Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 2 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes, Monsieur

  6   Kuzmanovic, nous vous souhaitons particulièrement la bienvenue; vous êtes à

  7   nouveau parmi nous, nous en sommes très content.

  8   Monsieur le Greffier, pourriez-vous nous donner le numéro de l'affaire,

  9   s'il vous plaît ?

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

 11   tout le monde.

 12   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina

 13   et consorts.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 15   La Défense de Gotovina est-elle prête à citer son premier témoin ?

 16   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme l'Huissière, je vous demanderais

 18   bien vouloir faire entrer dans le témoin dans le prétoire.

 19   En attendant l'entrée du témoin, je pense qu'à un moment donné, nous allons

 20   parler des déclarations déposées au titre de l'article 92 ter. A la page 28

 21   dans sa déclaration, le témoin dit : "Au 5 août 1991, Mrksic qui était

 22   rentré en mai 1995," et cetera. Je pense qu'il y a là une coquille, n'est-

 23   ce pas, et que ça doit être 1995 ?

 24   M. MISETIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a maintenant un Frenki qui est

 26   arrivé, c'est Simatovic ou Stimatovic.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Il en a parlé dans le cadre de sa déposition

 28   en fait dans le procès Milosevic, il utilisait les deux noms --

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous comprendrez qu'en attendant

  2   l'accord entre les parties, je n'ai pas lu chaque page, des pages par

  3   ailleurs très nombreuses.

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Lazarevic, je pense.

  6   M'entendez-vous dans une langue que vous comprenez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait clairement. Merci.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Lazarevic, avant de déposer, le

  9   Règlement de procédure et de preuve exige que vous prononciez une

 10   déclaration solennelle. Mme l'Huissière vous la tend, j'aimerais que vous

 11   la prononciez à haute voix.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 13   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 14   LE TÉMOIN: SLOBODAN LAZAREVIC [Assermenté]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Lazarevic.

 17   Veuillez vous asseoir.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que vous vous exprimez en

 20   anglais. Cela signifie-t-il que vous souhaitez déposer en anglais

 21   également, ou souhaitez-vous plutôt utiliser votre langue maternelle ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je préfère dépose en anglais.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Me Misetic va entamer son

 24   interrogatoire. Maître Misetic, vous avez la parole.

 25   Interrogatoire principal par M. Misetic : 

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Lazarevic.

 27   R.  Bonjour.

 28   Q.  Voulez-vous décliner votre identité.

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  1   R.  Slobodan Lazarevic.

  2   Q.  Vous avez choisi de vous exprimer en anglais; je dois vous rappeler que

  3   nous devons contrôler et maîtriser notre débit pour la sténotypiste et les

  4   interprètes.

  5   R.  Je ferai de mon mieux.

  6   Q.  Par exemple.

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Vous avez répondu avant que je finisse de poser ma question; je vous

  9   demanderais de bien vouloir ménager une pause entre mes questions et vos

 10   réponses. Je tâcherais de faire de même, et je pense que ceci aidera tout

 11   le monde.

 12   Monsieur Lazarevic, l'huissière vient de vous tendre une déclaration, la

 13   vôtre, celle que vous avez faite en 1992, n'est-ce pas ?

 14   R.  En effet.

 15   Q.  Vous souvenez-vous avoir donné une déclaration au bureau du Procureur,

 16   le 1er juillet 1999 ou aux environs de cette date ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Très bien. En examinant cette déclaration, en examinant la signature

 19   que l'on trouve sur chacune des pages, pouvez-vous confirmer qu'il s'agit

 20   bien de la déclaration que vous avez faite au bureau du Procureur ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  En examinant cette déclaration, j'aimerais d'abord vous indiquer plus

 23   précisément certaines pages, notamment la page 19.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, il s'agit de

 25   la déclaration de 1999, 65 ter 1D399.

 26   Q.  Au cours de la séance de récolement d'hier, vous nous avez fait savoir

 27   que vous souhaitiez apporter une correction quant au service du

 28   Renseignement pour lequel travaillait M. Karan. Voulez-vous apporter cette

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  1   correction ?

  2   R.  Oui, en effet. On nous dit que le colonel Karan faisait partie de la

  3   SDB, c'est une erreur. Il faisait partie de la sécurité intérieure, selon

  4   qu'il travaille pour le SVB et non pour le SDB; c'est cela que vous voulez

  5   dire ?

  6   R.  En effet. Je crois qu'il n'y a eu qu'un endroit où cette erreur est

  7   apparue; pour le reste, c'est tout à fait exact.

  8   Q.  Merci. J'aimerais que vous examiniez maintenant la page 22. Sur cette

  9   page, vous souhaitiez apporter une correction à la partie de la déclaration

 10   où il est dit que M. Sarac a ordonné que l'on tue par balle les

 11   prisonniers. Voulez-vous ajouter quelque chose ?

 12   R.  Non. Ce n'est pas ce que j'ai dit.

 13   Q.  Qu'avez-vous dit ? Cette partie est inexacte donc de votre déclaration

 14   ?

 15   R.  En effet, elle est inexacte.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. MISETIC : [interprétation] Passons à la page 28 de votre déclaration,

 18   s'il vous plaît.

 19   Q.  Dans le premier paragraphe, on lit, troisième phrase :

 20   "Au 5 août 1991, Mrksic qui était renté en mai 1995, en qualité de

 21   commandant de l'armée de la RSK."

 22   Cette date devrait être celle du 5 août 1995, n'est-ce pas, et pas

 23   mai ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  A la même page, tout en bas on lit :

 26   "J'ai moi-même concocté une histoire selon laquelle des civils

 27   étaient massacrés par les Musulmans, une histoire reprise par CNN."

 28   Voulez-vous corriger ceci ?

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  1   R.  Je n'ai jamais dit cela, je n'ai jamais été en contact avec CNN. C'est

  2   quelqu'un qui se trouvait dans le même bâtiment qu'il l'a fait. C'est une

  3   déclaration qui m'a été attribuée pour une raison qui m'échappe.

  4   Q.  Affirmez-vous que ce qui a été dit à CNN a été concocté ou non ?

  5   R.  Ce que je dis c'est que je n'ai jamais fait cette déclaration, était-ce

  6   une histoire concoctée par quelqu'un d'autre, je ne le sais pas

  7   véritablement.

  8   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur la page 33.

  9   Tout en haut de la page, voici ce qui est dit :

 10   "En tout état de cause, il y a eu un tel lavage de cerveau et un climat de

 11   terreur émanant de la propagande de leur propre gouvernement que peu aurait

 12   risqué de rester en Croatie."

 13   Vous dites, je crois, que vous n'avez pas utilisé le terme "de lavage de

 14   cerveau" mais vous avez bien dit que la population était terrorisée par la

 15   propagande de son propre gouvernement; c'est bien exact ?

 16   R.  Globalement, la déclaration est correcte simplement je n'ai pas utilisé

 17   le terme "de lavage de cerveau."

 18   Q.  Très bien. Y a-t-il d'autres choses à corriger dans cette déclaration à

 19   part ces différents éléments ?

 20   R.  Pas du tout.

 21   Q.  A l'époque où vous avez fait cette déclaration au bureau du Procureur

 22   en juillet 1999, tout ce que vous avez dit était-il vrai à l'époque où vous

 23   avez déclaré tout ceci ?

 24   R.  Absolument.

 25   Q.  Si je vous posais les mêmes questions qui vous ont été posées à

 26   l'époque, aujourd'hui dans ce prétoire, y répondriez-vous de la même

 27   manière ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Avec les corrections qui viennent d'être apportées ?

  2   R.  Oui.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander à ce

  4   que le document 65 ter 1D399 soit versé au dossier.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me tourne vers l'Accusation.

  6   M. HEDARALY : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président. Je

  7   ne sais pas s'il a dit véritablement que ce qui figurait dans cette

  8   déclaration reflète tout à fait ce qu'il a dit. Par ailleurs, il a fait

  9   référence à la copie papier. Nous voulions simplement vérifier que la copie

 10   papier correspond tout à fait au document que nous disposons dans le

 11   système de prétoire électronique. A part cela, nous n'avons pas

 12   d'objection.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 14   Pas d'objections.

 15   Monsieur le Greffier, pouvez-vous attribuer une cote à ce document ?

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Il s'agira de la pièce

 17   --

 18   L'INTERPRÈTE : Dont la cote a échappé à l'interprète --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Lazarevic, vous n'avez pas tout

 20   à fait dit si ce qui figurait dans ce document reflétait véritablement ce

 21   que vous aviez dit à l'époque à part la partie, bien sûr, où vous avez dit

 22   que ce n'était pas ce que vous aviez dit à ce moment-là.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voulez-vous répéter la cote, s'il vous

 25   plaît, qui n'a pas été reprise dans le compte rendu ?

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. D1461.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

 28   Maître Misetic, poursuivez.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

  2   J'aimerais que l'on demande, pardon j'aimerais que l'on affiche à l'écran

  3   1D2703, 2703.

  4   Q.  Monsieur Lazarevic, vous vous souvenez que vous avez témoignez devant

  5   ce Tribunal déjà en octobre 2002 dans l'affaire du Procureur contre

  6   Milosevic, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, Slobodan Milosevic.

  8   Q.  On vous a posé un certain nombre de questions, vous avez apporté un

  9   certain nombre de réponses à ces questions, questions qui vous ont été

 10   posées d'ailleurs par l'Accusation et la Défense et les Juges de la Chambre

 11   dans cette affaire. Les réponses que vous avez données à l'époque, sont-

 12   elles tout à fait conformes à la réalité ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous avez eu la possibilité d'examiner le compte rendu d'audience

 15   correspondant. Le compte rendu d'audience reflète-t-il fidèlement ce que

 16   vous avez dit à la Chambre en 2002 ?

 17   R.  Oui, absolument.

 18   Q.  Si je vous posais aujourd'hui en audience les mêmes questions qui vous

 19   ont été posées en 2002, fourniriez-vous les mêmes réponses ?

 20   R.  Oui, Monsieur.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons le

 22   versement au dossier des extraits qui figurent dans la pièce 1D non pardon

 23   qui figure dans le document 1D2073.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, vous acquiescez, il

 25   n'y a pas d'objection.

 26   M. HEDARALY : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je suppose que ceci vaut

 28   également pour les autres équipes de la Défense. Ce document est versé au

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  1   dossier. Monsieur le Greffier, peut-on lui attribuer une cote.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la pièce D1462.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce 1462 est versée au dossier.

  4   M. MISETIC : [interprétation] J'ai un résumé de la déclaration de la

  5   déposition de ce témoin. Je l'ai communiqué aux interprètes ainsi qu'à la

  6   sténotypiste.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez expliqué à M. Lazarevic

  8   quel était l'objet de la lecture qui sera faite de ce résumé de façon donc

  9   à ce que le public sache ce qui figure dans votre déclaration. Il s'agit en

 10   fait d'un résumé de la déposition que vous ferez devant cette Chambre.

 11   Maître Misetic, allez-y.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   [Le conseil de la Défense se concerte]

 14   M. MISETIC : [interprétation] M. le Témoin, Slobodan Lazarevic, est un

 15   ancien agent du renseignement qui a travaillé pour le contre-espionnage de

 16   l'armée yougoslave à l'étranger entre 1968 et environ 1990. En 1991, M.

 17   Lazarevic est devenu agent du renseignement pour la Republika Srpska

 18   Krajina.

 19   Ce témoin dira que ses fonctions, au sein du renseignement de la RSK,

 20   consistaient, entre autres, à entraver le travail des forces du maintien de

 21   la paix des Nations Unies et des observateurs de l'Union européenne afin

 22   d'empêcher qu'ils découvrent la vérité sur les activités des Serbes de

 23   Krajina, d'après le témoin, et je cite :

 24   "Chaque interprète qui travaillait pour les Nations Unies et le CNN

 25   en Krajina rendait compte aux organes serbes chargés du Renseignement."

 26   A partir du début de l'année 1992 et par la suite, le témoin a reçu

 27   pour instruction de son supérieur de recruter du personnel international,

 28   membres, représentants les Nations Unies et la MOCE en tant qu'agents

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  1   coopérant avec la RSK. Le témoin a fourni de l'argent et des femmes à ces

  2   personnes. Le témoin a pu recevoir des renseignements des observateurs de

  3   la MOCE et des Nations Unies.

  4   Le témoin a participé à quatre négociations de paix internationales en tant

  5   que délégué pour la RSK. L'objet de ces négociations de paix était

  6   d'essayer de parvenir à un règlement pacifique du différend qui opposait la

  7   Croatie et la RSK. Le témoin dira toutefois que chaque fois qu'une

  8   délégation de la RSK participait à une conférence à l'étranger, le groupe,

  9   la délégation de la RSK devait se rendre à Belgrade au moins 24 heures

 10   avant son départ pour la conférence afin d'être briefée par les

 11   représentants du gouvernement serbe. Belgrade ne voulait pas de règlement

 12   des questions qui opposaient les Serbes, la RSK, le gouvernement croate. Le

 13   témoin dira que sa délégation a reçu pour instruction de Belgrade de

 14   soulever toute objection procédurale et technique possible pour retarder

 15   simplement le moment où un accord serait conclu. Belgrade avait donné des

 16   instructions extrêmement strictes à la délégation, à savoir que la partie

 17   politique de la délégation ne devait pas parvenir au moindre accord sur un

 18   plan d'autonomie. Même lorsqu'il est devenu manifeste vers la fin que la

 19   RSK ne survivrait pas, Belgrade a continué à ne pas autoriser la délégation

 20   de la RSK à négocier ouvertement et en tout bonne foi. La délégation a, au

 21   contraire, reçu pour instruction de faire obstacle à toute négociation

 22   susceptible d'aboutir à une issue heureuse et de poursuivre la procédure

 23   dilatoire. Le témoin dira qu'au sein de la RSK, une politique continue

 24   était placée consistant à forcer les Croates à quitter la Krajina. Il était

 25   attendu de chaque corps de l'armée de la RSK que des unités soient mises à

 26   disposition afin de faire les sales boulots à cet effet. Elle a été chargée

 27   de viser des civils croates et de créer un climat de peur. D'après le

 28   témoin, l'existence de la RSK dépendait de la croyance de la population

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  1   serbe selon laquelle ils ne pourraient jamais vivres aux côtés des Croates.

  2   Toute personne se disant opposée à cet argument était considérée comme une

  3   menace par le gouvernement de la RSK.

  4   En 1995, la vie en Krajina était devenue de plus en plus difficile pour ses

  5   habitants. On avait l'impression que tout le monde était devenu fou. Chaque

  6   différend était résolu par les armes. Le problème fut amplifié par la

  7   militarisation totale de la population. Chaque homme entre 18 et 65 ans

  8   était mobilisé, chacun était armé et la loi obligeait chacun à porter

  9   l'uniforme à tout instant qu'il soit de service ou non. La militarisation

 10   totale et le climat de peur instauré par le gouvernement de la RSK se sont

 11   conjugués pour oppresser la population locale, et la violence est devenue

 12   la règle. Parmi toutes les pertes serbes dans la Krajina entre 1991 et

 13   1995, le témoin estime que 80 % sont le résultat de violence entre Serbes.

 14   La nuit qui a précédé l'opération Tempête, un observateur de l'Union

 15   européenne du nom de Bent Jensen avait obtenu les plans de la HV, les plans

 16   d'attaque de l'opération Tempête, et a transmis ces plans au témoin. Le

 17   témoin les a immédiatement communiqués à l'état-major principal de la RSK

 18   de Knin.

 19   Au cours de l'opération Tempête, le témoin a dit -- ou plutôt, à propos de

 20   l'opération Tempête, le témoin déclara que la population civile s'est mise

 21   à paniquer dans le secteur nord, lorsqu'elle s'est rendue compte qu'ils

 22   pourraient rien faire pour faire cesser la progression des soldats croates.

 23   Tout le monde a pensé que lorsque la HV reprendrait le contrôle de la zone,

 24   elle voudrait se venger après ce qui était arrivé aux Croates en 1991. La

 25   panique a été exacerbée par Belgrade qui souhaitait que les Serbes quittent

 26   la Krajina de façon à ce qu'ils puissent se réinstaller au Kosovo et dans

 27   les zones sous le contrôle serbe de Bosnie et de la Slavonie orientale.

 28   C'était un plan bien orchestré et le gouvernement et l'armée de la RSK ont

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  1   contribué au processus en suscitant intentionnellement la panique parmi les

  2   civils.

  3   Le témoin dira que la grande majorité des Serbes était partie bien avant

  4   que les forces croates n'arrivent jusqu'à elle. Au cours de l'opération

  5   Tempête, un certain nombre de Serbes se sont tirés les uns sur les autres

  6   dans le cadre de différends liés à des véhicules ou à des biens au moment

  7   où la population se préparait à fuir. Le témoin dira que la population

  8   était tellement terrorisée par la propre propagande du gouvernement, de

  9   leur propre gouvernement de la RSK que peu aurait risqué de rester en

 10   Croatie.

 11   Lorsque le témoin est arrivé en Serbie, il a vu comment la police serbe

 12   envoyait des réfugiés de la RSK dans le Kosovo. Des hommes de la RSK âgés

 13   de 16 à 65 ans ont été arrêtés en Serbie et envoyés dans le centre de

 14   réentraînement d'Arkan en Slavonie orientale. Après ce processus de leur

 15   réentraînement, ces hommes devaient être renvoyés pour lutter contre

 16   l'armée croate.

 17   Monsieur le Président, ceci conclut la lecture de ce résumé.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez poursuivre.

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Lazarevic, quelques questions au sujet de votre passé. Vous

 21   avez rejoint le service de contre-renseignement de l'armée yougoslave en

 22   1968 ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Pourriez-vous nous dire que représentait Nikola Zimonja pour vous à

 25   l'époque ?

 26   R.  Nikola Zimonja, c'est le premier contact que j'ai eu avec KOS, et

 27   pendant tout le travail que j'effectuais pour le KOS, c'est lui qui était

 28   mon contact pour ainsi dire.

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  1   Q.  Est-ce que, pendant toute votre carrière au niveau du KOS, il est resté

  2   votre point de contact ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Après 1990, quand vous avez rejoint la RSK; est-ce que vous avez

  5   continué à avoir des rapports avec Nikola Zimonja ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Que représentait-il au niveau de la RSK ?

  8   R.  Je ne pense pas vraiment qu'il avait un poste puisqu'il travaille pour

  9   la JNA. Mais il venait souvent sur le terrain.

 10   Q.  Mais il venait d'où ?

 11   R.  De Belgrade.

 12   Q.  Est-ce qu'il travaillait toujours pour le KOS à l'époque ?

 13   R.  Oui, bien sûr.

 14   Q.  Vous, vous travaillez pour l'armée de la Republika Srpska à l'époque,

 15   la Srpska Krajina ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous travaillez aussi pour M. Zimonja pendant que vous

 18   travailliez pour l'ARSK ?

 19   R.  Moi, je dirais plutôt que je travaillais pour le gouvernement

 20   yougoslave plutôt que de travailler pour un homme. Bon, c'est vrai que les

 21   infos, je les lui transmettais.

 22   Q.  Attendez, on va essayer de comprendre qu'on parle vraiment de la même

 23   chose.

 24   Entre 1991 et 1995, est-ce que vous travaillez pour le gouvernement

 25   yougoslave ?

 26   R.  Pour l'armée yougoslave.

 27   Q.  Mais quel était votre titre officiel ?

 28   R.  J'étais un officier de liaison pour le 21e Corps d'armée.

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  1   Q.  Mais de l'ARSK, donc pourriez-vous nous dire publiquement ? Vous disiez

  2   que vous travailliez pour l'ARSK, mais finalement ce que vous faisiez au

  3   fait c'était de travailler pour l'armée yougoslave ?

  4   R.  Il ne s'agissait pas de se présenter, c'était ma position officielle.

  5   J'ai été un officier de l'ARSK. Donc j'avais ce poste pour avoir accès à la

  6   communauté internationale, pour qu'on me fasse confiance. Je ne pourrais

  7   pas dire que je travaillais pour la JNA, à l'époque, puisque la JNA s'était

  8   officiellement retirée du territoire.

  9   Q.  Dans votre déclaration à la page 7, vous avez parlé de Toso Pajic.

 10   Pourriez-vous dire quel était le rapport que vous avez eu avec Toso Pajic,

 11   et ce qu'il faisait pendant l'opération Tempête ?

 12   R.  J'ai travaillé quotidiennement avec lui et pendant toute la période que

 13   j'ai passé dans la Krajina. Il était l'officier de liaison de la police qui

 14   travaillait pour la RSK. Il est devenu le ministre de l'intérieur par la

 15   suite. C'est un policier de carrière, il travaillait tout le temps pendant

 16   toute cette période pour la SDB serbe.

 17   Q.  Dans votre déclaration -- ou plutôt, dans l'affaire Milosevic aux pages

 18   12 337 et 38, vous parlez des rapports que vous avez eus avec Toso Pajic et

 19   Jovica Stanisic et qui était le chef de la SDB. Est-ce que vous pourriez

 20   nous dire comment se fait-il que vous pouviez dire que Pajic travaillait

 21   pour M. Stanisic ?

 22   R.  Le rapport était très proche parce que j'étais présent à plusieurs

 23   reprises. J'étais dans le bureau de M. Pajic quand M. Pajic appelait M.

 24   Stanisic. Donc il y avait un aller-retour en ce qui concerne les infos bien

 25   sûr constant entre ces deux personnes. Quand je suis retourné en Serbie à

 26   la fin, M. Pajic était déjà là-bas, et là, j'ai compris qu'il a toujours

 27   travaillé pour eux.

 28   Q.  Vous avez dit que vous êtes revenu en Serbie, c'était quand, c'était

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  1   après l'opération Tempête ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Donc M. Pajic, après l'opération Tempête, est allé travailler pour M.

  4   Stanisic ?

  5   R.  Oui, au niveau de la SDB.

  6   Il a déjà travaillé pour lui avant, mais c'était devenu officier le moment

  7   où il est revenu à Belgrade.

  8   Q.  On va maintenant parler de la page 10 de votre déclaration préalable.

  9   Donc c'est là que l'on parle de comment vous avez entravé le travail des

 10   observateurs européens, comment ce travail -- donc comment vous avez fait

 11   obstacle à ça ?

 12   Ici on peut lire :

 13   "Notre seul objectif était de faire obstacle au travail de la MOCE, et par

 14   la suite, de l'ONU. Nous avons tout fait pour les empêcher de trouver la

 15   vérité, et nous leur donnions sans cesse des mauvaises informations.

 16   C'était incroyable à quel point ils nous faisaient confiance. Mais si vous

 17   répétez sans arrêt la même chose, le même refrain, il semble que tout le

 18   monde finit par croire que ceci correspond à la vérité parce qu'en se

 19   disant qu'il n'est pas possible de mentir aussi souvent."

 20   Pourriez-vous nous citer quelques exemples de ces mensonges que vous

 21   communiquiez aux membres de la communauté internationale ?

 22   R.  La première chose qui me vient à l'esprit c'est que les Croates

 23   habitaient tranquillement dans la RSK. Nous avions un village qui est resté

 24   intact, le seul. Un village croate, pas trop loin de Topusko, et on est

 25   allé à plusieurs reprises d'ailleurs dans ce village pour faire en sorte

 26   que rien ne leur arrive, et c'était vraiment pour faire des relations

 27   publiques, parce qu'à chaque fois qu'il y avait un membre de la communauté

 28   internationale qui venait, on leur montrait ces villages en disant : mais,

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  1   regardez, ils vivent tranquillement là ces Croates. Rien ne leur arrive.

  2   Donc c'est un exemple.

  3   Mais d'autres c'était avec la MOCE parce qu'à l'époque, je dois vous

  4   expliquer, ils ne pouvaient pas passer la nuit sur le territoire de la RSK.

  5   Ils venaient, il fallait qu'ils rentrent à Zagreb, en Croatie, le

  6   lendemain, onc avant de partir, ils nous faisaient part de leurs plans

  7   qu'ils avaient en ce qui concernait les visites aux régions qu'ils

  8   voulaient faire le lendemain, et c'était à nous de décider si on allait

  9   leur permettre de faire cela. S'il n'était pas possible de les laisser

 10   partir là-bas, c'était très facile. Il fallait tout simplement provoquer un

 11   incident entre les forces de la RSK et la force de Croatie la même nuit, et

 12   de sorte qu'ils pouvaient bien voir qu'il y a eu un incident et à cause des

 13   problèmes de sécurité, ils ne pouvaient pas y aller tout simplement, ils ne

 14   pouvaient pas faire leur travail.

 15   Q.  Dans le cadre de cette désinformation que vous propagiez, est-ce que

 16   vous essayez aussi de cacher les endroits où se trouvaient les armes

 17   lourdes ?

 18   R.  Mais, oui, bien sûr. Vous devez comprendre que les membres de la MOCE

 19   ils empruntaient de toute façon les routes qui étaient déjà éloignées des

 20   positions de l'artillerie de l'ARSK. Tout ce qu'il fallait faire c'était

 21   faire en sorte qu'ils empruntaient bien cette route-là, la route prévue

 22   pour les convois, et c'est pour cela qu'ils étaient toujours escortés par

 23   la police et par l'armée.

 24   Q.  A la page 10, vous dites que : "Chaque interprète qui travaillait pour

 25   l'ONU et pour la MOCE sur le territoire de la Krajina informait la SDB et

 26   était payé la SDB."

 27   Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment se fait-il que la RSK était

 28   en mesure de contrôler le recrutement des interprètes de l'ONU ou de la

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  1   MOCE ?

  2   R.  C'était très simple. C'était clair qu'ils allaient besoin du personnel

  3   du cru, des interprètes, des gens qui vont faire le ménage, peu importe.

  4   Donc ce qu'il fallait faire c'est de recevoir les informations concernant

  5   le passé, l'expérience de chaque interprète, de chaque employé qui

  6   travaillait pour l'ONU, qui venait du cru évidemment. Evidemment, les

  7   membres de l'ONU, ils n'étaient pas très contents de le faire, mais ils

  8   nous donnaient, par exemple, la liste de personnes qui postulaient au

  9   poste. Alors ils étaient obligés de nous fournir de telles informations et

 10   nous faisions en sorte que les informations qui s'y trouvent soient

 11   pertinentes, et c'est nous qui en décidions, donc on organisait, si vous

 12   vouliez, les documents qu'ils leur étaient fournis.

 13   A partir du moment où on avait organisé cela, c'était facile de

 14   continuer parce que chaque employé de l'ONU nous faisait des rapports.

 15   C'est surtout les interprètes qui nous préoccupaient parce qu'ils étaient

 16   présents à chaque réunion, et comme c'était un vaste territoire, il fallait

 17   être sûrs de recevoir toutes les informations pertinentes de toutes les

 18   réunions qui se tenaient au sein de la Croix-Rouge internationale, et la

 19   MOCE ou l'ONU. Chaque rapport finalement finissait sur mon bureau puisqu'il

 20   y avait des procès-verbaux qui étaient faits.

 21   Q.  En ce qui concerne les interprètes et le personnel local qui ne

 22   souhaitaient pas vous fournir des informations, quelles étaient les

 23   méthodes que vous appliquiez pour les forcer à le faire ?

 24   R.  Personne refusait de travailler avec le gouvernement, l'armée, le SDB

 25   ou le KOS. Mais c'est vrai que cela est arrivé parfois; parfois, il y avait

 26   des gens qui disaient qu'ils n'allaient pas le faire. Ensuite on faisait

 27   des pressions et on leur expliquait qu'ils n'allaient pas avoir les jobs,

 28   tout simplement qu'ils n'allaient pas être recrutés.

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  1   Q.  Comment vous faisiez vous en sorte qu'ils ne reçoivent pas ce travail ?

  2   R.  On les mobilisait tout simplement de sorte qu'ils n'avaient pas

  3   suffisamment de temps pour aller travailler, on les envoyait sur le front.

  4   Q.  Maintenant je voudrais vous montrer la pièce à conviction D701.

  5   Bien hier je vous ai montré un document, c'est un document de 1993 au sujet

  6   d'une opération de renseignement de l'ARSK, qui s'appelait Horizont. 

  7   Les activités dont on parle ici en ce qui concerne la vérification des

  8   interprètes, des chauffeurs, des officiers de liaison, et cetera, est-ce

  9   que ce ça correspond à ces efforts que vous avez fournies pour que les

 10   membres de l'ONU vous favorisent en quelque sorte quand il s'agit de

 11   comprendre vos activités et la situation ?

 12   R.  Moi, j'ai aussi dit que, moi, je n'ai jamais entendu parler de cette

 13   action de l'action Horizont. Je n'ai jamais vu un document de ce genre mais

 14   en réalité dans ce document on parle de ce que je faisais, moi, dans mon

 15   secteur --

 16   L'INTERPRÈTE : Le document D702, l'interprète ne se reprend pas. M. Misetic

 17   demande à voir le document D702.

 18   M. MISETIC : [interprétation] D702. Donc la page 3 en anglais, s'il vous

 19   plaît.

 20   Q.  Donc, là encore, c'est un document que je vous ai déjà montré hier et

 21   il s'agit là des différentes opérations qui visent les organisations

 22   internationales. Si on regarde en bas du document, on va voir opération

 23   Genève qui vise le centre régional de la Communauté européenne à Knin.

 24   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 25   Q.  Donc là, il s'agit de l'action du 21e Corps de Knin et il s'agit d'un

 26   camp qui a son QG à Topusko dans le secteur sud, et donc, là, il s'agit de

 27   types d'activités que vous faisiez pendant que vous travaillez dans l'ARSK

 28   ?

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  1   R.  Oui, c'est exact.

  2   M. HEDARALY : [interprétation] Je pense qu'il y a peut-être une erreur, une

  3   erreur de traduction parce qu'on parle de Topusko et du secteur sud, parce

  4   que c'est vraiment bizarre, c'est peut-être une erreur au niveau du

  5   transcript.

  6   M. MISETIC : [interprétation] On va le faire.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'original, il est écrit le secteur nord.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, on le voit. Mais en même

  9   temps, on voit les guillemets pour le sud --

 10   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais pour le nord aussi.

 11   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 12   M. MISETIC : [interprétation]

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle était la chaîne de transmission

 14   d'information à partir du moment où vous receviez les informations des

 15   interprètes et des personnels locales travaillant pour l'ONU ou l'ONURC ?

 16   Que faisiez-vous ? A qui envoyez-vous les rapports ?

 17   R.  On avait plusieurs réunions qui se tenaient suite à cela. Moi, je

 18   faisais un dossier avec tous les rapports pertinents pour nous contenant

 19   des informations importantes; ensuite je faisais un rapport moi-même, je

 20   l'envoyais au colonel Zimonja. Le colonel Zimonja décidait qui devait

 21   recevoir ces informations, la police, l'armée, selon l'intéressé --

 22   l'intitulé intéressé, et parfois même le 21e Corps d'armée recevait cela

 23   aussi. Donc tout cela passait par Toso Pajic.

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25   M. MISETIC : [interprétation] Bien, je voudrais demander à présent de

 26   revenir sur la pièce D701 pour un instant, s'il vous plaît.

 27   Q.  La deuxième phrase, il se dit :

 28   "L'activité, l'action va avoir lieu sur tout le territoire de la République

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  1   serbe de la Krajina."

  2   Est-ce que ceci décrit bien les activités auxquelles vous avez

  3   participées quand il s'agissait du renseignement ou contre-renseignement

  4   dans la Krajina ?

  5   R.  Oui, c'est exactement comme cela.

  6   Q.  Très bien.

  7   Maintenant on va parler des informations, des informations que vous avez

  8   recueillies pendant l'opération Tempête.

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   Q.  Avant de faire cela, est-ce que les rapports que vous prépariez

 11   allaient à Belgrade, les rapports que vous receviez de la part du personnel

 12   du cru ?

 13   R.  C'était automatique puisque le colonel Zimonja était là, donc

 14   évidemment il le faisait, il les distribuait aux gens à Belgrade. Mais il

 15   fallait faire la différence entre les informations qui étaient vraiment

 16   très importantes et qu'il fallait absolument communiquer à Belgrade et les

 17   informations qui étaient plutôt les informations concernant notre région et

 18   qu'on avait pas besoin de transmettre.

 19   Q.  En ce qui concerne l'opération Tempête dans l'affaire Milosevic au

 20   niveau du compte rendu d'audience 12452, vous avez dit qu'un observateur de

 21   la MOCE, Bent Jensen, vous a informé avant l'opération Tempête du moment de

 22   l'attaque de la puissance de cette attaque et de la direction que l'attaque

 23   allait prendre.

 24   Est-ce que vous pouvez nous expliquer dans quelles circonstances M. Jensen

 25   s'est approché de vous. Quand est-ce qu'il vous en a parlé ?

 26   R.  Bien, nous avons fourni à M. Jensen une maison qui se trouvait à une

 27   centaine de mètres de notre maison. Donc c'était très facile d'aller le

 28   voir, c'était très facile pour lui aussi d'aller le voir mais je ne voulais

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  1   pas qu'il vienne chez moi. Je ne veux pas qu'on me voie aller chez lui.

  2   Un soir il n'était pas très sûr de lui. Il a dit qu'il a eu des

  3   informations très importantes et qu'il s'agissait là des informations très,

  4   très sensibles et c'était des informations concernant l'attaque, l'heure,

  5   la portée, et cetera, mais il ne m'a pas donné des documents. Il m'a juste

  6   communiqué cela verbalement, et moi, j'ai envoyé un rapport à l'état-major

  7   du 21e Corps.

  8   Moi, j'avais un commandant qui n'était pas très bon à l'époque, et

  9   pas à la hauteur de sa tâche, en tout cas, donc je l'ai fait moi-même, moi-

 10   même j'ai envoyé un télex à Knin, au QG pour les informer de cela.

 11   L'INTERPRÈTE : Moi, je ne l'entends pas du tout hein.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je vais demander à présent d'avoir la pièce

 13   D923 et de la montrer sur l'écran.

 14   Q.  Ici, on voit le rapport du général Mrksic qui a été fait après

 15   l'opération Tempête en date du 26 août.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Ce qui m'intéresse tout particulièrement

 17   c'est la page 5, et en B/C/S, cela se trouve à la page 3; et c'est la

 18   première information que vous allez trouver, c'est le deuxième paragraphe,

 19   le premier paragraphe de la deuxième partie de ce rapport.

 20   Q.  Donc dans son rapport du 26 août, le général Mrksic dit :

 21   "A 14 heures, le 3 août 1995, l'état-major a appris que l'agression allait

 22   commencer à 5 heures du matin, le 4 août. Tous les commandants et tous les

 23   commandements étaient informés du début de l'agression."

 24   Est-ce que cette heure, l'heure à laquelle vous avez envoyé le télex, est-

 25   ce que cela correspond à l'heure à laquelle vous avez envoyé votre télex au

 26   quartier général de Knin ?

 27   R.  Oui, oui, c'est tout à fait possible.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

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  1   Q.  Je voudrais vous présenter, Monsieur, un organigramme qui a été utilisé

  2   dans l'affaire Milosevic, c'est le Procureur qui l'a utilisé.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit là de la pièce 64 ter 1D2685. 

  4   Q.  Monsieur, là, c'est un organigramme que vous, vous avez élaboré ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Donc cet organigramme essaie de montrer les rapports qui existaient

  7   entre les politiques de la RSK et des Serbes, l'armée yougoslave et l'armée

  8   de la RSK. Est-ce que vous pouvez, vous, nous expliquer quel était donc ce

  9   rapport qui prévalait entre toutes ces entités ?

 10   R.  Sur la gauche, là, vous avez les politiques, les hommes politiques de

 11   la RSK. Là, vous avez les noms des gens qui étaient mes contacts

 12   personnels. Donc ils étaient tous liés entre eux. Ensuite vous avez les

 13   forces d'Arkan, là, vous avez la ligne qui va directement vers la SDB de

 14   Serbie. Ensuite vous avez Stanisic et Frenki Simatovic qui étaient les

 15   commandants des unités spéciales de la police serbe qui était déployée en

 16   Bosnie, à Pauk, et vous le voyez au milieu, dans le carré du milieu.

 17   Q.  Mais pouvez-vous nous expliquer qu'est-ce que c'était ce Pauk, quartier

 18   général Pauk de Bosnie ?

 19   R.  C'était un quartier général qui combinait les forces de Fikret Abdic en

 20   Bosnie avec les unités de la police serbe sur le terrain, ainsi que les

 21   membres du 21e Corps d'armée.

 22   Q.  Le 21e Corps d'armée de quelle armée ?

 23   R.  RSK, c'était une opération conjointe.

 24   Q.  Je dois tout d'abord vous poser quelques questions.

 25    Quel était le rapport qui prévalait entre la SDB de Serbie et la RSK

 26   ?

 27   R.  Il y avait un représentant de sécurité de l'Etat de la RSK, donc de

 28   Serbie, la Sûreté de l'Etat basé à Serbie, dont le chef était Milos Pajic

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  1   [comme interprété] et Toso Pajic qui plus tard est devenu ministre de

  2   l'Intérieur. Ces deux hommes étaient en communication directe avec Jovica

  3   Stanisic à Belgrade où disons qu'un jour, Jovica Stanisic inspecte ses

  4   troupes en RSK; dans ce cas-là, il aurait pris contact avec ces deux hommes

  5   également sur le terrain. Donc il y avait un lien direct entre eux.

  6   Q.  Penchons-nous sur la case où nous lisons SDB de Serbie. En dessous, on

  7   voit mention de Arkan et de ses forces. Mais à l'intérieur de cette case,

  8   on a la mention de Frenki Simatovic et du colonel Bozovic et d'un certain

  9   Legija; est-ce que vous pourriez expliquer quelles étaient les forces qui

 10   étaient placées sous le commandement de Simatovic, Bozovic et Legija ?

 11   R.  Ces forces étaient les forces spéciales de la Sûreté de l'Etat de

 12   Serbie qui ont été déployées dans le cadre de Pauk et sur le territoire de

 13   la RSK à l'époque. Les commandants étaient le colonel Bozovic et le colonel

 14   Unik.

 15   Frenki Simatovic avait un QG à Petrova Gora qui était dans le cadre de la

 16   RSK, alors que les autres étaient extérieurs à ce QG. Mais lui, était

 17   directement responsable devant Frenki Simatovic en Krajina.

 18   Q.  En page 13 de votre déclaration écrite, vous dites au troisième

 19   paragraphe entier, je cite :

 20   "Surla et Karan envoyaient tous mes rapports à Zimonja à Belgrade, et les

 21   enregistrements que je faisais étaient envoyés à un subordonné de Stanisic

 22   que je ne connais que sous le surnom de Medo."

 23   R.  En fait, c'est moi personnellement qui ai remis ces enregistrements à

 24   quelqu'un comme s'appelant Medo, dans le bâtiment de la Sûreté d'Etat à

 25   Belgrade. Des enregistrements très précis qui avaient quelque chose à avoir

 26   avec l'ambassadeur allemand.

 27   Q.  Moi, ce qui m'intéresse c'est ce Medo.

 28   R.  C'est la seule fois de ma vie que j'ai rencontré cet homme. Je ne le

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  1   connais pas, on me l'a présenté sous le surnom de Medo : hi, bonjour, je

  2   m'appelle Medo.

  3   Q.  Auriez-vous jamais entendu parler d'un homme dont le nom est Slobodan

  4   Medic ?

  5   R.  J'ai entendu parler de lui mais je ne l'ai jamais rencontré, je ne l'ai

  6   jamais vu. Je n'ai jamais eu de contact avec lui.

  7   Q.  Auriez-vous jamais entendu parler d'une unité connue sous le nom des

  8   Scorpions ?

  9   R.  Seulement par les articles de presse que j'ai pu lire à ce sujet.

 10   Q.  Savez-vous que Slobodan Medic était commandant des Scorpions ?

 11   R.  Je l'ai découvert par la suite.

 12   Q.  Puisque vous connaissez bien l'emploi des surnoms entre Medic et Medo,

 13   et je sais bien que quoi que vous direz ne sera pas fondé sur un fait

 14   nécessairement, mais est-ce que vous savez que Medic peut devenir Medo sous

 15   forme de surnom ?

 16   R.  Probablement. Mais il y a beaucoup de gens, beaucoup d'hommes selon

 17   leur force physique, leur stature qu'on peut appeler, surnommer Medo, parce

 18   que Medo c'est un surnom qui signifie l'ours.

 19   M. MISETIC : [interprétation]  Monsieur le Greffier, je demande l'affichage

 20   de la pièce D948.

 21   Q.  Je vais vous soumettre des conversations téléphoniques interceptées

 22   pendant l'opération Tempête, Monsieur Lazarevic, et nous verrons si vous

 23   pouvez nous aider à déterminer qui sont les interlocuteurs participant à

 24   ces conversations téléphoniques, étant donné ce que vous dites savoir dans

 25   votre déclaration écrite.

 26   Il s'agit de conversations enregistrées qui proviennent du QG de Knin dans

 27   la soirée du 4 août.

 28   Ici, nous avons une conversation entre Medo et Zezelj, et plus tard, le

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  1   général Mrksic participe à cette conversation téléphonique à Knin.

  2   Vous constaterez que la première partie de cette conversation se déroule

  3   entre Medo et Zezelj, Medo étant désigné par la lettre M et Zezelj par le Z

  4   avec un accent circonflexe à l'envers.

  5   Quelques lignes après le début de ce texte, nous voyons apparaître la

  6   lettre G, qui désigne le général Mrksic. Il apparaît dans la conversation;

  7   il dit bonjour à Medo. A quelques lignes plus basses, nous lisons ce qui

  8   suit, je cite :

  9   "Les combats, tout va bien, mais il y a quelques combats qui se déroulent

 10   là-haut à Velebit. Vos hommes ont très bien travaillé. Il y en a un qui a

 11   été blessé là-haut."

 12   Alors est-ce que cela vous permettrait de penser que Medo serait un des

 13   hommes qui serait sous le commandement de Zezelj étant donné cette

 14   conversation ?

 15   R.  Apparemment à la lecture de ce texte, ou, c'est ce que je dirais.

 16   Q.  Sur la base de ce que vous savez de l'opération Tempête, cette bataille

 17   non loin de Velebit qu'il se déroule entre les forces de la RSK et la

 18   police spéciale de la République de Croatie. Est-ce que vous êtes au

 19   courant de cela ?

 20   R.  Non, je ne le sais pas vraiment. Je ne le savais pas vraiment. Je ne

 21   peux que lire ce qui est écrit dans ce texte.

 22   Q.  D'accord.

 23   R.  A l'époque des événements, j'avais beaucoup de choses à faire dans le

 24   secteur nord, et les rapports venant d'autres secteurs, je ne les lisais

 25   pas nécessairement lorsqu'ils avaient sur mon bureau - je parle des

 26   journées du 4, 5, 6, 7, et 8 août - donc je ne peux prendre ce texte que

 27   pour ce qu'il est.

 28   Q.  D'accord.

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  1   R.  A l'analyse de ce texte, je dirais que vous avez probablement raison,

  2   mais je ne miserais pas ma réputation sur ce fait.

  3   Q.  Etant donné ce que vous saviez au sujet de toutes les unités, était-il

  4   possible que Medo soit une référence à commandant --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

  6   M. HEDARALY : [interprétation] Je pense que le témoin a dit clairement

  7   qu'il n'avait pas de connaissance au sujet de ces faits.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Misetic n'a pas terminé sa question;

  9   ça c'est le premier point, Monsieur Lazarevic, et ensuite pourriez-vous

 10   attendre la fin de la question avant de répondre ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes mes excuses.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, ce n'est pas une raison de

 13   vous excuser. Mais M. Hedaraly a élevé une objection par rapport avec cette

 14   question qui n'était pas entièrement terminée.

 15   Donc, Maître Misetic, veuillez poser votre question entièrement, et ensuite

 16   les Juges trancheront sur l'objection.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je poserai quelques

 18   questions supplémentaires avant de revenir à celle-ci.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc pour le moment, vous retirez cette

 20   question --

 21   M. MISETIC : [interprétation] Passons à quelques lignes plus bas, où on

 22   voit le même général Mrksic qui déclare à 21 heures 58 le 4 août, je cite :

 23   "Et bien, nous défendrons Knin après demain et le jour d'après et tant que

 24   nous le pourrons."

 25   Ensuite nous tournons la page, et nous lisons, je cite :

 26   "Nous continuerons à défendre Knin."

 27   Medo dit :

 28   "D'accord, vos amis sont ici, et je voudrais les saluer."

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  1   Puis il y a un PS, un ami qui est désigné sous la lettre X et Mrksic

  2   qui participe à la suite de la conversation.

  3   Donc Medo remet le téléphone à quelqu'un d'autre qui est identifié ici par

  4   la lettre X, et qui veut poser des questions. Peut-être pouvez-vous nous

  5   aider à déterminer l'identité de cet homme.

  6   Mais il y a une conversation qui se déroule à ce moment-là sur la stratégie

  7   à mettre en œuvre pour défendre Knin. Et au milieu de la page X déclare, je

  8   cite :

  9   "N'attendez pas qu'il arrive à Knin. N'attendez pas son arrivée, Mrksa.

 10   Rappelles-toi ce qui s'est passé à Gracac."

 11   Ensuite le texte se poursuit.

 12   Si nous tournons la page, nous voyons qui X pourrait être, en page 3, vers

 13   le bas de la page, troisième ligne à partir du bas. Nous lisons qu'un

 14   général Mrksic dit, je cite : "D'accord, d'accord, Feki, nous allons

 15   raccrocher."

 16   Alors en fonction de ce que vous savez de M. Simatovic, est-ce que ceci

 17   pourrait correspondre à Frenki Simatovic ?

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

 19   M. HEDARALY : [interprétation] Quelques éléments divers. D'abord, le

 20   conseil de la Défense guide le témoin dans la lecture et l'interprétation

 21   du document, en lui disant pour commencer qu'il est sans doute capable

 22   d'identifier l'interlocuteur, et il lui deuxième ensuite de donner des

 23   renseignements qu'il formule lui-même.

 24   En deuxième lieu, le témoin a déclaré qu'il n'avait aucune connaissance de

 25   l'existence de cette conversation, ou de quoi que ce soit qui pourrait

 26   s'être passé dans ces conditions, donc c'est un appel à spéculation.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, non pas

 28   nécessairement. Mais la question n'était pas aussi directrice que cela

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  1   vient d'être dit, je n'ai pas glissé à l'oreille d'un témoin une réponse

  2   qu'il n'était pas à même de donner lui-même.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'êtes tout de même pas censé

  4   le faire, Maître Misetic.

  5   M. MISETIC : [interprétation] D'accord. Nous reviendrons sur cette

  6   conversation plus tard, Monsieur le Président.

  7   Q.  Ensuite, il est question de ce qui s'est passé dans la soirée, dans la

  8   ligne -- à quelques lignes plus bas, nous lisons :

  9   "Pourquoi est-ce que vous n'avez pas fait ça il y a quelques jours ?"

 10   M. MISETIC : [interprétation] Tournez la page, je vous prie, ligne

 11   suivante.

 12   Q.  X dit : "Et bien, demandez à la personne avec qui vous avez eu une

 13   réunion."

 14   Au milieu de la ligne nous lisons : "D'accord, Frenki, à bientôt."

 15   Ça c'est à la page 2 158, mais j'aimerais maintenant que nous passions à la

 16   conversation qu'il se déroule dix minutes plus tard qui correspond au

 17   document 1D2706 dont je demande l'affichage.

 18   Alors pour répondre à l'objection de M. Hedaraly d'abord, je demanderais

 19   que nous regardions le bas de la première page de la version anglaise de ce

 20   texte.

 21   Dans cette conversation qui a lieu 12 minutes après la première, Mrksic dit

 22   : "J'ai parlé à Frenki." Combien connaissiez-vous de Frenki, combien avez-

 23   vous connu de Frenki dans toute votre vie, Monsieur Lazarevic ?

 24   R.  Sur le territoire de la RSK seulement un.

 25   Q.  Qui était-ce ?

 26   R.  Frenki Simatovic.

 27   Q.  D'accord. Auriez-vous jamais entendu parler de quelqu'un d'autre qui se

 28   serait appelé Frenki dans les milieux politiques ou militaires en Serbie,

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  1   en Bosnie, ou dans la RSK ?

  2   R.  D'origine serbe, non.

  3   Q.  D'accord. Alors cette conversation - et on le lit en haut de la page -

  4   est censée être une conversation entre Milan Martic et Mile Mrksic avec un

  5   certain Jole de la SRY. Alors ils font référence à cet homme comme étant

  6   Jole pendant toute la conversation, et là, je demande qu'on passe à la page

  7   suivante sur les écrans, et qu'on fasse défilé le texte jusqu'au bas de la

  8   page.

  9   Alors juste au-dessus du point 73, où on lit "pas de son," nous voyons dans

 10   les propos de M-r-k, je cite : "Ils l'appellent Jole pendant tout le texte,

 11   mais, là, vers la fin de la conversation Mrksic l'appelle Jovica, il dit :

 12   "Jovica, ne n'inquiète pas."

 13   Alors étant donné ce que vous avez dit dans votre déclaration écrite quant

 14   à votre connaissance des structures de la RSK, et des relations, qui

 15   existaient entre les responsables, combien est-ce que vous avez connu de

 16   Jovica qui occupait un poste de responsabilité en Serbie, en Bosnie, ou

 17   dans la RSK ?

 18   R.  Seulement un.

 19   Q.  Qui était-ce ?

 20   R.  Jovica Stanisic.

 21   Q.  D'accord.

 22   Alors nous avons ici une conversation entre Martic, Mrksic, et un certain

 23   Jole. Comme je l'ai dit tout à l'heure en revenant au début du texte, et ce

 24   qui m'intéresse c'est le bas de cette page du début de la conversation, où

 25   Mrksic dit : "J'ai parlé à Frenki, Meda. Ils arrivent; ils partiront

 26   demain. Il y a 200 hommes, mais ce qui est important c'est défendre Knin

 27   demain."

 28   Passons à la page suivante, je cite :

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  1   "Alors reste dans les parages demain. J'arriverais après demain."

  2   Vers le bas de cette page on lit, je cite : "Jovica, ne t'inquiète pas,"

  3   Jole dit :

  4   "Je vais rassembler ce que j'ai autour d moi d'effectifs, et nous

  5   prendrons le chemin pour aller là-bas."

  6   Alors étant donné ce que vous avez dit dans votre déposition jusqu'à

  7   présent, vous avez dit, n'est-ce pas, que vous ne connaissiez qu'un seul

  8   homme qui s'appelait Frenki qui était Frenki Simatovic et que vous ne

  9   connaissiez qu'un seul Jovica qui était Jovica Stanisic, et ici on parle de

 10   200 hommes qui vont arriver. Et d'après ce que vous savez ces hommes

 11   venaient dans la région et étaient qui ?

 12   R.  C'était les hommes qui étaient déployés dans l'ARSK sous les ordres de

 13   Frenki Simatovic.

 14   Q.  Ces 200 hommes d'après ce que vous savez, ils étaient sous le

 15   commandement direct de qui ?

 16   R.  Jovica Stanisic.

 17   Q.  Mais --

 18   R.  Ah, commandement direct -- commandement  direct de Frenki Simatovic.

 19   Q.  Dans l'organigramme, vous avez dit que deux unités étaient sous le

 20   contrôle du service de Sûreté de l'Etat serbe, il y a cette ligne qui

 21   établie la liaison avec Arkan et il y a une autre, une autre qui conduit un

 22   certain Milorad; lequel des deux vous parlez ?

 23   R.  A Unik, c'est-à-dire l'homme surnommé Legija.

 24   Q.  A Legija.

 25   R.  Oui.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Je demande, Monsieur le Président, le

 27   versement du document 1D207 au dossier --

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de la conversation

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  1   enregistrée.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux pages, n'est-ce pas ?

  4   M. HEDARALY : [interprétation] Je pense que c'est un extrait d'un document

  5   65 ter plus volumineux.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection.

  7   M. MISETIC : [interprétation] C'était un document 65 ter mais nous en avons

  8   extrait deux pages.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Alors pas d'objection du côté

 10   de la Défense non plus.

 11   Monsieur le Greffier, quelle sera la cote ?

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D1463,

 13   Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1463 est admise au dossier.

 15   Veuillez poursuivre.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   Q.  Monsieur, parlons maintenant un petit peu de votre présence aux

 18   négociations de paix.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce D922.

 20   Q.  Ici nous avons -- comment est-ce que je pourrais appeler ce texte ? Je

 21   l'appellerai un protocole où on trouve la liste des participants à la

 22   délégation et il est indiqué que vous êtes présent en tant qu'interprète de

 23   la délégation serbe et que c'est Kosta Novakovic qui dirige la délégation.

 24   Alors quel était votre rôle exact ? Est-ce que vous pourriez l'expliquer

 25   puisqu'ici, il est indiqué que vous êtes service d'interprète, c'est ce qui

 26   est dit officiellement.

 27   R.  Si je me souviens bien, le nombre autorisé de participants à cette

 28   délégation était très limité. Donc afin de faire en sorte que je puisse

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  1   participer à cette réunion, j'ai été nommé interprète, ce qui m'a permis

  2   d'être intégré officiellement à la délégation.

  3   Mais je lis la liste des membres de la délégation ici et je peux vous dire

  4   que ces quatre hommes dont les noms figurent ici étaient tous membres des

  5   services secrets du KOS.

  6   Q.  Comment savez-vous que Kosta Novakovic était membre du KOS ?

  7   R.  C'est le colonel Zimonja qui me l'a dit.

  8   Q.  D'accord.

  9   R.  Il faut bien que vous vous rendiez compte qu'aucun de ces  hommes

 10   n'avait un badge officiel sur son uniforme qui l'identifiait comme étant

 11   membre des services de Sûreté de l'Etat ou du KOS ou de ce genre de chose,

 12   donc on ne pouvait s'appuyer que sur des informations provenant de ses

 13   supérieurs pour le savoir et je n'avais aucune raison de mettre en doute le

 14   fait que Zimonja m'a dit : que Novakovic était également un membre du KOS,

 15   donc ne t'inquiète pas m'a-t-il dit il est l'un des nôtres.

 16   Q.  Vous rappelez-vous quand le colonel Zimonja vous l'a dit ?

 17   R.  Il me l'a dit quand la liste des participants a été établie.

 18   Q.  [interprétation] En fait, vous êtes allé un peu plus vite que moi.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je demande maintenant

 20   l'affichage de la pièce du document 1D2074 sur les écrans.

 21   Q.  Alors c'est une photographie où on vous voit sur la photo, qui est

 22   l'homme qui porte l'uniforme de camouflage ici ?

 23   R.  Toso Pajic.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche maintenant la

 25   cinquième photographie du lot.

 26   Q.  Pouvez-vous nous dire qui on voit sur cette photographie ?

 27   R.  C'est moi avec le béret rouge sur la tête, et à côté de moi, c'est le

 28   colonel Kosta Novakovic.

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  1   Q.  Combien de fois avez-vous rencontré Kosta Novakovic ?

  2   R.  Sur une période de cinq ans, peut-être une demi douzaine de fois.

  3   Q.  Qui d'autres étaient présents lorsque le colonel Zimonja vous a dit que

  4   M. Novakovic était membre du KOS ?

  5   R.  Il n'y avait personne d'autre que Zimonja et moi.

  6   Q.  Très bien.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  8   versement au dossier de ces photographies. Dans le lot il n'y en a six au

  9   total et nous reviendrons sur les quatre autres un peu plus tard.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ceci se fait pour des raisons très

 11   concrètes.

 12   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

 14   M. HEDARALY : [interprétation] Nous pouvons les enregistrer aux fins

 15   d'identification avant d'y revenir par la suite.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De façon à ce que toute la série soit

 17   versée en même temps.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Ces photos ont été authentifiées dans la

 19   déclaration écrite du témoin et produites par nos soins au bureau du

 20   Procureur.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dirais que oui également, même si ces

 22   photographies ne sont pas identifiées en tant que tel dans la déclaration

 23   écrite du témoin, mais il a répondu par l'affirmative aux questions qui

 24   viennent de lui être posées.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Oui, elles ont été identifiées, Monsieur le

 26   Président. Elles sont numérotées et les numéros correspondent à ce qui

 27   figure dans la déclaration écrite et on y trouve les noms au complet si je

 28   ne me trompe.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La cote suivante.

  2   [Le conseil de la Défense se concerte]

  3   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je reviendrai sur ce

  4   point un peu plus tard et je veillerai à ce que la numérotation que je

  5   propose corresponde bien à celle qui figure dans la déclaration écrite du

  6   témoin. Nous ne demanderons le versement au dossier que de six

  7   photographies sur les 90 dont il parle dans sa déclaration écrite.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces six photographies qui viennent

  9   d'être choisies recevront une cote et seront placées sous le statut de

 10   enregistrées aux fins d'identification jusqu'à ce qu'une décision

 11   définitive soit prise quant à leur versement après que vous aurez préposé

 12   des numéros en question.

 13   M. MISETIC : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 15   M. MISETIC : [interprétation] J'y reviendrai donc, pas de problème.

 16   Q.  Monsieur Lazarevic, photographie numéro 2.

 17   Est-ce que vous pouvez nous dire où cette photographie a été prise ?

 18   R.  Pendant une réunion à Norvège.

 19   Q.  C'est une de ces conférences où vous étiez membre de la délégation

 20   serbe ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Pouvez-vous nous dire qui sont les autres personnes qui figurent sur la

 23   photographie ?

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je demande un agrandissement sur les écrans.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] A gauche, il y a moi, ensuite Emir Rakic

 26   [phon], qui était ministre de la Défense de l'ARSK à l'époque. Ensuite à

 27   côté de lui, troisième à partir de la gauche, c'est celui qui était

 28   responsable de la sécurité rapprochée. La femme qui se trouve au milieu

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  1   était secrétaire de Goran Hadzic, l'homme qui a une barbe. Ensuite on a,

  2   derrière Hadzic, un responsable de la sécurité rapprochée de Goran Hadzic

  3   et je ne sais pas qui est l'homme qu'on voit à droite, complètement à

  4   droite de la photo.

  5   Q.  D'accord.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Affichage de la photographie suivante, je

  7   vous prie.

  8   Q.  Alors vous rappelez-vous qui sont les hommes qu'on voit sur cette photo

  9   ?

 10   R.  Je ne me rappelle plus leurs noms. Mais dans mon QG, nous avons

 11   beaucoup ri en voyant cette photographie parce que c'était très facile

 12   d'obtenir des renseignements sur les cartes de la FORPRONU en étant

 13   simplement sympa avec leurs hommes et en leur disant qu'on pouvait faire

 14   quelque chose ensemble.

 15   Q.  Faire quelque chose ensemble ?

 16   R.  Normalement ils ont la carte derrière eux ces trois hommes.

 17   Q.  Pourriez-vous nous expliquer plus avant sur ce point ?

 18   R.  C'était un QG des Nations Unies qu'on voit ici. C'est la salle des

 19   opérations de ce QG et on a la carte de la FORPRONU derrière nous sur le

 20   mur prise en photo avec toutes les annotations de leurs placements des

 21   unités des deux côtés de la frontière.

 22   Q.  D'accord.

 23   R.  Nous voulions avoir cette photographie. Je sais que ces gens-là

 24   voulaient qu'on les prenne en photo, donc voilà, j'ai dit : l'endroit est

 25   très agréable, on a la carte derrière nous, est-ce qu'on pourrait vous

 26   prendre en photo avec et ils étaient tout excités à cette idée ?

 27   Q.  D'accord.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Photographie suivante.

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  1   Q.  Les deux hommes en blanc ici, ils viennent d'où ?

  2   R.  Cette photo a été prise pendant la réunion de la présidence -- pendant

  3   que la Grèce présidait la Communauté européenne, et ces deux hommes étaient

  4   des représentants du gouvernement grec qui faisaient partie des

  5   observateurs européens de la MOCE. Je crois que la photo a été prise un

  6   jour de pique-nique organisé par les Grecs.

  7   Q.  Je crois que nous pourrions maintenant arriver à la dernière photo qui

  8   m'intéresse, la sixième.

  9   Vous rappelez-vous où cette photo a été prise ?

 10   R.  Aussi dans un banquet qui a eu lieu dans la RSK, dans le secteur nord,

 11   je me rappelle simplement que c'était une fête spéciale pour les

 12   bataillons, la fête de la République si je ne me trompe, et on a invité les

 13   responsables de la RSK. C'est toujours moi qui intervenais dans ces

 14   conditions.

 15   Ça y est, ça me revient maintenant parce que je vois mieux la photo.

 16   L'homme qui est assis à côté de moi, à ma gauche, c'est le commandant du

 17   Bataillon jordanien; à côté de lui, c'est le commandant qui va lui succéder

 18   dans ce poste au sein du Bataillon jordanien. Tout à fait à droite, on voit

 19   le commandant polonais, qui était le commandant de secteur à l'époque.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que la

 21   série des photographies est complète; j'en demande le versement maintenant.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une série de six photographies,

 23   Monsieur Hedaraly.

 24   M. HEDARALY : [interprétation] Pas d'objection.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection des autres équipes de

 26   Défense non plus.

 27   Monsieur le Greffier, quelle est la cote ?

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D1464,

Page 17902

  1   Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces photographies sont admises au

  3   dossier.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  5   Q.  En page 14 de votre déclaration écrite, vous dites que les délégations

  6   de paix, et nous avons constaté que vous étiez également présent à Genève,

  7   donc vous les évoquez en donnant des noms très clairs dans votre

  8   déclaration écrite.

  9   En page 14, vous dites avoir vu la délégation se rendre à Belgrade pour

 10   recevoir des renseignements préalables à son voyage jusqu'au lieu de la

 11   tenue de la Conférence internationale de paix. Pourriez-vous nous en dire

 12   un peu plus au sujet de ce qui s'est passé pendant cette réunion

 13   d'information à Belgrade ?

 14   R.  D'abord, il faut savoir que les délégations étaient divisées en deux.

 15   Est-ce que nous sommes attaqués ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça, c'est votre travail de le savoir.

 17   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc il y avait deux aspects à la délégation.

 19   Il y avait la partie militaire de la délégation et la partie politique.

 20   Moi, je faisais toujours partie de la partie militaire. Nous avons

 21   rencontré un responsable militaire croate et discuté de pas mal de choses,

 22   à quelle distance est-ce qu'on faisait battre en retraite l'artillerie,

 23   quelle était la stratégie par rapport aux frontières, et cetera. Nous

 24   discutions de ce genre de choses très rapidement, très brièvement pendant

 25   la soirée parce que c'étaient des spécialistes de la chose militaire, il

 26   n'y avait pas de problème. Du côté de la représentation politique de la

 27   délégation, là, il fallait sans arrêt discuter pour savoir sur quoi ils

 28   pouvaient donner leur accord et à quoi ils ne pouvaient pas donner leur

Page 17903

  1   accord. Les choses étaient simples, quelquefois ils étaient d'accord pour

  2   tout, quelquefois ils étaient d'accord pour rien. Donc, fondamentalement,

  3   lorsque nous nous préparions à une réunion en Norvège, à Genève ou

  4   ailleurs, nous répétions sans arrêt les consignes que nous avions à

  5   l'esprit en insistant quelles étaient les positions auxquelles nous ne

  6   pouvions pas donner notre accord. Si nous étions coincés pendant une

  7   réunion qu'ils nous disaient, nous sommes obligés de donner une réponse

  8   affirmative ou négative et que nous, nous n'étions pas encore d'accord à

  9   dire non très clairement; alors nous donnions notre accord de principe mais

 10   il fallait avant que cet accord ne devienne officiel revenir auprès de la

 11   RSK, que la question soit posée au parlement, que le parlement réponde et

 12   si la conférence se déroulait à Viennes, par exemple, à ce moment-là, nous

 13   pouvions finir par donner une réponse affirmative. Mais si le parlement ne

 14   donnait pas de réponse affirmative, nous ne pouvions que répondre par la

 15   négative.

 16   Q.  D'accord. Vous avez indiqué en page 15 de votre déclaration que deux de

 17   ces réunions d'information préliminaire ont été conduites par Jovica

 18   Stanisic, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous vous êtes fait une idée de l'objet poursuivi par cette

 21   opposition systématique à tout accord ?

 22   R.  Aucun des hommes qui ne nous donnait ces informations préliminaires ne

 23   nous disaient très clairement pourquoi nous ne devions pas accepter. Mais

 24   je sais qu'il y avait quelquefois des différences entre avant, pendant et

 25   après, et il était très facile d'en déduire la vraie raison. La vraie

 26   raison c'était de maintenir très intense le niveau de tension au sein de la

 27   RSK, parce que ces tensions avaient tendance à se concentrer sur les

 28   événements qui sont venus à Belgrade à cette époque-là. C'était une époque

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  1   où Milosevic était en train; comment est-ce que je pourrais dire de

  2   consolider sa position ?

  3   Q.  Un moment est-il venu, un moment dont vous avez été conscient où la

  4   position a changé à Belgrade, eu égard à ces négociations de paix, a changé

  5   de façon relativement importante ?

  6   R.  Pas vraiment. En ce qui me concerne, je ne voyais pas l'intérêt à y

  7   retourner à chaque fois, écouter encore, se faire entendre dire la même

  8   chose parce que les instructions étaient toujours les mêmes.

  9   Q.  C'est-à-dire ?

 10   R.  N'accepter rien. 

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   R.  Mais parfois la partie croate nous facilitait la tâche dans cette

 13   opposition qui était la nôtre, par exemple, lorsqu'ils nous ont demandé de

 14   retirer des pièces d'artillerie à 26 kilomètres de la Kupa, ils nous --

 15   Q.  [aucune interprétation]

 16   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi la fin de la réponse du témoin.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Je remarque qu'il est 10 heures 30, Monsieur

 18   le Président; l'heure se prête peut-être à la pause.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet, c'est la pause. Alors le

 20   compte rendu pourrait en surprendre plus d'un, en effet le témoin, à un

 21   moment donné, a dit : sommes-nous attaqués, pourquoi, parce que nous avons

 22   entendu des coups sourds dans le prétoire. Après ce qu'a dit le témoin et

 23   après ma réponse, il y a eu quelque rire dans le prétoire qui pourrait

 24   échapper à ceux qui n'auraient pas entendu ces coups dans la salle

 25   d'audience.

 26   Bien. Nous allons faire une pause et nous reprendrons après la pause. 

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 28   --- L'audience est reprise à 11 heures 02. 

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  1   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète, il conviendra de modifier la

  2   dernière réponse donnée au témoin juste avant la pause qui doit se lire

  3   comme suit :

  4   "Mais parfois la partie croate nous facilitait la tâche, lorsqu'ils nous

  5   ont demandé de retirer nos pièces d'artillerie à 25 kilomètres de la Kupa,

  6   cela nous aurait amené jusqu'à Bihac, qui était pratiquement un autre pays.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, deux toutes petites

  8   questions de procédure.

  9   La Chambre a reçu un exemplaire de l'accord en matière de confidentialité

 10   relatif à certains éléments 65 ter. Nous étudions la question, mais il est

 11   plus que probable que les parties soient invitées pour que cet accord

 12   figure au dossier. Mais nous allons revoir la chose encore une fois.

 13   Par ailleurs, le Témoin AG61. La Chambre a reçu quelques informations, vous

 14   aussi, je crois, Monsieur Misetic. Il est proposé que les documents

 15   pertinents soient obtenus en collaboration avec l'Unité d'aide aux Victimes

 16   et aux Témoins, de façon à disposer d'une base plus solide quelque soit la

 17   décision qui sera prise.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Ça ne pose aucune difficulté, Monsieur le

 19   Président. Lorsque j'ai parlé au témoin, la question se posait de savoir

 20   s'il devait venir ici plutôt que d'être entendu par la visioconférence

 21   parce qu'il a des problèmes de santé, mais la question n'était pas de

 22   savoir s'il témoignerait ou pas. L'idée est qu'il témoigne. Effectivement,

 23   je serais heureux que la Section d'aide aux Victimes et aux Témoins puisse

 24   nous aider afin de déterminer l'état de santé --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet, je pense qu'i serait bon

 26   que vous soyez en contact avec eux à propos des documents, notamment il

 27   s'agirait de voir ce que nous dit ces documents et quelles seront les

 28   répercussions.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je vais m'y pencher. Monsieur le Président,

  2   j'ai cru comprendre que le témoin avait dit qu'il ne pouvait pas se

  3   permettre de payer des soins de santé, et qu'il s'agissait peut-être d'une

  4   question de paiement d'examens médiaux, je ne sais pas quelle est la

  5   procédure dans ce cas de figure au niveau de la Section d'aide aux Victimes

  6   et aux Témoins.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une liste d'attente, on le sait

  8   bien, en ce qui concerne les soins, pour ce qui est du financement du

  9   paiement proprement, et la question est autre.

 10   Nous allons voir quelle est la situation.

 11   Enfin, la Chambre a été saisie d'une question ayant trait à la diffusion

 12   des débats au public. La Chambre n'est pas à même pour l'instant de

 13   trancher sur ce point mais la Chambre a été informée de la situation.

 14   Maître Misetic, poursuivez.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

 16   Q.  Monsieur Lazarevic, reprenons là où nous nous sommes arrêtés avant la

 17   pause; j'aimerais en venir au commandement de Pauk.

 18   M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche d'abord et encore

 19   une fois la pièce D923 à l'écran.

 20   Je demanderais à ce qu'on affiche la page 2 de l'anglais, s'il vous plaît.

 21   Le paragraphe du milieu.

 22   Pardon, non, excusez-moi, Madame l'Huissière, j'aimerais que l'on revienne

 23   à la première page du document.

 24   Q.  Alors j'aimerais parler de deux choses avec vous à la lumière de ces

 25   deux pages, nous allons le faire sans attendre. Le rapport de M. Mrksic du

 26   26 août 1995. C'est encore ce document donc en bas de la première page, le

 27   général Mrksic nous dit que :

 28   "En juin on a travaillé jour et nuit à la réorganisation de l'organisation

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  1   militaire existante et à l'établissement de nouvelles unités constituées de

  2   conscrits amenés du territoire de la République fédérale de Yougoslavie. Au

  3   cours de la parade de la Saint-Vitus, les différentes possibilités de

  4   réorganisation militaire ont été présentées."

  5   Un peu plus loin dans votre déposition, je vous montrerai une vidéo qui

  6   montre cette parade. Je vous demanderais d'identifier un certain nombre de

  7   personnes y ayant participé.

  8   "Le renforcement" - il faut, bien sûr, passer à la page suivante - "le

  9   renforcement de l'organisation établi a été prévu, la rendre capable de

 10   mener des activités de combat exigeait un minimum de deux ou trois mois (la

 11   réorganisation de la SVK, qui avait déjà commencé, devait prendre fin à la

 12   fin octobre, au plus tard)."

 13   C'est ce que dit ce document.

 14   Passons maintenant au paragraphe qui suit le paragraphe suivant.

 15   "L'opération Mac, donc 95, Epée 95, sur le territoire de la Bosnie

 16   occidentale a commencé le 19 juillet 1995 et aurai pu être menée à bien

 17   avec succès seulement si nos unités avaient été préparées pour mener à

 18   bien, au même moment, une attaque du niveau opérationnel dans le secteur de

 19   la Bosnie occidentale ainsi qu'une opération de défense de nature

 20   stratégique aux frontières avec la République de Croatie.

 21   "Après dix jours, il a fallu mettre un terme à l'opération Epée du fait de

 22   l'attaque contre Grahovo et de la mise en danger de Knin de la direction

 23   des montagnes Dinara. Les mouvements accomplis par le SVK ont dû être

 24   effectués par stabiliser le front vers Knin après la chute de Grahovo."

 25   J'aimerais à cet égard évoquer avec vous un certain nombre d'informations

 26   qui figurent dans votre déclaration parce que l'opération Mac nous donne

 27   quelques informations sur ce qui s'est passé ensuite au cours de

 28   l'opération "Storm." Pour en revenir au commandement Pauk d'ailleurs,

Page 17909

  1   j'aimerais que nous revenions à la page dont je viens de donner lecture

  2   pour revenir sur ce qu'a dit le général Mrksic dans son rapport :

  3   "Le lancement des opérations contre le 5e Corps musulman," le Corps de

  4   Bihac, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Bien. Je poursuis la lecture :

  7   "Sans être prêts comme nous aurions dû l'être apporter un coup dur à

  8   la SVK qui systématiquement a été repoussé, comme si l'on suivait une

  9   espèce de règle, repoussé dans le combat pour les territoires de la Bosnie

 10   occidentale."

 11   Nous allons parler de cela du fait que le SVK ait été repoussé dans ces

 12   combats pour les tr s de la Bosnie occidentale. Mais pour revenir à la

 13   question de l'opération de la SVK dans la poche de Bihac, vous souvenez-

 14   vous d'une opération qui a eu lieu dans la poche de Bihac ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens. C'est une opération qui a eu lieu plus tôt.

 16   Q.  Très bien.

 17   R.  Oui, c'était une opération conjointe de cinq corps, de Bosnie, de la

 18   République serbe de Bosnie, et de notre côté, la Krajina.

 19   Q.  En ce qui concerne le commandement Pauk, y a-t-il eu intervention de

 20   l'une de ces unités ?

 21   R.  Le Pauk était constitué d'Unités de soldats de Bosnie occidentale, les

 22   Unités spéciales de la Serbie, ainsi que les Tigres d'Arkan.

 23   Q.  J'aimerais maintenant vous renvoyer au compte rendu de l'affaire

 24   Milosevic, page 12 321, vous avez dit que les opérations exigeaient une

 25   consultation avec Belgrade.

 26   Pourquoi fallait-il consulter Belgrade pour ces opérations ?

 27   R.  L'ampleur de l'attaque était telle que l'on ne pouvait pas organiser

 28   les choses au niveau du corps. Il fallait que les choses soient organisées

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  1   à présent le quartier général de Belgrade parce qu'il fallait s'assurer de

  2   l'intervention de soldats de la Republika Srpska et de la Krajina, de la

  3   RSK.

  4   Q.  Bien, il y a eu donc intervention de soldats de la Serbie proprement

  5   dite, pardon, je reformule.

  6   Les soldats de la Serbie, proprement dit, dont vous avez parlé, vous avez

  7   dit qu'elles opéraient au sein du commandement Pauk; à qui appartenaient

  8   ces hommes ?

  9   R.  A la Serbie.

 10   Q.  Très bien. Lorsque vous parlez de l'ARSK et de la VRS, vous parlez de

 11   quoi --

 12   R.  Je parle du volet militaire. Pour la police, c'est autre chose, c'est

 13   quelque chose de tout à fait différent. Ils recevaient leurs instructions

 14   de Stanisic de toute façon.

 15   Q.  Savez-vous pourquoi il fallait consultation avec Belgrade pour cette

 16   opération ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Comment le savez-vous ?

 19   R.  A l'issue de discussion que j'ai eue dans la salle des opérations de

 20   mon propre corps, avec les officiers chargés du commandement, les officiers

 21   qui venaient de Pauk, au cours de conversations téléphoniques avec le

 22   quartier général de Belgrade de la police et de l'armée.

 23   Q.  D'après les connaissances que vous avez recueillies de ces

 24   conversations au quartier général, j'aimerais vous montrer autre chose.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, il s'agit du document

 26   1D2674. C'est le bureau du Procureur qui a communiqué ce document à la

 27   Défense, ce sont vraisemblablement les notes manuscrites de Ratko Mladic

 28   qui couvrent la période du 27 janvier 1995 jusqu'au 5 septembre 1995.

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  1   Je demanderais à ce que l'on affiche la page 201 de l'anglais, et 206 du

  2   B/C/S.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Misetic,

  4   vous avez parlé du compte rendu Milosevic, et d'une page qui ne figure pas

  5   parmi les pages qui m'ont été données sur papier.

  6   M. MISETIC : [interprétation] C'est une erreur de ma part.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que si effectivement ceci fait

  8   bien partie du compte rendu, y faire référence revient à faire référence à

  9   ce qui figure déjà au dossier. Si, par contre, ça n'en fait pas partie, M.

 10   Hedaraly pourrait se plaindre, ce qu'il n'a pas fait cela dit. Mais je n'ai

 11   pas cette page-ci moi mes pages commencent à 12 336 mais peut-être que

 12   l'exemplaire dont je dispose est erroné.

 13   M. HEDARALY : [interprétation] Non, Monsieur le Président, en effet, cette

 14   page ne figure pas parmi les documents qui nous ont été remis. Bon, je n'ai

 15   pas fait objection parce que ça ne m'apparaît pas catastrophique, mais

 16   effectivement ça ne figure pas parmi les documents.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aime toujours m'assurer de savoir si

 18   ce que nous est présenté figure bien au dossier ou pas.

 19   M. MISETIC : [interprétation] J'ajouterai cette page plus tard, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pas nécessairement; si M. Hedaraly

 22   n'a pas d'objection, ce n'est pas grave. Il s'agit simplement d'un rappel

 23   général de notre part. Dès lors que vous faites une référence, il convient

 24   de s'assurer qu'il s'agit de quelque chose qui figure au dossier ou

 25   éventuellement de vérifier que cela n'y figure pas. C'est simplement pour

 26   préciser les choses.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

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  1    M. MISETIC : [interprétation]

  2   Q.  Bien. Il s'agit donc des notes de Mladic. La page qui m'intéresse dit

  3   Belgrade, 29 juin 1995, vous voyez qu'il s'agit là de notes sur une réunion

  4   avec Bulatovic, Perisic, Mrksic et le présent Milosevic. Nous voyons SM,

  5   donc sans doute Slobodan Milosevic, qui dit :

  6   "Maintenant vous avez arrêté l'offensive croato-musulmane. Nous vous

  7   avons aidé mais nous en sommes à notre dernier souffle. La Republika Srpska

  8   est assurée. Nous devons la sceller et mettre l'accent sur l'ARSK et la

  9   défendre."

 10   J'aimerais maintenant que vous passiez à la page 203. Ensuite donc il y a

 11   une discussion. Nous devons instaurer la Republika Srpska et défendre la

 12   Republika Srpska Krajina. Que leur donneriez-vous, je lui demande.

 13   Slobodan Milosevic répond :

 14   "Je donnerais Vogosca et Ilijas, ils ont besoin d'un lien avec

 15   Sarajevo, Zenica, et Tuzla. Nous agrandirions à cause de Fikret, je ne

 16   toucherais pas les enclaves. Ce sont des îles qui disparaîtront."

 17   Q.  Qui est Fikret ?

 18   R.  Fikret Abdic.

 19   Q.  Bien. Nous agrandirions -- à cause de Fikret, qu'est-ce que vous pensez

 20   que cela veut dire ?

 21   R.  Il parle d'un échange de territoire.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, un instant.

 23   M. Hedaraly est debout.

 24   M. HEDARALY : [interprétation] Je crois qu'il faut établir le fondement de

 25   tout ceci avant de poser la question au témoin, demander si le témoin a une

 26   quelconque connaissance de tout ceci avant de lui demander une

 27   interprétation de quoi que ce soit. A-t-il la moindre information là-dessus

 28   avant de lui demander d'interpréter ?

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, peut-être qu'il vaudrait

  2   mieux lui demander s'il y a une quelconque connaissance factuelle de la

  3   chose, et en l'absence d'une telle connaissance factuelle.

  4   D'ailleurs, Monsieur Hedaraly, je ne crois pas que vous ayez dit que,

  5   compte tenu simplement de la connaissance qu'aura le témoin du contexte des

  6   événements, il ne pourrait -- il pourrait ne pas savoir ce qui est dit.

  7   Quoi qu'il en soit, la première question posée par M. Hedaraly me paraît

  8   tout à fait légitime.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Très bien.

 10   Q.  Monsieur Lazarevic, étiez-vous présent à cette réunion ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Avez-vous la moindre information sur cette réunion en particulier ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Bien. Compte tenu du fait que vous avez vécu dans la zone de Bihac

 15   pendant de nombreuses années et que vous avez participé ou en tout cas que

 16   vous avez eu connaissance des attaques menées contre la poche de Bihac,

 17   pensez-vous que vous pourriez nous aider à comprendre qui est ce Fikret et

 18   à comprendre le contexte dans lequel s'est inscrit cette attaque ?

 19   R.  Mais j'ai toujours eu pour volonté d'aider la cour dans ses

 20   délibérations mais vous me demandez ici de dire quelque chose que je

 21   connais mal et de procéder à une analyse; c'est bien exact ?

 22   Q.  Oui.

 23   R.  Je vais essayer.

 24   Q.  Alors que savez-vous de ce qui s'est passé sur le terrain ? La réalité

 25   du terrain correspond-elle à ce qui figure dans ces notes, et notamment ce

 26   qui figure à la page 206 ?

 27   M. MISETIC : [interprétation] 211 en version B/C/S.

 28   Q.  C'est une réunion qui s'est tenue le 30 juin 1995. Le président

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  1   Milosevic était présent et c'est au quartier général au Grand quartier

  2   général de l'armée yougoslave. Etiez-vous présent vous-même ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  La première ligne dit ceci :

  5   "J'ai appelé Fikret Abdic pour qu'il nous dise ce qui se passe le 9

  6   dans la poche de Bihac. C'est un point très important pour nous, nous

  7   devons faire quelque chose de façon à ce qu'il puisse prendre Cazin et ça

  8   sera plus facile par la suite."

  9   Alors savez-vous si la partie des opérations de l'ARSK avec participation

 10   de la VRS et d'autres ont eu lieu, à ce moment-là ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Passons à la page suivante.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

 14   M. HEDARALY : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre une fois encore

 15   l'interrogatoire mais je ne sais pas quand on passe à des questions

 16   directrices. Le témoin a dit qu'il ne sait rien sur telle ou telle chose;

 17   ensuite on lui lit une portion d'un texte et on lui dit savez-vous ce qui

 18   s'est passé ensuite ou avant. Non, je crois que Me Misetic devrait d'abord

 19   voir avec le témoin ce qu'il sait de ces événements et ensuite lui montrer

 20   le document. Il me semble que, d'une certaine manière, il agit de manière

 21   directrice sur quelque chose à propos duquel le témoin n'a rien -- n'a

 22   aucune connaissance.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est vrai que montrer au témoin quelque

 24   chose qu'il n'a pas vu à propos d'une réunion à laquelle il n'a pas

 25   participé cela revient en quelque sorte à une conduite un peu directrice.

 26   Monsieur Hedaraly, vous invitez Me Misetic à procéder par étape et à

 27   commencer par des questions non directrices pour ensuite éventuellement se

 28   diriger vers des questions un peu plus directrices auxquelles vous seriez

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  1   susceptibles de faire objection.

  2   M. HEDARALY : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Je pense

  3   que ceci aiderait au mieux la Chambre.

  4   M. MISETIC : [interprétation] J'ai essayé de citer l'auteur de ces notes.

  5   Malheureusement, M. Mladic n'était pas disponible pour nous. M. Milosevic

  6   nous le savons n'est pas disponible non plus pour déposer. Donc dans une

  7   certaine mesure je suppose que l'on pourrait dire que ces notes restent

  8   sans fondement à moins que M. Hedaraly soit en mesure de contacter M.

  9   Mladic et de veiller à ce qu'il vienne témoigner devant nous.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant.

 11   Bien entendu le fondement demandé par M. Hedaraly n'est pas une déposition

 12   de l'auteur de ces notes. Ce n'est pas l'objection qu'il a formulée. Je

 13   pense que vous avez d'ailleurs parfaitement compris la nature de cette

 14   objection. L'idée c'est que vous demandiez au témoin s'il a la moindre

 15   connaissance de ce qui semble avoir fait l'objet des discussions da la

 16   réunion. Une fois ceci vérifié, ce n'est qu'à ce moment-là que le témoin

 17   pourrait éventuellement faire part de sa connaissance sur les événements

 18   qui sont décrits ici. C'est à ce moment-là qu'il pourrait nous dire si,

 19   après lecture de ces passages pris dans leur contexte, ceci lui rappelle

 20   quelque chose à propos duquel il pourrait avoir une certaine connaissance

 21   directe. Je crois que M. Hedaraly n'envisageait pas véritablement de vous

 22   demander de citer M. Mladic à la barre pour confirmer qu'il s'agit là bien

 23   de ses notes.

 24   M. MISETIC : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Lazarevic, savez-vous si des unités placées sous le

 26   commandement de Jovica Stanisic ont participé aux attaques menées dans le

 27   secteur de Bihac ?

 28   R.  Je n'ai pas connaissance de cela.

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  1   Q.  Savez-vous si les forces de police ont participé au commandement Pauk ?

  2   R.  Là, je ne sais pas pour ce qui est de l'attaque sur Bihac. Je sais que

  3   les deux entités dont vous venez de parler ont participé à des attaques

  4   dans le secteur de Cazin en Bosnie occidentale, mais je ne sais pas en ce

  5   qui concerne Bihac.

  6   Q.  Pardon. Lorsque je parle de Bihac, je parle de toute l'enclave, je ne

  7   parle pas seulement de la ville. Alors je vous repose la question : savez-

  8   vous si dans les attaques menées dans l'enclave de Bihac les Unités de

  9   Jovica Stanisic ont participé ?

 10   R.  Oui, je le sais.

 11   Q.  Bien. Savez-vous si les forces placées sous le commandement du général

 12   Mrksic ont participé aux attaques menées dans l'enclave de Bihac ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Savez-vous quels étaient les objectifs poursuivis au travers de ces

 15   attaques contre l'enclave de Bihac ?

 16   R.  Il s'agissait d'assurer le passage du train entre Belgrade et Knin, en

 17   passant par Banja Luka. Il y a une partie de cette poche où se trouvaient

 18   les voies ferrées. Il nous fallait donc obtenir le contrôle de ce secteur.

 19   Q.  Très bien.

 20   M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, je pourrais le faire

 21   au cours du contre-interrogatoire, mais peut-être pourrait-on obtenir la

 22   source des informations dont dispose ce témoin, ce serait peut-être plus

 23   efficace.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Bien.

 25   Q.  Comment savez-vous qu'il s'agissait là des objectifs de l'attaque ?

 26   R.  On en parlait au sein du quartier général, mon quartier général.

 27   Q.  Qui ?

 28   R.  Le colonel Bulat, moi-même, Toso Pajic, on en parlait. On en a parlé au

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  1   cours de plusieurs réunions que nous avons eues.

  2   Q.  Très bien. Terminons-en de ceci à la lumière des réponses que vous

  3   venez de nous donner, j'aimerais revenir à la conversation dont je parlais

  4   tout à l'heure. Je crois que vous nous avez dit que vous ne disposiez

  5   d'aucune information sur cette réunion à Belgrade qui s'est tenue le 30

  6   juin 1995, et à laquelle ont participé M. Milosevic, Mrksic, Stanisic et un

  7   autre, n'est-ce pas ?

  8   R.  En effet.

  9   Q.  Bien. A la lumière de vos réponses sur la participation des unités de

 10   police serbe, j'aimerais vous donner lecture de la partie suivante :

 11   "Legija et Bozovic ont eu des contacts avec Nanic, grâce à un

 12   Motorola ?" Qui est Bozovic, le savez-vous ?

 13   R.  Oui, je le sais, il était colonel des Unités de Police spéciale de

 14   Belgrade.

 15   Q.  Bien, ensuite :

 16   "Nous pourrions prendre Cazin en deux semaines si nous avions 1 500

 17   hommes."

 18   Ensuite : "nous avons JS," un sigle.

 19   "Quelles sont les forces auxquelles peut recourir le général Mrksic

 20   ?"

 21   Ensuite, la discussion s'engage.

 22   Je vous demanderais à voir la page suivante, on trouve SM, donc

 23   Slobodan Milosevic, qui dit : "Je pense qu'il est important de résoudre le

 24   5e Corps."

 25   R.  L'armija sous le commandement général de Dudakovic.

 26   Q.  Je poursuis la lecture.

 27   "Il est important de résoudre le 5e Corps le plus rapidement

 28   possible, et ensuite d'essayer de couper la route près de Livno."

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  1   La discussion se poursuit à la page suivante, on parle de subordonner

  2   le commandement Pauk au général Mrksic, et cetera, et cetera.

  3   Alors d'après vos réponses, il semble que c'est là la discussion qui

  4   porte sur les différents éléments censés participer à l'attaque contre

  5   Bihac. Ceci, ce qui est dit ici correspond-il à l'attaque proprement dite

  6   qui a eu lieu à Bihac, à la mi-juillet, s'agissant des unités qui ont

  7   participé ?

  8   R.  Je n'ai qu'une connaissance limitée de ce qui se passait. J'avais

  9   suffisamment de choses à faire dans mon propre secteur d'opération pour

 10   savoir très précisément ce qui se passait dans la poche de Bihac.

 11   Mais ça correspond à peu près à ce qui s'est produit et la prise de

 12   la poche de Bihac. Nous avions déjà tenté la chose à plusieurs reprises au

 13   cours des quatre années précédentes.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons l'intention

 16   d'utiliser largement ce journal de Mladic au cours de la présentation de

 17   nos éléments de preuve. Différentes parties de ces notes, surtout pour la

 18   période du 1er juin 1995 au 5 septembre 1995. Je ne sais pas ce que vous

 19   voulez en faire.

 20   M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, je crois du point de

 21   vue de la pertinence, il serait bon de verser ces notes portion par

 22   portion. Verser l'intégralité des notes sans connaître la pertinence de ces

 23   différents éléments poserait peut-être quelque difficulté.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien entendu, il y a trois

 25   possibilités à mon sens. D'abord effectivement d'en demander le versement

 26   partie par partie, portion par portion. Nous risquerions de perdre de vue

 27   ce dont nous parlons, ce faisant. Une autre possibilité, serait

 28   d'enregistrer le document aux fins d'identification dans un premier temps,

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  1   et ensuite, de choisir les parties que nous souhaitions verser au dossier

  2   en fonction de celles que nous n'aurions pas examinées, et de laisser de

  3   côté celles que nous n'aurons pas prises en compte. L'autre possibilité

  4   serait donc d'accumuler les parties au fur et à mesure.

  5   Procédez partie par partie ne me paraît peut-être pas la solution la

  6   plus idéale, peut-être que nous pourrions enregistrer tout le document aux

  7   fins d'identification, et puis nous décider au final quant aux parties

  8   pertinentes compte tenu des différents thèmes que nous aurons à aborder, ce

  9   qui veut dire que les 334 pages seront, bien sûr, disponibles en anglais et

 10   en, bien sûr, dans leur langue d'origine et que tout ceci sera marqué aux

 11   fins d'identification.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le

 13   Président, particulièrement pour nos commis à l'affaire, ce sera sans doute

 14   plus simple au moment de charger les parties pertinentes du document dans

 15   le système du prétoire électronique en fonction de nos besoins.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Je demanderais de donner un

 17   numéro, Monsieur le Greffier, aux notes ou au journal Mladic. Il sera donc

 18   enregistré aux fins d'identification.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Il s'agira de la pièce D1465, MFI.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous avons, me semble-t-il,

 21   examiner à l'instant, en anglais version électronique, la page ou la partie

 22   correspondante à la réunion du 30 juin, c'est-à-dire la page 206.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Oui. En B/C/S, 206.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je l'ai là, en anglais 206.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Alors voici ce que nous avons fait, page

 26   anglaise 201, réunion à Belgrade du 29 juin, en B/C/S, page 206. Ensuite

 27   nous avons regardé la page 203 de l'anglais, 208 du B/C/S. Ensuite les

 28   pages 206 à 211 de l'anglais, en B/C/S, les pages 211 à 216.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pour que tout soit parfaitement

  2   clair dans mon esprit, je vois devant moi la page 206 en anglais. Je

  3   l'affiche à mon écran. Donc cela commence par : "J'ai appelé FA…" Après FA

  4   est présenté comme la personne qui parle, qui prend la parole, oui ou non ?

  5   Donc comment interprétez-vous cela ? Je ne suis pas en train d'analyser

  6   vraiment le contenu, mais on a ici une réunion qui a eu lieu entre les QG

  7   de l'armée yougoslave et Milosevic, pas forcément --

  8   M. MISETIC : [interprétation] Cela se passe dans le QG, dans les locaux du

  9   QG de l'armée yougoslave.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, mais donc ici, on peut lire :

 11   "J'ai appelé pour nous dire," ensuite on parle de FA, et on a l'impression

 12   que c'est FA qui parle.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que c'est lui qui parle. C'est M.

 14   Milosevic qui commence la réunion, en disant :

 15   "J'ai invité FA à venir pour nous dire quelle est la situation dans

 16   la poche de Bihac."

 17   Ensuite il donne la parole à FA.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. J'ai voulu tout simplement

 19   vérifier si c'était bien le cas, s'il était présent oui ou non, mais

 20   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment interprétez-vous ceci ?

 22   M. HEDARALY : [interprétation] J'ai essayé de voir quelle était l'opinion

 23   de mon assistante qui parle la langue pour voir s'il y a une ambiguïté dans

 24   l'original. Est-ce qu'on parle d'une conversation qu'ils ont déjà eue, ou

 25   est-ce qu'il a été invité à participer à la réunion ? Apparemment, sur

 26   cette page, on voit clairement de quoi il s'agit.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, à la page 209, en anglais, FA

 28   prend la parole à nouveau, et il en va de même avec la page 210. Donc pour

Page 17922

  1   que l'on comprenne --

  2   M. HEDARALY : [interprétation] Ecoutez, on peut examiner cela, et on peut

  3   effectivement se mettre d'accord avec M. Misetic quant à l'interprétation

  4   précise de cela.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Puisque de toute façon M.

  6   Lazarevic n'était pas présent pendant cette réunion qui a eu lieu le 30

  7   juin et ne pourra pas nous aider à ce sujet.

  8   Vous pouvez poursuivre.

  9   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 10   [Le conseil de la Défense se concerte]

 11   M. MISETIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Lazarevic --

 13   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai choisi

 14   cette portion-ci du compte rendu d'audience de l'affaire Milosevic, il

 15   s'agit de la page du compte rendu d'audience 12 343.

 16   M. HEDARALY : [interprétation] C'est vrai que ceci figure comme pièce

 17   à conviction.

 18   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Vous avez dit qu'on ne parle pas de deux armées différentes, et là,

 21   vous parlez de la Republika Srpska, RSK, et l'armée yougoslave, on parle

 22   d'une même armée, c'est la JNA. Que l'on appelle VRS ou RSK, ceci n'avait

 23   aucune importance puisque toute l'aide de munition, et cetera, les

 24   finances, les financements venaient de la Yougoslavie.

 25   Pourriez-vous nous expliquer cela ? Pourquoi dites-vous que, là, il s'agit

 26   de la même armée, d'une même armée ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait finir la citation,

 28   l'approvisionnement, les financements venaient de Yougoslavie, Serbie, si

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  1   vous voulez.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Oui, très bien.

  3   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux parler.

  5   Donc, oui, nous parlons du point de vue pratique d'une même armée. Quand la

  6   JNA s'est retirée de Croatie pour aller en Serbie, et ensuite en Serbie,

  7   tous les officiers étaient les officiers de la JNA, et ils ont gardé leurs

  8   fonctions telles qu'elles étaient avant. Le colonel Bulat était le

  9   commandant de corps d'armée avant, et ensuite il est devenu le commandant

 10   du Corps de Kordun, du 21e Corps, mais c'était toujours un commandant de la

 11   JNA. Ensuite c'est la même situation était -- enfin, quand on allait par

 12   Bosanski Posavina à Knin, par exemple, un grand convoi partait de Belgrade,

 13   et nous, on gardait, par exemple, 15 camions, et ensuite ils poursuivaient.

 14   Ensuite le reste du convoi arrivait en Krajina.

 15   Sur les 30 camions du départ, il en restait que 15. Les autres avaient été

 16   laissés en Bosnie et ailleurs. Puis tous les mois, on recevait les

 17   financements pour payer les soldes des officiers et cela venait de la JNA.

 18   Ils étaient payés par la JNA. Vous avez quelqu'un qui était à Knin qui

 19   payait ceux qui étaient nommés à Knin, mais vous avez en même temps le

 20   financement de Belgrade de la JNA qui payait les soldes des officiers qui

 21   venaient du QG de Belgrade.

 22   Q.  Je vais vous poser une question au sujet de connaissance que vous avez

 23   éventuellement au sujet de la coordination des activités militaires entre

 24   Belgrade, VRS, et l'ARSK.

 25   R.  Non, pas vraiment.

 26   Q.  [aucune interprétation]

 27   R.  Moi, les informations dont je dispose ce sont les informations

 28   concernant le secteur nord.

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  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Parce que s'il se passait quoi que ce soit dans le secteur nord, j'en

  3   étais informé. Le reste ce sont les informations que j'ai entendues en

  4   passant.

  5   Q.  Très bien, mais vous avez déjà dit que le commandement de Pauk avait

  6   des éléments de la police de Serbie, et aussi des éléments venant de

  7   l'ARSK; est-ce exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Mais qui commandait l'opération proprement dit ?

 10   R.  Pauk ?

 11   Q.  Oui.

 12   R.  C'était clairement la police serbe.

 13   Q.  Est-ce que vous avez quelqu'un à l'esprit ?

 14   R.  Frenki Simatovic c'est lui qui en était responsable, et son QG se

 15   trouvait dans la zone de responsabilité du 21e Corps. Le reste de Pauk se

 16   trouvait déjà en Bosnie.

 17   Q.  Vous avez parlé du chemin de fer. Je voudrais vous montrer une carte

 18   géographique de la région.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Pour cela, je vais demander au Greffier de

 20   placer sur l'écran la pièce 65 ter 1D2705.

 21   Q.  Sur cette carte, on voit la situation telle qu'elle était au mois de

 22   juillet 1995 avec différentes lignes de front dans la zone et avec les

 23   frontières internationales.

 24   Est-ce que vous voyez cette ligne noire qui va de Knin et qui serpente en

 25   direction de Banja Luka, est-ce que vous savez ce que c'est ?

 26   R.  C'est le chemin de fer qui date de l'ex-Yougoslavie.

 27   Q.  Très bien. Et ce chemin de fer –- on va s'arrêter à Banja Luka. Est-ce

 28   que vous savez s'il continue vers l'est de Banja Luka ?

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  1   R.  En 1995 ?

  2   Q.  Oui.

  3   R.  Non. Je ne pense pas qu'il y ait eu du trafic ferroviaire par là.

  4   Q.  Mais du temps de l'ex-Yougoslavie –-

  5   R.  Oui, à l'époque, oui, bien sûr, c'était très fréquent, et cette ligne

  6   de chemin de fer était utilisée régulièrement.

  7   Q.  Où se trouvait ce chemin de fer qui allait à l'est de Banja Luka ?

  8   R.  Il va vers Knin.

  9   Q.  Non, non. Si vous regardez Banja Luka.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que, ensuite, la ligne de chemin de fer se poursuit vers l'est ?

 12   R.  Elle commence et elle se termine à Banja Luka. Ensuite, elle va jusqu'à

 13   Belgrade.

 14   Q.  Très bien. Ce train, ce chemin de fer, est-ce qu'il existait pour

 15   l'attaque de l'enclave de Bihac ?

 16   R.  On m'a fait croire que c'était son objectif.

 17   Q.  Très bien.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous souhaitons verser

 19   ceci au dossier, et je voudrais vous dire que nous n'avons pas inscrit

 20   Belgrade sur la carte parce que, dans ce cas-là, la carte aurait dû être

 21   présentée à une trop petite échelle, et l'image de Bihac et son enclave

 22   aurait été beaucoup trop petite.

 23   M. HEDARALY : [interprétation] Je pense –-

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly. Allez-y.

 25   M. HEDARALY : [interprétation] Je voudrais qu'on nous explique quelque

 26   chose, je voudrais poser la question au témoin plus précisément. Quand on

 27   lui a demandé si cette ligne de chemin de fer se poursuit quelque part vers

 28   l'est en 1995, il a dit : Non. Et puis, par la suite, il a dit que oui. Je

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  1   voudrais que ceci soit bien clair pour qu'il n'y ait pas de réponses

  2   contradictoires. Nous n'avons aucune objection quant au versement de cette

  3   pièce, mais nous souhaitons poser cette question au témoin.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait aussi poser la question au

  5   sujet de Banja Luka, puisqu'il a dit que ceci commence et se termine à

  6   Banja Luka, et ça ne me paraît pas très clair comme réponse.

  7   M. MISETIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Lazarevic, je pense que vous n'étiez pas clair quand vous avez

  9   parlé du fait que cette ligne n'était pas opérationnelle en 1995. Est-ce

 10   que vous pourriez nous dire quelles sont les portions de la ligne de chemin

 11   de fer auxquelles vous avez pensé en parlant de cela ?

 12   R.  Entre Banja Luka et Bihac.

 13   Q.  Quelles sont les raisons pour cela ?

 14   R.  Parce qu'il y avait les conflits à l'époque, en cours.

 15   Q.  Très bien. Donc cette ligne va de Banja Luka vers l'est, et à l'est

 16   c'est la Serbie, n'est-ce pas. Donc, entre Banja Luka vers l'est, vous avez

 17   dit que cette ligne va jusqu'à Belgrade ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous savez si cette ligne, cette portion de la ligne

 20   Belgrade-Banja Luka était opérationnelle en 1995 ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Est-ce que vous savez pourquoi ?

 23   R.  Je n'en sais rien. Mais j'imagine que c'était à cause de ce qui se

 24   passait en Bosnie.

 25   Q.  Très bien.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans ce cas, nous

 27   souhaitons verser ceci.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Et regardez votre écran.

Page 17927

  1   M. MISETIC : [interprétation] Je suis désolé.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

  3   M. HEDARALY : [interprétation] J'ai voulu voir s'il est possible que le

  4   témoin répète la réponse parce qu'elle ne figure pas au compte rendu

  5   d'audience, en tout cas, pour l'instant il s'agit de la réponse à la ligne

  6   8.

  7   M. MISETIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous savez si cette portion de la ligne de chemin de fer qui

  9   allait de Belgrade à Banja Luka était opérationnelle en 1995 ?

 10   R.  Je suis à peu près sûr que non.

 11   Q.  Très bien, merci.

 12   M. HEDARALY : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection des autres

 14   équipes de la Défense, donc il n'y en a pas puisque je n'entends pas de

 15   réponse.

 16   Monsieur le Greffier.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci deviendra la

 18   pièce D1466.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est versé au dossier.

 20   M. MISETIC : [interprétation]

 21   Q.  Maintenant, nous avons parlé de la fête de St-Vitus ou Vidovdan, en

 22   serbe. Nous avons parlé de cette parade qui a eu lieu le 28 juin 1995, on

 23   en parle dans le rapport de M. Mrksic en date du 26 août. Est-ce que vous

 24   pourriez nous dire quel était l'objectif de cette parade ?

 25   R.  Il s'agissait de montrer sa puissance.

 26   Q.  La puissance de quoi ?

 27   R.  De l'armée de la RSK.

 28   Q.  Très bien. Et pourquoi pensez-vous que l'armée de la RSK essayait de

Page 17928

  1   montrer sa puissance ?

  2   R.  Pour soutenir le moral des troupes sur le terrain.

  3   Q.  Et cours du procès Milosevic, le Procureur vous a montré une vidéo. Il

  4   vous a demandé aussi d'identifier les gens qui y figuraient. Est-ce que

  5   vous vous souvenez de cela ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je voudrais faire la même chose pour quelques instants.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit de la vidéo 1D2677. Et nous

  9   n'allons pas utiliser l'enregistrement audio; il n'y a que les images qui

 10   nous intéressent.

 11   Q.  Etes-vous en mesure d'identifier les personnes qui s'y trouvent ?

 12   R.  La personne au milieu, c'est Legija. 

 13   Q.  Donc Legija ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Ceci se trouve au niveau de neuf secondes de la vidéo.

 16   Est-ce que vous reconnaissez un monsieur qui est sur la gauche ou sur la

 17   droite ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  En regardant à l'écran, en bas à droite, on voit un monsieur qui porte

 20   un chapeau - je ne parle pas de cet homme qui a un béret vert mais celui

 21   qui a un chapeau; est-ce que vous le reconnaissez ?

 22   R.  C'est le chapeau -- chef -- couvre-chef traditionnel de l'armée serbe.

 23   Q.  Oui.

 24   R.  Il est deuxième au deuxième rang, dernier sur la droite.

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   R.  Je ne vois pas qui sait.

 27   Q.  Est-ce que maintenant vous voyez mieux ?

 28   R.  Oui, je vois mieux mais je ne reconnais toujours pas cet homme.

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  1   Q.  Très bien. Celui qui est au premier rang avec un béret rouge. Est-ce

  2   que vous le reconnaissez ?

  3   R.  Le général Mrksic.

  4   Q.  Celui qui parle ?

  5   R.  Milan Martic.

  6   Q.  Ici qui voit-on ?

  7   R.  Le capitaine Dragan, et lui, il a été convoqué de Belgrade pour cette

  8   occasion.

  9   Q.  Qui était-ce ?

 10   R.  Il faudrait tout d'abord apprendre quelque chose au sujet de la

 11   mentalité serbe. Nous avons besoin des héros. Nous avons toujours eu besoin

 12   des héros. C'est pratiquement des héros de bandes dessinées, et le

 13   capitaine Dragan fait partie de ce genre d'héros. Moi, ce que j'ai entendu

 14   au sujet de lui c'est qu'il était chef de quelque camp d'entraînement

 15   autour de Knin.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   R.  Puis qu'à Belgrade, il s'occupait des soldats blessés, quelque chose

 18   dans ce sens. C'est tout ce que j'ai entendu à ce sujet.

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite verser

 21   cette vidéo.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez demandé quel était l'homme que

 23   l'on voit et bien je dois dire qu'on était à la quarantième seconde de la

 24   vidéo et que l'on a on a vu cet homme avec un béret rouge.

 25   Monsieur Hedaraly ?

 26   M. HEDARALY : [interprétation] Je n'ai pas d'objection. Mais à la page 62,

 27   ligne 1, je pense que le témoin devrait répéter ce qu'il a dit au sujet du

 28   capitaine Dragan et il faudrait qu'il répète s'il a été appelé et convoqué

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  1   au nom de Belgrade à cette fin.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le transcript n'est pas très clair. On

  3   vous a demandé qui c'était, je pense que vous avez dit que c'est le

  4   capitaine Dragan, vous avez dit qu'il n'a pas été convoqué de Belgrade.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il a été convoqué justement.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Donc il a été convoqué de

  7   Belgrade pour venir de Belgrade --

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour justement cette occasion-là.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous demander de parler plus

 10   lentement parce qu'on va gagner du temps.

 11   Donc il n'y a pas d'objections.

 12   Monsieur le Greffier.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci devient la pièce D1467.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versé au dossier.

 15   M. MISETIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Lazarevic, là, je vais passer à la page 20 de votre

 17   déclaration de 1999, D461. Ici vous parlez de la politique en vigueur de

 18   l'ARSK où il s'agissait de chasser les Croates de la Krajina et vous dites

 19   que chaque corps des armées, de l'armée de l'ARSK devait avoir quelques

 20   unités pour faire le sale bouleau avec cet objectif :

 21   "Et la cible étant les civils croates et la propagation de la peur."

 22   Comment étiez-vous au courant de l'existence de ces unités qui étaient

 23   censées faire ce sale, cette sale besogne ?

 24   R.  Je le rencontrais tous les jours, et ils étaient sur la route de

 25   Vojnic. Je vous ai dit il y avait des gars que je rencontrais tous les

 26   jours, qui faisaient partie de ces unités.

 27   Q.  A la même page, vous décrivez :

 28   "L'existence de la RSK et vous dites quelle dépendait de la population

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  1   serbe qui croyait qu'ils ne pourraient jamais vivre au côte à côte avec les

  2   Croates et tous ceux qui n'étaient pas d'accord avec cette affirmation tel

  3   qu'Obradovic étaient considérés comme représentant une menace pour la

  4   survie de la RSK."

  5   Alors est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi vous pensez qu'il

  6   était important qu'il existe cette conviction parmi la population serbe ?

  7   R.  L'idée -- la grande idée c'était de créer un Etat serbe à l'intérieur

  8   de la Croatie. C'était cela la grande idée qu'on l'appelle la Grande-Serbie

  9   ou autre chose peu importe qu'ils voulaient c'était avoir un état serbe,

 10   purement serbe à l'intérieur des frontières de la Croatie.

 11   Q.  Mais pourquoi alors vous liez la création de cet Etat serbe, constitué

 12   uniquement des Serbes à l'intérieur des frontières croates, avec les

 13   besoins qu'il y avait de propager parmi la population serbe cette

 14   conviction qu'ils ne pourraient jamais vivre cote à cote avec les Croates ?

 15   R.  C'était plus facile de procéder comme cela au lieu d'avoir une

 16   population mixte parce que, si ce n'était pas le cas, ils penseraient

 17   qu'ils pourraient vivre ensemble. Par exemple, lors d'une réunion avec les

 18   internationaux, on a proposé de créer un village modèle avec les Serbes et

 19   les Croates qui vivent ensemble, pour montrer qu'ils peuvent vivre

 20   ensemble. Evidemment, qu'ils n'étaient pas d'accord, ils étaient

 21   complètement contre cette idée.

 22   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé avec M. Obradovic ?

 23   R.  M. Obradovic, c'était le maire que j'ai rencontré une fois au moment où

 24   le 21e Corps a été créé. C'était une personne extrêmement intelligente, un

 25   Serbe très modéré. Il a été marié à une Croate. Ils étaient très heureux

 26   ensembles. Son idée, pendant qu'il était à cette place jusqu'à ce qu'il

 27   soit limogé, il était convaincu que les Serbes et les Croates pouvaient

 28   vivre ensemble et qu'ils allaient vivre ensemble. Mais les autorités à Knin

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  1   étaient contre lui.

  2   Mais ils ne pouvaient pas le limoger politiquement, ils ne pouvaient

  3   pas créer des élections pour le maire, et donc il a été assassiné.

  4   Officiellement c'était la faute des Croates. Ce n'était pas très -- enfin,

  5   c'était ça pouvait être compris et accepté -- ce qui ne pouvait être

  6   accepté.

  7   Q.  Est-ce que vous savez qui l'a assassiné ? Là, je parle donc du

  8   maire M. Obradovic.

  9   R.  C'est un Groupe de Sabotage de l'ARSK qui faisait partie de

 10   l'armée de la RSK, qui l'a tué.

 11   Q.  A la page 21, vous avez dit :

 12   "Les autorités de RSK, guidées par Belgrade, devaient donc nourrir cette

 13   conviction que pour survivre il fallait se débarrasser de cette menace

 14   croate permanente."

 15   Comment vous savez que ce sont les Serbes qui nourrissaient cette idée ?

 16   R.  La première réunion que nous avons eue à Belgrade, nous avons recueilli

 17   des instructions, et on a très bien vu que les Serbes ne voulaient pas

 18   aboutir à un accord. Finalement l'attitude n'a jamais changé.

 19   Q.  Quelle était cette attitude ?

 20   R.  L'attitude était que l'on ne pouvait pas vivre ensemble. Donc on ne

 21   pouvait pas se mettre d'accord sur quoi que ce soit, jamais.

 22   Q.  Est-ce que vous pouvez parler des différentes tactiques que vous avez

 23   employées, qui ont été employées pour nourrir cette atmosphère de peur,

 24   cette psychose puisque vous parlez donc de tactique, vous avez parlé des

 25   mines antichar qui ont été placées à Glina, le long, par exemple, de chemin

 26   de fer.

 27   Je vais vous poser la question : pourriez-vous nous dire ce que vous savez

 28   au sujet de différentes tactiques employées pour nourrir cette psychose,

Page 17934

  1   cette peur ?

  2   R.  Si la situation dans le secteur nord était trop calme, ceci ne plaisait

  3   pas à Belgrade parce que, si la situation était trop calme, ceci aurait

  4   mené à un accord, une espèce d'accord paisible. Donc il fallait nourrir les

  5   tensions, les garder, il fallait que les gens aient eu peur. Donc vous avez

  6   cette population, la population qui était armée et qui portait des

  7   uniformes, et nous avions les Groupes de Sabotage.

  8   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire ce qu'ils faisaient, par exemple ?

  9   R.  Il y avait une réunion publique, par exemple, avec cette ligne de

 10   chemin de fer. La première fois que depuis le début de conflit le train

 11   circulait entre Glina et Vrgi Most [phon], ils ont plastiqué la ligne de

 12   chemin de fer avec une mine antichar. Ensuite, évidemment, ils n'ont jamais

 13   réessayé de faire marcher le train, de faire circuler le train sur cette

 14   ligne de chemin de fer.

 15   Ensuite vous aviez un problème avec le système d'abduction d'eau, là,

 16   il s'agissait d'empêcher les gens de travailler, de faire quoi que ce soit,

 17   d'aller labourer les champs parce que c'était miné, parce qu'ils avaient

 18   peur. Ils risquaient leur vie en le faisant, et donc on empêchait la vie

 19   normale.

 20   Q.  Qui -- enfin, ARSK voulait que les Serbes aient peur de qui

 21   exactement ?

 22   R.  Ils voulaient qu'ils aient peur des Croates de la Croatie.

 23   Q.  Est-ce que vous êtes au courant des événements qui se sont produis en

 24   Slavonie occidentale au mois de mai 1995 ?

 25   R.  Oui, ce qui s'est passé après, je suis au courant.

 26   Q.  Oui, c'est ce qui m'intéresse.

 27   Est-ce que vous savez si les Serbes sont restés ou s'ils sont partis après

 28   les opérations croates du mois de mai 1995 ?

Page 17935

  1   R.  On m'a dit qu'il n'y a pas eu de Serbes qui sont restés.

  2   Q.  Est-ce que vous savez -- est-ce que vous avez appris pourquoi ils sont

  3   partis ?

  4   R.  L'opération des forces croates était très rapide, très puissante. Les

  5   Serbes ne se sont pas défendus, et bien, ils se sont retirés et avec eux la

  6   population serbe aussi.

  7   Q.  Est-ce que vous avez pourquoi la population serbe civile, les civils

  8   serbes ont quitté la Slavonie occidentale ?

  9   R.  Pour les mêmes raisons pour lesquelles ils ont quitté Knin. Si vous

 10   nourrissez leur peur, la seule possibilité que vous leur laissez c'est de

 11   quitter la région. Evidemment, l'armée croate nous a beaucoup aidés dans

 12   certains cas. Par exemple, la situation autour de Medak, la poche de Medak

 13   dont on a beaucoup parlé dans la région, évidemment, c'était cité comme

 14   exemple. Vous avez peur de cela, c'est ça qui va vous arriver.

 15   Q.  Vous avez parlé de nourrir leur peur, à qui pensiez-vous ?

 16   R.  A la population serbe, aux civils, pas tellement aux militaires mais

 17   aux civils.

 18   Q.  Mais qui nourrissait leur peur ?

 19   R.  La police.

 20   Q.  Quelle police ?

 21   R.  La police de la RSK.

 22   Q.  En page 26 de votre déclaration écrite, vous parlez de l'existence des

 23   gens qui vivaient dans la République serbe de Krajina en 1995, et vous

 24   dites je cite :

 25   "Il semblait que tout le monde était devenu fou. Les gens se sentaient pris

 26   au piège dans cette région isolée qui n'avait pas d'avenir. Toutes les

 27   querelles se terminaient par l'utilisation de fusils."

 28   Alors j'aimerais commencer par vous montrer un document qui est le document

Page 17936

  1   1D2602.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, j'en demande

  3   l'affichage sur les écrans.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'inviterais les parties à se pencher

  5   sur le compte rendu d'audience d'aujourd'hui, page 67, ligne 7, où

  6   apparemment le mot anglais "no" est manquant.

  7   M. MISETIC : [interprétation] En effet.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que le fait que vous ayez corrigé le

 10   compte rendu d'audience suffit, n'est-ce pas, Monsieur le Président ?

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense qu'il est bon pour chacun

 12   d'entre nous ici de ne pas perdre de vue le fait que beaucoup de travail

 13   est accompli sur le compte rendu d'audience avant sa diffusion définitive.

 14   Mais je tenais à vérifier moi-même ce qu'il en était sur ce point précis, à

 15   savoir si j'avais bien compris les choses car M. Lazarevic nous dit

 16   beaucoup de choses de façon assez rapide et ceci, bien entendu, débouche

 17   sur la nécessité, de temps en temps, d'effectuer quelques vérifications, ce

 18   qui d'ailleurs fait passer des moments difficiles à la sténotypiste.

 19   Veuillez poursuivre.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   Q.  Monsieur Lazarevic, c'est un article qui vient de la Tribune de Chicago

 22   parue le 9 janvier 1995, et bien sûr des propos qui vous sont attribués

 23   sans citer dans cet article. Il est question ici de violence impliquant

 24   l'emploi d'armes à feu et de dirigeants cruels de la Krajina, il est dit

 25   que les Serbes et les Croates sont enfermés dans un cercle vicieux mortels.

 26   Au troisième paragraphe nous lisons, je cite :

 27   "Ces jours-ci, la Krajina est sous le contrôle de Serbes puissamment

 28   militarisés qui, après le nettoyage ethnique de 200 000 Croates environ

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  1   expulsés de la région, ce sont déclarés à la tête d'un Etat indépendant."

  2   M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous passions à la

  3   page suivante sur les écrans. Je cite :

  4   "Les clients des bars des Nations Unies sont priés de montrer leurs armes à

  5   l'entrée. Mais dans le bar où les Serbes vont boire, un fusil est toujours

  6   à portée de main."

  7   Un peu plus loin, nous lisons, je cite :

  8   "Même si c'est un effet de la tradition, il est vrai que les fusils ont

  9   toujours suscité beaucoup plus de respect que les gouvernements ou les lois

 10   en Krajina, région que même les milieux serbes de l'ex-Yougoslavie

 11   considèrent comme étant particulièrement violentes et rétrogrades."

 12   Un peu plus loin, nous lisons :

 13   "Il est vrai que la Krajina semble au cœur de ces montagnes intégrer toutes

 14   les impulsions les plus sombres de la personnalité serbe. Les gens sont

 15   pleins de suspicions et divisés en clan. Ils ne se font pas confiance, et

 16   ils ont la plus grande foi dans les vertus de la vengeance."

 17   Un peu plus loin, nous lisons au milieu de la page, je cite :

 18   "'Les journalistes pensent que nous sommes un groupe d'ignorant retardé qui

 19   aime tuer,' a dit Slobodan Lazarevic, colonel de l'armée serbe de Krajina

 20   qui parle bien l'anglais et a l'oreille des étrangers présents sur place."

 21   Est-ce que vous portiez comme c'est dit dans cet article une boucle

 22   d'oreille en or en 1995 ?

 23   R.  Oui, c'était une petite croix.

 24   Q.  Manifestement, vous parlez l'anglais avec une grande assurance. Vous

 25   rappelez-vous avoir dit cela à ce journaliste ?

 26   R.  Absolument pas.

 27   Q.  D'accord.

 28   R.  Je ne l'ai vraiment pas fait.

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  1   Au début de l'article il est question de ce qui se passait dans un bar.

  2   Donc quelqu'un qui passait par là aurait pu me poser des questions de ce

  3   genre, mais ce n'était pas cas dans un entretien en bonne et due forme en

  4   tête-à-tête. Personne ne m'a dit : j'aimerais vous interviewer brièvement,

  5   car j'aurais refusé, je refusais toujours. Donc c'est simplement une

  6   opinion d'un journaliste qui s'exprime sur sa façon de voir les choses qui

  7   se passaient en Krajina et qui parle d'un événement qui s'est produit une

  8   seule fois et jamais par la suite.

  9   Q.  Certaines des parties que je viens de lire ici parlent de culture de

 10   cette population en 1995, est-ce que c'est bien ce que vous auriez dit dans

 11   une déclaration s'agissant du règlement des querelles à l'aide de fusils ?

 12   Au paragraphe suivant, vous êtes censé avoir dit que le problème venait de

 13   la militarisation importante de la population. Est-ce que c'est bien votre

 14   position ?

 15   R.  Je ne comprends pas très bien votre question.

 16   Q.  Les citations que je viens de lire --

 17   R.  D'accord.

 18   Q.  -- dans cet article, est-ce que ce qui est dit ici correspond à votre

 19   vision de ce qui se passait en Krajina en 1995 ?

 20   R.  Oui, oui, c'était ma position.

 21   Q.  D'accord.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 23   versement au dossier de cet article.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

 25   M. HEDARALY : [interprétation] Dans la mesure où le témoin est cité, et

 26   qu'il a confirmé, certains points, nous n'avons pas d'objection.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1468.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que la Chambre ne décide

  2   d'admettre l'admission de ce document au dossier, j'aimerais poser une

  3   question au sujet des conditions qui sous-tendent l'absence d'objection.

  4   Car nous venons d'entendre : étant donné ceci et cela, dans ces conditions,

  5   pas d'objection. Ce qui pose un peu un problème car d'une part, le témoin

  6   dit : ce n'est pas moi qui ai répondu à ces questions, je n'ai accordé

  7   d'interview à personne; et pas à ce journaliste, mais les citations qui

  8   viennent de lui être lues, semblent, d'après lui, rendre fidèlement compte

  9   de sa position à l'époque.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Ce que j'ai compris pour ma part, c'est que

 11   le témoin ne se rappelle pas avoir fait cette déclaration.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est fort possible que quelqu'un lui

 13   ait officieusement posé des questions.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de la

 15   valeur probante de ce document, je demanderais que soit pris en compte le

 16   fait que le journaliste a décrit des positions qui semblent, d'après ce que

 17   dit le témoin, correspondre à son opinion à l'époque.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Puis ensuite vous faites référence

 19   à des citations, je ne suis pas au courant que le témoin aurait eu la

 20   possibilité de relire l'intégralité de cet article.

 21   J'aimerais veiller à la bonne qualité de cet élément de preuve. Les

 22   citations, que vous venez de soumettre au témoin, même si elles ne sont pas

 23   celles d'une interview accordée officiellement par le témoin à un

 24   journaliste, peuvent tout de même correspondre à des réponses que le témoin

 25   aurait fournies à quelqu'un, je parle des citations que vient de citer Me

 26   Misetic.

 27   Monsieur Lazarevic, je crois comprendre que ce qui est dit dans ces

 28   citations correspond à vos positions de l'époque quant à la situation qui

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  1   prévalait à l'époque.

  2   Est-ce que c'est bien ainsi que je dois comprendre votre réponse ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ces conditions, je pense que rien

  5   ne s'oppose à ce que ce document soit admis au dossier, je parle du

  6   document D1468, qui par conséquent, devient un élément de preuve en

  7   l'espèce.

  8   Vous pouvez poursuivre, Maître Misetic.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   Q.  Je reviens, Monsieur Lazarevic, à votre déclaration écrite de 1999,

 11   vous dites dans cette déclaration, je cite :

 12   "Ce problème a été créé par la militarisation totale de la population. Tous

 13   les hommes ayant entre 18 et 65 ans ont été mobilisés, mais il y avait des

 14   volontaires qui n'avaient pas plus de 16 ans et qui avaient parfois jusqu'à

 15   75 ans. Tout le monde était armé et la loi exigeait de chacun qu'il porte

 16   un uniforme à tout moment, qu'il soit de service ou pas."

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner le numéro de

 18   page, Maître Misetic ?

 19   M. MISETIC : [interprétation] Page 26, bas de la page.

 20   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 21   M. MISETIC : [interprétation]

 22   Q.  Alors, Monsieur Lazarevic, savez-vous quel était en Serbie le nombre

 23   d'armes par personne ?

 24   R.  Dans un article récent que j'ai lu il y a une semaine à peine, il est

 25   question de 1,8 par habitant.

 26   Q.  D'accord. Donc par habitant en Serbie selon cet article --

 27   R.  Oui, aujourd'hui. Dans la situation actuelle c'est le nombre d'armes

 28   possédées par des citoyens.

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  1   Q.  Pouvez-vous nous donner une estimation, et je sais bien que ce ne sera

  2   pas un chiffre précis. Car il n'y a pas eu de recensement. Mais d'abord

  3   j'aimerais apporter une correction, page 73, ligne 2 du compte rendu

  4   d'audience. Non, excusez-moi, c'est sur votre écran. Vous avez dit :

  5   "Aujourd'hui il y a de près -- et quel était le nombre ?

  6   R.  Nous venons en quatrième position.

  7   Q.  Pouvez-vous nous donner une estimation --

  8   R.  Excusez-moi, je pense que c'est le Texas qui vient en numéro un.

  9   Q.  Je ne suis pas originaire du Texas donc tout va bien.

 10   R.  D'accord. Parfait.

 11   Q.  Pouvez-vous nous donner une estimation grossière du nombre d'armes à

 12   feu détenues par habitant en Krajina en 1995 ?

 13   R.  Au moins deux armes par habitant.

 14   Q.  D'accord. Est-ce que, quand vous dites habitant, il est question de

 15   civils ?

 16   R.  Deux armes par habitant y compris en comptant les bébés. Donc quand on

 17   prend la population totale, c'est le nombre d'armes par habitant qui est

 18   égal à deux par habitants. Autrement dit, il y avait des habitants qui

 19   pouvaient en avoir cinq et un bébé de six mois qui pouvait en avoir, n'en

 20   n'avoir pas du tout.

 21   Q.  D'accord.

 22   M. HEDARALY : [interprétation] Peut-on avoir la source de ces données ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr. Cette source m'intéresse

 24   également, Monsieur Hedaraly, mais Me Misetic posera la question au témoin

 25   et s'il ne le fait pas, vous pouvez Monsieur Hedaraly le faire au cours de

 26   votre contre-interrogatoire.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je vais poser la question au témoin.

 28   Q.  Monsieur, pouvez-vous nous donner le fondement de ce chiffre ?

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  1   R.  Bien, le fondement c'est ce que j'ai vu par écrit qui avait un rapport

  2   avec le nombre d'armes délivrées à la population dans la région placée sous

  3   la responsabilité du 21e Corps d'armée.

  4   Q.  Alors du point de vue de la militarisation de la population, dans le

  5   secteur sud, y avait-il une différence par rapport au secteur nord ?

  6   R.  Je ne peux pas vous répondre avec une absolue certitude, mais je dirais

  7   qu'il n'y avait pas de différence.

  8   Q.  Est-ce qu'il y avait en Krajina à l'époque des gens qui pouvaient être

  9   définis comme de simples civils, d'après vous, d'après ce que vous savez,

 10   des gens qui n'étaient pas militarisés ?

 11   R.  Non. Car aucun civil n'était vraiment un civil. Voyez-vous la

 12   conception de la défense qui était appliquée était celle qui existait au

 13   début des années 60 en Yougoslavie, autrement dit, en cas de problèmes, la

 14   défense impliquait l'intervention de tout le monde. Je ne pense pas que les

 15   Croates avaient des lois différentes à cette époque-là, donc la règle

 16   c'était que tout citoyen devait assurer la défense de son pays. C'était

 17   cette règle qui s'appliquait à l'ensemble d'entre nous à l'époque.

 18   Autrement dit, toute personne capable de porter une arme se voyait délivrer

 19   une arme.

 20   Q.  Mais qu'en était-il des gens qui portaient des vêtements civils ?

 21   R.  J'ai vu des gens de mes propres yeux qui étaient en jeans et qui

 22   portaient une AK-47. Cela n'avait rien de rare à l'époque.

 23   Q.  Mais le fait de voir une personne qui ne portait pas une arme, qu'est-

 24   ce que cela signifiait, à vos yeux à l'époque ?

 25   R.  Je vais vous dire ce qui se passait. Les 6 et 7 août, il y avait

 26   beaucoup de gens qui portaient une arme et c'était des gens qui avaient

 27   l'uniforme de l'ARSK, mais en dehors de cela, il n'y avait tout simplement

 28   pas de civils; tout le monde était versé dans les rangs de l'armée, à

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  1   l'exception des femmes.

  2   Q.  Oui, d'accord. Page 27 de votre déclaration, en haut de la page, vous

  3   dites, je cite :

  4   "Selon mes estimations du total des pertes subies par les Serbes entre 1991

  5   et 1995, plus de 80 % était infligé par les Serbes eux-mêmes."

  6   Alors qu'est-ce qui se passait en Krajina pour arriver à un tel pourcentage

  7   qui aboutissait donc à ce pourcentage de 80 ?%

  8   R.  Le premier facteur important qu'il faut prendre en compte c'est que la

  9   zone de la poche de Bihac a été inondée d'argent venant des pays arabes à

 10   peu près 15 milliards de marks allemands à l'époque. Est-ce que cela était

 11   le résultat de transactions commerciales, ou est-ce que cela venait de gens

 12   qui avaient des raisons précises d'agir ainsi pour influer sur les

 13   événements ? Je ne sais pas, mais en tout cas, si quelqu'un était tué par

 14   nos forces, parmi nous c'était soit à la suite d'un règlement de compte,

 15   soit à cause des conséquences du marché noir, ou bien du fait que quelqu'un

 16   aurait entassé beaucoup d'argent et que quelqu'un le tuait pour le voler,

 17   ou bien il y avait des meurtres qui étaient dus à des raisons encore moins

 18   importantes, c'est-à-dire que deux amis étaient en train de plaisanter et

 19   de charger leurs armes et puis tout d'un coup le gars qui avait une balle

 20   dans son barillet actionnait le mécanisme et le fusil tirait et tuait

 21   quelqu'un. Il y a eu un des cas où un petit garçon courait vers son père

 22   qui avait un fusil automatique sur l'épaule et qui était en train de manier

 23   son fusil, et accidentellement le petit garçon tue son père. Donc rien à

 24   voir avec une attaque ennemie. Il y a eu pas mal de pertes de ce genre

 25   parmi les nôtres et le pourcentage atteignait 80 %.

 26   Q.  D'accord. Est-ce que vous auriez des connaissances quant à des crimes

 27   commis par des Serbes contre des Serbes pendant l'opération Tempête ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Pourriez-vous nous donner plus de détails ?

  2   R.  Je pense que j'en ai déjà parlé des gens qui réglaient de vieux comptes

  3   parce qu'on ne laissait pas de l'argent derrière soi dans ces conditions.

  4   On risquait de ne pas le retrouver après. On emportait l'argent sur soi, et

  5   s'il y avait deux personnes qui participaient au marché noir, vous savez,

  6   on cite souvent des sommes atteignant des millions de deutsche marks, c'est

  7   motivant. Il y a des raisons suffisantes pour tuer quelqu'un dans ces

  8   conditions.

  9   Q.  Mais est-ce que vous avez une connaissance personnelle de meurtres

 10   commis par un Serbe contre un Serbe ?

 11   R.  Je n'ai lu que des rapports à ce sujet. Mais les rapports venant de

 12   Toso Pajic à ce sujet en faisaient état couramment.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais maintenant

 14   que nous parlions de l'opération Tempête. Je ne sais pas si vous souhaitez

 15   que nous fassions la pause tout de suite.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'heure normale de la pause était dans

 17   cinq minutes, donc je pense qu'il est préférable de la faire tout de suite

 18   dans ces conditions.

 19   Vous avez posé au témoin une question qui portait sur l'obligation légale

 20   pour les hommes de toujours porter un uniforme, alors que selon les

 21   dépositions des témoins ce n'était pas toujours le cas, ce n'était pas une

 22   obligation s'appliquant à tout le monde. Est-ce qu'il y a un texte de loi

 23   qui indique cette obligation.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je peux poser la question au témoin, Monsieur

 25   le Président.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'avez pas --

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je peux vous fournir une ancienne loi de

 28   l'ex-Yougoslavie après traduction. Mais je n'ai aucune loi de ce genre dans

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  1   les textes législatifs de l'ARSK.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit, Monsieur Lazarevic,

  3   et cela figure dans votre déclaration écrite que tout le monde était obligé

  4   par la loi de porter un uniforme. Pourriez-vous nous indiquer plus

  5   précisément quel est le texte de loi qui prévoit cette obligation ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas ce texte de loi sur moi. Mais

  7   j'évoquais les réglementations découlant de l'ancien commandement. Si on

  8   était engagé dans les rangs de l'armée, on avait obligation à tout moment

  9   de porter un uniforme et cela s'appliquait aux conscrits qui avaient entre

 10   16 et 60 ans, et qui étaient donc dans l'obligation dès lors qu'ils étaient

 11   conscrits de porter l'uniforme et une arme sans exception chez les hommes.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous dites que toute personne

 13   mobilisée était tenue de porter l'uniforme.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons faire la pause et

 16   reprendre nos débats à midi 45.

 17   --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.

 18   --- L'audience est reprise à 12 heures 52.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons résolu une question. Il

 20   s'agit de la diffusion en public à partir de la salle d'audience I.

 21   Monsieur Lazarevic, une autre question en revanche n'a pas trouvé solution,

 22   il s'agit de votre débit. Nous aimerions que le compte rendu reflète au

 23   mieux votre déposition. Si vous ne ralentissez pas quelque peu votre débit,

 24   malheureusement, nous risquons d'en perdre une partie, et ni vous ni nous

 25   ni les parties ne souhaitent que ceci se produise, et je vous rappelle les

 26   difficultés rencontrées par notre sténotypiste.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes mes excuses encore une fois, et je vais

 28   faire mon possible pour ralentir.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est moi qui vous ferai signe lorsque

  2   M. Misetic oubliera de le faire.

  3   Maître Misetic, poursuivez.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Q.  Pendant la pause, Monsieur Lazarevic, on m'a rappelé la nécessité de

  6   vous demander comment fonctionnait le marché noir à Bihac. D'où venait

  7   l'argent, et qui vendait ce qui était à vendre et à qui ?

  8   R.  Je crois que je l'ai déjà dit. Nous estimions qu'il y avait environ 15

  9   milliards de deutsche marks qui circulaient dans la poche de Bihac de

 10   l'argent reçu par les Musulmans de différents pays les Emerites Rabuni

 11   [phon] ou l'Arabie saoudite, et d'autres, mais en ce qui concerne la

 12   cigarette, le café, le carburant, il y avait pénurie. Toutes choses étaient

 13   offertes par des Serbes, non pas, bien sûr, officiellement. Ce n'était pas

 14   le gouvernement qui le faisait, mais certaines personnes qui participaient

 15   à ces activités sur le marché noir.

 16   Je vais vous donner un exemple, par exemple : à un moment donné, un paquet

 17   de cigarettes coûtait 100 deutsche marks, il était possible de l'acheter à

 18   12 à l'aéroport. Un litre de boisson pour 15 ou 20 deutsche marks, cela

 19   dépendait de l'était du marché, enfin tout aliment quel qu'il soit était à

 20   vendre. Puis il faut tenir compte de la proximité de la frontière entre la

 21   Bosnie et la RSK, les gens donc qui vivaient le long de la frontière

 22   participaient activement au marché noir.

 23   Q.  J'en viens à l'opération Tempête. J'aimerais que vous examiniez la page

 24   28 de votre déclaration de 1999, vous dites, c'est au milieu du premier

 25   paragraphe à peu près :

 26   "La panique a saisi la population de Topusko au moment où ils ont réalisé

 27   qu'il n'y avait rien à faire pour stopper les soldats croates. Tout le

 28   monde savait ce qui était arrivé aux Croates de Krajina en 1991, des

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  1   centaines avaient été tués, toutes leurs maisons, leurs entreprises avaient

  2   été incendiées et toute la population avait été expulsée. Alors chacun

  3   pensait que lorsque l'armée croate allait reprendre le contrôle du secteur,

  4   elle aurait soif de vengeance."

  5   Alors chacun pensait cela, mais pouvez-vous être plus précis quant au

  6   sentiment général qui régnait au sein de la population ?

  7   R.  Au début de la contre-attaque ou de l'attaque croate quel que soit le

  8   terme employé, ceux -- beaucoup envoyaient leurs familles directement en

  9   Bosnie et même jusqu'à la Serbie donc dès le début des convois se sont

 10   formés de gens qui quittaient le secteur très rapidement. Ceux qui

 11   n'avaient personne chez qui aller lorsqu'ils ont vu les premiers partir,

 12   ils ont fait la même chose néanmoins ceci a provoqué une réaction en chaîne

 13   donc rapidement les convois ont pris de l'ampleur.

 14   Q.  Mais comment savez-vous que la population était au courant des crimes

 15   qui avaient été commis contre les Croates, et comment savez-vous qu'il y

 16   avait un sentiment général parmi la population selon laquelle lorsque

 17   l'armée croate, lequel pardon, l'armée croate reprendrait le secteur, elle

 18   aurait soif de vengeance ?

 19   R.  Enfin il s'agit de la population locale qui vivait sur place, qui y

 20   vivait depuis des dizaines d'années. Certains d'entre eux avaient pris

 21   certains biens : maisons, terres, tracteurs, voitures, et cetera, qui

 22   appartenaient aux Croates expulsés enfin je ne sais pas. C'est, en tout

 23   cas, le sentiment que j'aurais, moi, si j'avais fait quelque chose de mal

 24   et que je voyais ces gens arrivés et j'aurais été quasiment certain qu'ils

 25   allaient se venger sur moi. En tout cas, c'est le sentiment qui existait

 26   parmi la population locale. Aucun des habitants du coin n'ont dit, je n'ai

 27   rien fait.

 28   Q.  J'aimerais revenir sur ce que vous venez juste de dire : qu'entendez-

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  1   vous par là, aucun des habitants ne pouvaient dire je n'ai rien fait ?

  2   R.  Dans le conflit qui a fait rage dans cette partie de la région des

  3   Balkans, chacun avait été enrôlé dans l'armée. Puis à l'époque, en portant

  4   simplement un uniforme de l'ARSK, on était considéré comme l'ennemi de

  5   l'armée croate. Personne ne pouvait dire : je n'ai jamais pris la moindre

  6   arme, je n'ai jamais tiré sur qui que ce soit, je n'ai jamais pris la

  7   maison de tel ou tel autre, j'étais chez moi et je ne me suis mêlé à rien

  8   de ce qui s'est passé; c'était quelque chose qu'il était impossible de dire

  9   par, en tout cas, ces gens-là.

 10   Q.  Qu'en est-il des femmes et des personnes âgées, pourquoi sont-elles

 11   parties ?

 12   R.  C'était les membres des familles des gens qui se trouvaient sur la

 13   ligne de front pour des raisons de sécurité sans doute.

 14   Q.  En page 27 de votre déclaration, vous dites que vous avez eu une

 15   conversation peu de temps après le début de l'opération Tempête avec un

 16   officier de liaison de la HV, Tihomir, Ticar, Brockman. Il m'a encouragé,

 17   moi et d'autres Serbes de Topusko, à rester. 

 18   Où étiez-vous lorsque cette conversation a eu lieu ?

 19   R.  Au QG des Nations Unies. On m'a informé qu'un officier de liaison de

 20   Karlovac voulait me parler au téléphone, je crois que c'était un commandant

 21   à l'époque.

 22   Q.  Comment se fait-il que vous, vous soyez retrouvé au QG des Nations

 23   Unies pendant l'opération Tempête ?

 24   R.  J'étais, à ce moment-là, toujours officier de liaison officiel, et

 25   l'une des tâches importantes de mon travail, à ce moment-là, c'était de

 26   protéger véritablement le personnel des Nations Unies de toutes

 27   représailles de la part des habitants de la région.

 28   Q.  Mais vous avez dit :

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  1   "Dans notre QG sur la base des Nations Unies, nous avons maintenu de

  2   manière ininterrompue des communications grâce aux liaisons satellites

  3   Nations Unies."

  4   R.  Oui, nous avions un bureau.

  5   Q.  Vous avez loué un bureau sur la base Nations Unies.

  6   R.  Oui, des Nations Unies.

  7   Q.  Excusez-moi, je n'ai pas ménagé de pause entre vos réponses et mes

  8   questions. Bien.

  9   Vous avez dit que vous avez versé par jour 5 000 deutsche marks à des fins

 10   de location aux responsables ukrainiens sur place ?

 11   R.  A son adjoint, oui.

 12   Q.  Bien. M. Brckan --

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Miletic, pourriez-vous répéter

 14   votre question parce que je n'ai pas bien entendu ? Vous avez dit que vous

 15   avez payé.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Oui, en page 27 -- c'est en page 27 en bas de

 17   la déclaration --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous citez la déclaration, je vois.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 20   "Vous avez obtenu ce bureau sur la base des Nations Unies en payant au

 21   commandant du secteur ukrainien 5 000 deutsche marks par jour pour location

 22   de son bureau."

 23   C'est bien ça ?

 24   R.  Oui, c'est ça, mais pas le commandant, proprement dit, son adjoint.

 25   Q.  Vous parlez également d'argent qui a été versé à son chef d'état-major

 26   un colonel polonais; c'est cela ?

 27   R.  C'est bien cela dont je parle.

 28   Q.  Très bien. Dans le bureau des Nations Unies, étiez-vous en mesure de

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  1   communiquer avec Belgrade en utilisant le système téléphonique des Nations

  2   Unies ?

  3   R.  Oui, à partir du moment où il y avait une liaison satellite dans le

  4   bureau ce qui était le cas on pouvait communiquer avec tout le monde.

  5   Q.  Très bien. Voyons d'abord ce que cet officier de liaison de la HV vous

  6   a dit. Que vous a-t-il dit dans cette conversation ?

  7   R.  Nous avions un contact personnel à plusieurs reprises dans mon secteur

  8   donc nous avons appris à nous connaître assez bien. Je crois que du fait du

  9   manque d'animosité qu'il pouvait ressentir à mon égard, il m'a proposé de

 10   passer de l'autre côté en toute sécurité si je souhaitais le faire dans ma

 11   voiture avec mon épouse. Je devais faire la même offre au colonel Bulat ou

 12   à qui que ce soit d'autre que je rencontrais en cours de route. Ce n'était

 13   pas une situation où il m'aurait dit que c'était une offre en contrepartie

 14   d'un dépôt des armes, et cetera, non. C'est une invitation qui m'a été

 15   adressée à moi et au colonel Bulat et je l'ai refusé.

 16   Q.  Qui est le colonel Bulat ?

 17   R.  Le colonel Bulat est devenu officier commandant le 21e Corps à

 18   l'époque, parce que le colonel, qui était ce poste avant cela, Bosanac,

 19   semble-t-il, qui commandait donc le 21e Corps à ce moment-là, a été démis

 20   de ses fonctions.

 21   Q.  Très bien. Lorsqu'on vous a -- on a proposé un sauf-conduit en quelque

 22   sorte au colonel Bulat, comment l'avez-vous interprété ?

 23   R.  Sauvez votre peau, sauvez-vous, c'est cela que j'ai compris.

 24   Q.  Mais je vais reformuler ma question : en offrant ce sauf-conduit au

 25   colonel Bulat, pensez-vous en fait qu'en réalité, il offrait ce sauf-

 26   conduit aux forces placées sous son commandement ?

 27   R.  Non, parce que, si vous retirez le commandement, le reste découle de

 28   toute façon.

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  1   Q.  Pendant combien de jours avez-vous tenu - je parle du 21e Corps et du

  2   colonel Bulat - au cours l'opération Tempête ?

  3   R.  Quatre à cinq jours.

  4   Q.  Donc nous parlons du 8 août, du 9 août, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Tous les membres du commandement avaient-ils entendu que Knin était

  7   tombé aux mains de la HV ?

  8   R.  La première information faisant état de la chute de Knin a été diffusée

  9   à la télé croate, c'est la première fois que j'ai vu le drapeau croate

 10   flotter tout en haut du château de Knin.

 11   Il y a un château tout en haut de Knin et le drapeau croate flottait

 12   au sommet de ce château. Il y avait tout un groupe d'officiers qui étaient

 13   autour de la télé et qui faisaient des commentaires. Je pensais que c'était

 14   simplement de la propagande croate. Je n'arrivais pas à imaginer que Knin

 15   avait pu tomber.

 16   Q.  A un moment donné ou à un autre, vous et d'autres au sein du

 17   commandement de l'ARSK, avez-vous fini par accepter la réalité des choses,

 18   à savoir que Knin était effectivement tombé ?

 19   R.  Oui, il a fallu effectivement au final parvenir à cette conclusion-là.

 20   Q.  Quel a été l'impact de cette nouvelle, donc de la chute de Knin sur le

 21   moral de l'ARSK ?

 22   R.  Je ne pense pas que nous étions très nombreux à le savoir. Ceux, qui en

 23   ont été informés, bien sûr, ont vu leur moral totalement saper. Ceux, qui

 24   ne le savaient pas, ont gardé à l'esprit l'importance de défendre le

 25   secteur.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais obtenir une précision de

 27   votre part, Monsieur Misetic -- Monsieur Lazarevic, plutôt.

 28   Vous savez, à la fin, il a fallu évidemment parvenir à la conclusion, mais

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  1   quand exactement ? A quel moment ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque les forces croates se sont approchées

  3   à quelque trois kilomètres de l'endroit où nous nous trouvions. Donc ils

  4   ont pénétré dans les profondeurs de la RSK.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand était-ce ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Le troisième jour de l'attaque, nous avions

  7   déplacé notre quartier général jusqu'aux périmètres de l'enceinte des

  8   Nations Unies, l'hôtel de Topusko.

  9   Donc je dirais que à vue de nez, nous étions à peu près à 150 heures [comme

 10   interprété] de l'enceinte onusienne. Dans ce rayon de cinq kilomètres

 11   environ, nous avions 4 000 membres du 21e Corps, armés jusqu'aux dents et

 12   environ 20 000 civils qui venaient du sud.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites le troisième jour de

 14   l'offensive. Nous savons que l'opération Tempête a commencé, en tout cas,

 15   que la partie militaire de l'opération a commencé le 4 août. Alors si vous

 16   parlez du troisième jour, nous en sommes sans doute au 6 août, était-ce le

 17   matin, le midi, l'après-midi, le soir ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais tâcher de vous donner la séquence

 19   chronologique des événements.

 20   D'abord, l'offensive principale a eu lieu aux premières heures du 4,

 21   en début d'après-midi. Nous avons appris que Knin n'était plus notre

 22   capitale. Le lendemain, nous avons découvert que les deux corps qui étaient

 23   à gauche et à droite du 21e Corps avaient quitté leur position.

 24   Le troisième jour, il y a eu ce flux énorme de civils à Topusko, et à

 25   partir de ce moment-là, il s'agit de négocier notre sortie de ce bourbier.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai posé la question en réaction à la

 27   réponse que vous avez donnée à la question posée par Me Misetic, question

 28   de savoir quand vous avez su que Knin était tombé. Vous avez dit que vous

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  1   aviez vu à la télévision le drapeau croate flotté au sommet du château.

  2   Vous aviez dit que vous aviez cru d'abord qu'il s'agissait de propagande,

  3   mais que finalement vous avez dû en arriver à la conclusion inéluctable

  4   que…

  5   Alors, moi, je vous parle de la chute de Knin. Il y a une seconde à peine,

  6   vous venez de me dire que, dès le 4, vous avez dit, je crois, que vous

  7   aviez su que Knin n'était plus votre capitale. Entendiez-vous par là que

  8   vous saviez alors que Knin était tombé, si ce n'était plus votre capitale ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans notre secteur sur le territoire du 21e

 10   Corps, nous savions que quelque chose en fonctionnait plus du tout puisque

 11   nous n'avions plus aucune communication avec le secteur sud.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais j'en reviens à ma question,

 13   mais je comprends que, si les soldats ne sont qu'à quelques kilomètres de

 14   vous, à Topusko, mais quand avez-vous appris la chute de Knin ? Quand avez-

 15   vous appris que l'armée de la RSK ne tenait plus Knin, mais que Knin était

 16   passé sous le contrôle militaire de la HV ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Soit très tard ce soir-là, soit très tôt le

 18   lendemain matin.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quel jour ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Le soir du 4.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ou aux premières heures du 5.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, poursuivez.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  J'aimerais donner suite à l'une des réponses que vous avez apportées à

 26   l'une des questions posées par le Président.

 27   Vous avez dit que vous saviez qu'il se passait quelque chose de très

 28   grave ou quelque chose d'approchante, en tout cas, parce que vous n'aviez

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  1   plus de communication du tout avec le secteur sud.

  2   Pourriez-vous nous dire avec un peu plus de détail ce qui s'est passé

  3   à ce moment-là ?

  4   R.  Tous nos appels restaient sans réponse. La seule communication que l'on

  5   pouvait établir, à ce moment-là, était une communication téléphonique, mais

  6   ces lignes étaient coupées ou, en tout cas, personne ne répondait plus à

  7   nos appels. Il en allait de même pour la police. Lorsque la police a essayé

  8   d'entrer en contact avec Knin, pour essayer d'entrer en contact avec un

  9   certain nombre de personnes, ils n'ont pas pu y parvenir; l'armée non plus.

 10   Lorsque nous avons essayé d'entrer en contact avec le Corps de Lika ou avec

 11   le Corps de Banja, et cetera, nous n'avons non plus eu la moindre

 12   communication. Ça, c'était le lendemain, ce qui nous amenait à conclure

 13   qu'ils avaient quitté leur position sans nous en informer.

 14   Q.  Avez-vous appris par la suite ce qui a été à l'origine de cette coupure

 15   de communication avec le secteur sud ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pendant la toute période qui a précédé l'opération Tempête, la

 18   population était-elle préoccupée d'une éventuelle attaque croate imminente

 19   ?

 20   R.  Excusez-moi, je n'ai pas entendu la question.

 21   Q.  Très bien. Donc avant l'opération Tempête, juste avant l'opération

 22   Tempête ?

 23   R.  Oui, une semaine avant, dix jours avant, quelques mois avant.

 24   Q.  Un ou deux jours ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous avez senti, ressenti une préoccupation accrue par

 27   rapport à l'attaque croate ?

 28   R.  Mais personne n'était au courant de l'attaque. On a appris deux jours

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  1   avant, moi, je l'ai appris deux jours avant. 

  2   Q.  Est-ce que vous avez été au courant des autorités, des préparations que

  3   faisaient les autorités pour retirer la population civile ?

  4   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela. Parce que cela voudrait dire

  5   que le QG de Knin était au courant de l'attaque deux ou trois jours avant.

  6   Q.  Est-ce que vous savez si les citoyens étaient inquiets ? Est-ce qu'ils

  7   auraient préféré être retirés de la ville dans si l'ARSK ne défendait pas

  8   la ville ?

  9   R.  Je ne suis pas au courant de cela.

 10   Q.  Est-ce que vous savez qui était le colonel Rade Raseta ?

 11   R.  Oui, j'ai entendu ce nom, mais je n'arrive pas à le situer.

 12   Q.  Est-ce que vous savez qu'il était adjoint du commandant chargé de la

 13   sécurité au niveau du QG de Knin ?

 14   R.  C'est possible, possible. Mais vraiment je n'en suis pas sûr.

 15   Q.  Dans votre déclaration préalable, quand vous parlez de la panique qui

 16   existait au sein de la population civile, vous avez dit que cette panique

 17   était - et cela se trouve à la page 28 - "était nourrie par Belgrade

 18   puisqu'ils voulaient que les Serbes partent, qu'ils quittent la Krajina."

 19   Ensuite vous dites :

 20   "Belgrade voulait que les Serbes de la Krajina s'insère au Kosovo dans les

 21   zones qu'ils pouvaient garder en tant que territoires serbes qui se

 22   trouvaient en Bosnie et en Slavonie orientale."

 23   R.  Pourriez-vous me montrer cela dans ma déclaration ?

 24   Q.  C'est la page 28, le deuxième paragraphe en entier.

 25   R.  Oui, je le vois. Quelle est la question ?

 26   Q.  Vous en êtes arrivé à faire cette conclusion sur la base de quels faits

 27   ?

 28   R.  Vous avez toujours des rumeurs, évidemment, ceci n'a jamais été

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  1   confirmé par des sources officielles, à savoir que le président Tudjman et

  2   le président Milosevic avaient fait un deal au sujet de la Krajina. Mais,

  3   moi, je ne peux pas vous dire pour sûr que cela a vraiment eu lieu. C'était

  4   les rumeurs.

  5   Le développement de la situation après l'attaque était telle qu'on a

  6   compris que personne n'allait nous aider à nous défendre, et les unités sur

  7   le terrain, elles ne pouvaient pas défendre les territoires parce que ceci

  8   aurait correspondu à un suicide collectif. Ils n'étaient pas suffisamment

  9   nombreux face à la force assaillante, et s'il y avait plus de militaires,

 10   personne ne pouvait défendre la population civile, s'il en restait.

 11   Moi, je pense que la situation -- enfin, les civils qui restaient, c'était

 12   les femmes, les enfants, et des vieillards, vraiment des vieillards. Tous

 13   les autres, c'était des militaires, ou faisaient partie de l'armée. C'est

 14   comme cela que je vois la situation.

 15   Quand on fait l'analyse de la situation, c'était clair et c'était un fait

 16   désagréable. C'était clair que pour nous c'était la fin de la route dans la

 17   Krajina. C'est tout ce que l'on pouvait dire. Il fallait se débrouiller.

 18   Q.  Ensuite le paragraphe suivant, vous dites :

 19   "Il s'agissait là d'un plan bien organisé et orchestré, et il s'agissait là

 20   d'un processus intentionnel de semer la panique parmi la population civile,

 21   semer par les militaires de la RSK et par son gouvernement.

 22   "Et donc cela a marché on racontait que les Oustacha allaient tuer tous les

 23   civils. Je sais qu'il y avait des gens qui étaient chargés d'aller raconter

 24   cela à la population civile. Les histoires des Oustacha qui tuent les

 25   enfants, qu'ils égorgent les enfants," et cetera.

 26   Est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose à ce sujet ?

 27   R.  Moi, je pense que c'est le ministère de l'Intérieur de Knin qui faisait

 28   cela au départ. Ensuite il y avait des gens qui venaient en convois du sud

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  1   d'un autre secteur, pour nous raconter ce qui s'est vraiment passé sur le

  2   terrain, les histoires, qui n'étaient pas forcément confirmées, mais

  3   personne ne voulait rester pour vérifier si elle était vraie ou non.

  4   La panique c'est une maladie qui progresse très rapidement. C'est très

  5   difficile de calmer les gens, une masse de gens, en leur disant : mais,

  6   non, non, cela ne va pas se passer. Tout ce que vous avez fait pour semer

  7   la panique c'est de dire : rappelez-vous ce qui s'est passé en 1941/1945,

  8   est-ce que cela vous donne un indice quant à votre propre sort ? Est-ce que

  9   vous pensez que vous, vous allez avoir meilleur sort que cela ? Même si

 10   vous avez l'imagination florissante, vous allez avoir du mal à vous dire :

 11   je peux rester, rien ne va m'arriver.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, est-ce que vous en

 13   avez terminé avec ce passage --

 14   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Lazarevic, je regarde votre

 16   déclaration, et là, vous parlez des gens qui étaient mandatés à raconter

 17   ces histoires parmi la population. Quand M. Misetic vous demande qui s'est

 18   vu confier cette mission, vous, vous mentionnez le ministère de

 19   l'Intérieur, et ensuite vous vous lancez dans les histoires de rumeurs, des

 20   histoires non confirmées, non vérifiées, vous dites que les gens ne

 21   voulaient pas prendre le risque, et cetera.

 22   Pour moi, il y a une grande différence entre demander à quelqu'un d'aller

 23   raconter une telle histoire à quelqu'un, et de propager ces histoires

 24   intentionnellement, et les histoires qui se racontent par la population en

 25   évoquant d'horribles histoires qui se sont produites dans le passé.

 26   Donc vous avez effectivement évoqué le ministère de l'information mais ce

 27   que vous avez dit après il ne s'agissait pas là de demander aux gens de

 28   raconter des fausses informations. Non. C'était autres choses. Est-ce que

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  1   vous avez des exemples que vous pouvez citer, des exemples où des gens se

  2   sont vus confier la mission de raconter les désinformations ? Donc je ne

  3   vous demande pas quel était le mécanisme de rumeurs et des histoires qui

  4   circulaient parmi la population mais de me dire si vous connaissez des cas

  5   précis où l'on demande à quelqu'un de raconter de telles histoires ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je sache, il y avait un prêtre - je ne

  7   me souviens pas de son nom - il travaillait à Slunj et on lui a demandé de

  8   raconter aux gens pourquoi ils devaient partir. Autrement dit, ils devaient

  9   préparer l'évacuation de Slunj.

 10   Mais je l'ai appris par la suite, pas contemparamment [phon]. Donc j'ai

 11   parlé aux gens, il n'y avait rien à entendre. Il fallait qu'on parte le

 12   plus rapidement possible. Même au niveau des structures politiques,

 13   personne ne nous encourageait à rester. Tout le monde nous encourageait à

 14   partir.

 15   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais que vous m'avez posé une question très

 17   précise, est-ce que je connais quelqu'un qui s'est vu confier cette mission

 18   ? Non, cela je ne le sais pas. Je sais qu'il y avait des gens qui allaient

 19   -- qui partaient parmi la population, qui s'infiltraient pour dire aux gens

 20   de partir.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne ce prêtre, est-ce que

 22   vous savez qui lui a dit de dire aux gens de partir ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, c'est Milan

 24   Martic qui lui a demandé de préparer la population à partir. Pourquoi ont-

 25   ils choisi Slunj ? Et-ce qu'ils ont -- est-ce qu'il y a d'autres prêtres

 26   dans d'autres zones ont reçu la même directive ? Je ne sais pas.

 27   En même temps, il y avait cette lettre aussi qui circulaient qui

 28   prétendument avait été signée par Milan Martic, en disant que tous les

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  1   civils devraient être évacués de la RSK. Peut-être qu'il y avait 50 % qui

  2   disaient -- non, non, ce n'est pas une vraie lettre, peut-être qu'il y en

  3   avait qui pensaient que c'était une lettre écrite par lui. Donc vous avez

  4   dit que vous avez compris, d'après vous, que c'était Milan Martic qui a

  5   demandé au prêtre de faire cela. D'où vous tenez cette information ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que j'ai parlé j'ai parlé avec des gens

  7   que j'ai rencontrés par la suite à Belgrade.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là, ce n'est pas très clair encore.

  9   Est-ce que vous voulez dire que vous avez entendu parler de cela par

 10   la suite, alors que vous étiez déjà à Belgrade ? Que c'est Milan Martic qui

 11   aurait demandé cela au prêtre ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le gouvernement en exil de la RSK -

 13   c'est comme ça qu'on l'appelait - a reçu des politiques serbes, enfin, au

 14   milieu de Belgrade, on leur a donné un bureau à une adresse précise.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, on n'a pas besoin de tous ces

 16   détails. Qui vous a dit que c'est Mile Martic qui a demandé au prêtre de le

 17   faire ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Des gens qui étaient très proches de ce

 19   prêtre, Mile Bosnic, que je connaissais personnellement avant le conflit,

 20   il était à l'époque présent à Slunj.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, je n'ai pas entendu le nom.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Mile Bosnic.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mile Bosnic, d'accord. Donc vous l'avez

 24   entendu de quelqu'un qui est très proche du prêtre.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Du prêtre et du gouvernement.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 27   Vous pourrez poursuivre.

 28   M. MISETIC : [interprétation]

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  1   Q.  Pourriez-vous nous dire qui était Mile Bosnic ?

  2   R.  Vous savez, en RSK, les nominations se faisaient sans cesse. Donc vous

  3   alliez vous coucher en tant que ministre de l'énergie, et puis vous

  4   réveillez, vous étiez ministre de l'information, c'était comme cela. Donc

  5   Bosnic était en politique à Knin, il était ministre de quelque chose, c'est

  6   sans doute un ministre sans portefeuille. Je ne sais pas.

  7   Q.  Est-ce que vous savez ce qui s'est passé à Petrova Gora et avant de

  8   commencer, pouvez-vous me dire où se trouve Petrova Gora ?

  9   R.  Petrova Gora, c'est un parc national, je ne sais pas si à l'époque,

 10   enfin à l'époque c'était un parc national. Je ne sais pas s'il l'est encore

 11   au jour d'aujourd'hui. Donc là-bas, il y avait des installations militaires

 12   et c'est là que nous avions notre QG. Quand les Unités spéciales sont

 13   arrivées de Belgrade, il fallait qu'on dégage de là. C'est là que Frenki

 14   s'est installé, depuis on n'a pas pu accéder. Donc ça a été leur QG au

 15   moment de l'attaque, le matin du 4.

 16   En l'espace d'un ou deux jours, à partir de l'attaque, après

 17   l'attaque nous avons envoyé une patrouille à Petrova Gora pour voir s'ils

 18   étaient encore. Il n'y avait plus personne là-bas. Cet endroit avait été

 19   incendié, il n'y avait personne sur place.

 20   Q.  Est-ce que vous avez reçu des infos vous informant de la façon dont cet

 21   endroit a été incendié ?

 22   R.  Nous pensons qu'ils l'ont fait eux-mêmes parce qu'ils se sont retirés.

 23   Q.  Qui cela ?

 24   R.  Frenki et ses hommes, la police spéciale.

 25   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez aussi des entretiens qui se sont

 26   déroulés à partir des installations de l'ONU entre le colonel Bulat et

 27   Momcilo Perisic. Puis il y avait aussi Jovica Stanisic qui a participé

 28   ainsi que M. Lilic, et vous avez reçu tout cela alors que vous étiez dans

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  1   votre base de l'ONU. Quel était le message qu'ils vous ont envoyé ?

  2   R.  Ils répétaient tout le temps la même chose, persévérer, c'était un mot,

  3   cela tenait en un seul mot sans aucune promesse d'assistance d'aide. Je

  4   dois dire qu'à l'époque, nous pensions encore qu'on allait, que la Serbie

  5   allait nous aider et que la Republika Srpska en Bosnie allait nous aider,

  6   parce qu'ils disaient qu'ils allaient envoyer les avions pour nous aider.

  7   Ils disaient qu'il y avait des troupes sur le chemin qui venaient en

  8   renfort. Nous avons eu cette réunion dans ce bureau de QG de l'ONU, mais

  9   ces gens que vous venez de mentionner Toso Pajic, le colonel Bulat, Toso

 10   Pajic c'était le ministre de l'intérieur.

 11   Moi, j'étais là aussi quand ils ont parlé avec ces gens, ils

 12   utilisaient l'interphone. Donc Toso Pajic a appelé Stanisic et on pouvait

 13   entendre la conversation, tout. Ce qui s'est passé c'est que le commandant

 14   du 21e Corps, le colonel Bulat, il faisait un rapport sur la situation en

 15   général à Perisic, en lui disant : voilà où nous en sommes, nous sommes

 16   encerclés; voilà ce que nous avons en face, et nous ne pouvons rien faire

 17   tout seul. Que proposez-vous, mon Général ? La réponse était : persévérez,

 18   persévérez.

 19   Avec Stanisic, c'était la même chose. Quand Toso Pajic l'appelait, il

 20   expliquait la situation, et il répondait de la même façon à peu près, la

 21   même façon que tout à l'heure, à nouveau, c'était persévérer, et ensuite

 22   rien, la ligne était coupée, était raccrochée. Puis du côté des politiques,

 23   on voulait voir ce que Lilic avait à dire. C'était exactement la même

 24   chose.

 25   Nus, qui étions là, nous avions l'impression qu'ils étaient tous

 26   assis au même endroit et qu'ils se sont regardés en se disant : écoutez,

 27   dites-leur de persévérer, point à la ligne. Parce qu'ils ont dit tous

 28   exactement la même chose, sans jouter quoi que ce soit d'autre.

Page 17965

  1   Q.  Du côté de l'ARSK, est-ce que vous avez tous tiré des conclusions de ce

  2   mot qu'on utilisait pour parler à vous, en vous disant de persévérer ?

  3   R.  Persévérer ne peut se traduire que comme signifiant une seule chose,

  4   continuez de combattre et quelque chose de positive en ressortira. Tous

  5   ceux qui étaient dans le bureau savaient bien que la bataille engagée ne

  6   pouvait pas être gagnée. Manifestement nous étions sacrifiés. Pourquoi est-

  7   ce que je pense que nous étions sacrifiés ? Parce qu'à partir du moment où

  8   les hommes qui se trouvaient sur le flanc gauche et sur le flanc droit ont

  9   battu en retraite sans que nous le sachions, cela signifie qu'il y avait un

 10   motif, et ce motif ce n'était pas le fait que le 21e Corps a été le dernier

 11   corps capable de combattre sur les Balkans. Non, et donc nous avons essayé

 12   de trouver une explication quant au motif qui avait justifié tout ce qui

 13   s'était passé.

 14   La conclusion obtenue c'est que Belgrade souhaitait marquer des

 15   points à bon marché au prix du sacrifice de 20 à 25 0000 hommes. Je n'ai

 16   jamais cru que les Croates allaient arriver à pied et tuer tout le monde.

 17   Ça, ce n'est pas ce que moi personnellement je croyais. Je ne pense pas non

 18   plus que Toso Pajic le croyait ou que Bulat le croyait.

 19   Q.  Je pense que  nous avons besoin d'explications quant à ce que

 20   signifiez, quant à ce que vous entendez par marquer des points à bon

 21   marché.

 22   R.  Ils souhaitaient que comme ça a été le cas pour Srebrenica que ce soit

 23   les Croates qui se voient reprocher tout cela. Donc l'idée c'était de

 24   présenter au monde des insinuations quant au fait qu'il y avait quelque

 25   chose qui ne sentait pas, dans tout ça, du genre ils sont aussi mauvais que

 26   nous. Ils viennent d'assassiner de nombreux civils à Topusko.

 27   Q.  Monsieur Lazarevic, en page 32 de votre déclaration écrite, vous dites

 28   dans le premier paragraphe complet, je cite :

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  1   "Etant donné le climat de peur qui avait été maintenu durant les quatre

  2   années précédentes et les nombreuses attaques ponctuelles qui ont fait

  3   suite à l'offensive croate, il y avait très peu de Serbes qui étaient

  4   désireux de rester à Topusko."

  5   Puis en page 33 de votre déclaration écrite, en haut de la page, vous

  6   dites, je cite :

  7   "En tout état de cause --"

  8   Bon, c'est un endroit où vous avez apporté une correction, mais, en

  9   tout cas, je lis :

 10   "-- en tout état de cause les gens étaient tellement terrorisés par la

 11   propagande gouvernementale qu'il n'y en avait très peu qui aurait pris le

 12   risque de rester en Croatie."

 13   Veuillez nous expliquer, je vous prie, ce que vous entendez par ces deux

 14   phrases; en particulier, lorsque vous parlez de propagande qui durait

 15   depuis quatre ans et du nombre limité de personnes qui étaient désireuses

 16   de rester en Croatie.

 17   R.  Je pense que nous en avons déjà parlé. Nous avons parlé du maintien de

 18   la tension au sein de la RSK, délibérément. A des moments ultérieurs, si un

 19   commandant de bataillon arrivait devant ces hommes et leur disait : les

 20   gars, évacuez vos familles; nous, nous restons pour nous battre, mais

 21   évacuez vos familles. Envoyez-les dans un endroit plus sûr.

 22   Dans une situation de ce genre, je ne pense pas que quiconque aurait

 23   été prêt à rester, et même ceux qui portaient l'uniforme s'efforçaient de

 24   partir. Il y a eu pas mal de désertion, des gens qui jetaient leur

 25   uniforme, qui sautaient dans une voiture ou dans n'importe lequel moyen de

 26   transport et qui simplement s'en allaient. A ce moment particulier, nous ne

 27   voulions pas que tout homme en âge de porter les armes se contente de

 28   partir. Peut-être que nous avions quelque part dans notre idée l'espoir que

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  1   nous pouvions l'emporter. Manifestement, nous avions tort, mais maintenir

  2   l'attention pendant la période d'existence de la RSK était une nécessité.

  3   Q.  Je vais vous poser une question précise. Vous avez dit dans votre

  4   déposition que, dans la poche où vous étiez enformé pendant l'opération

  5   Tempête, je crois que vous avez parlé de 5 000 hommes de l'ARSK et de 20

  6   000 civils qui se trouvaient là.

  7   R.  A peu près.

  8   Q.  Pourriez-vous expliquer pourquoi les soldats, autrement dit, les 5 000

  9   soldats s'étaient déjà retirés vers la Serbie, mais pourquoi est-ce que 20

 10   000 civils sont restés ?

 11   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir compris la question.

 12   Q.  Pourquoi est-ce que les 20 000 civils - je vais revenir un peu en

 13   arrière - votre situation dans le secteur nord avec le colonel Bulat a été

 14   négocié pacifiquement avec l'armée de Croatie, n'est-ce pas ?

 15   R.  Plus ou moins.

 16   Q.  Le colonel Bulat s'est rendu devant le général Stipetic de l'armée de

 17   Croatie, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  L'armée de Croatie a autorisé vos forces à partir vers Belgrade ?

 20   R.  En compagnie des civils.

 21   Q.  Non, ma question porte d'abord sur les soldats.

 22   R.  D'accord.

 23   Q.  Donc vos soldats de l'armée de la République serbe de Krajina ont été

 24   autorisés par la Croatie à traverser le secteur nord puis la Slavonie

 25   occidentale, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pour aller jusqu'à la Slavonie orientale puis en définitive jusqu'à la

 28   Serbie, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Exact.

  2   Q.  Pourriez-vous nous expliquer pour quelle raison les 20 000 civils qui

  3   étaient présents sur place sont partis avec vous aussi ?

  4   R.  La plupart d'entre eux n'étaient pas originaires de Topusko. Ils

  5   seraient restés dans un endroit où ils ne vivaient pas au départ.

  6   L'évolution de la situation était en train de changer. Cela ne les incitait

  7   pas à rester. C'était pour eux une façon de s'en sortir. Précisément, nous

  8   avions reçu un rapport indiquant que le 5e Corps attaquait les convois dans

  9   le sud, les convois qui essayaient de se rendre en Republika Srpska.

 10   Personne ne voulait y aller. Donc il était très important pour nous de

 11   négocier le retrait par la Croatie, ce qui s'est passé finalement. Mais il

 12   n'y avait pas que des soldats il y avait aussi des civils dans la zone de

 13   Topusko.

 14   Q.  Quelle incidence si tant est que cela a eu une incidence, les quatre

 15   années de terreur ont-elles eu sur la décision des civils qui ont décidé de

 16   partir ?

 17   R.  Une grande incidence, une grande influence, je crois, étant donné les

 18   pressions permanentes maintenues par notre gouvernement il était très peu

 19   naturel de vivre dans cet endroit dans ces conditions.

 20   Q.  Que voulez-vous dire par là ?

 21   R.  Etre en conflit avec soi-même n'est pas facile à régler, et tôt ou tard

 22   les Croates allaient tenter de s'emparer une nouvelle fois du territoire.

 23   Il fallait s'y préparer.

 24   Q.  D'accord. J'en arrive maintenant à votre arrivée en Serbie. Que s'est-

 25   il passé lorsque vous avez franchi la frontière serbe du point de vue des

 26   routes, qu'est-ce que vous avez vu ?

 27   R.  A partir du moment où finalement j'ai franchi la frontière, même si

 28   j'étais la septième voiture du convoi à ce moment-là, nous avons fini par

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  1   arriver dans le secteur de Sid et on m'a demandé de rester un peu en

  2   arrière avec plusieurs officiers de l'armée croate et de relever les noms

  3   des personnes qui franchissaient la frontière dans le convoi.

  4   Q.  Excusez-moi. Vous dites que l'on vous a demandé de relever les noms en

  5   compagnie des officiers croates ?

  6   R.  Oui, ou de la police croate, enfin des Croates en uniforme.

  7   Q.  D'accord.

  8   R.  Donc on relevait en quelques mots dans un calepin les noms des

  9   personnes qui franchissaient la frontière. On ne leur demandait pas leur

 10   grade, l'unité à laquelle ils appartenaient. On voulait simplement garder

 11   une trace du passage de ces gens de l'autre côté de la frontière. Cela m'a

 12   appris, m'a occupé pendant 25 à 30 heures, voyez-vous. Lorsque la dernière

 13   personne a franchi la frontière, j'ai franchi la frontière moi-même. A ce

 14   moment-là, j'ai garé ma voiture, et j'ai dormi pendant dix heures.

 15   Q.  Mais vous avez dit avoir vu des policiers serbes qui orientaient les

 16   gens vers le Kosovo.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Pourriez-vous nous expliquer sur ce point, nous dire ce que vous avez

 19   vu ?

 20   R.  Au moment où j'ai récupéré suffisamment pour estimer que je pouvais

 21   poursuivre mon voyage, j'étais en train d'entrer dans le secteur de Sid, et

 22   j'étais à la fin au bout du convoi, donc il a fallu beaucoup de temps, bien

 23   sûr, à toutes ces personnes pour franchir la frontière, et il y avait les

 24   fouilles. Ma voiture aussi a été fouillée, et cela m'a d'ailleurs pas mal

 25   ennuyé. J'ai poursuivi mon chemin vers la Croatie pendant quelques

 26   kilomètres, personne ne m'a plus fouillé, et j'allais chez moi. Donc je

 27   voulais emporter pas mal de choses dans ma voiture mais eux voulaient

 28   savoir ce qui avait dans ma voiture, et ce type qui m'a arrêté m'a présenté

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  1   des excuses, mais il m'a dit que c'était des ordres, ce n'était pas son

  2   idée dans un but d'accord.

  3   Il y avait cette route que nous avions empruntée qui s'appelle l'autoroute

  4   de la fraternité de l'unité, et qui part de Croatie, c'est une autoroute,

  5   et là, il y avait pas mal de policiers qui n'étaient pas des policiers de

  6   la police normale mais des policiers spéciaux. Ils avaient leur gyrophares,

  7   ils étaient un peu partout sur la route et ils disaient, Non, vous ne

  8   pouvez pas quitter l'autoroute, vous devez rester sur l'autoroute et vous

  9   dirigez vers le sud. Pour moi, cette expression "vers le sud," ça

 10   signifiait très clairement le Kosovo. Pourquoi est-ce qu'on aurait envoyé

 11   des dizaines de milliers de personnes vers Nis ? Evidemment, si Belgrade

 12   n'était pas prête à absorber ce flux d'arrivants Nis ne l'aurait pas été

 13   non plus. Donc vers le sud ça voulait dire aller encore plus vers le sud,

 14   vers le Kosovo. C'est la seule possibilité. Je conduisais un peu plus vite

 15   que les autres véhicules du convoi, il y avait des gens que j'ai donc

 16   laissé derrière moi, des véhicules que j'ai laissés derrière moi, mais je

 17   ne suis pas arrivé jusqu'à l'avant du convoi. A un moment, il y avait un

 18   morceau de la route qui était totalement désert et il y avait là des

 19   voitures de police qui étaient garées, mais personne à bord de ces

 20   véhicules donc, moi, j'ai réussi, à ce moment-là, à quitter l'autoroute ou

 21   la grande route.

 22   Q.  J'ai encore une question rapide et après quoi nous pourrons en

 23   terminer.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Peut-être, Monsieur le Président,

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Compte tenu de la longueur des réponses

 26   du témoin, je pense qu'il serait préférable de lui poser cette question

 27   demain.

 28   Monsieur Lazarevic, nous nous attendons à vous revoir demain à 14 heures 15

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  1   dans le prétoire numéro II, et je vous donne -- consigne -- je vous informe

  2   de l'interdiction qui vous est faite de parler du contenu de votre

  3   déposition à quiconque jusqu'à demain, qu'il s'agisse de ce que vous avez

  4   déjà dit dans votre déposition ou de ce que vous vous apprêtez à dire.

  5   Je prierais, maintenant, Mme l'Huissière de vous escorter hors du prétoire.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, j'aurais une

  9   question à vous poser : l'interrogatoire de ce témoin était prévu pour

 10   durer six heures, et vous en êtes arrivé à trois heures et demie.

 11   M. MISETIC : [interprétation] J'en aurai terminé en une demi-heure,

 12   Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Dans ces conditions, il est

 14   peut-être inutile de vous conseiller de demander au témoin des questions

 15   brèves, car nous avons constaté que le témoin a souvent tendance de ne pas

 16   se contenter de réponses simples et absolument précises mais de vous

 17   répondre avec des réponses assez longues.

 18   Nous suspendons l'audience jusqu'à demain, 3 juin, 14 heures 15,

 19   prétoire numéro II.

 20   --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 3

 21   juin 2009, à 14 heures 15.

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