Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 7 février 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Whiting.

7 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, bien entendu, vous aurez

9 remarqué que le témoin ne ressemble pas du tout au témoin qui était là

10 hier. Je pense que l'on vous a informés que le témoin qui a débuté sa

11 déposition hier est tombé malade et ne peut pas poursuivre sa déposition

12 aujourd'hui. Nous espérons qu'il pourra le faire demain, mais dans

13 l'intervalle nous avons cité à comparaître le témoin suivant.

14 Avant le début de la déposition du témoin - parce que je pense n'être

15 présent qu'au cours de la première séance d'aujourd'hui - nous étions

16 censés vous faire rapport de la situation sur les faits admis entre les

17 parties et sur les conversations interceptées. Si vous me le permettez,

18 pendant que je suis là je pourrais brièvement vous informer de la

19 situation.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. D'abord, nous souhaitons un

21 prompt rétablissement au témoin et nous espérons qu'il sera suffisamment en

22 bonne santé demain pour poursuivre sa déposition. Si toutefois tel n'est

23 pas le cas, je pense qu'il ne vaut mieux pas le faire venir. Faites-le

24 lorsque vous serez tout à fait sûr qu'il sera en mesure de poursuivre sa

25 déposition jusqu'au bout.

26 Monsieur Tapuskovic, souhaitez-vous nous parler des faits admis ?

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Tout ce que je peux dire c'est que nous

28 allons achever ce travail dans les jours à venir. Il n'y a pas de litige

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1 entre nous sur ce point. Je ne vais pas vous donner de chiffres, mais quoi

2 qu'il en soit il y a un certain nombre de faits qui sont non contestés et

3 qui seront présentés au cours des jours à venir.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'entendez-vous par "les jours à

5 venir ?" Aujourd'hui nous sommes mercredi.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] D'ici à la fin de la semaine.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Merci beaucoup.

8 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais vous dire

9 également pour tirer au clair tout ceci que ceci s'applique également aux

10 conversations interceptées, puisque c'était l'autre question qui était

11 encore en suspens.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez que

13 M. Tapuskovic confirme ?

14 M. WHITING : [interprétation] S'il vous plaît, oui.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que ceci s'applique également

16 aux conversations interceptées, Maître Tapuskovic ?

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je m'en suis remis à

18 Mme Isailovic pour cette question. Avant que le témoin entre dans le

19 prétoire nous pourrons faire part de notre position sans attendre. Nous

20 pourrions même le faire aujourd'hui d'ailleurs.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas compris, excusez-moi.

22 Avant que le témoin, le témoin qui nous parlera de ces conversations

23 interceptées ? Qu'est-ce que vous voulez dire ? Je n'ai pas compris ce que

24 vous avez dit, Monsieur Tapuskovic. De quel témoin parlez-vous ?

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Afin d'éviter d'autres éléments de

26 confusion, dans le même esprit que celui qui a prévalu dans le cadre de la

27 discussion sur les faits non contestés, nous préciserons notre position

28 s'agissant des conversations interceptées.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Je crois que c'est assez

2 clair maintenant. Merci, Maître Tapuskovic.

3 Mademoiselle Edgerton, vous êtes debout pour entendre ce témoin. Faisons

4 prononcer sa déclaration solennelle au témoin,

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

6 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 LE TÉMOIN: TARIK ZUNIC [Assermenté]

8 [Le témoin répond par l'interprète]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

10 Mademoiselle Edgerton, c'est à vous.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

12 Juges. Pour votre information, ce témoin va déposer à propos d'un incident

13 ayant impliqué un certain nombre de tirs issus de tirs isolés, incident qui

14 a eu lieu le 5 mars 1995 [comme interprété], numéro SN 15.

15 Interrogatoire principal par Mme Edgerton :

16 Q. [interprétation] Pourriez-vous nous dire quelle est votre identité.

17 R. Tarik Zunic.

18 Q. Monsieur Zunic, je sais que vous comprenez assez bien l'anglais.

19 J'aimerais vous rappeler de bien vouloir attendre la fin de

20 l'interprétation dans votre propre langue avant de répondre à ma question

21 de manière à ce que tout s'organise correctement.

22 Pourriez-vous nous dire si vous travaillez à l'heure actuelle ?

23 R. Non, non.

24 Q. Que faites-vous alors ?

25 R. Je termine mes études à l'université.

26 Q. Dans quelle discipline ?

27 R. A la faculté de transport.

28 Q. Merci.

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1 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche à l'écran la

2 pièce PT 0901 [comme interprété], s'il vous plaît. Je vais faire référence

3 à deux documents 2901 et 2902. J'aimerais qu'on les affiche tous deux à

4 l'écran. Merci.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il semblerait que nous ayons quelques

6 soucis avec le système électronique. Je vous demanderais encore 10 à 15

7 secondes de patience.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Y a-t-il un exemplaire papier de ce

9 document ?

10 Mme EDGERTON : [interprétation] J'ai effectivement quelques exemplaires du

11 document en anglais, Monsieur le Président, et puisque ces deux documents

12 ont été signés par le témoin, nous pourrions peut-être l'interroger sur

13 cette base-là.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous les avons, n'est-ce pas ? Oui,

15 nous les avons. La Chambre a ces documents et je suis tout à fait disposé à

16 en remettre un à la partie éventuellement qui n'en aurait pas.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vois qu'à l'écran est apparue la version

18 en B/C/S, du document 2901.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois que nous y sommes, Monsieur le

21 Président.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien.

23 Mme EDGERTON : [interprétation]

24 Q. Monsieur Zunic, sur l'écran devant vous est affichée une déclaration en

25 date du 10 novembre 1995, une déclaration remise à des représentants du

26 bureau du Procureur. Avez-vous eu la possibilité de revoir ce document

27 avant de venir déposer ici aujourd'hui ?

28 R. Oui.

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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on redonne au

2 témoin la version en anglais de sa déclaration, puisque c'est sur celle-ci

3 qu'il a posé sa signature.

4 Q. Sur la version en anglais de votre déclaration reconnaissez-vous votre

5 signature ?

6 R. Oui.

7 Q. Sur le document en anglais il y a également une autre signature juste

8 en dessous de la vôtre. A qui appartient-elle ?

9 R. C'est la signature de ma mère.

10 Q. Vous souvenez-vous si cette déclaration vous a été relue dans votre

11 langue avant que votre mère et vous-même ayez apposé votre signature ?

12 R. Oui.

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Je demanderais à ce que ce document soit

14 versé au dossier, première pièce pour ce témoin.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P184, Monsieur le

17 Président.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi ce document porte-t-il la

19 signature de sa mère ?

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être qu'il faudrait mieux poser la

21 question au témoin, mais je sais qu'à l'époque, si mes calculs sont bons,

22 il avait 14 ans à peu près.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, qu'il le dise aux fins de

24 compte rendu.

25 Monsieur, pourquoi trouve-t-on sur ce document la signature de votre mère

26 ainsi que la vôtre ?

27 Maître Tapuskovic, vous êtes debout.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais vous fournir une explication

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1 qui pourra peut-être vous servir.

2 J'aimerais d'abord apporter une correction. L'Accusation a dit qu'il devait

3 "avoir 14 ans," or, je crois qu'il avait plutôt 15 ans. D'après les lois en

4 vigueur à l'époque, y compris en Bosnie-Herzégovine, il y avait différentes

5 catégories de mineurs. Pour certains, l'un des deux parents devait toujours

6 être présent lorsque ce genre de déclaration était faite. Voilà ce que

7 prévoyait la loi.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois.

9 Est-ce là la raison pour laquelle ce document porte la signature de votre

10 mère ? Je veux l'entendre de la bouche du témoin.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était bien la raison à cela.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

13 Merci à Maître Tapuskovic de la précision.

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

15 J'aimerais maintenant que l'on passe au document 2902, s'il vous plaît, une

16 déclaration faite au TPIY par le témoin, datée du

17 21 avril 2006. Peut-être que l'on pourrait également lui remettre la

18 version en anglais de ce même document. Merci.

19 Q. Monsieur Zunic, vous voyez maintenant à l'écran la déclaration du 21

20 avril 2006 dans votre langue ainsi qu'une traduction en anglais. Avez-vous

21 eu la possibilité de relire ces deux documents avant de déposer

22 aujourd'hui ?

23 R. Oui.

24 Q. Cette seconde déclaration vous a-t-elle été relue dans votre propre

25 langue avant signature ?

26 R. Oui, oui.

27 Q. S'agissant de ces deux déclarations, pouvez-vous dire à la Chambre de

28 première instance si l'on vous posait ces mêmes questions aujourd'hui vous

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1 y répondriez de la même manière ?

2 R. Oui, bien sûr.

3 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais demander que l'on affecte une

4 cote au document 2902, s'il vous plaît.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P185, Messieurs

7 les Juges.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

9 J'aimerais maintenant que l'on passe à l'examen d'une carte qui figure déjà

10 au dossier et qui porte la cote P104.

11 A l'intention des membres de la Chambre, une partie importante de la

12 déposition de ce témoin-ci portera sur les cartes et des photographies.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour combien de temps avez-vous

14 prévu d'en avoir avec ce témoin ?

15 Mme EDGERTON : [interprétation] Un instant.

16 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'ai été un petit peu intimidé par

18 votre expression "la majeure partie de son témoignage," ou "la majeure

19 partie du temps" que nous allons passer ici avec lui aujourd'hui.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce n'était peut-être pas le meilleur moyen

21 de dire les choses. Nous allons de toute façon essayer d'être le plus

22 efficaces possible dans le délai qui nous a été imparti.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est une heure et demie ?

24 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je crois qu'il n'y aura aucun problème

25 à ce que nous soyons particulièrement efficaces vu le temps accordé.

26 Je vois maintenant le plan qui s'est affiché à l'écran. Je demanderais à ce

27 que la partie droite de ce plan soit agrandie, remontée un petit peu vers

28 le haut du plan, vers le nord. Merci. Stop. Voilà. Et un peu plus vers

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1 l'est, s'il vous plaît.

2 Q. Monsieur Zunic, apercevez-vous ce plan à l'écran devant vous ?

3 R. Oui.

4 Q. Pouvez-vous localiser votre école sur ce plan ?

5 R. Il faut faire défiler la carte un petit peu vers la gauche. Non, dans

6 l'autre sens. Oui, je la vois.

7 Q. A l'aide du stylet électronique qui est à droite de l'écran, pourriez-

8 vous, s'il vous plaît, indiquer d'une croix et du numéro 1 votre école.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Merci. Voyez-vous l'endroit où vous habitez sur cette carte ?

11 R. Oui, je la vois.

12 Q. Pourriez-vous indiquer ce lieu sur le plan et y apposer le chiffre 2.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Pourriez-vous indiquer l'itinéraire que vous avez suivi lorsque vous

15 êtes rentré chez vous en partant de l'école le jour où l'on vous a tiré

16 dessus.

17 R. Vous voulez que je tire un trait complet entre l'école et la maison ou

18 juste une partie ?

19 Q. Je ne pense pas qu'il vous faudra davantage de temps si vous indiquez

20 l'ensemble de l'itinéraire que vous avez suivi, alors allez-y.

21 Pendant ce temps-là, pourriez-vous nous dire si vous avez dû gravir

22 des pentes ou en descendre ou si tout le terrain était tout à fait plat ?

23 R. Une partie de l'itinéraire était assez plat, et autour de Sedrenik il a

24 fallu monter un peu.

25 Q. Merci. Pouvez-vous indiquer l'endroit où l'on vous a tiré dessus.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] J'indique que cette ligne rouge que le

27 témoin a tracée est l'itinéraire qu'il a suivi entre son école et chez lui.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'il serait possible d'agrandir cette

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1 carte un petit peu ?

2 Mme EDGERTON : [interprétation]

3 Q. Ce serait difficile. Est-ce que vous pourriez nous indiquer la zone

4 approximativement en y plaçant le chiffre 3.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. A l'aide d'une flèche, pourriez-vous nous indiquer la direction que

7 vous avez suivie et nous indiquer dans quel sens vous vous déplaciez de

8 manière à ce que tout soit parfaitement clair.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Merci beaucoup. Si vous vous en souvenez, la ligne de front était-elle

11 visible de l'endroit où vous avez reçu ces coups de feu ?

12 R. La ligne de Spicasta Stijena était visible. Les positions de l'ABiH

13 n'étaient pas visibles, c'étaient des positions serbes.

14 Q. Si la ligne de front était visible, pourriez-vous, s'il vous plaît,

15 nous indiquer quelle en était la direction à partir de l'endroit où l'on

16 vous a tiré dessus.

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 Q. Pourriez-vous placer le chiffre 4 à côté de la flèche qui indique dans

19 quel sens vous vous déplaciez, donc la première flèche que vous avez

20 dessinée.

21 R. [Le témoin s'exécute]

22 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, apposer le chiffre 5 à côté de la

23 flèche qui indique la direction de la ligne de front.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Q. Merci.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce document pourrait-il recevoir une cote.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P186, Messieurs

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1 les Juges.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle était la distance entre

3 l'endroit où on lui a tiré dessus et la ligne de front ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais le dire avec certitude absolue,

5 mais je dirais entre 700 et 900 mètres, à vol d'oiseau.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

8 Passons maintenant à une photo qui porte le numéro 2925. Je demanderais à

9 M. Zunic également d'annoter cette photo, et je demanderais à M. l'Huissier

10 de bien vouloir ne pas bouger de l'endroit où il se trouve.

11 Excusez-moi, ce sera plutôt la photo 2926.

12 Un moment, si vous me le permettez.

13 Pourrait-on voir cette photo avec davantage de recul, s'il vous plaît.

14 Monsieur le Président, il semblerait que ce qui figure dans le système

15 électronique est en réalité un agrandissement de la photo que j'aimerais

16 voir. J'ai cette photo ici et je propose qu'on la place sur le

17 rétroprojecteur afin de traiter de cette question plus rapidement.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allons-y.

19 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est en réalité la même photo, mais dans

20 le système nous avons un gros plan de la partie centrale de la photo. Il me

21 semble que pour être tout à fait clair, il faut avoir une bonne idée de ce

22 à quoi ressemblait le lieu, ensuite on pourra agrandir à nouveau une partie

23 de la photo.

24 Q. Monsieur Zunic, regardez la photo qui se trouve juste à côté de vous et

25 dites-nous si cette photo représente notamment le lieu où l'on vous a tiré

26 dessus en mars 1995 ?

27 R. Oui.

28 Q. Y a-t-il quoi que ce soit qui soit différent entre le moment où vous

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1 avez été la cible des tirs et votre souvenir du lieu à l'époque des faits

2 entre à lors et aujourd'hui ?

3 R. Il y a quelques nouvelles maisons qui ont été construites entre-temps,

4 les arbres ont poussé évidemment pendant 12 ans, et voilà. Puis, il y a

5 autre chose, cette photo a été prise en été, et j'ai été blessé à la fin de

6 l'hiver.

7 Q. Pourriez-vous indiquer sur cette photo l'endroit où l'on vous a tiré

8 dessus.

9 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrait-on peut-être remonter un peu le

10 rétroprojecteur ou la photo sur le rétroprojecteur. Merci.

11 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

12 Q. Pourriez-vous indiquer le lieu d'une croix et du chiffre 1. Peut-être

13 qu'il lui faudra un autre crayon.

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Aperçoit-on sur cette photo votre maison familiale ?

16 R. Oui, on la voit.

17 Q. Pourriez-vous l'indiquer et apposer peut-être le chiffre 2.

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Pourriez-vous indiquer d'une flèche la direction que vous suiviez à ce

20 moment-là à pied au moment où vous avez été pris pour cible de tirs, et

21 pourriez-vous y apposer le chiffre 3.

22 R. Oui.

23 Q. Pourriez-vous indiquer d'une flèche la direction de la ligne de front.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic, qui a-t-il ?

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Sur la photo que j'ai devant moi on ne

27 voit rien, on ne voit aucune inscription.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement. La première

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1 flèche qui porte le numéro 3 n'est pas très lisible. Peut-être que le

2 témoin pourrait l'annoter à nouveau.

3 Est-ce que vous avez appuyé sur le bouton ELMO correspondant au

4 rétroprojecteur ? Bien.

5 Mme EDGERTON : [interprétation]

6 Q. Est-ce que vous pourriez apposer le chiffre 4 à côté de la flèche que

7 vous venez d'inscrire pour nous montrer la direction de la ligne de front.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Est-ce qu'il y avait d'autres maisons ou d'autres obstacles entre cet

10 endroit, le lieu marqué par le numéro 1, là où vous avez été blessé, et

11 l'endroit qui menait vers la ligne de front d'après votre meilleur

12 souvenir ?

13 R. D'après mon meilleur souvenir, il n'y avait ni de maisons ni de

14 constructions entre moi et la ligne de front pendant que j'y étais. Là, je

15 fais référence à l'endroit où j'ai été blessé.

16 Q. Est-ce que vous vous souvenez si vous avez vu au cours de l'année 1994

17 ou de l'année 1995 des positions militaires bosniaques autour de votre

18 maison ?

19 R. Non, il n'y en avait nulle part autour de chez moi. Il n'y avait pas de

20 positions de l'armée bosniaque.

21 Q. Est-ce que vous vous souvenez avoir vu des mouvements de troupes ou

22 est-ce que vous avez remarqué des mouvements de troupes de l'armée

23 bosniaque sur la ligne de front, qui passaient près de votre maison ?

24 R. C'est vrai que j'en ai entendu, mais c'était surtout la nuit, puisque

25 pendant la journée l'armée ne circulait pratiquement pas. L'armée et les

26 soldats évitaient de circuler pendant la journée pour ne pas exposer la vie

27 des civils à un risque.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais demander que cette photo

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1 reçoive une cote en tant que la prochaine pièce à conviction. Et à présent

2 je voudrais aussi que nous passions à la pièce suivante, à savoir 2926.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Greffier.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce deviendra la pièce P187,

5 Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur l'Huissier, excusez-moi. Remettez la photo,

7 s'il vous plaît.

8 Monsieur le Témoin, à la question du Président de savoir à quelle distance

9 était la ligne de front, je pense que vous aviez dit 700 mètres à peu près;

10 c'est bien cela ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Entre 700 et 900 mètres, mais je n'en suis pas

12 sûr, je n'ai jamais vraiment mesuré cela. Je vous dis cela comme cela peut-

13 être.

14 M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup. Cette ligne de front, cela

15 signifie quoi ? Qu'il y avait l'ABiH, puis en face l'armée de la Republika

16 Srpska; c'est bien cela ? Je n'ai pas entendu la réponse.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr.

18 M. LE JUGE MINDUA : A quelle distance, à peu près, environ, était

19 respectivement l'ABiH et l'armée de la Republika Srpska par rapport au lieu

20 de l'incident ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pourriez être plus

22 clair. Excusez-moi, mais je ne vous ai pas très bien compris.

23 M. LE JUGE MINDUA : Ma question est celle-ci : parce que nous sommes sur

24 une ligne de front, deux armées se font face. S'il y a eu l'armée qui est à

25 700 mètres par rapport au lieu où vous avez été blessé, cela signifie que

26 l'autre armée en face devait être à une certaine distance aussi. Quelle est

27 cette distance-là ? Parce que nous avons deux armées sur la ligne de front.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas cela. Vous savez, je ne suis

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1 jamais allé sur la ligne de front, je n'ai jamais vu cela. Je n'ai vu cela

2 qu'après la guerre, quand la situation s'est calmée.

3 M. LE JUGE MINDUA : Merci.

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Une question qui découle de la dernière

5 réponse que vous venez de donner.

6 Q. Monsieur Zunic, vous avez dit que vous avez vu ces positions bien plus

7 tard. Est-ce que je dois comprendre que depuis la guerre vous vous êtes

8 rendu à cet endroit où à l'époque se trouvait la ligne de front ?

9 R. Je ne suis allé qu'à Spicasta Stijena puisque tout ce qui est autour

10 est encore miné, donc on ne pouvait pas s'approcher de là alors qu'à

11 Spicasta Stijena on pouvait y aller. Donc je n'ai pas osé aller aux autres

12 endroits.

13 Q. Quand vous faites cette évaluation de distance, à savoir entre 700 et

14 900 mètres, est-ce que vous la faites sur la base de la visite que vous

15 avez rendue à cet endroit après la guerre ?

16 R. Oui, c'est bien sur la base de cette visite et sur la base des

17 histoires que j'ai entendues.

18 Q. Merci.

19 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être pourrions-nous à présent examiner

20 la photo suivante, 2926.

21 Q. Monsieur Zunic, sur cette photo que l'on voit sur l'écran, est-ce que

22 vous voyez mieux l'endroit où vous avez été blessé mieux que sur la photo

23 précédente ?

24 R. Je vois l'endroit, mais c'est à peu près la même chose que sur la photo

25 précédente. C'est aussi clair.

26 Q. Pourriez-vous, à nouveau, marquer cet endroit et apposez-y le chiffre

27 1, s'il vous plaît.

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Pourriez-vous à nouveau indiquer la direction de provenance de ce tir

2 qui vous a touché.

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Apposez-y le chiffre 2, s'il vous plaît.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. Maintenant, à nouveau, pour que tout soit bien clair, alors que vous

7 marchiez, la ligne de front se trouvait de quel côté par rapport à vous ?

8 R. J'étais tourné de quel côté, c'est cela que vous m'avez demandé ?

9 Q. La ligne de front se trouvait de quel côté par rapport à vous, par

10 rapport à là où vous étiez ?

11 R. Elle était sur ma gauche.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que cette photo peut devenir la

13 pièce à conviction suivante.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, bien sûr.

15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P188.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que le

17 Procureur va présenter les preuves nous montrant comment était constituée

18 cette ligne de front, où se trouvaient exactement les positions serbes, où

19 se trouvaient exactement les positions de l'ABiH par rapport à cet

20 incident ? Par exemple, il serait important de savoir où étaient les

21 positions de l'ABiH à l'époque où ce témoin a été blessé puisque lui il ne

22 le sait pas.

23 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, effectivement. Lui, il ne le sait pas.

24 C'est vrai. Tout à fait vrai. Nous avons tout à fait l'intention de le

25 faire. Nous allons le faire.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Un instant, s'il

27 vous plaît.

28 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous savez, ceci peut porter à

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1 confusion, puisque le témoin a aussi dit que les positions n'étaient pas

2 visibles à partir de cet endroit-là. Je m'attends à ce que vous lui posiez

3 une question de savoir s'il savait à l'époque où étaient ces positions ou

4 bien s'il ne le savait pas du tout.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Si vous me permettez, je voudrais me

6 référer au compte rendu d'audience où le témoin, d'après mon meilleur

7 souvenir, a dit que les positions de l'armée bosniaque n'étaient pas

8 visibles de cet endroit-là, mais qu'en revanche, les positions de l'armée

9 serbe étaient visibles.

10 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui. Ceci sous-entend qu'il savait où

11 se trouvaient les positions bosniaques, mais qu'il ne pouvait pas le

12 savoir, c'est tout autre chose.

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, et nous allons aborder cette question

14 lors de la présentation de la photo suivante. Il s'agit de la photo 2716.

15 Q. Est-ce que vous la voyez, Monsieur le Témoin ?

16 R. Je vois la même photo que tout à l'heure.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Excusez-moi. C'est nous qui allons

18 présenter cette photo.

19 Q. Est-ce que vous voyez cette nouvelle photo sur votre écran, Monsieur

20 Zunic ?

21 R. Oui, je la vois, mais sur l'autre écran.

22 Q. Bien. En bas de la photo, il y a quelque chose qui est marqué, est-ce

23 que cet endroit correspond à l'endroit où vous avez été blessé par balle le

24 6 mars 1995 ?

25 R. Oui.

26 Q. Merci. Est-ce que vous voyez à présent une autre photo devant vous ?

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendez, Monsieur le Témoin.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, sur la photo

3 précédente on ne voit pas exactement cet endroit. On ne voit pas l'endroit

4 où se tenait le témoin, contrairement à la question posée par le Procureur.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Justement. Je voulais dire

6 exactement la même chose. Vous avez montré une photo où est marqué un

7 endroit, où un endroit est déjà marqué, et vous demandez au témoin si cet

8 endroit marqué sur la photo si c'est bien l'endroit où il a été blessé.

9 C'est au témoin de vous le dire, ensuite vous pouvez éventuellement marquer

10 cela à moins que ceci ait été établi auparavant, à savoir que l'endroit

11 marqué sur la photo est exactement le même que l'endroit dont il a déjà

12 déposé. Sinon, c'est une question qui guide beaucoup trop le témoin.

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais vous demander de revenir sur la

14 photo précédente, celle qui a précédé celle-ci.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De façon générale, je dois vous dire

16 que je ne vais pas permettre que l'on présente les photos marquées qui

17 n'ont pas été marquées par le témoin. Je ne permettrai pas que l'on

18 présente de telles photos aux témoins, leur demandant d'identifier

19 l'endroit où ils ont été blessés ou à un endroit [comme interprété].

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je propose tout simplement de laisser

21 tomber cette photo et de passer à la photo suivante. Nous allons procéder

22 d'une façon plus rapide et cela peut pouvoir résoudre le problème.

23 Q. Monsieur Zunic, est-ce que vous pourriez examiner cette photo, la photo

24 qui vous est présentée et nous dire si cette photo correspond à l'endroit

25 où vous avez été blessé le 6 mars 1995 ?

26 R. Oui, à 1 ou 2 mètres près.

27 Q. Est-ce qu'il y a quoi que ce soit de différent entre cette photo et

28 l'endroit tel que vous vous en rappelez il y a 12 ans ?

Page 1717

1 R. Oui, dans la mesure où les maisons ont été rénovées et que les arbres

2 sont verts et ils ont poussé depuis 12 ans.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Qu'il nous montre cet endroit où il se

6 tenait sur la photo et qu'il marque cet endroit. Puisque sur l'autre photo,

7 il nous a montré un endroit qui était dans un pré, puis maintenant on voit

8 une route. Qu'il nous montre bien où il était.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux dire quelque chose,

11 Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Où étiez-vous au moment où vous avez

13 été blessé ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me tenais pas debout contrairement à ce

15 que dit ce monsieur. Je circulais plutôt.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous étiez où exactement ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais sur la route. Sur la route, c'est

18 l'endroit qui est marqué par le chiffre 1; je n'étais pas dans un pré. Je

19 n'étais pas sur la pelouse.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, qu'il nous le

22 montre sur la photo, qu'il nous montre l'endroit où il était au moment où

23 il a été blessé, sur la photo.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

25 montrer cet endroit où vous étiez pendant que vous marchiez, comme vous

26 avez dit.

27 Mme EDGERTON : [interprétation] En ayant à l'esprit le fait que c'est le

28 début d'une photo de 350 degrés [comme interprété], une photo panoramique

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1 dont on a beaucoup parlé ici.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin peut être un peu aidé par

3 rapport à cela puisque c'est une question importante.

4 Sur la photo, Monsieur le Témoin, que vous voyez sur l'écran, est-ce que

5 vous voyez l'endroit précis où vous avez été blessé ? Si vous ne le voyez

6 pas, nous pourrions peut-être voir la photo panoramique.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être que je n'étais pas complètement

8 clair. Cette photo, la photo panoramique de 360 degrés, ce n'est pas une

9 photo qui peut être marquée. Mais je peux lui montrer les arrêts sur image,

10 en quelque sorte, qui se succèdent, où il pourrait marquer l'endroit où il

11 a été blessé.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce qu'il peut dire au sujet

13 de cette photo ?

14 Est-ce qu'il voit cet endroit ici ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une nouvelle photo qui montre cette

16 petite boutique et cette clôture. C'est là à peu près que j'étais, peut-

17 être un mètre plus loin ou plus près. C'est là que j'étais, c'est sûr à 100

18 %, au moment où j'ai été touché puisque j'ai marché vers ma maison.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous nous montrer sur la

20 photo exactement l'endroit, ou de façon plus précise l'endroit où vous avez

21 été blessé. Je peux voir cette petite boutique, je vois aussi la clôture.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais au tout début la photo, sur la droite.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, qu'est-ce que vous voulez

25 dire ?

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais lui demander de marquer cet

27 endroit sur la photo.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Techniquement, ce n'est pas

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1 possible.

2 Est-ce bien cela ?

3 Mme EDGERTON : [interprétation] Non. J'avais l'impression que les marques

4 que l'on a faites sur les deux photos précédentes suffisaient et que nous

5 n'avions pas besoin de marquer cette photo aussi.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, vous allez

7 contre-interroger, bien sûr, ce témoin, à ce moment-là vous allez pouvoir

8 reposer cette question. Madame le Procureur, si je vous ai compris, vous

9 pouvez faire un arrêt sur image par rapport à cette photo et que l'on peut

10 marquer cette photo-là.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et ceci ne va pas durer trop

13 longtemps ?

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Je dois poser des questions, mais j'espère

15 pouvoir l'avoir au cours de la session suivante.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Messieurs les Juges --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous vous demandons de le faire,

19 Madame Edgerton.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Au moment où nous allons faire la pause

21 tout à l'heure, je pense que nous allons pouvoir le faire. Peut-être que

22 nous aurons besoin de cinq minutes de plus pour faire ces clichés. Peut-

23 être que nous n'allons pas avoir le temps de les mettre dans le système

24 électronique, mais nous allons avoir les copies papier de ces photos, et

25 ceci, pour toutes les parties présentes dans le prétoire.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous vous remercions.

27 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce que je propose de faire, c'est de garder

28 les questions que j'ai voulu poser au sujet de cette photo panoramique pour

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1 la session d'après la pause.

2 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout ce que je peux vous dire, c'est

4 que vous avez prévu d'interroger ce témoin pendant une heure et demie, et

5 ceci, pour les deux côtés.

6 On va continuer. On va continuer puisque là vous avez déjà montré où il a

7 été blessé. Si on peut montrer cette photo, cet endroit précis, faites-le,

8 mais nous ne devrions pas perdre du temps. La photo devrait être évaluée

9 par les Juges de la Chambre à la lumière des éléments présentés.

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien. Je ne vous ai pas très bien

11 compris. Ce que j'ai compris, c'est que je devais vous présenter ce cliché

12 pour que le témoin puisse le marquer. Nous allons continuer notre contre-

13 interrogatoire et nous allons entendre les commentaires éventuels du

14 témoin.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Vous pouvez continuer.

16 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

17 Q. Monsieur le Témoin, vous avez montré à plusieurs reprises cet endroit

18 où vous avez été blessé en 1995.

19 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais demander que l'on fasse défiler

20 cette photo lentement.

21 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire, au fur et à mesure que nous le

22 faisons, si vous voyez l'endroit que vous avez marqué sur les photos

23 précédentes, les photos 187 et 188, comme étant la direction du tir dont

24 vous avez été l'objet ?

25 R. Exactement ici.

26 Q. "Ici," qu'est-ce que vous voulez dire ?

27 R. J'ai voulu vous demander de vous arrêter là.

28 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce que vous voyez sur cette photo

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1 en ce moment.

2 R. C'est à peu près au niveau du deuxième poteau de la clôture que l'on

3 voit le sommet de la Spicasta Stijena. C'est de là qu'on m'a tiré dessus.

4 Q. Plus tôt, vous avez dit que la ligne de front était visible depuis

5 l'endroit où vous avez été blessé ?

6 R. Oui, bien sûr.

7 Q. Est-ce que vous voyez cet endroit pour lequel vous croyez qu'il s'agit

8 de la ligne de front ? Est-ce que vous le voyez sur cette photo ?

9 R. D'ici on peut voir uniquement les positions serbes qui se trouvaient

10 sur la Spicasta Stijena.

11 Q. Par la suite, vous avez visité cette ligne de front, et par rapport à

12 ce que vous savez au jour d'aujourd'hui, est-ce que vous pouvez nous donner

13 des détails quant à l'endroit où se trouvaient les positions bosniaques par

14 rapport aux positions serbes ?

15 R. Oui, je pourrais le faire, mais c'est de là à peu près. Je ne saurais

16 vous répondre d'une façon exacte.

17 Q. Quelles positions --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour me permettre

20 de mener mon contre-interrogatoire, je voudrais leur demander de faire un

21 cliché justement de cet endroit-là pour que je puisse par la suite

22 interroger le témoin. Je voudrais aussi recevoir un arrêt sur image, un

23 cliché de cette photo-là pour pouvoir par la suite poser des questions au

24 témoin au sujet cette position-là sur la photo.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On va voir où veut en venir le

26 Procureur pour pouvoir prendre notre décision à ce sujet.

27 Mme EDGERTON : [interprétation]

28 Q. Monsieur Zunic, vous avez dit que depuis la guerre vous vous êtes rendu

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1 sur ce qui était auparavant la ligne de front.

2 R. J'ai dit que je suis allé uniquement sur la ligne de front puisque le

3 reste ce sont des champs minés qui sont dangereux. On ne peut pas y aller.

4 Q. Sur la base de ce que vous avez vu, quelle partie belligérante était

5 plus près par rapport à l'endroit où vous avez été blessé ?

6 R. Pourriez-vous répéter votre question ?

7 Q. Quelle faction était plus près par rapport à l'endroit où vous avez été

8 blessé ?

9 R. C'était l'ABiH.

10 Q. Sur la base de ce que vous avez pu observer, est-ce que vous savez

11 pourquoi on ne pouvait pas voir la position de l'ABiH au moment où vous

12 avez été blessé ?

13 R. Parce qu'ils étaient au pied de la Spicasta Stijena.

14 Q. Par rapport à ces positions, d'après ce que vous avez pu voir --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous parlez des

16 observations ou bien de ce qu'on lui a dit ? Quand est-ce qu'il y est

17 allé ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'y suis allé en 2000 à leur ligne de front.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que la ligne de front était

20 encore à l'époque ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, on n'y voit les restes, on n'y voit

22 toujours les restes.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous y êtes allé tout

24 seul ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, avec des amis, j'y suis allé avec des

26 amis.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment se fait-il que vous avez pu

28 déterminer où se trouvaient les lignes de front ? Sur la base de ce que

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1 vous avez vu ou bien sur la base de ce que l'on vous a dit ou bien les

2 deux ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'y suis allé à pied, j'y suis allé sur la

4 ligne, sur la ligne de l'armée serbe. On y voit encore les bunkers, les

5 tranchées, toutes les positions qui, aujourd'hui, font partie du territoire

6 de Bosnie-Herzégovine.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton, vous pouvez

8 continuer.

9 Mme EDGERTON : [interprétation]

10 Q. Pour continuer, pour enchaîner sur la question posée par les Juges, au

11 moment où vous avez été blessé, est-ce que vous saviez où se trouvaient les

12 lignes de front, et le cas échéant, comment le saviez-vous ?

13 R. Tout d'abord, on en parlait à la radio, les gens en parlaient, puis je

14 pouvais les voir de mes propres yeux, je pouvais voir tous les jours en

15 circulant à Spicasta Stijena.

16 Mme EDGERTON : [interprétation] A moins que vous n'ayez des questions par

17 rapport à ce point, je voudrais passer à un autre sujet.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui. Vous pouvez continuer.

19 Mme EDGERTON : [interprétation]

20 Q. Vous avez parlé de cette veste que vous portiez à l'époque où vous avez

21 été blessé, vous avez dit que cette veste était verte.

22 R. Oui, c'est ce que j'ai dit. En réalité, ce n'était pas vraiment une

23 veste vert militaire, si vous voulez. En fait, c'était une couleur vert

24 soutenu, je dirais, vert Benetton.

25 Q. Est-ce que vous portiez quelque chose à l'époque aussi ?

26 R. Oui, j'avais un sac à dos. C'était mon cartable de l'école, couleur

27 bleu.

28 Q. Est-ce que vous pouvez vous lever à présent pour nous montrer comment

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1 vous portiez votre sac à dos à l'époque, au moment où vous avez été

2 blessé ?

3 R. Je le portais sur mon épaule à droite en le tenant avec ma main droite.

4 Q. Tout à fait. Pourriez-vous nous dire où se trouvait la ligne de front

5 par rapport à vous quand vous vous placez comme vous êtes ?

6 R. J'allais dans cette direction-là, donc la ligne de front était à ma

7 gauche.

8 Q. Merci. Vous pouvez vous rasseoir.

9 Je remarque que dans les deux déclarations vous dites que vous avez été

10 blessé à la main droite; est-ce vrai ?

11 R. Oui, j'ai été atteint à la main droite.

12 Q. Vous dites que vous avez remarqué qu'il y avait des trous de balles

13 dans votre veste, à la gauche de votre veste et au niveau du cœur.

14 Pourriez-vous nous dire, d'après vous, ce qui s'est passé.

15 R. Cela s'est passé quand j'étais en train de marcher en portant mon sac à

16 dos sur mon épaule droite. Les balles qui sont arrivées de Spicasta Stijena

17 sont d'abord rentrées dans la gauche, du côté gauche de ma veste, sont

18 sorties à droite de ma veste, et du coup sont rentrées ensuite dans ma main

19 droite et ont traversé ma main. J'avais de la chance de ne pas avoir été en

20 train de marcher trop vite, sinon j'aurais été tué.

21 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir une autre

22 pièce à l'écran, s'il vous plaît. La pièce 150 qui est disponible en deux

23 langues, donc à la fin en B/C/S et en anglais.

24 Q. Monsieur Zunic, à droite de l'écran, sur l'écran qui est devant vous il

25 y a un document. Le reconnaissez-vous ?

26 R. Oui. C'est le diagnostic, c'est le dossier de diagnostic après mon

27 admission à l'hôpital.

28 Q. Pourriez-vous nous lire dans votre langue la phrase qui commence par le

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1 mot "Ranjen …"

2 R. Est-ce que vous pourriez un tout petit peu agrandir les caractères.

3 Merci.

4 "Civil blessé par la balle d'un tireur embusqué à Sebrenik. Blessure

5 perforante. Point d'entrée du côté distal de la main; et sortie de l'autre

6 côté. L'état du patient ne montre pas de conditions anormales."

7 Dois-je poursuivre ?

8 Q. Non.

9 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir une cote

10 pour ce document, s'il vous plaît.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P189.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais obtenir une clarification

15 de la part du témoin.

16 En réponse à Mme Edgerton, vous avez dit que l'armée de l'ABiH était

17 plus près de l'endroit où vous vous trouviez quand vous avez été blessé que

18 l'armée serbe, mais que l'armée de l'ABiH n'était pas visible de là où vous

19 vous trouviez. Pouvez-vous nous expliquer un tout petit peu la topographie

20 des lieux, ce qui nous permettrait de comprendre pourquoi, bien que l'ABiH

21 soit plus proche de vous, vous ne pouviez pas la voir.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, je peux vous expliquer.

23 Tout d'abord, il était quand même logique que notre armée soit plus proche

24 de nous que les forces serbes; cela paraît logique. Ensuite, Spicasta

25 Stijena est pratiquement presque verticale, en tout cas par rapport à ce

26 plateau où se trouvait notre armée, donc en contrebas. Enfin, c'est la

27 topographie générale de cette zone. L'armée serbe était sur un endroit

28 surplombant, c'était un endroit beaucoup plus élevé, on pouvait donc les

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1 voir, et ils voyaient extrêmement bien tout le quartier.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que l'armée serbe

3 surplombait finalement l'ABiH ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, exactement.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Entre l'ABiH et l'endroit où vous

6 vous trouviez à quoi ressemblait le terrain ? Pouvez-vous nous dire quel

7 était le relief et pourquoi l'ABiH n'était pas visible de là où vous vous

8 trouviez ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Le terrain qui allait jusqu'à la position de

10 l'ABiH, c'était un peu comme un plateau avec quelques petites collines,

11 enfin mettons qu'il y avait, disons, une montée toute douce qui menait à la

12 position qui était tenue par l'ABiH. C'était, en fait, les contreforts de

13 Spicasta Stijena.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

15 Mme EDGERTON : [interprétation]

16 Q. Maintenant, après avoir été atteint et vous étiez par terre, est-ce que

17 vous vous souvenez s'il y a encore eu des tirs ?

18 R. Oui, bien sûr, il y a encore eu des tirs. Ils ne voulaient pas que je

19 m'échappe. Ils savaient qu'ils m'avaient tiré dessus, qu'ils m'avaient

20 atteint, j'étais touché à terre. Ils ont continué à tirer. J'entendais les

21 balles siffler, j'entendais des détonations aussi.

22 Q. Puisque vous entendiez tout cela, est-ce que vous pouvez-nous dire s'il

23 s'agissait de tirs isolés ou bien de rafales ?

24 R. Les deux. Les deux.

25 Q. Monsieur Zunic, avez-vous résidé dans cette zone pendant toute la

26 guerre ?

27 R. Oui.

28 Q. Etait-ce la première fois qu'on vous a tiré dessus ?

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1 R. Non, ce n'est pas la première fois. Je crois qu'à deux reprises on m'a

2 tiré dessus.

3 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu'on vous ait tiré dessus d'une autre

4 direction, donc avoir essuyé des tirs qui auraient pu venir d'une autre

5 direction que ce que vous appelez la ligne de front ?

6 R. Non, je ne me souviens pas bien. Ils nous tiraient dessus, y compris

7 sur moi-même, depuis Spicasta Stijena, uniquement de là-bas.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

9 questions pour M. Zunic.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Dès que vous avez ce

11 cliché, s'il vous plaît, faites-nous-le savoir.

12 Monsieur Tapuskovic, c'est à vous.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

14 Je vais être très prudent, puisque cet incident qui a eu lieu a eu lieu

15 lors - nous avons maintenant un témoin qui est en train de témoigner. Il

16 est adulte à l'heure actuelle, mais je vais devoir lui faire part d'un

17 grand nombre de faits portant sur l'événement qui a eu lieu quand il était

18 plus jeune. Je ferai attention maintenant que --

19 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :

20 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, bonjour. Je suis Branislav

21 Tapuskovic, avocat à Belgrade. Je sais qu'à l'époque vous étiez un

22 adolescent, vous étiez encore très jeune. Je vais devoir vous poser des

23 questions à propos de tout ce que vous nous avez raconté aujourd'hui. Je

24 vais essayer de vous poser des questions directes, j'aimerais que vous

25 répondiez si possible uniquement par oui ou par non afin d'être concis.

26 Voici ma première question : quand la guerre a éclaté, vous aviez,

27 j'imagine, 11 ou 12 ans, n'est-ce pas, et quand on vous a tiré dessus et

28 que vous avez été blessé, comme vous venez de nous le dire - je connais

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1 votre date de naissance - donc j'ai calculé que vous aviez 14 ans et demi,

2 14 ans et 6 mois; c'est bien cela ?

3 R. Oui, tout à fait.

4 Q. Je vais maintenant vous lire un passage d'une pièce versée par

5 l'Accusation - j'avais l'intention aussi de la verser par notre biais, ce

6 ne sera plus nécessaire - il s'agit de votre déclaration du 10 novembre

7 1995, déclaration que vous avez faite en présence de votre mère.

8 J'aimerais attirer votre attention sur ce que vous avez dit à ce moment-là

9 et ce que vous avez dit lors de la déclaration que vous avez faite le 21

10 avril 2006, une déclaration que vous avez faite à ce moment-là en tant

11 qu'adulte, et qui porte la cote P185.

12 Pour ce qui est du document 65 ter portant le numéro 150, mais ayant reçu

13 la cote P188, donc il s'agit du dossier médical, nous avons encore deux

14 autres documents dans le dossier qui vous a été donné, qui ont le numéro 65

15 ter 2924.

16 Q. Pourriez-vous tout d'abord nous confirmer que la première déclaration

17 que vous avez faite, vous l'avez faite sans la présence de votre mère ?

18 R. Vous parlez de la déclaration que j'ai faite le 11 mars, cinq jours

19 après avoir été atteint; c'est cela ?

20 Q. [aucune interprétation]

21 R. En tout cas, je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de l'avoir

22 fait, mais cela dit --

23 Q. Je vais vous faire part d'un détail que vous avez noté dans la

24 déclaration P184 du 10 novembre 1995, faite en présence de votre mère.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pourrions-nous avoir à l'écran, s'il vous

26 plaît, cette pièce, la P184, et j'aimerais que l'on regarde la première

27 page.

28 Témoin - non, il s'agit de la page 2, puisque la page 1 porte

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1 principalement vos coordonnées. Donc je voudrais voir la page 2.

2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous pouvez déduire du temps du

3 temps qui m'était imparti, j'ai fait une erreur. Je voulais que l'on montre

4 au témoin la pièce P185, à la page 2, donc le document du 21 avril. C'est

5 moi qui me suis trompé. Je voulais voir la déclaration que le témoin a

6 faite en tant qu'adulte. C'est le

7 21 avril 2006. C'est celle-ci que j'aimerais voir affichée à l'écran, la

8 page 2 de cette déclaration.

9 Q. Voyez-vous ce document, cette déclaration que vous avez faite le 21

10 avril 2006 ?

11 R. Oui, je la vois.

12 Q. Je voudrais que vous vous intéressiez au paragraphe 2.

13 R. Oui.

14 Q. Je vais lire ce deuxième passage, je cite :

15 "Le lycée où j'allais en 1995 se trouvait dans le quartier Pofalici

16 de Sarajevo. Il s'agissait d'un bâtiment d'école tout à fait normal, et il

17 me fallait à peu près 45 minutes, voire une heure pour y arriver à pied."

18 C'est bien vrai ?

19 R. Oui.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pourrions-nous maintenant afficher à

21 l'écran la photo portant la cote P187 qui montre s'il s'agit de la carte de

22 la ville. La pièce P187 où le témoin a marqué l'itinéraire qu'il empruntait

23 pour aller à l'école.

24 Mme EDGERTON : [interprétation] Il me semble que c'est le P184 [comme

25 interprété].

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le P187 correspond au plan papier qui

27 était sur le rétroprojecteur.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Le P187 c'est une photo. La carte

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1 vierge de la ville est la P104 et le P186. C'est la carte de la ville avec

2 les annotations du témoin.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Dans ce cas-là, pourrions-nous voir la

4 photographie qui a été annotée par le témoin, où il montrait l'itinéraire

5 qu'il empruntait pour se rendre à l'école quand il a répondu aux questions

6 du Procureur. A nouveau, je suis en train de perdre du temps du fait de la

7 technique. J'aimerais bien que cela ne me soit pas reproché. Pourrions-

8 nous, s'il vous plaît, avoir la photo à l'écran ?

9 Q. Voyez-vous la photo ?

10 R. Oui.

11 Q. Il y a une minute vous avez dit en 2006 que vous aviez été au lycée en

12 1995 à Pofalici. Pourriez-vous dessiner une ligne droite qui va à

13 Pofalici ?

14 R. A vol d'oiseau, par exemple ?

15 Q. Oui.

16 R. Vous ne pourriez pas juste l'imaginer ?

17 Q. Non, je ne veux pas que l'imaginer, je veux que vous me dessiniez une

18 ligne droite allant de l'école à ma maison.

19 L'INTERPRÈTE : L'interprète s'excuse, mais les deux orateurs sont en train

20 de parler en même temps.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une minute.

22 Monsieur le Témoin, vous devez absolument ménager une pause entre les

23 questions que vous pose Me Tapuskovic et vos réponses, sinon

24 l'interprétation n'est absolument pas possible.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis désolé. Je vais faire attention.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, vous pouvez

27 poursuivre.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne veux pas perdre de temps, mais ce

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1 qui est important, c'est ce qu'a dit le témoin, c'est-à-dire que l'école se

2 trouvait dans le quartier de Pofalici. De toute façon, ce n'est pas très

3 important à l'heure actuelle.

4 Q. Je tiens à vous poser une autre question à propos de votre déclaration

5 que vous avez faite aux services de sécurité de Sarajevo, le 11 mars.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce 02924 sur la liste

7 65 ter. C'est une pièce qui porte la date du

8 11 mars 1995 qui a été traduite. Pourrions-nous, s'il vous plaît, afficher

9 ce document à l'écran. Je répète, c'est la pièce 02924, en date du 11 mars

10 1995.

11 Q. Est-ce que vous voyez ce document à l'écran ?

12 R. Non, je ne le vois pas.

13 Q. Il s'agit d'une note officielle en date du 11 mars 1995; ce n'est pas

14 affiché ?

15 R. Non, cela ne s'affiche pas pour l'instant.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît,

17 afficher ce document.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] La page 3 de ce document, s'il vous plaît.

19 Q. Est-ce que vous voyez la version en B/C/S ?

20 R. Non, pas encore.

21 Q. Cela dit, on voit la version en anglais, mais on n'a pas encore la

22 version en B/C/S.

23 R. En effet.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Nous avons quelque chose à l'écran.

25 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il semblerait qu'il y a un problème

27 avec le système du prétoire électronique. Cela dit, le Procureur a une

28 copie papier de ce document, nous pouvons donc le mettre sur le

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1 rétroprojecteur. On va s'en remettre aux vieilles techniques qui marchent

2 bien, finalement.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Voyez-vous le document maintenant ?

5 R. Oui.

6 Q. Je ne vais pas le lire en entier, mais je vais vous lire le dernier

7 paragraphe. Je pourrais le lire en entier si les Juges me le demandent.

8 Cinq jours après l'accident, vous avez fait la déclaration suivante à

9 l'inspecteur, je cite :

10 "Le 6 mars 1995, aux environs de 13 heures, je rentrais chez moi

11 depuis l'école et j'étais sur la rue Rogina. Quand je suis arrivé à la rue

12 Sedrenik, j'ai entendu un tir qui venait depuis les positions de

13 l'agresseur à Spicasta Stijena, j'ai ensuite ressenti une douleur très vive

14 dans ma main droite où j'avais été blessé avec une blessure perforante. Je

15 me suis immédiatement abrité, je me suis couché par terre et j'ai appelé au

16 secours assez rapidement. Des membres de la FORPRONU sont venus vers moi."

17 Est-ce bien la déclaration que vous avez faite cinq jours après cet

18 accident ?

19 R. Cela se peut, mais je ne m'en souviens pas.

20 Q. Très bien. J'aimerais maintenant vous montrer un autre document qui

21 porte le numéro 65 ter 02924, en date du 11 mars 1995 et c'est un document

22 qui est juste avant celui que je viens de vous montrer.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je sais que c'est un document dont la

24 traduction en anglais a été effectuée. Il me faut la page 3. Si le système

25 du prétoire électronique est toujours aussi réticent à afficher ce qu'on

26 lui demande, je pourrais demander l'aide de l'Accusation pour avoir un

27 document papier.

28 Puisque ce document n'est pas à l'écran, puis-je, s'il vous plaît, demander

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1 à l'Accusation de donner au témoin une copie papier de ce document.

2 Q. Est-ce que vous le voyez, Monsieur Zunic ? Il s'agit du document en

3 date du 11 mars 1995. C'est un document qui vient des services de Sécurité.

4 Il est écrit :

5 "Le 6 mars 1995, ce service a été informé qu'à Sedrenik, à côté du

6 supermarché, une balle tirée depuis les positions de l'agresseur a blessé

7 Tarik Zunic."

8 C'est bien ce qui est écrit ici ?

9 R. Ce n'est pas --

10 Q. Non, ce n'est pas le vôtre. Vous ne l'avez pas dit. Ce n'est pas la

11 déclaration que vous avez faite. Voici ma question :

12 "Bilal Sulejman qui est un enquêteur qui enquête sur les génocides a été

13 informé à propos de ceci. Voilà ce qu'il dit : Tarik Zunic a été atteint

14 depuis la position de l'agresseur. Nous ne pouvions pas nous rendre sur les

15 lieux. Nous sommes plutôt allés du côté de la clinique. Là, le médecin de

16 garde dans le service orthopédique nous a dit que les blessures étaient

17 légères, qu'il ne s'agissait que d'une balle qui avait perforé la main

18 droite."

19 Je vous demande s'il s'agissait bien d'une blessure avec entrée et

20 sortie dans votre balle.

21 R. Oui, oui, tout à fait. La balle est rentrée dans la paume de ma main et

22 est ressortie du côté du poignet.

23 Q. Très bien. J'ai une autre question à vous poser. Il y a des

24 descriptions assez contradictoires; dans l'une on parle de tirs nourris à

25 Spicasta Stijena et dans un autre rapport on parle juste d'un tir isolé.

26 R. Quand j'étais en train de revenir à pied de l'école, dès que je suis

27 parti, il y avait des tirs. J'avais 14 ans et je me suis dit à un moment :

28 il y a un petit calme, et je me suis dit, là ce n'est plus si dangereux, je

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1 peux continuer.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

3 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis désolée, je pense qu'il y a

4 énormément de chevauchements entre M. Zunic et Me Tapuskovic. Je pense que

5 les interprètes ont énormément de mal à suivre et j'aimerais que vous leur

6 demandiez vraiment de ménager une pause.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.

8 Messieurs, s'il vous plaît, Maître Tapuskovic, Monsieur le Témoin, il faut

9 absolument que vous ménagiez une pause. C'est difficile pour vous je sais,

10 parce que vous parlez la même langue, mais vous ne pouvez pas parler en

11 même temps car l'interprétation précise est impossible.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je veux simplement

13 en terminer de ce document médical, ensuite il sera temps de faire la

14 pause. Un document médical qui porte la cote P189.

15 Q. C'est le même document, Monsieur, que vous venez d'examiner. Ce rapport

16 médical, oui voilà, c'est celui-là. Le Procureur vous l'a montré il y a

17 quelques instants. On y lit certaines choses notamment dans ce que le

18 Procureur vous a demandé de lire :

19 "Civil blessé dans la rue de Sedrenik par une balle de tireur isolé. Entrée

20 de la balle dans la partie distale de l'avant-bras droit du côté radial

21 est sortie dans la zone ténère [phon]."

22 Je me demandais simplement pourquoi l'on vous avait décrit comme un civil,

23 puisque vous n'aviez que 14 ans ? Pourquoi a-t-on mis l'accent là-dessus ?

24 Comment l'expliquez-vous ?

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment pouvez-vous lui demander

26 qu'il sache pourquoi tel ou tel policier l'a décrit de telle ou telle

27 manière ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire la pause.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

3 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] A titre d'information, voici des

6 exemplaires de ces clichés qui représentent toutes les perspectives tirées

7 du panorama à 360 degrés dont nous avons parlé tout à l'heure.

8 Toutes ces perspectives en réalité doivent être vues dans le sens des

9 aiguilles d'une montre.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] -- ou disons dans la vidéo panoramique.

12 Elles sont classées en séquence. On me rappelle également que j'ai oublié

13 de demander à ce que le panorama reçoive une cote.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement, il sera versé au

15 dossier.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P190, Messieurs les

17 Juges.

18 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

19 Vous allez voir qu'il y a deux photos qui sont très semblables.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement.

21 M. WHITING : [interprétation] Ce ne sont pas les mêmes photos. Il y a peut-

22 être 1 à 2 mètres de distance entre l'une et l'autre, de manière à donner à

23 tous et à toutes, une idée la plus claire possible de la topographie des

24 lieux.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

26 Maître Tapuskovic, n'hésitez pas à utiliser ces clichés au cours de votre

27 contre-interrogatoire, si vous le souhaitez.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 Si vous me le permettez, j'aimerais demander au greffier d'audience de bien

2 vouloir donner des cotes aux deux documents de la Défense 02924, notes

3 officielles du 10 mars 1995 et du 11 mars 1995. Le numéro que j'ai donné

4 c'est le numéro 65 ter. Ces notes officielles ont été préparées par le

5 service de Sécurité de Bosnie-Herzégovine.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, elles sont admises.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour le numéro 02924, tel qu'il figure

8 sur la liste 65 ter, nous attribuerons la cote D43, Monsieur le Président.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez tout à

10 fait raison. La question que j'ai posée avant la pause est une question

11 qu'il vaudra mieux poser au médecin qui viendra déposer, je le sais. Il y a

12 toutefois une question que je puis poser au témoin s'agissant de ce rapport

13 médical, la voici :

14 Q. Monsieur Zunic, vous avez vu ce document. Il y est dit qu'il y a eu

15 lésion d'entrée et de sortie, que le point d'entrée se situe dans la région

16 distale de la partie inférieure du bras du côté radial. Pouvez-vous nous

17 montrer où ceci se trouve-t-il sur votre main parce que ceci diffère de ce

18 que vous nous avez dit. Vous avez dit que la balle était passée par la

19 paume de votre main. Pouvez-vous expliquer cela ?

20 R. Je persiste à dire qu'effectivement la balle est rentrée dans la paume

21 de ma main. Je peux vous le montrer. Mais évidemment, je ne comprends pas

22 les termes médicaux utilisés dans le rapport et je ne peux pas vous fournir

23 d'explication.

24 Q. Je ne sais pas ce que c'est ce côté radial, mais je sais ce qu'est

25 l'avant-bras ou la partie inférieure du bras droit. Dans ce rapport

26 médical, on lit que vous avez été touché dans la partie inférieure du bras,

27 dans notre langue le bosniaque, le serbe, quelle que soit l'appellation que

28 vous voulez utiliser.

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1 R. Ce n'est pas moi qui ai écrit ce rapport, c'est le médecin. Je porte

2 toujours sur moi la cicatrice qui montre l'endroit où la balle est entrée

3 et sortie.

4 Q. Je vous remercie.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demanderais maintenant à ce que le

6 document numéro 2901 de la liste 65 ter soit montré. C'est un document qui

7 a été versé au dossier par l'Accusation et il porte la cote 184. C'est une

8 déclaration en date du 10 novembre 1995. Nous allons l'apercevoir à l'écran

9 dans un instant et je tâcherai d'être le plus bref possible et de me

10 limiter à quelques questions.

11 Q. Page 1, Monsieur Zunic, ce qui figure à l'écran actuellement.

12 J'aimerais que l'on voie la page 2 plutôt. Puisque ce document vous l'avez

13 maintenant sous les yeux, j'aimerais que vous vous intéressiez au sixième

14 paragraphe qui commence par les termes, "Je crois --" Vous le voyez ?

15 R. Oui, je le vois.

16 Q. Je vais vous en donner lecture : "Je crois que les coups ont été tirés

17 de Spicasta Stijena, parce que ce n'est qu'à partir de là que les tireurs

18 embusqués peuvent atteindre des cibles qui se trouvent dans la rue."

19 Voilà ce qui est dit ici. Ici vous dites "Je crois" ce qui semble indiquer

20 que vous en n'êtes pas tout à fait sûr, n'est-ce

21 pas ?

22 R. Je continue à penser aujourd'hui que ces coups ont été tirés de

23 Spicasta Stijena, parce qu'il était impossible que les tirs proviennent de

24 l'autre côté. De toute façon, il y avait des tirs constants de cette

25 direction de Spicasta Stijena.

26 Q. Merci. Poursuivons la lecture et je vous cite d'ailleurs : "Il est

27 aussi possible d'atteindre des cibles dans la rue."

28 Continuez-vous d'affirmer que seuls des tireurs placés à Spicasta Stijena

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1 auraient pu atteindre l'endroit où vous vous trouviez ? N'aurait-il pas été

2 possible d'atteindre la cible que vous constituiez à ce moment-là en tirant

3 d'ailleurs ?

4 R. Peut-être.

5 Q. Vous poursuivez en disant la chose suivante :

6 "Il est possible de tirer de Trebevic, une autre zone contrôlée par les

7 Serbes, mais pas à l'aide d'armes de petit calibre. Seules des armes

8 antiaériennes pouvaient tirer et atteindre leurs cibles de Trebevic."

9 Voici ma question : à la lecture de ceci, pouvons-nous conclure que de

10 Trebevic il n'est pas possible de tirer à l'aide d'armes de petit calibre ?

11 R. Vous pouvez tirer de quoi que ce soit.

12 Q. Attention à ce que nos propos ne se chevauchent pas.

13 R. Ils ne se chevauchent pas. Vous pouvez tirer d'où vous voulez.

14 Q. Oui, mais vous dites qu'il est possible de tirer de Trebevic, mais pas

15 en utilisant des armes de petit calibre. Je veux simplement vérifier auprès

16 de vous que ceci est exact.

17 R. Oui, je peux vous dire que c'est exact, parce que je l'ai entendu de la

18 bouche d'adultes qui s'y connaissaient davantage en armes. S'agissant de

19 l'endroit où j'ai été touché, cet endroit ne pouvait être vu de Trebevic.

20 Il est dit très clairement que la rue dans laquelle je me trouvais quand

21 j'ai subi cette blessure n'était visible qu'en partie. C'est précisément ce

22 que j'ai dit.

23 Q. Mais pas par un tireur embusqué, par de simples fusils.

24 R. Pas efficacement, non. C'est ce que les gens ont dit à ce moment-là, vu

25 la distance et la portée et la visibilité.

26 Q. Alors la portée n'était pas suffisante à ce moment-là ?

27 R. Oui, il y avait possibilité.

28 Q. S'agissant maintenant de la balle qui vous a touché, vous dites au

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1 paragraphe 5 - et j'aimerais que vous confirmiez ce que vous avez dit. Je

2 cite :

3 "Je me suis immédiatement rendu compte que les tirs provenaient d'une

4 mitrailleuse M-84. Le son que fait cette arme est plus fort que d'autres

5 fusils ordinaires. Je peux faire la différence facilement parce que j'ai

6 entendu de nombreux tirs."

7 Je vous le demande, vous savez très bien ce qu'est ce fusil automatique M-

8 84. Savez-vous ce que c'est ?

9 R. Je ne sais pas ce que c'est qu'un fusil automatique. Je n'en ai jamais

10 vu.

11 Q. Je comprends, mais vous avez dit que dès que vous avez entendu les

12 tirs, vous avez su qu'ils provenaient d'un fusil automatique M-84 ?

13 R. Oui, parce que j'habitais là. J'étais un survivant dans cette

14 situation-là. J'écoutais les gens plus âgés que moi tout le temps. On ne

15 cessait d'en parler à la radio. On parlait des fusils automatiques M-84 et

16 des semeuses de mort, et j'étais capable de les distinguer au bruit.

17 Q. Très bien. Quatre paragraphes plus loin, vous dites :

18 "Sur place, j'ai découvert qu'il y avait deux trous qui avaient été

19 provoqués par des balles sur le devant de ma veste au niveau du cœur. Je

20 suppose que la balle a fait ces trous lorsqu'elle a traversé ma veste."

21 Voici ma question : au cours des premières journée, vous avez dit que vous

22 n'aviez été touché que par une seule balle. Ici vous parlez de plusieurs

23 balles. Comment cela est-ce possible ?

24 R. Non, je persiste à dire qu'il n'y a eu qu'une seule balle qui m'a

25 touché. C'est une erreur, je leur ai dit que c'était une erreur. Les gens

26 qui ont rédigé cela m'ont dit que ce n'était pas important et qu'une

27 correction serait apportée ultérieurement, mais je vois bien que vous avez

28 relevé cette erreur. Il y avait deux trous, le premier qui avait été

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1 provoqué au moment où la balle était rentrée, donc sur la gauche, puis il y

2 a eu un autre point où la balle est sortie sur la droite de ma veste.

3 Q. Ensuite, la balle a poursuivi son chemin pour terminer dans votre

4 main ?

5 R. Oui, elle a traversé la paume de ma main.

6 Q. Je vous demande la chose suivante : pourrait-on dire que vous portiez à

7 l'époque une veste qui protégeait votre poitrine et votre corps

8 d'éventuelles balles qui risquaient de vous tuer ? Portiez-vous un gilet

9 que l'on vous a donné pour vous protéger ?

10 R. Je ne sais pas où vous avez eu cette idée. Je n'ai jamais porté ce

11 genre de gilet, jamais.

12 Q. Vous saviez très bien, à l'époque, ce qu'était un fusil automatique M-

13 84. D'après tout ce que vous avez dit, je ne peux en conclure que vous avez

14 pu éventuellement participer à la défense contre l'agresseur.

15 R. S'agissant du M-84, ce fusil automatique, j'en avais entendu parler à

16 la radio. Je connaissais les bruits que j'entendais moi-même et je n'ai

17 jamais rejoint l'armée, parce que j'étais trop jeune et que cela ne m'est

18 jamais venu à l'esprit de participer.

19 Q. Dites-moi, dans ce périmètre entre l'endroit où vous avez été touché et

20 la paroi des rochers, les positions étaient-elles divisées, de telle sorte

21 que dans un ensemble de tranchées se trouvaient les soldats de l'ABiH, et

22 dans un autre, plus en surplomb, se trouvaient les membres de l'armée de la

23 Republika Srpska ?

24 R. Oui, à peu près, mais c'est normal.

25 Q. De ces positions, de ces tranchées, lorsque vous vous êtes enfin rendu

26 sur place dix ans plus tard, quelle distance avez-vous pu constater entre

27 ces tranchées ?

28 R. Elles n'étaient divisées que par Spicasta Stijena à cet endroit précis,

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1 parce que les positions serbes surplombaient les positions de l'ABiH qui se

2 trouvaient en bas de Spicasta Stijena. Je ne pourrais pas vous dire quelle

3 est la distance exacte, je ne l'ai pas mesurée et je n'ai jamais eu de

4 données particulières là-dessus.

5 Q. Très bien. Vous ne pouviez pas passer de l'autre côté, parce qu'il y

6 avait des champs de mines, mais de ce côté-ci il n'y en avait pas afin

7 d'éviter que les soldats de l'ABiH soient tués. Vous avez réussi un peu

8 plus tard à vous rendre sur place. Quelle était la distance en mètres qui

9 séparait ces positions ?

10 R. Je me suis rendu sur place voir ces positions à Spicasta Stijena en

11 passant par la partie qui, au cours de la guerre, était tenue par les

12 Serbes. Je suis parti d'en bas et je suis monté. Il n'y avait pas de mines

13 parce qu'une personne normalement constituée ne placerait pas de mines dans

14 un territoire qu'elle occupe. Je n'ai pas gravi Spicasta Stijena du côté

15 qui avait été tenu par l'ABiH parce que c'est quasiment impossible.

16 Q. Oui, je comprends. Je vous ai posé la question de savoir quelle était

17 la distance en mètres.

18 R. Je vous le répète, je ne sais pas, puis je n'ai rien lu là-dessus.

19 Q. En temps de paix, aviez-vous des amis de l'autre côté de Spicasta

20 Stijena ? Vous aviez des amis de ce côté-là, n'est-ce pas, avec qui vous

21 jouiez au football, juste derrière les rochers ?

22 R. Vous parlez de la région occupée par l'ABiH ?

23 Q. Oui.

24 R. Non.

25 Q. Il y avait des gens qui vivaient sur place depuis longtemps ?

26 R. Sans doute, oui.

27 Q. Ces gens-là se défendaient-ils également ?

28 R. Est-ce que les gens de l'autre côté avaient pris les tranchées pour

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1 protéger leurs propres vies ?

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je me demande vraiment où nous allons et

3 comment on peut demander au témoin de faire quelque commentaire que ce soit

4 sur ce que les gens --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, vous n'avez pas tort.

6 Maître Tapuskovic, passez à autre chose, s'il vous plaît. Ceci ne nous mène

7 nulle part.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien. Espérons qu'il nous reste

9 suffisamment de temps pour y revenir.

10 Q. Voici ma question suivante : lorsque vous vous êtes rendu sur ces

11 positions bien plus tard, positions qui avaient été tenues --

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais que dans le transcript

13 mon nom apparaisse en rapport avec la dernière intervention et non pas Mme

14 Edgerton.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

16 Q. D'après les positions que vous avez vues de nombreuses années plus

17 tard, positions qui avaient été tenues par l'ABiH, vous vous êtes rendu

18 compte qu'il y avait une vue panoramique de l'ensemble de Sarajevo, n'est-

19 ce pas ?

20 R. Je le répète : je ne suis jamais allé sur les positions qui avaient été

21 tenues par l'ABiH. Je ne suis allé que sur les positions qui avaient été

22 occupées par les Serbes à Spicasta Stijena.

23 Q. Très bien. Je comprends. Là où vous avez été blessé et là où se

24 trouvait votre maison n'étiez-vous pas en réalité sur une colline

25 surplombant l'ensemble de la ville de Sarajevo; Sedrenik en d'autres

26 termes ?

27 R. De chez moi il est impossible de voir la ville. Bien sûr, de Sedrenik,

28 on voit bien Sarajevo.

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1 Q. Merci beaucoup. J'en viens maintenant à votre deuxième déclaration.

2 J'aimerais m'attarder sur certains éléments de celle-ci.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est le document 2902, la déclaration que

4 vous avez faite le 21 avril 2006. Quelques petites questions. Commençons à

5 la page 2. Pièce de l'Accusation 185, page 2.

6 Q. Voyez-vous le début ?

7 R. Pas encore.

8 Q. La page est là. Cela c'est la première page. Intéressez-vous au

9 quatrième paragraphe en partant du haut. On laisse de côté certains

10 éléments et on prend le paragraphe qui commence par :

11 "Avant …" Vous le voyez ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous dites ici la chose suivante :

14 "Avant l'arrivée des Nations Unies, quelques personnes ont essayé de

15 m'aider mais l'un des hommes a été touché. Je ne sais pas s'il a été tué ou

16 blessé à l'époque, mais je sais qu'il a fini par mourir."

17 Comment se fait-il que vous n'ayez jamais mentionné auparavant mais

18 seulement en 2006, plus précisément le 21 mars, cet incident au cours

19 duquel un homme a été tué à côté de vous ? Pourriez-vous nous dire d'abord

20 si ces propos sont exacts ?

21 R. Ce que j'ai dit ici est exact, mais je n'ai pas dit qu'il avait été

22 tué. J'ai dit que je ne savais pas s'il avait été blessé ou tué. Par la

23 suite, dans les conversations que j'ai eues avec mes parents, j'ai appris

24 que cet homme était mort bien plus tard de mort naturelle. Je crois que

25 cette explication est suffisante.

26 Q. Oui, en effet. Je mets l'effort, mais il me faut néanmoins vous poser

27 la question suivante : quand avez-vous dit la vérité, le premier jour ou le

28 cinquième jour après l'incident ou dix ans plus tard ? Comment se fait-il

Page 1746

1 que vous puissiez prétendre ce genre de choses ici ? N'est-il pas exact que

2 vous avez inventé cela ?

3 R. Ce que j'ai dit, le premier jour et dix ans plus tard et ce que je dis

4 aujourd'hui n'est que la vérité. Ces informations peuvent être vérifiées

5 auprès de la famille de cet homme. Lorsque j'ai fait la première

6 déclaration, personne ne m'a posé la question. Vous voyez d'ailleurs qu'il

7 y a moins de détails dans la première déclaration que dans la déclaration

8 que j'ai faite ultérieurement. Mais lorsque j'ai fait ma seconde

9 déclaration, l'enquêteur m'a posé beaucoup plus de questions. On le voit

10 bien d'ailleurs à la déclaration que j'ai donnée.

11 Q. On peut en déduire que vous n'avez dit la vérité qu'en 2006 --

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, je ne crois pas

13 que ce soit une question juste que vous posiez au témoin. Le témoin a

14 expliqué qu'on ne lui avait pas posé la question en 1995, question relative

15 à cet incident. Il a même ajouté que l'enquêteur, en 2006, avait été plus

16 complet dans les questions qu'il lui avait posées.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis convaincu qu'il est vrai que

18 d'autres personnes ont été tuées. Je suggère simplement que même s'il était

19 jeune, il était lui aussi dans une tranchée. Mais je voulais lui poser

20 quelque chose d'autre.

21 Q. Je vous dis que vous étiez aussi dans les tranchées, n'est-ce pas ?

22 R. Vous avez tout à fait le droit de me poser la question, mais je vous

23 réponds que tout ceci est absolument faux.

24 Q. Merci. J'insiste. Ici devant cette Chambre depuis le début de votre

25 déposition, vous avez dit que seul une balle avait été tirée. Comment

26 expliquez-vous cela ?

27 R. Dans ma première déclaration, c'est ce qui est dit, je l'ai lu. C'est

28 ce que j'ai dit, parce que j'étais encore traumatisé, choqué. J'ai dit

Page 1747

1 également que les tirs se sont poursuivis, que des gens ont essayé de

2 m'aider et que ce n'est qu'une fois qu'un transporteur de troupes blindé

3 est venu me chercher, que je suis parti vers l'hôpital, ce n'est qu'à ce

4 moment-là que les tirs se sont arrêtés.

5 Q. Avant que je vous montre quelques photos, j'aimerais vous poser la

6 question suivante : s'agissant de l'itinéraire que vous suiviez pour aller

7 à l'école tous les jours - dans le dernier paragraphe dans cette page, vous

8 dites : "Dans le quartier de la ville dans lequel j'habitais il n'y avait

9 pas de tranchées ni d'installations militaires ni de casernes."

10 Donc, vous dites, que malgré tout ce que nous avons entendu plus tôt de

11 votre bouche, il n'y avait pas de tranchées ni d'armes ni tout autre chose

12 de ce genre; c'est exact ?

13 R. Bien entendu, il y avait des tranchées sur la ligne de front, parce que

14 j'étais relativement proche de la ligne de front. Si vous jugez que ma

15 déclaration ici est incorrecte, qu'il en soit ainsi. Mais je parlais du

16 quartier précisément où nous vivions, et dans ce quartier-là il n'y avait

17 pas d'installations militaires.

18 Q. Très bien. Sur le chemin de l'école en 1995, empruntiez-vous souvent

19 cet itinéraire ? Y avait-il moins de tirs à l'époque et est-ce la raison

20 pour laquelle vous étiez en mesure de vous rendre à l'école ? Peut-on

21 affirmer cela ?

22 R. Je ne dirais pas les choses comme cela. Il y avait des tirs, et parfois

23 il y avait des accalmies pour encourager la population à relâcher son

24 intention de manière à ce qu'ils puissent nous reprendre pour cibles.

25 Q. Au cours cette marche d'une heure ou de 45 minutes le long de la ligne

26 de front, n'avez-vous jamais aperçu des fusils, des armes, des chars, des

27 armes lourdes ou des mortiers, ou pas ?

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que, à

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1 aucun moment au cours de sa déposition, le témoin n'a parlé de cet

2 itinéraire suivi le long de la ligne de front. Je ne crois pas que cette

3 question reflète la teneur des éléments de preuve et de la déposition

4 entendue.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je suis d'accord. Maître

6 Tapuskovic, ceci ne reflète pas ce qui a été dit dans la déposition du

7 témoin.

8 Donc la question sera la suivante : au cours de cette marche de 45 minutes

9 à une heure, avez-vous jamais aperçu le moindre fusil, arme, char ou tout

10 autre arme ou mortier lourd ?

11 Qu'avez-vous à répondre ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Voici quelle est ma réponse : sur le chemin

13 que je suivais pour aller à l'école il n'y avait pas seulement des

14 écoliers, il y avait d'autres gens également et il n'y avait pas d'armes ni

15 d'installations militaires du tout.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

17 Q. Bien. Nous pouvons donc en déduire que les installations militaires

18 étaient seulement situées sur les hauteurs ?

19 R. Je ne peux pas vous dire où se trouvaient les installations militaires.

20 Je n'en sais véritablement rien. S'agissant des hauteurs, je ne sais pas

21 non plus. Je sais que c'était le camp serbe qui les tenait.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la photo

23 numéro P188, numéro 02926 sur la liste 65 ter.

24 Q. Voyez-vous cette photo ?

25 R. Oui, oui.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pourrait-on obtenir un agrandissement de

27 cette image.

28 Q. Vous avez indiqué l'endroit où vous vous trouviez au moment où l'on

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1 vous a tiré dessus.

2 R. Je me déplaçais en direction de chez moi. Je n'étais pas debout à

3 l'arrêt. On m'a tiré dessus pendant que je marchais.

4 Q. Oui, c'est ce que je voulais dire. Quand le représentant du Procureur

5 vous a montré cette photo, vous avez indiqué l'endroit où vous avez été

6 touché, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, c'est vrai.

8 Q. Si cette position est exacte, en réalité vous n'étiez pas dans la rue,

9 vous étiez dans le champ devant ces arbres. Parce que si vous vous étiez

10 trouvé derrière les arbres, vous n'auriez pas pu être touché par une balle

11 de tireur isolé.

12 R. Je ne sais pas si vous voyez bien où se trouvait cette croix. Je ne

13 sais pas si vous regardez la croix ou la ligne qui se trouve sur la gauche

14 de la croix et qui touche le champ, mais la croix, je l'ai placée sur la

15 rue. En plus, cette photo a été prise

16 12 ans après l'incident. Tout le monde sait bien que les arbres ont poussé

17 dans l'intervalle, et en plus, nous étions en mars, il n'y avait pas de

18 feuilles sur les arbres, personne ne l'ignore.

19 Q. Monsieur, je n'ai jamais parlé de feuilles. Vous avez indiqué l'endroit

20 où vous vous trouviez. En réalité, vous n'étiez pas dans la rue; vous étiez

21 dans le champ. Vous venez d'ailleurs de le confirmer. Je vous repose la

22 question : étiez-vous dans la rue ou dans le champ ? Les arbres ne

23 m'intéressent pas du tout.

24 R. J'étais dans la rue, comme je l'ai déjà dit, et cette croix, je l'ai

25 placée dans la rue et pas dans le champ.

26 Q. Il y a quelques secondes, vous avez dit que vous étiez là et vous ne

27 m'avez jamais montré le champ.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Quoi qu'il en soit, Messieurs les Juges,

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1 je ne souhaite plus perdre de temps davantage sur cette question.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est vrai que la croix est grande.

3 On aurait peut-être simplement dû lui demander d'apposer un point sur

4 l'endroit où il se trouvait plutôt qu'une croix, parce que c'est vrai que

5 la croix déborde à la fois sur la rue et le champ un petit peu.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est devant les arbres. Quoi qu'il en

7 soit, c'est devant les arbres qu'il a tracé cette croix, Monsieur le

8 Président, quoi qu'il en soit.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons entendu sa déposition et

10 nous en ferons ce que nous jugerons nécessaire d'en faire.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien. Afin de ne pas perdre davantage

12 de temps, je vais laisser de côté cette question et cette photo, puisqu'il

13 s'agirait là d'un véritable gaspillage de temps après tout ce que nous

14 avons entendu.

15 Q. Je vous repose la question. Je suis désolé mais en tant que jeune

16 homme, en tant qu'adolescent de 15 ans, effectivement, il était tout à fait

17 terrible que vous vous trouviez dans cette situation, vous et le reste de

18 la population de Bosnie-Herzégovine. Mais je dois vous reposer la question

19 : malgré votre âge, vous étiez membre de l'ABiH, n'est-ce pas, pouvez-vous

20 répondre à cette question ?

21 R. Tout d'abord, ce n'est qu'une suggestion de votre part. D'autre part,

22 j'affirme, et cela peut être vérifié, que je n'étais pas membre de l'ABiH.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

24 Est-ce qu'il y a des questions supplémentaires.

25 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Par rapport à

26 cette série de questions concernant l'endroit où se trouvait le témoin, qui

27 figurent aux pages 50, 51; les questions au sujet des élévations figurant à

28 la page 45, ligne 20, les pages 40, 41 et 43, je voudrais demander que l'on

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1 place une série de photos devant le témoin de sorte que l'on puisse les

2 voir sur le rétroprojecteur.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Justement. Il faudrait respecter l'ordre

5 proposé, puisque c'est l'ordre dans lequel toutes les parties ont reçu ces

6 photos.

7 Tout d'abord, pour revenir sur la photo que vous aviez entre vos

8 mains tout à l'heure.

9 Nouvel interrogatoire par Mme Edgerton :

10 Q. [interprétation] Monsieur Zunic, est-ce que cette photo montre

11 l'endroit où vous étiez au moment où vous avez été blessé par balle au mois

12 de mars 1995 ?

13 R. Oui, c'est par là que je passais. J'étais là au moment où j'ai été

14 touché.

15 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, montrer et marquer cet endroit, si vous

16 le voyez sur le cette photo, en ayant à l'esprit les commentaires que vous

17 avez entendus concernant la taille de ce que vous avez marqué tout à

18 l'heure ?

19 R. Je peux vous montrer cela à peu près. C'est de là, à peu près. C'est à

20 peu près ici.

21 Q. L'endroit que vous marquez par la lettre X, c'est l'endroit où vous

22 étiez au moment où vous avez été touché, vous avez été blessé par balle ?

23 R. Oui, c'est à peu près cela.

24 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que ceci peut devenir la pièce

25 suivante.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, est-ce qu'il va nous montrer

27 aussi la direction qui montre la provenance de ce tir ?

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vais lui

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1 demander cela.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci deviendra la pièce P191.

3 Mme EDGERTON : [interprétation] Passons à la photo suivante, s'il vous

4 plaît.

5 Q. Monsieur Zunic, alors que vous marchiez, est-ce que vous voyez sur

6 cette photo ce qui se trouvait sur votre droite ?

7 R. Oui. Il y avait une maison.

8 Q. Saviez-vous qui habitait cette maison ?

9 R. Bien sûr. C'étaient des amis d'ailleurs des familles.

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-on attribuer une cote à cette pièce,

11 également.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P192, Monsieur le

14 Président.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je voudrais vous poser une question,

16 Madame. Quelle est la valeur probante de cette dernière photo ?

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Je peux poser la question tout de suite,

18 Monsieur le Juge. Avec votre permission, je voudrais parcourir ces photos,

19 et c'est à la fin qu'on va comprendre l'objectif de tout cela.

20 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Allez-y.

21 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.

22 La photo suivante, s'il vous plaît. En réalité, nous n'avons pas besoin de

23 cette photo-là. Pouvez-vous passer à la photo suivante.

24 Q. Monsieur Zunic, cette photo, est-ce qu'elle montre la route sur

25 laquelle vous circuliez au moment où vous avez été blessé ?

26 R. Oui, en effet.

27 Q. Est-ce que vous voyez l'endroit où vous étiez au moment où vous étiez

28 blessé ?

Page 1753

1 R. Oui, c'est à peu près ici, un petit peu plus en contrebas. Je l'ai

2 montré sur la photo précédente, la première photo.

3 Q. Pourriez-vous mettre une croix à cet endroit.

4 R. Ce serait à peu près ici, ou peut-être comme je l'ai montré sur la

5 première photo, un petit peu plus en contrebas.

6 Q. Pourriez-vous nous montrer la direction que vous preniez en marchant le

7 long de cette route au moment où vous avez été blessé. Vous faites cela,

8 s'il vous plaît, avec une flèche.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que ceci pourrait devenir la

11 prochaine pièce à conviction.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 193, Monsieur le

14 Président.

15 Mme EDGERTON : [interprétation] La photo suivante, s'il vous plaît.

16 Q. Monsieur Zunic, que voyez-vous sur cette photo ?

17 R. Je vois une partie de Spicasta Stijena. C'est à cet endroit que j'ai

18 été blessé.

19 Q. Au fur et à mesure que vous avanciez le long de la route, est-ce que

20 vous pouvez nous dire par rapport à vous où se trouve cet endroit ?

21 R. Cet endroit se trouve sur ma gauche.

22 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, montrer à l'aide d'une flèche, la

23 provenance de ce tir.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Q. L'endroit qui montre la provenance de ce tir, est-ce que cet endroit

26 est au même niveau, à la même altitude que l'endroit où vous étiez ou bien

27 est-ce que c'est encore plus élevé ?

28 R. Beaucoup plus élevé par rapport à l'endroit où j'étais.

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1 Q. Monsieur Zunic, comment pouvez-vous être sûr à 100 % que le tir est

2 venu de cette direction et pas d'une autre ?

3 R. Tout d'abord, je peux en être sûr, parce qu'on tirait dessus tout le

4 temps de Spicasta Stijena; aussi à cause des caractéristiques de ma

5 blessure, l'orifice d'entrée et de sortie; troisièmement, il y avait une

6 maison sur ma droite, la même maison que vous avez pu voir sur la photo

7 précédente.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez mettre la photo

9 P192 sur le rétroprojecteur.

10 Q. Est-ce la photo à laquelle vous venez de faire référence ?

11 R. Oui.

12 Q. Pourquoi dites-vous que vous ne pouviez être blessé avec un tir venant

13 de la direction que vous avez indiquée. Pourquoi vous dites cela ?

14 R. Tout d'abord parce qu'ils tiraient sans arrêt d'en haut; et aussi

15 parce qu'il y avait des gens qui m'étaient proches qui habitaient dans

16 cette maison. Vous savez, à l'époque on était tous comme une famille, on

17 était très proche.

18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser.

19 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je voudrais vous poser une question

20 par rapport à cette dernière image que vous avez présentée, à savoir la

21 photo de la maison, P192. D'après ce que j'ai compris de vos questions, il

22 semblerait qu'il y ait des impacts de balles dans les murs qui prouveraient

23 la provenance des tirs.

24 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, c'est peut-être ce que l'on peut

25 déduire de la question que j'ai posée. La réponse du témoin indique que

26 puisqu'il y avait des amis de sa famille qui habitaient dans cette maison,

27 il ne peut pas croire que les tirs sont venus de cette maison.

28 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Zunic, avec ceci se termine

2 votre déposition. Je vous remercie d'être venu déposer. A présent, vous

3 pouvez partir.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

5 [Le témoin se retire]

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec votre permission, je vais partir à

7 présent. Je vais donner la parole à M. Docherty.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

9 Votre prochain témoin est-il disponible ?

10 M. DOCHERTY : [interprétation] Oui.

11 Nous citons le témoin David Fraser.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez prévu combien de temps

13 pour M. Fraser ?

14 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que je vais

15 utiliser ce qui me reste de la session ainsi que toute la session suivante

16 pour interroger ce témoin au principal.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin peut-il faire sa

20 déclaration solennelle ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

23 LE TÉMOIN: DAVID FRASER [Assermenté]

24 [Le témoin répond par l'interprète]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir et on va

26 commencer votre déposition.

27 C'est M. Docherty qui va commencer par vous poser des questions.

28 Interrogatoire principal par M. Docherty :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Pourriez-vous nous dire comment

2 vous vous appelez, nous donner votre grade et nous dire quelle est l'armée

3 à laquelle vous appartenez.

4 R. Je suis le général David Fraser. Je travaille dans les forces armées

5 canadiennes et je suis un officier d'infanterie.

6 Q. Qu'est-ce que vous faites dans l'armée canadienne ?

7 R. J'ai été le commandant de la Région sud au niveau d'une brigade

8 multinationale en Afghanistan.

9 Q. Vous êtes membre des forces armées canadiennes depuis combien de

10 temps ?

11 R. Je suis devenu membre des forces armées en 1975 en tant que soldat de

12 réserve et je suis devenu un soldat des forces régulières en 1980.

13 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner quelques éléments de votre

14 carrière qui pourraient être pertinents par rapport à votre déposition.

15 Est-ce que vous pourriez résumer votre expérience, ce que vous avez

16 fait au niveau de l'infanterie puisque vous avez dit que vous étiez un

17 officier d'infanterie.

18 R. J'ai été le commandant à tous les niveaux de l'armée. J'ai été

19 lieutenant, colonel, capitaine, commandant, lieutenant-colonel et général

20 de brigade au niveau des opérations à l'étranger, à Chypre, en Bosnie, à

21 plusieurs reprises, en Afghanistan; tout ceci en tant qu'officier

22 d'infanterie. Tout récemment, j'ai été aussi à la tête d'une brigade d'à

23 peu près 8 000 soldats.

24 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle est votre expérience avec les

25 mortiers ?

26 R. J'ai été aussi le commandant d'un peloton de mortiers à deux reprises

27 d'ailleurs au cours de ma carrière. J'ai été aussi commandant de bataillon

28 où il y avait de mortiers. En tant que commandant de brigade, j'ai commandé

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1 des éléments, des unités ayant des installations d'artillerie, y compris

2 les mortiers.

3 Q. Pourriez-vous dire aux Juges quelle est votre expérience par rapport au

4 commandement de tireurs embusqués ?

5 R. En tant que commandant de bataillon au niveau des opérations en Bosnie

6 et aussi en tant que commandant de brigade j'avais une unité de tireurs

7 embusqués qui travaillaient pour moi et je les ai déployés et utilisés dans

8 le cadre de ces opérations.

9 Q. Enfin, vous avez dit que vous avez eu aussi un commandement à

10 l'étranger. Est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont vos expériences

11 au niveau des Nations Unies ?

12 R. Au niveau des Nations Unies, j'ai été commandant à trois reprises et

13 avec l'OTAN à deux reprises.

14 Q. Est-ce que vous avez été affecté en Bosnie en 1994 et 1995 ?

15 R. Oui, je suis allé en Bosnie en avril 1994 et la première fois où j'ai

16 quitté la Bosnie, c'était au mois de mai 1995.

17 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Greffier, pendant que

18 l'interrogatoire continue, je voudrais demander que l'on place

19 la pièce contenant un numéro ter 02927 et je voudrais demander qu'on la

20 place sur nos écrans.

21 Q. En attendant, mon Général, pourriez-vous me dire comment vous avez été

22 envoyé en Bosnie pour la première fois ?

23 R. Je faisais partie des Forces armées canadiennes à l'époque, et de temps

24 en temps on nous envoyait à l'étranger par rapport à ce mandat. On m'a

25 demandé de me rendre en Bosnie pour devenir un assistant militaire du

26 commandant du secteur de Sarajevo. J'ai été sélectionné et on m'a envoyé

27 là-bas pendant une année.

28 Q. Vous avez dit que vous étiez l'assistant militaire au commandant du

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1 secteur Sarajevo. Je vais vous demander de nous définir deux choses que

2 vous avez dites dans votre réponse. Tout d'abord, la notion du premier

3 assistant militaire, ensuite ce que c'est que le secteur Sarajevo.

4 R. En tant qu'assistant militaire du commandant, j'étais responsable du

5 bureau du commandant du secteur et il fallait que je m'occupe de son

6 agenda, de sa correspondance, c'est-à-dire faire en sorte que la

7 correspondance se fasse par rapport à toutes ses responsabilités, par

8 rapport à ce qu'il nous demandait de faire et aussi je me rendais sur le

9 terrain. Je l'accompagnais lors de ses visites sur le terrain. Je faisais

10 en sorte que toute la coordination au niveau des unités soit faite sur le

11 terrain et qu'il assiste aux réunions auxquelles il assistait.

12 Ensuite, vous m'avez demandé ce que c'était que le secteur Sarajevo ? A

13 l'époque, en Bosnie, il y avait des secteurs. Le secteur pour lequel je

14 travaillais, c'était le secteur dirigé par deux généraux français. Tout

15 d'abord Soubirou, ensuite Gobillard. Ils étaient responsables du secteur

16 Sarajevo et de la zone démilitarisée qui était juste au sud du mont Igman.

17 Q. Que faisiez-vous au jour le jour dans le cadre de ce poste d'assistant

18 militaire du commandant de secteur militaire de Sarajevo ?

19 R. Le matin, il y avait les sessions de briefing du matin, ensuite on

20 s'occupait du courrier, on revoyait l'agenda du jour. Je me rendais avec

21 lui sur le terrain pour visiter les unités. Vers la fin de la journée, nous

22 allions visiter le commandant à l'époque. C'était le général Michel Rose.

23 Ensuite, le général Sir Rupert Smith. On rendait aussi la visite souvent

24 aux autorités bosniaques, musulmanes et serbes.

25 Q. Quel était le grade que vous aviez à l'époque pendant que vous étiez

26 assistant militaire à Sarajevo ?

27 R. A l'époque, j'étais commandant.

28 Q. Mon Général, je vais attirer votre attention sur la carte qui est

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1 placée sur l'écran et je vais vous poser quelques questions au sujet de

2 cette carte. Pendant que vous étiez à Sarajevo, est-ce que vous avez été

3 amené à connaître la géographie des lieux ?

4 R. Oui, oui, plus que connaître puisque j'y suis allé souvent. Je

5 visitais, je faisais le tour sur le terrain avec mon commandant.

6 Q. Est-ce que vous connaissiez aussi les endroits où se trouvaient les

7 lignes de confrontation ?

8 R. Oui.

9 Q. Est-ce que vous avez utilisé ces informations de façon quotidienne en

10 vous acquittant de vos obligations professionnelles ?

11 R. Oui.

12 Q. Avant de venir aujourd'hui, est-ce que vous avez eu la possibilité

13 d'examiner à nouveau la carte, l'original de la carte qui figure sur

14 l'écran ?

15 R. Oui, j'ai eu la possibilité de le faire.

16 Q. Est-ce que vous pensez que c'est une carte juste qui montre quelle

17 était la situation à Sarajevo et de ses environs à l'époque ?

18 R. Oui, je pense que cette carte était parfaitement claire et juste de la

19 région et de la ville.

20 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont vos observations par

21 rapport à ces endroits et les lignes de confrontation ?

22 R. Les lignes qui correspondent aux lignes de confrontation bosniaques ou

23 serbes sont pour la plupart exacte.

24 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander au greffier d'agrandir

25 cette carte pour se focaliser sur la ville de Sarajevo. C'est la région

26 brunâtre de la carte. Je vais lui demander de nous montrer le centre et

27 jusqu'au-dessus du centre.

28 Q. Mon Général, je vais vous demander de marquer quelques endroits sur

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1 cette carte.

2 M. DOCHERTY : [interprétation] Avant de faire ceci, je vais tout d'abord

3 verser au dossier la carte vierge au-dessus.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P194.

6 M. DOCHERTY : [interprétation]

7 Q. Mon Général, savez-vous où se trouve le site de Lukavica ?

8 R. Oui.

9 Q. Est-ce que ceci figure sur la carte ?

10 R. Oui.

11 Q. Il y a un stylet que vous pouvez utiliser pour noter sur l'écran cet

12 endroit. Je vais vous demander de faire un carré à l'endroit où se trouve

13 cette localité et d'y écrire la lettre L ?

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Est-ce qu'à Sarajevo, il y avait un endroit que l'on appelait "l'Allée

16 des Snipers" ?

17 R. Oui, il y en avait une.

18 Q. Pourriez-vous nous montrer une portion, est-ce qu'on voit une portion

19 de cette allée sur l'écran ?

20 R. Oui.

21 Q. Pourriez-vous nous dessiner une ligne qui correspond à cette "Allée des

22 Snipers" et écrire les lettres SA, correspondant au mot anglais "Snipers

23 Alley".

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Q. Est-ce que le mont d'Igman figure sur la carte ?

26 R. Oui.

27 Q. Pourriez-vous --

28 R. Non, ce n'est pas sur l'écran.

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1 Q. L'aéroport, est-ce qu'il est sur la carte ?

2 R. Oui.

3 Q. Pourriez-vous entourer le périmètre de l'aéroport et inscrire la lettre

4 A à ce niveau-là.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. Connaissez-vous le quartier d'Ilidza ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce qu'on le voit sur la carte ?

9 R. Non, ce n'est pas vraiment dans la partie agrandie.

10 Q. Nous allons y revenir.

11 Est-ce que vous connaissez le quartier de Sedrenik ou de Spicasta Stijena ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous voyez cela sur la carte ?

14 R. Oui.

15 Q. Est-ce que vous pourriez encercler la zone correspondant à

16 Spicasta Stijena ou Sedrenik et mettre la lettre S à côté de cet endroit-

17 là.

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 M. DOCHERTY : [interprétation] Je voudrais verser cela.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

21 Je voudrais tout d'abord poser une question au général de brigade. Est-ce

22 qu'il y avait quoi que ce soit de particulier par rapport à la

23 configuration de cette "Allée des Snipers" qui faisait que cette allée

24 était particulièrement intéressante pour les tireurs embusqués ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait toute une série d'immeubles le long

26 de cette "allée" qui était facile d'accès pour les tireurs embusqués. A

27 cause de l'élévation, ils avaient un bon contrôle du sud de la ville et de

28 la zone autour de la rivière, au sud de la rivière et c'était une position

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1 particulièrement intéressante.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE MINDUA : -- question du Président. Lorsque vous parlez des

4 tireurs embusqués, à quel camp pensez-vous ? Vous pensez aux deux camps ou

5 bien à un seul de factions armées qui utilisaient des tireurs embusqués ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux côtés ont eu recours aux tireurs

7 embusqués.

8 M. LE JUGE MINDUA : Nous parlons bien de "Sniper Alley".

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait des tireurs embusqués des deux

10 côtés de la "Sniper Alley," mais la plupart étaient du côté serbe et ils

11 tiraient sur le côté bosniaque.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Oui, justement je m'apprêtais à continuer.

14 Si vous le voulez bien, plus tard au cours de la déposition de ce

15 témoin nous allons proposer une photo plus détaillée de cette "Allée des

16 Snipers." Pour l'instant je vais demander que l'on verse au dossier cette

17 pièce et qu'on lui attribue une cote.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P195.

20 M. DOCHERTY : [interprétation] A présent, je voudrais demander au greffier

21 de remettre la carte vierge sur l'écran et de nous montrer une vue plus

22 large de cette carte pour y inclure les localités que l'on ne pouvait pas

23 identifier tout à l'heure.

24 Q. Mon Général, vu la carte telle qu'elle est présentée à présent, est-ce

25 que l'on y voit le mont d'Igman et le quartier d'Ilidza ?

26 R. Le mont d'Igman est là et Ilidza aussi.

27 Q. On va commencer par Ilidza. Pourriez-vous, sur cette carte, mettre un

28 carré au niveau de l'endroit où se trouve Ilidza et marquer cet endroit par

Page 1764

1 la lettre I en majuscule ?

2 R. Oui. [Le témoin s'exécute]

3 M. DOCHERTY : [interprétation]

4 Q. Pourriez-vous maintenant faire une marque sur le mont Igman. Même si

5 cela commence aussi par un I, nous allons le marquer à l'aide des lettre MT

6 pour "mont."

7 R. [Le témoin s'exécute]

8 Q. Y avait-il une route qui traversait le mont Igman ?

9 R. Oui.

10 Q. A l'aide de cette carte, pourriez-vous nous montrer quelle était la

11 configuration de la route ?

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Il s'agit de la ligne qui a été faite au bas

14 à gauche de la carte.

15 Maintenant, j'aimerais que l'on verse cette carte au dossier.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, pas de problème.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 196.

18 M. DOCHERTY : [interprétation] Pourrions-nous, à nouveau, voir la carte

19 vierge sans annotation. Merci.

20 Q. Général, je vais maintenant vous demander d'annoter la carte. Je ne

21 vais pas demander à ce que l'on verse cette carte annotée au dossier, mais

22 je vais demander plutôt que le greffier nous accorde une cote provisoire et

23 que l'on puisse ensuite zoomer sur l'endroit que vous avez annoté.

24 Général, est-ce que vous saviez qu'il y avait des endroits qui

25 surplombaient Sarajevo, comme Debelo Brdo, Mojmilo et Zuc ? Connaissez-vous

26 ces élévations ?

27 R. Oui.

28 Q. Commençons par Debelo Brdo. Sur la carte, pourriez-vous nous montrer où

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1 se trouve Debelo Brdo ?

2 M. DOCHERTY : [interprétation] Je demanderai ensuite au greffier de faire

3 un agrandissement, donc un zoom sur l'endroit que vous aurez marqué sur la

4 carte comme représentant Debelo Brdo.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. C'est un tout petit peu trop agrandi. La carte est très spécialisée

7 [phon]. C'est très bien.

8 Nous allons essayer de verser cette carte, ce cliché de carte au dossier.

9 Pourriez-vous maintenant à nouveau, sur cette carte, Général, nous marquer

10 Debelo Brdo.

11 R. [Le témoin s'exécute]

12 Q. Quand vous étiez à Sarajevo saviez-vous quelles factions contrôlaient

13 Debelo Brdo ?

14 R. Oui.

15 Q. Pourriez-vous nous le dire ?

16 R. Les Musulmans avaient des positions qui se trouvaient juste en

17 contrebas de ce téton que l'on appelait Debelo Brdo, les Nations Unies

18 étaient au-dessus et les tranchées des Musulmans étaient en dessous.

19 Ensuite, les Serbes étaient au sud sur un mont qui était encore plus haut

20 et qui surplombait Debelo Brdo.

21 Q. Merci.

22 M. DOCHERTY : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, Monsieur le

23 Témoin, annoter ce cercle que vous avez fait sur la carte avec un DB pour

24 "Debelo Brdo."

25 R. [Le témoin s'exécute]

26 M. DOCHERTY : [interprétation] J'aimerais maintenant, Monsieur le

27 Président, que l'on verse cette carte au dossier si c'était possible.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin pourrait-il peut-être nous

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1 montrer sur la carte les positions dont il vient de nous parler ? Les

2 positions des Nations Unies et des Serbes.

3 M. DOCHERTY : [interprétation] Tout à fait.

4 Q. Général, vous voyez une ligne brisée bleue sur la carte ?

5 R. Oui.

6 Q. A quoi cela correspond-il ?

7 R. C'était la position des Musulmans.

8 Q. C'était leurs positions le plus en avant ?

9 R. Oui, si je me souviens bien, c'est cela.

10 Q. Qu'en est-il de la ligne brisée rouge ?

11 R. Cela c'était la ligne de front des positions des Serbes. Si je me

12 souviens bien, il y a quelques petites modifications que j'apporterais à

13 cette ligne.

14 Q. Pouvez-vous le faire ?

15 R. Je peux vous le montrer peut-être. Vous voyez la route qui se trouve

16 juste sous le B ?

17 Q. Oui.

18 R. Si je me souviens bien, je crois que les Serbes contrôlaient cette

19 section de la route.

20 M. DOCHERTY : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, faire une

21 marque sur la carte. Ceci est-il possible ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois pas pourquoi cela ne

23 serait pas possible.

24 M. DOCHERTY : [interprétation]

25 Q. Très bien. Pourriez-vous faire cette marque sur la carte et l'annoter.

26 R. [Le témoin s'exécute]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, pourriez-vous ménager une

28 pause entre les questions et les réponses. Les interprètes ont du mal à

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1 suivre si vos propos se chevauchent.

2 M. DOCHERTY : [interprétation] Je suis bien au courant du problème et

3 j'essais de m'y tenir mais j'ai beaucoup de mal.

4 Q. Général, qu'est-ce qu'il y avait exactement en haut de Debelo Brdo ?

5 R. Il y avait une position des Nations Unies.

6 Q. Pourriez-vous nous dire exactement à quoi correspondait cette

7 position ? Qui s'y trouvait ? Avec combien d'hommes ? Qui étaient à la tête

8 de quoi ?

9 R. Si je me souviens bien, il s'agissait d'une petite section. C'était un

10 lieutenant qui était en charge de ce peloton. Il y avait sans doute une

11 trentaine d'hommes là-haut.

12 Q. Quand on descend la colline, quelle est la première faction que l'on

13 rencontre ?

14 R. Juste en dessous au pied de la colline plutôt à l'ouest et à l'est, on

15 avait les tranchées des Musulmans qui se poursuivaient jusqu'à la ville,

16 puis ensuite vers le nord, qui continuaient vers la ville.

17 Q. Continuons à descendre la colline. Quelle serait la faction suivante

18 que l'on pourrait rencontrer ?

19 R. Quand on est vers le sud, on descend un peu la colline - enfin, on

20 descend la colline mais on monte, en fait. Et on se retrouve exactement là

21 où étaient les positions serbes qui se trouvaient juste au-dessus de Debelo

22 Brdo. On pouvait un petit peu - enfin cela surplombait un peu Debelo Brdo,

23 et c'est là que se trouvaient les Serbes, le long de la ligne de crête.

24 Q. [aucune interprétation]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc les Serbes occupaient des

26 positions qui étaient plus hautes que les autres ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

28 Ils surplombaient, ils occupaient tout ce qui surplombait, enfin, en

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1 tout cas dans cet endroit-là. Les Nations Unies commandait dans ce petit

2 téton - j'appellerais cela un téton - qui est quand même assez élevé, et

3 les Musulmans étaient un petit peu en contrebas, ensuite des Serbes qui

4 étaient en hauteur. En fait, c'était quand même les Nations Unies qui

5 avaient la position-clé dans cette région.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que quand on descendait

7 on arrivait d'abord dans les tranchées musulmanes ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela signifie peut-être qu'ils se

10 trouvaient quand même dans une position élevée, en revanche non, vous avez

11 l'air de dire qu'ils n'occupaient pas les positions les plus élevées.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Les Nations Unies étaient un petit peu

13 au-dessus des Musulmans, et les Serbes surplombaient légèrement les Nations

14 Unies, et c'étaient eux vraiment qui occupaient tous les postes les plus

15 élevés de la région.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

17 Monsieur Docherty, poursuivez.

18 Q. Quand vous dites que les Serbes étaient légèrement au-dessus des

19 Musulmans, cela c'était une autre colline ?

20 R. Oui, c'était sur autre colline.

21 Q. Au point de vue militaire, quelle était la relation exacte entre cette

22 autre colline plus élevée et Debelo Brdo ?

23 R. C'étaient les Serbes qui occupaient les meilleures positions dans la

24 région, parce qu'ils possédaient toute la crête qui était au sud de la

25 ville. Debelo Brdo n'était que ce petit téton. Certes, c'était important.

26 C'était un point important qui se trouvait entre les positions serbes et la

27 ville. Les Nations Unies tenait Debelo Brdo, et les Musulmans avaient le

28 reste, c'est-à-dire ce qui était à l'est et à l'ouest de Debelo Brdo. Ils

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1 n'auraient pas pu avoir grand-chose de mieux, finalement. C'était vraiment

2 les Serbes qui occupaient les positions dominantes sur la crête dans cet

3 endroit-là.

4 M. DOCHERTY : [interprétation] Sur cette pièce, pourrions-nous encore à

5 nouveau avoir la carte vierge, mais toujours en la cadrant, en gardant le

6 même cadrage.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, cette carte annotée recevra la cote

8 P197.

9 M. DOCHERTY : [interprétation]

10 Q. Général, est-ce que vous connaissez Zuc ?

11 R. Oui. C'est là que se trouvait l'antenne de télévision.

12 Q. Est-ce que l'on voit Zuc sur cette carte ?

13 R. Oui, c'est en haut à gauche.

14 Q. Pourriez-vous annoter la carte avec un X à l'endroit de Zuc ?

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Votre X est assez grand. Est-ce que cela signifie que Zuc se trouve

17 exactement au centre de votre intersection ou bien dans les environs ?

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Très bien.

20 M. DOCHERTY : [interprétation] Pour le compte rendu, pourrions-nous noter

21 que le point rouge qui se trouve à la droite du X représente bien cette

22 colline de Zuc.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est peut-être plus simple tout

24 simplement d'enlever le X ?

25 M. DOCHERTY : [interprétation] En effet. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

26 Monsieur l'Huissier, enlever le X, et nous allons reprendre l'exercice pour

27 arriver à trouver Zuc.

28 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

Page 1770

1 M. DOCHERTY : [interprétation]

2 Q. Pourriez-vous mettre un Z à côté de ce point.

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 M. DOCHERTY : [interprétation] J'aimerais, s'il vous plaît, que l'on verse

5 cette pièce au dossier telle qu'elle a été annotée.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, pas de problème.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P198.

8 M. DOCHERTY : [interprétation] Si on pouvait à nouveau avoir la carte

9 vierge, puisque nous allons procéder à un autre marquage, ce sera le

10 dernier.

11 Q. Connaissez-vous, Monsieur le Témoin, une colline appelée Mojmilo ?

12 R. Oui.

13 Q. La voit-on sur la carte ?

14 R. Non.

15 M. DOCHERTY : [interprétation] Pourrions-nous dans ce cas-là avoir la vue

16 d'ensemble de la carte pour essayer de repérer cet endroit.

17 Q. Voyons-nous Mojmilo maintenant ?

18 R. Oui.

19 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, noter la position de Mojmilo à l'aide

20 d'un point et le repérer avec la lettre M.

21 R. [Le témoin s'exécute]

22 M. DOCHERTY : [interprétation] Je demande l'admission de cette carte

23 annotée.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons la verser au dossier.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P199.

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Merci, Monsieur l'Huissier. Nous en avons

27 terminé avec les annotations sur la carte.

28 Q. Général, ces deux collines dont on parlait, Zuc et Mojmilo, nous allons

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1 en parler. Tout d'abord, commençons par Zuc. Qui contrôlait Zuc, pouvez-

2 vous nous dire quelles factions belligérantes le tenaient ?

3 R. Les Musulmans.

4 Q. Du haut en bas ?

5 R. Oui.

6 Q. Pour Mojmilo, pouvez-vous nous dire qui contrôlait Mojmilo ?

7 R. Les Musulmans.

8 Q. Du haut en bas ?

9 R. Oui.

10 Q. Passons à autre chose. Passons aux tirs embusqués. Les attaques de

11 sniper contre des civils étaient-ils une grande préoccupation pour vous

12 lors de votre séjour à Sarajevo ?

13 R. Oui, tout à fait.

14 Q. Pourriez-vous nous dire comment les troupes des Nations Unies qui se

15 trouvaient dans la ville étaient informées de ces attaques de tireurs

16 embusqués portées contres les civils ?

17 R. On avait différentes façons de le savoir. D'abord, nos forces qui se

18 trouvaient sur le sol et qui faisaient partie des unités antisnipers ou

19 alors on entendait aussi quand il y avait des protestations qui étaient

20 envoyées par l'une des factions belligérantes.

21 Q. Quelle forme prenait ces protestations, ces réclamations ? C'était par

22 téléphone, c'était en tête-à-tête, en lettre ou quoi ?

23 R. Soit c'était des coups de fil, des entretiens en tête-à-tête ou alors

24 des lettres envoyées. De toute façon, il y avait toujours une enquête.

25 Q. En quoi consistait cette enquête ? Une fois qu'on avait eu le rapport à

26 propos d'un incident de tirs embusqués, que faisaient les Nations Unies ?

27 R. Tout d'abord, on notait tous les détails de la réclamation. On essayait

28 de voir quel était le bataillon qui se trouvait à cet endroit-là pour

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1 essayer de trouver le plus d'informations à ce propos en recueillant des

2 informations de la part des autorités locales, par exemple. Ensuite, on

3 répondait à la protestation. On envoyait une réponse à la faction

4 belligérante concernée, ce qui générait encore des communications

5 supplémentaires, des discussions. On leur demandait d'arrêter de poursuivre

6 ces activités.

7 Q. La plupart du temps quelle était l'efficacité de toute cette procédure

8 qui était engagée après réclamation ?

9 R. Normalement, voilà ce qui se passait. Il y avait une augmentation

10 d'incidents de tirs embusqués, donc on avait un bon nombre de réunions, des

11 discussions en grand nombre. On en arrivait ensuite à un point, où au

12 niveau du commandant du corps ou du commandant de secteur, même le

13 commandant de toute la Bosnie à l'époque, soit Sir Michael Rose ou Rupert

14 Smith devait intervenir. Il intervenait, la situation s'apaisait un petit

15 peu, puis cela recommençait doucement à s'accumuler jusqu'à en arriver à

16 une autre situation de crise où il fallait à nouveau se concerter pour

17 essayer d'empêcher ces incidents de tirs.

18 Q. Est-ce que --

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, je vois qu'il est

20 l'heure de faire la pause.

21 Nous allons lever la séance pour 20 minutes.

22 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

23 --- L'audience est reprise à 12 heures 35.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous devrions nous féliciter puisque

25 notre pause n'a duré que 18 minutes et non 20.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Si je pouvais demander trois minutes de

27 votre temps. Je crois que j'ai eu beaucoup de mal ce matin, puisque j'ai

28 oublié de verser la dernière photographie qui avait été marquée par notre

Page 1773

1 dernier témoin, M. Zunic. Pourrions-nous verser cette pièce ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pas de problème.

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P200.

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.

5 M. DOCHERTY : [interprétation]

6 Q. Général, juste avant la pause vous nous parliez de la procédure qui

7 était employée couramment lorsqu'une réclamation avait été envoyée de la

8 part d'une des factions belligérante. Vous étiez en charge du commandement

9 et contrôle. Pourriez-vous nous dire exactement quelles étaient les

10 activités qui faisaient l'objet de réclamation, quelles étaient les

11 conclusions que vous avez pu en tirer ?

12 R. De mes observations, j'ai cru comprendre qu'il y avait une intention

13 d'un commandant qui était en jeu ici, en tout cas, en ce qui concerne les

14 incidents de "sniping" sur Sarajevo. Ceci est illustré par le fait que le

15 "sniping" se faisait le long de "Sniper Alley," que les tirs embusqués se

16 faisaient aussi du côté de l'aéroport et qu'il y avait aussi des incidents

17 de "sniping" du côté de Spicasta Stijena, Sharpstone. Il s'agissait de

18 trois endroits bien distincts, trois organisations bien distinctes. En nous

19 basant sur l'expérience militaire, il me semble que l'on peut en tirer la

20 déduction qu'il y avait une intention délibérée de la part d'un

21 commandement quelconque.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comme vous l'avez fait sur "Sniper

23 Alley," pourriez-vous nous dire si, pour ce qui est de ces deux autres

24 emplacements, les tirs embusqués se faisaient depuis les deux parties en

25 présence ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de Spicasta Stijena, il me

27 semble me souvenir que la plupart des tirs embusqués venaient du côté

28 serbe. Pour ce qui est de "Sniper Alley," de façon principale cela venait

Page 1774

1 du côté serbe et pour ce qui est de la zone de l'aéroport, là je crois que

2 c'était 50-50. Peut-être un petit peu plus du côté serbe que de l'autre

3 côté.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si je vous ai bien compris, pour ce

5 qui est de Spicasta Stijena, vous dites que la plupart des tirs embusqués

6 provenaient du côté serbe, ce qui semblerait indiquer qu'il y avait quand

7 même quelques tirs qui venaient de l'autre côté aussi. Pour ce qui est de

8 "Sniper Alley," les tirs provenaient surtout du côté serbe.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est en effet ce que j'ai voulu dire.

10 M. DOCHERTY : [interprétation]

11 Q. Général, s'il vous plaît, nous allons étudier ces différents

12 emplacements, un par un. Tout d'abord "Sniper Alley."

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander au greffier d'audience

14 d'afficher la pièce 2819. Il s'agit d'une photographie aérienne.

15 Q. Nous attendons l'affichage et dans l'intervalle, connaissez-vous un

16 quartier de Sarajevo qui s'appelle Grbavica ?

17 R. Oui.

18 M. DOCHERTY : [interprétation] Je voudrais que l'on recadre cette

19 photographie, s'il vous plaît.

20 Q. En regardant cette photographie, Général, voyez-vous le Holiday Inn ?

21 R. Oui.

22 Q. De quelle couleur est le Holiday Inn ?

23 R. Il est jaune moutarde et il se trouve en plein milieu, en haut de la

24 photo.

25 Q. Y a-t-il une route qui passe devant ce Holiday Inn ?

26 R. Oui. C'est cette route à laquelle on faisait référence sous le nom de

27 "Sniper Alley."

28 Q. Vers le milieu de cette photographie, est-ce que vous voyez une rangée

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1 d'arbres qui traversent la photo de gauche à droite ?

2 R. Oui. Cela correspond à la rivière Miljacka.

3 Q. Cette rivière avait-elle une signification militaire quelconque, en

4 tout cas lors de votre séjour à Sarajevo ?

5 R. C'était en fait la ligne de séparation entre les Musulmans et les

6 Serbes.

7 Q. En bas de la photo, il y a une zone résidentielle assez dense, en tout

8 cas c'est ce que je vois. Pourriez-vous nous dire quelle était la faction

9 belligérante qui contrôlait cette zone qui se trouve en bas de l'écran sur

10 la photo ?

11 R. C'étaient les Serbes.

12 Q. Connaissez-vous le nom de ce quartier qui, selon vos dires, était

13 contrôlé par les Serbes ?

14 R. Oui, je pense que c'est bien Grbavica, je n'en suis pas absolument

15 certain. Il faudrait que je voie une carte plus détaillée.

16 M. DOCHERTY : [interprétation] Pouvons-nous maintenant passer à la pièce

17 2930 [comme interprété], qui est une autre photo aérienne. Pourrions-nous

18 l'afficher, s'il vous plaît ?

19 Q. Nous avons sur l'écran maintenant une autre photo aérienne. Est-ce que

20 vous reconnaissez ce qui est à l'écran, Général ?

21 R. Oui.

22 Q. La route que vous avez appelée "Sniper Alley" figure-t-elle sur cette

23 photo ?

24 R. Ce n'est pas très clair, mais je sais que c'est là quelque part entre

25 les grandes tours. On voit bien quand même la rangée d'arbres qui suit la

26 rivière.

27 Q. A l'aide du stylet, pourriez-vous, s'il vous plaît, déjà repérer la

28 rivière Miljacka sur l'écran. Cela permettrait de se repérer.

Page 1776

1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Merci.

3 M. DOCHERTY : [interprétation] J'aimerais encore que l'on annote à nouveau

4 cette carte. J'ai encore quelques questions à poser tout d'abord.

5 Q. Général, dans cette photo que nous avons à l'écran, est-ce que vous

6 voyez le quartier qui s'appelle Grbavica ?

7 R. Je crois que c'est en haut à droite.

8 Q. Le long de "Snipper Alley," avez-vous vu de vos propres yeux un nid de

9 tireurs embusqués serbes ?

10 R. Mon patron et moi-même en avons visité un lors de notre séjour.

11 Q. Pouvez-vous nous dire à peu près à quel moment vous vous y êtes

12 rendus ?

13 R. C'était printemps ou été 1995.

14 Q. Pourriez-vous nous dire ce qui a provoqué cette visite dans ce nid de

15 snipers ?

16 R. Nous étions très occupés à propos d'incidents de tirs embusqués qui

17 avaient eu lieu. Nous avions entendu dire qu'il y avait plusieurs positions

18 concernées. Nous avons demandé aux Serbes de nous rendre dans certains de

19 ces bâtiments, ils nous ont escortés jusqu'à l'un de ces bâtiments.

20 Q. Ce bâtiment dans lequel on vous a escortés figure-t-il sur la

21 photographie que nous avons sous les yeux à l'heure actuelle ?

22 R. Oui.

23 Q. Pourriez-vous le marquer d'un X, s'il vous plaît.

24 R. Est-ce qu'on pourrait agrandir la carte, s'il vous plaît, pour faire un

25 zoom.

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Il faudrait, bien sûr, dans ce cas-là

27 enlever le marquage qui existe pour pouvoir zoomer sur l'endroit qui vous

28 intéresse.

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1 Q. Est-ce que c'est suffisamment prêt ?

2 R. Oui.

3 Q. Avant de marquer, d'annoter le bâtiment en question, pourriez-vous

4 retracer une ligne qui suivrait la rivière.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 Q. Maintenant, pouvez-vous annoter le bâtiment dans lequel vous vous êtes

7 rendu d'un X.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 M. DOCHERTY : [interprétation] Nous aimerions verser au dossier cette pièce

10 telle qu'elle a été annotée.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est possible.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P201.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] J'en ai terminé avec les annotations pour

14 l'instant en tout cas et poursuis mes questions.

15 Q. Quand vous êtes entré dans ce bâtiment, Général, à quoi avez-vous

16 remarqué que ce bâtiment avait déjà été employé par des snipers ? Pourriez-

17 vous nous le dire ?

18 R. C'est un bâtiment qui faisait trois à quatre étages, en brique rouge.

19 On a monté les étages, et on s'est rendu compte en montant dans les étages

20 qu'il y avait des meurtrières, des trous, des orifices qui avaient été

21 percés dans les murs. On les appellerait des meurtrières presque. Vous

22 pouvez ainsi observer le côté musulman de la rivière. Il y avait aussi des

23 sacs de sable qui pouvaient être utilisés pour protéger l'emplacement des

24 tireurs. Il y avait d'autres endroits qui pouvaient être utilisés par les

25 tireurs embusqués afin de tirer.

26 Q. Suite à ces observations, en avez-vous tiré des conclusions

27 professionnelles en ce qui concerne l'utilisation de ce bâtiment rouge qui

28 existait à Grbavica ?

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1 R. C'était une bonne position pour procéder à des tirs embusqués. J'avais

2 bien l'impression que tout avait été prêt pour qu'on puisse s'en servir

3 comme nid de snipers.

4 Q. Des tirs embusqués ont eu lieu tout au long -- pardon excusez-moi, je

5 reprends.

6 Plus tôt au cours de votre déposition, vous avez indiqué "Sniper Alley" sur

7 une carte. J'aimerais savoir si les tirs embusqués ont eu lieu tout au long

8 de la ligne que vous avez tracée sur cette carte ?

9 R. Oui.

10 Q. Au cours de la période que vous avez passée à Sarajevo, êtes-vous entré

11 en possession d'informations portant sur d'autres nids de snipers, à savoir

12 autre que celui que vous avez indiqué d'une croix sur la pièce qui figure

13 devant vous dans ce bâtiment en brique rouge ?

14 R. Nous avons eu des informations faisant état d'un certain nombre

15 d'autres bâtiments dans toute la ville, principalement le long de "Sniper

16 Alley" où il y avait eu des activités. Tout ceci a été cartographié par le

17 groupe spécial de lutte contre les tireurs embusqués positionnés chaque

18 jour le long de "Sniper Alley" et ce, sous la supervision des Français

19 aidés par les Ukrainiens.

20 Q. Bien. Je vais arriver dans un instant à ce groupe spécial chargé de

21 lutter contre les tirs embusqués.

22 Avant cela, j'aimerais savoir si vous avez eu vent d'allégations

23 selon lesquelles la partie musulmane de Bosnie avait éventuellement tiré

24 sur ses propres civils à un moment donné afin de faire en sorte que les

25 médias reflètent cette information et que l'on suscite ainsi une certaine

26 sympathie vis-à-vis de leur part, et au contraire une certaine antipathie

27 vis-à-vis de la partie serbe ?

28 R. En fait, j'ai été informé de deux incidents ainsi que d'un troisième

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1 incident qui a été précipité en quelque sorte par les Serbes mais dont la

2 conclusion a été signée d'une main musulmane.

3 Q. Bien. Lorsque vous avez fait cette déclaration, s'agissant des deux

4 incidents plus cet incident de pilonnage, j'aimerais que vous nous parliez

5 de ces incidents tour à tour, dans n'importe quel ordre, celui qui vous

6 conviendra le mieux. Prenez le premier, puis le second, puis le troisième.

7 R. Le premier cas, c'est un cas dans lequel les Français étaient en

8 possession d'une vidéo montrant un tireur embusqué musulman tirant sur des

9 gens de sa propre population. Je n'ai jamais vu la vidéo, mais j'en ai

10 entendu parler de la bouche des officiers français dans mon bureau et de

11 mon supérieur français. Le vice-président musulman en a parlé lors d'une

12 des réunions que nous avons eue, lorsqu'il essayait d'accuser la partie

13 adverse, les Serbes, de certains actes. En fait, nous savions qu'il était

14 coupable et qu'il avait à voir avec le pilonnage en question dont j'ai

15 parlé.

16 Q. Par rapport à cela, passons à cet incident de pilonnage dont vous

17 parlez, puisque clairement il y a un rapport entre les deux. A quelle date

18 cet incident a eu lieu, l'incident dont vous parlez ?

19 R. Je pense que cet incident-là a eu lieu le 18 ou le

20 19 septembre. Tout a commencé lorsque deux attaques au mortier ont eu lieu

21 dans un intervalle d'environ 40 minutes. Au cours de la première attaque,

22 les mortiers ont touché la ville. Comme je l'ai dit, quelque 40 minutes

23 plus tard, une autre attaque de mortier a eu lieu ciblant le même endroit.

24 En général, ce qui se passe à ce moment-là, c'est que la population --

25 enfin l'attaque se fait à l'endroit où il y a une importante quantité de

26 gens. Et là il y a eu deux fois le nombre de victimes.

27 Suite à toutes ces attaques, ce pilonnage de la ville, nous avons constitué

28 une équipe d'enquêtes. Dans ce cas-ci, c'était un lieutenant-colonel

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1 français, un officier qui se chargeait de cela. Il y a eu enquête conjointe

2 avec les autorités musulmanes, en l'occurrence la police musulmane. La

3 police musulmane nous a donné en réalité des tableaux qui servent au

4 lancement de mortier de calibre 82-millimètres.

5 Du fait de la sensibilité en quelque sorte des conclusions auxquelles

6 nous avons abouti, puisque nous nous sommes rendu compte que les obus

7 venaient de deux directions différentes, les autorités musulmanes ont

8 indiqué que ce sont eux qui étaient coupables. Parce que la deuxième série,

9 en réalité, de mortier avait été tirée en parallèle à la rivière du côté

10 musulman, alors que la première série de tirs provenait de l'autre côté de

11 la rivière, donc des positions serbes.

12 Au départ, les Musulmans n'ont pas souhaité nous en parler. Nous

13 avons mis sur pied une conférence de presse, et mon superviseur a parlé de

14 ce que nous faisions à la presse de la manière dont nous avions mené

15 l'enquête, et a déclaré que nous n'allions pas formuler de conclusions.

16 Nous avons expliqué au public comment nous avons procédé à notre analyse.

17 Nous avons finalement posé les faits sur la table. Nous leur avons dit qui

18 avait participé à l'équipe d'enquêtes et nous avons laissé les gens tirer

19 leurs propres conclusions.

20 Il était évident, au final, que tout le monde disait que la première

21 série de tirs venait de la partie serbe et la seconde de la partie

22 musulmane. Nous avons été convoqués par le vice-président qui était en

23 ville.

24 Il a fait participer tout le monde, les médias et tout le monde, et

25 c'est à ce moment-là que nous avons dit que les Musulmans faisaient partie

26 de l'équipe d'enquêtes. Nous avions également des éléments qui nous

27 permettaient de penser que ce n'était pas là la première fois, qu'il y

28 avait également une cassette qui était en possession des Français. A ce

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1 moment-là, le vice-président a fait sortir tout le monde de la salle et il

2 ne restait plus que mon supérieur, quelques officiers français et moi-même

3 ainsi évidemment que le vice-président. Les choses sont devenues un peu

4 plus sincères. On a laissé un peu la rhétorique de côté, lorsqu'il s'est

5 rendu compte que nous avions des informations et que nous ne bluffions pas.

6 Je crois qu'il est devenu un peu plus ouvert à la discussion à ce stade.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dites-moi, c'était une réponse

8 extrêmement longue. Je pense qu'il faudrait mieux se limiter à des réponses

9 plus courtes.

10 M. DOCHERTY : [interprétation]

11 Q. Général, je reviens sur quelques éléments que vous avez évoqués.

12 Vous-même n'avez jamais vu visionner la cassette qui était en possession de

13 votre superviseur, n'est-ce pas ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Le général Soubirou vous a confirmé l'existence de cette cassette ou

16 pas ?

17 R. Non.

18 Q. Avez-vous une idée de la date à laquelle aurait eu lieu cet incident

19 filmé ?

20 R. Non.

21 Q. Vous avez parlé d'un incident où il y a eu un pilonnage et d'un autre

22 où il y a eu un des tirs embusqués. Il me semble qu'il y a eu un troisième

23 incident dont vous vouliez nous parler par rapport à tout cela ?

24 R. Il y a eu un troisième incident au cours duquel des soldats français

25 nous ont dit qu'ils avaient croisé des Musulmans qui étaient en train de

26 filmer une fausse attaque avec des enfants. Personne n'a été blessé. Tout

27 ceci était une mise en scène. Ils s'apprêtaient à filmer cela pour montrer

28 cela à la télé contre les Serbes.

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1 Q. Très bien. Revenons maintenant aux tireurs embusqués serbes le long de

2 "Sniper Alley" dont vous avez parlé. Vous avez dit dans votre déposition,

3 juste après la pause, que vous aviez tiré certaines conclusions s'agissant

4 du niveau de commandement de ces tireurs embusqués. Qui était le commandant

5 du Corps Sarajevo-Romanija au cours 13 mois que vous avez passés en

6 Bosnie ?

7 R. Il y avait deux commandants serbes lorsque j'y étais, le général Galic

8 d'abord, puis le général Milosevic.

9 Q. Avez-vous jamais rencontré le général Milosevic ?

10 R. Je l'ai rencontré à plusieurs reprises avec mon supérieur. A de

11 nombreuses reprises.

12 Q. Pourriez-vous nous donner une date approximative de la première réunion

13 ou rencontre avec le général Milosevic, Dragomir Milosevic ?

14 R. Je crois que la première fois que je l'ai rencontré, c'était en mai ou

15 juin, l'été de 1994, lorsque pour la première fois j'ai commencé à me

16 déplacer sur les lieux avec le général Soubirou, et que nous parcourions le

17 lieu de bataille et d'affrontement, et que nous rencontrions les

18 commandants sur le terrain.

19 Q. Ces rencontres avec le général Dragomir Milosevic vous ont-elles permis

20 de vous faire une opinion de lui en tant qu'officier militaire ?

21 R. Oui. Au cours des rencontres que nous avons eues, il m'a semblé être un

22 commandant compétent, mais il semblait quelque peu gêné en même temps,

23 tourmenté par ce qu'il faisait. En dépit de cela, il semblait exercer une

24 forte influence sur Indic, qui était officier de liaison, et qui parlait au

25 quartier général serbe à Pale. Parfois, le général Milosevic a essayé de

26 nous voir en laissant Indic de côté pour essayer de régler avec les Nations

27 Unies certaines questions auxquelles il était confronté, par exemple.

28 Q. Oui. Vous avez dit qu'Indic était un LO. Cela veut dire quoi ?

Page 1784

1 R. Indic était commandant à l'époque. Je crois qu'il a été promu colonel.

2 C'est ce qu'il a toujours dit. Par LO, j'entendais officier de liaison,

3 officier de liaison de Pale. En fait, il s'exprimait au nom du commandement

4 supérieur serbe pour veiller à ce que leurs ordres soient exécutés à ce

5 niveau-là.

6 Q. Bien. Lors d'une de vos réponses il y a quelques minutes, vous avez dit

7 que le général Milosevic semblait être un peu gêné ou tourmenté, disons,

8 par les choses qu'il était censé faire, qu'on lui demandait de faire. Avez-

9 vous jamais eu la moindre conversation avec lui au cours de laquelle il

10 vous a fait part d'éventuelles répercussions pour lui des choses qu'il

11 était censé faire à Sarajevo, qu'il faisait à Sarajevo en 1994 et en 1995 ?

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé) Il m'a dit qu'il ne pensait pas pouvoir quitter la

17 Bosnie un jour du fait de ce qu'il faisait dans le pays et de la manière

18 dont ceci allait être perçu.

19 Q. Y a-t-il eu des discussions entre vous-même et Dragomir Milosevic sur

20 un poste de contrôle appelé Sierra 4 ?

21 R. Oui. En fait, mon supérieur et le général Milosevic ont eu des

22 discussions sur Sierra 4, qui se trouvait juste en dehors de la zone de

23 l'aéroport vers le bâtiment de la poste. C'était une zone qui faisait

24 litige avec les Nations Unies. En effet, leur liberté de mouvement était

25 fortement limitée par les Serbes là-bas.

26 Le général Milosevic avait conclu un accord avec mon supérieur, à savoir

27 d'améliorer la facilité de circulation dans cette zone. Il l'a fait via la

28 Brigade d'Ilidza, je crois, et nous avons laissé Indic en dehors de tout

Page 1785

1 cela, parce que nous savions que ceci allait irriter le commandement

2 supérieur serbe. L'idée, c'était simplement d'améliorer notre capacité de

3 mouvement. Il s'agissait simplement d'exercer le droit que nous avions à ce

4 moment-là. Ceci a montré à ce moment-là que le général avait fait une

5 véritable tentative au moins de collaborer avec nous à ce stade-là.

6 Q. Bien. De ces discussions sur Sierra 4 et ce poste de contrôle et du

7 fait du rôle joué par Dragomir Milosevic dans ces discussions, avez-vous pu

8 tirer la moindre conclusion s'agissant du contrôle exercé par Dragomir

9 Milosevic sur le Corps Sarajevo-Romanija ?

10 R. D'après mes observations et dans le cadre de mes contacts avec lui il

11 exerçait le commandement et le contrôle du corps. Il contrôlait également

12 les opérations menées dans la ville. Lorsque nous avons exprimé nos

13 préoccupations vis-à-vis des tireurs embusqués, lorsque nous lui en

14 parlions, la situation en général s'améliorait un petit peu par la suite,

15 ensuite il fallait bien reprendre contact avec lui et lui refaire part de

16 nos préoccupations lorsque la situation devenait un peu plus tendue.

17 Q. J'aimerais revenir sur la question du contrôle des snipers, du

18 commandement et des efforts faits pour lutter contre ce phénomène dans un

19 instant. Avant cela, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit tout à

20 l'heure. Vous avez dit plus tôt que vous aviez commandé au cours de votre

21 carrière de nombreuses formations militaires, y compris des formations de

22 snipers; c'est exact ?

23 R. Oui, c'est exact.

24 Q. Sur la base de cette expérience qui est la vôtre, êtes-vous en mesure

25 de tirer la moindre conclusion sur la qualité des unités de snipers

26 simplement en observant la manière dont ils opèrent ?

27 R. Pour les snipers, oui. Les snipers ont des compétences très

28 spécialisées. Leur commandement se situe en général à un niveau très élevé.

Page 1786

1 En tant que commandant de bataillon je contrôlais les snipers en tant que

2 commandant de brigade. Je décidais de la manière dont ils allaient être

3 utilisés du fait de leur nombre limité. Vous voulez, bien sûr, faire en

4 sorte de les utiliser au mieux et vous voulez faire en sorte qu'ils ciblent

5 des cibles extrêmement précises.

6 Les snipers que j'ai vus opérer à Sarajevo étaient très compétents, d'après

7 les observations que j'ai reçues du groupe d'intervention spéciale de lutte

8 contre le "sniping".

9 Q. Lorsque vous parlez de ces observations, pouvez-vous nous dire quelles

10 étaient les cibles des snipers en termes de factions belligérantes ?

11 R. Ceux qui étaient le long de "Sniper Alley" visaient principalement la

12 partie serbe.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] S'agissant des efforts entrepris afin de

14 limiter le phénomène, j'aimerais maintenant demander au greffier de bien

15 vouloir faire apparaître à l'écran le document 1917 tel qu'il est indiqué

16 sur la liste 65 ter. C'est le document de gauche sur l'écran qui

17 m'intéresse et sur lequel je vais poser certaines questions au général.

18 Q. Général, avez-vous déjà vu cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Très bien. Je regrette, il semble que nous n'ayons pas une traduction

21 en B/C/S. Je vais vous demander ce dont il s'agit.

22 R. C'est un ordre adressé à tous les bataillons et portant sur les mesures

23 de lutte antisniper pour Sarajevo.

24 Q. De qui vient cet ordre et à qui est-il adressé ?

25 R. Il vient du quartier général placé sous l'autorité du commandant et

26 c'est signé par le principal officier des opérations, Peter Anthony, un

27 marine français. C'est comme cela que les Français faisaient les choses.

28 Tout ce qui était adressé par le commandant faisait l'objet d'un ordre ou

Page 1787

1 d'ordres de suivi, et ceci porte directement sur les mesures de lutte

2 contre le phénomène des tirs embusqués dans Sarajevo.

3 M. DOCHERTY : [interprétation] J'aimerais demander le versement de tout le

4 document présenté sur la liste 65 ter, 1917.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, il sera versé au dossier.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce de l'Accusation

7 202, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais que l'on tire quelque

9 chose au clair, Général. S'agissant de l'unité de lutte antisniper et la

10 manière dont elle était censée opérer. Je regarde ici l'exécution, même si

11 ce n'est pas très clair et je vois "moyen de dissuasion." C'est un peu plus

12 clair maintenant. Il s'agissait de dissuader ce genre d'activités. Cela

13 faisait partie de la stratégie, n'est-ce pas ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en effet. Il s'agissait d'assurer la

15 présence de la force pour dissuader les deux parties, principalement les

16 Serbes, de tirer sur les civils, par exemple.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment faisaient-ils ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] En s'interposant physiquement entre la partie

19 serbe et les civils. Par exemple, le long de "Sniper Alley," il y avait des

20 véhicules et des soldats des Nations Unies le long de cette allée aux

21 points principaux où les tireurs embusqués risquaient de viser les civils

22 et nous nous sommes placés entre eux et l'autre partie.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela fonctionnait cette présence

24 physique, c'était efficace ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans une certaine mesure. Nous avions mis

26 également ce que l'on a appelé des barrières passives, mais même la

27 présence physique des soldats n'était pas suffisante. Parce que je me

28 souviens même à une époque, il y a eu un soldat français qui a reçu une

Page 1788

1 balle dans la tête provenant d'un tireur embusqué serbe. Nous y sommes

2 allés nous-mêmes et nous avons vu à ce moment-là ce soldat qui était emmené

3 par une ambulance.

4 M. LE JUGE MINDUA : Brigadier, revenons un peu sur votre document que nous

5 avons sur l'écran.

6 Paragraphe premier, "Situation." Vous avez vous-même dit que vous

7 avez commandé des unités dans lesquelles il y avait une formation ou des

8 formations de snipers. J'imagine que des tireurs d'élite ou embusqués

9 constitue une activité normale dans le cadre des forces armées; c'est bien

10 cela ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE MINDUA : Si nous regardons le paragraphe premier. Il est dit sur

13 le document que les activités des snipers des deux côtés augmentaient à

14 l'époque.

15 Ma question c'est : des deux côtés, les tireurs embusqués se tiraient

16 sur les forces armées opposées ou des deux côtés, les tireurs embusqués

17 tiraient sur la population civile et éventuellement sur leur propre

18 population ? Est-ce que dans ce rapport on peut l'interpréter comme la

19 possibilité pour les Serbes d'avoir tiré sur des Serbes aussi et la

20 possibilité pour les troupes musulmanes d'avoir tiré aussi sur les troupes

21 musulmanes ? A partir de ce paragraphe.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] L'objectif de cet ordre était d'arrêter les

23 Serbes, tout d'abord les Serbes, mais aussi les Musulmans, d'arrêter qu'ils

24 tirent sur les civils. L'utilisation des tireurs embusqués est destinée aux

25 cibles militaires légitimes. Si les Serbes avaient tiré sur les soldats

26 musulmans, soldat sur soldat, les Nations Unies ne seraient pas intervenues

27 dans le cadre de ces opérations. Parce que dans ce cas-là ceci aurait

28 représenté des cibles militaires légitimes. Nous sommes intervenus à partir

Page 1789

1 du moment où ces tireurs embusqués tiraient sur des civils qui n'étaient

2 pas des combattants au sein du conflit. On était là pour protéger la

3 population et toutes les mesures qui devaient être prises pour protéger ces

4 civils ont été prises. Il s'agissait des attaques sur civils pas sur les

5 soldats.

6 M. LE JUGE MINDUA : Cela je le comprends très bien évidemment. Mais la

7 question que je pose, c'est de savoir si par inadvertance ou volontairement

8 les soldats serbes ont tiré sur des civils serbes et de l'autre côté, si

9 volontairement ou par inadvertance, des soldats musulmans ont tiré sur des

10 civils musulmans.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas de connaissance des Serbes à avoir

12 tiré sur des civils serbes et je suis au courant d'un cas où un tireur

13 embusqué musulman a tiré sur des civils musulmans, ensuite il y a eu des

14 incidents de pilonnage. Ce sont les deux seuls exemples que je peux vous

15 fournir.

16 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic.

18 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, juste pour qu'on ne perde pas

19 beaucoup de temps pour l'expurgation du transcript concernant le lieu où

20 habite la fille de notre client. Parce que je ne me suis pas rendu compte,

21 mais M. le général me signale que peut-être que c'est une chose qui doit

22 rester entre les murs de cette salle. Ce n'est pas la peine de passer ce

23 lieu à l'extérieur. Cela s'est passé il y a à peu près 15 minutes, il me

24 semble. Peut-être on peut le trouver rapidement parce que je sais qu'on est

25 décalé 30 minutes sur internet. Merci.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les Juges ont décidé que cette

Page 1790

1 référence sera expurgée du compte rendu d'audience.

2 M. DOCHERTY : [interprétation] Ceci figure à la page 85,

3 ligne 7.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez continuer.

5 M. DOCHERTY : [interprétation]

6 Q. Il y a un petit moment, je vous ai posé une question, mon Général, au

7 sujet de votre évaluation quant à la qualité de ces tireurs embusqués. Vous

8 avez dit que vous avez reçu le récit venant de ces unités de lutte contre

9 les tireurs embusqués. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que l'on vous

10 disait et quelle était leur évaluation de la qualité de ces tireurs

11 embusqués du côté des Serbes de Bosnie ?

12 R. Les soldats français nous faisaient des rapports et ils parlaient, dans

13 une certaine mesure, de la qualité de ces tireurs, et ils disaient qu'ils

14 étaient très compétents dans leur domaine d'activité. Par exemple, au

15 niveau de "l'Allée des Snipers," les soldats entendaient de façon régulière

16 des tirs des tireurs embusqués venant du côté serbe. Ils tiraient sur les

17 pylônes de téléphone pour leur dire qu'ils étaient là.

18 D'après cela, il n'était pas inhabituel pour les tireurs embusqués de

19 marquer leurs positions en tirant quelques tirs pour vérifier leur distance

20 par rapport à l'endroit où ils s'étaient placés ce jour-là. Ensuite, vers

21 la fin de la journée, il arrivait aussi que les tireurs tirent autour de

22 nos véhicules pour nous dire qu'ils quittaient, qu'ils avaient terminé leur

23 travail pour ce jour-là. C'était une espèce de langage codé, si je peux

24 dire, entre les tireurs embusqués et cette unité de la lutte contre les

25 tireurs embusqués pour dire qu'ils sont là. "Essayez de me trouver." Nous

26 avions des unités qui avaient du mal à les trouver puisqu'ils étaient

27 vraiment bons.

28 Q. Quelle était la qualité de ces équipes de lutte contre les tireurs

Page 1791

1 embusqués ?

2 R. C'étaient des Français, ils dépendaient du Bataillon français qui était

3 stationné à l'aéroport. Il y avait aussi des Français qui étaient placés le

4 long de cette allée. Ils faisaient de la reconnaissance des troupes, ils

5 étaient là pour trouver, pour découvrir l'emplacement de ces tireurs. C'est

6 vrai qu'ils avaient du mal à les trouver. A partir du moment où ils les

7 trouvaient, on recevait une réponse et on envoyait une information aux

8 factions belligérantes leur indiquant qu'il y a des chances qu'on ait

9 trouvé leurs tireurs embusqués. Si on n'entendait rien, cela veut dire

10 qu'on n'avait rien trouvé. A partir du moment où on entendait des cris,

11 c'était un bon signe.

12 Q. Est-ce qu'il est arrivé que des soldats français se fassent tuer

13 pendant ces opérations de lutte contre les tireurs embusqués ?

14 R. Un soldat a été blessé sur cette allée.

15 Un autre soldat était aussi dans son véhicule au moment où il a été

16 blessé et il est mort pendant que l'on regardait cela sur la télé. En

17 réalité, c'est comme cela que son épouse a appris sa mort, elle l'a vu

18 mourir littéralement sur les écrans de la télé. Nous avons appris cela dans

19 nos quartiers généraux, à peu près 15 minutes plus tard.

20 Nous avons vu qu'il a succombé à ses blessures. Je pense qu'il a été

21 visé à partir d'une tour, il a été touché à la tête et il est mort de la

22 suite de ses blessures.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous nous expliquer ce que

24 cela veut dire ? Vous dites qu'il était assis et qu'il regardait par la

25 visée. Qu'est-ce que cela veut dire ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Il regardait par un système antichar Milan,

27 appelé comme cela, qui a été utilisé dans les chars. C'était un mécanisme

28 qui a une ouverture d'à peu près de 10 "inches." Il était dans "l'Allée des

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1 Snipers." Il essayait de trouver des tireurs embusqués. Il a été trouvé,

2 repéré et ils l'ont visé. Ils lui ont tiré dessus.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On avait vraiment besoin d'être

4 très, très qualifié pour arriver à faire cela ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'était très, très difficile de réussir à

6 toucher quelqu'un se trouvant dans cette position.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez réussi à

8 trouver des tireurs embusqués, cette unité ? C'est la lutte.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Combien ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas des nombres exacts, mais

12 je sais qu'ils ont été efficaces en travaillant dans cette "Allée des

13 Snipers." Ils étaient aussi présents à l'aéroport. Je sais qu'ils ont

14 retourné des tirs vers Sedrenik et Spicasta Stijena. Ils cherchaient au

15 fait une femme qui était là-bas, qui était une tireuse embusquée qui tirait

16 sur des Musulmans, qui était très bonne tireuse puisqu'elle était d'une

17 qualité olympique, si vous voulez.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour une question de suivi. A partir

19 du moment où vous avez descendu des tireurs embusqués, est-ce que vous avez

20 pu déterminer leur appartenance ethnique ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous ne pouvions le faire, mais nous

22 pouvions en arriver à cette conclusion par rapport au côté de la ligne de

23 confrontation, du côté où ils se trouvaient par rapport à la ligne de

24 confrontation.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Comment me répondez-

26 vous ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Pour expliquer davantage, je peux vous

28 dire, par exemple, c'était au mois d'avril 1995, un soldat français

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1 revenait de l'aéroport. Il a été tué en venant de l'aéroport, un autre

2 soldat français a été tué par un tireur embusqué, dans "l'Allée des

3 Snipers." Un de ces tireurs embusqués était Serbe et c'est lui qui était

4 sur "l'Allée des Snipers," et l'autre - et c'est probablement un Musulman

5 puisqu'il était à l'aéroport. Ce sont les conclusions auxquelles nous

6 sommes arrivés.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 M. DOCHERTY : [interprétation]

9 Q. Mon Général, il y a quelques instants on vous a posé une question. Je

10 crois que c'est le Juge Mindua qui vous a posé une question concernant le

11 premier paragraphe de ce document. Il vous a parlé de l'utilisation "des

12 snipers des deux côtés," c'est-à-dire c'est quelque chose qui figure dans

13 ce paragraphe. Est-ce que les civils serbes vivaient toujours à Grbavica

14 pendant que vous étiez à Sarajevo ?

15 R. Oui.

16 Q. Dans la région de Grbavica il y avait aussi des cibles militaires

17 serbes, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Quelles étaient ces cibles militaires ?

20 R. Il y avait des soldats appartenaient à une brigade qui était postée là,

21 plus des tireurs embusqués. Ils étaient partout de la ville où il y avait

22 beaucoup de civils.

23 Q. Vous avez répondu à une question un tout petit peu différente. Pouvez-

24 vous nous dire quelle est l'utilisation correcte du point de vue militaire

25 des tireurs embusqués ?

26 R. Ils sont utilisés pour tirer sur des cibles militaires très importantes

27 comme les commandants militaires, les opérateurs radio, mais d'après mon

28 expérience, ils ne sont utilisés en aucun cas pour tirer sur des cibles

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1 civiles. Les civils ne peuvent pas constituer une cible. Si vous avez un

2 très bon tireur embusqué, normalement, ce n'est pas possible de rater sa

3 cible, si vous êtes un bon tireur embusqué.

4 Q. Je pense que votre question concernait une question particulière. Qu'en

5 est-il d'une situation où l'on vise sur un tram, par exemple. Est-ce qu'il

6 est possible qu'un tireur embusqué serbe de Bosnie se trouvant dans

7 "l'Allée des Snipers" tire en se trompant sur un tram ?

8 R. C'est peu probable, vraiment peu probable. D'après l'expérience que

9 j'ai, les tireurs embusqués tiraient très souvent sur les trams puisqu'il y

10 avait un impact psychologique sur les habitants de Sarajevo. Les gens

11 regardaient quelle était la situation avec les trams. Si, par exemple, les

12 trams circulaient, ils se disaient que la situation dans la ville était

13 bonne, si les trams ne circulaient pas, ils se disaient que la situation

14 était mauvaise. Tirer sur les trams avait un impact psychologique très

15 important sur la population de la ville.

16 Q. Une dernière question sur les tireurs embusqués.

17 M. DOCHERTY : [interprétation] Je voudrais vous demander de présenter la

18 pièce 2009 et c'est surtout les pages 2 à 7 de ladite pièce et de la

19 présenter sur le e-court.

20 Q. En attendant, mon Général, est-ce que cette unité d'activités, la lutte

21 contre les tireurs embusqués, a présenté des rapports sur les activités qui

22 étaient les leurs ?

23 R. Pendant toute la période que j'étais là, je dirais que c'était le cas.

24 Les Français étaient particulièrement soigneux avec ces rapports.

25 Q. Sur l'écran vous allez voir ce document, le document dont je vous ai

26 parlé. Est-ce que vous le reconnaissez ?

27 R. Oui, j'ai l'impression reconnaître ce document. C'est un registre

28 venant du Bataillon russe, du Bataillon du FreBat, du Bataillon français.

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1 Cela vient du QG du secteur.

2 Q. Pourquoi vous le pensez ?

3 R. Puisqu'on parle du Bataillon russe, du Bataillon français numéro 2, de

4 l'officier de liaison du côté serbe. Tous ces individus normalement

5 rendaient leurs rapports par le biais du quartier général, le secteur du

6 quartier général.

7 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que je peux demander de présenter la

8 septième page de ce document.

9 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, surtout quel est le type de

10 document présenté ?

11 R. Oui.

12 Q. Quel est ce document, mon Général ?

13 R. Il s'agit d'un résumé d'incidents tout à fait typique que nous

14 envoyons, pas seulement pour notre commandant mais pour d'autres personnes,

15 y compris notre quartier général.

16 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander que

17 l'on verse au dossier ce document qui comporte la cote 2009 en vertu de

18 l'article 65 ter.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci devient la pièce P203.

21 M. DOCHERTY : [interprétation]

22 Q. Mon Général, je voudrais à présent aborder un autre thème. Le thème des

23 mortiers.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste avant cela, je voudrais vous

25 poser une question, mon Général.

26 Un tireur embusqué qui tire sur un tram en motion, est-ce qu'il vise sur le

27 tram généralement parlant ou bien sur les personnes concrètes se trouvant

28 dans ce tram ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart des snipers essaieraient plutôt de

2 repérer une cible dans le tram.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Même si le tram est en déplacement ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] On leur apprend à tirer sur des cibles

5 mouvantes.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

7 M. DOCHERTY : [interprétation]

8 Q. Général, vous avez témoigné. Vous nous avez dit qu'à deux reprises,

9 lors de votre carrière, vous étiez chef d'une compagnie de mortiers, d'une

10 section de mortiers, je ne sais plus très bien. De par votre métier et

11 votre expérience, vous savez exactement comment travaille une équipe de

12 différents mortiers, vous pouvez juger de leurs compétences.

13 R. Oui, en effet. J'ai, à deux reprises, commandé une section de mortiers

14 et je peux vous dire que les équipes de mortiers que j'ai observées à

15 Sarajevo étaient extrêmement compétentes. Ils pouvaient tirer sur la cible,

16 ils pouvaient atteindre leur cible de façon générale.

17 Q. Les tirs des Serbes sur la ville de Sarajevo étaient-ils, à votre avis,

18 des tirs qui réagissaient aux tirs qui avaient été lancés sur les Serbes

19 par les défenseurs de la ville ?

20 R. Pendant que les Musulmans tiraient, les Serbes ripostaient, et la

21 plupart du temps ils ripostaient de façon bien plus importante que les tirs

22 qu'ils avaient reçus. Une fois, par exemple, les Musulmans ont tiré sur le

23 QG au Corps de Lukavica, c'était complètement contre les conventions

24 d'ailleurs. En riposte, il y a eu des tirs de barrage absolument énormes.

25 Q. Quand vous nous dites, les tirs de barrages, est-ce que ces tirs ont

26 atteint Lukavica ou ailleurs ? Pourriez-vous nous dire après ce qui s'est

27 passé ?

28 R. Les tirs en riposte n'ont pas été renvoyés sur l'origine des tirs de

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1 départ. Ils ont tiré dans la ville. Ils tiraient sur Debelo Brdo et dans

2 toute la zone qui entourait la rivière Miljacka, côté musulman, et c'était

3 vraiment à tirs nourris.

4 Q. Lors de votre service au sein de l'armée canadienne, avez-vous entendu

5 parler de la proportionnalité de la réaction et de la réponse et

6 connaissez-vous ce concept ?

7 R. Oui.

8 Q. Pourriez-vous nous dire quelle formation vous avez reçue pour mieux

9 comprendre ce concept de proportionnalité de la réponse ?

10 R. C'est un cours de base. Tout soldat canadien doit suivre ce cours. Il y

11 a les règles d'engagement. Il y a la proportionnalité justifiée pour des

12 raisons militaires et les dommages collatéraux. C'est absolument un élément

13 essentiel de toute formation visant à savoir comment appliquer la force.

14 Q. Comme résultat à cette formation, formation qui, selon vous, est

15 essentielle pour tout soldat canadien, pourriez-vous nous dire quels sont

16 les points essentiels qui caractérisent une réponse proportionnelle ? Je

17 reformule ma question. Sans nous donner la réponse, pourriez-vous nous dire

18 comment vous analyseriez une question où l'on vous aurait demandé si telle

19 ou telle réponse était proportionnelle ou non ?

20 R. Voici la procédure : vous essayez de déterminer la nécessité militaire

21 de riposte, le type de tir à envisager, le type de tir qui a été envoyé au

22 départ et on essaie toujours de riposter avec le même type de tir, si

23 possible, et de minimiser les dégâts collatéraux, civils, biens,

24 propriétés. Je vais vous donner un exemple : si un sniper me tire dessus,

25 j'essaierais de lui riposter avec la même arme que lui, avec un fusil de

26 sniper, ne pas essayer de suremployer ma force pour étouffer l'origine du

27 tir.

28 Q. Très bien. Nous allons appliquer ces critères maintenant, cette méthode

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1 d'analyse.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic.

3 Mme ISAILOVIC : Avant d'entendre la question, Monsieur le Président, il me

4 semble que cela va dans un sens qui laisse votre travail vain. Je pense que

5 c'est à la Chambre d'appliquer les critères sur les faits.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais cela c'est à la Chambre de

7 déterminer ce qu'est la proportionnalité quand même. C'est à nous aussi de

8 l'estimer et cette question de force excessive employée. Il s'agit quand

9 même d'un témoin qui connaît le terrain, qui peut nous aider à déterminer

10 la proportionnalité. J'ai déjà identifié les limites qui sont autorisées

11 pour ce type de questions. J'ai l'impression que M. Docherty pour l'instant

12 se tient à ces limites. Jusqu'à présent le témoin nous dit que l'on riposte

13 sniper contre sniper, un tir précis contre un tir précis, un tir de mortier

14 en riposte par un autre tir de mortier. C'est ce qu'il nous a dit jusqu'à

15 présent.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on ne peut pas, par exemple, riposter sur

17 l'aéroport. A l'est de l'aéroport, il y avait les positions serbes

18 embusquées sur l'aéroport et on ne pouvait pas riposter, puisque nous

19 n'avions pas suffisamment de système d'armes bien précis nous permettant de

20 tirer à cette portée-là sans qu'il y ait des dommages collatéraux infligés

21 à tous les civils qui habitaient aux environs de l'endroit d'où ils

22 tiraient.

23 Il faut identifier la cible et savoir s'il y a une nécessité militaire. On

24 doit identifier le type de système d'armes. Nous n'avions pas de système

25 d'armes suffisamment précis qui nous aurait permis de riposter de façon

26 précise sans infliger trop de dommages collatéraux aux personnes aux

27 environs. Dans ces cas-là, on ne ripostait pas. Mais normalement, on

28 riposte d'un tir, le même type de tir en essayant d'éviter les dommages

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1 collatéraux.

2 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, juste une intervention par rapport à

3 l'interprétation. Je m'excuse vraiment. Je sais que c'est un travail très

4 dur comme le nôtre aussi, mais là ce que je viens de vous dire, d'après la

5 traduction anglaise, c'est très chevaleresque. Personnellement, je n'aurais

6 jamais osé de m'adresser à la Chambre de cette manière. Ce n'est pas du

7 tout -- cela ne reflète pas du tout mon intervention.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

9 M. DOCHERTY : [interprétation]

10 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, utiliser la procédure que vous avez

11 décrite pour l'appliquer à la réaction des Serbes de Bosnie contre les

12 Musulmans de Bosnie qui avaient attaqué la caserne de Lukavica.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si j'ai bien compris, vous allez lui

14 demander si dans une situation bien précise, une réaction aurait été

15 proportionnelle ou non ?

16 M. DOCHERTY : [interprétation] J'avais cru comprendre, après avoir discuté

17 avec Mme Nicolai, j'avais cru comprendre que ce type de questions serait

18 autorisé. Sinon, bien sûr, je retirerai ma question.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il est temps de faire la

20 pause. Nous allons y penser pendant la nuit et nous vous donnerons notre

21 réponse demain.

22 --- L'audience est levée à 13 heures 42, et reprendra le jeudi

23 8 février 2007, à 9 heures 00.

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