LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Mohamed Bennouna, Président
M. le Juge Mohamed Shahabuddeen
M. le Juge Lal Chand Vohrah
M. le Juge Wang Tieya
M. le Juge Rafael Nieto-Navia

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le :
16 novembre 1999

LE PROCUREUR

C/

RADOSLAV BRDANIN
MOMIR TALIC

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DÉCISION RELATIVE À L’APPEL INTERLOCUTOIRE INTERJETÉ DE LA DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE AUX FINS DE REJETER L’ACTE D’ACCUSATION DÉPOSÉE EN APPLICATION DE L’ARTICLE 72

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Le Bureau du Procureur :

Mme Joanna Korner

Le Conseil de la Défense :

M. John Ackermann pour l’Appelant Radoslav Brdanin

 

LA CHAMBRE D’APPEL du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le «Tribunal international»),

VU la Décision relative à la Requête aux fins de rejeter l’Acte d’accusation (la «Décision»), rendue le 5 octobre 1999 par la Chambre de première instance II, par laquelle cette dernière a rejeté la contestation de Radoslav Brdanin («l’Appelant») relative r la confirmation de l’Acte d’accusation établi contre lui, au motif, entre autres, qu’aucune disposition du Règlement de Procédure et de Preuve du Tribunal international («le Règlement») n’habilite une Chambre de première instance à examiner la décision du juge de confirmation, quant à l’existence de présomptions suffisantes pour engager des poursuites contre l’accusé ;

VU l’Appel interlocutoire interjeté de la Décision relative à la Requête aux fins de rejeter l’Acte d’accusation, déposé par l’Appelant le 12 octobre 1999 («l’Appel interlocutoire»), par lequel il soutient que sa contestation relative à la confirmation de l’Acte d’accusation constitue une exception d’incompétence en application de l’article 72 B) i) du Règlement, et qu’elle devrait être traitée dans l’alternative comme une demande aux fins d’obtenir l’autorisation d’interjeter appel en application de l’article 72 B) ii) ;

VU la Réponse de l’Accusation à l’Appel interlocutoire (la «Réponse de l’Accusation»), déposée le 21 octobre 1999, par laquelle le Bureau du Procureur («l’Accusation») soutient que l’Appel interlocutoire ne relève pas véritablement du champ d’application de l’article 72 B) i) du Règlement et devrait aussi être rejeté en application de l’article 72 B) ii) ; par laquelle il notifie également son intention de demander au juge de confirmation l’autorisation de modifier l’Acte d’accusation établi contre l’accusé ;

VU la Réplique à la Réponse de l’Accusation et la Requête aux fins d’une Ordonnance de protection, déposée par l’Appelant le 25 octobre 1999 (la «Requête aux fins d’une Ordonnance de protection»), par laquelle celui-ci sollicite une Ordonnance de protection qui empêcherait l’Accusation d’obtenir l’autorisation de modifier l’Acte d’accusation jusqu’à ce que la Chambre d’appel ait statué dans cette procédure ;

VU la Réponse de l’Accusation à la Requête aux fins d’une Ordonnance de protection déposée le 29 octobre 1999, par laquelle l’Accusation s’oppose à la Requête aux fins d’une Ordonnance de protection ;

ATTENDU qu’à ce stade de la procédure, la Chambre d’appel doit trancher la question de savoir si l’Appel interlocutoire interjeté relève effectivement du champ d’application de l’article 72 du Règlement ;

ATTENDU que devant la Chambre de première instance, l’Appelant a invoqué, à l’appui de sa contestation relative à la confirmation de l’Acte d’accusation, l’existence d’un vice de procédure et d’un vice de fond ;

ATTENDU que l’argument de l’Appelant relatif au vice de procédure confond, comme l’a déclaré à juste titre la Chambre de première instance, les questions de forme et de fond, et que l’existence du vice allégué par l’Appelant relève donc du fond ;

ATTENDU que, en admettant l’existence, qui reste encore à établir, d’un vice de fond lors de l’appréciation par le juge de confirmation du caractère suffisant des éléments de preuve communiqués pour engager des poursuites contre Radoslav Brdanin, cette irrégularité ne pourrait etre considérée comme touchant à la compétence au sens de l’article 72 B) i) du Règlement ;

ATTENDU PAR CONSÉQUENT qu’une contestation relative à la confirmation de l’Acte d’accusation ne peut être qualifiée d’exception d’incompétence et relever de la disposition susmentionnée ;

ATTENDU EN OUTRE que l’Appel interlocutoire de l’Appelant ne vise aucun des cas d’ouverture énumérés à l’article 72 A) et auxquels se rapporte l’article 72 B) ii) du Règlement ;

ATTENDU PAR CONSÉQUENT que l’on ne peut considérer l’Appel interlocutoire comme une demande aux fins d’autorisation d’interjeter appel en application de l’article 72 B) ii) ;

ATTENDU que rien ne justifie, dans ces circonstances, de faire droit à la Requête aux fins d’une Ordonnance de protection ;

REJETTE l’Appel interlocutoire interjeté à tort en application de l’article 72 ET REJETTE la Requête aux fins d’une ordonnance de protection.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la Chambre d’appel
(signé)
M. le Juge Mohamed Bennouna

Fait le seize novembre 1999,
La Haye (Pays Bas).

[Sceau du Tribunal]