Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 7 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, je vous prie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à

  9   toutes les personnes du prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina

 11   et consorts.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 13   Bonjour à vous, Monsieur Dodig.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions,

 16   j'aimerais vous rappeler que vous êtes toujours tenu de respecter la

 17   déclaration solennelle que vous avez prononcée hier, en vertu de laquelle

 18   vous avez annoncé que vous diriez la vérité, toute la vérité et rien que la

 19   vérité.

 20   Monsieur Carrier, êtes-vous prêt à reprendre votre contre-interrogatoire ou

 21   à commencer votre contre-interrogatoire plutôt ?

 22   LE TÉMOIN : GORAN DODIG [Reprise]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   M. CARRIER : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.  Je

 25   pense que nous avons un léger problème ce matin, avec la liste des pièces à

 26   conviction. J'aimerais juste obtenir une confirmation de la part de mes

 27   confrères, qu'ils l'ont bien reçue. Et puis, parce que je pense qu'il y a

 28   certains documents qui n'ont pas encore été communiqués. Il y a un

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  1   document, et j'aimerais en informer mes confrères et consoeurs pour lequel

  2   la traduction est en cours. Elle est terminée en fait, mais il y a juste eu

  3   un léger retard à l'inclusion de ce document sur la liste.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie, à moins que les

  5   équipes de la Défense ne souhaitent répondre. Visiblement, cela n'est pas

  6   le cas.

  7   Donc poursuivez, Monsieur Carrier.

  8   M. CARRIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

  9   Président.

 10   Contre-interrogatoire par M. Carrier : 

 11   Q.  [interprétation] Monsieur Dodig, vous avez dit qu'entre le mois

 12   d'octobre 1993 jusqu'en juin 1994, vous étiez l'adjoint du ministre de la

 13   Défense, et vous ne l'avez pas mentionné cela dans votre déclaration. Ce

 14   que j'aimerais savoir : est-ce qu'il s'agissait d'un poste d'adjoint du

 15   ministre ? C'est cela, vous étiez adjoint du ministre, chef de la sécurité

 16   du service d'Information; est-ce que vous pourriez le confirmer cela ?

 17   R.  Oui, ce que vous venez de dire est exact. Mon CV, à savoir celui qui a

 18   été rédigé ici n'a pas été écrit par moi, il a été compilé à partir des

 19   documents mis à la disposition de la Défense. Si j'avais su que j'étais

 20   censé rédiger mon propre curriculum vitae, je l'aurais fait. Mais il est

 21   exact, ceci étant dit que je faisais partie du ministère de la Défense et

 22   que j'étais le ministre adjoint chargé de la sécurité.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, j'aimerais vous dire,

 24   Monsieur, que nous n'avons pas tout le temps du monde.

 25   Vous avez répondu à la question lorsque vous avez formulé votre première

 26   phrase. Ensuite, précisez pour dire que votre curriculum vitae aurait pu

 27   être créé ou rédigé d'une autre façon, d'abord, ce n'est pas quelque chose

 28   pour lequel M. Carrier avait montré beaucoup d'intérêt pour le moment, donc

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  1   j'aimerais vous demander de vous concentrer sur les questions qu'il vous

  2   pose. Car, M. Carrier essayait de savoir quelles étaient exactement vos

  3   fonctions en tant que ministre adjoint.

  4   Poursuivez, Monsieur Carrier, je vous en prie.

  5   M. CARRIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  6   Q.  Monsieur Dodig, pour enchaîner à la suite de cette première question,

  7   parce que je suis le premier à vous poser des questions de contre-

  8   interrogatoire ici, votre CV a été versé au dossier. Donc ce n'est pas la

  9   peine de répéter des choses superflues. Je vous demanderais comme l'a dit

 10   le Président, de vous concentrer sur ce que je vous demande.

 11   Mais est-il exact que même avant le début du procès, avant que les éléments

 12   de preuve n'aient commencé à être apportés en l'espèce, vous aviez exprimé

 13   publiquement des opinions négatives à propos de ce Tribunal. Vous avez, par

 14   exemple, déclaré que les actes d'accusation de ce Tribunal, notamment

 15   l'acte d'accusation en l'espèce sont motivés ou ont des connotations

 16   politiques et des motivations politiques ?

 17   R.  Ecoutez, moi, je suis une personnalité publique. Très souvent dans le

 18   contexte de mes activités publiques, j'exprime justement certains points de

 19   vue à propos de certaines questions. Je suppose que c'est dans ce contexte

 20   que je me suis exprimé. Je ne me suis pas exprimé à propos du travail du

 21   Tribunal, mais à propos des motifs ou motivations telles que je les

 22   perçois, en tout cas.

 23   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que nous

 24   pourrions avoir le document de la liste 65 ter, 7428 ? J'aimerais demander

 25   l'affichage de ce document à l'écran.

 26   Q.  Monsieur Dodig, ce qui va être affiché sur votre écran est un article

 27   qui a été publié dans un article, un article dans le journal Slobodna

 28   Dalmacija. Cet article a été publié le 30 juin 2001.

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  1   Alors je m'excuse.

  2   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Président, visiblement ce

  3   document n'a pas encore communiqué. C'est ce dont je vous parlais au début,

  4   donc il va falloir que nous attendions peut-être. Je pensais qu'ils avaient

  5   fini par être insérés dans le prétoire.

  6   Monsieur le Président, mon assistant juridique vient de m'informer qu'il

  7   essaie encore et toujours de saisir le document dans le prétoire.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, passez à autre chose pour le

  9   moment, jusqu'à ce que ce document soit véritablement communiqué dans le

 10   système et apparaisse dans le système.

 11   M. CARRIER : [interprétation] C'est ce que je vais faire alors.

 12   Q.  Monsieur Dodig, je m'excuse, car je vais vous demander donc de passer

 13   tout à fait à autre chose.

 14   Mais vous avez dit dans votre déclaration que vous avez entendu parler de

 15   l'opération Tempête, en même temps que les autres ressortissants croates ou

 16   en Croatie. Je suppose que ce que vous entendez par cela, c'est que vous en

 17   avez entendu parler au moment où cette opération Tempête a commencé, à

 18   savoir le 4 août 1995, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, c'est tout à fait cela.

 20   Q.  Peut-on dire donc Monsieur Dodig, que vous n'avez pas été

 21   particulièrement consulté à ce sujet, on ne vous a pas demandé votre

 22   contribution non plus, et j'entends par cela les membres du bureau du

 23   président, les membres du ministère de la Défense ou d'ailleurs les membres

 24   du ministère de l'Intérieur. On ne vous a pas demandé votre avis à propos

 25   de la planification et de l'exécution de l'opération Tempête ?

 26   R.  Non, non, personne n'a pris contact avec moi. Personne d'ailleurs ne

 27   m'a non plus informé.

 28   Q.  Monsieur Dodig, dans le tout dernier paragraphe de votre déclaration,

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  1   vous expliquez comment vous comprenez les allégations de l'Accusation, à

  2   savoir qu'il y avait une politique qui visait à encourager et à fermer les

  3   yeux sur les crimes et les discriminations à l'égard des Serbes, et ce,

  4   dans le sillage de l'opération Tempête; et vous indiquez en fait que cela

  5   avait été fait pour engendrer un climat de terreur pour chasser les Serbes

  6   de la zone, et dans ce paragraphe, vous indiquez que ces allégations sont

  7   fausses.

  8   Vous expliquez également que vous auriez probablement été informé, à ce

  9   moment-là, si ce type d'allégation avait été véridique. Donc j'aimerais

 10   vous poser une question. Etant donné que vous n'avez même pas été consulté

 11   à propos de l'opération Tempête, pourquoi estimez-vous que vous auriez été

 12   probablement informé s'il y avait eu une conspiration criminelle à

 13   l'encontre des Serbes de la Krajina ?

 14   R.  Accordez-moi une petite minute, je vous prie, pour voir ce dont il

 15   s'agit.

 16   Oui, oui, oui, effectivement dans cette dernière phrase, j'ai écrit que si

 17   la position politique du gouvernement croate avait été ce que vous avancez,

 18   j'en aurai été informé. Ce que j'entendais, c'est que je l'aurais su, si ce

 19   genre de tendance s'était dégagé pendant la guerre, je l'aurais su. Je ne

 20   voulais pas indiquer que j'en aurais été informé. Mais je savais quels

 21   étaient les différents points de vue politiques, l'attitude générale vis-à-

 22   vis des Serbes en Croatie, vis-à-vis de leur direction. Je dois dire que je

 23   n'ai jamais rien entendu de la sorte de la part de personne. Je n'ai même

 24   pas, il n'y a même pas eu ne serait-ce qu'un sous-entendu de la part des

 25   officiels suivant lesquels ils auraient eu ce genre d'attitude vis-à-vis de

 26   la communauté serbe en Croatie. Cela est -- que cela aurait corroboré en

 27   quelque sorte la théorie suivant laquelle il devait être expulsé de la

 28   Croatie.

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  1   Q.  Monsieur Dodig, alors, pour enchaîner à la suite de ça, vous avez

  2   mentionné le fait que vous avez eu de nombreuses réunions et de nombreuses

  3   conversations avec M. Pasic qui était le représentant de l'autorité civile

  4   du gouvernement croate pour Knin. Vous indiquez également qu'à votre avis,

  5   il a été -- il a fait l'objet de terreurs politiques et psychologiques, et

  6   ce, de la part des Serbes. Apparemment, il s'agissait de ceux qui ne

  7   voulaient pas entendre parler ou qui ne voulaient même pas accepter ne

  8   serait-ce qu'un minimum de coopération avec les Croates et qui avaient

  9   déclaré qu'il s'agissait d'un traître parce qu'il parlait aux Croates.

 10   Alors, est-ce que -- alors, dans votre déclaration, donc, vous faites cette

 11   évaluation et j'aimerais mettre cela en parallèle avec l'évaluation qui a

 12   été faite des véritables relations de M. Pasic avec les Croates et vous

 13   remarquez, en fait, ensuite, qu'il a été accepté par toutes les autorités

 14   et par tous les -- et par les Croates de la zone. Donc est-ce que c'est

 15   ainsi que je peux résumer votre point de vue ?

 16   R.  Oui, je le pense parce que cette communauté où cela s'est passé est une

 17   communauté assez petite, donc je connais certaines -- j'en connais

 18   certaines personnes. Je connais des Croates de la ville où résidait M.

 19   Pasic et ils avaient une très bonne opinion de lui, à cette époque-là, et

 20   puis par la suite également. Je dirais que ce n'est pas un point de vue ou

 21   un jugement personnel. C'est tout simplement le fait que c'est ce que je

 22   pense de M. Pasic en tant qu'homme qui s'est trouvé dans une situation

 23   très, très délicate.

 24   Q.  Mais lorsque vous dites qu'il avait été accepté par toutes les

 25   autorités, est-ce que vous faites référence à toutes les autorités croates

 26   ?

 27   R.  Non, j'entends par cela les autorités avec lesquelles j'avais pu avoir

 28   des contacts, à ce moment-là. Moi, je ne pouvais absolument pas parler de

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  1   M. Pasic avec les représentants supérieurs de l'autorité croate, mais je

  2   parlais aux maires de la ville, aux représentants municipaux et ils étaient

  3   tous d'accord pour dire que M. Pasic était un -- était quelqu'un de très

  4   bien, quelqu'un de bonne moralité.

  5   Q.  Donc, en dépit de ce que vous dites, en fait, vous ne savez pas

  6   véritablement quel était le comportement ou l'attitude de la direction vis-

  7   à-vis de M. Pasic, n'est-ce pas ?

  8   R.  Non, non, je ne le savais pas.

  9   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que nous

 10   pourrions avoir la pièce P463 à l'écran, je vous prie ?

 11   Q.  Monsieur Dodig, il s'agit d'une -- de la transcription d'une réunion

 12   qui a eu lieu le 22 août 1995 et vous voyez qu'il y a le président Tudjman

 13   et le Dr Jure Radic; cela s'est passé au palais présidentiel.

 14   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que vous

 15   pourriez présenter la page numéro 5 de la version anglaise et la page 7 de

 16   la version B/C/S ? Est-ce que vous pourriez afficher le bas de la page de

 17   la version anglaise ?

 18   Q.  Alors vous voyez donc qu'il y a ce dialogue.

 19   Il s'agit du président Tudjman qui s'exprime et voilà ce qu'il dit, le

 20   président Tudjman :

 21   "Attendez, attendez un peu, si j'avais -- si je n'avais pas envoyé Cermak à

 22   Knin, cela aurait été épouvantable."

 23   Le Dr Radic répond :

 24   "Oui, je suis d'accord. Peut-être que je n'ai pas utilisé le bon exemple,

 25   précisément parce que nous utilisons, tous, cet exemple, mais les autorités

 26   militaires ne peuvent pas gérer les affaires civiles sur le terrain…"

 27   M. CARRIER : [interprétation] J'aimerais, en fait, que nous affichions la

 28   page suivante de la version en B/C/S.

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  1   Q.  "…les autorités militaires ne peuvent pas décider des personnes pour

  2   savoir qui ira dans quelle maison."

  3   Le président dit :

  4   "Non, elles ne peuvent pas, mais elles peuvent préserver l'ordre pendant

  5   ces périodes de transition."

  6   M. CARRIER : [interprétation] Alors, page suivante.

  7   Q.  Le Dr Radic répond :

  8   "Je suis d'accord avec vous, mais où est le problème ? Le problème, en

  9   fait, se situe -- ou le problème, il vient du fait qui -- on l'a quand

 10   quelqu'un qui a été élu et qui est l'autorité civile est mauvais et c'est

 11   en général, ce qui se passe -- enfin, peut-être pas partout. Il y en a un

 12   qui est bon à Kostajnica, mais celui de Knin n'est pas bon. Je ne sais pas

 13   d'où il vient, c'est un Serbe."

 14   Le président répond à cela, c'est une question qu'il pose :

 15   "C'est un Serbe ?"

 16   Le Dr Radic répond à cela :

 17   "Oui, oui, on m'a dit, hier, qu'il était serbe. C'est un bon à rien."

 18   Le président Tudjman répond :

 19   "Bien, remplacez-le."

 20   Le Dr Radic poursuit :

 21   "Nous en avons parlé de cela aujourd'hui, également. Etant donné que ce

 22   type ne fait vraiment pas l'affaire, alors bien sûr que Cermak doit tout

 23   faire. Alors il y a plusieurs problèmes qui se posent…"

 24   M. CARRIER : [interprétation] Est-ce que vous pourriez présenter la page

 25   suivante en B/C/S.

 26   Q.  "Le responsable exécutif du comté a lâché du terrain, et cetera; donc,

 27   c'est quand même une grande pagaille sur le terrain. Je vous dis cela parce

 28   que -- parce qu'en fait, j'ai vu ce qui se passait, j'ai vu que cela se

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  1   passait partout."

  2   Le président Tudjman dit :

  3   "Il n'y a aucune raison pour qu'il y ait un Serbe là-bas maintenant.

  4   Le Dr Radic répond :

  5   "Oui, bien sûr, il ne devrait pas être là-bas."

  6   Le président dit :

  7   "Il y a une majorité de Croates là-bas; donc, changez cela."

  8   J'attends la traduction.

  9   R.  Non, j'ai entendu la traduction.

 10   Q.  Monsieur Dodig, alors, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que la

 11   personne dont parlent le président Tudjman et le Dr Radic est M. Pasic,

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Bien que dans votre déclaration, vous ayez dit que toutes les autorités

 15   l'acceptaient; est-ce que vous pourriez peut-être nuancer maintenant ?

 16   Enfin, vous aviez d'ailleurs déjà nuancé en disant que c'était les gens que

 17   vous connaissiez dans le secteur qui l'avaient accepté. Mais vous aviez

 18   précisé, dans votre déclaration, ce que vous pensiez de ce que pensait la

 19   direction à son sujet. Toutefois, ce dialogue suggère, en fait, que pour ce

 20   qui était de M. Pasic, il y a quand même une certaine partialité du fait

 21   qu'il s'agissait d'un Serbe qui avait cette fonction à Knin. Est-ce que je

 22   peux avancer cela ?

 23   R.  Je vois mal comment je pourrais formuler des commentaires sur -- suite

 24   à une réunion à laquelle je n'ai pas assisté. Souvent, il y a beaucoup

 25   d'éléments qui entrent en jeu pour déterminer ce qu'un tel dira dans telle

 26   ou telle circonstance. Si vous voulez une explication, je peux vous la

 27   donner, mais le -- puisque le président a demandé que l'on soit bref,

 28   j'essaie de le respecter. Si, toutefois, vous le demandez, je suis prêt à

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  1   vous fournir un commentaire.

  2   Q.  Donc je suppose que vous êtes d'accord avec moi ?

  3   R.  Non. Non, je ne suis pas d'accord avec vous à savoir le président

  4   Tudjman était quelqu'un qui cherchait à être efficace. Donc la chose la

  5   plus importante ici n'est pas de savoir que M. Pasic est un Serbe; le

  6   problème c'est qu'il n'est pas efficace et qu'il ne fait pas le travail.

  7   Comme, à l'époque, on n'arrêtait pas de faire cette distinction serbe,

  8   croate, on a la sensation que c'est la caractéristique principale, là,

  9   enfin qui est l'élément le plus important. Mais ce n'est pas vrai c'est

 10   parce que le président Tudjman cherche à résoudre un certain nombre de

 11   problèmes qui se posent à un moment précis sur un territoire précis.

 12   Q.  Vous ne dites pas, dans votre déclaration, en fait à aucun endroit vous

 13   ne le dites que m. Pasic n'a pas été efficace ou plutôt vous vous félicitez

 14   de la qualité de cet homme dans deux paragraphes. Alors est-ce que vous

 15   pouvez maintenant nous expliquer d'où vient ce changement ?

 16   R.  C'est l'appréciation des raisons pour lesquelles M. le président

 17   Tudjman a dit cela, et quant à l'efficacité de M. Pasic, je suis mal placé

 18   pour en juger. J'ai parlé uniquement de sa position et de sa moralité, de

 19   sa personne, de l'impression que j'ai pu me faire dans les contacts avec

 20   lui de ce que j'ai entendu de la part d'autres personnes en particulier des

 21   Croates qui estimaient que c'était un homme bien.

 22   Q.  Revenons un petit peu, si vous voulez bien en arrière.

 23   Malgré ce que le président dit dans cette transcription, donc il n'est bon

 24   à rien, il faudrait le remplacer, manque d'efficacité, et ce que vous lui

 25   attribuez en fait ce ne sont que des hypothèses. Vous ne le savez pas

 26   malgré ce que l'on lit sur cette page. Est-ce que cela est vrai ?

 27   R.  Non, je ne serais pas d'accord avec vous. On ne peut pas formuler les

 28   choses ainsi. Tout simplement je savais comment se faisait sa réflexion

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  1   parce qu'il y a eu beaucoup de situation politique en Croatie où le

  2   président a accepté quelqu'un d'efficace indépendamment de son appartenance

  3   ethnique. Là, c'est à un moment où il a fallu réagir vite, et finalement il

  4   prenait ses décisions sur la base des faits qu'on lui présentait, qu'on lui

  5   soumettait. Donc on lui a dit il y a une situation qui échappe au contrôle,

  6   qui est chaotique, donc il voulait remplacer la personne qui semblait être

  7   en charge.

  8   Q.  En août, en septembre 1995, vous étiez là et il n'a pas été remplacé,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Je ne sais pas.

 11   Q.  Est-ce que vous vous souvenez d'avoir vu M. Pasic à Knin en septembre

 12   1995 ?

 13   R.  Il m'est arrivé de le voir, jamais cependant lors d'une réunion

 14   officielle.

 15   Q.  Monsieur Dodig, vous dites dans votre déclaration que vous n'avez pas

 16   parlé avec M. Tudjman pendant la période qui a précédé l'opération Tempête,

 17   et que c'est vrai également pour la période qui a suivi l'opération

 18   Tempête; cependant, vous dites que vous avez eu des échanges avec le

 19   président Tudjman avant cela dans son bureau à Zagreb. En quelques mots,

 20   pouvez-vous nous dire de quelle période vous parlez là ? Quand est-ce que

 21   vous l'avez rencontré ?

 22   R.  C'était à partir de la fin de l'année 1993, donc novembre 1993 à peu

 23   près, jusqu'en mai 1994. Plus tard, il est arrivé occasionnellement que je

 24   le rencontre, par exemple, en faisant du tennis.

 25   Q.  Pendant la période qui a précédé l'opération Tempête, est-ce que vous

 26   estimiez que vous étiez un confident du président ?

 27   R.  Je pensais qu'il me faisait confiance. J'étais une personne de

 28   confiance pendant toute cette période. Mais je savais aussi que cela ne

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  1   suffisait pas pour que des choses se passent et qu'il faut aussi savoir

  2   comment aborder les choses, et je ne pensais pas, le président Tudjman non

  3   plus n'a dû penser que je pouvais lui être utile, que ce soit sur le plan

  4   militaire ou autre pendant cette période-là car j'ignore tout des affaires

  5   militaires.

  6   Q.  Passons à autre chose une seconde, dans votre déclaration vous semblez

  7   fonder votre analyse de la position du président Tudjman eu égard aux

  8   Serbes par rapport à son caractère et d'après vous c'était quelqu'un de

  9   beaucoup plus en proie aux émotions, beaucoup plus sensible que ce qu'on

 10   pourrait en penser de prime abord.

 11   Donc j'aimerais savoir pendant vos échanges avec le président

 12   Tudjman, pendant vos contacts avec lui, est-ce que vous n'avez jamais

 13   entendu dire qu'il qualifiait les Serbes de Croatie comme constituant une

 14   menace, et une menace stratégique, ou un cancer ?

 15   R.  Non, jamais de cette manière-là. Il a pu arriver que l'on évoque le

 16   problème des Serbes, que l'on évoque la nécessité de consolider l'Etat sans

 17   pour autant jamais pouvoir penser que le président Tudjman avait une

 18   attitude négative à l'égard de quelques communautés ethniques que ce soit y

 19   compris les Serbes.

 20   Lorsque l'on évoquait un "cancer," et cela ne se référait pas à tous

 21   les Serbes; cela se référait uniquement aux Serbes qui empêchaient

 22   l'accession de la Croatie à sa pleine souveraineté d'Etat, et la plupart

 23   des Serbes de Croatie vivaient à l'époque et vivent encore aujourd'hui dans

 24   des villes où ce danger ne se présentait pas.

 25   Donc cela concerne uniquement un territoire bien délimité qui

 26   échappait entièrement à l'Etat croate au contrôle de l'Etat croate. Le

 27   président Tudjman avait une attitude tout à fait raisonnable et normale à

 28   l'égard des Serbes de Croatie, il estimait qu'il constituait une partie

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  1   intégrante de la population croate, c'était des citoyens comme les autres.

  2   Q.  Mais j'ai raison de dire que vous avez entendu ce terme de "cancer"

  3   employé pour qualifier les Serbes de Croatie ?

  4   M. KEHOE : [interprétation] On a déjà répondu à la question.

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6   M. KEHOE : [interprétation] Mais le contexte est très important pour ce

  7   type de question et je me permet de vous référer à la déposition du Témoin

  8   Zuzul en l'espèce.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin nous a expliqué ce que cela

 10   signifie lorsque ce terme "cancer" était employé. Donc il serait utile de

 11   demander au témoin de savoir à quel moment ce terme a été employé et dans

 12   quelle circonstance.

 13   Alors est-ce que vous pourriez à titre d'exemple nous citer une

 14   circonstance où ce terme a été employé pour qualifier les Serbes ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me suis jamais trouvé dans une situation

 16   où on aurait proféré ce mot, donc je ne pourrais que formuler des

 17   hypothèses.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous invite à ne pas vous aventurer

 19   dans des conjectures, j'aimerais que vous nous disiez même si vous n'étiez

 20   pas présent lorsqu'on a employé le terme de "cancer" en relation aux

 21   Serbes. Vous pourriez savoir ce que cela signifiait, et il ne s'agit pas

 22   véritablement de vous perdre dans des conjectures, qui n'aident pas la

 23   Chambre.

 24   Monsieur Carrier.

 25   M. CARRIER : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Q.  Monsieur Dodig, vous n'avez jamais été présent d'après ce que vous

 27   dites lorsque le terme "cancer" a été utilisé pour qualifier les Serbes.

 28   Est-ce que vous étiez présent pendant que le train de la liberté pendant

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  1   que le président Tudjman a fait son discours le 26 août 1995 à bord du

  2   train de la liberté à Knin ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Monsieur Dodig, toujours en parlant de l'attitude du président Tudjman

  5   à l'égard des Serbes, vous avez dit qu'il voulait encourager les Serbes à

  6   commencer à aimer la Croatie, que le président estimait qu'il fallait

  7   accorder aux Serbes des droits plus importants que ceux qui seraient

  8   accordés à d'autres citoyens de Croatie, et vous dites qu'il s'agit là

  9   d'une discrimination positive.

 10   Les Juges de la Chambre ont reçu des éléments permettant de comprendre que

 11   le président Tudjman prônait ouvertement le fait que les Croates de

 12   l'étranger, de Chili, d'Australie, d'Argentine, d'Allemagne, de Paraguay,

 13   devraient retourner en Croatie après l'opération Tempête, pour repeupler la

 14   Croatie et, dans un même temps, le président Tudjman disait que les Serbes

 15   qui avaient pris la fuite pendant l'opération Tempête ne devraient pas

 16   avoir la possibilité de regagner leur foyer.

 17   Je vous demande, Monsieur Dodig : seriez-vous d'accord pour confirmer que

 18   le fait d'envisager, de réserver un traitement différents aux uns et aux

 19   autres, que c'est un petit peu difficile à réconcilier avec votre

 20   déclaration lorsque vous parlez des opinions du président Tudjman comme

 21   quoi les Serbes constituent une partie intégrante de la Croatie, et qu'ils

 22   méritaient des mesures de discrimination positive.

 23   R.  Ecoutez, si vous m'y autorisez, je vais vous l'expliquer brièvement.

 24   Il faut savoir que le président Tudjman, pour ce qui est du peuplement de

 25   la Croatie, il n'a pas uniquement lancé un appel aux Croates vivant dans

 26   les pays étrangers que vous avez cités ou qui viennent en Krajina mais les

 27   inviter à venir sur les îles, ou la Lika, qui est dépeuplée, parce que la

 28   Croatie n'a que légèrement plus de 4 millions, 4 millions et demi

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  1   d'habitants, ce qui est très peu par rapport à sa superficie.

  2   Sinon, le président Tudjman m'a expressément parlé de la discrimination

  3   positive, en comprenant l'importance politique du rôle qui était appelé à

  4   jouer les Serbes en Croatie, donc le rôle dans l'Etat croate, et l'attitude

  5   de la communauté internationale par rapport aux Serbes de Croatie.

  6   Donc il est tout à fait vrai qu'il ne réservait pas une attitude négative

  7   aux Serbes. Est-ce qu'il les aimait ou pas ça je ne veux pas entrer dans

  8   ces considérations. Mais ce qui est vrai c'est qu'il voulait que les Serbes

  9   en Croatie se sentent comme partie intégrante de l'Etat, comme des citoyens

 10   sur un pied d'égalité, il voulait qu'ils aient la sensation d'avoir cette

 11   place et pour s'en assurer il voulait leur accorder des droits même plus

 12   importants que ceux accordés à d'autres citoyens.

 13   A titre d'exemple, prenons les élections, le système de vote en Croatie.

 14   Q.  Monsieur Dodig, je voudrais revenir sur quelque chose que vous venez de

 15   dire, il me semble que vous vous contredisez.

 16   Vous dites, et je vous cite s'agissant du président Tudjman, vous dites :

 17   "Donc très certainement il ne réservait pas une attitude négative aux

 18   Serbes."

 19   Puis vous dites dans la suite :

 20   "Quant à savoir s'il les aimait ou pas je ne souhaite pas m'aventurer dans

 21   ces considérations."

 22   Mais comment est-ce que vous pouvez maintenir ces deux déclarations --

 23   R.  Excusez-moi, je ne suis pas d'accord avec vous. On ne doit pas

 24   nécessairement avoir une attitude positive à l'égard de quelqu'un

 25   simplement parce que vous l'aimez, parce que l'amour c'est une catégorie

 26   affective, tandis qu'une attitude positive, elle constitue une catégorie

 27   rationnelle.

 28   Q.  Donc peut-on affirmer qu'en fait vous n'en savez rien de ce que le

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  1   président Tudjman pensait des Serbes ?

  2   R.  Non, on ne peut pas affirmer cela.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Carrier, en quoi est-ce que

  4   cela peut aider la Chambre ? Le témoin est en train de nous dire que le

  5   fait d'aimer quelqu'un ou non. Cela ne signifie pas nécessairement qu'on ne

  6   peut pas lui réserver une attitude positive donc il s'agit d'une personne

  7   ou d'un groupe. Donc pensez, par exemple, des médecins dans des hôpitaux

  8   qui donnent des soins aux gens qu'ils n'aiment pas du tout et qu'ils les

  9   traitent d'une manière tout à fait parfaite.

 10   J'ai du mal à vous suivre.

 11   Puis il y a autre chose. Voilà comment vous avez commencé votre série de

 12   questions, vous avez demandé au témoin ainsi le fait d'opérer une

 13   différence dans le traitement réservé aux Serbes ou aux Croates était

 14   quelque chose qu'on pouvait difficilement réconcilier avec la déclaration

 15   faite par ce témoin au sujet des opinions du président Tudjman, à savoir

 16   que les Serbes constituaient partie intégrante de l'Etat croate.

 17   Le témoin a répondu longuement mais en fait ce qu'il a dit c'est qu'il ne

 18   pensait pas qu'il y avait une manière différente de traiter les Croates et

 19   les Serbes. Alors si vous n'êtes pas d'accord sur certaines positions, le

 20   fait de rentrer dans la question, la cohérence de ces positions, cela n'est

 21   pas très utile.

 22   Vous voyez un manque de cohérence, mais le témoin très clairement n'accepte

 23   pas que ce témoignage reflète la vérité, point final.

 24   Donc la réponse du témoin est la suivante : je n'accepte pas ce que

 25   vous me soumettez disant qu'il y a des éléments de preuve quel qu'il soit

 26   et qui soient crédibles ou fiables et qui refléteraient ce genre de

 27   traitement différence de traitement.

 28   Donc passez à autre chose.

Page 22643

  1   M. CARRIER : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Q.  Monsieur Dodig, est-ce que vous vous rappelez la date de votre arrivée

  3   à Knin pour la première fois en août 1995 ?

  4   R.  Non, je ne peux pas vous l'affirmer avec certitude, c'était quelques

  5   jours après la libération de Knin.

  6   Q.  Dans votre déclaration, vous semblez dire que vous êtes arrivé quelques

  7   jours avant que vous êtes allé le 9 août avec le général Cermak à la base

  8   des Nations Unies. Donc pourrait-on dire que cela se situe à peu près

  9   autour du 7 août ?

 10   R.  Oui, oui, disons que oui, c'est possible.

 11   Q.  A votre arrivée à Knin dans votre déclaration, vous dites que vous êtes

 12   trouvé pendant une heure ou deux dans les rues, et vous dites que

 13   l'ambiance était joyeuse, qu'il y avait des gens qui pleuraient de joie.

 14   Vous dites, cependant, que c'est le désordre qui régnait; vous avez vu des

 15   déchets par exemple.

 16   Donc j'aimerais savoir, Monsieur Dodig : vous êtes arrivé à Knin, et

 17   pendant les jours qui ont suivi, est-ce que vous avez remarqué premièrement

 18   qu'il y ait eu beaucoup de membres de la HV dans la ville ?

 19   R.  Beaucoup de personnes en uniforme, oui.

 20   Q.  Qu'en est-il des dégâts occasionnés à des bâtiments civils par le

 21   pilonnage ?

 22   R.  Dans la rue principale où j'ai circulé pour l'essentiel et je n'ai pas

 23   vu de dégâts significatifs.

 24   Q.  Est-ce que vous avez pu remarquer qu'il y ait eu des pillages, des

 25   pillages par des membres de la HV ?

 26   R.  Non, j'ai vu des vitrines brisées mais que j'ai vu des preuves qu'il y

 27   a eu des pillages et en particulier des pillages fait par des soldats

 28   croates, non.

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  1   Q.  Mais qu'en est-il des personnes en uniforme, en uniforme de l'armée

  2   croate ?

  3   R.  Non. Non, c'était de jour et je n'ai vu personne pillé.

  4   Q.  Qu'en est-il des incendies, en avez-vous vus ?

  5   R.  Dans la ville même de Knin, non. Mais en arrivant de Drnis, il m'est

  6   arrivé de voir de la fumée au loin. Etait-ce du foin ou des maisons qui

  7   brûlaient, ça je ne peux pas, je ne peux pas le savoir.

  8   Q.  Monsieur Dodig, les Juges de la Chambre ont entendu des témoignages

  9   disant que suite à la campagne de pilonnage dans le cadre de l'opération

 10   Tempête, la ville de Knin a vu arriver nombre de soldats de la HV pendant

 11   les journées qui ont suivi, qu'il y a eu des pillages à Knin commis par des

 12   membres de la HV, qu'il y a eu des incendies criminelles à Knin, et qu'il y

 13   avait des signes de destruction, des dégâts sur des bâtiments civils. A la

 14   lumière de cela, comment expliquez-vous que vous-même vous n'avez vu rien

 15   de tel ?

 16   R.  Je vous affirme que dans la rue principale où j'ai circulé, il n'y

 17   avait pas de traces de dégâts qui auraient permis de penser qu'il y ait eu

 18   des dégâts considérables. Est-ce qu'il y en avait dans d'autres quartiers

 19   de Knin, des quartiers où je ne suis pas allé, ça je pourrais difficilement

 20   vous en parler.

 21   Q.  Monsieur Dodig, reprenons une partie de votre déclaration, si vous

 22   voulez bien, et je vais vous poser quelques questions là-dessus.

 23   Prenons le paragraphe 19 de votre déclaration, page 11 en anglais, page 10

 24   dans la version croate. La deuxième partie de ce paragraphe, vous dites, et

 25   je vous cite :

 26   "Mais c'était au moment où les gens sont venus de toutes les régions de

 27   Croatie et je pense que c'est la raison que des choses que nous ne

 28   souhaitions pas se sont produites, nous souhaitions pas voir arriver. Je

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  1   suis certain que ce n'était pas des membres de l'armée croate, même s'ils

  2   étaient en uniforme, car à l'époque tout un chacun pouvait revêtir un

  3   uniforme."

  4   Puis je passe au paragraphe suivant, paragraphe 20, vous continuez, vous

  5   dites :

  6   "Je pense que M. Cermak n'était pas au courant de ces crimes."

  7   Monsieur Dodig, là, vous, vous référez à des choses qu'on ne souhaitait pas

  8   voir se produire; là, vous voulez dire à des incendies et des pillages ?

  9   R.  Ce que j'ai déclaré je l'ai dit en me fondant sur ce que je savais sur

 10   des faits que j'ai appris tout au long de ces années qui nous séparent de

 11   l'opération Tempête, et je ne me fonde pas sur ce que j'ai su à l'époque

 12   des crimes, à l'époque. Je n'en n'ai su rien, et c'est pendant des années

 13   qui ont suivi que j'ai été mis au courant de cela. Lorsque j'ai déclaré que

 14   je n'ai pas eu de conversations avec le général -- avec M. Cermak là-dessus

 15   parce que je ne savais pas que quelqu'un ait été tué et que je pense que

 16   lui n'était pas au courant. Si je le dis, c'est parce que je pense qu'il me

 17   l'aurait dit s'il l'avait su. Donc on n'allait pas parler de quelque chose

 18   dont on ignorait l'existence.

 19   Q.  En fait, dans votre déclaration, vous ne pensez pas que le général

 20   Cermak était au courant des crimes parce qu'il vous en aurait parlés;

 21   sinon, vous dites simplement : "Je pense que M. Cermak, lui non plus,

 22   n'était pas au courant des crimes;" donc là encore, vous vous contredisez.

 23   Vous ne parlez pas des choses que vous ignorez.

 24   Alors est-ce que vous êtes en train de formuler des hypothèses ?

 25   R.  Mais j'ai dit : je pense qu'il ne le savait pas, parce que je pense

 26   que, s'il avait été au courant, il en aurait -- il m'en aurait parlé, et à

 27   l'époque, moi, je n'étais pas au courant des crimes. Je vous dis clairement

 28   que j'ai appris leur existence plus tard, et lorsque je dis "plus tard,"

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  1   c'est cinq ou six mois plus tard, un an, deux ans plus tard. J'ai lu des

  2   choses dans la presse et ça m'a permis de comprendre que des crimes se sont

  3   produits. Mais à l'époque je ne le savais pas. Je n'ai pas vu un seul

  4   cadavre donc qui m'aurait, ça m'aurait incité à m'interroger là-dessus,

  5   mais je n'en n'ai pas vus.

  6   Q.  Monsieur Dodig, seriez-vous, alors, surpris si je vous disais que le

  7   général Cermak a déclaré aux enquêteurs du bureau du Procureur avoir été

  8   tout à fait conscient que des membres de la HV avaient commis des crimes

  9   pendant cette période, comprenant des actes de pillage, d'incendies

 10   volontaires, de meurtres ? Vous, vous êtes référé aux journaux que vous

 11   avez lus ultérieurement, mais même à l'époque, en septembre 1995, le

 12   général Cermak a fait des apparitions dans les médias, il s'est exprimé sur

 13   des crimes qui avaient été commis, le fait que des crimes avaient été

 14   commis.

 15   Est-ce que cela constitue une surprise pour vous ?

 16   R.  Non. M. Cermak est quelqu'un de sincère, il a dit ce qu'il avait appris

 17   à posteriori.

 18   Au moment où, moi, j'ai eu des discussions avec lui, pendant nos

 19   premières visites à Knin, nous n'avons pas parlé de cela. Donc je suppose

 20   qu'à ce moment précis, il n'était pas au courant. Il n'y a pas de

 21   contradiction à dire cela.  

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, vous dites, à nouveau,

 23   qu'à l'époque, à ce moment précis, il n'était pas conscient, il n'était pas

 24   au courant de cela. Mais tenez-vous en peut-être aux faits --

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose qu'il n'était pas au courant.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ce que vous savez, c'est ce dont

 27   vous avez éventuellement discuté avec M. Cermak. Alors, évitons de tirer

 28   des conclusions. Ce que vous pouvez affirmer au titre des faits, c'est ce

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  1   dont vous avez discuté, ce qu'il vous a dit ou tout autre fait qui pourrait

  2   indiquer une telle connaissance de sa part.

  3   Je voudrais que nous nous en tenions à ces faits avant toute chose et que

  4   nous nous abstenions de tirer des conclusions parce que c'est cela qui est

  5   à l'origine de la confusion dans laquelle nous nous trouvons.

  6   M. KAY : [interprétation] Je voudrais juste soulever un point, Monsieur le

  7   Président. Il me semble que la spéculation était inhérente aux questions

  8   qui ont été posées lorsqu'il s'agissait de demander au témoin de formuler

  9   un commentaire sur des propos, par exemple, sans préciser la période de --

 10   sans préciser le contexte. Je pense que cela revient quasiment à inviter le

 11   témoin à spéculer, lorsqu'on lui pose une question sous cette forme-là, qui

 12   l'invite donc, au témoin, des commentaires concernant des événements

 13   auxquels il n'a pas participé.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis d'accord, dans une certaine

 15   mesure, avec vous, mais le fondement de questions de cette nature n'est pas

 16   -- ne fait pas l'objet de doutes, c'est au niveau des réponses que se situe

 17   le problème. Nous avons déjà un motif de confusion lorsqu'on utilise des

 18   formulations du type : "de mon avis" ou "je pense que," et cetera.

 19   Donc, il serait peut-être plus sage, Monsieur le Procureur, que vous

 20   essayiez d'explorer la base factuelle de ce que recouvrent les réponses des

 21   témoins -- du témoin lorsque ce dernier dit, "je pense que" ou "c'est mon

 22   opinion que." Une opinion peut être juste ou fausse, mais ce qui nous

 23   intéresse, c'est la connaissance qui est celle de ce témoin pour ce qui est

 24   des faits. C'est sur la base de ces faits que les Juges de la Chambre

 25   tireront leur conclusion, qu'elle soit identique ou non à celle que tire ce

 26   témoin.

 27   Continuez, je vous en prie.

 28   M. CARRIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   Q.  Monsieur Dodig, est-il exact de dire que vous avez eu des contacts

  2   assez limités avec le général Cermak pendant la pendant où vous avez été à

  3   Knin, du mois d'août au mois de septembre 1995 ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit que, pendant votre séjour à Knin,

  6   vous n'avez rencontré le général Cermak qu'à trois ou quatre reprises et

  7   vous avez précisé, notamment les conditions de votre première rencontre,

  8   lorsque vous êtes arrivé dans son bureau; deuxième rencontre au mois d'août

  9   à la base des Nations Unies et vous avez également mentionné, en plus de

 10   cela, une réunion à laquelle vous vous êtes rendu, au cours de laquelle le

 11   général Cermak s'est adressé aux personnes présentes.

 12   Est-ce que cela résume les contacts que vous avez eus avec le général

 13   Cermak ou y a-t-il quoi que ce soit d'autre dont vous vous souveniez qui

 14   ait constitué une rencontre entre vous et le général Cermak, à Knin ?

 15   R.  Je ne sais pas s'il est nécessaire de mentionner le fait que chaque

 16   fois que j'arrivais, j'allais le voir pour le saluer. Mais cela se limitait

 17   à cela. Il n'y avait pas de réunion à part entière.

 18   Q.  Donc, vous ne pouvez pas vous rappeler d'une autre occasion qui aurait

 19   été un moment où vous auriez rencontré le général Cermak, à part les trois

 20   dont vous faites état dans votre déclaration, n'est-ce pas ? A part pour ce

 21   qui consiste à être allé le saluer de façon occasionnelle, lorsque vous

 22   reveniez à Knin ?

 23   R.  En effet.

 24   Q.  Quand vous avez -- quand vous quittiez Knin, pendant cette période qui

 25   s'étendait d'août à septembre, pendant combien de temps étiez-vous absent ?

 26   Etait-ce pour un jour, pour une semaine ?

 27   R.  Je ne vous ai pas compris. Excusez-moi.

 28   Q.  Vous nous avez dit que lorsque vous reveniez à Knin, vous alliez le

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  1   saluer. Donc, si vous "reveniez," cela sous-entend que vous aviez quitté

  2   Knin. Ce que je vous demande, c'est de préciser cet aspect. Vous n'avez pas

  3   été présent, de façon continue, à Knin; donc combien de jours avez-vous

  4   passé à Knin, dans cette période s'étendant d'août à septembre 1995 ?

  5   R.  Je ne peux pas vous dire exactement combien de jours. Mais j'ai très

  6   certainement été six ou sept fois dans -- j'étais au camp de réfugiés où

  7   j'ai -- qui était l'endroit, en fait, où j'ai pu voir ce qui faisait

  8   l'objet de mes activités et j'ai essayé, là-bas, de résoudre les problèmes

  9   qui se présentaient. Il me semblait que c'était là le seul cadre structuré

 10   dans lequel il était possible d'accomplir quoi que ce soit.

 11   Q.  Vous ne vous êtes pas contenté d'aller au camp de réfugiés. Vous êtes

 12   également allé à Zagreb, n'est-ce pas, pour aller à des réunions du

 13   gouvernement ?

 14   R.  Je suis revenu à Zagreb, mais je n'ai pas été présent à des réunions

 15   sur ce thème. J'avais tout simplement des affaires auxquelles je souhaitais

 16   -- je devais vaquer.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, le Procureur, encore une

 18   fois, est à la recherche d'informations concernant votre présence à Knin ou

 19   votre absence de Knin. Vous nous avez donné quelques éléments concernant

 20   votre présence dans ce camp de réfugiés. Alors, je ne sais pas si c'était

 21   situé à dix ou à 100 kilomètres de Knin, ce qui pourrait, éventuellement,

 22   nous donner une indication de la durée de vos absences. Alors, vous nous

 23   avez parlé de l'importance qu'il y avait à être dans ce camp de réfugiés.

 24   Le Procureur dit ensuite que vous êtes aussi allé à Zagreb et vous

 25   enchaînez ensuite, en nous disant l'importance de ces réunions,

 26   l'importance ou non de ces réunions à Zagreb.

 27   Mais ce que le Procureur souhaite savoir, c'est à quelle fréquence et

 28   pendant quelle durée, durant cette période, vous avez été présent à Knin,

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  1   et pendant quelle durée vous avez été absent de Knin. Donc pourriez-vous,

  2   s'il vous plaît, essayer de vous concentrer, dans vos réponses, sur ce qui

  3   vous est demandé plutôt que d'élargir en précisant toutes sortes d'aspects

  4   sur lesquels le Procureur, pour le moment, n'a pas manifesté son intérêt à

  5   être informé.

  6   Donc pour ce qui est du mois d'août, pourriez-vous nous dire à quelle

  7   fréquence vous avez été absent de Knin et où se trouvait ce camp de

  8   réfugiés ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer d'être aussi précis, dans ma

 10   réponse, que possible.

 11   Le camp de réfugiés à Knin, selon mon estimation assez libre, se trouvait à

 12   environ 1 800 mètres de Knin, donc très près. Mon poste ne se trouvait ne

 13   se trouvait pas --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc du point de vue de vos retours à

 15   Knin, en fait lorsque vous étiez dans ce camp de réfugiés, vous étiez à

 16   Knin, peut-être pas au centre-ville mais dans un rayon d'un kilomètre,

 17   n'est-ce pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc M. le Procureur a commencé à vous

 20   poser des questions sur vos retours à Knin, alors que le camp de réfugiés

 21   était plus ou moins à l'intérieur de Knin.

 22   Mais combien de temps restiez-vous là-bas ? Est-ce que c'était

 23   quelques heures, ou plusieurs jours ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] En général, c'était de deux à trois

 25   heures et demie, ou quatre heures pour ce qui est de mes séjours au camp de

 26   réfugiés.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. le Procureur semble vouloir

 28   préciser ce que vous vouliez dire, lorsque vous parliez de vos retours à

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  1   Knin, précisez notamment d'où vous reveniez.

  2   Alors est-ce que vous incluiez dans votre réponse ces absences de

  3   quelques heures, lorsque vous étiez au camp de réfugiés?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je discutais généralement avec les gens

  5   dans la rue. Je sais qu'à deux reprises, je suis allé à l'hôpital --

  6   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] -- parce que --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, une fois encore, je vous

  9   prie, de bien vouloir essayer de comprendre ce que l'on attend ici de vous

 10   à ce qu'on vous demande.

 11   Il s'agissait de vos rencontres avec M. Cermak lorsque vous reveniez à

 12   Knin.

 13   Donc est-ce que, lorsque vous parliez de cela, vous pensiez à des réunions

 14   ou des rencontres avec M. Cermak alors que vous étiez au camp de réfugiés;

 15   ou pensiez-vous à des rencontres avec M. Cermak lorsque vous étiez à Zagreb

 16   pour d'autre raison ?

 17   C'est ce que M. le Procureur essaie de savoir.

 18   M. KAY : [aucune interprétation]

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci pour cette précision.

 20   M. KAY : [interprétation] Juste peut-être -- excusez-moi, mais juste une ou

 21   deux questions que je souhaiterais soulever.

 22   Je suis le compte rendu d'audience, je lis donc, je suis intéressé pour ce

 23   qui est de savoir combien de jours vous avez passé à Knin. Je pense que

 24   cela pourrait peut-être assister les Juges de la Chambre --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas ce que je voulais dire,

 26   mais le nombre de jours passés à Knin est directement relié au nombre de

 27   jours où il était absent de Knin.

 28   Manifestement, l'objectif initial de la question était de connaître la

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  1   fréquence des contacts du témoin avec le général Cermak; cela a été décrit

  2   par rapport au nombre de fois où il est retourné à Knin.

  3   Alors, Monsieur le Procureur --

  4   M. CARRIER : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- le Procureur de s'enquérir de cela.

  6   Donc essayons de nous en ternir strictement aux faits et, Monsieur le

  7   Témoin, aux faits au sujet desquels on vous interroge, et si vous ne le

  8   savez pas, dites-le-nous.

  9   Continuez, Monsieur le Procureur.

 10   M. CARRIER : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Dodig, pendant les mois d'août et septembre 1995, combien de

 12   jours avez-vous passé à Knin, si vous le savez ?

 13   R.  Je ne le sais pas avec une précision mathématique, mais je peux vous

 14   dire de façon approximative que cela était -- ça représentait sept ou huit

 15   jours. Quand je dis "jours," ça veut du matin vers 9 heures du matin, par

 16   exemple, jusqu'à 2 heures ou 2 heures 30 de l'après-midi.

 17   Q.  En dehors de ces sept jours, où avez-vous passé le reste de ces mois

 18   d'août et septembre 1995 ?

 19   R.  J'ai travaillé au poste qui était le mien. J'ai été en congé et j'ai

 20   également vaqué à d'autres tâches au sein de cet hôpital où j'intervenais.

 21   Q.  Cela était à Split, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Dans votre déclaration, toutes les estimations et les remarques que

 24   vous faites concernant le général Cermak, concernant son autorité, ce qui

 25   se passe lors des réunions, sa possibilité ou non d'émettre des ordres,

 26   tout cela se fonde sur le peu de jours que vous avez passé à Knin, c'est-à-

 27   dire au maximum sept jours pendant les mois d'août et de septembre 1995 ?

 28   Ai-je raison de dire cela ?

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  1   R.  Oui. C'était, en fait, surtout au cours du mois d'août.

  2   Q.  Du fait que le camp de réfugiés se trouvait en fait à Knin, ce camp où

  3   vous vous êtes rendu parce que vous avez dit qu'il était au centre de votre

  4   attention, je présume que vous avez été physiquement présent à Knin pendant

  5   les mois d'août et septembre 1995 du fait de la présence de ce camp de

  6   réfugiés à Knin ?

  7   R.  Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur, par rapport à la

  9   déclaration du témoin --

 10   Monsieur le Témoin, quand vous parlez de camp de réfugiés, est-ce que vous

 11   parlez des infrastructures des Nations Unies, ou d'un autre camp de

 12   réfugiés ?

 13   Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous le dire --

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je pense à la base des Nations Unies.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Entendu, c'est clair maintenant. Nous

 16   savons où cela se situe. Si vous aviez utilisé ce mot, cela aurait plus

 17   clair - je ne vous en tiens pas rigueur - dans ce cas-là, je ne vous aurais

 18   pas posé la question.

 19   Continuez, je vous prie.

 20   M. CARRIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Q.  Dans votre déclaration, vous dites avoir été présent à une réunion avec

 22   le général Cermak. Une réunion à laquelle tout le monde était présent,

 23   alors qu'en est-il de cette réunion ?

 24   R.  Excusez-moi, mais il y a une confusion ici. Lorsque je parle de

 25   rencontres avec le général Cermak, je parle également de rencontres tout à

 26   fait informelles parce qu'il y avait un tel désordre, il y avait tant de

 27   personnes qui voulaient rencontrer le général Cermak, tant de monde donc

 28   autour de lui, qu'il était extrêmement occupé. C'est pour ça que j'ai parlé

Page 22655

  1   de rencontres ou de réunions qui étaient une forme de rencontres où tout le

  2   monde était présent. C'était une réunion à porte ouverte pour ainsi dire.

  3   Le général Cermak était souvent embarrassé de ne pas pouvoir consacrer plus

  4   de temps à notre entretien, ne pas pouvoir me recevoir correctement.

  5   Lorsqu'on parle de réunions, on pense généralement à une réunion

  6   structurée avec un ordre du jour, avec des personnes qui sont sensées y

  7   participer.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors je souhaiterais peut-être vous

  9   suggérer de faire une différence dans les termes que vous employez, et de

 10   dire clairement que vous l'avez brièvement rencontré lorsque cela a été le

 11   cas, pour faire la distinction avec les réunions qui avaient peut-être un

 12   ordre du jour, et que vous pourriez désigner strictement sous le nom de

 13   réunion que nous évitions toute confusion.

 14   Continuez, je vous prie.

 15   M. CARRIER : [interprétation]

 16   Q.  Alors, Monsieur Dodig, lorsque vous parlez de bref contact avec le

 17   général Cermak et lorsque vous dites que vous n'avez pas remarqué la

 18   présence de policiers militaires ou de membres de la police civile il ne

 19   s'agissait pas véritablement d'une réunion au sens propre mais de bref

 20   contact entre vous et le général Cermak. Est-ce que c'est bien de cela que

 21   vous parlez dans votre déclaration ?

 22   R.  Précisément.

 23   Q.  Est-il alors juste de dire, que dans votre déclaration lorsque vous

 24   parlez du général Cermak et de la façon dont il donne des ordres à

 25   certaines personnes, est-il juste de dire que cela aussi correspond à ces

 26   moments où vous avez de bref contact avec le général Cermak, à savoir que,

 27   pendant ces brefs contacts, vous ne l'avez pas vu émettre quelques ordres

 28   que ce soit ?

Page 22656

  1   R.  Il s'agissait de brèves rencontres -- de brefs contacts, mais pendant

  2   ces brefs contacts, il se mettait en relation avec différentes personnes

  3   auxquelles il transmettait plutôt que des ordres, des instructions, dirais-

  4   je, concernant ce que ces personnes étaient censées faire.

  5   Q.  Mais vous ne savez pas vraiment si le général Cermak adressait des

  6   ordres à qui que ce soit. Vous n'en avez pas connaissance. Vous ne vous

  7   exprimez que concernant de brefs contacts que vous avez eus avec lui,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  En effet.

 10   Q.  C'est la même chose lorsque vous dites que vous ne pensiez pas que le

 11   général Cermak ait eu une compréhension claire de la hiérarchie militaire,

 12   ni qu'il ait été membre des forces armées. Tout cela se fonde sur des

 13   brèves interactions, des contacts que vous avez eus avec lui pendant ces

 14   sept jours passés à Knin, et sur rien d'autre, n'est-ce pas ?

 15   R.  En effet.

 16   Q.  Alors je reviens à votre déclaration. Il y a un passage où vous parlez

 17   du fait que vous n'avez pas vu beaucoup de destruction ou d'actes de

 18   pillage ou de crimes commis par la HV. Cela aussi se limite aux quelques

 19   jours que vous avez passés dans la ville de Knin, et que vous n'avez pas pu

 20   indiquer de façon plus précise qu'en nous disant peut-être, le 9 mois

 21   d'août, n'est-ce pas ?

 22   R.  En effet.

 23   Q.  Y a-t-il la moindre raison pour laquelle vous n'avez pas été en mesure

 24   d'indiquer clairement dans votre déclaration que vous n'avez passé que sept

 25   jours à Knin, pendant les mois d'août et septembre 1995 ?

 26   R.  Je ne savais pas que c'était important.

 27   Q.  Revenons alors à quelque chose que vous avez dit précédemment. Lorsque

 28   j'ai avancé votre participation à une réunion du gouvernement à Zagreb.

Page 22657

  1   Vous avez indiqué, avoir participé à des réunions du gouvernement pendant

  2   les mois d'août et septembre 1995, n'est-ce pas, à Zagreb ?

  3   R.  J'ai été présent à des réunions à l'intérieur du bureau à la tête

  4   duquel je me trouvais, non pas aux réunions du gouvernement. Il y a eu une

  5   réunion du gouvernement à Knin même, à laquelle j'ai été convié. J'ai été

  6   présent à cette réunion-là, mais pas aux autres réunions du gouvernement.

  7   Q.  Au cours de cette réunion du gouvernement où vous avez été présent,

  8   vous n'avez pas abordé quoi que ce soit qui ait été en rapport avec les

  9   problèmes se présentant à Knin, n'est-ce pas ? Parce qu'il y avait une

 10   certaine confusion dans mon esprit par rapport à ce que vous avez dit à ce

 11   sujet.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Donc je présume que votre nom ne devrait pas figurer au procès-verbal

 14   de la réunion lorsqu'il est discuté des quatre types de Serbes qui restent

 15   dans Krajina, au mois d'août 1995; lorsque l'on aborde un certain nombre de

 16   problèmes et la question du nombre de Serbes qui restent en Krajina.

 17   Cela ne vous rappelle rien ?

 18   R.  Non.

 19   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que c'est un

 20   peu tôt, mais le document suivant, celui que nous avons eu du mal à

 21   afficher et à récupérer, et c'est le dernier point que je souhaite aborder.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je présume que nous pourrions prendre

 23   une pause de 25 minutes, le temps que le problème soit résolu.

 24   M. CARRIER : [interprétation] J'aimerais pouvoir répondre affirmativement,

 25   mais je voudrais juste pouvoir vérifier, s'il vous plaît.

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 27   M. CARRIER : [interprétation] On me dit que ce sera bien le cas.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous garantissez contre peut-être un

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  1   revirement déjà. Alors est-ce que ce sera le seul document que vous

  2   aborderez.

  3   M. CARRIER : [interprétation] J'aurais peut-être quelques brèves questions

  4   concernant les premiers documents que j'ai présentés.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre souhaiterait éviter que nous

  6   ayons à attendre encore 15 minutes en reprenant l'audience avant que les

  7   problèmes en question ne soient résolus.

  8   Donc nous allons avoir une pause de 25 minutes, maintenant, nous

  9   reprendrons à 11 heures, mais si pour quelle que raison que ce soit, vous

 10   n'êtes pas en mesure à 10 heures 50, mais si pour quelle que raison que ce

 11   soit, vous n'avez toujours pas résolu les problèmes techniques d'affichage,

 12   au moment de la reprise de l'audience, je souhaiterais que vous puissiez

 13   nous en informer avant que nous ne reprenions l'audience.

 14   Donc nous prenons maintenant une pause et nous reprendrons, je vous

 15   donne cinq minutes de plus à 10 heures 55.

 16   --- L'audience est suspendue à 10 heures 26.

 17   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Carrier, vous avez même eu

 19   encore un peu plus de temps donc vaquer à tous ce qui devait être résolu

 20   donc mais nos excuses pour ce retard.

 21   M. CARRIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Monsieur le Greffier, pouvons-nous avoir le document portant la cote P7431

 23   à l'écran, s'il vous plaît ? Merci.

 24   Q.  Monsieur Dodig, ce qui va s'afficher à l'écran est le procès-verbal de

 25   la 260e Session à huis clos du gouvernement croate.

 26   Seul six pages en ont été traduites en anglais, et malheureusement, la page

 27   de garde ne fait pas partie de ces pages traduites. Mais, Monsieur le

 28   Témoin, vous nous dites s'il confirme ou pas de quoi il s'agit. Cela nous

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  1   aidera.

  2   Alors si nous nous reportons à cette page de garde, elle porte la date du

  3   23 août 1995, intitulée donc 260e Session à huis clos du gouvernement de la

  4   République de Croatie et nous trouvons la liste des participants à cette

  5   réunion, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je n'ai pas été présent à cette réunion.

  7   M. CARRIER : [interprétation] Alors peut-être pourrions-nous passer à la

  8   page 2 en B/C/S, plus vers le haut de la page s'il vous plaît ?

  9   Q.  Donc dans le paragraphe qui est en haut de page, votre nom figure, le

 10   Dr Dodig, Monsieur le Témoin.

 11   R.  En effet.

 12   Q.  Est-ce que cela rafraîchit peut-être votre mémoire concernant cette

 13   réunion qui s'était tenue le 23 août 1995 à 11 heures 05 du matin ? Votre

 14   présence donc à cette réunion, étiez-vous vraiment présent ou non ?

 15   R.  Oui, puisque c'est écrit ici.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, c'est cinq lignes à

 17   peine plus haut dans le compte rendu d'audience que vous déclarez n'avoir

 18   pas été présent à cette réunion. Alors je voudrais vous demander de

 19   réfléchir très soigneusement aux réponses que vous donnez ici. Je comprends

 20   que vous vous soyez concentrés sur ce que vous avez vu sur la page de

 21   garde, mais si vous vous appuyez, si l'on s'appuie sur un document à un

 22   moment donné, lorsque vous répondez nous devrions savoir exactement ce qui

 23   correspond à votre souvenir et ce qui est basé sur un document que vous

 24   avez sous les yeux puisque vous venez de redonner une réponse en examinant

 25   la page de garde et la réponse contraire en examinant la page 2.

 26   Continuez, je vous prie.

 27   M. CARRIER : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous passer à

 28   la page 14 en B/C/S et en restant sur la page 1 en anglais ?

Page 22660

  1   Q.  En haut de page, votre nom apparaît Monsieur Dodig et je pense que cela

  2   a une certaine importance parce que cela signifie que c'est vous qui prenez

  3   la parole ici. Cette réunion a fait l'objet d'un procès-verbal, a été

  4   transcrite.

  5   Si vous examinez la version anglaise, vers le milieu de la page, vous voyez

  6   qu'il y a une phrase qui commence par les mots suivants : bien sûr c'est

  7   vous qui prenez la parole donc pour ce paragraphe, Monsieur Dodig, c'est

  8   vous qui prenez la parole et vous concluez qu'il y a quatre catégories de

  9   personnes, quatre catégories de Serbes qui sont restés dans les zones

 10   libérées après l'opération Tempête. Ensuite vous faites une ventilation de

 11   ces groupes. Vous dites il y a ceux qui sont restés chez eux dans les

 12   villages et dans les hameaux; puis il y a les Serbes qui se trouvent dans

 13   la caserne de l'ONURC à Knin; ensuite vous faites référence aux Serbes qui

 14   se trouvent dans les centres de collectes et font partie de la troisième

 15   catégorie; et puis vous avez également ceux qui se trouvent en Slavonie

 16   occidentale. C'est juste le bas de la page anglaise.

 17   M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. M. LE JUGE

 18   ORIE : [interprétation] Ah non, je vois -- non, non, je vois que Me Kehoe

 19   souhaite intervenir.

 20   Oui, Maître Kehoe.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Ecoutez, j'examine ce document enfin je cherche

 22   le document dans la liste 65 ter et je regarde ce procès-verbal, je l'ai

 23   regardé avec Me Misetic, bon, je ne veux pas m'exprimer, au nom de mes

 24   autres confrères --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de

 26   soulever une question qui pourrait être -- qui peut être soulevée en

 27   présence du témoin ? Je n'en sais rien.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, oui. Il s'agit de communications au

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  1   titre de l'article 65 ter, alinéa (2) pour ce qui est des informations

  2   pertinentes car il nous semble que nous, nous n'avons jamais vu ce

  3   document, alors bien que, bien entendu, il relève de la catégorie de

  4   l'article 65 ter, petit (2) comme étant et considéré comme un document

  5   pertinent. Donc je me demande pourquoi il n'a pas été communiqué.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors la question de savoir pourquoi il

  7   n'a pas été communiqué --

  8   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est cela.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, je m'excuse. En fait, j'en ai parlé

 11   avec mon confrère, Me Misetic, et notre assistante juridique, Mme

 12   Katalinic.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends en fait que ce qui est

 14   important pour vous, c'est de savoir pourquoi cela n'a pas été communiqué.

 15   Nous allons vérifier dans un premier temps et si, effectivement, il n'y a

 16   pas eu de communication, nous essayons de savoir pourquoi.

 17   Qu'en est-il Maître Kay ?

 18   M. KAY : [interprétation] En ce qui nous concerne, Monsieur le Président,

 19   je vous dirais que cela n'a pas été communiqué. Ce témoin figure sur notre

 20   liste de témoins depuis un certain temps. Vous aviez donc la liste 65 ter,

 21   il figurait là-dessus, il figurait sur la liste des témoins, et vous avez

 22   donc la communication au titre de l'article 68, pour ce témoin. Nous avons

 23   déjà présenté un certain nombre de griefs à plusieurs reprises, car ces

 24   communications ne sont pas faites. J'ai pu retrouver une référence qui est

 25   extrêmement importante pour mon client, une référence qui est faite à mon

 26   client dans ce document et, pour moi, il s'agit en fait d'une référence qui

 27   est véritablement à décharge. Elle est très importante, et je vous dirais

 28   que je suis extrêmement préoccupé.

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  1   Parce qu'il y a un document que l'on présente comme cela, au pied

  2   élevé, on demande au témoin s'il peut se souvenir de quelque chose qui

  3   s'est passé, il y a 15 ans, puis on lui pose des questions. On lui dit :

  4   voilà votre nom, donc il dit : s'il y a mon nom, je devais y être. Il doit

  5   ensuite prendre connaissance du document, le lire. Il aurait dû pouvoir

  6   lire ce document lorsque nous l'avons interrogé, lorsque nous avons en fait

  7   confirmé sa déclaration au titre de l'article 92 ter, car c'est un document

  8   qui est pertinent en l'espèce.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous interromps. Parce que dans

 10   un premier temps, il faudrait que nous nous assurions bien qu'il y ait un

 11   accord à propos de la non communication.

 12   M. KAY : [interprétation] Mais, enfin, cela ne faisait pas partie du

 13   système de prétoire électronique.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Carrier.

 15   M. CARRIER : [interprétation] A propos de la communication, je dirais que

 16   ce document a été communiqué en mars 2008. Il s'agit RFA 750, donc cela a

 17   été communiqué le 6 mars 2008, sur un CD, et les cotes ERN sont les

 18   suivantes : 0614-2565, 0614-3142.

 19    Peut-être qu'à propos d'autre chose --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors il y a plusieurs choses. Dans un

 21   premier temps, est-ce que ce document a été communiqué ou non ? Il

 22   semblerait qu'il y ait des accords à ce sujet d'ailleurs. Donc il va

 23   falloir que nous vérifiions que le document a bel et bien été confirmé.

 24   Deuxièmement, est-ce qu'il a été communiqué conformément à l'article

 25   68 (ii), communiqué en tant que document à décharge, ou est-ce qu'il a été

 26   juste communiqué dans le système des documents électroniques ? Monsieur

 27   Carrier, d'après votre réponse, je n'ai pas véritablement compris si ce

 28   document avait été communiqué en tant que document à décharge. Ce qui

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  1   soulève d'ailleurs une autre question, parce qu'il s'agit d'un document

  2   communiqué à décharge, il va falloir que nous acceptions ce que nous dit Me

  3   Kay à propos de documents communiqués à décharge. Alors il y a plusieurs

  4   questions qu'il va falloir que nous élucidions. Nous allons, dans un

  5   premier temps, voir et vérifier si ce document a été bien communiqué comme

  6   l'a indiqué M. Carrier, puisqu'il nous a donné de plus amples

  7   renseignements à propos de la communication.

  8   Est-ce que vous avez la possibilité de vérifier ?

  9   M. KAY : [interprétation] Au moment où nous sommes en train de parler, les

 10   machines turbinent pour voir si cela a été communiqué.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout comme nos esprits d'ailleurs.

 12   Maître Kehoe.

 13   M. KEHOE : [interprétation] A propos de cette communication et à propos de

 14   la dernière remarque qui vient d'être faite, puisqu'on nous a donné des

 15   cotes, je dirais que nous aimerions savoir en fait si le document a été

 16   communiqué en anglais, ce qui est une des obligations du Procureur.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Carrier, en quelle langue est-

 18   ce que ce document a été communiqué, parce qu'il se peut qu'en mars 2008,

 19   la traduction n'ait pas été terminée ?

 20   M. CARRIER : [interprétation] En fait il a été communiqué en B/C/S, je

 21   dirais, d'où ce que je vous ai dit, nous attendons la traduction.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous attendez la traduction depuis

 23   le mois de mars, c'est cela ?

 24   M. CARRIER : [interprétation] Non, non, mois j'avais cru comprendre qu'il

 25   n'y a pas de règle qui exige la communication en anglais.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'article 68(ii) indique que cela n'a

 27   pas besoin d'être traduit, s'il s'agit --

 28   M. CARRIER : [interprétation] Non, non, cela n'a pas été considéré comme un

Page 22665

  1   document au titre de l'article 68. Je vais vous expliquer en fait ce qui

  2   s'est passé.

  3   Parce qu'au départ, il y avait juste le nom de M. Dodig qui apparaissait

  4   dans le corps du document. Moi, je ne lis pas et je ne comprends pas le

  5   B/C/S, donc il a fallu que j'attende pour que l'on m'explique pourquoi son

  6   nom figurait dans ledit document, cela a pris un certain temps. Puis lundi,

  7   lorsque j'ai examiné tous les documents, je ne savais pas exactement ce

  8   qu'il en était. On nous a dit que M. Dodig allait être le témoin qui allait

  9   venir comparaître le lendemain, et c'est une des raisons pour lesquelles

 10   nous n'avons pas véritablement pris en considération ce document dans ce

 11   contexte, dans le contexte de cet article.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors il y a deux choses bien

 13   différentes. Premièrement, vous avez expliqué le temps qui s'est écoulé

 14   entre mars et septembre, puis, deuxièmement, cela est peut-être moins

 15   important, vous nous avez dit en fait que vous ne saviez pas si M. Dodig

 16   allait être entendu mercredi ou vendredi. Alors la première explication,

 17   c'est une explication qui porte sur six mois, la deuxième explication,

 18   c'est une question de deux jours.

 19   M. CARRIER : [interprétation] En fait c'est plus que six mois, puisque

 20   c'était mars 2008.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 2008, donc ça nous fait 18 mois.

 22   M. CARRIER : [interprétation] Oui, mais cela a été communiqué en B/C/S, le

 23   6 mars 2008.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc si nous faisons une recherche du

 25   nom du témoin même en B/C/S, nous devons obtenir au moins une indication de

 26   la pertinence de ce document eu égard à ce témoin; c'est cela ce que vous

 27   nous dites, Monsieur Carrier ?

 28   M. CARRIER : [interprétation] Oui, oui, parce que en fait, parfois

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  1   lorsqu'il y a des noms qui apparaissent, parfois vous avez le même nom ou

  2   un nom qui apparaît qui n'a aucune importance. Vous savez il y a des

  3   centaines de documents où l'on trouve le nom de M. Dodig. Par exemple, je

  4   pense à sa carrière médicale, ne serait-ce que pour cela. Donc c'est un

  5   processus qui est très lent, et nous sommes en -- c'est un processus en

  6   plus, manuel.

  7   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  8   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais ajouter quelque chose. Il y a

  9   86 documents qui figurent sur la liste des documents à utiliser pour le

 10   contre-interrogatoire, je dirais que ce document ne figure pas sur cette

 11   liste.

 12   M. CARRIER : [interprétation] Oui, je sais, je l'ai déjà dit ce matin.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous attendiez encore

 14   un document, dont vous attendiez plutôt la traduction.

 15   M. CARRIER : [interprétation] Mais c'est ce document-ci, justement.

 16   M. KAY : [interprétation] A propos de la communication, je viens

 17   d'apprendre que l'on a retrouvé ce document, c'est un document de 577

 18   pages, en croate. Il n'y a aucune description quant à la nature du

 19   document.

 20   Il ne s'agit pas seulement du nom de M. Dodig, car vous avez le nom

 21   de M. Cermak qui est mentionné également, d'où mon extrêmement

 22   préoccupation. Parce qu'il y a une référence que l'on trouve qui est une

 23   référence du témoin par rapport à M. Cermak, c'est une référence qui a est

 24   une référence à décharge, en quelque sorte, et mon estimé confrère le sait

 25   cela puisqu'il a étudié, examiné le document.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est justement l'un des

 27   problèmes qui se pose lorsque l'on communique tardivement les documents.

 28   Car d'après le Règlement, il faut que les documents soient communiqués à la

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  1   Chambre également.

  2   Donc parfois en fait, lorsque les documents sont communiqués tardivement,

  3   cela véritablement n'est pas nui à la partie en fait qui pâtit de cette

  4   communication tardive. Toutefois, puisqu'il semblerait qu'il s'agit de

  5   documents de nature à disculper, la Chambre doit être informée aussi

  6   rapidement que possible du fait que ce type de document qui est de nature à

  7   disculper n'est pas communiqué à la Défense.

  8   Alors je vais consulter mes collègues, pendant un petit moment à ce sujet.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 11   [Le conseil de la Défense se concerte]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, avez-vous quoi que ce soit à

 13   nous dire --

 14   M. KAY : [interprétation] Oui, pour vous tenir au courant de la dernier

 15   évolution parce que les turbines nous ont permis d'avoir un élément

 16   d'information supplémentaire.

 17   Alors le document à proprement parler n'a pas été communiqué. C'était un

 18   tableur. Le document à proprement parler ne se trouve pas dans le système

 19   des documents électroniques, donc il se trouve sur un tableau.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est quoi, il s'agit d'un index, quelle

 21   est la description --

 22   M. KAY : [interprétation] Ces documents demandés au titre d'assistance 750.

 23   M. CARRIER : [interprétation] Laissez-moi préciser quelque chose. Pour

 24   revenir sur ce que je vous disais tout à l'heure. Le document a été

 25   communiqué sous forme de CD.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, je suis tout à fait

 27   conscient du fait que vous êtes la victime de cette question de procédure.

 28   J'espère que vous comprendrez que la Chambre doit absolument régler ce

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  1   problème avant que nous ne continuions et même avant de décider de pouvoir

  2   continuer ou non.

  3   Donc je suppose que je m'exprime au nom de la Chambre et au nom des

  4   parties, je m'excuse de ce problème.

  5   Monsieur Carrier.

  6   M. CARRIER : [interprétation] Je m'excuse. Je m'excuse, peut-être que

  7   j'avais été interrompu, mais j'étais en train de vous dire que nous avons

  8   communiqué le document sous forme de CD le 6 mars exactement, alors pour

  9   corriger ce que vient de dire Me Kay. Moi, je suis tout à fait disposé à

 10   vous donner lecture de la référence au général Cermak qui est de nature à

 11   le disculper. Si cela peut vous aider --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, vous avez dit justement

 13   qu'il s'agissait d'un élément à décharge qui se trouve dans ce document

 14   communiqué si tardivement. Alors, bien entendu, la Chambre n'est absolument

 15   pas informée de ce qui est dit à propos de M. Cermak. Donc M. Carrier vient

 16   de nous présenter une suggestion il se propose de donner lecture de cette

 17   partie du document. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de marquer votre

 18   accord ou vous souhaitez préconiser une autre approche.

 19   M. KAY : [interprétation] Non, cela me semble très utile. Je dirais, pour

 20   le contexte, qu'il s'agit de ce témoin-ci qui mentionne certains faits dont

 21   M. Carrier peut nous donner lecture.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous ne vous opposez pas à ce que

 23   M. Carrier fasse ce qu'il a proposé.

 24   M. KAY : [interprétation] Non, non, pas du tout.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes invité, Monsieur Carrier, à

 26   nous donner lecture de l'extrait ou du passage qui, d'après ce que je crois

 27   comprendre, si j'ai bien compris vos propos ou les propos, sont d'après la

 28   Défense de M. Cermak de nature à disculper M. Cermak.

Page 22669

  1   M. CARRIER : [interprétation] Oui, il s'agit du passage où figure le nom de

  2   M. Cermak. Alors je vais vérifier qu'il s'agit bien de la bonne page.

  3   C'est la page numéro 3; c'est cela ?

  4   M. KAY : [interprétation] Oui.

  5   M. CARRIER : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Visiblement vous êtes d'accord à ce

  7   sujet.

  8   M. CARRIER : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites donc.

 10   M. CARRIER : [interprétation] Je vais vous donner le contexte --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. Je vous en prie, lisez-nous

 12   cela, parce que vous êtes d'accord à ce sujet -- Me Kay est d'accord pour

 13   que vous lisiez cela, ce passage. Donc avant que nous ne nous retrouvions à

 14   nouveau dans un débat qui porterait sur le contexte pour savoir s'il est

 15   approprié ou non, dans un premier temps, écoutons ce que vous avez à nous

 16   dire à propos de ce qui a été dit.

 17   M. CARRIER : [interprétation] Je cite :

 18   "Par ailleurs --"

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui s'exprime ?

 20   M. CARRIER : [interprétation] C'est M. Dodig.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, c'est M. Dodig qui s'exprime, très

 22   bien.

 23   M. CARRIER : [interprétation] Je cite :

 24   "Par ailleurs, vous avez le souhait positif du général Cermak qui

 25   souhaite régler cela aussi rapidement que possible, donc ça c'est d'un

 26   côté, mais de l'autre côté, ou par ailleurs, au sein de la caserne, à

 27   proprement parler, la tendance est de laisser partir ceux qui souhaitent

 28   partir; donc ceux qui se trouvent dans la caserne de l'ONURC et ainsi cela

Page 22670

  1   permettra d'éviter toutes sortes de possibilité."

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais, dans un premier temps,

  3   savoir à qui fait-on référence lorsque l'on dit qu'il y a des gens qui

  4   peuvent partir ou quitter la caserne de l'ONURC, c'est ça que M. Cermak

  5   veut solutionner.

  6   M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait. Puis il y a également la

  7   question de ces personnes qui partent --

  8   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  9   M. CARRIER : [interprétation] -- et cela est extrêmement pertinent --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   M. KAY : [interprétation] -- oui, parce que du fait de l'entreprise

 12   criminelle commune, c'est pour cela que cela a une pertinence.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends maintenant.

 14   Donc nous avons une information factuelle qui est de nature à disculper

 15   l'accusé, et le fait que, le passage a été lu, est une communication pour

 16   la Chambre, même si cela ne concerne pas évidemment toute l'intégralité du

 17   document, mais ce document a été communiqué tardivement. Mais le but de la

 18   communication du document est de permettre à la Chambre de se forger une

 19   opinion sur le résultat de la communication tardive pour l'équipe de la

 20   Défense qui a le plus à souffrir des conséquences de cette communication

 21   tardive.

 22   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie de votre aide, Monsieur le

 23   Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc M. Carrier nous dit ceci, et tant

 25   que le document a bel et bien été communiqué sous forme de CD et que ce

 26   document existe à la suite d'une demande d'entraide, et qu'à la suite de

 27   cette demande, le document a bien été communiqué dans le système des

 28   documents électroniques, voilà quelle est la situation. La référence n'est

Page 22671

  1   pas très précise mais, apparemment, cela fait partie des documents qui ont

  2   été reçus à la suite d'une d'entraide, et donc le document a été communiqué

  3   sur CD-ROM.

  4   J'essaie dans un premier temps de déterminer ce qui s'est passé. J'aimerais

  5   savoir si vous avez des observations à faire à propos de la partie

  6   factuelle de mon intervention ?

  7   M. KEHOE : [interprétation] Ma seule réponse, après avoir entendu les

  8   observations de M. Carrier, sera la suivante : nous n'avons pas ce document

  9   de 577 pages, donc nous aimerions au moins avoir le document, c'est un

 10   minimum. Je pense que nous avons été très circonspect nous avons essayé de

 11   retrouver le document mais le fait est que nous n'avons pas le document.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous nous dites que -- qu'est-ce

 13   que vous nous dites, que vous ne trouvez pas le document pour le moment, ou

 14   qu'il n'a jamais été communiqué ?

 15   M. KEHOE : [interprétation] Moi, d'après mes notes, ce que j'en conclus,

 16   c'est que ce document n'a jamais été communiqué à la Défense de Gotovina.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'en est-il des autres parties ?

 18   M. MIKULICIC : [interprétation] C'est exactement la même situation pour la

 19   Défense de M. Markac, c'est ce qu'on vient de me dire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, est-ce que la Défense de M.

 21   Cermak avait reçu ce CD-ROM ?

 22   M. KAY : [interprétation] Jusqu'à présent, notre recherche n'a pas abouti.

 23   Alors nous sommes en train de voir quelles sont les autres références,

 24   parce que nous avons tout un arsenal de documents, mais -- alors je vais

 25   essayer de voir si nous pouvons le trouver dans d'autres parties de notre

 26   base de données, mais pour le moment, notre recherche n'a pas abouti.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc les parties ne sont pas d'accord à

 28   propos de la partie factuelle du fait qui a été présenté relative à la

Page 22672

  1   communication de ce document, donc ce qu'il a été que le document avait été

  2   reçu à la suite d'une demande d'entraide.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A partir du moment où nous savons ce qui

  5   s'est réellement passé sur le plan de la communication, la Chambre n'est

  6   pas d'avis qu'il convienne d'empêcher M. Carrier de poser des questions au

  7   témoin. Mais la Chambre se réserve le droit de voir quels sont les moyens

  8   qui devraient être mis à la disposition de la Défense dans le cadre des

  9   questions supplémentaires ou dans le cadre du contre-interrogatoire, eu

 10   égard à ces documents.

 11   D'ici au moment où nous aurions pris une décision définitive sur le sort à

 12   réserver à ce document, nous estimons qu'il convient de lui attribuer une

 13   cote aux fins d'identification.

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pense qu'il serait correct de donner la

 15   possibilité au témoin de prendre connaissance du document.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Oui, ce serait juste.

 17   Il y a six pages, si j'ai bien compris, Monsieur Carrier, de traduites ?

 18   M. CARRIER : [interprétation] Oui, six pages de traduites et 54 pages en

 19   tout.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais nous n'avons pas évoqué le reste

 21   des pages. Je ne sais pas si on peut inviter le témoin à parcourir le texte

 22   pour que cela lui rafraîchisse la mémoire.

 23   Mais j'aimerais savoir ce qu'en pensent les parties; alors, nous

 24   avons du temps pour examiner six pages ou 50 pages.

 25   Je pense que 15 à 20 minutes suffiraient pour les six pages. Donc,

 26   donnons au témoin 30 minutes, pour commencer.

 27   M. KAY : [interprétation] Il pourra répondre aux questions posées sur ces

 28   six pages.

Page 22673

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si on lui donne l'opportunité de

  2   les lire, tout d'abord.

  3   M. KAY : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  5   M. KAY : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

  7   M. KAY : [interprétation] Oui. Pour voir ce qui est dit --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, 15 minutes devraient suffire.

  9   M. KAY : [interprétation] Oui, mais s'il souhaite voir davantage le texte -

 10   - enfin, s'il souhaite voir plus de pages, effectivement, il faudra revoir.

 11   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 12   M. KAY : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Kehoe.

 14   M. KEHOE : [interprétation] En application de l'article 65 ter, nous

 15   réitérons notre requête aux fins de communication.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Carrier.

 17   M. CARRIER : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, c'est déjà sur

 18   CD.

 19   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 20   M. CARRIER : [interprétation] Cet après-midi, ça sera communiqué aux

 21   parties et un exemplaire sera apporté pour le témoin.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une impression du document sur papier ?

 23   M. CARRIER : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelles sont les six pages ? Comment

 25   est-ce qu'il s'y retrouvera ?

 26   M. CARRIER : [interprétation] Là où le nom apparaît -- où son nom apparaît.

 27   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 28   M. CARRIER : [interprétation] Donc, c'est pages 14 à 19 ou 20.

Page 22674

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, donc, vous -- nous

  2   allons vous accorder du temps pour que vous puissiez vous pencher sur

  3   l'extrait le plus important de ce document.

  4   Pages 14 à 20; c'est bien cela, en B/C/S, Monsieur Carrier ?

  5   M. CARRIER : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, je vous invite à lire les pages 14

  7   à 20, dans votre langue, et nous allons vous accorder un peu plus de temps

  8   pour que vous puissiez jeter un coup d'œil sur le reste du document. Mais

  9   d'après ce que j'ai compris, l'Accusation ne vous interrogera pas là-

 10   dessus.

 11   Maître Kay, est-ce que vous pensez que le témoin devrait lire la page 3

 12   également.

 13   M. KAY : [aucune interprétation] [hors micro]

 14   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 15   M. KAY : [interprétation] Oui, je viens de voir les six pages  et vous,

 16   vous verrez que cette page se trouve parmi celles-là.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, on s'est référé à la page 3 sur

 18   six.

 19   M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, sur les six. Donc, je comprends

 21   mieux.

 22   Monsieur Dodig, essayez, tout d'abord, de lire les pages 14 à 20 et puis

 23   essayez de voir en diagonale, rapidement, le reste, mais au vu des

 24   intentions annoncées, on ne vous interrogera pas là-dessus.

 25   Alors, je regarde l'heure. Nous allons faire une pause anticipée et puis,

 26   nous poursuivrons.

 27   Je vais vérifier auprès de M. le Greffier.

 28   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

Page 22675

  1    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, on vous remettra une

  2   impression sur papier de ce document. Donc, je vais vous demander de bien

  3   vouloir lire ces pages, et puis nous allons nous pencher sur quelques

  4   points de procédure.

  5   Madame l'Huissière, veuillez raccompagner M. Dodig.

  6   M. Dodig peut recevoir le document ? Toutes les dispositions ont été prises

  7   ?

  8   [Le témoin quitte la barre]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très brièvement, essayons de voir

 10   quelques points. Avant d'envisager les aspects pratiques, je devrais peut-

 11   être rendre deux décisions sur les visioconférences et sur les mesures de

 12   protection

 13   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les décisions que je souhaitais rendre

 15   concernent les Témoins IC-2 et IC-1 et ces décisions sont importantes parce

 16   qu'il convient de prendre des mesures pratiques pour organiser les

 17   audiences.

 18   Si j'ai bien compris, les conclusions de vos échanges d'hier, une solution

 19   serait d'entendre la déposition du témoin -- des Témoins IC-1 et IC-2 par

 20   visioconférence, la semaine prochaine, mercredi et jeudi.

 21   M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les décisions que je souhaitais lire, je

 23   ne sais pas si nous allons pouvoir en donner lecture intégralement. La

 24   Chambre de première instance a décidé d'agréer votre demande de procéder

 25   par visioconférence; donc, vous n'avez plus cet obstacle à franchir.

 26   Puis au stade où nous en sommes, tout un chacun s'efforce de voir si cela

 27   est faisable. Donc, nous avons bien accepté l'idée en soi, mais l'aspect

 28   pratique n'est pas sans difficulté parce qu'au même jour, on a prévu

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  1   d'autres visioconférences et en d'autres termes à la fois la Section des

  2   Victimes et des Témoins et les Services de Gestion des prétoires doivent

  3   s'assurer d'avoir suffisamment d'employés pour faire cela simultanément, ou

  4   bien pour reprendre rendez-vous pour une autre date, soit pour un autre

  5   affaire, soit pour les autres Chambres qui souhaitent procéder par

  6   visioconférence en même temps.

  7   Donc pratiquement le problème est plutôt complexe, donc nous sommes tout à

  8   fait favorable à procéder ainsi si toutefois cela peut se faire

  9   concrètement.

 10   Je dois dire que, pour l'instant, je ne suis pas en mesure de vous donner

 11   une décision finale. Nous ne savons pas encore ce qu'il en est. Nous devons

 12   attendre que toutes les parties intéressées aient fait le nécessaire pour

 13   s'assurer que cette visioconférence puisse s'inscrire dans le planning.

 14   Est-ce que vous avez des commentaires ? Sinon, je me propose de donner

 15   lecture des deux décisions par la suite nous ferons une pause et ceci

 16   permettra à M. Dodig d'avoir un moment supplémentaire même si vous n'avez

 17   pas envie d'écouter, écouter les décisions, que vous souhaitez passer ce

 18   temps à contacter les gens à l'extérieur du prétoire, la Chambre le

 19   comprendrait. Puis nous aurions du temps pour nous préparer pour la suite.

 20   Je commence, par conséquent, par cette décision, par notre décision qui

 21   concerne le Témoin IC-1, la décision qui concerne la visioconférence et les

 22   mesures de protection.

 23   Le 14 septembre 2009, la Défense Cermak a déposé une requête demandant des

 24   mesures de protection consistant à déformer les traits du visage et la voix

 25   et en demandant qu'un pseudonyme soit accordé au Témoin IC-1. La Défense

 26   Cermak a également demandé que la déposition du Témoin IC-1 soit faite par

 27   voie de visioconférence.

 28   En date du 17 septembre 2009, l'Accusation a répondu en laissant entendre

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  1   qu'elle n'entendait pas soulever une objection à l'une ou l'autre de ces

  2   requêtes. La Défense Gotovina et la Défense Markac n'ont pas répondu quant

  3   à elle.

  4   La Chambre se penchera tout d'abord sur la requête aux fins de

  5   mesures de protection. Comme cela a été dit dans les décisions préalables

  6   rendues de par le passé, la partie qui demande des mesures de protection

  7   doit démontrer qu'il existe un risque objectif qui pèse sur la sécurité ou

  8   le bien-être du témoin ou des membres de la famille du témoin, si on venait

  9   à apprendre que le témoin est venu déposer devant le Tribunal.

 10   Comme la Chambre le dit dans sa décision récente portant sur les

 11   mesures de protection à accorder au Témoin 13, le 8 juin 2009, il convient

 12   de voir si, même en accordant des mesures de protection, l'exception à la

 13   règle de la publicité des débats, le seuil à partir duquel on garantit les

 14   mesures de protection ne devrait pas être trop élevé. Par exemple, exclure

 15   les personnes qui n'ont pas fait l'objet de menaces ou d'harcèlement

 16   compromettrait l'objectif de la finalité de ces mesures, à savoir la

 17   protection des risques qui peuvent se produire comme résultat de la

 18   déposition.

 19   Alors quant à savoir ce qu'il en est du Témoin IC-1, c'est un Serbe

 20   de Croatie qui réside avec d'autres membres de sa famille en Croatie. Il se

 21   dit préoccuper pour ce qui est de lui-même et de sa famille, parce qu'il

 22   pense que cette déposition pourrait provoquer des réactions hostiles au

 23   sein de la communauté serbe de sa ville natale.

 24   On s'attend à ce que le témoin dépose au sujet du traitement qui lui

 25   a été réservé par les autorités croates après l'opération Tempête.

 26   Récemment le témoin a su qu'il y a eu des menaces et de l'harcèlement

 27   dirigé contre un autre témoin de la Défense, un Serbe qui vit dans la même

 28   ville et qui est venu déposer en l'espèce sur des événements comparables.

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  1   Cette personne s'est vue garantir des mesures de protection par la Chambre.

  2   Même si le Témoin IC-1 n'a pas fait l'objet de menaces, ni lui-même, ni

  3   d'ailleurs les membres de sa famille, la Chambre estime qu'il y a un risque

  4   que sa déposition dirige contre lui des personnes qui évoluent dans son

  5   entourage et que par conséquence il pourrait faire l'objet de menaces ou

  6   d'harcèlement comparables à ceux du témoin ci-dessus visé.

  7   Pour les raisons invoquées, la Chambre estime que la Défense Cermak a

  8   démontré qu'il existe un risque objectif qui pèse sur la sécurité et le

  9   bien-être du Témoin IC-1, si jamais on venait à apprendre qu'il est venu

 10   déposer devant ce Tribunal.

 11   Par conséquent, la Chambre octroi des mesures de protection

 12   consistant à déformer les traits du visage et la voix et accorde un

 13   pseudonyme à cette personne. Même si cela n'a pas été demandé par la

 14   Défense Cermak, la Chambre octroie également le droit à ce témoin d'être

 15   entendu à huis clos partiel pour des parties de sa déposition qui risquent

 16   de révéler son identité.

 17   La Chambre se penchera à présent sur la requête demandant une

 18   déposition par visioconférence. En application de l'article 81 bis du

 19   Règlement de procédure et de preuve du Tribunal, la Chambre peut ordonner

 20   que les débats se passent par visioconférence si cela correspond aux

 21   intérêts de la justice. Puisque cette norme est respectée, tout d'abord le

 22   témoin -- ce critère est satisfait si le témoin n'est pas capable de se

 23   rendre au Tribunal ou s'il a de bonnes raisons qui l'empêchent de venir au

 24   Tribunal. Si la déposition du témoin est suffisamment importante pour qu'il

 25   ne soit pas juste d'en priver la partie requérante.

 26   Troisièmement, s'il n'y a pas de préjudice par rapport aux accusés dans

 27   l'exercice de leurs droits à être confronté avec le témoin.

 28   Le témoin a 79 ans. Il a informé la Défense Cermak qu'il souffre d'une

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  1   arythmie cardiaque et du cancer du colon. Le témoin a récemment subi une

  2   opération et suit un traitement médical qui aggrave son état. Même s'il n'y

  3   a pas eu de fichier médical présenté et en l'absence d'objections soulevées

  4   par l'Accusation et par les autres parties, la Chambre estime que le témoin

  5   qui est âgé et qui est dans un état de santé délicat, donc présente une

  6   situation telle qu'il ne peut pas se déplacer au Tribunal pour déposer.

  7   Nous avons été notifiés sur le sujet de la déposition du témoin à venir sur

  8   sa substance et la Chambre estime que sa déposition soit suffisamment

  9   importante pour qu'il serait injuste d'en priver la Défense Cermak.

 10   Enfin la Chambre estime qu'aucune parties ne souffrira de préjudice dans

 11   l'exercice de leurs droits d'être confrontés au Témoin IC-1, si le témoin

 12   témoignage par visioconférence. Aucunes des parties n'a opposé d'objections

 13   à cette requête et toutes les parties auront la possibilité de contre-

 14   interroger le témoin.

 15   Par conséquent, la Chambre estime qu'il correspond aux intérêts de la

 16   justice de faire droit à la requête de la Défense Cermak d'entendre la

 17   déposition du Témoin IC-1 par visioconférence fait droit à cette requête en

 18   application de l'article 81 bis.

 19   Ainsi se termine la décision de la Chambre portant sur les mesures de

 20   protection et sur la déposition par visioconférence du Témoin IC-1. Je me

 21   propose à présent de rendre la décision que la Chambre, sur la requête de

 22   la Défense Cermak, demande une visioconférence pour la déposition du Témoin

 23   IC-2. En date du 14 septembre 2009, la Défense Cermak a déposé une requête

 24   demandant que la déposition du Témoin IC-2 se passe par visioconférence. Le

 25   28 septembre 2009, l'Accusation a répondu en faisant savoir qu'elle

 26   n'allait pas soulever d'objection à cette requête. La Défense Gotovina et

 27   la Défense Markac n'ont pas répondu.

 28   Au titre de l'article 81 bis du Règlement de procédure et de preuve du

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  1   Tribunal, la Chambre peut ordonner que les débats se passent par

  2   visioconférence si cela correspond aux intérêts de la justice. Ce critère

  3   est satisfait, si premièrement le témoin n'est pas capable de se rendre au

  4   Tribunal ou s'il a de bonnes raisons de refuser de s'y rendre.

  5   Deuxièmement, si la déposition du témoin est suffisamment importante pour

  6   qu'il ne soit pas juste de demander à la partie requérante de s'en passer.

  7   Troisièmement, si les accusés ne sont pas préjugés dans l'exercice de leur

  8   droit à voir le témoin, le Témoin IC-2 est âgé de 83 ans. La Défense Cermak

  9   soumet qu'il est -- que sa santé est fragile, et qu'il souffre d'asthme.

 10   Récemment le témoin a reçu des soins à l'hôpital local, et son médecin a

 11   dit à un membre de la Défense Cermak, que l'état de santé du témoin est tel

 12   que -- et a été causé par le stress dû aux menaces qu'il a reçues eu égard

 13   à sa déposition devant le Tribunal. Même s'il n'y a pas eu de fichier

 14   médical présenté, en l'absence d'objection soulevée de la part de

 15   l'Accusation et des autres parties, des autres équipes de la Défense, la

 16   Chambre estime qu'au vu de l'âge avancé du témoin et de son état de santé,

 17   il n'est pas en mesure de se déplacer au siège du Tribunal pour déposer.

 18   Après avoir été informé de la teneur de la déposition future du témoin, la

 19   Chambre estime que celle-ci sera suffisamment importante pour estimer qu'il

 20   serait injuste d'en priver la Défense Cermak.

 21   Enfin, la Chambre constate qu'il n'y aura de préjudice subi par aucune des

 22   parties quant à leur droit d'être confronté au Témoin IC-2, si le témoin

 23   dépose par visioconférence. Aucune des parties n'a soulevé d'objection

 24   suite à cette requête et toutes les parties auront la possibilité de

 25   contre-interroger le témoin.

 26   Par conséquent, la Chambre estime qu'il correspond aux intérêts de la

 27   justice de faire droit à la requête de la Défense Cermak, d'entendre le

 28   Témoin IC-2 par visioconférence, et par conséquent, faire droit à la

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  1   requête en application de l'article 81 bis.

  2   Ainsi se termine la décision de la Chambre portant sur la déposition du

  3   Témoin IC-2 par visioconférence.

  4   Je regarde l'heure, à supposer que l'on reprenne à 12 heures 15, est-ce

  5   qu'on aura la possibilité d'en terminer avec la déposition de M. Dodig,

  6   aujourd'hui ?

  7   Je sais qu'au vu de nos échanges -- nos derniers échanges, il y a un

  8   certain nombre d'incertitude.

  9   Maître Kehoe, vous êtes debout même avant que je ne pose la question, mais

 10   peut-être que vous vouliez parler d'autre chose.

 11   M. KEHOE : [interprétation] C'est au sujet des débats que nous avons eus

 12   précédemment. Nous avons continué de rechercher cette transcription du 23

 13   août 1995, et en fait, je dois informer la Chambre du fait que c'est un

 14   document qui est déjà versé au dossier et qui constitue la pièce D426.

 15   C'est une autre source qui nous l'a fournie, et nous l'avons versée au

 16   dossier. Ce n'est pas le bureau du Procureur qui nous a communiqué cela,

 17   mais ça a été versé par nous. Je tenais à en informer la Chambre, puisque

 18   depuis que nous en avons parlé, nous avons continué de rechercher, chercher

 19   le document. Donc page 9, de la pièce D426, vous verrez que c'est là que se

 20   trouvent l'extrait qui nous intéresse, et puis aussi 89.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce 426, c'est une transcription

 22   d'une réunion gouvernementale, en date du 23 août 1995. Je vais voir

 23   maintenant ce qui en est de la traduction.

 24   Oui, cela aurait permis au témoin de ne pas dire ce qu'il a dit, à savoir

 25   en voyant en page de garde qu'il n'y a pas son nom, donc de dire qu'il ne

 26   s'est pas trouvé à cette réunion.

 27   La Chambre est pleinement consciente des difficultés que les parties

 28   rencontrent en gérant un volume très considérable de documents, des

Page 22683

  1   documents communiqués, des documents versés au dossier. La Chambre

  2   comprendrait également si la leçon tirée de cela par les parties serait

  3   qu'avant de reprocher aux autres de ne pas avoir fait leur travail --

  4   Monsieur Carrier, vous devez vous féliciter qu'il n'y ait pas eu

  5   d'autres obligations, c'est comme dans une pièce de Molière, personnage,

  6   dit : "Je n'étais même pas;" lorsque M. Jourdain [phon] dit : "Mais je ne

  7   savais même pas que je faisais des vers."

  8   Donc en fait, nous n'avions pas du tout un problème de communication.

  9   En fait, maintenant cela est au compte rendu d'audience. Ce que cela nous

 10   montre, comme j'ai essayé de le faire au départ, sur des faits et c'est

 11   uniquement à partir du moment où nous sommes sûrs de savoir que les faits

 12   sont tels qu'il y a lieu de réagir avant de passer du temps à polémiquer ou

 13   à avoir un débat houleux sur des questions qui finalement en fait n'étaient

 14   pas des questions.

 15   Maître Kehoe, vous nous avez aidé absolument à éviter de perdre encore plus

 16   de temps, là-dessus.

 17   M. KEHOE : [interprétation] Je ne vais pas prolonger cela, Monsieur le

 18   Président, pour ce qui est de cette communication. Un problème pour nous,

 19   c'est que nous n'avons pas reçu ce document de 177 pages que nous aurions

 20   aimé pouvoir examiner. Nous aimerions connaître ce qui figure dans cette

 21   communication. Ce document précis vient d'une autre source et non pas du

 22   bureau du Procureur.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends la nature de votre requête

 24   consistant à demander à avoir accès  au 177 pages. C'est tout à fait clair.

 25   Monsieur le Procureur, je pense que vous donnerez satisfaction à Me Kehoe,

 26   qui s'est avéré -- vous a apporté son concours, d'une certaine façon.

 27   M. CARRIER : [interprétation] Absolument.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause

Page 22684

  1   et nous reprendrons l'audience à midi 20.

  2   --- L'audience est suspendue à 12 heures 02.

  3   --- L'audience est reprise à 12 heures 25.

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, avez-vous eu la

  6   possibilité de lire les pages qui nous intéressent ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur, continuez, je

  9   vous prie.

 10   M. CARRIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Pouvons-nous avoir la pièce D426 à l'écran, s'il vous plaît. Pouvons-nous

 12   passer à la page 9 de la version anglaise. C'est un document qui a déjà le

 13   statut de pièce à conviction. Peut-être devrions-nous commencer par la page

 14   8. Page 14, en version B/C/S.

 15   Q.  Monsieur Dodig, vous pouvez voir que c'est là que vous avez pu passer

 16   en revue, votre nom apparaît en haut de la page. Je suppose que vous avez

 17   donc pu relire -- ou plutôt lire tout cela. Je voudrais donc vous demander

 18   si vous êtes amené de par cela revoir votre position concernant la question

 19   que je vous ai posée précédemment, à savoir si vous aviez été présent à

 20   cette réunion au cours de laquelle vous avez abordé la question des

 21   différentes catégories de Serbes qui restaient en Krajina, et également les

 22   différents problèmes qui se présentaient, le nombre de Serbes restant en

 23   Krajina; alors avez-vous pu revoir tout cela maintenant, l'examiner ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Donc est-ce que vous aviez simplement oublié cela, ou pouvez-vous

 26   expliquer comment il se fait que vous ayez d'abord répondu ?

 27   R.  Non, je n'avais pas oublié. Quoi donc ?

 28   Q.  Alors, Monsieur Dodig, je vous ai posé une question très spécifique,

Page 22685

  1   vous avez d'abord répondu "Non," à la question de savoir si vous aviez été

  2   présent à cette réunion où on distinguait différentes catégories de Serbes

  3   ? Puis vous avez répondu "Non," pour ce qui était de savoir si vous aviez

  4   abordé ou non certains problèmes, si vous avez été présent à cette réunion,

  5   on a discuté de certains problèmes. Est-ce que c'était un problème dans la

  6   façon dans votre possibilité de vous souvenir de certaines choses ?

  7   R.  Je reconnais qu'il y a eu un manque de précision, Monsieur le

  8   Procureur. On parle ici ou plutôt il est question d'une réunion du

  9   gouvernement et non pas de mon bureau. Je ne peux pas me rappeler tout ce

 10   qui s'est passé il y a 15 ans. Je maintiens tout ce que j'ai dit. S'il y a

 11   une contradiction ou une incohérence cela est dû certainement au fait que

 12   je n'ai pas réussi à me rappeler quelque chose. Toutefois, si vous

 13   rafraîchissez ma mémoire je serais certainement en position de lever ces

 14   imprécisions. Je ferais de mon mieux en tout cas.

 15   M. CARRIER : [interprétation] Alors passons à la page 9, Monsieur le

 16   Greffier, s'il vous plaît, en version anglaise, je crois que c'est la page

 17   15, de la version B/C/S.

 18   Q.  Monsieur Dodig, vers le milieu de la page anglaise vous parlez des

 19   casernes de l'ONURC à Knin et vous décrivez un problème, alors vous

 20   décrivez une situation qui est assez problématique, vous dites qu'il y a

 21   des blessés et que la situation dans son ensemble est problématique du

 22   point de vue des soins de santé qui peuvent être fournis et de l'hôpital;

 23   la fourniture de lits, notamment pour des adultes mais également des

 24   enfants.

 25   Alors je voudrais vous demander d'expliquer les commentaires que vous

 26   faites ici lors de cette réunion du gouvernement par rapport à votre

 27   déclaration dans son paragraphe numéro 16. Vous dites :

 28   "En effet, à cet endroit, que la situation s'était complètement

Page 22686

  1   apaisée au moment de votre -- après avoir visité, après quelques visites au

  2   camp de l'ONURC, et vous faites état d'une situation qui du point de vue

  3   médical ne pose aucun problème."

  4   Alors pouvez-vous expliquer pourquoi lors de cette réunion du gouvernement

  5   on voit une interprétation tout à fait différente de ces mêmes événements ?

  6   R.  Je n'arrive pas à me rappeler dans quelle mesure lors de cette réunion

  7   du gouvernement, j'ai parlé de cette situation en disant qu'elle était,

  8   elle se présentait ainsi comme c'est indiqué dans ce document, ou bien s'il

  9   s'agissait de la situation telle qu'on me l'avait rapporté. Mais, en tout

 10   cas, pour ce qui est de ma visite au camp de réfugiés de l'ONURC, comme

 11   nous l'appelions, la situation est telle que je l'y ai constatée du point

 12   de vue humanitaire et c'était bien du point de vue humanitaire que je l'ai

 13   examiné et non pas d'un point de vue politique.

 14   Dès le jour suivant, nous avons réagi sans que le gouvernement -- que

 15   ce soit d'autre soit au courant, nous avons envoyé un camion de matériel

 16   médical sur place parce que je savais qu'elle était l'orientation politique

 17   générale en la matière et je savais comment nous devions réagir dans ce

 18   genre de situation. Quant à mon interprétation de la situation et cette

 19   distinction entre quatre catégories de Serbes, c'est quelque chose qui ne

 20   résulte absolument pas de recherches scientifiques ou de critères

 21   scientifiques mais qui est fondé sur mon observation. Il s'agit de

 22   catégories qui ont été improvisées par moi dans un instant bien particulier

 23   parce qu'il y avait mille et un autres problèmes qui se présentait.

 24   Ultérieurement, les gens ne se sont pas du tout intéressés à cela parce

 25   qu'ils ont obtenu ce dont ils avaient besoin, ce qu'ils avaient demandé.

 26   Ils ont commencé à quitter ce camp.

 27   Il s'agissait de savoir s'ils allaient partir ensemble dans une me

 28   direction; certains sont partis pour l'étranger, et maintenant lorsque je

Page 22687

  1   me penche à nouveau sur ce rapport et la façon dont nous nous sommes

  2   entretenus ainsi que sur les réactions et celles du gouvernement, je peux

  3   dire qu'aujourd'hui encore, je suis fier de ce que nous avons fait parce

  4   que nous ne considérions pas ces personnes comme des ennemis mais comme des

  5   êtres humains à qui il fallait venir en aide. 

  6   Par conséquent, je ne sais pas ce que je pourrais vous répondre tout

  7   à fait concrètement s'il y a quoi que ce soit que vous souhaitez soulever

  8   de façon plus précise, allez-y, je vous en prie.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, je vous prie de bien

 10   vouloir restreindre le champ de vos réponses à ce qui vous est demandé.

 11   Mais, manifestement, Monsieur le Procureur, le témoin a du mal à donner des

 12   réponses plus précises, donc peut-être que vous devriez essayer de l'y

 13   inciter, Monsieur le Procureur. 

 14   M. CARRIER : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur le Témoin, ce qui m'intéresse c'est la différence entre ce que

 16   vous dites dans cette réunion du gouvernement et ce que vous dites dans

 17   votre déclaration, de formulation différente.

 18   R.  Je voudrais que vous m'indiquiez où se trouvent ces différences

 19   significatives.

 20   Q.  J'accepte votre réponse comme signifiant que vous ne voyez pas de

 21   différences significatives. Nous allons continuer.

 22   En page 16 de votre déclaration, vers la moitié de la page, près du bas de

 23   la page en fait qui se trouve dans la version anglaise en page 9, vous

 24   abordez le problème particulier des casernes de l'ONURC. L'une des

 25   questions que vous abordez la présence des médias et le problème de la soi-

 26   disant -- d'unitaire du soi-disant de nature informative la façon dont des

 27   personnes qui d'une certaine façon n'ont pas participé à une rébellion

 28   armée contre la Croatie serait censé être séparé de ceux qui y ont

Page 22688

  1   participé.

  2   Le paragraphe continue :

  3   "D'un côté, c'est le général Cermak et qui, dans ses meilleures intentions,

  4   souhaitent -- avec les meilleures intentions, souhaitent résoudre cela dès

  5   que possible alors que d'un autre côté il y a une tendance à l'intérieur

  6   même des casernes à laisser partir quiconque souhaite partir, le laisser

  7   partir librement."

  8   Alors ma question est la suivante : ce dont vous parlez ici c'est que le

  9   général Cermak insistait pour -- qu'il y ait des interviews des personnes

 10   qui se trouvaient au sein du camp avant qu'on ne les laisse partir, n'est-

 11   ce pas ?

 12   R.  Pour autant que je m'en souvienne, le général Cermak a dit qu'il devait

 13   s'entretenir avec le commandant du camp et convenir avec lui de la façon de

 14   trouver une solution à cette situation.

 15   Q.  Cela concerne les interviews, cependant, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je suppose que oui.

 17   M. CARRIER : [interprétation] Alors si nous pouvions passer à la page 17 en

 18   B/C/S qui est donc au paragraphe numéro 2 de la version en B/C/S et c'est

 19   le dernier paragraphe de la page 9 de l'anglais.

 20   Q.  On vous attribue les propos suivants, Monsieur Dodig, pour ce qui

 21   concerne les personnes se trouvant à l'intérieur du camp de l'ONURC, je

 22   cite :

 23   "Concernant leur attitude pour ce qui est de quitter la Croatie, la plupart

 24   d'entre eux souhaitent partir, à peu près 70 % d'entre eux, il y a aussi

 25   une fraction moins importante d'entre eux qui n'arrivent pas à prendre une

 26   décision compte tenu du fait que leur décision dépend de l'état de leur

 27   maison; la question est donc de savoir si cette maison a été incendié ou

 28   non, et cela constitue souvent une condition préalable à toute prise de

Page 22689

  1   décision. Ils ont demandé à ce qu'on les autorise à sortir pour qu'ils

  2   puissent se rendre sur place et se rendre compte de l'état de leurs biens."

  3   Alors dans votre déclaration, vous ne mentionnez à aucun moment que les

  4   personnes avec qui vous avez parlé au sein du camp de l'ONURC avaient mis

  5   une condition à leur décision à savoir en fonction de l'autorisation qui

  6   leur serait donné ou non par le chef de la police de se rendre sur place

  7   pour constater l'état de leurs biens.

  8   Pouvez-vous expliquer le fait de ne pas avoir mentionné cela ?

  9   R.  Oui. Je n'ai pas mentionné cela dans ma déclaration car autrement je

 10   pourrais témoigner pendant des jours entiers à ce sujet.

 11   Je peux mentionner des dizaines d'exemples de personnes que j'ai aidées à

 12   sortir et je n'ai pas considéré comme nécessaire de le mentionner dans ce

 13   prétoire. Lorsqu'ils disaient qu'ils voulaient partir et ils étaient

 14   apeurés, et par ailleurs ils étaient également curieux de voir ce qui

 15   s'était passé. La plupart des gens qui n'était pas, la plupart des gens

 16   n'étaient pas originaires de Knin même mais des environs.

 17   Donc il fallait disposer d'une période de temps afin de leur permettre de

 18   voir ce qu'il en était. Il y a eu aussi des cas de personnes qui étaient

 19   parties et d'autres qui avaient décidé de leur propre gré de rester.

 20   Souvent, il y a eu aussi des personnes qui se sont cachées alors qu'elles

 21   se sentaient complètement innocentes et la question pour elles était plus

 22   de savoir si elles allaient disposer de moyens suffisants pour subsister,

 23   si elles allaient avoir un travail, donc il s'agissait de questions qui

 24   étaient purement pratiques et non pas de nature politique pour ce qui était

 25   de savoir si elles allaient rester ou non.

 26   Q.  Je voudrais juste que nous attendions que l'interprétation finisse

 27   avant que vous ne continuiez.

 28   M. CARRIER : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 19 en B/C/S -

Page 22690

  1   -

  2   Q.  Alors quand vous parliez du bas de la page 10, vous parliez du nombre

  3   de Serbes qui étaient restés en territoire temporairement occupé. Vous avez

  4   estimé leur nombre à 2 000 à 2 500 citoyens appartenant au groupe national

  5   serbe.

  6   Dans votre déclaration, vous ne faites pas non plus état à aucun endroit de

  7   ces chiffres, pouvez-vous expliquer pourquoi ?

  8   R.  Je n'ai tout simplement pas estimé qu'il se serait agi là d'une donnée

  9   importante.

 10   Q.  Monsieur Dodig, lorsque je vous ai demandé, plus tôt, aujourd'hui, de

 11   nous en dire plus concernant les déclarations publiques que vous avez

 12   faites concernant ce Tribunal, vous avez répondu que vous ne vous êtes pas

 13   exprimé concernant les travaux du Tribunal, mais plutôt concernant ses

 14   motifs, ses motivations. Mais, moi, j'avance que vos commentaires -- vos

 15   déclarations allaient au-delà des simples motivations du Tribunal. Je fais

 16   référence ici, au document, qui porte la cote 7428 dans la liste 65 ter que

 17   nous avons commencé à examiner précédemment. C'est -- pour être tout à fait

 18   clair, cet article est paru dans Slobodna Dalmacija, à la date du 30

 19   janvier 2001, où certains commentaires vous sont attribués. Je vais lire la

 20   partie en question, je cite :

 21   "'Le Tribunal de La Haye est un Tribunal politique. Il dispose de moyens

 22   financiers, de pouvoir, il a les médias de son côté et également, une -- le

 23   pouvoir des forces armées, mais il n'a pas de son côté le pouvoir de la

 24   morale et il sera amené, tôt ou tard, à se fourvoyer ou à faire un faux

 25   pas' avertit Dodig, avançant que les jugements du Tribunal sont sans

 26   valeur, à moins qu'ils soient perçus comme tels."

 27   Alors, vous souvenez-vous, Monsieur Dodig, d'avoir donné ce type de

 28   déclaration ?

Page 22691

  1   R.  Non. J'ai fréquemment parlé de ma position pour ce qui concerne le

  2   TPIY. Cependant, je ne me rappelle pas quand j'aurais pu donner ces

  3   déclarations et je suis tout à fait certain de ne pas avoir donné

  4   l'autorisation qu'un tel texte soit publié.

  5   Par conséquent, il peut s'agir, ici, d'une libre interprétation du

  6   journaliste. Si vous me demandez, en revanche, sur mon opinion, quelle est

  7   mon opinion, je peux vous la donner. Je considère que ce que nous avons

  8   ici, c'est une interprétation libre du journaliste.

  9   Q.  Alors, est-ce que vous êtes d'accord avec le sentiment qui est exprimé

 10   ici ?

 11   R.  Je n'irais pas -- même sans -- au-delà du simple sentiment, je n'ai

 12   certainement pas parlé d'armée parce que le Tribunal n'a pas de forces

 13   armées à sa disposition, c'est absurde.

 14   Il y a beaucoup -- donc il faut aussi tenir compte du fait que l'on change

 15   -- l'on est amené à changer de position au fur et à mesure que l'on apprend

 16   des faits nouveaux. Le fait que quelque chose ait été déclaré par moi, en

 17   2001, ne signifie pas qu'aujourd'hui, sous l'influence d'événements

 18   nouveaux et de faits nouveaux que j'ai appris, je déclarerais exactement la

 19   même chose car tout cela influence mon opinion et mon point de vue.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, le Procureur vous

 22   demande si le sentiment qui est exprimé dans cette situation correspond à

 23   ce que vous avez dit. Vous commencez à nous expliquer que vous avez été

 24   amené à changer de point de vue et que vous n'avez certainement jamais dit

 25   que le Tribunal avait une armée.

 26   Doit-on comprendre cela que le sentiment exprimé en 2001

 27   correspondait bien à votre opinion, si l'on met de côté ce point sur une

 28   armée ? J'essaie de comprendre ce que vous avez dit parce que M. le

Page 22692

  1   Procureur s'est concentré sur ce que vous avez dit à l'époque, alors que

  2   vous avez dit que vous n'envisagez plus les choses de cette manière.

  3   Est-ce que ça signifie que cette position telle qu'elle est exprimée

  4   ici, mis à part ce point sur une éventuelle armée, reflète plus ou moins la

  5   position qui était la vôtre, à l'époque ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] La question qui est celle de savoir

  7   quelle était ma perception du TPIY ou quelle est ma perception du TPIY

  8   aujourd'hui est une question qui exigerait beaucoup plus de temps pour que

  9   je puisse l'expliciter que ce qui -- à laquelle je ne peux pas répondre

 10   simplement par oui ou non. Je me sens profondément blessé d'être amené à

 11   défendre des personnes honorables dont j'estime qu'elles ne sont

 12   certainement pas coupables de ce pour quoi elles sont poursuivies. C'est

 13   cela qui est à l'origine de ma position affective concernant ce Tribunal.

 14   Alors conformément à ce que j'ai dit au tout début de ma déposition,

 15   j'ai dit -- j'ai prêté serment en disant que j'allais dire toute la vérité

 16   et rien que la vérité et je ne peux pas, en ce moment précis, vous mentir à

 17   vous, ni me mentir à moi-même. J'ai mes propres positions concernant ce

 18   Tribunal, mais je ne souhaite certainement pas que ces positions

 19   influencent votre jugement ou votre attitude concernant les personnes qui

 20   sont ici mises en accusation. Je suis profondément convaincu que si ces

 21   personnes n'avaient pas été là, les événements particulièrement

 22   regrettables et graves qui se sont produits après l'opération Tempête

 23   auraient été pires encore. Sans connaître le contexte des événements,

 24   lorsque l'on s'exprime sur la période dans laquelle ces événements se sont

 25   produits, on est souvent amené à parvenir à des conclusions inexactes ou

 26   fausses et non pas seulement à avoir une perception différente de la chose.

 27   Je suis profondément convaincu, en tant que médecin et en tant qu'être

 28   humain, que ceux qui ont commis des actes horribles et que l'on ne peut que

Page 22693

  1   réprouver, ne sont pas ici, dans ce prétoire et ne sont pas traduits en

  2   justice, de façon générale, pas seulement en Croatie, mais également dans

  3   le monde entier. C'est dans la société de tous les pays en général qu'on

  4   trouve une proportion peut-être de 15 à 20%, seulement des psychopathes qui

  5   sont à l'origine d'actes aussi répréhensibles, qui se trouvent être

  6   traduits en justice. Et c'est là, la raison des positions qui sont les

  7   miennes.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay.

  9   M. KAY : [interprétation] Je voudrais peut-être demander une précision.

 10   Vous avez dit précédemment être préoccupé ou embarrassé par rapport -- vous

 11   êtes préoccupé par rapport au jugement qui est attendu par rapport aux

 12   personnes qui sont poursuivies. Vous avez dit :

 13   "Je suis embarrassé d'avoir à formuler des jugements concernant les

 14   personnes qui sont mises en accusation et c'est la raison pour laquelle

 15   j'ai une position affective par rapport au Tribunal."

 16   Alors, c'est la première partie de la phrase que vous avez prononcée. Je

 17   voudrais vous demander d'expliquer ce que vous venez de dire exactement.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Les réponses que je dois donner en tant que

 19   témoin, qui sont parfois très brèves, ma déposition, en général, amène une

 20   situation dans laquelle il est possible de parvenir à des conclusions

 21   fausses. Moi, je perçois ma propre position comme étant partie intégrante

 22   de ces personnes ici mises en accusation. Si j'avais connaissance que l'une

 23   quelconque de ces personnes avait, directement ou indirectement ou par

 24   manquement, contribué ou aidé à ce qu'au fait que ces actes criminels aient

 25   été commis, croyez que je ne serais absolument pas disposé, ni à vivre dans

 26   ce pays, ni à m'identifier avec cette société, ni avec les personnes qui

 27   sont mises en accusation ici.

 28   Je connais tout le sens du sacrifice avec lequel je suis entré dans

Page 22694

  1   ce prétoire et ces personnes, également, sont entrées dans ce prétoire. Je

  2   sais que les destins individuels ne sont pas le centre de votre attention,

  3   mais, moi, j'en resterai à ce proverbe juif qui dit que :

  4   "Le destin d'un homme c'est le destin du monde entier et de

  5   l'humanité toute entière."

  6   C'est là la raison de la position qui est la mienne, et c'est

  7   pourquoi je me sens aussi -- je sens qu'en participant en tant que témoin à

  8   ce procès je participe aussi au jugement qui sera prononcé contre ces

  9   personnes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur, vous pouvez

 11   continuer.

 12   M. CARRIER : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions. Merci.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que je donne la possibilité aux

 15   parties de vous poser des questions supplémentaires, j'aimerais savoir ce

 16   qui suit : vous avez à propos de cette réunion du 23 août qu'il y avait des

 17   personnes blessées, et j'aimerais vous demander d'étoffer un peu votre

 18   propos, qui était blessé exactement, de quel type de blessure, s'agissait-

 19   il pour ce qui est des blessures que vous avez vues ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma déclaration, j'ai mentionné que

 21   j'avais vu des blessures, certes. Mais j'ai vu des jeunes gens qui étaient

 22   recouverts de couvertures jusqu'à la taille, jusqu'à la ceinture ou jusqu'à

 23   la taille, et ces personnes étaient allongées. Donc je leur ai serrés la

 24   main, bon, j'en ai conclu que ces personnes n'avaient que des blessures

 25   légères et, en fait, qu'il ne s'agissait même pas de blessures qui

 26   saignaient. Alors, pour moi, ce fut un véritable dilemme moral : devais-je

 27   réagir en tant que médecin ou en tant que représentant des autorités

 28   croates ? Parmi les personnes à qui j'ai serré la main, je dirais qu'il n'y

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  1   en avait aucun qui avait de la fièvre. Bien sûr, je ne peux pas l'avancer

  2   avec une certitude absolue. Mais ils avaient suffisamment de forces, de

  3   poigne dans la main, et je le peux dire parce que ça fait des décennies que

  4   j'exerce mon métier de médecin donc j'ai une certaine expérience, et je

  5   peux dire en voyant un problème médicale ce dont il s'agit. Donc j'ai

  6   supposé que ces personnes souffraient d'un virus.

  7   Et d'ailleurs, bon, ils bougeaient sous leurs couvertures. Je pouvais dire

  8   qu'ils souffraient d'autres problèmes. Bon, ces personnes étaient jeunes,

  9   elles avaient un âge compris entre 20 et 35 ans. Et d'ailleurs, même lors

 10   d'une conversation qui n'a rien à voir avec le sujet, une conversation avec

 11   feu M. Pupovac, qui était le président du conseil pour les réfugiés, il m'a

 12   dit, S'il y a parmi ces personnes quelqu'un qui a besoin d'une assistance

 13   médicale, indique-le-moi, et je verrais ce que je peux faire. Donc c'est ce

 14   que je lui ai dit et il a dit : "Non, non, il n'y a pas de problème mais je

 15   vous tiendrais au courant si cela est nécessaire." Donc, bien sûr, ces

 16   personnes n'avaient pas été blessées à la suite d'un match de football.

 17   Mais comme je l'ai dit, lors de la réunion du cabinet, c'est ce que

 18   j'ai dit, en fait, et comme je l'ai dit également, essayer de trouver une

 19   solution à ce problème à ce moment-là aurait eu des conséquences beaucoup

 20   plus négatives que positives à ce moment-là, bien sûr.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dodig, une question vous

 22   avait été posée -- Monsieur Dodig, disais-je, vous aviez demandé à M.

 23   Carrier de vous expliquer quelles seraient les divergences entre ce que

 24   vous avez dit lors de cette réunion du 23, et ce qui figure dans votre

 25   déclaration.

 26   Alors dans votre déclaration, premièrement, vous dites qu'il n'y

 27   avait pas de blessé, alors que lors de la réunion gouvernementale les

 28   propos que vous avez tenus et qui ont été consignés étaient qu'il y avait

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  1   des personnes blessées et qu'il y avait une situation sanitaire

  2   problématique.

  3   Alors si nous nous plaçons ou nous replaçons dans le

  4   contexte, sans oublier la réponse que vous venez d'apporter, d'aucun

  5   pourrait penser que les divergences entre ce que vous avez dit à la réunion

  6   du gouvernement et ce que vous avez dit dans la déclaration sont comme suit

  7   : parce que dans la déclaration vous décrivez en fait une situation qui est

  8   la situation de personnes qui simulent la maladie, qui font semblant d'être

  9   blessées, et dont vous, vous êtes parfaitement conscient du fait qu'ils

 10   essayaient seulement de se cacher et que vous n'avez rien dit à ce sujet.

 11   Alors que lors de la réunion gouvernementale l'impression que vous donnez

 12   est une impression tout à fait ou peut être comprise de façon tout à fait

 13   différente, à savoir que les personnes étaient blessées et qu'il y avait

 14   vraiment un problème sanitaire qui commençait à se poser.

 15   Alors je pense que c'était justement l'un des exemples auquel pensait

 16   M. Carrier lorsqu'il vous a demandé d'expliquer les décalages entre la

 17   description que vous faites à la page 8 de votre déclaration et les mots

 18   que vous avez prononcés lors d'une réunion gouvernementale.

 19   Est-ce que vous pourriez me donner une explication à ce sujet ? Je ne

 20   vous invite absolument pas à nous répéter ce que vous avez fait exactement.

 21   Je vous invite par contre à nous expliquer pourquoi les deux descriptions

 22   sont divergentes ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de vous expliquer cela

 24   brièvement. Dans la déclaration que j'ai faite pour ce Tribunal, je n'avais

 25   pas mentionné le fait qu'il y avait des blessés parce que ce n'est pas

 26   quelque chose que je peux avancer avec certitude. Lorsque je me suis

 27   exprimé lors de la séance de la réunion avec le gouvernement, j'ai dit

 28   qu'il y avait des blessés --

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous interromps. Vous venez de dire

  2   que vous ne pouviez pas déterminer qu'il y avait des blessés c'est pour

  3   cela que vous n'en avez pas parlé dans la déclaration. Alors votre

  4   déclaration, si elle a été mal traduite, bon, j'aimerais qu'on me le dise,

  5   mais dans votre déclaration il est indiqué -- d'après votre déposition

  6   maintenant, vous dites qu'ils n'étaient pas blessés. En fait, maintenant

  7   vous nous dites, apparemment, je n'étais pas en mesure de déterminer s'ils

  8   étaient bel et bien blessés. C'est ce que vous nous dites maintenant.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, personnellement, je n'ai pas vu une seule

 10   blessure. Mais il y a des éléments de preuve indirects et d'après ces

 11   éléments de preuve indirects en quelque sorte j'ai pensé qu'il y avait des

 12   blessures. Mais, moi, je ne peux pas avancer avec certitude puisque je ne

 13   dispose pas des éléments de preuve tangibles je ne peux pas avancer comme

 14   le font des Juges qu'ils étaient blessés. Mais lorsque je dis qu'il y avait

 15   des blessés, cela, je l'ai dit lors d'une réunion gouvernementale. Je l'ai

 16   dit et cela a obligé les personnes présentes à la réunion à réagir plus

 17   rapidement.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors si vous -- ce que vous me dites ou

 19   ce que vous nous dites pour le moment, et corrigez-moi si je ne m'abuse,

 20   c'est qu'il y avait de bonnes raisons de penser ou de croire que des

 21   personnes avaient été blessées mais je n'ai pas été en mesure de déterminer

 22   définitivement que si ces personnes avaient été blessées ou non; c'est ce

 23   que vous nous dites maintenant plus ou moins, n'est-ce pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, grosso modo c'est cela, et bien sûr,

 25   qu'en plus qu'en matière de -- il y a des blessures plus ou moins graves.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vous demande pas de développer la

 27   nature des blessures. Dans votre déclaration, vous dites que ces personnes

 28   n'étaient pas blessées. Vous ne dites pas j'avais toutes les raisons du

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  1   monde de croire que ces personnes étaient blessées, mais je n'ai pas pu le

  2   déterminer. Vous nous dites tout simplement, elles n'étaient pas blessées.

  3   Qui plus est, vous expliquez à ce sujet que ces personnes se cachaient,

  4   qu'elles n'étaient pas blessées ou qu'elles n'étaient pas malades, mais

  5   qu'elles se cachaient plutôt. Ce qui nous donne une impression tout à fait

  6   différente, ou, ce qui correspond à une description tout à fait différente,

  7   qu'à celle que vous nous aviez donnée maintenant.

  8   Alors qu'avez-vous à me dire à ce sujet ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai toujours dit dans ma déclaration que ce

 10   que je disais était une évaluation de ma part, était la façon dont je

 11   voyais les choses. Lorsque je dis c'est qu'il n'y avait pas blessés, je

 12   l'ai dit parce qu'il n'y avait, en tout cas, ou plutôt parce que je n'ai

 13   pas vu de blessure, et précisément, parce que je comprenais que le Tribunal

 14   avait besoin de déclaration positive en quelque sorte. Donc, moi, je n'ai

 15   pas vu de blessure, donc je ne pouvais pas dire qu'il y avait des blessés.

 16   Mais ce que je dis et cela c'est le fruit de mon expérience de médecin,

 17   c'est également expliqué par les circonstances de la situation bien

 18   particulière dans laquelle nous nous trouvions. Certaines de ces personnes

 19   qui peut-être étaient malades, ou qui peut-être étaient blessées, faisaient

 20   semblant d'être ne bonne santé. Mais moi-même, j'ai fait comme si je ne

 21   l'avais pas remarqué. Il y a un moment de cela, je vous ai dit que ces

 22   personnes, que je voyais qu'elles bougeaient sous leur drap, les

 23   couvertures. Donc il était manifestement qu'elles avaient certains

 24   problèmes, ces personnes, et que ces problèmes pouvaient être le résultat

 25   de traumatisme plutôt que pathologie, et je crois que ce sont des

 26   traumatismes qu'ils ont eus lors d'opération de guerre.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous le croyez cela, cette croyance qui

 28   est la vôtre. Vous pouvez l'étayer de base factuelle, ou est-ce que vous

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  1   pensez tout simplement que cela pourrait correspondre à la réalité ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je pense que c'était la situation.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, souhaitez-vous poser des

  4   questions supplémentaires au témoin ?

  5   M. KAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je n'aurais que

  6   quelques questions à poser au témoin.

  7   Nouvel interrogatoire par M. Kay: 

  8   Q.  [interprétation] Docteur Dodig, des questions qui vous ont été posées à

  9   propos de réunion avec M. Cermak; et pour bien comprendre ce dont il est

 10   question, j'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet.

 11   Dans votre déclaration, vous décrivez comment vous vous êtes rendu dans le

 12   camp ou la base des Nations Unies, en compagnie de M. Cermak, le 9 août. Je

 13   me demande si vous êtes en mesure de nous dire combien de temps vous avez

 14   passé avec M. Cermak, ce jour-là ?

 15   R.  J'ai passé peu de temps avec lui. Je pense que j'ai passé une heure

 16   dans son bureau, mais cela ne signifie pas que j'étais tout le temps avec

 17   lui d'ailleurs. Nous sommes arrivés à la base, je ne sais plus très bien

 18   comment, d'ailleurs, lui, s'est dirigé vers un côté pour parler au

 19   commandant militaire du camp, de la base; et moi, j'ai suivi ou je me suis

 20   occupé d'un autre problème médical.

 21   Q.  Cette réunion avec les représentants du conseil des réfugiés, combien

 22   de temps a-t-elle duré ?

 23   R.  Bon, je pense entre deux heures et demie et trois heures.

 24   Q.  Alors est-ce qu'il s'agit d'une réunion où M. Cermak et vous-même, avez

 25   été présents ensemble, pendant toute la réunion ?

 26   R.  Non, non, non, moi j'étais seul à cette réunion.

 27   Q.  Est-ce que vous pouvez nous expliquer combien de temps M. Cermak a

 28   passé à vos côtés, avec donc le conseil pour les réfugiés, lorsque vous

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  1   avez eu des contacts et des conversations avec eux lors de cette visite ?

  2   R.  Quelques minutes peut-être, il les a salués, et puis il est parti.

  3   Q.  Une question vous a été posée à propos d'autres réunions, et d'ailleurs

  4   vous y faites référence dans votre déclaration. Vous dites que vous saviez

  5   que M. Cermak avait des réunions dans son bureau avec les représentants des

  6   autorités civiles.

  7   R.  Oui, j'ai entendu de la part de nombreuses personnes qui sont venues à

  8   Knin, qu'elles avaient parlé à M. Cermak. Mais j'aimerais trouver le terme

  9   exact, parce que en fait il s'agissait de rencontres brèves plutôt que de

 10   réunions.

 11   Q.  Merci. Des questions vous ont été posées à propos des différences

 12   exprimées. Vous avez dans un premier temps donné votre -- vous avez indiqué

 13   comment vous voyez le camp dans la déclaration, dans vos déclarations et

 14   puis vous avez également décrit et fait une déclaration d'ailleurs lors

 15   d'une séance à huis clos du gouvernement, le 23 août. Cela faisant l'objet

 16   de la pièce D426. Dans votre déclaration, vous dites :

 17   "La situation était complètement calme, et aucune de ces personnes n'a

 18   montré le moindre intérêt à me parler."

 19   Alors est-ce que vous pourriez expliquer ce que vous entendez par la

 20   situation était complètement calme ?

 21   R.  la situation était suffisamment calme pour que l'on puisse contrôler la

 22   situation médicale. Deuxièmement, on leur a donné la possibilité de décider

 23   de ce qu'ils souhaitaient faire : rester ou quitter le camp. Puis la

 24   situation était calme également parce qu'il y avait en quelque sorte une

 25   atmosphère plutôt pacifique qui régnait, les gens n'avaient plus peur de ce

 26   qui allait se passer la minute d'après, et n'avaient plus peur d'envisager

 27   la solution de partir ou de rester. Donc ils avaient pu déjà établir des

 28   contacts avec un certain nombre d'organisations internationales, des

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  1   organisations humanitaires qui étaient venues. Ils avaient pu prendre

  2   contact avec leurs familles, et peut-être avec d'autres personnes, des

  3   organisations qui étaient beaucoup mieux placées que moi pour leur fournir

  4   une aide à l'époque.

  5   M. KAY : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Oui, brièvement.

  8   Contre-interrogatoire par M. Kehoe : 

  9   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Dodig.

 10   J'aimerais que nous revenions sur certaines des questions qui ont été

 11   posées par mon estimé confrère, M. Carrier. Alors il vous a fait, il a lu

 12   une citation qu'il vous a attribuée selon laquelle ce Tribunal, le Tribunal

 13   de La Haye est un Tribunal politique. Je suppose en fait que vos points de

 14   vue et avis sur le Tribunal ont été en quelque sorte modelés par la lecture

 15   des déclarations émanant de ce Tribunal et de son personnel, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   L'INTERPRÈTE : Maître Kehoe, hors micro. 

 18   M. KEHOE : [interprétation] Alors j'aimerais demander l'affichage de la

 19   pièce de la liste 65 ter 1D2986. Il s'agit d'un extrait du livre de Mme

 20   Florence Hartmann qui a été traduit.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, avant que nous nous

 22   engagions sur cette voie, si vous voulez présenter quelque chose au témoin,

 23   plutôt que de lui faire la lecture d'un texte.

 24   Monsieur Dodig, j'aimerais vous demander de ne pas lire ce qui se trouve en

 25   ce moment sur votre écran.

 26   Ce que vous pourriez dans un premier temps demander au témoin s'il a lu ce

 27   livre avant de ne tirer d'autres conclusions à ce sujet.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Est-ce que vous connaissez le livre de Mme Hartmann ?

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas ce que je vous ai suggéré

  3   de poser comme question.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Non, non, j'allais lui demander s'il

  5   connaissait, s'il était au courant de l'existence de ce livre. Et ensuite

  6   je lui aurais demandé en deuxième question s'il l'avait lu. Bon. Je vais

  7   donc, je vais reposer ma question.

  8   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler du livre de Mme Hartmann ?

  9   R.  Je sais que Mme Hartmann a publié un livre dont j'ai lu certains

 10   extraits qui ont été publiés dans notre presse.

 11   Q.  Donc vous savez que ce livre a été traduit en croate ?

 12   R.  Oui, oui, je le sais.

 13   Q.  Vous saviez également que Mme Hartmann a été reçue par les médias en

 14   Croatie et que des extraits de son ouvrage ont été publiés dans la presse

 15   croate; vous saviez cela ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous savez -- vous connaissez les allégations de Mme Hartmann --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 19   Maître Kehoe, je vous en prie, demandons d'abord au témoin ce dont il se

 20   souvient et nous verrons si un lien peut être établi. Lorsque le lien aura

 21   été établi, bien, ça sera une chose. Si aucun lien n'est établi, nous

 22   pourrons voir si cela rafraîchit la mémoire du témoin.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Docteur Dodig, donc pour ce qui est donc du livre écrit par Mme

 25   Hartmann et de ce qu'elle a dit à ce sujet, est-ce que vous pourriez nous

 26   dire ce que vous avez lu de ce livre ? Est-ce que vous pourriez nous dire

 27   quels sont les extraits de ce livre que vous avez lu à propos donc de ces

 28   activités au sein du Tribunal dont elle était au sein du bureau du

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  1   Procureur dont elle était le porte-parole ?

  2   R.  Ecoutez pour le moment, je ne me souviens pas de détails. Il s'agissait

  3   d'extraits que j'ai lus dans la presse écrite. Il s'agissait en fait des

  4   points de vue des journalistes de l'interprétation des journalistes. Vous

  5   savez, je déteste parler de choses que je ne connais pas absolument. Je

  6   sais que Mme Hartmann a publié un livre. Je sais qu'elle a été traduite en

  7   justice ici pour outrage au tribunal mais je ne me souviens pas des détails

  8   de ce livre.

  9   Q.  Je vais vous montrer quelque chose qui vous rafraîchira peut-être la

 10   mémoire à propos de ses observations.

 11   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais demander que soit affiché la pièce

 12   1D2986 de la liste 65 ter.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, pour ma gouverne

 14   personnelle, vous avez commencé par parler de ce qui avait été publié. Vous

 15   avez demandé le point de vue de M. Dodig pour ce qui était de l'année 2001,

 16   puis ensuite vous avez commencé à lui poser des questions à propos de la

 17   façon dont il s'était forgé ses opinions.

 18    Alors est-ce que vous parlez des points de vue exprimés en 2001, ou est-ce

 19   que nous parlons de points de vue qui ont changé son point de vue ?

 20   M. KEHOE : [interprétation] Mme Hartmann elle parlait de ce qui s'était

 21   passé en 2001. Pour placer le contexte, il s'agit d'événements qui se sont

 22   déroulés en 2001.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être, mais alors il est

 24   important de savoir ce que sait le témoin, bon outre le fait qu'il a peut-

 25   être lu certaines choses dans le livre de Mme Hartmann à propos de ce qui

 26   s'était passé en 2001. Vous voyez où je veux en venir ?

 27   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je comprends tout à fait, Monsieur le

 28   Président. Oui, mais l'Accusation essaie de dire et peut-être que le témoin

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  1   pourrait ôter ses écouteurs.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais dans un premier temps il va falloir

  3   que nous lui demandons s'il parle l'anglais ou non. Il y a certains

  4   psychiatres qui parlent anglais.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je parle l'anglais.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors ça ne sert à rien d'ôter vos

  7   écouteurs.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends l'anglais.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut toujours savoir clairement ce

 10   qu'un témoin sait à quel moment qui peut être le fondement d'une

 11   déclaration ou d'un avis ou d'un point de vue. Donc dans un premier temps

 12   encore faut-il déterminer ce dont il se souvient sans pour autant lui

 13   rafraîchir la mémoire et après seulement nous pouvons voir -- nous pourrons

 14   voir si on peut lui rafraîchir la mémoire. Donc je voudrais que cela soit

 15   bien clair.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui, mais moi en fait la façon dont je procède

 17   est différente.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je ne parle pas de la façon dont

 19   vous procédez.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui, mais c'est différent parce que ce n'est

 21   pas le temps de savoir si le témoin a lu ou analysé les propos de Mme

 22   Hartmann mais il -- à propos de son point de vue en 2001 et de ce qu'il a

 23   dit, puisqu'il pensait que le Tribunal était un organe politique mais il

 24   faut savoir que c'est sa crédibilité, son impartialité qui a été attaqué

 25   par le bureau du Procureur à ce sujet. En fait par le truchement de ce

 26   témoin, nous allons montrer à la Chambre de première instance qu'il n'était

 27   pas le seul à estimer à l'époque que le Tribunal était politique et que le

 28   bureau du Procureur donc --

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Kehoe, vous êtes dans un

  2   premier temps invité à demander au témoin sans lui parler de livre ou autre

  3   chose, vous êtes invité disais-je à demander au témoin sur quoi il se

  4   fondait pour -- ou sur quoi il s'était fondé pour se faire son avis ou son

  5   opinion, à ce moment-là. Une fois que vous aurez posé cette question et

  6   obtenu la réponse, nous pourrons mettre cela en parallèle avec les opinions

  7   d'autres personnes à l'époque. Au moins nous saurons si ce que vous allez

  8   lui présenter comme le point de vue d'autrui est le même ou différent. Par

  9   conséquent, il faudra également lui demander sur quoi il s'est fondé pour

 10   se forger une opinion.

 11   Monsieur Carrier.

 12   M. CARRIER : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à huis clos

 13   partiel pendant un petit moment, je vous prie ?

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

 15   Je ne connais pas la raison de votre demande pour le moment mais le --

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 17   partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 27  (expurgé)

 28   [Audience publique] 

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. J'ai entendu mes

  2   collègues et je peux m'exprimer au nom de la Chambre. Ce qui serait utile

  3   aux yeux des Juges c'est que vous jetiez d'abord les

  4   bases des opinions qui ont été exprimées à quelque moment que ce soit par

  5   le témoin. Nous ne savons pas, pour le moment, quelle a été la substance de

  6   ses opinions à l'époque. Nous n'y sommes pas encore parvenus. Puis dans un

  7   deuxième temps, vous pouvez établir une comparaison. Vous pouvez vous

  8   servir de livres ou autres sources. Donc c'est la manière adéquate et c'est

  9   cela qui nous sera utile.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Q.  Docteur Dodig, parlons maintenant de votre commentaire lorsque vous

 12   avez dit que le Tribunal de La Haye est un Tribunal politique, en 2001, si

 13   vous avez dit cela.

 14   Alors si on se penche sur le bureau du Procureur, est-ce que vous

 15   avez pensé, à l'époque, que ce bureau du Tribunal de La Haye est un organe

 16   politique ?

 17   R.  Oui. Surtout le Procureur -- le bureau du Procureur.

 18   Q.  Qu'est-ce qui vous incitait à penser cela, Docteur Dodig ?

 19   R.  Je l'ai pensé parce que mon impression - et cette impression se fonde

 20   sur ce que j'ai lu et écouté pendant des années - c'est que le bureau du

 21   Procureur est l'organe qui domine ici, dans ce Tribunal. Tout ce que nous

 22   entendons et qui sort du Tribunal comme étant, en fait, une institution

 23   complexe, qui comporte trois parties, et bien, que tout ce que nous

 24   entendons se résume finalement à ce que pense le Procureur principal du

 25   Tribunal.

 26   La Croatie, sur le plan politique, en tant qu'état et ses

 27   représentants, on a posé des conditions qui émanaient toujours du bureau du

 28   Procureur. C'est la raison pour laquelle on a toujours perçu ce bureau

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  1   comme étant l'organe du Tribunal qui mène le jeu, qui a un objectif très

  2   clairement établi et qui, à mon sens, n'était pas de repérer les

  3   responsables des crimes ou infractions, mais de choisir les figures qui,

  4   sur le plan militaire ou politique, symbolisait la guerre de Défense qui a

  5   été menée par la Croatie. Donc on a cherché à identifier des individus pour

  6   lesquels je suis profondément, profondément convaincu que ce sont des

  7   hommes les plus honnêtes, les plus intègres qui soient et c'est de cette

  8   manière-là qu'ils ont joué leur rôle pendant cette guerre. Or, nous avons

  9   vu que dans cette catégorie de psychopathes, effectivement, il y a eu des

 10   individus qui ont mal agi, mais --

 11   Q.  Excusez-moi, mais je voulais juste savoir quels sont les faits qui vous

 12   permettaient de penser ce que vous avez pensé. Je comprends vos

 13   conclusions, Monsieur, mais nous n'avons pas beaucoup de temps. Et vous

 14   nous avez dit que vous ne vous souveniez pas très bien de ce que disait Mme

 15   Hartmann dans son livre --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons de voir cela d'un peu plus

 17   près.

 18   Dois-je comprendre qu'en fait, pour deux raisons, vous avez estimé

 19   que le bureau du Procureur était l'organe politique avant tout et qu'il

 20   dominait dans ce Tribunal ? Premièrement, parce que c'était toujours eux

 21   qui agissaient vers l'extérieur et puis, deuxièmement, parce qu'ils ne

 22   cherchaient pas à repérer les coupables, mais uniquement les symboles qui,

 23   eux, en fait, se sont comportés correctement.

 24   Est-ce que je vous ai bien compris ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a eu d'autres raisons,

 27   mis à part ceux que nous venons d'évoquer, d'autres raisons qui vous ont

 28   incité à formuler cette opinion sur le bureau du Procureur, donc, de penser

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  1   que c'est un organe politique ? Est-ce qu'il y a quelque chose d'autre qui

  2   vous vient à l'esprit maintenant et qui vous a incité à penser cela ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, c'était fondamental et c'est de ce fait-là

  4   que découle ma conclusion.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y avait pas d'autres éléments

  6   importants qui vous ont incité à formuler cette opinion ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Rien ne me vient à l'esprit sur-le-champ, rien

  8   de spécial. Disons que c'était la seule raison.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, veuillez poursuivre,

 10   Monsieur Kehoe.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Docteur, le Président Orie vous a interrogé sur les deux raisons qui

 13   vous ont fait penser ce que vous avez pensé. Le Juge Orie dit : "Vous

 14   pensez que le bureau du Procureur était, pour deux raisons, l'organe

 15   politique qui dominait au Tribunal ?" Vous avez répondu par l'affirmative.

 16   Est-ce que vous savez que Florence Hartmann a fait état de cette même

 17   opinion que celle que vous venez de formuler au sujet du bureau du

 18   Procureur comme étant l'organe politique du Tribunal ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Est-ce que nous pouvons reparler du livre de Mme Hartmann et de sa

 21   campagne de promotion du livre et de ce qui a été dit dans la presse ? Vous

 22   dites que vous ne vous souveniez pas exactement ce que vous avez lu. Donc,

 23   j'aimerais vous présenter de nouveau ces extraits du livre de Mme Hartmann,

 24   1D2986 sur la liste 65 ter. Vous pouvez suivre cela grâce au logiciel

 25   Sanction. Nous avons quelques extraits brefs, pages 44, 47, 48 traduites en

 26   anglais.

 27   Page 44, en haut :

 28   "Des juristes, des analystes militaires, des policiers de tous les

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  1   pays du "Commonwealth" venaient à leur suite et se précipitaient à La Haye.

  2   La France prenait du retard. Pendant que le bureau du Procureur et la

  3   procédure tombe entre les mains anglo-saxonnes, Paris ne souhaite pas

  4   prendre part à cet effort. Toutefois, le TPIY, son budget dépend des

  5   contributions volontaires. Un an plus tard, la France…"

  6   Je vais prendre le paragraphe suivant --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous dites, "un an plus

  8   tard," mais de quelle année s'agit-il ? Replacez cela chronologiquement.

  9   M. KEHOE : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, le livre a

 10   été publié uniquement en français et en Croate.

 11   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : nous sommes en train de

 12   retraduire depuis la traduction croate.

 13   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

 14   M. CARRIER : [interprétation] J'aimerais savoir qui sont les "eux" dans le

 15   texte.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Ce serait la fin des années 1990, d'après ce

 17   que me dit Vintko [phon] Misetic.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 19   M. KEHOE : [interprétation]

 20   Q.  Le paragraphe suivant : 

 21   "Ces différences dans l'attitude, entre les Français et les Anglo-saxons,

 22   visibles d'emblée, ne sont pas dues au hasard. Tous les réalistes au

 23   Tribunal ne voient, dans le Tribunal, que la main prolongée du pouvoir

 24   politique, sa branche judiciaire. Dès qu'on a aperçu les dividendes de

 25   l'annonce, tout le monde est d'accord pour dire que l'objectif a été

 26   atteint. Le TPIY a été utilisé en tant que justification aux hommes

 27   politiques pour -- comme une soupape, suite à des émotions suscitées par

 28   les atrocités, à cause des crimes commis en Bosnie-Herzégovine.

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  1   "Tout de suite après, il a été abandonné sans aucun moyen lui

  2   permettant de survivre sans budget. Contre toute attente, une poignée de

  3   magistrats idéalistes se -- nous parviendrons à l'arracher à son destin

  4   d'alibi rejeté, abandonné, il frappe à toutes les portes et finissent par

  5   recueillir suffisamment de moyens pour amorcer les premières enquêtes. Cet

  6   éveil inattendu place les grandes puissances dans une situation délicate,

  7   ces puissances avaient fait des promesses qu'elles n'avaient pas

  8   l'intention de remplir et elles se sont créées des obligations qu'elles ne

  9   percevaient pas comme étant contraignantes. A présent, elles seront

 10   obligées de trouver des arrangements parce que le travail du Tribunal aura

 11   sans doute des implications politiques; cependant, toutes les grandes

 12   puissances ne réagissent pas avec la même rapidité ni en se servant des

 13   mêmes armes devant cette créature qui leur échappe des mains et qui leur

 14   fait peur."

 15   M. KEHOE : [interprétation] Essayons de voir le paragraphe suivant.

 16   Q.  Il est question du bureau du Procureur, page 42 :

 17   "Certains savent à peine où se situent les Balkans, ils hantent le

 18   bureau du Procureur, le moteur du Tribunal dont les Juges sont repoussés

 19   dans un rôle d'arbitre entre la Défense et le Procureur. Les analystes

 20   militaires et les juristes, les agents du renseignement disparaissent

 21   facilement dans la foule en occupant des positions certes modestes mais

 22   stratégiquement importante en servant davantage le gouvernement que le

 23   TPIY."

 24   Puis le dernier extrait où il est question de Carla Del Ponte :

 25   "Mais jamais comme elle le confie à la fin de son mandat elle n'a pu

 26   envisager que les fonctions d'un Procureur international puisse être aussi

 27   différentes que celles d'un Procureur d'Etat à tel point les pressions et

 28   les tentatives de s'immiscer des hommes politiques étaient nombreuses. Face

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  1   à la capacité de ne pas [imperceptible] du Procureur ou des Procureurs, les

  2   Anglo-saxons ne peuvent pas se satisfaire de simplement donner des conseils

  3   qui ne sont que trop rarement suivis. C'est la raison pour laquelle en

  4   parallèle ils développent des stratégies beaucoup plus sournoises et

  5   dangereuses que les Magistrats ne seront pas toujours démasquées à temps."

  6   Docteur Dodig, est-ce que cela vous permet de vous rafraîchir la

  7   mémoire pour ce qui est de la position de l'ex-porte-parole du bureau du

  8   Procureur où elle évoque la nature politique du bureau du Procureur ?

  9   R.  Hélas, cela ne rafraîchit pas ma mémoire. Ce sont mes réflexions que

 10   les pensés que j'ai eu bien avant de voir cela. Est-ce que c'est le

 11   résultat des informations dont je n'arrive plus à me souvenir ou des choses

 12   que j'ai entendues ? Est-ce que j'ai fait une synthèse de tout cela ? Mais,

 13   en fait, je respecte les efforts de ce Tribunal et je suis tout à fait

 14   persuadé que le Tribunal fera tout ce qui est en son pouvoir en sa qualité

 15   de Tribunal. Je serai ravi de pouvoir dire finalement que j'avais eu tort

 16   que ce Tribunal n'a pas été un Tribunal politique et vous pouvez en être

 17   sûr que je le ferais. Cela ne vous importe pas, mais là où je vis là où mon

 18   opinion est prisée, j'expliquerais aux gens que je m'étais trompé, si

 19   jamais quelque chose venait à démentir mon opinion sur le fait

 20   qu'effectivement il s'est agi d'un Tribunal politique. Est-ce qu'il est

 21   toujours ? Je ne sais pas. On le verra.

 22   Mais je ne me sens pas très à l'aise après tout cela.

 23   Q.  Je vous remercie, Docteur. Je n'ai plus d'autres questions.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour terminer une toute dernière

 26   question. Dans votre déclaration, vous dites au paragraphe 6 :

 27   "Lorsque je me suis déplacé vers Knin le long de la route, ce matin

 28   il n'y a eu que quelques maisons incendiées."

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  1   Ce matin, page 17, lignes 21 et 22, vous dites que vous ne pouviez pas

  2   savoir si c'était du foin, des herbes, ou des maisons qui brûlaient.

  3   Est-ce que vous pouvez nous expliquer la différence entre votre déclaration

  4   ce matin lorsque vous avez dit que vous ne pouvez pas savoir de quoi il

  5   s'agissait --

  6   R.  C'est exact, au loin je n'ai pas pu voir de quoi il s'agissait, lorsque

  7   je dis que j'ai vu quelques maisons ça c'est en déplaçant de Drnis vers

  8   Knin, c'est une distance de 30 kilomètres, à peu près, et parmi les maisons

  9   que j'ai vues incendier aucune ne présentait des traces récentes de feu.

 10   Donc depuis la route je n'ai pas pu voir s'il s'agissait de maisons qui ont

 11   été incendiées pendant l'opération Tempête ou avant cela. C'est la raison

 12   pour laquelle je n'ai pas à jugé utile de rentrer dans les détails. Quand

 13   je dis que je ne pouvais pas voir si c'était récent, depuis la route où je

 14   me trouvais c'était peut-être à 200 ou 300 mètres. On voyait qu'il n'y

 15   avait pas de toit et que la maison a brûlé, il m'était difficile de savoir

 16   si c'était récent ou pas et où est-ce que c'était dû à des opérations

 17   militaires.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Est-ce qu'il y a des questions dans la suite des questions posées par la

 20   Chambre ?

 21   M. KAY : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sinon, Monsieur Dodig, vous avez fini de

 23   témoigner devant ce Tribunal, et je tiens à vous remercier d'avoir fait le

 24   déplacement jusqu'à La Haye et d'avoir répondu à toutes les questions qui

 25   vous ont été posées --

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- et d'avoir également répondu aux

 28   questions de la Chambre. Je vous souhaite de bien rentrer chez vous.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

  2   [Le témoin se retire]

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agissant de la semaine prochaine,

  5   s'agissant du 15, jeudi, si l'audience durait toute la journée, alors

  6   pendant une partie de l'audience la Chambre devrait siéger en application

  7   de l'article 15 bis, au moins pendant une partie de l'après-midi. Bien sûr,

  8   à la lumière des éléments auxquels nous nous attendons il faudrait savoir

  9   s'il serait dans l'intérêt de la justice de travailler en l'absence de l'un

 10   des Juges, tout un chacun fait de son mieux, nous espérons pouvoir le

 11   savoir le plus vite possible. Donc peut-être ce jeudi, et nous allons voir

 12   si cela aura une incidence sur la Défense Cermak, pour ce qui est du

 13   mercredi 14. Donc le 14, on ne pourra pas avoir de visioconférence, et si

 14   nous prévoyons d'avoir plus qu'une demi-journée, le 15, alors il faut voir

 15   les conséquences que cela aurait sur les audiences du 14.

 16   M. KAY : [interprétation] Nous avons le planning pour la semaine en

 17   question. M. Cetina est prévu pour lundi et mardi, et puis, nous avons un

 18   autre témoin qui était hospitalisé, mais qui sera libre pour témoigner le

 19   14, donc mercredi. Donc ces trois journées en principe sont remplies.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ce serait le témoin qui n'a pas pu

 21   déposer cette semaine, vendredi.

 22   M. KAY : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il viendrait déposer mercredi.

 24   M. KAY : [interprétation] Oui, il voyagerait mardi, il serait ici

 25   mercredi. Donc nous avons une journée de disponible.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous savez bien que si on n'a

 27   pas terminé la déposition de ce témoin mercredi, et si nous avons prévu une

 28   visioconférence jeudi, indépendamment du fait de savoir si le témoin ait

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  1   terminé ou non, il nous faudra bien commencer la visioconférence, au moment

  2   où elle est prévue. Car c'est toujours la visioconférence qui a la primauté

  3   sur toute autre déposition, puisque nous avons des possibilités techniques

  4   à un moment donné, il faut les utiliser à ce moment-là.

  5   M. KAY : [interprétation] Oui, ce n'est pas un témoin très long.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors voyons avec les autres parties si

  7   on pourra terminer mercredi, cette déposition, pour éviter qu'il reste ici

  8   jusqu'à vendredi.

  9   Nous allons donc lever l'audience pour aujourd'hui, nous reprendrons

 10   demain, le 8 octobre, à 9 heures du matin, dans le même prétoire.

 11   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 8 octobre

 12   2009, à 9 heures 00.

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