Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 19 novembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 22.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  6   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à

  8   tout le monde. C'est l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Gotovina et

  9   consorts.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 11   Avant que le Procureur ne cite son prochain témoin, ça va être M. Theunens,

 12   avec son rapport d'expert, il y avait deux points à soulever. Le premier,

 13   on avait dit, mais maintenant c'est couché au compte rendu d'audience, je

 14   pense que c'était la Défense de M. Gotovina qui a dit qu'il était

 15   extrêmement important de savoir quelle était l'exacte portée du rapport

 16   d'expert de M. Theunens. Nous avons réfléchi à cela, et nous invitons les

 17   parties à présenter les arguments là-dessus, et voici ce que nous

 18   proposons. Avant de commencer d'entendre la déposition de M. Theunens au

 19   sujet de son rapport d'expert, qu'on donne la possibilité aux parties

 20   d'explorer davantage toute pertinence, tous faits pertinents qui portent

 21   sur la portée et la nature de l'expertise de M. Theunens, et pour le faire,

 22   il va y avoir une autre portion tout à fait séparée de sa déposition, et

 23   c'est dans le cadre de cette portion que vous allez pouvoir poser les

 24   questions pertinentes par rapport à ce sujet. Donc, ça veut dire que la

 25   Défense va pouvoir tout d'abord explorer ce point-là, et ensuite aller au

 26   fond éventuellement. Donc de cette façon, en procédant comme cela, les

 27   informations que nous allons obtenir de M. Theunens vont aider les Juges

 28   dans leur devoir de contrôler la présentation des moyens de preuve.

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  1   Si le besoin se présente, vous allez pouvoir, après avoir posé les

  2   questions au témoin par rapport à ce sujet précis, faire valoir vos

  3   arguments. Eventuellement, vous allez pouvoir nous le dire donc

  4   éventuellement, on allait décider là-dessus, statuer là-dessus.

  5   Voilà, c'est un premier point.

  6   Ensuite, nous proposons de procéder ainsi. Tout d'abord, entendre vos

  7   commentaires, brefs si possible, là-dessus. Donc, si vous avez quelque

  8   chose à dire, pourriez-vous le faire immédiatement, ensuite on va vraiment

  9   décider comment procéder.

 10   M. WAESPI : [interprétation] Je vous remercie. Une grande partie de mon

 11   interrogatoire principal va porter sur la méthodologie et sur l'expertise

 12   du témoin expert. Si vous voulez, je vais intégrer ce que vous venez de

 13   suggérer dans cette partie-là.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez des commentaires

 15   quant à la proposition que je viens de faire, à savoir de parler de cela de

 16   façon séparée avant d'entrer dans le vif du sujet ?

 17   M. WAESPI : [interprétation] Oui, oui, je pense que c'est une très bonne

 18   façon d procéder. Donc, de toute façon, la première partie de mes questions

 19   portera sur la méthodologie, sur les questions de fond, son CV, et cetera.

 20   Ensuite, nous allons poser les questions de fond.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, on vous propose donc de

 22   prendre la parole après cette première portion. Ceci, de toute façon,

 23   pourrait être très utile aux Juges quand il s'agit de contrôler la

 24   présentation des moyens de preuve.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le Procureur a

 26   apparemment déjà présenté M. Theunens, comme vous le dites dans le

 27   paragraphe 25 de votre ordonnance, il s'agit d'un expert des conflits

 28   armés, de la structure du commandement et du contrôle, de la discipline, et

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  1   cetera. C'est très général.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, très général, effectivement,

  3   et vu les soucis exprimés par la Défense, et apparemment c'est vraiment au

  4   cœur de vos préoccupations, nous allons répondre à cela.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Un point pratique. Nous souhaitons demander aux

  6   Juges de prendre des décisions quant au degré de son champ d'expertise, et

  7   ceci par rapport aux changements dont on parle dans votre ordonnance dans

  8   le paragraphe 29, deuxième phrase, vous dites : "Les opinions qui dépassent

  9   son champ d'expertise vont être traitées comme d'autres points d'opinion,

 10   d'éléments de preuve qui relèvent des opinions et pas d'expertise."

 11   Pour cela, il serait très important d'avoir des indications quant à ce que

 12   vous considérez comme étant vraiment le champ d'expertise de M. Theunens,

 13   et ce qui dépasse cela.

 14   Puis, pour terminer, il devient très important à cause -- peut-être

 15   que je n'ai pas bien lu ce texte, et corrigez-moi si c'est vrai, dans le

 16   paragraphe 26 de l'ordonnance, on peut lire que dans la mesure où les

 17   documents figurent en tant que moyens de preuve en corroboration du rapport

 18   de M. Theunens, ceci va être examiné comme dans ce cadre-là.

 19   Mais si un document - et vous avez des centaines de documents qui figurent

 20   comme des documents relevant des notes de bas de page - donc, si c'est un

 21   document qui ne fait pas partie de cela, et s'il s'agit des opinions du

 22   témoin expert, là on aura l'impression que la charge de la preuve est

 23   basculée sur la Défense. Je pense que là, il faudrait tout d'abord que le

 24   Procureur décide de la validité de telle opinion.

 25   Donc là, il y a deux questions qui se posent. Il s'agit des questions qui

 26   sont séparées mais interdépendantes, et ceci met la Défense dans une

 27   situation difficile parce qu'il y a quand même des chevauchements entre ces

 28   deux champs pourtant différents.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Je vois ce que pose problème à la Défense

  3   quand on parle de la portée de l'expertise de l'expert. Je pense que la

  4   Défense a tout simplement mal interprété l'ordonnance des Juges de la

  5   Chambre, parce que ceci voudrait dire qu'on demande au Procureur de

  6   refaire, re-assembler ce rapport d'expert pendant l'interrogatoire

  7   principal, si on croit ce qu'a dit M. Kehoe, et je pense qu'une telle

  8   interprétation est totalement contraire au paragraphe 30 de votre décision

  9   dans laquelle les Juges de la Chambre demandent au Procureur de limiter

 10   l'interrogatoire principal aux questions qui portent à controverse ou aux

 11   questions d'une importance cruciale.

 12   Donc, les limites imposées sur les opinions ou les conclusions qui se

 13   trouvent dans le rapport d'expert, même s'ils ont une valeur probante ou

 14   sont admissibles, ne sont pas de nature à apporter une controverse et ne

 15   sont pas au cœur de notre affaire.

 16   Et par rapport au champ d'expertise, comme disait M. Kehoe, dans votre

 17   paragraphe 25, vous avez accepté que M. Theunens était expert des forces

 18   armées croates, et vous avez dit que :"Son expertise du domaine de

 19   commandement et de contrôle militaire et des conflits armés, et cetera,

 20   c'est quelque chose qui relève de sa vaste expérience et qu'il a pu

 21   acquérir en travaillant pour le bureau du Procureur."

 22   Donc, M. Theunens n'a pas besoin d'être un expert indépendant sur le

 23   commandant et le contrôle sur les lois des conflits armés, et cetera, ou

 24   sur l'application des différentes lois. Quand il s'agit des questions de

 25   droit humanitaire, de la balistique, et cetera, et bien là, il s'agit de

 26   points qui dépassent clairement son domaine d'expertise, et là, c'est comme

 27   cela que j'interprète, en tout cas, le paragraphe 29 de votre décision, et

 28   bien là, dans ce cas spécifique, il faut que je pose des bases pour faire

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  1   valoir son expertise par rapport à ce point précis; pour le reste, vous

  2   l'avez accepté comme relevant du domaine de son expertise. Et de toute

  3   façon, je vais parler de la méthodologie, et je vais parler de son

  4   expérience et de tout ce qui fait de lui un expert en la matière.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Puis-je répondre ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le

  8   respect que je dois à mon collègue, ce que le Procureur propose, c'est que

  9   parce que quelqu'un est médecin généraliste, il est forcément expert en

 10   oncologie, radiologie ,et d'autres domaines de médecine. M. Theunens a eu

 11   une carrière importante en tant qu'officier de renseignement, et c'est ce

 12   qu'il est. Il n'est pas expert en combat armé ou autre.

 13   Donc, il s'agit là d'un rapport de 700 pages, et nous demandons que

 14   les opinions qui sont exprimées soient isolées pour que l'on puisse les

 15   traiter comme telles. Et cela n'a pas eu lieu. Donc, là, on a un document

 16   où le Procureur dit que cet expert peut témoigner en tant que témoin expert

 17   sur les choses aussi différentes que la loi croate, les questions

 18   militaires, la structure de l'armée croate, et il peut faire ce que tout le

 19   monde ici peut faire; il peut lire les textes de loi croates, et pourtant,

 20   il n'a pas la même formation que les Juges, et il vient tout de même

 21   déposer et donner ses opinions à ce sujet en tant qu'expert.

 22   Franchement, Monsieur le Président, la portée de l'expertise, selon le

 23   Procureur, de ce témoin expert est si large, si vaste que ceci ressemble

 24   vraiment à un réquisitoire présenté en personne d'un témoin expert déguisé,

 25   et c'est cela qu'on nous propose.

 26   Je ne dis pas que M. Theunens ne peut pas déposer de toute une série de

 27   choses qui relèvent du renseignement militaire. Mais on ne peut pas tout

 28   mettre dans le même sac, on ne peut pas ajouter tout ce qu'on veut dans son

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  1   CV, on voit exactement quels sont les points d'expertise de M. Theunens.

  2   Le problème se trouve dans le paragraphe 25, où il est dit : "Le document

  3   qui --" c'est le paragraphe 26.

  4   "Un document qui ne fait pas partie des moyens de preuve, s'il est résumé

  5   de façon incorrecte, les Juges s'attendent à ce que les parties, au cours

  6   de l'interrogatoire, posent des questions à M. Theunens pour bien

  7   comprendre la teneur du document sous-jacent."

  8   Donc, nous avons demandé que l'on précise exactement quelle était la portée

  9   de l'expertise de ce témoin; et qu'est-ce qu'on a ? On a à faire face à un

 10   document de 700 pages, et si l'on ne conteste pas cela par le biais des

 11   différents documents, ils vont être acceptés sans avoir été contestés ou

 12   testés, et acceptés comme faisant partie de son opinion d'expert.

 13   Ceci nous met dans une situation extrêmement difficile, surtout vu la

 14   portée, la largeur de ce rapport.

 15   J'ai pensé que la plus simple façon de procéder serait de dire au

 16   Procureur de lui demander d'identifier ses opinions, ensuite on va en

 17   parler concrètement. C'est exactement à quoi vous avez pensé dans votre

 18   décision, dans les paragraphes 30 à 31. Parce que maintenant, on se voit

 19   obligés de tester ce témoin sur un rapport qui contient 700 pages, sur tous

 20   ces points, alors qu'on ne sait pas quand est-ce qu'il s'agit de ses

 21   opinions. Ceci rend notre travail extrêmement difficile, surtout si on veut

 22   procéder de la façon dont le Procureur le propose.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 24   M. KAY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je me suis dit que les autres

 26   conseils de la Défense allaient avoir aussi la possibilité de s'exprimer.

 27   Mais j'attends souvent que vous vous leviez, mais là, vous l'avez fait.

 28   M. KAY : [interprétation] Je me cache derrière M. Kehoe, mais il s'est

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  1   assis; alors c'est mon tour. Donc, la question qu'il faudrait avoir à

  2   l'esprit par rapport à ce rapport d'expert, ce sont les questions

  3   auxquelles le Procureur a fait référence quand il a parlé du témoin, et qui

  4   ne se trouvent pas dans le texte de son rapport. On a reçu le projet des

  5   documents, enfin, des questions de M. Waespi au cours des deux derniers

  6   jours, et ceci se trouve dans le deuxième intercalaire de son rapport, et

  7   là, on trouve la pièce 65 ter 6111, et on a dix intitulés, le premier :

  8   Veuillez identifier les documents qui indiquent quelle était la structure

  9   de la défense dans la République de Croatie au mois d'août 1995.

 10   Ensuite, le point suivante : Veuillez identifier les documents qui

 11   reflètent le système de commandement et de contrôle dans l'armée croate en

 12   1995.

 13   Ensuite, le point 3, je ne sais pas si c'est sur l'écran déjà, alors là, on

 14   peut lire : Veuillez identifier les documents qui reflètent les règles en

 15   vigueur par rapport à l'application des lois sur les conflits armés, les

 16   conventions de Genève, et cetera, dans l'armée croate.

 17   4 : Identifier les documents concrets portant sur la structure de

 18   commandement et de contrôle, y compris l'exercice de commandement et de

 19   contrôle, qui ont un rapport avec l'opération Tempête, et autres opérations

 20   liées à cela. Des documents devraient avoir un rapport avec le commandement

 21   de jure et de fait.

 22   Ensuite identifiez ceci se trouve au point 5 : Les documents qui portent

 23   sur les unités qui ont participé à l'opération Tempête et autres opérations

 24   qui ont suivi après cette opération.

 25   Ensuite 6 : Identifier les documents portant sur la commission de crimes

 26   pendant et après l'opération Tempête, y compris le fait de faire des

 27   rapports sur les crimes, et là, on parle surtout des structures militaires

 28   de l'armée croate. Identifier aussi tous les documents concernant la

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  1   planification, l'exécution ou l'objectif des activités de l'armée croate.

  2   Ensuite identifier tous les documents qui montrent les rapports, les liens

  3   ou toute interaction entre les autorités civiles et militaires.

  4   L'armée croate en particulier ainsi que la société civile croate. Donc le

  5   gouvernement, les autorités civiles, structures civiles. Identifier, s'il

  6   vous plaît, tous les documents qui comportent des ordres pour voir que l'on

  7   applique les lois sur les conflits armés ou autres protections concernant

  8   les civils ou autres personnes protégés ou biens, et ceci immédiatement,

  9   avant, pendant, ou après l'opération Tempête.

 10   L'armée croate mais aussi la société civile donc les instruments tel

 11   que le gouvernement, institution, et cetera, croate évidemment.

 12   Ensuite identifier, s'il vous plaît, tous les documents portant sur les

 13   mesures prises pour vérifier la mise en œuvre de tout ordre présenté en

 14   vertu de l'article 9. Là, à nouveau, la société civile croate, les

 15   structures militaires, et ceci concrètement.

 16   Ensuite en ce qui concerne le curriculum vitae de M. Theunens, on y trouve

 17   très peu d'information qui montre qu'est-ce qui le qualifie pour parler de

 18   ces sujets. Tout d'abord, je parle des structures de l'armée croate en 1995

 19   par rapport à l'opération Tempête qui a eu lieu en 1995, et autres

 20   opérations liées à celle-ci. Ensuite, par rapport à l'administration civile

 21   croate et son gouvernement, quelles sont ses qualifications pour donner un

 22   point de vue d'expert sur le gouvernement croate et ses structures et les

 23   structures et institutions de la société civile.

 24   C'était le choix du Procureur de choisir cette personne comme un témoin

 25   expert. Ils ont leurs propres raisons de cela. Cependant, les domaines

 26   d'expertise concernant lesquels vous demandez de l'aide, Madame, Messieurs

 27   les Juges, concernent les aspects de la société civile, notamment avant

 28   l'opération Tempête et immédiatement après, liés aux événements de Knin de

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  1   même qu'ailleurs dans la République de Croatie. Vous vous souviendrez de

  2   l'allégation de cette affaire portant sur l'entreprise criminelle commune,

  3   de même que les forces armées croates, et les structures militaires. Ce

  4   type d'expertise peut provenir soit de quelqu'un qui avait travaillé au

  5   sein du système militaire croate et au sein du gouvernement civil ou de la

  6   part de quelqu'un qui aurait fait une étude de tels sujets de manière qui

  7   serait reconnue. Ainsi ces personnes pourraient donner une opinion qui fait

  8   autorité.

  9   D'après nous, si l'on examine le curriculum vitae contenu dans

 10   l'intercalaire 1, il contient très peu d'éléments fournissant le fondement

 11   pour les opinions requises dans l'intercalaire 2 et qui sont reflétées dans

 12   la structure de ce rapport.

 13   Monsieur le Président, voici ce que je souhaitais dire à ce sujet.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci. Je ne vais pas répéter ce que

 16   disait Me Kay, mais nous considérons que notre position est semblable à

 17   l'égard de la police spéciale, et la façon dont elle est traitée en tant

 18   que partie intégrante de l'armée croate. Je ne vais pas entrer dans les

 19   détails concrets, mais notre position est semblable à celle de Me Kay.

 20   Donc la question de l'expertise concernant la question de la police

 21   spéciale qui est une structure tout à fait différente concernant

 22   l'opération, l'organisation et l'armée croate.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 24   M. WAESPI : [interprétation] Deux points. Tout d'abord, vous avez lu le

 25   rapport d'expert et vous avez décidé, pris une décision concernant les

 26   défis soulevés par la Défense du général Gotovina, et soutenue par d'autres

 27   Défenses, qui concerne qu'il s'agit là d'un expert prima facie sur ces

 28   matières et qui a exprimé son opinion dans son rapport qui couvre le

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  1   conflit armée, le commandement et contrôle, et la police spéciale. Et vous

  2   avez pris une décision.

  3   Deuxième point concerne les opinions. Comme Me Kay l'a mentionné et je l'ai

  4   mentionné précédemment moi-même, il existe plusieurs sujets dans le cadre

  5   desquels on fait référence de façon spécifique au résumé exécutif et

  6   parfois de tels résumés précéderont l'interrogatoire de M. Theunens. Je

  7   donne un exemple, au paragraphe 49, Me Kay a lu : "Cermak est l'autorité la

  8   plus élevée à Knin et il est supérieur au MP et à la police civile de

  9   Knin." C'est une opinion, et concernant la conclusion de cet expert, bien

 10   sûr, que je lui posais des questions concernant le fondement. Ensuite ça

 11   peut être modifié.

 12   Donc je crois, Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, que

 13   l'expertise de M. Theunens, tel que ceci est montré dans son rapport, a été

 14   accepté par la Chambre. D'après le paragraphe 29 : "Des questions qui vont

 15   visiblement au-delà de cette expertise assez vaste, non pas seulement d'une

 16   personne appartenant au renseignement militaire mais ayant la formation et

 17   les capacités de l'expert, expertise qu'il a acquise en 16 ans permettant

 18   au témoin de prononcer les opinions lors de son interrogatoire.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Avec tout le respect que je dois à mon éminent

 21   collègue et à M. Theunens, je suis sûr que c'est un très bon officier de

 22   renseignements, mais ce qu'il a fait, c'est qu'il a recueilli des

 23   documents. Vous savez, n'importe qui dans ce prétoire, y compris mon

 24   collègue, Me Misetic, aurait pu faire la même chose.

 25   Nous parlons des domaines d'expertise et du fait que cette personne

 26   est un officier de renseignements et non pas un juriste. Le problème

 27   soulevé par mon éminent collègue est lié à cela. Il a parlé de certains

 28   sujets discrets dans son courrier électronique qu'il nous a envoyé. Nous

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  1   apprécions cela.

  2   Mais il nous a aussi informé que l'Accusation allait maintenir le

  3   reste de ce rapport. Donc même si le bureau du Procureur n'allait pas en

  4   traiter directement par le biais d'un interrogatoire, ils vont néanmoins

  5   verser au dossier ce document qui devait être utilisé par la Chambre de

  6   première instance concernant toute une série d'opinions; parfois opinions

  7   que le bureau du Procureur n'a jamais demandé au témoin d'exprimer.

  8   Et à ce stade, je pense que la Chambre au paragraphe 29 a pris en

  9   considération certaines limitations portant sur le domaine d'expertise de

 10   ce témoin. Si tel n'est pas le cas, il n'y aurait pas de raisons de faire

 11   cette distinction entre les commentaires qui sont faits dans le cadre de

 12   son domaine d'expertise conformément à ce qui est écrit dans le paragraphe

 13   29.

 14   Si nous examinons le CV de M. Theunens et si on lui donne autant de

 15   crédibilité que possible concernant tout ce qui est contenu, son expertise

 16   est limitée au domaine de renseignements militaires.

 17   Je ne dis pas qu'il n'est pas possible de parler en termes généraux

 18   d'autre chose comme la législation croate ou militaire dans la République

 19   de Croatie, mais je pense qu'aller au-delà de cela n'est pas approprié.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 21   Maître Kay.

 22   M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je vais juste

 23   répondre.

 24   Nous allons prendre l'exemple de ce que M. Waespi vient de faire.

 25   Ceci montre l'aspect diabolique de cela, si je puis m'exprimer ainsi.

 26   "Cermak est l'autorité la plus haute placée à Knin et est supérieur à la

 27   police militaire et civile à Knin."

 28   Nous avons entendu de nombreux éléments de preuve émanant des témoins dans

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  1   cette affaire qui contestent ça, qui le contredisent, et la Chambre a le

  2   droit de prendre cela en considération. Mais si vous examinez, si vous

  3   parcourez le CV, il n'y a rien dans la carrière très distinguée de ce

  4   témoin qui lui donne une certaine autorité lui permettant d'exprimer une

  5   opinion concernant le contexte de cette déclaration. Il y a beaucoup de

  6   personnes dans le monde qui ont un CV semblable à celui-ci et beaucoup

  7   d'entre eux, je suggérerais ou même tous, je suggère hésiteraient à donner

  8   des opinions concernant le sujet concernant lesquelles l'Accusation lui a

  9   demandé de ce faire.

 10   Les détails des questions abordées ici sont trop éloignés du domaine

 11   d'expertise que l'on demande de lui, que l'Accusation lui demande, et le

 12   danger c'est que la Chambre de première instance recevra une opinion

 13   d'expert qui convient à une partie, opinion qui est défaillante pour ce qui

 14   est de l'étendue et des connaissances qui sous-tendent cette opinion. Bien

 15   des personnes sont prêtes à donner leurs opinions, nous le savons tous,

 16   mais la question est de savoir quel est le degré d'autorité que l'on peut

 17   accorder à une telle opinion et si ceci peut être versé au dossier devant

 18   un tribunal. Merci.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kay.

 20   Monsieur Waespi, je ne souhaitais pas que ceci dure interminablement. Je

 21   pense que vous avez commencé vous-même et j'ai invité les parties à fournir

 22   leurs commentaires sur la suggestion puis la Défense, puis vous. Donc je

 23   pense qu'en ce moment nous devrions terminer pour ce qui est des

 24   commentaires à soumettre devant la Chambre.

 25   La Chambre prendra en considération vos observations. Comme je l'ai déjà

 26   dit, lorsqu'elle décidera de la façon dont elle va procéder.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Oui. J'ai une autre question.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il y avait une autre question, je

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  1   ne sais pas si vous voulez parler de la même chose que moi, car lorsqu'il

  2   est question de l'expertise et des limites d'expertise, vous avez également

  3   soulevé la question de l'inversement de la charge de la preuve qui vous

  4   préoccupait aussi.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Puis-je ajouter une autre question à

  6   soulever.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est l'autre élément que j'avais à

  8   l'esprit puisque nous allons traiter de l'expertise. Bien sûr, la Chambre a

  9   reçu la requête demandant la communication des versions préalables du

 10   rapport d'expert et la Chambre est reconnaissante d'avoir reçu cela hier,

 11   hier soir, même si ce n'était pas très tôt le matin, et je suppose qu'un

 12   exemplaire photocopié de la réponse a été fourni ce matin ?

 13   M. WAESPI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous souhaitez répondre brièvement.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je vais le faire aussi brièvement que

 16   possible.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il ne faut pas dépasser quatre à

 18   cinq minutes.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Je souhaite dire que l'article 66 ne

 20   s'applique pas car -- enfin lorsque l'Accusation dit que cela ne s'applique

 21   pas car tous les documents concernant M. Theunens ont été communiqués, je

 22   souhaite attirer votre attention sur la lettre de M. Russo en date du 12

 23   novembre 2008, qui souligne le fait que la communication a été faite

 24   conformément à l'article 66(B), puis il y avait un courrier électronique du

 25   14 novembre 1992 [comme interprété], émanant du substitut d'audience qui

 26   souligne cette question.

 27   Donc l'argument présenté par l'Accusation concernant l'Accusation

 28   n'est pas acceptable du point de vue de la Défense. 66(B) va nous permettre

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  1   d'examiner les questions soulevées mais nous ne demandons pas d'avoir

  2   chaque partie ou notes ou commentaires de la part de M. Theunens; nous

  3   demandons le projet de ce document.

  4   M. Theunens nous a dit, lors de la réunion en janvier de cette année,

  5   qu'il a fourni une copie de son rapport au bureau du Procureur en mars

  6   2007. Par conséquent, il existe au moins un rapport discret et concret que

  7   M. Theunens a donné au bureau du Procureur. Donc je souhaite clairement

  8   indiquer que la Défense ne s'intéresse pas à toutes ces autres notes, mais

  9   à ce rapport en particulier.

 10   Je vais vous dire qu'entre le premier rapport et le deuxième rapport,

 11   M. Theunens nous a dit que non seulement il a lu le mémoire préalable de

 12   l'Accusation mais aussi de la Défense. C'est tout à fait intéressant

 13   lorsqu'on analyse l'évolution de ces opinions. Ceci n'est pas seulement

 14   couvert par l'article 66, mais aussi 68. Pourquoi ?

 15   L'article 66 [comme interprété] porte sur les éléments à décharge,

 16   mais aussi sur la question de savoir si les informations affectent la

 17   crédibilité des éléments de preuve de l'Accusation. Si en réalité c'est le

 18   cas, si cela affecte la crédibilité des éléments de preuve de l'Accusation,

 19   ceci devient un critère de communication de la part du bureau du Procureur.

 20   Nous sommes lésés, car nous n'avons tout simplement pas ce rapport.

 21   Nous avons reçu les copies des rapports précédents de M. Theunens

 22   conformément à 66(B). Nous demandons simplement, conformément à ce même

 23   article, un exemplaire de ce rapport-là. Si, comme vous le dites, Monsieur

 24   le Président, la question est celle de la méthodologie et d'évolution d'une

 25   opinion, ceci peut s'appliquer directement. Je souhaite attirer votre

 26   attention sur la décision de la Chambre du 17 novembre, paragraphe 29,

 27   dernière phrase où la Chambre dit que : "La Chambre considère que beaucoup

 28   de transparence est nécessaire à l'égard de ce processus, notamment de la

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  1   part de l'Accusation lors de son interrogatoire."

  2   La question de la transparence est d'une importance-clé. Pourquoi ?

  3   Parce que l'Accusation présente un témoin qui fait partie du bureau du

  4   Procureur.

  5   Deuxièmement, il a écrit un rapport préalable qu'il a visiblement

  6   changé.

  7   Troisièmement, la Défense a le droit d'explorer les bases de ces

  8   changements. Est-ce que ceci était car il appris plus de choses ou sous

  9   l'influence des membres du bureau du Procureur ? Est-ce que le bureau du

 10   Procureur avait une thèse et souhaitait qu'il présente cette thèse dans son

 11   rapport d'expert ? Je soumets, Monsieur le Président, que ce dernier aspect

 12   va être montré, démontré au cours du contre-interrogatoire.

 13   Mais en termes généraux, la question qui se pose est de savoir

 14   pourquoi le niveau de la communication, compte tenu du niveau de

 15   communication dans cette Chambre, l'Accusation ne communique pas ce

 16   document à la Chambre ? Pourquoi l'Accusation ne souhaite pas que la

 17   Chambre de première instance voie ce document ?

 18   La charge est au bureau du Procureur, et c'est le bureau du Procureur

 19   qui doit présenter cela à la Chambre et présenter l'argument pour expliquer

 20   pourquoi l'article 66(B) ne s'applique pas. Ils ne l'ont pas fait. Rien

 21   dans leurs écritures soumises à la Chambre ne dit que ceci ne s'applique

 22   pas. Le seul argument est qu'il serait trop difficile de parler de cela, de

 23   l'évolution de sa pensée.

 24   Encore une fois soyons clair, la Défense ne demande pas cela. Nous

 25   demandons les rapports discrets que M. Theunens a remis au bureau du

 26   Procureur. Nous savons sur la base des discussions avec M. Theunens, qu'il

 27   y en avait au moins un qu'il avait soumis au bureau du Procureur à la mi-

 28   mars 2007. S'il y en a d'autres, nous souhaiterions les avoir aussi.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, vous êtes toujours

  2   caché. Si, je vous vois maintenant.

  3   M. KAY : [interprétation] Pas de commentaire.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

  5   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Pour ce qui est de la communication, oui, nous avons expliqué, je pense que

  7   nous l'avons fait de manière très précise dans notre réponse de la nuit

  8   dernière en disant que l'article 66(B) ne s'applique pas. Lex specialis

  9   concerne les rapports d'expert, et l'article 94 bis dit que le rapport

 10   définitif doit être communiqué, et non pas les projets de rapport.

 11   Deuxièmement, c'est ce que nous avons expliqué comme travail qui

 12   évolue. Un projet a été soumis à l'équipe de l'Accusation à un moment

 13   donné. Il n'y a pas eu d'influence exercée par l'Accusation sur l'expert

 14   pour qu'il change quoi que ce soit. Je ne suis pas au courant des

 15   changements importants. S'il y avait eu une influence de l'Accusation sur

 16   la manière dont l'expert a rédigé son rapport, nous l'aurions communiqué en

 17   vertu de l'article 68.

 18   Nous ne considérons pas que nous étions dans l'obligation de

 19   communiquer ce projet de rapport.

 20   Le premier argument de M. Kehoe concernant la communication récente

 21   de la part de M. Russo est une question tout à fait différente et n'a rien

 22   à voir avec le projet du rapport d'expert. Il s'agit là des communications

 23   normales, je pense, puisque la Défense a voulu -- je pense que nous avons

 24   vu ce qui a été fourni par Me Kay, 65 ter 6111, et je pense que ceci a été

 25   déclenché par l'article 66(4). Il s'agit d'une demande bureaucratique et

 26   d'autres documents. Nous n'avons pas communiqué, nous ne demandons pas la

 27   communication d'un projet, d'un travail en cours de progression.

 28   Si tel était le cas, nous aurions dû communiquer dans toutes les

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  1   autres affaires à chaque fois des projets de rapports semblables. Or,

  2   depuis les 14 ans que j'ai passés dans ce Tribunal, je n'en ai pas vu un

  3   seul, c'est la première fois où l'on demande la présentation du projet de

  4   rapport. Je pense que seulement on a présenté les projets de rapports

  5   lorsque le rapport définitif n'existait pas.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, apparemment il y a un

  7   désaccord concernant la question de savoir si l'article 66 s'applique ou

  8   pas. Vous dites que ça ne s'est jamais passé et que le projet de rapport

  9   avait été présenté.

 10   Est-ce qu'on ne l'a jamais demandé ? Car, nous avons l'article 66(B),

 11   et je prends ma version française où il est dit au début, sur demande --

 12   oui, le Procureur doit sur demande permettre à la Défense, et cetera. Donc

 13   vous dites que ça ne s'est jamais passé. Donc prenons une supposition, si

 14   on suppose que l'article 66(B) s'applique, si une demande a été formulée,

 15   s'il n'y a pas eu de demande, on ne peut pas s'attendre à ce que la

 16   communication soit faite de ce qui doit être spécifiquement être communiqué

 17   sur demande de l'autre partie.

 18   M. WAESPI : [interprétation] Nous avons reçu un e-mail de la Défense

 19   il y a quelques jours.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous dites que ça ne s'est jamais

 21   passé dans ce Tribunal.

 22   M. WAESPI : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ça a été demandé dans

 24   d'autres affaires ?

 25   M. WAESPI : [interprétation] Je ne sais pas. Je sais seulement quel était

 26   le résultat. J'ai demandé aux équipes, je me suis penché sur la pratique

 27   judiciaire, et je n'ai pas vu d'exemple d'une équipe qui aurait fourni un

 28   tel projet de rapport de façon volontaire.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, est-ce qu'il y a une demande ?

  2   M. WAESPI : [interprétation] Je ne sais pas. Je n'ai vu rien de tel.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cette information.

  4   Maître Kehoe.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Rien n'est reflété dans la pratique judiciaire

  6   devant ce Tribunal indiquant que quelqu'un aurait déjà demandé cela.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que quelque chose est reflété,

  8   c'est-à-dire par rapport à la partie où il est dit spécifiquement que

  9   l'article 66 s'appliquerait sur les projets de rapports d'expert ?

 10   M. KEHOE : [interprétation] Non, ce n'est pas écrit, non plus.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, ce que disent l'Accusation et la

 12   Défense n'est pas soutenu dans la pratique judiciaire dans ce Tribunal

 13   s'agissant des projets de rapports d'expert.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je prends note du fait que les rapports

 17   précédents dans Mrksic et Seselj ont été remis conformément au Règlement.

 18   S'agissant de l'ensemble de cette question, la Défense a le droit

 19   d'explorer au moins l'effet que la lecture du témoin des mémoires

 20   préalables au procès de la Défense a eu sur la façon dont il a élaboré son

 21   rapport présenté à la Chambre.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que M. Theunens vous l'a dit,

 23   M. Waespi dit -- nous raconte ce qui s'est passé et ce qui ne s'est pas

 24   passé au sein du bureau du Procureur, et la Chambre souhaite vous présenter

 25   les choses ainsi. La Chambre était prête à prendre une décision, jusqu'au

 26   moment de la présentation de ces arguments supplémentaires, la Chambre n'a

 27   pas constaté -- et bien sûr nous allons prendre cela en considération même

 28   après que vous ayez soumis vos arguments. La Chambre n'a pas trouvé de base

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  1   suffisante pour accorder la requête, pour faire droit à la requête, mais

  2   simplement, la Chambre souhaite exprimer le fait aussi qu'elle n'est pas

  3   aveugle devant vos préoccupations. Et la Chambre, par conséquent, souhaite

  4   suggérer aux parties d'explorer de manière supplémentaire la façon dont le

  5   rapport a été rédigé, comment il s'est développé, si une version a été

  6   fournie au bureau du Procureur, quelles sont les questions que vous

  7   soulevez. Bien sûr, maintenant, la Chambre a entendu, mais elle n'a pas

  8   entendu de déposition à ce sujet. Donc, pour donner l'occasion aux parties

  9   d'explorer cela de manière supplémentaire, d'un point de vue factuel, si

 10   vous avez jamais donné un rapport, s'il s'agissait de 300 pages ou de 100

 11   pages, pour quelle raison est-ce que ceci a évolué ainsi, est-ce que les

 12   conclusions ont été modifiées et ainsi de suite, quoi que ce soit. Donc,

 13   vous pourrez explorer cela de manière supplémentaire. Vous pouvez le faire

 14   soit lors du contre-interrogatoire et voir quelle est l'importance de la

 15   question pour la présentation des éléments de preuve dans leur ensemble, et

 16   aussi afin de permettre à la Défense de soumettre une demande visant à ce

 17   que ceci soit fait de façon semblable à la question de l'expertise soulevée

 18   au début avant d'entrer dans le fond de la déposition. Si les réponses à

 19   cette question nous amèneraient à réexaminer ce qui était notre conclusion

 20   provisoire jusqu'à au moins il y a une heure, bien sûr, nous allons prendre

 21   cela en considération.

 22   C'est ce que la Chambre souhaitait dire avant d'entendre vos arguments

 23   supplémentaires, et j'invite les deux parties à faire aussi des

 24   commentaires là-dessus au cours des trois à quatre minutes qui viennent.

 25   M. WAESPI : [interprétation] Oui. Je peux tout à fait, effectivement, me

 26   pencher sur la question et sur le fait que M. Theunens a, dans un premier

 27   temps, présenté un premier rapport en mars 2007. Donc, je peux lui dire ce

 28   qui faisait partie de ce rapport, ce qui a été modifié après. Tout à fait,

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  1   je peux le faire.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, en d'autres termes, vous ne vous

  3   opposez pas à la suggestion, vous n'avez aucune objection à ce que cela

  4   soit fait avant votre interrogatoire principal.

  5   M. WAESPI : [interprétation] Absolument pas.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Il appartient quand même à l'Accusation de

  8   démontrer que les documents relatifs à l'article 66(B) ne sont pas

  9   importants pour la préparation de la Défense et pour le début de la

 10   présentation des moyens à charge. La difficulté, comme vous l'avez

 11   d'ailleurs à juste titre indiquée, Monsieur le Président, c'est que si nous

 12   ne pouvons pas vérifier la déposition, nous n'avons absolument aucune

 13   possibilité de déterminer si ce que M. Theunens nous relate est exact.

 14   Tout simplement, nous devons nous en tenir à ce qu'il dit --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si M. Theunens vient et dépose après

 16   avoir prononcé sa déclaration solennelle, je pense que M. Theunens, comme

 17   n'importe quel témoin qui se présente dans ce Tribunal, nous dira la

 18   vérité, et il est absolument indubitable que vous pourrez mettre cela à

 19   l'épreuve lors du contre-interrogatoire.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je comprends tout à fait cela et je suis

 21   sûr qu'il fera de son mieux à ce sujet, mais il faut savoir en fait s'il y

 22   a eu des modifications de perspective d'un rapport par rapport à un autre,

 23   et cela mérite quand même un examen profond du fond du rapport, justement.

 24   Je ne suis pas en train de remettre en question la crédibilité de M.

 25   Theunens qui va venir déposer ici devant cette Chambre, en tant,

 26   d'ailleurs, que représentant du Tribunal. Ce que je voulais savoir, en

 27   fait, si nous allons pouvoir jauger l'évolution des changements de ces

 28   points de vue, d'ailleurs, changements de points de vue que l'on ne trouve

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  1   pas dans le rapport, donc je pense que c'est assez difficile à la Chambre

  2   d'évaluer tout cela.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je regarde l'heure qu'il est.

  4   Bien entendu, la Chambre va devoir se pencher sur la façon de procéder à

  5   l'avenir au vu des circonstances actuelles.

  6   Puis, il y a autre chose. Il y a plusieurs décisions qu'il va falloir que

  7   nous rendions, et je sais d'ores et déjà que la déposition de M. Theunens

  8   va prendre un certain temps, je sais également à quel point il est souvent

  9   difficile de trouver le temps pour ne pas trop précipiter les choses, puis

 10   nous avons ces limites horaires, donc 19 heures ou 13 heures 45, donc la

 11   Chambre va, pour le moment, rendre certaines décisions. Puis nous aurons

 12   une pause. Pendant cette pause, la Chambre va prendre en considération les

 13   arguments présentés par les parties, ensuite, la Chambre va déterminer

 14   comment nous allons procéder.

 15   Ce qui nous donne, par ailleurs, la possibilité, et qui donne la

 16   possibilité aux parties de déjà prévoir certaines choses, car si la Chambre

 17   décidait de poursuivre comme cela avait été suggéré, donc hormis le fait

 18   d'entendre ma voix, vous pourrez déjà commencer à réfléchir à la façon dont

 19   vous allez traiter l'interrogatoire principal du témoin qui va déposer.

 20   Alors, je vais dans un premier temps vous expliquer les raisons qui sous-

 21   tendent la décision visant à verser au dossier les documents suivants,

 22   P986, P987 et P988.

 23   Nous avons pris la décision de verser au dossier ces pièces avec des

 24   expurgations.

 25   Alors, par le truchement d'une écriture déposée le 8 octobre 2008, ainsi

 26   qu'à la suite d'arguments présentés oralement le 14 octobre 2008 et qui

 27   figurent aux pages du compte rendu d'audience suivantes, 10 568 à 10 570,

 28   la Défense de M. Gotovina a soulevé une objection à ce que soit versée au

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  1   dossier la pièce P988, qui est un rapport préparé par la Fédération

  2   internationale d'Helsinki pour les droits de l'homme, et d'ailleurs, je

  3   ferai référence à cette fédération en citant ses initiales, IHF, et le

  4   rapport a été préparé par l'IHF au nom de l'Organisation pour la Sécurité

  5   et la Coopération en Europe, à savoir l'OSCE.

  6   L'objection se fondait sur le fait que le rapport était dénué de fondement

  7   et utilisait l'ouï-dire. A la suite de cette objection le 8 octobre 2008,

  8   la Défense de M. Markac a retiré son écriture originale qui ne soulevait

  9   aucune objection au versement au dossier de la pièce P988, et a soulevé des

 10   objections vis-à-vis du versement au dossier des éléments de preuve, et ce,

 11   en fonction des mêmes moyens avancés par la Défense de Gotovina.

 12   Qui plus est, par le biais d'une écriture déposée le 14 octobre 2008,

 13   et à la suite d'arguments présentés oralement le même jour, arguments que

 14   nous pouvons voir aux pages du compte rendu d'audience 10 568 et 10 569, la

 15   Défense de Gotovina a soulevé une objection à ce que soient versés au

 16   dossier des extraits importants des deux déclarations de témoin au titre de

 17   l'article 92 ter, à savoir les pièces P986 et P987.

 18   L'Accusation a présenté sa requête au titre de l'article 92 ter eu égard

 19   aux pièces P986, P987 et P988 le 23 septembre 2008. La Défense Gotovina n'a

 20   pas déposé sa réponse avant le 8 octobre 2008 et le 14 octobre 2008, ce qui

 21   a dépassé la date butoir de 14 jours qui avait été imposée pour déposer les

 22   réponses, et ce, en fonction de l'article 126 bis.

 23   De surcroît, la Défense Markac a retiré sa première écriture en date

 24   du 4 octobre 2008, et a déposé son objection à la pièce P988 le 8 octobre

 25   2008, ce qui dépasse également la période de 14 jours stipulée par

 26   l'article 126 bis.

 27   La Chambre s'est penchée sur la question le 14 octobre 2008, et je ne

 28   ferais plus référence à l'année, et à moins que je ne le précise, il

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  1   s'agira toujours de l'année 2008. Ceci étant dit, la Chambre a toutefois

  2   décidé de prendre en considération les objections au vu du fond de ces

  3   objections, et la Chambre a entendu des arguments présentés à la fois par

  4   l'Accusation et la Défense. Cela figure aux pages suivantes du compte rendu

  5   d'audience 10 568 jusqu'à 10 574, ainsi qu'à la page 10 577.

  6   Le 14 octobre 2008, la Chambre a décidé de verser au dossier les pièces

  7   P986, P987 et P988. Cette décision figure aux pages 10 578 et 10 579 du

  8   compte rendu d'audience.

  9   La Chambre estime qu'eu égard aux deux déclarations de l'article 92

 10   ter versées au dossier par l'Accusation, les critères stipulés par

 11   l'article 92 ter ont été respectés. A la suite des consignes fournies par

 12   la Chambre le 13 octobre 2008, consignes que l'on peut trouver à la page 10

 13   480 du compte rendu d'audience, consignes visant l'intérêt principal de la

 14   Chambre vis-à-vis des propres observations du témoin, la Défense Gotovina a

 15   soulevé des objections à ce que des extraits importants des pièces P986 et

 16   P987 soient versés au dossier. Elle a soulevé une objection pour ce qui

 17   était de toutes les déclarations de Hayden qui ne sont pas le fruit

 18   d'observations personnelles et à propos de toute conclusion tirée sans

 19   aucun fondement. En présentant ces arguments, la Défense Gotovina n'a pas

 20   appliqué à juste titre la consigne donnée par la Chambre.

 21   Car l'admissibilité des moyens de preuve par ouï-dire est très bien

 22   établie dans la jurisprudence du Tribunal, en fonction de l'article 89(C),

 23   et la Chambre, comme elle l'a fait avec d'autres moyens de preuve par ouï-

 24   dire, évalue la pertinence ainsi que la valeur probante des moyens de

 25   preuve présentés par ouï-dire, dans le contexte plus général des moyens de

 26   preuve présentés dans leur globalité.

 27   Eu égard aux opinions et conclusions des témoins, bien que cela ne doive

 28   pas forcément être expurgé des déclarations au titre de l'article 92 ter,

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  1   les parties ne doivent pas oublier de fournir un fondement, une base pour

  2   ces avis et conclusions. Si cela n'est pas fait, il y a très peu, pour ne

  3   pas dire aucun, poids accordé à ces moyens de preuve.

  4   Le deuxième argument soulevé par la Défense vise les moyens de preuve que

  5   le témoin William Hayden a fournis à propos des observations du lieutenant-

  6   colonel Hjertnes. Hjertnes figurait sur la liste originale de témoins de

  7   l'Accusation qui portait la date du 16 mars 2007, mais à la suite d'une

  8   requête en date du 4 février 2008, l'Accusation a essayé de supprimer le

  9   colonel Hjertnes de cette liste et souhaitait le remplacer par un autre

 10   témoin.

 11   Le 10 mars 2008, en dépit des objections avancées par la Défense

 12   Gotovina, la Chambre a autorisé l'Accusation à supprimer le nom du colonel

 13   Hjertnes de sa liste de témoins, et cela fait l'objet des pages 403 et 404

 14   du compte rendu d'audience.

 15   A la page 10 569 du compte rendu d'audience, la Défense Gotovina a avancé

 16   qu'en présentant les moyens de preuve de Hjertnes par le truchement de

 17   William Hayden, l'Accusation pourrait ainsi ne pas convoquer le lieutenant-

 18   colonel Hjertnes pour qu'il vienne déposer. Au vu de ces circonstances, la

 19   Chambre n'a pas estimé qu'il était judicieux et approprié d'inclure ces

 20   extraits des pièces à conviction P986 et P987, qui font référence aux

 21   moyens de preuve de Hjertnes. Deux déclarations ont été versées au dossier

 22   après qu'il y a eu expurgation du paragraphe 2 de la pièce P986 et du

 23   paragraphe 7 et d'une partie du paragraphe 26 de la pièce P987.

 24   La pièce P988 est un rapport préparé par l'IHF, et ce, pour l'OSCE.

 25   Conformément à l'article 89(C), la Chambre peut verser au dossier tout

 26   document qu'elle considère pertinent et pour lequel elle reconnaît une

 27   valeur probante. La pièce à conviction, compilée à la suite d'une mission

 28   d'enquête de l'IHF dans la zone de la Krajina entre le 17 août 1995 et le

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  1   19 août 1995, est pertinente, étant donné qu'elle porte sur une période et

  2   sur une zone qui figure dans l'acte d'accusation. Le rapport de l'IHF

  3   établit des incidents que la mission a pu constater, des incidents tels

  4   que, par exemple, un entretien avec l'accusé, Ivan Cermak, et son officier

  5   de liaison, Karolj Dondo, ainsi que le commissaire politique civil croate,

  6   Petar Pasic. Il y est également relaté par le menu une visite accomplie par

  7   la mission au cimetière de Knin, et nous pouvons y trouver également de

  8   nombreux détails émanant de représentants des Nations Unies et de Serbes

  9   déplacés qui font état de meurtres, pillages et incendies qu'ils allèguent

 10   avoir vus.

 11   La Chambre n'a pas trouvé de raison de considérer que l'IHF, qui est

 12   une partie absolument non intéressée par la question -- la Chambre disait

 13   elle n'a pas trouvé de raison de considérer que l'IHF n'était pas une

 14   source neutre. Le rapport présente ses références pour les sources, et cela

 15   inclut, par exemple, des représentants des Nations Unies et des Serbes

 16   déplacés. De surcroît, il est absolument évident que la mission a rencontré

 17   l'accusé, Ivan Cermak, ainsi que son officier de liaison, Karolj Dondo et

 18   Petar Pasic.

 19   Pour ces raisons, les arguments présentés par les Défenses Gotovina et

 20   Markac suivant lesquels la pièce à conviction est dénuée de fondement et se

 21   fonde essentiellement sur l'ouï-dire sont rejetés par la Chambre.

 22   Toutefois, la Chambre estime que l'expurgation du paragraphe 5.4.6 du

 23   rapport de l'IHF, chapitre relatif aux moyens de preuve présentés par le

 24   lieutenant-colonel Hjertnes, telle que présentée par l'Accusation et la

 25   Défense à la page 10 602 du compte rendu d'audience, peut être acceptée, et

 26   ce, au vu des raisons qui ont été expliquées préalablement, eu égard aux

 27   pièces à conviction P986 et P987.

 28   La Chambre a également ordonné l'expurgation de la partie 6 du rapport,

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  1   telle que cela avait été suggéré par la Défense Markac à la page 10 604 du

  2   compte rendu d'audience, étant donné que cela ne porte pas ou n'est pas

  3   repris dans l'acte d'accusation, puisqu'il s'agit d'événements qui se sont

  4   déroulés dans le secteur nord.

  5   Je vous ai maintenant présenté les raisons avancées par la Chambre, raisons

  6   qui sous-tendent sa décision de versement au dossier des pièces P986, P987

  7   et P988.

  8   Je vais maintenant vous donner lecture des consignes et orientations

  9   fournies par la Chambre eu égard à l'utilisation des moyens de preuve par

 10   ouïe-dire, ainsi qu'à d'autres questions portant sur l'utilisation des

 11   déclarations fournies par les parties lors des séances de récolement avec

 12   les témoins et des contre-interrogatoires.

 13   Le 14 octobre 2008, aux pages 10 573 jusqu'à 10 575 du compte rendu

 14   d'audience, la Défense de Gotovina a demandé à la Chambre son point de vue

 15   à propos de trois questions. Dans un premier temps, il s'agissait du

 16   contre-interrogatoire d'un témoin à charge qui a présenté un témoignage par

 17   ouï-dire relatif à un autre témoin qui se trouvait, à un moment donné, sur

 18   la liste des témoins de l'Accusation mais dont le nom a maintenant été

 19   supprimé de cette liste. 

 20   Le deuxième élément portait sur ce qui suit : est-ce qu'avant de faire des

 21   certifications en fonction de l'article 92 ter, un témoin doit pouvoir

 22   examiner toutes les déclarations faites par ce témoin, notamment les

 23   déclarations qui ont préalablement été données par le témoin à la Défense.

 24   Le troisième élément portait sur la façon dont la Défense a la possibilité

 25   de poser des questions à un témoin dans le cadre d'un contre-interrogatoire

 26   sans qu'aucune ligne ou aucune référence, pour ce qui est des lignes ou des

 27   pages, lui soit fournie, qu'il s'agisse du compte rendu d'audience ou de la

 28   déclaration du témoin, au titre de l'article 92 ter.

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  1   Pour ce qui est du premier élément, la Défense de Gotovina avance, à la

  2   page 10 573 du compte rendu d'audience, que l'Accusation ne doit pas

  3   pouvoir éviter de convoquer un témoin en demandant à un autre témoin de

  4   présenter des moyens de preuve à propos des moyens de preuve qui auraient

  5   figuré dans la déposition du premier témoin s'il avait comparu devant la

  6   Chambre. Par conséquent, la Défense de Gotovina indique, au nom des trois

  7   équipes de la Défense, que ce genre de témoignage devrait soit être exclu,

  8   afin de protéger les droits des accusés au titre de l'article 21, et la

  9   Défense devrait pouvoir avoir le droit de réfuter ce genre de témoignage en

 10   faisant référence à d'autres témoignages par ouï-dire lors du contre-

 11   interrogatoire de ce témoin.

 12   L'article 89(C) autorise une Chambre à verser au dossier tout moyen

 13   de preuve pertinent pour lequel elle considère qu'il existe une valeur

 14   probante. Le versement au dossier de moyens de preuve par ouï-dire est bien

 15   établi dans la pratique du Tribunal en fonction de l'article 89(C). La

 16   Chambre, comme elle l'a déjà fait jusqu'à présent, évalue la pertinence des

 17   moyens de preuve présentés par ouï-dire, évalue leur valeur probante au cas

 18   par cas. Il est inutile de dire que la recevabilité des moyens de preuve

 19   présentés par ouï-dire est valable pour les deux parties, ce qui fait que

 20   la Défense bénéficie de la même latitude pour utiliser des moyens de preuve

 21   présentés par ouï-dire lors du contre-interrogatoire d'un témoin à charge

 22   qui présente des moyens de preuve par ouï-dire.

 23   Ceci étant dit, la Chambre insiste sur un fait : lorsqu'elle entend la

 24   déposition d'un témoin, la Chambre est surtout mue par un intérêt qui

 25   consiste à apprendre les faits tels qu'ils sont présentés par les

 26   observations du témoin. Par conséquent, la Chambre rappelle aux parties, et

 27   notamment à l'Accusation, leurs devoirs, car ils doivent choisir et trier

 28   sur le volet les meilleurs moyens de preuve afin de les présenter à la

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  1   Chambre de la façon la plus efficace et la plus exhaustive. Certes, des

  2   moyens de preuve par ouï-dire peuvent être versés au dossier s'ils ont une

  3   certaine pertinence et s'ils présentent une valeur probante, mais le poids

  4   de ce moyen de preuve est évalué par la Chambre qui évalue ces moyens de

  5   preuve dans le contexte de la globalité des moyens de preuve. Ces moyens de

  6   preuve, par conséquent, peuvent se voir octroyer aucun poids si leur

  7   importance dans le contexte de la globalité des moyens de preuve reste

  8   absolument obscure. Nous pouvons également avancer que les moyens de preuve

  9   présentés par ouï-dire peuvent être considérés comme autant d'éléments

 10   corroborant d'autres moyens de preuve qui sont meilleurs.

 11   Pour ce qui est de cette situation bien précise, à savoir il s'agissait

 12   d'un témoin à charge qui présente des moyens de preuve par ouï-dire,

 13   afférant à un autre témoin qui figurait auparavant sur la liste des témoins

 14   de l'Accusation, mais dont le nom a été par la suite supprimé, la Chambre a

 15   déjà avancé ses raisons lorsqu'elle a rendu sa décision à propos du

 16   versement au dossier des pièces P986, P987 et P988. La Chambre, donc,

 17   étudiera ces moyens de preuve par ouï-dire au cas par cas.

 18   Eu égard au deuxième élément, la Défense de Gotovina a suggéré, à la page

 19   10 575 du compte rendu d'audience, qu'avant que les certifications soient

 20   faites en fonction de l'article 92 ter, un témoin doit pouvoir examiner

 21   toutes les déclarations qui appartiennent à l'Accusation, notamment les

 22   déclarations qui ont été préalablement données à la Défense. La Défense

 23   avance que si cela était le cas, le témoin a ainsi l'occasion de se

 24   rafraîchir la mémoire. Cela permet également au témoin de comprendre qu'il

 25   n'est absolument pas erroné de fournir des déclarations à la Défense. Ce

 26   faisant, la Défense avance qu'un témoin disposera de tous les faits et que

 27   les parties pourront ainsi gérer sa déposition de façon plus rapide, puis

 28   cela diminue également la possibilité que le témoin certifie plusieurs

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  1   déclarations contradictoires. Ces arguments peuvent être trouvés aux pages

  2   10 178 à 10 190 du compte rendu d'audience.

  3   La Chambre reconnaît qu'il va dans l'intérêt de l'Accusation que ses

  4   témoins soient informés et conscients de toutes les déclarations qu'ils ont

  5   faites et qui ont été remises aux parties, mais il appartient aux parties

  6   de décider comment procéder lors de la séance de récolement des témoins.

  7   Par conséquent, la Chambre s'abstient de fournir quelque consigne que ce

  8   soit à ce sujet.

  9   Eu égard au troisième élément, la Défense de Gotovina a avancé à la page 10

 10   575 du compte rendu d'audience, qu'il pourrait être intéressant d'autoriser

 11   la Défense à mettre à l'épreuve l'aptitude du témoin à fournir de façon

 12   indépendante à la Chambre une déposition, hormis ce qui figure dans ses

 13   déclarations au titre de l'article 92 ter. Par conséquent, à la page 10 575

 14   du compte rendu d'audience, la Défense demande l'autorisation de poser des

 15   questions au témoin, sans qu'il n'y ait de références aux lignes ou aux

 16   pages des déclarations du témoin, au titre de l'article 92 ter, ou sans

 17   qu'il y ait de références aux pages du compte rendu d'audience.

 18   La Chambre considère que normalement point n'est besoin pour la Défense de

 19   citer une page précise ou une ligne précise à un témoin lorsqu'elle fait

 20   référence à la déposition du témoin lors de son interrogatoire principal ou

 21   lorsqu'elle fait référence à une déclaration au titre de l'article 92 ter.

 22   Toutefois, la Chambre insiste sur le fait qu'il ne faut pas mal reprendre

 23   les propos du témoin et qu'il ne faut pas donc ainsi induire en erreur le

 24   témoin ou jeter la confusion dans son esprit. Lorsque l'une des parties

 25   avance que les moyens de preuve ne sont pas repris en tant que tels, cette

 26   partie devra fournir une référence de ligne précise, une référence de page

 27   précise par rapport à la déposition préalable pour que la Chambre puisse

 28   évaluer l'exactitude de ce qui est avancé par les parties. Ainsi, nous

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  1   éviterons que soient reformulées de façon inadéquate les déclarations de

  2   témoin.

  3   Cela termine les consignes et orientations fournies par la Chambre.

  4   Je vais maintenant vous donner la décision et les raisons qui sous-

  5   tendent la décision de la Chambre à propos du versement au dossier des

  6   pièces P842, P846, P848 et P854, qui ont été enregistrées aux fins

  7   d'identification à l'heure actuelle.

  8   Par le biais d'écritures déposées le 2 septembre 2008 ainsi qu'à la suite

  9   des arguments présentés de façon orale devant la Chambre à la page 8 333

 10   [comme interprété] du compte rendu d'audience, l'Accusation a souhaité

 11   verser au dossier l'intégralité des quatre vidéos présentées par le

 12   truchement du témoin Soren Liborius. Ces vidéos nous permettent de voir le

 13   témoin accompagné de deux membres de la police néerlandaise et de deux

 14   représentants de l'Accusation, qui conduisent et passent par un certain

 15   nombre de villages de l'ancien secteur sud, entre le 16 et le 21 mai 1997.

 16   Dans ces vidéos, par ces vidéos, le témoin fourni une description des zones

 17   par lesquelles il est passé ainsi que des informations précises relatives à

 18   des événements auxquels a assisté le témoin dans cette zone lorsqu'il était

 19   observateur de l'EUMM pendant les mois d'août et de septembre 1995.

 20   Des extraits des vidéos P842, P846 et P848 ont été présentés le 9

 21   septembre 2008. Ces extraits ont obtenu des cotes séparées et ont été

 22   versés au dossier. Il faut savoir qu'il n'y a eu aucune partie de la vidéo

 23   P854 qui a été présentée à la Chambre.

 24   A la page 8 332 du compte rendu d'audience, l'Accusation avance que

 25   l'intégralité des vidéos permettrait à la Chambre de première instance

 26   d'avoir une bonne vue de la zone entourant Knin.

 27   La Défense n'a pas soulevé d'objection à ce que soient versés au

 28   dossier ces extraits séparés des vidéos. Mais la Défense a ajouté que si

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  1   les textes et toutes les vidéos venaient à être versés au dossier, alors il

  2   faudrait que le témoin certifie de l'exactitude de ces textes en fonction

  3   de l'article 92 ter.

  4   Aux paragraphes 35 et 36 de la déclaration 92 ter du témoin du 20 juin

  5   2008, il s'agit de la pièce P802, ainsi qu'aux pages du compte rendu

  6   d'audience 8 332 et 8 333, le témoin a déclaré qu'il était tout à fait

  7   capable de visionner les quatre vidéos, du moins, qu'il avait pu visionner

  8   les quatre vidéos en juin 2008 ainsi que les textes non révisés des vidéos,

  9   et qu'il avait apporté des corrections aux textes lorsque cela a été

 10   nécessaire, et que les observations à propos des vidéos se fondaient sur ce

 11   dont il se souvenait à l'époque. Il lui a été demandé s'il ferait les mêmes

 12   observations à propos des vidéos, et à cette question, le témoin a confirmé

 13   qu'il ferait les mêmes observations.

 14   De ce fait, à partir de cela, la Défense, à la page 8 334 du compte

 15   rendu d'audience, a exprimé qu'elle n'avait plus d'objection à ce que

 16   soient versées au dossier ces vidéos.

 17   La Chambre a examiné les vidéos et a conclu que chacune de ces vidéos

 18   présentait des documents importants pour les preuves et pertinents pour les

 19   preuves. Ce document traite d'événements contemporains que le témoin a pu

 20   personnellement observer ou dont il a entendu parler en tant qu'observateur

 21   de l'EUMM dans le secteur sud. Les événements que le témoin décrit dans ces

 22   vidéos sont également consignés dans ses déclarations au titre de l'article

 23   92 ter. Qui plus est, la pièce P820, qui est une carte versée au dossier

 24   par le truchement du témoin, nous indique les endroits auxquels fait

 25   référence le témoin dans ces quatre vidéos ainsi que les endroits où se

 26   trouvaient les postes de contrôle, endroits qui ont été vus par le témoin

 27   ou dont il était au courant en 1995.

 28   La Chambre insiste sur le fait qu'elle ne considère pas tous les

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  1   renseignements des vidéos et de leurs textes pertinents. Toutefois, pour

  2   éviter de forcer ou de contraindre les parties à commencer à diviser ou

  3   séparer les vidéos, séparer en sous-vidéos en quelque sorte, la Chambre a

  4   décidé de traiter dans leur intégralité les pièces P842, P846, P848 et

  5   P854.

  6   Pour les raisons exprimées ci-dessus, la Chambre décide donc de

  7   verser au dossier les pièces P842, P846, P848 et P854, et la Chambre

  8   demande au Greffier de modifier leur statut dans le système du prétoire

  9   électronique en fonction de cette décision qui vient d'être rendue par la

 10   Chambre.

 11   J'ai encore une petite décision à rendre, et on va le faire avant la pause.

 12   Il s'agit des motivations de la Chambre qui ont fait que la Chambre a

 13   décidé d'entendre la déposition de Milica Djurica par la visioconférence.

 14   Le 10 octobre 2008, le Procureur a soumis une requête demandant que

 15   la déposition de Milica Djurica soit entendue par biais de visioconférence

 16   de Belgrade le 29 octobre 2008.Les trois équipes de Défense ont fourni leur

 17   réponse en disant qu'elles n'ont pas d'objections à cette requête.

 18   Le 16 octobre 2008, les Juges de la Chambre ont communiqué la

 19   décision orale des Juges par laquelle ils font droit à la requête avec la

 20   motivation qui suit. Le témoin a déposé en l'espèce par visioconférence le

 21   29 octobre 2008.

 22   En vertu de l'article 81 bis du Règlement de procédure et de preuve

 23   du Tribunal, les Juges peuvent ordonner que la procédure se fasse par le

 24   biais d'une visioconférence si cela est cohérent avec les intérêts de la

 25   justice. Le critère de l'article 81 bis a été satisfait si le témoin n'est

 26   pas en mesure de se rendre au Tribunal, si la déposition du témoin est

 27   suffisamment importante pour qu'il soit injuste par rapport à la partie

 28   requérante de s'en passer, et si l'accusé n'est pas empêché dans son droit

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  1   de contre-interroger le témoin.

  2   En prenant cette décision, les Juges ont réfléchi à l'âge de Milica

  3   Djurica, qui a plus de 70 ans, et à son état, sa condition physique.

  4   L'enquêteur du Procureur qui a visité Milica Djurica a dit qu'elle lui a

  5   dit qu'elle était tout à fait prête à déposer, mais que sa mobilité était

  6   extrêmement limitée à cause de problèmes avec la colonne vertébrale, ce qui

  7   faisait qu'elle ne pouvait pas se rendre loin de chez elle. Le témoin a dit

  8   aux enquêteurs qu'à cause de cela, elle était très inquiète quant à la

  9   possibilité de voyager en avion jusqu'à La Haye, mais qu'elle pensait

 10   qu'elle serait en mesure de voyager en voiture jusqu'à Belgrade pour

 11   déposer.

 12   C'est pour cela que les Juges ont trouvé que, dû à son âge et son

 13   état de santé, Milica Djurica ne peut pas se rendre au Tribunal pour

 14   déposer.

 15   Le témoin devait déposer, entre autres, sur le meurtre qui figure à

 16   l'acte d'accusation, l'incident numéro 2, le meurtre de son époux Savo

 17   Djurica. C'est pour cela que les Juges de la Chambre ont trouvé que sa

 18   déposition éventuelle avait suffisamment d'importance pour qu'il soit

 19   injuste pour le Procureur de s'en passer.

 20   Enfin, la Défense n'a pas avancé l'argument, et d'ailleurs les Juges

 21   n'ont pas trouvé cela, que l'accusé n'aurait pas la possibilité

 22   d'interroger le témoin. Donc, les Juges ont trouvé qu'il était dans

 23   l'intérêt de la justice de faire droit à la requête du Procureur, à savoir

 24   d'entendre Milica Djurica par biais de visioconférence, et c'est pour cela

 25   qu'on a fait droit à la requête du Procureur.

 26   Avec ceci se conclut la motivation de la décision des Juges en l'espèce.

 27   Maintenant on va prendre une pause, et on va reprendre nos travaux à 16

 28   heures 20 minutes.

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  1   --- L'audience est suspendue à 15 heures 53.

  2   --- L'audience est reprise à 16 heures 35.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il nous a fallu un peu de temps pour

  4   décider de quelle façon nous allions procéder.

  5   Donc, les Juges ont réfléchi à nouveau aux conclusions provisoires faites

  6   sur la base des arguments présentés par écrit, et ceci par rapport au

  7   devoir de communiquer la version précédente du rapport d'expert. Les Juges

  8   ne sont pas arrivés à la conclusion que sur la base des faits présentés aux

  9   Juges, qu'il existe une obligation en vertu du Règlement de présenter un

 10   exemplaire de la version précédente à la Défense. Cela étant dit, les Juges

 11   donnent la possibilité aux deux parties d'explorer la façon dont s'est fait

 12   ces rapports d'expert, et ceci avec le témoin M. Theunens. Les Juges de la

 13   Chambre vont peut-être aussi poser leurs questions par rapport à cela. S'il

 14   existe une quelconque raison pour revenir là-dessus, les Juges vont le

 15   faire si les parties le demandent.

 16   Donc, ceci va représenter la première partie de la déposition de M.

 17   Theunens.

 18   Ensuite, les deux parties vont avoir à peu près un quart d'heure pour

 19   discuter avec nous des résultats de cet exercice.

 20   Ensuite, les Juges vont inviter le Procureur de commencer à parler du

 21   rapport d'expert, de sa portée et de sa méthode. Ensuite, il va s'arrêter

 22   pour donner la possibilité à la Défense de poser ses questions par rapport

 23   à ce thème précis, et s'il y a des problèmes quant à la méthode utilisée et

 24   si on a besoin de parler de cela en détail. Mais il ne faudrait pas

 25   vraiment entrer en détail, il faudrait vraiment que là on parle de façon

 26   générale de la portée de ces rapports d'expert, de la méthode utilisée, et

 27   cetera, pour que l'on ait cela à l'esprit, si on entend le restant de la

 28   déposition de ce témoin expert, à savoir ce qui est au cœur de son rapport

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  1   d'expert. Donc, il s'agit de connaître la façon dont il a procédé pour

  2   analyser les documents et pour tirer ses conclusions et ses opinions, les

  3   opinions qui y figurent.

  4   Donc voilà, c'est comme cela que nous allons procéder.

  5   M. WAESPI : [interprétation] Un point de clarification, Monsieur le

  6   Président. Apparemment la portée de l'expertise de M. Theunens est liée à

  7   son expérience, sa formation, et cetera.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais oui, bien sûr. Vous pouvez le

  9   faire. Vous pouvez lier les deux, parce qu'il s'agit d'établir tous les

 10   faits pertinents pour évaluer le degré de son expertise. Mais pour

 11   commencer, comme on a dit, vous devez tout d'abord poser les questions

 12   quant à la façon dont s'est fait ces rapports d'expert, et ensuite vous

 13   pouvez éventuellement parler de ses qualités d'expert, explorer la portée

 14   de son expertise, et cetera.

 15   M. WAESPI : [interprétation] Très bien.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, est-ce que c'est clair pour tout

 17   le monde ? Oui ? Bien.

 18   Monsieur Waespi, vous êtes prêt pour faire venir le témoin ?

 19   M. WAESPI : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A chaque fois que vous faites une

 21   référence, soit aux rapports, soit aux annexes, je vous demanderais de nous

 22   fournir le numéro de page, parce que je n'ai pas d'exemplaire papier avec

 23   moi, et je pense que peut-être les pages vont être plus faciles à trouver

 24   que les paragraphes.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Ceci est pareil en fonction du numéro 65 ter,

 26   partie 1 et partie 2, et ceci ne couvre pas forcément le préambule qui est

 27   au début du rapport-ci.

 28   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est exact.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Theunens.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de commencer votre déposition, le

  5   Règlement de procédure et de preuve exige que vous fassiez une déclaration

  6   solennelle indiquant que vous alliez dire la vérité, toute la vérité et

  7   rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : REYNAUD THEUNENS [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous pouvez vous asseoir,

 13   Monsieur Theunens.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Theunens, tout d'abord, je vais

 16   vous expliquer comment on va procéder.

 17   Tout d'abord, vous allez être interrogé sur ce qu'on appelle la genèse, et

 18   ce que je vais appeler la genèse du rapport, votre rapport. Cela ne va pas

 19   durer bien longtemps. Ensuite, les conseils de la Défense vont avoir

 20   l'opportunité de vous poser des questions là-dessus dans le cadre d'un

 21   contre-interrogatoire. Ensuite, nous allons passer au sujet suivant, à

 22   savoir votre expérience, formation, méthodologie utilisée, et cetera.

 23   Ensuite, il va y avoir le contre-interrogatoire du conseil de la Défense,

 24   et à la fin, nous allons parler du contenu du rapport.

 25   Donc, avant de donner la parole à M. Waespi qui va vous poser des questions

 26   au sujet de la genèse du rapport, je voudrais vous poser la question

 27   suivante : y a-t-il eu d'autres versions de ce rapport que vous auriez

 28   présentées au bureau du Procureur ou au conseil en l'espèce ? Est-ce que

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  1   vous vous souvenez de cela ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Le premier

  3   délai qu'on a donné pour mon rapport, c'était le mois de mars 2007. A cette

  4   époque-là, j'avais envoyé un projet de rapport à M. Alan Tieger, qui était

  5   le Procureur en l'espèce. Je l'ai peut-être aussi envoyé aux autres membres

  6   de l'équipe du Procureur. Cependant, je dois ajouter que je n'avais pas eu

  7   de feedback sur ce projet, mis à part que l'on a prorogé les délais pour la

  8   présentation du rapport, de sorte que j'ai pu continuer à travailler sur le

  9   rapport, le finaliser au cours des semaines et des mois qui ont suivi.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous jamais discuté de cela, du

 11   fait que vous n'avez pas finalisé ce rapport, avec un quelconque membre du

 12   bureau du Procureur comme, par exemple, les conseils du Procureur, et

 13   cetera ? Avec quiconque du bureau du Procureur, est-ce que vous vous êtes

 14   jamais assis autour d'une table pour discuter de cela ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, non. La seule

 16   chose que j'ai faite était, par exemple, j'ai découvert qu'il y avait pas

 17   mal de choses qui manquaient. Je m'attendais à ce qu'il existe un règlement

 18   des forces armées croates et, d'après les informations que j'avais, ceci

 19   n'était pas disponible pour le bureau du Procureur. Je savais que les

 20   membres de l'équipe du Procureur étaient toujours en train de visiter les

 21   archives en Croatie, et c'est pour ça que j'ai envoyé un e-mail et j'ai

 22   envoyé une espèce de liste de courses. Entre autres, j'ai demandé à avoir

 23   cette liste de règles qui existaient, dont j'avais besoin pour faire mon

 24   rapport.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous avez demandé qu'on vous

 26   envoie les matériels qui vous manquaient, en gros ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous changé une quelconque

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  1   conclusion ? Est-ce que vous êtes arrivé à une autre conclusion par rapport

  2   au rapport définitif ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il n'y a que très peu

  4   de conclusions dans le projet de départ parce que j'ai bien compris que je

  5   n'avais pas tout le matériel dont j'avais besoin et donc, la plupart des

  6   conclusions, je les ai tirées à la fin, plus tard. Je ne me souviens pas de

  7   conclusions que j'aurais pu faire avant, et je ne me souviens pas qu'il y

  8   ait eu des changements importants de telles conclusions, en fait, de sorte

  9   que j'arrive à des avis contraires.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez encore les

 11   exemplaires de ces projets ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je les ai, je les ai dans mon ordinateur.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, parce qu'il arrive que les gens

 14   remplacent les vieilles, les anciennes versions par des nouvelles. Je

 15   comprends que vous, vous ne l'avez pas fait. Est-ce qu'il vous serait

 16   possible de nous fournir cette version du mois de mars, de les fournir à la

 17   Défense ?

 18   Est-ce que cela vous poserait un problème ? Le Procureur est au courant.

 19   Est-ce que cela vous pose un problème ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je n'ai aucun

 21   problème avec cela. Je peux le faire, je peux les fournir aussi bien aux

 22   Juges, à la Défense qu'à toutes les parties, tout simplement.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous, on va recevoir les documents

 24   que les parties souhaitent nous soumettre.

 25   Monsieur Theunens, maintenant ce sont les parties qui vont poser leurs

 26   questions, et ceci au sujet de la genèse de ce rapport. Il se pourrait que

 27   la Défense soit intéressée à lire, à voir d'autres versions de ce rapport.

 28   Donc, s'ils expriment ce désir, on va revenir là-dessus.

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  1   Donc, Monsieur Waespi, comme j'ai dit, 15 minutes, pas plus.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Merci.

  3   Interrogatoire principal par M. Waespi : 

  4   Q.  [interprétation] Monsieur, je pense que vous devez vous présenter.

  5   R.  Je m'appelle Reynaud Theunens.

  6   Q.  On va revenir sur la question de projet. Est-ce que vous pouvez nous

  7   dire ce qui a changé à partir du premier projet que vous avez envoyé au

  8   mois de mars 2006 et la version définitive qui était, je pense, terminée au

  9   mois de décembre 2007 ? Quelle est la différence ?

 10   R.  Petite correction. Ce projet a été envoyé au mois de mars 2007.

 11   Les différences qui s'y trouvent c'est que dans la version du mois de mars

 12   2007, il y avait encore des titres sans contenu parce que j'ai pas eu le

 13   temps d'ajouter le matériel. Si vous voulez, cela attendait dans d'autres

 14   dossiers, dans d'autres documents électroniques, mais je ne les avais pas

 15   encore incorporés dans le rapport.

 16   Comme je l'ai expliqué au Président, je n'avais pas tiré encore beaucoup de

 17   conclusions, il y avait pas encore de résumés parce que j'attendais de

 18   finaliser tout cela pour les faire. Donc, si vous comparez la version du

 19   mois de décembre 2007 avec la version du mois de mars 2007, la différence

 20   qu'on y voit c'est que la version du mois de décembre est bien plus

 21   complète, on voit toute les informations par rapport à tous les titres,

 22   sauf s'il n'y avait pas suffisamment d'informations, dans quel cas j'avais

 23   enlevé tout simplement le titre, paragraphe.

 24   Mais je ne voudrais pas sauter le pas, les étapes. Donc tout d'abord, j'ai

 25   voulu créer un plan et là, j'avais énuméré tous les thèmes importants pour

 26   le travail qu'on me demandait de faire. Mais je pense que vous allez

 27   revenir là-dessus quand vous allez parler de méthode.

 28   Q.  Après avoir terminé le rapport, est-ce que vous avez ajouté des thèmes

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  1   importants, des portions importantes ?

  2   R.  Il faudrait mettre côte à côte les deux rapports parce que je ne sais

  3   pas trop ce qui manquait vraiment dans ce rapport de mars 2007. Ce que je

  4   sais, c'est que pour les titres qu'il fallait encore rechercher, très

  5   souvent, j'ai surligné cela en jaune. Et on peut le voir encore. Je me

  6   souviens, par exemple, que je n'avais pas vraiment les événements de

  7   l'opération Tempête au jour le jour dans la deuxième partie du rapport.

  8   Pour la première partie, je pense qu'il me manquait des informations

  9   directes détaillées par rapport à cette bataille air/terre, puis je

 10   m'attendais à obtenir ce manuel de doctrine des forces armées que je

 11   pouvais utiliser aussi pour parler de cela. J'ai trouvé des références dans

 12   un autre manuel, qui n'a pas la même date, du mois d'octobre 1995. Même si

 13   je savais que cette doctrine s'appliquait aussi à la période précédente, ce

 14   que j'avais fait, j'avais pris de l'internet la version qui existait, et

 15   c'était une version d'un manuel américain, des forces américaines. Je

 16   l'avais fait juste pour la version de travail.

 17   Si vous comparez les deux, vous allez voir qu'il y en a une qui est plutôt

 18   brouillon et l'autre qui est beaucoup plus clair. Je ne me souviens pas

 19   vraiment des différences extraordinaires, mis à part que la version du mois

 20   de décembre 2007 était bien plus complète.

 21   Q.  Quand vous dites que vous vous attendiez à ce qu'il y ait un manuel de

 22   doctrine de disponible, et quand on parle surtout de bataille air/terre,

 23   comment se fait-il que vous avez commencé à parler de cela ? Est-ce que

 24   quelqu'un vous a dit qu'il s'agissait de parler de cela, que la question

 25   allait être posée ? Est-ce que c'est vous-même qui êtes arrivé à cette

 26   conclusion ?

 27   R.  Sans entrer dans trop de détail, Monsieur le Président, je savais, vu

 28   que j'ai été dans les forces armées en Belgique, qu'au plus tard en 1994,

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  1   les forces armées croates ont commencé à adopter différentes doctrines de

  2   l'OTAN, y compris la doctrine de batailles aériennes. Je me souviens d'une

  3   interview qui avait été donnée par le feu ministre de la Défense croate,

  4   Gojko Susak, qui a parlé de la coopération entre le ministère de la Défense

  5   croate et les militaires américains, et c'était à un moment donné en 1994.

  6   Je me souviens aussi que pendant que j'étais dans la FORPRONU, j'ai obtenu

  7   deux brochures qui relevaient du domaine public, en quelque sorte, et que

  8   j'ai étoffés pour Oluja. Là aussi, on a parlé de cette bataille air/terre.

  9   J'ai utilisé tout cela.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, vous savez que vous

 11   n'avez pas beaucoup de temps. Ceci ne pose pas de problème que le témoin

 12   donne de longues réponses, mais il faudrait que vous puissiez quand même

 13   contrôler le temps que vous utilisez.

 14   M. WAESPI : [interprétation] J'ai terminé avec cette première version. Il y

 15   a peut-être encore quelques points à couvrir.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous auriez pu trouver la genèse --

 17   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je peux le faire tout de suite

 18   d'ailleurs.

 19   Pourriez-vous montrer le document 65 ter 6011 [comme interprété].

 20   Q.  Vous nous avez dit il y a quelques instants que M. Tieger vous a donné

 21   une mission, que c'est lui qui vous a donné cette mission. Est-ce qu'il y

 22   avait un autre avocat qui est impliqué là-dedans ?

 23   R.  Oui, oui. Il y avait M. Douglas Marks Moore. Lui aussi, il était

 24   impliqué là-dedans.

 25   Q.  Est-ce que là vous voyez cette lettre de mission originale, cahier de

 26   charge ?

 27   R.  Oui, c'est cela.

 28   M. WAESPI : [interprétation] Je vais demander que ceci soit versé au

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  1   dossier.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] P1110 sera versée au dossier.

  4   M. WAESPI : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, je vais demander

  5   que l'on montre la pièce 65 ter 6112.

  6   Q.  Monsieur Theunens, peu de temps après avoir reçu le premier cahier de

  7   charge, est-ce que vous en avez reçu un autre plus détaillé par la suite ?

  8   R.  En effet, Monsieur le Président. Je me souviens qu'on a, à l'époque,

  9   discuté de la meilleure façon de définir ces cahiers de charge. Dans la

 10   mesure où j'avais reçu cette liste desdites tâches, ensuite le chef de mon

 11   équipe a commencé à participer à cela, et par la suite j'ai reçu quelque

 12   chose de plus détaillé avec 17 points.

 13   Q.  Il vous a fallu combien de temps pour finaliser ce rapport ?

 14   R.  Je peux vous dire que j'ai tout d'abord mis différents documents dans

 15   différentes catégories. Je les ai classés. Ensuite, j'ai travaillé dans

 16   quatre autres affaires. Là aussi, j'avais fait des rapports et j'ai utilisé

 17   exactement les mêmes plans et j'ai utilisé la même méthode. Je me suis dit

 18   que c'était quelque chose qui est vraiment très utile pour les lecteurs,

 19   puisque de toute façon, depuis le mois de février 2007 jusqu'au mois de

 20   décembre 2007, j'ai travaillé sur différents rapports portant sur les

 21   domaines comme le renseignement militaire, et cetera.

 22   Q.  Par rapport à ce deuxième cahier de charge que vous avez reçu, est-ce

 23   qu'il y avait quoi que ce soit que vous avez ajouté par rapport à ce qui

 24   s'y trouvait ? C'est la première question.

 25   R.  Par rapport au deuxième aspect de votre question, le point 10, qui est

 26   sur la page suivante, on parle de l'interaction entre les autorités civiles

 27   et militaires entre le mois d'août et le mois de novembre 1995. Sur la base

 28   des matériaux que j'ai pu examinés, j'avais l'impression qu'on n'avait pas

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  1   suffisamment d'information sur les autorités civiles. Evidemment que

  2   j'avais les informations sur le fonctionnement de l'administration de Knin,

  3   de la zone opérationnelle de Knin, mais je n'avais pas suffisamment d'info

  4   sur le fonctionnement des autorités civiles, purement civiles, là-bas.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez être un petit peu plus précis là. Quand vous

  6   parlez des autorités civiles, qu'est-ce qui vous posait problème ?

  7   R.  Je savais qu'il y avait un gouvernement civil qui avait été créé fin

  8   août, et quand j'ai commencé à examiner les documents, j'avais l'impression

  9   qu'on n'avait pas suffisamment d'information pour vraiment me prononcer là-

 10   dessus. En ce qui concerne les autorités civiles et les fonctionnements des

 11   autorités civiles, j'ai compris qu'il y avait deux volets là, et j'avais

 12   l'impression que je n'avais pas suffisamment d'info pour en parler.

 13   Ensuite, quand j'ai terminé mon rapport en décembre 2007, sur la base

 14   de tous les documents militaires que j'ai pu recevoir, je me suis dit que

 15   je pouvais désormais parler de ces questions civiles, d'autorité civile,

 16   que j'avais suffisamment d'information, donc que je pouvais en parler dans

 17   mon rapport.

 18   Q.  Encore une ou deux questions pour terminer. Vous avez dit que vous

 19   n'aviez pas suffisamment d'info au sujet des aspects civils. Mais est-ce

 20   que vous pensiez que vous étiez capable d'en parler, de discuter de cela,

 21   en ce qui concerne votre expertise ?

 22   R.  C'est une question difficile, parce qu'évidemment si vous regardez mon

 23   travail au bureau du Procureur, non, je n'en avais pas suffisamment. Mais

 24   si vous regardez mon CV, j'ai eu des missions dans l'armée, et quand on

 25   parle de ces missions que j'ai eues dans l'armée entre 1992 et 2001, il

 26   s'agissait surtout de parler des autorités civiles et d'analyser les

 27   autorités civiles. Pour répondre à la question que vous me posez, la

 28   réponse est non.

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  1   Q.  Merci.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Je n'ai plus de questions concernant cet

  3   aspect-là, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Waespi.

  5   Maître Kehoe.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Merci.

  7   Contre-interrogatoire par M. Kehoe : 

  8   Q.  [interprétation] Monsieur Theunens, juste quelques questions concernant

  9   la préparation de ce rapport.

 10   Tout d'abord, votre premier rapport a été déposé en mars 2007, n'est-

 11   ce pas ?

 12   R.  Non. Le rapport n'a pas été déposé en mars 2007. J'ai envoyé un projet

 13   de rapport à Alan Tieger et peut-être à d'autres personnes --

 14   L'INTERPRÈTE : Nom inaudible.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] -- pour son utilisation personnelle, mais pour

 16   autant que je le sache, la dernière version a été celle déposée -- ou la

 17   version définitive a été déposée en décembre 2007.

 18   M. KEHOE : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Theunens, lorsque vous avez donné ce rapport à M. Tieger et à

 20   M. Moore en mars 2007, vous saviez que le procès était censé commencer au

 21   cours de la première semaine du mois de mai 2007, n'est-ce pas ?

 22   R.  Non, je ne me souviens pas tout à fait de cela. J'avais une date butoir

 23   qui était mars 2007, et bien sûr j'ai compris le mécanisme des projets de

 24   rapport ou des projets de rapport non finalisés. Donc j'ai travaillé

 25   pendant de longues semaines, y compris le soir, afin d'élaborer un rapport

 26   aussi bon que possible avant mars 2007. Mais vous pouvez très bien

 27   comprendre qu'en deux mois ceci n'est pas possible.

 28   Q.  Monsieur Theunens, lorsque vous avez communiqué ce rapport à M. Tieger

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  1   et à M. Moore en mars 2007, vous vous attendiez à ce que ce rapport-là soit

  2   communiqué à la Défense pour le procès qui était censé commencer en mai

  3   2007, n'est-ce pas exact, Monsieur ?

  4   R.  Probablement. S'il y a un délai imposé pour la communication, je

  5   suppose que le pas suivant serait de communiquer cela à la Défense. Mais

  6   puisque cette date butoir n'a pas été retenue, je ne sais pas pour quelle

  7   raison -- vous savez, je ne suis pas responsable et je ne travaille pas

  8   dans le cadre de l'équipe du bureau du Procureur, ou l'équipe d'Accusation

  9   ne m'a de toute façon pas informé des changements, mais la seule réponse

 10   que j'ai obtenue, c'était que le délai du mois de mars ne s'applique plus,

 11   et que je pouvais continuer à travailler sur le rapport.

 12   Q.  Lorsque vous lui avez envoyé le rapport en mars 2007, ceci allait être

 13   le rapport final en attendant le procès de mai 2007, car vous avez reçu un

 14   délai visant à remettre cela à l'Accusation, car il fallait soumettre et

 15   communiquer cela à la Défense, n'est-ce pas ?

 16   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, les équipes

 17   d'analystes militaires -- dans mon équipe, j'ai des collègues qui ont

 18   rédigé des rapports concernant d'autres affaires. Je me souviens que le

 19   chef d'équipe a eu un délai très court une fois. Je ne sais pas exactement

 20   dans quelle affaire, mais il a dû soumettre le projet de rapport non

 21   finalisé.

 22   Je souhaite aussi souligner le fait que lorsque j'ai reçu mes tâches

 23   de la part de M. Tieger, et lorsque j'ai envoyé le projet de rapport entre

 24   les deux, je n'ai pas eu de contacts avec eux. Je n'ai pas eu de coups de

 25   fil ni de courriers électroniques. Lorsque j'ai envoyé le projet de rapport

 26   en mars 2007, je ne sais plus comment j'ai été informé du fait que je

 27   pourrais continuer mon travail et que le délai n'était plus retenu. J'ai

 28   considéré que mon rapport de 2007 n'était pas finalisé, mais j'avais

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  1   compris que l'équipe devait respecter certains délais, donc j'ai pu

  2   continuer mon travail.

  3   Q.  Vous nous avez dit qu'il n'y a pas eu de conclusions tirées dans votre

  4   premier rapport; est-ce exact ?

  5   R.  Je pense que j'ai dit qu'elles étaient très --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez faire un peu

  7   plus attention à vos caractérisations. Pas de conclusions. Soyons précis,

  8   car le témoin dit : "Ce n'est pas ce que j'ai dit." Il faut être précis.

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Vous avez fait très peu de conclusions, n'est-ce pas ?

 11   R.  Exactement. Mais parfois, comme vous pouvez le constater  lorsque vous

 12   examinez le projet de rapport, j'ai surligné en jaune certaines parties

 13   qui, pour moi, ne sont pas une conclusion, même si une conclusion pourrait

 14   être tirée de ces notes. Je travaillais dans le cadre d'autres affaires

 15   aussi. J'ai essayé d'expliquer comment je comprenais le fait qu'il fallait

 16   que je soumette un rapport non finalisé. Lorsque le délai de mars 2007 a

 17   été retenu, on m'a donné plus de temps.

 18   Q.  Nous devrions examiner ce rapport de mars 2007, et le comparer au

 19   rapport final afin de voir quelles sont les différences qui sont contenues,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, c'est exact.

 22   Q.  Combien de projets de rapport avez-vous présenté au bureau du Procureur

 23   ou combien de versions ?

 24   R.  Après le mois de mars, j'ai envoyé d'autres projets. Je ne sais pas

 25   exactement combien. Je pourrais vérifier les e-mails. Peut-être cinq, six.

 26   Je les ai envoyés à M. Tieger. Mon but était de le tenir informé de ce que

 27   je faisais. M. Tieger savait très bien que je travaillais dans le cadre de

 28   trois, quatre autres affaires en tant qu'expert, dans une autre affaire, et

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  1   pour moi il n'était pas tout à fait clair quand était le nouveau délai. Je

  2   savais que le délai de mars 2007 avait été retiré, mais je ne savais pas

  3   quel était le nouveau délai. C'était difficile, car je travaillais dans

  4   plusieurs affaires et j'ai essayé d'organiser mon travail. Bien sûr,

  5   lorsque quelque chose est urgent, vous essayez que ça passe en premier et

  6   le reste est laissé pour après.

  7   C'est la raison pour laquelle je le tenais informé de mes progrès, et

  8   je ne me souviens pas avoir reçu de réactions aux autres projets de rapport

  9   que j'ai envoyés.

 10   Q.  M. Tieger et M. Moore n'ont pas réagi à votre table des matières. Ils

 11   ne vous ont pas dit -- enfin, ils ont approuvé cela ?

 12   R.  Maintenant, nous parlons de 2007, avant le mois de mars. Vous parlez

 13   d'autre chose maintenant.

 14   Q.  S'agissant de l'une quelconque des versions que vous avez envoyées,

 15   est-ce que vous dites devant ce Tribunal que s'agissant de toutes ces

 16   versions que vous avez envoyées à M. Tieger ou d'autres juristes du bureau

 17   du Procureur, vous n'avez jamais reçu de réactions, de réponses ?

 18   R.  Je vais expliquer un peu plus en détail.

 19   Au début, j'ai reçu les tâches et les documents dont il a été

 20   question. D'abord, j'ai reçu une tâche en dix points, et je me suis dit, on

 21   va voir comment ça va aller, mais je pense qu'il est plus approprié de

 22   rédiger un rapport dont la forme ressemblerait à celle des autres rapports

 23   que j'ai faits dans d'autres affaires. Ensuite, mon chef d'équipe est

 24   intervenu et j'ai reçu des tâches en 17 points, donc plus détaillés. J'ai

 25   examiné cela et j'ai élaboré une table des matières que j'ai effectivement

 26   envoyée à M. Tieger et à M. Moore. Ils l'ont examinée.

 27   Je pense que c'était une question de concept. Ils étaient d'accord

 28   pour que j'utilise la même approche que celle appliquée dans d'autres

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  1   procès. Ensuite, j'ai commencé à rédiger le rapport. Le premier projet a

  2   été envoyé à l'équipe en mars 2007, et là je veux dire à M. Tieger et M.

  3   Moore. La seule réaction était que le délai ne s'appliquait plus et que je

  4   pourrais continuer. Par la suite, j'ai envoyé d'autres projets de rapport.

  5   Je les ai. Il n'y a pas de problème de les montrer à tous ceux qui s'y

  6   intéressent. Simplement pour montrer que --

  7   Q.  Excusez-moi, nous n'avons pas suffisamment de temps, donc veuillez

  8   répondre à la question. Avant de soumettre le rapport, vous avez lu à la

  9   fois le mémoire préalable de l'Accusation et de la Défense, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je ne suis pas sûr que j'aie lu le mémoire préalable de l'Accusation,

 11   mais effectivement je l'ai fait. J'ai lu celui de la Défense, mais comme

 12   j'ai lu la déclaration solennelle, je sais ce que ça implique. Aucun des

 13   mémoires préalables, ni de l'Accusation ni de la Défense, n'ont eu d'impact

 14   sur mon rapport. C'est ce que je peux déclarer.

 15   Q.  Nous allons maintenant, par le biais du logiciel Sanction, vous montrer

 16   le mémoire préalable au procès de la Défense, pages 16 à 53.

 17   Monsieur Theunens, ici il est question dans le mémoire de la Défense d'une

 18   bataille aérienne, terrestre. Vous voyez cela dans le paragraphe 41.

 19   Monsieur Theunens, est-ce qu'il est exact de dire que sur la base de votre

 20   lecture du mémoire de la Défense, vous vous êtes décidé d'inclure dans

 21   votre rapport un passage en revue de la bataille aérienne et terrestre et

 22   commencer à apprendre cela de votre côté, n'est-ce pas ?

 23   R.  J'ai expliqué à M. Tieger comment j'ai inclus la bataille aérienne et

 24   terrestre, et j'avais expliqué à M. Kehoe quelle était ma formation dans le

 25   domaine au sein de l'armée belge. Donc, nous appliquons, au fond, les mêmes

 26   méthodes, y compris l'utilisation de l'artillerie et le concept de mener la

 27   guerre. Je suis d'accord pour dire qu'en Belgique, le nom bataille aérienne

 28   et terrestre, tel que je l'ai appris lors de ma formation est exactement la

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  1   même chose. Je me souviens encore de l'interview de M. Susak. J'ai reçu un

  2   article faxé, et qui a été traduit en anglais, et ce n'est pas sur la base

  3   du mémoire de la Défense que je l'ai inclus aux questions.

  4   Q.  Est-ce que ceci faisait partie de votre mémoire, de votre texte de mars

  5   2007 ? Peut-on examiner ?

  6   R.  Il faudrait examiner tous les projets, toutes les parties de projets

  7   pour déterminer cela. Je ne sais pas. J'ai des versions électroniques de

  8   mon rapport, et je n'ai pas vérifié tous les projets avant de venir ici.

  9   Q.  Monsieur, si l'on examine vos projets, et si dans aucun des projets

 10   déposés avant de lire le mémoire de la Défense il n'est fait référence à la

 11   bataille aérienne et terrestre, ensuite, vous avez lu le mémoire de la

 12   Défense et, dans ce cas-là, la Chambre de première instance peut conclure

 13   que sur la base de ce que la Défense a écrit, vous avez décidé d'inclure

 14   cela dans votre rapport, n'est-ce pas ?

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que la Chambre va conclure, il ne

 16   revient pas au témoin de répondre à ce sujet.

 17   M. KEHOE : [interprétation]

 18   Q.  Si on met à côté la question liée aux conclusions de la Chambre, le

 19   fait est que vous êtes décidé de traiter de la bataille aérienne terrestre

 20   dans vos rapports suite à la lecture du mémoire de la Défense.

 21   R.  Je veux simplement expliquer ce que j'ai fait, je ne peux pas tirer des

 22   conclusions pour les autres.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Theunens, clairement, on se

 24   demande si c'était la lecture du mémoire de la Défense qui a déclenché le

 25   fait que vous ayez introduit la bataille aérienne et terrestre dans votre

 26   rapport. C'est ça la question.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après mes souvenirs, j'ai essayé d'expliquer

 28   mon intention d'inclure la bataille aérienne terrestre et cette doctrine

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  1   dans mon rapport - et ceci n'a pas été déclenché par ce que j'ai lu dans le

  2   mémoire préalable de la Défense - mais par mon expertise et par les

  3   documents que j'ai examinés avant dans le cadre de la rédaction de mon

  4   rapport.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Kehoe.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Dernière partie. Passons à la page 37 des 53.

  7   Q.  J'attire votre attention sur le paragraphe 104 du mémoire de la Défense

  8   où il est écrit que : "Le 4 août 1995, le gouvernement croate a décidé que

  9   les forces de police civile, le MUP, allaient assumer la responsabilité

 10   pour la loi et l'ordre immédiatement après la libération des villes par le

 11   HV."

 12   Vous avez lu cela dans le mémoire de la Défense, n'est-ce pas ?

 13   R.  Probablement, je ne me souviens pas, mais probablement.

 14   Q.  Vous nous avez dit que vous avez lu cela mais vous avez décidé que vous

 15   n'y êtes pas penché sur les structures civiles au sein des zones libérées

 16   de la République de Croatie, n'est-ce pas ?

 17   R.  Monsieur le Président, ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est que pour

 18   moi, les autorités civiles ce sont les organes d'autorités locaux qui

 19   fonctionnent afin de faire fonctionner les services publics, afin de

 20   permettre aux fonctions telles que celles du maire et du chef de district à

 21   pouvoir être exercées.

 22   En ce qui concerne la partie deux de mon rapport, je traite, par

 23   exemple, de l'interaction entre la police militaire et la police civile

 24   pendant et après l'opération Tempête et dans la partie portant sur le rôle

 25   de la police militaire pendant et après l'opération Tempête dans la région

 26   militaire de Split.

 27   Q.  Est-ce que la question des autorités civiles figurait dans votre

 28   rapport de mars 2007 ?

Page 12164

  1   R.  Il faudrait qu'on se penche là-dessus. Par exemple, les documents qui

  2   sont les échanges des lettres ou documents entre M. Lausic, qui était le

  3   chef de la police militaire ou plutôt, de l'administration de la police

  4   militaire et le ministre civil de l'Intérieur, M. Moric, j'ai inclus cela

  5   dans le projet de rapport de mars.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, vos 15 minutes sont

  7   terminées.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Merci beaucoup.

  9   Q.  Monsieur Theunens, excusez-moi, j'ai pris un peu plus longtemps que

 10   prévu initialement.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de problème puisque nous avons

 12   traité de cette question.

 13   Monsieur Theunens, nous allons prendre une pause maintenant. Et nous

 14   souhaiterions vous revoir ici d'ici 20 minutes approximativement.

 15   Monsieur le Huissier, veuillez escorter M. Theunens à l'extérieur.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   M. WAESPI : [interprétation] Il me reste à indiquer que je souhaite verser

 18   au dossier la pièce 6112 en vertu de l'article 65 ter.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

 22   P10111 [comme interprété].

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P10111 [comme interprété] est

 24   versée au dossier.

 25   Quant à la question des autres versions qui devraient être fournies, nous

 26   en menons qu'il existe une requête en suspens et nous avons un expert qui a

 27   dit qu'il dispose de ces documents et que ça ne lui pose pas de problème de

 28   montrer cela à qui que ce soit.

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  1   Je regarde les parties.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous souhaiterions

  3   les examiner dès que possible.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Toutes ?

  5   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Electroniquement ?

  7   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Plutôt électroniquement qu'en imprimé.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  9   Dans ce cas-là, nous allons - enfin - si c'est sur papier, au moins on ne

 10   ferait pas détruire le bois. Mais électroniquement, il n'y a pas de

 11   problème. Nous allons décider pendant la pause.

 12   Monsieur Waespi.

 13   M. WAESPI : [interprétation] Oui. Nous maintenons nos objections,

 14   évidemment.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les objections. Mais il y a deux

 16   questions : d'abord la requête en suspens et puis la deuxième question est

 17   liée au fait que nous avons ici le témoin qui a fait l'objet d'un contre-

 18   interrogatoire concernant l'existence de ces documents et concernant la

 19   question de savoir s'il est prêt à les montrer. Et même si nous savons tous

 20   que le témoin travaille pour le bureau du Procureur, je suppose que le

 21   témoin prend une position indépendante dans ce genre d'affaire.

 22   Je comprends que vous vous opposez à cette requête. Est-ce que vous

 23   souhaitez attirer notre attention ou quoi que ce soit qui priverait cet

 24   expert de sa liberté inhérente, pour ainsi dire, de partager avec les

 25   autres ce qu'il avait préparé dans le cadre de son travail en tant

 26   qu'expert indépendant ? Puis aussi, compte tenu de ses explications ?

 27   M. WAESPI : [interprétation] Non, Monsieur le Président. En réalité, nous

 28   avons une version électronique à notre disposition. Nous pouvons l'envoyer

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  1   par courrier électronique.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons besoin de cinq versions, car

  3   si j'ai bien compris, vous les souhaitez toutes ?

  4   M. WAESPI : [interprétation] Je ne savais pas. Je suis au courant pour mars

  5   2007. Je l'ai vu. Car, comme je l'ai dit, il y avait l'aspect de l'article

  6   68. Mais c'est la première fois que j'entends dire qu'il y avait eu des

  7   versions précédentes, ce qui est tout à fait probable, compte tenu de la

  8   manière dont il exerce son travail.

  9   Donc si vous me demandez de mettre cela à la disposition des autres

 10   parties, c'est une autre question.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que ce témoin a sauvegardé ce

 12   qu'il faisait au jour le jour. Si j'ai bien compris, la Défense demande

 13   qu'il présente une version électronique de chaque version qu'il avait

 14   envoyée au bureau du Procureur.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est compris.

 17   Nous allons prendre une pause et reprendre notre travail à 18 heures

 18   moins le quart.

 19   --- L'audience est suspendue à 17 heures 23.

 20   --- L'audience est reprise à 17 heures 47.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Theunens, les Juges ont pris

 23   note de votre volonté de partager les premières versions de votre rapport

 24   d'expert avec celui qui serait intéressé de les voir.

 25   Je vous demande donc de préparer deux CD-ROM qui ont le même contenu

 26   et dans les deux, je voudrais vous demander de mettre les versions

 27   précédentes du rapport définitif, et je vous demande d'y mettre uniquement

 28   les versions que vous avez communiquées au Procureur. Donc, vous n'avez pas

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  1   besoin de nous donner vraiment toutes les versions. Donnez-nous les

  2   versions que vous avez envoyées au bureau du Procureur. Et vous pouvez les

  3   donner au Greffier et -- enfin, l'idéal serait d'avoir quatre CD-ROM mais

  4   bon, si c'est possible, évidemment.

  5   J'espère que cela va être fait dans un format Word et pas PDF ou un format

  6   trop complexe pour pouvoir ouvrir.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est en Word.

  8   Est-ce que vous pourrez me donner des CD-ROM vierges pour que je puisse

  9   faire des copies, donc ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Le Greffier va vous les

 11   donner.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Je vais pouvoir les faire, alors.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est très bien. Maintenant, on va

 14   passer au sujet suivant.

 15   M. WAESPI : [interprétation] Vous me permettez de faire un commentaire par

 16   rapport à l'ordonnance que vous venez de faire ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai accepté une offre, ce n'était pas

 18   une d'ordonnance.

 19   M. WAESPI : [interprétation] Mais la même situation pourrait se présenter

 20   si un autre témoin expert se présente, à savoir je voudrais être sûr que la

 21   Défense ne va pas faire valoir ses droits désormais avec tous les autres

 22   experts.Donc, j'espère que la Défense ne va pas dire que là il s'agit de

 23   matériel vraiment confidentiel.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a un degré de confidentialité,

 25   là, c'est par rapport à l'accusé. Et je pense que là, il y a une

 26   différence.

 27   Mais je peux imaginer que vous allez vouloir poser la question par la

 28   suite, à savoir demander que le Procureur aussi voie ces premiers projets

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  1   du rapport d'expert.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Je ne veux pas ouvrir à nouveau la question,

  3   mais vous savez, c'est le produit de travail. C'est un brouillon du bureau

  4   du Procureur.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Objection.

  6   M. WAESPI : [aucune interprétation] 

  7   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  8   M. WAESPI : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous réservez le droit et vous

 10   pouvez vous réserver le droit de demander exactement la même chose de la

 11   Défense.

 12   Là, vous avez soulevé et mentionné quelques termes juridiques, mais on va

 13   peut-être pas s'avancer immédiatement. Il s'agit d'analyser le problème au

 14   fur et à mesure qu'il se présente, et de toute façon le problème qui va

 15   peut-être se présenter à l'avenir va être peut-être aussi complexe que

 16   celui qui se présente aujourd'hui. Dans ce cas-là, les parties vont se

 17   prononcer là-dessus. En tout cas, je vous remercie, Monsieur Theunens, de

 18   nous avoir proposé la version précédente.

 19   M. WAESPI : [interprétation]

 20   Interrogatoire principal par M. Waespi : 

 21   Q.  [interprétation] On va parler de votre expertise et on va parler de

 22   votre expérience et votre formation.

 23   Tout d'abord, votre formation. Donc, vous avez une maîtrise des

 24   sciences sociales et militaires de l'Académie miliaire de Bruxelles de

 25   1997.

 26   R.  Oui, à l'époque c'était une licence, mais avec la nouvelle

 27   réglementation européenne, cela devient une maîtrise.

 28   Q.  Très bien. On va parler des principaux sujets que vous avez abordés.

Page 12169

  1   R.  Je vois que l'on parle de 1997. Non, c'est 1987. J'ai eu mon diplôme en

  2   1987. Ce que j'ai étudié, c'était l'histoire militaire, les sciences

  3   sociales, la psychologie, la balistique, la géographie politique, le

  4   management, le droit militaire et différentes points économiques, et en

  5   même temps j'ai été aussi formé à l'académie militaire, donc dans des

  6   matières purement militaires.

  7   Q.  On va parler de cela aussi. 

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Theunens, vous avez tendance à

  9   parler rapidement. Pourriez-vous, s'il vous plaît, ralentir la cadence.

 10   Monsieur Waespi, vous devriez peut-être de temps en temps vérifier soit la

 11   traduction sur l'écran pour voir si l'on peut vous suivre.

 12   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Q.  Donc, maintenant on sait que vous êtes membre de l'équipe d'analystes

 14   militaires du bureau du Procureur. Depuis quand ?

 15   R.  J'ai rejoint l'équipe d'analystes militaires du bureau du Procureur le

 16   29 juin 2001.

 17   Q.  Qu'est-ce que fait cette équipe ?

 18   R.  On examine les côtés militaires de certaines choses. On aide le bureau

 19   du Procureur avec parfois des aspects extrêmement basiques. On explique

 20   comment fonctionne l'artillerie, quelle est la différence entre un feu

 21   direct ou indirect. Puis de façon plus -- enfin, ce qui est plus

 22   intéressant, c'est qu'on analyse les moyens de preuve pour essayer de

 23   reconstruire les structures de commandement du point de vue de la doctrine,

 24   de la législation, mais aussi des faits en analysant différents éléments

 25   que l'on a.

 26   Puis aussi nous analysons l'interaction entre les politiques et les

 27   militaires. Nous essayons d'établir des faits, aider à établir les faits

 28   par rapport à différents événements ou développements qui sont intéressants

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  1   pour le bureau du Procureur.

  2   Q.  Et vous personnellement, vous avez participé à tous ces événements,

  3   toutes ces activités que vous venez de décrire, n'est-ce pas ?

  4   R.  En effet, Monsieur le Président. Je ne sais pas s'il faut vraiment que

  5   je parle de toutes les affaires pour lesquelles j'ai travaillé et où j'ai

  6   déposée.

  7   Q.  Je vais vous poser la question précise à la question. Mais est-ce que

  8   vous, personnellement, vous avez participé à toutes ces activités que vous

  9   venez de décrire ?

 10   R.  Oui, en effet, Monsieur le Président. Et comme je l'ai mis dans mon CV,

 11   souvent j'ai aussi participé à des interviews et des entretiens avec les

 12   témoins militaires haut gradés, de haut rang. Mais je ne l'ai pas fait par

 13   rapport à ce procès.

 14   Q.  Puisque vous avez rejoint cette unité en 2001, depuis cette date est-ce

 15   que vous vous êtes spécialisé plutôt dans certains domaines, et le cas

 16   échéant, lesquels ?

 17   R.  Monsieur le Président, vu l'expérience que j'avais, j'avais souvent

 18   pour mission de m'occuper des affaires qui concernaient la JNA et les

 19   Serbes en Croatie entre 1991 et 1992.

 20   Q.  Est-ce que vous avez déjà déposé en l'espèce en tant que témoin expert,

 21   et le cas échant, où ?

 22   R.  Oui. J'ai déposé dans l'affaire de Slobodan Milosevic, Milan Martic;

 23   puis les trois de Vukovar, Radic, Sljivancanin et Mrksic. Puis au mois de

 24   février j'ai été témoin dans l'affaire Vojislav Seselj.

 25   Q.  Est-ce que toutes ces affaires parlent de ce qui s'est passé en Croatie

 26   ?

 27   R.  Oui, bien sûr, et pour Vojislav Seselj, il y avait aussi les événements

 28   qui se sont produits en Bosnie-Herzégovine entre 1992 et 1993.

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  1   Q.  En ce qui concerne l'affaire Milan Martic, est-ce que vous pouvez

  2   rapidement nous dire de quoi vous avez parlé ?

  3   R.  Le cahier de charges que j'ai reçu dans le cadre de cette affaire,

  4   c'était d'établir -- en fait, d'analyser plutôt les documents pour voir

  5   quel était exactement le rôle de Milan Martic dans les événements de 1991,

  6   ainsi que son rôle par rapport au pilonnage de Zagreb au mois de mai 1995.

  7   Q.  Et quel est le territoire qui est lié au rôle de Milan Martic ?

  8   R.  La République de Croatie.

  9   Q.  Mais quelle partie de la république ?

 10   R.  Pour 1991, 1992, c'était ce qu'on appelait "Krajina," qui est devenu

 11   par la suite la soi-disant SAO Krajina, et ensuite RSK; et puis Zagreb, ça,

 12   c'est la ville principale de Croatie.

 13   Q.  On va parler de vos rapports.

 14   Est-ce que vous avez préparé des rapports avant de déposer dans ces

 15   quatre affaires ?

 16   R.  Oui, effectivement, Monsieur le Président. J'ai toujours déposé sur la

 17   base des rapports, et on avait toujours le même plan, comme le plan que

 18   j'ai utilisé en l'espèce.

 19   Q.  Est-ce qu'en ce moment, est-ce que vous êtes en train de préparer

 20   d'autres rapports ?

 21   R.  Oui. On m'a demandé de préparer un ajout à mon rapport dans l'affaire

 22   Milan Martic, pour l'affaire Perisic aussi, en parlant de rapports entre la

 23   VJ après le mois de mai 1992 et la VRS, ou plutôt les forces armées des

 24   Serbes de Bosnie.

 25   Q.  La dernière question à ce sujet. Vos rapports préparés pour toutes ces

 26   affaires dans lesquelles vous avez déposé, ces rapports ont été versés en

 27   tant que pièce à conviction ?

 28   R.  Oui, en effet, Monsieur le Président. A chaque fois qu'il y avait un

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  1   jugement ou même un arrêt, il y a des citations ou des références de faites

  2   à mes rapports ou à ma déposition que l'on retrouve dans ces jugements et

  3   dans ces arrêts.

  4   Q.  On va parler maintenant plus en détail de votre expérience militaire.

  5   Vous avez fait vos études à l'académie militaire à partir de 1983 ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Cette formation a duré combien de temps ?

  8   R.  J'ai suivi les études concernant toutes les armes, et cela a duré

  9   quatre années. J'ai eu mon diplôme au mois de décembre 1987, ensuite je

 10   suis allé à l'armée et là, j'ai choisi les blindés, les chars plutôt. J'ai

 11   été formé pendant six mois au maniement des chars.

 12   Q.  On va en parler.

 13   Mais tout d'abord on va parler de votre académie militaire. Pourriez-

 14   vous nous dire ce que vous avez étudié là-bas ? Quels étaient les sujets

 15   abordés dans le cadre de vos études ?

 16   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, et cela figure d'ailleurs dans mon CV, le

 17   CV qui fait partie de mon rapport, dans le cadre de ces cours, on étudiait

 18   l'histoire militaire, les sciences sociales telles que la psychologie, la

 19   sociologie et le droit, aussi bien le droit privé que le droit

 20   international et les droits de guerre. Il y avait aussi un cours sur

 21   l'encadrement militaire ainsi que physique, chimie, balistique et le

 22   management, évidemment.

 23   Q.  Vous avez dit qu'il y avait un volet militaire aussi dans le cadre de

 24   ces études. Est-ce que vous pourriez nous dire en détail ce que vous avez

 25   étudié là ?

 26   R.  Nous avions un régime militaire. Il fallait se lever à une certaine

 27   heure, respecter une certaine discipline de vie. Mais au cours des

 28   vacances, on subissait un entraînement militaire, souvent c'était

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  1   l'infanterie légère. Par la suite, on a fait aussi l'entraînement à

  2   l'aviation, on a passé nos permis de conduire de montagne, et cetera.

  3   Q.  On va parler de cet autre volet de votre CV, à savoir ce que vous avez

  4   fait dans cette école que vous avez faite pendant six mois, l'école de

  5   blindés.

  6   R.  J'ai appris à être un commandant de peloton, donc c'est un peloton qui

  7   comprend quatre chars. Il s'agissait de s'initier à ces chars mais aussi

  8   ai-je appris des aspects techniques ainsi que de la reconnaissance.

  9   Q.  Au bout de ces six mois, si j'ai bien compris, vous faisiez partie des

 10   forces belges armées en Allemagne. Pouvez-vous nous dire ce que c'est - et

 11   vous êtes resté là-bas pendant trois ans - pourriez-vous nous donner plus

 12   de détails ?

 13   R.  Oui, oui, en effet, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

 14   Au cours des deux premières années, j'étais le commandant de peloton pour

 15   ce peloton de chars dans le 2e Régiment de Gardes. La dernière année,

 16   j'étais le deuxième en commandement de cette compagnie, et quand le

 17   commandant de compagnie n'était pas là parce qu'il suivait des formations,

 18   et cetera, j'étais le commandant en exercice.

 19   Au cours de la troisième année, j'étais le S1, ça veut dire un

 20   officier de personnel et en même temps étais-je aussi le secrétaire

 21   personnel du commandant de bataillon. On l'appelle régiment mais cela

 22   équivaut à un bataillon.

 23   Q.  Au cours de ces différents rôles de commandement que vous avez pu

 24   avoir, est-ce que vous avez acquis une certaine expérience au sujet du

 25   commandement et du contrôle ?

 26   R.  En effet, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges. Même si

 27   par la suite j'ai été exposé à l'exercice de commandement et de contrôle à

 28   un niveau plus élevé, même si je n'étais pas personnellement commandant,

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  1   mais j'ai travaillé dans les QG où il y avait cette ambiance de

  2   commandement et de contrôle à un niveau plus élevé, j'ai vraiment appris le

  3   commandement et le contrôle à un niveau plus bas. On peut dire que c'est là

  4   que c'est difficile d'exercer le commandement et le contrôle parce que

  5   c'est assez facile finalement de commander les officiers, parce que les

  6   soldats c'est bien plus difficile, c'est une tâche autrement plus difficile

  7   parce que vous avez les soldats qui ont des valeurs différentes, d'origines

  8   sociales différentes. Donc là, la tâche de commandement est très ardue.

  9   Q.  Est-ce que vous avez aussi traité des questions de discipline

 10   militaire, est-ce que vous vous êtes occupé de cela ?

 11   R.  Oui, Monsieur le Président, même au niveau de commandant de peloton, il

 12   s'agit d'appliquer la discipline, parce que vous avez trois sous-officiers

 13   et 12 soldats. Et ils étaient, pour la plupart, des soldats de carrière

 14   mais il y avait aussi quatre conscrits.

 15   Comme je l'ai dit, ils ont des origines différentes, des expériences

 16   différentes et ce sont des êtres humains, enfin. Les leçons que vous

 17   apprenez à l'académie militaire sont très utiles dans le sens où, tout

 18   d'abord, il s'agit d'avoir un certain degré d'autodiscipline pour être

 19   respecté par votre personnel et ensuite, il s'agit de faire régner la

 20   discipline à tout moment pour faire en sorte que les gens, au bout d'un

 21   moment, quand ils commencent à vous connaître, deviennent plus spontanés

 22   quand il s'agit de respecter les règles. Et là, il s'agissait d'être

 23   extrêmement vigilant.

 24   Q.  Vous avez parlé de votre rôle de commandant et vous avez dit que vous

 25   étiez aussi dans un bataillon. Quelle était la fonction que vous aviez au

 26   sein de ce bataillon ?

 27   R.  La fonction que j'avais c'était la fonction de S1. Donc S1 à S6, S1

 28   c'est personnel; 2, c'est le renseignement; 3, ce sont les opérations; 4,

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  1   logistique; 5, ce qu'on appelle la coopération civile et militaire, civique

  2   aujourd'hui; ensuite, 6, communication, et cetera, et cetera. Quand je

  3   parle du personnel ça veut dire que vous êtes responsable pas seulement de

  4   management mais aussi du respect des règles et vous aidez aussi le

  5   commandant du bataillon dans le domaine de discipline quand il s'agit de

  6   préparer ses décisions disciplinaires. Parce que comme dans la plupart des

  7   autres armées, un commandant de bataillon va avoir plus d'autorité pour

  8   faire respecter la discipline qu'un commandant de compagnie qui, quant à

  9   lui, a plus d'autorité que le commandant de peloton.

 10   Pour la plupart des infractions, le commandant de peloton ne peut

 11   qu'informer. Parfois, le commandant de compagnie peut décider de

 12   différentes mesures disciplinaires, ou peines même. En ce qui concerne les

 13   vraies infractions plus graves, cela se passe au niveau du commandant de

 14   bataillon plus haut.

 15   Parfois, il s'agissait de situations où il y avait des crimes qui avaient

 16   été commis à l'intérieur ou à l'extérieur du bataillon. Dans ce cas, le

 17   commandant de bataillon devait être informé et il lui appartenait de

 18   prendre des mesures. Et les S1 étaient censés aider le commandant de

 19   bataillon dans ce domaine.

 20   Q.  Merci. Vous nous avez parlé de votre rôle d'officier de QG général au

 21   niveau du bataillon, mais vous avez dit aussi que vous avez travaillé à un

 22   niveau plus élevé.

 23   R.  J'avais mentionné brièvement le fait que j'avais un poste de

 24   commandement au niveau du corps d'armée où j'ai été officier de liaison

 25   pendant deux semaines, entre deux brigades. Donc il y avait ma brigade et

 26   une autre brigade, et la plupart du temps, j'ai été présent dans la salle

 27   des opérations où j'ai pu apprendre beaucoup sur le fonctionnement du QG

 28   d'une brigade, les agissements d'un commandant, comment différents

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  1   officiers du QG coopèrent et travaillent. Pendant que j'ai assisté à des

  2   opérations du maintien de la paix dans l'ex-Yougoslavie dans le cadre de la

  3   FORPRONU dans le QG, qui par la suite est devenu le QG de l'UNPF, j'ai

  4   travaillé dans le 4e QG. On avait un général quatre étoiles français qui

  5   était à la tête - c'est l'équivalent des trois étoiles à l'OTAN - avec plus

  6   de 300 hommes sous ses ordres. Au-dessus de cela, il y avait le QG du corps

  7   d'armée.

  8   Q.  Merci, Monsieur Theunens. Est-ce que vous avez des connaissances quant

  9   à l'artillerie ?

 10   R.  J'ai mentionné les cours de balistique qui vous donnent un bon aperçu

 11   du feu d'artillerie, les statistiques, la distorsion, et cetera. Pendant

 12   que j'étais commandant de peloton, j'ai été au poste d'observation avancé

 13   où le commandant de peloton, dans les armes de combat, infanterie, blindé,

 14   reconnaissance, doit être en mesure de guider les feux d'artillerie sur

 15   différents objectifs. On parle d'une artillerie classique, pas de missiles.

 16   Vous avez quelqu'un qui voit les objectifs et qui est en contact avec le

 17   centre de contrôle des feux qui dirige les feux d'artillerie. Ensuite,

 18   l'observateur qui se trouve au poste avancé, par ce qu'il voit, peut

 19   informer le poste de commandement ou le poste de contrôle de feu sur ce

 20   qu'il a pu apercevoir et leur demander éventuellement de rectifier les

 21   tirs, et cetera, afin de tirer sur les objectifs définis. 

 22   Je m'excuse d'être un peu long en la matière, mais lorsque j'ai

 23   participé à ce qu'on appelle un deuxième cycle, il s'agit d'un cours des

 24   forces armées belges, et c'est un cours sur une année au niveau de la

 25   brigade. C'est là que vous apprenez comment organiser l'appui d'artillerie,

 26   vous apprenez aussi à utiliser d'autres armes d'appui au niveau de la

 27   brigade, ce qui signifie que vous allez choisir les cibles. Vous vous

 28   assurez d'avoir les bonnes cibles et les bonnes munitions et de faire en

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  1   sorte que les munitions soient engagées au bon moment.

  2   Q.  Je remarque dans votre CV que vous avez été également formateur pendant

  3   une année à l'académie militaire. Quand est-ce que cela s'est passé et

  4   quelle a été exactement votre fonction ?

  5   R.  En juillet 1991, j'ai été réaffecté du Régiment de la 2e Garde à

  6   l'académie militaire. J'étais commandant adjoint à la promotion - je

  7   traduit littéralement - j'étais en quelque sorte l'adjoint au commandant

  8   chargé des promotions. Lui, il est parti en décembre et j'ai assumé cette

  9   fonction pendant une première année.

 10   Mon travail consistait à former les aspirants officiers pour ce qui

 11   était de la formation théorique. J'ai organisé la formation militaire aux

 12   aspirants officier. Je parle d'"aspirants officiers" parce qu'ils n'étaient

 13   pas encore officiers justement, car ils ne deviennent officiers que

 14   lorsqu'ils prononcent une déclaration solennelle, et cela se fait au début

 15   de la troisième année de l'académie militaire.

 16   Bien sûr, lorsque je parle de formation militaire, cela consiste

 17   également à expliquer la discipline, faire en sorte d'appliquer la

 18   discipline, leur expliquer pourquoi la discipline militaire est extrêmement

 19   importante à un niveau personnel, mais également lorsque vous travaillez

 20   avec des subordonnés, et ce, pendant toute votre carrière.

 21   Q.  Nous allons parler maintenant de l'époque que vous avez passée en tant

 22   que responsable du renseignement militaire belge, cela pendant la période

 23   comprise entre septembre 1992 et mai 2000.

 24   Vous avez déjà mentionné que vous avez travaillé sur l'ex-

 25   Yougoslavie, et nous allons en parler dans un petit moment, mais j'aimerais

 26   dans un premier temps que vous nous expliquiez ce en quoi consistait ce

 27   travail en Belgique.

 28   R.  Madame, Messieurs les Juges, avec votre permission, je préférerais que

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  1   cela se fasse à huis clos.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections à ce que

  3   nous passions à huis clos partiel ?

  4   M. KEHOE : [interprétation] Je ne vois pas pourquoi l'on devrait passer à

  5   huis clos partiel -- ou plutôt, on a demandé le huis clos ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que le huis clos partiel serait

  7   suffisant, Monsieur Theunens.

  8   Alors nous allons passer à huis clos partiel.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 10   partiel.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 25   [Audience publique]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 27   M. WAESPI : [interprétation]

 28   Q.  Avez-vous eu la possibilité de vous rendre en ex-Yougoslavie lorsque

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  1   vous travailliez pour les autorités belges ?

  2   R.  Monsieur le Président, la première fois que je m'y suis rendu c'était

  3   en juillet ou en août 1993 et c'était une visite d'une semaine. Je me suis

  4   rendu au QG de la FORPRONU à Zagreb, QG du secteur est à Erdut, et je suis

  5   également allé au commandement à Kiseljak et Sarajevo, au commandement de

  6   la BiH. Ce qui est encore plus important, c'est qu'à partir du mois de

  7   décembre 1994 jusqu'au mois d'octobre 1995, j'ai été affecté officier du

  8   renseignement militaire auprès du QG de la FORPRONU et de l'UNPF à Zagreb.

  9   Vous voulez que je parle de la suite ?

 10   Q.  Non. Nous allons maintenant nous intéresser à cette partie, justement.

 11   Quel a été votre rôle entre décembre 1994 et octobre 1995 et où étiez-vous

 12   cantonné ?

 13   R.  Monsieur le Président, au départ j'ai remplacé un collègue belge dont

 14   la mission de six mois s'était terminée. A ce moment-là, ma mission

 15   consistait à conserver des bases de données avec les ordres de bataille.

 16   J'ai expliqué à l'adjoint auprès du chef du bureau et au chef du bureau

 17   d'information militaire que j'avais déjà travaillé dans le cadre de

 18   conflits auparavant. Après un mois et demi, un nouveau chef des opérations

 19   est arrivé, c'est un colonel suédois, M. Svenson. Il a établi ce que l'on a

 20   appelé ensuite le bureau d'évaluation du bureau et j'ai été affecté à ce

 21   bureau avec un commandant suédois, Joakim Robertsson, qui lui avait

 22   travaillé auparavant pour la FORPRONU et qui était revenu, me semble-t-il,

 23   en janvier 1995.

 24   Il est revenu au bureau d'information militaire. A partir des

 25   renseignements que nous recevions des différentes composantes militaires, à

 26   savoir les bataillons, le commandement du secteur, le commandement de la

 27   zone ainsi que d'autres informations, affaires civiles, affaires

 28   militaires, tout ce qui fait partie des sources ouvertes, à partir de cette

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  1   pléthore d'information nous devions fournir des évaluations à moyen et à

  2   long terme à propos de l'évolution possible du conflit en ex-Yougoslavie,

  3   et nous nous concentrions sur la Bosnie-Herzégovine et la Croatie.

  4   Robertsson, quant à lui, se concentrait davantage sur la Bosnie-

  5   Herzégovine, si je ne m'abuse, et je m'occupais plus de la Croatie. J'étais

  6   d'ailleurs basé à Zagreb, comme je l'ai déjà mentionné.

  7   Q.  Est-ce que vous étiez censé fournir des informations particulières, des

  8   séances d'instruction militaire dans le cadre de vos fonctions ?

  9   R.  Oui. Il y avait des séances d'information militaire quotidiennes. Il y

 10   en avait à 8 heures ou à 8 heures 15 au niveau du QG de la FORPRONU. Il y

 11   avait Robertsson et deux autres membres du bureau ou moi-même qui

 12   fournissions ce qu'on appelle l'évaluation G2, il s'agissait de

 13   l'évaluation de la situation au cours des 24 dernières heures. Il y avait

 14   également des séances d'information militaire à 11 heures destinées aux

 15   commandements des forces. Nous étions un groupe de quatre dont le rôle

 16   était de fournir ces renseignements. Il y avait également de temps à autre

 17   des séances d'information destinées à M. Akashi, qui était le représentant

 18   spécial du secrétaire général. Il y avait également des séances

 19   d'information moins officielles, plus informelles destinées aux

 20   représentants militaires et civils du QG.

 21   Q.  Est-ce que vous rédigiez des rapports également ?

 22   R.  Oui, tout à fait, Madame, Messieurs les Juges. Nous rédigeons un

 23   rapport interne que l'on appelait la synthèse quotidienne G2, si je ne me

 24   trompe, et cela pour donner une évaluation écrite de l'évolution de la

 25   situation au cours des 24 dernières heures. Nous publiions également des

 26   rapports qui étaient beaucoup plus des analyses à moyenne échéance et à

 27   longue échéance. Il y avait certaines analyses que nous faisions de notre

 28   propre initiative, d'autres qui nous étaient demandées par des membres du

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  1   QG. Il y a une de ces analyses qui était un document qui portait justement

  2   sur la situation en Croatie.

  3   Q.  En 1995, lorsque vous faisiez partie de la FORPRONU, est-ce que vous

  4   avez participé à des déplacements sur le terrain ?

  5   R.  Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Je me suis rendu dans la zone

  6   de Bihac avec un convoi logistique français en décembre. Je pense que

  7   c'était à la fin du mois de décembre 1994 ou au début du mois de janvier

  8   1995. Par la suite en janvier 1995, j'ai participé à un déplacement de deux

  9   semaines avec le chef du bureau de renseignement militaire, celui qui

 10   allait devenir le chef. Il s'agit du colonel Svenson et il y avait le

 11   commandant Robertsson. Nous sommes allés dans le secteur nord, dans le

 12   secteur sud, ainsi que dans certaines zones du centre de la Bosnie-

 13   Herzégovine. Entre janvier et juillet, il y a eu plusieurs déplacements

 14   dans le secteur nord parce qu'il se trouvait très proche de nous, puis il y

 15   a eu également des déplacements dans le secteur ouest, dans le secteur est,

 16   et pendant la troisième ou la quatrième semaine d'août, je me suis rendu

 17   avec un observateur militaire des Nations Unies belge dans la zone de Bihac

 18   à nouveau, ainsi que dans l'ancien secteur nord et l'ancien secteur sud.

 19   Q.  A propos de ce dernier déplacement, est-ce que vous êtes allé à Knin

 20   également ?

 21   R.  Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Si je ne m'abuse, nous sommes

 22   allés deux fois à Knin. La première fois, c'était lorsque nous sommes

 23   descendus là-bas parce que nous étions à Split. Split était notre dernière

 24   étape, donc dans la première partie du voyage, nous sommes passés par là et

 25   nous sommes allés au QG.

 26   Pendant le deuxième voyage de Split à Zagreb, nous sommes passés par

 27   Knin. Je m'excuse. Je m'excuse si j'ai induit quelqu'un en erreur, mais ce

 28   que je voulais dire, c'est qu'en janvier 1995, pendant ce voyage dans le

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  1   secteur nord et le secteur sud, là aussi nous sommes passés par Knin, donc

  2   j'y suis allé en janvier ainsi qu'à la fin du mois d'août 1995.

  3   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'allons pas poser

  4   des questions directrices par le truchement de ce témoin, mais je voulais

  5   être tout à fait honnête parce que vous savez que ce témoin est expert,

  6   qu'il a fourni un rapport, et je pense qu'il était important que vous

  7   sachiez que le témoin s'était rendu dans cet endroit, et je pense que la

  8   Défense voudra peut-être lui poser des questions lors du contre-

  9   interrogatoire. Mais je ne vais pas lui poser des questions pour le moment

 10   à ce sujet.

 11   Q.  Nous allons maintenant passer à un autre aspect de vos compétences

 12   d'expert. 

 13   J'aimerais savoir si vous avez jamais écrit quoi que ce soit sur le

 14   sujet des forces armées croates ?

 15   R.  Madame, Messieurs les Juges, lorsque je faisais partie de la mission

 16   UNTAES en Croatie en 1997, j'ai été invité par une personne que je

 17   connaissais de l'époque de la FORPRONU qui travaillait en Allemagne, donc

 18   j'ai été invité à rédiger un article sur les aspects militaires de la

 19   mission UNTAES. Cet article a par la suite été publié dans un petit ouvrage

 20   où l'on trouvait des contributions d'autres personnes, essentiellement des

 21   civils, et il s'agissait des développements et de l'évolution en ex-

 22   Yougoslavie. Je pense que cela a été publié pendant la première partie de

 23   l'année 1997. Mais je pense que de toute façon la Défense a reçu un

 24   exemplaire de cet article lors de notre réunion, la réunion officieuse que

 25   nous avons eue en janvier 2008.

 26   Lorsque je travaillais en Belgique, lorsque vous travaillez comme

 27   analyste du renseignement militaire, il est évident que vous ne publiez pas

 28   l'article parce qu'il est très difficile de faire la part des choses et de

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  1   faire la différence entre ce que vous avez appris par le biais de vos

  2   activités professionnelles et ce que vous avez appris par vos activités

  3   privées lorsque vous avez rencontré des personnes qui se trouvaient dans ce

  4   même secteur mais dans un environnement différent.

  5   Q.  Avez-vous été invité à des conférences, et le cas échéant, en quelle

  6   capacité ?

  7   R.  Vous voulez parler de cette période ou vous voulez parler de la phase

  8   ultérieure ?

  9   Q.  Je veux parler des deux périodes.

 10   R.  Avant que je n'arrive au TPIY, évidemment j'étais tenu par les mêmes

 11   contraintes dont j'ai déjà parlé. Donc il y a eu des conférences mais qui

 12   avaient lieu dans un environnement très clos. 

 13   En septembre 2008, je suis intervenu dans une conférence à Oslo à

 14   propos de l'utilisation des compétences militaires lors d'enquêtes portant

 15   sur des violations graves des lois de la guerre. J'ai rédigé un article

 16   pour cette conférence, mais cet article n'a pas encore été publié, c'est

 17   encore en quelque sorte un projet d'article, un article provisoire.

 18   Q.  Merci, Monsieur Theunens. Nous allons maintenant parler de la

 19   méthodologie que vous avez utilisée lorsque vous avez rédigé le rapport qui

 20   fait l'objet de votre déposition.

 21   Est-ce que vous pourriez nous dire assez succinctement quels sont les

 22   documents que vous avez consultés lors de la préparation de ce rapport ?

 23   R.  Madame, Messieurs les Juges, les documents que j'ai consultés pour

 24   préparer mon rapport se trouve également dans le chapitre intitulé, "Portée

 25   du rapport." Donc il y a différentes catégories de documents. Vous avez,

 26   dans un premier temps, tous les documents militaires. Ils incluent ce que

 27   j'appelle les documents relatifs à la doctrine, donc la législation, les

 28   manuels de réglementation militaire, et cetera. Dans cette deuxième

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  1   catégorie se trouvent les documents du commandement, à savoir les ordres.

  2   La troisième catégorie comprend les documents de rapport. Il s'agit des

  3   journaux de guerre, des journaux opérationnels, des rapports de situation,

  4   et d'autres rapports semblables.

  5   Il s'agit essentiellement de rapports -- de documents, je m'excuse,

  6   qui ont été préparés par les forces armées croates. Qu'entends-je par cela

  7   ? J'entends l'état-major principal des forces armées croates, des documents

  8   également du district militaire Split ainsi que des documents rédigés par

  9   les unités subordonnées du district militaire de Split. J'ai également

 10   consulté des documents militaires qui appartiennent à la même catégorie et

 11   qui portent sur la garnison de Knin ainsi que sur la police spéciale. Je me

 12   suis limité pour ce qui est du mois d'août, aux documents qui font

 13   référence à août 1995. J'aurais dû le mentionner. Je m'excuse. Je me suis

 14   concentré sur les documents qui font référence aux opérations et activités

 15   de la police spéciale à l'intérieur et à côté de la zone de responsabilité

 16   du district militaire de Split.

 17   Puis, j'ai consulté également ces documents sources ouvertes. Par

 18   exemple, les rapports des Nations Unies. Pour ce qui est des rapports des

 19   Nations Unies, je n'ai utilisé que les rapports du secrétaire général

 20   destinés au Conseil de sécurité à propos de la mise en application de

 21   certaines résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies qui portent

 22   sur certains aspects du mandat de la FORPRONU et de l'UNCRO. J'ai également

 23   consulté des traductions que nous avons, des traductions des sources

 24   ouvertes croates. J'entends par cela les médias. A l'exception d'un

 25   article, je n'ai pas inclus ces rapports de médias dans mon rapport.

 26   Q.  Où aviez-vous accès à ces documents ?

 27   R.  Lorsque j'ai reçu mes premières tâches en dix points, j'ai reçu aussi

 28   des tableaux sous forme Excel que mes collègues analystes militaires Dai

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  1   Morris et Andrei Shakhmetov avaient élaborés. Ces tableaux comportaient des

  2   informations concernant le titre du document, la date, l'ERN, et les

  3   tableaux étaient organisés suivant les sujets généraux; par exemple, la

  4   région militaire de Split et Tempête. Le sujet pouvait être la police et

  5   ainsi de suite.

  6   J'ai utilisé cela afin de mieux connaître la nature et l'ampleur des

  7   documents à la disposition du bureau du Procureur. J'ai utilisé aussi les

  8   tableaux afin de m'aider à mener des recherches que j'ai faites par la

  9   suite dans la base de données ou le système de base de données à la

 10   disposition du bureau du Procureur.

 11   Donc ce que j'essaie de dire, c'est que les documents que j'ai inclus

 12   dans le rapport ne sont pas simplement un reflet des tableaux; au

 13   contraire, j'ai utilisé bien d'autres documents mis à part les tableaux,

 14   donc aussi des documents différents. Mais je vais, au moment où

 15   j'adresserai la question de la méthodologie en détail, je vais pouvoir

 16   expliquer de quelle manière j'ai sélectionné certains documents sans

 17   inclure d'autres.

 18   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire approximativement combien de documents

 19   ou de pages vous avez examinés dans le processus de la rédaction de ce

 20   rapport ?

 21   R.  Je n'ai pas eu de statistiques, mais lorsque je compare les deux

 22   parties du rapport, je dirais qu'approximativement deux tiers, la moitié à

 23   deux tiers des documents que j'ai passé en revue, je les ai inclus dans le

 24   rapport. Je ne suis pas tout à fait sûr, mais je vais essayer d'expliquer

 25   les critères.

 26   J'ai essayé d'être aussi vaste que possible avec certains critères.

 27   Par exemple, j'ai fait les recherches sur Ante Gotovina. Bien sûr, beaucoup

 28   de documents vont apparaître qui ne sont pas pertinents pour les rapports.

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  1   Ensuite, j'ai fait des recherches suivant les noms d'unités, sur les

  2   événements, les emplacements, les dates, les numéros de documents. Nous

  3   savons que les documents militaires ont toujours des numéros de référence

  4   qui font référence souvent aux autres documents militaires. Donc j'ai

  5   utilisé aussi ces numéros-là pour faire des recherches. J'ai utilisé aussi

  6   certaines parties des numéros afin d'identifier les séries de documents. Je

  7   souhaitais faire un travail de façon aussi approfondie que possible afin

  8   d'éviter des omissions. Dans d'autres affaires, j'avais une partie de

  9   l'enquête avant la rédaction du rapport. Or, ici, je n'avais pas fait

 10   partie de l'enquête. Donc avant de passer en revue les documents à la

 11   disposition du bureau du Procureur, je n'avais pas de connaissance des

 12   documents.

 13   Q.  Avez-vous mené des recherches sur internet ?

 14   R.  Effectivement, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges. Par

 15   exemple, le règlement militaire américain, que l'on peut trouver sur

 16   internet, puis d'autres règlements aussi de l'OTAN. S'agissant aux forces

 17   armées croates, je me souviens que j'ai travaillé sur les forces armées

 18   croates avant, et je me suis penché sur les gens qui faisaient partie des

 19   unités. Ces personnes étaient fières. Donc il existe des sites internet sur

 20   lesquels on peut trouver des informations concernant les activités de cette

 21   unité.

 22   Je n'ai pas utilisé ces documents en tant que tels dans le rapport,

 23   mais il s'agissait là des traces utiles qui m'ont amené vers d'autres

 24   objets de recherche.

 25   Q.  Est-ce que vous vous êtes appuyé sur les déclarations de témoins ?

 26   R.  Non, Madame, Messieurs les Juges, je ne me suis pas penché sur les

 27   déclarations de témoins.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire pour quelle raison ?

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  1   R.  La raison principale, Madame, Messieurs les Juges, c'est que d'après

  2   mon expérience devant le Tribunal, il peut y avoir une différence entre ce

  3   que le témoin dit dans sa déclaration préalable et sa déposition. Mis à

  4   part cela, je ne savais pas qui l'équipe Gotovina allait citer à la barre.

  5   Donc même si je pouvais trouver une déclaration de quelqu'un que je

  6   trouverais utile, si la personne ne venait pas déposer, au moins d'après la

  7   méthodologie que j'applique, je pense que la valeur d'une telle déclaration

  8   serait limitée. Et si une telle personne venait déposer, probablement après

  9   le rapport définitif, il y aurait un problème technique. Que faire si cette

 10   personne change sa déclaration ? Je devrais changer cette entrée dans mon

 11   rapport.

 12   Ma conclusion, d'après les documents que j'ai examinés, est que les

 13   documents sont tellement compréhensifs pour ce qui est des aspects dont je

 14   souhaitais traiter, il n'était pas du tout nécessaire d'inclure les

 15   déclarations de témoin ou même déclarations publiques de personnes qui

 16   risquaient de déposer.

 17   Q.  Avez-vous inclus dans les deux parties de votre rapport et l'annexe,

 18   des annotations détaillées ou des citations concernant les documents sur

 19   lesquels vous vous êtes appuyé ?

 20   R.  En effet, j'essayais, s'agissant de chaque entrée factuelle,

 21   d'identifier au moins une source. Lorsque je dis source, je veux dire

 22   document militaire. J'espère que ceci ressort visiblement par le biais des

 23   notes en bas de page du rapport.

 24   Si possible, lorsque je croyais qu'il était vraiment important que le

 25   lecteur voit l'original du document, j'incluais la citation littérale du

 26   document, en petits caractères, dans le rapport car je pensais que c'était

 27   très important afin de comprendre ce que j'essayais de dire; par exemple,

 28   des conclusions que je tirais et qui peuvent être trouvées dans le résumé

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  1   exécutif.

  2   Q.  Est-ce que des limites ont été placées sur votre accès aux documents de

  3   la part du bureau du Procureur ?

  4   R.  Non, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges. Le bureau du

  5   Procureur n'a posé aucune limite à mon accès aux documents.

  6   Q.  Maintenant --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, puis-je demander…

  8   Est-ce qu'il y a eu des limites imposées par qui que ce soit ou

  9   quelque autre organisation que ce soit ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne dirais pas que ce

 11   sont des limites mais, par exemple, il y avait des règlements que j'aurais

 12   aimé avoir et je n'ai pas pu. Par exemple, je n'ai pas pu trouver le

 13   règlement des forces armées croates portant sur la mise en œuvre des Lois

 14   relatives aux conflits armés. Comme je l'ai déjà dit, j'ai trouvé d'autres

 15   règlements des forces armées croates qui font référence aux aspects

 16   importants du droit international, mais je n'ai pas trouvé celui-ci.

 17   C'était sur la liste que j'ai donnée à mes collègues lorsqu'ils sont allés

 18   aux archives.

 19   Je n'ai pas trouvé le règlement spécifiant les devoirs du commandant de la

 20   région militaire. Même si j'ai trouvé des règlements traitant des

 21   commandants en général, et des commandants de brigades et des commandants

 22   de Brigade de Gardes, je suppose qu'un tel règlement concernant le

 23   commandant de la région militaire existe, certainement.

 24   Comme vous avez pu voir dans la partie 1 du rapport, j'ai considéré que

 25   certains documents provenant des forces armées croates ne suffisaient peut-

 26   être pas, donc j'ai inclus aussi les règlements de la JNA, de même que de

 27   l'OTAN -- ou des règlements américains, plutôt. Je peux l'expliquer, mais

 28   peut-être ce serait d'aller trop loin.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A vous de décider, Monsieur Waespi.

  2   M. WAESPI : [interprétation]

  3   Q.  Oui. Faites-le.

  4   R.  S'agissant du règlement de la JNA, encore une fois, compte tenu de mon

  5   expérience précédente et de mes contacts avec les anciens officiers de la

  6   JNA, l'un d'eux, au moins, a été formé en matière de la doctrine de l'OTAN.

  7   J'ai constaté qu'il y a eu beaucoup de similitudes. J'ai compris aussi que

  8   de nombreux officiers qui faisaient leur service au sein de la HV --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Peut-on connaître l'identité de l'officier de

 11   la JNA auquel il fait référence.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je suis un peu perplexe, Maître

 13   Kehoe. Vous dites un officier de la JNA, et je vois que dans le transcript

 14   il est dit "officiers," au pluriel, de la JNA. Donc, l'un d'eux, d'accord.

 15   Est-ce que vous pourriez nous dire le nom de cet officier en particulier.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cet officier est

 17   le général de brigade, Milovan Zorc, qui a déposé dans l'affaire Strugar en

 18   tant que témoin expert militaire. Il est de nationalité slovène. Il a

 19   quitté la JNA en 1991, si je ne me trompe. Après, avec les événements en

 20   Slovénie, il a commencé à connaître, par le biais des différents cours, la

 21   doctrine de l'OTAN. Je lui ai rendu visite, par exemple, lors de la

 22   rédaction de mon rapport dans l'affaire Slobodan Milosevic.

 23   Pour terminer la réponse à la question précédente, d'après la manière dont

 24   je comprends la chose, de nombreux officiers haut placés de la HV avaient

 25   eu précédemment une formation de la JNA, et donc connaissaient certainement

 26   la doctrine de la JNA en ce qui concerne la question que j'ai abordée dans

 27   mon rapport.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi, je regarde l'heure.

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  1   M. WAESPI : [interprétation] Une seule question, seulement.

  2   Q.  Pourquoi avez-vous inclus le règlement des Etats-Unis ?

  3   R.  Je l'ai inclus pour des raisons invoquées lors de la première séance,

  4   c'est-à-dire qu'au plus tard, en 1994, des relations particulières se sont

  5   développées entre le ministère de la Défense croate et les autorités

  6   américaines, ce qui était visible, par exemple, par le biais des activités

  7   de MPRI, de cette organisation en Croatie, ou plutôt, la coopération entre

  8   la Croatie et le MPRI, et aussi la similitude entre le règlement de la JNA

  9   ou la doctrine de la JNA et la doctrine de l'OTAN. Comme je l'ai expliqué,

 10   afin de couvrir certains aspects concernant lesquels les documents de la HV

 11   étaient incomplets, je me suis penché aussi sur ces règlements des Etats-

 12   Unis.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Theunens, maintenant il est 7

 14   heures. Nous avons terminé pour la journée d'aujourd'hui.

 15   Je souhaite vous dire que vous ne devez parler avec qui que ce soit

 16   de votre déposition jusqu'à présent et de sa suite. Compte tenu de votre

 17   position spéciale, je souhaite même vous inviter, s'agissant de vos

 18   conversations avec vos collègues ou membres de l'Accusation, de les limiter

 19   au minimum, car cela peut soulever toutes sortes de questions. Même si je

 20   vous fais confiance et la Chambre vous fait confiance, je suis sûr que vous

 21   allez respecter les instructions que je vous ai données. Mais il serait

 22   avantageux que si vous avez des discussions avec vos collègues, vous ne

 23   traitiez pas de votre déposition aussi afin d'éviter toute impression selon

 24   laquelle vous aurez pu discuter avec qui que ce soit au sujet du contenu de

 25   votre déposition.

 26   Nous allons lever l'audience et reprendre le travail demain, à 2 heures et

 27   quart dans ce même prétoire.

 28   --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le jeudi 20

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  1   novembre 2008, à 14 heures 15.  

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