Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 9 avril 2002.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 14 heures 20.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière d'audience, merci de

6 nous donner le numéro de l'affaire.

7 Mme Chen (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, il s'agit de

8 l'affaire IT-99-36-T, le Procureur contre Radoslav Brdanin et Momir Talic.

9 M. le Président (interprétation): Monsieur Brdanin, bonjour, je me tourne

10 vers vous pour vous demander si vous nous suivez dans une langue que vous

11 comprenez?

12 M. Brdanin (interprétation): Bonjour Monsieur le Président, Mesdames les

13 Juges. Malheureusement, je dois signaler que je vous entends mais que je

14 ne vous comprends pas. Je ne peux vous suivre aujourd'hui.

15 M. le Président (interprétation): Mais que voulez-vous dire par là? Que se

16 passe-t-il?

17 M. Brdanin (inteprétation): Eh bien, la même chose s'est reproduite. J'ai

18 appris qu'un autre enquêteur avait reçu une lettre lui demandant pourquoi

19 il travaillait à Banja Luka. Je crois que, Monsieur le Président, il faut

20 que vous interveniez pour régler ce genre de problèmes. Je ne sais pas

21 pourquoi ce genre de tentatives est fait pour essayer d'avoir un impact

22 négatif sur ma stratégie de défense, c'est la stratégie que j'ai adoptée

23 il y a un certain temps, et je ne souhaite pas que l'équipe qui assure ma

24 défense fasse l'objet de quelque attaque que ce soit. Je suis très

25 préoccupé par cet état de chose.

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1 J'ai suivi très régulièrement les décisions et les ordonnances que vous

2 avez rendues. J'ai suivi tout ce qui a été fait, les différents documents

3 m'ont été remis. Hier je n'ai rien pu suivre, je n'ai pas pu me concentrer

4 du fait de ces choses très perturbantes qui se produisent et je voudrais

5 faire part ici de ma préoccupation. Je voudrais faire état ici de la

6 situation dans laquelle se trouve mon avocat, et je tenais à attirer votre

7 attention sur cette question, Monsieur le Président.

8 M. le Président (interprétation): Vous avez discuté de cela avec votre

9 avocat?

10 M. Brdanin (interprétation): Cet incident, j'en ai pris connaissance

11 aujourd'hui. Apparemment le deuxième enquêteur a également reçu une

12 lettre, c'est quelque chose que j'ai appris il y a environ une heure. J'ai

13 appris cela par le moyen d'un appel que j'ai reçu au téléphone. C'est

14 quelque chose dont je sais bien que nous en avons parlé hier, mais voici

15 un incident nouveau qui ne fait qu'exacerber la situation difficile dans

16 laquelle nous nous trouvons.

17 M. le Président (interprétation): Vous faites référence à un deuxième

18 enquêteur, Monsieur Brdanin, il y a peut-être un problème au niveau de

19 l'interprétation qui est faite de vos propos. Est-ce que Me Ackerman peut

20 nous aider à mieux comprendre ce qui se passe? Nous parlons d'enquêteurs,

21 de quoi parlons-nous exactement Maître?

22 M. Brdanin (interprétation): Oui je parle, en fait, du conseil juridique,

23 de l'assistant juridique.

24 M. le Président (interprétation): Très bien, mais je me tourne vers Me

25 Ackerman pour avoir des éléments d'explication. A quoi votre client fait-

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1 il référence? Votre client nous dit qu'il a reçu certains éléments

2 d'information aujourd'hui.

3 M. Ackerman (interprétation): Je peux vous dire ce que je pense être la

4 situation, je ne me suis pas entretenu avec mon client aujourd'hui, donc

5 je ne sais pas d'où il tient ces éléments d'information. Moi, ce que j'ai

6 pu observer aujourd'hui c'est qu'une lettre avait été envoyée depuis le

7 Greffe, le Greffe indiquant par le moyen de ce courrier qu'un de mes

8 enquêteurs se voyait refuser le droit de voyager de son domicile à Banja

9 Luka; Banja Luka où il devait travailler du 1er au 16 de ce mois. Le

10 Greffe indique qu'il n'y a aucun motif justifiant la présence de cette

11 personne à Banja Luka.

12 Moi je voulais répondre à cela que nous nous trouvons dans la phase de

13 l'affaire où nous nous penchons sur les incidents de Banja Luka et j'ai

14 besoin de pouvoir mener des enquêtes sur ce qui s'est passé à Banja Luka

15 pendant la période de temps dans laquelle nous nous trouvons, c'est tout

16 nouveau.

17 M. le Président (interprétation): C'est tout nouveau effectivement.

18 M. Ackerman (interprétation): J'en ai pris connaissance il y en a environ

19 5 minutes, mais c'est vrai que ce genre de situation surgit parfois, nous

20 y sommes parfois confrontés.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Brdanin, vous avez entendu ce

22 que j'ai dit. J'ai dit que tout cela était fort nouveau, que je n'avais

23 pas été informé de cela, donc c'est pour la première fois que j'entends

24 parler de cet incident et de ces derniers développements et cela me pousse

25 à vous dire que je n'ai rien à ajouter pour le moment.

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1 Je ne pourrais vous faire de commentaires que lorsque j'aurais eu des

2 éléments d'information supplémentaires. Ce dont je peux vous assurer en

3 tout cas c'est que s'il y a quelque irrégularité que ce soit, je tâcherai

4 d'intervenir et de régler la situation. Si ce qui est fait est conforme au

5 Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal, eh bien, les choses

6 devront demeurer en l'état, mais s'il y a infraction au Règlement, eh

7 bien, nous interviendrons.

8 Si on essaie d'une quelconque façon de ridiculiser le fonctionnement de

9 cette institution ou bien si on essaie de porter atteinte à vos droits en

10 tant qu'accusé dans cette affaire, eh bien, j'interviendrai et nous

11 agirons. Mais j'ai besoin d'obtenir des éléments d'information

12 supplémentaires. Je n'ai rien à ajouter pour le moment.

13 M. Brdanin (interprétation): Merci.

14 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'il y a quoi que ce soit

15 d'autre que vous souhaitiez me dire ou nous dire?

16 M. Brdanin (inteprétation): Non, Monsieur le Président, et je suis désolé

17 d'avoir eu à prendre la parole ainsi que je l'ai fait. D'habitude je ne

18 prends pas la parole de mon propre chef, je m'exprime toujours par le

19 truchement de mon avocat, mais j'avais vraiment besoin de m'adresser à

20 vous.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Brdanin, je comprends bien deux

22 des choses que vous avez dites à l'instant. Effectivement, d'habitude,

23 vous vous exprimez par le truchement de votre avocat. Et je peux

24 d'ailleurs en profiter pour dire que vous avez un avocat tout ce qu'il y a

25 de compétent pour vous représenter, et je suis certain que votre avocat

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1 mettra toujours tout en œuvre pour expliquer vos préoccupations à la

2 Chambre. C'est la première chose que je voulais dire.

3 Et puis, je voudrais également ajouter que je veux vous encourager à

4 prendre la parole s'il y a quoi que ce soit au cours du procès qui vous

5 perturbe. S'il y a des choses sur lesquelles vous souhaitez exprimer des

6 réserves, eh bien, prenez la parole notamment lorsque que vous pensez que

7 votre droit à un procès équitable est menacé. N'hésitez jamais à prendre

8 la parole, personne ne vous réprimandera, personne ne vous demandera de

9 vous taire, personne ne vous demandera de garder le silence, vous avez

10 tous les droits à un procès équitable.

11 C'est ce Tribunal qui souhaite vous assurer ce type de procès. Donc, je le

12 répète: s'il y a quoi que ce soit sur quoi vous voulez émettre des

13 réserves, s'il y a des choses sur lesquelles vous n'êtes pas d'accord, si

14 vous êtes par exemple en désaccord sur certains aspects de l'affaire avec

15 votre conseil de la défense, eh bien, vous avez toute latitude pour en

16 faire part à la Chambre qui vous entendra, qui vous écoutera.

17 M. Brdanin (inteprétation): Je vous remercie Monsieur le Président.

18 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, je ne voudrais pas dire

19 ici qu'il y a quelque désaccord que ce soit entre vous-même et votre

20 client -vous êtes quand même un avocat de grande expérience et vous savez

21 que parfois il peut y avoir des différends entre un avocat et l'accusé

22 qu'il défend, et vous savez comme moi que c'est parfois grâce à la Chambre

23 et aux Juges que ce type de différend peut être réglé.

24 Maintenant Général Talic, je me tourne vers vous, bonjour.

25 M. Talic (interprétation): Bonjour Monsieur le Président, Mesdames les

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1 Juges. Je vous entends.

2 M. le Président (interprétation): Dans une langue que vous comprenez?

3 M. Talic (interprétation): Oui, je vous entends dans une langue que je

4 comprends.

5 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez des problèmes dont

6 vous souhaitez nous faire part? Est-ce que vous êtes confronté au même

7 type de situation que M. Brdanin? Si ce n'est pas le cas je vais vous

8 demander de prendre place et nous pourrons passer à autre chose.

9 M. Talic (interprétation): Je n'ai rien à dire, Monsieur le Président. Je

10 n'ai aucun type de problème.

11 M. le Président (interprétation): Monsieur Cayley, vous n'avez pas non

12 plus de questions que vous vouliez soulever et porter à notre attention.

13 Nous allons introduire le témoin. Non je vois Maître Ackerman debout.

14 M. Ackerman (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Une question que

15 je souhaiterais soulever. Peut-être que je suis la seule personne à

16 n'avoir pas compris ce qui s'est passé dans cette salle d'audience, mais

17 hier lorsque nous avons parlé du témoin qui a été interviewé par mon

18 coconseil, vous, Monsieur le Président, vous avez demandé à Mme Korner

19 s'il s'agissait d'un témoin protégé. Moi, j'avais compris qu'elle vous

20 avait dit qu'il s'agissait d'un témoin protégé.

21 M. le Président (interprétation): Elle m'a dit que ce témoin avait dans un

22 premier temps demandé à bénéficier de toutes les mesures de protection,

23 c'est-à-dire attribution d'un pseudonyme et d'autres choses encore. Mais

24 Mme Korner a été tout à fait claire sur le point suivant: il s'agit d'un

25 témoin protégé.

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1 M. Ackerman (interprétation): Je suis rentré chez moi, j'ai cherché des

2 ordonnances, des décisions qui pouvaient avoir trait à cette question et

3 j'ai soulevé la question auprès du Bureau du Procureur aujourd'hui et je

4 m'aperçois qu'il n'y a eu pas de demande formulée par le Bureau du

5 Procureur, pas de demande d'attribution de mesures de protection et aucune

6 ordonnance n'a été rendue en ce sens par la Chambre.

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Cayley, vous pouvez revenir sur

8 le détail de ce qui vient d'être évoqué par Me Ackerman?

9 M. Cayley (interprétation): Oui, effectivement avant que vous n'arriviez

10 dans le prétoire, la question a été soulevée par Me Ackerman. Et d'après

11 ce que j'ai compris, nous n'avons pas fait de demande officielle

12 d'attribution de mesures de protection pour l'un quelconque des témoins

13 qui vient de cette municipalité qui nous intéresse pour le moment.

14 M. le Président (interprétation): Mais j'ai entendu Mme Korner dire sans

15 ambiguïté possible que le témoin dont nous parlions avait demandé que des

16 mesures de protection lui soient accordées.

17 M. Cayley (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président, mais

18 lorsque nous faisons une demande aux fins d'application de mesures de

19 protection, nous le faisons municipalité par municipalité. Lorsque nous

20 abordons une municipalité, nous faisons une demande qui va, en fait,

21 toucher tous les témoins qui s'exprimeront sur cette municipalité.

22 Je ne me rappelle pas exactement ce qu'a pu dire Mme Korner, si elle a

23 déclaré quelque chose qui va dans le sens de ce que vous dites, peut-être

24 faisait-elle référence à l'ordonnance générale qui est d'application pour

25 tous les témoins ou peut-être faisait-elle référence au fait que ce témoin

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1 avait demandé au Bureau du Procureur si des mesures de protection

2 pouvaient lui être accordées avant sa venue ici pour déposer.

3 M. le Président (interprétation): D'après ce qu'avait dit Mme Korner,

4 j'avais l'impression que, suite à l'incident dont nous avons débattu hier

5 à huis clos, ce témoin avait très clairement réitéré sa demande

6 d'attribution de mesures de protection. Il avait demandé dans un premier

7 temps des mesures de protection, cela remonte à un certain nombre de

8 temps, lorsqu'on l'a contacté pour la première fois pour lui demander de

9 coopérer avec ce Tribunal, mais la demande a été par la suite réitérée.

10 L'importance de cette question apparaîtra lorsque nous rendrons la

11 décision qui tranchera la question qui a été soulevée hier, et cela aura

12 bien évidemment un impact sur la décision qui devra être prise

13 ultérieurement dans une deuxième étape de la procédure; décision qui

14 pourrait intervenir suite à une enquête que nous pourrions demander, nous,

15 Juges de la Chambre.

16 En tant que Chambre de première instance, nous sommes un peu troublés de

17 savoir que tout simplement parce qu'on n'a pas encore évoqué le nom de

18 telle ou telle municipalité dans le cadre de l'affaire, la question des

19 mesures de protection reste en suspens et n'est pas abordée. Vous êtes

20 suffisamment intelligent, Monsieur Cayley, pour lire entre les lignes.

21 Vous savez quelles pourraient être les conséquences de ce que je suis en

22 train d'évoquer.

23 M. Cayley (interprétation): Monsieur le Président, je vous comprends très

24 bien. Effectivement les mesures de protection s'appliquent de façon

25 générale à l'intérieur du prétoire du Tribunal, qu'il s'agisse de

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1 déformation des traits du visage, de déformation de la voix ou d'audience

2 à huis clos.

3 Nous pourrions débattre entre membres du Bureau du Procureur de la

4 meilleure façon de procéder après l'audience d'aujourd'hui. Peut-être que

5 nous devrions demander de façon générale des mesures de protection pour

6 tous les témoins qui sont encore à venir, mais vous savez qu'il est

7 difficile d'avoir une liste définitive des témoins. Il arrive, et ça a été

8 le cas pour Banja Luka, que tous les témoins ne se présentent pas comme

9 c'était initialement prévu.

10 M. le Président (interprétation): Mais ce que je souhaite dire c'est que

11 d'après ce que je constate, il peut y avoir parfois une situation où

12 pendant la phase préalable au procès il y a une liste de témoins dont

13 l'accusation pense qu'elle va les citer à comparaître. Cette liste

14 comprend le nom de personnes qui ont peut-être déjà ou qui vont peut-être

15 demander à ce que des mesures de protection leur soient accordées.

16 La conséquence de cela est qu'on ne peut pas toujours deviner à l'avance,

17 c'est qu'on se retrouve dans une situation tout à fait similaire à celle

18 dans laquelle nous nous trouvons en ce moment même. Je ne vais pas rentrer

19 dans le détail. Et ça change toute la donne.

20 M. Cayley (interprétation): Effectivement.

21 M. le Président (interprétation): En effet, si le nom d'un témoin

22 particulier apparaît sur la liste dans la phase préalable au procès

23 lorsque l'accusation est tenue par le Règlement de fournir le détail des

24 éléments de preuve qu'elle souhaite porter à la connaissance de la Chambre

25 et s'il y a donc le nom d'une personne qui apparaît sur cette liste et qui

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1 est une personne qui a déjà demandé des mesures de protection ou qui va

2 sans doute demander des mesures de protection, eh bien, cela pourrait nous

3 poser de graves problèmes.

4 M. Cayley (interprétation): Je crois que le document auquel vous faites

5 référence est placé sous scellés, notamment les synthèses au titre de

6 l'Article 65, mais je dois m'en assurer. Je parle bien des synthèses des

7 déclarations des témoins.

8 M. le Président (interprétation): Je suis a priori d'accord avec vous. Je

9 pense que cela a été déposé sous scellés.

10 M. Cayley (interprétation): Donc cela n'a pas été divulgué au grand

11 public.

12 M. le Président (interprétation): Mais si vous proposez de faire

13 comparaître les témoins 1 à 10, et si vous nous fournissez les noms de ces

14 témoins sous scellés, si ensuite vous déposez des requêtes visant à ne pas

15 divulguer le nom de ces témoins à la défense avant 21 jours, enfin je n'ai

16 pas besoin de vous rappeler la procédure à suivre. Tout cela, il faut y

17 réfléchir, et je crois qu'il faut que l'équipe du Bureau du Procureur se

18 penche sur la meilleure façon de procéder parce que je le répète je crois

19 que la situation dans laquelle nous nous trouvons pourrait se reproduire

20 et nous poser gravement problème.

21 M. Cayley (interprétation): Je crois qu'il y a une ordonnance d'ordre

22 général qui est d'application. Me Ackerman se conforme à la lettre de

23 cette ordonnance. La défense est obligée de ne pas divulguer à des parties

24 tiers l'un quelconque de ces documents, notamment des déclarations

25 préalables. Et cela s'applique à toutes les déclarations préalables de

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1 témoin.

2 M. le Président (interprétation): Oui, mais vous savez, comme Procureur

3 dans cette affaire et dans trop d'autres affaires, qu'il y a des

4 situations parfois où une ordonnance qui vise à appliquer une mesure de

5 protection à tel ou tel témoin est une ordonnance par laquelle, en fait,

6 vous demandez à ce que la défense se voie refuser l'accès à un certain

7 type d'informations jusqu'à une certaine date.

8 Alors, est-ce que nous sommes dans ce type de situation dans le respect du

9 système que nous avons mis en place jusqu'à ce jour dans ce Tribunal? Je

10 ne le sais pas. Et je vous invite, en tant que membre fort expérimenté du

11 Bureau du Procureur, c'est une question sur laquelle je vous invite à

12 réfléchir. Mais vous savez que ces questions sont indissociables, et je ne

13 voudrais pas que nous nous aventurions dans des eaux troubles.

14 M. Cayley (interprétation): Oui, nous évoquons ici en fait ce dont nous

15 débattions hier.

16 M. le Président (interprétation): Le problème, ce n'est pas Me Ackerman.

17 Maître Ackerman ne pose plus du tout de problème, si tant est qu'il en ait

18 jamais posé.

19 Maître Ackerman, vous souhaitez intervenir?

20 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, vous venez de mettre

21 le doigt sur le problème qui est celui-ci: nous avons, nous, une

22 obligation qui est celle de mener des enquêtes. Les témoins qui viennent

23 devant la Chambre sont parfois des témoins qui se moquent bien de savoir

24 si le public est tenu informé ou pas de la teneur de leur disposition,

25 mais il y a des témoins pour qui la question de la publicité des débats

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1 est fondamentale. Et il est toujours important de savoir quel est l'avis

2 du témoin sur le cadre dans lequel il va faire sa déposition.

3 Nous ne savons pas toujours dans quelle circonstance particulière se

4 trouvent les témoins: s'ils sont en danger, s'ils sont menacés, etc. Nous

5 n'en sommes pas toujours tenus informés. Hier, j'ai bien vu qu'il n'y

6 avait pas de mesures de protection qui s'appliquaient au témoin dont nous

7 avons parlé hier. Bon, je ne vais pas m'étendre là-dessus parce que nous

8 sommes en audience publique, mais on ne peut pas nous demander de

9 respecter certains critères vis-à-vis de certains témoins si nous nous

10 voyons nier l'accès à des informations qui sont absolument cruciales pour

11 l'élaboration de notre stratégie de défense.

12 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, il faut que tout soit

13 bien clair ici. Il faut anticiper toute ambiguïté. Je ne crois pas que le

14 Bureau du Procureur à quelque moment que ce soit hier vous ait nié l'accès

15 au témoin, vous ait refusé le droit de vous entretenir avec des témoins de

16 l'accusation. Et quand je dis des témoins de l'accusation, tout est

17 relatif parce que Mme Korner a reconnu elle-même que les témoins

18 n'appartenaient à personne, ni à une partie ni à l'autre. Donc ce n'est

19 pas là vraiment la question.

20 En revanche, la question est de savoir où l'on trace la ligne. Dès lors

21 que vous décidez d'entrer en contact avec un témoin, dont vous savez qu'il

22 est l'un des témoins qui va être cité à comparaître par l'accusation, vous

23 devez faire preuve d'une grande diligence, d'une grande efficacité, d'une

24 grande sagesse, pour ne pas aller au-delà de cette ligne subtile qui

25 existe.

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1 Si vous la franchissez, cette fameuse ligne, ne vous attendez pas que la

2 Chambre fasse preuve à votre égard de mansuétude ou de compréhension, nous

3 vous tomberons dessus toutes griffes dehors. Et je parle de votre équipe

4 de la défense, je parle de l'équipe de la défense du général Talic. Nous

5 prendrons toutes les mesures qui s'imposent si vous allez au-delà de vos

6 droits.

7 Vous êtes un bon conseil de la défense, on s'attend à ce que vous fassiez

8 un bon travail, et ce travail suppose que vous n'alliez pas au-delà de

9 certaines limites. Dès lors que vous vous en tenez à votre travail, la

10 Chambre de première instance n'interviendra pas, mais gare à tout

11 débordement. Je ne vais pas vous dire exactement où se trouve cette

12 fameuse ligne de démarcation. C'est vrai que parfois il est un petit peu

13 difficile de savoir exactement quel est son tracé, mais cette ligne de

14 démarcation, elle existe bel et bien.

15 Entrer en contact avec un témoin de l'accusation, c'est une chose, mais

16 essayer d'exercer une influence indue sur ce même témoin, ceci en est une

17 autre. Et il ne convient pas de s'engager dans quelque activité que ce

18 soit qui soit en contravention avec le Règlement de procédure et de

19 preuve.

20 Je n'ai pas besoin de m'étendre sur les détails de ce que j'entends dire

21 ici. Vous êtes un avocat très compétent, vous avez une grande expérience,

22 et vous savez qu'il peut y avoir des cas où l'accusation a tout à fait le

23 droit de demander à la Chambre d'instance d'appliquer des mesures de

24 protection très spécifiques s'appliquant à des témoins particuliers qui

25 peuvent être exposés à de très grands dangers du fait de leurs

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1 circonstances personnelles. Et moi j'ai eu l'impression, j'ai eu cette

2 impression lors d'une des toutes premières audiences que nous avons eues

3 ici, j'ai l'impression que vous faites preuve d'un grand esprit de

4 coopération Maître Ackerman, et je ne mets pas cet esprit de coopération

5 en doute. Mais dans de tels cas, il est du devoir de la Chambre de

6 première instance de prendre toutes les mesures de précaution possibles.

7 Il s'agit d'empêcher que ce témoin ne soit exposé à quelque risque que ce

8 soit, à quelque danger que ce soit.

9 L'accusation peut compter sur la coopération de la Chambre. Et moi je

10 m'attends à ce que les équipes de la défense fassent preuve de

11 coopération, et je crois pouvoir m'attendre à ce comportement de votre

12 part. Mais, vous pouvez être assurés du fait et -je dis cela très

13 clairement à l'accusation à d'autres reprises-, on ne peut pas vous

14 demander de vous préparer adéquatement à représenter votre client si vous

15 n'avez pas toutes les possibilités d'accéder aux éléments dont vous avez

16 besoin pour travailler de façon efficace.

17 Vous savez que nous devons parfois garder secret l'identité de tel ou tel

18 témoin, des coordonnées de tel ou tel témoin. La communication de ces

19 éléments d'information se fera en temps utile et elle vous permettra de

20 mener à bien votre travail de conseil de la défense.

21 Et la Chambre prêtera toujours une oreille attentive à toute demande que

22 vous auriez à formuler lorsque cette demande vise à obtenir des conditions

23 de travail adéquates, mais vous devez également faire preuve de

24 coopération à l'égard de la Chambre, vous devez veiller à ce que toutes

25 les précautions soient prises quand on parle de certains témoins.

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1 En m'exprimant ainsi, je crois que je dis les choses très clairement tant

2 à l'accusation qu'à vous-même. Vous êtes bien libres de vous exprimer

3 comme vous le souhaitez, vous êtes libres de formuler les demandes qui

4 vous paraissent nécessaires, mais je vous informe, maintenant et ici, de

5 la position qui sera celle de la Chambre en toute situation.

6 La Chambre de première instance conçoit que vous puissiez ressentir le

7 besoin d'entrer en contact avec certains témoins, mais tout est dans les

8 circonstances qui prévalent lors de ces contacts et lors de ces

9 entretiens, et tout dépend des circonstances dans lesquelles se déroulent

10 ces entretiens. C'est là que le bât peut blesser.

11 Je vous invite donc, Maître, à vous rappeler ce qui a été dit par Mme

12 Korner hier. Si ce qu'elle a dit hier est exact, à savoir qu'au tout début

13 du procès, vous avez déclaré qu'en tant que conseil principal de la

14 défense vous aviez le contrôle de tout ce qui se passait à Banja Luka ou

15 dans d'autres municipalités de l'ex-Yougoslavie, eh bien, ce que nous

16 attendons de vous c'est très simple vous devez toujours avoir le contrôle

17 de la situation et vous devez toujours veiller à ce qu'on n'aille pas au-

18 delà de la ligne de démarcation dont je parlais tout à l'heure.

19 Et s'il y a outre-passement de cette ligne, le prix à payer sera assez

20 lourd. Je crois être assez clair ici.

21 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, je crois que nous

22 prenons tous bonne note des éléments d'information que vous venez de nous

23 donner. Le Président Truman, le Président des Etats-Unis avait autrefois

24 sur son bureau une petite plaque qui disait "c'est ici qu'on s'arrête,

25 c'est là qu'on doit s'arrêter." Eh bien, je crois que nous prendrons cela

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1 comme slogan. Si vous voulez, nous nous tiendrons à la ligne de conduite

2 que vous avez tracée.

3 M. le Président (interprétation): S'il n'y a rien ajouté, nous allons

4 faire entrer le témoin.

5 M. Cayley (interprétation): Je n'ai rien à ajouter.

6 M. le Président (interprétation): Monsieur l'huissier, nous passons

7 d'abord à huis clos et nous faisons entrer ensuite le témoin.

8 (Audience à huis clos à 14 heures 49.)

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18 (L'audience est levée à 19 heures.)

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