Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 15 juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Pouvons-nous citer l'affaire, Madame la Greffière d'audience ?

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Nous sommes dans l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante

 10   Gotovina et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 12   Monsieur Sterc, j'aimerais vous rappeler que vous êtes encore et toujours

 13   tenu par la déclaration solennelle que vous avez donnée au début de votre

 14   déposition.

 15   Monsieur Misetic, vous pouvez poursuivre.

 16   LE TÉMOIN : STJEPAN STERC [Reprise]

 17   [Le témoin répond par l'interprète]

 18   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Interrogatoire principal par M. Misetic : [Suite]

 20   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Sterc.

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  Lorsque vous étiez ministre adjoint pour la reconstruction et le

 23   développement, étiez-vous au courant des questions qui concernaient la

 24   transition pacifique de la Slavonie orientale sous contrôle gouvernemental

 25   croate entre 1996 et 1998 ?

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous étiez au courant des questions de réfugiés pour les

 28   réfugiés croates de Slavonie orientale et la situation concernant aussi les

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  1   civils serbes et les réfugiés serbes en Slavonie orientale ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Pendant le mandat de l'UNTAES qui a duré deux ans, étiez-vous au

  4   courant de ce qui se passait avec les Serbes qui vivaient en Slavonie

  5   orientale puisque c'était une région qui, à ce moment-là, passait sous le

  6   contrôle du gouvernement croate ?

  7   R.  Une partie de la population a quitté la Slavonie orientale pour

  8   s'installer en Serbie et c'est une migration qui était assez permanente,

  9   continue.

 10   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler d'une population civile serbe de

 11   Slavonie orientale qui aurait été domiciliée en Slavonie orientale en 1991,

 12   et est-ce que vous êtes au courant du pourcentage qui était domicilié en

 13   Slavonie orientale en 1996 et 1998, dans la région ?

 14   R.  C'était une partie de la population qui était -- 7,14s -- également

 15   mais je ne me souviens pas du chiffre.

 16   Q.  Monsieur Sterc, je vous propose de voir alors la pièce à conviction

 17   D419.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page 6 en version

 19   anglaise. Il n'y a qu'une version anglaise.

 20   Q.  Prenons le paragraphe 23, et je souhaite verser cela. Il s'agit du

 21   rapport de l'OSCE du 8 septembre 1998, et l'on peut lire que :

 22   "Le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations Unies estime qu'entre le

 23   mois d'août 1996 et le mois de juillet 1998, environ

 24   16 000 des 67 000 Serbes qui résidaient dans la région avant la guerre ont,

 25   à ce moment-là, quitté le pays, et la majorité d'entre eux s'étant rendu en

 26   République fédérale de Yougoslavie."

 27   Ce qui représentent un peu plus de 25 % de Serbes domiciliés en Slavonie

 28   qui ont quitté.

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  1   Alors vous étiez ministre adjoint de la reconstruction du développement et

  2   est-ce que vous pourriez nous dire ce qui a incité ces 16 000 parties à

  3   quitter la Slavonie orientale ?

  4   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne suis pas sûre si on ne devrait pas

  5   préciser la question. Je ne suis pas sûre qu'ils aient quitté sous mandat

  6   des Nations Unies.

  7   M. MISETIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Sterc, en d'autres termes, ils ont quitté alors que la

  9   Slavonie orientale était sous contrôle de l'administration des Nations

 10   Unies. Alors est-ce que vous pouvez vous comprenez la question et nous dire

 11   pourquoi 16 000 personnes ont quitté la Croatie pour la République fédérale

 12   yougoslave et comment vous comprenez cela ?

 13   R.  Je comprends cela, oui.

 14   Q.  Mais comment comprenez-vous les causes qui ont fait que 16 000

 15   personnes ont quitté la République fédérale de Yougoslavie alors que le

 16   territoire était sous administration des Nations Unies ?

 17   R.  Ma réponse est la suivante. Mme s'il y avait administration par

 18   l'UNTAES de la région de Podunavlje, il y avait tout un climat

 19   d'incertitude économique et politique, et je crois que c'était la raison

 20   principale. Je pourrais peut-être vous donner une comparaison.

 21   Les informations que nous avions à l'époque, il y avait l'administration

 22   UNTAES à Podunavlje, et à ce moment-là quelques 900 non-Serbes furent

 23   assassinés, et lorsque notre groupe de travail se réunissait, j'abordais

 24   cette question systématiquement. Je posais la question : je demandais

 25   exactement ce qui c'était passé là lorsque la Croatie n'en avait pas encore

 26   le contrôle, et l'immigration, ce genre de région, à ce moment-là, il faut

 27   s'y attendre c'est quelque chose qui est condamné à arriver.

 28   Q.  [aucune interprétation]

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, est-ce qu'on peut se

  2   mettre d'accord sur le fait que 16 000 personnes sur 67 000 c'est un peu

  3   moins de 25 %, n'est-ce pas ?

  4   M. MISETIC : [interprétation] Oui, bon, peut-être que je ne suis pas bon

  5   mathématicien --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, quatre fois 16 -- 24 -- oui.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je voudrais faire remarquer que le mandat

 10   de l'UNTAES nous dit-on en janvier 1998. Or, ce rapport porte la date du 8

 11   septembre 1998, et je ne suis pas sûre que la question et que les

 12   statistiques portant sur les gens qui ont quitté entre août 1996 et juillet

 13   1998, donc je ne suis pas sûre que la question, portant sur les gens qui

 14   ont quitté alors que le territoire était sous administration de l'ONU, soit

 15   une question qui soit tout à fait précise.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait peut-être

 17   réinterroger le témoin --

 18   M. MISETIC : [interprétation] Le mandat a pris fin en février 1998 --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Février 1998.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que ça fait une différence ?

 21   Q.  Est-ce que cela fait une différence pour le Procureur ?

 22   R.  Non. Ça ne change rien. Parce que c'est ce qui était en place, à ce

 23   moment-là, et c'est ce qui a fait cette migration des populations des

 24   territoires orientaux vers la Yougoslavie. C'est de toute façon quelque

 25   chose qui se poursuivait en continue, et qui n'était pas contesté. C'était

 26   une tendance sous-jacente quelle que soit la date d'ailleurs que l'on cite.

 27   Q.  D'accord.

 28   R.  Puis-je ajouter quelque chose ?

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  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Cette période à partir du mois d'août 1996, à l'époque quelque 18 000

  3   personnes ont quitté ce qui était avant les territoires occupées d'après

  4   nos estimations et se sont vus accueillis et relogés à Podunavlje. Donc

  5   peut-être plus probablement ce chiffre est un peu différent, c'est quelque

  6   chose d'ailleurs qui a été confirmé par la suite lorsque nous avons

  7   enregistré la population à Podunavlje. D'après les informations que nous

  8   avions, à un moment donné, quelque 138 000 documents d'identité furent émis

  9   pour toute la zone de l'UNTAES, et qui étaient principalement émis et

 10   donnés à des Serbes.

 11   Q.  Puis-je vous inviter à prendre le paragraphe 9.1 de votre déclaration.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Peut-être que la Greffière d'audience peut

 13   vous aider à trouver ce document.

 14   Q.  La Chambre a longtemps entendu parler de la reprise momentané de

 15   l'administration - bon, ça c'est repris dans votre déclaration ici - est-ce

 16   que vous étiez au courant du fait ? Au paragraphe 9.1, vous parlez de la

 17   constitution de la création d'une agence de façon à ce que les personnes

 18   puissent revendre leur propriété au gouvernement croate, leurs objets

 19   personnels au gouvernement croate, alors à l'agence du gouvernement, et

 20   j'aimerais attirer votre attention donc dans ce document.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Madame la Greffière, c'est le document de la

 22   liste 65 ter, le document 1D1561.

 23   Q.  Monsieur Sterc, ce que je vais vous montrer --

 24   M. MISETIC : [interprétation] Madame la Greffière, il n'y a pas de page --

 25   de numérotation de pages; il va falloir utiliser les documents que nous

 26   avons dans le bas de ce document, il nous faut le 1D7161.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de la page 56 de ce

 28   document.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Merci à vous, Madame.

  2   Q.  [aucune interprétation]

  3   M. MISETIC : [interprétation] Page 52 en version croate.

  4   Q.  Monsieur Sterc, est-ce que vous reconnaissez ce document comme étant le

  5   décret qui constituait cette agence pour la médiation et transactions des

  6   propriétés?

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Comme vous pouvez le voir, ce décret porte la date du 24 avril 1997;

  9   s'agit-il du décret qui constituait donc l'agence qui a à partir de ce

 10   moment-là était autorisée à revendre la propriété des Serbes qui

 11   souhaitaient vendre leur propriété pour rentrer en République croate ?

 12   R.  C'est une bonne chose que l'on puisse justement consulter ce document

 13   qui date du 23 avril où il y a finalement toutes les démarches qui doivent

 14   être entreprises et ce document-ci qui constitue l'agence, et en fait dans

 15   le groupe de travail, nous avions accepté le principe selon lequel il

 16   fallait accepter que tous rentrent chez eux, ce que nous avions proposé

 17   c'était de constituer ce genre d'agence dans chacun des pays où il y avait

 18   des personnes réfugiées ou déplacées et ces personnes venaient. C'est la

 19   raison pour laquelle en Croatie aussi ce genre d'agence fut créé.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser

 22   tout cela au dossier, je voudrais faire remarquer que nous avons ici à

 23   l'écran un document qui sont des annexes d'un rapport du gouvernement

 24   croate au parlement croate en 1998, et qui abordent le programme qui fut

 25   décidé en juin 1998 par le gouvernement croate pour le retour des réfugiés.

 26   Lorsque nous y reviendrons, je verserai ce document et ses annexes

 27   d'ailleurs au dossier parce que le programme a déjà, lui, été accepté comme

 28   pièce à conviction.

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  1   Q.  Pouvons-nous prendre dans ce document-ci, la page suivante, où nous

  2   avons l'article 3 ? Je pense qu'en version croate cela reste la même page,

  3   il faut défiler vers le bas. Ce qui m'intéresse c'est l'alinéa numéro 2.

  4   "APN a l'autorisation d'acheter ses propriétés immobilières en son nom

  5   propre et au nom de la République de Croatie. L'APN est autorisé à donner

  6   ces propriétés immobilières aux citoyens de la République de Croatie."

  7   Article 4 :

  8   "Les propriétés immobilières précisées sont considérées comme immobilières

  9   qui en fonction du droit de la reprise momentanée par l'administration des

 10   propriétés spécifiées, sont celles qui sont placées sous administration

 11   temporaire de la République de Croatie."

 12   Donc ce que nous avions ici c'était une banque foncière, finalement. Est-ce

 13   que ceci encore toujours aujourd'hui et fonctionne tel ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Dans votre déposition, vous faites référence à une déclaration de ce

 16   groupe de travail conjoint lors des procédures opérationnelles de retour.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit du document 1D1555 de la liste 65

 18   ter. Je me corrige, je veux dire le document 1D1556.

 19   Q.  Il s'agit en fait du paragraphe 13 de votre déposition.

 20   Dans votre déposition, vous faites référence au fait qu'il s'agissait d'un

 21   accord de ce groupe de travail conjoint et que des principes généraux

 22   régissant le retour avait été fixé. Il s'agissait de directives sur le

 23   retour. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendiez par cela,

 24   directives sur le retour ?

 25   R.  A l'issue de longues discussions au sein du groupe de travail, ce que

 26   nous voulions c'était signer un document et le rendre public, afin de

 27   définir les procédures de base qui devaient organiser le retour afin de

 28   montrer qu'en Croatie, la question du retour des réfugiés et des personnes

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  1   déplacées sont compris les Serbes, était une question qui avait été

  2   transférée du domaine politique vers le domaine humanitaire. Donc c'est

  3   dans ce cercle-là que tous les représentants de la communauté

  4   internationale étaient présents et aussi les représentants des Serbes. Ce

  5   qui a suscité un sentiment général de satisfaction, la publication de ce

  6   document.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Pouvons-nous prendre la dernière page de ce

  8   document ?

  9   Q.  Nous avons ici la signature de celui qui a signé ce document. C'est un

 10   document donc signé avec des membres de la communauté internationale, c'est

 11   une évidence. Alors pourquoi l'UNTAES et le Haut-commissariat aux Réfugiés

 12   des Nations Unies ?

 13   R.  Je ne sais pas vraiment comment les signataires ont été choisis entre

 14   les différents groupes qui appartenaient à ce groupe de travail. Eduardo

 15   Arboleda était à la tête de ce Haut-commissariat aux Réfugiés des Nations

 16   Unies en Croatie, et quelqu'un a remplacé M. Fischer, au nom de l'UNTAES.

 17   Mais, de toute façon, tout avait été décidé au sein du groupe de travail.

 18   En définitive, qui allait signer n'était pas vraiment ce qui était le plus

 19   important, qui allait signer au nom de la communauté internationale.

 20   Q.  Si l'on prend ce document, il semble que l'on se concentre surtout sur

 21   la Slavonie orientale. Alors c'est vrai que, dans ce document, c'est ce

 22   qu'on aborde la Slavonie orientale. Dans quelle mesure ce document a-t-il

 23   aussi eu un impact pour le retour dans les anciens territoires occupés de

 24   la République croate ?

 25   R.  C'était une des démarches entreprises pour gérer l'ensemble de la

 26   situation, parce que c'était pour mettre en œuvre le retour de tout un

 27   chacun chez soi et tel que cela avait été conçu. La participation de

 28   l'UNTAES était particulièrement importante, parce qu'il y avait là une

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  1   administration qui était préparée à accepter el principe qui était en

  2   discussion.

  3   L'administration de l'UNTAES, au nom de la communauté internationale, était

  4   très souvent faite celui qui -- celle qui était porteur de toute nouvelle

  5   initiative. Même dans d'autres documents dont nous avons déjà discuté, dont

  6   j'ai d'ailleurs oublié de dire cela, lorsqu'il s'agissait de la

  7   constitution de cette agence dont on a parlé, le premier projet avait été

  8   apporté au groupe de travail par le représentant de l'UNTAES.

  9   La chose sur laquelle je voudrais insister, c'est que lorsque ce décret a

 10   été rendu public, il y a une chose que vous devriez savoir, c'est qu'une

 11   partie de l'opinion publique pensait que la Croatie avait mis sur pied une

 12   agence d'épuration ethnique. Nous étions choqués parce que ce document, de

 13   son tout premier mot à son tout dernier mot, était le résultat d'un texte

 14   harmonisé avec toute la communauté internationale et que ce genre d'agence

 15   avait également été constitué dans d'autres pays.

 16   Q.  Vous avez anticipé ma question suivante, parce que je voulais justement

 17   voir d'abord ce que nous avions ici à l'écran.

 18   Je vous propose de prendre les quatre derniers paragraphes ici, qui

 19   sont en fait semblables à ce que nous venons de voir, à savoir dans le

 20   document précédent.

 21   Ici, on voit par exemple l'alinéa 2, je cite :

 22   "Le groupe de travail accueillit favorablement la proposition visant

 23   à créer l'agence de médiation ainsi qu'une banque foncière, une base de

 24   données de la propriété et des propriétaires, sous les auspices du

 25   ministère de la Reconstruction et du Développement."

 26   Sur la base de ce que vous venez de dire, est-ce que la mise en place

 27   de cette banque foncière ou de l'agence ? Est-ce que c'est quelque chose

 28   qui était considéré comme faisant partie de la manière dont il s'agissait

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  1   de résoudre les questions des réfugiés ?

  2   R.  Oui, plus encore, nous croyons tous que cette agence permettrait

  3   de mettre en place la logistique nécessaire aux procédures qui avaient fait

  4   l'objet d'un accord dans plusieurs documents, les procédures

  5   opérationnelles, à savoir que chaque pays devait mettre de côté des

  6   montants permettant de financer cette agence qui s'occuperait des questions

  7   liées à la propriété et aux questions foncières. Ensuite, lorsque ces biens

  8   devenaient propriété de l'Etat, ils seraient mis à la disposition de ceux

  9   qui rentraient ainsi qu'aux réfugiés.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que la

 11   pièce 65 ter 1D1556 soit marquée et versée au dossier.

 12   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Greffe.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la

 15   pièce D1609.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Versée au dossier.

 17   Veuillez continuer.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Au cours de la période qui a suivi l'opération Tempête, et au cours des

 20   années qui ont suivi, connaissez-vous des positions qui auraient été

 21   adoptées par la RSK en exil concernant la question du retour des réfugiés ?

 22   R.  Oui. Nous avons assisté à une conférence conjointe sur le retour à

 23   Banja Luka.

 24   Q.  Quelles étaient, selon vous, les positions adoptées par les

 25   responsables de la RSK en exil concernant le retour des réfugiés ?

 26   R.  Leurs représentants se sont exprimés de manière explicite, d'ailleurs

 27   les représentants de la communauté internationale avaient assisté également

 28   à la réunion, et leur position consistait à dire qu'un grand nombre de

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  1   personnes ne souhaitait pas rentrer en Croatie, ils souhaitaient une

  2   compensation pour la propriété qu'ils avaient laissée au pays.

  3   Q.  Pouvez-vous nous dire à quel moment cette conférence s'est tenue à

  4   Banja Luka ?

  5   R.  Je ne me souviens pas de la date exacte. Mais tous les représentants,

  6   ainsi que des ministres de la Croatie, de la Republika Srpska, ainsi que

  7   les représentants politiques des Serbes dans les zones occupées. Je ne me

  8   souviens pas de la date exacte, mais on en a beaucoup parlé.

  9   Q.  Vous souvenez-vous des responsables des zones anciennement occupées qui

 10   étaient présents à l'époque, qui étaient présents à la réunion ?

 11   R.  Personnellement j'ai parlé avec ceux qui s'occupaient du retour des

 12   réfugiés et de personnes déplacées, et un nom dont je me souviens c'est

 13   Sime Djodan. Il était celui qui présentait cette position lors de la

 14   conférence.

 15   Q.  Est-ce que M. Djodan a adopté des positions ou quiconque d'autre ?

 16   R.  Le nom est Djodan.

 17   Q.  Est-ce que des positions ont été présentées ou défendues par lui-même

 18   ou par quiconque d'autre concernant des retours individuels en Croatie, des

 19   demandes de retours individuels en Croatie ?

 20   R.  D'autres ont adopté des avis différents. Une position qui a été

 21   exprimée consistait à demander que des conditions s'appliquent pour le

 22   retour en Croatie, notamment ils voulaient rentrer en Croatie à condition

 23   que les autorités en place changent. Certains étaient favorables aux

 24   retours individuels, mais ceci était entouré de doutes et de craintes.

 25   Q.  Est-ce que certains s'exprimaient en faveur de retours en masse de

 26   civils serbes en Croatie ?

 27   R.  En ce qui concerne des retours en masse de civils serbes qui avaient

 28   quitté des zones occupées, nous étions tous favorables à ce que des retours

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  1   en masse ne pouvaient être organisés de cette façon-là. Les représentants

  2   de la Croatie, la communauté internationale, ainsi que les Serbes, tous

  3   étaient d'accord là-dessus.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais montrer au

  5   témoin un document et je demande la permission de le rajouter à la liste 65

  6   ter. Il s'agit de la pièce 1D2778.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous des objections à ce que cette

  8   pièce soit ajoutée, Madame Gustafson ?

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez le faire.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Je demande donc la pièce 65 ter 1D2778, s'il

 12   vous plaît.

 13   Q.  En attendant que le document nous parvienne, pouvez-vous nous expliquer

 14   pourquoi des retours en masse n'étaient pas possibles, ou pourquoi vous

 15   n'étiez pas favorable à ce qu'il y ait des retours en masse ?

 16   R.  Des retours en masse ne pouvaient s'organiser pour une foule de

 17   raisons, non pas seulement dans le cas de la Croatie mais ailleurs

 18   également. Les représentants de la communauté internationale nous avaient

 19   dit que dans des contextes similaires il n'y avait jamais eu de retours en

 20   masse. Le retour devait être bien planifié, organisé, et sûr, et il était

 21   nécessaire qu'un certain nombre de conditions soient satisfaites afin qu'un

 22   tel retour soit possible, telles que la reconstruction, un financement, la

 23   mise en place d'organisations, et cetera.

 24   Q.  D'accord.

 25   M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant -- ce document c'est le

 26   rapport de Banja Luka de l'AIM, à la page 2 en bas de la version anglaise.

 27   C'est également la page 2 en version B/C/S. Dernier alinéa.

 28   Q.  Il s'agit d'une déclaration de M. Milan Babic, qui le cite comme suit :

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  1   "Je ne suis pas favorable à des solutions individuelles au problème du

  2   retour puisque cela signifierait" --

  3   M. MISETIC : [interprétation] Puis il faut passer à la page suivante en

  4   anglais, s'il vous plaît.

  5   Q.  "…cela signifierait la croatisation des Serbes de retour, ce qui

  6   mettrait en danger les droits collectifs des réfugiés et rendrait confus le

  7   problème des Serbes en exil. Je suis favorable à un retour collectif, à la

  8   sécurité collective ainsi que des droits collectifs des Serbes, ce qui

  9   implique la résolution de leur statut politique. Puisque les Serbes de

 10   Krajina" - continue le Dr Babic - "ont un droit politique au territoire de

 11   la Krajina. Si le comité de Borislav Mikelic aborde la question de la

 12   résolution du retour des réfugiés serbes de cette façon, il n'y aura pas de

 13   conflit entre nous."

 14   Le Dr Babic continue en disant que :

 15   "Le gouvernement de la Krajina fonctionne en exil et qu'une

 16   Commission spéciale a été mise en place afin de s'occuper des questions du

 17   statut et des droits des réfugiés, de la coopération avec différentes

 18   organisations et institutions, donc pourquoi pas Mikelic également."

 19   Connaissez-vous cet avis qui avait été exprimé par M. Babic ou quiconque

 20   d'autre parmi les leaders serbes au sein de la Commission spéciale mise en

 21   place par le gouvernement de la Krajina dans le but de permettre le retour

 22   des serbes exilés -- ou réfugiés ?

 23   R.  Je n'ai jamais parlé à ces personnes, mais on pouvait lire leurs

 24   déclarations dans les journaux, et ces positions nous avaient été relayées

 25   également par les représentants de la communauté internationale.

 26   Q.  Où est-ce que -- comment les représentants de la communauté

 27   internationale vous relayaient ces avis ? Sous quelle forme avez-vous vu

 28   ces déclarations ?

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  1   R.  A l'époque, j'étais député ministre chargé de la reconstruction net du

  2   développement, si c'est cela que vous voulez savoir.

  3   Q.  Je pensais plutôt au contexte; est-ce que vous aviez des conversations

  4   avec la communauté internationale sur la question ?

  5   R.  Oui, bien sûr, c'était dans le contexte de nos discussions sur le

  6   modèle de retour que nous devions mettre en place. Etant donné que les

  7   retours individuels ont posé des problèmes, étant donné la situation sur le

  8   terrain, nous savions tous qu'un retour collectif était pour ainsi dire

  9   impossible, donc la seule solution qui nous restait c'était un retour

 10   planifié de chacun à leurs foyers respectifs dans le cadre des accords

 11   agréés.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser au

 13   dossier la pièce 1D2778.

 14   Mme GUSTAFSON : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le greffe.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1610.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1610 est versée au dossier.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut encore demander, s'il

 19   vous plaît, la pièce 1D1561, s'il vous plaît, de la liste 65 ter ? Je

 20   voudrais voir la page 1D71-7166, s'il vous plaît.

 21   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je crois que c'est la page 61 dans la

 22   version anglaise, si cela peut vous aider.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Merci. Il s'agit de la page 56 en B/C/S.

 24   Q.  Il s'agit d'un document en date du 2 octobre 1997, c'est le programme

 25   du gouvernement de la République de Croatie sur la mise en place de la

 26   confiance, le retour accéléré, ainsi que la normalisation des conditions de

 27   vie dans les zones affectées par la guerre en République de Croatie.

 28   Connaissiez-vous ce document dans le cadre de votre fonction de député

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  1   ministre ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Au troisième alinéa, vous avez un considérant qui dit - c'est le

  4   troisième considérant - que :

  5   "Au cours de la guerre un langage inapproprié a été utilisé dans des

  6   domaines publics et privés afin de généraliser un sentiment de culpabilité

  7   et de renforcer les sentiments de haine et de division."

  8   M. MISETIC : [interprétation] Puis un peu plus bas, le septième alinéa.

  9   Puis je demande que l'on passe à la page suivante en B/C/S, s'il vous plaît

 10   : 

 11   Q.  "Considérant que le gouvernement de la République de Croatie souhaite

 12   promouvoir un mode de vie permettant le pardon, la tolérance, la

 13   coexistence ainsi, ainsi que des droits égaux de l'ensemble de ses citoyens

 14   représentant le fondement du progrès et du développement."

 15   Plus loin, on dit :

 16   "De nombreux citoyens ont participé à la rébellion armée contre la

 17   République de Croatie, ont demandé et se sont vu accorder des documents

 18   croates, et que par ce fait ont accepté l'ensemble des droits et des

 19   obligations qui découlent de la citoyenneté croate, y compris le respect

 20   pour et la défense de l'intégrité territoriale ainsi que la souveraineté de

 21   la Croatie, et qu'ils ont accepté la République de Croatie comme leur

 22   patrie et ont exprimé le souhait de se voir inclus dans la vie politique,

 23   économique et sociale, ainsi participant à sa prospérité."

 24   M. MISETIC : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

 25   Q.  Puis on a le paragraphe qui commence :

 26   "Considérant que la restauration de la confiance entre l'ensemble des

 27   citoyens est d'intérêt vital pour le développement de la République de la

 28   Croatie en tant qu'Etat et en tant que membre respecté de la communauté

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  1   internationale.

  2   "Considérant qu'il est anticonstitutionnel de distinguer entre les

  3   anciennes parties au conflit sur la base de l'origine ethnique, ce qui a

  4   pour résultat de souligner la culpabilité collective et ignore la

  5   responsabilité individuelle pour les crimes, ainsi que le rôle positif des

  6   membres des différentes communautés ethniques au cours des hostilités."

  7   M. MISETIC : [interprétation] Je demande que l'on passe maintenant à la

  8   page --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.

 10   M. MISETIC : [interprétation]

 11   Q.  Puis le texte continue en disant :

 12   "Le gouvernement de la République de Croatie adopte un programme sur le

 13   rétablissement de la confiance, le retour accéléré, et la normalisation des

 14   conditions de vie dans les zones affectées par la guerre en République de

 15   Croatie."

 16   Puis le texte définit un certain nombre d'objectifs en bas de la page, à

 17   savoir créer un climat général de tolérance et de sécurité; l'égalité de

 18   l'ensemble des citoyens vis-à-vis de l'administration de l'Etat.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

 20   Q.  La mise en place de la confiance entre l'ensemble des citoyens, et

 21   cetera.

 22   Puis le texte continue sous la rubrique : "Organisation," et je cite :

 23   "Le gouvernement de la République de Croatie mettra en place un comité

 24   national permettant le monitoring et la réalisation du programme. Puis il y

 25   a les domaines de compétence."

 26   Je ne vais pas en donner toute la liste, mais c'est assez complet

 27   avec des aspects politiques, juridiques, administratifs, affaires internes,

 28   les aspects économiques, sociaux, culturels, la reconstruction du système

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  1   éducatif, le retour, les médias, enfin l'ensemble des domaines du programme

  2   sont cités.

  3   On peut passer à la troisième page, au paragraphe 6, intitulé :

  4   "Média," je cite :

  5   "Etant donné l'importance des médias dans une société démocratique, le

  6   gouvernement recommande que les médias oeuvrent en faveur de l'égalité de

  7   l'ensemble des citoyens, car le besoin de coexistence dans une ambiance de

  8   tolérance et le seul mode de vie acceptable en démocratie les médias

  9   doivent également promouvoir les droits des citoyens qui découlent du

 10   système juridique de la République de Croatie et que les médias doivent

 11   promouvoir une atmosphère de tolérance et de résistance, de respect des

 12   droits humains et le dialogue pour la résolution des conflits."

 13   Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez nous expliquer quels étaient les

 14   objectifs de ce programme ? De quoi s'agit-il ?

 15   R.  Après l'ensemble des documents, les discussions, les négociations qui

 16   avaient eu lieu, nous savions tous qu'en fin de compte il fallait mettre

 17   fin à tout cela par un programme compréhensif de retour. Nous devions

 18   consacrer beaucoup d'efforts, beaucoup de temps à la mise en place d'un tel

 19   programme et bien souvent les représentants de la communauté internationale

 20   n'avaient pas confiance que l'on pourrait adopter ces documents et nous

 21   avons répété à plusieurs reprises que c'était notre intention et notre

 22   souhait de le faire.

 23   Après nous avons commencé à entendre des déclarations conjointes de la

 24   communauté internationale, des représentants du gouvernement croate ainsi

 25   que des représentants des Serbes dans les territoires occupés qui avaient

 26   quitté la Croatie. En tant que président du groupe de travail, c'est ce que

 27   j'avais demandé dès le début, puisque je savais que ce n'était qu'à l'aide

 28   de telles déclarations publiques, ce n'était -- c'était le seul moyen de

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  1   mettre en place la confiance de part et d'autre.

  2   Après l'adoption de ce programme, tout le monde était soulagé. Je parle là

  3   des représentants politiques mais pour nous qui avions travaillé sur la

  4   question, nous savions que la tâche ne faisait que commencer.

  5   Q.  Comme je l'avais dit, Monsieur Sterc, à la Chambre, il s'agit ici

  6   d'annexes au programme de 1998, et puisqu'on a le document à l'écran,

  7   j'aimerais attirer l'attention à quelques paragraphes puis on pourra le

  8   verser au dossier.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Je demande la page 1D71-7173, s'il vous

 10   plaît, 1D71-7173, s'il vous plaît. Tout en bas de ce document, s'il vous

 11   plaît.

 12   Q.  Monsieur Sterc, vous avez à l'annexe 6 de ce document une annexe qui

 13   s'intitule programme pour les utilisateurs de propriété sous administration

 14   provisoire à la République de Croatie.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Puis on passe à la page suivante, s'il vous

 16   plaît.

 17   Q.  Propriétés qui doivent être rendues aux propriétaires. Puis on a

 18   quelque chose à propos du droit constitutionnel de Croatie. Et un passage

 19   après décision de la cour constitutionnelle, et cetera.

 20   Vous souvenez-vous que cette interprétation de la Cour constitutionnelle

 21   figure à l'annexe du programme qui a été adopté en juin 1998 ?

 22   R.  Oui.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Je demande au greffe de passer à la page

 24   1D71-7154 du même document, s'il vous plaît.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est la page 49.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

 27   C'est la page 49 dans le document en croate. Non c'est 49 en anglais.

 28   Q.  Nous attendons l'affichage et dans l'intervalle j'ai peut-être une

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  1   question à vous poser.

  2   [Le conseil de la Défense se concerte]

  3   M. MISETIC : [interprétation] C'est la page 46 en croate.

  4   Q.  Donc il s'agit de l'accord du groupe de travail conjoint sur les

  5   procédures opérationnelles permettant le retour.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Pourrions-nous avoir la page suivante en

  7   anglais.

  8   Q.  Mais vous faites partie de ce groupe de travail. Voici sous le

  9   chapitre, "Principes directifs," aux paragraphes 4 et 5, on parle de la

 10   mise en place de cette banque foncière. Ensuite il est écrit que :

 11   "Le gouvernement croate, l'UNTAES et le HCR vont chercher à obtenir des

 12   financements internationaux supplémentaires pour la mise en œuvre des

 13   mécanismes décrits lorsqu'ils seront établis."

 14   Savez-vous si, oui ou non, cette banque foncière a bel et bien reçu des

 15   financements afin que les maisons des Serbes qui ne souhaitaient pas

 16   rentrer puissent être achetées par le gouvernement croate ?

 17   R.  Oui, nous avons demandé l'aide des internationaux et nous avons demandé

 18   aussi qu'il y ait une conférence sur la reconstruction en Croatie.

 19   Q.  Mais y a-t-il eu un financement -- cette banque foncière a-t-elle reçu

 20   un financement ?

 21   R.  Non.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Maintenant j'aimerais, s'il vous plaît,

 23   demander le versement au dossier de la pièce 65 ter 1D1561 qui est le

 24   rapport du gouvernement croate sur le programme portant sur le retour des

 25   réfugiés ainsi que toutes ces annexes. Le programme en soi a déjà été versé

 26   précédemment au cours de ce procès sous la cote D428.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des objections ?

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, pas d'objection. Pour qu'il n'y ait

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  1   pas de confusion ultérieure, je tiens à dire que la pièce en annexe numéro

  2   3 est exactement le même document que celui qui a été versé au dossier sous

  3   la cote D1609.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc nous avons déjà une cote; ce

  5   serait plus simple de garder la cote précédente qui permettra de mieux

  6   suivre le compte rendu.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Tout à fait.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le rapport du gouvernement croate,

  9   portant sur le retour des réfugiés et toutes ces annexes, visiblement ont

 10   déjà été versées au dossier. La pièce qui manque qui reste à verser serait

 11   donc -- était -- a déjà été versée, donc ça été versé mais sans les

 12   annexes.

 13   Maintenant, nous allons avoir le document entier versé avec ces annexes.

 14   Pourrions-nous avoir une cote.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela sera -- recevra la cote D1611,

 16   Monsieur le Président.

 17    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, cette pièce est versée au

 18   dossier. 

 19   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Pouvons-nous avoir la pièce D428 à l'écran.

 21   La pièce D428 est le programme en tant que tel, la pièce D1611

 22   reprendre en fait ce rapport envoyé par le gouvernement croate au parlement

 23   pour qu'il y ait discussion sur ce programme. Donc D428, c'est le rapport

 24   en tant que tel et le D1611, c'est le rapport avec les annexes.

 25   Q.  Monsieur Sterc, donc ceci est le programme de retour et de soins

 26   apportés aux personnes qui ont été chassées, aux réfugiés, aux personnes

 27   déplacées.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, aller

Page 20329

  1   à la page 5 -- le paragraphe 5. En croate, c'est le paragraphe qui sert de

  2   préambule, donc il faudrait remonter dans le document croate pour trouver

  3   le paragraphe qui nous intéresse, c'est la page précédente en fait en

  4   croate.

  5   Q.  Il est écrit :

  6   "En ce qui concerne, ce qui mentionné ci-dessus, le gouvernement a

  7   donné les détails du programme suivant, en coopération avec le HCR qui joue

  8   un rôle important pour trouver une solution au problème des réfugiés, ce

  9   programme bénéficie aussi du soutien de l'OCDE."

 10   Alors, là, il y a une erreur, ça ne devrait pas être "l'OCDE," mais

 11   "l'OSCE."

 12   R.  En effet, c'est l'OSCE et certainement pas l'OCDE.

 13   Q.  Donc ce programme a été préparé avec l'aide de l'HCR et l'OSCE; c'est

 14   bien cela ?

 15   R.  Ce programme faisait au départ plus de 100 pages, c'est moi qui l'ai

 16   écrit moi-même, à la main, bien sûr, avec l'aide de mes équipes. C'est la

 17   version que nous avons présentée au HCR et à l'OSCE afin d'obtenir leur

 18   approbation.

 19   Q.  Avez-vous obtenu leur approbation ?

 20   R.  Oui. Le but de ce point numéro 5 est le suivant.

 21   Une fois que nous sommes mis d'accord sur les principes qui étaient que

 22   chaque personne devait rentrer dans sa propre maison qu'il avait au départ,

 23   en ce qui concerne, bien sûr, le retour des Croates en Bosnie-Herzégovine,

 24   au Kosovo et au Macédoine, il nous fallait l'aide du HCR. C'est pour cela

 25   que nous avons abordé ce point dans ce paragraphe 5.

 26   Q.  Si nous passons maintenant aux remarques liminaires, au paragraphe 4,

 27   il est écrit que :

 28   "Le gouvernement de Croatie a nommé une commission comprenant,

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  1   premièrement le vice-ministre pour le développement et de la restauration,

  2   président de la commission."

  3   De qui s'agit-il, s'il vous plaît ?

  4   R.  C'est moi.

  5   Q.  Très bien.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Passons à la page suivante en anglais.

  7   Q.  Donc à la fin de la liste des membres de la commission, il est écrit

  8   ensuite :

  9   "Après avoir énuméré tous les membres de la commission, que le but de

 10   la commission est de développer et de surveiller la mise en place d'un

 11   programme en coopération avec le HCR. La commission se rencontrera de façon

 12   régulière deux fois par mois, ou plus fréquemment si les circonstances

 13   l'exigent."

 14   Paragraphe 5 ensuite :

 15   "Les commissions prévues à la disposition numéro 4 devront proposer un

 16   gouvernement un co-président qui traitera directement des problèmes de

 17   retour et traitera aussi avec les représentants de la communauté

 18   internationale. Les commissions de l'article 11, les donateurs, les ONG,

 19   tous ces éléments ensemble représentent le comité de coordination

 20   surveillant les retours."

 21   Donc ce programme a-t-il bel et bien réalisé ? A-t-il bien eu une

 22   commission qui a été formée ? Avez-vous véritablement surveillé la mise en

 23   œuvre de tout cela avec les représentants de la communauté internationale ?

 24   R.  Oui, on s'est rencontré, on a parlé même des fréquences bien

 25   supérieures à ce qui est écrit ici.

 26   Q.  Au paragraphe 14 de votre déclaration, vous dites que ce document est

 27   le document le plus important du groupe de travail. Il est écrit :

 28   "Ce programme a été mis en œuvre jusqu'à aujourd'hui, est encore mis

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  1   en œuvre avec quelques modifications mineures."

  2   Donc à votre connaissance, ce programme est-il encore en vigueur en

  3   République de Croatie ?

  4   R.  Il me semble que oui.

  5   Q.  Vous êtes ensuite devenu vice-ministre de la Défense au sein du

  6   gouvernement Racan. Donc j'aimerais savoir s'il y a eu des modifications

  7   apportées au programme, à ce programme lorsqu'il y a eu transfèrement de

  8   pouvoir depuis le gouvernement de Tudjman jusqu'au gouvernement de Racan ?

  9   R.  Lorsque j'étais muté au ministère de la Défense, au sein du nouveau

 10   gouvernement de feu M. Racan, je ne me suis plus occupé de ce point de

 11   retour. Cela dit qu'un grand nombre de mes anciens collaborateurs ont

 12   conservé leur poste. Je suis resté en contact avec eux, ils m'ont tous dit

 13   que le programme était toujours en vigueur, toujours mis en œuvre et que le

 14   processus que nous avions mis sur pied ensemble, se poursuivait au même

 15   rythme et sans grand changement. Donc le processus était enclenché, le

 16   processus s'est poursuivi, pratiquement sur la même forme que celle qu'il

 17   avait, lorsque tout a commencé.

 18   Q.  Monsieur Sterc, pouvez-vous nous faire part d'expérience personnelle

 19   que vous auriez eue sur le terrain à propos de retour de réfugiés serbes ?

 20   Pourriez-vous nous expliquer ce que vous avez vécu dans ce domaine ?

 21   R.  Oui, je suis très reconnaissant que vous me posiez cette question. Si

 22   je puis, j'aimerais vraiment vous faire part de mon expérience. C'était une

 23   période difficile et ces problèmes étaient cruciaux et difficiles en

 24   Croatie.

 25   Tous ceux d'entre nous qui travaillions, nous travaillions sans

 26   relâche à cette tâche. Des journées de ferveur. Nous faisons des tournées à

 27   toutes les municipalités, nous devions traiter des conflits qui

 28   surgissaient sans cesse.

Page 20332

  1   J'aimerais vous faire part d'une expérience personnelle en ce qui

  2   concerne et de mon opinion personnelle en ce qui concerne la communauté

  3   internationale. Moi, je pensais que nous faisions le même travail, qu'il

  4   fallait que nous travaillions ensemble pour résoudre tous les problèmes qui

  5   surgissaient sur le terrain. Je pensais que le retour des Serbes n'était

  6   pas le seul intérêt, la seule chose qui nous réunissait, et qu'il nous

  7   fallait apparaître ensemble en public --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, j'avais l'impression que

  9   nous allons --

 10   M. MISETIC : [interprétation] Je crois que nous allons très certainement --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, j'ai l'impression que

 12   vous voulez savoir un peu ce que nous pouvons -- vous voulez que le témoin

 13   nous parle ce que nous trouvons à la fin du paragraphe C de la déclaration.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Tout à fait.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Or, je pense qu'il n'a pas compris votre

 16   question de cette façon-là.

 17   Dans votre déclaration, Monsieur Sterc, vous dites que vous vous êtes

 18   personnellement rendu sur le terrain avec la police, et cetera. Je crois

 19   que c'est de cela que Me Misetic voudrait que vous nous parliez.

 20   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où vous êtes-vous rendu, qu'avez-vous

 22   vu, et cetera, et cetera ?

 23   M. MISETIC : [interprétation] Tout à fait.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'allais y venir.

 25   Les retours individuels, peu de temps après la libération de la Croatie,

 26   ont provoqué des tensions intenses sur le terrain, et de ce fait, la

 27   Croatie était en but aux accusations de la communauté internationale. Je

 28   vous donne un exemple : une famille qui rentrerait en banovina, et

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  1   retournait en banovina, accord -- qui avait fait l'objet d'un retour -- qui

  2   avait fait l'objet d'un accord entre la communauté internationale et nous-

  3   mêmes, on ne pouvait pas quand même s'attendre à ce que, simultanément, 500

  4   à 600 manifestants se massent autour de la maison de ces candidats au

  5   retour. Des gens qui manifestaient contre le retour de cette famille, des

  6   Croates locaux, les Croates du cru, dont les maisons aux alentours avaient

  7   été saccagées, bien sûr, il nous fallait intervenir, il nous a fallu

  8   intervenir avec la police pour protéger la famille, et d'ailleurs, moi-

  9   même, j'ai passé 24 heures sur place. C'est ainsi que nous travaillions;

 10   c'était notre mode de travail pour créer un climat propice au retour des

 11   réfugiés et des déplacées, en essayant de faire tomber tous les problèmes

 12   psychologiques qui pourraient avoir lieu sur le terrain.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous avez passé 24 heures

 14   sur le terrain. Donnez-nous des précisions : quels villages, le nom de la

 15   famille, et cetera ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je ne peux pas

 17   vous aider. Je ne m'en souviens pas; c'était en banovina, mais je ne peux

 18   pas vous donner le nom exact de villages.

 19   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas grave. Ça peut être vérifié. Ça

 21   peut être retrouvé. D'ailleurs, ça fait l'objet de rapport dans les

 22   journaux.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous eu d'autres expériences

 24   identiques, des expériences où vous seriez rendu dans des endroits où il y

 25   avait des manifestations parce qu'une famille voulait rentrer pour

 26   réoccuper sa maison ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je suis aussi allé rencontrer les Serbes.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Je vous demande si vous avez vécu

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  1   d'autres expériences similaires. Bon, lorsque c'est arrivé en banovina,

  2   pouvez-vous au moins nous donner la date ? Cet exemple en banovina. Je ne

  3   vous demande pas une date exacte mais au moins le mois, le mois et l'année

  4   pour qu'on puisse resituer un peu les choses.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] En banovina, je pense que c'était au milieu de

  6   l'année 1996.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les autres occasions, si tant est qu'il

  8   y en a eu, où vous vous êtes rendu personnellement sur les lieux pour

  9   surveiller un peu ce qui se passait et pour voir quels étaient les

 10   problèmes provoqués par le retour soit d'une petite communauté soit d'une

 11   famille soit même d'individu ? Vous avez des exemples, d'autres exemples de

 12   ce type à nous donner ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Après l'incident dont je vous ai parlé à

 14   banovina, je crois que c'était à l'été 1996. J'ai demandé aux membres de la

 15   communauté internationale de m'accompagner dans mes visites de ce type afin

 16   de pouvoir émettre un message conjoint aux deux camps. Entre autres, aux

 17   personnes qui étaient à l'origine de cette manifestation de tensions. Nous

 18   sommes allés à Kuruzari, par exemple, en banovina nous y sommes allés je

 19   pense à la fin 1996, peut-être au début 1997. D'après les rapports

 20   internationaux, une famille serbe avait été passée à tabac.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet événement qui a eu lieu à l'été 1996

 22   en banovina, j'aimerais si vous savez : quel est le sort de cette famille

 23   qui avait essayé de revenir ? Est-ce qu'elle est finalement restée sur

 24   place ? Savez-vous ce qu'il leur ait arrivé ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas exactement ce qu'il leur ait

 26   arrivé, mais une source de la communauté internationale m'a fait savoir que

 27   finalement la famille est rentée en Serbie.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc dois-je -- quelle est la conclusion

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  1   que je dois en tirer parce qu'il n'était pas protégé, ce n'était pas

  2   efficace, ou pourquoi sont-ils rentrés en Serbie ? Y avait-il d'autres

  3   raisons qui ont motivé leur retour ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous leur avons offert une protection

  5   maximum nous avions décidé de le faire de leur fournir une protection de

  6   police, mais visiblement c'était trop de stress, ils ont décidé de rentrer

  7   en Serbie et d'attendre des jours meilleurs pour un retour chez eux.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre réponse précédente était la

  9   suivante :

 10   "Je ne sais pas exactement ce qu'il leur ait arrivé, mais j'ai eu une

 11   source de la communauté internationale m'a informé qu'ils étaient rentrés

 12   en Serbie."

 13   Donc visiblement, au vu de ce que vous venez de nous dire, vous savez

 14   pourquoi ils sont rentrés. Ils sont rentrés parce qu'ils étaient trop

 15   stressés, c'est pour ça qu'ils ont retourné en Serbie finalement. Pourriez-

 16   vous nous donner plus de détails ? J'aimerais savoir : combien de temps ils

 17   ont essayé de rester dans leur ancienne maison ? J'aimerais savoir :

 18   combien de -- quel est le type de protection policière ils ont obtenue ?

 19   Pourriez-vous nous donner quelque détail expliquant ce fameux stress qu'ils

 20   auraient enduré ?

 21   D'abord, la protection policière, est-ce que vous savez quel était le

 22   nombre de policiers affectés à leur sécurité ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'ai vu, puisque je me suis

 24   entretenu personnellement avec eux, et j'ai visité personnellement leur

 25   propre maison, ils avaient l'air assez effrayé quand même. Deux ou trois

 26   policiers montaient la garde 24 heures sur 24, et lorsque les manifestants

 27   ont été dispersés, le HCR a rejoint nos rangs pour essayer de nous aider à

 28   trouver une solution, on s'est rendu compte alors qu'il était complètement

Page 20336

  1   illogique d'assurer une protection 24 heures sur 24 à une seule famille

  2   étant donné que nous -- que le but du programme était un retour massif.

  3   Nous sommes rendus compte donc que le problème des retours devait être

  4   abordé de façon publique et pour que les solutions soient ensuite traduites

  5   sur le terrain.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. J'ai lu votre déclaration et

  7   :

  8   "Personnellement, je ne me suis pas seulement rendu sur le terrain

  9   avec la police pour -- et j'ai aidé à assurer la sécurité de ces premières

 10   personnes qui étaient revenues."

 11   Donc si j'ai bien compris votre témoignage en revanche, vous dites que vous

 12   êtes personnellement rendu sur le terrain mais vous n'avez pas réussi à

 13   créer un climat propice au retour -- au séjour définitif de cette famille

 14   en tout cas. C'est un peu différent quand même.

 15   Dans votre déposition, vous dites un peu des choses différentes de ce que

 16   vous avez dans votre déclaration.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais nous avons échoué à créer ces conditions.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous dites que vous avez assuré la

 19   sécurité de ces premières familles qui souhaitaient rentrer, c'est-à-dire

 20   que vous mettre -- dites dans votre déclaration ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, je pose toutes ces

 23   questions parce que les réponses du témoin sont trop abstraites; maintenant

 24   bon la Chambre de première instance est au courant de projets, de

 25   développements, de rapports, d'évolution de choses, mais elle aimerait

 26   quand même être mise au courant des conséquences même de ce programme et

 27   des faits qui ont pu en découler.

 28   Veuillez poursuivre.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je tiens à vous dire que l'incident auquel

  2   vous faites référence a eu lieu deux ans avant la mise en œuvre du plan.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Je me rends bien compte. Cela

  4   dit, les réponses que l'on trouve dans la déclaration sont extrêmement

  5   abstraites. Il est écrit nous avons assuré la sécurité de ces premières

  6   familles. Bon, quand on va un peu plus loin, on se rend compte dans la

  7   déposition du témoin que finalement un climat de confiance n'a pas été

  8   restauré et donc la famille n'a pas pu rester finalement. C'est le risque

  9   que l'on coure lorsqu'on reste trop abstrait et il vaut mieux s'en tenir

 10   aux faits.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais je voulais le lancer sur le sujet

 12   et ensuite j'allais lui poser des questions pour avoir les détails, pour

 13   savoir : combien de temps par exemple il avait, il était resté avec cette

 14   famille, ou bien combien de temps la police avait assuré la garde auprès de

 15   cette famille ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, on pourrait lui avoir posé tout de

 17   suite. 

 18   Monsieur Sterc, pourriez-vous nous dire combien de temps la police a monté

 19   la garde auprès de la maison de cette famille serbe ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient en dehors de la maison. Ils sont

 21   restés une semaine à mon avis, enfin je pense une semaine.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette famille serbe, combien de temps

 23   est-elle restée sur place après votre visite avant qu'elle ne décide

 24   finalement de rebrousser chemin de rentrer en Serbie ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] J'imagine qu'ils ont décidé de rentrer en

 26   Serbie lorsqu'ils se sont dits qu'ils ne pouvaient plus supporter le stress

 27   de la protection 24 heures sur 24, le fait de toutes ces pressions exercées

 28   sur eux par leurs voisins, et on a appris cela par le HCR.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais combien de temps ? Un mois,

  2   une semaine.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, une semaine. Ils sont restés une semaine.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ils ont eu une présence policière

  5   pendant une semaine mais au bout d'une semaine, ils ont décidé de rentrer

  6   en Serbie; c'est bien cela ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Puis-je poser des questions supplémentaires

  9   pour clarifier ce point.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 11   M. MISETIC : [interprétation]

 12   Q.  J'aimerais savoir : si cette famille serbe est-elle rentrée en Serbie

 13   parce que la police avait -- ne montait plus la garde auprès de leur

 14   domicile ?

 15   R.  Non, absolument pas.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. MISETIC : [interprétation] Puis-je passer à autre chose ?

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, j'aimerais que nous poursuivions un

 19   peu ce type de questions.

 20   Comment savez-vous, Monsieur le Témoin, que la police était encore là ?

 21   Vous avez dit il y a peu de temps que finalement vous êtes rendu compte que

 22   ça ne servait à rien de mettre une escouade de police auprès de chaque

 23   maison de réfugiés revenant chez lui; donc que s'est-il passé donc ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, on ne se comprend pas. On ne se comprend

 25   pas.

 26   La police avait reçu des ordres qui étaient de monter la garde auprès de la

 27   famille 24 heures sur 24, et cette garde policière a été retirée, une fois

 28   la famille ayant décidé de rentrer en Serbie.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais comment avez-vous appris que cette

  2   famille avait décidé de rentrer en Serbie ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le HCR qui nous en a informés.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On n'a pas essayé de les convaincre

  5   qu'il fallait essayer de rester, cela valait le coût.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Si, bien sûr. Le HCR nous a tenu au courant de

  7   l'évolution de la situation puisque c'était eux qui étaient en pourparlers

  8   avec la famille de façon régulière.

  9   Nous, nous étions là pour nous entretenir plutôt avec les voisins, pour

 10   essayer de convaincre les voisins que le retour des réfugiés était normal,

 11   qu'il fallait l'accepter pour les rassurer aussi.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais lorsque vous avez appris que

 13   cette famille voulait rentrer, qu'avez-vous fait, donc rentrer en Serbie,

 14   qu'avez-vous fait ? Est-ce que vous êtes revenu sur place ? Est-ce que vous

 15   avez demandé à ce que l'on parle aux voisins ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, bien sûr. D'après nous, il fallait

 17   surtout parler aux voisins pour qu'à l'avenir, il n'y ait plus de

 18   manifestations lorsque le HCR ou le gouvernement croate prendrait une

 19   décision à propos d'un autre retour d'une autre famille.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que nous pensions que la

 21   chose la plus importante était de faire ceci. Bon, vous l'avez su, mais

 22   est-ce que vous l'avez vraiment fait ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons discuté avec les habitants.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand l'avez-vous fait ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, personnellement, j'ai discuté avec les

 26   habitants de la région le lendemain du jour où cette manifestation avait

 27   commencé. C'était en l'occurrence des gens qui ne pouvaient pas rentrer

 28   chez eux -- enfin, des gens du -- d'après le ministère pour la

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  1   reconstruction et le développement, et il fallait vraiment essayer de les

  2   convaincre et c'était dur, que leurs maisons seraient reconstruites et nous

  3   avons pensé que si on allait très souvent sur place, nous et le Haut-

  4   commissariat aux réfugiés sur le terrain --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question était la chose suivante :

  6   qu'est-ce que vous avez fait quand vous avez reçu le message selon lequel

  7   la famille avait décidé de quitter ? D'après ce que j'ai compris, une

  8   semaine après que la police ait commencé cette garde.

  9   Bon, dans votre réponse, vous me parlez du moment où vous êtes retourné sur

 10   place. Mais ce n'est pas ça que je vous ai demandé. Je vous ai demandé : ce

 11   que vous avez fait lorsque le message vous était parvenu ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Mes excuses, je n'avais pas compris la

 13   question au départ.

 14   En fait ce que nous avons fait, nous avons rassemblé le groupe de travail

 15   et c'était une question que nous avons mise à l'ordre du jour et on a

 16   envisagé et discuté des solutions éventuelles.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Est-ce qu'il y a un PV de cette

 18   réunion du groupe de travail où l'on pourrait retrouver tout cela ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Le groupe de travail en effet avait des PV; en

 20   toute franchise, moi, personnellement quand j'ai voulu vérifier tout cela,

 21   je n'ai pas réussi à mettre la main dessus.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui les garde ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Les PV étaient normalement conservés par un

 24   des employés dans mon département, dans mon bureau au ministère.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y avait-il une raison pour laquelle vous

 26   n'avez pas retrouvé ces PV ? Est-ce qu'on vous avait dit ? Est-ce que vous

 27   a répondu qu'on ne pouvait plus les trouver, qu'ils n'existaient plus, que

 28   tout simplement il n'était pas autorisé y avoir accès ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Le ministère pour la Reconstruction et le

  2   Développement, et tout particulièrement le département, ou en l'occurrence,

  3   mon département, a déménagé à quatre reprises depuis que j'ai quitté, et

  4   dans ce déménagement, tous les documents étaient mélangés.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand avez-vous demandé avoir accès à

  6   ces documents récemment ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas récemment. J'imagine en début d'année, je

  8   pense.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Revenons à la situation de cette famille

 10   qui avait décidé qu'elle ne pouvait plus rester, qu'avez-vous fait pour la

 11   famille, mis à part prévoir et organiser une réunion du groupe de travail ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce groupe de travail, nous avions décidé

 13   de présenter nos excuses à cette famille au nom du gouvernement croate, ce

 14   que nous avons fait. Et nous leur avons proposé un logement, dans des

 15   conditions plus sûres. Et dans ce cas bien spécifique, en fait, cette

 16   proposition a été refusée.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des documents qui peuvent

 18   confirmer cette proposition ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Tout cela était abordé lors des

 20   réunions du groupe de travail.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la famille ne participait pas à ces

 22   réunions du groupe de travail, ou bien est-ce qu'elles y participaient ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, elles n'y participaient pas.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment est-ce que cette proposition

 25   alors a été transmise à la famille ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] D'habitude, ce que nous faisions c'était

 27   transmettre cette proposition au commissariat pour les réfugiés de l'ONU,

 28   qui à son tour transmettait la proposition à la famille.

Page 20343

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-ci, c'est ce que vous avez

  2   fait également ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez du type de

  5   logement qui avait été proposé à cette famille ? Quel genre de logement

  6   avait été proposé ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas avec précision, mais je

  8   crois que c'était une l'Etat, un logement, un  appartement qui appartenait

  9   à l'Etat.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La famille, lorsqu'ils habitaient dans

 11   leur maison personnelle était une maison de quatre façades entourée de

 12   terrain, quel genre de maison ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'était une maison familiale entourée

 14   d'un jardin.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 16   Monsieur Misetic, je suis tout à fait conscient que j'ai grignoté votre

 17   horaire. Combien de temps vous faut-il encore ?

 18   M. MISETIC : [interprétation] Quinze minutes.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons d'abord lever la séance,

 20   avoir une petite pause, mais je dois vérifier quelques questions

 21   administratives.

 22   Un instant, s'il vous plaît.

 23   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 24   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 25   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je m'étais levé juste parce que vous aviez

 26   annoncé qu'on allait avoir une pause et c'est ce que j'avais prévu.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever la séance.

 28   Nous reprendrons nos travaux à 11 heures et cinq minutes.

Page 20344

  1   --- L'audience est suspendue à 10 heures 40.

  2   --- L'audience est reprise à 11 heures 28.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre tient à s'excuser pour ce

  4   retard. Il était important pour nous de continuer à discuter entre nous des

  5   documents MFI qui sont joints à votre déposition et l'article publié dans

  6   "Globus" afin de pouvoir donner à Mme Gustafson quelques orientations sur

  7   la position que nous voulons avoir, et la décision d'ailleurs sera rendue à

  8   la fin de l'interrogatoire principal de M. Misetic. S'il est nécessaire de

  9   poser des questions supplémentaires, à ce moment-là, nous l'envisagerons,

 10   nous verrons, mais je crois qu'il n'y aura pas vraiment de grande surprise.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, si la décision est

 12   négative, nous sommes tout à fait prêts à rappeler ce témoin ultérieurement

 13   de façon à donner à Mme Gustafson le temps qu'il faut à une date ultérieure

 14   donc.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il n'est peut-être pas

 17   nécessaire d'attendre la fin de l'interrogatoire principal.

 18   Aussi, je peux vous dire que la Chambre accepte de verser comme pièce

 19   à conviction le document - laissez-moi le chercher - la déclaration de la

 20   liste 92 ter, à l'exception des paragraphes 3, 5 -- ou plutôt, une partie

 21   du paragraphe 5, à savoir 5.1, 5.2, 5.3, 5.4 sont exclus, le 5.5 qui

 22   explique ce que le programme ne reprenait pas -- ne citait pas. Nous

 23   n'avons pas de problème à accepter ce paragraphe et donc le verser au

 24   dossier.

 25   Donc, Monsieur Misetic, ce sera à vous de voir ce que vous allez faire du

 26   fait que les paragraphes 5.1 à 5.4 compris ne sont pas acceptés, et nous

 27   pouvons accepter 5.5 en partie, 5.6 et 5.7. Donc de 5.1 à 5.4 compris ne

 28   sont pas acceptés, 5.5 en partie, et le 5.7 est exclu également, donc ce

Page 20345

  1   n'est pas accepté, le 5.7

  2   L'article publié dans "Globus" est accepté et est versé comme pièce à

  3   conviction avec une remarque cependant, une observation, c'est que la

  4   valeur probante de cet article est estimée par la Chambre du fait que cet

  5   article aurait visiblement servi comme base pour gérer les problèmes des

  6   personnes réfugiées et les problèmes de migration.

  7   Ce paragraphe 7 qui n'est pas accepté dans le document 92 ter, il y a

  8   référence à l'article "Globus." Sur base du témoignage viva voce, nous

  9   pensons que ce qui était dans ce paragraphe 7 reflète dans une grande

 10   partie ce que nous avons dans l'article "Globus," et nous pensons qu'il

 11   s'agit d'un avis d'expert.

 12   Aussi, comme je l'ai dit précédemment, cet article "Globus" est admis

 13   -- est versé parce que la Chambre a entendu le témoignage et que ses

 14   valeurs avait une valeur factuelle, et la valeur probante ne provient pas

 15   de la précision des chiffres en tant que telle parce que les chiffres,

 16   repris dans l'article ou d'ailleurs dans la déclaration, sont le résultat

 17   d'une analyse scientifique dont les sources et la méthodologie ne sont pas

 18   claires.

 19   Donc la Chambre insiste sur la nature de la valeur probante de cette pièce

 20   à conviction versée au dossier, et donc les commentaires seront assortis à

 21   ce document.

 22   Madame Gustafson, est-ce que cela vous est clair ?

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est très utile, merci.

 24   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 25   Q.  Monsieur Sterc, vous souvenez-vous du nombre approximatif de Serbes qui

 26   sont rentrés dans - ce que l'on appelait à l'époque - les secteurs sud en

 27   Croatie jusqu'au jour où il y a eu publication de cet article dans "Globus"

 28   en 1998 ?

Page 20346

  1   R.  Si je me souviens bien, à la lumière des rapports et des discussions

  2   que nous avions eues à l'époque, il devait y avoir 30 000 personnes.

  3   Q.  Dans le droit fil des questions que vous a posé la Chambre, juste avant

  4   la pause, et son Président, pourriez-vous nous dire si, dans ces 30 000

  5   personnes, pour vous, quelles furent les mesures qui ont été prises de

  6   manière générale pour leur sécurité ? Donc je ne parle pas des différentes

  7   situations individuelles, mais d'une manière générale. Comment avez-vous

  8   assuré la sécurité de ces gens-là jusqu'en 1998 ? Il y en avait donc 30

  9   000.

 10   R.  A l'issue des événements de banovina dont nous avons discuté

 11   précédemment, les tensions sont retombées, et ce, parce que nous nous

 12   sommes rendus sur le terrain à plusieurs reprises. Il y a eu plusieurs

 13   interventions du gouvernement croate d'abord portant sur la reconstruction

 14   des infrastructures. Il était de moins en moins nécessaire de protéger les

 15   personnes qui revenaient et il était dès lors de plus en plus possible --

 16   il y avait de plus en plus de retours individuels, et c'est vrai que notre

 17   intention était de les faire enregistrer, et nous voulions pouvoir rétablir

 18   une situation dans la mesure du possible aussi identique à celle qui

 19   prévalait avant la guerre.

 20   Q.  Comme nous venons d'en discuter, il y avait malgré tout des incidents

 21   avec ces personnes qui revenaient ?

 22   R.  Oui, il y avait, mais dans ces cas-là, nous réagissions de la manière

 23   suivante, nous allions tous ensemble sur place pour rendre visite là où il

 24   y avait des incidents. Vous vous souviendrez qu'il y a eu un incident à

 25   Kostajnica, et même le secrétaire d'Etat américain s'est rendu sur place à

 26   Kostajnica, et nous avons d'ailleurs tenu une réunion du groupe de travail

 27   là sur place parce que nous pensions que cela nous permettrait de

 28   démanteler ces entraves psychologiques au retour dans la région.

Page 20347

  1   D'ailleurs, nous pensions que pour tout incident, qu'il soit expérimenté

  2   par qui que ce soit d'ailleurs sur le terrain, dès qu'il y avait incident

  3   nous allions tous ensemble nous rendre sur place pour rendre visite et pour

  4   discuter avec les personnes qui avaient subi ce genre d'incident.

  5   Q.  On parle de 30 000 personnes qui retournent, 30 000 retours d'ici 1998,

  6   alors c'est 30 000 personnes qui avaient établi une résidence permanente en

  7   Croatie et qui revenaient de Serbie ou de Bosnie-Herzégovine, je dois dire

  8   de la république fédérale ?

  9   R.  Oui, oui. C'étaient des gens qui avaient leur résidence permanente en

 10   Croatie avant la guerre.

 11   Q.  Oui, mais après la guerre ? Quand ils sont revenus et sont restés en

 12   Croatie ?

 13   R.  Il y avait une grande mobilité par rapport à tous ces gens-là. C'est

 14   vrai qu'officiellement ils revenaient. Ils étaient enregistrés comme

 15   retours, mais très souvent ils repartaient en Bosnie-Herzégovine ou en

 16   Yougoslavie, puis revenaient en Croatie, c'était une population des plus

 17   mobiles. Que ce soit nous ou le Haut-commissariat aux réfugiés de l'ONU,

 18   nous avons toujours veillé à enregistrer leur retour.

 19   Q.  S'agissant de cette mobilité, de manière générale, quelles étaient les

 20   raisons qui pourraient expliquer ces allers-retours ?

 21   R.  Je pense que dans un premier temps ils revenaient souvent pour veiller

 22   sur leurs propriétés, travailler à leurs maisons, leurs jardins, leurs

 23   terres, et certains d'entre eux avaient aussi un emploi en Bosnie-

 24   Herzégovine ou en Yougoslavie, puis alors ils retournaient.

 25   Q.  Monsieur Sterc, est-ce que vous savez s'il y a eu des recensements qui

 26   auraient été faits, des sondages d'opinion pour voir pourquoi ces réfugiés

 27   croates et serbes faisaient ces allers et retours ?

 28   Est-ce qu'il y a une référence à ces sondages ?

Page 20348

  1   R.  Oui. Nous avons d'ailleurs insisté là-dessus. Nous voulions que l'UNHCR

  2   réalise ce genre de sondage pour voir pourquoi ils souhaitaient revenir et

  3   s'ils souhaitaient revenir d'abord.

  4   Q.  Je vais vous poser une toute autre question.

  5   Est-ce que vous avez entendu parler à un moment ou à un autre de ce genre

  6   de sondages qui auraient été menés auprès de la population croate et serbe

  7   par l'OSCE ?

  8   R.  Je pense qu'ils avaient un contrat avec une agence de Zagreb du nom de

  9   Pus [phon] qui réalisait ce genre de sondages en leur nom.

 10   Q.  Avez-vous jamais eu l'occasion de voir les résultats de ces sondages ?

 11   R.  Oui, et nous en avons tenu compte, ces sondages ne venaient que

 12   confirmer ce que nous pensions et des discussions que nous avions au sein

 13   du groupe de travail. Les avis allaient de ceux qui ne voulaient pas

 14   rentrer jusqu'à ceux qui voulaient bien rentrer, mais dans certaines

 15   circonstances.

 16   Il y avait toute une variété dans les réponses données, et d'une manière

 17   générale, ceux qui ne voulaient pas revenir en Croatie voulaient être

 18   récompensés pour leur propriété, et ceux qui étaient prêts à revenir

 19   voulaient que leur retour soit organisé dans la dignité avec une protection

 20   pleine et entière par la Croatie.

 21   Q.  D'accord.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Madame la Greffière, pouvons-nous appeler le

 23   document 65 ter 1D1151, s'il vous plaît, et l'afficher à l'écran ?

 24   Q.  Monsieur Sterc, je vais vous montrer ici un sondage qui fut réalisé en

 25   2004.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je m'oppose à l'utilisation de cette

 28   pièce. Il s'agit d'un sondage réalisé en 2004 sur les émotions et les

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  1   facteurs qui motivent les Serbes dans leurs souhaits de revenir, de

  2   retourner en Croatie. Alors d'abord ce sondage a été réalisé en 2003 et

  3   c'est un sondage qui n'interroge que les Serbes qui ont quitté la Croatie

  4   entre 1990 et 1997, et 47 % des personnes, qui ont répondu à cette enquête,

  5   avaient quitté à l'époque de l'opération Tempête et il n'y a pas de

  6   distinctions qui sont faites dans les réponses entre les différentes

  7   personnes interrogées dans cette enquête. Donc ce sont toutes ces raisons

  8   qui font qu'à nos yeux ce rapport n'est pas pertinent et qu'il y des

  9   facteurs justement établissant les souhaits qu'ont rencontré des Serbes de

 10   Krajina qui souhaitaient rentrer en Krajina, après l'opération Tempête et

 11   ce dans un délai raisonnable après 1995.

 12   Merci.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne crois pas que

 14   cette objection soit acceptable --

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 17   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 18   L'INTERPRÈTE : correction de l'interprète : cette objection n'est pas

 19   recevable.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une

 21   objection d'ordre juridique.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il s'agit d'une objection de pertinence.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Tout d'abord, il n'y a pas de fondement selon

 24   la règle 89(D) visant à exclure ce type de document. Nous -- le bureau du

 25   Procureur estime que la Croatie avait empêché les Serbes du secteur nord et

 26   sud de rentrer et comme politique générale --

 27   L'INTERPRÈTE : Deux intervenants parlent en même temps.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demanderais à M. Misetic de ne pas dire

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  1   devant le témoin quelle est la thèse du bureau du Procureur. Merci.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

  3   Lorsque Me Misetic ou M. Kehoe ou Mme Higgins ou Me Mikulicic parlent

  4   de la thèse du Procureur, la Chambre est à même d'envisager la question de

  5   savoir si cela est en accord avec la thèse du bureau du Procureur et la

  6   manière dont le bureau du Procureur l'interprète.

  7   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je comprends tout à fait. Ma préoccupation

  8   était la présence du témoin. Merci.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. L'objection d'abord. On peut

 10   montrer le document au témoin --

 11   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- nous l'avons déjà vu,

 13   L'INTERPRÈTE : Pardon, l'interprète reprend, une fois que nous l'aurons vu

 14   --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- puisqu'il est difficile de déterminer

 16   sa pertinence tant qu'on ne l'a pas vu, donc une fois que nous l'aurons vu,

 17   nous déciderons de son importance ou de sa recevabilité.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Comme vous le voyez, Monsieur, il s'agit d'un document de 2004, qui

 20   porte sur les facteurs liés aux motivations et les facteurs émotionnels

 21   concernant le retour des réfugiés à leur patrie et l'acceptation de leur

 22   retour par la population locale.

 23   Est-ce que l'on peut maintenant tourner à la page 4 dans la version du

 24   prétoire électronique ? C'est l'avant propos du texte.

 25   Troisième alinéa, je cite :

 26   "Puisque le processus de retour a commencé en 1995, depuis cette date le

 27   gouvernement croate a enregistré un total de 321 400 individus de retour.

 28   Les deux tiers correspondent à des individus d'origine -- d'ethnie croate

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  1   qui se sont réinstallés à l'intérieur de la Croatie pendant la guerre.

  2   Environ un tiers correspond à des Serbes croates qui se sont enfuis en

  3   Serbie et au Monténégro, en Bosnie-Herzégovine, et dans la région du Danube

  4   de la Croatie et en Slavonie orientale."

  5   Q.  Alors si mes calculs sont justes, si on dit qu'environ 100 000 sont des

  6   Serbes qui sont de retour, en date de 2003, tout d'abord, Docteur, vous

  7   étiez membre du gouvernement, et pendant la période concernée, est-ce que

  8   vous avez eu connaissance du retour de ces 100 000 Serbes et vous avez dit

  9   vous-même avoir écrit à la main en 1998 qu'ils étaient rentrés en Croatie ?

 10   R.  J'en avais connaissance, je savais que ce programme était mis en œuvre.

 11   Je l'ai déjà dit, je n'ai pas participé à sa mise en œuvre après l'an 2000,

 12   mais d'après les rapports que nous avons reçus, ce programme était encore

 13   mis en œuvre et les chiffres qui sont cités pour l'année 2003, si l'on

 14   regarde les tendances c'était une continuation logique de ce qui avait été

 15   préparé dans d'autres documents ainsi que dans le cadre du programme lui-

 16   même.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas entendu la réponse à votre

 18   question.

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Avez-vous eu connaissance en 2003 de tout autre programme de retour mis

 21   en œuvre à l'époque autre que celui que vous avez élaboré vous-même de

 22   votre propre main en 1998 ?

 23   R.  A ma connaissance, il n'y avait pas d'autre programme.

 24   L'INTERPRÈTE : l'interprète signale que Me Misetic ne parle pas dans son

 25   micro.

 26   M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on affiche la

 27   page 6 en anglais, la page 5 en B/C/S.

 28   Q.  Ma question est la suivante : on parle de la destruction et je cite le

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  1   texte : "L'objectif de cette phase particulière consistait à établir

  2   quelles étaient les motivations et les facteurs émotionnels liés au retour

  3   des réfugiés serbes en Croatie ainsi que de comprendre la perception de la

  4   population croate locale concernant ce retour."

  5   M. MISETIC : [interprétation] Si l'on peut passer à la page 11 du texte sur

  6   le prétoire électronique. C'est le résumé. Page 8 en B/C/S.

  7   Pour le procès-verbal, Monsieur le Président, je crois que le rapport

  8   indique qu'il s'agit d'une commission de l'OSCE qui a mené à bien ce

  9   sondage et on constate également un sceau de l'agence des Nations Unies

 10   pour le développement international sur le rapport lui-même.

 11   Q.  Quand on parle des dommages de guerre, les individus sondés indiquent

 12   la chose suivante :

 13   "36 % de la population serbe ont quitté leurs foyers en 1991; 37 %

 14   pendant et tout de suite après l'opération Tempête en 1995, plus de 50 %

 15   ont quitté la Croatie dans le cadre d'une fuite massive collective

 16   organisée la nuit, et qu'ils indiquaient que la raison principale de

 17   l'incident était les conditions de vie et la crainte."

 18   Si l'on passe au paragraphe sur la vie aujourd'hui --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, puis-je vous

 20   demander s'il s'agit d'un résumé de --

 21   M. MISETIC : [interprétation] En effet, c'est un rapport -- un résumé

 22   d'un rapport.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, y a-t-il des questions ?

 24   Evidemment la Chambre n'a pas pu consulter le texte. Y a-t-il des questions

 25   dans ce sondage sur l'organisation du départ, ou est-ce qu'il s'agit d'un

 26   avis, d'une opinion qui se glisse ici ? C'est un problème puisqu'on n'a pas

 27   encore vu le document.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, les questions sont

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  1   annexées au rapport. La question 8 dit :

  2   "Dans quelles conditions avez-vous quitté la Croatie ? S'agissait-il

  3   d'une fuite massive avec d'autres personnes ?"

  4   Deux :

  5   "Est-ce que cette fuite était organisé avec d'autres ?"

  6   Trois :

  7   "S'agissait-il d'un départ indépendant avec les membres de la famille

  8   ?"

  9   Et cetera. Puis l'autre option c'est de permettre à l'individu de

 10   dire qu'il ne sait pas ou de refuser de répondre.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En effet on constate qu'il y a

 12   plusieurs options l'une n'excluant pas l'autre.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va devoir garder ça de plus près,

 15   mais, en effet, c'est ce qui pose problème, puisqu'on ne peut pas parcourir

 16   chaque mot du document la Chambre le conçoit très bien, je crois que

 17   l'ensemble des parties le comprend bien, mais on peut dire qu'il y a un

 18   certain brouillard ici.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'ai lu le texte tout à fait à partir

 20   d'une version anglaise que j'ai trouvée sur internet puisque nous n'avions

 21   qu'une traduction partielle des dix premières pages du document qui est

 22   présenté par la Défense Gotovina, la version est donc légèrement différente

 23   de celle que l'on affiche à l'écran.

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Et bien --

 25   L'INTERPRÈTE : Non, correction, Me Misetic.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Et bien --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je disais cela parce que cela porte sur

 28   une question qui fait l'objet de désaccord dans cette affaire, concernant

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  1   la manière dont le départ a été organisé. Je n'ai pas lu le rapport, je ne

  2   suis pas non plus un expert en statistique, et je ne voudrais en aucune

  3   manière disqualifier le rapport, mais chacun sait qu'on peut faire mentir

  4   des statistiques, je vous demande de poursuivre tout en faisant preuve de

  5   prudence.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Le sondage, le rapport porte sur des

  7   tendances et sur les motivations que ressentaient les gens à l'époque, je

  8   crois que c'est pertinent tant que tel et non pas les pourcentages --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout dépend de la manière dont les

 10   questions sont posées et dans quelle mesure ceux qui répondaient à ce

 11   sondage pouvaient choisir l'une ou l'autre option, si les options se

 12   chevauchaient en quelque sorte.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Je comprends fort bien --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer --

 15   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- il ne s'agit pas de parler de --

 17   d'interroger les réfugiés serbes qui ne sont pas rentrés. Mais on peut dire

 18   qu'il faut presque être un expert pour comprendre tout cela.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Mais nous avons un témoin expert justement

 20   devant nous --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non --

 22   M. MISETIC : [interprétation] Je plaisantais.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet, vous plaisantez, tout à

 24   fait.

 25   M. MISETIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors dans le chapitre la vie aujourd'hui, on peut lire :

 27   "41 % des réfugiés serbes de Croatie possède une maison ou un appartement

 28   dans leur lieu actuel de résidence."

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  1   Le texte se poursuit en disant que :

  2   "A l'avenir ils ont l'intention de se construire une maison ou un

  3   appartement dans leur lieu actuel de résidence," et cetera.

  4   Puis un peu plus loin dans le texte, sous la rubrique : "Retours" -- sous

  5   le chapitre : "Attitude vis-à-vis du retour" :

  6   "Seul 14 % des réfugiés serbes de Croatie ont exprimé leur intention de

  7   rentrer en Croatie, seulement 4 % des répondants de ce groupe avaient

  8   exprimé une intention relativement ferme."

  9   Paragraphe suivant, on parle des obstacles telles que perçues par ces

 10   individus au retour.

 11   Ma question est la suivante, Monsieur Sterc, et nous n'avons pas besoin de

 12   rentrer dans les chiffres : quels étaient les facteurs qui rentraient en

 13   ligne de compte dans la décision de rentrer -- quelle était l'importance du

 14   désir des gens de rentrer ?

 15   R.  C'était tout à fait essentiel, surtout si l'on voulait mettre en place

 16   un plan opérationnel au sein du groupe de travail, c'est ce plan que l'on a

 17   ensuite présenté au gouvernement croate ainsi qu'au public.

 18   Q.  Par rapport au groupe de travail, comment avez-vous compris quelles

 19   étaient les raisons qui faisaient que ces gens ne voulaient pas rentrer en

 20   Croatie ? Je ne parle pas de ceux qui avaient des craintes en matière de

 21   sécurité à court terme, mais parmi ceux qui ont décidé qu'ils n'avaient pas

 22   l'intention à long terme de rentrer en Croatie, comment avez-vous perçu ces

 23   motivations ?

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne suis pas certaine qu'on est déjà

 25   établi qu'un tel groupe existait.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais relire la question.

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

Page 20357

  1   Je crains que je ne comprends pas tout à fait votre objection, Madame

  2   Gustafson.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il s'agit d'une question directrice

  4   puisqu'il n'a pas été établi par ce témoin qu'un tel groupe existe --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le groupe de travail --

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, un groupe d'individus qui n'avaient

  7   pas l'intention à long terme de rentrer en Croatie, alors qu'on a posé des

  8   questions sur les raisons pour lesquelles ce groupe entre guillemets ne

  9   souhaitait rentrer.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Je peux poser un fondement. Je considérais

 11   que ce n'était pas un fait disputé concernant le fait qu'il existait des

 12   gens qui ne voulaient pas rentrer, mais je vais m'en occuper.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 14   M. MISETIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Sterc, avez-vous connaissance du fait que certains des Serbes

 16   qui avaient quitté la Croatie avaient exprimé le désir de ne pas rentrer ?

 17   R.  Oui, bien sûr, nous le savions, ainsi que la communauté internationale

 18   le savait.

 19   Q.  Sans rentrer dans les statistiques, pouvez-vous nous dire -- pouvez-

 20   vous nous donner une estimation du nombre de l'ensemble des Serbes qui

 21   avaient quitté la Croatie, de manière générale, et qui avaient, d'après

 22   vous, conclu qu'ils ne souhaitaient pas rentrer en Croatie dans le long

 23   terme ?

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est très vague par rapport à la période

 25   couverte, et deuxièmement, je crois que l'on demande un avis du témoin, une

 26   opinion.

 27   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous demandez, Maître Misetic, une

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  1   conclusion. Il serait utile de savoir sur quoi cette conclusion pourrait se

  2   fonder.

  3   M. MISETIC : [interprétation]

  4   Q.  Nous avons passé maintenant une demi-heure à parler des sondages qui

  5   avaient été menés. Vous nous aviez dit qu'il y avait des sondages même

  6   alors que vous faisiez partie du groupe de travail conjoint, que c'était

  7   important pour comprendre quelle était la portée de cette question de

  8   retour des réfugiés. Dans le cadre de ces sondages, avez-vous pu conclure

  9   que tous les Serbes qui avaient quitté la Croatie voulaient rentrer ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Quelle était votre conclusion lorsque vous avez voulu évaluer la portée

 12   de ce problème de retour concernant les Serbes qui souhaitaient rentrer,

 13   que ce soit des réfugiés ou des personnes déplacées, ou quel que soit le

 14   terme que vous utilisez, grosso modo, quel était le nombre ou le

 15   pourcentage de ceux qui ne voulaient pas rentrer en Croatie ?

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne comprends pas quel est le fondement

 17   de cette question.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un peu le même problème. Vos

 19   conclusions sont basées sur toutes sortes d'analyses scientifiques, qui

 20   avaient été menées --

 21   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, on peut peut-être

 23   trouver une façon de gérer cela. Vous pouvez demander au témoin quelles

 24   sont ses hypothèses de travail; est-ce que vous comprenez ce que je veux

 25   dire ? Posez une question de fait. Je comprends très bien, et d'ailleurs,

 26   il est évident que nous posons des questions à un témoin qui était témoin

 27   de fait, qui s'est occupé de programme et qui était en contact avec des

 28   organisations internationales. Il a également publier des articles de

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  1   caractère scientifique, donc essayons de nous en tenir au fait dans la

  2   mesure du possible, surtout étant donné son poste de député ministre, on

  3   pourrait penser qu'il a pris comme point de départ à ses activités, à sa

  4   réflexion le résultat de ce qu'il savait -- ou plutôt, des résultats dont

  5   il avait eu connaissance de telle ou telle recherche.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Que cette recherche soit correcte ou

  8   pas, ça, c'est une autre question. Mais vous pouvez poser une question de

  9   fait concernant le point de départ, ses hypothèses de départ à sa

 10   réflexion.

 11   M. MISETIC : [interprétation]

 12   Q.  Quelles étaient - je vais utiliser des mots différents - quelles

 13   étaient vos hypothèses de départ concernant le nombre éventuel de Serbe qui

 14   ne souhaiterait pas rentrer de manière permanente ?

 15   R.  Je vais vous répondre de manière très spécifique, après ce débat. Il ne

 16   s'agit pas d'hypothèse, il y a eu des discussions au sein du groupe de

 17   travail concernant les résultats.

 18   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le témoin parle plus lentement,

 19   s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Désolé.

 21   M. MISETIC : [interprétation]

 22   Q.  Pouvez-vous reprendre la réponse, s'il vous plaît, plus lentement ?

 23   R.  Je vais essayer. Il ne s'agit pas d'hypothèse, il s'agissait de données

 24   spécifiques dont nous avons discuté au sein du groupe de travail, avec le

 25   HCR, étude qui avait été menée en Pologne et en Serbie. On a tiré la

 26   conclusion que les deux tiers, les deux tiers des Serbes ne souhaitaient

 27   pas rentrer en Croatie.

 28   Q.  Quand vous donnez ce chiffre, les deux tiers des Serbes ne souhaitaient

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  1   pas rentrer en Croatie; vous voulez dire ne voulaient pas rentrer dans le

  2   court terme en raison de problème de sécurité ou est-ce que nous parlons de

  3   vos hypothèses, de vos conclusions en tant que quelqu'un qui élabore un

  4   plan de retour des réfugiés ? Parmi ces deux tiers, quel est le pourcentage

  5   de ceux qui n'ont pas l'intention à long terme de rentrer en Croatie ?

  6   R.  Selon la même procédure que j'ai déjà décrite, c'est-à-dire avant même

  7   que le programme soit adopté par le parlement croate, un petit peu plus de

  8   50 % ne souhaitaient pas rentrer en Croatie du tout, puisque dans leur

  9   réponse, ils avaient défini des conditions à leur retour. Ces conditions

 10   étaient catégoriques. Ils ne souhaitaient pas rentrer en Croatie, tant

 11   qu'il n'y avait pas eu un changement de gouvernement en Croatie.

 12   Q.  D'accord, merci.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais passer à un

 14   autre sujet. Je ne vais pas verser ce document au dossier, à moins que la

 15   Chambre le souhaite.

 16   Q.  Ma dernière question, Monsieur Sterc, est la suivante : vous avez dit à

 17   plusieurs reprises depuis ces derniers jours que vous avez eu des

 18   discussions et des débats avec les représentants de la communauté

 19   internationale; vous avez parlé de M. Guldimann ?

 20   R.  Robinson.

 21   Q.  Oui, M. Guldimann était responsable de l'OSCE en Croatie. Vous

 22   souvenez-vous avoir parlé avec lui de la question du retour des réfugiés ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Avez-vous participé à des discussions publiques avec M. Guldimann

 25   concernant la question du retour des réfugiés ?

 26   R.  Oui. On parlait en direct, ce n'était pas une émission préenregistrée.

 27   Q.  Il s'agissait d'une émission de télévision en direct ?

 28   R.  Oui.

Page 20361

  1   Q.  Au cours de cette discussion télévisée, vous souvenez-vous si M.

  2   Guldimann a indiqué quelle était la position de la communauté

  3   internationale par rapport au fait de savoir si l'on recherchait ou si l'on

  4   demandait à un retour en masse des réfugiés serbes ou pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Vous souvenez-vous de sa réponse ?

  7   R.  Il n'y avait pas de problème particulier à la suite de ce programme,

  8   puisque cela avait suivi l'adoption du programme et de l'harmonisation avec

  9   la communauté internationale. Il a simplement confirmé que ce que faisait

 10   le gouvernement croate était appuyé et par la communauté internationale et

 11   par l'OSCE, et nous avions en fait passé à ce stade à un nouveau stade de

 12   la résolution du problème.

 13   Q.  D'accord. J'aimerais vous montrer un passage annexé d'une vidéo pour

 14   vous demander si cela correspond à un extrait de cette discussion.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Madame la Greffière, il s'agit du document 65

 16   ter 1D1560.

 17   Monsieur le Président, les interprètes ont reçu un exemplaire de l'extrait

 18   de ce passage vidéo que nous avons l'intention de diffuser.

 19    [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 21   "Monsieur Guldimann, que dites-vous ?

 22   Monsieur Guldimann : Je suis très heureux de ce que nous venons

 23   d'entendre de M. Sterc. C'est un problème que nous devons gérer

 24   conjointement. Toute tentative, telles que les tentatives de média ces

 25   dernières semaines visant à créer une atmosphère de confrontation, de

 26   conflit comme s'il y avait des pressions, ces tentatives ne sont pas

 27   justes, ne sont pas correctes. Il est certain que du côté de la communauté

 28   internationale, nous n'avons jamais insisté sur quoi que ce soit qui

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  1   pourrait signifier un retour en masse des réfugiés serbes. Nous avons

  2   conscience du fait et nous savons qu'il doit y avoir un droit sans

  3   condition pour ces gens à rentrer comme a donné son accord le gouvernement

  4   de Croatie, dans le cadre d'accords internationaux et nous ferons ce que

  5   nous pourrons afin d'appuyer ce processus et d'apporter notre assistance;

  6   et pour contribuer à faciliter ce processus.

  7   Nous sommes parfaitement d'accord avec cela et nous sommes tous

  8   d'accord qu'il faut faire quelque chose."

  9   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 10   M. MISETIC : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Sterc, s'agit-il du débat avec M. Guldimann dont vous parliez

 12   ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que cet extrait reflète de façon précise cette partie du débat ?

 15   R.  Oui.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous voudrions verser

 17   ce document, cette vidéo 65 ter 1D1560.

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Greffière.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la

 21   pièce D1612.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier. Il

 23   s'agit donc de la vidéo plus les transcriptions.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé mon

 25   examen en chef; est-ce que vous voulez que je fasse maintenant mes

 26   conclusions ou plus tard ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pourriez peut-être présenter

 28   votre thèse maintenant, tenant compte de la décision de la Chambre.

Page 20363

  1   M. MISETIC : [interprétation] Je donne un instant aux interprètes de

  2   trouver le procès-verbal. Il s'agit de la déclaration du témoin de M.

  3   Stjepan Sterc : 

  4   "Le Témoin Stjepan Sterc est professeur à la faculté des Sciences de

  5   l'université de Zagreb et a rédigé un grand nombre de documents sur les

  6   problèmes de démographie dans l'ex-Yougoslavie. En octobre 1995, M. Sterc

  7   est devenu vice ministre de la reconstruction et du développement. Dans le

  8   cadre de son portefeuille, M. Sterc était -- devait trouvé les procédures

  9   opérationnelles permettant le retour de réfugiés chez eux.

 10   "M. Sterc a travaillé sur le retour des réfugiés en tant que président du

 11   groupe de travail conjoint chargé des retours qui comprenaient des

 12   représentants du gouvernement de la République de Croatie et les

 13   représentants de la communauté internationale présents au sein de la

 14   République de Croatie. En tant que président du groupe de travail conjoint,

 15   M. Sterc a conclu un grand nombre d'accords et a rédigé un grand nombre de

 16   procédures opérationnelles permettant le retour des réfugiés, des déplacés

 17   et des personnes devant être réinstallées chez eux.

 18   "En tant que président de ce groupe de travail conjoint, le témoin a rédigé

 19   des accords en 1997 et en 1998 portant sur le retour des réfugiés, plus

 20   particulièrement, et le témoin donc a rédigé un programme de 100 pages

 21   portant sur le retour des réfugiés, des retours et des personnes devant

 22   être réinstallées. Ce programme portait sur tous les paramètres intervenant

 23   dans -- pour le retour. Il s'agit d'un programme qui fait plus de 100 pages

 24   et qui est extrêmement exhaustif en ce qui concerne le problème du retour.

 25   Ce programme est encore en œuvre à l'heure actuelle dans sa quasi-totalité,

 26   et donc il est mis en œuvre dans la République de Croatie en ce qui

 27   concerne le retour des réfugiés serbes.

 28   "Le témoin n'était pas uniquement vice ministre au cours -- dans le

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  1   gouvernement du président Tudjman mais après les élections ayant eu lieu en

  2   2000, le nouveau gouvernement du premier ministre Ivica Racan l'a nommé au

  3   poste de vice ministre de la Défense, poste qu'il a occupé jusqu'à la fin

  4   de 2003. En 2000, on a demandé au témoin de rejoindre les rangs de la

  5   Mission de l'OSCE au Kosovo pour effectuer des missions identiques à celles

  6   qu'il avait déjà effectuées en Croatie. Mais le témoin a refusé cette offre

  7   et ce pour pouvoir prendre le poste que -- que l'on lui proposait au sein

  8   du gouvernement Racan."

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Misetic.

 10   Peut-être faudrait-il faire la pause; sinon, Madame Gustafson, vous allez

 11   devoir commencer votre contre-interrogatoire et vous serez pratiquement

 12   interrompu tout de suite.

 13   Maître Misetic, peut-on -- pouvez-vous nous télécharger une version révisée

 14   de la déclaration 92 ter ? Ensuite ce sera à vous de décider si vous voulez

 15   conserver certains passages, comme par exemple, les passages du paragraphe

 16   5, ou si vous préférez tout simplement ne pas les inclure.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Nous aurons téléchargé une nouvelle version

 18   de cette déclaration 92 ter d'ici vendredi matin.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Nous allons donc faire une pause et nous reprendrons à 1 heures moins 20.

 21   --- L'audience est suspendue à 12 heures 19.

 22   --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, êtes-vous prête à

 24   procéder au contre-interrogatoire de ce témoin ?

 25   Monsieur Sterc, Mme Gustafson va maintenant vous poser des questions dans

 26   le cadre du contre-interrogatoire. Mme Gustafson travaille pour

 27   l'Accusation.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Tout d'abord, je tiens à aborder deux

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  1   points, la vidéo qui vient juste d'être admise. En ce qui concerne donc

  2   cette vidéo, je tiens à dire que cette pièce 1D1562 est accompagnée d'un

  3   transcript de ce clip qui dit la chose suivante, je donne lecture :

  4   "…nous venant de la communauté internationale n'ont jamais insisté sur quoi

  5   que ce soit qui signifierait un retour en masse des Serbes en Croatie du

  6   jour au lendemain."

  7   Je tiens à dire que les mots "du jour au lendemain" n'ont jamais été portés

  8   au compte rendu et je voulais donc corriger le compte rendu.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Oui, je crois que la procédure en fait c'est

 10   que ce soit -- que Mme Gustafson s'entretienne avec moi à ce propos afin

 11   que nous le traitions ensemble.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il vaut mieux en effet s'arranger.

 13   De toute façon, ça me semble tout à fait simple, et je vois que vous ne

 14   pouvez que féliciter Mme Gustafson d'avoir relevé ce point.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Tout à fait.

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je tiens à dire aussi que M. Carrier a

 17   besoin de cinq minutes pour aborder un point de procédure, et peut-être

 18   qu'il faudrait le faire juste avant la fin de notre journée de travail.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais j'aimerais savoir si nous

 20   avons d'autres témoins pour le reste de la semaine, il semble que nous --

 21   donc vendredi est disponible, n'est-ce pas ? Donc nous n'avons pas de

 22   problème de temps. Le seul risque c'est que nous allons perdre du temps et

 23   non pas employer notre temps au mieux. Mais visiblement, Madame, au vu des

 24   circonstances, nous pouvons facilement accorder à M. Carrier les cinq

 25   minutes qu'il a demandées.

 26   Allez-y, Madame Gustafson.

 27   Contre-interrogatoire par Mme Gustafson : 

 28   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Sterc.

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  1   R.  Bonjour.

  2   Q.  Je voudrais vous poser quelques questions à propos de votre poste et

  3   des fonctions que vous avez occupées au sein du gouvernement, ce que vous

  4   avez fait avant d'être nommé vice-ministre et après aussi.

  5   Donc avant être nommé vice-ministre en octobre 1995, avez-vous eu des

  6   contacts personnels avec le président Tudjman ?

  7   R.  Non, malheureusement, je n'ai jamais rencontré le premier président de

  8   la République de Croatie, je ne l'ai jamais contacté, même pas par

  9   téléphone.

 10   Q.  Après votre nomination au poste de vice-ministre vous n'avez toujours

 11   pas eu de contact avec M. Tudjman ?

 12   R.  Non, je ne l'ai jamais rencontré, je n'ai jamais eu le moindre contact

 13   avec M. Tudjman.

 14   Q.  Très bien. En ce qui concerne le ministre Jure Radic, avant que vous ne

 15   soyez nommé adjoint de ce ministre, le connaissiez-vous ? Aviez-vous eu des

 16   contacts avec lui personnels ?

 17   R.  Je ne le connaissais pas avant qu'il ne prenne son poste de vice-

 18   ministre -- avant que je ne prenne mon poste d'adjoint au ministre.

 19   Q.  Très bien. Après avoir pris votre poste de vice-ministre, j'imagine que

 20   vous l'avez contacté. Pourriez-vous nous parler de la nature des contacts

 21   que vous avez eus avec Jure Radic une fois que vous avez été en poste au

 22   ministère ?

 23   R.  Je le rencontrais surtout dans le cadre des réunions du collège du

 24   ministère de la Reconstruction et Développement.

 25   Q.  De quoi s'agit-il exactement ?

 26   R.  C'étaient des réunions où l'on parlait des travaux qui avaient été

 27   effectués la semaine précédentes au sein de tous les services, réunion de

 28   bilan.

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  1   Q.  Il s'agissait de réunions hebdomadaires ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Pouvez-vous nous dire qui participait à ces réunions, mis à part vous

  4   et M. Radic ?

  5   R.  Tous les autres vice-ministres et le chef de cabinet du ministère.

  6   Q.  Donc en dehors de ces réunions vous rencontriez peu M. Radic, n'est-ce

  7   pas ?

  8   R.  En effet.

  9   Q.  La Chambre a entendu dire que M. Radic avaient des réunions en tête-à-

 10   tête avec le président Tudjman au cours de la période suivant l'opération

 11   Tempête. Etiez-vous au courant de ces réunions en tête-à-tête ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Je vous remercie. Passons à autre chose, nous allons nous pencher sur

 14   le paragraphe 8 de votre déclaration de témoin. Plus particulièrement ce

 15   dont vous nous avez parlé en ce qui concerne le retour des Serbes et les

 16   obstacles éventuels qu'ils auraient rencontrés.

 17   Donc vous avez dit que :

 18   "Il n'y avait pas d'obstacles étant donné que dès le départ on a déclaré

 19   que le retour des Serbes en République de Croatie était un problème

 20   humanitaire et non un problème politique, et nous étions parfaitement en

 21   faveur du concept du retour de toutes les personnes qui devaient avoir le

 22   droit d'entrer chez eux."

 23   Au paragraphe 10 de votre déclaration, vous faites allusion aux remarques

 24   de Galbraith, et vous dites que :

 25   "Ces remarques doivent porter sur la période suivant l'opération Tempête,

 26   en août et en septembre, de notre avis il était absolument impossible

 27   d'assurer un retour en toute sécurité à toutes ces personnes au vu des

 28   circonstances qui existaient à l'époque."

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je voudrais soulever une objection à propos

  2   des mots formulés pour décrire la déclaration. Dans la déclaration, il ne

  3   dit pas qu'il n'y avait pas d'obstacles; il est écrit qu'il n'y avait pas

  4   d'obstacles politiques.

  5   Mme GUSTAFSON : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous vouliez dire quelque chose, n'est-

  7   ce pas, Madame Gustafson.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] En effet, oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 11   Q.  En ce qui concerne les remarques que vous avez faites à propos de

 12   l'ambassadeur Galbraith, j'aimerais savoir tout d'abord si vous ne l'avez

 13   jamais rencontré.

 14   R.  Non.

 15   Q.  Lorsque vous faites référence à ses remarques, pourriez-vous nous dire

 16   exactement à quelles remarques vous faites allusion, remarques qu'il aurait

 17   faites ?

 18   R.  Ce que j'ai vu dans les journaux, à la télévision, la façon dont il

 19   s'est assis sur un tracteur, par exemple, pour assister au départ des

 20   Serbes, cela m'a donné ma propre opinion, ça m'a permis de me fabriquer ma

 21   propre opinion à propos de cette personne.

 22   Q.  Oui, enfin, moi, je vous demandais plutôt quelle était la teneur des

 23   remarques sur lesquelles vous vous êtes basé. Vous avez dit maintenant que

 24   vous avez lu des choses dans les journaux, vous avez vu des choses à la

 25   télévision, j'aimerais savoir quelles sont les remarques qu'il a faites et

 26   qui vous ont tant frappé.

 27   R.  Non, c'est juste ce que j'ai vu dans les journaux surtout et ce que

 28   j'ai vu à la télévision.

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  1   Q.  Mais dans votre déclaration, vous parlez des remarques de Galbraith;

  2   donc pourriez-vous être plus précis pour nous dire exactement quelle était

  3   la teneur de ses remarques ?

  4   R.  Un peu plus tard quand on a commencé à négocier avec les communautés

  5   internationales, ses propos nous ont été relatés dans le cadre des réunions

  6   du groupe de travail, et cetera. Il disait qu'il y avait des conditions

  7   bien qui avaient été établies par le gouvernement croate et qui empêchaient

  8   totalement les Serbes de rentrer, de revenir sur place. C'était très clair.

  9   Q.  Très bien. Paragraphe 8 maintenant. Vous dites :

 10   "Nous étions d'accord avec le concept du retour de toute personne chez

 11   eux."

 12   "Nous étions d'accord;" "nous," "nous" c'est la direction croate, c'est ça

 13   la direction du gouvernement croate ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Mais en fait le président Tudjman et les dirigeants croates n'étaient

 16   absolument pas d'accord pour permettre à tous les Serbes de rentrer dans

 17   leurs propres maisons, et ils ont pris des mesures bien précises dans le

 18   but d'empêcher les Serbes de la Krajina de rentrer dans leurs anciennes

 19   maisons, n'est-ce pas ?

 20   R.  Lorsque j'ai pris mon poste au sein du ministère de la Reconstruction

 21   et du Développement, les processus ont commencé tels qu'ils ont été

 22   décrits. Donc le but était que tout le monde rentre chez soi. A différents

 23   niveaux, les hommes politiques discutaient de choses, certes, mais, moi, ça

 24   n'avait rien à voir avec mon travail. A ce moment-là, au sein du

 25   gouvernement croate, il n'y avait pas d'homme politique qui pouvait me

 26   donner d'ordre. D'ailleurs, c'est tout à fait -- c'est parfaitement en

 27   ligne avec ce que nous avions accepté en tant que principe. Nous savions

 28   exactement quel était l'intérêt de la République de Croatie.

Page 20371

  1   Q.  Mais cela dit, le ministre Radic vous a donné des ordres, c'était quand

  2   même votre supérieur hiérarchique ?

  3   R.  Non, non, personne n'avait le droit de me donner d'ordre. Nous n'avions

  4   pas ce type de relation, M. le ministre Radic ne pouvait pas me donner

  5   d'ordre que je devais exécuter. S'il avait essayé de me donner un ordre

  6   quelconque je lui aurais donné ma démission immédiatement. C'était la

  7   relation qui nous unissait, ce n'était pas une relation hiérarchique.

  8   Q.  Mais s'il n'était pas satisfait de votre travail, vous auriez été

  9   licencié, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, bien sûr, il aurait pu me licencier.

 11   Q.  Dans votre déclaration, vous faites référence à des circonstances

 12   objectives ayant rendu le retour en toute sécurité des Serbes parfaitement

 13   impossible au mois de mai -- aux mois d'août et d'octobre -- d'août et de

 14   septembre. De quelles circonstances objectives parlez-vous ?

 15   R.  Il était complètement impossible pour ces gens de rentrer, on était

 16   juste deux ou trois mois après la guerre, il y avait tout le passif de la

 17   guerre, c'était complètement impossible de créer un climat permettant aux

 18   gens de rentrer. Il y avait énormément de tensions, il y avait des tensions

 19   psychologiques, des tensions politiques, le pays était saccagé, les

 20   infrastructures ne fonctionnaient plus. Donc toute personne à un poste de

 21   responsabilité qui aurait essayé de faire rentrer -- revenir les gens

 22   devait quand même prendre cela en compte.

 23   Q.  Pourriez-vous être un peu plus précis en ce qui concerne ces

 24   circonstances objectives ? Vous parlez du passif de la guerre, des

 25   tensions, du pays qui est saccagé, des tensions politiques, psychologiques,

 26   et cetera. Donc pourriez-vous être un peu plus précis, dire exactement ce

 27   qui se passait et ce qui empêchait donc le retour de ces déplacés ?

 28   R.  Tout d'abord, le territoire était sens dessus dessous, saccagé, tous

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  1   les gens étaient partis, il n'y avait plus rien qui marchait. Les écoles,

  2   les hôpitaux, tout ça, alors plus rien ne marchait. Lorsque je suis arrivé

  3   au ministère en octobre, je connaissais toutes ces raisons. Il était

  4   évident que toute mesure prise dans ce sens, s'il n'y avait pas

  5   l'organisation et la planification préalable ça ne servirait à rien. Nous

  6   savions que la Croatie était -- on exerçait énormément de pression sur la

  7   Croatie à cause de ça, il y avait des accusations contre la Croatie à cause

  8   de ça, mais nous savions que la Croatie devait d'abord créer les bonnes

  9   conditions, convaincre la communauté internationale de son bon vouloir.

 10   Mais il nous fallait absolument procéder d'abord à la planification, à

 11   l'organisation, au financement et à la remise sur pied d'un consensus

 12   général.

 13   Q.  Au début de votre réponse, vous avez dit : "Le territoire était

 14   saccagé, la population était partie, il n'y avait plus la moindre

 15   infrastructure qui fonctionnait, rien ne marchait, ni les écoles ni les

 16   hôpitaux, ni rien."

 17   Donc à votre avis, en août et en septembre, les circonstances étaient-elles

 18   telles qu'il était impossible d'envisager le retour de quiconque sur le

 19   territoire, qu'ils soient Serbes aussi bien que Croates ?

 20   R.  Non, non, pas tout à fait. Les retours individuels étaient possibles.

 21   Q.  Donc, à votre avis, la situation était tout aussi mauvaise en ce qui

 22   concerne le retour des Serbes ou le retour des Croates ? Les circonstances

 23   étaient toutes aussi difficiles pour un groupe que pour l'autre ?

 24   R.  A mon avis, en tant qu'observateur extérieur à l'époque, oui, oui, oui,

 25   tout à fait.

 26   Q.  Je vous remercie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, j'aimerais un petit

 28   éclaircissement sur quelque chose.

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  1   Monsieur Sterc, vous avez dit la chose suivante :

  2   "Le territoire était complètement saccagé, mis sans dessus dessous.

  3   La population était partie. Il ne restait plus une seule infrastructure qui

  4   fonctionnait, ni les écoles ni les hôpitaux ni rien."

  5   Cette Chambre de première instance a entendu des témoins et eu

  6   connaissance des éléments de preuve qui suggéraient que l'hôpital à Knin

  7   était remis sur pied très rapidement en quelques jours. Je me souviens même

  8   qu'on nous a parlé du premier bébé qui était né dans cet hôpital, qui a

  9   d'ailleurs fait l'objet d'un reportage à la télévision.

 10   Vous nous dites maintenant que tout était saccagé, que les

 11   infrastructures ne fonctionnaient pas, que rien ne marchait. Alors comment

 12   puis-je réconcilier ces deux éléments ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y avait des institutions ici et là qui

 14   étaient remises sur pied. Il fallait commencer, bien sûr, par les hôpitaux,

 15   c'est normal. Mais il n'y avait pas de transport public, pas d'électricité,

 16   pas d'adduction d'eau. Enfin ce sont des conclusions que j'ai atteintes en

 17   me basant sur les rapports quotidiens et sur tout ce que j'ai lu dans les

 18   journaux. C'était mon opinion en tant qu'observateur extérieur. J'ai étudié

 19   un peu ce qui se passait dans tous ces endroits, mais de loin, certes.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant vous nous parlez d'adduction

 21   d'eau, c'est nouveau. Avant vous parliez quand même des hôpitaux.

 22   Cela dit, poursuivez, Madame Gustafson.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous remercie.

 24   Pouvons-nous maintenant passer à la pièce P466. Je voudrais que l'on prenne

 25   la page 25 en anglais et la page 53 en B/C/S.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, j'ai encore une

 27   question dans le droit fil de ce qu'on vient de discuter.

 28   Pourriez-vous nous citer d'autres hôpitaux qui avaient besoin d'être

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  1   reconstruits ? Parce que dans votre réponse vous nous avez

  2   dit :

  3   "Bien, il y avait des cas isolés de reconstruction. Il était logique

  4   de veiller à ce que les hôpitaux puissent fonctionner et comment ça

  5   fonctionnait."

  6   Alors est-ce que vous pourriez être plus spécifique et nous dire exactement

  7   ce qui en était par rapport aux hôpitaux ? Parce que dans votre réponse --

  8   c'est vrai que d'après votre réponse on pourrait imaginer que Knin était

  9   une exception qui confirmait la règle.

 10   Alors pouvez-vous étayer ces problèmes dont vous nous parlez avec les

 11   hôpitaux ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, Monsieur le Président, je ne

 13   peux pas vous en parler, parce que je ne sais pas. Ce n'était pas de mon

 14   ressort ni à l'époque ni ultérieurement quand j'ai rejoint le ministère

 15   pour la Reconstruction et le Développement. Donc ce que je peux vous dire

 16   ici est une information que j'ai reçue en deuxième ou troisième main, je

 17   dirais. Je ne peux pas vous donner une réponse directe.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous demander : Quand vous

 19   répondez avant de vous poser la question de savoir ce que vous, vous

 20   saviez, parce que vous nous avez dit : J'ai vu dans la presse qu'il n'y

 21   avait plus d'installations qui fonctionnaient, ensuite dans votre

 22   déclaration vous avez dit : Il y en avait même pas une qui fonctionnait. Je

 23   crois que ça c'est une déclaration quand même très forte et j'aimerais que

 24   vous soyez plus précis dans vos réponses et que vous fassiez état de ce que

 25   vous saviez sur base de vos observations personnelles, et non pas ce que

 26   vous avez entendu par ouï-dire.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ne pas donner de réponse générale,

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  1   mais des réponses tout à fait précises et spécifiques.

  2   Madame Gustafson, poursuivez, s'il vous plaît.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Monsieur Sterc, nous avons maintenant à l'écran le PV d'une réunion qui

  5   s'est tenue au mois d'août 1995, en date du 30, entre le président Tudjman

  6   et plusieurs de ses ministres et conseillers. Alors je voudrais attirer

  7   votre attention sur ce que nous avons en bas de page en B/C/S. Nous avons

  8   ici le ministre Jarnjak qui prend la parole et qui déclare :

  9   "S'agissant des Serbes qui viennent par la frontière hongroise et qui

 10   viennent frapper à notre porte parce qu'ils veulent revenir."

 11   Là, il faut passer à la page suivante en B/C/S.

 12   "Question du président Tudjman :

 13   "Est-ce qu'ils ont un passeport ?"

 14   Réponse de M. Jarnjak :

 15   "Non, ils n'ont rien."

 16   Ensuite Sarinic déclare :

 17   "Ils ont un passeport yougoslave ?"

 18   Jarnjak déclare :

 19   "J'aimerais qu'on donne instruction pour qu'ils aient un visa

 20   d'entrée à Belgrade."

 21   Réponse du président Tudjman :

 22   "Je ne donnerai rien. Il faut donner instruction aux douanes de ne

 23   pas laisser ces personnes qui n'ont pas de documents traverser la

 24   frontière."

 25   M. Sarinic dit :

 26   "Monsieur le Président, nous ne nous inspirons pas de comment les

 27   choses se font en Slavonie occidentale. Ce fut très positif pour nous,

 28   personne n'est revenu. Il faut que ceux-ci s'adressent aux organisations

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  1   humanitaires internationales, alors ces organisations-là devraient nous

  2   donner…"

  3   M. le Président dit :

  4   "Un instant. Si vous venez d'un autre pays et l'agent de douanes

  5   n'est pas celui qui dirige la politique."

  6   M. Sarinic déclare :

  7   "Non, il ne faut pas les laisser venir ici. Ce n'est pas possible.

  8   C'est comme ça qu'ils viennent aussi à Banja Luka…"

  9   Puis quelques lignes plus bas, le président reprend et dit :

 10   "C'est pour cela qu'il ne faut pas donner de directive en tant que

 11   telle, simplement faire savoir qu'il ne faut pas les laisser rentrer."

 12   Alors à la page suivante, nous avons M. Granic qui dit :

 13   "D'après l'accord à Belgrade, il n'y en a que 204 qui se sont faits

 14   enregistrés et ils ont commencé à se faire enregistrer à Skopje. C'est ce

 15   qu'ils ont fait là-bas aussi. La troisième chose, c'est qu'ils sont d'abord

 16   arrivés ici sans documents."

 17   Réponse du président Tudjman :

 18   "Si on en laisse 204 rentrés demain, on en aura 1 204; et dans dix

 19   jours, on en aura 12 000…"

 20   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Puis en B/C/S, il faut passer à la page

 21   suivante. En anglais, c'est sur la même page.

 22   Q.  "Donc rien du tout pour le moment."

 23   Alors j'ai une question à vous poser, Monsieur Sterc.

 24   Quand M. Sarinic déclare :

 25   "Inspirons-nous de ce qui s'est passé en Slavonie occidentale, parce

 26   que personne n'est revenu;" est-ce que c'est une référence au départ des

 27   Serbes de Slavonie occidentale pendant l'opération Eclair ?

 28   R.  Oui, j'imagine.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je voudrais simplement dire que là c'est, je

  2   crois, des hypothèses.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a répondu à la question et

  4   vous, vous pensez que ce sont simplement des hypothèses.

  5   M. MISETIC : [interprétation] C'est de l'exégèse en un mot…

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Madame Gustafson.

  7   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  8   Q.  Quand M. Tudjman a donné instruction à Jarnjak de donner l'ordre aux

  9   agents de douanes de ne pas laisser les gens traverser les frontières et

 10   lorsque celui-ci fait part de son inquiétude selon laquelle, si on en

 11   laisse d'abord quelques-uns et dix jours plus tard, il y en aura 12 000,

 12   cela reflète bien le souhait du président Tudjman que les Serbes de Krajina

 13   restent hors de Croatie, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, probablement. Je ne sais pas.

 15   Q.  A l'époque, c'était la politique de la direction croate d'éviter les

 16   retours à grande échelle des Serbes de Krajina en Croatie et de limiter les

 17   retours individuels pour qu'une infime fraction seulement de ces Serbes

 18   reviennent finalement en Croatie.

 19   C'était la politique ?

 20   R.  Je ne l'ai pas senti. J'étais la personne principalement responsable de

 21   mettre en place les conditions pour le retour ayant contact avec la

 22   communauté internationale et tous les dossiers qui y sont associés

 23   d'ailleurs. Ce que je peux dire, c'est la chose suivante, parce que vous me

 24   dites ici -- c'est la première fois que j'entends tout ça. Cela confirme

 25   que tous ceux qui ont participé à cette réunion n'avaient pas la moindre

 26   idée de comment la migration avait lieu à ce moment-là en général et

 27   surtout pas les conséquences de la guerre sur la migration.

 28   Q.  Vous êtes en train de nous dire que le président du pays, le ministre

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  1   de l'Intérieur et le ministre des Affaires étrangères de la Croatie

  2   n'avaient pas la moindre idée des causes sous-jacentes à la migration

  3   pendant la guerre et ce qui s'est passé avec les Serbes de Krajina; c'est

  4   ce que vous maintenez ?

  5   M. MISETIC : [interprétation] C'est une erreur que le témoin ait répondu

  6   comme ça.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez peut-être déformé mes propos.

  9   Quand on parle de ceux qui participent à une réunion, est-ce que c'est

 10   toutes les personnes, certaines personnes, ou tout dépend forcément de ce

 11   que l'on dit et de qui on parle.

 12   Votre réponse était que ce que Mme Gustafson vous a dit, c'est que :

 13   "Vous confirmez que les personnes qui ont participé à cette réunion

 14   n'avaient pas la moindre idée sur la migration en général et sur les causes

 15   de la migration pendant la guerre."

 16   Est-ce que cela inclut finalement ces personnes-là, y compris le

 17   président Tudjman de l'époque, M. Jarnjak et je ne sais plus qui c'est le

 18   ministre des Affaires étrangères.

 19   Est-ce que ceux-ci sont repris dans votre commentaire ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dit que je n'avais pas la moindre

 21   idée. Ce que j'ai dit, c'est que sur base des discussions et des chiffres

 22   qui sont repris par ce qui est écrit ici, c'est que l'on peut conclure, et

 23   c'est ma conclusion personnelle au titre d'expert sur le terrain, c'est

 24   qu'il n'était pas du tout au courant du droit de la migration et surtout

 25   pas des règles qui régissaient la migration pendant et après la guerre.

 26   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que l'on peut dire alors qu'à ce moment-là et au moment où

 28   vous étiez ministre adjoint, il y avait des milliers de Serbes de Krajina

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  1   qui essayaient de revenir en Croatie et qui ont été empêchés de le faire;

  2   est-ce correct ?

  3   R.  Je vous remercie pour votre question.

  4   Lorsque je suis arrivé au ministère pour la reconstruction et le

  5   développement, l'enjeu n'était pas le souhait de ces milliers de gens qui

  6   voulaient retourner, mais d'organiser ce retour. C'est vrai que j'ai senti

  7   toutes ces pressions quand je suis arrivé au ministre, mais j'ai senti ces

  8   pressions depuis le tout début, depuis le premier jour. Et quand vous

  9   sentez ces pressions de milliers de personnes qui veulent revenir en

 10   Croatie, en fait cette pression on ne la ressentait pas en tant que tel. Ce

 11   que l'on ressentait, c'était plutôt la pression au niveau politique et au

 12   niveau des médias.

 13   Ce fut moi, en fait, qui ai demandé à l'époque, au vu de la situation

 14   et vu que le pays que je représentais était attaqué, c'est moi qui ai

 15   demandé que l'on aborde la question publiquement. A partir du moment où

 16   c'est public, c'est en incluant également les représentants de la

 17   communauté internationale, de la diplomatie et tout autres personnes.

 18   Q.  Ma question était : à l'époque où vous avez été nommé ministère

 19   adjoint, il y avait des milliers de Serbes de Krajina qui essayaient de

 20   revenir en Croatie et qui ont été empêchés de le faire.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que ce sont de longues réponses,

 22   parce que la question de --

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Octobre 1995.

 24   M. MISETIC : [interprétation] C'était avant le 11 octobre ou après ? Parce

 25   que cela fait une différence, puisque cela va influencer directement les

 26   connaissances du client.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Après.

 28   Q.  Après, puisque vous avez été nommé ministre adjoint. Il y avait à ce

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  1   moment-là des milliers de Serbes de Krajina qui essayaient de revenir en

  2   Croatie et qui ont été empêchés de le faire.

  3   Est-ce que vous pouvez répondre à ma question par un oui ou par un

  4   non ?

  5   R.  Oui, il y avait des milliers de Serbes qui souhaitaient retourner chez

  6   eux. C'était leur droit certainement. Ils provenaient d'anciens territoires

  7   occupés, mais il y avait aussi des Serbes qui voulaient s'installer dans

  8   d'autres zones de Croatie.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une question sur des faits ici.

 10   Or, dans votre réponse, vous changez la question. La question était

 11   simplement de savoir s'il y avait des milliers de Serbes de Krajina qui

 12   essayaient de revenir. Puis dans votre réponse vous nous dites : oui, il y

 13   avait des milliers de Serbes qui souhaitaient revenir, puis vous commencer

 14   à rentrer dans toutes sortes de nuances.

 15   La question est : est-ce qu'il y avait des milliers de Serbes qui

 16   essayaient de revenir en Croatie --

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ok.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui ont été empêchés de le faire.

 19   Si à la fin de votre témoignage, vous souhaitez revenir pour apporter

 20   des précisions, vous pouvez le faire. Mais maintenant je vous demande de

 21   répondre à la question telle qu'elle vous a été posée.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le ferai.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, poursuivez.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.

 25   Il y avait des milliers de Serbes qui souhaitaient revenir en Croatie, mais

 26   aucune pression n'était ressortie comme quoi ce retour devait se faire

 27   immédiatement. Je ne peux qu'expliquer une chose par rapport à votre

 28   question, parce que j'ai quand même fait plusieurs analyses dans la

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  1   fonction qui était la mienne. Il faut préciser de quels Serbes, dans

  2   quelles régions de Croatie, parce qu'ils pouvaient revenir sans que cela ne

  3   pose aucun problème dans les deux tiers du territoire de la Croatie.

  4    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

  5   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'ai constaté que, dans ma question

  6   précédente, la réponse est affirmative. Puis le témoin change la question

  7   d'une telle manière que l'affirmation n'est plus aussi claire. Alors je

  8   m'en remets à vous, c'est à vous de faire la différence entre souhaiter,

  9   vouloir, essayer et la pertinence que tout cela peut avoir.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Peut-être justement il y a ce problème de

 11   nuance du fait de l'interprétation.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si c'est un problème d'interprétation,

 13   j'invite une fois de plus ceux qui peuvent justement préciser et apporter

 14   des précisions, de le faire. J'invite les interprètes à utiliser à chaque

 15   fois le même mot plutôt que d'essayer de trouver des équivalents.

 16   Alors, Madame Gustafson, reformulez votre question sans utiliser le mot

 17   "essayer." Alors je vous invite peut-être à reposer cette question.

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci.

 19   On peut peut-être regarder le document 65 ter, 4333, en page 12, en anglais

 20   et en page 14 en B/C/S.

 21   Q.  Il s'agit d'un document en date du 25 octobre 1995, c'est le procès-

 22   verbal d'une réunion qui s'est tenue entre le président Tudjman et un

 23   certain nombre des ministres de son gouvernement ainsi que de ses

 24   conseillers. Le Dr Ivica Kostovic, il était vice-premier ministre à

 25   l'époque, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  J'aimerais que l'on regarde le passage où il parle, qui se trouve en

 28   bas de cette page, en bas aussi en B/C/S. Je cite :

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  1   "Président : Avant que ne partiez hier, Galbraith a fait pression sur moi.

  2   Aujourd'hui, Satuk est venu de Belgrade. Ils ont trouvé une demande du côté

  3   américain concernant la réception de 3 000 Serbes qui souhaitaient rentrer,

  4   plus 1 500 qui demandent le retour de leur bien. Je leur ai dit, bien sûr,

  5   rien avant les élections et en plus de la procédure habituelle, il n'y a

  6   que cette démarche humanitaire.

  7   "Je vous demande maintenant quelles sont vos instructions politiques avant

  8   que vous ne partiez, de manière à ce que nous puissions donner au MUP ainsi

  9   qu'au ministère des Affaires étrangères …"

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Le texte se poursuit dans les deux

 11   versions, à la page suivante s'il vous plaît. Le président continue en

 12   disant :

 13   "La procédure habituelle lorsque cela est justifiable, que ce soit une

 14   réunification familiale ou autre chose, qu'ils rentrent individuellement

 15   mais qu'il n'y ait aucune pression de Satuk ou de Batok ou quiconque

 16   d'autre. Le retour de quelque 300 000 qui sont partis ne devrait pas nous

 17   gêner du tout."

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Puis j'aimerais passer un peu plus bas sur

 19   cette page, c'est M. Jarnjak qui parle, page 16 en B/C/S.

 20   Jarnjak dit :

 21   "Il téléphone tous les jours, Zivko Juzbasic téléphone tous les

 22   jours. J'ai une liste de 50 personnes environ," et cetera, "et je lui ai

 23   dit, mon frère, tu n'es rien dans ce pays."

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 25   Q.  Juste une question, Zivko Juzbasic était un Serbe délégué au parlement,

 26   n'est-ce pas, à l'époque ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  A la page suivante en B/C/S, Tudjman dit :

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  1   "Il y a 10 000 personnes devant notre bureau qui veulent rentrer."

  2   Puis Kosovic dit :

  3   "8 000 à Belgrade. Deux à Rebic et ce Galbraith m'a donné une liste

  4   de 3 000 noms."

  5   Puis Tudjman prend la parole, puis Jarnjak continue en disant :

  6   "Président, selon les informations les plus récentes, il les envoie

  7   au Kosovo, 90 % se sont échappés à Nis. Ceux qui sont partis travailler se

  8   sont échappés à Nis. Une partie de ceux de Nis sont venus à Zagreb,

  9   maintenant et disent qu'ils préfèrent entrer en Croatie ou de faire

 10   n'importe quoi plutôt que de rester. C'est cela l'essence même de leur

 11   désir de rentrer. Ils peuvent le matérialiser de cette façon."

 12   Puis le président dit :

 13   "Individuellement, un processus individuel."

 14   Puis Zarko Domljan répond :

 15   "Je crois que c'est une décision qui devrait être prise si le

 16   processus se fait de manière individuelle. Chacun qui est citoyen a le

 17   droit mais il doit le prouver, si nous allons devoir accepter ces listes."

 18   Puis le président Tudjman reprend en disant :

 19   "Nous n'accepterons aucune liste mais nous allons traiter la question

 20   individuellement."

 21   Puis à la prochaine page, en anglais, Kosovic dit :

 22   "J'aimerais ajouter quelque chose, M. le président, puisque cela

 23   faisait partie de mon programme. La question c'est que les gens voudraient

 24   rentrer, parfois ils disent : 'Ma mère est très âgée, elle a 86 ans, elle

 25   est à Nis,' et cetera. Donc il serait bien de sélectionner les vieillards

 26   et les malades afin de traiter ces cas-là individuellement."

 27   Jarnjak continue en disant :

 28   "C'est une tâche qui devrait être accomplie par les humanitaires."

Page 20385

  1   Kosovic dit :

  2   "Il y a des officiers militaires dont les parents voudraient rentrer.

  3   Susak dit :

  4   "M. le président, une instruction devrait être publiée afin

  5   d'accélérer le processus de manière à ce que nous ayons une solution de

  6   rechange pendant que les autres décisions suivent."

  7   Puis la page d'après, en B/C/S, Jarnjak dit :

  8   "Je vais publier un ordre demain que l'on décompte le nombre qui est

  9   déjà rentré. Une partie c'est le retour et nous avons permis le retour de

 10   certains qui posaient un problème humanitaire. Donc je crois qu'il y a déjà

 11   eu une centaine de familles réunies. Nous allons ensuite publier et dire

 12   oui a de telles politiques, à savoir la méthode de réunification familiale,

 13   le traitement de cas individuel, mais pas de retour en masse."

 14   Enfin, à la page d'après, le Dr Kosovic dit :

 15   "J'ai menti en disant que quelques milliers sont arrivés, donc il

 16   faut faire les choses avec beaucoup de soin, car cela pourrait provoquer…"

 17   M. Jarnjak répond :

 18   "Vous n'avez pas menti, vous avez écrit comme d'habitude."

 19   Ce procès-verbal reflète, n'est-ce pas, le fait qu'il s'agisse de vouloir

 20   ou d'essayer de faire quelque chose ? Il y avait des milliers de Serbes de

 21   Krajina qui voulaient se rendre en Croatie et que les hauts responsables

 22   prenaient des mesures afin d'empêcher cela, n'est-ce pas ?

 23   R.  Franchement je n'en sais rien. Je ne sais pas s'il y a eu des

 24   tentatives concrètes. Je ne peux que vous dire ce qui s'est produit après

 25   mon arrivée. D'après ce que j'ai entendu ici, rien ne nous a été demandé.

 26   Q.  Vous n'étiez pas responsable d'empêcher les gens de traverser la

 27   frontière. Quel serait le lien avec votre poste ? -- 

 28   R.  Je dois reconnaître que, lorsque je suis arrivé, je n'ai vu personne

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  1   qui empêchait quiconque de rentrer. Au contraire, on faisait tout ce que

  2   l'on pouvait pour aider les gens à rentrer avec succès. Bien que les

  3   nombres de personnes étaient relativement faibles.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, vous avez montré un

  5   procès-verbal au témoin. Il vous dit qu'il n'en sait rien. Que voulez-vous

  6   lui demander de plus, vous avez poursuivi en lui demandant s'il pouvait

  7   commenter, vous avez donné votre interprétation de ce que signifie cet

  8   échange. Il se pourrait qu'il n'ait aucune connaissance précise ou aucune

  9   information qui lui montre que votre interprétation du procès-verbal n'est

 10   erronée. Apparemment il n'a pas d'information, en tout cas c'est ce que

 11   j'ai compris dans sa dernière réponse.

 12   Donc je vous demande de bien vouloir nous dire ce que la Chambre peut

 13   bien faire de cet échange étant donné ce qu'a dit le témoin.

 14   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais poser

 15   encore une question, si vous me le permettez.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, si vous avez des questions. Mais

 17   essayez, si je puis dire, si vous avez un but en fin de parcours, merci de

 18   bien vouloir vous approcher de ce but.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 20   Q.  Vous avez dit tout à l'heure et vous parliez du leadership croate, vous

 21   disiez que les leaders croates étaient d'accord avec l'idée de retour, le

 22   retour de toutes les personnes chez eux. Mais vous ne savez pas si vos

 23   commentaires dans notre procès-verbal reflètent véritablement ce que les

 24   leaders de plus haut niveau, les leaders croates de plus haut niveau

 25   décidaient concernant le retour des Serbes de la Krajina, n'est-ce pas, le

 26   cas ?

 27   R.  Bien évidemment, je ne sais pas cela. Je ne peux que déduire cela

 28   d'après les cas que j'ai traités. Tout ce que nous avons fait en accord

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  1   avec la communauté internationale personne ne m'a demandé de revenir sur

  2   ces décisions ou personne ne m'a demandé de donner tel ou tel ordre.

  3   Q.  Je voudrais poser encore une question sur ce point, puisque vous avez

  4   formulé des commentaires et des critiques concernant la compréhension de

  5   l'ambassadeur Galbraith, concernant le retour des Serbes de la Krajina.

  6   Saviez-vous qu'à l'époque, à savoir le 25 octobre, saviez-vous que

  7   l'ambassadeur Galbraith était en possession d'une liste de 3 000 Serbes qui

  8   voulaient rentrer, liste qu'il présentait aux leaders croates; est-ce que

  9   vous le saviez ?

 10   R.  Non. Je voudrais expliquer quelque chose, si vous permettez. J'aurais

 11   été tout à fait satisfait si l'ambassadeur Galbraith aurait apporté cette

 12   liste au ministère pour que nous puissions entamer la procédure.

 13   Q.  Mais vous n'aviez pas votre mot à dire concernant le fait de savoir qui

 14   pouvait traverser ou ne pas traverser la frontière, ce n'était pas la

 15   responsabilité du ministre de la reconstruction cette liste, quelque chose

 16   qui relevait du ministère de l'Intérieur ou de l'immigration, n'est-ce pas

 17   ?

 18   R.  Tout à fait. C'est exact. Une fois que les gens se trouvaient en

 19   Croatie alors là, nous pouvions nous mettre d'accord avec eux concernant

 20   les différents soins et le logement notamment.

 21   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vois l'heure qui passe.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un moment approprié, je sais que

 23   M. Carrier souhaiterait --

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je voulais verser cette pièce au dossier.

 25   Monsieur le Président, je vous prie de m'excuser.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame la Greffière, s'il n'y a pas

 27   d'objection.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P2589.

Page 20388

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P2589 est versée au dossier.

  2   Monsieur Sterc, nous ne siégeons pas demain, ce qui signifie que nous vous

  3   demandons d'être de retour pour la fin de votre déposition, je pense,

  4   vendredi matin, à 9 heures dans cette même salle d'audience. Je vais

  5   répéter les mêmes instructions qu'hier, à savoir que vous ne devez parler à

  6   quiconque de votre témoignage que ce soit ce que vous avez déjà dit dans

  7   cette salle d'audience, ou ce que vous avez encore à dire vendredi.

  8   Est-ce que je peux demander à Mme l'Huissière de conduire le témoin en

  9   dehors du prétoire.

 10   [Le témoin quitte la barre]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de donner la parole à M. Carrier

 12   qui souhaite poser une question, je voudrais informer les parties de la

 13   chose suivante, et là, je pense à l'avenir.

 14   En date du 16 octobre, il n'y aura pas d'audience. C'est un vendredi. La

 15   semaine qui suit, à savoir le 19, 20, 21, et 22, ainsi que le 23 qui est un

 16   jour férié des Nations Unies, la Chambre ne siègera pas dans cette affaire.

 17   C'est donc notre semaine d'automne de suspension. Cela comprend le vendredi

 18   16 octobre ainsi que la semaine d'après.

 19   Monsieur Carrier.

 20   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Président, je vous prie de

 21   m'excuser. Tout d'abord, je crains que je tousse beaucoup aujourd'hui.

 22   Juste pour le procès-verbal, l'Accusation a reçu un rapport d'expert d'Ivan

 23   Pokaz. Je vous prie de m'excuser, il faut expurger cette partie car c'est

 24   confidentiel. Il ne faudrait pas que le nom soit inclus.

 25   L'Accusation a reçu un rapport d'expert.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je crois que ce rapport est public.

 28   M. KEHOE : [interprétation] C'est un document public.

Page 20389

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

  2   Mme la Greffière, je demanderais une expurgation à partir de la mention de

  3   la toux de M. Carrier, s'il vous plaît.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  5   [Audience à huis clos partiel]

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

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 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25   [Audience publique]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez. Nous avons déjà utilisé

 27   trois de vos cinq minutes.

 28   M. CARRIER : [interprétation] Je vais essayer de faire vite.

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  1   Oui, donc juste une question très rapide.

  2   Q.  Nous avons reçu donc un document de la Défense. Vous avez là le 9

  3   juillet 2009. Le document, il fait 148 pages. Il s'agit d'un rapport qui

  4   comprend quatre chapitres. Chaque chapitre comporte des annexes. A l'heure

  5   actuelle, l'Accusation n'a toujours pas reçu les annexes. Donc il y fait

  6   référence sans le document mais qui étaye des arguments présentés dans le

  7   document. J'ai regardé rapidement la version en B/C/S dans le système

  8   électronique, et là non plus, il n'y a pas d'annexes.

  9   Donc nous avons vu que c'était de cela de façon informelle avec la Défense

 10   Gotovina le 9 juillet 2009. L'Accusation -- on a dit à l'Accusation qu'on

 11   aurait très certainement un tableur ou un tableau dans lequel il y aurait

 12   les documents, une liste des documents et normalement on devrait le

 13   recevoir demain.

 14   La Défense Gotovina a aussi déclaré que du fait du manque de ressources en

 15   traduction, je ne devrais nous attendre à avoir une traduction en anglais

 16   de certains des documents qui se trouvent dans les pièces jointes, dans les

 17   annexes donc nous aurons la traduction plus tard, à une date ultérieure. 

 18   Le 10 juillet 2009, la Défense Gotovina a repris l'angle avec nous, et nous

 19   a dit qu'ils avaient jusqu'au 25 août 2009 pour nous donner les versions en

 20   anglais des documents qui seront employés qui sont utilisés par M. Pokaz,

 21   dans son rapport. Donc on aura en fait les traductions en anglais cinq

 22   jours avant le jour où cette personne viendra témoigner. De plus, ils se

 23   sont réservés le droit de donner en plus 40 pages supplémentaires mais,

 24   cette fois, c'est uniquement avant la déposition de ce M. Pokaz. Donc pour

 25   le compte rendu, nous voudrions savoir, nous voulons vous faire savoir pour

 26   le compte rendu que nous ne sommes pas sûrs -- que nous voulons avoir la

 27   version la plus complète du rapport avec les documents joints, traduits et

 28   si possible aussi avoir un exemplaire aussi du CV de M. Pokaz.

Page 20391

  1   J'en ai parlé avec M. Kehoe ce matin d'ailleurs et il m'a dit qu'il

  2   essaierait de nous arranger; sinon, nous devons absolument avoir tous ces

  3   documents pour pouvoir évaluer l'expertise de M. Pokaz pour pouvoir savoir

  4   quel est l'importance et l'utilité des opinions qu'il nous donne dans son

  5   rapport et pour savoir comment traiter de ce rapport surtout.  

  6   L'Accusation sait bien que le rapport en tant que tel n'a pas été

  7   traduit de façon officielle. Nous n'avons qu'un brouillon de traduction.

  8   Nous ne savons pas si nous aurons une traduction définitive une bonne fois

  9   pour toute. Si oui, il faudrait qu'il y ait une pagination pour l'instant

 10   les pages ne sont même pas numérotées donc on aura énormément de mal à

 11   essayer de remettre en ordre ce document.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ne rentrons pas trop dans

 13   les détails mais j'ai remarqué qu'il n'y avait pas de CV accompagnant le

 14   rapport. Il n'y a pas, on ne sait rien sur M. Pokaz.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Nous allons déposer tout cela aujourd'hui.

 16   C'est déjà dans mon e-mail. En ce qui concerne le reste du problème, la

 17   Chambre sait bien que nous voulons être traité de façon égale avec

 18   l'Accusation en ce qui concerne en tout cas la Défense Gotovina. Alors je

 19   trouve ça très étrange, je ne comprends pas très bien cette -- les 30

 20   jours, concernant le rapport de M. Theunens. Nous aussi, on n'avait peu de

 21   délai, on a quand même réussi à s'en sortir dans les 30 jours pour préparer

 22   notre contre-interrogatoire, et le rapport de M. Theunens faisait carrément

 23   700 pages.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai une chose à dire : la Chambre

 25   prendra en compte toute objection mais au cas par cas uniquement. Donc si

 26   j'ai bien compris, l'Accusation -- vous dites que l'Accusation n'a pas

 27   suivi le règlement, l'égalité des armes cela veut dire que nous on ne suit

 28   pas les règles puisque vous ne les avez pas suivies précédemment. C'est

Page 20392

  1   bien cela ? Ça ne vous va pas.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Non. Au titre de l'article 20 de -- l'article

  3   1, au titre de l'article 21, nous devrons être au même

  4   -- nous devrons -- c'est la façon dont j'ai compris l'article 21. Donc mais

  5   de toute façon, moi, je pense que c'est un -- nous comprenons bien votre

  6   irritation. Nous savons -- sachez que nous faisons de notre mieux à l'heure

  7   actuelle. Nos traducteurs sont des êtres humains, ce ne sont pas des

  8   machines. On va le plus vite qu'on veut. On donnera le rapport au fil de

  9   l'eau, sur la mesure qu'on a des traductions et qu'on aura aussi des

 10   traductions venant du CLSS.

 11   Sur le fond, je ne pense pas qu'il n'y ait pas de raisons de dire quoi que

 12   ce soit. Ils vont au contre-interrogatoire, enfin je ne voudrais pas

 13   employer un langage trop fort mais dire qu'ils ne vont pas contre-

 14   interroger M. Pokaz, et je considère que c'est encore une option qui est

 15   ouverte. Je considère que c'est allé un peu loin quand même. Cela dit, M.

 16   Theunens lui a quand même réussi à soumettre, à présenter quelque chose

 17   qu'on a eu uniquement trois semaines avant sa déposition. Nous, on a tout

 18   reçu de la part de M. Theunens cinq jours avant la déposition de M.

 19   Theunens.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais nous comprenons les détails. Nous

 21   avons bien compris vos problèmes. M. Carrier vous a bien expliqué quel

 22   était son problème. Il nous dit -- il vous dit surtout qu'il a du mal à se

 23   préparer au contre-interrogatoire de ce témoin expert. Donc la Chambre

 24   invite les parties à essayer de trouver une solution à l'amiable, qu'il lui

 25   arrive à se parler, qu'il arrive à trouver une solution entre eux. Si ce

 26   n'est pas possible de façon amiable, dans ce cas-là, revenez auprès de nous

 27   et nous prendrons une décision.

 28   Alors sachez qu'on n'est pas en train de vous dire -- vous êtes arrangé

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  1   d'ici vendredi, nous aimerions quand même que vous essayez d'avoir trouvé

  2   une solution, sachant que tout le monde a des contraintes. Si on en arrive

  3   à un moment où la Chambre doit intervenir bien sûr, elle interviendra mais

  4   essayez quand même de vous arranger à l'amiable.

  5   Il y a un autre point que nous aimerions aborder à propos du mois d'août.

  6   En ce qui concerne les délais de l'Accusation pour le contre-interrogatoire

  7   du témoin, celui du témoin expert qui est celui qui est censé témoigner le

  8   24 juillet. Vous avec tout reçu déjà.

  9   M. CARRIER : [interprétation] Je crois que oui.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 11   Dans ce cas, nous nous retrouverons --

 12   M. CARRIER : [interprétation] J'ai une chose à rajouter. Je tiens à vous

 13   dire que je ne vais pas être dans le pays donc je ne vais pas pouvoir

 14   m'entretenir avec M. Misetic.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je pense que vous avez des

 16   éminents confrères qui seront capables de renter en contact avec M. Misetic

 17   et de donner des consignes. Vous pouvez l'appeler aussi il y a des

 18   téléphones, ça marche.

 19   M. CARRIER : [interprétation] Très bien. C'est une très bonne idée.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

 21   Bien. Nous allons maintenant lever la séance et nous reprendrons donc

 22   vendredi matin à 9 heures.

 23   --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le vendredi le 17

 24   juillet 2009, à 9 heures 00.

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