Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 9 juillet 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous.

6 Je souhaiterais que le greffier appelle l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-04-83-

8 T, le Procureur contre Rasim Delic.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

10 Greffier d'audience.

11 Je souhaiterais que les parties se présentent, en commençant par

12 l'Accusation.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

14 Nous avons le premier substitut du Procureur, M. David Tolbert, moi-

15 même, Daryl Mundis, ainsi que notre commis d'audience, Alma Imamovic.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Qu'en est-il de la

17 Défense ?

18 Mme VIDOVIC : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Je suis Me

19 Vasvija Vidovic, et avec M. Nicholas Robson, nous représentons M. Rasim

20 Delic. Nous avons également Lejla Gluhic qui est notre commis aux affaires,

21 ainsi qu'Asja Zujo.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de commencer, je souhaiterais

23 juste soulever une question qui a trait à une décision prise par la

24 Chambre. Nous devions rendre une décision orale à ce sujet.

25 La Chambre de première instance est en mesure maintenant de statuer sur

26 cette affaire.

27 Le 15 juin 2007, la Chambre de première instance a rendu une décision

28 afin que soient versés au dossier les 48 documents qui ont été appelés "les

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1 documents de la bibliothèque de droit" qui avaient été présentés

2 conjointement par les parties. En rendant cette décision, la Chambre de

3 première instance a également intimé au greffier d'audience d'octroyer une

4 cote à l'ensemble de cette collection de documents le premier jour de la

5 présentation des moyens à charge.

6 La Chambre de première instance a été informé par le greffe que du fait des

7 problèmes techniques du système électronique, il n'est pas possible

8 d'octroyer une seule cote à cette collection de documents. La Chambre de

9 première instance a remarqué également qu'un index amendé des documents a

10 été fourni par la Chambre de première instance par les parties ainsi

11 qu'avec les documents de la bibliothèque juridique le 1er juin 2007.

12 Dans une lettre émanant de l'Accusation destinée à la Chambre de première

13 instance et présentée en pièce jointe à cet index amendé et aux documents,

14 l'Accusation a indiqué que les deux documents ne se sont pas vus octroyer

15 des numéros ERN et elle indiquera à la Chambre de première instance quels

16 sont les numéros ERN qui seront attribués lorsque cela sera fait. Dans

17 cette lettre, l'Accusation a également fait remarquer qu'une partie ou des

18 parties du document PT-40-37 doivent encore être traduits en anglais. Cela

19 est également mentionné dans l'index.

20 La Chambre de première instance a également indiqué, premièrement, que le

21 greffe doit octroyer 48 cotes aux 48 documents; deuxièmement, les parties

22 doivent fournir les traductions qui font défaut, à moins que cela n'ait été

23 fait, et ils doivent le faire au plus tard le 13 juillet 2007;

24 troisièmement, les parties doivent amender l'index des documents compte

25 tenu de ce qui vient d'être mentionné et doivent inclure les références aux

26 cotes des documents; quatrièmement, cet index sera versé au dossier comme

27 la première pièce à conviction de cette série de documents.

28 Je vous remercie.

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1 Monsieur Mundis.

2 M. MUNDIS : [interprétation] Nous nous assurerons de vous fournir cela au

3 plus tard le 13 juillet 2007.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

5 Monsieur Mundis.

6 M. MUNDIS : [interprétation] L'Accusation est reconnaissante pour les

7 décisions préalables au procès qui ont été rendues ce matin. Toutefois,

8 compte tenu de la décision qui a été prise eu égard au temps octroyé et au

9 nombre de témoins pour l'Accusation, l'Accusation n'est pas prête à

10 poursuivre pour le moment.

11 Nous aimerions avoir quelques jours supplémentaires afin, dans un premier

12 temps, de prendre en considération et d'assimiler les décisions qui ont été

13 rendues un peu plus tôt ce matin et peut-être afin d'avoir la possibilité

14 de fournir de plus amples explications à la Chambre de première instance à

15 propos de la durée dont nous avons besoin et à propos du nombre de témoins

16 que nous souhaiterions voir augmenter. Nous souhaitons également avoir

17 l'occasion de présenter de plus amples arguments eu égard aux décisions qui

18 ont été rendues ce matin, et je pense notamment à la décision qui n'a pas

19 fait droit à la requête présentée par l'Accusation.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous en avez terminé ?

21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Combien de temps souhaitez-vous avoir

22 ?

23 Mme VIDOVIC : [interprétation] Permettez-moi, je vous prie, d'intervenir.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse. Maître Vidovic, M. le

25 Juge Harhoff souhaitait poser une question à l'Accusation.

26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je m'excuse d'intervenir.

27 Monsieur Mundis, j'aimerais savoir, est-ce que vous souhaitez avoir

28 un ou deux jours pour pouvoir prendre en considération tout cela. Comment

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1 devons-nous comprendre votre requête ?

2 M. MUNDIS : [interprétation] Je pense que cela dépend de la présentation

3 par écrit ou par voie orale des autres requêtes. Je pense que dans trois

4 jours nous serons à même de réagir et de répondre, et d'ailleurs, nous

5 pourrons vous fournir une explication plus détaillée afin de vous permettre

6 de comprendre pourquoi l'Accusation souhaite voir faire comparaître 70

7 témoins et un peu plus que 100 heures d'examens d'interrogatoire principal

8 afin de présenter nos moyens à charge.

9 Si la Chambre de première instance souhaite avoir ces arguments par

10 écrit, cela signifiera qu'il faudra attendre quelques journées

11 supplémentaires, puisqu'il faudra que nous préparions ces documents par

12 écrit. Ceci étant, nous pourrions le faire d'ici une semaine, exactement,

13 et si nous pouvons présenter cela par voie orale, nous pourrions peut-être

14 reprendre jeudi.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Vidovic.

17 Mme VIDOVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, voilà ce que

18 nous pensons. Nous sommes tout à fait disposés à commencer le procès, et il

19 appartient à la Chambre de première instance de statuer à propos de la

20 requête présentée par l'Accusation.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Vidovic.

22 J'aimerais vous poser une question, Monsieur Mundis, puisque la

23 Défense a indiqué qu'il appartenait à la Chambre de statuer en la matière.

24 Qu'allez-vous dire à la Chambre dans trois jours que vous ne pouvez

25 pas dire maintenant ?

26 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

27 L'Accusation a indiqué de façon très claire par voie écrite, vendredi

28 dernier, ainsi que lors de l'audience relative à l'article 11 bis, quel

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1 était notre point de vue --

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre. Vous

3 savez certainement que cette Chambre n'a pas été saisie de ce renvoi au

4 titre de l'article 11 bis.

5 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, bien entendu, mais au cas où vous auriez

6 lu le compte rendu d'audience.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je ne l'ai pas fait.

8 M. MUNDIS : [interprétation] Bien. Alors, nous pouvons réitérer notre point

9 de vue. Tout simplement, nous ne pouvons pas -- on ne nous donne pas les

10 moyens de présenter nos moyens à charge avec un total de 55 témoins

11 seulement et une durée totale de 170 heures, qui incluent l'interrogatoire

12 principal, le contre-interrogatoire, les questions supplémentaires et les

13 questions des Juges, ainsi que toutes questions de procédure.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, je suppose que vous

15 aurez lu la décision rendue cet après-midi par la Chambre, et vous

16 connaissez les dispositions de l'article 73 bis (F). Alors, vous ne pouvez

17 pas utiliser cette voie ?

18 M. MUNDIS : [interprétation] Nous pensons que nous devons être beaucoup

19 plus sûrs de la durée qui va nous être impartie et du nombre de témoins que

20 nous pourrons faire comparaître. Je ne veux surtout pas paraître

21 désinvolte, mais nous pensons que dans les conditions telles qu'elles ont

22 été présentées, cela se soldera par un acquittement.

23 Nous ne pouvons pas courir ce danger, cinq minutes ou cinq jours

24 après l'ouverture du procès, nous ne pouvons pas courir le risque de voir

25 la Chambre de première instance refuser une requête aux fins d'avoir des

26 heures supplémentaires. Je vais être très clair. Lorsque l'on commence un

27 procès en sachant - c'est ce que nous pensons, en tout cas - que nous

28 n'avons pas suffisamment de témoins à notre disposition et que nous n'avons

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1 pas suffisamment d'heures à notre disposition, nous pensons que cela est

2 parfaitement irresponsable.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, j'essaie de suivre la

4 logique de votre thèse.

5 Vous êtes en train de nous dire que vous ne pouvez pas utiliser le

6 recours à une requête au titre de l'article 73 bis (F) parce que vous ne

7 voulez pas courir le risque d'avoir un refus. Mais vous nous demandez, en

8 fait, un délai de trois jours, et vous allez dire exactement la même chose

9 dans trois jours.

10 Je ne comprends pas, Monsieur Mundis, pourquoi vous ne pouvez pas

11 présenter vos thèses conformément au Règlement de procédure et de preuve de

12 ce Tribunal e,t plus précisément, conformément à l'article 73 bis (F), et

13 alors nous étudierons votre requête. Je ne vois pas où est la difficulté.

14 Mais entre-temps, le procès aurait commencé.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Mundis, permettez-moi

16 d'intervenir et de vous dire au nom de la Chambre de première instance et

17 dans le droit fil de ce que vient de vous dire le Président de la Chambre

18 de première instance que, bien entendu, la Chambre de première instance

19 n'essaie absolument pas de s'immiscer dans la présentation des moyens à

20 charge, et nous ne voulons pas rendre la vie de l'Accusation plus difficile

21 qu'elle ne l'est déjà. La décision qui a été prise de réduire le nombre de

22 témoins et de diminuer le nombre d'heures mises à la disposition de

23 l'Accusation a été prise au vu de tous les documents que nous avons

24 étudiés, et nous avons très sincèrement pensé que ce que nous vous

25 octroyons vous permettrait de présenter vos moyens à charge. Nous pensions

26 également, ce faisant, qu'il n'y a que deux chefs d'inculpation qui doivent

27 être prouvés, nous avons très sincèrement et très honnêtement pensé que 55

28 témoins et 170 heures seraient suffisants.

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1 Nous considérons que le grand défi de ce procès vient du fait que

2 l'accusé a un grade extrêmement élevé et, comme vous l'avez dit lors de

3 votre intervention lors de l'audience de l'article 11 bis, cela rend cette

4 affaire beaucoup plus difficile. Nous avons pris cet argument en

5 considération également.

6 Jusqu'à présent, tout ce que nous avons entendu -- en fait, nous

7 aimerions que vous nous expliquiez pourquoi vous pensez que vous ne pouvez

8 pas présenter vos moyens à charge avec ce nombre de 55 témoins et cette

9 durée de 170 heures, c'est qu'il s'agit d'une affaire au titre de l'article

10 73. Lorsque nous consultons la liste des témoins que vous proposez, nous

11 avons l'impression que la plupart des témoins que vous avez l'intention de

12 citer à la barre sont des témoins qui vont témoigner à propos des crimes

13 commis sur le terrain, et nous n'avons pas vu dans cette liste de nombreux

14 témoins qui pourraient présenter des éléments de preuve pertinents et

15 importants à propos du lien à établir entre les événements sur le terrain

16 et l'accusé. C'est pour cela que nous avons pensé qu'il était primordial

17 d'entendre la déposition des témoins, mais il faut en fait placer cette

18 affaire dans une juste perspective, et c'est pour cela que nous avons pensé

19 à ces chiffres pour les témoins et la durée.

20 Alors que vous êtes érigé contre ce qui a été décidé, nous nous

21 sommes dit qu'il fallait que nous vous écoutions, mais je dois vous dire

22 que la Chambre, pour le moment, n'a absolument rien entendu qui lui

23 permettrait de comprendre pourquoi vous pensez qu'il est impossible de

24 présenter vos moyens à charge au vu de ces chiffres limités, d'après vous.

25 Et si vous avez des raisons supplémentaires ou des arguments que nous

26 n'avons pas entendus, faites-le en audience publique, mais de grâce,

27 expliquez-nous où réside le problème.

28 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Harhoff.

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1 Je vais essayer d'être aussi succinct que faire se peut, au vu de la

2 situation.

3 Premièrement, l'Accusation n'est pas forcément d'accord lorsque vous

4 avancez que la majorité des témoins vont évoquer les faits incriminés. En

5 fait, je pense qu'il y a environ un tiers des témoins qui vont témoigner

6 sur les faits incriminés, et puis pour ce qui est de Maline, il y a cinq ou

7 cinq témoins qui sont des témoins qui vont témoigner sur les faits

8 incriminés.

9 Il faut savoir que l'essentiel de ces témoins sont des personnes qui

10 assuraient la sécurité, des témoins qui connaissaient très bien la

11 situation, des témoins, en fait, qui vont parler de voie hiérarchique de

12 commandement et de contrôle, de la présence des Moudjahiddines ou des

13 combattants étrangers dans certaines unités de l'ABiH. Nous ne sommes pas

14 d'accord lorsque l'on dit qu'un grand nombre de témoins sont des témoins

15 qui vont témoigner sur les faits incriminés. Si c'est ce qui est indiqué

16 par nos résumés au titre de l'article 65 ter, peut-être qu'il faudrait que

17 nous réétudions la question.

18 Mais ce que je suggère, ce serait peut-être une audience au titre de

19 l'article 65 ter ou une conférence de mise en état peut-être, ce serait des

20 forums beaucoup plus appropriés, car l'Accusation est tout à fait disposée

21 à prendre en considération toute la liste des témoins et expliquer

22 brièvement à la Chambre de première instance l'objectif de la comparution

23 de ces témoins afin que l'on puisse faire la part des choses entre les

24 différents témoins. Nous pensons que cela devait être fait, mais n'oublions

25 pas la décision qui a été rendue par la Chambre un peu plus tôt ce matin à

26 propos de l'article 94(B) et des faits retenus et admis dans d'autres

27 affaires. Là, nous serons à même de vous expliquer pourquoi nous pensons

28 que nous devons citer à la barre quelque 70 témoins pour prouver ce que

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1 nous avançons.

2 Ce que je vous dis pour répondre à la question posée par M. le Président,

3 c'est qu'aujourd'hui nous ne sommes pas en mesure de le faire, mais nous

4 pensons que nous pourrons le faire oralement dans trois jours ou par écrit

5 dans une semaine.

6 Pour répondre très brièvement à l'autre question qui a été posée par

7 M. le Président à propos de l'article 73 bis (F), j'indiquerais tout

8 simplement que c'est une disposition qui a été prévue pour les situations

9 où l'on a invoqué l'article 73 bis (C), lorsque le procès a déjà démarré,

10 et l'Accusation ensuite indique, maintenant il est clair, six, sept ou huit

11 semaines après le début du procès, il est clair, disais-je, que nous avons

12 besoin d'un délai supplémentaire.

13 Je ne vous demande pas que vous fassiez droit au titre de l'article 73 bis

14 (F) parce que le procès n'a pas encore commencé. Ce que nous demandons à la

15 Chambre c'est de pouvoir exercer son pouvoir discrétionnaire afin de

16 reconsidérer toutes décisions qu'elle peut reconsidérer bien entendu, et

17 nous aimerions tout simplement que la décision soit prise avant le début du

18 procès, et ce, afin que l'Accusation et la Défense, qui est encore plus

19 importante d'ailleurs, puissent savoir exactement quels seront précisément

20 les témoins qui seront appelés à la barre. C'est pour cela que nous avons

21 attiré l'attention de la Chambre de première instance sur ce problème avant

22 le début du procès.

23 Je comprends tout à fait que l'article 73 bis (F) peut être invoqué

24 par les parties après le début du procès. Mais ce que nous demandons c'est

25 qu'au vu de notre situation, nous devons savoir cela avant le début du

26 procès, et ce, afin de pouvoir faire progresser cette affaire de la façon

27 la plus rapide possible. Je dirais que cela va également dans l'intérêt de

28 la Défense d'ailleurs, car la Défense ne pensera pas que nous allons

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1 appeler quelque 55 témoins à la barre, alors que je sais pertinemment que

2 de suite après le début du procès, je présenterai une requête au titre de

3 l'article 73 bis (F), et ce, pour pouvoir présenter tous les moyens à

4 charge.

5 Et je dirais qu'il serait entièrement irresponsable de ma part de

6 commencer un procès en sachant que si cette décision n'est pas modifiée,

7 l'accusé sera acquitté. Je ne pense pas que ce soit la meilleure façon

8 d'utiliser à meilleur escient les ressources de ce Tribunal et les

9 ressources de cette institution.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, vous nous parlez de

11 l'objectif de l'article 73 bis (F), mais je vois que cet article stipule

12 que lorsque le procès a commencé vous pouvez faire référence et utiliser

13 cet article pour demander une plus longue durée. Premièrement, c'est ce que

14 je voulais vous dire.

15 Puis, je vous dirais que la Chambre de première instance a rendu une

16 décision le 2 juillet en indiquant très clairement quel était le nombre de

17 témoins que l'Accusation pourrait appeler à la barre, et en indiquant le

18 nombre d'heures qui peut être utilisé par l'Accusation. L'Accusation a

19 demandé à ce que cela soit réétudié. Alors, il y a une décision qui a été

20 rendue à propos de cette requête aux fins de reconsidération. Je pense que

21 si vous relisez la requête, vous verrez que ce que vous avez demandé a été

22 demandé sans pour autant nous présenter toutes les raisons.

23 Vous nous demandez de reconsidérer et de réétudier à nouveau une

24 requête, alors que vous ne nous avez pas présenté les raisons qui militent

25 en faveur de cette reconsidération de ladite requête.

26 Ce que la Chambre de première instance essaie de vous dire c'est que

27 nous sommes disposés à donner à l'Accusation la possibilité de nous

28 présenter ces raisons aux fins de reconsidération, qu'il s'agisse de

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1 l'article 73 bis (F) ou d'une autre voie de recours, peu importe, qu'à cela

2 ne tienne. Cette Chambre de première instance étudiera toute requête à

3 partir du moment où elle est motivée. Mais nous ne pouvons nous permettre

4 de retarder le début du procès, et ce, pour moult raisons; le souci

5 d'équité vis-à-vis de l'accusé, le fait que nous devons être aussi

6 efficaces que possible dans le cadre de nos procès.

7 Je ne vois franchement pas pourquoi l'Accusation ne pourrait pas

8 commencer à présenter ses moyens à charge; et dans trois jours, elle pourra

9 nous présenter une requête orale pour nous présenter ses raisons, ou dans

10 une semaine elle nous présentera une requête écrite pour demander que cette

11 requête soit reconsidérée.

12 Nous sommes d'accord avec vous, mais le seul problème c'est que vous devez

13 commencer. Je ne vois vraiment pas -- ou plutôt je ne comprends pas

14 pourquoi l'Accusation ne veut pas commencer maintenant. J'ai bien entendu

15 ce que vous avez dit, mais une fois que vous aurez présenté cette requête

16 et que nous l'aurons reconsidérée, la Chambre rendra une décision, et peut-

17 être qu'en fonction de cette décision, la liste des témoins sera modifiée.

18 Mais il est un peu prématuré de parler de préjudice à la Défense. Car

19 la Défense sait pertinemment quel est le nombre de témoins que vous êtes

20 sur le point de convoquer, et si vous commenciez vos déclarations

21 liminaires, cette requête sera étudiée à temps, Monsieur Mundis.

22 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est justement parce

23 que nous souhaiterions avoir la possibilité d'avoir ces quelques jours qui

24 nous permettraient de présenter, de compiler et de préparer nos arguments

25 que la Chambre souhaite entendre. Parce que, vous l'avez indiqué d'ailleurs

26 en partie, Monsieur le Président, il se peut que la Chambre de première

27 instance fasse droit à la requête, d'où le problème d'ailleurs, et c'est

28 pour cela que je ne peux pas m'aventurer à commencer ce procès sans savoir

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1 pour autant le nombre de témoins que je pourrai convoquer.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maintenant, je comprends ce que vous

3 dites. Vous êtes en train de placer sur la tempe des Juges un pistolet et

4 vous nous dites : "Vous devez me garantir que vous allez faire droit à ma

5 requête; sinon, je ne commence pas." C'est bien ainsi qu'il faut comprendre

6 ce que vous dites, Monsieur Mundis ? En fait, si vous ne présentez pas vos

7 raisons, vous ne pouvez pas vous attendre à ce que la Chambre de première

8 instance vous garantisse qu'elle fera droit à votre requête.

9 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est justement la

10 décision que le bureau du Procureur doit avoir. Il ne s'agit pas de savoir

11 si on va nous accorder un temps supplémentaire, mais il faut que nous

12 sachions si nous pourrons entièrement présenter les arguments à la Chambre

13 et présenter les explications également, alors le bureau du Procureur

14 prendra les mesures qui devront être prises.

15 Permettez-moi de terminer, car si la décision de la Chambre de

16 première instance reste la même dans une semaine après que nous présentons

17 nos arguments, le bureau du Procureur réagira comme il réagira au vu des

18 circonstances.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'à cela ne tienne.

20 M. MUNDIS : [interprétation] Mais nous voulons avoir la possibilité d'être

21 entendus à ce sujet et nous voulons qu'on nous comprenne bien, et si la

22 Chambre de première instance ne change pas d'avis et nous dit que nous

23 avons droit à 55 témoins et 170 heures en tout, alors nous prendrons les

24 mesures nécessaires. Mais nous demanderons très certainement un retard de

25 quelques jours, et c'est ce que nous demandons maintenant et nous ne

26 pensons pas que cela lèse particulièrement la Défense. Ce que nous

27 souhaitons c'est que la Chambre dispose de toutes les informations

28 nécessaires pour pouvoir reconsidérer sa décision. Si cela est voué à

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1 l'échec, nous prendrons les mesures nécessaires à ce moment-là.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, tout ce que vous

3 demandez, ce n'est pas que ce soit refusé, ce n'est pas contesté. La

4 Chambre est prête à vous accorder ces quelques jours.

5 Ce que je ne comprends pas, c'est le lien qui existe entre le début

6 du procès et la décision que vous demandez à la Chambre. Je ne vois pas

7 pourquoi on ne peut pas commencer. Nous pouvons commencer dès maintenant,

8 vous pouvez avoir tout le temps dont vous avez besoin pour réunir vos

9 pensées, mettre votre requête par écrit, la présenter verbalement. Nous

10 l'écouterons et nous vous donnerons notre décision en fonction de cela.

11 Vous savez, vous ne nous expliquez même pas pourquoi nous ne pouvons pas

12 commencer le procès, Monsieur le Substitut. Je pense que maintenant nous

13 sommes en train de débattre de ceci, en fait on tourne en rond, et je pense

14 qu'il faudrait commencer à résoudre cette question. Vous savez tout au

15 moins que nous devons commencer. Vous pouvez faire votre déclaration

16 liminaire et nous pouvons avoir une réunion 65 ter demain. Nous pouvons

17 avoir une réunion 65 ter et vous nous direz quand vous êtes prêt pour cela,

18 mais nous pouvons commencer le procès.

19 Vous ne m'avez expliqué quel est le lien entre les deux éléments, et

20 je vous dis que ceci est un temps précieux qui passe. Je ne voudrais pas

21 gaspiller davantage de temps. Je voudrais pouvoir utiliser le temps

22 d'aujourd'hui pour entendre les déclarations liminaires, ensuite vous

23 pourrez nous présenter ce que vous voulez.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 Est-ce que je peux consulter un instant mes collègues.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais, bien sûr.

27 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

28 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

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1 Messieurs les Juges.

2 Brièvement, je répondrai à la question pour laquelle nous ne sommes

3 pas en mesure de commencer aujourd'hui, c'est en fait très simple. C'est

4 que tant que nous ne connaîtrons pas exactement quelles sont les dimensions

5 du procès, quel est le temps qui est vraiment disponible qui nous est

6 octroyé, et que nous ayons le temps de bien comprendre et de digérer les

7 décisions préalables au procès qui ont été rendues ce matin, je ne suis pas

8 en mesure d'articuler complètement la portée de ce procès. En d'autres

9 termes, je ne suis pas sûr de savoir si je vais pouvoir présenter une

10 déclaration liminaire dans le cadre de cette partie du procès tant que je

11 ne sais pas exactement quels témoins je vais pouvoir faire déposer et

12 l'étendue de la question que je vais devoir traiter.

13 Je comprends que ceci n'est peut-être pas pleinement satisfaisant;

14 mais en vérité, je ne sais pas si je vais pouvoir faire déposer 55 témoins

15 ou si à un moment quelconque j'aurais davantage de témoins que cela, donc

16 je ne peux pas présenter mes arguments dans toute leur ampleur avec 55

17 témoins. Par définition, je ne peux pas commencer à expliquer nos thèses,

18 les arguments à charge si moi-même je ne connais pas exactement l'étendue

19 du procès que je vais être autorisé à présenter à la Chambre.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Effectivement, vous avez raison,

21 Monsieur Mundis, ceci n'est pas du tout convaincant.

22 Je ne pense pas qu'en expliquant dans une déclaration liminaire la portée

23 de votre affaire, ceci ait à voir avec le nombre de témoins que vous allez

24 faire déposer. La Chambre de première instance est parfaitement consciente,

25 tout le monde en est conscient, tout le monde peut vous entendre, que vous

26 voulez davantage de témoins. Tout ce que vous faites dans une déclaration

27 liminaire c'est de nous expliquer quelle est l'étendue de vos moyens à

28 charge comme vous la connaissez. Pour le reste, vous allez ou bien

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1 présenter davantage d'arguments devant la Chambre pour avoir davantage de

2 témoins et davantage de temps en heures.

3 Si je ne peux moi-même expliquer la question telle que vous l'avez posée un

4 peu plus tôt, si, à ce moment-là, vous obtenez une réponse négative, je ne

5 vois pas ce qui empêche l'Accusation de prendre la décision qu'elle aurait

6 prise si elle avait su d'avance qu'elle n'allait pas obtenir un nombre plus

7 important de témoins et davantage de temps. A moment-là, vous pourrez

8 encore prendre votre décision, Monsieur le Substitut.

9 Donc, je ne vois pas pourquoi nous ne pouvons pas commencer maintenant,

10 Monsieur Mundis. Commençons le procès parce qu'il n'existe aucun lien entre

11 le commencement et la décision qui sera prise sur la requête demandant

12 davantage de témoins et davantage de temps. Cette requête, si elle est

13 correctement motivée, va être examinée. Si elle ne l'est pas -- et c'est la

14 raison pour laquelle à ce stade et c'est la seule réponse que la Chambre

15 peut vous donner c'est oui, il se peut qu'elle fasse droit à la requête,

16 mais on ne pas donner de garantie sans avoir vu les documents.

17 Il faut que nous voyons les documents, il faut que nous entendions les

18 arguments, nous devons entendre ce que la Défense elle-même a à dire, nous

19 devons apprécier quels sont les arguments présentés, à ce moment-là, nous

20 prendrons une décision.

21 Donc, oui, la réponse c'est "possible", elle peut, mais ayant fait cette

22 réponse quelle que soit la réponse positive ou négative, il est loisible à

23 l'Accusation de prendre la décision qu'elle souhaite pour prendre les

24 mesures qu'elle souhaite, il n'y a rien qui empêche de commencer

25 aujourd'hui.

26 Est-ce que nous pouvons commencer avec votre déclaration liminaire ?

27 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation voudrait

28 respectueusement demander une suspension d'audience. Il faut que je prenne

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1 des instructions à ce sujet.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Pendant

3 comment de temps ?

4 M. MUNDIS : [interprétation] Vingt minutes.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vingt minutes. La séance est

6 suspendue.

7 --- L'audience est suspendue à 14 heures 53.

8 --- L'audience est reprise à 16 heures 09.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à nouveau. Nous présentons des

10 excuses, on a pris beaucoup plus que 20 minutes, comme on l'avait annoncé,

11 mais pour des raisons indépendantes de notre volonté qui nous ont retenues.

12 Monsieur Mundis, c'est à vous.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Avant que l'Accusation commence à présenter sa déclaration liminaire, je

15 voudrais saisir cette occasion pour présenter à la Chambre de première

16 instance l'équipe pour le présent procès.

17 Immédiatement à ma droite, il y a Laurie Sartorio; et à côté, Kyle

18 Wood, et finalement, Aditya Menon. Un autre membre de l'équipe, qui est

19 désigné pour le moment pour une autre affaire, n'est pas en mesure d'être

20 avec nous cet après-midi, mais apparaîtra pour l'Accusation pendant ce

21 procès.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur

23 Mundis.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

25 Juges, nous sommes tous définis par les valeurs que nous chérissons. Nous

26 sommes tous jugés par les décisions que nous prenons en défendant ces

27 valeurs.

28 Il y a beaucoup de sagesse dans le vieux proverbe "les actes parlent

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1 davantage que les mots." L'inaction, toutefois, plus particulièrement pour

2 ce qui est de ne pas agir, parle encore plus fort, c'est un silence

3 éloquent. En quelque sorte, c'est là une affaire, un procès concernant des

4 valeurs, des décisions et le fait d'agir ou ne pas agir.

5 S'agissant d'un homme d'armes, les valeurs que l'accusé Rasim Delic

6 avait et pour lesquelles il combattait étaient nobles. Les décisions qu'il

7 prenait en défendant ces valeurs sont les fondements des chefs d'accusation

8 dont il doit maintenant répondre devant ce Tribunal international.

9 L'Accusation a allégué qu'en tant que commandant suprême de l'ABiH,

10 l'accusé, Rasim Delic, a manqué à son devoir qui était d'empêcher que

11 fussent commis certains crimes qui ont été commis par ses unités sur

12 lesquelles il exerçait un contrôle effectif et réel. Subsidiairement,

13 l'Accusation a également soutenu que l'accusé, en tant que commandant

14 suprême de l'ABiH tout au long de la période couverte par l'acte

15 d'accusation, a manqué en ce qui concerne ses obligations de punir les

16 auteurs de ces crimes, ayant été avisé que de tels crimes avaient été

17 commis.

18 Ces carences, cette inaction, si vous voulez, c'est ce dont il est

19 question dans ce procès. Ainsi l'affaire, d'un point de vue conceptuel, est

20 en fait assez simple. Il avait le devoir d'agir et il a manqué à ce devoir;

21 de ce fait, le résultat était que des crimes ont été commis et que les

22 auteurs de ces crimes ont été autorisés à échapper à la justice.

23 A un autre niveau, toutefois, l'affaire est plus complexe. Comme ce que

24 l'on a appelé l'affaire de l'article 7.3 : de nombreux aspects de voir

25 d'être établis par des éléments de preuve indirects. De nombreux aspects

26 doivent être établis par un très grand nombre de documents qui

27 nécessiteront la présence de témoins qui viendront ici expliquer à la barre

28 le contexte dans lesquels ces documents ont été créés. Il y a d'autres

Page 243

1 aspects de ce procès, tel que le fait de ne pas avoir puni ou réprimé, qui

2 nécessiteront de prouver quelque chose de négatif, c'est-à-dire que

3 personne n'a été poursuivi, personne n'a fait l'objet d'enquête, personne

4 n'a été accusé, personne n'a été reconnu coupable.

5 Pour ces raisons, dans cette déclaration liminaire que vous entendez

6 aujourd'hui, l'Accusation a choisi de se fonder essentiellement sur un

7 certain nombre de documents et de cartes. Ces documents serviront comme la

8 feuille de route pour la Chambre de première instance de façon à pouvoir

9 brièvement comprendre ce que l'Accusation va essayer de prouver dans la

10 présente affaire. Plutôt que de vous expliquer tout simplement ce qui s'est

11 passé, nous allons nous efforcer de vous démontrer ce qui s'est passé par

12 des documents de l'époque, y compris, comme je l'ai dit, des cartes et des

13 documents. Nous allons nous centrer sur des documents.

14 Pour commencer, quelques brefs renseignements concernant l'accusé dans ce

15 procès. C'est un ancien soldat de métier, un militaire de carrière de

16 l'armée populaire yougoslave. En tant que soldat de métier, Rasim Delic a

17 été à l'école d'état-major du commandement de la JNA entre 1988 et 1999, et

18 il a demandé à quitter la JNA en 1992, lorsque la guerre en Bosnie-

19 Herzégovine a commencé.

20 Peu de temps après cela, il a participé à l'organe de formation de

21 l'ABiH, et plus tard, il est devenu membre du Groupe d'attaque Vozuca avant

22 de participer à la Défense territoriale, et il s'est occupé d'un certain

23 nombre d'activités en Bosnie-Herzégovine.

24 En octobre 1992, il a été désigné comme chef par intérim du département des

25 opérations, de la planification et de la formation à l'état-major principal

26 de l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine.

27 Le 8 juin 1993, la présidence de Bosnie-Herzégovine a restructuré le

28 quartier général du commandement Suprême de l'armée pour établir un poste

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1 de commandant de l'état-major principal, poste auquel l'accusé a été nommé.

2 Le document qui a reçu pour cote PT-11-86, qui est placé devant vous

3 pendant la durée de ce procès, est un document daté du 8 juin 1992, signé

4 par le président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine, Alija

5 Izetbegovic. Il s'agit d'une décision concernant la redistribution du

6 quartier général du commandement Suprême de la République de Bosnie-

7 Herzégovine et la désignation des officiers supérieurs et des officiers

8 généraux.

9 Le paragraphe 1 de ce document crée le poste de commandant de l'état-major

10 principal des forces armées et, en même temps, maintient l'état-major ou le

11 poste de chef de l'état-major principal.

12 Le paragraphe 4 de ce document indique que Rasim Delic sera désigné comme

13 commandant de l'état-major principal des forces armées de la République de

14 Bosnie-Herzégovine. Il s'agit du paragraphe 4.

15 Lorsque nous regardons le paragraphe 6 du même document, il indique

16 que les personnes désignées au paragraphe 4, tel que l'accusé Rasim Delic,

17 n'ont plus à remplir les postes et les fonctions qu'ils avaient jusqu'à

18 présent. L'Accusation fait valoir que ce paragraphe est important pour

19 comprendre l'ensemble du document, parce que nous affirmerons que sur la

20 base de ce document et sur le fait que Rasim Delic était dégagé de ses

21 responsabilités antérieures, ceci est une indication claire qu'à partir du

22 8 juin, il a pris son nouveau poste de commandant suprême. Là encore, le 8

23 juin 1993, c'est un document signé par Alija Izetbegovic, président de la

24 République de Bosnie-Herzégovine.

25 Je voudrais maintenant passer à la question des Moudjahiddines. Au cours du

26 présent procès, vous entendrez des éléments de preuve très développés

27 concernant la participation de Moudjahiddines à ces crimes. Ces personnes,

28 qui sont des combattants étrangers et qui ont commencé à entrer en Bosnie

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1 en 1992, ont rejoint un certain nombre d'unités de l'armée de Bosnie-

2 Herzégovine au cours de la période de 1992, 1993, ces unités étaient

3 formées en août 1993, comme nous l'expliquerons dans un moment, c'est

4 devenu le détachement El Moudjahed.

5 En ce qui concerne l'arrivée des Moudjahiddines, vous entendrez

6 demain un témoin, il s'agit d'un journaliste du nom de Andrew Hogg, qui

7 s'est rendu en Bosnie au cours de l'été 1992 avec pour objectif explicite

8 d'essayer de rencontrer un certain nombre de ces combattants étrangers et

9 de les interviewer. Il travaillait à l'époque pour le "Times" de Londres.

10 Andrew Hogg a réussi à trouver et à identifier un chef de ces combattants

11 étrangers, un homme nommé Abu Abdel Aziz. Il a ensuite interviewé cette

12 personne au mois d'août 1992, cette interview a été enregistrée au

13 magnétophone et vous pourrez entendre entièrement cette interview demain.

14 Avant cette interview, il est important de faire remarquer qu'Abu Abdel

15 Aziz avait demandé la permission aux autorités de Bosnie avant qu'il

16 accorde cette interview à M. Hogg, et Andrew Hogg a obtenu cette permission

17 - c'est sur ce point que nous nous attendons à qu'il dépose - du poste de

18 commandement de l'armée à Travnik, et c'est l'endroit où cette interview a

19 eu lieu.

20 Juste quelques mots concernant Abu Abdel Aziz. Ce combattant étranger, qui

21 est originaire d'Arabie Saoudite, est également connu sous le nom de Barbe

22 Rousse ou Barbaros. Nous nous attendons à ce que M. Hogg, qui déposera,

23 indique que certains de ces combattants étrangers, y compris Abu Abdel

24 Aziz, mettaient du henné dans leurs cheveux avant de se consacrer à Allah.

25 C'est ce que M. Hogg dira dans sa déposition pour expliquer pourquoi Abu

26 Abdel Aziz teignait ses cheveux de cette manière.

27 Cette personne était bien connue de la communauté Djihad. Il avait combattu

28 au Cachemire, aux Philippes, en Afghanistan et il s'est trouvé en Bosnie à

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1 l'été 1992, et, là encore, a donné une interview que vous entendrez demain.

2 En fait, Abu Abdel Aziz a été le premier commandant de ces combattants

3 étrangers en Bosnie-Herzégovine.

4 Maintenant, parmi les questions posées par M. Hogg à Abu Abdel Aziz au

5 cours de l'été 1992, il y avait la question de savoir pourquoi les

6 Moudjahiddines étaient venus en Bosnie. Et si les choses vont bien comme on

7 les a prévues, nous entendrons une petite séquence de cette interview pour

8 expliquer pourquoi les Moudjahiddines sont venus.

9 [Diffusion de la cassette audio]

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

11 "Notre devoir est d'aller là où tous les Musulmans ont été forcés de partir

12 du pays, ont été tués ou ont été punis, parce ce ne sont que des Musulmans,

13 parce que notre devoir et le devoir de tout autre Moudjahiddine, c'est

14 d'aider ces gens à se défendre contre [inaudible], contre ce que l'on

15 pourrait appeler une agression."

16 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

17 M. MUNDIS : [interprétation] La question suivante qui pourrait avoir une

18 certaine importance est de savoir d'où venaient les Moudjahiddines. Là

19 encore, en ce qui concerne cette question, Abu Abdel Aziz a fourni à M.

20 Hogg, les réponses suivantes :

21 [Diffusion de la cassette audio]

22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

23 "M. Aziz : Une des choses que j'aimerais vous dire, c'est que mon peuple,

24 ils ne viennent pas seulement des pays arabes, ils viennent aussi des pays

25 islamiques, ils sillonnent d'un lieu différent et nous venons parfois

26 d'Angleterre, d'Allemagne, d'Albanie et d'autres pays musulmans. Nous avons

27 perdu environ huit personnes.

28 M. Hogg : Lorsque vous dites que vos gens viennent d'Angleterre et

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1 d'Allemagne, vous parlez de Musulmans qui vivent en Angleterre ?

2 M. Aziz : Oui, ce sont des Musulmans anglais ou des Musulmans allemands, ou

3 des Musulmans albanais.

4 M. Hogg : Oui, je vois, vous avez perdu huit personnes jusqu'à présent.

5 Cela fait un mois que vous vous battez, et huit morts ont déjà été

6 recensés. Vous avez parlé du Pakistan, vous avez parlé de l'Afrique du

7 Nord, peut-on dire qu'il y a en fait beaucoup de gens qui viennent de

8 différents endroits, de l'Egypte, de l'Algérie, de la Tunisie ?

9 M. Aziz : Oui, il y en a beaucoup. Je ne peux pas compter combien il y en

10 a, mais il y en a de chacun de ces pays.

11 M. Hogg: Oui.

12 M. Aziz : Parce que notre règlement est que pour chaque personne qui vient

13 ici, on ne lui demande jamais quelle est son origine. Peut-être qu'à sa

14 manière de parler, on peut le reconnaître, on peut savoir qu'il est de tel

15 ou tel pays, mais on ne pose pas la question."

16 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

17 M. MUNDIS : [interprétation] Abu Abdel Aziz s'est vu également demandé par

18 M. Hogg quel était le niveau ou le type d'appui que ces combattants

19 étrangers avaient reçu des forces armées de Bosnie-Herzégovine au cours de

20 l'été 1992. Et voilà ce que M. Aziz peut dire à ce sujet :

21 [Diffusion de la cassette audio]

22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

23 "M. Hogg : Etes-vous en mesure d'amener du matériel avec vous. Parce

24 que ce dont ont besoin les Bosniaques, de toute évidence, ce sont des

25 armes, vous avez pu les aider avec ça ?

26 M. Aziz : Non, c'est un problème. C'est très difficile de faire venir du

27 matériel et des armes.

28 M. Hogg : Oui.

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1 M. Aziz : Ensuite [inaudible] les Bosniaques eux-mêmes nous fournissent,

2 disons, les armes dont nous avons besoin, mais il y en a pas beaucoup, il

3 n'y a pas non plus beaucoup d'équipements lourds."

4 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

5 M. MUNDIS : [interprétation] En ce qui concerne la question du commandement

6 et du contrôle de ces combattants étrangers au cours de l'été 1992, Abdel

7 Aziz a dit ceci :

8 [Diffusion de la cassette audio]

9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

10 "M. Aziz : Jusqu'au nord, il n'y a pas de lieu particulier dans

11 lequel nous nous battons. Nous nous battons dans différents endroits. Ce

12 que je veux vous dire à propos de mes Moudjahiddines, c'est que nous sommes

13 sous la supervision, sous la direction des forces musulmanes, si on peut

14 dire. Ensuite [inaudible] mes Moudjahiddines et les règles que l'on suit --

15 comme vous voulez les appeler, les conditions, c'est que nous ne dirigeons

16 pas ici. Nous n'aimons pas avoir notre propre première ligne ou notre

17 propre base. Nous travaillons sous leur supervision et leur direction."

18 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

19 M. MUNDIS : [interprétation] Ce qui est intéressant dans cette séquence,

20 c'est que M. Abdel Aziz fait référence à des forces musulmanes et bien que

21 la transcription dise "inaudible", je crois que lorsque l'on écoute ceci -

22 et lorsque vous réécouterez ceci demain - vous pouvez l'entendre dire

23 [inaudible]. Je parlerai des forces musulmanes et des Musulmans dans un

24 moment, mais je pense qu'il est important de comprendre et de se rendre

25 compte à ce stade exactement ce dont parle M. Abdel Aziz lorsqu'il parle

26 des forces musulmanes, je voudrais souligner qu'à ce stade, lorsque nous

27 parlerons de ce qu'il a dit dans quelques moments, vous pourrez établir le

28 lien avec ce qu'Abdel Aziz a à dire.

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1 La dernière séquence de l'interview que je vous présente concerne

2 simplement où étaient les activités des Moudjahiddines pendant cette

3 période, été 1992, lorsque M. Hogg a interviewé Abdel Aziz.

4 [Diffusion de la cassette audio]

5 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

6 "M. Hogg : Oui, c'est la région de Visoko jusqu'à Parobas [phon] et

7 le front sur lequel vous vous battez, c'est là que vous avez des gens ?

8 M. Aziz : Oui, c'est le secteur. Ça commence là, à la frontière, à

9 Sarajevo.

10 M. Hogg : Oui.

11 M. Aziz : Jusqu'au nord, il n'y a pas de zone particulière dans laquelle

12 nous nous battons, mais plusieurs zones."

13 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

14 M. MUNDIS : [interprétation] Je voudrais maintenant présenter brièvement au

15 membres de la Chambre des photographies et des renseignements de base

16 concernant d'autres chefs des Moudjahiddines étrangers, c'est-à-dire des

17 combattants étrangers qui sont venus en Bosnie. Un certain nombre de

18 témoins tout au long de ce procès parleront de ces personnes, de ces

19 individus, donc je pense qu'il est important à ce stade simplement de

20 commencer à établir des liens entre les photos et les images, les photos de

21 ces personnes de façon à ce que nous comprenions bien qui ils sont. La

22 première personne est un individu du nom de cheik Anwar Shabban. Shabban,

23 un Egyptien, est devenu le chef spirituel de ce qui est devenu le

24 Détachement El Moudjahed. Vous entendrez parler de cela tout au long de ce

25 procès, on parlera de l'EMD, le Détachement El Moudjahed, qui a été formé

26 dans l'ABiH, le 3e Corps, en 1993. Le cheik a été tué en 1995, peu de temps

27 après la conclusion des accords de Dayton.

28 Un autre chef, très connu, c'est Abu Haris. Abu Haris, là encore,

Page 251

1 était un commandant supérieur du Détachement El Moudjahed. Il a été

2 remplacé par une personne du nom de Vahudin en tant que commandant des

3 Moudjahiddines en 1992.

4 Il s'agit d'un Algérien, Abu Al-Maali, il l'a remplacé, et son

5 quartier général dont nous entendrons également parler tout au long de ce

6 procès, c'était une usine abandonnée à Zenica. Zenica, bien entendu, étant

7 le lieu où l'ABiH avait le QG de son 3e Corps. Donc vous entendrez de

8 nombreuses références qui sont faites dans la présente affaire à Zenica.

9 C'était le lieu où se trouvait le 3e Corps de l'armée.

10 Muataz Bila [phon], qui faisait fonctionner les centres de formation

11 des Moudjahiddines, était le chef des opérations militaires pour une

12 formation qui a commencé vers la fin de 1993 à la suite de la mort de

13 Vahudin. En août 1994, il a été officiellement promu au rang de capitaine

14 dans l'ABiH, et en 1995, il a été tué lors d'affrontements avec la VRS,

15 l'armée de la Republika Srpska.

16 Le suivant, Vahudin Al Mazari [phon] a participé à la guerre en

17 Afghanistan contre l'Union soviétique, et notamment a participé à des

18 échanges de prisonniers, y compris l'échange de prisonniers bien connu à

19 Zenica. Il a été tué en 1993 alors qu'il y avait des combats entre l'ABiH

20 et la VRS.

21 Ensuite, Aiman Awad, un Syrien, qui a étudié la médecine à Zagreb et

22 qui connaissait bien le B/C/S comme nous appelons cette langue, le bosnien,

23 le serbe et le croate, il était chargé de toutes sortes de choses, la

24 traduction de documents, le fait de maintenir des contacts avec d'autres

25 chefs au sein de l'ABiH et, en raison de ses capacités, il était parfois

26 officier de liaison avec Abu Al- Maali, et il a été promu dans l'ABiH en

27 1994.

28 Pour finir, Abu Hamza était, en 1994, le chef au sein de l'EMD en

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1 1994-1995.

2 Ces personnes dont il sera question tout au long de ce procès, et là

3 encore, nous avons pensé qu'il pourrait être utile à ce stade de vous

4 présenter brièvement ces personnes.

5 Nous parlerons maintenant des combattants étrangers au cours de la

6 période qui va de l'été 1992 jusqu'au mois d'août 1993, lorsque le

7 Détachement El Moudjahed a été formé, c'est-à-dire ces combattants

8 étrangers au cours de cette période qui a duré un an avant la formation du

9 Détachement El Moudjahed. A ce stade, je voudrais faire quelques

10 commentaires concernant ce qu'Abdel Aziz a appelé les forces musulmanes ou

11 les Musulmans. Nous verrons un certain nombre de documents portant des

12 références qui comprennent l'abréviation "MS" pour Musulmans, et de même,

13 les forces armées musulmanes ou "MOS". Il y avait déjà des premières unités

14 qui, selon l'Accusation --

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, mais ces mots sont

16 utilisés de façon interchangeable comme voulant dire la même chose ?

17 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

19 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie de votre intervention. Les MS

20 ou les MOS, c'est un sigle utilisé de façon interchangeable. C'était les

21 premières unités sur lesquelles l'Accusation posera des questions aux

22 témoins concernant la façon dont les membres des différentes unités ont

23 rejoint l'ABiH, et nous verrons certains documents au cours de cette

24 présentation et tout au long du procès.

25 Regardons maintenant un document qui a pour cote PT6001. Il s'agit d'une

26 séquence vidéo, d'une prestation de serment dans la ville du centre de

27 Bosnie-Herzégovine de Travnik, le 21 août 1992. Si vous regardez, vous

28 verrez Abdel Aziz qui parle à ses troupes assemblées lors de cette

Page 253

1 cérémonie de prestation de serment à l'extérieur de Travnik.

2 [Diffusion de la cassette vidéo]

3 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

4 Voix d'homme inaudible, probablement en arabe.

5 "Chers frères, je vous confie la tâche" --

6 Ensuite, malheureusement, le reste n'est pas compréhensible. Puis il

7 dit : "Guerre au nom d'Allah."

8 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

9 M. MUNDIS : [interprétation] Ce que vous voyez ici, Monsieur le Président,

10 c'est le mufti de Travnik qui prend la parole et qui traduit en B/C/S ce

11 qu'a dit l'intervenant pour tous les soldats qui étaient présents.

12 Malheureusement, la qualité de la bande sonore n'est pas bonne du tout.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ni la vidéo.

14 M. MUNDIS : [interprétation] Ni la vidéo. On voit au fond, à l'arrière-

15 plan, la madrasa de Travnik. Au milieu, avec la barbe, c'est Makteuf. Son

16 nom risque d'être prononcé au cours de ce procès, mais pas plus que cela.

17 C'était un Iraqien.

18 Voyons maintenant la liste des forces de Travnik. C'est le document PT1014.

19 Ce que nous allons faire, c'est qu'au travers de ces documents, vous

20 montrer un certain nombre d'extraits, extraits pertinents qui mettent en

21 lumière certains aspects des moyens de preuve de l'Accusation. Ce document

22 porte la date du 15 septembre 1992. Il comporte une liste de soldats de la

23 zone de Travnik. Nous avons placé le B/C/S et l'anglais en regard sur la

24 même diapositive. C'est une liste de soldats des forces musulmanes à

25 Travnik, les "Muslimanske Snage".

26 Si vous regardez cette liste, vous allez en voir plusieurs, mais vous

27 verrez au travers de ces listes que des soldats se déplaçaient d'une unité

28 à l'autre, y compris au sein du Détachement El Moudjahed, dans ce document

Page 254

1 vous verrez qu'il y a les noms des neuf premières personnes qui sont mises

2 en lumière. Vous verrez que M. Makteuf y est mentionné en numéro 2, une

3 personne que je viens de vous indiquer sur la vidéo, ainsi qu'un certain

4 nombre d'autres individus, dont nous reparlerons au cours de l'affaire pour

5 certains d'entre eux. Ce document a été signé par le commandant de l'unité,

6 M. Redzic.

7 Nous avons le document suivant qui présente également une liste de

8 personnes. Certaines figuraient déjà dans la liste précédente. Si ce n'est

9 pas très lisible sur cette page, ça l'est à la page suivante. On voit qu'il

10 est indiqué "forces musulmanes". On y trouve un certain nombre d'individus

11 qui ne semblent pas avoir de noms d'origine yougoslave. Il s'agit donc là

12 d'une liste de noms d'un certain nombre de combattants étrangers faisant

13 partie de ces forces musulmanes.

14 Tous ces documents seront présentés dans le cadre du procès et

15 permettront à la Chambre de parvenir à leurs propres conclusions s'agissant

16 de ces étrangers au sein des différentes unités, y compris de ceux qui

17 figuraient dans les forces musulmanes.

18 Nous allons maintenant parler des Musulmans, des étrangers qui faisaient

19 partie de la 7e Brigade musulmane de Montagne. Là encore, il y aura un

20 certain nombre d'éléments de preuve indirects qui seront présentés

21 s'agissant de la présence d'étrangers au sein de cette unité.

22 Nous avons le document PT1043. C'est un document daté du 15 mars 1993, où

23 il est question des dispositions et de l'engagement dans les combats de la

24 brigade en question. Le rapport indique à cette époque, en mars 1993, à la

25 mi-mars 1993, la brigade comptait 1 439 hommes divisés en trois bataillons.

26 Le 1er Bataillon du 7e comptait environ 325 soldats et était engagé dans la

27 région de Bijelo Bucje et de Ravno Rostovo. Le 1er Bataillon - c'est ce

28 qu'on lit dans ce paragraphe - fait état de Gornji Vakuf, Vitez, et cetera,

Page 255

1 Visoko." Puis, à la fin on lit, c'est intéressant : En outre, il y avait

2 aussi 60 Arabes et Turcs qui ne figurent pas dans ce calcul, ce qui est un

3 peu particulier peut-être mais qui montre, selon nous, qu'à ce moment-là à

4 la mi-mars 1993, il y avait 60 Arabes et Turcs au sein de la 7e Brigade

5 musulmane de Montagne. Ce document a été signé au nom du commandant de

6 cette brigade par Amir Kubura.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La signature --

8 M. MUNDIS : [interprétation] La signature sur ce document est celle de M.

9 Amir Kubura.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, la signature.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Mais la signature de cette page, oui,

12 c'est celui d'Amir Kubura qui signe au nom de la 7e Brigade musulmane de

13 Montagne.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois.

15 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, effectivement. C'est une bonne remarque

16 que vous avez faite, Monsieur le Président. Quand vous voyez le terme

17 "Komandant" sur la gauche on voit qu'il y a une mention manuscrite, en fait

18 ça veut dire "pour", c'est-à-dire au nom de. Donc c'est Amir Kubura qui l'a

19 signé au nom du commandant qui n'était pas présent.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

21 M. MUNDIS : [interprétation] Le document suivant est le document PT1055 qui

22 porte la date du 2 avril 1993. On y voit que c'est un avertissement adressé

23 à M. Dario Kordic, le commandant du HVO à l'époque. Un avertissement est

24 donc adressé à Kordic.

25 Dans ce document le commandant de la 7e Brigade de Montagne se plaint

26 d'incidents, d'arrestations, d'harcèlements, d'abus, voire même de meurtres

27 de membres de la 7e Brigade par des membres des unités du HVO.

28 Et il dit la chose suivante : "Le plus triste dans l'histoire

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1 c'est qu'on le fait aussi à des ressortissants étrangers, des bénévoles,

2 des volontaires dans nos rangs, particulièrement des pays arabes. Nous vous

3 avertissons, M. Kordic, il faut que vous libériez tous les ressortissants

4 étrangers à la fois membres de l'ABiH mais également les civils."

5 Ce sont les plaintes que l'on retrouvera dans d'autres documents. Ce

6 sont des plaintes adressées par la 7e Brigade, 3e Corps de l'ABiH au

7 commandement des unités du HVO faisant état de harcèlement de volontaires,

8 d'étrangers, membres de l'unité. Ceci démontre aussi qu'au sein de la 7e

9 Brigade musulmane de Montagne ces ressortissants étrangers étaient bien

10 présents.

11 Le document suivant est le document PT1056, c'est un bulletin du 4 avril

12 1993 de l'administration de la sécurité de l'état-major du commandement

13 Suprême de l'ABiH. Dans ce document, document de l'administration de la

14 sécurité, un bulletin en quelque sorte, adressé, entre autres, à l'état-

15 major principal des forces armées : "Des membres de la 7e Brigade --"

16 C'est une plainte ici qui est exprimée par rapport à un incident qui

17 s'est produit à un poste de contrôle. Des membres de la 7e Brigade

18 musulmane se trouvaient à l'intérieur du véhicule, le chauffeur était un

19 citoyen de la République de Bosnie-Herzégovine tandis que les autres

20 venaient de pays arabes. Et là encore, il y a eu harcèlement par le HVO. Le

21 lendemain, la police militaire de la 7e Brigade de Montagne a retrouvé l'un

22 de ces citoyens étrangers susmentionnés qui avait été tellement frappé

23 qu'il était sans doute mort depuis.

24 Puis, on y lit plus loin que le cadavre d'un homme âgé de 30 à 35 ans

25 avait été retrouvé dans la zone de responsabilité de la 306e Brigade de

26 Montagne, toujours membre du 3e Corps de l'ABiH. Nous avons des

27 informations fiables sur la base desquelles nous pensons que c'était un

28 ressortissant étranger et très probablement un membre de la 7e Brigade

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1 musulmane; là encore, il fait état d'une personne qui aurait été tuée à un

2 poste de contrôle par le HVO, un membre de la Brigade musulmane.

3 Le document suivant, c'est le document PT1059, un document du 12 avril

4 1993, un rapport sur des membres de la brigade qui auraient été fait

5 prisonniers par des membres du HVO. Ce document est signé par Ahmet

6 Adilovic, commandant en second chargé de la morale des troupes, de

7 l'information de la propagande et des questions religieuses au sein de la

8 7e Brigade musulmane de Montagne. Il fait état d'un nombre croissant de cas

9 dans lesquels des membres du HVO à certains postes de contrôle de manière

10 illégale ont fait prisonniers des ressortissants étrangers, à savoir

11 paiement contre l'ABiH, à savoir "des volontaires membres de notre unité."

12 Ensuite, il se demande pourquoi le HVO procède ainsi. Parce que les

13 étrangers ne font que lutter contre les Chetniks. Alors pourquoi les

14 Croates de Bosnie tenteraient-ils de porter préjudice aux ressortissants

15 étrangers de notre unité puisqu'ils sont venus nous aider dans la lutte que

16 nous menons conjointement contre les Serbes.

17 Ce document se poursuit, on y voit une liste d'un certain nombre

18 d'individus qui ont été fait prisonniers par le HVO, y compris cinq Arabes

19 et deux Iraniens qui sont envoyés à la caserne Kajenik [phon]. On y voit

20 des ressortissants du Pakistan, de l'Algérie, de la Tunisie et de l'Egypte.

21 Ensuite, on parle de trois Arabes, trois Iraniens, Turcs emprisonnés à

22 Kiseljak aux mains du HVO toujours, puis on parle aussi dans ce document de

23 deux autres hommes tués à une patte-d'oie près de Novo Travnik et d'autres

24 faits prisonniers également du côté de Travnik.

25 Enfin, trois personnes d'Arabie Saoudite arrêtées près de Vitez et sans

26 doute encore à Kajenik et enfin trois Tucs et deux Arabes, là encore des

27 plaintes émanant de la 7e Brigade musulmane de Montagne faisant état de

28 mauvais traitements infligés à ces ressortissants, à ces membres étrangers,

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1 ces soldats moudjahiddines.

2 Passons maintenant très brièvement à la pièce PT1102, c'est le procès-

3 verbal d'une réunion de la 7e Brigade musulmane de Montagne du 13 mai 1993.

4 Le sujet de cette réunion c'est la distribution du bulletin de guerre.

5 L'un des membres présents à cette réunion s'est plaint du manque

6 d'organisation dans le rassemblement, le recueil de ce bulletin de guerre

7 du fait de notre manque d'expérience, comme il le dit, et il indique que

8 les Arabes n'ont pas accès aux munitions et au dépôt d'explosifs. Ensuite

9 les conclusions de cette réunion se trouvent également dans ce document, et

10 Afandi Adilovic qui s'était plaint plus tôt, nous l'avons vu dans un autre

11 document du mauvais traitement infligé aux ressortissants étrangers est

12 chargé de tenir des pourparlers avec les Arabes sur le bulletin de guerre

13 qu'ils ont saisi.

14 Passons maintenant à Bijelo Bucje. C'est l'un des lieux où était actif la

15 7e Brigade musulmane de Montagne, et là encore en juin 1993, nous avons un

16 ordre donné au 3e Corps, ce document est signé par toujours Amir Kubura au

17 nom du commandant ou pour le commandant Asim Koricic. Le paragraphe 2 de ce

18 document indique la chose suivante : "Le commandant du 1er Bataillon de la

19 7e Brigade a immédiatement envoyé une unité de 70 soldats dans le secteur

20 de Bijelo Bucje.

21 "Une contre-attaque a été menée selon trois axes. Au cours de

22 l'opération quatre soldats, des ressortissants étrangers, des Arabes, ont

23 été tués."

24 Là encore, ceci montre la présence de ces combattants étrangers dans

25 la 7e Brigade avant la formation du Détachement El Moudjahed.

26 Passons maintenant à une autre unité, la 306e Brigade, autre unité de

27 l'ABiH et du 3e Corps. Nous avançons qu'il y avait, là aussi, des

28 combattants étrangers.

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1 L'école de Mehurici. Mehurici, c'est un petit village. Vous allez

2 entendre parler des événements qui se sont passés dans ce village et de ce

3 qui s'est passé à l'école de Mehurici. Voici une photo de l'école. C'était

4 le QG des arabes de Mehurici, comme on les appelait ou des Moudjahiddines

5 jusqu'à ce qu'ils quittent l'école pour un autre endroit à Poljanice, à

6 quelques centaines de mètres de l'école, à l'extérieur de la délimitation,

7 disons, des confins de la petite ville de Mehurici. Des forces de 306e

8 Brigade étaient également dans cette école au moment même où les arabes de

9 Mehurici s'y trouvaient et avant que ceux-ci ne se déplacent pour

10 Poljanice.

11 Ce document porte la date du 25 juin 1993, c'est un rapport manuscrit sur

12 le moral des troupes au sein des unités de l'ABiH, la 306e Brigade. Ce

13 document fait état d'un manque de coordination entre les unités. Là, on

14 fait la liste de ces unités : 306e, 17e, 312e, 314e, 7e arabe de Mehurici et

15 MS, donc les forces musulmanes de Mehurici ont abouti à la situation dans

16 laquelle plusieurs soldats ont perdu la vie. Donc, il y avait un manque de

17 coordination entre ces différentes unités au sein de la zone de

18 responsabilité de la 306e Brigade. On nous parle ici des arabes de Mehurici

19 et des MS, donc les forces musulmanes de Mehurici. Ce document a été signé

20 par le commandant adjoint de la 306e Brigade, la personne chargée de la

21 morale des troupes, de l'information, de la propagande et des questions

22 religieuses, Halil Husic, de son nom, nous le retrouverons dans d'autres

23 documents que nous allons voir dans un instant.

24 Parlons maintenant des Moudjahiddines dans les autres unités, de ces

25 combattants étrangers dans les unités autres que la 7e Brigade et de la

26 306e.

27 Le document suivant, en date du 16 juin 1993, est adressé au

28 commandant de 3e Corps et au commandant lui-même. Dans ce document, on lit

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1 la chose suivante :

2 "Depuis le début de la guerre, des volontaires de pays étrangers et

3 un groupe de Bosniaques, unis dans ce que l'on pourrait appeler une unité

4 de guérillas, se sont trouvés sur le territoire de Zenica."

5 Là encore, le quartier général du 3e Corps :

6 "Afin qu'ils poursuivent leur engagement dans notre lutte, j'ordonne

7 d'envoyer ces groupes à Igman et de les fusionner avec le détachement

8 indépendant SVK de l'unité de Zukic, sans quoi il faudra les priver de

9 l'hospitalité qui leur a été donnée jusqu'à présent et il faudra peut-être

10 les désarmer."

11 Ce document est signé le 16 juin 1993 par l'accusé lui-même, Rasim

12 Delic.

13 "El Djihad" ou "Brigada Djihad". A un moment donné à l'été 1993, juste

14 avant la constitution du Détachement El Moudjahed en août, les étrangers

15 ont commencé à se rassembler dans une unité qu'ils ont baptisée "El Djihad"

16 ou la "Brigada Djihad". Ce nom est devenu relativement bien connu dans le

17 secteur et, comme on le dira dans un instant, des documents officiels de

18 l'ABiH ont commencé à appeler cette formation sous ce nom là, "El Djihad"

19 ou "Brigada Djihad".

20 Regardez le document PT1433. C'est un document de la 306e Brigade de

21 Montagne en date du 30 juillet 1993, adressé au secteur du 3e Corps pour

22 les questions de morale, propagande, formation, questions religieuses, et

23 cetera. Dans ce document, vous lirez la chose suivante : "Pour différentes

24 raisons, un certain nombre de combattants a rejoint la nouvelle unité El

25 Djihad, où ils se forment, ils ne sont pas sur la ligne, ils sont aidés

26 financièrement, et cetera." Là encore, on fait état d'une nouvelle unité El

27 Djihad, nouvellement créée. Le document porte la date du 30 juillet 1993

28 et, là encore, le document était signé par Husic Halil, qui était chargé de

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1 toute la question religieuse ou morale des troupes, propagande,

2 information, et cetera.

3 Le document suivant PT1454 est daté du 10 août 1993, nous nous approchons

4 donc de la date de la formation du Détachement El Moudjahed. C'est un

5 rapport adressé au président de la présidence de la République de Bosnie-

6 Herzégovine, il porte sur des changements intervenus sur le champ de

7 bataille pour le 9 août 1993 :

8 "Un certain mécontentement gronde au sein des troupes de la zone de

9 responsabilité du groupe opérationnel de Bosanska Krupa après qu'une

10 compagnie du 1er Bataillon de -- la glorieuse brigade de montagne a quitté

11 ses positions le 8 août et est rentrée au camp avec l'intention de

12 rejoindre l'unité El Djihad et a refusé de se rendre aux positions du

13 village de Radonjcici [phon] --

14 Passons maintenant au Détachement El Moudjahed proprement dit. Quelques

15 explications brèves sur un certain nombre de ces documents militaires que

16 vous allez voir. Ce document, me semble-t-il, est le premier document qui

17 ait été envoyé par voie électronique, par le système qui était utilisé à

18 l'époque par l'ABiH et que l'on appelait "système de communication par

19 paquet." Vous voyez la ligne qui divise ce document en deux. Au-dessus de

20 cette ligne se trouvent toutes les informations sur la réception du

21 document, c'est-à-dire que ce document a été reçu le 13 août 1993 à 10

22 heures 03 du matin. En dessous, vous trouverez des informations sur la date

23 d'envoi et l'expéditeur. Ce document a été envoyé de Zenica le 12 août

24 1993. C'est une proposition visant à l'établissement d'un détachement

25 constitué de ressortissants étrangers, datée du 12 août 1993, et reçue à

26 Sarajevo, le 13 août 1993. Ce document est adressé aux forces armées et à

27 l'état-major du commandement Suprême des forces armées de la République de

28 Bosnie-Herzégovine. Dans ce document, c'est une requête en réalité qui a

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1 été envoyée par Enver Hadzihasanovic qui était le commandant du 3e Corps et

2 qui est devenu par la suite chef d'état-major de l'accusé Rasim Delic.

3 Cette proposition visait à la formation d'une unité regroupant tous les

4 volontaires étrangers dans la zone de responsabilité du 3e Corps et la

5 formation d'un détachement. Il s'agissait en réalité de mettre tous les

6 volontaires étrangers dans une seule unité.

7 Le point de rassemblement de mobilisation du détachement devait être

8 Mehurici. Le nom du détachement, El Moudjahed. Son matricule, à être

9 déterminé par l'état-major du commandement Suprême. L'appui logistique

10 organisé par les services logistiques du 3e Corps et la demande était

11 urgente, dit le commandant Hadzihasanovic.

12 Le 13 août 1993, ce document est reçu à Sarajevo, et ce même jour nous

13 avons un ordre visant à ce que le Détachement El Moudjahed soit constitué

14 au sein de la zone de responsabilité du 3e Corps. Le document est adressé

15 au commandant du 3e Corps et signé, là encore, par Rasim Delic.

16 Dans cet ordre, il indique que l'établissement de ce Détachement El

17 Moudjahed doit commencer immédiatement et doit prendre fin au plus tard

18 avant le 31 août 1993. Cette unité nouvellement formée sera constituée au

19 sein du 3e Corps et il demande que l'on procède à la désignation et à la

20 nomination d'officiers conformément aux Règlements.

21 Peu de temps après, une cérémonie a été organisée au cours de laquelle le

22 Détachement El Moudjahed a été officiellement créé.

23 L'extrait vidéo suivant vous montre cette cérémonie.

24 [Diffusion de la cassette vidéo]

25 M. MUNDIS : [interprétation] Peu de temps après, ou dès le 16 août 1993, le

26 commandant du 3e Corps, Enver Hadzihasanovic, donne un ordre au commandant

27 du groupe opérationnel Bosna indiquant que 50 membres du Détachement El

28 Moudjahed souhaitent aller à la ligne de front à Zavidovici.

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1 Vous vous souviendrez de l'ordre du 13 août 1993. On y disait que le

2 Détachement El Moudjahed devait être formé au plus tard le 31 août 1993, et

3 là, pourtant, trois jours après que l'ordre a été émis, le commandant du 3e

4 corps fait déjà référence au Détachement El Moudjahed, ce qui veut dire

5 que, vraisemblablement, l'unité a été constituée très rapidement après

6 l'ordre du 13 août 1993, puisque le commandant du 3e Corps, qui était le

7 commandant global sous l'autorité de laquelle fonctionnait l'unité,

8 indiquait que l'unité était déjà formée et qu'elle souhaitait se rendre sur

9 la ligne de front, ce qui veut dire que l'on demandait ici au commandement

10 du groupe opérationnel Bosna de bien vouloir fournir les moyens

11 logistiques, et que, s'il pouvait le faire, les hommes seraient mis à sa

12 disposition.

13 Dans le document suivant, vous trouverez un certain nombre de listes

14 qui vous seront présentées au cours du procès. Là encore, l'exemplaire

15 n'est pas de très bonne qualité, mais en haut à gauche de ce document, vous

16 lisez "Republika BiH", République de Bosnie-Herzégovine, armée de la

17 République de Bosnie-Herzégovine, 3e Corps, Détachement El Moudjahed. C'est

18 une liste de soldats membres de cette unité. Malheureusement, il n'y a pas

19 de date, mais on y voit un numéro de série ou un code 001/93. Dans ce

20 document, qui contient prénom, nom de famille, date et lieu de naissance et

21 membre de l'ABiH depuis quand, on arrive à voir qui sont ces hommes, et on

22 se rend compte que certains de ces individus faisaient déjà partie du

23 Détachement El Moudjahed. Je ne vais pas mettre en exergue tel ou tel nom,

24 mais il y a un certain nombre d'individus qui sont ici et que nous citerons

25 à comparaître au cours des semaines à venir. Ces témoins nous parlerons de

26 la formation de cette unité.

27 De même, à la fin du document, nous voyons - et je dirais qu'il

28 s'agit de l'année 1993, au début de la période - des Pakistanais, un

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1 Britannique, un Danois, un Marocain, des Kényans, des Jordaniens et des

2 ressortissants d'Arabie Saoudite, ainsi que des ressortissants du Qatar,

3 ainsi qu'un Palestinien. Ce document nous donne des détails relatifs au

4 Détachement El Moudjahed, en ce sens qu'il s'agit de l'état-major. Quel est

5 le nom que nous voyons comme émir du détachement ? Le Dr Abu Haris.

6 Il y a une citation de ce document, "l'adjoint" qui est représentant

7 de l'émir à Zenica, Abu Maali, et vous avez également Muataz, vous avez

8 également le commandant adjoint responsable de la sécurité, Abu Iaman.

9 Pour ce qui est du commandant et du contrôle des Moudjahiddines

10 pendant l'année 1993, ce document, qui a été envoyé par un représentant du

11 centre des Nations Unies pour les droits de l'homme sur le terrain - je

12 vous signale qu'il s'agit de la date du mois d'octobre 1993, ce qui a son

13 importance, plusieurs mois après la création du Détachement El Moudjahed -

14 ce document, donc, il s'agit d'une réunion qui a eu lieu avec le commandant

15 adjoint du 3e Corps de l'ABiH : "En répondant à ma question à propos du

16 facteur moudjahiddine, il a expliqué qu'il n'y avait pas d'unité de

17 Moudjahiddines au sein de l'ABiH. Ce qui n'est pas vrai. Mais il y a de

18 nombreux volontaires venant d'un certain nombre de pays, notamment des

19 occidentaux, qui sont venus pour lutter contre le fascisme moderne, et ils

20 doivent tous obéir aux ordres et respecter les lois de l'armée."

21 Nous avançons que cela est faux à plusieurs égards, car même la

22 présence ou la création du Détachement El Moudjahed est quelque chose que

23 les dirigeants ou les chefs du 3w Corps ainsi que d'autres chefs au sein de

24 l'ABiH ont réfuté.

25 Nous allons passer à la pièce PT2880. Nous allons rapidement en besogne,

26 mais il s'agit quasiment de la période qui suit la fin du Détachement El

27 Moudjahed. Il s'agit du 26 février 1996. C'est un document qui est très

28 intéressant à plusieurs égards. Nous voyons dans un premier temps une liste

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1 des membres du Détachement El Moudjahed. Nous voyons très clairement le

2 numéro du matricule de la VJ. Il s'agit du numéro de l'unité militaire que

3 nous avons vu un peu plus tôt, avec le numéro de matricule de l'unité

4 militaire qui a leur été accordé. Le Détachement El Moudjahed était le

5 détachement 5689. Il y a des documents ou des références qui sont faites à

6 5689, VJ 5689, au Détachement El Moudjahed du 3e Corps de l'ABiH.

7 Vous avez la liste des membres de cette unité, et cela commence par

8 des ressortissants de l'Arabie Saoudite, des Arabes, des Turcs, des

9 Algériens, des Libyens, des Tunisiens, et cetera. Et si vous voyez le haut

10 du document, vous voyez qu'il y a 1 774 noms pour la période 1994-1995. Et

11 à la fin de ce document, vous voyez un certain nombre de personnes qui,

12 manifestement, sont originaires de Bosnie-Herzégovine. Vous voyez les lieux

13 : Zenica, Gornji Vakuf, Zenica encore, et Sarajevo.

14 Nous allons maintenant aborder le thème de Maline-Bikosi, le 8 juin

15 1993, et c'est là que Rasim Delic, avance l'Accusation, c'est le jour où

16 Rasim Delic a été nommé commandant de l'ABiH.

17 Le 5 juin 1993, trois jours avant les crimes qui sont allégués, nous

18 voyons un rapport et une proposition. Il s'agit d'un rapport qui émane du

19 groupe opérationnel Bosanska Krajina -- cela inclut la 306e Brigade de

20 Montagne. Nous avons le numéro du Corps --

21 Il y a un certain nombre de groupes opérationnels qui ont été

22 établis, certains pour des périodes de temps plus longues que d'autres. Les

23 groupes opérationnels étaient composés de brigades, donc nous avons le

24 corps, les groupes opérationnels, les brigades puis les bataillons, les

25 compagnies et les sections.

26 Le groupe opérationnel Bosanska Krajina, à cette période, en juin

27 1993, incluait la 306e Brigade de Montagne, et cela a son importance.

28 C'est une proposition qui porte la date du 5 juin 1993, destinée au

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1 commandement du 3e Corps, et qui émane du commandant du groupe opérationnel

2 Bosanska Krajina. Voilà l'ordre qu'il donne. Il donne l'ordre que soit

3 organisée une unité composée d'un bataillon qui se dirigera le long de

4 l'axe des villages suivants : Maline, Radonjici, Krpeljici, Velika Bukovica

5 et vers la petite chapelle St-Yvan.

6 Ensuite, vous avez le document suivant, un télégramme, ou cela en

7 tout cas est écrit sous forme télégraphique. Cela émane de la 306e Brigade

8 de Montagne, au commandement du 3e Corps. Il s'agit du 8 juin à 22 heures

9 10. De quoi s'agit-il ? Du commandant de la 306e Brigade de Montagne qui

10 indique que :

11 "Mous sommes sur l'axe Maline, Guca Gora, Mosor, Velika Bukovica,

12 exactement comme le plan avait été indiqué par le commandant du Groupe

13 opérationnel Bosanska Krajina."

14 Le document suivant est un document qui émane une fois de plus de la 306e

15 Brigade de Montagne destiné au 3e Corps, qui porte la date du 9 juin 1993,

16 et indique la présence de cette unité qui a investi Maline et il est

17 indiqué à la fin du document : "Nos forces ont atteint l'axe des villages

18 Maline, Velika Bukovica, Guca Gora, Mosor et Bukovica, hier, à savoir donc

19 le 8 juin."

20 Puis dans un rapport de combat destiné à l'état-major des forces armées de

21 l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine en date du 9 juin, une fois

22 de plus, nous voyons un rapport selon lequel : "Nos forces se trouvent sur

23 la ligne entre Maline, Prcanj, et Dzumalija [phon]." Alors il y a donc des

24 combattants étrangers qui sont allés à Maline, le 8 juin 1993.

25 Le matin du 8 juin 1993, environ 200 à 300 personnes, notamment des

26 civils croates de Bosnie et des membres du HVO, à savoir des membres du

27 conseil de Défense croates, il s'agit donc du HVO qui est l'armée de

28 Croatie. Donc je reprends : Entre 200 à 300 personnes donc incluant des

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1 civils croates de Bosnie et des membres du HVO des villages de Maline,

2 Podstinje, Podovi, et Matici se sont rassemblés à Gornji Maline, au moment

3 où Maline a été investi par l'ABiH le matin du 8 juin 1993.

4 Donc voilà une leçon très, très rapide en langue B/C/S. "Gornji"

5 signifie haut, supérieur. Vous verrez que cela est traduit par le "haut de

6 Maline", alors que "Donje" signifie le "bas de Maline". Cela signifie donc

7 que le village de Maline est composé de deux quartiers, deux parties : la

8 partie supérieure, le haut, et la partie basse du village.

9 A la suite de négociations, ces 200 à 300 Croates, qui se trouvaient à

10 Gornji Maline, se sont rendus à l'armée ou aux forces de l'ABiH vers 11

11 heures du matin. Les membres du HVO ont rendu leurs armes, et certains des

12 témoins vont parler de la présence de Moudjahiddines dans le village au

13 moment où les Croates de Bosnie étaient en train de se rendre ou peu de

14 temps après leur reddition.

15 Les 200 à 300 membres du HVO ainsi que les civils croates ont reçu l'ordre

16 de se ranger suivant des lignes, l'intention étant de les faire marcher

17 depuis Gornji Maline vers Bikosi, il s'agit d'une montagne assez pointue,

18 et ce, en direction de Mehurici. Ils ont été escortés par des soldats armés

19 de l'ABiH.

20 Au moment où la colonne a quitté Gornji Maline, les hommes et les

21 femmes ont été séparés. Les personnes qui avaient été blessées lors de

22 l'attaque sont restées à Gornji Maline.

23 Le groupe le plus important de Croates - et là, je parle maintenant

24 des hommes - donc le groupe le plus nombreux des hommes où il y avait

25 présence des membres du HVO qui s'étaient rendus et présence de civils

26 croates, ont été conduits par l'ABiH en passant par Bikosi vers Poljanice,

27 où se trouvait le camp des Moudjahiddines, une fois qu'ils ont quitté

28 l'école de Mehurici, comme je vous l'avais montré sur un autre cliché. Et

Page 269

1 là, nous voyons Mehurici à droite. Puis, vous voyez l'abréviation "SK.", ce

2 qui signifie école sur cette carte. Cela se trouve juste en dessous de la

3 mention Mehurici. Donc "SK" fait état de l'école. Vous voyez également

4 Poljanice où se trouvait le camp des Moudjahiddines, tel que cela est

5 indiqué sur la carte.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Etes-vous en mesure de nous dire

7 combien de personnes ont pu se déplacer parmi ces personnes qui avaient été

8 capturées ?

9 M. MUNDIS : [interprétation] Parmi ces personnes capturées, il y avait plus

10 de 200 personnes en fait qui se sont déplacées de Gornji Maline en passant

11 par Bikosi, puis ensuite vers Mehurici.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc ce nombre compris en 200 et 300,

13 c'est le chiffre en fait qui fait référence au groupe après que les femmes

14 aient été séparées du groupe ?

15 M. MUNDIS : [interprétation] Non, quand je dis 200 à 300 personnes c'était

16 l'ensemble du groupe, ensuite les femmes ont été enlevées du groupe, les

17 personnes blessées sont restées, et il n'y avait plus qu'environ de 200

18 personnes dans cette colonne. Donc il s'agit de 200 hommes environ qui se

19 déplacent dans ces colonnes vers cette direction.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

21 M. MUNDIS : [interprétation] Au moment où ce groupe, cette colonne s'est

22 rapprochée du camp des Moudjahiddines à Poljanice, environ neuf

23 Moudjahiddines, cinq personnes du cru et quatre étrangers qui avaient tous

24 des armes automatiques sont sortis du camp de Poljanice. Nous pensons que

25 les preuves que nous allons présenter vont prouver que les personnes

26 locales qui s'étaient ralliées aux Moudjahiddines portaient des cagoules

27 pour dissimuler leur identité alors que les Moudjahiddines n'avaient

28 absolument pas besoin de dissimuler leur identité parce que les gens du cru

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1 ne savaient pas qui ils étaient.

2 Ils ont arrêté la colonne. Ils ont pointé leur arme sur le commandant

3 de l'armée des forces de Bosnie-Herzégovine, qui accompagnait ce groupe, et

4 ils ont en fait séparé encore le groupe. Ils ont demandé à une trentaine ou

5 à une quarantaine d'hommes de sortir de la colonne et les ont renvoyés vers

6 Bikosi. Le reste du groupe a continué à se déplacer vers l'école de

7 Mehurici; donc il y a une trentaine ou une quarantaine de personnes qui ont

8 été sortis du groupe, qui ont dû repartir, qui ont dû rebrousser chemin; et

9 les autres ont poursuivi leur chemin vers Mehurici.

10 Alors qu'ils rebroussaient chemin vers Bikosi, les Moudjahiddines ont

11 demandé aux hommes croates qui avaient été capturés de celle de se brancher

12 suivant les lignes devant les tranchées et ont menacé de les tuer, ce qui

13 ne s'est pas passé à ce moment-là.

14 Mais entre-temps à Gornji Maline, le groupe des Croates blessés qui avaient

15 été laissés à Gornji Maline ont été placés à bord de camions par les

16 soldats, les soldats de l'ABiH, avec les Moudjahiddines qui sont montés au

17 moins dans un des camions avec des fusils automatiques. Puis le camion

18 s'est dirigé vers Bikosi. Mais avant d'arriver à Bikosi, le camion s'est

19 arrêté et les personnes blessées ont reçu l'ordre de descendre des camions,

20 et ont commencé à marcher vers le camp de Poljanice ou vers Mehurici, tout

21 comme l'avait fait l'autre groupe à partir de Bikosi.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous donner des

23 nombres ?

24 M. MUNDIS : [interprétation] Pour ce qui est des blessés, non, ce n'est pas

25 très précis. Je ne peux pas véritablement vous donner un chiffre exact.

26 A ce moment-là, ce que nous avons c'est que vous avez la situation

27 suivante : il y a une trentaine, une quarantaine d'hommes qui reviennent de

28 Poljanice vers Bikosi, et là ils rencontrent ce groupe de personnes

Page 271

1 blessées qui descendent de la montagne vers Mehurici en direction de

2 Poljanice et de Mehurici, comme vous le voyez sur le cliché devant vous.

3 Et au moment où les deux groupes se rencontrent, le groupe des blessés

4 reçoit l'ordre de rebrousser chemin et de se rallier au groupe des 30 et 40

5 personnes qui rebroussent chemin vers Bikosi. Donc vous avez Maline, vous

6 avez Mehurici, ces deux localités se trouvent dans une vallée, et vous avez

7 Poljanice, qui se trouve en fait en altitude.

8 Donc vous avez ce groupe de blessés, puis ces 30 ou 40 Croates

9 capturés qui marchent tous vers Bikosi. Juste avant l'arrivée à Bikosi, la

10 seule femme du groupe, Ana Pranjes, a été tuée par un Moudjahiddine. Et

11 après cet assassinat, le groupe poursuit son chemin en gravissant la

12 montagne jusqu'au moment où ils arrivent au carrefour où on les force à

13 emprunter la direction vers Bikosi, plutôt que la direction qui les aurait

14 conduits à Maline.

15 A ce moment-là, ce groupe se trouve près de ce carrefour ou un peu

16 au-dessus du carrefour, il y a quelques maisons qui forment la localité de

17 Bikosi. Vous avez Sreco Bobas, l'un des membres du HVO capturé qui a une

18 crise d'épilepsie. Il y a un témoin qui viendra déposer et ce n'était pas

19 quelque chose de tout à fait imprévisible, car c'était un de leurs voisins,

20 ils savaient qu'il était sujet à des crises d'épilepsie.

21 Donc Sreco Bobas a eu une crise d'épilepsie. Les Moudjahiddines ont

22 commence à tirer de façon tout à fait aléatoire sur tous les hommes croates

23 du groupe. Les Moudjahiddines ont continué à tirer à bout portant, et ce,

24 pour achever les survivants, jusqu'au moment où l'un de leurs soldats a été

25 touché de façon accidentelle lors de cet incident, et à ce moment-là donc

26 ils se sont retirés.

27 Ce qui fait qu'il y a eu 24 Croates de Bosnie qui ont été assassinés.

28 Nous avons le 39e fait faisant l'objet d'accord, qui fournira leur

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1 identité. La Défense a accepté qu'il y avait 24 personnes qui ont été tuées

2 ce jour-là à Bikosi. Bien entendu, il s'agit de savoir comment et par qui,

3 qui avait le contrôle véritable, ce qui fait l'objet de litige. Mais le

4 fait est que les parties sont convenues qu'il y a au moins 24 personnes qui

5 ont été assassinées le 8 juin 1993 à Bikosi et autour de Bikosi.

6 Pour ce qui est des survivants, il y a au moins six personnes qui ont

7 survécu à ce massacre. Plusieurs d'entre eux ont essuyé des tirs très, très

8 sérieux, mais certains ont survécu. Vous avez, par exemple, Marian Bobas,

9 Darko Puselja et Zeljko Puselja. Vous avez Berislav Marijanovic qui a été

10 touché à la jambe, et vous avez également Zdravko Pranjes, qui a survécu.

11 Vous avez ensuite Pavo Barac, qui a été capturé par la suite, qui a été

12 détenu, et ce, jusqu'au 4 juillet, moment où ils ont été transformés au KP

13 Dom de Zenica ou à l'école de musique ou encore certains ont été libérés.

14 Pourquoi est-ce que je mentionne ce fait ? Comme nous le verrons un

15 peu plus tard, lorsque le moment sera venu de se demander véritablement ce

16 qui s'est passé à Bikosi le 8 juin 1993, il est évident qu'il y a eu des

17 survivants de cet incident qui ont été détenus par une unité de l'ABiH, et

18 cela nous donne la possibilité de mener à bien une enquête et de savoir ce

19 qui s'est passé, parce qu'il y en a au moins trois qui ont été détenus par

20 une unité de l'ABiH, et c'est l'une des raisons pour lesquelles cela a sa

21 pertinence, à savoir le thème des survivants et pour ce qu'il s'agit de

22 savoir ce qui s'est passé immédiatement après ce massacre.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qu'entendez-vous par "ou ont été

24 libérés" ?

25 M. MUNDIS : [interprétation] Il y a un certain nombre de cas où il y a eu

26 des échanges de combattants, des échanges de prisonniers de guerre, et

27 cetera, et cetera. Donc je pense qu'il y a au moins une de ces personnes

28 qui a fait l'objet d'un échange de prisonniers.

Page 273

1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. MUNDIS : [interprétation] J'aimerais maintenant parler des crimes qui

3 ont été commis à Bikosi.

4 Car le 13 juin 1993, Enver Hadzihasanovic a envoyé un rapport

5 directement à l'accusé, Rasim Delic; et dans ce document, il fait référence

6 à des combattants étrangers, des volontaires ressortissants de pays

7 étrangers, des Arabes et des Turcs, il fait référence à une unité de

8 guérillas, et il se trouvait sur ce territoire même avant la formation du

9 3e Corps, et ils ont agi sans tenir compte du contexte et des méthodes

10 licites de combat, ce qui nuit aux intérêts de l'Etat de la Bosnie-

11 Herzégovine. Il faut savoir qu'il ne fait pas référence à l'incident de

12 Bikosi, mais il fait référence au fait qu'ils ont agi sans tenir compte du

13 contexte habituel, et sans tenir compte des méthodes légales de combat.

14 Et il faut savoir que deux jours plus tard, dans un document qui est

15 adressé à l'état-major de l'armée, une fois de plus, il s'agit de Rasim

16 Delic qui est mentionné, et c'est un document qui indique qu'une fois de

17 plus, il y a des crimes graves qui ont été commis dans le territoire du 3e

18 Corps, Susanj, Ovnak, et d'autres villages, et les assassins ne sont pas

19 punis. Il est fait référence dans ce document à des crimes commis dans la

20 zone de Zenica. C'est le premier de toute une série de documents qui

21 émanent de Stjepan Siber, le député adjoint de l'ABiH.

22 J'aimerais faire une pause, pour le moment, et vous fournir une

23 information brève ici à l'intention de la Chambre de première instance.

24 L'accusé, Rasim Delic, est un Musulman de Bosnie, et le commandant général

25 de l'ABiH. Il a deux adjoints, un Serbe de Bosnie qui s'appelle Divjak, et

26 un Croate de Bosnie, Stjepan Siber. Stjepan Siber, dans ce document que

27 nous avons maintenant, expose ses griefs à propos de crimes qui ont été

28 commis par l'ABiH dans des territoires croates où se trouvent des Croates

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1 de Bosnie.

2 Nous verrons un autre document où le général Siber expose ses

3 plaintes à propos de ce qui s'est passé à Maline le 23 juin 1993. C'est un

4 document qu'il adresse au commandant du 3e Corps, Hadzihasanovic, et à M.

5 Bakir Alispahic. Et Siber indique dans son document, il s'agit en fait d'un

6 document du général Delic, et vous avez le ministre de l'Intérieur, et dans

7 ce document, Siber les informe de problèmes de sécurité très graves dans

8 leur secteur. Cela a été adressé au commandant du 3e Corps, cela a été

9 indiqué en fait au chef de la police civile, en fait. Il indique qu'il y a

10 un nombre de plus en plus important des membres forces armées qui font

11 partie des auteurs des crimes graves, et c'est Alispahic qui envoie ce

12 document.

13 Le 24 juin, dans un document qui est adressé au commandement Suprême,

14 et au président de la présidence, pour son information, nous avons un

15 document qui indique que dans les volontaires de Mehurici, il y a 247

16 civils de nationalité croate qui ont été placés dans le gymnase de l'école,

17 ce qui incluait les femmes blessées et toutes les personnes qui s'étaient

18 retrouvées dans le gymnase à Mehurici : "Ils sont placés sous la protection

19 de la police militaire de la 306e Brigade, mais ils sont menacés de danger

20 de mort par ce qu'on appelle 'la Brigade de la mort', composée

21 essentiellement de Moudjahiddines et d'étrangers cantonnés dans le

22 secteur."

23 Le 25 juin, maintenant, un autre document qui montre une fois de plus

24 que le général Siber fait référence à un document préalable qu'il avait

25 envoyé, et il prend la liberté d'insister une fois de plus auprès du

26 président de la présidence, Alija Izetbegovic, ainsi qu'auprès de Rasim

27 Delic, commandant suprême, il insiste pour qu'ils viennent à Zenica, pour

28 qu'ils viennent régler les problèmes provoqués par les étrangers.

Page 275

1 Le document PT1328, qui fait également état de ce qui suit : "Le 8

2 juin 1993, 35 Croates ont été exécutés dans le village de Bikosi. Quatre

3 témoins ont été blessés, mais ont survécu. Il y a des changements de

4 personnel qui sont absolument essentiels au niveau du commandement du 3e

5 Corps." Il s'agit en fait d'une mise en garde pour le général Delic qui, à

6 partir du 25 juin, a été prévenu du fait qu'il y a eu 35 personnes qui ont

7 été assassinées.

8 Puis il y a un ou deux autres documents qui portent sur cette question. Une

9 semaine plus tard, le 3 juillet, une fois de plus envoyé au commandant

10 suprême des forces armées : "Répondez à ma lettre du 3 juillet. Je vous

11 demande et j'insiste pour que vous, le président de la Bosnie-Herzégovine,

12 le ministre de la Bosnie-Herzégovine de l'Intérieur, venez dans cette ville

13 avant qu'il ne soit trop tard. Je n'ai pas le pouvoir ou la compétence pour

14 procéder à des changements importants sans vous." Signé général Siber.

15 Et ce n'est que le 17 octobre 1993, après que le président Izetbegovic a

16 reçu une lettre de Tadeusz Mazowiecki, qu'il commence à réagir. Et le 13

17 octobre, Rasim Delic donne l'ordre au commandement du 3e Corps d'étudier ou

18 de prendre en considération les allégations eu égard au massacre de Croates

19 de Bosnie à Maline, et de prendre des mesures, et il demande des

20 informations telles que le nom des unités qui ont participé; il demande si

21 le massacre s'est passé; s'il y a eu massacre, quelles sont les mesures qui

22 ont été prises à l'encontre des auteurs du massacre.

23 Il obtient un rapport, d'ailleurs plusieurs jours après, de la part de M.

24 Asim Delalic, qui était l'officier chargé de la sécurité de la 306e

25 Brigade; et dans ce document Asim Delalic indique, je cite : "Toutes ces

26 personnes ont été tuées pendant des activités de combat." C'est une

27 information qui est ensuite relayée, nonobstant le fait que son commandant

28 adjoint lui avait parlé de ces massacres, cela est relayé au ministre des

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1 Affaires étrangères, pour qu'ils puissent réagir à la lettre du rapporteur

2 spécial international, et ils nous expliquent qu'il s'agit de victimes de

3 combat.

4 "Mais le massacre qui a été attribué à l'ABiH n'a pas eu lieu à la suite

5 d'un conflit armé qui a été provoqué par des extrémistes croates, des

6 extrémistes des forces du HVO, 25 personnes ont été tuées notamment des

7 villageois de Maline."

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je me permets de vous interrompre. Il

9 y est maintenant quasiment 17 heures 30, mais je ne sais pas pendant

10 combien de temps nous pouvons poursuivre avant d'avoir une pause.

11 Je souhaiterais que M. le Greffier d'audience puisse nous transmettre

12 l'information à ce sujet.

13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On me dit que les interprètes

15 souhaiteraient avoir une pause.

16 M. MUNDIS : [interprétation] Nous écoutons toujours les interprètes,

17 Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

19 A quelle heure revenons-nous pour l'audience ? A 18 heures ?

20 Très bien, nous reviendrons à 18 heures.

21 --- L'audience est suspendue à 17 heures 28.

22 --- L'audience est reprise à 18 heures 00.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, la Chambre de

24 première instance vous présente des excuses pour ne pas vous avoir demandé

25 si le moment vous convenait pour la suspension de l'audience.

26 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Donc, passons

27 maintenant au point suivant concernant l'incident, c'est-à-dire le massacre

28 à Bikosi, la question de savoir si les auteurs de ce crime n'ont jamais été

Page 277

1 punis, en fait.

2 Le document PT9918 [comme interprété], c'est une lettre qui a été

3 reçue par le bureau du Procureur et qui émane du bureau du Procureur de

4 Travnik, datée du 16 avril 2002, répondant à certaines questions que notre

5 bureau avait faites concernant cet événement qui a fait l'objet d'une

6 enquête et de poursuite. D'après ce document, ils rendent compte du fait

7 que le tribunal militaire de District et le bureau du procureur militaire

8 de district à Travnik et le tribunal militaire de Travnik et le bureau du

9 Procureur à Vitez fonctionnaient au cours du mois de mars 1993 et mars

10 1994, et d'après les renseignements disponibles à ce bureau et les archives

11 que ce bureau aurait pu avoir accès de façon à aider le bureau du

12 Procureur, il n'y avait aucune documentation ayant trait aux crimes de

13 guerre qui auraient été commis par des membres de l'ABiH autre que quelques

14 crimes ou des vies en question qui n'avaient pas trait à l'incident de

15 Bikosi. Nous entendrons des témoins s'exprimer de façon abondante sur le

16 fait que ces auteurs n'ont pas été punis.

17 De même, nous avons envoyé à la demande du tribunal cantonal de

18 Zenica et des municipalités voisines de Zenica et Travnik, et à cause du

19 fait que ce lieu est très proche de la municipalité de Zenica, nous avons

20 en fait demandé aux deux municipalités dans le cas où l'affaire aurait pu

21 être déférée de façon inadéquate devant un tribunal à ce moment-là, contre

22 -- et encore à nouveau auprès du Tribunal militaire du district de Zenica

23 ou du tribunal cantonal, il y avait trois procès pendant la période, et pas

24 une seule n'a été jugé, par un seul soldat de l'ABiH n'a été poursuivi pour

25 crimes de guerre pendant la période pertinente à Zenica, à ce moment-là,

26 devant le tribunal militaire du district de Zenica.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que l'on dit qui avait

28 participé à ces trois procès pour crimes de guerre ?

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1 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, c'est bien dit, et nous pourrons vous

2 présenter le document. Cette lettre contient tous les renseignements.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

4 M. MUNDIS : [interprétation] Enfin, à nouveau en 2006, nous avons fait des

5 recherches et des enquêtes supplémentaires auprès du tribunal cantonal de

6 Zenica, il s'agit du document PT2946. En réponse à notre demande, ils nous

7 ont écrit pour indiquer en ce qui concernait l'existence ou non d'autres

8 dossiers ou documents, je cite : "Veuillez, vous êtes avisés du fait

9 qu'aucun procès n'a eu lieu."

10 En fait, ils disent : "Aucun compte rendu, aucun rapport n'a été

11 reçu, aucun procès n'a eu lieu et aucun acte d'accusation n'a été présenté

12 pour les 25 civils dans la région et autour de la région des villages de

13 Maline et Bikosi."

14 Encore, des preuves abondantes seront obtenues des témoins en ce qui

15 concerne le fait que les auteurs de ces crimes à Maline n'ont pas été

16 punis.

17 Je passe maintenant en 1994. Il n'y a pas de crimes allégués dans cet acte

18 d'accusation concernant 1994. Toutefois, nous obtiendrons des dépositions

19 qui montreront que tout au long de cette période les Moudjahiddines, là

20 encore, ont participé à des activités criminelles et que l'accusé a été

21 avisé de cela. Ces dépositions, selon nous, démontrent, font partie de la

22 démonstration du fait qu'il était au courant du fait que les membres du

23 Détachement des Moudjahiddines avaient tendance à commettre des crimes, et

24 par conséquent, sont pertinents pour cet objectif limité de prouver qu'il

25 avait connaissance et qu'il était avisé de cela.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que ces éléments de preuve

27 seront très détaillés ?

28 M. MUNDIS : [interprétation] Non, ce ne sera pas très détaillé, Monsieur le

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1 Président, Messieurs les Juges. Il s'agit essentiellement d'éléments de

2 preuve documentaires. Mais, bien entendu, il se peut que nous ayons besoin

3 de demander à un ou deux témoins d'expliquer ces documents et des mesures

4 qui ont été prises plus particulièrement à l'égard de ce que je décrirai

5 dans un moment, une opération que l'on a appelé l'opération Vranduk, mais

6 nous ne nous attendons pas à demander une déposition sur ce sujet.

7 Simplement, il y aura quelques éléments de preuve pour démontrer que,

8 nonobstant le fait qu'il n'y avait pas eu de crime commis au cours de cette

9 période, les membres de cette unité ont continué à commettre des crimes, et

10 l'accusé était au courant de ces crimes, ce qui, selon nous, désigne la

11 tendance de cette unité à commettre des crimes et qu'il en avait

12 connaissance.

13 En 1994, il y a eu le meurtre de Paul Goodale était [inaudible] Nous

14 verrons dans le document PT1609 [comme interprété] que le 29 janvier 2004

15 un plan d'opération a été mis en application de façon déterminée -- les

16 circonstances dans lesquelles M. Goodale avait été tué. Les employés du

17 HCR, Simon King, David Kurt, et Paul Goodale avaient été enlevés le 27

18 janvier 1994 par des personnes non identifiées portant des barbes et ayant

19 le teint basané, d'après ce document.

20 Plus tard, vers 21 heures 30, Paul Goodale a été assassiné. Ce document dit

21 :

22 "Compte tenu de l'appréciation de la situation de sécurité, les

23 mesures opérationnelles suivantes seront mises en application : Faire une

24 appréciation de la personne dont on assure la sécurité, en ce qui

25 concernait les membres de l'Unité El Moudjahedin et les personnes connexes,

26 et transmette ceci au secteur sécurité du ministère de la Défense."

27 Le document continue en indiquant que sur la base des renseignements

28 disponibles à ce moment-là, il était vraisemblable que des membres de

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1 l'Unité El Moudjahedin étaient impliqués. De telles personnes devaient être

2 auditionnées et ensuite averties à l'effet que vraisemblablement il y

3 aurait une réaction non positive au nom de l'Unité El Moudjahedin par

4 rapport à une enquête sur ce point.

5 Le document PT1783, du mois d'août 1994, et là, encore un document qui a

6 trait au Détachement El Moudjahed. Dans ce document on indique :

7 "Avec la formation des unités auxquelles participaient des étrangers,

8 il y a eu une très grande affluence et une arrivée de ressortissants

9 étrangers de pays d'Afrique et d'Asie."

10 Je voudrais également avertir les membres de la Chambre que dans un certain

11 nombre de ces documents concernant l'ABiH, il y a des références faites à

12 l'Asie. La plupart du temps, il s'agit de personnes qui sont de pays

13 d'Afrique ou d'Asie. Parfois, nous verrons qu'il y aura l'abréviation A/A

14 pour les personnes des pays de l'A/A. Ceci veut dire, selon nous, la même

15 chose que combattants moudjahiddines et les personnes qui venaient

16 d'Afrique ou du Moyen-Orient, si vous voulez.

17 Il y a eu l'arrivée de nombreux ressortissants étrangers de pays d'Afrique

18 et d'Asie, et les voies par lesquelles ils sont venus à l'ABiH dans la

19 République de Bosnie-Herzégovine étaient essentiellement par la République

20 de Croatie. La destination finale était la Bosnie centrale où, pour

21 commencer, ils ont rejoint les unités existantes de l'ABiH. Après une

22 certaine période, plusieurs unités ont été formées dont les membres étaient

23 essentiellement des étrangers d'origine à afro-asiatique ainsi que des

24 Musulmans de Bosnie. Il y a une liste des problèmes qu'ont rencontrés les

25 gens du cru, ce qui a causé des provocations et il y avait un --

26 Ce document poursuit :

27 "L'un des incidents les plus graves s'est passé avec cette unité en

28 janvier 1994 lorsque Paul Goodale a été tué. Le suspect principal Abdul

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1 Hadi el-Katani [phon] a été enlevé au cours de son transfert à Sarajevo."

2 Puis le rapport se poursuit : "Divers auteurs qui étaient membres de ce

3 détachement opèrent journellement." C'est juste un exemple de leur

4 comportement scandaleux par rapport aux lois de cet Etat. Il poursuit que

5 ceci a été signé par Sakib Mahmuljin [inaudible] au mois d'août 1994.

6 A la suite de cela, et à la suite de ces crimes continus au cours de

7 la période de 1994, "Vranduk" a été entrepris. C'est le moment où ils

8 allaient placer le Détachement El Moudjahed sous surveillance pour un

9 certain nombre de raisons dont nous parlerons dans un instant. Mais au

10 début de 1994, au plus tard, la préparation du processus Vranduk était en

11 cours, ce qui a conduit à cette opération Vranduk qui a été ordonnée et

12 appliquée en 1995.

13 Le document PT2069 a trait à ceci. Nous voyons le sujet : "Opération

14 Vranduk" concernant le Détachement El Moudjahed, 3e Corps et leurs

15 contacts.

16 Là encore, je serai très franc avec la Chambre de première instance.

17 Il y a un certain nombre de raisons pour lesquelles l'opération Vranduk a

18 été conçue et exécutée. La criminalité du Détachement El Moudjahed n'était

19 nullement l'unique motif pour placer cette unité sous surveillance. Nous

20 verrons cela dans les documents. Et en même temps, l'un des éléments pour

21 lesquels l'opération Vranduk a été mise en place.

22 Le document poursuit : "Le Détachement El Moudjahed par sa formation

23 comprend un certain nombre de personnes de nationalités afro-asiatiques

24 dont le comportement est très subjectif du point de vue sécurité."

25 On poursuit : "Indépendamment de ce qui a été dit précédemment et du fait

26 qu'il y a un certain nombre d'activités et d'actions illégales qui sont

27 commises par certains membres du détachement, il y a également un point

28 important qui est le fait d'essayer d'échapper à la participation des

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1 activités de combat. Le général de brigade Jusef Jusarovic [phon], qui

2 était à la tête de l'administration de sécurité indique, avec le but de

3 surveiller, documenter, intercepter les activités de renseignement et

4 d'amener quelque lumière sur toutes les activités des membres de ce

5 détachement, il suggère la mise en place d'opération concernant le

6 Détachement El Moudjahed."

7 Au bas de ce document, l'accusé Rasim Delic approuve le commencement

8 de l'opération Vranduk.

9 Entre autres raisons, comme je l'ai indiqué, en plus des crimes, il y

10 avait certaines indications que des membres du Détachement El Moudjahed

11 rendaient compte de renseignements à des organes de renseignement à

12 l'extérieur des États ou rendaient compte de ce qui se passaient en Bosnie-

13 Herzégovine à des Etats à l'extérieur. C'est la raison pour laquelle

14 l'administration de la sécurité s'est beaucoup occupée de cette opération

15 Vranduk également. Donc, nous affirmons qu'il y avait deux raisons : les

16 activités de renseignement extérieures du Détachement El Moudjahed et cette

17 criminalité alléguée.

18 Indépendamment des motifs réels pour la création de l'opération Vranduk,

19 comme nous le verrons, le fait d'exercer une surveillance sur le

20 Détachement El Moudjahed en 1995, l'accusé était informé de façon régulière

21 des activités de cette unité, y compris les activités criminelles

22 régulières de cette unité, et nous présenterons des éléments de preuve en

23 ce sens au cours de ce procès.

24 Je passe à un autre document. Il s'agit d'un rapport du 15 juin 1995.

25 Rapport contenant des renseignements concernant El Mujahedin et le

26 renseignement. Il est rendu compte d'emblée que des membres de l'Unité El

27 Moudjahedin continuait de faire des reconnaissances : "Au cours des dix

28 jours en question, quelques membres de l'unité ont détruit plus casemates

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1 et ont liquidé des dizaines de Chetniks et ont créé une panique et des

2 craintes. A la suite du meurtre d'un certain nombre de Chetniks, deux ont

3 été tués et leurs têtes ont été promenées dans les villages jusqu'à la

4 rivière Krivija [phon] en les montrant aux gens du cru et aux enfants des

5 écoles.

6 Sur le front, des soldats recevaient des vivres et des fruits de

7 l'Unité El Moudjahedin ainsi que des munitions et d'autres denrées

8 nécessaires, et ils disaient qu'il ne voulait pas que cette unité quitte

9 leur zone -- les autres unités de l'ABiH ne souhaitaient pas que l'Unité El

10 Moudjahedin puisse se déplacer. "Nous allons continuer à suivre la conduite

11 de l'Unité El Moudjahedin et de ses membres par des renseignements sur le

12 terrain et nous vous rendrons compte.

13 Vous verrez, au cours de ce procès, qu'un certain nombre de rapports

14 de ce genre concernant les activités du Détachement El Moudjahed sont

15 disponibles.

16 Revenons au camp de Kamenica et centrons-nous sur un certain nombre

17 de crimes qui ont été commis en 1995.

18 En avril 1995, comme indiqué dans le document PT2016, le commandement

19 de la 35e Division. Je voudrais encore expliquer brièvement à la Chambre de

20 première instance ce que l'on entend ici par rapport aux événements

21 concernant les crimes de 1993 et les éléments concernant les crimes en

22 1995.

23 Je vous ai dit plus tôt cet après-midi qu'en 1993, en dessous du

24 niveau du corps d'armée, il y avait ce que l'on appelait des groupes

25 opérationnels. En 1995, ce concept de groupes opérationnels a été remplacé

26 par un concept plus occidental de "divisions" selon la terminologie de

27 l'OTAN. Donc, des divisions ont été mises en œuvre; en 1995, en dessous du

28 niveau du corps d'armée, nous avons des divisions qui étaient composées

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1 d'un certain nombre de bataillons plutôt que de groupes d'opération.

2 Nous avons ici un document du commandement de la 35e Division au 3e

3 Corps, qui a été également adressé au Détachement El Moudjahed. Dans ce

4 document d'avril 1995, nous voyons aux paragraphes 5, 6 et 7, que la 35e

5 Division indique qu'il y aura une zone de déploiement pour le Détachement

6 El Moudjahed qui devra être créé -- préparé au kilomètre 12. Là encore,

7 c'est l'endroit où le camp de Kamenica a été construit.

8 Ceci a trait au douzième kilomètre au sud de Zavidovici sur la grand-

9 route. On en parle parfois en disant qu'il est à 12 kilomètres, parfois on

10 parle du kilomètre 13. Comme nous l'avons expliqué dans l'acte

11 d'accusation, ainsi que dans notre mémoire préalable au procès, il s'agit

12 de la même chose. Que nous parlions du camp à 12 kilomètres, du camp à 13

13 kilomètres, ou du camp de Kamenica, tout ça, c'est la même chose. Et dans

14 ce document, nous voyons que cet endroit, la 35e Division du 3e Corps

15 d'armée est en train de préparer cet endroit pour que le Détachement El

16 Moudjahed puisse l'utiliser et s'y déployer.

17 Maintenant, qu'y avait-il à cet endroit ? Cet endroit, c'est là que

18 le camp a été construit. Il y avait environ deux maisons qui ont été

19 abandonnées. Il y avait un bâtiment de couleur rouge, et un autre bâtiment

20 qui n'avait pas de toit, et il y a un certain nombre de tentes qui ont été

21 montées. Comme nous l'avons vu dans une des photos déjà présentées, ceci

22 comprenait une tente qui était utilisée pour la prière. Il y avait aussi un

23 secteur dont de nombreux témoins ont parlé comme étant le terrain de

24 football. On ne sait pas clairement si en fait c'était marqué comme un

25 terrain de football. C'était tout simplement une grande étendue herbeuse où

26 on jouait souvent au football, et il y aura des références qui seront

27 faites à cela, vous entendrez des témoins se référer à cela comme étant le

28 terrain de football. Tout au long de son existence, ce camp a été géré par

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1 le Détachement El Moudjahed du 3e Corps de l'ABiH.

2 Passons à nouveau à 1995. En 1993, les lieux du crime correspondent à

3 un conflit armé ou à un combat entre l'ABiH et le HVO, c'est-à-dire les

4 Croates de Bosnie. La situation en 1995 concerne des combats entre l'ABiH

5 et la VRS ou l'armée serbe et l'armée de la Republika Srpska. Ce que nous

6 avons en 1993, ce sont des victimes croates. Ce que nous avons en 1995, ce

7 sont des victimes serbes, et le conflit en 1995, c'est le conflit entre

8 l'ABiH et la VRS.

9 Maintenant, entre le mois d'avril et le mois de novembre 1995,

10 l'ABiH, 3e Corps, 35e Division, qui à ce stade comprenait le Détachement El

11 Moudjahed, a conduit quatre opérations dont le but essentiel était de

12 libérer le territoire dans la poche de la région de Vozuca. En 1995, nous

13 avons l'opération Behar 95, et en juin et juillet, Proljece 95, Proljece

14 voulant dire le printemps; et [inaudible] une opération qui est appelée F-

15 95. Il y a là quatre opérations au cours de cette période qui ont trait à

16 la libération de ce territoire de l'armée des Serbes de Bosnie.

17 L'opération Sabur 95 n'a pas été couronnée de succès comme l'aurait

18 espéré le grand état-major. C'est la raison pour laquelle l'opération

19 Proljece a été mise en place. L'opération principale a été mise sur place

20 près de cette zone, et le Détachement El Moudjahed a participé à cette

21 opération.

22 Au cours de ce procès, des éléments de preuve seront présentés

23 concernant la planification de cette opération et la façon dont elle a

24 exécuté tout simplement pour que la Chambre de première instance puisse

25 bien comprendre quels sont les tenants et les aboutissants, et montrer que

26 le Détachement El Moudjahed a participé de façon active à la fois à

27 Proljece 95 et [inaudible] 95. Nous ne demanderons pas de déposition très

28 développée à ce sujet. Il ne s'agit pas d'une attaque illicite ou

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1 d'hostilités, mais il est important de comprendre le cadre général de ces

2 opérations militaires pour montrer encore une fois que l'accusé avait

3 connaissance de cela, qu'il était conscient du fait que le Détachement El

4 Moudjahed participait à ces opérations de combat, et ceci concerne

5 également le fait que des prisonniers étaient faits au cours de ces

6 opérations de combat.

7 Là encore, les cartes montrant les opérations de Proljece 95 signées

8 par Favil Hasanovic, qui était commandant de la 35e Division. Les lignes

9 proposées, vous verrez qu'il y a une indication du lieu où le Détachement

10 El Moudjahed devait être engagé pour cette opération.

11 Le document PT2075, dès 1995, c'est un plan d'attaque qui était

12 proposé ou présenté. Ce document, signé Abu Maali, du Détachement El

13 Moudjahed, indique : "Nous avons planifié une attaque contre le secteur

14 Podujevo sur trois axes." --

15 PT2130 présente une analyse de l'attaque et de la manière dont elle

16 est sensée se produire. Il y a des rapports de combats réguliers, y compris

17 le 6 juillet 1995, l'opération est alors en cours. C'est un rapport qui est

18 adressé à l'état-major principal de l'armée de la République de Bosnie-

19 Herzégovine. Dans ce rapport, il est dit que le El Moudjahed est allé au

20 commandement de la 35e Division pour coordonner les tâches en vue des

21 activités de combat imminentes. Là encore, cela signifie que l'accusé

22 savait que le Détachement El Moudjahed allait participer à cette opération.

23 Enfin, le 16 juillet 1995, s'agissant de l'opération Proljece, nous

24 voyons ici un ordre où il est question de mener à bien des activités de

25 combat actives. Cet ordre est adressé à un certain nombre de corps

26 d'unités, y compris le 3e Corps : "Menez à bien immédiatement des activités

27 de combat le long du front tout entier et à des points choisis."

28 Le 18 juillet, le lendemain, un rapport a été produit sur les progrès

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1 réalisés dans le cadre des opérations et adressé au poste de commandement

2 de l'état-major principal à Kakanj. Il y est dit que, conformément aux

3 ordres donnés, les combats étaient en cours et que les membres de la 35e

4 Division avaient coordonné l'action avec le Détachement El Moudjahed, que

5 les préparatifs nécessaires avaient été menés à bien et que : "Nous nous

6 attendons à ce que l'attaque démarre dans peu de temps. Le commandement du

7 détachement fixera l'heure en question, puisque El Moudjahedin est la

8 principale unité chargée de la tâche imminente."

9 S'agissant maintenant de l'ensemble des éléments constituant les crimes en

10 l'espèce et pour la période de juillet 1995. Aux premières heures du 21

11 juillet 1995, le Détachement El Moudjahed du 3e Corps a lancé une attaque à

12 Krcevine. Des soldats de la VRS ont été capturés et emmenés dans un village

13 qui se situe à proximité, le village de Livade.

14 Au cours de la soirée du 21 juillet 1995, on a entendu des membres de El

15 Moudjahed crier "Allah-u-Akbar" et un soldat est entré dans la salle de

16 détention et portait à la main deux têtes d'un certain Momir --

17 Les prisonniers de la VRS qui ont été arrêtés ont été soumis à des passages

18 à tabac quotidiens à Livade avant d'avoir été emmenés au camp de Kamenica,

19 le 23 juillet 1995.

20 Ce soir-là, à leur arrivée, les prisonniers ont été aveuglés et emmenés au

21 terrain de football où ils ont été frappés ou maltraités.

22 Gojko Vujicic, le matin du 24 juillet 1995, a hurlé de douleur. Un soldat

23 est venu et l'a tué d'une balle dans la tempe droite. Le soldat a ensuite

24 tiré un sabre de la tente de prière et a coupé la tête de Vujicic. Certains

25 des prisonniers de la VRS ont ensuite été forcés à embrasser la tête en

26 question, qui avait été pendue sur un mur dans la cellule où ils étaient

27 emprisonnés.

28 Par la suite, les passages à tabac se sont poursuivis, notamment avec des

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1 tuyaux en caoutchouc. Un prisonnier a été menacé et blessé par un soldat

2 arabe avec un sabre. Les prisonniers ont été menés à l'extérieur et des

3 tuyaux à haute pression, des tuyaux à air sous haute pression ont été liés

4 autour de leurs jambes pendant des heures ce qui a provoqué des douleurs

5 très graves.

6 Dans l'après-midi du 23 ou 24 août 1995, les prisonniers ont été

7 amenés au terrain de football et là encore, ils ont été frappés violemment

8 et ils ont été soumis à des chocs électriques à l'aide de batteries.

9 Le 28 juillet 1995, un rapport sur l'action du Détachement El Moudjahed a

10 été envoyé à l'état-major général de l'armée, administration et service de

11 sécurité. Dans ce rapport, on y lit qu'une source fiable avait indiqué que

12 le Détachement El Moudjahed avait eu certaines activités et, toujours dans

13 ce document, on nous parle de 10 à 15 captifs. Et on nous parle d'un autre

14 groupe de Chetniks, ensuite on nous dit que les activités des membres de El

15 Moudjahed continueraient à faire l'objet d'un suivi et l'on nous dit

16 également que la source est parfaitement fiable.

17 Nous dirons qu'au cours de la période au cours de laquelle ces prisonniers

18 ont été maintenus au camp, l'accusé, Rasim Delic, est venu voir le poste de

19 commandement de la 35e Division à Zavidovici, à environ 12 kilomètres du

20 camp, avec Izetbegovic et Sakib Mahmuljin. On trouve cette source

21 d'information dans le document PT2356, c'est un rapport de combat quotidien

22 régulier qui indique que l'un des facteurs ayant eu une incidence positive

23 sur le moral des troupes était en fait la visite du président de la

24 présidence, du chef d'état-major principal, l'accusé, et du commandant du

25 3e Corps, le Sakib Mahmuljin en question.

26 Le 24 août 1995, ces prisonniers de guerre ont été transférés à KP Dom

27 Zenica qui est une prison civile. KP Dom, c'est un centre pénitentiaire, un

28 établissement pénitentiaire de Zenica où ces prisonniers ont été maintenus

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1 en captivité pendant quelques jours avant d'être échangés, puis libérés.

2 L'administration en sécurité de l'ABiH a été informée de tout ceci et ces

3 prisonniers ont été interrogés toujours alors même qu'ils se trouvaient à

4 KP Dom. Ceci va dans le sens de notre argument selon lequel ces prisonniers

5 ont été briefés par rapport aux agissements des personnes qui ont commis

6 des crimes dans le camp au cours de cette période.

7 Le 30 août 1995, dans une note d'information adressée au chef du

8 Département chargé du service de la sécurité militaire du camp du 3e Corps,

9 on trouve un nouveau rapport sur des activités de renseignements concernant

10 des personnes d'origine africaines et asiatiques. Et nous avons d'autres

11 informations sur les efforts qui sont accomplis dans ce sens. Et ce

12 document est important parce qu'il indique que l'organe de sécurité de la

13 35e Division avait pris note de tous ces incidents. Je ne parle pas

14 seulement du camp mais d'autres activités ici, c'est pourquoi ce document

15 est important.

16 Mais ils n'ont pas pris de mesures énergiques puisqu'ils ne

17 souhaitaient troubler les rapports avec cette unité. Donc, le Détachement

18 El Moudjahed pour veiller à ce que les actions de combat soient menées à

19 bien et couronnées de succès. Donc là pas de mesure n'a été prise

20 puisqu'ils ne voulaient pas troubler les activités de combat auxquelles

21 participait le Détachement El Moudjahed.

22 Passons maintenant à l'opération Farz ou F-95.

23 Contrairement à ce que nous avons dit jusqu'à présent, l'opération

24 Farz -- enfin, cette opération en réalité suivait une ligne de faille en

25 quelque sorte entre deux corps de l'ABiH, l'opération Farz -- alors, nous

26 avons d'un côté le 2e Corps qui arrive du nord et du nord-est, et nous

27 avons le 3e Corps plutôt vers le sud-ouest sur cette ligne de front. Le 2e

28 Corps avait nommé cette opération conjointe "Uragon" [phon]. Alors vous

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1 verrez dans certains documents le terme de Uragon. En fait, Uragon et Farz

2 étaient des actions complémentaires qui avaient pour objet d'écraser au

3 milieu de ces deux corps les Serbes qui se trouvaient dans cette poche.

4 Donc, vous verrez dans des documents une référence à Uragon. En fait, il

5 s'agit de l'action, si vous voulez, du pendant du 2e Corps par rapport à

6 l'opération Farz du 3e Corps.

7 Cette opération a eu lieu en septembre, octobre 1995. Là encore, dès

8 la fin du mois d'août, nous commençons à avoir le processus de

9 planification mis en œuvre pour cette opération. Nous voyons un ordre de

10 l'accusé adressé à ses commandants des 2e et 3e Corps d'armée qui les invite

11 à mener à bien tous les préparatifs nécessaires et à produire tous les

12 documents pour la libération de la poche de Vozuca. Là encore, ce document

13 est signé par l'accusé, ce qui nous amène à l'opération Farz.

14 La carte que vous voyez est en fait la carte de planification de

15 l'opération Farz. Vous verrez un agrandissement de cette carte en temps

16 voulu et vous verrez que cette opération était censée durer du 10 septembre

17 au 10 octobre 1995.

18 Le 28 août 1995, dans le cadre des préparatifs pour cette opération, on

19 voit que le commandement des 3e, 4e et 5e Bataillon de la 329e Brigade

20 doivent établir les conditions nécessaires pour l'entraînement de leurs

21 soldats et l'organisation dans l'organisation du Détachement El Moudjahed.

22 Ce qui veut dire que le Détachement El Moudjahed est maintenant chargé de

23 former les hommes de trois bataillons de la 329e Brigade de Montagne en

24 préparation de ces attaques.

25 Le journal du 3e Corps, on voit un "F" à partir du 26 août, nous pensons

26 que le "F" fait référence à Farz. Et pour le 2 septembre 1995, et là

27 encore, ce sont des extraits de ce journal, on lit pour 20 heures la chose

28 suivante : "Les commandants des unités subordonnées ont informé le

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1 commandant du 3e Corps de 10 heures à 18 heures aujourd'hui, le commandant

2 de la 37e Division, responsable des municipalités de Tesanj, Teslic et

3 Doboj a fait l'inspection d'eux." Ensuite, il donne le nom de quelques

4 unités et il parle également du Détachement El Moudjahed.

5 Le 3 septembre, nous trouvons des ordres intitulés F-95 adressés au

6 commandant de la 328e Brigade de Montagne et de El Moudjahed afin que 55

7 membres de El Moudjahed de la compagnie d'Asim Camdzic soient resubordonnés

8 à une autre unité. Ce qui veut dire qu'ici il y a des niveaux de

9 participation très bien défini du 3e Corps et que le commandant du 3e Corps

10 de la 35e Division redéploie certains hommes, certains El Mujahedin dans le

11 cadre de différentes unités dans le cadre des préparatifs à ces opérations

12 de combat, ceci montre bien que cette unité faisait partie intégrante du 3e

13 Corps et particulièrement de la 35e Division de l'ABiH. Ce ne sont pas des

14 individus incontrôlables qui erraient sur le champ de bataille. Nous avons

15 des preuves, nous avons des ordres de resubordination, des demandes de

16 formation et d'entraînement qui sont tout à fait clairs.

17 De même, le document PT2513 en date du 3 septembre 1995, fait état de

18 fortifications, de renforcement de positions de combat compte tenu de la

19 nécessité établie et tel que l'a demandé le Détachement El Moudjahed afin

20 d'apporter un appui d'artillerie, il est demandé de : "Procéder à la

21 fortification," et cetera, et cetera. Donc, nous voyons ici que ces

22 fortifications sont réalisées à la demande du Détachement El Moudjahed.

23 Nous passons à la date du 7 septembre, complément à l'ordre d'attaque

24 adressé au 3e Bataillon, Détachement El Moudjahed et commandement. Ici,

25 nous avons un ordre qui invite le commandement du 3e Bataillon de manœuvre

26 à se joindre aux forces du Détachement El Moudjahed et à leur commandement

27 pour l'exécution de la tâche telle que présentée par le commandement du

28 Détachement El Moudjahed. Il y a là encore resubordination de certaines

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1 unités auprès du commandant du Détachement El Moudjahed.

2 Le document se poursuit et indique que le commandant du 3e Bataillon de

3 manœuvre se situera au poste de commandement avancé du Détachement El

4 Moudjahed et c'est qu'à partir de ce point-là, qu'ils procèderont

5 conjointement aux tâches qui leur seront confiées.

6 Je passe maintenant à un autre extrait du journal, PT2561, pour la période

7 du 9 septembre 1995, c'est-à-dire à la veille du lancement de l'opération

8 Farz : "20 heures 15, le commandant de la 35e Division a informé le

9 commandant du 3e Corps que tout se faisait conformément à ce qui avait été

10 prévu. Quarante-cinq minutes plus tard, le commandant du Détachement El

11 Moudjahed et des Détachements Aiman a une réunion avec le commandant du 3e

12 Corps d'armée au poste de commandement avancé du 3e Corps, poste 1."

13 Revenons à cette carte de l'opération Farz que je vous ai montrée tout à

14 l'heure. Là encore, nous parlons de la période du 10 septembre au 10

15 octobre. En haut à gauche de la carte : "Aval, commandant d'armée Rasim

16 Delic", ce qui veut dire que Rasim Delic a approuvé cette opération Farz.

17 Revenons maintenant donc à l'extrait du journal, PT2465, 26 août. C'est la

18 première date qui figure dans ce journal. A 6 heures 20, le 10 septembre

19 1995, donc le premier jour de l'opération Farz. Donc à 6 heures 20, le

20 Détachement El Moudjahed a informé le commandant du 3e Corps que la tâche

21 qui leur avait été confiée était presque achevée, à savoir que Paljenik

22 avait été nettoyé en moins de cinq minutes. "Suite à ce premier succès de

23 nos forces tout s'est fait à la vitesse de l'éclair. En moins d'une minute,

24 les bastions chetniks sont tombés les uns après les autres."

25 "A 10 heures, nos forces sont parvenues à expulser les Chetniks d'un

26 certain nombre de lieux où nos forces ont réussi à se rejoindre à l'entrée

27 juste du village de Stog."

28 Le journal dit ensuite : "Ces résultats exceptionnels et ces victoire

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1 militaires dans des points dominants dans le secteur général du village de

2 Vozuca ont été obtenus par les unités conjointes du 3e Corps, c'est-à-dire,

3 le Détachement El Moudjahed et les 1ère, 2e et 3e Brigade; des Unités de

4 Garrison des 329e et 328e Brigade.

5 Le lendemain le 11 septembre 1995, on trouve de nouvelles tâches, un

6 nouvel axe d'attaque dans la zone de responsabilité de la 35e Division,

7 nouvelle tâche, le Détachement El Moudjahed et le 2e Détachement attaquent

8 et prennent de nouveaux points.

9 Alors il y a quelque chose qui est assez intéressant. Au moment de

10 l'opération Farz, au moment où cette opération est lancée, l'accusé, Rasim

11 Delic, ne se trouve pas sur le terrain de la Bosnie-Herzégovine. Toutefois,

12 après son retour, il est interviewé par une journaliste à Sarajevo, et elle

13 lui pose les questions à propos de cette opération et du fait qu'il se

14 trouvait hors du pays au moment où cette opération a été lancée et menée à

15 bien. Voilà ce qu'il a eu à dire à ce sujet.

16 [Diffusion de la cassette vidéo]

17 L'INTEPRÈTE : [voix sur voix]

18 "La journaliste : Alors pendant que ces événements récents se déroulaient,

19 vous aviez une série de contacts internationaux importants en Iran ainsi

20 qu'en Malaisie, ce qui a provoqué des réactions différentes parmi le

21 public.

22 Rasim Delic : Des réactions différentes malheureusement. J'ai entendu ce

23 qui avait été rédigé à ce sujet pendant que je me trouvais en Malaisie et

24 l'armée se battait ici. D'aucuns doivent savoir que ces opérations ont été

25 planifiées depuis très longtemps, que personnellement j'ai tout vérifié sur

26 chacune des cartes, que ces opérations ont commencé le 9 septembre, à

27 savoir le jour après mon départ pour la Malaisie, mais qu'ils m'ont tenu

28 informé et que tout cela a été placé sous mon contrôle immédiat parce qu'en

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1 fait le système de commandement et de contrôle fonctionne même lorsque

2 quelqu'un n'est pas présent sur le site. Donc j'ai été en contact permanent

3 et j'ai toujours su ce qui se passait.

4 La journaliste : Vous nous dites qu'il y a eu un succès assez important qui

5 a été obtenu.

6 Rasim Delic : Il faut le dire. Depuis le début de la guerre la conférence à

7 Kuala Lumpur a été la conférence la plus importante qui s'est penchée sur

8 la situation militaire en Bosnie-Herzégovine et probablement dans toute

9 l'histoire du monde islamique. Il n'y a jamais eu autant de personnes

10 réunies qui étaient responsables de l'armée et de la défense. Ce qui

11 signifie qu'au cours des deux, trois premiers jours, les commandants

12 militaires des pays islamiques, les membres du Groupe de contact des pays

13 islamiques, les pays membres qui envoient des forces pour la FORPRONU en

14 Bosnie-Herzégovine ainsi que d'autres pays observateurs étaient présents. A

15 la suite, les ministres de la Défense sont venus à la conférence.

16 Alors que les personnes participaient à la conférence, il était tout

17 à fait illogique au vu de ces personnes que je m'absente pendant que les

18 commandants militaires d'autres pays étaient réunis pour discuter de la

19 guerre en Bosnie-Herzégovine. Donc en dépit de mon souhait de ne pas

20 quitter la Bosnie, cela m'a été impossible de ne pas le faire.

21 Je peux également dire que du fait de l'engagement de l'ensemble de la

22 délégation que j'ai dirigée pendant la première phase et grâce au ministre

23 Begovic qui est venu nous rejoindre par la suite, des progrès ont été

24 effectués pour ce qui est de l'ABiH et ce fut en fait la plus grosse

25 réussite pour l'armée au cours de la période à venir.

26 Il suffit que je dise que tout ceux qui étaient présents et qui nous

27 aident, qui nous ont déjà aidés vont continuer à nous aider davantage, que

28 ceux qui ont un dilemme ont vu ces dilemmes se disperser, et que beaucoup

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1 de personnes qui étaient présentes là-bas et qui étaient neutres se sont

2 finalement ralliées à notre camp.

3 C'était une occasion que je ne pouvais absolument pas me permettre de

4 rater. Après tout, je suis allé là-bas après avoir donné des ordres qui ont

5 été utiles à la fois pour l'armée et pour l'Etat de la Bosnie-Herzégovine

6 parce qu'il y a des documents extrêmement importants qui ont été adoptés.

7 Ce qui signifie, et je pense à la résolution ou à une solution apportée à

8 la situation générale. Je pense à un processus de paix et je pense à la

9 situation que nous avons sur le terrain en Bosnie-Herzégovine."

10 [Fin de la cassette vidéo]

11 M. MUNDIS : [interprétation] Nous indiquons que ce qu'a dit l'accusé

12 à cette journaliste, notamment au début de l'entretien est extrêmement

13 important dans ce contexte, car voici ce qu'il dit : "D'aucuns doivent

14 savoir que ces opérations avaient été prévues et planifiées depuis très

15 longtemps, et personnellement j'ai tout contrôlé sur les cartes, ces

16 opérations qui ont commencé le lendemain de mon départ pour la Malaisie, et

17 que cela a été placé sous mon contrôle et sous ma supervision parce que le

18 système de commandement et de contrôle continue à fonctionner même lorsque

19 quelqu'un n'est pas présent, parce que j'ai été en tout cas permanent et je

20 me suis assuré que tout cela continuait à fonctionner."

21 Alors quelles sont les retombées de l'opération Farz, ensuite nous

22 allons parler des faits incriminés en septembre 1995.

23 Le 11 septembre 1995, alors que l'accusé se trouve en Malaisie à

24 cette conférence, le journal de bord du 3e Corps fait état que le président

25 de la présidence, M. Alija Izetbegovic, va venir inspecter l'unité le

26 "lendemain", d'ailleurs pour le 12 le journal indique que le président

27 Alija Izetbegovic a bien effectué cette visite sur ces lieux.

28 Nous allons maintenant aborder les faits incriminés pour le mois de

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1 septembre 1995. Le 11 septembre 1995, la 2e Compagnie du 5e Bataillon de la

2 328e Brigade de Montagne de l'ABiH a capturé une soixante de personnes,

3 essentiellement des soldats de la VRS, ainsi que quelques civils, notamment

4 trois femmes qui étaient restées après la chute de Vozuca. Les soldats

5 ainsi que ces quelques femmes et des enfants se sont rendus dans différents

6 groupes, et ce, dans la partie supérieure de Kesten, près d'un ruisseau.

7 Ils se sont rendus à la 2e Compagnie du 5e Bataillon de la 328e Brigade de

8 Montagne. Un groupe de Serbes a été capturé dans les forêts pendant

9 l'après-midi du 11 septembre 1995 par les soldats de l'ABiH où il y avait

10 des membres du Détachement El Moudjahed. Sur la route de Kesten, Zivinko

11 Tadorovic et Milenko Stanic ont été tués par les soldats du Détachement El

12 Moudjahed, donc ils ne sont jamais arrivés au village. Les soldats du

13 Détachement El Moudjahed ont pris immédiatement quatre autres prisonniers

14 de guerre de la VRS qui n'ont jamais plus été revus depuis ou dont on a

15 perdu la trace depuis.

16 D'autres prisonniers, notamment les quelques civils et les femmes, ont

17 ensuite été conduits dans un centre à Kesten. Par la suite, les trois

18 femmes qui avaient été capturées ont été conduites vers un endroit inconnu.

19 Peu de temps après cela, d'autres membres du Détachement El Moudjahed sont

20 arrivés, et ont en fait pris la direction des opérations pour les

21 prisonniers de guerre de la VRS qui avaient été placés sous la garde du 5e

22 Bataillon de la 328e Brigade de Montagne.

23 Vous avez le document PT2596, un rapport de combat, il s'agit d'un

24 rapport de combat de la 328e Brigade de Montagne du 13 septembre 1995, et

25 il est indiqué dans ce rapport que le 11 septembre 1995, deux compagnies du

26 5e Bataillon et de la 328e Brigade de Montagne ont capturé 61 personnes

27 hostiles et trois femmes serbes. Les membres de l'Unité El Moudjahid se

28 sont occupés de toutes les personnes qui avaient été capturées, à

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1 l'exception de deux, et ces deux personnes ont été données à la police

2 militaire du Détachement El Moudjahed.

3 Le document PT2356 [comme interprété] fait référence à 61 personnes

4 hostiles et trois femmes. Le document PT2575 est une liste qui a été

5 établie à ce moment-là à propos de ces détenus, liste compilée par le 5e

6 Bataillon de la 328e Brigade de Montagne à Kesten. Ce document fait

7 référence à un total de 62 personnes.

8 Nous allons maintenant examiner le document PT2356 qui est une liste

9 des personnes détenues. Donc, si vous prenez en considération ce document,

10 vous verrez qu'il y a une numérotation jusqu'à 51, puis ensuite il y a

11 quelques remarques : "Quatre ont été pris par les Arabes immédiatement,

12 trois femmes, dont l'une a été libérée, deux ont été tuées sur la route de

13 Kesten, deux enfants ont été libérés." Ce qui nous donne un total de 62.

14 Et ces chiffres -- en fait, il y a un problème au niveau de ces chiffres,

15 parce que je vous dirais que les 51 personnes énumérées dans ce document se

16 trouvent dans un addendum à l'acte d'accusation. Il y a une personne qui ne

17 se trouve pas incluse sur cette liste, et nous ne savons pas quelle est la

18 raison de ce fait. Mais ce qui est évident, c'est que ces chiffres sont

19 assez proches de la réalité, et s'il y a une personne qui se trouve sur la

20 liste pour laquelle cela ne correspond pas à la réalité, cela n'est pas

21 véritablement un énorme problème, mais il y a quand même un léger décalage

22 dans les chiffres. Les 51 personnes dont les noms se trouvent énumérés dans

23 l'acte d'accusation ainsi qu'une personne pour lesquelles nous avons des

24 éléments de preuve qui suggèrent qu'ils faisaient partie de ce groupe, mais

25 pour une raison qui nous échappe, son nom ne se trouve pas inclus sur la

26 liste qui a été établie dans le centre de Kesten.

27 Nous revenons au 11 septembre 1995, donc ces personnes ont pris ces

28 prisonniers de guerre et les ont conduits au camp de Kamenica. Peu de temps

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1 après, les femmes, qui avaient été emmenées dans un autre lieu

2 intermédiaire, ont également été amenées dans ce camp, où elles ont été

3 détenues dans une remise en bois, comme cela a été décrit, qui se trouvait

4 dans le camp de Kamenica.

5 Pendant la période comprise entre le 11 septembre 1995 et le 17 septembre

6 1995, les femmes ont entendu des cris et des bruits de passages à tabac et

7 de tirs, pour ce qui était des prisonniers. Trois ou quatre fois, des

8 commandements militaires indiquant : "Préparez vos armes et tirez", ont été

9 entendus, et cela a été suivi par des salves de tirs automatiques, puis il

10 y a des éléments de preuve qui tendraient à indiquer que certaines victimes

11 ont été mutilées à l'aide d'une scie ou d'un autre outil permettant de

12 couper, pendant cette période de la mi-septembre.

13 Les trois femmes ont été détenues dans le camp de Kamenica pendant

14 plusieurs jours pendant lesquels elles ont subi des sévices. Le 13

15 septembre 1995, elles ont été transférées dans le bâtiment Vatrostalna,

16 dans le village de Brezik, près de Zenica, qui faisait office de QG pour le

17 Détachement El Moudjahed. Ces trois femmes ont été transférées par la

18 police militaire du 3e Corps de l'ABiH de ce bâtiment au KP Dom de Zenica,

19 où elles ont été détenues jusqu'au moment de leur libération.

20 J'aimerais maintenant revenir sur le camp de Kamenica et sur ces 52

21 personnes qui avaient été capturées, qu'il s'agisse de soldats de la VRS ou

22 non, et ces soldats ayant été faits prisonniers de guerre le 11 septembre.

23 Pendant cette période, en sus des sévices mentionnés il y a quelques

24 minutes, il y a un certain nombre de personnes qui ont essuyé des coups de

25 feu, d'autres ont été tuées. Certaines personnes ont même été décapitées.

26 Toutes ces personnes ont été assassinées dans le camp de Kamenica ou aux

27 alentours du camp de Kamenica.

28 Le 17 septembre 1995, il y avait moins d'une douzaine de ces soldats

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1 de la VRS qui avaient été capturés le 11 septembre qui étaient encore en

2 vie.

3 Le document PT2964 est un document qui sera présenté, il s'agit d'un

4 rapport d'exhumation qui a été établi en 2005, près de la berge de la

5 rivière près du camp de Kamenica, où plusieurs cadavres, les cadavres de

6 ces personnes qui avaient été capturées le 11 septembre et qui ensuite

7 avaient été emmenées au camp de Kamenica, ont été retrouvées.

8 Le 17 septembre 1995, un autre groupe d'une dizaine de soldats de la VRS

9 s'est rendu à l'ABiH à quelques kilomètres au nord-ouest de Vozuca, sur la

10 route principale reliant Vozuca à Zavidovici. Ce groupe a dans un premier

11 temps été conduit dans un bâtiment à Brezik, dans la municipalité de

12 Zavidovici, qui à l'époque était occupé par des soldats du Détachement El

13 Moudjahed. Après avoir été détenu brièvement à cet endroit, ce groupe de

14 soldats a été amené au camp de Kamenica.

15 Pendant tout le temps où ils ont été détenus dans ce camp, ces personnes

16 ont été interrogées, ont été rouées de coups avec des bâtons, avec des

17 tuyaux en plastique, et ont subi des sévices de la part des soldats du

18 Détachement El Moudjahed. Des chocs électriques leur ont été infligés, et

19 un soldat du Détachement El Moudjahed a menacé une des personnes de lui

20 couper l'oreille.

21 A ce moment-là, il y a ce groupe de dix soldats qui est arrivé le 17

22 septembre, et à ce moment-là, il y avait quelques survivants du groupe de

23 52 personnes; et le 18 septembre 1995, sept des survivants qui faisaient

24 partie au départ du groupe de 52 personnes ont été emmenés vers un champ,

25 où des tirs ont été entendus, et sept de ces hommes n'ont plus jamais été

26 retrouvés.

27 Entre le 20 et le 22 septembre 1995 - et nous pensons que cela s'est passé

28 quelques jours après l'arrivée du groupe qui est arrivé le 17 septembre -

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1 Nenad Jovic [comme interprété], un homme serbe de Bosnie, un homme âgé,

2 Serbe de Bosnie, qui était détenu avec le groupe qui était arrivé le 17

3 septembre, a été passé à tabac, déshabillé, et on lui a donné de l'eau

4 mélangée d'essence à boire. Il est décédé quelques jours après dans le

5 camp.

6 Le 29 septembre 1995, le groupe qui avait été capturé le 17 septembre a été

7 transféré par le 3e Corps de l'ABiH et par la police militaire du 3e Corps

8 du camp de Kamenica au KP Dom de Zenica. Donc, nous avons donc le groupe de

9 10 qui avaient été capturés le 17 qui est resté dans le camp jusqu'au 29

10 septembre, et à ce moment-là, ils sont transférés au KP Dom de Zenica. Au

11 moment où ils partent, le 29 septembre 1995, trois ou quatre de ce groupe

12 qui au départ était composé de 52 soldats et qui avaient été capturés le 11

13 septembre étaient encore en vie dans le camp de Kamenica. Ces trois ou

14 quatre prisonniers de guerre qui au départ faisaient partie de ce groupe de

15 52 personnes n'ont plus jamais été retrouvées, et on n'a plus jamais

16 retrouvé leurs traces.

17 Alors brièvement, et je suis conscient du temps qui passe, Monsieur le

18 Président, je ne serai pas en mesure de terminer aujourd'hui, mais je

19 souhaiterais que nous finissions aujourd'hui, ensuite j'aurai une demi-

20 heure encore.

21 Mais pour ce qui est des informations fournies à propos de ces crimes, nous

22 pensons que tous les éléments de preuve qui vont être présentés, depuis le

23 début, où il a assumé le commandement, nous pensons que Rasim Delic avait

24 été informé du fait que des membres du détachement El Moudjahed avaient une

25 tendance à commettre des crimes et que notamment ces crimes étaient commis

26 à l'encontre de non-Musulmans tels que, par exemple, à Maline, où il y a eu

27 des étrangers qui ont participé à cela. Je pense aux crimes en 1994, à

28 l'information qu'il avait reçue à propos de l'opération Vranduk, et en

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1 juillet 1995. L'accusé a été certainement informé que des membres de cette

2 unité, qui étaient particulièrement dangereux, et avait quand même une

3 certaine propension à commettre des crimes, et qu'en aucune circonstance

4 cette unité n'aurait dû se charger de prisonniers.

5 Alors, j'aimerais maintenant vous parler du camp de Kamenica ou de Kesten,

6 et de la période comprise entre juillet et septembre 1995.

7 Car des éléments de preuve seront présentés indiquant qu'aucun soldat de

8 l'ABiH n'a jamais été poursuivi pour ces crimes. Car il faut savoir que des

9 procédures ont été diligentées, des documents ont été envoyés, des requêtes

10 ont été présentées dans des tribunaux militaires, et les archives, en fait,

11 disposent de ces collections de documents.

12 Je souhaiterais que nous étudiions ensemble un autre document, un

13 dernier document, le document PT2943, qui est une lettre qui vient du

14 bureau du Procureur, et nous leur demandons de consulter les archives et de

15 chercher des informations suggérant que des personnes n'auraient été

16 poursuivies pour ces crimes. Nous voyons au paragraphe 2, que le Procureur

17 chef du tribunal de Zenica indique qu'il n'y a aucunes archives indiquant

18 qu'il y a eu des poursuites, qu'il y a eu des enquêtes diligentées. Il

19 s'agit de Maline, et nous en avons déjà parlé; deuxièmement, meurtre et

20 sévices de trois prisonniers de guerre dans le village de Livade; meurtre

21 et sévices imposés à 62 prisonniers de guerre, membres de l'armée de la

22 Republika Srpska, dans le secteur de Kesten. Ils font référence à la liste

23 de victimes qui leur a été fournie à propos de ces crimes.

24 Monsieur le Président, mous avançons que personne, personne n'a été traduit

25 en justice pour les crimes allégués dans l'acte d'accusation, et que le

26 fait que cela n'a pas été fait est de la responsabilité de l'accusé.

27 Comme je vous l'ai déjà dit, j'aurais besoin environ une demi-heure demain

28 avant de faire venir le premier témoin. Il y a un autre témoin qui a été

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1 prévu pour mercredi et qui pourra d'ailleurs commencer à témoigner dès

2 mercredi.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

4 Est-ce que vous en avez terminé pour aujourd'hui ?

5 M. MUNDIS : [interprétation] Pour aujourd'hui, oui, vu le temps, vu l'heure

6 plutôt. Mais j'aurais besoin d'une demi-heure demain avant que je n'appelle

7 à la barre le premier témoin.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Mundis.

9 Nous avons un peu dépassé le temps qui nous était imparti. Nous allons

10 lever l'audience jusqu'à 14 heures 15, et nous serons dans la salle

11 d'audience numéro II demain.

12 L'audience est levée.

13 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 10 juillet

14 2005, à 14 heures 15.

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