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Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi 31 août 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour à tous. J'ai du plaisir à vous

7 voir à une certaine distance.

8 Puis-je vous rappeler, Monsieur, du serment que vous avez fait au début de

9 votre déposition s'applique toujours ?

10 C'est à vous, Monsieur Saxon.

11 M. SAXON : [interprétation] Je prends ça pour un compliment, Monsieur le

12 Président.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est censé -- c'était l'ambiance

14 calfeutrée et agréable de notre prétoire habituel.

15 LE TÉMOIN: BLAGOJA TOSKOVSKI [Reprise]

16 [Le témoin répond par l'interprète]

17 Nouvel interrogatoire par M. Saxon : [Suite]

18 Q. [interprétation] Monsieur Toskovski, je vais maintenant aborder avec

19 vous plus de détails de la blessure que vous avez eue à Atulla Qaili

20 lorsque vous avez été interrogé la nuit du 12 au 13. Cependant, je souhaite

21 voir avec vous un autre aspect qui a été en ce qui concerne M. Qaili, et

22 question qui a été posée par Me Residovic, hier.

23 A la page 4 376 du compte rendu, Me Residovic vous a indiqué que, d'après

24 un témoin, deux officiers de police sont venus chez vous, et c'est le frère

25 de M. Atulla Qaili -- sont venus au domicile du frère de M. Atulla Qaili,

26 et Me Residovic vous a demandé : "Est-ce que ceci semblait indiquer que

27 c'était sans doute parce que vos collègues d'autres services voulaient en

28 savoir un peu plus sur la mort de Atulla Qaili ?"

Page 4415

1 Et vous avez répondu en disant : "Oui, oui, c'est exact. Et d'autres

2 collègues et nous du service opérationnel du Poste de police de Cair, nous

3 avons à plusieurs reprises essayé de recueillir des éléments d'information,

4 non seulement sur Atulla mais également au sujet d'autres personnes, mais

5 la coopération n'était pas possible parce que le village, les routes menant

6 au village étaient bloquées. Nous n'avions pas l'occasion d'échanger des

7 informations."

8 Vous souvenez-vous avoir eu cet échange avec ma consoeur, Me

9 Residovic, hier ?

10 R. Oui.

11 Q. J'aimerais mieux comprendre quelque chose, Monsieur Toskovski, peut-

12 être que vous pourrez nous aider. Comment la police aurait-elle pu

13 retrouver Atulla Qaili et l'adresse de son frère ?

14 R. Je ne comprends pas votre question; pourriez-vous la préciser, s'il

15 vous plaît ?

16 Q. Bien. Hier, Me Residovic vous a dit que les officiers de police se sont

17 rendus au domicile du frère de Atulla Qaili, pour lui poser des questions.

18 Donc, je vous demande : comment la police aurait-elle pu découvrir

19 l'adresse du frère ? Comment est-ce qu'elle aurait pu retrouver -- comment

20 la police aurait-elle pu retrouver son adresse ? Comment la police savait-

21 elle qu'il avait un frère ? D'où venait cette information ?

22 R. Je ne sais rien au sujet de ce cas précis, mais d'après certaines

23 sources, de tels éléments d'information peuvent être obtenus. Mais dans le

24 cas qui nous intéresse, je ne sais pas où la police a obtenu ces

25 renseignements.

26 Q. Qu'est-ce que vous entendez par source, s'il vous plaît ? Plus

27 précisément, quel genre de sources ?

28 R. Il s'agit surtout des archives officielles -- des fichiers officiels.

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1 Ensuite, nos amis qui se trouvent dans le village ou dans la ville, et des

2 sources analogues.

3 Q. Lorsque vous parlez de fait des fichiers, des dossiers officiels que

4 nous comprenons bien, est-ce que vous pourriez être plus précis ? De quoi,

5 voulez-vous parler ? De quels dossiers ou fichiers officiels s'agit-il ?

6 R. Il y a une base de données sur toutes les cartes d'identité. Ce sont

7 des éléments d'information sur toute personne ayant atteint de la majorité

8 et qui disposent d'une carte d'identité.

9 Q. Donc, lorsqu'il y a une enquête policière, à ce moment-là, ils se

10 tournent vers ces bases de données; c'est cela ?

11 R. Oui.

12 Q. Pourriez-vous nous dire, Monsieur Toskovski, lequel de vos collègues

13 s'est rendu à la maison du frère de Atulla Qaili ?

14 R. Je ne sais pas quels collègues s'y sont rendus.

15 Q. Savez-vous pourquoi vos collègues se sont rendus au domicile du frère

16 de Atulla Qaili ?

17 R. Les raisons réelles je ne les connais pas, mais je suppose que c'est à

18 propos de ce que nous avons évoqué un peu plus tôt, à savoir pour avoir

19 d'autres éléments d'information sur cette affaire.

20 Q. Savez-vous ce qui a été dit lors de cette visite, ce qui a été échangé

21 entre vos collègues et le frère de Atulla Qaili ?

22 R. Je n'ai pas vu de rapport, donc, je ne sais pas.

23 Q. Vous avez parlé de a question dont la police, à de maintes reprises, a

24 essayé de recueillir des éléments d'information sur Atulla Qaili, à cette

25 époque-là; est-ce que la police a vérifié le dossier médical de Atulla

26 Qaili à l'hôpital de Skopje, l'hôpital municipal, ou est-ce qu'ils se sont

27 entretenus avec les médecins qui ont traité M. Qaili ?

28 R. Cela, je ne le sais pas.

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1 Q. Si cela avait été le cas, est-ce que vous auriez intégré ces éléments à

2 votre rapport ?

3 R. Je suppose que cela se serait passé ainsi.

4 Q. savez-vous si la police a examiné les rapports d'autopsie de Atulla

5 Qaili ? Je ne peux pas être très précis à cet égard, mais l'autopsie a été

6 faite soit le 13 ou le 14 août.

7 R. La police ne regarde ces conclusions. Les conclusions -- les rapports

8 d'autopsie sont remis au procureur de la République et aux Juges

9 d'instruction.

10 Q. Est-ce que la police pouvait s'entretenir avec les médecins qui

11 travaillaient pour l'institut médico-légal à Skopje, qui ont procédé à

12 cette autopsie ?

13 R. Je ne sais pas. Mais je suppose que le service de la Police judiciaire

14 s'est entretenu avec lui, certainement.

15 Q. Si cela avait été fait, où se trouverait consigner le procès verbal de

16 cet échange ?

17 R. Dans le service chargé des Analyses.

18 Q. Très bien. Je vais revenir à ce service-là dans quelques instants.

19 Hier, à la page 4 368, vous avez expliqué à ma consoeur que, lorsque vous

20 avez remis le casier judiciaire de dix personnes qui avaient été arrêtées

21 et détenues au poste de police de Mirkovci, vous attendiez encore les

22 résultats du test à la paraffine. Vous souvenez-vous de cela ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous souvenez-vous des résultats de ces tests qui utilisent des gants

25 de paraffine qui avaient été pratiqués sur ces dix personnes détenues à

26 Mirkovci ?

27 R. Je crois que le test était positif.

28 M. SAXON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons montrer au témoin, s'il

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1 vous plaît, la pièce P46, page 45, s'il vous plaît.

2 Q. Il s'agit là d'un document qui est daté du 14 août 2001. Il a été

3 envoyé au SOI, de Skopje, OKT ? Monsieur Toskovski, pourriez-vous nous

4 dire, s'il vous plaît, ce que représente ce sigle, SOI, Skopje, OKT, ces

5 abréviations ?

6 R. SVR, section chargée -- service de la Police scientifique.

7 Q. Ici, l'objet de ce document est l'analyse des restes d'armes à feu liée

8 à une action qui est datée du 12 août 2001. Ce document a été écrit par un

9 expert, Silvija, qui était un officier supérieur, Miroslav Uslinkovski, et

10 qui indique que : "D'après votre lettre, qui indique que vous recherchez

11 des éléments d'information, à savoir, si vous pouviez, pour retrouver la

12 présence de résidus ou de traces de poudre sur les mains de différentes

13 personnes," nous constatons que les noms de dix personnes sont citées, ces

14 personnes ont été détenues à Mirkovci. "Nous souhaitons vous informer par

15 la présente que c'est en raison de l'existence d'une contamination très

16 importante (de salissure de différentes natures) découverte sur les

17 éléments en question, que nous ne pouvons pas nous livrer à l'examen que

18 vous nous avez demandé. En réalité, nous ne pouvons pas appliquer les

19 méthodes appropriées afin de découvrir si, oui ou non, il y avait la

20 présence de particules de poudre sur les mains de l'accusé."

21 Pouvons-nous convenir, Monsieur Toskovski, qu'il n'a aucun résultat

22 d'examen confirmant la présence de nitrate sur les mains de dix personnes

23 qui avaient été détenues au poste de police de

24 Mirkovci ?

25 R. Je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point. J'ai reçu des éléments

26 d'information oralement qui indiquait que la plupart des tests étaient

27 positifs. Je ne sais pas si toutes ces personnes sont celles qui ont un

28 casier judiciaire.

Page 4419

1 Q. Ces personnes en fait qui figurent sur la liste des personnes que vous

2 avez interrogées au poste de police de Mirkovci dans la nuit du 12 au 13 et

3 qui ont un casier judiciaire, puisque c'est vous qui avez commencé à le

4 rédiger.

5 R. Je crois qu'il y a eu des enquêtes supplémentaires et je crois que le

6 test du gang à la paraffine était positif.

7 Q. Où seraient ces résultats positifs ?

8 R. Ils ont été remis au procureur de la république.

9 Q. Bien. A la page 4 386, hier vous avez expliqué à Me Residovic qu'entre

10 le 12 et 31 août lorsque vous avez présenté votre rapport sur les

11 événements de Ljuboten vous et vos collègues vous essayez sans cesse de

12 recueillir d'autres éléments d'information pour comprendre ce qui s'était

13 passé à Ljuboten.

14 La question que je souhaite vous poser est comme suit : vous souvenez-vous

15 si oui ou non vous avez examiné les registres quotidiens des postes de

16 police Cair et Mirkovci pour voir si ces registres pouvaient vous fournir

17 des éléments supplémentaires ?

18 R. Les registres quotidiens de Mirkovci, je l'ai examiné pour voir si ces

19 personnes avaient été enregistrées, si les détenus avaient été enregistrés

20 à Mirkovci.

21 Q. Vous avez donc examiné ces registres pour comprendre s'ils pouvaient

22 vous fournir une quelconque indication sur les membres de la police

23 macédonienne qui seraient trouvés à Ljuboten le 12 août ?

24 R. Je n'ai pas vu de tels éléments d'information.

25 Q. Vous souvenez-vous en avoir parlé à votre supérieur hiérarchique, Ljube

26 Krstevski, sur le fait d'avoir trouvé des informations sur les officiers de

27 police qui s'étaient trouvés à Ljuboten le 12 août ?

28 R. Je n'ai pas eu cette conversation-là avec lui.

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1 Q. Connaissez-vous quelqu'un qui s'appelle Dragan Jakimovski ?

2 R. Non, je ne connais pas cette personne-là.

3 Q. Hier, à la page 4 387, vous avez dit à Me Residovic que vous avez

4 examiné les éléments d'information qui sont arrivés au service analytique

5 du poste de police de Cair à propos des événements de Ljuboten.

6 J'aimerais comprendre quelque chose avec vous, Monsieur. Une fois que les

7 éléments arrivent au service des Analyses au poste de police de Cair, ce

8 service en question, où envoie-t-il les éléments qu'il a reçus ? De Cair où

9 sont envoyés ces renseignements ?

10 R. De tels renseignements sont envoyés au centre analytique de Serovac

11 [phon] -- Skopje -- du SVR de Skopje, de la ville.

12 Q. Et ces renseignements partiraient où ensuite ?

13 R. Au centre analytique du ministère de l'Intérieur, au niveau de l'Etat -

14 - le ministère d'Etat.

15 Q. Je vois. Et ce serait à Skopje ?

16 R. Vous voulez parler de la ville ?

17 Q. Oui.

18 R. Oui.

19 Q. Et s'il s'agit du ministère étatique, est-ce que ce secteur analytique

20 conserve les archives de toutes les informations qu'elle a reçues ?

21 R. Je ne comprends pas votre question.

22 Q. Lorsque le secteur analytique au niveau du ministère d'Etat reçoit

23 toutes ces informations, est-ce que ce service -- cette unité, conserve les

24 informations à un endroit donné, ou sous une forme donnée ?

25 R. Je ne sais pas quelles sont leurs méthodes de travail. Je suppose que

26 oui, mais je n'en suis pas certain.

27 Q. Après avoir terminé l'entretien de ces dix personnes qui avaient été

28 arrêtées dans la nuit du 12 au 13 août, vers quelle heure environ avez-vous

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1 quitté le poste de police de Mirkovci ?

2 R. Le matin du 13, vers 3 heures.

3 Q. A la page 4 364 [comme interprété] du compte rendu, vous avez dit à mon

4 consoeur que, si un Juge d'instruction disposait de renseignement sur les

5 mauvais traitements infligés à des détenus, ils auraient ouvert une

6 enquête.

7 Je souhaite vous poser cette question : supposer qu'un Juge d'instruction

8 ait des informations qui précisaient que des détenus avaient peut-être été

9 maltraités mais qu'il n'a pas ouvert une enquête, vous sauriez parvenu à

10 quelle conclusion ?

11 R. Je ne ferais aucun commentaire au sujet du travail mené par un Juge

12 d'instruction.

13 M. SAXON : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous serez certainement heureux de

15 constater qu'il s'agit des dernières questions qui vous ont été posées. La

16 Chambre vous remercie pour être venu témoigner à La Haye et du concours que

17 vous avez apporté à la Chambre et un représentant du Greffe va vous

18 raccompagner.

19 Je vous remercie.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

21 [Le témoin se retire]

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Faites entrer le témoin suivant, s'il

23 vous plaît.

24 Monsieur Dobbyn, quel est le nom de votre témoin suivant, s'il vous plaît ?

25 M. DOBBYN : [interprétation] Bonjour. Ejup Hamiti, plus connu précédemment

26 sous le nom d'Ejup Ametov.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

Page 4422

1 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous voudriez prononcer la

5 déclaration solennelle qui vous est tendue ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

7 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

8 LE TÉMOIN: EJUP HAMITI [Assermenté]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez vous asseoir.

11 M. Dobbyn va vous poser quelques questions.

12 M. DOBBYN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Interrogatoire principal par M. Dobbyn :

14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Hamiti.

15 R. Bonjour.

16 Q. Monsieur Hamiti, vous souvenez-vous d'avoir fait une déclaration au

17 bureau du Procureur le 9 février 2003 ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce que vous vous souvenez que, le 19 novembre 2005, la déclaration

20 a été notifiée par un officier du Tribunal ?

21 R. Oui.

22 Q. A l'époque, avez-vous eu l'occasion de lire la déclaration dans votre

23 langue maternelle ?

24 R. Oui.

25 Q. Avez-vous eu l'occasion d'apporter des modifications à cette

26 déclaration ?

27 R. Oui.

28 Q. Ces modifications et compléments ont-ils été notés dans votre

Page 4423

1 déclaration sous forme de notes manuscrites et jointes à la déclaration en

2 annexe ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous estimez que la teneur de votre déclaration y compris

5 ces modifications et l'annexe est exacte ?

6 R. Oui.

7 M. DOBBYN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je demande le

8 versement au dossier de la déclaration ainsi que de son annexe qui porte le

9 numéro ERN N002-1977, N002-1987, conformément à l'article 92 bis du

10 Règlement.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Mettraux.

12 M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Simplement pour éclaircir un point. Nous avions pu comprendre par le passé

14 que l'Accusation n'avait pas chercher le versement au dossier

15 d'observations faites par tel ou tel témoin en ce qui concerne des

16 documents en particulier et il semblerait en l'espèce que les observations

17 ont été jointes en annexe, donc, est-ce que

18 M. Dobbyn pourrait nous indiquer s'il souhaite seulement demander le

19 versement au dossier -- des corrections -- des modifications faites par le

20 témoin et non des observations qu'il aurait faites concernant certains

21 documents ?

22 M. DOBBYN : [interprétation] Je me réfère à l'annexe qui ne contient aucune

23 observation sur les documents, donc ERN N002-1985 à 1986, du 19 novembre

24 2005.

25 M. METTRAUX : [interprétation] Merci. Nous avons une version un quelque peu

26 différente. Je vous suis reconnaissant de cette précision.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La déclaration et son annexe seront

28 versées.

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P417.

2 M. DOBBYN : [interprétation] Je vais vous donner lecture du résumé de cette

3 déclaration.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

5 M. DOBBYN : [interprétation] Le Témoin, Ejup Hamiti, connu précédemment

6 sous le nom d'Ejup Ametov, est un résident de Ljuboten, Albanais de souche.

7 Entre les 10 et 12 août 2001, Ljuboten a fait l'objet de pilonnage et de

8 tirs. Le 12 août, le témoin a vu une maison de son voisin brûlée, incendiée

9 et le voisin lui-même a été blessé pendant l'offensive dirigée contre un

10 grand nombre de villageois. Le témoin souhaitait retourner dans son village

11 mais on lui a dit que la police allait entrer à Ljuboten et que ce serait

12 dangereux d'y retourner. Le témoin a alors rejoint d'autres villageois qui

13 prenaient la fuite en direction de Skopje.

14 En approchant d'un point de contrôle sur la route menant à Skopje, des

15 policiers ont approché le témoin et d'autres. Ils ont subi des -- ils ont

16 été insultés. Un certain nombre de civils macédoniens ont été réunis et ont

17 frappé le témoin et d'autres villageois de Ljuboten. Le témoin et un autre

18 villageois ont pris la fuite en direction de Radisani. Deux policiers leur

19 ont donné l'ordre de s'arrêter avant d'ouvrir le feu sur eux. Le témoin a

20 été atteint par une balle au front et a ainsi perdu connaissance.

21 Il a ensuite été admis aux soins intensifs à l'hôpital municipal de Skopje,

22 il a dû être opéré d'urgence. Quand il a repris connaissance, ses mains et

23 ses jambes étaient liés comme l'étaient ceux des autres villageois de

24 Ljuboten qu'il a pu voir à l'hôpital. Il a pu quitter l'hôpital le 17 août

25 2001, mais il continue à souffrir de problèmes de santé en conséquence de

26 sa blessure à la tête.

27 Q. Monsieur Hamiti, j'aimerais vous poser quelques questions. Je vous

28 demanderais d'écouter très attentivement et de me répondre.

Page 4425

1 M. DOBBYN : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on montre la pièce

2 65 ter 199.21, une photo qui est également à la page 15 du classeur.

3 Donc, je saisis l'occasion pour vous dire que nous avons des classeurs pour

4 les Juges ainsi que le témoin.

5 Q. Monsieur Hamiti, dans votre déclaration, vous décrivez le fait que vous

6 avez été roué de coups par des civils macédoniens près d'un poste de

7 contrôle de la police, sur la route qui mène à Skopje. Sur la photo que

8 vous voyez à l'écran, est-ce que vous pouvez voir ce point de contrôle ?

9 R. Oui, ici.

10 M. DOBBYN : [interprétation] Puis-je demander à l'huissier de nous aider.

11 Q. Monsieur Hamiti, avec l'aide de l'huissier, est-ce que vous voudriez

12 bien entourer d'un cercle l'endroit où se trouvait ce poste de contrôle ?

13 R. A peu près par ici.

14 Q. Est-ce que vous voudriez bien mettre un chiffre 1, à côté de ce cercle.

15 R. A l'intérieur ou à l'extérieur du cercle ?

16 Q. A l'extérieur.

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 Q. Merci. Et sur cette photo, pouvez-vous situer Buzalak ?

19 R. Oui. Buzalak de Ljuboten est tout près par ici, et plus loin, vous avez

20 Buzalak de Radisani.

21 Q. Pourriez-vous également encercler cet endroit, s'il vous plaît.

22 R. [Le témoin s'exécute]

23 Q. Vous avez donc dessiné deux cercles, sur la gauche, comment s'appelle

24 cet endroit ?

25 R. Buzalak de Radisani.

26 Q. Est-ce que vous voudriez bien mettre le chiffre 2, au-dessus de ce

27 cercle ?

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Merci. Et sur la droite, quel est le nom de cet endroit ?

2 R. Buzalak de Ljuboten.

3 Q. Est-ce que vous voudriez bien mettre le chiffre 3 au-dessus de ce

4 cercle.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. Merci. Et sur cette photo, est-ce que vous arrivez à situer un endroit

7 du nom de Kodra e Zajmit ?

8 R. Non.

9 Q. Mais par rapport à ce que l'on voit sur cette photo, pouvez-vous nous

10 dire où se trouve Kodra e Zajmit ?

11 R. Kodra e Zajmit se trouvent sur la gauche de cette route, environ 200 à

12 300 mètres sur la gauche.

13 Q. Merci. Pourriez-vous indiquer par une flèche la direction dans laquelle

14 se trouve Kodra e Zajmit.

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Merci. Est-ce que vous voulez bien mettre le chiffre 4 à côté de cette

17 flèche.

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Et pourriez-vous nous dire dans quelle direction se trouve Skopje ?

20 R. Derrière la flèche que l'on voit donc sur le chiffre 4, on voit la

21 route qui mène vers Skopje.

22 Q. Merci. Sur cette photo, est-ce que vous voyez l'endroit où vous-même,

23 votre ami, Dilaver Fetahovski, et son père avez été roués de coups par les

24 civils macédoniens ?

25 R. Non. Ce serait un peu plus vers l'intérieur, environ par là.

26 Q. Donc, si je vous comprends bien, c'est près de cet endroit mais, en

27 fait, on ne voit pas le lieu exact sur la photo ?

28 R. Oui, c'est à proximité.

Page 4427

1 Q. Merci. Alors, veuillez mettre un chiffre 5 à côté de cette annotation.

2 R. [Le témoin s'exécute]

3 Q. Merci.

4 M. DOBBYN : [interprétation] Je demanderais maintenant le versement au

5 dossier de cette photo.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Dobbyn, si j'ai bien compris,

7 les annotations 2 et 3 représentent Buzalak de

8 Radisani ?

9 M. DOBBYN : [interprétation] Non, d'après ce que j'ai compris, le numéro 2

10 représente -- ou indique Buzalak de Radisani, et le numéro 3 indique

11 Buzalak de Ljuboten.

12 Q. Est-ce exact, Monsieur le Témoin ?

13 R. Oui.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

15 Une cote, s'il vous plaît.

16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P418.

17 M. DOBBYN : [interprétation] Merci de votre aide, Monsieur l'Huissier.

18 Q. Monsieur Hamiti, le policier qui a incité les civils à vous frapper,

19 comme vous l'avez décrit dans votre déclaration, comment était-il vêtu ?

20 R. Il portait un uniforme de police.

21 Q. Pourriez-vous décrire pour nous cet uniforme ?

22 R. Plus ou moins je ne m'en souviens pas si bien. Quand j'ai vu qu'ils ont

23 commencé à être roué de coups, j'ai perdu connaissance. J'ai simplement vu

24 qu'ils portaient des uniformes de police avec l'insigne qui identifiait la

25 police. Après ils ont commencé à nous frapper. Enfin, comme cet uniforme-

26 ci.

27 Q. Je vous prie de ne pas encore examiner cette photo, nous y reviendrons.

28 R. Pardon.

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1 Q. J'aimerais maintenant que l'on soumette au témoin la pièce P00015,

2 photo A du classeur de l'Accusation à l'intercalaire 2 du classeur soumis

3 au témoin.

4 Est-ce que vous voulez bien donc examiner cette photo, Monsieur Hamiti.

5 Est-ce que vous reconnaissez cette photo ?

6 R. Oui, c'est ce type d'uniforme qu'ils arboraient.

7 Q. Outre les policiers qui ont incité les civils macédoniens à vous

8 frapper, avez-vous vu d'autres policiers ce jour-là, donc le 12 août 2001 ?

9 R. Oui, nous en avons vu.

10 Q. Où avez-vous vu ces autres policiers ?

11 R. Lorsque nous étions en train de fuir en direction de la Radisani, j'ai

12 vu deux policiers, c'est à ce moment-là que j'ai perdu connaissance quand

13 j'ai été frappé par une balle.

14 Q. Très bien, merci. Et que portaient ces policiers-là ?

15 R. Ils étaient trop loin. J'ai simplement pu voir qu'il s'agissait de

16 policiers et ils portaient des fusils automatiques également.

17 Q. Avant le 12 août 2001, aviez-vous traversé des postes de contrôle aux

18 alentours du village de Ljuboten ?

19 R. Oui, nous traversions souvent le poste de contrôle que je vous ai

20 indiqué. J'étais étudiant et je devais donc régulièrement passer par là.

21 Q. Quels uniformes arboraient les policiers à ces points de contrôle, dans

22 la mesure où ils portaient des uniformes ?

23 R. Ce type d'uniforme que l'on voit sur la photo.

24 Q. Merci. J'aimerais maintenant que nous puissions visionner une séquence

25 vidéo et j'aimerais vous montrer donc l'extrait entre une minute 50 et deux

26 minutes 20. Monsieur Hamiti, je vous demanderais de l'examiner ou le

27 regarder très attentivement l'écran et donc la séquence vidéo.

28 [Diffusion de la cassette vidéo]

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1 M. DOBBYN : [interprétation]

2 Q. Monsieur Hamiti, savez-vous à quelle date cet enregistrement vidéo a

3 été fait ?

4 R. Le jour des événements donc le 12 août.

5 Q. Et que voyons-nous sur cette séquence vidéo ?

6 R. Cette séquence nous montre alors que nous prenons la fuite, et montre

7 aussi qu'ils ont tiré sur nous et que j'ai été touché par une balle et je

8 suis tombé. La séquence illustre très bien.

9 Q. Vous dites : "La vidéo nous montre, prenons la fuite," qui est l'autre

10 individu qui court à vos côtés, qui dévale la colline à vos côtés ?

11 R. Dilaver Fetahovski.

12 Q. Savez-vous si cette séquence vidéo a été diffusée à la télévision

13 macédonienne ?

14 R. Je n'en sais rien.

15 M. DOBBYN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je demanderais

16 le versement au dossier de cette pièce.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Elle sera versée au dossier.

18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P419.

19 M. DOBBYN : [interprétation]

20 Q. Monsieur Hamiti, dans la version en albanais de votre déclaration, il

21 est dit que vous avez été touché par une balle sur le côté droit de votre

22 front, alors qu'en anglais, il est dit que la balle vous a touché sur le

23 côté gauche de votre front. Pourriez-vous préciser cela pour nous, donc,

24 nous dire de quel côté du front la balle vous a frappé ?

25 R. Le côté gauche.

26 Q. Monsieur Hamiti, puis-je vous demander d'écarter un peu votre frange ?

27 R. [Le témoin s'exécute]

28 Q. Je vous remercie.

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1 M. DOBBYN : [interprétation] Je demanderais que le compte rendu reflète que

2 le témoin a écarté sa frange et l'on voit donc sur la gauche de son front,

3 ce que j'appellerais, faute d'un meilleur terme, un cratère du côté de son

4 front.

5 Q. Monsieur le Témoin, la blessure que vous venez de nous montrer a-t-elle

6 été causée par la balle qui vous a frappé le 12 août 2001 ?

7 R. Oui.

8 Q. Dans votre déclaration, vous décrivez que vous avez perdu connaissance

9 et lorsque vous avez repris connaissance vous vous trouviez à l'hôpital

10 municipal de Skopje.

11 M. DOBBYN : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on soumette au

12 témoin la pièce P00192, et plus précisément la page 6 de la pièce ERN N000-

13 5719 et le témoin pourra trouver cela à l'intercalaire 4 de son classeur.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

15 M. DOBBYN : [interprétation]

16 Q. Il s'agit d'un rapport médical de l'hôpital municipal de Skopje. Voyez-

17 vous votre nom en haut à gauche ?

18 R. Oui.

19 Q. A la première ligne on voit : "Le 12 août 2001, Ejup Ametov a été admis

20 en urgence souffrant d'une blessure à la tête et neurologique." Est-ce une

21 description exacte de votre état lorsque vous avez été admis à l'hôpital et

22 de la raison pour laquelle vous avez été admis ?

23 R. Oui.

24 Q. Dans votre déclaration et son annexe vous nous décrivez les problèmes

25 de santé dont vous souffrez encore en raison de cette blessure à la tête.

26 Vous nous dites que vous vous évanouissez de temps en temps.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Mettraux.

28 M. METTRAUX : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président,

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1 je ne voulais pas interrompre mon collègue mais il semblerait que le

2 document que nous voyons à l'écran ne soit pas le bon document. Je voulais

3 juste le signaler.

4 M. DOBBYN : [interprétation] Merci, Monsieur Mettraux, de me l'avoir

5 indiqué. J'avais le document sous les yeux mais je n'ai pas vu que ce

6 n'était pas celui-là que l'on voyait à l'écran.

7 Il faudrait peut-être que l'on puisse voir la page 6 de cette pièce à

8 l'écran.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette pièce, en fait, n'a qu'une seule

10 page. Il se peut que vous vous soyez trompé de numéro.

11 M. DOBBYN : [interprétation] Oui, je me rencontre, c'est mon erreur. J'ai

12 demandé que l'on voit la pièce P192. En fait, j'aurais dû demander la pièce

13 220. Toutes mes excuses.

14 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Tout à l'heure, il s'agissait

15 de blessure donc à la tête et au thorax.

16 M. DOBBYN : [interprétation] Je vais passer à autre chose, puisque le

17 témoin s'est déjà prononcé sur ce document.

18 Q. Vous nous dites que vous vous évanouissez de temps en temps. Est-ce que

19 vous avez un diagnostic médical précis concernant cet état de santé ?

20 R. Oui. Suite à la blessure, j'ai souffert d'épilepsie et j'ai des

21 contrôles médicaux fréquent tous les deux ou trois mois. Et je dois payer

22 moi-même toutes les factures médicales.

23 Q. Est-ce qu'on vous a dit si, oui ou non, votre épilepsie résulte de

24 votre blessure à la tête ?

25 R. Oui, elle a été causée par cette blessure.

26 Q. Depuis le 12 août 2001, à ce jour, avez-vous à quelque occasion que ce

27 soit été contacté par un membre de la police macédonienne du gouvernement

28 Macédoine pour vous demander ce qui vous était arrivé et ce qui est survenu

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1 entre le 10 et 12 août 2001 ?

2 R. Non.

3 Q. Vous-même, avez-vous pris la moindre mesure à l'encontre de la police

4 du gouvernement macédonien afin que quelqu'un réponde des actes qui ont été

5 commis à votre encontre ?

6 R. Oui.

7 Q. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous avez entrepris ?

8 R. J'ai intenté une action en justice contre l'Etat car j'ai été victime

9 d'injustice.

10 Q. En disant que vous avez intenté une action en justice contre l'Etat,

11 pourriez-vous nous préciser qu'est-ce que vous voulez dire par là ?

12 R. J'ai intenté une action contre l'Etat parce que sur la photo on voit

13 clairement que j'étais civil, et tous les documents que j'ai obtenus à

14 l'hôpital montrent également ou décrivent également la situation de façon

15 très claire, j'ai donc porté plainte contre eux, et la procédure judiciaire

16 est en cours à l'heure actuelle.

17 M. DOBBYN : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour l'instant.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document que nous voyons à l'écran,

19 Monsieur Dobbyn, on me dit qu'il ne s'agit pas d'une pièce, mais fait

20 partie de la pièce 220, pièce 65 ter. Est-ce que vous souhaiteriez que ce

21 document soit admis en tant que pièce au dossier ?

22 M. DOBBYN : [interprétation] Oui. Pardon, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document sera versé au dossier,

24 cette page seulement.

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce P420.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Dobbyn.

27 Monsieur Mettraux, vous avez la parole.

28 Contre-interrogatoire par M. Mettraux :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Hamiti. Je suis

2 M. Mettraux, et avec ma collègue, Mme Residovic, nous représentons

3 M. Boskoski.

4 Monsieur Hamiti, nous avons un exemplaire de votre déclaration. Je ne

5 souhaite pas passer en revue toutes les informations que vous avez données

6 à l'Accusation. Mais il y a quelques questions que j'aimerais éclaircir

7 concernant les circonstances dans lesquelles vous avez été grièvement

8 blessé.

9 Ai-je bien compris qu'en raison des circonstances à l'époque, la peur qui

10 régnait, le fait qu'il y avait beaucoup d'agitation autour de vous, vous

11 étiez extrêmement stressé; est-ce exact ?

12 R. Lorsque je suis arrivé au poste de contrôle, j'ai vu ces civils et

13 lorsque j'ai vu qu'ils étaient passés à tabac, j'ai vu les policiers, et

14 c'est la raison pour laquelle je suis parti en courant en direction de

15 Radisani. Mais plutôt que d'emprunter la route pour aller vers Radisani,

16 enfin quand j'ai commencé à courir, je ne savais pas très bien où j'allais.

17 C'est la vérité.

18 Q. Est-ce exact que, lorsque vous avez commencé à courir, votre ami,

19 Dilaver Fetahovski, était à quelques mètres derrière vous -- environ 20

20 mètres derrière vous ?

21 R. Comme je vous l'ai dit, j'étais dans un état très confus, je ne sais

22 pas si Dilaver était derrière moi. Je ne peux vous parler que de moi-même.

23 Je sais que j'ai commencé à courir. Je n'ai pas vu s'il y avait quelqu'un

24 derrière moi qui me suivant.

25 Q. Serait-il exact de dire qu'en raison de votre état d'agitation, vous

26 n'avez pas pu voir à l'époque d'où provenait le coup de feu qui vous a

27 blessé ?

28 R. Non. Ce n'est pas exact. Lorsque j'ai vu que l'on frappait Dilaver et

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1 que l'on routait de coups son père également, j'ai eu très peur et il y

2 avait une certaine confusion dans mon esprit, j'ai commencé à courir. J'ai

3 vu deux policiers sur ma gauche lorsqu'ils ont commencé à tirer, j'ai

4 entendu le tir de fusil automatique. Je n'ai pas entendu la balle qui m'a

5 frappée et je suis simplement tombé et pendant deux heures je suis resté

6 ainsi par terre -- à terre dans cet état qui ressemblait être un coma.

7 Q. Et ces deux policiers que vous venez de nous décrire, ce sont les mêmes

8 policiers que vous avez mentionnés dans votre déclaration du 9 février 2003

9 à l'Accusation; est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Dans votre déclaration, je crois que vous avez indiqué que ces

12 personnes dont vous pensez qu'il s'agissait de policiers étaient à une

13 cinquantaine de mètres à peu près, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, à peu près. Comme je vous l'ai dit, je ne peux pas être précis,

15 mais ils étaient à une distance de 50 mètres à peu près. Comme je vous l'ai

16 dit il y avait beaucoup de confusion dans mon esprit. J'ai simplement pu

17 voir qu'il s'agissait de policiers et qu'ils portaient des fusils

18 automatiques.

19 Q. Je suppose que vous conviendrez avec moi que c'est Dilaver, qui courait

20 derrière vous, qui était également en mesure de voir ces deux hommes,

21 n'est-ce pas ?

22 R. Monsieur, je vous décris ma propre expérience. Je n'ai pas vu Dilaver

23 et je me suis retrouvé dans un état comateux pendant deux heures. Je vous

24 décris l'état dans lequel je me trouvais. L'ambulance est ensuite arrivée

25 et m'a emmené à l'hôpital en ville, et j'ai dû être opéré d'urgence.

26 Q. Je vais vous poser la question de cette manière. Y a-t-il eu des

27 obstacles ou des raisons pour lesquelles Dilaver n'aurait pas vu ces deux

28 policiers, pour autant que vous puissiez nous le dire ?

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1 R. Pardonnez-moi, mais je ne peux pas parler au nom de Dilaver. Je ne peux

2 parler qu'en mon propre nom et vous décrire l'état dans lequel je me

3 trouvais et ce que j'ai enduré. Si vous avez des questions à lui poser, il

4 serait peut-être préférable de lui poser directement.

5 Q. Est-il exact, Monsieur, que la raison pour laquelle vous pensez que ces

6 deux hommes étaient des officiers de police c'était en raison de l'uniforme

7 qu'ils portaient; est-ce exact ?

8 R. Vous voyez, leurs uniformes très distinctement et je voyais qu'ils

9 portaient des fusils automatiques. Je ne sais pas si je suis suffisamment

10 clair mais ils avaient des fusils automatiques.

11 Q. Est-il exact de dire également que ce jour-là, vous avez indiqué à

12 l'Accusation que vous n'avez vu qu'un homme qui portait, d'après ce que

13 vous pensiez, un insigne de la police et qui se trouvait dans le voisinage

14 du poste de contrôle ? C'est ce que vous avez dit au Procureur ?

15 R. Un instant, s'il vous plaît. Je vais vous expliquer ceci dans le -- ou

16 les détails.

17 Ce policier c'est celui qui nous a emmené de Buzalak de Radisani jusqu'aux

18 civils macédoniens. C'était lui, lorsque nous courions en direction de

19 Radisani, ces deux personnes étaient deux autres policiers, ce n'était pas

20 le même que celui que j'ai évoqué précédemment.

21 Q. C'est exact, Monsieur, que c'est ainsi que nous l'avons compris

22 également.

23 Est-il exact de dire que vous avez indiqué à l'Accusation que vous n'avez

24 vu qu'un seul homme qui portait un insigne que vous avez reconnu comme

25 étant un badge de la police et ceci dans le voisine du poste de contrôle ?

26 En d'autres termes, ou à proximité du poste de contrôle -- en d'autres

27 termes, vous n'avez pas reconnu des badges ou des insignes sur les deux

28 autres policiers qui étaient à vos côtés lorsque vous couriez; c'est exact

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1 ?

2 R. Ils étaient loin mais je les ai vus et ils portaient des fusils

3 automatiques et on peut reconnaître les uniformes de la police. La police

4 qui était avec nous à Buzalak de Radisani était là, et il avait également

5 un fusil automatique, mais son insigne je le voyais bien puisqu'il y avait

6 "policija" écrit sur son insigne.

7 Q. Est-il exact, Monsieur, que vous avez été interviewé par un

8 représentant de l'Accusation un peu plus tôt cette année là dans le village

9 de Ljuboten au mois de juin; est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Et vous souvenez-vous du fait que le représentant du bureau du

12 Procureur vous a montré un certain nombre de photographies lors de cet

13 entretien ?

14 R. Oui.

15 Q. Et vous souvenez-vous du fait qu'une des photographies qu'on vous a

16 montrée représentait des insignes de la police. Vous souvenez-vous de cela

17 ?

18 R. Oui.

19 Q. Et vous souvenez-vous avoir dit ceci au Procureur lorsqu'on vous a

20 montré ces photographies : "Je vois qu'il s'agit là d'insignes de la police

21 mais je ne peux pas être sûr à 100 % qu'il s'agit là du même insigne que

22 celui que portait le policier en uniforme le jour où on m'a tiré dessus."

23 Vous souvenez-vous de cela ?

24 R. Un instant, s'il vous plaît, Monsieur. Ces deux policiers que j'ai

25 évoqués étaient assez loin, ils étaient à 50 ou 100 mètres et je ne pouvais

26 pas voir leurs uniformes distinctement, mais celui qui était avec nous

27 avant cela, il était très près de nous et je voyais bien l'insigne et je

28 voyais ce qui était inscrit sur l'insigne.

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1 Q. Est-il exact, Monsieur, qu'en réalité, vous ne savez que les deux

2 hommes que vous voyez à vos côtés étaient des policiers ou des membres de

3 l'armée macédonienne; est-ce exact ?

4 R. Je ne saurais dire s'il s'agissait de policiers ou de membres de

5 l'armée mais ils portaient des uniformes et je vous ai dit dans quel état

6 d'esprit j'étais lorsque je me suis mis à courir. J'étais complètement

7 désorienté et je n'étais plus moi-même et j'avais du mal à voir cela

8 distinctement.

9 Q. Connaissez-vous quelqu'un qui s'appelle Saqir Fetahovski ?

10 R. Oui.

11 Q. C'était un habitant de votre village, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Ce jour-là, il était là également avec vous à proximité du poste de

14 contrôle que vous avez évoqué un peu plus tôt ?

15 R. Oui.

16 Q. Il vous aurait également vu vous enfuir de ce poste de contrôle, n'est-

17 ce pas ?

18 R. Je ne sais pas. Posez-lui la question.

19 Q. Mais si M. Fetahovski devait dire que les personnes qu'il a vues tirant

20 dans votre direction étaient des soldats et n'étaient des policiers; est-ce

21 qu'on aurait des raisons de ne pas le croire -- est-ce que vous auriez des

22 raisons de ne pas le croire ?

23 R. Je vous ai dit que je ne savais pas très bien ce que je faisais. Je

24 voyais simplement qu'ils portaient des uniformes de la police, peut-être

25 qu'il était mieux placé pour le voir, mais cela m'étonnerait parce qu'il a

26 été assez sévèrement battu.

27 Q. Est-ce exact, Monsieur, néanmoins que vous n'êtes pas certain que la

28 balle qui vous a touché venait en réalité de ces -- provenait en réalité de

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1 l'un de ces deux hommes; est-ce exact ?

2 R. Je ne sais pas exactement qui a tiré, mais j'ai entendu le bruit de la

3 balle. Je ne sais pas si je peux être plus clair, j'entendais la balle qui

4 avait été tirée du fusil automatique.

5 Q. Mais vous n'êtes pas certain que le tir en question provenait de l'un

6 ou de l'autre de ces deux personnes. Vous n'aviez pas le temps de -- vous

7 n'aviez pas eu le temps de regarder pour constater si le coup provenait

8 d'un autre endroit; est-ce exact ?

9 R. Bien sûr.

10 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, dans ce cas, je crois

11 que je n'ai plus de questions.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Maître

13 Mettraux.

14 Maître Apostolski.

15 M. METTRAUX : [interprétation] Et je remercie, le témoin.

16 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

17 Bonjour, Monsieur le Témoin.

18 Contre-interrogatoire par M. Apostolski :

19 Q. [interprétation] Je m'appelle Antonio Apostolski, et avec ma consoeur,

20 Jasmina Zivkovic, je représente les intérêts de Johan Tarculovski.

21 Est-ce exact que vous avez fait vos études à l'école élémentaire dans

22 l'école de votre village et que vous avez étudié dans le village de

23 Ljuboten, dans votre langue maternelle,

24 l'albanais ?

25 R. C'est exact.

26 Q. Ensuite, vos études secondaires, vous les avez faites à Skopje ?

27 R. Oui.

28 Q. Lorsque vous avez remis votre déclaration au bureau du Procureur, vous

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1 étiez étudiant à la Faculté pédagogique de Skopje; c'est exact ?

2 R. Oui.

3 Q. Pourriez-vous nous dire quand vous êtes inscrit dans cette faculté ?

4 R. Je me suis inscrit pour l'année universitaire 2001.

5 Q. Est-il exact de dire que vous avez fait vos études supérieures en

6 albanais à Skopje ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Merci. Vous avez dit que vous avez passé plusieurs postes de contrôle;

9 est-ce exact de dire qu'il y avait un poste de contrôle au dernier arrêt de

10 bus au numéro 57 à Radisani, dans ce quartier-

11 là ?

12 R. Pardonnez-moi, Monsieur, mais je ne parle pas de Radisani, je parle de

13 la route qui relie Ljuboten à Skopje. Sur cette route, il y avait qu'un

14 poste de contrôle, ce poste de contrôle se trouvait à Cezmae Rizvanit. Nous

15 connaissons bien cet endroit parce que ce poste de contrôle a été installé

16 à cet endroit-là bien avant les événements de Ljuboten.

17 Q. Je ne vous demande pas, je ne vous pose pas de question à propos de

18 votre déclaration mais des questions d'ordre général, compte tenu du fait

19 que vous avez beaucoup voyagé dans cette région. Est-il exact de dire qu'il

20 y avait un poste de contrôle au dernier arrêt du bus numéro 57 dans le

21 quartier de Radisani, savez-vous cela, êtes-vous au courant de ce fait ?

22 R. Je me déplaçais en voiture, j'empruntais une autre route et je

23 n'empruntais pas les autocars. C'est la raison pour laquelle je ne sais pas

24 où se trouvait ce poste de contrôle.

25 Q. Monsieur le Témoin, je vous pose des questions générales. Je ne vous

26 demande pas de me donner des dates précises, je parle de la période

27 couvrant le mois de juillet, août, à partir du moment où vous avez commencé

28 à voyager fréquemment et à vous rendre fréquemment entre Ljuboten et

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1 Skopje. A cette époque-là, avez-vous vu le poste de contrôle ?

2 R. Je crois que je vais vous l'expliquer très bien. Peut-être que vous

3 connaissez la route qui relie Ljuboten à Skopje, pas l'ancienne route qui

4 relie Ljuboten à Skopje en passant par Ljubanci. C'est le seul poste de

5 contrôle que j'ai vu sur cette route et nous passions devant fréquemment,

6 je ne me suis jamais rendu à Radisani et je suis toujours allé en voiture

7 et je pense que je suis assez clair, et je parle de l'année 2001.

8 Q. Bien.

9 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Apostolski.

11 Monsieur Dobbyn.

12 M. DOBBYN : [interprétation] Très brièvement, Madame, Messieurs les Juges.

13 Nouvel interrogatoire par M. Dobbyn :

14 Q. [interprétation] Monsieur Hamiti, vous nous avez décrit le poste de

15 contrôle le long de la route entre Ljuboten et Skopje. Et vous avez appelé

16 ce poste de contrôle comment ?

17 R. Nous l'appelions autrefois, Cezmae Rizvanit. Il y a une fontaine qui

18 s'appelle Cezmae Rizvanit qui est juste à côté. C'est ainsi que nous avons

19 nommé le poste de contrôle.

20 Q. C'est le même poste de contrôle que celui que nous avons vu dans la

21 photographie lorsque vous vous rapprochez de cette fontaine le jour où vous

22 avez été frappé, le 12 août ?

23 R. Oui.

24 Q. Donc, ai-je raison de dire que ce poste de contrôle se trouve dans le

25 secteur entre Buzalak et Kodra e Zajmit ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous nous avez également dit un peu plus tôt être passé devant ce poste

28 de contrôle à plusieurs reprises avant le 12 août, alors que vous vous

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1 rendiez à Skopje pour aller à l'école ?

2 R. Oui, j'étais étudiant et j'allais régulièrement à l'école. J'allais à

3 des conférences.

4 Q. Au moment où vous passez le poste de contrôle, qui contrôlait ce poste,

5 c'était l'armée ou la police ?

6 R. La police. La police et les réservistes qui étaient là.

7 Q. [aucune interprétation]

8 M. DOBBYN : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Madame,

9 Messieurs les Juges.

10 Merci de nous avoir consacré une partie de votre temps, Monsieur

11 Hamiti,

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Dobbyn.

13 Vous serez heureux de savoir que ceci met un terme aux questions qui vous

14 seront posées. Les Juges de la Chambre vous remercient beaucoup du concours

15 que vous nous avez apporté, d'avoir pris la peine d'être venu déposer ici

16 aujourd'hui, et maintenant, vous pouvez partir et rentrer chez vous.

17 Nous allons lever l'audience dans quelques instants et

18 M. l'Huissier va vous raccompagner.

19 Nous vous remercions beaucoup.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vois que M. Saxon est debout et

22 qu'il a quelque chose à dire.

23 M. SAXON : [interprétation] Bien, simplement pour confirmer que la

24 Procureur n'avait pas prévu que l'interrogatoire et le contre-

25 interrogatoire serait aussi court de ce témoin, donc, nous n'avons pas

26 d'autre témoin pour ce matin.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est ce que nous avions prévu par

28 rapport à ce que vous aviez dit, Monsieur Saxon, et donc, nous allons

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1 poursuivre lundi.

2 Je crois que nous avons été un petit peu déplacé et l'audience se tiendra

3 l'après-midi à 2 heures 15.

4 Donc, nous allons lever l'audience et reprendre lundi.

5 --- L'audience est levée à 10 heures 17 et reprendra le lundi

6 3 septembre, à 14 heures 15.

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