Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 7 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il conviendrait que le témoin fasse

7 la déclaration solennelle.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

10 LE TÉMOIN: RUPERT SMITH [Assermenté]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

13 Monsieur Whiting vous avez la parole pour votre interrogatoire

14 principal.

15 M. WHITING : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

16 Messieurs les Juges.

17 Interrogatoire principal par M. Whiting :

18 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

19 R. Bonjour.

20 Q. Pourriez-vous pour le compte rendu nous donner votre nom.

21 R. Je suis Rupert Smith.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que vous avez perdu quelque

23 chose dans le micro. Vous parlez la même langue, donc il y a une tendance à

24 chevaucher. Pour les interprètes, il faut absolument que vous ménagiez une

25 pause entre les questions et les réponses.

26 M. WHITING : [interprétation] Nous le ferons.

27 J'aimerais demander à M. l'Huissier de montrer au témoin sa déclaration

28 ainsi qu'un dossier.

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1 Vous devriez avoir aussi un exemplaire de la déclaration, les dossiers, le

2 même dossier aussi, bien sûr, la Défense et les Juristes ont exactement les

3 mêmes documents sous les yeux. Je pense que pour aller rapidement, nous

4 allons procéder de la façon ancienne avec du papier, un dossier.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet, c'est très efficace.

6 M. WHITING : [interprétation] Nous ne le ferons qu'une fois

7 malheureusement.

8 Q. Général, pourriez-vous regarder votre déclaration et cette déclaration

9 est-elle véridique et précise ?

10 R. Oui. Je reconnais bien ma déclaration et c'est en effet une description

11 précise de ce que j'ai dit à l'époque.

12 Q. Si vous aviez à déposer aujourd'hui et répondre aux mêmes questions que

13 celles qu'on vous a posées à l'époque, répondriez-vous de la même façon ?

14 R. Oui.

15 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, ce document 65 ter

16 3027 pourrait-il être versé au dossier.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P334.

19 M. WHITING : [interprétation]

20 Q. Général, au paragraphe 3, vous nous dites que le

21 23 janvier 1995, vous avez pris le commandement de la FORPRONU en Bosnie-

22 Herzégovine. Où se trouvait exactement votre QG, s'il vous plaît ?

23 R. Le QG se trouvait à Sarajevo dans un bâtiment que l'on appelait la

24 Résidence.

25 Q. Pourriez-vous nous décrire le type de rapports que vous receviez en

26 tant que commandant des forces de la FORPRONU en Bosnie-Herzégovine ?

27 R. Le "reporting" formel se faisait à l'aide de mon état-major restreint

28 qui se trouvait au QG. Je tiens à vous dire que le QG n'était pas

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1 uniquement un QG militaire. Il y avait aussi une branche politique qui y

2 siégeait pour le Département des coordinations des Affaires politiques.

3 Tous les matins, j'étais briefé. Je pense que c'était vers 9 heures, si je

4 me souviens bien. Lors de ce briefing, on me relatait ce qui s'était passé

5 les 24 heures précédentes et toutes les personnes qui étaient intéressées

6 participaient à cette réunion. Il n'y avait pas uniquement mon état-major

7 restreint, mais aussi des personnes du HCR, de la Croix-Rouge, et cetera,

8 et toute autre personne qui pouvait être présente à Sarajevo à l'époque.

9 Différentes décisions étaient prises à l'issue du briefing.

10 Ensuite, il y avait une deuxième réunion quotidienne, je crois que c'était

11 vers 17 heures, où là on avait une réunion plus restreinte. C'étaient

12 uniquement les membres du QG principalement. Là, on passait en revue un

13 petit peu ce qui s'était passé dans la journée. J'obtenais des rapports ou

14 des briefings à propos des points qui avaient déjà été soulevés le matin

15 lors du premier briefing ou aussi des résultats et des conclusions

16 d'enquêtes. Si j'avais des décisions à prendre, j'en étais briefé

17 exactement à ce moment-là. Ensuite, s'il y avait une urgence les gens

18 avaient un accès direct à ma personne.

19 De plus, je me rendais aussi le plus souvent possible au QG du secteur.

20 Etant donné que j'étais à Sarajevo, j'allais au secteur Sarajevo. Je les

21 voyais très souvent.

22 J'étais aussi en contact avec le gouvernement de la Fédération du

23 gouvernement bosniaque ainsi que leurs représentants parfois au niveau

24 présidentiel. J'obtenais des informations, puisque là aussi on me faisait

25 aussi rapport de ce qui se passait de leur côté, côté serbe, en revanche,

26 quand j'allais à Pale ou j'allais à Lukavica pour obtenir des informations.

27 Il y avait aussi une réunion médias des journalistes importante où on

28 échangeait des informations.

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1 Q. Vous dites que vous receviez des informations de la part du contact qui

2 faisait la liaison avec les Serbes qui étaient de Lukavica. Quelle est

3 cette personne, s'il vous plaît ?

4 R. Oui. C'est le colonel Indic. C'était lui l'officier de liaison. Il me

5 semble qu'il était colonel. Il était peut-être commandant. Je ne me

6 souviens pas très bien. Appelons-le colonel.

7 Q. Avez-vous pu évaluer quelle était la relation entre Indjic et Mladic ?

8 R. J'avais cru comprendre qu'il était vraiment l'officier de liaison du

9 général Mladic, le lien direct à Mladic. C'est ainsi d'ailleurs qu'on le

10 traitait. C'était sa fonction et on travaillait avec lui dans ce but.

11 Q. Vous nous avez dit comment vous obteniez des informations. Maintenant,

12 je vais vous poser quelques questions sur le type d'information que vous

13 receviez principalement à propos des parties belligérantes dans Sarajevo et

14 autour de Sarajevo.

15 A votre poste était-il important d'avoir des informations et

16 d'évaluer aussi la nature de la structure de commandement et de contrôle

17 des deux parties, des deux belligérantes, côté BiH et côté serbe de

18 Bosnie ?

19 R. Oui. Il fallait que je comprenne comment ils étaient structurés

20 et comment ils fonctionnaient. Je savais plus ou moins à qui parler

21 d'ailleurs. Cela me permettait d'ailleurs de savoir à qui parler et

22 d'interpréter aussi ce que l'on disait.

23 Q. Etait-il important pour vous d'avoir des informations et de pouvoir

24 évaluer des informations à propos de la stratégie des factions en

25 présence ?

26 R. Bien sûr, c'était essentiel, ne serait-ce que pour comprendre et pour

27 essayer d'anticiper un petit peu ce qui pouvait bien arriver.

28 Q. Au paragraphe 16 de votre déclaration vous parlez de

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1 M. Karadzic et de l'autorité politique qu'il exerçait sur les Serbes de

2 Bosnie. Au paragraphe 21, vous parlez du général Mladic et du commandement

3 qu'il exerçait sur l'armée des Serbes de Bosnie. J'ai quelques questions à

4 vous poser à propos du général Mladic.

5 D'après ce que vous avez observé, d'après ce que vous avez appris, est-ce

6 que le commandement exercé par le général Mladic cascadait bien jusqu'au

7 niveau de l'armée des Serbes de Bosnie qui se trouvait autour de Sarajevo ?

8 R. Oui. C'était le commandant en chef et c'était lui qui commandait. On

9 voyait bien que c'était le chef. Son influence était ressentie à un niveau

10 extrêmement bas.

11 Q. Pourriez-vous nous donner des exemples bien précis de cela ? Comment

12 êtes-vous arrivé à cette conclusion ?

13 R. C'est juste pour vous donner une ambiance. Quand il disait que quelque

14 chose va arriver, cela arrivait. Si vous lui demandiez que quelque chose

15 cesse et qu'il disait : oui, cela va cesser, en effet cela cessait. J'ai un

16 exemple bien précis qui n'est pas à Sarajevo. A un moment j'allais en

17 voiture vers Srebrenica et mes véhicules se sont perdus. On s'est retrouvé

18 dans une position au nord, quelque part, je ne sais plus très bien. On

19 était totalement perdu. L'officier de liaison n'a eu qu'à passer un seul

20 coup de fil à Mladic. Immédiatement on a été libéré puisqu'on avait été

21 pris par une position serbe et ils nous avaient arrêtés.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, avant que vous

23 alliez relier ceci au général qui est accusé en l'espèce, je ne vois pas la

24 pertinence de vos questions.

25 M. WHITING : [interprétation] Notre thèse est la suivante : je vais obtenir

26 des informations sur le commandement - mais voici notre thèse. Le

27 commandement irait depuis Mladic jusqu'aux hommes sur le terrain à

28 Sarajevo. Or, le général Milosevic étant dans la chaîne de commandement il

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1 va être automatiquement impliqué.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est donc cela la pertinence. C'est

3 que le général Milosevic se trouve dans la chaîne de commandement.

4 M. WHITING : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

6 M. WHITING : [interprétation]

7 Q. Cette histoire que vous venez de nous relater, c'est celle que l'on

8 trouve au paragraphe 31 de votre déclaration, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, c'est cela.

10 Q. Lors de vos entretiens avec le général Mladic, aviez-vous l'impression

11 qu'il savait bien ce qui se passait à Sarajevo ?

12 R. Oui. Il savait toujours de quoi il parlait. S'il y avait eu un incident

13 sur Srebrenica ou s'il soulevait un incident sur Srebrenica, il connaissait

14 cet incident.

15 Q. Je suis désolé. Vous avez dit Srebrenica.

16 R. Je voulais dire Sarajevo.

17 Q. [aucune interprétation]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, vous nous avez quand même

19 dit précédemment que vous n'aviez pas d'exemple de l'influence du général

20 Mladic qui serait sentie du côté de Sarajevo.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en ai pas à l'esprit. Le premier qui

22 m'est venu à l'esprit c'est ce coup de fil qu'on a passé quand on a été

23 perdu et qu'on s'est fait arrêté par cette compagnie au nord de Srebrenica.

24 Je suis sûr que si je relis ma déclaration en entier, je vous

25 trouverais un exemple car j'en ai un.

26 Si je me souviens bien en mars il y a eu un incident où deux jeunes

27 filles, côté serbe, ont été tuées par des tireurs embusqués venant du côté

28 BiH. Il y a eu énormément de discussions à ce sujet entre le général Mladic

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1 et moi. Il connaissait extrêmement bien tous les détails de l'affaire. Ou

2 ceci est une occasion où un de mes soldats était tué, un soldat français,

3 tué par un sniper serbe. Là aussi il connaissait l'incident, il connaissait

4 tous les détails y afférents.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting. Vous pouvez

6 poursuivre.

7 M. WHITING : [interprétation]

8 Q. Pouvez-vous nous décrire rapidement la façon dont le général Mladic

9 exerçait son commandement ? Quel était son style de commandement ?

10 R. Il donnait des ordres, pour être bref, plutôt que des missions. Je vais

11 un petit un peu expliquer, si vous me le permettez.

12 Q. Allez-y.

13 R. En terme général, il y a deux façons d'organiser une armée. Soit on

14 peut décentraliser les décisions auquel cas on donne des missions, c'est-à-

15 dire on dit à quelqu'un exactement quel est le résultat que l'on veut

16 obtenir, on lui dit il faut que la brigade passe la rivière d'ici midi

17 demain. Vous ne lui dites pas s'il doit faire un pont, s'il doit capturer

18 un pont, s'il doit faire un pont flottant. C'est à lui de voir.

19 L'exécution, c'est à lui de voir, c'est à la personne qui a reçu la mission

20 de savoir comment faire.

21 D'un autre côté, si on centralise les décisions, on a tendance plutôt à

22 donner des ordres qui sont beaucoup plus détaillés et plus limitatifs. Là,

23 pour cette fameuse rivière, je dirais : Construisez un pont au point X, Y,

24 Z, d'ici telle heure, et cetera, et cetera. Ensuite, vous donnez un autre

25 ordre à quelqu'un d'autre pour ce qui est de la gestion des routes qui vont

26 vous amener à ce pont. Ensuite, il faut donner encore un ordre pour savoir

27 comment on va gérer les véhicules qui vont emprunter le pont, et cetera.

28 Tout cela fait partie, bien sûr, de la mission.

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1 L'armée de Mladic était gérée de façon centralisée avec des ordres, pour

2 des très bonnes raisons d'ailleurs. Cela vous suffit --

3 Q. Oui, tout à fait.

4 Vous basant sur les informations que vous avez reçues et aussi en vous

5 basant sur vos contacts avec les personnes autour du général Mladic, y

6 compris le commandant Indic, avez-vous pu savoir si le général Mladic

7 respectait bien la chaîne de commandement au sein de l'armée des Serbes de

8 Bosnie ?

9 R. Oui, oui, tout à fait. Il l'utilisait exactement comme je vous l'ai

10 décrit. Ses subalternes étaient responsables et devaient exécuter les

11 ordres qui leur avaient été donnés.

12 Q. Est-ce qu'il tolérait le moindre effondrement dans la chaîne de

13 commandement ?

14 R. Non, absolument pas.

15 Q. Pourriez-vous regarder le premier intercalaire qui est un ordre en date

16 du 23 janvier 1995, venant du général Mladic.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourrions-nous revenir à la réponse

18 que nous a donnée le général sur votre réponse [comme interprété], quant à

19 savoir si le général Mladic tolérait la moindre lacune dans la chaîne de

20 commandement. Vous avez dit, "non, je n'en ai pas observé. Est-ce que cela

21 signifie que vous ne pouvez pas vraiment nous répondre à la question de

22 façon précise ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne faisais pas partie de son armée, je

24 n'étais pas dans son QG, donc je n'ai pas pu tout voir. Depuis mes

25 observations, en me basant sur mes observations, j'avais l'impression qu'il

26 était seul maître à bord, si je puis dire. Puis, il tirait la vis. Je

27 n'avais pas du tout l'impression que c'était quelqu'un qui tolère

28 l'indiscipline ou quoi que ce soit ou les failles.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous un exemple où il y aura pu

2 avoir une faille dans le commandement et il aurait rectifié le tir?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je peux plutôt vous répondre dans un

4 autre sens. Je n'ai jamais vu de moment où on n'a pas exécuté l'ordre qu'il

5 a donné.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

7 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

8 M. LE JUGE MINDUA : Général Smith, j'ai compris ce que vous avez dit au

9 sujet du système de commandement du général Mladic, basé sur des ordres

10 précis et non sur l'attribution des missions, ce qui signifie qu'il ne

11 pouvait pas tolérer aucune faille dans l'exécution des ordres qu'il

12 donnait.

13 Dans un tel système de commandement, quelle est la part de l'autonomie des

14 subordonnés ? Les subordonnés reçoivent des ordres précis coup par coup à

15 exécuter et non pas des missions. Et s'ils n'obéissent pas à ces ordres,

16 selon ce que vous avez dit, ils sont sévèrement sanctionnés.

17 Alors, dans le système du général Mladic, est-ce que les subordonnés

18 avaient une marge de manœuvre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'ai vu lors de mon mandat, je

20 vous ai donné les deux extraits du modèle théorique basé sur ordres ou basé

21 sur missions. Bien sûr, aucun système n'est aussi rigide. Les choses

22 fluctuent, il faut toujours faire évoluer les choses un petit peu. Mais pas

23 totalement au sein de l'armée. C'est vrai que cela varie un petit peu à

24 différents échelons, ce qui reflète, bien sûr, la confiance que le

25 supérieur a dans son subalterne.

26 La façon dont travaillait le général Mladic, enfin c'est ce que j'ai

27 observé en tout cas, c'est qu'il donnait un ordre. Il était capable. Mais

28 cela fait partie de son organisation. Il était capable de créer un QG

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1 avancé depuis son QG central, et d'y poster un député, un commandant

2 adjoint, enfin une personne de confiance qui agirait en son nom, ce qui

3 permettait aussi de faire un petit peu évoluer les choses. Parce qu'il

4 avait sa propre personne, son propre officier qui était là, quand il y

5 avait des problèmes, pour rendre compte. Il faisait cela assez souvent

6 d'ailleurs. Quand il était engagé à l'est de la Republika Srpska et qu'il

7 se pouvait y avoir un problème à l'ouest, il déléguait dans ce cas-là à son

8 officier, qui était sur le poste de commandement avancé.

9 Le degré d'autonomie pour ce qui est de l'exécution de l'ordre pouvait être

10 considérable. Revenons à mon exemple de pont. L'ingénieur à qui on avait

11 dit de construire un pont, lui, il était libre de le construire comme il

12 voulait. Il pouvait faire ce qu'il voulait pour construire son pont, mais

13 il fallait qu'il construise un pont, et cela c'était essentiel. Même si 3

14 kilomètres [comme interprété] plus bas de la rivière, il y avait un gué.

15 Son ordre était d'avoir un pont, de construire un pont, il devait

16 construire un pont.

17 Est-ce que vous avez compris ? Est-ce que j'ai vous ai expliqué un petit

18 peu la souplesse qu'il donnait dans l'exécution des ordres ? Est-ce que

19 cela vous suffit ?

20 M. LE JUGE MINDUA : Merci.

21 M. WHITING : [interprétation]

22 Q. Pour ce qui est de ce document 2209, ordre de général Mladic, cet ordre

23 est-il cohérent avec le style de commandement que vous venez de nous

24 exposer, qui était celui du général Mladic ?

25 R. Oui, tout à fait. C'est extrêmement détaillé. Cela descend du QG de

26 l'armée jusqu'au QG du corps, en spécifiant bien la nature du "reporting"

27 qui devait être fait, et cetera.

28 M. WHITING : [interprétation] Pouvez-vous verser cette pièce au dossier ?

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P335.

3 M. WHITING : [interprétation]

4 Q. Pourriez-vous regarder maintenant le document suivant, qui est pièce

5 ter 89 et passer à la deuxième page de la version en anglais. Il s'agit

6 d'un ordre du 8 mars 1995, qui nous vient de

7 M. Karadzic. Cet ordre est-il bien cohérent avec l'autorité, le

8 commandement qui était celui exercé par M. Karadzic, tel que vous l'avez

9 décrit dans votre déclaration ?

10 R. Oui, tout à fait. Ici, on a, si je puis dire, la direction politique

11 qui est donnée émanant du commandement Suprême, du commandant en chef. Là

12 encore, c'est extrêmement détaillé. Et cela, de la page de garde, je vois

13 bien que cela va directement au corps depuis le QG de l'armée.

14 M. WHITING : [interprétation] Je pense que nous pouvons maintenant verser

15 cette pièce.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vérifie. Le premier était un

17 ordre donné par Mladic.

18 M. WHITING : [interprétation] Oui. Le premier était un ordre de M. Karadzic

19 et le deuxième document est un ordre donné par

20 M. Karadzic. Dans la déclaration, il est fait mention que M. Karadzic et de

21 son autorité politique.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais son système de

23 commandement qu'il décrit, sur quoi cela porte-t-il ?

24 M. WHITING : [interprétation] Sur M. Mladic. D'ailleurs avec la pièce

25 suivante, on va voir un petit peu le lien. M. Karadzic, bien sûr, était le

26 chef politique.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

28 M. WHITING : [interprétation] C'est le chef politique, le commandant en

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1 chef qui donne des ordres au général Mladic, ensuite les ordres descendent

2 toute la chaîne. On va voir tout cela d'ailleurs.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Dans ce cas, nous

4 admettons la pièce.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P336.

6 M. WHITING : [interprétation]

7 Q. Pourriez-vous regarder le document suivant, le document

8 65 ter 02267. L'ordre précédent était un ordre qui datait du 8 mars,

9 c'était celui de M. Karadzic. Maintenant c'est l'ordre du général Mladic,

10 du 31 mars 1995, et c'est "Directives à propos des opérations à venir,

11 opération numéro 7/1." Là encore, cet ordre est-il bien cohérent, ce que

12 vous venez de nous décrire, pour ce qui est de la relation entre M.

13 Karadzic et M. Mladic et le style de commandement de M. Mladic ?

14 R. Oui. Je crois que ce document fait suite au précédent. Il reprend les

15 directives provenant du commandement Suprême, qui est digéré avec force de

16 détail par l'état-major principal sous le nom de Mladic. Et les ordres sont

17 donnés au commandant des corps.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, vous parlez de la

19 cohérence entre cet ordre et la description par le général des relations

20 entre Karadzic et Mladic. Est-ce que le général vous a donné une telle

21 description ?

22 M. WHITING : [interprétation] Oui. Il fait référence à cela dans sa

23 déclaration. Paragraphe 16, il parle de M. Karadzic; et au paragraphe 21,

24 il fait référence à M. Mladic.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous cité ces paragraphes ?

26 M. WHITING : [interprétation] Oui.

27 Au paragraphe 16, au milieu, il dit : "Toutes mes rencontres avec M.

28 Karadzic, cela était évident …"

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettez au général d'expliquer

2 tout cela. Cela nous permettra de mieux comprendre l'objectif.

3 M. WHITING : [interprétation] J'essaie de trouver un juste équilibre entre

4 tirer des conclusions plutôt que de répéter ce qu'il dit dans la

5 déclaration. Je serai tout à fait -- il me paraîtra très acceptable que le

6 général explique brièvement comment il avait compris les relations entre M.

7 Karadzic et M. Mladic.

8 R. Karadzic était très clairement le dirigeant politique des Serbes de

9 Bosnie, Mladic était le commandant militaire. La distinction entre les deux

10 était maintenue dans la façon, parce qu'ils faisaient la façon dont ils

11 m'approchaient. Au fil de l'année 1995, lorsque j'étais présent sur les

12 lieux et que la pression a augmenté, Mladic a continué à affirmer qu'il

13 était le commandant militaire.

14 En pratique, évidemment les actes militaires sont également

15 politiques et vice versa. Il n'y a pas une ligne extrêmement claire, elle

16 est plutôt vague, en réalité. Mais Mladic s'est toujours tenu au côté ou a

17 essayé à se tenir du côté militaire.

18 M. WHITING : [interprétation] Pourrait-on verser ce document au

19 dossier.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, cote P337.

22 M. WHITING : [interprétation]

23 Q. Monsieur le Général, j'aimerais vous poser des questions sur la

24 stratégie des deux côtés, des deux camps. En mars 1995, est-ce que vous

25 aviez un avis sur le comportement des deux factions contre la cessation des

26 hostilités et l'accord en la matière, j'y fais référence sous le terme

27 COHA.

28 R. Oui. Je ne connais pas le numéro des paragraphes dans ma déclaration,

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1 mais j'y fais référence.

2 En un mot, j'ai formé ce que j'ai appelé une thèse, le fondement, enfin ce

3 qui pourrait m'aider à interpréter les événements. Cette thèse se résumait

4 à la chose suivante : aucune des parties ne souhaitait la paix, nous

5 parlons de mars 1995. De toute évidence, l'accord pour la cessation des

6 hostilités était en train de s'effondrer.

7 La fédération et le gouvernement bosniaque étaient repoussés. Ils avaient

8 suffisamment d'effectifs, mais ils avaient une pénurie de munitions et

9 d'armes. Ils étaient convaincus également qu'ils avaient le soutien

10 potentiel de la communauté internationale. Donc, ce qui les intéressait,

11 c'était de percer le siège de Sarajevo et d'avancer leur position par les

12 armes.

13 Les Serbes de Bosnie avaient pris tellement de territoires avec peu

14 d'hommes, ils n'étaient pas en situation d'élargir leur territoire et de le

15 tenir. Ils étaient vraiment au bout de ce qu'ils pouvaient faire. Un de

16 leurs problèmes principaux étaient les enclaves à l'est, Srebrenica, Zepa

17 et Gorazde. Les Bosniaques pouvaient circuler dans les enclaves et les

18 Serbes de Bosnie avaient du mal à affecter des hommes à ces enclaves.

19 Les Serbes de Bosnie souhaitaient resserrer l'étau sur ces enclaves

20 afin d'évacuer ce problème. En fait, c'est ce qui se passait, et cela avec

21 un impact sur les forces des Nations Unies.

22 M. WHITING : [interprétation] Quand vous dites "resserrer l'étau sur

23 les enclaves," est-ce que cela inclut Sarajevo ?

24 R. Je viens à Sarajevo.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Monsieur Whiting.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, le témoin nous

28 fait son témoignage sous l'article 92 ter. Son témoignage est extrêmement

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1 important pour comprendre la responsabilité autour du titre de supérieur

2 hiérarchique. Nous avons décidé de faire droit à votre requête, mais il

3 n'est peut-être pas approprié de recevoir son témoignage sous le 92 ter,

4 cette forme abrégée.

5 Vous devriez vous sentir libre d'obtenir autant d'informations que

6 vous souhaitez, de façon à la rendre compréhensible à la Chambre, et ceci

7 de façon à ce que ce procès soit équitable.

8 Vous pouvez prendre un petit peu plus de temps que le temps que je

9 vous avais imparti au départ.

10 M. WHITING : [interprétation] Merci. J'espérais terminer le

11 témoignage du général aujourd'hui, car il espérait pouvoir avoir fini

12 aujourd'hui. Je ne sais pas dans quelle mesure il peut rester avec nous

13 demain. Sa déposition est extrêmement détaillée, et de revenir sur tout

14 son témoignage prendrait beaucoup de temps.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Ce que j'ai dit c'est,

16 obtenez autant d'informations que vous le souhaitez de façon à nous aider à

17 comprendre la responsabilité au titre du supérieur hiérarchique.

18 M. WHITING : [interprétation] Je garderai cela à l'esprit. Si cela

19 n'est pas compréhensible, j'inviterai MM. les Juges à poser des questions.

20 Merci.

21 Q. Vous en veniez à Sarajevo, Général.

22 R. Sarajevo en soi était une enclave et je traite Sarajevo de façon

23 distincte de part sa signification. Dans ma thèse, pour moi Sarajevo était

24 la capitale. C'était le centre d'attention de la communauté internationale.

25 Pour comprendre la stratégie des Serbes de Bosnie, pour ce que j'en avais

26 compris, c'est que pour maintenir la pression et pour tenir ce siège de

27 façon aussi étroite que possible.

28 Je m'attendais à ce qu'ils tentent de fermer le chemin Igman, la

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1 seule route disponible aux Bosniaques, pour obtenir un ravitaillement outre

2 le tunnel menant à l'aéroport.

3 Je m'attendais également que le gouvernement bosnien tienne Sarajevo

4 de façon très serrée et de tenter de lever le siège aussi rapidement que

5 possible. Je ne vous ai pas parlé de l'enclave du nord-ouest Bihac, un

6 petit peu distincte.

7 Q. On verra cela plus tard.

8 Est-ce qu'il y avait un lien entre l'abandon de l'accord sur la cessation

9 des activités et le siège de Sarajevo ?

10 R. Alors que l'accord était abandonné à l'initiative des Bosniaques, le

11 siège de Sarajevo devenait de plus en plus dur.

12 Q. Est-ce que l'armée des Serbes de Bosnie a utilisé le pilonnage et les

13 tirs embusqués à Sarajevo ?

14 R. Oui.

15 Q. Y a-t-il eu pilonnage de zones civiles ? Y a-t-il eu des cibles

16 civiles ?

17 R. Oui, les deux.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les "deux," qu'entendez-vous ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Pilonnage et tirs embusqués de cibles civiles.

20 M. WHITING : [interprétation]

21 Q. Avez-vous pu évaluer les stratégies des Serbes de Bosnie dans leur

22 pilonnage et tirs embusqués de cibles civiles à Sarajevo ?

23 R. A l'exception d'attaque qui était contrée dans des incidents

24 spécifiques, l'utilisation de ces armes visait à terroriser, à user la

25 détermination des assiégés afin que les habitants de Sarajevo n'arrivent

26 plus à supporter cette pression.

27 Q. Etait-ce efficace ?

28 R. Oui, tout à fait, pour ce qui est de la vie ordinaire à Sarajevo.

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1 Q. Est-ce que cela a eu un effet sur la communauté internationale qui se

2 trouvait à Sarajevo ?

3 R. Oui. Cela a limité les activités. Comme je l'ai dit, parfois, il y

4 avait des effets directs. Nous avons eu parfois des soldats tués.

5 Q. J'aimerais vous poser des questions spécifiques sur votre déclaration.

6 Paragraphe 29, à la page 7 de la version anglaise, vous décrivez une

7 rencontre que vous avez eue avec le général Mladic le

8 5 mars. Au paragraphe 29 vous dites : "Il a menacé de bloquer un blocus de

9 toutes les enclaves, y compris Sarajevo si les sanctions n'étaient pas

10 levées." Est-ce que vous l'avez pris au sérieux ?

11 R. Oui, il aurait pu le faire. Je regarde le paragraphe - oui, j'étais à

12 Jahorina. Oui, je prenais cela très au sérieux. C'est à ce moment-là que je

13 formais la thèse que je vous ai décrite.

14 Q. Je vérifie que j'ai bien compris votre réponse. Il avait la capacité

15 de faire cela à Sarajevo ?

16 R. Oui, tout à fait.

17 Q. Passons au prochain document, 65 ter 8. Un mémoire daté le 6 mars 1995

18 concernant la réunion à laquelle vous faites référence dans votre

19 déclaration. Avez-vous pu lire ce document ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce une description fidèle de votre réunion avec le général Mladic

22 ce jour-là ?

23 R. Oui.

24 M. WHITING : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait verser cette pièce au

25 dossier, Monsieur le Président.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Y a-t-il un élément important

28 qu'il faudrait porter à notre connaissance.

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1 M. WHITING : [interprétation] Le général Mladic, comme on vient de le dire,

2 a menacé d'établir un blocus complet sur toutes les enclaves Cela est

3 décrit de façon détaillée dans ce document qui corrobore la déclaration du

4 général. A la page 2 du document,

5 point 4, à la fin du paragraphe il est dit que le général Mladic a menacé

6 d'établir un blocus complet des enclaves.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Je le vois.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P338.

9 M. WHITING : [interprétation]

10 Q. Paragraphe 38 de votre déclaration, vous décrivez le

11 12 mars votre arrivée à Sarajevo par avion. Vous avez été touché par des

12 tirs de feu de mitrailleuses et vous affirmez que l'origine des feux était

13 avec certitude les Serbes de Bosnie. Comment êtes-vous arrivé à cette

14 conclusion ?

15 R. Je crois que ce n'était pas très difficile. Si je me souviens

16 correctement, les Serbes de Bosnie ont reconnu que c'étaient eux qui

17 avaient tiré. La partie musulmane n'avait pas d'armes de ce calibre. Le feu

18 provenait d'une position particulière sur une petite colline qui

19 surplombait la piste d'atterrissage. Pour ce que je me souviens, Mladic et

20 compagnie, lorsqu'on leur a présenté cette information, ont reconnu que

21 c'étaient eux qui avaient tiré.

22 Q. Passons maintenant au paragraphe 44, une rencontre avec Karadzic. Est-

23 ce que vous vous souvenez de cette réunion ? Est-ce que vous pouvez nous

24 dire quelle était l'importance de cette réunion ?

25 R. Si je me souviens bien, M. Mladic et moi-même ne nous parlions plus.

26 C'était expliqué probablement dans ma déclaration. Nous n'avions plus de

27 communication, moi et Mladic. J'ai donc contacté le Dr Karadzic et nous

28 avons organisé une réunion.

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1 Je souhaitais le rencontrer, parce que la situation se détériorait

2 progressivement au fur et à mesure que l'accord était abandonné, l'accord

3 de cessation des hostilités. Je n'arrivais pas à obtenir l'autorisation de

4 voyage pour mes convois et notamment les convois humanitaires.

5 Q. Pouvez-vous regarder le document suivant dans le classeur 65 ter, 9. Un

6 document daté le 5 avril 1995 qui explique ce qui s'est passé au cours de

7 cette réunion ce jour-là. Est-ce que vous avez pu lire ce document et est-

8 ce que c'est une description fidèle de cette réunion ?

9 R. Oui, c'est exact.

10 M. WHITING : [interprétation] Peut-on verser cette pièce au dossier.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

13 M. WHITING : [interprétation]

14 Q. Paragraphe 49 de la déclaration, dans ce paragraphe vous parlez de la

15 semaine qui a suivi votre rencontre avec le Dr Karadzic du 5 avril, début

16 avril 1995 et vous dites que "La semaine suivante, l'armée serbe de Bosnie

17 a fermé l'aéroport de Sarajevo à tous les vols sauf les vols militaires de

18 la FORPRONU."

19 Ma question est : quel a été l'effet sur Sarajevo et est-ce que cela a

20 servi des fins militaires ?

21 R. Vous voulez dire l'armée des Serbes de Bosnie ?

22 Q. Oui. L'objectif militaire était d'affaiblir davantage Sarajevo en tant

23 que ville assiégée.

24 Est-ce que des armes ou des fournitures militaires étaient apportées par

25 l'aéroport à cette époque-là ?

26 R. Absolument aucune.

27 Q. Est-ce que l'objectif de la fermeture de l'aéroport était d'arrêter

28 l'aide humanitaire ?

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1 R. Je ne sais pas si c'était le seul objectif, mais c'était un des effets.

2 Peut-être un effet sur le personnel.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, vous avez une

4 tendance à apporter la réponse du témoin avant même qu'il l'ait donnée.

5 Vous avez dit : est-ce que le seul effet était d'arrêter l'aide

6 humanitaire ? Vous êtes censé obtenir des informations du témoin.

7 M. WHITING : [interprétation]

8 Q. Voyons le paragraphe 50. Vous décrivez un incident du

9 21 avril où les membres du Groupe de contact détenus par les Serbes de

10 Bosnie à l'aéroport et auxquels on a refusé l'accès à Sarajevo. Est-ce que

11 cette action a servi des objectifs militaires pour les Serbes de Bosnie ?

12 R. Non.

13 Q. Paragraphe 54. Vous décrivez comment début mai la situation en Bosnie

14 et autour de Sarajevo s'est détériorée. Vous donnez des exemples précis

15 d'événements qui ont lieu le 7 et 8 mai.

16 R. Oui.

17 Q. Un petit plus tard en mai, vous parlez de pilonnage régulier. Ma

18 question est la suivante : en avril, mai 1995, avez-vous constaté un

19 changement de niveau quant au pilonnage et aux tirs embusqués ?

20 R. Pendant le mois de mai la fréquence a augmenté, Le nombre d'attaques a

21 augmenté et le volume de feu a également augmenté.

22 Q. Est-ce que cela était vrai pour le pilonnage et les tirs embusqués ou

23 seulement le pilonnage ?

24 R. Certainement vrai pour le pilonnage. Je ne suis pas tout à fait sûr

25 pour les tirs embusqués.

26 Q. L'augmentation s'est poursuivie après mai ou s'est arrêtée ?

27 R. L'accord pour la cessation des activités avait été abandonné. Il y

28 avait également les points de collecte des armes. La zone d'exclusion qui

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1 avait été établie en 1994. Là aussi il y avait un abandon de certains

2 engagements, et les armes, on venait récupérer les armes au point de

3 collecte.

4 Il ne s'agissait pas uniquement que les forces des Nations Unies

5 s'interposent entre les deux factions, non. Les Nations Unies étaient

6 associées directement avec les zones d'exclusion et les points de collecte

7 d'armes. Cet arrangement a commencé s'étioler également. Ceci a empiré au

8 fil du mois de mai, vers la fin mai - la date exacte, je crois que je suis

9 au paragraphe 61 maintenant - Là, j'émets un ultimatum et je demande à

10 l'OTAN de bombarder certains objectifs afin d'arrêter.

11 Le 25 mai, d'arrêter ce mouvement vers les points de collecte et les

12 zones d'exclusion.

13 Q. Nous y reviendrons. Est-ce qu'en juin, juillet, août, est-ce que les

14 niveaux de pilonnage et de tirs embusqués ont augmenté également ou est-ce

15 que cela a changé ?

16 R. Pardonnez-moi, j'ai mal compris. C'est après mai que ces incidents ont

17 eu lieu, ceux que je viens de décrire.

18 Q. Est-ce que ces incidents ont eu lieu à nouveau ?

19 R. Oui. En juillet, fin août, la situation devient à nouveau explosive.

20 Q. Avez-vous pu évaluer si un contrôle était exercé par l'armée des Serbes

21 de Bosnie quant au pilonnage et aux tirs embusqués des zones civiles et

22 dans quelle mesure ?

23 R. Oui, il y avait contrôle.

24 Q. A quel niveau, était-ce contrôlé, à votre avis ?

25 R. Le contrôle du feu d'artillerie a été mené de façon normale, c'est

26 comme cela que je l'ai compris, autour de Sarajevo, au niveau pratique le

27 plus élevé. Donc, je pense que c'était au niveau du corps de Sarajevo. Cela

28 c'était pour l'artillerie.

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1 Pour les tirs embusqués, ce n'était pas contrôlé de cette façon, c'était à

2 un niveau beaucoup plus bas de la hiérarchie.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi cette distinction ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la portée de l'arme. Si la cible est à

5 60 degrés [comme interprété], si l'objectif est à

6 15 kilomètres -- le rayon peut être de 15 kilomètres, à ce moment-là, le

7 commandement se fait à ce niveau, parce que cette arme peut avoir une

8 influence sur tout ce rayon. Un tireur embusqué utilise un fusil avec une

9 portée 400 à 600 mètres, en tout état de cause, donc contrôlé à un niveau

10 beaucoup plus bas.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on appliquer la même analyse au

12 pilonnage ?

13 R. Je vous l'ai déjà dit, pour pilonner il faut une arme d'artillerie. Il

14 faudrait que je vérifie l'armement qui a cette portée. Mais lorsqu'on a un

15 rayon de 15 kilomètres, en général, c'est un rayon qui peut effectivement

16 être atteint par ce genre d'arme.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le commandement se ferait où ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors là, je m'attendrais que le commandement

19 se situe au niveau du corps d'armée, puisque c'était là le niveau de

20 commandement qui était en place pour le siège de Sarajevo.

21 Je pourrais m'expliquer davantage lorsque je tiens ces propos. Si vous avez

22 ce genre d'arme sur place, vous lui avez donné une cible et vous avez dit

23 au commandement de cette pièce d'artillerie ce qu'il devait faire, c'est un

24 ordre que vous lui avez donné quelles que soient les modalités de

25 commandement. Je reviens aux termes de ma mission. En tant que chef de

26 corps d'armée, vous essayez de tenir toute votre artillerie parce que cela

27 couvre tout le rayon de vos activités. Vous allez peut-être donner un ordre

28 et dire voilà que : Vous devez détruire tout ce qui se trouve de l'autre

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1 côté de cette rivière," ou vous donnez une mission. "Vous êtes censés

2 bloquer, enrayer tout mouvement sur cette autre rive." Et vous laissez au

3 commandant le soin de déterminer de quelle façon il va s'y prendre.

4 Il n'empêche que vous, vous êtes encore directeur de ces tirs. Parce que

5 vous pouvez dire voilà vous retirez cette mission et vous dites à ce

6 commandant de faire d'autres choses. Parce qu'effectivement, cette arme

7 porte sur tout le rayon géographique de votre zone de commandement. Est-ce

8 que c'est clair ?

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pas tout à fait.

10 M. WHITING : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE MINDUA : En termes de hiérarchie dans l'armée, parce que nous

12 avons des pelotons, des compagnies de bataillon, des divisions, et ainsi de

13 suite. Vous dites que le "sniping," c'est au niveau le plus bas, tandis que

14 les pièces d'artillerie c'est plus haut, parce que le rayon d'activité est

15 plus grand.

16 Selon votre expérience à Sarajevo, selon votre expérience, à quel niveau

17 pouvait se décider des opérations de "sniping" ? Est-ce que c'est au niveau

18 de section ou de compagnie ? L'autonomie dont je parlais tout à l'heure. A

19 quel niveau pouvait se situer les décisions concernant le pilonnage de

20 localités civiles ? Est-ce que c'est encore au niveau de bataillons, de

21 pelotons, de divisions ? Comment vous expliquez tout cela ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer tout d'abord, pour répondre à

23 votre question, de vous donner la théorie que j'appliquerais ensuite à la

24 situation concrète.

25 Cette logique qui dit que votre pièce d'artillerie allait diriger au niveau

26 suprême du commandement, parce que cela couvre effectivement toute la gamme

27 des responsabilités de cet homme, et ceci peut descendre jusqu'au niveau

28 des tireurs embusqués. En règle générale, les opérations de tireurs

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1 embusqués sont contrôlés au niveau du bataillon, parce que c'est une

2 compétence de spécialiste, et l'arme correspond effectivement à cette

3 portée du commandement ou à cette gamme dans la hiérarchie militaire.

4 J'ai essayé de vous fournir une explication sur la façon dont on allait

5 utiliser une telle arme. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas contrôler

6 son utilisation à un niveau supérieur même si les activités, minute après

7 minute, jour après jour, se tiennent à un niveau inférieur. On peut

8 arrêter, on peut donner un ordre et dire : Voilà, on ne va plus avoir de

9 tirs embusqués ou on va uniquement engager ce type de cibles-ci. Il revient

10 alors au subordonné d'agir dans le cadre restreint de l'ordre que vous avez

11 donné pour l'exécution des autres missions ou des autres ordres qu'il a

12 reçus en tenant compte des restrictions que vous avez données.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il y a combien de niveaux entre le

14 bataillon et le tireur embusqué ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un peu différent sur l'armée.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Mais pour ce qui est de

17 Sarajevo.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] A Sarajevo, vous aviez des compagnies, à peu

19 près 100 hommes par compagnie. Un bataillon cela fait 3, 400 dans le

20 meilleur des cas. Les brigades serbes de Bosnie étaient très petites,

21 avaient peu d'effectifs, et la taille était différente selon la communauté

22 dans laquelle on avait puisé pour obtenir ces effectifs.

23 M. WHITING : [interprétation]

24 Q. Une question de suivi, Général. Donc, "cela ne veut pas dire qu'il

25 n'est pas possible de contrôler l'utilisation des tireurs embusqués à un

26 niveau supérieur." Je veux faire toute la lumière sur ceci. Le commandant

27 de corps, du Corps de Sarajevo-Romanija, puisque nous parlons de Sarajevo,

28 le chef de ce corps aurait-il pu arrêter les tirs embusqués ou est-ce qu'il

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1 aurait pu donner un ordre de tirer sur telle ou telle cible ?

2 R. Oui, cela aurait pu être fait.

3 Q. Auparavant, vous avez dit qu'on avait tiré sur des installations

4 civiles, des cibles civiles. Est-ce que c'était quelque chose qui était

5 bien connu, qui était notoire ?

6 R. Vous voulez dire qu'on tuait des civils ? Oui.

7 Q. Paragraphe 56 de la déclaration préalable. Vous y décrivez une

8 situation où vous étiez absent et le général Gobillard a exercé vos

9 fonctions pendant votre absence. Première question : est-ce que cela s'est

10 passé plus d'une fois ?

11 R. Oui. C'est la première fois que cela se passait, qu'il a été mon

12 adjoint. Il l'a été aussi en juillet pendant qu'il était en permission, en

13 congé.

14 Q. Lorsque vous êtes revenu et que vous avez repris vos fonctions, est-ce

15 que vous avez pris la responsabilité de ce dont il était chargé

16 auparavant ?

17 R. Oui.

18 Q. Au paragraphe 61, vous dites qu'il y a une recrudescence des combats le

19 24 mai à Sarajevo. Un ultimatum a été donné le 25 mai, l'OTAN a bombardé

20 les dépôts de munitions de Pale.

21 Vous dites ensuite qu'il y a eu une réponse de la VRS ce soir-là, qui a

22 pilonné toutes les zones protégées, un des obus étant tombé et a tué 71

23 personnes à Tuzla. Quand vous parlez des "zones protégées," vous parlez

24 aussi de Sarajevo ?

25 R. Tout à fait.

26 Q. Voyons le document suivant en application de l'article 65 ter. Je pense

27 que c'est le document qui porte la cote 02376. Oui, c'est cela.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je me suis abstenu d'intervenir jusqu'à

3 présent. Mais à plusieurs reprises, plutôt que ce soit le témoin qui nous

4 parle de ce qui se passe au paragraphe premier, on lui pose des questions

5 directes. On lui demande si effectivement le pilonnage s'est passé selon

6 les modalités décrites là. Le Procureur devrait plutôt lui demander ce qui

7 s'est passé ce jour-là à Tuzla. C'était une question qui guidait le témoin

8 dans sa réponse et ce n'est pas la première fois.

9 Je ne vais pas le dire à chaque fois, mais je voulais simplement

10 appeler votre attention sur ce problème.

11 M. WHITING : [interprétation] Je ne pense pas que c'était une

12 question qui dirigeait le témoin dans sa réponse.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle était la question ?

14 M. WHITING : [interprétation] Lorsque vous avez parlé de zones protégées,

15 est-ce que vous parliez aussi de Sarajevo. Puisqu'on dit ici : "Qu'il y a

16 eu pilonnage de toutes les zones protégées." Il y en a plusieurs. J'ai

17 demandé s'il y avait aussi Sarajevo. Donc, ce n'est pas une question qui

18 dirige le témoin.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Mais si vous posez une question

20 de la façon qu'a proposée ou qu'a présentée

21 Me Tapuskovic, c'est une question directrice.

22 M. WHITING : [interprétation] Ce n'est pas ce que j'ai fait.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez une petite tendance à le

24 faire. Vous demandez simplement au témoin de confirmer ce qu'il a dit dans

25 sa déclaration. Si vous disiez, par exemple, au témoin, ce que vous avez

26 dit au paragraphe 61 de votre déclaration c'est bien ce que vous voulez

27 dire et si c'est exact ?

28 M. WHITING : [interprétation] C'est ce que j'ai déjà fait. Cela a été déjà

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1 versé au dossier. Je ne vais pas le faire. Je vais me contenter de demander

2 au témoin les éléments qui doivent être précisés. Par exemple, qu'est-ce

3 que cela veut dire ? Comment le saviez-vous ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Rappelez-vous, il faut que ce soit

5 le témoin qui fournisse les éléments de preuve, pas vous.

6 M. WHITING : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

7 M. WHITING : [interprétation]

8 Q. Vous avez ce document 2376 en application de

9 l'article 65 ter. Vous l'avez vu ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que c'est le reflet fidèle des événements dont les frappes

12 aériennes qui étaient intervenues à l'époque ?

13 R. Oui.

14 M. WHITING : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document sera versé au

17 dossier.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P340, Monsieur le

19 Président.

20 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Q. Paragraphe 61 qui va de la page 13 à la page 14 de votre déclaration

22 préalable, vous parlez du fait que les Serbes auraient pris en otages

23 quelque 400 membres de la FORPRONU dont vous pensez qu'ils veulent se

24 servir comme boucliers humains. Paragraphe 62, dernière phrase, vous dites

25 que vous avez conclu que cette prise d'otages avait été décidée et

26 coordonnée au niveau le plus élevé de l'armée des Serbes de Bosnie.

27 Quels sont les facteurs qui vous ont permis de déboucher sur cette

28 conclusion ? C'est là la question que je vous pose.

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1 R. Le fait que j'avais reçu un coup de fil de l'officier de liaison qui

2 parlait canadien à Pale. Les premiers otages avaient été pris en otages

3 près de Pale. Personne n'avait été pris en otage sur un territoire qui

4 était passé de simple territoire de Sarajevo et de Pale, qui s'étendait à

5 d'autres parties de la Bosnie tenues par les Serbes.

6 Q. Document suivant, 2382, d'après la liste 65 ter. C'est un document qui

7 émane de l'accusé et qui porte la date du 27 mai 1995. Je vous demande

8 d'examiner tout particulièrement le point 1A et B. Est-ce que ceci cadre

9 bien avec les événements qui interviennent à l'époque et dont vous parlez

10 dans votre déclaration préalable ?

11 R. Tout à fait.

12 Q. Entre parenthèses, ceci montre aussi qu'un régiment d'artillerie ou une

13 photodéfense [phon] antiaérienne était dirigée -- même si c'était un

14 commandement des forces antiaériennes était dirigé par le commandement du

15 corps d'armée.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que dit le point 1A et le

17 point 1B ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci s'inscrit dans la discussion sur le

19 commandement. J'ai relevé simplement que toutes les unités du Corps de

20 Romanija-Sarajevo étaient tenues par le commandement.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. C'est ce que je voulais dire.

22 Il faut que ce soit le témoin qui parle dans la mesure du possible, même si

23 c'est en application du 92 ter.

24 M. WHITING : [interprétation] Je voulais parler de la partie de l'ordre qui

25 concerne le nombre de membres de la FORPRONU, du HCR et d'autres

26 organisations qui ont été fait prisonniers --

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est ce que je vois bien, mais

28 je pense que là c'est tout à fait pertinent.

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1 M. WHITING : [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est ce qu'on voit au 1A et au 1B.

3 M. WHITING : [interprétation] Oui. Et je pense que le général a dit que

4 ceci correspond bien à ce qu'il a dit dans sa déclaration.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A l'avenir, veillez à ce que ce soit

6 lui qui présente ces éléments directement.

7 M. WHITING : [interprétation]

8 Q. Point 3. On dit que des membres russes de la FORPRONU ne doivent pas

9 être fait prisonniers et les Russes capturés doivent être relâchés. Est-ce

10 que vous avez un commentaire à faire à ce propos ?

11 R. C'était manifeste à l'époque où ceci se passait, puisque les

12 ressortissants de toutes les autres nationalités étaient fait prisonniers,

13 sauf les Russes. Ceci n'a pas vraiment surpris, surtout si on se souvient

14 que les Russes étaient arrivés au moment où les zones d'exclusion

15 existaient et ils avaient été, pour ainsi dire, introduits à Sarajevo

16 d'abord, puis étaient devenus membres des forces des Nations Unies et que

17 leurs casernes se trouvaient du côté serbe de Bosnie. Je parle du côté de

18 la ligne de confrontation.

19 Plus récemment, il y avait eu beaucoup de choses attestant du fait qu'avant

20 ma réunion, la réunion dont nous avons déjà parlé, qui s'est tenue, je

21 pense, le 5 mars à Jahorina. Il y avait beaucoup de preuves qui disaient

22 qu'avant moi, il y avait eu des Russes à Jahorina dans le cadre d'une

23 réunion qui s'était tenue auparavant. Nous avions vu les véhicules et

24 quelqu'un qui était venu de Belgrade.

25 Q. Vous y faites référence à la page 28 de votre déclaration, n'est-ce pas

26 ?

27 M. WHITING : [interprétation] Je demande le versement de ce document,

28 Monsieur le Président.

Page 3326

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P341.

3 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous demander au témoin

4 d'expliquer les implications de ce qu'il vient de décrire. Si j'ai bien

5 compris ce qu'il a dit, juste avant que lui ne rencontre Mladic à cet

6 endroit, ils ont vu les véhicules russes qui partaient. Est-ce que cela

7 veut dire que les Russes venaient d'avoir une réunion séparée avec les

8 Serbes ? Est-ce que j'ai bien compris ce que vous disiez ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Voici comment j'ai compris cet événement. La

10 délégation russe, à un niveau que je n'ai jamais pu déterminer - je ne sais

11 pas à quel niveau cela s'était passé - mais qu'une délégation russe était

12 venue de Belgrade. Une délégation avait reçu l'escorte de Russes de la

13 FORPRONU et on m'a fait part du fait qu'il y a eu effectivement ces

14 véhicules qui étaient partis.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je suppose que vous auriez dû en être

16 informé avant qu'il y ait eu cette action menée par les soldats russes dans

17 la FORPRONU.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] En théorie, lorsque vous avez un commandement

19 international, on pourrait s'attendre effectivement à ce que tout le monde

20 dise à tout le monde ce que chacun fait; mais en pratique ce n'est pas ce

21 qui se passe du tout.

22 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je subodore qu'il y a beaucoup de

23 choses qui se passaient sous vos yeux à votre insu, pour ne pas mettre de

24 gants.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai même pas un doute. C'est une

26 certitude.

27 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Qu'est-ce que ceci a comme

28 implication pour ce qui est de la hiérarchie serbe ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Serbes savaient ce qui se passait dans

2 leur zone. Souvenez-vous de ceci : deux des camps au bas mot, je parle des

3 Serbes de Bosnie, des Bosniens, ils étaient en guerre et ils faisaient

4 l'impossible pour dissimuler à l'autre ses intentions, ses objectifs. C'est

5 un tel cas de figure. Si une des parties croit savoir ce qu'elle fait, si,

6 par exemple, on introduit des forces de l'ONU, aucune des parties ne va le

7 dire à une tierce partie, aucune de ces deux factions. Cette tierce partie

8 ne va pas forcément savoir ce que, dans son dos, ses représentants

9 politiques font dans le cadre national plutôt que dans le cadre

10 international.

11 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, je comprends. J'attends que les

12 interprètes aient terminé.

13 Mais les unités russes de la FORPRONU vous rendaient compte, vous ont dit

14 ce que ces unités ont appris grâce à ces contacts indépendants avec les

15 dirigeants serbes ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Quand je dis "pas cette fois-là," on ne m'a

19 pas fait rapport. Il s'est présenté des cas où le chef du régiment m'a dit

20 ce qu'il avait appris; mais cette fois-là, ils sont restés muets même lors

21 que je leur ai reposé la question.

22 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

23 Q. Général, vous avez qu'il y avait sans nul doute des choses qui se

24 passaient sans que vous en ayez connaissance. Vous avez parlé dans votre

25 déposition de la façon dont vous compreniez certaines choses, la nature du

26 commandement de la VRS, sa stratégie par rapport à Sarajevo. Pour faire

27 toute la lumière sur ce point, je vous demande ceci : le fait qu'il y avait

28 des choses dont vous n'étiez pas au courant, est-ce que cela vous a poussé

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1 à douter d'une façon ou d'une autre des conclusions que vous nous aviez

2 rapportées à propos de ces sujets, à propos du type de la structure du

3 commandement ?

4 R. Evidemment. Après les événements on tire plus d'enseignement, mais ils

5 ont conforté l'avis que j'avais à l'époque.

6 Q. Paragraphe 63, s'il vous plaît. Après la prise d'otages de ces membres

7 des Nations Unies, vous avez quelques coups de fil avec le général Mladic.

8 Vous en parlez ici. Vous décrivez ces conversations. Deuxième phrase du

9 paragraphe 63, page 14, voici ce que vous dites au cours de la première

10 conversation téléphonique : "J'ai condamné Mladic ou du moins je l'ai

11 accusé d'être responsable des attaques menées sur les zones protégées."

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Me Tapuskovic veut intervenir.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, une fois de plus on

14 fait lecture de ce paragraphe, alors qu'on attend du témoin un commentaire.

15 Par conséquent, on donne lecture de certaines choses, choses dont en

16 principe devrait parler le témoin. On devrait simplement lui rappeler

17 certains éléments et lui laisser le soin de parler plutôt que ce soit M.

18 Whiting qui lui donne tout contenu.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Rappelez-vous,

20 Maître Tapuskovic, que c'est une déposition qui se fait en application du

21 92 ter. Cet article permet que sa déposition préalable soit versée au

22 dossier plutôt que ce ne soit le témoin même qui dépose. On pourrait

23 simplement avoir dans le cadre du 92 ter uniquement la déclaration. Il ne

24 faudrait même pas que le témoin soit présent à l'audience.

25 Cependant, nous avons modifié dans une certaine mesure la procédure et en

26 application du 92 ter. Bien souvent l'Accusation présente des éléments ou

27 obtient des éléments du témoin sur des points précis. A mon avis, en

28 principe, le substitut du Procureur est en droit de lire certaines parties

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1 de la déclaration préalable du témoin. D'ailleurs, dans un premier temps,

2 au début de l'interrogatoire principal, le témoin a confirmé l'exactitude

3 de tout ce qui est contenu dans sa déclaration préalable.

4 M. WHITING : [interprétation] Merci.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'en demeure pas moins que

6 parfois le Procureur a tendance à diriger le témoin dans ses réponses et

7 nous veillons au grain, Je vous le garantis.

8 M. WHITING : [interprétation] Moi aussi, je veille au grain, Monsieur le

9 Président. Je suis en état d'alerte. Maintenant, j'ai un peu perdu le fil

10 de mes pensées.

11 Q. Deuxième phrase, vous accusez Mladic, et je poursuis la lecture :

12 "Mladic a dit qu'il était désolé de ces actions," qu'il les regrettait mais

13 il m'a accusé, il m'a imputé ce blâme. Il m'a dit que je précipitais la

14 situation. Quand il a dit qu'il était désolé, qu'il regrettait ces actions,

15 pour vous qu'est-ce que cela voulait dire ? Comment avez-vous interprété

16 ces paroles ?

17 R. Pour moi, c'était surtout de la rhétorique, paroles creuses.

18 Q. Est-ce que vous voulez dire qu'il reconnaissait avoir été partie

19 prenante dans ces actions ?

20 R. Sans le moindre doute. Cela n'a jamais été en question.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Là, vous dirigez le témoin. Vous

22 auriez dû lui demander qu'est-ce qu'il voulait dire. Il n'a pas donné la

23 réponse que vous attendiez. C'est tout.

24 M. WHITING : [interprétation] Je pense qu'il n'a pas très bien compris ma

25 question.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais vous auriez dû vous

27 arrêter là. Ce n'est pas à vous de souffler la réponse au témoin.

28 M. WHITING : [interprétation] Je passe à autre chose.

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1 Q. Au paragraphe 69, vous évoquez une autre conversation que vous avez eue

2 avec le général Mladic le 28 mai. Consultez le document suivant, en

3 application de l'article 65 ter, c'est le document 42. Prenez surtout la

4 deuxième page. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner ce document et

5 est-ce qu'il est le reflet fidèle de cette conversation que vous avez eue

6 par téléphone avec le général Mladic ?

7 R. Oui.

8 M. WHITING : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quels ont été les moments saillants

10 de cette conversation ? Est-ce que vous pourriez nous résumer cette

11 conversation.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, vous avez beaucoup de

13 personnes prises en otages, beaucoup de membres de la FORPRONU. Attendez,

14 je vérifie. Deux soldats serbes ont été capturés par les Français dans un

15 incident survenu à un pont à Sarajevo. Je dis notamment dans cette

16 conversation que ceci est contraire au protocole des conventions de Genève.

17 Ceci est aussi contraire au Règlement. Si, par exemple, des personnes sont

18 en uniforme des Nations Unies, on n'a pas le droit de les prendre en

19 otages. Il viole toutes ces dispositions, tous ces points de droit. J'exige

20 la libération de tous mes soldats et je lui dis, dans le même souffle, que

21 ces deux soldats qui ont été capturés par les Français sont bien traités.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous nous dire en quelques

23 mots quelle fut la réponse ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] On n'avait rien comme résultat à moment-là. On

25 se contentait de rappeler quelle était notre position au niveau de ces

26 négociations. Il refusait de rendre les otages et finalement, on n'allait

27 pas avoir un échange de prisonniers à ce moment-là.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, le document sera versé au

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1 dossier.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P342, Monsieur le

3 Président.

4 M. WHITING : [interprétation] Je pense que l'heure est venue de faire la

5 pause.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement.

7 L'audience est suspendue.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

9 --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous avez la

12 parole.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Jusqu'à maintenant, je ne savais pas que

14 l'accusé, Dragomir Milosevic, n'avait pas reçu le dossier. Il ne peut pas

15 suivre sur l'écran. Il ne peut pas voir les documents qui sont présentés.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la raison de cela ?

17 Monsieur Whiting, expliquez-nous. Avez-vous donné un exemplaire du dossier

18 à l'accusé ?

19 M. WHITING : [interprétation] Nous avons donné un exemplaire du dossier à

20 la Défense. J'avais cru comprendre que ces documents seraient appelés à

21 l'écran en même temps que nous les propulsions sur papier. Mais comme nous

22 avons propulsé ces documents très rapidement, visiblement on n'a pas eu le

23 temps de les afficher.

24 Je peux donner le dossier de Sean, de M. le Greffier à l'accusé, j'en

25 serais ravi. Je suis désolé. J'ai aussi oublié de donner un exemplaire pour

26 l'accusé.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Autre chose maintenant. Il n'y a que deux

28 de ces documents qui sont en B/C/S; tous les autres sont en anglais, tous

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1 les documents qui sont dans le dossier, qui sont dans le classeur. L'accusé

2 n'est absolument pas en mesure de les regarder.

3 M. WHITING : [interprétation] Non, ce n'est pas vrai, puisque dans le

4 dossier, il y a toujours la traduction en B/C/S, une version en B/C/S. Vous

5 le voyez d'ailleurs. Je crois qu'il y a un intercalaire vert à chaque fois

6 entre la version B/C/S et la version anglaise.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] En effet, en effet.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est en effet le cas.

9 M. WHITING : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.

11 M. WHITING : [interprétation]

12 Q. Maintenant, passons au paragraphe 71. Là vous parlez de "l'ABiH qui a

13 lancé son attaque, qui était connue de longue date, pour briser le siège de

14 Sarajevo."

15 Combien de temps a duré cette attaque ?

16 R. Si je me souviens bien, cela a duré deux ou trois jours --enfin,

17 l'attaque en tant que telle n'a duré que deux ou trois jours. Après, bien

18 sûr, quand ils se sont retirés il y a encore eu quelques conflits

19 sporadiques.

20 Q. Passons maintenant au document suivant, le document 65 ter, numéro 43.

21 C'est une lettre en date du 26 juin 1995. S'agit-il bien de votre signature

22 au bas de cette lettre ?

23 R. Oui.

24 Q. Pouvez-vous nous dire quel était l'objectif de cette lettre, si vous

25 vous en souvenez ?

26 R. Il me semble que là, nous étions vers la fin d'un mois très difficile,

27 après les bombardements qui avaient eu lieu en mai, les incidents de mai

28 aussi. Donc j'ai essayé de tout rassembler dans une lettre. J'ai essayé

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1 d'exprimer dans cette lettre mes préoccupations à propos de l'emploi de la

2 force, et à propos des incidents qui avaient affecté les personnes vivant

3 dans les zones protégées.

4 A ce moment aussi, je m'apprêtais à partir en permission, et je pense que

5 j'étais en train de résumer un petit peu la situation pour être sûr que la

6 transition se passe correctement avec mon subordonné.

7 M. WHITING : [interprétation] Pourrions-nous verser cette pièce au dossier,

8 s'il vous plaît.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P343.

11 M. WHITING : [interprétation]

12 Q. Maintenant, nous allons regarder le document suivant. Si vous pouviez

13 passer directement à la page 3, car c'est elle qui m'intéresse.

14 R. De quel document s'agit-il ?

15 Q. C'est le document 65 ter 824.

16 R. Oui, je voulais m'assurer.

17 Q. Il s'agit d'un document, à la page 3 de ce document, daté du 22 août

18 1995, et c'est le compte rendu d'une réunion que vous avez eue avec le

19 général Mladic. Je tiens à attirer votre attention sur le point 6, qui se

20 trouve à la page 2 de ce mémo. Pourriez-vous nous dire si ceci correspond

21 bien à ce qui s'est passé lors de la réunion et nous décrire aussi les

22 points saillants de cette réunion ?

23 R. Oui. Comme on le voit dans la phrase liminaire de ce paragraphe, on

24 était encore en train d'essayer de savoir qui parle au nom des Serbes de

25 Bosnie. C'est parce qu'en juin, juillet, ce début août 1995, les

26 dispositifs de la direction à Pale étaient sous pression très forte, une

27 pression politique surtout. Les choses n'étaient plus très claires; on

28 avait du mal à comprendre la relation entre Karadzic et Mladic. Si vous

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1 vous souvenez précédemment dans la déposition, j'ai bien dit qu'il n'avait

2 jamais de limitations bien précises en ce qui est militaire et ce qui est

3 politique à ce niveau très élevé, et j'ai essayé là de déterminer où se

4 trouvait exactement cette ligne entre le politique d'un côté et le

5 militaire de l'autre.

6 Ce qu'on voit aussi dans ce paragraphe, c'est qu'à ce moment-là, Karadzic

7 et Mladic, tous les deux, avaient déjà été mis en accusation en tant que

8 criminels de guerre après ce qui s'était passé dans l'enclave de

9 Srebrenica. Il dit ouvertement : "Je suis criminel de guerre, mais vous

10 devez quand même parler avec moi, vous devez quand même vous entretenir

11 avec moi et traiter avec moi."

12 M. WHITING : [interprétation] Pourrions-nous verser ce document au dossier,

13 s'il vous plaît ?

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P344.

15 M. WHITING : [interprétation]

16 Q. Maintenant, je voudrais vous parler de ce qui s'est passé donc en août

17 1995, ce qu'on appelle ici l'incident Markale 2. Cela se trouve dans votre

18 déclaration, j'espère que vous allez trouver le paragraphe, paragraphe 108.

19 R. Très bien.

20 Q. Pourriez-vous dire à la Chambre ce que vous avez appris à ce moment-là

21 à propos de l'incident Markale 2.

22 R. Pour vous donner un peu d'élément de contexte, Markale 2 c'est une

23 attaque par mortier, cinq obus de mortier qui auraient été tirés, et un de

24 ces obus a tué une trentaine de personnes sur le marché de Markale.

25 On appelle cet incident Markale 2, parce qu'il y avait eu l'année

26 précédente Markale 1, un incident de la même envergure.

27 Il y avait une procédure qui existait. C'étaient des personnes appelés des

28 UNMOS, donc des observateurs militaires des Nations Unies, qui était une

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1 organisation qui était là pour faire des rapports et qui était superposée

2 pour tout le commandement des Nations Unies dans les Balkans et qui devait

3 rendre compte à Zagreb uniquement. C'est une réalisation transversale.

4 Donc, ils étaient là seulement pour aller sur place et pour obtenir des

5 informations sur les incidents afin qu'au niveau des Nations Unies il n'y

6 ait qu'une seule source d'information.

7 Le commandement du secteur, donc le commandement du secteur de Sarajevo,

8 devait aussi rendre compte, il faisait partie de mon commandement. Les

9 UNMOS avaient un officier de liaison, dont vous savez très bien ce qu'il

10 faisait. Ce n'était pas des électrons libres qui faisaient n'importe quoi,

11 mais ils avaient un commandement bien séparé du mien. Donc, il y avait deux

12 enquêtes qui ont eu lieu avec différentes compétences pour chaque équipe.

13 Q. Y a-t-il d'autres enquêtes qui ont été menées ?

14 R. Vous savez qu'il y avait déjà ces deux équipes. Nous nous sommes

15 retrouvés avec des différences par rapport aux conclusions sur ce qui

16 s'était passé. De ce fait, j'ai demandé à l'un de mes subalternes de faire

17 une synthèse de ces rapports afin d'avoir une conclusion plus unique. En

18 tout cas, pas une conclusion unique mais au moins d'avoir un même ensemble

19 des éléments de preuve.

20 Q. Les enquêtes qui ont été effectuées sur cet incident ont-elles conclues

21 que l'obus qui avait tué une trentaine de personnes avait été tiré depuis

22 une position de l'ABiH ?

23 R. Non.

24 Q. Vous dites au paragraphe 108 : "Après l'enquête, j'ai décidé au-delà de

25 tout doute raisonnable que les tirs venaient du côté serbe."

26 Pourriez-vous nous dire ce qui vous a poussé à déduire cela ?

27 R. Il y avait un désaccord à propos de la direction. Il y avait deux

28 opinions différentes à propos de la direction, de la provenance du tir. De

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1 toute façon, c'était en dehors du territoire de Sarajevo détenu par l'ABiH.

2 Il y avait un radar qui s'appelait le Cymbelline qui, étant donné qu'on

3 n'avait pas obtenu aucune trace de radar par rapport à la provenance du

4 mortier, cela signifiait que la trajectoire était trop basse pour que le

5 radar le remarque, le repère, donc la déduction en était que le tir venait

6 de très loin.

7 Ensuite, il y avait le système acoustique aussi qui n'avait pas récupéré

8 aucune trace acoustique, ce qui signifiait que c'était en dehors de la

9 portée des systèmes acoustiques. Puis, il y avait aussi de nombreuses

10 personnes qui ont témoigné qu'elles n'avaient pas entendu les tirs avant la

11 détonation. De ce fait, j'en ai conclu que ces obus avaient été tirés

12 depuis l'extérieur de l'enclave, dans l'une ou l'autre des directions,

13 puisqu'il y avait deux opinions à propos de la provenance d'origine.

14 Surtout encore, j'ai l'expérience des sièges, et normalement, quand on a un

15 obus qui tombe à l'intérieur de la ville assiégée, cet obus vient de

16 l'extérieur de la ville assiégée.

17 Q. Général, quelle était l'importance de cette conclusion ? Pourquoi il a

18 fallu absolument savoir d'où venaient ces tirs ?

19 R. J'étais quand même commandant des forces des Nations Unies sur place et

20 je devais le faire. Tout d'abord parce que les décisions qui avaient été

21 prises à la Conférence de Londres, je crois le 21 et le 22 juillet, pas

22 vers la fin de juillet, en tout cas, étaient essentielles.

23 Q. Paragraphe 110, vous relatez une conversation entre vous et le général

24 Mladic où il propose que l'on mette sur pied une équipe d'enquête

25 conjointe. Quelle était votre réaction ?

26 R. Ce n'était pas nouveau. C'était un peu nouveau parce que l'incident

27 venait juste d'arriver. Mais ce type de commissions d'enquête conjointe

28 avait déjà été suggéré précédemment pour d'autres incidents; et quand on

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1 avait employé ces commissions conjointes, on en arrivait uniquement à des

2 disputes : ce n'est pas lui, c'est moi, c'est l'autre. On n'arrivait jamais

3 à la moindre conclusion. Tout le monde se rejetait la faute et rien de

4 plus.

5 Q. Dans ce paragraphe, vous nous dites aussi que Mladic a déclaré que son

6 état-major avait confirmé qu'aucun ordre de tirs n'avait été donné à ses

7 unités. Quelle était votre réaction à cette déclaration ?

8 R. Je ne l'ai pas cru. Je veux dire, je m'attendais à ce qu'il le dise.

9 C'était évident. On ne pouvait pas dire autre chose.

10 Q. Enfin, un sujet que nous avons déjà abordé, mais je vais quand même

11 vous poser la question. Quelle est votre réaction à l'allégation selon

12 laquelle l'ABiH pilonnait son propre peuple dans la zone assiégée et

13 procédait aussi à des tirs embusqués sur son propre peuple dans la zone

14 assiégée ?

15 R. Oui. J'ai entendu ces allégations. Je les ai entendues même quand j'y

16 étais. A aucun moment on ne m'a convaincu de cette allégation, car on ne

17 m'a jamais proposé aucun élément de preuve qui m'aurait permis d'y croire.

18 M. WHITING : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

20 Monsieur Tapuskovic, c'est à vous.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

22 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :

23 Q. [interprétation] Monsieur Smith, je suis le conseil de l'accusé

24 Dragomir Milosevic qui commandait le Corps de Sarajevo-Romanija. J'ai pu

25 déjà vous poser des questions par le passé et nous nous retrouvons à

26 nouveau. Je peux à nouveau vous poser des questions à propos de votre

27 séjour à Sarajevo et de vos fonctions en tant que commandant.

28 Comme j'ai pu lire dans votre déclaration, je voudrais commencer par

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1 votre déclaration. Nous allons commencer par le paragraphe 3 de ladite

2 déclaration. Vous avez pris le commandement de la FORPRONU en Bosnie-

3 Herzégovine le 23 janvier 1995; c'est bien cela, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. Votre prédécesseur était le général Rupert Smith; c'est bien cela ?

6 Non, non, je me trompe, général Rose.

7 R. Oui.

8 Q. Y a-t-il eu un passage de fonctions, d'un protocole ou quoi que ce soit

9 avec le général Rose avant qu'il ne quitte Sarajevo ?

10 R. Je m'étais déjà rendu à Sarajevo en novembre de l'année précédente. Le

11 général Rose m'avait déjà briefé sur la situation et nous nous étions

12 rencontrés aussi à Zagreb plutôt qu'à Sarajevo, à Zagreb la veille de ma

13 prise de fonction.

14 Q. Vous êtes-vous rencontrés à Sarajevo le jour de la prise d'armes ?

15 J'imagine que le général Rose était encore là quand même.

16 R. Non, non. C'est à Zagreb que nous nous sommes vus. Quand je suis passé

17 par Zagreb j'ai rencontré le général Rose avant de me rendre sur Sarajevo.

18 Q. Pouvons-nous affirmer qu'en novembre quand vous l'avez vu, et ensuite

19 quand vous l'avez vu à Zagreb, vous vous êtes entretenu avec le général

20 Rose à propos de la situation qui prévalait à Sarajevo pour essayer de

21 mieux comprendre ce qui s'est passé, les problèmes que rencontrait la

22 FORPRONU principalement à Sarajevo ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous a-t-il dit qu'après ce qui s'était passé le

25 5 février 1994, après le premier incident, après le massacre de Markale,

26 l'ABiH pendant plusieurs mois a enfreint le cessez-le-feu ?

27 R. Non. Je ne me souviens pas que nous soyons rentrés dans les détails de

28 ce type.

Page 3340

1 Q. Vous a-t-il parlé des violations de cessez-le-feu en vous disant quelle

2 était la partie qui avait d'abord fait enfreindre le cessez-le-feu ?

3 R. De quel cessez-le-feu parlez-vous ?

4 Q. Le général Rose vous a-t-il dit quoi que ce soit à propos de la

5 situation qui prévalait lors de ses fonctions en tant que commandant de la

6 FORPRONU, et vous a-t-il dit que dans cette période-là, principalement

7 après l'incident de Markale, le cessez-le-feu était constamment violé par

8 l'ABiH ?

9 R. Non. Nous ne sommes pas entrés dans ce genre de détail. C'étaient des

10 détails qui avaient quand même un an. Quand je me suis entretenu avec le

11 général Rose cela faisait un an que tout ceci s'était passé.

12 Q. Vous a-t-il quoi que ce soit à propos de ce qu'il savait sur les

13 activités de "sniping" à Sarajevo ? Il y a une chose qui m'intéresse

14 principalement et c'est pour cela que je vous pose cette question. S'est-il

15 plaint que l'ABiH, les forces musulmanes à Sarajevo avaient tendance à

16 tirer fréquemment sur leurs propres citoyens pour essayer de faire endosser

17 ce type de tirs par le côté serbe ?

18 R. Non. Je ne me souviens pas qu'il m'ait dit quoi que ce soit de ce type.

19 Q. Saviez-vous que dans son livre "Mission pour la Bosnie," le général

20 Rose a écrit la chose suivante à propos de Markale 1.

21 "L'enquête initiale sur site effectuée par les experts français a montré

22 que la distance proche d'un bâtiment extrêmement élevé qui était proche du

23 marché faisait qu'il était impossible qu'un obus tombe sur le marché,

24 surtout depuis cet angle. C'est pour cela que la conclusion de l'équipe

25 française a été que l'obus était un obus de mortier ou que l'explosion

26 avait eu lieu depuis le sol."

27 Vous en a-t-il parlé ou au moins l'avez-vous lu dans son livre, étant

28 donné que c'est un livre qui est quand même rédigé en langue anglaise ?

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1 R. Oui, mais je n'ai pas lu son livre et il ne m'en a pas parlé.

2 Q. Général --

3 M. WHITING : [interprétation] Je me demande si Me Tapuskovic aurait la

4 référence de la page de l'ouvrage du général Rose dont il a tiré la

5 citation, car cela m'intéresse.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Maître Tapuskovic,

7 pouvez-vous nous donner la référence exacte.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai la référence en B/C/S. C'est la page

9 60 de la version en B/C/S du livre de général Rose. J'aurais dû apporter le

10 livre avec moi. J'ai aussi la version anglaise mais je voulais gagner du

11 temps. C'est pour cela que je ne l'ai pas apporté. Bien sûr, si vous en

12 avez besoin, je vous l'enverrai. Je voulais juste présenter au témoin ce

13 qui est écrit à la page 60 de la traduction en B/C/S.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il y a un autre passage que j'aimerais

16 lire.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à autre chose.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

19 Q. Le général Rose vous a-t-il dit la chose suivante : "Quand un

20 journaliste du CNN m'a dit qu'il était impossible de savoir qui avait tiré

21 l'obus, je lui ai dit qu'il est impossible d'avoir une conclusion en ne se

22 basant que sur le tir d'un obus."

23 Saviez-vous que ceci avait été discuté à l'époque ?

24 R. Non.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, je dois vous dire

26 que si vous allez vous baser sur ce livre, vous auriez vraiment dû nous

27 apporter la version anglaise. Mais continuons, nous allons voir si nous

28 avons vraiment besoin de la version anglaise de cet ouvrage. Il ne s'agit

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1 pas de la traduction en anglais, mais de la version en anglais, la version

2 originale, puisque le document a été écrit en anglais.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est le bureau du Procureur qui me l'a

4 envoyé. J'aurais pu l'apporter, mais je n'avais que quelques questions à

5 poser. Je voulais juste lui demander si ce qui était décrit dans le livre

6 était bel et bien la vérité. Je ne pensais pas que j'allais avoir besoin de

7 vous le montrer pour vous prouver que ma citation est correcte. C'est sans

8 doute une erreur de ma part. J'essayais juste de gagner du temps. Si le

9 témoin ne sait rien à ce propos --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais très souvent il est

11 important de lire d'autres passages dans le livre pour savoir si la

12 question a bien été posée avec son contexte. Je ne suis pas en train de

13 vous accuser, mais c'est une des raisons pour laquelle nous aurions aimé

14 avoir la version anglaise, l'original de l'ouvrage.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cela dit, j'en arrive finalement à ma

16 question :

17 Q. Monsieur le Témoin, saviez-vous que l'ABiH ainsi que son gouvernement

18 utilisaient parfois sa propre population pour en faire des victimes dans

19 des buts militaires et des buts politiques ? Etiez-vous au courant de

20 cela et vous en a-t-on averti ?

21 R. Non. Je n'en sais rien. J'ai entendu des allégations allant dans ce

22 sens, mais jusqu'à présent personne n'a réussi à me prouver que c'était bel

23 et bien la vérité.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ces allégations que vous avez

25 entendues, pourriez-vous nous dire si c'étaient des rumeurs qui venaient de

26 sources qui étaient crédibles ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela venait toujours de l'autre camp.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Maître Tapuskovic. Vous pouvez

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1 poursuivre.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

3 Q. Je vois que votre adjoint était le général Nicolai. Nous l'avons

4 d'ailleurs entendu ici même. A la page 974 et 975, lignes 17 à 25, lignes 1

5 à 10, à la page 975, il a dit, quand on lui a demandé si les Musulmans de

6 Bosnie avaient bel et bien tiré sur leur propre peuple, Nicolai a confirmé

7 qu'il avait entendu de son prédécesseur que des choses de ce type auraient

8 pu avoir lieu, que c'était peut-être possible. Il a poursuivi en disant

9 qu'il y avait une présomption selon laquelle ils avaient l'intention de

10 tirer sur leurs propres troupes et de faire endosser la chose par l'autre

11 camp.

12 Votre adjoint, Nicolai, vous a-t-il appris ce qu'il avait entendu de la

13 part de Van Ball ?

14 R. Non. Ce n'était pas du tout mon adjoint, mais c'était mon chef d'état-

15 major. Il résidait au QG.

16 Je ne vais pas faire de commentaires sur les propos de quelqu'un

17 d'autre, mais même de la façon dont vous me l'avez dit, cela reste des

18 allégations. Il n'y a toujours pas de preuve. Personne d'ailleurs n'a

19 jamais apporté de preuve que ceci était bel et bien vrai.

20 Q. A la page 975 et 976, lignes 20 à 25, et lignes 1 à 16 de cette

21 déposition en l'espèce, voici ce qu'a dit Nicolai --

22 R. Vous êtes en train de faire référence au compte rendu de la déposition

23 de Nicolai; c'est bien cela ? Je ne l'ai pas sous les yeux.

24 Q. C'est pour notre affaire ici, l'affaire du général Milosevic. Je vais

25 citer le compte rendu.

26 R. Très bien.

27 Q. Vous avez les références. Nicolai continue :

28 "Le général Van Ball m'a parlé d'une affaire bien spécifique où les

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1 forces de Bosnie ont tiré sur leur propre peuple en essayant de faire

2 endosser la responsabilité à l'autre camp. Le général Van Ball était

3 presque sûr que c'était bien ce qui était arrivé."

4 Nicolai, qui était votre chef d'état-major, a-t-il attiré votre

5 attention sur cet état de fait, pour que vous le gardiez à l'esprit lors de

6 l'évaluation de la situation et l'évaluation des actions et des mesures à

7 prendre par la FORPRONU ?

8 R. Non. Je ne me souviens pas qu'il ait fait quoi que ce soit de la sorte.

9 Qui est ce général Van Ball d'ailleurs ? Je ne me souviens absolument pas

10 qu'il y ait eu un général Van Ball. Il se peut très bien qu'il ait été là,

11 mais je ne me souviens pas de lui. Je ne me souviens absolument pas de ce

12 qu'il faisait.

13 Q. C'était le prédécesseur de Nicolai et c'est ce que Nicolai avait appris

14 de lui.

15 R. C'était le général Brinquemont qui était le prédécesseur de Nikolai.

16 Q. Je ne l'ai pas sous les yeux, mais de toute façon quand on arrivera à

17 Markale, je vous le montrerai.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'essaie de m'en souvenir, mais qu'a

19 dit Nicolai ?

20 M. WHITING : [interprétation] Je pense qu'il est bon de lire ce qu'a dit M.

21 Nicolai. Il a dit et je cite : "Le général Van Ball, le prédécesseur de mon

22 prédécesseur m'a dit avant mon départ --" Je pense qu'il faut dire qu'il

23 avait une impression forte "mais il n'en était pas sûr à 100 %." C'est à la

24 page 975 du compte rendu.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que cela vous vous rafraîchit

26 un peu le mémoire, Général ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, mais on parle d'un homme, je ne le

28 connais pas. On parle d'événements qui ont eu lieu avant que j'arrive. Si

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1 Nicolai a dit que c'est ce que cet homme lui a dit, et bien, il l'a sans

2 doute dit, en effet.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. A la page 964, ligne 12, le général Nicolai dit ce qui suit et je cite

5 :

6 "Pour ce qui est des provocations qui avaient lieu dans Sarajevo et

7 qui étaient le fait de l'ABiH, parfois il y avait des provocations qui,

8 c'est-à-dire que les provocations c'étaient des tirs d'arme de petit

9 calibre depuis des positions serbes. Autre forme de provocation, c'était

10 des tirs d'arme lourde. Il est bien connu qu'entre autres des véhicules

11 avec des mortiers à bord étaient utilisés pour tirer de façon aléatoire sur

12 les différentes positions des Serbes de Bosnie qui se trouvaient en dehors

13 de la ville."

14 Savez-vous quoi que ce soit à ce propos, et le général Nicolai vous en a-t-

15 il parlé, vous a-t-il averti de tout cela ?

16 M. WHITING : [interprétation] Je soulève une objection là, parce que la

17 citation n'est pas correcte, ce n'est pas ce qu'a dit

18 M. Nicolai, il n'a pas dit "tirer aléatoirement," il a dit, "les tirs

19 arbitraires en dehors du territoire des Serbes de Bosnie." Dans ce passage,

20 il ne dit pas qu'ils tiraient de façon aléatoire. Ce qui est ce que nous

21 avons entendu.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic qu'avez-vous à

23 dire après ce que nous a dit M. Whiting ?

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est l'esprit de ce qui a été dit. Ils

25 sont quand même interprétés. Si on a besoin d'interpréter les choses qu'on

26 demande aux interprètes de le faire, mais c'est quand même l'esprit de ce

27 qui a été dit. Si vous vous en souvenez, d'ailleurs on en a parlé

28 longuement.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En B/C/S y a-t-il le mot

2 "aléatoire" ?

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous essayons de retrouver à l'écran

5 ce qui a été dit.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] On a passé un long moment là-dessus.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donnez-nous la ligne exacte du

8 compte rendu, s'il vous plaît.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est la ligne 12, à la

10 page 964.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. WHITING : [interprétation] Voici ce qu'a dit le général Nicolai ailleurs

13 à la page 9 --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

15 M. WHITING : [interprétation] Il parle de tirs aléatoires sur le territoire

16 serbe. C'est ce qu'a dit le général Nicolai dans le compte rendu. Cela

17 c'est à la page 997 et 998 du compte rendu.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation]

20 M. WHITING : [interprétation] C'est en bas de la page 997. On lui demande :

21 "N'est-il pas vrai …" ensuite, vous avez une réponse qui se poursuit à la

22 page 998.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vois bien. Il est écrit,

24 dans le bas il y a une question posée par Me Tapuskovic : "N'est-il pas

25 vrai que les soldats de l'ABiH tiraient ces obus de façon aléatoire

26 uniquement pour qu'il y ait riposte de l'armée de Republika Srpska; n'est-

27 ce pas vrai ?"

28 Réponse : Oui. Oui, c'est l'essence même de la déclaration que j'ai

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1 faite à l'époque."

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous permettons la question.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Général, le général Nicolai était votre chef d'état-major, et vous

5 dites que le général Nicolai ne vous aurait pas rapporté ce type de propos.

6 Or, ce sont quand même des propos très importants pour les mesures à

7 prendre. Mais vous continuez à nous dire qu'il ne vous en a absolument pas

8 parlé.

9 R. Je ne me souviens absolument pas avoir entendu de sa bouche ce que vous

10 venez de dire, ce dont il a déposé ici. En tout cas, il ne l'a pas dit en

11 ces termes, je ne m'en souviens absolument pas.

12 Q. Très bien. Je comprends. Si nous passons à la page 986,

13 mai 1995, et là, Monsieur Nicolai dit à propos des bombardements de l'OTAN,

14 lignes 17 à 22 :

15 "A la mi-mai, une série de conflits ont eu lieu. Certains ont été

16 causés par les Serbes de Bosnie et d'autres par l'ABiH. Dans certains cas,

17 dans le cimetière juif, à l'initiative de l'ABiH. Lorsque nous en avons

18 parlé --"

19 Ma question est : Qu'à l'époque vous avez préconisé un bombardement

20 immédiat de certaines positions serbes, alors que la provocation venait du

21 côté de l'ABiH ?

22 R. C'est ce que dit le général Nicolai ou c'est vous qui l'affirmez ?

23 Q. Je n'affirme rien. Je cite le général Nicolai devant cette Chambre. Ce

24 qu'il a observé et affirmé, et je vous demande, je vous pose la question

25 suivante : vous étiez favorable aux bombardements des positions VRS, et

26 pourtant, vous avez abandonné l'idée car l'incident avait été provoqué par

27 l'ABiH.

28 R. Vous faites référence à l'incident où un nombre de personnes ont été

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1 tuées à l'entrée Butmir du tunnel sous l'aéroport, est-ce l'incident que

2 vous faites référence ?

3 Q. Non. Le cimetière juif, dans une partie complètement différente de la

4 ville, alors que le tunnel se trouve dans la zone Dobrinja.

5 R. Je ne me souviens pas de l'incident précis auquel vous faites

6 référence. Si mon chef d'état-major le général Nicolai s'en souvient, s'il

7 se souvient de la décision que j'ai prise et qu'il l'a affirmée de la

8 sorte, et bien, il a probablement raison.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question est : pendant votre

10 séjour à Sarajevo, avez-vous à un moment ou un autre préconisé le

11 bombardement immédiatement de positions serbes après avoir établi que la

12 provocation venait de l'ABiH ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'essaie de retrouver l'endroit dans ma propre

14 déposition. Il y a eu un cas début mai, paragraphe 54. A ce moment-là a eu

15 lieu l'attaque où un grand nombre de personnes ont été tuées à l'entrée

16 Butmir du tunnel et je me souviens avoir appelé à une frappe aérienne.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Paragraphe 54 de ma déclaration.M. LE JUGE

19 ROBINSON : [aucune interprétation]

20 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

22 LE TÉMOIN : [interprétation] "Un tir de mortier a tué

23 11 personnes à l'entrée Butmir du tunnel le 7 mai," donc, mortier serbe --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le conseil ne fait pas référence à

25 cet incident et ce n'est pas l'incident auquel j'ai fait référence dans ma

26 question. Ce que je vous ai demandé c'est : est-ce qu'à un moment ou un

27 autre pendant votre séjour vous avez préconisé.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'essaie de vous dire, c'est que voilà

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1 un exemple où je n'ai pas appelé à des frappes, car j'ai considéré qu'il

2 s'agissait là de combats entre les deux parties, qu'il ne fallait pas

3 s'impliquer. Mais pendant la soirée, la situation a changé, et là, des

4 zones civiles ont été bombardées de façon répétée. Là, ma position a

5 changé. Alors --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais m'exprimer plus simplement.

7 Bien que vous venez d'y répondre en disant qu'il y avait des combats entre

8 les deux parties, je souhaite vous demander précisément si, lorsque vous

9 avez pu isoler des cas où la provocation venait au départ de l'ABiH. Est-ce

10 que vous avez préconisé et auquel les forces serbes ont répondu.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] L'utilisation du terme "provocation," --

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je biffe le terme "provocation". Je

13 vais formuler ma question différemment. Pouvez-vous trouver des incidents,

14 vous souvenez-vous d'incidents lorsque la provocation venait tout d'abord

15 de l'ABiH et qui auraient provoqué une réponse de la partie serbe ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, j'ai des incidents qui me viennent

17 en mémoire. Si j'avais des documents, je pourrais vous trouver des

18 incidents précis.

19 Une guerre avait lieu. Nous étions au milieu des combats. C'est pour

20 cela que le terme "provocation," et bien, la provocation était utilisée des

21 deux côtés pour justifier les actions. C'était une justification a

22 posteriori.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous pouvez

24 poursuivre.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

26 Q. Monsieur Smith, je vais vous poser des questions sur le tunnel.

27 Toutefois, le cimetière juif se trouve dans une autre partie de la ville et

28 cette situation a mené aux bombardements des positions serbes et non pas

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1 celles de l'ABiH. Pourtant, c'est elle qui avait causé cette situation.

2 Pourtant vous avez décidé de prendre des mesures contre la partie serbe et

3 pourtant vous avez décidé de revenir sur votre déclaration une fois qu'on

4 vous a informé que c'était la partie BiH qui en était responsable, e

5 pourtant elle méritait punition.

6 R. Je n'étais pas là pour punir qui que ce soit. Deuxièmement, je ne me

7 souviens absolument pas de l'incident en question.

8 Q. Eu égard au tunnel au paragraphe 54 de votre déclaration et j'aimerais

9 vous rappeler la page 982 du compte rendu de la déclaration de M. Nicolai,

10 lignes 2 à 5, page 982, je répète. Voilà ce qu'il dit à propos du tunnel

11 comme cible militaire.

12 "M. Nicolai confirme qu'où que soient les points d'entrée ou de sortie du

13 tunnel, si des troupes étaient en mouvement à l'intérieur du tunnel cela

14 pouvait devenir une cible militaire."

15 Etes-vous d'accord sur le fait que des troupes entraient ou sortaient du

16 tunnel, le tunnel pouvait devenir une cible militaire ?

17 R. Ce sont les troupes qui sont les cibles militaires et non pas le

18 tunnel. Le fait qu'ils se trouvent à l'entrée fait de cet emplacement une

19 cible. C'est parce que les troupes se trouvent là. Ce sont les troupes les

20 cibles militaires, et non pas le trou, le tunnel.

21 Q. C'était ma question. Je ne l'ai peut-être pas formulée correctement.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la distinction que vous

23 essayez d'établir ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez dit un trou dans le sol --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

26 LE TÉMOIN : [interprétation] La cible militaire - la signification de la

27 cible militaire, c'est la force militaire plutôt que son emplacement, là où

28 elle se trouve. La force militaire utilise peut-être l'emplacement à son

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1 avantage, par exemple, une tour ou une colline, ce qui devient à son tour

2 une cible militaire. Mais c'est parce qu'il y a présence de troupes que cet

3 emplacement devient cible militaire.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'accord.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

6 Q. C'est précisément la raison pour laquelle je vous ai lu la déclaration

7 de M. Nicolai. Les troupes se déplaçant et entrant ou sortant du tunnel

8 étaient la cible, vous venez de le confirmer.

9 Pouvez-vous nous le dire sans hocher de la tête.

10 R. Oui, je confirme.

11 Q. J'aimerais maintenant vous poser une question sur le paragraphe 54. Il

12 est dit : "Qu'un mortier serbe a tué 11 personnes à l'entrée Butmir du

13 tunnel. Certains d'entre eux étant en uniforme, portant un uniforme."

14 Comment savez-vous que toutes les personnes n'étaient pas en uniforme ?

15 R. Je ne me souviens pas comment j'avais cette information. Peut-être que

16 nous avions des hommes là-bas. Peut-être que les Bosniens m'ont fait

17 rapport, m'ont fait état que de certaines portant uniforme.

18 Q. La FORPRONU n'avait pas d'observateurs à cet emplacement. Le seul

19 rapport que vous ayez pu recevoir ne pouvait provenir que par de

20 représentants de l'ABiH ?

21 R. Effectivement, nous n'avions personne, aucun de nos hommes n'était sur

22 place. Mais nous aurions pu conduire un membre de la FORPRONU après

23 l'incident.

24 Q. Ce qui m'intéresse, Monsieur Smith, c'est que vous étiez très clair

25 dans votre demande de frappe aérienne immédiate contre le Corps Sarajevo-

26 Romanija, bien que vous ayez dit vous-même, comme l'a dit M. Nicolai, que

27 la cible était légitime, et pourtant, vous avez demandé un bombardement

28 immédiat des forces serbes.

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1 Pourtant, toutefois, après évaluation, votre demande a été retirée --

2 en fait, elle a été refusée par le QG à Zagreb; est-ce correct ?

3 R. Non, ce n'est pas correct. Ce n'est pas ce que j'ai dit dans ma

4 déclaration. J'ai décidé de ne pas demander une frappe aérienne, ensuite le

5 pilonnage de Sarajevo s'est poursuivi pendant la nuit, certains mortiers

6 tombant sur les zones civiles. C'est à ce moment-là que j'ai demandé des

7 frappes aériennes, qui ont été refusées, je le reconnais.

8 Q. Monsieur Smith, dans la dernière phrase, vous dites que le quartier

9 général des Nations Unies à Zagreb a refusé.

10 R. [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, lisez à partir

12 du milieu du paragraphe 54. Il est dit : "Pendant cette journée-là, la

13 pression en faveur des frappes aériennes a augmenté, mais il a été décidé

14 de ne pas faire cette demande. Toutefois, pendant la nuit du 7 au 8 mai, le

15 pilonnage de Sarajevo s'est poursuivi, et certains mortiers tombant dans

16 les zones civiles. C'est à ce moment-là qu'une frappe aérienne a été

17 demandée, ce qui a été refusé par le quartier général des Nations Unies à

18 Zagreb."

19 Ce qui correspond à ce que vient d'expliquer le témoin.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Quoi qu'il en soit, à l'époque où le

21 pilonnage a eu lieu et certains des mortiers ont atterri à Sarajevo, on

22 pourrait peut-être demander au témoin qu'il confirme que ces mortiers

23 étaient tirés que d'un côté ou qu'il y avait un échange de feu, et pourtant

24 il a demandé les frappes, qui ont été refusées après vérification. Ainsi le

25 QG à Zagreb a refusé sa demande.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Posons la question au témoin.

27 Pouvez-vous confirmer que le pilonnage provenait que d'un côté, ou y avait-

28 il un échange de tir ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas si échange de feu il y

2 avait. Je suis relativement sûr que certaines zones civiles de Sarajevo

3 étaient pilonnées, et c'est pour cette raison que j'ai demandé les frappes

4 aériennes.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pilonnage provenant de quel côté ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Du côté serbe.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi votre demande de frappe

8 aérienne a-t-elle été refusée par le QG à Zagreb ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'ai compris à l'époque, les

10 événements n'ont pas contredit mon évaluation, c'était sur la base de

11 raison politique plutôt que militaire et étaient liés au fait que le

12 Conseil de sécurité ne souhaitait pas poursuivre dans ce sens.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais vous référer à une autre partie

15 de la déclaration de M. Nicolai, pages 996 et 997, lignes 21 à 25 et lignes

16 1 à 25, je vous cite maintenant : "La FORPRONU partait de l'hypothèse que

17 les points des Nations Unies étaient visés de façon délibérée avec l'espoir

18 que les Serbes réagissent et touchent des personnes des Nations Unies."

19 Q. Avez-vous eu connaissance de tels événements lorsque des tirs étaient

20 visés des points des Nations Unies ou proche des points des Nations Unies,

21 des postes de contrôle, afin de provoquer les Serbes à réagir, et que les

22 Serbes prennent la responsabilité ?

23 R. [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'interprète demande que le conseil

25 de la Défense éteigne son micro lorsque le témoin parle car la cabine B/C/S

26 n'a pas pu interpréter.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Musulmans bosniens tiraient de positions

28 très proches de celles des Nations Unies avec l'espoir de provoquer un

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1 contre-feu de la part des Serbes de Bosnie qui toucherait des positions des

2 Nations Unies.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Voilà ce que dit également M. Nicolai. Il ne s'agit pas uniquement

5 d'incidents isolés. Ce sont des choses qui avaient lieu régulièrement, le

6 feu venait de positions proches de celles des Nations Unies. En novembre

7 1996, il a dit que des Musulmans bosniens tiraient de positions proches du

8 bâtiment des Nations Unies utilisant des mortiers mobiles de petit calibre.

9 M. Nicolai a également confirmé ce qu'il avait dit plus tôt, à savoir que

10 très souvent ces positions étaient proches de positions des Nations Unies,

11 tel que le bâtiment des PTT, le QG des Nations Unies, la patinoire et la

12 caserne du maréchal Tito.

13 Est-ce que vous pouvez confirmer ce qu'a dit M. Nicolai ?

14 R. Oui, j'avais cette information à l'époque. Je savais que des tirs

15 provenaient de positions proches de celles des Nations Unies et ce qui

16 provoquait des tirs en retour.

17 Par contre, on ne m'a jamais montré la preuve qu'il s'agissait là

18 d'acte délibéré pour provoquer une attaque sur les forces des Nations

19 Unies. Je crois que le soupçon auquel fait référence

20 M. Nicolai - et ceci était vrai pour les deux parties - nous, les Nations

21 Unies, étaient utilisées comme bouclier pour leurs actions.

22 Q. Monsieur Smith, ce dont nous parlons ici, c'est ce qu'a vu M. Nicolai,

23 des tirs de feu à partir d'objets mobiles tels que des camions, lorsque des

24 mortiers étaient tirés, et l'objet était ensuite immédiatement déplacé,

25 ceci afin de provoquer une réaction du côté des Serbes. En étiez-vous

26 conscient ?

27 R. Je sais que certains des incidents ont eu lieu. Je ne sais pas que

28 l'objectif était de provoquer une attaque sur les Nations Unies.

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1 Q. Ainsi, vous n'êtes pas d'accord avec l'affirmation de

2 M. Nicolai; est-ce exact ?

3 R. Non. Je suis d'accord sur le fait que certains de ces incidents ont eu

4 lieu, et je crois que vous avez utilisé le mot "supposition." Nous ne

5 supposions pas que ce n'était pas le cas, mais nous n'avions pas de preuve

6 concrète pour corroborer cette affirmation.

7 Q. Le général Nicolai l'a affirmé de façon très claire. Ce n'était pas une

8 supposition. C'était ce qu'il affirmait.

9 M. WHITING : [interprétation] J'ai deux objections. Dans le témoignage de

10 M. Nicolai, il parle d'une hypothèse, et je crois qu'on en a parlé -- on a

11 posé la question qu'à trois ou quatre fois, et le général a répondu.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'effectivement le témoin

13 a répondu. Donc, nous pouvons maintenant décider de ce que nous tirons du

14 témoignage de M. Nicolai.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

16 Q. Autre chose importante pour conclure sur cette question.

17 Le général Nicolai estimait qu'un seul tir n'était pas suffisant pour

18 neutraliser ce type de position, il fallait plusieurs tirs, et il y avait

19 plusieurs positions de ce type de par la ville. Donc, ma question c'est :

20 comment neutraliser ce type d'objet ?

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez entendu la question,

22 Monsieur le Témoin ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez reformuler votre question,

25 Maître Tapuskovic, pour qu'on l'a comprenne mieux.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

27 Q. Si vous avez un mortier mobile qui tire un seul projectile, puis se

28 déplace, est-ce qu'on peut neutraliser une telle arme à l'aide d'un seul

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1 projectile ou est-ce qu'il en faudrait plusieurs lorsqu'on a affaire à ce

2 genre d'armes ?

3 R. En règle générale, la pratique veut qu'on tire des obus de mortier en

4 particulier, mais c'est vrai aussi des pièces d'artillerie, qu'on tire

5 plusieurs mortiers à la fois. Ici, en l'occurrence, s'agissant des combats

6 qu'il y a eu autour de Sarajevo, l'ABiH avait peu d'armes lourdes, n'en

7 avait peut-être même pas, en tout cas, de ce type d'armes lourdes. Cette

8 armée avait quelques mortiers dont elle s'est servie. Comme j'ai pu

9 l'observer, c'étaient des obus à tube unique. Ils ne s'en sont pas servis,

10 c'est-à-dire qu'ils n'ont pas eu des sections de batteries de plusieurs

11 mortiers. C'est parce qu'il y avait pénurie ou peu d'armes, peu de

12 munitions. Ce n'est pas nécessairement parce qu'ils voulaient au départ les

13 utiliser de cette façon-là.

14 On pourrait dire dans une certaine mesure que c'était vrai aussi des Serbes

15 de Bosnie. Oui, effectivement. Donc, les Serbes avaient un peu la même

16 situation, mais ils avaient plusieurs armes et ils s'en servaient d'une

17 façon plus conventionnelle. Donc, s'il y avait un tir, il y avait riposte

18 par batteries plutôt que par tir isolé.

19 Q. Au paragraphe 6, Général, vous parlez des rapports que vous aviez avec

20 M. Izetbegovic, aujourd'hui décédé, qui était président. Dans la dernière

21 phrase, vous dites ceci : "Je pense que nos relations se sont développées

22 et ont fini par se caractériser par un respect, une compréhension mutuelle.

23 Il était toujours à ma disposition."

24 Est-ce exact ?

25 R. Oui.

26 Q. Je pense à la période au cours de laquelle vous avez été commandant.

27 Saviez-vous que le tunnel utilisé pour le déplacement des troupes était

28 également utilisé, comme il le dit dans son livre et pendant la période où

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1 vous étiez présent, était aussi utilisé pour transporter des centaines de

2 milliers de tonnes d'armements à Sarajevo ? Est-ce que vous étiez au

3 courant de cela ?

4 R. Je ne peux pas garantir la quantité que vous indiquez, mais je savais

5 qu'il y avait des armes et aussi es effectifs qui étaient transportés ou

6 acheminés en passant par ce tunnel.

7 Q. Savez-vous qu'au moment des faits repris dans l'acte d'accusation, et

8 plus exactement ici nous parlons des derniers mois de 1994 et la totalité

9 de l'année 1995, est-ce que vous saviez que l'ABiH était mieux équipée en

10 matériel notamment que la VRS, même d'après ce qu'ont dit certains de vos

11 officiers ?

12 R. Ce n'est pas comme cela que je voyais les choses à l'époque.

13 Q. Est-ce qu'Alija Izetbegovic avait coutume de vous parler du fait que de

14 20 à 30 avions, au cours de l'offensive du mois de juin, étaient arrivés

15 chargés d'armes destinées à l'ABiH, et que ces avions venaient d'un pays

16 islamique ?

17 R. Non, il ne m'en a pas parlé.

18 Q. Est-ce que vous saviez que le 27 août 1995, un jour précisément avant

19 l'incident de Markale 2, Alija Izetbegovic s'était rendu à Paris ?

20 R. Je ne m'en souviens pas du tout.

21 Q. Ce qui veut dire que vous ne saviez pas du tout que le commandant de

22 l'ABiH avait quitté Sarajevo le 28. Vos services n'étaient pas du tout au

23 courant; ou plutôt le 27. Vous ne saviez pas qu'il avait quitté Sarajevo.

24 Vous n'avez pas été averti du fait que le commandant avait quitté les

25 positions qu'avait son armée ?

26 R. Non. Il n'avait d'ailleurs aucune raison de le faire. Il n'était pas

27 censé transmettre ce genre d'information.

28 Q. Nous y reviendrons un peu plus tard.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avant que vous n'abordiez un autre

2 sujet, j'aurais voulu que le général nous dise ce qu'il pensait des forces

3 numériques des deux armées, forces relatives aussi au niveau de l'armement.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme moi, j'ai vu la chose à l'époque ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] L'ABiH était numériquement plus forte que

7 l'armée des Serbes de Bosnie. Elle avait plus d'effectifs, elle se

8 réarmait; elle était en train d'obtenir de nouvelles armes.

9 Les Serbes de Bosnie en grande partie avait l'équipement, le matériel

10 de l'ancienne armée. Dans une certaine mesure, jamais je n'ai pu déterminer

11 quelle mesure précise ceci avait été possible à cette armée, mais elle

12 pouvait compter sur l'assistance de l'armée de Serbie surtout pour ce qui

13 est d'approvisionnement logistique, du soutien matériel.

14 L'armée des Serbes de Bosnie était mieux organisée. Elle avait un corps

15 d'officiers plus professionnels quant à l'ABiH, elle avait du mal, elle

16 essayait de créer ce centre vital qui lui permettrait d'être plus efficace.

17 Je pense que c'est là leur rapport de force. Est-ce que ceci vous

18 semble correct ?

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais je pensais surtout aux armes.

20 Avez-vous une idée quelle était l'armée la plus forte et en quoi elle était

21 plus forte ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce stade-là, rappelez-vous que Sarajevo est

23 assiégée et le rapport de force en matière d'armes lourdes. Quand je pense

24 à armes lourdes, cela part du mortier

25 80-millimètres et cela va plus haut. A ce moment-là, on peut dire que

26 pratiquement c'étaient les Serbes de Bosnie qui avaient l'avantage.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

28 Poursuivez, Maître Tapuskovic.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

2 Q. -- composition de ce corps d'officier, le colonel Relic et d'autres,

3 c'est vrai aussi beaucoup de membres qui étaient d'anciens membres de la

4 JNA. On pourrait dire qu'il en avait plus de ces officiers du côté des

5 Musulmans de Bosnie que des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

6 R. C'était peut-être vrai, j'ai parlé de ce "système nerveux" de ce centre

7 vital, comme l'interprète l'a qualifié, effectivement c'est cela qui est

8 plus important que les personnes individuelles pour que le système

9 fonctionne bien. Pour ce qui est des structures de corps d'armée, du

10 système de transmission, effectivement, il fallait des personnes bien

11 formées, aptes pour que cela marche et c'étaient surtout les Serbes qui

12 avaient l'avantage dans une moindre mesure, les Musulmans de Bosnie.

13 Q. En ce qui concerne Sarajevo, saviez-vous que les combattants du Corps

14 de Sarajevo-Romanija étaient sans exception des personnes qui vivaient

15 depuis des centaines d'années dans des lieux qui étaient tout près des

16 positions qu'ils occupaient. C'étaient des gens ordinaires qui étaient

17 devenus des soldats à cause de la situation.

18 R. Cela ne me surprend pas, parce que si vous regardiez l'armée de l'ex-

19 Yougoslavie, elle avait pour base la Défense territoriale. C'est comme cela

20 qu'elle avait été constituée. Ce que vous venez dire ne me surprend pas.

21 Q. Savez-vous qu'à l'époque outre les sanctions imposées par la communauté

22 internationale sur l'armée de Republika Srpska, la VRS, il y avait aussi

23 des sanctions qui avaient été imposées par la RFY à l'égard des Serbes de

24 Bosnie. Sur la Drina, pour empêcher notamment le déplacement d'armes.

25 R. Je ne le savais pas.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai pas pu beaucoup avancer et je suis

27 en train d'examiner le compte rendu d'audience.

28 Q. Vous avez aussi des contacts avec Haris Silajdzic, qui était

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1 représentant du gouvernement de Bosnie, au paragraphe 8. Vous dites avoir

2 rencontré cet homme, c'étaient les réunions les plus nombreuses à la veille

3 des premières frappes aériennes de l'OTAN en mai. Haris Silajdzic a

4 constamment exigé de vous que vous preniez des mesures pour ce que soit

5 levé l'embargo qui pesait sur l'ABiH et pour que soient commencés les

6 bombardements de l'OTAN sur les positions serbes ? Est-ce que vous avez

7 utilisé les occasions qui se présentaient à vous pour insister là-dessus ?

8 R. Non, je ne m'en souviens pas.

9 Q. Peu de temps après vos réunions, effectivement, il y a eu les premières

10 frappes de l'OTAN sur les positions serbes, est-ce que cela n'a été une

11 coïncidence ou est-ce qu'il y a un lien ?

12 R. Non. Je ne rencontrais pas Silajdzic pour discuter des bombardements de

13 l'OTAN. Un peu plus loin dans ce paragraphe, je vous expliquais la raison

14 de mes rencontres avec lui. C'est parce qu'il fait partie de l'opposition

15 et ceci me permet de mieux comprendre ce qui se passe dans le monde de la

16 politique en Bosnie.

17 Q. Au paragraphe 12, vous parlez du général Mustafa Hajrulahovic, surnommé

18 Talijan. Vous dites de lui que c'était un officier supérieur de l'armée de

19 Bosnie, au paragraphe 12 ?

20 R. C'est comme cela que j'ai compris les choses à l'époque.

21 Q. Il y a un document que je tiens en main, ou plutôt dans ce document que

22 je tiens des archives de l'ABiH, se trouve une information concernant le 5

23 août 1994. Est-ce que vous vous souvenez de ce qui s'est passé ce jour-là ?

24 Est-ce que vous êtes intervenu suite à cet incident ? Il s'agissait d'une

25 frappe aérienne le

26 5 août 1994 et l'auteur de ce rapport nous le dit.

27 En 1994. Je sais que vous n'étiez pas présent à ce moment-là, mais est-ce

28 que vous avez empêché ou enrayé une action particulière puisque vous étiez

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1 commandant des forces de l'OTAN pour l'Europe méridionale ?

2 R. Je ne sais, non, je ne sais pas de quoi vous parlez, vous parlez du

3 mois d'août 1994, je ne vois pas.

4 Q. Est-ce que je peux vous lire ce passage.

5 Voici ce qui est dit dans ce rapport --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que vous lisez ?

7 M. WHITING : [interprétation] Peut-on montrer le document au témoin ainsi

8 qu'à l'Accusation.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

10 Q. Je n'ai pas de traduction. Il s'agit du général Mustafa Hajrulahovic

11 qui relate un événement survenu le 5 août. Un bombardement aérien qui a été

12 empêché - document 65 ter, numéro 01958. Nous l'avons reçu du bureau du

13 Procureur. Cela faisait partie de la liasse de documents visés par le 65

14 ter. Je répète le numéro 01958.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez un exemplaire, Maître

16 Tapuskovic, à l'intention de la Chambre ?

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] A moins que ce ne soit autre chose.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Normalement vous devriez avoir des

19 exemplaires pour la partie adverse et pour la Chambre.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, j'en ai. Mais je me suis trompé dans

21 la référence. Cela concernait M. Layton Smith, pas

22 M. Rupert Smith. Je vais donc me servir de ce document lorsque nous aurons

23 la déposition du général Rose. Je m'excuse. Ici ce n'est pas Rupert mais

24 Layton Smith. Je me suis trompé dans le prénom.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre

26 car j'ai une question d'intendance à évoquer.

27 Monsieur Whiting, des dispositions avaient été prises hier en vertu

28 desquelles M. Hadzic allait terminer sa déposition à 13 heures. Est-ce

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1 qu'il allait être présent de 13 heures à 13 heures 45 ?

2 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, il se peut que je me

3 trompe, cela arrive, mais j'avais cru comprendre que le témoin serait ici,

4 disponible à 13 heures au cas où le général Smith aurait terminé sa

5 déposition. L'autre témoin, M. Hadzic, pourrait terminer demain.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas compris. J'avais compris

7 qu'en raison de son état de santé vous vouliez qu'il termine sa déposition

8 aujourd'hui.

9 M. WHITING : [interprétation] Je vais m'enquérir par courrier électronique

10 en l'espace de cinq minutes, ne serait-ce ce qu'il en est et je vous ferai

11 part de la situation. Parce que c'est comme cela que j'avais compris les

12 choses, mais je me trompe peut-être parce que je n'ai pas participé à la

13 prise de décisions.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez encore le temps de poser

15 une question, Maître Tapuskovic, avant la pause.

16 M. WHITING : [interprétation] Je viens de recevoir un e-mail parce qu'on

17 nous regarde. Je confirme ce que j'avais dit. Le témoin peut terminer

18 aujourd'hui. Evidemment si le général Smith pouvait terminer sa déposition

19 aujourd'hui, ce serait parfait.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il serait content aussi.

21 Poursuivez, Maître Tapuskovic.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je dois passer à un nouveau sujet à propos

23 des paragraphes 16 et 21. Au paragraphe 16, il est question de Radovan

24 Karadzic et les réunions qu'il avait avec le général Rupert Smith.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Puisque vous voulez aborder un

26 nouveau sujet, autant faire la pause maintenant.

27 Nous reprendrons dans 20 minutes. A la reprise de l'audience, j'aimerais

28 aborder quelques questions administratives avant que le témoin n'entre dans

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1 le prétoire. Cela durera cinq minutes.

2 L'audience est suspendue.

3 --- L'audience est suspendue à 12 heures 21.

4 [Le témoin quitte la barre]

5 --- L'audience est reprise à 12 heures 43.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, vous étiez censé

7 me faire rapport des efforts entrepris pour obtenir la comparution du

8 capitaine Hansen.

9 M. WHITING : [interprétation] Oui. Il est en mesure de venir.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le 2 avril.

11 M. WHITING : [interprétation] Oui. Après la fin de l'audience, je prévoyais

12 de vous préparer un mémo contenant tous les détails.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien.

14 M. WHITING : [interprétation] Mais la réponse est affirmative.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Qu'en est-il de l'observateur

16 militaire inconnu.

17 M. WHITING : [interprétation] Pas de nouvelles. Je pense qu'il faudra non

18 pas des jours mais des semaines pour identifier cette personne. Nous avons

19 un nom le concernant; mais pour obtenir un complément d'information, il

20 faudra plutôt des semaines pour les obtenir. Je vous l'ai dit, il est

21 originaire du Kenya. Je vais peut-être même essayer aujourd'hui d'organiser

22 une réunion avec l'ambassade du Kenya pour voir s'il est possible

23 d'accélérer la procédure.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais oui, ils devraient quand même

25 connaître son identité, c'était un soldat après tout.

26 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Vous savez, si

27 j'avais un euro pour tous les "devrait", je serais riche. L'expérience que

28 nous avons acquise dans le passé, c'est qu'il est quelquefois ardu, très

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1 ardu d'obtenir ce genre d'information. Je ferai l'impossible, et je l'ai

2 dit dans ce mémo, si tous nos efforts échouent s'agissant des observateurs

3 militaires, nous demanderons votre aide, Messieurs les Juges.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Faisons entrer le témoin

5 le plus vite possible.

6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître

8 Tapuskovic.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

10 Q. Au paragraphe 21, aux paragraphes 16 et 21 de votre déclaration, vous

11 relatez les réunions et les relations que vous avez avec Radovan Karadzic

12 ainsi qu'avec le général Ratko Mladic.

13 J'aimerais tout d'abord traiter du document verser au dossier par

14 l'Accusation, P336. Pourriez-vous attentivement examiner la première page

15 de ce document.

16 M. WHITING : [interprétation] Il faut lui donner le numéro 65 ter.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] 65 ter 00089, qui est devenu la pièce à

19 charge P336.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quel document s'agit-il, Monsieur

21 Whiting ?

22 M. WHITING : [interprétation] C'est le document qui se trouve sur le

23 deuxième onglet, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

26 Q. Monsieur Smith, vous avez examiné ces documents qui portent la

27 signature du Dr Radovan Karadzic, commandant en chef; est-ce exact ?

28 R. Attendez que je le trouve. Oui.

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1 Q. Radovan Karadzic occupait le poste le plus élevé au sein de l'armée de

2 la Republika Srpska, puisqu'il était président de la république, il était

3 commandant en chef de la VRS, n'est-ce pas ?

4 R. Oui. C'est comme cela que je le comprenais.

5 Q. Une des rubriques que l'on a ici dans ce document, page 1, premier

6 point. Je lis : "Caractéristiques principales de la situation militaire et

7 politique internationale."

8 Est-ce bien ce qui est écrit ici ?

9 R. Oui.

10 Q. Dans ce document où que ce soit, avez-vous trouvé une référence en

11 rapport avec une annonce faite, un ordre de pilonner Sarajevo ou de lancer

12 sur Sarajevo des tirs de tireurs embusqués ?

13 R. Non, je ne pense pas que ce soit le cas, mais je vais vérifier.

14 Q. Il faudra peut-être une demi-heure ?

15 R. Non, non. Je peux examiner la partie qui concerne le Corps de Sarajevo.

16 Q. Je vais vous aider. Je vais vous le montrer.

17 R. Page 11 ?

18 Q. Oui.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous savez, la numérotation n'est

20 pas la même dans les deux langues.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

22 Q. En B/C/S, c'est la page 9, et on parle de façon tout à fait express du

23 Corps de Sarajevo-Romanija.

24 Dans ce passage, trouve-t-on la moindre référence aux tirs embusqués, aux

25 pilonnages dirigés sur Sarajevo ?

26 R. Non.

27 Q. Si vous regardez ce texte de très près, est-ce qu'on peut considérer

28 que ceci représente des directives générales permettant le fonctionnement

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1 de la VRS dans le but de réaliser certains objectifs militaires ?

2 R. Oui, la plupart des directives. C'est ce qui est dit dans la lettre qui

3 accompagne ceci. C'est ce que dit le général Milanovic dans cette lettre

4 qui accompagne la directive.

5 Q. Je vais vous demander de regarder le début du document, page 3 en

6 B/C/S. C'est peut-être la page 4 en anglais. Il est question à cet endroit-

7 là des forces armées musulmanes.

8 R. Oui, c'est bien la page 4.

9 Q. Regardez la dernière phrase. Aux deux dernières phrases du premier

10 paragraphe, on y parle surtout de déclencher des contre-offensives si on

11 avait recours à l'OTAN.

12 R. Oui, effectivement, on parle de l'utilisation de l'OTAN.

13 Q. Etes-vous en mesure de confirmer que ce document porte bien la date du

14 8 mars 1995, à peine un mois après votre arrivée ?

15 R. Oui, effectivement. C'est la date du 8 mars, un peu plus d'un mois

16 après mon arrivée, mais c'est à peu près juste.

17 Q. Revenons, si vous le voulez bien, à la page précédente, là où il est

18 question des forces armées musulmanes. Vous dites au troisième paragraphe,

19 il est dit que "L'ABiH est constituée de six corps d'armée, 112 brigades et

20 45 bataillons indépendants, environ 270 000 hommes, 120 chars, 80 véhicules

21 blindés transporteurs de troupes, 340 pièces d'artillerie, 90 lance-

22 roquettes multiples, 230 lance-missiles légers, 1 800 mortiers, 450 canons

23 antiaériens, 700 mitrailleuses antiaériennes, 200 missiles antiaériens, des

24 stinger, 370 roquettes antiblindées, 16 hélicoptères de transport et

25 17 aéronefs sportifs ou agricoles."

26 Au cours de votre mission en Bosnie-Herzégovine, lorsque vous avez survolé

27 cette position, est-ce que vous avez pu déterminer tout du moins qu'il y

28 avait autant d'hommes que ceux qui sont mentionnés ici, à l'intérieur, mais

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1 aussi à l'extérieur de Sarajevo ? Est-ce que vous avez constaté la présence

2 de toutes ces armes énumérées ici ?

3 R. Je n'ai vu aucune trace, aucun élément de preuve à l'appui de ce qui

4 est dit ici, ne serait-ce qu'une portion infime de ces armes qui sont

5 mentionnées, parce que si c'est vraiment le cas, s'ils avaient autant

6 d'armes que ce qui est dit ici, elles étaient bien dissimulées.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que ceci vous ferait changer

8 la réponse que vous avez donnée à ma question s'agissant du rapport de

9 force relatif ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai aucun souvenir de ce genre de

11 concentration d'armes que j'aurais vu au cours de mes périples dans la

12 région qui auraient été en possession de l'ABiH, pas seulement à Sarajevo,

13 mais dans toute la Bosnie-Herzégovine. Il y avait à Sarajevo même très peu

14 d'armes lourdes.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre micro n'est pas branchée,

16 Maître Tapuskovic.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Mais vous avez bien dit il y a un instant qu'il était possible que vous

19 n'ayez pas eu vraiment une connaissance parfaite de toute la situation, si

20 ces armes étaient bien dissimulées surtout dans l'environnement naturel ?

21 R. Je préfère une distinction entre la situation à l'intérieur de Sarajevo

22 et la situation générale qui prévalait en Bosnie même. Je suis certain de

23 ce que je dis. Ce genre d'armes et surtout le nombre qui est indiqué ici,

24 ce genre d'armes n'était pas disponible à l'intérieur de Sarajevo. Si ces

25 armes existaient à l'extérieur de la ville, moi, mon commandant, nous ne

26 les avons pas vues.

27 Q. Il faut encore que je vous pose une question. Cet armement lourd, est-

28 ce qu'il n'aurait pas été beaucoup plus facile de le camoufler, surtout à

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1 l'intérieur de Sarajevo ? Est-ce que vous avez des informations à ce

2 propos ? Est-ce que vous n'excluez pas qu'il y ait aussi ces armes bien

3 camouflées à l'intérieur de la ville ?

4 R. Tout est toujours possible. Il est possible que certaines armes s'y

5 soient trouvées et aient été camouflées, mais je peux vous dire qu'il n'y

6 en avait pas autant que ces nombres mentionnés ici. D'après mes souvenirs,

7 il y avait deux ou trois chars qui se trouvaient au point de contrôle des

8 armes sous mon contrôle. Je ne pense pas qu'il y ait eu une seule pièce

9 d'artillerie, le moindre lance-roquettes à l'intérieur de Sarajevo. S'il y

10 avait des pièces d'artillerie, il n'y en avait qu'une ou deux. C'est tout.

11 Q. Saviez-vous qu'au cours de l'offensive qui a eu lieu à la mi-juin qui,

12 selon vous, n'aurait duré que deux, trois jours, la plupart des armes qui

13 sont énumérées dans ce document ont été utilisées sur les lignes de front

14 qui séparaient les forces serbes des forces musulmanes. Etiez-vous au

15 courant de cela ?

16 R. Je me souviens bien. Elles n'étaient pas utilisées, parce que cette

17 quantité d'armes n'a jamais été utilisée lors de cette attaque.

18 Q. Etant donné que vous avez passé un certain temps à Sarajevo et que vous

19 avez très certainement survolé la ville à bord d'un hélicoptère ou d'un

20 autre aéronef, pouvez-vous, en regardant la carte qui est derrière vous,

21 nous dire quoi que ce soit à propos de la ligne de démarcation ? Vous êtes

22 un militaire, vous devez vous y retrouver.

23 R. Oui, en effet. Je reconnais la région. J'espère que vous m'entendez.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre micro, s'il vous plaît, Maître

25 Tapuskovic.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

27 Q. Pourriez-vous expliquer à la Chambre ce que signifie la ligne rouge et

28 la ligne bleue, enfin ce que vous en savez ?

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1 R. La ligne bleue, si je me souviens bien, représente la ligne de défense

2 avant de l'ABiH, et en rouge c'est la ligne de défense avant des Serbes de

3 Bosnie. Pour ce qui est de la marque jaune, c'est l'aéroport. Sarajevo, je

4 crois, est représentée par un IK. Elle se trouve au centre de la petite

5 enclave que l'on voit entourée de rouge. Igman, qui est une élévation, se

6 trouve au sud-ouest de la carte.

7 Q. Vous nous avez parlé de ceci et vous nous avez dit qu'il était de

8 notoriété publique que le tunnel était utilisé pour quitter Sarajevo.

9 Savez-vous que l'ABiH avait utilisé ce tunnel pour prendre des positions en

10 dehors de Sarajevo et pour équiper les positions qui étaient marquées en

11 bleu ?

12 R. Je savais que les militaires empruntaient le tunnel. Quant à savoir

13 dans quelle direction les gens se déplaçaient, cela je n'étais pas

14 forcément au courant, à moins que je l'aie appris d'une façon ou d'une

15 autre, tout du moins que quelqu'un l'ait appris d'une façon ou d'une autre.

16 Q. Vous savez que l'offensive de juin a compris toute la ligne de

17 démarcation. Saviez-vous que sur toutes ces positions bleues ainsi qu'à

18 l'intérieur même de Sarajevo, des attaques ont eu lieu, des attaques qui

19 impliquaient plusieurs corps de l'ABiH qui étaient équipés d'armes

20 lourdes ?

21 R. Oui, je sais qu'il y avait des attaques. Enfin, je sais que ces

22 attaques ont eu lieu. Bien sûr. Mais l'attaque que j'ai observée, puisque

23 j'étais là précisément, est celle qui a été déclenchée depuis l'extérieur

24 de Sarajevo.

25 Q. Je n'ai pas bien compris votre réponse. Vous observiez le conflit le

26 long de ces lignes extérieures ou vous l'observiez depuis l'intérieur de

27 Sarajevo ?

28 R. Je me trouvais à l'intérieur de Sarajevo.

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1 Q. Très bien. Merci. Ce document, ce P336, était un document qui

2 intéressait principalement le commandant de la VRS, c'est-à-dire le général

3 Mladic puisque c'est lui qui était en première ligne ici ?

4 R. Oui, pour ce qui est de cette directive, en effet, il s'agit de son

5 chef d'état-major qui passe toutes ses informations et ses ordres aux

6 commandants des corps sous son autorité.

7 Q. Oui, oui, certes. Mais cette directive aurait dû surtout être mise en

8 œuvre par le général Mladic. C'était sa responsabilité.

9 R. Oui, certes. C'est le même QG qui rédige le document. C'est son QG qui

10 a rédigé le document.

11 Q. Dans ce cas-là, le document suivant que j'aimerais vous soumettre, le

12 document 02267 ter sur la liste 65 ter, admis sous la cote P337. Voyez-vous

13 ce document ?

14 R. Oui.

15 Q. C'est une décision exécutée par le général Mladic en se basant sur une

16 des directives reçues de son commandant suprême, donc M. Karadzic ?

17 R. Oui.

18 Q. Passons à la page suivante. Pouvez-vous dire s'il y a des références au

19 moindre ordre qui aurait été donné et qui demanderait que l'on pilonne

20 Sarajevo, que l'on procède à des tirs embusqués, et ce, dans la période

21 après le 31 mars ? En est-il été mention dans ce document ?

22 R. Je vérifie. Ici, on voit qu'il y a des instructions bien précises qui

23 sont données. Je cherche le conseil.

24 Q. Pourriez-vous regarder les missions de l'armée de la Republika Srpska

25 au rang 2, page 2. Il est écrit principalement qu'il convient de procéder à

26 la défense du territoire de la Republika Srpska; c'est bien cela ?

27 R. Oui. Mais j'essaie de trouver quelles sont les instructions données au

28 Corps de Sarajevo-Romanija. Je ne retrouve pas le passage.

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1 M. WHITING : [interprétation] Si je peux vous aider, il s'agit de la page

2 6, c'est au 5.5.

3 R. Oui. Très bien. Tout ce qu'il dit, le seul ordre qui est donné, c'est

4 de planifier, d'exécuter les missions qui ont déjà été données dans la

5 directive numéro 7 qu'il a déjà reçue.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Peut-on dire que le général Mladic a donné des ordres à tous les corps

8 d'armée, y compris le Corps de Sarajevo-Romanija; donc, le général Dragomir

9 Milosevic, des ordres, bien sûr, qui étaient dans l'esprit même de la

10 décision qui avait été prise par Karadzic.

11 R. Oui. C'est exactement ce qui est appliqué ici.

12 Q. Monsieur Smith, passons maintenant au paragraphe 21 de votre

13 déclaration, où vous nous parlez de vos rencontres avec le général Ratko

14 Mladic. Je ne vais pas vous lire le passage entier. Si nécessaire et si les

15 Juges le désire, je le ferai.

16 A peu près au début du paragraphe vous dites ce qui suit et je cite :

17 "Mladic est tout d'abord soldat, ensuite politique."

18 Qu'est-ce que vous voulez dire par cela ?

19 R. Je vous ai déjà répondu, je crois. J'ai déjà une réponse à ce propos. A

20 ce niveau très élevé de la hiérarchie, tout ce que l'on fait est politique.

21 Ce que j'essayais de faire comprendre, c'est quand même, il se ressentait,

22 il se percevait lui-même comme étant un soldat avant tout.

23 Q. "Donc, il ne visait pas à obtenir le moindre bénéfice politique. Il ne

24 voulait pas tirer un profit politique de ce qu'il faisait." C'est bien

25 cela ?

26 R. [aucune interprétation]

27 Q. Oui.

28 R. Non, ce n'est pas ce que je voulais dire. Puisqu'il avait quand même

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1 des visées politiques. Quand il se demandait ce qu'il fallait faire, ce

2 qu'il convenait de faire, pour lui, sa première responsabilité, c'était une

3 responsabilité de militaire, et non pas de responsabilité d'homme

4 politique. Donc, il se voyait d'abord comme un militaire.

5 Q. Vous pouvez peut-être ne pas être d'accord avec moi, mais vous dites

6 ici --

7 L'INTERPRÈTE : Demande à ce que le Conseil précise exactement le passage

8 qu'il lit.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, il faut

10 absolument que vous fassiez savoir aux interprètes le passage que vous êtes

11 en train de lire.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis au paragraphe 21, vers la fin de

13 ce paragraphe, où il est écrit, je cite : "Il était brave, résolu. Il

14 gardait toujours la tête froide en toutes situations. Je pense que ce qui

15 le motivait, avant tout et uniquement, était la défense des Serbes de

16 Bosnie, et que tout le reste était subordonné à l'accomplissement de cet

17 objectif."

18 C'est ce que vous avez dit, ce que vous avez écrit, Monsieur Smith. C'est

19 donc votre évaluation et votre opinion de Mladic en vous basant sans doute

20 sur ces rencontres avec lui.

21 R. Oui. Je suis encore de cet avis.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pouvons-nous maintenant regarder le

23 document 65 ter 00042, qui a reçu la cote P342.

24 Q. Il s'agit d'une conversation téléphonique entre vous-même et Mladic,

25 qui a eu lieu le 28 mai 1995.

26 Au paragraphe 1, vous dites qu'il a exigé l'arrêt immédiat de tous les vols

27 de la firme de transport de l'OTAN. Cela avait été fait auparavant ?

28 R. Oui, il a exigé surtout l'arrêt de tous les combats de l'OTAN et

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1 l'arrêt de ce fait aussi des vols de transport. C'est à cela que vous

2 faites référence ?

3 Q. Oui.

4 R. Oui, c'est ce qu'il exigeait.

5 Q. Je voudrais attirer votre attention sur la fin de cette conversation,

6 donc le paragraphe 12 de ce document, je cite :

7 "Le général Smith a dit qu'il ne commandait pas les forces de l'OTAN

8 et qu'il ne dirigeait pas non plus leurs actions. Mladic a répondu en

9 disant qu'il ne savait que c'était un mensonge étant donné que l'OTAN ne

10 pouvait agir sans son consentement et sa demande, surtout. Le général Smith

11 a acquiescé. Il était l'une des personnes responsables de la préconisation

12 d'une attaque, mais il ne commandait, en effet, pas les forces de l'OTAN."

13 C'est bien ce que vous avez dit lors de cette conversation téléphonique.

14 Vous avez bel et bien dit que vous n'étiez pas la personne qui commandait

15 les forces de l'OTAN ?

16 R. Oui.

17 Q. Qui commandait puisque vous commandiez la FORPRONU ? Quand vous preniez

18 des décisions, qui était au commandement, notamment lorsqu'on parle des

19 premières étapes de frappes aériennes après Markale ?

20 R. Le commandement des forces de l'OTAN se situait entre les mains des

21 commandants de l'OTAN. Un était l'amiral Leighton Smith qui se trouvait à

22 Naples. Je me trouvais moi-même dans la chaîne de commandement des Nations

23 Unies. L'amiral Leighton Smith se trouvait, lui, auprès du conseil de

24 l'Atlantique Nord à Bruxelles.

25 Q. Le 28 août 1995 --

26 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Voilà, mes arguments pour la Défense

28 partent en fumée.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment l'organisation ou la

2 structure du commandement de l'OTAN, quelle est la pertinence de la

3 structure du commandement de l'OTAN ?

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis arrivé.

5 Q. Le 28 août 1995 au soir, vous avez demandé que les avions de l'OTAN

6 soient prêts pour une attaque sur les positions serbes. C'était le même

7 jour que l'incident Markale 2. C'est ce que vous indiquez dans votre

8 déclaration. Je peux vous indiquer l'endroit précis, j'y venais. Le 28

9 août, vous avez pris cette décision.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois toujours pas la

12 pertinence qu'il y ait eu cet ordre donné aux avions de l'OTAN et que

13 l'incident Markale 2 ait eu lieu le même jour. Est-ce que vous avancez que

14 les frappes aériennes de l'OTAN étaient responsables de l'incident

15 Markale ?

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non. Le 28, on ne savait pas encore que

17 l'incident aurait lieu. Nous pouvons revenir au rapport et aucune

18 conclusion définitive ne pouvait être tirée de l'incident Markale 2 et

19 pourtant un ordre a été donné de mener des attaques de l'OTAN par avion.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Affirmez-vous que les attaques de

21 l'OTAN ont montré que la question de la responsabilité de Markale 2 était

22 déjà décidée.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui. Le général Smith avait déjà tiré les

24 conclusions et j'en ai la preuve.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est le lien avec la

26 responsabilité de l'accusé, même si l'OTAN avait pris la décision avant de

27 connaître le résultat de l'enquête ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le général Dragomir Milosevic n'est pas

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1 responsable du massacre survenu le 28 au marché aux puces. Je le prouverai

2 à la Chambre. C'est bien là mon intention. Il n'empêche que cet incident a

3 été utilisé pour déclencher des bombardements massifs qui ont duré des

4 journées entières sur les positions militaires serbes et qui ont fait

5 beaucoup de victimes civiles. Nous estimons que toutes les activités

6 déployées auparavant, avant cette date, ne reposaient sur ce qu'avaient

7 fait les forces serbes ou sur ce qui s'était passé à Markale; que c'était

8 plutôt le fait de l'ABiH.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le lien semblait être tenu, mais je

10 vous laisse poursuivre.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mon équipe me rappelle que j'ai dit que

13 l'OTAN avait pris partie pour l'ABiH et s'était rangée à ses côtés et on me

14 dit que cette partie-là manque dans le compte rendu. Je vais donc la

15 répéter.

16 Q. Paragraphe 24, vous y parlez du fait que les Croates avançaient dans la

17 partie méridionale de la Bosnie-Herzégovine. Dernière phrase de ce

18 paragraphe, vous dites que : "Les Bosniens s'étaient aussi servis de la

19 piste de Tuzla pour des vols de nuit. Ce qui a provoqué certaines frictions

20 entre l'OTAN et les Nations Unies." Vous avez dès lors autorisé des sorties

21 de l'ABiH; est-ce exact ?

22 R. Non.

23 Q. Une dernière phrase, mais aussi ce paragraphe dit que: "D'après ce que

24 nous avons observé et en raison de griefs venant du général Mladic, nous

25 savions qu'il y avait des avions légers qui utilisaient cette piste, cet

26 aérodrome."

27 Vous savez que c'était l'OTAN qui était responsable de veiller à ce que la

28 zone d'exclusion aérienne soit respectée. Apparemment, on nous dit que ces

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1 vols n'avaient pas lieu. Or nous, nous les voyions. C'est là l'origine de

2 la friction dont il est question ici. Nous, nous n'avons pas autorisé ces

3 vols.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous

6 vouliez préciser que vous aviez dit que l'OTAN était de connivence avec

7 l'ABiH ?

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai dit "aussitôt," mais les membres de

9 mon équipe disent que ce n'est pas répercuté au compte rendu d'audience.

10 C'est ce que je voulais évoquer dans mon contre-interrogatoire.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peu importe. Maintenant je comprends

12 mieux la thèse que vous défendez. Je comprends mieux maintenant pourquoi

13 vous estimez que les attaques de l'OTAN sont pertinentes surtout si celles-

14 ci interviennent avant qu'on ait établi la responsabilité. Ce que je veux

15 dire c'est que je comprends la thèse que vous défendez. Quant à savoir si

16 ceci est étayé par des éléments de preuve, c'est une autre paire de

17 manches, mais je vois maintenant la pertinence que ceci peut avoir puisque

18 vous invoquez une collusion entre l'OTAN et l'ABiH.

19 Poursuivez.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, cela aussi, je voulais le dire.

21 Q. Revenons au paragraphe 24. Là vous dites expressément que les Bosniens

22 avaient également utilisé la piste de Tuzla pour effectuer des vols de

23 nuit. Vous saviez précisément que les Bosniens avaient utilisé cette piste

24 à Tuzla pour des vols de nuit. Est-ce que vous le niez ?

25 R. Non, je ne le nie pas.

26 Q. Merci. Vous savez qu'ils avaient un autre aérodrome à Visiko et qu'ils

27 avaient utilisé cette piste-là aussi à des fins militaires ?

28 R. Je l'ai découvert bien plus tard, plus exactement, me semble-t-il, en

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1 septembre cette année-là.

2 Q. Vous l'avez découvert. Je ne l'avais pas entendu, je ne vous avais pas

3 entendu. Dans la phrase précédente, vous avez dit que l'armée de Bosnie

4 effectuait des préparatifs visibles pour lancer une attaque au printemps. A

5 ce moment-là, vous étiez déjà au courant de ces préparatifs ?

6 R. Je n'en avais pas les détails, mais je savais qu'il s'effectuait

7 effectivement des préparatifs.

8 Q. Au paragraphe 27, vous parlez d'une réunion que vous avez eu avec le

9 général Mladic, et vous dites ceci : "Il est devenu apparent que les Serbes

10 de Bosnie avaient décidé que la guerre était inévitable." Est-ce bien le

11 cas ?

12 R. Oui.

13 Q. La question que je vous pose est celle-ci : ils savaient qu'elle était

14 inévitable cette guerre parce que l'ABiH avait, de façon ininterrompue,

15 lancé des préparatifs en vue d'une offensive. Donc, ils se préparaient à

16 une riposte. Est-ce qu'on peut qualifier cette situation de cette façon-

17 là ?

18 R. Oui.

19 Q. Au paragraphe 29, lorsque Mladic s'est plaint auprès de vous des

20 sanctions imposées aux Serbes de Bosnie. Est-ce qu'il ne demandait pas en

21 réalité que la FORPRONU fasse preuve d'équité envers les deux camps de

22 façon à ce que les Serbes aussi reçoivent des vivres et d'autres

23 approvisionnements. Est-ce que ce n'était pas là la substance de sa

24 demande ? Est-ce qu'il ne demandait pas que la FORPRONU change de stratégie

25 pour ne pas simplement aider les Bosniens pour qu'aussi une partie de

26 l'aide humanitaire soit acheminée à destination des Serbes, comme vous le

27 dites d'ailleurs plus loin au paragraphe 30.

28 R. Non. Au premier paragraphe, il demande la suppression des sanctions qui

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1 ne concernaient pas l'aide humanitaire, elles concernaient toutes

2 l'approvisionnement en armes, notamment. Au paragraphe suivant, il est

3 question de l'aide humanitaire qui ne tombait sur le coup des sanctions,

4 elle était fournie cette aide à ceux qui en avaient le besoin, ceux qui

5 étaient dans le besoin se trouvaient dans l'enclave. Il s'agit de deux

6 questions tout à fait distinctes.

7 Q. Les Serbes ont à ces positions de Sarajevo et dans les enclaves comme

8 l'on voit sur la carte qui s'est effondrée.

9 R. Oui, il existait un programme d'aide importante pour les aider tout au

10 moins dans les enclaves.

11 Q. Paragraphe 38, vous mentionnez un avion qui a été touché par les Serbes

12 de Bosnie. Je n'ai vu aucun élément de preuve expliquant que ce tir

13 provenant des Serbes de Bosnie. Pour moi, la provenance était de Dobrinja

14 aux mains des Musulmans de Bosnie. Qu'est-ce qui vous fait penser que la

15 provenance était des Serbes de Bosnie ?

16 R. Je n'ai aucun élément pour étayer cela.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous précisez néanmoins que des

18 enquêtes postérieures ont fait la preuve qu'effectivement les tirs

19 provenaient de mitrailleuses serbes de Bosnie.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, mais je ne peux pas vous le

21 prouver maintenant. Je ne crois pas que c'était une question polémique à

22 l'époque. Mladic était d'accord sur le fait lorsque je lui ai porté ce

23 grief. Il a reconnu que c'était ses hommes qui avaient tiré.

24 Q. Quelle était la raison pour ces tirs, pour les tirs sur l'avion ?

25 R. Je ne suis pas sûr que nous ayons bien compris. Je crois que c'était un

26 des petits avions utilisés par Akashi et j'imagine que c'était pour lui

27 faire peur, mais ici c'est une thèse et je ne peux pas le prouver.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une convention des Nations Unies

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1 porte sur la protection du personnel des Nations Unies et cette attaque

2 aurait constitué une violation de cette convention.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Vous avez dit au Juge Robinson que vous confirmiez l'origine des

5 tirs, mais vous dites que vous n'en aviez pas la preuve. Pour la première

6 fois, vous dites que Mladic l'a reconnu, à qui l'a-t-il dit et où ?

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, ce n'est pas la première

8 fois qu'il dit cela, il a dit pendant l'interrogatoire principal.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] A propos de l'avion ?

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non. Le fait que Mladic a

11 reconnu que le tir provenait des forces serbes de Bosnie.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] A qui l'a-t-il admis ? Vous savez que de

13 reconnaître quelque chose ne constitue pas un élément de preuve.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettez-moi d'expliquer à nouveau.

15 Permettez au témoin d'expliquer à nouveau où cette concession ou accord a

16 été établi.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Après l'événement, si ce n'était pas à moi

18 directement. Un membre de l'équipe d'Akashi s'est plaint de cet événement.

19 Pour ce que je m'en souviens, Mladic a reconnu que les Serbes de Bosnie

20 étaient responsables des tirs sur l'avion.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

22 Q. Pour ce que j'en sais, Mladic ne parlerait pas à n'importe qui. D'après

23 les documents, je vois qu'il s'agit de personnes de bonne réputation et de

24 hauts représentants de la FORPRONU. Je n'imagine pas M. Mladic admettant

25 cela à un membre inférieur. A qui l'a-t-il dit, à vous, à M. Nicolai.

26 R. Tout de suite après l'événement, la plainte a été faite et après tout,

27 il s'agissait de M. Akashi, de ses collaborateurs et moi-même qui se

28 trouvaient dans l'avion. Nous nous trouvions dans l'avion lorsqu'il a été

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1 touché.

2 Q. Je ne vous posais pas cette question, je ne remets pas en cause cela.

3 M. Mladic faisait très attention à ce qu'il disait, à qui il parlait. A qui

4 a-t-il reconnu, admis cela de façon à ce que nous puissions constater

5 judiciairement cela ?

6 R. Je ne m'en souviens pas.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'essaie de sauter un certain nombre de

8 choses.

9 Q. Paragraphe 60.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

11 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai noté l'heure et

12 je me demande s'il serait possible de terminer avec ce témoin aujourd'hui.

13 J'ai raccourci mon interrogatoire principal. Je n'ai pas abordé la moitié

14 des documents que je souhaitais soumettre, et j'estime que le contre-

15 interrogatoire a porté sur beaucoup d'éléments qui ne sont pas directement

16 liés à l'acte d'accusation.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'est pas à vous d'en juger,

18 Monsieur Whiting. Nous sommes ceux qui menons cette Chambre, et --

19 M. WHITING : [interprétation] J'aimerais faire une proposition. Evidemment

20 qu'il est du ressort de M. le Juge d'en décider, qui --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous pourrons poursuivre

22 éventuellement pour dix ou 15 minutes supplémentaires, mais il y a un

23 procès qui se tient dans ce prétoire cet après-midi.

24 Monsieur Tapuskovic, de combien de temps avez-vous besoin ?

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai sauté au moins

26 20 ou 30 paragraphes.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'avez pas besoin de poser une

28 question sur chacun des paragraphes.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je le sais, mais quasiment chacun de ces

2 paragraphes est important. Je sélectionne les plus importants. On m'a dit

3 que j'aurais trois heures pour mon contre-interrogatoire. Croyez-moi, c'est

4 le temps minimum dont j'ai besoin pour passer en revue toutes les questions

5 qui m'intéressent.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre va conférer à ce

7 sujet.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons quelques difficultés en

10 termes de logistique. La Défense a utilisé un peu moins de deux heures.

11 Nous lui avons alloué trois heures. Sachant que nous avons affecté cinq

12 heures à ce témoin, nous pourrions siéger plus longuement, mais le prétoire

13 n'est pas disponible. Il semblerait que dans l'intérêt de l'administration

14 de la justice, nous pourrions soit reconvoquer le témoin demain, soit à un

15 autre moment si demain ne convient pas au témoin.

16 Monsieur le Témoin, êtes-vous disponible demain ou souhaitez-vous

17 revenir à un autre moment ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois me rendre à Bruxelles ce soir

19 pour signer un document. Il faudrait que je passe deux ou trois coups de

20 téléphone pour savoir si je peux y aller et revenir.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je prends le train très souvent. Je

22 peux vous donner les horaires des trains.

23 L'INTERPRÈTE : Peut-on demander au témoin de parler dans le micro.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Vendredi, la Chambre ne siège pas. Il me faut

25 passer deux ou trois coups de fil pour voir s'il est possible -- il faut

26 que j'aille livrer un document. Il faut que j'aille signer une déclaration

27 et la remettre en main propre et revenir ici.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous allez vous débrouiller et voir

Page 3387

1 ce que vous pouvez faire. Vous informerez le substitut du Procureur, nous

2 reprendrons demain matin, soit avec vous, soit avec M. Hadzic, car nous

3 devons donner suffisamment de temps à la Défense pour conclure.

4 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends. Je

5 remarque que le prétoire numéro III est libre à partir de 3 heures 30 cet

6 après-midi.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous nous sommes renseignés, aucun

8 prétoire n'est libre cet après-midi.

9 Le prétoire numéro I est disponible à 15 heures 30, car l'affaire se

10 termine à 15 heures 30, mais aura-t-elle terminé ?

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il ne faut pas oublier qu'il nous faut

12 physiquement pouvoir tout cela. Attendre une heure et demie, je le ferai si

13 on me l'ordonne, mais il serait beaucoup plus pratique que M. Smith

14 revienne un autre jour. Evidemment, si on me l'ordonne, je suivrai les

15 instructions.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si nous pouvons nous retrouver à 15

17 heures 30, nous le ferons. Vous êtes un jeune homme, et vous pouvez le

18 faire.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai 70 ans.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est jeune.

21 M. WHITING : [interprétation] Puisque l'audience se termine à 15 heures 30,

22 je crois que nous ne pourrions reprendre qu'à

23 16 heures.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'audience démarre à

25 9 heures et se termine à 15 heures 30. J'imagine qu'ils auront terminé à 15

26 heures 30, puisqu'ils auront démarré à 9 heures. Est-ce qu'il serait

27 possible pour vous, Monsieur Smith, d'être présent entre 16 heures 30 -- 16

28 heures pardon, et 18 heures ? Cela vous permettrait de vous rendre à

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1 Bruxelles.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela me conviendrait tout à fait.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. A ce moment-là, nous

4 suspendons la séance et nous reprendrons au prétoire numéro I à 4 heures.

5 --- L'audience est suspendue à 13 heures 48.

6 --- L'audience est reprise à 16 heures 01.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général Smith vous êtes tenu par la

8 déclaration officielle que vous avez faite au début de votre déposition.

9 Maître Tapuskovic, vous avez la parole.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, merci.

11 Q. Général Smith, tout d'abord j'ai quelques questions à vous poser à

12 propos de votre réunion avec Karadzic le 5 avril 1995. Ceci est le document

13 65 ter 009 qui a reçu la cote de l'Accusation P339.

14 R. Malheureusement, je n'ai plus le dossier sous les yeux. J'ai trouvé le

15 document.

16 Q. Il s'agit de votre réunion, réunion que vous avez eu avec

17 Karadzic le 5 avril 1995, au point 2 -- les points que vous avez évoqués et

18 j'aimerais que vous nous parliez du point 3 qui, je cite : "Le général

19 Smith a parlé de ses préoccupations importantes à propos des actions

20 récemment attribuées à l'armée des Serbes de Bosnie; il s'agit

21 principalement d'un nombre de plus en plus grand d'attaques sur les zones

22 protégées et de violations des zones d'exclusion totales."

23 Vous en souvenez-vous ?

24 R. Je me souviens de la réunion.

25 Q. Plus loin, vous dites que généralement ces actions avaient contribué à

26 l'augmentation des tensions, est-ce vrai ?

27 R. Oui.

28 Q. Puis, vous avez ajouté ce qui suit : vous seriez obligés en fin de

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1 compte de riposter en employant des frappes aériennes de l'OTAN et que ce

2 ne serait pas dans l'intérêt des Serbes de Bosnie. Vous avez répété le 5

3 avril que le côté serbe serait soumis à des bombardements de l'OTAN, s'ils

4 continuaient à se comporter de la façon que vous avez décrite dans votre

5 conversation avec M. Karadzic ?

6 R. Oui, en effet, s'ils continuaient à attaquer les zones protégées et à

7 enfreindre les zones d'exclusion, c'était le cas.

8 Q. Saviez-vous, d'après les déclarations de Karadzic, que ces zones

9 d'exclusion n'étaient pas souvent respectées, et que l'ABiH attaquait des

10 civils, surtout du côté de Srebrenica, et que c'était particulièrement Oric

11 qui se livrait à ce type d'attaques. Le saviez-vous ?

12 R. Dans la zone d'exclusion, il y avait exclusion de l'emploi d'armes

13 lourdes, mais il ne s'agissait pas de zones où aucune activité de combat ne

14 devait avoir lieu en tant que tel. Je savais que les forces de l'ABiH

15 opéraient à l'extérieur de ces zones protégées, par exemple, autour de

16 Srebrenica.

17 Q. Si les forces serbes ripostaient à ces attaques de l'ABiH, était-il

18 vraiment nécessaire de les menacer immédiatement de frappes aériennes de

19 l'OTAN, c'est qu'ils n'avaient pas d'autre option finalement pour protéger

20 la population civile, c'est ce que disait Karadzic, si j'ai bien compris ce

21 qui est écrit, c'est ce qui a été discuté lors de cette réunion ?

22 R. Je ne m'en souviens pas, et je ne pense pas que c'est ce qui est écrit

23 au paragraphe 3. En ce qui me concerne, la population civile était une

24 chose, mais les zones d'exclusion n'étaient pas respectées, les zones

25 protégées étaient attaquées, et la sanction et la menace que nous avions

26 étaient la possibilité de nous livrer à des frappes de l'OTAN, si tant est

27 que ce comportement se poursuive.

28 Q. Les frappes aériennes de l'OTAN n'étaient pas une option quand les

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1 zones d'exclusion n'étaient pas respectées et quand il y avait des attaques

2 sur les positions serbes et sur les civils serbes, là, l'OTAN n'était pas

3 censée riposter ?

4 R. Non, non, pas du tout. La zone d'exclusion indiquait qu'il fallait

5 qu'aucune arme lourde ne soit utilisée dans ces zones. Il y avait des zones

6 de collecte d'armes dans ces zones d'exclusion où l'on devait remettre

7 toutes les armes lourdes. C'est la définition d'une zone d'exclusion. Le

8 but d'une zone d'exclusion, c'est de limiter les types d'armes qui sont

9 employées plutôt que d'en faire une zone où il y a aucune attaque sur

10 civils. Cela, de toute façon, les conventions de Genève l'interdisent

11 formellement.

12 Q. Au paragraphe 4, où l'on parle là des zones protégées, je lis, je cite

13 : "Le général Smith a expliqué en tant que commandant des Nations Unies, il

14 devait s'assurer que les mandats à propos des zones protégées étaient bel

15 et bien respectés, et que de ce fait, si ces zones protégées étaient

16 attaquées, il convenait d'employer les forces aériennes de l'OTAN en

17 représailles."

18 C'est bien ce que vous dites ?

19 R. Oui.

20 Q. Ensuite, vous poursuivez en disant : "Karadzic a fait remarquer que,

21 selon lui, les zones protégées sont des points où l'ABiH est très forte. Il

22 a clairement dit qu'il considère que ces zones protégées, et le mandat des

23 zones protégées est tout à fait illégal."

24 C'est bien ce qui est dit ?

25 R. Oui, c'est ce que j'ai cru comprendre en tout cas. Je n'ai pas le verso

26 de cette page. Il s'agit du rapport du colonel Baxter, du rapport qu'il a

27 fait de cette réunion.

28 Q. Mais a-t-il dit à cette occasion aussi, ce jour-là, que selon lui,

Page 3391

1 l'accord sur les zones protégées et l'accord sur les zones d'exclusion

2 étaient violés par l'ABiH ? Il l'a dit, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, tout à fait. Karadzic l'a dit.

4 Q. Alors, pour qu'une zone soit une zone protégée, ne fallait-il pas que

5 cette zone soit totalement débarrassée de toutes troupes, armes, et cetera,

6 pour qu'elle soit vraiment une zone protégée ? C'est quand même l'essence

7 même de la résolution du Conseil de sécurité. C'était l'essence même de

8 concept de démilitarisation, qui permet ensuite l'établissement d'une zone

9 protégée ?

10 R. Non, je ne pense pas du tout que c'était l'essence même où l'esprit

11 même de la lettre de la résolution du Conseil de sécurité.

12 Q. Je ne vais pas rentrer dans une polémique avec vous, mais il me semble

13 que si quelque chose doit être considérée comme une zone protégée, il

14 conviendrait d'en enlever toutes les armes, afin que ce soit vraiment une

15 zone protégée, une zone sûre. Il faut aussi respecter cette zone protégée

16 pour ne pas lancer de combat depuis cet endroit ?

17 R. Certes, peut-être. Mais en tout cas, en pratique, ce n'était pas

18 exactement ce qu'étaient ces zones protégées. Je ne pense pas que la

19 résolution du Conseil de sécurité corresponde parfaitement à l'avant-

20 dernière phrase au paragraphe 4.

21 Q. Selon le général Nicolai, chaque jeune homme dans Sarajevo avait un

22 pistolet. Il y avait 50 à 60 000 hommes en armes à Sarajevo pendant toute

23 la période de l'acte d'accusation contre le général Milosevic. Le saviez-

24 vous ?

25 R. Non. Je ne pense d'ailleurs que ce soit le cas. Je ne suis pas d'accord

26 avec cette allégation selon laquelle tous les jeunes garçons avaient un

27 pistolet. Je ne suis pas non plus d'accord avec ce nombre de personnes

28 armées dans Sarajevo.

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1 Q. Très bien. Je ne vous parle que de la période de référence en l'espèce

2 et de la responsabilité du général Milosevic concernant les incidents qui

3 auraient eu lieu à Sarajevo et aux alentours. Mais vous nous dites que la

4 situation que j'ai décrite n'était pas correcte ?

5 R. Vous avez dit que le général Nicolai avait dit quelque chose, et je ne

6 suis pas d'accord avec ce que dit le général Nicolai.

7 Q. Merci. Au point 9 maintenant de ce même PV de réunion avec Karadzic :

8 "Contre-offensive des Serbes de Bosnie : Karadzic a du mal à dire quelle

9 était la décision qui avait été prise concernant la contre-offensive. Le

10 général Smith a essayé de savoir de Karadzic quelle était la forme que

11 prenait cette offensive."

12 Est-ce bien ce qui est arrivé ?

13 R. Oui, en effet. J'étais extrêmement intéressé, je voulais savoir ce qui

14 allait se passer, quelle allait être la réaction du côté serbe.

15 Q. Est-ce que Karadzic vous a répondu en disant : oui, il y aura une

16 contre-offensive, mais uniquement si nous sommes attaqués. Vous a-t-il dit

17 qu'il y aurait une contre-offensive que s'il y aurait contre-offensive ?

18 R. Il est écrit ici qu'il y aurait contre-offensive à l'endroit où ils

19 auraient été attaqués. Il y aura contre-offensive si nous sommes attaqués,

20 mais uniquement il y aura contre-offensive là où nous sommes attaqués; ce

21 qui est différent.

22 Q. Vous avez déjà dit ici que l'ABiH est en train de se préparer à

23 l'offensive et que cette offensive a été déclenchée le 15 juin 1995 en ce

24 qui concerne Sarajevo, en tout cas. Est-il vrai que cette offensive a bel

25 et bien été préparée et déclenchée ?

26 R. Oui.

27 Q. Le côté serbe a riposté à l'offensive; c'est bien cela ?

28 R. Oui.

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1 Q. Au paragraphe 59 de votre déclaration, vous dites que vous avez

2 rencontré le général Delic à Zenica le 24 mai; et vous avez dit que la

3 réunion avait été très utile pour savoir quelles étaient les opinions de

4 Delic sur la situation militaire et pour essayer de savoir quelles étaient

5 ses intentions en terme d'opérations militaire. C'est bien vrai ?

6 R. Oui.

7 Q. Le général Delic à l'époque vous a-t-il dit qu'ils étaient déjà en

8 train de préparer l'offensive, que rien ne sortirait d'un accord pacifique,

9 et qu'ils avaient déjà l'intention de s'en sortir militairement ?

10 R. Je ne me souviens pas exactement de tous les détails qu'il m'a donnés à

11 propos de la préparation et des préparatifs, et cela dit, j'avais déjà

12 observé ces préparatifs, comme je vous l'ai dit; pas tant pour ce qui est

13 de l'attaque à Sarajevo, mais le déclenchement de l'offensive en général,

14 et on l'avait déjà vu dès mars qu'il se préparait.

15 Je pense que vous avez posé deux questions et j'ai répondu à la

16 première et je ne me souviens plus de la deuxième.

17 Oui, voilà. Quant à savoir s'il s'attendait à quoi que ce soit avec un

18 accord pacifique, et cetera, ce n'est pas tant qu'il pensait que les

19 négociations n'aboutiraient à rien. C'est plutôt que lui, son métier,

20 c'était le côté militaire. Il n'était pas là pour les négociations. C'était

21 un militaire et il s'occupait de questions militaires.

22 Q. Merci. Au paragraphe 60 ensuite, vous parlez de la chose suivante, et

23 je cite : "A ce moment-là, Sarajevo était pilonné par les Serbes de Bosnie

24 de façon régulière et il y avait parfois jusqu'à trois missions par jour.

25 Les cibles principales étaient le centre-ville, le cimetière juif, le

26 bâtiment des PTT, et les casernes de l'ABiH qui est en face des casernes

27 Tito ainsi que la zone entre la résidence et la caserne des Nations Unies

28 au stade Zetra; c'est bien cela ?

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1 R. Oui.

2 Q. Mais vous rajoutez la chose suivante : "La provocation n'était pas

3 toujours évidente, mais il était clair que l'ABiH pilonnait les positions

4 serbes depuis la ville, et ce, de façon régulière."

5 C'est aussi vrai ?

6 R. Oui.

7 Q. Donc, si l'on veut parler de provocations, cela signifie que l'ABiH a

8 tiré en premier, et qu'ensuite les Serbes ripostaient, mais ripostaient

9 avec jusqu'à trois missions de pilonnage par jour ?

10 R. Je crois qu'il faut comprendre qu'il y a deux réponses à deux

11 questions. Ce n'est pas écrit ici que chaque incident surtout résulte d'une

12 provocation. Je pense que quand j'ai déclaré cela, pour répondre à la

13 question qui m'a été posée, je ne pense pas que je voulais dire que les

14 pilonnages des Serbes étaient toujours en riposte à une provocation des

15 Bosniens, ni d'ailleurs vice versa.

16 Q. Attention aux termes que vous expliquez et notamment "lorsqu'on parle

17 de pilonnage." Qu'entendez-vous par "pilonnage régulier ?"

18 R. Ce que je voulais dire - et à nouveau quand je l'ai dit - la fréquence

19 était telle qu'on s'attendait à ce qu'il y ait un pilonnage à l'époque.

20 Qu'il s'agisse d'une fois ou deux fois par jour, et j'imagine que c'est la

21 raison pour laquelle je précise à la phrase suivante que si on souhaite

22 avoir davantage de détails il faudra aller voir les comptes rendus

23 détaillés, à savoir les rapports de situations des Nations Unies.

24 Q. Au paragraphe 61 : "Le 24 mai, les combats ont repris à Sarajevo dans

25 la zone de Sarajevo." Est-ce que vous entendez par cela que les combats ont

26 repris des deux côtés ?

27 R. Oui.

28 Q. Qu'en est-il des victimes, victimes des bombardements sur Sarajevo du

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1 côté serbe de Bosnie, les soldats ou les civils ? Ou n'aviez-vous peut-être

2 pas d'information.

3 R. Oui, nous avions des informations. Je ne m'en souviens pas aujourd'hui

4 à l'instant, mais j'avais des informations disponibles à l'époque, et je

5 savais ce qui se passait des deux côtés.

6 Q. A la phrase suivante du paragraphe 61, vous dites que : "L'armée des

7 Serbes de Bosnie ont enlevé des armes des points de collecte d'armes et ils

8 ne les ont pas retournées."

9 Est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous poursuivez : "J'ai émis un ultimatum afin de rétablir la zone

12 d'exclusion."

13 Est-ce exact ?

14 R. Oui, pour rétablir la zone d'exclusion.

15 Q. Ensuite vous dites que : "Cela a été ignoré et qu'ensuite l'OTAN a

16 bombardé le dépôt de munitions de Pale."

17 Donc les Serbes ont retiré leurs armes de la zone d'exclusion et

18 immédiatement ils ont été bombardés par l'OTAN à Pale ?

19 R. Oui, parce qu'ils n'avaient pas remis leurs armes aux points de

20 collecte, alors que c'est ce qu'ils étaient censés faire.

21 Q. N'auriez-vous pas pu attendre pour voir ce qui allait se passer, car

22 lorsque les combats ont lieu, il est naturel que l'on souhaite se protéger

23 avec les armes.

24 R. Non, j'avais donné un ultimatum. Je ne pouvais pas attendre et les

25 Serbes de Bosnie n'ont pas répondu à mes instructions, et donc les

26 bombardements ont démarré.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'étaient les points de collecte

28 d'armes ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut revenir en arrière un an, début 1994.

2 Les zones d'exclusion aérienne de l'OTAN avaient été définies, et pourtant

3 des attaques dans les zones protégées se poursuivaient à l'aide d'armes

4 lourdes, donc différentes zones d'exclusion ont été déclarées autour des

5 zones protégées, et toutes armes lourdes devaient être retirées, retirées

6 de ces zones d'exclusion pour les mettre dans des points de collecte

7 d'armes et les forces des Nations Unies devaient suivre les armes dans ces

8 dépôts. Si les armes étaient retirées de ces points de collecte, à ce

9 moment-là l'OTAN réagirait par le biais de sanction.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Tapuskovic.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

12 Q. Une fois le 24 passé ou plutôt le 25, le lendemain à nouveau vous avez

13 pilonné les positions des Serbes de Bosnie à Pale, bien qu'un événement ait

14 eu lieu à Tuzla entre-temps. Toutefois, vous avez bombardé Pale. Pouvez-

15 vous expliquer cela ?

16 R. Oui. L'ultimatum n'avait pas été respecté, n'avait toujours pas été

17 respecté, et à nouveau à ma demande, l'OTAN a effectué des bombardements

18 pour une deuxième fois.

19 Q. Le même jour qu'a eu lieu l'événement à Tuzla; est-ce exact ?

20 R. Non. C'était le lendemain. Si je me souviens bien, le pilonnage de

21 toutes les zones protégées, pas uniquement Tuzla, ont eu lieu à la veille

22 ou le soir du 24.

23 Pardonnez-moi. J'ai oublié une journée. C'est le 25. C'est le 25 au soir

24 que Tuzla et les zones protégées ont été pilonnées, et le deuxième

25 bombardement de l'OTAN a eu lieu le 26, mais je me suis trompé d'un jour.

26 Pardonnez-moi.

27 Q. Il s'agissait d'un seul mortier; d'un seul obus, pardon ?

28 R. Vous voulez dire à Tuzla ? Oui. Un seul obus a été responsable de la

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1 tuerie, mais il y a eu plusieurs obus de tirés.

2 Q. Différentes allégations ont été faites selon lesquelles différents obus

3 avaient atteint Tuzla mais la provenance aurait été de plusieurs centaines

4 de kilomètres. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la portée ?

5 R. Distance de quoi ?

6 Q. Quelle était la distance d'où provenait le mortier, l'obus du mortier ?

7 R. Certainement pas 700 kilomètres.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai pas dit "700." J'ai dit "quelques

9 centaines" de kilomètres.

10 Q. Quel était le chiffre, d'après les informations que je détiens, la

11 distance était importante, la distance couverte par l'obus à partir de son

12 point de départ et son point d'arrivée ?

13 R. Je ne connais pas la distance à partir de laquelle cet obus a été tiré.

14 Q. Et pourtant, immédiatement vous avez ordonné les bombardements aériens

15 de l'OTAN, et Pale a été bombardée, y compris les parties résidentielles de

16 Pale ?

17 R. Tout d'abord, au cours de la deuxième frappe aérienne, il ne s'agissait

18 pas d'une riposte à l'attaque de Tuzla, même s'il s'agissait d'une attaque

19 sur une zone protégée. La deuxième frappe aérienne à Pale était une

20 continuation de l'engagement précédent fondé sur le non-respect de

21 l'ultimatum des points de collecte d'armes. Deuxièmement, nous n'avons pas

22 attaqué les parties résidentielles de Pale. Nous attaquions le dépôt de

23 munitions à l'extérieur de Pale.

24 Q. Nous y reviendrons. Nous reparlerons des bombardements de l'OTAN. Mais

25 passons au paragraphe 71 de votre déclaration, qui concerne l'offensive

26 lancée le 16 juin.

27 Vous voyez ici que vous avez déclaré que cette offensive a démarré ce jour-

28 là, et que l'ABiH a connu quelques succès au départ, mais qu'ensuite cette

Page 3399

1 armée a connu un revers avec un nombre important de victimes, notamment

2 parmi les soldats, particulièrement sur la ligne de front, à l'arrière, et

3 proche des lignes de séparation; est-ce correct ?

4 R. Pardonnez-moi. Donnez-moi un instant.

5 Je ne suis pas certain ce que vous entendez par "sur la ligne de

6 front, à l'arrière, proche de la ligne de séparation." Qu'est-ce que vous

7 voulez dire ? Ce n'est pas dit dans ma déclaration. Vous l'avez ajouté

8 vous-même. Je ne sais pas ce que vous voulez dire par cela.

9 Q. C'était ma question. Vous avez dit qu'après quelques succès au départ,

10 l'ABiH avait connu des revers et avait de nombreuses victimes. Alors, ces

11 victimes -- c'est ma question. Ces victimes se trouvaient-elles sur toutes

12 les lignes de front où se trouvaient les forces de l'ABiH ? Est-ce que ces

13 victimes étaient constituées essentiellement par des soldats ?

14 R. Les victimes effectivement se trouvaient parmi les forces attaquantes.

15 Q. J'ai un document ici, un document de la FORPRONU, un rapport rédigé par

16 David Harland daté 24 juin, un document 65 ter 2471, cote 2471, cote P16.

17 Peut-être pourrions-nous la voir ? Je crois qu'on le voit à l'écran

18 maintenant. Il est dit au paragraphe 3 : "Vendredi et samedi dernier,"

19 Harland faisait rapport à d'autres personnes. A la page 2, troisième

20 paragraphe. Il est dit : "Vendredi et samedi dernier (15 et 16 juin) les

21 troupes de l'ABiH ont attaqué les positions serbes tout au long de la ligne

22 de confrontation, attaquant à l'extérieur de la ville et dans la ville,

23 vers le sud, ouest et nord."

24 Etait-ce effectivement le cas ? Avez-vous déjà vu ce rapport ?

25 R. Non, je ne l'ai pas vu. Si je me souviens bien, Harland était dans le

26 secteur Sarajevo à l'époque, ses rapports en tant que tels n'aboutiraient

27 pas sur mon bureau en temps normal. Mais ce paragraphe 3 auquel vous faites

28 référence correspond à mon souvenir des événements.

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1 Q. C'est ce que je souhaitais entendre. Voyons le paragraphe suivant.

2 "Un jour ou deux après, les Bosniens ont arrêté leurs attaques du

3 fait des pertes lourdes dans leurs rangs. La FORPRONU n'a pas pu faire une

4 estimation précise de ses pertes, toutefois, comme les Bosniens ne donnent

5 plus accès aux hôpitaux à la FORPRONU."

6 Etes-vous d'accord avec le fait que la FORPRONU n'avait plus accès

7 aux hôpitaux afin d'établir qui étaient les victimes de ces combats ?

8 R. Je ne suis pas sûr pour ces affrontements. Je ne me souviens pas

9 de cette histoire de non accès aux hôpitaux.

10 Q. Cela se trouve dans le rapport de Harland, un rapport officiel.

11 J'imagine que Harland a décrit la situation telle qu'elle se présentait.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting.

13 M. WHITING : [interprétation] Je soulève une objection. Le témoin a dit ce

14 qu'il pensait du document, et maintenant nous entendons le conseil de la

15 Défense nous donner --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, poursuivons.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cette pièce a été versée au-dessus de

18 toute façon.

19 Passons à au paragraphe 99 : "Le reste du mois de juillet et la

20 première partie du mois d'août ont été dominés par l'offensive conjuguée de

21 la HV, de le HVO à Livno, Glamoc, Grahovo, et l'offensive HV en Krajina."

22 Etait-ce exact ?

23 R. Oui.

24 Q. Au paragraphe 100, vous dites : "J'ai rencontré le général Mladic le 31

25 juillet à Mrkonjic Grad." Est-ce exact ?

26 R. Oui.

27 Q. Passons au paragraphe 101. "Au cours de la première partie de la

28 réunion, le général Mladic a décrit la situation militaire et humanitaire

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1 en Bosnie occidentale, du fait des offensives de l'armée HV, HVO." Est-ce

2 exact ?

3 R. Oui.

4 Q. "Le général Mladic était de toute évidence très peu préoccupé par la

5 situation militaire et apparaissait fatigué et harcelé. Il m'a demandé de

6 faire passer un passage au Conseil de sécurité pour demander un arrêt

7 immédiat des attaques et le retrait des forces croates du territoire des

8 Serbes de Bosnie."

9 R. [aucune interprétation]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la pertinence de vos

11 questions, Maître Tapuskovic ?

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais il poursuit, Monsieur le Président,

13 en disant : "J'étais d'accord avec Mladic à propos de la situation. J'étais

14 aussi inquiet que lui quand il était clair que le combat allait s'étendre,

15 mais j'ai remarqué que l'offensive de la HV pourrait être justifiée au

16 titre de l'article 51 de la charte des Nations Unies."

17 C'est bien cela ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

20 Q. J'en arrive à ma question : l'armée croate qui venait d'un Etat et qui

21 était entré dans le territoire de Bosnie-Herzégovine en passant par des

22 territoires détenus depuis des siècles par les Serbes, et tout d'un coup

23 les tirs proviennent de tous les côtés, vous trouviez quand même que ce

24 qu'ils ont fait c'est dans l'esprit de l'article 51 de la charte, vous

25 considérez qu'il est parfaitement juste qu'un Etat enfreigne le territoire

26 d'un autre parce qu'ils avaient le droit de se défendre. C'est cela ?

27 R. J'ai dit que cela se pourrait. Là, je n'ai pas dit que c'était

28 vraiment. J'étais quand même assez prudent. Il faudrait peut-être que je

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1 revoie un petit peu la situation pour savoir ce que faisait exactement

2 chaque contingent, pour savoir exactement pourquoi j'ai dit cette phrase

3 dont vous venez parler, car je ne m'en souviens pas vraiment à l'heure

4 actuelle.

5 Q. Très bien. Pouvez-vous au moins confirmer que les Serbes étaient quand

6 même dans les territoires où ils habitaient depuis des siècles. Ils avaient

7 quand même le droit de se défendre au titre de cette charte des Nations

8 Unies. Alors si les Croates avaient le droit de défendre leur propre

9 territoire, les Serbes aussi avaient le droit de défendre leur propre terre

10 et leurs frères et leurs soeurs ?

11 R. Mais votre question porte sur les Serbes de Croatie qui se trouvaient

12 dans la Krajina; c'est cela ?

13 Q. Non. Ma question porte sur les Serbes qui habitaient aux alentours de

14 Sarajevo et dans Sarajevo, où il y avait ce conflit armé. Ils avaient quand

15 même le droit de se défendre eux-mêmes dans l'esprit de l'article 59 de la

16 charte des Nations Unies, puisqu'on avait autorisé à la Croatie à traverser

17 un territoire qui n'était pas le sien et pour se défendre, soi-disant ?

18 R. La réponse est que je ne sais pas, et je ne me souviens pas pourquoi

19 j'ai fait ressortir cet article 51 de la charte des Nations Unies. Il

20 fallait que je sache exactement ce qui se passait à l'époque en Bosnie-

21 Herzégovine occidentale, quelles étaient les attaques auxquelles je faisais

22 référence. Il fallait que je me souvienne de tout cela, pour pouvoir vous

23 répondre correctement.

24 Q. Monsieur Smith, je vais vous poser une question à propos de deux

25 incidents qui ont lieu en juin et juillet. Selon les documents que j'ai

26 apportés - et il s'agit du rapport de la FORPRONU - savez-vous que le 18

27 juin l'ancienne école a été atteinte, l'école élémentaire Simone Bolivar,

28 de son nom. Je sais pourtant bien qui est Simone Bolivar, bien sûr. Donc,

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1 cette école a été atteinte, il y a eu des victimes civiles.

2 R. Où se trouvait l'école, s'il vous plaît ?

3 Q. A Dobrinja.

4 R. Non, je ne me souviens pas du tout de cet incident.

5 Q. Vous vous souvenez qu'il était impossible de savoir qui avait tiré

6 l'obus, impossible de savoir si l'obus venait des Serbes ou venait des

7 Musulmans ? Est-ce que vous vous souvenez de cet incident, peut-être que

8 vous n'étiez tout simplement pas à Sarajevo à ce moment-là ?

9 R. Je pense que j'y étais puisque j'étais en juin, mais je ne me souviens

10 pas de cet incident.

11 Q. Un incident qui a été repris par toute les télévisions et toute la

12 presse. Ici, je parle de l'incident du 28 juin quand le bâtiment de la télé

13 a été atteint. Vous devez vous en souvenir ?

14 R. Là encore, je ne m'en souviens pas précisément. C'étaient les bâtiments

15 de la télévision à Sarajevo; c'est cela ?

16 Q. Oui.

17 R. Je ne m'en souviens pas.

18 M. LE JUGE MINDUA : Vous ne vous rappelez pas l'incident parce que le temps

19 est passé - il y a quand même une dizaine - ou parce qu'il y avait beaucoup

20 d'incidents de cette nature, je sais bien qu'il vous est difficile de vous

21 en rappeler.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Un petit des deux, je pense. Peut-être une ou

23 deux raisons. Mais souvenez-vous je ne commandais pas que Sarajevo. Je suis

24 certes dans Sarajevo, mais j'ai d'autres responsabilités. Et à ce moment-

25 là, si je me souviens bien, c'était surtout les enclaves de l'ouest qui

26 devaient être ravitaillées qui me préoccupent principalement, puisqu'elles

27 n'avaient pas reçu d'aide humanitaire depuis mars ou avril.

28 Donc, c'était cela que j'avais vraiment à l'esprit à l'époque. Donc,

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1 je me concentrais beaucoup plus là-dessus que sur Sarajevo à l'époque. De

2 plus, bien sûr, il y avait beaucoup d'incidents, en effet, au cours de tout

3 mon commandement. Et c'est en effet des faits qui ont eu lieu il y a assez

4 longtemps.

5 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Merci.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Mais est-il possible que votre commandement n'ait pas reçu ce rapport

8 de la FORPRONU - je pense que quand les Juges devront rendre leur jugement

9 il faudrait quand même qu'ils se penchent là-dessus - mais vous n'auriez

10 pas reçu un rapport selon lequel le bâtiment de la télévision de la Bosnie-

11 Herzégovine a été frappé par un obus qui avait été tiré depuis l'ABiH ?

12 Votre commandement n'aurait pas reçu ce type d'information ? Comment

13 expliqué que vous n'auriez pas reçu ce type d'information ?

14 R. Si cet incident a eu lieu, il y a bien sûr eu un rapport. Tous les

15 rapports n'arrivaient pas sur mon bureau. Même si je suis au QG, il y a

16 quand même un système pour les filtrer, puis les compiler ensuite. Cet

17 incident est arrivé, je m'en souviens. Quant à savoir si mon attention a

18 été attiré sur cet incident, cela c'est autre chose.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous auriez été surpris

20 si c'était bien arrivé ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, si c'était en effet ce qui s'était passé,

22 je pense qu'on m'en aurait fait part à l'époque.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais est-ce que cela vous aurait

24 surpris que le bâtiment de la télévision ait été atteint par un projectile

25 lancé par l'ABiH ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui. Cela aurait été surprenant, et

27 je suis sûr qu'on m'en aurait fait part.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Smith, M. Nicolai, votre chef d'état-major, a écrit une lettre

2 le 1er juillet 1995 à Ratko Mladic. Il s'agit du document 65 ter 02498, qui

3 a reçu la cote P103. Nous l'avons à l'écran.

4 Je cite : "Je vous écris pour protester fermement à propos des pillages

5 indiscriminés et délibérés et continus et récents de la zone résidentielle

6 de Sarajevo."

7 Au paragraphe 3, il dit : "Je vous envoie une copie de la lettre de

8 réclamation et de protestation du commandant du secteur de Sarajevo le

9 colonel Rober May au général Milosevic commandant du Corps de Sarajevo-

10 Romanija à propos des bombardements qui ont eu lieu les 28 et 29 juin

11 1995."

12 Vous souvenez-vous de ces deux lettres; la première qui a été envoyée à

13 Milosevic, et la deuxième qui a été envoyée à Ratko Mladic ? Sont-ce les

14 membres de votre état-major qui ont écrit ces lettres ? Peut-être que vous

15 ne vous en souvenez pas.

16 R. Non, je ne m'en souviens pas. Je tiens à vous dire que le 1er juillet,

17 je suis parti en permission. Je n'étais sans doute pas là physiquement,

18 mais ces lettres ont été écrites, cela c'est certain. Je reprends ce que

19 j'ai dit auparavant.

20 Je ne commandais pas que le secteur Sarajevo. Le secteur Sarajevo

21 était celui qui s'occupait principalement du QG local, avec des contacts

22 avec le général Milosevic. Mon chef d'état-major était autorisé à faire

23 cela. Je lui avais délégué en mon absence le droit d'écrire ce type de

24 lettre.

25 Q. Voici ma question : si ces deux lettres ont été écrites le 1er juillet,

26 la première le 1er juillet et la deuxième le 30 juin, c'est-à-dire deux

27 jours après l'incident, que pouvait en déduire le général Milosevic après

28 cet incident si le 29 juin la FORPRONU a déclaré qu'il s'agissait de

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1 quelque chose qui était du fait de l'ABiH ? Comment était-il censé savoir

2 lequel de leurs soldats était responsable ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne répondez pas à cette question. Le

4 témoin n'est pas en position de répondre et de faire une extrapolation sur

5 la déduction éventuelle. Vous n'avez pas à répondre à cette question,

6 Monsieur le Témoin. Maître Tapuskovic posez une autre question.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne vais plus poser de questions à ce

8 propos. Je pense que tout est déjà au compte rendu. Je ne pense pas avoir

9 besoin de vous donner d'autres explications, et vous avez raison, je ne

10 pense que le général Smith puisse répondre à cette question. Vous avez

11 raison je ne peux pas reformuler cette question étant donné que le général

12 Smith n'était tout simplement pas présent ce jour-là.

13 De toute façon, Messieurs les Juges, ce sera à vous de tirer tout

14 cela au clair puisque encore à l'heure actuelle on ne sait pas vraiment qui

15 a commis ces actes. Le général Smith n'est pas la personne qui nous

16 permettra de trouver la réponse, étant donné que tout ceci n'est pas de son

17 ressort.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez de douter de la vie, posez

19 des questions, s'il vous plaît.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'évite de me lancer dans de grands

21 discours.

22 Q. Cela dit, je tiens quand même maintenant à vous faire part d'un autre

23 rapport, Général, en date du 2 juillet 1995. Il s'agit de la pièce 65 ter

24 2503, qui a reçu la cote P19, à la page 3 de la version en anglais. Si nous

25 pouvions avoir la page 3 de la version en anglais à l'écran. C'est :

26 "Problème de l'emplacement des armes des Musulmans de Bosnie."

27 Je cite : "Depuis le début de l'offensive de l'ABiH il y a deux semaines…"

28 voici ma première question. Vous nous avez dit que l'offensive avait duré

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1 quelques jours alors le rapport de Harland semble indiquer que l'offensive

2 a commencé il y a au moins deux semaines et n'indique pas quand cette

3 offensive s'est terminée. Cette offensive s'est-elle vraiment terminée au

4 bout de trois jours ou s'est-elle poursuivie pendant au moins deux semaines

5 tel que nous le voyons dans le rapport de M. Harland ?

6 R. Qui a écrit ce rapport, s'il vous plaît ?

7 Q. C'est un rapport qui a été rédigé par David Harland des Affaires

8 civiles envoyé à Philip Corwin.

9 R. Cela vient du secteur Sarajevo. C'est ce que je voulais dire. Si

10 Harland a écrit ce rapport et si dans le rapport précédent il a dit que

11 l'attaque avait débuté depuis quelques jours, ce paragraphe qu'il a rajouté

12 dans le rapport suivant, là il fait visiblement référence au début de

13 l'attaque, il n'est pas en train de dire que l'attaque se poursuit. Il dit

14 juste qu'elle a commencé il y a deux semaines.

15 Q. Ce qu'il dit quand même c'est que l'attaque se poursuit depuis deux

16 semaines. Merci vous nous avez répondu. Vous avez fait de votre mieux.

17 Ensuite, il poursuit …

18 R. Non, il a dit : "Depuis l'attaque", il ne dit pas que l'attaque se

19 poursuit depuis deux semaines.

20 Si nous pouvions avoir la troisième page à l'écran à nouveau, nous

21 pourrions relire ce qui est écrit.

22 Q. "Depuis le début de l'offensive de l'ABiH il y a deux semaines." Il

23 n'est pas écrit que l'offensive s'est terminée.

24 R. Oui, mais dans le rapport précédent, écrit exactement par le même

25 homme, il est écrit que cette attaque s'est arrêtée deux jours après le

26 début. Il est juste en train de dire "depuis le début de l'attaque il y a

27 deux semaines", il aurait pu dire le 16 -- en fait que ce soit le 16, il

28 aurait pu écrire depuis le 16 juin; c'est tout. Le nombre d'armements de

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1 l'ABiH et cetera, et cetera. C'est tout ce qu'il dit, rien de plus.

2 Q. Monsieur le Témoin, vous êtes le seul qui ait dit lors de votre

3 déposition que cette offensive n'avait duré que deux ou trois jours. Aucune

4 autre personne n'a dit cela. Je pense que ce que vous dites est assez

5 différent.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, c'est à nous d'en juger.

7 Nous avons entendu l'opinion du témoin. Nous avons aussi entendu vos

8 arguments, et nous en déciderons entre nous. Maintenant, vous pouvez passer

9 à autre chose.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

11 Q. Dans le rapport ensuite, il est écrit que : "Le nombre d'armes lourdes

12 détenues par les Musulmans de Bosnie fonctionnant, près de l'installation

13 de la FORPRONU a augmenté. Certaines personnes de la FORPRONU considèrent

14 qu'il s'agit d'un effort des Bosniens pour que les tirs de riposte soient

15 lancés sur la FORPRONU, ce qui les obligerait ensuite à rentrer en conflit

16 avec les Serbes."

17 Est-ce bien ce qui est dit ?

18 R. Il faut lire le paragraphe en entier, parce qu'il est ensuite écrit

19 d'autres notes, qu'il y a une augmentation générale. Ma réponse sera la

20 même que celle que je vous ai donnée précédemment quand on a parlé des

21 armes mobiles.

22 Q. Oui, c'est exactement là-dessus que je veux en venir. Il est écrit

23 ensuite : "D'autres personnes notent qu'il y a une augmentation générale

24 dans le nombre d'armes active, et que la densité d'armes lourdes n'est pas

25 plus importante autour des installations de la FORPRONU qu'ailleurs."

26 Est-il vrai que ces armes lourdes n'étaient pas uniquement déployées

27 là, mais aussi dans d'autres endroits de la zone de responsabilité de

28 l'ABiH ? C'était ma question.

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1 R. Il y avait eu une augmentation, en effet, puisqu'il y a des effectifs

2 supplémentaires qui sont arrivés par le tunnel, on a en parlé. Il y a aussi

3 une augmentation des effectifs des forces de l'ABiH, de ce fait, au centre

4 de Sarajevo.

5 Q. Il y a eu une augmentation des pièces lourdes à Sarajevo. C'est ce que

6 j'en conclu.

7 R. Pas des armes lourdes telles que celles interdites dans les zones

8 d'exclusion, non. Là, ce qu'on entend, ce sont les mortiers légers et

9 cetera.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous avez encore

11 cinq minutes.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas encore

13 commencé à poser des questions sur Markale. J'ai besoin de voir ces

14 documents, notamment celui-là.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre avis sur ce qui est important

16 pour votre thèse est ce qu'il est, mais il vous reste cinq minutes sur les

17 trois heures, et vous n'avez pas encore abordé Markale. Vous avez passé en

18 revue toutes ces déclarations. Je ne sais pas à quelle fin. On me dit qu'on

19 ne peut pas rester plus longtemps; 5 heures 20 au plus tard. Et ce n'était

20 pas mon intention que de vous donner plus de trois heures.

21 Donc, passez à Markale tout de suite.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est ce que je vais faire, Monsieur le

23 Président. Mais je devais poser toutes ces questions afin d'établir un

24 tableau ou de brosser le contexte dans lequel le général Smith avait

25 ordonné les bombardements, et les événements qui ont mené à Markale. Si

26 vous pensez que Markale n'est pas important -- bon.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, Markale, passons-y, puisque

28 vous estimez que c'est si important.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

2 Q. Monsieur le Général, j'ai deux documents à vous montrer afin

3 d'éclaircir certains points, même si je n'aurai peut-être pas le temps.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Tout d'abord, le lieutenant Higgs, qui

5 faisait partie de l'équipe de Konings, document 65 ter, numéro 198.

6 Pourrions-nous l'afficher à l'écran en premier, s'il vous plaît.

7 Q. Le chef de patrouille était Konings, et les membres étaient capitaine

8 Karbone [phon] et capitaine Higgs, à la partie générale.

9 Il est dit, à la première page : "L'équipe chargée de l'enquête a

10 mené toute l'enquête en équipe, y compris les visites à l'hôpital afin de

11 confirmer le nombre de victimes, ou plutôt, de ceux qui avaient été tués ou

12 blessés." Une équipe chargée d'une enquête du côté du ministère de

13 l'Intérieur également, et leurs observations.

14 "Cinq sites d'impact, tous touchés par des projectiles de 122

15 millimètres en calibre; 130 degrés azimut, 33 personnes tuées, 58 blessés

16 dans une zone de marché avec beaucoup de personnes. Deuxième partie de la

17 trace est visible. L'angle d'impact estimé ne pouvait pas donner

18 d'information quant à la provenance du feu et la charge d'explosif n'était

19 pas connue également."

20 Je passe maintenant à la page 2. "En collaboration avec l'équipe chargée de

21 l'enquête du côté du ministère de l'Intérieur, cette équipe a pu confirmer

22 que 38 ont été tués, et 64 blessés. Nous n'avons pas pu démontrer --"

23 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande au conseil de

24 ralentir.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous lisez trop rapidement. Posez

26 votre question maintenant.

27 Quelle est la question au témoin ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

Page 3412

1 Q. "L'équipe chargée de l'enquête pour la FORPRONU a conclu qu'on ne

2 pouvait pas établir l'origine du tir puisqu'ils n'avaient pas à déterminer

3 quel était le type de projectile."

4 Avez-vous déjà vu ce rapport ?

5 R. Je n'ai pas vu ce rapport-ci exactement, non. J'ai vu un rapport de

6 l'OMNU.

7 Q. Avez-vous vu un rapport envoyé par le général Janvier au secrétaire

8 général des Nations Unies, le même jour ?

9 R. Peut-être, mais je ne m'en souviens pas précisément.

10 Q. Mais cela correspond parfaitement avec le rapport précédent puisque

11 dans ce document à la page D00001 --

12 L'INTERPRÈTE : Il s'agit de la pièce DD00-10, FORPRONU, secteur Sarajevo.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Donc si nous pouvions voir la page 3 de la

14 version anglaise à l'écran.

15 Q. Je ne tiens pas à lire le document en entier mais les contenus de ce

16 rapport-ci correspondent de très près à celui que nous avons vu auparavant.

17 Il dit : "Il est difficile de trouver et de déterminer la provenance de

18 tirs pour ce qui est des obus de mortier, car il est impossible de savoir

19 quelle était la charge qui a été utilisée pour lancer le projectile." Ici,

20 nous parlons bien sûr du 28 août. A cause des caractéristiques de l'obus,

21 il était impossible d'établir ce dont je viens de parler.

22 Connaissez-vous ce rapport ?

23 R. Non. Il s'agit ici d'un rapport de situation de routine de mon QG

24 supérieur, donc il s'agit en fait de notes de synthèse qu'il compilait

25 chaque fois qu'ils avaient des rapports des OMNU, il les utilisait et il

26 les compilait, ensuite il les envoyait au quartier général des Nations

27 Unies à New York. En tout cas, c'est ce que je tire de la page de garde de

28 ce rapport.

Page 3413

1 Q. Savez-vous ce qu'a dit le colonel Demurenko, le colonel russe, quand il

2 est arrivé sur place, et il était l'un des premiers à arriver sur place ?

3 J'ai posé cette question à l'un des témoins déjà, mais savez-vous ce qu'a

4 dit Demurenko ? Je crois qu'il a dit quelque chose du style : il est

5 impossible que ces obus proviennent des positions occupées par l'armée des

6 Serbes de Bosnie.

7 R. Je me souviens qu'il l'a dit, mais ce n'était pas tout de suite

8 après l'événement. Je crois que c'était deux jours ou 36 heures après

9 l'incident, même peut-être un peu plus tard.

10 Q. Peut-on dire que vous avez arrêté les frappes aériennes de l'OTAN

11 pendant une journée ?

12 R. Non, pas du tout. Je ne les ai pas arrêtées pendant une journée.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les frappes se sont-elles arrêtées ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous avons arrêté les frappes - ce

15 n'était pas ma décision d'ailleurs à ce moment-là - nous avons arrêté après

16 cinq à six jours, cinq à sept jours; nous avons arrêté pendant quatre

17 jours, je crois, si je me souviens bien. Si on parle bien de la même chose.

18 Il est vrai que j'ai participé à la décision, mais ce n'est pas moi qui ai

19 pris ma décision de mon propre chef.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est à cela que vous faisiez

21 allusion quand vous avez demandé si le général avait arrêté les frappes

22 aériennes de l'OTAN, vous voulez dire juste après Markale; c'est cela ?

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non. Quelques jours plus tard, après

24 Markale, quand une fois que les propos de Demurenko ont été connus de tous.

25 Quand on lit à la page 730, à la ligne 17, j'ai demandé à ce témoin la

26 chose suivante : "Le 1er septembre, les bombardements se sont arrêtés suite

27 aux allégations du colonel Demuenko comme quoi ce n'était pas la VRS qui

28 était responsable du pilonnage." Il a dit : "En effet." Et à partir du 1er

Page 3414

1 septembre quand l'opinion publique a su ce qu'avait dit le colonel

2 Demurenko les bombardements ont été suspendus.

3 Q. C'est bien cela ?

4 R. Non, ce n'est pas les propos de Demurenko qui ont arrêté quoi que ce

5 soit.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors pourquoi ces bombardements

7 ont-ils été suspendus ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est au paragraphe 113 de ma déclaration. La

9 raison c'était parce que le commandant de la force du général Janvier

10 devait rencontrer le général Mladic et c'était pour permettre cette

11 rencontre. Et la rencontre avait pour but de savoir si les exigences que

12 nous avions imposées aux Serbes de Bosnie, la demande surtout de retrait de

13 toutes armes lourdes des zones d'exclusion était satisfaite ou non.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

15 Monsieur Tapuskovic, voyez-vous cela c'était le paragraphe 113 de la

16 déclaration générale, il est bien écrit : "Le 1er septembre, une pause de 24

17 heures a été accordée pour que le commandant de la force puisse rencontrer

18 le général Mladic à Zvornik au matin."

19 Vous pouvez passer à votre question suivante maintenant.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

21 Q. A la page 1 023, lignes 16 à 25 du compte rendu, là on voit le général

22 Nikolai qui répond : "Oui, les radars néerlandais," et il a aussi mentionné

23 les radars anglais, "n'ont pas repérés les obus qui ont causé la mort de

24 tant de personnes." Vous a-t-on dit cela ? En avez-vous été averti que les

25 radars n'avaient pas repéré ces projectiles ? Oui ou non.

26 R. Oui, oui, oui. On me l'a dit.

27 Q. Pour ce qui est maintenant du 1 027, lignes 19 à 22, c'est toujours

28 Nicolai, et il dit : "Tout ce que je peux vous dire c'est qu'aucun radar

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1 n'a repéré de traces. C'est pour cela que nous avons dû à faire une analyse

2 de cratères sur le terrain."

3 C'est bien cela, n'est-ce pas ?

4 R. Ce n'est pas tout à fait cela en fait. Je n'aurais pas formulé la chose

5 ainsi. Nous aurions analysé les cratères de toute façon. On procède

6 toujours à l'analyse de cratères. Comme on le voit dans le rapport des

7 OMNU, ils ont immédiatement procédé à cette analyse de cratères puisque

8 c'est la procédure. Ensuite on a essayé de rassembler aussi toutes les

9 autres informations disponibles et il s'agissait, entre autres, de savoir

10 s'il y avait quoi que ce soit sur les écrans radars.

11 Q. Est-il vrai que vous avez eu vent de ces informations. Page 1 028,

12 lignes 4 à 23, qui fait référence à un rapport selon lequel l'obus aurait

13 atteint un bâtiment et que de ce fait l'obus aurait explosé en l'air. En

14 tout cas, c'est la déposition de M. Nicolai devant cette Chambre. Le

15 saviez-vous ?

16 R. Je ne savais pas qu'il l'avait dit, non. Pour ce qui est de l'explosion

17 de l'obus en l'air, faut-il que je réponde aussi à cette question ?

18 Q. M. Nicolai a affirmé qu'il avait reçu un rapport selon lequel l'obus --

19 enfin un obus avait atteint le plafond, le toit d'un bâtiment et qu'ensuite

20 il s'était désintégré en tuant les gens dans la rue ?

21 R. Il a peut-être reçu ce rapport, mais ce rapport est erroné puisqu'il

22 avait cinq cratères.

23 Q. A la page 1 039, lignes 7 à 10. J'ai posé une question à M. Nicolai. Je

24 lui ai dit : "Est-ce que cela correspond à ce que M. Van Baal vous a dit

25 selon lequel dans l'intérêt de l'Etat on peut sacrifier son peuple ?"

26 Nicolai a répondu : "Nous n'avons pas exclu cette option."

27 Je vous demande si vous saviez que cette option existait ? Votre état-major

28 était-il au courant de l'existence de cette option ?

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1 R. Si je vous comprends bien, vous me dites que cela aurait été une action

2 des Bosniaques contre les Bosniaques. C'est vrai que théoriquement c'est

3 possible, en théorie.

4 Q. Cela dit, ce soir-là, vous avez donné l'ordre de procéder à des frappes

5 aériennes sur les positions de l'ABiH. Malgré toutes les ambiguïtés à

6 propos de cet incident et des enquêtes incomplètes, vous avez ordonné le

7 soir même l'ordre de procéder à des bombardements aériens ?

8 R. Ce ne s'est pas passé comme cela. Il y avait d'autres enquêtes en

9 cours, des enquêtes du secteur de Sarajevo, des enquêtes de mon propre

10 état-major, ensuite il fallait deux personnes pour prendre ces décisions.

11 Puisque comme on dit maintenant, il y avait deux clés à tourner. J'avais

12 une clé en main et l'amiral Leighton Smith avait l'autre.

13 Q. Encore deux points à soulever --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, réexpliquez-moi

15 à nouveau quelle est votre thèse en l'espèce. Les frappes aériennes de

16 l'OTAN sur les positions des Serbes de Bosnie qui auraient été lancées

17 avant même que l'enquête soit terminée. Quelle est votre argumentation ?

18 Je pense que cela a à voir avec l'argument selon lequel selon vous il

19 y aurait collusion entre d'un côté l'OTAN et l'ABiH, il y a visiblement un

20 lien.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai malheureusement

22 laissé passer trop de choses. Au paragraphe 113 de la déclaration du

23 témoin, il dit ce qui suit : "Les attaques avaient été réalisées pour

24 obtenir une domination aérienne, pour montrer la mesure et la nature de la

25 sanction et pour détruire les armes, les dépôts de munitions et les QG de

26 commandement et de contrôle."

27 Ensuite, il y a un incident sur lequel on n'avait pas correctement enquêté.

28 Q. Vous avez quand même dit cela, n'est-ce pas ? Je cite : "La nature et

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1 la sanction qui était de détruire les armes, de détruire les fonctions de

2 commandement et de contrôle et de détruire les entrepôts de munitions."

3 R. Vous me demandez si je l'ai dit ?

4 Q. Oui, c'était bien l'objectif ?

5 R. Oui, c'était l'objectif du plan, ce plan-là dont on parle.

6 Q. Vous avez atteint des cibles militaires, mais aussi toute

7 l'infrastructure des positions où vivaient des Serbes qui vivaient aux

8 alentours de Sarajevo, c'est bien cela ?

9 R. Non, absolument pas. Nous n'avons attaqué que des cibles militaires.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, votre thèse est

11 telle que Markale a été provoquée par des attaques de l'ABiH. C'est ce que

12 vous soutenez ? Répondez-moi, répondez-moi, c'est votre thèse c'est cela ?

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous soutenez aussi que l'OTAN était

15 un complice de cette attaque, que l'OTAN savait que l'ABiH avait attaqué le

16 marché de Markale, vous soutenez que l'OTAN était au courant ?

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, et je vais en terminer avec mon

18 contre-interrogatoire exactement là où je l'ai commencé. Le général, notre

19 témoin sait, je viens de lui dire ouvertement, il sait quelque chose que

20 j'ai trouvé dans le livre d'Alija Izetbegovic. Il sait que le 29 il y a eu

21 une réunion à l'ambassade américaine avec Holbrooke, il a aussi parlé à

22 Talbot, à l'adjoint de Christopher, et on lui avait dit que l'attaque

23 contre les forces serbes allait commencer très rapidement.

24 Q. D'où venait cet ordre, est-ce bien de là que venait cet ordre ?

25 R. Non, non, la décision était aux mains des deux personnes détenant les

26 clés à égalité. Je répète, il s'agissait de l'amiral Leathon Smith et de

27 moi-même. Cela venait de la Conférence de Londres qui s'était tenue à la

28 fin de juillet.

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1 Q. Ma question est la suivante : est-il vrai ce que dit Alija Izetbegovic

2 dans son livre, comme quoi c'était une action concertée, comme je l'ai déjà

3 dit, il est allé à Paris avec cette même intention, cette intention-là en

4 tête et que tout a été coordonné et tout a été manipulé dès le départ ?

5 R. Non, c'est absolument faux.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien. Merci.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, des questions

8 supplémentaires.

9 M. WHITING : [interprétation] Je n'ai pas de questions supplémentaires.

10 Questions de la Cour :

11 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Général, nous n'avons plus beaucoup

12 de temps, mais j'aimerais quand même vous poser deux ou trois questions

13 avant votre départ à propos de l'implication de l'accusé en l'espèce.

14 Tout d'abord, avez-vous rencontré le général Milosevic à un moment où à un

15 autre ?

16 R. Je l'ai rencontré, si je me souviens bien, uniquement après les

17 bombardements en septembre. Il me semble que nous avons eu deux réunions

18 ensemble, pas plus. C'était pour expliquer ce qu'il devait faire, ce que

19 son Corps devait faire suite aux bombardements et au fait qu'un accord

20 avait enfin été atteint avec les Serbes de Bosnie.

21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. A-t-il respecté

22 l'accord que vous aviez conclu avec lui lors de ces réunions ?

23 R. Plus ou moins, plus ou moins. Il me semble que la première fois, il y a

24 eu quelques dérapages. Le respect n'a pas été total, mais la tendance

25 allait dans le bon sens. Au fur et à mesure du temps, les choses sont

26 devenues de plus en plus positives.

27 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Avez-vous eu d'autres contacts avec

28 le général Milosevic ? Pas forcément en tête-à-tête mais lettres,

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1 courriels, consignes ?

2 R. Cela se faisait au niveau du secteur Sarajevo. Il s'agissait de mes

3 subordonnées qui communiquaient avec lui. En revanche, pour ce qui est de

4 communications directes entre lui et moi, non je ne m'en souviens pas, ni

5 en tête-à-tête, ni par lettre, mis à part les réunions dont je vous ai

6 parlé.

7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pendant votre mandat, à un moment ou

8 à un autre, avez-vous eu vent de la possibilité que le général Milosevic ne

9 puisse pas satisfaire aux termes de l'accord, accord que vous auriez conclu

10 ou d'autres agents des Nations Unies auraient conclu avec les dirigeants

11 serbes ?

12 R. Vous voulez dire l'impossibilité d'y satisfaire parce qu'on lui avait

13 donné un ordre contraire ou parce qu'il y avait des obstacles physiques qui

14 l'empêcheraient de satisfaire aux accords.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ma question porte sur l'impossibilité

16 qu'il aurait de contrôler les forces sous son commandement.

17 R. Non, non. Là je n'ai jamais eu de preuve de ce type.

18 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, Général, vous en avez terminé

20 avec votre déposition. Nous vous remercions d'être venu pour déposer. Je

21 tiens à remercier les juristes et les interprètes aussi pour les services

22 qu'ils nous rendent et pour leur gentillesse.

23 Merci.

24 --- L'audience est levée à 17 heures 29 et reprendra le jeudi 8 mars 2007,

25 à 9 heures 00.

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