Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 14 juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Madame la Greffière, veuillez citer le numéro de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina

 10   et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Barkovic. Je tiens à

 12   vous rappeler que vous êtes toujours lié par la déclaration solennelle que

 13   vous avez prononcée hier par lequel vous indiquiez que vous étiez sur le

 14   point de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 15   LE TÉMOIN : MLADEN BARKOVIC [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   Monsieur Russo, êtes-vous prêt à poursuivre votre contre-interrogatoire ?

 18   M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Veuillez procéder.

 20   M. RUSSO : [interprétation] Merci.

 21   Contre-interrogatoire par M. Russo : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur.

 23   R.  Bonjour.

 24   Q.  Professeur, nous avons suspendu l'audience hier alors que nous étions

 25   en train de discuter de la réaffectation du commandant Werner Ilic. Alors

 26   je récapitule : le commandant Ilic avait été chargé de suivre les cours du

 27   MPRI destinés à lui apprendre comment enseigner à d'autres sous officiers;

 28   c'est bien ça, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Vous nous avez hier apporté quelques explications quant aux raisons

  3   pour lesquelles le commandant Ilic était mécontent de son affectation. L'un

  4   des motifs qui figure dans la lettre du général Griffith dont lecture a été

  5   donnée hier réside dans le fait que le commandant Ilic ne voyait pas quelle

  6   était la valeur du programme d'enseignement; n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Le commandant Ilic a-t-il finalement été autorisé à retourner au sein

  9   de son unité ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Savez-vous vous si le commandant Ilic a subi des sanctions

 12   disciplinaires en raison du fait qu'il ne s'est pas présenté au cours du

 13   MPRI ?

 14   R.  Ça je ne sais pas, je n'ai pas d'information à ce sujet.

 15   Q.  Professeur, à votre avis quel message qui a été adressé au commandant

 16   Ilic et aux autres soldats de l'armée croate avec lesquels il a

 17   probablement discuté des cours du MPRI quant à la qualité, à la valeur des

 18   cours du MPRI, étant donné que le commandant Ilic a tout simplement été

 19   autorisé à ne pas se présenter à ces cours ?

 20   R.  Il est tout à fait clair que le message en question n'était pas bon

 21   mais il est tout aussi clair que si quelqu'un ne souhaite pas accepté un

 22   travail d'enseignant, il est impossible de le lui imposer. Or le commandant

 23   Werner Ilic n'a pas été intégré au MPRI immédiatement. Il est arrivé avec

 24   un peu de retard. Je ne sais pas si c'est une circonstance atténuante mais,

 25   en tout cas, il ne connaissait pas l'intégralité du programme au départ. Il

 26   a simplement été intégré dans la première phase du travail qui était un

 27   travail préparatoire. A ce stade, il n'avait pas une vision complète du

 28   programme du MPRI mais nous avons eu ensuite des contacts, lui et moi, car

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  1   il fait partie de l'école de l'état-major et je dois dire que nous n'avons

  2   jamais eu le moindre problème d'intolérance entre nous donc je ne pense pas

  3   qu'il ait diffusé des informations négatives quant au programme

  4   d'enseignement du MPRI.

  5   Q.  Merci. Mais vous conviendrez avec moi que la décision unilatérale du

  6   commandant Ilic qui a décidé de ne pas se rendre au cours du MPRI n'était

  7   pas acceptable et aurait pu justifier des mesures disciplinaires, d'autant

  8   plus que l'on peut y ajouter des sentiments exprimés par le général de

  9   division Cosic.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais ce n'est pas ce qu'indique la

 11   lettre du général Cosic.

 12   M. RUSSO : [interprétation] Toutes mes excuses, c'est exact.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Peut-être pourrions-nous diviser les choses en

 14   plusieurs parties et revenir à la lettre du général Cosic en donner lecture

 15   de façon à en connaître le contenu de façon précise ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, voudriez-vous reformuler

 17   votre question de façon à ce qu'elle rende fidèlement compte du document

 18   auquel vous faites référence et avancer point par point, si vous le voulez

 19   bien ?

 20   M. RUSSO : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. Je vous

 21   remercie.

 22   Q.  Monsieur Barkovic, vous conviendrez que le général de division Cosic

 23   indique que la décision unilatérale du commandant Ilic consistant à ne plus

 24   se rendre au cours était inappropriée et ne convenait pas pour un officier

 25   de l'armée de Croatie, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, ça c'est clair.

 27   Q.  Conviendrez-vous avec moi que lorsqu'un officier ou un sous officier,

 28   ou même un soldat ou qui que ce soit qui fait partie de l'armée de Croatie

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  1   prend une décision unilatérale aussi inacceptable que celle-ci, cela

  2   implique ou conduit à des mesures disciplinaires ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Je vous remercie.

  5   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

  6   au dossier du document 65 ter numéro 7276, à savoir de la lettre du général

  7   de division Cosic.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ce document

 11   devient la pièce à conviction P2588.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

 13   Monsieur Russo, permettez-moi une question au témoin.

 14   Monsieur Barkovic, pourriez-vous expliquer la réponse, dans laquelle vous

 15   avez indiqué qu'il est clair qu'une personne, qui ne souhaite pas accepter

 16   un travail d'enseignement, ne peut pas y être contraint ?

 17   N'est-il pas vrai que, dans la structure militaire, l'on ait tenu d'obéir

 18   aux ordres, et n'est-il pas vrai que, si l'on n'y obéit pas, on peut être

 19   contraint à y obéir ou, en tout cas, que des mesures peuvent être prises

 20   aux fins que la mission que l'on confie à cette personne soit acceptée et

 21   dans la cas contraire des conséquences peuvent s'en suivre ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais les deux propositions ne sont pas

 23   contradictoires. En tant qu'enseignant, je sais qu'une personne, qui ne

 24   souhaite pas enseigner à d'autres est contrainte à le faire, ne fera pas un

 25   bon travail. Chacun le sait. Donc si quelqu'un n'a pas le désir d'être

 26   instructeur ou enseignant, il est préférable de l'autoriser à partir.

 27   Par ailleurs, je suis d'accord avec vous quant au fait qu'une personne, qui

 28   fait partie de l'armée et qui n'obéit pas aux ordres, doit subir certaines

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  1   sanctions.

  2   Mais il est importe de ne pas perdre de vue la dynamique dans laquelle les

  3   événements en question ont eu lieu. Nous avons regroupé, nous avons formé

  4   des équipes d'officiers américains et croates en novembre 1994, et dans

  5   l'espace d'un mois, nous avons évalué la situation, nous avons rédigé un

  6   rapport indiquant quelle était la situation; et dans le même temps, nous

  7   avons préparé un manuel d'enseignant pour les officiers, car nous avons

  8   constaté que c'était indispensable, et à ce moment-là, nous avons remarqué

  9   certaines insuffisances. C'est au moment où nous avions constaté

 10   l'existence de ces insuffisances, que le commandant Werner Ilic est arrivé,

 11   je suis convaincu qu'il ne savait pas exactement ce qu'il allait faire, et

 12   si l'on tient compte des caractéristiques de sa personnalité, il est

 13   probable qu'il est réagi de façon explosive. Il importe également de ne pas

 14   perdre de vue qu'il était volontaire.

 15   Il a quitté une situation très sûr aux Etats-Unis pour venir en

 16   Croatie, participer à la défense, et donc il est probable que ceux qui ont

 17   pensé à des mesures disciplinaires ont tenu compte de ce fait. C'est la

 18   raison pour laquelle je suppose qu'il a simplement été averti du fait que

 19   son comportement n'était pas acceptable, et qu'un autre travail lui a été

 20   proposé, travail qu'il était prêt à effectuer et qu'il pouvait effectuer.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 22   Russo.

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Page

 24   5, ligne 6 du compte rendu d'audience, nous constatons que les

 25   circonstances dans lesquelles M. Werner Ilic est arrivé ne sont pas

 26   mentionnées au compte rendu.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] La question m'est adressée ?

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez préciser, Monsieur.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, Madame, Monsieur

  2   les Juges, durant le travail préparatoire, nous avons reçu un bref

  3   avertissement qui comptait deux points, indiquant que le commandant Werner

  4   Ilic allait nous rejoindre, et le lendemain sur la base de cet ordre, le

  5   commandant Ilic est arrivé. Nous lui avons trouvé un logement dans la

  6   caserne très rapidement, et troisième jour après la rédaction de cet ordre,

  7   il a commencé à travailler. C'est dans ce sens que j'ai dit qu'il a fait

  8   son apparition, qu'il est arrivé. Il n'est pas sorti de nulle part. Il est

  9   arrivé sur la base d'un ordre qui, je crois, était signé par le général

 10   Cosic.

 11   M. RUSSO : [interprétation]

 12   Q.  Merci, Professeur. Je n'ai plus de questions à vous poser. Je vous

 13   remercie de votre déposition.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous des questions supplémentaires

 18   ?

 19   M. KEHOE : [interprétation] J'ai quelques questions à poser encore au

 20   témoin.

 21   Nouvel interrogatoire par M. Kehoe : 

 22   Q.  [interprétation] Monsieur Barkovic, parlons du commandant Ilic, dites-

 23   vous dans votre déposition que le commandant Ilic est arrivé pour suivre

 24   des cours afin de devenir instructeur par la suite; c'est bien ça ?

 25   R.  A ce moment-là, tous nos instructeurs accomplissaient deux tâches.

 26   D'une part, sur la base des compétences qu'ils avaient à ce moment-là, ils

 27   préparaient d'autres hommes pour que ces derniers deviennent instructeurs

 28   il le faisait du mieux qu'il le pouvait, et puis il y avait certains hommes

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  1   qui venaient pour la première fois suivre ces cours de préparation au

  2   métier d'instructeur, et ils ont donc participé à ces stages. Le commandant

  3   Ilic était censé rejoindre le groupe d'hommes qui étaient déjà instructeur

  4   et qui suivaient un stage de perfectionnement afin de devenir de meilleurs

  5   instructeurs, et de pouvoir former d'autres hommes au métier

  6   d'instructeurs, à savoir un certain nombre de sous officiers qui avaient

  7   besoin de suivre un stage de formation.

  8   Donc le commandant Ilic avait une certaine expérience en matière

  9   d'instruction, une expérience assez limitée, il avait donc a priori les

 10   compétences nécessaires et était censé pouvoir former les soldats et les

 11   sous officiers à des tâches concrètes, mais ils n'avaient pas encore des

 12   compétences suffisantes sur le plan théorique.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Je crois qu'il y a un problème de compte rendu

 14   d'audience que Me Misetic va vous exposer.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, page 6, ligne 24 du

 16   compte rendu, le témoin a décrit la raison pour laquelle M. Ilic a été

 17   envoyé au MPRI pour suivre le programme d'enseignement mais ceci n'est pas

 18   consigné.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez entendu la question. Pourriez-

 20   vous, je vous prie, préciser les choses s'agissant des raisons pour

 21   lesquelles M. Ilic a été intégré à ce programme.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandant Ilic a été envoyé au MPRI pour

 23   faire partie de l'équipe d'instructeur qui devait préparer le contenu des

 24   cours, dispensés par les instructeurs, tout en suivant le programme

 25   d'enseignement. Mais tous nos instructeurs à ce moment-là avaient pour but

 26   et de se perfectionner dans leur métier d'instructeur et de participer à

 27   l'élaboration des programmes d'enseignement. C'est peut-être un peu

 28   difficile à comprendre parce qu'en raison du temps limité dont nous

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  1   disposions, nous avons été contraint d'agir de cette façon. Nous avons donc

  2   travaillé hardiment à la préparation des programmes d'enseignement tout en

  3   dispensant des cours de perfectionnement.

  4   M. KEHOE : [interprétation]

  5   Q.  Professeur, dans la pièce P2528, qui est le document émanant du général

  6   Cosic avec en annexe la lettre du général Griffiths, nous lisons au

  7   paragraphe 5 que le commandant Ilic a demandé à être libéré de son

  8   affectation, de sa mission.

  9   Vous vous rappelez cela, Monsieur ?

 10   R.  Oui, je me le rappelle. Mais ce n'est ni à moi ni au général Griffiths

 11   qu'il a présenté sa demande, or nous étions responsable du programme. I a

 12   envoyé une lettre à l'état-major principal et au ministre de la Défense

 13   pour indiquer qu'il ne souhaitait plus faire ce travail.

 14   Q.  Vous rappelez-vous ce que dit le général Griffiths, au paragraphe 5,

 15   dans lequel il indique que :

 16   "A son avis, le commandant Ilic n'est pas la personne la plus adaptée

 17   pour cette mission."

 18   Deux phrases plus loin, il dit que : "Le commandant Ilic est jeune,

 19   immature et très axé sur sa propre personne."

 20   Vous rappelez-vous ce point de vue; était-ce un point de vue partagé

 21   ou était-ce simplement le point de vue du général Griffiths au sujet du

 22   commandant Ilic ?

 23   R.  Oui, nous en avons discuté ensemble, donc c'était une position que nous

 24   partagions tous. Position consistant à penser qu'en fait le commandant Ilic

 25   s'était trouvé peut-être un peu par hasard dans ce programme qui

 26   nécessitait un travail plus réfléchi, plus pensé et que, sur la base de ses

 27   compétences de l'époque et de ses capacités, cela dépassait un peu ce qu'il

 28   était capable de faire. Donc ceci explique sans doute la façon dont il

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  1   s'est comporté.

  2   M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais simplement indiquer qu'en page 7,

  3   ligne 18, le numéro de la pièce est P2588.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur Russo. J'avais

  5   fait une erreur dans le numéro.

  6   Q.  Monsieur le Témoin, cette discussion que vous avez eue avec le

  7   commandant Ilic, vous en avez ensuite discuté avec le général Cosic avant

  8   l'envoi de cette lettre au ministère de la Défense, à M. Susak, n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Je ne me rappelle pas si nous en avons discuté ou pas avant. Mais en

 11   tout cas, nous avons mis par écrit ce que nous pensions, c'est certain.

 12   Q.  Toutes les personnes qui ont participé à la prise de décision, aient-

 13   elle d'accord sur le fait que le commandant Ilic n'était pas la personne la

 14   plus adaptée pour ce travail et qu'il convenait de le renvoyer dans son

 15   unité ?

 16   R.  Puisque le résultat a été de le renvoyer dans son unité, je veux croire

 17   que le général Cosic partageait cet avis. Il a consulté le général de

 18   brigade Sundov de la 4e Brigade, si je ne me trompe, ainsi que M. Gotovina,

 19   et ce faisant, il a donc confirmé notre position selon laquelle pour

 20   participer à ce programme, le commandant Ilic n'était pas la personne la

 21   plus adaptée.

 22   Donc le commandant Ilic n'était pas satisfait de nous, et de notre côté,

 23   nous avons estimé que ce programme serait mené à bien, plus aisément en son

 24   absence.

 25   Q.  Ça ressemble beaucoup à mon premier mariage.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le second a-t-il été meilleur ?

 27   M. KEHOE : [interprétation] Le second est bien meilleur, Monsieur le

 28   Président, c'est ce que je m'aventurerais à dire.

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  1   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais que nous revenions sur un certain nombre

  2   de points qui ont été discutés hier, par M. Russo.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Je demande d'abord l'affichage de la pièce

  4   P2559, Monsieur le Président, je crois que c'est un document dont nous

  5   avons discuté un passage qui se trouve entre les pages 20 197 et 20 198 du

  6   compte rendu d'audience. J'aimerais que ce document soit affiché sur les

  7   écrans.

  8   Q.  Alors prenons d'abord l'avant-dernière page de ce document, paragraphe

  9   2.10 qui a fait l'objet de certaines questions posées par M. Russo. Alors

 10   d'abord la dernière page.

 11   Dans le cadre du sujet dont vous avez parlé avec M. Russo, hier, il a été

 12   question du paragraphe 2.10 qui se lit comme suit, je cite :

 13   "Proposition de nomination d'officiers, sous-officiers et d'hommes du

 14   rang, qui concerneront l'opération d'attaque et seront soumis plus tard."

 15   Alors j'ai constaté qu'aucun nom ne figurait dans ce paragraphe, mais

 16   j'aimerais maintenant que nous revenions à sa première page.

 17   Professeur, vous remarquerez que là où figurent les noms, les noms propres,

 18   nous voyons que cette tâche est exécutée par le général Gotovina en

 19   application de votre ordre, et vous voyez un numéro de référence qui est

 20   une date, à savoir celle du 8 août.

 21   Est-il permis de dire que c'est une réponse à un ordre ? Passons maintenant

 22   au document 65 ter numéro 5634, dont je demande l'affichage.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Alors nous avons maintenant sur les écrans le document 65 ter 5634, et

 25   pour ma part, je vous indique, Professeur, que les numéros de référence que

 26   l'on trouve dans ce document au milieu de la page sur la gauche

 27   correspondent à l'ordre du général Gotovina. Comme nous l'avons constaté à

 28   la lecture de la pièce P2559, la date est celle du 15 août, et cet ordre

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  1   vient du général Cervenko, il date du 8 août et il indique que :

  2   "Les opérations menées doivent être analysées, et qu'avant le 15 août 1995,

  3   des rapports, conclusions et propositions doivent lui être soumis par écrit

  4   au sujet des questions énumérées plus loin dans le texte."

  5   Alors affichage s'il vous plaît de la page suivante en anglais et en B/C/S,

  6   sous B, la partie commence par conclusions et propositions de promotion.

  7   Dans ce paragraphe, j'attire votre attention sur le dernier tiret,

  8   conclusions et propositions de promotion. On y note les distinctions

  9   obtenues par certains officiers, sous-officiers et soldats.

 10   Alors d'après votre expérience au sein de l'armée croate à l'examen de ces

 11   deux documents, pourriez-vous conclure que le général Gotovina répondait à

 12   un ordre émanant de l'état-major principal ?

 13   M. RUSSO : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, voici une

 14   question extrêmement directrice.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Je retire la question.

 16   Q.  Monsieur, d'après ces deux documents et d'après votre expérience, à la

 17   lecture conjointe de ces deux documents, ainsi qu'avec l'ordre de l'état-

 18   major et l'ordre du général Gotovina, pourriez-vous dire à la Chambre

 19   quelles sont vos conclusions ?

 20   R.  Connaissant le fonctionnement de l'armée et ayant à l'esprit le

 21   principe de commandement unifié, je dirais que ces deux documents montrent

 22   tout à fait clairement, que le 8 août, le chef de l'état-major principal a

 23   ordonné que l'on effectue une analyse en précisant les éléments examinés.

 24   Il ordonne également que des conclusions soient tirées et que des

 25   recommandations soient formulées afin de faire des progrès dans un certain

 26   nombre de domaines et sur un certain nombre de questions, afin d'améliorer

 27   l'organisation militaire.

 28   Nous constatons également que cet ordre est indiqué comme étant

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  1   extrêmement urgent. A la lumière du premier document, qui est en fait la

  2   réponse du général Gotovina, on constate qu'une semaine plus tard l'analyse

  3   a été menée à bien, que les conclusions ont été couchées sur le papier et

  4   que les réponses aux questions ont été apportées.

  5   On peut donc conclure qu'il a agi conformément à l'ordre qui avait

  6   été donné par le chef de l'état-major principal. Si l'on en vient

  7   maintenant au point 2.10 plus précisément, on voit qu'il a pris le temps

  8   nécessaire, qu'il n'a pas agi avec hâte, et qu'il y précise que les

  9   propositions de distinction seraient soumises à une date ultérieure. Il se

 10   donne donc le temps nécessaire de voir qui parmi ses subordonnés s'est

 11   suffisamment distingué pendant l'opération Tempête pour bénéficier de

 12   distinctions.

 13   Q.  Merci, Professeur.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Je pensais que Me Misetic avait une autre

 15   correction à apporter.

 16   Q.  Vous souvenez-vous si le président Tudjman a donné l'ordre de décorer

 17   certaines personnes ayant participé aux opérations Tempête et Eclair,

 18   indépendamment des éloges dont certains individus auraient pu faire l'objet

 19   ou des recommandations qui auraient pu être faites ?

 20   R.  Je n'en ai pas le souvenir.

 21   Q.  Très bien. Alors examinons quelque chose, nous verrons si ceci peut

 22   vous rafraîchir la mémoire.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche à l'écran la

 24   pièce 1D2783.

 25   Q.  J'aimerais, Professeur, que vous examiniez ce document, c'est une

 26   décision du président, est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire quant à

 27   la chronologie des événements -- une décision du président Tudjman, je le

 28   précise, qui porte la date du 7 août 1995 ? Il s'agit donc de la remise de

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  1   médailles pour les opérations Eclair, Tempête, et à d'autres qui auraient

  2   participé à la libération de la Slavonie occidentale, Dalmatie, Lika,

  3   Kordun, Banja, tout comme d'ailleurs ceux qui auraient participé à des

  4   actions entreprises à l'été 1995.

  5   R.  Oui, je sais ce dont vous parlez. Il est d'usage non pas seulement au

  6   sein de l'armée croate mais de toutes les armées du monde de décerner des

  7   médailles à des personnes s'étant distinguées dans le cadre de certaines

  8   opérations militaires, la pratique a donc été introduite après l'opération

  9   Tempête et d'autres opérations, et ces médailles ont été décernées à tout

 10   ceux qui y ont participé.

 11   A ma connaissance, ces médailles n'avaient pas pour objet de récompenser

 12   une action particulière, elles ont été remises à tous les soldats, aux

 13   sous-officiers, aux officiers, du simple fait qu'ils ont participé à ces

 14   opérations.

 15   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier,

 16   Monsieur le Président, de la pièce 1D2783, ainsi que le document 65 ter

 17   5634, qui est l'ordre du 8 août du général Cervenko.

 18   M. RUSSO : [interprétation] Aucune objection.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Commencez par l'ordre du 8 août, le

 22   document 5634 de la liste 65 ter, qui a été présenté avant l'autre.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce de la Défense D1605,

 24   et le deuxième document, D1606.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les deux documents sont versés au

 26   dossier.

 27   Veuillez poursuivre.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Barkovic, d'après votre expérience au sein de l'armée croate,

  2   un ordre tel que celui-ci serait-il transmis par le biais de l'état-major

  3   principal vers les commandants afin que ceux-ci fournissent une liste de

  4   personnes pouvant prétendre à une médaille ?

  5   L'INTERPRÈTE : Le témoin acquiesce.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Compte tenu de la relative longueur de la

  7   filière hiérarchique, donc cela commençait effectivement au niveau du chef

  8   de l'état-major principal, et ensuite l'ordre descendait jusqu'au niveau

  9   des sections, et il fallait un certain temps.

 10   M. KEHOE : [interprétation]

 11   Q.  Très bien. Examinons la pièce P1184 déjà versée au dossier. Il s'agit

 12   d'un ordre du général Gotovina du 16 août 1995 adressé à toutes les Unités

 13   de la Région militaire de Split.

 14   Examinez ce document et son préambule notamment. Il y est dit que :

 15   "Conformément au paragraphe 23 du règlement des forces armées de la

 16   République de Croatie… et en application de l'ordre du chef de

 17   l'administration du personnel du ministère de la Défense de la République

 18   de Croatie… du 14 août 1995, et afin de mettre en place les conditions

 19   optimales permettant l'exécution de la décision du président de la

 20   République de cora prévoyant que l'on décerne une médaille aux participants

 21   aux opérations de l'armée de la police, j'ordonne ce qui suit, la remise de

 22   médailles pour la participation couronnée de succès aux opérations

 23   militaires et de police Eté 95 et Tempête --" 

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez lu "conditions optimales,"

 25   Maître Kehoe, mais en fait il s'agit de conditions "opérationnelles," c'est

 26   ce qui est écrit dans le document.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, en effet, opérationnelles.

 28   Donc je reprends la lecture :

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  1   "…pour la participation couronnée de succès aux opérations militaires et

  2   opérations de police, Eté 95 et Tempête, conformément à cet ordre, tous les

  3   membres des unités de l'armée croate, qui ont participé aux opérations dans

  4   la zone de responsabilité de la Région militaire de Split, pourront se voir

  5   décerner une médaille…"

  6   Voyez-vous le moindre lien entre ces documents, et si oui, lequel ?

  7   R.  Vous parlez des trois derniers documents, l'ordre donné par le chef de

  8   l'état-major principal, l'ordre donné par le général Gotovina, et l'ordre

  9   qui se trouve ici à l'écran ?

 10   Q.  Non, non, non, la décision de Tudjman, puis cet ordre du général

 11   Gotovina.

 12   R.  Je vois.

 13   La décision du président Tudjman consistait à ce que l'on décerne un

 14   certain nombre de médailles à l'issue de certaines opérations militaires.

 15   Le général Gotovina devait quant à lui préciser qui avait participé à ces

 16   opérations. Je vois ici un paragraphe qui précise que tout ceux qui

 17   n'avaient pas été présents sur les zones de combat ne pourraient se voir

 18   remettre une médaille; et comme on le voit ici, les médailles sont prévues

 19   pour tous les membres des unités ayant participé aux opérations Eté 95 et

 20   Tempête qui se sont succédées, donc tout ceux qui y avaient participé

 21   étaient censés recevoir une médaille.

 22   Q.  Une précision : dans ce document, vous faisiez référence aux

 23   paragraphes 3 et 4. Au paragraphe 3, on lit que :

 24   "Tous les membres des unités pourront recevoir une médaille du fait

 25   de leur participation aux opérations évoquées dans le présent ordre quel

 26   que soit la durée de leur présence au sein de l'unité pendant les

 27   opérations."

 28   Au paragraphe 4, il est dit effectivement que :

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  1   "Les membres absents des rangs de l'unité pendant la durée des

  2   opérations du fait d'une maladie ou pour tout autres raisons ne pourront

  3   prétendre à une médaille."

  4   Je souhaitais simplement que le compte rendu soit clair; c'est bien de ces

  5   deux paragraphes dont vous parliez, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant en venir à un autre thème pour

  8   quelques instants et revenir sur la discussion que vous avez eue hier avec

  9   M. Russo sur le travail des sous officiers.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, si vous me le permettez,

 11   j'aimerais obtenir précision de la part du témoin sur quelque chose qui

 12   reste un peu vague dans mon esprit.

 13   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, nous avons vu un

 15   ordre du président Tudjman du 7 août, qui introduit disons plus ou moins un

 16   mécanisme automatique de récompense de tous ceux qui ont participé aux

 17   opérations sous forme de la remise de médailles; on constate que ce

 18   document du 14 demande des informations complémentaires afin de connaître

 19   l'identité de ces personnes.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Je crois que c'est le 16, Monsieur le

 21   Président. L'ordre du général Gotovina porte la date du 16; le document

 22   P1184.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vérifier. En effet,

 24   c'est le 16, toutes mes excuses de ce manque de précision.

 25   Alors nous avons également l'ordre du général Cervenko du 8, par le biais

 26   duquel il demande qu'une analyse soit réalisée; nous avons également la

 27   réponse du 15 août du général Gotovina dans laquelle il dit :

 28   "Qu'il transmettra ses recommandations tant pour la remise de

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  1   médailles que pour l'octroi de promotion à un stade ultérieur."

  2   Alors ce qui m'intéresse c'est cette remise automatique de médailles,

  3   disons, à tous ceux qui ont participé aux opérations. Est-ce que ce

  4   mécanisme en quelque sorte remplaçait le système de recommandations dont

  5   aurait pu faire l'objet certains officiers, sous officiers, et soldats,

  6   recommandations donc invitant les autorités supérieures à leur accorder une

  7   promotion ou une médaille quel qu'elle soit ? Est-ce la même chose, ou bien

  8   sont-ce deux exercices différents, l'un étant la remise automatique en

  9   quelque sorte de médailles à l'ensemble des participants; et l'autre qui me

 10   semble, d'après ce que j'ai vu jusqu'à présent, un exercice disons plus

 11   personnalisé qui consiste à déterminer qui s'est particulièrement distingué

 12   par sa conduite au-delà d'une simple participation à une opération ? Une

 13   personne donc qui se serait suffisamment distinguée pour recevoir une

 14   médaille ou bénéficier d'une promotion.

 15   Alors était-ce un seul exercice ou y avait-il véritablement deux exercices

 16   parallèles ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que ce sont deux choses différentes.

 18   Le premier exercice en quelque sorte débute lorsque l'on décide de remettre

 19   une médaille et que l'on continue par la suite en essayant de déterminer

 20   qui a véritablement participé aux opérations; et l'autre exercice qui

 21   consiste à recommander certains noms de personnes qui se sont

 22   particulièrement illustrées, qui se sont distinguées des autres.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 24   Poursuivez, Monsieur Kehoe.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais revenir, si vous me le permettez, à la

 27   question des sous officiers, j'aimerais revenir au point du compte rendu, à

 28   l'endroit du compte rendu où nous avons parlé de cette question.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Page 20 204, la question posée par M. Russo sur

  2   les sous officiers et l'accomplissement des objectifs est la suivante :

  3   "Professeur, ceci ne montre-t-il pas que ce n'était pas un problème de

  4   manque de formation ou d'instruction ou un problème de pénurie de sous

  5   officiers lorsque les sous officiers ont une tâche à accomplir et qu'ils

  6   sont motivés à le faire, ils le font ? Cela n'était-il pas exact ?"

  7   Votre réponse à la ligne 7 est la suivante :

  8   "Dans l'une de mes réponses, j'ai expliqué que les sous officiers avaient

  9   trois grandes catégories de tâches à accomplir. Certaines étaient

 10   accomplies mieux que d'autres. Cela dépendait bien sûr de leur compétence

 11   technique et tactique, de leur niveau d'instruction dans ces domaines, de

 12   leur morale et de la discipline qui régnait au sein de l'unité. Ces

 13   objectifs auraient pu être atteints si le niveau d'instruction et de

 14   compétence tactique était bon même si le moral des hommes ou la discipline

 15   l'était moins. Ce sont deux choses différentes."

 16   Alors revenons, s'il vous plaît, à la pièce D204, l'ordre du général

 17   Gotovina que nous avons abordé brièvement hier et qui porte la date du 10

 18   août 1995. Vous pouvez bien sûr lire le paragraphe de préambule mais

 19   l'objet de cet ordre est le respect des mesures disciplinaires militaires.

 20   Au premier paragraphe, on lit :

 21   "J'interdis tout mouvement arbitraire de membres de la HV dans les zones

 22   libérées sans information préalable de leurs commandants supérieurs."

 23   J'avance, Monsieur, qu'au cours dans dépositions entendues par cette

 24   Chambre, une question a été posée par un membre de la Chambre. Je fais

 25   référence à la page 19 644, lignes 15 à 20 par le Juge Kinis. Une question

 26   donc qui a été posée à ce membre des Gardes nationales. La question était

 27   la suivante :

 28   "Vous dites que vous ne saviez pas qui était votre commandant de section

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  1   mais qu'il y avait tout de même un certain contrôle qui s'exerçait sur la

  2   conduite des soldats. Ou bien dites-vous plutôt que les soldats étaient

  3   tout à fait libres de se déplacer pendant la nuit, par exemple, et de se

  4   rendre là où ils le souhaitaient."

  5   La réponse est : "Non."

  6   Alors, Monsieur, un témoin dit qu'il n'y a pas de contrôle, que leur

  7   conduite n'est pas du tout contrôlée et que le général Gotovina a dû

  8   émettre un ordre le 10 août pour interdire le mouvement arbitraire de tout

  9   membres de la HV.

 10   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je me dois de faire

 11   objection. Il s'agit de questions complémentaires, or on fournit ici des

 12   informations au témoin pour le pousser à tirer certaines conclusions

 13   particulières.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je ne fais que reprendre les questions qui ont

 17   été posées par M. Russo. Il a dit à plusieurs reprises, notamment aux pages

 18   20 203 et 204 -- il a essayé de faire dire au témoin qu'il n'y avait en

 19   réalité pas de problème au niveau des sous officiers, pendant les

 20   opérations -- après l'opération Tempête. C'est ce que j'essaie de revoir

 21   avec le témoin et ceci renvoie naturellement à la question posée par le

 22   Juge Kinis.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais le témoin pourra répondre à la

 24   question. Cela étant dit, j'ajouterais qu'effectivement, ces questions ont

 25   été posées par M. Russo hier, il a demandé si le résultat était bon, cela

 26   ne suffit-il pas que les sous officiers faisaient correctement leur

 27   travail. Il me semble cela, étant que ce témoin ne dispose pas

 28   d'information directe sur la question parce que nous examinons des

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  1   documents, nous voyons que l'opération était couronnée de succès. La seule

  2   chose que l'on puisse dire, en tout cas, que le témoin puisse dire c'est

  3   que le manque de formation vraisemblablement n'a pas été un obstacle au

  4   succès de l'opération. On ne peut pas aller au-delà de cela sans une

  5   analyse supplémentaire et plus approfondie pour déterminer exactement

  6   quelles ont été les raisons à l'origine de ce succès. Ce serait un exercice

  7   ici qui n'aurait aucun sens.

  8   Alors tirer toute sorte de conclusions des documents, je ne sais pas

  9   si cela présente un intérêt véritable. Je ne parle pas, bien sûr, de

 10   quelqu'un qui disposerait d'information directe sur la question, mais je

 11   vous parle d'un témoin qui est contraint de tirer des conclusions à partir

 12   de documents qui pourraient d'ailleurs se prêter à de très nombreuses

 13   conclusions pour toute personne qui n'aura pas observé ni analysé les

 14   causes véritables d'une situation donnée.

 15   Monsieur Kehoe, j'y pensais hier, mais je n'ai pas pris la liberté

 16   d'intervenir pendant le contre-interrogatoire de M. Russo. Toutefois,

 17   j'espère que si nous nous engagions dans un exercice un peu futile, je

 18   risquerais d'intervenir puisque j'avais déjà cette idée à l'esprit hier.

 19   Veuillez poursuivre, Monsieur Kehoe.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président, je pense

 21   néanmoins que ce témoin pourrait répondre à la question.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il peut répondre à la question, mais

 23   s'il tire des conclusions tout aussi discutables que les conclusions que M.

 24   Russo essayait d'obtenir du témoin hier, ça n'aura pas beaucoup d'intérêt.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Je comprends, nous pouvons passer à autre

 26   chose, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en remets à vous. Le témoin peut

 28   répondre à la question, je l'ai dit tout à l'heure, voilà c'est tout.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Demandons brièvement au témoin de bien vouloir

  2   répondre à la question et nous passerons à autre chose.

  3   Q.  Professeur --

  4   R.  Je pourrais répéter encore une fois que différentes tâches peuvent être

  5   accomplies plus ou moins bien, et je pense que les questions de discipline

  6   sont à part. Nous parlons d'activités de combat mais, bien sûr, il y a

  7   aussi ce qui se passe au sein de l'armée lorsqu'il n'y a pas de combat.

  8   Après la victoire, il y a toujours une certaine période de relâchement, de

  9   repos, de célébration, et les conduites se relâchent peut-être également.

 10   La conduite des sous-officiers et donc importante, à ce moment-là, et

 11   l'on constate -- l'on sait que l'imposition de mesures disciplinaires peut

 12   être importante; ne serait-ce que pour prévenir des actes inappropriés de

 13   la part des soldats ? Des mesures dont notamment la limitation de leur

 14   mouvement, qui contribue non seulement à la sécurité et à la préparation au

 15   combat des hommes, mais qui peut aussi prévenir certains actes de soldats

 16   s'ils devaient se déplacer de manière arbitraire.

 17   Q.  Bien. Passons à un dernier sujet, les questions de discipline

 18   concernant Grahovo et Glamoc, dont M. Russo a parlé avec vous, hier, des

 19   questions évoquées dans le journal de la Région militaire de Split, sur

 20   lesquelles votre attention était attirée. Il s'agit de la pièce P71.

 21   Ce dont j'aimerais vous parler se trouve à la page 20 187 -- 20 187,

 22   pardon. Vous dites :

 23   Question :

 24   "En particulier, le général Gotovina savait que les soldats qui

 25   allaient utiliser pour l'opération Tempête avaient tendance au pillage, et

 26   à mettre le feu à des biens serbes; cela n'est pas exact ?

 27   Votre réponse :

 28   "Je ne sais pas ce qu'il en pensait. Il avait sans doute de bonnes raisons

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  1   de soupçonner qu'il pourrait y avoir des conduites non conformes aux règles

  2   de disciplines, mais sa mission était trop importante et trop sérieuse. Il

  3   devait envisager la possibilité de certains risques dans le secteur."

  4   Vous avez dit que la mission était donc d'une importance et d'une ampleur

  5   telle qu'il devait courir certains risques dans le secteur. De quoi

  6   parliez-vous exactement ?

  7   R.  Je disais qu'il ne pouvait pas mobiliser des forces importantes pour la

  8   préservation de la sécurité, parce qu'il n'en avait pas suffisamment dans

  9   la zone où les premières opérations militaires étaient déjà terminées. Il

 10   devait utiliser les armes en question pour sécuriser les flancs de ses

 11   troupes. Parce que s'il ne l'avait pas fait, ces unités auraient été en

 12   péril et que les conséquences d'une telle situation aurait été plus grave

 13   que ce à quoi on peut raisonnablement s'attendre quant aux conséquences de

 14   certaines conduites inappropriées des soldats. C'est la raison pour

 15   laquelle dans ses ordres, il attachait de sensibiliser les commandants des

 16   subalternes à l'existence de tels risques. Il a donc essayé de réduire ces

 17   risques au minimum sachant que ceci aurait pu compromettre

 18   l'accomplissement de but plus élevé. Mais la situation n'était due qu'au

 19   manque de ressources à sa disposition pour les deux tâches de nature

 20   différente.

 21   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant revenir à une question qui a été posée

 22   par M. Russo --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Kehoe, établissons

 24   la base factuelle sur laquelle repose la dernière réponse donnée à votre

 25   question.

 26   Monsieur le Témoin, vous avez commencé par répondre à la question de M.

 27   Russo, en disant que :

 28   "Vous n'étiez pas en mesure de dire ce qu'il en avait pensé. Il avait sans

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  1   doute de bonnes raisons de soupçonner qu'il se pourrait que certains hommes

  2   se donnent à des conduites en violation des règles de discipline, mais que

  3   la mission était d'une importance telle," et cetera.

  4   En réponse maintenant à la question de M. Kehoe, vous avez dit :

  5   "Manifestement, il a essayé d'y réagir, d'y répondre au travers de

  6   ses ordres dans lesquels il a appelé l'attention des commandants

  7   subalternes sur les risques existants."

  8   Alors pourriez-vous nous donner un exemple d'ordre tel que celui-ci,

  9   ordre adressé aux commandants subalternes et leur indiquant quels pouvaient

 10   être les risques en question, parce que c'est quelque chose de tout à fait

 11   nouveau que vous évoquez ici dans votre réponse ? Pourriez-vous nous parler

 12   de l'un de ces ordres ? A quel ordre dans lequel il aurait effectivement

 13   énuméré les risques possibles à l'intention des commandants subalternes ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas, parce que tout cela ne

 15   se fonde pas sur mes connaissances que j'avais en direct, mais sur base de

 16   documents que l'on m'a proposés et présentés ici. Dans ces ordres tels que

 17   soumis ici, il y a ce genre d'initiative. Aussi, je pensais qu'il était

 18   logique que ce genre de réflexion amenait justement ces idées à l'issue de

 19   l'opération Tempête.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez de bonnes

 21   raisons de penser que ce genre d'ordre justement -- ce genre d'ordre était

 22   donné aux commandants subalternes et les mettait en garde avant le début de

 23   l'opération Tempête des risques encourus ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur base de mon expérience générale,

 25   expérience de combat, je me suis inspiré de ce comment les soldats souvent

 26   pensent.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il faut essayer de ne pas se

 28   laisser aller à des hypothèses, des attentes, des conclusions, et se

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  1   concentrer sur les faits.

  2   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

  4   M. KEHOE : [interprétation]

  5   Q.  On vous a montré des documents qui proviennent du journal de guerre de

  6   la Région militaire de Split, ces documents vous ont été montrés par M.

  7   Russo et couvrent le mois de juillet 1995, la fin du mois. Sur base de la

  8   page 20 186, dans laquelle M. Russo parle justement d'ordres bien

  9   spécifiques, il fait remarquer en page 13 :

 10   Question :

 11   "Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que lorsqu'un tel

 12   ordre est donné, s'il n'est pas effectif, s'il n'est pas suivi, il

 13   appartient au commandant d'émettre cet ordre à nouveau et espérer qu'il

 14   soit exécuter la deuxième fois ?"

 15   Votre réponse est :

 16   "Non. Des mesures de contrôle et d'inspection se doivent d'être prises à ce

 17   moment-là. Cela appartient au niveau inférieur ou deux niveaux inférieurs,

 18   il faut voir ce qui s'est passé, voir comment ça s'est passé, en tirer les

 19   renseignements, aller au fond des choses et obtenir un comportement adéquat

 20   à ce moment-là."

 21   Ensuite, en page 20 183 à la ligne 6, M. Russo vous pose une question :

 22   "Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que si des mesures n'avaient pas

 23   été prises après Grahovo et Glamoc pour justement s'occuper du problème de

 24   pillages et d'incendies volontaires, que cela entraînait un risque, à

 25   savoir que ce genre de conduite se répète après l'opération Tempête; est-ce

 26   exact ?"

 27   Votre réponse est : "Oui."

 28   Alors reprenons la première partie de cette question. Quand on voit à la

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  1   ligne 19 de la page 20 18 qu'un comportement inadéquat est apporté à

  2   l'attention d'un commandant, celui-ci doit aller au fond des choses. Je

  3   voudrais vous montrer cette fois-ci une partie de ce journal qui ne vous a

  4   pas été montrée hier, il s'agit du document P71, page 69 en anglais et la

  5   page 34 en B/C/S.  

  6   R.  C'est toujours le même document qui apparaît à l'écran.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   R.  [aucune interprétation]

  9   Q.  Professeur Barkovic, je reviens ici un peu en arrière sur ce que M.

 10   Russo vous a montré hier, quelques extraits. Nous sommes ici au 1er août

 11   1995, à savoir trois jours avant l'opération Tempête. Plus ou moins dans la

 12   deuxième moitié de la feuille…

 13   Nous pouvons lire le commentaire du général Gotovina dans la colonne de

 14   gauche -- je suis désolé, on vient de me dire que ce n'est pas la bonne

 15   page.

 16   Pouvons-nous peut-être passer à la colonne suivante en B/C/S ?

 17   R.  [aucune interprétation]

 18   Q.  Il s'agit donc ici du commentaire du général Gotovina qui nous dit, Le

 19   plus gros problème rencontré dans le secteur nord, le secteur Sjever --

 20   L'INTERPRÈTE : La traduction est reprise également.

 21   M. KEHOE : [interprétation]

 22   Q.  -- le plus gros problème rencontré --

 23   R.  Je vois cela.

 24   Q.  -- est le manque de discipline, nous donnons l'ordre aux commandants

 25   des troupes d'être particulièrement vigilants sur les risques de pillages

 26   et d'incendies.

 27   Alors si le commandant de la section de la zone nord, sur base du

 28   commentaire de M. Russo et votre réponse à M. Russo, si le commandant donc

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  1   ne prend pas les mesures disciplinaires nécessaires pour éviter le pillage

  2   et les incendies, est-ce qu'il y a quelque chose que le général Gotovina

  3   devait faire par rapport à ce commandant de la zone OG nord ?

  4   M. RUSSO : [interprétation] Je m'oppose à cette question. Parce que ce que

  5   l'on vient de lire ici n'indique pas un ordre au commandant de la zone

  6   nord. Mais un ordre qui serait donné aux commandants des troupes.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Le gros problème, tel qu'il est dit ici, est un

  9   problème de discipline, si nous donnons ordre aux commandants des troupes

 10   d'être particulièrement vigilants et interdire pillages et incendies

 11   volontaires. Alors c'est vrai que c'est un ordre qui est donné aux

 12   commandants des troupes et le commandant de l'OG nord commande ces troupes-

 13   là.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons d'éviter ce genre d'exercice.

 15   Ce que M. Kehoe cherche à savoir, Monsieur Barkovic, visiblement, c'est ce

 16   qu'aurait dû faire le général Gotovina devant ce manque de discipline

 17   éventuel, quelle aurait été la solution ?

 18   M. KEHOE : [interprétation] Par rapport au commandant de l'OG nord.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, j'imagine que ce sont des ordres

 20   qui sont donnés aux commandants, alors que ce soit le commandant du secteur

 21   ou les commandants subalternes.

 22   M. KEHOE : [interprétation] C'est OG nord, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mes excuses.

 24   Donc quelle aurait été la solution adéquate si, apparemment, la discipline

 25   n'était pas celle que le général Gotovina souhaitait être appliquée ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je pense qu'une chose qui a été faite

 27   était aussi, lors des réunions de tous les commandants, et qu'instruction

 28   été donnée, il y avait mise en garde qui était adressée, soit à un

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  1   commandant, soit à un groupe. On les informait quand il y avait des

  2   problèmes de comportement des troupes, et ça devait être suffisant pour

  3   motiver pour que les démarches nécessaires soient prises pour réinsuffler

  4   cette discipline. Evidement, là on était pris par le temps, surtout à ce

  5   moment-là, le 1er août, à ce moment-là, une réunion en tête-à-tête avec le

  6   commandant ou avec une troupe particulière était probablement un bon moyen

  7   d'imposer cette discipline à ces troupes.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Je peux continuer, Monsieur le Président ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

 10   M. KEHOE : [interprétation]

 11   Q.  Donc vous nous dites "pas suffisamment de temps puisqu'on était le 1er

 12   août," sachant que l'opération Tempête a commencé à environ 5 heures du

 13   matin le 4 août ?

 14   R.  Oui, c'est ce que je voulais dire.

 15   Q.  Est-ce qu'il y a un moyen adéquat qui permettrait d'éviter un

 16   comportement qui ne serait pas adéquat pour les personnes qui se trouvaient

 17   sous le commandement de l'OG nord, peut-être changer le commandant lui-même

 18   ? Est-ce qu'il y a une solution éventuelle pour éviter ce comportement

 19   inadéquat des troupes qui se trouvent sous le commandement de l'OG nord,

 20   peut-être enlever le commandant lui-même ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous demandez que -- que

 22   demandez-vous, vous demandez s'il y a une solution éventuelle ou une

 23   solution adéquate ? Peut-être que vous avez changé en répétant votre

 24   question, alors je me demandais si c'était une solution adéquate que vous

 25   vouliez proposer ou éventuelle.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela aurait été une solution éventuelle, avec

 27   un risque quand même énorme, puisque ce commandant avait suivi déjà toute

 28   une longue formation pour exécuter l'opération Il connaissait l'opération.

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  1   Il savait ce que ses troupes devaient faire mieux que n'importe qui

  2   d'autre, il faisait partie, bien sûr, de ce commandement, et c'était sur

  3   base des ordres qu'ils avaient été donnés et qu'il devait par la suite

  4   faire passer. Si vous changez un commandant quelques jours avant une

  5   opération, pour des raisons de discipline peut-être aurez-vous une solution

  6   à ce problème de discipline mais vous aurez beaucoup plus de problèmes pour

  7   le bon fonctionnement des troupes en général.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  Je vais vous montrer un document.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit du document D793.

 11   Q.  Nous avons ici, Professeur, un ordre du 3 août 1995, un ordre du

 12   général Gotovina :

 13   "Au fil de l'ordre pour l'attaque du commandant de Split de façon à avoir

 14   une direction et commandement uniforme de l'unité, le brigadier Rahim Ademi

 15   est nommé momentanément commandant de l'OG Nord, et il va assumer ses

 16   fonctions dans le cadre de son devoir.

 17   "Le commandant de l'OG nord sortant, le colonel Slaven Zdilar, reprendra

 18   ces fonctions, commandant d'infanterie, pour la zone de commandement de

 19   Split.

 20   "C'est un ordre qui sera d'application immédiate."

 21   Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que vous pensez que cet ordre-là à ce

 22   moment-là --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne devrions-nous pas d'abord demander au

 24   témoin s'il connaît les raisons qui sous-tendent la nomination momentanée

 25   du brigadier Ademi.

 26   Monsieur le Témoin, connaissez-vous les raisons du remplacement du

 27   commandant du groupe nord, OG nord ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.

Page 20245

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, puisque le témoin ne

  2   sait pas, on peut commencer à imaginer que c'était peut-être la raison.

  3   Mais le témoin ne la connaît pas, et j'aimerais que vous acceptiez que nous

  4   n'avons pas donc de connaissance des faits ici vous pouvez poursuivre avec

  5   votre question.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect que

  7   je vous dois M. Russo avait posé une question qui était déjà une hypothèse

  8   à l'époque, et qu'il n'a pas été à l'époque interrompu. Il s'agit de la

  9   page 20 193, lignes 6 à 10 --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, c'était en contre-

 11   interrogatoire du témoin, à ce moment-là, s'il y avait des questions qui

 12   appliquaient une réponse et qui étaient suggérées sur des faits qui

 13   n'avaient établi, je crois que ce n'était pas le cas. Moi, ce que la

 14   Chambre ici souhaiterait entendre, c'est un témoignage qui puisse l'aider,

 15   je ne dis pas que vous ne pouvez pas poser de questions sur cet ordre ici.

 16   Ce que je cherchais à vérifier c'est ce que le témoin connaissait et ce

 17   qu'il ne connaissait pas.

 18   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit précédemment, je

 20   crois que c'était hier par rapport à une autre question, c'est ce que nous

 21   recherchons, alors si vous me dites que vous devez continuer parce qu'à

 22   l'époque je n'ai pas interrompu M. Russo, alors je vous laisse continuer

 23   mais vous savez ce qui est important pour la Chambre c'est de pouvoir

 24   évaluer justement ce que le témoin connaît de la question.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je comprends, mais je crois qu'il faut

 26   reprendre dans l'ordre justement les questions qui avaient été posées par

 27   M. Russo à ce témoin portant justement sur les incendies volontaires et le

 28   pillage --

Page 20246

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mon problème c'est que le témoin nous a

  2   dit qu'il n'avait aucune idée des raisons qui avaient suscité cet ordre.

  3   Peut-être que la mère de ce monsieur est tombée malade, nous ne savons pas,

  4   alors je vous laisse poursuivre. Mais n'oubliez pas que le témoin a une

  5   connaissance des faits qui semblent être particulièrement restreintes.

  6   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Bien, donc nous avons un changement de commandant à peu près 24 heures

  8   moins de 24 heures avant le début de l'opération Tempête, environ, alors

  9   sur base de votre expérience militaire c'est une décision assez radicale du

 10   général Gotovina ?

 11   R.  En effet, c'est une démarche assez radicale. Sur la base de ce que nous

 12   avons déjà discuté précédemment, s'il y a un lien entre ces deux choses, je

 13   serais très impressionné. Si c'est lié à la réunion qui avait eu lieu deux

 14   jours avant. Il y a, bien sûr, des circonstances imminentes et c'est parce

 15   que nous voyons là que nous avons le général Gotovina qui place comme

 16   commandant une personne qui avait une grande expérience de combat et qui

 17   avait déjà coopéré avec lui précédemment, et si le brigadier d'état-major

 18   Ademi était conscient et au courant de toute la préparation de l'opération,

 19   ça aurait été une solution optimale à ce problème, remplacer un commandant

 20   juste avant une opération et le remplacer par un homme qui est vraiment au

 21   courant de l'opération.

 22   Q.  Sur base de votre expérience militaire, est-ce que ce genre de décision

 23   qui se passe donc avec un changement de commandement en tête du groupe

 24   opérationnel aura un impact directement sur les troupes sur le terrain ?

 25   R.  Je pense bien. Je le crois en effectivement. Mais je ne peux pas savoir

 26   si c'était pour un mieux ou pas, parce que le tout dépend des sentiments

 27   des commandants subalternes et de ceux qui sont remplacés et de ce qu'ils

 28   pensaient de ce nouveau commandant.

Page 20247

  1   Q.  Merci, Professeur. Merci, pour tout votre temps.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser,

  3   Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Kehoe.

  5   D'autres dans la Défense ont des questions à poser ?

  6   Mme HIGGINS : [interprétation] Non, pas d'autres questions, Monsieur le

  7   Président. Merci beaucoup.

  8   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

  9   Merci beaucoup.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, moi, j'ai une

 12   question précise à poser.

 13   Questions de la Cour : 

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit : j'essaie de

 15   retrouver en fait cette citation. J'essaie de trouver la formulation que

 16   vous avez utilisée.

 17   Vous nous avez dit que vous aviez rassemblé une équipe d'officiers

 18   américains et Croates, au mois de novembre 1994. Pourriez-vous nous dire

 19   par le détail ce que ces officiers faisaient et quelle a été la raison pour

 20   laquelle vous avez constitué une telle équipe ?

 21   R.  Monsieur le Président, le ministre de la Défense avait signé un contrat

 22   avec une entreprise privée, le MPRI, pour l'exécution d'un programme de

 23   transition dans la démocratie. Ce programme avait tout un volet technique.

 24   Bon. Je ne pense pas qu'on en ait un ici mais je ne crois pas que ce soit

 25   non plus pertinent ici et maintenant. Mais d'après ce programme il fallait

 26   également apporter une gestion personnelle des forces armées. Donc tout

 27   éléments liés au combat et à la formation étaient extérieurs au contrat. Ce

 28   n'était pas couvert par le contrat.

Page 20248

  1   Aussi au mois de novembre, ce que nous avons fait c'était mettre sur pied

  2   une équipe pour évaluer la situation et nous avions dans cette équipe cinq

  3   officiers américains et cinq officiers croates.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai besoin de quelques précisions.

  5   S'agissait-il d'officiers d'active de l'armée américaine ?

  6   R.  Non, officiers à la retraite, et l'un d'entre eux était un sous

  7   officier.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'était donc pas à ce moment-là payé

  9   par l'armée américaine.

 10   Etaient-ils tous employés par cette entreprise, cette compagnie qui était

 11   là pour aider ? Il pourrait y avoir une certaine confusion dès lors que

 12   l'on parle d'officiers américains parce que si c'était des officiers

 13   d'active, les choses sont différentes. Or visiblement ce n'était pas des

 14   officiers d'active. Donc vous aviez quatre officiers ou quatre anciens

 15   officiers de l'armée américaine et un sous officier engagés par une

 16   compagnie privée. Est-ce que le gouvernement américain était impliqué pour

 17   engager le MPRI pour le financement du programme ?

 18   Pourriez-vous nous dire s'il y avait ce lien ou pas ?

 19   R.  Le programme avait été accepté par le gouvernement américain mais

 20   celui-ci ne participait pas au financement. L'Etat croate finançait et le

 21   projet, le contenu du projet d'ailleurs avait été accepté par le

 22   gouvernement américain, à ce moment-là, il y avait embargo et il

 23   appartenait au gouvernement américain de vérifier ce programme afin de

 24   s'assurer qu'il y ait cohérence. Nous ne pouvions pas dès lors aider à la

 25   formation de combat dans ce programme.

 26   Puis-je continuer ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est exactement ce que je voulais

 28   savoir et c'est la raison pour laquelle je voulais savoir aussi s'il

Page 20249

  1   s'agissait d'officiers d'active ou d'officiers à la retraite. J'étais un

  2   peu perdu.

  3   Alors si vous souhaitez encore ajouter une chose ou l'autre, c'est très

  4   bien. Mais en fait la question que je voulais vous poser et bien vous y

  5   avez répondue à ma satisfaction.

  6   Mais si vous voulez ajouter quelque chose, c'est à vous de décider.

  7   R.  Je serai très bref. Les officiers étaient par pair, un Croate, un

  8   Américain, et ensemble ils procédaient à l'évaluation d'un niveau de

  9   formation, et les sous officiers et les commandants ainsi que l'état-major

 10   étaient donc évalués et le fonctionnement de l'état-major; tout cela était

 11   évalué. Une évaluation que nous avons réalisée en 1994 et alors en 1995

 12   après avoir approuvé l'évaluation de base nous avons également mis sur pied

 13   cette formation de perfectionnement en fait pour les sous officiers et les

 14   officiers, les commandants et l'état-major, et nous avons voulu établir le

 15   lien avec le système de formation et comment ces gens allaient pouvoir

 16   gérer le service.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci pour votre réponse. Je n'ai pas

 18   d'autres questions à vous poser.

 19   Je ne sais pas à moins que la Chambre ait d'autres questions ou M. Russo.

 20   M. RUSSO : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 21   M. KEHOE : [aucune interprétation] 

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Barkovic, nous sommes arrivés à

 23   la fin de votre témoignage. Je voudrais vous remercier pour les réponses

 24   que vous nous avez données à toutes les questions qui ont été posées par

 25   les uns et par les autres ainsi que les questions que nous vous avons

 26   posées, nous les Juges, et je vous souhaite un bon voyage de retour.

 27   Puis-je demander que le témoin soit escorté hors du prétoire ?

 28   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

Page 20250

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donc avoir une réponse et

  2   puis nous pourrons reprendre avec le prochain témoin.

  3   [Le témoin se retire]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vendredi passé, vous aurez reçu -- il

  5   semblerait que justement il fallait se préparer au témoignage du prochain

  6   témoin et il semblerait qu'il était important que vous sachiez un peu quel

  7   était l'état de la réflexion de la Chambre à titre provisoire, en tout cas,

  8   pour le moment. Donc j'imagine que c'est un message qui vous est bien

  9   parvenu. Alors maintenant je ne sais pas si cela va influencer les

 10   questions que vous allez poser au témoin et dans quelle mesure, un 92 ter,

 11   mais j'espère que les choses sont claires pour les uns et pour les autres.

 12   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, justement votre observation m'amène à

 13   vous poser une question. En fait cette objection portait surtout sur

 14   certains morceaux, certains extraits de cette déclaration de cet avis

 15   d'expert et, si j'ai bien compris que la Chambre, on pensait que certains

 16   paragraphes ne pouvaient pas être acceptés, il semblerait maintenant que ce

 17   n'est pas le cas et que M. Misetic pourrait être accepté oralement dans sa

 18   déclaration.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais préciser.

 20   S'il y a des extraits de cette déclaration 92 ter, qui ne peuvent pas être

 21   versés comme élément de preuve. Je peux donc dire maintenant aux parties

 22   que votre première objection, si des parties de la déclaration 92 ter ne

 23   sont pas admises en tant qu'élément de preuve, et je reviens immédiatement

 24   sous votre première objection. Donc je ne parle pas de communication mais

 25   d'un avis et d'un avis qui devient l'élément prévalant de la déposition en

 26   question. En tout cas, c'est ce que la Chambre avait à l'esprit. Alors,

 27   bien entendu, si vous citez un témoin qui est censé s'exprimer sur les

 28   faits et que vous lui posez les questions exactement de la même façon

Page 20251

  1   qu'auparavant, je suppose que les objections, qui leur seront opposées,

  2   seront identiques, et ceci, dans le cas où on demanderait à un témoin de

  3   fait de proposer une déposition d'expert.

  4   Dans le même temps, nous ne savons pas comment Me Misetic va formuler

  5   ses questions. Je voulais simplement dire qu'il ne lui était pas interdit

  6   d'aborder ces sujets mais que les Juges gardaient également à l'esprit

  7   l'idée que ceci résulterait très certainement dans la nécessité d'inviter

  8   Me Misetic à demander avant tout au témoin ce qu'il sait sur les faits.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, ceci évoque des

 10   préoccupations de notre part. Par exemple, eu égard aux parties du

 11   paragraphe 7, que la Chambre était encline à admettre, nous avons reçu

 12   communication d'un article en anglais qui sous-tend ce paragraphe, il y a à

 13   peine 24 heures. Il compte huit pages en simple interligne, c'est une

 14   analyse qui présente des dizaines de chiffres littéralement, quant au

 15   divers déplacement de populations, de plusieurs groupes ethniques à des

 16   moments différents. Nous ne sommes absolument pas en mesure d'évaluer cette

 17   information, de déterminer son exactitude car la source n'est absolument

 18   pas connue. Ce document repose largement sur la seule analyse du témoin en

 19   qualité de démographe, et nous ne pouvons pas apprécier ou contester cette

 20   analyse sans en connaître la source et la période significative, et sans

 21   disposer d'un temps assez important pour consulter ces sources, grâces à

 22   nos experts, et produire notre propre analyse et nos documents pour

 23   canaliser les conclusions du témoin.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ce qui pourrait déterminer un

 25   certain nombre de démarches sur le plan de la procédure. D'abord, Maître

 26   Misetic, vous ne devriez pas commencer votre interrogatoire du témoin, ça,

 27   c'est une possibilité. Une autre possibilité, c'est que nous aurions besoin

 28   davantage de temps pour préparer le contre-interrogatoire du témoin. Par

Page 20252

  1   conséquent, nous ne pourrons pas commencer le contre-interrogatoire

  2   immédiatement après l'interrogatoire principal. Donc ce sont diverses

  3   possibilités, et il est clair que vous êtes préoccupé. Je comprends que ce

  4   témoin est important par rapport à la détermination de la chronologie des

  5   événements dans la guerre de Croatie.

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il y a aussi l'analyse qui est importante.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, les analyses sociales et

  8   humanitaires.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, et l'analyse évoquée au paragraphe 7,

 10   qui est celle dont je viens de parler devant les Juges de la Chambre, à

 11   savoir la Croatie coincée entre immigration et émigration.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Etes-vous d'avis que

 13   l'interrogatoire ne devrait pas du tout commencer; ou est-ce que vous

 14   pensez avoir besoin d'un certain temps pour consulter vos experts afin

 15   d'être en mesure de contre-interroger efficacement le témoin sur ces

 16   questions.

 17   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de ce

 18   qui figure aux paragraphes, 3, 5 et 7, nous sommes d'avis que

 19   l'interrogatoire ne devrait pas commencer. En effet, ce document est une

 20   analyse d'expert. Nous aurions besoin d'un certain temps, d'un temps assez

 21   important pour peser les éléments de ce document, les éléments

 22   d'information qu'il contient, et il faudrait que l'on nous fournisse les

 23   sources de l'analyse du témoin qui ne nous ont pas encore été communiquées,

 24   de façon à pouvoir apprécier la méthodologie appliquée et la façon dont les

 25   sources ont été choisies, et cetera, et cetera.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je répondre ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 28   M. KEHOE : [interprétation] Je fais objection énergiquement à ce qui vient

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  1   d'être dit, car la demande de versement ne concerne pas un avis d'expert.

  2   C'est un document, un article qui a été publié dans un magazine de 1998,

  3   dont le nom est "Globus," à l'époque où il était adjoint du ministre. Ces

  4   chiffres et statistiques faisaient partie des chiffres qu'il devait

  5   recueillir dans le cadre de son travail. Il devait connaître la statistique

  6   démographique. Il n'est pas cité ici en tant que témoin censé rendre compte

  7   de la valeur probante de l'Université de Zagreb, mais plutôt en sa qualité

  8   de ministre adjoint chargé de la reconstruction et du développement. Ces

  9   statistiques, il travaillait avec elles au quotidien, et comme le témoin le

 10   dira dans sa déposition, ces chiffres faisaient partie de ses conversations

 11   hebdomadaires avec des membres de la communauté internationale aux côtés

 12   desquels il participait à un groupe de travail conjoint chargé d'organiser

 13   le retour des réfugiés.

 14   Donc nous disons que communiquer les sources, et cetera, c'est totalement

 15   inutile et ce ne serait pas suffisamment précis. Il s'agit d'un article

 16   concernant les faits qui est indicatif de ce qui se passait à l'époque. Ce

 17   sont des statistiques qui sont parlantes -- qui étaient parlantes à

 18   l'époque pour la communauté internationale, comme le sont toutes les

 19   statistiques qui figurent dans le portefeuille d'un ministre adjoint.

 20   Pour simplifier les choses, je dirais que j'ai indiqué que je n'allais pas

 21   évoquer le paragraphe 3 de la déclaration préalable de ce témoin. Ceci a

 22   été dit à l'Accusation, donc il n'y a pas de problème là-dessus. Le témoin

 23   a des connaissances sur ces sujets et il connaît bien la question de la

 24   démographie pendant la guerre. Nous n'avons pas besoin de passer en revue

 25   tous les chiffres qui figurent dans le rapport au paragraphe 3.

 26   Donc si ceci allége un peu le fardeau, parfait. En tout cas, le programme

 27   national mentionné au paragraphe --

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, apparemment c'est

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  1   quelque chose qui n'a pas encore été discuté vendredi ou peut-être --

  2   M. MISETIC : [interprétation] Ce que j'ai dit, Monsieur le Président, c'est

  3   que nous laissons tomber l'intégralité de ce paragraphe.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela allège le fardeau.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Je vais avancer point par point.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Donc le problème du paragraphe 3, est réglé.

  8   Paragraphe 5, nous ne demandons pas le versement du programme national,

  9   parce que peut-être y a-t-il eu confusion à ce sujet. Ce programme national

 10   n'est pas une étude scientifique, c'était un programme agréé par le

 11   parlement croate, approuvé par le parlement croate en 1996, et complété par

 12   le témoin, alors qu'il était ministre adjoint. Si l'Accusation, enfin quoi

 13   qu'il en soit, en dehors de ce qui figure sur cette page, nous ne demandons

 14   pas le versement au dossier de documents étayant cet article. Donc si cela

 15   vous aide en quoi que ce soit, je peux vous dire que nous ne demandons pas

 16   le versement au dossier de tout ce qui figure au paragraphe 5. Nous avons

 17   un exemplaire séparé du texte du programme national.

 18   Donc j'aimerais appeler, j'aimerais établir une distinction entre une étude

 19   scientifique et un programme gouvernemental adopté par le parlement. 

 20   L'article est paru à une époque, à l'époque où le témoin faisait sa

 21   déclaration préliminaire. Il est téléchargé dans le prétoire électronique,

 22   le 4 juin de cette année. Je crois savoir que l'Accusation ne savait pas

 23   que ce document était dans le prétoire électronique. C'est la raison pour

 24   laquelle je l'indique. Toutefois, notre position sur ce document c'est que

 25   nous n'avons pas été informés à l'avance d'une quelconque protestation de

 26   l'Accusation, quant au fait que toutes les déclarations préalables

 27   n'avaient pas été communiquées. Je parle de celles qui figurent sur la

 28   liste 65 ter. Donc c'est seulement jeudi  dernier que l'Accusation a déposé

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  1   son opposition à la déclaration préliminaire 92 ter. En fait, nous avons

  2   donc été informés tardivement de l'existence de ces problèmes, et très

  3   franchement, l'article de "Globus" a déjà été remis au CLSS pour

  4   traduction. Nous avons fait tout ce que nous pouvions jusqu'à vendredi, et

  5   encore une fois, pour être cohérent, je rappelle que tout ceci ne se passe

  6   pas la veille de la comparution du témoin. M. Rajcic me vient à l'esprit du

  7   point de vue du nombre de documents qui n'étaient pas traduits au courant

  8   de sa déposition et nous avons tout de même continué à travailler pour

  9   contourner ce problème.

 10   Je vous remercie.

 11   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas

 12   un problème de document qui aurait été reçu hier. J'ai reçu hier de

 13   nombreux documents. Je fais objection à l'analyse de huit pages du témoin,

 14   qui je crois devraient être distribuées aux Juges de la Chambre parce que

 15   la Chambre verra que c'est une analyse, qui est dépourvue de source dans sa

 16   majeure partie, dont la méthodologie n'est pas très claire, et qui conteste

 17   de façon un peu aléatoire les conclusions tirées par le témoin au

 18   paragraphe 7.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, vous nous avez proposé

 20   une chose j'étais sur le point de poser une question à Me Misetic. Nous

 21   aimerions très concrètement jeter un coup d'œil à cet article de "Globus,"

 22   et nous réfléchirons aux conséquences du point de vue de la procédure après

 23   vous avoir entendu.

 24   Nous allons faire la pause, et nous reprendrons nos débats très

 25   probablement à 11 heures 10.

 26   --- L'audience est suspendue à 10 heures 45.

 27   --- L'audience est reprise à 11 heures 18.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de décider de la façon dont nous

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  1   allons poursuivre, la Chambre aimerait obtenir quelques renseignements

  2   complémentaires au sujet de la façon dont le document a été communiqué à

  3   l'Accusation.

  4   Maître Misetic, vous dites que cet article de "Globus" a été communiqué le

  5   4 juin; c'est ça ?

  6   M. MISETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ou téléchargé dans le prétoire

  8   électronique --

  9   M. MISETIC : [interprétation] Non, non, non. La version B/C/S de l'article

 10   a été communiquée, je crois, le 4 mai. La traduction de cet article de

 11   "Globus" n'est arrivée qu'hier du service du CLSS.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous pose d'abord une question

 13   préliminaire : il a été communiqué dans quel contexte ?

 14   M. MISETIC : [interprétation] Deux points à ce sujet. La liste des pièces à

 15   conviction a été communiquée au début de la semaine dernière, et cet

 16   article figurait dans la liste. La déclaration préliminaire du témoin a été

 17   téléchargée dans le prétoire électronique en anglais le 4 juin, et je crois

 18   savoir que dans la déclaration préliminaire il est fait référence à cet

 19   article au paragraphe 7 --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est un élément intéressant --

 21   M. MISETIC : [interprétation] L'article de "Globus," d'avril 1998, qui est

 22   l'article dont nous parlons a été traduit et reçu hier soir du CLSS ou

 23   peut-être hier matin.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre autorise la Défense Gotovina

 27   a interrogé le témoin au principal sur cet article. Mais dans le même

 28   temps, elle invite la Défense chaque fois qu'il y aura difficulté à

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  1   déterminer s'il s'agit de réponse du témoin sur les faits ou de réponse qui

  2   pourrait être assimilable à des réponses de témoin expert, et bien, chaque

  3   fois que ce cas se présentera, Maître Misetic, vous êtes instamment invité

  4   par le biais de vos questions à démontrer que vous êtes bien dans la bonne

  5   position; parce que ce témoin est un témoin de fait, ce n'est pas un témoin

  6   expert, ce qui veut dire qu'il ne doit pas fournir un avis d'expert. Il ne

  7   doit pas non plus formuler d'opinion personnelle et étant donné le contexte

  8   dont nous sommes en train de parler. Ce point est d'une importance peut-

  9   être accrue par rapport à la situation générale, car apparemment l'avis de

 10   ce témoin serait un avis venant d'un professionnel de la démographie, il

 11   importe donc au plus haut point d'être attentif à cette contrainte, et de

 12   veiller à ce qu'aucun avis personnel ne soit formuler.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Ce n'était pas mon intention, Monsieur le

 14   Président. Je n'ai pas l'intention de lui demander de tirer des conclusions

 15   sur les raisons des départs de population et de problèmes de ce genre. Ce

 16   qui m'intéresse c'est surtout 1998, ce qu'il pourra nous donner comme

 17   chiffres, par exemple, le nombre de Serbes qui sont partis, ou qu'ils sont

 18   revenus, ou le nombre de Croates expulsés.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, moi aussi, bien sûr, je pourrais

 20   maintenant immédiatement vous faire une déclaration sur le nombre de Belges

 21   qui ont quitté les Pays Bas après l'année 1831, mais je veux dire ça n'a

 22   que la valeur de ce que je vous dis.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que je veux dire,

 24   c'est que je demande pas le versement au dossier de quelque chose que je

 25   considère comme une étude scientifique, et que la Chambre devrait accepter

 26   comme vérité infuse. Ce document peut être abordé par la Chambre qui lui

 27   accordera le poids qu'elle voudra lui accorder, mais étant donné le texte

 28   global du retour des réfugiés.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si le gouvernement croate avait dit en

  2   1858 qu'il y avait 32 Serbes dans un certain village cela ne veut pas dire

  3   que 32 Serbes étaient vraiment présents dans ce village. Mais cela démontre

  4   ce que le gouvernement de l'époque voulait dire.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Exact.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça c'est un fait. Puis, bien sûr, le

  7   deuxième problème c'est le problème de pertinence et de valeur probante.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Ce que nous allons faire, Monsieur le

  9   Président, c'est simplement aborder la question du retour des réfugiés qui

 10   était un problème tressé par le gouvernement croate aussi bien du côté

 11   serbe que du côté croate.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous direz si c'est bon ou mauvais.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Exact. Il est possible que Mme Gustafson

 14   prenne la parole et qu'elle dise qu'aucune hypothèse n'a évoqué 100 000

 15   Croates mais que c'était 50 000, et cetera.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, en fait, Maître Misetic, ce que

 17   j'attends de Mme Gustafson c'est qu'elle nous évoque au cours de son

 18   contre-interrogatoire la position du gouvernement parce que vous ne

 19   présentez pas ces chiffres pour démontrer qu'ils sont exacts; par

 20   conséquent, Mme Gustafson ne peut pas -- ne répondra pas de cette façon

 21   parce que ce que vous présentez aux Juges c'est la position justifiée ou

 22   non du gouvernement croate, à savoir le gouvernement a dit ceci ou cela.

 23   Les Juges de la Chambre se fondront également sur d'autres éléments de

 24   preuve pour combiner un certain nombre de sources et déterminer si le

 25   gouvernement croate avait raison ou tort. Bien entendu, ces éléments sont

 26   contestés; Mme Gustafson serait avisée -- bien avisée de contester les

 27   chiffres en question. Mais sur la base de cet élément de preuve, ce que

 28   nous voyons c'est que vous nous présenter un certain nombre d'éléments et

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  1   que la Chambre pourra arrêter le témoin si vos questions vont au-delà de ce

  2   que le témoin sait.

  3   M. MISETIC : [interprétation] J'ai travaillé très dur avec le témoin pour

  4   essayer à l'avance ce matin de faire en sorte de ne pas passer outre cette

  5   consigne. Les Juges détermineront la valeur probante à leur gré sur la base

  6   des réponses fournies par le témoin. Il comprend très bien les signaux que

  7   je lui ferai éventuellement de la main.

  8   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  9   M. MISETIC : [interprétation] Je lui ferai éventuellement des signaux pour

 10   lui demander de ralentir.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'autres signaux qui

 12   peuvent être acceptés à l'intention du témoin.

 13   Madame Gustafson.

 14   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ajouterai une chose. Que la Chambre

 16   vous accorde ou pas un temps supplémentaire pour préparer votre contre-

 17   interrogatoire c'est une question qui sera examiné plus tard.

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

 19   j'ai besoin de dire un certain nombre de choses après Me Misetic parce que

 20   ses propos reposaient sur l'idée que, par exemple, le nombre de Serbes qui

 21   était parti était un fait et non un avis. Mais le chiffre fourni par le

 22   témoin dans sa déclaration préalable est tiré d'un article de presse et il

 23   est égal à 130 000. Manifestement, il est le résultat de son analyse sur la

 24   base d'un certain nombre de sources qui étayent cette analyse. Si ces

 25   sources sont présentées comme étant des faits, ce que dit le gouvernement

 26   croate ou pas, peut l'être également. Mais en fait à notre avis, cela va

 27   au-delà de l'expertise du témoin en sa qualité de professionnel de la

 28   démographie. Voila ce qui m'inquiète un peu.

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  1   Ma deuxième question : c'est qu'à partir de la décision de la Chambre,

  2   Monsieur le Président, nous ne savons pas exactement ce qui a été décidé au

  3   sujet des paragraphes de la déclaration 92 ter qui sont en matière

  4   d'admission ou de non admission. Je vous remercie.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ces documents n'ont pas encore été

  6   versés, la demande de versement n'a pas encore été faite, nous attendons de

  7   voir ce qu'en dira le témoin. Il faut que ces documents soient certifiés

  8   par le témoin. Je peux vous dire une chose c'est que très vraisemblablement

  9   la demande de versement sera faite si le témoin valide ces documents et ils

 10   seront, à ce moment-là, enregistrés aux fins d'identification, et le motif

 11   principal de leur non admission immédiate réside dans les paragraphe 3, 5

 12   et 7 du document.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais vous poser

 14   une question de procédure. Souhaitez-vous que je présente les fondements du

 15   paragraphe 5 avant d'en demander le versement au dossier ? Ou bien puisque

 16   ce paragraphe sera enregistré aux fins d'identification, puis-je simplement

 17   en demander le versement définitif plus tard ?

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça c'est une question très concrète, me

 19   semble-t-il. La Chambre ne décidera pas immédiatement.  Bien entendu, nous

 20   nous pencherons sur toutes les questions liées à l'admission définitive

 21   après l'enregistrement aux fins d'identification.

 22   Madame l'Huissière, puis-je vous demander de faire entrer le témoin dans le

 23   prétoire ?

 24   [Le témoin est introduit dans le prétoire] 

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Sterc.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de déposer, vous êtes censé

 28   prononcer une déclaration solennelle dont le texte vous est tendu. Je vous

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  1   demande de bien vouloir prononcer cette déclaration à haute voix, s'il vous

  2   plaît.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je déclare solennellement que je dirai

  4   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   LE TÉMOIN : STJEPAN STERC [Assermenté]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Monsieur Sterc, veuillez vous

  8   asseoir.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez être interrogé par Me Misetic

 11   qui représente M. Gotovina.

 12   Maître Misetic, je vous donne la parole.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Interrogatoire principal par M. Misetic : 

 15   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 16   R.  Bonjour à vous et à toutes les autres personnes présentes dans ce

 17   prétoire.

 18   Q.  Pourriez-vous décliner votre identité afin que le compte rendu

 19   l'enregistre, s'il vous plaît ?

 20   R.  Stjepan Sterc.

 21   Q.  Monsieur Sterc, vous souvenez-vous avoir rencontré des membres de la

 22   Défense Gotovina le 7 avril 2009, le 7 mai 2009 et le 20 mai 2009 ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous souvenez-vous avoir donné une déclaration à des membres de la

 25   Défense Gotovina à ces dates ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous souvenez-vous avoir signé une déclaration le 20 mai 2009 ?

 28   R.  Oui.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Madame la Greffière, j'aimerais qu'on affiche

  2   à l'écran le document 65 ter 1D2702, s'il vous plaît.

  3   Avec l'aide de Mme l'Huissière, j'aimerais que sois remis un exemplaire

  4   papier de cette déclaration en croate au témoin.

  5   Q.  Monsieur Sterc, avez-vous eu la possibilité de réexaminer cette

  6   déclaration avant votre entrée dans le prétoire aujourd'hui ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce bien la déclaration que vous avez signée le 20 mai 2009 ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Voyez l'écran, s'il vous plaît, je sais que vous examinez la copie

 11   papier mais vous pouvez aussi voir la version en croate de votre

 12   déclaration à l'écran. Est-ce bien votre signature que l'on voie en bas à

 13   droite ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  En examinant votre déclaration avant d'entrer dans ce prétoire, avez-

 16   vous été en mesure de vérifier que cette déclaration reflète bien ce que

 17   vous avez dit aux membres de l'équipe de la Défense Gotovina au cours de

 18   vos entretiens ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Y a-t-il des corrections ou des précisions dont vous pensez qu'elles

 21   doivent être apportées à cette déclaration ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Cette déclaration que vous avez faite à l'équipe de la Défense Gotovina

 24   est-elle fidèle à vos souvenirs et à ce que vous pensez être la vérité ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Si je devais vous reposer les mêmes questions aujourd'hui que celles

 27   qui vous ont été posées par l'équipe de la Défense Gotovina, au cours des

 28   différents entretiens, fourniriez-vous les mêmes réponses aujourd'hui en

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  1   prétoire que celle que vous avez fournies à l'équipe ?

  2   R.  Je pense, oui, sachant que cette déclaration est très complexe.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande à ce que

  4   cette pièce soit enregistrée et qu'elle soit versée au dossier ou, en tout

  5   cas, qu'elle soit enregistrée aux fins d'identification conformément à vos

  6   consignes.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière, pourriez-vous

  8   affecter une cote à cette pièce, s'il vous plaît ?

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce

 10   D1607 marquée ou enregistrée aux fins d'identification.

 11   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 12   M. MISETIC : [interprétation] J'ai expliqué au témoin la procédure de

 13   lecture du résumé. Si vous me l'autorisez, je donnerais lecture de ce

 14   résumé.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce ceci inclura 3, 5, et 7.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Je ne le pense pas mais je vais tâcher

 17   d'éviter ces trois paragraphes.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ou bien connaissant les

 19   circonstances, peut-être qu'il vaudrait mieux reporter la lecture de la

 20   déclaration jusqu'à la fin de la déposition. Je ne sais pas dans quelle

 21   mesure le public sera encore en mesure de comprendre la déposition s'il n'y

 22   a pas eu lecture préalable.

 23   M. MISETIC : [interprétation] La seule question qui se poserait, Monsieur

 24   le Président, serait de savoir si certains de ces chiffres peuvent être

 25   examinés, dans le contexte de l'article "Globus," si tel est le cas, ça ne

 26   posera aucun problème avez des paragraphes 3 et 5, puisqu'ils ne figurent

 27   pas dans le résumé.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Le fondement qu'invoque M. Misetic vis-à-

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  1   vis de ces chiffres n'est pas le même que celui qui ressort de la

  2   déclaration, je ne pense pas qu'ils pourraient être résumés de la manière

  3   qu'envisage M. Misetic --

  4   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que je suis tout à fait capable de

  5   faire la distinction.

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Cela n'est pas la question, la question

  7   est de savoir s'il peut résumer les choses de la manière dont il a

  8   l'intention d'obtenir les informations de la part du témoin.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre propose que le résumé soit lu

 10   à la fin de la déposition du témoin de façon à compléter la connaissance du

 11   public plutôt que de lui fournir la base de compréhension de la déposition.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Très bien.

 13   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, je dois vous rappeler que votre débit est

 15   extrêmement rapide, je le sais, je dois donc vous inviter à bien vouloir

 16   ralentir pour les interprètes et pour la sténotypiste, et parfois

 17   j'essaierai de vous inviter à ralentir parce que nous souhaitons que tout

 18   ce que vous direz soit inscrit au compte rendu et interprété.

 19   Me comprenez-vous ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Bien. Monsieur Sterc, quelques éléments de contexte peut-être, quel

 22   poste occupez-vous actuellement ?

 23   R.  Je suis professeur au sein du département de la géographie de la

 24   faculté de sciences et des mathématiques à l'université de Zagreb.

 25   Q.  Bien. Vous avez été ministre adjoint chargé de la reconstruction et du

 26   développement du 11 octobre 1995, jusqu'à quand ?

 27   R.  Jusqu'à la fin de 1999. Jusqu'aux changements survenus au sein du

 28   gouvernement de la Croatie.

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  1   Q.  Après ces changements au sein du gouvernement croate -- quel poste

  2   avez-vous occupé ?

  3   R.  Après les changements aux pouvoirs, le nouveau gouvernement m'a invité

  4   à assumer certaines fonctions, en son sein, et je suis devenu ministre

  5   adjoint de la défense.

  6   Q.  En votre qualité de ministre adjoint chargé de la reconstruction et du

  7   développement du 11 octobre 1995 jusqu'aux changements de gouvernement,

  8   vous avez pris une part active dans les retours des réfugiés, n'est-ce pas

  9   ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Au sein du gouvernement croate, y avait-il quoi que ce soit ou qui que

 12   ce soit qui s'occupait au premier chef de la mise en œuvre de programmes de

 13   retour des réfugiés ?

 14   R.  Au niveau opérationnel, non, il n'y avait personne.

 15   Q.  En d'autres termes, en votre qualité de ministre adjoint, c'est vous

 16   qui vous occupiez des activités quotidiennes liées aux retours des

 17   réfugiés, n'est-ce pas ?

 18   R.  De cela et d'autres choses encore.

 19   Q.  A qui rendiez-vous compte de votre travail ?

 20   R.  Au ministre, au ministre de la reconstruction et du développement.

 21   Q.  Comment s'appelait-il ?

 22   R.  Jure Radic.

 23   Q.  Dans votre portefeuille, comportait-il une partie de votre travail

 24   consistant à étudier les statistiques démographiques et les tendances

 25   démographiques ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pouvez-vous expliquer aux Juges de la Chambre pourquoi ces éléments

 28   faisaient partie de votre portefeuille ?

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  1   R.  Parce que toute la situation démographique en Croatie, particulièrement

  2   du fait des conséquences de la guerre et donc après la guerre, était

  3   extrêmement complexe, et tout ensemble de plans devaient être élaborés dans

  4   ce domaine.

  5   Q.  Avez-vous, effectivement, élaboré un certain nombre de plans après

  6   avoir étudié les statistiques et les tendances démographiques de l'époque ?

  7   R.  Par la suite, puisque j'étais aussi responsable du département de la

  8   recherche scientifique au sein du ministère et que les réfugiés posaient un

  9   problème considérable, nous avons dû consacrer de nombreux efforts à

 10   résoudre ce problème, parce qu'au quotidien nous avions de grosses

 11   difficultés liées aux réfugiés, réfugiés qui à un moment donné ont atteint

 12   le nombre de 750 000 en Croatie.

 13   Q.  Avez-vous dû vous pencher sur des statistiques relatives à la

 14   composition ethnique des secteurs occupés de Croatie, à partir de 1991 et

 15   ce jusqu'en 1995, là encore dans le cadre de vos activités en tant que

 16   ministre adjoint ?

 17   R.  Oui, cela faisait partie effectivement de mes activités, de mes

 18   attributions, puisque des pourparlers importants s'étaient déjà engagés

 19   avec la communauté internationale sur cette question.

 20   Q.  Vous pouvez expliquer pourquoi ces statistiques sur la composition

 21   ethnique des secteurs occupés de la Croatie entre 1991 et 1995 avaient un

 22   rapport avec les pourparlers qui avaient lieu avec des représentants de la

 23   communauté internationale ?

 24   R.  Parce qu'ensemble, nous essayions de démêler cette situation complexe,

 25   et qu'avant d'engager tout pourparler sérieux sur la question, nous devions

 26   nous mettre d'accord sur le nombre total de réfugié, et sur les différents

 27   groupes ethniques au sein de ce groupe de réfugiés.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

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  1   autorisation, j'aimerais m'appesantir sur un certain nombre de ces

  2   chiffres, si vous me le permettez, bien sûr. Je ne sais pas si c'est ce que

  3   vous souhaitez.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela dépend de la manière dont vous

  5   allez procéder.

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je suis un peu perdue. Je pensais que la

  7   décision de la Chambre continuait de s'appliquer on pose des questions au

  8   témoin sur son portefeuille à l'époque, je ne vois pas très bien où nous en

  9   allons.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous avons maintenant établi qu'il

 11   avait étudié des statistiques en sa qualité officielle. Si vous voulez vous

 12   attarder sur les chiffres, cela dépend - je le répète - sur la manière dont

 13   vous allez procéder, Maître Misetic, mais vous verrez.

 14   M. MISETIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Sterc, en votre qualité de ministre adjoint chargé de la

 16   reconstruction et du développement, quel était selon vous, le pourcentage

 17   du territoire de la Croatie, à partir du 3 janvier 1992 qui se trouvait

 18   hors du contrôle du gouvernement croate ?

 19   R.  Selon nos estimations, il s'agissait d'un territoire d'une surface de

 20   15 000 kilomètres carrés, soit environ 26.5 % de l'ensemble du territoire

 21   croate. Cela étant, ce n'est pas tout. Toujours d'après nos estimations,

 22   près d'un tiers de la République de Croatie n'était plus contrôlé par les

 23   autorités. Parce qu'il faut aussi tenir compte de la zone qui se trouvait

 24   dans une partie limitrophe à la ligne de front et qui n'était contrôlée par

 25   personne. Or, dans les statistiques, cette région est considérée comme

 26   étant contrôlée par le gouvernement croate. 

 27   Q.  Très bien. Alors que vous étiez ministre adjoint de la reconstruction

 28   et du développement, quelle était selon vous la composition ethnique des

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  1   parties occupées de la Croatie, disons en 1991 ?

  2   R.  Nous avons procédé à nos évaluations à la lumière du recensement de

  3   1991. Les estimations n'étaient pas possibles à l'époque. Voici les

  4   résultats de l'analyse, dans les zones occupées au moment du recensement en

  5   1991, il y avait environ 50.5 % de Serbes et 49 -- ou plutôt, 48.5 %

  6   d'autres groupes ethniques dont 37.75 % de Croates.

  7   Mme GUSTAFSON : [interprétation] La réponse du témoin, Monsieur le

  8   Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, elle est un peu curieuse en effet,

 10   ambiguë.

 11   Monsieur Sterc, vous avez dit que vous aviez effectué votre analyse à la

 12   lumière du recensement de 1991, et, vous avez dit que les estimations 

 13   n'étaient pas possibles à l'époque. Dois-je comprendre par là, que les

 14   chiffres que vous venez de nous donner sont des chiffres tirés du

 15   recensement de 1991, mais que l'on n'est pas certain, que ces chiffres

 16   reflétaient effectivement la situation actuelle dans les territoires que

 17   vous ne contrôliez pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien entendu, ce ne sont pas les mêmes

 19   chiffres. Nous voulions simplement montrer au début des pourparlers avec la

 20   communauté internationale quels étaient les rapports entre les différents

 21   groupes à la lumière du recensement de 1991. Par la suite, lors d'analyse

 22   ultérieure, nous avons procédé à des estimations en s'intéressant à des

 23   situations particulières, à des périodes particulières.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, ceci répond-il à votre

 25   préoccupation ?

 26   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je me préoccupe simplement ce que l'on

 27   doit tirer de la dernière réponse du témoin; est-ce que c'est véritablement

 28   la position officielle.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, il nous a dit que plusieurs

  2   chiffres avaient été utilisés. Il nous parle de quelque chose que nous ne

  3   sommes pas en mesure de vérifier, donc le témoin par contre nous dit que

  4   les chiffres qu'il vient de donner reposent sur les chiffres tirés du

  5   recensement et qu'ils ne reflètent pas nécessairement la situation

  6   véritable. Ensuite, évidemment, on peut s'interroger à la valeur probante

  7   d'une telle déclaration, mais ceci nous le ferons à un stade ultérieur.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, mais je

  9   demanderais à Me Misetic de bien vouloir faire référence à la position

 10   officielle du gouvernement croate pour se conformer à votre décision.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'il exprime cette position en sa

 12   qualité d'ancien ministre adjoint ou que ce soit la position du

 13   gouvernement croate, bien sûr, on pourrait toujours demander au témoin de

 14   dire chaque fois qu'il nous dit ce qu'il a jugé être la vérité en tant que

 15   ministre adjoint si cette position était ou n'était pas partagée par le

 16   gouvernement croate dans son ensemble.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je dirais simplement

 18   que toutes ces questions pourraient être examinées au cours du contre-

 19   interrogatoire. Mais se lever et dire ne pas comprendre, être perdue, et

 20   cetera, je ne suis pas sûr que ces objections soient très utiles. Mais je

 21   ferai de mon mieux pour lui demander de manière générale s'il y a

 22   différence entre sa position en tant que ministre adjoint et la position de

 23   l'ensemble du gouvernement. Mais je ne vais pas le faire pour chacune des

 24   questions.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, bien sûr, pas pour chacune des

 26   questions. Mais l'on pourrait demander au témoin de nous dire si pour

 27   chaque sujet que nous abordons, il sait qu'il y ait eu éventuelle

 28   divergence entre sa propre position en tant que ministre adjoint et la

Page 20271

  1   position du gouvernement.

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

  3   j'avais compris que la décision de la Chambre était la suivante : les

  4   chiffres peuvent être évoqués par ce témoin pour autant que ce soient des

  5   chiffres entérinés, reconnus par le gouvernement croate. J'aimerais

  6   insister sur cette décision.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je crois que nous

  8   avons dit dans notre décision qu'il fallait que les éléments soient

  9   factuels. Il se peut très bien, cela étant que certains des chiffres

 10   n'aient pas fait l'objet de discussion au sein du gouvernement. La position

 11   d'un gouvernement ou d'un ministre adjoint c'est une question de fait, que

 12   ces chiffres soient exacts ou non, c'est quelque chose que l'on pourrait

 13   étudier davantage, mais il faut toujours que l'on sache clairement si c'est

 14   une position qui est défendue par une personne que ce soit une personne ou

 15   un membre du gouvernement, et en tel cas, il pourrait y avoir contestation

 16   sur la base d'élément de preuve documentaire, sachant qu'il y a une

 17   différence entre ce premier cas de figure et le cas de figure où l'on

 18   examine l'exactitude des chiffres mêmes ou inexactitude, qui peut être mise

 19   en lumière par des moyens tout à fait différents.

 20   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je peux poser

 22   la question, bien sûr, au témoin et je peux demander quelle était la

 23   position du gouvernement --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Restez bref.

 25   Monsieur Sterc, quelques questions vous ont été posées par Me Misetic sur

 26   votre position en tant que ministre adjoint, position que vous avez occupée

 27   jusqu'en 1995, pas celle que vous avez occupée par la suite au sein d'un

 28   autre ministère, on s'entend. Alors si jamais il y a eu des accords ou

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  1   divergences plus précisément entre la position que vous avez défendue en

  2   tant que ministre adjoint et la position défendue par d'autres membres du

  3   gouvernement, j'aimerais que vous l'indiquiez très clairement à chaque

  4   fois. Si vous ne l'indiquez pas, nous partirons du postulat que vous

  5   défendiez une position en tant que membre du gouvernement croate conforme à

  6   la position officielle défendue par l'ensemble du gouvernement. Ceci est-il

  7   clair ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Même si je crois que ceci

  9   mérite une précision, j'espère que vous donnerez l'autorisation de

 10   l'apporter dès lors qu'elle paraîtra nécessaire, parce que nous parlons

 11   d'une procédure d'analyse, d'analyse d'information dans le cadre des

 12   pourparlers que nous avons engagés avec la communauté internationale qui

 13   nous l'a demandé d'ailleurs. Nous nous sommes sentis tenus également

 14   d'analyser les données statistiques et de les ventiler par source avant de

 15   pouvoir engager les pourparlers sur le processus de retour proprement dit.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 17   M. MISETIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Sterc, en tant que ministre adjoint, quelle était votre

 19   position sur l'ensemble de la population serbe en Croatie ? En d'autres

 20   termes, quel était le pourcentage de Serbes qui vivaient dans les zones

 21   inoccupées de la Croatie et quel pourcentage de cette même population

 22   vivait dans les régions occupées de la Croatie en 1991 ?

 23   R.  Dans les parties inoccupées de Croatie, on trouvait une population d'un

 24   peu plus de 50 % de tous les Serbes de Croatie et dans les zones occupées

 25   49,5 à peu près ou 49. Donc quasiment 50/50.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais comprendre, Maître Misetic.

 27   Je me tourne vers le témoin.

 28   Etes-vous parvenu à ce chiffre à la lumière des résultats du recensement de

Page 20273

  1   1991 ou bien avant ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] 1991, oui, le recensement de 1991.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  4   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Monsieur, en votre qualité de ministre adjoint, avez-vous pris position

  7   sur ce qui est arrivé aux populations serbes après 1991 ?

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, la question invite

  9   le témoin à formuler un avis, une opinion.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Terminez votre question et le témoin

 11   peut répondre.

 12   M. MISETIC : [interprétation]

 13   Q.  Qu'est-il arrivé à la population serbe qui vivait dans les zones

 14   inoccupées de Croatie, après le début de la guerre ?

 15   R.  La population serbe qui vivait dans d'autres parties de Croatie

 16   principalement dans les zones urbaines et sur le littoral participaient à

 17   la vie économique et à l'effort de guerre en Croatie avec le reste de la

 18   population croate. Selon nos estimations environ 70 000 d'entre eux ont

 19   quitté la zone libre de Croatie et se sont déplacés vers la zone occupée de

 20   Croatie, vers la Serbie ou encore vers la Bosnie-Herzégovine.

 21   Q.  En votre qualité de ministre adjoint, avez-vous procédé à une

 22   évaluation du nombre de Croates qui vivaient dans les zones occupées de

 23   Croatie, d'après le recensement de 1991 ?

 24   R.  Oui. Oui.

 25   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre les chiffres auxquels vous

 26   êtes parvenu ?

 27   R.  Bien sûr, l'ensemble de la population vivant des les zones occupées de

 28   Croatie, d'après le recensement de 1991, la population totale des zones

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  1   occupées de Croatie comptait plus de 70 % de Croates; le total représentant

  2   environ 200 000 personnes.

  3   Q.  Entre 1991 et 1995, d'après vous en tant que ministre adjoint, combien

  4   de Croates sont partis de la zone occupée de Croatie avant le début de

  5   l'opération Eclair ?

  6   R.  D'après nos estimations, environ 5 %.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Sterc, en répondant à deux

  8   questions, vous nous avez dit qu'elles étaient vos estimations ? D'abord

  9   environ 70 % des Serbes sont passés dans des secteurs de la Croatie qui ne

 10   relevaient pas de votre contrôle ou vers la Serbie. Alors sur quoi faites-

 11   vous reposer cette estimation ? Puis même question, en ce qui concerne

 12   voyons voir en ce qui concerne l'autre estimation - donnez-moi une seconde

 13   - concernant les 5 % de Croates restés sur les territoires que vous ne

 14   contrôliez pas ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit ce sont des estimations, ce

 16   ne sont pas les chiffres officiels tirés du recensement. Nous n'avions que

 17   des sources partielles d'information, informations donc communiquées par la

 18   communauté internationale. Nous avons également trouvé certaines choses

 19   dans la presse serbe, et nous avons donc trouvé certaines informations dans

 20   un certain nombre de leurs bulletins.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eux, c'est-à-dire ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Les bulletins du HCR, de l'OSCE et d'autres de

 23   la communauté internationale. Il publiait régulièrement des bulletins

 24   d'information et ils fournissaient notamment des estimations

 25   démographiques.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez finalement compilé des

 27   informations issues de différentes sources, notamment la presse, et ceci

 28   vous a abouti -- permis d'aboutir à certains chiffres.

Page 20275

  1   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

  2   M. MISETIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Sterc, au paragraphe 7, vous abordez dans votre déclaration

  4   l'article publié, dans le Globus que je vous ai montré. Je voudrais vous

  5   poser une question, plusieurs questions sur cet article. Pourquoi cet

  6   article a-t-il été publié en 1998 dans le Globus ?

  7   R.  En 1998, nous avions déjà progressé dans nos négociations avec la

  8   communauté internationale et nous ressentions le besoin d'avoir des

  9   estimations et que ces estimations qui étaient abordées lors des

 10   négociations sont également publiées quelque part. Nous pensions que nous

 11   ne pouvions publier cela dans un document scientifique car rare sont ceux

 12   qui lisent ce genre de document. Nous avions donc pensé qu'il fallait

 13   publier cela dans ce qui était perçu en Croatie comme étant la presse de

 14   l'opposition, donc publié à environ 100 000 exemplaires. De surcroît, les

 15   éditeurs de cette revue ont manifesté leur intérêt également pour cette

 16   publication.

 17   Q.  Dans votre réponse vous venez de dire que nous avons ressenti le besoin

 18   de publier les estimations qui étaient abordées lors de négociations.

 19   Qu'elles étaient ces estimations que vous échangiez lors des négociations ?

 20   R.  Nous avions beaucoup de problèmes à aligner les données que nous

 21   avions. Il y avait nos données, la communauté internationale et puis les

 22   Serbes. Nous pensions qu'il était nécessaire d'arriver à une estimation

 23   définitive sur les migrations de la population et des communautés.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, je voudrais quand même

 25   une petite précision par rapport aux réponses qui ont été apportées

 26   précédemment.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Sterc, vous venez de nous dire

Page 20276

  1   que ces estimations n'ont pas été publiées dans un document scientifique

  2   lequel n'aurait pas atteint beaucoup de lecteurs, donc là, il s'agit du

  3   genre de publication de la forme; est-ce que vous avez aussi envisagé le

  4   contenu de l'article ? Comment vous aviez abordé ces données, les

  5   conclusions que vous aviez tirées ? Est-ce que vous avez considéré à

  6   l'époque que ce que vous y présentiez était le résultat d'une analyse

  7   scientifique ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] En partie, oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela ne voudrait pas dire dès

 10   lors que pour pouvoir atteindre un grand nombre de lecteurs et qui est la

 11   raison qui vous a motivé à publier dans "Globus" qu'à ce moment-là, le

 12   contenu de l'article et la manière dont s'était publié aurait également pu

 13   être publié dans un document scientifique ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Mes excuses. Puis-je continuer ?

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous aurions pu publier ce document sous

 17   forme d'un document scientifique, une publication scientifique, mais cela

 18   prend beaucoup plus de temps. Or à ce moment-là le grand public mais aussi

 19   les milieux diplomatiques, et à différents niveaux on voyait que des

 20   chiffres divergents étaient présentés, et que les chiffres réels n'étaient

 21   pas toujours cohérents, qu'il y avait multiplication. Donc c'est dans ce

 22   sens que nous avons pensé qu'il était important de publier à l'adresse du

 23   public en général.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais est-ce que c'était le résultat

 25   d'une analyse scientifique ou d'autres choses ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans une analyse scientifique vous ne pouvez

 27   pas citer les informations que vous avez obtenues dans la presse s'ils

 28   n'ont pas de pertinence scientifique. Ce qui ne veut pas dire pour autant

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  1   que ces informations ne sont pas correctes. Mais la méthodologie

  2   scientifique est différente.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous dites que vous ne pouviez pas

  4   vous fonder sur les articles de la presse, même si le contenu est correct;

  5   exact ? Alors, j'en conclus que vous avez utilisé ce genre de sources,

  6   n'est-ce pas, la presse ? Quelles ont été vos méthodes pour vérifier les

  7   données qui étaient publiées dans ces articles dans la presse afin de

  8   savoir si ces données étaient exactes ou pas ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque ce genre de données sont publiées dans

 10   la presse, dans des revues, ces données ne sont jamais tout à fait exactes.

 11   La méthodologie scientifique est telle que la recherche qui est menée est

 12   beaucoup plus approfondie puisque l'on cherche à vérifier ce qui est avancé

 13   à confirmer ou infirmer et nous voulions que nos estimations définitives

 14   puissent être couchées par écrit, couchées sur papier de façon à ce que

 15   tout un chacun puisse les lire et faire des commentaires. A ce moment-là,

 16   l'information pouvait être souhaiter harmonisée, souhaiter renouvelée.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Mais vous n'avez pas répondu à ma

 18   question. Je vous ai demandé la chose suivante : quand vous vous inspiriez

 19   d'articles publiés dans la presse, qui vous nous avez dit, ne pouvaient pas

 20   être utilisés dans une analyse scientifique normale, or malgré tout, vous

 21   avez utilisé ces articles ? Comment avez-vous fait pour vérifier

 22   l'exactitude de ce qui avait été publié dans la presse ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons pas pu vérifier. Nous avons

 24   comparé. Nous avons comparé les données qui étaient publiées dans la presse

 25   et dans les publications de la communauté internationale, et c'est sur base

 26   de cette comparaison et c'est sur base des chiffres officiels de notre

 27   recensement que nous avons pu à ce moment-là faire une estimation.

 28   Ceci étant, les Serbes dans la zone occupée avaient également fait ce

Page 20278

  1   que l'on peut appeler un recensement partiel, et très souvent, entre

  2   autres, ils avançaient des informations sur leurs forces militaires.

  3   S'agissant de la composition de la population de sa répartition entre

  4   hommes et femmes de sa moyenne d'âge mais aussi de la tendance de

  5   croissance de cette population, nous avons pu faire des estimations sur

  6   base de ces informations-là. Dans certains cas, ce qui est publié dans la

  7   presse peut être vérifié auprès des sources officielles, et parfois

  8   d'ailleurs ces articles publiés dans la presse font état de publication

  9   scientifique, d'autres par contre ne font pas ce genre de référence.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors est-ce que cette publication ou

 11   ces chiffres tels qu'apparus dans l'article publié dans "Globus" est le

 12   résultat justement d'articles qui se fondaient sur des publications

 13   scientifiques avec des techniques scientifiques ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était possible, oui, eu égard aux données

 15   existantes.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je prends votre réponse comme une

 17   réponse de confirmation de ma question.

 18   Monsieur Misetic, vous pouvez continuer.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne dois pas vous expliquer que cela

 21   permet d'éclairer un peu le genre d'article auquel nous avons affaire ici.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Je ne suis pas sûr que je sois en mesure de

 23   montrer ou pas --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette Chambre souhaite la transparence

 25   ici dans ce genre d'affaires, nous ne sommes pas là pour interrompre qui

 26   que ce soit dans une démarche, mais nous sommes là pour montrer aux parties

 27   ce que le témoignage et que chacun en prenne pleinement conscience surtout

 28   particulièrement en relation avec cet article.

Page 20279

  1   Vous pouvez poursuivre.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Puis-je demander que l'on affiche à l'écran la pièce de la liste 65 ter

  4   1D1559 ?

  5   Q.  Nous avons ici à l'écran un article. S'agit-il de l'article dont nous

  6   sommes en train de parler qui a été publié dans "Gobus," Monsieur Sterc ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Vous êtes l'auteur de ce texte ?

  9   R.  Oui. Je suis l'auteur de ce texte et le texte a été corrigé aussi et

 10   rajouté; il y a eu une mise en page puis il a été rajouté.

 11   Q.  Les graphiques sont les vôtres ?

 12   R.  Les intitulés des les titres graphiques ont été rajoutées par

 13   l'éditeur.

 14   Q.  Pouvez-vous dire à la Chambre s'agissant de la question des réfugiés, y

 15   avait-il en Croatie des réfugiés qui venaient de Serbie, enfin je veux dire

 16   de l'ancienne République de Yougoslavie à l'époque où vous avez rédigé

 17   l'article ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Pouvez-vous dire à la Chambre, en espérant de vous souvenir quel était

 20   le nombre de réfugiés qu'il y avait en république, dans cette ancienne

 21   République fédérale de Yougoslavie en Croatie en 1998 ?

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Puis-je demander à M. Misetic de donner la

 23   date à sa question ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vos souvenirs, quels souvenirs ?

 25   L'INTERPRÈTE : correction, il s'agit de 1991.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous, donc, s'agissant de votre

 27   souvenir, nous dire exactement ce que vous pensez quand on parle de

 28   souvenirs ? S'agit-il de statistiques utilisées par le gouvernement ou le

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  1   résultat de ces statistiques quand on parle de souvenir ? A quoi est-il

  2   censé faire appel dans ses souvenirs, Monsieur Misetic ?

  3   M. MISETIC : [interprétation] D'accord.

  4   Q.  Alors nous allons reprendre l'article --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas eu beaucoup de temps

  6   pour regarder cet article. Monsieur Misetic, quelle est la page de cet

  7   article dans la version anglaise ?

  8   M. MISETIC : [interprétation] En anglais, c'est la page 4.

  9   Q.  Monsieur Sterc, il s'agit de la page 3 dans la version en croate.

 10   Dans la version originale, la colonne de gauche au bas du paragraphe à la

 11   fin du paragraphe et dans la version anglaise c'est le chapitre intitulé :

 12   "La structure de la migration" :

 13   "Jusqu'à aujourd'hui, quelques 40 000 Croates ont quitté Vojvodina, 5 000

 14   ont quitté le Kosovo et environ 4 000 ont quitté la Serbie de Monténégro ce

 15   qui nous donne un total de 49 000, et la majorité d'entre eux ont pu se

 16   reloger en Croatie."

 17   Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre d'où proviennent ces chiffres que

 18   vous avez publiés dans l'article ?

 19   R.  Ce sont des chiffres que nous avons reçus du bureau croate pour les

 20   personnes réfugiés et déplacées.

 21   Q.  Merci. Bien le paragraphe suivant nous dit :

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on peut demander au témoin

 23   d'où eux ils ont obtenu ces chiffres, s'il le sait.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des chiffres qu'ils ont obtenus parce

 25   que les personnes qui se trouvaient en Croatie se sont faits enregistrés en

 26   Croatie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ils mentionnaient d'où ils venaient

 28   ? Par exemple, si, moi, je me fais enregistrer quelque part, est-ce que

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  1   dans ce cas-là la personne va également expliquer d'où elle vient ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par nationalité ou le lieu de résidence

  4   ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait aussi des données qui portaient sur

  6   le lieu de naissance, la religion, et cetera, toutes sortes de données.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce sont des données que vous avez

  8   utilisées pour tirer des conclusions, leurs origines parce qu'un lieu de

  9   naissance ne donne pas automatiquement le lieu de résidence ou la résidence

 10   précédente.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était le lieu de résidence.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous enregistriez également à

 13   l'époque le lieu de la résidence précédente au moment de l'inscription en

 14   Croatie.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 17   Poursuivez.

 18   M. MISETIC : [interprétation]

 19   Q.  Bien. Le paragraphe suivant nous dit :

 20   "D'ici la fin de 1992, quelques 500 000 personnes avaient trouvé logement,

 21   à se reloger en Croatie et provenaient de Bosnie-Herzégovine, bien sûr, ces

 22   500 000, nous avions 400 000 Croates et environ 100 000 Musulmans."

 23   D'où provenaient ces chiffres ?

 24   R.  Encore une fois, c'était des chiffres qui provenaient du même bureau,

 25   le bureau pour les personnes réfugiés et déplacées.

 26   Q.  Comme le Président vient de vous le dire ou vient de vous demander,

 27   quelle était la base pour justement déterminer ces chiffres, est-ce que

 28   c'était la même base qui vous a inspiré à arriver à ces chiffres, à savoir

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  1   leur inscription en République fédérale ?

  2   R.  Oui, c'était la procédure habituelle et c'était la procédure qui était

  3   appliquée par le bureau pour les personnes réfugiés et déplacées.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va terminer ce paragraphe :

  5   "Il nous restait que 60 % de la population d'origine en Bosnie-

  6   Herzégovine en 1991."

  7   Quelle est la base de cette information ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça c'est une estimation personnelle.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sur la base de quoi ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur base de données que j'avais reçues du

 11   bureau pour les personnes réfugiés et déplacées des rapports du Haut-

 12   commissariat des réfugiés de l'ONU et puis aussi des données qui avaient

 13   été publiées dans la presse scientifique ou dans les quotidiens.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pensiez qu'à partir de

 15   1992, il y avait des chiffres fiables sur la situation réelle sur le

 16   terrain en Bosnie-Herzégovine à ce moment-là ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Misetic.

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Le paragraphe suivant nous dit :

 21   "A un moment donné en Croatie, il a fallu reloger 750 000 personnes."

 22   D'où vient ce chiffre ?

 23   R.  Une fois du bureau croate pour les personnes réfugiés et déplacées 775

 24   000 personnes -- 750 000 personnes.

 25   Q.  Bien. Nous pouvons passer à la deuxième colonne et on doit prendre le

 26   haut de cette colonne dans la version croate.

 27   Je saute le paragraphe suivant en fait et je passe directement aux données

 28   qui furent transmises au départ par le Haut-commissariat de l'ONU entre

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  1   1991 et 1992 d'après ces publications :

  2   "Quelques 90 000 Serbes auraient quitté le territoire et en 1995, la

  3   libération leur nombre était passé à 140 000 environ."

  4   Alors pouvez-vous dire à la Chambre comment vous étiez arrivé à ces deux

  5   chiffres 90 000 dans un premier temps et 140 000 ensuite; donc ça c'était

  6   avant les opérations Tempête et Eclair.

  7   R.  Ce ne sont pas mes estimations personnelles. C'était celles qui étaient

  8   publiées par le Haut-commissariat aux Réfugiés des Nations Unies.

  9   Q.  Oui, mais d'où provenaient ces chiffres ? Comment les avez-vous obtenus

 10   ? Quel a été votre support ?

 11   R.  En partie de leurs publications, leurs bulletins et en partie en

 12   discutant avec eux. On discutait presque au quotidien ensemble.

 13   Q.  Le paragraphe suivant nous dit :

 14   "Pendant la libération en 1995, quelques 130 000 personnes ont quitté les

 15   anciens territoires occupés et on estime que quelques

 16   10 000 sont restés après les opérations Eclair et Tempête."

 17   Est-ce que vous pouvez nous dire d'où vient ce chiffre qui est avancé ici

 18   de 130 000 personnes ?

 19   R.  Quand on compare tous les chiffres que nous venons d'aborder, et quand

 20   on reprend aussi le recensement partiel qui avait eu lieu dans les

 21   territoires occupés, et sur base des estimations des forces militaires qui

 22   étaient reprises dans les bulletins, en compilant tout cela, on arrivait à

 23   cette estimation, ce chiffre de 130 000. Dans les anciens territoires

 24   occupés, nous avons supposé qu'il restait 10 000 Croates environ. C'est une

 25   hypothèse qui découle des informations que nous avions reçues après

 26   l'opération.

 27   Q.  Vous nous dites 10 000 Croates, c'est à ça que vous aviez pensé ?

 28   R.  10 000 qui n'étaient pas d'origine ethnique serbe.

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  1   Q.  Est-ce que vous avez pu faire une estimation du nombre de Serbes qui

  2   étaient restés dans les anciens territoires occupés ?

  3   R.  Oui. Mais je dois un peu y penser maintenant. Je pense que c'est une

  4   information que vous pourriez obtenir dans ce travail, dans ce document. Je

  5   pense que le chiffre était d'environ 13 000.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez donné un peu plus tôt le

  7   chiffre de 130 000 personnes qui auraient quitté les anciens territoires

  8   occupés. Vous nous avez expliqué, en expliquant d'où provenait ce chiffre,

  9   vous nous avez dit :

 10   "Quand on compare tous les chiffres dont on vient de discuter, quand

 11   on reprend leurs recensements partiels dans les territoires occupés, quand

 12   on reprend les estimations des forces militaires…"

 13   Donc il y a toute sorte de sources d'information qui devaient être

 14   interprétées et analysées pour finalement arriver à ce chiffre de 130 000,

 15   n'est-ce pas; est-ce exact ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc votre conclusion c'est ce chiffre

 18   130 000, qui est un chiffre que vous avez dégagé en utilisant des

 19   pourcentages sur des statistiques sur d'autres chiffres; est-ce que vous

 20   avez encore la liste complète de toutes les données que vous avez utilisées

 21   à l'époque et la méthodologie que vous avez appliquée pour arriver à ce

 22   chiffre de 130 000 ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ?

 24   En fait, on est arrivé à ce chiffre de 130 000 non seulement en se fondant

 25   sur ces sources-là, mais déjà avant cela, on avait pu faire une estimation

 26   du nombre de Serbes qui étaient restés dans les territoires libres et puis

 27   on avait aussi pu estimer ceux qui étaient restés sur place. Nous avons

 28   également utilisé les données du Haut- commissariat de l'ONU, et des

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  1   estimations qui avaient été présentées du nombre de Serbes qui étaient

  2   restés en Bosnie-Herzégovine. Donc c'est en compilant tous ces chiffres que

  3   nous sommes arrivés à un potentiel démographique des territoires occupés

  4   avant l'opération Tempête. C'était notre procédure à l'époque.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit que c'était

  6   l'objectif en fait de cet exercice, que l'objectif de cet exercice était

  7   d'arriver à un chiffre parce que vous n'étiez pas toujours satisfait des

  8   chiffres qui étaient utilisés, à ce moment-là.

  9   Mais qu'est-ce qu'il vous a donné l'occasion, par exemple, de vérifier

 10   l'exactitude des chiffres du Haut-commissariat de l'ONU puisque vous, vous

 11   aviez des doutes par rapport aux chiffres qui étaient avancés par les uns

 12   et les autres ? 

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Le chiffre, qui a été beaucoup entendu après

 14   la fin de l'opération très concrètement, était celui de 300 000 personnes.

 15   Il a été accepté au niveau diplomatique ainsi que journalistique et de

 16   façon générale, par l'opinion sans que quiconque ait même essayé de faire

 17   un simple calcul mathématique des additions à partir des chiffres

 18   concernant les différentes régions de Croatie.

 19   Donc pour éviter la moindre erreur, nous avons décidé afin de n'obtenir

 20   aucune réaction négative de la part d'un quelconque diplomate ou

 21   journaliste, de faire ce genre d'addition. Mais ce processus est très

 22   complexe. Quelqu'un qui accomplit une analyse sur une partie uniquement de

 23   la Croatie ou sur une partie de quel qu'autre pays de la communauté

 24   internationale, doit au départ savoir quel est le niveau de la population,

 25   le niveau de reproduction de la population, les migrations, quelle est

 26   l'espérance de vie et l'âge de la population. Donc vous voyez, ce sont un

 27   certain nombre de paramètres démographiques qui permettent lorsqu'on les

 28   utilise tous ensemble de déterminer la population totale, le total de la

Page 20287

  1   population.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etes-vous en train de dire que parce que

  3   les paramètres démographiques ont été correctement appliqués dans votre

  4   analyse, il en résulte que ceux qui avaient diffusé des chiffres erronés

  5   n'avaient pas la possibilité de contester vos conclusions chiffrées ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ce que j'affirme. Je

  7   n'affirme pas cela, car je viens du monde scientifique, et selon nous,

  8   lorsqu'on publie un élément scientifique, il faut toujours réagir comme il

  9   convient, c'est-à-dire en avançant des arguments. Donc même si ceci doit

 10   être compris comme une simple tentative de résoudre un problème, il faut

 11   néanmoins appliquer ce comportement scientifique.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous avez dit vous être posé vous-

 13   même la question du pourquoi. Je vois cela à la page 69, ligne 22 du compte

 14   rendu d'audience. Vous avez dit, et je cite :

 15   "Parce que les procédures impliquées étaient très complexes." Alors cela

 16   veut-il dire que vous ne maîtrisiez pas totalement ces questions complexes

 17   et que c'est la raison pour laquelle vous n'avez pas été capable de

 18   répondre à la question que vous vous posiez dans votre analyse vous-même ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai participé à de nombreuses réunions et

 20   conférences où l'on m'a opposé pas mal d'arguments contre ce genre de

 21   chiffre. Dans une discussion, un débat public, c'est tout à fait autorisé.

 22   Mais dans le monde scientifique, si on agit de la sorte, il faut le

 23   faire avec des arguments avant que la conclusion ne paraisse dans l'opinion

 24   publique. Or, cette démarche n'a jamais été accomplie par personne.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde l'horloge, Maître

 26   Misetic, je vois que l'heure de la pause est arrivée.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause, Monsieur

Page 20288

  1   Sterc. Je vais d'ores et déjà demander à Mme l'Huissière de vous

  2   accompagner hors du prétoire.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre aimerait reprendre les débats

  5   après la pause sans que le témoin ne soit dans le prétoire pour discuter

  6   rapidement de la façon dont nous allons procéder et où nous en sommes dans

  7   cet équilibre à trouver entre la définition de ce témoin comme un témoin

  8   des faits ou comme un témoin expert.

  9   Donc pause et reprise à 12 heures 55.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 36.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, la Chambre s'est

 13   interrogée sur la manière de procéder, et voici ce qui pourra peut-être

 14   vous aider.

 15   Après avoir entendu le début de la déposition de ce témoin, les Juges de la

 16   Chambre estiment qu'il apparaît que les chiffres cités dans l'article de

 17   "Globus" sont pour la plupart suite à des analyses scientifiques dont les

 18   sources sont multiples et non identifiées de façon précise, donc nous ne

 19   savons pas exactement quelles ont été les méthodes utilisées pour aboutir à

 20   ces chiffres. Ce témoin étant un témoin de fait a, semble-t-il, publié un

 21   article qui, premièrement, est le résultat d'une analyse scientifique, ce

 22   qui n'est donc pas une déclaration relative aux faits. Mais cela étant,

 23   cela ne veut pas dire que ces chiffres n'ont aucun rôle à jouer, simplement

 24   - et je vais vous donner un exemple - ces chiffres, quelle que soit la

 25   façon dont ils pourraient être utilisés, prenons par exemple ce chiffre de

 26   130 000 personnes. Est-ce qu'il a été utilisé dans des négociations

 27   internationales ? Est-ce qu'il a servi de base à l'établissement d'un

 28   programme international de quelque nature que ce soit, nous ne le savons

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  1   pas. Par exemple, nous ne savons pas quel est le chiffre précis qui a été

  2   utilisé dans des négociations internationales menées avec tel ou tel

  3   organisme. Si tel était le cas, il pourrait être important de citer ce

  4   chiffre. Mais en tout cas, si nous disons que ce chiffre est le résultat

  5   d'une analyse que nous avons utilisée pour développer nos plans, nos

  6   projets, alors nous n'avons plus à prêter attention à ces chiffres en tant

  7   que tel, parce que les chiffres cités dans cet article, étant donné ce que

  8   le témoin a déjà déclaré dans sa déposition jusqu'à présent, sont le

  9   résultat d'une analyse d'expert relative à des données disponibles.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, deux points, si vous

 11   me le permettez.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 13   M. MISETIC : [interprétation] D'abord, je suppose que je puis, sauf votre

 14   respect, me dire en contradiction avec la conclusion que je viens

 15   d'entendre car, Monsieur le Président, nous sommes à mi-chemin. C'est un

 16   témoin qui par profession est un expert, en tout cas il se perçoit comme un

 17   expert sur la question, donc le fait qu'il aurait pu regrouper ces éléments

 18   d'information et ne pas les aborder d'un point de vue scientifique, je ne

 19   suis pas sûr que la Chambre ait bien tiré au clair ce sujet avec le témoin.

 20   Un expert dans un domaine particulier, je suppose, s'appuie sur sa

 21   propre connaissance et sa propre expertise, pour recueillir les données de

 22   base.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cela ne me gêne pas s'il s'est

 24   appuyé sur ceci dans son travail en tant que ministre.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Parce que dans les négociations avec la

 26   communauté internationale --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il aurait pu dire : J'ai travaillé dans

 28   ce domaine, nous avons utilisé ces chiffres au cours de nos négociations.

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  1   Ceci aurait été considéré comme un fait.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Mais si je relis le compte rendu d'audience,

  3   je crois que tout ceci est évoqué.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, vous pourriez lui demander

  5   des détails complémentaires au sujet de ces chiffres de la façon dont ils

  6   ont été utilisés pour élaborer le programme de son ministère, quels

  7   chiffres il a utilisés au cours des négociations avec ABC, ou D, ou autres

  8   organisations. Mais je vais maintenant vous laisser parler de votre

  9   deuxième point.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Je crois qu'il y en aura deux de plus parce

 11   qu'il y en a qui vient de me venir à l'esprit suite à ce que vous venez de

 12   dire, Monsieur le Président.

 13   Monsieur le Président, une question a été évoquée par l'Accusation lors de

 14   la présentation de ses moyens qui portait sur le retour des réfugiés. Ce

 15   que nous essayons de faire c'est établir, grâce à cette personne qui était

 16   une personnalité de haut rang dans le domaine opérationnel sur cette

 17   question, ce que cette personne pensait qu'était le nombre de Serbes qui

 18   étaient revenus ou qui théoriquement auraient pu revenir en Croatie,

 19   combien était revenu dans le cadre de leur travail, combien de Croates

 20   n'étaient toujours pas revenus à leurs domiciles en 1998 dans les

 21   territoires occupés. C'est ce dont traite l'article. C'est ce que j'avais

 22   l'intention d'aborder avec lui dans la suite de mon interrogatoire au sujet

 23   de la situation factuelle sur le terrain du point de vue du retour des

 24   réfugiés.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous percevez cette

 26   déposition comme concernant la situation sur le terrain ?

 27   M. MISETIC : [interprétation] Exact. Sa perception, leurs perceptions, et

 28   cetera, parce que nous parlons ici du gouvernement croate qui était

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  1   responsable de cette question, et donc de sa perception de l'importance du

  2   problème, des dimensions du problème. Pour l'instant, nous n'avons vu ce

  3   problème que par le prisme des personnes retournées à leurs domiciles

  4   d'appartenance ethnique serbe, et nous souhaitons l'aborder et citer des

  5   chiffres qui sont le reflet de la perception du témoin et qui sont

  6   pertinents. Est-ce qu'il s'agissait de 170 000 Serbes qui étaient partis

  7   après l'opération Tempête ou de 90 000, c'est une question qui peut être

  8   débattue à l'infini. Nous n'avons pas l'intention de l'aborder avec un

  9   témoin expert parce que ce témoin-ci n'est pas cité à la barre par nous en

 10   tant qu'observateur extérieur indépendant. Nous avons un plan de 100 pages

 11   qui a été rédigé par ce ministère avec des statistiques à l'esprit et qui a

 12   été mis en œuvre s'agissant du retour des réfugiés. Donc, notre position

 13   c'est qu'on ne peut pas comprendre ce plan si on ne comprend pas

 14   l'importance du problème qui présentait toutes sortes d'aspects très

 15   multiples.

 16   Finalement, en tant que question de procédure, nous aimerions demander que

 17   la Chambre ne perde pas de vue un point. Si nous avions disposé de plus de

 18   temps, et ceci a été un gros problème pour l'Accusation également, nous

 19   aurions simplement pu ajourner l'audition de ce témoin et essayer

 20   d'entendre les témoins prévus la semaine prochaine. Nous demandons donc à

 21   ne pas être pénalisé en raison du manque de temps et de la comparution

 22   prématurée de ce témoin.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est clair.

 24   Madame Gustafson.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Sur le dernier point, Monsieur le

 26   Président. La Défense a choisi d'entendre ce témoin en tant que témoin des

 27   faits, et ma foi, elle a joué son jeu à ce sujet. Il est tout à fait clair

 28   au vu de la déclaration préalable que la déposition de ce témoin est tout à

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  1   fait limite. Et d'ailleurs, comme la Chambre l'a déclaré dans sa décision,

  2   il y a des parties de cette déposition qui entrent dans le domaine du

  3   témoignage expert. Donc la Défense a joué son jeu. Maintenant elle demande

  4   une nouvelle décision, et il n'est pas question d'être pénalisé injustement

  5   parce que la réponse a été apportée par la Défense le jour où elle a versé

  6   la déclaration préalable 92 ter du témoin. Je répète que j'ai reçu les

  7   documents en questions relatifs à ces paragraphes hier.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Mais --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Misetic.

 10   M. MISETIC : [interprétation] [inaudible]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout nouvel élément introduit dans la

 12   discussion, je l'accueille favorablement. Mais s'il ne s'agit pas d'un

 13   nouvel élément, alors je suis certain que nous pourrions continuer pendant

 14   une heure cette controverse, et je n'apprécie guère.

 15   Y a-t-il quelque chose de nouveau ?

 16   M. MISETIC : [interprétation] D'abord, je ne considère pas que ce soit une

 17   deuxième décision. Je ne perçois pas non plus ce qui se passe ici comme un

 18   jeu où là ou l'autre joue son propre jeu; nous essayons de produire des

 19   éléments de preuve à l'attention de la Chambre. Je pense que l'Accusation a

 20   une certaine responsabilité par rapport à l'évocation de certaines

 21   questions dès lors que la liste des témoins est mise en circulation et

 22   qu'elle savait que ce témoin allait être entendu; et puis troisièmement, je

 23   crois savoir que Mme Gustafson n'était pas dans le pays ces deux dernières

 24   semaines, et donc certaines questions, me semble-t-il, sont apparues ou ont

 25   été reportées à la semaine dernière date à laquelle elle est rentrée. Je

 26   n'ai pas de problème s'agissant de ses voyages --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même au pôle nord, je pourrais traiter

 28   de ces questions. Enfin, essayons de rester dans le cadre du débat.

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  1   Il peut y avoir quelques valeurs aux positions des deux parties sur

  2   ce sujet. La Chambre s'intéresse davantage à ce que la procédure se déroule

  3   équitablement.

  4   Madame Gustafson, vous n'allez pas nous dire où Me Misetic a passé ses

  5   dernières vacances.

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Toutes mes

  7   excuses pour le fait que je me lève dans une telle confusion. J'ai cru

  8   comprendre, Monsieur le Président, que la Chambre allait rendre une

  9   décision quant à la nature de la déposition de ce témoin, à savoir qu'il

 10   s'agit d'une déposition d'expert. Nous aimerions avoir quelque précision à

 11   ce sujet de la part de la Chambre.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que j'ai dit, c'est que l'article de

 13   "Globus" utilisé en tant que fondement de la déposition se présente comme

 14   étant le résultat d'une analyse scientifique dont il est pour le moment

 15   difficile de définir les sources ou de déterminer la méthode qui a été

 16   utilisée pour cette analyse. J'ai invité instamment Me Misetic à nous dire

 17   quels étaient ces chiffres, justes ou faux, ou même inventés, ou recopiés

 18   de "New York Times," ou "Du Soir," ou du journal local de La Haye, et de

 19   nous dire également comment ces chiffres ont été utilisés pour

 20   l'établissement de plans factuels ou pour des négociations ou quoi que ce

 21   soit de ce genre.

 22   Voilà ce que la Chambre a invité Me Misetic à faire, et je suis sûr qu'il

 23   le fera.

 24   Maître Misetic.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. S'agissant de

 26   ce dont je parlais tout à l'heure, on trouve la référence que j'ai faite à

 27   la déposition du témoin en page 58 du compte rendu d'aujourd'hui à partir

 28   de la ligne 20, et j'explorerais ces questions plus en détail si la Chambre

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  1   le souhaite, car nous étions en train de parler des discussions entre le

  2   témoin et la communauté internationale --

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ça. J'aimerais

  4   entendre cela de la bouche du témoin, s'il nous dit : En septembre, nous

  5   avons négocié avec telle et telle organisation, nous avons utilisé ces

  6   chiffres, ou nous n'avons pas utilisé ces autres chiffres qui n'étaient pas

  7   pertinents ou nous avons attendu 1995, ou une autre année pour les

  8   utiliser. Mais j'aimerais que ce qu'il nous dit soit aussi factuel que

  9   possible, parce que si vous dites ces chiffres ont été utilisés lors de nos

 10   discussions et que nous passions davantage de temps à discuter de la façon

 11   dont ces chiffres ont été utilisés que d'autres choses, alors je pense que

 12   nous risquons, pour le moins, d'avoir une chance de nous appuyer sur des

 13   chiffres, sur des données fiables.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Oui. Comme je vous l'ai indiqué,  Monsieur le

 15   Président, c'est ce que je m'apprêtais à faire finalement dans le reste des

 16   questions que je poserai au sujet de l'article de Globus.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, qu'on fasse entrer le témoin et

 18   vous agirez comme convenu.

 19   [Le témoin vient à la barre]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Sterc, veuillez vous asseoir.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pause a duré un peu plus longtemps

 23   que prévu pour vous, mais j'espère que vous saurez nous pardonner. Me

 24   Misetic va poursuivre son interrogatoire principal.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Madame la Greffière, je demanderais qu'on affiche la page 6 de l'anglais à

 27   l'écran, s'il vous plaît, et la dernière page dans la version croate.

 28   J'aimerais qu'on affiche la colonne de gauche.

Page 20295

  1   Q.  Monsieur Sterc, dans cet article, dans le premier paragraphe qui suit

  2   le titre "Equilibre tragique", à la quatrième phrase, vous écrivez :

  3   "Et par conséquent, il y a près de 100 000 Croates en Croatie

  4   aujourd'hui qui ont été expulsés et qui n'occupent plus leurs habitations

  5   dans les zones anciennement occupées."

  6   Je m'arrête là pour l'instant. D'où vient ce chiffre pour commencer ?

  7   R.  Ce chiffre provient du Bureau des réfugiés et des personnes déplacées.

  8   Ce sont les personnes qui ne sont pas rentrées chez elles, qui ne l'étaient

  9   pas encore à l'époque.

 10   Q.  Pourquoi ces personnes ne sont-elles toujours pas chez elles trois ans

 11   quasiment après l'opération Tempête ?

 12   R.  Parce que pour la plupart leurs maisons avaient été détruites.

 13   Q.  Avez-vous abordé les chiffres avec des représentants de la communauté

 14   internationale, chiffres correspondant au nombre de Croates qui, d'après

 15   cet article, n'avait pas encore réussi à rentrer chez eux dans les

 16   territoires occupés ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Avec qui en avez-vous parlé de ce chiffre ?

 19   R.  Avec tous les représentants du HCR, du UTS, l'OTSS, la Troïka,

 20   différentes missions diplomatiques et autres présentes en Croatie, des plus

 21   hauts représentants aux agents subalternes. Ils ont déclaré à l'époque que

 22   la Croatie ne pouvait pas renvoyer les

 23   100 000 Croates en question vers les territoires occupés pour les raisons

 24   que j'ai évoquées. Mais ça n'a pas été considéré comme un véritable

 25   problème.

 26   Q.  J'aimerais corriger certains cigles.

 27   A la ligne 18, on voit apparaître OTSS dans le compte rendu.

 28   Pourriez-vous préciser de quelle organisation il s'agit, s'il vous plaît ?

Page 20296

  1   R.  Pardon, je parlais de l'OSCE en réalité.

  2   Q.  Très bien. Le troisième sigle. On voit dans le compte rendu, UTS, de

  3   quoi s'agit-il ?

  4   R.  L'UNTAES, U-n-t-a-e-s, c'est l'administration de transition dans la

  5   Slavonie orientale.

  6   Q.  Où rencontriez-vous ces représentants ?

  7   R.  Un peu partout. Quasiment partout en Croatie et quasiment chaque

  8   semaine nous nous rencontrions à Vukovar occupée en tant qu'invités de

  9   l'UNTAES. Nous tenions également des négociations à Vukovar, à Banja Luka,

 10   Topusko, Plasko et, bien entendu, Zagreb également.

 11   Q.  Lors de ces réunions, est-ce que ce nombre de Croates, qui n'avaient

 12   pas encore pu rentrer chez eux, faisaient l'objet de discussions ces 100

 13   000 personnes ?

 14   R.  Oui. Parce qu'au cours de ces pourparlers, nous avons insisté sur le

 15   retour intégral des populations chez elles, parce que nous pensions que

 16   c'était là la seule véritable solution à la crise liée aux réfugiés, aux

 17   personnes déplacées en Croatie. Toutefois, la plupart des activités menées

 18   à bien avaient pour objet d'assurer le retour des Serbes.

 19   Q.  Monsieur Sterc, vous venez d'aborder brièvement une question à laquelle

 20   j'avais l'intention de revenir tout à l'heure, mais il se peut qu'elle

 21   présente une certaine pertinence ici aussi. Alors peut-être pourriez-vous

 22   nous en dire davantage.

 23   Vous parlez de ce principe de retour intégral de toutes les personnes

 24   chez elles. Ensuite vous avez dit que la plupart des activités menées à

 25   bien par les représentants de la communauté internationale étaient surtout

 26   axés sur le retour des Serbes. Je vous demanderais de bien vouloir

 27   expliquer aux Juges de la Chambre en quoi consistait ce principe de retour

 28   intégral, et quel est son rapport avec la question des Serbes qui devaient

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  1   rentrer chez eux ?

  2   R.  C'est un principe fondamental dans la résolution de la crise des

  3   réfugiés, des personnes déplacées. C'est une première chose.

  4   Puis puisque les maisons étaient occupées en Croatie, Podunavlje et

  5   la Bosnie-Herzégovine il nous fallait essayer de résoudre l'ensemble de ces

  6   questions complexes en attirant davantage l'attention sur ces questions et

  7   en sollicitant un concours financier logistique et organisationnel, parce

  8   que ceci aurait permis de contribuer à la résolution de toute la situation

  9   très complexe qui prévalait en Croatie.

 10   Q.  Je serai plus précis. La question du retour des Croates chez eux avait-

 11   elle un lien avec la question du retour des Serbes ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Pourriez-vous expliquer quel était ce lien aux Juges de la Chambre ?

 14   R.  Parce que tout était lié, entremêlé. Des réfugiés étaient arrivés en

 15   Croatie, en Bosnie-Herzégovine, et en Serbie, des quatre coins de la

 16   région, et les nombres, les chiffres étaient tellement considérables et

 17   leurs mouvements étaient tout à fait incontrôlables. Ils choisissaient la

 18   solution la plus aisée où ils rencontraient la moindre résistance, et ils

 19   occupaient tous les bâtiments qui se trouvaient vacants ou sur lesquels ils

 20   tombaient en route et qui étaient intacts.

 21   Q.  S'agissant de cette interrelation entre les différents problèmes, avez-

 22   vous mené une analyse statistique pour déterminer l'étendue du problème,

 23   une ou plusieurs ?

 24   R.  Nous produisions des estimations hebdomadaires lors des réunions du

 25   groupe de travail avec des représentants de la communauté internationale.

 26   Nos chiffres ne correspondaient pas toujours, mais dans tout ce que nous

 27   faisions et dans toutes nos discussions, nous tâchions de les harmoniser.

 28   Q.  Vous parlez d'"estimations hebdomadaires," et elles portaient sur quel

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  1   type de chiffres ?

  2   R.  Il s'agissait surtout d'estimation du HCR ou de la Croatie, de la

  3   Serbie ou de la Bosnie-Herzégovine.

  4   Q.  J'entends bien, mais qu'estimiez-vous ?

  5   R.  Nous estimions le nombre de personnes se trouvant en Croatie, en Serbie

  6   et en Bosnie-Herzégovine, respectivement. Leur origine et l'endroit où elle

  7   devait rentrer.

  8   Q.  Très bien. Je reviens à l'article de Globus. Ces chiffres ont-ils fait

  9   l'objet de discussion lors des réunions hebdomadaires du groupe de travail

 10   conjoint ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Bien. Poursuivons.

 13   Nous avons parlé de ces 100 000 Croates en Croatie, la phrase

 14   suivante dit ce qui suit :

 15   "Environ 120 000 Croates de Bosnie-Herzégovine se trouvent sur tout

 16   le territoire de la Croatie dans différents types d'hébergement. 80 000

 17   Croates de Bosnie-Herzégovine en Allemagne attendent de rentrer en Bosnie-

 18   Herzégovine. 40 000 Croates de Vojvodine ont reçu un logement sous

 19   différentes formes dans la République de Croatie, et 5 000 Croates du

 20   Kosovo se sont également vus donner un logement sous différentes formes

 21   dans la région de Croatie. Ce qui signifie que globalement environ 395 000

 22   Croates sont hors de chez eux."

 23   Alors tous ces chiffres dont je viens de donner lecture, ont-ils fait

 24   l'objet de discussion lors des réunions du groupe de travail conjoint, tous

 25   ou l'un ou plusieurs d'entre eux ?

 26   R.  Oui. 

 27   Q.  Lesquels ?

 28   R.  Prenons l'exemple des Croates du Kosovo. Notre estimation nous la

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  1   tirions des chiffres du bureau des Réfugiés et des Personnes déplacées, et

  2   qui parlait de 5 000. Conformément à la politique visant à un retour

  3   intégral à des populations chez elles, j'avais également demandé ou fait

  4   une proposition plus précisément consistant à ce que ces personnes puissent

  5   rentrer chez elles, lors d'une des réunions du groupe de travail conjoint.

  6   Q.  Poursuivez.

  7   R.  De plus, nous voulions que les Croates rentrent chez eux en Bosnie-

  8   Herzégovine. Les Croates se trouvant alors en Croatie, si toutefois ils le

  9   souhaitaient.

 10   Q.  Très bien. Mais parmi les chiffres que nous avons lus, le nombre de

 11   Croates de Bosnie-Herzégovine qui se trouvaient en Croatie, le nombre de

 12   Croates en Allemagne, de Bosnie-Herzégovine, le nombre de Croates de

 13   Vojvodine, parmi tous ces chiffres donc quels ont été ceux qui ont fait

 14   l'objet de discussion lors de la réunion ou des réunions du groupe de

 15   travail conjoint ?

 16   R.  Oui, ces chiffres ont fait l'objet de discussion, mais voici quelles

 17   étaient les positions, à savoir que c'était là un problème qui regardait la

 18   Croatie.

 19   Q.  Quelle était votre position lorsque vous entendiez que c'était là un

 20   problème qui regardait la Croatie et que c'était donc a à la Croatie d'y

 21   remédier ?

 22   R.  Je disais comme d'autres qu'il était de l'intérêt de la Croatie que les

 23   Croates entre autres puissent rentrer chez eux en Bosnie-Herzégovine, et au

 24   Kosovo, et que la communauté internationale prenne part à cet effort,

 25   puisque nous parlions du retour de populations vers d'autres pays.

 26   Q.  Y avait-il un lien particulier entre votre évocation du retour des

 27   Croates chez eux et l'insistance de la communauté internationale pour que

 28   les Serbes rentrent chez eux ?

Page 20300

  1   R.  Ces deux choses étaient logiques. Nous devons tous dans nos différentes

  2   qualités accepter ce principe fondamental et faire ce qu'il fallait pour

  3   que les deux groupes puissent rentrer chez eux, parce que c'était

  4   véritablement un principe fondamental, permettre aux populations de rentrer

  5   chez elles. Nous savions bien entendu que certaines de ces personnes pour

  6   différentes raisons ne souhaitaient pas rentrer mais nous devions permettre

  7   à tous ceux et celles qui le souhaitaient de pouvoir rentrer chez elles.

  8   Q.  Avant la pause, nous avons parlé de statistiques applicables à la

  9   période de guerre. Nous avons parlé du lieu où se trouvaient des

 10   populations de différents groupes ethniques en 1991, puis en 1995. Les

 11   réunions du groupe de travail conjoint, ont-elles également permis de

 12   discuter de ces chiffres et si oui, pourquoi ?

 13   R.  Oui, bien sûr, ces chiffres étaient discutés. Tous les articles que

 14   j'avais publiés ont été utilisés par la communauté internationale, après

 15   traduction. Lors des réunions, nous avions -- nous étions là, à ce moment-

 16   là, d'apporter une harmonisation entre ces chiffres, parce qu'il y avait

 17   parfois quelque doute qui était émis par rapport à ces chiffres.

 18   Q.  L'article dans Globus, puis vous avez parlé d'articles qui étaient

 19   utilisés par la communauté internationale; est-ce que cet article-ci de

 20   Globus, est un de ces articles qui furent utilisés par la communauté

 21   internationale ?

 22   R.  Oui, j'imagine.

 23   Q.  Est-ce que vous êtes au courant, est-ce que vous le savez ?

 24   R.  Je ne peux pas le confirmer, ce n'est qu'une hypothèse.

 25   Q.  Pourquoi ?

 26   R.  Parce que comme nous avons discuté de ces chiffres, et bien, c'est

 27   logique et c'est pour cela que je l'imagine.

 28   Q.  Qu'est-ce qui vous a motivé, à publier ce travail dans Globus ? Est-ce

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  1   que c'était lié au travail que vous aviez fait, que vous étiez en train de

  2   faire dans ce groupe conjoint ?

  3   R.  Oui, il y avait un lien. En effet, on voulait publier cet article de

  4   façon à pouvoir susciter un débat sur cet article, voir en faire corriger

  5   les données, si nécessaire. C'est comme ça qu'on a pu finalement se mettre

  6   d'accord sur le nombre de personnes qui devait rentrer chez eux, et sur

  7   base du principe que tout un chacun était invité à rentrer chez soi.

  8   Q.  Ma question était plus précise. Pourquoi est-ce que vous souhaitiez

  9   publier cet article ? Pourquoi était-ce important pour vous de lancer tout

 10   un débat sur le nombre de personnes qui devait rentrer chez elles ?

 11   R.  Vous voulez dire moi, moi personnellement, parce que j'étais président

 12   de ce groupe conjoint ?

 13   Q.  Oui, commençons par vous.

 14   R.  Personnellement, c'était important pour moi parce qu'on n'arrivait pas

 15   à harmoniser les chiffres entre nous, très souvent en tout cas. Il y avait

 16   beaucoup de choses qui devaient faire l'objet d'harmonisation; c'étaient

 17   les finances, la logistique, et cetera, et nous étions sous pression. On en

 18   a souvent parlé d'ailleurs, il fallait ramener les choses à la normale.

 19   Q.  Vous nous dites que nous n'étions pas en mesure d'harmoniser les

 20   chiffres. C'est qui "nous" ?

 21   R.  Oui, je veux dire dans un premier temps, les représentants de la

 22   communauté internationale, qui, au début, était la Croatie pendant ou avant

 23   l'opération Tempête.

 24   Q.  Trois cent personnes ou 300 000 personnes ?

 25   R.  300 000 personnes.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Personne ou

 27   en général ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] De personnes, oui.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, parmi toutes ces personnes la

  3   majorité était serbe.

  4   M. MISETIC : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que cet article publié dans "Globus" a pu amener cette

  6   harmonisation du nombre de personnes qui devaient rentrer chez elles ?

  7   R.  Oui, certainement. C'est sûr, parce que tout d'un coup nous avions une

  8   base de discussion et d'harmonisation.

  9   Je peux également ajouter que beaucoup de critiques avaient été mises

 10   à l'encontre de ce que j'avais publié parce que plusieurs ont prétendu que

 11   ce que j'avais publié n'avait pas de base, n'était pas fondé. Je sais que

 12   cela fût l'objet de discussions d'ailleurs lors de réunions publiques ou de

 13   conférences, et d'ailleurs ce fut le cas lors de la Conférence des Serbes

 14   en Croatie, qui était organisée à l'époque par le comité d'Helsinki pour la

 15   Croatie. J'y ai participé, j'ai pris la parole, on a discuté, mais personne

 16   n'a jamais présenté d'autres chiffres de manière analytique.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, je voudrais une

 18   précision sur une des réponses.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais juste vous

 20   dire que je n'avais pas d'autres questions moi-même à poser.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, non, ce n'est pas de ça qu'il

 22   s'agit.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Oui, je voulais simplement vous inviter à

 24   poser votre question sur le fond et ce qui sous-tend cet article parce que

 25   moi j'ai terminé par rapport à cela.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit qu'en publiant cet

 27   article dans "Globus" vous avez pu arriver à une certaine harmonisation des

 28   chiffres reflétant le nombre de personnes qui devaient rentrer chez elles

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  1   parce que vous nous dites : "Nous avions en fin une base pour la

  2   discussion." Alors est-ce qu'il y a à un moment donné eu un accord réel sur

  3   -- comment les choses devaient se poursuivre avec la communauté

  4   internationale ou les organisations internationales ? Est-ce que -- je veux

  5   dire par là, vous avez pu dire : bien, voilà on va travailler sur telle

  6   base ou telle autre base.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, on a pu en définitive finalement se

  8   mettre d'accord sur un chiffre harmonisé. C'est ce qui a pu déclencher le

  9   programme de retour et la mise sur pied de tout ce programme qui fut par la

 10   suite adopter d'ailleurs par le gouvernement. Tout cela grâce à cette

 11   harmonisation, à ces négociations, et c'est un programme qui tourne encore

 12   et toujours aujourd'hui à quelque petite modification près, et je pense

 13   d'ailleurs que c'est également utilisé dans d'autres pays.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'était aussi accepté par d'autres

 15   groupes de travail parce que j'essaie de comprendre ce que veut dire

 16   "harmoniser" dans ce cas-ci. Est-ce qu'il y avait un différent par rapport

 17   à l'harmonisation ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, oui, au début dans le groupe de travail.

 19   Toutes ces discussions, ces négociations dans ces groupes de travail

 20   n'étaient pas vraiment indifférentes. On n'était pas dans la confrontation.

 21   Personne n'accusait qui que ce soit. Nous essayions, à ce moment-là,

 22   simplement de trouver une solution pour que cette procédure qui allait être

 23   très complexe puisse démarrer. Pour ce faire, il nous fallait un document

 24   qui serait utilisé.

 25   S'agissant justement des personnes réfugiées et déplacées c'était une

 26   question qui du monde politique devaient passer entre les mains des

 27   personnes responsables du côté humanitaire.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'était pas du tout ma question.

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  1   Il y avait visiblement un désaccord entre les chiffres présentés par le

  2   gouvernement croate d'un côté, et de l'autre, les organisations

  3   internationales qui seraient impliquées dans la gestion du retour. Vous

  4   nous dites que du fait de la publication de cet article il y a eu

  5   harmonisation de ces chiffres.

  6   Alors la question que je vous pose est la suivante : est-ce que finalement

  7   dans ce groupe de travail conjoint a-t-on pu finalement se mettre d'accord

  8   sur cette question ? Vous nous avez ajouté : bien, oui, nous avions enfin

  9   ce programme qui semble être le programme du gouvernement croate. Bon,

 10   enfin, tel que je l'ai compris, il n'y avait pas vraiment de problème au

 11   sein du gouvernement croate, c'était entre le gouvernement croate et les

 12   organisations et institutions internationales qu'il y avait un problème.

 13   Alors la question que je pose est la suivante : est-ce qu'il y a eu

 14   un moment donné un accord entre les organisations et institutions

 15   internationales et le gouvernement croate sur le nombre de personnes qui

 16   avaient émigrés et qui devaient bénéficier d'un retour et si cet accord a

 17   permis d'organiser ce plan de retour ? Donc c'est ça que je voudrais

 18   savoir. Est-ce qu'il y a eu un accord et s'il y a eu un accord quelle a été

 19   la base pour cet accord ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, les chiffres ont été harmonisés. A

 21   l'issue de l'harmonisation qui a eu lieu au sein du groupe de travail ces

 22   chiffres ont été repris dans ces documents-là, mais pas rien que là,

 23   également dans tous les débats publics, entre autres, à la télévision.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, je puis imaginer que si on se met

 25   d'accord sur les chiffres c'est qu'il y a harmonisation. Ceux-ci sont

 26   repris par écrit quelque part parce que, sinon, ces chiffres peuvent assez

 27   facilement être égarés ou oubliés. Alors est-ce qu'il y a un document qui

 28   reprend ces chiffres ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il y a le programme dont je vous ai parlé

  2   dans lequel ces chiffres sont cités.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit que c'était un

  4   programme croate. Est-ce qu'il y a quelque part un document qui confirme

  5   que ces chiffres n'étaient pas simplement les chiffres croates mais

  6   confirmés par les institutions et organisations internationales ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est correct. C'est exact. En fait, les

  8   négociations pour l'élaboration de ce programme je les ai menées moi

  9   personnellement avec le directeur de la Mission de l'OSCE en Croatie ainsi

 10   que le représentant de l'UNTAES, et on s'est mis d'accord ensemble sur ces

 11   chiffres. Bon, c'est un document de 100 pages qui était particulièrement

 12   complexe.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je m'en tiens à cela et je m'en

 14   remets à vous, Monsieur Misetic. Je sais qu'on est à peu près au bout du

 15   temps imparti.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions sur la base

 17   même de ce document. Je demande simplement si on peut verser cet article

 18   "Globus" au dossier et si on peut lui donner une cote.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons le verser au dossier.

 20   Madame Gustafson,  vous aurez l'occasion de toute façon de revenir sur le

 21   fait que ce document soit versé ou pas mais, en tous les cas, pour le

 22   moment, on s'en tient à ça, on verra ça ultérieurement.

 23   Nous allons lever la séance aujourd'hui. Je sais que la question que je

 24   vais vous poser peut vous paraître difficile. Je voudrais savoir combien de

 25   temps il va faudrait encore pour continuer cette interrogatoire sachant que

 26   la Chambre a peut-être un peu mis les choses plus complexes.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je ne suis pas du tout perdu ici. J'ose

 28   espérer que je devrais pouvoir terminer demain, enfin. J'espère.

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  1   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je suis tout à fait

  3   conscient du fait que c'est une question particulièrement délicate pour

  4   l'heure si je vous la pose. Mais pourriez-vous quand même nous donner une

  5   appréciation du temps que vous pensiez, que vous auriez besoin sachant

  6   qu'on ne sait pas encore quand vous allez commencer de toute façon ?

  7   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Bon. Je peux bien sûr commencer avec

  8   certaines parties de la déclaration. Cela ne me pose pas de problème; pour

  9   le reste, ça dépend. Moi, ce qui se passe c'est que pour l'heure je pense

 10   trois, quatre heures sur les parties de cette déclaration qui ne font pas

 11   l'objet d'une contestation.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en fait, j'ai oublié de demander à

 13   la Défense de Cermak et Markac combien de temps eux auraient besoin.

 14   Mme HIGGINS : [interprétation] Pour le moment, nous n'avons pas de

 15   questions mais je reviendrai peut-être sur cette déclaration.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pour l'heure, Monsieur le Président, je

 18   n'ai pas de questions à poser.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.

 20   Monsieur Sterc, nous allons lever la séance pour la journée et je vous

 21   intime de ne parler à personne de ce témoignage de ce que vous avez déjà

 22   dit de ce que vous serez amené à dire. Je vais demander à notre huissière

 23   d'audience de vous escorter pour sortir de la Chambre parce que nous nous

 24   devons encore verser votre témoignage au dossier.

 25   Nous vous reverrons, Monsieur Sterc pour la poursuite de ce

 26   témoignage, cette déposition. Nous allons nous retrouver demain matin à 9

 27   heures et ce sera dans la même salle d'audience.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, 65 ter 1D1559,

  3   qui deviendra la pièce à conviction D1608.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous gardons cette référence-

  5   là pour l'heure.

  6   L'INTERPRÈTE : -- document D1608 enregistré aux fins d'identification.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous nous arrêterons là pour

  8   le moment et nous levons la séance et on se trouve demain le 15 juillet à 9

  9   heures, dans cette salle d'audience numéro III.

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le mercredi 15 juillet

 11   2009 à 9 heures 00.

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