne vous demandais pas si vous aviez été

 13   nommé en raison de vos qualités -nous en sommes bien persuadés depuis

 14   longtemps.

 15   Je vous demandais, c'était ma quatrième question, si la tendance

 16   politique au pouvoir qui a généré, ou favorisé votre nomination, était-

 17   elle celle de M. Boban, Kostroman et Kordic ?

 18   Est-ce que vous avez le sentiment que ces gens qui étaient au

 19   pouvoir civil, à la tête de la toute nouvelle communauté croate de Herceg-

 20   Bosna, est-ce que c'est eux qui ont été à l'origine de votre nomination ?

 21   Est-ce que vous leur devez cette nomination ?

 22   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je ne peux

 23   pas répondre et dire précisément à qui je dois cette nomination. Je ne

 24   sais pas qui m'a proposé. Si je connaissais son nom et son prénom, peut-

 25   être que c'était le colonel Filipovic ; peut-être que c'étaient des


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  1   autorités civiles de la municipalité de Kiseljak qui m'ont nommé au

  2   départ. Mais je suis profondément convaincu que ma nomination, en fait, a

  3   résulté d'un certain potentiel militaire et non pas de qualités

  4   politiques, parce que je n'avais aucune affinité ou aucun souhait

  5   d'ailleurs

  6   de me mêler à la politique.

  7   M. le Président. - Je comprends vous nous l'avez dit , merci de

  8   nous le rappeler.

  9   Cinquième question : est-ce que vous pensez -je retourne la

 10   quatrième question- est-ce que vous pensez que votre nomination aurait pu

 11   se faire sans leur avis ?

 12   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, si je vous

 13   ai bien compris, sans l'opinion de M. Boban et des autres c'est cela ?

 14   M. le Président. - Sans leur opinion ou contre eux. Est-ce que

 15   cela aurait été possible ? Je suppose que non.

 16   M. Blaskic (interprétation). - Je pense également que cela

 17   n'aurait pas été possible, si en tout cas ils y étaient opposés. Mais je

 18   suis le cinquième commandant. J'étais le cinquième commandant en un mois.

 19   Je ne m'attendais pas à durer si longtemps.

 20   M. le Président. - Vous avez répondu de façon précise aux cinq

 21   questions que je vous posais.

 22   Maintenant je vous pose la sixième et la dernière : est-ce que

 23   quand on est un M. Blaskic, qu'on ne partage pas ce genre d'opinion -bien

 24   que l'on soit croate d'origine- est-ce que vous n'avez pas le sentiment

 25   que vous risquez d'être en difficultés avec des politiques qui partagent,


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  1   qui ont plutôt ces opinions ?

  2   Et est-ce que dans la réalité, vous n'allez pas vous retrouver

  3   devant de graves difficultés ?

  4   Avez-vous compris ma question ?

  5   Vous ne partagez pas ce discours sur la Croatie. Vous êtes,

  6   disons, un Croate légitime. Vous croyez en la Bosnie, vous venez de nous

  7   le dire, vous êtes de culture multiculturelle et multiethnique, vous êtes

  8   un libéral. C'est-ce que pratiquement vous nous dites. Voilà les hommes

  9   politiques au pouvoir. Il s'appelle Kostroman, il s'appelle Boban, il

 10   s'appelle Kordic. Votre nomination ne peut pas se faire sans eux. Est-ce

 11   que vous ne vous posez pas la question de savoir, de vous dire : je vais

 12   avoir de graves difficultés. Nous n'avons pas le même objectif.

 13   Vous ne rentrez pas un soir chez vous ou vous ne dites pas à

 14   votre femme : oh, je suis dans une drôle de situation ! Je vais me

 15   retrouver à la tête du plus au haut poste militaire avec des gens comme

 16   ceux-là qui parlent de Croatie, de Bosnie centrale rattachée à la Croatie,

 17   etc.

 18   Ma question est précise. Si vous devez me répondre que vous

 19   allez lutter contre les Serbes… Je le sais que vous allez lutter contre

 20   les Serbes et vous l'avez fait d'ailleurs. Mais je voulais, là, aller au

 21   cœur des interrogations, et savoir : est-ce que vous vous êtes posé ces

 22   questions ou pas du tout ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Je ne me suis pas posé cette

 24   question monsieur le Président. Mais permettez-moi simplement d'ajouter

 25   ceci : je ne connaissais même pas la plupart de ces hommes en 1992.


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  1   J'avais 32 ans. Je suis arrivé dans cette région, en arrivant de la JNA.

  2   J'étais complètement isolé des autorités civiles, alors qu'en Bosnie

  3   centrale la lutte se poursuivait pour la survie.

  4   Moi, c'était ma tâche militaire qui me concernait

  5   principalement, la chute de Jajce notamment. Et si la moindre politique

  6   m'intéressait, c'était la politique de survie que nous devions mener. Par

  7   conséquent, aucun de ces dirigeants ne m'a présenté ce type d'idée

  8   radicale.

  9   M. le Président. - Général, c'est vrai, je vais m'arrêter là.

 10   Vous vous présentez toujours -et c'est vrai je crois- comme un

 11   professionnel accompli. Mais quand on occupe un poste d'état-major aussi

 12   élevé, il me semble qu'on se pose la question de savoir qui sont les

 13   politiques qui vous nomment, il me semble.

 14   Qui m'a fait roi ? Vous connaissez cette célèbre phrase : qui

 15   m'a fait roi ? Vous qui êtes cultivé.

 16   Général Blaskic, qui vous fait roi ? Qui vous fait général en

 17   chef ? Donc vous vous

 18   posez la question certainement de savoir dans quelle galère on vous amène.

 19   M. Blaskic (interprétation). – C'est monsieur Krecimir Jubac (?)

 20   qui m'a nommé colonel ainsi que le conseil Présidentiel qui a pris le

 21   pouvoir après la démission de M. Boban ; c'est-à-dire après la signature

 22   de l'accord de Washington et après tout ce qui s'est produit dans la

 23   sphère politique.

 24   Monsieur le Président, je me suis demandé qui m'a donné la croix

 25   plutôt que qui m'a fait roi, parce que ma tâche principale était de


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  1   parvenir à survivre dans cette situation d'encerclement.

  2   M. le Président. - Je crois que le Juge, M. Rodrigues, va poser

  3   une question.

  4   M. Rodrigues (interprétation). – Général, nous avons ici ce

  5   document 627 : " Le soldat ". Avez-vous jamais lu ce journal ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Parfois cela m'est arrivé, mais

  7   pas à titre régulier. Parfois, quand il me tombait sous la main, je

  8   feuilletais au moins le journal.

  9   M. Rodrigues (interprétation). –  Lisiez-vous d'autres

 10   journaux ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Généralement non parce qu'il n'y

 12   en avait pas. Il y avait quelques publications locales. Une brigade, une

 13   compagnie, un régiment éditaient une gazette, et cela m'était transmis.

 14   Oui je le lisais, mais il n'y avait pas de journaux officiels qui nous

 15   arrivaient dans notre enclave. Donc généralement, je ne lisais pas la

 16   presse.

 17   M. Rodrigues (interprétation). – Y avait-il la télévision ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Très rarement. Moi,

 19   personnellement, pendant assez longtemps, je pense pendant toute

 20   l'année 1993, je n'avais pas de télévision, pas de poste de télévision

 21   dans mon bureau. Je me trouvais dans des bunkers, des caves, des maisons à

 22   moitié détruites. En fait, je peux vous montrer et indiquer chacun des

 23   postes où je me suis trouvé. Rarement j'ai eu l'occasion de regarder la

 24   télévision. Parfois cela m'arrivait si j'avais un moment, mais c'était le

 25   plus souvent les stations locales, donc un programme municipal de la


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  1   télévision municipale de Busovaca et le programme central ne nous

  2   parvenait pas.

  3   M. Rodrigues (interprétation). –  Même dans les bunkers,

  4   parliez-vous avec les personnes qui étaient avec vous sur d'autres choses,

  5   sans être militaires ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Très rarement, très rarement

  7   monsieur le Juge.

  8   M. Rodrigues (interprétation). – Est-ce qu'on doit conclure que

  9   vous étiez dans un bunker, dans la totalité du sens ? C'est-à-dire vous ne

 10   parliez d'autres choses que des choses militaires. Vous ne parliez pas

 11   avec d'autres personnes que des militaires. Vous ne saviez d'autres chose

 12   que de militaires ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - On ne peut pas affirmer des

 14   extrémités, dire que je ne me préoccupais de rien hormis les affaires

 15   militaires. Mais la plupart de mon temps était consacré aux questions

 16   militaires. Toutefois, l'évacuation des blessés, le passage des convois y

 17   étaient compris également ; donc, tout ce qui tenait à la survie et à

 18   notre maintien.

 19   M. Rodrigues (interprétation). – Donc il y avait d'autres

 20   informations qui n'étaient pas militaires. Vous parliez avec d'autres

 21   personnes qui n'étaient pas militaires. Vous aviez diverses sortes

 22   d'informations ?

 23   M. Blaskic (interprétation). – Dans les circonstances où je me

 24   trouvais, les informations qui me parvenaient, elles étaient mesurées par

 25   moi. Je leur attribuais une certaine importance, mais ce qui m'intéressait


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  1   le plus, c'étaient les informations militaires.

  2   M. Rodrigues (interprétation). – Nous regardons la poche. Vous

  3   n'étiez pas seul. Vous aviez 35 000 réfugiés, je ne sais pas combien de

  4   soldats, il y avait d'autres personnes civiles. On peut imaginer un petit

  5   monde et là, il y a beaucoup d'informations qui circulent. Et je crois que

  6   vous étiez atteint par toute cette information.

  7   Ce que je veux dire, c'est cela : imaginez qu'on peut séparer

  8   plusieurs secteurs : un secteur d'information, un secteur d'opinion, un

  9   secteur d'action. Vous aviez plusieurs informations. Je crois que peut-

 10   être vous saviez qu'il y avait des personnes qui défendaient la

 11   perspective dont monsieur le Président a parlé, la perspective

 12   intégrationniste. Il y avait d'autres personnes qui défendaient la

 13   perspective séparatiste. Vous connaissiez peut-être cette différence ou

 14   non ?

 15   M. Blaskic (interprétation). – Je comprends mieux maintenant

 16   votre question, monsieur le Juge. C'est possible qu'il y ait eu ce genre

 17   de prise de position, mais dans l'enclave de la Lasva, notre politique,

 18   c'était celle de la survie.

 19   M. Rodrigues (interprétation). – C'est possible que vous

 20   connaissiez ou vous connaissiez même...

 21   M. Blaskic (interprétation). – A quel sujet ? Pouvez-vous

 22   terminer la question ?

 23   M. Rodrigues (interprétation). – Je vais me répéter. Peut-être

 24   est-ce que je n'étais pas clair. Il y avait certainement des personnes qui

 25   défendaient une perspective intégrationniste. C'est-à-dire du point de vue


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  1   de la Bosnie, il y avait des personnes qui défendaient que la Bosnie

  2   centrale devait appartenir à la Croatie. Peut-être il y avait d'autres

  3   personnes qui défendaient l'autre position. C'était : la Bosnie doit être

  4   un Etat indépendant. Cela arrivait ou non ? Saviez-vous que cela

  5   arrivait ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Au moment où j'étais commandant,

  7   il y a eu toutes sortes d'idées sur l'organisation de la Bosnie-

  8   Herzégovine et j'ai pu entendre diverses positions. J'étais au courant de

  9   ces diversités de position. J'étais informé de cela, du moins pour la

 10   partie qui était importante pour moi.

 11   Je dois dire aussi que c'était une période où il y avait

 12   beaucoup de prises de positions individuelles, à titres individuels, qui

 13   étaient parfois radicales, mais jamais -pour autant que je le sache- elles

 14   n'ont été officielles et...

 15   M. Rodrigues (interprétation). – Il y avait beaucoup

 16   d'informations. Vous connaissiez diverses positions, même si on peut aller

 17   plus loin. On pourrait dire qu'il y avait chaque personne, chaque opinion.

 18   C'était possible.

 19   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, vous savez, je

 20   devais faire face à 35 000 réfugiés. Ce n'étaient pas des individus.

 21   C'étaient des gens désespérés. Eux, ils nous regardaient depuis la vallée.

 22   Depuis la vallée, ils regardaient leurs maisons brûler, incendier. Il y

 23   avait toutes sortes de positions, toutes sortes de points de vue.

 24   C'étaient des gens désespérés.

 25   M. Rodrigues (interprétation). – Ce que je voudrais vous dire,


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  1   c'est qu'il y avait un domaine d'information. Vous aviez beaucoup

  2   d'informations, même au niveau de chaque personne, chaque information.

  3   Si nous passons à un niveau d'opinion, quelle était votre

  4   opinion devant toute cette diversité d'informations ? Etiez-vous partisan

  5   de l'indépendance ? De la scission plutôt. Quelle était votre opinion ?

  6   Je veux arriver à comprendre votre action.

  7   M. Blaskic (interprétation). – Quant à ma position, j'en ai fait

  8   part à tous les interlocuteurs avec qui j'ai eu l'occasion de collaborer

  9   et je l'ai partagée également avec M. Mc Leod qui a déposé ici. Ils m'ont

 10   dit que ma position divergeait de celle de certains responsables locaux.

 11   Ma position était que nous devions cohabiter avec les Musulmans, dans la

 12   région où je me trouvais et où j'avais un certain nombre de pouvoirs.

 13   J'ai fait ce que j'ai pu pour que le commandement conjoint

 14   fonctionne et également, en tant que commandant, en tant que personne qui

 15   se trouvait à la tête du chef d'état-major. J'étais membre de ce

 16   commandement conjoint de la fédération.

 17   M. Rodrigues (interprétation). – Dans le domaine de l'action,

 18   qu'avez-vous fait ? Est-ce que je peux admettre que vous avez défendu dans

 19   la pratique votre opinion ? Votre façon de voir la réalité ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – Quant à ma position, oui, j'ai

 21   essayé de la mettre en œuvre, de la traduire dans les faits.

 22   M. Rodrigues (interprétation). – Merci, Général. Je crois que

 23   vous m'avez aidé.

 24   M. le Président. – Merci, monsieur le Juge. Monsieur le

 25   Procureur.


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  1   M. Kehoe (interprétation). – Pour que cela soit tout à fait

  2   clair, par rapport aux réponses que vous avez données au Juge Rodrigues,

  3   Général, je vous demande la chose suivante : la position politique du HVO,

  4   peu après le moment où vous êtes devenu commandant de la zone

  5   opérationnelle de Bosnie centrale, était d'établir de manière ferme le

  6   pouvoir du HVO ?

  7   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas exactement quelle

  8   était la position politique du HVO à l'époque. Est-ce qu'il fallait

  9   établir très fermement le pouvoir du HVO ou non ? Je sais que quand moi

 10   j'étais le commandant, le HVO et la TO ont bien coopéré. Je considérais

 11   que le HVO faisait partie intégrante des forces armées de Bosnie-

 12   Herzégovine. D'ailleurs, les accords qui ont été signés entre le chef

 13   d'état-major et l'état-major suprême de l'armée de Bosnie-Herzégovine le

 14   confirment.

 15   M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, poursuivons alors,

 16   Général. Voyons qu'elles sont les réunions où vous avez effectivement pris

 17   part, où vous avez participé.

 18   Monsieur le Greffier, je vous demanderai de retirer la

 19   pièce 456/95. Voyons quel est le premier point de l'ordre du jour de cette

 20   réunion.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Général, il s'agit d'un document

 22   dont nous avons déjà parlé longuement. C'est un extrait du compte rendu

 23   d'une réunion qui s'est tenue entre le HVO des municipalités et les

 24   municipalités de Bosnie centrale, à la date du 22 septembre 1992 où vous

 25   êtes présent ainsi que Kordic, Kostroman et Valenta ; vous discutez de la


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  1   situation. Le point 1 de l'ordre du jour est la mise en œuvre des

  2   décisions visant à établir le pouvoir du HVO.

  3   Donc vous, Général, vous étiez bien au courant très tôt, très

  4   tôt au moment où vous prenez le commandement que ces hommes –Kostroman,

  5   Kordic, etc.- visent à réaliser le pouvoir du HVO dans les municipalités

  6   de Bosnie centrale, n'est-ce pas ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Permettez-moi de répondre que

  8   j'ai été convoqué,

  9   invité à cette réunion. C'était ma première réunion où j'étais invité en

 10   temps qu'invité spécial. Moi-même, je suis le seul parmi les présents à ne

 11   pas avoir reçu ni signé ce compte rendu de réunion. Effectivement, c'est

 12   cela qui figure au point 1 de l'ordre du jour : la mise en place du

 13   pouvoir du HVO.

 14   Mais consultons également le point 5 où d'emblée, on voit quelle

 15   était la situation qui prévalait.

 16   Je dois dire qu'en septembre, octobre, sur le plan militaire, nous avions

 17   d'ores et déjà une excellente coopération avec l'armée de Bosnie-

 18   Herzégovine. Le commandement conjoint fonctionnait à Travnik en novembre

 19   et, avant cela, j'ai été à Jajce avec les membres de la TO, avec les

 20   représentants du HOS ; nous avions une excellente coopération dans la

 21   défense de la ville. Il y avait également les représentants du SDR.

 22   Donc, les présents à cette réunion, vraisemblablement, parlaient

 23   de ce qui figure dans la suite à la page 5.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Général, étiez-vous conscient ou

 25   non du fait que le pouvoir politique en Bosnie centrale cherchait à


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  1   établir un contrôle du HVO sur l'ensemble de la Bosnie centrale ? Vous

  2   étiez ou vous n'étiez pas au courant de cela ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Ce que je savais c'était qu'on

  4   essayait d'établir un contrôle personnel et non pas un contrôle, à savoir

  5   en cas où le gouvernement central ne fonctionnait plus, ce gouvernement

  6   devait être réparti d'une part entre le SDA –les représentants bosniaques

  7   musulmans- et d'autre part, devait incomber aux Croates et ce, en fonction

  8   des résultats des élections, pour les pouvoirs civils.

  9   Je n'ai pas participé à ce genre de débat lors de cette réunion,

 10   ni à d'autres réunions mais je savais que c'était une pratique.

 11   M. Kehoe (interprétation). – Donc, le 22 septembre 1992, saviez-

 12   vous que le HVO tentait d'établir son pouvoir dans ces municipalités au

 13   détriment de Musulmans de Bosnie ?

 14   Vous étiez au courant de cela, n'est-ce pas ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Je savais que d'une municipalité

 16   à l'autre ce n'étaient pas les mêmes autorités, le même pouvoir. En août,

 17   une assemblée s'est tenue dans la municipalité de Kiseljak ; les états-

 18   majors de crises fonctionnaient par endroits avec un nombre égal de

 19   participants du côté croate et musulman ; par endroit ou par période il y

 20   a eu partage de pouvoir, puis il y a eu le pouvoir concentré entre les

 21   mains des présidences de guerre, donc c'était un titre individuel ou

 22   personnel.

 23   Les représentants croates d'un côté, les représentants musulmans

 24   bosniens d'autre part détenaient le pouvoir en représentant leurs peuples

 25   respectifs.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Général, au moins Kostroman et

  2   Kordic déployaient des efforts afin d'appliquer ce pouvoir du HVO en

  3   Bosnie centrale. A partir du moment où vous l'avez appris, vous-même, vous

  4   avez nommé ces individus pour qu'ils négocient avec le général Morillon

  5   devant le HVO, en représentant le HVO et ce, pour établir un cessez-le-feu

  6   avec la médiation internationale. N'est-ce pas ?

  7   M. Blaskic (interprétation). – Non, ce n'est pas exact. Ce n'est

  8   pas moi qui ai nommé ces hommes pour qu'ils négocient avec le général

  9   Morillon. C'est totalement inexact. C'est une contrevérité.

 10   Permettez-moi de vous dire que le colonel Sartre -qui était à la

 11   tête du bataillon français- m'a informé qu'une réunion se tiendrait, qui

 12   serait présidée avec le général Morillon et qu'elle réunirait les trois

 13   partis, c'était début octobre. J'ai dit qu'avant qu'une telle réunion

 14   tripartite ne se tienne, une autre réunion réunissant les représentants du

 15   HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine devait se tenir pour accorder nos

 16   positions au sujet de cette initiative. J'ai informé le colonel Sartre, le

 17   chef d'état-major Petkovic en a effet informé. Et dans cette délégation

 18   qui devait se rendre à Sarajevo ont été nommés moi-même, lui, quelques

 19   officiers de l'état-major principal et Ignac Kostroman. Lui, il a été

 20   nommé par le chef du grand état-major

 21   du HVO.

 22   Avant la réunion convoquée par le général Morillon, nous nous

 23   sommes réunis dans le bâtiment de la présidence d'Etat à Sarajevo. Nous

 24   avons rencontré les hauts représentants politiques et militaires de

 25   Bosnie-Herzégovine, des bosniaques de Bosnie ; je pense que c'était


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  1   M. Kanic qui était à leur tête, M. Halilovic ainsi que Stjepan Siber.

  2   A l'issue de cette réunion, nous nous sommes rendus à la réunion

  3   tripartite à l'aéroport de Sarajevo. Quant à M. Kordic, lui-même a été

  4   nommé a posteriori dans cette délégation.

  5   Lorsqu'il y a eu attaque sur Travnik -et c'était en

  6   novembre 1992- au moment où vu la situation militaire je ne pouvais pas me

  7   rendre à ces réunions. Donc Kordic y a participé lorsque moi, je ne

  8   pouvais pas m'y rendre parce que la chute de la ville de Travnik était

  9   imminente. Presque toujours les dates de ces réunions coïncidaient avec

 10   les attaques serbes qui étaient au courant de ces réunions.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Je vais vous présenter un document,

 12   Général.

 13   M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce de l'accusation 628 et 628 a)

 14   pour la version anglaise.

 15   M. Kehoe (interprétation). - Ce document a été envoyé par

 16   communication, par paquet n'est-ce pas ?

 17   Avez-vous entendu ma question, Général ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – J'étais en train de lire le

 19   document, je n'ai pas entendu votre question.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Je vous demande si c'est bien un

 21   document qui a été envoyé par communication, par paquet ?

 22   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est cela ce document a été

 23   envoyé par paquet.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Nous n'avons pas une version

 25   française, je le regrette, monsieur le Président ; je lirai lentement en


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  1   anglais. Il existe, bien entendu, une version en BCS pour le témoin.

  2   Il s'agit de la zone opérationnelle de Bosnie centrale le

  3   10 novembre 1992 à 22 h 00 ; c'est le poste de commandement avancé envoyé

  4   à Mostar, Grude via Bugojno, Gornji Vakuf, le commandant en chef du HVO…

  5   commandant ou chef du département de la défense.

  6   1. En relation avec les pourparlers que le

  7   général Morillon a eu avec les représentants de la partie

  8   serbe, une invitation officielle est envoyée pour une réunion

  9   de haut niveau avec les hommes politiques du HVO le plus tôt

 10   possible.

 11   2. Proposition serbe le 11 novembre 1992

 12   vraisemblablement à l'aéroport de Sarajevo ou que nous le

 13   proposions en Bosnie centrale, Kiseljak-Busovaca-Vitez.

 14   3. Le représentants de la partie serbe est

 15   M. Koljevic.

 16   4. Sujet des pourparlers : cessez-le-feu

 17   immédiat à Mostar ;

 18   Je suggère que notre parti soit représenté par le vice-Président

 19   de HZ-HB, M. Dario Kordic et son secrétaire Ignac Kostroman.

 20   5. Je vous demande d'envoyer une autorisation

 21   et une approbation sur la participation à cette réunion ou

 22   bien faut-il le refuser ?

 23   6. Cette réunion sera présidée par le

 24   général Morillon.

 25   7. Je dois recevoir la réponse au plus tard à


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  1   9 h 00 le 11 novembre 1992 et la transmettre au

  2   général Morillon, commandant colonel Blaskic reçu le

  3   10 novembre 1992 à 23 h 55.

  4   Et puis une abréviation suit.

  5   Général, vous l'avez envoyé ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Oui bien entendu. On voit ici que

  7   j'ai eu un entretien, et je sais que le 5 novembre j'ai participé à une

  8   réunion à Sarajevo. J'y étais même avant à partir du 23 octobre 1992. J'ai

  9   assisté à toutes les réunions tripartites qui ont été réunies par le

 10   général Morillon qui présidait ces réunions. Et à ces réunions qui avaient

 11   leur contenu, leur ordre du jour, je représentais le HVO, y compris à la

 12   date du 5 novembre 1992.

 13   Et je crois que, comme cela est dit dans ce document, que sur la

 14   base des entretiens avec le général Morillon, cette convocation a été

 15   lancée et les informations que j'ai reçues de la part de M. le Général, je

 16   les ai transmises à Mostar. Il est dit ici d'ailleurs " via Gornji

 17   Vakuf ".

 18   Il ressort des points 2 et 3 que j'ai envoyé les informations

 19   que j'avais reçues, ainsi que le sujet des entretiens. Et je propose un

 20   représentant qui pourrait assister à cette réunion. Je ne sais pas si ma

 21   proposition a été retenue ou non.

 22   Mais, comme il s'agit ici d'une réunion qui doit se tenir dans

 23   la région de Bosnie centrale, et vu les aspects techniques concernant

 24   l'arrivée des participants, j'ai proposé ces hommes-là puisque Kostroman

 25   avait participé à toutes les réunions tripartites précédentes qui avaient


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  1   été présidées par le général Morillon. J'ai donc dit qu'à cette réunion le

  2   général Morillon présiderait également et que je devais recevoir la

  3   réponse avant 9 h 00, à la date du 11 novembre 1992 et que je devais

  4   présenter cette réponse au général Morillon.

  5   Je ne suis pas tout à fait sûr, mais je pense que le 12 novembre

  6   -puisque ces réunions se tenaient tous les sept jours- je pense que le

  7   12 novembre à Sarajevo une réunion tripartite s'est tenue qui a été

  8   présidée par le général Morillon, ou peut-être par le général Cordy-

  9   Simpson. Car en l'absence du général Morillon, c'est Cordy-Simpson qui

 10   présidait ces réunions.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, Général, pour en

 12   revenir à ma première question, après avoir appris que Kostroman et Kordic

 13   souhaitaient établir un contrôle du HVO sur ces municipalités, après avoir

 14   appris qu'il s'agissait-là de leur programme politique, néanmoins, vous

 15   les avez nommés afin qu'ils participent à différentes réunions ?

 16   Vous nous avez dit que vous ne l'avez pas fait, mais en fait

 17   vous l'avez bel et bien fait, n'est-ce pas ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Non, c'est inexact.

 19   Vous m'avez posé une question. Vous m'avez demandé qui avait nommé

 20   M. Kostroman et qui lui avait demandé d'assister aux réunions et j'ai

 21   compris qu'il s'agissait des réunions de Sarajevo, comme vous me l'avez

 22   demandé d'ailleurs pour M. Kordic. Il ne s'agit pas de nomination, c'était

 23   simplement une proposition. Et comme je l'ai dit à la Chambre, après cela,

 24   outre cela, Kostroman a participé à certaines réunions à partir du

 25   23 octobre 1992. Mais il n'a pas été nommé par moi, mais par le chef du


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  1   grand état-major. Je n'ai pas proposé sa candidature à ce moment-là, je ne

  2   l'ai pas nommé.

  3   Par conséquent, il était déjà à ces réunions et certains

  4   documents le montrent.

  5   M. Koljevic d'ailleurs n'est pas un soldat. Et j'aurais proposé

  6   qu'il s'agisse d'une personne militaire, quelqu'un qui venait de la

  7   branche militaire du HVO. Et si du côté serbe, cela avait été le

  8   général Guero qui avait participé à ces réunions, à ce moment-là, j'aurais

  9   proposé quelqu'un de militaire du HVO.

 10   A l'époque également, une certaine réunion était tenue à

 11   Sarajevo, réunion à laquelle participaient toutes les parties. C'était à

 12   l'époque où le commandement conjoint fonctionnait en novembre 1992. C'est

 13   ce moment-là d'ailleurs qu'il a commencé à fonctionner sur une décision de

 14   M. Bojo Rajic (?), le ministère de la Défense.

 15   M. Kehoe (interprétation). – Passons maintenant à la pièce 95

 16   dont j'ai demandé qu'elle vous soit soumise, la pièce 459/95. On y voit

 17   certaines observations qui sont valables pour toute la municipalité

 18   provenant de M. Kostroman, Valenta et Kordic.

 19   Voyez-vous cette partie du document, Général ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – Oui, je la vois à la page 5.

 21   M. Kehoe (interprétation). - A peu près au milieu, n'est-ce

 22   pas ? Je vais vous la lire.

 23   A peu près au milieu, je vais vous lire ces observations,

 24   document de la présidence en place :

 25   " Le Gouvernement exilé de Bosnie-Herzégovine et ses entités


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  1   présentant des politiques pro-musulmanes ne sont pas désirés sur notre

  2   territoire et leurs activités potentielles risquent d'être contraires aux

  3   principes des entités du HDZ. Or ces activités ne seront pas tolérées. "

  4   Général, il s'agissait-là de la position politique maintenue,

  5   même lorsque vous avez nommé -et je souligne bien le terme nommé-,

  6   Kostroman et Kordic afin qu'ils se rendent à ces réunions.

  7   M. Blaskic (interprétation). - Ce n'était pas là une position

  8   politique officielle. C'est ce qui est dit sur ce papier, mais dans la

  9   pratique ce n'était pas vrai, car c'est un document à la date du mois de

 10   septembre. Et il y a eu une conférence de presse du ministère de la

 11   République de Bosnie-Herzégovine, je crois, le 3 novembre 1992, conférence

 12   de presse qui a eu lieu à Busovaca.

 13   Il y a eu également d'autres réunions officielles. Le Premier

 14   ministre de la Bosnie-Herzégovine était Mile Akmadzic ou Jure Pelivan, je

 15   ne sais plus très bien.

 16   Du côté croate, je dirai également qu'il y avait également des

 17   gens tels que M. Franjo Boras qui ont participé à ces réunions. Il y était

 18   d'ailleurs en temps qu'invité. Il était membre des commandements suprêmes

 19   des forces armées, également de la présidence de guerre de Bosnie-

 20   Herzégovine. C'est ce qui est dit dans ce document, dans la partie que

 21   vous venez de lire. Mais sur le terrain, la situation était toute

 22   différente.

 23   M. Kehoe (interprétation). - Restons un instant avec

 24   Franjo Boras. Franjo Boras défendait l'idée du partage de la Bosnie-

 25   Herzégovine et de l'absorption d'une certaine partie de cette Bosnie-


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  1   Herzégovine dans la République de Croatie, n'est-ce pas ?

  2   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas qu'elle était

  3   suffisamment sa position politique pour pouvoir m'exprimer. Moi je parle

  4   simplement du moment où j'étais présent au cours de la réunion et où se

  5   trouvait également Franjo Boras. Je me souviens bien de ce qu'il a dit le

  6   26 mars 1993 à Zenica, par exemple.

  7   Pour ce qui est des activités de Franjo Boras lorsqu'il

  8   travaillait dans la Présidence de la Bosnie-Herzégovine, je ne pourrais

  9   pas vous le dire en détail, car je n'avais que très peu de contact avec

 10   lui.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Vous saviez bien que M. Boras

 12   s'était entretenu avec M. Koljevic du côté serbe, et qu'il avait mis sur

 13   pied un plan visant au partage de la Bosnie-Herzégovine et du déplacement

 14   de populations musulmanes habitant dans les régions concernées. N'est-ce

 15   pas ? Vous le saviez ?

 16   M. Blaskic (interprétation). – Que Franjo Boras s'était

 17   entretenu avec Franjo Koljevic ? Je n'avais pas ce type d'informations,

 18   notamment à l'époque. Peut-être qu'il y a eu effectivement ce type de

 19   rencontres, mais je voudrais souligner, une fois de plus, que j'avais des

 20   informations officielles qui me parvenaient, des positions officielles.

 21   Peut-être, qu'effectivement, des réunions de ce type ont eu lieu

 22   mais je n'en avais pas connaissance et Franjo Boras ne m'en a jamais

 23   parlé.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Nous reviendrons à la politique

 25   proposée par Franjo Boras plus tard.


Page 19971

  1   Nous parlons de Kostroman, n'est-ce pas ? Et nous parlons de

  2   discours prononcé le 16  janvier. Il dit vers la fin du discours, je

  3   crois : " J'aimerais souligner encore une chose. Peut-être qu'il n'y aura

  4   pas de conflit dans nos régions si nous réussissons à parvenir à des

  5   accords entre frères afin que nous renforcions les frontières de l'Etat de

  6   Croatie de façon pacifique, et si nous n'y parvenons pas, eh bien il

  7   faudra défendre les frontières de cet Etat, de tous les Etats et notamment

  8   ces frontières-ci. Nous sommes la meilleure garantie de cette défense. "

  9   Alors Général, en se fondant sur ces propos, pensez-vous que

 10   Kostroman était en train de défendre l'idée d'une opération militaire,

 11   afin de défendre l'objectif qui était, à l'époque, d'intégrer la Bosnie

 12   centrale en Croatie ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Vous me parlez de décision, mais

 14   il s'agit-là d'une expression personnelle. Il dit : j'affirme, je

 15   soutiens, c'est une opinion personnelle qu'il exprime là.

 16   D'autre part, je ne peux pas faire de commentaire sur des

 17   hypothèses parce que je ne pourrais que spéculer sur la position ou ce

 18   qu'il avait derrière la tête, à ce moment-là.

 19   A l'époque, effectivement, il y avait l'armée populaire

 20   yougoslave qui se situait dans la région. C'était la seule force armée en

 21   Bosnie-Herzégovine. Par conséquent, il aurait pu envoyer ce type de

 22   message notamment à la JNA et ses composantes ainsi qu'aux membres de tous

 23   les autres groupes qui s'opposaient à cette idée qui était la sienne.

 24   Je pense que ce n'était pas là l'expression d'une position

 25   officielle.


Page 19972

  1   En tout cas cette idée ne m'a pas été communiquée par mes

  2   supérieurs.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Général, soyons clairs ! Lorsque

  4   vous étiez en Bosnie centrale, quelles étaient les obligations et les

  5   responsabilités de Kordic en tant que représentant politique ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas, je ne sais pas.

  7   Si vous me demandez quelles étaient mes obligations et mes

  8   responsabilités, je serais tout à fait près à vous répondre. Mais quant

  9   aux siennes, je n'en sais rien. Je sais qu'il était vice-Président de la

 10   communauté croate de Herceg-Bosna et qu'il était membre du HDZ, et qu'à un

 11   certain moment il a été vice-

 12   président.

 13   Mais quelles étaient ses responsabilités et ses obligations en

 14   tant que président ? Je n'ai jamais assisté à aucune réunion de ce parti

 15   et je n'étais pas membre de ce parti et je ne peux pas vous dire quelles

 16   étaient ses obligations et ses responsabilités. Je peux vous donner les

 17   miennes si vous voulez, mais les siennes, non.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Nous pouvons faire une pause

 19   maintenant, si vous le voulez bien.

 20   M. le Président. - Nous suspendons pour 20 mn.

 21   (La séance suspendue à 15 h 45 est reprise à 16 h 05.)

 22   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je vous

 23   prie de m'excuser, mais si vous m'en donniez la possibilité, j'aimerais

 24   parler quelques instants du document 628 que j'ai réussi à lire en entier

 25   pendant la pause.


Page 19973

  1   M. le Président. – Allez y !

  2   M. Blaskic (interprétation). – Merci, monsieur le Président.

  3   Au point 1 de ce document, nous constatons que le

  4   général Morillon a envoyé la convocation à cette réunion à laquelle

  5   devaient participer des représentants politiques du plus haut niveau, et

  6   que le sujet était le cessez-le-feu de Mostar à ce moment-là. Et qu'il y

  7   avait aussi une proposition pour que M. Koljevic participe au nom des

  8   Serbes. Il était Vice-Président.

  9   Je pense que c'est pour cette raison que j'ai moi-même proposé

 10   que M. le Vice-Président Dario Kordic représente la communauté croate de

 11   Herceg-Bosna puisqu'il était au même niveau politique que M. Koljevic.

 12   J'ajouterai simplement que cette réunion devait être présidée

 13   par le général Morillon et qu'une réponse aurait dû me parvenir le

 14   11 novembre déjà, c'est-à-dire au cours de la nuit.

 15   M. le Président. – Bien, merci Général Blaskic. Le Tribunal

 16   apprécie que vous

 17   ayez donc apporté des précisions qui paraissaient souhaitables pour votre

 18   défense.

 19   Monsieur le Procureur, nous passons à un autre sujet ou bien

 20   nous restons sur le même sujet ?

 21   M. Kehoe (interprétation). – Encore quelques questions,

 22   monsieur le Président, sur ce même sujet. J'aimerais que nous reprenions

 23   nos débats en parlant de ce qu’a dit le Général au sujet des déclarations

 24   publiques de M. Kordic et M. Kostroman ; au sujet de questions ethniques

 25   ou même, peut-on dire, racistes.


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  1   Je reformule donc ma question : Général, avez-vous jamais

  2   entendu Dario Kordic formulait des affirmations en public qui étaient

  3   dénigrantes à l'égard des personnes d'appartenance ethnique musulmane ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – Il me semble que j'aurais le plus

  5   grand mal à déterminer les dates de ces discours car nous sommes en train

  6   de parler du mois de novembre 1992. Nous avons aussi parlé de janvier 1992

  7   et il y a eu pas mal d'événements sur le territoire de Bosnie-Herzégovine

  8   qui impliquaient des hommes politiques locaux et autres. Je l'ai entendu

  9   parler avec peut-être plus d'émotion que d'habitude au sujet d'un certain

 10   nombre de dirigeants des Musulmans bosniens.

 11   Il est possible que de temps à autres, il ait fait des remarques

 12   inacceptables comportant un certain degré de ce que vous venez d'évoquer.

 13   Mais ce qu'il disait n'était pas -à mon avis- quelque chose qui nous

 14   liait. Ce qui nous liait -me semble-t-il- c'étaient les documents

 15   officiels de la communauté croate de Herceg-Bosna et les ordres liés à ces

 16   documents.

 17   Moi, en tout cas personnellement, je n'ai pas vu de

 18   comportements racistes de sa part.

 19   M. Kehoe (interprétation). – L'avez-vous entendu dire que la

 20   Bosnie-Herzégovine allait cesser d'exister par exemple ?

 21   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, voilà où est le

 22   problème. De quelle Bosnie-Herzégovine parlons-nous ? Le 16 janvier 1992,

 23   voyez-vous, la Bosnie-Herzégovine a effectivement cessé d'exister, mais la

 24   République socialiste de Bosnie-Herzégovine faisant partie de la

 25   République socialiste fédérative de Yougoslavie est celle qui a cessé


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  1   d'exister. Il y avait un processus qui était en cours. C'est cette

  2   République qui a cessé d'exister en tant que telle puisque c'est la

  3   République de Bosnie-Herzégovine qui a été créée à l'issue du référendum.

  4   Donc, peut-être y a-t-il eu des déclarations de sa part allant

  5   dans ce sens, mais monsieur le Procureur, je ne sais pas exactement de

  6   quelle date vous parlez.

  7   M. le Président. - Soyez plus direct, monsieur le Procureur.

  8   Quand vous avez une idée que vous voulez démontrer –ce qui est tout à fait

  9   votre droit-, allez-y directement. Là, on tourne autour de ce que pense

 10   M. Kordic. Si vous avez un fait, vous pouvez dire tout simplement au

 11   témoin : vous n'êtes pas sans ignorer que M. Kordic tenait des propos… Le

 12   témoin vous répond oui ou non et vous donnez vos documents. Sinon, on ne

 13   s'en sortira pas.

 14   Essayons d'avancer.

 15   M. Kehoe (interprétation). – Oui, monsieur le Président. Je

 16   propose qu'un nouveau document soit soumis au témoin.

 17   M. Abtahi. – Il s'agit de la pièce de l'accusation 629 et

 18   629A a) pour la version anglaise.

 19   M. Kehoe (interprétation). – Général, il s'agit d'un article de

 20   presse émanant du parti d'action démocratique, le SDA de Vitez, en date du

 21   2 février 1993, signé par le conseil exécutif de Vitez. J'aimerais que ce

 22   texte soit placé sur le rétroprojecteur.

 23   Je lis le texte, je cite : " Au cours d'un entretien avec

 24   Dario Kordic, Vice-Président de ce que l'on appelle la communauté croate

 25   de Herceg-Bosna, interview diffusée à la télévision de Herceg-Bosna le


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  1   1er février 1993 à Vitez, il a été déclaré entre autre que les Musulmans

  2   et la Bosnie-Herzégovine allaient cesser d'exister. L'affirmation de

  3   Dario Kordic

  4   arrive précisément au moment où nous faisons de gros efforts pour

  5   surmonter tous les problèmes par des moyens pacifiques et à l'aide de

  6   pourparlers concrets qui se tiennent au sujet de la création d'un

  7   gouvernement conjoint et d'un ministère de l'Intérieur, MUP, unique et ces

  8   déclarations entravent le cours de ces pourparlers.

  9   Le peuple musulman de la municipalité de Vitez est rendu amère

 10   par cette déclaration qui lui rappelle une déclaration identique émanant à

 11   une certaine époque du criminel de guerre Radovan Karadzic au Parlement de

 12   Bosnie-Herzégovine. Nous allons transmettre cette déclaration aux agences

 13   de presse étrangères et aux organes des Nations unies compétents pour

 14   montrer qui provoque les hostilités en Bosnie centrale.

 15   Nous en appelons au peuple croate pour prendre ses distances en

 16   public par rapport à des déclarations aussi enflammées de la part des

 17   extrémistes du peuple croate, afin de pouvoir continuer la construction

 18   d'une vie commune et d'un esprit communautaire unissant les deux peuples

 19   de la région. "

 20   C'est signé par le conseil exécutif du SDA de Vitez. Fin de

 21   citation.

 22   Général, conviendrez-vous certain que Kordic faisait des

 23   déclarations enflammées dans lesquelles il disait que les Musulmans et la

 24   Bosnie-Herzégovine allaient cesser d'exister.

 25   M. Blaskic (interprétation). - Permettez-moi de lire ce


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  1   document. C'est la première fois que je le vois. Je n'ai pas eu la

  2   possibilité de le lire avant. Je n'étais pas dans la région de Vitez

  3   en 1993, le 2 février.

  4   (Le témoin lit le document)

  5   Je n'ai pas retenu votre question pourriez-vous la répéter ?

  6   M. Kehoe (interprétation). - Ma question était la suivante :

  7   cette déclaration de Kordic, selon laquelle les Musulmans et la Bosnie-

  8   Herzégovine allaient cesser d'exister est une déclaration très enflammée,

  9   n'est-ce pas ?

 10   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président,

 11   messieurs les Juges, il est dit ici que cette déclaration a été faite en

 12   février 1993, c'est-à-dire au cours du conflit ou à la suite du conflit du

 13   mois de janvier.

 14   Bien entendu, une telle déclaration ne peut que susciter

 15   quelques inquiétudes chez ceux qui l'ont entendue. Mais à la lecture de ce

 16   document, on constate combien il y a eu de changements au cours du

 17   conflit. A Vitez il était question de créer un gouvernement conjoint et un

 18   MUP unique. Je suppose qu'il est question des pourparlers impliquant les

 19   représentants croates et les représentants musulmans bosniens, au cours de

 20   cette première partie du conflit opposant l'armée de Bosnie-Herzégovine et

 21   le HVO ?

 22   A cette époque, la municipalité était celle de Busovaca et moi je me

 23   trouvais à Kiseljak. J'étais coupé du reste de la région. Mais j'ai

 24   participé à cette réunion qui s'est tenue à la base des Nations Unies.

 25   Alors je ne peux que lire ce que je lis dans cette déclaration écrite.


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  1   S'il a effectivement été dit que les uns et les autres allaient

  2   disparaître, allaient cesser d'exister, ce n'est pas une déclaration qui a

  3   de bonnes intentions, mais il n'existe pas de documents officiels prouvant

  4   qu'il s'agit-là d'une position officielle du HVO.

  5   Et je n'ai reçu à aucun moment le moindre ordre allant dans ce

  6   sens.

  7   M. Kehoe (interprétation). - Général, cette affirmation, cette

  8   déclaration selon laquelle la Bosnie-Herzégovine allait cesser d'exister

  9   correspond bien aux déclarations faites précédemment par Kordic et

 10   Kostroman, eu égard à la division de la Bosnie et au fait qu'une partie de

 11   la Bosnie centrale allait être intégrée en tant que partie intégrante de

 12   la Croatie, n'est-ce pas ?

 13   M. Blaskic (interprétation). – Le problème est plus complexe que

 14   cela, monsieur le Président, messieurs les Juges. Nous avons vu, il y a

 15   quelques instants, une cassette datant du 16 janvier 1992, date à laquelle

 16   l'Etat de Bosnie-Herzégovine n'existait pas encore.

 17   Puis nous avons sauté une certaine période, la période de

 18   création de cet Etat de Bosnie-Herzégovine. Je ne suis pas un expert en la

 19   matière mais je sais que c'est par un référendum que la Bosnie-Herzégovine

 20   a été proclamée.

 21   Puis nous avons encore sauté la période pendant laquelle la

 22   Bosnie-Herzégovine a vécu une agression de la part de forces armées

 23   déterminées et maintenant nous sautons encore une autre période, celle du

 24   conflit du mois de janvier 1993 ainsi que la signature d'un cessez-le-feu

 25   entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine. Aujourd'hui, je vois ce


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  1   papier pour la première fois

  2   Je le lis et on m'appelle à faire des commentaires et à tirer des

  3   conclusions sur la base de ce document. Donc il y a des sauts dans le

  4   temps qui sont très importants et qui distinguent des situations très

  5   différentes sur le plan militaire. Notamment, car il y avait des périodes

  6   où nous avions une bonne coopération avec l'armée de Bosnie-Herzégovine,

  7   des périodes où le conflit a commencé entre HVO et armée de Bosnie-

  8   Herzégovine, des périodes où l'Etat de Bosnie-Herzégovine existait,

  9   d'autre où elle n'existait pas.

 10   M. le Président. - Je partage là l'avis du témoin. Il faut faire

 11   attention quand on met en regard des morceaux de déclarations, évidemment.

 12   Par ailleurs, il y avait tout un contexte qui se déroulait

 13   militaire, politique, diplomatique. Donc c'est toujours un peu délicat que

 14   de présenter ces éléments les uns à la suite des autres, comme s'ils

 15   étaient dans une séquence ininterrompue.

 16   Vous avez d'autres documents monsieur le Procureur ? Nous sommes

 17   toujours dans le volet politique je suppose, puisque j'essaie un peu de

 18   recentrer. Vous êtes toujours dans ce que vous estimez être…

 19   M. Kehoe (interprétation). - Oui monsieur le Président.

 20   M. le Président. - Dans ce que vous estimez être l'adhésion

 21   politique du témoin, thèse j'allais dire sécessionniste en quelque sorte.

 22   Alors avançons s'il vous plaît.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Oui, monsieur le Président.

 24   Général, revenons si vous le voulez bien, au mois de janvier  992, après

 25   la réunion, peu de temps avant, quelques mois avant votre retour en Bosnie


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  1   centrale.

  2   Je vous demanderai d'examiner un autre document et ce faisant,

  3   de vous demander si l'un des participants était Josip Boro, l'homme que

  4   vous avez rencontré dans la municipalité de Kiseljak, à votre retour au

  5   mois d'avril.

  6   Je demanderai que ce document que j'ai entre les mains soit

  7   distribué.

  8   M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce de l'accusation 630 et 630 a)

  9   pour la version anglaise.

 10   M. Kehoe (interprétation). - Général, ce document est un extrait

 11   de procès-verbal d'une réunion tenue le 27 janvier 1992 par la communauté

 12   sous régionale de Herceg-Bosna, de Travnik. Elle est signée par

 13   Ignac Kostroman et Dario Kordic. Je vous demande si l'un des participants

 14   à cette réunion était Josip Boro. Lisez bien toute la page.

 15   M. le Président. - Si vous en êtes sûr, monsieur le Procureur,

 16   ce n'est pas la peine de poser la question au témoin. Nous constatons que

 17   Josip Boro, Président de Kiseljak, était parmi les représentants.

 18   Nous perdons du temps, il vous manquera du temps. A la fin vous

 19   savez qu'il vous en manquera ?

 20   M. Kehoe (interprétation). - Je comprends monsieur le Président.

 21   M. le Président. - Si le témoin conteste la participation de

 22   Josip Boro, on verra bien. Donc M. Boro participait à la réunion.

 23   Maintenant vous posez votre question.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Oui monsieur le Président.

 25   Josip Boro, c'est l'homme que vous avez rencontré pour la


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  1   première fois à votre retour à Kiseljak, au cours de la deuxième semaine

  2   d'avril 1992 ?

  3   M. Blaskic (interprétation). – Oui, il était Président de la

  4   municipalité de Kiseljak, du Parlement municipal de Kiseljak.

  5   M. Kehoe (interprétation). - J'appelle votre attention sur le

  6   bas de la page 2 de ce document et le haut de la page 3 dont je vais

  7   donner lecture, puisque ce document ne comporte pas de version française.

  8   Excusez-moi monsieur l'Huissier, il s'agit du paragraphe 2, en

  9   version anglaise un peu plus haut. Voilà.

 10   Paragraphe 2, je cite : " La présidence de Herceg-Bosna est

 11   appelée et invitée à proclamer la décision de l'assemblée de Bosnie-

 12   Herzégovine qui considère le référendum comme illégitime car il ne reflète

 13   pas l'attitude réelle du peuple croate dans ces régions. Elle est invitée

 14   également à organiser un référendum destiné aux citoyens de Herceg-Bosna ,

 15   aux fins de demander à ces citoyens quels sont leurs voeux quant à la

 16   possibilité de rejoindre les zones croates de la République de Croatie.

 17   Ceci est recommandé pour la communauté croate de Posavina. "  Fin de

 18   citation.

 19   M. Nobilo (interprétation). - Excusez-moi, monsieur le

 20   Président, il y a un petit problème d'interprétation. C'est la première

 21   chose, à savoir qu'en langue croate il a été dit que la présidence de

 22   Herceg-Bosna demande que le référendum soit considéré comme illégitime

 23   alors qu'il est écrit dans le texte que ce groupe, ces gens demandent à la

 24   présidence de Herceg-Bosna de proclamer le caractère illégitime du

 25   référendum. Donc, voilà, c'était un problème d'interprétation.


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  1   Deuxièmement, mais…

  2   M. Kehoe (interprétation). - C'est ce qui est dit dans le texte,

  3   Maître.

  4   M. Nobilo (interprétation). - Mais l'interprétation croate était

  5   différente. Donc c'était la première chose. Et deuxièmement, j'aimerais

  6   que l'on accorde quelque temps au témoin pour qu'il lise le document avant

  7   de passer à la question, car un document doit toujours

  8   être considéré dans sa totalité.

  9   M. Kehoe (interprétation). – Eh bien c'est la méthode qui a été

 10   utilisée par la défense tout au long de l'interrogatoire principal, le

 11   fait de mettre en exergue un point particulier que la défense souhaitait

 12   discuter.

 13   A présent, si le témoin veut lire intégralement tous les

 14   documents, nous serons là dans très longtemps encore.

 15   M. le Président. - Il n'en est pas question. C'est vous qui

 16   dirigez le contre-interrogatoire. J'aimerais bien par contre que la cabine

 17   me retraduise le paragraphe 2 litigieux. La cabine a le texte serbo-

 18   croate, je suppose ?

 19   Une interprète. – Non, le texte anglais monsieur le Président.

 20   M. le Président. - Si on pouvait avoir le texte serbo-croate et

 21   qu'on essaie de traduire à partir de ce texte ?

 22   Maître Nobilo, pouvez-vous lire ce paragraphe 2. Vous le lisez

 23   lentement. Je voudrais avoir la traduction par les interprètes.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Je peux essayer de lire. On voit

 25   très mal le texte sur le rétroprojecteur.


Page 19983

  1   Je lis : " Il est demandé à la présidence de Herceg-Bosna de

  2   déclarer la décision de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, au sujet du

  3   référendum, de la déclarer illégitime car elle ne représente pas la

  4   position réelle des Croates vivants dans ces régions, et il est demandé

  5   d'organiser un référendum permettant au citoyen de Herceg-Bosna de se

  6   prononcer sur la création de ces Banovina et de leur adhésion à la

  7   République de Croatie. "

  8   M. le Président. - Il y a le mot Banovina. C'est le mot qui est

  9   employé ?

 10   Une interprète. - La même chose étant recommandé pour la

 11   communauté croate de Posavina.

 12   M. le Président. - J'ai entendu le mot de Banovina. Je me tourne

 13   vers la cabine.

 14   Une interprète. - L'interprète a attendu Banovina.

 15   M. le Président. – L'interprète a entendu Banovina.

 16   M. Nobilo (interprétation). – Oui, oui à un endroit il est fait

 17   référence aux banovina.

 18   Il est dit les régions croates de la Banovina.. Donc des régions

 19   qui font parti des Banovine.

 20   Et à la fin, il est recommandé que la même chose soit faite pour

 21   la communauté de Posavina . C'est une communauté croate qui est au nord.

 22   M. le Président. - Je crois que maintenant peut-être le témoin a

 23   lu le texte.

 24   Général Blaskic, avez-vous lu le texte ?

 25   Je demande au Procureur de vous poser la question.


Page 19984

  1   M. Blaskic (interprétation). – Oui, monsieur le Président.

  2   M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, nous allons

  3   faire corriger cette traduction car, manifestement, la traduction n'est

  4   pas complète.

  5   Général, quand vous avez rencontré Josip Boro, au cours du mois

  6   d'avril ou plutôt, excusez-moi, au cours de la deuxième semaine du mois

  7   d'avril 1992, Josip Boro vous a-t-il informé qu'il allait représenter les

  8   intérêts de la communauté croate de Herceg-Bosna dans des réunions de ce

  9   genre où il était préconisé de rejoindre, d'adhérer à la Banovina. Vous en

 10   a-t-il informé ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Non, il ne m'a pas informé de

 12   cela. Je n'ai jamais vu jusqu'à aujourd'hui ce document, et je n'ai pas

 13   été informé jusqu'à la date d'aujourd'hui, de cette exigence exprimée le

 14   27 janvier 1992.

 15   A ce moment-là, je n'étais pas présent sur le territoire de la

 16   Bosnie centrale et, à ce moment-là, je n'avais pas fait la connaissance de

 17   Josip Boro.

 18   Je parle donc du moment où se sont déroulés ces événements. Je

 19   constate qu'il est

 20   question ici de la communauté régionale de Travnik et que cette demande

 21   est adressée à cette communauté. Mais je dois dire que, pour autant que je

 22   le sache -et je dis bien je m'appuie sur mes connaissances pour dire ce

 23   que je dis- un tel référendum n'a pas existé.

 24   M. Kehoe (interprétation). – Donc, vous dites dans votre

 25   déposition que Josip Boro ne vous a jamais fait part des vœux qu'il


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  1   nourrissait pour la Bosnie centrale, ces vœux consistant à souhaiter que

  2   la Bosnie centrale rejoigne la République de Croatie. C'est ce que vous

  3   dites, n'est-ce pas ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – Vous m'avez posé une question -si

  5   j'ai bien compris- qui portait sur le document que j'ai entre les mains.

  6   Peut-être n'ai-je pas bien compris votre question ? Je dis que,

  7   personnellement, Josip Boro ne m'a donné aucune information quant à sa

  8   participation à une telle réunion. Je n'ai jamais entendu de la bouche de

  9   Josip Boro quoi que ce soit qui puisse être relié au document que j'ai

 10   entre les mains.

 11   Quant à l'adhésion à la République de Croatie, je ne sais pas de

 12   quelle période nous sommes en train de parler. Mais si je m'appuie sur mes

 13   souvenirs, si j'essaie de me rappeler, je suis dans l'incapacité de me

 14   rappeler que Josip Boro m’ait jamais parlé de questions de cette nature.

 15   M. Kehoe (interprétation). – La période dont nous parlons est la

 16   période de votre retour en Bosnie centrale en avril 1992. Cette période va

 17   jusqu'au moment où vous avez été nommé au poste de commandant de la zone

 18   opérationnelle de Bosnie centrale, le 22 juin 1992.

 19   Pendant cette période, je vous demande si Josip Boro vous a fait

 20   part de ses objectifs politiques qui consistaient à réunir la Bosnie

 21   centrale et la République de Croatie.

 22   M. Blaskic (interprétation). – A moi, en personne, je ne me

 23   rappelle pas qu'il m'en ait parlé. Je suis incapable de me rappeler que

 24   Josip Boro m’ait parlé de cela. Josip Boro était à l'époque Président de

 25   la cellule de crise municipale et de l'assemblée municipale de Kiseljak.


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  1   M. Kehoe (interprétation). – Pour résumer vos contacts avec ces

  2   dirigeants politiques, Josip Boro ne vous a jamais fait part du désir

  3   qu'il avait que la Bosnie centrale rejoigne la République de Croatie.

  4   Kordic ne l'a pas fait non plus et Kostroman non plus.

  5   C'est bien ce que vous dites dans votre déposition ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – J’affirme que, eu égard à la

  7   période que vous venez de délimiter, dans cette période, je n'ai jamais

  8   reçu de ces hommes des informations officielles à ce sujet. Je sais qu'il

  9   y avait des positions officielles. Je parle de positions exprimées dans

 10   les documents publiés par la communauté croate de Herceg-Bosna et des

 11   documents qui m'engageaient moi, en tant que commandant.

 12   M. Kehoe (interprétation). – Mais, Général, qu'en est-il de

 13   commentaires officieux qui auraient pu être faits sur ce sujet ?

 14   M. Blaskic (interprétation). – J'ai dit, et d'ailleurs nous

 15   avons vu ce matin qu'en janvier 1992, il y a eu des déclarations

 16   radicales, des déclarations émises sous l'effet de l'émotion, diverses

 17   affirmations qui ont été prononcées, mais à des époques différentes sur le

 18   plan politique, militaire et autre, lorsqu'il se passait des événements de

 19   toutes sortes sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. C'est -je crois- ce

 20   que nous sommes autorisés à dire, eu égard aux événements qui se

 21   déroulaient dans la période dont nous sommes en train de discuter.

 22   M. Kehoe (interprétation). – Excusez-moi, monsieur le Président.

 23   Pour que nous soyons tout à fait complets, Ante Sliskovic a lui aussi

 24   assisté à cette réunion. Cela ressort de la liste des participants. Si la

 25   Chambre l'accepte, je voudrais passer en session à huis clos partiel,


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  1   parce que je souhaite aborder des sujets qui le demandent.

  2   Des dépositions ont été faites à huis clos.

  3   M. le Président. - J'explique pour la galerie du public : il

  4   s'agit d'allusions plus ou moins explicites que va faire l'une des parties

  5   -en l’occurrence l'accusation- par rapport à des témoignages qui ont déjà

  6   été produits devant cette Chambre, mais à huis clos. Donc, il convient

  7   de protéger à nouveau ces témoignages.

  8   Donc, huis clos partiel.

  9   M. Abtahi (interprétation). – Nous sommes à huis clos partiel.

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 22   M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, nous pouvons

 23   revenir en session publique pour les questions qui sont devant nous.

 24   Je voudrais que l'on replace sur le rétroprojecteur la

 25   pièce 572/1, la pièce de l'accusation. Merci.


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  1   Général, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous montrer

  2   Anto Valenta sur cette photographie ?

  3   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est cela, M. Anto Valenta.

  4   (Le témoin le montre.)

  5   M. Kehoe (interprétation). - Pour le procès-verbal, monsieur le

  6   Président, Anto Valenta était également présent à la réunion du

  7   27 janvier 1992, ce que reflète la pièce 630.

  8   Général, quelles étaient les positions d'Anto Valenta concernant

  9   le fait de faire partir les Musulmans des territoires qui, selon lui,

 10   devaient revenir aux Croates ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – Ce que je sais, c'est

 12   qu'auparavant, même avant que le conflit armé n'éclate en Bosnie-

 13   Herzégovine, il a écrit un livre. Et, dans ce livre, il a exposé ses

 14   points de vue, en disant à peu près comment éviter les conflits, comment

 15   éviter la guerre tout en se mettant d'accord sur une partition.

 16   Alors, lui, il avait un certain nombre de positions concernant

 17   cette question, concernant le partage tout en évitant le conflit. Donc,

 18   une partition qui reposerait sur un accord. Je dois dire que les points de

 19   vue, concrètement, en pratique, ne reflétaient pas ses positions exprimées

 20   là-bas et il a occupé toute une série de positions ; il a été Président du

 21   gouvernement de la communauté croate d'Herceg-Bosna entre autres.

 22   M. Kehoe (interprétation). - Est-ce qu'il prenait la position

 23   qu'il qualifiait de déménagements humains de populations, déplacements

 24   humains des populations ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est ce qu'il apprenait


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  1   dans son livre. Je pense que son livre a été publié avant que la guerre

  2   n'éclate en Bosnie-Herzégovine, peut-être au tout début de 1992, je n'en

  3   suis pas tout à fait sûr. S'agissant de ces questions, je ne les ai jamais

  4   évoquées directement avec lui.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Pouvez-vous expliquer à la Chambre

  6   cette notion de déplacements humanitaires ou humains de

  7   population ? De quoi s'agit-il ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Ce n'était pas mon idée, ma

  9   notion pour que je puisse être la meilleure personne pour vous

 10   l'expliquez. Je sais que Valenta en parle dans son livre. Et de la manière

 11   dont il décrit cela, il s'agit de déplacer une population donnée, des

 12   habitants d'une région à une autre et ceci, afin d'éviter la guerre. C'est

 13   du moins comme cela qu'il l'a formulé dans son livre.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Et cette politique, cette politique

 15   elle émane du Dr Franjo Tudjman, c'est émanant de lui qu'elle arrive en

 16   Bosnie centrale ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas où est la source

 18   de cette idée. Peut-être qu'en écrivant son livre, il a cité d'autres

 19   ouvrages. Je ne sais pas d'où cela lui vient, il était technologue. Je ne

 20   sais pas d'où, mais moi, personnellement, je ne sais pas si cette idée

 21   provient du Dr Franjo Tudjman ou de quelqu'un d'autre.

 22   Très franchement, je dois dire que je n'ai même pas lu le livre

 23   du Dr Franjo Tudjman et je ne dispose pas de ce genre d'information.

 24   M. Kehoe (interprétation). - Vous étiez présent quand Valenta a

 25   articulé en public, publiquement sa position.


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, Valenta a fait part de

  2   ce point de vue devant des responsables, oui. Une fois j'ai été présent,

  3   mais je ne me rappelle pas tous les détails de ces propos. Ce n'était

  4   certainement pas mes points de vue, ces points de vue qu'il exprimait et

  5   qu'il défendait.

  6   Plus tard, Valenta n'a pas participé à ces conférences de

  7   presse. Il organisait des conférences de presse séparées en tant que

  8   représentant des autorités civiles.

  9   M. Kehoe (interprétation). - Général, un des témoins de la

 10   défense a dit, à savoir M. Martin Bel (?) a dit que Valenta a exprimé,

 11   articulé sa position donc, concernant le déplacement humain des

 12   populations lors d'une conférence de presse où vous étiez présent. N'est-

 13   ce pas ? Vous vous rappelez la déposition qui a été faite à ce sujet ?

 14   Cela va des pages 17619 à 17721, jusqu'à la page 17621.

 15   M. Blaskic (interprétation). – Non seulement il a dit

 16   publiquement, il a écrit un livre, il à écrit avant que le conflit

 17   n'éclate en Bosnie-Herzégovine. Son livre dit… comme je l'ai déjà dit,

 18   peut-être l'aurait-il dit en ma présence lors de cette conférence de

 19   presse, mais je ne peux pas l'affirmer avec certitude.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Général, il a dit en votre présence

 21   lors de la conférence de presse. Kordic et Kostroman étaient également

 22   présents. Les trois personnes les plus hauts placées sur le plan politique

 23   en Bosnie centrale.

 24   M. Blaskic (interprétation). - Il a probablement dit, incité par

 25   la question qui lui a été posé. Et j'ai déjà dit à la Chambre que,


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  1   lorsqu'il s'agissait de questions qui traitaient des sujets militaires,

  2   c'était moi qui répondait. Mais si c'était un sujet civil qui était abordé

  3   c'était l'un des responsables civils présents à cette conférence de presse

  4   qui répondait. Donc, aux questions politiques répondaient les responsables

  5   politiques.

  6   Je ne sais pas dans quel contexte il a dit, je ne sais pas ce

  7   qu'il a dit et je n'arrive pas à me rappeler ce qu'il a dit. Si vous me

  8   montriez un document, je pourrais peut-être faire réfléchir ma mémoire. Je

  9   sais qu'il a écrit à ce sujet, mais je répète : moi, pour moi, seuls les

 10   ordres émanant du chef du grand état-major étaient contraignants.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Je voudrais que nous réexaminions

 12   la pièce de l'accusation 460. Je peux distribuer des exemplaires à nos

 13   cabines d'interprètes. Je pense que cela peut s'avérer utile. Nous avons

 14   également une version française de ce document.

 15   Il s'agit d'un document qui a été reçu en mai 1992 par les

 16   organisations internationales. Je commencerai par la lecture du premier

 17   paragraphe à la page 1. Il s'agit du papier avec l'en-tête de la

 18   République de Bosnie-Herzégovine, communauté croate d'Herceg-Bosnie,

 19   conseil croate de défense.

 20   Le titre est : " Permettre à la population de Bosnie-Herzégovine

 21   de vivre dans un milieu plus sûr, plus sein et plus heureux.

 22   Ce qui serait humain et civilisé ce serait d'aider les gens à

 23   changer de lieux, de résidences, d'appartements, de maisons familiales ou

 24   d'emplois quelles que soient les raisons qui les incitent à le faire. "

 25   A la page suivante, s'il vous plaît, nous commençons par le


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  1   premier paragraphe qui commence par : Les Musulmans...

  2   " Les Musulmans ne permettent pas de migrations, ne permettent

  3   pas de changer d'appartements ou de maisons dans les provinces à majorité

  4   croate. La raison de cette attitude est qu'ils espèrent que l'augmentation

  5   de la population les rendra majoritaire non seulement dans les

  6   municipalités avec une légère majorité musulmane, mais aussi dans les

  7   municipalités avec une majorité croate ; par exemple il y a 25 000 Croates

  8   à Zenica, la plupart de ces gens sont prêts à aller à Vitez ou Busovaca

  9   mais les autorités musulmanes de Zenica ne leur permettent pas de le faire

 10   et préfèrent les garder à Zenica où ils sont détenus et font l'objet de

 11   harcèlements. Les Musulmans de Vitez et de Busovaca ont reçu l'ordre de ne

 12   pas échanger leurs maisons ou leurs appartements avec les Croates de

 13   Zenica.

 14   Quoiqu'il en soit cette pression n'aura aucun effet. Les Croates

 15   vont s'installer dans les provinces ou ils sont majoritaires. "

 16   Et puis, nous allons plus loin.

 17   " Pendant des centaines d'années, l'Islam et Byzance ont été

 18   imposés aux Croates. Ce que les Croates ont éprouvé comme une pression les

 19   a poussés à émigrer en Croatie et en Europe occidentale ou plus loin.

 20   Environ un millier de mosquées ont été construites dans le passé

 21   avec des minarets très élevés, le même nombre à peu près d'écoles

 22   religieuses. Plus de 5 000 hauts parleurs sont installés sur ces minarets

 23   qui sont des points dominants et qui montrent que la région qu'ils

 24   surplombent appartient aux Musulmans. Ils font partie de l'héritage

 25   religieux. Même dans de petits villages musulmans ou à population mixte il


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  1   doit y avoir une mosquée avec un minaret. Quatre fois par jour on peut

  2   entendre les gémissements, hurlements de la prière musulmane.

  3   Il s'agit de chansons vulgaires, arrogantes, musulmanes, qui

  4   font peur aux Croates qui sont révoltés. C'est vrai que les églises

  5   catholiques ont également des cloches, mais elles ne sonnent pas pendant

  6   aussi longtemps.

  7   Les Musulmans ne se demandent jamais si cela gêne qui que ce

  8   soit, si les enfants dorment ou si les personnes âgées se reposent. Les

  9   enseignants interrompent leurs cours durant les prières pendant que leurs

 10   élèves rient. Croates et Serbes dont le domicile est dans le voisinage de

 11   ces bâtiments attendent avec peine le moment de déménager. Les Musulmans

 12   le savent de sorte qu'ils ont construit sans cesse. "

 13   Nous allons passer vers la fin de la page.

 14   " Si nous ajoutons à ce mal tous les incidents qui se sont

 15   produits à Travnik où des drapeaux croates ont été brûlés, où il y a eu

 16   des assassinats, des vols de propriétés dans les appartements et les

 17   maisons croates ainsi que le déplacement violent, (l'interprète se

 18   reprend) des entrées par effraction dans les appartements croates, la

 19   conclusion est évidente : il y a un manque de conscience et de la haine

 20   entre les deux peuples à tel point que cela devient un fardeau de vivre

 21   ensemble.

 22   Et il doit y avoir un moyen de permettre à ces peuples de mener…

 23   dans un environnement meilleur. "

 24   Donc, c'était ce point de vue qui a été présenté lors de cette

 25   conférence de presse en votre présence ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Je n'ai pas pu voir la date, mais

  2   je sais qui a rédigé ce document et je sais que M. Valenta exprimait ce

  3   point de vue.

  4   Cependant, ce que je dois dire, c'est que dans une guerre civile

  5   comme celle qui s'est produite sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine,

  6   le point de vue du HCR n'était pas unifié, concernant le déplacement de

  7   certaines catégories de la population.

  8   J'ai exposé déjà à la Chambre les problèmes auxquels j'ai dû

  9   faire face. Je ne souscris pas à ce document quelles qu'aient pu être les

 10   difficultés auxquelles nous avons été confronté sur le terrain.

 11   Donc, j'insiste : je ne confirme pas et je n'adhère pas à ces

 12   points de vue de M. Valenta et je l'ai dit clairement dans nos entretiens.

 13   Dans mes entretiens avec (expurgé), -je pense que ce document a dû être

 14   envoyé à (expurgé)- je n'ai pas pu le voir dans la version originale

 15   pour le lire dans ma langue maternelle. Mais, permettez-moi de dire que le

 16   HCR avait une certaine attitude dans la région qui était sous le contrôle

 17   de l'armée de la Republika Srpska et déplaçait les victimes donc de cette

 18   armée-là vers les zones sous le contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine

 19   et du HVO. Mais une autre attitude existait pour le contrôle pour les

 20   zones qui étaient sous le contrôle du HVO et de l'armée de Bosnie-

 21   Herzégovine.

 22   Donc, la position n'était pas unifiée quant au danger que

 23   représentait le nettoyage ethnique. Le HCR était d'avis qu'il fallait

 24   garantir une liberté totale, là… excusez-moi (l'interprète se reprend) la

 25   Croix-Rouge et la Forpronu estimaient qu'il fallait garantir une liberté


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  1   totale de circulation.

  2   A un moment, nous avions un commandement conjoint, nous avions

  3   les généraux Petkovic et Halilovic, moi et le commandant du troisième

  4   corps Enver Hadzihasanovic à un échelon plus bas à un moment.

  5   Mais quant à cette position et quant à ces propos, ils

  6   n'engagent que M. Anto Valenta.

  7   M. Kehoe (interprétation). - Vous n'étiez pas d'accord avec ce

  8   point de vue, mais vous étiez d'accord avec M. Ivo Santic, le maire. C'est

  9   cela que vous avez dit lors de l'interrogatoire principal, n'est-ce pas ?

 10   M. Blaskic (interprétation). – Quant aux positions du

 11   maire Santic ou la plupart de ses points de vue, oui, j'étais d'accord

 12   avec cela, car l'approche était une approche rationnelle, une approche

 13   raisonnable. Je n'étais pas d'accord avec toutes ses positions, mais avec

 14   certaines oui, parce que ma façon d'agir était celle qui cherchait à

 15   garantir notre survie, notre maintien dans cette région à Travnik, Zenica,

 16   etc. A d'autres endroits les Croates ont été expulsés et ils sont arrivés

 17   dans l'enclave de la Lasva.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Vous étiez d'accord avec Santic

 19   concernant la question du déménagement, du déplacement des populations ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – Je pense que les points de vue de

 21   M. Santic étaient différents de ceux que défendait M. Anto Valenta.

 22   Vu la situation qui prévalait, il a peut-être défendu certains

 23   points de vue, mais je dois dire que pour de nombreux Musulmans de Bosnie,

 24   Ivo Santic a été important ; il leur a apporté secours, assistance et

 25   certainement les mesures n'ont pas été suffisantes pour protéger


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  1   l'ensemble des citoyens dans la zone de Vitez, les Musulmans de Bosnie,

  2   les Roms, toutes les populations qui habitaient. Mais moi aussi j'ai pu

  3   les aider grâce aux informations reçues par M. Santic.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Etiez-vous d'accord avec les idées

  5   de Santic sur les déplacements ?

  6   M. Hayman (interprétation). – Peut-on savoir de quoi il s'agit ?

  7   Quelles sont ces positions ?

  8   M. Kehoe (interprétation). - Ce témoin nous parle de M. Santic

  9   en sachant quels sont les points de vue de M. Santic. Laissons le témoin

 10   répondre.

 11   M. Hayman (interprétation). - Nous n'avons pas le procès-verbal,

 12   il n'y a pas de communication clandestine secrète entre les parties dans

 13   ce prétoire. Nous ne savons pas ce qui est dit, c'est tout à fait….

 14   M. le Président. - Pouvez-vous être plus précis dans votre

 15   question, s'il vous plaît ?

 16   M. Kehoe (interprétation). - Santic avait-il une position, un

 17   point de vue relatif au déplacement de la population musulmane et de la

 18   population croate de la vallée de la Lasva ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – J'ai déjà dit que Santic avait

 20   une position diamétralement opposée à celle de M. Valenta, absolument

 21   contraire à celle de M. Valenta.

 22   Nous l'avons vu d'ailleurs à la lecture du document précédent.

 23   Tant qu'a duré le conflit à Busovaca -je parle du document que vous m'avez

 24   montré tout à l'heure- à Vitez il y avait une réunion qui portait sur la

 25   création d'un gouvernement conjoint entre les Musulmans et les Croates, et


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  1   la création d'un MUP commun et unique dont je sais qu'il a fait tout ce

  2   qu'il pouvait pour garantir la coexistence entre Musulmans et Croates.

  3   Maintenant est-ce qu'à un certain moment, alors que le conflit

  4   avait déjà démarré, je ne sais pas à ce moment-là quelles étaient

  5   éventuellement ses positions. Mais s'agissant des conséquences sur le

  6   terrain, je ne sais pas quelles ont été ces conséquences. Je sais que lui

  7   était, comme je l'étais moi-même, contre l'évacuation des Roms du

  8   territoire de Vitez. Et c'est sur la base du fait qu'il m'a donné des

  9   informations, à moi, que cette population a pu rester sur le territoire de

 10   Vitez. Les Roms sont toujours présents sur le territoire de Vitez, alors

 11   qu'ils étaient déjà promis à l'expulsion de cette région.

 12   Donc s'agissant de moi, M. Santic, tout ce que je peux dire à

 13   son sujet, c'est qu'il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour

 14   garantir la coexistence, la vie commune dans la région de Vitez de toutes

 15   les populations qui y vivaient.

 16   M. Kehoe (interprétation). – Peut-on passer en huis clos partiel

 17   (expurgée)

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 12   Pages 20001 – 20011 expurgées en audience à huis clos partiel

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 25   L'audience est levée à 17 heures 25.