Affaire n° : IT-99-36-R77

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Carmel Agius, Président
Mme le Juge Ivana Janu
Mme le Juge Chikako Taya

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
19 mars 2004

LE PROCUREUR

c/

RADOSLAV BRDJANIN

CONCERNANT LES ALLÉGATIONS FORMULÉES À L’ENCONTRE DE MILKA MAGLOV

___________________________________________

DÉCISION RELATIVE À LA DEMANDE D’ACQUITTEMENT INTRODUITE EN VERTU DE L’ARTICLE 98 BIS DU RÈGLEMENT

___________________________________________

L’Amicus Curiae chargé des poursuites :

Mme Brenda J. Hollis

La Défenderesse :

Mme Milka Maglov

La Défense :

M. Jonathan Cooper

TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION

A. Rappel de la procédure
B. Article 98 bis du Règlement : droit applicable et critère d’examen
C. Actes dont l’Amicus curiae chargé des poursuites reconnaît qu’ils n’ont pas été prouvés

a) Communication du lieu de séjour du Témoin
b) Entreprise criminelle commune

II. LE DROIT APPLICABLE EN MATIÈRE D’OUTRAGE AU TRIBUNAL

A. Introduction
B. Intimidation d’un témoin

a) Arguments de la Défenderesse
b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites
c) Position de la Chambre de première instance

C. Exercice de toute autre pression sur un témoin

a) Arguments de la Défenderesse
b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites
c) Position de la Chambre de première instance

D. Tentative d’intimider un témoin ou de faire pression sur lui de toute autre manière

a) Arguments de la Défenderesse
b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites
c) Position de la Chambre de première instance

E. Communication de l’identité d’un témoin à un tiers en violation d’une ordonnance d’une Chambre

a) Arguments de la Défenderesse
b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites
c) Position de la Chambre de première instance

III. ÉLÉMENTS DE FAIT

A. Arguments de la Défenderesse
B. Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites
C. Conclusions de la Chambre de première instance

IV. DISPOSITIF

I. INTRODUCTION

A. Rappel de la procédure

1. Le 15 avril 2003, dans l’affaire Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin1, la présente Chambre de première instance (la « Chambre de première instance » ou la « Chambre ») a rendu l’Ordonnance relative aux allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov (la « Défenderesse »)2, dans laquelle elle a estimé qu’à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, les faits portés à sa connaissance pouvaient amener à conclure 1) que la Défenderesse était entrée en contact avec un témoin potentiel de l’Accusation (le « Témoin ») et l’avait intimidé, et/ou 2) qu’elle avait révélé l’identité du Témoin à un tiers en violation d’une ordonnance d’une Chambre et que sur cette base, il existait des motifs suffisants pour poursuivre Milka Maglov pour outrage au Tribunal en vertu des alinéas iv) et ii) de l’article 77 A) du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »). Le 8 mai 2003, la Chambre a rendu l’Ordonnance déclenchant l’engagement d’une procédure contre Milka Maglov3, dans laquelle elle demandait au Greffier de nommer un amicus curiae (l’«  Amicus curiae chargé des poursuites ») et ordonnait à ce dernier de poursuivre la Défenderesse pour 1) intimidation présumée du Témoin et 2) communication présumée de son identité à un tiers, en violation d’une ordonnance d’une Chambre.

2. Le 6 février 2004, la Chambre a fait droit à la requête présentée par l’Amicus curiae chargé des poursuites aux fins de modification des allégations d’outrage au Tribunal4, en ordonnant que la Défenderesse soit poursuivie pour les faits suivants (les « Allégations »), ayant consisté à :

1. intimider, ou de toute autre manière fait pression sur le Témoin, aux termes de l’article 77 A) iv) du Règlement, ou, à titre subsidiaire,

2. tenter d’intimider, ou de toute autre manière faire pression sur le Témoin au sens de l’article 77 B) du Règlement, et

3. divulguer, au sens de l’article 77 A) ii) du Règlement, l’identité et/ou le lieu de séjour du Témoin à un membre du public, en violation d’une ordonnance de la Chambre de première instance,

3. Le procès de la Défenderesse s’est ouvert le 16 février 2004. L’Amicus curiae chargé des poursuites a achevé la présentation des moyens à charge le 19 février  2004, après quatre journées d’audience qui ont vu la comparution de cinq témoins et le versement de dix-sept documents au dossier. La Défenderesse a produit pour sa part cinq documents.

4. Le 24 février 2004, la Défenderesse a introduit à titre confidentiel une demande d’acquittement en vertu de l’article 98 bis du Règlement5. Le 26 février 2004, l’Amicus curiae chargé des poursuites a déposé à titre confidentiel une réponse à la Requête fondée sur l’article 98 bis6 et, le 27 février 2004, il a déposé un corrigendum à cette réponse7. Le 4 mars 2004, la Défenderesse a déposé à titre confidentiel une réplique à la Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites8.

5. La Défenderesse a assuré sa propre défense jusqu’au 18 mars 2004, date à laquelle le Greffe a commis Me Jonathan Cooper pour la défendre dans la procédure relative aux allégations d’outrage formulées à son encontre.

B. Article 98 bis du Règlement : droit applicable et critère d’examen

6. L’article 98 bis du Règlement (Demande d’acquittement) dispose ce qui suit :

A) Un accusé peut déposer une requête aux fins d’acquittement pour une ou plusieurs des infractions figurant dans l’acte d’accusation dans les sept jours suivant la fin de la présentation des moyens à charge et, dans tous les cas, avant la présentation des moyens à décharge en application de l’article 85 A) ii).

B) Si la Chambre de première instance estime que les éléments de preuve présentés ne suffisent pas à justifier une condamnation pour cette ou ces accusations, elle prononce l’acquittement, à la demande de l’accusé ou d’office.

7. La Défenderesse et l’Amicus curiae chargé des poursuites s’accordent à considérer9 que le critère applicable pour l’examen des requêtes fondées sur l’article 98 bis du Règlement, est défini de manière satisfaisante dans l’Arrêt Jelisic :

La Chambre d’appel estime qu’à travers la formule, « les éléments de preuve ne suffisent pas à justifier une condamnation », l’article 98 bis fait référence à une situation où, aux yeux de la Chambre de première instance, les éléments à charge , à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, sont insuffisants pour qu’un juge du fait raisonnable en infère que la culpabilité a été établie au-delà de tout doute raisonnable. De ce point de vue, la Chambre d’appel s’en tient à ce qu’elle déclarait récemment dans l’Arrêt Delalic : « SlCe critère appliqué est celui de savoir s’il existe des moyens de preuve au vu desquels (s’ils sont admis) un juge du fond raisonnable pourrait être convaincu au-delà du doute raisonnable que l’accusé est coupable du chef d’accusation précis en cause ». Ce qui est essentiel, c’est que les moyens de preuve à charge (s’ils sont admis) puissent justifier une condamnation au-delà de tout doute raisonnable par un juge du fait raisonnable. La question n’est donc pas de savoir si le juge prononcerait effectivement une condamnation au-delà de tout doute raisonnable au vu des moyens à charge (s’ils sont admis), mais s’il le pourrait. Il se peut qu’à l’issue de la présentation des moyens de l’Accusation , la Chambre considère que les preuves à charge sont suffisantes pour justifier une condamnation au-delà de tout doute raisonnable, et qu’elle prononce néanmoins l’acquittement à la fin du procès, même si la Défense n’a pas présenté d’éléments par la suite, dès lors que sa propre analyse des éléments de preuve l’amène à conclure que l’Accusation n’a pas réussi à prouver la culpabilité au-delà de tout doute raisonnable10.

8. Tant la Défenderesse que l’Amicus curiae chargé des poursuites ont présenté des conclusions concernant la manière dont la Chambre de première instance devrait exercer ses pouvoirs et sa compétence lorsqu’elle est saisie d’une requête fondée sur l’article 98 bis. Il est inutile de faire ici un rappel détaillé de ces arguments, dans la mesure où ils ont déjà été étudiés dans la jurisprudence du Tribunal concernant cet article. La Chambre de première instance estime cependant nécessaire de revenir sur certaines des questions soulevées, en raison de l’approche adoptée par la Défenderesse à propos de l’appréciation des éléments de preuve.

9. La Chambre de première instance accueille les arguments suivants de l’Amicus curiae chargé des poursuites, qui sont conformes à la jurisprudence du Tribunal  :

a) En appliquant le critère, la Chambre de première instance ne devrait pas évaluer la crédibilité et la fiabilité des moyens à charge, sauf « quand ces témoignages sont si manifestement dépourvus de fiabilité ou de crédibilité qu’aucun juge du fond ne pourrait raisonnablement y accorder le moindre crédit », c’est-à-dire lorsqu’il est possible de dire que la cause de l’Accusation « s’est totalement effondrée », au point qu’aucun juge du fait ne pourrait accepter les éléments de preuve invoqués par l’Accusation à l’appui de son argumentation sur une question particulière11.

b) À cet égard, les contradictions que pourraient recéler les éléments de preuve de l’Accusation sont à examiner dans le cadre de l’appréciation de la crédibilité et de la fiabilité des preuves et doivent, par conséquent, être examinées à la fin du procès et non à ce stade12.

c) La Chambre de première instance ne devrait pas tenir compte d’éléments de preuve favorables à la Défenderesse. C’est à la fin des débats, et non à mi-chemin, que la Chambre devrait déterminer dans quelle mesure des éléments de preuve sont favorables à la Défenderesse et se prononcer sur leur effet d’ensemble à la lumière des autres éléments versés au dossier13.

9. Ces principes sont réaffirmés ici parce que dans ses conclusions écrites, la Défenderesse a adopté une approche qui exigerait de la Chambre de première instance qu’elle aille bien au-delà de la jurisprudence et de la pratique du Tribunal, désormais bien établies pour ce qui est de l’examen des requêtes fondées sur l’article 98  bis du Règlement. Les constatations formulées dans la présente décision ont donc été dégagées à l’aide du « critère relatif à l’article 98 bis », tel qu’exposé ci-dessus, qui consiste à se demander si un juge du fait raisonnable pourrait être convaincu au-delà de tout doute raisonnable qu’à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, les éléments de preuve versés pourraient justifier de déclarer la Défenderesse coupable des actes qui lui sont reprochés.

C. Actes dont l’Amicus curiae chargé des poursuites reconnaît qu’ils n’ont pas été prouvés

a) Communication du lieu de séjour du Témoin

9. La Défenderesse a, de son propre aveu14, révélé au témoin R77-B le lieu de séjour du Témoin, ce qui constitue normalement une violation des termes de l’ordonnance rendue par la Chambre de première instance le 3 juillet 2000. Il appert cependant que comme beaucoup de personnes de son entourage , le témoin R77-B savait déjà où se trouvait le Témoin15. C’est pourquoi l’Amicus curiae chargé des poursuites concède que c’est la divulgation du fait que le Témoin allait déposer dans l’affaire Brdanin, et non celle de son lieu de séjour, qui constitue une violation présumée de l’esprit et de la lettre de l’ordonnance de la Chambre de première instance. En raison des circonstances de l’espèce, l’Amicus curiae chargé des poursuites demande donc l’abandon de l’accusation de divulgation du lieu de séjour du Témoin16.

10. Par conséquent, la Chambre conclut à l’insuffisance des moyens de preuve à charge pour la partie du chef 3 qui reproche à la Défenderesse d’avoir révélé le lieu de séjour du Témoin à un tiers en violation d’une ordonnance rendue par une Chambre, accusation portée en vertu de l’article 77 A) ii).

b) Entreprise criminelle commune

11. L’Amicus curiae chargé des poursuites concède également l’absence d’éléments de preuve sur la base desquels un juge du fait raisonnable pourrait conclure au- delà de tout doute raisonnable à l’existence d’une entreprise criminelle commune , et demande à la Chambre de première instance d’écarter cette forme de responsabilité 17.

12. Vu la pratique du Tribunal en matière de formulation des chefs d’accusation18 et la précision exigée en la matière pour les procédures relevant de l’article 77 du Règlement19, la Chambre de première instance estime que la Défenderesse n’a pas été accusée d’avoir participé à une entreprise criminelle commune dont le but était de commettre l’une quelconque des infractions alléguées. Quels que soient les éléments de preuve présentés à charge, la Chambre relève qu’il serait injuste vis-à-vis de la Défenderesse de permettre à l’Amicus curiae chargé des poursuites d’invoquer une entreprise criminelle commune, quel qu’ait pu en être le but20. En tout état de cause, il n’est pas possible en l’espèce d’envisager cette forme de responsabilité. Partant, il n’y a aucun intérêt à examiner cette question et les arguments présentés par l’Amicus curiae chargé des poursuites, et la Chambre s’en abstiendra.

II. LE DROIT APPLICABLE EN MATIÈRE D’OUTRAGE AU TRIBUNAL

A. Introduction

13. Historiquement, le droit applicable en matière d’outrage (contempt) est et demeure une création de common law. Ce concept est réputé étranger au droit romano-germanique, mais de nombreux systèmes de cette tradition ont institué des infractions emportant des effets similaires21.

14. L’outrage au tribunal (contempt of court) consiste en un acte ou une omission visant à entraver la bonne administration de la justice22. Le Tribunal détient le pouvoir inhérent de déclarer coupables d’outrage les personnes qui entravent sciemment et délibérément le cours de la justice23. Si on examine les alinéas i) à v) de l’article 77 A) du Règlement à la lumière de cette définition du pouvoir inhérent du Tribunal, on constate que tous visent des comportements tombant sous le coup de ce pouvoir, dans la mesure où ils reviennent clairement à entraver délibérément et sciemment la bonne administration de la justice par le Tribunal24. La nature de ce pouvoir inhérent découle des sources traditionnelles du droit international et est indépendante du libellé de l’article 77 du Règlement. Les modifications apportées à l’article ne limitent donc pas ce pouvoir inhérent25.

15. Les différents comportements envisagés au paragraphe A) de l’article 77 ne requièrent pas tous le même état d’esprit26. L’élément moral doit être établi au cas par cas pour chacun des comportements visés aux alinéas i) à v). Pour chaque forme d’outrage à caractère pénal, l’Accusation doit démontrer que l’accusé a agi avec l’intention spécifique d’entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal27.

B. Intimidation d’un témoin

a) Arguments de la Défenderesse

16. Pour ce qui est de l’allégation d’intimidation ou de tentative d’intimidation d’un témoin ou d’un témoin potentiel, la Défenderesse soutient que selon les termes clairs et sans ambiguïté de l’article 77 du Règlement, il faut, pour établir l’outrage pénal, prouver que l’acte condamnable a été commis sciemment et délibérément28. S’agissant de l’intention spécifique exigée pour établir un outrage de nature pénale sanctionné par l’article 77, la Défenderesse invoque l’arrêt rendu par la Chambre d’appel dans l’affaire Le Procureur c/ Aleksovski29. Quant à l’élément matériel de l’infraction, la Défenderesse renvoie aux Recommandations du Comité d’experts du Conseil de l’Europe sur l’intimidation des témoins et les droits de la défense (le « Comité d’experts »), recommandations dans lesquelles il est dit que l’intimidation s’entend de « toute menace directe, indirecte ou potentielle exercée sur un témoin et pouvant conduire à une ingérence dans son devoir de témoigner en ne subissant aucune influence, quelle qu’elle soit30 ».

17. La Défenderesse s’oppose au recours à la définition figurant dans le dictionnaire Merriam Webster, proposé par l’Amicus curiae chargé des poursuites dans son mémoire préalable au procès. Elle considère en effet que cette définition permet de conclure à l’intimidation sur la seule base du point de vue subjectif du témoin, puisque l’acte y est caractérisé comme le fait de « rendre timide ou [d’] effrayer » (to make timid or fearful)31. Elle ne récuse cependant pas la partie plus précise de la définition : « en particulier, contraindre ou dissuader par des menaces, réelles ou simulées ; intimider par des menaces, des insultes ou un comportement agressif » (especially to compel or deter by or as if by threats; to intimidate through threats, insults or aggressive behaviour)32.

b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites

18. L’Amicus curiae chargé des poursuites avance que les éléments constitutifs de l’intimidation, ou de toute autre pression exercée sur un témoin, sont les suivants  :

a) seul ou de concert avec d’autres, l’accusé a, par un acte ou une omission, intimidé le témoin ou de toute autre manière fait pression sur celui-ci ;

b) l’acte ou l’omission de l’accusé a été accompli sciemment et délibérément.

19. L’Amicus curiae chargé des poursuites soutient qu’il convient de donner au terme « intimider » son sens courant, à savoir « rendre timide ou effrayer ; susciter chez autrui la peur ou un sentiment d’infériorité ; faire peur ; en particulier , contraindre ou dissuader par des menaces, réelles ou simulées ; intimider par des menaces, des insultes ou un comportement agressif » (to make timid or fearful ; inducing fear or a sense or inferiority into another; frighten; especially to compel or deter by or as if by threats; to intimidate through threats, insults or aggressive behaviour)33. S’opposant à la Défenderesse qui souhaiterait voir appliquer la définition de l’intimidation recommandée par le Comité d’experts, l’Amicus curiae chargé des poursuites considère que la définition du dictionnaire est plus adaptée au regard de l’obligation statutaire qu’a le Tribunal de protéger les victimes et les témoins. Il fait observer que la définition retenue par la Défenderesse n’exige pas de menace physique ou verbale directe, ni d’ingérence effective dans le devoir de témoigner en ne subissant aucune influence. D’après l’Amicus curiae chargé des poursuites, il suffit que le comportement de l’accusé, agissant seul ou de concert avec d’autres, ait constitué une menace indirecte ou potentielle envers un témoin, ayant pu aboutir à une ingérence dans le devoir de celui-ci de déposer en ne subissant aucune influence 34.

20. Pour ce qui est du deuxième élément constitutif, c’est-à-dire du caractère conscient et délibéré de l’acte ou de l’omission de l’accusé, l’Amicus curiae chargé des poursuites soutient que l’accusé a agi sciemment si les preuves démontrent l’un des aspects suivants : l’accusé avait une connaissance effective de la nature et des conséquences de son comportement, il a fait preuve à cet égard d’un aveuglement délibéré (d’une ignorance volontaire) ou d’une indifférence irresponsable. Il soutient également que l’intimidation délibérée ou l’exercice délibéré de toute autre pression sur un témoin comprend aussi bien les cas où l’accusé entendait spécifiquement se comporter de la sorte, que ceux où son comportement était simplement volontaire, c’est-à-dire non fortuit. D’après l’Amicus curiae chargé des poursuites, la preuve d’un seul de ces éléments suffirait à établir l’intimidation délibérée ou l’exercice délibéré de toute autre pression sur le témoin35.

c) Position de la Chambre de première instance

21. En tant qu’outrage au Tribunal, l’intimidation de témoin exige la preuve a)  que l’accusé a eu un comportement de nature à intimider un témoin et b) qu’il a agi sciemment et délibérément36.

22. L’élément matériel de l’intimidation de témoin, en tant qu’outrage au Tribunal , consiste en des actes ou omissions condamnables de nature à constituer des menaces directes, indirectes ou potentielles envers un témoin ou un témoin potentiel. Pour être qualifié d’outrage au tribunal, le comportement en question doit être suffisamment grave pour être de nature à intimider un témoin37. Ces actes ou omissions doivent être appréciés dans le contexte particulier de l’espèce considérée38. En tant qu’outrage au Tribunal, l’intimidation de témoin est une infraction formelle, et la preuve de son résultat n’est donc pas requise. Il importe peu de savoir si le témoin a effectivement été intimidé : il suffit que l’Accusation prouve que le comportement en question visait à entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal39.

23. Pour ce qui est de l’élément moral de l’infraction d’intimidation de témoin constitutive d’outrage au Tribunal, l’Accusation doit établir que l’accusé savait que son comportement était de nature à intimider un témoin. Il faut également prouver que l’accusé a agi avec l’intention spécifique d’entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal40.

C. Exercice de toute autre pression sur un témoin

a) Arguments de la Défenderesse

24. S’agissant de l’exercice de toute autre pression sur un témoin, la Défenderesse invoque la conclusion, tirée par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (le « TPIR »), selon laquelle la disposition qui prévoit « au titre des actes constitutifs d’outrage l’intervention auprès d’un témoin, doit être interprété[e] comme ne sanctionnant une telle intervention que si elle est abusive. […] [L]’intervention abusive […] pourrait être retenue […] si les intervenants ont […] tenté d’ […] inciter [les témoins] à modifier leur témoignage41  ».

b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites

25. L’Amicus curiae chargé des poursuites soutient que dans les circonstances de l’espèce, le fait de « faire pression de toute autre manière » sur un témoin désigne toute intervention abusive et comprend tout comportement qui influence le témoin ou l’incite à modifier son témoignage42.

c) Position de la Chambre de première instance

26. Pour qu’une personne puisse être tenue responsable d’outrage au Tribunal pour avoir fait pression sur un témoin de toute autre manière, il doit être prouvé : a) que l’accusé a eu un comportement de nature à dissuader un témoin ou un témoin potentiel de déposer, ou propre à influer sur la nature de son témoignage et b)  que l’accusé a agi sciemment et délibérément43.

27. L’élément matériel de l’infraction consistant à faire pression sur un témoin de toute autre manière peut revêtir différentes formes. Celles-ci comprennent sans s’y limiter : le fait de faire en sorte, par la corruption ou autrement, qu’un témoin soit introuvable, pour éviter ou empêcher qu’une injonction de comparaître lui soit signifiée44 ; le fait d’agresser, de menacer ou d’intimider un témoin ou une personne probablement appelée à comparaître comme témoin45 ; le fait d’influencer un témoin contre une partie, notamment en dénigrant celle-ci46  ; le fait d’entreprendre, par la corruption, de pousser un témoin à dissimuler des éléments de preuve47. La Chambre est d’avis que le fait d’exercer des pressions sur un témoin en le menaçant, l’intimidant , le blessant ou tentant de le soudoyer doit être reproché en tant que tel, tandis que le fait de « faire pression de toute autre manière » sur un témoin renverra à d’autres actes ou comportements de gravité comparable, visant également à influer sur l’issue d’une affaire pendante en faisant pression sur un témoin ou un témoin potentiel. Examinés à la lumière des circonstances de l’espèce, les actes ou omissions de l’accusé doivent être de nature à dissuader un témoin ou un témoin potentiel de déposer, ou propres à influer sur la nature de son témoignage. Comme dans le cas de l’intimidation de témoin constitutive d’outrage au Tribunal, il n’est pas nécessaire que l’Accusation prouve que le comportement incriminé a effectivement dissuadé le témoin de déposer ou influé sur son témoignage48.

28. L’élément moral de l’infraction consistant à faire pression sur un témoin de toute autre manière exige la preuve que l’accusé savait que son comportement dissuaderait probablement un témoin ou un témoin potentiel de déposer, ou influerait probablement sur la nature du témoignage49. L’Accusation doit également démontrer que l’accusé avait spécifiquement l’intention d’entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal50.

D. Tentative d’intimider un témoin ou de faire pression sur lui de toute autre manière

a) Arguments de la Défenderesse

29. Que ce soit dans la Requête fondée sur l’article 98 bis ou dans sa Réplique à la Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, la Défenderesse ne présente aucun argument juridique relatif au fait de « tenter » d’intimider un témoin ou de faire pression sur lui de toute autre manière, qui lui est reproché au chef  2 des Allégations. Toutefois, dans sa réponse à la Requête de l’Amicus curiae chargé des poursuites aux fins de modifier les allégations d’outrage au Tribunal , elle estime irrecevable le chef 2 des Allégations, en faisant valoir qu’il n’est pas possible de commettre une tentative d’intimidation. Elle soutient que chaque acte d’intimidation serait assimilable à une intimidation effective. La Défenderesse estime que les modifications proposées par l’Amicus curiae chargé des poursuites lui porteraient préjudice, parce que nul ne peut être déclaré coupable d’un acte ou d’une omission qui, au moment où ils ont été commis, n’étaient pas sanctionnés pénalement par le droit interne ou international51.

b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites

30. L’Amicus curiae chargé des poursuites avance que la tentative d’intimider un témoin ou de faire pression sur lui de toute autre manière est constituée dès lors que le comportement de l’accusé a clairement constitué un commencement d’exécution de l’acte d’intimidation ou de l’exercice d’autres pressions, mais qu’en dépit de ce comportement, l’infraction ne s’est pas concrétisée parce que le témoin n’a pas été effrayé ou n’a pas été soumis à d’autres pressions52.

c) Position de la Chambre de première instance

31. La Chambre conclut que le critère relatif à l’article 98 bis est rempli pour ce qui est du chef 1 des Allégations, à savoir le fait d’avoir intimidé le Témoin ou fait pression sur celui-ci de toute autre manière. À ce stade, il est superflu de procéder à l’analyse des questions de droit soulevées par l’accusation subsidiaire de tentative, portée sous le chef 2 des Allégations (fait d’avoir tenté d’intimider le Témoin, ou d’avoir de toute autre manière tenté de faire pression sur celui-ci), puisqu’en tout état de cause, la tentative d’un crime constitue une partie de sa commission53. La Chambre traitera des aspects particuliers de cette accusation subsidiaire à un stade ultérieur, après avoir entendu les arguments détaillés des parties à ce sujet et ce, au cas où l’Amicus curiae chargé des poursuites n’obtiendrait pas gain de cause au sujet des allégations figurant au chef 1.

E. Communication de l’identité d’un témoin à un tiers en violation d’une ordonnance d’une Chambre

a) Arguments de la Défenderesse

32. S’agissant des éléments que l’Amicus curiae chargé des poursuites doit prouver au-delà de tout doute raisonnable, les arguments avancés par la Défenderesse sont presque tous d’ordre factuel. La Chambre de première instance n’est pas en mesure de déceler un quelconque argument juridique portant sur le droit applicable à cette accusation.

b) Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites

33. S’agissant de l’accusation de violation d’une ordonnance d’une Chambre par la communication de l’identité du Témoin à un tiers, l’Amicus curiae chargé des poursuites estime que les éléments constitutifs de cette infraction sont les suivants :

1. L’accusé, seul ou de concert avec d’autres, a, par un acte ou une omission, communiqué l’identité (et le lieu de séjour) d’un témoin à un tiers ;

2. La communication a été faite en violation d’une ordonnance d’une Chambre ;

3. La violation a été commise sciemment.

34. L’Amicus curiae chargé des poursuites soutient que l’adverbe « sciemment  » s’applique aux violations d’une ordonnance d’une Chambre commises en connaissance de cause : connaissance effective de l’ordonnance violée, aveuglement délibéré ( ignorance volontaire) ou indifférence irresponsable à l’égard de son existence. S’agissant du caractère « délibéré » d’une violation commise sciemment, il avance qu’il est nécessaire de prouver que l’accusé entendait spécifiquement se comporter de la sorte, ou bien que son comportement était volontaire et non fortuit.

c) Position de la Chambre de première instance

35. Pour qu’une personne soit déclarée coupable d’outrage au Tribunal pour avoir communiqué l’identité d’un témoin à un tiers en violation d’une ordonnance d’une Chambre, l’Accusation doit établir : a) que l’accusé a révélé l’identité d’un témoin à un tiers, b) que la communication s’est faite en violation d’une ordonnance d’une Chambre et c) que la violation a été commise sciemment et délibérément54.

36. Pour déterminer si une ordonnance d’une Chambre a été violée en l’espèce, il convient de se référer à la teneur exacte de l’ordonnance visée dans les allégations d’outrage au Tribunal. L’ordonnance en question a été rendue par la Chambre de première instance le 3 juillet 2000, dans l’affaire Brdanin, et elle autorise la Défense de Brdanin55 à communiquer à des tiers l’identité d’un témoin ou d’un témoin potentiel qui lui a été révélée par le Procureur, si cette communication est directement et spécifiquement nécessaire à la préparation et à la présentation de la cause de son client56. Pour prouver l’allégation de violation de cette Ordonnance portant mesures de protection, l’Amicus curiae chargé des poursuites doit établir non seulement que la Défenderesse a révélé à un tiers l’identité d’un témoin ou d’un témoin potentiel mais également que cette communication n’était pas directement et spécifiquement nécessaire à la préparation et à la présentation de la cause de Brdanin. La Chambre de première instance souligne qu’à cet égard, la charge de la preuve pèse sur l’Amicus curiae chargé des poursuites.

37. L’Accusation doit aussi démontrer que la violation d’une ordonnance d’une Chambre a été commise à la fois sciemment et délibérément. Pour qu’une telle violation soit commise sciemment, la connaissance effective de l’ordonnance en question n’est pas nécessaire, car il suffit que la personne à qui la violation est reprochée ait fait preuve d’un aveuglement délibéré à l’égard de son existence57. On considère que l’aveuglement délibéré (également appelé ignorance volontaire) est tout aussi répréhensible que la connaissance effective d’un fait particulier58. Dans le cas de l’aveuglement délibéré, la connaissance de l’existence du fait en question est réputée prouvée lorsque l’Accusation établit que l’accusé se doutait que le fait existait (ou savait que son existence était fortement probable) mais s’est abstenu de vérifier s’il existait vraiment, dans le but de pouvoir nier qu’il en avait connaissance59.

38. La jurisprudence du Tribunal ne répond pas à la question de savoir si d’autres états d’esprit, tels que l’indifférence irresponsable à l’existence d’une ordonnance , suffisent pour que l’on puisse considérer que la violation d’une ordonnance a été commise « sciemment »60. La Chambre de première instance note que l’Amicus curiae chargé des poursuites estime que l’indifférence irresponsable à l’existence d’une ordonnance emporte une telle conséquence61. Toutefois, à ce stade de la procédure, la Chambre de première instance s’abstiendra de déterminer si l’indifférence irresponsable à l’égard de l’existence d’une ordonnance suffirait à constituer un outrage. Elle ne se prononcera à ce sujet que dans son jugement final, si la question venait effectivement à se poser.

39. Le simple fait de négliger de vérifier si une ordonnance a été rendue ne constitue pas un outrage au Tribunal. Pareil comportement pourrait donner lieu à des mesures disciplinaires, suffisantes et plus appropriées, mais ne saurait en aucun cas justifier une peine d’emprisonnement ou une amende élevée, même si l’indifférence irresponsable ou la négligence peuvent avoir pour conséquence imprévue d’entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal62.

40. Dans la plupart des cas où l’Accusation établit que l’accusé avait connaissance de l’existence d’une ordonnance (qu’il se soit agi d’une connaissance effective ou d’un aveuglement délibéré à l’égard de son existence), il en est presque inévitablement conclu que l’accusé entendait violer l’ordonnance. Cela étant, on peut envisager le cas où l’accusé a agi avec une indifférence irresponsable à la question de savoir si son comportement violait une telle ordonnance. La présente Chambre de première instance note que cet état d’esprit n’équivaut pas à l’indifférence irresponsable à l’existence d’une ordonnance d’une Chambre63. Pour la Chambre d’appel, un tel comportement est au demeurant suffisamment condamnable pour justifier que son auteur soit sanctionné pour outrage au Tribunal, que l’Accusation ait prouvé ou non qu’il avait l’intention spécifique de commettre une violation. D’après la Chambre d’appel, il suffit d’établir que le comportement constitutif de la violation était volontaire et non fortuit64. La Chambre de première instance estime quant à elle que même si la preuve de l’intention spécifique de violer une ordonnance n’est pas exigée pour qu’un accusé soit déclaré coupable d’outrage, l’Accusation doit tout de même établir que l’accusé avait l’intention spécifique d’entraver la bonne administration de la justice par le Tribunal65.

III. ÉLÉMENTS DE FAIT

A. Arguments de la Défenderesse

41. Dans la Requête fondée sur l’article 98 bis, la Défenderesse soutient que même appréciés de la manière la plus favorable à l’Amicus curiae chargé des poursuites, les éléments de preuve présentés jusqu’ici n’établissent aucune des infractions qui lui sont reprochées. Elle demande donc à être acquittée de toutes les accusations66.

42. La Défenderesse soutient que les éléments de preuve soumis à la Chambre de première instance montrent que le Témoin a été traité poliment pendant tout l’interrogatoire visé en l’espèce et qu’aucune menace n’a été proférée pendant ou après cet interrogatoire. La Défenderesse affirme qu’elle s’est présentée, qu’elle avait une attitude correcte et que les inquiétudes du Témoin n’ont pas résulté d’un quelconque comportement fautif de sa part. Elle soutient que le Témoin lui-même a déclaré qu’elle n’avait rien fait pour l’intimider ou faire pression sur lui. Pour la Défenderesse, le fait que le Témoin ait apparemment pris peur tient à ce que le Bureau du Procureur ne lui a pas expliqué la réalité de sa situation aux termes de l’Ordonnance portant mesures de protection, et notamment que la Défense avait le droit d’interroger des témoins. D’après elle, aucun élément de preuve ne laisse penser qu’avant de rendre visite au Témoin le 13 septembre 2001, elle savait qu’il avait fourni une déclaration à l’Accusation. La Défenderesse déclare que les preuves indiquent plutôt que le but de la visite était de demander au Témoin s’il accepterait de déposer pour la Défense dans le procès Brdanin67. Elle soutient également qu’au vu des preuves, aucune Chambre de première instance raisonnable ne pourrait conclure qu’un conseil de la Défense aurait sciemment et délibérément intimidé un témoin parce qu’il s’est contenté d’interroger un témoin potentiel et de lui demander de témoigner pour la Défense68.

43. La Défenderesse estime que les éléments de preuve soumis à la Chambre de première instance montrent que, lors de sa visite au Témoin le 19 décembre 2001, elle n’a pas révélé au témoin R77-B que le Témoin avait fourni une déclaration à l’Accusation , ni qu’il avait prévu de témoigner pour celle-ci. Au lieu de cela, elle a, pour la deuxième fois, demandé au Témoin s’il accepterait de témoigner pour la Défense de Brdanin. Elle soutient, en outre, que ces mêmes éléments de preuve n’établissent pas à quel moment le conseil principal de Brdanin lui a donné accès à l’Ordonnance portant mesures de protection69.

B. Arguments de l’Amicus curiae chargé des poursuites

44. L’Amicus curiae chargé des poursuites avance que la Chambre de première instance a reçu suffisamment d’éléments de preuve qui, jugés dignes de foi, permettraient à un juge du fait raisonnable de conclure au-delà de tout doute raisonnable que la Défenderesse a sciemment et délibérément intimidé le Témoin, tenté de l’intimider ou de toute autre manière tenté de faire pression sur lui, et qu’elle a divulgué l’identité du Témoin en violation d’une ordonnance d’une Chambre. Par conséquent, il demande le rejet de la Requête fondée sur l’article 98 bis70.

45. D’après l’Amicus curiae chargé des poursuites, le comportement de la Défenderesse devrait être apprécié dans le contexte de l’environnement hostile dans lequel vivait et travaillait le Témoin, et en tenant compte de la vulnérabilité du Témoin au regard de ce contexte71. L’Amicus curiae chargé des poursuites fait valoir que, par son comportement , la Défenderesse a, seule ou de concert avec M. Peric, intimidé le témoin ou tenté de l’intimider et de faire pression sur lui de toute autre manière. Quant à la question de savoir si les actes de la Défenderesse tenaient de l’ignorance volontaire ou de l’indifférence irresponsable, l’Amicus curiae chargé des poursuites soutient que c’est par omission que la Défenderesse s’est rendue coupable d’intimidation ou de l’exercice d’autres pressions, dans la mesure où elle n’a pas pris connaissance des documents dont elle disposait ou auxquels elle avait accès. L’Amicus curiae chargé des poursuites considère que le critère relatif à l’article 98 bis est rempli en ce que la Défenderesse a agi sciemment et délibérément72.

46. De surcroît, l’Amicus curiae chargé des poursuites affirme que même en supposant que le Témoin n’ait pas été intimidé, les éléments de preuve suffisent à établir que la Défenderesse a tenté de faire en sorte qu’il le soit, en ce que son comportement a clairement représenté un commencement d’exécution de l’acte d’intimidation . L’Amicus curiae chargé des poursuites précise que l’infraction d’intimidation n’a pas été constituée malgré le comportement de la Défenderesse, parce que dans les faits, le Témoin n’a pas pris peur73.

47. L’Amicus curiae chargé des poursuites concède que rien ne prouve que le comportement de la Défenderesse ait poussé le Témoin à modifier sa déposition devant le Tribunal. Il soutient cependant qu’à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, les éléments de preuve soumis à la Chambre de première instance sont suffisants pour qu’un juge du fait raisonnable puisse conclure que la Défenderesse a tenté de peser sur la déposition du Témoin. L’Amicus curiae chargé des poursuites estime que bien que, dans les faits, le Témoin ne se soit pas laissé influencer et n’ait pas modifié sa déposition, il est raisonnable de dire que le comportement de la Défenderesse a clairement constitué un commencement d’exécution du projet visant à influencer le Témoin afin qu’il modifie sa déposition74.

48. Pour ce qui est du troisième chef d’accusation, l’Amicus curiae chargé des poursuites avance que les éléments de preuve soumis à la Chambre de première instance suffisent à établir que la Défenderesse a communiqué l’identité du Témoin à un tiers en violant sciemment une ordonnance d’une Chambre75. Il affirme que le 13 septembre 2001, la Défenderesse savait que le Témoin avait fourni une déclaration à l’Accusation et que des mesures de protection avait été mises en place au bénéfice des témoins potentiels de l’Accusation76.

C. Conclusions de la Chambre de première instance

49. Compte tenu des définitions juridiques données plus haut des infractions en question, et indépendamment du fait que l’Amicus curiae chargé des poursuites a concédé que les éléments de preuve ne suffisent pas à établir que le comportement de la Défenderesse a conduit le témoin à modifier sa déposition devant le Tribunal 77, la Chambre de première instance conclut qu’un juge du fait raisonnable pourrait être convaincu au-delà de tout doute raisonnable qu’à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, les éléments de preuve produits pourraient justifier de déclarer la Défenderesse coupable d’outrage au Tribunal pour des actes ayant consisté à :

1. intimider, ou de toute autre manière faire pression sur le Témoin, aux termes de l’article 77 A) iv) du Règlement, ou, à titre subsidiaire,

2. tenter d’intimider, ou de toute autre manière faire pression sur le Témoin au sens de l’article 77 B) du Règlement, et

3. divulguer, au sens de l’article 77 A) ii) du Règlement, l’identité du Témoin à un membre du public, en violation d’une ordonnance de la Chambre de première instance.

50. La Chambre de première instance conclut qu’un juge du fait raisonnable ne saurait être convaincu au-delà de tout doute raisonnable que les éléments de preuve produits , à supposer qu’ils soient jugés dignes de foi, pourraient justifier de déclarer la Défenderesse coupable d’outrage au Tribunal pour avoir, en violation d’une ordonnance de la Chambre, divulgué auprès d’un tiers le lieu de séjour du Témoin, au sens de l’article 77 A) ii) du Règlement.

51. La Requête fondée sur l’article 98 bis est donc rejetée pour les chefs  1 et 2 des Allégations. Elle est également rejetée pour le chef 3 des Allégations en ce qu’il reproche à la Défenderesse d’avoir dévoilé l’identité du Témoin à un tiers, en violation d’une ordonnance d’une Chambre. Il n’est fait droit à la Requête que pour le chef 3 des Allégations en ce qu’il reproche à la Défenderesse d’avoir révélé à un tiers le lieu de séjour du Témoin, en violation d’une ordonnance d’une Chambre.

IV. DISPOSITIF

Par ces motifs, en application de l’article 98 bis du Règlement, la Chambre de première instance :

1) FAIT DROIT à la Requête fondée sur l’article 98 bis uniquement pour le chef 3 des Allégations, en ce qu’il reproche à la Défenderesse d’avoir révélé à un tiers le lieu de séjour du Témoin en violation d’une ordonnance d’une Chambre , et conclut que la Défenderesse n’a pas à se défendre de cette accusation particulière en raison de l’insuffisance des moyens à charge ;

2) REJETTE la Requête fondée sur l’article 98 bis pour toutes les autres questions soulevées par la Défenderesse et déboute celle-ci de sa demande d’acquittement pour les chefs 1 et 2 et pour le surplus du chef 3.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre de première instance
__________
Carmel Agius

__________
Juge Ivana Janu

__________
Juge Chikako Taya

Fait le 19 mars 2004
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-T.
2 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-T, Ordonnance relative aux allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, 15 avril 2003.
3 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-R77, Ordonnance déclenchant l’engagement d’une procédure contre Milka Maglov, 8 mai 2003.
4 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-R77, Décision relative à la requête aux fins de modification des allégations d’outrage déposée par l’Amicus curiae chargé des poursuites, 6 février 2004.
5 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, Confidential Motion for Judgement of Acquittal — Rule 98 bis, 24 février 2004 (la « Requête fondée sur l’article 98 bis »).
6 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, Confidential Response to the Respondent’s Motion for Judgement of Acquittal — Rule 98 bis, 26 février 2004 (la « Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites »).
7 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, Corrigendum to Confidential Response to the Respondent’s Motion for Judgement of Acquittal — Rule 98 bis, 27 février 2004 (le « Corrigendum de l’Amicus curiae chargé des poursuites »).
8 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, Milka Maglov’s Reply to the Prosecutor’s Response to Ms Maglov’s Motion for Judgement of Acquittal Pursuant to Rule 98 bis, document déposé à titre confidentiel (la « Réplique à la réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites »).
9 - Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 12 et 13 ; Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 5 à 9.
10 - Le Procureur c/ Goran Jelisic, affaire n° IT-95-10-A, Arrêt, 5 juillet 2001 (l’« Arrêt Jelisic »), par. 37 [non souligné dans l’original].
11 - Voir Le Procureur c/ Dario Kordic et Mario Cerkez, affaire n° IT-95-14/2, Décision relative aux demandes d’acquittement de la Défense, 6 avril 2000, par. 28 ; Le Procureur c/ Galic, affaire n° IT-98-29-T, Décision relative à la demande d’acquittement de l’accusé Stanislav Galic, 3 octobre 2002, par. 11.
12 - Le Procureur c/ Zoran Kupreskic et consorts, affaire n° IT-95-16, Arrêt, 23 octobre 2001 (l’« Arrêt Kupreskic »), par. 332 à 334.
13 - Voir Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-T, Décision relative à la requête aux fins d’acquittement introduite en vertu de l’article 98 bis du Règlement, 28 novembre 2003, par. 62.
14 - Pièce P 10.
15 - R77-B, compte rendu d’audience (« CR »), p. 192, audience à huis clos et CR, p. 105, audience à huis clos partiel.
16 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 10.
17 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 11.
18 - Voir Arrêt Kupreskic, par. 88 et 116 ; voir aussi Le Procureur c/ Miroslav Kvocka et consorts, affaire n° IT-98-30-PT, Décision relative aux exceptions préjudicielles de la Défense portant sur la forme de l’acte d’accusation, 12 avril 1999, par. 23 ; Le Procureur c/ Milorad Krnojelac, affaire n° IT-97-25-PT, Décision relative à l’exception préjudicielle pour vices de forme de l’acte d’accusation modifié, 11 février 1999, par. 18 ; Le Procureur c/ Milorad Krnojelac, affaire n° IT-97-25-PT, Décision relative à l’exception préjudicielle de la Défense pour vices de forme de l’acte d’accusation, 24 février 1999, par. 11 à 20 ; Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin et Momir Talic, affaire n° IT-99-36-PT, Décision relative à l’exception préjudicielle soulevée par Momir Talic pour vices de forme de l’acte d’accusation modifié, 20 février 2001, par. 13.
19 - Le Procureur c/ Zlatko Aleksovski, affaire n° IT-95-14/1-AR77, Arrêt relatif à l’appel de la décision portant condamnation pour outrage au Tribunal interjeté par Anto Nobilo, 30 mai 2001 (l’« Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage »), par. 56. Voir aussi Le Procureur c/ Blagoje Simic et consorts, affaire n° IT-95-9-R77, Scheduling Order in the Matter of Allegations Against Accused Milan Simic and his Counsel, 7 juillet 1999.
20 - Voir Le Procureur c/ Milorad Krnojelac, affaire n° IT-97-25-A, Arrêt, 21 septembre 2001, par. 124 à 144. Voir aussi l’Arrêt Kupreskic, par. 114.
21 - Le Procureur c/ Dusko Tadic, affaire n° IT-94-1-A-R77, Arrêt relatif aux allégations d’outrage formulées à l’encontre du précédent conseil, Milan Vujin, 31 janvier 2000 (l’« Arrêt Tadic relatif à l’outrage »), par. 15. À la note 20 de l’Arrêt Tadic relatif à l’outrage, la Chambre d’appel a étudié les codes pénaux d’un certain nombre de systèmes romano-germaniques : « Par exemple, le Code pénal allemand sanctionne comme agent principal de l’infraction quiconque incite un témoin à faire une fausse déclaration (par. 26 et 153). Le droit pénal de la République populaire de Chine sanctionne quiconque incite un témoin à faire un faux témoignage (Article 306). Le Nouveau Code Pénal français sanctionne ceux qui font pression sur un témoin pour qu’il fasse une déclaration mensongère ou s’abstienne de faire une déclaration véridique (Article 434-15). Des dispositions législatives plus générales existent, concernant notamment la police de l’audience, les « affronts » (outrages), les infractions commises en audience (par exemple, les délits d’audience) et la publication de commentaires tendant à exercer une pression sur les témoignages ou sur la décision d’un tribunal quel qu’il soit. Le Code pénal russe sanctionne toute entrave, quelle qu’elle soit, aux activités des tribunaux, pour peu que l’auteur ait eu l’intention d’entraver le cours de la justice (Article 294) et sanctionne également des infractions plus spécifiques, telles que la falsification d’éléments de preuve (Article 303). »
22 - Att.-Gen. v. Butterworth (1963) 1 Q.B. 696 ; The St James’s Evening Post, 2 Atk. 469, p. 471 ; Bahama Islands, re a special reference from (1893) A.C. 138. Pour une synthèse actuelle de la question de l’outrage au tribunal, voir Att.-Gen. v. Times Newspapers Ltd (1992) 1 AC 191, HL. Voir aussi, à cet égard, l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Sunday Times c. Royaume-Uni, 26 avril 1979, Série A, vol. 30, par. 18, p. 14 à 16 et par. 55, p. 34 (où cette définition du but et de la portée du droit relatif à l’outrage est adoptée).
23 - Arrêt Tadic relatif à l’outrage, par. 26 ; Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 30.
24 - Arrêt Tadic relatif à l’outrage, par. 26, faisant référence à la version de l’article 77 du Règlement applicable le 31 janvier 2000.
25 - Arrêt Tadic relatif à l’outrage, par. 24 ; Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 30 ; Le Procureur c/ Blagoje Simic et consorts, affaire n° IT-95-9-R77, Jugement relatif aux allégations d’outrage formulées à l’encontre d’un accusé et de son conseil, 30 juin 2000, par. 91.
26 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 40 et 42.
27 - R v. Almon (1770) 20 St. Tr 803, p. 839 ; Ahnee v. DPP (1999) 2 AC 294, PC (publication propre à jeter le discrédit sur une cour) ; Att.-Gen. v. Butterworth (1963) 1. W.B. 696, CA (acte hostile commis contre un témoin avec l’intention de le punir d’avoir déposé) ; Att.-Gen. v. Judd (1995) C.O.D. 15 DC (harcèlement d’un ancien juré) ; R. v. Schot and Barclay (19972 Cr.App.R. 383, CA (refus obstiné d’un juré de rendre un verdict) ; Att.-Gen. v. News Group Newspaper plc (1989) Q.B. 110, DC ; Re Lonrho plc (1990) 2 A.C. 154, HL ; Att.-Gen. v. Times Newspaper Ltd (1992) 1 A.C. 191, HL ; Att.-Gen. v. Newspaper Publishing plc (1997) 1 W.L.R. 926, CA. (publications) ; Att.-Gen. v. Sports Newspaper Ltd (1991) 1.W.L.R. 1194, p. 1200, CA (Civ. Div.).
28 - Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 14.
29 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 45 et 46.
30 - Comité d’experts sur l’intimidation des témoins et les droits de la défense, Conseil de l’Europe. Intimidation des témoins et droits de la défense : Recommandation n° R (97) 13, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 10 septembre 1997, avec un Exposé des motifs, p. 7. Voir Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 15.
31 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, affaire n° IT-99-36-R77, Pretrial Brief of Amicus Curiae Prosecutor, par. 42.
32 - Ibidem ; voir Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 15.
33 - Voir le Merriam Webster Dictionary.
34 - Voir Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 14 et 20.
35 - Voir Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 17 et 18.
36 - Att.-Gen v. Sport Newspaper Ltd (1991) 1 W.L.R. 1194, p. 1200, CA (Civ. Div.). La définition proposée pour l’infraction en question est clarifiée dans les paragraphes suivants.
37 - R. v. Kellet (1976) 1 Q.B. 372, 61, Cr. App.R. 240. Voir, par exemple, 18 U.S.C.§ 1512 (2004) Federal Obstruction of Justice Statute. Le même point de vue, ayant rang d’opinio juris des États, est exposé dans la Recommandation n° R (97) 13 sur l’intimidation de témoins et les droits de la défense, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 10 septembre 1997 avec un exposé des motifs (p. 7).
38 - Voir, p. ex., l’Arrêt R. v. Clemente, dans lequel la Cour suprême du Canada a considéré, au regard de l’article 264.1 du Code criminel canadien (Infraction contre la personne et la réputation), que la question de savoir si l’accusé avait l’intention d’intimider la victime ou si les termes qu’il a employés visaient à être pris au sérieux sera habituellement tranchée, en l’absence d’explication de la part de l’accusé, en fonction des mots utilisés, du contexte dans lequel ils s’inscrivent et de la personne à qui ils étaient destinés (R. c. Clemente (1994) 2 R.C.S. 758).
39 - Shaw v. Shaw (1861) 2 Sw. & Tr. 517 ; Bromilow v. Phillips (1891) 40 W.R. 220 ; R. v. Greenberg (1919) 121 L.T. 288.
40 - Wong Yeung Ng v. Secretary for Justice (1999) 2 HKC 24. Voir aussi supra, par. 15.
41 - Le Procureur c/ Kajelijeli, affaire n° ICTR-98-44A-T, Décision sur la requête de Kajelijeli demandant que des membres du Bureau du Procureur soient déclarés coupables d’outrage au Tribunal en vertu de l’article 77 C) du Règlement, 15 novembre 2002 (« Décision Kajelijeli relative à l’outrage »), par. 9.
42 - Voir Décision Kajelijeli relative à l’outrage, par. 9.
43 - Cette définition de l’infraction considérée procède de l’analyse présentée dans les paragraphes suivants.
44 - Clement v. Williams (1836) 2 Scott 814 ; Lewis v. James (1887) 3 TLR 527.
45 - Partridge v. Partridge (1639) Toth 40 ; Shaw v. Shaw (1861) 2 Sw & Tr 517 ; Bromilow v. Phillops (1891) 40 W.R. 220 ; R v. Castro, Onslow’s and Whalley’s Case (1873) LR 9 QB 219 ; Re B (A) (1965) Ch 1112, (1965) 2 All ER 168 ; voir aussi The County Courts Act 1959, article 157 I) a) (« insulte délibérément un témoin »).
46 - Welby v. Still (1892) 66 LT 523.
47 - Re Hooley, Rucker’s Case (1898) 79 LT 306. Au sujet des différentes formes que peuvent revêtir les pressions exercées sur les témoins, voir aussi : R. v. Kellet (1976) 1 Q.B. 372, 61 Cr.App.R. 240 ; Martin’s case (1747) 2 Russ. & My. 674 ; Macgill’s Case (1848) 2 Fowler’s Exch. Prac., 2e éd., p. 404 ; R. v. Gurney (1867) 10 Cox C.C. 550 ; Ex p. Jones (1806) 13 Ves. 237 ; Re Ludlow Charities ; Lechmere Charlton’s Case (1837) 2 My. & Cr. 316, p. 229 ; Décision Kajelijeli relative à l’outrage, par. 9 et Le Procureur c/ Kanyabashi et consorts, Décision sur les allégations d’outrage formulées de nouveau par le Procureur, 30 novembre 2001.
48 - Re B (J.A.) (an infant : cas d’un enfant) (1965) Ch 1112, (1965) 2 All ER.
49 - Voir l’arrêt rendu par Lord Denning (Président de la Cour d’appel) et le Juge Donovan dans l’affaire in Re A-G’s Application, A-G v. Butterworth (1963) I QB 696, (1962) 3 All ER 326, CA. Dans ce contexte, voir aussi : Re Johnson (1887) 20 Q.B.D. 68 ; Gariboldo v. Gagnoni (1704) 6 Mod. 90 ; Purdin v. Roberts, 74 J.P. 88 ; Re de Court, The Times, 27 novembre 1997, Ch. D.
50 - Voir supra, par. 15.
51 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, affaire n° IT-99-36-R77, Response of the Accused to the Motion by Amicus Curiae Prosecutor to Amend Allegations of Contempt of the Tribunal, 24 janvier 2004, p. 3 et 4.
52 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 38.
53 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, affaire n° IT-99-36-R77, Décision relative à la requête aux fins de modification des allégations d’outrage déposée par l’Amicus curiae chargé des poursuites, 6 février 2004, p. 4.
54 - Cette définition du crime considéré découle de l’analyse présentée dans les paragraphes suivants.
55 - La Chambre de première instance note que les éléments de preuve dont elle dispose montrent qu’à l’époque visée par les Allégations, la Défenderesse faisait partie de l’équipe de la Défense de Brdanin.
56 - Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin et Momir Talic, affaire n° IT-99-36-PT, Décision relative à la requête de l’Accusation aux fins de mesures de protection, 3 juillet 2000 (l’« Ordonnance portant mesures de protection »), versée au dossier sous la cote P4, par. 65 4).
57 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 45.
58 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 43.
59 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 43.
60 - Dans l’Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, la Chambre d’appel a laissé à d’autres Chambres le soin de trancher la question (par. 45).
61 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 17. L’Amicus curiae chargé des poursuites reprend à cet endroit, en y renvoyant, les arguments présentés aux paragraphes 44 à 46 de son Mémoire préalable au procès, déposé à titre confidentiel (Le Procureur c/ Radoslav Brdjanin, concernant les allégations formulées à l’encontre de Milka Maglov, Confidential Pre-Trial Brief of Amicus Curiae Prosecutor, 18 janvier 2004).
62 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 45.
63 - Il s’agit d’une indifférence irresponsable aux conséquences de l’acte par lequel l’ordonnance est violée, plutôt que d’une indifférence irresponsable à l’existence de l’ordonnance violée, hypothèse dont il est fait mention au paragraphe 45 de l’Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage.
64 - Arrêt Aleksovski relatif à l’outrage, par. 54.
65 - Voir supra, par. 15.
66 - Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 2.
67 - Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 2 à 7.
68 - Réplique à la réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, p. 2 à 4.
69 - Requête fondée sur l’article 98 bis, p. 7 à 12 ; Réplique à la réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, p. 2 et 5 à 7.
70 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 52.
71 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 16, 19 à 27 et 35. Les éléments de preuve y afférents sont énumérés aux pages 6 à 13.
72 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 17, 18, 28 et 29. Les éléments de preuve y afférents sont énumérés aux pages 14 à 17.
73 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 37 à 40. Les éléments de preuve y afférents sont énumérés aux pages 6 à 13.
74 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 38 et 39.
75 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 42 à 49. Les éléments de preuve y afférents sont énumérés aux pages 14 à 17 et 24 à 27.
76 - Réponse de l’Amicus curiae chargé des poursuites, par. 17, 18 et 30 à 36.
77 - Voir le paragraphe 27 de la présente décision, où le fait de faire pression sur un témoin de toute autre manière est défini comme une infraction formelle n’exigeant pas la preuve que le Témoin a effectivement été dissuadé d’agir comme il l’entendait, ou influencé.