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1 Le mardi 8 mai 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
6 LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
7 La déclaration que vous avez faite au début de votre témoignage, Madame
8 Jusufi, est encore en vigueur.
9 Maître Apostolski, il me semble que vous avez encore des questions à poser.
10 Je vous remercie.
11 LE TÉMOIN: ZENEP JUSUFI [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. J'aimerais
14 continuer avec quelques questions supplémentaires qui couvriront quatre
15 sujets.
16 Contre-interrogatoire par M. Apostolski : [Suite]
17 Q. [interprétation] Avez-vous été auprès de votre fils tout le temps après
18 qu'il ait été blessé ?
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense qu'il faudrait que ce soit un
20 peu plus clair, Monsieur Apostolski, si vous souhaitez qu'elle réponde.
21 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils n'ont pas entendu.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On vous a demandé si vous étiez avec
23 votre fils en permanence après qu'il ait été tué.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
26 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
27 Q. Qui étaient les autres qui étaient à ses côtés entre le moment où
28 il a été blessé et le moment où il est mort ?
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1 R. Moi-même, mon mari et le fils de l'oncle, Muzafer.
2 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande que le témoin
3 parle un peu plus près du micro.
4 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
5 Q. Vous avez dit hier que lorsque votre fils a été blessé, vous vous êtes
6 évanouie. Cela est-il exact ?
7 R. Oui, je me suis évanouie.
8 Q. Lorsque vous avez repris conscience, vous avez vu que votre fils
9 saignait abondamment; cela est-il exact ?
10 R. Oui, c'est exact.
11 Q. Vous avez dit qu'après 15 ou 20 minutes après sa blessure, votre fils
12 est mort alors que vous étiez en train d'essayer de panser ses blessures.
13 Cela est-il exact ?
14 R. J'ai pris un drap pour bander ses blessures, mais après il est mort. Il
15 est mort très rapidement.
16 Q. Entre le moment où il a été blessé et le moment où il est mort, vous
17 avez appelé quelqu'un ?
18 R. Non. Qui aurais-je pu appeler ? Je n'avais pas de téléphone.
19 Q. Est-ce que votre mari a appelé quelqu'un ?
20 R. Mais nous n'avions pas de téléphone.
21 Q. Est-ce que cela signifie que votre mari n'a jamais appelé personne ?
22 R. Non, il n'a appelé personne, parce que comme je l'ai déjà dit, nous
23 n'avions pas de téléphone.
24 Q. Est-ce que votre fils a appelé quelqu'un ?
25 R. Non, il est mort. Il est mort après un bref moment. Il n'était pas en
26 mesure d'appeler qui que ce soit.
27 Q. Vous avez dit qu'au moment où il a été blessé, il y avait dans la
28 maison vous-même, votre mari, Muzafer et Elmaz, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce que votre fils a parlé avec quelqu'un d'autre en dehors de ces
3 trois personnes, dont vous-même à l'intérieur de la maison ?
4 R. Non.
5 Q. Cela signifie donc qu'il n'était pas en mesure de parler parce que ses
6 blessures étaient trop importantes; cela est-il exact ?
7 R. Oui.
8 Q. Donc, votre fils n'était pas en mesure d'appeler qui que ce soit au
9 téléphone ?
10 R. Non, il ne pouvait pas.
11 Q. Est-ce que vous connaissez le nom de Fatmir Ademi ?
12 R. Je ne sais pas.
13 Q. Je vais me permettre de vous rappeler qu'il est un député à l'assemblée
14 de la République de Macédoine et qu'il défend les intérêts des Albanais de
15 Macédoine.
16 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas, je ne le connais pas.
17 Q. Est-ce que vous pensez qu'il pourrait dire quoi que ce soit qui soit
18 inexact concernant l'affaire Ljuboten, dans la mesure où il est député ?
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sans avoir besoin de vous entendre,
20 Madame Motoike, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question quelconque à
21 laquelle quiconque peut répondre, Maître Apostolski. Vous pouvez peut-être
22 me demander si vous croyez ce que je dis tout simplement parce que je suis
23 un juge. Je pense que vous voyez très bien ce que je voulais dire.
24 Donc vous n'avez pas besoin de répondre à cette question, Madame
25 Jusufi.
26 Veuillez poursuivre, Maître Apostolski.
27 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
28 Q. J'aimerais que nous passions à huis clos pour quelques instants, dans
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1 la mesure où je vais lire un passage d'une déclaration d'un témoin qui
2 pourrait être un témoin qui va peut-être déposer devant ce Tribunal.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à
5 huis clos partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
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18 [Audience publique]
19 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
20 Q. Dans la mesure où il s'agissait de ses cousins, ils avaient de très
21 bonnes relations avec Rami, ils avaient été en contact, n'est-ce pas; cela
22 est exact ?
23 R. Je n'ai rien entendu dire à ce sujet. Je sais que c'est son frère.
24 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous passer
25 à huis clos dans la mesure où il y a cette déclaration ?
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
27 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Je vais maintenant lire une déclaration
28 d'un témoin, Xhevdet Jusufovski.
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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à
2 huis clos partiel.
3 [Audience à huis clos partiel]
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4 [Audience publique]
5 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
6 Q. Vous avez dit que le soir de cet épisode vous avez quitté la maison,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez dit qu'environ trois semaines plus tard vous êtes retournée
10 dans la maison, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Vous avez dit que votre maison avait été endommagée, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, c'est exact. Elle était criblée de balles.
14 Q. Quand avez-vous retiré ces balles et fait le ménage dans votre maison
15 pour la première fois ?
16 R. Je ne sais pas. Quand nous sommes revenus. Je ne connais pas la date.
17 Q. Quand vous êtes-vous débarrassés des munitions et où vous en êtes-vous
18 débarrassé, où les avez-vous mises ?
19 R. Je ne sais pas quand nous nous en sommes débarrassé ni où nous les
20 avons mises. Dans la poubelle.
21 Q. Avez-vous une salle de bain dans votre maison ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous avez dit hier que vous n'aviez pas le courant dans votre maison,
24 n'est-ce pas ?
25 R. Ce jour-là nous n'avions pas d'eau, mais nous avions de l'eau dehors.
26 Q. Les forces de sécurité macédoniennes ont-elle pénétré dans la maison ?
27 R. Non, pas dans la maison. Ils sont venus jusqu'au portail, à la porte
28 d'entrée.
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1 Q. Avez-vous été blessée par un des membres des forces de
2 sécurité ?
3 R. Je n'ai pas entendu votre question. Non, je n'ai pas été blessée.
4 J'étais à l'intérieur.
5 Q. Un membre des forces de sécurité s'est-il adressé à vous ?
6 R. Je ne suis pas sortie. Je suis restée à l'intérieur de la maison, dans
7 un coin. C'est Elmaz, mon mari.
8 Q. Vous avez dit hier que lorsque votre fils est mort il n'y avait à
9 l'intérieur de la maison que vous-même, votre mari et Muzafer, n'est-ce pas
10 ?
11 R. Oui, c'est exact. Mais vous me reposez la même question encore au même
12 sujet, jusqu'à ce que la nuit tombe.
13 Q. Jusqu'à ce que la nuit tombe personne n'est venu dans votre maison,
14 n'est-ce pas ?
15 R. Non, personne n'est venu, c'est exact.
16 Q. Vous avez dit que lorsque la nuit est tombée, vos voisins et des
17 membres de votre famille ont déplacé le corps de votre fils et l'ont emmené
18 dans la maison de votre fille, n'est-ce pas ?
19 R. Ils sont venus et ils ont emmené son corps. Il était
20 2 heures du matin. Peut-être qu'il était 1 heure du matin, je ne sais pas.
21 Il faisait nuit; mais c'est exact.
22 Q. Donc vous seriez d'accord pour dire avec moi que cela a eu lieu à 2
23 heures du matin, 2 heures après minuit ?
24 R. Je n'ai pas regardé la pendule, parce que je n'avais pas d'électricité,
25 il faisait nuit, la nuit était très profonde, mais je ne peux pas vous
26 donner une heure précise. Je n'ai -- ça ne m'est même pas venu à l'idée de
27 regarder l'heure.
28 Q. Je suis navré, mais je vais vous demander à nouveau de regarder la
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1 photo de votre fils décédé, au moment de sa mort. Je vais donc demander à
2 l'huissier de montrer la photographie 65 ter 608,
3 ERN 0501-6263.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] S'agit-il de l'intercalaire numéro 1,
5 pièce P4 ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est mon fils.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
8 M. APOSTOLSKI : [interprétation]
9 Q. Cette photographie a été prise -- cette photographie a été prise au
10 moment qui a suivi la mort de votre fils, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, c'est exact.
12 Q. La photographie a été prise à l'intérieur de votre maison, n'est-ce pas
13 ?
14 R. Je ne sais pas, je ne me souviens pas. Mon mari saurait mieux vous le
15 dire. Je crois qu'il a été pris en photo le jour suivant.
16 Q. Cette photographie a-t-elle été prise par votre mari ou non, a-t-elle
17 été prise par vous ?
18 R. Elle a été prise par le hodxa, le prêtre musulman, le jour suivant.
19 Q. Cela signifie-t-il que cette photographie a été prise à l'intérieur de
20 la maison de votre fille; cela est-il exact ?
21 R. Oui, c'est exact.
22 M. APOSTOLSKI : [interprétation] J'aimerais vous demander -- c'est tout,
23 Monsieur le Président. Je n'ai pas de questions supplémentaires.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Apostolski.
25 Madame Motoike, avez-vous des questions supplémentaires ?
26 Mme MOTOIKE : [interprétation] Non, merci.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
28 Madame Jusufi, vous serez très heureuse de savoir que voici la fin des
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1 questions que nous souhaitions vous poser. Nous aimerions vous remercier de
2 nous avoir aidés. Nous savons que c'est très difficile pour vous. Nous
3 voulons donc vous remercier d'avoir pris la peine de venir à La Haye. La
4 greffière va à présent vous escorter à l'extérieur du prétoire.
5 Je vous remercie à nouveau.
6 [Le témoin se retire]
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Residovic.
8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense a montré
9 au témoin le document 65 ter 1D1, il s'agissait de sa déclaration du 3
10 octobre 2004, et le document 65 ter numéro 1D4, en plus de la déclaration
11 de Mme Jusufi du 22 avril 2007. Monsieur le Président, la Défense ajoute
12 que pour ce témoin, ces documents sont acceptés comme moyens de preuve de
13 la Défense.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Motoike.
15 Mme MOTOIKE : [interprétation] Si vous me le permettez, il me semble que
16 normalement dans ce Tribunal, que le compte rendu d'audience est complet
17 lorsque le témoin a témoigné et que lors du contre-interrogatoire, on
18 montre au témoin les incohérences entre les déclarations du témoin et ce
19 qui a été dit lors de l'audience. Donc l'admission de ces déclarations que
20 la Défense souhaite verser au dossier risquerait peut-être d'encombrer le
21 dossier avec des incohérences qui ont déjà été soulignées et qui ont été
22 lues au témoin et donc déjà dans le compte rendu d'audience.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
24 Avez-vous quelque chose à dire, Maître Residovic ?
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la jurisprudence de
26 ce Tribunal montre que dans de nombreuses affaires, bien qu'on ait montré
27 au témoin ces contradictions dans la déclaration, la Chambre devrait
28 admettre que dans le but de discréditer le témoin, on a aussi admis au
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1 dossier leurs déclarations préalables.
2 Actuellement, je ne peux pas vous citer les affaires particulières, mais je
3 sais qu'il y en a de nombreuses, comme par exemple, l'affaire Celebici et
4 d'autres. Je ne suis pas en mesure de vous citer l'ensemble de la
5 jurisprudence dans ce domaine, mais j'aimerais maintenir ma requête.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La jurisprudence du Tribunal est celle
7 qui a été indiquée par Mme Motoike. Il y a des situations dans lesquelles,
8 il y a un exemple typique, les différences entre les anciens moyens de
9 preuve et le témoignage sont très différentes ou lorsque le contexte de la
10 déclaration précédente est important, de façon à comprendre les
11 incohérences qui existent, et donc cela prend un certain intérêt, une
12 certaine valeur qui permet donc de justifier le fait de verser au dossier
13 ces déclarations.
14 Me Residovic a très attentivement souligné les différences importantes
15 entre les déclarations préalables du témoin et son témoignage oral. Donc le
16 compte rendu d'audience montre de façon précise toutes les différences
17 entre le témoignage oral et les déclarations faites préalablement par le
18 témoin. C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas que soient
19 versées au dossier ses déclarations précédentes comme moyens de preuve.
20 Le témoin suivant.
21 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation appelle M.
22 Elmaz Jusufi --
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Saxon.
24 M. SAXON : [interprétation] Il va déposer conformément à l'article 92 ter
25 du Règlement.
26 Monsieur le Président, tant que nous attendons le témoin, pour
27 accélérer les choses peut-être, j'aimerais demander à l'un de mes éminents
28 collègues de m'apporter son assistance. Nous avons des documents imprimés
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1 que nous voulons présenter au témoin, car étant nerveux, comme tout avocat
2 qui se respecte, nous avions peur que le système de cour électronique tombe
3 en panne. Nous avons donc des versions imprimées de tous ces documents.
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bon après-midi, Monsieur Jusufi.
6 Pouvez-vous prêter serment que la déclaration que vous allez faire
7 représente la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] En premier lieu, avec votre permission,
9 j'aimerais vous saluer tous avant que nous ne commencions.
10 Bon après-midi, Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges
11 du Tribunal de La Haye. Je déclare solennellement que je ne dirai que la
12 vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous remercie de m'avoir
13 accordé cette occasion de paraître devant vous pour témoigner devant ce
14 Tribunal. Merci beaucoup.
15 LE TÉMOIN: ELMAZ JUSUFI [Assermenté]
16 [Le témoin répond par l'interprète]
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.
18 M. Saxon commencera avec quelques questions qu'il désire vous poser.
19 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président. Si je puis demander à
20 l'huissier de nous aider encore un peu. Nous avons des exemplaires des
21 différents éléments de preuve que j'entends présenter au témoin. J'aimerais
22 que ceci soit distribué aux Juges. Nous vous en serions très
23 reconnaissants.
24 Peut-être nous avons aussi des exemplaires de la déclaration
25 consolidée 92 ter qui a été produite pour ce témoin ainsi qu'une cote P
26 d'un document qui s'appelle : "Annexes et Corrections" à ce document. Si
27 c'est possible, j'aimerais que des copies de ces deux documents soient
28 placées sur la table devant le témoin afin qu'il puisse les voir. Si les
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1 Juges désirent obtenir des copies papier de ce document, nous pouvons leur
2 en fournir également.
3 [La Chambre de première instance se concerte]
4 Interrogatoire principal par M. Saxon :
5 Q. [interprétation] Bon après-midi, Monsieur le Témoin.
6 R. Bon après-midi.
7 Q. Vous appelez-vous Elmaz Jusufi ?
8 R. Oui, Elmaz Jusufov.
9 Q. Votre nom de famille en albanais est bien "Jusufi" ?
10 R. En albanais, c'est "Jusufi," et en macédonien "Jusufov."
11 Q. Etes-vous l'époux de Mme Zenep Jusufi ?
12 R. Oui.
13 Q. Etes-vous de souche ethnique albanaise ?
14 R. Oui, Albanais.
15 Q. Est-ce que vous résidez dans le village de Ljuboten en Macédoine ?
16 R. Oui.
17 Q. J'aimerais, s'il vous plaît, que vous vous concentriez sur une journée
18 en avril de cette année, il y a deux ou trois semaines, lorsque des membres
19 du bureau pour lequel je travaille sont venus au village et se sont
20 entretenus avec vous.
21 R. Oui.
22 Q. Avez-vous souvenir que --
23 R. Oui, je me souviens.
24 Q. Monsieur Jusufi, écoutez mes questions, s'il vous plaît, jusqu'au bout.
25 Concentrez-vous sur ces questions pour y répondre, ensuite après votre
26 réponse je poserai la question suivante. D'accord ?
27 Dans le passé, vous aviez fourni quelques déclarations à des représentants
28 de mon bureau; est-ce exact ?
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1 R. Oui.
2 Q. En avril de cette année, vous avez signé une autre déclaration
3 contenant des éléments de ces déclarations antérieures; est-ce exact ?
4 R. Oui, c'est exact.
5 M. SAXON : [interprétation] Je me demande si l'huissier pourrait placer un
6 exemplaire de ce document sur le rétroprojecteur.
7 Q. Monsieur Jusufi --
8 M. SAXON : [interprétation] Je me demande si le responsable de régie peut
9 me faire un champ arrière pour qu'on puisse voir la signature en bas du
10 document.
11 Q. Monsieur Jusufi, s'agit-il bien de votre signature en bas de page
12 ?
13 R. Oui.
14 Q. Avez-vous paraphé chacune des pages de ce document ?
15 R. Oui.
16 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous passer à la dernière page, s'il
17 vous plaît. Excusez-moi. En fait, il s'agit, Monsieur l'Huissier, de la
18 page avant celle-là.
19 Q. Il y a un paragraphe sur cette dernière page intitulé en anglais
20 "Witness Acknowledgment. S'agit-il de votre signature en bas de ce
21 paragraphe ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 M. SAXON : [interprétation] Merci. Monsieur l'Huissier, pouvez-vous retirer
24 ce document du rétroprojecteur.
25 Q. Monsieur Jusufi, après avoir signé cette déclaration, avez-vous alors
26 ajouté -- non, laissez-moi reprendre. Avez-vous apporté des modifications à
27 cette déclaration ?
28 R. Oui. Oui, certaines modifications ont été faites, des modifications
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1 mineures, à mon avis, et j'ai procédé à ces corrections mineures, mais
2 elles n'étaient pas si importantes que cela par rapport à la teneur de la
3 déclaration. Quant à savoir si c'était ce jour-là ou un autre jour ou si
4 c'était la main gauche ou la main droite, c'était des erreurs mineures, à
5 mon avis. Ceci étant dit, la majeure partie de la déclaration était
6 correcte.
7 M. SAXON : [interprétation] Je dois, Monsieur l'Huissier, vous demander
8 d'intervenir à nouveau. Il y a plusieurs documents qui sont encore devant
9 le témoin. Est-ce que l'on peut placer cet autre document sur le
10 rétroprojecteur.
11 Q. Monsieur Jusufi, est-ce bien votre signature qui figure en bas de ce
12 document ?
13 R. Oui.
14 M. SAXON : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pouvons-nous tourner la
15 page, s'il vous plaît ? A l'intention du responsable de régie, j'ai besoin
16 de voir ce qui figure tout en haut de la page. Non, ce n'est pas le bon
17 document. Nous avons déjà vu ce document. Nous devons voir un autre
18 document qui s'appelle : "Ajouts et corrections." D'accord.
19 Q. Donc, pouvez-vous vous porter sur la signature en première page, M.
20 Jusufi. Encore une fois, s'agit-il de votre signature ?
21 R. Oui.
22 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page suivante, s'il
23 vous plaît. Et est-ce que l'on peut faire un zoom arrière afin de pouvoir
24 voir le haut de la page. En haut de page il est indiqué : "Ajouts et
25 corrections à la déclaration 92 ter, article 92 ter."
26 Q. Monsieur Jusufi, avez-vous parafé chacune des pages de ce document ?
27 R. Oui, chacune des pages.
28 Q. La teneur de ce document vous a-t-elle été lue dans votre langue avant
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1 que vous n'apposiez votre signature ?
2 R. Oui.
3 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page 6, s'il vous
4 plaît ?
5 Q. Monsieur Jusufi, s'agit-il bien de votre signature en bas de page ?
6 R. Oui.
7 Q. Monsieur Jusufi, ces deux documents pris ensemble, les documents que
8 vous avez signés en avril de cette année, représentent-ils ce que vous
9 auriez à déclarer aujourd'hui si vous deviez témoigner oralement ?
10 R. Oui, oui.
11 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais à ce stade
12 demander à ce que l'on verse la déclaration article 92 ter consolidée et le
13 document "Ajouts et corrections" au dossier et à la déclaration article 92
14 ter de M. Jusufi.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
16 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous attendre
17 que le témoin ait témoigné avant de devoir interrompre de manière à ce
18 qu'il y aura des réponses à fournir quant à la suggestion qui vient d'être
19 faite par l'Accusation ?
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. A cette occasion,
21 effectivement, Monsieur Mettraux, quoique la procédure normale serait de le
22 faire maintenant.
23 M. METTRAUX : [interprétation] Je peux le faire maintenant.
24 L'objection que nous avons à faire est la même qui est en substance.
25 Il y a quelques inquiétudes quant à la manière et à la façon dont la
26 consolidation a été effectuée.
27 Nous avons envoyé un courrier électronique à M. Saxon il y a deux
28 jours. Il n'a pas eu le temps d'y répondre. Ce que nous aimerions faire,
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1 c'est demander à l'Accusation de nous fournir un document qui nous permet
2 d'identifier les modifications apportées. Si nous sommes d'accord avec
3 elle, la Chambre n'aura rien à décider. Je crois que nous pourrions marquer
4 notre accord avec l'Accusation quant à savoir si les amendements sont
5 appropriés et adéquats à la circonstance, et nous n'aurons besoin de
6 l'assistance de la Cour que si l'une des parties ne peut pas marquer son
7 accord, qu'il s'agit effectivement de ce qui se situe dans le cadre de la
8 décision du Président.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'en la circonstance,
10 la Chambre se doit de recevoir tant la déclaration que le document
11 d'amendement y apporté, et nous tiendrons compte de toute préoccupation
12 qu'aurait pu être formulée par vous en temps utile.
13 M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pouvez-vous nous donner une cote pour
15 le versement au dossier.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document portant la cote
17 transformée de ERN N006-4132 à pièce P8. Le deuxième document portant la
18 cote ERN numéro N006-4121 devient la pièce P9. Merci.
19 M. SAXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suis en train de me demander de
21 réfléchir au fait qu'il serait peut-être mieux sur le long terme que nous
22 disposions des amendements avec la même pièce que la déclaration
23 principale.
24 M. SAXON : [interprétation] Oui, je crois que c'est exact, Monsieur le
25 Président.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que cela prêterait moins à
27 confusion. Au fur et à mesure où nous trouverons notre voie dans cette
28 affaire, nous pouvons alors indiquer les nouvelles cotes pour les documents
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1 qui feront partie de la pièce P8. Donc, 8(1) et 8(2) seront probablement
2 les cotes définitives de ces pièces. Je pense que ce sera plus simple pour
3 tout le monde.
4 Je vous remercie.
5 M. SAXON : [interprétation] Merci.
6 Q. Monsieur Jusufi, je vais vous montrer une photo à ce stade, et je me
7 demande si nous pourrions la montrer à l'écran, article 65 ter 608, la
8 photo portant ERN 0501-6264, intercalaire 1 des pièces qui ont été
9 distribuées aujourd'hui.
10 Reconnaissez-vous la personne qui est sur cette photo ?
11 R. Bien sûr que je la reconnais. Un homme reconnaît un enfant quel que
12 soit l'état dans lequel il se trouve.
13 Q. Quel est le nom du fils qui se trouve sur cette photo ?
14 R. Rami Jusufi.
15 Q. Je vous remercie.
16 M. SAXON : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser cette photo au
17 dossier en tant que pièce.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous acceptons.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P9.
20 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous retirer cette photo de l'écran et
21 montrer au témoin sur base à l'article 65 ter le numéro 170, une photo
22 portant la cote ERN N000-7850. Il s'agirait de l'intercalaire 2.
23 Q. Monsieur Jusufi, qui figure sur cette photo ?
24 R. Elmaz Jusufi, la personne que vous avez devant vous.
25 Q. Et sur cette photo, où vous trouvez-vous ?
26 R. Dans le couloir. Nous appelons cela "hodnik", en anglais "corridor,"
27 couloir ou corridor.
28 Q. Le couloir ou le corridor de quel bâtiment, de quel endroit ?
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1 R. De la maison d'Elmaz Jusufi.
2 Q. Il s'agit donc de votre maison, votre logis; est-ce exact ?
3 R. Oui.
4 Q. Vous semblez être assis très près d'une porte.
5 R. Oui. La porte donnant accès à la pièce qui est à l'opposé de cette
6 porte. Il n'y a que deux mètres et demi entre l'endroit où je me trouve et
7 la porte.
8 Q. D'accord. La porte qui est ouverte, que nous voyons sur la photo,
9 s'agit-il de la porte d'entrée de votre logis ?
10 R. Oui, il s'agit de la porte de devant, de la porte d'entrée de la
11 maison.
12 M. SAXON : [interprétation] J'aimerais que cette photographie soit versée
13 au dossier.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Elle est admise.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P10.
16 M. SAXON : [interprétation] Merci.
17 J'aimerais vous demander, s'il vous plaît, que la photo soit retirée
18 de l'écran, et que nous présentions l'intercalaire 3, article 65 ter,
19 numéro 609, la photo portant la cote ERN 0501-6271.
20 Q. De qui s'agit-il ?
21 R. Rami Jusufi.
22 M. SAXON : [interprétation] Excusez-moi, il semble qu'il y a un problème
23 technique de mon côté. Désolé. Je crois qu'il y a un problème technique,
24 parce que je suis toujours sur la pièce précédente. Voilà.
25 Q. Monsieur Jusufi, reconnaissez-vous les deux personnes qui figurent sur
26 cette photo ?
27 R. Oui.
28 Q. Qui est représenté sur cette photo ?
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1 R. Rami Jusufi et Elivje Jusufi.
2 Q. Quelle était la relation familiale, s'il y en a eu une, entre Elivje et
3 Rami Jusufi ?
4 R. C'était son épouse.
5 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous aussi
6 verser cette photo au dossier.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Exact.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P11.
9 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous maintenant présenter au témoin la
10 65 ter 197, ERN N001-4925.10. C'est le dernier intercalaire dans le
11 classeur qui a été fourni aux Juges, Monsieur le Président.
12 Q. Monsieur Jusufi, reconnaissez-vous ce qui est représenté sur cette
13 photo ?
14 R. Oui. Cette photo représente la cour et le portail d'entrée de ma cour
15 et une voiture de marque Golf II, qui était immatriculée à mon nom. Mais
16 comme j'étais malade, c'est mon fils Rami qui la conduisait et qui
17 m'amenait pour recevoir des soins.
18 De l'autre côté, vous voyez un bâtiment en construction, mais les
19 matériaux de construction pour le terminer ont été incendiés.
20 Q. Ce véhicule que nous voyons, qu'est-il arrivé à ce véhicule ? Pouvez-
21 vous nous le dire ?
22 R. Oui, je vais vous le dire maintenant de façon détaillée ce qui est
23 arrivé à la voiture.
24 Q. Oui brièvement, une réponse brève s'il vous plaît. Oui, brève.
25 R. Après que mon fils ait été tué, la voiture a été incendiée. C'est-à-
26 dire que la voiture a été incendiée après la mort de mon fils.
27 Q. Est-ce que la voiture a été incendiée le même jour que celui de la mort
28 de votre fils ?
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1 R. Oui, à ce moment.
2 Q. Savez-vous qui a incendié cette voiture ?
3 R. La police, la police l'a incendiée.
4 M. SAXON : [interprétation] : Je vous remercie, Monsieur le Président, à ce
5 stade -- Excusez-moi, j'ai une demande. Pouvons-nous, s'il vous plaît,
6 verser cette photo comme pièce du dossier ?
7 L'INTERPRÈTE : Le Président acquiesce.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira donc de la pièce P12.
9 M. SAXON : [interprétation] : Je n'ai plus d'autres questions.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Peut-être avant que vous ne vous
11 asseyiez, la première photographie que vous avez vue représentant votre
12 fils, Monsieur Jusufi. Vous vous souvenez, allongé sur le tapis au sol,
13 savez-vous où cette photo a été prise et quand elle fut prise ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette photo fut prise le 13 à 10 heures dans
15 la maison de ma fille, qui est dans le même village à Ljuboten.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Et savez-vous qui a
17 pris la photo ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le Hodxa, le prêtre musulman de notre
19 village.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
21 Bien sûr, Monsieur Saxon, vous vous basez sur la déclaration qui a été
22 versée au dossier en accord avec l'article 92 ter.
23 M. SAXON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
24 L'Accusation, outre ce que le témoin nous a dit aujourd'hui concernant ces
25 quatre pièces particulières.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
27 Bien, nous passons maintenant au contre-interrogatoire.
28 Madame Residovic.
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1 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,
2 Messieurs les Juges.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc il y aura des questions qui vont
4 vous être posées par Mme Residovic, Monsieur Jusufi.
5 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :
6 Q. [interprétation] Monsieur Jusufi, je m'appelle Edina Residovic, et avec
7 mon collègue, Guenal Mettraux, j'assure la Défense de M. Ljube Boskoski. Au
8 nom de mon client, M. Boskoski, et en mon nom à moi et au nom de M.
9 Mettraux, je tiens à vous exprimer nos condoléances et la sympathie que
10 nous éprouvons en ce qui concerne le deuil de votre fils.
11 Monsieur Jusufi, sur la base des informations fournies, je crois que vous
12 comprenez aussi le bosniaque ?
13 R. Oui, je comprends tout. Oui, vous n'avez même pas besoin d'interpréter,
14 je peux écouter l'avocat de la Défense, je comprends très bien ce que vous
15 dites.
16 Q. Oui. Mais M. Jusufi, tout ce que nous disons doit être interprété afin
17 que les Juges et les autres qui participent à l'audience puissent
18 comprendre ce qui se dit et suivre la procédure. Dès lors, Monsieur Jusufi,
19 j'aimerais que lorsque je conclus ma question, que vous attendiez un
20 instant afin que les interprètes puissent finir d'interpréter ma question,
21 puis alors vous pourrez y répondre, de manière à ce que tout le monde dans
22 le prétoire puisse comprendre votre témoignage.
23 Avez-vous bien compris, Monsieur Jusufi ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, que nous nous sommes rencontré l'année
26 passée chez vous à Ljuboten à votre maison ?
27 R. Oui.
28 Q. Je vous remercie de m'avoir accueilli, Monsieur Jusufi, car vous êtes
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1 le seul résident de Ljuboten à s'être montré prêt à parler à la Défense.
2 R. Oui, c'était le cas.
3 Q. Monsieur Jusufi, vous êtes de souche ethnique albanaise et de croyance
4 musulmane ?
5 R. Oui.
6 Q. Il y a peu de temps, à la question de mon éminent collègue, vous avez
7 répondu que votre nom de famille est prononcé de manière différente selon
8 que l'on exprime en albanais ou en macédonien; est-ce exact ?
9 R. Oui.
10 Q. Mais il existe une coutume chez les Albanais qui veut qu'une famille
11 puisse changer de nom, n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Votre famille, Monsieur Jusufi, s'appelait "Rashiti" précédemment ? Il
14 est possible qu'aujourd'hui certaines personnes vous appellent votre ancien
15 nom de famille, n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Monsieur Jusufi, est-il exact que les noms musulmans sont
18 reconnaissables ?
19 R. Oui.
20 Q. Et ceux qui sont d'origine turque ou d'origine arabe en particulier,
21 n'est-ce pas ?
22 R. Non. Je ne suis pas d'origine turque ou arable. Je suis Albanais.
23 Q. Oui, mais les noms de famille des musulmans ont fréquemment un nom de
24 personne qui est turque ou arabe; n'est-ce pas vrai ? Les noms musulmans
25 sont identiques ?
26 R. Oui, c'est exact, ils sont analogues.
27 Q. Est-il bien vrai, Monsieur Jusufi, lorsque je suis venu chez vous dans
28 votre maison et que je me suis présenté, que vous avez compris aussi que
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1 j'étais d'une famille musulmane ?
2 R. Oui, c'est exact.
3 Q. Et cela, vous l'avez reconnu par mon nom, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, qu'à ce moment-là vous m'avez dit que
6 vous étiez surpris que je venais d'une famille musulmane mais que je
7 défendais votre ennemi; vous vous rappelez
8 cela ?
9 R. Oui.
10 Q. Vous rappelez-vous que je vous ai répondu, Monsieur Jusufi, que je
11 défendais M. Boskoski et qu'il n'était pas l'ennemi, mais un ami des
12 Albanais, qu'il avait grandi avec eux, et que c'était le Tribunal qui
13 serait à même de décider s'il était ou non responsable de ce qui est dit
14 dans l'acte d'accusation, les chefs d'accusation ?
15 R. C'est exact.
16 Q. Cela a fait partie de notre conversation ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-il exact qu'à ce moment-là vous avez dit de façon sympathique que
19 vous alliez parler avec moi de ces événements ?
20 R. Oui.
21 Q. La conversation qui a eu lieu, c'était dans votre salon ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous étiez allongé sur une partie du divan, et j'étais assis sur le
24 divan à un angle de 90 degrés par rapport à l'endroit où vous étiez vous-
25 même; est-ce que bien cela ?
26 R. Oui, oui.
27 Q. A ce moment-là, étaient présents chez vous votre femme, votre belle-
28 sœur, l'épouse, de Rami décédé, votre belle-fille -- excusez-moi, et vos
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1 petits enfants, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous rappelez-vous, Monsieur Jusufi, qu'à un moment donné, votre belle-
4 fille a dit que son mari, Rami, lui avait dit qu'il avait vu les policiers
5 depuis le toit de la maison de Brace au début de la matinée, tôt le matin ?
6 A ce moment-là, vous l'avez interrompue, vous lui avez dit qu'elle ne se
7 trouvait pas dans la maison, vous lui avez dit que vous aviez déjà fait une
8 déclaration au bureau du Procureur et que vous ne vouliez pas modifier
9 cette déclaration. Vous rappelez-vous cette partie de la conversation ?
10 R. Nous n'avons pas eu une telle conversation. Nous l'avons interrompue
11 parce que cela c'était des rumeurs. Je n'ai pas dit cela. J'ai seulement
12 dit lorsque mon fils est revenu dans la soirée, dans la soirée du samedi,
13 il a dit que : "Je m'en suis tiré de justesse à cause de la police." Peut-
14 être que Boskoski était là aussi, parce que j'ai vu un grand nombre de
15 policiers. C'est pour cela que je l'ai interrompue, parce que ce n'était
16 pas exact. Parce qu'il a dit "peut-être," il n'a pas dit qu'il était là. Il
17 y a une différence à cela, et c'est pour cela que je l'ai interrompue.
18 Parce que, comme je l'ai dit, c'est différent, il y a une différence. Il
19 est probable ou peut-être qu'il était là, mais c'est une chose différente
20 lorsque vous dites qu'il y était. C'est la raison pour laquelle je l'ai
21 interrompue. Parce que c'était simplement sur une rumeur sans fondement,
22 dirais-je.
23 Q. Je vous remercie. Vous avez demandé à votre belle-fille de quitter la
24 pièce, et après cela il n'y avait plus que vous et moi ayant cette
25 conversation; c'est exact ?
26 R. Oui.
27 Q. Je vous remercie. Monsieur Jusufi, je voudrais vous poser quelques
28 questions d'ordre général afin que nous puissions mieux comprendre
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1 l'ensemble de la situation.
2 Monsieur Jusufi, depuis votre naissance, vous avez vécu à Ljuboten; c'est
3 exact ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Ljuboten se trouve vers les pentes de Skopska, de la montagne Skopska
6 Crna; c'est exact ?
7 R. Oui.
8 Q. Depuis le village de Ljuboten, on peut voir très bien Skopje, de sorte
9 que sa position -- cette situation, pratiquement domine la vallée de
10 Skopje; c'est bien cela ?
11 R. Oui.
12 Q. Savez-vous, Monsieur Jusufi, qu'au-dessus du village il y a Ljubotenski
13 Bachilo, puis Bacula, Ivudibra [phon], Batulekomez [phon], ensuite, Crn
14 Common [phon]; est-ce exact ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, que depuis les temps immémoriaux dans
17 cette région au-dessus du village de Ljuboten, il y avait une route
18 qu'empruntaient les caravanes qui passaient et que les gens appelaient
19 Sultana Vaxada [phon] ?
20 R. C'était la route de Sultan Murat.
21 Q. A l'époque, cette route servait à relier les parties méridionales de la
22 Serbie, les régions autour de Kumanovo, vers Tetovo et Kosovo; c'est bien
23 cela ?
24 R. Non, ce n'était pas cela, cette route. Cette route devait être utilisée
25 par des gens qui se déplaçaient à pied ou à cheval. C'est un sentier
26 étroit. On n'aurait pas pu conduire une voiture sur cette route. Elle avait
27 été construite à l'époque de la présence turque. Maintenant, nous utilisons
28 une autre voie, une autre route.
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1 Q. Monsieur Jusufi, peut-être que nous ne nous sommes pas bien compris,
2 là.
3 R. Bien. Alors bien.
4 Q. C'est exactement ce que je pensais. A l'époque de la présence turque,
5 cette route servait à relier l'est et l'ouest ?
6 R. Vous avez raison, oui. Oui, oui.
7 Q. Avant la désintégration de la République fédérale socialiste de
8 Yougoslavie, c'est-à-dire pendant l'existence de ce pays, vous savez que
9 cette route était fréquemment utilisée comme voie qui était empruntée par
10 des groupes de contrebandiers, des contrebandiers d'armes à feu, de
11 cigarettes, et cetera ?
12 R. Veuillez vous arrêter un moment, s'il vous plaît. Cette route ne passe
13 pas par Ljuboten. Cette route n'appartient pas à Ljuboten. Cette route
14 passe par Radisan, Brodec. C'est une route asphaltée jusqu'à [inaudible].
15 La route que vous avez dite n'a rien à voir avec la contrebande. Ça c'est
16 faux.
17 Q. Je vous remercie. Gardons à l'esprit l'endroit où se trouve Skopje, au
18 cours du conflit, plus particulièrement dans le sud de la Serbie, dans la
19 région de Tetovo, vous serez d'accord avec moi que Ljuboten avait une
20 importance stratégique très grande pour Skopje ?
21 R. Non, Ljuboten ne constitue pas un point stratégique. Nous n'avons
22 jamais pensé que ceci pourrait échouer à Ljuboten. Ça n'avait rien à voir
23 avec Lipkove ou Tanushevc. C'était un secteur très tranquille. Ljuboten
24 était entouré par des Macédoniens. L'autre village est situé au Monténégro.
25 Q. Skopska - c'est votre opinion, je l'accepte. Mais Skopska Crna Gora, où
26 se trouve Ljuboten, c'est, bien entendu, quelque chose qui a une grande
27 importance stratégique pour Skopje proprement dit ?
28 R. C'est stratégique, position stratégique. Il y a Kucevishte qui est
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1 également un point stratégique. Il y a une vingtaine de villages auprès de
2 Skopje. Ils se trouvent soit à 10, soit à 8 kilomètres de distance de
3 Skopje et ils sont tous reliés à Skopje. Ljubans, Ljuboten, se trouvent
4 également placé dans une bonne position stratégique, même meilleure que
5 Ljuboten.
6 Mais nous ne sommes pas ici pour parler de stratégie ou position
7 stratégique.
8 Q. Oui, mais votre village à une certaine époque était un lieu de
9 répartition de forces militaires de la République de Macédoine, parce
10 qu'ils pensaient que cette région revêtait une importance stratégique
11 particulière ?
12 R. Oui, mais nous sommes Albanais, eux sont Macédoniens. Nous sommes
13 Albanais, et ils pensaient qu'ils devaient protéger ce village contre
14 quiconque voudrait y entrer. C'est pour cela que l'armée est venue là. Mais
15 nous n'avions rien à voir avec cela.
16 Q. Vous avez déclaré que Ljuboten n'avait rien à voir avec certaines
17 attaques, et je pourrais être d'accord avec vous qu'au moment des
18 événements à Ljuboten ce n'était pas le point central des attaques des
19 groupes albanais, comme c'était le cas pour Kumanovo et Tetovo. Mais vous
20 seriez d'accord avec moi que Ljuboten pouvait servir comme base logistique
21 importante pour certains groupes extrémistes de ces régions ?
22 R. Non, non. Vous devez être sûr, je vous assure que Ljuboten n'avait
23 jamais pensé à cela, n'a jamais pensé à faire cela, n'a jamais œuvré dans
24 ce sens, pas du tout. Je parle pour l'ensemble du village de Ljuboten,
25 parce que c'était un village qui s'occupait uniquement de l'agriculture,
26 comme un ouvrier qui travaillait dur. Ils n'avaient pas d'intérêts en jeu
27 pour cela. Parce que si cela avait été le cas, ils auraient quitté le
28 village comme les autres l'ont fait et ils seraient allés à Skopje ou au
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1 Kosovo. La population de Ljuboten est restée sur place. Nous n'avons jamais
2 pensé ni même songé nous trouver dans cette situation lorsqu'on nous a tiré
3 dessus.
4 Q. Bien. Je vous remercie. Je vais vous poser d'autres questions
5 maintenant.
6 R. Oui, allez-y.
7 Q. Est-il exact que dans le village de Ljuboten, que vous pouviez venir de
8 Skopje jusqu'au village de Ljuboten par la route qui passait par Ljubanci
9 ou la route qui y conduisait en passant par Radisani; est-ce exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, qu'il y avait également une route
12 supplémentaire qui a été construite et qui contournait une partie du
13 village où vit la population macédonienne, et que vous avez l'habitude
14 d'appeler la route de Ljuboten, Ljubotenski Pat en albanais ?
15 R. C'est une route que nous avons construite nous-mêmes, parce qu'elle se
16 trouvait à 3 kilomètres de distance du village et c'est toute la population
17 qui l'a construite.
18 Q. Bien, je vous remercie. Lorsque vous allez depuis Skopje en direction
19 de Ljuboten, depuis la direction de Ljubanci, la route passe à côté de la
20 maison de Brace, qui est située directement à l'intersection entre les
21 villages de Ljubanci et Ljuboten; c'est exact ?
22 R. Oui, oui. Brace est à 100 mètres de distance de ma maison. C'est moi
23 qui ai vendu ce terrain à Brace. C'était mon voisin. Je lui ai vendu cette
24 terre. C'était un ami. Mon fils était également un de ses amis. Il faisait
25 ce qu'il voulait avec nous.
26 Q. Après la maison de Brace, vous passez devant plusieurs maisons où
27 vivent les Macédoniens, ensuite vous arrivez à l'intersection au bas de
28 laquelle il y a un magasin; c'est exact ?
Page 495
1 R. Oui, c'est exact.
2 Q. Cette rue est la rue principale de Ljuboten, et son nom est la rue
3 numéro 5; c'est exact ?
4 R. Oui, oui. Je ne sais pas, je ne sais pas le numéro, mais vous avez
5 raison, c'est la route principale. Mais je ne sais pas quel est son numéro.
6 Q. Si l'on va depuis ce magasin vers l'église orthodoxe, les maisons -
7 enfin votre maison, la maison de Kenan Jusufi, ou de Xhabir Jusufi et Sefer
8 Jusufi, là où elle se trouvait; c'est exact ?
9 R. Oui, il y a encore d'autres maisons.
10 Q. Juste à côté de ce magasin, il y avait une allée étroite où une
11 nouvelle maison de votre voisin, Fatmir Kamberi, se trouvait, et aussi son
12 frère, Memshi; est-ce exact ?
13 R. Oui, Memshi.
14 Q. Oui, votre frère.
15 R. Ce n'est pas une route qui se trouve là, c'est à 50 mètres à
16 l'intérieur par rapport à la route. Est-ce que vous parlez de Fatmir ?
17 Q. Oui. C'est une nouvelle maison de Fatmir et une nouvelle maison de
18 Mershir ?
19 R. Je pense qu'il y avait trois nouvelles maisons, oui. Il n'y a que trois
20 maisons comme cela.
21 Q. Bien, je n'avais connaissance que de deux. Je vous remercie beaucoup.
22 R. Trois.
23 Q. Si vous vouliez aller du magasin en direction de la mosquée qui se
24 trouve au centre du village, à la rue principale, les maisons des Jusufi
25 sont situées là où elles sont situées ainsi que Xhevdet Jusufi, l'ancienne
26 maison de Fatmir Kamberi --
27 R. Non, non, non.
28 Q. -- et en face de la vieille maison de Fatmir Kamberi, il y une maison
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1 des Macédoniens, Sande Kostovski ?
2 R. Vous avez passé devant cette maison. Sabit Jusufi, Nazmi Jusufi,
3 Xhevdet Jusufi, Kamberi Fatmir et Sande Kostovski. Cela se trouve au-dessus
4 de la route de Sande, mais je ne pense pas que vous ayez mentionné ces
5 maisons dans l'ordre dans lequel elles sont vraiment situées.
6 Q. En tout état de cause, la majorité de ces maisons appartiennent --
7 enfin, la plupart de ces maisons appartiennent à la famille Jusufi.
8 R. Il y a dix maisons en tout, dix ou 12, je pense. Jusufi ou Rashit, mais
9 il s'agit de la même famille.
10 Q. Et cela, Monsieur Jusufi, c'est autrement la façon dont les familles
11 albanaises vivaient, tout particulièrement dans les villages. La famille
12 avait des liens de sang, par les hommes, par la voie masculine, et vivait
13 normalement dans le même voisinage; c'est exact ?
14 R. Oui. Ils vivent proches les uns des autres, à dix ou 20 mètres les uns
15 des autres, quelle que ce soit l'étendue de la famille Jusufi.
16 Q. Toutes ces maisons qui faisaient face à la grand-rue, la rue
17 principale, celles que j'ai mentionnées et celles que vous avez ajoutées
18 parce que j'avais oublié de les mentionner, elles étaient, comme votre
19 maison, entourées d'un mur de sorte que la vie de famille était protégée de
20 la curiosité et de la vue des passants dans la rue; est-ce exact ?
21 R. Toutes ces maisons ont de grandes barrières ou grands portails qui les
22 séparent de la rue, de sorte que vous pouvez voir dix ou 12 portes l'une
23 après l'autre et toutes appartiennent à la famille Rashiti ou à la famille
24 Jusufi, ou réciproquement.
25 Q. Je vous remercie.
26 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente
27 maintenant au témoin la pièce 1953 de la liste 65 ter du Procureur. C'est
28 un document qui hier a été reçu comme portant la cote P3 du document
Page 497
1 présenté par le Procureur.
2 Q. Monsieur Jusufi, pourriez-vous me dire ce que vous reconnaissez là sur
3 cette image ?
4 R. Oui. C'est là une photo de ma propre maison. C'est une cour.
5 Q. Pourriez-vous savoir si vous aviez un pointeur ?
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais demander à Monsieur l'Huissier
7 de vous donner un pointeur.
8 R. Je ne parviens pas à atteindre le chiffre qui est là.
9 Q. Excusez-moi, mais je ne pense pas que cela sera visible.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Nous allons fournir au témoin une copie
11 papier photographie, et je voudrais vous demander de la placer sur le
12 rétroprojecteur.
13 R. Elle n'est pas pertinente. Je peux voir ce que vous voulez me montrer,
14 ce que vous voulez que je voie, et je dirai ce que vous voulez ce que je
15 dise, mais je répondrai à chacune des questions que vous me posez. Dites-
16 moi simplement ce que vous voulez dire. Vous n'avez pas à être embarrassée.
17 Q. S'il vous plaît, Monsieur Jusufi, pourriez-vous simplement utiliser la
18 photographie qui est là devant vous et montrer sur l'écran où se trouve la
19 barrière principale à partir de laquelle on entrait dans la maison ?
20 R. C'est ici.
21 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, que derrière cette barrière, le mur se
22 prolonge ?
23 R. Oui.
24 Q. Que nous avons discuté avant et après de ce qui empêche les gens qui se
25 trouvaient dans la rue de voir ce qui se passe à l'intérieur de la cour,
26 n'est-ce pas exact ?
27 R. Oui. C'est un petit peu en pente ici, un petit peu abrupt, et le mur
28 n'est pas très élevé. Vous pouvez voir, parce que je crois que cela fait un
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1 mètre et 50 centimètres. On ne peut pas voir cette partie. Mais de là,
2 c'était encore plus à moins que vous envisagiez quelqu'un qui est vraiment
3 très grand de taille.
4 Q. Je vous remercie. Dites-moi, s'il vous plaît, pourriez-vous indiquer
5 sur la photographie où se situait votre appentis ?
6 R. Mon appentis est situé -- ce n'est pas un appentis. Ce qu'il y a là,
7 ici, vous voyez la petite grille, et après cela il y a un mur. Ceci est où
8 se trouvait la remise par rapport à cette porte. Il y avait dix mètres cube
9 de bois et autres matériaux, et tout a brûlé. Les barrières également ont
10 été incendiées, ont brûlé.
11 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, que depuis cette entrée principale,
12 votre jardin ou votre cour se trouve sur un plan légèrement incliné en
13 allant vers votre maison ?
14 R. Oui. C'est assez abrupt, comme dix degrés de pente. Je ne peux pas être
15 très précis. Ce n'est qu'une indication.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur
17 Jusufi. Monsieur le Juge, peut-être que ceci serait le bon moment pour
18 faire une suspension de séance.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, nous avons besoin de nous arrêter
20 maintenant pendant une demi-heure. Mais avant de le faire, je voudrais
21 consigner au procès-verbal que lorsque le témoin pointait au lieu de cet
22 appentis, de cette remise, c'était qu'il désignait une position qui se
23 trouvait à droite de l'appareil qui a pris la photographie, entre la
24 position de la caméra et la palissade ou la clôture et le portail. Et c'est
25 ceci que nous avons vu comme étant la pièce à conviction P2.
26 Nous suspendons la séance pour le moment et nous la reprendrons à 16 heures
27 15.
28 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
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1 --- L'audience est reprise à 16 heures 34.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous espérons que vous vous sentez un
3 peu mieux, Monsieur Jusufi.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Je vais donc demander à Mme
6 Residovic de continuer avec ses questions.
7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Monsieur Jusufi, --
9 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais demander que l'on montre à
10 nouveau au témoin la pièce de l'Accusation P2. Il s'agit de la pièce qui
11 est sur le rétroprojecteur devant le témoin, et j'aimerais demander au
12 huissier de fournir au témoin un stylo.
13 Q. Monsieur Jusufi, il y a quelques instants, vous m'avez montré le mur
14 qui continue à partir du portail. Pouvez-vous inscrire le chiffre 1 pour
15 montrer la partie du mur qui est située derrière votre maison, qui fait
16 face à la grande rue ? Je vous demande de bien vouloir écrire le chiffre
17 numéro 1 à cet endroit.
18 R. Ici ? [Le témoin s'exécute]
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Le témoin a marqué du chiffre 1 le mur qui
20 sépare la cour de sa maison de la rue principale.
21 Q. Maintenant, Monsieur Jusufi, j'aimerais vous demander, puisque avant la
22 pause vous nous avez indiqué le coin dans lequel votre remise se trouvait
23 avec les poutres, le bois qui a brûlé, j'aimerais vous demander de bien
24 vouloir inscrire le chiffre 2 à cet endroit-là.
25 R. Ici ? Le mur à côté de la remise, vous voulez dire ?
26 Q. Oui.
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Le témoin a indiqué la direction dans
Page 500
1 laquelle se trouvait la remise avec le bois.
2 Q. Monsieur Jusufi, pouvons-nous sur cette photographie -- le portail --
3 la grille qui mène au jardin ?
4 R. Je ne comprends pas ce que vous entendez par "jardin." Ici, c'est la
5 cour, et à partir du portail principal, jusqu'à ce point ici. Ici, c'est la
6 cour. Ici, et jusqu'à la maison, l'entrée de la maison. On ne peut pas
7 appeler cela une cour. C'est la partie ici qui est la cour, à partir de ce
8 point jusqu'à ce point, il y a 5 mètres.
9 Q. Très bien. J'aimerais vous poser une question. Cette partie est-elle
10 séparée par une porte, par une grille, un "kapidzik" ?
11 R. Non, il n'y a pas de grille de jardin ici. Autrefois, c'était ouvert,
12 et ça n'a aucune importance, ça ne sert à rien.
13 Q. Merci. J'aimerais maintenant vous demander de signer cette photographie
14 et indiquer la date d'aujourd'hui, le 8 mai 2007.
15 R. Ici ?
16 Q. Oui.
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Oui, 2007. Et veuillez signer votre nom également.
19 R. Ici ?
20 Q. Oui.
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Q. Merci beaucoup.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demande à présent que cette
24 photographie soit versée au dossier.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien, elle sera versée au
26 dossier.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce 1D1, Monsieur le
28 Président.
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1 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais à présent que l'on montre au
2 témoin la pièce P12. Et dans la mesure où le témoin n'a pas été en mesure
3 d'écrire quoi que ce soit sur le système e-court, j'aimerais que l'on
4 demande à l'huissier de remettre cette photographie au témoin, qu'elle soit
5 posée sur le rétroprojecteur, dont la cote dans les pièces de l'Accusation
6 est le
7 numéro 65 ter 197.
8 Q. Monsieur Jusufi, il y a ici deux photographies qui montrent les mêmes
9 bâtiments, pour ainsi dire. La voyez-vous ?
10 R. Oui, c'est la même photographie. Il n'y a aucune différence entre les
11 deux photographies.
12 Q. J'aimerais vous poser simplement une question. Je vais vous demander
13 d'annoter sur cette photographie une flèche qui partirait de la porte
14 d'entrée vers la cour, vers le portail, où on voit clairement également un
15 véhicule, une voiture dont vous nous avez dit tout à l'heure que cette
16 partie de la cour est légèrement inclinée, c'est-à-dire qu'il y a une
17 pente. Donc, je vais vous demander de faire une flèche de l'arrière de la
18 voiture vers le bas de la photographie. C'est cela même, juste à la partie
19 inférieure de la photographie.
20 R. Vous voulez que je fasse un trait.
21 Q. Oui, oui, un trait avec une flèche au bout.
22 R. Bien, c'est jusqu'ici. [Le témoin s'exécute]
23 Q. Merci. Vous avez également dit, lorsque je vous ai demandé de quelle
24 hauteur était ce mur - j'aimerais vous poser la question suivante :
25 j'aimerais vous demander de faire un cercle autour de l'homme qui se trouve
26 près du portail, et de faire le chiffre 1 à côté de cette personne, dans la
27 mesure où il permet de mesurer, de se rendre compte de la hauteur du mur.
28 R. Il s'agit de la route principale.
Page 502
1 Q. A côté de l'homme ?
2 R. Oui, à côté de l'homme.
3 Q. Dans la mesure où cet homme est d'une certaine taille, je vous demande
4 de bien vouloir écrire le chiffre 1 à côté de lui.
5 R. Ce mur est à l'extérieur, ce n'est pas de mon côté du portail.
6 Q. Oui, oui, c'est également une partie qui vous appartient ?
7 R. Cela, c'est à l'extérieur, alors que là, c'est mon mur. Là, c'est mon
8 côté de la maison.
9 Q. Très bien.
10 R. Et ici, c'est aussi de mon côté.
11 Q. Très bien. Donc je vais vous demander d'inscrire le chiffre 1 à côté du
12 mur.
13 R. Donc vous voulez que je fasse un 1 sur mon mur.
14 Q. Oui.
15 R. [Le témoin s'exécute]
16 Q. Sur le portail, faites le chiffre 2, indiquez le chiffre 2.
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Et sur l'homme, faites le chiffre 3.
19 R. Chiffre 3. [Le témoin s'exécute]
20 Q. J'aimerais également vous demander d'indiquer la date d'aujourd'hui, le
21 8 mai 2007 --
22 R. 8/5/2007.
23 Q. Et signez, s'il vous plaît.
24 R. [Le témoin s'exécute]
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup. Je souhaite que cette
26 pièce soit versée au dossier comme pièce qui a été utilisée pendant
27 l'audience.
28 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce 1D2, Monsieur le
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1 Président.
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais à présent que l'on montre au
3 témoin la pièce 65 ter 179, page 5, et j'aimerais également que l'huissier
4 fournisse au témoin et place sur le rétroprojecteur une photographie.
5 Q. Monsieur Jusufi, vous reconnaissez certainement votre maison ? Cette
6 maison, c'est votre maison ?
7 R. Oui.
8 Q. Et sur cette feuille de papier, vous avez à nouveau deux fois la même
9 photographie, n'est-ce pas ?
10 R. Oui. Elle montre la même image. Elles sont exactement identiques. Il y
11 a l'entrée ici, puis il y a la même entrée sur l'autre partie.
12 Q. Monsieur Jusufi, je vais vous demander d'indiquer ou de nous dire si
13 ces petits cadres noirs que l'on peut voir sur la droite, cette embrasure
14 par la gauche, il s'agit du contour de la fenêtre du salon, de la salle à
15 manger.
16 R. Oui. Il s'agit de la fenêtre de la pièce de gauche. Lorsque vous entrez
17 dans la maison, cette pièce se trouve à gauche. Il y a ici le mètre ici, et
18 il s'agit de la trace de ce qui a été touché par la police, et je ne l'ai
19 pas changé. Je l'ai laissé en l'état.
20 Q. Très bien. Je vais vous demander sur le châssis, le contour de la
21 fenêtre, d'écrire le chiffre 1, de façon à ce que nous sachions qu'il
22 s'agit de la fenêtre. Oui, c'est exactement ici.
23 R. Numéro 1. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Vous avez fait une annotation à côté de la fenêtre de la salle à manger
25 dans laquelle on pénètre lorsque l'on rentre dans le couloir et qu'on va
26 ensuite sur la gauche. Au-dessus de cette fenêtre, on peut voir à l'étage
27 l'ouverture, le contour d'une autre fenêtre. Pouvez-vous me dire à quelle
28 pièce cette fenêtre appartient ?
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1 R. A la pièce qui se trouve à l'étage. Il s'agit ici du rez-de-chaussée,
2 puis voici l'étage. Nous, on appelle cela le deuxième étage.
3 Q. Très bien. Dites-moi s'il s'agit de la chambre, de la pièce qui était
4 normalement utilisée par votre fils, Rami Jusufi ?
5 R. Il utilisait deux pièces; celle-ci et celle-ci. Il avait deux pièces à
6 l'étage, puis j'avais deux pièces au rez-de-chaussée.
7 Q. Pourriez-vous donc indiquer le chiffre 2 à côté de l'étage supérieur,
8 qui confirme que votre fils Rami utilisait les pièces qui se trouvaient à
9 l'étage supérieur ?
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Dites-moi à présent, Monsieur Jusufi, si pendant cette période
12 entre le 11 et le 12 août, votre fils Rami utilisait encore ces pièces à
13 l'étage ?
14 R. Le 12 août, vous voulez dire ?
15 Q. Le 11 --
16 R. Cela devrait être le 11. Il n'a pas utilisé cette pièce le 11. Le 11,
17 il a dormi ici dans cette pièce avec moi, parce que sa femme n'était pas
18 là. Les enfants étaient là, mais sa femme n'était pas là. Il faudrait
19 d'abord que vous me demandiez comment cela se fait-il.
20 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise signale qu'elle fait une
21 correction. "Les enfants n'étaient pas là."
22 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
23 Q. Très bien. Pourriez-vous indiquer la date sur cette photographie
24 également et signer ?
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Residovic --
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais signer la date.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous n'êtes pas obligé de le faire.
28 Madame Residovic, avec la technologie électronique que nous utilisons à
Page 506
1 présent dans le cadre de cette affaire, ce n'est pas la peine de demander
2 au témoin de signer et d'indiquer la date. Vous pouvez bien sûr faire
3 indiquer les chiffres 1, 2, 3, comme vous le souhaitez, mais nous avons
4 cette photographie. Un cliché en a été pris. Cela permettrait d'accélérer
5 un peu les choses. Donc, nous n'avons pas besoin de dater et de signer
6 cette photographie.
7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
8 C'est la première fois que je participe à un procès dans lequel le système
9 e-court est utilisé, je vous remercie de m'avoir rappelé ceci. Je vous
10 remercie.
11 Vous pouvez retirer cette photographie de devant le témoin, et
12 j'aimerais verser au dossier cette photographie telle qu'annotée par le
13 témoin, et je demande qu'une cote lui soit attribuée.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce 1D3 [comme
15 interprété], Monsieur le Président.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur Jusufi, vous avez dit plus tôt qu'il n'y avait pas de
18 problèmes dans le village de Ljuboten, n'est-ce pas ?
19 R. Oui. Par le passé, il n'y avait pas de problèmes, mais pendant cette
20 période, nous n'étions tant pas en paix. Je l'étais personnellement, mais
21 les enfants avaient très peur à cause des coups de feu qui étaient tirés et
22 des points de contrôle, des barrages qui étaient installés sur les routes.
23 Q. Mais, Monsieur Jusufi, vous souvenez-vous que dès 1992, un processus
24 s'est engagé au cours duquel en 1994 certaines personnes, dont Mithat
25 Emini, et Hasan Agushi, et d'autres personnes ont été condamnées parce
26 qu'elles ont tenté dans le village de Ljuboten d'établir une unité
27 paramilitaire indépendante ? Etes-vous au courant de cela ?
28 R. Non, non. J'en entends parler pour la première fois aujourd'hui. A
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1 l'époque, je travaillais pour une société d'Etat, et ce genre de question
2 ne m'intéressait pas du tout. Je n'en avais jamais entendu parler.
3 Q. Très bien. Concernant les événements qui ont eu lieu entre le 10 et le
4 12 août 2001, au cours desquels, malheureusement, votre fils a perdu la
5 vie, vous-même, Monsieur Jusufi, avez abordé la question très fréquemment,
6 pas seulement avec la Défense, mais également avec des représentants des
7 organisations internationales, des journalistes, et bien sûr à de
8 nombreuses reprises avec les enquêteurs du bureau du Procureur du Tribunal
9 pénal pour l'ex-Yougoslavie. Cela est-il exact ?
10 R. Oui, c'est exact. Nous leur avons parlé. Nous leur avons expliqué ce
11 qui nous était arrivé.
12 Q. Merci.
13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais vous demander qu'à présent la
14 pièce numéro ID24 65 ter vous soit montrée, page ID 0971D. Je me suis peut-
15 être trompée. 65 ter 1D, page 1D0297.
16 Q. Ce document, Monsieur Jusufi, est en langue anglaise, mais j'aimerais
17 vous demander s'il est exact que vous, en avril 2007, lorsque ce procès a
18 commencé, avez fait une déclaration à des journalistes d'Associated Press,
19 si bien que le reportage fait par le journaliste de cette agence, Karentin
20 Kry [phon], il est dit la chose suivante :
21 "Jusufi pense se rendre à La Haye pour témoigner dans cette affaire,
22 bien qu'il soit paralysé. Il dit qu'il espère voir Boskoski et Tarculovski
23 condamnés."
24 Est-il exact que vous avez dit ceci ?
25 R. Je n'ai pas dit "condamnés." J'ai dit que j'étais prêt à me rendre à La
26 Haye, mais ce n'est pas à moi de décider s'ils seront condamnés ou pas. Il
27 y a un autre organisme qui est chargé de faire cela. J'ai dit que j'étais
28 prêt à me rendre à La Haye, à témoigner devant ce Tribunal, mais je n'ai
Page 508
1 pas dit que je voulais voir condamnés Tarculovski et Boskoski. Comme je
2 l'ai dit, il y a un autre organe qui prend des décisions à ce sujet.
3 Q. Si ces journalistes vous ont effectivement cité, tel que je vous ai
4 cité, tel que je l'ai lu, il est clair qu'ils ont mal interprété vos
5 déclarations. Est-ce que c'est ce que vous tentez de nous dire ?
6 R. Oui. Je pense que c'est le cas, parce que je n'ai pas dit "condamné."
7 Il a tué quelqu'un de ma famille, mais en ce qui le concerne lui,
8 personnellement, il y a un autre organe qui décide de s'il sera condamné ou
9 pas.
10 Q. J'aimerais vous poser la question suivante, Monsieur Jusufi : avez-vous
11 également abordé, en 2001, avec les représentants de "Human Rights Watch,"
12 avez-vous abordé diverses questions avec eux ?
13 R. Non, je ne connais pas ce représentant, et je ne crois pas avoir parlé
14 avec cette personne. Je ne peux pas dire "oui." Peut-être que c'est vrai,
15 mais peut-être que j'ai oublié ceci.
16 Q. Très bien.
17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais donc à présent demander que le
18 document 65 ter 1D22 soit affiché, page 1D0287, en macédonien 1D0291.
19 Q. Monsieur Jusufi, il s'agit de la première page, ainsi que la page sur
20 laquelle il y a plus de détails concernant votre déclaration. Vous avez dit
21 que peut-être vous ne vous en souveniez pas, que peut-être vous aviez fait
22 cette déclaration et que peut-être non --
23 R. Je ne m'en souviens pas du tout. Ils ne m'ont pas dit qu'il s'agissait
24 de qui il s'agissait. Pour les autres, je les connais.
25 Q. Dans cet article, dans ce rapport, je vous rappelle qu'il est déclaré
26 qu'il s'agit d'une déclaration que vous avez faite le 20 août 2001, comme
27 cela est dit dans le rapport, juste après les événements. Il est dit la
28 chose suivante :
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1 "Au moment où l'attaque a commencé, ils sont venus dans ma maison. Ma
2 cour était pleine. Ils étaient à peu près 20. Ils portaient tous des
3 uniformes, mais pas de cagoules. Ils ont lancé un projectile explosif sur
4 le portail de ma cour. Mon fils est allé fermer la porte, et au moment où
5 il a fermé la porte et qu'il est retourné vers la pièce, il y a eu une
6 grande explosion. Ils ont démoli la porte. Ils ont fait exploser la porte
7 avec une mitrailleuse."
8 R. C'est une erreur. C'est une erreur, complètement une erreur. Je vais
9 vous dire à présent comment cela s'est passé.
10 Q. Attendez un instant, s'il vous plaît.
11 "C'était le moment, c'est alors que mon fils a été touché au côté et
12 à l'abdomen suite à ces coups. Il s'est effondré sur place. Cela s'est
13 produit devant moi."
14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'ai demandé que la version anglaise de ce
15 texte soit montrée. Il s'agit de 1D0288.
16 Donc, il s'agit là de 1D22, et la page, c'est 1D0288. Merci.
17 Q. Vous avez essayé de m'interrompre en indiquant que ceci était inexact;
18 est-ce vrai ?
19 R. Ce que vous avez lu au début, ce n'est pas exact. Il est exact qu'il a
20 été tué à la porte, mais il n'est pas vrai qu'il est allé dehors puis qu'il
21 est rentré. Je vais vous dire exactement comment cela s'est passé. Ce que
22 vous venez de lire est inexact.
23 Q. Donc, si "Human Rights Watch" a écrit ce que je viens de vous lire,
24 vous me dites qu'ils n'ont pas reflété de manière exacte ce que vous leur
25 avez dit ?
26 R. C'est partiellement correct, mais il y a une partie qui est erronée. La
27 partie décrivant la manière dont il a été tué près de la porte d'entrée,
28 cela c'est exact, mais la partie portant sur le fait qu'il serait sorti
Page 510
1 puis revenu, cela c'est inexact. Au moment où il allait fermer la porte, il
2 a été tué sur le pas de la porte.
3 Q. Avez-vous souvenir, Monsieur Jusufi, qu'après cet entretien avec vous
4 et avec Muzafer Jusufi, les représentants de "Human Rights Watch," avec les
5 représentants de "Human Rights Watch," le 23 août, ils ont visité votre
6 domicile, ont pris des photos et vous n'étiez pas encore revenu chez vous à
7 ce moment-là ?
8 R. Muzafer était à Skopje. Nous, nous sommes restés à Skopje plus d'un
9 mois, à peu près 45 jours. Je ne sais pas qui a fait cette déclaration.
10 J'ai fait ma propre déclaration. Muzafer n'est pas revenu à Ljuboten
11 pendant cinq mois. Il est resté à Skopje.
12 Q. Mais vous êtes certain que vous n'êtes pas revenu chez vous au cours de
13 trois à quatre semaines; est-ce exact ?
14 R. Six semaines, six semaines entières. Alors, quant à savoir si six
15 semaines cela fait 50 jours ou 45, je n'en sais rien, mais cela a fait six
16 semaines.
17 Q. Donc, ni vous ni votre femme, Zenep, ne sont revenus à la maison ?
18 R. Non, personne.
19 Q. Merci.
20 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais à présent demander que le
21 document 65 ter 1D2, page 1D0012, vous soit affiché.
22 Q. Je vous demande, si vous, Monsieur Jusufi, après les événements, si
23 vous avez eu plusieurs discussions avec des journalistes ?
24 R. J'ai parlé à des journalistes à plusieurs reprises.
25 Q. Nous avons devant nous le document du journal londonien, "The
26 Independant," et leur journaliste, Justin Huggler.
27 Au paragraphe 4 de l'édition du 6 septembre, indique, 2001, indique
28 que vous avez écrit ce qui suit :
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1 "Le 12 août, la police est entrée dans Ljuboten. Ils ont encerclé 20
2 maisons autour de la nôtre. Il y avait un vieillard dans la maison."
3 Cela veut dire vous, votre femme, Zenep, votre fils Rami, et deux
4 membres de votre famille :
5 "Les membres de la famille se sont cachés derrière l'abri ou
6 l'appentis tandis que --"
7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquent qu'ils ne sont pas sûrs de
8 l'endroit où se sont cachés les deux membres de la famille.
9 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
10 Q. "… alors que Mme Jusufi s'est cachée derrière la cuisinière. Ils
11 sont entrés dans la cour. Ils ont tiré sur ma voiture, puis ils l'ont
12 incendiée. Puis, Rami s'est souvenu que le portail n'était pas ouvert et
13 est allé le verrouiller. Ils lui ont tiré dessus à travers la porte."
14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Avant de vous poser cette question,
15 j'aimerais vous demander -- il reste -- j'ai eu plusieurs jours où j'ai pu
16 préparer mon travail sur e-court. Je demande que la pièce 1D0013 soit
17 affichée. Donc à la page suivante, 1D2, page 1D0013.
18 Dans le quatrième paragraphe, l'extrait que je viens de lire à M.
19 Jusufi.
20 Q. Dites-moi, Monsieur Jusufi, si le journaliste de l'"Independent" a
21 relaté exactement ce que vous lui avez déclaré ?
22 L'INTERPRÈTE : Entre-temps, l'interprète signale que c'est derrière un
23 divan ou un canapé que s'étaient caché les membres de la famille.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela n'est pas exact. Certains aspects
25 sont exacts, d'autres ne le sont pas. Alors je vais vous dire la vérité,
26 ici, aujourd'hui, devant Madame et Messieurs les Juges. Ce qui figure dans
27 le rapport n'est pas totalement exact. Ils disent que mon fils est allé à
28 l'extérieur et est rentré; c'est faux. Je ne sais vraiment pas comment
Page 512
1 répondre à cette question que vous me posez. Ma réponse sera la même. Quand
2 vous me demanderez ce qui s'est produit, je vous dirai exactement ce qui
3 s'est produit. Je suis venu ici, j'ai parcouru des milliers de kilomètres
4 dans cet Etat pour dire la vérité. Si le fait que je sois invalide ne
5 signifie pas que mon cerveau ne fonctionne pas correctement; mon cerveau
6 fonctionne correctement.
7 Ce rapport n'est pas totalement correct. Il y a des confusions dans
8 ce rapport.
9 Q. Très bien. Merci beaucoup.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant vous demander
11 d'afficher le 65 ter 1D25, page 1D0299.
12 Il s'agit de la première page du livre IWPER, et je demande que l'on
13 affiche la page suivante, 1D25, 1D0303, dernier paragraphe, et pourriez-
14 vous afficher 1D0304, le premier paragraphe.
15 Q. Monsieur Jusufi, vous avez indiqué que vous aviez parlé à plusieurs
16 reprises avec des journalistes et des organisations internationales, à cet
17 institut faisant rapport sur la guerre et la paix, a fait rapport du fait
18 que le 3 avril 2002, vous leur avez dit ce qui suit :
19 "Nous avons entendu des coups de feu. Le courant a été coupé. Mon
20 fils s'est précipité pour fermer la porte de devant, mais la police était
21 déjà dans la cour. Ils l'ont vu et lui ont tiré dessus. Il a essayé de
22 s'échapper, mais il a été touché et il est tombé."
23 Vous avez aussi dit que votre fils avait été touché de deux balles
24 dans le dos et les reins, qui ont traversé son estomac et il est mort une
25 heure après.
26 Avez-vous bien dit cela, Monsieur Jusufi, le 3 avril 2002 ?
27 R. Non. Pouvez-vous répéter la partie à partir du moment où ils ont passé
28 le portail et le moment où mon fils a été tué. Est-ce que c'est inscrit
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1 comme cela, parce qu'il y a une partie du rapport qui est exact et d'autres
2 parties qui ne le sont pas.
3 Q. "Il a essayé de s'échapper, mais il a été touché et est tombé." Voilà
4 ce qui est indiqué.
5 R. Là, cela, c'est erroné. C'est une erreur, manifestement une erreur.
6 Vous pouvez être sûrs de ce que je vous dis, Madame et Messieurs les Juges.
7 Je puis vous dire, si vous le voulez, exactement comment les choses se sont
8 passées, mais ceci est erroné.
9 Q. Bien, Monsieur Jusufi, votre témoignage donc est que ces personnes
10 aussi, venant de l'institut sur la Paix et la Guerre, ainsi que les
11 journalistes qui ont été cités auparavant, ont cité de manière inexacte ce
12 que vous leur avez rapporté ? Est-ce ce que vous voulez nous dire ?
13 R. Il y a des erreurs. Certaines choses sont exactes. Ils ont dit qu'il
14 voulait partir, ce qui est inexact. Comment pouvait-il -- où pouvait-il
15 aller ? Il dormait. Comment pouvait-il partir ?
16 Q. Monsieur Jusufi, nous allons maintenant passer aux déclarations que
17 vous avez faites aux enquêteurs du TPIY. Vous avez déjà auparavant répondu
18 qu'à plusieurs occasions vous avez eu des entretiens avec les enquêteurs;
19 est-ce exact ?
20 R. Oui, c'est exact.
21 Q. Si je puis vous rappeler, vous avez indiqué aux enquêteurs du TPIY, et
22 vous avez fait des déclarations le 9 février 2003, puis le 3 octobre 2003,
23 puis vous avez ajouté à cette déclaration du 9 février 2003, et ces deux
24 déclarations ont été confirmées par le représentant du TPIY qui s'est rendu
25 à Ljuboten; est-ce exact ?
26 R. Je ne sais pas à quelle date ni combien de fois ils sont venus. Je ne
27 me souviens pas de cela, mais ce dont je me souviens, c'est qu'ils sont
28 venus. Je peux vous confirmer qu'ils sont venus et que j'ai fait des
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1 déclarations, mais je ne peux pas vous donner des dates précises. Ce qu'ils
2 ont noté est exact, mais ce que vous me montrez là, ce n'est pas
3 entièrement exact. Je ne suis pas entièrement d'accord avec ce que vous
4 m'avez cité. Mon fils -- quand vous avez dit que mon fils a tenté de
5 partir, qu'ils l'ont vu et qu'ils l'ont abattu, ce n'est pas exact. Cette
6 partie-là n'est pas exacte.
7 Je pense que vous devez me croire, Madame et Messieurs les Juges, je
8 dis la vérité. Car si vous ne me croyez pas, Dieu ne me croira pas non
9 plus, car Dieu nous enseigne à dire la vérité. Allah a toujours dit que :
10 "J'aime les hommes justes et honnêtes. Le fait est -- le fait que mon fils
11 aurait quitté la maison est inexact, et je ne tiens pas à mentir ici.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Saxon.
13 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse de devoir
14 interrompre, mais il faut clarifier quelque chose.
15 Dans la traduction dans la dernière question de Mme Residovic, la
16 traduction en anglais, la dernière partie de la question se lit comme suit
17 :
18 "Ces deux déclarations ont été confirmées par le représentant du TPIY
19 qui s'est rendu à Ljuboten; est-ce exact ?"
20 S'il s'agit là d'une traduction exacte, je ne sais pas si
21 Mme Residovic pourrait éclaircir ce qu'elle entend par "confirmées par les
22 enquêteurs du TPIY," parce nous ne voyons pas ce qu'elle entend par là.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup. J'aimerais corriger
24 une erreur, une erreur commise par moi, qui est que la déclaration du 3
25 octobre n'a pas été faite en 2003 mais en 2004, et en ce qui concerne
26 l'aspect confirmation, ce que j'ai dit c'est que le représentant du greffe
27 a authentifié cette déclaration comme étant une déclaration, et j'ajoute
28 maintenant le 92 bis.
Page 515
1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup, Madame
2 Residovic.
3 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
4 Q. Monsieur Jusufi, si j'ai bien compris, il n'est pas nécessaire de
5 procéder à l'énumération de toutes les déclarations que vous avez faites
6 car vous n'avez pas un souvenir clair des dates. Dès lors, je vais me
7 permettre de vous montrer chacune de ces déclarations, et vous pourrez
8 alors confirmer si vous avez effectivement fait et signé ces déclarations.
9 J'aimerais à présent demander que l'on affiche la déclaration du 9 février.
10 Il s'agit du 60 ter 1D5, page 1D025, et en albanais page 1D036.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Saxon.
12 M. SAXON : [interprétation] Encore une fois, je vous présente mes excuses
13 de devoir interrompre, mais j'aimerais à nouveau demander s'il est
14 absolument nécessaire de montrer ces documents l'un après l'autre au témoin
15 afin qu'il puisse confirmer qu'il les a effectivement signés à une date
16 donnée. La déclaration sous article 92 ter consolidée, qui a déjà été
17 signifiée au début de cette déclaration consolidée, fait référence aux
18 déclarations antérieures du témoin. Et ce qui me préoccupe, c'est la santé
19 du témoin et la durée que devra encore prendre ce témoignage.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Saxon.
21 Je vois, Madame Residovic, qu'il est fait mention de la déclaration
22 du 9 février 2003 et du 3 octobre 2004. Y a-t-il des déclarations autres
23 que celles-ci que vous aimeriez voir identifier par le témoin ?
24 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je présenterais
25 toutes les déclarations faites par ce témoin, tenant compte du fait que
26 certains éléments très importants pour la Défense de mon client y figurent,
27 car il existe des écarts importants entre ces déclarations. Mon éminent
28 collègue, Guenal Mettraux, a déjà remarqué - et nous allons faire en sorte
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1 que ceci soit réglé avec le bureau du Procureur - nous pensons, en fait,
2 que le texte consolidé n'est pas en accord avec ce que vous avez dit,
3 Monsieur le Président. Dès lors, nous n'avons pas pu en faire usage pour
4 procéder à l'interrogatoire de ce témoin.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc ce que je comprends de ce que
6 vous nous dites, c'est que vous voulez identifier avec le témoin certains
7 de ces écarts entre les textes ?
8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Continuez.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci.
11 Q. Monsieur Jusufi, s'agit-il bien de votre signature sur cette page ?
12 R. Celui-ci ? Celle-ci, oui.
13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin 65
14 ter numéro 1D5, page 1D031, et en version albanaise 1D042.
15 Q. Monsieur Jusufi, vous reconnaissez bien votre signature sur cette page,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Dans cette déclaration, ainsi que dans toutes les autres déclarations
19 que vous avez faites, après avoir été interrogé par l'enquêteur du bureau
20 du Procureur, vous avez indiqué que la déclaration vous avait été
21 interprétée en langue albanaise et qu'elle était exacte, qu'elle reflétait
22 votre meilleur souvenir ou connaissance des événements qui s'étaient
23 produits. Est-ce bien ce que vous avez dit ?
24 R. Oui.
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais donc demander que l'on montre au
26 témoin sa déclaration du 3 octobre 2004. Il s'agit du
27 65 ter numéro 1D6, page 1D0052, en langue albanaise page 1D0067.
28 Q. Est-ce que cette déclaration que vous avez faite le
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1 3 octobre 2004 porte bien votre signature ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-il exact, Monsieur Jusufi, qu'à chaque fois, à la demande de
4 l'enquêteur, vous avez paraphé chaque page de la déclaration faite par vous
5 ?
6 R. Oui. Au Tribunal, oui.
7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais demander que l'on montre au
8 témoin l'addendum à la déclaration du 9 février 2003. Document 65 ter 1D7,
9 page 1D0091, page en langue albanaise 1D0095.
10 Q. Monsieur Jusufi, cette déclaration que vous avez faite le 11 août 2006
11 porte-t-elle aussi votre signature personnelle ?
12 R. Oui.
13 Q. Aujourd'hui, suite à la question de mon éminent collègue, vous avez
14 confirmé que vous avez aussi signé la déclaration consolidée signée le 22
15 avril 2007; il s'agit du document P81 et l'addendum à cette déclaration,
16 P82. Il s'agit là de toutes les déclarations faites par vous depuis 2001
17 aux enquêteurs du TPIY; est-ce bien le cas ?
18 R. Oui.
19 Q. A chaque fois, Monsieur Jusufi, vous avez stipulé que tout ce qui
20 figurait dans votre déclaration était véridique au mieux de votre
21 connaissance; est-ce exact ?
22 R. Oui, c'est exact. C'est exact.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin 65
24 ter numéro 1D5 page 1D0028, page en langue albanaise, 1D0039.
25 Q. Dans la déclaration du 9 février 2003, Monsieur Jusufi, vous avez,
26 comme on peut le constater, que le samedi - donc on est au 1er paragraphe -
27 que vous avez vu cinq voitures blindées, APC, et cinq camions bâchés et
28 vous avez indiqué que vous étiez dans votre cour et que vous avez vu ces
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1 véhicules se rendre vers la cour de l'église orthodoxe. Avez-vous bien dit
2 cela ?
3 R. Non. Je n'ai pas mentionné de nombres. J'ai simplement indiqué que j'ai
4 vu des -- des, ça peut être deux ou trois, mais je n'ai pas spécifié de
5 nombres. Ça ce n'est pas exact.
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je souhaiterais que l'on présente au
7 témoin la pièce 1D10 de la liste 65 ter, à la
8 page 1D0120, qui est un addendum. Et, je fais une correction, vous avez
9 donné au bureau du Procureur le 22 avril, a reçu, en fait, la cote P82
10 aujourd'hui. Correction.
11 Q. Au paragraphe 6, vous avez dit que le samedi, à 2 heures de l'après-
12 midi, je cite:
13 "J'ai vu un APC, un véhicule blindé et un camion bâché."
14 Maintenant, Monsieur Jusufi, vous avez dit que vous aviez vu des ou
15 plusieurs, que vous n'aviez jamais cité de chiffres. Dites-moi, Monsieur
16 Jusufi, est-ce que tout est exact dans cette déclaration, dans toutes les
17 déclarations sur ce que vous avez vu ? Tout ceci est complètement
18 différent.
19 R. Non, seulement le nombre, le chiffre. Ce qui me pose problème
20 c'est le nombre, le chiffre. En fait, si j'en ai vu, j'ai vu quelques-uns,
21 parce qu'il était 8 heures, 8 heures 30, il faisait encore jour, on peut
22 encore voir. J'étais dans la cour à ce moment-là près du portail et le
23 portail de l'église était ouvert. J'ai vu un convoi de la police ou des
24 soldats. Ils étaient mélangés. Il y avait des deux.
25 Q. Mais ceci sont les faits dans les déclarations que vous avez faites et
26 que vous avez signées, et tous les faits sont complètement différents. Vous
27 êtes d'accord avec moi sur ce point, n'est-ce pas ?
28 R. Non. Non. Ils ne sont pas différents. Je ne change rien ici. J'ai
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1 dit que je les ai vus, et c'est comme cela que ça s'est passé. Il n'y a
2 rien que je modifie ici.
3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais demander maintenant que l'on vous
4 présente le document 1D5 de la liste 65 ter, page 1D0028, paragraphe 4, et
5 de la version albanaise la page 1D0039, paragraphe 4.
6 Q. Dans cette déclaration qui est du 9 février 2003, vous avez dit que
7 vous n'aviez pas bien dormi cette nuit-là, que vous vous étiez réveillé
8 vers 6 heures du matin. Vous avez dit aussi que votre femme vous avez aidé
9 pour vous asseoir dans votre fauteuil roulant. Vous avez entendu un bruit
10 de camion, vous avez dit à votre femme et à votre fils de rester dans la
11 maison et vous êtes sorti pour voir ce qui se passait, et vous êtes resté
12 là jusqu'à 7 heures 30.
13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on montre au
14 témoin la pièce numéro 1D10 de la liste 65 ter à la page 1D0120 au
15 paragraphes 11 et 12. Là encore, il s'agit du numéro P8.2.
16 Q. Dans la correction de la déclaration que vous avez faite le 22 avril
17 2007, concernant ce fait, vous avez dit que vous vous étiez réveillé entre
18 5 heures et 6 heures du matin et que vous avez seulement dit à votre femme
19 de rester dans la maison et que vous alliez voir ce qui se passait. N'est-
20 il pas vrai que ces deux déclarations divergent, concernant le moment où
21 vous vous êtes réveillé et afin de savoir à qui vous avez dit de rester
22 dans la maison ?
23 R. Ce que vous me présentez là et ce que vous me dites en ce qui concerne
24 l'heure quant à savoir si c'était 6 heures ou 5 heures du matin, je ne peux
25 vous le confirmer et vous dire si c'était
26 six heures moins le quart ou cinq heures et demie ou si c'était vers cette
27 heure-là parce que d'habitude je me réveille à 4 heures. Je ne peux pas
28 bien dormir.
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1 Q. Donc ce jour-là, ce jour précis dont vous parlez, vous dites "vous
2 n'avez pas dormi toute la nuit," c'était le 11 du huitième mois. Au moins,
3 c'est la façon dont - enfin, veuillez, s'il vous plaît, m'expliquer.
4 R. Bien. Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous
5 plaît ?
6 Q. Je voudrais dire, je veux dire que vous avez fait des déclarations
7 différentes le 9 février 2003, et le 22 avril 2007, et ceci pas seulement
8 en ce qui concerne l'heure, mais également la question de savoir à qui vous
9 avez dû rester la maison. Dans la première déclaration, vous dites que vous
10 avez dit cela à votre épouse et à votre fils, et dans la deuxième
11 déclaration vous avez dit que vous ne l'avez dit qu'à votre femme. Est-ce
12 qu'il n'y a pas de différence entre ces deux déclarations ? C'est cela que
13 je vous demande, si c'est différent ?
14 R. Non, non.
15 Q. Dites-moi, Monsieur Jusufi, une fois que vous êtes trouvé dans la cour,
16 indépendamment de savoir si c'était à 5 heures ou à 6 heures, vous êtes
17 resté dans la cour jusqu'à 7 heures 30, n'est-ce pas ?
18 R. C'est vrai. C'est exact.
19 Q. Et vous étiez seul dans la cour, n'est-ce pas ?
20 R. Moi et ma femme, nous sommes réveillés et sommes sortis. A savoir si
21 c'était 5 heures et demie ou 6 heures du matin, je ne sais pas. Le fait est
22 que nous sommes sortis. Elle m'a aidé un petit peu. Puis, elle est allée
23 s'occuper de ce qu'elle avait à faire, ses tâches habituelles, et je suis
24 resté près du portail principal. Pendant que je me trouvais là, près du
25 portail principal, j'ai vu qu'il y avait quelque chose qui se passait.
26 J'ai quelque chose de plus à dire. Je me suis rendu compte alors
27 qu'il y avait quelque chose qui se passait. Il y avait du bruit. Je parle
28 et je comprends très bien macédonien. Je pouvais entendre les
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1 conversations. Certains allaient dans la direction de l'église, d'autres
2 allaient dans la direction de l'intersection. Là, j'ai entendu un nom --
3 Q. Bien, Monsieur Jusufi, je sais que vous avez dit tout cela dans
4 les déclarations que vous avez faites au bureau du Procureur. Je voudrais
5 brièvement répondre. Je voudrais que vous répondiez brièvement au fait que
6 je suis en train de vous présenter. Normalement, si vous avez quelque chose
7 à ajouter, la Chambre vous autorisera à donner des explications
8 supplémentaires ou complémentaires.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Residovic, avant de le
10 faire, je vous prie de m'excuser, mais je pense que nous devrions suspendre
11 la séance maintenant pour permettre au témoin de pouvoir prendre un peu de
12 repos à nouveau, et à cause de l'heure, nous reprendrons à 6 heures 10.
13 La séance est suspendue.
14 --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.
15 --- L'audience est reprise à 18 heures 14.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Residovic.
17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Monsieur Jusufi, avant la suspension de la séance, si vous vous en
19 souvenez bien, vous avez dit que dans la matinée, votre femme vous avait
20 amené dans la cour, qu'elle était retournée à l'intérieur, et que vous
21 étiez resté dans la cour tout seul jusqu'au moment où vous avez entendu des
22 bruits, et que vers 7 heures et demi, vous êtes rentré dans la maison. J'ai
23 interprété ce que vous avez dit, mais je crois que je l'ai fait
24 correctement. Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit ?
25 R. Ce que vous dites maintenant, et bien ma femme m'a amené dehors, elle
26 est rentrée, et je pouvais entendre leurs conversations, parce que je
27 comprends le macédonien assez bien, et d'après ce que je pouvais entendre,
28 ils étaient nombreux. Nombre d'entre eux passaient par là. Ils allaient
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1 dans la direction de l'église, peut-être dans la direction de la maison de
2 Brace aussi, mais j'ai entendu beaucoup de choses se dire.
3 Q. Bien, je vous remercie. Dites-moi simplement ceci, c'est ça que je
4 voudrais savoir. Donc votre femme n'était pas avec vous pendant toute la
5 période que vous avez passé dans la cour; c'est exact ?
6 R. Non. Non, elle était tout près. Elle faisait ses tâches habituelles.
7 Elle travaillait dans le jardin. Elle préparait le pain. Elle avait mis le
8 pain au four pour la maison.
9 Q. Bien, je vous remercie.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais vous demander maintenant de
11 montrer au témoin la pièce numéro 1D5 65 ter, à la page 1D0028, paragraphe
12 5. Et pour l'albanais, il s'agit de la page 1D039, paragraphe 5.
13 Q. Monsieur Jusufi, dans la déclaration faite le 2 février 2003, vous avez
14 dit que vous étiez rentré dans la maison vers 8 heures, quand vous aviez vu
15 votre fils qui s'était réveillé, et qui portait encore son pyjama. Je
16 voudrais maintenant demander qu'on montre au témoin la pièce 1D8 de la
17 liste 65 ter, à la page 1D0101, et pour la page en macédonien, 1D0102.
18 Q. L'enquêteur du Tribunal, Arunkumar Balakrishnan, vous a interviewé le 2
19 octobre 2005, et alors vous lui avez dit que votre fils, qui était en
20 pyjama et dormait lorsque la police est arrivée, vous lui avez dit que Rami
21 était allé à la porte juste à cause des coups de feu qu'il entendait. Vous
22 avez aussi dit qu'après que votre fils ait été mort et a été emmené pour
23 être enterré, vous n'avez jamais changé ses vêtements, qui étaient
24 complètement maculés de sang.
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais maintenant demander que l'on
26 montre au témoin la pièce numéro 1D10 de la liste 65 ter, à la page 1D0121,
27 paragraphe 17, qui a été versée au dossier aujourd'hui en tant que pièce à
28 conviction P8.2, présentée par le bureau du Procureur.
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1 Q. Monsieur Jusufi, il s'agit là des corrections que vous avez apportées
2 le mois dernier, le 22 avril 2007, et alors vous avez dit, en parlant des
3 vêtements que portait votre fils, vous avez dit ceci, je cite :
4 "Lorsque je suis arrivé dans la maison et j'ai entendu le bruit, j'ai
5 pensé que la porte avait explosé. Alors mon fils s'était réveillé à cause
6 du bruit. Il portait un pyjama. Il s'est rapidement changé et s'est mis en
7 jeans."
8 Etes-vous d'accord avec moi, Monsieur Jusufi, pour dire que ces
9 déclarations diffèrent l'une de l'autre ?
10 R. Non. Ce que vous dites, à savoir qu'il est descendu ou venu, ce n'est
11 pas exact. Il n'était pas à l'étage. Il était dans la pièce du rez-de-
12 chaussée. Cette phrase-là est différente. Il n'est pas descendu. Il était
13 dans la pièce du rez-de-chaussée. Il dormait dans cette pièce. Il portait
14 son pyjama pendant qu'il dormait, et vous avez dit qu'il était descendu.
15 Q. Monsieur Jusufi, vous avez dit, n'est-ce pas, que votre fils avait été
16 réveillé par l'explosion. Si je vous dis que votre femme a déclaré à la
17 page du compte rendu numéro 423 lignes 22 à 24, qu'elle avait
18 personnellement réveillé votre fils, est-ce que ceci encore une fois n'est
19 pas différent de ce que vous êtes en train de dire maintenant ?
20 R. Non, cela n'y a pas de différence. Nous étions là, tous les deux, ma
21 femme et moi, mais la phrase que vous lisez est différente. Ma femme et
22 moi-même étions dans le couloir lorsque la porte a explosé. Ma femme a dit
23 à mon fils : "Réveille-toi, fils, parce qu'on a fait sauter la porte." Tant
24 ma femme que moi-même avons entendu l'explosion. Ceci est la vérité.
25 Q. Bien. Dans vos déclarations au bureau du Procureur du Tribunal, vous
26 avez aussi parlé de personnes qui se trouvaient dans votre maison à ce
27 moment-là.
28 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais demander qu'on montre au
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1 témoin le numéro 11 de la liste 65 ter --
2 L'INTERPRÈTE : Il s'agit de 1D5.
3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] -- à la page 123, et pour l'albanais à la
4 page 1D0039, paragraphe 3.
5 Q. Dans cette déclaration que nous avons citée plusieurs fois, déclaration
6 faite le 9 février 2003, au paragraphe 3, vous avez déclaré :
7 "Moi-même, ma femme et mon fils aîné, Rami, étions restés à la
8 maison. Puis, deux de nos parents sont venus, Muzafer et Imret Jusufi, pour
9 prendre le petit déjeuner avec nous."
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais maintenant demander qu'on
11 présente au témoin la pièce numéro 1D6 de la liste 65 ter, à la page
12 1D0055, paragraphe 15, et pour la version albanaise, la page 1D0070,
13 paragraphe 15.
14 Q. C'est votre déclaration du 3 octobre 2004. Alors, Monsieur Jusufi, vous
15 avez dit ceci, je cite :
16 "Muzafer et toute sa famille, et je pense tout le voisinage qui
17 n'était pas parti avant le dimanche matin se sont tout simplement mis à
18 courir lorsqu'ils ont vu la police."
19 Alors, au paragraphe 19, vous déclarez, je cite :
20 "Le jour de cet évènement, les personnes suivantes se trouvaient à
21 l'intérieur de la maison : Moi-même, ma femme Zenep, Muzafer, le fils de
22 mon oncle. La raison pour laquelle nous étions encore dans la maison était
23 que nous ne pouvions plus nous enfuir parce que j'étais dans mon fauteuil
24 roulant."
25 Mme RESIDOVIC : [interprétation] En ce qui concerne les mêmes faits, je
26 souhaiterais que l'on montre au témoin cette déclaration qui est le numéro
27 1D8 de la liste 65 ter, à la page 1D0101, et pour le macédonien la page
28 1D0102.
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1 Q. Le 12 octobre 2005, lors de l'interview avec l'enquêteur déjà mentionné
2 au bureau du Procureur du Tribunal, vous avez déclaré ceci, je cite :
3 "Pendant la nuit, personne n'était dans la maison."
4 Muzafer Jusufi est arrivé à votre maison pour prendre le petit
5 déjeuner et le café du matin vers 7 heures -- vers 7 heures 30. Vous avez
6 aussi dit que vous aviez fait une erreur dans votre déclaration précédente
7 et qu'Imret Jusufi n'était pas là à l'intérieur de votre maison le 12 août
8 2001 ?
9 R. C'est exact, seul Muzafer.
10 Q. Plus tard dans votre déclaration --
11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demande que l'on présente maintenant le
12 document 1D7 de la liste 65 ter, à la page 0092, et pour l'albanais à la
13 page 1D0096.
14 Q. C'est là un addendum à la déclaration que vous avez faite le 11 août
15 concernant les évènements en 2003. Vous avez dit que Muzafer Jusufi se
16 trouvait à l'intérieur de votre maison lorsque la police est arrivée. Puis,
17 vous avez déclaré :
18 "Ma femme, mon fils aîné Rami, moi-même, sommes restés dans la
19 maison. Le dimanche matin, deux de mes parents sont venus, pas ensemble
20 mais séparément. Imret Jusufi est venu à la maison vers 7 heures du matin.
21 Il m'a apporté des cigarettes et est reparti immédiatement. Muzafer Jusufi
22 est venu vers 7 heures 30, après que nous l'ayons invité à prendre le petit
23 déjeuner avec nous. Il se trouvait à l'intérieur de notre maison lorsque la
24 police est arrivée. Il s'est caché derrière la porte pendant toute la
25 période pendant laquelle la police se trouvait à l'intérieur de notre
26 maison."
27 Mme RESIDOVIC : [interprétation] En ce qui concerne ce même fait, je
28 demande que l'on présente le document numéro 1D10 de la liste 65 ter, à la
Page 527
1 page 1D0020, paragraphe 10. Il s'agit d'une pièce présentée par
2 l'Accusation portant la cote P8.2.
3 Q. Vous avez dit que Muzafer était arrivé dimanche du côté de 7 heures
4 pour prendre le petit déjeuner. Vous remarquerez, Monsieur Jusufi, que vos
5 déclarations concernant la présence de certaines personnes à l'intérieur de
6 votre maison là encore sont différentes, n'est-ce pas ?
7 R. Ce n'est pas différent. Seul Muzafer a été dans la maison. Je ne vois
8 pas de différence. Il doit y avoir une erreur. Tous deux portent comme nom
9 Jusufi, comme nom de famille. Mais seul Muzafer était dans la maison. Je
10 n'ai aucune raison de mentir là. Même s'il y avait deux ou trois personnes
11 là, je dirais qu'il y avait deux ou trois personnes. Mais la vérité, c'est
12 que seul Muzafer était dans maison, et je l'avais invité pour prendre le
13 petit déjeuner avec nous. Je lui ai dit : "Viens, Muzafer, prendre le café
14 avec nous." C'est un homme âgé. Ceci est une erreur, mais je ne vois pas
15 cela comme étant une grosse erreur.
16 Q. Très bien, Monsieur Jusufi. Je vais maintenant vous poser plusieurs
17 questions concernant la mort de votre fils.
18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais que le
19 document 65 ter 1D5 soit présenté au témoin, page 1D028,
20 paragraphes 6 et 7. En albanais, page 1D039 jusqu'à 1D0040.
21 Q. Dans la déclaration que vous avez faite le 9 février 2003, vous avez
22 dit que votre fils a tenté de fermer la porte, mais que tous les policiers
23 ont tiré sur lui. Vous avez déclaré que votre fils avait été touché à
24 l'estomac, dans le ventre et qu'il saignait abondamment, et que vous avez
25 vu deux blessures par balles sur son corps, que vous étiez à côté de lui
26 quand cela s'est passé.
27 Vous avez également déclaré qu'un autre policier avait poussé l'autre côté
28 de la porte d'entrée et qu'il avait fait presque tomber la porte sur vous.
Page 528
1 Le policier a dit alors qu'il n'y avait que deux personnes dans la maison,
2 une fois qu'il m'a vu dans mon fauteuil roulant et mon fils qui était
3 allongé par terre et qui saignait abondamment.
4 "Ils n'ont pas vu ma femme et les membres de ma famille. Je leur
5 avais dit plus tôt de se cacher."
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demanderais donc que l'on présente au
7 témoin le document 65 ter numéro 1D6 concernant ces faits, page 1D0057,
8 paragraphe --
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux parler à présent ?
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] -- paragraphes 33 à 35.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux parler à présent ?
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce qui se passe, en fait, c'est que
13 Mme Residovic vous cite des déclarations et vous demande de dire si elles
14 sont différentes l'une de l'autre. Vous tentez de dire à chaque fois "la
15 vérité c'est ceci," et que vous n'avez aucune raison de mentir ou
16 simplement que vous avez fait une erreur concernant certaines questions.
17 Donc ce qui se passe, si vous souhaitez faire des commentaires sur
18 une question particulière qui vous est citée, vous avez la possibilité de
19 le faire, veuillez bien le comprendre. Mais il faut que vous compreniez que
20 ce qui vous est cité ce sont des déclarations précédentes que vous avez
21 faites à diverses personnes. J'espère que vous comprenez ce qui se passe en
22 ce moment.
23 Donc si vous souhaitez intervenir, vous pouvez le faire.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je ? Je voulais simplement dire, signaler
25 que les faits concernant du moment du pyjama à la porte. Il dormait. A ce
26 moment-là, sa mère lui a dit : "Fils, réveille-toi. La porte a explosé."
27 C'était une explosion très forte, comme s'ils avaient lancé une bombe sur
28 la porte. Ils sont allés à la porte, à la porte d'entrée. Il était en
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1 pyjama, mais il s'est changé en cinq secondes pour des vêtements
2 ordinaires. Cela c'était très rapide. Il est allé à la porte d'entrée, la
3 porte d'entrée qui était ouverte. Ils étaient là, ils étaient en train de
4 tirer en l'air. Et dès qu'ils l'ont vu - parce que la porte était grande
5 ouverte et qu'il tentait de la fermer, ils ont immédiatement tiré sur lui
6 et il est immédiatement tombé à terre.
7 C'est le fait. J'étais là, moi-même, dans le fauteuil roulant, dans
8 lequel je suis assis ici aujourd'hui. Je suis très calme à présent alors
9 que je suis en train de vous parler de ceci.
10 En ce qui concerne d'autres rumeurs disant que cela s'est passé comme-ci ou
11 comme cela, je n'en sais rien. Je vous dis ce qui s'est passé. C'est entre
12 vos mains, c'est à vous de décider concernant cette question. Je ne suis
13 ici que pour vous dire ce qui est la vérité.
14 Alors, de savoir s'il était à la porte ou s'il était plus loin à
15 l'intérieur, s'il s'agit de trop de détails, ce qui est clair et qui est un
16 fait, c'est qu'il a été tué à la porte d'entrée quand les policiers sont
17 venus, sont arrivés à la porte et la porte était ouverte comme cela. Le
18 policier l'a ouverte à coups de pied et je l'ai vu de mes propres yeux, et
19 pendant un instant j'ai pensé que la porte allait tomber sur moi. La porte
20 a buté dans les pieds de mon fils qui était tombé sur le ventre. J'étais
21 juste en face du policier et le policier m'a dit, il a dit en macédonien
22 pour que nous le comprenions : "Il n'y a que deux personnes," et ont tourné
23 le dos, ils ne m'ont pas tué.
24 En ce qui concerne d'autres choses sur lesquelles vous me posez des
25 questions, des choses que vous me soumettez, vous savez mieux que moi quoi
26 penser de ces choses-là. Vous êtes les Juges des Nations Unies. La vérité
27 est celle-ci concernant la mort de mon fils.
28 Donc du moment des pyjamas jusqu'au moment où il a changé de
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1 vêtements, cela n'a pas duré plus de dix secondes. Quelques instants après,
2 il est allé à la porte d'entrée et c'est là qui l'ont tué. C'est la vérité.
3 Maintenant, de savoir où cela c'est passé comme ci ou comme ça, à nouveau,
4 c'est à vous de décider.
5 Je vous prie de bien vouloir m'excuser, parce que je suis souffrant.
6 Je pourrais continuer à parler avec Me Residovic pendant des heures et
7 pendant des jours entiers, mais ce qui est important ici c'est l'acte de
8 meurtre, et la raison pour laquelle il a été tué, il n'y avait aucune
9 raison pour qu'il soit tué. Je vous prie de bien vouloir m'excuser de
10 parler si longtemps à ce sujet.
11 Cette nuit-là, le samedi 11, lorsqu'il est revenu de Skopje, tout le monde
12 était paniqué, les femmes et les enfants en général paniquent. Donc j'ai
13 dit à ma belle-fille : "Amène les enfants dans la maison de ma fille, parce
14 que c'est un peu comme une vallée, donc il n'y a pas de risque."
15 Puis quelqu'un a proposé que nous partions tous. Mais il venait juste
16 de rentrer de Skopje, et il a également dit : "Que se passera-t-il s'ils
17 partent et qu'ils sont à nouveau renvoyés au point de contrôle ? Donc je
18 lui ai dit : "Amène les enfants, sept enfants, va là-bas à Reka et nous
19 resterons à la maison seuls avec ta mère."
20 Il m'a dit : "Je ne peux pas te laisser seul ici." Ça, c'est la vérité.
21 Rien ne peut changer cette vérité.
22 Vous êtes les Honorables Juges qui vont statuer à ce sujet. Voilà ce qui
23 doit être analysé.
24 Concernant d'autres choses, je ne sais pas quoi dire. Je vous prie de bien
25 vouloir m'excuser d'être si long et de prendre autant de temps, mais je
26 suis très calme, croyez-moi. Je ne suis pas nerveux du tout. Je suis tout
27 simplement souffrant et je voudrais simplement en avoir terminé avec ce
28 témoignage aussi rapidement que possible et pouvoir partir.
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1 S'il vous plaît, Madame Residovic, je suis seul à savoir à quel point
2 c'est difficile pour moi d'être assis ici parce que je suis dans cet étage
3 et j'ai cette maladie depuis des années, et cette maladie s'est aggravée de
4 100 % depuis 2001. Je m'occupe de quatre enfants avec seulement 100 euros
5 par mois. Je n'ai pas d'autres revenus. Donc, je vous prie, Madame
6 Residovic, et tous ici, ne me posez plus de questions supplémentaires. Vous
7 êtes ceux qui menez la procédure ici, et Monsieur le Président, je vous
8 remercie de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer à ce sujet.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Ce que vous venez de dire a été
10 bien entendu et bien compris par nous. Je vous prie de bien vouloir
11 comprendre que Me Residovic tente de voir pourquoi, si vous pouvez
12 expliquer comment se fait-il que vous sembleriez avoir fait des
13 déclarations différentes de ce que vous nous expliquez actuellement. Je
14 vous prie de bien vouloir la laisser poser les questions supplémentaires
15 concernant - elle essaie de vous rappeler certaines choses que vous avez
16 dites dans des déclarations précédentes, de façon à pouvoir l'aider à
17 comprendre, elle et nous, à comprendre pourquoi vous n'avez pas dit tout --
18 vous n'êtes pas toujours d'accord avec ce que vous avez dit concernant
19 certaines questions.
20 Donc, Maître Residovic, je vous prie de bien vouloir continuer et de ne pas
21 perdre de temps.
22 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup. Concernant la décision de
23 ce matin, il va falloir que je mette en exergue des différences
24 supplémentaires concernant la déclaration de M. Jusufi. Et je puis vous
25 assurer, Monsieur Jusufi, que je comprends que ce n'est pas facile pour
26 vous. Il faut que vous compreniez que le Tribunal, la Chambre, ne peut pas
27 en arriver à une décision juste si je ne peux pas vous poser l'ensemble des
28 questions qu'il me faut vous poser.
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1 Q. Monsieur Jusufi --
2 R. Oui, vous pouvez me poser des questions.
3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Il y a quelques instants - je vous prie de
4 bien vouloir m'excuser. Il faut que je vérifie.
5 Je vous ai montré le document 1D5 de la liste 65 ter,
6 page 1D057, paragraphes 33 et 35; en albanais, page 1D0072, paragraphes 33
7 et 35.
8 Q. Dans votre déclaration du 3 octobre 2003 -- 2004, vous avez déclaré que
9 votre fils, après avoir été touché, il était tombé immédiatement, et en
10 tombant il avait fermé la porte. Juste après la porte avait été ouverte.
11 Vous avez déclaré que la personne qui était là-bas a regardé à l'intérieur,
12 et lorsqu'elle vous a vus, vous et votre femme, vous avez déclaré qu'ils
13 avaient dit qu'il n'y avait que deux personnes à l'intérieur.
14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je souhaiterais à présent que le document
15 1D7 de la liste 65 ter, page 190012 soit montré; en albanais, page 9 --
16 1D0096.
17 Q. Il s'agit des déclarations que vous avez faites le
18 11 août 2006, lorsque vous avez fait remarquer à nouveau que le policier
19 n'avait pas vu votre femme et les membres de votre famille. Etes-vous
20 d'accord avec moi pour dire que l'ensemble de ces déclarations que je vous
21 ai montrées sont différentes les unes des autres, en particulier concernant
22 le moment où vous avez vu le policier où vous étiez et avec qui la police
23 vous a vus ? Etes-vous d'accord pour dire qu'elles sont toutes différentes
24 les unes des autres ?
25 R. Je ne vois pas ce que vous êtes en train de me dire. Le policier n'a
26 pas -- si le policier m'a vu, moi ou ma femme, il n'a pas vu ma femme. Il
27 n'a vu moi uniquement. Il n'a vu que moi-même, et non pas ma femme. Donc
28 lorsqu'il a ouvert la porte à coups de pied, la porte était ouverte, et je
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1 me suis retrouvé face à lui. C'est à ce moment-là qu'il a donné un coup de
2 pied dans la porte, et lorsqu'elle s'est ouverte, il a dit : "Il n'y que
3 deux personnes ici."
4 Q. Merci. J'aimerais --
5 R. Ma femme était à l'intérieur. Elle était dans la pièce.
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais que l'on
7 présente au témoin 65 ter 608, page 7. Si cette photo ne s'affiche pas sur
8 écran, j'aimerais que ce soit l'huissier qui le place sur le
9 rétroprojecteur, qui place ce document sur le rétroprojecteur.
10 Voilà. La photo vient d'être affichée.
11 Q. Mon éminent collègue, le Procureur, au cours de l'interrogatoire vous a
12 demandé de reconnaître ou d'identifier certaines photos. Pouvez-vous me
13 dire si vous reconnaissez votre fils décédé sur cette figure, Rami ?
14 R. Oui. Oui. Rami Jusufi.
15 Q. Pouvez-vous confirmer que cette photo a été prise dans la maison de
16 votre fille, à Durmishi mehalla ?
17 R. Oui.
18 Q. Ceci s'est produit le 13 août ?
19 R. Oui.
20 Q. Avant que votre fils soit enterré dans la cour de votre fille ?
21 R. Non, ce n'est pas dans la cour. Dans le jardin.
22 Q. D'accord, dans le jardin. Si je me souviens bien, vous avez aussi dit
23 que ces photos ont été prises par le prêtre local, le "hoxha."
24 R. Oui, oui.
25 Q. Et ces photos ont été remises au Procureur par vous après que vous les
26 ayez obtenues de votre voisin, Sulejman, que l'on appelle Suljo; est-ce
27 exact ?
28 R. Suljo ?
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1 Q. Sulejman.
2 R. Je ne me souviens plus qui les a apportées.
3 Q. Ce n'est pas important. Monsieur Jusufi, l'enquêteur du bureau du
4 Procureur vous a montré ces photos lorsqu'il était à Ljuboten le mois passé
5 et lorsque vous avez procédé aux corrections et ajouts à vos déclarations
6 antérieures; est-ce exact ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. Cette photo a été prise après le décès de votre fils; est-ce exact ?
9 R. Oui, c'est exact.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on présente au
11 témoin, 65 ter 1D4, page 1D0021.
12 Q. Ces photos ont également été présentées à votre épouse, et votre épouse
13 - en tenant compte du fait que l'on parle d'une photo qui était dans la
14 liste 65 ter du Procureur sous la cote 609, numéro 0501-6265 - votre épouse
15 a dit, comme on le trouve indiqué dans cette phrase particulière, après que
16 cette photo ait été montré à votre épouse, elle a indiqué reconnaître son
17 fils sur la photo et elle a reconnu --
18 L'INTERPRÈTE : [inaudible]
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
20 Q. Dans la description de la photo que vous pouvez voir dans la deuxième
21 colonne, il est indiqué que celle-ci est prise avant le décès de Rami
22 Jusufi.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais à présent que le document 1D4
24 soit affiché, page 1D0124.
25 Q. Comme vous l'avez déjà dit, Monsieur Jusufi, on vous a aussi montré ces
26 photos le mois passé ?
27 R. Oui.
28 Mme RESIDOVIC : [interprétation] 1D0124, 1D4, 1D-0124. Excusez-moi, nous
Page 535
1 avons un problème.
2 Bien. Ne passons pas trop de temps là-dessus. Nous demanderons à
3 l'Huissier de bien vouloir présenter ce document afin qu'il s'affiche sur
4 le rétroprojecteur.
5 Excusez-moi. Il semble que ce soit le document 1D10. 1D0021. Q. Nous avons
6 maintenant le document requis affiché à l'écran, et sous la cote 608, nous
7 pouvons constater que les photos vous ont été montrées et que vous avez
8 alors dit que vous voyiez ces blessures, et vous avez aussi indiqué qu'il a
9 été disposé dans cette position par votre mère et un autre membre de la
10 famille afin d'arrêter l'épanchement de sang.
11 Avez-vous dit cela ?
12 L'INTERPRÈTE : "Par la mère," pas "par votre mère."
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Sa mère et Muzafer, qui l'a aidée, mais
14 c'était essentiellement sa mère. Je n'ai même pas vu cela. Je ne pouvais
15 pas voir cela.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
17 Q. Mais au moment où cette photo a été prise, vous dites qu'il était déjà
18 mort, or ces deux déclarations ne concordent pas; est-ce exact ?
19 R. Qu'entendez-vous par "elles ne concordent pas" ? Pouvez-vous répéter ou
20 préciser la différence, s'il vous plaît.
21 Q. Votre épouse a déclaré que cette photo a été prise alors que votre fils
22 était encore en vie. Comme on peut le lire dans les notes du Procureur,
23 vous avez indiqué que la photo montre la position dans laquelle votre fils
24 avait été placé par votre épouse et le membre de votre famille afin
25 d'arrêter l'hémorragie. Aujourd'hui, vous nous avez dit que cette photo a
26 été prise le 13, dans la maison de votre fille alors qu'il était déjà mort.
27 R. Il n'a pas été photographié le 11, mais le 13. Le 12, très tard dans la
28 nuit, nous avons transporté le corps à la maison de ma fille. Le lendemain,
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1 le "hoxha," le prêtre musulman, a pris la photo. La photo n'a pas été prise
2 chez nous. Peut-être est-ce qu'elle ne savait pas cela. Elle n'était pas
3 dans son état normal quand tout cela s'est produit. Je ne sais pas ce
4 qu'elle a dit, mais je sais cela très bien.
5 Q. Très bien. Merci.
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin le
7 document 65 ter 1D5, page 1D0028, paragraphe 5; en version albanaise, page
8 1D0039, paragraphe 5. Dans ces déclarations du 9 février 2003, Monsieur
9 Jusufi, vous avez déclaré que vous avez, parmi les policiers, reconnu Dusan
10 Kruskarov de Ljuboten; est-ce exact ?
11 R. Oui, c'est exact, j'ai reconnu sa voix.
12 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que le document 65
13 ter 1D18 soit affiché. Pages 1D0262 et 0263.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Residovic, nous devrons aborder
15 cette question demain.
16 Il est à présent 19 heures et par rapport au témoin et aux accusés
17 qui doivent regagner le centre de Détention, nous devons nous arrêter
18 maintenant.
19 Et nous devons vous demander, Monsieur, si vous êtes prêt à revenir
20 pour que l'on puisse conclure cette déposition. Demain, nous allons donc
21 reprendre à 14 heures 15.
22 Je crois que vous avez pu constater que la majeure partie des
23 questions, des preuves, a déjà été vue et cela ne devrait pas durer trop
24 longtemps. Nous reprendrons donc demain à 14 heures 15.
25 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mercredi 9 mai
26 2007, à 14 heures 15.
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