Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 9 juillet 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il convient que le témoin fasse la

7 déclaration solennelle.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

10 LE TÉMOIN: TÉMOIN T-61 [Assermenté]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez commencer votre

13 interrogatoire principal, Maître Tapuskovic.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

15 les Juges. Ce témoin a des mesures de protection, pseudonyme et altération

16 des traits du visage, c'est le Témoin T-61.

17 Je prie que cette liste soit montrée au témoin.

18 Est-ce que ce document pourrait être versé au dossier en tant que pièce à

19 conviction de la Défense, sous pli scellé ?

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document recevra la cote D288, sous

23 pli scellé.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, on va

25 continuer et je prie qu'on passe à huis clos partiel pour le temps que le

26 témoin se présente.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut passer à huis clos

28 partiel.

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

2 [Audience à huis clos partiel]

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17 [Audience publique]

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

19 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges pour ce qui est du début

20 du conflit, qu'est-ce que vous avez fait au début du conflit ? En quoi

21 consistait votre travail à l'hôpital ?

22 R. Je m'occupais de mes activités régulières en tant que chirurgien, mais

23 les patients étaient pour la plupart des blessés. Avant la guerre, il y

24 avait d'autres causes d'accident, il s'agissait pour la plupart des

25 accidents de la route. Comme j'ai déjà dit j'étais à la tête d'une équipe

26 de 12 ou 16 chirurgiens et nous travaillions dans des conditions de guerre.

27 Q. Quel était le type de blessures ou quels étaient les blessés au début

28 du travail de votre équipe, disons au début de l'année 1992 ?

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1 R. Je vais commencer par le mois d'avril 1992, il y avait principalement

2 des blessés. Cela a commencé le 2 ou le 3 août, le 6 ou le 7 avril, et cela

3 a duré jusqu'au mois de juin. Ça a duré pendant trois ou quatre mois

4 jusqu'à la deuxième moitié du mois de juin, et surtout dans la première

5 moitié du mois de juin, il y avait des blessés qui affluaient. Pour la

6 plupart il s'agissait de soldats, à savoir, pour être franc, il y avait des

7 soldats en uniforme de l'ancienne JNA surtout au début de la guerre, et il

8 y avait d'autres blessés, à savoir il y avait des blessés en uniformes de

9 camouflage, en uniformes complets ou partiels ou en vêtements civils, et

10 cetera. Pour ce qui est des vêtements, c'était ainsi. Il s'agissait de

11 jeunes gens pour la plupart d'entre eux.

12 Au début de la guerre, ce qui est intéressant c'est que jusqu'au 10 ou 12

13 avril à peu près, il y avait beaucoup de blessés qui étaient soldats

14 arrêtés de l'ancienne JNA, des jeunes gens entre 15 et 20 ans ou 19 à 20

15 ans. Ils ont été abandonnés par leurs supérieurs dans des installations de

16 la JNA sans électricité, sans eau, et après quoi ils se sont rendus en

17 ville et beaucoup d'entre eux ont été blessés. Il y avait également

18 beaucoup d'entre eux qui se sont autoblessés. Les membres, je pense, de la

19 Ligue patriotique et des Bérets verts les ont amené ailleurs. Je ne sais

20 pas quel a été leur sort par la suite. On disait qu'ils ont été échangés

21 par la suite, plus tard.

22 Q. Je vous remercie. Plus tard, pouvez-vous nous dire quelle était la

23 composition des blessés au fur et à mesure que le temps s'écoulait ?

24 R. Cinquante ou 70 % étaient des soldats. Le reste, des civils, parmi

25 lesquels entre 5 et 8 % des enfants.

26 Q. Vous parlez de l'hôpital qui se trouvait dans la zone de responsabilité

27 et sous le contrôle de l'ABiH ?

28 R. Au début, on les appelait la Ligue patriotique, après les Bérets verts.

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1 Oui, mais il s'agissait de cette zone-là. A la fin, c'était l'ABiH.

2 Q. Pendant tout le temps jusqu'au début du mois de janvier 1994 vous avez

3 travaillé dans cet hôpital ?

4 R. J'ai déjà dit, le 2 janvier 1994 était la date qui est la date de mon

5 dernier jour de travail à l'hôpital.

6 Q. En tant que médecin, comment pouvez-vous qualifier votre travail par

7 rapport à la période avant la guerre ?

8 R. Les médecins ne changent pas leur mode de travail; mais tout

9 simplement, ils s'adaptent aux conditions de travail. Je procédais aux

10 opérations de la même façon. Il y avait le ministre de la Santé que j'ai

11 opéré. Il ne s'agissait pas d'une blessure de guerre. J'ai opéré plusieurs

12 professeurs de l'université parce que j'étais le plus expérimenté dans

13 l'équipe de chirurgiens. Ceux qui pouvaient demander le chirurgien le plus

14 expérimenté demandaient que je les opère. Juka Prazina également je l'ai

15 opéré, c'était quelqu'un qui avait beaucoup de pouvoir à l'époque à

16 Sarajevo.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, cela mène où ?

18 Cela nous mène où ? Parce que vous parlez de beaucoup de détails. S'il vous

19 plaît, posez des questions au témoin en présentant des pièces à conviction

20 qui sont pertinentes.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Même s'il s'agit du témoin qui parlera de

22 certaines activités de combat concernant cette région, mais c'est le témoin

23 qui se trouve dans la même position que M. Pejic, médecin, qui a témoigné

24 auparavant. A propos de ce témoin, nous avons mené une discussion sérieuse

25 et par rapport à cette discussion nous avons déposé nos arguments par

26 écrit. Ce témoin a travaillé à l'hôpital qui était dans la zone de

27 responsabilité du Corps Sarajevo-Romanija.

28 Est-ce qu'on peut passer maintenant à huis clos partiel, s'il vous

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1 plaît ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour discuter de quoi ? Est-ce qu'il

3 s'agit du témoignage de ce témoin ou de vos arguments ?

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je dois dire quelque chose qui le

5 concerne, après quoi nous pourrions revenir en audience publique. Je dois

6 dire quelque chose qui risquerait de l'identifier.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous allons passer à huis clos

8 partiel.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel

10 maintenant.

11 [Audience à huis clos partiel]

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16 [Audience publique]

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur le Témoin, vous étiez témoin dans l'affaire du général Galic,

19 n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Vous avez été témoin dans un procès qui a été mené à Trebinje en 1996,

22 n'est-ce pas ?

23 R. C'est exact. Un juge, je ne me souviens pas de son nom, il s'appelait

24 peut-être Stevic ou Stanic, m'a convoqué au tribunal de Trebinje où j'ai

25 fait une déclaration. Ça a duré une heure ou une heure et demie, si je me

26 souviens bien.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

28 Juges, j'ai reçu un document de l'Accusation, 65 ter 3388, une petite

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1 partie est traduite. J'aimerais qu'on montre ce document au témoin parce

2 que je voudrais lui présenter la partie qui est traduite et lui poser des

3 questions sur les choses dont il a parlé devant le juge d'instruction à

4 Trebinje.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] S'il vous plaît, j'aimerais voir le document

6 en serbe.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page numéro

8 6 du document en B/C/S ? C'est la partie du document qui est traduite.

9 Q. Regardez le paragraphe numéro 2 et lisez le paragraphe numéro 2, s'il

10 vous plaît.

11 R. "A plusieurs reprises j'ai été témoin de l'atterrissage des obus dans

12 l'enceinte de l'hôpital Kosevo. A deux reprises, la clinique de

13 traumatologie a été touchée, à ma proximité

14 immédiate -- "

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît,

16 parce que l'interprète n'est pas en mesure d'entendre bien ce que dit le

17 témoin."

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais recommencer à lire.

19 "A plusieurs reprises, j'ai été témoin de l'atterrissage des obus dans

20 l'enceinte de l'hôpital Kosevo. A deux reprises, les obus ont touché la

21 clinique de traumatologie en ma proximité immédiate, pourtant cela s'est

22 passé toujours après une série de lancements de projectiles de la part de

23 l'armée musulmane en dessous de la clinique de traumatologie où se

24 trouvaient leur école, dès qu'ils commençaient à tirer de cette école sur

25 les positions serbes, nous nous mettions à l'abri. Ma clinique se trouve à

26 une distance de 15 mètres par rapport à la faculté du bâtiment."

27 L'institut pour les matériaux de construction se trouvait à cette

28 distance-là et la faculté même à 30 ou 50 mètres plus bas.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

2 Q. Merci. De quelles armes l'armée musulmane tirait-elle de cet endroit

3 près de l'hôpital ?

4 R. Dans l'enceinte de la faculté, il y a un parc. Il y a beaucoup

5 d'arbres.

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Je ne veux pas soulever une objection, mais

9 je voudrais dire que ce témoignage n'a pas été mentionné du tout dans le

10 résumé 65 ter, bien que nous soyons au courant du fait que le témoin a

11 témoigné dans l'affaire Galic et nous avons examiné son témoignage, mais le

12 type d'armes qui auraient pu ou qui n'auraient pas pu se trouver dans la

13 proximité de l'hôpital Kosevo n'est pas quelque chose dont il est question

14 dans la résumé 65 ter; c'est pour cela que je veux mentionner cela parce

15 cela a été mentionné dans l'affaire Galic.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous avons entendu votre

17 argument.

18 Continuez, Maître Tapuskovic.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.

20 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre quel était le type d'armes qui opéraient

21 à proximité de l'hôpital ?

22 R. Je les ai vues, il s'agissait de deux petits canons dissimulés. Ils ont

23 été déplacés entre quatre bâtiments qui étaient dans l'enceinte. Ils

24 lançaient des projectiles dans la direction de Poljine où se trouvaient les

25 positions de l'armée serbe à l'est de l'endroit qu'on appelle Jezero et

26 encore plus loin. Parfois, après deux ou trois projectiles lancés de ces

27 pièces, nous nous mettions à l'abri dans l'autre partie du bâtiment parce

28 que cette partie du bâtiment qui donnait sur la faculté était

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1 habituellement touchée par ces projectiles.

2 Q. Dites-moi, un peu plus bas sur la même page du document, vous avez

3 mentionné la Ligue des Patriotes qui se trouvait dans un bâtiment. Pouvez-

4 vous lire le dernier paragraphe de la même page. Oui, lisez cela parce que

5 c'est traduit à la fin. Pouvez-vous lire cela, s'il vous plaît ?

6 R. "Au début de la guerre --"

7 Q. Non, le dernier paragraphe.

8 R. "Un commandement de la Ligue des Patriotes se trouvait également

9 dans la cave et au rez-de-chaussée de la faculté de stomatologie, de la

10 clinique et dans la plupart des écoles et des crèches que je connais aux

11 alentours de l'hôpital Kosevo. Le commandant de quartier de l'état-major à

12 la clinique de stomatologie était Juka Prazina, et je ne sais pas qui

13 étaient les commandants des états-majors pour ce qui est d'autres endroits

14 susmentionnés."

15 Q. Pouvez-vous dire, pour ce qui est des écoles et des crèches et de

16 l'hôpital de la faculté de stomatologie, en quoi ces bâtiments étaient-ils

17 transformés ?

18 R. Cela se passait de la façon suivante --

19 Q. S'il vous plaît, Monsieur le Témoin, attendez à ce que ma question soit

20 affichée sur l'écran et répondez à ma question par la suite.

21 R. Je me rendais à la clinique de stomatologie pour rendre visite à

22 l'épouse de Juka Prazina qui a été blessé. C'est ce qu'il m'a demandé de

23 faire parce qu'en février de la même année, je l'ai opéré après qu'il avait

24 été blessé dans une bagarre. Dans la cave de ce bâtiment, c'était fermé. Il

25 y avait des sacs et des planches. Il y avait des sacs remplis de terre et

26 de sable. Pour nous, le personnel, nous entrions par une autre entrée.

27 Cette entrée-là était toujours gardée. Dans la crèche, tout près de la

28 faculté où se trouvaient mes amis, il y avait beaucoup de soldats. Je ne

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1 connais pas leurs noms.

2 Q. Merci. A la page 4.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page 4.

4 Cette page n'est pas traduite.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Avant de continuer, est-ce qu'on peut

6 confirmer s'il s'agit de la période de 1992, 1993 ou on parle d'une période

7 de temps de l'année 1994 ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quelle année il s'agit, Monsieur

9 le Témoin ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque les soldats qui se trouvaient dans ces

11 bâtiments, ils s'y trouvaient -- les membres de l'armée si trouvaient

12 pendant toute la guerre. Bien sûr, ils y étaient aussi au début de la

13 guerre.

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je dirais que cela

15 n'est pas pertinent parce que pour ce qui est des connaissances du témoin

16 par rapport à cela, il n'y avait pas de fondement.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela ne veut pas dire que cela ne

18 soit pas pertinent. La question qui se pose c'est de voir quelle est la

19 fiabilité de ce qu'il dit.

20 Monsieur le Témoin, quels sont les fondements de vos connaissances par

21 rapport à cela ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis rendu à deux reprises à la clinique

23 de stomatologie. A deux reprises, la situation était la même. La situation

24 que j'ai déjà décrite. Une fois, mis à part la crèche que j'ai mentionnée,

25 je vous ai dit ce que j'ai vu. La situation était la même à l'école à

26 Kosevsko Brdo, c'est cette école que fréquentait ma fille cadette. Il

27 s'agit d'une école primaire.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez répéter la dernière partie

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1 de votre réponse, s'il vous plaît.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] La même situation prévalait à l'école

3 élémentaire de Kosevsko Brdo où se trouvait l'armée. Je le sais parce que

4 ma plus jeune fille se rendait à cette école-là avant la guerre. Lorsque

5 j'allais travailler, je passais souvent devant cette école.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

8 Q. Vous avez évoqué le jardin d'enfants dans votre déclaration. Pourriez-

9 vous brièvement nous dire ce que vous savez à propos de ce jardin d'enfants

10 qui a servi de jardin d'enfants jusqu'à un certain moment.

11 R. C'était un jardin d'enfants jusqu'au début de la guerre; après, plus

12 aucun enfant ne s'est rendu dans ce jardin d'enfants. Le jardin d'enfants

13 se trouvait juste à côté de la rue Mosa Pijade, c'était le nom de la rue

14 avant la guerre. Cela se trouve près de la faculté de médecine. Lorsque

15 l'on passe devant le jardin d'enfants, je dois vous le dire, j'ai vu qu'il

16 y avait des soldats à l'intérieur et il y avait un gardien devant.

17 Q. Dans votre déposition aujourd'hui, ainsi que dans votre déposition dans

18 l'affaire Galic, vous avez évoqué la souffrance de personnes et d'un

19 certain nombre de vos amis. Pourriez-vous brièvement nous dire ce que vous

20 savez à ce sujet à l'époque où vous travailliez dans l'hôpital et jusqu'au

21 début de l'année 1994 ?

22 R. Je sais au fait quelque chose à propos de la souffrance des Serbes et

23 des Musulmans --

24 Q. Veuillez attendre la fin de ma question, s'il vous plaît, avant de

25 répondre.

26 R. Je sais quelque chose à propos de la souffrance des Serbes et des

27 Musulmans. Je souhaite parler du feu professeur Milutin Najdanovic qui est

28 parti à la retraite juste avant la guerre. Il vivait tout près de l'hôpital

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1 de Kosevo, dans ce quartier-là. C'est le quartier qui porte le même nom,

2 Kosevo. Un groupe de policiers militaires musulmans, un groupe de polices

3 spéciales appelé Crna, l'ont fait sortir de son appartement, un soir devant

4 sa femme, sa fille et petite-fille et à 15 mètres de là, ils l'ont tué. On

5 l'a retrouvé --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Maintenant, je me lève pour invoquer la

8 question de la pertinence, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon, à moins que Me Tapuskovic ne

10 puisse me convaincre du contraire, Maître Tapuskovic, je suis d'accord avec

11 Mme Edgerton.

12 Est-ce que vous pouvez me convaincre, Maître Tapuskovic ?

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit là de questions qui relèvent de

14 la zone de responsabilité au moment où Dragomir Milosevic était commandant.

15 Les choses se passaient à ce moment-là. Ces événements se sont passés ainsi

16 sans raison et ont eu une influence importante sur la décision que

17 prenaient les gens à ce moment-là d'après les positions qu'ils occupaient.

18 Les choses ne se sont pas produites par hasard.

19 Il s'agit d'éléments importants ici.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci n'est pas pertinent. Nous avons

21 répété à maintes reprises que les éléments de preuve faisant état de la

22 souffrance des Serbes ne constituent pas des éléments en soi qui soient

23 pertinents. Il faut qu'il y ait un lien avec l'acte d'accusation. Veuillez

24 passer à autre chose, s'il vous plaît.

25 [Le conseil de la Défense se concerte]

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin vient de

27 parler des Musulmans et des Serbes. C'est lui qui a dit cela plus

28 particulièrement. Moi, je n'insiste pas sur les Serbes, mais c'est lui qui

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1 l'a dit. Il a dit que les Serbes et les Musulmans ont souffert la même

2 chose.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci n'a pas d'importance. Cet

4 élément de preuve n'est pas pertinent.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bien. Puis-je dire encore une phrase, s'il

6 vous plaît ?

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, pas sur cette question-ci.

8 Veuillez passer à autre chose et veuillez passer à la partie de la

9 déposition du témoin qui est pertinente.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

11 Q. Témoin T-61, vous souvenez-vous d'événements concernant les tirs

12 d'artillerie dans la zone de responsabilité placée sous le commandement de

13 l'ABiH ?

14 R. Il y avait des fusillades pendant la guerre, pendant toute la durée de

15 la guerre.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] En français, je voulais parler de "tir

17 d'infanterie," non pas d'artillerie.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dans le transcript, nous avons "tirs

19 d'infanterie."

20 Vous souvenez-vous d'événements ayant trait à des tirs d'infanterie ? C'est

21 ce que vous avez dit ?

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] En fait, ma collègue écoutait le français.

23 En fait, on l'a traduit par "tirs d'artillerie." En anglais, cela va.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

26 Q. Oui, pourriez-vous répondre à cette question, s'il vous plaît, si vous

27 personnellement vous avez vu quelque chose de la sorte ou remarqué quelque

28 chose de la sorte.

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1 R. J'ai dit qu'il y avait des fusillades incessantes en ville. Bien

2 sûr, nous avons entendu des tirs davantage car c'était plus près. A un

3 moment donné, j'étais avec ma femme, je me trouvais à la société bénévole

4 Adra qui se trouve juste à côté de la gare ferroviaire. Il y avait à peu

5 près 80 à 120 personnes qui attendaient. Ils formaient une colonne. Ils

6 attendaient de l'aide qui leur était fournie à chacun nommément, mais ceci

7 a été remis également aux personnes dont les noms ne figuraient pas sur la

8 liste des organisations caritatives. Donc, il y avait des organisations

9 chargées d'aide humanitaire. On a entendu des tirs qui, d'après moi,

10 venaient du bâtiment Energoinvest. Il y a des gens qui se sont jetés par

11 terre, d'autres qui ont fui. Moi, je me suis caché derrière un mur, et j'ai

12 vu qu'à l'avant-dernier étage du bâtiment Energoinvest il y avait de la

13 fumée blanche qui sortait. D'après la provenance du son, nous avons compris

14 que les tirs venaient de là.

15 J'ai compris à une autre occasion dans le courant de l'été 1993, je

16 crois que c'était à ce moment-là, c'était le milieu de l'été. J'étais sur

17 la place qui se trouvait devant la gare ferroviaire et devant moi à 2 ou

18 300 mètres une balle a touché le macadam. J'ai marché plus rapidement, j'ai

19 pressé le pas et une balle est tombée derrière moi. A ce moment-là, je me

20 suis caché derrière un bâtiment et j'ai vu que l'on tirait deux ou trois

21 fois. Tout ceci provenait de la direction de Marin Dvor, et nous avons

22 entendu qu'il y avait des tirs depuis les tours qui se trouvaient près du

23 lycée technique. Près de l'endroit où je me trouvais, cette place cela se

24 trouvait à 3 ou 350 mètres à vol d'oiseau.

25 Q. Donc l'endroit où se trouvait Marin Dvor et ce bâtiment ?

26 R. Energoinvest.

27 Q. C'était sur quel territoire ?

28 R. Sur le territoire de l'ABiH pendant toute la durée de la guerre.

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1 Q. Savez-vous ce qui s'est passé au début du mois de janvier ? Jusqu'à ce

2 moment-là vous avez travaillé comme médecin, et qu'avez-vous fait après

3 cela au début du mois de janvier 1994 ?

4 R. Entre les 3 et 4 janvier pendant la nuit vers 2 heures du matin, la

5 police a frappé à ma porte. En tout cas, c'est comme ça qu'ils se sont

6 présentés. J'ai ouvert la porte. J'étais seul. Il y avait cinq policiers

7 qui sont entrés chez moi. L'un d'entre eux tenait une lampe de poche qu'il

8 a dirigée sur mon visage, et deux autres policiers me tenaient à bout

9 portant, les deux autres fouillaient l'appartement. Tout ceci a duré peut-

10 être 30 secondes. J'ai ensuite été emmené en bas de le véhicule qui leur

11 appartenait, et on m'a emmené dans l'appartement d'Ivan Sabljak, du

12 médecin. Ensuite, nous avons tous deux été emmenés chez le médecin, chez le

13 Dr Nemanja Veljkov dans son appartement. Etant donné qu'il n'était pas chez

14 lui, on nous a ensuite emmenés à l'hôpital et ensuite au poste de police. A

15 partir de ce moment-là, nous avons été détenus.

16 Trois jours après cela, le père d'Ivan Sabljak s'est pendu. C'était

17 également un médecin.

18 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre pourquoi vous avez été

19 arrêté. Est-ce qu'ils vous ont dit quelque chose à ce sujet ? Y a-t-il eu

20 des poursuites ?

21 R. Nous ne connaissons pas les vraies raisons. Ceci ne nous a pas été

22 expliqué au moment de notre arrestation. Lorsque nous étions en prison et

23 lorsque nous avons reçu un acte d'accusation, l'acte d'accusation disait

24 que nous étions accusés de génocide, que nous avons voulu échapper au

25 service militaire et échapper à nos obligations de travail. Nous avons

26 également été accusés de collaboration avec l'ennemi, à savoir avec le camp

27 serbe.

28 Q. Est-ce qu'ils vous ont expliqué de quel type de génocide il s'agissait

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1 ?

2 R. Non, pas le procureur, mais Fahija Karkanj, un avocat, nous l'a

3 expliqué. En fait, il partageait la même cellule que moi. Il m'a dit quelle

4 était leur version du génocide, lorsqu'une assemblée se tient et qu'il y a

5 plus de trois personnes à un seul et même endroit, ils nous ont accusé

6 d'avoir préparé notre fuite en passant par les égouts, ce qui n'existe pas.

7 Nous avons simplement été pris chez nous et emmenés. Il y a quelque chose

8 qui a été dit dans la presse à propos - c'est mon frère qui m'a montré cela

9 - c'était une coupure de presse.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous arrêter, s'il vous

11 plaît.

12 Madame Edgerton.

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Encore une fois, cette déposition n'est pas

14 pertinente eu égard aux charges contre Dragomir Milosevic.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Encore une fois, veuillez expliquer

16 la pertinence de ceci, Maître Tapuskovic.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, il s'agit de terreur ici

18 qui prenait pour cible les civils à Sarajevo et de façon permanente.

19 C'était la terreur au sens propre du terme, des meurtres et des

20 arrestations sans justification. Je crois que si pris dans le contexte

21 général, ceci est très important, étant donné que nous parlons ici de

22 Dragomir Milosevic, et le fait qu'il ait répandu la terreur, dans d'autres

23 circonstances il devait simplement répondre aux activités de l'ennemi

24 lorsqu'il y avait des combats intenses. Pour ce qui est du sens littéral de

25 ce terme, et comme ceci a été interprété par le monde entier, ceci est

26 arrivé dans tout Sarajevo. Les gens ont été arrêtés de cette manière,

27 détenus en prison et tués, comme l'ami du témoin, le Dr Najdanovic. Il n'y

28 a jamais eu de terreur au sens de l'acte d'accusation. C'est la terreur qui

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1 régnait à Sarajevo comme cela a été décrit par ce témoin. Ceci n'est rien

2 d'autre qu'un comportement terroriste. Bien sûr, c'est à vous d'en

3 déterminer la pertinence, mais le fait que les gens disparaissent et le

4 fait que les gens étaient détenus, le fait que les gens soient détenus dans

5 des camps dans la zone de responsabilité de l'ABiH, c'est un exemple, un

6 cas d'espèce ici qui permet de montrer et démontrer la terreur, comme ceci

7 a été interprété dans le monde entier.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais je ne vois pas en quoi la

9 déposition de ce témoin devient pertinente par rapport aux chefs de terreur

10 contre l'accusé, quand bien même on serait d'accord sur la notion de

11 terreur. Ceci ne correspond pas à l'allégation faite par l'Accusation

12 contre l'accusé, et ceci n'est pas justifié. Peut-être qu'ils ont été

13 terrorisés, le médecin et ses amis, mais je ne vois pas comment votre

14 argument constitue une explication à cet égard et comment ceci vous permet

15 de mieux défendre votre thèse face aux chefs d'accusation présentés par

16 l'Accusation contre l'accusé. C'est cela qu'il vous faut expliquer.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Comme je vous l'ai expliqué à plusieurs

18 reprises à votre demande, l'intensité des combats menés par l'ABiH était

19 telle qu'il fallait riposter, ce qu'a fait l'armée de Republika Srpska.

20 Cette armée n'a pas mené une campagne qui était dirigée contre les civils.

21 D'après ce que nous avons pu entendre de témoins comme celui-ci

22 aujourd'hui, des témoins qui ont pu passer de l'autre côté dans la période

23 qui nous intéresse, à savoir celle qui est couverte par l'acte

24 d'accusation, ce que nous avons pu entendre de ces gens-là sur ce qui se

25 passait sur le territoire de la Republika Srpska est quelque chose qui a

26 renforcé leur détermination. Ils voulaient maintenir les positions qui

27 étaient les leurs, et ils n'ont jamais répondu de la même manière. C'est ce

28 que nous avançons. Mais ceci leur a permis de renforcer leur volonté et

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1 leur désir de tenir leurs positions, surtout au moment où Dragomir

2 Milosevic était commandant, de façon à ne pas subir le même sort que les

3 personnes qui se trouvaient de l'autre côté. De telles choses ne se sont

4 pas passées au sein du Corps de Sarajevo-Romanija au moment où Dragomir

5 Milosevic commandait ce corps.

6 Nous avons déjà expliqué ceci, et c'est une raison fort importante. C'est

7 la raison qui fait qu'ils ont pu garder leurs positions. Ceci a renforcé

8 leur détermination, et ils n'ont mené leurs activités qu'aux fins de

9 maintenir ces derniers, ce qui ne correspond pas à une campagne menée par

10 l'armée de Republika Srpska, surtout pendant la période où les civils ont

11 été pris pour cible, à savoir juin, juillet et les mois qui ont suivi. Il

12 n'y avait pas une telle campagne, surtout pas entre le mois d'août 1994 et

13 jusqu'à l'année 1995.

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Je maintiens mon objection, et j'insiste

15 sur le fait que nous parlons d'une période qui précède l'acte d'accusation.

16 Peut-être qu'il y a une question marginale relative à la pertinence, si on

17 peut parler en fait de quelque chose qui se serait produit pendant la

18 période couverte par l'acte d'accusation. Mais maintenant, nous parlons

19 d'une période en fait qui précède quasiment d'une année la période de

20 l'acte d'accusation.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, il ne s'agit pas

23 d'une question simple ici. Il n'est pas aisé de déterminer la pertinence de

24 ce témoignage. Ceci n'est pas très clair, et on ne peut pas en déterminer

25 la pertinence. Tout d'abord, il parle de la période qui précède l'acte

26 d'accusation comme l'a dit Mme Edgerton. Est-ce que vous allez recueillir

27 des éléments de preuve qui portent sur l'acte d'accusation avec ce témoin-

28 ci ? Veuillez ne pas faire un long discours. Répondez simplement par oui ou

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1 par non, s'il vous plaît.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'étais sur le

3 point de passer à cette période-là.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un de mes collègues est

5 particulièrement soucieux concernant l'absence de tout élément de preuve

6 portant sur les incidents précis de l'acte d'accusation, et m'a instruit de

7 vous poser des questions à cet égard. Est-ce que vous disposez d'éléments

8 de preuve par rapport à ces incidents précis, incidents de pilonnage et de

9 tirs embusqués qui sont exposés dans l'acte d'accusation ou est-ce que ceci

10 ne fait pas partie de la thèse que vous allez nous présenter ?

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messiers les Juges, par le truchement de

12 ce témoin, je dois reprendre l'acte d'accusation. Il est certain que je

13 dois répéter, cette fois-ci encore, que l'acte d'accusation n'aurait sans

14 doute pas évoqué la période qui précède le mois d'août 1994. Si ceci avait

15 été le cas, notre tâche aurait été bien plus aisée. Pardonnez-moi, je dois

16 me corriger. Il ne s'agit pas de l'acte d'accusation mais de la Défense. La

17 Défense aurait aimé ne pas devoir faire référence à la période qui a

18 précédé le commandement de Dragomir Milosevic, qui va du mois d'août 1994

19 au 21 novembre 1995. Dans ce cas-là, la Défense aurait pu traiter de cette

20 situation beaucoup plus aisée. Je dois dire encore une fois qu'un mois

21 avant le début du procès, nous avons reçu un acte d'accusation modifié.

22 Nous n'avons absolument pas pu présenter des arguments ou évoquer des

23 questions de procédure ou soulever des objections. Mais les chefs

24 d'accusation sont essentiels. Cet acte d'accusation déclare que Dragomir

25 Milosevic, à partir du jour où il a pris le commandement, a hérité de ce

26 commandement de la campagne qui avait été menée jusque-là.

27 Donc, la Défense s'est retrouvée dans une situation où elle ne

28 pouvait pas se passer de jours qui ont précédé la période couverte par

Page 7843

1 l'acte d'accusation. Il fallait évoquer les questions générales qui ont

2 précédées cette période. Par conséquent, nous nous sommes retrouvés dans

3 l'obligation d'évoquer les événements de 1992, 1993 et de présenter des

4 témoins comme celui-ci. Ce témoin, ce médecin, va parler d'éléments qui ont

5 également qui ont été évoqués par M. Pejic, à savoir les victimes, les

6 blessés et les pertes en hommes ou en femmes lorsqu'il a travaillé dans un

7 hôpital donné et ensuite dans un autre. Vous avez approuvé la déposition de

8 témoin à l'époque, après les écritures présentées par l'Accusation sur le

9 manque de pertinence et après nos réponses par écrit et le débat qui a

10 suivi. Vous avez décidé néanmoins que ceci était pertinent. Etant donné que

11 les victimes dans l'autre camp n'existaient pas de façon abstraite, étant

12 donné que ceci porte sur l'intensité des activités de l'ABiH, surtout dans

13 le courant de l'été 1995, alors qu'il n'y avait pas dans la période qui a

14 précédé des activités de combat aussi intenses.

15 Le témoin devrait pouvoir terminer sa déposition dans les dix minutes

16 qui vont suivre, pour ce qui est de la partie initiale. Ensuite, nous

17 voulons passer à une autre phase de sa déposition, lorsqu'il a travaillé

18 dans un autre hôpital. Il pourra nous parler des personnes qu'il a traitées

19 à cet endroit-là.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cette période porte sur quelle

21 date, s'il vous plaît ?

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] La période qui va de l'été 1994

23 jusqu'à la fin de la guerre.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Je crois que ceci nous

25 intéresse davantage.

26 M. le Juge Mindua a une question à poser.

27 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, ce n'est pas vraiment une

28 question, mais c'est une observation. Comme le Juge Président l'a dit, le

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1 travail des Juges est très délicat. Au départ, c'est normal pour nous, les

2 deux parties, le Procureur et la Défense, vous êtes à égalité. Chaque

3 partie doit mettre en avant ses arguments. En ce qui me concerne, je

4 comprends la position du Procureur et je comprends ou j'essaie de

5 comprendre, parce que le Procureur amène un acte d'accusation et vous, vous

6 venez évidemment pour mettre en avant cet acte d'accusation. C'est pour

7 cela que je fais des efforts pour comprendre le travail que vous êtes en

8 train de faire maintenant. Alors, je voudrais vous résumer pour être sûr

9 que je vous comprends bien.

10 Il y a la période pré-acte d'accusation et la période -- non qu'est-

11 ce que je dis ? Il y a la période qui précède le commandement du général

12 Milosevic et la période qui part de son commandement, évidemment, jusqu'à

13 la fin. Vous avez raison de dire que, selon l'acte d'accusation, il a

14 hérité de la campagne du général Galic. C'est là votre argumentation de la

15 terreur.

16 Vous êtes en train de nous démontrer, si je comprends bien - si je ne

17 comprends pas il faut me corriger - que cette terreur, en fait, si elle

18 existait, n'était pas le fait du général Milosevic parce qu'elle était

19 générale et concernait tout le monde, Musulmans et Serbes. C'est bien cela

20 ? Si elle existait, elle concernait tout le monde.

21 Pour ce qui est du commandement du général Milosevic, la question que

22 je voudrais vous poser : c'est de savoir si votre thèse c'est toujours la

23 terreur qui n'existait pas ou qui existait pour tout le monde,

24 indistinctement, et si vous allez ou pas vous appesantir sur les incidents

25 que le Procureur cite dans son acte d'accusation ? Vous n'êtes pas obligé,

26 c'est votre stratégie, mais c'est juste la question que je pose pour savoir

27 si, à partir du commandement du général Milosevic, vous allez vous

28 appesantir encore une fois sur l'augmentation de la terreur ou si vous

Page 7846

1 allez vous attacher à détruire des arguments du Procureur en ce qui

2 concerne les incidents spécifiques. Voilà mon observation.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

4 Juges, si nous nous en étions tenus à l'acte d'accusation initial que nous

5 avions un mois et demi avant le début du procès, j'aurais exclusivement

6 traité de cette période. J'aurais tenté de démontrer quelle était la

7 situation depuis le mois d'octobre jusqu'au mois de décembre -- entre le

8 mois d'août et le mois de décembre 1994, puis entre le mois de décembre

9 jusqu'au mois de mai 1995, et ainsi de suite. Ce que l'on aurait pu faire

10 concernant l'acte d'accusation, ce que nous avons fait, c'est que nous

11 avons présenté un certain nombre d'éléments de preuve que nous avons pu

12 recueillir. Tout ce que nous avons pu recueillir, nous les avons

13 recueillis, mais il n'a jamais été possible, même pas pendant la durée des

14 événements, il n'a pas été possible à aucun officier de la Republika Srpska

15 d'aller du côté où il y avait un contrôle effectif effectué par l'ABiH pour

16 effectuer une enquête supplémentaire pour enquêter sur ce dont est accusé

17 Dragomir Milosevic. Nous allons essayer de démontrer qu'il n'a pas été

18 possible de mener aucune enquête parce qu'il était absolument impossible de

19 passer de l'autre côté et d'essayer de déterminer certains faits. Ce que

20 toutefois nous pouvons faire, dans le contexte des éléments de preuve

21 présentés par le Procureur, est d'analyser chacun des incidents un par un.

22 Nous pourrons analyser chacun des ces incidents, nous devons attendre la

23 fin du procès et c'est ainsi que nous ferons de notre mieux pour essayer de

24 vous démontrer nos arguments selon lesquels nous estimons que ces incidents

25 non pas été prouvés en tant que quelque chose qui était fait directement

26 par Dragomir Milosevic.

27 L'Honorable, Monsieur le Juge Mindua, cela sera notre devoir. Notre devoir

28 sera difficile, mais c'est notre devoir principal. Nous pensons que d'après

Page 7847

1 les éléments de preuve déjà démontrés par le Procureur, que nous allons

2 pouvoir détruire certaines thèses et nous allons pouvoir démontrer que ce

3 n'est pas du tout que les choses ne se sont pas déroulées comme le prétend

4 le Procureur. Ce n'est que dans quelques cas que nous sommes en mesure de

5 vous présenter des éléments de preuve des témoins tel quel vous avez

6 entendu le témoin ici il y a quelques semaines, le témoin qui a parlé de

7 Grdonja nous n'avons été en mesure qu'à ce moment-là, que par le biais de

8 ces deux témoins de vous démontrer certains faits, mais nous n'avons pas

9 toujours la possibilité de trouver des témoins qui peuvent parler de ce

10 genre de faits. Alors, voici notre défense. La Défense estime que c'est sa

11 tâche la plus difficile, la tâche d'examiner les incidents. Mais dans les

12 circonstances, nous pouvons seulement maintenant parler des éléments de

13 preuve que nous pouvons prouver, c'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de

14 campagne. Il n'y a absolument pas eu de campagne comme étant quelque chose

15 qui dominait, une campagne qui dominait. C'est la partie la plus difficile

16 de l'acte d'accusation. Il n'y a pas eu de terreur menée sur la population.

17 C'est ce que j'ai déjà essayé d'expliquer à plusieurs reprises, pour ne pas

18 répéter, mais nous voulions absolument démontrer que cette campagne dont le

19 but principal -- voilà c'est la campagne figure dans l'acte d'accusation,

20 ensuite nous allons parler des incidents et c'est notre devoir de vous

21 démontrer ou nous vous démontrerons en temps voulu, nous vous parlerons des

22 incidents un par un.

23 M. LE JUGE MINDUA : Maître, merci beaucoup.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Waespi. Je vous

25 écoute.

26 M. WAESPI : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Un point

27 important que je voulais soulever. C'est un point de nature générale. Me

28 Tapuskovic a dit que l'Accusation a changé les règles du jeu en délivrant

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1 un nouvel acte d'accusation modifié un mois avant le procès, mais l'acte

2 d'accusation reprend presque de façon verbatim tout ce qui est énoncé dans

3 l'ancien acte d'accusation, c'est que cela a été peut-être dit de façon un

4 peu plus claire dans l'ancien acte d'accusation. Par exemple, au paragraphe

5 4 on dit : "Pendant 44 mois, le Corps de Sarajevo-Romanija a mené à bien

6 une stratégie militaire envoyant le pilonnage et les tireurs embusqués pour

7 tuer, blesser et terroriser la population civile de Sarajevo. Le pilonnage

8 et les tireurs embusqués ont blessé des milliers de civils des deux sexes

9 de tous âges, y compris les enfants et les personnes âgées."

10 Ensuite dans l'acte original, on parle du rôle de l'accusé comme

11 étant chef d'état-major sous le général Galic, mais le mot "inherited",

12 c'est un nouveau mot, "hérité". Le fait d'avoir hérité, c'est que le chef

13 d'état-major pendant la période de Galic a repris cette campagne, a hérité

14 de cette campagne. C'est ce qui a été repris. C'est un peu plus clair. Ici,

15 on parle peut-être un peu plus des rôles précédents, des rôles qu'avait

16 l'accusé, des rôles précédents qu'il avait en tant que commandant de la 1ère

17 Brigade de Sarajevo en 1992, mais les caractéristiques et la campagne n'a

18 pas changé. Je trouve qu'il est très important que je vous dise, Monsieur

19 le Président, Messieurs les Juges, que l'affaire est absolument la même,

20 l'ancien acte d'accusation et le nouvel acte d'accusation, l'acte

21 d'accusation modifié, les deux sont absolument identiques pour ce qui est

22 du fond.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que l'accusé a

24 hérité. Lorsque vous dites qu'il a hérité de la campagne du général Galic,

25 il serait fort utile à la Défense si vous pouviez -- enfin, la Défense

26 devrait bien pouvoir démontrer qu'il n'y a pas eu de telle campagne pendant

27 que le général Galic était chef, donc l'accusé était général, était chef

28 d'état-major, et donc l'accusé n'aurait pas pu hériter de cette campagne,

Page 7849

1 si l'on a pas démontré que le général Galic n'a pas exécuté une campagne de

2 terreur.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître

5 Tapuskovic.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

7 Messieurs les Juges.

8 Mais avant de poursuivre l'interrogatoire principal de ce témoin, il

9 ne nous reste pas encore trop de temps pour ce témoin. En fait, je crois

10 pouvoir en terminer avant la pause. Je voudrais que le document 65 ter 3388

11 soit versé au dossier.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document sera versé au dossier.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Sous pli scellé, je vous prie.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Ce document sera versé au

15 dossier sous pli scellé.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

17 Juges, ce document sera versé au dossier en tant que pièce D289, sous pli

18 scellé.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

20 Q. Monsieur le Témoin T-61, avec votre permission, je voudrais que l'on

21 accélère un peu le pas pour ne pas revenir en arrière et pour ne plus

22 parler de la prison, je voudrais vous demander jusqu'à quand êtes-vous

23 resté en prison ?

24 R. J'ai fait l'objet d'un échange et je suis passé sur le territoire serbe

25 en date du 16 juin 1994, et j'ai passé cinq mois et demi en prison.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je souhaiterais passer pour quelques brefs

27 instants, Monsieur le Président, en audience à huis clos partiel.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, huis clos partiel, je

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1 vous prie.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

3 Juges, nous sommes à huis clos partiel.

4 [Audience à huis clos partiel]

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18 (expurgé)

19 [Audience publique]

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

21 Q. Où se trouvait cet hôpital ?

22 R. L'hôpital se trouvait sur Trebevic, tout près de Mojmilo. L'hôpital

23 était à l'est de Sarajevo, à environ trois kilomètres de l'aéroport, mais

24 il y avait également des soldats de l'armée de la Republika Srpska qui

25 étaient soignés dans cet hôpital ainsi que des civils de Grbavica, Vrace,

26 d'Ilidza et autour de Nedzarici et Trnovo, et Kalinovik, ainsi que

27 Dobrinje, Lukavica, tout comme les autres hameaux avoisinants.

28 Q. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si c'est bien au mois de juin

Page 7851

1 que vous dites --

2 R. Oui, c'était vers la fin du mois de juin.

3 Q. Avez-vous jamais rencontré le général Dragomir Milosevic ?

4 R. Je l'ai vu ici pour la première fois. J'avais entendu parler de lui

5 bien sûr, je connaissais son nom, mais pour ce qui est de la date de la

6 passation des fonctions, et à quelle date il aurait repris les fonctions du

7 commandant précédent, je ne le sais pas.

8 Q. Que faisiez-vous ?

9 R. Je travaillais à l'hôpital. J'habitais également à l'hôpital. C'est là

10 que je dormais. J'ai passé quatre mois à Treskavica et à Kalinovik où nous

11 avions des unités médicales mobiles.

12 Q. Jusqu'à quand êtes-vous resté à l'hôpital ?

13 R. Jusqu'à la fin de la guerre, en fait jusqu'au mois de mars ou avril

14 1996.

15 Q. Pourriez-vous, je vous prie, répondre encore à quelques questions ?

16 Monsieur, vous dites que c'est en juin vers la fin de juin que vous êtes

17 retourné à l'hôpital. Pourriez-vous nous expliquer la situation qui

18 prévalait à l'hôpital s'agissant des blessés que l'hôpital soignait, et ce,

19 jusqu'à la fin de 1994 ?

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne suis plus à huis clos partiel,

21 n'est-ce pas ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ? Bien. Alors, je me souviens

23 que lorsque je suis retourné à l'hôpital de Kasindol, et ce, jusqu'à la fin

24 de cette année. Toute cette période était une période relativement calme.

25 Les activités militaires étaient assez rares. Les blessés n'étaient pas

26 très nombreux. Les soldats blessés n'étaient pas très nombreux, mais il y

27 avait plutôt des blessés à Grbavica. C'était une localité assez densément

28 peuplée. Mais tout près de là il y avait un endroit qui s'appelait Debelo

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1 Brdo ou Debeli Brijeg qui se trouve tout juste derrière cette localité.

2 C'est de là que l'on tirait avec toutes sortes d'armes. Je me souviens

3 qu'un après-midi quatre femmes très blessées se sont présentées à

4 l'hôpital, car je crois que cette journée-là les activités de combat

5 étaient beaucoup plus violentes.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Monsieur le Témoin T-61, cette période d'accalmie ou cette période plus

8 calme a duré jusqu'à quand ?

9 R. C'était jusqu'en octobre environ. Déjà au mois d'octobre, il nous a

10 fallu déplacer l'équipe mobile de chirurgie à Kalinovik, et il nous a fallu

11 passer par un détour. Nous avons fait 300 kilomètres pour y arriver, car la

12 route Kalinovik-Kasindol-Sarajevo avait été coupée, cette route ne pouvait

13 être plus empruntée pour évacuer les blessés. Donc nous avions dû sortir.

14 Il y avait une équipe mobile de trois chirurgiens composée et d'autre

15 personnel et nous avons dû aller à Kalinovik, à la caserne de Kalinovik.

16 Nous avons fait un détour de 300 kilomètres même si l'ancienne route ne

17 faisait que 50 kilomètres. C'est à ce moment-là que les activités se sont

18 faites plus violentes, mais c'était plutôt à Treskavica qui était un

19 quartier où habitaient les civils, c'est là que - lorsque nous étions à cet

20 endroit-là - nous avons commencé à prodiguer des soins plutôt aux soldats

21 qu'aux civils à cet endroit-là.

22 Q. Combien de temps est-ce que cela a duré ?

23 R. Il m'est bien difficile de déterminer cette période.

24 Q. Est-ce que plus tard il y a eu une autre période ?

25 R. Pendant l'été 1994 ?

26 Q. Non, je parle du début de 1995.

27 R. Début 1995, début de l'hiver à la fin du printemps. Parlons du mois de

28 mars. Il y avait des activités sur Igman et Treskavica. J'étais à Kalinovik

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1 avec mes collègues.

2 Q. Quelle était la période la plus difficile ?

3 R. Juin, juillet 1995 et novembre 1995. Ce sont les périodes les plus

4 difficiles. En juin, j'étais à Kasindol, alors qu'en novembre j'étais à

5 Kalinovik. Pour ce qui est de Kalinovik, Kalinovik a fait l'objet de

6 pilonnages intenses. Il y a eu une élève qui a trouvé la mort devant un

7 hôpital, et il y a eu aussi une installation qui a été touchée,

8 l'installation où nous trouvions mais sans de très grands dégâts. J'ai été

9 également blessé par un éclat d'obus, mais cet éclat d'obus n'a fait que

10 déchirer mon pantalon.

11 Q. Je voudrais maintenant parler du mois de juin et juillet --

12 R. Vous parlez de 1995 ?

13 Q. Oui.

14 R. La période était assez difficile, c'est à ce moment-là qu'on a pilonné

15 Lukavica, je crois. On a également pilonné les installations qui se

16 trouvaient autour de Kalinovik. On a également bombardé les ponts de Foca,

17 c'est ainsi que toutes les communications avaient été coupées.

18 Q. Excusez-moi, je vous interromps ici. Je voudrais vous demander de nous

19 dire quelle était la situation dans les municipalités de Sarajevo ?

20 R. Sarajevo, il y a Lukavica, pour les municipalités de Sarajevo, elle a

21 été pilonnée fortement, elle a perdu plusieurs bâtiments, plusieurs civils

22 ont été blessés, il y avait un certain nombre de soldats aussi; mais Trnovo

23 a également fait l'objet de grands dégâts. Puisque notre équipe n'a pas pu

24 aller à Trnovo, nous avons lancé un appel au personnel de l'hôpital de Foca

25 qui leur est venu en aide.

26 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire combien il y avait de blessés à

27 cette époque-là et quelle était la nature des blessures ?

28 R. C'étaient des blessures causées par le pilonnage, puisque les forces

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1 armées étaient beaucoup plus loin. On ne pouvait pas nécessairement tuer ou

2 blesser avec quelqu'un avec des armes d'infanterie. Ce n'était pas

3 possible. Mais si vous pensez à la composition de la population il y avait

4 beaucoup plus de civils à Trnovo que de soldats.

5 Q. Je vous remercie.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Monsieur

7 le Président, Messieurs les Juges.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

9 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Mais je remarque l'heure, et puisque

10 la majeure partie du témoignage de ce témoin de ce matin a traité des

11 événements autour de l'hôpital de Kosevo et l'emploi des armes, nous

12 n'avons pas du tout eu un préavis dans le résumé 65 ter sur cela. Je vous

13 demanderais peut-être quelque chose d'un peu inhabituel, c'est-à-dire de

14 prendre une pause maintenant et de reprendre nos travaux à la fin de la

15 pause habituelle. C'est ce qui me permettrait d'examiner quelque peu la

16 situation et de me préparer.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Puisque vous l'avez dit vous-

18 même, il s'agit d'une demande un peu inhabituelle, mais vous l'avez déjà

19 fait auparavant. Ce n'est pas tout à fait une demande inhabituelle.

20 Oui, Maître Tapuskovic.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ici il est

22 clairement écrit : "Le début du conflit armé de Sarajevo."

23 [en français] "Du fonctionnement surtout de Bosnie Herzégovine depuis

24 l'hôpital Kosevo."

25 [interprétation] Il est clairement dit dans le résumé 65 ter que nous

26 allions parler de ceci ainsi que des tirs provenant de l'hôpital.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Eu égard aux circonstances,

Page 7855

1 nous allons faire droit à votre requête, Maître Edgerton. Nous reprendrons

2 nos travaux à dix minutes avant 11 heures, c'est-à-dire 10 heures 50.

3 --- L'audience est suspendue à 10 heures 24.

4 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez la

6 parole.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :

9 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin T-61, maintenant je voudrais vous

10 poser des questions qui découlent de votre témoignage et du témoignage que

11 vous avez déjà fait devant ce Tribunal et devant d'autres autorités. Si

12 vous ne comprenez pas quelque chose ou ce que je dis, s'il vous plaît,

13 dites-le-moi.

14 R. Oui.

15 Q. Merci. Maintenant, je voudrais préciser certaines choses. D'après ce

16 que vous avez dit et ce que j'ai compris, du mois de janvier jusqu'au mois

17 de juin 1994, vous avez été détenu, n'est-ce pas ?

18 R. Entre le 2 janvier et le 16 juin 1994.

19 Q. A partir de votre échange, si j'ose appeler cela ainsi, jusqu'à la fin

20 du conflit, vous n'étiez pas sur le territoire contrôlé par les autorités

21 bosniennes, n'est-ce pas ?

22 R. Non.

23 Q. Sur la base de votre expérience personnelle, vous n'avez pas

24 d'information concernant la situation à Sarajevo à partir du mois de

25 janvier 1994; c'est vrai ?

26 R. Oui, nous écoutions les deux télévisions. C'est vrai qu'à partir de ce

27 moment-là, je n'ai pas eu d'expériences personnelles pour ce qui est de

28 cette situation. Nous écoutions la radio également.

Page 7856

1 Q. Lorsque vous avez dit, "la télévision des deux côtés," je comprends que

2 vous avez regardé la télévision bosnienne et serbe ainsi que la radio

3 bosnienne et serbe, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. Merci. Ai-je raison pour dire que, si j'ai bien compris, durant le

6 conflit il y avait au moins trois hôpitaux dans la ville de Sarajevo tenue

7 par les autorités bosniennes qui recevaient des patients, Kosevo, l'hôpital

8 d'Etat et l'hôpital à Dobrinja, n'est-ce pas ?

9 R. L'hôpital à Dobrinja est un dispensaire de 20 lits et Hadzi Jusuf était

10 à la tête de cet hôpital, il était mon collègue lorsque je travaillais à

11 Sarajevo, j'étais son chef à l'époque.

12 Q. Les gens venaient pour chercher de l'aide dans ces hôpitaux. Cela

13 dépendait de la région où ils vivaient et du fait vers quel hôpital ils

14 pouvaient se diriger -- à quel hôpital ils ont eu accès.

15 R. Au début de la guerre, c'était un peu différent. Mais un peu plus tard,

16 il y avait un centre de tri à la clinique où je travaillais. C'était

17 pendant les premiers cinq ou six mois. Ce tri a été fait par l'équipe dont

18 j'étais chef. Nous envoyions les gens à toutes les cliniques de chirurgie

19 et à l'hôpital d'Etat qui auparavant était l'hôpital militaire. Nous

20 n'envoyions pas les patients à l'hôpital de Dobrinja parce que c'était

21 risqué et d'ailleurs, cet hôpital était petit.

22 Q. Maintenant, je vais aborder un autre sujet. J'ai compris que vous

23 n'avez pas vu, pour ce qui est de la période allant d'août 1994 à novembre

24 1995, vous n'avez pas vu en personne les soldats autour de l'hôpital

25 Kosevo, parce que tout simplement vous n'étiez pas là-bas.

26 R. Oui, je n'étais pas là-bas. Il faut que j'ajoute quelque chose. La

27 télévision montrait la faculté, le bâtiment, c'était à proximité de

28 l'hôpital. Il y avait des exercices militaires dans l'enceinte de la

Page 7857

1 faculté. On disposait de certaines informations indirectes.

2 Q. Je vais parler des médias un peu plus tard, mais pour ce qui est de

3 cela, vous n'avez pas vu, entre août 1994 et novembre 1995, les forces

4 bosniennes tirer quoi que ce soit de l'enceinte de l'hôpital ou d'autres

5 installations. Vous n'avez pas vu cela vous en personne ?

6 R. J'étais à dix kilomètres plus loin et je n'étais pas en mesure de voir

7 cela.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci. A la ligne -- à la page 34, à la

10 ligne 9, il a été question de l'école pour l'artillerie qui organisait des

11 exercices. Ici, il est consigné au compte rendu, des "soldats". Ce ne sont

12 pas les propos du témoin.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que vous dites que le

14 témoin a dit quoi ?

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ma collègue a suivi le compte rendu.

16 L'école d'artillerie qui organisait des exercices là-bas, est-ce que le

17 témoin peut confirmer ?

18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Ce

19 n'était pas ma question posée au témoin. Je ne sais pas de quoi il s'agit

20 précisément pour ce qui est du compte rendu.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettons au témoin de nous dire

22 lui-même ce qu'il a dit.

23 Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez dit que vous avez vu les membres

24 des unités participant à des exercices ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant que j'étais à Sarajevo, jusqu'au 30

26 janvier 1994, il y avait une école d'artillerie qui a été formée au début

27 de la guerre, pendant les premiers mois de la guerre. Je crois que cette

28 école a continué à fonctionner jusqu'à la fin de la guerre, mais je ne peux

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1 pas affirmer cela avec certitude parce que je ne sais pas.

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Ma question posée au témoin était si le

3 témoin a vu les forces bosniennes tirer ou lancer quoi que ce soit de

4 l'enceinte de l'hôpital entre août 1994 et novembre 1995, mais je vais

5 retirer cette question.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais ce qui m'intéresse c'est

7 de savoir c'est de quelle école d'artillerie le témoin a parlé et qui a

8 formé cette école, et où se trouvait exactement cette école ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] L'école se trouvait dans le bâtiment de la

10 faculté d'architecture. Il s'agit d'un bâtiment à deux ailes. Ma fille

11 aînée a étudié à cette faculté d'architecture. En été 1992, je me suis

12 rendu à la faculté pour récupérer ses papiers. Il y avait des gardiens qui

13 m'ont empêché d'y entrer. C'est dans ce bâtiment que se trouvait l'école

14 d'artillerie. Une dame du service pour les étudiants est entrée dans le

15 bâtiment et je suis resté à l'attendre devant le bâtiment. C'est comme cela

16 que j'ai vu cela de mes propres yeux. En passant par ce bâtiment tous les

17 jours en allant au travail, j'ai vu les membres de l'armée ainsi que les

18 gardiens, bien sûr pendant que j'étais à Sarajevo. Cela était sous le

19 contrôle des Musulmans.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Où se trouvait exactement

21 l'école par rapport à l'hôpital ? Est-ce que l'école se trouvait à

22 l'hôpital ou à côté de l'hôpital ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] L'école ne se trouvait pas à l'hôpital.

24 L'école se trouvait à 50 ou 70 mètres en dessous du bâtiment où je

25 travaillais. Il y avait d'ailleurs quatre bâtiments. Dans un bâtiment se

26 trouvait la faculté; dans le deuxième, l'institut pour la circulation; le

27 troisième pour les matériaux de construction, cet institut de trouvait à

28 une vingtaine de mètres du bâtiment où je travaillais. Les autres bâtiments

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1 se trouvaient à l'enceinte.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cette école avait-elle été formée

3 par l'ABiH, par les Musulmans de Bosnie ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce qu'il n'y avait pas d'autres armées

5 là-bas. C'était l'ABiH.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Madame Edgerton, continuez.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Aux fins du compte rendu, Monsieur le

8 Président, il faut dire que l'Accusation est prête à admettre qu'à un

9 moment donné en juin ou en juillet 1992, il y avait deux chars là-bas qui

10 se trouvaient au début à la faculté de l'architecture et du génie et cela

11 se trouvait à une centaine de mètres de l'hôpital Kosevo. Nous sommes prêts

12 à admettre cela. Pourtant, très vite après le début, l'un de ces chars ne

13 pouvait plus fonctionner et l'autre a été déplacé dans le tunnel de

14 Ciglane.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous admettez qu'il y

16 avait une école d'artillerie qui a été créée là-bas ?

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Non.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ma collègue a dit

20 que l'Accusation était prête à admettre. C'est une sorte de témoignage. Je

21 m'attends ce que le Procureur demande au témoin : quel était le nombre de

22 pièces d'artillerie. Ma collègue de l'Accusation a dit qu'elle est prête à

23 admettre, mais admettre quoi parce que le témoin n'a rien dit par rapport à

24 cela. Il n'a pas encore répondu à la question du Procureur concernant les

25 chars, et le Procureur dit que l'Accusation est prête à admettre le fait

26 qu'il y avait deux chars. Je pense que cette question n'est pas du tout

27 appropriée.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, peut-être que je ne comprends

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1 pas bien Mme Edgerton. Madame Edgerton, ce que vous avez fait, vous n'avez

2 pas posé de question concernant les chars.

3 Mme EDGERTON : [interprétation] Ma question était limitée uniquement à la

4 période entre 1994 et 1995.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Dans la discussion menée entre vous,

7 Monsieur le Président, et mon éminent collègue, par rapport à cette

8 discussion je voulais dire que nous sommes prêts à accepter certaines

9 choses qui pourront accélérer les choses concernant la période avant la

10 période de l'acte d'accusation.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est par rapport à 1992. C'est ce

12 que vous êtes prêts à admettre, mais vous n'avez pas posé de questions au

13 témoin par rapport à cela.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est à vous, Maître Tapuskovic, de

16 décider pour ce qui est de votre réaction à cela.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que je peux continuer, Monsieur le

18 Président ?

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

21 Q. Monsieur le Témoin 61, revenons à notre sujet principal. Vous en

22 personne -- et maintenant je dois répéter certaines choses. Vous n'avez pas

23 vu, entre août 1994 et novembre 1995, des soldats armés à l'hôpital ou

24 autour de l'hôpital Kosevo, n'est-ce pas ?

25 R. J'étais 12 kilomètres plus loin de l'hôpital Kosevo, et je ne pouvais

26 pas voir cela. Je répète ça pour la troisième fois.

27 Q. Merci. Cela s'applique également aux forces bosniennes, à savoir si les

28 forces bosniennes tiraient de l'hôpital ou des installations de l'hôpital ?

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1 R. Oui, c'est oui.

2 Q. Est-ce qu'il y avait des chars ou d'autres pièces d'artillerie situés

3 dans l'enceinte de l'hôpital ? Est-ce vrai ?

4 R. Tout cela était à la proximité de l'enceinte de l'hôpital. Les chars se

5 trouvaient à la proximité de l'enceinte de l'hôpital, en dessous de

6 l'enceinte de l'hôpital, je disais cela tout le temps. Ce qui s'est passé

7 entre janvier 1994 jusqu'à la fin de la guerre, je ne sais pas parce que

8 j'étais en prison, et je n'empruntais pas ce chemin pour aller au travail

9 parce que j'étais en prison.

10 Q. Est-ce que par rapport au fait de savoir s'il y avait des installations

11 militaires à l'hôpital ou autour de l'hôpital, et pour être plus précis

12 nous parlons de l'enceinte de l'hôpital Kosevo. Dites-nous s'il y avait des

13 installations militaires opérationnelles.

14 R. Pour ce qui est de la période allant de l'année 1994 et plus tard, je

15 n'en sais rien. La faculté d'architecture a été, pendant toute la guerre,

16 déplacée dans le bâtiment de la faculté de médecine et la faculté de génie

17 dans le bâtiment de la faculté de mécanique.

18 Q. J'ai compris que ce que vous avez affirmé dans ce sens-là, c'est une

19 affirmation qui provient de ouï-dire, ce que vous avez vu dans les médias.

20 R. Oui. J'ai regardé les deux télévisions, les deux radios, serbe et

21 bosnienne, et on recevait la presse des soldats de la FORPRONU. Je pense à

22 la presse provenant du territoire contrôlé par les Musulmans.

23 Q. Merci. Puisque vous n'étiez pas là-bas, vous ne pouvez rien dire pour

24 ce qui est de la fréquence d'arrivée des patients ou du nombre d'admissions

25 des patients à l'hôpital Kosevo, les patients qui ont été blessés par obus

26 durant août 1994 jusqu'au mois de novembre 1995.

27 R. Je n'ai pas de réponse à cette question. Je n'étais pas là-bas.

28 Q. Revenons à la période pendant laquelle vous étiez là-bas. Monsieur,

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1 vous avez dit lors de l'interrogatoire principal, vous avez parlé de la

2 proportion de civils blessés et de gens blessés qui auraient pu être

3 engagés dans des activités militaires. Est-ce que j'ai raison pour dire que

4 ces proportions auraient pu varier d'un hôpital à l'autre, parce qu'il

5 s'agissait de régions très différentes, des régions ou des zones de la

6 ville où ces hôpitaux étaient situés ?

7 R. A l'hôpital de Dobrinja, à Nedzarici, il y avait la plupart des soldats

8 qui ont été admis parce que là-bas se trouvait la ligne de séparation.

9 Alors qu'à l'hôpital de Kosevo il y avait entre 60 et 70 % des soldats qui

10 ont été accueillis et 30 % des civils. Ce sont des pourcentages moyens.

11 Parfois la situation était différente.

12 Q. Monsieur, durant votre témoignage aujourd'hui, vous avez dit qu'entre

13 50 et 60 % des blessés étaient soldats et entre 30 et

14 40 % étaient des civils. Est-ce que vous venez de dire que cette proportion

15 que vous avez mentionnée auparavant est inexacte ?

16 R. Après 15 ans, il m'est difficile de retenir ces pourcentages. Personne

17 n'a calculé et n'a fait des rapports portant là-dessus. Donc parler d'un

18 pourcentage qui dépasse le pourcentage que j'ai donné de 3 ou 5 %, il est

19 impossible de dire exactement quel était le pourcentage des blessés.

20 Q. Bien. Pourriez-vous dire la chose suivante : est-ce que les incidents

21 provoqués par des obus et des tirs de tireurs embusqués, bien que les

22 chiffres soient différents, est-ce que c'était sans cesse ? Permettez-moi

23 d'être un peu plus clair dans ma question.

24 Est-ce que vous avez vu des blessures provoquées par des obus ou des

25 tirs de tireurs embusqués pendant que vous étiez là-bas ?

26 R. Il y a une différence entre la blessure provoquée par une balle et

27 provoquée par obus. On ne peut pas faire une différence provoquée par balle

28 de tireurs embusqués, parce que souvent ou presque tout le temps, les gens

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1 qui sont blessés par balle de tireurs embusqués n'arrivent pas à l'hôpital,

2 n'arrivent pas vivants à l'hôpital. Il y a très peu de chance que la

3 personne qui est blessée par balle de tireurs embusqués survive à l'arrivée

4 à l'hôpital, parce que les tireurs embusqués ciblent la plupart du temps la

5 tête et la poitrine.

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Juste un instant.

7 Q. Pour ce qui est par rapport aux civils à l'hôpital, est-ce qu'il y

8 avait une plus grande proportion de ceux qui ont été blessés par balle de

9 tireurs embusqués ? Dans le compte rendu, il est écrit, "les autres

10 civils."

11 Je parle des civils qui ont été accueillis à l'hôpital. Est-ce que la

12 proportion des civils blessés par balle de tireurs embusqués était plus

13 grande par rapport aux autres blessures ?

14 R. Je vous ai dit qu'un chirurgien ne peut pas faire la différence

15 entre blessures provoquées par balle d'un tireur embusqué et par d'autres

16 armes. Nous faisions une différence entre les blessures provoquées par un

17 obus ou un engin explosif et d'autres armes d'artillerie.

18 Q. Lorsque vous dites "la blessure d'entrée", est-ce qu'il s'agit d'une

19 blessure par balle ?

20 R. Les deux. Les deux types de blessures, par balle et par projectile, par

21 explosion, ont toutes les deux un point d'entrée et un point de sortie.

22 Q. Mais c'est différent, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Quelle est la proportion des patients civils que vous avez traités qui

25 ont été blessés et avaient des blessures provoquées par des obus ?

26 R. Peut-être qu'une moitié était des patients avec des blessures

27 provoquées par balle et l'autre moitié par engins explosifs, mais cela

28 variait. Lorsqu'il y avait des activités de combat, il y avait plus de

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1 civils qui venaient. Il y en avait plus qui se présentaient comme civils,

2 mais parmi eux il y avait des soldats mais qui portaient des vêtements

3 civils. Les données statistiques n'ont pas été collectées de façon correcte

4 et n'ont pas été publiées.

5 Q. Avec tout le respect que je vous dois, à Sarajevo pendant le conflit,

6 il y avait deux types de blessures, n'est-ce pas ? Des blessures causées

7 par explosion et des blessures causées par balle, n'est-ce pas ?

8 R. Oui. C'est ce que j'ai déjà dit aujourd'hui à deux reprises.

9 Q. Tous les civils que vous avez traités avec peu d'exception qui venaient

10 à votre clinique étaient victimes de ce type de blessures, n'est-ce pas ?

11 R. Il y avait deux types de blessures si vous pensez à la cause de ces

12 blessures ou armes qui ont été utilisées par causer ces blessures.

13 Q. Je vous remercie. Vous avez traité des civils qui avaient des blessures

14 provoquées par des tirs de tireurs embusqués et par des obus à partir

15 d'avril 1992, --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

18 Juges, déjà la troisième fois on dit : les blessures provoquées par balle

19 de tireurs embusqués. Le témoin a déjà dit plusieurs fois des blessures par

20 balle et des blessures par explosion ou engins explosifs. Ma collègue dit

21 constamment blessures provoquées par balle de tireurs embusqués, mais lui

22 il a dit qu'il ne pouvait que déterminer s'il s'agissait d'une blessure par

23 balle ou d'une blessure par explosion ou engin explosif. Ma collègue répète

24 pour la troisième fois qu'il y avait des blessures provoquées par balle de

25 tireurs embusqués et il a déjà dit qu'il n'était en mesure que de

26 distinguer une blessure par balle, d'une blessure par explosion ou par un

27 engin explosif.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est vrai, Madame Edgerton. Le

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1 témoin a dit et il a répété qu'il ne pouvait pas faire une distinction

2 entre des blessures provoquées par balle de tireurs embusqués et par obus.

3 Donc, il n'est pas approprié de lui poser des questions pour savoir s'il a

4 traité des civils qui avaient ces deux types de blessures.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Il a dit cela, mais, Monsieur le Président,

6 des blessures par balle et des blessures par explosion ou engin explosif

7 sont très différentes les unes des autres et par rapport aux autres

8 blessures provoquées par d'autres armes d'infanterie. Je pourrais peut-être

9 utiliser cette expression en faisant la différence entre les blessures

10 provoquées par les armes d'infanterie, d'autres armes d'infanterie.

11 Q. Donc, vous avez traité les blessures provoquées par balle et provoquées

12 par obus en avril 1992, à partir de ce mois-ci ?

13 R. Une grenade également représente une arme d'infanterie. Il y a deux

14 types de blessures de guerre. Je suis spécialiste en traumatologie, en

15 chirurgie. Un chirurgien ne peut distinguer qu'une blessure par balle d'une

16 blessure d'obus, de grenade, d'autres engins explosifs. Un chirurgien ne

17 peut faire d'autres distinctions par rapport aux blessures de guerre, dire

18 autre chose par rapport à la distinction de ces blessures est inexact d'un

19 point de vue médical. Pour ce qui est de ces engins explosifs tous le

20 soldats portent avec eux entre deux et trois grenades et ce sont aussi des

21 engins explosifs.

22 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche un document sur

23 nos écrans. Il s'agit du document 03381. La version en B/C/S est difficile

24 à lire. Les caractères sont petits.

25 Q. Est-ce que vous arrivez à voir le document qui se trouve à droite de

26 votre écran ?

27 R. Oui.

28 Q. Ai-je raison de dire qu'il s'agit d'un rapport médical qui

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1 porte sur --

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Permettez-moi --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je connaissais ce médecin. Malheureusement il a

4 été tué.

5 Mme EDGERTON : [interprétation]

6 Q. Il s'agit d'un rapport médical portant sur une femme qui a été touchée

7 par un obus, n'est-ce pas ?

8 R. C'est exact. En fait, c'est un éclat d'obus qui l'a touchée.

9 Q. C'était le 5 avril 1992. Monsieur, la mention de l'éclat qui a été

10 retrouvé au niveau de la blessure indique que cette blessure est due à un

11 mortier ?

12 R. Ou un engin explosif, on ne sait pas si c'est un mortier, une roquette,

13 une bombe ou un obus, mais c'était certainement un engin explosif.

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec votre permission, Messieurs les Juges,

15 il nous manque la deuxième page de ce document.

16 [hors micro]

17 Merci. Est-ce qu'on peut ne pas montrer cette deuxième page.

18 Q. Monsieur, sur la deuxième page que vous avez sous les yeux, sous le

19 titre "historique," est-ce que vous voyez l'endroit où on voit que cette

20 femme a été touchée ?

21 R. Oui, je vois l'endroit en question.

22 Q. Est-ce que vous voyez l'endroit où l'on peut lire que cette femme a été

23 touchée par un obus ?

24 R. Oui, c'est ce que dit le texte. C'est ce que j'ai dit même avant de

25 voir ce document.

26 Q. Ce document vous semble-t-il être un document authentique ?

27 R. Oui, certainement.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

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1 document, s'il vous plaît. Ce serait préférable sous pli scellé.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi, pour quelle raison ?

3 Pourquoi, Madame Edgerton ?

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pensais qu'il manquait la deuxième page

5 de ce document étant donné qu'il y avait une confusion au niveau des pages.

6 J'ai omis de poser une question justement à propos de cette deuxième page,

7 donc je vais reprendre.

8 (expurgé)

9 (expurgé)

10 (expurgé)

11 (expurgé)

12 Mme EDGERTON : [interprétation] En fait, j'aurais besoin que l'on procède à

13 l'expurgation de ce passage. Ensuite, nous allons retirer le document. Ça y

14 est, nous avons trouvé une réponse à notre question.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Faites en sorte que cet élément-là

16 soit expurgé.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir le document

18 03383, s'il vous plaît, affiché à l'écran ?

19 Est-ce que ce document comporte une deuxième page ? Ce document ne devrait

20 pas être diffusé non plus.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce document est également signé, mais rien

23 ne semble indiquer que ceci ait été signé par ce médecin-ci.

24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

25 (expurgé)

26 (expurgé)

27 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aurais besoin d'une autre expurgation,

28 Messieurs les Juges.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Procédons à une autre expurgation,

2 s'il vous plaît.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais enlever le document et passer à

5 autre chose.

6 Je souhaite passer à autre chose, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, faites.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

9 Q. Dans votre déposition, dans l'affaire Galic ainsi qu'aujourd'hui et

10 dans la déclaration que vous avez remise aux autorités de la Republika

11 Srpska il y a quelques années, vous avez dit avoir vu des obus tomber à

12 plusieurs reprises sur l'hôpital de Kosevo dans la période allant de 1992 à

13 1994. Est-ce exact ?

14 R. J'ai vu trois obus tomber. Je me trouvais à la clinique lorsque deux

15 obus sont tombés. Le troisième obus est tombé dans la partie en haut à

16 droite de la clinique lorsque j'étais absent, mais j'ai vu l'orifice en

17 question.

18 Q. Vous étiez en réalité à l'intérieur de l'hôpital lorsque trois obus

19 sont tombés ?

20 R. J'étais là lorsque deux obus sont tombés. Le troisième est tombé en mon

21 absence, mais j'ai vu l'endroit où l'obus en question est tombé.

22 Q. Ce que vous dites en somme c'est qu'entre 1992 et 1994, toute cette

23 période, l'hôpital de Kosevo a fait l'objet de tirs d'obus à trois reprises

24 seulement ?

25 R. Je parle en fait du service de traumatologie dans lequel je

26 travaillais. L'hôpital de Kosevo est un complexe hospitalier assez

27 important, mais nous avons entendu les obus tombés à côté de nous. Je suis

28 sûr que dix obus environ sont tombés sur l'hôpital de Kosevo. Je sais qu'un

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1 obus est tombé sur la clinique ophtalmologique, l'autre est tombé sur la

2 clinique orthopédique et la troisième -- L'INTERPRÈTE : l'interprète n'a

3 pas entendu le nom de la troisième clinique.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez répéter ce que vous venez

5 dire. Vous avez parlé de deux ou trois, les interprètes n'ont pas saisis le

6 nom de la dernière clinique.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je travaillais dans le service de

8 traumatologie lorsque deux obus sont tombés. Fort heureusement, il y a un

9 obus qui n'a pas explosé. Un troisième est tombé sur le service de

10 traumatologie et j'ai vu l'endroit où il est tombé. Un autre obus est tombé

11 sur la clinique orthopédique que j'ai vu moi-même. Je n'ai pas vu l'obus

12 tomber mais j'ai vu l'endroit où l'obus était tombé et j'ai entendu dire

13 qu'un obus était tombé dans les couloirs de la clinique ophtalmologique.

14 Comme cela se trouvait en dehors de l'enceinte de l'hôpital. A cette

15 occasion-là, un de mes amis, le docteur Vladimir Deljanik a été tué.

16 Q. Quelle est la superficie de l'enceinte de l'hôpital ? Cela couvre

17 combien d'hectares ?

18 R. Je vais vous énumérer la liste des bâtiments, il y a 12 à 14 bâtiments

19 dans l'enceinte. Cela couvre une superficie assez importante, mais je ne

20 peux pas vous dire combien de mètres carrés il y a au total.

21 Q. Douze à 14 cliniques différentes ?

22 R. Il y avait également un bâtiment administratif, il y avait un bâtiment

23 pour les services techniques et la chaufferie, et les autres bâtiments

24 étaient des cliniques.

25 Q. Merci.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez dit 12 à

27 14 bâtiments ?

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En fait, non pas 12 à 14 cliniques.

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je vois, Monsieur le Président.

3 Q. Vous avez parlé de l'hôpital de Kosevo. Vous avez dit que cet hôpital

4 avait été touché et conviendrez-vous avec moi que d'après vous c'était les

5 forces serbes, plus précisément le Corps de Sarajevo-Romanija, qui tiraient

6 sur l'hôpital ?

7 R. C'est exact de dire que les forces serbes tiraient vers l'hôpital

8 Kosevo. Je sais parce que mon bureau à la clinique était en face de la

9 faculté du bâtiment que j'ai déjà évoquée, il y a déjà deux, trois ou

10 quatre tirs dans la direction de Poljine, là où se trouvaient les forces

11 serbes, ensuite il y avait une riposte. Je ne peux pas dire que l'obus qui

12 a été tiré sur la clinique orthopédique provenait de ce quartier-là parce

13 qu'on ne pouvait pas y accéder depuis Poljine. L'obus a dû venir d'une

14 autre direction. Lorsque les obus ont été tirés à partir de la faculté

15 technique ou la faculté du bâtiment de la construction, nous nous abritions

16 toujours dans la partie supérieure du bâtiment qui se trouvait un peu plus

17 éloigné et nous étions davantage en sécurité. A ce moment-là nous emmenions

18 les patients pour les éloigner de la partie qui était face à la faculté

19 technique.

20 Q. Je comprends bien, dans votre déposition vous avez découvert ou vous

21 estimez que les obus qui sont tombés sur votre clinique à deux reprises en

22 tout cas étaient une riposte par rapport aux coups tirés par les forces

23 bosniaques, mais est-ce que vous nous dites en somme que tous les obus qui

24 sont tombés sur l'enceinte de l'hôpital de Kosevo étaient des tirs en

25 riposte par rapport aux tirs qui provenaient des forces de l'ABiH ?

26 R. Non, je ne peux pas affirmer cela. Je ne peux en tout cas pas parler du

27 moment où je n'étais pas là, lorsque j'étais chez moi. Mais c'était comme

28 cela lorsque j'y étais.

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1 Q. Qu'en est-il de l'obus qui est tombé sur la clinique orthopédique ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite éclaircir ce point.

3 Monsieur, vous dites lorsque vous étiez à l'hôpital tous les tirs

4 provenant des forces du Corps de Sarajevo-Romanija étaient des tirs en

5 riposte aux tirs provenant de l'ABiH ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas parler de chaque coup tiré

7 parce que je n'étais pas à l'hôpital tout le temps, mais au moment où je me

8 trouvais à l'hôpital ces tirs étaient certainement des tirs en riposte.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

10 Mme EDGERTON : [interprétation]

11 Q. Vous nous avez précisé que ces tirs étaient des tirs en riposte par

12 rapport à des coups tirés à partir de petits chars. Je crois que c'est ce

13 que vous nous avez dit, n'est-ce pas ?

14 R. Tout d'abord, il y avait des tirs à partir de chars de petite taille

15 qui étaient plus petits, ensuite dix minutes plus tard, après trois ou

16 quatre tirs, on ripostait en direction des forces de l'ABiH.

17 Q. Et vous ripostiez à l'aide de mortiers ainsi qu'avec des tirs

18 d'artillerie, n'est-ce pas ?

19 R. Madame, les mortiers sont également des pièces d'artillerie. Tout engin

20 qui utilise des charges explosives sont des pièces d'artillerie. Je ne sais

21 pas ce qui a été utilisé précisément, mais on les connaît sous le nom

22 d'obus.

23 Q. Conviendrez-vous avec moi que les obus utilisés contre l'hôpital n'ont

24 pas été tirés aux fins de détruire les chars, mais afin d'infliger le plus

25 de dommages possibles ?

26 R. Non. Je ne vois pas en quoi se serait utile de blesser des patients qui

27 ne pouvaient pas combattre, ils tiraient sur les chars qui étaient à côté

28 de l'hôpital. Mais parce que l'enceinte de l'hôpital était près et à cause

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1 de la distance, avec une marge d'erreur infime le projectile atterrissait

2 sur l'hôpital. Pour une armée, les patients ne constituent pas des cibles

3 intéressantes car ils ne sont pas en mesure de se battre. Inutile de perdre

4 des munitions sur des patients, sur des gens comme ça, et ceci s'applique à

5 toute armée.

6 Q. Vous ne seriez pas d'accord si je vous pose cette question-ci. Les tirs

7 en riposte contre l'hôpital étaient en réalité des tirs destinés à tuer et

8 à blesser le plus grand nombre de personnes possible. En réalité, Monsieur,

9 c'était une arme tout à fait inadaptée pour riposter et tirer sur un char ?

10 R. Vous n'avez pas raison. Ces tirs avaient pour but de faire taire les

11 armes tirées à partir des chars autour de l'hôpital. Etant donné que

12 l'endroit où ils se trouvaient c'était assez loin, donc avec une toute

13 petite marge d'erreur par rapport à la cible, les obus tombaient quand même

14 autour de l'hôpital. Si vous parlez de pilonnage de façon générale,

15 l'hôpital ne serait pas très difficile à atteindre.

16 Q. Vous venez de dire à deux reprises, maintenant une toute marge d'erreur

17 signifiait que l'hôpital était touché. Est-ce que ceci n'est pas

18 particulièrement éloquent et que ce type d'armes était tout à fait inadapté

19 contre ce type de bâtiment ?

20 R. Peut-être que l'intention précisément ne consistait pas à l'utiliser

21 contre l'hôpital, mais avait pour but de détruire les chars qui se

22 trouvaient en deçà de l'hôpital. Il eut été très aisé de toucher l'hôpital

23 et n'importe quel arme aurait pu atteindre le bâtiment qui se trouvait dans

24 l'enceinte de l'hôpital.

25 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'ai une question à vous poser,

26 Monsieur le Témoin. Vous souvenez-vous si, oui ou non, les chars étaient

27 encore là au moment où les deux obus ont été tirés en riposte ? En d'autres

28 termes, est-ce que les deux chars qui avaient tiré les coups contre

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1 Poljine, est-ce que ces deux chars se trouvaient encore à proximité

2 lorsqu'on a riposté ou est-ce que ces chars n'étaient plus là, étaient

3 partis ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Les chars étaient là pendant toute la durée de

5 ma présence à l'hôpital jusqu'au 1er janvier 1994. Les chars étaient

6 toujours là autour de la faculté technique. Ils tiraient, ensuite ils se

7 repliaient rapidement. Mais pendant toute la durée de ma présence à cet

8 endroit-là, ils étaient toujours dans ce quartier-là.

9 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous nous dites en somme que les

10 chars qui ont tiré les coups, qui ont provoqué des tirs en riposte de la

11 part du Corps de Sarajevo-Romanija que ces chars sont restés sur les mêmes

12 positions lorsqu'ils ont riposté. Autrement dit, ils ne se déplaçaient pas

13 et ne sont pas partis. C'est ce que vous dites en somme ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur, peut-être que nous ne nous sommes

15 pas compris ou peut-être que ceci a été mal interprété. Les chars étaient

16 recouverts de dispositifs de camouflage. Ils se déplaçaient dans le

17 quartier, ils étaient toujours dans le quartier. En fait, ils se

18 déplaçaient un tout petit peu autant qu'ils le pouvaient. En fait,

19 l'enceinte de l'hôpital est assez importante. Il y a des arbres importants,

20 c'était comme un grand parc, que ces bâtiments qui se trouvaient dans cette

21 enceinte et les chars sont restés là pendant toute cette période-là. En

22 fait, ils se déplaçaient de 50, 100, 150 mètres en avant ou en arrière. Ils

23 se protégeaient derrière un bâtiment ou derrière la faculté du bâtiment des

24 matériaux de construction.

25 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

26 Mme EDGERTON : [interprétation]

27 Q. Monsieur, lorsque après avoir tiré ils se déplaçaient de 50, 100, 150

28 mètres, pourquoi riposter alors avec quelque chose comme un mortier qui est

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1 censé blesser le plus grand nombre de gens possible ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin n'a pas

4 utilisé le terme de "mortiers" une seule fois. Il a dit qu'il n'était pas

5 en mesure d'établir quel type d'armes a été utilisé pour tirer. Il n'a

6 jamais utilisé le terme de "mortiers". Il a clairement indiqué qu'il ne

7 savait pas quel type d'armes a été utilisé et l'Accusation insiste sur

8 quelque chose que le témoin n'a pas évoqué.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne sais pas s'il peut dire grand-

10 chose à propos de cette question : pourquoi les tirs en riposte étaient des

11 tirs de mortier.

12 Mme EDGERTON : [interprétation]

13 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous trouvez, puisque vous étiez là à

14 l'époque, avez-vous trouvé que le type d'armes qui avait été utilisé contre

15 l'hôpital, d'après vous est-ce que l'arme tirée était une arme inadaptée

16 compte tenu des circonstances ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faudrait que vous expliquiez au

18 témoin le sens du terme "inadapté".

19 Mme EDGERTON : [interprétation]

20 Q. Une arme du type que vous avez vu qui a été utilisée contre l'hôpital

21 avec les dégâts que ce type d'arme aurait provoqué, d'après vous est-ce

22 qu'il s'agissait d'une arme inadaptée, peu adaptée étant donné les

23 circonstances puisque cette arme a été utilisée contre ce le centre

24 hospitalier ?

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez ne pas répondre à la

26 question, pas encore.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin n'a pas besoin de

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1 répondre à cette question. Il n'est pas en position de le faire. Il ne peut

2 pas parler de cela.

3 Mme EDGERTON : [interprétation]

4 Q. Autrement dit, vous n'avez aucun moyen de savoir quelle était

5 l'intention des tireurs du Corps de Sarajevo-Romanija, n'est-ce pas ?

6 R. [hors micro]

7 L'INTERPRÈTE : Le témoin n'a pas allumé son micro.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous assurer que le

9 microphone du témoin soit allumé.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas leurs intentions, mais le

11 fait est que des obus sont tombés sur les bâtiments qui étaient en face de

12 la faculté de génie technique et sur les abords de l'hôpital. Je crois que

13 la clinique d'oto-rhino-laryngologie a été touchée également, mais l'autre

14 bâtiment n'a pas été touché. Nous avions vraiment l'impression que

15 l'hôpital n'avait pas été pris pour cible directement et que les obus

16 n'étaient pas tombés sur l'hôpital à cause du manque de précision des tirs.

17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous nous dire quelle est la

18 distance environ qui sépare Poljine de l'hôpital de Kosevo ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me suis jamais rendu à Poljine, mais

20 d'après mes estimations cela doit faire 3 ou 4 kilomètres à vol d'oiseau,

21 mais je n'étais jamais à Poljine.

22 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

23 Mme EDGERTON : [interprétation]

24 Q. Monsieur, j'aimerais revenir sur votre réponse, celle que vous avez

25 donnée à M. le Juge Robinson : "Donc, nous avions l'impression que

26 l'hôpital n'était pas pris pour cible de façon délibérée."

27 Est-ce que vous dites en somme que l'hôpital -- est-ce que vous

28 décrivez vos impressions personnelles jusqu'au jour de votre arrestation ou

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1 est-ce que vous ne voulez parler que de ces deux occasions à propos

2 desquelles vous avez témoigné ?

3 R. Je voulais parler de l'ensemble de la période, parce que comme je l'ai

4 dit un peu plus tôt en réponse à une question qui m'a été posée

5 précédemment, l'enceinte de l'hôpital était importante. Elle comporte

6 quelque 13 à 14 bâtiments. Donc, si quelqu'un avait délibérément pris

7 l'hôpital pour cible il ne pouvait que toucher quelque chose. Comme je l'ai

8 indiqué, les endroits touchés étaient les endroits qui étaient face à la

9 faculté de génie technique.

10 Q. Tout d'abord, j'ai cru que vous avez dit un peu plus tôt que vous ne

11 pouviez pas témoigner au sujet de -- pardonnez-moi, je retire cette

12 question. D'après vous, entre 1992 et 1994, l'hôpital de Kosevo n'a pas été

13 délibérément pris pour cible ?

14 R. Tel est ce que j'affirme et c'est ainsi que j'ai compris les choses.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez nous dire alors pourquoi ?

16 Pourquoi vous êtes parvenu à cette conclusion, que ceci n'a pas été

17 délibérément pris pour cible ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est assez facile de conclure cela car

19 l'hôpital est important. L'enceinte comprend quelque 12 à 14 bâtiments.

20 Toute personne qui aurait voulu atteindre l'hôpital aurait pu atteindre

21 tous les bâtiments. Les bâtiments qui ont été touchés ont été ceux qui

22 étaient face à la faculté de génie civil et c'est la raison pour laquelle

23 nous pensions que c'était une erreur et que les gens avaient manqué leur

24 cible, qu'il ne s'agissait pas de ciblage délibéré. Aucun obus n'est tombé

25 sur la clinique des maladies infectieuses, des problèmes de dermatologie,

26 de médecine interne ou des services de chirurgie.

27 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur, si j'ai bien compris, les obus n'ont pas

28 touché l'hôpital, ce qui était facile, selon vous, si quelqu'un voulait les

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1 toucher ? Est-ce que vous savez si des obus ont pu toucher les tanks qui

2 étaient autour de l'hôpital ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que oui, mais s'ils ne tiraient pas

4 directement dessus, en tout cas ils auraient pu les empêcher de se déplacer

5 à l'intérieur de l'enceinte de l'hôpital, les empêcher de tirer. Bien sûr,

6 c'est beaucoup plus difficile à toucher qu'un bâtiment.

7 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

8 Mme EDGERTON : [interprétation]

9 Q. Conviendrez-vous, Monsieur le Témoin, que riposter comportait un risque

10 très important, s'il s'agissait d'éliminer les chars, il y avait un risque

11 très important de pertes en vie même du côté des civils, étant donné les

12 endroits que vous nous avez indiqué dans votre déposition.

13 R. Fort heureusement, lorsque j'étais à l'hôpital, il n'y a pas eu de

14 pertes civiles, mais cela est vrai qu'il y avait un risque. Je ne peux pas

15 mesurer le niveau de risque, car cela dépend beaucoup des personnes qui

16 tiraient et de leur niveau d'expérience.

17 Q. Quels bâtiments sont en face de la faculté de génie civil ?

18 R. Je vais répéter ceci pour la troisième fois. C'étaient les services de

19 traumatologie. Cette clinique était la plus proche; ensuite, il y avait le

20 bâtiment d'oto-rhino-laryngologie.

21 Q. Il s'agissait tous de bâtiments qui étaient orientés vers le nord, en

22 direction de Poljine ?

23 R. Non. Ils étaient orientés vers le bâtiment de génie civil, en direction

24 de Poljine, sur le côté. La façade du bâtiment se trouvait en face de la

25 faculté de génie civil.

26 Q. Les parties de l'enceinte de l'hôpital, donc les bâtiments qui se

27 trouvaient à l'intérieur et qui étaient en face de Trebevic, est-ce que ces

28 bâtiments-là n'ont pas été pris pour cibles et n'ont pas été touchés entre

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1 1992 et 1994 ?

2 R. Trebevic est assez loin, et d'après ce que je sais, la partie qui est

3 en face de Trebevic a été touchée une seule fois par un obus qui a atteint

4 la clinique orthopédique. Aucun autre obus n'aurait pu provenir de cette

5 direction-là, Kosevo, pas en tout cas quand j'étais là.

6 Q. Donc, lorsque vous étiez à l'hôpital de Kosevo pendant toute cette

7 période-là, est-ce que vous aviez de l'électricité tout le temps ?

8 R. Non, non. Quelquefois nous utilisons un générateur, quelquefois, nous

9 n'avions ni l'un ni l'autre. C'était intermittent.

10 Q. Est-ce que vous aviez de l'eau courante ?

11 R. Quelquefois il y avait des coupures d'eau.

12 Q. Est-ce que vous disposiez de suffisamment de médicaments et autres

13 fournitures médicales pour répondre à vos besoins ?

14 R. On ne peut jamais en avoir assez en temps de guerre. Nous avions en

15 fait du matériel chirurgical. Nous avions des stocks qui dataient d'avant

16 la guerre. Il y avait effectivement de par le biais des organisations

17 humanitaires, nous recevions pas mal de choses, mais il y a des choses que

18 nous confectionnions nous-mêmes. J'ai confectionné quelque chose qui

19 permettait d'immobiliser des os.

20 Q. Est-ce que vos collègues ou le personnel médical, entre 1992 et 1994,

21 ont présenté des signes particuliers parce qu'ils vivaient et travaillaient

22 dans des conditions difficiles dues aux effets du pilonnage et des tirs

23 d'artillerie ?

24 R. Je ne sais pas quels sont les effets que cela provoque sur chaque

25 personne en raison de différents facteurs. Il y a du personnel médical qui

26 était Serbe qui travaillait là-bas et qui a été insulté. On les appelait

27 des Chetniks --

28 Q. Ceci n'était pas ma question.

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1 R. -- c'étaient surtout les citoyens et les soldats. Ce n'est pas le

2 personnel médical qui souffrait de cela.

3 (expurgé)

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois que oui. Excusez-moi, je crois que

6 j'ai dit quelque chose de trop.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une expurgation, je vous prie.

8 Mme EDGERTON : [interprétation]

9 Q. Monsieur le Témoin, je souhaiterais répéter ma question. Est-ce qu'il y

10 avait des employés qui, au cours des deux années de votre travail à

11 l'hôpital, ont démontré des signes de détresse psychologique parce qu'ils

12 travaillaient dans les conditions difficiles ? Ils étaient sujets aux

13 pilonnages et aux tirs. Ma question a trait spécifiquement aux pilonnages

14 et aux tirs d'artillerie.

15 R. J'étais en contact avec les personnes qui travaillaient à la clinique

16 de traumatologie ainsi qu'avec l'équipe de 12 ou 16 chirurgiens et 10

17 personnes infirmiers, mais il n'y avait pas de tels cas. Je crois qu'il y

18 avait 2 500 à 2 500 employés qui étaient employés à l'hôpital. Pour eux, je

19 ne sais pas, mais pour ce qui est de mon équipe, je n'ai pas vu de signe de

20 détresse psychologique.

21 Q. Personne ne s'est jamais plaint d'être fatigué ?

22 R. Tout le monde était fatigué.

23 Q. Personne ne s'est plaint d'avoir froid ?

24 R. Oui, l'hiver tout le monde avait froid. Moi ici, j'avais froid et le

25 personnel également.

26 Q. Personne ne s'est plaint d'avoir faim ?

27 R. Il y avait toujours quelque chose à manger, même si le choix était très

28 modeste, mais il était toujours possible de manger quelque chose. Il

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1 m'arrivait des fois de passer des journées entières sans rentrer à la

2 maison, des dizaines de jours sans rentrer à la maison. Je peux vous dire

3 que j'avais toujours quelque chose à manger. C'était modeste certes, mais

4 il y avait toujours une possibilité de manger un repas.

5 Q. Vous n'avez jamais entendu de plaintes formulées par le personnel vous

6 disant qu'ils étaient déprimés parce qu'ils devaient venir travailler,

7 qu'ils avaient froid, ils étaient fatigués, qu'ils avaient faim.

8 R. Je ne sais pas s'ils étaient déprimés. Je ne le sais pas, mais tout le

9 monde était terrorisé, ça oui. Les gens avaient peur.

10 Q. Lorsque vous dites que "la plupart des gens" avaient peur, à qui

11 faites-vous allusion ?

12 R. Je parle du personnel hospitalier. Je fais également allusion aux

13 patients de l'hôpital. Ce sont les personnes avec lesquelles j'entrais en

14 contact de façon régulière.

15 Q. Est-ce que vous avez entendu des personnes se plaindre, à savoir qu'ils

16 avaient du mal à se rendre au travail parce qu'il y avait un pilonnage et

17 des tirs d'artillerie ?

18 R. Oui, de telles choses oui. Pour ce qui est de mon équipe, oui, j'ai

19 entendu des propos semblables, oui. Des gens de mon équipe se sont plaints

20 de ce type de choses s'agissant de la clinique de Kosevo.

21 Q. Est-ce que vous avez entendu des griefs formulés par le personnel ou

22 par les personnes en général, vous disant qu'ils étaient très tristes parce

23 qu'ils avaient perdu soit un membre de leur famille ou des voisins ou des

24 amis à la suite de pilonnages et de tirs d'artillerie ?

25 R. Oui, certainement.

26 Q. De quoi avaient-ils peur, ces gens, selon vous ?

27 R. Ces personnes vivaient toutes dans une ville qui était en guerre. Il

28 n'y a pas une seule personne qui puisse penser qu'elle ne serait ni tuée ou

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1 blessée. Il n'y a aucune guerre, et plus particulièrement dans des endroits

2 montagneux comme c'était le cas autour de Sarajevo, où il n'y a pas de

3 difficultés semblables, des difficultés avec le chauffage et la nourriture.

4 Je suis passé par deux guerres et j'en ai fait une expérience personnelle.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le

6 Président, quelques instants, je vous prie.

7 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

9 Président, Messieurs les Juges.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

11 Maître Tapuskovic, est-ce que vous avez des questions dans le cadre des

12 questions supplémentaires ?

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

14 Messieurs les Juges, quelques questions dans la même veine découlant des

15 questions posées par mon éminente consoeur.

16 Nouvel interrogatoire par M. Tapuskovic :

17 Q. [interprétation] Monsieur, pendant que vous étiez à l'hôpital, lorsque

18 vous avez commencé à travailler de l'autre côté, comment le dire, vous avez

19 passé un certain temps là-bas, de l'été 1994 jusqu'à la fin des conflits.

20 S'agissant de cette période dans ces hôpitaux, et pendant que vous étiez

21 sur le terrain, y avait-il toujours suffisamment d'électricité, d'eau et de

22 fournitures médicales ?

23 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect

24 que je dois à mon éminent confrère, cela ne découle pas de mon contre-

25 interrogatoire.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, est-ce que cette

27 question découle du contre-interrogatoire de Mme Edgerton ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais bien sûr, justement c'est de cela

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1 qu'on parle. Le témoin a répondu aux questions posées par mon éminente

2 consoeur : stress émotif, pénurie de nourriture, et cetera. J'aimerais

3 savoir si, pendant qu'il travaillait dans cet autre hôpital, il avait les

4 mêmes problèmes. Est-ce que dans cet hôpital-là aussi il y avait des

5 problèmes d'électricité, de pénurie de nourriture, de peur de la guerre, de

6 traumatismes psychologiques et des difficultés. Cette question découle de

7 ses questions, car je n'ai pas posé ces questions dans le cadre de mon

8 interrogatoire principal. Effectivement, elle a posé cette même question

9 qui avait trait à une partie, j'aimerais savoir si pour l'autre partie la

10 situation était identique, de l'autre côté également. Il faudrait permettre

11 au témoin de dire si, s'agissant de l'autre partie, la situation était la

12 même. Il nous dira peut-être que non, qu'effectivement là-bas, il n'y avait

13 pas de peur, qu'il n'y avait pas d'angoisse, qu'il y avait toujours de

14 l'électricité, qu'il y avait même des gâteaux.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, rapidement, je

17 vous écoute.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

19 Q. Non, je n'ai plus d'autres questions. En fait, c'était tout ce que je

20 voulais demander. C'est tout ce que je voulais savoir. Monsieur, est-ce que

21 c'est effectivement ce que vous avez dit, est-ce que cela s'appliquait

22 également de l'autre côté ? Est-ce que vous pourriez nous racontez

23 brièvement comment les choses se passaient de l'autre côté ? Vous étiez

24 l'une des rares personnes qui prodiguiez des soins des deux côtés pendant

25 presque la même période de temps, alors si vous pouviez peut-être nous

26 décrire brièvement la situation, je vous écoute.

27 R. Si je ne m'abuse, du côté serbe, il y avait un petit peu plus de

28 nourriture, elle était un petit peu meilleure. Pour l'électricité, c'était

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1 pareil. Pour ce qui est du mazout, c'était un peu plus difficile du côté

2 serbe. Pour ce qui est de l'équipement médical, des fournitures médicales,

3 c'était beaucoup pire du côté serbe, car l'hôpital était un établissement

4 qui, au début de la guerre, n'avait pas suffisamment de médicaments. L'aide

5 humanitaire n'était pas distribuée de façon égale au détriment du côté

6 serbe.

7 Q. Qu'en est-il de ce stress émotionnel, de cette peur ?

8 R. Il n'y avait pas de différence. Il y avait une ligne de séparation. Des

9 troupes étaient là des deux côtés, les gens étaient tués des deux côtés.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

12 Témoin, cela met fin à votre témoignage, nous vous remercions de vous être

13 déplacé, d'être venu témoigner au Tribunal. Vous pouvez maintenant

14 disposer.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

16 [Le témoin se retire]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qui est votre prochain témoin,

18 Maître Tapuskovic ?

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je peux l'appeler

20 immédiatement. Mais la question de la pause se pose. Je ne sais pas si vous

21 aimeriez la prendre tout de suite.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous reste encore cinq à six

24 minutes. Je préfère commencer maintenant.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le prochain témoin est le Témoin T-27. Il

26 s'appelle Borislav Kovacevic et il n'a demandé aucune mesure de protection.

27 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait faire

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1 sa déclaration solennelle ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

3 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

4 LE TÉMOIN: BORISLAV KOVACEVIC [Assermenté]

5 [Le témoin répond par l'interprète]

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez vous

7 asseoir.

8 Maître Tapuskovic, vous pouvez commencer.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

10 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic :

11 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, comme vous le savez, je représente

12 les intérêts de Dragomir Milosevic. Nous nous sommes rencontrés et nous

13 nous sommes déjà entretenus sur certains points. J'aimerais vous demander

14 de décliner votre identité pour les Juges de la Chambre ?

15 R. Je m'appelle Borislav Kovacevic.

16 Q. Merci. Vous êtes né le 11 mai 1963, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous êtes né à Ilijas, à Sarajevo, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez fait vos études à l'école élémentaire à Ilijas, n'est-ce pas

21 ?

22 R. Oui.

23 Q. Vos études secondaires à l'école électrotechnique, vous les avez faites

24 à Sarajevo ?

25 R. Oui.

26 Q. Jusqu'au début du conflit, vous avez travaillé dans une entreprise qui

27 s'appelait Zrak à Cevljanovici à Srednje ?

28 R. Oui.

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1 Q. Le siège de cette entreprise se trouvait à Sarajevo, à Buca Potok. Est-

2 ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Pourriez-vous, je vous prie, expliquer aux Juges de la Chambre,

5 s'agissant de cette succursale à Cevljanovici de l'entreprise Zrak, que

6 produisait-elle avant le conflit ?

7 R. C'était une usine de Sarajevo appelée Zrak, et on découpait le verre

8 pour diverses entreprises.

9 Q. Lorsque le conflit a commencé, est-ce que cette usine avait d'autres

10 activités ?

11 R. Non. Nous recevions du matériel de façon quotidienne du bureau chef de

12 Sarajevo. Lorsque le conflit a commencé, le matériel ne nous arrivait plus,

13 donc nous n'avions plus rien à faire et les activités ont cessé.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je continuer

15 ou est-ce que vous aimeriez prendre la pause ?

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La pause est à midi 20.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis réellement désolé, excusez-moi.

18 Q. Dites-moi, Monsieur le Témoin, pour gagner du temps, rapidement, est-ce

19 que vous étiez membre du Corps Sarajevo-Romanija ?

20 R. Oui. J'étais membre du Corps Sarajevo-Romanija à partir du premier jour

21 du conflit.

22 Q. Quel rôle avez-vous joué dans ce conflit ?

23 R. J'étais soldat pendant toute la durée du conflit sur les lignes de

24 front dans les tranchées.

25 Q. A quelle brigade du Corps de Sarajevo-Romanija apparteniez-vous au

26 début des conflits ?

27 R. Au début du conflit, j'étais membre de la Brigade de d'Ilijas jusqu'en

28 novembre 1994.

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1 Q. Qui était le commandant de cette Brigade d'Ilijas jusqu'à ce mois de

2 novembre 1994 ?

3 R. Le commandant s'appelait Josipovic.

4 Q. Quel était le nom du commandant du bataillon ?

5 R. Le commandant du bataillon était d'abord Luka Vukovic qui a été tué;

6 ensuite, c'était Zeljko Micic, lui aussi a été tué; ensuite Acim Vukovic

7 qui était le frère de Luka Vukovic, il est resté là-bas jusqu'à la fin.

8 Q. Pourriez-vous répéter la date ou les dates, s'il vous plaît ?

9 R. Jusqu'au mois de novembre 1994, j'étais dans la Brigade d'Ilijas. A

10 partir du mois de novembre 1994, je suis devenu membre de la 1ère Brigade de

11 Romanija.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous prendrons notre pause

13 maintenant.

14 --- L'audience est suspendue à 12 heures 19.

15 --- L'audience est reprise à 12 heures 44.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, c'est à vous.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Kovacevic, vous nous avez dit avant la pause que par la suite

19 vous avez rejoint les rangs de cette autre brigade. Qui en était le

20 commandant ? Vous nous l'avez dit, je crois.

21 R. Le commandant de cette brigade s'appelait Vlado Lizdek.

22 Q. Le commandant du bataillon, comment s'appelait-il ?

23 R. Le commandant du bataillon s'appelait Pajic Dragan [comme interprété].

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, oui.

25 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, une petite précision,

26 je pourrais certainement soulever des questions lors du contre-

27 interrogatoire, mais je crois qu'une brigade est composée de plus d'un

28 bataillon. Est-ce que le témoin est en train de nous parler du bataillon

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1 dont il faisait partie ou parle-t-il d'un autre bataillon ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous parlez de quel bataillon

3 exactement, Monsieur le Témoin ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le 1er Bataillon de la 1ère Brigade de

5 Romanija.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis vraiment désolé de cette

7 imprécision.

8 Q. Je souhaiterais vous poser la question suivante : à l'époque Tupajic

9 Dragan, le commandant de ce 1er Battaillon, quel âge avait-il ?

10 R. Je ne peux pas vous répondre avec précision, mais je crois qu'il avait

11 environ 50 ans.

12 Q. Est-ce qu'il était officier ?

13 R. Non. Il faisait des travaux de la défense civile. Nous n'avions pas de

14 vrais officiers.

15 Q. Lorsque vous dites que vous n'aviez pas de vrais officiers, à quoi

16 faites-vous exactement allusion ?

17 R. En fait, nous n'avions pas d'officiers qui avaient fait l'école des

18 officiers de la JNA. C'est simplement nous qui devions faire les tâches

19 d'officiers et de soldats.

20 Q. Ce 1er Bataillon était composé de quelles personnes, de quels hommes.

21 D'où venaient ces hommes ?

22 R. C'étaient des hommes qui venaient tous de cette région. C'étaient les

23 habitants de cette région. C'étaient eux qui avaient composé le bataillon.

24 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre puisque vous avez

25 expliqué que vous étiez soldat au sein du Corps Sarajevo-Romanija depuis le

26 début du conflit. Vous souvenez-vous au début, à l'endroit, où vous étiez,

27 quel était l'armement, c'est-à-dire, dites-nous d'abord puisque vous étiez,

28 comme vous dites, toujours dans les tranchées, de quel type d'armes

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1 disposiez-vous ?

2 R. Nous, les simples soldats, nous n'avions que des armes personnelles,

3 c'est-à-dire des fusils automatiques et semi-automatiques. Nous avions

4 quelques fusils d'artillerie, quelques mortiers, quelques obusiers et j'ai

5 également aperçu un char.

6 Q. Est-ce que vous savez à quel moment le général Dragomir Milosevic est

7 devenu commandant du Corps Sarajevo-Romanija ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva.

9 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, de nouveau je suis

10 désolé d'interrompre, mais le témoin a dit qu'il a fait partie de deux

11 brigades. Lorsque mon éminent confrère lui a demandé de quel type d'armes

12 il disposait, est-ce qu'il parle des armes pendant qu'il était dans la

13 Brigade Ilijas ou pendant qu'il était dans la 1ère Brigade de Romanija ?

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous parlez, Monsieur le

15 Témoin, de la Brigade Ilijas ou de la 1ère Brigade de Romanija ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] L'avocat m'a demandé de lui dire de quel type

17 d'armes nous disposions au début de la guerre ? Puisqu'à ce moment-là je

18 faisais partie de la Brigade d'Ilijas, je parle de la Brigade Ilijas.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

20 Q. Oui, mais justement c'est pour cela que je vous demande de nous

21 expliquer cela. Mon confrère est intervenu de façon peut-être un peu trop

22 rapide. Dites-moi, est-ce que vous savez à quel moment le général Dragomir

23 Milosevic est devenu commandant du Corps Sarajevo-Romanija, indépendamment

24 de l'autre brigade faisant partie du Corps Sarajevo-Romanija. J'aimerais

25 savoir à quel moment est-il devenu commandant du Corps Sarajevo-Romanija.

26 Est-ce que vous le savez ?

27 R. Dans la zone dans laquelle j'étais dans les tranchées, dans la zone de

28 mes activités de combat, il y avait plusieurs activités de combat. Je crois

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1 que c'était au début du mois d'août et nous avions pendant tout le mois

2 d'août --

3 Q. Je vous interromps pour vous demander quand est-ce que c'était ?

4 R. Je crois que c'était au début du mois d'août 1994, précisément à ce

5 moment-là.

6 Q. Lorsqu'il est devenu un commandant, vous étiez membre de quelle brigade

7 du Corps de Sarajevo-Romanija ?

8 R. J'étais membre de la Brigade d'Ilijas.

9 Q. Ensuite vous êtes devenu membre de la Brigade de Romanija, quand ?

10 R. C'était en novembre 1994.

11 Q. Que s'est-il passé immédiatement après que le général Dragomir

12 Milosevic eut exercé ses fonctions de commandant, mais avant cela je vais

13 vous demander : vous avez décrit la situation des armes lourdes au début du

14 conflit. Que s'est-il passé avec les armes lourdes en 1994 ? Est-ce que

15 vous pouvez nous en dire quelque chose ?

16 R. Dans la première partie de 1994, nous avions des armes lourdes. Nous

17 avions eu un renfort en armes lourdes.

18 Q. Non, non, non. D'accord, je ne vais pas vous interrompre. Oui,

19 continuez.

20 R. Dans la première partie de 1994, nous avions un appui supplémentaire

21 des armes lourdes qui venaient de Sarajevo qui était sous notre contrôle.

22 Q. Que s'est-il passé avec les armes lourdes en 1994 ? Veuillez nous

23 l'expliquer, je vous prie ?

24 R. En 1994, je crois que c'était à partir du mois de mars que les armes

25 lourdes de Sarajevo qui était sous notre contrôle ont commencé à se

26 retirer. Donc, sur nos terrains, sur le plateau de Nisic, nous avions reçu

27 beaucoup d'armes lourdes. Il y avait cinq chars. J'avais entendu de

28 quelqu'un, plusieurs pièces d'artillerie, et j'avais entendu d'un de mes

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1 camarades qu'une partie de cet équipement est partie à Trnovo.

2 Q. Avant que le général Dragomir Milosevic prenne le commandement du Corps

3 Sarajevo-Romanija, dites-moi si quelque chose est arrivé peu de temps après

4 son arrivée ?

5 R. A la fin du mois de juillet. Pendant tout le mois de juillet, le

6 plateau de Nisici où étaient situées nos positions avait subi des attaques.

7 Il y a eu une offensive importante sur les villages de la municipalité de

8 Vares et tous les jours nous perdions un village. Il n'y avait pas

9 suffisamment de combattants. Par exemple, ma sœur était restée dans un de

10 ces villages. Elle avait deux petits enfants. Mon beau-frère a été tué

11 dans ce village-là. Après, ils sont venus vivre près de moi. Par la suite,

12 en août, les autres villages sont tombés également. Son tombeau était là

13 également. Avec l'aide de l'appui d'artillerie et à cause du fait que nous

14 étions tous motivés, nous avons arrêté l'attaque sur le plateau de Nisici,

15 et c'est à ce moment-là que le général a été nommé en tant que commandant

16 du corps. Pendant les combats dans ma ville d'Ilijas, il y avait un

17 pilonnage intense tous les jours, nuit et jour. Il y avait plusieurs

18 pertes. Il y avait d'abord deux victimes, un garçon de 11 ans, c'était

19 Boban. Andjelina Antunovic, une petite fille de 14 ans, la fille de Miloj

20 et Zdravko Kabudrov [phon] ce sont des amis. Il y a eu d'autres morts

21 aussi. J'ai mentionné ces deux-là, d'abord.

22 Q. Est-ce que la situation s'est stabilisée après que le général Dragomir

23 Milosevic est arrivé ?

24 R. Oui, à la mi-août, la situation s'est stabilisée. Nos positions ont été

25 renforcées et les combattants dont les villages sont tombés autour de Vares

26 sont restés pour être notre renfort. Il y avait les pièces d'artillerie

27 également en plus grand nombre, et les attaques ont cessé.

28 Q. Y avait-il des réfugiés qui sont venus dans votre région ?

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1 R. Oui, nous avons accueilli ces gens et nous les avons envoyés à Vogosca

2 et à Ilijas. Il y avait pas mal de blessés qui ont été envoyés à Pale et à

3 Sokolac.

4 Q. Pendant les mois qui ont suivi, est-ce que la situation a changé, après

5 la mi-août ?

6 R. Dans la deuxième moitié du mois d'août, au mois de septembre et jusqu'à

7 la fin du mois d'octobre, la situation était relativement calme. Il n'y

8 avait pas d'activités de combat. Mais à la fin du mois d'octobre et au

9 début du mois de novembre 1994, une nouvelle attaque a été menée contre nos

10 positions. C'était une attaque violente. Ils ont attaqué avec leur

11 artillerie. On avait beaucoup de pertes. Pedjo Arsic a été tué. Vladimir

12 Sepur [phon], Slavisa Kosarac a été grièvement blessé. Il y avait beaucoup

13 de blessés, mais nous avons rejeté ces attaques. Tous les jours, il y avait

14 beaucoup de blessés, entre dix et 15.

15 Q. Avez-vous reçu des informations portant sur les mouvements du 1er Corps

16 de l'ABiH ? Avez-vous reçu des informations en octobre, en novembre 1995,

17 au cours de ces événements dont vous avez parlé ?

18 R. On avait des informations de nos observateurs disant que leurs forces

19 s'approchaient et qu'il fallait s'attendre à leurs attaques ?

20 Q. Est-ce que vous avez appris de quelle direction leurs forces arrivaient

21 ?

22 R. Le plus probablement, les gens qui étaient en captivité à Ilidza et

23 Sarajevo nous ont dit qu'un grand nombre de combattants ont quitté Sarajevo

24 en se déplaçant par le tunnel, et --

25 Q. Savez-vous s'il y a eu un accord à un moment donné entre les factions

26 belligérantes; et si oui, quand ?

27 R. Dans les médias et par le biais du commandement, on a appris en

28 décembre 1994 qu'un accord a été conclu, un accord de cessez-le-feu.

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1 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre pendant combien de temps cet accord de

2 cessation des hostilités a été respecté pour ce qui est des positions sur

3 lesquelles vous vous trouviez ?

4 R. Tout l'hiver 1994 et 1995, à partir du mois de décembre jusqu'au

5 printemps. Jusqu'au début du mois de juin 1995, la situation était calme.

6 Q. Que s'est-il passé au mois de juin ?

7 R. Au début de juin 1995, le commandant supérieur nous a informés que les

8 forces ennemies se regroupaient et qu'un grand nombre de leurs forces sont

9 sorties de Sarajevo. Nous nous attendions à ce qu'un accord définitif de la

10 cessation des hostilités soit conclu, mais l'attaque a commencé le 15 juin

11 1995 tôt dans la matinée. Les forces de l'ABiH, avec beaucoup de pièces

12 d'artillerie, ont attaqué toutes les positions sur le plateau de Nisici sur

13 tous les axes. Nous étions surpris par cette attaque et nous avions

14 beaucoup de pertes dans nos rangs. Ils ont occupé une partie de la route

15 entre Semizovac et Srednje qui reliait Ilijas. A Ilijas, il y avait des

16 blessés. Nous ne pouvions pas arriver à Sokolac avec des blessés. Les gens

17 mouraient durant le transport. Nous avons essayé de reprendre nos tranchées

18 ce jour même au courant de l'après-midi et de libérer cette partie de la

19 route.

20 Q. Vous avez vous avez dit que l'attaque vous a surpris, et qu'il y avait

21 des combats violents. Pouvez-vous nous dire ce que vous avez remarqué

22 précisément lorsque vous avez dit qu'il y avait des combats violents et des

23 armes ?

24 R. Il y avait un grand nombre de soldats. Il y avait peut-être dix soldats

25 pour un de l'autre. Il y avait des obus tout le temps sur nos positions,

26 sur des cibles civiles. C'était presque insoutenable. Il y avait des

27 combats le 16. Les combats étaient encore plus violents, peut-être parce

28 qu'ils ont été un peu déçus parce que nous avions repris cette partie de la

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1 route. Nous avions beaucoup de pertes. Le fils et le père Djurovic ont été

2 tués dans la tranchée à côté de la mienne. Rajic Radislav [phon], Gavric

3 [phon], Zladjan [phon] Ladanac [phon] ont été grièvement blessés. Luka

4 Maric [phon] également. Il y avait beaucoup d'autres personnes qui ont été

5 blessées. Je ne me souviens pas de leurs noms.

6 Q. Sur ces axes par lesquels le 15 et le 16 ils se sont déplacés, vous

7 avez mentionné Semizovac-Srednje, est-ce que, mis à part les victimes parmi

8 les soldats, est-ce qu'il y avait d'autres victimes ?

9 R. Oui, j'allais le dire. Le 16, lorsqu'il y avait des combats encore plus

10 violents, les obus sont tombés et ont coupé nos communications

11 téléphoniques ? Nous ne recevions plus d'informations ce jour-là.

12 Nous n'osions pas quitter nos tranchées parce que derrière nos

13 tranchées se trouvaient nos familles, nos enfants, nos parents. Nous

14 devions les défendre. Le 17 seulement, on a nous a dit qu'à Srednje, dans

15 mon village, trois hommes ont été tués du 16 au 17. Ils ont été enterrés

16 durant la nuit : Mile Kozekic; Sejanovic Caca [phon], une personne âgée;

17 Nedeljko Rasovic, une personne âgée également. Il y avait des victimes

18 civiles.

19 Q. Finalement, je n'ai pas de raison de vous poser encore beaucoup de

20 questions, je voudrais vous montrer deux documents. L'un des deux a été

21 montré à un autre témoin qui vient de la même région. C'est DD00-2840, il

22 s'agit du document de la Défense D282.

23 Regardez ce document et dites-nous, par rapport à ce que vous avez dit sur

24 la communication Srednje-Semizovac, si cela reflète l'événement qui a eu

25 lieu ces jours-là. C'est le premier document par rapport au témoin à qui je

26 l'ai montré. Regardez la date et l'en-tête du document, et le deuxième

27 paragraphe du texte du document.

28 R. "La République de Bosnie-Herzégovine, armée de la Bosnie-Herzégovine,

Page 7896

1 commandement du 1er Corps, poste de commandement avancé - Igman.

2 "Strictement confidentiel, numéro 01/1-222, Igman, le 15 juin 1995,

3 heure : 14 heures.

4 "Informations transmises : Les forces du 3e Corps avec notre 126e

5 Brigade et 134e Brigade/16 ont libéré Ravni Nabozic, Lipa, la cote 701, ils

6 ont pris le contrôle de Semizovac Srednje, le carrefour de Semizovac."

7 Q. Quel corps a rejoint le 1er Corps à la 6e Division ?

8 R. Il est écrit ici que c'était le 3e Corps.

9 Q. Est-ce que par rapport à ce que vous avez dit tout à l'heure, qu'il y

10 avait beaucoup d'armes qui vous tiraient dessus et qu'il y avait dix

11 soldats ennemis pour un soldat de vos rangs, est-ce que cela correspond à

12 cela ?

13 R. Oui, cela correspond tout à fait à ce que j'ai dit.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

15 Juges, je voudrais montrer au témoin un document quant aux événements de

16 l'automne 1994. Tout à l'heure, j'ai omis de lui poser des questions par

17 rapport à cela. Je vais en finir avec mon interrogatoire en présentant ce

18 document. C'est DD --

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, continuez. J'ai vu M. Sachdeva

20 debout.

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas

22 prendre la parole en ce moment.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous voulez faire quelque

24 chose par rapport au document ?

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] L'accusé m'a dit qu'il s'agit de la pièce

26 à conviction de la Défense qui a été déjà versée au dossier en tant que

27 pièce D282.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

2 Q. Le deuxième document est le 2D002466. Monsieur le Témoin, tout à

3 l'heure vous avez parlé des activités de combat en 1994. Je voudrais vous

4 montrer ce document pour voir si vous êtes en mesure dire si ce document

5 reflète ce qui s'est passé en automne 1994. Regardez maintenant d'abord la

6 date du document ?

7 R. "République de Bosnie-Herzégovine, état-major du commandement Suprême

8 des forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine, poste de

9 commandement Kakanj, strictement confidentiel, numéro 02-1/1381-1, Kakanj,

10 le 7 novembre 1994."

11 Oui, c'est ça.

12 "La demande et la proposition pour organiser les forces transmises

13 aux fins de" --

14 Q. Au point 1, s'il vous plaît, regardez. Il est question de certains

15 endroits. Pouvez-vous vous concentrer sur ces endroits et nous dire si ces

16 activités dont vous avez parlé tout à l'heure au moment où je vous ai posé

17 des questions portant sur les activités de combat en automne 1994, est-ce

18 que ces endroits sont en liaison avec ces activités de combat ?

19 R. Oui. Il s'agit du plateau de Nisici, les monts de Jasen et de Polom,

20 c'est là où il y avait des activités de combat. Les gens dont j'ai parlé

21 tout à l'heure ont été tués dans ces localités.

22 Q. Tout ce qui est écrit, à partir du mot "Analysant" jusqu'à la fin,

23 lisez cela, s'il vous plaît.

24 R. "Analysant votre succès et la situation actuelle côté ennemi, je vous

25 propose de regrouper vos forces et vos moyens pour procéder à des attaques

26 finales pour libérer le plateau de Nisici sur les axes suivants :

27 "Donji Potok - Gornji Ivancici; Stomorine - Donji Ivancici - Gradina

28 (cote 1121), Ninici - Borak; Konjsko (cote 1022, 1032) Dusevine.

Page 7898

1 "Je vous félicite parce que vous avez eu des succès, et je félicite

2 tous les participants aux actions, et je vous souhaite beaucoup de succès

3 dans le travail futur."

4 Le commandement : Commandant -- je ne vois pas qui a signé cela.

5 Q. Regardez, c'est lisible.

6 R. Le général de brigade Enver Hadzihasanovic, c'est ce que je vois ici.

7 Q. Est-ce que ce document, ce que vous y avez lu et ce que vous avez dit,

8 reflète ce qui s'est passé en octobre et en novembre ?

9 R. C'est ce dont j'ai parlé.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Etant donné que le témoin vient de

12 confirmer que tout s'est passé ainsi, comme c'est écrit dans ce document,

13 qu'il y avait des combats sur ces positions et qu'on proposait d'autres

14 actions pour la libération finale, je prie qu'on verse ce document au

15 dossier, parce que pour ce qui est des combats en 1994 il s'agissait des

16 offensives de l'ABiH.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Ce sera versé au dossier.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction D290.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

20 Q. Monsieur le Témoin, à la fin, je vais vous poser la question suivante.

21 Vous avez fait l'école à Sarajevo. Vous avez vécu à Sarajevo ?

22 R. Oui, c'est vrai.

23 Q. Pouvez-vous dire, lorsqu'il s'agit de la situation au sens géographique

24 du mot, quelles sont les élévations géographiques dominantes par rapport à

25 Stari Grad, Novo Sarajevo, Ilidza centre, Grbavica, Nedzarici, Vogosca ?

26 Pouvez-vous nous dire cela en vous basant sur votre propre expérience et

27 sur ce que vous avez pu observer ou remarquer durant votre vie à Sarajevo.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva.

Page 7899

1 M. SACHDEVA : [interprétation] J'hésitais jusqu'ici, mais étant donné que

2 mon éminent collègue vient de dire : "Puisque que vous étiez en mesure de

3 remarquer cela parce que vous avez vécu à Sarajevo." J'ai compris que le

4 témoin a vécu à Ilijas durant la guerre. Ilijas se trouve à 20 kilomètres

5 de distance de Sarajevo. Il est peut-être allé à Sarajevo, mais déduire

6 cela parce qu'il a vécu là-bas --

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur, où avez-vous vécu, à

8 Sarajevo, à Ilijas ou dans les deux ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vécu dans la municipalité d'Ilijas et je

10 suis allé à l'école à Sarajevo. C'était notre ville. Je connais Sarajevo.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez continuer.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

13 Q. Monsieur le Témoin, dites-nous, Ilijas appartient à quelle ville ?

14 R. Ilijas appartient à Sarajevo, c'est notre ville.

15 Q. Vous n'avez jamais vécu dans d'autres villes, uniquement à Sarajevo ?

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. Pour finir, est-ce que vous pouvez répondre à cette question par

18 rapport au lieu où vous habitiez ainsi que du terrain, par rapport à tous

19 ces lieux que j'ai évoqués, de façon à ce que je ne sois pas obligé de les

20 redire ?

21 R. Oui, Mojmilo, Zuc, Hum, Igman, Trebevic, ça serait ça.

22 Q. Est-ce que vous pourriez maintenant nous dire, s'il vous plaît, quelles

23 forces armées se trouvaient à ce moment-là sur ces positions par rapport

24 aux caractéristiques du terrain, à moins que vous ne connaissiez pas les

25 positions ou est-ce que c'est quelque chose que vous savez étant donné que

26 vous faisiez partie du Corps de Sarajevo-Romanija ?

27 R. D'après ce que je sais tout, hormis Trebevic, était tenu par les forces

28 de l'ABiH.

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1 Q. Merci.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions à vous

3 poser.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva.

5 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

6 Contre-interrogatoire par M. Sachdeva :

7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kovacevic. Je m'appelle Manoj

8 Sachdeva et je suis un avocat de l'Accusation. Je vais vous poser quelques

9 questions aujourd'hui. Est-ce que je peux simplement comprendre ceci de

10 vous. Alors que vous faisiez partie de la Brigade d'Ilijas, vous étiez sur

11 le plateau de Nisici, c'est cela ?

12 R. Oui. Toute la route qui va de Nisici à Semizovac, tout ceci comprend le

13 plateau de Nisici et c'est là que je me trouvais.

14 Q. Dans les grandes lignes, depuis la région de Skenderija qui se trouve

15 au sud de Sarajevo, l'endroit où vous serviez dans l'armée se trouvait à 20

16 ou 25 kilomètres au nord-ouest de là, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Dans lequel -- je vais vous poser cette question-ci. La Brigade

19 d'Ilijas était composée de combien de bataillons ?

20 R. Je ne sais pas exactement, trois ou quatre je crois, mais je n'en suis

21 sûr.

22 Q. Le bataillon que vous avez cité un peu plus tôt, c'était le 1er

23 Bataillon, était-ce le bataillon auquel vous apparteniez ?

24 R. Oui, le Bataillon de Srednje. Je faisais partie de celui-là.

25 Q. Ce bataillon comprenait combien de compagnies ?

26 R. Trois compagnies.

27 Q. Je suppose que chaque compagnie était dotée d'une centaine d'hommes

28 environ; c'est exact ?

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1 R. Il y avait 80 hommes dans ma compagnie, et à peu près le même nombre

2 dans les deux autres compagnies, mais je n'en suis pas tout à fait sûr.

3 Q. La compagnie dont vous faisiez partie, vous avez dit aux Juges de la

4 Chambre que vous étiez un soldat d'infanterie dans les tranchées. Je

5 suppose que vous n'avez joué aucun rôle au sein de la compagnie. Par

6 exemple, vous n'étiez pas le commandant de la compagnie, n'est-ce pas ?

7 R. Non, j'étais un combattant dans les tranchées pendant toute la durée.

8 Q. Vous avez dit que lorsque vous parliez des armes, je crois que vous

9 parliez de la brigade à ce moment-là. Lorsque vous avez parlé des fusils

10 automatiques et semi-automatiques et de quelques mortiers, vous avez

11 également parlé d'un char et d'un obusier. Est-ce que ces armes étaient

12 celles de votre bataillon ou est-ce que vous pensiez plutôt à la brigade

13 lorsque vous avez dit cela ?

14 R. Ceci appartenait au plateau de Nisici. Peut-être que plusieurs

15 bataillons ont utilisé tout ceci, mais c'est en tout cas ce qu'il y avait

16 en termes de nombre à l'époque.

17 Q. Vous, dans votre compagnie, on vous a remis des fusils automatiques et

18 semi-automatiques, c'est cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Vos collègues dans votre compagnie recevaient les mêmes, c'est cela ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Est-ce que vous disposiez de mortiers dans votre compagnie ?

23 R. Non, pas dans la compagnie. Comme je vous l'ai dit, ceci n'appartenait

24 pas à ma seule compagnie. Les pièces d'artillerie s'appliquaient à

25 l'ensemble de cette région.

26 Q. Je suppose que si votre compagnie avait besoin de mortiers ou de pièces

27 d'artillerie, ils pouvaient se procurer cet appui en matière d'artillerie;

28 c'est exact ?

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1 R. Oui, c'est exact.

2 Q. Pour ce qui est des mortiers, simplement, je vous ai posé une question

3 au sujet des mortiers, je suppose que vous aviez des mortiers de 120

4 millimètres, 90 millimètres et 60 millimètres ?

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. Vous avez dit que le commandant de la brigade était Dragan Josipovic;

7 est-ce exact ?

8 R. Oui.

9 Q. Vous avez quitté la brigade en novembre 1994, c'est cela ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui répondait au nom de Milos Delic, qui

12 à un moment donné était commandant de la brigade ?

13 R. Oui, au fil des jours, ils changeaient. Josipovic est allé rejoindre

14 Sarajevo 3, je crois, mais pour ce qui est de Milos Delic, je ne sais pas

15 vraiment, parce que cela n'était pas très important pour moi.

16 Q. Je souhaite établir ceci, au moment où vous étiez rattaché à la Brigade

17 d'Ilijas, Dragan Josipovic était le commandant de la brigade, n'est-ce pas

18 ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Avez-vous jamais rencontré Dragan Josipovic ?

21 R. Je le voyais. Quelquefois il venait nous rendre visite dans les

22 tranchées là où nous étions.

23 Q. Un peu plut tôt, vous avez dit dans votre déposition - pardonnez-moi si

24 je passe d'un sujet à l'autre un petit peu - mais je souhaite vous poser

25 cette question. Vous avez parlé de la date du 15 juin 1995. Vous en

26 souvenez-vous ? Je sais qu'en fait j'évoque maintenant la période au cours

27 de laquelle vous faisiez partie de la 1ère Brigade de Romanija, et je vais

28 vous poser des questions à ce sujet un peu plus tard. Mais je souhaite vous

Page 7903

1 poser cette question-ci : vous souvenez-vous avoir parlé dans votre

2 déposition du 15 juin 1995. Vous avez parlé du fait d'avoir été touché par

3 la foudre, n'est-ce pas ? Vous en souvenez-vous ?

4 R. Oui.

5 Q. Donc le ratio n'était pas en votre faveur puisque le ratio était de 1

6 pour 10 ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que je dois comprendre que le lendemain ou très peu de temps

9 après l'attaque de l'ABiH, le Corps Sarajevo-Romanija a pu reprendre le

10 terrain et reprendre le contrôle de la route de Srednje; c'est exact ?

11 R. Oui, c'est exact.

12 Q. Vous avez dit que le moral des troupes était bon et que vous aviez un

13 appui en matière d'artillerie important, c'est comme ça que vous avez

14 réussi à reprendre le terrain. Je souhaite simplement vous demander quel

15 type d'appui en matière d'artillerie vous aviez et de quoi disposiez-vous

16 qui vous a permis finalement de reprendre le contrôle de cette zone ?

17 R. En artillerie c'étaient des obusiers, des chars et des mortiers. Je

18 n'ai pas dit que le moral était bon. Nous étions motivés et nous n'avions

19 aucun endroit où aller. Nous avions nos enfants et en ce qui nous

20 concernait il fallait survivre.

21 Q. Par rapport au moral, je lis simplement ce que vous avez dit, mais peu

22 importe. Vous avez parlé d'obusiers, de mortiers, de chars. De combien de

23 mortiers parlons-nous et de quels types de mortiers s'agissait-il ?

24 R. Je vous ai dit que j'étais dans les tranchées pendant toute la durée de

25 ce conflit. Je ne me trouvais pas à l'endroit où il y avait les pièces

26 d'artillerie. Les mortiers étaient des mortiers de 120 millimètres, 80

27 millimètres, les chars étaient vieux. Je ne sais pas en fait quelles

28 étaient les inscriptions sur les chars, mais il y avait une pléthore

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1 d'armes et de pièces d'artillerie. Je ne sais pas de quelles il s'agissait.

2 Q. Oui. Je suppose que lorsque vous dites qu'il y avait une pléthore

3 d'armes ou de pièces d'artillerie, que malgré cela le rapport n'était pas

4 en votre faveur. C'était dix pour un. Le Corps de Sarajevo-Romanija a

5 néanmoins réussi à reprendre le contrôle militaire de la région, n'est-ce

6 pas ?

7 R. Nous devions simplement nous défendre. Je ne sais pas si nous étions en

8 mesure de reprendre le terrain sur un plan militaire. C'était une des

9 actions défensives et non offensives que nous menions.

10 Q. Lors de ces activités de combat le 15 juin vous étiez en minorité et le

11 rapport était d'un sur dix, lorsque le Corps de Sarajevo-Romanija a repris

12 le contrôle de cette route stratégique, n'est-ce pas ? C'est exact ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Lorsque vous faisiez partie de la Brigade d'Ilijas, je vais vous poser

15 cette question : connaissez-vous un endroit qui s'appelle Breza ?

16 R. Oui.

17 Q. A l'époque où vous faisiez partie de la Brigade d'Ilijas, je suppose

18 que Breza était sous le contrôle de -- en tout cas sur le territoire de

19 l'ABiH -- contrôlé par l'ABiH; c'est exact ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que je peux vous présenter les choses ainsi ? Breza, disons,

22 faisait partie - je ne dirais pas de votre zone de responsabilité au plan

23 militaire parce que je parle d'une région qui n'était pas contrôlée par le

24 Corps de Sarajevo-Romanija. Mais c'était important pour votre brigade de

25 comprendre quels mouvements il aurait pu y avoir, quels mouvements

26 militaires entre Breza et les autres municipalités voisines, n'est-ce pas ?

27 Ceci présentait un intérêt militaire ?

28 R. C'est exact.

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1 Q. En réalité pendant ces activités de combat les forces qui composaient

2 la Brigade d'Ilijas tiraient sur Breza, n'est-ce pas ?

3 R. Non. Nos positions de l'ABiH étaient précisément ici à la frontière

4 entre Breza et Ilijas, et c'est possible -- il y avait en fait des tirs le

5 long de la ligne de séparation mais il y avait davantage de combats --

6 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la dernière partie de la

7 réponse du témoin.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, répéter

9 la dernière partie de votre réponse car les interprètes ne vous ont pas

10 compris.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] La ligne de séparation entre Ilijas et Breza

12 se trouvait sur le territoire de la municipalité d'Ilijas. Donc il n'y

13 avait absolument aucune raison de tirer sur la municipalité de Breza

14 puisqu'il s'agissait de la ligne de séparation.

15 M. SACHDEVA : [interprétation]

16 Q. Selon vous, vous dites qu'il n'y avait pas besoin de tirer sur Breza,

17 mais si je vous disais qu'il arrivait que l'on tire sur la Brigade d'Ilijas

18 ?

19 R. S'il y avait une cible militaire, oui, bien sûr, que l'on tirait.

20 Q. Vous dites s'il y avait une cible militaire, d'accord, mais, par

21 exemple, si un char se trouvait dans la ville de Breza, de façon

22 hypothétique la RSK tirait à ce moment-là dans la ville de Breza ?

23 R. Si des armes d'artillerie avaient été ciblées, il n'était pas

24 nécessaire d'employer l'ensemble du Corps Sarajevo-Romanija pour tirer sur

25 Breza. Si quelqu'un avait tiré depuis les airs, c'était logique de riposter

26 ces tirs.

27 Q. Je suis navré. Non, bien sûr que je ne voulais pas parler de l'ensemble

28 des forces du Corps Sarajevo-Romanija, mais je faisais plutôt allusion aux

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1 forces de la Brigade d'Ilijas.

2 Permettez-moi de vous poser cette question : les commandants de

3 bataillon, en fait les commandants de brigade, évaluaient certains

4 objectifs, trouvaient certaines cibles. Ils les donnaient aux soldats et à

5 leurs subordonnés. En d'autres mots, les cibles qui devaient être touchées

6 étaient communiquées aux personnes qui devaient tirer sur ces cibles et

7 c'était le commandement qui s'en chargeait; est-ce exact ?

8 R. Peut-être pour ce qui est de l'artillerie, j'étais combattant et je

9 dois dire que la cible était claire : l'ennemi se trouvait devant moi et il

10 était toujours à la portée de mon fusil.

11 Q. Oui, je comprends pour ce qui est de l'artillerie. Mais s'il y avait,

12 par exemple, des cibles à toucher par des chars ou des obusiers, et aussi

13 par des mortiers, ces cibles étaient données par le commandant à ses

14 subordonnés. Est-ce que je vous ai bien compris, c'est le commandant qui

15 déterminait les cibles ?

16 R. Oui. Par exemple, si une cible a été déterminée, s'il y a eu une

17 provocation, peut-être que oui. Je n'ai pas été officier d'artillerie, mais

18 je présume que c'est comme ça.

19 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on passer à

20 huis clos partiel, je vous prie ?

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Huis clos partiel.

22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

23 Juges, nous sommes à huis clos partiel.

24 [Audience à huis clos partiel]

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18 --- L'audience est levée à 13 heures 42 et reprendra le mardi 10 juillet

19 2007, à 9 heures 00.

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