Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 27 février 2008

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

7 Monsieur, j'aimerais vous rappeler que la déclaration solennelle que vous

8 avez prononcée est toujours valable.

9 Madame Issa, je vous en prie.

10 LE TÉMOIN: ZLATKO KESKOVSKI [Reprise]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 Contre-interrogatoire par Mme Issa : [Suite]

13 Mme ISSA : [interprétation] Bonjour. Merci, Madame, Monsieur les Juges.

14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Keskovski.

15 R. Bonjour.

16 Q. Je pense qu'avant-hier lors de votre déposition vous aviez dit que le

17 11 août vous vous trouviez ce matin-là au cabinet du président; est-ce

18 exact ?

19 R. Oui.

20 Q. C'était une journée plutôt tranquille, donc vous avez décidé de rentrer

21 chez vous pour aller déjeuner, et ce, vers

22 14 heures 30, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous avez indiqué que vers 15 heures vous avez reçu un appel

25 téléphonique de la part du président qui vous a demandé où vous vous

26 trouviez, vous lui avez expliqué alors que vous étiez en train de déjeuner,

27 et il vous a dit qu'il souhaitait se joindre à vous; est-ce exact ?

28 R. Oui.

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1 Q. Il était à votre domicile entre 15 heures et 17 heures toujours pour la

2 même journée; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Et pendant que vous déjeuniez, vous avez à ce moment-là reçu un appel

5 téléphonique de la part du cabinet du premier ministre; est-ce exact ?

6 R. Oui, c'est exact.

7 Q. Vous avez été informé du fait qu'il y avait des escarmouches à Radusa

8 et le premier ministre avait demandé l'aide de l'armée; est-ce exact ?

9 R. Oui, oui, c'est exact.

10 Q. Donc ce qui s'est passé c'est que le premier ministre avait besoin de

11 prendre contact avec le président pour lui demander de l'aide, parce que le

12 premier ministre était le seul qui pouvait donner des ordres à la police,

13 alors que le président était le seul qui pouvait donner des ordres à

14 l'armée; est-ce exact ?

15 R. Ils ont appelé, c'était le cabinet du premier ministre, et ils ont

16 demandé l'aide de l'armée. Pourquoi ? Je suppose que c'est parce que le

17 président est la personne qui est à même de donner des ordres à l'armée.

18 Q. [aucune interprétation]

19 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Mettraux.

21 M. METTRAUX : [interprétation] Avant que ma consoeur ne poursuive,

22 j'aimerais corriger le compte rendu d'audience. Elle a indiqué au témoin,

23 elle a fait référence à ce qui s'était passé, cela concerne les pages 1 004

24 à 1 005, à la fois dans la déclaration du bureau du Procureur ainsi que

25 lors de l'interrogatoire principal il avait été mentionné que le président

26 était arrivé non pas à 15 heures mais à 17 heures, donc non pas à 15 heures

27 comme l'a indiqué ma consoeur.

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

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1 Mme ISSA : [interprétation] Dois-je poursuivre, Monsieur le Président ?

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Allez-y.

3 Mme ISSA : [interprétation]

4 Q. Monsieur, vous avez reçu des éléments d'information à propos des

5 positions des soldats qui se trouvaient sur le terrain. C'est le bureau du

6 premier ministre qui vous a transmis ces renseignements, et vous avez

7 relayé lesdits renseignements au président, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Je devrais dire que vous avez reçu des éléments d'information à propos

10 des positions de la police ou des forces de sécurité sur le terrain, n'est-

11 ce pas ?

12 R. Oui, il s'agissait des forces de sécurité.

13 Q. Bien entendu, le premier ministre pouvait obtenir des informations de

14 la part du ministre de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

15 R. Oui, je le suppose, oui.

16 Q. J'aimerais que nous examinions la pièce P464 qui correspond à

17 l'intercalaire 3 du classeur de l'Accusation.

18 Pour le prétoire électronique, il s'agit de la pièce N006-3017 à

19 N006-3033 à la page 8 de la version anglaise; et pour la version

20 macédonienne, il s'agit des pages 106 à 107.

21 Monsieur Keskovski, vous voyez qu'il s'agit d'un extrait d'un livre

22 intitulé "La guerre en Macédoine en 2001." J'aimerais attirer votre

23 attention sur le passage qui se trouve après le titre suivant : Donne

24 l'ordre d'utiliser la police durant la loi martiale, et ce, afin d'apporter

25 le soutien à l'armée.

26 Alors il est indiqué - c'est en fait le troisième paragraphe qui

27 m'intéresse, troisième paragraphe après ce titre - il est

28 indiqué : "Etant donné que la loi martiale n'avait pas été promulguée, la

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1 police ne se trouvait pas placée sous commandement conjoint et agissait de

2 façon indépendante. D'aucuns peuvent seulement imaginer quelle est la

3 situation qui prévaut lorsque deux ministres du même gouvernement, à savoir

4 le ministère de l'Intérieur et les ministères de la Défense ont deux

5 éléments armés à leur disposition, dont l'un est commandé par le premier

6 ministre par le truchement du ministre de l'Intérieur, alors que l'autre

7 est placé sous le commandement du président de la République, et ce, par

8 l'entremise du ministre de la Défense."

9 "Les deux ministres venant de deux factions politiques différentes

10 semblent, plutôt que d'envisager une défense conjointe dans l'intérêt de

11 l'Etat et dans l'intérêt de la nation, semblent se trouver dans une

12 situation plutôt complexe, et d'aucuns peuvent dire que les deux structures

13 armées, à savoir la police et l'armée se battent chacune sur leur propre

14 front."

15 Est-ce que vous voyez cela ?

16 R. Oui, je le vois.

17 Q. Et en 2001, l'état de guerre n'avait pas été déclaré, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Pour en revenir à cet appel téléphonique qui provenait du cabinet du

20 premier ministre, avant cet appel téléphonique le président ne vous avait

21 absolument pas mentionné des batailles, des escarmouches dans le secteur

22 qui le préoccupait particulièrement au moment où vous déjeuniez avec lui ?

23 R. Vous voulez parler du secteur de Radusa ?

24 Q. Ou de tout autre bataille qui aurait été livrée dans cette région ?

25 R. Le public était continuellement informé des escarmouches ponctuelles

26 des forces de sécurité qui avaient lieu dans la région de Ljuboten et dans

27 la région de Radusa, et ce, le 10 et le 11 août.

28 Q. Au compte rendu d'audience vous avez dit : Le public était

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1 continuellement informé des escarmouches ponctuelles. Vous parlez des

2 médias, Monsieur Keskovski ?

3 R. Oui, je parle des médias et je parle des rapports diffusés au public de

4 la part des institutions. Il s'agissait d'information du domaine public.

5 Q. Oui, mais à ce moment-là, le président n'avait pas parlé avec vous des

6 soucis qu'il aurait eus, d'une préoccupation particulière ou de plans

7 visant une opération qui se serait déroulée pendant ce déjeuner, n'est-ce

8 pas ?

9 R. Oui, c'est exact.

10 Q. Le 12 août 2001, vous êtes ensuite allé au cabinet du président -- ou

11 vous êtes allé, plutôt, au cabinet du président entre 9 heures et 10 heures

12 du matin; est-ce exact ?

13 R. Oui, c'est exact.

14 Q. Il s'agissait d'une journée particulièrement importante pour le

15 président et son cabinet, puisque la signature de l'accord d'Ohrid avait

16 été prévue pour le lendemain, n'est-ce pas ?

17 R. Bien sûr qu'il s'agissait d'une journée importante, mais il n'y avait

18 pas tous les membres du cabinet qui étaient présents, parce que le cabinet

19 avait terminé tous les préparatifs. Il s'agissait d'une journée importante,

20 parce que nous recevions toutes les délégations, les personnes qui

21 composaient en quelque sorte l'avant-garde de leur délégation et cela

22 représentait beaucoup de travail pour la sécurité.

23 Q. Donc il y avait beaucoup de travail au sein du cabinet, et ce, dans le

24 cadre des préparatifs et des préparations pour les délégations

25 internationales. Il y avait tant de travail que le président ne s'est même

26 pas rendu à l'église ce dimanche-là, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, c'est exact.

28 Q. Et la signature de l'accord d'Ohrid était ce jour-là, ce qui était, en

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1 fait, au centre des préoccupations de tous les membres du bureau du

2 président, notamment pour le président également, n'est-ce pas ?

3 R. Oui. Toutefois, la signature était prévue pour le lendemain. Vous avec

4 compris que cette signature était prévue le 13. Mais cette journée était

5 toutefois importante.

6 Q. Oui, oui, je comprends tout à fait. Je faisais référence aux

7 préparatifs pour cette journée.

8 Comme vous le dites au paragraphe 49 de votre déclaration - et vous pouvez

9 prendre votre déclaration, si vous le souhaitez, elle se trouve à

10 l'intercalaire premier du classeur du Procureur.

11 Du fait de l'importance du travail préparatoire qui avait lieu, personne au

12 sein du bureau du président ne prêtait la moindre attention à ce qui se

13 passait à Ljuboten; est-ce exact ?

14 R. Oui, oui, c'est exact.

15 Q. Hier vous avez dit, Monsieur Keskovski - et cela figure aux pages 10

16 022 à 10 023 du compte rendu d'audience - vous avez dit, disais-je, que le

17 président vous avait convoqué dans son bureau ce jour-là et qu'il vous

18 avait dit qu'il y avait des activités dans la région ou le secteur de

19 Ljuboten et de Ljubanci, il vous avait demandé de prendre contact

20 immédiatement avec Ljube Boskoski.

21 Vous vous souvenez avoir dit cela ?

22 R. Oui.

23 Q. J'aimerais vous demander d'avoir l'amabilité de bien vouloir examiner

24 le paragraphe 50 de votre déclaration.

25 Mme ISSA : [interprétation] Je dirais qu'il s'agit de la pièce 1D1249 pour

26 la liste 65 ter.

27 Q. Voilà ce que vous avez déclaré, je cite : "Le président m'a dit qu'il

28 disposait d'informations selon lesquelles quelque chose se passait dans le

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1 village de Radisani, qu'il n'avait pas pu prendre contact avec le ministre

2 de l'Intérieur, Ljube Boskoski. Il voulait lui parler, donc il m'a demandé

3 de prendre contact avec Ljube Boskoski."

4 Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit dans votre déclaration, Monsieur

5 Keskovski ?

6 R. Oui.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Mettraux.

8 M. METTRAUX : [interprétation] Ma consoeur, je suppose, souhaite révéler

9 une contradiction entre ce qui a été dit hier et ce qui est dit dans la

10 déclaration. Alors j'aimerais en fait qu'elle nous donne la référence

11 exacte de la page au compte rendu d'audience à laquelle elle fait

12 référence. Parce que pour ce qui est de la déclaration d'hier ou la

13 déposition d'hier, il me semble que la dernière page est 1 019, et je ne

14 vois pas les pages dont elle nous a parlé.

15 Mme ISSA : [interprétation] Le compte rendu d'audience d'hier commence en

16 bas de page 1 022 [comme interprété] et va jusqu'à la page 1 023 [comme

17 interprété]. En fait, ce sont les pages auxquelles j'ai fait référence un

18 peu plus tôt.

19 Q. Dans votre déclaration, Monsieur Keskovski, vous faites une réponse

20 très précise à une question très précise qui vous avait été posée en 2005

21 par l'un des enquêteurs et vous leur avez dit que le président était

22 préoccupé par quelque chose qui se déroulait dans le village de Radisani;

23 est-ce exact ?

24 R. Oui, j'ai dit cela, c'est exact. Mais je n'ai pas dit cela en réponse à

25 une question précise.

26 Q. Oui, mais enfin, toutefois, dans votre déclaration, vous avez fait

27 référence à une préoccupation que le président avait à propos du village de

28 Radisani, n'est-ce pas ?

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1 R. Dans ma déclaration - il s'agit de la déclaration de 2005 - mais

2 également dans la déclaration qui s'inscrit dans le cadre de cette

3 déposition, j'ai dit que le président était informé des activités qui se

4 déroulaient dans le village de Ljubanci, ou dans le secteur de Ljubanci,

5 que de ce fait, il y avait des déplacements et des mouvements de population

6 civile dans la zone du village de Radisani.

7 Voilà, pour placer le contexte. Et dans ce contexte, je conviens avec vous

8 de ce que vous avez avancé.

9 Q. Oui, mais Monsieur Keskovski, pour que le compte rendu d'audience soit

10 absolument clair, je vous demande lecture de ce que vous avez dit hier

11 lorsqu'on vous a posé cette question, et c'est

12 Me Mettraux qui vous a posé la question.

13 Cela figure en bas de page 1 022 du compte rendu d'audience. Il vous a posé

14 la question suivante, je cite : "Et que vous a-t-il dit, s'il tant est

15 qu'il vous ait dit quoi que ce soit à ce moment-là ?" Me Mettraux fait

16 référence au président.

17 Voilà ce que vous avez répondu : "Le président m'a appelé, m'a dit qu'à

18 Ljuboten, ainsi dans le secteur de Ljubanci, il y avait eu des activités et

19 qu'il voulait immédiatement prendre contact avec le ministre de

20 l'Intérieur, M. Ljube Boskoski. Sur ses ordres, j'ai essayé de trouver le

21 ministre. Toutefois, je n'ai pas été en mesure de prendre contact avec lui.

22 Il s'agissait d'un numéro de téléphone qui se trouvait dans la mémoire de

23 mon téléphone portable."

24 Ensuite, une autre question vous est posée. Et la question suivante était

25 comme suit : "Est-ce que le président vous a dit d'où provenait cette

26 information ? Qui lui avait relayé l'information à propos de ce qui se

27 passait à Ljuboten et à Ljubanci ?"

28 Vous avez répondu : "Il ne m'a pas dit qui lui avait transmis cette

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1 information."

2 Vous voyez cela ?

3 R. Je n'ai pas la possibilité de lire ceci, mais je l'ai entendu.

4 Q. Vous avez entendu ce que je viens de lire, à savoir les questions qui

5 vous ont été posées hier, les réponses que vous avez apportées hier, vous

6 les avez entendues.

7 R. Oui. Et j'ai répété la même chose aujourd'hui. Je pense avoir tenu

8 exactement les mêmes propos aujourd'hui.

9 Q. Bien, pour que tout soit clair et limpide, Monsieur Keskovski,

10 qu'entendez-vous lorsque vous dites, je pense avoir dit la même chose

11 aujourd'hui ?

12 R. Je n'ai pas dit, je crois ou je pense. C'est peut-être comme cela que

13 cela a été interprété.

14 Vous venez de me donner lecture de cet extrait. C'est ce que j'ai dit il y

15 a deux minutes également.

16 Q. Mais ce ne n'est pas ce que vous avez dit dans votre déclaration de

17 2005, n'est-ce pas ?

18 R. Si vous lisez la déclaration, ma déclaration de 2005 et si vous lisez

19 l'intégralité de la déclaration, vous y trouverez les mêmes informations.

20 Si vous le souhaitez, je les répéterai à nouveau. Si vous souhaitez, je

21 peux répéter la même déclaration, déclaration que j'ai faite à ce moment-là

22 et que je réitère maintenant dans le même contexte.

23 Q. Ce n'est pas la peine que vous réitérez quoi que ce soit, Monsieur

24 Keskovski. Vous avez dit lors de votre déposition, que le président était

25 préoccupé de l'état des activités dans la région dans la déclaration. En

26 fait, vous faites référence au village de Radisani; maintenant vous parlez

27 de Ljuboten. Mais toujours est-il qu'il vous a convoqué parce que ce matin-

28 là qui était si important, le président n'a pas pu entrer en contact avec

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1 le ministre de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

2 R. Je pense que vous êtes en train de diviser en quelque sorte deux

3 facettes du même événement, c'est quelque chose qui porte sur les mêmes

4 événements, les événements de Ljubanci. Je l'ai dit lors de ma déclaration

5 en 2005 qu'il y avait la population civile qui s'était rassemblée dans le

6 secteur du village de Radisani. C'est ce que je vous ai dit hier et c'est

7 ce que d'ailleurs j'avais dit en 2005.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux.

9 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le

10 Procureur -- ou plutôt, si l'on essaie de formuler cette suggestion, si

11 l'on essaie de faire entendre que M. Keskovski essaie de modifier ses

12 propos et qu'apparemment il aurait été dit que le président était préoccupé

13 à propos des activités de Radisani alors que maintenant il s'agit de ce qui

14 se passait à Ljuboten, au paragraphe 51 --

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais le témoin vient de faire

16 référence à cela.

17 M. METTRAUX : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais il l'a dit de façon très, très

19 claire. Vous savez, ne vous préoccupez pas, nous sommes tout à fait

20 conscients de l'existence du paragraphe 51.

21 Mme ISSA : [interprétation] Justement, j'y arrivais à ce paragraphe.

22 Q. Monsieur Keskovski, lorsque le président vous a convoqué lors de cette

23 matinée si importante, c'est parce qu'il ne parvenait à prendre contact

24 avec le ministre Ljube Boskoski, n'est-ce pas ?

25 R. Non. Ce n'est pas parce qu'il ne parvenait à prendre contact avec lui.

26 C'était un dimanche. Le cabinet du président ne fonctionnait pas de façon

27 normale, à savoir son secrétaire ne travaillait pas ce jour-là. Donc il m'a

28 appelé, puisque moi, je parvenais à prendre contact avec toutes les

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1 institutions avec lesquelles il devait prendre contact, qu'il s'agisse

2 d'ailleurs d'institutions de la République de Macédoine ou à l'étranger.

3 Les personnes qui étaient de permanence le samedi ou le dimanche ne

4 disposaient pas des informations qu'ils leur permettaient de prendre

5 contact avec ces entités. Il s'agissait en fait d'activités qui n'étaient

6 pas des activités standard ou régulières. C'est pour cela qu'il m'a

7 convoqué, c'est ainsi que l'on faisait cela et pas seulement le 12. C'était

8 une procédure qui était suivie normalement.

9 Q. Bien. Mais le président était si préoccupé, il voulait tellement

10 établir le contact avec Ljube Boskoski, qu'il vous a en fait,

11 essentiellement forcé la main et forcé à annuler cette réunion que vous

12 avez planifiée avec vos subordonnés ce jour-là, parce qu'il voulait

13 absolument que vous preniez contact avec le ministre, n'est-ce pas ?

14 R. Non, ce n'est pas exact. Je n'ai jamais dit que j'avais annulé la

15 réunion.

16 Avant le début de la réunion, le président m'a convoqué, je pense que c'est

17 ce que j'avais dit à l'époque et c'est ce que j'avance maintenant. Je n'ai

18 pas annulé la réunion, parce qu'il s'agissait d'une réunion

19 particulièrement importante.

20 Q. Mais vous avez différé cette réunion pour justement pouvoir établir le

21 contact avec Ljube Boskoski. C'est ce que vous êtes en train de nous dire

22 maintenant ?

23 R. Avant le début de la réunion, rien n'avait pas commencé, donc je

24 n'avais encore rien fait dans le cadre de cette réunion. Il s'agit de la

25 réunion avec le groupe chargé d'assurer la sécurité du président. Vous

26 pouvez interpréter cela comme bon vous semble, mais c'est ce que j'ai dit

27 lors de ma déclaration.

28 Q. Mais le président voulait absolument que vous parliez avec le ministre

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1 Boskoski, parce qu'il craignait une escalade de la situation, une escalade

2 de la violence à Radisani, ainsi qu'à Ljubanci, et il craignait que cela

3 puisse avoir une incidence négative sur la signature de l'accord d'Ohrid,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Le présent était soucieux; c'est exact. Il ne m'a pas demandé de parler

6 à M. Boskoski, il voulait tout simplement que j'établisse le contact avec

7 lui pour que lui puisse parler à M. Boskoski.

8 Q. Vous avez essayé de prendre contact avec le ministre Boskoski sur son

9 téléphone mais en vain, n'est-ce pas, vous n'y avez pas réussi; est-ce

10 exact ?

11 R. Oui, c'est exact.

12 Q. Le président vous a ensuite donné des instructions, vous avez exhorté à

13 prendre contact avec le cabinet du premier ministre pour voir si vous

14 pouviez prendre contact avec le ministre; est-ce exact ?

15 R. Oui. Il m'a dit d'appeler le cabinet du premier ministre pour qu'il

16 puisse m'indiquer comment est-ce que l'on pourrait prendre contact avec le

17 ministre.

18 Q. Donc quelqu'un du cabinet du premier ministre vous a donné le numéro de

19 téléphone du chauffeur de Ljube Boskoski, et c'est ainsi que vous l'avez

20 finalement joint, n'est-ce pas ?

21 R. Comme je l'ai déjà dit, c'est Robert Ljusev du cabinet du premier

22 ministre, en effet, oui.

23 Q. Donc au cabinet du premier ministre on savait comment prendre contact

24 avec le ministre Boskoski, n'est-ce pas ?

25 R. Ils m'ont donné des numéros de téléphone pour essayer de le joindre.

26 Q. C'est bien donc que le premier ministre et le ministre Boskoski étaient

27 en fait assez proches, n'est-ce pas ?

28 R. Ça, ce n'est pas à mon pouvoir de le confirmer.

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1 Q. Lorsque vous avez réussi à joindre le ministre Boskoski, le président

2 s'est entretenu avec lui, lui a posé des questions sur la situation à

3 Radisani et il lui a demandé s'il savait quoi que ce soit d'autre de ce qui

4 s'y passait, n'est-ce pas ?

5 R. En effet, comme je l'ai déjà dit.

6 Q. Le président a alors ordonné, comme vous l'avez dit en page 1 025 du

7 compte rendu d'audience, donc ordonné au ministre Boskoski de se rendre à

8 Radisani et de faire usage de son autorité pour calmer la foule et leur

9 interdire d'entrer dans le village de Ljubanci, n'est-ce pas ?

10 R. Oui, en effet.

11 Q. Donc le ministre Boskoski disposait de l'autorité nécessaire pour

12 calmer le jeu à ce moment-là, n'est-ce pas ?

13 R. Je pense que c'est ce que pensait le président, en effet.

14 Q. Si nous revenons maintenant au paragraphe 51 de votre déclaration,

15 Monsieur Keskovski, vous nous y avez dit que la population était en colère.

16 Là vous faites référence au village de Radisani et Ljubanci, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, c'est cela.

18 Q. Mais vous ne nous parlez pas à ce moment-là du village de Ljuboten,

19 n'est-ce pas ?

20 R. Si vous lisez ce paragraphe avec attention, vous verrez qu'il y est dit

21 : Dans le village de Radisani et Ljubanci. A Ljuboten, il n'y a pas de

22 population macédonienne. Vous n'avez pas lu l'intégralité du paragraphe,

23 donc vous avez raison. Dans les villages de Radisani et Ljubanci, si vous

24 dites Ljubanci, vous entendez Ljubanci et Radisani et si vous parlez de

25 Radisani, alors vous parlez aussi de Ljuboten et Ljubanci parce que tous

26 ces villages se trouvent dans un même périmètre de 2 kilomètres. Si vous

27 regardez une carte de la région, tout cela sera beaucoup plus clair.

28 Q. D'accord. Donc si le président était effectivement soucieux, Monsieur

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1 Keskovski, que des escarmouches entre groupes ethniques aient des

2 conséquences négatives sur la signature des accords, serait-il logique que

3 le président choisisse de verser l'huile sur le feu de ces problèmes

4 interethniques en ordonnant une opération dans le village de Ljuboten ?

5 R. La position du président et des dirigeants de l'Etat, en général,

6 pendant cette période, était que pour signer les accords- cadres et étant

7 donné la pression exercée par la population macédonienne pendant cette

8 période, les positions de l'armée de la République de Macédoine et des

9 forces de sécurité devaient être ramenées en deçà des lignes du 5 juillet

10 2001, c'est-à-dire, sous la menace des groupes terroristes albanais, faute

11 de quoi la situation serait restée très agitée et ça n'aurait pas facilité

12 la signature des accords-cadres. Je pense ne pas avoir été le seul à

13 l'avoir dit d'ailleurs. Je suis sûr que vous l'avez déjà lu à plusieurs

14 reprises.

15 Les opérations dont vous nous parlez font partie des efforts visant à

16 repousser les groupes terroristes albanais au-delà des lignes du 5 juillet

17 garanties par l'OTAN.

18 Q. Vous nous avez dit, Monsieur Keskovski, dans le paragraphe 53 de votre

19 déclaration, qu'après que le président se soit entretenu avec Ljube

20 Boskoski et lui ait dit et enjoint de calmer le jeu, que le président vous

21 avait prié de vérifier si vous connaissiez quelqu'un à Ljuboten; est-ce

22 exact ?

23 R. Il m'a demandé spécifiquement de prendre contact avec M. Tarculovski,

24 d'ailleurs je crois que c'est déjà dans ma déclaration, n'est-ce pas ?

25 Q. Sans doute, je sais ce qui est dans votre déclaration, mais là nous

26 sommes sur la partie de la déclaration où vous nous dites que le président

27 vous a demandé de vérifier si vous aviez à Ljuboten quelqu'un que vous

28 connaissiez ?

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1 R. Et ma déclaration poursuit et il m'a demandé plus particulièrement

2 d'entrer en contact avec M. Tarculovski, parce qu'en fait ce que vous me

3 demandez maintenant est en dehors du contexte de la phrase. Vous ne pouvez

4 pas me poser de questions comme cela.

5 Q. Je ne vous ai pas encore posé de questions, Monsieur Keskovski. Je me

6 contente de faire référence à votre de déclaration, à une partie spécifique

7 de votre déclaration.

8 Maintenant si le président, Monsieur Keskovski, maîtrisait une opération,

9 vous demanderait-il si vous connaissez quelqu'un à Ljuboten ?

10 R. Je désire préciser que je n'ai jamais dit à aucun moment que le

11 président maîtrisait cette opération. Vous cherchez à me faire dire quelque

12 chose que je n'ai pas dit. Autrement dit, c'est votre propre conclusion,

13 mais moi, ce n'est pas ce que j'ai dit.

14 Q. D'accord. Donc ce que vous nous dites maintenant c'est que le président

15 ne maîtrisait pas l'opération de Ljuboten ?

16 R. Je n'ai dit ni l'un ni l'autre. C'est vous que le dites. C'est vous qui

17 faites une déclaration pour l'instant. Je n'ai rien dit de tel. Vous avez

18 fait une conclusion et vous me demandez si cette conclusion est juste. Ce

19 que je vous dis, c'est que je n'ai rien dit de tel, je ne me suis pas

20 exprimé ainsi dans aucune de mes déclarations. Si vous choisissez

21 d'interpréter mes paroles de cette façon, c'est de votre responsabilité,

22 c'est votre conclusion. Ce n'est pas la mienne.

23 Q. Bon. Bien, je vais vous poser une question plus claire.

24 Pouvez-vous nous dire si le président maîtrisait cette opération à Ljuboten

25 ?

26 R. Je n'ai pas la possibilité de répondre à cette question.

27 Q. Et pourquoi ?

28 R. Comment voulez-vous que je vous réponde ?

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1 Q. C'est que vous ne savez pas ?

2 R. En effet, je ne sais pas.

3 Q. Bon. Vous nous avez également dit - et vous venez de nous dire il y a

4 quelques instants ou vous l'avez répété il y a quelques instants - que le

5 président vous a interrogé sur Johan Tarculovski dont le téléphone n'était

6 pas joignable pendant toute cette période. C'est ce que vous nous avez dit

7 au paragraphe 53 de votre déclaration.

8 Cela étant, Monsieur Keskovski, si Johan Tarculovski était censé faire son

9 rapport auprès du président sur la situation à Ljuboten, comment est-il

10 envisageable que Johan se soit mis hors de portée du président, ne soit pas

11 joignable ?

12 R. Pourquoi vous me posez cette question à moi ?

13 Q. Je vous pose cette question à vous parce que c'est mon travail. Mon

14 travail consiste à vous poser des questions, votre tâche consiste à y

15 répondre.

16 R. Mais moi je ne peux que faire des conjectures sur ce sujet. Je ne peux

17 pas vous donner de réponse précise ni exacte puisque cette question ne me

18 concerne pas.

19 Pourquoi Johan Tarculovski n'était-il pas joignable si le président

20 souhaitait le joindre, qu'est-ce que cela a à voir avec

21 moi ? Comment voulez-vous que je le sache ? Quelle connaissance puis-je

22 avoir sur ce sujet ?

23 Ma réponse c'est je n'en sais rien.

24 Q. Ce jour-là, comme vous nous l'avez dit au paragraphe 53 de votre

25 déclaration, vous n'aviez pas conscience qu'il se soit passé quoi que ce

26 soit d'autre à Ljuboten, n'est-ce pas ?

27 R. En effet.

28 Q. Après le 13 août, après la signature des accords d'Ohrid, ce jour-là

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1 Johan Tarculovski est revenu au travail, comme vous nous l'avez déclaré,

2 quelques jours plus tard, il est revenu au travail et vous avez entendu

3 dire ultérieurement, et vous nous l'avez également dit, vous avez entendu

4 dire par les medias que Johan Tarculovski avait été impliqué dans les

5 événements de Ljuboten. C'est ce que vous nous avez dit dans votre

6 témoignage, n'est-ce pas ?

7 R. Bien plus tard, nettement plus tard. Voilà ce que je vous ai dit. Pour

8 être précis, dix mois plus tard.

9 Q. D'accord. Donc dix mois plus tard, vous avez entendu dire pour la

10 première fois que Johan Tarculovski aurait été impliqué dans l'opération de

11 Ljuboten. Vous l'avez appris par les médias, n'est-ce pas ?

12 R. En effet, c'est cela.

13 Q. Et d'après vos dires, vous l'avez interrogé sur cette implication, sur

14 ce que les médias qualifiaient de son implication dans cette opération, et

15 qu'il l'avait nié, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, en effet.

17 Q. Le président n'a-t-il pas également interrogé Johan Tarculovski sur son

18 implication dans l'opération de Ljuboten, Monsieur Keskovski ?

19 R. Cela s'est produit au moment et au même endroit.

20 Q. Pour bien clarifier ce que vous nous dites, je vous demanderais de

21 jeter un coup d'œil au paragraphe 57 de votre déclaration.

22 L'avez-vous sous les yeux ?

23 R. Oui, oui.

24 Q. Vous nous disiez dans ce paragraphe 57 : "A la question avais-je

25 demandé à Johan Tarculovski de commenter le fait que certains journaux le

26 décrivait comme lourdement impliqué dans les événements de Ljuboten, il m'a

27 répondu brièvement que c'étaient des âneries, et qu'il n'avait pas bougé de

28 Ljubanci pendant toute cette période."

Page 10120

1 Vous nous avez ensuite dit : "Le président lui a également posé cette même

2 question en ma présence et Tarculovski lui a donné la même réponse."

3 Vous voyez cette partie du texte ?

4 R. En effet. C'est ce que j'ai dit et c'est ce que je redis.

5 Q. Donc le président a directement interrogé Johan Tarculovski s'il avait

6 été impliqué dans l'opération de Ljuboten, n'est-ce pas ?

7 R. Comme je vous l'ai déjà dit, cela s'est passé au même moment, au même

8 endroit. Ça n'était pas deux réunions différentes, deux occasions

9 différentes. C'était quelque chose de tout à fait informel. Nous nous

10 trouvions avec Johan Tarculovski et nous lui avons posé la question,

11 directement : Les journaux disent que tu étais impliqué, l'étais-tu

12 vraiment ? Et il nous a répondu que c'étaient des histoires. C'est tout.

13 C'est tout ce qui s'est passé. C'est tout ce que je lui ai demandé et c'est

14 tout ce que j'ai vu le président lui demander. Je ne sais rien de plus.

15 Q. Bon. Je vais maintenant passer à un autre sujet.

16 En 2001, Monsieur Keskovski, vous avez ordonné à vos subordonnés dans le

17 secteur de prendre contact avec vous avant de chercher à contacter un autre

18 membre quelconque du ministère de l'Intérieur; est-ce exact ?

19 R. Non. Ce n'est pas un ordre qui date de l'an 2000. C'est un ordre qui

20 date du début du fonctionnement du groupe de sécurité du président.

21 Q. Bon.

22 R. Il s'agit d'un ordre général et bien antérieur à tout cela.

23 Q. D'accord. Donc il y avait un ordre général que vous aviez émis à

24 l'intention de vos subordonnés, peut-être même avant 2001, enjoignant à vos

25 subordonnés de prendre contact avec vous avant de chercher à joindre

26 n'importe quelle autre personne du ministère de l'Intérieur; c'est bien

27 cela ?

28 R. Non. Il ne s'agissait pas des autres personnes du ministère de

Page 10121

1 l'Intérieur. J'ai déclaré très précisément de quoi il retourne. Je l'ai dit

2 très clairement. Toutes nécessités individuelles pour un membre du secteur

3 des affaires internes et pour les membres de notre groupe du ministère de

4 l'Intérieur ou de la Défense concernant des besoins personnels ou privés,

5 doivent être adressées d'abord à notre secteur et passer par notre secteur

6 pour contacter le ministère de l'Intérieur. Ceci étant lié à des raisons de

7 sécurité, faute de quoi il aurait pu se produire des fuites d'information

8 entre deux ministères qui ne sont pas de même nature, des informations du

9 cabinet du président auraient pu faire l'objet de fuites. Cela s'était

10 produit antérieurement, en l'an 2000 plus précisément, et c'est pourquoi

11 nous avions pris cette déclaration en concertation avec le président.

12 Q. Bien, si nous pouvons maintenant faire référence au paragraphe 30 de

13 votre déclaration, Monsieur Keskovski, vous nous y avez dit - c'est la

14 deuxième phrase plus précisément du

15 paragraphe 30 :

16 "Mon personnel avait l'obligation de prendre contact avec moi avant de

17 chercher à contacter un autre membre quelconque du personnel du ministère

18 de l'Intérieur, y compris le ministre de l'Intérieur lui-même. Toutes les

19 demandes devaient passer par moi. J'étais la seule personne responsable et

20 la seule personne pouvant répondre au ministère de l'Intérieur en ce qui

21 concerne les affaires relatives à la sécurité du président."

22 Tout cela est exact ?

23 R. C'est bien ce que je vois écrit. C'est ce que j'ai dit. C'est ce que

24 vous nous lisez. C'est exactement cela et cela me semble très précis.

25 Q. Donc pour toutes questions relatives à la sécurité, votre personnel

26 devait passer par vous avant d'entrer en contact avec d'autres personnes du

27 ministère de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

28 R. Oui, c'est vrai. Mais je peux vous le répéter. Il s'agit de leurs

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1 besoins personnels. Autrement dit, s'il s'agissait des activités régulières

2 du secteur, alors ils pouvaient avoir les contacts réguliers avec d'autres

3 services qui se trouvaient impliqués dans nos opérations. Si c'était

4 quelque chose de normal, ils n'avaient pas besoin de me contacter pour

5 demander à pouvoir contacter la première ligne ou la police de la

6 circulation, par exemple, tout ce qui était de l'ordre du quotidien.

7 Q. Donc quand vous nous parlez de leurs besoins personnels, qu'entendez-

8 vous par là ?

9 R. Les besoins personnels d'un employé d'une institution, quels qu'ils

10 soient. Il y a différentes questions qui relèvent en fin de compte du

11 ministère.

12 Q. Vous pouvez nous donner un exemple ?

13 R. Si une personne se trouve à avoir un contrat d'un certain grade

14 requérant, par exemple, simplement le baccalauréat, et s'ils veulent voir

15 reconnaître le fait qu'ils ont en fait une formation supérieure, qu'ils ont

16 acquise entre-temps, alors il faut en faire la demande au ministère. Mais

17 avant de demander au ministère de faire enregistrer cette formation

18 supplémentaire, alors il fallait qu'ils nous posent la question d'abord et

19 c'est nous qui, par les canaux officiels, transmettions la demande au

20 ministère. C'est un exemple.

21 Q. D'accord. Donc si je comprends ce que vous nous dites, vous voulez dire

22 que --

23 R. Je peux aussi vous donner un autre exemple d'ailleurs.

24 S'ils voulaient un équipement, quel qu'il soit, il fallait d'abord qu'ils

25 nous le disent qu'ils avaient besoin de tel ou tel équipement, ensuite

26 s'adresser au ministère de l'Intérieur pour que cet équipement leur soit

27 fourni. C'est un autre exemple.

28 Je ne vous parle pas d'un équipement personnel. Ça peut être un poste

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1 de radio, par exemple, cassé ou quelque chose comme ça.

2 Q. Donc pour ce qui est de questions d'emploi, de ressources

3 humaines, ce genre de chose, ou de matériel, alors il fallait que cela

4 passe par vous. C'est cela que vous voulez dire, n'est-ce pas ?

5 R. Tout à fait.

6 Q. Et ce, parce que vous vouliez faire en sorte que la chaîne de

7 commandement soit dûment respectée, n'est-ce pas ?

8 R. Pardon. Je vous l'ai déjà dit. Il s'était produit en l'an 2000 des

9 incidents de fuite d'informations provenant du bureau du président, et

10 c'est pour cette raison --

11 Q. Monsieur Keskovski, j'ai parfaitement entendu votre réponse. Maintenant

12 je vous pose une autre question à laquelle j'aimerais, s'il vous plaît, que

13 vous répondiez.

14 R. Vous me demandez quelque chose d'autre ? Vous me demandez si cet ordre

15 était lié au fait que je voulais faire respecter la chaîne de commandement.

16 Bien, je vous réponds, la raison pour laquelle j'ai émis cet ordre était

17 qu'avant que cette instruction soit en place il y avait eu en l'an 2000 des

18 contacts entre les membres du secteur de la sécurité du président et

19 d'autres secteurs, ce qui leur permettait de communiquer avec d'autres

20 institutions au sein du ministère. Je vous ai expliqué pourquoi j'ai émis

21 cet ordre et pourquoi cette procédure devait être suivie. D'ailleurs

22 c'était une procédure qui ne s'appliquait pas exclusivement au ministère de

23 l'Intérieur mais aussi au ministère de la Défense. Il me semble l'avoir

24 déjà parfaitement clarifié.

25 Q. Bon. Lorsque les employés de votre unité ou secteur n'étaient pas en

26 service, ils ne devaient pas nécessairement vous informer de toutes leurs

27 activités lorsqu'ils étaient en privé ou en congé, n'est-ce pas ?

28 R. Si cela n'avait rien à voir avec le service, en effet, tant que cela

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1 restait de nature privée, ils n'étaient pas censés m'en informer,

2 naturellement.

3 Q. Donc vous ne saviez pas avec qui ils communiquaient peut-être lorsqu'il

4 s'agissait d'activités qui étaient en dehors du périmètre de leur service ?

5 R. Non.

6 Q. Alors si un membre de votre unité était, par exemple, en contact avec

7 un membre de l'équipe de sécurité du premier ministre, vous n'en seriez pas

8 nécessairement tenu au courant, n'est-ce pas ?

9 R. En effet, c'est tout à fait exact.

10 Mme ISSA : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous passions à la

11 pièce P369, intercalaire 12 du classeur. Et peut-être serait-il plus facile

12 de voir d'emblée la version en macédonien sur le prétoire électronique.

13 Q. Pour la greffière, je devrais commencer par la version du prétoire

14 électronique. Il s'agit de la page 22, N000-7433, 022, version anglaise et

15 macédonienne.

16 Bien, Monsieur Keskovski, Il s'agit là d'un relevé de communications

17 téléphoniques dont on pense qu'il appartenait à Johan Tarculovski.

18 Il s'agit d'un relevé des coups de fil passés par Johan Tarculovski. Je

19 vous demanderais de jeter un coup d'œil à la page 22 de la version papier.

20 Vous pouvez plus simplement dérouler sur votre écran, mais ça devrait être

21 21 de la version papier.

22 Si vous voulez maintenant jeter un coup d'œil à la troisième ligne à partir

23 du bas de cette même page. Sur ce relevé, il apparaît que Johan Tarculovski

24 a passé un coup de fil à Vlatko Stefanovski le 19 août 2001.

25 Le voyez-vous cette case ?

26 R. Oui, je la vois.

27 Mme ISSA : [interprétation] Si vous voulez bien maintenant passer à la page

28 58 du prétoire électronique, version anglaise et macédonienne. Et à la page

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1 3 des appels entrants sur la version papier.

2 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Mettraux.

4 M. METTRAUX : [interprétation] Excusez-moi, je suis désolé d'intervenir.

5 Nous voudrions simplement demander à Mme Issa de nous dire sur quoi

6 l'Accusation s'est appuyée pour dire que cet appel téléphonique était

7 adressé à M. Stefanovski, et si en fait elle s'appuie uniquement sur le

8 document que nous avons ici sous les yeux, le témoin aussi. Il y a

9 certaines choses que je ne peux pas nécessairement évoquer en présence du

10 témoin, mais est-ce que

11 Mme Issa pourrait nous le préciser.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne pense pas qu'il convienne à

13 cette fin d'interrompre le contre-interrogatoire, Maître. Mme Issa se sert

14 d'une pièce déjà versée au dossier et qui a été utilisée jusqu'à présent à

15 cette fin.

16 Poursuivez, Madame Issa.

17 Mme ISSA : [interprétation]

18 Q. Prenez la onzième ligne, s'il vous plaît, à partir du haut - je parle

19 de la page affichée à l'écran - regardez, ici nous avons d'après le relevé

20 un appel passé à un numéro qui était celui de Johan Tarculovski et un appel

21 fait par quelqu'un qui faisait partie de la sécurité du premier ministre le

22 11 août 2001.

23 Vous voyez ?

24 R. Oui.

25 Q. Peut-on afficher la page suivante.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître.

27 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Est-ce qu'on peut utiliser le terme de

28 "téléphone ou numéro de téléphone utilisé par

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1 M. Tarculovski."

2 Elle l'avait déjà fait à la page 23. Est-ce qu'elle peut s'abstenir de le

3 faire ?

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais je pense que le contre-

5 interrogatoire peut se poursuivre. Ou vous, comme Me Mettraux, vous tenez à

6 évoquer des arguments que vous pourriez utilement évoquer après, à un autre

7 moment qu'au moment du contre-interrogatoire.

8 Poursuivez, Madame Issa.

9 Mme ISSA : [interprétation]

10 Q. Vers la onzième ligne à partir du haut à cette page suivante, nous

11 voyons un appel entrant ou reçu. C'est ce qu'indique le relevé, c'est un

12 appel qui vient de la sécurité du premier ministre et le destinataire c'est

13 le numéro de Johan Tarculovski.

14 Vous le voyez ?

15 R. Oui.

16 Q. Monsieur Keskovski, est-ce que vous saviez que M. Tarculovski était en

17 contact avec M. Vlatko Stefanovski et la sécurité du premier ministre ces

18 fois-là ?

19 R. Non, je ne le savais pas.

20 Mme ISSA : [interprétation] Peut-on afficher la page 44.

21 Q. Regardez vers le milieu de la page, Monsieur le Témoin. D'après ces

22 relevés, M. Johan Tarculovski a passé un appel téléphonique à M. Goran

23 Stojkov le 4 août 2001.

24 Vous le voyez ?

25 R. Non, je ne le vois pas. Parce que j'ai deux documents en même temps sur

26 l'écran, et du coup je ne vois pas autre chose que les numéros.

27 Mme ISSA : [interprétation] Est-ce que je peux demander à l'huissière de

28 montrer uniquement un des documents.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, je peux tout voir. Merci.

2 Mme ISSA : [interprétation]

3 Q. Je vais enfin demander à Mme la Greffière d'afficher la page 47 en

4 macédonien. Ce sera la page 46 pour la copie papier en anglais.

5 En bas de page, nous avons plusieurs appels. D'après le relevé, ce sont des

6 appels qui viennent du téléphone de M. Tarculovski et qui sont adressés à

7 M. Goran Stojkov le 6 août 2001.

8 Vous le voyez ?

9 R. A mon avis, ce n'est pas la bonne page. Oui, maintenant je vois, c'est

10 bon.

11 Q. Est-ce que vous saviez que M. Tarculovski avait eu des contacts avec M.

12 Goran Stojkov au cours de cette période ?

13 R. Non, je ne le savais pas.

14 Q. Au cours de cette période, nous sommes là au mois d'août 2001, Goran

15 Stojkov travaillait dans l'unité chargée de la sécurité du premier

16 ministre, n'est-ce pas ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Vous nous avez expliqué que M. Tarculovski avait pour mission de

19 s'assurer de la sécurité de la première dame du pays dans ces déplacements,

20 c'est-à-dire, c'était sa fonction au sein de votre secteur, n'est-ce pas ?

21 R. C'est exact.

22 Q. Et il rendait compte de tout ce qui avait trait à la sécurité de cette

23 personnalité et il ne rendait compte directement à vous, à vos adjoints,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Il informait M. Jarcev, moi-même ou mes adjoints.

26 Q. Dans le service où il avait travaillé à ce moment-là, il avait plus de

27 souplesse dans ses heures de travail, parce que le niveau de sécurité de la

28 première dame du pays était quand même beaucoup plus faible que celui du

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1 président ?

2 R. [aucune interprétation]

3 Q. Et pour ce qui est de ses heures de travail, de ses horaires, c'était

4 établi non pas par vous, mais par celui qui avait une responsabilité de ce

5 service-là dans ce secteur, n'est-ce pas ?

6 R. Pas régulièrement, mais en fonction des circonstances quand c'était

7 nécessité ou demandé par le président, oui, je m'en occupais. Mais de façon

8 générale ou régulière, non, je ne m'en occupais pas.

9 Q. Etant donné qu'il avait plus de souplesse dans ses horaires de travail

10 dans ce service, il arrivait à Tarculovski et à d'autres membres de ce

11 service de travailler deux ou trois jours d'affilée, après quoi ils avaient

12 deux, trois jours de repos, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, c'est exact.

14 Q. Hier, page 10 034 du compte rendu d'audience, on vous a demandé s'il

15 était exact de dire que M. Tarculovski avait la responsabilité de la

16 sécurité de l'épouse du président au cours de ses déplacements privés comme

17 officiel, c'était la question posée, vous avez répondu à cette question par

18 l'affirmative.

19 Vous vous en souvenez ?

20 R. Oui, c'est exact.

21 Q. Veuillez consulter le paragraphe 19 de votre déclaration préalable.

22 Ce que vous avez dit aux enquêteurs dans le cadre de cette déclaration

23 préalable, vous avez dit ceci :

24 "En ce qui concerne les fonctions de Johan Tarculovski pour la sécurité de

25 la première dame du pays, j'aimerais dire que dans ce service où il

26 travaillait, l'horaire de travail était déterminé par les membres de ce

27 service, puisque le niveau de sécurité était beaucoup plus faible que celui

28 du président, donc il avait beaucoup plus de souplesse. Il travaillait deux

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1 ou trois jours, puis il avait deux ou trois jours de repos. Il avait pour

2 mission de suivre et d'assurer la sécurité de tout déplacement de la

3 présidente, et il n'a jamais été l'inspecteur de sécurité direct du

4 président d'alors."

5 Nous allons prendre après ce paragraphe, le paragraphe 23. Voici ce que

6 vous dites au paragraphe 23 : "Je ne me souviens pas où la première dame

7 était à cette époque." Quand on dit cette époque, il faut lire le

8 paragraphe précédent, dernière phrase, c'était en août. Je poursuis le

9 paragraphe 23.

10 "Je me souviens simplement qu'en juin/juillet, début août 2001, elle se

11 trouvait à Londres, elle est revenue brièvement pour partir plus tard en

12 Turquie. Mais je ne me souviens pas de son itinéraire exact, pourtant il

13 était facile de vérifier ses déplacements en s'enquérant auprès du

14 ministère de l'Intérieur et plus exactement au poste de police responsable

15 des postes-frontières en Macédoine. Puis vous dites ceci :

16 "Tarculovski n'était pas avec elle quand elle était à l'étranger. Je

17 me souviens que je l'ai vu - je parle de Johan Tarculovski - à Ohrid, mais

18 je ne me souviens pas quand exactement. J'ai donné aux hommes davantage de

19 temps de repos, puisque l'épouse du président n'était pas dans le pays. Ils

20 pouvaient se reposer davantage. Mais quand il était à Ohrid avec l'équipe,

21 Johan Tarculovski n'a pas reçu d'ordre particulier de ma part."

22 Vous voyez ?

23 R. Oui.

24 Q. Je vous demande dès lors une précision. Johan Tarculovski n'a pas

25 accompagné l'épouse du président au cours de cette période-là, lorsqu'elle

26 s'est trouvée à l'étranger, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, c'est ce que je pense au cours de ces déplacements, puisqu'ils

28 étaient d'un caractère particulier. Il n'y a aucun membre de l'équipe

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1 chargée de la sécurité de l'épouse du président qui l'accompagnait. C'est

2 certain pour la Grande-Bretagne, parce que c'était le service MI-6 qui

3 avait organisé la sécurité de cette personnalité à l'époque.

4 Q. Merci.

5 R. Personne ne savait si elle se trouvait en Macédoine ou pas.

6 Q. Je vous remercie. Passons à un autre sujet.

7 A divers moments de votre déposition, vous avez déclaré que vous

8 étiez allé à Vaksince, à Tetovo, entre autres endroits, et que vous y avez

9 recueilli des renseignements pour le président; est-ce exact ?

10 R. J'ai dit qu'après avoir reçu un ordre du président j'ai été à plusieurs

11 endroits, Tetovo, Aracinovo, la région de Lipkovo, Lipkovo-Kumanovo, et

12 j'avais l'ordre de faire rapport de ce qui se passait sur le terrain, ce

13 qui voulait dire que, si je puis dire, j'ai communiqué avec des officiers

14 de l'armée, de la police, et que je devais rendre compte de l'évolution des

15 activités effectuées suite à des ordres donnés.

16 Q. D'accord.

17 R. Je n'ai pas dit que c'était pour recueillir des renseignements. Cela

18 n'a pas été possible puisqu'on était en situation de crise.

19 Q. Pourtant vous nous dites que vous aviez été dépêché par le président

20 aux fins précises de recueillir pour lui des renseignements et de les lui

21 rapporter dans le cadre de tout ce qui se passait dans ces régions que vous

22 venez d'énumérer, n'est-ce pas ?

23 R. Oui, c'est exact.

24 Q. A l'époque, en 2001, Monsieur Keskovski, il y avait un service chargé

25 du renseignement au gouvernement, chargé de recueillir des renseignements

26 sur des questions importantes à l'époque, n'est-ce pas ?

27 R. C'est exact.

28 Q. L'armée a son propre renseignement. Ce service s'appelle

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1 G-2, non ?

2 R. C'est le secteur chargé de la sécurité, ou plutôt, du renseignement

3 militaire.

4 Q. Quant au ministère de l'Intérieur, il a son propre service du

5 renseignement qui s'appelle DBK, n'est-ce pas ?

6 R. Je pense qu'à la question précédente vous me posez une question à

7 propos des services de renseignements. Ici, il s'agit d'un service sous la

8 tutelle du président, alors la question suivante concerne sans doute le DBK

9 qui fait partie du ministère de l'Intérieur, mais le DBK ne s'occupe pas du

10 renseignement mais du contre-renseignement, contre-espionnage.

11 Q. Toutes ces agences sont chargées de recueillir des renseignements,

12 notamment à l'époque, à propos de la crise, et tous ces services étaient

13 actifs. Alors vous, vous affirmez que le président vous aurait chargés,

14 vous et d'autres personnes de votre secteur comme, par exemple, Johan

15 Tarculovski, vous aurait chargés, disais-je, de faire du travail de

16 renseignement pour lui, c'est ce que vous dites ?

17 R. Pour ce qui est de ce que vous voulez me demander, je peux vous

18 répondre précisément. Tous ces services que vous avez cités recueillaient

19 des renseignements, et une fois par jour ou une fois par semaine ils

20 donnaient des informations aux institutions sur la situation prévalant sur

21 le terrain. Le président m'avait chargé d'une mission qui concernait une

22 opération concrète où je devais recueillir des renseignements pour lui sur

23 le terrain. Je le répète, je n'ai pas recueilli des renseignements à propos

24 d'opérations en général. Une fois de plus, je parle d'opérations, je ne

25 parle pas de recueillir des renseignements sur le terrain. Ça c'est une

26 activité de longue haleine. Il m'avait envoyé sur le terrain pour faire

27 état des activités qui s'y passaient surtout pour l'affaire d'Aracinovo. Il

28 m'a envoyé dès le début de l'action pour savoir quelles étaient les

Page 10133

1 positions de l'armée et de la police à Brnjanci. De là j'ai pris contact

2 avec lui. Je lui ai donné le commandant de l'unité spéciale de l'unité pour

3 qu'il lui donne directement des informations sur la situation présente sur

4 le terrain. C'était ça ma mission. A mon retour, je lui ai fait rapport. Je

5 lui ai dit que l'action d'Aracinovo ne réussirait pas, et ça dès vendredi,

6 ainsi de suite.

7 Je pense être très précis dans la réponse que je vous donne.

8 Q. Monsieur Keskovski, est-ce que ce n'est pas l'armée qui fait rapport

9 d'opérations qui se déroulent sur le terrain ?

10 R. Le président avait des renseignements selon lesquels ce qui se passait

11 sur le terrain n'avait pas été fidèlement rapporté. Je pense que c'est pour

12 ça que Pande Petrovski a été démis de ses fonctions qui étaient celles de

13 chef du Grand état-major. Je l'ai dit de façon précise hier. C'est pour ça

14 qu’il était nécessaire d'avoir des contacts directs, et quand je dis

15 "directs," je veux dire sans passer par des intermédiaires, contacts

16 directs pour être ses yeux à lui sur le terrain.

17 Q. Est-ce que ce n'était pas le ministère de l'Intérieur qui faisait

18 rapport, qui rendait compte de ce qui se passait sur le terrain ?

19 R. Je pense que vous ne me comprenez pas ou que vous ne voulez pas me

20 comprendre. Je vous parle de maintenant. S'il y a maintenant une opération,

21 c'est maintenant que je dois faire rapport. Je ne dois pas écrire un

22 rapport sur le fonctionnement ou les activités de d'opération. Ce sont deux

23 choses différentes ici.

24 Q. Et si le président voulait un rapport précis sur une opération, est-ce

25 que, par exemple, il n'aurait pas pu passer un coup de fil au chef du Grand

26 état-major pour peut-être obtenir de lui un rapport sur ce qui se passait

27 sur le terrain ?

28 R. Il est certain qu'il l'a fait, cependant il pensait qu'il voulait

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1 savoir directement ce qu'il en était de la bouche de personnes en qui il

2 avait la plus grande confiance, quelqu'un qui soit à la fois ses oreilles

3 et ses yeux sur le terrain. C'est pour ça qu'il m'a envoyé à Aracinovo. De

4 cette façon, il pouvait rester en contact avec les commandants et pas

5 seulement avec ceux qui dirigeaient l'opération, mais aussi avec des autres

6 commandants qui se trouvaient sur le terrain dans le cadre de l'opération.

7 Q. Est-ce que le président ne pouvait pas ou n'aurait pas pu contacter le

8 ministre Ljube Boskoski pour obtenir de lui ces informations de ce qui se

9 passait sur le terrain ?

10 R. Sans nul doute l'a-t-il fait, il a appelé Boskoski, le chef d'état-

11 major, le ministre de la Défense, mais il m'a quand même envoyé moi aussi

12 sur le terrain. J'y ai presque été touché par une balle. J'ai passé quatre

13 heures dans une embuscade à Aracinovo. Il ne m'aurait pas envoyé pour

14 risquer ma vie dans ces affrontements si cela n'avait pas été nécessaire

15 parce que ce n'était pas dans mon descriptif d'emploi. C'est un ordre du

16 président.

17 Q. Et le président ne faisait pas vraiment confiance à Boskoski pour

18 obtenir directement ces informations ? C'est pour ça qu'il vous a envoyé

19 vous plutôt que s'adresser à lui ?

20 R. Impossible à répondre à cette question. Comment est-ce que je pourrais

21 vous dire si le président faisait confiance ou non à M. Boskoski ?

22 Q. Vous venez de nous dire que le président vous a envoyé vous plutôt que

23 de chercher à obtenir ses renseignements de toutes ces autres organisations

24 qui auraient pu le faire, car avez-vous dit, il avait besoin de quelqu'un

25 en qui il pouvait avoir confiance; c'est bien ça, n'est-ce pas ?

26 R. C'est tout à fait exact, et j'ai dit qu'il voulait établir un contact

27 avec des commandants qui commandaient directement sur le terrain, pas

28 exactement avec les chefs ou le commandement supérieur. Je suis sûr qu'il a

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1 eu des contacts avec tous ces gens-là, le ministre de l'Intérieur, le

2 ministre de la Défense ainsi qu'avec le chef du Grand état-major.

3 Q. Est-ce qu'il ne faisait pas, par exemple, confiance au ministre

4 Boskoski, est-ce qu'il ne pensait pas que ce dernier pouvait lui rendre

5 compte de façon fidèle et précise de ce qui se passait sur le terrain ?

6 R. Il faisait confiance au ministre Boskoski, car je vous l'ai déjà dit,

7 il l'avait envoyé déjà auparavant à d'autres endroits. Il faisait aussi

8 confiance au ministre Buckovski, puisqu'il était en contact avec lui et lui

9 donnait des renseignements. Je suppose qu'il faisait aussi confiance à M.

10 Pande Petrovski, puisqu'ils étaient en contact quotidien, mais ces trois

11 personnes ne sont pas du tout en rapport avec la mission qu'il m'avait

12 confiée. Je pense avoir été clair dans mes explications. Des renseignements

13 directs, ça ne veut pas dire que ça vient des commandants du terrain en

14 passant par les chefs de service dont ils font partie, puis que ça passe au

15 président. Il voulait être en contact direct pour savoir si ces gens

16 éprouvaient des difficultés dans l'exécution de l'action, pas seulement

17 avec la police mais aussi avec l'armée. Si vous me demandiez si le

18 président Trajkovski faisait confiance à M. Boskoski, vous devriez me

19 demander aussi s'il faisait confiance à M. Buckovski, au chef du Grand

20 état-major.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maintenant, vous avez la possibilité

22 d'intervenir, Maître Mettraux.

23 M. METTRAUX : [interprétation] Manifestement, ma consoeur ne lui a pas fait

24 un dessin, mais je comprends qu'elle veut soumettre une idée au témoin et

25 si elle veut le faire, elle doit le faire de façon équitable; dans la

26 question il y avait quelque chose qu'on pouvait sous-entendre, à savoir

27 qu'on avait envoyé M. Keskovski plutôt que quelqu'un d'autre là, c'est

28 déformer ce que le témoin a dit parce qu'il n'avait pas d'idée pour dire

Page 10136

1 qu'en fait il avait été envoyé là en plus. Je pense qu'il faut être juste

2 envers le témoin.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je dois le répéter une fois de plus.

4 Si la Chambre pense que le témoin risque d'être induit en erreur par une

5 question posée, rassurez-vous, la Chambre interviendra. Mais lorsqu'une

6 question est posée que le témoin est parfaitement à même de maîtriser, nous

7 n'allons pas intervenir. Ce n'est pas nécessaire, ça ne fait que retarder

8 la procédure.

9 Ici nous avons un témoin qui est très clair, qui est à même de répondre

10 adéquatement aux questions, alors nous n'allons pas nous en mêler, parce

11 que le témoin a déjà montré -- laissez le témoin montrer ce qu'il veut dire

12 véritablement. Je pense qu'en fin de compte ça sera beaucoup plus utile et

13 qu'il y aura moins d'immixtion dans la procédure.

14 M. METTRAUX : [interprétation] Je vous remercie.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que le moment se prête bien à

16 une pause, Madame Issa ?

17 Mme ISSA : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Fort bien. Nous reprendrons les débats

19 à 11 heures.

20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

21 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Issa.

23 Mme ISSA : [interprétation]

24 Q. Avant que nous ne passions à un autre sujet, Monsieur Keskovski, je

25 souhaiterais revenir sur quelque chose. Vous aviez mentionné, juste avant

26 la pause ce matin, que lorsque le président vous envoyait sur le terrain,

27 on vous tirait dessus, vous passiez des heures et des heures dans le cadre

28 d'embuscades, et que cela ne correspondait pas à votre descriptif du

Page 10137

1 travail. Cela fait l'objet de la page 32 du compte rendu d'audience

2 d'aujourd'hui, lignes 6 à 12.

3 Vous vous en souvenez de cela ?

4 R. Je me souviens avoir dit cela et je me souviens des événements,

5 également.

6 Q. Donc parfois, du fait de la complexité de la situation en matière de

7 sécurité en 2001, des personnes telles que vous-même devaient effectuer des

8 fonctions, des tâches, qui ne correspondaient pas à leurs fonctions

9 normales, n'est-ce pas, qui dépassaient en quelque sorte la portée de ces

10 fonctions ?

11 R. Oui, c'est ce que j'ai dit. Nous avions les tâches qui nous revenaient,

12 mais - et ça, c'est dans un premier temps - mais sur ordre du président, il

13 y a d'autres fonctions et tâches qui sont devenues des fonctions et des

14 tâches qui nous revenaient, parce que le président en avait donné l'ordre.

15 Q. Bien. J'aimerais passer maintenant à un autre sujet.

16 Vous avez expliqué lors de l'interrogatoire principal, que le 11 août 2001

17 Johan Tarculovski vous avait appelé de Ljubanci et vous avait dit qu'il y

18 avait eu une action qui était prévue à Ljuboten, cela s'étant passé juste

19 après 17 heures, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, c'est exact.

21 Q. Comme vous l'indiquiez au paragraphe 39 de votre déclaration, vous lui

22 avez demandé ce que cela signifiait, et il a répondu qu'à Ljuboten il y

23 avait des fortifications faites par les terroristes.

24 Vous lui avez posé cette question, parce qu'à ce moment-là vous, vous ne

25 saviez pas ce dont parlait Johan, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, c'est cela.

27 Q. Donc Johan vous a dit que des unités de la police, ainsi que les unités

28 de l'armée, participaient aux préparatifs en vue de cette action, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous lui avez demandé quel était le problème, et il vous a expliqué

4 qu'il y avait un manque de coopération de la part d'un commandant de

5 l'armée, qu'il ne souhaitait pas se lancer dans cette action sans avoir

6 reçu les ordres, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, c'est exactement comme cela que les choses se sont passées.

8 Q. Mais c'est la première fois que vous, vous aviez entendu parler de

9 cette action, c'est au moment où Johan vous a appelé que vous en avez

10 entendu parler, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, c'est exact.

12 Q. Alors, hormis le fait relatif à ce commandant de l'armée, à part cela,

13 Johan n'a jamais mentionné de problèmes posés par quelqu'un d'autre, n'est-

14 ce pas ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Il n'a jamais évoqué de problèmes avec la police, n'est-ce pas ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Et la nature du problème avec ce commandant de l'armée était venue du

19 fait que ce commandant ne voulait pas se lancer dans une activité quelle

20 qu'elle soit tant que ce commandant n'avait pas reçu d'ordre émanant de ses

21 supérieurs; c'est cela ?

22 R. Oui, c'est tout à fait cela.

23 Q. Donc vous, vous avez demandé au commandant quel était son grade, vous

24 lui avez demandé qui était son supérieur immédiat, et ce commandant vous a

25 dit que son supérieur était le général Sokol Mitrevski, qui était l'aide de

26 camp du président, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, c'est tout à fait cela.

28 Q. Vous avez également demandé à ce commandant de l'armée si ce commandant

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1 obéirait à un ordre donné par le président; c'est

2 cela ?

3 R. Oui, oui, c'est exact.

4 Q. Et le commandant a répondu par l'affirmative; c'est cela ?

5 R. C'est exact.

6 Q. Vous dites au paragraphe 40 - et je pense que vous l'avez également dit

7 dans votre déposition - que vous aviez encore le téléphone à la main et

8 que, ce faisant, vous expliquiez la situation au président.

9 R. Oui, c'est tout à fait cela.

10 Q. D'ailleurs, vous avez dit que, lors de votre déposition, que le

11 président avait parlé à Johan Tarculovski avant de parler au commandant de

12 l'armée. Vous vous en souvenez de cela ?

13 R. Oui, oui. Oui, oui. Tout à fait.

14 Q. Mais si nous examinons le paragraphe 40 de votre déclaration, il n'y a

15 absolument rien dans ce paragraphe qui indique que le président a parlé

16 directement à Johan Tarculovski à ce moment-là.

17 R. Je me suis contenté de répondre aux questions qu'il me posait. Et je

18 continue à penser que ma déclaration est tout à fait valable.

19 Q. Lorsque le président a parlé au commandant Despodov, il lui a demandé,

20 à ce commandant, quel était son grade, et il lui a demandé qui était son

21 supérieur, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, précisément.

23 Q. Et vous, vous avez entendu le président dire au commandant qu'il allait

24 appeler Sokol Mitrevski, qui était le supérieur du commandant Despodov ?

25 R. Voilà ce qu'il a dit au commandant : Prenez toutes les actions qui sont

26 de votre compétence pour que l'opération militaire, ou l'action militaire

27 menée là-bas soit couronnée de succès, moi, je me chargerai de téléphoner

28 au général Sokol Mitrevski.

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1 Q. Bien. Donc le président voulait bien, voulait s'assurer du fait que

2 tout ordre qu'il allait donner soit donné en respectant la voie

3 hiérarchique, la chaîne de commandement. C'est pour cela qu'il a dit qu'il

4 téléphonerait au général Sokol Mitrevski ?

5 R. Le président avait déjà donné un ordre à un niveau plus subalterne, et

6 il a dit qu'il allait informer le général Sokol Mitrevski de l'ordre qu'il

7 avait donné.

8 Q. Alors pourquoi est-ce qu'il était nécessaire que le président informe

9 le général Sokol Mitrevski de cet ordre ?

10 R. Etant donné qu'il était le commandant suprême des forces armées de la

11 République de Macédoine, c'est pour cela qu'il l'a fait.

12 Q. En d'autres termes, le président voulait s'assurer que les échelons

13 supérieurs ou les grades supérieurs de la chaîne de commandement de l'armée

14 soient informés de la situation. Il voulait s'assurer que ces grades

15 supérieurs soient informés du fait que cet ordre avait été donné, n'est-ce

16 pas ?

17 R. Oui, c'est tout à fait cela.

18 Q. Le commandant Despodov était le commandant de l'armée et, comme vous

19 l'avez indiqué à l'instant, son supérieur était le général Sokol Mitrevski

20 ainsi que le général Stamboliski; est-ce exact ?

21 R. Oui. Oui, si vous suivez la voie hiérarchique, c'est cela.

22 Q. Lorsque vous avez parlé à Johan Tarculovski, est-ce que vous ne lui

23 avez pas demandé pourquoi le supérieur du commandant Despodov ne lui avait

24 pas donné l'ordre à Despodov de mener à bien cette action ?

25 R. Ce n'était pas la peine que je m'immisce, puisque le président avait

26 déjà émis ces ordres. En vertu de quoi est-ce que j'aurais posé ces

27 questions à Johan. Si c'est moi qui avais envoyé Johan sur le terrain,

28 peut-être que j'aurais posé la question. Mais je n'avais absolument pas le

Page 10141

1 pouvoir de l'envoyer sur le terrain, je n'avais absolument pas le pouvoir

2 de lui demander d'effectuer des tâches en fait la portée de ses fonctions

3 de travail qui étaient stipulées par la loi.

4 Q. Mais s'il y avait une action qui était organisée par le président,

5 action à laquelle participait d'ailleurs l'armée du président, pourquoi

6 est-ce que le général Stamboliski n'aurait pas contacté le président au

7 lieu que ce soit Johan Tarculovski qui contacte le président ?

8 R. Une fois de plus, je dirais que je ne comprends pas votre question.

9 Parce qu'il y a deux choses différentes. Vous me posez une question à

10 propos du général Stamboliski et de Johan Tarculovski. Alors là je ne vous

11 comprends pas du tout. Est-ce que vous auriez l'amabilité de reformuler la

12 question, de la répéter ou de la préciser ?

13 Q. S'il y avait une action qui avait été organisée par le président,

14 action à laquelle participait l'armée du président, pourquoi est-ce que le

15 chef d'état-major ou le supérieur du commandant Despodov, ou le général

16 Stamboliski, qui sont tous membres de l'armée, pourquoi est-ce qu'ils

17 n'avaient pas contacté le président à propos de ce commandant qui refusait

18 d'effectuer une action par opposition à Johan Tarculovski qui a contacté le

19 président ? Pourquoi est-ce qu'ils ne l'ont pas fait à la place de Johan

20 Tarculovski ?

21 R. Je pense que c'est une question qu'il faudra que vous posiez au

22 commandant Despodov ou à quelqu'un d'autre dont vous avez mentionné le nom.

23 C'est à eux que vous devez demander s'ils avaient été en mesure d'établir

24 ou de prendre le contact avec ses supérieurs. Moi, je ne peux pas répondre

25 à cette question. Je ne peux pas vous dire pourquoi est-ce que le

26 commandant n'a pas pu établir de contact pour qu'il suive la voie

27 hiérarchique et la chaîne de commandement.

28 Q. Mais ce jour-là, il n'y a pas eu d'autres prises de contact de la part

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1 de Johan Tarculovski et de la part de quelqu'un d'autre, d'ailleurs à

2 propos de cette question ?

3 R. Oui, tout à fait.

4 Q. D'après ce que vous savez ou d'après vos informations, le président,

5 lui, n'a pas contacté Sokol Mitrevski, n'est-ce pas ?

6 R. Pendant qu'il était avec moi ? Non, il ne l'a pas fait.

7 Q. En 2001, Monsieur Keskovski, lorsqu'une action était préparée par les

8 forces de sécurité, en général il s'agit d'un fait qui n'est pas porté à la

9 connaissance du grand public, n'est-ce pas ?

10 R. Oui, oui. Oui, oui, c'est exact.

11 Q. Et cela est la raison pour laquelle -- ou la raison en est plutôt,

12 qu'en 2001 les forces de sécurité avaient donné des ordres confidentiels

13 lorsqu'il y avait des plans visant des opérations, parce que si ces plans

14 ou si ces ordres étaient connus du grand public, ils auraient pu en fait

15 alerter l'ennemi et indiquer à l'ennemi qu'il y avait des forces de

16 sécurité qui se préparaient ?

17 R. Oui, c'était pour des raisons de sécurité. C'est ce que l'on peut

18 écrire.

19 Q. Donc les forces de sécurité, en d'autres termes, étaient extrêmement

20 prudentes pour ce qui était des informations qui auraient pu être

21 divulguées, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, c'est exact.

23 Q. Vous avez indiqué que lorsque Johan Tarculovski vous a appelé, il vous

24 a dit qu'il y avait un problème posé par un commandant de l'armée, Johan

25 Tarculovski ne vous a pas dit à vous qu'il participait à l'opération,

26 n'est-ce pas ?

27 R. Oui, c'est précisément cela.

28 Q. En fait, d'après ce que vous saviez, Johan se trouvait à Ljubanci,

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1 n'est-ce pas ?

2 R. Oui, exactement.

3 Q. Et après le 13 août, lorsque Johan est revenu au travail, une dizaine

4 de mois après, lorsque vous lui avez posé des questions à propos de sa

5 participation à l'action de Ljuboten, il a nié cela, n'est-ce pas ?

6 R. Oui. Oui, tout à fait.

7 Q. Si Johan Tarculovski n'a pas participé à cette opération, comment est-

8 ce que vous expliquez le fait que Johan Tarculovski savait qu'il y avait un

9 problème posé par le commandant Despodov ?

10 R. Je peux vous donner un exemple à titre d'illustration, un exemple qui

11 se fonde sur mon expérience, si vous m'y autorisez.

12 Q. Je ne vous demande pas de me donner un exemple. Je vous demande tout

13 simplement de m'expliquer comment se fait-il que Johan Tarculovski était

14 conscient qu'il y avait un problème, un problème posé par le commandant de

15 l'armée Despodov, un problème donc au sein de la chaîne de commandement

16 militaire ?

17 R. Lorsque j'ai été envoyé par le président de l'Etat à Aracinovo pendant

18 l'action menée, donc il s'agissait de s'emparer du village d'Aracinovo dans

19 la région de Brnjanci, on m'avait en fait attribué une tâche qui est assez

20 semblable à celle qui avait été confiée à M. Tarculovski eu égard à la

21 région de Ljubanci. D'après ce que j'ai entendu, d'après ce que je peux

22 subodorer, c'était assez semblable.

23 Lorsque je suis arrivé là-bas, le général, le commandant de l'unité

24 spéciale de la police a communiqué avec nous et il nous a dit qu'ils

25 avaient un problème, parce qu'ils n'avaient pas de char dans la région où

26 ils se trouvaient, où ils étaient actifs. Donc j'ai téléphoné directement

27 et personnellement au président, je l'ai informé du problème qui avait été

28 identifié afin qu'il soit mis au courant des problèmes que les commandants

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1 avaient sur ce terrain.

2 Dans ce contexte, il se peut que M. Tarculovski soit au courant de certains

3 problèmes qui s'étaient posés sur le terrain et qu'il s'agissait de

4 problèmes de coordination entre les forces de sécurité.

5 Q. Mais contrairement à la situation que vous venez de nous décrire,

6 Monsieur Keskovski, pour ce qui nous concerne, vous avez d'ailleurs

7 expliqué un peu plus tôt lors de votre déposition - et cela se trouve au

8 paragraphe 34 de votre déclaration - que le président avait demandé à Johan

9 Tarculovski de l'informer de la situation qui prévalait dans le village et

10 vous avez dit que le président était quand même inquiet, préoccupé du fait

11 qu'il y avait certaines perturbations dans ce village, n'est-ce pas ?

12 R. Non pas à propos des troubles ou des perturbations dans le village. Je

13 pense que je n'ai pas dit cela dans ma déclaration, lorsque nous parlons du

14 10 août 2001. Ce que j'ai dit, c'est que

15 M. Boris Trajkovski, le président, avait donné un ordre à M. Tarculovski,

16 il lui avait dit qu'alors qu'il allait se rendre au village de Ljubanci,

17 puisqu'il avait une affaire personnelle à régler là-bas, il lui a demandé

18 de s'y rendre et il lui a demandé de l'informer de la situation qui

19 prévalait sur le terrain étant donné que la situation n'était un secret

20 pour personne. Le public était informé également de cela. Et après l'action

21 menée par les terroristes albanais, après le meurtre de ces huit soldats,

22 il y avait des combats sporadiques qui opposaient les forces de sécurité

23 macédoniennes et les terroristes albanais dans le secteur du village de

24 Ljuboten.

25 Le président était préoccupé, parce qu'il y avait un potentiel d'escalade

26 de ce conflit, il y avait des menaces qui avaient été proférées selon

27 lesquelles la ville de Skopje allait être pilonnée, ce qui allait

28 véritablement compromettre la signature de l'accord- cadre d'Ohrid.

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1 Je pense que maintenant je vous ai fourni toutes les explications à ce

2 sujet.

3 Q. Mais si vous prenez le paragraphe 34, vous voyez que ce qui est indiqué

4 c'est que vous "avez entendu le président demander à Johan Tarculovski de

5 l'appeler le lendemain et d'informer le président à propos de la situation

6 dans le village. Le président était préoccupé que s'il y avait des

7 perturbations dans ce village, cela pourrait différer la signature de

8 l'accord d'Ohrid qui avait été prévue pour le lundi, 13 août 2001."

9 R. Si vous faites référence à des troubles tels que des protestations, je

10 ne suis pas d'accord. Il y a plusieurs soldats qui ont été tués le 10 août

11 et qui ont été tués par les terroristes albanais dans la localité de

12 Ljubotenski Bacila, il faut savoir qu'ils étaient originaux du village de

13 Ljuboten. Vous pouvez aisément imaginer la situation si vous avez plusieurs

14 personnes qui viennent du même village qui sont tuées, d'où les

15 préoccupations exprimées. Je ne vous ai pas dit qu'il y avait des

16 perturbations là-bas, ce que je voulais entendre c'est ce que je viens de

17 vous expliquer.

18 Le village de Ljuboten et le village de Ljubanci se trouvent à une distance

19 de 2 kilomètres.

20 Q. Monsieur Keskovski, dans ce que vous venez de nous dire, dans votre

21 déclaration il n'y a absolument rien qui indique que Johan Tarculovski a

22 été envoyé par le président afin d'obtenir des informations de la part des

23 forces qui se trouvaient sur le terrain afin d'obtenir directement des

24 informations de la part de ces

25 forces ?

26 R. Le président avait envoyé M. Tarculovski, l'avait envoyé là-bas, il lui

27 avait demandé de l'informer de la situation qui prévalait sur le terrain.

28 C'était un ordre assez général.

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1 Q. Monsieur Keskovski, en fait, vous êtes en train de nous dire que M.

2 Tarculovski était informé de l'opération, mais qu'il n'y a pas du tout

3 participé; c'est cela ?

4 R. J'ai dit ce que j'ai déjà déclaré dans ma déclaration et je tiens à ce

5 que j'ai dit. L'ordre du président était bien précis. Il lui a dit : Vas-y,

6 puisque de toute façon tu y seras, informe-moi de la situation qui prévaut

7 sur le terrain pendant que tu te trouves dans le secteur du village de

8 Ljubanci.

9 Q. Veuillez prendre l'intercalaire 7 du dossier des pièces à charge.

10 Mme ISSA : [interprétation] Ce sera la pièce P303 dans le prétoire

11 électronique.

12 Q. C'est un rapport militaire faisant état de la situation militaire dans

13 le secteur de la 3e Brigade de la Garde dans le village de Ljuboten, ce

14 rapport a été envoyé le 12 août 2001. Je pense que vous avez déjà vu ce

15 document, n'est-ce pas ?

16 R. Si vous me posez la question à moi, je vous dirais que non, je ne l'ai

17 jamais vu.

18 Q. Peut-être avez-vous vu l'autre rapport, mais peu importe.

19 R. Est-ce qu'on pourrait me montrer uniquement la version en macédonien ?

20 Q. Oui.

21 Mme ISSA : [interprétation] Madame la Greffière, est-ce que vous pouvez

22 faire dérouler ce texte afin que le témoin voit le paragraphe qui

23 m'intéresse. Merci.

24 Q. Regardez ce premier paragraphe du rapport, Monsieur Keskovski. Le 10

25 août 2001, à 9 heures 30 du soir, un groupe d'une quarantaine de personnes

26 est venu dans l'école du village de Ljubanci. Il avait à sa tête Johan

27 Tarculovski, puis on dit qu'il est chef de l'agence Kometa qui vient du

28 village de Ljubanci. Un certain temps s'écoule, après quoi davantage de

Page 10148

1 personnes sont arrivées et le groupe est passé à 60, 70 personnes. Un

2 camion du ministère de l'Intérieur est arrivé duquel on a sorti des armes,

3 des grenades et des bazookas qui ont été distribués. Les personnes étaient

4 en uniforme militaire. Ces personnes ont demandé au commandant Mitre

5 Despodov, qui était le commandant de la 3e Brigade de la Garde, de leur

6 donner un endroit où ils pourraient se loger dans le village de Ljubanci.

7 Ensuite, il est dit que le commandant Despodov leur avait demandé qui avait

8 donné cet ordre de venir et ils ont demandé si ceci était connu du

9 président et il était ajouté que personne ne devrait être au courant du

10 fait que ces personnes séjournaient là. Le commandant leur a demandé quel

11 était leur rôle et ils ont répondu qu'ils avaient reçu pour instruction

12 d'entrer dans le village de Ljuboten et d'y mener une opération de

13 nettoyage du terrain.

14 Donc si M. Tarculovski n'était pas impliqué dans cette opération, n'y

15 participait pas, comment se fait-il qu'il soit arrivé vers 21 heures 30 le

16 10 août avec d'autres personnes du ministère de l'Intérieur et qu'il y

17 avait un camion rempli d'armes du ministère de l'Intérieur ?

18 R. Comment voulez-vous que je réponde à cette question ? Ce n'est pas une

19 note officielle que j'ai rédigée. Il m'est impossible de répondre à cette

20 question. J'ai dit que je ne savais pas si

21 M. Tarculovski avait participé aux événements de Ljuboten. Maintenant, vous

22 présentez des éléments de preuve, par exemple, ici une note de service de

23 l'armée. Il m'est impossible de confirmer quoi que ce soit.

24 Q. Donc lorsque vous dites que vous ne saviez pas s'il participait à une

25 action, au fond vous vous appuyez pour dire cela sur ce que vous a dit

26 Johan lui-même; c'est ça, n'est-ce pas ?

27 R. Oui.

28 Q. Veuillez prendre la deuxième page.

Page 10149

1 Mme ISSA : [interprétation] Peut-on l'afficher à l'écran.

2 Q. Voilà le paragraphe qui dit : "Le samedi, 11 août 2001." Il commence

3 par ces mots.

4 Vous voyez ce paragraphe ?

5 R. Oui.

6 Q. Voici ce qui est dit : "Le samedi, 11 août 2001, les personnes

7 susmentionnées ayant à leur tête Johan Tarculovski ont mené une action de

8 reconnaissance dans le village de Ljuboten et ils ont…"

9 Il est dit ensuite ceci : "Vers 17 heures, Johan Tarculovski a demandé au

10 commandant Mitre Despodov de tirer sur cette cible dans le village qu'ils

11 avaient établie auparavant ensemble. Despodov n'a pas ouvert le feu sur

12 cette cible sans avoir des ordres qui auraient été approuvés par ses

13 supérieurs."

14 Vous voyez ce qui est écrit là ?

15 R. Oui.

16 Q. Ensuite voici ce qui est dit : "Vers 18 ou 19 heures, Johan a parlé au

17 président de l'Etat tout d'abord, ensuite c'est le commandant Despodov qui

18 a parlé au président, lequel lui a demandé s'il se trouvait sous le

19 commandement du général Sokol. Le commandant Despodov a répondu que oui, et

20 le président a dit : Fort bien. Je vais parler au général, après quoi je

21 vous rappellerai."

22 Vous voyez ce qui est écrit dans le rapport ?

23 R. Oui.

24 Q. Regardez le paragraphe suivant : Après 22 heures, le

25 11 août 2001."

26 Vous voyez ce passage ?

27 R. Oui.

28 Q. Il est dit : "Les personnes sus-citées du ministère de l'Intérieur sont

Page 10150

1 revenues et exigeaient des ordres de commencer l'action et ils ont pris

2 leurs distances par rapport à ceci alors que Johan Tarculovski avait

3 demandé à commencer cette action."

4 "Le commandant Despodov a aussi demandé l'autorisation, un ordre à l'appui

5 de l'action demandée par Tarculovski, même si un accord avait été obtenu

6 auparavant. Tarculovski a dit au commandant Despodov qu'il y aurait des

7 ordres venant du président ou de son entourage."

8 Vous voyez ?

9 R. Oui.

10 Q. Cette conversation, elle a eu lieu à 22 heures, le 11 août 2001. A en

11 croire ce rapport, Sokol Mitrevski n'avait toujours pas donné d'ordre; est-

12 ce exact ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Le rapport dit ceci : "Le dimanche, 12 août 2001, à

15 4 heures 30 du matin, Johan Tarculovski, en compagnie d'autres personnes,

16 des réservistes du ministère de l'Intérieur, ont entamé une action. Dès

17 après le début de l'action, le capitaine Grozdanovski a appelé le

18 commandant Despodov pour lui dire que l'action avait débuté.

19 Le rapport dit ensuite ceci : il est dit qu'ils ont appelé le commandant

20 Despodov, ont demandé l'appui pour tirer sur le bâtiment mentionné et le

21 commandant Despodov a donné son accord.

22 Vous voyez ce passage du rapport ?

23 R. Oui, je vois.

24 Q. Regardez le tout dernier paragraphe de ce rapport. Il dit que vers 8

25 heures --

26 R. Est-ce qu'on pourrait me montrer cette partie-là du texte à l'écran.

27 Q. Est-ce que c'est affiché maintenant ?

28 R. Oui.

Page 10151

1 Q. Tout à la fin, il est dit que : "Vers 8 heures du matin, le commandant

2 Despodov a appelé le commandant pour lui demander s'il avait reçu des

3 ordres du général Sokol Mitrevski pour qu'il y ait une action dirigée sur

4 le village de Ljuboten."

5 Vous voyez ce passage ?

6 R. Oui, je l'ai vu.

7 Q. Il est ajouté que le commandant avait répondu qu'il n'avait pas encore

8 reçu d'ordres, après quoi il a appelé lui-même le général Mitrevski lequel

9 a dit qu'il n'avait donné aucun ordre."

10 Vous voyez ce passage ?

11 R. Oui, j'ai vu.

12 Q. Prenons la page suivante. Si on regardait la toute première phrase de

13 cette page.

14 Mme ISSA : [interprétation] Ce n'est peut-être pas au début de la page,

15 c'est plutôt à la fin de la précédente. Peut-être en macédonien. Le passage

16 qui m'intéresse commence par les mots

17 suivants : "Vers 8 heures 30."

18 Voilà. Je pense que vous l'avez trouvé. Je vous remercie.

19 Q. Vers 8 heures 30, est-il dit, le commandant Despodov a de nouveau

20 appelé le commandant pour lui demander si ses supérieurs étaient au courant

21 de l'action qui avait été organisée et exécutée par le ministère de

22 l'Intérieur au village de Ljuboten. Et la réponse du commandant, c'est

23 qu'il n'est pas informé de l'action et qu'il va aller en personne sur place

24 pour trouver une solution à la situation. Après quoi, lorsque le commandant

25 a vu comment l'opération était effectuée par le ministère de l'Intérieur,

26 il a ordonné de mettre fin à cette action.

27 Est-ce que vous voyez ce passage ?

28 R. Oui.

Page 10152

1 Q. Ce qui veut dire que lorsqu'on arrive le 12 août à

2 8 heures 30 du matin, le commandant Despodov demande encore et toujours si

3 des supérieurs ont donné l'ordre ou pas; c'est bien cela, n'est-ce pas ?

4 R. Ce que vous me lisez, ce n'est pas une déclaration du commandant

5 Despodov. C'est une narration faite par quelqu'un qui relate les événements

6 survenus là alors qu'il n'était pas sur le terrain. De là à savoir si le

7 commandant Despodov a reçu ou pas cet ordre, ça c'est une question qu'il

8 faut poser à ce monsieur, lui-même. Le reste, ce sont des hypothèses

9 évoquées dans ce rapport. Ce n'est que de l'ouï-dire et vraiment de l'ouï-

10 dire. Il m'est donc impossible de répondre à votre question.

11 Le commandant Despodov a reçu l'ordre du président dans des activités

12 qui relevaient de ses compétences. C'est ce que j'ai entendu dire. Alors

13 moi, je ne sais pas ce que l'auteur de ce rapport a entendu dire. Ça c'est

14 autre chose.

15 Q. Je comprends bien que vous ne soyez au courant, mais il s'agit ici d'un

16 rapport envoyé par l'adjoint du chef de la sécurité de l'armée pour ce

17 secteur-là ?

18 R. Oui. Mais il relate quelque chose qui lui était raconté, alors que lui-

19 même n'était pas présent sur les lieux. Ce n'est pas la même chose. Moi, si

20 je vous relate quelque chose qui m'a été dit, on ne va pas nécessairement

21 comprendre ce que je vous dis de la même chose, ça pourrait être des

22 conjectures, des hypothèses, des suppositions. A ma connaissance, je dis,

23 il lui a aussi dit ceci, puis il répond. Celui qui a rédigé ce rapport a

24 parlé avec des individus partant de quoi il a établi ce rapport.

25 Q. Mais nous voyons ici aussi, Monsieur Keskovski, que le commandant

26 Kopacev [phon] a fait ceci, toutes les actions d'appui lorsqu'il s'est

27 rendu compte qu'un ordre n'avait pas été donné par les structures

28 supérieures de l'armée; c'est exact, n'est-ce pas ?

Page 10153

1 R. C'est ce qui est écrit. Quant à savoir si c'est vrai ou pas, impossible

2 de vous le dire puisque je n'étais pas là.

3 Q. J'aimerais maintenant que nous consultions l'intercalaire 8 de votre

4 classeur. Ce sera la pièce P304.

5 Deuxième page, le tout premier paragraphe, s'il vous plaît. Rappelez-vous

6 au moment de l'interrogatoire principal, c'est un rapport rédigé par un

7 certain commandant Kopacev.

8 Je précise que ce sera dans le prétoire électronique, la deuxième

9 page.

10 Le tout premier paragraphe : "Après 22 heures, ce même jour," à

11 savoir, le 11 août 2001. Nous venons de le voir dans le rapport précédent.

12 R. Excusez-moi, mais je ne le vois pas à l'écran. A l'écran, il est

13 dit : le 12 août à 16 heures 30 ou à 4 heures 30. C'est peut-être la page

14 précédent.

15 Q. Je pense que c'est la page N001-4677 pour ce qui est de la

16 version macédonienne.

17 Mme ISSA : [interprétation] Merci, Madame l'Huissière, de nous l'avoir

18 affichée.

19 Q. Vous voyez maintenant, Monsieur le Témoin ?

20 R. Oui, oui.

21 Q. Il est dit ceci : "Après 22 heures, ce même jour, les personnes

22 susmentionnées dirigées par Tarculovski sont revenues pour voir le

23 commandant Despodov à propos de l'action. Tarculovski leur a dit à tous que

24 l'action allait commencer à 4 heures 30 du matin, qu'il y ait appui de

25 l'armée ou pas."

26 Vous voyez ?

27 R. Oui.

28 Q. Puis il est dit ceci : "Le commandant Despodov a dit qu'il n'avait pas

Page 10154

1 le pouvoir d'ordonner un appui ou une action en appui."

2 Vous voyez ?

3 R. Oui.

4 Q. En dépit de ça, le commandant Despodov a pris toutes les mesures

5 nécessaires pour exécuter l'action et pour qu'elle soit couronnée de succès

6 au cas où elle serait approuvée par nous.

7 Vous voyez cela ?

8 R. Oui, je vois.

9 Q. Prenons l'intercalaire 42. C'est la pièce 1D00936, plus

10 particulièrement certaines pages. Madame l'Huissière, pourriez-vous donner

11 la version en macédonien et en anglais, nous les afficher à l'écran.

12 La première page, ce sera la page 17 en anglais 1D00-7925. Je devrais

13 préciser que c'est la page 17 en copie papier.

14 Il s'agit ici d'un entretien mené par les enquêteurs du bureau du Procureur

15 qui interrogeaient M. Sokol Mitrevski. Prenez la page 17, s'il vous plaît.

16 Il faudrait peut-être voir les pages précédentes. On pose une question à M.

17 Mitrevski à ce propos, à propos de cette action menée dans le village de

18 Ljuboten. Le contexte, il se présente à la page 15, 1D00-7923. Mitrevski

19 dit :

20 "Tout d'abord, j'aimerais dire," vers la ligne 6 du compte rendu, "que je

21 ne suis aucunement en rapport avec des événements de Ljuboten, que c'est

22 après les événements que j'en ai été informé par le commandant de la

23 Brigade de la Garde, plus exactement par le colonel Kopacev qui était le

24 commandant de la 1ère Brigade de la Garde et qui était en position en

25 surplomb du village de Ljuboten à l'époque. J'ai demandé au commandant en

26 personne à ce que me soit soumis un rapport contenant toutes les

27 informations…" puis le rapport se poursuit.

28 Page 17, Sokol Mitrevski explique, c'est en haut de la page à la ligne 2 :

Page 10155

1 "Il y avait un système de commandement dans l'armée. Vous savez, une fois

2 que dans l'armée il y a un seul individu qui prend une décision." Puis il y

3 a un mot qui n'est pas compréhensible, le commandant dit :

4 "Le commandement c'est la planification, l'exécution à la laisser aux

5 unités et toute exécution doit être précédée d'un ordre". Une fois de plus

6 je résume pour dire que ni l'armée ni ses officiers n'ont participé d'une

7 quelconque façon. Dans cette action, c'était uniquement une action menée

8 par le ministère de l'Intérieur. Puis, il poursuit.

9 Il dit ensuite : "Qui dit que personne n'était censé d'être au courant de

10 cette action." Ligne 13 "mis à part lui et certains du ministère. Je ne

11 veux pas essayer de justifier ce qu'aura fait le commandant, parce qu'il a

12 violé finalement le principe fondamental du commandement et de la voie

13 hiérarchiques; il a été puni et il a été démis, révoqué de ses fonctions.

14 Vous le voyez ?

15 R. Je vois la version en anglais par écrit, mais j'entends dans ma langue

16 ce que vous dites.

17 Q. Fort bien. Pensez-vous, Monsieur Keskovski, que le commandant Despodov

18 aurait été l'objet de mesure disciplinaire s'il avait reçu directement un

19 ordre du président ?

20 R. Je ne suis pas compétent pour répondre à votre question.

21 Q. Fort bien. Poursuivons.

22 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux.

24 M. METTRAUX : [interprétation] Je me souviens fort bien des instructions

25 que vous avez données avant la pause, mais je pense que la question était

26 lourde de sens et chargée, parce qu'on suppose que le commandant Despodov a

27 subi des sanctions disciplinaires. Parce que jusqu'à présent, d'après ce

28 que nous avons qui est écrit au compte rendu à cette page de compte rendu

Page 10156

1 ça n'a pas été le cas.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mettraux.

3 Le problème c'est que c'est en référence avec un entretien qui n'a pas été

4 versé au dossier et dont la teneur n'a aucune valeur probante en tant que

5 poids. Donc nous ne retenons pas la teneur de cet entretien.

6 Mme ISSA : [interprétation] Je peux continuer, Monsieur le Président. Fort

7 bien. Merci.

8 Q. Ce que Mitrevski poursuit, il dit ceci : "En tant qu'être humain, pas

9 en tant que général, en tant que commandant de brigade, je suppose qu'il

10 est un peu impressionné par le fait que le président lui avait téléphoné en

11 personne. Peut-être qu'il s'est pris pour quelqu'un parce que le président

12 l'a appelé. Je ne le sais pas. Peut-être qu'il était un peu perturbé par

13 cette conversation. Je ne le sais pas."

14 Est-ce que le général Mitrevski ne dit pas ici que le commandant Despodov

15 finalement a pris certaines décisions tout seul ?

16 R. C'est impossible de répondre à cette question. Je ne sais pas.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Issa, est-ce que la Chambre

18 peut intervenir pour signaler que vous vous appuyez sur une déclaration qui

19 n'est pas versée au dossier. Nous n'avons pas entendu de témoins nous

20 parler de ce sujet. Un contre-interrogatoire mené sur cette base est sans

21 aucun intérêt pour la Chambre, sauf si le témoin se basant sur ce qu'il

22 sait est à même de dire que ces événements sont exacts. Or, ce témoin est

23 d'avis qu'il lui est impossible de parler se basant sur ce qu'il sait de

24 ces événements.

25 Mme ISSA : [interprétation] Fort bien. Dans ce cas, je passerai à autre

26 chose, Monsieur le Président.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en remercie.

28 Mme ISSA : [interprétation] Monsieur Keskovski, je vous demande de

Page 10157

1 consulter la pièce P379.04 de l'intercalaire 19. Peut-on l'afficher dans le

2 prétoire électronique.

3 Il s'agit ici d'un renseignement obtenu en 2003 par une commission établie

4 par le ministre Hari Kostov, commission chargée d'enquêter sur les

5 événements survenus dans le village de Ljuboten. Ce rapport porte la date

6 du 25 novembre 2003. Puis-je vous demander de vous reporter au quatrième

7 paragraphe, c'est la première page de ce rapport. Johan Tarculovski a été

8 entendu par des membres de cette commission. Il dit ceci :

9 "Dans ce sens, on a demandé à Tarculovski qui lui avait donné l'ordre

10 d'aller au village de Ljuboten, qui avait donné l'ordre de tirer et qui

11 était présent avec lui dans ce village."

12 "Lorsqu'il a répondu à ces questions, il a d'abord expliqué qu'à la réunion

13 précédente il avait été convoqué en tant qu'employé du ministère, alors

14 qu'il l'est maintenant en tant que civil puisqu'il a démissionné du

15 ministère de l'Intérieur. Il a aussi dit qu'il était parti à Ljuboten après

16 avoir décidé de lui-même, tout seul, qu'il n'avait pas reçu d'ordres de

17 quoi que ce soit d'aller dans le village de Ljuboten."

18 Vous voyez ?

19 R. Oui.

20 Q. Il ajoute ceci, tout à la fin du paragraphe, ou plutôt de la page.

21 "Quant à la question de la façon dont les armes ont été distribuées,

22 Tarculovski a répondu qu'il avait été appelé par le ministre de l'époque,

23 le ministre de l'Intérieur, qui lui avait dit de choisir des forces de

24 réserve qui assureraient la sécurité des installations de l'Etat, des

25 installations essentielles."

26 Vous voyez ?

27 R. Oui.

28 Q. Par conséquent, même quand on a posé -- la commission a posé cette

Page 10158

1 question à Tarculovski, ce dernier n'a pas répondu qu'il avait reçu l'ordre

2 d'aller à Ljuboten du président pour y mener une action ou pour donner des

3 renseignements au président, il ne l'a pas dit, n'est-ce pas ?

4 R. Vous tenez à ce que je réponde à ça ?

5 Q. Certainement.

6 R. Trouvez-moi un seul endroit dans cette déclaration, dans la déclaration

7 précédente, enfin une de mes déclarations, où j'ai dit que le président a

8 ordonné à M. Tarculovski de se rendre à Ljuboten. Dans toutes mes

9 déclarations, j'ai parlé du village de Ljubanci. Quant à ce que M.

10 Tarculovski a dit lui-même, je n'ai pas à commenter ça. Ça n'est pas de mon

11 ressort.

12 Q. D'accord. Il est écrit ici que M. Tarculovski a dit, à la commission,

13 qu'il s'était effectivement rendu à Ljuboten ?

14 R. Vous le lisez là ce qu'a dit M. Tarculovski. Mais c'est une déclaration

15 que je vois pour la première fois.

16 Q. Je vous remercie. Passons à autre chose. Vous nous avez déclaré,

17 Monsieur Keskovski, que Ljube Boskoski est un homme honnête, n'est-ce pas ?

18 R. C'est mon avis, en effet.

19 Q. Et qu'il ne dissimulerait pas la vérité, n'est-ce pas ?

20 R. C'est une réponse à laquelle je ne suis pas qualifié pour répondre. Je

21 pense que c'est quelqu'un d'honnête et qui ne dissimulerait pas la vérité.

22 Q. Il ne chercherait donc pas à déguiser délibérément ce qui s'est

23 réellement passé en 2001, n'est-ce pas ?

24 R. Je ne peux pas répondre à des questions qu'il conviendrait de poser

25 directement à M. Ljube Boskoski et non pas à moi. Si vous me posez une

26 question de ce genre, je ne peux que vous donner mon opinion. Je ne peux

27 pas vous dire exactement ce qui se passe dans la tête de M. Ljube Boskoski.

28 Q. Je vais vous demander à présent de jeter un coup d'œil à l'intercalaire

Page 10159

1 2 du classeur de l'Accusation, s'il vous plaît.

2 Mme ISSA : [interprétation] Je me réfère plus précisément à la pièce P402,

3 pour le compte rendu.

4 Q. Là je me réfère d'abord à la page 32 de la version papier anglaise, qui

5 sera la page 66 de votre exemplaire, Monsieur Keskovski. Pour ce qui est du

6 prétoire électronique, c'est la page 35 de la version macédonienne.

7 R. La page 35 ?

8 Q. Je parle de la page 66 de la version papier macédonienne.

9 Donc pour commencer, il s'agit de --

10 R. Oui, je vois.

11 Q. C'est un ouvrage qui s'appelle : Mon combat pour la Macédoine, il

12 s'agit des événements de 2001.

13 Vous le connaissez ?

14 R. Oui.

15 Q. Avez-vous lu ce livre ?

16 R. Je l'ai feuilleté.

17 Q. D'accord. Je vous demanderais de regarder le bas de la page que vous

18 avez sous les yeux, un paragraphe qui commence par : "Cependant les

19 tensions à Aracinovo étaient de plus en plus perturbantes."

20 Vous avez trouvé ce passage ?

21 R. Oui, oui. Tout à fait.

22 Q. Bien, dans ce paragraphe, M. Boskoski parle des événements qui se sont

23 déroulés à Aracinovo en 2001. Et il dit ce qui suit :

24 "Qu'une trentaine de personnes armées en uniforme avaient pénétré dans ce

25 village. Et que des informations provenant de ce village avaient confirmé

26 que ces nouveaux venus avaient immédiatement pris leurs postes dans

27 différents emplacements."

28 Et il poursuit. Vers la fin du paragraphe, à cinq lignes de la fin, il dit

Page 10160

1 :

2 "En résultat de la coopération entre la police et l'armée de la République

3 de Macédoine, la sécurité et les activités de défense ont été consolidés.

4 Nous avons renforcé la position de la police aux entrées et sorties

5 d'Aracinovo, de même qu'en des positions stratégiques autour du village.

6 Notre objectif était de prendre les mesures opérationnelles et techniques

7 de protection de ce village et d'empêcher ce groupe de militants de quitter

8 Aracinovo," et il poursuit ensuite.

9 Alors, ne dit-il pas, dans ce passage, bel et bien que les forces de police

10 travaillaient en coopération avec l'armée ?

11 R. Evidemment qu'ils coopéraient. C'est normal.

12 Q. Donc les forces de police n'étaient pas subordonnées à l'armée, n'est-

13 ce pas ?

14 R. Vous parlez de cet événement en particulier, parce que dans ce cas-là,

15 si, les forces étaient subordonnées à l'armée.

16 Q. Mais n'est-ce pas ce que dit Ljube Boskoski, en l'occurrence, qu'il y

17 avait une coopération, sur pied d'égalité, entre la police et l'armée ?

18 R. Il me semble que cette question n'est pas bien formulée, parce que

19 coopérer, c'est tout à fait clair. La coopération, c'est la coopération.

20 Cela veut dire qu'on fait des choses ensemble, mais ça n'est pas une seule

21 et même institution. Donc dans la mesure où ce sont des institutions

22 distinctes, elles peuvent coopérer et entreprendre des actions conjointes.

23 Q. Nous pourrions poursuivre --

24 R. Maintenant si vous voulez une réponse précise, M. Boskoski dit très

25 clairement qu'il s'agissait d'une coopération avec l'armée. Je ne vois pas

26 du tout ce qu'il y a dans ce texte qui dit que l'une de ces deux forces

27 avait le commandement de l'autre.

28 Q. Poursuivons, Monsieur Keskovski, et je vais vous demander de vouloir

Page 10161

1 jeter un coup d'œil à la page 67 de la version papier. En ce qui concerne

2 le prétoire électronique, nous sommes toujours sur la page 35. Et

3 maintenant, c'est la page 33 de la version papier en anglais.

4 J'attirerais votre attention sur le paragraphe qui commence

5 par : "Tout était prêt pour entreprendre les forces de sécurité

6 macédoniennes."

7 Vous voyez ce texte ?

8 R. Oui.

9 Q. Il dit : "Tout était prêt pour entreprendre une action décisive contre

10 les terroristes d'Aracinovo. Nous attendions simplement l'ordre des

11 autorités suprêmes de l'Etat et de l'organe de coordination de gestion de

12 la crise. Je n'étais pas d'accord avec le point de vue indécis de cet

13 organe qui poussait la Macédoine à entrer en négociation avec les

14 terroristes, une chose que les nationalistes de la Grande-Albanie ne

15 pouvaient que souhaiter. Moi, j'avais pris ma décision, et j'ai rendu ma

16 carte et quitté l'organisation."

17 Puis, il poursuit.

18 Vous voyez ce passage ?

19 R. Je le vois.

20 Q. Alors maintenant, veuillez passer à la page - ma foi, je pense que

21 c'est la même page dans votre version, mais pour le prétoire électronique,

22 c'est la page 36 et pour la version anglaise, c'est tout à fait en bas de

23 la page. Le ministre Boskoski parle ici, toujours, de l'opération

24 d'Aracinovo. Et il dit que : "L'action des forces de sécurité de la

25 Macédoine à Aracinovo a confirmé que la Macédoine était capable de

26 s'occuper indépendamment de ses ennemis quels qu'ils soient."

27 Et il poursuit.

28 Vous avez trouvé ce paragraphe ? Vous devriez l'avoir sur l'écran. Il est

Page 10162

1 intitulé : La réaction du peuple.

2 R. Je ne vois pas ce paragraphe. J'ai un paragraphe qui commence par tout

3 était prêt pour, on attendait une décision, enfin, ce que vous nous avez lu

4 tout à l'heure.

5 Q. Je vous demanderais maintenant de lire le paragraphe suivant, le

6 paragraphe qui suit le paragraphe assez long que nous venons de regarder.

7 R. D'accord. Donc c'est un nouveau paragraphe. Oui, un nouveau sujet. Très

8 bien.

9 Q. En effet. Donc le ministre Boskoski poursuit en disant : "Je l'ai

10 constaté moi-même quand j'ai donné le drapeau à ce groupe et que je leur ai

11 dit de le planter au centre d'Aracinovo."

12 Donc il dit bien qu'il était là.

13 Maintenant, on ne voit nulle part dans ces passages, Monsieur Keskovski,

14 mention du président, n'est-ce pas ?

15 R. Dans ce que vous avez dit, c'est exact, mais ce n'est pas moi qui ai

16 écrit ce livre.

17 Q. Bien.

18 R. Vous devriez en parler avec lui, l'auteur de ce livre concernant son

19 point de vue et sa position. C'est mon avis. En tout cas, en ce qui me

20 concerne, je ne suis pas un critique littéraire et donc je ne peux pas

21 commenter l'ouvrage de M. Boskoski.

22 Q. D'accord. Alors, si je puis vous demander de regarder maintenant la

23 page 35 de la version anglaise qui est en version macédonienne, les pages

24 38 et 39 sur le prétoire électronique.

25 Mme ISSA : [interprétation] Je demanderais peut-être à Mme la Greffière de

26 nous la mettre en évidence.

27 Q. Le passage commence par - sur votre écran tout à fait en bas, Monsieur

28 Keskovski, en bas de la page 38, commence par, et c'est le dernier

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1 paragraphe : "Je vous garantis que les terroristes ne continueront pas la

2 paix. Nous poursuivrons nos actions et le président Trajkovski négociera en

3 tant que président d'un Etat qui a vocation à devenir membre de l'Union

4 européenne."

5 Vous voyez cela ?

6 R. Oui, je le vois à l'écran.

7 Q. Donc Ljube Boskoski n'était pas tout à fait d'accord avec le président

8 ?

9 R. Je ne peux pas répondre à cette question. Je ne suis pas Ljube

10 Boskoski. Je ne suis pas non plus le président.

11 Je ne peux que le répéter qu'il s'agit là d'un ouvrage écrit par M.

12 Boskoski et qu'il n'est pas de mon ressort de le commenter.

13 Q. D'accord. Monsieur Keskovski, connaissiez-vous le ministre Boskoski, ou

14 Ljube Boskoski était-il, pour autant que vous le connaissiez, un homme

15 porté vers la paix ?

16 R. Comment voulez-vous que je réponde à cette question ? Je ne peux pas

17 répondre à cette question.

18 Q. Enfin --

19 R. C'est une question qui ne me semble pas claire.

20 Q. C'était un homme qui avait tendance à pardonner les offenses ?

21 R. C'est une vertu chrétienne de pardonner.

22 Q. Mais je crois que vous n'avez pas répondu à ma question, Monsieur

23 Keskovski. Est-ce que Ljube Boskoski a tendance à

24 pardonner ?

25 R. Oui.

26 Q. J'aimerais que vous passiez maintenant au 65 ter 1117.6, s'il vous

27 plaît. Il s'agit d'une coupure vidéo.

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Mettraux.

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1 M. METTRAUX : [interprétation] Peut-être, Monsieur le Président, avant de

2 poursuivre et avant de décider si nous voulons ou pas regarder cette vidéo,

3 j'aimerais vous dire de quoi il s'agit. C'est un discours politique de M.

4 Boskoski qui date du mois de juillet 2002. Au cours du dimanche du week-end

5 dernier, nos collègues de l'Accusation nous ont envoyé une liste des

6 documents dont ils avaient l'intention de se servir avec M. Keskovski. Nous

7 avons envoyé un e-mail à l'Accusation concernant cette vidéo en particulier

8 pour leur demander dans quelle mesure ce document était à leur avis

9 pertinent dans l'affaire en l'espèce, et plus particulièrement pour le

10 témoignage de M. Keskovski.

11 L'Accusation a refusé de nous répondre en nous indiquant qu'ils n'avaient

12 pas d'obligation de le faire. Par un e-mail précédent concernant un témoin

13 antérieur, ils nous avaient dit que les choses s'éclairciraient.

14 Il me semble que cette vidéo n'a rien à voir avec l'affaire en

15 l'espèce, encore moins à faire avec le témoignage de ce témoin en

16 particulier. Ce que l'Accusation cherche à faire est aujourd'hui de nous

17 montrer une vidéo de M. Boskoski faisant des déclarations politiques qui

18 n'ont rien à voir avec l'affaire qui nous occupe aujourd'hui.

19 Il me semble que l'Accusation devrait démontrer la pertinence de ce

20 document et satisfaire la Chambre sur cette pertinence avant de pouvoir

21 montrer leur document. C'est à vous, Monsieur le Président, de décider

22 ensuite ce qu'il convient d'en faire.

23 La dernière fois qu'une vidéo nous a été montrée, il y a eu des

24 doutes sur la pertinence de cette documentation, notamment en ce qui

25 concerne la période dans le temps. Le fait est que si vous, les Juges,

26 aviez accepté cette documentation, c'était parce que le premier ministre,

27 si je ne me trompe, et un autre haut fonctionnaire dont je ne me souviens

28 plus le nom, étaient présents au moment de cette rencontre politique, et

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1 qu'en fait, lorsque nous avons vu la vidéo, apparemment ces personnes ne

2 semblaient pas être présentes. Donc nous aimerions, à la lumière de ce qui

3 s'est passé par le passé, savoir plus précisément dans quelle mesure ce

4 document est pertinent.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

6 Monsieur Saxon.

7 Le témoin étant interrogé par Mme Issa, je préfère m'adresser à elle

8 directement.

9 Mme ISSA : [interprétation] D'accord. Monsieur le Président, pour ce qui

10 est de ce témoin en particulier, la Défense met en question la bonne

11 renommée de M. Boskoski et on pose des questions au témoin sur la renommée

12 de M. Boskoski au cours de l'interrogatoire principal. A la lumière de

13 cela, nous aimerions présenter des éléments qui me semblent éclairer la

14 réputation de M. Boskoski.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est donc cette vidéo que vous allez

16 montrer au témoin ? Quelle est sa nature, de quoi

17 s'agit-il ?

18 Mme ISSA : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'un discours

19 fait par le ministre Boskoski à Tetovo le

20 29 juillet 2002, où il parle de la crise de 2001, et au cours duquel il

21 parle de la possibilité pour les Macédoniens de gérer toutes crises quelles

22 qu'elles soient et de l'impossibilité de pardonner à ceux qui ont tué des

23 fils de Macédoniens.

24 Et il poursuit sur un ton qui reflète très bien son point de vue, sa

25 façon de voir la crise de 2001. C'est un discours qui reflète et éclaire

26 d'une certaine façon sa personnalité.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre n'a pas l'intention

2 d'entendre cette vidéo ni d'accepter les questions posées à son sujet.

3 Madame Issa. Je vous remercie.

4 Mme ISSA : [interprétation]

5 Q. Monsieur Keskovski, connaissiez-vous la réaction de

6 M. Boskoski à l'incident à Karpalak ?

7 R. Permettez que je vous corrige. Je m'appelle Keskovski.

8 Q. D'accord. Je vous remercie de m'avoir corrigée. Je vais donc reposer ma

9 question.

10 Savez-vous quelle fut la réaction du ministre Boskoski à l'incident de

11 Karpalak en 2001 ?

12 R. Non.

13 Q. J'aimerais me référer maintenant à l'intercalaire 2 de la pièce P402,

14 il s'agit de la même liasse ERN dont nous parlions tout à l'heure. Nous

15 sommes en page 46, pour la version macédonienne c'est la page 51. C'est la

16 page 46 en version anglaise.

17 Je vous demanderais de trouver le paragraphe qui commence par : "Cependant,

18 le 8 août 2001."

19 R. Je suis en train de regarder la page 51 comme vous me l'avez demandé,

20 c'est la version macédonienne, et je ne vois pas de paragraphe qui commence

21 comme vous dites.

22 Q. C'est tout à fait en bas, ça devrait être tout à fait en bas de

23 l'écran. Madame la Greffière, veuillez avoir la gentillesse de faire

24 défiler la page vers le bas. Si vous regardez maintenant l'écran, vous

25 verrez le texte dont je vous parle. Dans la version anglaise, il s'agit de

26 la page 46, version papier.

27 Donc il y est dit : "Cependant, le 8 août 2001, c'est le jour où nous avons

28 été confrontés à la grande offensive impudente albanaise, des dizaines de

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1 soldats ont été abattus. J'ai immédiatement ordonné que l'on contienne ce

2 mouvement en ce qui concerne Aracinovo, il s'est poursuivi pendant encore

3 une heure, donc jusqu'à peu près 5 heures. Nous prévoyons que ceux qui ont

4 commis cet impardonnable crime qui s'est produit au lieu-dit Karpalak,

5 avaient les bras tachés de sang jusqu'aux épaules et qu'ils resteront dans

6 ce village où ils prévoyaient de poursuivre leurs actions sanguinaires. La

7 même remarque concernant la possibilité de contenir ce mouvement s'applique

8 à Tetovo."

9 Vous voyez ce texte ?

10 R. Oui, je le vois.

11 Q. Monsieur Keskovski, êtes-vous au courant du point de vue du ministre

12 Boskoski concernant les efforts de la communauté internationale et les

13 efforts du gouvernement macédonien visant à trouver une solution pacifique

14 à la crise ?

15 R. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Je ne suis pas

16 compétent pour cela.

17 Q. Donc vous ne savez pas ?

18 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas répondre. Voilà, ça veut dire que ça

19 veut dire. Vous me posez des questions sur M. Boskoski, quelle a été la

20 réaction de M. Boskoski. Pendant la période dont vous me parlez, j'étais

21 responsable de la sécurité du président, de la République de Macédoine.

22 Q. Monsieur Keskovski, vous nous avez également dit que vous connaissiez

23 M. Boskoski personnellement et qu'il avait été témoin à votre mariage, donc

24 vous êtes proche, n'est-ce pas ?

25 R. M. Boskoski a effectivement été témoin à mon mariage, le

26 18 mai 2002.

27 Q. Vous voulez dire qu'avant cette date du 18 mai 2002, vous ne le

28 connaissiez pas ?

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1 R. Je le connaissais, certes. C'était le ministre de l'Intérieur. Et sa

2 position politique n'avait rien à voir avec sa présence et son rôle à mon

3 mariage en tant que témoin. Je n'ai pas à savoir quelle était la position

4 politique de M. Boskoski ni quel était son avis concernant la position de

5 la communauté internationale. Il me semble que votre question n'a aucune

6 pertinence. Je ne peux pas savoir ce que pensait M. Boskoski le

7 8 août 2001. Le 8 août 2001, j'étais chargé de la sécurité du président,

8 nous arrivions à la date de signature des accords-cadres d'Ohrid.

9 Q. Monsieur Keskovski, je vais vous demander de passer à la page 41 de la

10 version macédonienne, nous pourrons peut-être plus aisément la faire

11 apparaître directement à l'écran. Il s'agit de la page 38 de la version

12 papier en anglais. Sous le titre "Les provocations se poursuivent."

13 Commence un paragraphe avec les mots : "Après les paroles conciliantes et

14 les efforts des plus hauts fonctionnaires de l'Etat macédonien."

15 Vous voyez ce passage ?

16 R. Oui, je le vois.

17 Q. Le texte se poursuit : "Après les efforts de conciliation des hauts

18 fonctionnaires de l'Etat macédonien visant à résoudre la crise, la

19 situation loin de se calmer, a été marquée par les provocations poursuivies

20 des terroristes et des extrémistes albanais."

21 Et il poursuit.

22 Maintenant, si vous regardez le dernier paragraphe qui commence par : "Il

23 se passait des choses étranges."

24 Nous sommes cette fois à la page 42 de la version macédonienne.

25 Voilà ce qu'il dit : "Alors que les activités des terroristes albanais se

26 poursuivaient, les représentants de la communauté internationale ont exigé

27 que les forces de sécurité macédoniennes s'abstiennent de se lancer dans

28 des actions armées. Ces propositions naïves émanaient des représentants

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1 politiques de l'Union européenne et des Etats-Unis. Je pense, par exemple,

2 à M. Leotard et M. Pardew, à ce qu'ils m'ont dit lorsqu'ils sont venus me

3 voir au cabinet du ministère de l'Intérieur. Ils m'ont demandé de façon

4 tout à fait franche que les forces de sécurité macédoniennes s'abstiennent

5 de s'opposer aux provocations de la part des terroristes albanais. La

6 terminologie utilisée par ces deux personnes avait déjà changée puisqu'ils

7 parlaient d'insurgence [comme interprété]. Ils ont expliqué leur

8 comportement en avançant que les négociations devaient se poursuivre afin

9 de trouver une solution définitive.

10 Puis le texte se poursuit et il lit : "J'ai répondu de façon véhémente en

11 indiquant que nous n'avions pas envoyé sur le terrain des chèvres qui

12 allaient être offertes aux mâchoires des bêtes, des animaux féroces."

13 Finalement, il poursuit. J'aimerais de vous demander de bien vouloir

14 prendre la page 46 de la version macédonienne, il s'agit de la page 41 pour

15 la version anglaise. Et je vais faire référence au paragraphe qui commence

16 par les mots suivants :

17 "J'avais également indiqué qu'une trêve unilatérale qui avait été signée

18 avec l'OTAN serait respectée."

19 Est-ce que vous voyez cela à votre écran, Monsieur Keskovski ?

20 Vous le voyez ?

21 R. Oui.

22 Q. Au milieu de ce paragraphe, voilà ce qu'il dit : "J'ai été agréablement

23 surpris par l'intérêt manifesté par les journalistes à propos de la réunion

24 que j'avais eue avec les envoyés spéciaux Leotard et Pardew. De quoi avez-

25 vous parlé, l'un des journalistes a demandé. Ils ont essayé en fait

26 d'édulcorer mon comportement très strict eu égard aux intérêts nationaux

27 macédoniens. J'ai pensé que les journalistes étaient ravis d'entendre cette

28 déclaration."

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1 Vous voyez cela ?

2 R. Oui, je le vois.

3 Q. Monsieur Keskovski, je vais vous présenter quelques idées, et

4 j'aimerais vous demander tout simplement de répondre par oui ou par non,

5 d'accord ?

6 R. Oui, si je peux répondre à ces idées par oui ou par non, je le ferai.

7 Q. Voilà ce que j'avance, Monsieur Keskovski : ce que je vous dis, ce que

8 j'avance, c'est qu'il n'y avait pas d'ordre donné par le président aux fins

9 d'attaque du village de Ljuboten, parce que s'il y avait eu un ordre, le

10 commandant Despodov n'aurait pas continuellement demandé cet ordre jusqu'au

11 12 août 2001. Est-ce que vous êtes d'accord ?

12 R. Ce sont vos propos. C'est vous qui avez tenu ces propos. Comment est-ce

13 que je peux répondre à cette question ?

14 Q. Ce que je dis --

15 R. Un petit moment, je vous prie. Est-ce qu'il y bien un ordre du

16 président pour que Ljuboten soit attaqué ? Est-ce que l'ordre a été donné

17 au commandant Despodov ? Oui.

18 Q. Ce que je vous avais dit, Monsieur Keskovski, ou ce que je vous dis,

19 c'est que ce que voulait absolument le président, c'était de faire en sorte

20 que soit facilitée la signature de l'accord-cadre d'Ohrid dans une

21 situation de crise en août 2001, et que le président n'avait absolument

22 rien fait pour mettre en danger l'accord, qu'il n'aurait absolument rien

23 fait pour le mettre en danger pendant les jours qui précédaient la

24 signature de l'accord. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

25 R. Oui.

26 Q. Ce que j'avance également, Monsieur Keskovski, c'est que Johan

27 Tarculovski a participé à l'action de Ljuboten. Il y a participé ce jour-

28 là. Vous êtes d'accord avec ce que j'avance ?

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1 R. Je ne peux pas répondre à cette question par oui ou par non. C'est ce

2 que vous, vous affirmez. C'est ce que vous avancez. Vous nous dites que

3 vous affirmez cela, moi, je ne suis pas en mesure de confirmer ce que vous

4 pensez.

5 Q. Parce que vous, vous --

6 R. Parce que vos questions sont très générales.

7 Q. Monsieur Keskovski, ce que j'avance, c'est que vous avez démontré que

8 vous étiez partial à l'égard de M. Boskoski, qui est un de vos amis, qui

9 était votre témoin lors de votre mariage, et que vous essayez tout

10 simplement de présenter des éléments de preuve en sa faveur, et c'est la

11 raison pour laquelle vous avez modifié certains points de vue. Vous êtes

12 d'accord ?

13 R. Non.

14 Q. Je vous remercie.

15 Mme ISSA : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Madame Issa.

17 Nous allons donc faire la pause maintenant.

18 Maître Mettraux, vous n'allez pas avoir beaucoup de temps, mais --

19 M. METTRAUX : [interprétation] Je pense que je n'aurai pas de problème.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je disais donc que nous allons

21 reprendre à 13 heures 10.

22 --- L'audience est suspendue à 12 heures 38.

23 --- L'audience est reprise à 13 heures 12.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux, vous avez la parole.

25 M. METTRAUX : [interprétation] Je vous remercie.

26 Nouvel interrogatoire par M. Mettraux :

27 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

28 R. Bonjour.

Page 10173

1 Q. Vous vous souvenez que ma consoeur de l'Accusation vous a posé des

2 questions à propos de la déclaration fournie par vous au bureau du

3 Procureur ? On vous a demandé des commentaires à propos de certains

4 paragraphes de cette déclaration. Vous vous en souvenez ?

5 R. Oui, je m'en souviens.

6 Q. Vous souvenez-vous qu'elle vous a demandé si vous aviez essayé dans vos

7 réponses d'être le plus exact et le plus fidèle à la vérité que possible.

8 Vous vous en souvenez ?

9 R. Oui, je m'en souviens.

10 Q. L'entretien que vous avez eu avec les enquêteurs du bureau du

11 Procureur, il a duré combien de temps à peu près ? Est-ce que vous vous en

12 souvenez ?

13 R. Nous avons commencé à 9 heures le matin et nous avons travaillé jusqu'à

14 19 heures 30.

15 Q. Donc il a duré une dizaine d'heures ?

16 R. Exact.

17 Q. Pendant cette audition, est-ce qu'il y a eu un enregistrement verbatim

18 de ce que vous vous êtes dit, l'enquêteur et vous, ou est-ce que c'est

19 l'enquêteur qui a pris des notes au fur et à mesure ?

20 R. L'enquêteur a pris des notes pendant que je parlais.

21 Q. Et à la fin de ces dix heures d'audition, vous a-t-il donné au fond une

22 synthèse de la discussion que vous aviez menée ?

23 R. Oui.

24 Q. Serais-je en droit de dire que la déclaration qui vous a été présentée

25 ne représentait qu'une partie, un résumé de la totalité de la conversation

26 que vous aviez eue avec lui ?

27 R. Oui.

28 Q. Qui a posé les questions pendant cette audition ? Vous ? Etait-ce vous

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1 qui posiez les questions ou était-ce l'enquêteur ?

2 R. Je répondais aux questions posées par l'enquêteur.

3 Q. Vous a-t-il, à un moment donné, donné une liste de questions écrites,

4 ou bien est-ce qu'il les posait au fil de l'entretien ?

5 R. Il m'a posé les questions une à une ?

6 Q. Et vous n'avez pas reçu une liste par écrit des questions qu'il allait

7 vous poser; est-ce bien cela ?

8 R. Exact.

9 Q. Qui a consigné ce qui s'est dit au cours de l'entretien, est-ce vous ou

10 est-ce l'enquêteur ?

11 R. C'est l'enquêteur.

12 Q. Qui a décidé de ce qu'il fallait incorporer dans la déclaration et de

13 ce qu'il fallait laisser de côté ? Est-ce vous ou l'enquêteur ?

14 R. C'est l'enquêteur.

15 Q. En fin d'audition, après ces dix heures que vous avez passées avec

16 l'enquêteur, est-ce qu'il vous a remis une copie que vous avez pu emmener ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce que le bureau du Procureur vous a recontacté pour vous demander

19 si vous étiez en mesure ou prêt à apporter un complément d'information, de

20 précision, à propos de ce que vous aviez déjà dit dans votre déclaration

21 préalable ? Est-ce qu'ils vous ont recontacté pour obtenir un complément

22 d'information ?

23 R. Après que j'eus fait cette déclaration, on m'a dit qu'on allait me

24 recontacter s'ils avaient besoin de moi. J'ai donné mon accord. En février

25 2007, le bureau du Procureur m'a appelé pour me dire qu'ils voulaient me

26 parler, fin février. Cependant, le bureau du Procureur ne m'a pas

27 recontacté en mars ni en avril 2007. Puis j'ai reçu une convocation aux

28 fins de comparution à titre de témoin à décharge, convocation signée par

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1 Mme Carla Del Ponte. C'est tous les contacts que j'ai eus.

2 M. METTRAUX : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce 1D1249 de

3 la liste 65 ter. Madame l'Huissière, est-ce que vous pourriez donner le

4 classeur comprenant les pièces à décharge.

5 Q. Il s'agit ici de la déclaration que vous avez faite au bureau du

6 Procureur. Page 8, 1D00-9966, paragraphe 34. Monsieur Keskovski, j'aimerais

7 que vous trouviez si possible le paragraphe 34 de votre déclaration. Vous

8 l'avez sous les yeux ?

9 R. Oui.

10 Q. Vous souvenez-vous que ma collègue de l'Accusation vous a posé un

11 certain nombre de questions relatives à ce paragraphe ?

12 R. En effet.

13 Q. Je vais vous relire ce paragraphe si vous le voulez bien. Il commence

14 par la première phrase suivante : "Dans l'après-midi du 10 août 2001, le

15 président a approuvé cette demande et m'a demandé d'appeler Johan

16 Tarculovski."

17 Je vous pose maintenant la question suivante : cette déclaration était-elle

18 exacte, était-elle précise ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous la maintenez donc aujourd'hui ?

21 R. Oui.

22 Q. Maintenant la phrase suivante dit, je cite : "Lorsque j'ai appelé Johan

23 Tarculovski, le président a voulu lui parler, donc je lui ai passé le

24 téléphone portable."

25 Je vous demande à nouveau : cette déclaration était-elle précise et exacte

26 ?

27 R. Oui.

28 Q. Vous maintenez donc cette déclaration aujourd'hui ?

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1 R. Oui.

2 Q. Passons à la phrase suivante. Je cite : "J'étais présent pendant

3 l'entretien et j'ai entendu le président demander à Johan Tarculovski de le

4 rappeler le lendemain pour le tenir au courant de la situation dans le

5 village." Je vous demande : cette déclaration était-elle précise et exacte

6 ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous la maintenez donc aujourd'hui ?

9 R. Oui.

10 Q. Lorsque vous avez dit à l'enquêteur du bureau du Procureur que vous

11 étiez présent lors de cet entretien et que vous aviez entendu le président

12 demander à Johan Tarculovski de le rappeler le lendemain, de quel entretien

13 s'agissait-il ?

14 R. Il s'agissait de l'entretien entre le président et Tarculovski qui

15 avait lieu concernant la visite de ce dernier à Ljubanci, et où on lui

16 demandait de tenir le président au courant de ce qui se passait sur le

17 terrain.

18 Q. Mais s'agissait-il de la conversation téléphonique ou de la

19 conversation qui s'était passée de vive voix dans le bureau du président ?

20 R. Il s'agissait de ce qui s'était passé dans le bureau du président. En

21 fait, cette conversation s'est produite deux fois, une fois au téléphone et

22 une fois au bureau.

23 Q. Etait-ce ce que vous cherchiez à faire comprendre à l'enquêteur de

24 l'Accusation ?

25 Mme ISSA : [interprétation] Monsieur le Président.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Mettraux.

27 M. METTRAUX : [interprétation]

28 Q. Etait-ce ce que vous cherchiez à faire comprendre à l'enquêteur de

Page 10177

1 l'Accusation ?

2 R. Oui.

3 Q. Maintenant examinons ce paragraphe, le paragraphe en question. Vous

4 semble-t-il, à la lecture de ce paragraphe, que l'enquêteur souhaitait ou

5 avait besoin d'éclaircir le lieu où s'était passée cette conversation en

6 particulier ? Vous semble-t-il, à relire votre déclaration, qu'il a cherché

7 à obtenir de vous des précisions sur ce point ?

8 Mme ISSA : [interprétation] Bien --

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant cet entretien, on m'a demandé de

10 répondre à des questions assez générales. Que savez-vous de ce qui s'est

11 passé le 10 août ? Que savez-vous de ce qui s'est passé le 11 et le 12 ? On

12 ne m'a pas demandé de précision. On ne m'a pas posé de questions exactes

13 sur aucune situation. On ne m'a pas demandé de préciser les événements de

14 ce genre, comme vous le faites aujourd'hui ou comme le fait aujourd'hui

15 l'Accusation.

16 M. METTRAUX : [interprétation]

17 Q. Serait-il correct de dire que si l'on avait besoin de préciser,

18 l'Accusation vous poserait des questions supplémentaires ? Est-ce que c'est

19 ainsi que cela fonctionne ?

20 R. Il me semble qu'il aurait dû me poser des questions concrètes sur ce

21 qui était susceptible de l'intéresser.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maintenant, Maître Mettraux, je vais

23 vous interrompre. Mme Issa a une remarque à faire.

24 Mme ISSA : [interprétation] Oui, en effet. Il me semble, Monsieur le

25 Président, que quant aux questions critiques et qui concernent la fiabilité

26 de la déclaration, Me Mettraux ne devrait pas se permettre de poser des

27 questions aussi directives.

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Elles avaient

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1 tendance à être directives et le poids que nous accorderons aux réponses

2 sera effectivement influencé par cet état de fait. Je vous ferai remarquer,

3 Madame Issa, que je ne vous ai pas permis d'interrompre à un point

4 critique, mais je ne permets pas non plus à Me Mettraux d'interrompre votre

5 contre-interrogatoire en ce genre de situation.

6 Mme ISSA : [interprétation] En effet, Monsieur le Président, je comprends.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux, vous pouvez

8 poursuivre.

9 M. METTRAUX : [interprétation]

10 Q. Quant au paragraphe 3 de votre déclaration, juste au-dessus. Vous

11 pouvez le voir ?

12 R. Oui, je le vois.

13 Q. Est-ce que vous vous souvenez que mon collègue de l'Accusation vous a

14 posé un certain nombre de questions sur ce paragraphe ?

15 R. Oui.

16 Q. Maintenant, je vais vous lire ce paragraphe, en tout cas, ce qui en est

17 pertinent : "Le 10 août 2001, nous sommes revenus d'Ohrid dans la matinée

18 et le chef d'état-major de l'armée, Metodija Stamboliski, m'a appelé au

19 téléphone pour m'informer de l'incident de la mine de Ljubotenski Bacila."

20 Cette déclaration était-elle exacte et précise, pour autant que vous le

21 sachiez ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous maintenez donc cette partie de votre déclaration aujourd'hui ?

24 R. Oui.

25 Q. La phrase suivante : "Ultérieurement j'ai transmis cette information au

26 président."

27 Même question : Cette déclaration était-elle précise et exacte pour autant

28 que vous le sachiez ?

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1 R. Oui, en effet.

2 Q. Je lis ensuite : "J'ai cru comprendre que lors de cet incident des

3 soldats de l'armée avaient été tués. Ces soldats étaient originaires du

4 village de Ljubanci."

5 Cette déclaration était-elle précise et exacte pour autant que vous le

6 sachiez ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous la maintenez donc aujourd'hui ?

9 R. Oui.

10 Q. L'enquêteur de l'Accusation vous a-t-il demandé si le président avait

11 émis un ordre à l'intention du général Stamboliski, pour autant que vous

12 puissiez vous en souvenir ?

13 R. On ne m'a pas posé de question de ce genre.

14 Q. Maintenant regardons le paragraphe, plus particulièrement la section

15 que je viens de vous lire. Vous semble-t-il que l'enquêteur s'intéressait

16 particulièrement à ce qui avait été dit entre le président, le général

17 Stamboliski et vous-même; vous semble-t-il que l'enquêteur s'intéressait

18 particulièrement à la formulation plutôt qu'au contenu général ?

19 R. Comme je vous l'ai déjà dit, on ne m'a posé aucune question

20 supplémentaire.

21 Q. Encore une fois, comme nous l'avons déjà dit, il me semble que c'était

22 à l'enquêteur de décider quelles questions il convenait de vous poser,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Tout à fait.

25 Q. Vous vous souvenez sans doute que ma consoeur et moi-même, pendant

26 l'interrogatoire principal, vous avions interrogé sur un ordre émis par le

27 président au général Stamboliski concernant l'élimination de l'ALN. Vous

28 souvenez-vous de ces questions ?

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1 R. Oui, je m'en souviens.

2 M. METTRAUX : [interprétation] J'aimerais que l'on montre au témoin la

3 pièce 1D249, s'il vous plaît.

4 Q. Monsieur Keskovski, vous trouverez ce document sous l'intercalaire 10

5 de votre classeur.

6 Monsieur Keskovski, ce document vous a déjà été montré pendant

7 l'interrogatoire principal. C'est une revue de presse, pour autant que nous

8 puissions le voir, basée sur le communiqué de presse provenant du Conseil

9 de sécurité et concernant les événements de Ljubotenski Bacila. Je vais

10 vous demander de relire le dernier paragraphe de ce document qui dit :

11 "Lors de la réunion de la nuit dernière, le conseil estime qu'une action

12 ferme visant à éliminer toute menace à l'encontre des forces de sécurité

13 des citoyens de la République de Macédoine doit être entreprise."

14 Cette déclaration, Monsieur Keskovski, qui vient du Conseil de sécurité de

15 la République de Macédoine, est-il cohérent avec l'ordre que vous avez

16 entendu le président donner au général Stamboliski ?

17 R. Oui.

18 Q. Pour autant que vous le sachiez, vous savez qui était le président du

19 Conseil de sécurité de la République de Macédoine ?

20 R. Le président de la République de Macédoine.

21 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de

22 l'article 86, 1 de la constitution de la république, c'est la pièce P91.

23 Q. Monsieur Keskovski, vous souvenez-vous qu'on vous a posé un certain

24 nombre de questions, ma collègue vous a posé des questions sur la signature

25 proche des accords-cadres d'Ohrid, vous vous en souvenez ?

26 R. Oui.

27 Q. Et vous vous souvenez que ma consoeur vous a suggéré que le président

28 était soucieux. Je pense que vous êtes assez d'accord sur ce point, que

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1 l'accord soit bel et bien signé ce lundi 13. Vous vous en souvenez ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous vous souvenez aussi que ma consoeur de l'Accusation vous a suggéré

4 que le président aurait pu être soucieux le 10 août, que des actions de

5 représailles, si je ne me trompe, c'est l'expression utilisée, pouvaient

6 remettre en question la signature des accords. Vous vous en souvenez ?

7 R. Oui, je m'en souviens très bien.

8 Q. Est-ce que le président aurait également été préoccupé s'il n'y avait

9 pas eu d'autres attaques de l'ALN avant la signature de l'accord ce lundi-

10 là ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous avez indiqué qu'il souhaitait que l'accord-cadre soit signé le

13 lundi 13 août. Est-ce que de ce fait il aurait été

14 préoccupé ?

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce que vous savez qui est M. Vlado Buckovski ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle était au mois d'août 2001 la

19 fonction de M. Buckovski ?

20 R. M. Buckovski était le ministre de la Défense du gouvernement de la

21 République de Macédoine.

22 M. METTRAUX : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin

23 la pièce 1D856 de la liste 65 ter.

24 Q. Je pense, Monsieur Keskovski, que cela correspond à l'intercalaire 12

25 bis de votre déclaration.

26 Vous verrez, Monsieur Keskovski, qu'il s'agit d'une déclaration du bureau

27 du procureur, c'est une déclaration de M. le ministre Buckovski, cette

28 déclaration porte la date du 11 juin 2004.

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1 M. METTRAUX : [interprétation] J'aimerais demander à Mme la Greffière de

2 bien vouloir afficher la page 1D00-7491.

3 Q. Je souhaiterais que vous trouviez le paragraphe 21 de cette

4 déclaration.

5 R. Oui, je l'ai trouvé, je le vois.

6 Q. J'aimerais vous donner lecture de deux phrases de cette déclaration,

7 voilà ce qui est écrit : --

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Issa.

9 Mme ISSA : [interprétation] Je ne comprends vraiment pas comment cela peut

10 émaner de mon contre-interrogatoire, je pense à cette déclaration et il

11 s'agit, j'aimerais le faire remarquer, d'une déclaration qui n'est pas une

12 des pièces de ce dossier.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux.

14 M. METTRAUX : [interprétation] Nous avons eu un contre-interrogatoire qui a

15 été très long et qui a porté très longuement sur à la fois la réaction du

16 président et la réaction de M. Boskoski à la suite de l'incident de

17 Karpalak. Il avait été demandé quelles avaient été les incidences sur la

18 chaîne des événements et sur la signature de l'accord-cadre. Donc je pense

19 que ce sont des questions que nous pouvons poser au témoin.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez poser ces questions au

21 témoin, mais pourquoi utiliser cette déclaration ?

22 M. METTRAUX : [interprétation] Nous aimerions comparer la teneur de cette

23 déclaration et indiquer si le témoin peut nous dire quoi que ce soit à

24 propos de la véracité des éléments de cette déclaration.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais pourquoi est-ce que vous

26 présentez cela lors des questions supplémentaires, et pourquoi est-ce que

27 vous n'avez pas présenté ce document lors de l'interrogatoire principal, si

28 vous pensez que ce document peut avoir une pertinence ?

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1 M. METTRAUX : [interprétation] La Défense avait estimé que cette question

2 ne serait pas une question sur laquelle nous serions en désaccord avec le

3 Procureur. Ce n'est pas la première fois d'ailleurs qu'ils viennent

4 exprimer leur désaccord à propos de ce que nous avons dit. Il y a eu

5 d'autres occasions avec d'autres témoins où ils n'ont pas remis en question

6 auprès des témoins la chaîne des événements et ce à quoi cela aurait pu

7 aboutir. Mais c'est la première fois, d'après ce que nous comprenons, que

8 cela est contesté par le Procureur.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne sais pas si le mot contester est

10 le mot idoine. Quoi qu'il en soit Me Apostolski semble vouloir intervenir.

11 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Les accusés n'ont pas entendu

12 l'interprétation macédonienne, mais cela a été réglé une minute après.

13 C'est pour cela que je me suis levé et que j'avais demandé la parole il y a

14 une minute de cela.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons délibérer sur ce que vous

16 venez de soulever.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux, je pense qu'il serait

19 opportun que vous poursuiviez et que vous passiez à autre chose.

20 M. METTRAUX : [interprétation]

21 Q. Monsieur Keskovski, est-ce que vous vous souvenez que ma consoeur vous

22 a demandé un certain nombre de fois si vous aviez été envoyé par le

23 président sur le terrain afin de lui fournir des informations. Je pense que

24 vous avez mentionné Aracinovo, Tetovo, ou la région de Lipkovo, plus

25 précisément. Vous vous en souvenez ?

26 R. Oui, je m'en souviens.

27 Q. A ce sujet, est-ce que vous avez été témoin, lorsque le président a

28 donné des ordres ou des instructions aux soldats qui ont participé à ces

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1 opérations ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que cela englobe notamment des ordres qui ont été donnés à

4 l'armée ?

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce que cela inclut également des ordres donnés à la police, parfois

7 ?

8 R. Oui.

9 Q. Monsieur Keskovski, est-ce que vous vous souvenez - et cela concerne un

10 sujet tout à fait différent - que ma consoeur vous a posé des questions à

11 propos de la procédure de recrutement de vos adjoints au sein du secteur de

12 sécurité. Je pense qu'elle avait d'ailleurs utilisé une expression

13 indiquant que c'est vous qui aviez le dernier mot en la matière.

14 Vous vous en souvenez ?

15 R. Oui.

16 Q. Et je pense que vous avez expliqué - et corrigez-moi si je ne reprends

17 au pied de la lettre ce que vous avez dit - mais je pense que vous avez

18 indiqué que c'est vous qui preniez la décision effectivement, mais que vous

19 le faisiez après avoir consulté le président; est-ce exact ?

20 R. Oui. Avec la suggestion du président.

21 Q. J'aimerais vous poser une question. Est-ce que vous avez jamais choisi

22 ou décidé de nommer quelqu'un au sein de votre secteur, quelqu'un qui

23 n'aurait pas eu l'aval du président ?

24 R. Non, cela ne s'est pas passé pour l'équipe de la sécurité.

25 Q. Est-ce que le président vous a parfois demandé d'enlever de votre

26 service des personnes pour lesquelles il n'approuvait pas qu'elles en

27 fassent partie ?

28 R. Oui, à plusieurs reprises.

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1 Q. Je vais maintenant aborder un autre thème. Voilà ce que j'aimerais

2 savoir : en août 2001, est-ce que vous connaissiez le numéro de téléphone

3 de M. Stefanovski à l'époque ? Est-ce que vous connaissiez ce numéro ?

4 R. Non.

5 Q. Est-ce que vous vous souvenez également qu'un certain nombre de

6 questions vous ont été posées par ma consoeur à propos des ordres que le

7 président a donné à Mitre Despodov, et à la fin de ce contre-

8 interrogatoire, la proposition qu'elle a avancée consistait à dire que cet

9 ordre n'existait pas. Vous vous en souvenez ?

10 R. Oui.

11 M. METTRAUX : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin

12 la pièce de la liste 65 ter 1D332, je vous prie.

13 Q. Monsieur Keskovski, il va falloir que je vous demande d'examiner la

14 version qui est affichée sur votre écran, parce que cela ne fait pas partie

15 du classeur. Il s'agit d'une déclaration de quelqu'un que ma consoeur et

16 moi-même avons mentionné. Il s'agit de Blazo Kopacev. Il s'agit de la

17 déclaration qu'il a présentée au bureau du Procureur.

18 J'aimerais demander à la greffière d'audience d'avoir l'amabilité

19 d'afficher la page 8 de la déclaration. Il s'agit de la page 1D00-3061. Et

20 je souhaiterais que le paragraphe 38 soit affiché à l'écran. Merci.

21 Q. Monsieur Keskovski, j'aimerais vous demander d'avoir l'obligeance de

22 bien vouloir examiner le paragraphe qui se trouve en bas de la page. Je

23 vais vous en donner lecture pour que vous entendiez l'interprétation.

24 Voilà ce qui est écrit : "A propos de la réunion qui a eu lieu entre

25 Despodov et Tarculovski le vendredi 10 août, Tarculovski avait demandé à

26 Despodov d'apporter un soutien à son groupe. Despodov était réticent. Il ne

27 voulait pas s'engager sans pour autant avoir reçu un ordre. Je ne sais pas

28 qui d'autre parmi les membres de l'armée était présent à cette réunion."

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1 Voilà le passage qui m'intéresse, Monsieur Keskovski. C'est le passage que

2 je vais lire maintenant : "J'insiste pour dire que la seule source qui m'a

3 été donnée à propos des ordres allégués du président au commandant Despodov

4 pour qu'il agisse, ordres qu'il aurait apparemment reçus par téléphone du

5 président directement, est le commandant Despodov 'himself'."

6 J'aimerais savoir, Monsieur Keskovski, nous allons supposer que ce qui est

7 indiqué est exact, que l'information que nous venons de lire est tout à

8 fait exacte, d'après la déclaration de ce M. Kopacev, le commandant

9 Despodov lui avait confirmé personnellement qu'il avait reçu un ordre

10 direct aux fins d'action, et ce, de la part du président et par téléphone."

11 Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que cela correspond aux éléments de preuve que vous avez

14 apportés à cette Chambre de première instance ?

15 R. Oui.

16 M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

17 questions à poser.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Maître

19 Mettraux.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Keskovski, vous serez heureux

22 d'entendre que vous êtes arrivé au terme de votre déposition. Il n'y a plus

23 d'autres questions qui vous seront posées. La Chambre aimerait vous

24 remercier d'être venu à La Haye. La Chambre vous remercie de l'avoir aidée.

25 Et vous allez pouvoir reprendre le fil de vos activités quotidiennes. Mme

26 l'Huissière va vous escorter hors du prétoire.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'y autorisez,

28 je souhaiterais dire qu'étant donné que l'on a fait référence souvent au

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1 cours de ces derniers jours au président Trajkovski, et qu'hier il se

2 trouve qu'il s'agissait du quatrième anniversaire de la date de son décès,

3 je souhaiterais exprimer mes condoléances à l'égard de sa famille.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

5 [Le témoin se retire]

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Issa, vous souhaitez

7 intervenir ?

8 Mme ISSA : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais indiqué à mon

9 confrère que je vais demander le versement au dossier des deux documents

10 que je n'ai pas versés au dossier pendant la présentation des éléments de

11 preuve. J'avais accepté d'attendre la fin des questions supplémentaires.

12 Etant donné que le moment de lever l'audience approche, je me

13 demandais si je pouvais vous en parler maintenant.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suppose qu'il y a opposition

15 à ce sujet, n'est-ce pas ?

16 Mme ISSA : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Quel est le premier de ces

18 documents ?

19 Mme ISSA : [interprétation] Le premier de ces documents est le dossier

20 personnel qui a été identifié par le témoin comme étant un de ses

21 documents, il s'agit de la pièce 1139 de la liste 65 ter -- j'ai fait

22 référence à plusieurs documents de ce dossier lors du contre-

23 interrogatoire, et je demanderais le versement au dossier.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourquoi est-ce que vous voulez que

25 tout le dossier soit versé au dossier ?

26 Mme ISSA : [interprétation] Je pense que j'ai fait référence à la plupart

27 des documents qui font partie de ce dossier, Monsieur le Président. Vous

28 aurez peut-être remarqué que certains des documents sont répétitifs, qu'il

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1 y a plus qu'un seul document qui a trait au même événement de la même

2 question, mais pour pouvoir avoir tout le contexte ainsi que la chronologie

3 des événements, je pense que l'ensemble de ce dossier pourrait être utile à

4 la Chambre de première instance.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous n'allons pas accepter le

7 versement au dossier de l'ensemble du dossier en question, Madame Issa.

8 Qu'en est-il de votre deuxième document ?

9 Mme ISSA : [interprétation] Le deuxième document est le document 314.1 de

10 la liste 65 ter. Il s'agit de l'article relatif à l'accord-cadre d'Ohrid

11 qui a été présenté au témoin à propos des événements qui se sont déroulés.

12 Je pense notamment aux événements qui se sont déroulés pendant les derniers

13 mois, et ce, jusqu'au moment où l'accord-cadre d'Ohrid a été paraphé, puis

14 signé. Le témoin a indiqué qu'il connaissait certains des événements qui

15 sont présentés dans ce document, c'est pour cela que je demande que ce

16 document soit versé au dossier.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre ne pense pas que ce

19 document soit suffisamment pertinent, donc ce document ne sera pas versé au

20 dossier.

21 Mme ISSA : [interprétation] Je vous remercie.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avions exprimé un espoir il n'y a

23 pas si longtemps de cela, nous avions exprimé l'espoir qu'il serait

24 possible de terminer la déposition des deux prochains témoins lors de

25 l'audience de demain, qui sera beaucoup plus brève que d'habitude. Pour ce

26 qui est de chacun de ces témoins, nous avons leur interrogatoire principal

27 qui semble faire l'objet d'une déclaration écrite qui a déjà été reçue,

28 donc nous espérons que pour ce qui est du contre-interrogatoire et des

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1 questions supplémentaires, nous espérons que cela pourrait être fait en une

2 heure. Et lorsque je dis une heure, j'entends une heure par témoin.

3 Monsieur Saxon, est-ce que vous pensez que nous péchons par excès

4 d'ambition ?

5 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être, Monsieur le

6 Président, peut-être que tel sera le cas, mais le Procureur essaiera de

7 faire en sorte que son contre-interrogatoire essaie de ne pas durer plus

8 d'une heure.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, en fait, nous avons une ou deux

10 minutes de plus pour chaque témoin, parce qu'il doit y avoir une pause et

11 nous devrons terminer à 11 heures 45.

12 M. SAXON : [interprétation] Est-ce que la Chambre accepterait que pour l'un

13 des témoins le Procureur devra disposer d'un peu plus d'une heure et d'un

14 peu moins d'une heure pour l'autre témoin. Ainsi nous pourrons terminer

15 dans les temps impartis.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre vous autorisera toute

17 latitude tant que nous pouvons terminer à 11 heures 45, donc il vous

18 appartiendra de décider.

19 M. SAXON : [interprétation] Je vous remercie.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons lever l'audience et nous

21 reprendrons demain matin à 9 heures.

22 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le jeudi 28 février

23 2008, à 9 heures 00.

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