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1 Le mercredi 17 juin 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez citer
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à
8 toutes les personnes présentes dans ce prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-
9 06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
11 Je voudrais informer les parties que nous avons réfléchi à la
12 possibilité de donner suite à la question de M. van Rooyen, et telles que
13 les choses se présentent maintenant, nous avons décidé de ne pas donner
14 suite, de notre côté.
15 Donc, Monsieur Waespi, vous pouvez en parler avec M. van Rooyen, et
16 comme vous nous l'avez déjà dit, vous allez nous dire quelle a été l'issue
17 de cet entretien.
18 Ensuite, nous passons en audience à huis clos.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos,
20 Monsieur le Président.
21 [Audience à huis clos]
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13 [Audience à huis clos partiel]
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15 [Audience publique]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
17 Je vais demander que l'on introduise le témoin dans ce prétoire.
18 On va encore un instant passer à huis clos partiel -- et même à huis
19 clos, je dirais. Vous allez comprendre pourquoi. Donc, il faut attendre,
20 Madame l'Huissière.
21 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Session à huis clos pour l'instant et
23 pour un petit instant.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos.
25 [Audience à huis clos]
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11 [Audience publique]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
13 Monsieur Mrksic, je voudrais aborder avec vous quelques questions, avant de
14 donner la possibilité à M. Misetic de vous poser ses questions, puisque
15 vous êtes ici comme son témoin.
16 Tout d'abord, chaque personne citée comme témoin est obligée de déposer.
17 Les Juges sont conscients que vous n'étiez pas enclin à venir déposer, que
18 vous vous attendiez à recevoir une injonction à comparaître; vous l'avez
19 reçue.
20 Je vous informe que l'article 77(A)(i) dit, de façon très précise,
21 que vous pouvez être considéré comme ayant commis un outrage au tribunal,
22 si, étant témoin devant une Chambre vous refusez de répondre à une
23 question, malgré la demande qui vous est faite par la Chambre. Autrement
24 dit, vous devez répondre aux questions qui vous sont posées. Et si vous ne
25 le faites pas, vous pouvez faire l'objet d'une procédure en outrage. Donc,
26 ne pas répondre correspond à une infraction. Et la peine maximale encourue
27 pour outrage au Tribunal, y compris la situation où l'on refuse à répondre
28 aux questions, je pense que la peine maximale est une peine de prison de
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1 sept ans -- sept années d'emprisonnement donc, ou bien une amende qui ne
2 dépasserait pas 100 000 Euros ou bien les deux. Donc, ce sont les peines
3 maximales qu'encourt la personne qui a commis un outrage au Tribunal, qui a
4 refusé de répondre aux questions.
5 En même temps, je voudrais vous informer de la chose suivante. Si l'on vous
6 pose des questions et si vous pensez qu'en répondant à ces questions vous
7 pourriez vous auto-incriminer, vous pouvez refuser de répondre à une telle
8 question, demander à ne pas avoir à répondre; et ensuite, les Juges vont
9 réfléchir et on va, soit vous donner la possibilité de ne pas répondre à la
10 question, mais on peut aussi vous obliger à répondre à la question. Cela
11 étant dit, votre réponse ne pourra, en aucun cas, être utilisée comme moyen
12 de preuve dans un procès intenté contre vous, correspondant à une
13 quelconque violation, mis à part le faux témoignage. Donc, si vous répondez
14 de façon véridique, ce que vous allez dire ne pourrait pas être retenu
15 contre vous.
16 Je vous dis aussi que là, il s'agit uniquement, évidemment, du Tribunal
17 pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Il n'est jamais arrivé, que je
18 sache, que de telles informations aient été utilisées dans d'autres
19 instances, devant les autres tribunaux. Les Juges ont demandé s'il existe
20 des intentions d'entamer des poursuites contre vous ailleurs. Nous savons
21 qu'il vous reste encore beaucoup d'années à purger, puisque vous avez été
22 condamné à une peine et vous attendez à être transféré dans le pays où vous
23 allez purger cette peine. Donc, il n'y a pas eu d'indication que d'autres
24 instances ailleurs voudraient éventuellement entamer des poursuites contre
25 vous.
26 Et puis, un dernier point. On nous a informé du fait que vous hésitiez à
27 venir déposer, vous n'êtes pas enclin à le faire parce que votre avocat ne
28 serait pas présent. Nous y avons réfléchi, et voici les conclusions
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1 auxquelles nous sommes arrivés pour l'instant. Donc, vous savez, depuis un
2 moment, qu'on allait peut-être vous citer comme témoin. D'après l'échange
3 de correspondance entre les parties et les Juges de la Chambre, nous avons
4 compris que ceux qui ont agi comme vos conseils dans le procès où vous
5 étiez l'accusé, ceux-là ont été informés de toutes les mesures prises afin
6 de vous voir comparaître en tant que témoin. Cependant, il n'y a pas eu de
7 mesures de prises pour qu'un conseil soit présent ici, alors même qu'ils
8 étaient au courant de cette possibilité et ils n'ont pas, non plus, informé
9 les Juges d'une quelconque préoccupation. La seule chose que nous ayons
10 comprise, c'est qu'on a dit au Procureur que vous préféreriez ne pas
11 déposer, si votre conseil n'était pas présent.
12 Il n'existe pas de droit à se voir assister, aider par un conseil, si vous
13 êtes ici en tant que simple témoin. Donc, on pourrait tout simplement
14 ignorer cette demande, mais ce n'est pas ce que l'on fait. On va demander
15 que l'on vous aide dans la mesure où un conseil sera présent dans ce
16 prétoire et il va vous donner des conseils quant à votre position de
17 témoin, la position dans laquelle vous vous trouvez en ce moment. Donc, on
18 va faire cela le plus rapidement possible, mais votre déposition va
19 commencer aujourd'hui.
20 Donc, on va faire tout ce que l'on peut et peut-être, déjà demain, il va y
21 avoir un conseil assis à côté de vous. Cela étant dit, on ne voit pas
22 pourquoi ne pas commencer votre déposition aujourd'hui.
23 Les Juges ont demandé à la partie qui vous a cité de ne vous poser
24 aucune question qui risquerait, de près ou de loin, de vous incriminer pour
25 que vraiment il n'y ait pas de souci, objectivement parlé, de vous voir
26 vous incriminer, auto-incriminer par les réponses données.
27 Donc, on va vous demander de faire une déclaration solennelle, à
28 présent. On va commencer par votre déposition et en même temps, si vous
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1 poursuivez à souhaiter vous voir représenter par un conseil ou si vous
2 souhaitez qu'un conseil soit présent, d'ores et déjà, dans ce prétoire, on
3 va faire en sorte que ceci se fasse le plus rapidement possible. Donc,
4 c'est la situation dans laquelle nous nous trouvons à présent.
5 Est-ce que vous l'avez bien compris ? Est-ce que vous avez compris la
6 situation telle qu'elle est ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, moi, j'ai bien compris
8 ce que vous m'avez dit. Mais personne ne les a convoqués, mes avocats. Il y
9 en a un qui n'a pas de visa; l'autre, il a un visa, mais je ne vois pas où
10 est le problème. Ils entretiennent une correspondance avec la Défense.
11 Donc, je ne vois pas pourquoi on fait de moi un bouc émissaire alors qu'il
12 y en a d'autres qui sont venus, avec injonction à comparaître ou non, mais
13 étaient assistés par les avocats. Donc moi, je compte sur vous, parce que
14 j'ai peur, et je compte sur vous pour m'avertir si jamais je fais quelque
15 chose qui risquerait de m'incriminer. Mais je m'attends aussi à faire
16 valoir mes droits parce que vous savez, il y a eu pas mal d'exceptions qui
17 ont été faites lors de mon procès, à mon détriment. Moi, je ne demande pas
18 à être récompensé. Je demande à faire valoir et jouir de mes droits.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'article du Règlement qui
20 vous donne le droit à être représenté par un conseil. Vos conseils ont eu
21 la possibilité de faire une demande, de nous contacter. Ils ne l'ont pas
22 fait pendant des semaines. Il n'y a pas de fondement, juridiquement, pour
23 que vous soyez représenté par un avocat, en tant que témoin. Donc, on ne
24 fait aucune exception aux règles. Vous, vous n'avez pas adressé la Chambre
25 en demandant à être représenté par un avocat. Vos conseils ne l'ont pas
26 fait non plus. Et je peux vous dire que finalement, ce qu'on est en train
27 de faire ici, c'est une exception à la règle, à la règle générale. Parce
28 que ce qui se passe ici, c'est que vous voyez des témoins qui viennent
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1 répondre aux questions posées par les Juges sans être pour autant
2 représentés par un avocat. C'est la règle. Et si vous vouliez que l'on
3 fasse une exception à cette règle, vous auriez dû prendre les mesures
4 adéquates, ou vos avocats auraient pu le faire.
5 En même temps, j'ajoute que pour vous tranquilliser et pour que vous
6 soyez en paix avec vous-même, j'ai demandé donc que l'on rentre en contact
7 avec l'OLAD pour voir s'ils peuvent faire venir un avocat pour qu'il soit
8 présent ici, avec vous; et nous allons tout faire pour faire droit à cette
9 demande. Donc, les membres du personnel de cette Chambre de première
10 instance vont s'atteler à la tâche et vont commencer à rechercher un avocat
11 qui va pouvoir vous aider.
12 En même temps, si cela va vous aider, on vous dit qu'on est tout à
13 fait prêt à le faire. Cela étant dit, nous avons demandé à M. Misetic -
14 c'est lui qui va vous poser les questions - de ne pas poser de questions
15 aujourd'hui portant sur les sujets qui pourraient éventuellement vous
16 incriminer. Et peut-être que déjà demain, nous allons pouvoir faire droit à
17 votre demande et satisfaire votre désir. Mais je dois vous dire que nous
18 devons, nous allons commencer avec votre déposition aujourd'hui.
19 Est-ce que vous l'avez compris ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai compris, Monsieur le Président,
21 et je compte sur votre honnêteté.
22 J'aurais aimé avoir un avocat ici. J'aurais préféré ça. Il y avait
23 des gens qui sont venus de l'Autriche, d'autres pays étrangers, et à chaque
24 fois, ils venaient accompagnés des avocats qui ont assisté à la procédure.
25 Si j'ai été condamné, cela ne veut pas dire que je ne peux pas être assisté
26 par mon avocat. Parce que moi, je ne sais pas ce que je vais répondre, vous
27 savez. Peut-être que je vais répondre quelque chose spontanément qui n'est
28 pas dans mon intérêt et que je ne devrais pas dire. Je ne suis pas un
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1 expert.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais laissez-moi vous dire les choses
3 bien clairement. Même si un avocat est présent, vous ne serez pas en mesure
4 de consulter cet avocat en dehors de ce prétoire, parce qu'un avocat n'aura
5 pas le droit de discuter avec vous ou de parler avec vous du fond de votre
6 témoignage. Il n'y a qu'une seule chose, il ne s'agit pas de savoir si
7 c'est dans votre intérêt ou pas. Ce que nous voulons, c'est que vous
8 apportiez des réponses qui soient conformes à la vérité et rien d'autre.
9 Que ce soit en votre faveur ou pas, ce n'est pas le problème. Maintenant,
10 si seulement vous avez peur que telle ou telle réponse risque de vous
11 autoincriminer, alors, dans de telles circonstances, nous pouvons envisager
12 d'étudier si l'obligation de répondre à cette question existe toujours ou
13 non. Et à ce moment-là, vous pourrez consulter votre avocat. Donc, il ne
14 s'agit pas de consulter l'avocat pour des questions de fond, comme je le
15 répète encore une fois.
16 Donc, je suis heureux d'entendre que vous espérez que cette procédure
17 soit équitable, non seulement à l'égard des accusés, mais également, sachez
18 que nous serons le plus équitable possible également à l'égard des témoins.
19 Donc, il s'agit pour vous de connaître non seulement vos obligations, mais
20 aussi vos droits.
21 Alors, sur la base de tout cela, j'aimerais maintenant vous demander
22 de déclarer solennellement que vous direz la vérité et rien que la vérité.
23 Je vous demanderais donc de vous lever et de faire cette déclaration
24 solennelle.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN : MILE MRKSIC [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Je vous demande de
2 vous asseoir, et je m'adresserai à vous en vous appelant M. Mrksic. C'est
3 M. Misetic maintenant qui va commencer à vous poser des questions.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant que M. Misetic me pose des questions,
5 pourrais-je avoir une minute ou deux.
6 Tout d'abord, j'ai dit que de nouvelles méthodes étaient appliquées à
7 mon égard. Ce que je voulais dire par là, c'est que j'ai eu aussi le même
8 problème lors de mon procès, (expurgé) devait être cité dans
9 mon procès. Il avait reçu une injonction à comparaître et ensuite, il n'y a
10 pas eu de suivi. C'est la raison pour laquelle, moi, j'ai suivi cette même
11 démarche, à savoir j'ai attendu de recevoir l'injonction à comparaître.
12 Le Tribunal semble avoir exercé une certaine pression et ensuite, on
13 m'a dit qu'il fallait que je comparaisse, et je n'avais pas l'impression
14 que ces questions seraient menacées. Ensuite, j'ai eu un médecin qui est
15 venu me voir en toute urgence, qui m'a demandé de procéder à un bilan
16 médical pour l'injonction à comparaître. Mais là encore, il n'y a pas eu de
17 suivi. Ensuite, j'ai eu un officiel qui est venu me voir avec l'injonction,
18 qui m'a demandé de signer cette injonction. J'ai essayé de consulter mon
19 avocat. On ne m'a rien dit. J'espérais que mon avocat serait présent, mais
20 puisqu'il n'est pas présent, je peux vous dire que je répondrai à vos
21 questions, que je ne dirai que la vérité, rien que la vérité.
22 Mais maintenant, je peux vous dire que je n'ai jamais témoigné depuis
23 maintenant très longtemps. Je n'ai fait aucune autre déclaration à la
24 presse ou à la télévision. Je suis demeuré parfaitement silencieux pendant
25 longtemps, et je ne voudrais certainement pas porter préjudice à qui que ce
26 soit. Par conséquent, ma position est une position ici difficile, et c'est
27 à vous de prêter attention au fait que je fais tout cela alors que mon
28 avocat n'est pas présent.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Hedaraly.
2 M. HEDARALY : [interprétation] Il y a la question du nom qui a été
3 mentionné et qui devrait être expurgé.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le
5 Greffier, 49, ligne 19.
6 M. MISETIC : [aucune interprétation]
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis désolé. J'avais oublié qu'il
8 s'agissait d'un témoin protégé.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demanderais de bien vouloir
10 écouter attentivement les questions qui vont vous être posées par M.
11 Misetic, et je vais vous demander d'y répondre en vous concentrant
12 essentiellement sur les questions qui vous sont posées.
13 Je comprends que vous êtes parfaitement conscient du fait que M.
14 Misetic défend les intérêts de M. Gotovina. Il va être le premier à vous
15 interroger. Et je tiens à vous assurer que la Chambre est parfaitement
16 consciente que peut-être la situation n'est pas facile pour vous, mais cela
17 ne change en rien la situation. Sachez que nous en sommes parfaitement
18 conscients que la situation n'est pas facile pour vous.
19 Interrogatoire principal par M. Misetic :
20 Q. [interprétation] Bonjour, Général Mrksic.
21 R. Bonjour, Monsieur Misetic.
22 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous donner votre nom.
23 R. Je m'appelle Mile Mrksic. Je suis lieutenant général à la retraite.
24 Q. Je tiens à vous dire que je vais tout faire pour que les questions que
25 je vais vous poser soient le moins pénibles ou stressantes pour vous. Si à
26 tout moment vous avez le moindre problème, si vous ne vous sentez pas bien,
27 je vous demanderais de bien vouloir en informer le Président. Vous
28 comprenez bien ?
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1 R. Oui, tout à fait.
2 Q. Je vais commencer par vous poser quelques questions préliminaires.
3 Tout d'abord, pouvez-vous nous dire quand vous êtes devenu chef d'état-
4 major de l'armée de la RSK ?
5 R. Je pense que c'est après la chute de la Slavonie occidentale, lorsque
6 le commandement a été remplacé, le commandant Celeketic. Ils cherchaient un
7 individu qui puisse créer un climat de sécurité, qui puisse avoir une
8 influence sur les grands dirigeants de la RSK de façon à ce que l'on puisse
9 se concentrer sur la recherche, le règlement pacifique de la situation.
10 C'était un processus très difficile. On m'a appelé à plusieurs
11 reprises au téléphone chez moi. On m'a demandé d'accepter cette mission en
12 m'informant qu'effectivement cela allait être très difficile.
13 Q. Pouvez-vous vous concentrer sur la réponse aux questions que je vous
14 pose. Nous aurons le temps par la suite d'avoir d'autres détails.
15 R. Je comprends.
16 Q. Ce sera plus facile si vous vous concentrez vraiment sur la réponse à
17 mes questions.
18 Pouvez-vous nous dire où vous vous trouviez physiquement lorsque vous avez
19 été contacté pour la première fois et lorsque l'on vous a demandé de
20 devenir le chef d'état-major de l'armée de la RSK ?
21 R. Le commandant de l'armée de la Krajina serbe. Auparavant, j'étais
22 adjoint au chef des forces terrestres de l'armée de la République fédérale
23 de Yougoslavie et de Monténégro. Juste avant cela, j'étais conseiller
24 auprès du ministère de la Défense, c'est-à-dire entre février 1995 et mai
25 1995, lorsque j'ai pris mes fonctions en tant que commandant de l'armée de
26 la RSK.
27 Avant cela, si cela vous intéresse, j'étais commandant du corps
28 permanent --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Misetic vient de vous poser des
2 questions bien précises. Où vous trouviez-vous ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] A Belgrade.
4 M. MISETIC : [interprétation]
5 Q. Maintenant --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais peut-être vous interrompre, mais
7 les questions sont beaucoup plus simples que ce que vous pensez. M. Misetic
8 vous demande juste où vous vous trouviez --
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais vous savez comment sont les choses.
10 Nous avons envie de dire le plus possible, donc je suis désolé. Je vais
11 essayer de m'en tenir à la simple réponse aux questions qui sont posées.
12 Mais vous savez, je n'ai pas l'habitude de témoigner. Je n'ai pas
13 d'expérience dans ce domaine. Jamais je ne suis comparu dans un tribunal
14 quelconque, que ce soit pour la moindre amende de circulation.
15 M. MISETIC : [interprétation]
16 Q. D'accord, nous avons bien compris. Est-ce que vous pouvez nous
17 expliquer un peu plus en détail la situation lorsque vous étiez conseiller
18 auprès du ministère de la Défense. C'était de quel pays ?
19 R. Je crois que c'était Serbie-et-Monténégro. Je ne sais plus. Vous savez,
20 les noms changeaient souvent. Je ne sais plus si c'était la République
21 fédérale de Yougoslavie et Monténégro. Je ne sais plus. Je crois que le
22 Monténégro faisait encore partie de cette Yougoslavie à ce moment-là. Ou
23 peut-être était-ce la République fédérale de Yougoslavie. Je ne sais plus.
24 C'est également possible.
25 Q. Qui vous a contacté pour que vous quittiez votre poste de conseiller
26 auprès du ministère de la Défense de la RFY pour devenir commandant des
27 forces armées de la RSK ?
28 R. C'est le chef d'état-major général, ou, plutôt, le ministre de la
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1 Défense qui m'a contacté. J'étais invité à un entretien, ou plutôt, le
2 ministre m'a dit qu'il fallait que je me rende à une réunion, une réunion
3 qui, je crois, devait se tenir à Dedinje, une réunion avec le président
4 Milosevic, où il devait y avoir également le président de la RSK, le
5 président Martic, qui était en situation difficile à cause de la chute de
6 la Slavonie occidentale et à cause de tout ce qui se passait. On me
7 demandait de venir à cette réunion pour être nommé commandant et chef
8 d'état-major de l'armée.
9 Q. Vous avez été contacté par le chef de l'état-major général, mais
10 comment s'appelait-il ?
11 R. Je ne sais plus si c'est lui ou si c'est le ministre de la Défense. En
12 fait, je crois que non, c'est le ministre de Défense qui m'a demandé de me
13 rendre à cette réunion. Je ne suis plus tout à fait sûr. En tout cas, le
14 chef d'état-major à l'époque était le colonel Perisic, et le ministre de la
15 Défense était à l'époque, Pavle Bulatovic, qui est décédé aujourd'hui.
16 Q. Vous ont-ils expliqué pour quelle raison vous deviez vous rendre à
17 cette réunion ?
18 R. A cette réunion, ils n'ont fait qu'une tentative de me demander
19 d'assumer ces fonctions-là. Ils m'ont dit qu'il n'y avait que les personnes
20 les plus compétentes qui pouvaient assumer de telles fonctions pour
21 améliorer la situation après la chute de la Slavonie occidentale. Il
22 recherchait donc une personne qui puisse être acceptable, qui puisse être
23 acceptée, aussi bien par les combattants que par la population, puis aussi
24 qui puisse être acceptée facilement par les autorités de Croatie et, bien
25 sûr, par le président Milosevic. Le président était présent à cette réunion
26 et a déclaré qu'ils avaient choisi la personne la plus compétente à leurs
27 yeux pour assumer ces fonctions-là.
28 Q. Que vous a-t-on dit lors de cette réunion ? Comment vous a-t-on décrit
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1 la mission qui vous attendait ?
2 R. Lors de cette réunion, je n'ai pas accepté à ce moment-là encore cette
3 mission. Donc, le détail de la mission ne m'a pas été expliqué. En fait, la
4 seule discussion portait sur -- enfin, comment puis-je m'expliquer ? Nous
5 avons surtout discuté de savoir comment ils allaient me convaincre
6 d'accepter cette mission. Si vous voulez, c'était seulement la première
7 réunion. Il y en a encore eu deux ou trois par la suite. Il y a eu aussi
8 des conversations par téléphone. Ils m'ont appelé chez moi. Il y a eu aussi
9 des conversations téléphoniques privées, et c'est à la fin que je me suis
10 rendu compte qu'il fallait que j'accepte cette mission.
11 En ce qui concerne le détail de la tâche et de la mission qui m'attendait,
12 c'est quelque chose qui m'a été expliqué plus tard, à savoir quand et
13 comment travailler. C'est justement ce dont j'aimerais parler ici, parce
14 que c'est quelque chose qui a été un lourd fardeau pour moi, et personne ne
15 m'a jamais posé de questions à ce sujet.
16 Q. Je vous poserai des questions à ce sujet dans quelques instants.
17 Mais pour le moment, pouvez-vous nous dire essentiellement comment
18 vous aviez compris, ou plutôt, pour quelle raison, à votre avis, M.
19 Milosevic, M. Perisic avaient eu besoin de prendre part à ce processus de
20 décision pour savoir qui allait être le commandant des forces armées de la
21 RSK ? A votre avis, pourquoi la décision était-elle prise à ce niveau-là ?
22 R. Monsieur Misetic, si vous me le permettez, j'aimerais vous dire la
23 chose suivante : ce n'est pas eux qui devaient décider de tout cela. Parce
24 que d'après la loi, ils n'avaient pas les pouvoirs de m'envoyer sur le
25 territoire d'une autre république ou d'un autre Etat sauf si je l'acceptais
26 moi-même.
27 Donc, en fait, c'était M. Martic qui était celui qui devait décider.
28 C'est lui qui avait fait la demande au départ, parce qu'il savait que
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1 j'étais né dans cette région, que j'étais en mesure d'assumer ces
2 fonctions, et il savait que j'étais la seule personne qui puisse avoir une
3 influence quelconque sur les personnes qui habitaient dans cette région.
4 Donc, c'est M. Martic qui a demandé cela au départ.
5 Eux, ils n'étaient pas vraiment contents de cela, mais ils savaient
6 qu'il fallait bien et que c'était dans leur intérêt de trouver quelqu'un
7 qui puisse permettre de stabiliser quelque peu la situation.
8 M. MISETIC : [interprétation] Je voudrais que l'on présente la pièce 65 ter
9 1D1077.
10 Q. Je vais vous montrer ici l'extrait d'une conversation téléphonique
11 interceptée entre MM. Milosevic et Perisic le 18 mai, et je voudrais
12 informer la Chambre qu'il y a la traduction anglaise de ce document.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que --
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 18 mai, oui ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous parlons ici d'un extrait d'une
16 conversation téléphonique interceptée le 18 mai.
17 M. MISETIC : [interprétation]
18 Q. Si vous regardez ce texte, il s'agit de M. Martic.
19 R. Oui, Martic.
20 Q. Non. Il s'agit de M. Perisic et M. Milosevic.
21 R. D'accord.
22 Q. Si nous regardons le texte un petit peu plus bas, ils se disent
23 bonjour. Et ensuite, on entend l'un des deux dire :
24 "Je viens de recevoir un rapport. M. Martic est absolument furieux."
25 R. Oui.
26 M. MISETIC : [interprétation] Je vais vous donner lecture de ce texte
27 --
28 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
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1 M. MISETIC : [interprétation]
2 Q. "Il est devenu absolument furieux lorsqu'il a entendu la nomination de
3 Mrksic."
4 Je voudrais finir de vous donner lecture de cette partie qui est
5 importante, et il a déclaré :
6 "Maintenant, il ne sait pas comment éviter sa participation. Il s'est
7 mis d'accord avec M. Karadzic pour prendre des mesures pour une unification
8 urgente de façon à ce que M. Karadzic devienne président et Martic,
9 commandant de l'armée. Donc, cela permettrait d'éliminer à la fois MM.
10 Mrksic et Mladic, avec M. Karadzic comme premier ministre."
11 Ensuite, si nous tournons la page en anglais --
12 R. Oui.
13 Q. Dans la version B/C/S, il est dit la chose suivante :
14 "Voilà ce que nous allons faire. Je veux Mrksic dans mon bureau demain
15 matin à 7 heures.
16 "Très bien. Parce qu'il va à cette réunion."
17 Vous savez où ?
18 R. Oui, exactement. Ça doit être effectivement dans l'un de ces deux
19 endroits où l'on m'a proposé, justement, d'assumer ces fonctions --
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous demander d'attendre. M.
21 Misetic est en train de vous donner lecture d'un document. Je vous
22 demanderais de ne pas le commenter tout de suite. C'est après avoir donné
23 lecture de ce document qu'il vous posera une question. Donc, s'il vous
24 plaît, attendez sa question pour donner une réponse.
25 Veuillez procéder, Monsieur Misetic.
26 M. MISETIC : [interprétation]
27 Q. Je poursuis la lecture du document :
28 "Et dis à Mile de ne pas s'inquiéter. La réunion se passera très bien. Tout
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1 se passera très bien au sein du gouvernement. Après tout cela, il n'y aura
2 pas de conséquences. Toutes ces différentes démarches n'auront pas de
3 conséquences."
4 R. [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
6 M. MISETIC : [interprétation] Si nous pouvons tourner la page encore une
7 fois.
8 Q. Au milieu de la page, vous voyez :
9 "Voilà ce que je vais faire avec Loncar, il ne faut pas s'inquiéter."
10 Et ensuite, Milosevic dit :
11 "Dites-lui de communiquer avec moi et de n'accepter aucun ordre de Martic."
12 Donc, ma question est la suivante : est-ce que vous vous souvenez avoir eu
13 une conversation avec M. Milosevic ou M. Perisic ou les deux ?
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Russo.
15 M. RUSSO : [interprétation] Ce n'est pas que cette question me pose
16 forcément problème, mais je m'oppose à la procédure qui consiste à montrer
17 un document à un témoin qui est en interrogatoire principal, qu'on lui lit
18 le document. On n'a pas justifié pourquoi on présente ce document. On n'a
19 pas dit qui parle, ce que ces intervenants disent. Je pense que cela
20 guidait le témoin de façon indue dans ses réponses. On doit d'abord lui
21 demander s'il est au courant de la tenue de cette conversation, et avant
22 qu'on lui montre le document, on doit lui poser des questions sur sa
23 teneur, avant qu'on ne lui dise ce qu'ont dit certains intervenants.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous ne vous opposiez
25 pas à cette question. Ce que vous avez dit était bien compris par Me
26 Misetic. Est-ce que ceci était déjà repris dans la question précédente, je
27 ne sais pas. Mais puisque la question a été posée, le témoin peut y
28 répondre.
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1 M. MISETIC : [interprétation] Oui, je vais poser la question.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vous a demandé si vous aviez eu à ce
3 moment-là des conversations avec M. Milosevic et avec M. Perisic.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ou Maître Misetic, je
5 n'ai pas la moindre idée de ce que vous me montrez. C'est la première fois
6 que je vois ce document. Je n'ai pas non plus eu l'occasion d'entendre
7 parler de ces conversations. Il y a eu une réunion de l'assemblée au cours
8 de laquelle quelqu'un est venu vers moi et m'a dit d'aller au poste de
9 commandement.
10 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu le lieu.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Et à ce moment-là, ils ont dit : voilà, à
12 Karadjordjevo, le président t'y attends. Le président Milosevic. Je suis
13 content que vous me posiez la question, parce que ça me permet d'en parler.
14 M. MISETIC : [interprétation] Je lui ai posé la question parce qu'il a dit
15 qu'il avait été choisi par M. Martic. Pour ce qui est de la question de la
16 nature directrice de la question, je précise les circonstances. Je cite la
17 décision de la Chambre d'appel du 1er février 2008, qui était un appel à un
18 recours formé contre une tentative de récuser son propre témoin, et la
19 Chambre se prononce sur la marge de manœuvre qu'on a en interrogatoire
20 principal. C'est de chaque question, que ceci est autorisé.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a aussi une loi qui dit que le
22 Tribunal connaît les lois, mais c'est bien que vous l'ayez rappelé.
23 Monsieur Russo, je suppose que vous comprendrez la position de la Défense.
24 Elle n'a pas eu l'occasion de s'entretenir au préalable avec le témoin.
25 M. RUSSO : [interprétation] Je dirais d'abord que je ne connais pas cette
26 décision de la Chambre d'appel. Est-ce que la Chambre a le pouvoir --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enfin, je disais ça en guise de boutade
28 pratiquement. Mais je pense avoir dit que je n'avais pas un souvenir
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1 parfait maintenant de cette décision prise en appel. Si nous examinons
2 cette décision, et vous aussi, nous verrons que faire.
3 M. RUSSO : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président. Mais tant
4 qu'il n'y a pas de décision, mon objection demeurera pour ce qui est du
5 fait de présenter un document à un témoin et en ayant l'intention de poser
6 des questions directrices.
7 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
8 M. MISETIC : [interprétation] Je dois redire ceci. Pour ce qui est de
9 l'équité de la procédure, si nous étoffons cette question, par exemple,
10 qu'a fait l'Accusation dans la présentation de ses moyens, elle a présenté
11 un témoin 92 ter et elle a contourné la question de nature directrice en
12 disant que c'est un 92 ter. Nous n'avons pas l'occasion de le faire, de
13 recourir au 92 ter. Donc il faudrait que l'équité prévale ici aussi.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous verrons, mais votre objection
15 permanente, Monsieur Russo, restera consignée.
16 M. MISETIC : [interprétation] Merci.
17 Peut-on verser ce document au dossier.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Russo.
19 M. RUSSO : [interprétation] Objection, parce qu'il n'y a pas suffisamment
20 de fondement apporté.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, donnez une cote
22 provisoire.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1408 [comme interprété]
24 pour identification.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Misetic.
26 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Q. Monsieur le Témoin, vous faites état d'une réunion de l'assemblée.
28 Quelle a été l'issue de cette réunion s'agissant de votre désignation ?
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1 R. C'est qu'il y a eu une discussion sur la responsabilité de Mikelic à
2 cause de la chute de la Slavonie occidentale. On a parlé aussi de la
3 responsabilité de Celeketic. Mais tout ce dont je me souviens, c'est que
4 j'étais nommé "commander" et qu'on m'a dit, après la réunion parlementaire,
5 que je devais aller à la villa de Karadjordjevo où se trouvait Milosevic et
6 qu'il m'y attendait. J'y suis allé avec les gens chargés de ma sécurité
7 sans tarder pour avoir une conversation. Nous avons eu une conversation
8 d'environ deux heures ou plus. C'est de cela que j'aimerais parler ici,
9 parce que cette conversation, c'était vraiment la clé de nous deux. Elle
10 était essentielle pour moi cette conversation, essentielle pour tout ce qui
11 s'est passé après aussi. Pourtant, on n'a montré aucun document, on n'a
12 montré aucune note venant de cette réunion.
13 On dit ici que Martic n'était pas favorable à ma désignation. C'est
14 ce que vous essayer de montrer. Dans certains documents, on voit qu'il
15 s'est plaint du fait que j'ai été désigné. C'est vrai. Mais les
16 circonstances l'ont forcé à m'accepter, parce qu'il savait, comme le
17 savaient les commandants précédents --
18 Q. Finissez juste la phrase. Il savait, comme les commandants précédents,
19 quoi ?
20 R. Il savait que j'étais un commandant différent, que j'étais un
21 professionnel qui ne s'intéressait pas à la chose politique. Je demandais
22 simplement que les missions soient exécutées et que je voulais imposer des
23 questions qui devaient être résolues.
24 Je n'avais aucun problème avec les hommes qui représentaient
25 l'autorité, que ce soit Mladic, Karadzic ou Milosevic. Pour moi, la seule
26 autorité, c'est le peuple.
27 Q. Vous verrez, c'est un signe de communication entre nous. Si je lève la
28 main, je vous demande d'arrêter pour que l'interprétation se termine, puis
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1 je vais vous poser une question.
2 Parlons de cette réunion dont vous parlez que vous avez eue à Karadjordjevo
3 avec le président Milosevic. Ça s'est passé quand, tout d'abord ? Ça c'est
4 ma première question.
5 R. C'est exact. Ça s'est passé juste après la réunion parlementaire. Il
6 m'a fallu, disons, deux heures pour aller de Borovo Selo à Karadjordjevo.
7 Nous sommes passés par Ilok. C'était la séance parlementaire dans l'après-
8 midi, je pense. Mais je ne me souviens plus exactement.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, j'ai deux choses à vous
10 demander. D'abord, ne donnez pas de détails s'il ne vous est pas demandé.
11 On vous a demandé, en l'occurrence, quand cette conversation avait eu lieu.
12 Maintenant vous nous dites par où vous êtes passé pour aller à cet
13 endroit. Ça ne va nécessairement intéresser Me Misetic. Dites simplement :
14 Deux heures après la séance parlementaire ou le 24 mai à 15 heures. Essayez
15 de vous concentrer sur les questions qui vous sont posées et d'y répondre.
16 Deuxième chose, vous parlez très vite. Puis-je vous demander de ralentir,
17 mais aussi de ne pas oublier de faire une pause entre les questions et les
18 réponses. Si vous avez fini de répondre, les interprètes doivent encore
19 interpréter vos derniers mots. Ça prend un certain temps. Me Misetic attend
20 que l'interprétation soit terminée, avant de poser la question suivante.
21 Si vous commencez à ajouter quelque chose à votre réponse, alors que
22 Me Misetic attend encore que les interprètes aient terminé de parler, les
23 interprètes ne parviennent plus à vous suivre. De toute façon, Me Misetic
24 est déjà satisfait de la réponse que vous avez fournie et veut vous poser
25 une autre question.
26 Essayez de garder ceci à l'esprit.
27 Maître Misetic, poursuivez.
28 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Vous rencontrez le président Milosevic à Karadjordjevo. Que vous dit-il
2 ?
3 R. Si je me souviens bien, parce que je n'ai pas de documents ni rien
4 d'écrit, j'ai dû les rendre après la chute de la Krajina. Je n'ai pas de
5 notes officielles, de notes de service, rien. Mais au fond, ça revient à
6 dire ceci.
7 J'avais déjà été envoyé là avant. Avant la séance parlementaire,
8 j'avais été informé de la situation qui prévalait en Krajina, parce que
9 plusieurs corps m'avaient envoyé des rapports, ce qui fait que je
10 connaissais déjà la nature de la situation, et j'ai pu en parler avec
11 Milosevic.
12 Au fond, on a dit qu'il n'était plus possible de trouver une solution
13 militaire. Il fallait une situation politique. La Slavonie occidentale nous
14 avait montré que les forces croates s'étaient tellement accrues que le
15 rapport de force était modifié et que nous devions essayer de modifier la
16 perception qu'avaient nos dirigeants, mais aussi la conception qu'avaient
17 le peuple de la situation sur le terrain, qu'il fallait essayer de faire
18 comprendre à la population qu'elle devrait accepter la partie adverse et de
19 rester sur place. Puis je lui ai demandé : Comment on va y parvenir ? Et il
20 m'a répondu que : Les dirigeants, le président, mais aussi Mikelic, le
21 président du parlement, qui était censé partir à la retraite à ce moment-
22 là, que je devrais leur parler, m'a-t-il dit, et que je devrais faire jouer
23 mon autorité pour essayer d'empêcher l'unification de la République de la
24 Krajina serbe et de la Republika Srpska, parce que selon les normes
25 internationales, c'était inacceptable et que ça reviendrait à jeter de la
26 poudre aux yeux de la population. Il m'a dit que je devais agir aussitôt
27 dans l'armée, prendre des mesures immédiates pour que les gens changent
28 d'attention, parce que ils étaient déjà préparés à partir. En somme, il me
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1 disait de faire tout ce qui était dans mes possibilités pour que les gens
2 fassent confiance à l'armée.
3 Il m'a dit : Ici, tu as cinq ou six mois, jusqu'en novembre, pour
4 qu'il y ait un nouveau climat dans l'armée. Je voulais établir plusieurs
5 corps qui chacun aurait une brigade de réserve. Il fallait comprendre que,
6 logistiquement, on ne pouvait pas partir en guerre, que ce n'est pas non
7 plus raisonnable, qu'il faudrait essayer de trouver d'autres méthodes
8 permettant une coexistence sur le terrain.
9 Milosevic m'a dit : Mile, je sais que la Slavonie occidentale, c'est loin,
10 que Knin et Vukovar sont loin aussi, mais je veux que tu t'occupes des
11 quatre corps et je vais donner les mêmes missions aux autres commandants.
12 Ma mission à moi, c'était de modifier la perception qu'avait la population
13 du rôle joué par l'armée. Une fois que c'était réalisé, ce serait facile de
14 convaincre les gens qu'ils devaient rester.
15 Puis il m'a dit : Mets ta patte sur tous les programmes de la
16 télévision.
17 Q. Bien, parlons-en.
18 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez afficher la
19 pièce D923.
20 Q. Vous allez voir un document à l'écran.
21 Avez-vous, après l'opération Tempête, envoyé un rapport au chef de
22 l'état-major principal de l'armée yougoslave qui portait sur les activités
23 de la RSK du 4 au 10 août 1995 ?
24 Prenons la dernière page pour voir le cachet.
25 R. Oui, je vois.
26 Q. C'est bien votre signature ?
27 R. Est-ce que vous pouvez déplacer vers la gauche pour que je voie qui est
28 l'auteur de ce document.
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1 C'est bien ma signature, mais ils n'auraient pas osé me soumettre
2 pour signature un document de ce type.
3 Q. Mais vous étiez où --
4 R. Je vais vous dire tout de suite pourquoi.
5 Q. Oui.
6 R. Le 26 août ?
7 Q. Oui.
8 R. J'étais à Banja Luka. Mais si je vous dis ça, c'est parce que vous
9 allez peut-être me montrer d'autres documents. Il y en a plusieurs qui
10 portent ma signature, mais je veux vous dire ceci : Je suis un homme de
11 carrière, un général formé et nommé aux plus hautes fonctions. Il était
12 absolument impensable que je signe un document sans que je sache qui
13 l'avait préparé. Quiconque a fait une formation le sait. Même si c'était un
14 chef de section dans mon armée, il ne le ferait pas.
15 Pour ce qui est de la teneur, nous pouvons discuter, si je m'en
16 souviens. Mais il faut d'abord voir si c'est bien un document qui me
17 revient, parce que sur le plan technique, ce n'est pas un document. Il est
18 inconcevable que j'aie signé un tel document.
19 Q. Est-ce que vous avez envoyé, après l'opération Tempête, un rapport au
20 chef du Grand état-major de l'armée yougoslave ?
21 R. Nous avons envoyé des rapports, mais outre que cela, des analyses
22 complètes faites par toute une équipe. Parce que perdre une guerre, perdre
23 un territoire, perdre une population, ce n'est pas une mince affaire. Nous
24 avons fait ce travail sérieusement. C'était même une étude que nous avons
25 faite.
26 Q. Si vous le voulez bien, nous allons examiner ce document. M. MISETIC :
27 [interprétation] Prenons-en la première page. Q. Prenons la première
28 partie, qui dit ceci :
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1 "Situation dans l'armée de la Krajina, conditions et caractéristiques de la
2 situation avant l'agression."
3 Premier paragraphe :
4 "En juin, on a travaillé jour et nuit pour réorganiser l'armée
5 existante et pour établir de nouvelles unités avec des conscrits militaires
6 qui avaient été emmenés du territoire de la République fédérale de
7 Yougoslavie."
8 Est-ce que ceci est exact ? Est-ce que vous avez travaillé jour et nuit
9 pour établir de nouvelles unités avec des conscrits ?
10 R. Oui, c'est juste. Nous étions en train de réorganiser au fur et à
11 mesure. Permettez-moi d'expliquer la situation.
12 Comme ça, vous n'aurez pas à me poser d'autres questions.
13 Q. Je vais d'abord vous poser les questions. Je suis sûr que vous aurez
14 l'occasion de nous fournir les éléments d'information que vous souhaitez.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, je vois l'heure qu'il
16 est. Est-ce que dans trois ou quatre minutes nous pourrions faire une
17 pause.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait.
19 Q. Monsieur Mrksic, prenons la page suivante en anglais. Ce sera encore
20 cette page-ci en B/C/S, je crois.
21 "Le renforcement des unités organiques et rendre ces unités capables
22 de mener un combat, tout ceci requière au moins deux ou trois mois (pour
23 réorganiser la SVK, cette réorganisation avait déjà commencé, mais devrait
24 se terminer au plus tard début octobre.)"
25 Dites-nous en quelques minutes et en quelques mots - nous pourrons
26 reprendre cette discussion après la pause - mais dites-nous brièvement ce
27 que vous avez pris comme mesures précises en matière de réorganisation,
28 chose qui devait être terminée début du mois d'octobre.
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1 R. Concrètement, nous essayions de créer une armée professionnelle du type
2 de l'armée qu'a la Croatie ou la Serbie aujourd'hui, une armée qui n'allait
3 pas nécessairement être liée à un bout de terre, une armée qui pourrait se
4 déployer à Grahovo ou des parties de ce qui était la République de la
5 Krajina serbe.
6 Je parle des unités se trouvant sous mon commandement. Le personnel
7 le plus qualifié est parti dès 1994 ou 1995 en Serbie pour se livrer à des
8 activités de trafic. Alors en quoi consistait cette réorganisation ?
9 Des groupes tactiques devaient être formés jusqu'au niveau de la
10 brigade dans les corps d'armée chargés de problèmes spécifiques.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous ne voulons pas rater une seule
12 syllabe de ce que vous dites. Je vous demande donc de ralentir votre débit
13 pour que tout soit bien saisi.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens que pendant mon procès, on
15 demandait sans cesse aux témoins de ralentir et je me demandais sans cesse
16 pourquoi ils ne comprenaient pas qu'il fallait ralentir. Je m'excuse auprès
17 des interprètes.
18 M. MISETIC : [interprétation] Ce moment se prête bien à la pause, Monsieur
19 le Président.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parfait. Nous reprendrons à 17 heures
21 55.
22 [Le témoin quitte la barre]
23 --- L'audience est suspendue à 17 heures 36.
24 --- L'audience est reprise à 18 heures 03.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites entrer le témoin dans le
26 prétoire.
27 [Le témoin vient à la barre]
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne recommenciez,
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1 Monsieur Misetic.
2 Monsieur Mrksic, si tout va bien demain – et je veux juste voir nous
3 siégeons, Monsieur le Greffier, demain, l'après-midi ? Le matin, donc
4 demain matin, le conseil arrivera, il pourra donc être présent dans ce rôle
5 limité que j'ai mentionné – donc, je pense qu'il y a de forces chances que
6 cela puisse se produire. Il ne sera peut-être pas là dès le matin, dès le
7 début de la matinée, mais peut-être à la fin de la matinée.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Domazet. A qui faites-vous allusion ?
9 Qui avez-vous en tête, Me Domazet ou Vasic, ou qui exactement ?
10 M. LE JUGE ORIE : [chevauchement]
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Me Domazet, merci.
12 M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Q. Général Mrksic, pour reprendre là où nous nous en arrêter au niveau de
14 la réorganisation.
15 Savez-vous au sujet de ce corps à défense spéciale, il était donc l'ARSK,
16 est-ce que vous pouvez nous dire comment il a été créé ?
17 R. Monsieur Misetic, ce corps à défense spéciale s'appelait un corps, mais
18 c'était loin d'être un corps d'armée. Vous savez qu'en général, les corps
19 d'armée ont leur AOR. Celui-là avait peu d'hommes, mais il était très
20 efficace. Il avait tous les armements les plus sophistiqués, 94 canons à sa
21 disposition, du matériel très sophistiqué.
22 Vous voyez, lorsque je suis arrivé en Krajina pour inspecter l'armée, j'ai
23 vu qu'il y avait les chars M84, et ils étaient vraiment à la pointe de la
24 technologie. Et j'ai alors suggéré au Conseil de la défense suprême
25 d'établir et de renforcer les forces dans cette zone, et lorsque je disais
26 cela, je voulais parler des chars, des blindés, de l'artillerie 130
27 millimètres, des lance-roquettes, des Orkans, des Dvinas, des Nevas, tous
28 ces systèmes que, s'ils n'étaient pas proprement contrôlés, pouvaient
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1 devenir extrêmement dangereux. Donc une brigade, elle était constituée à
2 partir des meilleurs fantassins, de façon à fournir un soutien technique à
3 tout ce matériel.
4 J'ai essayé de m'assurer que des contrats d'emploi professionnels étaient
5 rédigés, et le jour de la St-Vitus, ce corps avait effectivement été
6 constitué.
7 Q. D'accord. Maintenant, quel était l'objectif de l'utilisation de ce
8 corps ?
9 R. Ce corps d'armée avait été constitué à titre préventif s'il devait y
10 avoir une incursion ou une avancée comme ce qui s'était passé en Slavonie
11 occidentale, ce corps était censé être là pour arrêter l'avancée.
12 Son importance était plus une importance d'ordre psychologique, il
13 s'agissait de restaurer la confiance de la population dans l'armée, de
14 rassurer la population qu'elle pouvait rester sur place, pour montrer à la
15 population, aussi bien à la communauté internationale et à la République de
16 Croatie, que nous étions prêts à nous engager dans des négociations, et non
17 pas dans une guerre. L'objectif était donc de s'assurer que des
18 négociations seraient entamées, et non pas une activité d'ordre militaire.
19 Voilà pourquoi j'avais constitué ce corps d'armée.
20 Q. Savez-vous ce qu'était le commandement Pauk ?
21 R. Je ne crois pas que ce commandement, en fait, était dans la zone
22 en question. C'est un commandement qui ouvre, là, d'autres questions,
23 d'autres problèmes, qui n'ont rien à voir avec cela. Je peux vous dire que
24 la première expérience de combat du corps en question –
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cette question était très simple,
26 il s'agit juste de vous demander si vous savez ce qu'était le commandement
27 Pauk. Si vous le savez, vous dites oui; si vous ne le savez pas, vous
28 dites, non. Maintenant, si c'est une autre question tout à fait différente,
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1 alors c'est à Me Misetic d'en –
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur Misetic, j'ai
3 entendu parler du commandement Pauk, qui faisait partie de la Bosnie
4 occidentale, dans le cadre de la zone de Fikret Abdic. Ce commandement
5 n'était pas sous mes ordres, en tout cas, pas jusqu'au début des activités
6 de combat en Bosnie occidentale, ce qui était à peu près au moment du mois
7 de juillet, l'objectif de cette activité étant que certains villages qui
8 faisaient partie de la Krajina ou, plutôt, qui étaient en bordure de la
9 Krajina Cazin, qui voulaient venir sous son commandement, sous le
10 commandement d'Abdic, c'était à cette fin que ces forces avaient été
11 utilisées. Le commandement Pauk et les forces de Fikret s'étaient emparés
12 des territoires auxquels j'ai fait allusion, et s'étaient assurés que les
13 personnes qui occupaient cette zone rejoignent leurs côtés. Ce commandement
14 particulier était donc là avant que je n'arrive dans ma région.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à peu près maintenant que nous
16 recevons l'interprétation.
17 Je vous demanderais de bien vouloir continuer.
18 M. MISETIC : [interprétation] Merci.
19 Q. Quelles étaient les unités qui constituait le commandement Pauk ou qui
20 étaient sous le commandement Pauk ?
21 R. Soit le commandement soit les forces impliquées, ça c'est quelque chose
22 que je n'ai jamais su. C'étaient des unités qui étaient sous le
23 commandement de Fikret Abdic. Elles étaient soumises à un régime spécial,
24 et je ne peux rien vous en dire. Je sais qu'il y avait environ 10 000
25 hommes, c'est ce que l'on m'avait dit. C'était à peu près les forces, les
26 effectifs sur lesquels je pouvais compter. Mais c'est un sujet tout à fait
27 différent, que nous pouvons aborder d'ailleurs.
28 Q. Monsieur Mrksic, aviez-vous entendu parler d'unités de la DB serbe sous
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1 les ordres de Frenki Simatovic ou de Jovica Stanisic, qui opéraient sur le
2 territoire du commandement Pauk ?
3 R. Je ne pense pas qu'il y avait des unités à cet endroit-là. Il n'y avait
4 que des personnes, des individus, qui étaient en fait des commandants de
5 ces unités, et qui étaient sous les ordres de Fikret Abdic. Et je suis sûr
6 que ceux qui étaient dans la Légion, parmi vous, savez cela, parce qu'il
7 s'agissait uniquement d'unités qui étaient déployées dans une région et qui
8 coopéraient. Elles n'étaient pas d'accord avec les politiques du 5e Corps.
9 Je ne sais pas qui étaient ces personnes. J'ai peut-être entendu parler
10 d'elles, mais je n'ai pas posé de questions, je n'étais pas intéressé.
11 Q. Monsieur Mrksic, vous souvenez-vous avoir été à Belgrade à la fin du
12 mois de juin et avoir assisté à des réunions au cours desquelles MM.
13 Perisic, Milosevic, Ratko Mladic, et Jovica Stanisic étaient présents, avec
14 vous-même ?
15 R. Il y a eu des réunions. Je ne sais pas à quelle réunion vous faites
16 allusion. Il y a eu juste une réunion, une décision a été prise pour lancer
17 une action impliquant Fikret Abdic –
18 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas exactement entendu.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avions effectivement prévu une opération.
20 M. MISETIC : [interprétation]
21 Q. Et –
22 R. Néanmoins, cela n'avait rien à voir avec la région de la Dalmatie. Je
23 pourrais témoigner à ce sujet à une autre occasion, peut-être.
24 Q. Vous semblez donc avoir l'impression, et ça n'a pas été repris dans la
25 traduction, mais que c'est vous qui décidez ce qui est important ou non
26 dans l'affaire du général Gotovina. Mais je vous demanderais de bien
27 vouloir simplement répondre aux questions que je vous pose, et s'il y a
28 quelque chose en dehors de l'acte d'accusation, nos collègues de
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1 l'Accusation, bien entendu, se lèveront pour objecter. Mais entre-temps, je
2 vous demanderais de bien vouloir répondre à mes questions, j'apprécierais.
3 Maintenant, lors de cette réunion, de ces réunions auxquelles nous faisons
4 allusion à la fin du mois de juin, vous souvenez-vous que M. Stanisic ait
5 indiqué qu'il avait des forces sous son commandement, qu'il pouvait envoyer
6 ces forces pour aider dans l'opération à laquelle vous venez de faire
7 allusion ?
8 R. Je ne me souviens pas. Il faudrait que je vérifie. Je ne connais pas
9 très bien le procès-verbal de ces réunions. Je n'ai pas les documents, il y
10 a eu plusieurs réunions de ce type. Tout ce que je sais, c'est que la
11 position générale était que cette action devait être lancée de façon à
12 avoir plus de marge de manœuvre pour Fikret Abdic, de façon à ce que les
13 gens puissent le rejoindre.
14 Q. Je vais vous montrer maintenant quelques notes de cette réunion dans un
15 procès-verbal. Mais ce que j'aimerais savoir maintenant, c'est quels sont
16 vos souvenirs exacts de tout cela.
17 Et lors de ces réunions concernant le commandement Pauk, les opérations en
18 Bosnie occidentale, vous souvenez-vous qu'il y ait eu des forces de l'ARSK
19 dans cette opération dans la poche de Bihac ?
20 R. Moi, je contrôlais, je supervisais mes forces, et dans la région de
21 Krslja, j'ai exercé une certaine pression, de façon à ce que ces forces
22 atteignent leurs objectifs. C'est la raison pour laquelle il y avait ce
23 corps d'armée à des fins spéciales. Les forces, en fait, venaient de la
24 région de Kladusa et de la montagne, il s'agissait de forces musulmanes qui
25 étaient sous le commandement Pauk.
26 Q. Outre les forces que vous commandiez, qui étaient sous vos ordres, y
27 avait-il également d'autres forces envoyées par la DB serbe ?
28 R. Je ne sais pas. On en avait parlé, on a mentionné certaines forces qui
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1 seraient peut-être venues de la Slavonie orientale ou de la Republika
2 Srpska, du MUP, mais elles ne sont pas venues dans mon AOR
3 venues dans la région de Kladusa. Et je ne pouvais pas savoir ce qui se
4 passait là. J'étais en fait à mon poste de commandement de Slunj, et Krslja
5 est juste de l'autre côté de la Koran. Donc, je ne peux pas vraiment vous
6 dire ce qui s'est passé dans cette région-là. C'était un système séparé et
7 avec lequel nous n'étions pas du tout impliqués.
8 Q. Connaissez-vous Frenki Simatovic ?
9 R. Oui. Il est là aussi au quartier pénitentiaire.
10 Q. Connaissiez-vous Frenki Simatovic en 1995 ?
11 R. Oui, je le connaissais, mais je ne l'ai pas vu en 1995. Je l'avais vu
12 plus souvent en 1994 à Belgrade.
13 Q. Est-ce que vous aviez été en contact avec Frenki Simatovic en 1995 par
14 téléphone ou par tout autre moyen ?
15 R. Je ne me souviens pas.
16 Q. Est-ce que Frenki Simatovic –
17 R. J'avais un mandat qui était tel que je n'avais pas besoin d'entrer en
18 contact avec lui. Il y avait le général Novakovic qui, en fait, était
19 chargé de coordonner les affaires au sein du commandement Pauk, et il y
20 avait aussi Cedo Bulat.
21 Q. Alors, d'après vous, quelles étaient les fonctions de Frenki Simatovic
22 en 1995 ?
23 R. Je crois qu'il était l'un des assistants dans le secteur de la DB –- en
24 fait, je ne sais pas exactement quel type de secteurs il y avait là-bas. Il
25 était en tout cas dans l'un de ces secteurs, et il était l'adjoint.
26 Q. Je crois qu'il s'agissait donc du secteur de la DB de Serbie; c'est
27 bien cela ?
28 R. La Serbie, oui, absolument.
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1 Q. Alors ce secteur, est-ce qu'il y avait dans ce secteur des unités de
2 combat ?
3 R. D'après ce que je sais, il y avait quelques unités de combat, qu'on
4 appelait les Bérets rouges, ou quelque chose comme cela. Il s'agissait
5 d'unités spéciales qui remplissaient des missions tout à fait
6 particulières. Fikret Abdic n'aurait pas pu constituer une armée à lui seul
7 sans ces spécialistes qui étaient chargés de missions spéciales.
8 Maintenant, combien ils étaient, je ne sais pas exactement, je ne le savais
9 pas, et je n'ai pas posé la question.
10 Q. Monsieur, savez-vous qui est Milorad Ulemek Legija ?
11 R. Oui, Legija, oui, je connais.
12 Q. Connaissiez-vous –- je suis désolé, mais aviez-vous communiqué avec,
13 aviez-vous été en contact avec Milorad Ulemek Legija en 1995 ?
14 R. Il était là lors de l'action nommée Epée a été lancée. C'était au mois
15 de juillet. Il était là pour justement recevoir cette mission. Je lui avais
16 demandé comment il avait l'intention de réaliser cette mission, et il
17 m'avait dit que là-bas dans la Légion étrangère, il ne connaissait qu'un
18 escadron. Il ne savait pas comment il allait pouvoir transmettre ces ordres
19 de missions aux brigades. Il faisait partie des forces de Fikret Abdic à
20 l'époque. Et son attitude envers cette mission était tout à fait correcte.
21 Q. Maintenant, sous les ordres de qui était Milorad Ulemek Legija ?
22 R. Il était sous les ordres du commandement Pauk. Il s'agissait du général
23 Novakovic et Bulat. En ce qui les concerne, eux, ils étaient soumis à une
24 surveillance, enfin ils étaient soumis, probablement en plus de l'équipe de
25 Fikret Abdic, au contrôle de personnes de la DB. Je ne sais pas exactement
26 qui, ni quand ils sont venus, mais c'était une structure à part. C'était à
27 Kladusa, alors que moi j'étais à Slunj.
28 Q. Lors de ces réunions de Belgrade, qui ont eu lieu vers la fin du mois
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1 de juin 1995, est-ce que vous vous souvenez pourquoi a-t-on lancé cette
2 opération ? Est-ce qu'on en a parlé ?
3 R. Oui, oui. Cette opération a été lancée, parce que moi, il fallait que
4 j'y aille avec ces forces qui venaient d'être créées. Vous ne m'avez pas
5 donné la possibilité de vous dire tout ce que j'ai fait au sein de l'armée,
6 parce que c'est quelque chose qui va être très important par la suite. Et
7 je m'attends à ce que vous me posiez ces questions-là.
8 Mais cela étant dit, moi, j'ai proposé et nous avons commencé à
9 élaborer un plan pour couper les forces dans la vallée de Livno. Donc, il
10 fallait procéder à une contre-attaque. La Republika Srpska et la Republika
11 Srpska Krajina devaient le faire ensemble pour que Knin ne soit pas coupée,
12 ce qui s'est passé à la fin. Mais la Republika Srpska avait autre chose à
13 faire, d'autres chats à fouetter. Je ne sais pas ce qu'ils avaient à faire
14 exactement. En tout cas, ils ont laissé tomber. Moi, ils ne m'ont pas
15 permis d'y aller avec mes forces, parce qu'ils m'ont dit que je ne pouvais
16 pas donner des ordres sur le territoire, parce que là, il y avait un
17 certain général Milovanovic qui était le chef de l'état-major principal, et
18 il était là avec un commandant, et ils ne m'ont pas laissé y aller. Ils
19 m'ont juste dit : donne-nous des obus, donne-nous une compagnie, et pas par
20 pas, on va avancer, mètre par mètre, dans leur zone de responsabilité. Je
21 vais vous dire franchement, moi, je me suis mis en colère, à l'époque.
22 Q. Je vous prie de ne pas vouloir vous adresser aux gens qui sont assis
23 derrière.
24 R. Mais non, non, non. Loin de là. Nous, on est des soldats. On se
25 comprend, nous.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne la discipline, je
27 pense que déjà, si vous ralentissiez votre débit, vous allez faire preuve
28 d'une grande discipline.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, merci. Il faut juste me mettre en
2 garde et je vais exécuter.
3 M. MISETIC : [interprétation]
4 Q. Apparemment, vous comprenez les questions que je vous pose en anglais,
5 mais vous savez, il y a quand même des interprètes et les sténotypistes, et
6 vous devez vraiment attendre la fin de l'interprétation avant de commencer
7 de parler, parce que eux, ils doivent faire leur travail aussi.
8 Donc, je vais revenir sur la question que je vous ai posée, à savoir
9 pourquoi avez-vous lancé une opération contre la poche de Bihac, ou plutôt,
10 dans la poche de Bihac ?
11 R. Mais ce n'est pas moi qui ai lancé cette opération. Pour moi, c'était
12 quelque chose de complètement accessoire. Moi, mon problème principal,
13 c'était le mont de Dinara, et Livno et Grahovo.
14 Q. On va revenir sur ce rapport, et peut-être que je vais vous aider et
15 vous poser une question très précise.
16 M. MISETIC : [interprétation] Veuillez vous référer à la page 3 en anglais,
17 s'il vous plaît.
18 Q. Vous allez voir : "Le lancement des opérations …"
19 Où on peut lire :
20 "Le lancement des opérations contre le 5e Corps musulman," c'est
21 celui qui se trouve dans la poche de Bihac.
22 Est-ce que vous voyez cela ?
23 R. Non, non, je ne le vois pas.
24 Q. C'est en haut de la page 2 en B/C/S.
25 R. Oui, oui, je vois, là. "Le lancement des opérations" Oui, oui.
26 Q. Le 5e Corps musulman, c'est un corps de l'ABiH qui se trouvait à Bihac,
27 dans la poche ?
28 R. Oui.
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1 Q. On peut y lire :
2 "Le lancement des opérations contre le 5e Corps musulman, sans qu'il
3 y ait l'aptitude au combat, va être extrêmement nocive pour la SVK qui a
4 toujours été poussée à se battre dans le territoire de la Bosnie
5 occidentale."
6 Est-ce que vous le voyez ?
7 R. Oui.
8 Q. Mais qui pousse à ce que l'ARSK combatte sur le territoire de la Bosnie
9 occidentale ? Parce que vous, vous êtes le commandant de l'état-major
10 principal de l'ARSK. Alors, qui vous pousse à faire cela, aller sur ce
11 territoire ?
12 R. Il y a eu une réunion à Belgrade. Fikret Abdic est allé. Vous avez
13 mentionné les autres, Perisic, et cetera. Je pense qu'il y en avait
14 d'autres aussi de la Republika Srpska, mais je ne me souviens pas des noms.
15 Moi, j'y étais aussi. Moi, j'ai dit que le problème le plus important,
16 c'était Dinara et cet axe-là. Cependant, quelqu'un a eu cette idée. C'était
17 une faveur pour Fikret Abdic. Ils ont dit que le peuple de Cazin
18 n'attendait qu'avoir une action, une opération, pour qu'ils passent tous de
19 son côté. Comme vous savez que c'est le territoire le plus réduit, le plus
20 mince de la Republika Srpska Krajina entre Ogulin et Bihac, qu'il
21 s'agissait là d'une zone très peu peuplée et qu'il aurait été très facile -
22 il serait peut-être très facile un jour, se disait-on - de gagner ce
23 territoire, de conquérir ce territoire, on s'est dit qu'il fallait
24 contrôler ce territoire pour assurer nos arrières, parce qu'on ne pouvait
25 pas tenir les deux fronts.
26 On n'arrivait même pas à s'occuper de notre front, celui qui était le
27 nôtre; et comment voulez-vous qu'on assure le front du 5e Corps d'armée ?
28 C'est pour cela --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous venez de parler, et cela
2 figure au niveau de 15 lignes sur le compte rendu d'audience. Je ne sais
3 toujours pas qui vous a poussé à y aller.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est Fikret Abdic qui a fait la demande.
5 Il a formulé cette requête et le président Milosevic lui-même a voulu qu'on
6 résolve ce problème. Et ensuite, il a dit : Mile, écoute, après va là-bas
7 et regarde ce que tu peux faire à Dinara, mais après avoir résolu ce
8 problème-là.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la réponse simple serait : c'est
10 Fikret Abdic qui a été aidé et appuyé par Milosevic. Donc, c'est eux qui
11 vous ont poussé à faire cela.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, Fikret Abdic ne pouvait pas me
13 commander, moi. Il aurait pu le demander à Milosevic, et ensuite Milosevic,
14 il aurait pu appeler Martic ou m'appeler moi, et on aurait pu
15 éventuellement prendre une décision.
16 Cette décision nous arrangeait dans le sens où on allait gagner du
17 territoire en profondeur et assurer nos arrières.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaie toujours de comprendre. Donc,
19 les personnes présentes à la réunion poussaient, comme on a dit. C'est bien
20 cela ? Parce que la question est très simple. Dans le rapport, on dit -- je
21 vais essayer de retrouver cela. M. Misetic vous a posé une question et vous
22 a lu ce passage. Donc, on a poussé l'ARSK à se battre pour le territoire
23 dans la Bosnie occidentale.
24 Est-ce que là, vous êtes en train de nous dire que ceux qui vous ont
25 poussé à y aller, ce sont les personnes qui ont été présentes à ladite
26 réunion ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Essayez de vous concentrer, parce
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1 que là, vous nous avez expliqué toutes sortes de choses, et M. Misetic
2 voulait savoir une seule chose. Il voulait savoir qui vous a poussé. Vous
3 auriez pu répondre très brièvement. Vous auriez pu dire : A la réunion de
4 Belgrade il y a eu un tel, un tel, un tel, et ils nous ont poussés. Ils ont
5 poussé l'ARSK.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais comment voulez-vous que je me souvienne
7 de tout cela ? Il faudrait que je lise le document pour me souvenir de tous
8 les noms.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur
10 Misetic.
11 M. MISETIC : [interprétation]
12 Q. Je vais voir si je peux rafraîchir votre mémoire, Général. M. MISETIC :
13 [interprétation] Je vais demander que l'on présente la pièce D1465.
14 Q. Monsieur Mrksic --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai bien vu que vous n'avez pas versé
16 au dossier le document précédent, la transcription Perisic/Milosevic,
17 1D1007.
18 M. MISETIC : [interprétation] Je pense que vous l'avez marqué aux fins
19 d'identification.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Je ne pense pas
21 que c'était ce document.
22 Oui. Effectivement oui, ceci a été marqué aux fins d'identification.
23 D157 [comme interprété].
24 M. MISETIC : [interprétation]
25 Q. Donc, Mon Général, là on voit le journal de Ratko Mladic, et --
26 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vais vous demander
27 de nous montrer la version en B/C/S. En B/C/S ce serait la page 206, et en
28 anglais la page 201.
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1 Q. Vous pouvez voir sur l'écran, la partie gauche de l'écran, et c'est une
2 réunion qui aurait dû se tenir le 29 juin 1995. J'attends la traduction en
3 anglais de ce document. Voilà.
4 Belgrade, le soir à 21 heures 10, ont été présents Milosevic,
5 Bulatovic, Perisic et Mrksic. Ensuite, c'est Mladic qui prend les notes. Si
6 vous regardez ce qu'il écrit, vous pouvez lire ce qui suit : SM, les
7 initiales donc, Slobodan Milosevic sans doute.
8 "Maintenant, vous avez arrêté l'offensive croato-musulmane. Nous vous
9 avons aidés, mais on est à bout de souffle.
10 "La Republika Srpska est sûre, et il faut sceller cela et maintenant
11 mettre l'accent sur la RSK et la défendre."
12 M. MISETIC : [interprétation] Ensuite, la page 201 en anglais.
13 Il faudrait tourner la page en B/C/S.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, je suis un peu
15 perdu, parce qu'on a la date du 3 août, là.
16 M. MISETIC : [interprétation] Il faudrait revenir sur la page précédente,
17 la page sur laquelle on était tout à l'heure, et ensuite allez deux pages
18 plus loin. La page 203 en anglais. Peut-être est-ce bien la page 208 en
19 B/C/S.
20 Je suis dans l'obligation de faire confiance au fait que le B/C/S rend
21 compte de ce qui est dit correctement. Je ne lis pas le cyrillique,
22 Monsieur le Président. Donc, bon, enfin… d'accord.
23 Q. Le texte se lit comme suit, je cite :
24 "Nous devons installer la Republika Srpska, puis défendre la Krajina de
25 République serbe."
26 "Je lui ai demandé qu'est-ce que vous leur donneriez ?"
27 Et SM a répondu : "Je donnerais Vogosca et Ilijas."
28 Maintenant, général Mrksic, sans entrer dans le détail, pouvez-vous dire
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1 aux Juges de la Chambre où se trouve Vogosca et Ilijas ?
2 R. Vogosca et Ilijas étaient des municipalités de Sarajevo.
3 Q. Et le texte se poursuit comme suit, je cite :
4 "Ils ont besoin d'une liaison avec Sarajevo, Zenica, et Tuzla. Nous allons
5 élargir le territoire grâce à Fikret. Je ne toucherai pas aux enclaves,
6 elles sont des îles qui demeureront distinctes."
7 Alors, est-ce que vous vous rappelez avoir été présent lors d'une réunion
8 où ces sujets ont été abordés ou une conversation de ce genre a eu lieu ?
9 R. Maître Misetic, il y a eu de nombreuses réunions, et je ne peux pas me
10 rappeler si j'ai assisté à cette réunion en particulier. Il y a eu une
11 réunion, je m'en souviens, mais ce qui est écrit ici dans ce texte, ce
12 n'est pas ce qui a été dit durant cette réunion. J'ai effectivement assisté
13 à une réunion où une conversation informelle a eu lieu, et je n'avais pas
14 été convoqué. J'ai été invité à assister une fois, et c'était tout.
15 Q. Mais, vous rappelez-vous –- je vais vous reposer la question que je
16 vous ai posée tout à l'heure.
17 Vous rappelez-vous avoir assisté à une réunion à Belgrade en présence de M.
18 Milosevic, de M. Perisic, de M. Mladic, où vous étiez donc présent
19 également, une réunion qui a donné lieu à une discussion relative au fait
20 que Vogosca et Ilijas seraient agrandis dans l'intérêt de Fikret ?
21 R. Je n'ai pas assisté à une réunion où ce genre de sujet a été discuté.
22 La réunion à laquelle j'ai assisté était informelle. Elle s'est déroulée
23 dans une atmosphère détendue, elle a eu lieu dans la soirée, et il n'a pas
24 été question de prises de territoires, et cetera, et cetera. Le président
25 Milosevic et Mladic se sont un peu accrochés. Ils ont dit certaines choses
26 au sujet du micro, de l'enregistrement et cetera, et cetera.
27 Donc, cela n'avait pas l'aspect d'une réunion, et aucune note n'a été
28 prise. Je n'ai vu personne qui prenait des notes, je n'ai pas non plus,
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1 moi-même, écrit qui que ce soit dans mon carnet, et je n'ai reçu aucune
2 mission particulière. C'était simplement une réunion informelle, et j'ai
3 remarqué que tout ce qui a été dit l'a été dans une atmosphère étendue, il
4 était question de la nécessité d'apporter de l'aide à certains pour leur
5 permettre de survivre. Mais je n'ai rien entendu du genre de ce que vous
6 venez de dire.
7 Q. Passons à la journée suivante.
8 M. MISETIC : [interprétation] Et nous avons ici un document de trois pages
9 en anglais, dont je demande l'affichage, Monsieur le Greffier. Il est
10 question ici d'une autre réunion, qui s'est tenue le 30 juin 1995. La page
11 en B/C/S qui m'intéresse, c'est la page 211.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous parlons du 30 juin.
13 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'espère que cette fois-ci, au moins, le
15 témoin a assisté à la réunion.
16 M. MISETIC : [interprétation] Oui, cela est écrit dans les notes. Page 206
17 de la version anglaise.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 206 sur un total de 334, oui.
19 M. MISETIC : [interprétation]
20 Q. Alors, Monsieur Mrksic, nous sommes à la date du 30 juin 1995. Il est
21 écrit ici que la réunion se déroule entre le président Milosevic et l'état-
22 major général de l'armée yougoslave. Et le président Milosevic déclare, je
23 cite :
24 "J'ai appelé FA", il s'agit de Fikret Abdic, "pour qu'il nous dise ce qu'il
25 y a de nouveau dans la poche de Bihac. C'est très important à nos yeux.
26 Nous devons faire ce qu'il faut pour qu'il puisse s'emparer de Cazin. A ce
27 moment-là, les choses seront plus faciles pour nous." Ensuite, apparemment,
28 c'est FA qui prend la parole.
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1 M. MISETIC : [interprétation] Je demanderais que l'on passe à la page
2 suivante.
3 Q. Et nous voyons une rubrique dans le texte qui se lit comme suit, je
4 cite :
5 "Legija et Bozovic ont pris contact avec Nanic par Motorala. Nous pourrions
6 nous emparer de Cazin dans deux semaines si nous disposions de 1 500
7 hommes."
8 Alors, pourriez-vous d'abord dire aux Juges qui est Bozovic ?
9 R. Bozovic était au même niveau que l'autre, comment il s'appelait déjà ?
10 Au même niveau que Legija, c'est ça.
11 Tous les deux étaient représentants de deux structures différentes. Ils
12 étaient instructeurs, comme on les appelait. Je crois que c'est le mot
13 utilisé dans le code de la Légion. Ils étaient instructeurs au sein de
14 l'armée de Fikret Abdic, et chacun d'entre eux exerçaient son contrôle sur
15 une brigade ennemie ou deux brigades et conduisaient des opérations avec
16 l'autre. Donc, ils étaient instructeurs. Et chaque fois que la nécessité se
17 faisait sentir de décerner une mission particulière dans le cadre de
18 l'opération Pauk, c'étaient eux qui s'en chargeaient. Ils transmettaient
19 leurs renseignements à Fikret Abdic. Lui n'était pas présent. Et ce Nanic
20 dont vous avez parlé, c'était une espèce de responsable du 5e Corps
21 d'armée, mais je ne sais pas exactement quelles étaient ses fonctions,
22 simplement j'ai entendu dire plus tard qu'il avait été tué.
23 Q. Jovica Stanisic assistait-il à cette réunion ?
24 R. Je ne sais pas si son nom figure dans les notes que nous avons ici. Je
25 ne me souviens pas exactement s'il a assisté ou pas, mais s'il était
26 présent, cela doit être écrit dans les notes, et dans ce cas-là, nous
27 devons croire que c'est exact, n'est-ce pas ?
28 Q. Si vous passez à la phrase suivante, on lit les initiales "JS".
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1 R. Oui, oui, il s'agit probablement de Jovica Stanisic, JS. Ce sont ses
2 initiales. Je suppose qu'il s'agit probablement de lui. Et si on lit les
3 notes, on voit qu'il a assisté à cette discussion. Je n'en ai pas un
4 souvenir réel, un souvenir précis, mais je crois qu'il y avait cinq à six
5 hommes présents. Je ne me rappelle pas exactement qui ils étaient, qui
6 étaient là et qui n'étaient pas là.
7 Q. Oui, je vous pose la question en raison de la phrase suivante, je cite
8 :
9 "JS : Quelles forces M. Mrksic peut-il engager ?"
10 Ensuite, il est question de la police de Banja Luka, et cetera. Et le texte
11 se poursuit. Vous avez dit quelques mots –
12 M. MISETIC : [interprétation] Passons à la page suivante.
13 Q. Donc, vous avez pris la parole pendant cette discussion, je crois qu'un
14 peu plus tôt dans votre déposition durant l'audience d'aujourd'hui, vous
15 avez été interrogé au sujet de votre venue dans la poche de Bihac, mais en
16 fait vous parliez de Livno à ce moment-là.
17 M. MISETIC : [interprétation] Passons à la page suivante.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mon projet concernait Livno, oui, Livno.
19 M. MISETIC : [interprétation]
20 Q. Et si nous voyons ce qui est écrit au milieu de la page, nous lisons,
21 "SM", encore une fois nous pouvons présumer qu'il s'agit de Slobodan
22 Milosevic. Puis nous lisons, je cite :
23 "Je pense qu'il est important de résoudre les problèmes du 5e Corps d'armée
24 dans les délais les plus brefs et d'essayer d'effectuer une coupure au
25 niveau de Livno."
26 Est-ce que vous vous rappelez que M. Milosevic ait dit ceci durant la
27 conversation ?
28 R. Je pense qu'il a dit ceci, car je ne cessais d'insister sur
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1 l'importance de Livno. Je considérais que Livno était d'une importance
2 cruciale pour la Republika Srpska.
3 Donc, le mot Dinara, et pas le 5e Corps. Et il a probablement dit que pour
4 satisfaire les besoins des uns et des autres, il fallait agir ainsi, mais
5 que la Republika Srpska avait totalement échoué de ce point de vue.
6 Q. Expliquez aux Juges de la Chambre pourquoi Livno était d'une importance
7 si cruciale.
8 R. Quand je dis "Livno", je ne pense pas au fait que nous ayons dû
9 attaquer la ville de Livno. Mais nous devions entrer en contact avec les
10 forces de Livanjsko Polje de façon à ce que l'axe Knin-Drvar ne soit plus
11 menacé. Quand je dis "nous", je pense que nous devions déplacer le front,
12 et de cette façon, la situation sur le mont Dinara serait revenue à ce
13 qu'elle était en 1994, à la mi-1994.
14 Donc, lorsque je dis que les transmissions et les communications s'étaient
15 améliorées là-bas, du travail avait été fait, nous pouvions entendre des
16 engins qui étaient en train de fonctionner, une attaque se préparait depuis
17 l'arrière, les gens de la Republika Srpska ne mâchaient pas leurs mots, ils
18 ne considéraient pas tout cela comme suffisamment sérieux, en particulier
19 Milovanovic ne le croyait pas, mais bien sûr, il a continué sa carrière, il
20 a transmis les responsabilités à quelqu'un, et aujourd'hui il est devenu
21 sénateur de la Republika Srpska.
22 Q. D'accord. Je vais vous poser la question suivante, Monsieur. Vous avez
23 dit que les choses étaient revenues à ce qu'elles étaient à la mi-1994.
24 Est-ce que -– parce que nous avons entendu de votre bouche il y a quelques
25 instants, que vous aviez un plan destiné à améliorer la situation de
26 l'armée de la République serbe de Krajina avant le début du mois d'octobre.
27 Est-ce que le retour à la situation de la mi-1994 faisait partie de ce plan
28 global de votre part ?
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1 R. Sur le plan politique et sur le plan de l'organisation, telle était
2 bien notre idée, nous souhaitions harmoniser la volonté de la population et
3 des responsables politiques et garantir la sécurité de la Republika Srpska
4 sans mettre en danger la Serbie parce qu'ils nous semblaient clairs que
5 nous n'obtiendrions aucune aide de la République de Serbie. Et d'ailleurs,
6 il y a quelque chose que j'aimerais vous raconter.
7 Q. Bon, vous avez dit sur le plan politique. Mais les questions que je
8 vous pose sont exclusivement centrées sur l'aspect militaire. Donc, je vous
9 interroge d'un point de vue militaire.
10 R. Oui, d'un point de vue militaire, mais c'était bien l'objet de ma
11 réponse. J'aimerais que nous ayons la volonté de nous comprendre.
12 En d'autres termes, utiliser nos propres forces, c'était le plan, et
13 s'appuyer exclusivement sur nos forces, afin de contraindre nos
14 responsables politiques à s'engager dans la recherche d'une solution
15 pacifique du problème en Croatie.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter plus
17 lentement la dernière partie de votre réponse, Monsieur Mrksic, car nous
18 n'entendons pas tous les mots prononcés par vous si vous allez trop vite.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. D'accord, je vais essayer de
20 ralentir, et toutes mes excuses aux interprètes.
21 M. MISETIC : [interprétation] Votre réponse a consisté, si je ne trompe, à
22 dire que vous souhaitiez revenir sur le front à la situation de –
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, j'ai invité le témoin à
24 répéter la dernière partie de sa réponse, parce que j'ai entendu les
25 interprètes de la cabine anglaise dire qu'ils ne pouvaient pas suivre. Mais
26 j'ai invité M. Mrksic à ralentir également. Donc, --
27 M. MISETIC : [interprétation] Pas de problèmes. J'essayais simplement
28 d'obtenir une réponse à ma question. Mais s'agissant du compte rendu
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1 d'audience, nous avons, bien entendu, besoin d'entendre ce que dit le
2 témoin.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous vous penchez sur la page 87,
4 ligne 237, c'est à cela que je faisais référence.
5 M. Mrksic, vous avez dit, je cite :
6 "En d'autres termes, utiliser nos propres forces, nous appuyer
7 exclusivement sur nos forces et contraindre nos responsables politiques à
8 s'engager sur la voie de la recherche d'une solution pacifique du problème
9 en Croatie."
10 Et c'est là, si j'ai bien compris, que l'interprète de la cabine anglaise
11 vous a perdu. Pourriez-vous répondre à ce niveau.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je vais ajouter ceci.
13 Ce n'était pas notre objectif de nous emparer de la Croatie, parce qu'en
14 tout réalisme, c'était impossible; nous souhaitions stabiliser le front sur
15 l'axe reliant Livno au mont Dinara en passant par Grahovo.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Afin de pouvoir mener à bien cette nouvelle
18 option plutôt de nous engager dans une option de guerre, nous souhaitions
19 une coexistence, c'est-à-dire une solution pacifique, le désarmement et
20 cetera, et nous voulions que ceux qui devaient quitter la Krajina, parce
21 qu'ils avaient commis un crime, par exemple, s'en aillent, mais nous
22 voulions que les responsables politiques restent à un poste où ils
23 n'auraient plus la possibilité de tromper la population, qu'ils s'engagent
24 en lieu de cela dans des négociations sérieuses avec le gouvernement
25 croate, parce que nous ne pouvions attendre aucune aide de la Serbie étant
26 donné que eux, ils n'étaient prêts à se battre pour personne. La Republika
27 Srpska, en d'autres termes, a pris les choses dans ses propres mains, et a
28 essayé de résoudre ses problèmes.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous ai invité à répéter la dernière
2 partie de votre réponse. Toutefois, j'ai l'impression qu'en dehors de
3 répéter ce que vous aviez déjà dit, vous avez également ajouté pas mal de
4 mots supplémentaires.
5 A l'avenir, si vous voulez bien, je pense que cela nous permettra d'avancer
6 plus rapidement, je vous ferai un geste de la main lorsque je souhaiterais
7 vous demander de vous arrêter pour reprendre votre souffle et vous pourrez
8 poursuivre une fois que vous aurez respirer, lorsque je vous l'indiquerai
9 par un autre geste de la main.
10 Veuillez poursuivre, Maître Misetic.
11 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 Q. Général Mrksic, je reviens à la ligne du compte rendu où vous disiez
13 que vous souhaitiez voir la situation du front revenir à ce qu'elle était à
14 la mi-1994. Afin de réaliser cela, vous deviez repousser les forces croates
15 hors de leurs positions sur le mont Dinara et dans le secteur de Grahovo,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Ce n'était pas possible si l'on voulait être réaliste. La seule
18 possibilité qui existait, c'était d'obtenir une stabilisation du front.
19 Donc, le plan prévoyait de se lancer dans des opérations spéciales avec la
20 Republika Srpska. Toutefois, j'ajouterai un bémol, parce qu'il était
21 possible, en fait, de mettre ce plan en application, et lorsque je m'en
22 suis rendu compte, je me suis rendu compte qu'on m'avait menti. Est-ce que
23 vous m'autorisez à terminer ?
24 Q. Je voudrais que nous en arrivions à la question, et j'appelle votre
25 attention sur la réponse que vous avez faite qui figure en page 86, ligne
26 19 du compte rendu d'audience, où vous dites, je cite :
27 "Nous allons déplacer le front, et les choses reviendront à la normale. De
28 cette façon, la situation sur le mont Dinara reviendra à ce qu'elle était
Page 18791
1 en 1994, à la mi-1994."
2 Alors, voici ma question : est-ce que vous auriez pu ramener le front à la
3 situation dans laquelle il se trouvait à la mi-1994 sans repousser les
4 forces croates hors du mont Dinara et de Grahovo ?
5 R. C'est ce qui était la situation avant l'entrée des forces croates à
6 Grahovo. Les forces croates n'avaient pas pris le contrôle de tout le mont
7 Dinara. C'est à ce moment-là que nous avons élaboré ce plan, et depuis
8 l'élaboration de ce plan, pas un seul représentant des forces croates n'a
9 pénétré à Grahovo, parce que c'était un fait accompli. Cela aurait dû être
10 fait avant, au début du mois de juillet, plutôt que dans le cadre de
11 l'opération Pauk. Nous aurions dû faire cela en premier lieu, et ensuite
12 stabiliser le front en Bosnie occidentale plutôt que de nous emparer de, je
13 ne sais pas combien, 40 à 50 kilomètres, nous aurions dû nous concentrer
14 sur 4 ou 5 kilomètres. En d'autres termes, nous aurions dû tourner le dos à
15 la situation militaire, à la solution militaire et nous engager sur la voie
16 d'une solution politique.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les interprètes n'ont pas encore
18 terminé.
19 Veuillez poursuivre maintenant.
20 M. MISETIC : [interprétation]
21 Q. Je regarde une nouvelle fois le document à l'écran, général Mrksic, et
22 je vois la dernière ligne du compte rendu en anglais –- je ne sais pas si
23 c'est également la dernière ligne du B/C/S. Je cite :
24 "Le général Mrksic est présent, et dès que" –
25 M. MISETIC : [interprétation] Passons à la page suivante.
26 Q. "Dès qu'il partira, nous prendrons la décision de le subordonner au
27 commandement de l'opération Pauk."
28 Alors, par la suite, est-ce que le commandement de Pauk a finalement été
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1 subordonné à vous ?
2 R. Pendant l'opération, pendant les 70 jours environ de sa durée, Mile
3 Novakovic a reçu des missions directement de moi, et pas de la République
4 de Serbie ou de Fikret. Je ne sais pas de qui il recevait ses missions
5 auparavant. Mais en tout cas, il en a reçu de moi, c'était moi qui étais le
6 commandant, j'exerçais mon commandement, et je donnais des ordres en vue
7 d'opérations actives.
8 Q. La ligne du compte rendu se poursuit comme suit…
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble qu'il y a un problème.
10 M. MISETIC : [interprétation] Votre micro, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble qu'il y ait un problème
12 technique.
13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, il y a des problèmes
15 techniques avec la cabine française, alors que je suis en train d'écouter
16 la cabine française, et j'entends l'interprétation, donc apparemment, le
17 problème a été résolu ?
18 L'INTERPRÈTE : Oui, Monsieur le Président, tout va bien. C'était un
19 problème de console.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout va bien, d'après ce que j'ai
21 compris.
22 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, là, je regarde l'heure
24 et -- de toute façon, nous avons été interrompus, et je propose que l'on
25 arrête les travaux pour la journée.
26 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais tout d'abord demander que le
28 témoin quitte le prétoire.
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1 Monsieur Mrksic, je voudrais vous demander de ne parler avec qui que ce
2 soit, même pas qui que ce soit dans le quartier pénitentiaire ou ailleurs,
3 au sujet de votre déposition, qu'il s'agisse des choses que vous nous avez
4 déjà dites ou de ce que vous allez encore nous dire au cours des jours à
5 venir. Je vous demande de ne parler avec personne. Je voudrais vous voir
6 revenir demain matin à 9 heures, et j'espère que vous allez, au cours de la
7 journée, voir votre conseil arriver dans ce prétoire. Nous avons fait de
8 notre mieux pour résoudre ce problème. Apparemment, il n'y a pas eu de
9 problème de questions qui vous incrimineraient.
10 M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que je peux demander que le conseil
11 soit inclus aussi dans votre mise en garde ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Même si -- cela veut
13 dire que si vous parlez, par exemple, au téléphone avec votre conseil, vous
14 n'avez pas le droit d'évoquer les questions qui vous ont été posées et les
15 réponses que vous avez données. Vous n'avez pas le droit d'en parler avec
16 qui que ce soit dans le quartier pénitentiaire, à l'extérieur du quartier
17 pénitentiaire, même pas par téléphone, quel que soit le moyen
18 technologique. Vous ne devez parler avec qui que ce soit au sujet de votre
19 déposition.
20 Est-ce que vous m'avez bien compris ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais je ne sais pas combien de temps ça
22 va durer, je veux dire ma déposition. Enfin, à peu près, combien de jours à
23 peu près, combien d'heures ? Parce que je n'ai pas eu de contact avec qui
24 que ce soit, ni avec le Procureur ni avec les autres, alors je ne sais pas
25 jusqu'à quand ça va durer.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense a demandé à disposer de neuf
27 heures, et ensuite, bien sûr, il va y avoir par la suite des questions
28 posées par les autres parties du côté de la Défense, et ensuite par le
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1 Procureur. Donc cela va durer un certain temps, oui.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Neuf heures. Mais c'est quelques jours, alors
3 ? Ça va durer quelques jours ?
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez avoir trois jours
5 d'interrogatoire principal, et ensuite, peut-être autant de temps du côté
6 du Procureur. Effectivement, oui, cela va peut-être durer. J'en suis
7 conscient.
8 Mais pourquoi ? Est-ce que vous avez une raison particulière pour me
9 poser cette question ? Vous n'avez pas un programme particulier ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Mais mercredi prochain, ma fille vient me
11 visiter, et je ne souhaite pas déposer ce jour-là. C'est le 24. Je souhaite
12 être libre ce jour-là. D'ailleurs, je l'ai écrit. Je l'ai dit.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien que vous nous le dites.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faudrait que ça soit fini avant mercredi
15 prochain, donc que ça se termine, que ça se finisse mardi. Donc, on a
16 demain, lundi et mardi.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai l'impression que ça serait trop
18 optimiste que de penser cela.
19 Mais cette visite, votre fille qui vient vous voir, est-ce qu'elle
20 vient vous voir toute la journée, le matin, l'après-midi ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais toute la journée du 24, et le 25 et le 26
22 aussi. Ces trois jours-là. D'ailleurs, sa visite était prévue avant que je
23 ne sache que j'allais être convoqué.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, on va voir ce que l'on peut
25 faire pour vous aider. Je ne peux rien vous promettre à présent. Ce qui est
26 sûr, c'est que vous n'allez déposer que le matin ou l'après-midi, mais nous
27 allons nous pencher sur la question, et on va voir ce que l'on peut faire,
28 et si on ne peut rien faire --
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais vous savez, il faut quand même me donner
2 au moins une journée entière pour déposer. Ceci ne poserait pas de
3 problème.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord, c'est une proposition. Mais
5 peut-être que nous, nous n'allons pas être disponibles pour siéger toute la
6 journée, mais on va y réfléchir. On va réfléchir à toutes les possibilités
7 pour essayer de vous aider. Mais vous, est-ce que vous êtes d'accord que
8 l'on pose la question au quartier pénitentiaire pour savoir exactement
9 quand sont prévues ces visites, pour essayer de vous organiser cela ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.
12 M. RUSSO : [interprétation] Est-ce que vous pourriez demander au témoin
13 d'enlever ses écouteurs –
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin doit-il rester, parce que j'ai
15 déjà demandé à ce qu'il soit escorté de la salle d'audience.
16 M. RUSSO : [interprétation] Je crois que cela va dépendre de la réponse que
17 vous allez donner à mes commentaires.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez retiré vos écouteurs. Je crois
19 savoir que le témoin comprend très bien l'anglais. C'est la raison pour
20 laquelle M. Misetic a dit tout à l'heure, --
21 M. RUSSO : [interprétation] Alors, peut-être que je peux apporter mes
22 commentaires en dehors de la présence du témoin.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 Le témoin doit-il rester à cette fin ?
25 M. RUSSO : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je ne le pense pas.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, Monsieur Mrksic, je vous ai donc
27 donné mes instructions. Nous aimerions vous revoir ici, demain matin, oui,
28 demain matin. Nous aimerions vous retrouver ici demain à 9 heures, mais ce
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1 ne sera pas dans la même salle d'audience. Il s'agira de la salle III
2 Je vous demande donc maintenant de bien vouloir sortir de cette salle sous
3 escorte.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
5 [Le témoin quitte la barre]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Russo.
7 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je serai
8 très bref. En fait, les instructions données par le Tribunal au témoin de
9 ne pas parler à son avocat ni au sujet du témoignage qu'il a donné ni au
10 sujet du témoignage qu'il va donner, me préoccupe quelque peu parce que je
11 ne vois pas comment l'avocat va pouvoir conseiller son client sur les
12 questions ou le type de questions, en tout cas, qui pourraient impliquer
13 son droit à éviter tout auto-incrimination.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que si le conseil arrive
15 demain, nous aurons alors l'occasion d'en discuter brièvement avec lui. Le
16 témoin sera également présent à ce moment-là, et alors, nous pourrons voir
17 dans quelle mesure nous devons adapter nos instructions.
18 Pour le moment, je pense que la Chambre prêtera une attention tout à fait
19 appropriée à cela demain. Mais je pensais que ce qui était important,
20 c'était d'insister sur les instructions à donner au témoin ce soir.
21 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
23 M. MISETIC : [interprétation] Donc, notre position est très claire, tout
24 d'abord, nous ne voyons pas pourquoi l'Accusation a besoin de soulever
25 cette question. Deuxièmement, s'il s'agit pour le témoin de demander le
26 conseil de son avocat, ou alors si c'est à l'avocat de commencer à prendre
27 la parole –
28 L'INTERPRÈTE : Chevauchement des orateurs.
Page 18797
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne discutons pas de cela pour le moment
2 en détail.
3 Je pense que la Chambre a fait de son mieux pour maintenir les choses dans
4 le bon ordre. Et c'est très certainement une question que nous aborderons
5 en la présence du conseil pour voir exactement quel doit être ou quel peut
6 être et quel ne pas être son rôle, comment communiquer avec le témoin et,
7 bien entendu, s'il y a des questions ou d'autres questions ou d'autres
8 besoins, nous pourrons en discuter également à ce moment-là.
9 Je ne crois pas que ce soit pour le moment une question qui mérite
10 d'obliger la présence des interprètes et des procès-verbalistes plus
11 longtemps au sein de cette d'audience.
12 Nous allons donc lever l'audience pour aujourd'hui, et nous reprendrons
13 demain, demain matin jeudi, 18 juin, à 9 heures en salle III
14 --- L'audience est levée à 19 heures 08 et reprendra le jeudi 18 juin 2009,
15 à 9 heures 00.
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