Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

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4 LE PROCUREUR

5 c/

6 Tihomir BLASKIC

7 Mercredi 19 mai 1999

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10 L’audience est ouverte à 10 heures 05.

11 M. le Président. – Veuillez vous asseoir. Monsieur le greffier,

12 faites introduire le témoin.

13 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

14 M. le Président. - Je salue nos fidèles interprètes qui sont à

15 leur poste, je suppose.

16 Les interprètes. - Bonjour.

17 M. le Président. – Bonjour. Je salue les conseils de

18 l'accusation, les conseils de la défense. Je salue le témoin qui n'est pas

19 encore là. Je salue le général Blaskic. Je rappelle que nous sommes en

20 audience publique et je rappelle, pour la galerie du public, que nous

21 sommes dans le contre-interrogatoire de l'accusé qui a choisi de

22 témoigner. Il est donc sous serment et considéré, par les Juges et par le

23 Règlement de notre Tribunal, comme un témoin, comme tous

24 les témoins. Monsieur le Procureur, c'est à vous.

25 M. Kehoe (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

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1 Bonjour, Monsieur le Président, bonjour Messieurs les Juges, bonjour aux

2 conseils de la défense, bonjour général.

3 M. Blaskic (interprétation). – Bonjour.

4 M. Kehoe (interprétation). - Général, au cours de

5 l'interrogatoire principal, vous nous avez dit que le 27 avril, après

6 avoir vu Ahmici -je me réfère aux pages du compte rendu d'audience 19 031

7 et 19 032-, après vous être rendu à Ahmici, vous avez conclu qu'Ahmici

8 n'avait pas pu être l'œuvre d'un groupe de trois ou quatre soldats ivres.

9 Vous dites : "Je suis sûr que ce groupe, qui a commis cet acte, était sous

10 le contrôle d'un commandant élu propre à ce groupe"

11 Général, vous étant rendu à Ahmici, quel genre de planification

12 était-elle nécessaire pour accomplir la tâche que vous y avez vu

13 accomplie ?

14 M. Blaskic (interprétation). – Je crois que cette action a été

15 organisée, planifiée et exécutée sur ordre. Il est certain que le

16 commandant de ces groupes a dû préparer et planifier une telle action. Il

17 m'est difficile, car je n'ai pas les informations précises au sujet de

18 l'ensemble des circonstances et je ne peux me fonder dans ce que je dis

19 ici que sur ce que j'ai entendu de la bouche des témoins qui se sont

20 exprimés au cours de ce procès, mais il est certain, à mes yeux, qu'il a

21 dû y avoir planification de la part d'un certain nombre de commandants qui

22 devaient bien connaître le terrain et qui, je suppose, devaient être

23 informés de l'objectif de cette action.

24 M. Kehoe (interprétation). – Ma question était la suivante :

25 quel genre de planification a été réalisée et je vais essayer de préciser

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1 plus encore ma question.

2 Général, lorsque vous préparez, planifiez une telle opération,

3 dites nous ce qui est nécessaire du point de vue des fournitures

4 logistiques, du point des hommes, du point de vue des équipements médicaux

5 pour les éventuels blessés au cours d'une telle opération. Dites-nous

6 ce qui est nécessaire.

7 M. Blaskic (interprétation). – Vous avez parlé de moyens

8 logistiques, d'effectifs en hommes, de moyens militaires, ce sont des

9 moyens qui sont nécessaires pour n'importe quelle action. Alors, je

10 comprends mal ce que vous voulez dire par "quel genre de planification".

11 La planification est une action qui intervient au niveau tactique, aussi

12 je ne comprends pas bien ce que vous demandez. Pouvez-vous préciser ?

13 M. Kehoe (interprétation). – Je vous ai posé une question très

14 ouverte, général. Pouvez-vous expliquer aux Juges, si l'on veut accomplir

15 une telle action, un commandant, dans votre position par exemple, quel

16 genre d'action doit-il entreprendre et de quoi a-t-il exactement besoin

17 pour mener à bien une telle action ? Que ferait, dans ces conditions, un

18 commandant ? Pouvez-vous nous le dire ?

19 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que les conclusions

20 que j'ai tirées, le fait de dire que cette action était planifiée et que

21 ce n'était pas l'œuvre de quelques individus isolés, que ces conclusions

22 se fondent sur les observations que j'ai pu faire, à savoir le degré de

23 destruction, tout ce qui s'est passé, les ressources qui ont été

24 nécessaires.

25 M. le Président. – La question est très simple. Quel genre de

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1 planification. Vous êtes un militaire professionnel. Vous avez visité le

2 site d'Ahmici sur lequel un certain nombre d'atrocités ont été commises.

3 Vous les avez reconnues, dénoncées et vous les avez condamnées. Vous êtes

4 un commandant. La question est, en tant que militaire, qu'aurait-il fallu

5 avoir comme moyens logistiques pour accomplir une telle action ?

6 Vous avez vu le village. Est-il grand, petit, moyen ? Quel genre

7 d'hommes, de commandos ? Entraînés, pas entraînés ? Faut-il beaucoup de

8 moyens, beaucoup d'armes, beaucoup de fusils, beaucoup de cagoules,

9 beaucoup d'uniformes ? C'est une question adressée à un soldat

10 professionnel. Veuillez y répondre, s'il vous plaît, ou dites que vous ne

11 savez pas.

12 M. Blaskic (interprétation). – J'ai dit, Monsieur le Président,

13 que si l'on parle de

14 type de planification, nous sommes au niveau de la tactique, c'est-à-dire

15 à un niveau où, à mon avis, trente à cinquante personnes interviennent,

16 peut-être une centaine. Mais, en tout état de cause, il s'agit d'un niveau

17 de planification tactique, c'est-à-dire le niveau où l'on détermine les

18 orientations de l'opération comme dans toute action, où l'on détermine les

19 objectifs de l'opération et, bien entendu, la planification des moyens

20 logistiques, c'est-à-dire en munitions notamment ainsi que le nombre de

21 participants à l'action.

22 Mais si l'on me demande quel est le genre d'action, je dirais

23 que sur le plan tactique, la planification de cette action se ferait comme

24 je viens de le dire.

25 M. Kehoe (interprétation). – Général, revenons à des éléments

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1 tout à fait fondamentaux : il y a des nécessités en munitions pour les

2 troupes n'est-ce pas ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Oui, il faut des munitions.

4 M. Kehoe (interprétation). - Il faut des transports pour les

5 troupes ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Si l'on planifie de faire venir

7 des troupes de l'extérieur, il faut également prévoir et planifier le

8 transport de ces troupes. Mais si l'on planifie d'engager des troupes

9 présentes sur place, le transport n'est pas nécessaire. Tout dépend de ce

10 que le planificateur de l'action avait en tête et du type d'effectif qu'il

11 avait à sa disposition.

12 S'agissant du transport, celui-ci peut être nécessaire ou pas.

13 M. Kehoe (interprétation). - Il faut nourrir les troupes ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Oui, il faut nourrir les troupes.

15 Cela dépend de la durée de l'action. Si l'action dure une heure, ce n'est

16 pas nécessaire.

17 M. Kehoe (interprétation). - Et puis, il faut disposer de

18 certains équipements médicaux si certains soldats sont blessés de quelque

19 façon que ce soit.

20 M. Blaskic (interprétation). - En cas de guerre, selon la

21 doctrine qui m'a été enseignée, toutes les unités disposaient d'au moins

22 un infirmier, qui n'était pas particulièrement formé sur le plan médical,

23 mais qui savait fournir les premiers soins, panser une plaie par exemple.

24 Cet élément fait partie de toutes les formations à partir du moment où une

25 formation compte au moins 30 soldats ou 30 paysans armés.

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1 M. Kehoe (interprétation). - Et vous avez besoin de moyens de

2 transmission entre les troupes dans une même unité, n'est-ce pas ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Oui, des moyens de transmission

4 sont nécessaires ou, en tout cas, un moyen de communiquer entre les

5 soldats qui est entendu à l'avance. Si l'on dispose de moyens matériels de

6 transmission, la qualité de la communication est meilleure. On peut

7 s'entendre également pour communiquer par signaux, par messagers, par

8 divers moyens improvisés.

9 M. Kehoe (interprétation). - Compte tenu du degré de destruction

10 qui s'est produit sur une période très restreinte, cette attaque d'Ahmici

11 a été réalisée de façon très efficace, n'est-ce pas ?

12 M. Blaskic (interprétation). - Oui, si l'on tient compte du

13 degré de destruction et de tout ce qui s'est passé, il ne fait aucun

14 doute. En tout cas, c'est la conclusion que j'ai tirée comme étant

15 possible, que certains actes ont été commis au cours de cette action qui

16 était totalement contraire aux ordres émanant de moi, si je tiens compte

17 également des ordres que j'ai délivrés.

18 M. Kehoe (interprétation). - Général, si vous n'avez pas

19 ordonné cette action, qui l'a fait ? Donnez-nous un nom, le nom d'une

20 personne ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Dans les ordres que j'ai

22 délivrés, le premier ordre notamment, où je demandais une enquête active,

23 j'ai demandé que soient identifiées les personnes responsables de cet

24 acte. J'ai demandé également que soient vérifiées et confirmées les

25 conditions qui ont créé ces victimes et toutes les circonstances de cet

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1 acte.

2 Mais, le nom que j'ai demandé, c'était ce qui a été le plus

3 difficile à obtenir. Je sais qui était le commandant des unités complètes

4 qui se trouvaient comprises dans la région

5 d'Ahmici. Mais qui a planifié dans le détail cette action ? Je n'en est

6 aucune connaissance, je ne connais pas son nom. Cela étant, mon adjoint à

7 la sécurité m'a fait savoir qu'un certain nombre de noms avaient été

8 mentionnés, mais ces noms ne m'ont jamais été transmis.

9 M. Kehoe (interprétation). - Général, vous avez dit que Pasko

10 Ljubicic n'a pas donné l'ordre de cette action à lui tout seul, n'est-ce

11 pas ?

12 M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que je croyais à lui

13 seul, il n'a pas donné l'ordre d'exécuter cette action. Donc, il n'a pas

14 pris l'initiative de cet ordre, mais j'ai dit qu'il était possible qu'il

15 ait participé à l'organisation de cette action.

16 M. Kehoe (interprétation). - Général, j'aimerais revenir à ma

17 question. Qui aurait pu donner l'ordre d'exécuter ce massacre ? Le

18 ministre de la défense, Bruno Stojic ?

19 M. Hayman (interprétation). - Nous faisons remarquer,

20 simplement, Monsieur le Président, que nous avons demandé une audience à

21 huis clos pour des raisons de sécurité. Si elle ne nous est pas accordée,

22 que cela soit le cas. Mais nous tenons à faire remarquer que ce sera le

23 seul témoin, au cours de ce procès, à qui une mesure de cette nature aura

24 été refusée.

25 M. le Président. - Monsieur le Procureur, qu'avez-vous à

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1 répondre sur la question ?

2 M. Kehoe (interprétation). - S'agissant de ces questions

3 particulières sur ces personnes, je n'ai que quelques questions. Si la

4 défense veut une audience à huis clos sur point, cela ne pose aucune

5 question problème au Procureur.

6 M. le Président. - Huis clos partiel alors, s'il vous plaît. Sur

7 les quelques questions qui sont posées, d'accord. Il sera donc mentionné

8 que ce n'est pas le seul témoin qui aura obtenu des mesures, quand il les

9 a demandé, Maître Hayman.

10 M. Hayman (interprétation). - Merci, Monsieur. le Président.

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12 L'audience se poursuit à huis clos partiel

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13 L'audience se poursuit en audience publique.

14 M. le Greffier (interprétation). - Nous sommes à présent en

15 audience publique.

16 M. le Président. - Bien. Nous reprenons donc en audience

17 publique. Vous pouvez continuer vos questions, Monsieur le Procureur.

18 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Je vais

19 changer de sujet un peu et, Général, je souhaite discuter avec vous de ce

20 que vous saviez sur Ahmici, conformément à votre témoignage. D'abord, nous

21 allons nous baser sur la pièce à conviction de

22 l'accusation 456/56. Il s'agit d'une lettre que le colonel Stewart vous a

23 adressée.

24 Général, pendant que vous examinez cette lettre, je sais que

25 vous l'avez déjà vue, permettez-moi de vous rappeler quelle a été votre

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1 déposition en réponse à la question de M. Nobilo, à la page 18 912.

2 "Question : est-ce qu'il s'agissait là de la première référence concrète

3 et claire concernant Ahmici, en ce qui vous concerne ? Réponse : oui,

4 c'était la première lettre et le premier lien concret entre le village

5 d'Ahmici et le crime qui s'y est produit".

6 Sur la page, le Juge Jorda vous a posé la question suivante :

7 "Apportez une clarification, s'il vous plaît. Beaucoup de choses ont été

8 dites au cours des derniers jours et je souhaite, Monsieur Blaskic, que

9 vous nous dites très clairement si c'était, là, la première fois où

10 quelqu'un vous a dit quelque chose que ce soit sur les événements

11 d'Ahmici. Est-ce exact ?".

12 (Les Juges se consultent sur le Siège).

13 M. le Président. - Allez-y.

14 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Par

15 conséquent, c'était la question qui porte sur la page 18 916, la page 12,

16 le Juge Jorda avait demandé tout simplement : "Est-ce que le général peut

17 nous dire clairement si c'était la première fois que quelqu'un ait parlé

18 sur Ahmici. Est-ce que c'est vrai ?" Et la réponse était la suivante :

19 "Oui, Monsieur le Président, c'est la première fois que j'ai fait face de

20 ce nom du village". Juge Jorda -ligne 21- : Ce que je vous demande, c'est

21 de nous dire clairement si c'était bien pour la première fois que vous

22 avez entendu parler sur Ahmici ? C'était le 22 avril ?"

23 Votre réponse, à la ligne 2, 19 917 est la suivante : "C'est la

24 première fois que j'ai entendu parler d'Ahmici par cette lettre qui m'a

25 été adressée". La question de Me Nobilo, la ligne 20 : "Est-ce que la

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1 lettre du Colonel Stewart, par conséquent, vous parle pour la première

2 fois du crime Ahmici ?" Réponse : "oui".

3 Par conséquent, Monsieur le Général, je voudrais vous poser une

4 question fondamentale concernant Ahmici. A combien se trouve Ahmici par

5 rapport à l'Hôtel Vitez, s'il vous plaît ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Cinq kilomètres à peu près, même

7 si cette distance n'a pas un très grand rôle dans les conditions de

8 guerre.

9 M. Kehoe (interprétation). - Général, si le village Ahmici est

10 en flammes, est-ce que vous avez pu, par exemple, vous trouver devant

11 l'Hôtel Vitez et voir la fumée qui s'élève ? Est-ce que vous avez pu, par

12 exemple, voir cela ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Moi, j'ai été obligé d'être en

14 permanence en communication, enfin au téléphone, parce que c'était la

15 seule façon de pouvoir communiquer avec ceux qui m'ont été subordonnés.

16 C'est la raison pour laquelle j'ai pratiquement séjourné dans

17 l'abri de l'hôtel et commandé de cette manière-là. Je n'ai pas reçu

18 d'informations, aucune information concernant la flamme et je ne suis pas

19 sûr que l'on puisse voir également si j'étais devant l'hôtel, d'autant

20 plus que l'hôtel était une cible, entre autres.

21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Général, quand vous dites

22 que la que la distance représentait 5 kilomètres, est-ce que vous voulez

23 parler de la distance en passant par la route ou à vol d'oiseau ?

24 M. Blaskic (interprétation). - En passant par la route. A vol

25 d'oiseau, cela doit être un peu moins. Je ne suis pas sûr mais je pourrais

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1 éventuellement mesurer sur la carte, s'il est indispensable de vous le

2 dire en détail. De toute façon, moi, j'étais à l'intérieur de l'hôtel.

3 J'étais en communication permanente.

4 M. Shahabuddeen (interprétation). – Je vous remercie.

5 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que nous pouvons montrer au

6 témoin la pièce à conviction 29C ? Il s'agit du diagramme. Nous pouvons

7 revenir éventuellement sur cette pièce à conviction plus tard, Monsieur le

8 Président. Je vais revenir à la question posée tout à l'heure. Tout à

9 l'heure, monsieur l'huissier, nous viendrons sur le diagramme.

10 Général, compte tenu du fait que vous avez dit qu'Ahmici se

11 trouvait à 5 kilomètres de distance par rapport à Vitez, est-ce que

12 quelqu'un qui vous a été subordonné, qui se rendait à l'hôtel, se

13 déplaçait au cours de la journée du 16 avril, vous a dit qu'en provenance

14 d'Ahmici, on pouvait voir une fumée, une grande quantité de fumée ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Non, il y n'y avait pas tellement

16 de mouvements, de déplacements. C'était le chaos général et des conflits

17 dans une vingtaine de places. Par conséquent, nous avons fonctionné sur la

18 base des informations reçues par téléphone.

19 M. Kehoe (interprétation). – Vlado Santic, commandant de la

20 police militaire du premier bataillon d'actifs, venait au cours de la

21 journée ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Je ne l'ai pas vu. Je n'ai jamais

23 eu de contact avec lui. Il n'était pas le premier commandant du bataillon

24 d'actifs de la police militaire, il était le commandant de la compagnie de

25 la police militaire. De toute façon, je ne l'ai pas vu ces jours-ci.

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1 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que le commandant Marin vous

2 a dit avoir vu, éventuellement, le commandant Santic à l'hôtel Vitez, le

3 matin du 16 avril ?

4 M. Blaskic (interprétation). – A ma connaissance -il faudrait

5 que je vérifie- il ne l'a pas dit.

6 M. Kehoe (interprétation). – Et Marko Prskalo que vous avez

7 envoyé le 16 avril avec Piskulic pour se rendre au Britbat ? Eux se

8 rendaient-ils à l'hôtel ? Est-ce qu'ils ont mentionné qu'en provenance

9 d'Ahmici, on pouvait voir une grande quantité de fumée ?

10 M. Blaskic (interprétation). – Non, le 16, au moment où il est

11 rentré, il m'a dit qu'on pouvait voir des civils le long de la route car

12 ils ont été conduits dans les véhicules blindés, enfermés. Ils ne

13 pouvaient voir que par les petites fenêtres à une très petite distance

14 parce qu'ils étaient en véhicule transporteur des troupes blindées. La

15 Forpronu était venue les chercher avec une très grande protection parce

16 qu'il y avait des grandes activités, opérations, sur l'hôtel aussi avec

17 les pièces d'artillerie. L'hôtel a subi des dégâts.

18 M. Kehoe (interprétation). - Au cours de la journée du 16 avril,

19 le HVO était en communication par émetteur radio avec ces formations,

20 n'est-ce pas ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas. Entre moi-même et

22 les brigades, il n'y avait pas d'émetteur radio, deux téléphones, des

23 lignes ordinaires. Je ne peux pas savoir si, éventuellement, les

24 formations différentes possédaient des émetteurs radios. C'est fort

25 possible, mais peut-être pas. En ce qui concerne les émetteurs radio,

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1 quand il s'agit des actions du point de vue de la zone opérationnelle,

2 nous n'avons absolument aucun plan. Cette activité précède généralement

3 toutes opérations, toutes actions, même les transports de troupes.

4 M. Kehoe (interprétation). – Général, dites-nous, s'il vous

5 plaît, qu'est-ce que "rup 12" , dans le jargon de communication ?

6 M. Blaskic (interprétation). - C'est un émetteur radio de

7 transmission qui, à un niveau tactique à l'ex-JNA, était utilisé pour le

8 niveau de la compagnie, jusqu'à cents soldats au total, et à une portée

9 limitée. Normalement, c'est pour la liaison entre le commandant de la

10 compagnie et le commandant du bataillon. La portée dans des conditions

11 idéales est entre 8 et 10 kilomètres.

12 M. Kehoe (interprétation). - Général, je vais vous donner

13 lecture d'une déposition donnée par Anto Rajic et qui était membre d'une

14 formation antiaérienne. C'est dans l'affaire de Kupreskic et autres. La

15 déposition de M. Rajic a été donnée devant une autre chambre en date du

16 18 mai 1999 et commence à la page 8 683. Avez-vous la copie ?

17 M. Hayman (interprétation). - Je vais demander au Procureur de

18 bien vouloir nous donner une copie de la déposition de l'affaire

19 Kupreskic.

20 M. le Président (interprétation). – Je vous rappelle que quand

21 vous voudrez

22 contester ce genre de témoignage, vous le ferez au moment de votre droit

23 de réplique.

24 Pour l'instant, le témoin est confronté à un témoignage tiré

25 d'une autre déposition et d'un autre procès. Veillez, Monsieur le

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1 Procureur, à ce que ce soit présenté à la défense avant le droit de

2 réplique ?

3 M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

4 Maintenant, nous allons parler de la page 8 683, de la

5 déposition de M. Rajic, 17ème ligne, la question : "Dites-nous, étiez-vous

6 sur place le 16 avril 1993, au moment où le conflit s'est déclenché dans

7 la vallée de la Lasva ? Réponse : Oui. Je me suis trouvé sur cette

8 position, à Prahulje. Question : Avez-vous des informations concernant des

9 événements dans les secteurs différents dans la municipalité de Vitez ?

10 Est-ce que vous étiez en communication avec Vitez ? Réponse : Nous étions

11 en communication avec Travnik mais, bien évidemment, nous avions un

12 émetteur radio. Nous avons pu communiquer avec Vitez sur un autre

13 fréquence. J'ai essayé d'obtenir un certain nombre de données, j'ai appris

14 que dans le village d'Ahmici des tirs avaient été échangés et que le

15 village s'était enflammé. Ensuite, je ne sais pas ce qui s'est passé sur

16 place".

17 D'autres questions ont été posées au même témoin, page 8 709,

18 5ème ligne : "Monsieur Rajic, vous avez dit qu'auparavant, le 16

19 avril 1993, vous avez pu en entendre par l'émetteur radio qu'Ahmici était

20 en flammes ?

21 Réponse : Par l'émetteur radio RUP 12. Question : Est-ce vous

22 pouvez nous donner des précisions concernant le RUP 12 ? Réponse : Oui, le

23 RUP 12 est un émetteur radio. Je pense qu'il a un demi-mètre de hauteur,

24 63 centimètres de largeur. Vous pouvez chercher les fréquences entre 12 et

25 15 kilomètres. Question : Dites-moi un peu plus, s'il vous plaît. Parlons-

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1 nous d'un moyen de communication militaire qui éventuellement serait

2 réservée exclusivement pour l'utilisation militaire ? Réponse : Oui. RUP

3 était un équipement de la JNA et nous avons donc eu à notre disposition

4 cet équipement à AD. Question : Qui vous a envoyé

5 les informations, qui a parlé d'Ahmici en flammes ? Réponse : J'ai essayé

6 de me mettre en contact avec mon commandement à Novi Travnik et je n'ai

7 pas réussi à me mettre en contact. Par la suite, j'ai essayé de contacter

8 Vitez et j'ai réussi à obtenir Vitez. C'est d'eux-mêmes que j'ai entendu

9 qu'Ahmici était en flammes. Question : Pouvez-vous être un peu plus

10 concret, s'il vous plaît ? Qui vivait à Vitez ? Qui aurait pu vous donner

11 les renseignements concernant ce qui se passait à Ahmici ? Réponse :

12 "C'est mon commandement qui était à Vitez" ? Question : Pouvez-vous être

13 un peu plus précis ? Comment s'appelait la personne qui vous a donné les

14 données par l'émetteur radio à votre demande et qui vous a dit qu'Ahmici

15 était en flammes ? Réponse : Oui, je peux, c'était Mirko Safradin.

16 Question : Quel était le poste qu'il occupait ? Quel était son grade ?

17 Réponse : Il était membre de la compagnie de liaison, je ne pense pas

18 qu'il avait un grade. Question : Savez-vous d'où il avait ces

19 informations ? Réponse : Je n'ai jamais réussi à lui poser la question.

20 C'est tout ce que j'ai entendu et après, la ligne a été coupée. Question :

21 Pouvez-vous nous dire à quelle heure vous avez pu vous contacter avec

22 lui ? Réponse : C'était à 9 heures 30, le matin du 16 avril. Question :

23 Pouvez-vous être un peu plus précis concernant ce que vous avez entendu

24 par Mirko Safradin à 9 heures 30 ? Réponse : La réponse n'a pas duré au-

25 delà de 20 secondes. Je ne sais pas ce qui s'est passé et je ne savais

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1 même pas qu'il y avait des coups de feu car nous n'avons pas pu

2 l'entendre. Je lui ai posé la question de savoir s'il était au courant de

3 quoi que ce soit. Il m'a dit : Anto, Ahmici est en flammes. Ensuite, il a

4 commencé sa phrase suivante et la ligne a été coupée. Question : A-t-il

5 parlé des victimes ? Réponse : Non, il n'a pas parlé de victimes car on ne

6 savait pas encore ce qui s'était passé là-bas."

7 Général, où se trouve Prahulje, s'il vous plaît ?

8 M. Blaskic (interprétation). – Prahulje, c'est un cimetière qui

9 se trouve dans la municipalité de Travnik, au sud-est de Travnik, mais

10 c'est dans la municipalité de Travnik. Je peux également vous le montrer

11 sur la carte si vous le voulez bien.

12 M. Kehoe (interprétation). – C'est dans la région de Puticevo,

13 n'est-ce pas ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Ce n'est pas loin de Puticevo, à

15 un ou deux kilomètres par rapport à Puticevo, je ne suis pas sûr.

16 M. Kehoe (interprétation). – Et à quelle distance se trouve

17 Prahulje ou Puticevo par rapport à Ahmici ?

18 M. Blaskic (interprétation). – Le mieux serait peut-être que je

19 vous montre sur la carte, sinon c'est trop approximatif. C'est à 15 ou

20 20 kilomètres éventuellement. 15 kilomètres, je ne suis pas sûr

21 véritablement.

22 M. Kehoe (interprétation). - Vers 9 heures 30, le matin, le

23 16 avril 1993, vous-même, ainsi que d'autres membres du commandement, vous

24 étiez en communication par la radio, n'est-ce pas, et en contact avec

25 d'autres brigades ?

Page 20801

1 M. Blaskic (interprétation). – J'ai déjà dit qu'il n'y avait pas

2 de plan de liaison et de communication. Le commandement de la zone

3 opérationnelle, jusqu'à la fin du mois de mai, n'avait pas de centre de

4 liaison. Moi-même, j'étais en communication avec mes subordonnés avec les

5 deux lignes téléphoniques que j'avais à ma disposition. Je n'avais pas

6 d'autres moyens de communication. Dans ces dépositions, je sais que le

7 commandant de la compagnie chargé de liaison était Zeljko Blaz. Mirko

8 Safradin, à ma connaissance, n'a jamais été commandant de compagnie chargé

9 de liaison. Je n'avais pas de telles informations. Je ne les ai jamais

10 reçues. La première information que je reçue sur Ahmici était en

11 11 heures 42, quand on m'a parlé des opérations de combat à Ahmici.

12 M. Kehoe (interprétation). - A 9 heures 30, à Vitez, quelqu'un

13 qui était à la radio était au courant de ce qui se passait à Ahmici et pas

14 vous, général ? C'est ce que vous affirmez ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Je n'avais même pas l'information

16 selon laquelle des opérations de combats étaient en cours à 9 heures du

17 matin. Je n'avais pas de telles informations et j'affirme que je n'avais

18 pas des communication par la radio avec mes subordonnés.

19 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, je vais

20 poser des questions concernant un autre document. Je peux éventuellement

21 continuer après la pause. C'est à vous de décider.

22 M. le Président. – Je voudrais savoir si sur ce point exact,

23 vous en avez terminé ?

24 M. Kehoe (interprétation). – En ce qui concerne l'émetteur

25 radio ?

Page 20802

1 M. le Président. - Oui.

2 M. Kehoe (interprétation). – Oui, je vais parlé d'un autre

3 document.

4 M. le Président. – Nous suspendons pour 20 minutes.

5 L'audience, suspendue à 11 heures 20, est reprise à 11 heures 50.

6 M. le Président. - Monsieur le Procureur, poursuivons.

7 M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président. Je

8 voudrais tout simplement mettre au clair un certain nombre de choses.

9 M. Fourmy vient de me dire que je n'ai pas donné une bonne date de la

10 déposition dans l'affaire Kupreskic et c'est vrai. La date de la

11 déposition était le 23 mars 1999. C'est donc la correction que je voulais

12 faire.

13 M. le Président. - On va vérifier, d'accord. Merci.

14 Poursuivons.

15 M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce que nous pouvons

16 voir la pièce à conviction P690, la troisième page ? Est-ce que l'huissier

17 peut m'aider ?

18 M. le Greffier. - Il s'agit une fois de plus du rapport résumé

19 du rapport du Britbat du 16 avril 1993.

20 M. Kehoe (interprétation). – Merci, les points J et K nous

21 intéressent. Il s'agit donc d'une observation du Britbat, qui porte sur

22 14 heures 15 minutes. Il a été rapporté que, dans le village Poculica, il

23 y avait des combats violents qui se sont produits. On a donné des

24 coordonnées également à Ahmici. Ensuite, les coordonnées du HVO prétendent

25 que la 7ème brigade de Krajina est responsable pour l'attaque à Poculica.

Page 20803

1 En ce qui concerne Ahmici, beaucoup de maisons ont été en

2 flammes ; la plupart le long de la route en allant vers Dubravica.

3 Ensuite, il y a un autre extrait, un intercalaire, pour

4 14 heures 45. Je cite : "Selon la source fiable, il a été rapporté qu'un

5 grand nombre de civils ont été tués dans le village d'Ahmici".

6 Encore, des coordonnées, des références. L'extrait suivant 1642.

7 On parle du 16 avril 1993 : "Du régiment Chechire, il a été rapporté que

8 35 maisons brûlent le long de la route, entre les coordonnées 294906 et la

9 coordonnée YJ263919. Les victimes, les corps des victimes sont le long de

10 la route et à côté de la maison. Il a été rapporté également qu'au moins

11 20 à 30 corps, des femmes et des hommes, entre les coordonnées 281912 et

12 274916, se trouvent. Les combats se poursuivent et les coups de feu. Les

13 dépouilles mortelles sont recueillies, on a pu identifié également un

14 grand nombre de soldats entre Ahmici et la route, étant donné que les tirs

15 sont très violents".

16 Général, jusqu'au 16 avril, les troupes, vos troupes, se

17 déplaçaient entre Vitez et Busovaca, donc dans cette direction, n'est-ce

18 pas, Général ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Vous dites : "mon armée", "mes

20 soldats", je ne sais pas à quelle formation vous pensez, car je n'ai pas

21 eu d'information concernant le mouvement des troupes. Je n'ai pas eu de

22 telles informations des commandants. J'ai tenu compte donc des

23 informations que j'ai obtenues de ces commandants, en leur demandant

24 d'être le plus précis possible. Par conséquent, s'il vous plaît, voulez-

25 vous bien me dire de quelles troupes il s'agit ?

Page 20804

1 M. Kehoe (interprétation). - Je pense à toute l'armée, tous ceux

2 qui étaient sous votre commandement, qui vous ont été rattachés. Je parle

3 de l'après-midi du 16 avril 1993. Est-ce que nous pouvons nous focaliser,

4 par conséquent, à l'après-midi de ce jour là ? Est-ce qu'il y avait vos

5 soldats, votre formation qui vous ont été rattachés et qui se déplaçaient

6 vers Busovaca, entre Busovaca et Vitez, dans les deux directions ?

7 M. Blaskic (interprétation). - En ce qui concerne les

8 déplacements, les mouvements de troupes, je n'ai pas d'information

9 directe. Je ne me souviens pas de les avoir reçues. Je sais que la brigade

10 de Vitez m'a été rattachée, ainsi que Nikola Zubic-Zrinjski mais, le

11 matin, uniquement la partie qui a été mobilisée. Le 16 avril, nous n'avons

12 pas mobilisé tous les hommes en âge de combattre.

13 M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, Général, je voudrais,

14 tout simplement, vous poser une question tout à fait claire. L'armée qui

15 vous a été subordonnée ou rattachée, le matin 16 avril, est-ce que vous

16 voulez vous concentrer sur cette période ? Est-ce que ces soldats se sont

17 donc déplacés de Vitez à Busovaca et à l'envers également ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Est-ce que vous pouvez, s'il vous

19 plaît, me préciser ce que vous entendez sous l'armée du HVO ? En effet,

20 chaque personne porte l'uniforme, est en tenue de soldat et le HVO. Et

21 quelle est la période, donc, sur le plan horaire ? Je vais voir un petit

22 peu ma chronologie.

23 M. le Président. – C'est le HVO, là quand même ? A partir de

24 11 heures 42, tout vous est un peu rattaché, non ? Ou vous contestez

25 cela ?

Page 20805

1 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, on vient

2 de me poser la question et on parle du terme "l'armée du HVO". Ceux qui

3 n'ont pas été mobilisés n'étaient pas encore rattachés et subordonnés à

4 moi. Ils étaient encore dans leur propre maison et ils n'ont pas encore

5 été mobilisés, même si le conflit était en cours.

6 M. le Président. - Les brigades étaient sous vos ordres comme

7 commandant de la zone opérationnelle du HVO. C'est tout. Cela n'était pas

8 plus compliqué. C'est cela, Monsieur le Procureur ?

9 M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président, y

10 compris tout le monde.

11 Je parle de l'après-midi et également de 11 heures 42.

12 M. Hayman (interprétation). – Le terme de "brigade" n'a pas été

13 utilisé ni mentionné. C'est ce que nous voulions éclaircir.

14 M. le Président. - Dans ce genre de procès, on doit quand même à

15 peu près s'entendre sur un certain nombre de questions. Donc arrêtons de

16 tourner un peu en rond. Monsieur le Procureur, précisez la question car

17 nous perdons du temps. Il s'agit de savoir les troupes qui sont sous vos

18 ordres le 16 avril après-midi. Il ne s'agit pas de quelque chose de très

19 compliqué. Il ne faut pas sortir de le l'académie militaire pour parler

20 des troupes qui sont sous vos ordres à partir du 16 avril, y compris à

21 partir de 11 heures 42. Ou bien dites que vous ne savez pas quelles

22 troupes étaient sous vos ordres ce jour-là.

23 Monsieur le Procureur ?

24 Maître Nobilo, j'ai posé la question au général, je ne vous

25 donne pas la parole. Je voudrais que le Procureur continue son contre-

Page 20806

1 interrogatoire. Je regrette. Le témoin est seul devant les Juges pour

2 l'instant.

3 Général Blaskic, vous avez quand même des troupes sous vos

4 ordres ? Nous pouvons admettre que vous avez quand même les troupes du HVO

5 sous vos ordres, le 16 avril ?

6 M. Blaskic (interprétation). – Oui, je l'ai dit. Je ne l'ai

7 jamais contesté. Mais c'est la question que je n'ai pas compris, Monsieur

8 le Président.

9 M. le Président. – Répétez la question, Monsieur le Procureur.

10 M. Kehoe (interprétation). – La question est la suivante :

11 l'après-midi du 16 avril, avez-vous eu des troupes qui étaient sous vos

12 ordres et qui se sont déplacées sur la route de Vitez-Busovaca dans les

13 deux sens ?

14 M. Blaskic (interprétation). – Il faut que je vois ma

15 chronologie pour le constater parce que de mémoire, je ne peux pas m'en

16 souvenir. Bien évidemment, j'avais des troupes qui

17 étaient sous mes ordres. Cela, je ne le conteste pas. Si vous pouvez me

18 dire également l'heure pour me reporter un peu à ma chronologie et voir

19 quelles étaient les informations que j'avais à ce moment-là ?

20 M. Kehoe (interprétation). - Généra, si vous ne pouvez pas

21 répondre de cette manière-là sans vous référer à votre chronologie, je

22 vais poser une autre question. Les troupes qui se trouvaient à Nadioci,

23 Santici et Ahmici, vous ont-ils dit que l'après-midi du 16 avril Ahmici

24 était en flammes ? Est-ce que qui que ce soit membre de ces troupes vous a

25 donné une telle information ?

Page 20807

1 M. Blaskic (interprétation). – Je n'avais pas de telles

2 informations.

3 M. le Président. – Bien, on y est arrivé, finalement.

4 M. Kehoe (interprétation). - Nous pouvons revenir maintenant à

5 la carte. Pour la voir, je vais vous demander de vous levez, de prendre le

6 feutre qui se trouve à votre droite. L'huissier va vous aider.

7 Général, voulez-vous utiliser ce feutre, s'il vous plaît et

8 encercler Ahmici et l'indiquer par le chiffre 1 ?

9 (Le témoin s'exécute.)

10 Et maintenant, voulez-vous bien encercler le village Rovna et

11 l'indiquer par le chiffre 2 ?

12 (Le témoin s'exécute.)

13 M. Blaskic (interprétation). – Quel Rovna ? Parce qu'il y a

14 Donja et Gornja ? Peut-être souhaitez-vous que je marque les deux ?

15 M. Kehoe (interprétation). – Les deux, s'il vous plaît. Si vous

16 voulez bien encercler donc tout ce secteur, y compris Gronja et Donja

17 Rovna et l'indiquer par le chiffre 2 ?

18 (Le témoin s'exécute.)

19 Et maintenant, voulez-vous encercler le village Bare et le

20 marquer par le chiffre 3 ?

21 (Le témoin s'exécute.)

22 Général, est-ce qu'à partir de Rovna et de Bare, il était

23 possible de voir le village d'Ahmici ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Depuis Bare, je crois qu'il était

25 impossible de voir Ahmici parce que Bare se trouve dans une vallée.

Page 20808

1 S'agissant de Donja Rovna, parce qu'il y a le mont Safradin, je n epeux

2 pas dire avec certitude que l'on peut voir Ahmici à partir de Donja Rovna,

3 donc je ne me prononce pas. Mais pour Bare, je suis sûr que c'est

4 impossible parce qu'au-dessus de Bare, il y a des collines et des monts.

5 M. Kehoe (interprétation). – Vous pouvez vous asseoir, général.

6 Général, à 18 heures 02, le 16, vous avez dit aux juges de cette

7 Chambre, en page 18 580 du transcript, ligne 6, je cite : "A 18 heures 02,

8 j'ai reçu des informations de M. Kordic qui m'a dit que les hommes de

9 Pasko étaient en train de monter les flancs de la colline et que lui avait

10 rempli son rôle."

11 Dario Kordic regardait les hommes de la police militaire

12 remonter une colline à partir d'Ahmici pour atteindre une certaine

13 altitude, n'est-ce pas ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas dit que Dario Kordic

15 avait regardé les hommes de la police militaire, j'ai dit qu'il m'avait

16 téléphoné pour me transmettre une information dont nous avons parlé tout à

17 l'heure. C'est l'information que j'ai reçue de sa bouche.

18 M. Kehoe (interprétation). - Général, où était Kordic quand il

19 vous a dit que les hommes de Pasko étaient en train de remonter les flancs

20 de la colline ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Je suppose qu'il pouvait se

22 trouver en deux endroits possibles : soit à son siège de Tisovci, soit

23 chez lui à la maison où il a pu m'appeler par téléphone, parce que c'est

24 par téléphone qu'il m'a transmis cette information.

25 M. Kehoe (interprétation). – Général, êtes-vous en train de dire

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1 dans votre déposition que, d'une certaine façon, il reçoit des

2 informations relatives à Ahmici, c'est-à-dire à

3 une distance de 5 kilomètres par rapport à vous et qu'il va d'abord à

4 Busovaca, chez lui, à la maison pour vous les retransmettre à Vitez, pour

5 vous dire que Pasko fait grimper une colline à ses hommes ? C'est cette

6 séquence d'événements que vous voulez nous donner ?

7 M. Blaskic (interprétation). - Non, ce que j'affirme, c'est qu'à

8 18 heures 02, c'est la nature de l'information que j'ai reçue de lui par

9 téléphone. Maintenant, de quelle façon, lui est parvenu à cette

10 information ? Est-ce quelqu'un qui lui a transmise à lui par téléphone ou

11 pas ? Je ne sais pas, car je suis incapable de confirmer avec certitude la

12 position exacte sur laquelle il se trouvait. Je ne peux que supposer qu'il

13 se trouvait à Tisovac.

14 M. Kehoe (interprétation). - Mais lui avez-vous posé la

15 question ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Non. Quoi ? Qu'est-ce que je lui

17 ai demandé ? Où il se trouve exactement ? Quoi ?

18 M. Kehoe (interprétation). - Lui avez-vous demandé où il se

19 trouvait au moment où il vous transmettait cette information selon

20 laquelle au moment où selon les hommes de Pasko étaient en train de

21 grimper la colline car ce sont les mots que vous avez utilisés : "étaient

22 en train de grimper les flancs de la colline" ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Je ne lui ai pas demandé où il se

24 trouvait exactement. J'ai reçu l'information qu'il me transmettait et,

25 pendant tout ce temps-là, les combats étaient en cours. Les conversations

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1 par téléphone étaient donc très courtes. Il y avait de nombreux appels, je

2 n'avais, à ma disposition pour communiquer, que le téléphone.

3 M. Kehoe (interprétation). – Général, si quelqu'un vous dit que

4 les hommes de Pasko sont en train de grimper les flancs de la colline,

5 cela vous indique, n'est-ce pas, que cette personne est en train de

6 regarder ces hommes qui grimpent les flancs de la colline, n'est-ce pas ?

7 M. Blaskic (interprétation). - Ce n'est pas obligatoire. Il

8 aurait pu recevoir cette information de quelqu'un et me la transmette. Ce

9 que vous dites est une possibilité mais, quoi

10 qu'il en soit, il aurait pu aussi recevoir cette information par téléphone

11 puis me la transmettre.

12 M. Kehoe (interprétation). - Général, passons à la suite de ce

13 que vous avez dit. Lorsque Kordic vous a dit que Pasko, je cite et je lis

14 le compte rendu d'audience à partir de la ligne 8 : "avait rempli son

15 rôle", qu'avez vous compris que Kordic avait fait ? Ou plutôt que pensiez-

16 vous que Kordic avait à l'esprit ? De quoi parlait-il quand il vous a dit

17 que Pasko avait ses hommes qui avaient remonté la colline et qu'il avait

18 rempli son rôle ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Je pensais qu'il parlait des

20 opérations de combats qui se déroulaient entre les membres de l'armée de

21 Bosnie-Herzégovine, aux abords immédiats de l'école et de la mosquée où se

22 trouvaient des forces nombreuses de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Je

23 pensais que c'était donc à cet endroit que se déroulait le combat en

24 question et qu'il y avait eu retrait d'une partie des forces de l'armée de

25 Bosnie-Herzégovine.

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1 M. Kehoe (interprétation). – Mais, général, Kordic vous a-t-il

2 dit que le village était en feu ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Tout ce que Kordic m'a dit est

4 consigné et j'en ai parlé. C'est consigné dans mon journal d'opérations.

5 Il ne m'a pas fourni une information de ce genre.

6 M. Kehoe (interprétation). - Mais à partir de 18 heures 06, le

7 soir du 16, vous continuez à maintenir que vous n'aviez pas reçu des

8 informations selon lesquelles pratiquement la totalité du village d'Ahmici

9 avait été incendiée, n'est-ce pas ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Je ne disposais pas d'information

11 de cette nature.

12 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, nous allons

13 maintenant passer à un autre élément de preuve. Il s'agit, Monsieur le

14 Président, de la pièce à conviction 270. Nous n'allons pas revoir la

15 totalité du compte rendu à ce sujet. Nous n'allons en faire passer que

16 quelques pages. Il s'agit de l'incendie d'Ahmici, le 16 avril 1993, en

17 soirée. C'est une cassette vidéo qui provient de la télévision de Busovaca

18 par le biais du gouvernement bosniaque. J'en ai

19 des exemplaires supplémentaires pour les cabines d'interprètes et pour

20 tous ceux qui en auraient besoin. Il s'agit donc de la pièce, d'une

21 transcription de la cassette vidéo qui est la pièce à conviction 270E. Il

22 en existe une version française.

23 M. le Président (interprétation). - Monsieur le Greffier, nous

24 gardons ce compte rendu avec un nouveau numéro ?

25 M. Abtahi. - Je vais juste vérifier. Je vous demande juste une

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1 seconde.

2 M. le Président (interprétation). - Pendant ce temps, passons à

3 la vidéo, s'il vous plaît.

4 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, il n'est pas

5 nécessaire d'affecter une nouvelle cote à cette pièce, car c'est un

6 élément de preuve qui a déjà été versé au dossier, de même que la

7 transcription de cette cassette vidéo. Il serait donc sans doute plus

8 facile de conserver la même cote mais je demanderai aux interprètes de

9 bien vouloir nous aider en traduisant à vue la transcription de la

10 cassette vidéo.

11 Peut-on maintenant baisser un peu les lumières et diffuser cette

12 partie de la cassette ?

13 (Projection de la vidéo)

14 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, nous avons

15 le début de cette séquence qui commence en page 2 de votre version,

16 "1 heure 46, 16".

17 M. le Président (interprétation). - J'y suis en ce qui me

18 concerne, alors allons-y.

19 M. Kehoe (interprétation). - Merci.

20 "Actuellement, il est 21 heures 30, nous passons devant la

21 maison du défunt Arapovic dont le corps a été retiré de la morgue. Nous

22 n'avons pas eu l'occasion de voir sa photographie. Nous nous dirigeons

23 maintenant vers le village de Hasno d'où nous pourrons voir ce qui s'est

24 passé à Ahmici. Je suis caméraman et je me trouve dans ce véhicule avec un

25 (prénom inaudible, Ivo ou Ide) Batinic et Drago Smoljo qui est au volant.

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1 Voici un autre lieu assez important sur le plan stratégique. Il

2 se situe à la frontière entre les municipalités de Vitez et de Busovaca.

3 Je pense qu'à l'avenir Vitez et Busovaca seront aussi proches que des

4 frères.

5 Vous pouvez nous parler d'Ahmici ?

6 Voici Ahmici en feu.

7 Nous entendons des coups de feu au loin. D'où viennent ces coups

8 de feu ? De derrière Ahmici. Cela vient d'au-dessus d'Ahmici. Quel est le

9 nom de cette ferme, là ? Que pensez-vous des combats d'aujourd'hui ?

10 Etaient-ils violents ? Une balle m'est passé à côté de la tête. Les balles

11 ont sifflé toute la journée. Nous ne pouvions pas bouger. Entendez-vous

12 cela de ce côté ?

13 C'est Ravan que vous voyez brûler, là où se trouve l'ancienne

14 école. Ce sont nos forces. Donc cela veut dire que nous pouvons dire

15 qu'Ahmici est tombée, si c'est le cas dès que l'armée tirera. C'est là

16 qu'elle était la plus forte. A moins que les Musulmans ne soient de ce

17 côté-ci. C'est impossible, ils étaient tous dans cette forêt. Ils ont été

18 chassés de la mosquée et de l'école. Leur place forte était près de la

19 mosquée.

20 Plusieurs personnes parlent en même temps. Ils m'ont appelé par

21 téléphone. Vous avez vu quelque chose ? Nous avons passé la journée à

22 regarder depuis l'arrière de la maison."

23 (Plusieurs personnes parlent en même temps.)

24 "Ils étaient tous dans la forêt. Ils sont tous les nôtres. Vous

25 avez des informations sur ce qui se passe à …(inaudible) ? On a annoncé

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1 qu'il y avait des combats de rue et que nos forces avancent pas à pas et

2 prennent le contrôle de Kruscica. Kruscica ? Ils montent."

3 (Plusieurs personnes parlent à la fois.)

4 Ils ont fait des prisonniers et fini le nettoyage pour reprendre

5 nos forces à…(inaudible). Nos forces sont-elles à Pacici ou à Kovacevici ?

6 Je peux descendre jusqu'à

7 (inaudible). Ce n'est pas possible aujourd'hui. Je plaisantais.

8 (Inaudible) pour enlever lui et les réinstaller tous les deux, la réserve

9 les autres. OK, mets-toi d'accord avec eux et fait le faire immédiatement

10 pendant la nuit. Oui, il faut le faire tout de suite. Dès que tu l'as

11 fait, reviens tout de suite.

12 Ils pensaient que nous commencerions… (inaudible)…Puis nous

13 appelons."

14 (Plusieurs personnes parlent en même temps.)

15 "L'opération doit être coordonnée. Vous devez respecter celui

16 qui dirige. Vous êtes ici ensemble. Vous devez vous mettre d'accord entre

17 vous sur la personne qui, le moment où, dirige la patrouille."

18 (Plusieurs personnes parlent même temps.)

19 "C'est ce que nous avons fait. A l'avenir, que ce soit lui ou

20 Joker demain, ou Alpha qui dirige les opérations, qui sait qui ce sera

21 (inaudible), aucun doute il doit être respecté.

22 Ecoutez, nous l'avons fait sans tuer aucun de nos hommes. Il y a

23 des munitions, mais elles doivent être utilisées de façon rationnelle. La

24 police était là et elle nous a arrêtés alors que tout allait bien.

25 Mais quand on te dit arrête-toi, tu t'arrêtes. Il est

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1 pratiquement quoi, il est 10 heures. Vous devez être de retour à minuit et

2 demi au plus tard. C'est ce que nous allons faire. Il y aura ces trucs,

3 des cigarettes et le reste. Vous dormirez. Comment savez-vous qui peut

4 venir ? Il ne faut jamais faire confiance au diable. Donc nous sommes tous

5 d'accord. Je sais que vous êtes des types bien et vous devez l'écouter. Ne

6 vous inquiétez pas.

7 Tiens la main. Nous devions tous nous écouter les uns les

8 autres.

9 Nous entendons des coups de feu dans la municipalité de Vitez,

10 le long de la route de Vitez, sur la gauche, dans la direction de

11 Vranjska.

12 Lentement nous sortons du village de Hrasno d'où nous pouvions

13 voir Ahmici, le village qui brûle et entendre les derniers coups de feu de

14 la bataille pour Ahmici. Les jeunes

15 qui défendent le village disent que la mosquée a aussi été détruite.

16 Nous verrons les photographies demain parce que c'est vraiment

17 la guerre ici, une guerre importante dans la région de la Bosnie centrale.

18 Il est 22 heures 30, nous entrons dans Busovaca libérée. De

19 temps à autres, une voiture passe. Mais pour l'essentiel, c'est le désert.

20 Les gens sont chez eux, les hommes sont sur les positions qu'ils tiennent,

21 les femmes et les enfants à la maison.

22 (Inaudible)… à Busovaca. La police militaire nous escorte. Zeljo

23 est au volant, Zeljo Komsic et deux policiers sont présents. Le premier

24 est Ljubo Akrap et le deuxième Jozo Akrap. Nous nous dirigeons vers une

25 région qui se trouve à cheval sur la frontière entre Vitez et Busovaca.

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1 Quelque chose est en train de s'y passer. Nous allons également essayer

2 d'entrer dans Ahmici. On entend des coups de feu provenant de Hrasno.

3 Maintenant, nous allons tenter de voir ce qui se passe à l'intérieur du

4 village.

5 Jelko m'a dit qu'il avait pleuré comme un enfant aujourd'hui,

6 bien sûr puisque des frères d'arme sont en train de mourir. Nous savons

7 pourquoi ils meurent : la liberté vaut cher et il vaut mieux l'obtenir de

8 cette manière que de cesser d'exister.

9 (Plusieurs personnes parlent en même temps)

10 Passage inaudible.

11 "C'est de Busovaca, prends-le.

12 Où l'avez vous trouvé ?

13 Donne, c'est le rapport. Très bien, tout va bien.

14 C'est ici que se trouve le quartier général de la police. Nous

15 nous dirigeons vers le village d'Ahmici à présent libéré. Nous voyons des

16 flammes, là haut. Il serait plus juste de parler d'un village détruit, et

17 ainsi libéré.

18 (Rires et quelques mots inaudibles).

19 Voilà, nous voyons là haut des flammes.

20

21 Fin de séquence.

22 (Les interprètes de cabine française signalent qu'elles ont lu

23 la transcription de la cassette vidéo, n'ayant pratiquement rien entendu

24 du son de cette cassette vidéo).

25 M. le Président. - Merci.

Page 20817

1 M. Kehoe (interprétation). - Général, vous aviez bien un

2 officier responsable de l'information et de la propagande au sein de votre

3 commandement, n'est-ce pas ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Oui, effectivement.

5 M. Kehoe (interprétation). - Et le nom de cet homme, quel était-

6 il ?

7 M. Blaskic (interprétation). - Marko Prskalo.

8 M. Kehoe (interprétation). - Cet homme était-il en contact avec

9 les médias locaux à Vitez et à Busovaca ?

10 M. Blaskic (interprétation). - De quel moment, parlez-vous ?

11 Avant le conflit, pendant le conflit ou après le conflit ?

12 M. Kehoe (interprétation). - Avant, pendant et après, général.

13 M. Blaskic (interprétation). - Avant le conflit, je crois qu'il

14 était en contact avec les médias mais, au moment où ces événements ont eu

15 lieu, il n'y a pas eu de nombreux contacts, car nous avions de grandes

16 difficultés de communication, de transmission. Nous étions regroupés pour

17 l'essentiel dans l'hôtel Vitez et nous étions condamnés à ne recevoir que

18 les appels téléphoniques qui nous parvenaient.

19 M. Kehoe (interprétation). - La télévision de Busovaca a-t-elle

20 partagé ce film avec votre officier responsable de la propagande et de

21 l'information. Ce film qui montre qu'Ahmici brûlait la nuit du 16 et que

22 des journalistes s'étaient rendus dans le village pour couvrir l'incendie

23 du village au cours de la nuit du 16 ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Je n'avais pas ces informations à

25 ce moment-là. Pour ce qui me concerne, je les ai obtenues, ici, pour la

Page 20818

1 première fois dans ce Tribunal. S'agissant du

2 commentaire et du film tourné par ces journalistes, ils sont venus de

3 Busovaca, donc pas de Vitez. Ils provenaient de Busovaca et c'est en

4 provenance de Busovaca qu'ils ont filmé ce qu'ils ont pu voir dans les

5 zones où ils se sont rendus.

6 M. Kehoe (interprétation). - Général, votre officier responsable

7 de l'information et de la propagande, Marko Prskalo, était-il en contact

8 avec les responsables de l'information et de la propagande des brigades ?

9 M. Blaskic (interprétation). - Avant le conflit, oui,

10 effectivement. Pendant le conflit, nous ne pouvions communiquer que par

11 bulletin d'information déterminé. Mais, chacune des communications

12 téléphoniques est reprise dans mon journal d'opérations dont j'ai parlé

13 dans ma déposition.

14 Pour ce qui me concerne, la seule chose sur laquelle je puisse

15 donc m'appuyer est la chronologie très précise que j'ai tenue à partir de

16 la journée du 16.

17 M. Kehoe (interprétation). - Mais en tant qu'officier de

18 l'information et de la propagande de votre commandement, Marko Prskalo

19 n'avait-il pas, dans ses tâches, dans les tâches qui lui étaient

20 assignées, la nécessité de rester le plus possible en contact avec les

21 officiers chargés de la propagande dans les différentes brigades pour vous

22 rapporter le maximum d'informations ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Bien entendu, cela faisait partie

24 de son travail mais il arrive, parfois, que les circonstances imposent de

25 s'adapter aux possibilités. Et compte tenu des circonstances dans

Page 20819

1 lesquelles nous étions, entourés d'un nombre très restreint de

2 collaborateurs (7 au total) et manquant grandement des moyens nécessaires

3 pour communiquer en plein combat, eh bien ces circonstances étaient

4 telles, qu'il était parfois impossible d'utiliser les deux téléphones à

5 notre disposition pour des communications supplémentaires.

6 M. Kehoe (interprétation). - En quelques mots, Général, nous

7 pouvons donc dire que la télévision de Busovaca sait qu'Ahmici est en feu,

8 et qu'Ahmici a été détruite, le soir du 16. Alors que, vous, le commandant

9 militaire de toute la région, vous ne le saviez pas ? C'est bien cela ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Je savais ce qui m'avait été dit

11 dans les informations reçues de mes subordonnés. Cela, je ne le savais

12 pas. Je ne l'ai pas su à ce moment-là; C'est ainsi.

13 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien, Général, passons au

14 lendemain du 16, la journée du 17 et ne perdons pas de vue que vous nous

15 avez dit avoir reçu cette lettre du colonel Stewart le 22. Le 17 avril,

16 Anto Valenta utilisait-il toujours le bureau de Franjo Nakic ou votre

17 bureau dans l'Hôtel Vitez ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Mon bureau, il ne l'a

19 certainement jamais utilisé. Quant à savoir, s'il a utilisé le bureau de

20 M. Nakic, je ne sais pas. Je crois qu'il a passé la plus grande partie de

21 la journée du 17 avril chez lui, à la maison. Mais je n'exclus pas la

22 possibilité qu'il se soit peut-être trouvé dans le bureau de

23 M. Franjo Nakic, à l'Hôtel Vitez. Ce que je sais avec certitude, c'est

24 qu'il n'a pas pu se rendre dans son bureau à lui, à Travnik.

25 M. Kehoe (interprétation). – Général, quelle était la distance

Page 20820

1 qui séparait l'Hôtel Vitez du cinéma où était installé le quartier

2 générale de la brigade de Cerkez ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Je ne peux donner qu'une réponse

4 approximative. Je dirais 30 mètres ou peut-être 50 mètres au maximum, mais

5 je ne connais pas exactement cette distance. En tout cas, les deux

6 bâtiments sont très près l'un de l'autre.

7 M. Kehoe (interprétation). – Le 17 avril, ou peu après, Anto

8 Valenta ou Mario Cerkez vous ont-ils dit qu'ils avaient eu une discussion

9 avec le commandant Morsink de la Mission d'observation européenne, donc

10 l'ECMM, pour parler des crimes et des destructions constatés à Ahmici ?

11 M. Blaskic (interprétation). - J'ai la date du 17 avril dans ma

12 chronologie, je devrais la consulter mais, pour autant que je me rappelle,

13 je n'ai pas eu de contact le 17 avril avec Anto Valenta. Quant à savoir si

14 Cerkez m'a donné une telle information, il faudrait que je vérifie. Je ne

15 me rappelle pas. Est-ce que je peux consulter ma chronologie ?

16 M. Kehoe (interprétation). - Mais s'il vous a donné cette

17 information le 17, cela voudrait dire que vous avez reçu l'information sur

18 Ahmici le 17 et non pas le 22, n'est-ce pas ?

19 M. Blaskic (interprétation). - La première information

20 concernant les événements d'Ahmici, je l'ai reçue le 22 avril 1993.

21 M. le Président (interprétation). - Nous savons, essayons de

22 rester... Nous connaissons votre thèse, Général Blaskic. Là, je crois que

23 le Procureur essaie de savoir si vous n'auriez pas pu, peut-être, le

24 savoir avant. Essayons de nous concentrer sur ces questions. Votre thèse,

25 je crois que les Juges la connaissent et, pour l'instant, l'admettent

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1 comme telle. Alors la question est très précise. M. le Procureur vous a

2 posé une question très précise.

3 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, je devrais

4 consulter ma chronologie concernant le 17 avril.

5 M. le Président (interprétation). – Rapidement, puisque vous

6 connaissez très bien votre chronologie, vous nous l'avez donnée minute par

7 minute. Vous pouvez très bien la retrouver très vite, s'il vous plaît.

8 Pendant ce temps-là, Monsieur le Procureur, vous pouvez bien

9 expliquer aux Juges la focalisation de votre question. Est-ce que j'ai

10 bien compris ? D'après vous, Monsieur le Procureur, Anto Valenta et Mario

11 Cerkez, qui sont des voisins de bureaux du commandant de la zone

12 opérationnelle, auraient rencontré…, je ne sais plus qui, et seraient donc

13 à même de connaître ce qui se passe à Ahmici ?

14 M. Kehoe (interprétation). - Permettez-moi d'utiliser la carte.

15 Il s'agit de la pièce à conviction de l'accusation n° 45. C'est la photo

16 du bureau de M. Cerkez qui se trouvait dans la salle de cinéma, dans

17 l'immeuble du cinéma qui était à proximité, à 30 ou 50 mètres par rapport

18 à l'Hôtel Vitez. C'est là qu'a eu lieu une réunion avec les responsables

19 de l'ECMM. Valenta et Cerkez ont parlé d'Ahmici, le 17. L'officiel, le

20 responsable de l'ECMM, était le colonel Morsink qui, à l'époque, était le

21 commandant et il a témoigné ici.

22 M. Abtahi. - Vous avez demandé la pièce 45 de l'accusation ?

23 M. Kehoe (interprétation). - Oui, c'était sur la liste que je

24 vous ai fournie. Mais nous pouvons passer à autre chose.

25 (Les Juges se concertent sur le siège.)

Page 20822

1 M. le Président (interprétation). - Général Blaskic, peut-être

2 que vous avez pu consulter ? C'est quand même un élément qui serait très

3 important et vous nous avez montré une très grande mémoire. Vous n'avez

4 peut-être rien dans votre chronologie sur une telle rencontre ?

5 M. Blaskic (interprétation). - J'essaie de me souvenir et, pour

6 autant que je me souvienne, et d'après la chronologie que j'ai consultée,

7 je n'ai pas eu de contact avec M. Valenta alors que Cerkez ne m'a pas

8 parlé du crime d'Ahmici ni de cette réunion sur le crime d'Ahmici.

9 M. Kehoe (interprétation). - Très bien, passons à autre chose.

10 Je voudrais soumettre au témoin le document qui est un extrait du journal

11 du colonel Stewart, en date du 4 mai 1993, du lieutenant-colonel Stewart.

12 M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce de l'accusation 695.

13 M. Kehoe (interprétation). - Veuillez vous focaliser sur la

14 page 2 de cette partie. C'est le dernier paragraphe avant

15 "mercredi 5 mai".

16 C'est la partie qui commence avec les mots "lorsque le déjeuner

17 s'est terminé" ; est-ce qu'on peut montrer cela un petit peu mieux pour

18 les interprètes, s'il vous plaît ? Merci.

19 Comme je l'ai dit, Général, il s'agit là d'un extrait du journal

20 du Colonel Stewart du 4 mai 1993, où il est noté la chose suivante :

21 "lorsque le déjeuner s'est terminé, j'ai pris les ambassadeurs à Vitez et,

22 là, j'ai rencontré Valenta et Blaskic. J'ai dit que rien ne s'était passé

23 concernant la commission d'enquête concernant Ahmici depuis 18 jours, que

24 personne n'était poursuivi ou arrêté, pour autant que je le savais, et que

25 je savais les noms des accusés ; j'ai dit que je connaissais les noms des

Page 20823

1 accusés, que j'allais remettre aux ambassadeurs de l'ECMM.

2 J'ai insisté pour dire que le gouvernement de Vitez était

3 impliqué lui aussi dans le crime et le génocide. Là, je voulais dire, je

4 voulais parler de Valenta, qui avait dit qu'il n'avait rien su concernant

5 Ahmici jusqu'à deux jours plus tard et puis je parlais aussi de Blaskic et

6 de Skopljak".

7 Alors, Général, ici, il y a un extrait d'un commentaire

8 concernant Anto Valenta, qui a dit qu'il a appris sur les événements

9 d'Ahmici deux jours plus tard, c'est-à-dire le 18 avril 1993. Est-ce exact

10 étant donné que le crime à Ahmici a eu lieu le 16 avril ?

11 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas à quel moment

12 M. Valenta a appris ce qui s'est passé et je n'ai pas reçu cette

13 information de la part d'Anto Valenta.

14 Ceci n'est pas tout à fait exact étant donné que j'ai été

15 présent à la réunion dès le début et ici, c'est indiqué dans le journal

16 que M. Valenta était là lui aussi, mais la réunion s'est tenue entre

17 M. Thébault et le Colonel Stewart avec M. Valenta. Et moi-même, j'étais

18 invité plus tard dans la conclusion de cette réunion.

19 Mais Valenta, je ne sais pas quand il a appris ce qui s'est

20 passé à Ahmici, mais moi, c'était le cas seulement le 22 avril, je l'ai

21 appris de la part du Colonel Stewart.

22 M. Kehoe (interprétation). - Général, à l'époque, c'est-à-dire

23 le 18 avril, Valenta était dans le bureau de Franjo Nakic à l'hôtel

24 Vitez ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Pendant tout ce temps du 16 avril

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1 jusqu'au 19, j'étais en train de communiquer par téléphone dans la cave de

2 l'hôtel Vitez ; pour autant que je sache, Valenta, s'il a eu une réunion,

3 peut-être il a été dans le bureau de Franjo Nakic, mais pour la plupart du

4 temps, il a été chez lui dans la ville de Vitez.

5 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que Valenta est venu vous

6 voir après la réunion du 18 pour vous dire ce qui s'est passé à Ahmici,

7 Général ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Non, il ne m'a pas posé cette

9 question et je suis étonné de voir que ceci ne figure pas dans ce journal

10 parce que, pendant cette réunion-là, j'ai

11 demandé qu'une commission conjointe soit créée pour mener une enquête

12 concernant Ahmici et j'ai demandé l'aide du Colonel Stewart et de

13 M. Thébault en disant que c'était nécessaire d'avoir une commission

14 conjointe avec le HVO, avec l'armée de Bosnie-Herzégovine, avec la Croix-

15 Rouge internationale et l'ECMM.

16 M. Kehoe (interprétation). - Ce n'est pas la question. Mais au

17 fond, Général, d'après cela, et sur la base de votre déposition, on dirait

18 que Valenta était mieux informé le 18 avril que vous-même ; est-ce que

19 vous affirmez cela ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Ce que j'affirme, c'est que

21 toutes les informations que j'ai reçues de mes subordonnés, je les ai

22 enregistrées, notées dans mon journal opérationnel et j'ai dit également

23 que j'agissais suite aux informations reçues.

24 M. Kehoe (interprétation). - Passons maintenant aux pièces à

25 conviction de l'accusation 456/60 et 456/55. Mais nous allons commencer

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1 avec 456/60.

2 456/60 est un document rédigé par Slavko Marin, qui était votre

3 chef d'état-major, ou chef opérationnel à l'époque, en date du

4 17 avril 1993, concernant le massacre des civils à Kuber. Dans le premier

5 paragraphe, sur la base des informations reçues par la population civile

6 vivant à proximité des villages de Jelinak et Putis, dans la zone de

7 Kuber : "Nous souhaitons vous informer du fait que les extrémistes

8 musulmans tuent la population civile dans les villages susmentionnés et

9 dans la zone limitrophe de Kuber".

10 Maintenant, le général de brigade Marin nous a dit que cette

11 information n'était pas correcte. Cependant, Général, vous et votre

12 commandement étiez en train de recevoir des informations de la part de la

13 population civile concernant les crimes qui se produisaient dans la vallée

14 de la Lasva et aux alentours, n'est-ce pas ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Tout d'abord, il ne s'agit pas

16 d'un ordre donné par

17 Slavko Marin, mais d'une information demandant que cette information sur

18 le massacre soit vérifiée. Et pour autant que je sache, en ce qui concerne

19 certaines personnes disparues, qui sont disparues dans la région de Kuber,

20 encore aujourd'hui, nous ne savons pas ce qui leur est arrivé, en ce qui

21 concerne un certain nombre d'entre eux.

22 Nous nous sommes adressés aux instances qui étaient dans une

23 situation plus favorable que la notre de vérifier cette information, donc

24 Slavko Marin a agi de bonne foi dans la tentative de vérifier

25 l'information que nous avons reçue. Et il a envoyé cette information à la

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1 Forpronu étant donné que la Forpronu disposait des véhicules blindés et

2 pouvait se déplacer afin de vérifier toute information.

3 M. Kehoe (interprétation). - Général, je vais parler en termes

4 très concrets. Vous étiez en train de recevoir des informations de la part

5 de la population civile concernant des crimes, n'est-ce pas ?

6 M. Blaskic (interprétation). - La plupart de ces informations,

7 les civils les envoyaient à la police civile. C'était rare que nous

8 recevions ce genre d'informations, ou bien c'était envoyé au centre de la

9 municipalité de Vitez, c'était une instance civile qui nous transmettait

10 parfois ces informations. Moi, je doute que des civils nous contactaient

11 directement au sein du commandement étant donné que les lignes

12 téléphoniques étaient sans cesse occupées.

13 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que vous étiez en train de

14 recevoir, est-ce que vous avez reçu des informations de la part de la

15 population civile concernant les crimes qui ont été commis à Ahmici ?

16 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit à quel moment j'ai

17 reçu l'information concernant les crimes à Ahmici et j'ai insisté que mes

18 subordonnés directs m'informent de manière très exacte et précise de tous

19 les événements. Et je n'avais que deux téléphones à ma disposition.

20 M. Kehoe (interprétation). - Parlons maintenant de la pièce à

21 conviction 456/55. C'est votre ordre en date du 18 avril 1993. Vous avez

22 émis cet ordre. C'est sur la base de l'ordre du chef d'état-major

23 principal, et dans le paragraphe 4, vous dites recueillir les informations

24 pertinentes concernant les auteurs du conflit, les causes des expulsions

25 de la population, les meurtres des civils et des soldats, les incendies

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1 des maisons et d'autres immeubles.

2 Et ceci a été adressé à tous les commandants des unités du HVO

3 dans la zone opérationnelle de la Bosnie centrale.

4 Général, c'est un ordre que vous avez envoyé le 18 et ma

5 question est la suivante : est-ce que vous avez reçu une information

6 concernant les crimes qui ont été commis à Ahmici de la part d'une

7 quelconque unité du HVO dans la zone opérationnelle ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas reçu d'informations

9 concernant Ahmici et j'ai rédigé cet ordre sur la base de l'ordre que j'ai

10 reçu de la part du chef d'état-major principal du HVO, et c'est un ordre

11 identique à l'ordre que j'ai reçu.

12 Et tout comme le chef d'état-major principal l'a fait, dans le

13 point 4, j'ai demandé que l'on recueille toutes les informations

14 pertinentes, étant donné que lorsqu'il y a des opérations de combats dans

15 une zone urbaine, il est possible de prévoir qu'il y ait eu également des

16 destructions de bâtiments.

17 M. Kehoe (interprétation). - Parlons maintenant de la date du

18 19, et je vais vous lire une partie de la déposition du Dr Mujezinovic,

19 page 1 017, ligne 12 :

20 "Question : Je souhaite attirer votre attention sur le 19 avril

21 1993. Est-ce qu'à ce moment-là, on a parlé d'Ahmici ?

22 "Réponse : Oui. Jusque là, je ne savais pas ce qui s'est passé à

23 Ahmici. Deux infirmières d'Ahmici, dont l'une travaillait à l'hôpital de

24 Travnik avec moi, qui s'appelle Ankica Tuda, je l'ai emmenée à Vitez au

25 centre médical afin qu'elle puisse travailler avec moi. Puis, il y avait

Page 20828

1 une autre infirmière que je ne connaissais pas avant. Elle travaillait

2 dans la clinique et

3 son nom de famille était Santic. Son mari venait d'Ahmici. Je connaissait

4 son père, Mate.

5 Et Ankica, l'autre infirmière, m'a demandé si je savais ce qui s'était

6 produit à Ahmici. J'ai dit que non. Elles m'ont dit qu'à 1 heure du matin,

7 les soldats du HVO avaient évacué tous les Croates d'Ahmici vers la Lasva

8 et qu'ils ont participé aux événements. Elles ont commencé à pleurer et

9 m'ont dit…"

10 A ce moment-là, le Juge Jorda a fait remarquer ceci :

11 "Cela veut dire donc que tous les Musulmans étaient expulsés. Le

12 témoin a dit : Non, j'ai dit la chose suivante : les témoins m'ont informé

13 du fait que le HVO a Ahmici avait retiré tous les Croates, les femmes et

14 les enfants, les ont fait sortir d'Ahmici vers la Donja Lasva, qu'aucun

15 civil croate n'est resté à Ahmici.

16 Le matin, vers 5 ou 6 heures du matin, Ahmici a subi une attaque

17 et ils ont tué tous ceux qu'ils ont pu tuer : les femmes, les enfants, les

18 animaux, les vaches. Elles m'ont dit que c'était quelque chose d'atroce de

19 voir ces vaches.

20 Question : Docteur Mujezinovic, ces deux infirmières étaient-

21 elles musulmanes ou croates ?

22 Réponse : L'une était Croate.

23 Question : Quelle était son histoire ?

24 Réponse : Elles pleuraient, les infirmières pleuraient."

25 Général, avez-vous eu des contacts avec le personnel médical du

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1 centre médical de Vitez avant le 22 avril 1993 ?

2 M. Blaskic (interprétation). – Je ne me souviens pas avoir eu

3 des contacts avec le personnel médical de Vitez, sauf que je sais que le

4 16 au matin, le centre médical de Vitez a subi une attaque. Je sais aussi

5 que le personnel a été déplacé ailleurs, dans la ville de Vitez, afin de

6 sauver la vie des médecins.

7 En ce qui concerne le 19 avril, c'était l'une des journées les plus

8 difficiles et j'ai été

9 extrêmement préoccupé par le fait que l'armée de Bosnie-Herzégovine

10 essayait de prendre le contrôle de la ville de Busovaca. L'attaque qu'ils

11 ont lancé a commencé à 1 heure 40 et a duré jusqu'à après minuit.

12 M. Kehoe (interprétation). - D'après votre déposition, vous

13 n'avez pas reçu d'information du personnel médical de Vitez concernant ces

14 atrocités qui ont eu lieu à Ahmici ?

15 M. Blaskic (interprétation). – J'ai déjà dit que je n'étais pas

16 au contact avec eux. Je n'ai pas reçu d'informations sur les crimes à

17 Ahmici avant le 22 avril 1993.

18 M. Kehoe (interprétation). – Général, nous allons parler d'une

19 autre partie de la journée du 19. Est-ce que vous connaissez Zvonko

20 Cilic ?

21 M. Blaskic (interprétation). – Oui, je connais Zvonko Cilic.

22 M. le Président. – Nous allons suspendre, si cela ne vous

23 dérange pas ?

24 M. Kehoe (interprétation). – Très bien, Monsieur le Président.

25 M. le Président. – Nous suspendons et reprendrons à 14 heures

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1 30.

2 L'audience est suspendue à 12 heures 50.

3 L'audience est reprise à 14 heures 35.

4 M. le Président. - L'audience est reprise, veuillez vous

5 asseoir. Je rappelle deux choses pour la galerie du public, nous sommes

6 dans le contre-interrogatoire de l'accusé, mais qui témoigne, qui est en

7 position de témoin. D'autre part, je donne la parole à M. le Greffier qui

8 veut faire une petite précision.

9 M. Abtahi. - Merci Monsieur le Président. Ce matin, Me Hayman a

10 attiré notre attention sur le fait que le procureur disposait des

11 extraits, en tout cas de transcripts, de l'affaire Andro Kupreskic. Je

12 tiens à préciser qu'aucun de ces transcripts, en l'état actuel, aucun des

13 transcripts de l'affaire Kupreskic n'a été finalisé c'est-à-dire qu'on les

14 revoit. Nous sommes en

15 train de revoir.

16 En principe, nous ne les communiquons pas aux parties. Cependant nous

17 serions disposés, si la défense le demande, insiste, à mettre à la

18 disposition de la défense les versions non finalisées de ces transcripts,

19 même s'agissant de ceux tenus en audience publique car la section des

20 victimes et des témoins, en général, même pour les audiences publiques,

21 revoit ces transcrits.

22 M. le Président. - Elle est consultée, si je comprends bien,

23 elle est consultée avant ?

24 M. Abtahi. – Oui, Monsieur le Président.

25 M. le Président. - Maître Hayman, Maître Nobilo, il n'y a plus

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1 aucun problème ?

2 M. Hayman (interprétation). - Nous aimerions bien évidemment

3 traiter de cette manière-là, merci.

4 M. le Président. - Normal, il n'est pas convenable que le

5 Procureur ait des pièces d'un autre procès qui se déroule dans cette

6 instance sans que l'accusé ou la défense ne les ait également.

7 Monsieur le Procureur, c'est à vous pour la poursuite du

8 contre-interrogatoire.

9 M. Kehoe (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

10 Général, nous avons parlé tout à l'heure, de quelqu'un qui

11 s'appelle Zvonko Cilic, avant la pause. Je pense que vous avez dit qu'il

12 était officier pour IPD de la brigade de Vitez. Et puis il y a un autre

13 nom dont je voulais parler, celui de M. Boro Jozic.

14 M. Blaskic (interprétation). – Oui, Boro Jozic. Je connaissais

15 ce nom.

16 M. Kehoe (interprétation). - Et qui est Boro Jozic ?

17 M. Blaskic (interprétation). - Il a travaillé à un moment donné

18 à la Commission chargée de l'échange des détenus.

19 M. Kehoe (interprétation). - Et quelle était sa fonction, le

20 16 avril 1993 ? Le savez-vous ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas précisément quelle

22 était sa fonction. Il

23 est possible qu'il était membre ou officier de la brigade de Vitez dans

24 une des formation ou unités, ou membre également de la Commission chargée

25 de l'échange de ceux qui ont été disparus ou éventuellement détenus. Je ne

Page 20832

1 sais pas exactement quelle était la fonction qu'il avait exercé à cette

2 époque-là.

3 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce qu'il était un des

4 représentants du HVO à la Commission conjointe de Busovaca. ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Il s'agit de la Commission

6 conjointe à des niveaux plus bas. Entre les brigades, je ne sais pas

7 véritablement, s'il y était. Il y était éventuellement, mais peut-être

8 pas. Ce que je sais, c'est qu'en ce qui concerne les présidents de la

9 Commission conjointe, je connais pour la zone opérationnelle et pour le

10 3ème Corps d'armée.

11 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que vous connaissez Stipo

12 Dzigonjin ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Stipo Dzigonjin, c'est comme

14 cela qu'on m'avait dit par l'interprète. Mais, je ne connais pas une telle

15 personne.

16 M. Kehoe (interprétation). - Et Zeljko Rebak.

17 M. Blaskic (interprétation). - Je ne connais pas Zeljko Rebak.

18 M. Kehoe (interprétation). – Et Zeljko Sajevic ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Je ne le connais pas

20 personnellement, je sais qu'il occupait le poste d'officier à la brigade

21 de Vitez, mais je n'ai pas eu l'occasion de le connaître en personne.

22 M. Kehoe (interprétation). - Nous pouvons parler maintenant

23 quelque peu sur la réunion au siège de la brigade de Vitez, le soir, le

24 19 avril 1993.

25 Mario Cerkez et d'autres ont pris part à cette réunion avec le

Page 20833

1 Dr Mujezinovic. Je vais vous donner lecture de la page 1 705 de la

2 déposition du Dr Mujezinovic, 17ème ligne : "Dans un bureau, il y avait

3 Mario Cerkez, ensemble avec Zvonko Cilic, Boro Jozic, Stipo Dzigonjin,

4 Zeljko Rebak et Zeljko Sajevic".

5 La question : "Est-ce que ces personnes-là ont été toutes

6 membres du HVO ?" La réponse : "Tous étaient en tenue et corroboraient les

7 symboles du HVO. Je connaissais chaque personne parmi eux et relativement

8 bien". Question : "Monsieur Mujezinovic, est-ce que vous avez la

9 possibilité de nous dire ce qui s'est passé au moment où vous êtes

10 arrivé ?".

11 Je suis passé à la page 1 706, ligne 3. La réponse : "Mario

12 Cerkez, je le connaissais de la période précédente, il était commandant

13 des forces du HVO à Vitez, il m'avait demandé si je savais dans quelle

14 situation je me trouvais. Je lui ai répondu par l'affirmative par la suite

15 et il m'a dit : "à ce moment-là, vous devez faire ce qu'on vous ordonne".

16 Ensuite, il m'a demandé si j'avais entendu parler d'Ahmici ; j'ai répondu

17 par l'affirmative. Mario Cerkez m'a répondu que je me dois de faire tout

18 ce qu'il m'ordonne pour faire".

19 Général, au cours de cette déposition, quelqu'un qui vous a

20 été subordonné directement. Mario Cerkez était au courant d'Ahmici, tout

21 au moins le soir, le 19 ; est-ce que vous-même, vous avez parlé avec lui

22 d'Ahmici ? Est-ce que vous avez parlé de cette réunion avec le

23 Dr Mujezinovic ?

24 M. Blaskic (interprétation). – Moi, je n'ai pas parlé avec lui

25 de cet événement très concret en personne car tout le long du 19, je me

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1 suis concentré sur l'aide pour envoyer les renforts du côté de Busovaca,

2 étant donné qu'il y avait l'attaque qui a été organisée par les forces de

3 l'armée de Bosnie-Herzégovine dans la municipalité de Busovaca.

4 M. Kehoe (interprétation). - Général, vous nous avez dit que la

5 première information concernant Ahmici vous est parvenue par le Colonel

6 Stewart le 22 avril 1993, que vous l'avez su par la lettre ?

7 M. Blaskic (interprétation). - Au moment où vous posez la

8 question concernant Ahmici, si vous pensez aux crimes commis à Ahmici, que

9 les civils ont été tués, que l'on avait brûlé également les maisons, oui,

10 mais en ce qui concerne les opérations de combat, que ces opérations de

11 combat avaient lieu, cela, je le savais auparavant. Je savais que l'armée

12 de

13 Bosnie-Herzégovine et le HVO étaient en conflit, qu'il y avait des combats

14 entre les deux.

15 M. Kehoe (interprétation). - Je voudrais simplement vous donner

16 lecture du chef de l'état-major Slavko Marin de l'époque, c'est la page

17 12 507. Il parle de la réunion que vous avez eue avec lui-même le soir, le

18 20 avril 1993.

19 Il s'agit du général de brigade, Marin. Il avait été cité ici

20 devant le Tribunal. Question : "Il dit qu'il y avait un certain nombre

21 d'événements dont j'étais au courant quand Blaskic était à Zenica. Je vais

22 parler maintenant du retour du général Blaskic de Zenica ; j'ai déjà dit

23 que je l'ai rencontré pendant la guerre et j'ai remarqué sur son visage

24 qu'il a été préoccupé et déprimé.

25 Il a dit juste une phrase que je vais essayer de citer en

Page 20835

1 entier : "J'ai été informé que lors des conflits dans le secteur de la

2 municipalité de Vitez, plus particulièrement à Ahmici, un grand nombre de

3 personnes ont été tuées, parmi lesquelles les civils."

4 C'était l'information qu'il nous a transmise et c'est alors que

5 j'ai appris qu'à Ahmici, un grand nombre de personnes ont été tuées, parmi

6 lesquelles il y avait des civils."

7 Général, votre chef de l'état-major, quelqu'un qui était chef de

8 la section opérationnelle, a été cité ici devant la Chambre et c'est sous

9 serment qu'il a témoigné que vous lui avez parlé des crimes commis à

10 Ahmici deux jours avant Ahmici, deux jours avant que vous ayez été en

11 possibilité de lire la lettre du colonel Stewart. Est-ce vrai ?

12 M. Blaskic (interprétation). – Ce n'est pas vrai. Lors de ma

13 déposition, j'en ai parlé également. C'était le 20 avril 1993 à la réunion

14 à Zenica au cours d'un débat très violent et animé que Dzemo nous a dit :

15 "Vous avez tué là-bas les gens le long de la route et il y a des

16 dépouilles mortelles, des cadavres, que l'on peut voir le long de la

17 route". On n'a pas spécifié véritablement qu'il s'agissait d'une position

18 précise, mais il a dit : "vous autres, vous avez…, là-bas".

19 C'est pourquoi, moi, ce dont j'ai parlé également devant cette

20 Chambre, j'ai pensé

21 que cela aurait pu être tout le long de la route : Nadioci, Santici et

22 tous ces villages le long de la route. Au moment où je suis arrivé, j'ai

23 demandé à Slavko Marin de recueillir tous les rapports et si nous avions

24 reçu des informations sur un tel événement. J'ai été surpris également

25 quand, lors de la réunion, on n'a plus parlé de cette information de Dzemo

Page 20836

1 Merdan et j'ai également avancé ma proposition de créer une commission

2 conjointe et que l'on procède à une enquête à ce sujet là.

3 M. Kehoe (interprétation). – Général, passons à la page 18 916.

4 Le Président Jorda vous a interrogé au sujet de la lettre du

5 Colonel Stewart. Ligne 12, très clairement, la question était la

6 suivante : "C'était bien la première fois, Général Blaskic, que vous avez

7 entendu que qui que ce soit vous parle d'Ahmici ? Réponse : "Oui, Monsieur

8 le Président."

9 Excusez-moi, Général, c'était bien, pour la première fois, que

10 vous avez entendu parlé du nom de ce village ?

11 M. Hayman (interprétation). - Si vous citez la transcription, il

12 faut alors véritablement que vous alliez jusqu'au bout. Tel est le

13 problème.

14 M. Kehoe (interprétation). - J'ai bien compris.

15 M. le Président. - Maître Hayman, je vous avertis, je ne veux

16 pas que vous interrompiez ainsi le conseil de l'accusation. Vous aurez un

17 droit de réplique que vous exercerez. Je vous ai déjà fait l'observation

18 hier.

19 M. Hayman (interprétation). - Oui, mais ce que j'ai dit, c'est

20 que mon témoin ne peut pas le lire parce qu'il ne peut pas lire dans une

21 langue qu'il ne connaît pas. C'est la difficulté.

22 M. le Président. - Votre témoin entend un extrait d'un

23 transcript qui est lu par l'accusation. L'accusation vous a cité la page.

24 Si vous n'êtes pas d'accord avec l'intégralité de la transcription,

25 lorsque vous exercerez votre droit de réplique, vous ferez observer que

Page 20837

1 l'accusation a tronqué, n'a pris de la déposition que ce qui

2 l'intéressait. Il vous appartiendra de redresser.

3 Ce que je conteste dans ces interruptions, c'est qu'en même

4 temps vous donnez des indications sur la réponse au général Blaskic. Et

5 cela, c'est anormal. Le général Blaskic est un témoin ici. Vous n'êtes pas

6 peut-être pas d'accord, mais je sais ce que le Règlement me dit qu'il faut

7 je fasse. Voilà ce que je voulais dire.

8 M. Hayman (interprétation). – Monsieur le Président, je ne suis

9 pas d'accord avec vous parce qu'il n'y a absolument aucune possibilité que

10 le client sachent ce qui se trouve dans la suite du transcript. Il ne l'a

11 pas devant lui. C'est tout ce que je voulais dire. Par conséquent, le

12 Procureur ne cite pas exactement une partie de la réponse.

13 M. le Président. – S'il fallait lire 25 000 page de transcript

14 pour que le général Blaskic puisse répondre aux questions, reconnaissez

15 que ce serait un peu compliqué. Le droit de réplique est fait pour cela.

16 Votre droit de réplique, que vous exercerez dans quelques jours.

17 Dans quelques jours, il vous appartiendra, de votre place, de

18 dire : à tel moment, vous avez dit dire ceci à mon client. Général

19 Blaskic, huit lignes plus loin, vous avez une déclaration sur laquelle

20 vous étiez en train de préciser.

21 Ce que je regrette, c'est la façon dont vous interrompez au

22 moment où le Procureur fait son contre-interrogatoire. Il a le droit de le

23 faire comme il l'entend. C'est tout.

24 Monsieur le Procureur, veuillez continuer.

25 M. Kehoe (interprétation). – Général, 20ème ligne, on parle du

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1 colonel Stewart. J'ai compris. Pouvez-vous dire, concrètement, si c'était

2 bien la première fois que vous avez entendu parler de ce qui s'est passé à

3 Ahmici ? C'était le 22 avril. Etait-ce ainsi ?

4 "Réponse : Il s'agit de deux questions, Monsieur le Président,

5 si j'ai bien suivi ce que vous avez posé comme question. Tout d'abord,

6 j'ai dit que l'on parle d'Ahmici dans la lettre. En ce qui concerne les

7 souffrances des civils, c'est le 22 avril 1993 que j'ai entendu

8 parler de cela, la première fois, lors de la réunion à Zenica."

9 M. Blaskic (interprétation). - Pouvez-vous, s'il vous plaît,

10 parler un peu plus lentement parce que j'ai entendu dire également que le

11 22, j'étais à Zenica, alors que je n'ai jamais dit que j'étais le 22 avril

12 à Zenica. Puis, c'est un peu trop rapide, vous parlez trop rapidement. Je

13 ne suis absolument pas en mesure de vous suivre.

14 M. Kehoe (interprétation). – Général, vous avez reçu la lettre

15 du colonel Stewart, le 22 avril 1993. Le juge Jorda vous a posé la

16 question à ce sujet-là, je cite :

17 "Je vous demande donc de me dire si c'est bien dans cette lettre

18 que pour la première fois vous avez entendu dire qu'il s'agissait d'Ahmici

19 et de ce qui s'est passé à Ahmici. C'était le 22 avril.

20 Réponse : Monsieur le Président, il s'agit de deux questions qui

21 sont contenues dans la même. J'ai entendu effectivement parler d'Ahmici

22 pour la première fois dans la lettre du colonel Stewart."

23 M. Hayman (interprétation). – Est-il possible que mon client

24 voit la transcription ? Je sais que vous ne l'avez pas devant vous, mais

25 je pense que Me Kehoe doit l'avoir. Il a expurgé un certain nombre de

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1 points.

2 M. le Président. – Encore une fois, je répète que le témoin est

3 assez grand pour demander ce dont il a besoin. Je suis désolé de devoir le

4 rappeler.

5 Cela étant, je suis tout à fait prêt à vous donner satisfaction.

6 M. Kehoe (interprétation). – "C'est bien pour la première fois

7 que j'ai entendu parler d'Ahmici dans cette lettre. En ce qui concerne les

8 souffrances des civils, c'est le 20 avril 1993 que, pour la première fois,

9 j'ai entendu cela à la réunion de Zenica au moment où Dzemo, lors d'un

10 débat animé, a dit : "Vous avez tué là-bas des civils."

11 Général, avez-vous dit à Slavko Marin, au cours de l'entretien

12 que vous avez eu le 20 avril 1993, que des civils ont été tués ? Oui ou

13 non, s'il vous plaît ?

14 M. Blaskic (interprétation). – A ma connaissance, j'ai demandé

15 que tous les rapports me soient communiqué en ce qui concerne les civils

16 tués, par conséquent, tous les rapports que nous avons reçus ce jour-là,

17 et jusqu'à ce jour-là. Je n'ai peut-être pas été lié sur cet secteur, mais

18 quand il a dit "à côté de la route", j'ai bien évidemment pensé aux

19 villages qui longeaient la route. C'était à cette époque-là, la formation,

20 l'unité de la police militaire qui se trouvait à cet endroit-là, sur la

21 ligne de front.

22 M. Kehoe (interprétation). – Avez-vous parlé avec Slavko Marin

23 d'Ahmici ou non ?

24 M. Blaskic (interprétation). – Je ne m'en souviens pas. Je ne

25 sais pas si je lui en ai parlé. A ce moment-là, je ne me souviens pas si

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1 je lui ai parlé d'Ahmici. Mais je reste sur ce que je dis, à savoir que

2 lorsqu'il s'agit d'Ahmici, pour la première fois, je l'ai appris de la

3 lettre du colonel Stewart le 22 avril 1993. Je parle des crimes et de ce

4 qui a été dit dans la lettre.

5 M. Kehoe (interprétation). – Général, vous saviez que le secteur

6 dont parlait Merdan est à côté d'Ahmici ?

7 M. Blaskic (interprétation). – Merdan a dit, je cite : "Vous

8 autres, en bas, vous avez tué les hommes dont les cadavres se trouvent

9 dans le caniveau, le long de la route. Cinq cents personnes ont été

10 tuées."

11 Je lui ai donc proposé d'organiser l'enquête et de me fournir

12 les rapports pour pouvoir en tirer la conclusion. Monsieur Eljub Ganic

13 avait interrompu cette discussion et il a dit, je cite : "Laissons les

14 morts à côté, soyons responsables. Laissons le temps aux commandants de se

15 mettre d'accord sur le cessez-le-feu et ce n'est qu'après que nous nous

16 occuperons des morts. Il faut arrêter cela."

17 M. Kehoe (interprétation). - Entendu, Général. Avez-vous des

18 raisons de mettre en doute que Merdan était au courant que ceci se

19 produisait à Ahmici ? Avez-vous une raison de douter de ce que le général

20 de brigade Marin avait dit ?

21 M. Blaskic (interprétation). – Non. Je ne sais pas ce que Dzemo

22 Merdan avait dit. Je sais que je ne pouvais pas partager son point de vue

23 et son affirmation.

24 Mais lors de cette réunion, il n'a pas parlé du village. Moi

25 j'ai compris, quand il avait dit "le long de la route", qu'il était

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1 possible qu'il s'agisse de tous les villages qui étaient le long de la

2 route, par conséquent de l'autre côté du mont Kuber, par conséquent en

3 bas.

4 M. le Président. - Je vais poser une question. Entre le 16 avril

5 à 5 heures 30 du matin et le 22 avril, où vous découvrez, à travers...

6 Monsieur le Greffier, rendez-moi la lettre du Colonel Stewart, s'il vous

7 plaît... vous découvrez à travers la lettre du Colonel Stewart les

8 massacres d'Ahmici, si j'ai bien compris, la télévision de Busovaca est au

9 courant, vous êtes au courant qu'il y a des opérations de combats sur

10 Ahmici, puisque vous êtes un chef militaire, Valenta est au courant,

11 Cerkez est au courant, semble-t-il, votre propre chef d'état-major est au

12 courant, vos ennemis sont au courant, le long de la route, vous êtes au

13 courant. Alors, la question que je vous pose : comment expliquez-vous que

14 vous seul, commandant en chef de la zone opérationnelle de Bosnie

15 centrale, ne soyez pas au courant ?

16 Vous avez une radio qui vous permet d'avoir des transmissions,

17 des communications, vous êtes donc un chef qui n'est absolument pas au

18 courant de massacres qui se commettent très exactement à 5 km par la route

19 de votre quartier général, et même, vous avez dit ce matin au Juge

20 Shahabuddeen, à 4 km, en tout cas un petit peu moins à vol d'oiseau, et on

21 voit les lueurs des incendies dans la nuit. Et vous savez qu'il y a des

22 opérations militaires à Ahmici.

23 Comment pouvez-vous expliquer aux Juges, sur le plan militaire,

24 que vous ne soyez au courant de rien ? Car là, il s'agit de rien, vous

25 êtes au courant de rien, vous êtes le chef qui n'est au courant de rien,

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1 vous ignorez tout de ce qui se passe à 4 km de votre quartier général.

2 Tout le monde sait sauf vous ! Est-ce que vous pouvez répondre aux Juges ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Le

4 Colonel Stewart, qui

5 m'a écrit la lettre le 22 avril 1993 a appris le 22 avril ce qui s'est

6 passé ; même si, le 16 avril, il avait des véhicules blindés et que ces

7 véhicules se trouvaient à Ahmici, il avait des opérateurs également qui se

8 trouvaient à Ahmici. Moi je n'avais pas de véhicule blindé et je n'étais

9 pas dans la position pour quitter le poste de commandement, de me rendre

10 dans ce secteur car, dans ce cas-là, je n'aurais pas fait ce qui était ma

11 tâche. Par conséquent...

12 M. le Président. - Vous ne répondez pas à ma question. Vous avez

13 des réunions d'état-major tous les matins, vous réunissez vos commandants

14 de brigade tous les matins ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Non, je n'avais pas de réunions,

16 même pas un seul matin car les trois matins, pratiquement, étaient une

17 seule journée, vu ma condition physique et ce que j'ai pu faire

18 physiquement.

19 A partir du 16 avril, les combats ne se sont pas arrêtés

20 jusqu'au 23 avril, les 4 jours de combats. Moi j'étais attaché, lié à mon

21 poste de commandement. Ici, on ne dit pas ce que M. Valenta savait ou non

22 parce que je n'ai jamais nié, ici, dans ce prétoire, qu'il y avait des

23 opérations de combats qui étaient menées à Ahmici, mais j'ignorais qu'il y

24 avait des crimes à Ahmici. Est-ce que Valenta, dans sa déposition, était

25 au courant du crime ou il savait qu'il y avait quelque chose qui se

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1 passait à Ahmici ?

2 Ensuite, je n'avais absolument jamais la radio, l'émetteur de

3 radio. Moi je savais qu'il y avait des opérations de combats ; en ce qui

4 concerne le crime, je l'ai appris par la lettre du Colonel Stewart alors

5 question que je me pose : comment lui ne le savait pas avant le 22 alors

6 qu'il avait ses soldats à Ahmici le 16 avril ?

7 M. le Président. - Nous le verrons quand le Colonel Stewart

8 viendra. Nous aurons les réponses. Je crois que le Juge Rodrigues veut

9 poser une question.

10 M. Rodrigues. - A cette question, je crois que nous avons déjà

11 la réponse. Il ne faut pas avoir la présence du Colonel Stewart pour

12 savoir que, le 16 avril 1993, un document que nous avons lu aujourd'hui,

13 donc c'est la pièce 690, il dit à la page 3, je crois, 14 heures 15, il

14 fait une référence à Ahmici comme ayant des maisons brûlées, avec d'autres

15 le long de la route. Donc je crois que le Colonel Stewart savait déjà le

16 16 avril à 14 heures 45, je crois.

17 Mais je voudrais revenir à la question que M. le Président vous

18 a posée, Général Blaskic. Vous avez répondu plusieurs fois à M. le

19 Procureur que vous ne pouviez pas voir l'incendie ; je peux peut-être

20 revenir un peu ; nous avons parlé aussi à propos de logistique et nous

21 avons parlé aussi des munitions. Quel type de munitions, selon vous, ont

22 été utilisées pour détruire Ahmici ? Quel type d'armes et de munitions ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Je peux vous donner mon point de

24 vue. Si on se pose la question sur les armes, à ce moment-là, ce sont les

25 pièces d'infanterie, les pièces d'infanterie légère, donc les fusils

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1 automatiques, éventuellement quelques chars antiaériens, mais de petites

2 armes antichars petit calibre.

3 En ce qui concerne les munitions, l'infanterie utilise une balle

4 ordinaire, mais des balles incendiaires également. Personnellement, je

5 n'ai pas de données, je ne suis pas sûr de ce qui a été utilisé ;

6 éventuellement, ces armes auraient pu être aussi bien les unes que les

7 autres.

8 Mais au moment où il y a des combats en ville, au centre ville,

9 il y avait une vingtaine de villes dans lesquelles ces combats ont été

10 menés ; même une balle ordinaire peut également mettre le feu, si par

11 exemple, il y a la paille, le foin etc...

12 M. Rodrigues. - Etait-il possible d'entendre le bruit de ces

13 armes, de ces explosions, à Vitez ou non ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Ce matin, toute la ville a été

15 sujette à des déflagrations, des explosions, dans une vingtaine de

16 localités. Par conséquent, il était fort difficile de détecter ce qui se

17 passait et à quel l'endroit. Evidemment, on a pu entendre ce qui se

18 passait à côté de l'hôtel. C'est là que j'ai entendu le mieux.

19 M. Rodrigues. – Il était normal que d'autres personnes sortaient

20 et faisaient un peu le trajet entre Vitez et tout près d'Ahmici. Donc,

21 comme vous étiez le commandant de la zone opérationnelle, il était normal

22 d'admettre que quelqu'un vous a donné l'information. C'est tout à fait

23 normal.

24 La question du Juge Jorda était : vous ne saviez pas ? Vous ne

25 saviez pas, mais j'en viens presque à vous demander si vous vouliez

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1 savoir ?

2 M. Blaskic (interprétation). – Certes, j'ai parlé en utilisant

3 les deux téléphones et j'ai demandé au commandant de m'informer, d'être

4 très précis et d'avoir les informations le plus tôt possible. Mais ce

5 matin-là, je n'avais pas tous mes collaborateurs autour de moi parce

6 qu'ils n'ont pas pu se déplacer et venir jusqu'à chez moi.

7 M. Rodrigues. – Je ne parle pas seulement de ce matin. Mais

8 entre le 16 avril et le 22 avril, personne... Vous aviez au moins deux

9 téléphones. Vous étiez dans la cave de l'Hôtel Vitez. Mais vous aviez au

10 moins deux téléphones. Personne de l'extérieur ne vous a informé ? Parce

11 que pour vos fonctions, pour votre commandant, il était important de

12 savoir cela ?

13 M. Blaskic (interprétation). – Oui, certainement, c'était

14 important et je recevais les rapports réguliers et exceptionnels

15 également. Sur demande, j'ai reçu les rapports selon lesquels j'ai pu

16 savoir que des combats avaient eu lieu à Ahmici, mais les rapports

17 n'étaient toujours pas exacts.

18 M. Rodrigues. - Si cette information, pour vous, à votre avis

19 était importantes, le 22 avril au moins vous avez constaté que toutes les

20 personnes vous ont caché cette information. Mario Cerkez savait, Dario

21 Kordic savait. Tout le monde savait, sauf vous. Qu'elle a été votre

22 réflexion à l'époque ?

23 Si c'était important, vous étiez le commandant de la zone

24 opérationnelle de la Bosnie centrale, vous saviez bien que toute la

25 responsabilité de ce qui est arrivé à Ahmici retomberait sur vous. Vous

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1 avez constaté que tout le monde vous a caché l'information. Quelle a été

2 votre réflexion à ce moment-là ?

3 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, à ce moment-là,

4 je ne croyais pas

5 que toutes ces personnes me cachaient ces informations.

6 M. Rodrigues. – Mais c'était vrai. Vous avez constaté que toutes

7 ces personnes vous cachaient ces informations. Quelle a été votre

8 réflexion, à ce moment-là ?

9 M. Blaskic (interprétation). – J'ai constaté tout simplement que

10 j'avais reçu des rapports qui étaient faux du 4ème Corps de la bataillon

11 de la police militaire et que lui ne m'a pas envoyé une information

12 correcte. Je ne sais pas si à cette époque-là, ces informations étaient à

13 la disposition de Valenta, Cerkez, Kordic et les autres.

14 M. Rodrigues. – Mais nous savons déjà cela. Nous avons cette

15 conclusion que vous aussi, vous avez cette conclusion : les personnes,

16 notamment mes collaborateurs, m'ont caché cette information. Travaillons

17 sur cette hypothèse. Quelle a été votre conclusion ? Quelle a été votre

18 réflexion sur cette conclusion ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Si vous pensez à mes

20 collaborateurs les plus directs, aux personnes…

21 M. Rodrigues. – Je pense à vous. Quelle fut votre réflexion ?

22 Quelle leçon pouvez-vous tirer de ces conclusions, de ces faits, de la

23 constatation que vous avez faite ?

24 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, je n'ai peut-

25 être tout à fait bien compris. De toute façon, j'ai compris que le chef du

Page 20847

1 4ème bataillon de la police militaire avait caché des informations qu'il

2 connaissait. Mais à aucun moment je n'ai…

3 M. Rodrigues. – Et Mario Cerkez a-t-il caché des informations ?

4 M. Blaskic (interprétation). – Non.

5 M. Rodrigues. – Et Dario Kordic a-t-il caché des informations ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas ce qu'il savait,

7 mais je suis convaincu que Mario Cerkez n'avait pas caché des informations

8 devant moi. Il a su que des opérations de combats avaient eu lieu. Moi

9 aussi, je le savais. Mais qu'il y a eu crimes, car la distinction est très

10 nette, substantielle, je ne crois pas que Mario Cerkez était au courant et

11 qu'il me l'a caché.

12 M. Rodrigues. – Général, je crois que je dois revenir en

13 arrière. Vous avez constaté, au moins le 22 avril, que beaucoup de monde

14 savait et notamment qui était au courant du crime. Or ils vous ont caché

15 l'information.

16 M. Blaskic (interprétation). – Le 22 avril, Monsieur le Juge,

17 j'étais conscient que le commandant du 4ème bataillon m'a envoyé des

18 rapports faux. En ce qui concerne mes collaborateurs dans le commandement,

19 ils disposaient de tous les rapports qu'ils ont reçu et tous étaient dans

20 un seul dossier. C'est le journal opérationnel, ainsi que les rapports,

21 qui n'ont pas pu me donner une telle information comme l'information du

22 colonel Stewart.

23 M. Rodrigues. – On va peut-être revenir, ensuite, sur cette

24 question. Mais je crois qu'il y a là un doute qu'il conviendrait de bien

25 éclaircir. Mais pour l'instant, je pense que nous allons en rester là.

Page 20848

1 Merci, Général.

2 M. le Président. - Merci, Juge Rodrigues.

3 Monsieur le Procureur, nous sommes toujours au 19 avril ?

4 M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président. En

5 fait, nous en sommes au 20, au moment actuel. La conversation entre

6 M. Marin et M. Blaskic se déroulait le 20.

7 Général, pour suivre votre logique, vous êtes partis de

8 l'hypothèse que lorsque Merdan s'est levé au cours de cette réunion à

9 Zenica pour vous parler des 500 personnes environ qui s'étaient faites

10 tuer le long du fossé, vous en avez tiré l'hypothèse que le fossé était

11 près d'Ahmici, n'est-ce pas ?

12 M. Blaskic (interprétation). – Il a dit que ces corps étaient

13 allongés dans le fossé, le long de la route et la route va par Nadioci,

14 Santici, Ahmici et d'autres villages. J'ai donc passé qu'il s'agissait de

15 cette route principale.

16 M. Kehoe (interprétation). - Le 21 avril, pensant que ces corps

17 étaient allongés dans le fossé, le long de la route, avez-vous appelé

18 Pasko Ljubicic, lui avez-vous demandé de venir dans votre bureau ou lui

19 avez-vous demandé au téléphone : que s'est-il passé là-bas ?

20 M. Blaskic (interprétation). – Cela, je ne l'ai pas fait, mais

21 j'ai demandé à Slavko Marin de recueillir tous les rapports, de les

22 rassembler et de vérifier si nous disposions d'informations dans ce sens

23 car j'étais surpris que l'on soit passé sur l'affirmation par Dzemo Merdan

24 à Zenica, que personne n'ai réagi à cette affirmation de Dzemo Merdan.

25 M. Kehoe (interprétation). – Général, la seule personne qui

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1 pouvait fournir le nombre le plus important d'informations, le seul

2 commandant apte à vous fournir des informations importantes étaient Pasko

3 Ljubicic, s'agissant des événements d'Ahmici, n'est-ce pas ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Bien sûr. Mais il aurait dû me

5 remettre ces informations le 16, 17 et 19 déjà. Pendant toutes ces

6 journées, il m'a transmis des informations fausses.

7 M. Kehoe (interprétation). - Merci, Général, vous avez répondu.

8 Le 21 avril, après avoir entendu parler du massacre de civils, vous

9 n'essayez pas d'appeler ou rencontrer le commandant le plus important qui

10 pouvait vous dire ce qui s'était passé à Ahmici, n'est-ce pas ?

11 M. Blaskic (interprétation). – Non, ce n'est pas le cas car lui

12 m'a dit ce qui s'était passé jusqu'au 20, et même jusqu'au 21 si nous le

13 voulons. Ces rapports sont écrits et montrent très clairement qu'il ne m'a

14 pas dit la vérité.

15 M. Kehoe (interprétation). – Général, vous êtes revenu de cette

16 réunion du 20 avril 1993 et 21 avril ou jusqu'au moment où vous recevez la

17 lettre du colonel Stewart, le 22, avez-vous fait le moindre effort pour

18 contacter Pasko Ljubicic et lui demander ce qu'il savait au sujet de ces

19 civils, de ces cadavres de civils à Ahmici ? Oui ou non ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Je ne pouvais pas lui demander ce

21 qu'il savait au sujet des cadavres de civils d'Ahmici puisque personne

22 n'en a parlé précisément. Ce qui a été dit précisément, c'est qu'il y

23 avait des cadavres de civils le long de la route. Moi, j'ai donné l'ordre

24 que soient recueillis tous les rapports dont nous disposions pour les

25 regarder au

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1 préalable avant de déterminer si oui ou nom, au sein du commandement, nous

2 avions des rapports dans ce sens ou pas. Le lendemain matin, j'étais déjà

3 dans une autre réunion à Vitez, une réunion sous l'égide des Nations

4 Unies.

5 M. Kehoe (interprétation). – Votre réponse est que vous n'avez

6 jamais pris la peine de poser une seule question à Pasko Ljubicic, le 21

7 ou le 22, jusqu'au moment où vous recevez la lettre de Stewart au sujet de

8 ces cadavres allongés dans un fossé le long de la route. C'est ce que vous

9 dites dans votre déposition ?

10 M. Blaskic (interprétation). – J'ai dit quelles mesures j'avais

11 prises, ce que j'avais fait. Or, il n'avait pas été dit de façon précise

12 qu'il s'agissait du village d'Ahmici. Je ne l'ai su qu'à la réception de

13 la lettre du colonel Stewart. Quand j'ai reçu cette lettre, je me suis

14 rendu compte que tous les rapports que j'avais reçus étaient inexacts et,

15 pour être plus précis, qu'ils étaient mensongers.

16 M. Kehoe (interprétation). - Mais vous avez supposé que c'était

17 le village d'Ahmici dont il s'agissait, n'est-ce pas général, puisque

18 répondant à une question de M. le Juge Shahabuddeen, lorsque le Juge

19 Shahabuddeen parlait de ce que Merdan avait dit, vous faites remarquer en

20 page 18 930, je cite : "Il a dit : Ecoutez, vous avez tué des centaines de

21 personnes là-bas, en bas. Il y a des civils aussi, leurs corps gisent dans

22 un fossé près de la route. Il y a près de 500 personnes tuées."

23 Ensuite, le Juge Shahabuddeen vous a demandé si vous vous

24 rendiez compte de l'endroit où se trouvait le fossé dont il parlait et

25 vous répondez : "Je suppose que ce fossé aurait pu se trouver aux

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1 environs, aux abords d'Ahmici."

2 M. Blaskic (interprétation). – Oui, aux abords, mais c'est sur

3 le territoire de la route toute entière : Nadioci, Ahmici, Santici,

4 Sivrino Selo. J'ai déjà cité ces villages le long de la route.

5 M. Kehoe (interprétation). – Général, lorsque vous recevez cette

6 affirmation de

7 Dzemo Merdan, le soir du 20, faites-vous l'effort de vous rendre dans ce

8 secteur, près du fossé le long de la route, pour voir ce qui s'est passé,

9 s'il y a oui ou non des cadavres qui gisent là-bas, si des civils ont été

10 tués ? Faites-vous cet effort ou est-ce que vous envoyez quelqu'un le

11 faire pour vous ?

12 M. Blaskic (interprétation). - On m'a ramené tard le soir, tard

13 dans la nuit, aux alentours de 23 heures, même un peu plus tard, je n'ai

14 pas vérifié l'heure, dans un véhicule des Nations Unies. C'est donc la

15 Forpronu qui m'a amené et ramené. A ce moment-là, mon activité la plus

16 importante était de parvenir à un cessez-le-feu, à une interruption des

17 combats. Si j'en avais eu la possibilité, je me serais rendu sur les lieux

18 sans aucun doute, mais cela était rendu très difficile parce que les

19 combats faisaient toujours rage.

20 M. Kehoe (interprétation). – Etes-vous en train de dire que le

21 secteur était inaccessible à vous et à d'autres membres de votre état-

22 major ou à d'autres membres du HVO ?

23 M. Blaskic (interprétation). – Non, je suis en train de dire que

24 compte tenu des conditions dans lesquelles je fonctionnais, notamment

25 l'impossibilité des communications, la priorité a été accordée à la

Page 20852

1 réalisation du cessez-le-feu. C'est le général Morillon, ainsi que les

2 autres personnes présentes à la réunion, qui avaient établi cette

3 priorité. Le 21 déjà, j'ai eu une autre réunion au cours de laquelle les

4 autres questions ont été abordées, réunion à laquelle participaient les

5 plus hauts représentants du HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

6 A ce moment là, personne n'était encore allé à Ahmici. Si on

7 allait quelque part, on allait à Kula. Je crois que même s'ils étaient

8 présents eux aussi à cette réunion, ils n'accordaient pas une importance

9 particulière aux propos de Dzemo Merdan sur lesquels chacun semblait être

10 passé.

11 M. Kehoe (interprétation). – Général, le 21, n'est-il pas exact

12 que l'ECMM a envoyé une équipe à Ahmici pour procéder à une inspection ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas ce que les

14 observateurs européens ont

15 fait le 21. Mais je sais parfaitement bien que lors de la réunion

16 conjointe où étaient représentés les représentants du grand quartier

17 général de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du quartier général du HVO,

18 une décision a été prise de se rendre sur la position de Kula à Busovaca

19 et que le village d'Ahmici n'a jamais été mentionné, pas une seule fois,

20 même si Dzemo Merdan était présent encore à cette réunion.

21 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur, j'aimerais vous montrer

22 un rapport de l'ECMM qui date du 21 avril 1993.

23 M. Abtahi. – Pièce à conviction de l'accusation 696.

24 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur l'huissier, ce qui

25 m'intéresse est le paragraphe 9D qui commence par les mots "au cours de

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1 l'après-midi". C'est un rapport émanant de la Commission conjointe de

2 Busovaca, en date du 21 avril 1993. L'auteur de ce rapport est le

3 commandant Morsink qui, aujourd'hui, est colonel.

4 Paragraphe D, je cite : "Durant l'après-midi, l'équipe et la

5 Croix-Rouge internationale ont mené à bien leur mission coordonnée.

6 L'équipe a enquêté à Ahmici ouest, Ahmici est, 90 % de l'ensemble des

7 maisons ainsi que la mosquée sont détruites. Personne n'est plus là. Un

8 cadavre a été trouvé dans un garage, 15 mètres au sud-est de la mosquée.

9 Troisièmement : Novaci, près de 200 femmes et enfants musulmans

10 vivent dans trois maisons. La moitié d'entre eux aimerait être évacuée.

11 Quatrièmement : Rijeka, quelques familles musulmanes NTR.

12 Cinquièmement : Vitez, quelques familles croates, une famille

13 aimerait être évacuée. La Croix Rouge Internationale et le HCR ont des

14 représentants responsables, je suppose, et sont informés de ce qui

15 précède".

16 Alors, ces équipes, Général, l'équipe d'ECMM de la Commission

17 conjointe de Busovaca avaient des représentants du HVO, n'est-ce pas ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Au sein de la mission

19 d'observation européenne, vous

20 me demandez. Cette information ne m'a pas été envoyée par mes

21 représentants, même si j'ai participé à la réunion du 21. Je sais que la

22 Commission conjointe de Busovaca date de 1993, de janvier 1993, et qu'il y

23 avait des membres du HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine, qui y

24 siégeaient et qui y travaillaient dans le cadre de cette commission. Quant

25 au 21 avril 1993, je pense qu'une réunion de la Commission conjointe

Page 20854

1 avait été prévue ce jour-là à Vitez. Je n'ai aucune information quant au

2 fait que la commission est passé du temps à Ahmici. Je n'ai aucune

3 information relative à ce que vous venez de me lire, je l'entends pour la

4 première fois ici.

5 M. Kehoe (interprétation). - Savez-vous si un membre du HVO,

6 Boro Jozic est allé avec la Commission conjointe de Busovaca, avec son

7 équipe, inspecter Ahmici le 21.

8 M. Blaskic (interprétation). - Non, c'est la première fois que

9 je l'entends ici.

10 M. Kehoe (interprétation). - Général, revenons sur ce que vous

11 avez fait vous-même. Vous n'avez pas pris la peine d'envoyer quelqu'un

12 pour vérifier si oui ou non les meurtres de civils allégués par Merdan

13 étaient exacts, n'est-ce pas.

14 M. Blaskic (interprétation). - Non, ce n'est pas le cas. J'ai

15 déjà reçu cette information avec une certaine réserve parce que tous les

16 officiers présents à la réunion ont demandé qu'on ne parle plus de cette

17 information. Et, Merdan lui-même n'a plus réagi. C'est la seule fois où il

18 a réagi.

19 Par la suite, au cours de la discussion avec Ejub Ganic, nous

20 nous sommes tous mis d'accord sur la nécessité d'interrompre les combats.

21 A ce moment là, j'avais déjà un nombre de collaborateurs restreint autour

22 de mois, parce que deux d'entre eux Pilicic et Prskalo s'étaient déjà

23 faits blessés. Mais, j'ai proposé que la Commission conjointe enquête sur

24 les propos, sur les allégations de Dzemo Merdan, et si cela avait été

25 accepté j'aurais sûrement déployé des efforts plus importants pour

Page 20855

1 vérifier ces affirmations. Tout en continuant à travailler au cessez-le-

2 feu.

3 M. Kehoe (interprétation). - Ces allégations de Dzemo Merdan,

4 pensez-vous qu'elles étaient sérieuses, les avez-vous prises au sérieux ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Je pensais qu'il y avait sans

6 doute un certain nombre de victimes. Mais il ne fait aucun doute que j'ai

7 pris au sérieux ce qu'a dit Merdan. Mais, compte tenu qu'il n'a pas repris

8 ses propos par la suite au cours de la même soirée. Malgré cela, à mon

9 retour j'ai demandé que tous les rapports soient recueillis au sein du

10 commandement, rassemblés et que l'on recherche tout rapport susceptible de

11 confirmer les allégations de Dzemo Merdan. Mais, je n'ai rien trouvé dans

12 ces rapports, qui ont été fournis aux commandements, qui puisse confirmer

13 les allégations de Merdan.

14 M. Kehoe (interprétation). – Mais Général, la réalité c'est que

15 vous n'avez jamais envoyé personne sur les lieux, dans le secteur, pour

16 voir si ce qu'avait dit Merdan était exact.

17 M. Blaskic (interprétation). - Je n'étais pas en mesure

18 d'envoyer quelqu'un sur ce secteur. J'avais dans ce secteur des

19 commandants qui m'informaient de tous les événements qui se déroulaient.

20 M. Kehoe (interprétation). - Mais, Général, avez-vous donné

21 l'ordre pour que le nettoyage des cadavres se fasse, le 21, à Ahmici ?

22 Qui a donné cet ordre ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Vous m'interrogez au sujet du

24 21 avril ?

25 M. Kehoe (interprétation). - Le 21 avril qui, au sein du HVO, a

Page 20856

1 donné l'ordre de ramasser les cadavres à Ahmici étant donné que vous aviez

2 entendu les allégations de Merdan dans la nuit du 20.

3 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai jamais délivré un ordre

4 au téléphone et je ne suis pas au courant qu'il ait été délivré. Je sais

5 qu'un ordre a été donné par les autorités civiles responsables de la

6 défense, ordre portant sur le ramassage des cadavres. Mais je crois que

7 c'était un ordre qui résultait de l'ordre du Général Petkovic et du

8 Général Lovrinovic. Le ramassage des cadavres s'est fait, mutuellement,

9 donc, les cadavres musulmans et les cadavres

10 du HVO ont été ramassés. C'était l'oeuvre d'unités de la protection

11 civile.

12 M. Kehoe (interprétation). - Général, j'aimerais vous lire un

13 rapport du témoin K qui se rappelle avoir participé au ramassage des

14 cadavres à Ahmici, le 21. Page 4191 :"Le 21, nous avons entendu des bruits

15 bizarres. Nous avons vu arriver des transports de troupes des Nations

16 Unies qui provenaient de la route principale et se sont arrêtés devant la

17 mosquée d'Ahmici. Nous avons vu des soldats des Nations Unies sortir de

18 ces blindés transports de troupes.

19 Et, pendant que nous poursuivions notre observation, nous avons

20 vu trois hommes s'approcher de la maison où nous nous trouvions. Ils

21 portaient un uniforme bleu et un masque à gaz sur le visage. Nous étions à

22 l'intérieur de cette maison. L'un de ces hommes a pénétré dans la cuisine,

23 l'autre est monté à l'étage, le troisième est resté derrière. Nous nous

24 sommes renfoncés davantage encore sous l'escalier, ils ont traversé la

25 maison avant de ressortir. Nous pensions qu'il s'agissait de membres de la

Page 20857

1 Forpronu, nous avons commencé à sortir.

2 Mon père est sorti le premier, suivi de mon oncle et de moi-

3 même. Mon père a dit : l' un des hommes en uniforme a sursauté, il était

4 surpris et a dit : "Nom de Dieu, nous cherchons des cadavres et nous

5 voyons qu'il y a encore des êtres vivants".

6 Je passe à la page suivante du compte rendu d'audience, la

7 page 4192 : "L'homme qui se tenait à côté de lui a fait un geste de la

8 main. J'ai remarqué que deux soldats couraient sur la route : l'un portait

9 un uniforme et l'autre un uniforme noir. Les insultes ont commencé tout de

10 suite. Ils ont insulté nos mères balija et ont dit : "Tuez-les" mais

11 l'homme qui avait dit "Nom de Dieu" a ajouté "Emmenez ces hommes devant

12 leur commandant". Donc nous avons commencé à marcher et ils nous ont

13 emmenés à l'endroit où ils voulaient nous emmener. Nous avions les mains

14 sur la tête. Nous étions obligés de regarder par terre".

15 J'interromps ici, la déposition du témoin K, ou plutôt :

16 questions dans le compte rendu d'audience :

17 "Question : "Permettez-moi de vous interrompre témoin K, avez-

18 vous remarqué des insignes sur les vêtements du soldat qui portait un

19 uniforme noir ou un uniforme de camouflage ?" Réponse : "Sur les uniformes

20 j'ai seulement vu le mot Jokeri, je ne sais pas sur quelle manche de

21 l'uniforme".

22 "Question : "A ce moment-là, en avez-vous tiré la conclusion que

23 ces soldats, ces hommes habillés en bleu et portant un masque à gaz

24 n'appartenaient pas à Forpronu". Réponse : "Oui, en effet. Nous en avons

25 conclu que ces hommes n'étaient pas membres de la Forpronu".

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1 "Question : "Lorsque vous êtes sortis, et qu'ils vous ont fait

2 sortir de la maison et vous ont dit de mettre les mains au-dessus de la

3 tête, avez-vous vu des cadavres, s'il y en avait ?"

4 J'ai vu un cadavre à côté de l'entrée, du porche menant à la

5 maison. C'était un squelette, il était calciné en dessous des genoux. Il

6 était davantage calciné que brûlé. J'ai remarqué des chaussures sur ses

7 pieds, le même genre de chaussures que celles que portait notre voisin du

8 n° 7.

9 Question : "Témoin K, vous avez dit avoir reconnu cet hommes par

10 ses chaussures et vous avez dit que le corps était calciné. Pensez-vous

11 que ce corps avait été jeté là ou brûlé à l'endroit même ? Réponse : Il

12 avait été jeté là car on ne voyait pas d'herbe brûlée autour du cadavre.

13 On avait aussi entendu des voix un peu avant, quelqu'un qui disait qu'il

14 fallait jeter le cadavre à cet endroit.

15 Question : Un peu plutôt, est-ce que l'un des ces hommes vous

16 avait dit qu'il cherchait des cadavres ? Lorsqu'il a dit : "Nom de Dieu,

17 nous cherchions des cadavres et je vois qu'il y a encore des êtres

18 vivants".

19 Général, les personnes qui portaient cet uniforme bleu, les

20 personnes de la défense de la protection de la défense civile étaient les

21 personnes de la protection civile affectées au

22 ramassage des cadavres, n'est-ce pas ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Je sais que les membres de la

24 protection civile portaient des uniformes bleus. Je sais que je n'ai pas

25 délivré d'ordres à la protection civile lui demandant de ramasser les

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1 cadavres. Je crois que personne de mon commandement ne l'a fait. Je sais

2 ce qu'est une opération de ramassage des cadavres sur-le-champ de

3 bataille. Je pense qu'une s'est déroulée le 28 ou 29 avril, une opération

4 mutuelle.

5 M. Kehoe (interprétation). – Général, conviendrez-vous que

6 quelqu'un, au sein du commandement du HVO, a dû ordonner à la protection

7 civile d'aller ramasser les cadavres de Ahmici ? Seriez-vous d'accord avec

8 cela ?

9 M. Blaskic (interprétation). - Les ordres sont émis à la

10 protection civile par les autorités civiles. Je ne vois pas comment cela

11 aurait pu être le cas. Je sais, avec certitude, que personne de mon

12 commandement n'a délivré un quelconque ordre de cette espèce, et je ne

13 l'ai pas fait non plus.

14 M. Kehoe (interprétation). – Général, ce jour-là, après votre

15 réunion avec Merdan, à Zenica, c'était bien ce moment-là dont nous

16 parlons ,

17 M. Blaskic (interprétation). - La date correspond mais je

18 souligne que j'entends parler, pour la première fois, de cet ordre du

19 21 avril. Je n'ai jamais délivré un tel ordre.

20 M. Kehoe (interprétation). - Revenons au 22, à la réunion de la

21 Commission conjointe de Busovaca, au cours de laquelle le commandant

22 Morsink a divulgué, devant la Commission, ce qu'il avait vu à Ahmici. Vos

23 représentants, au sein de la Commission conjointe, étaient Franjo Nakic,

24 n'est-ce pas ,

25 M. Blaskic (interprétation). – Franjo Nakic était membre de la

Page 20860

1 Commission conjointe avec Dzemo Merdan.

2 M. Kehoe (interprétation). – Franjo Nakic est-il revenu à

3 l'Hôtel Vitez le matin du 22 et vous a-t-il dit ce que le commandant

4 Morsink vous avez dit avoir vu à Ahmici le jour

5 précédent ? Nakic ne vous en a pas parlé ?

6 M. Blaskic (interprétation). – Je ne me rappelle pas que Nakic

7 soit revenu de cette réunion ? D'habitude, tous les matins, il allait aux

8 séances de la Commission conjointe et y restait jusqu'à tard le soir, mais

9 je peux consulter ma chronologie.

10 M. Kehoe (interprétation). - Général, nous pouvons revenir sur

11 ce point, vous pourrez consulter votre chronologie pendant la pause.

12 Monsieur le Président, je pense qu'il serait préférable que le

13 témoin consulte ses notes pendant la pause, il ne prendrait pas le temps

14 de l'accusation.

15 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez poser la

16 question suivante, Maître Kehoe, s'il vous plaît ?

17 M. Kehoe (interprétation). - Général, le fond du problème, c'est

18 que vous saviez exactement ce qui s'est passé à Ahmici bien avant de

19 recevoir la lettre de Stewart, le 22, n'est-ce pas ?

20 M. le Président (interprétation). - C'est une affirmation, vous

21 posez une question. Si vous commencez par une affirmation, faites la

22 suivre d'une question.

23 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur, vous saviez avant de

24 recevoir la lettre de Stewart ce qui s'était passé à Ahmici. Vous saviez

25 que des civils s'étaient faits massacrés à Ahmici, n'est-ce pas ?

Page 20861

1 M. Blaskic (interprétation). - Non.

2 M. Kehoe (interprétation). - Le fait est qu'un certain nombre de

3 personnes autour de vous le savaient et que, selon votre déposition, vous

4 étiez la seule personne à ne pas le savoir . Est-ce ce que vous dites dans

5 votre déposition ?

6 M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que je connaissais les

7 informations que j'avais reçues de mes subordonnés directs, ainsi que les

8 informations qui sont consignées dans mon journal d'opérations, c'est-à-

9 dire le journal d'opérations du commandement.

10 M. le Président (interprétation). - Ce n'est pas la question. La

11 question est de savoir si toutes les personnes qui vous ont été cités, qui

12 avaient des responsabilités autour de vous, que ce soit des politiques,

13 des supérieurs ou inférieurs, semblaient savoir un certain nombre de

14 choses que, vous, semblait-il, vous ne saviez pas. C'est la question.

15 M. Blaskic (interprétation). - Ce n'est pas de cette façon que

16 j'ai compris la question. Si c'est la question qui m'a été posée, je peux

17 répondre que je pense que les membres de mon commandement avec moi dans la

18 cave de l'hôtel ne connaissaient pas des informations qu'ils m'auraient

19 cachées. C'est sûr.

20 M. le Président (interprétation). – Reposez autrement la

21 question, Monsieur le Procureur. C'est très important.

22 Il s'agit de savoir si vous étiez en position de commandant

23 pouvant savoir un certain nombre de choses ou si vous étiez un commandant

24 qui, en fin de compte, entre les unités directement rattachées à des

25 pouvoirs civils, entre les unités recevant leurs ordres du ministre de la

Page 20862

1 Défense à Mostar –ceci pour la police militaire-, entre les politiques –

2 parce que vous ne faisiez pas de politique-, entre les civils parce que

3 c'était les autorités civiles, parce que vous n'étiez que militaire, entre

4 les moments où vous étiez militaire mais où, à ce moment là, vous ne vous

5 occupiez que du front serbe, la question est celle-ci : admettez-vous

6 qu'en fin de compte, vous pouviez ne pas savoir un certain nombre de

7 choses que les personnes savaient autour de vous ? C'est la question, elle

8 est très simple.

9 M. Blaskic (interprétation). - La seule chose que je peux

10 accepter, c'est que certains commandants n'étaient pas au poste de

11 commandement, je parle par exemple du commandement sur le terrain. Nous

12 avons entendu la déposition du Dr Mujezinovic, par exemple, qui a eu la

13 possibilité de parler avec les habitants du village d'Ahmici et qui a pu

14 obtenir des informations. Mais même lui n'a obtenu ces informations que le

15 19. Moi, je n'avais la possibilité de parler avec personne puisque j'ai

16 passé tout mon temps dans la cave et que c'est

17 à partir de cette cave que j'exerçais mon commandement. J'étais condamné à

18 me fier aux informations que je recevais de mes subordonnés par le

19 téléphone. Mes collaborateurs les plus proches, je dis bien les plus

20 proches, n'en savaient pas plus que moi non plus.

21 M. Kehoe (interprétation). – Passons à un autre sujet, Général,

22 si vous le voulez bien. J'aimerais vous montrer…

23 Je ne sais pas si vous souhaitez que la pause se déroule

24 maintenant, Monsieur le Président. Nous passons à un autre sujet.

25 M. le Président. – Nous prenons une pause de vingt minutes.

Page 20863

1

2 L'audience, suspendue à 15 heures 45, est reprise à 16 heures 05.

3

4 M. le Président. – L'audience est reprise, asseyez-vous.

5 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, permettez-

6 moi de dire un mot.

7 M. le Président. – Je vous en prie, oui.

8 M. Blaskic (interprétation). - J'ai vérifié ma chronologie et

9 j'ai constaté que le 22 avril, au matin, j'ai eu une réunion avec M. Nakic

10 et que c'est après cette réunion qu'il est allé assister à la réunion de

11 la Commission conjointe. La prochaine fois que j'ai rencontré M. Nakic,

12 c'était le 23 avril 1993, donc après son travail au sein de la Commission

13 conjointe. Je crois qu'il est rentré chez lui.

14 M. le Président. – Merci de cette précision. Monsieur le

15 Procureur ?

16 M. Kehoe (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

17 Monsieur l'huissier, veuillez remettre au témoin les pièces à

18 conviction de

19 l'accusation 456/56, 456/57 et 456/58, s'il vous plaît.

20 (L'huissier s'exécute.)

21 Veuillez examiner la première pièce à conviction. Il s'agit de

22 la lettre du colonel Stewart du 22 avril concernant les atrocités commises

23 à Ahmici. Lorsque vous avez reçu cette lettre, Général, et lorsque vous

24 l'avez lue, avez-vous cru que ce que disait le colonel Stewart était

25 vrai ?

Page 20864

1 M. Blaskic (interprétation). - Lorsque j'ai reçu cette lettre,

2 j'ai cru que ses affirmations étaient justifiées et vraies.

3 M. Kehoe (interprétation). - Général, votre réponse à cette

4 lettre constitue la pièce à conviction 456/57 et, dans la première page,

5 vous dites : "Je suis prêt à envoyer tout de suite une Commission

6 d'enquête dans le village d'Ahmici".

7 Général, de quelle Commission d'enquête parlez-vous ?

8 M. Blaskic (interprétation). – Je parle de la Commission

9 conjointe qui se rendait sur place juste ce moment-là aussi et dans

10 laquelle se trouvaient mes représentants.

11 M. Kehoe (interprétation). – Donc vous parlez de la Commission

12 conjointe de Busovaca ? C'est de cela que vous parlez ?

13 M. Blaskic (interprétation). – La Commission conjointe de

14 Busovaca. Encore une fois, je vais le dire, cette commission a été créée

15 lors de la réunion qui a eu lieu le 20 ou le 21 avril et ce sont mes

16 représentant, Nakic et ses collaborateurs, qui faisaient partie de cette

17 Commission.

18 M. Kehoe (interprétation). – Général, est-ce qu'à quelque moment

19 que ce soit, vous avez demandé que la Commission conjointe de Busovaca

20 mène une enquête sur Ahmici ? Avez-vous jamais fait cette demande ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Sur la base de cette lettre que

22 j'ai envoyée le 3 avril, il est clair que je fais référence à la

23 Commission conjointe que je souhaite envoyer pour qu'elle

24 mène une enquête. La pratique valable jusqu'alors était que chaque fois

25 quand il y avait des points, des lieux où un conflit aurait eu lieu, cela

Page 20865

1 faisait l'objet d'une enquête de la Commission conjointe et ce sont des

2 responsables du service de sécurité du HVO et aussi de l'armée de Bosnie-

3 Herzégovine qui faisaient partie de cette Commission.

4 Par exemple, en ce qui concerne le village de Katici, une telle

5 Commission conjointe y est allée. Je crois qu'ils ont également mené une

6 enquête concernant la prise d'otage. Ils se sont rendus également à

7 Dusina, Lasva, Visnjica et dans d'autres endroits.

8 M. Kehoe (interprétation). – Le colonel Stewart a eu

9 l'impression que vous parliez de la Commission conjointe de Busovaca

10 lorsque vous lui avez envoyé cette lettre, le 23, et lorsque vous l'avez

11 vu, le 24 avril ?

12 M. Blaskic (interprétation). – Je crois que c'est ce qu'il a cru

13 étant donné que c'est la seule commission qui aurait pu mener cette

14 enquête et il savait très bien de quoi on parlait lorsqu'on utilisait le

15 terme "Commission conjointe". Lors de la réunion du 24, j'ai été tout à

16 fait clair. J'ai même indiqué quelle devait être la composition de cette

17 Commission conjointe.

18 M. Kehoe (interprétation). - Général, revenons maintenant à la

19 pièce à conviction 685. Encore une fois, il s'agit d'un extrait du journal

20 du colonel Stewart du 4 mai. Veuillez surtout examiner la partie que nous

21 avons déjà examinée ce matin, c'est-à-dire le dernier paragraphe de la

22 page 2.

23 (L'huissier s'exécute).

24 M. Kehoe (interprétation). - Général, permettez-moi de vous lire

25 ce paragraphe. Ceci figure maintenant sur le rétroprojecteur : "Lorsque le

Page 20866

1 déjeuner s'est terminé, j'ai amené les ambassadeurs à Vitez où j'ai

2 rencontré Valenta et Blaskic. J'ai dit que rien ne s'était passé en ce qui

3 concerne la Commission d'enquête sur Ahmici depuis déjà 18 jours et que

4 personne n'était poursuivi ni arrêté pour autant que je le savais. Et, je

5 connaissais les noms des accusés que j'allais remettre au ambassadeur de

6 l'ECMM".

7 Général, le colonel s'attendait à ce que ce soit vous qui créiez

8 la Commission conjointe n'est-ce pas ?

9 M. Blaskic (interprétation). - Non, à la réunion à laquelle j'ai

10 été convoqué, c'est moi durant mon intervention qui ai demandé au colonel

11 Stewart et à l'ambassadeur Thébault de créer une Commission conjointe. Et

12 j'ai justifié mes propos en disant que c'était le seul moyen pour que les

13 résultats de l'enquête soient acceptables, pour que l'enquête soit

14 complète. Et lorsque l'on m'a posé la question de savoir quelle devait

15 être la composition de la Commission conjointe, j'ai expliqué qu'elle

16 devait être cette composition selon moi.

17 M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce qu'à quelque moment

18 que ce soit, vous avez donné des instructions à vos représentants ou bien

19 est-ce que vous êtes allé vous même assister à une réunion, une des

20 réunions quotidiennes la Commission conjointe de Busovaca, pour demander

21 quels étaient les résultats de l'enquête sur Ahmici. Et, si oui, dites-

22 nous quand et quelles étaient les réponses que vous avez reçues.

23 M. Blaskic (interprétation). - J'ai envoyé une réponse à la

24 lettre et le colonel Stewart l'a très bien comprise, le 23 avril 1993,

25 lors de la réunion. Il s'agit du document que nous avons vu tout à l'heure

Page 20867

1 en date du 4 mai 1993. Encore une fois, j'ai demandé à deux personnes les

2 plus responsables, c'est-à-dire le chef de la Mission des observateurs

3 européens, M. Thébault et au colonel Stewart, de créer une Commission

4 conjointe qui mènerait une enquête. Et à partir du 24 avril, j'ai demandé

5 au service de sécurité de mener une enquête étant donné qu'avec le colonel

6 Stewart…

7 M. Kehoe (interprétation). - … Je dois vous interrompre. Ma

8 question porte sur les réunions quotidiennes de la Commission conjointe de

9 Busovaca . En ce qui concerne ces rencontres, est-ce qu'à quelque moment

10 que ce soit, vous avez donné des instructions à vos représentants tel que

11 Nakic, ou qui que ce soit d'autre, d'aller assister à cette rencontre, à

12 ces rencontres, et de demander ce qu'il en était des résultats de

13 l'enquête sur Ahmici ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Permettez-moi de vérifier quelque

15 chose, s'il vous plaît.

16 M. le Président. - Qu'est-ce que vous cherchez à vérifier, s'il

17 vous plaît, Général Blaskic ?

18 M. Blaskic (interprétation). - J'essaie de vérifier ma réunion

19 avec M. Franjo Nakic le 23. Je sais que je l'ai rencontré et je sais que,

20 dès le 22, j'ai dit à mes collaborateurs que j'allais demander qu'une

21 Commission conjointe soit mise en place pour qu'une enquête conjointe soit

22 menée avec aussi la participation des institutions internationales. Mais

23 je souhaite vérifier si ceci s'est produit le 23 très exactement.

24 M. le Président. - Un point d'information,

25 Monsieur le Procureur, pendant que le témoin cherche : la commission était

Page 20868

1 convoquée par qui sur le plan institutionnel ?

2 M. Kehoe (interprétation). - Comme le témoin l'a dit, il y a

3 eu des réunions hebdomadaires de la Commission conjointe de Busovaca qui

4 avaient commencé à être organisées depuis un moment. En fait, il

5 s'agissait de réunions quotidiennes et certaines personnes, nous les avons

6 vues sur des cassettes vidéo, ont assisté à ces réunions entre autres le

7 commandant Morsink.

8 M. le Président. - Il me semble, et vous me direz si je me

9 trompe, que si le 23 avril vous décidez, vous, d'envoyer une commission

10 d'enquête, est-ce que vous ne pensez pas qu'il aurait fallu préciser dans

11 votre lettre d'un mot : "Je suis prêt à envoyer immédiatement une

12 commission d'enquête. Je propose, par exemple, la commission conjointe qui

13 me paraît la mieux habilitée à établir les faits de façon

14 contradictoire" ? Vous ne croyez pas ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, dès le

16 mois de janvier, donc depuis 4 mois déjà, nous avions une collaboration

17 dans le cadre de la Commission conjointe. Il s'agissait déjà d'une

18 routine. C'est la Commission conjointe qui menait des enquêtes concernant

19 chaque incident.

20 M. le Président. - Il s'agit de crimes dont a priori, en tout

21 cas depuis la veille, vous avez conscience, d'après vous, qu'ils sont

22 importants, au point d'envoyer, c'est quand même inhabituel, une

23 commission d'enquête. Il me semble que cela ne va pas de soi, que c'est la

24 Commission conjointe. Ce n'est quand même pas vous qui dirigez la

25 Commission conjointe. Vous n'êtes pas propriétaire de la Commission

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1 conjointe.

2 Vous lui assignez un rôle de commission d'enquête qu'elle peut

3 jouer, qu'elle peut certainement jouer mais il me semble, quand on lit la

4 phrase, en tout cas, dans la version française -je me mets à la place du

5 colonel Stewart- il peut légitimement penser que vous allez créer de vous-

6 même une commission d'enquête du côté du HVO. D'autant que vous dites –

7 merci, Monsieur le Juge- : "Envoyez immédiatement une commission

8 d'enquête". Ce n'est pas vous, quand même, qui désignez comme cela la

9 Commission conjointe. La Commission conjointe comporte vos ennemis. Ma

10 question c'est : ne pensez-vous pas qu'en choisissant d'écrire de cette

11 façon-là, vous induisez le colonel Stewart en erreur et qu'il peut

12 légitimement penser que vous créez une commission d'enquête de votre

13 côté ? Cela ne va pas de soi que c'est la commission conjointe. Ou alors,

14 si c'était, pour vous, évident, il me semble que, sous la plume, j'aurais

15 ajouté "je pense, Monsieur le Colonel, que la commission conjointe serait

16 la mieux habilitée".

17 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, peut-être

18 n'ai-je pas été suffisamment précis lorsque j'ai parlé de la routine. Je

19 n'ai pas parlé du fait que ce crime, que le crime était une routine, mais

20 j'ai parlé du travail de la commission conjointe. Cette commission

21 conjointe existait déjà et, bien sûr, s'il y avait un crime, je ne parlais

22 pas de crime en employant le mot "routine", mais je crois que tout le

23 monde, et surtout moi-même et M. Stewart et M. Thébault, ainsi que le

24 commandant du 3ème Corps d'armée connaissaient… On connaissait tous le

25 travail de la commission conjointe.

Page 20870

1 M. le Président (interprétation). - Vous voulez une précision,

2 Monsieur le Juge ?

3 M. Rodrigues. - Oui. Général, vous avez dit que, dans votre

4 lettre, je lis : "je suis prêt -donc tout de suite- à envoyer

5 immédiatement une commission d'enquête". Vous répondez cela au Colonel

6 Stewart. Vous avez dit à vos collaborateurs dans la commission conjointe :

7 "je vais demander une enquête avec la participation des institutions

8 internationales". Vous avez dit que vous-même étiez très touché quand vous

9 avez conclu qu'il y avait des crimes à Ahmici. Vous dites une chose au

10 Colonel Stewart, une autre chose à vos collaborateurs, mais qu'est-ce que

11 vous faisiez ? Quelles ont été vos actions ? A la fin, vous n'avez pas la

12 disponibilité d'une commission pour envoyer immédiatement au Colonel

13 Stewart.

14 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, jusqu'à ce

15 moment-là, donc jusqu'à cette enquête, toutes les enquêtes étaient menées

16 par la commission conjointe. Mes officiers qui faisaient partie de la

17 commission conjointe agissaient suite à mes instructions aussi. J'ai

18 compris le 23, au matin, que j'allais donner l'ordre à Franjo Nakic, avec

19 qui j'ai rédigé cette lettre, d'enquêter sur ce cas d'Ahmici dans le cadre

20 de la commission conjointe.

21 Jusque là, c'était la routine. A chaque fois qu'il fallait mener

22 une enquête -y compris à Busovaca, j'ai mentionné aussi la Lasva, Dusina

23 et d'autres villages- la commission conjointe allait sur le terrain et

24 c'est la Forpronu qui fournissait la protection.

25 M. Rodrigues. - Excusez-moi de vous interrompre. Vous avez dit à

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1 Franjo Nakic "demandez tout de suite, immédiatement, une enquête sur

2 Ahmici". Ce que j'ai entendu dire, c'est que vous avez dit à Franjo

3 Nakic : "je vais demander une enquête" ; est-ce que vous avez donné

4 l'ordre à Franjo Nakic : "dans la commission, demandez tout de suite,

5 immédiatement, une enquête" ou non ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Je l'ai demandé. J'ai demandé de

7 vérifier cela selon mes notes et selon la chronologie pour avoir tous les

8 détails, mais je sais qu'au moment où je rédigeais la lettre, j'ai dit à

9 Nakic que cela allait être notre attitude, donc mon attitude. C'est-à-dire

10 que la commission conjointe devait mener une enquête. Il était avec moi, à

11 mes côtés,

12 lorsque je rédigeais cette lettre et j'essayais de trouver cette donnée

13 dans la chronologie.

14 M. Kehoe (interprétation). – Oui, Général. Allons un peu plus

15 loin. Nous parlons de votre lettre, que vous avez envoyée au Colonel

16 Stewart, où on vous a dit "je suis prêt à envoyer immédiatement une

17 commission d'enquête au village d'Ahmici".

18 Dans votre lettre, envoyée à Kordic, Sotjic et Petkovic –il

19 s'agit de la pièce à conviction 456/58-, vous marquez que Stewart était en

20 train de se plaindre parce qu'aucune commission d'enquête n'a été créée.

21 Je suis sûr que vous avez entendu le témoignage de Martin Bell qui a dit

22 que, pendant la conférence de presse du 27, vous avez dit que la

23 commission avait été mise en place. Le 4, le colonel Stewart redit que

24 rien ne s'était passé concernant la commission d'enquête sur Ahmici depuis

25 18 jours.

Page 20872

1 Est-ce que vous affirmez que cette commission dont il a été

2 question est la commission conjointe de Busovaca qui existait depuis

3 février 1993 ? Est-ce que c'est cela que vous affirmez dans le cadre de

4 votre déposition ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Tout d'abord, j'ai entendu à peu

6 près cinq questions. Je vais essayer de répondre point par point.

7 En ce qui concerne le document 456/ 58, il s'agit d'un document

8 qui n'est pas complet, donc ce document ne contient pas tout ce que j'ai

9 dit au colonel Stewart et tout ce que j'ai écrit dans l'original, et que

10 j'ai adressé à l'état-major principal.

11 Deuxièmement, j'ai demandé qu'une commission conjointe soit mise

12 en place et j'ai dit au colonel Stewart que tout ce que j'avais à dire

13 était contenu dans ma réponse à sa lettre.

14 Ensuite, après cette réunion, j'ai donné un ordre à l'adjoint

15 chargé de la sécurité de mener une enquête, mais je croyais toujours que

16 j'allais réussir et qu'une commission conjointe allait être créée.

17 C'est pour cela qu'à la rencontre avec M. Thébault et

18 M. Stewart, j'ai demandé qu'une commission chargée d'enquête sur Ahmici

19 soit quand même conjointe. Ils m'ont

20 demandé pourquoi, j'ai dit "à cause d'aboutir à des résultats objectifs et

21 aux résultats complets. Pour que les résultats soient acceptables aussi

22 pour l'armée de Bosnie-Herzégovine, il faut que l'enquête soit menée par

23 une Commission conjointe et j'ai besoin de l'aide de l'ONU et de la Croix-

24 Rouge internationale et aussi de l'ECMM".

25 M. Kehoe (interprétation). - Général, votre représentant dans la

Page 20873

1 Commission conjointe de Busovaca était Franjo Nakic, n'est-ce pas ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

3 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que, à quelque moment que ce

4 soit, vous avez donné l'ordre à Franjo Nakic d'aller aux rencontres

5 quotidiennes de la Commission conjointe de Busovaca afin de demander une

6 enquête sur Ahmici ? Si vous avez fait une telle demande auprès de Nakic,

7 à quel moment l'avez-vous fait ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Je dois consulter ma chronologie,

9 s'il vous plaît.

10 En ce qui concerne Nakic, j'ai été le 23 avril, au moment où

11 j'ai écrit la lettre pour le Colonel Stewart et, à ce moment-là, il

12 connaissait le contenu de la lettre. Il connaissait mon attitude en ce qui

13 concerne la création de la Commission conjointe et l'enquête sur Ahmici.

14 M. Kehoe (interprétation). - La question que j'ai posée est la

15 suivante : est-ce que Nakic avait demandé l'enquête sur Ahmici à travers

16 la Commission conjointe de Busovaca ? S'il l'a fait, quand l'a-t-il fait ?

17 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas s'il avait demandé

18 cette enquête conjointe mais, en ce qui me concerne, je sais que j'ai

19 demandé, à travers cette lettre que j'ai adressée au Colonel Stewart.

20 Le 24, j'ai compris que ce serait trop difficile. C'est la raison pour

21 laquelle j'ai ordonné à l'adjoint de sécurité de le faire.

22 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que vous avez un papier ou

23 bien une preuve quelconque selon laquelle nous pourrions en conclure que

24 vous avez émis l'ordre à Franjo Nakic en lui demandant d'entreprendre une

25 telle enquête au sein de la Commission de

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1 Busovaca ? Avez-vous quelque chose ?

2 M. Blaskic (interprétation). – Que j'avais donné un ordre écrit

3 à mon chef de l'état-major ? Oui, dans mon journal de guerre, j'ai donc

4 mis une note que, le 23 avril, j'ai eu une réunion avec lui, que lui avait

5 participé à cette réunion, qu'il était présent également quand j'ai

6 discuté de la lettre également, quand j'ai discuté de la lettre, de ma

7 réponse au Colonel Stewart.

8 Je sais que lui était conscient que j'exigeais une Commission

9 conjointe. Bien évidemment, je n'ai pas eu une correspondance écrite avec

10 mon premier collaborateur, le chef de l'état-major.

11 M. Kehoe (interprétation). - Général, revenons à notre document,

12 au document auquel vous vous êtes référé, le 456/58, l'ordre du

13 24 avril 1993. Au cours de votre témoignage, à plusieurs reprises, vous

14 vous êtes référé à cet ordre, sur la page 19 077. Vous dites : "tous mes

15 ordres étaient écrits le 24 avril".

16 Sur la page 19 166, vous dites que les dirigeants militaires et

17 politiques de Vitez, normalement, devraient donc s'engager dans cette

18 enquête.

19 Sur la page 19 239, vous dites que vous avez envoyé la lettre le

20 24 avril, que vous avez exprimé également à vos supérieurs votre attitude

21 en disant que les fonctionnaires les plus hauts devraient se rendre dans

22 cette région. A la page 19 659, jusqu'à 19 660, vous dites : "je crois

23 qu'il y a un rapport par lequel je demande au commandant suprême de

24 visiter Vitez pour appuyer cette enquête que nous avons entreprise".

25 A la page 20 116, vous dites que Mate Boban aurait dû se

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1 trouver à Vitez ce jour-là et qu'il aurait fallu, également, lui dire

2 qu'il y avait ce crime qui s'était produit à Ahmici, l'informer sur

3 l'enquête et sur tout ce qui s'est passé à Ahmici.

4 Au cours de votre déposition, à la page 20 115, et vous avez

5 répété la même chose également aujourd'hui, que ce document n'était pas

6 complet. Avant de revenir au contenu de ce document, j'aimerais tout

7 simplement que vous parcourriez le document en lui-même. Si vous pouvez

8 prendre l'original, et on va mettre sur le rétroprojecteur... on va donc

9 parler du document 456/58.

10 J'aimerais que, sur le rétroprojecteur, soit la version

11 croate 456/58.

12 M. le Président (interprétation). - Les Juges n'ont plus aucune

13 version. Est-ce que vous pouvez nous la donner, Monsieur le Greffier ? Il

14 faut choisir : le témoin ne peut pas avoir à la fois la version anglaise

15 et croate, et les Juges, aucune version. Moi, en tant que Français, je

16 n'ai pas de version, ce qui est normal, mais j'aimerais bien avoir la

17 version anglaise pour mes collègues et moi-même, et le témoin a la version

18 croate.

19 Voilà, merci.

20 Bien, alors, il s'agit d'un document -je le dis aussi pour que

21 nos débats soient toujours très clairs vis-à-vis du public-

22 Il s'agit d'un document du colonel Blaskic, Monsieur le

23 Procureur ? Il s'agit du compte rendu d'une réunion…

24 M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est cela, Monsieur le

25 Président.

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1 Général, est-ce que vous pouvez voir s'il vous plaît,

2 l'original ? C'est vous qui l'avaient rédigé, n'est-ce pas ?

3 M. Blaskic (interprétation). – Je l'ai rédigé effectivement,

4 mais c'était le manuscrit. Je ne l'ai pas dactylographié, ce n'était que

5 le manuscrit.

6 M. Kehoe (interprétation). - Et en ce qui concerne vos

7 initiales, elles sont en haut à gauche, en bas, deuxième page. Es-ce bien

8 vos initiales ? Vous avez dit également que l'on avait dactylographié par

9 la suite le manuscrit ?

10 M. Blaskic (interprétation). – Le document, je l'ai écrit à la

11 main. Ensuite, c'est la dactylo qui avait dactylographié à la machine le

12 texte sous la forme que vous avez actuellement.

13 M. Kehoe (interprétation). – Général, ceci a donc été

14 dactylographié dans votre

15 langue maternelle, n'est-ce pas ?

16 M. Blaskic (interprétation). – Oui.

17 M. Kehoe (interprétation). – A qui avez-vous adressé cette

18 lettre, s'il vous plaît ? Qui est donc le vice-président de la communauté

19 croate d'Herceg-Bosna, le ministre de la Défense de la communauté croate

20 d'Herceg-Bosna, puis il y a un autre destinataire ?

21 M. Blaskic (interprétation). – Dario Kordic était le vice-

22 président de la communauté croate d'Herceg-Bosna. Bruno Stojic était le

23 ministre de la Défense et le chef de l'état-major du HVO était Milivoj

24 Petkovic.

25 M. Kehoe (interprétation). - Général, par conséquent, il s'agit

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1 de trois personnes très importantes, n'est-ce pas, de la communauté croate

2 d'Herceg-Bosna.

3 M. Blaskic (interprétation). – Oui.

4 M. Kehoe (interprétation). – Avant que vous envoyiez cette

5 lettre à ces trois destinataires, vous étiez très prudent n'est-ce pas et

6 vous vouliez être sûr que le contenu de la lettre soit bon, n'est-ce pas ?

7 M. Blaskic (interprétation). - J'ai essayé bien évidemment, dans

8 toutes les situations, d'être sûr du contenu, de voir si le contenu était

9 correct ou non et ceci en fonction de la situation, mais j'ai toujours

10 essayé d'être le plus correct possible. Cela dépendait des conditions dans

11 lesquelles j'agissais.

12 M. Kehoe (interprétation). – Par conséquent, vous avez lu la

13 lettre avant de l'envoyer à ces trois destinataires, à ces trois personnes

14 importantes ?

15 M. Blaskic (interprétation). – Je ne m'en souviens pas, mais il

16 est probable que je l'ai lue, ou du moins je l'ai parcourue.

17 M. le Président. – Posez vos questions, Monsieur le Procureur.

18 M. Kehoe (interprétation). – Avez-vous parcouru quand même la

19 lettre avant de la signer et de l'envoyer ?

20 M. Blaskic (interprétation). – Il m'est extrêmement difficile de

21 vous répondre maintenant parce qu'il s'agit d'une situation qui date de

22 1993, mais il est probable que je l'ai parcourue en vitesse. Je sais

23 comment j'ai rédigé les rapports, de cela je me souviens.

24 M. Kehoe (interprétation). – Général, il s'agit d'un document

25 strictement confidentiel, n'est-ce pas ?

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1 M. Blaskic (interprétation). – Il n'y avait pratiquement pas de

2 documents qui n'aient porté cette enseigne "strictement confidentiel",

3 chaque document portait la mention "strictement confidentiel". Bien

4 évidemment, je ne sais pas si nous avons été véritablement formé pour en

5 tenir compte, pour manipuler le document comme strictement confidentiel.

6 Effectivement, c'est un document qui portait cette en-tête

7 strictement confidentiel, comme tout autre document à cette époque.

8 M. Kehoe (interprétation). - Par ailleurs, j'insiste, il était

9 marqué "strictement confidentiel" ?

10 M. Blaskic (interprétation). – Oui, je viens de le dire, comme

11 tous les documents militaires.

12 M. le Président. – Question ?

13 M. Kehoe (interprétation). - D'accord, Monsieur le Président.

14 Général, vous avez autorisé le fait que le document soit

15 autorisé aux trois personnes dont il a été question et qui étaient

16 importantes au niveau de la communauté croate d'Herceg-Bosna ?

17 M. Blaskic (interprétation). – Oui, je l'ai autorisé, mais j'ai

18 été surpris quand même de constater que le seul document ne correspond pas

19 au document que normalement j'avais rédigé. Car j'ai assisté également, à

20 Sarajevo, à la réunion avec les représentants de la Forpronu. J'en avais

21 donc d'autres. Il est tout à fait exceptionnel qu'un tel de document soit

22 fait de cette manière-là.

23 M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce que vous voulez

24 jeter un coup d'œil sur le document en question, pages 1 et 2. Vous avez

25 signé, à la deuxième page, là où c'est marqué "signature" ?

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1 M. Blaskic (interprétation). – Oui, je l'ai signé. Je ne le

2 conteste pas, c'est tout à fait vrai. Mais je dis que la forme du

3 document, pour moi, n'est pas tout à fait logique. Pour moi,

4 personnellement, parce que je n'ai jamais rédigé le document de cette

5 façon-là. Je ne sais pas comment cela s'est produit ni comment on a pu

6 faire une telle erreur, mais le document n'est pas complet.

7 M. le Président. - Excusez-moi, je ne suis plus du tout. Je vois

8 sur le rétroprojecteur le document 456-57. Nous sommes bien d'accord que

9 vous parlez, Monsieur le Procureur, que vous parlez du document 458/58 ?

10 M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est vrai, Monsieur le

11 Président.

12 M. le Président. – Dans cette version, qu'est-ce qui n'est pas

13 complet à vos yeux ? Général Blaskic, qu'es-ce qui n'est pas complet par

14 rapport aux versions que vous avez sous les yeux ?

15 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je vais

16 tenter, très brièvement, de m'expliquer.

17 M. le Président. – Posez le sur le rétroprojecteur pour le

18 public, ainsi tout le monde pourra le voir, que le débat soit clair si

19 vous plaît. Vous avez la pièce 456/58, qui est un compte rendu qui est

20 adressé à Dario Kordic, à Bruno Stojic et au général Petkovic sur une

21 discussion que vous avez eue avec le colonel Stewart, dès le 24 avril,

22 c'est-à-dire le lendemain du jour où vous avez écrit au colonel Stewart

23 que vous alliez envoyer une commission d'enquête. C'est le document qui

24 vous est soumis. Nous avons ici la version anglaise, mes collègues et moi-

25 même. Vous dites que ce n'est pas complet. Qu'est-ce qui n'est pas

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1 complet ? Nous vous écoutons.

2 M. Blaskic (interprétation). – J'ai marqué sur la première

3 page : "colonel Stewart". J'ai cité en mettant les petits tirets ce que le

4 colonel Stewart m'avait dit lors de la réunion. Ensuite, j'avais

5 l'habitude d'écrire mon nom et mon prénom. Puis, je disais ce que moi-même

6 j'ai dit en réponse au colonel Stewart.

7 Normalement, je terminais le document avec mes propositions et

8 mes suggestions éventuellement. Alors qu'ici, il manque ce que j'ai dit au

9 colonel Stewart à la réunion qui a eu lieu entre moi-même et le colonel

10 Stewart.

11 M. le Président. – Qu'est-ce qui manque ?

12 M. Blaskic (interprétation). – Ce qui manque, c'est la partie où

13 moi-même je me suis déclaré et j'ai parlé au sujet de ce que me disait le

14 colonel Stewart. Il y avait également un sujet dont nous avons débattu le

15 24 avril. Nous avons parlé du pilonnage de Zenica. Cela correspond à la

16 page 2. Mais le colonel Stewart m'a dit, à moi-même, et cela aurait dû

17 figurer dans la partie où l'on parle des affirmations du colonel Stewart.

18 Par conséquent, tout ce document est présenté différemment et il

19 me semble qu'il y a une partie qui manque. Nous avons donc un rapport du

20 21 avril où l'on voit comment je rédige les rapports.

21 M. le Président (interprétation). - Je voudrais redonner la

22 parole au Procureur qui mène l'accusation pour savoir si, donc, on

23 conteste ce document. Monsieur le Procureur, c'est à vous. Je n'ai rien

24 d'autre à ajouter en ce qui me concerne.

25 M. Rodrigues. - Général Blaskic, ce document que nous avons vu,

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1 qui est sur le rétroprojecteur, a-t-il un caractère civil ou militaire ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Le document a un caractère

3 militaire et j'envoie une information sur la réunion que j'ai eue avec le

4 Colonel Stewart.

5 M. Rodrigues. - Pourquoi avez-vous envoyé cette information au

6 vice-président Dario Kordic et à Bruno Stojic ? Pourquoi avez-vous envoyé

7 à ces deux personnes ?

8 M. Blaskic (interprétation). - En ce qui concerne Bruno Stojic,

9 il était ministre de la Défense. Par conséquent, compétent sur la police

10 militaire en passant par le chef de la direction de la police militaire et

11 puis la personne qui occupait le poste le plus important au niveau de

12 l'armée qui aurait pu…

13 M. Rodrigues. - Pourquoi Dario Kordic ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Parce que je croyais qu'il allait

15 informer Mate Boban là-dessus. Si Mate Boban ne pouvait pas s'y rendre, à

16 ce moment-là pour moi, il était important également de bénéficier de

17 l'appui politique dans l'enquête.

18 M. Rodrigues. - Vous nous avez dit que seulement vous receviez

19 des ordres de vos supérieurs hiérarchiques. Je suppose que les

20 informations allaient dans le sens contraire, donc seulement à travers vos

21 supérieurs hiérarchiques. Je me trompe ?

22 M. Blaskic (interprétation). - C'est exact. La plupart des

23 informations allaient dans le sens inverse, en passant les supérieurs,

24 mais il y avait quelques exceptions également. Si l'information, par

25 exemple, avait besoin d'un appui général global ou si elle portait sur la

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1 partie politique, à ce moment-là, il y a des représentants civils

2 également qui étaient au courant.

3 M. Rodrigues. - Mais si vous envoyiez cette information

4 seulement à votre supérieur hiérarchique, il devait décider si

5 l'information devait être ou non envoyée à Dario Kordic ou au ministre de

6 la Défense pour que vous soyiez cohérent avec tout ce que vous nous avez

7 dit avant.

8 M. Blaskic (interprétation). - Il s'agit d'une information qui a

9 été envoyée, Monsieur le Juge, sur la réunion en question, alors que la

10 réunion avait eu lieu au sujet d'un certain nombre également d'actes qui

11 ont été commis. Par conséquent, il m'a été important également d'avoir

12 l'appui des dirigeants.

13 M. Shahabuddeen (interprétation). - Nous souhaiterions attirer

14 l'attention du Général sur le document où l'on parle des souffrances et

15 des épreuves, des massacres des

16 Musulmans dans la municipalité de Vitez et la visite du Conseil de

17 sécurité en date du 24 avril 1993. Est-ce qu'éventuellement, il y a eu une

18 omission de ma part où on parle du Conseil de sécurité ? Est-ce que vous

19 pouvez m'aider, s'il vous plaît ?

20 M. Blaskic (interprétation). – Oui, Monsieur le Juge, vous

21 l'avez lu, c'est vrai. Je ne sais pas si la délégation, la mission, était

22 la mission de l'ONU ou du Conseil de sécurité, mais je ne m'en souviens

23 pas véritablement. Je sais qu'il y avait une délégation qui a visité cette

24 région. Pour moi, c'était extrêmement important et je voulais également

25 envoyer le document, en parler devant les hommes politiques parce que,

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1 comme cela, cela appuyait cette enquête.

2 M. le Président (interprétation). – Merci, Monsieur le Juge.

3 Monsieur le Procureur, reprenez sur la question du document,

4 s'il vous plaît.

5 M. Kehoe (interprétation). - Général, pour ce qui est de ce

6 document très concret, personne n'a rien effacé du texte original que vous

7 avez rédigé vous-même et envoyé aux trois personnes importantes ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas comment le

9 document n'a pas été complété. Je ne sais pas si, éventuellement, c'est la

10 dactylo qui avait omis un certain nombre de choses, mais le document n'est

11 pas l'original, n'est pas celui que j'ai fait à la main. Il y a une partie

12 qui manque dans le document.

13 M. Kehoe (interprétation). - Général, ce document que le

14 Lieutenant-Colonel Jean-Pierre Capelle a reçu de la part du HVO, enfin de

15 la Fédération, sous cette forme, c'est la forme de la lettre que vous avez

16 envoyée le 24 avril 1993 ?

17 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas dit que c'est

18 l'accusation, le Procureur, qui avait rédigé le document, j'ai tout

19 simplement dit que ce n'est pas la forme de document ; tout au moins pas

20 comme normalement, moi, j'avais rédigé les documents. Je ne sais pas si

21 c'est la dactylo qui avait éventuellement omis un certain nombre de

22 paragraphes, mais, de toute façon, pour moi, le document n'est pas

23 complet. Il n'est pas logique. En ce qui me concerne, je n'ai

24 jamais rédigé des documents de cet type-là en parlant d'une réunion à

25 laquelle j'ai assisté.

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1 M. Kehoe (interprétation). - Général, il s'agit d'un document

2 que vous avez signé sous cette forme, n'est-ce pas ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Mais je vois à la page 2 que j'ai

4 signé le document. Je ne conteste pas le fait qu'il s'agit là de ma

5 signature, mais j'affirme que le document n'est pas complet. Pourquoi ? Je

6 ne peux pas vous le dire, je ne le sais pas.

7 M. le Président. - Ce document n'est pas contesté, Monsieur le

8 Procureur, donc vous pouvez poursuivre... Simplement, les Juges ont

9 entendu ce que le témoin a dit sur le plan de l'habitude qu'il avait de

10 rédiger des documents et qu'il ne retrouve pas ici. Il pense qu'il est

11 incomplet, mais il ne conteste pas la signature. Allez-y, Monsieur le

12 Procureur.

13 M. Kehoe (interprétation). - Général, il s'agit d'un document

14 qui est strictement confidentiel ; comment l'avez-vous envoyé à Mostar

15 avec votre signature ? Comment l'avez-vous fait ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Je pense que c'était par

17 télécopie ; enfin, par une ligne normale.

18 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que c'était donc les

19 documents comme tous les autres documents envoyés par cryptage ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Mais j'avais une télécopie, une

21 télécopie normale, je n'avais pas des télécopies cryptées.

22 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que vous voulez affirmer,

23 Général, que ce document strictement confidentiel a été envoyé par la

24 ligne téléphonique normale ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Je l'ai déjà dit pendant que

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1 j'étais commandant au niveau de Vitez : je n'ai jamais été dans la

2 situation d'utiliser une télécopie cryptée. Par conséquent, c'était une

3 télécopie normale que n'importe qui aurait pu éventuellement voir.

4 M. Kehoe (interprétation). - Revenons à la réunion du 24 avril

5 avec le Colonel

6 Stewart. Nous pouvons éventuellement voir ce que vous avez fait, ce que

7 vous n'avez pas fait avant la réunion. Cette réunion qui a eu lieu le

8 24 avril était une réunion très importante lors de laquelle vous vous êtes

9 entretenus sur des allégations qui étaient très importantes et très

10 graves, n'est-ce pas, Général ?

11 M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai eu la réunion avec le

12 Colonel Stewart. Juste un petit moment...

13 M. Kehoe (interprétation). - C'est le document 456/58 et il est

14 question de la réunion du 24 avril. Vous venez de voir ce document.

15 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

16 M. Kehoe (interprétation). - Le Colonel Stewart occupait un

17 poste le plus élevé militaire à proximité de Vitez à cette époque-là,

18 n'est-ce pas ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Il y avait le général Morillon

20 également qui était commandant de Bosnie-Herzégovine, car ce n'était pas

21 uniquement Vitez que je couvrais, mais dans la vallée de la Lasva, c'était

22 le colonel Stewart. Il y avait peut-être quelqu'un d'autre du bataillon de

23 Belgique, des Pays-Bas, mais je ne connaissais pas les grades.

24 M. Kehoe (interprétation). - Une fois que vous avez reçu la

25 lettre le 24 avril et, avant la réunion, est-ce que vous vous êtes mis en

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1 contact avec Petkovic, ou Stojic, ou Kordic, et ceci, pour discuter les

2 allégations qui ont fait l'objet de la lettre du Colonel Stewart ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Une fois que j'ai reçu la lettre

4 du Colonel Stewart, le 22 avril, j'ai informé par téléphone le chef de

5 l'état-major Petkovic, le général de Brigade Petkovic, et puis je lui ai

6 lu le contenu de la lettre et j'ai parlé également avec lui de quelles

7 seraient les thèses dans ma réponse au Colonel Stewart.

8 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que, vous-même et Milivoj

9 Petkovic, vous vous êtes entretenus sur le fait de convoquer Pasko

10 Ljubicic, Mario Cerkez ou un autre officier dans votre bureau le 23 avril,

11 pour pouvoir vérifier le plus tôt possible ce qui s'était passé à Ahmici ?

12 M. Blaskic (interprétation). - Avec le Général Petkovic, moi

13 j'ai parlé de la lettre du Colonel Stewart. C'était une ligne de

14 communication normale. Par téléphone, je lui ai transmis le contenu de la

15 lettre en ce qui concerne mes doutes, j'ai informé le général Petkovic

16 oralement le 28 avril 1993, donc quelques jours plus tard, de ce qui

17 s'était passé.

18 M. Kehoe (interprétation). - Général, une fois que vous avez

19 reçu la lettre, 22, est-ce que vous avez émis les ordres à tous vos

20 subordonnés, à toutes les unités spéciales qu'ils vous envoient toutes les

21 informations, toutes les précisions sur ce qui s'est passé ?

22 M. Blaskic (interprétation). - C'est beaucoup d'informations ;

23 je vous entends très bien, mais je vous demande de ralentir, s'il vous

24 plaît.

25 M. Kehoe (interprétation). - Je vous en prie, certainement.

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1 Général, après avoir reçu la lettre de la part du Colonel Stewart, le

2 22 avril, est-ce que vous avez émis un ordre écrit à tous les commandants

3 des unités des formations militaires en demandant que, dans un délai de

4 2 heures, 3 heures, 4 heures, on vous envoie les informations, toutes les

5 informations et toutes les précisions sur les événements à Ahmici ? Est-ce

6 que vous l'avez fait ?

7 M. Blaskic (interprétation). - Dès que j'ai reçu la lettre, j'ai

8 appelé Slavko Marin, le chef de la section opérationnelle, et j'ai demandé

9 qu'il rassemble toutes les informations qu'il pourrait obtenir de la part

10 des subordonnés.

11 En ce qui concerne l'ordre, l'ordre a déjà été émis le

12 18 avril 1993, le point 4 où les commandants qui ont été sous mes ordres

13 étaient dans l'obligation de se déclarer sur tous les événements, y

14 compris non seulement Ahmici, mais tous les autres événements qui ont eu

15 lieu dans les zones de leur responsabilité. C'est un ordre qui est émis le

16 18 avril 1993.

17 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que l'ordre émis le

18 18 avril 1993 précise quelque chose au sujet d'Ahmici ? Si vous souhaitez

19 voir le document, bien évidemment, nous pouvons vous le montrer, Général.

20 M. Blaskic (interprétation). - Vous m'avez demandé si j'avais

21 émis un ordre écrit en ce qui concerne les informations, toutes les

22 informations concernant cette lettre. J'ai déjà répondu qu'il y avait déjà

23 un ordre qui a été émis par écrit. Ce qui m'a été nécessaire, c'est

24 d'avoir toutes les autres informations et les précisions et donc de

25 parcourir toutes les informations dont nous avons disposé. Moi, je pense

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1 qu'il ne fallait pas émettre un autre ordre.

2 M. Kehoe (interprétation). - Général, en ce qui concerne votre

3 réponse à la question que je vous ai posée, une fois que vous avez reçu

4 cette information de la part du Colonel Stewart, et ceci concernant les

5 crimes qui ont été commis à Ahmici, vous n'avez pas délivré un autre ordre

6 à vos subordonnés par lequel vous demandez toutes les informations

7 concernant le crime très précis à Ahmici, n'est-ce pas ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Non, moi je n'ai pas délivré

9 l'ordre aux subordonnés, mais j'ai demandé au chef de la section

10 opérationnelle, mon collaborateur, de me compléter tous les rapports,

11 toutes les informations. J'avais une centaine de documents.

12 M. Kehoe (interprétation). - Avant d'envoyer ce document à

13 Petkovic, je parle du document sous la cote 456/58, du 24 avril, avant

14 d'envoyer ce document à Kordic, à Stojic, à Petkovic, est-ce que vous avez

15 parlé avec ces personnes au téléphone et tout de suite après avoir eu

16 cette réunion et avant d'envoyer la lettre ?

17 M. Blaskic (interprétation). - Je ne me souviens pas que j'ai eu

18 de tels entretiens. Il y avait beaucoup d'activité. Je ne sais pas si j'ai

19 parlé avec Petkovic. Le 21 avril, j'étais avec Petkovic à Vitez. Ensuite,

20 c'est la Forpronu qui l'avait transporté à Mostar, mais je ne pense pas

21 que j'ai eu une telle discussion, je crois que je n'ai pas eu de telles

22 discussions.

23 M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce que c'était la

24 seule lettre que vous avez envoyée à Petkovic, Stojic et Kordic en date du

25 24 avril 1993 ?

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1 M. Blaskic (interprétation). - J'ai envoyé au Général Petkovic

2 les rapports, les rapports opérationnels sur tous les événements, et ceci

3 quotidiennement. Je pense donc qu'en ce qui concerne la réunion, c'est la

4 seule fois mais tout ce qui s'est passé le 24 avril, il faudrait bien

5 évidemment que je revoie la chronologie car il y avait beaucoup d'ordres,

6 beaucoup d'activités, beaucoup de réunions et d'opérations de combats qui

7 se déroulaient dans ce secteur.

8 M. Kehoe (interprétation). - Vous pourrez parcourir votre

9 chronologie tout à l'heure pendant la pause ou à la fin de la journée,

10 mais je vais poursuivre mes questions.

11 Si vous voulez bien parcourir encore une fois le document

12 456/58, prenez l'original; Comme cela, vous l'aurez sous vos yeux.

13 L'huissier va vous aider.

14 (L'huissier s'exécute).

15 M. Kehoe (interprétation). - Général, vous nous avez dit que

16 toutes vos positions, tous vos points de vue, étaient transmis au grand

17 quartier général par écrit le 24 avril. Vous faites remarquer en bas de la

18 première page, que : "Je crois que Boban, Mate Boban, aurait dû se trouver

19 à Vitez aujourd'hui". Vous voyez ce passage ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je le vois.

21 M. Kehoe (interprétation). - Alors dites-nous, Général, dans ce

22 document, à quel endroit vous demandez, ou dites-vous à ces trois hommes

23 que vous pensez qu'il devrait y avoir une enquête au sujet d'Ahmici.

24 Pouvez-vous nous montrer à quel endroit du texte vous le

25 faites ?

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1 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que ce document

2 n'était absolument pas complet, qu'il ne contenait pas tous les détails

3 que j'ai écrits moi-même en rapport avec la réponse apportée au Colonel

4 Stewart lors de la réunion ou en rapport avec mes positions et avec les

5 raisons de l'arrivée de M. Mate Boban. Je ne pensais pas que Mate Boban

6 devrait venir à Vitez en vacances. Après tout ce qui s'était passé, je

7 pensais qu'il devait venir à Vitez se distinguer du crime commis et donner

8 son point de vue au sujet de l'enquête.

9 M. Kehoe (interprétation). - Et bien, permettez-moi de modifier

10 un peu ma question. Regardez, je vous prie, une nouvelle fois ce document

11 et dites-nous si, dans cette lettre, vous demandez une commission

12 d'enquête au sujet d'Ahmici.

13 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que ce document

14 était incomplet. Ce document est un document d'information relatif à la

15 rencontre que j'ai eue avec le Colonel Stewart et signale ce que j'ai dit

16 au Colonel Stewart et ce que le Colonel Stewart m'a dit lors de cette

17 réunion. Et le 23 avril, dans ma lettre au Colonel Stewart, je demande la

18 création d'une commission conjointe. Et le 4 mai, je répète ma demande par

19 oral.

20 M. le Président. - Je voudrais savoir si vous avez la mémoire,

21 le souvenir, que dans votre lettre à Dario Kordic, au Général Petkovic et

22 à Bruno Stojic, vous leur avez dit : "j'ai pris l'initiative de créer,

23 d'ordonner une commission d'enquête. Je reçois tous les éléments

24 d'information. J'essaie de me faire ma propre idée sur ce qui s'est

25 passé". C'est de cela dont vous parlez qui ne figurerait plus dans le

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1 document ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, avant de

3 rédiger la lettre le 23 avril, j'ai informé de mes positions le Général

4 Petkovic, y compris des points de vue que j'allais exprimer dans cette

5 lettre au sujet de la commission conjointe, je ne pouvais pas, au nom de

6 Petkovic et à son insu, organiser la rencontre entre deux hautes

7 personnalités, Alilovic et Petkovic. Je crois que cela correspond au

8 point, je ne sais pas exactement quel point, quel paragraphe, je n'ai pas

9 la lettre entre les mains en ce moment.

10 M. le Président. - Vous n'avez pas répondu à ma question. Je ne

11 voudrais pas que l'on glisse insensiblement de la probabilité que le

12 document était incomplet à la certitude que le document est incomplet

13 parce que nous sommes en train de passer dans la dialectique. Ce document,

14 vous pensez qu'il est incomplet et puis maintenant à chaque question, vous

15 répondez "comme il est incomplet" alors je vous rappelle que nous avons

16 quand même un document. Monsieur le Procureur, vous poursuivez.

17 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien poursuivons l'examen de ce

18 document, Général. Vous avez dit que vous souhaitiez que Boban vienne à

19 Vitez pour favoriser une enquête, mais cela ne figure pas non plus dans ce

20 document. Vous n'y dites rien quant au fait

21 que vous demanderiez à Boban de venir à Vitez pour favoriser une enquête.

22 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit qu'à la lecture de

23 ce document, on pourrait penser que le Colonel Stewart s'est rencontré

24 avec lui, a rencontré lui-même. Ici, c'est écrit très clairement.

25 Ce que Bob Stewart a dit est écrit ici, mais moi, j'ai dit

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1 quelque chose au moment de cette réunion et cela n'est pas écrit dans ce

2 document. Il n'y a qu'une phrase écrite dans ce document, mais il devrait

3 y avoir ici mon nom et mon prénom à cet endroit du texte et ensuite, on

4 devrait pouvoir lire tout ce que j'ai dit au Colonel Stewart lors de cette

5 réunion où je transmettais des informations.

6 M. le Président. - C'est un peu compliqué pour les Juges. Vous

7 ne pouvez pas vous plaindre quand même que ce document qui est signé de

8 vous soit incomplet alors qu'on n'a même pas d'explications pourquoi il

9 serait incomplet. Je pense personnellement, quand on lit, vous, vous le

10 lisez avec votre idée, Général Blaskic. Quand je lis (le Président lit en

11 anglais) : "I think that Mr. Mate Boban should have been in Vitez today"

12 je dois reconnaître qu'en ce qui me concerne, je n'ai pas imaginé que

13 c'est Bob Stewart qui dit cela. Parce que si on parle de forme, il y a des

14 interlignes qui montrent… alors je vais vous répondre sur le plan de la

15 forme : il y a notamment trois interlignes qui montrent bien que, d'une

16 part, au-dessus, il y avait des petits tirets et ensuite, il y a quelque

17 chose qui dit (le Président lit en anglais) : "I think et c'est donc vous

18 qui signez. Alors, de grâce, simplement c'est pour vous montrer que l'on

19 peut discuter à perte de vue. Je vous rappelle qu'il s'agit de votre

20 document. Vous ne pouvez pas faire à la fois la question et la réponse.

21 Vous dites, et je respecte votre opinion, que, probablement, il n'est pas

22 complet, je crois qu'il faut en rester là.

23 Mais progressivement, n'allons pas dans le sens inverse, c'est-

24 à-dire que de "probablement, il est incomplet" on en arrive à

25 "certainement, il est incomplet" et bientôt, ça va être la faute du

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1 Colonel Stewart si le document est rédigé ainsi ! Il faut quand même

2 garder

3 raison dans les réponses, s'il vous plaît.

4 Alors, Monsieur le Procureur, nous enregistrons la réponse du

5 Général Blaskic, qui est sa réponse. Poursuivez.

6 M. Kehoe (interprétation). - Je vais passer maintenant à un

7 autre sujet, toujours relatif à cette lettre.

8 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je croyais que vous n'alliez

9 plus parler du tout de la lettre. Général, j'aimerais rappeler à votre

10 attention la référence que vous avez faite au Conseil de sécurité. Vous

11 avez expliqué cela, je crois vous avoir entendu dire que vous aviez

12 l'intention de faire référence aux membres de la délégation que vous

13 considériez comme ayant le standing de membres de Conseil de sécurité.

14 Vous rappelez-vous avoir dit cela dans votre déposition ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je me rappelle, mais

16 j'aimerais vérifier si le Colonel Stewart est bien celui qui m'a informé

17 de la visite dans la région de Vitez d'une délégation du Conseil de

18 sécurité.

19 M. Shahabuddeen (interprétation). - Non, je ne vais pas vous

20 imposer cette tâche trop ardue à l'instant, Général, car ma question va

21 plutôt dans un sens un peu différent. Votre référence à la délégation du

22 Conseil de sécurité, qui avait effectué cette visite, était-elle en

23 rapport, dans votre esprit, avec le fait que la communauté internationale

24 à son plus haut niveau manifestait un intérêt eu égard à une enquête

25 efficace, approfondie et rapide des événements qui étaient survenus en ces

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1 lieux ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Bien entendu, je pensais que, si,

3 dans cette lettre, je signalais que les niveaux les plus élevés de la

4 communauté internationale s'intéressaient à une telle enquête, je

5 faciliterais d'autant l'arrivée de représentants de l'Herceg-Bosna dans la

6 région et que, donc, l'enquête n'en serait que plus rapide.

7 M. Shahabuddeen (interprétation). - Pensez-vous que les méthodes

8 que vous avez utilisées étaient à la hauteur de l'efficacité, de la

9 vigueur, de la rapidité, que vous auriez pu estimer nécessaire au vu de

10 l'intérêt manifesté par la communauté internationale ?

11 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, je crois au

12 plus profond de moi que, dans les circonstances de l'époque, les

13 circonstances qui étaient celles de ce moment-là, j'ai utilisé les

14 méthodes les plus appropriées pour aboutir à une enquête. Maintenant, ces

15 méthodes étaient-elles satisfaisantes ?

16 Je crois que les représentants de la communauté internationale

17 n'ont jamais su exactement avant ma déposition quelles étaient exactement

18 ces circonstances. Peut-être, n'en était-elle pas informée. Ce qui se

19 passait à l'intérieur du HVO, combien il y avait de chaînes de

20 commandement, étais-je un commandant ayant un réel pouvoir de commandement

21 correspondant à mes fonctions ? Je ne vais pas entrer dans le détail, mais

22 je crois, au plus profond de moi, que, dans les circonstances de l'époque,

23 j'ai utilisé les méthodes les plus appropriées.

24 Je n'aurais pas pu en trouver de meilleures.

25 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vous remercie, Général.

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1 M. Kehoe (interprétation). – Général, revenons à ce document.

2 Vous nous avez déjà dit qu'un crime de guerre avait été commis à Ahmici et

3 vous nous avez également dit que, lorsque vous avez reçu la lettre de

4 Bob Stewart, le 22 avril, vous avez soupçonné la police militaire d'être

5 impliquée dans ce crime. Est-ce exact, Monsieur ?

6 M. Blaskic (interprétation). – Oui, que sur le territoire où le

7 crime a été commis se trouvait une unité complète de la police militaire.

8 M. Kehoe (interprétation). - Vous nous avez dit également que,

9 parce que Pasko Ljubicic vous avait remis un rapport erroné, vous n'avez

10 ressenti aucun besoin lorsque vous avez reçu la lettre du colonel Stewart

11 de communiquer davantage avec lui au sujet d'Ahmici.

12 Est-ce exact ?

13 M. Blaskic (interprétation). - C'est exact parce que je me

14 demandai ce qu'il aurait bien pu me dire de nouveau si, jusqu'à cette

15 date, il ne m'avait rien dit. Par ailleurs, je crois encore, aujourd'hui,

16 que cela aurait été la seule façon de protéger l'enquête dans les

17 conditions dans lesquelles j'étais contraint de mener cette enquête.

18 M. Kehoe (interprétation). - Général, dans cette lettre où vous

19 signalez l'ensemble de vos positions à l'intention de Kordic, Stojic et

20 Petkovic, demandez-vous que Pasko Ljubicic soit destitué de ses fonctions

21 de commandant de la police militaire et, si oui, dites-nous à quel endroit

22 vous le faites dans cette lettre ?

23 M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que cette lettre

24 était incomplète. Je suis incapable, vraiment, de me rappeler tous les

25 détails de cette lettre. Je ne peux donc pas répondre à cette question, je

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1 ne peux pas vous dire si j'ai demandé ou si je n'ai pas demandé cela. Ce

2 que je sais, c'est que je voulais qu'une enquête soit menée et que j'ai

3 fait mon possible pour qu'elle soit menée le plus rapidement possible.

4 M. le Président (interprétation). – Sur la question qui vous est

5 posée, les Juges, ici, peuvent admettre que cette lettre soit incomplète.

6 Ce ne serait ni la première ni la dernière fois que les documents sont

7 incomplets, mais là, il n'y a que vous qui pouvez dire qu'elle est

8 incomplète. C'est une lettre signée de vous, adressée -comme l'a fait

9 observer le Juge M. Rodrigues- aux hommes politiques, alors que vous êtes

10 un soldat. Vous nous avez toujours dit que vous ne vous occupiez pas de

11 politique. Vous envoyez notamment à Dario Kordic.

12 Concentrez-vous sur ma question. A supposer que cette lettre

13 soit incomplète, et là, je ne vous demande pas de me parler des

14 paragraphes de Blaskic qui doivent être mis en regard dans la marge comme

15 colonel Stewart. Je ne vous parle pas de la forme. Est-ce qu'aujourd'hui,

16 puisque pour vous, le massacre d'Ahmici était quelque chose de très

17 important ; puisque pour vous, M. Pasko Ljubicic vous avait menti ;

18 puisque pour vous vous attendiez des éléments

19 d'information depuis soi-disant votre ordre du 18 avril ; puisque vous

20 estimez -je dis soi-disant parce que vous pensiez que l'ordre du 18 avril

21 englobait les atrocités commises notamment à Ahmici-, je vous demande de

22 vous concentrer sur ma question suivante : avez-vous le souvenir de ce qui

23 manque dans cette lettre ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Je ne me rappelle pas tous les

25 détails mais je me rappelle que ce qui manque, c'est la teneur complète

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1 des propos que j'ai tenus à l'intention du colonel Stewart lors de la

2 réunion du 24 avril.

3 Quant au sens de cette lettre, il avait pour but d'obtenir

4 l'arrivée du dirigeant de la communauté croate d'Herceg-Bosna qui avait

5 autorité, y compris sur la police militaire dans son ensemble et pas

6 seulement sur Pasko Ljubicic, qui pourrait mener une enquête.

7 M. le Président (interprétation). - A ce moment-là, l'huissier

8 peut me montrer sur le rétroprojecteur la deuxième page de cette lettre ?

9 (L'huissier s'exécute.)

10 M. le Président (interprétation). - Alors la question que je

11 vous pose, si vraiment vous demandez à vos chefs, les plus hauts

12 personnages de la communauté croate de la Défense, vous leur parlez de vos

13 discussions avec le colonel Stewart, est-ce qu'à un moment donné,

14 n'aurait-il pas fallu terminer cette lettre par : "Approuvez-vous ce que

15 j'ai fait ? Désapprouvez-vous ce que j'ai fait ? J'attends vos

16 instructions" ?

17 Ou est-ce que vous nous dites qu'il manque également quelque

18 chose à la fin de cette lettre au-dessus de votre signature ? Est-ce qu'il

19 manque encore quelque chose ? Avez vous compris ma question ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Je pense que j'ai compris votre

21 question. Je pense, en fait je crois que ce passage, je parle du dernier

22 passage de la lettre au-dessus du sceau, est correct mais je ne me

23 rappelle pas les détails, mais je ne terminais pas mes lettres à mes

24 supérieurs en leur demandant s'ils étaient de d'accord ou pas, en leur

25 disant si j'étais de d'accord ou pas. Je pensais que ce qui importait,

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1 c'était que je leur dise quelles étaient mes positions, que j'expose mes

2 positions sur l'ensemble de la situation.

3 M. le Président (interprétation). - Si je rentre dans votre

4 raisonnement qu'il manque dans votre lettre… D'après vos souvenirs, il

5 manquerait toute la teneur des propos tenus au colonel Stewart. Concevez

6 quand même que par la lettre, telle que vous nous la décrivez, vous mettez

7 devant un fait accompli vos chefs ? Je suis donc en droit de penser qu'il

8 y a quelque chose d'illogique à agiter, à alarmer en quelque sorte les

9 plus grands responsables de la communauté croate d'Herceg-Bosna

10 -malheureusement, je n'ai pas le document, mais si je prenais la première

11 page, monsieur l'huissier, mettez la première page, s'il vous plaît- en

12 disant que les conséquences du massacre d'Ahmici ont une signification

13 politique internationale très grave pour le HVO.

14 Concevez que, même si on rentre dans votre raisonnement, il

15 manque des choses très importantes. Vous êtes en droit de nous dire qu'il

16 manque les propos que vous avez tenus au colonel Stewart. Concevez qu'il

17 n'est pas très logique quand même de ne pas dire si vous avez bien ou mal

18 fait, si vous attendez des instructions ou pas des instructions ou, alors,

19 à quoi servait cette lettre ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, je n'ai

21 pas mis mes chefs devant le fait accompli, car la lettre que j'ai reçue du

22 colonel Stewart, je l'ai lue à mon chef d'état-major principal au

23 téléphone. J'ai reçu de lui des instructions quant à la façon de répondre

24 à la lettre que j'avais reçue du colonel Stewart.

25 Quant à ce que je tiens actuellement dans la main, à savoir la

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1 pièce 456/58, c'est une information au sujet de ma rencontre avec

2 M. Stewart, le 24 avril 1993. Ce document contient mes propositions, mes

3 suggestions quant à ce qu'il convenait de faire plus tard ; tout ce qu'il

4 convenait de faire afin de mener l'enquête, etc.. Malheureusement, ce

5 document est incomplet.

6 M. le Président (interprétation). – Oui, mais je crois que votre

7 répons est aussi incomplète, Général Blaskic.

8 Si on rentre dans votre raisonnement, vous rendez compte à vos

9 chefs de toute votre conversation avec le colonel Stewart. Vous rendez

10 compte à votre chef du fait que vous avez pris l'initiative d'une

11 commission d'enquête et, à ce moment-là, on reste sur le bombardement de

12 Zenica. Il semble donc qu'il y ait deux endroits qui ne soient pas

13 complétés : la première page et la deuxième page. Mais peut-être qu'en

14 retrouvant votre chronologie, vous pourrez nous aider sur ce point-là.

15 Je crois que le Juge Rodrigues voudrait également intervenir.

16 M. Rodrigues. - Général, vous avez répondu à M. le Procureur que

17 vous ne vous souvenez pas si vous aviez demandé à vos supérieurs la

18 destitution du commandant du 4ème bataillon de la police militaire, Pasko

19 Ljubicic. Votre réponse a été, si je me souviens bien : "Je ne me souviens

20 pas". Je crois que cette réponse, à mon avis, n'est pas acceptable, et je

21 vais vous poser des questions.

22 Si votre lettre reproduit tout ce dont vous avez parlé avec le

23 colonel Stewart, cette question était vraiment, mais vraiment, importante

24 et vous devez vous en souvenir, je crois. Le colonel Stewart et vous, si

25 vous parlez de la destitution de Pasko Ljubicic avec le colonel Stewart,

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1 certainement vous pourriez vous rappeler maintenant parce que la question

2 était aussi chaude que vous pouvez vous en souvenir.

3 Si vous n'avez pas, parce que quelque part vous avez dit, vous

4 nous avez dit que, comme vous n'aviez pas les conclusions de l'enquête, il

5 n'était pas convenable de parler avec le colonel Stewart sur cette

6 question.

7 Si pour cette raison, vous n'aviez donc pas parlé avec le

8 colonel Stewart, ce serait tout à fait raisonnable maintenant de vous

9 souvenir que vous n'aviez pas parlé.

10 Je ne sais pas si vous avez compris ma question. Comment je peux

11 comprendre votre réponse : "Je ne me souviens pas". "Je ne me souviens pas

12 si j'ai demandé à mes supérieurs hiérarchiques la destitution de Pasko

13 Ljubicic". Comment puis-je comprendre ?

14 M. Blaskic (interprétation). – Eh bien la question que j'ai

15 entendue de la bouche des interprètes est la suivante : où cela est-il

16 écrit dans cette lettre ou, encore, est-ce écrit dans cette lettre ? Et

17 c'est en référence à cela que j'ai dit que je ne me rappelait pas. En

18 référence à cette lettre, je ne me rappelle pas s'il était écrit dans tous

19 les détails que je demande le remplacement du commandant de la police

20 militaire.

21 M. Rodrigues. - Mais si votre réponse est celle-ci, je vous

22 demande si vous vous rappelez -oublier la lettre maintenant, oubliez la

23 lettre que vous avez envoyée à Dario Kordic, etc., est-ce que vous vous

24 rappelez maintenant si vous avez parlé avec le colonel Stewart que vous

25 alliez de demander la destitution de Pasko Ljubicic ?

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1 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai jamais eu l'autorisation

2 de partager de telles informations avec le colonel Stewart. Pour moi,

3 s'agissant d'informations de cette nature, le colonel Stewart était une

4 personne extérieure. Je n'avais pas l'autorisation du grand quartier

5 général pour partager de telles informations avec le colonel Stewart.

6 M. Rodrigues. - Votre réponse devrait donc être : "Sûrement,

7 cette partie n'était pas l'information que j'ai envoyée à mes supérieurs

8 parce que, même à l'époque, je n'étais pas autorisé à parler sur cette

9 question avec le colonel Stewart".

10 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, j'essaie

11 d'apporter tous les éclaircissements quant à la façon dont j'ai rédigé ce

12 rapport mais vous avez un grand nombre d'exemplaires de rapports écrits

13 par moi qui vous montrent de quelle façon je les rédigeais.

14 J'ai donc écrit tous ce que le colonel Stewart m'a dit à moi.

15 Après quoi, j'ai écrit ce que, moi, j'avais dit en général au colonel

16 Stewart. Et en général, j'en terminai avec mes propositions, les

17 propositions je dis bien, que je faisais à mes subordonnés.

18 Malheureusement,

19 ici ne figure qu'une seule proposition.

20 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, il est

21 17 heures 30 et je suis prêt à passer à un autre sujet. Je ne sais pas

22 quels sont vos souhaits, Monsieur le Président.

23 M. le Président (interprétation). - Je ne savais pas si vous

24 aviez terminé sur ce point là, mais si vous avez terminé ce point-là,

25 effectivement, il est 17 heures 30, nous allons donc lever notre audience

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1 jusqu'à demain matin 10 heures.

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3 L'audience est levée à 17 heures 30.

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