Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 7 septembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 13.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes présentes

  6   dans le prétoire et hors du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez appeler la cause, je vous prie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre

 10   Ante Gotovina et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 12   Avant que nous ne commencions et que nous n'entendions le témoin suivant,

 13   j'ai quelques questions de procédure à régler. Je vais essayer d'aller

 14   aussi vite que faire se peut.

 15   Premièrement, j'aimerais indiquer officiellement que la Chambre n'a pas

 16   siégé du 2 au 4 septembre, parce que la Défense de M. Gotovina avait

 17   officieusement retiré de sa liste le Témoin Pokaz.

 18   La Chambre le regrette mais comprend qu'il n'y avait pas d'autres témoins

 19   prévus pour ces jours-là. Pour ce qui est du rapport d'expert du général de

 20   brigade Ivan Pokaz, rapport qui d'ailleurs avait été déposé le 9 juillet

 21   conformément à l'article 94 bis, ce rapport sera versé au dossier.

 22   J'aimerais maintenant que nous passions à huis clos partiel pendant une

 23   petite seconde, je vous prie.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 25   partiel, Monsieur le Président.

 26   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 21129 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  2   [Audience publique]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

  4   La Chambre doit maintenant réagir face à la demande présentée par

  5   l'Accusation pour ce qui est du Témoin Stepjan Sterc.

  6   Voici quelles sont les raisons qui ont motivé la Chambre à prendre la

  7   décision de biffer les paragraphes 3, 5.1, 5.2, 5.3, 5.4, et 7 de la

  8   déclaration au titre de l'article 92 ter du Témoin Sterc ainsi que les

  9   raisons qui motivent la Chambre à recevoir les autres parties de sa

 10   déclaration.

 11   Le 9 juillet 2009, la Défense de M. Gotovina a présenté une déclaration au

 12   titre de l'article 92 ter pour le Témoin Sterc. Le même jour, l'Accusation

 13   a déposé une objection eu égard à cette déclaration, en avançant que des

 14   extraits de cette déclaration étaient fondamentalement un rapport d'expert

 15   qui aurait dû être versé conformément à l'article 94 bis, l'Accusation

 16   avait également indiqué qu'elle n'avait pas reçu en bonne et due forme les

 17   documents de contexte permettant d'évaluer les points de vue avancés par le

 18   témoin. Ce sont les raisons pour lesquelles l'Accusation demandait que les

 19   paragraphes 3, 5, et 7 de la déclaration soient biffés, ou, d'une autre

 20   façon, il avait été indiqué que l'Accusation devrait bénéficier d'un temps

 21   nécessaire pour préparer son contre-interrogatoire à la suite de la

 22   communication de ces documents de contexte. La question a été abordée

 23   également dans le prétoire ce même jour et fut l'objet de communications

 24   officieuses entre les parties et la Chambre le 10 juillet 2009.

 25   Le 14 juillet 2009, la déclaration au titre de l'article 92 ter a été

 26   versée au dossier, cette demande ayant été faite oralement, et elle a

 27   ensuite été enregistrée aux fins d'identification sous la cote D1607. Cela

 28   fait l'objet de la page 20 260 du compte rendu d'audience.

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  1   Le 15 juillet 2009, la Chambre a versé au dossier en partie la déclaration

  2   du Témoin Sterc en vertu de l'article 92 ter, à l'exclusion des paragraphes

  3   3, 5.1, 5.2, 5.3, 5.4, et 7. Cette décision figure aux pages 20 343 et 20

  4   344 du compte rendu d'audience.

  5   La Chambre avait considéré précédemment que les parties n'étaient pas

  6   forcément empêchées de demander des points de vue à des témoins qui

  7   témoignent sur le fait, et qu'il n'était pas toujours très facile de faire

  8   la part des choses entre les faits et les opinions et avis, et que de très

  9   simples déclarations pouvaient inclure ces deux éléments. Lorsqu'un témoin

 10   qui vient témoigner sur le fait donne un avis dans le cadre de sa

 11   déposition, la Chambre considère que cet avis a une base factuelle en ce

 12   sens que le témoin a une expérience personnelle du fait dont il parle, et

 13   la Chambre a également indiqué qu'il fallait savoir si le témoin avait

 14   besoin de compétences, connaissances ou expériences spéciales afin d'étayer

 15   ce qu'il avance.

 16   Pour essayer de déterminer si un élément de preuve doit être versé au

 17   dossier, la Chambre doit, qui plus est, envisager si les éléments de preuve

 18   qui sont présentés sont composés essentiellement d'avis ou d'opinions ou de

 19   faits. Toutefois, lorsqu'un témoin fournit des opinions, des avis ou des

 20   conclusions qui ont trait aux compétences d'expert, à savoir qu'elles sont

 21   telles que la personne qui fournit ces avis doit avoir une connaissance

 22   spécialisée en la matière, la Chambre s'attend à ce que ce témoin qui

 23   fournit son avis d'expert le fasse de façon absolument transparente par

 24   rapport aux faits supposés ou établis qu'il présente, et la Chambre indique

 25   également que la méthodologie utilisée pour présenter ces connaissances,

 26   ces expériences, ou ces compétences doit faire partie de son opinion

 27   d'expert. Lorsque cela est possible, les parties doivent se voir octroyer

 28   la possibilité de contester ou de poser des questions sur la base factuelle

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  1   et sur la méthodologie qui a été utilisée par l'expert pour parvenir à sa

  2   conclusion. Qui plus est, un certain degré de transparence pour ce qui est

  3   des sources et des méthodes utilisées dans un rapport d'expert est

  4   nécessaire au moment où les éléments de preuve sont versés au dossier afin

  5   que la Chambre puisse véritablement déterminer la véritable valeur probante

  6   du rapport. La Chambre doit absolument être convaincue qu'un témoin expert

  7   dispose de connaissances, expériences ou compétences spéciales nécessaires

  8   pour pouvoir permettre à la Chambre de comprendre les questions faisant

  9   l'objet du litige et pour pouvoir statuer.

 10   En général, ces critères sont respectés grâce au mécanisme de

 11   l'article 94 bis du Règlement de preuve et de procédure. En l'espèce, le

 12   témoin en question n'a pas été présenté par la Défense de M. Gotovina en

 13   fonction de cet article. La Chambre a considéré que les paragraphes 3, 5.1,

 14   5.2, 5.3 et 5.4, ainsi que 7 de la déclaration au titre de l'article 92 ter

 15   du Témoin Sterc, qui décrit les résultats d'une analyse scientifique et

 16   démographique et qui contient également des conclusions qui ont été tirées

 17   sur la base de ces résultats, correspondent à une déposition présentée par

 18   un expert.

 19   Afin d'empêcher que ce témoignage d'expert soit présenté en quelque

 20   sorte en le faisant passer pour un témoin des faits, la Chambre s'attend à

 21   ce que les éléments de preuve présentés par le Témoin Sterc respectent les

 22   critères qui sont normalement utilisés par rapport aux témoins experts,

 23   critères que j'ai énumérés ci-dessus. Toutefois, la Chambre a estimé qu'en

 24   l'espèce, les avis, opinions et conclusions du Témoin Sterc n'ont pas été

 25   fournis de façon absolument transparente par rapport aux fais supposés ou

 26   établis qu'il a utilisés et par rapport aux méthodes qu'il a également

 27   utilisées pour se forger ses opinions et tirer ses conclusions. Par

 28   conséquent, la Chambre a estimé que les parties n'étaient pas à même

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  1   d'étudier la base utilisée par le Témoin Sterc pour parvenir à ces

  2   conclusions et la Chambre n'est pas en mesure d'évaluer de façon absolument

  3   précise la valeur probante des extraits de la déclaration du témoin au

  4   titre de l'article 92 ter. Ce qui fait que les paragraphes 3, 5.1, 5.2,

  5   5.3, 5.4, et 7 de la déclaration au titre de l'article 92 ter du Témoin

  6   Sterc ne seront donc pas versés au dossier.

  7   La Chambre a par contre été convaincue que les autres parties de la

  8   déclaration du Témoin Sterc sont pertinentes et ont une valeur probante et

  9   peuvent donc, de ce fait, être versées au dossier conformément à l'article

 10   92 ter (A) du Règlement. Pour ces raisons, la Chambre a décidé de verser au

 11   dossier de façon partielle la déclaration au titre de l'article 92 ter du

 12   Témoin Sterc, à l'exclusion des paragraphes 3, 5.1, 5.2, 5.3, 5.4 et 7.

 13   Nous en avons terminé avec l'exposé des raisons utilisées par la

 14   Chambre pour statuer en matière de versement au dossier de la déclaration

 15   au titre de l'article 92 ter du Témoin Sterc.

 16   La Chambre doit également présenter les raisons qui l'ont motivée à

 17   prendre sa décision eu égard à l'objection présentée par l'Accusation vis-

 18   à-vis de la déclaration au titre de l'article 92 ter du Témoin Mladen

 19   Barkovic.

 20   Voici quelles sont les raisons avancées par la Chambre pour ne pas

 21   faire droit à l'objection de l'Accusation eu égard à la présentation de la

 22   Défense de M. Gotovina, de la déclaration au titre de 92 ter du Témoin

 23   Barkovic.

 24   Le 10 juin 2009, la Défense de M. Gotovina a présenté une déclaration

 25   92 ter pour le Témoin Barkovic.

 26   Le 23 juin, l'Accusation a déposé une objection eu égard à cette

 27   déclaration, et a demandé à la fois qu'une partie de la déclaration soit

 28   supprimée et que l'on empêche le témoin de témoigner en tant qu'expert à

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  1   propos de certaines questions, et ce, du fait d'un manque de

  2   qualifications.

  3   Le 25 juin 2009, la Défense de M. Gotovina a demandé la permission de

  4   répondre. La Chambre a fait droit à cette requête et en a informé les

  5   parties par le biais d'une communication officieuse le 29 juin 2009.

  6   La réponse de la Défense de M. Gotovina a été déposée le 30 juin 2009

  7   et indiquait que cette déposition se concentrerait sur des faits, et non

  8   pas sur des opinions d'expert et que le témoin disposait de suffisamment

  9   d'expérience dans le domaine en question pour fournir une base factuelle à

 10   ses déclarations. Qui plus est, la réponse citait une décision précédente

 11   prise en l'espèce qui indiquait qu'il n'était pas besoin qu'une ordonnance

 12   soit rendue pour empêcher l'Accusation de demander des opinions à un témoin

 13   déposant sur les faits. Cette décision fait l'objet des pages 1 927 à 1 929

 14   du compte rendu d'audience.

 15   En audience le 9 juillet 2009, la Chambre n'a fait droit ni à l'objection

 16   de l'Accusation pour ce qui était du versement au dossier des extraits de

 17   cette déclaration ni à sa demande pour empêcher que le témoin ne témoigne à

 18   propos de certaines questions. C'est une décision que l'on peut trouver à

 19   la page 20 117 du compte rendu d'audience.

 20   Dans la décision citée par la Défense de M. Gotovina, la Chambre fait

 21   remarquer que, bien que le témoignage de tout témoin peut comporter des

 22   éléments d'opinion, les parties ont amplement la possibilité de contester

 23   ces opinions en audience et les parties sont exhortées à étudier les bases

 24   factuelles. La Chambre est particulièrement consciente de ce raisonnement.

 25   Il n'est pas toujours très facile de faire la part des choses entre des

 26   faits et des opinions, et de très simples déclarations peuvent inclure ces

 27   deux éléments.

 28   Comme la Chambre l'a déjà exposé lorsqu'elle a présenté ses raisons pour

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  1   expliquer sa décision de supprimer les paragraphes 3, 5.1, 5.2, 5.3, 5.4,

  2   et 7 de la déclaration 92 ter du Témoin Sterc, lorsqu'un témoin qui vient

  3   témoigner sur les faits fait état d'une opinions dans le cadre de sa

  4   déposition, la Chambre considère si cette opinion a une base factuelle par

  5   rapport à l'expérience et au vécu personnel du témoin. Lorsqu'un témoin

  6   fournit des opinions ou des conclusions qui ont une nature d'expert, la

  7   Chambre s'attend à ce que ce témoin fournisse son avis d'expert de façon

  8   absolument transparente par rapport aux faits établis ou supposés qu'il

  9   utilise pour présenter son opinion et par rapport à la méthodologie

 10   utilisée lorsqu'il fait appel à ses connaissances, expériences ou

 11   compétences spécialisées pour présenter son opinion d'expert. Lorsqu'il

 12   s'agit de déterminer le versement au dossier d'un élément de preuve, la

 13   Chambre envisage si les éléments de preuve sont essentiellement composés

 14   d'opinions ou de faits.

 15   En l'espèce, la Chambre est convaincue que dans sa déclaration 92 ter, le

 16   Témoin Barkovic décrit le domaine dans lequel il a travaillé pendant

 17   plusieurs années, domaine qui fait justement l'objet de sa déposition, et

 18   le témoin en fait se concentre essentiellement sur des faits, il se

 19   concentre sur des faits et non pas sur des opinions que l'on peut demander

 20   à un expert, et cette déclaration donc fait état de ses expériences

 21   personnelles et de ses observations. La Chambre en conclut donc que les

 22   bases factuelles pour les extraits qui font l'objet de contestations pour

 23   la déclaration du Témoin Barkovic et pour ce qui est également de sa

 24   déposition orale ont pu faire l'objet d'examens suffisants eu égard à ses

 25   expériences personnelles, et la Chambre en a conclu que les conclusions

 26   qu'il tire ne sont pas de nature à requérir une compétence, connaissance ou

 27   formation spécialisée, pour ces raisons, la demande de l'Accusation visant

 28   à biffer ou à supprimer des parties de la déclaration du témoin et à

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  1   limiter la portée de la déposition du témoin n'est pas acceptée.

  2   J'en ai terminé avec les raisons expliquant la décision de la Chambre eu

  3   égard à l'objection de l'Accusation pour la déposition du Témoin Barkovic

  4   en fonction de l'article 92 ter.

  5   J'aimerais maintenant vous rendre la dernière décision de la Chambre eu

  6   égard au versement au dossier de la pièce P2593.

  7   Le 17 juillet 2009, lors du contre-interrogatoire du Témoin Sterc,

  8   l'Accusation a versé au dossier le procès-verbal d'une réunion qui s'est

  9   tenue entre les membres de la direction croate à propos, entre autres, de

 10   la réintégration des Serbes en Slavonie orientale. La Défense de M.

 11   Gotovina a versé une objection à ce que soit admis au dossier ce document.

 12   La Chambre a par la suite invité les parties à présenter leurs arguments

 13   sur la question. Cela fait l'objet des pages 20 433 à 20 437 du compte

 14   rendu d'audience.

 15   Le 20 juillet 2009, la Défense de M. Gotovina ainsi que l'Accusation on

 16   présenté d'autres écritures. Il faut savoir que la Défense de M. Cermak et

 17   que la Défense de M. Markac n'ont pas présenté de document en la matière.

 18   Par ces documents, la Défense de M. Gotovina avance que l'Accusation n'a

 19   pas su respecter son obligation au titre de l'article 90(H)(ii) du

 20   Règlement de preuve et de procédure pour ce qui est de la présentation du

 21   document P2593 lors du contre-interrogatoire du Témoin Skare Ozbolt, qui,

 22   contrairement au Témoin Sterc, était présent à la réunion indiquée par la

 23   pièce P2593. La Défense de M. Gotovina avance donc que de ce fait le

 24   document ne doit pas être versé au dossier. L'Accusation avance que le

 25   document P2593 est pertinent, et a une valeur probante, par rapport aux

 26   points de vue exprimés par les membres de la direction croate eu égard au

 27   fait qu'il était désirable d'avoir une Croatie largement homogène du point

 28   de vue de l'appartenance ethnique. Elle avance, qui plus est, qu'en

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  1   présentant la question à ce sujet au Témoin Skare Ozbolt, elle a

  2   parfaitement respecté son obligation en vertu de l'article 90(H)(ii) du

  3   Règlement, et ce, lors du contre-interrogatoire de ce témoin.

  4   L'article 90(H)(ii) du Règlement stipule, et je cite :

  5   "Lorsqu'une partie contre-interroge un témoin qui est en mesure de déposer

  6   sur un point ayant trait à sa cause, elle doit le confronter aux éléments

  7   dont elle dispose qui contredisent ces déclarations."

  8   Dans son arrêt dans l'affaire contre Momcilo Krajisnik, la Chambre d'appel

  9   a expliqué que cet article souhaitait faciliter la présentation juste et

 10   efficace d'éléments de preuve tout en donnant la possibilité au témoin qui

 11   fait l'objet d'un contre-interrogatoire de s'expliquer à propos de certains

 12   aspects de sa déposition qui ont été contredits par les éléments de preuve

 13   avancés par la partie adverse. Cela donc évite au témoin de devoir revenir

 14   de façon inutile pour s'expliquer et cela permet à la Chambre de première

 15   instance d'évaluer la crédibilité de la déposition de façon plus exacte. La

 16   Chambre d'appel avait conclu qu'afin de satisfaire ces critères de cet

 17   article, il suffisait que la partie qui procède au contre-interrogatoire

 18   présente au témoin la nature et le fond de ces éléments qui sont en

 19   opposition avec la déposition du témoin et ce qu'il avance.

 20   En l'espèce, l'Accusation a présenté au Témoin Skare Ozbolt plusieurs

 21   documents, apparemment pour prouver que la politique suivie par la

 22   direction croate était de diminuer le nombre de Serbes en Slavonie

 23   orientale et dans la région de la Krajina, et que leur objectif principal

 24   était de faire en sorte que des Croates s'installent de façon permanente

 25   dans ces zones. Cela figure aux pages suivantes du compte rendu d'audience,

 26   18 148 à 18 165, 18 188 à 18 196, et 18 202 à 18 212.

 27   La Chambre considère de ce fait que le Témoin Skare Ozbolt a eu amplement

 28   la possibilité de s'expliquer à propos de ses aspects de sa déposition

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  1   relative à la politique menée à bien par la direction croate par rapport à

  2   la Slavonie orientale, ce qui a fait l'objet d'une contradiction lorsque

  3   l'on pense aux éléments présentés par l'Accusation.

  4   Dans l'arrêt Krajisnik, la Chambre d'appel estime de surcroît qu'en

  5   vertu de l'article 90(H)(ii) il n'est pas besoin que la partie qui procède

  6   au contre-interrogatoire expliquer de façon détaillée les éléments de

  7   preuve contradictoires et que cet article envisage une certaine souplesse

  8   en fonction des circonstances du procès. Par conséquent, la Chambre estime

  9   que la partie qui procède au contre-interrogatoire n'est pas obligée au

 10   titre de l'article 90(H)(ii) de présenter au témoin tous les documents ou

 11   des documents précis ayant trait à la déposition du témoin, documents donc

 12   qui contredisent ce qui est avancé. Au vu de cet aspect, et pour ne pas

 13   oublier l'objectif général de l'article, la Chambre estime que de ce fait

 14   en l'espèce l'Accusation n'a pas enfreint ses obligations au titre de

 15   l'article 90(H)(ii). Néanmoins, la Chambre réitère qu'il lui est

 16   particulièrement utile que des documents soient présentés de façon logique

 17   par le biais de témoins qui sont en mesure de fournir les meilleurs

 18   éléments par rapport au contexte de la situation. 

 19   La Chambre s'est également demandée si les documents respectent ou si

 20   le document respecte les critères envisagés pour le versement au dossier au

 21   titre de l'article 89(C) du Règlement, à savoir il faut que le document

 22   soit pertinent et ait une valeur probante. Aucun argument n'a été présenté

 23   par la Défense du M. Gotovina pour contester ou la pertinence ou la valeur

 24   probante du document.

 25   Le document P2593 est le procès-verbal d'un réunion qui a été

 26   organisée entre les membres de la direction croate notamment des personnes

 27   qui son censées avoir été membres d'une entreprise criminelle commune

 28   alléguée, document qui permet de mieux comprendre les points de vue et

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  1   politiques avancés eu égard au retour des Serbes en Croatie, et eu égard

  2   aux questions relatives à la réintégration des Serbes tout en notant que la

  3   portée territoriale de l'acte d'accusation ne se concentre pas sur la

  4   Slavonie orientale mais plutôt sur les municipalités énumérées aux chefs

  5   d'inculpation 1 à 9, la Chambre est convaincue que l'opération Tempête ne

  6   peut pas être perçue dans un vide temporel ou géographique mais qu'elle est

  7   un épisode dans une série d'épisodes et que le document a donc une certaine

  8   pertinence et une valeur probante.

  9   Par conséquent, la Chambre a décidé de verser au dossier le document

 10   P2593.

 11   La Chambre fait également remarquer que la traduction anglaise de la

 12   pièce à conviction a été présentée sans la page de garde qui est incluse

 13   dans la version originale en B/C/S, et exhorte par conséquent l'Accusation

 14   à ajouter la page qui fait défaut à la traduction anglaise et à en notifier

 15   le greffe, la Chambre et les parties lorsque cela sera effectué.

 16   Nous en avons terminé avec la décision rendue par la Chambre eu égard

 17   au versement au dossier de la pièce P2593.

 18   Les Juges souhaitent dire pour le compte rendu d'audience que nous

 19   avons prévu à travailler vendredi le 11 septembre pour terminer la

 20   déposition du témoin Corn avant le début du week-end. On a informé les

 21   Juges du fait que le Procureur avait des objections par rapport à la

 22   possibilité d'utiliser certains documents par le biais du témoin Corn. Il

 23   s'agit de trois documents et maintenant cette objection n'est plus valide

 24   puisque la Défense Gotovina n'a plus l'intention d'utiliser ces documents.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Nous n'avons pas l'intention de les utiliser

 26   lors de l'interrogatoire principal.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, je vois que vous vous

 28   levez que vous faites des signes.

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  1   M. RUSSO : [interprétation] Si, Monsieur le Président, je le fais parce que

  2   quand on dit pas pendant l'interrogatoire principal, est-ce que cela veut

  3   dire qu'ils ont l'intention de les utiliser à une autre fois ou pendant des

  4   questions supplémentaires ?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous, vous gardez la

  6   possibilité d'utiliser ces documents au moment du contre-interrogatoire,

  7   donc même si vous n'allez pas l'utiliser au moment de l'interrogatoire

  8   principal, vous allez peut-être les utiliser plus tard ?

  9   M. KEHOE : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour terminer, on a informé les Juges du

 11   fait qu'il existe une question dont nous n'allons pas nous occuper

 12   immédiatement. Il s'agit de la communication des documents qui sont de

 13   nature à disculper les accusés. Nous allons entendre les parties à ce sujet

 14   voire quelles sont les objections éventuelles, les plaintes et pour voir

 15   comment nous allons nous en occuper.

 16   M. KEHOE : [interprétation] J'ai un point là-dessus, je ne suis pas sûr si

 17   quoi que ce soit va se passer au cours du contre-interrogatoire qui va

 18   faire en sorte qu'on va peut-être utiliser ces documents. Nous n'avons pas

 19   inclus ces documents dans le rapport d'expert du Pr Corn, mais je ne peux

 20   pas anticiper tout ce que le Procureur va présenter et s'il y a des

 21   éléments qui nous incitent à présenter ces documents, nous souhaitons voir

 22   la possibilité de le faire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que : "Vous n'avez donc pas

 24   inclus ces documents."

 25   M. KEHOE : [interprétation] Effectivement.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas été très clair.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Effectivement. Je m'en excuse.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons plus de questions de

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  1   procédure. Ce qui me fait dire que nous allons pouvoir entendre le témoin

  2   expert à présent.

  3   Mais Monsieur Russo.

  4   M. RUSSO : [interprétation] J'ai voulu présenter notre nouvelle avocate,

  5   Mme Adria Delandry.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous souhaite la bienvenue. Ce n'est

  7   pas vraiment une question de procédure.

  8   Monsieur Kehoe, est-ce que vous êtes prêt ?

  9   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation]  Vous êtes prêt. Très bien. Donc je vais

 11   demander à Mme l'Huissière de conduire M. Corn dans le prétoire.

 12   Je vais demander aux parties même si je sais que nous avons pratiquement

 13   passé une heure mais je vais quand même demander aux parties d'utiliser le

 14   temps qui leur est imparti de la façon la plus efficace possible.

 15   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Corn.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Corn, avant de déposer en

 19   l'espèce, le Règlement de procédure et de preuve exige que vous fassiez la

 20   déclaration solennelle vous engageant de dire la vérité, toute la vérité,

 21   et rien que la vérité. Le texte vous est présenté, et je vais vous demander

 22   de faire cette déclaration.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 24   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : GEOFFREY CORN [Assermenté]

 26   [Le témoin répond par l'interprète]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Corn, vous pouvez

 28   vous asseoir.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais déjà vous demandé, Monsieur

  3   Corn, et je vais rappeler M. Kehoe, le fait que vous parlez la même langue

  4   de sorte que vous soyez obligé de faire des petites pauses entre les

  5   questions et les réponses, les réponses et les questions, pour que les

  6   interprètes puissent vous interpréter.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Kehoe va vous poser ses questions.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Interrogatoire principal par M. Kehoe : 

 11   Q.  [interprétation] Monsieur, pourriez-vous vous présenter ?

 12   R.  Je m'appelle Geoffrey S. Corn. C-o-r-n.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Moi, j'ai fourni au greffe des exemplaires

 14   papier de certains documents pour faciliter la déposition, et avec votre

 15   permission je voudrais vous demander la permission de fournir ces documents

 16   au témoin.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous le permettons, comme d'habitude.

 18   M. KEHOE : [interprétation]

 19   Q.  Tout d'abord, je vais vous demander d'examiner la première

 20   intercalaire, 1D2949. C'est un document qui va présenter sur l'écran devant

 21   vous, vous allez voir donc le document sur l'écran, et dans votre dossier.

 22   R.  [aucune interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous le reconnaissez ce document ?

 24   R.  Oui, c'est mon CV.

 25   Q.  Professeur, nous n'allons pas parcourir tous les éléments qui y

 26   figurent, mais est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont votre

 27   expérience professionnelle, formation, et cetera ?

 28   R.  En ce qui concerne mon éducation civile, j'ai eu une licence de lettres

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  1   de "Harwick College," à Oneonta, New York, et c'était en 1983 et j'ai été

  2   spécialisé en histoire.

  3   En 1989, j'ai commencé à étudier le droit à l'Université de George

  4   Washington. J'ai été diplôme en 1992 avec donc une maîtrise. J'ai une

  5   mention très bien, ce qui indique que j'ai été parmi les 2 % de mes

  6   meilleurs élèves, de meilleurs étudiants de mon université. Ensuite, en

  7   1996, j'ai fait l'école de Magistrature de l'armée américaine. C'est la

  8   seule école militaire américaine qui est habilitée à fournir des diplômes

  9   de droit, les diplômes au niveau maîtrise ou LLM; et au bout de dix mois,

 10   j'ai été diplômé, j'ai été spécialisé dans le droit international et le

 11   droit opérationnel. J'ai été le premier de ma promo et j'ai eu une mention

 12   très bien.

 13   Ensuite j'ai commencé à travailler dans l'armée américaine en 1993. Je suis

 14   allé -- je suis passé par différentes écoles. J'ai commencé comme un simple

 15   soldat, avec un entraînement au combat. Ensuite je suis allé à l'école des

 16   officiers à Benning, Georgia, et là, j'ai encore, en 1984, eu un diplôme de

 17   cette école, avec mention très bien. Ensuite je suis devenu un officier de

 18   renseignement militaire. J'ai suivi un cours de base de l'armée américaine,

 19   et c'est un cours de six mois où j'ai été formé pour devenir l'officier de

 20   renseignement en tactique.

 21   Ensuite je suis revenu à Fort Huachuca en 1998 [comme interprété], où je

 22   suis passé par un cours avancé de renseignement. L'analyse d'image et

 23   l'exploitation. Pendant que j'ai participé à ce cours, j'ai été sélectionné

 24   par l'armée à participer dans ce qui est appelé le programme des juristes.

 25   C'est un programme qui est proposé à une dizaine ou une quinzaine

 26   d'officiers chaque année. Donc vous avez la proposition, la possibilité de

 27   faire vos études de droit aux frais de l'Etat et de devenir par la suite le

 28   Juge dans l'armée, donc ce que je fais.

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  1   Mais après cela donc j'ai suivi les cours à l'école de Magistrature

  2   en Virginie donc c'est un cours qui est destiné aux juristes militaires, et

  3   après ma première fonction, je suis revenu à nouveau à l'école pour faire

  4   mes études de droit au niveau maîtrise. Après avoir terminé ces études,

  5   j'ai travaillé dans l'école de magistrature en tant que professeur de la

  6   loi sur la sécurité internationale pendant trois années. Après cela j'ai

  7   suivi un cours à l'école de guerre. Ce n'est pas quelque chose qui est

  8   destiné aux juristes mais aux officiers. A peu près 1 100 officiers

  9   américains à peu près une centaine internationaux, et en général, vous

 10   n'avez qu'une quinzaine de juges avocats qui militaires qui peuvent suivre

 11   ce cours. J'ai fini ce cours, j'ai été diplômé donc l'an 2000 enfin 2001 au

 12   mois de mai, et c'est la dernière école militaire -- les dernières études

 13   au niveau d'activité militaire que j'ai effectué.

 14   Q.  Quand vous parlez de "JAG," vous parlez de juge avocat général ?

 15   R.  C'est une organisation au niveau de l'armée américaine qui est appelée

 16   le corps des juges avocat général. Donc c'est un juge un avocat chevronné

 17   de l'armée américaine, et quand je dis que je faisais partie de ce corps,

 18   JAP, j'ai voulu dire que j'y étais en tant que juriste militaire de l'armée

 19   américaine.

 20   Q.  Professeur, quel est le grade que vous avez acquis au niveau de l'armée

 21   ?

 22   R.  Moi, j'ai pris ma retraite le 1er novembre 2004. J'ai pris ma retraite

 23   avec le grade de lieutenant-colonel. J'ai été promu à chaque grade en tant

 24   normal, conformément aux statistiques militaires, et cela a été -- donc a

 25   mis la fin à 21 années de service dans le militaire, le service d'active.

 26   Q.  Depuis cette époque, est-ce que vous avez continué à travailler dans le

 27   domaine de droit des conflits armés, et d'autres domaines de droit

 28   humanitaire ?

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  1   R.  Quand j'ai pris cette décision, je suis devenu juriste conseiller civil

  2   travaillant pour le ministère de l'armée. Donc, là, j'ai été juge avocat

  3   général dans la division en terme du droit international où j'ai été

  4   assistant spécial pour les questions, chargé de conseiller le juge avocat

  5   général. Mais, finalement, la véritable position que j'avais c'était la

  6   position de conseiller senior sur les Lois de la guerre. Donc j'ai commencé

  7   ce travail en automne 2004, et à peu près à la moitié de cette année-là, on

  8   m'a proposé de rejoindre la faculté de Droit en tant que professeur à temps

  9   plein. Je me suis dit que c'était vraiment l'opportunité à saisir puisque

 10   je n'allais peut-être plus avoir cette possibilité au cours de ma carrière.

 11   Donc j'ai quitté les services du gouvernement et j'ai commencé à travailler

 12   à l'université.

 13   Q.  J'ai vu, dans votre curriculum vitae, que vous étiez professeur de

 14   droit à l'Université de droit du Texas du sud.

 15   R.  Oui, c'est vrai. Cela fait quatre ans que j'y enseigne le droit pénal,

 16   la procédure pénale constitutionnelle, la loi sur les conflits armés, et

 17   j'ai écrit un certain nombre de livres que j'ai écrits avec d'autres

 18   officiers de la JAG qui va être publié dans deux semaines, je pense, à

 19   "Oxford University Press," c'est donc l'éditeur de ce livre, le titre en

 20   est : "Les Lois de la guerre."

 21   Q.  Professeur, je vais vous demander maintenant de parler de l'artillerie.

 22   Est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous savez au sujet de

 23   l'artillerie, votre formation, votre expérience, et dans quelle mesure vous

 24   êtes qualifié à nous faire une analyse d'expert par rapport à l'utilisation

 25   de l'artillerie dans une situation de guerre ?

 26   R.  J'ai eu une formation militaire - évidemment que, moi, je n'ai jamais

 27   été officier dans l'artillerie - mais aussi en tant qu'officier de

 28   renseignement et tactique et en tant que conseiller juridique, j'ai une

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  1   certaine expérience par rapport à l'évaluation et l'analyse de

  2   l'utilisation de l'artillerie, de sa planification et la mise en œuvre de

  3   telles opérations, la planification de telles opérations en vue de combats.

  4   Tout cela a commencé quand j'ai commencé finalement ma carrière militaire

  5   en tant qu'officier des renseignements tactiques au Panama. J'ai travaillé

  6   pour une Brigade d'Infanterie, et j'ai travaillé aussi pour un Bataillon de

  7   Parachutistes, et à chaque fois, j'ai été obligé de préparer les

  8   opérations, de participer aux formations quand il s'agissait de cette force

  9   multinationale qui se trouvait dans l'Amérique centrale et l'Amérique du

 10   sud. Le rapport entre l'officier de renseignements et l'officier à l'appui

 11   feu, c'est une connexion qui est très forte puisqu'il existe un passage

 12   d'informations entre les deux. De toute façon, chaque éducation militaire

 13   dans l'armée américaine a une composante qui est au cœur de cette

 14   formation, par exemple, quand vous suivez une formation en renseignement,

 15   vous avez tout de même un enseignement de base que tous les officiers

 16   doivent suivre, et cela comprend le support de feu.

 17   Je peux dire que quand j'ai commencé à travailler comme un officier de la

 18   JAG, ma première mission était à Kentucky, et là, j'ai dû conseiller une

 19   Brigade de Combat, la 4e Brigade. C'est moi qui ai été responsable de

 20   fournir les renseignements au commandant quant à la légalité de

 21   l'engagement en ce qui concerne le feu quand il s'agissait d'analyser les

 22   cibles, d'évaluer les cibles, et il y avait un rapport de travail très

 23   étroit entre la JAG et l'officier d'appui feu puisque ces missions sont

 24   très importantes quand il s'agit de savoir si on a respecté les lois du

 25   conflit armé.

 26   Ce que nous essayons de faire aussi à l'école de la JAG c'était

 27   d'essayer d'enseigner aux étudiants pas seulement le droit mais aussi le

 28   contexte de l'application du droit. Donc on peut dire qu'il fallait que de

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  1   tels officiers comprennent comment fonctionnent les supports, l'appui feu

  2   et le combat, la routine de règle et d'engagement.

  3   Ensuite je suis allé en Allemagne en tant que chef du droit

  4   international pour l'armée américaine en Europe, et j'y ai été entre 2001

  5   et 2003, et pendant cette période, il y a eu un délai de préparation très

  6   important pour les forces militaires américaines pour participer aux

  7   opérations en Afghanistan, en Irak, et cetera. Donc le 5e Corps de l'armée

  8   américaine était désigné comme une composante de l'armée des terres pour

  9   l'opération la liberté de l'Irak au mois de mars 2003. Nous, nous avons

 10   participé à ces préparatifs de façon très intense, nous, les officiers de

 11   la JAG, et nous devions aussi revoir, vérifier les plans et les ordres pour

 12   faire en sorte qu'ils respectent le droit du conflit armé.

 13   Donc on peut dire que j'ai toujours été impliqué dans le système

 14   d'artillerie depuis le tout début de ma carrière militaire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous ralentir, s'il vous

 16   plaît.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.

 18   M. KEHOE : [interprétation] A présent, je voudrais demander que l'on

 19   verse au dossier la pièce 1D2949.

 20   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci deviendra la

 23   pièce D1641.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.

 25   M. KEHOE : [interprétation]

 26   Q.  Professeur, est-ce que vous avez déjà déposé en tant qu'expert devant

 27   un tribunal ?

 28   R.  Oui, effectivement, je l'ai fait dans le procès de Salim Hamdam,

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  1   c'était en 2007, donc j'étais là, j'ai été expert sur les droits de

  2   conflits armés.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente la pièce

  4   1D2772.

  5   Q.  Professeur, c'est le deuxième intercalaire dans votre classeur.

  6   Professeur, est-ce que vous reconnaissez ce rapport --

  7   R.  Oui.

  8   Q.  -- il se trouve au deuxième intercalaire de votre classeur ? Est-ce

  9   bien le rapport que vous avez préparé à la demande de l'équipe Gotovina ?

 10   R.  Oui, effectivement.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Je voudrais demander que l'on verse au dossier

 12   cette pièce, s'il vous plaît.

 13   M. RUSSO : [interprétation] L'objection que nous avons soulevée est

 14   toujours valable, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez, s'il

 16   vous plaît, nous donner un numéro d'identification pour ce document.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci deviendra la pièce D1642, marquée

 18   aux fins d'identification.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Monsieur Kehoe.

 21   M. KEHOE : [interprétation]

 22   Q.  Avant de parler du fond, je voudrais tout d'abord vous demander :

 23   quelle était la mission qui vous a été confiée par la Défense Gotovina ?

 24   Comment les choses se sont faites, comment vous avez été contacté, et

 25   cetera ?

 26   R.  J'ai été contacté pour la première fois par l'équipe de la Défense.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais vous interrompre un instant.

 28   Les Juges savent qu'il existe une feuille d'information supplémentaire,

Page 21151

  1   avec les informations supplémentaires et qui couvre pratiquement toutes les

  2   questions que vous vouliez poser au témoin.

  3   Monsieur Russo, j'ai l'impression que tout ceci sont tout simplement des

  4   faits. On nous a informé du fait que les parties n'étaient pas d'accord sur

  5   la possibilité de verser ou non cette pièce. C'est un document très long,

  6   et puisqu'il s'agit là d'un document assez long avec beaucoup

  7   d'informations, est-ce que nous pouvons aller plus rapidement et essayer

  8   d'éviter cela ?

  9   M. KEHOE : [interprétation] J'ai cru comprendre qu'il n'y aurait pas

 10   d'objection. Ceci a été signé par le Pr Corn, et effectivement, tout ceci

 11   se trouve dans cette information contenant des informations

 12   supplémentaires; vous pouvez le lire.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où est le problème ? Pourquoi vous ne

 14   voulez pas que ceci soit versé au dossier ?

 15   M. RUSSO : [interprétation] Du point de vue de la procédure, non, il n'y a

 16   pas de problème effectivement en vertu du 92 ter, on peut ajouter ce

 17   document. Mais, moi, le problème que cela me pose c'est le document fait la

 18   deuxième partie du paragraphe 2, et tout le paragraphe 3, dans la mesure où

 19   là le témoin nous parle de son évaluation de la crédibilité d'un autre

 20   témoin et cela n'est pas admissible.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Je pense qu'on parle de son évaluation du

 23   lieutenant-colonel Konings. J'en parle effectivement ici, mais si vous

 24   voulez, on peut attribuer la cote MFI à ce document, et après

 25   l'interrogatoire principal ou le contre-interrogatoire, vous pouvez décider

 26   si on a besoin d'ajouter quoi que ce soit.

 27   Moi, je veux bien ajouter d'éléments nouveaux, mais je pense que ceci va

 28   abroger de façon significative l'interrogatoire principal si l'on versait

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  1   directement ce dossier.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il existe la possibilité que

  3   si l'on a les objections que par rapport à la moitié du paragraphe 2 et le

  4   paragraphe 3 --

  5   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- et bien que vous pouvez des questions

  7   justement par rapport à cela et qu'on exclut donc cette partie du document

  8   versé au dossier.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Pas de problème.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, est-ce que cela vous

 11   convient ?

 12   M. RUSSO : [interprétation] Oui, effectivement.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc à partir de quel moment

 14   commence votre objection, Monsieur Russo ?

 15   M. RUSSO : [interprétation] Cela commence par "however."

 16   "However" - donc cependant - j'avais des doutes si, et cetera."

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux proposer la solution

 18   suivante, à savoir la feuille d'information supplémentaire peut être versé

 19   en vertu de l'article 92 ter, l'exception faite de la deuxième moitié du

 20   paragraphe 2 en commençant par le mot "cependant," et à l'exception donc du

 21   paragraphe 3.

 22   Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 23   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Pas de problème, Monsieur le Président. Moi, de

 25   toute façon, je vais parcourir ces questions avec le témoin au cours de la

 26   deuxième moitié de mon interrogatoire principal.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous ne voulez pas aborder cette

 28   question de façon séparée mais au cours de l'interrogatoire principal, vous

Page 21153

  1   pouvez le faire, bien sûr. Donc c'est à vous qu'appartient le choix de la

  2   méthode.

  3   Je vais demander donc que vous téléchargiez ce document dans le système de

  4   prétoire électronique que vous expurgiez les éléments dont nous avons

  5   décidés et qu'il fallait expurger, et ensuite le témoin pourra

  6   éventuellement relire ce document.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Je pense que le témoin va accepter le fait

  8   qu'il a lu ce document et qu'il l'a signé la nuit dernière.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 10   M. KEHOE : [interprétation]

 11   Q.  Professeur, je vais vous demander de vous référer à l'intercalaire 5 du

 12   classeur.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Je vais demander que l'on place ce document sur

 14   le rétroprojecteur. C'est le document 1D2956.

 15   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous reconnaissez qu'il s'agit d'un certain nombre de

 18   renseignements que vous avez fourni à la Défense de M. Gotovina, donc cela

 19   a été écrit avec votre aide la nuit dernière, le 9 septembre 2009 ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Non, le 6, je suppose.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Kehoe, je comprends

 23   pourquoi vous voulez aller très, très rapidement en besogne mais bon ce

 24   n'est pas possible le 9 puisque hier c'était le 6 seulement.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, non, non, non, le 6, bien entendu.

 26   Q.  Monsieur le Professeur, lorsque vous avez fourni ces renseignements à

 27   la Défense de M. Gotovina, est-ce qu'ils étaient exacts ?

 28   R.  Oui.

Page 21154

  1   Q.  Si je devais vous poser des questions à propos des renseignements qui

  2   figurent dans ce document, est-ce que vous fourniriez les mêmes réponses ?

  3   R.  Oui, tout à fait.

  4   Q.  Hormis les paragraphes que nous n'allons pas prendre en considération -

  5   - ou plutôt, les lignes de ce paragraphe 2 qui commencent par les mots

  6   "toutefois" jusqu'à la fin du paragraphe 3, hormis donc cet extrait - je

  7   pense aux quatre autres pages - est-ce qu'il y a quelque chose que vous

  8   voulez corriger, ou est-ce que cela représente de façon exacte ce que vous

  9   avez dit ? Est-ce que vous voulez modifier ou supprimer quoi que ce soit ?

 10   R.  Non, pas du tout, je ne souhaiterais absolument rien ajouter et je

 11   réponds par l'affirmative. Cela représente absolument les éléments de notre

 12   discussion que nous avons eue et que nous avons eue jusqu'à hier.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 14   dossier de cette pièce 1D2596.

 15   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce D1643, Monsieur

 18   le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela est en train d'être mis dans le

 20   système électronique maintenant mais il ne faut pas oublier donc que le

 21   milieu du paragraphe 2, qui commence par les mots "Néanmoins ou toutefois"

 22   jusqu'à la fin du paragraphe 3, donc j'invite la Défense de M. Gotovina à

 23   informer le greffier du moment où ils auront inséré dans le prétoire

 24   électronique une version expurgée de ce document, donc avec la précision

 25   que je viens d'avancer.

 26   Hormis cela, le document D1643 est versé au dossier.

 27   Poursuivez, Maître Kehoe.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Un petit moment, je vous prie, Monsieur le

Page 21155

  1   Président.

  2   [Le conseil de la Défense se concerte]

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  Professeur, j'aimerais que nous parlions justement de ce qui a été

  5   supprimé en fait, il s'agit donc du rapport du lieutenant-colonel Konings.

  6   Il vous a été demandé donc d'examiner ou d'étudier ce rapport et ce au

  7   début lorsque la Défense de M. Gotovina a pris contact avec vous donc

  8   j'aimerais maintenant que vous preniez l'intercalaire 4, à savoir la pièce

  9   P1259, donc P1259, je le répète qui correspond à l'intercalaire 4 de votre

 10   classeur.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, avant que nous ne

 12   parlions, justement de cette pièce P1259, je dirais donc que je

 13   souhaiterais parler de la méthodologie qui a été utilisée et je

 14   souhaiterais faire un effort de transparence et j'allais en fait demander

 15   le versement au dossier d'une des lettres qui a été utilisée par le

 16   professeur Corn lorsqu'il a préparé son rapport. Il s'agit d'une lettre,

 17   là, qui fait l'objet de la pièce 1D2592, lettre du 27 mars 2009, et nous

 18   souhaiterions demander le versement au dossier et cette lettre également.

 19   M. RUSSO : [interprétation] Je n'ai pas d'objection.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce D1644.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cette pièce est maintenant versée

 23   au dossier.

 24    M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 25   Q.  Donc pour en revenir au document qui a été affiché à l'écran et le

 26   document intercalaire numéro 4, je le répète, il s'agit donc du rapport du

 27   lieutenant-colonel Konings, et avant d'entrer dans le détail de ce rapport,

 28   j'aimerais que vous nous indiquiez quels sont les problèmes qui vous ont

Page 21156

  1   été posés par ce rapport dès le début, lorsque la Défense de M. Gotovina

  2   vous a pris contact avec vous, et ensuite nous parlerons de certains

  3   passages bien précis.

  4   R.  Cela justement à propos du premier contact, que j'ai eu avec la Défense

  5   de M. Gotovina, en décembre 2008, il m'a été demandé si je serai disposé à

  6   analyser un rapport qui avait été présenté par un expert, et ce, au nom de

  7   l'Accusation. Le but étant de procéder à un examen critique afin de voir

  8   s'il s'agissait d'un rapport exact et d'une explication précise du droit

  9   lorsqu'il s'agit de l'emploi de tir d'artillerie indirect.

 10   Donc on m'a fourni ce rapport et bien évidemment ma première mesure,

 11   la première chose que j'ai faite à consister à analyser, évaluer le rapport

 12   en question. Donc j'ai lu le rapport et je dois vous dire qu'à la lecture

 13   du rapport, j'ai été convaincu du fait que le rapport citait de façon

 14   inexacte le droit. Je dois dire que ce qui m'a en fait préoccupé, c'est que

 15   dans le rapport, il y avait des modifications qui personnellement en fait

 16   pour moi, ressemblaient à une façon de répéter la doctrine, la doctrine

 17   militaire eu égard à l'utilisation de l'appui feu. De ce fait, j'ai informé

 18   la Défense de M. Gotovina qu'il fallait, que je pouvais dans un premier

 19   temps et qu'il serait utile en fait que je présente mon avis à propos de ce

 20   qui me semblait être des lacunes, des imperfections, voire des erreurs dans

 21   le rapport en question.

 22   Q.  Alors nous allons parler de certains éléments de ce rapport et ensuite,

 23   vous pourrez développer vos propos un peu plus, les étoffer.

 24   Nous allons commencer par la première page, au paragraphe 1(C) petit

 25   (iv).

 26   Point n'est besoin de lire tout ce qui précède cet alinéa. Mais voilà

 27   ce qu'avance le lieutenant-colonel Konings :

 28   "L'objectif indiqué ci-dessus lorsqu'il y a appui feu, aboutit à la

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  1   conclusion préliminaire que l'appui feu ne doit pas être utilisé contre des

  2   cibles civiles."

  3   Alors pourquoi est-ce que cela vous a sauté aux yeux ?

  4   R.  Cela m'a sauté aux yeux, je vais vous dire pourquoi. Dès le début en

  5   fait, et ce, pour un certain nombre de raisons.

  6   Premièrement, je dirais que je connais très bien la doctrine

  7   militaire américaine. Alors, j'avais l'impression que jusqu'à ce moment-là,

  8   ce que je lisais c'était tout simplement une copie de la doctrine militaire

  9   américaine. Donc, moi, je n'ai pas en fait pris la doctrine appui feu pour

 10   étayer ce que je dis, mais ça a été une réaction quasiment vicérale. Mais

 11   le numéro 4 ne correspond pas avec ce qui précède, donc j'ai eu

 12   l'impression que c'était un ajout qui avait été fait à la suite ou dans

 13   cette doctrine militaire. Dans une certaine mesure, c'est contradictoire en

 14   fait, parce que vous avez donc en tant qu'expert du conflit armé, ma

 15   réaction c'est qu'il n'y a pas de cible civile. Une cible est un objet

 16   militaire tout à fait licite. Un civil, en fait, ne peut être considéré

 17   comme un objet d'attaque à moins qu'il n'ait partie directement aux

 18   hostilités. Lorsque cela se passe, il ne peut plus bénéficier, il ne plus

 19   bénéficier ce civil, de son immunité de civil. Donc lorsqu'il est indiqué

 20   qu'un appui feu ne peut pas être utilisé contre une cible civile, je dirais

 21   en fait que c'est évident, c'est manifeste.

 22    Mais vous ne pouvez pas utiliser ce type de terminologie lorsque

 23   vous parlez de doctrine militaire. Il faudrait dire un appui feu ne doit

 24   pas, ne doit jamais être utilisé pour cibler des personnes ou des lieux ou

 25   des civils qui sont considérés comme devant être protégés de l'objet de

 26   l'attaque. On ne met pas en regard ces mots, "civil et cible," en fait.

 27   Q.  Est-ce que nous pouvons tourner la page de la version anglaise, et

 28   j'aimerais maintenant vous montrer une autre partie du document. Il s'agit

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  1   du paragraphe qui se trouve au bas de la page, vous voyez l'alinéa H au bas

  2   de la page.

  3   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, si vous n'y voyez pas

  5   d'inconvénient, je vais essayer d'obtenir une précision pour mieux

  6   comprendre la réponse précédente du témoin.

  7   En fait, ce qui vous pose problème, c'est le libellé utilisé, mais

  8   vous n'êtes pas en désaccord avec ce qui est écrit.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, je ne suis pas en désaccord

 10   lorsqu'on dit que des civils doivent être protégés.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ne doivent pas cibler.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. Mais ce qui me préoccupe,

 13   c'est que la terminologie qui est utilisée est en fait un complément ajouté

 14   à la doctrine.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais un complément en quel sens,

 16   Monsieur ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] En d'autres termes, jusqu'à cet alinéa, je lis

 18   une doctrine opérationnelle, et puis vous avez ce numéro 4 -- cet alinéa 4,

 19   qui en fait est un ajout. Donc on essaie d'étayer cela par une règle du

 20   droit du conflit armé, mais le fait est que cela n'a pas été bien formulé.

 21   Cela n'a pas été rédigé par un juge avocat général qui a participé à toute

 22   la procédure.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez expliqué vous n'utilisez

 24   jamais les termes, "cible, civil," parce que les civils devraient être

 25   protégés. Donc cela se passe d'explication et ce n'est pas la peine de le

 26   formuler. Mais est-ce que la différence pourrait être comme suit : le

 27   libellé utilisé par M. Konings envisage la possibilité justement que

 28   quelqu'un cible de façon illicite des cibles civiles, il l'exprime de cette

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  1   façon. Alors vous, vous dites n'utilisez pas ce libellé parce que jamais ou

  2   grand jamais on ne cible une cible qui a été considérée comme M. Konings

  3   comme une cible civile, et du fait qu'elle est civile, elle est protégée de

  4   toute attaque. Elle ne doit pas être attaquée.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exactement ma conclusion. C'est tout à

  6   fait -- cela fut tout à fait mon sentiment. Je n'ai pas eu de problème à

  7   comprendre ce qui est indiqué, mais la façon dont cela a été indiquée,

  8   lorsque je l'ai lu, j'ai eu l'impression que quelque chose avait été ajouté

  9   à la doctrine.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais qu'est-ce qui a été ajouté

 11   exactement ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Justement, cette disposition qui est un effort

 13   manifeste, qui a été fait pour expliquer une règle de base du droit des

 14   conflits armés, justement parce que les civils jouissent d'une immunité par

 15   rapport à une attaque, ils ne doivent jamais devenir la cible de

 16   l'utilisation d'un tir indirect. Mais c'est la terminologie qui a attiré

 17   mon attention.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La terminologie, certes, mais vous

 19   n'êtes pas en désaccord avec le fond de cet alinéa, n'est-ce pas ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui, tout à fait.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 22   Poursuivez.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Passons à la page suivante, j'étais sur le point de poser une question

 25   à ce sujet. Il s'agit donc du paragraphe H, comme je vous l'ai déjà dit et

 26   non pas 8, comme je vous l'ai dit. Donc c'est la page 2, et voilà ce qui

 27   est indiqué :

 28   "Le système d'appui feu est un système qui appuie les opérations

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  1   militaires, leur donne des possibilités, et devraient seulement être

  2   utilisé pour cibler les cibles militaires. Seulement en cas d'autodéfense,

  3   les unités militaires (notamment les unités d'appui feu) peuvent être

  4   forcées ou contraintes à tirer sur des cibles civiles."

  5   Qu'avez-vous à nous dire a ce sujet, cela a été inclus dans le rapport du

  6   lieutenant-colonel Konings.

  7   R.  Ecoutez, c'est une autre disposition qui a immédiatement attiré mon

  8   attention, parce que je crois que je comprenais le fond, l'essence de ce

  9   qui est dit la façon, la formule -- les formules utilisées ratissent

 10   beaucoup plus larges en quelque sorte. Parce que ce qu'il suggérait c'est

 11   que les civils sont à l'abri d'attaque à moins et jusqu'au moment où il ne

 12   déclenche un droit d'agir dans le cadre d'une autodéfense parce qu'ils ont

 13   participé aux hostilités.

 14   Mais le libellé est beaucoup plus large que cela. Car le libellé

 15   suggère que chaque fois qu'un commandant militaire que ciblé à un civil qui

 16   doit être protégé pourrait contribuer à la défense de ses fores, il est

 17   justifié d'agir de la sorte. Donc j'ai eu l'impression qu'il s'agissait

 18   d'une disposition qui a été incluse dans une déclaration relative à une

 19   doctrine. Mais la façon dont cela est formulé, m'a suggéré en fait que cela

 20   n'était pas rédigé par quelqu'un qui est compétent en matière de droit du

 21   conflit armé du fait de la portée beaucoup trop générale de ce qui est

 22   écrit.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, j'allais poursuivre. Je

 24   ne sais pas si vous voulez faire une pause. Si vous voulez que je

 25   poursuive. Peu m'importe. Je suis -- il vous appartient d'en décider,

 26   Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que le moment est venu de faire

 28   une pause. Donc nous allons, Monsieur Corn, faire une pause d'une demi-

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  1   heure, et nous reprendrons à 10 heures 55.

  2   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

  3   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  5   M. KEHOE : [interprétation] Merci.

  6   Q.  Monsieur, si nous pouvions passer à la page 5 du rapport du lieutenant-

  7   colonel Konings, car j'aimerais vous poser quelques autres questions.

  8   Alors vous voyez donc juste avant l'alinéa (b), vous avez donc la suite du

  9   paragraphe de la page précédente, et j'aimerais que nous nous concentrions

 10   sur une phrase qui commence par les mots suivants : "Les biens

 11   d'artillerie."

 12   Vous voyez, c'est la dernière -- en fait c'est la toute dernière phrase;

 13   vous la voyez ?

 14   R.  A la page 5 ?

 15   Q.  A la page 5 du rapport, oui. Vous voyez l'alinéa (b), vous le voyez ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Juste au-dessous c'est une phrase qui commence par les mots suivants :

 18   "Les biens d'artillerie ne peuvent être ou les pièces d'artillerie ne

 19   peuvent être utilisées qu'au cas où."

 20   Vous voyez cette phrase ?

 21   R.  Ecoutez, je m'excuse, je ne la vois pas cette phrase.

 22   Q.  Bien. Nous allons afficher cela à l'écran.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est juste avant le paragraphe 5 sur

 24   cette page, donc il s'agit de la fin du paragraphe 4, la dernière ligne

 25   avant l'alinéa (b).

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, oui, maintenant je le vois. Je le vois. Je

 27   m'excuse.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Cette phrase qui a été rédigée par le lieutenant-colonel Konings est

  2   comme suit :

  3   "Les pièces d'artillerie ne peuvent être utilisées qu'au cas où la

  4   distance sur -- entre les impacts escomptés et la population civile soit

  5   assez large pour ou importante pour éviter des victimes."

  6   Qu'avez-vous à nous dire à propos de cette observation du lieutenant-

  7   colonel Konings ?

  8   R.  Je dirais que j'ai compris en fait l'idée générale qu'il essaie de

  9   transmettre, mais je dois dire que c'est une phrase très imprécise et cela

 10   peut être dangereux. Parce qu'en fait, fondamentalement qu'est-ce qu'il

 11   nous dit ? Il nous dit que vous ne pouvez utiliser que les pièces

 12   d'artillerie que lorsque vous savez qu'elles ne vont pas provoquer des

 13   victimes parmi la population civile. Si cela était la règle parmi les

 14   règles de combat, vous n'auriez pas la règle de proportionnalité. Parce que

 15   la règle de la proportionnalité est une façon de reconnaître qu'un

 16   commandant qui dirige une opération devra prendre des décisions et c'est

 17   inévitable et devra juger, devra voir si une attaque dont il sait qu'elle

 18   va provoquer des victimes civiles peut ou ne peut pas être effectuée. Donc

 19   il faut -- et cela se fonde -- cette décision est prise sur la base de

 20   l'évaluation des dégâts collatéraux prévus, des blessures prévues et une

 21   comparaison de ces dégâts vis-à-vis de l'avantage militaire prévue, il faut

 22   également voir si les victimes ou les dégâts -- les victimes civiles ne

 23   seront pas trop excessives.

 24   Alors, là, ce n'est pas une bonne façon que de citer la loi, parce qu'il

 25   dit : vous ne pouvez pas utiliser l'artillerie si vous savez -- vous ne

 26   pouvez l'utiliser que si vous savez qu'elle ne va pas provoquer de victimes

 27   civiles. Si tel était le cas, nous n'aurions pas besoin de la règle de

 28   proportionnalité. Donc non seulement j'ai l'impression que c'est un ajout à

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  1   la doctrine militaire mais, là, il suggère en fait un élément de droit qui

  2   vaut plus restrictif que ce qui est stipulé par le droit justement.

  3   Q.  Alors nous allons continuer notre examen de cette page, Monsieur, et

  4   j'aimerais en fait que nous passions à la première phrase de l'alinéa (b) :

  5   "Le ciblage de cibles essentiellement civil est hors de question, étant

  6   donné qu'une opération au niveau tactique est planifié et exécutée contre

  7   des cibles militaires. Les cibles militaires. "Les Cibles militaires" -

  8   disais-je - "qui se trouvent dans des zones à population civile seront

  9   attaquées seulement conformément aux règles de combat et aux estimations de

 10   dégâts collatéraux établis par le commandant tactique supérieur ou, dans

 11   certains cas, par le commandant opérationnel ou stratégique."

 12   Là, vous voyez qu'il y a de nombreux concepts, règles de combat, dégâts

 13   collatéraux, mais est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous pensez,

 14   vous, de cette observation du lieutenant-colonel Konings ?

 15   R.  Alors, je dirais, que la -- vous voyez la premier élément de phrase, le

 16   premier -- de phrase :

 17   "Le ciblage de cibles essentiellement civil est hors de question, étant

 18   donné qu'une opération au niveau tactique est planifiée et exécutée contre

 19   des cibles militaires."

 20   Donc il faut savoir en fait que cela ne peut être planifié donc que contre

 21   des cibles militaires.

 22   Donc cela est exact parce que du point de vue tactique vous n'êtes censé

 23   qu'attaquer des cibles militaires mais cela limite la règle à la tactique.

 24   Ce qui m'a frappé dans ce paragraphe c'est que là j'ai commencé à me rendre

 25   compte à la lecture de ce paragraphe que cet auteur était en train en fait

 26   d'amalgamer la restriction au niveau du droit des conflits armés ou les

 27   restrictions au niveau des règles de combat avec le droit du conflit armé.

 28   Alors, bien entendu, je savais que ce rapport avait été écrit par un

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  1   officier de métier, un militaire de métier de l'armée néerlandaise. Je sais

  2   par expérience que l'armée néerlandaise a une très longue expérience des

  3   règles de combat, par exemple, de l'OTAN. Je n'ai pas véritablement été

  4   surpris de voir cet amalgame à ce moment-là parce que je dirais que c'est

  5   une erreur très, très commune commise par les opérateurs. Parce qu'ils ont

  6   -- ils ont habitude d'opérer au vu ou au contenu des limites établies par

  7   les règles de combat. Mais les règles de combat en fait sont des mesures de

  8   contrôle tactique et opérationnel qui sont imposées par des autorités

  9   nationales ou multinationales pour gérer l'espace des champs de bataille et

 10   pour faire en sorte que l'on puisse utiliser les puissances de combat, et

 11   il faut qu'il s'assure que tout cela soit conforme aux objectifs

 12   politiques, et aux droits du conflit armé. Alors, bien entendu, les règles

 13   de combat doivent être -- ont été établies conformément au droit du conflit

 14   armé mais elles ne sont pas comme synonymes avec ce droit. Dans bien des

 15   cas, elles sont beaucoup plus restrictives que le droit des conflits armés.

 16   Lorsque j'ai lu ce paragraphe, j'ai compris qu'il s'agissait d'un officier

 17   qui supposait que l'expérience qu'il avait eue en opérant conformément à

 18   des règles de combat très strictes était, en fait, ce qui permettait de

 19   définir ce qui était autorisé ou non autorisé pour ce qui est de

 20   l'utilisation de la puissance feu dans un combat armé, donc ce n'est pas

 21   une façon très exacte que de présenter le droit. Parce que, vous voyez,

 22   dans le même paragraphe, dans la deuxième phrase, il nous dit :

 23   "Les cibles militaires qui se trouvent dans les zones peuplées par des

 24   civils ne seront attaquées que conformément aux règles de combat et les

 25   estimations de dégâts collatéraux seront établies ou déterminées par le

 26   commandant supérieur tactique ou dans certains cas par le commandant

 27   stratégique."

 28   Alors si vous opérez pour l'OTAN, ou pour les Etats-Unis, ou pour le

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  1   Royaume-uni d'ailleurs, là, vous savez qu'il y a toute une procédure de

  2   règles de combat, cela peut être exact, mais cela n'est pas exact, parce

  3   que cela est stipulé et préconisé par le droit du conflit armé. Donc si

  4   vous n'oeuvrez pas dans ce cadre, ce n'est pas une déclaration exacte.

  5   Parce que l'obligation ultime d'un commandant est de faire en sorte que

  6   lorsque vous avez un combat contre des cibles militaires dans une zone

  7   peuplée, il faut que cela se fasse conformément au droit relatif au conflit

  8   armé. Si les autorités supérieures de ce commandant lui imposent des

  9   restrictions supplémentaires au niveau de l'exécution de ces opérations,

 10   qu'ils appellent cela des règles de combat, ou des ordres opérationnels ou

 11   des mesures de contrôle tactique ou qu'ils leur disent tout simplement,

 12   voilà ce que vous avez le droit de faire. En tant que commandant et lorsque

 13   vous pensez à vos obligations en tant que commandant, ce commandant va

 14   devoir restreindre davantage la façon dont il utilise la puissance feu,

 15   mais ce n'est pas du fait du droit relatif ou confirmé. Donc cela, pour

 16   moi, m'a permis de comprendre qu'il y a quand même une lacune, une

 17   imperfection systématique dans ce rapport, parce qu'il y a un amalgame qui

 18   est fait entre deux sources très disparates de contraintes et d'obligations

 19   conformément aux droits et à la politique qui régit les opérations

 20   militaires contemporaines.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, j'aimerais demander une

 22   petite précision, parce que vous nous dites, il a tort parce qu'il ne tient

 23   pas compte du droit du conflit armé; c'est cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ça. Moi, je dis que

 25   cela ratisse trop large parce que les règles de combat sont les sources qui

 26   définissent les obligations d'un commandant militaire, ce qui est vrai si

 27   ces règles ont été émises mais elles ne peuvent pas modifier ces règles, ce

 28   droit du conflit armé en donnant, en conférant une autorité supplémentaire.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais d'après ce que je comprends de

  2   votre déposition, vous dites : il définit de façon très, très large ce qui

  3   va au-delà des limites préconisées par le droit du conflit armé; c'est cela

  4   ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais j'aimerais vous poser une question

  7   : où est-ce qu'il est indiqué dans le paragraphe 4 que -- où sont indiquées

  8   ces limites, ces limites formulées et prescrites  par le droit du conflit

  9   armé ? Parce qu'apparemment, je vois qu'il a été invité à expliquer les

 10   considérations qui sont prises en matière de ciblage notamment la façon

 11   dont les décisions en matière de ciblage sont prises eu égard à des cibles

 12   qui se trouvent dans des zones peuplées par les civils.

 13   Alors, où est-ce que vous indiquez qu'il indique et stipule quel est

 14   le droit du conflit armé ? Ce qu'il dit en fait, c'est qu'il indique ce qui

 15   est approprié et ce qui n'est pas approprié.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, le paragraphe a un titre, on lui

 17   demande d'expliquer les considérations qui sont prises en matière de

 18   ciblage.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec vous lorsque vous

 21   dites qu'il énumère, qu'il nous donne la déclaration, la doctrine pour les

 22   ciblages.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec tous les préparatifs en amont du champ de

 25   bataille, le choix et l'identification des cibles et puis ensuite, il nous

 26   donne une liste des contraintes opérationnelles pour ce qui est de

 27   l'utilisation de la puissance de combat. Mais, lui, il se centre

 28   exclusivement sur les règles de combat. Bien entendu, c'est un facteur, un

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  1   paramètre qui a son importance. Cela, je le comprends.

  2   Mais à la lecture, je me suis rendu compte qu'il semble suggérer que

  3   lorsque vous avez ces cibles qui sont établies, la source de contraintes la

  4   plus importante est représentée par les règles de combat. Je dis que cela

  5   est valable pour un pays pour des commandants qui opèrent strictement

  6   conformément aux règles de combat mais ce n'est pas valable pour n'importe

  7   quelle force armée, n'importe quel commandant.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais moi, je ne vois pas où, dans

  9   le paragraphe 4, il indique ce qui devait être fait sans le placer

 10   précisément dans un contexte de droit de conflit armé.

 11   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis d'accord avec vous que si vous

 13   vous concentrez essentiellement sur le droit des conflits armés, cela n'est

 14   pas exact parce que cela dépasse en quelque sorte ce qui est préconisé par

 15   le droit du conflit armé. Là, c'est plutôt les règles de combat. Mais je

 16   dirais que vous dites que cela n'est pas précis, vous dites que le contexte

 17   n'est pas précis pour ce qui est des conclusions.

 18   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que vous dites, n'est-ce pas ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi d'attirer

 21   votre attention sur la suite du paragraphe où il est dit que la règle de

 22   base consistera toujours à ne pas provoquer des victimes ou des dégâts pour

 23   les civils ou pour leurs biens fonciers.

 24   Mais ce que j'avance, moi, c'est que cela n'est pas la règle

 25   fondamentale en matière de conflit armé. La règle fondamentale du droit du

 26   conflit armé consiste à faire la différence entre des objectifs militaires

 27   tout à fait licites et les civils. Les civils ont leur importance. Mais la

 28   règle de proportionnalité dont je parlais établit justement l'équilibre que

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  1   doit trouver un commandant lorsqu'il se demande s'il doit attaquer un

  2   objectif militaire parfaitement licite et si lors de cette attaque, cela va

  3   provoquer des victimes civiles, des dégâts collatéraux ou autres. Donc s'il

  4   prend cette règle de combat et que pour lui, cela devient sa règle

  5   fondamentale, nous savons qu'il y a dans le protocole I, le protocole

  6   supplémentaire I, on utilise justement cette même terminologique, que c'est

  7   une règle de base. Mais la règle de base consiste à faire la part des

  8   choses entre les objectifs militaires licites et les civils. Donc dans cet

  9   alinéa bien précis, je comprends tout à fait ce que vous soulevez comme

 10   question lorsque vous nous dites qu'il ne nous dit pas de façon explicite,

 11   il ne donne pas de définition explicite du droit des conflits armés. Mais

 12   moi, ce que je dis, c'est qu'il y a quand même une confusion qui règne

 13   entre les contraintes qui sont imposées par des politiques et les limites

 14   d'une conduite qui est considérée comme autorisée, conformément au droit du

 15   conflit armé.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc en fait, vous êtes en train

 17   d'interpréter une règle fondamentale comme étant une règle de droit par

 18   opposition à une règle d'un autre genre; n'est-ce pas ? C'est ainsi que

 19   vous interprétez ce texte ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, si vous prenez le contexte général de

 21   ce rapport, d'après ce que je comprends, il a rédigé ce rapport pour

 22   définir les obligations juridiques ou pour éliminer l'utilisation

 23   permissible de pièces d'artillerie lors d'une opération militaire et cela,

 24   dans le cadre de ce procès. Lorsqu'il utilise le terme "de règle

 25   fondamentale," ce que je dis c'est est-ce qu'il essaie automatiquement de

 26   nous dire qu'il s'agit du droit du conflit armé ? Non, non. Mais moi ce que

 27   je comprends, c'est qu'il est en train de suggérer qu'il y a un principe de

 28   base lors de l'exécution de toute opération militaire, notamment celle-ci

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  1   et en fait, on lui a demandé de procéder à une évaluation critique de ces

  2   concepts.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est clair maintenant.

  4   Poursuivez, Maître Kehoe. 

  5   M. KEHOE : [interprétation]

  6   Q.  Justement donc à propos de ces deux règles, j'aimerais savoir quels

  7   sont les problèmes auxquels vous pouvez penser lorsqu'il est indiqué dans

  8   la déclaration précédente, ce que nous avons vu, à savoir les pièces

  9   d'artillerie ne peuvent être utilisées qu'au cas où il y a une distance

 10   sûre qui sépare les impacts escomptés et la population civile et ce, pour

 11   éviter les victimes.

 12   R.  En fait, il y a une question de routine. Moi, lorsque j'ai fait office

 13   de conseil juridique au sein de l'armée américaine, je dirais que nos chefs

 14   d'état-major et nos commandants sont absolument bombardés des différentes

 15   règles et règlements de combat. Donc en fait, on leur dit fait que les

 16   règles de combat représentent la source définissant l'autorité et

 17   l'obligation pour tout comportement pendant des opérations militaires. Mais

 18   il faut savoir que le danger c'est que les règles de combat peuvent être

 19   supprimées tout aussi facilement qu'elles peuvent être mises sur pied, mais

 20   ce qu'elles ne peuvent pas faire c'est qu'elles ne peuvent pas autoriser à

 21   une autorité à dépasser, à élargir la portée du droit du conflit armé.

 22   Mais, par exemple, ce qu'elles peuvent faire, si vous avez par

 23   exemple des règles de combat dans l'opération la Cause juste au Panama, il

 24   y avait une règle de combat : les forces de défense panaméennes étaient

 25   considérées et déclarées hostiles, ce qui signifiait que les commandants

 26   militaires pouvaient utiliser toute puissance de combat conformément à

 27   l'autorité qui leur avait été donnée par le droit du conflit armé. Le

 28   danger ici c'est que l'on suggère qu'il y a des restrictions de routine par

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  1   rapport au champ d'application de l'autorité qui deviennent des

  2   restrictions permanentes. Moi, j'ai eu une expérience personnelle lors de

  3   séances d'entraînement avec des commandants. Moi, je leur donnais des

  4   conseils, je leur disais : telle méthode de guerre est autorisée, vous

  5   pouvez l'utiliser. La réponse était : ah oui, mais on n'a pas le droit de

  6   le faire conformément aux règles de combat, donc cela n'est pas exact. Il

  7   faut essayer de leur faire comprendre que les règles de combat

  8   correspondent à toute une série de contraintes placées dans un contexte que

  9   l'on appelle le droit du conflit armé mais que cela peut être modifié. Je

 10   dirais que les règles de combat de l'OTAN, des Etats-Unis ont des

 11   dispositions qui, de façon routinière, envisagent des scénarii très

 12   restrictifs. Par exemple, il y a une disposition qui est très commune: pas

 13   de tir indirect dans des zones peuplées.

 14   Mais, là encore, il faut apporter une nuance, et au vu de certaines

 15   situations tactiques, vous pouvez, par exemple lorsqu'il faut que vous

 16   supprimiez les tirs indirects de l'ennemi, du point de vue tactique, c'est

 17   logique. Vous avez identifié un ennemi qui vous tire dessus grâce à un

 18   radar contrebatterie. Là, il ne s'agit pas de tirs observés, mais vous ne

 19   savez pas exactement d'où viennent les tirs. Donc il y a quand même une

 20   certaine souplesse, une certaine exonération, parce que vous pouvez prévoir

 21   de réutiliser toute l'autorité avec toutes les autorisations que cela

 22   représente dans le cadre du droit du conflit armé.

 23   Mais le danger c'est lorsqu'il y a amalgame parce que, dans ce

 24   rapport, on a l'impression que les contraintes de politique deviennent des

 25   contraintes juridiques, et je comprends ce rapport comme une déclaration

 26   faite par un expert d'artillerie à propos de l'utilisation autorisée de

 27   l'artillerie dans des zones peuplées. Il commence par dire qu'au vu des

 28   contraintes imposées par les règles de combat, il n'est pas autorisé

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  1   d'utiliser l'artillerie en tant que tel lorsqu'il n'y a pas une distance

  2   sûre qui ferait en sorte qu'il n'y aura pas de dégâts collatéraux ou de

  3   blessures. C'est beaucoup trop large.  

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous inviter à ralentir un peu.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je pensais tout simplement aux

  7   interprètes et à la sténotypiste.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  Nous allons donc aller au bas de la page 5. Voyez que c'est le

 10   paragraphe 6, il y a un certain nombre de paramètres mentionnés par le

 11   lieutenant-colonel Konings. Si vous prenez la page suivante, j'aimerais

 12   attirer votre attention sur une partie du rapport qui se trouve au début de

 13   la page suivante. Regardez le petit ii, en haut de la page 6.

 14   Vous l'avez trouvé, Monsieur ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Alors, voilà ce qui est écrit :

 17   "Lorsque ces aspects ainsi que d'autres aspects ont été pris en

 18   considération, les meilleures pièces utilisées pour l'attaque seront

 19   choisies. Pour que l'attaque soit précise et ce, afin de minimiser les

 20   risques de dégâts collatéraux, ce qui est extrêmement important,

 21   l'artillerie et notamment les roquettes et les mortiers ne seront pas

 22   considérés prioritaires. Seulement au cas où la cible dépasse la distance

 23   où il peut y avoir des dégâts collatéraux, on peut procéder au choix

 24   d'utiliser l'artillerie. Cette distance est variable et dépend de nombreux

 25   facteurs tels que les armes, les projectiles, les conditions

 26   climatologiques, la position et la distance."

 27   Donc nous allons nous concentrer sur ce paragraphe. Monsieur, est-ce

 28   que vous pourriez nous dire comment vous évaluez ces remarques faites par

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  1   le lieutenant-colonel Konings ?

  2   R.  Je pense que cela démarre très bien.

  3   "Lorsque ces aspects et d'autres aspects ont été pris en

  4   considération, les meilleures pièces qui vont être utilisées pour l'attaque

  5   seront choisies."

  6   C'est ce que nous appelons, nous, le choix des armes, à savoir nous

  7   choisissons les armes qui seront les plus aptes au vu des circonstances,

  8   les plus aptes pour obtenir l'effet escompté.

  9   Vous avez, par exemple, la précision de l'attaque, pour minimiser les

 10   dégâts collatéraux, et cela est extrêmement crucial, les mortiers et

 11   certaines pièces d'artillerie, telles que les roquettes et les mortiers ne

 12   seront pas prioritaires.

 13   Ce qui est exact, parce que c'est ce qu'ont fait les commandants

 14   lorsqu'ils envisagent leur cible. Ils voient si les unités ont choisi des

 15   armes qui permettront de minimiser le risque de dégât collatéral et de

 16   blessures. Donc, là encore, vous avez ce fameux principe de

 17   proportionnalité. Mais là, la déclaration se poursuit, et il est indiqué

 18   donc les roquettes et les mortiers ne seront absolument pas prioritaires.

 19   Moi, je pense qu'il ne s'agit pas de doctrine, là. Il s'agit plutôt de

 20   technique tactique. Pour ce qui est de savoir quelles sont les armes qui

 21   seront peu utilisées, cela est tributaire de deux considérations : l'effet

 22   escompté et puis le risque de dégâts collatéraux et de blessures

 23   collatérales.

 24   Il se peut qu'il y ait des situations qui soient telles que la nature

 25   de la cible, l'effet escompté, les ressources disponibles aux commandants

 26   ainsi que la situation de l'ennemi, sans oublier la situation de la

 27   population civile, qui seront telles que la conclusion qui sera dégagée est

 28   que l'utilisation de l'une de ces pièces d'artillerie sera beaucoup plus

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  1   prioritaire. Je pense, par exemple, à des canons ou des armes. Je pense,

  2   par exemple, à des hélicoptères également ou certaines pièces d'aviation.

  3   Il n'y a pas en fait de règles en tant que telles pour indiquer quel

  4   système est meilleur que l'autre, et c'est cela qui est dangereux, parce

  5   que ce n'est qu'au cas par cas, ce n'est qu'en procédant à une analyse

  6   contextuelle qu'un commandant peut véritablement utiliser sa puissance de

  7   combat d'une façon qui est telle que cela permettra d'obtenir l'équilibre

  8   fondamental préconisé par le droit, à savoir l'équilibre entre la nécessité

  9   et l'humanité.

 10   Le paragraphe se poursuit, parce qu'il dit :

 11   "Ce n'est qu'au cas où la cible se trouve au-delà de la distance où

 12   l'on peut avoir des dégâts collatéraux que l'on peut choisir ces pièces

 13   d'artillerie."

 14   C'est une phrase qui est une contradiction fragrante avec la première

 15   phrase de ce paragraphe, parce que dans la première phrase -- non, je

 16   m'excuse; en fait, c'est la deuxième phrase qui indique que vous devez

 17   considérer les dégâts collatéraux comme étant un élément lorsque vous

 18   pensez à vos cibles, et puis la phrase suivante est en quelque sorte une

 19   interdiction qui est faite des dégâts collatéraux. Parce que, si la phrase

 20   suivante était exacte, vous n'auriez pas envisagé des dégâts collatéraux,

 21   parce que vous n'auriez jamais le droit d'utiliser une arme qui provoque

 22   des dégâts collatéraux.

 23   Nous savons pertinemment que ce n'est pas ce qui est stipulé par le

 24   droit du conflit armé. Donc c'est une conjugaison de considérations qui

 25   sont tout à fait légitimes et qui sont des considérations tout à fait

 26   exactes pour tout expert d'artillerie, pour tout officier, pour tout

 27   artilleur, car il doit se dire: je dois prendre en considération l'arme,

 28   l'ennemi, l'effet escompté, la façon de mettre en œuvre l'intention du

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  1   commandant et les dégâts collatéraux. Mais une fois de plus, il y a cet

  2   instinct qui le pousse à supposer que les règles de combat restrictives

  3   sont définitives et c'est de ce fait que nous avons cette contradiction

  4   d'incongruité. 

  5   Q.  Alors, regardez il est indiqué, vous voyez un peu plus loin: 

  6   "L'effet escompté est extrêmement important. L'artillerie n'est pas

  7   le système d'armement qui permet de détruire des bâtiments très solides."

  8   Vous voyez ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  "Le commandement armé…"

 11   Ensuite il poursuit:

 12   "L'artillerie peut provoquer des dégâts, des victimes, et a une

 13   grande capacité en tant que système d'armement non mortel."

 14   Alors, est-ce que vous pourriez nous développer un peu ces propos ?

 15   R.  Je pense qu'il faut commencer par la page 5, la question qui est posée

 16   à la ligne 6 :

 17   "Expliquez, je vous prie, les considérations et les contraintes qui

 18   sont prises en considération pour déterminer si et comment l'on doit

 19   utiliser des tirs d'artillerie dans des zones peuplées par des civils."

 20   A l'alinéa 3 (iii), l'auteur indique de façon définitive que

 21   l'artillerie n'est pas le système d'armement qui doit être utilisé pour

 22   détruire des bâtiments très solides.

 23   Alors, ce qui m'a sauté aux yeux un peu comme au début de ce rapport,

 24   c'est que lorsqu'il explique la doctrine en matière d'artillerie, il

 25   reconnaît que les systèmes d'appui feu d'artillerie sont utilisés pour

 26   obtenir de nombreux effets autres que la destruction, à savoir le

 27   harcèlement, l'interdiction, la neutralisation. Il est extrêmement courant

 28   d'avoir un commandant qui utilisait l'artillerie en sachant parfaitement

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  1   bien que l'effet qui sera obtenu ne sera pas la destruction car tel n'est

  2   pas l'effet qu'il a besoin d'obtenir. L'artillerie peut être un moyen

  3   extrêmement utile pour parvenir à d'autres effets que la destruction.

  4   Donc j'ai pensé que toutes les conclusions n'étaient pas indiquées à

  5   ce niveau, car en fait on ne tenait pas compte des considérations liées à

  6   l'emploi de l'artillerie dans une zone habitée par des civils, c'est-à-dire

  7   dans des circonstances ou l'effet souhaité est différent de la destruction.

  8   Même par rapport à la déclaration en tant que telle, je pense que les

  9   spécialistes des opérations militaires lorsqu'ils conçoivent un emploi de

 10   l'artillerie ne cherchent pas toujours à détruire tous les bâtiments l'un

 11   après l'autre, mais l'exigence exprimée par le commandant qui veut

 12   apprécier les possibilités, déterminer la cible qui sera visée, l'objectif

 13   qu'il veut atteindre, et les possibilités d'atteindre cette cible sont

 14   importantes.

 15   Si je fais partie d'une unité d'infanterie légère et que les armes

 16   les plus lourdes dont je dispose soient un canon d'artillerie, je pense que

 17   je vais devoir tenter de détruire un bâtiment, et qu'en fait la meilleure

 18   capacité de le faire c'est d'utiliser ce canon pour essayer de parvenir à

 19   cette fin. Donc tout dépend des circonstances et l'analyse indique les

 20   facteurs dont la situation dépend.

 21   Donc, encore une fois, dans la phrase de suivi, à mon avis, on a

 22   sauté d'un élément à un autre en omettant de reprendre les objectifs

 23   légitimes selon la doctrine militaire qui sont ceux de l'emploi de

 24   l'artillerie et l'affirmation en particulier ici me semble indiquer un

 25   objection qui n'est pas le bon, à savoir que l'emploi de l'artillerie est

 26   destiné à influencer le moral des civils. Je ne conteste pas cela. Mais

 27   c'est un emploi de l'artillerie qui est abusif, qui n'est pas justifiable.

 28   Ce qui a semblé me dire qu'on ne détruit pas une cible avec de l'artillerie

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  1   dans une ville, mais c'est seulement la deuxième raison d'utiliser

  2   l'artillerie qui consisterait à influer sur le moral des habitants, les

  3   premiers objectifs plus acceptables ne sont pas celui-ci. Donc en omettant

  4   le harassement, l'interdépendance entre les différentes actions possibles,

  5   la neutralisation et la perturbation d'une mission, on va au-delà des

  6   règles d'engagement.

  7   Q.  Vous avez évoqué quelque peu les observateurs avancés, et le colonel

  8   Konings aborde ce sujet en page 8.

  9   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais que nous affichions sur les écrans

 10   la page 8 du rapport du général.

 11   Q.  Il est question à ce niveau du rapport de l'emploi et de l'importance

 12   des observateurs avancés et de la façon dont ces observateurs peuvent être

 13   employés de bonne façon.

 14   J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur le paragraphe (f) -- donc

 15   alinéa (f) du paragraphe 8. Vous voyez cela, Professeur ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Voici donc la phrase de ce paragraphe, je cite :

 18   "C'est l'emploi de l'artillerie et des mortiers contre des cibles situées

 19   dans des zones habitées par des civils sans que ces cibles soient

 20   visualisables ou observables par un observateur avancé qu'il est interdit

 21   de faire, à moins que la cible ne soit au-delà de la distance déjà décrite

 22   comme étant celle des dommages collatéraux et que la localisation exacte de

 23   la cible soit connue. Mais même dans ce cas, le commandant devra vérifier

 24   quels peuvent être les effets d'une telle attaque."

 25   Pouvez-vous nous donner votre estimation de ce qui est écrit dans ce

 26   paragraphe ?

 27   R.  Oui. Encore une fois, nous commençons par nous poser la question,

 28   expliquer l'emploi et l'importance des observateurs avancés, y compris s'il

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  1   est justifié d'employer de tels observateurs avancés contre des cibles dans

  2   des zones habitées. Donc la question semble inviter une appréciation de ce

  3   qui est légalement acceptable, ce qui va un peu au-delà de déterminer ce

  4   qui est approprié. Je suppose que vous pourriez dire que le mot "approprié"

  5   n'implique pas nécessairement que c'est justifiable légalement, même si

  6   cela permet de le penser.

  7   Donc il n'y a absolument aucune contestation quant au fait que l'emploi des

  8   observateurs avancés dans le cas de tirs indirects est une solution idéale.

  9   C'est idéal d'un point de vue opérationnel, et également idéal d'un point

 10   de vue humanitaire. Opérationnellement, cela améliore la possibilité

 11   d'atteindre l'effet désiré avec le moins de moyens possible, et d'un point

 12   de vue humanitaire, cela donne au commandant une meilleure idée des

 13   dommages collatéraux potentiels ou des blessures accidentelles

 14   potentielles.

 15   Donc suggérer qu'un commandant devrait en tout état de cause s'efforcer de

 16   placer les cibles sous observation, cela revient à dire que l'on s'efforce

 17   d'obtenir la meilleure situation possible, la situation idéale. Mais cela

 18   n'implique pas nécessairement qu'il est dans l'obligation de le faire, car

 19   ça nous l'avons déjà bien compris. C'est là que se pose le problème. Mais

 20   encore une fois, ce paragraphe me permet de penser que ce que l'auteur

 21   affirme c'est qu'à moins de situer une cible qui se trouve dans une zone

 22   habitée et de la place sous observation humaine, on ne devrait pas la

 23   prendre pour cible.

 24   Je vais vous donner un exemple avant, un exemple que j'ai déjà utilisé,

 25   celui des tirs anti-batterie d'artillerie. Imaginez l'hypothèse suivante :

 26   Un commandant est en train de mener une opération et il a effectué une

 27   appréciation de la situation, il sait que l'ennemi va placer son poste de

 28   commandant sous tir indirect, en tout cas, c'est ce qu'il imagine, pour

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  1   essayer de perturber l'opération qu'il est en train de mener et de mettre

  2   en danger la réussite de toute son opération. Alors neutraliser la source

  3   du tir est une mission tout à fait critique dans ce cas. Ce commandant peut

  4   disposer éventuellement d'un radar anti-batterie, donc ce radar peut lui

  5   permettre d'identifier très précisément la source des tirs d'artillerie

  6   ennemis sur des coordonnées qui peuvent aller jusqu'au huitième chiffre

  7   après la virgule. Donc il est nécessaire pour lui d'être en relation

  8   constante avec son centre d'appui et de coordination des tirs.

  9   Dans un espace de quelques secondes, littéralement, il faut qu'il détermine

 10   la source des tirs d'artillerie et que cela lui permette de mener à bien sa

 11   propre mission en répliquant à des tirs indirects pour neutraliser la

 12   menace. Maintenant, évidemment, ce commandant, je parle toujours sur le

 13   mode hypothétique, ce commandant n'a pas d'observateur avancé, il ne sait

 14   pas si l'ennemi a situé ses pièces d'artillerie dans la cour d'une école ou

 15   dans la cour d'un hôpital ou dans un quartier habité par des civils. Il ne

 16   peut pas le savoir. Mais il lui faut faire un jugement tactique important

 17   pour décider quelle sera la valeur pour lui, en tant que commandant du

 18   point de vue du contrôle et de la gestion des moyens de communication,

 19   quelle sera la valeur d'un tir indirect ou pas. Dans la plupart des cas, je

 20   pense qu'un commandant militaire autorisera la mission des pièces anti-

 21   batterie à ce faire. Si vous posez la question au commandant, si vous lui

 22   demandez : est-ce que vous préférez avoir la cible en visuel ? N'importe

 23   quel commandant vous dira : bien sûr, mais ce n'est pas une exigence

 24   absolue, ce n'est pas, disons, une condition sine qua non pour l'emploi de

 25   tirs indirects sur une cible qui n'est pas visible par le tireur dans un

 26   quartier habité. Toutefois, c'est une contrainte tout à fait courante de

 27   l'OTAN et des règles d'engagement occidentales que de souhaiter disposer de

 28   ces qualificatifs. Donc, pour moi, ceci explique ce qu'il convient de ne

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  1   pas faire.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, j'aimerais comprendre

  3   totalement ce qu'a dit le témoin au sujet de ce paragraphe. Apparemment,

  4   comme on le voit au début de ce paragraphe, il est dit : "Ceci ne devrait

  5   pas se faire." Ensuite vient le mot ou l'expression "à moins que" et après

  6   le "à moins que," nous avons la description que vous nous avez faite de ce

  7   que l'auteur considère comme étant une exception. Donc l'observation

  8   visuelle de la cible ou l'absence de cette observation, qui est considérée

  9   comme un critère. Vous nous avez expliqué que, si l'on dispose du système

 10   radar dont vous avez parlé, cela revient pratiquement au même que de dire

 11   que l'on dispose de moyens techniques permettant de préciser de façon très

 12   pointue la localisation d'une cible, et vous nous dites que parfois cela

 13   permet de savoir si la cible se trouve dans la cour d'un hôpital ou

 14   ailleurs.

 15   Alors si l'on connaît le secteur, si l'on a identifié le secteur, est-ce

 16   que vous tiendriez compte de ce fait au moment de décider de façon

 17   définitive si, oui ou non, on va utiliser des systèmes de tir pour viser

 18   une cible ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 21   Donc il me semble que, dans ce cas, on peut dire en d'autres termes, que le

 22   lieutenant-colonel -- ou plutôt, M. Konings aurait dû se poser la question

 23   du fait de savoir s'il convenait d'agir ou pas selon l'explication que vous

 24   venez de nous donner impliquant qu'il y a des circonstances différentes qui

 25   peuvent exister et justifier ou non une telle action.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, la partie de la phrase

 27   qui, je pense, exprime une divergence importante entre lui et moi, c'est

 28   qu'il affirme qu'à moins que la cible soit au-delà de ce qui a déjà été

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  1   décrit comme la distance de dommage collatérale, et à moins que sa

  2   situation géographie soit parfaitement bien définie, il s'agira d'un tir

  3   aveugle pour autant qu'on sache qu'il n'y a pas de civil dans le secteur.

  4   Or quand on utilise une arme, on vise à obtenir un effet qui peut se

  5   limiter à un cartier habité, mais sans affecter les civils.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si vous regardez le contexte du

  7   rapport vous verrez que parfois le libellé dans ce rapport anticipe un

  8   risque de dommage collatéral. Ce qui ne revient pas au même que d'exclure

  9   totalement et définitivement tout dommage collatéral. Vous avez dit que si

 10   ce qu'il dit est exact, vous n'auriez plus besoin de la règle de

 11   proportionnalité, alors que dans le rapport, il admet qu'une règle de

 12   proportionnalité existe. Donc dans cette mesure, je me demande où vous

 13   trouvez la différence substantielle entre sa position et la vôtre. Même si

 14   on peut admettre que le point de départ n'est pas toujours le même entre

 15   vous et que vos façons d'expliquer les choses n'est pas toujours identique,

 16   mais j'essaie de déterminer moi-même où se situe cette différence de

 17   position substantielle entre vous et lui.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce que je dis repose,

 19   bien entendu, parce que je suis censé essayer de comprendre ce qu'il dit,

 20   donc ce que je crois comprendre c'est qu'il déclare qu'il faut tenir compte

 21   d'une distance supérieure à la distance de dommage collatéral, ce qui me

 22   permet de penser qu'il l'a déjà définie cette distance de dommage

 23   collatéral. Donc, pour moi, cela revient au même que de dire, On peut tirer

 24   à l'aveuglette aussi longtemps qu'on a déterminé à l'avance que cela ne

 25   produira pas de dommages collatéraux. Alors si c'est bien ce qu'il a à

 26   l'esprit, alors je suis fondamentalement d'accord avec lui. Mais si l'on

 27   tire à l'aveuglette, on doit envisager que le lieu où la cible sur laquelle

 28   on tire n'est pas identifiée de façon très précise. Donc il faut que cela

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  1   soit pris en compte dans l'analyse de proportionnalité, et si cela se fait,

  2   je n'ai pas de désaccord avec lui. A ce moment-là, je pense qu'il y a

  3   respect de la loi.

  4   Mais dans un contexte plus flux sur le plan juridique dans ce paragraphe,

  5   si ce qui est dit c'est qu'à moins de disposer d'observateur avancé donc

  6   d'un véhicule aérien ou d'un véhicule aérien automatisé ou d'un système de

  7   vidéo ou d'un autre moyen qui vous permet d'avoir une précision complète

  8   sur la localisation de la cible, on ne doit pas tirer un tir indirect. Je

  9   pense que c'est plutôt un bon principe en soi, une bonne règle à appliquer.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce contexte, permettez-moi de vous

 11   poser la question suivante : l'expression utilisée par M. Konings est

 12   "CDE." Je ne suis pas sûr le plan technique de très bien connaître le sens

 13   de ce sigle. CDE c'est bien le sigle que vous avez utilisé, n'est-ce pas ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est une estimation qui

 16   indique qu'un plus aucun dommage collatéral ne risque d'être infligé, ou

 17   est-ce que c'est un sigle qui indique que ce risque est toujours acceptable

 18   en tant que risque ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je vais essayer de préciser ma réponse et

 20   de la resituer dans le contexte de ce paragraphe.

 21   L'estimation d'un dommage collatéral se fait dans les étapes préalables au

 22   ciblage et dans le cadre d'un processus en plusieurs phases. Donc, par

 23   exemple, on identifie d'abord une cible potentielle, et puis les experts,

 24   des effets produits par les armes et des questions liées aux civils, vont

 25   donner leur meilleure appréciation quant à la qualité du cartier en

 26   question. Est-ce qu'il est habité par des civils ou pas ? Ils ont également

 27   donné leur meilleure appréciation possible quant au système d'armes qu'il

 28   est acceptable d'utiliser, selon eux, dans un tel endroit en évitant au

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  1   maximum les dommages collatéraux ou les blessures accidentelles, ceci sur

  2   un diagramme de dommages collatéraux et de blessures accidentelles qui sont

  3   examinés avant le début de l'exécution d'une mission.

  4   Le commandant a donc une appréciation préalable qu'il peut utiliser pour

  5   entamer son analyse de proportionnalité. Donc ça c'est une estimation de

  6   risque, une appréciation de risque.

  7   Ce qui est dit dans ce paragraphe c'est qu'à moins que la cible se

  8   situe au-delà de la distance déjà déterminée comme étant la distance de

  9   dommage collatéral. En d'autres termes, c'est bien ce que vous venez de

 10   dire, à savoir qu'une appréciation préexistante est établie avec un certain

 11   degré de certitude que la cible visée par ce système d'armes particulier

 12   pourra l'être sans que cela résulte en dommages collatéraux, alors on peut

 13   viser à l'aveugle.

 14   Je veux dire ça ce serait une situation idéale, n'est-ce pas, si je

 15   suppose que l'artillerie ennemie a un certain degré de certitude de sa

 16   capacité à ne pas produire de dommages collatéraux c'est le scénario idéal

 17   ? Mais je ne pense pas que cela prenne en compte le risque de l'utilisation

 18   de ce système au-delà d'une distance prédéterminée comme étant estimée être

 19   une distance produisant des dégâts, des dommages, et pourtant on a situé la

 20   cible.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc vous interprétez, n'est-ce

 22   pas, le libellé de M. Konings comme à l'endroit où il parle des dommages

 23   collatéraux et des estimations relatives à ces dommages ? Vous interprétez

 24   cela comme signifiant qu'il vise à exclure ou à réduire à pratiquement zéro

 25   le risque de dommages collatéraux, plutôt que de situer ce risque dans le

 26   cadre des règles généralement admises, n'est-ce pas ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ceci est

 28   principalement dû à l'utilisation du mot "distance," "distance," en

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  1   anglais, au lieu d'"estimation," "estimate," en anglais. Mais ce qu'il veut

  2   dire -- si ce qu'il veut dire se situe dans le cadre de l'analyse de

  3   proportionnalité, alors je suis tout à fait d'accord avec lui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  5   Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

  6   M. KEHOE : [interprétation]

  7   Q.  Un dernier commentaire sur ce rapport que je porte à votre attention,

  8   page 13, paragraphe 12. Nous pourrions peut-être lire ces paragraphes

  9   ensemble. Au paragraphe 12, la question posée au lieutenant-colonel Konings

 10   est la suivante :

 11   "Vous êtes prié d'expliquer l'emploi où les contraintes liées à l'emploi de

 12   divers systèmes d'arme."

 13   Alors j'aimerais que vous vous concentriez sur la fin de ce paragraphe,

 14   "Les armes relativement imprécises," car ce sont les derniers mots.

 15   Vous voyez ces mots ?

 16   R.  Oui, Monsieur.

 17   Q.  Alors est-ce que ceci constitue un risque pour les civils vivant dans

 18   le cartier ? Il est donc question d'équilibre entre l'importance de la

 19   cible et l'importance de l'effet négatif qui sera subie par la population

 20   civile dans ce secteur ainsi que l'importance du risque couru par ces

 21   forces à lui et la disponibilité d'autres moyens qui pourraient pousser le

 22   commandant à recourir à l'artillerie ou pas. Dans pratiquement 100 % des

 23   cas, il est décidé de ne pas recourir à l'artillerie, et si nous prenons la

 24   dernière phrase du paragraphe 12, nous voyons, je le cite :

 25   "Par conséquent, des tirs sans réplique ne devraient pas intervenir

 26   dans des lieux peuplés par des civils."

 27   Veuillez commenter ces dispositions, Professeur.

 28   R.  Nous commençons par la dernière phrase du paragraphe 13. Elle concerne

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  1   -- elle nous renvoie au dialogue que je viens d'avoir avec les Juges de la

  2   Chambre. Je pense que c'est une déclaration assez catégorique qui signifie

  3   comme nous l'avons discuté tout à l'heure que dans le paragraphe précédent,

  4   il était question de tirs indirects sans moyens d'observation visuelle. Les

  5   corrections de tirs sont le résultat de l'existence d'observateurs visuels

  6   qui permettent d'ajuster le tir entre le premier et le deuxième et les

  7   suivants en cas de tirs indirects. Donc des mesures sans correction

  8   signifient que l'on tir en l'absence de toute observation directe.

  9   Quant au paragraphe précédent, ce dont nous discutons dans ce

 10   paragraphe précédent, c'est la grande diversité des canons et des pièces

 11   d'artillerie qui existent et je dois dire qu'il est absolument incroyable

 12   de voir à quel point cette diversité est grande. Dans pratiquement 100 %

 13   des cas, un commandant décidera de ne pas recourir à l'artillerie dans un

 14   quartier peuplé par des civils. En fait, l'histoire des opérations

 15   militaires même contemporaines nie complètement les suppositions faites

 16   précédemment.

 17   Dans mon expérience, ma première expérience réelle de la réalité du

 18   combat, c'est lorsque j'ai quitté Panama et que je m'inquiétais évidemment

 19   de ce qui s'y passait, et durant l'opération Cause juste en 1989, une des

 20   cibles les plus importantes était un bâtiment, une tour d'habitation qui ne

 21   pouvait pas se trouver que mal situer du point de vue du risque de dommages

 22   collatéraux. Ce bâtiment se trouvait au cœur d'un quartier qui s'appelait

 23   RoE, qui était une zone très miséreuse avec des bâtiments en bois en très

 24   mauvais état qui avaient subi des tirs indirects très nombreux dès le début

 25   de la mission, ce qui avait fait de nombreuses victimes parmi les civils

 26   qui avaient la plus grande malchance de se trouver là.

 27   Je pense que le commandant devait savoir qu'il y avait une énorme

 28   probabilité que des tirs indirects de cette sorte produisent un grand

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  1   nombre de victimes civiles, aussi bien pendant la phase aérienne que

  2   pendant la phase terrestre de l'opération. Un missile de croisière tire un

  3   tir indirect et il y a eu des centaines de missiles de croisière qui ont

  4   été tirés contre des objectifs militaires dans la ville de Bagdad pendant

  5   la mission en Irak. Les raids aériens contre la Serbie en sont un autre

  6   exemple. L'opération en Irak a eu lieu en 2003. Il y avait des quartiers

  7   habités par l'ennemi qui étaient transformés en véritable fort et les

  8   forces alliées ont recouru de façon très courante aux tirs indirects pour

  9   faciliter la chute des forces ennemies.

 10   Mais ce qui est important ici c'est qu'un commandant se pose la

 11   question de l'emploi de telle ou telle arme, donc de la compatibilité avec

 12   ses obligations au titre de la loi au moment où le risque de dommage

 13   collatéral ou de blessures accidentelles existent et est directement lié à

 14   l'emploi des armes qu'il envisage d'utiliser. On pourrait passer des heures

 15   à dresser des hypothèses où on verrait un commandant face à tout un arsenal

 16   de possibilités contraint de décider si le tir indirect est compatible avec

 17   les faits qu'il souhaite obtenir dans un quartier habité par des civils.

 18   C'est une très malheureuse réalité de la guerre. Mais laissez entendre que

 19   parce qu'un tir indirect ne peut pas obtenir l'effet destructeur souhaité

 20   et que la cible se trouve dans un quartier habité par des civils, où il

 21   existe des bâtiments interdits à la destruction, et bien laissez entendre

 22   que le tir indirect est autorisé dans un tel cas n'est pas acceptable. Le

 23   tir indirect -- doit être interdit dans un tel cas. C'est une déformation

 24   de la doctrine et du droit.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, je vous demanderais une

 26   explication. Comment entendez-vous la phrase, je cite : "Dans pratiquement

 27   100 % des cas, on ne décidera pas de recourir à l'artillerie" ? Est-ce que

 28   cela signifie qu'on ne doit jamais recourir à l'artillerie ou que

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  1   pratiquement jamais on ne doit le faire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je la comprends comme signifiant que l'on

  3   ne doit pratiquement jamais recourir à l'artillerie dans un quartier habité

  4   par des civils.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis quelqu'un qui a pour langue

  6   maternelle la même langue maternelle que M. Konings. Donc le mot

  7   "practically" ici en anglais me fait beaucoup penser au mot "practice" en

  8   Néerlandais, qui signifie "proche de." Est-ce que vos commentaires

  9   correspondent à ma façon de voir les choses ? Est-ce que vous pourriez nous

 10   dire si vous comprenez cette expression comme signifiant que, dans près de

 11   100 % des cas ou dans presque 100 % des cas, le commandant décidera de ne

 12   pas recourir à l'artillerie ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que ceci est également peut-être un

 14   peu trop général. Je pense, et là je ne parle pas d'un point de vue

 15   juridique mais d'un point de vue opérationnel. Je pense que si l'on se

 16   penche de plus près sur la doctrine militaire que l'on trouve dans le

 17   rapport, comme vous l'avez remarqué vous-même, il y a mention de

 18   l'appréciation des dommages collatéraux, il y a la règle de

 19   proportionnalité qui est considérée comme une règle routinière dans

 20   l'appréciation du recours ou du non recours aux tirs indirects dans des

 21   quartiers habités par des civils.

 22   Donc la doctrine elle-même nous révèle qu'il y a des exceptions et des

 23   situations où les commandants vont pratiquer leur appréciation et employer

 24   tout de même les moyens à leur disposition pour obtenir des effets

 25   déterminés. Ça c'est tout de même un aspect très courant des opérations

 26   militaires. Donc même si nous apportons des nuances, même si nous ne disons

 27   pas dans 100 % des cas, mais presque jamais, je pense que c'est encore un

 28   peu trop général.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors est-ce que je dois comprendre que

  2   votre commentaire et la critique que vous faites de ce rapport concernent

  3   tous les -- concernent les moments où on voit que le commandant a tous les

  4   moyens nécessaires pour prendre sa décision et que tout de même à la fin on

  5   trouve des déclarations très générales dont vous dites qu'elles ne sont pas

  6   justifiées de la part de l'auteur ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est l'une de mes critiques du rapport,

  8   Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Veuillez poursuivre, Maître Kehoe.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Je vais rebondir sur la déclaration, sur les propos de M. le Juge Orie.

 13   C'est l'une de vos critiques, l'équilibre. L'équilibrage de vos critiques

 14   de ce rapport avec examen du rapport, d'une part, est prise en compte de ce

 15   dont nous discutons au sujet de l'amalgame entre les règles d'engagement,

 16   règles de combat et le droit du conflit armé; c'est bien cela ?

 17   R.  Je pense que nombre des règles de combat impliquent des contraintes qui

 18   sont évoquées dans le rapport mais qui ne découlent pas toutes de la

 19   doctrine militaire reprise de façon générale dans ce rapport, qui

 20   s'ajoutent donc à cette doctrine. J'ai parlé du triple aspect à prendre en

 21   compte. Je veux dire : quand vous êtes un expert et que vous rédiger un

 22   rapport, si vous pensez qu'il est utile pour celui qui va juger les faits

 23   d'ajouter quelque chose à une autre doctrine ou de la modifier, parfait.

 24   Mais si cela vous ennui un petit peu de voir qu'il y a des éléments qui

 25   sont ajoutés à la doctrine et que le résultat c'est une déclaration assez

 26   peu précise sur le plan juridique qui ne tient pas absolument compte de

 27   toutes les contraintes figurant dans la doctrine, alors je parle d'amalgame

 28   et cela me dérange un petit peu. Je pense que c'est finalement ce qui s'est

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  1   passé avec l'amalgame systématique entre les règles de combat et la loi des

  2   conflits armés.

  3   Dans mon expérience, les responsables des opérations que j'ai eues dans mon

  4   entourage, durant ma carrière, m'ont permis de comprendre ce qui se passait

  5   et je crois l'avoir bien compris. Mais ce qui me dérange davantage

  6   toutefois c'est de voir que l'on modifie la doctrine en tant que tel et

  7   c'est bien ce que laisse entendre la dernière partie du rapport dont nous

  8   venons de discuter, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, où

  9   vous voyez toute une série de considérations doctrinales, tout à fait

 10   légitimes, liées au recours ou au non recours, tirs indirects dans un

 11   quartier habité par des civils, et puis on arrive, après tout cela, à une

 12   conclusion qui, à mon avis, ne correspond pas à la pratique des opérations

 13   militaires, en tout cas, du point de vue de la doctrine militaire. Cela me

 14   dérange un peu plus. Je ne suis pas officier d'artillerie.

 15   Je n'ai pas été entraîné, été formé, suivi des cours d'artillerie.

 16   Donc je ne prétendrais pas avoir une expertise en matière d'artillerie, en

 17   tout cas pas celle du lieutenant-colonel Konings. Je suis sûr qu'il a de

 18   nombreuses connaissances en matière d'artillerie, mais je ne peux pas

 19   m'empêcher de me pencher sur tout cela d'un point de vue juridique. Parce

 20   que ce que j'ai vu, c'est une déformation des règles et des contraintes qui

 21   étaient expliquées dans la doctrine militaire, et c'est que j'ai essayé

 22   d'indiquer au représentant de la Défense.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   [Le conseil de la Défense se concerte]

 25   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je vais vous demander la

 26   permission de revenir sur certaines abréviations qui ont été utilisées dans

 27   le rapport du Pr Corn.

 28   C'est pour cela que je vais vous demander de revenir sur la pièce

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  1   D1642 MFI.

  2   Donc je reviens vers le rapport et, vous voyez la date du rapport. C'est un

  3   rapport qui a été fourni le 22 juin, c'est la date qui y figure, il

  4   faudrait corriger cela. Donc dans le paragraphe 10, donc il ne s'agit pas

  5   de juillet, de 22 juillet, mais juin. Donc au niveau du dixième paragraphe

  6   du document qui contient des informations supplémentaires, on y voit une

  7   date qu'il s'agit de corriger, puisqu'ici on parle du mois de juillet donc

  8   2009, alors qu'il s'agit du rapport qui a été écrit au mois de juin, le 22

  9   juin 2009.

 10   Voilà, c'est ce document qui contient des informations

 11   supplémentaires.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait que je dise à M. Corn, que

 13   le premier lundi du mois, au Pays-Bas, c'est un mois où on attend le

 14   système puisqu'on teste les systèmes d'alerte. Donc ne vous inquiétez pas.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu qu'il y avait une erreur dans la

 16   transcription en anglais, je voudrais attirer votre attention sur cette

 17   erreur, parce que je pense que c'est un point qui est important.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais faites donc, faites donc. C'est

 19   vrai que cela pourrait nous aider.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] A la ligne 2112, à 01 : 07, le mot

 21   "explicable" doit être remplacé par le mot, "inexplicable."

 22   M. KEHOE : [interprétation] Merci. Donc il s'agit de la page 29 [comme

 23   interprété], ligne 21. Donc on parle de quelque chose qui n'est pas

 24   explicable, qu'on ne peut pas expliquer.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, merci. D'ailleurs je me

 26   souviens que M. Corn nous a dit précisément cela.

 27   Vous pouvez poursuivre, Monsieur Kehoe.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Donc je voudrais

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  1   tout simplement clarifier quelques sigles.

  2   Q.  C'est la page 23 de votre rapport qui m'intéresse, Monsieur.

  3   A peu près à la moitié du premier paragraphe, vous parlez, au milieu

  4   du paragraphe, vous dites :

  5   "Les renseignements du général Gotovina, on indiquait que en plus

  6   d'être C31, centre de forces ennemies, il y avait d'autres aspects qui nous

  7   intéressaient."

  8    Voici ce qui m'intéresse, vous avez utilisé donc ce sigle C3I, qu'est-ce

  9   que cela veut dire ?

 10   R.  C'est le sigle qui veut dire, le commandement, le contrôle, la

 11   communication et le renseignement, intelligence en anglais, d'où le

 12   troisième i.

 13   Q.  Si l'on se concentre sur les paragraphes, B, où on parle du 7e QG du

 14   Corps de la Krajina; est-ce que vous pensez qu'on pourrait changer quoi que

 15   ce soit par rapport à votre opinion exprimée à ce sujet de la cible que

 16   cela représentait, si le commandant du 7e Corps de la Krajina était

 17   présent, oui ou non au QG au moment du bombardement ?

 18   R.  Non, pas du tout.

 19   Q.  On va passer à la page 27, le premier paragraphe en entier de cette

 20   page. Donc là vous parler de la campagne malouine, de cette campagne des

 21   îles maliennes et on peut lire :

 22   "Même s'ils n'avaient personne suffisamment de moyens pour détruire

 23   les cibles à Knin, créer la perception de - entre guillemets - 'dominance

 24   opérationnelle à grand spectre,' aurait été quelque chose de bénéfique pour

 25   diminuer la capacité de l'ennemi pour riposter."

 26   De quoi s'agit-il ?

 27   R.  Cette notion de domination opérationnelle à large spectre, il s'agit

 28   donc de convaincre l'ennemi que vous dominez absolument tous les aspects de

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  1   l'opération. En profondeur, les combats rapprochés, les combats à venir,

  2   parfois on parle cela de la profondeur opérationnelle.

  3   Donc ce dont je parle ici c'est que au moment où vous avez une

  4   attaque délibérée, que vous avez les positions de la défense qui ont été

  5   préparées à l'avance. Les commandants souhaitent que l'ennemi sache qu'ils

  6   dominent -- qu'ils contrôlent toutes les phases de l'opération. Donc il

  7   veut contrôler l'ennemi, il veut contrôler les rythmes de la bataille, et

  8   pour lui démontrer qu'ils contrôlent le résultat de la bataille, et ceci,

  9   en profondeur opérationnellement. Donc tous les spectres, tous les aspects

 10   du combat sont contrôlés. La capacité de démontrer cette domination à grand

 11   spectre va faire en sorte que l'ennemi va juger futile toute opposition

 12   puisque c'est vous qui contrôlez la situation.

 13   Q.  Maintenant nous passons à la page 28. A nouveau, au milieu de la

 14   page, c'est un paragraphe qui commence par : "Basez sur ce fait…"

 15   Vous dites que le général que :

 16   "Le général Gotovina aurait pu penser, ça aurait été tout à fait

 17   raisonnable que en réduisant la population civile de Knin serait allé

 18   réduire à la terre, ras, plat."

 19   Qu'est-ce que cela veut dire ?

 20   R.  Cela veut dire chercher à s'abriter, fuir. Cela veut dire que les

 21   civils ont essayé de trouver un endroit aussi sûr que possible, tout

 22   simplement. C'est un terme [imperceptible].

 23   Q.  Autrement dit, vous êtes arrivé à la conclusion que ça a été la

 24   supposition qu'a faite le général Gotovina, que c'est tout à fait

 25   raisonnable d'imaginer qu'il a fait cela ?

 26   R.  Oui. Je l'ai dit, moi, je dis tout simplement que, moi, si j'avais été

 27   dans la cellule qui s'occupe de finir les cibles, pour la mission, je serai

 28   parti de la même hypothèse, à savoir que vu les circonstances, vu l'heure,

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  1   les civils ont tout fait pour ne pas être touchés par les obus pour

  2   s'abriter.

  3   Q.  Ensuite la page 31 de votre rapport, le dernier point de clarification,

  4   il s'agit du paragraphe qui commence par : "Le timing de l'utilisation."

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  Quatre lignes plus bas, vous dites :

  7   "Tirer contre C3I, la logistique et les objectifs renforcés auraient

  8   contribué au sens de confusion et isolation."

  9   Qu'est-ce que cela veut dire quand vous parlez de "ces tirs récurrents" ?

 10   R.  Je parle du principe de masse, la multiplication des tirs. Donc c'est

 11   le modèle qui a été utilisé des tirs indirects, et ceci basé donc sur la

 12   base des faits qui m'ont été présentés, j'en suis arrivé à la conclusion

 13   que l'objectif primordial de ces tirs non corrigés était de supporter les

 14   tirs précis pour pénétrer les positions de l'ennemi.

 15   Chaque matin quand les tirs rapprochaient et commençaient, vous aviez en

 16   même temps les feux indirects visant les moyens de commandement et de

 17   contrôle et des communications de l'ennemi, et ceci, dans les arrières.

 18   Donc c'est tout à fait logique parce que c'est un point décisif dans le

 19   combat tactique puisque vous avez -- vous devez induire en erreur l'ennemi,

 20   semer la pagaille pour que tout simplement il n'y ait plus de contrôle et

 21   de commandement au niveau de troupes de l'ennemi parce que c'est exactement

 22   ce qui se passe, il n'est plus en contact avec les éléments d'appui et il

 23   va sans doute -- tout cela va sans doute mener vers la capitulation de

 24   l'ennemi.

 25   Q.  Le dernier sigle que vous avez utilisé à plusieurs reprises c'est le

 26   concept de METT-T-C -- M-E-E-T-T-T-C [sic], est-ce que vous pouvez me dire

 27   de quoi il s'agit ?

 28   R.  C'est un sigle militaire américain qui veut dire Mission ennemie,

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  1   troupes, terrain, temps, civils. Donc c'est un sigle de sténotypie qui --

  2   de sténographie qui a été utilisé, qui est utilisé pour appeler les

  3   commandants ou un dirigeant au niveau commandant au niveau opérationnel à

  4   tous les niveaux pour leur rappeler ce principe, à savoir que les décisions

  5   opérationnelles doivent toujours tenir compte de ce sigle de ces éléments,

  6   et vous le voyez dans le rapport du colonel Konings qui parle du processus

  7   de prise de décision par rapport aux objectifs. Il n'utilise pas ce terme

  8   mais si vous réfléchissez à la façon dont il décrit cela, c'est de cela

  9   qu'il parle et on parle de ressources de troupes. On parle de la mission,

 10   de la mission qui est la vôtre, des effets. Vous regardez l'ennemi, vous

 11   observez les informations de renseignements que vous avez, la préparation

 12   du terrain de combat. Donc tout cela fait partie du procès IPB, comme nous

 13   l'appelons, donc la préparation au niveau de renseignements du terrain de

 14   combat. Ensuite vous pensez à l'effet que cela va avoir sur la population,

 15   et dans la prise de décision quand il s'agit des cibles, il faut absolument

 16   prendre en compte la situation et tous ces facteurs vont être modifiés,

 17   vont changer à la guise des modifications de la situation, parce que vous

 18   pouvez changer le poids de chacun de ces facteurs par rapport à la

 19   situation telle qu'elle se présente.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions pour ce témoin.

 21   Q.  Je vous remercie, Monsieur.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Moi, il y a un terme qui m'intéresse, un terme que vous avez utilisé.

 24   Vous avez parlé du droit opérationnel; est-ce que je vous ai bien compris ?

 25   Quand vous parlez du droit opérationnel ou la loi opérationnelle, c'est une

 26   portion du droit des conflits armés qui ait très directement aux

 27   opérations; est-ce bien cela ? Puisque vous parlez du droit international

 28   et vous parlez aussi du droit des opérations, je ne connais pas ce terme

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  1   mais je vois que vous avez des manuels portant sur cela. Je pense que c'est

  2   quelque chose qui figure aussi dans votre curriculum vitae.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement puisque je suis un professeur. Je

  4   suis le professeur du droit international et du droit des opérations.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà. Je vois que vous avez publié des

  6   articles par rapport au droit international et droit des opérations.

  7   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ou vous avez à plusieurs reprises

  9   utilisé ce terme et c'est une des sources que vous avez utilisée.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Le droit des opérations, c'est tout le texte

 11   de loi qui régule la planification et l'exécution des opérations militaires

 12   Dans mon rapport, le droit des opérations c'est donc une partie du droit

 13   des conflits armés, la partie qui régule les opérations. Quand on parle du

 14   manuel, c'est quelque chose qui est beaucoup plus large puisqu'on y parle

 15   des autorités nationales et juridiques qui planifient les opérations

 16   militaires.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il peut y avoir là des éléments du

 18   droit constitutionnel, administratif, et cetera.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le droit des conflits armés qui concerne

 21   le droit des opérations fait partie donc de ce corps de loi ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc maintenant je comprends mieux

 24   ce que cela veut dire.

 25   Monsieur Russo, je regarde l'heure. Peut-être serait-il mieux de prendre la

 26   pause à présent, mais est-ce qu'il y avait d'autres questions de la part

 27   d'autres conseils ?

 28   Monsieur Cayley.

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  1   M. CAYLEY : [interprétation] Non, non, nous n'avons pas de questions.

  2   Monsieur Kuzmanovic.

  3   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Non, nous non plus nous n'avons pas de

  4   questions.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Oui, c'est ce que j'ai cru

  6   comprendre.

  7   Donc, Monsieur Russo, c'est à vous donc alors que préférez-vous ? Est-ce

  8   que vous préférez commencer votre contre-interrogatoire après la pause ?

  9   M. RUSSO : [interprétation] Oui, effectivement.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre la pause

 11   et nous allons reprendre nos travaux à 12 heures 40.

 12   --- L'audience est suspendue à 12 heures 19.

 13   --- L'audience est reprise à 12 heures 44. 

 14    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Corn, Professeur, puisque vous

 15   êtes ici en tant que témoin expert, c'est M. Russo qui va vous poser ses

 16   questions. Il est ici en tant que conseil du Procureur.

 17   M. RUSSO : [aucune interprétation]

 18   Contre-interrogatoire par M. Russo : 

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 20   R.  Bonjour.

 21   Q.  Je vais tout d'abord vous poser quelques questions au sujet des

 22   informations qui se trouvent dans votre feuille d'information

 23   supplémentaire, et il s'agit de la pièce D1643. Est-ce que vous pouvez

 24   trouver cela ?

 25   Est-ce que vous pouvez me dire si l'on trouve dans ce document les

 26   informations concernant tous les contacts que vous avez pu avoir avec la

 27   Défense Gotovina ?

 28   R.  Il y a eu un échange d'e-mails assez nombreux, assez fournis concernant

Page 21201

  1   les dates, et cetera, que je sache c'est une bonne discussion, correcte,

  2   des interactions qu'il y ait pu avoir entre nous, et ceci, par rapport aux

  3   différents rapports qui ont été faits.

  4   Q.  Donc vous pouvez aisément dire qu'il n'y a pas eu de e-mails entre vous

  5   et la Défense Gotovina par rapport aux questions posées, et cetera ?

  6   R.  Oui, c'est exact. J'ai toujours su qu'on allait se rencontrer à

  7   l'avenir donc j'écrivais un e-mail en disant voilà je voudrais vous poser

  8   une telle question lors de la réunion, et c'est tout.

  9   Q.  Au début, on vous a demandé à donner votre opinion -- ou plutôt, de

 10   faire un rapport d'expert par rapport au rapport du colonel Konings ?

 11   R.  Oui, au début on m'a demandé si je serais en mesure de le faire, et si

 12   je serais éventuellement en mesure de comparaître en tant que témoin de la

 13   Défense, mais au début, il ne savait si j'allais comparaître en tant que

 14   témoin de la Défense, et nous devions parler en l'avenir.

 15   Q.  Je pense que vous en avez parlé au début du mois de décembre 2008;

 16   c'est là qu'on vous a dit que vous alliez peut-être déposer en tant que

 17   témoin de la Défense ?

 18   R.  C'est vrai qu'on n'en a pas parlé en détail. Puisque ce qui est

 19   importait à l'époque c'était le rapport.

 20   Q.  Si j'ai bien compris cette feuille d'information supplémentaire, la

 21   première fois que vous avez fourni votre opinion à la Défense Gotovina au

 22   sujet du rapport d'expert et du lieutenant-colonel Konings, c'est venu à la

 23   fin du mois de décembre 2008 lors de la réunion que vous avez eue à Tampa

 24   en Floride ?

 25   R.  Je me souviens que j'ai rencontré un des conseils à Houston dans ma

 26   maison avant d'aller à Tampa. Donc je pense que d'abord, on s'est rencontré

 27   à Houston.

 28   Q.  Bien. Quand j'examine le deuxième paragraphe de cette feuille contenant

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  1   des informations supplémentaires on peut voir qu'au début du mois de

  2   décembre vous avez rencontré les membres de l'équipe de la Défense à

  3   Houston dans votre maison pour discuter de votre rapport et de l'addendum.

  4   Puisqu'à l'époque, on vous a proposé un DVD avec un certain nombre de

  5   documents concernant l'utilisation de l'artillerie. Mais vous avez dit

  6   qu'au début dans cette phase initiale, il n'était pas nécessaire pour vous

  7   d'avoir tous ces documents. Autrement dit, quand le conseil est venu vous

  8   voir chez vous, vous n'aviez pas encore fait l'analyse du rapport Konings ?

  9   R.  Non, ce n'est pas exact. Car, moi, je fais une -- enfin, je l'ai revu,

 10   je l'ai examiné. Je leur ai dit que j'étais tout à fait prêt à en parler,

 11   et que c'était tout à fait quelque chose qui correspondait donc aux

 12   discussions que nous avons eues. Un des membres de l'équipe de la Défense

 13   est venue à Houston pour me rencontrer, pour me voir, et pour que je puisse

 14   lui expliquer ce que je considérais être les erreurs au niveau du rapport.

 15   Il importait en ce défi mais, moi, ce qui m'intéressait c'étaient vraiment

 16   les erreurs que j'ai pu apercevoir en examinant le rapport pour la première

 17   fois. Ensuite, quand j'ai communiqué le résumé de la critique de ce rapport

 18   à l'équipe, ce n'est qu'après que l'on m'a invité pour discuter davantage

 19   et pour rencontrer les autres membres de l'équipe.

 20   Q.  Est-ce que vous avez fourni des indications à la Défense Gotovina avant

 21   qu'ils ne vous donnent les documents, même s'il s'agit des remarques

 22   générales ?

 23   R.  Oui, effectivement. J'ai parcouru ce rapport et j'ai trouvé qu'il y

 24   avait des problèmes importants avec ce rapport et que j'ai voulu les

 25   examiner avec eux.

 26   Q.  Est-ce que vous avez jamais examiné les documents qui étaient sur ce

 27   DVD ?

 28   R.  Il s'agissait des documents qu'on m'a donnés de toute façon en copie

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  1   papier. Mais à l'époque, nous n'avons pas examiné les DVD.

  2   Q.  Pourquoi pensez-vous donc que ces documents se trouvaient sur les DVD ?

  3   R.  Parce que, de la façon dont j'ai compris, c'étaient les documents du

  4   procès. Ils m'ont dit qu'ils allaient m'envoyer des exemplaires papier de

  5   cela plus tard.

  6   Q.  Oui, mais en réalité, vous n'avez pas vraiment revu de documents autres

  7   que le rapport et les addendum aux rapports avant de tirer vos conclusions;

  8   est-ce exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Quand vous avez vu -- que vous avez revu le rapport du colonel Konings

 11   et l'addendum à ce rapport, il y a eu des pièces jointes au rapport et j'ai

 12   voulu vous demander si vous avez examiné tout cela.

 13   R.  Ce dont je me souviens, c'est que dans cet addendum au rapport, il y

 14   avait des hypothèses par rapport aux différentes cibles.

 15   Q.  Il y avait aussi toute une série de documents que le lieutenant-colonel

 16   avait revus, examinés, et qui ont été versés avec l'addendum; est-ce que

 17   vous vous souvenez de cette liste de documents ?

 18   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 19   Q.  Après avoir rencontré le conseil chez vous dans votre maison, vous avez

 20   eu une autre réunion à Tampa; est-ce exact ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  On parle de cette réunion dans le quatrième paragraphe, des

 23   informations supplémentaires, et vous avez dit à l'époque :

 24   "Je me souviens avoir examiné un certain nombre de documents qui

 25   auraient été utilisés par le lieutenant-colonel Konings quand il a préparé

 26   son rapport et l'addendum au rapport."

 27   Pourriez-vous dire aux Juges quels étaient ces documents ?

 28   R.  Je ne me souviens pas du titre de chaque document mais je pense que

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  1   j'ai revu les documents. Je me souviens que j'ai vu un résumé des cibles,

  2   les différents faits par rapport aux cibles, et j'ai examiné les cibles qui

  3   ont été analysées dans l'addendum. Effectivement, on m'a montré quelques

  4   photos aériennes. Ce qui était le plus important pour moi à l'époque

  5   c'était l'exposé verbal de l'opération Tempête. Nous avons utilisé des

  6   photos, des cartes, de temps en temps, le conseil me montrait un document

  7   qui corroborait certaines explications fournies.

  8   Q.  On va parler de cela, mais avant, on va parler des documents qui

  9   auraient été utilisés par le lieutenant-colonel Konings quand il a préparé

 10   l'addendum de son rapport. Est-ce qu'il y avait des documents parmi ces

 11   documents qui étaient les documents du HV ?

 12   R.  Je sais que j'ai examiné le résumé opérationnel produit par la HV.

 13   Quand je parle des informations utilisées par le colonel Konings, ce dont

 14   je me souviens c'est que je regardais les informations, je regardais les

 15   faits qui se trouvaient dans le rapport qui expliquait chaque cible et les

 16   effets. Donc est-ce que j'ai vu le résumé opérationnel produit par la HV

 17   lors de cette réunion ? Je dirais que c'est sans doute le cas, mais j'ai

 18   cru comprendre que c'est quelque chose qu'il a pris en compte.

 19   Q.  En ce qui concerne cette présentation verbale, je vais vous demander de

 20   nous donner des informations claires quant aux informations qui vous ont

 21   été fournies pendant cette opération.

 22   R.  Aussi précisément que possible, j'avais l'impression d'avoir besoin de

 23   connaître mieux la situation au niveau de l'opération avant de donner mon

 24   avis quant à l'utilisation de certains moyens dans un certain contexte. Ce

 25   qu'on a fait c'est qu'on a mis une carte sur la table, une autre sur le

 26   mur, et on a donné une explication large portant sur les objectifs de

 27   l'opération, les forces de l'ennemi, les rapports stratégiques entre

 28   l'opération Tempête et la libération ou le lever de pression sur la zone

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  1   qui appartenait aux Musulmans de Bosnie et qui avait été assiégée à

  2   l'époque. On a parlé de l'initiation de l'opération, j'ai vu les photos,

  3   j'ai vu les cartes qui identifiaient certaines cibles qui figuraient dans

  4   l'addendum. J'ai voulu voir la façon dont ces cibles étaient situées dans

  5   la ville, parce que je pensais que c'était important. On m'a expliqué

  6   quelles étaient ces installations, parfois je posais certaines questions,

  7   quelles étaient les unités, qu'est-ce que l'on produisait à cet endroit, où

  8   allait-on en passant ce pont, vers où allait cette ligne de chemin de fer.

  9   Ensuite, on a parlé du progrès de la bataille le premier jour de l'attaque,

 10   l'attaque -- l'intrusion dans les lignes -- la percée dans les lignes

 11   serbes, les actions de la première nuit, quand il fallait prendre la

 12   décision d'évacuer les civils de Knin, de raccourcir les lignes de défense.

 13   Ensuite, l'opération du deuxième jour et dispositions pour les civils

 14   serbes, les discussions par rapport aux moyens qu'avait le général Gotovina

 15   en ce qui concerne l'artillerie avant la bataille, la localité, la portée

 16   de ces moyens quand il s'agit donc de tirer avec ces moyens. On a parlé du

 17   fait qu'on n'a pas utilisé de feu indirect avant le début même de

 18   l'attaque. La discussion sur les possibilités qui existaient quand il

 19   s'agissait de fermer la route d'échappement par les forces du général

 20   Gotovina, la possibilité de tirer sur cette route, la route de sortie, le

 21   fait que cela n'allait être fait et ensuite on a parlé de la suite de

 22   l'opération à partir du moment où Knin a été pris.

 23   Q.  Vous avez une très bonne mémoire. Je vous remercie de tous ces détails.

 24   Je voudrais que ceci soit clair. J'avais l'impression que c'était une

 25   réunion va-et-vient, où on vous informait de la situation; on vous posait

 26   des questions précises, ils vous demandaient des réponses, et vous les

 27   donnez.

 28   R.  Oui.

Page 21206

  1   Q.  Vous avez mentionné des photos de documents qu'on vous a montrés. Est-

  2   ce que vous savez si ces photos -- si ces documents figurent en tant que

  3   liste de pièces à conviction ou des documents dans le paragraphe 12 ?

  4   R.  Je n'en suis pas sûr. Je ne sais pas si c'est le cas pour chaque photo

  5   qui s'y trouve. Je peux vous dire que je me souviens par rapport à la

  6   réunion qui était pour moi importante, je peux vous dire de quoi je me

  7   souviens.

  8   Il y avait l'évaluation des dégâts suite à la bataille, qui a été fournie

  9   par un observateur des Nations Unies. Je pense que cela avait de

 10   l'importance.

 11   Q.  Je vais vous arrêter là; est-ce le même document que le document dont

 12   on parle dans ma dernière question de votre addendum, à savoir la pièce P64

 13   ?

 14   R.  Permettez-vous moi de voir la dernière page de ce document.

 15   Oui, c'est bien cela. C'est cette évaluation provisoire. Je pensais qu'il

 16   était utile de voir sur une carte ou sur des photos, l'endroit où se

 17   trouvaient les cibles militaires.

 18   Q.  Est-ce qu'il s'agissait d'une seule photo aérienne ou de plusieurs ?

 19   R.  Que je sache, il y en avait plusieurs.

 20   Q.  Est-ce qu'il y avait d'autres documents qui vous ont marqué?

 21   R.  Pas que je m'en souvienne de cette réunion.

 22   Q.  Est-ce que vous avez pris un quelconque de ces documents avec vous ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Est-ce qu'on vous a envoyé un quelconque de ces documents avant que

 25   vous l'écriviez, votre rapport ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que vous pourriez me dire lesquels de ces documents vous avez

 28   reçus avant ? Je pense que, là, il faudrait que l'on procède par étape,

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  1   parce que le rapport et l'addendum ont été faits à de moments différents.

  2   Est-ce que vous avez reçu un document ?

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que M. Misetic, qui s'est vu

  4   investir de la tâche de ralentir tout le monde, maintenant transfère ses

  5   compétences au Procureur. Je suis tout à fait d'accord avec lui.

  6   M. RUSSO : [interprétation] Je vais faire attention davantage à ce que fait

  7   M. Misetic.

  8   Q.  Est-ce que vous voulez que je répète la question que je vous ai posée ?

  9   R.  Non, je l'ai très bien comprise.

 10   Comme la feuille d'information, on m'a donné un CD avant d'écrire ma

 11   critique du rapport d'expert du lieutenant-colonel Konings. A l'époque, la

 12   critique que j'ai écrite était concentrée sur les points de méthodologie.

 13   Donc je ne m'y suis pas appuyé sur ces documents pour écrire ce

 14   premier rapport, la première version. Avant d'écrire mon addendum, j'ai

 15   reçu un certain nombre de documents, et c'est quelque chose qui se trouve

 16   dans cette feuille avec des informations. Moi, je suis revenu vers l'équipe

 17   de la Défense en proposant une autre méthode, à savoir si je devais écrire

 18   cet addendum qui proposait mon point de vue par rapport à la légalité de

 19   tirer sur certaines cibles avec certains systèmes d'armes, d'armement,

 20   j'avais besoin de savoir les faits, les hypothèses qui étaient celles dont

 21   disposait le général Gotovina, et qui existent en tant que documents. Je

 22   pensais qu'il serait plus, que l'on doit agir de façon plus légitime si

 23   c'est le conseil qui me présente ces faits, ces documents, ces hypothèses,

 24   plutôt que de parcourir le compte rendu d'audience en essayant de trouver

 25   des informations, alors que je n'ai pas été présent pendant le procès.

 26   Donc je demande au conseil de la Défense de me fournir ces informations,

 27   car c'est la première, le premier pas qu'il s'agit d'entreprendre quand

 28   vous voulez évaluer la valeur des cibles; et il faut savoir quels étaient

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  1   les faits dont ils disposaient, les informations dont ils disposaient.

  2   Donc je leur ai demandé de me fournir des faits, des hypothèses, des

  3   postulats de base qui se trouvaient consigner au compte rendu d'audience et

  4   qui figuraient dans le dossier de l'affaire. Je leur ai demandé de façon

  5   très directe, s'ils étaient sûrs que là, il s'agissait des faits qui ont

  6   été présentés aux Juges de ce Tribunal. Ils m'ont dit qu'ils étaient

  7   absolument sûrs que, par rapport à la façon dont ils comprennent l'affaire,

  8   c'étaient des faits légitimes. Il y en avait qui étaient plus controversés

  9   que d'autres mais qu'ils étaient tout à fait confiants que je pouvais tout

 10   à fait, en tout connaissance de cause former mon opinion, tirer mes

 11   conclusions sur la base de ces faits, de ces hypothèses, celles qu'ils

 12   m'ont présentées, donc.

 13   Q.  Merci, Professeur. Là, vous êtes allé même plus loin que la question

 14   que je vous ai posée. Donc j'ai voulu parler de cela mais, tout d'abord,

 15   j'ai voulu savoir quels sont vraiment les documents que vous avez examinés

 16   avant d'écrire votre rapport d'expert, avant de parler de ce que vous avez

 17   fait avec l'addendum.

 18   Donc vous aviez ce DVD qui contenait des documents, et vous l'aviez fin

 19   décembre, vous n'avez pas examiné ces documents avant de faire votre

 20   critique du rapport Konings. Ensuite, on vous a demandé d'écrire votre

 21   propre rapport au sujet de certains points qui se posent, de certaines

 22   questions qui se posent.

 23   Est-ce qu'avant de le faire -- est-ce que vous avez examiné le contenu de

 24   ce DVD ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Est-ce que vous avez examiné quelques autres documents par rapport,

 27   avant d'écrire ce rapport ?

 28   R.  Ce rapport a été écrit après cette réunion à Tampa. Comme j'ai dit, je

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  1   l'ai fait après cette explication qui m'a été fournie verbalement,

  2   explication, la description de l'opération Tempête en détail. Ensuite quand

  3   je me suis assis pour commencer à écrire ou résumer le principe juridique

  4   qui régit l'utilisation du feu indirect, et de l'écrire par rapport à des

  5   faits, des conclusions assez peu précises qui se trouvent dans le rapport

  6   Konings, dans cette partie-là du rapport, il s'agissait surtout de discuter

  7   du droit compétent, des principes de droit.

  8   Q.  Merci. Pour être tout à fait clair, le premier rapport donc comme vous

  9   l'avez dit c'était un exposé du droit de conflit armé, l'utilisation de

 10   l'artillerie dans les zones résidentielles, ou habitées par la population

 11   civile, mais j'avais l'impression aussi que c'était en quelque sorte la

 12   réponse au problème identifié dans le rapport Konings; est-ce exact ?

 13   R.  Je me suis surtout concentré sur son rapport, un rapport initial. Je ne

 14   me suis pas peut-être autant occupé de l'addendum à son rapport. Autrement

 15   dit, lors de la réunion avec les conseils de la Défense à Tampa, j'ai

 16   formulé quelques critiques, et là, il s'agissait de les coucher sur papier.

 17   Q.  Est-ce qu'il y avait une raison particulière pour laquelle vous n'avez

 18   pas montré quels sont les points concrets du rapport du lieutenant-colonel

 19   Konings qui vous posaient problèmes avec lesquels vous n'étiez pas d'accord

 20   dans votre rapport, qu'une critique du rapport du colonel Konings ?

 21   R.  Non. A partir du moment où j'ai discuté à Tampa avec les conseils de la

 22   Défense, ils sont venus me voir par rapport à certains points que j'ai

 23   soulevés et m'ont demandé de m'occuper de ces points précis. Ensuite j'ai

 24   reçu la lettre et j'ai répondu en apportant quelques modifications là où

 25   j'ai trouvé que je ne me suis pas exprimé de façon suffisamment précise.

 26   Ils m'ont répondu que je pouvais modifier le rapport de la façon dont je

 27   l'ai souhaité pour intégrer donc les discussions que nous avons eues, et

 28   c'est dans ce cadre-là que je travaillais.

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  1   Q.  En pièce jointe de votre rapport d'expert, on trouve la lettre du 19

  2   mai, et on a vu aujourd'hui encore la pièce D1644; c'est la lettre du 27

  3   mars, et c'est la lettre dans laquelle on expose les questions qu'il s'agit

  4   de prendre en compte dans votre rapport initial. Est-ce que vous avez

  5   modifié ces questions, les questions qui figurent dans ce rapport ?

  6   R.  Non. Moi, j'ai reçu un coup de fil, enfin nous avons parlé donc après

  7   au téléphone après la réunion de Tampa. On a discuté des points que j'ai

  8   soulevés suite à ce que les conseils m'ont dit, et ils m'ont dit qu'il

  9   serait utile de le coucher par écrit, et j'ai proposé de le faire, de leur

 10   fournir ces informations. Quand j'ai commencé à faire cela, j'ai commencé à

 11   extrapoler par rapport à la réponse parce que je me suis dit que ceci

 12   serait utile par rapport à mon rapport que de modifier certains de ces

 13   points. Donc je suis revenu vers eux, en leur disant : écoutez, je voudrais

 14   modifier le style ou certains points que je soulève. Ils nous ont dit :

 15   écoutez, c'est votre rapport donc faites ce que vous voulez faire; changez

 16   ce que vous voulez changer.

 17   Q.  Bien. Ce que j'essaie de comprendre c'est : est-ce que la lettre du 27

 18   mars, est-ce une lettre qui a été écrite après les modifications, ou bien

 19   est-ce que vous avez modifié les questions par rapport à ce qui est écrit

 20   dans la lettre du 27 mars ?

 21   R.  Je ne sais pas à quelle date j'ai écrit le rapport exactement. Je pense

 22   qu'après avoir reçu la lettre, je leur ai dit que j'allais changer quelques

 23   points dans mon rapport.

 24   Q.  Donc on ne peut pas s'attendre à trouver deux lettres qui vous ont été

 25   envoyées et qui contiennent des questions qui vous sont posées ?

 26   R.  Pas dans mon souvenir.

 27   Q.  Si l'on se penche sur le paragraphe 6 de votre feuille de renseignement

 28   supplémentaire, vous y indiquez que vous avez remis à la Défense un projet

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  1   de rapport à peu près le 10 avril 2009, et que vous n'avez pas reçu de

  2   commentaire important au sujet de ce projet de rapport. Est-ce qu'on vous a

  3   posé des questions au sujet de ce comportait votre rapport ?

  4   R.  Non. En fait, je n'ai plus rien entendu de leur part une fois que j'ai

  5   envoyé ce projet de rapport et ma fierté d'auteur en a été un peu frustrée

  6   car j'aurais aimé savoir quelle était leur réaction. Donc après quelques

  7   semaines, je les ai contactés et j'ai dit : est-ce que mon rapport vous

  8   satisfait ? Ils m'ont répondu qu'il y avait seulement quelques petites

  9   fautes de frappe et qu'ils allaient me tenir au courant mais que pour le

 10   reste tout allait bien.

 11   Q.  Au paragraphe suivant, nous lisons, je cite :

 12   "Pendant ce laps de temps, j'ai reçu un exemplaire du compte rendu complet

 13   du témoignage pendant le procès du lieutenant-colonel Konings ainsi que de

 14   sa déclaration de témoin au titre de l'article 92 ter du Règlement,

 15   s'agissant de Marko Rajic, et le compte rendu complet de sa déposition en

 16   tant que témoin."

 17   Est-ce que vous avez reçu ces documents avant de rédiger votre rapport

 18   d'expert, ou est-ce que vous les avez reçus après la rédaction de votre

 19   rapport d'expert ?

 20   R.  Dans mon souvenir, je les ai reçus après. Je sais que je ne les ai pas

 21   pris en compte dans mon rapport initial.

 22   Q.  Est-ce que vous les avez pris en compte dans l'addendum à votre rapport

 23   rédigé plus tard ?

 24   R.  Je pense que j'ai tenu compte de certains des renseignements émanant de

 25   la déposition de Marko Rajic lorsque j'ai rédigé l'addendum. Mais j'étais à

 26   Santiago, capitale du Chili, lorsque j'ai rédigé cet addendum. Je n'étais

 27   pas aux Etats-Unis; j'étais au Chili pour des cours que j'avais à donner,

 28   et je n'avais pas les documents sur moi. Donc ce rapport est principalement

Page 21213

  1   dirigé par les faits et les hypothèses qui m'ont été communiqués par le

  2   conseil de la Défense auquel j'avais demandé de me les communiquer. Telle a

  3   donc été la première principale source d'information que j'ai eue pour

  4   évaluer chacune des cibles. Maintenant je ne saurais pas vous dire

  5   exactement quels autre renseignements j'ai obtenus au fil du temps, je ne

  6   sais absolument pas si cela a pu influer sur mon évaluation. Mais en tout

  7   cas, la chose principale de renseignement sur laquelle je me suis appuyé

  8   était ces faits et ces hypothèses communiqués par le conseil de la Défense

  9   au début.

 10   Je me souviens qu'il y avait un fait que j'ai considéré comme étant

 11   important et j'en ai appris l'existence à mon arrivée à la réunion de

 12   Tampa, si je ne m'abuse. Les autres faits je les ai appris grâce à des

 13   communications téléphoniques par "skype." Je parle des autres faits et

 14   hypothèses que j'ai considérés comme importants, et eux me disaient au

 15   cours de ces conversations s'ils estimaient qu'un tel élément était

 16   important vous pouvez ajouter cet élément comme étant un fait dans votre

 17   rapport.

 18   Q.  Manifestement, vous avez une certaine expérience des procès devant les

 19   Tribunaux, donc vous comprenez bien que la transparence est l'un des points

 20   les plus importants s'agissant de juger de la fiabilité d'un rapport

 21   d'expert. Transparence des sources sur lesquelles cet expert s'est appuyé

 22   pour rédiger ces conclusions, n'est-ce pas ?

 23   R.  Absolument.

 24   Q.  S'il y avait des problèmes de calendrier, je voudrais en fait

 25   comprendre : pourquoi, si vous avez jugé que quelque chose n'avait pas

 26   besoin d'être fait à un certain moment, vous avez ensuite jugé que cela

 27   devait être fait, et que par la suite, vous avez décidé d'indiquer

 28   précisément quels documents vous aviez pris en compte pour rédiger

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  1   certaines parties de votre addendum ?

  2   R.  Pour l'addendum de façon très précise, parce que j'ai décidé de

  3   communiquer ces renseignements que l'on trouve dans l'addendum en fonction

  4   des renseignements qui avaient déjà été présentés au Tribunal. Donc j'ai

  5   pensé que la façon la plus efficace et la plus logique était de demander au

  6   conseil de me dire ce que lui considérait comme des faits pertinents et des

  7   hypothèses pertinentes.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, excusez-moi de vous

  9   interrompre, mais le témoin dans l'une de ses réponses antérieures a parlé

 10   d'un fait précis qui a fait l'objet d'une conversation téléphonique. Est-ce

 11   que vous pourriez lui demander quel était ce fait ? Qu'est-ce qu'il a

 12   considéré comme d'une telle importance pour justifier cette conversation ?

 13   Pourriez-vous le vérifier ?

 14   M. RUSSO : [interprétation] C'était ce que je m'apprêtais à faire, Monsieur

 15   le Président, dans mes questions de suivi.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez déjà réfléchir à cette

 17   question mais M. Russo va maintenant vous poser d'autres questions,

 18   Monsieur le Président.

 19   Je pensais, Monsieur Russo, que vous étiez passé à un autre sujet;

 20   apparemment ce n'était pas encore le cas.

 21   Veuillez poursuivre.

 22   M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   Q.  Le Président de la Chambre a abordé un point qui a été discuté dans le

 24   paragraphe 9 de votre feuille de renseignements complémentaires, où vous

 25   soulignez que l'hypothèse que nous voyons en page 30-D de votre addendum

 26   est une hypothèse qui a été prise en compte dans votre rapport, mais dont

 27   vous vous souvenez comme ayant été évoqué à la réunion de Tampa.

 28   Vous avez donné -- vous avez passé un coup de fil au conseil Gotovina pour

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  1   vous rafraîchir la mémoire ou bien pour déterminer auprès de ce conseil si

  2   c'était un fait que vous pourriez utiliser dans votre analyse; c'est bien

  3   ça ?

  4   R.  Absolument.

  5   Q.  C'est là que je commence à me préoccuper un peu parce que manifestement

  6   si vous vous étiez limité dans votre addendum aux faits et appréciations

  7   qui vous avaient été proposés dans la lettre du 19 mai, vous n'auriez pas

  8   eu besoin d'appeler le conseil pour obtenir de lui des faits

  9   supplémentaires, des élémentaires. Donc il est clair au moins pour moi, et

 10   dites-moi si je me trompe que vous vous êtes également appuyé sur des

 11   éléments qui vous ont été présentés verbalement à la fin du mois de

 12   décembre pour rédiger votre addendum; c'est bien cela ?

 13   R.  Je ne pense pas que j'aurais pu écrire cet addendum sans avoir eu une

 14   conception générale de l'opération dans mon esprit, donc je vous réponds

 15   oui. La réponse à votre question est oui. Je me suis appuyé sur l'ensemble

 16   de l'opération ce que nous pourrions appeler en termes militaires, le

 17   concept de l'opération, mais il y avait un fait bien précis qui concernait

 18   le processus de prise de décision du général, et avant que j'ai été

 19   autorisé à agir sur mon opinion, j'ai pris la décision que j'avais besoin

 20   de valider tout cela pour en vérifier la cohérence en comparant cela à

 21   d'autres faits et d'autres hypothèses qui étaient consignés noir sur blanc

 22   dans les comptes rendus d'audience. C'est la raison pour laquelle j'ai agi

 23   de cette façon.

 24   Q.  Mais sachant qu'il y avait des préoccupations par rapport à votre

 25   rapport, pourquoi est-ce que vous n'avez pas insisté pour que toute la

 26   discussion que vous aviez au sujet des renseignements qui vous étaient

 27   communiqués, des documents qui vous étaient soumis -- pourquoi est-ce que

 28   vous n'avez pas insisté pour que ceci soit mémorisé comme étant soit des

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  1   faits, soit des hypothèses que vous prendriez en compte d'une façon ou

  2   d'une autre dans votre addendum ?

  3   R.  Ce que je veux dire c'est que je ne sais pas si j'ai réfléchi à cette

  4   question. Je sais que je voulais le faire, ce que je tenais à faire c'était

  5   veillé à rendre un avis qui respectait les normes de la critique de la

  6   prospective critique. Je ne voulais pas me pencher sur ce qui s'était

  7   passé, et puis ensuite donner mon avis rétrospectivement et dire parce que

  8   telle et telle chose s'est passée, elle est illégale. Parce que, comme je

  9   l'ai dit dans la première partie de mon rapport, je pense que ce n'est pas

 10   une bonne façon d'appliquer les normes juridiques qui régissent les

 11   opérations de combat dès lors qu'elles se transforment peu à peu en

 12   responsabilité criminelle. Par conséquent, j'ai estimé qu'il était tout à

 13   fait capital pour moi de rendre mon avis en me fondant sur des faits et des

 14   hypothèses qui étaient connus du général Gotovina et que l'on peut trouver

 15   noir sur blanc dans les procès-verbaux du procès.

 16   Donc, très sincèrement, je n'étais pas au courant des renseignements qu'il

 17   pouvait me donner à l'époque. Je ne pense pas que ceci est pertinent dans

 18   ma critique du jugement qu'il a fait intervenir sur le champ de bataille à

 19   l'époque et des décisions qu'il a prises. Je me contente d'appliquer les

 20   normes et objectifs du droit en évaluant la situation de l'époque et les

 21   décisions qui s'en sont suivies.

 22   Q.  Professeur, vous avez dit, je cite :

 23   "Je ne voulais pas me pencher sur ce qui s'était passé, puis dire

 24   rétrospectivement qu'à mon avis parce que telle et telle s'était passée,

 25   elle était illégale."

 26   Page 85, lignes 9 à 11 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui.

 27   Ceci, Professeur, me semble une limitation de l'avis que vous avez déjà

 28   donné, et je voudrais vérifier la chose auprès de vous. D'abord vous

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  1   conviendrez, n'est-ce pas, qu'il y a une différence entre ce que quelqu'un

  2   vous dit avoir su à l'époque et ce que d'autres personnes peuvent

  3   déterminer sur la base des éléments de preuve disponibles pour dire que

  4   telle et telle situation était effectivement réelle à l'époque, n'est-ce

  5   pas ? Vous êtes d'accord là-dessus.

  6   R.  Il y a une différence entre des éléments de preuve directs et

  7   indirects. Si c'est un fait, alors il y a possibilité qu'il s'agisse d'un

  8   élément de preuve indirect. Je comprends bien cela.

  9   Q.  Mais au moment de rédiger votre addendum, suis-je en droit de penser

 10   que vous ne vous intéressiez pas à entendre des témoignages ou à lire des

 11   éléments de preuve relatifs à ce qui s'était passé pour déterminer que ce

 12   qui s'était effectivement passé constituait une violation des lois du

 13   conflit armé; est-ce que j'ai raison ?

 14   R.  Non. Je pense que ceci va trop loin. Vous examinez les effets parce

 15   qu'ils constituent un élément de preuve indirect d'où vous pouvez tirer

 16   certaines conclusions. Mais ce à quoi je m'oppose, c'est à me pencher

 17   uniquement sur les effets d'une situation pour ensuite considérer que les

 18   faits à l'origine de ces effets étaient indéfendables à l'époque, où

 19   l'accusé a pris sa décision, et puis en conclure ensuite que la décision en

 20   question était erronée.

 21   Q.  Je vais prendre les choses point par point.

 22   D'abord, si vous vous penchez sur ce qui s'est passé, cela peut se faire

 23   sur la base d'éléments de preuve dans lesquels le général Gotovina prétend

 24   avoir été au courant de certaines choses à l'époque mais également

 25   d'éléments de preuve dans lesquels vous trouverez ce qu'il aurait dû savoir

 26   à l'époque, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Les faits qui étaient portés à sa connaissance à l'époque où il a

 28   pris sa décision.

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  1   Q.  D'accord. Donc ce qui me préoccupe un peu c'est que vous avez dit que

  2   vous vouliez utiliser une autre méthode, en demandant à la Défense de vous

  3   communiquer uniquement les faits et hypothèses au sujet desquels le général

  4   Gotovina affirmait qu'il s'était appuyé sur ces faits et hypothèses; est-ce

  5   que vous conviendriez avec moi qu'en fait vous fermiez les yeux sur des

  6   éléments de preuve qui auraient pu vous démontrer ce qu'il avait raté, ce

  7   qu'il n'avait pas pris en compte et qu'il aurait dû prendre en compte à

  8   l'époque ?

  9   R.  Vous arrivez à la limite entre ce qui est un fait et ce qui est une

 10   appréciation. Les faits sont des faits établis par le dossier de l'affaire

 11   ou par les documents relatifs à la mission, et les hypothèses sont des

 12   hypothèses qui sont celles du commandant. Les deux sont pertinents dans le

 13   processus de prise des décisions.

 14   Je suis 100 % d'accord avec vous pour dire qu'on peut se trouver face à une

 15   situation où il y a un fait objectif qui est connu de l'accusé et dont il

 16   n'a pas tenu compte ou pour lequel il a failli à son devoir d'être informé

 17   de ce qui peut être pertinent pour apprécier l'étendue de sa responsabilité

 18   par rapport au droit.

 19   Mais les faits certains faits énumérés dans la réponse à la requête étaient

 20   des faits liés à des effets bien précis. Donc je ne dis pas que les effets

 21   ne sont pas pertinents. Vous constatez que des tirs indirects ont eu lieu,

 22   n'est-ce pas, que des cibles ont été visés par ces tirs ? Si vous modifiez

 23   ce fait, si vous me dites que ces cibles n'ont jamais subi les tirs, et que

 24   les seuls éléments soumis aux tirs étaient les hôpitaux, les écoles et des

 25   bâtiments civils, alors ceci influe grandement sur votre avis. Donc il y a

 26   les faits, il y a les hypothèses et je suppose que la Défense n'est pas la

 27   seule à pouvoir me dire que le général a raté certains faits. Il y avait

 28   des faits généraux ou liés à la situation et des hypothèses faites par le

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  1   commandant.

  2   Q.  Je comprends tout cela, Professeur. Ce que j'essaie de vous dire, c'est

  3   que l'analyse ou la méthode que vous avez considérée bon d'employer n'est

  4   pas nécessairement indépendante parce que vous refusez de prendre en compte

  5   les éléments de preuve en tant que tel, vous vous êtes privé de la

  6   possibilité de découvrir des éléments de preuve qui vous auraient permis de

  7   penser que le général Gotovina agissait en pleine bonne foi ou qu'une

  8   hypothèse faite par lui ne concordait pas avec la réalité de la situation

  9   ou avec la réalité de sa tâche.

 10   R.  Je pense que c'est toujours le cas si un fait ou une hypothèse

 11   importante n'est pas pris en compte par moi, alors que je pouvais en avoir

 12   connaissance à l'époque des faits, ceci est une bonne occasion pour la

 13   partie adverse de mettre en cause l'avis exprimé par moi. De m'exposer ce

 14   fait ou cette hypothèse en me demandant si après en avoir pris

 15   connaissance, je modifie mon avis, donc je concéderais tout à fait que,

 16   pour que mon avis soit absolument parfait, il aurait été idéal d'être assis

 17   dans un prétoire et d'écouter l'intégralité des audiences. Cela aurait été

 18   plus idéal encore d'être assis à côté du commandant, à savoir du général

 19   Gotovina au poste de commandement en Croatie et de suivre le processus de

 20   décision du général pas à pas.

 21   Il n'y a aucune discussion possible quant au fait que le degré de

 22   renseignements dont on dispose est fondamental pour ce faire un avis, pour

 23   fonder son avis, et c'est la raison pour laquelle j'ai insisté auprès du

 24   conseil de la Défense pour qu'ils ne me donnent pas des éléments idéaux ou

 25   exprimant la perfection d'un espoir, mais qu'ils me communiquent bien des

 26   conclusions factuelles prises en compte pendant les audiences du procès,

 27   donc les faits et les hypothèses qui ont été établis par le dossier du

 28   procès avec un certain degré de fiabilité. Je sais que ce n'est pas une

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  1   preuve absolue, mais l'Accusation, bien sûr, peut les contester ces faits

  2   et hypothèses, mais ce sont ces faits et hypothèses sur lesquels j'ai fondé

  3   mon avis.

  4   Q.  Je vous remercie pour vos explications, Professeur. Je comprends tout à

  5   fait que vous êtes originaire d'un système judiciaire qui fonctionnent sur

  6   un mode contradictoire, comme la plupart d'entre nous d'ailleurs dans ce

  7   prétoire.

  8   J'aimerais maintenant vous ramener à une série de questions antérieures que

  9   je n'ai fait qu'aborder rapidement aujourd'hui avant que nous passions à

 10   autre chose.

 11   Votre curriculum vitae, la pièce D1641, en page 5, je vois que sous le

 12   titre : "Sécurité internationale et nationale," on voit en deuxième

 13   position de la liste, un poste occupé par vous, celui de chef de la

 14   division du Droit international et des Opérations dans le bureau de

 15   l'avocat général; et au troisième tiret, on voit que vous avez apporté un

 16   avis d'expert à tous les avocats militaires activement impliqués dans des

 17   opérations pendant un peu partout dans les Balkans.

 18   Pouvez-vous nous en dire un peu plus quant à votre participation dans les

 19   Balkans à l'époque ?

 20   R.  Les avocats militaires que je conseillais étaient des avocats

 21   militaires américains ayant participé à des opérations en Bosnie et au

 22   Kosovo. La mission IFOR de Bosnie, composante américaine de cette mission,

 23   et la mission SFOR au Kosovo, composante américaine de la deuxième mission.

 24   Je n'ai pas été conseiller des commandants de l'OTAN, donc je n'ai apporté

 25   aucun conseil et aucune aide au QG de l'IFOR ou au QG de la SFOR. Mais dans

 26   ces deux missions, il y a eu un contingent américain important, et ces

 27   contingents étaient fortement présents et comptaient dans leur rang un

 28   grand nombre d'avocats américains. Donc chaque fois qu'un problème

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  1   juridique se posait du point de vue de la planification et de la conduite

  2   d'une opération militaire et qu'une assistance était jugé utile, telle

  3   était la fonction du bureau dont je faisais partie, à savoir apporter un

  4   certain niveau de conseils et d'assistance.

  5   Je peux vous dire avec une certaine certitude que c'était même un centre

  6   d'intérêt très important pour moi. Les problèmes liés aux opérations de

  7   détention au Kosovo, 90 % de notre action portait sur des environs

  8   relativement stables, et pour une raison ou pour une autre, le responsable

  9   militaire juridique américain en Bosnie était toujours quelqu'un qui avait

 10   un poste plus important que le responsable équivalent au Kosovo, donc il y

 11   avait un colonel en Bosnie et en général un commandant au Kosovo, et les

 12   compétences du responsable de Bosnie rendait notre participation moins

 13   importante -- rendait moins crucial la nécessité de notre participation.

 14   Puis l'autre domaine un peu difficile c'était la loi fiscale, à savoir ce

 15   qu'on est autorisé à dépenser pour mener à bien une opération. Ce sont les

 16   deux centres d'intérêt principaux dans lesquels j'ai travaillé.

 17   Q.  Je vous remercie, Professeur.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Professeur Corn, étant donné le temps

 19   qu'il a fallu attendre à l'instant vous pouvez en tirer la con que vous

 20   avez encore nécessité de ralentir un peu votre débit.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   M. RUSSO : [interprétation]

 23   Q.  Professeur, au paragraphe 12 de votre feuille de renseignement

 24   complémentaire, vous énumérez des documents qui vous ont été remis par la

 25   Défense Gotovina et vous indiquez que ceci s'est fait après que vous ayez

 26   rédigé votre rapport.

 27   J'ai un peu de mal à comprendre si vous avez, par conséquent, reçu ces

 28   documents après avoir rédigé l'addendum, ou si vous les avez reçus après

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  1   avoir rédigé l'intégralité de votre rapport.

  2   R.  Je sais que je n'ai tenu compte d'aucun de ces documents avant de

  3   rédiger mon rapport initial. Je sais que j'ai reçu un paquet de "Federal

  4   Express," avec un certain nombre de documents dans ce paquet. Je pense que

  5   je les ai reçus avant de rédiger l'addendum mais je ne peux pas vous le

  6   dire avec une totale certitude. Je sais que, lorsque j'ai rédigé l'addendum

  7   j'étais au Chili et que je n'ai pas emporté ces documents avec moi.

  8   Q.  Sur la base de votre réponse, puis-je considérer que vous n'avez pas

  9   tenu compte de façon très précise de tous ces documents au moment où vous

 10   avez rédigé votre addendum ?

 11   R.  Je pense que,  dans ces documents, il y avait des photographies, des

 12   copies photographies que j'avais déjà vues à la réunion de Tampa, donc si

 13   ces copies avaient le moindre rapport avec le concept général, elles

 14   m'auraient sans doute été faxées. Mais d'un point de vue général, ce que

 15   vous dites est exact.

 16   Q.  En dehors de la liste que l'on trouve au paragraphe 12 et de l'exposé

 17   oral qui vous a été fait à la fin du mois de décembre 2008, y a-t-il eu

 18   d'autres documents ou d'autres éléments d'information ? J'ajouterais

 19   également dans les éléments que vous aviez à votre disposition les

 20   témoignages de Konings et de Rajcic; donc en dehors de cela, est-ce qu'on

 21   vous a montré ou dit autre chose sur le fond de la présente affaire ?

 22   R.  Je ne veux pas immédiatement établir un lien entre un numéro et un

 23   document. Ce que je peux vous dire c'est que j'ai tenu compte d'autres

 24   éléments d'information avant de venir ici, à savoir d'un procès-verbal de

 25   réunion entre le président de l'état-major militaire et les membres de cet

 26   état-major, y compris le général; donc ça j'en ai tenu compte. Puis il y a

 27   eu aussi des directives relatives au aspect psychologique des opérations

 28   qui pouvaient avoir un effet sur le comportement par rapport à la

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  1   population civile. La déposition de Rajcic, je l'ai examinée de façon très

  2   exhaustive, et comme je l'ai dit, la disposition des objectifs militaires à

  3   Knin, du point de vue de la possibilité de les voir, est quelque chose qui

  4   était très important à mon avis. Donc je vous dis de façon très franche

  5   quels sont les principaux éléments d'information dont j'ai tenu compte

  6   comme pouvant avoir une influence sur mon processus de réflexion.

  7   Q.  Au paragraphe 13 --

  8   M. RUSSO : [interprétation] En fait, Monsieur le Président, il nous faudra

  9   plus que quelques minutes pour ces questions que je m'apprête à aborder,

 10   donc je crois que nous pouvons disposer encore d'un peu de temps.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons encore que peu de temps,

 12   par conséquent, faute de suffisamment de temps aujourd'hui; nous

 13   reprendrons demain matin, demain, en tout cas.

 14   Y a-t-il des questions de procédure que l'une ou l'autre partie

 15   souhaiterait évoquer en cet instant ? Cela nous permettra, lorsque vous les

 16   aurez définies, de voir si nous avons encore besoin de la présence de M.

 17   Corn dans la salle.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Nous n'avons pas besoin que le Pr Corn soit

 19   encore dans la salle pour les questions de procédure que je m'apprête à

 20   aborder.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Professeur Corn, nous allons

 22   suspendre votre déposition pour aujourd'hui, et la reprendre demain à 9

 23   heures, dans la même salle d'audience. Mais avant de vous autoriser à

 24   quitter la salle, je tiens à vous rappeler la consigne qui vous interdit de

 25   parler avec qui que ce soit de ce que vous pouvez dire au sujet des crimes

 26   de guerre dans votre déposition déjà faite ou à venir.

 27   Madame l'Huissière, veuillez escorter le témoin hors de la salle.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

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  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, en ce moment, le

  4   général Gotovina voudrait soumettre à la Chambre une requête de suppression

  5   du rapport d'expert de M. Pokaz.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est fait droit à la requête demandant

  8   la suppression du rapport de M. Pokaz. Donc M. Pokaz ne fait plus partie du

  9   dossier de la présente affaire sur le plan de la procédure.

 10   D'autres questions ?

 11   M. KEHOE : [interprétation] Une encore qui concerne le problème de

 12   l'application de l'article 68 évoqué ce matin. La seule raison pour

 13   laquelle je soulève ce point, c'est que je ne sais pas exactement si nous

 14   aurons à demander le versement au dossier automatique d'un certain nombre

 15   de documents par la suite, ou si vous demanderez à entendre des témoins en

 16   chair et en os, ou si ce que Me Misetic va vous dire la semaine prochaine

 17   aura une influence sur tout cela, je ne sais pas. Donc j'ai la pièce qui

 18   m'a été envoyée la semaine dernière par Me Misetic, présentée dans

 19   l'affaire Popovic, qui apparemment était à la disposition du bureau du

 20   Procureur depuis pas mal de temps. Mais compte tenu que nous arrivons à la

 21   fin de la présentation des moyens de la Défense du général Gotovina, nous

 22   aimerions savoir quelles sont les décisions correctes à prendre pour

 23   englober ces éléments dans le dossier de l'affaire.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le compte rendu, il y a peut-être

 25   un problème de communication qui s'est posé, qui, si j'ai bien compris,

 26   émane d'un ordre de préparation d'une action opérationnelle, émise par M.

 27   Mladic dès les premiers jours du mois d'août.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Le 3 août 1995.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 3 août, et la question c'est -- la

  2   question se pose en raison du fait que la Défense estime que cet élément

  3   est un élément à décharge, qui aurait dû être communiqué pendant l'affaire

  4   Popovic.

  5   Alors voyons si nous nous comprenions bien. Maître Kehoe, le sujet de notre

  6   discussion actuelle est d'ores et déjà consigné au compte rendu d'audience.

  7   Vous considérez que, sur le plan de la procédure, il importe de reparler de

  8   tout cela et vous aimeriez que l'on vous entende le plus tôt possible la

  9   semaine prochaine. Il est bien consigné au compte rendu qu'il s'agit d'un

 10   problème de communication.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Autre problème de

 12   communication lié à un ordre d'attaque du 3, dans lequel le général Mladic

 13   ordonne une attaque à partir de 6 heures du matin, le 5. Il s'agit de

 14   l'opération qui porte le nom de Vaganj 95, et que nous allons voir

 15   mentionner dans d'autres documents et même dans plusieurs documents. Ceci

 16   concerne non seulement l'offensive dont nous discutons ici, planifiée par

 17   la VRS et le général Mladic qui devait démarrer le 5, mais il y a aussi des

 18   documents qui ont été présentés dans l'affaire Popovic et qui détaillent le

 19   redéploiement des unités à partir du Corps de la Drina en vue de combattre

 20   l'armée de Croatie dès le 9 août, dans la région.

 21   Donc il s'agit de toute une série de documents. Nous aurions eu tendance à

 22   demander le versement automatique, mais il y a des mesures appropriées à

 23   prendre dans ce cas-là.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je comprends que vous avez besoin

 25   de réfléchir plus avant à la question, d'examiner le contexte des autres

 26   documents et que vous reviendrez devant la Chambre pour dire aux Juges de

 27   quelle façon vous aimeriez procéder, par rapport à ces éléments.

 28   C'est consigné au compte rendu.

Page 21227

  1   Puisque c'est le cas, Monsieur Russo, je vous inviterai à répondre à ce qui

  2   vient d'être dit par la Défense. Bien entendu, s'il y a communication utile

  3   entre les parties sur cette question, elles sont encouragées à saisir

  4   l'occasion qui leur est faite.

  5   Nous suspendons pour aujourd'hui, nous reprendrons demain, 8 septembre à 9

  6   heures 00, salle d'audience numéro I.

  7   --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mardi 8 septembre

  8   2009, à 9 heures 00.

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