Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 6 novembre 2003

2 [Audience sentencielle]

3 [Audience publique]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 09.

6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bonjour à tous. Je souhaite

7 demander à Madame la Greffière, de citer l'affaire, s'il vous plaît.

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

9 Messieurs les Juges, il s'agit de l'affaire IT-94-2-S, l'Accusation contre

10 Dragan Nikolic.

11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.

12 Et la présentation des parties aujourd'hui, s'il vous plaît.

13 Mme SELLERS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mme Patricia

14 Sellers, M. Yapa nous rejoindra un peu plus tard dans la matinée. M. Smith

15 et Diane Boles, commis à ces audiences.

16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Et la Défense, s'il vous plaît.

17 M. MORRISON : [interprétation] Howard Morrison et Tanja Radosavljevic,

18 représentant l'accusé, Dragan Nikolic.

19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.

20 Puis-je demander à M. Nikolic lui-même, suivez-vous la procédure dans une

21 langue que vous comprenez ?

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.

24 Je vais demander à la Défense de poursuivre, le témoignage du Dr

25 Grosselfinger qui a été interrompu.

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1 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bonjour, Madame Grosselfinger.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

4 M. MORRISON : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain que

5 l'Accusation ait pu poser à Mme Grosselfinger toutes les questions qu'elle

6 souhaitait poser. Donc je souhaitais simplement m'en assurer.

7 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu

9 d'audience, bonjour Monsieur Yapa.

10 M. YAPA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames les

11 Juges, j'ai terminé les questions que j'avais à poser. Merci.

12 LE TÉMOIN: NANCY GROSSELFINGER [Reprise]

13 [Le témoin répond par l'interprète]

14 M. MORRISON : [interprétation] Je vous remercie.

15 Questions de la Défense, M. Morrison :

16 Q. [interprétation] Madame Grosselfinger, hier, je vous ai remis sur une

17 feuille de papier trois questions portant sur votre rapport. La première

18 question était la suivante : Avez-vous consulté des études empiriques pour

19 rédiger votre rapport ? Et si oui, pouvez-vous me dire lesquelles ?

20 R. Oui. De façon générale, j'ai essayé de me familiariser le plus possible

21 avec tout encore plus de documents qui portent sur le droit pénal, le lien

22 qui existe entre les auteurs et les victimes. Il s'agissait d'un des

23 domaines que j'ai étudié de façon très approfondie.

24 Une des études, que j'ai évoquée au cours de mes échanges avec les membres

25 du Tribunal, était une étude qui avait été rédigée par Eric Stover de

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1 l'université de California, à Berkeley, et ceci faisait partie d'un plus

2 grand projet. Mais il a rédigé une étude séparée sur les témoins au TPI.

3 C'était une étude empirique, qui a été publiée au mois de mai 2003 dont

4 j'ai pris connaissance au mois d'août et de septembre de cette même année.

5 Il s'agit là d'une étude empirique auquelle je fais référence dans mes

6 différentes conversations.

7 Q. Pouvez-vous nous dire, s'il vous plaît et il est toujours difficile de

8 dire de façon concise, quel est le thème de ces études ?

9 R. En général, le professeur Stover a beaucoup paralysé la

10 -- a beaucoup banalisé la situation des victimes elles-mêmes. A savoir

11 s'elles étaient à même de faire un témoignage lorsqu'elles se trouvaient --

12 où elles devaient faire un témoignage et également l'attitude a suivi sur

13 ces dépositions. Certaines personnes estimaient qu'à la suite de ces

14 dépositions, elles n'étaient pas toujours satisfaites. On devrait davantage

15 utiliser leurs connaissances des faits en situation et pour d'autres il

16 était important qu'elles participent davantage ou qu'elles arrivent à

17 prendre du recul davantage, qu'on puisse avoir l'histoire dans son

18 ensemble.

19 Q. Très bien.

20 R. En fait, c'est pour la plupart, c'étaient les traits les plus saillants

21 de cette étude.

22 Q. Si je comprends bien ce que vous dites, certains détenus estiment --

23 devraient davantage -- avoir davantage d'informations fournies par le

24 Tribunal. Est-ce que s'est posé de façon trop simpliste ? Je ne suis pas

25 tout à fait --

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1 R. Vous êtes bien certain qu'il s'agisse ici d'un échange avec les

2 détenus. Ils cherchaient en fait des moyens davantage de s'exprimer eux-

3 mêmes qui auraient été plus satisfaits par une réponse ou un commentaire

4 émanant du détenu ou que la personne aurait pu recueillir les connaissances

5 dont disposait le détenu.

6 Q. La deuxième question que je vous souhaite vous poser, je vous ai fait

7 ça par écrit. Qu'en est-il de la discussion avec Liam McDowal [phon] à la

8 page 8 de votre rapport ? Avez-vous pu consulter avec lui ou discuter avec

9 lui du contenu de cela ?

10 R. Si je me souviens bien, je me suis entretenu avec M. McDowal, jeudi ou

11 mercredi, je crois, dans la deuxième semaine de la préparation de ce

12 rapport, aux environs du 16, 17 octobre. J'ai obtenu ces coordonnées par

13 l'intermédiaire du Greffe.

14 Donc je pense que le Greffe a dû être prévenu de mon appel et le prévenir

15 de mon appel. C'est la première déclaration qu'il m'a faite, il m'a dit,

16 que je vais partir en vacances aujourd'hui vers la fin de la journée. J'ai

17 donc proposé de fixer un rendez-vous avec lui et de venir le voir

18 immédiatement au Tribunal. Il m'a dit, non, cela ne sera pas nécessaire.

19 Nous pourrions nous entretenir au téléphone et je crois que notre

20 conversation a duré au total 15 minutes environ. Et le contenu de cette

21 conversation, il s'agissait d'avoir un aperçu de différents programmes ou

22 projets existants dans la communauté où les crimes avaient été commis. Et

23 de façon à pouvoir élaborer quelque chose et satisfaire aux exigences du

24 Tribunal puisqu'il s'agissait ici de fournir de sa formation à une unité

25 des victimes qui avaient été victimes dans cette communauté en question.

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1 Nous n'avons pas parlé de la littérature et des documents existants.

2 Q. Je vous ai posé cette question simplement pour savoir si quelque chose

3 avait été consigné par écrit, ce qui aurait pu aider le Tribunal dans la

4 matière.

5 Je vais peut-être y revenir un peu plus tard et évoquer le concept proposé

6 par M. McDowal, à savoir la question des responsabilités.

7 La dernière question que j'ai posée par écrit est la suivante : Vous parlez

8 d'une consultation avec M. McFadden avec l'UNDC, à la page 9. Y avait-il

9 des documents qui existaient ou il y avait-il des notes internes ?

10 R. J'ai appelé M. McFadden à deux reprises. A ces deux reprises, j'ai

11 proposé de le rencontrer. La première fois, lorsque j'ai reçu l'ordre de

12 mener cette étude, je l'ai appelé quasiment instantanément pour lui dire

13 que je devais rencontrer l'accusé, et il n'était pas au courant. J'ai

14 demandé à m'entretenir avec lui, à propos de l'accusé en particulier. Et

15 comme le rapport le précise, il jugeait que ce n'était pas nécessaire.

16 Je me suis entretenu par la suite avec lui au moment des présentations ou

17 lorsqu'il s'agissait, en fait, de préparer le dossier médical pour y avoir

18 accès. En tout cas, j'ai proposé de lui parler. Il venait de recevoir une

19 ordonnance du Tribunal et il devait préparer un rapport. Et il a précisé

20 que tout serait consigné dans ce rapport.

21 Q. Très bien. Et bien, telles que les choses se sont déroulées, ce rapport

22 n'a pas encore -- n'est pas parvenu entre les mains de la Défense, mais

23 nous pouvons en parler un peu plus tard.

24 Et je dois dire que j'ai ici un compte rendu assez impressionnant, un

25 curriculum vitae qui semble indiquer qu'entre 1972 -- en 1967 et 1977,

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1 pendant dix années, qui semble être un parcours académique tout à fait

2 exceptionnel, vous avez -- vous étiez, pendant dix ans, en contact avec les

3 -- et vous avez été en contact directement avec les criminels. Et vous

4 aviez déjà terminé votre diplôme. Vous aviez déjà obtenu votre diplôme de

5 sociologie. Est-ce exact ?

6 R. Oui.

7 Q. Par conséquent, est-il exact de dire que vous avez l'habitude de ce

8 genre d'étude, et vous êtes -- donc vous aviez l'habitude d'être en contact

9 avec les criminels ?

10 R. Oui, c'est exact. J'avais de l'expérience déjà à ce moment-là.

11 Q. Bon, c'est peut-être une question d'ordre général un petit peu, mais

12 dix ans me semblent être un niveau d'expérience assez élevé. Est-ce que

13 vous, lorsque vous avez organisé cet entretien avec M. Nikolic, vous êtes-

14 vous appuyée sur cette expérience qui était la vôtre ?

15 R. Oui, en partie.

16 Q. Vous êtes ici en tant qu'expert. Est-ce que vous estimez, en vous-même,

17 que vous êtes arrivée au moment de votre parcours où vous êtes à même de

18 faire une évaluation correcte ? Que cette personne soit véritablement

19 ouverte et soit à même de dire la vérité ?

20 R. Ecoutez, je pense que je sens relativement bien les choses, et je crois

21 qu'on est -- je sais -- je ne pense pas que l'on puisse me duper.

22 Q. Quand vous dites que vous avez -- vous dites que vous avez une

23 impression assez bonne, est-ce le cas avec M. Nikolic ? Vous avez

24 l'impression qu'il disait la vérité, qu'il était assez ouvert ?

25 R. Oui.

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1 Q. Je vais maintenant regarder votre rapport. Il a été rédigé de façon

2 assez détaillée. Et nous savons que M. Nikolic a plaidé coupable à tout ce

3 qui lui a été reproché. Ceci a duré environ une heure. Il a plaidé coupable

4 à l'ensemble des chefs d'accusation. Je crois qu'il a fait la même chose

5 avec vous.

6 R. Oui, je crois que nous avons abordé ceci vraiment dans le détail, car

7 je voulais voir s'il allait retirer certaines choses ou être équivoque,

8 certains accusés répondent : "Mon avocat m'a demandé d'agir ainsi." Donc je

9 voulais savoir si cela venait de lui ou d'une autre source peut-être.

10 Q. A la première page de votre rapport, lorsque l'on voit le titre,

11 "Rapport de synthèse", au milieu de ce paragraphe, vous dites -- vous

12 commencez en disant : "M. Nikolic a précisé que c'était de sa

13 responsabilité, que ce comportement était dû à sa responsabilité

14 personnelle."

15 "Il a exprimé le remords et le regret pour chaque individu et pour sa

16 conduite, de façon générale, aux chefs où les victimes n'ont pas été

17 nommées."

18 Et je l'entends pour dire que vous avez passé en revue chaque victime.

19 R. C'est exact.

20 Q. Et à chaque -- et dans chaque cas, il a exprimé le remords et le

21 regret ?

22 R. Oui, parce que je lui ai demandé à chaque fois.

23 Q. Et ensuite, il a exprimé des excuses, eu égard l'ensemble de cette

24 entreprise criminelle, et vous élargissez ici le domaine. Est-ce qu'on

25 entend la guerre, au sens large ?

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1 R. Oui.

2 Q. Et que s'est-il passé pendant cette guerre ?

3 R. Il ne s'agissait pas simplement de la guerre, mais de son comportement

4 pendant cette guerre, et son comportement qui était lié à la guerre.

5 Q. Non seulement sa mauvaise conduite, mais également la conduite d'autres

6 dont les noms ne sont pas cités ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que vous avez l'impression qu'il exprimait le regret -- du

9 regret par rapport à ces politiques élaborées par les personnes qui avaient

10 été à la source du conflit ?

11 R. Je crois qu'il prenait la responsabilité -- il précisait que c'était sa

12 propre responsabilité, mais il exprimait des regrets pour le corps

13 policier.

14 Q. Ensuite, il avançait -- il a poursuivi -- il a eu du mal à expliquer le

15 comportement. Il a expliquait que c'est toujours mystérieux et il ne

16 pouvait pas imaginer qu'il puisse adopter un comportement aussi brutal.

17 R. Oui.

18 Q. Et il n'a jamais agi ainsi à un autre moment de sa vie. Ensuite, il

19 poursuit. Voici quelques détails. Je voudrais vous demander de regarder la

20 page suivante, s'il vous plaît.

21 Au milieu de la page : "Après trois ans et cinq mois…"

22 Est-ce que vous voyez ce paragraphe ?

23 R. Très bien.

24 Q. "Il est prêt à faire face à l'avenir, accepter les conséquences et son

25 acceptation de la responsabilité, du remords et proposer ses excuses pour

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1 le comportement, par écrit."

2 Ensuite, il précise : "Il est prêt à rencontrer les victimes

3 individuellement ou des groupes de victimes si tel est le souhait qui est

4 avancé."

5 C'est une chose qui est facile à dire. Quelle était votre perception de

6 cela ? S'agissait-il d'une manifestation d'honnête, d'ouverture d'esprit, à

7 votre avis, de la part de M. Nikolic ?

8 R. Il n'avait aucune hésitation à dire cela. Il a précisé que c'est une

9 présentation tout à fait franche, et cela devait se faire plus d'une fois -

10 - à plus d'une question. Il avait ses propres -- bon, il avait son propre

11 point de vue là-dessus. Il savait qu'il y avait peut-être d'autres idées à

12 proposer. Il comprenait que c'était important. C'est ainsi qu'il exprimait.

13 Lorsqu'il s'agissait d'une rencontre face à face, c'était très important

14 que la personne soit en face de lui, lui étant l'auteur de ces crimes. Et

15 cet individu pouvait être représenté par une personne ou plusieurs qu'il

16 avait -- contre laquelle il avait commis des crimes.

17 Q. Bien. Alors, je passe un petit peu plus avant. Je ne vais pas lire le

18 rapport ligne après ligne. Pour ce qui est de la Défense, nous avons --

19 nous acceptons l'ensemble de ce rapport.

20 Je veux maintenant passer à la page 7. C'est au milieu de la page. Et nous

21 avons ici le sous-titre "L'attitude du criminel eu égard ses victimes", le

22 2e paragraphe.

23 Lorsqu'on lui a demandé comment il avait abordé la question avec ses

24 victimes. Lorsqu'on lui a demandé comment il avait abordé la question à ses

25 victimes, il a proposé une stratégie. Est-ce exact ?

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1 R. Oui. Encore une fois cela indiquait clairement que cela n'était pas une

2 des nouvelles pour lui, il avait eu déjà l'idée de contacter les personnes,

3 car sa famille lui avait fourni ces renseignements qu'il pourrait

4 rencontrer les victimes et s'entretenir avec eux et rechercher en ces

5 personnes, des personnes qui jouaient le rôle d'interface et qu'ils lui

6 permettraient de reconstruire le tissus social.

7 Q. Merci beaucoup. Donc au milieu de la page, vous avez précisé que vous

8 avez contacté M. Liam McDowal et vous avez abordé cette question avec lui ?

9 R. Oui, oui, je vois tout à fait.

10 Q. Vous êtes dans le texte, je ne pense pas qu'il soit contesté dans le

11 cadre de cette affaire, ni dans une autre affaire de ce tribunal que M.

12 Nikolic est la seule personne de Vlasenica à l'encontre duquel il y un acte

13 d'accusation, est-ce que c'est l'impression que vous avez, il y a peut-être

14 d'autres personnes suspectes dans cette région ?

15 R. Je ne peux véritablement pas répondre à cette question.

16 Q. Je crois que le point de vue de la Défense et de l'Accusation sont

17 assez semblables sur ce point.

18 Je souhaite maintenant aborder un point qui se trouve en bas de la page 9,

19 où il précise très clairement que mon co-conseil lui a porté des ouvrages

20 tels que Thomas Mann, Tolkien, Dostoyevsky, Harold Robbins et Herman Hesse

21 et Paulo Coelho. Est-ce que cela vous a surpris ?

22 R. Ecoutez, je trouvais que c'était une bonne chose, parce qu'il m'avait

23 avoué qu'il n'avait pas été très bon élève à l'école. Et deuxièmement en

24 tant qu'universitaire, j'ai moi-même -- je suis allé à l'école à plusieurs

25 reprises et je pense que la lecture est une très bonne chose que ce soit au

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1 plan personnel ou pour poursuivre des études. Je crois que nous pouvons

2 être transformés parce que nous lisons pour le meilleur ou pour le pire. Et

3 il lisait, il admit qu'il lisait évidement, certain de ces ouvrages et ces

4 auteurs sont connus pour la complexité de leurs œuvres, pas tous bien sûr,

5 mais j'ai jugé qu'il s'agissait d'une attitude très positive car étant

6 donné les circonstances dans lesquelles il se trouvait, il pouvait être à

7 même de mieux se connaître en lisant ce genre d'ouvrage.

8 Q. Harold Robbins, je crois que nous allons le laisser du côté un petit

9 peu, oui ?

10 R. C'est pour cela que j'ai dit à l'exception de certain.

11 Q. Il est vrai que Thomas Mann, Dostoyevsky et Herman Hesse et Paulo

12 Coelho ne sont pas des auteurs faciles.

13 R. Il s'agit en fait -- je sais de quoi il s'agit certain ne sont pas

14 toujours facile.

15 Q. Il est vrai que le portrait des sentiments humains est parfois assez

16 complexe et je crois qu'il faut bien comprendre la condition humaine pour

17 pouvoir en retirer le sel ?

18 R. Cela dépend du niveau -- cela dépend de votre niveau bien évidement,

19 mais il faut une certaine ténacité pour poursuivre la lecture de ces

20 ouvrages. Il est vrai.

21 Q. Vous donnez ensuite ses antécédents personnels, son histoire à partir

22 de la page 11 à la page 15, son état civil, sa famille, je crois qu'il n'y

23 a pas -- ceci n'est pas contesté. Ensuite à partir de la page 15 jusqu'à la

24 fin de l'essentiel du rapport. Je crois que c'est difficile d'en juger lors

25 d'un entretien. Mais avez-vous estimé lors de votre évaluation avec, votre

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1 niveau d'expertise jusqu'à la fin de tous vos entretiens avec M. Nikolic

2 qui l'en avait bénéficié au sens large du terme, qu'il en avait tiré

3 profit ?

4 R. C'est en tout cas ce qu'il m'a dit.

5 Q. Je vous remercie beaucoup, Madame Grosselfinger.

6 L'INTERPRÈTE : Précise que Mme Grosselfinger est déléguée à la probation,

7 agent de probation.

8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que je peux demander à

9 l'Accusation si vous avez des questions supplémentaires ?

10 M. YAPA : [interprétation] Non. Nous n'avons pas de questions.

11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je ne vois pas de questions de la

12 part des Juges, par conséquent il s'agit que d'une question d'ordre

13 technique que je souhaite poser.

14 Puis-je demander à Mme l'Huissier de donner à Mme Grosselfinger le rapport

15 qui a été fourni par elle de façon à ce qu'elle puisse signer -- apposer sa

16 signature à la dernière page.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est vrai que j'ai remis au Greffe hier un

18 document dont j'ai apposé ma signature sur la première page, mais je suis

19 tout à fait prête à poser ma signature à la dernière page.

20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] La signature doit être apposée à la

21 dernière page du rapport de façon à ce que vous confirmiez l'ensemble du

22 rapport.

23 Mme la Greffière a eu l'obligeance de bien vouloir attacher votre addendum

24 et votre curriculum vitae, ce que vous nous avez envoyé par la suite. Donc

25 tout sera -- le rapport sera au complet.

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1 Nous allons verser au dossier la déclaration de Mme Grosselfinger au

2 dossier. Y a-t-il des objections ? Si tel n'est pas le cas, cette

3 déclaration est versée au dossier. Je souhaite avoir un numéro de cote s'il

4 vous plaît. S'agit-il de J4. Est-ce exact ? C'est donc la cote J4. Je dois

5 vous remercier car vous avez été -- je vous remercie disposer à préparer

6 cette étude complète et vous êtes venue à La Haye, je sais que ce n'est pas

7 toujours facile et vous l'avez fait au pied levé et nous vous remercions

8 beaucoup. C'est bien évidemment c'est extrêmement important parce que nous

9 sommes un Tribunal pénal, et nous allons -- nous entendons bien pour le

10 sort des victimes et également de ces crimes haineux qui ont été commis. Il

11 est important d'avoir pu entendre les professionnels en la matière qui sont

12 à même d'analyser la personnalité des auteurs de ces crimes.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir invité ici.

14 [Le témoin se retire]

15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Puisque nous en sommes aux

16 questions pratiques, je me tourne vers la Greffière d'audience pour lui

17 demander quel est le résultat de ces recherches s'agissant du rapport du Dr

18 Zepter. Est-ce que ce rapport a finalement été versé au dossier ? Bon.

19 Puisque la question était encore indécise.

20 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien, dans ce cas effectivement ma

22 mémoire m'a servi. On en avait parlé mais malheureusement il n'est pas

23 possible de voir dans le compte rendu d'audience que ceci avait été versé

24 au dossier. Il n'y a aucune contestation, cependant, si bien que ce

25 document est définitivement versé au dossier. Il s'agit d'une pièce à

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1 conviction de l'Accusation.

2 Ce qui m'amène à la question suivante. Comment faut-il traiter de l'annexe

3 C qui pour l'instant est confidentielle, l'annexe du mémoire concernant la

4 peine préparée par l'Accusation. Cette annexe concerne la coopération de

5 l'accusé.

6 M. YAPA : [interprétation] Je ne voulais pas vous interrompre. Mais je

7 souhaite vous signaler au lieu du Dr Zepter plutôt on a parlé du "Dr

8 Dexter" ici au compte rendu d'audience.

9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, effectivement à la page 14, on

10 voit la mention du nom de Dexter alors bien entendu c'est Zepter qu'il

11 faut lire.

12 M. YAPA : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui. J'attends vos réponses au

14 sujet du document concernant la coopération de l'accusé.

15 M. MORRISON : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, mais

16 j'imagine que là nous allons aborder des sujets qui sont confidentiels qui

17 sont couverts par le secret professionnel et je pense qu'il vaudrait mieux

18 à passer à huis clos partiel pour se faire.

19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Si la Défense ne souhaite pas

20 parler de la coopération fournie par l'accusé en public les juges ne vont

21 pas insister pour le faire si bien que nous allons passer à huis clos

22 partiel.

23 [Audience à huis clos partiel]

24 (expurgé)

25 (expurgé)

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11 Pages 445 à 453 expurgés, audience à huis-clos partiel

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1 [Audience publique]

2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Si j'ai bien compris, l'Accusation

3 propose le versement de l'annexe C de son mémoire préalable à la

4 détermination de la peine dans son paragraphe 5, en l'espèce.

5 Est-ce bien cela, Monsieur Yapa ?

6 M. YAPA : [interprétation] Oui, telle est notre requête, Monsieur le

7 Président.

8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il n'y a pas lieu de s'adresser à

9 la Défense puisque la suggestion vient d'elle. Par conséquence, tout

10 d'abord la confidentialité de cette portion-là est levée et le paragraphe

11 C.5 de l'annexe du mémoire préalable au prononcé de l'accusation est versé

12 au dossier. Je demanderais à Mme la Greffière d'audience de nous citer la

13 cote de ce document.

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P7,

15 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. La pièce P7 est

17 donc versée au dossier.

18 Abordons à présent la question suivante, qui est restée en suspens du moins

19 pendant les discussions en audience publique. Qu'en est-il de la position

20 de l'accusé ? L'accusé est-il prêt à faire une déclaration ou bien l'accusé

21 souhaite-t-il déposer ? Je tiens à m'en assurer avant que la Défense ne

22 prenne une décision définitive à ce sujet. Il se peut que je m'abuse, mais

23 j'ai eu l'impression hier que la Défense aurait éventuellement eu -- enfin

24 que la Défense semble estimer qu'une déposition formelle, après avoir

25 prononcé une déclaration solennelle, donc de la part de l'accusé l'aurait

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1 limité à un certain nombre de points tels que le fait de faire part de ses

2 remords, et que des questions supplémentaires, pertinentes pour la

3 détermination de la peine, ne pourra pas lui être poser. La Chambre s'est

4 penchée sur cette question et il faudrait que ce soit tout à fait claire

5 qu'il s'agisse de la "common law" ou du droit civiliste, lorsqu'un témoin

6 dépose, toutes les questions peuvent lui être adressées, toutes les

7 questions qui sont pertinentes pour la détermination de la peine. Je tiens

8 à ce que ce soit tout à fait clair avant que nous n'entendions votre

9 décision finale.

10 M. MORRISON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. En

11 effet, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec mes éminents collègues de

12 l'Accusation, et nous partageons l'avis que pour ce qui est de

13 l'Accusation, si M. Nikolic déposait, et bien, cela ne pourrait concerner

14 que les questions de remords et que l'Accusation ne le contre interrogerait

15 pas. Et ceci a été confirmé ce matin dans mes entretiens avec mes collègues

16 de l'Accusation.

17 D'après ce que j'ai compris, il s'agit d'un point sur lequel nous nous

18 sommes mis d'accord entre la Défense et l'Accusation déjà lors de notre

19 réunion en application de l'Article 65 ter. Et c'est la manière dont j'ai

20 l'habitude de traiter de ce genre de choses dans mon propre système. Bien

21 entendu, ici il ne s'agit pas de système juridique auquel je suis habitué,

22 mais c'est une question d'équité et d'équité que la Défense et l'Accusation

23 doivent respecter.

24 Il me semble que si quelqu'un décide de déposer, il devrait être possible

25 de lui poser toute question acceptable et pertinente. Mais, bien entendu,

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1 ceci dans le cadre qui respecte l'équité. Ici, il ne s'agit pas de

2 déterminer si la personne est coupable puisque l'accusé a déjà plaidé

3 coupable et est passé aux aveux. Nous avons cette audience uniquement pour

4 déterminer la peine appropriée.

5 Donc je demanderais peut-être une petite interruption de séance pour

6 pouvoir consulter l'accusé. Je sais qu'il a toujours souhaité déposer, mais

7 j'ai ici quelques réserves, bien entendu, compte tenu -- et je souhaite

8 entendre tout d'abord sa réaction.

9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je voulais simplement que le compte

10 rendu d'audience soit tout à fait clair sur ce point. J'ai vérifié avec

11 d'autres personnes qui ont été présentes lors des dernières réunions en

12 application de 65 ter, et ce genre d'accord n'a pas été passé. Peut-être

13 cela s'est-il passé en l'absence de la Chambre, entre l'Accusation et la

14 Défense. Toujours en est-il que la Chambre n'en a pas été informée. Il

15 serait possible peut-être de procéder avec une déposition formelle,

16 uniquement sur des points de remords. Donc dans un cadre limité, mais ce

17 serait néanmoins -- cela néanmoins laisserait la possibilité de poser

18 toutes les questions pertinentes quant à la détermination de la peine

19 appropriée.

20 Et c'est la raison pour laquelle que j'ai fait les observations que j'ai

21 faites. Je pense que vous connaissez parfaitement bien la "Common law".

22 Vous connaissez l'affaire Brown contre les Etats-Unis, et la décision de la

23 Cour suprême des Etats-Unis où il a été décidé, et je cite : "Que l'accusé

24 ne pouvait pas déposer pour défendre sa propre cause, et aussi qu'il y

25 avait le droit au contre-interrogatoire."

Page 457

1 Nous devons savoir que notre système est un système qui réunit les éléments

2 des plus grands systèmes juridiques, et il ne fait aucun doute que dans un

3 système civiliste, à chaque fois que l'accusé se lance dans une déposition,

4 il ne peut pas être contraint à répondre. Donc lorsqu'il accepte de

5 déposer, il ne peut pas être contraint à répondre. Cependant, si lorsqu'on

6 lui pose des questions auxquelles il ne souhaite pas donner des questions

7 [sic] concrètes, cela est aussi possible.

8 Donc je pense que le cadre est ainsi déterminé d'une éventuelle déposition

9 de votre client. Et ceci vous fourni tous les éléments nécessaires pour que

10 vous puissiez en discuter avec lui. Combien de temps vous faudrait-il pour

11 le consulter ?

12 M. MORRISON : [interprétation] Si je souhaitais ne pas vous aider

13 énormément, et bien, je vous dirais qu'il ne me faudrait pas beaucoup de

14 temps. Je suis en train de voir quelle heure il est. Je me demande, s'il ne

15 vaudrait pas mieux faire une suspension d'audience maintenant, donc plus

16 tôt que prévu. Et nous pourrions donc en bénéficier aussi pour les

17 consultations.

18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il nous semble encore qu'il serait

19 possible de mener notre affaire à son terme aujourd'hui, si nous faisons de

20 notre mieux. Donc essayons de limiter cette pause et ne la prolongeons pas

21 au-delà de 10 heures 30. Si vous avez besoin de plus de temps, je vous prie

22 de nous en informer.

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] M. le Juge Agius me fait observer,

25 et il a raison de le faire, qu'en plus, vous devriez savoir que, même s'il

Page 458

1 y a eu un accord entre vous et l'Accusation, à savoir que l'Accusation ne

2 contre interrogerait pas le Dr. Stakic, excusez-moi, ça a été un lapsus

3 Freudien. Je vous présente mes excuses, Monsieur Nikolic. Donc si

4 l'Accusation ne contre interroge pas M. Dragan Nikolic, alors, en

5 application de notre règlement qui est à la croisée des chemins, et nous

6 savons comment cela nous rend notre travail difficile, et bien, nous avons

7 toujours l'Article 98 qui s'applique. A savoir, les Juges ont la

8 possibilité de poser des questions à l'accusé. Je pense que l'affaire est

9 claire à présent.

10 La Chambre suspend l'audience jusqu'à 10 heures 30.

11 --- L'audience est suspendue à 10 heures 17.

12 --- L'audience est reprise à 10 heures 34.

13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Veuillez prendre place.

14 Maître Morrison.

15 M. MORRISON : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

16 m'avoir donner la possibilité de recueillir l'avis et de recevoir les

17 instructions de mon client en la matière. Et d'après les instructions que

18 j'ai reçues ou plutôt d'après l'avis que je me suis senti invité à fournir,

19 et bien mon client fera une déclaration à la fin de la présentation de tous

20 les arguments en l'espèce et ce afin d'aborder un certain nombre de

21 questions mais il ne déposera pas. Cependant, nous sommes tout à fait prêts

22 à aider la Chambre pour ce qui est de tout point qui pourrait être abordé

23 au sujet des choses qui relèvent du cadre de connaissance de la Défense et

24 je suis autorisé à faire -- à dire cela à la Chambre sans entraver la règle

25 du secret de communication entre le client et son Conseil.

Page 459

1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie de nous avoir

2 apporter ces points de précision. Il me semble que nous avons entendu tous

3 les éléments de preuve supplémentaires nous permettant de déterminer la

4 peine la plus appropriée et je donnerais la possibilité bien entendu aux

5 parties de fournir ou de verser des documents supplémentaires, des pièce à

6 conviction, et cetera, s'il y

7 en a.

8 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

9 M. YAPA : [interprétation] Je vous en prie.

10 Monsieur le Président, si je puis aborder un point sur les documents que

11 nous allons verser au dossier à savoir les transcriptions ce seront les

12 entretiens avec M. Nikolic. Donc comme cela a été demandé nous pouvons le

13 faire aujourd'hui.

14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien. Est-ce que l'un des

15 membres du bureau du Procureur pourrait se rendre dans mon bureau, s'il

16 vous plaît. S'il y a des questions à poser ceci nous aiderait donc au sujet

17 de ces documents.

18 La Défense a-t-elle des documents supplémentaires qu'elle souhaite proposer

19 au versement.

20 M. MORRISON : [interprétation] Comme nous le savons tous la date butoir qui

21 a été fixée, c'est celle du 24 novembre pour verser toutes écritures

22 supplémentaires au sujet de ce qui est contenu dans le rapport du

23 professeur Sieber et au sujet de la déposition du professeur Sieber je ne

24 peux pas encore vous dire aujourd'hui si nous allons le faire mais il y a

25 de fortes chances que nous le fassions.

Page 460

1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien. Mais nous avons déjà

2 donné cette possibilité à accorder ce droit hier. Je voulais simplement

3 préciser la chose suivante. Nous avons versé au dossier le rapport du

4 professeur Sieber dans la forme qu'il avait

5 hier. Cependant, il nous a dit qu'il allait pouvoir nous communiquer une

6 version plus complète mardi prochain et je suppose que cette pièce pourra

7 être versé qu'il n'y aura pas d'objection et que la cote qu'elle aura sera

8 la même tout simplement avec une barre oblique, 1, en plus. Et cette pièce

9 remplacera le CD-ROM que nous avions reçu précédemment.

10 Pour ce qui est des rapports par pays, compte tenu du fait que nous n'avons

11 pas beaucoup de temps à notre disposition et que cet expert n'a pas eu

12 beaucoup de temps nous n'avons pas ces documents dans une des langues de

13 travail de ce Tribunal, nous allons essayer de faire mieux afin de faire

14 traduire les parties les plus importantes de l'allemand donc les parties

15 qui ont fait l'objet des débats hier pendant la déposition du professeur et

16 je suppose qu'il n'y aura pas d'objection à ce que ces traductions soient

17 versées au dossier en leur attribuant simplement la même cote, et en

18 ajoutant une barre oblique et le chiffre 2, à la suite de la cote initiale.

19 Y a-t-il des objections ? Puisqu'il me semble qu'il n'est pas nécessaire de

20 revenir là-dessus simplement afin de verser ces traductions. Donc il n'est

21 pas nécessaire de revenir -- à passer au fond simplement pour ça.

22 M. YAPA : [interprétation] Pas d'objection.

23 M. MORRISON : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection, Monsieur le

24 Président. Pour ce qui est du texte allemand, bien entendu, il ne s'agit

25 pas d'une telle langue de travail de ce Tribunal mais mon conseil parle

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1 couramment l'allemand, c'est pratiquement sa langue maternelle et nous

2 pouvons vous aider pour ce qui est des parties qui ne seraient pas

3 traduites par ailleurs.

4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie de nous avoir

5 proposé votre aide. Alors nous pouvons donc à présent passer au plaidoyer

6 réquisitoire, nous devons tenir compte de plusieurs choses.

7 Tout d'abord les interprètes n'ont eu qu'une pause de 15 minutes jusqu'à

8 présent. Il nous faudra respecter les contraintes que -- concernant les

9 interprètes. Je suppose que l'Accusation aura besoin d'environ 60 minutes

10 pour présenter son réquisitoire et qu'en est-il de la Défense. Nous

11 souhaitons éviter qu'on le fasse le lendemain afin qu'on ne fasse pas tout

12 en une journée.

13 Donc pouvez-vous nous dire de combien de temps il vous faudra ?

14 M. MORRISON : [interprétation] Je peux vous dire à peu près combien de

15 temps j'ai l'intention de prendre et j'espère que je m'y trompes pas mais

16 vous savez s'il y a des choses qui sont toujours très incertaines ce sont

17 les estimations que les conseils font du temps qu'il leur faudra. Lorsque

18 je travaille en tant que juge en Angleterre, je dis toujours aux jurés

19 lorsqu'un conseil me demande une pause de cinq minutes et bien cela

20 signifie en fait dans les termes juridiques 30 minutes. Mais j'en aurais

21 terminé aujourd'hui il y a aucun doute là-dessus.

22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Alors de manière informelle puis je

23 m'adressé aux interprètes pour savoir s'ils sont prêts à procéder de la

24 façon suivante. On entendra le réquisitoire de l'Accusation pendant les 60

25 minutes qui viennent puis on aura une pause pendant 30 minutes. Est-ce que

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1 cela vous paraît acceptable.

2 L'INTERPRÈTE : L'interprète accepte aux noms des interprètes.

3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vois donc que vous acceptez, je

4 vous remercie de votre aide et je demande à l'Accusation de prendre la

5 parole.

6 M. YAPA : [interprétation] Pardonnez-moi. Je vais chercher le pupitre mais

7 je ne le trouvais pas. Je crois qu'il était sous la table.

8 Merci, Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge. Je crois que le

9 moment est venu maintenant pour présenter notre réquisitoire et conclusion

10 portant sur cette audience portant sur le prononcé de la peine suite à la

11 présentation d'un plaidoyer de culpabilité que nous avons décidé

12 d'organiser cette audience portant sur le prononcé de la peine. La fixation

13 de la peine aura une forme quelque peu différente parce qu'elle comporte

14 certaines caractéristiques assez particulières. C'est la première fois au

15 sein de Tribunal que nous avons présenté d'un rapport d'expert portant sur

16 la fixation des peines. Il y avait un certain désavantage à cela, c'était

17 assez contraignant au plan temporelle et d'autres facteurs également à

18 prendre en compte et le rapport était incomplet de l'expert mais nous

19 espérons qu'il nous parviendra avant le 24 octobre -- novembre et nous

20 pourrons à ce moment-là proposer des arguments à ce propos. A ce stade de

21 la procédure, je souhaite proposer mes arguments sur le déroulement de la

22 procédure jusqu'à présent. Je souhaite attirer votre attention sur le

23 mémoire portant sur la fixation de la peine proposée par l'Accusation dans

24 laquelle nous souhaitions inclure tous les documents pertinents et tous les

25 arguments pertinents que nous jugeons important et qui doivent figurer dans

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1 un tel mémoire. Mais je vais devoir peut-être évoquer certaines

2 dispositions juridiques qui sont -- qui figurent également dans ce mémoire

3 au cours de mon réquisitoire d'aujourd'hui.

4 Je vais simplement m'appuyer dessus si je puis -- je souhaite parler un

5 petit peu des antécédents dans ce Tribunal et de ce qui a -- et la manière

6 dont les Juges ont déterminé les peines des personnes condamnées. Je

7 souhaite parler du droit pénal international, les règles du droit sont

8 prévues -- les dispositions des règles du droit sont prévues dans les codes

9 pénaux. La question de la responsabilité individuelle est bien reconnue par

10 un tel système juridique lorsqu'un des critères de conduite sont abordés

11 [sic]. Il s'agit évidement de prévoir pour la punition d'un tel condamné,

12 il n'est pas nécessaire de répéter tout ce qui figure déjà dans notre

13 mémoire portant sur le prononcé de la peine, mais je souhaite proposer

14 comme point de départ, c'est tout à fait pertinent et dans l'ordre des

15 choses d'évoquer le droit applicable.

16 L'Article 24 des règles du statut du Tribunal fait référence aux peines qui

17 pourront être imposées à un condamné, et si je puisse lire cette partie qui

18 est partie pertinente, Article 24 du statut : "La peine imposée par le

19 Chambre de première instance est limité à l'emprisonnement. De plus dans la

20 pratique générale et les différentes peines d'emprisonnement on tiendra

21 compte de ce qui est appliqué dans le Tribunal de l'ex-Yougoslavie."

22 En imposant toute peine : "La Chambre de première instance tient compte de

23 facteurs qui ne sont pas restrictifs telle que la gravité de l'infraction

24 et la situation personnelle du condamné."

25 Il y a un troisième point qui est moins pertinent en la matière. Il y a

Page 464

1 également d'autres dispositions prévues qui sont applicables et qui

2 figurent dans les règles de procédure et de preuve. Et je vais évoquer

3 celle-ci également et figure également dans notre mémoire portant sur le

4 prononcé de la peine ainsi que le mémoire de mon éminent confrère.

5 Il s'agit de procédures portant sur le prononcé de la peine à l'Article 100

6 suite à un plaidoyer de culpabilité : "Si le plaidoyer de culpabilité d'un

7 accusé est retenu par la Chambre de première instance, le Procureur et la

8 Défense peuvent présenter toute information pertinente permettant à la

9 Chambre de première instance de décider de la sentence appropriée," chose

10 que nous avons faite.

11 A l'Article 101 : "Toute personne reconnue coupable est passible de

12 l'emprisonnement pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à vie." Ensuite les

13 facteurs qui pourront être prises en compte lorsqu'il s'agit de fixer la

14 peine appropriée."

15 "Ce faisant la Chambre de première instance tiendra compte des

16 dispositions prévues à l'Article 24 du statut du paragraphe 4," que je

17 viens de lire "tels que d'autres facteurs comme l'existence de

18 circonstances aggravantes, l'existence de circonstances atténuantes y

19 compris le sérieux et l'étendu de la coopération que l'accusé a fourni au

20 Procureur avant ou après sa déclaration de culpabilité."

21 "Dans la pratique -- ainsi que la pratique -- ainsi que les peines

22 généralement appliquées dans les tribunaux de l'ex-Yougoslavie," ceci

23 constitue le troisième point et lorsque le quatrième point de la durée de

24 la période le cas échéant pendant laquelle, "la personne reconnue coupable

25 a déjà purgé une peine imposée dans le même acte par une autre juridiction

Page 465

1 -- par une juridiction interne dans l'application du paragraphe 3 de

2 l'Article 10 du statut."

3 Eu égard à ces dispositions, Madame, Messieurs les Juges, nous avons fait

4 référence à toutes ces dispositions qui ont été appliquées dans ce Tribunal

5 que ce soit dans des jugements après être passé en appel ou dans les

6 plaidoyer de culpabilité, et dans le cas d'un jugement en appel après

7 condamnation.

8 Et aujourd'hui, nous tentons de voir quelles sont les principes directeurs

9 pour comprendre quelle est la sentence appropriée dans un cas précis, dans

10 les prémices -- au départ lorsque ce droit pénal a été instauré, la

11 disposition était la suivante : le Tribunal ou le Juge a le droit d'imposer

12 à l'accusé la punition qui sera jugée juste.

13 Et par conséquent, le seul principe directeur était celui de la justesse de

14 la punition, la marge de manœuvre des Juges était par conséquent très

15 importante dans le statut des tribunaux. Je tiens ici compte également du

16 TPIR, la disposition ici en fait référence à l'Article 23 du statut de ce

17 Tribunal. Ces dispositions sont davantage détaillées et ces critères

18 tiennent compte de la gravité de l'offense, les circonstances individuelles

19 de la personne condamnée.

20 Le règlement précise que la Chambre tiendra compte hormis les facteurs

21 précisés à l'Article 24, les facteurs, les circonstances aggravantes, les

22 circonstances atténuantes ainsi que la coopération et l'étendu de cette

23 coopération avec le bureau du Procureur avant ou après. Et la pratique

24 générale veut que ces peines soient celles qui sont appliquées dans les

25 tribunaux de l'ex-Yougoslavie. Le principe directeur qui porte sur le

Page 466

1 dernier facteur, à savoir, les peines appliquées dans les tribunaux de

2 l'ex-Yougoslavie ont été interprétées comme suit : comme étant un principe

3 directeur mais non exécutoire. Et tel que ça a été mentionné dans notre

4 mémoire, la Chambre de première instance ont à plusieurs reprises précisé

5 que la gravité de l'offense du crime commis constitue le facteur

6 déterminant dans la position de la peine.

7 Et pour ce qui est de Aleksovski la Chambre d'appel a précisé que la

8 gravité du crime constitue -- est le résultat de l'analyse des

9 circonstances de l'affaire et du degré de participation de l'accusé à ce

10 crime.

11 Dans ce cas le plaidoyer de culpabilité apporté sur un certain nombre de

12 crimes a été accepté. Il s'agit du crime contre l'humanité. A ce stade de

13 la procédure, je souhaite préciser, Monsieur le Président, Madame,

14 Messieurs les Juges, que conformément aux opérations qui ont été faites et

15 conformément aux arguments proposés par nous-même dans notre mémoire

16 portant sur le prononcé de la peine, les circonstances aggravantes et les

17 documents que nous avons qui les sous tendent sont comme suit : --

18 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

19 M. YAPA : [interprétation] Si vous voulez bien m'accorder quelques instants

20 s'il vous plaît, je dois retrouver mes documents. Merci, Monsieur le

21 Président.

22 Les circonstances aggravantes dont vous prendrez note que nous allons

23 présenter en tant que telles : Circonstances aggravantes dans le cadre de

24 cette affaire. Premièrement, l'impacte sur les victimes, les blessures

25 reçues à la suite de coups, les effets dû à la perte d'enfants, de parents

Page 467

1 proche, et l'incertitude qui a été exacerbée par la souffrance des victimes

2 des détenus du camp. Il s'agit ici d'un facteur qui ressort dans ces

3 procédures jusqu'à présent.

4 Deuxièmement, le spectacle des détenus, d'autres détenus étant torturés,

5 tués en particulier des détenus qui se connaissaient les uns les autres et

6 qui étaient parfois liés par des liens de parenté ou qui avaient vécu dans

7 la même commune, il s'agit ici des choses qui ont été mis en exorde par nos

8 différentes déclarations. Troisièmement, des détenus femmes qui ont été

9 dégoûtées par ce qui leur est arrivé suite au viol -- à leur viol.

10 Certaines d'entre elles n'ont pas pu avoir une vie normale et remplir le

11 rôle de mère ou de femme par rapport aux épreuves qu'elles ont dû subir

12 dans ce camp. Les liens familiaux en ont été affectés.

13 M. Nikolic a reconnu qu'il était un des commandants du camp de Susica, mais

14 nous estimons qu'il s'agit ici d'une circonstance aggravante eue égard aux

15 crimes qui ont été commis ou qui ont été reconnus par l'accusé, M. Nikolic.

16 Et M. Nikolic pourrait -- avait ordonné les -- donné des ordres aux

17 prisonniers, les prisonniers ne pouvaient pas se déplacer sans l'ordre de

18 M. Nikolic. Les détenus devaient accomplir des taches avilissantes telles

19 que le lavage de ses pieds. Les femmes devaient nettoyer les maisons et les

20 assiettes et travailler dans le camp, et certaines d'entre elles ont été

21 portées disparues par la suite. Et lui seul, en tant que commandant, a

22 ordonné aux victimes d'être battues -- que les victimes des passages à

23 tabac soient enterrées, et a demandé également à ce que des véhicules de

24 fossoyeurs soient présents. C'est sous son autorité que ces choses-là ont

25 été faites.

Page 468

1 Il est clair, d'après les éléments de preuve que nous avons, que nous

2 l'avons vu dans le camp plus souvent que les autres gardes. Il savait qui

3 était de garde au camp, c'est lui qui donnait les ordres. Il était présent

4 dans le camp quasiment au quotidien. Et la plupart du temps, l'après-midi

5 et le soir. Et le soir, il dormait dans la maison du garde où il avait son

6 logement, et quelques fois, il se rendait au camp à minuit. Et il semble

7 clair qu'il s'y rendait la nuit assez souvent -- assez régulièrement, et

8 qu'il venait dans le hangar.

9 Ensuite, les victimes, les victimes étaient tous des civils y compris des

10 enfants et des femmes. Celles-ci n'étaient pas volontaires. Elles ne sont

11 pas venues au camp de leur plein gré. On les y a forcées. Elles ont été

12 emmenées dans le camp contre leur gré, et on n'a laissé entrevoir la

13 possibilité d'être échangé par la suite, ce qui était le cas de

14 (expurgé)]. On avait précisé qu'il devait être échangé et donc il est

15 resté dans ce camp pendant un mois par la suite.

16 Le camp, depuis sa création, était bondé de monde et (expurgé)-- ça

17 a été confirmé par un des témoins que -- cela a été confirmé par ce témoin

18 que des prisonniers arrivaient au camp régulièrement et ensuite ils étaient

19 déplacés, mais que le camp était en permanence rempli.

20 Des jeunes femmes ont été -- des jeunes femmes ont été emmenées la nuit et

21 ramenées le lendemain matin.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Puis-je demander à Mme la Greffière

24 d'expurger le nom qui vient d'être prononcé, s'il vous plaît -- l'expurger

25 du compte rendu d'audience.

Page 469

1 M. YAPA : [interprétation] Le soir, la nuit, les femmes étaient emmenées,

2 on les ramenait le lendemain matin. D'après les éléments de preuve, ces

3 femmes étaient dans un grand désarroi et bouleversées, ce qui semblait

4 indiquer qu'elles avaient été agressées d'une manière ou d'une autre.

5 Il apparaît clairement également que Dragan Nikolic emmenait les femmes

6 personnellement et les remettait entre les mains des gardes et les ramenait

7 lui-même et il avait l'habitude de se comporter ainsi.

8 Eu égard la nourriture, les détenus n'étaient pas alimentés qu'une seule

9 fois par jour. Mais lorsqu'ils venaient d'arriver, ils n'avaient pas de

10 nourriture du tout et ils devaient passer un certain temps sans être

11 nourris. Et très souvent, la nourriture était de très mauvaise qualité. Les

12 détenus ne recevaient aucun soin médical.

13 On ne leur prodiguait aucun soin sur le plan médical, et les victimes non

14 plus. Pour ce qui est des conditions de détention dans le hangar, ces

15 conditions étaient extrêmement mauvaises. Il y avait certaines personnes

16 qui tombaient malade et il y avait une odeur épouvantable dans ce hangar --

17 une odeur pestilentielle. Il était armé en permanence. Et à une occasion,

18 il a été établi qu'il est entré dans le hangar et qu'il a utilisé son arme

19 à feu. Et les personnes, les détenus, dans le hangar ont dû baisser la

20 tête, mais il a tiré tout autour de lui.

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Madame la Greffière, je crois que

22 ce nom a été évoqué à deux reprises.

23 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]M. LE JUGE

24 SCHOMBURG : [interprétation] Veuillez poursuivre.

25 M. YAPA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

Page 470

1 Il semble que Dragan Nikolic ressentait un certain plaisir lorsqu'il

2 terrorisait les détenus dans le camp. En outre, tous les gardes étaient

3 armés en permanence, hormis Nikolic. Et il avait un chien de garde à ses

4 côtés. Et ce chien de garde était un chien qui avait, comme tout chien de

5 garde, était formé à cet effet.

6 Un autre facteur aggravant que je souhaite porter à votre attention. Il a

7 battu un nombre de détenus hommes. Et à une occasion, nous avons eu un

8 incident très grave qui se produit, au cours duquel un détenu est -- un œil

9 -- un détenu a perdu un œil. On l'a fait revenir, il n'avait aucun endroit

10 où dormir, on l'a jeté à même le sol. Le sol était humide, on ne lui a

11 donné aucune nourriture. Nikolic a interdit qu'on lui serve de la

12 nourriture. Et il a été établi qu'il passait à tabac les détenus de façon

13 régulière. Et ces détenus qui avaient été battus étaient incapables de

14 s'asseoir, incapables de se tenir debout, et étaient dans une situation

15 tout à fait désespérée. Les détenus étaient sortis du hangar. On les

16 passait à tabac et on les ramenait dans le hangar après ces passages à

17 tabac. Et les autres détenus pouvaient voir que ces victimes, qui avaient

18 été frappées, avaient été soumises à des conditions inhumaines, et qui

19 avaient provoqué souvent des blessures très graves.

20 Il a été établi que Dragan Nikolic a personnellement empêché que de la

21 nourriture soit servie aux détenus. Quelquefois, à la suite des passages à

22 tabac, l'un ou l'autre détenu perdait connaissance. Il a été établi que

23 l'on réveillait et qu'on le frappait à nouveau. Il a été établi qu'il ne

24 répondait pas aux demandes des détenus, eu égard à la nourriture ou

25 d'autres formes d'aide qui ne leur a pas été fournies par Nikolic. Il a

Page 471

1 également été établi que son propre frère l'a imploré de cesser ces

2 passages à tabac. Chose qu'il a refusé, il continuait à maltraiter les

3 détenus.

4 Un autre facteur, facteur important est le suivant. Bon nombre de victimes,

5 dans le hangar ou dans le camp, étaient des personnes que M. Nikolic

6 connaissait. Il les connaissait et il était très clair là-dessus. Il

7 précisait que tous les liens de parenté et toute affinité n'avait aucune

8 importance, -- n'avait aucune espèce d'importance.

9 Qu'il s'agisse là des circonstances aggravantes qui ont été présentées dans

10 le cadre de cette procédure. Pour ce qui est des points d'accord -- tous

11 les points d'accord : la perversité, le caractère gravissime et les

12 facteurs aggravants sont plus importants que ce qui est précisé ici

13 maintenant car certains témoins n'ont pas témoigné. Il n'y a que trois

14 témoins qui ont été présentés par l'Accusation, il existe par ailleurs

15 leurs déclarations, la déclaration des autres témoins. Mais les points

16 d'accord qui ont été -- les faits qui ont été admis par M. Nikolic lui-même

17 doivent également être pris en compte.

18 Dans l'article que je viens de vous lire, l'Article 101, mention est faite

19 des circonstances atténuantes, il s'agit de l'Article 101. Et mon éminent

20 confrère de la Défense y a fait référence, a fait référence à ces

21 différents facteurs comme autant de facteurs atténuants. Quels sont donc

22 ces facteurs auxquels il a fait référence ? Si vous me le permettez je vais

23 évoquer quelque chose qui s'est passé sous vos propres yeux, Monsieur le

24 Président, Madame, Monsieur les Juges. La Défense a appelé deux témoins,

25 deux témoins qui sont venus à la barre pour évoquer la personnalité de M.

Page 472

1 Nikolic, la personnalité de M. Nikolic avant -- auparavant -- avant les

2 événements. C'était une personne qui était bien élevée, c'était quelqu'un

3 qui était aimable et les témoins ne pouvaient pas croire qu'il ait pu

4 commettre de tels actes qui lui sont reprochés. Autrement dit, cet homme

5 n'avait aucune disposition à la violence avant les événements. Dans mes

6 arguments, pour ce qui est des événements, des incidents qui sont -- qui

7 figurent dans l'acte d'accusation, ceci ne me paraît pas très crédible.

8 Il y a un autre aspect dont il faut tenir compte. Nous n'avons jamais

9 entendu que l'accusé exprime du remords. Mme Grosselfinger a précisé que,

10 lors des entretiens avec l'accusé, M. Nikolic était soucieux car il

11 souhaitait exprimer du remords. Le sentiment de culpabilité qu'il avait, il

12 souhaitait faire des excuses, ceci a été dit mais je plaide en disant

13 évidemment, il s'agit d'un rapport qui vous a été présenté mais ceci est

14 important pour M. Nikolic.Il est important pour M. Nikolic qu'il le dise

15 devant vous, Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge.

16 Et pour ce qui est du plaidoyer de culpabilité ceci est également pris en

17 compte dans les facteurs atténuants. L'Accusation reconnaît que l'accusé a

18 plaidé coupable et je dirais qu'il n'a pas plaidé coupable dès le début,

19 mais il a plaidé avant le début -- avant d'être représenté à ce procès.

20 C'est vrai que l'affaire avait commencé à être engagée mais il est exact

21 qu'il avait connaissance de l'existence d'un acte d'accusation à son

22 encontre. Alors même qu'il se trouvait à Belgrade, il savait qu'il y avait

23 un acte d'accusation qui le concernait. Et deux ou trois ans plus tard, il

24 a plaidé coupable. Ceci peut être éventuellement considéré comme une

25 circonstance atténuante mais vous savez que lorsqu'on considère un

Page 473

1 plaidoyer de culpabilité, le plus important c'est ce que ce plaidoyer soit

2 fait dès que la personne concernée en a la possibilité. Or, ceci n'est pas

3 le cas en l'espèce. Le fait qu'il ait plaidé coupable avant l'ouverture du

4 procès, ça, on doit le porter à son crédit.

5 Cependant, s'agissant de sa situation personnelle, c'est quelque chose qui

6 est évoquée dans le règlement. J'avance que nous n'avons que peu de choses

7 à dire à ce sujet. Il était à Vlasenica, il avait un emploi rémunéré, il a

8 été recruté afin de travailler au camp de Susica. Il n'était pas marié mais

9 il ne s'agit pas là des événements qui doivent être considérés comme des

10 circonstances atténuantes et d'éléments relevant de sa situation

11 personnelle.

12 Il y a d'autres éléments qui ont été évoqués par mon éminent confrère dans

13 son mémoire. Il a parlé de l'âge, il a parlé de l'âge qu'il aurait s'il

14 sortait de prison après une longue peine. Nous faisons valoir, quant à

15 nous, que ce facteur ne doit pas être porté à son crédit. Rien ne nous

16 invite à le faire. Ce n'est pas quelqu'un d'âgé, cet accusé. Il était jeune

17 au moment où il a commis les crimes et il est toujours un homme, un adulte

18 dans la pleine force de l'âge,

19 en son style inimitable.

20 Mon confrère de la Défense fait référence à l'acte d'accusation, nous dit

21 que cet acte d'accusation a une histoire fort complexe. Je n'ai pas

22 l'intention de me lancer dans une polémique à ce sujet personnellement.

23 Mais l'acte d'accusation lui-même, l'acte d'accusation que vous avez sous

24 les yeux, c'est un acte d'accusation qui a été peaufiné. Au début, c'était

25 un acte qui comptait un grand nombre de chefs d'accusation, 80 environ mais

Page 474

1 on a diminué suite à un grand travail, on a diminué ce nombre de chefs à 8

2 et ensuite 4. Et moi j'estime que c'est un processus d'amélioration qui va

3 dans l'intérêt de tout le monde, l'Accusation, Défense, et j'irais même

4 jusqu'à dire dans l'intérêt également des Juges.

5 Il faut que je parle également de l'accord de plaidoyer qui a été conclu

6 avec l'accusé. Vous savez, Mesdames et Messieurs de la Chambre, qu'une

7 disposition prévoit, de manière explicite que vous n'êtes nullement tenus

8 de respecter un accord de plaidoyer. Cependant, un accord de plaidoyer,

9 c'est quelque chose auquel on fait référence dans le règlement. On parle

10 également des recommandations faites s'agissant de la peine. Mais là il est

11 également précisé que vous n'êtes pas tenus de respecter ces

12 recommandations et tout le monde le comprend bien. Lorsque le moment est

13 venu de déterminer la peine, il appartient aux Juges et aux Juges seuls de

14 le faire. Cependant, il est important de se souvenir que dans cet -- en

15 l'espèce il y a eu accord de plaidoyer entre les parties et que dans le

16 cadre de cet accord de plaidoyer, l'accusé a plaidé coupable, M. Nikolic a

17 plaidé coupable.

18 Si l'on examine les conditions, les termes de cet accord de plaidoyer, j'ai

19 déjà mentionné que nous avions fait un certain nombre de réserves,

20 s'agissant des recommandations faites par nous-même. Ceci nous l'avons déjà

21 souligné et nous estimons que c'est important. Et quand vous disposerez des

22 éléments requis, vous serez en mesure de déterminer si les déclarations de

23 l'Accusation, au sujet de la coopération garantie et fournie par M.

24 Nikolic, si ces déclarations nous montrent que nous avons eu affaire à une

25 coopération sérieuse et étendue.

Page 475

1 Si l'on tient compte des circonstances aggravantes, des circonstances

2 atténuantes, telles quelles sont apparues au fil de cette procédure, et si

3 l'on tient compte de la coopération, nous -- quant à nous, nous avons

4 recommandé une peine de 15 ans. Ceci figurait dans l'accord de plaidoyer et

5 aujourd'hui, je souhaite vous dire que nous maintenons cette recommandation

6 quant à la peine.

7 J'en ai terminé de mon intervention.

8 Questions de la Cour :

9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je souhaiterais vous poser deux

10 questions sur le fond et une question de nature juridique.

11 Ma première question est de savoir s'il y a eu coopération entre

12 l'Accusation et l'accusé avant l'accord de plaidoyer ?

13 M. YAPA : [interprétation] Je vous dirais que -- je pourrais qualifier les

14 relations que nous avions de relations cordiales, mais je ne pourrais pas

15 qualifier ces contacts de coopération. Tout ce que je peux dire, c'est que

16 les relations que nous avions n'étaient nullement hostiles, mais je ne peux

17 pas dire qu'il y avait véritablement coopération.

18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Deuxième question, est-il exact de

19 dire que le plaidoyer de culpabilité et l'accord de plaidoyer ont été fait

20 alors que des témoins avaient déjà été cités à comparaître à La Haye. Ces

21 témoins se trouvaient d'ailleurs à La Haye pour déposer, n'est-ce pas ?

22 M. YAPA : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien, maintenant je vais passer à

24 ma question d'ordre juridique, l'acte d'accusation compte quatre chefs, et

25 comme nous en avons parlé lors d'une réunion 65 ter, nous rencontrons

Page 476

1 certaines difficultés qui résultent de la jurisprudence du Tribunal. Nous

2 avons un chef, le chef de persécutions, dans lequel il est reproché à M.

3 Nikolic et il l'a d'ailleurs reconnu, on lui reproche d'avoir commis ce

4 crime. Il reconnaît avoir persécuté des Musulmans et des non-Serbes en les

5 soumettant à des actes de meurtres, de viols et de tortures. Les autres

6 éléments, qui sont considérés comme des actes de persécutions, ne nous

7 concernent pas pour l'instant. Cependant si on prononçait une condamnation

8 cumulée pour persécution, cela serait une solution. La persécution étant

9 constitué de ces différents actes de meurtres pour avoir persécutions qui

10 résulte de plusieurs actes de meurtres, persécution résultant de plusieurs

11 actes de viols, persécution résultant de -- ou plutôt de tortures et

12 persécutions qui ont été commises dans le cadre -- étant donné que

13 "l'accusé a aidé, a encouragé à la perpétration de violences sexuelles"; et

14 ceci serait le troisième point.

15 Ma question est la suivante : Est-ce que l'Accusation reconnaît que vu la

16 jurisprudence du Tribunal, la solution appropriée serait que la persécution

17 et les chefs deux, trois et quatre soient inclus dans le cadre d'une seule

18 déclaration de culpabilité. Et puis il y aurait également la persécution,

19 quand les persécutions sont incluses avec cependant, des éléments de crimes

20 additionnels en cas d'intention discriminatoire.

21 M. YAPA : [interprétation] Je souhaiterais répondre à votre question mais

22 est-ce que je peux revenir à ce que j'ai dit au sujet de notre accord de

23 plaidoyer, la peine que nous recommandons. Nous recommandons une peine de

24 prison de 15 ans, une peine globale et nous avons, pour ce faire, tenu

25 compte des crimes pour lesquels l'accusé a plaidé coupable. Notre

Page 477

1 recommandation n'a pas trait à chacun des chefs, elle a trait à la totalité

2 de la peine à prononcer.

3 Pour ce qui est du chef d'accusation de persécution, inclus le meurtre, les

4 violences sexuelles, et les autres qui prend l'objet, dans cet acte

5 d'accusation de chefs d'accusation distincts, cette inclusion, cette

6 incorporation peut être pratiquement, concrètement n'est pas la bonne

7 solution, cependant ceci est prévu dans le chef de persécutions. Il y a

8 d'autres éléments qui sont mentionnés, transfert forcé par exemple,

9 détention, atmosphère de terreur, et cetera. On ne les prend pas en compte

10 des charges distinctes comme des crimes distincts. Donc si vous avez

11 l'intention d'omettre les meurtres et tous les autres crimes qui font

12 l'objet de chefs d'accusation distincts, il reste quand même des éléments

13 constitutifs du chef de persécution. C'est-à-dire que la persécution en

14 tant que telle, c'est un crime, c'est une infraction distincte. Donc nous,

15 nous avons choisi de la présenter comme une infraction distincte, distincte

16 des actes de meurtre, de violence sexuelle, de viol et de torture. Donc si

17 on prend en compte les autres éléments constitutifs, détention, atmosphère

18 de terreur, transfert forcé, à ce moment-là, on peut effectivement déclarer

19 l'accusé coupable au titre de ce chef. Ceci tenant compte également du fait

20 qu'il a plaidé coupable de tous les autres chefs d'accusation.

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je pense que nous en sommes déjà

22 arrivés à la conclusion que les autres faits qui lui sont reprochés, les

23 autres crimes, si on garde la jurisprudence du Tribunal, sont considérés

24 comme des actes de persécution, constitutifs d'un acte de persécution,

25 atmosphère de terreur qui résulte des sévices infligés aux détenus, du

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1 transfert forcé, des violences sexuelles, des viols, des meurtres, et

2 cetera. Ceci, nul ne le contesterait. Mais il reste une question,

3 cependant, qui est de savoir s'il est possible de déclarer un accusé

4 coupable, deux fois d'assassinat pour plusieurs actes de meurtres ou

5 d'assassinat d'un côté, et ensuite, est-ce qu'il est possible de prononcer

6 une déclaration cumulative de culpabilité pour des actes de persécution.

7 Voilà la question qui nous intéresse.

8 M. YAPA : [interprétation] Je vous entend bien, Monsieur le Président.

9 C'est pourquoi je vous ai dit qu'il vous était loisible de déterminer ou de

10 décider de ne pas le déclarer coupable du chef de meurtre, parce qu'il a

11 effectivement commis un meurtre. Mais de le déclarer coupable au titre --

12 du titre du chef de persécution à cause des autres éléments constitutifs de

13 ce crime. Donc vous pourriez le déclarer coupable de meurtre au titre du

14 chef de meurtre. Je pense que cela ne sortirait pas de la pratique. Ce ne

15 serait nullement irrégulier.

16 C'est pourquoi je reviens aux recommandations que nous avons faites

17 s'agissant de la peine dans notre -- dans notre mémoire. Nous ne

18 recommandons pas qu'il soit condamné à 15 ans pour chaque chef

19 d'accusation, mais que cette peine soit prononcée de manière globale pour

20 la totalité des chefs d'accusation.

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.

22 Est-ce que mes confrères ont des questions à vous poser ?

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Monsieur le Juge Agius, oui.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur Yapa. Avez-vous des

Page 479

1 arguments à nous présenter au sujet de deux éléments qui m'intéressent. Il

2 y a un élément qui s'inscrit dans le cadre de la -- du concept du

3 châtiment. Et le deuxième élément relève de la raison d'être même du

4 Tribunal. La première question a trait à la réinsertion de l'accusé, qui

5 est un des objectifs de toute sanction, de tout châtiment. Et le deuxième

6 élément, c'est celui de la réconciliation, le rétablissement de la paix et

7 la réconciliation sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. Est-ce que vous

8 avez envisagé ces deux aspects de la question et est-ce que l'un ou l'autre

9 de ces éléments ont été pris en compte au moment de faire des

10 recommandations concernant la peine ?

11 M. YAPA : [interprétation] Oui, nous avons tenu compte de cela. Mais la

12 réconciliation doit de toute manière être prise en compte. Si le Statut le

13 prévoit, les résolutions de l'ONU la prévoient. C'est le facteur le plus

14 important dont il convient de tenir compte. Donc nous en avons,

15 effectivement, tenu compte.

16 S'agissant de la réhabilitation, de la réinsertion de l'accusé dans la

17 société, bien entendu, ça, ça concerne l'accusé. Et la façon dont le

18 plaidoyer a été formulé, les autres facteurs que j'ai mentionnés, ça

19 également c'est quelque chose qui convient d'avoir à l'esprit. Nous, dans

20 le cadre de notre recommandation, nous en avons tenu compte.

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il n'y a pas d'autres questions. Je

22 souhaiterais vous remercier, Monsieur Yapa, de ce réquisitoire fait, au nom

23 de la communauté internationale.

24 L'audience est suspendue jusqu'à midi.

25 --- L'audience est suspendue à 11 heures 33.

Page 480

1 --- L'audience est reprise à 12 heures 04.

2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous allons maintenant écouter la

3 plaidoirie de la Défense.

4 M. YAPA : [interprétation] Je vous prie de m'excuser de cet interruption

5 mais nous nous étions engagés de vous fournir des comptes rendus ou plutôt

6 les transcriptions de deux jours d'entretien, 25 et 26 septembre 2003. Et

7 la teneur de ces documents va vous donner une idée de la nature de la

8 coopération fournie par l'accusé. En tout ces entretiens ont eu lieu

9 pendant 10 jours. Mais là vous avez les transcriptions de deux journées

10 d'entretien pendant lesquelles nous avons abordé les questions que vous

11 savez.

12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que la Défense a

13 connaissance de ces documents.

14 M. MORRISON : [interprétation] On vient de me remettre un exemplaire. Bien

15 entendu, je n'ai pas eu le temps de faire quoi que ce soit à part de

16 compter le nombre de pages. Mais mon co-conseil était présent pendant toute

17 la durée des entretiens si bien que cela ne nous pose pas de difficulté.

18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je parts du principe que ces

19 documents sont confidentiels même si cela n'a pas été indiqué expressément.

20 M. YAPA : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Il n'y a pas d'autres

22 questions à régler. Donc je recommence et je redonne la parole à la

23 Défense, Maître Morrison.

24 M. MORRISON : [interprétation] Je ne sais pas si les juges ont eu la

25 possibilité de lire le livre de Faulkner sur "La rivière San Luis Rey."

Page 481

1 Dans ce livre on parle d'un religieux, d'un frère franciscain et un homme

2 saint. Il se trouve au Pérou au 16e siècle à côté de ce pont qui traverse

3 la rivière San Luis Rey. C'est un pont qui surplombe un abysse, un

4 précipice et ce personnage se trouve une colline avoisine sur laquelle il

5 observe les personnes qui sont en train de traverser en empruntant ce pont.

6 Ce pont s'effondre et un certain nombre de personnes se sont précipitées

7 dans cet abysse et meurent. Le frère est bouleversé par cet événement, et

8 il est persuadé que dieu l'a placé à destin à cet endroit pour assister à

9 cette scène et pour déterminer pour résoudre le mystère qui consiste à voir

10 pourquoi tous ces gens étaient là, à ce moment-là précis et pourquoi ils

11 sont morts dans cet accident. Et dans le reste de cet ouvrage, on nous

12 relate l'histoire de l'ensemble de ces protagonistes jusqu'au moment où ils

13 se rejoignent ce même jour à ce même moment sur ce pont au dessus de la

14 rivière San Luis Rey. Et ce livre est frappant parce qu'il nous rappelle

15 que parfois sans le vouloir, on peut se trouver au mauvais moment, au

16 mauvais endroit.

17 Et il convient également de se souvenir que ce religieux a consigné ces

18 réflexions dans un ouvrage qui a suscité la colère des autorités religieuse

19 qui ont voulu le condamner pour hérésie et là, je reprendrais la fameuse

20 formule qui consiste à dire qu'il ne faut pas tuer le messager.

21 Je ne vais pas entrer dans les détails de notre mémoire consacré à la

22 détermination de la peine, mais je vais commencer par en lire malgré tout

23 le premier paragraphe. Je cite :

24 "L'objectif de ce mémoire n'est pas de chercher à persuader le Tribunal de

25 prononcer une peine qui soit trop clémente. Cependant, il appartient à la

Page 482

1 Défense, à l'Accusation et à la Chambre ensemble d'agir dans l'intérêt de

2 la justice pour garantir que la peine prononcée remplisse les objectifs

3 d'une jurisprudence juste et équitable et reflète non seulement les

4 aspirations de trois entités à remplir leurs obligations, mais respecte

5 également la primauté du droit humanitaire international."

6 Et ceci correspond tout à fait aux arguments que j'ai à vous présentés.

7 Tous les tribunaux d'une manière ou d'une autre interviennent d'un exercice

8 de socialisation, mais on oubli trop souvent au jour le jour cet aspect. On

9 considère souvent les tribunaux comme des endroits où les gens sont

10 condamnés à telle ou telle peine. Mais même dans les plus petites instances

11 judiciaires, et ceci est encore plus vrai ici, en nous inscrivons dans le

12 cadre d'un tissu social et ceci touche à la raison d'être de notre

13 cohabitation en communauté nous les êtres humains. Et ce Tribunal on est un

14 exemple flagrant puisque le concept même de ce concept Ad hoc, de ce

15 concept du Tribunal Ad hoc ici ou à Arusha, le concept c'est qu'il faut

16 faire de ce que l'on peut pour revenir, pour essayer de remédier à ce qui a

17 été fait dans les pays concernés, des atrocités qui ont eu lieu dans ces

18 deux pays, dans ces deux régions Rwanda et ex-Yougoslavie.

19 En l'espèce, l'accusé a confessé ou a reconnu sa participation à des crimes

20 atroces. On ne peut le dire autrement. Il n'est pas facile de trouver des

21 circonstances atténuantes lorsqu'on prononce une peine pour une atrocité

22 quelle que soit la manière d'aborder cette atrocité, il reste une atrocité.

23 C'est pourquoi le mieux que l'on puisse faire lorsque l'on détermine les

24 circonstances atténuantes, c'est de se demander ce qu'a fait l'accusé pour

25 rendre ces atrocités moins pesantes, et il y a trois éléments qu'on

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1 rencontre ici. Le premier élément, c'est que l'accusé a plaidé coupable; le

2 deuxième élément, c'est le remord; et le troisième élément, c'est

3 l'intention qui est la sienne de contribuer de manière globale à la

4 réconciliation et par-là j'entends non seulement la réconciliation au sens

5 concret au sens pratique, c'est le Dr Grosselfinger qui on parle dans son

6 rapport, mais je pense à la réconciliation telle quelle est évoquée dans le

7 dernier paragraphe de l'annexe C du mémoire de l'Accusation. Tout ceci

8 s'inscrit dans ce même processus. Ces trois éléments en réalité font partie

9 intégrante de ce processus et sont liés.

10 Avant la guerre, Dragan Nikolic était un citoyen ordinaire qui menait une

11 vie ordinaire, jamais il n'a eu d'ennui avec la justice, il avait des

12 activités sociales normales. Il était apprécié de tous, c'était quelqu'un

13 qui était amical et à Vlasenica une ville à majorité musulmane. Il avait

14 des amis dans toutes les communautés. Si on traçait une ligne dans cet

15 espace du temps, où moment -- avant que lui-même et tous les intervenants

16 dans cette affaire n'aient traversé le pont sur la rivière Saint-Louis Rey,

17 rien n'aurait pu se passe. On peut envisager qu'il se serait marié, qu'il

18 aurait eu des enfants et qu'il aurait continué à travailler à la fabrique

19 Alpro. Il aurait fini ensuite par prendre sa retraite et aurait fini ses

20 jours dans cette même communauté et les choses se seraient poursuis pour

21 ainsi pendant des générations. Mais le pont s'est effondré et la vie dans

22 cette communauté n'a pas et ne sera jamais la même. On ne peut nullement

23 affirmer qu'il est responsable de l'effondrement de ce pont parce qu'il y a

24 des gens placé bien plus haut que lui dans la hiérarchie. Il y a des gens

25 qui étaient responsables des stratégies, des politiques adoptés, se sont

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1 eux qui sont responsables de ce qui se passé. Mais lui comme tous les

2 autres qui se trouvaient sur le pont, lui il se trouvait au mauvais moment,

3 au mauvais endroit. Et maintenant, il ne comprend pas ce qu'il a amené à

4 commettre ces atrocités, personne ne peut le comprendre, le mieux que l'on

5 puisse dire à ce sujet, c'est que tout au long de l'histoire on trouve des

6 exemples de personnes ordinaires placées dans des situations

7 extraordinaires. Et si ces personnes n'ont pas reçu la formation adéquate,

8 si elles ne sont pas assez mûres pour réagir de manière appropriée et si il

9 y a dans leur personnalité un caractère -- un aspect sombre, il risque de

10 se révéler à ce moment-là. Quand on regarde le comportement de Dragan

11 Nikolic, si on le présente sous forme de graphe, on voit que c'est une

12 ligne, une ligne horizontale jusqu'à la guerre et soudain au moment de la

13 guerre, cette ligne redescend et là on connaît -- on sait les atrocités qui

14 ont été commises. Puis lentement pas tout de suite, mais lentement, cette

15 droite faite adopte un ange de 45 degré pour revenir à l'horizontal. C'est

16 le processus qu'a suivi Dragan Nikolic au cours de ces 11 ans. Il n'y a là

17 rien de formidable, de magique, c'est tout ce qui s'est passé, simplement

18 tout ce qui s'est passé.

19 Je vais maintenant parler de plaidoyer de culpabilité. Lorsqu'il y a

20 plaidoyer de culpabilité dans cette affaire ou dans d'autre, il y a

21 toujours un certain nombre d'éléments qui entre en jeu. Au premier lieu,

22 l'honnêteté, la clairvoyance et la réinsertion personnelle, parce que

23 jusqu'au moment où quelqu'un -- avant de reconnaître ce qu'on a fait, on ne

24 peut pas dire qu'une personne qui a commis un crime ce soit réinsérée, ce

25 soit rachetée. Il a reconnu la reconnu la responsabilité de ces actions pas

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1 seulement ces actions à lui, il a reconnu la responsabilité de ces actions

2 pour tous ceux qui en ont été victimes. Et il a accepté sa responsabilité

3 et la nécessité de la sanction. Le remord c'est quelque chose de personnel

4 qui va peut-être moins loin mais qui est essentiel pour participer à ce

5 processus de réconciliation. Si on voit ce qui s'est passé en 1992 le

6 plaidoyer de culpabilité de mon client est essentiel pour la réconciliation

7 entre les communautés et cet acte s'inscrit dans le cadre de la création

8 par le conseil des Nations Unies de ce Tribunal puisque la réconciliation a

9 -- s'est vue octroyer une place prépondérante non seulement dans le statut,

10 dans le règlement de ce Tribunal mais dans de nombreuses affaires. C'est un

11 élément essentiel. Prononcé coupable des gens qui refusent absolument

12 d'admettre leur culpabilité cela ne fait que très peu avancer la

13 réconciliation -- certain -- il faut châtier, il faut punir ces gens mais

14 c'est tout ce que l'on obtient, il est possible que les victimes ressentent

15 une certaine satisfaction à voir leur bourreau, être puni, mais ça ne va

16 pas beaucoup plus loin que cela. Ce qui est absolument essentiel dans tout

17 Tribunal c'est que l'on mette en place les conditions qui permettent aux

18 accusés de plaider coupable lorsque ces accusés sont confrontées aux

19 preuves qui prouvent leur culpabilité et lorsque ces accusés après certes,

20 un certain passage du temps ont l'intégrité suffisante pour reconnaître

21 leurs actes et leurs responsabilités.

22 Puisque je parle de temps justement, je voudrais vous dire la chose

23 suivante. Nous savons ici que Dragan Nikolic a passé quelques trois ans au

24 quartier pénitentiaire avant de prononcer son plaidoyer de culpabilité.

25 Beaucoup de temps a été consacré à la fameuse question du male captus au

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1 moment où il a été fait prisonnier. Nous savons tout le temps qui a été

2 consacré à cette question je ne veux nullement critiquer la chose, c'est

3 simplement vous rappeler cet élément dans le contexte de l'historique de

4 cette affaire.

5 Ceci étant dit, tous ici, du côté de la Défense comme de l'Accusation

6 savent qu'environ 12 mois -- il y 12 mois il est apparu manifeste qu'il

7 était probable que mon client plaide coupable en l'espèce. Mais le chemin

8 parcouru n'a pas été un chemin aisé. Je ne sais, si les trois juges qui

9 sont ici dans le prétoire étaient présents lors de la réunion 65 ter du 2

10 septembre. Je sais en tout cas que Monsieur le Juge Schomburg était

11 présent, il y avait également Michael Johnson le chef des poursuites qui

12 était là, et il a dit en terme, on ne peut plus clair que le retard dans le

13 prononcé du plaidoyer de culpabilité n'était pas un retard qui était dû à

14 l'accusé mais qui était dû à d'autres éléments. Il a eu la courtoisie de

15 reconnaître cet élément et je m'appuie sur cette reconnaissance parce qu'on

16 affirme que mon client a plaidé coupable uniquement lorsque les témoins

17 étaient déjà là pour faire des dépositions. Ce n'est pas le cas. Ce n'est

18 pas de sa faute. Bien entendu, lui, il n'était pas en mesure de déterminer

19 à quel moment ces dépositions devaient être recueillies, il a fait ce qui

20 était à son pouvoir et ensuite d'autres se sont emparés du contrôle du

21 calendrier, donc si, il est affirmé que le plaidoyer de culpabilité a été

22 fait avec retard en raison des activités de l'accusé il faut absolument

23 rejeter cet argument.

24 Parce que le fait est que non seulement il a plaidé coupable mais qu'il a

25 plaidé coupable sainement. Il ne s'agit pas ici d'une sorte d'arrangements,

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1 d'une sorte de troc, une pratique qui n'existe pas vraiment au Royaume Uni,

2 mais qui existe beaucoup aux

3 Etas-Unies. Ce qui se passe c'est la chose suivante. On confronte une

4 personne à multiples charges et on lui dit, on lui offre la possibilité de

5 plaider coupable pour certains de ces crimes bien qu'on sache qu'il soit

6 responsable de la totalité de ces crimes.

7 Et pour éviter un procès qui risque d'être long et très coûteux

8 l'Accusation accepte de reconnaître, accepte un plaidoyer de culpabilité

9 partiel. Or, ici, nous ne sommes pas du tout dans le même état de figure.

10 Bien que l'acte d'accusation initial a été réduite de 88 à 4 chefs

11 d'accusation, la réalité c'est la gravité des infractions est reflétée

12 aussi bien par ces quatre chefs d'accusation que par les 88 qui existaient

13 au départ. Mon éminent confrère de l'Accusation l'a reconnu et mon client a

14 plaidé coupable au titre de la totalité de l'acte d'accusation, il n'a

15 jamais essayé à minimiser sa responsabilité. Il a été proposé qu'il plaide

16 coupable uniquement au titre de la persécution afin d'éviter les cueilles

17 des déclarations de culpabilité multiples et des peines multiples ou

18 cumulées.

19 Mais je dois dire que ce n'est pas une suggestion qui a été faite par la

20 Défense plutôt c'est une suggestion qui n'a pas été -- qui n'a pas été

21 acceptée par l'Accusation, bien que l'Accusation a été représentée par des

22 Procureurs différents que ceux que nous avons ici aujourd'hui. Et nous

23 avons finalement décidé qu'il valait mieux qu'il plaide coupable pour la

24 totalité de chefs d'accusation plutôt que de se bloquer, puisqu'en face on

25 n'était pas prêt à accepter notre proposition s'agissant du chef de

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1 persécution. Voilà donc les faits tels qu'ils sont.

2 Je souhaiterais vous demander très brièvement de consulter notre mémoire

3 préalable au prononcé de la peine, page 8, dernier paragraphe. Je cite :

4 "Nous faisons valoir que le plaidoyer -- un plaidoyer de culpabilité, la

5 reconnaissance de la culpabilité, la [imperceptible] que cela implique

6 allié aux désirs de coopérer de manière effective avec le Procureur du

7 Tribunal est d'une importance considérable pour permettre des pays grecques

8 d'arriver à ces objectifs et c'est également dans l'intérêt du droit pénal

9 international en général." Ce que je veux dire par là, c, est qu'une telle

10 attitude doit être encouragée et doit entraîner une réduction nette de la

11 peine prononcée. Et je pense ici à une peine qui serait prononcée s'il n'y

12 avait pas un plaidoyer de culpabilité. Il convient de reconnaître la valeur

13 de plaidoyer de culpabilité ainsi de la coopération. Pour encourager que

14 d'autres le fassent, d'autres accusés le fassent. Car l'histoire nous a

15 montré que lorsque quelqu'un fait quelque chose et bien cela est suivi par

16 d'autres en bien ou mal, l'histoire nous a donné de nombreux exemples

17 d'hommes animés de mauvaises intentions qui ont été suivies d'autres. Mais

18 il apparaît quant quelqu'un fait quelque chose d'utile de positif souvent

19 cela est suivi par d'autres. Et moi, je pense qu'on peut espérer que

20 d'autres prendront exemple sur mon client et auront le même courage que

21 lui. Et il reconnaît l'importance de son acte et espère que d'autres

22 suivront son exemple et en comprendront l'importance.

23 Le remords, maintenant. Dans le rapport du Dr Grosselfinger le remords est

24 présenté et évoqué, et mon avis à son sujet est la chose suivante. J'espère

25 que ceci soit bien compris. Nous avons ici affaire à quelqu'un de

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1 professionnel, de qualifier qui reconnaît bien entendu qu'il est possible

2 pour quelqu'un de la tromper mais elle a déclaré que c'était très peu

3 probable en l'espèce, et qu'il faudrait vraiment être un acteur de premiers

4 ordres pour lui faire prendre -- pour la tromper à ce sujet puisqu'elle a

5 quelque dix ans d'expérience en tant qu'agent chargé du respect de la

6 liberté conditionnelle. Et les personnes qui ont ce type d'activités

7 professionnelles sont souvent -- sont des personnes qui sont très

8 difficiles à tromper. Donc c'est cette femme, c'est une professionnelle qui

9 nous a dit qu'il était très peu probable que mon client lui ait raconté des

10 mensonges. Et ceci est confirmé par le fait qu'il ait plaidé coupable et

11 par le fait qu'il ait fourni une coopération dont nous savons qu'elle a été

12 étendue et significative.

13 Je ne veux pas entrer dans les détails du rapport du Dr Grosselfinger. Il

14 ne s'agit pas d'un document qui a été fourni par la Défense, mais nous

15 adoptons ce document, car nous estimons que c'est un document qui est

16 précieux et qui démontre la -- et dont personne ne conteste la réalité et

17 la teneur.

18 Et il est indéniable que, depuis qu'il a plaidé coupable, l'accusé a fait

19 tout ce qui était en son pouvoir, bien qu'il soit en prison, pour essayer

20 de réparer des ponts. Vous disposez du droit relatif aux peines, qui est

21 appliqué en ex-Yougoslavie, je l'ai indiqué dans mon mémoire. L'Accusation

22 et la Défense ne s'opposent pas à ce sujet. Nous savons quelle était la loi

23 qui a été applicable en 1992. On la retrouve dans la jurisprudence du

24 Tribunal, et je ne vais pas me lancer dans un discours au sujet de la

25 jurisprudence du Tribunal ni sur le droit de procédure et sur la procédure

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1 de fond. Mais simplement, je souhaiterais vous rappeler les dernières

2 peines prononcées.

3 Il s'agit ici, contre un certain nombre de cas contre détenus y compris

4 cinq meurtres. C'est tout à fait impossible de comparer une affaire à une

5 autre. Mais tout ce que je peux dire est la chose suivante. Il faut tenir

6 compte du fait que la sentence recommandée dans le cadre de cette affaire,

7 et bien sûr à la lumière des faits, et évidemment eu égard à d'autres

8 affaires, représente deux fois la peine fixée dans d'autres cas. Et je

9 crois qu'ici nous sommes tout à fait dans le cadre étendu de peines déjà

10 prononcées par ce Tribunal et tout à fait dans le cadre des peines

11 appliquées en 1992 en ex-Yougoslavie. Le principe de lex mitior étant

12 appliqué ici. Et bien évidemment, également dans le cadre, le contexte

13 d'après le témoignage du Dr Sieber, il y a certain nombre de jurisprudences

14 assez significatives.

15 Et nous avons les témoins de personnalité. Nous avons différents témoins.

16 L'effet qu'ils ont eu est quelque chose qui doit être décidé par le

17 Tribunal. Et ils sont venus dire et rapporter leurs impressions à propos de

18 l'accusé. Ce n'est pas un choix -- que de venir témoigner devant ce

19 Tribunal et remplir au mieux de leur capacité. Néanmoins, ils ont permis

20 d'établir deux choses. Ils ont permis de souligner le fait suivant. Avant

21 les événements de 1992, Dragan Nikolic était un homme sans faille. Autre --

22 il a battu sa propre coupe et il ne rend personne d'autre responsable. Il

23 sait très bien qu'il est responsable.

24 Et ensuite, après la guerre, après -- nous sommes sur cette courbe à 45

25 degrés. C'était un homme en Serbie -- lorsqu'il était en Serbie, sa

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1 cousine, Ljiljana a pu dire des choses agréables à son sujet. Bien sûr, on

2 pourrait rétorquer que c'est tout à fait normal puisque c'est sa cousine.

3 Mais pourquoi devrait-elle tenir de tels propos concernant cet homme alors

4 -- devant un Tribunal, alors qu'elle pouvait être ridiculisée, si ses dires

5 n'étaient pas exacts. Et personne n'a suggéré que ce qu'elle pouvait dire

6 ne correspondait pas à la vérité. Par conséquent, si nous considérons qu'il

7 s'agit d'un homme qui est descendu dans l'arène et qu'il a, en partie,

8 grâce à ses propres efforts et grâce à l'effet du temps, revenu à l'état

9 qui était le sien avant ces événements, alors il s'agit d'une question très

10 complexe auquel [sic] la Chambre doit trouver une solution.

11 Il est vrai que son âge est un facteur important. Et je crois qu'il ne

12 serait pas approprié de ne pas en tenir compte. Un homme de 70 ans qui est

13 condamné à dix ans de prison, cela correspond certainement à une peine de

14 prison à perpétuité. En revanche, un homme de 20 ans qui est condamné à dix

15 ans, cela est autre chose. Mais Dragan Nikolic n'est pas entre ces deux

16 cas, mais plutôt du côté du premier cas. Et la peine recommandée par le

17 Procureur représente un part important du reste de sa vie. Et vous avez

18 certainement vu la graphique présentée par l'OMS, et cela correspond à

19 quelques 16 années de vie en pleine santé qui lui restent -- 60 ans -- 16

20 ans de vie en bonne santé. Bien sûr, cela pourrait être de moins. Peut-être

21 que cela pourrait être plus. C'est une moyenne. C'est une peine assez

22 courte.

23 Ce n'est pas quelque chose qui a été décidé à l'improviste. Il s'agit d'une

24 recommandation qui a été faite, suite à une analyse très approfondie de la

25 part des Juges et des deux parties. Il s'agit d'une recommandation qui est

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1 censée, qui est mûrie, tenant compte de son plaidoyer, tenant compte de son

2 remords et tenant compte de son esprit de coopération. Et si on ne tient

3 pas compte de ces éléments, nous sommes alors tous, d'une manière ou d'une

4 autre, nous serons tous les perdants dans cette affaire.

5 Je vais demander, dans très peu de temps, à Dragan Nikolic, de faire une

6 déclaration portant sur des choses que j'ignore pour l'instant puisque cela

7 viendra de lui. Je sais qu'il s'agit principalement de son remords.

8 Et ce que je demande à la Chambre, c'est la chose suivante : Vous ne pouvez

9 pas repartir en arrière et prendre du recul vis-à-vis des atrocités

10 commises et lorsque vous avez le spectacle devant vous des personnes qui

11 ont pris part à l'effondrement de ce pont. Néanmoins, je crois qu'il faut

12 comprendre que nous pouvons prendre part au processus de reconstruction.

13 Merci.

14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci, Maître Morrison. Puis-je

15 demander à l'Accusation si elle souhaite répondre à ces propos.

16 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

17 M. YAPA : [interprétation] Non, je vous remercie, le Président, ce n'est

18 pas le cas.

19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je crois que le moment est venu

20 maintenant --

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Mme la Juge Mumba a une question à

23 poser à Me Morrison.

24 Questions de la Cour :

25 Mme LA JUGE MUMBA : [interprétation] Merci. Maître Morrison, j'ai bien tenu

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1 compte de ce que vous avez dit, les arguments concernant la personnalité de

2 l'accusé. En particulier, lorsque vous avez fait allusion qu'au fait

3 qu'avant le camp de Susica et les incidents qui ont eu lieu, c'était une

4 personne droite et qui n'avait aucun casier judiciaire. Mais dans sa

5 conduite personnelle, lorsque vous regardez le rapport d'expert de Mme

6 Grosselfinger, le passage qui évoque l'accusé lui-même, et d'après le

7 document que j'ai sous les yeux, à la page 4. Ceci a été -- nous parlons

8 ici du début de sa carrière dans le camp, au 2e paragraphe.

9 Et elle précise dans son rapport que : "D'après l'accusé, il a été

10 mobilisé, il devait agir comme garde et devait s'assurer de la garde de ces

11 détenus musulmans. Il devait empêcher les détenus de fuir et il était

12 responsable de leur sécurité et il devait contrôler leurs allées et

13 venues."

14 Et nous avons consigné dans ce rapport et la façon dont il comprenait sa

15 responsabilité dans ce camp. Nous avons également établi que son propre

16 frère dans le camp, qui était avec lui, qui l'implorait de cesser les

17 passages à tabac, ce qui signifie que cela ne faisait pas partie intégrante

18 de sa fonction, même si c'est la façon dont lui-même interprétait, d'après

19 ce rapport, de frapper les détenus et de les traiter mal d'une manière ou

20 d'une autre, hormis le fait qu'il devait les empêcher de quitter le camp.

21 Et si nous mettons cet argument de côté et que nous regardons maintenant

22 le rapport de M. Sieber, d'après ses conclusions et la détermination des

23 peins en ex-Yougoslavie, il a bien évidemment dit aux Juges, que c'étaient

24 aux Juges d'en décider, si nous allons évidement regarder la grille des

25 peines qui s'applique à l'année 1993 -- 1992 ou 2003. Jusqu'en 1992 et en

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1 Bosnie-Herzégovine en particulier, une peine d'emprisonnement à vie est

2 quelque chose comme 20 ans, qui était appliquée dans les cas les plus

3 graves.

4 Et si nous passons à l'année 2003, maintenant et quelques années précédent

5 l'année 2003, la fin des années 1990, au moment du changement de la loi

6 dans les différentes républiques, la période d'emprisonnement augmente et

7 jusqu'à -- et quelques 45 années. Ce qui signifie qu'en ex-Yougoslavie, en

8 particulier en Bosnie-Herzégovine, les crimes graves ont été considérés

9 comme nécessitant une peine d'emprisonnement plus longue. C'est un principe

10 de lex mitior qu'il s'agit de considérer quand les peines d'emprisonnement

11 sont plus longue et -- mais la tendance s'est accrue ici et c'est

12 intéressant de constater que telle a été la pratique dans le pays d'où

13 vient l'accusé.

14 Il était également intéressant de constater que l'accusé avait 35 lorsqu'il

15 était dans le camp de Susica, c'est un homme mûr, c'est un adulte, c'est un

16 homme qui est censé être responsable. Il avait lui-même perdu son père

17 lorsqu'il avait environ 23 ans. Et par conséquent, il savait ce que cela

18 signifiait que de grandir sans un de ses parents. Il avait sa mère, sa

19 sœur, il comprenait très bien les liens familiaux et comprenait très bien

20 la valeur de tels liens familiaux. Néanmoins, à l'intérieur du camp il

21 comprenait qu'il devait s'assurer de la sécurité dans le camp, il devait

22 s'assurer que les détenus musulmans ne quittent pas le camp. Il part de son

23 propre gré, il n'y a pas des ordres -- des ordres ne lui ont pas été

24 donnés. En tout cas ceci n'a pas été établi et contre le vœu de son propre

25 frère, il fait preuve d'une cruauté indicible. Il fait sortir, il frappe

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1 les gens à mort, il sort les femmes en sachant qu'elles vont être abusées

2 et il les emmène avec d'autres gardes. Et pour quelques une des victimes,

3 la première -- les premières victimes, elle n'y a passé que très, très peu

4 du temps. Il y avait de telles violences qu'elle a pu voir, en espace de

5 très peu de temps, certaines de ces victimes étaient des enfants, et des

6 enfants -- adultes. Et hier, lorsque la victime a précisé qu'elle ne peut

7 plus avoir un lien avec son fils qu'elle avait auparavant, que cela a été

8 rompu.

9 Ceci m'inquiète beaucoup car quand bien même l'Accusation a recommandé une

10 peine de 15 ans et l'Accusation a tenu compte de tous les faits qui étaient

11 avancés dans le cadre de cette affaire -- tous les éléments qui ont été

12 avancés dans le cadre de cette affaire, la détermination de la peine, la

13 réinsertion, le châtiment peut-être aussi, néanmoins cela me préoccupe

14 beaucoup, car il me semble que l'accusé semble être une personne cruelle.

15 Il a saisi cette occasion, il avait été mobilisé, placé dans ce camp et a

16 fait preuve d'une très grande cruauté et sans aucune raison apparente,

17 ayant compris qu'il devait assurer la sécurité dans le camp. Je vous expose

18 par conséquent les sujets de préoccupations qui sont les miens.

19 M. MORRISON : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, je

20 crois qu'il s'agit là des préoccupations de tout un chacun. Et je vous

21 remercie, Madame la Juge Mumba de les avoir mentionnées. Et comme il s'agit

22 des préoccupations de tout un chacun, ils sont consignés dans l'acte

23 d'accusation. Et deuxièmement, c'est l'accusé lui-même s'est inquiété de

24 cela depuis qu'il a pu le faire.

25 Nous parlons ici d'actes de cruauté, il s'agit véritablement de cruauté

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1 d'un homme qui est âgé de 35 ans et sur une période de trois à quatre mois.

2 Si vous observez cet homme dans une situation sociale normale, il sortait

3 le soir, il frappait les gens, il les tuait, lorsqu'il vivait dans une vie

4 -- lorsqu'il vivait au sein d'une communauté, il avait une vie sociale,

5 normale et équilibrée. Vous pensez à ce moment-là que cet homme est un

6 psychopathe, si vous le voyez agir ainsi.

7 Si vous prenez le cas d'un homme, qui commis ce genre de crimes dans le

8 contexte de la maladie mentale, de la folie, et d'un conflit ethnique qui

9 n'était pas utile de part et d'autre, il s'agit d'atrocités commises qui

10 ont été -- de part et d'autre non seulement par Dragan Nikolic mais par des

11 centaines ou des milliers de personnes à Vlasenica, dans cette communauté.

12 C'est la seule personne contre laquelle un acte d'accusation a été rédigé.

13 Il s'agit d'un accord ici entre l'Accusation et la Défense de dire qu'il y

14 a bon nombre d'autres personnes de cette région qui sont toutes aussi

15 coupables que Dragan Nikolic et qui ne se sont pas inquiétées à Vlasenica

16 et contre lesquelles on ne pourrait aucunement dire qu'il s'agit de

17 psychopathes. Et ces personnes sont également coupables au plan moral.

18 Elles ne sont pas encore coupables au plan juridique car elles n'ont pas

19 été poursuivies par la justice, mais les choses changeront peut-être à

20 l'avenir. Et tout ce que je peux dire à cet égard, c'est la question

21 suivante. Comment la société va-t-elle répondre de cela, de personnes qui

22 sont responsables sans devoir évidement traiter correctement la question de

23 gens comme Dragan Nikolic ? Il est très important de répondre à ces

24 questions à la question que vous avez soulevée, Madame la Juge Mumba.

25 Ces actes portent sur un cours laps du temps, il y a 11 ans, une période

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1 pendant laquelle il a fait preuve d'une extraordinaire cruauté. Cela il le

2 sait parce qu'il a plaidé coupable. Il s'est amendé et il va tenter de

3 s'amender davantage. Bon nombre de personnes ne l'ont pas fait et ne le

4 feront peut-être jamais, et cela est fort triste. Mais lui va faire de son

5 mieux.

6 Pour ce qui est de la réintégration sociale au fil des ans, et bien, c'est

7 exactement le principe ici de la lex mitior qui pourrait servir de

8 fondement au plan de la jurisprudence puisque les normes changent. Et on ne

9 modifie pas les normes en fonction d'un comportement ancien parce que cela

10 est tout à fait injuste. Je vais vous donner un exemple beaucoup plus

11 tragique en 1990, un agissement malhonnête et illégal a été frappé d'une

12 peine sans emprisonnement. Et dix ans plus tard, la société décide que le

13 même acte était un acte horrible qui mérite la peine de mort. Personne

14 n'envisage, à ce moment-là, de revoir la peine de mort. Et les mêmes

15 principes s'appliquent à tout le monde. C'est comme ça qu'on peut répondre

16 à la question de la réintégration sociale.

17 Mais je souhaite soulever un autre point : La réintégration sociale -- ce

18 qui s'est passé en 1992 sur le plan de l'échange entre les différentes

19 sociétés, c'était de la folie. Il s'agissait de la purification ethnique.

20 Ce dont il s'agit ici, il s'agit de reconstruction au plan social. Il

21 s'agit de quelque chose de complètement différent. Il s'agit de

22 reconstruire les ponts, et en l'absence de personnes qui pourront aider à

23 cette reconstruction et qui reconnaissent leur culpabilité. Ce faisant, il

24 sera très difficile de reconstruire les choses et de construire ce pont. Et

25 j'avance que ceci ne pourra jamais se faire à moins que des gens comme

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1 Dragan Nikolic ne soient là pour le faire.

2 Et ceci n'a pas été évoqué lors des écritures initiales, mais je soulève ce

3 point -- le point qu'a soulevé Mme la Juge Mumba. Ce qu'il a fait dans ce

4 camp était épouvantable. Il a ignoré les conseils de son frère. Ceci était

5 tout à fait bête de sa part. Mais je peux vous donner d'autres exemples. Il

6 ne s'agit pas d'une cruauté aveugle. Il s'agissait d'actes, il est vrai,

7 qui sont relativement banals comparés à d'autres actes criminels. Il a

8 distribué des vivres dans le camp au -- pour lesquelles ces vivres avaient

9 été apportées. Il y en avait d'autres qui l'auraient empêché. Et lorsque

10 ces personnes étaient là, pour s'assurer que cette nourriture-là soit

11 donnée, et ceci a été établi par un témoin à charge, il a ordonné la

12 distribution de lait aux enfants, et il aurait pu l'empêcher. Cela était

13 également établi par un témoin de l'Accusation. A une reprise, il a permis

14 à ce que des enfants aient une couverture et un oreiller. D'autres

15 personnes leur en auraient empêché. Donc même si le portrait de cet homme

16 est un portrait peu favorable, cela n'a duré que quatre mois. Il y avait

17 également -- il a fait preuve de gentillesse quelques fois.

18 Je ne peux pas vous dire davantage.

19 Mme LA JUGE MUMBA : [interprétation] Merci.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Le Juge Agius, avez-vous des

22 questions ?

23 Si tel n'est pas le cas, nous allons retourner au dernier chapitre de

24 l'audience portant sur la condamnation. Il s'agit en fait du système

25 civiliste qui aura le dernier mot. Et si c'est la coutume que l'accusé

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1 puisse avoir le droit de faire une déclaration à la fin de l'audience, une

2 déclaration auquel [sic] personne ne peut ajouter des questions. C'est sa

3 déclaration qui terminera cette audience. J'apprécierais que M. Nikolic

4 puisse s'asseoir comme le font d'habituellement les témoins, de façon à ce

5 qu'il puisse lire sa déclaration avec plus de facilité. Par conséquent, je

6 vais demander à ce que Monsieur Nikolic, s'il vous plaît, vous vous

7 asseyez ici devant moi.

8 Monsieur Nikolic, vous pouvez vous asseoir, je vous en prie. Dans votre

9 déclaration, vous pouvez aborder toutes les questions que vous souhaitez.

10 La parole est à vous. Je vous en prie. Vous pouvez faire votre déclaration.

11 Prenez place.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

13 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je suis pleinement

14 conscient de ce qui m'est reproché et je suis conscient des faits que j'ai

15 commis. Je l'ai reconnu, point par point, chef par chef, lorsqu'on m'a

16 donné lecture de ce texte. J'ai plaidé coupable, et je suis prêt à assumer

17 toute la responsabilité qui correspond aux actes que j'ai commis.

18 Comment donc --quel état -- qu'est-ce que j'éprouve quant à ce que j'ai

19 fait pendant cette période des trois mois que j'ai passés à Susica ? Je

20 suis le seul à le savoir. Mais ce qui est essentiel, c'est que j'éprouve

21 réellement une honte, une grande honte. En plus de tout ce qui a été dit

22 ici, et bien, à Susica, moi, je me suis retrouvé d'un côté, en uniforme,

23 armé. Et puis en face de moi, il y avait des femmes qui avaient l'âge de ma

24 mère, il y avait des enfants et il y avait aussi mes camarades, mes

25 copains, ceux avec qui j'ai passé des années à faire du sport ensemble, à

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1 les fréquenter dans des cafés, à passer des vacances d'été ensemble. Et

2 lorsqu'on y songe, réellement, et bien, cela tourne à une sorte de

3 cauchemar lorsque vous pensez à toutes ces images, ces visages, à ces

4 événements, à tout ce qui s'est produit. Et souvent, la question que je me

5 pose, c'est de savoir pourquoi et comment ? Et j'ai eu beaucoup de temps,

6 11 ans, 11 années se sont écoulées depuis. Mais j'ai du mal à répondre à

7 ces questions.

8 Moi, très sincèrement, je n'ai jamais éprouvé le besoin de me plaindre, car

9 je n'avais pas 15 ans à l'époque, j'étais un homme mûr. Et si j'ai éprouvé

10 le besoin de plaindre quelqu'un, et bien, c'était les victimes. Pas

11 seulement mes victimes directes, mais aussi leurs proches et aussi tous ces

12 gens qui se sont trouvés à Susica, et il y en a eu beaucoup. Ils sont tous

13 victimes.

14 Que puis-je en dire ? Ce que je peux dire, c'est que j'éprouve des remords

15 très sincères à cause de tout cela. Réellement, j'éprouve des remords. Je

16 ne le dis pas pour la forme. Je sais très bien ce que j'éprouve, et ce

17 remord, je l'éprouve de manière très profonde, car pour la grosse majorité

18 de ces gens, et bien, je dois dire que je les connaissais. Je -- nous avons

19 grandi ensemble. Il y avait parmi eux des voisins aussi, enfin des gens qui

20 étaient mes voisins. Et je tiens à saisir cette occasion pour ce qui est de

21 toutes ces victimes, et comme je l'ai déjà dit, mes victimes directes. Les

22 victimes dans la vie ont été influencées par mes actes. Donc je tiens à

23 leur exprimer mes plus profondes excuses. Et tous ceux qui se sont trouvés

24 à Susica, ne serait-ce qu'un jour, un mois ou plus de temps, et bien, je

25 leur présente mes excuses.

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1 Je souhaiterais aujourd'hui que ces victimes, si possible, voient que mes

2 remords et mes excuses sont sincères, adressées à eux tous, même ceux qui

3 n'ont pas été détenus au camp de Susica et qui sont aujourd'hui dispersés

4 de par le monde. Et c'est la conséquence de ce conflit et ces expulsions et

5 leurs départs -- leurs expulsions sont dus à ce conflit et non pas la

6 possibilité de retourner dans leurs foyers de retrouver le reste.

7 Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge, je suis conscient du fait

8 que je passerais beaucoup de temps en prison, mais aussi j'espère que le

9 moment viendra où je serais sorti de prison.

10 Ce que je souhaite c'est de revenir à Vlasenica. Je souhaite faire ce qui

11 est à mon pouvoir si cela est possible, faire en sorte que ces gens

12 retourne chez eux que les gens revivent ensemble. Et à aucun moment je ne

13 souhaiterais constituer une menace à pour qui que ce soit. Je m'y rendrais

14 et même si à un moment donné je devais avoir l'impression que

15 j'embarrasserais, que je gênerais quelqu'un et bien je serais prêt à

16 repartir. Je peux aller m'installer chez des parents mais aussi je veux

17 revenir et tant que je vivrai j'y reviendrais jusqu'à ce que j'ai

18 l'impression de ne plus constituer une gêne, une entrave à la vie de ces

19 gens pour que finalement une nouvelle vie puisse recommencer dans cette

20 ville qui n'a pas été détruite en fait.

21 J'ai fait mes aveux et comme mon conseil l'a dit, j'espère que d'autres

22 suivront mon exemple d'autres de quelques côtés qu'ils soient, et j'espère

23 que cela les encouragera à assumer leurs responsabilités, tous ceux qui ont

24 commis des actes atroces car ce n'est que comme cela qu'il sera possible de

25 rétablir une cohabitation des peuples dans ces contrés. Il faudra du temps

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1 pour cela. Nous tous qui avons pris part directement à tout cela et bien il

2 nous faut comprendre que nous avons été un facteur important ou plutôt que

3 nous serons un facteur important dans cette réconciliation et le

4 rétablissement de la vie commune. Et ce Tribunal y joue un rôle important

5 également et ce que j'essaie c'est de l'aider. Nous ne devons jamais

6 oublier les victimes.

7 Je ne peux pas parler aux noms des autres, je ne peux parler qu'en mon nom

8 propre. Et parmi ces victimes je dois dire que j'ai eu vraiment de vrais

9 amis des gens avec qui j'ai grandi et encore une fois je vous fais part --

10 je fais part à tous de mes remords les plus sincères pour tout ce que j'ai

11 commis là-bas et j'espère avoir l'occasion afin d'agir autant que possible

12 pour réduire leur souffrance.

13 Un message m'a été envoyé, une parente m'a rendu visite et Monsieur le

14 Président, Madame le Juge, je souhaite saisir cette occasion afin de vous

15 remercier de m'avoir donné la parole, de m'avoir entendu. Je vous remercie

16 en mon nom propre et au nom de ma mère, au nom de ma sœur qui sont ici. Je

17 leur ai dit que cela se déroulait en audience publique, elles m'ont laissé

18 entendre ou plutôt le message qu'elles envoient c'est que la porte -- leur

19 porte est ouverte à tout moment l'on peut s'entretenir soit avec des

20 voisins, soit avec des gens qui ont été ou non pas été à Susica.

21 On peut considérer qu'il s'agit -- il s'agit ici que de paroles lancées en

22 l'air et que ceci ne suffit pas qu'il faut passer aux actes or, je suis

23 prêt à travailler sur le retour et le rétablissement de la confiance, le

24 retour de ces personnes déplacées. C'est mon souhait. Je vous remercie

25 encore une fois, Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge.

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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Nikolic

2 d'avoir fait ces observations finales. Ainsi se termine l'audience

3 consacrée à la détermination de la peine dans cette affaire, le jugement

4 sera rendu en tant voulu. Et comme nous l'avons déjà annoncé très

5 vraisemblance à 14 heures le 18 décembre.

6 --- L'audience est levée à 13 heures 04.

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