Page 20811
1 Le mardi 25 août 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire et
6 autour du prétoire. Alors on va nous aider.
7 Monsieur le Greffier d'audience, je vous demanderais de bien vouloir citer
8 l'affaire.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
10 Messieurs les Juges. Bonjour à tous.
11 Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina
12 et consorts.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier d'audience.
14 Avant de poursuivre avec la déposition du témoin, je souhaiterais que
15 nous passions à huis clos partiel.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs
17 les Juges, nous sommes à huis clos partiel.
18 [Audience à huis clos partiel]
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 20812
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 [Audience publique]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier d'audience.
12 J'imagine qu'il n'y a pas d'autres questions de procédure qui doivent faire
13 l'objet de discussions à ce stade-ci. Par conséquent, je propose, Madame
14 l'Huissière, que nous invitions le témoin à pénétrer dans le prétoire.
15 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Afin de gagner du temps, Monsieur le
16 Président, je demanderais en attendant que le témoin pénètre dans le
17 prétoire que l'on affiche à l'écran la pièce à conviction P2604, page 38,
18 s'il vous plaît.
19 [Le témoin vient à la barre]
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Bajic.
21 Monsieur Bajic, un petit rappel : tout d'abord, sachez que la déclaration
22 solennelle que vous avez prononcée hier au début de votre déposition
23 continue d'avoir un caractère contraignant pour vous, c'est-à-dire que vous
24 vous engagez à nous dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité.
25 LE TÉMOIN : MLADEN BAJIC Reprise]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je vous invite à
28 présent à poursuivre votre contre-interrogatoire.
Page 20813
1 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
2 Contre-interrogatoire par Mme Gustafson : [Suite]
3 Q. [interprétation] Monsieur Bajic, bonjour.
4 Une question à propos du registre KT, que nous évoquions ici hier, et c'est
5 une question que j'ai omise de vous poser hier.
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous invite à reporter votre attention
7 sur la deuxième entrée, entrée 796.
8 Q. C'est une des entrées que nous avions examinée, souvenez-vous, hier.
9 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je propose que nous passions à présent à
10 la page suivante du registre puisque y figure la suite de cette entrée.
11 Q. Vous voyez à la colonne 32 qu'il est dit l'intitulé dit : "Jugement ou
12 décision première instance."
13 Cette entrée correspond à la date du 6 décembre 1996 et fait référence au
14 transfert de ce dossier vers le bureau du procureur municipal de Knin.
15 J'aurais souhaité que vous nous confirmiez que cette entrée fait
16 effectivement référence à un transfert de dossiers qui a trait à l'arrêt
17 des activités du bureau du procureur militaire à l'époque en décembre 1996,
18 et que, par conséquent, l'on prévoit de transférer l'ensemble des dossiers
19 existant depuis les bureaux du procureur militaire de Split vers les
20 bureaux du Procureur civils.
21 Est-ce exact ? Est-ce que j'ai bien compris cette entrée ?
22 R. Oui. En fait le 6 décembre 1996, les bureaux du procureur militaire et
23 les tribunaux militaires ont effectivement cessé de fonctionner. Ils ont
24 été aboli et toutes les affaires en suspens et pour lesquelles aucune
25 décision n'était tombé étaient saisies de ces affaires, les bureaux du
26 procureur ordinaires et les affaires étaient déposées au bureau du
27 procureur du comté de Split où on les trouve encore d'ailleurs à cette
28 date-ci et ce dossier-là fait référence au bureau du procureur de Zadar, la
Page 20814
1 date étant le 6 décembre et d'où la référence -- le numéro de référence qui
2 apparaît ici.
3 Q. Contrairement à ce transfert de l'ensemble des dossiers de 1996 --
4 décembre 1996, si l'on suppose qu'un bureau du procureur civil est saisi
5 d'un dossier dans des circonstances dans lesquelles le suspect a été
6 démobilisé avant l'établissement de l'Accusation dans des circonstances
7 dans lesquelles on s'est aperçu que le suspect n'était pas membre de
8 l'armée croate, ceci figurerait en entrer dans la colonne 26 de ce
9 diagramme où il est dit : "Transmis à un autre bureau du Procureur de la
10 république."
11 Est-ce exact ?
12 R. Oui.
13 Q. Merci. Je vous propose de passer au sujet suivant à présent. Il s'agit
14 du fait que les commandants étaient tenus de déposer des plaintes au pénal
15 et vous avez déposé hier et vous nous avez parlé de cette obligation qui
16 est faite aux membres des institutions de l'Etat de déposer des plaintes au
17 pénal à partir du moment où ils ont connaissance d'un crime, et ce que
18 j'aimerais vous poser comme question est la suivante : est-ce que vous avez
19 eu connaissance de commandement Suprême dans l'armée croate et de leurs et
20 j'aimerais vous poser des questions à propos de commandants croates et de
21 leurs attitude face à leurs subordonnés ?
22 Ma première question est la suivante : vous nous avez dit hier dans
23 votre déposition que vous n'étiez pas un soldat professionnel; est-ce que
24 vous avez des connaissances spécialisées, ou est-ce que vous avez été formé
25 aux obligations faites aux commandants de l'armée croate, s'agissant de
26 l'attitude qu'ils doivent adopter vis-à-vis de leurs subordonnés ?
27 R. Non, je ne suis pas un soldat professionnel et je n'ai suivi
28 aucune formation. En fait, la réponse que je vous ai apportée se fonde sur
Page 20815
1 le droit pénal et les dispositions générales du droit pénal, article 141 du
2 code pénal de l'époque qui prévoit que toutes les instances de l'Etat, et
3 tous les pouvoirs publics, toutes les institutions de l'Etat étaient tenues
4 de faire référence aux forces de l'ordre, de déposer une plainte, de
5 signaler tout délit au pénal aux forces de l'ordre à partir du moment où
6 elles en ont connaissance y compris tout délits commis par les commandants
7 de leurs unités.
8 Q. Merci.
9 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous invite à présent à examiner
10 la pièce à conviction P1007.
11 Q. Dans votre déposition d'hier, l'on vous a posé la question de la
12 différence entre les procédures au pénal et les procédures disciplinaires.
13 Vous nous avez dit que les procédures pénales se distinguaient nettement
14 des procédures disciplinaires, et vous nous avez dit que les procureurs
15 militaires et les tribunaux militaires n'avaient strictement rien à voir
16 avec les questions de procédure disciplinaire.
17 R. Oui, c'est exact.
18 Q. S'agissant -- compte tenu du fait que vous nous avez dit qu'il
19 s'agissait de deux systèmes très différents, j'aimerais vous poser à
20 nouveau la question de savoir si vous avez eu quelle qu'information que ce
21 soit portant sur les structures ou le fonctionnement de système permettant
22 d'imposer la discipline militaire, système qui aurait été en place au
23 moment de l'opération Tempête; est-ce que vous avez quelque connaissance
24 spécialisée en la matière ?
25 R. Non, je n'en ai pas. Tout ce que je savais se limitait à ce qu'un
26 juriste saurait.
27 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous invite à reporter votre attention
28 sur la page 2 de la version anglaise, et page 2 de la version en B/C/S,
Page 20816
1 également.
2 Q. Monsieur Bajic, pourriez-vous reporter votre attention sur l'article 3,
3 s'il vous plaît, de ce document, de cette loi ?
4 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Puis passons à la page suivante, si vous
5 voulez bien, dans la version anglaise. Ce qui m'intéresse particulièrement
6 c'est le point 7 de l'article 3.
7 Q. Vous voyez qu'il est dit que les violations du code de discipline
8 militaire incluent le fait de commettre un crime pour lequel des procédures
9 ont été entamées ex officio.
10 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous invite maintenant à passer à la
11 page 10 en anglais, page 4 en B/C/S.
12 Q. Toujours article 31, paragraphe premier, où il est dit :
13 "Dans les situations dans lesquelles l'officier agréé s'aperçoit que le
14 délit de violation de la discipline militaire est également un délit au
15 pénal, il doit être saisi de l'affaire par les canaux habituels. Le
16 procureur agréé, s'il estime que cela est dans l'intérêt du service, il
17 lancera également des procédures disciplinaires."
18 L'on vous a demandé hier, ce qu'il en était des possibilités d'enquête ou
19 d'instruction parallèle par les autorités militaires, par les autorités de
20 la police militaire. Ces questions n'étaient pas très spécifiques,
21 s'agissant du type d'instruction. Seriez-vous d'accord pour affirmer comme
22 le disent les articles du code de discipline militaire qu'un commandant
23 peut effectivement mener, imposer des disciplines -- peut mener
24 parallèlement une enquête disciplinaire et une instruction pénale ?
25 R. Oui, c'est absolument ce que je disais hier. Les procédures pénales se
26 distinguent nettement des procédures en matière de discipline militaire, et
27 moi, j'évoquais hier les procédures disciplinaires -- j'évoquais hier, les
28 procédures pénales. En d'autres termes, oui, cela est possible.
Page 20817
1 Q. Merci. Je souhaiterais passer au sujet suivant, à présent.
2 On vous a posé des questions à propos des affaires dont était chargé le
3 bureau du procureur militaire, et la question que je souhaite vous poser
4 est la suivante : le procureur militaire de Split, a-t-il, à votre
5 connaissance, à quel que moment que ce soit, renoncé à engager des
6 poursuites ou abandonner des poursuites en raison précisément du volume de
7 travail excessif ?
8 R. Non, et à vrai dire je suis très heureux que vous me posiez la
9 question. Permettez-moi en effet de dissiper tout doute qui pourrait peser
10 sur la conduite du bureau du procureur militaire.
11 J'ai essayé de l'expliquer hier, et je vais essayer de préciser les choses
12 aujourd'hui. Toutes les plaintes au pénal déposées auprès du bureau du
13 procureur militaire de Split, que ce soit contre X ou contre une personne
14 identifiée, étaient reçues par nous, étaient consignées au registre et
15 traitées. En fait, il y avait cinq ou six procureurs militaires et
16 substituts du procureur militaire, mais ceci n'avait strictement aucun
17 impact sur la qualité de leur travail ou sur le sort qui était réservé aux
18 affaires dont ils étaient saisis. S'ils les mettaient de côté ou pas, en
19 fait, le traitement se faisait au rythme auquel on recevait les plaintes,
20 et celles qui n'avaient pas été traitées le 6 décembre 1996, ont été
21 indiquées comme tel et étaient transmises au bureau du procureur de la
22 république. Ensuite l'on closait le dossier en respectant la procédure
23 prévue.
24 Q. Merci. Si l'on se fonde sur l'analyse que nous avons faite des
25 registres KT, au cours des mois d'août et de septembre 1995, le procureur
26 militaire de Split a reçu au total cinq plaintes portant sur des auteurs
27 connus de crime, qui sont liés à l'acte d'accusation de l'affaire qui nous
28 intéresse aujourd'hui. Il s'agit, comme je l'ai dit, essentiellement
Page 20818
1 d'activité de pillage, de destruction et de meurtre dans un certain nombre
2 de municipalités du secteur sud au cours des mois d'août et de septembre.
3 Il s'agit de quatre affaires ayant trait à des vols aggravés ou meurtre, et
4 plus généralement, lorsque l'on analyse ces mêmes registres, et ce, jusqu'à
5 la date du mois de mars 1996, on s'aperçoit qu'il y a un total de 31
6 plaintes pertinentes dans l'acte d'accusation de cette affaire, deux pour
7 meurtre, l'une pour vol, et l'autre pour vol à main armée. Par ailleurs, il
8 y a 18 autres plaintes au pénal qui ont trait à du pillage dans des zones
9 libérées suite à l'opération Tempête mais qui n'ont strictement rien à voir
10 avec l'acte d'accusation de l'affaire qui nous intéresse ici, parce
11 qu'elles ne sont pas déroulées ces activités au moment qui est couvert et
12 dans les lieux couverts par l'acte d'accusation.
13 Puis on vous a posé des questions à propos du nombre de plaintes qui sont
14 pertinentes dans le cadre de cet acte d'accusation et ont été reçues au
15 mois d'août. Dans le cadre de l'entretien que vous avez eu avec un
16 responsable du bureau du Procureur, vous avez indiqué que le nombre de
17 crimes en fait était nettement plus important. Page 7 de votre déclaration
18 écrite au bureau du Procureur, mais vous nous dites également que les
19 bureaux du procureur civil ont également été saisis d'un certain nombre
20 d'affaires; et vous indiquez que pour autant que vous puissiez vous en
21 souvenir, la plupart des crimes avaient été commis au mois de septembre,
22 octobre et novembre. Mais vous dites que vous n'en aviez pas fait
23 d'analyse, mais que des rapports en faisant état avaient été transmis au
24 bureau du ministère de la Justice chargé de la coopération avec le TPY.
25 Donc j'aimerais simplement apporter quelque précision sur les
26 informations que vous nous apportiez sur le nombre de crimes commis à
27 différents moments.
28 Est-il exact d'affirmer que selon vous, la plupart des crimes avaient
Page 20819
1 été commis en septembre, octobre, et novembre et que vous tirez ces
2 informations essentiellement de rapports que la Croatie avait envoyé elle-
3 même au TPY; est-ce effectivement de là que vous tirez essentiellement vos
4 informations ?
5 R. Oui, c'est exact. Ce que je précise au point 7 du document qui fait
6 état de ma discussion que j'ai eue avec vous à Zagreb, est un élément que
7 je peux confirmer aujourd'hui. En effet, c'est ainsi que je vois les
8 choses. Les informations que vous avez présentées qui émanent des archives
9 du bureau du procureur militaire, ces informations sont tout à fait exactes
10 et précises. A l'époque où j'étais substitut du procureur militaire de
11 Split, je faisais -- je comprenais les choses de la manière suivante, à
12 savoir que la plupart des documents étaient déposés auprès du bureau du
13 procureur de la République de Sibenik, de Sinj, de Zadar, de Split. Je n'ai
14 eu connaissance des chiffres précis que plus tard en me fondant sur les
15 informations émanant du ministère de la Justice de la République de
16 Croatie, information que le ministère a présentée à la fin de 1995 au
17 moment où le ministère demandait au bureau du procureur de faire état au
18 ministère à intervalle régulier de toutes les questions qui avaient trait à
19 l'opération Tempête. Je me souviens qu'en 1993, une analyse de toutes les
20 affaires de ce type avait été réalisée et elle contenait des informations
21 des bureaux du procureur de Zadar, Sibenik, Split, Dubrovnik, et bien au-
22 delà. L'analyse ensuite était destinée au ministère de la Justice lequel
23 ministère était ensuite chargé de transmettre cela à l'ensemble de la
24 communauté internationale.
25 Les informations qui étaient contenues dans ces analyses --
26 Q. Merci, Monsieur Bajic. A vrai dire, je ne souhaitais pas que vous nous
27 fournissiez des informations aussi détaillées. Merci beaucoup d'être aussi
28 précis mais tout ce que je souhaitais c'était connaître quelle était --
Page 20820
1 savoir quelle était la nature des informations dont vous disposiez. Si je
2 vous comprends bien, elles se fondaient essentiellement sur des rapports
3 portant sur les enquêtes et instructions menées, par conséquent, si je vous
4 ai bien compris, lorsque vous nous dites que la plupart des crimes ont été
5 commis en septembre, octobre, et novembre, vous vous fondez sur des
6 statistiques portant sur le nombre d'enquêtes et d'instructions menées;
7 est-ce exact ?
8 R. Oui, c'est exact.
9 Q. Merci. Il y avait une autre question que je souhaitais vous poser hier.
10 L'on a parfois soupçonné qu'une personne était membre de la HV parce qu'il
11 portait un uniforme militaire, et l'on s'est ensuite aperçu, au cours de
12 l'instruction, qu'en fait cette personne n'était pas membre de l'armée
13 croate. A quelle fréquence ce genre de situations se produisait-il, vous
14 nous avez dit dans votre déposition d'hier que ce genre de situation se
15 produisait assez fréquemment suite à l'opération Tempête, vous nous dites :
16 "En vertu des informations dont je disposais à l'époque, un grand
17 nombre de membres de l'armée croate avaient été démobilisés."
18 Vous ajoutez, je cite :
19 "Lorsque l'on faisait suite à une plainte au pénal, on s'apercevait que la
20 personne qui faisait l'objet de cette plainte n'était plus membre de
21 l'armée croate."
22 Ma question est la suivante, Monsieur : vous concluez que ce genre de
23 situation se produisait à intervalle assez régulier; lorsque vous concluez
24 cela, est-ce que vous vous fondez sur le nombre de plaintes au pénal dont
25 est saisi le bureau du procureur militaire de Split et qui ensuite étaient
26 transmises aux procureurs municipaux et que c'est à ce moment-là qu'on
27 s'apercevait que le suspect n'était en fait pas du tout membre de l'armée
28 croate ?
Page 20821
1 R. Mes conclusions se fondaient effectivement partie sur des connaissances
2 que j'avais à titre personnel, et puis en partie également sur le fait
3 qu'après l'opération Tempête - et c'est un fait bien connu - un grand
4 nombre des forces de réserve avaient été démobilisés. C'est pour cette
5 raison que pratiquement tous les rapports ou la grande majorité des
6 plaintes qui ont fait suite à l'opération Tempête avaient trait à des
7 forces de réserve démobilisées. C'est la raison pour laquelle un grand
8 nombre de personnes ont été introduites dans les rapports KT 262, personnes
9 figuraient dans les registres, personnes non identifiées, 4 122 dans les
10 registres KT, et par conséquent, je suis arrivé à la conclusion que la
11 plupart des personnes, qui faisaient l'objet d'une plainte, allaient être
12 dans l'intervalle devenues des civils et avaient, par conséquent, perdu ce
13 statut de membres de la HV.
14 Q. S'agissant à présent des plaintes dont étaient saisis les procureurs de
15 la république civils, donc vous ne disposiez pas d'information spécifique
16 quant au nombre de plaintes dont était l'objet des civils portant des
17 uniformes militaires, n'est-ce pas ?
18 R. Non, je ne disposais pas d'information spécifique ou d'indicateur me
19 permettant de le dire. En revanche, ce que je sais de source personnelle
20 c'est qu'à l'époque où j'étais procureur en 1996, lorsque les affaires
21 étaient traitées, il y avait un collègue du bureau du procureur municipal
22 de Split qui était là dans mes locaux, il se trouve qu'il m'a consulté et
23 m'a posé la question de savoir ce qu'il en était des décisions, des actes
24 d'accusation et de la façon dont il fallait les formuler. Suite aux
25 nombreux contacts que nous avions noués, nous avons obtenu des informations
26 complémentaires qui venaient s'ajouter aux statistiques que je mentionnais
27 il y a quelques instants.
28 Q. Sur les 49 plaintes au pénal figurant dans le registre KT qui ont trait
Page 20822
1 aux crimes de pillage, incendie volontaire ou meurtre consécutif à
2 l'opération Tempête dans la zone libérée, il y en a 19 à propos desquels
3 l'on dit, dans le registre, qu'elles ont été transmises aux procureurs
4 municipaux. Vous nous avez dit, dans votre déposition d'hier, que ces
5 affaires étaient transmises à ces procureurs soit parce qu'on s'était
6 aperçu que la personne n'était pas membre de la HV au moment du crime, ou
7 parce que l'on s'était aperçu que la personne avait cessé d'être membre de
8 la HV avant l'établissement de l'acte d'accusation.
9 Par conséquent, les informations précises sur lesquelles vous fondez votre
10 conclusion qui vous amène à dire -- vos conclusions portant sur les civils
11 portant l'uniforme, ces informations précises elles émanent en fait des 19
12 plaintes qui dont ont été saisis les procureurs municipaux ?
13 R. Je ne peux pas vous dire exactement où j'ai trouvé ces informations, si
14 elles émanent des affaires elles-mêmes, ou si au contraire elles sont
15 issues de conversations que j'ai eues l'occasion d'avoir avec d'autres
16 procureurs, saisis de ces affaires.
17 Q. Merci.
18 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je propose que l'on passe à la pièce de la
19 liste 65 ter numéro 7373 [comme interprété].
20 Q. Monsieur Bajic, il s'agit du premier intercalaire du classeur qui vous
21 a été remis par mes soins hier, et je vous invite à bien vouloir reporter
22 votre attention sur la copie papier de ce document.
23 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais obtenir quelques précisions en
24 attendant que nous abordions ce nouveau thème. Je ne suis pas sûr d'avoir
25 très bien compris la question posée par l'Accusation à la page 7, lignes
26 13, et ce, jusqu'à 15, où il est question de cinq rapports seulement
27 dressés contre des auteurs connus qui figuraient dans le registre KT.
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je pense que j'ai précisé qu'il s'agissait
Page 20823
1 des mois d'août et septembre. Donc il s'agit de rapports qui ont été reçus
2 en août et en septembre.
3 M. MISETIC : [interprétation] Ah, ce sont des rapports qui ont été reçus en
4 août et en septembre mais pas pour des crimes commis en août et en
5 septembre.
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est tout à fait cela.
7 M. MISETIC : [interprétation] Bien.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque le problème a été réglé, est-ce
9 que vous pouvez poursuivre ?
10 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
11 Q. Alors, Monsieur Bajic, il s'agit en fait du numéro 989 KT dans le
12 registre, donc il s'agit en fait de deux membres de la HV qui se livraient
13 à des activités de pillage à Knin le 31 août, et en l'espèce, ils ont été
14 arrêtés par la police militaire à la gare de Knin.
15 J'aimerais savoir si vous avez eu vous la possibilité d'examiner ce dossier
16 ?
17 R. Oui.
18 Q. [aucune interprétation]
19 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la page 8
20 pour la version anglaise et la page 7 pour la version B/C/S, je vous prie ?
21 Q. Au milieu de la page, vous voyez qu'il est fait référence à Marinko
22 Sabljic, l'accusé, et voilà ce qu'il a indiqué :
23 "A leur arrivée à Knin, Petar Vujnovac est resté dans un café pour boire un
24 verre alors que lui-même et Grubicic ont poursuivi leur route dans la
25 voiture de par la ville, ils y ont vu de nombreux camions et de nombreux
26 soldats qui se trouvaient près de maisons et qui chargeaient sur ces
27 camions différents objets."
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que la page suivante de la version
Page 20824
1 anglaise pourrait être affichée, je vous prie ?
2 Q. Au bas de cette page, il s'agit de la même page pour la version en
3 B/C/S mais au bas de la page il est question donc de Damir Grubicic qui
4 indique que :
5 "Dans les environs de l'endroit où ils souhaitaient garer leurs véhicules,
6 ils ont vu des membres de la HV qui prenaient plusieurs objets dans les
7 maisons et qui les plaçaient à bord des camions. Il est absolument évident
8 ou plutôt il est clair que l'un des soldats croates leur a demandé de
9 transporter certains de ces objets qui se trouvaient disséminer devant les
10 maisons de les transporter à la gare ferroviaire ce qu'ils ont accepté et
11 ils ont donc chargé cela à bord du camion."
12 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Nous allons maintenant étudier une autre
13 affaire.
14 Q. Je vais vous indiquer donc plusieurs éléments et ensuite je vous
15 poserai des questions.
16 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il s'agit de la pièce maintenant 7375 dont
17 je souhaiterais demander l'affichage.
18 Q. Il s'agit de l'entrée 997 KT dans le registre, et il s'agit en fait de
19 la condamnation d'un membre de la 113e Brigade qui se trouvait ou qui a
20 pillé dans le village de Kosovo le 2 septembre 1995, donc il a été inculpé
21 le 2 septembre 1995, le jugement ayant été rendu en février ou le 1er
22 février 1996.
23 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais en fait que nous
24 affichions la page 5 de la version anglaise et 4 de la version B/C/S.
25 Q. En haut de la page de la version anglaise, il est indiqué que :
26 "Depuis son inculpation, le soldat en question est devenu un membre
27 actif du 72e Bataillon de la Police militaire à Sibenik."
28 Si vous continuez votre lecture un peu plus vers le bas, vous voyez qu'au
Page 20825
1 bas du paragraphe assez important, il est indiqué :
2 "Qui plus est les raisons avancées par l'accusé pour expliquer que ce
3 crime a été commis et avancer à sa défense ne sont pas acceptables parce
4 que ce genre de crime ne doit pas devenir une règle pour permettre à
5 quelqu'un d'obtenir un objet dont il ou elle a besoin et ce n'est pas non
6 plus une justification lorsqu'il est indiqué que tout le monde 'prenait des
7 objets et les mettait à bord de camion, et donc pourquoi pas moi'."
8 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Si nous pouvons maintenant prendre la
9 pièce 7376 qui correspond au troisième intercalaire de votre classeur, il
10 s'agit de l'affaire 1000 pour le registre KT, et là, il s'agit de la
11 condamnation d'un certain nombre de membres de la 204e Brigade qui ont
12 pillé dans Golubic le 8 septembre 1995. Veuillez afficher la page 10 de la
13 version anglaise et la page 7 de la version B/C/S. Vous verrez qu'au bas de
14 la page anglaise, il est dit :
15 "D'après la défense avancée par le premier accusé, Davor Zdrilic, il
16 s'ensuit qu'au moment de la commission du crime reproché, il faisait partie
17 de l'armée croate et qu'il se trouvait dans la zone de Golubic avec de
18 jeunes conscrits où se trouvait également le commandement de la 204e
19 Brigade de la HV. Il a également été mentionné que devant le commandement
20 les conscrits plaçaient ou chargeaient dans des camions plusieurs objets
21 ménagers et il avait supposé que ces objets avaient probablement été amenés
22 là par quelqu'un."
23 Prenez le milieu de la page de la version anglaise et ce qui correspond à
24 la page suivante de la version B/C/S.
25 Il y est question du deuxième accusé et voilà ce qui est indiqué :
26 "Il a avancé lors de sa défense qu'à l'époque, il faisait partie de l'armée
27 croate qui se trouvait -- qui faisait partie du poste des gardes qui
28 surplombait Golubic et qu'après son service, il est venu à Golubic et près
Page 20826
1 du commandement, et qu'il y a vu un camion qui avait déjà été chargé de
2 différents objets et qu'étant donné qu'il voulait se rendre à Zadar, il
3 leur a demandé de le conduire à Zadar."
4 Si vous voulez bien prendre la page 13 de la version anglaise qui
5 correspond à la page suivante de la version B/C/S, la page suivante à celle
6 qui est affichée à l'écran, et au bas de la page anglaise et au milieu de
7 la page B/C/S, il est question du sixième accusé. Il est indiqué que :
8 "Le sixième accusé, Vlade Lukic, avait indiqué pour sa défense qu'il
9 se trouvait sur la position de la zone de Golubic, qu'il était responsable
10 des communications et qu'il se souvient que des objets requis pour les
11 unités avaient été pris, à ce moment-là, de cette zone. Pour ce qui est de
12 l'événement incriminé à proprement parler, il se souvient qu'il a lui-même
13 placé les outils dans le camion mais qu'étant donné que la nuit était déjà
14 tombée, il ne pouvait pas se souvenir si d'autres personnes avaient placé
15 d'autres objets dans le camion, il ne se souvenait de toute façon qu'elles
16 étaient ces objets. Toutefois, il se souvient que le commandant les avait
17 autorisé à prendre le camion pour transporter ces objets et qu'il leur
18 avait dit qu'il pouvait rentrer chez eux avec ce camion."
19 Alors je souhaiterais que la page suivante de la version anglaise soit
20 affichée ainsi que la page suivante de la version B/C/S. Cela se trouve
21 quasiment au bas de la page de la version anglaise mais au haut de la
22 version de la page de la version B/C/S.
23 Il est indiqué que :
24 "Le Témoin Miodrag Pavic a indiqué, lors de sa déposition, qu'à propos de
25 l'événement incriminé, ils étaient 15 conscrits militaires à avoir placé
26 des objets qui figurent dans l'acte d'accusation et ils les avaient placé à
27 bord du camion et ce conformément à un ordre qui avait probablement été
28 donné par le commandant de batterie, et que deux, à savoir lui-même et
Page 20827
1 Stipe Vulic, qui étaient tous les deux des conscrits, avaient été choisis
2 pour accompagner le camion; toutefois, il ne savait ni où ils allaient ni à
3 qui étaient destinés les objets en question."
4 Q. Donc nous avons lu ces dossiers, je fais appel à votre expérience de
5 procureur et de procureur militaire au moment de ces événements, et
6 j'aimerais savoir si vous convenez que ces affaires précisent certaines
7 indications telles que, par exemple, un grand groupe de soldats de la HV
8 qui plaçaient des objets dans des camions à Knin, il a également été d'un
9 soldat dont le nom figure à l'acte d'accusation qui est inculpé de vol, et
10 qui ensuite devient membre du 72e Bataillon de la police militaire. Il a
11 également été question d'un groupe important de conscrits qui ont placé des
12 objets dans un camion, et ce, devant le commandement de l'unité.
13 Donc est-ce que tous ces indices indiquent dans une certaine mesure le
14 pillage était accepté ou autorisé au sein des Unités de la HV à l'époque ?
15 R. Je suis entièrement d'accord avec vos conclusions, et d'ailleurs, je
16 dois réitérer quelque chose car tous les rapports de délit ou crimes pénaux
17 présentés au procureur de la république ont été traités, mais le problème
18 en fait, c'est qu'il y a des événements qui n'ont fait l'objet d'aucun
19 rapport. Vos conclusions sont tout à fait valables, je suis entièrement
20 d'accord avec la conclusion que vous avez avancée; de toute façon, nous
21 pouvons lire les explications, nous pouvons lire également les jugements
22 qui ont été rendus, nous pouvons lire les témoignages de témoins, les avis
23 des juges. Et, il faut savoir d'ailleurs que ce genre d'affaire a été assez
24 nombreux, parce qu'il ne faut pas oublier qu'il y avait cette modification
25 du statut des auteurs des crimes.
26 Donc je suis d'accord avec tout ce que vous avez dit.
27 Q. Alors j'aimerais juste vous poser une question plus secondaire.
28 Puisqu'il s'agit de la toute dernière affaire, ce jugement qui fut rendu le
Page 20828
1 5 novembre 1998, bien entendu, après l'adoption de la loi relative à
2 l'amnistie, hier, vous avez indiqué que cette loi portait essentiellement
3 sur des actes d'agression, de rébellion armée ou de conflit armé. Mais je
4 voudrais juste vous demander : cette précision, cette loi, cette loi
5 d'amnistie ne pouvait pas être utilisée, n'était pas valable pour des
6 crimes de pillage ou des meurtres ou assassinats commis après l'opération
7 Tempête, n'est-ce pas ?
8 R. Oui, c'est tout à fait exact. Dans le texte de la loi relative à
9 l'amnistie générale, texte de l'année 1996, il est stipulé que cette loi
10 est valable seulement pour les personnes qui ont commis leur délit ou crime
11 dans le cadre de la guerre. Mais cela n'est pas valable pour des crimes de
12 guerre, cela n'est pas valable pour des crimes commis à l'encontre du droit
13 humanitaire international, et cetera, et cetera.
14 Mais pour ce qui est de pillage, de vol, d'incendie commis après
15 l'opération, d'ailleurs pendant l'opération, cette loi relative à
16 l'amnistie générale ne pouvait pas être utilisée. D'ailleurs, ce n'était ni
17 son objectif ni son intention.
18 Q. Je vous remercie.
19 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais en fait demander le versement
20 au dossier de toutes ces affaires, donc il s'agit des pièces 7374 à 7376.
21 M. MISETIC : [interprétation] Pas d'objection.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 7374 de la liste 65 ter devient
24 la pièce P2608; la pièce 7375 devient la pièce P2609; et la pièce 7376
25 devient la pièce P2610.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Donc les pièces P2608,
27 P2609 et P2610 sont maintenant versées au dossier.
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous remercie.
Page 20829
1 Je souhaiterais que l'on affiche maintenant la pièce D1619.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, j'aimerais juste
3 demander une petite précision.
4 Car, Monsieur Bajic, vous avez dit que ces crimes pouvaient faire l'objet
5 de poursuite parce que la loi relative à l'amnistie était seulement valable
6 - et là, vous avez donné deux catégories de crimes - était seulement
7 valable, était seulement valable, disais-je, pour des crimes commis, des
8 crimes qui s'inscrivaient dans le cadre de la guerre.
9 Puis vous avez également mentionné que cette loi ne couvrait pas des crimes
10 de guerre ou des crimes commis en violation du droit humanitaire
11 international. Alors qu'en est-il des catégories qui justement n'étaient
12 pas couvertes par la loi relative à l'amnistie ?
13 Alors ces catégories donc elles n'étaient pas couvertes parce qu'il
14 s'agissait de violation de droit humanitaire international ou alors elles
15 n'étaient pas couvertes par la loi relative à l'amnistie parce qu'elles ne
16 s'inscrivaient plus dans le cadre d'un conflit armé?
17 Alors quelle est l'option valable ? Est-ce qu'il s'agit -- est-ce que c'est
18 une question de période, de cadre temporel, ou est-ce qu'il s'agit de la
19 nature du crime qui était pris en considération ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Les délits dont nous parlons, dont il est
21 question dans ces documents, ne pouvaient pas être exempts ou exonérés par
22 la loi relative à l'amnistie générale, parce qu'ils n'avaient pas été
23 commis dans le cadre de la guerre.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
25 Poursuivez.
26 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
27 Q. Monsieur Bajic, vous avez devant vous une invitation. Une invitation
28 qui porte la date du 27 septembre. Il s'agit en fait d'une invitation
Page 20830
1 envoyée à tous les procureurs militaires. Vous voyez qu'il s'agit d'une
2 invitation à une session de travail conjointe du 19 octobre 1995.
3 Est-ce que vous vous souvenez si vous avez assisté et participé à cette
4 réunion ?
5 R. Non, non, je n'ai pas été présent à cette réunion, parce que c'était
6 une invitation qui avait été envoyée à tous les procureurs militaires,
7 alors que, moi, j'ai été substitut du procureur. Je crois qu'il y avait
8 quatre ou cinq procureurs militaires. Il y en avait à Rijeka, Karlovac
9 également dans d'autres localités, c'est à eux que s'adressait cette
10 invitation. Les substituts des procureurs militaires ne participaient pas à
11 cette réunion -- à ces réunions, parce qu'ils n'étaient pas prévus par
12 l'invitation qu'ils y participent, donc je n'y suis pas allé.
13 Q. D'après cette convocation, il s'agit en fait de prendre en
14 considération les problèmes auxquels se confrontent les tribunaux
15 militaires ainsi que les bureaux des procureurs militaires dans le cadre
16 des activités professionnelles eu égard aux obligations juridiques du
17 ministère de la Défense et de l'armée croate notamment après les opérations
18 Eclair et Tempête.
19 Je souhaiterais maintenant -- il s'agit également d'assurer en fait que le
20 fonctionnement des organes du ministère de la Défense soit fait de façon
21 licite, et cetera, et cetera.
22 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais maintenant que la pièce
23 D1621 soit affichée.
24 Q. Alors je comprends que vous n'étiez pas présent à cette réunion, mais
25 j'aimerais quand même vous montrer les réunions qui ont été dégagées à ces
26 réunions, pour voir si vous pourriez aider la Chambre de première instance
27 au vu de ce que vous saviez.
28 J'aimerais en fait que vous vous intéressiez plus particulièrement aux
Page 20831
1 paragraphes 6 et 7, et vous voyez qu'il est dit :
2 "Que le ministère de la Défense engage les commandements des unités des
3 forces armées de la République de Croatie à agir conformément à la loi pour
4 ce qui est de la présentation de convocation de tribunaux aux membres des
5 forces armées…"
6 Ensuite il est dit :
7 "Que le ministère de la Défense engagera toutes les unités de la
8 structure de l'état-major et des commandements des districts militaires à
9 prendre en considération les demandes présentées par le tribunaux de façon
10 exhaustive et à temps. Il est également question de la présentation
11 d'élément de preuve nécessaire pour certaines affaires bien précises. Alors
12 au vu de votre expérience dans le bureau du procureur militaire à Split,
13 j'aimerais savoir si vous avez eu des problèmes avec les Unités de la HV et
14 les commandements des districts militaires pour ce qui était de présenter
15 les convocations au tribunal ou aux tribunaux de façon rapide et exhaustive
16 ? Je vous parle de la période qui suit l'opération Tempête.
17 M. MISETIC : [interprétation] Objection, car je ne sais pas quelle est la
18 base présentée pour cette question demandée au témoin, je ne sais pas
19 comment le témoin pourrait savoir si les tribunaux avaient des problèmes à
20 présenter leurs convocations -- à leurs convocations, parce que cela n'est
21 pas mentionné précisément dans ce document.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, voyons ce que le témoin a à
23 nous dire à ce sujet.
24 Est-ce que vous pourriez répondre à cette question, Monsieur ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Lors des réunions de travail telle que
26 celle-ci, il était justement souvent question des opérations des procureurs
27 militaires, des tribunaux militaires, il fallait que cela soit fait de la
28 façon la plus rapide possible. Il ne faut pas oublier qu'il y avait
Page 20832
1 fréquemment des changements d'adresse, des changements de localisation des
2 unités militaires. Il y avait des problèmes pour ce qui était des
3 communications qui n'étaient pas rapides lorsque certains documents étaient
4 demandés, lorsqu'il s'agissait en fait de signifier une convocation; très
5 souvent il fallait surseoir à une audience parce que le soldat n'avait tout
6 simplement pas reçu la convocation ou l'injonction, donc -- ou les soldats
7 ne faisaient pas -- faisaient peu de cas de ces injonctions, donc je peux
8 voir que les procureurs militaires et les juges des tribunaux militaires
9 ont essayé lors de ce genre de réunion d'obtenir une aide, au vu de leur
10 expérience. Voilà comment j'évalue toute la situation.
11 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
12 Q. Mais vous personnellement est-ce que vous avez eu des cas d'audience
13 qui avaient été différés parce que justement les soldats n'avaient pas été
14 au courant de leurs convocations ?
15 R. Oui, oui, nous avons eu ce genre d'affaires, ce genre de cas. Parce
16 que, comme je vous l'ai déjà dit, le problème était posé par les
17 changements d'adresses, le fait que le soldat ne se présentait pas au
18 tribunal c'était véritablement un problème en 1991 et 1992, parce qu'il y
19 avait un manque de respect vis-à-vis du système judiciaire militaire. Mais
20 les choses ensuite se sont améliorées.
21 Donc les conclusions que vous voyez portent sur l'aide qui était demandée
22 par le ministère de la Défense qui voulait en fait prêter main-forte au
23 ministère de la Justice.
24 Q. Je vous remercie. J'aimerais maintenant vous poser quelques questions -
25 -
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je m'excuse de vous
27 interrompre.
28 Vous avez donné lecture du paragraphe 7 au témoin, et ce paragraphe 7
Page 20833
1 semble porter essentiellement sur l'obtention d'élément de preuve, puis
2 ensuite vous avez posé une question, et cette question portait
3 essentiellement sur la signification des injonctions de tribunal, qui
4 semble faire l'objet du paragraphe 6. Donc je dois vous dire que je suis un
5 tant soit peu perplexe --
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, j'ai enchaîné à la suite d'une
7 réponse qui a été fournie par le témoin qui avait évoqué des problèmes de
8 signification d'injonction. J'ai juste demandé s'il avait eu lui-même une
9 expérience personnelle de ce genre de problème.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
11 Poursuivez alors.
12 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
13 Q. J'aimerais, Monsieur Bajic, vous poser quelques questions à propos du
14 rôle que vous avez eu -- ou du rôle de la police militaire qui est un rôle
15 de prévention de crime et un rôle d'identification et de détection des
16 auteurs des délits et crimes. Et dans votre déclaration vous dites au
17 paragraphe 14 en réponse à la Défense vous dites ce qui suit :
18 "Après qu'il a été établi qu'un délit a été commis, la police civile traite
19 le dossier."
20 Vous aviez dit hier que :
21 "Il fallait qu'il soit déterminé que l'auteur du crime soit bien un membre
22 de la police, et si cela avait été déterminé et avéré la police militaire
23 ensuite était saisie du traitement du dossier."
24 Puis hier vous avez développé un peu ce propos, et vous avez notamment --
25 ou plutôt, des questions vous ont été posées à propos de l'instance qui
26 avait compétence pour diligenter l'enquête dans ce genre d'incident, et il
27 avait été indiqué que lorsqu'il s'agit de membres inconnus dont on ne
28 connaissait pas les noms de membres de l'armée croate, qui se trouvaient
Page 20834
1 dans les environs de maisons qui prenaient feu, voilà ce que vous avez
2 répondu, vous avez dit :
3 "Vous savez, d'après ce que vous me demandez, il n'était pas clair qu'il y
4 avait suffisamment d'éléments permettant de soupçonner que ces membres de
5 la HV avaient commis ces crimes que les auteurs étaient tout simplement
6 inconnus et peut-être même des civils. Mais quelle que soit la situation,
7 quel que soit le cas, dans ce genre de situation, la loi indique que toutes
8 les mesures nécessaires et possibles doivent être prises pour obtenir les
9 éléments de preuve pour mener à bien une enquête et une enquête -- et une
10 instruction, et dans ce cas, la police militaire et la police militaire, à
11 savoir celle qui est le plus proche du lieu du crime, doit agir; si le
12 sauteurs ne sont pas connus - et là, les organes de compétence générale
13 doivent avoir la priorité, ce qui signifie qu'il s'agit de la police civile
14 - s'il y a des raisons de soupçonner que les auteurs sont des militaires,
15 et dans ce cas d'espèce, c'est la police militaire qui doit agir."
16 J'aimerais vous donner quelques exemples concrets qui figurent dans le
17 document P886.
18 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Si nous pouvions l'avoir à l'écran.
19 Q. Il s'agit du registre d'une Compagnie de la Police militaire de Knin,
20 registre ou main courante --
21 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, je vous prie,
22 afficher la page 4 de la version B/C/S et la première page de la deuxième
23 traduction anglaise qui est présentée en annexe de ce document ? Nous
24 allons maintenant regarder la page du 11 août. L'entrée qui nous intéresse
25 est l'entrée de 10 heures.
26 Q. Ici on voit que les informations sont reçues depuis la 40e Compagnie de
27 Sapeurs, ils font rapport de tir et d'incendie dans le village de Kovacic.
28 Dernière colonne, la colonne des remarques, il est écrit que la patrouille
Page 20835
1 Cobra 40, cette patrouille de police militaire a été envoyée, et que le
2 rapport de cette patrouille est joint.
3 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Passons maintenant à la 16 de la version
4 en anglais qui correspond aussi à la page 16 en B/C/S. Maintenant c'est une
5 entrée du 23 août qui vous nous intéresser; 8 heures 10, c'est-à-dire la
6 première.
7 Q. Information reçue du commissariat de police de Knin à quelque 100
8 mètres de la sortie de Grude après un tir, après un incendie, il y a eu une
9 détonation, et on soupçonne qu'un membre de l'armée croate ait incendié une
10 maison. Ma remarque patrouille envoyée, il s'agit de la patrouille Mosor
11 31, sur les lieux on a trouvé personne.
12 "Et aucun membre de la HV ont été vu en train d'incendier les maisons."
13 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Passons maintenant à la page 22 de la
14 version en anglais qui correspond à la page 20 de la version en B/C/S.
15 Rapport du 26 août 1995, 16 heures 41, c'est-à-dire l'entrée numéro 6.
16 Rapport provenant d'Ivan Peric, civil, propriétaire de la maison à Lukar.
17 Donc :
18 "Slavko Peric de la HV le menace ainsi que son fils dans le village de
19 Lukar. Une patrouille a été envoyée mais n'a pas trouvé présence de la HV
20 sur les lieux."
21 Pourrions-nous maintenant passer à la page 55 de la version anglaise, soit
22 à la page 38 en B/C/S, 9 septembre, entrée à 20 heures 10, c'est-à-dire la
23 première entrée. Rapport provenant du Commissariat de Police de Knin. Sur
24 la route vers Stara Straza, des personnes en uniforme ont été observées en
25 train d'incendier les maisons.
26 Remarques :
27 "Etant donné que la nuit est tombée, il vaut mieux envoyer les patrouilles
28 demain."
Page 20836
1 Voici ma question : nous avons regardé plusieurs entrées où le Commissariat
2 de Knin reçoit des rapports de crimes éventuellement commis par les membres
3 de la HV, envoi donc des patrouilles pour vérifier que les patrouilles
4 seront envoyées le lendemain. Mais donc conviendriez-vous avez moi que ce
5 sont des exemples où il y a raison de soupçonner que les auteurs sont bel
6 et bien des membres des forces armées et que donc la police militaire doit
7 répondre et prendre en charge ces incidents ?
8 R. Oui, tout à fait, je suis d'accord avec vous.
9 Q. Merci. Hier, on vous a posé une question à propos de ce qu'un
10 commandant de la HV est tenu de faire, s'il est averti de crime qui aurait
11 été commis. On vous a posé des questions à propos de la fréquence à
12 laquelle il doit faire rapport de ce type de crime à la police militaire.
13 Vous avez répondu en disant tout d'abord que vous n'étiez pas un soldat de
14 métier donc vous ne pouvez pas vraiment dire quelle était la procédure qui
15 s'appliquait dans une unité spécifique, et que tout dépendait en fait de la
16 position du commandant.Donc j'aimerais un petit peu vous poser des
17 questions supplémentaires à propos de ce point.
18 Hier et aujourd'hui, vous nous avez expliqué que vous savez bien
19 quels sont les devoirs des autorités de l'Etat, en ce qui concerne les
20 devoirs qui doivent être envoyés au procureur, et cetera, vous ne saviez
21 pas grand-chose en ce qui concerne la formation ou la connaissance
22 qu'avaient les commandants par rapport à leurs subordonnés.
23 J'aimerais avoir plus d'information sur ce que vous savez à propos de
24 la relation entre les commandants de la HV et la police militaire. Dans vos
25 notes, vous nous avez expliqué que vous n'aviez pas de connaissances
26 directes, d'agissements quotidiens de la police militaire au sein de leurs
27 unités. Or, cette Chambre de première instance a entendu un grand nombre
28 d'éléments de preuve, y compris de la part de membres de la police
Page 20837
1 militaire, d'officiers de la police militaire à propos du système de
2 commandement en duel --
3 M. MISETIC : [interprétation] Je souhaite une objection car je ne suis pas
4 d'accord avec la façon dont la question a été présentée.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, la structure de commandement et
6 contrôle, je pense que, Madame Gustafson, vous n'avez pas [imperceptible]
7 plus loin que cela.
8 Poursuivez.
9 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
10 Q. Donc, nous avons -- cette Chambre de première instance a reçu un nombre
11 important d'éléments de preuve à propos du système double de commandement
12 et de contrôle.
13 M. MISETIC : [interprétation] Je soulève encore une objection, toujours la
14 même.
15 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais reformuler ma question.
16 Donc la Chambre a déjà été informé de système de contrôle et de
17 commandement et de subordination qui existait entre les Unités de Police
18 militaire, les commandants de la HV et l'administration de la police
19 militaire.
20 Q. Donc voici ma question : j'aimerais savoir si vous avez des
21 connaissances précises sur ces structures et sur la façon dont ce système
22 de commandement et de contrôle et de subordination fonctionnait.
23 R. Non, non. Je n'ai pas de connaissance bien précise à ce propos, je l'ai
24 déjà hier d'ailleurs, et je le redis ce matin. Tout ce que je sais, c'est
25 que les procureurs militaires et leurs substituts étaient en communication
26 directe avec les représentants des 72e, 73e Bataillons de Police militaire
27 qui travaillaient sur un territoire sous la juridiction du bureau du
28 procureur militaire de Split. Donc ils étaient en communication avec ces
Page 20838
1 entités, à propos des enquêtes pénales, pour ces unités. Je sais que les
2 unités étaient contrôlées par l'administration de la police militaire à
3 Zagreb.
4 En ce qui concerne les autres relations en revanche qui pourraient
5 exister entre les différentes structures militaires sur le terrain, là, je
6 dois dire que je n'y connais pas grand-chose et je ne voudrais surtout pas
7 m'y hasarder. Je sais seulement que j'étais en contact avec les entités
8 autorisées des sections d'enquête pénale de ces unités à propos des
9 affaires dont le procureur militaire était saisi. Professionnellement je
10 n'étais en contact avec personne d'autre.
11 Il y a des règles bien précises qui gouvernent le fonctionnement de
12 la police militaire. Je suis absolument certain que dans ces règles,
13 [imperceptible] informations nécessaires.
14 Q. Je vous remercie. Hier on vous a demandé si dans un cas où un
15 commandant était au courant que la police militaire avait déjà eu vent d'un
16 crime commis, s'il devait de plus en saisir la police militaire ?
17 Votre réponse était la suivante :
18 "S'il sait que la police militaire a déjà été saisi des faits, il ne
19 sert pas à grand-chose de répéter cette procédure; néanmoins son commandant
20 est tenu d'aider ses associés à obtenir tous les éléments de preuve
21 nécessaires et tous les faits qui permettront de mener à bien les
22 poursuites ultérieures."
23 J'ai une question à vous poser à ce propos, un peu différente. Imaginons
24 qu'un commandant de la HV sache que la police militaire a déjà été saisi
25 d'un crime qui a été commis par l'un des subordonnés de ce même commandant,
26 et que le commandant donc sache que la police militaire ne fait pas tout ce
27 qu'elle devrait faire pour s'assurer qu'une enquête est diligenté afin que
28 le crime soit puni.
Page 20839
1 Connaissez-vous suffisamment le système de commandement et de contrôle de
2 subordination et des fonctions, droits et devoirs des commandants du HV
3 pour dire aux Juges de cette Chambre si ce commandant doit prendre toutes
4 les mesures nécessaires pour s'assurer le subordonné fait l'objet d'une
5 enquête et ensuite fera l'objet de sanctions. Si vous le savez aussi,
6 pourriez-vous nous dire quelles seraient ces mesures qui doivent être
7 prises par le commandant ?
8 Je voudrais tout d'abord que vous nous disiez si vous avez les
9 compétences nécessaires pour répondre à cette question.
10 R. Oui, je peux répondre à votre question, en tout cas, d'après ce que
11 j'ai compris à l'époque lorsque j'étais substitut du procureur militaire.
12 Dans la situation que vous nous avez présentée, le commandant de
13 l'unité, dès qu'il sait que la politique militaire fait obstruction en ce
14 qui concerne l'enquête sur une affaire à propos de l'un de ses subordonnés,
15 il doit absolument vérifier quelles sont les mesures qui sont prises, mais
16 il va le faire auprès de ses supérieurs hiérarchiques, au sein de la police
17 militaire. Donc il doit s'en acquérir auprès des -- ailleurs, dans les
18 rangs de la police militaire, et ensuite il doit demander, par exemple, à
19 avoir un entretien pour parler de tout cela avec un procureur militaire, le
20 cas échéant. De toute façon, pendant toute la durée de l'affaire, et en
21 tout cas, au début, il doit faire en sorte de collecter toutes les éléments
22 de preuve, tous les faits pour pouvoir ensuite permettre au bureau du
23 procureur de traiter l'affaire du mieux possible.
24 Q. Très bien.
25 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir, s'il vous
26 plaît -- afficher la pièce D1631.
27 Q. Nous allons passer, Monsieur Bajic, à un autre sujet. Nous allons
28 maintenant nous pencher sur la liste que vous avez fournie, que votre
Page 20840
1 bureau a fourni à l'équipe de Défense de M. Gotovina portant sur le statut
2 d'un certain nombre d'incidents impliquant des meurtres allégués.
3 Donc il n'y a pas de page de garde, mais ici j'aimerais maintenant vous
4 demander tout d'abord si on vous a bel et bien fourni cette liste des 337
5 victimes de meurtres qui sont énumérés dans un tableau joint à l'acte
6 d'accusation en l'espèce. Donc on vous a bien demandé si vous avez des
7 informations à propos des enquêtes diligentées par le procureur de la
8 république -- par le ministre de la république dans le cadre de ces
9 incidents.
10 C'est bien cela qu'on vous a demandé de faire ?
11 R. Ce n'est pas très, très clair. Je ne comprends pas très bien à quoi
12 vous faites allusion. Vous faites allusion aux données qui sont dans le
13 tableau, ou est-ce que vous êtes en train de parler de façon générale ?
14 Q. J'aimerais savoir ce qu'on vous a demandé lorsque l'on vous a demandé
15 de compiler ce tableau parce que les chiffres ici correspondent en fait aux
16 chiffres que l'on trouve dans la pièce jointe à l'acte d'accusation en
17 l'espèce de cette affaire, donc ces 337 individus qui se trouvent dans
18 cette pièce jointe à l'acte d'accusation.
19 Est-ce qu'on vous a donné au départ la liste des 337 personnes ?
20 R. Ça je ne m'en souviens pas. Il faudrait que je regarde la demande qui
21 m'a été adressée et le rapport que j'ai compilé. Nous avons travaillé de
22 façon habituelle. D'abord on reçoit une demande soit de l'Accusation, soit
23 de la Défense. J'imagine que, là, nous avons reçu une liste de victimes et
24 ensuite nous avons vérifié les archives du ministère public pour croiser un
25 peu ces informations avec les informations de la liste, et ensuite nous
26 avons rédigé le rapport. Je pense que je vais vérifier un petit peu quand
27 même pour savoir comment nous allons procéder.
28 Q. Oui, si je suis un peu étonnée parce qu'il y a 88 victimes qui sont
Page 20841
1 énumérées dans ce tableau, et ils ne sont pas énumérés dans un ordre
2 séquentiel; on a le 3, le 5, le 6, le 7, donc ils ne sont pas numérotés
3 dans l'ordre. Donc j'aimerais savoir si au départ on vous a donné une liste
4 plus importante de victimes et vous n'avez fait le tableau qu'à propos de
5 ceux dont vous avez réussi à trouver la trace.
6 R. Non, ça, malheureusement, je ne peux pas vous répondre; je n'ai pas
7 assez d'information à ce propos. Ce sont mes collègues qui ont fait ce
8 travail donc je ne peux pas vous expliquer pourquoi la numérotation n'est
9 pas séquentielle.
10 Il faudrait retrouver la demande et tous les éléments qu'il y est
11 joint.
12 Q. Très bien. Regardons un peu le premier cas, le numéro 3, il s'agit du
13 numéro KN-DO-5/07. Cela signifie-t-il qu'un dossier a été ouvert à ce
14 propos en 2007 ? Est-ce la signification de ce chiffre ou cette référence ?
15 R. Oui.
16 Q. J'imagine que la même numérotation s'applique à toutes les entrées de
17 ce tableau donc les deux derniers chiffres de numéros de dossiers indiquent
18 l'année où l'on a ouvert le dossier; c'est cela ?
19 R. Oui.
20 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, nous
21 pencher sur l'entrée numéro 7, Babic Sava, à la fin en bas du tableau sur
22 cette page ?
23 Q. Donc il s'agit d'après ce tableau d'un Mario Dukic qui a été condamné
24 pour meurtre de cet individu Babic Sava.
25 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais avoir la pièce 7378 de la liste
26 65 ter à l'écran.
27 Q. Il s'agit d'un dossier que vous trouverez à l'onglet numéro 5,
28 l'intercalaire numéro 5 du dossier que vous avez sous les mains -- du
Page 20842
1 classeur que vous avez en main.
2 Le premier document ici il s'agit d'un jugement du tribunal militaire de
3 Split. Si nous pouvions regarder le bas de la page en B/C/S et le bas de la
4 page en anglais, et ensuite page numéro 2 en anglais, s'il vous plaît. On
5 voit que l'accusé Mario Dukic, membre de la 134e Brigade des Gardes
6 nationaux, a été condamné pour le meurtre de Petar Botar dans sa maison de
7 Kolarina; il a été condamné à six ans de prison.
8 Page suivante maintenant en anglais, et page suivante en B/C/S. Nous voyons
9 en anglais que l'accusé Mario Dukic, ainsi que les deux autres co-accusés,
10 ont été acquittés du meurtre de Sava Babic.
11 Si nous passons à la page 19 de la version en B/C/S, page 28 de la version
12 en anglais, le jugement ultérieur au tribunal régional de Zadar qui
13 confirme ces verdicts; donc condamnation de Dukic pour le meurtre de Petar
14 Botar, mais acquittement de cette même personne et de ses deux co-accusés
15 pour le meurtre de Sava Babic; c'est bien cela ?
16 Donc le tableau avait indiqué que Mario Dukic avait été condamné pour le
17 meurtre de Sava Babic, ce n'est pas tout à fait correct, ce n'est pas vrai,
18 puisqu'il a été condamné pour le meurtre de Petar Botar mais certainement
19 pas pour celui de Sava Babic. Il est acquitté pour celui-là.
20 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir --
21 puis-je, s'il vous plaît, verser au dossier cette pièce 7378 ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait correct.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic.
24 M. MISETIC : [interprétation] Pas d'objection.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P2611.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P2611 est maintenant versée au
27 dossier.
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Passons maintenant à la pièce 65 ter,
Page 20843
1 7377.
2 Q. Vous le trouverez à l'intercalaire 4 de votre classeur. Il s'agit du
3 dossier 107 sur le tableau que vous avez compilé, donc la victime s'appelle
4 Manda Tizma [phon], donc le tribunal régional de Sibenik ainsi que la cour
5 suprême de la ville de Croatie ont condamné l'accusé et il a été condamné à
6 quatre ans et 11 mois de prison, accusé donc Zeljko Sunjerga.
7 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Nous pouvons passer à la page 8 de ce
8 document en anglais qui correspond à la page 7 en B/C/S.
9 Q. Donc j'aimerais juste que nous nous mettions d'accord pour dire qu'il
10 s'agit bien de jugement de la cour suprême de Croatie qui a bel et bien
11 condamné cet accusé, Zeljko Sunjerga, pour le meurtre d'un membre de la --
12 qui, à l'époque, était membre du 15e Régiment des Gardes nationaux.
13 R. Oui, en effet, c'est cela.
14 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Puis-je demander le versement au dossier
15 de cette pièce ?
16 M. MISETIC : [interprétation] Pas d'objection.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P2612.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la pièce P2612 est versée au
20 dossier.
21 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais passer à autre chose, Monsieur le
22 Président, mais je pense qu'il serait opportun de faire une pause.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons donc faire la
24 pause. Pause de 25 minutes et nous reprendrons à 10 heures 50.
25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 26.
26 --- L'audience est reprise à 11 heures 06.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que nous poursuivions, Madame
28 Gustafson, la Chambre de première instance souhaiterait informer les
Page 20844
1 parties d'une décision rendue et portant sur la demande d'onze 92 bis,
2 demande de versement au dossier de ces déclarations. Les raisons étant les
3 suivantes : nous souhaitons accélérer un petit peu les choses, et par
4 conséquent, la Chambre de première instance donne droit à la requête
5 formulée par l'équipe de la Défense visant à inviter quatre des 11 témoins
6 à se soumettre au contre-interrogatoire, mais la Chambre a décidé, proprio
7 motu, que nous entendrons le contre-interrogatoire, les dépositions au
8 contre-interrogatoire par visioconférence, et que l'on limiterait le temps
9 de ces dépositions. Il a donc été décidé que le temps serait limité. Nous
10 souhaiterions entendre les dépositions de ces quatre témoins dans le cadre
11 du contre-interrogatoire dans le cadre d'une seule journée, 30 ou 40
12 minutes par témoin. Il faudra encore le décider. La Chambre décidera
13 ensuite s'agissant des 11 déclarations, des admettres ou de ne pas les
14 admettre.
15 La Chambre estime qu'il n'y a plus lieu de procéder au récolement des
16 témoins en question avant le contre-interrogatoire et si les parties
17 estiment qu'il y a eu lieu de procéder à un nouveau récolement des témoins,
18 et bien, nous invitons les parties à en informer la Chambre de première
19 instance, qui, à son tour, examinera les raisons présentées et décidera
20 s'il y a lieu effectivement de rendre des ordonnances ayant trait à cette
21 question.
22 Une petite seconde, s'il vous plaît.
23 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, j'ai fait une petite
25 erreur lorsque je disais que la demande de contre-interrogatoire émanait de
26 la Défense. Puisque, bien entendu, il s'agissait d'une demande émanant de
27 l'Accusation. Voilà le risque de parler sans avoir un texte écrit sous les
28 yeux, je m'en excuse.
Page 20845
1 Les raisons pour lesquelles cette décision est rendue à ce stade-ci est la
2 suivante : il se peut qu'il faille un certain temps pour l'Accusation et
3 pour le Greffe, afin de préparer justement ce contre-interrogatoire, et
4 l'assistance des Sections Victimes et Témoins, pourrait être nécessaire
5 afin que les témoins puissent être au bon endroit au bon moment.
6 Si d'autres problèmes pratiques devaient se poser, nous vous invitons, bien
7 entendu, en informer le Greffe, et s'il y a lieu d'en communiquer les
8 éléments à la Chambre.
9 Si toutes questions ayant trait à ceci, bien entendu, seront résolues
10 ultérieurement.
11 Ensuite, Monsieur Bajic, toutes mes excuses, non pas de vous avoir fait
12 perdre du temps, il se trouve que nous avons dû prendre une pause un peu
13 plus longue pour nous pencher sur des questions, et je suis sûr que vous
14 connaissez les aléas des procédures dans les tribunaux. Toutes mes excuses
15 donc.
16 Madame Gustafson, si vous êtes prête à poursuivre le contre-interrogatoire,
17 je vous y invite.
18 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
20 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
21 Q. Monsieur Bajic, avant de passer au sujet, je présente toutes mes
22 excuses mais il me semble que vous nous disiez tout à l'heure que vous ne
23 vous souveniez pas exactement de cette requête qui vous a été -- avait été
24 adressée afin que votre bureau crée un diagramme reprenant les différents
25 enquêtes et instructions portant sur les meurtres allégués. Je me demandais
26 si vous pouviez peut-être fournir cette requête à l'Accusation de manier et
27 aux différentes parties ainsi qu'au Tribunal que vous pourriez-vous donc
28 nous fournir cette requête de manière à ce que nous puissions mieux
Page 20846
1 comprendre sur quelle base a été établi ce diagramme. Est-ce que ça vous
2 semble possible ?
3 R. Oui, absolument, c'est possible.
4 Q. Merci. Hier, l'on vous a demandé de décrire les éléments qui étaient
5 préjudiciables à l'aptitude qu'auraient les autorités de l'Etat croate à
6 mener enquête dans le cadre des meurtres dont la liste figure dans les
7 clarifications apportées à l'acte d'accusation de cette affaire. Vous avez
8 décrit les différents problèmes tels que le fait que témoins et suspects
9 étaient parfois dans d'autres pays, la coopération insuffisante avec les
10 forces de police et des instances chargées de l'instruction dans ces pays
11 par le passé.
12 Maintenant, la Chambre de première instance a reçu des éléments de preuve
13 indiquant que, suite à l'opération "Storm," un système d'assainissement
14 avait été mis en place dans le cadre duquel les membres du MUP et de
15 l'armée croate découvraient à partir du moment où ils découvraient des
16 corps dans le territoire libéré, les recueillaient et chargeaient des
17 équipes d'assainissement de recueillir ces corps et de les enterrer dans
18 des cimetières. Pour la plupart, l'enquête sur les lieux avait été conduite
19 suite au dépôt d'une plainte au pénal.
20 Hier, vous nous avez indiqué les exhumations de 2001 et du cimetière de
21 Knin où un grand nombre de ces victimes était enterré, donc si je vous
22 comprends bien, vous n'aviez pas connaissance de l'existence de cette
23 équipe d'assainissement et même que vous ne le saviez pas à l'époque ?
24 R. Oui. Je l'ai appris par la suite, une fois l'exhumation réalisée. Je ne
25 l'ai appris qu'après. Je répète, je ne travaillais pas dans cette zone à
26 l'époque.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.
28 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que la
Page 20847
1 question n'est pas suffisamment claire et donc la réponse ne l'est pas.
2 Est-ce qu'il avait connaissance de ce système d'assainissement. Je dois
3 dire que je ne sais pas si le témoin indique qu'il était -- ne savait pas
4 comment l'assainissement se faisait ou s'il ne savait pas qu'il y avait eu
5 exhumation en 2001.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, pourriez-vous peut-
7 être nous amener à mieux comprendre quel était le sens de votre question,
8 ce qui nous permettra de mieux comprendre la réponse du témoin s'agissant
9 du système d'assainissement ?
10 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
11 Q. Monsieur Bajic, vous savez maintenant qu'un système d'assainissement
12 avait été mis en œuvre après l'opération Tempête tel que je vous l'ai
13 décrite, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, bien entendu, maintenant j'en ai connaissance mais je l'ai appris
15 par la suite. Les premières informations que j'ai reçues avaient trait à
16 une opération d'exhumation importante à Knin en 2001.
17 Q. Le fait qu'un grand nombre de ces individus était simplement enterré
18 sans qu'il y ait enquête portant et sans qu'il y ait plainte au pénal est
19 un des éléments qui a eu pour conséquence le ralentissement ou le retard
20 accusé par les activités d'enquêtes et d'instructions portant sur ces
21 incidents; est-ce exact ?
22 R. Oui, je suis tout à fait d'accord parce que ce n'est qu'après 2001 ou
23 plus précisément en 2004, une fois que les premiers résultats des examens
24 médico-légaux réalisés dans cette zone étaient inconnus que nous avons
25 connu l'identité de 128 personnes dont 124 avaient été tuées à bout
26 portant, et 75 avaient été tuées aux environs des 4, 5 et 6 août -- et 7
27 août 1995, et pour ce qui est du reste, ils ont été tués au cours des 30
28 jours qui ont suivi.
Page 20848
1 C'est, en tout cas, le souvenir que j'ai gardé de la lecture des documents
2 portant sur les affaires qui avaient fait l'objet d'un dépôt de dossiers.
3 Sur base des examens relatifs à ces exhumations, nous avons utilisé ces
4 informations pour les affaires en cours pour les zones de Sibenik et Zadar.
5 Q. Merci.
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais à présent que nous
7 passions à la pièce de la liste 65 ter 2273.
8 Q. Monsieur Bajic, il s'agit d'un rapport venant d'une agence de presse
9 portant la date du 8 février 2007.
10 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous invite à reporter votre attention
11 sur la version anglaise de la page qui reprend des remarques qui vous sont
12 attribuées. Le troisième paragraphe en partant du bas où il est dit :
13 "Depuis 2001, les autorités ont adopté une approche plus sérieuse des
14 enquêtes à mener sur les crimes commis par les membres de l'armée croate de
15 la police croate ajoutant que ceci était important pour la crédibilité du
16 judiciaire croate."
17 Ensuite il est indiqué au paragraphe suivant :
18 "Bajic indiquait que des procès au pénal juste et conforme au droit
19 contribueraient à l'établissement de la vérité et permettrait aux
20 historiens de rendre un jugement final."
21 Je souhaiterais tout d'abord vous demander si vous êtes -- si cette
22 déclaration correspond fidèlement à ce que vous avez dit.
23 R. Oui. C'est un discours que j'ai prononcé lors d'une conférence en 2007
24 à l'hôtel Sheraton, si je ne m'abuse, conférence à laquelle participaient
25 les participants dont on reprend les propos ici. Je suis d'accord avec les
26 déclarations qui figurent dans ce communiqué de presse à l'exception des
27 chiffres qui sont incorrects. Si vous me le permettez, je vais vous
28 l'expliquer, cela pourrait vous être utile.
Page 20849
1 Je sais que c'est effectivement le cas indépendamment de ce qui est écrit
2 ici. Jusqu'en 2002, nous avions inscrit quelques 4 000 personnes figurant
3 dans le système de la justice pénale, donc qui faisait l'objet d'une
4 plainte mais pour lesquelles il n'y avait pas eu procès. Certains avaient
5 fait l'objet de procès par contumace, et pour d'autres il n'y avait que des
6 actes d'accusation. En 2002, j'ai donné des instructions à l'ensemble des
7 procureurs de la république de procéder à un examen de toutes les affaires
8 remontant à 1991 et après, parce que j'estimais qu'un grand nombre de ces
9 affaires n'avait pas fait l'objet d'un traitement conforme aux normes qui
10 prévalent à l'heure actuelle en Croatie et dans le système judiciaire
11 international. Un grand nombre des personnes avait été -- fait l'objet de
12 procès pour des crimes de guerre même si en se fondant sur les éléments du
13 droit croate ces délits étaient plutôt des rébellions contre l'Etat croate,
14 et cetera.
15 Donc en résumé, à partir de 2001 jusqu'à maintenant, sur les quelques 4 000
16 personnes ou un peu moins, 1 100 personnes ont été poursuivies, et pour ce
17 qui est des autres affaires, elles ont fait l'objet de non-lieu ou elles
18 ont été abandonnées, elles ont donc été, elles sont passées dans une autre
19 catégorie.
20 Donc exception faite des chiffres qui sont cités ici, tout le reste
21 de la déclaration reflète effectivement mes propos.
22 Q. Merci. Afin que nous soyons certain d'avoir bien compris quels sont les
23 chiffres qui devraient figurer -- que vous évoquez, il s'agit des chiffres
24 qui figurent dans le paragraphe qui précède ce dont j'ai fait une lecture;
25 est-ce exact ?
26 R. Oui.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je souhaiterais mieux
28 comprendre la dernière réponse.
Page 20850
1 Vous nous parliez de procès par contumace pour lesquels les accusés étaient
2 essentiellement des Croates, ou est-ce qu'il s'agissait d'accusés serbes?
3 R. Les procès par contumax avaient lieu en Croatie jusqu'à il y a de cela
4 quelques années, jusqu'à la date où, en tant que procureur général, j'ai
5 donné des instructions aux procureurs du pays afin qu'ils renoncent aux
6 procès par contumax pour des raisons qui sont évidentes pour tous. Les
7 procès étaient menés essentiellement contre les membres d'autres armées.
8 Nous n'avions pas de registre nous permettant de connaître leur origine
9 ethnique, mais il s'agissait essentiellement ou pour la plupart d'entre eux
10 de combattants des forces ennemies, ou bien des citoyens de nationalité
11 serbe, essentiellement.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Je vous invite à poursuivre,
13 Madame Gustafson.
14 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci.
15 Q. Les remarques que vous faites à propos des autorités qui jusqu'en 2001
16 qui, à partir de 2001 - pardon - adoptaient une approche plus sérieuse des
17 enquêtes portant sur les crimes commis par les membres de l'armée et de la
18 police croates. Est-ce qu'il s'agit aussi de crimes commis suite à
19 l'opération Tempête ?
20 R. Oui.
21 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
22 document.
23 M. MISETIC : [interprétation] Objection. Pas d'objection.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs
26 les Juges, il s'agira de la pièce à conviction portant la cote P2613.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P2613 est versé au dossier.
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais à présent que l'on examine
Page 20851
1 le document de la liste 65 ter portant la cote 4461. Merci.
2 Q. Monsieur Bajic, il s'agit du compte rendu de la réunion de la 33e
3 Session du Conseil de coopération avec le TPIY, réunion qui s'est tenue le
4 6 novembre 1998.
5 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je propose que l'on affiche à l'écran la
6 page suivante du texte en anglais, où l'on voit au haut de la page en
7 anglais qu'ont participé à cette session plusieurs membres des ministères
8 croates, ainsi que d'autres hauts responsables du gouvernement croate.
9 Si l'on pouvait faire défiler le texte vers le bas de la page en B/C/S,
10 ainsi qu'en anglais. L'on voit qu'un des points à l'ordre du jour est le
11 suivant, je cite :
12 "Définir la position de la République de Croatie sur la proposition
13 formulée par le Procureur Rivkin, s'agissant de la stratégie de déposition
14 devant le MKS, donc, il s'agit du TPIY, dans le cadre de l'opération Oluja
15 ou Tempête."
16 Je propose que l'on passe à la page suivante à présent; page suivante en
17 B/C/S et puis également la page suivante en anglais.
18 Q. Les participants à cette réunion discutent d'un certain nombre de
19 propositions portant sur la stratégie à adopter, dès lors qu'il s'agit de
20 saisir le Tribunal international d'une affaire contre la République
21 fédérative de Yougoslavie. L'on voit que M. Granic prend la parole au
22 milieu de la page. A l'époque, il est au ministère des Affaires civiles et
23 il commence en disant que les propositions semblent mauvaises d'un point de
24 vue politique.
25 Au bas de la page, il est dit :
26 "Lorsque l'on définit l'opération Oluja, nous-mêmes l'appelons
27 Opération de police et Opération militaire, et il s'agissait d'une
28 opération qui avait été planifiée et qui s'est déroulé tel que prévu. Les
Page 20852
1 manquements sont apparus par la suite, après l'opération Oluja, lorsque
2 nous n'avons pas poursuivi les auteurs possibles de crimes de guerre."
3 Ensuite je propose que l'on passe à la page suivante en anglais, au bas de
4 la page en B/C/S, et il s'agit de M. Separovic qui, à l'époque, était
5 directeur du CPS, et il est dit :
6 "En accord avec M. Granic, le dépôt des dossiers ne doit pas empêcher le
7 Tribunal de mener enquête dans l'opération Oluja…"
8 Je propose que l'on passe à la page suivante en anglais, et au milieu du
9 texte en page B/C/S, où il est dit par M. Penic, et il est à l'époque
10 ministre de l'Intérieur. Au début de la deuxième phrase, il est dit :
11 "M. Penic ajoute qu'il estime que nous sommes la raison pour laquelle il
12 n'y a pas eu de poursuites pour les crimes commis suite à l'opération
13 Oluja, mais que les crimes ont été commis exclusivement par des individus
14 ou des petits groupes. Il ne faut pas oublier les souffrances causées à la
15 République de Croatie et que ces souffrances avaient été planifiées et
16 constituaient un crime organisé, commis par l'Etat."
17 Je propose que l'on passe à la page 5 du texte en anglais, au bas de la
18 même page en B/C/S.
19 Vous trouvez les conclusions. Vous voyez que le Dr. Ramljak qui, à
20 l'époque, était ministre de la Justice, présente ses conclusions. Au
21 paragraphe 2, voilà ce qui est dit :
22 "Les événements qui se sont produits après, éléments postérieurs à
23 l'opération Eclair, il semble nécessaire de procéder à une réévaluation de
24 la stratégie adoptée il y a deux à trois ans, stratégie qui visait à ne pas
25 traiter les événements et les crimes commis après l'opération, mais nous ne
26 devons pas oublier que le Conseil pour la coopération avec le TPIY n'est
27 pas obligé de parler de cette question."
28 Alors, vous avez dit que les autorités croates ont adopté une approche
Page 20853
1 beaucoup plus sérieuse pour ce qui était donc de la poursuite des crimes
2 commis après l'opération Tempête, donc, après 2001, et là, en 1998, nous
3 avons de hauts responsables du membre du gouvernement, de hauts
4 responsables du gouvernement croate qui parlent du fait que les crimes ou
5 que des crimes commis après l'opération Tempête n'ont toujours pas fait
6 l'objet de poursuites. Le ministre de la Justice conclut qu'il faut
7 réévaluer la stratégie, la stratégie qui visait le fait que ces événements
8 n'ont pas fait l'objet de poursuites, tout comme les crimes commis après
9 l'opération Tempête.
10 Alors, voilà la question que j'aimerais vous poser. Conviendrez-vous que
11 sous le régime de l'ancien président Tudjman, il y avait quand même une
12 certaine réticence de la part de la classe dirigeante politique réticente à
13 mener à bien des enquêtes à propos de crimes dont l'on soupçonnait qu'ils,
14 dont on soutenait qu'ils avaient été commis par des membres de la HV après
15 l'opération Tempête ?
16 M. MISETIC : [interprétation] Objection, car je me demande sur quelle base,
17 à partir de quelle base cette question est posée. Est-ce qu'il s'agit d'une
18 question générale ou est-ce que vous lui demandez précisément de faire une
19 observation à propos de ce document ? Parce que si tel est le cas, je
20 souhaiterais que l'on jette la base de ce qui est avancé pour voir si ce
21 témoin sait ce qu'on lui demande.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.
23 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, c'est une question générale.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Une question générale.
25 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je pense d'ailleurs que j'ai déjà jeté la
26 base à partir de l'avis exprimé par le témoin et à partir des remarques
27 faites sur la nature des enquêtes.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. D'ailleurs, il faudrait que je
Page 20854
1 demande la base de la question selon s'il ne s'agit pas d'une question
2 générale. Or, entendons d'abord la réponse du témoin.
3 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais il est indiqué au compte rendu
4 d'audience que des documents lui ont été présentés, mais la question en
5 fait --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, est-ce que vous pourriez
7 répéter la question, Madame Gustafson ?
8 Mme GUSTAFSON : [interprétation]
9 Q. Oui, ma question était comme suit : conviendrez-vous que, sous le
10 régime de l'ancien président Tudjman, la classe dirigeante avait une
11 certaine ou faisait preuve d'une certaine réticence à mener à bien des
12 enquêtes portant sur des crimes pour lesquels on soupçonnait que des
13 membres de la HV avaient été responsables de ces crimes, crimes commis
14 après l'opération Tempête ?
15 R. Voilà ce que je pourrais dire en réponse à votre question.
16 Premièrement, il faudrait que nous en revenions à mon travail pendant
17 l'opération Tempête et après l'opération Tempête, en 2001 jusqu'en 2002,
18 parce qu'il faut savoir qu'à l'époque, j'étais substitut du procureur
19 militaire, et ce, jusqu'à la fin de l'année 1996; puis ensuite, j'ai été
20 substitut du procureur du comté à Split. En 2000, j'ai été nommé procureur
21 à Split, et en 2002, je suis devenu procureur général de la République de
22 Croatie.
23 Lorsque vous dites les autorités croates ont décidé telle et telle, et
24 telle, telle chose, ce que je voudrais dire, c'est que lorsque j'ai assumé
25 ma fonction de procureur général, j'ai mené à bien une analyse de toutes
26 les affaires avec tous mes substituts. J'ai analysé donc, j'ai fait le
27 bilan de ce qui avait été fait jusqu'à ce moment-là. Je dirais à ce sujet
28 que je pense que bien souvent dans de nombreux, pour de nombreuses
Page 20855
1 affaires, l'évolution de la situation n'a pas été la meilleure. Moi, de
2 toute façon, j'ai toujours été contre les procès par contumace, car je
3 pense que -- et puis, il y a eu aussi des affaires pour lesquelles les
4 actes d'accusation avaient une portée beaucoup trop générale. Il y a
5 beaucoup de crimes qui n'ont pas fait l'objet de poursuite. Je continue à
6 maintenir cela. Alors au vu de ce bilan, j'ai rédigé des instructions
7 écrites. Il y a d'ailleurs un document à ce sujet, la Chambre pourra
8 l'avoir. Ces instructions visaient les procureurs de la république et je
9 leur indiquais comment examiner les affaires actuelles ou les affaires, les
10 procès du passé. Mais je voulais également essayer d'obtenir de la part de
11 la police tous les éléments de preuve pour ces affaires ou ces crimes qui
12 n'avaient pas fait l'objet de poursuite. En tant que procureur, je peux en
13 parler. Je ne peux pas vous présenter un bilan politique des opinons et
14 avis adoptés par certains membres de la classe dirigeante politique, parce
15 que je n'en ai pas de connaissance immédiate, si ce n'est ce que je viens
16 de lire sur l'écran maintenant.
17 Q. Bien, merci. Est-ce que vous savez pourquoi les autorités croates ont
18 attendu l'an 2001, à savoir six ans après les événements en question pour
19 commencer des exhumations de corps dans le cimetière de Knin; alors que le
20 MUP savait au moins où ces personnes avaient été inhumées. Est-ce que vous
21 savez pourquoi aucune enquête sur le terrain n'a été menée à bien, parce
22 qu'en fait, c'était des responsables ou des membres du MUP qui avaient
23 enterré ces cadavres.
24 Donc est-ce que vous savez pourquoi il a fallu attendre l'an 2001, pour
25 commencer l'exhumation de ces corps et pour procéder à des autopsies ?
26 R. Je n'en sais rien. Je n'en sais rien. Ce que je sais c'est que depuis
27 que je suis devenu procureur général, j'ai pris des initiatives à plusieurs
28 reprises, des initiatives à l'intention du ministre de la police -- du
Page 20856
1 ministère de la Police ainsi qui visaient d'autres personnes pour que ces
2 personnes puissent conjointement collecter des faits pertinents relatifs à
3 l'identification et à la détection des auteurs de crimes de guerre. Je les
4 exhortais à accélérer leurs efforts pour pouvoir établir certains services
5 pour les crimes de guerre, pour qu'ils adoptent une approche de travail
6 d'équipe, pour qu'ils mènent à bien des enquêtes au bureau des procureurs
7 essentiellement d'ailleurs dans les zones de Sibenik, Zadar, Osijek et
8 Vukovar.
9 Q. Vous avez mentionné donc le retard qui avait été pris pour commencer
10 les exhumations. Vous avez indiqué en fait que cela pourrait être un
11 facteur qui pourrait alors faire une incidence sur l'attitude à mener à
12 bien une enquête et à poursuivre. Il ne faut pas oublier en fait que ces
13 cadavres avaient été enterrés pendant six ans, donc il y avait déjà eu
14 décomposition, qui est un autre facteur qui peut quand même entraver les
15 enquêtes, n'est-ce pas ? Le fait que ces cadavres avaient subi cette
16 décomposition pendant six ans, signifie qu'il y a beaucoup d'éléments de
17 preuve scientifiques qui ont été perdus en quelque sorte, du fait de cette
18 décomposition, n'est-ce pas ?
19 Est-ce que vous convenez de ce que j'avance ?
20 R. Oui, c'est exact. Vous savez, comme tout le monde le sait pertinemment
21 dans ce prétoire, avec le passage du temps, avec le temps qui passe, plutôt
22 cela étant en quelque sorte un facteur qui milite en faveur des auteurs de
23 crimes et qui entravent le travail fait par ceux qui veulent identifier les
24 auteurs, qui veulent poursuivre pour ces crimes et délits. Malheureusement,
25 cela est vrai, certes.
26 Q. Je n'ai plus de questions à poser.
27 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au
28 dossier des tableaux. Je pense que nous avons un accord avec la Défense
Page 20857
1 Gotovina; il s'agit des pièces 7380 et 7382 de la liste 65 ter.
2 M. MISETIC : [interprétation] C'est tout à fait exact.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 7381 de la liste 65 ter devient
5 la pièce P2614; et la pièce 7382 devient la pièce P2615.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous savez, la Chambre ne connaît pas en
7 règle générale les cotes 65 ter, de quel tableau parlez-vous exactement ?
8 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je pense que je les -- ces tableaux
9 étaient envoyés à la Chambre par courriel ce matin.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce matin, par courriel. Laissez-moi
11 vérifier.
12 Bien. Je vois qu'il s'agit d'un extrait et effectivement il y a eu un
13 accord entre les parties.
14 Les pièces P2614 et P2615 sont versées au dossier.
15 Maître Misetic, avez-vous des questions supplémentaires à poser au témoin ?
16 Est-ce que cela est justifié ?
17 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
18 Nouvel interrogatoire par M. Misetic :
19 Q. [interprétation] Bonjour à nouveau, Monsieur Bajic. J'ai quelques
20 questions à vous poser pour justement préciser certains éléments.
21 Lorsque l'Accusation vous a posé des questions, vous avez ou plutôt une
22 question vous avait été posée. On vous avait demandé si un commandant était
23 obligé de déposer un rapport au pénal auprès du bureau du procureur
24 militaire.
25 J'aimerais vous poser une question à ce sujet : si le commandant
26 informe la police militaire du fait qu'un acte criminel a été commis, est-
27 ce qu'il a respecté ses obligations, obligations imposées par le code de
28 procédure pénal ?
Page 20858
1 R. Des rapports au pénal, des rapports d'enquête judiciaire sont
2 essentiellement envoyés aux représentants de la loi, aux organes chargés de
3 faire respecter l'ordre public, qu'il s'agisse d'organe militaire ou de la
4 police civile d'ailleurs. J'ai répondu à cette question ainsi aujourd'hui,
5 car si un commandant présente un rapport à propos de quelque chose à la
6 police militaire, il s'est ainsi acquitté de ses obligations conformément à
7 la loi précise de la procédure pénale, notamment si en plus il détient des
8 éléments de preuve et qu'il fournit tous les renseignements permettant aux
9 autorités qui vont poursuivre la personne de bien mener à leur enquête.
10 Q. Oui, mais j'aimerais vous poser la question suivante : vous avez le
11 système de justice pénal militaire, et j'aimerais savoir : quelle est
12 l'institution qui a la responsabilité principale pour détecter les crimes -
13 et je pense au sein de l'armée - et quelle est la responsabilité de
14 présenter ces éléments de preuve ?
15 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je pense que nous avons beaucoup parlé de
16 cela lors de l'interrogatoire principal. Je ne vois pas comment est-ce que
17 cela émane du contre-interrogatoire.
18 M. MISETIC : [interprétation] Si tout est clair et que l'Accusation accepte
19 que le témoin vient de répondre -- vient de dire : je ne vais plus poser de
20 question à ce sujet. S'il y a encore toutefois un contentieux, je pense
21 qu'il faudra que cela soit précisé.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question a été abordée, certes, lors
23 de l'interrogatoire principal. Ensuite Mme Gustafson a posé des questions
24 au témoin à propos de ce qu'un commandant devait faire s'il a certains
25 éléments de connaissance et si la police militaire n'est pas au courant de
26 ces éléments d'information. Alors pour mener à bien une enquête de façon
27 sérieuse, si vous avez un commandant donc qui sait certaines choses, est-ce
28 qu'il doit s'adresser à un supérieur hiérarchique pour déclencher justement
Page 20859
1 l'enquête, et si cela n'aboutit pas à une enquête et seulement à cette
2 condition il doit en fait en référer au procureur militaire ?
3 Je vois que le témoin hoche du chef.
4 [aucune interprétation]
5 M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas de cela la question
6 que je lui ai posée. Moi, je parlais de ce qui avait été abordé hier, et il
7 avait été question de déposer des rapports auprès du bureau du procureur
8 militaire. En fait, je vais retrouver la trace de ce que j'ai dit.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais alors nous avons l'objection
10 qui a été soulevée par Mme Gustafson. Comment est-ce que cela émane du
11 contre-interrogatoire ? Puisque vous faites référence à ce qu'il a dit
12 hier.
13 M. MISETIC : [interprétation] Oui, pendant le contre-interrogatoire.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah, pendant la toute dernière partie de
15 l'audience, le début du contre-interrogatoire.
16 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
17 Q. Donc, Monsieur Bajic, je répète ma question : qui a la responsabilité
18 essentielle dans le cadre du système de justice militaire pour détecter et
19 identifier des crimes ?
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, est-ce que vous
21 pourriez, je vous prie, nous donner la référence de la page où cela se
22 trouve, et cela -- c'est la page du compte rendu d'audience d'hier ?
23 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ou peut-être donnez-nous quelques mots
25 qui nous permettront de retrouver cela.
26 M. MISETIC : [interprétation] Là, il s'agit de la page 20 798, ligne 26.
27 Cela commence à la ligne 26.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais maintenant, moi, j'ai un
Page 20860
1 problème, et le problème est le suivant : la page 20 798 n'a que 25 lignes,
2 voyez-vous.
3 M. MISETIC : [interprétation] Bien.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enfin c'est, en tout cas, ce que je vois
5 sur mon écran.
6 M. MISETIC : [interprétation] Je vais vous donner lecture de la phrase.
7 "Et de façon plus générale si un commandant militaire --"
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. "Si de façon plus générale…" Alors
9 ligne 16, même page mais il s'agit de la ligne 16.
10 M. MISETIC : [interprétation] Je m'excuse de mon erreur.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est cela et : "et de façon plus
12 générale, si un commandant militaire…" c'est cela ?
13 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
15 M. MISETIC : [interprétation]
16 Q. Alors voilà quelle est ma question : qui a la responsabilité
17 fondamentale pour détecter et élucider des crimes, et je pense au système
18 judiciaire pénale militaire ?
19 R. Ecoutez, il s'agit des représentants de la loi et cela inclut à la fois
20 la police militaire et la police civile.
21 Q. Mais lorsqu'un commandant transmet des informations à la police
22 militaire, renseignements suivant lesquels un crime a été commis par un
23 membre de la HV, est-ce que vous savez si la pratique retenue était que la
24 police militaire renvoyait un rapport à ce sujet au commandant en question
25 pour lui indiquer quels avaient été les résultats de l'enquête ?
26 R. Ecoutez, je ne suis pas informé de ce genre de chose, mais je pense que
27 conformément au règlement qui régit la profession ils doivent présenter un
28 rapport en retour. Ils doivent en fait transmettre -- ils doivent
Page 20861
1 transmettre le rapport pénal au bureau du procureur militaire.
2 Q. Non, là, je pense que nous nous ne sommes peut-être pas compris. La
3 question que je vous avais posée était comme suit : donc il y a en fait,
4 bon, ces règles qui indiquent que cela doit être -- qu'un rapport doit être
5 présente au bureau du procureur militaire, mais est-ce qu'ils doivent
6 présenter un rapport, un compte rendu au commandant à propos de ce qui a
7 été fait en matière d'enquête concernant le délit en question ? Si votre
8 réponse est affirmative, vous avez, en tout cas, cité le règlement qui
9 régit la profession, est-ce que vous pourriez nous dire plus précisément à
10 quel règlement ou quelle règle de service vous faites référence ?
11 R. Ecoutez, je vous ai dit que je ne savais pas ce qu'avait fait la police
12 militaire pour ce qui est des rapports qui avaient été déposés ou à propos
13 desquels ils avaient une information. Mais conformément aux normes
14 professionnelles, il n'est que logique de renvoyer un compte rendu à la
15 partie qui a présenté un rapport, tout comme un bureau du procureur
16 lorsqu'il reçoit un rapport informe la personne qui a envoyé le rapport de
17 ce qui a été fait. Je me contente d'établir un parallèle.
18 Q. Mais est-ce que vous pourriez nous dire puisque vous avez fait
19 référence aux normes et ces normes vous en parlez à la page 48, ligne 17 ?
20 Est-ce que vous -- de quelles normes parlez-vous ? Est-ce que vous parlez
21 de normes bien précises, écrites, consignées quelque part, ou est-ce que
22 vous parlez de pratique et d'orientation générale ?
23 R. Non, je parle de la pratique générale retenue surtout, parce que je ne
24 sais pas quelles sont les règles qui régissent la police militaire, en tout
25 cas, je ne sais pas ce qu'elles disent précisément à propos de ce genre de
26 procédure.
27 Q. Bien. Alors j'aimerais vous poser une autre question. Est-ce que vous
28 pensez bien connaître la pratique générale adoptée par la police militaire
Page 20862
1 en 1995 lorsqu'il y avait des informations qui étaient données; est-ce que
2 vous savez à qui ils présentaient un compte rendu à ce sujet ?
3 R. Non.
4 Q. Une autre question vous a été posée à propos des commandants qui
5 menaient à bien des enquêtes en parallèle ou parallèlement à une enquête
6 pénale. Je voulais juste --
7 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, non, non, non, je voulais juste
8 préciser qu'il s'agissait en fait de commandants qui menaient à bien des
9 enquêtes disciplinaires pour qu'il n'y ait pas de confusion qui règne.
10 M. MISETIC : [interprétation] Oui.
11 Q. Donc des commandants qui organisent des enquêtes disciplinaires
12 parallèlement à une enquête criminelle. Alors voilà la question que
13 j'aimerais vous poser : est-ce que vous aviez compris qu'un commandant
14 pouvait mener à bien une enquête à propos d'un acte criminel donné, et ce,
15 donc sous l'égide d'une enquête disciplinaire parallèlement, et en même
16 temps, que la police militaire et le bureau du procureur militaire menaient
17 à bien leurs propres enquêtes, toujours portant sur le même acte ?
18 R. Oui, théoriquement, oui.
19 Q. Qu'en est-il de l'enquête disciplinaire puisque vous dites
20 "théoriquement, oui," est-ce que cela a été la pratique à l'époque ?
21 R. Je dois vous avouer que je ne sais pas quelle était la pratique
22 utilisée. Mais si un rapport d'enquête judiciaire a été déposé pour un
23 crime grave, se lancer dans une procédure disciplinaire était tout à fait
24 superflue. Mais, bien entendu, cela dépendait du commandant et des
25 intentions du commandant vis-à-vis ou par rapport à l'enquête.
26 Q. Des documents vous ont été présentés. Il s'agissait de documents
27 émanant de dossiers de tribunaux. Il s'agissait de personnes qui se
28 trouvaient dans la zone de Grude, de Golubic qui avaient été arrêtées par
Page 20863
1 la police militaire et qui avaient été poursuivies pour pillage, et une
2 question vous a été posée à ce sujet. Dans un premier temps, il vous a été
3 demandé si vous pensiez que le pillage était accepté ou toléré dans une
4 certaine mesure au sein de la HV. Alors voilà la question que j'aimerais
5 vous poser : est-ce que vous pourriez nous expliquer si la police militaire
6 arrêtait ces personnes, les traduisait en justice ? Est-ce que vous
7 pourriez en fait développer votre réponse, la réponse que vous avez
8 apportée ?
9 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Si je peux préciser à nouveau, il s'agit
10 de savoir si cela était permis ou toléré au sein des Unités de la HV, non
11 pas au sein de la HV de façon générale.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
13 M. MISETIC : [interprétation] Je pense que la police militaire était
14 mentionnée également.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons vérifier, nous pourrons voir
16 ce qu'il en est.
17 M. MISETIC : [interprétation] Moi, je suis assez sûr que Mme Gustafson --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, nous n'allons pas nous
19 prononcer à propos de ce qu'elle a dit tant que nous n'avons pas vérifié
20 cela. Alors, nous pouvons voir ce que Mme Gustafson a dit, nous pourrons le
21 vérifier en présence du témoin d'ailleurs.
22 M. MISETIC : [interprétation] Cela se trouve à la page 15, au début de la
23 ligne 17.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un petit moment, je vous prie. Ligne --
25 page 15, ligne 17 donc. Une seconde.
26 Mme GUSTAFSON : [interprétation] La question commence à la page 15, ligne
27 25.
28 M. MISETIC : [interprétation] Non, la question commence à la ligne 17.
Page 20864
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, écoutez, moi, je vais lire
2 lentement, à l'intention du témoin l'extrait du compte rendu d'audience.
3 Qu'est-ce que vous voulez que nous vous lisions ?
4 M. MISETIC : [interprétation] Cela commence exactement avec la référence
5 "72e Bataillon de la Police militaire," et cela figure à la ligne 21.
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il y a une référence précise qui est faite
7 à une personne qui fait l'objet d'un acte d'accusation et qui devient
8 membre ensuite du 72e Bataillon de la Police militaire; voilà la référence
9 précise. La question quant à la -- elle commence à la ligne 25.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la question a été posée en faisant
11 une référence à des extraits de dossiers qui ont été lus au témoin. Alors,
12 je vais vous donner lecture, à la fois du préambule à la question et de la
13 question.
14 Monsieur Bajic, je vais vous donner lecture donc du compte rendu d'audience
15 de ce matin.
16 Mme Gustafson dit ce qui suit : Alors, nous avons maintenant lui ces
17 dossiers, et compte tenu de votre expérience en tant que procureur, en tant
18 que procureur militaire à l'époque des événements, j'aimerais savoir si
19 vous acceptez que pour ces affaires, il y a des indications qui sont
20 donnée. Je fais plus particulièrement référence aux indications suivantes :
21 un groupe important de soldats de la HV qui charge des objets dans des
22 camions à Knin, un soldat qui faisait l'objet également d'un acte
23 d'accusation pour vol, qui devient membre du 72e Bataillon de la Police
24 militaire, un large groupe de conscrits qui chargent des objets ayant été
25 pillés dans un camion devant le commandement de leur unité. Est-ce que tous
26 ces éléments vous permettent ou sont une indication que, dans une certaine
27 mesure, le pillage était accepté ou toléré au sein des Unités de la HV à
28 l'époque ? Voilà exactement la question qui vous a été posée, et vous avez
Page 20865
1 commencé votre réponse par les mots suivants : "Je suis absolument d'accord
2 avec votre conclusion."
3 Me Misetic maintenant souhaiterait vous poser une question à propos de
4 cette suite de questions réponses.
5 Maître Misetic.
6 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
7 Q. Voilà quelle est ma question, Monsieur Bajic, et vous avez donc apporté
8 cette réponse : étant donné que cette information vise une situation où les
9 auteurs sont arrêtés par la police et sont traduits en justice. Est-ce que
10 vous pourriez nous expliquer pourquoi vous avez indiqué que vous êtes
11 absolument d'accord lorsqu'il vous ait indiqué que le pillage était dans
12 une certaine mesure autorisé ou toléré au sein des Unités de la HV ?
13 R. Parce que des dossiers d'affaire m'ont été présentés. Il s'agit de
14 l'affaire 1, 2 et 3, c'est ainsi qu'on me les a présentées lorsque je les
15 ai obtenues. Il s'en suivait sans aucun doute que ces vols - ou je ne sais
16 pas comment vous souhaiteriez les appeler - que ces vols, commis par des
17 membres de l'armée croate dans des immeubles de civils dans la zone,
18 étaient une activité assez répondue, et c'est quelque chose que l'on peut
19 déduire des actes d'accusation. Alors, certes, la police militaire dans ces
20 cas d'espèce a réagi et a déposé des rapports d'enquête judiciaire. Il est
21 également vrai de dire que dans ces trois cas les auteurs ont fait l'objet
22 de poursuite et ont été condamnés d'ailleurs. Mais toutefois, ce genre de
23 vols, il y a des vols tels que ceux-ci, qui n'ont pas fait l'objet
24 d'enquête, qui n'ont pas fait de poursuite, mais qui se sont produits et
25 qui ont été assez nombreux. Ce sont des déclarations que l'on retrouve
26 notamment dans certains jugements.
27 Q. Alors, une question de suivi. Une autre question vous a été posée à
28 propos de la façon dont la loi relative à l'amnistie pouvait être appliquée
Page 20866
1 et utilisée dans ces affaires; et vous avez répondu à une question posée
2 par M. le Président de la Chambre, que ces crimes ne pouvaient pas être
3 englobés par la loi d'amnistie parce que c'était des crimes qui ne
4 pouvaient pas être considérés comme s'inscrivant dans le cadre de la
5 guerre, et le jugement, d'ailleurs, le jugement a été rendu en 1998. Alors
6 je sais que l'acte d'accusation stipule que le vol s'est produit le 8
7 septembre 1995. Est-ce que vous savez, d'ailleurs - je ne pense pas que
8 cela fasse l'objet d'un litige en l'espèce - est-ce que vous savez quelle
9 était l'opération militaire qui a commencé le 8 septembre 1995, opération
10 militaire à laquelle ont participé des unités du district militaire de
11 Split. Est-ce que vous savez où exactement s'est déroulé cette opération
12 militaire ce jour-là ?
13 R. Je n'en suis pas sûr. L'opération Maestral, j'en ai entendu dans les
14 médias [imperceptible] mais ça c'est uniquement ce que j'ai appris; ce qui
15 était d'autorité publique, ce n'est pas quelque chose que j'aurais appris
16 du fait de ma profession.
17 Q. Le fait que ces individus, leur agissement aurait pu s'inscrire dans
18 l'opération Maestral. Dans ce cas-là, est-ce qu'elle aurait été couverte
19 par la loi relative à l'amnistie, et donc n'aurait pas dû être -- il n'y
20 aurait pas eu droit de poursuite en 1998 ?
21 R. Je pense que bien expliquer la loi relative à l'amnistie. Le pillage et
22 le vol ne peuvent jamais être des faits qui s'inscrivent dans le cadre de
23 la guerre, c'est parfaitement clair, et là, maintenant je parle en ma
24 capacité de procureur. Ce qui peut s'inscrire dans le cadre de la guerre,
25 ce sont des dégâts collatéraux, parfaitement différents d'ailleurs, et cela
26 ne peut absolument pas être le pillage, le pillage ne peut pas s'inscrire
27 dans le cadre de la guerre. De ce fait, le pillage ne peut absolument pas
28 être englobé par la loi relative à l'amnistie, en tout cas, c'est mon
Page 20867
1 interprétation de la chose.
2 Q. Je vérifie votre réponse. Vous avez dit -- l'interprète nous a dit :
3 "Cet événement ne peux en aucune façon s'inscrire dans…" S'inscrire en quoi
4 ?
5 R. S'inscrire dans le cadre d'une opération de guerre.
6 Q. Merci.
7 Maintenant on vous a posé une question à propos du traitement de tous ces
8 crimes. Vous avez dit qu'il n'y a eu que cinq rapports d'enquêtes
9 judiciaires déposés en août et septembre 1995 à l'encontre des membres de
10 l'armée croate. Ce tableau fait maintenant -- a maintenant été versé au
11 dossier sous la cote P2614.
12 M. MISETIC : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît, l'avoir à
13 l'écran ?
14 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il y avait donc cinq rapports d'enquêtes
15 judiciaires qui ont été déposées en août et septembre contre les membres du
16 HV, et c'est-à-dire crimes qui sont donc pertinents en ce qui concerne le
17 cadre temporel de l'acte d'accusation qui nous intéresse en l'espèce.
18 M. MISETIC : [interprétation] En effet.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
20 M. MISETIC : [interprétation]
21 Q. Si nous pouvions passer en revue les pages de ce tableau. Si nous
22 pouvions passer page 8 de la version en anglais, je crois qu'il n'y a
23 qu'une version en anglais qui existe d'ailleurs.
24 Dans les cases en gris, il s'agit donc des entrées qui, selon l'Accusation,
25 relèvent à l'acte d'accusation. Donc dans les cases qui sont grisées, il
26 s'agit de crimes commis dans les territoires libérés et dans les
27 municipalités qui sont pertinentes dans le cas de l'acte d'accusation en
28 l'espèce. Mais sachez que tout le territoire libéré du secteur sud ne fait
Page 20868
1 pas l'objet de la thèse de l'Accusation. Ce qui est écrit en jaune sont en
2 fait des crimes perpétrés par les membres de l'armée croate à l'encontre --
3 M. MISETIC : [interprétation] je suis désolé, il faut que je m'entretienne
4 avec l'Accusation. Donc je suis désolé parce que je parle d'une autre
5 version du document où les entrées 7, 9 et 8 sont dans des cases qui sont
6 colorées en jaune. Je ne sais pas si cette version a été chargée dans le
7 système électronique.
8 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Nous allons vérifier.
9 M. MISETIC : [interprétation] Oui, alors, par exemple, pour ce qui est du
10 798, donc 198 [comme interprété], il s'agit d'un crime qui aurait eu lieu à
11 Zelengrad, donc il s'agit d'un crime à l'encontre de propriété serbe, mais
12 cela ne rentre pas techniquement dans l'acte d'accusation qui nous
13 intéresse.
14 Enfin, je vais peut-être passer à une autre page, la page 23, par
15 exemple.
16 Donc les cases grisées sont des entrées concernant des crimes qui ont
17 été -- qui relèvent de l'acte d'accusation, dans les cases qui sont en
18 blanc en revanche, ce sont des crimes qui ont été commis dans les
19 territoires qui venaient juste d'être libérés mais qui ne sont pas dans
20 l'acte d'accusation. Donc étudions de près le document numéro 12. Il s'agit
21 d'un seul rapport d'enquête judiciaire qui concerne cinq personnes, cinq
22 individus. Donc dans les rapports d'enquête judiciaire, il y a souvent de
23 nombreux auteurs. C'est ainsi que ça fonctionnait, n'est-ce pas ? Il y a un
24 rapport d'enquête, mais il peut y avoir plusieurs auteurs concernés ?
25 R. Oui.
26 Q. [aucune interprétation]
27 R. S'ils sont relies entre eux, si la façon dont ils ont commis le crime
28 est commune, ils feront l'objet d'un seul rap d'enquête. En revanche, enfin
Page 20869
1 ça c'est s'ils ont commis le crime ensemble.
2 Q. D'après mes chiffres, et j'aimerais savoir si --
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, votre dernière question
4 était assez évidente quand même, il est évident, on a un rapport d'enquête
5 et cinq noms. Ça signifie que ces cinq personnes ont commis le même crime.
6 Ça paraît évident.
7 Maintenant vous allez demander au témoin de faire des calculs. Afin il va
8 falloir -- il suffit peut-être juste d'évaluer ce que nous avons sous les
9 yeux. J'ai bien compris ce que vous avez -- ce que vous voulez dire. Vous
10 voulez dire qu'il y a certes quelques rapports d'enquêtes, mais qu'ils
11 concernent plusieurs individus, donc il y a plus d'individus concernés que
12 de rapports d'enquêtes, ça paraît simple, cinq fois cinq -- cinq plus cinq
13 font dix. Donc ça paraît simple.
14 M. MISETIC : [interprétation] Je vais plutôt parler en fait du dernier
15 point que je voulais soulever, à propos du fait certains avaient été assez
16 réticents à lancer des poursuites.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, enfin, il a dit qu'il ne pouvait
18 pas dire grand-chose à ce propos. Il nous a dit ce qu'il a dit, il a dit
19 qu'il ne pouvait faire rien d'autre que d'interpréter de façon personnelle
20 l'attitude des politiques, rien de plus.
21 M. MISETIC : [interprétation] Oui, j'allais lui poser justement des
22 questions à propos de cela.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais enfin il ne peut pas vraiment
24 vous dire grand-chose.
25 M. MISETIC : [interprétation] Oui, la question était la suivante : Le
26 régime de Tudjman était-il assez réticent à diligenter des enquêtes ?
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais n'en a déjà parlé.
28 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais quand même revenir sur ce point.
Page 20870
1 Il s'agit de la page 42, ligne 4.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
3 L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend : 42, ligne 4.
4 M. MISETIC : [interprétation] Oui, on parle là de la direction politique.
5 Mais donc techniquement cette réticence pourrait se sentir. La question
6 était, y avait-il une réticence du point de vue de la part des politiques à
7 diligenter des enquêtes.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin nous a dit qu'il ne pouvait
9 pas parler de la direction politique. Il a dit qu'il se souvenait -- il a
10 bien dit qu'il ne pouvait pas faire de commentaires à ce propos, à propos
11 de la réticence éventuelle des dirigeants politiques. Il a dit : "Je ne
12 peux pas évaluer l'attitude politique de certaines autorités, de leur
13 réticence ou non."
14 Donc on a posé une question à propos de la réticence qu'auraient
15 éventuellement les dirigeants politiques et il a bien dit qu'il ne pouvait
16 pas y répondre.
17 M. MISETIC : [interprétation] J'aimerais savoir si en tant que procureur il
18 a ressenti à un moment ou à un autre qu'il y avait des réticences venant de
19 quelqu'un, peut-être quelqu'un dans un poste politique. Ces trois faits ont
20 été -- ont fait l'objet d'une enquête de sa part; j'aimerais savoir si,
21 d'après lui, il y avait des réticences politiques ou pas, s'il l'avait
22 ressenti.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, c'est simple ici dans sa
24 réponse. Corrigez-moi si je me trompe, Monsieur Bajic, mais j'ai bien
25 l'impression que lorsque vous avez répondu, vous nous avez dit que vous
26 faisiez votre travail comme vous pensiez qu'il fallait le faire, et que
27 vous ne pouvez pas dire grand-chose d'autre, et que vous n'avez pas
28 ressenti de signaux venant des politiques qui vous auraient permis de
Page 20871
1 savoir s'ils étaient oui ou non réticents. Donc ces questions étaient
2 basées uniquement d'ailleurs sur la lecture qu'on vous a faite du rapport
3 de la réunion.
4 M. MISETIC : [interprétation] Très bien. Dans ce cas, je vais passer à
5 autre chose.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Parfait.
8 M. MISETIC : [interprétation]
9 Q. Maintenant à propos de l'assainissement et des mesures prises
10 d'assainissement. On vous a posé quelques questions, et vous avez dit au
11 cours ces deux derniers jours que vous diligentiez des enquêtes concernant
12 ces meurtres allégués. Maintenant, en ce qui concerne les mesures
13 d'assainissement et leur fonctionnement, j'aimerais savoir si vous avez
14 obtenu des éléments de preuve pouvant indiquer que la façon dont les corps
15 avaient été inhumés pendant l'opération Tempête était indicatif qu'il y
16 avait eu un effet d'étouffer toute cette affaire et d'étouffer tous ces
17 crimes.
18 R. Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question. Les exhumations qui
19 ont eu lieu à Knin et donc qui portaient sur les premières campagnes
20 d'assainissement et bien sachez qu'en ce qui concerne le nombre de
21 personnes de corps que l'on a retrouvés, le nombre de corps identifiés, et
22 cetera, étaient -- sont tel qu'ils sont ce qu'ils sont. En fait, je ne peux
23 pas rajouter grand-chose. Je ne peux pas vous dire quoi que ce soit de plus
24 à ce propos. Certains corps ont été identifiés. Voilà les faits que je
25 connais. Je ne peux pas aller beaucoup plus loin.
26 Q. Je comprends pourquoi vous avez du mal à répondre à ma question.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Misetic, je pense que la
28 première question à poser à M. Bajic à ce propos est la suivante : avez-
Page 20872
1 vous enquêté, avez-vous essayé d'analyser le contexte dans lequel cet
2 assainissement a eu lieu en 1995 ? Avez-vous essayé d'analyser quel était
3 le mode opératoire, par exemple ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc si vous ne cherchez rien, vous ne
6 pouvez rien trouver.
7 Maître Misetic, ça me paraît évident.
8 M. MISETIC : [interprétation] Oui, je comprends bien. C'est pour cela que
9 je me suis levé précédemment lorsque la question a été posée. Maintenant en
10 plus j'ai un problème parce que je n'ai plus d'ordinateur, il ne marche
11 plus.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Enfin, votre question quand même
13 était assez directive étant donné que le but d'une enquête n'est pas
14 forcément d'obtenir des éléments de preuve à propos des restes humains
15 trouvés. Vous vouliez aussi vous concentrer là sur les enquêtes éventuelles
16 qui auraient pu être faites à propos du mode opératoire de l'assainissement
17 en 1995. Mais si j'ai bien compris le témoin maintenant il n'a pas enquêté
18 là-dessus.
19 M. MISETIC : [interprétation] Je suis désolé. Je crois que c'est un point
20 qui a déjà été abordé précédemment, et j'aimerais vraiment bien comprendre
21 quelle était la réponse du témoin avant de passer à autre chose.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous trouvez le passage du compte
23 rendu pertinent, veuillez, s'il vous plaît, nous en informer.
24 M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit de la page 34 vos commentaires
25 commencent à la ligne 24.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer d'accélérer un peu les
27 choses.
28 Vous nous avez dit, Monsieur le Témoin, qu'ultérieurement après que les
Page 20873
1 exhumations ont commencé, vous avez appris que des personnes avaient été
2 enterrés sans qu'il y ait d'enquêtes sur les lieux du crime. Donc comme l'a
3 dit Mme Gustafson, ces personnes ont été enterrées dans le cadre d'une
4 campagne d'assainissement. Vous nous avez dit que vous avez appris cela
5 ultérieurement, et Me Misetic voudrait savoir la chose suivante : il
6 voudrait savoir si à partir du moment où vous avez eu connaissance de cette
7 campagne d'assainissement. De ce système d'assainissement, vous avez essayé
8 d'analyser et d'évaluer et de tirer des conclusions sur le pourquoi et le
9 comment de cette fameuse campagne d'assainissement.
10 Maître Misetic, je pense que c'est cela votre point qui vous intéresse,
11 n'est-ce pas ?
12 M. MISETIC : [interprétation] En effet.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, tout d'abord, avez-vous diligenté
14 la moindre enquête ? Avez-vous analysé, avez-vous tiré des conclusions
15 éventuelles sur la façon dont ce système d'assainissement avait été mis sur
16 pied ? Comment il avait été développé ? Quel était son contexte, quel était
17 son but ? Enfin, est-ce que vous vous êtes penché sur ce point ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, personnellement, je n'ai absolument
19 aucune connaissance à ce propos. Je n'en sais rien. Le bureau du procureur
20 régional de Sibenik a été saisi de cette affaire; ils ont participé aux
21 exhumations. Si j'avais regardé cette affaire, si je l'avais étudié,
22 j'aurais pu vous donner des informations supplémentaires.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si tant est que vous l'ayez fait,
24 mais visiblement, vous ne l'avez pas fait donc je pense que Me Misetic
25 voulait passer à autre chose.
26 M. MISETIC : [interprétation] Très bien.
27 Q. A propos de ces exhumations, on vous a demandé pourquoi les exhumations
28 n'ont eu lieu qu'en 2001, qu'à partir de 2001; est-ce que vous pouvez nous
Page 20874
1 dire qui a demandé ces exhumations, qui est à l'origine de la demande
2 visant à procéder à ces exhumations ?
3 R. Je n'en sais rien.
4 Q. Avez-vous participé à la moindre exhumation en 2001 ?
5 R. En 2001, je travaillais au bureau du procureur au ministère public de
6 Split et les exhumations ont eu lieu à Knin qui fait partie du bureau de
7 Sibenik, donc ce n'est pas du tout de mon ressort.
8 Q. Bien. Savez-vous pourquoi ces exhumations ont commencé en 2001,
9 pourquoi cette année 2001 ? Quels faits ont déclenché ces exhumations ?
10 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'ai déjà posé la question et le témoin a
11 répondu qu'il n'en savait pas.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Misetic a formulé sa question un
13 petit peu différente et il aimerait vraiment avoir une réponse visiblement.
14 L'INTERPRÈTE : Le témoin ne répond pas.
15 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, de toute façon, le témoin a
17 bien dit qu'il ne savait pas. Passez à autre chose, Maître Misetic.
18 L'INTERPRÈTE : Les interprètes font remarquer que le témoin a dit : je n'en
19 sais rien.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis désolé, je n'ai pas entendu
21 l'interprétation en anglais. Mais peut-être que j'ai passé trop de temps
22 dans ce Tribunal, c'est peut-être pour cela que je commence à aller un peu
23 vite en besogne.
24 M. MISETIC : [interprétation]
25 Q. On vous a montré un article de HINA où il y avait on vous citait en
26 disant : "Qu'à partir de 2001 les enquêtes ont commencé de façon beaucoup
27 plus sérieuses."
28 Alors j'aimerais bien que vous commentiez cela. Est-ce que cela veut dire
Page 20875
1 qu'avant 2001, ces enquêtes étaient prises un peu à la légère ?
2 R. Lorsque j'ai réussi de répondre à la question, j'ai dit que, lorsque
3 j'ai pris le poste de procureur général de Croatie, j'avais l'impression
4 qu'il fallait faire un bilan très sérieux de tous les crimes de guerre. Il
5 fallait s'y mettre. J'ai analysé un grand nombre d'affaires et j'en ai
6 conclu en fait qu'il y avait eu trop d'affaires qui avaient été poursuivies
7 par contumace -- d'affaires par contumace, que de plus les actes
8 d'accusation étaient beaucoup trop larges la plus part du temps. Donc j'ai
9 demandé, aux procureurs régionaux chargés des enquêtes sur le terrain, de
10 mettre sur pied un système au sein de leurs bureaux permettant d'étoffer un
11 peu leurs effectifs, chargés de ces crimes de guerre, pour arriver à
12 coordonner leurs travaux avec les services du Renseignement et services de
13 Police pour essayer d'obtenir plus d'éléments de preuve afin de pouvoir
14 vraiment traiter tous les cas qui jusqu'à présent étaient en souffrance.
15 De plus, j'ai donné des consignes demandant à ce que l'on interdise
16 les procès par contumace et en ce qui concerne les procès en souffrance,
17 les affaires en souffrance, de vérifier si les actes d'accusation avaient
18 été correctement rédigés et s'ils respectaient vraiment les normes
19 habituelles en l'espèce. Il fallait revérifier aussi si les crimes étaient
20 véritablement des crimes de guerre et non pas uniquement des délits, et
21 cetera, et cetera. Cela dit, il était difficile à l'époque aussi de
22 collecter des informations et des éléments de preuve à propos de crimes de
23 guerre qui avaient eu lieu dix ans auparavant. Donc j'ai mis sur pied des
24 mesures permettant de renforcer la coopération entre les institutions, donc
25 entre les autres procureurs généraux de la région pour pouvoir obtenir des
26 informations, pour pouvoir obtenir des informations aussi recueillies déjà
27 ici, dans ce Tribunal. De ce fait, le nombre de cas s'est réduit de 4 000 à
28 uniquement 1 100, et nous avons aussi lancé de nouvelles procédures. Nous
Page 20876
1 avons renvoyé un certain nombre d'affaires dans les pays concernés où les
2 personnes qui maintenant résidaient dans ces pays allaient pouvoir être
3 poursuivies.
4 Q. Je vous remercie de vos réponses.
5 M. MISETIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le
6 Président.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, avez-vous des
8 questions ?
9 M. MIKULICIC : [interprétation] Pas de questions.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, plus de questions ? Je
11 vais vérifier aussi si mes confrères et consoeurs ont des questions.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Kinis a une question pour
14 vous, Monsieur Bajic.
15 Questions de la Cour :
16 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Monsieur Bajic, j'ai une question à
17 vous poser à propos du butin de guerre. Nous avons entendu un grand nombre
18 d'éléments de preuve selon lesquels les commandants de l'armée croate
19 avaient donné des consignes permettant de recueillir un butin de guerre, et
20 ce, pour des fins militaires.
21 Donc avez-vous reçu des instructions à un moment ou à un autre vous
22 permettant de savoir ce qui pouvait être du ressort d'un butin de guerre et
23 ce qui pouvait ne pas être de ce ressort ?
24 R. Non.
25 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Avez-vous fait une différence entre les
26 incidents où des biens aménagés, des meubles avaient été recueillis,
27 avaient été collectés par des militaires de façon organisée avec d'autres
28 incidents qui n'auraient pas pu être traités de la même façon et avez-vous
Page 20877
1 bien fait une différence ?
2 R. Non, j'ai tout traité de la même façon.
3 M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Très bien.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bajic, j'ai une question
5 portant sur la déclaration que vous avez faite à la Défense Gotovina.
6 Au paragraphe 4, vous avez dit que les procureurs militaires étaient en
7 uniforme, mais en fait, agissaient dans le cadre du système du ministère
8 public.
9 Donc d'après ce que j'ai compris, ce n'était pas des soldats mais ils
10 étaient en uniformes. Vous-même, vous étiez aussi en uniforme ?
11 R. Oui, oui, j'étais en uniforme.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un bel uniforme, vous aviez des
13 insignes, vous faisiez partie d'une unité ou est-ce que vous pouviez
14 choisir les emblèmes que vous arboriez ? Pouvez-vous nous expliquer à quoi
15 ressemblait l'uniforme que vous arboriez ?
16 R. Après que ces décrets rentraient en vigueur en 1991, décrets sur
17 l'organisation du système judiciaire militaire, le ministère de la Défense,
18 sur proposition du procureur général de Croatie, a déployé les substituts
19 du procureur au sein des bureaux de procureurs militaires.
20 Donc à partir de 1992, le 6 février, j'ai changé même la plaque qui était
21 sur ma porte. J'ai mis "substitut du procureur militaire" au lieu de
22 "procureur public". A partir de ce moment-là, aussi j'étais en tenue
23 militaire, tenue militaire que j'ai reçue lorsque j'ai été déployé sur le
24 terrain. Mais les services des Procureurs militaires faisaient partie du
25 ministère public croate et nous devions rendre compte au service du
26 procureur de la République de Croatie.
27 Pourquoi nous étions en uniformes, tout d'abord parce qu'on a reçu nos
28 papiers militaires et nous avions aussi l'uniforme avec les papiers
Page 20878
1 militaires. Donc il était impossible à l'époque que des militaires soient
2 poursuivis et soient jugés par des gens qui n'étaient pas en uniformes et
3 qui ne feraient pas partie du personnel militaire. Ça a été complètement
4 abandonné depuis, mais j'ai été en tenue militaire jusqu'au 6 décembre
5 1996, jusqu'à ce que je quitte mon poste. Donc à part le soutien technique
6 nous avons reçu du ministère de la Défense, nous n'avions aucun devoir
7 envers le ministère de la Défense.
8 De plus, les décisions prises en première instance au niveau des tribunaux
9 militaires ont été faites par les tribunaux régionaux, par exemple, à
10 Split, les délits au pénal sanctionnables par un certain nombre d'années de
11 prison. Ensuite on passait à la deuxième instance et là la deuxième
12 instance était du ressort de la Cour suprême de la Croatie. En ce qui
13 concerne la paye, nous étions payés par le ministère de la Justice puisque
14 nous faisons partie du système judiciaire.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous dites qu'afin que vous ayez
16 une certaine autorité sur les soldats de l'armée croate, est-ce que cela
17 était exclusivement le cas dans votre bureau, c'est-à-dire lorsqu'un
18 suspect ou d'autres personnes, ou bien est-ce qu'au contraire vous alliez
19 aussi sur le terrain ?
20 R. Nous portions des uniformes militaires tant en tant que juges
21 militaires et que procureurs militaires au cours de notre mandat dans le
22 système de la justice militaire. Maintenant, pour ce qui était de nos
23 déplacements sur le terrain, il s'agissait pour nous de nous rendre sur les
24 lieux de crimes ou de reconstructions de crimes et c'étaient les seuls
25 déplacements que nous effectuions en tant que procureurs militaires portant
26 des uniformes. Nous ne participions à aucune activité ordinaire ou
27 opération militaire de la HV parce que nous étions déployés au sein du
28 bureau du procureur militaire et donc nous faisions partie intégrante du
Page 20879
1 système de justice militaire. Nous avions le statut de soldats.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une fois de plus, pourriez-vous nous
3 décrire, s'il vous plaît, en décrivant les insignes que vous portiez, à
4 quelle unité vous apparteniez, même si bien entendu je comprends que ceci
5 ne décrit pas une fonction, mais quelles étaient les unités auxquelles vous
6 apparteniez lorsque vous portiez ces uniformes ?
7 R. Nous n'étions membres d'aucune unité.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais les personnes qui vous
9 voyaient en uniforme, à quelle unité pensaient-ils que vous apparteniez ?
10 R. Ils ne pouvaient pas vraiment nous distinguer d'autres soldats parce
11 qu'il n'y avait aucune autre indication dressant sur l'uniforme leur
12 permettant de le faire. Peut-être vers la fin de 1996, oui, mais au début,
13 il n'y avait strictement aucun insigne qui permettait à un observateur de
14 nous distinguer, nous, juges militaires ou procureurs militaires d'autres
15 soldats de l'armée ordinaire. Nous étions déployés en vertu d'une décision
16 rendue par le ministre de la Défense à l'initiative d'une proposition du
17 procureur général. Ceci figure dans le décret qui a déjà été versé au
18 dossier.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel était votre grade, si l'on se fonde
20 sur l'uniforme que vous portiez ?
21 R. Je n'avais aucun grade les deux premières années, mais c'est vrai qu'en
22 1995 ou 1996, vers la fin, j'avais le grade de capitaine.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un autre sujet, donc nous allons
24 laisser ces questions vestimentaires de côté pour l'instant. Est-ce qu'il
25 existait des registres strictement confidentiels, vous avez dit qu'il
26 n'existait que quelques entrées et qu'il ne restait plus rien de ce
27 registre, mais que faudrait-il qu'il se passât pour figurer dans ce
28 registre ? Qu'est-ce qu'il avait de si particulier ce registre ?
Page 20880
1 R. Les registres de base pour les opérations des procureurs ou du
2 ministère public en général sont les registres qui ont fait l'objet de
3 discussions lorsque nous avons discuté de ces registres de façon détaillée
4 lors du contre-interrogatoire par l'Accusation.
5 Ceci étant dit, dans les services du procureur de la république et du
6 procureur militaire, les règlements finalement s'appliquaient aux deux
7 services et étaient identiques et il y avait un certain nombre de registres
8 qui avaient un degré de confidentialité différent. Maintenant, ce que l'on
9 consignait par écrit dans ces registres, c'était des notes, des memoranda,
10 des éléments d'information émanant d'autres organes de l'Etat qui étaient
11 classées comme courrier, lettres. Et en raison du règlement, un règlement
12 qui s'applique encore à l'heure actuelle, l'organe de l'Etat qui reçoit un
13 document classé ne devait en aucun changer le statut du document en
14 question sans l'accord de l'auteur ou de l'expéditeur du document classé en
15 question.
16 Dans certains cas spécifiques, et ils étaient assez nombreux, à mon avis en
17 tout cas, mais je ne me suis peut-être trompé, c'est la seule façon que je
18 peux l'expliquer, certains se retrouvaient dans le registre très
19 confidentiel ou VT. Mais d'autres plaintes au pénal se retrouvaient dans
20 les registres KT et ensuite faisaient l'objet d'un traitement.
21 Donc il n'y avait là aucun secret particulier qui s'appliquait à ces
22 documents-là.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce registre spécial on trouvait des
24 éléments qui tôt ou tard finissaient toujours par se retrouver dans les
25 registres normaux ?
26 R. Oui.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaie simplement de comprendre s'il y
28 avait des éléments à caractère sensible qu'on pourrait ne pas retrouver
Page 20881
1 dans des registres tel que, par exemple, des données portant sur des
2 suspects de haut rang, portant sur des crimes très spécifiques, sur le fait
3 d'étouffer quelque affaire. Est-ce qu'il y avait dans ces registres-là quoi
4 que ce soit de différent ou quelque chose qu'on ne retrouverait pas
5 justement dans les registres normaux ?
6 R. Tout ce qui était pertinent dans le cadre d'un rapport pénal, c'est-à-
7 dire les informations qui figuraient dans des documents confidentiels se
8 retrouvaient dans les registres KT ordinaires et faisaient l'objet d'un
9 traitement. C'est en tout cas ce qui me semble me souvenir pour ce qui est
10 de Split. Et certains éléments qui étaient consignés par écrit dans le
11 registre VT étaient les éléments qu'il y avait lieu de maintenir
12 confidentiels, de manière à ce que l'on puisse au bout du compte assurer un
13 traitement efficace de l'affaire. Il n'y avait qu'un nombre très limité de
14 personnes qui connaissaient ces informations, et c'était nécessaire pour
15 que justement l'on puisse traiter correctement l'affaire.
16 Nous avons parcouru ces registres afin d'utiliser les informations
17 qui étaient nécessaires afin que nous puissions traiter efficacement
18 certaines des affaires. Mais rien n'est resté dans ces registres VOTRE dans
19 la catégorie affaires classées. Je l'ai mentionné hier parce que je me suis
20 aperçu que certains procureurs, notamment le procureur de Sibenik, avait
21 fait figurer dans le registre VT par erreur des documents au lieu de les
22 faire consigner dans le registre KT. J'ai voulu simplement être très
23 vigilant et c'est la raison pour laquelle je l'ai mentionné hier afin que
24 vous disposiez de toutes les informations.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci pour cette réponse.
26 Est-ce que les questions des Juges de la Chambre incitent les parties à
27 poser d'autres questions ?
28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, j'ai
Page 20882
1 simplement un certain nombre d'autres questions.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A propos de ce témoin ?
3 Mme GUSTAFSON : [interprétation] A propos de ce témoin, mais il n'est pas
4 nécessaire qu'il soit présent dans le prétoire.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une autre question, Madame Gustafson.
6 Vous nous avez dit hier que vous risquiez d'avoir besoin d'un peu plus de
7 temps, est-ce qu'il vous reste encore des choses à traiter ?
8 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Bajic, voilà qui
10 conclut votre déposition devant ce Tribunal. On ne peut certainement pas
11 comparer le sort d'un témoin et celui d'un procureur, j'en ai bien
12 conscience. Il ne me reste plus qu'à vous remercier très cordialement,
13 Monsieur, d'avoir répondu à toutes les questions qui vous ont été posées
14 tant par les parties que par les Juges de la Chambre et à vous souhaiter un
15 bon retour chez vous.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'huissière, je vous demanderais
18 de bien vouloir escorter le Témoin, M. Bajic.
19 [Le témoin se retire]
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, il est 12 heures 40,
21 il reste encore un certain nombre de questions de procédure que les Juges
22 de la Chambre souhaiteraient évoquer aujourd'hui même. Si les questions que
23 vous souhaitiez soulever à propos de ce témoin peuvent attendre que nous
24 revenions de la pause, cela nous arrangerait beaucoup et le mieux serait
25 sans doute de régler ces questions de procédure après la pause. Ça nous
26 permettrait de gagner du temps.
27 Donc nous reprendrons à 13 heures 05.
28 --- L'audience est suspendue à 12 heures 41.
Page 20883
1 --- L'audience est reprise à 13 heures 10.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelques questions de procédure doivent
3 être abordées. Je commencerais par la première.
4 Madame Gustafson, vous nous disiez que vous souhaitiez évoquer deux
5 questions ayant trait à M. Bajic.
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Madame,
7 Messieurs les Juges. Tout d'abord, la pièce à conviction P2614, le résumé
8 des diagrammes qui ont été versés au dossier. Une erreur a été commise. Une
9 version a été envoyée hier soir, et j'ai eu l'occasion de m'entretenir à
10 nouveau avec M. Misetic, et une nouvelle version a été envoyée ce matin.
11 Ensuite une erreur a été faite à nouveau et la version incorrecte a été
12 présentée. Comme M. Misetic l'a dit au cours de ces questions
13 supplémentaires, cela a été corrigé grâce à l'aide du Greffe. Donc la
14 version correcte est présente dans le prétoire électronique et c'est la
15 cote P2614.
16 Un autre élément est j'ai oublié de demander le versement au dossier de la
17 pièce de la liste 65 ter portant la cote 4461, qui est le compte rendu du
18 conseil du 6 novembre 1998, et j'en demande le versement au dossier.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, il y a des objections
20 à propos de la pièce 65 ter 4461 ?
21 M. MISETIC : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président. Je
22 souhaite simplement dire que je demanderais à l'Accusation que nous nous
23 mettions d'accord sur certains points notamment concernant un fait
24 particulier, mais cela pourra se faire ultérieurement.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs
27 les Juges, il s'agira de la pièce à conviction P2616.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P2616 est versée au dossier.
Page 20884
1 Madame Gustafson, j'avais fait une remarque hier à propos des colonnes d'un
2 document qui me posait problème, parce que -- je constatais qu'il y avait
3 des différences entre les versions anglaises et originales DO, DOD, et
4 cetera. Est-ce que cette question a été résolue ?
5 [Le conseil de la Défense se concerte]
6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, la traduction
7 a été corrigée et un courrier électronique a été envoyé expliquant à la
8 Chambre les erreurs et ce en date d'hier.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça ne nous a pas encore été transmis
10 mais la Défense est au courant également. Par conséquent, cette question
11 est réglée.
12 Autre point que je souhaitais évoquer, il s'agit d'une déclaration émanant
13 des Juges de la Chambre et qui a trait au rapport d'expert du Témoin Ivan
14 Pokaz.
15 Le 9 juillet 2009, l'équipe de la Défense Gotovina a déposé un
16 rapport d'expert rédigé par le Témoin Pokaz, dont une traduction finalisée
17 a été communiquée à la Chambre par courriel en date du 15 juillet 2009. Par
18 la suite, le curriculum vitae du Témoin Pokaz a été déposé en date du 16
19 juillet 2009. Le 10 août 2009, l'Accusation a déposé une notice au titre de
20 l'article 94 bis du Règlement, formulant une objection à l'encontre du
21 rapport et contestant le niveau d'expertise et les qualifications du
22 témoin. L'Accusation avançait l'argument que le rapport ne devrait pas être
23 versé au dossier. Par ailleurs, l'Accusation indiquait que quelque soit la
24 décision prise par les Juges de la Chambre concernant l'admission du
25 rapport, elle ne procéderait pas au contre-interrogatoire du témoin à moins
26 que ce dernier soit appelé à déposer de vive voix.
27 Le 12 août 2009, la Défense Markac a déposé sa notice exprimant le souhait
28 de procéder au contre-interrogatoire du témoin Pokaz.
Page 20885
1 Le 25 août 2009, l'équipe de la Défense Gotovina a déposé un addendum au
2 rapport d'expert du Témoin Pokaz, expliquant les raisons de recours à des
3 guillemets dans l'ensemble du rapport d'expert.
4 La Chambre surseoit à sa décision portant sur l'admission du rapport
5 d'expert jusqu'après la déposition du Témoin Pokaz. L'Accusation dans sa
6 notice a contesté de façon détaillée les éléments du rapport, et la Chambre
7 estime que les préoccupations exprimées par l'Accusation ne sont pas sans
8 fondement, notamment la Chambre exprime ses doutes quant à la transparence
9 des méthodes appliquées par le témoin et quant aux sources sur lesquelles
10 se fondent les conclusions du témoin. A cet égard, la Chambre signale avec
11 insistance le fait qu'un expert doit donner son avis d'expert en présentant
12 de façon parfaitement transparente les faits supposés ou établis sur
13 lesquels il se fonde, ainsi que les méthodes auxquelles il a eu recours
14 afin de se former son avis d'expert en se basant sur ses connaissances ou
15 son expérience. Les sources sur lesquelles il s'est fondé doivent être
16 indiquées clairement et accessibles. En l'absence d'une telle transparence,
17 il sera difficile aux parties et aux Juges de la Chambre de juger du bien-
18 fondé de la base factuelle sur laquelle se fonde l'expert témoin pour
19 parvenir à ses conclusions, et par conséquent il leur est difficile de
20 procéder à une évaluation de la valeur probative [phon] du rapport
21 d'expert. Le résultat pouvant être la non recevabilité du rapport d'expert
22 ou la conséquence peut en être que l'on y accordera une importance limitée.
23 Par conséquent, avant de rendre sa décision sur l'admission du rapport
24 d'expert, les Juges de la Chambre donneront aux parties la possibilité
25 d'explorer les avis exprimés par le Témoin Pokaz dans son rapport en tenant
26 compte des orientations mentionnées.
27 Ceci conclut la déclaration des Juges de la Chambre.
28 J'ajouterais ici que l'on autorise du côté de la Chambre l'Accusation
Page 20886
1 à dépasser le maximum de mots à utiliser pour la notice.
2 Je passe maintenant au point suivant à l'ordre du jour et je propose que
3 nous passions à huis clos partiel.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos
5 partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 20887
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 [Audience publique]
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
Page 20888
1 Il y a encore une question qui n'a pas été réglée à propos de la mission de
2 l'Union européenne, car la Chambre a été informée par la Défense de M.
3 Gotovina du fait qu'il y avait encore des documents qui faisaient défaut.
4 Alors la Chambre a reçu une lettre qui, me semble-t-il, a été écrite par M.
5 Solana; cette lettre a été écrite et déposée, je pense qu'elle portait la
6 date du 13 août. Nous avons trois catégories de documents qui sont
7 présentés en addendum ou en addenda plutôt de cette lettre. Vous avez la
8 première catégorie, il s'agit de documents qui ont été reçus par
9 l'Accusation. Je pense qu'ils sont au nombre de deux, donc il s'agit de
10 documents qui ont été reçus par l'Accusation et qui par la suite ont fait
11 l'objet, ou certains éléments de ces documents ont été caviardés en fait,
12 ont été expurgés par l'Union européenne. Ils ont ensuite été remis à
13 nouveau à l'Accusation pour que ces documents soient communiqués à la
14 Défense.
15 Dans la deuxième catégorie de documents qui sont présentés en
16 addendum, nous trouvons des documents qui n'ont pas été trouvés lorsque les
17 archives ont été consultées à nouveau.
18 Puis la troisième catégorie de documents est des documents qui,
19 apparemment, ont fait l'objet d'expurgation mais qui ont été communiqués à
20 la Défense de M. Gotovina, le 1er juillet, si je ne me trompe.
21 Est-ce que cela signifie, Maître Misetic, que les documents, que vous avez
22 reçus directement de la part de la MOCE à cette date-là, ont été reçus
23 directement de la part de la MOCE et n'ont pas été reçus par le biais de
24 l'Accusation; c'est cela ?
25 M. MISETIC : [interprétation] Oui, c'est exact. Nous sommes allés à
26 Bruxelles pour prendre ces documents.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. D'après ce que je comprends, ils
28 étaient au nombre de six, ces documents.
Page 20889
1 Donc la Chambre va statuer sur la façon de procéder puisqu'une
2 requête avait été présentée à ce sujet. Mais la Chambre aimerait savoir
3 quels sont les documents que la Défense de M. Gotovina souhaite encore
4 avoir ?
5 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous allons
6 réagir le plus rapidement possible et vous fournir une liste à ce sujet,
7 car nous voulons être absolument clairs à ce sujet. Je dirais également que
8 outre les documents mentionnés par la Chambre, il est plus que vrai
9 semblable que nous demandions à la Chambre d'étudier le cas d'une catégorie
10 de documents, il s'agit des documents du registre de la MOCE à Knin. Il y a
11 un autre jeu supplémentaire de documents, nous pensons, nous avons de
12 bonnes raisons de penser qu'ils existent et qu'ils ont une pertinence assez
13 importante pour ce procès. Donc nous aimerions ajouter ces documents à la
14 liste, la liste écourtée en fait qui a été présentée par la Chambre.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si elle est écourtée.
16 Nous vous avons invités dans un premier temps à vous concentrer sur les
17 documents qui ont été mis à la disposition de la Chambre, et d'après la
18 réponse de M. Solana, nous voyons en fait qu'ils ont consulté leurs
19 archives pour ce qui est de ces documents. Je dois dire que la procédure
20 peut parfois être un peu floue puisqu'il y a des documents que vous
21 recherchez et qui sont déjà disponibles, ou d'autres documents que l'on
22 considère qui sont des documents qui existent alors qu'il y a un doute qui
23 subsiste, on ne sait pas s'ils existent véritablement. Donc vous pourriez
24 peut-être nous fournir une information mise à jour, nous dire quels sont
25 les documents que vous souhaitez encore obtenir, nous dire si vous avez eu
26 des indices relatifs à leur existence et, bien entendu, vous nous
27 présenterez la situation la plus récente. Ce n'est pas un engagement
28 d'ailleurs de la part de la Chambre, ce que je vous dis, si ce n'est que
Page 20890
1 nous allons nous pencher sur tous ces documents.
2 M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà, voilà ce que j'avais à mon ordre
4 du jour.
5 Est-ce que vous avez d'autres questions à soulever ?
6 Monsieur Hedaraly.
7 M. HEDARALY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il y avait cette
8 liste de pièces à conviction que nous avions reçue pour l'expert Jones et
9 l'expert Corn. Il y a certains documents qui figurent sur cette liste, et
10 qui ne font pas l'objet d'examen dans le rapport. Pour l'expert Corn, par
11 exemple, il s'agit du document P1125, l'ordre du général Gotovina, l'ordre
12 d'attaque. Vous avez le document D1205, il s'agit de la pièce jointe de M.
13 Rajcic pour l'artillerie, et puis vous avez le P461, le procès-verbal de
14 Brioni. En fait, nous n'avons pas reçu d'information à ce sujet. Nous ne
15 savons pas quel est l'avis de l'expert à propos de ces documents. Nous ne
16 savons pas d'ailleurs d'après le rapport, si c'est lui qui a fourni ces
17 documents. Nous ne savons pas si lorsqu'il sera interrogé, il fournira un
18 avis à ce sujet, et de toute façon, nous n'avons pas eu la notification
19 nécessaire à propos de ces documents. Puis il en va de même pour l'expert
20 Jones. Il y a un rapport d'artillerie, par exemple, et nous aimerions
21 soulever une objection à propos de ces documents et nous voulons que cela
22 soit consigné au compte rendu d'audience.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Kehoe.
24 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, l'avis des experts, ou
25 les avis des experts se trouvent dans les rapports. La Chambre pourra en
26 prendre connaissance. Pour ce qui est des documents qui pourraient
27 éventuellement être utilisés, nous avons fourni la liste des documents à
28 l'Accusation. Nous nous contentons de suivre la procédure qui a été
Page 20891
1 utilisée par l'Accusation, lors de l'interrogatoire principal du colonel
2 Konings, par exemple. Nous, nous avions reçu une pléthore de documents. Il
3 s'agissait de documents dont certains ne faisaient pas partie de son
4 rapport, mais ces documents ont été utilisés lors de l'interrogatoire
5 principal.
6 Mais les avis qui vont être fournis par ces experts se trouvent dans les
7 rapports, il n'y a pas de divergence par rapport à ce qui se trouve dans
8 les documents. Nous nous sommes contentés de donner toute la gamme possible
9 des documents qui pourraient être utilisés pendant l'interrogatoire
10 principal.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense qu'il y a une
12 préoccupation qui a été exprimée par M. Hedaraly, puisqu'il s'agit de
13 documents qui avaient été mis à la disposition de l'expert lorsqu'il s'est
14 forgé son point de vue. Alors un peu plus tôt, je vous ai donné lecture
15 d'une déclaration, d'une déclaration qui portait sur le rapport d'expert de
16 M. Pokaz. Alors, bien entendu, il se peut que certaines choses qui étaient
17 dites à propos de ce rapport soient valables également pour ces autres
18 rapports d'experts; à savoir j'avais insisté sur la transparence des
19 sources, sur la transparence, sur les sources, sur les faits qui sont
20 supposés, qui sont avancés. Alors par exemple dans le rapport, je donne le
21 rapport de M. Corn comme exemple, donc son opinion, son avis est très, très
22 clair.
23 M. KEHOE : [interprétation] Mais vous avez les faits par rapport à ce
24 que dit, M. Corn mais tout cela était fourni à l'Accusation avec M. le Pr
25 Corn, par exemple, il y a toute une série --
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais tout cela nous l'avons vu,
27 bien sûr. Mais M. Hedaraly a exprimé un souci. Son souci étant qu'il se
28 peut qu'il n'ait pas une connaissance globale et générale de tous les
Page 20892
1 documents qui ont été fournis aux experts. Alors, bien entendu, il n'est
2 pas toujours facile d'avoir une véritable vision d'ensemble. Nous, nous
3 avons reçu ces écritures de la part des parties. Il nous avait été demandé
4 s'il y avait des obligations à ce sujet. Nous n'avons toujours pas statué
5 sur la question. Nous n'avons pas rendu d'ordonnance. Nous sommes en train
6 d'y travailler, d'arrache-pied d'ailleurs. Il semblerait que la Défense
7 pense avant tout à ses obligations en matière de communication de documents
8 alors que l'Accusation semble plutôt penser à la façon de mettre à
9 l'épreuve les éléments de preuve si nous n'avons pas tous les éléments
10 d'information.
11 Alors je ne vais pas me prononcer davantage sur la question, car la
12 Chambre va bientôt vous fournir des orientations plus précises, ou va
13 rendre des ordonnances.
14 M. KEHOE : [interprétation] Oui, autre point, j'aimerais, s'il vous plaît,
15 que vous étudiez le rapport de Konings, puisqu'il y a deux documents dans
16 son rapport qui sont cités mais nous avons aussi fourni un grand nombre
17 d'autres documents sur une liste qui avait été fournie par M. Russo et qui
18 avait été donnée au témoin, donc à ce fameux expert Konings. La situation
19 est identique.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, vous êtes en train
21 d'essayer de plaider. On connaît tous ceci, mais voici ce que nous a
22 demandé M. Hedaraly. C'était simple. Il ne voulait pas que les choses
23 soient au compte rendu tout de suite, en tout cas. Il ne voulait pas
24 présenter d'argument à l'heure actuelle, il ne voulait pas que ce soit au
25 compte rendu.
26 Alors, sachez que la Chambre de première instance a bien compris les
27 deux positions de vos -- des deux parties en ce qui concerne leurs
28 obligations respectives, et donc, s'il vous plaît, vous, en ce qui concerne
Page 20893
1 le rapport Pokaz, vous connaissez quelles sont les consignes de la Chambre,
2 vous savez ce dont a besoin la Chambre de première instance pour pouvoir
3 mettre à l'épreuve les faits et évaluer la validité du rapport d'expert. Je
4 pense que nous n'avons pas besoin d'aller plus loin -- plus avant, et vous
5 n'avez qu'à nous envoyer les écritures et nous statuerons sur ce point.
6 M. KEHOE : [interprétation] J'ai bien compris. Merci.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il d'autres points à l'ordre du
8 jour ? Non ? Il n'y a pas de témoin disponible avant lundi, si j'ai bien
9 compris, ce qui signifie donc que nous allons lever la séance, et nous
10 reprendrons lundi, 31 août, 9 heures du matin, dans le prétoire I.
11 --- L'audience est levée à 13 heures 36 et reprendra le lundi 31 août 2009,
12 à 9 heures 00.
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28