Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 8 décembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, je vous prie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  9   Madame, Messieurs les Juges, il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le

 10   Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 12   La Chambre a été informée que nous allons nous pencher sur une question de

 13   programmation, de calendrier, mais nous nous pencherons sur cette question

 14   plus tard, pas maintenant.

 15   Monsieur Moric, bonjour.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

 18   toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez

 19   prononcée au début de votre déposition.

 20   Etes-vous prête, Madame Mahindaratne ?

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre vous serait extrêmement

 23   reconnaissante, Madame, de pouvoir faire en sorte de terminer dans deux

 24   séances.

 25   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je ferai de mon mieux, Monsieur le

 26   Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage de

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  1   la pièce D1759.

  2   LE TÉMOIN : JOSKO MORIC [Reprise]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   Interrogatoire principal par Mme Mahindaratne: [Suite]

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Moric.

  6   R.  Bonjour, Madame le Procureur, et bonjour à Madame, Messieurs les Juges

  7   et à toutes les personnes présentes dans le prétoire.

  8   Q.  Nous avons remarqué lors de votre interrogatoire que vous aviez donné

  9   un ordre pour que soient réouvertes les routes, et ce, le 8 août, et la

 10   référence pour le compte rendu d'audience, c'est la page 25 556. Me

 11   Mikulicic vous avait montré cet ordre qui montre que les routes ont été

 12   ouvertes le 8 août à 22 heures.

 13   En fait, cela suivait la fermeture des routes qui avaient été fermées

 14   à 3 heures du matin, le 4 août, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, Madame le Procureur, c'est exact.

 16   Q.  Je m'excuse, mais je pense que le document n'est pas le bon document.

 17   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage du

 18   document D1759. Merci.

 19   Q.  Voici donc l'ordre par le truchement duquel vous avez fermé les routes;

 20   n'est-ce pas exact, Monsieur Moric ?

 21   R.  C'est tout à fait exact, Madame le Procureur.

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage de

 23   la pièce D1769 à l'écran.

 24   Q.  Après avoir ouvert les routes le 8 août, vous avez également donné un

 25   ordre qui empêchait l'accès dans les zones libérées, à savoir il s'agissait

 26   plutôt de restreindre les déplacements pour les personnes qui n'étaient pas

 27   autorisées à se déplacer dans ces endroits, n'est-ce pas ?

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce que je pourrais voir la pièce

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  1   D1769.

  2   Q.  Vous voyez votre ordre, l'objet étant l'arrivée des journalistes et des

  3   personnalités dans la zone libérée. Et voilà ce qui est écrit :

  4   "Autoriser tous les journalistes, tous les reporters et correspondants

  5   accrédités en République de Croatie à travailler sans aucune entrave, sans

  6   qu'il ne leur soit demandé une permission nécessaire dans la zone de

  7   Petrina et dans la région du lac de Plitvice, mais en leur demandant la

  8   permission du ministère de la Défense de la République de Croatie et du

  9   ministère de l'Intérieur, permission qui est nécessaire pour ces zones."

 10   Puis vous dites à la deuxième page :

 11   "Lorsque des personnalités connues et importantes entrent dans la zone

 12   libérée, vous devez prendre contact avec les opérations de permanence du

 13   MUP, avec l'état-major, de l'action Povratak, ainsi que pour toutes les

 14   autres personnes demandant l'accès, et l'accès pour toutes les autres

 15   personnes dans la zone libérée est interdit jusqu'à nouvel ordre."

 16   Donc voilà l'ordre par lequel l'accès est restreint pour toutes les

 17   personnes qui ne sont pas autorisées pour entrer dans cette zone libérée;

 18   est-ce bien exact ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre de première instance comment

 21   cet ordre a été mis en œuvre sur le terrain. Est-ce que cela a été fait

 22   grâce à des postes de contrôle de la police civile ? Comment est-ce que

 23   vous avez opéré sur le terrain ?

 24   R.  Oui, grâce à des postes de contrôle de la police civile. Effectivement,

 25   il n'y avait aucun autre moyen pour ce faire.

 26   Q.  Bien. Merci.

 27   Monsieur Moric --

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Greffier, j'aimerais vous

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  1   demander l'affichage de la pièce P203 à l'écran.

  2   Q.  Lors de l'interrogatoire principal, ce document vous a été présenté,

  3   vous le reconnaîtrez, d'ailleurs. Mais voilà quelle est ma question. Lors

  4   de l'interrogatoire principal, Me Mikulicic vous avait montré un ordre du

  5   18 août qui est, je le rappelle, la pièce D49, et ce document a fait

  6   l'objet de discussion. On vous avait demandé quand vous aviez obtenu les

  7   renseignements relatifs à l'augmentation du nombre de crimes. Et voilà ce

  8   que vous avez dit, à la page 25 561, je vais vous rappeler vos propos. Vous

  9   avez dit :

 10   "Si je me fonde sur la date de ce document, qui est la date du 18 août, je

 11   dirais, qu'en fait, mes collaborateurs et moi-même, nous nous sommes rendu

 12   compte que nous nous trouvions confrontés à une flambée des crimes et que

 13   c'était une tendance qui avait commencé à se dessiner quelques jours avant

 14   cette journée. Donc disons que cela a commencé aux alentours du 15 août."

 15   Vous voyez, Monsieur Moric, un rapport qui émane de M. Ante Gugic, et de M.

 16   Miroslav Tudjman. Et au paragraphe 4, voilà ce qui est indiqué :

 17   "Dans la zone libérée de l'arrière-pays de Zadar et de Sibenik,

 18   l'établissement des autorités civiles n'est pas effectuée de façon

 19   satisfaisante. Plus précisément, dans les localités libérées" -- et il y a

 20   des noms de localités qui sont indiqués et qui incluent Djevrska et

 21   Kistanje -- "la situation est plutôt chaotique. Des incidents d'incendies

 22   importants de maisons, de pillage de propriétés, de consommation d'alcool.

 23   Et il faut savoir que les unités manquent tout à fait d'organisation. La

 24   raison qui explique cette situation est le manque d'engagement du

 25   commandement des unités."

 26   Alors, est-ce que vous aviez été informé de cette situation le 8 août ou

 27   peut-être le lendemain, le 9 août. Est-ce que quelqu'un du ministère de

 28   l'Intérieur ou est-ce que quelqu'un d'une autre agence, d'ailleurs, vous

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  1   aurait informé de cette situation ?

  2   R.  Non. Il est question de villages là. Pour ces villages Djevrska,

  3   Kistanje et Bribirski Mostine, je n'avais pas été informé de ceci. Personne

  4   du ministère ou des ministères ne m'a informé de la situation.

  5   Q.  Nous allons peut-être -- ou plutôt, outre ces villages, faites

  6   abstraction de ces villages, mais j'aimerais savoir si le 8 août ou aux

  7   alentours du 8 août, vous aviez été informé soit par un représentant du

  8   ministère de l'Intérieur ou par un représentant du ministère de la Défense

  9   ou par un représentant des services du Renseignement; j'aimerais savoir si

 10   quelqu'un vous a jamais dit qu'il y avait un problème posé par le fait que

 11   des militaires incendiaient des maisons et commettaient des crimes.

 12   R.  Non. Non, non. Personne ne m'en a informé. De toute façon, il n'aurait

 13   pas été logique que l'on m'informe d'un problème militaire ou que l'on me

 14   parle d'un problème militaire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Si l'on donnait l'autorisation au témoin

 17   de lire l'intégralité du document, à savoir cette page et l'autre page pour

 18   que tout soit placé dans le bon contexte. Peut-être que tout simplement, si

 19   ce paragraphe était lu ainsi que le paragraphe suivante, cela serait très

 20   utile à la Chambre.

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 22   Q.  Si vous souhaitez, Monsieur Moric, lire tout le document, ça ne pose

 23   pas de problème, à moins que, je ne sais pas, Me Kehoe souhaite poser des

 24   questions lors des questions supplémentaires.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il pourrait tout à fait le faire.

 26   Ce n'est pas un problème. Mais peut-être que vous pourriez éviter

 27   d'entendre la moitié de la réponse maintenant et l'autre moitié plus tard.

 28   Ce serait beaucoup plus utile.

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  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui.

  2   Q.  Monsieur Moric, si vous souhaitez lire tout le document, ainsi que la

  3   page suivante d'ailleurs, cette page donc qui est la page suivante, qu'à

  4   cela ne tienne, et si vous aviez peut-être des observations à faire à ce

  5   sujet.

  6   Est-ce que vous avez lu le document, tout le document ?

  7   R.  Non. Mais maintenant, la page suivante est affichée. Est-ce que l'on

  8   pourrait à nouveau afficher la première page du document. Merci.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

 10   Q.  Avez-vous quoi que ce soit à ajouter maintenant que vous avez pris

 11   connaissance du document ? Vous avez des observations à nous livrer à ce

 12   sujet ? A propos du sujet dont nous parlions, bien sûr.

 13   R.  Je pense que le dernier paragraphe de la première page donne un élément

 14   d'information qui a son importance, car il est indiqué par l'auteur du

 15   document dans ce dernier paragraphe qu'il a informé l'administration de la

 16   police de Zadar et de Knin, qu'il les a informés des problèmes encourus ou

 17   des problèmes qui avaient été remarqués ou constatés dans les villages

 18   susmentionnés.

 19   Q.  Pour revenir à ma première question, je vous avais demandé si vous,

 20   vous aviez été informé du fait que des militaires commettaient des crimes

 21   et incendiaient des maisons le 8 août ou aux environs du 8 août. Vous avez

 22   répondu : "Personne ne m'en a informé. Il n'aurait pas été logique que

 23   quelqu'un représentant les militaires m'informe de cette situation ou m'en

 24   parle."

 25   Donc, en règle générale, vous n'étiez pas informé des problèmes causés par

 26   les militaires puisque vous, vous faisiez partie du ministère de

 27   l'Intérieur. C'est ce que vous êtes en train de nous dire ?

 28    R.  Non, non, non. Pas du tout. Ce n'est pas ce que je suis en train de

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  1   vous dire. Ce que je vous dis, je vous l'ai dit à propos de ces villages

  2   mentionnés dans ce document.

  3   Pour ce qui est de problèmes qui impliquaient ou qui auraient impliqué des

  4   personnes portant l'uniforme ou des personnes de l'armée croate ou des

  5   personnes, en fait, qui arboraient les uniformes de l'armée croate, j'en

  6   avais été informé, parce qu'on m'avait dit qu'il s'agissait d'une tendance

  7   à l'époque, d'un problème véritablement qui s'était posé.

  8   Q.  Mais est-ce que vous pourriez dire à la Chambre de première instance

  9   quand vous avez entendu parler de cette tendance après la libération de ces

 10   zones ? Cette tendance étant que des personnes portant l'uniforme militaire

 11   commettaient des crimes. Quand en avez-vous entendu parler pour la première

 12   fois, approximativement, bien sûr ?

 13   Un peu plus tôt, vous nous avez dit, vous avez fait référence à la date du

 14   15 août. Non, plutôt, plus tôt, je vous avais dit que ces renseignements,

 15   ils ont été mis à la disposition du ministère de la Défense le 8 août ou

 16   aux environs du 8 août. Donc quand est-ce que vous en avez entendu parler

 17   pour la première fois ?

 18   R.  Ecoutez, je ne peux pas être très précis. Je ne peux pas vous donner la

 19   date exacte. Mais c'est une information qui porte sur trois villages dans

 20   le document. Donc moi, je ne peux pas véritablement vous dire quand j'en ai

 21   entendu parler.

 22   Q.  Mais n'est-il pas exact que vous avez entendu parler de militaires qui

 23   commettaient des crimes dès le 7 août ?

 24   R.  Je ne m'en souviens pas -- enfin, je ne me souviens pas de la date.

 25   Q.  Mais n'est-il pas exact qu'en fait, vous, vous avez téléphoné au

 26   général de division Lausic et que vous l'avez informé du problème le 7 août

 27   ?

 28   R.  Ecoutez, Madame le Procureur, je ne me souviens pas de la date.

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  1   Q.  Bien, Monsieur Moric. Alors, nous allons nous pencher sur un autre

  2   document.   

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander

  4   l'affichage de la pièce P2174.

  5   Q.  Monsieur Moric, je vais vous montrer un extrait, un extrait du journal

  6   de bord de M. Lausic qui, d'ailleurs, a été versé au dossier en l'espèce.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Donc je le répète, il s'agit de la

  8   pièce P2174.

  9   Q.  Comme vous pouvez le voir, il y a les informations qui correspondent au

 10   7 août et vous voyez que M. Lausic indique qu'à 18 heures 45, le ministre

 11   assistant du ministère de l'Intérieur, M. Moric, l'a contacté.

 12   Voilà ce qui est écrit :

 13   "Le ministre assistant, S. Reljic, a indiqué que des membres de l'armée

 14   croate étaient en train de piller, et ce, sur une grande échelle, à

 15   Benkovac et opposent apparemment une résistance armée aux membres de la

 16   police militaire s'ils essayent de les contrôler."

 17   Ensuite, vous avez : "Général de brigade Biskic."

 18   Bon. N'est-il pas exact que vous l'avez appelé le 7 août et que vous

 19   lui avez dit que le ministre assistant Reljic vous avait transmis ces

 20   informations-là ?

 21   R.  Madame le Procureur, écoutez, j'ai de grande difficulté à faire des

 22   observations à propos d'un journal de bord privé personnel.

 23   Q.  Je ne vous demande pas de faire des observations à ce sujet. Je vous

 24   demande tout simplement si vous avez appelé le général de brigade Lausic le

 25   7 août et si vous lui avez relaté ces faits ou non.

 26   R.  Mais j'ai déjà répondu à votre question, et je vous avais dit que je ne

 27   me souvenais pas de la date. J'ai répondu de façon très précise.

 28   Q.  Mais je ne vous parle pas de la date, Monsieur. Est-ce que vous vous

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  1   souvenez avoir eu cette conversation téléphonique ? Ou d'abord, je vais

  2   vous poser une autre question. Premièrement, est-ce que vous vous souvenez

  3   que le ministre assistant, Reljic, M. Reljic, vous avait parlé de crimes

  4   qui étaient commis à Benkovac, et qui vous a dit que lorsque l'on essayait

  5   de les contrôler, ces personnes avaient opposé une résistance armée ? Vous

  6   vous souvenez de tout

  7   cela ?

  8   R.  Non, je ne m'en souviens pas. Vous savez, à l'époque il y a eu de

  9   nombreuses conversations téléphoniques, donc je ne me souviens pas de

 10   celle-ci précisément.

 11   Q.  Donc vous ne vous souvenez pas avoir téléphoné à M. Lausic et avoir eu

 12   une discussion à propos de crimes ?

 13   M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 15   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je m'excuse. Je suis d'accord. Je suis

 16   d'accord avec ce qui vient d'être dit. Je retire ma question.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, poursuivez.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Reljic était le ministre assistant chargé du SUP, n'est-ce pas

 20   ? Ou plutôt, chargé du responsable du service pour la protection de l'ordre

 21   constitutionnel, n'est-ce pas ? Est-ce exact ?

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage de

 24   la pièce D46, Monsieur le Greffier.

 25   Q.  Vous verrez, Monsieur Moric, votre lettre à M. Lausic. C'est une lettre

 26   qui est en date du 10 août. Vous indiquez que sur le territoire libéré il a

 27   été indiqué :

 28   "Il y a des cas de membres individuels de l'armée croate qui volent des

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  1   biens meubles, qui incendient les maisons et qui tuent le bétail qui

  2   déambule dans la zone.

  3   "Il est également question du manque de coopération au poste de contrôle et

  4   au niveau de barrages routiers également."

  5   Lorsque vous avez envoyé cette lettre au général Lausic, j'aimerais savoir

  6   s'il y a eu une réponse, une réponse positive ? Est-ce que la situation

  7   s'est améliorée ? Est-ce que vous avez reçu une réponse de la part du

  8   général Lausic ? Est-ce qu'il vous a indiqué qu'une attention allait être

  9   accordée à cette situation ? Ou est-ce que sur le terrain la situation

 10   s'est améliorée alors ?

 11   R.  Madame le Procureur, je ne me souviens pas si j'ai reçu la réponse. A

 12   l'époque, on avait de nombreuses communications, et je ne peux pas me

 13   souvenir si j'avais reçu la réponse. Mais il est bien possible que je l'aie

 14   reçu.

 15   Q.  Monsieur Moric, lors de votre témoignage dans cette affaire, en parlant

 16   des contacts que vous avez eus avec M. Lausic, dites-nous, lors de ces

 17   contacts, dites-nous, est-ce que vous avez jamais discuté de ces problèmes

 18   avec votre ministre M. Jarnjak ?

 19   R.  Je n'ai pas compris votre question. A quel problème pensez-vous, à des

 20   problèmes indiqués dans cette lettre ?

 21   Q.  Quand j'ai utilisé le terme "problèmes," j'ai fait référence aux crimes

 22   commis par le personnel militaire dont vous avez discuté avec le général

 23   Lausic. Avez-vous parlé des mêmes problèmes avec votre ministre, M. Jarnjak

 24   ? Est-ce que vous avez discuté avec lui des crimes qui ont été commis ?

 25   Est-ce que vous lui avez dit que certains des auteurs de ces crimes

 26   portaient des uniformes

 27   militaires ? Avez-vous discuté de ce sujet avec votre ministre ?

 28   R.  Bien sûr. Le ministre devait être informé de la situation de sécurité

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  1   sur ce territoire. Oui, je l'ai informé de ces problèmes.

  2   Q.  Est-ce que le ministre vous a dit à un moment donné lors de la

  3   conversation que vous avez eue avec lui qu'il allait s'adresser au

  4   ministère de la Défense ou au président ? Ou est-ce que vous savez si le

  5   ministre a exprimé ses préoccupations pour ce qui est de sa conversation

  6   avec le ministre de la Défense ou avec le président ?

  7   R.  On a parlé de cela. Je sais que le ministre a été préoccupé de

  8   l'évolution potentielle de la situation. Je sais qu'il y a eu beaucoup de

  9   contacts avec le ministre de la Défense à ce sujet, mais je ne sais pas

 10   s'il a contacté le président de la république. Mais suivant la logique des

 11   choses, je pense qu'il l'a fait.

 12   Q.  Vous avez dit, je cite : "Je sais qu'il a discuté de ce sujet souvent

 13   avec le ministre de la Défense."

 14   Est-ce qu'il vous a jamais parlé de ces discussions, de la réponse du

 15   ministre de la Défense par rapport aux crimes commis par les membres de

 16   l'armée ?

 17   R.  En principe, la réponse était la suivante : le chef de la police

 18   militaire et moi-même, nous devions déployer des efforts plus considérables

 19   pour que la situation dans le domaine de la sécurité soit stable, ou se

 20   stabilise.

 21   Q.  Vous avez dit que c'était en principe la réponse donnée. Est-ce que le

 22   ministre en personne vous a dit cela, ou est-ce que vous avez pu arriver à

 23   cette réponse du ministre de la Défense en suivant la logique ? Est-ce

 24   qu'il vous a dit que le ministre de la Défense lui a envoyé la réponse

 25   selon laquelle le chef de la police militaire et vous-même devaient

 26   déployer des efforts plus considérables dans ce domaine ?

 27   R.  Lorsqu'on a parlé de cela, l'intention du ministre était toujours de

 28   voir la police militaire et le ministre de l'Intérieur à faire tout ce qui

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  1   était possible pour stabiliser la situation de sécurité. C'est pour cela

  2   que j'ai dit qu'en principe c'était toujours cette réponse qu'on recevait.

  3   Q.  Monsieur Moric, j'essaie de voir ce que vous savez précisément. Je ne

  4   m'intéresse pas à savoir quelles étaient les règles. Est-ce que M. Jarnjak

  5   vous a jamais dit, après avoir envoyé des informations au ministre de la

  6   Défense, que sa réponse était de déployer plus d'efforts pour ce qui est de

  7   la stabilisation de la situation de sécurité ? Est-ce que le ministre

  8   Jarnjak vous a dit cela, vous a transmis cette réponse ?

  9   R.  Je ne sais pas s'il a formulé sa réponse ainsi, mais il n'y avait

 10   aucune ambiguïté que c'était quelque chose que nous, nous devions faire et

 11   qu'il s'attendait à ce que nous fassions cela.

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Maintenant, j'aimerais qu'on affiche la

 13   pièce à conviction D48.

 14   Q.  Une semaine après que vous avez rédigé votre lettre du 10 août, vous

 15   avez encore une fois exprimé vos préoccupations et vous avez dit cela au

 16   général Lausic. Evidemment, vous avez dû réitérer ce qui a été déjà dit au

 17   général Lausic, parce qu'une semaine après la première lettre le problème

 18   était toujours présent, n'avait pas été résolu, et au lieu de vous adresser

 19   au général Lausic, est-ce que vous avez pensé s'adresser à quelqu'un

 20   d'autre, à un autre organe par le biais du ministre pour essayer de

 21   résoudre le problème en s'adressant à d'autres organes, en utilisant

 22   d'autres moyens ?

 23   R.  Cette lettre a été envoyée après avoir eu des contacts avec le général

 24   Lausic et c'étaient des contacts quotidiens.

 25   En réponse à votre question, je peux dire que pour ce qui est d'autres

 26   moyens ou d'autres organes, d'autres adresses, mise à part la coopération

 27   entre la police militaire et la police civile, je peux dire qu'il n'y en

 28   avait pas.

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  1   Q.  Si je vous ai bien compris, cette lettre a été envoyée après les

  2   contacts quotidiens avec le général Lausic, à savoir qu'à partir du 10

  3   août, au moins, vous étiez en contact quotidien avec le général Lausic. Et

  4   le 17 août, vous lui avez écrit que :

  5   "Sur la base des rapports soumis par les postes de police --"

  6   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

  7   Je soulève une objection pour ce qui est de la qualification donnée à cette

  8   réponse parce que ce n'est pas ce que le témoin a dit.

  9   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais reformuler ma question.

 11   Q.  Nous avons vu la lettre que vous avez envoyée au général Lausic le 10

 12   août, Monsieur Moric, et vous nous avez dit que vous aviez des contacts

 13   quotidiens avec le général Lausic. Est-ce qu'à partir du 10 août jusqu'à la

 14   rédaction de cette lettre du 17 août, vous aviez des contacts réguliers,

 15   quotidiens, avec le général

 16   Lausic ?

 17   R. Je m'en souviens pas. Je ne me souviens pas si on a eu des contacts

 18   quotidiens ou non pendant cette période de temps.

 19   Q. Maintenant, vous avez témoigné, Monsieur Moric, vous venez de nous dire

 20   que la lettre a été envoyée après avoir eu des contacts quotidiens avec M.

 21   Lausic. Pouvez-vous nous dire ou pouvez-vous dire à la Chambre quand ces

 22   contacts ont commencé, ces contacts quotidiens, ce qui devait être avant

 23   l'envoi de cette lettre ?

 24   R.  Les contacts quotidiens ont commencé à la réunion entre les ministres

 25   de la Défense et de l'Intérieur dont on a parlé hier. On a eu des contacts

 26   quotidiens à partir de cette réunion. Cela ne veut pas dire qu'on a eu des

 27   contacts tous les jours, mais cela dépendait des problèmes qui surgissaient

 28   de temps en temps. Donc on a eu des contacts pour en parler.

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  1   Q.  Bien. Pour ce qui est de cette lettre, Monsieur Moric, vous avez fait

  2   rapport à M. Lausic en disant, je cite :

  3   "Il est évident sur la base des rapports soumis par les postes de police et

  4   administrations de la police que des cas où les maisons ont été incendiées

  5   et où les biens ont été pillés, que cela était enregistré quotidiennement

  6   dans les zones libérées par la Défense territoriale lors de l'opération

  7   Tempête."

  8   Vous avez dit que la raison pour laquelle cela n'a pas pu être résolu est

  9   qu'il n'y avait pas de coopération entre la police militaire et la police

 10   civile. Revenons à ces deux documents, D46 et D48, ces deux lettres que

 11   vous avez envoyées le 10 et le 17. Vous vous êtes adressé à M. Lausic pour

 12   lui parler de ces problèmes au moins pendant une semaine avant le 17 août.

 13   Puisque M. Lausic n'a pas été efficace dans son approche de ces problèmes,

 14   n'avez-vous pas pensé à utiliser une autre méthode pour résoudre ce

 15   problème en s'adressant à quelqu'un d'autre ?

 16   R.  Madame le Procureur, je n'ai pas dit que le problème a été un problème

 17   important parce qu'il y a eu le manque de coopération avec la police

 18   militaire, mais plutôt parce que la police militaire avait des difficultés

 19   que nous, dans la police civile, n'avions pas ou dans une moindre mesure.

 20   Et mis à part la coopération efficace entre la police militaire et la

 21   police civile, il n'y avait pas d'autre moyen ou d'autre mode de résolution

 22   de ce problème.

 23   Q.  Bien.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher à

 25   nouveau D48, s'il vous plaît.

 26   Q.  Après que vous avez envoyé la lettre du 17 août -- je m'excuse. C'est

 27   la pièce D49. Excusez-moi, Monsieur le Greffier d'audience.

 28   Vous avez donné l'ordre le 18 août et nous avons déjà discuté de cet ordre

Page 25845

  1   dans le prétoire.

  2   J'ai compris dans votre témoignage, Monsieur Moric, que vous nous avez dit

  3   qu'après avoir donné cet ordre, vous vous êtes attendu à ce que les crimes

  4   commis avant la date du 18 août soient résolus et enquêtés après qu'un

  5   contrôle sur le territoire ait été établi. C'est comme ça que j'ai compris

  6   votre témoignage. Je fais référence à la page du compte rendu d'audience 25

  7   563. 

  8   Pourquoi, pour ce qui est de ce cas, vous n'avez pas mentionné ce fait dans

  9   cet ordre ? Au lieu de donner l'ordre général, dire lors des réunions,

 10   informer les gens de la décision pour ce qui est d'éviter de telles

 11   situations où il y avait des maisons incendiées et les pillages, pourquoi

 12   vous n'avez pas dit que les crimes seraient commis avant le 18 août,

 13   seraient enquêtés de façon rétroactive ou donné d'autres indices à vos

 14   subordonnés en disant que les crimes allaient être enquêtés une fois le

 15   contrôle du territoire établi ?

 16   Pourquoi vous n'avez pas mentionné cela dans votre ordre ?

 17   R.  Est-ce que je peux voir la deuxième page de ce document ?

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la deuxième

 19   page du document, Monsieur le Greffier.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation]

 21   R.  Madame le Procureur, dans les documents que nous avons vus la semaine

 22   dernière, il est clair que je dirigeais les activités de la police de base,

 23   ainsi que les activités concernant la prévention, ce qui est prévu par le

 24   décret portant sur l'organisation et le fonctionnement du ministère de

 25   l'Intérieur. Donc la prévention faisait partie de mes activités et de mes

 26   tâches.

 27   Et comme vous pouvez le voir dans ce document, il n'y a pas de

 28   mention de la police judiciaire. C'est parce que d'après l'organisation du

Page 25846

  1   ministère, je n'ai pas été en charge de la police judiciaire. Donc ce

  2   document ne concerne pas la modification de la façon à laquelle travaillait

  3   la police de base. Et les policiers ne devaient pas être retenus à des

  4   endroits où, malheureusement, des infractions pénales telles que pillage et

  5   incendies criminels ont eu lieux, mais plutôt de les envoyer à des endroits

  6   où il y avait des déluges ou autre chose relevant de la compétence de la

  7   police de base. Mais je ne dis pas que la police judiciaire a dû être

  8   exclue des activités se déroulant sur les lieux de ces événements.

  9   D'ailleurs, dans le contexte de cette lettre, il est clair que les enquêtes

 10   sur les lieux de crimes allaient se poursuivre.

 11   Q.  Monsieur Moric, si vous avancez que vous et vos forces de la

 12   police, vous n'avez pas été impliqués dans des enquêtes des crimes, alors

 13   quel est l'objectif ou la fin de l'ordre au paragraphe 2 ? Pouvez-vous dire

 14   à la Chambre de première instance précisément comment vous avez obtenu des

 15   ressources complémentaires, en disant à la police de base que les crimes

 16   commis avant le 18 août n'allaient pas être enquêtés.

 17   Vous avez dit qu'ils ne devaient pas rester dans les zones où il y

 18   avait des pillages. Et si j'ai bien compris le paragraphe 2 de votre ordre,

 19   et d'après votre témoignage, vous avez dit que vous avez fait partir la

 20   police de base dans des endroits où elle devait s'occuper plutôt de la

 21   prévention du crime, et non pas des enquêtes menées sur les lieux de

 22   crimes.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Objection pour ce qui est des

 24   commentaires éventuels du conseil, parce que je ne sais pas de quoi il

 25   s'agit pour ce qui est de la fin du document. Mais si nous regardons les

 26   questions et les réponses, il y a 15 lignes pour ce qui est de ces

 27   questions et des réponses. La forme de la question prête à confusion,

 28   ensuite il y a une question complémentaire à la fin.

Page 25847

  1   J'aimerais que mon éminente collègue pose des questions concrètes et

  2   s'abstienne des commentaires antérieurs à la réponse.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dois dire que poser des questions de

  4   cette façon n'est pas une chose qui est habituelle dans ce prétoire, c'est-

  5   à-dire d'entendre d'abord des commentaires et après la question. Et cela ne

  6   devrait pas être la pratique adoptée dans ce prétoire.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais reformuler ma question. Merci,

  8   Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, s'il vous plait.

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Moric, pouvez-vous dire à la Chambre de première instance

 12   comment précisément vous avez voulu déployer des efforts pour ce qui est de

 13   la prévention de crimes, justement, en prenant la décision de ne pas mener

 14   des enquêtes sur les lieux des crimes pour ce qui est des crimes commis

 15   avant le 18 août.

 16   Vous pouvez expliquer cela ?

 17   R.  En vous donnant la réponse précédente, je vous ai expliqué cela, à

 18   savoir que les policiers de la police de base ne devaient pas rester près

 19   des maisons qui, malheureusement, étaient déjà pillées ou détruites ou

 20   incendiées, non pas parce que la police judiciaire avait besoin de l'aide

 21   de la police de base, mais plutôt que la police de base devait s'occuper de

 22   la prévention de crimes et empêcher que de tels crimes soient commis à

 23   nouveau. Et la police de base allait apporter son aide pour ce qui est des

 24   enquêtes sur les lieux de crimes, une fois la situation stabilisée sur ce

 25   territoire.

 26   Dans le contexte de ce document, on peut donc voir que cela a été

 27   quelque chose qui a été clairement dit.

 28   Q.  Vous avez dit que la police de base ne devait pas être retenue,

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  1   gardée à la proximité des maisons.

  2   Lorsque vous avez utilisé ces mots "retenue" et "gardée", est-ce que

  3   cela veut dire que la police de base a été impliquée à des enquêtes menées

  4   sur place pour préserver des éléments de preuve matériels ?

  5   R.  Cela dépendait de la situation. Lorsqu'il y avait plusieurs

  6   maisons sur place, les policiers de la police de base devaient garder ces

  7   maisons, se trouver à la proximité de ces maisons en attendant l'arrivée de

  8   la police judiciaire. Donc je pensais à l'obligation de la police de base,

  9   à son devoir d'assurer la sécurité des endroits où les crimes ont été

 10   perpétrés.

 11   Q.  Monsieur Moric, vous allez vous souvenir qu'en répondant à des

 12   questions de la Chambre, au moment où la Chambre vous a posé la question

 13   pour savoir quel était le nombre de policiers de la police de base qui a

 14   été nécessaire pour mener des enquêtes sur les lieux de crimes, vous nous

 15   avez donné trois exemples pour ce qui est des incendies criminels, vous

 16   nous avez donné des chiffres. Et ces chiffres s'appuient probablement - et

 17   corrigez-moi si je n'ai pas raison - probablement sont basés sur le type

 18   d'activités menées sur place, à savoir s'il s'agit du fait d'assurer la

 19   sécurité du lieu des crimes, de rassembler des éléments de preuve, et

 20   cetera.

 21   R.  Je n'ai pas donné des chiffres exacts. J'ai donné des chiffres

 22   approximatifs, si je me souviens bien. C'était en répondant à la question

 23   de la Chambre, parce que je n'ai pas pu donner un chiffre précis car cela

 24   dépendait de la situation concrète. J'ai fourni le chiffre approximatif de

 25   policiers.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais la question ne concernait pas

 27   les chiffres approximatifs, ou autre. Vous avez répondu à la question qui

 28   vous a été posée, parce que Mme Mahindaratne ne vous a pas posé la question

Page 25849

  1   concernant les chiffres exacts. Je pense que c'est clair pour tout le

  2   monde.

  3   J'aimerais vous poser une question pour ce qui est du document

  4   affiché sur l'écran.

  5   Cet ordre qui a été adressé aux administrations de la police était

  6   très général. Est-ce que dans cet ordre on voit que la police judiciaire

  7   allait être incluse dans ces administrations de la

  8   police ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, parce que les chefs des

 10   administrations de la police savent que je suis responsable de la police de

 11   base et de la prévention du crime.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La deuxième page du document, où il est

 13   dit qu'il ne faut pas mener des enquêtes pour ce qui est des crimes commis

 14   précédemment, et après on donne des instructions claires pour ce qui est

 15   des activités sur les lieux de crime, des enquêtes sur les lieux de crime,

 16   qu'il faut donc arriver à un accord pour savoir si la police militaire

 17   allait faire ça ou pas, et que cela serait la police civile qui ferait cela

 18   seule.

 19   Et d'après ces instructions, il est clair que pour ce qui est de la

 20   police judiciaire et des enquêtes sur les lieux de crime, mises à part les

 21   activités de la police de base, que la police judiciaire devait s'occuper

 22   des enquêtes sur les lieux de crime. C'est la tâche spécifique de la police

 23   judiciaire, n'est-ce pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est de ces

 25   activités, la police de base coopère avec la police judiciaire, apporte son

 26   aide; et dans ce document, il est question de telles activités.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Oui, mais vous dites que parce que

 28   vous n'avez pas été responsable de la police judiciaire, tout le monde

Page 25850

  1   aurait pu comprendre que malgré le fait qu'ici il ne s'agit pas

  2   spécifiquement de cette assistance, qu'ici il soit question de savoir s'il

  3   faut mener une enquête ou pas. Donc vous dites que la police de base, ses

  4   activités se sont limitées uniquement à apporter de l'aide à la police

  5   judiciaire pour ce qui est de ces activités spécifiques, n'est-ce pas ?

  6   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Il y a une

  7   question pour ce qui est de la traduction ou de l'interprétation.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'abord, répondez à ma question.

  9   Monsieur Moric, ne regardez pas le conseil de la Défense.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je m'excuse, Monsieur le Président.

 11   Oui, c'est dans ce sens qu'il faut comprendre cet ordre.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, Maître Misetic, pour

 13   ce qui est de la question concernant la traduction.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Pour que la Chambre soit consciente du

 15   fait, en croate le témoin a dit qu'il n'a pas donné des chiffres exacts.

 16   Peut-être qu'il y aurait une interprétation différente par rapport au

 17   contexte dans lequel le témoin a essayé de nous expliquer ce qu'il pensait.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Mahindaratne, lorsqu'elle vous

 19   a posé cette question pour ce qui est des chiffres, vous avez commencé

 20   votre réponse en disant : "Je n'ai pas fourni…"

 21   Qu'est-ce que vous avez fourni comme chiffres ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas fourni de chiffres précis.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 24   Continuez, Madame Mahindaratne.

 25   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Moric, revenons à ma question pour ce qui est de ces chiffres;

 27   et encore une fois, il ne s'agit pas de chiffres précis, de chiffres

 28   approximatifs. Ces chiffres approximatifs sont fondés sur le volume des

Page 25851

  1   activités de la police de base lors des enquêtes menées sur les lieux de

  2   crime, n'est-ce pas ?

  3   R.  Exact.

  4   Q.  Maintenant --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si vous posez cette question, c'est

  6   tout à fait superflu, Madame le Procureur. Si vous vous passez en revanche

  7   en détail sur le nombre d'hommes nécessaires pour tel ou tel type de

  8   tâches, le nombre d'experts en divers domaines, peut-être que vous pourriez

  9   vous essayer de concentrer sur de tels aspects; en tout cas, sur ce qui est

 10   réellement controversé, parce que près de 30 % de vos questions concernent

 11   des sujets qui ne sont pas controversés du tout, qui sont l'évidence même.

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Q.  Dans le paragraphe 2 de cet ordre, vous décidez d'affecter certaines

 14   ressources de la police de base à la prévention, donc des ressources qui

 15   avaient été impliquées dans des enquêtes sur site. Peut-être que le

 16   ministre de l'Intérieur ne s'en est pas rendu compte. Peut-être qu'une

 17   autre façon de faire face à la situation aurait pu consister à recourir à

 18   la police judiciaire dont le personnel était impliqué dans d'autres tâches

 19   que la conduite d'enquêtes criminelles pendant cette période afin qu'elle

 20   intervienne dans des enquêtes criminelles.

 21   R.  Excusez-moi, peut-être y a-t-il eu un problème de traduction, mais je

 22   ne suis pas sûr d'avoir compris parfaitement votre question.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas compris non plus, Monsieur

 24   Moric.

 25   Veuillez, Madame le Procureur, reformuler.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Moric, est-ce que vous aviez clairement à l'esprit une échelle

 28   de priorités pour les différentes tâches dans lesquelles la police

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  1   judiciaire intervenait juste après l'opération Tempête ?

  2   R.  Je ne comprends pas pourquoi. Juste après cette opération, il y aurait

  3   quoi que ce soit de nouveau par rapport aux tâches de la police judiciaire.

  4   Q.  Monsieur Moric, est-ce que vous étiez conscient du fait qu'après la

  5   libération de ces territoires, un nombre important des effectifs de la

  6   police judiciaire était utilisé pour s'occuper des prisonniers de guerre

  7   dans les centres de rassemblement, et également pour enquêter sur les sites

  8   de charniers où des personnes appartenant au groupe ethnique croate avaient

  9   été enterrées ?

 10   M. KEHOE : [interprétation] Pouvons-nous avoir une mention précise pour

 11   cela, s'il vous plaît ?

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je me réfère aux témoignages de M.

 13   Kardum, pages 9 306, 9 290, 9 400 du compte rendu d'audience, ainsi que la

 14   pièce P896, paragraphe 41. Je pourrais en donner lecture si vous le

 15   souhaitez.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons de subdiviser cette question.

 17   Est-ce que vous saviez, Monsieur Moric, que la police judiciaire avait été

 18   utilisée pour conduire des entretiens, pour interroger ceux qui étaient

 19   suspectés d'avoir participé à l'insurrection ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le savais, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, seconde question de Mme le

 22   Procureur. Allez-y, Madame le Procureur, pour la deuxième partie.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 24   Q.  A-t-on jamais envisagé au sein du ministère de l'Intérieur qu'une autre

 25   façon possible de faire face à ce manque d'effectifs aurait été --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La seconde partie de votre question

 27   concernait les charniers --

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

Page 25853

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- qui entrent dans des catégories

  2   différentes.

  3   Veuillez continuer.

  4   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le

  5   Président.

  6   Q.  Est-ce que vous étiez tout à fait conscient également que la tâche

  7   prioritaire de la police judiciaire après la libération consistait à

  8   rechercher des charniers et enquêter sur des charniers où des personnes

  9   appartenant au groupe ethnique croate avaient été inhumées ?

 10   R.  Ce que vous me demandez, est-ce que c'est si je savais que cela

 11   constituait une priorité ?

 12   Q.  Oui. Est-ce que vous saviez que c'était en fait la tâche prioritaire de

 13   la tâche judiciaire ?

 14   R.  Non, je l'ignorais, parce que je pense à vrai dire que ce n'était pas

 15   la priorité.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur, il semble qu'il y

 17   ait ici deux questions.

 18   Premièrement, étiez-vous informé que la police judiciaire participait à des

 19   enquêtes concernant les charniers, charniers dans lesquels des Croates

 20   avaient été inhumés ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que cela a bien été le cas,

 22   Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Savez-vous quelle part de

 24   leur temps a été consacrée à cette tâche ? Quel pourcentage du temps dont

 25   disposait la police judiciaire était-il consacré à des enquêtes de cette

 26   nature ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas la réponse à ces questions.

 28   Je ne sais pas.

Page 25854

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  2   Veuillez poursuivre, Madame le Procureur.

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

  4   Q.  Donc vous nous dites que vous ne savez pas, Monsieur Moric, je

  5   n'insisterai pas.

  6   En répondant à une question de la Chambre - peut-être juste avant, je vais

  7   redonner lecture de ce que vous avez dit - par rapport à votre ordre du 18

  8   août, vous avez répondu à plusieurs questions, et je vais donner lecture de

  9   la question de M. le Président, je cite, et vous avez dit ne pas avoir été

 10   à la tête de la police judiciaire.

 11   Vous dites donc que : "Tout un chacun pouvait comprendre que ce soutien

 12   n'était pas fourni de façon spécifique mais qu'un grand nombre d'éléments,

 13   y compris cette instruction de ne pas procéder à des enquêtes, qu'une

 14   enquête ait à être diligentée ou non, bien, que tout un chacun devait

 15   comprendre dans la lettre que vous avez rédigée, qu'en fait, tout cela se

 16   limitait à la seule police de base qui devait fournir ce soutien dans

 17   différentes tâches."

 18   Est-ce la façon dont nous devons comprendre votre réponse ?

 19   Malheureusement, vous n'avez pas répondu à la question parce qu'il y avait

 20   une interruption.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, il y a bien une réponse donnée

 22   après. Cette interruption, elle a été affirmative.

 23   Veuillez poursuivre.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 25   Q.  Confirmez-vous donc, Monsieur Moric, concernant cet ordre, ce que vous

 26   avez dit, je cite ?

 27   "Il n'y a pas un seul document émanant d'une direction de la police et qui

 28   aurait demandé quelque chose qui aurait pu être considéré comme inadéquat

Page 25855

  1   d'un point de vue professionnel ou illégal. Ils avaient l'obligation de

  2   m'avertir si jamais je demandais quelque chose qui n'était pas

  3   professionnellement correct ou qui n'était pas strictement dans le cadre de

  4   la loi. Donc dans notre communication quotidienne, tout était parfaitement

  5   clair quant aux intentions en jeu."

  6   Donc votre déposition, Monsieur Moric, est que vos subordonnés ont compris

  7   votre ordre du 18 août dans le contexte que vous dites avoir été celui de

  8   son émission. Je voudrais vous demander si vous seriez surpris d'apprendre

  9   que certains de vos subordonnés, ici, ont déposé, notamment M. Cetina, et

 10   voilà ce qu'il a eu à dire à propos de votre ordre. Je vais en donner

 11   lecture.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A quelle page, Madame le Procureur ?

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Page 23 589, Monsieur le Président.

 14   Q.  Je cite : "Je ne me rappelle pas avoir discuté cet ordre avec qui que

 15   ce soit… mais je n'étais pas tenu par cela. La Loi sur les Affaires

 16   intérieures stipulait que si je recevais un ordre qui s'avérerait illégal,

 17   je n'aurais pas l'obligation de le mettre en œuvre."

 18   En fait, en page 23 415, il y a eu une discussion, un débat concernant cet

 19   ordre entre la Chambre et M. Cetina. Et il dit, je cite : "D'un certain

 20   point de vue, il n'est pas conforme à la loi."

 21   Ensuite, on lui demande si cet ordre présentait une violation de la loi. Il

 22   répond : "Oui."

 23   M. KEHOE : [interprétation] Je souhaiterais que Mme le Procureur veuille

 24   bien replacer tout cela dans son contexte, parce que les questions étaient

 25   posées par rapport à la question d'une amnistie pour des crimes commis

 26   précédemment. Il ne s'agissait pas de l'ordre en lui-même. Donc si nous

 27   repassons en revue l'ensemble de ce débat et le contexte des questions

 28   posées par la Chambre à M. Cetina, cela apparaît clairement.

Page 25856

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, nous n'allons pas dire à -

  2   -

  3   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur, essayez de vous

  5   abstenir de poser des questions dans un contexte vague, parce que cela va

  6   susciter des questions supplémentaires, et si vous souhaitez avoir une

  7   réponse immédiate, rapide, comme je l'ai déjà indiqué, faites en sorte de

  8   préciser le contexte.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 10   Q.  Monsieur Moric, cette référence que fait M. Cetina à un ordre illégal

 11   concerne le paragraphe 2 de votre ordre, indiquant que les crimes commis

 12   avant le 18 août ne devraient pas faire l'objet d'une enquête. Voilà ce qui

 13   était l'objet du débat, et non pas l'ordre dans son intégralité.

 14   Et voilà ce que M. Cetina dit, et il y a d'ailleurs eu également des

 15   positions d'un autre agent du ministère de l'Intérieur. Je ne peux pas

 16   m'étendre sur les détails de ce qu'il a dit, parce qu'il a bénéficié des

 17   mesures de protection, Monsieur Moric. Mais pour ce qui concerne ce

 18   paragraphe numéro 2 de votre ordre indiquant qu'il convenait de ne pas

 19   enquêter sur les crimes commis avant le 18 août, ces dispositions

 20   particulières, selon lui, selon ce deuxième témoin, représentaient une

 21   erreur flagrante. Cela se trouve en

 22   page 5 845 à 5 846 du compte rendu d'audience.

 23   Donc, Monsieur Moric, est-ce que vous éprouvez une certaine surprise à

 24   apprendre que vos propres subordonnés, en réalité, avaient compris votre

 25   ordre de cette façon, dans ce contexte que vous nous avez expliqué ?

 26   R.  Oui, je suis surpris, Madame le Procureur.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur, votre référence aux

 28   pages 5 845 et suivantes, est-ce que c'était pour M. Cetina --

Page 25857

  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, c'était

  2   pour le second témoin.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci.

  4   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pour M. Cetina, c'était les pages 23

  5   415 et 23 589 dont il s'agissait.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  7   Veuillez poursuivre.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais je

  9   dois encore une fois soulever une objection. Si nous examinons la page

 10   précise qui vient d'être citée par le Procureur - et j'en réfère, Monsieur

 11   le Président, à la page 23 411, donc la déposition de M. Cetina - si nous

 12   examinons les lignes 16 à 18, nous pouvons une nouvelle fois -- voir les

 13   lignes 8 à 16, excusez-moi. Je voudrais juste demander qu'on veuille bien

 14   replacer les choses dans leur contexte encore une fois.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur acceptera peut-être

 16   de suivre votre suggestion, ou bien vous aurez à vous repencher sur la

 17   chose dans les questions supplémentaires.

 18   Madame le Procureur, je le laisse à votre discrétion.

 19   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas

 20   avoir cité les choses hors contexte.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous déclinez donc

 22   l'invitation ou la suggestion qui vous est faite.

 23   Veuillez poursuivre.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Pouvons-nous avoir maintenant le document D595 à l'écran, Monsieur le

 26   Greffier.

 27   Q.  Monsieur Moric, pendant que ce document s'affiche, je voulais vous

 28   demander la chose suivante : en répondant à une question de la Chambre

Page 25858

  1   concernant cet ordre, vous avez répondu qu'en réalité vous n'aviez pas émis

  2   un ordre après celui du 18 août demandant à vos subordonnés d'enquêter sur

  3   les crimes commis avant le 18 août, un ordre qui aurait consisté à faire

  4   machine arrière en quelque sorte.

  5   Dans ce contexte, puisque vous n'avez pas émis un tel ordre, comment vous

  6   seriez-vous attendu ou comment vous attendiez-vous à ce que vos

  7   subordonnées réagissent ? Est-ce que vous vous attendiez à ce qu'ils

  8   réagissent spontanément et qu'ils décident qu'il était maintenant temps

  9   d'enquêter sur ces crimes ? Vous attendiez-vous à ce qu'ils le fassent à

 10   titre individuel ? Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre quelles

 11   étaient vos attentes quant à la façon dont vos subordonnés étaient censés

 12   reprendre ces enquêtes ou les initier ?

 13   R.  Madame le Procureur, cela suivrait la façon de procéder des services de

 14   police. Si ces derniers avaient été informés dans le cadre de leurs tâches

 15   quotidiennes qu'une maison, par exemple, avait été incendiée ou pillée, si

 16   les services de police de base s'étaient rendus sur place, bien, cela a

 17   fait l'objet d'un constat qui a été des décès, comme événement ayant trait

 18   à la sécurité, enregistré donc à la direction de la police dans la zone où

 19   s'est produit l'événement. Alors, si un ordre est émis pour modifier la

 20   stratégie appliquée par les services de police et que ces derniers sont

 21   retirés d'une zone afin de renforcer les activités de prévention d'actes

 22   délictieux ou d'autres crimes, bien, l'événement que j'ai donné en exemple

 23   et dont le constat a déjà été dressé, a déjà entraîné le déclenchement

 24   d'une procédure ou d'une enquête, et toutes les autres actions ou

 25   procédures prévues par la loi ont ainsi été mises en route.

 26   C'est pourquoi nous avons eu à faire face à une situation dans

 27   laquelle tous les constats et tous les rapports concernant des crimes

 28   perpétrés avant la date du 18 ont, en fait, été remis après cette date.

Page 25859

  1   Q.  Très bien.  Monsieur Moric, je voudrais passer maintenant à d'autres

  2   sujets. Nous avons à l'écran un document qui vient de s'afficher et qui

  3   vous est connu, je pense. Il s'agit du procès-verbal de la réunion de

  4   Plitvice qui s'est tenue le 15 septembre.

  5   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais juste avoir un instant,

  6   Monsieur le Président, s'il vous plaît.

  7   Pouvons-nous passer à la page suivante, s'il vous plaît.

  8   Q.  Monsieur Moric, voyez-vous ici les propos de M. Cetina ? Il est dit que

  9   M. Cetina a insisté sur le fait que, "la plus large part de ce territoire

 10   avait été occupée, et la situation dans la zone a été présentée par lui en

 11   trois étapes."

 12   Première étape, la présence des unités professionnelles de la HV.

 13   Deuxième étape, la présence d'unités qui ont incendié des maisons et

 14   menacé au moyen d'armes, si des crimes étaient sur le point d'être commis.

 15   Troisième étape, présence de civils qui ont confisqué des biens et

 16   les ont volés à une échelle massive.

 17   L'INTERPRÈTE : Remplacer séjour ou présence par suspension.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous

 19   passer à la page suivante.

 20   Q.  Ensuite, il est dit :

 21   "Il a également considéré la coopération avec la police militaire comme

 22   ayant été insatisfaisante en raison du nombre insuffisant de policiers

 23   militaires.

 24   Le chef de l'administration de la police militaire de Knin a convenu

 25   avec M. Cetina et a donné son accord à son rapport concernant la situation

 26   jugée insatisfaisante compte tenu des circonstances."

 27   Donc voilà une réunion à laquelle vous avez participé, ainsi que le

 28   personnel de la police militaire, et nous avons ici un rapport qui est fait

Page 25860

  1   par le chef d'une administration de la police, d'une direction de la

  2   police, concernant des crimes commis par des membres de la HV et des

  3   tentatives de s'y opposer qui ont résulté en des réactions de personnes qui

  4   étaient armées, qui ont recouru à l'usage de leurs armes, ce qui pose un

  5   problème très sérieux en termes de sécurité.

  6   Alors, avez-vous jamais envisagé de soulever cette question auprès du

  7   ministre de la Défense, ou bien de dire, au moins, à votre ministre que

  8   peut-être qu'il était temps de soulever cette question auprès du ministre

  9   de la Défense sans en référer en permanence à

 10   M. Lausic ?

 11   R.  Des cas isolés de menaces au moyen d'armes, qui étaient le fait de

 12   personnes portant l'uniforme de l'armée croate, qu'elles aient été des

 13   membres ou non de cette armée, se sont présentés, et dans la plupart des

 14   cas, il s'agissait de soldats. Mais la seule façon de traiter ce problème

 15   était de coopérer avec la police militaire.

 16   Q.  Très bien. Mais vous nous avez dit, Monsieur Moric, nous avons vu votre

 17   tentative du 10 août, et ici, nous sommes déjà au 15 septembre, c'est-à-

 18   dire plus de cinq semaines plus tard. Alors manifestement, la coopération

 19   avec la police militaire n'a pas fonctionné et la situation n'est pas ce

 20   qu'elle aurait du être à cette étape-là. Est-ce que vous n'avez pas

 21   considéré peut-être que les efforts que vous aviez mis en jeu n'avaient pas

 22   porté leurs fruits ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur, je vous écoute

 24   toujours d'une oreille et de l'autre, j'écoute ou je m'efforce d'anticiper

 25   ce que Me Kehoe pourrait avoir à dire.

 26   Si je voulais que vous fassiez une pause, je vous le demanderais.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, j'ai fini

 28   ma question. J'attendais une réponse du témoin.

Page 25861

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  2   Maître Kehoe.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, la question a été

  4   soulevée, ou peut-être ne l'a-t-elle pas été, de savoir si ces questions

  5   avaient été portées à l'attention du ministre de la Défense. Mais le

  6   document est un document conjoint. C'est une réunion conjointe du ministère

  7   de l'Intérieur et du ministère de la Défense. Je parle du document qui est

  8   à l'écran et qui émane du ministère de la Défense et de la direction de la

  9   police militaire. Donc tout cela n'est pas très clair pour moi pour ce qui

 10   est de la question posée par le Procureur, de signaler cela au ministère de

 11   la Défense.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Procureur [comme interprété].

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, ma question

 14   était de savoir si cela avait été porté à l'attention du ministre de la

 15   Défense.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, la question qui a été

 17   posée n'était pas celle de savoir si cela avait été fait, mais de savoir si

 18   cela avait été envisagé.

 19   M. KEHOE : [interprétation] Si vous vous reportez à la page 30, ligne 3,

 20   vous voyez qu'il s'agit non pas du ministre, mais du ministère de la

 21   Défense. Ensuite, le Procureur demande si le témoin envisageait d'en

 22   référer au ministre ou ministère, encore une fois, de la Défense.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans mon souvenir, Mme le Procureur

 24   s'est référée au ministre de la Défense. Mais peut-être que je me trompe.

 25   Il s'agissait de s'adresser au ministre de la Défense, plutôt que M.

 26   Lausic, auquel cas, évidemment, tout cela est logique.

 27   M. KEHOE : [interprétation] Juste pour être tout à fait précis, je présume

 28   que si cela a été interprété au témoin comme étant le ministère de la

Page 25862

  1   Défense, cela a pu entraîner une certaine confusion dans son esprit.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Bien, le témoin, Maître

  3   Kehoe, nous déjà montré à plusieurs reprises qu'il était tout à fait en

  4   mesure d'indiquer la moindre absence de précision, la moindre confusion, si

  5   jamais elle s'était présentée, et de poser une question dans ce cas-là.

  6   Monsieur Moric, avez-vous envisagé de soulever cette question auprès du

  7   ministre de la Défense plutôt que de vous contenter de discuter de cela

  8   avec M. Lausic, ou du moins, à l'échelon de M. Lausic ?

  9   R.  Monsieur le Président, M. Lausic était mon interlocuteur normal. Je ne

 10   me suis pas posé la question de savoir si --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous poursuivons, il s'agissait de

 12   savoir si vous n'avez pas envisagé, en fait, d'en référer à un niveau plus

 13   élevé dans la hiérarchie ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, malheureusement pas, parce que si j'en

 15   avais référé à un niveau plus élevé, il m'aurait renvoyé à un niveau plus

 16   bas. C'était le niveau opérationnel et la personne qui était compétente

 17   pour ces sujets.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous dites que c'est la raison pour

 19   laquelle vous n'avez pas évoqué cela avec le ministre.

 20   Madame le Procureur, je surveille l'heure. J'ai dit qu'il y avait une

 21   question de calendrier que la Chambre souhaitait régler avant la pause.

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc nous avons un instant maintenant

 24   pour envisager ces questions.

 25   C'est pourquoi, Monsieur Moric, la pause va commencer pour vous dès

 26   maintenant.

 27   Je vous prie de bien vouloir suivre Mme l'Huissière, qui va vous

 28   raccompagner.

Page 25863

  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question de calendrier qui doit être

  3   abordée, qui va la présenter ?

  4   M. MIKULICIC : [interprétation] Je peux le faire, Monsieur le Président.

  5   Il s'agit du début de la semaine prochaine, qui commence le 14 décembre.

  6   Nous sommes prêts à citer Tomislav Penic à comparaître en début de semaine.

  7   Mais suite à des conversations téléphoniques qui ont eu lieu hier, il s'est

  8   avéré qu'il ne pourra pas venir la semaine prochaine comme cela avait été

  9   prévu initialement, mais uniquement après les vacations judiciaires.

 10   Par conséquent, nous avons calculé qu'à la place de M. Penic, nous

 11   pourrions citer à comparaître Mme Bagic la semaine prochaine, qui était

 12   prévue après la période de vacations judiciaires.

 13   Avec cette proposition, nous l'avons proposé au bureau du Procureur qui

 14   nous a répondu qu'il n'était pas d'accord avec cette organisation.

 15   Donc j'ai bien peur que nous soyons contraints à reporter la déposition de

 16   M. Penic, qui était prévu pour le début de la semaine prochaine, et nous

 17   aurons donc une lacune de deux jours au début de cette semaine prochaine.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Il y a donc deux questions

 19   qui se posent. Si vous ne citez pas à comparaître Mme Bagic, cela entraîne

 20   un délai supplémentaire, à moins qu'il y ait un autre témoin qui puisse

 21   peut-être combler cette lacune. Dans ce cas-là, il n'y aurait pas de perte

 22   de temps.

 23   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons

 24   envisagé également cette possibilité, mais nous n'avons pas pu trouver

 25   d'autres témoins pouvant occuper ces deux jours.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. La question suivante qui se

 27   pose s'adresse à l'Accusation. Qu'est-ce qui s'oppose, Madame et Monsieur

 28   le Procureur, à ce que Mme Bagic soit prévue pour début janvier, parce que

Page 25864

  1   Mme Bagic, au lieu de début janvier, vienne témoigner la semaine prochaine

  2   ?

  3   M. WAESPI : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à

  4   tous.

  5   Nous comprenons tout à fait la position de la Défense par rapport à la

  6   succession de leurs témoins dans le prétoire. C'est une question difficile,

  7   notamment lorsque vous êtes à court d'options disponibles.

  8   Mais j'ai dit à plusieurs reprises, nous avons envoyé des

  9   e-mails concernant ce que la Défense s'apprêtait à faire concernant deux

 10   témoins qu'elle souhaitait ajouter, et Mme Bagic est l'un de ces témoins.

 11   La Défense souhaitait donc les ajouter pour le fin de sa présentation des

 12   moyens à décharge, et Me Kuzmanovic essaye de faire en sorte que les deux

 13   derniers témoins dans cette présentation des moyens à décharge soient cités

 14   à comparaître ou bien dans les deux dernières semaines ou bien la dernière

 15   semaine avant les vacations judiciaires, ou si nous avons besoin de plus de

 16   temps, peut-être après cette interruption. C'est tel.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, pouvons-nous avoir le texte

 18   précis de --

 19   M. WAESPI : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- de cet e-mail ?

 21   M. WAESPI : [interprétation] Je cite :

 22   "Cher Stephan, je vais vous envoyer par e-mail le CV en pièce jointe pour

 23   les deux témoins, s'ils sont cités à comparaître, ces deux témoins seront

 24   les deux derniers que nous présenterons, ce qui correspondra à la dernière

 25   semaine avant les vacations judiciaires, et au-delà si nous devons

 26   prolonger les débats. Faites-moi savoir si vous avez la moindre question.

 27   Merci. Salutations, Tom." C'était le 13 novembre.

 28   Et nous avons un certain nombre de discussions avec la Défense dans

Page 25865

  1   lesquelles nous avons confirmé notre position.

  2   La question suivante qui se présente est que la semaine juste avant les

  3   vacations judiciaires est normalement réservée pour le témoin Baric, témoin

  4   expert, et nous aurons un entretien avec lui. Je n'ai pas entendu dire par

  5   la Défense qu'elle avait l'intention de retirer ce témoin. C'est cela le

  6   problème. Le problème est de savoir pourquoi maintenant il y a un temps

  7   disponible avant les vacations judiciaires.

  8   Concernant notre acceptation ou non de citer à comparaître Mme Bagic,

  9   si on revient à la demande initiale de la Défense, la demande du 10

 10   novembre demandant l'ajout des deux témoins, il faut tenir compte du fait

 11   que nous nous sommes organisés nous-mêmes sur la base de ce qui avait été

 12   fourni, et nous ne sommes pas en mesure de démarrer la semaine prochaine

 13   pour différentes raisons avec ce témoin. C'est la raison pour laquelle je

 14   souhaite insister pour que la Défense Markac remplisse ses obligations par

 15   rapport à la citation à comparaître de Mme Bagic après les vacations

 16   judiciaires.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, je comprends

 18   qu'initialement il a été annoncé qu'elle déposerait fin décembre ou début

 19   janvier. Dans les écritures de la Défense il a été demandé l'ajout du

 20   témoin MM-026. Je pense que cela avait été ajouté sur la liste modifiée de

 21   témoins de la Défense, puisqu'il n'en résulterait aucune perte de temps

 22   significative et puisque toute question relative à la préparation requise

 23   pour le contre-interrogatoire de ce témoin ou la conduite d'enquêtes

 24   prioritaires ne semblait pas être insurmontable. Cela semblait pouvoir être

 25   résolu par le déplacement de ce témoin vers la fin du calendrier de la

 26   Défense Markac.

 27   Alors, pour ce qui est du démarrage fin décembre ou début janvier, il y a

 28   une requête disant que s'il n'y a pas d'objection ou de réserve émise par

Page 25866

  1   l'autre partie concernant l'ajout du témoin

  2   MM-026 à la liste de la Défense Markac, cela pourrait être fait ainsi.

  3   Je vous dis que ça ne pourrait pas être fait avant les vacations

  4   judiciaires.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président --

  6   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  7   M. MISETIC : [interprétation] C'est juste une question de pratique qui nous

  8   permettrait de nous permettre d'accord entre parties. Je relève que cette

  9   dame, ce témoin, est prévu pour le dernier jour où nous siégerons avant les

 10   vacations judiciaires, c'est-à-dire le 16 décembre. La Défense Markac a

 11   demandé d'avoir trois ou quatre séances, donc nous devrons revenir sur

 12   cette question pour le contre-interrogatoire. Nous devrons parvenir à un

 13   accord.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 15   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense Gotovina agit en tant

 17   qu'intermédiaire ici.

 18   M. WAESPI : [interprétation] Merci.

 19   M. Rendulic nous a dit par e-mail que ce témoin pourrait être cité plus

 20   tôt. Et j'ai répondu immédiatement par e-mail. J'en ai discuté avec la

 21   Défense pour dire que cela n'était pas notre conception.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais quand vous dites plus tôt c'est

 23   ambigu, cela pourrait signifier qu'on n'est pas à la fin de la présentation

 24   des moyens à décharge. Mais cela pourrait signifier aussi plus tôt, peut-

 25   être même un mois plus tôt. Je crois comprendre donc qu'il y avait une

 26   option qui a été envisagée aux termes de laquelle cette dame aurait pu

 27   peut-être déposer en tant que dernier témoin du mois de décembre et que

 28   l'Accusation aurait pu être prête et n'aurait plus d'objection à soulever à

Page 25867

  1   ce sujet.

  2   Alors, je vais être très concret, Monsieur Waespi. Est-ce que ces

  3   préparatifs sont tels que cela vous prend beaucoup de temps ou est-ce que

  4   ce sera tout simplement l'un des membres de votre équipe qui devra faire

  5   ces préparatifs, mais que cette personne n'est pas présente; c'est cela ?

  6   M. WAESPI : [interprétation] Ecoutez, c'est un peu des deux. C'est Mme

  7   Gustafson qui posera des questions à Mme Bagic, et il ne faut pas oublier

  8   qu'il y a les préparatifs au titre de l'article 54 bis.

  9   Vous savez, nous ne sommes pas si différents que cela de la Défense, je

 10   veux dire, notre position n'est pas si divergente parce que nous n'avons

 11   pas beaucoup de ressources. Lorsqu'il y a un problème de calendrier, il

 12   faut pouvoir réagir aux nombreuses questions. C'est pour cela, en fait, que

 13   nous avions sauté sur l'occasion pour ce qui était de réserver le

 14   témoignage si important de Mme Bagic à la fin de la présentation des moyens

 15   à décharge. 

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ce n'est pas une question

 17   d'indisponibilité physique, en quelque sorte, mais le fait est que vous

 18   êtes occupé par d'autres questions.

 19   Alors, Maître Misetic, voilà ce que je suggère. Vous pourriez suggérer aux

 20   parties de vous accepter en tant que médiateur et, bien entendu, si cela

 21   n'aboutit à aucun résultat positif, la Chambre statuera.

 22   Nous allons faire une pause, et nous reprendrons à

 23   11 heures 05.

 24   --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 10.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous savez, en matière

 28   de médiation, d'après ce que je sais des efforts de médiation, on ne peut

Page 25868

  1   pas toujours pointer un doigt accusateur vers le médiateur parce que --

  2   La Chambre est informée du fait que vos efforts, que les efforts que vous

  3   avez déployés ont été voués à l'échec. Donc les parties sont invitées à

  4   nous dire très brièvement, et je vous invite, vous, en tant que médiateur,

  5   à nous expliquer le problème. Je ne souhaite pas que l'on passe trop du

  6   temps de la Chambre à écouter ce problème --

  7   Monsieur Waespi.

  8   M. WAESPI : [interprétation] Je ne pense pas que le médiateur ait pris

  9   contact avec moi pendant la pause --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous dire ce que j'ai appris.

 11   Lorsque l'on est médiateur, il faut que le médiateur essaie de parler au

 12   moins à chacune des parties.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais moi, par expérience, je sais que

 14   l'une des parties a une position qui est telle que ce n'est pas la peine de

 15   prendre langue avec la partie en question.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, non, je voulais que nous

 17   nous penchions sur cette question de façon plus détaillée, ici. J'étais sur

 18   le point de vous inviter à nous envoyer un courriel bref pour que nous

 19   comprenions quel était le problème, mais si les parties ne se sont même pas

 20   rencontrées, je vous suggérerais la pause suivante et, bien entendu, nous

 21   ne nous attendons pas à un meilleur résultat sans vos efforts, Maître

 22   Misetic, mais voyons quand même si un contact direct entre les parties - et

 23   c'est le dernier recours - pourrait nous permettre de régler le problème.

 24   Sinon, la Chambre statuera et rendra une décision. Mais la Chambre

 25   préférerait véritablement recevoir de la part des parties un message

 26   succinct, la moitié d'une page standard A-4, pour que la partie explique

 27   quels sont les obstacles pour l'autre partie et pour que nous puissions

 28   comprendre quel est le véritable problème. Oui, j'essaie désespérément de

Page 25869

  1   ne pas faire mourir d'ennui M. Moric avec cette question et de ne pas trop

  2   consacrer de temps à cette affaire.

  3   M. MIKULICIC : [interprétation] J'ai seulement une phrase, Monsieur le

  4   Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  6   M. MIKULICIC : [interprétation] Nous n'avons aucun problème, ou nous ne

  7   posons aucun obstacle. Donc nous suivrons la décision qui sera rendue.

  8   M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, nous serons prêts à ce

  9   que l'interrogatoire principal commence et à commencer notre contre-

 10   interrogatoire après la pause.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai été informé du fait que cela ne

 12   donnerait pas les résultats escomptés. C'est la raison pour laquelle je

 13   vous invite à nouveau à essayer de prendre contact avec ou sans,

 14   d'ailleurs, une tasse de café.

 15   Ceci étant dit, Madame Mahindaratne, poursuivez.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Monsieur Moric --

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Moric, vous offrez vos bons

 20   services en tant que médiateur, ce que j'apprécie beaucoup, d'ailleurs.

 21   Mais bon --

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, j'aimerais

 23   vous demander votre aide.

 24   Car lorsque Mme le Procureur m'a posé une question à propos de mon document

 25   du 18 août, et lorsqu'elle a remis en question la légalité du document, je

 26   pensais que j'aurais eu la possibilité de fournir les faits à la Chambre

 27   pour que la Chambre comprenne que l'on ne puisse pas remettre en question

 28   la légalité du document.

Page 25870

  1   Mais malheureusement, entre-temps nous sommes passés à autre chose.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous expliquer ce qui s'est

  3   passé, Monsieur Moric. Me Kehoe souhaitait que les choses soient placées

  4   dans un contexte pour que nous puissions bien comprendre les différentes

  5   phases du témoignage du témoin qui s'était exprimé afin de savoir s'il

  6   était légal ou non de fournir des instructions pour qu'aucune enquête ne

  7   soit diligentée. Mais nous comprenons de votre déposition que vous, vous

  8   avez un point de vue différent et que vous considérez de façon différente

  9   le fait que cela n'a pas fait l'objet d'enquête, et que vous avez considéré

 10   qu'il fallait attendre le moment où l'occasion se présentait de diligenter

 11   une enquête. D'ailleurs, aucune question ne vous a été posée à ce sujet, et

 12   il se peut, effectivement, que cela ait une incidence sur la légalité de la

 13   chose.

 14   Mais je pense que Me Kehoe aura la possibilité de revenir là-dessus.

 15   Si tel n'est pas le cas, vous aurez alors la possibilité de revenir là-

 16   dessus dans un contexte limité. Vous aurez la possibilité de vous exprimer.

 17   Je comprends que vous êtes un tant soit peu préoccupé par le témoignage qui

 18   indique que l'ordre que vous aviez donné était un ordre illégal, ce qui

 19   justifie tout à fait votre préoccupation, ce que je peux tout à fait

 20   comprendre.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Moric, avant que nous passions à un autre document, j'aimerais

 25   quand même que vous vous penchiez sur deux éléments qui sont donnés, parce

 26   que j'aimerais poser quelques questions à ce sujet.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je souhaiterais que la

 28   page 4 de la version anglaise soit affichée, Monsieur le Greffier, qui

Page 25871

  1   correspond à la page 3 de la version croate.

  2   Q.  Là, vous verrez qu'il y a quelque chose qui a été consigné. Il s'agit

  3   des propos du capitaine Matanic, qui était commandant du 71e Bataillon de

  4   la Police militaire lors de la réunion à laquelle vous étiez présent. Au

  5   deuxième paragraphe, voilà ce qu'il dit :

  6   "Il a mentionné l'exemple de Donji Lapac, où même des membres du MUP ont

  7   incendié des maisons."

  8   Je voulais que vous preniez bonne note de ce fait, parce que j'aimerais

  9   vous poser quelques questions à ce sujet par la suite.

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais maintenant demander

 11   l'affichage de la page 6 pour la version anglaise, qui correspond à la page

 12   4 de la version croate, Monsieur le Greffier.

 13   Q.  Là, nous voyons vos remarques de conclusion, Monsieur Moric. Voilà ce

 14   qui est indiqué :

 15   "M. Moric a insisté sur le fait que les responsabilités étaient transférées

 16   et que cela n'aboutissait à rien. Il a exprimé son point de vue positif

 17   relatif aux rapports de MM. Cetina, Dasovic et Matanic.

 18   "Il s'est également rallié aux remarques faites par le général Lausic et

 19   indiquait que nous avions tous une responsabilité égale pour tous les

 20   citoyens de la République de Croatie, quelle que soit leur nationalité. Le

 21   fait est qu'en ce moment tout le monde participe au pillage, qu'il s'agisse

 22   de civils, de représentants des autorités civiles et des membres de la

 23   police civile et militaire. Mais ce qui est absolument important, c'est de

 24   s'acquitter de ses fonctions de façon professionnelle et de faire la

 25   différence entre la conduite professionnelle et l'attitude personnelle."

 26   Voilà. Je voulais vous citer cela parce que j'avais quelques questions à

 27   vous poser à ce sujet.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais que le document D3483 soit

Page 25872

  1   affiché.

  2   Q.  Vous verrez dans un petit moment, Monsieur Moric, votre ordre du 13

  3   septembre. Cet ordre est donné pour que soient retirées les forces de

  4   police.

  5   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez afficher le

  6   haut de la page pour que M. Moric puisse voir tout le document.

  7   Q.  Alors, vous pouvez, Monsieur Moric, voir le document, document qui

  8   porte la date du 13 septembre, à savoir deux jours avant la réunion de

  9   Plitvice. Et voilà votre ordre :

 10   "Le 15 septembre 1995, retirer les unités de police séparées afin de

 11   diminuer le nombre d'officiers de police, comme suit :

 12   "Administration de police de Krapina et de Zagorje qui va retirer 61

 13   officiers de Knin.

 14   "L'administration de police de Primorje et Gorski Kotar retirera 50

 15   officiers de Gracac.

 16   "L'administration de police de Zagreb va retirer 63 officiers de Korenica

 17   et 28 officiers de Donji Lapac.

 18   "L'administration de police de Split-Dalmatie retirera 50 officiers de

 19   Vrlika.

 20   "Et l'administration de police de Karlovac retirera 20 officiers de Krnjak.

 21   "Après le retrait, les officiers seront affectés à leurs fonctions

 22   régulières."

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais que la page suivante de la

 24   version anglaise soit maintenant affichée, Monsieur le Greffier.

 25   Q.  Car, vous voyez, il est indiqué ce qui suit : "Après le retrait du

 26   nombre déterminé des officiers, le nombre des officiers qui restera à cet

 27   endroit sera diminué de 15 % par mois - lors de la relève régulière des

 28   officiers."

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  1   J'essaie de comprendre ce pourcentage de 15 %, parce que nous voyons que le

  2   15, nous voyons qu'il y a un rapport établi indiquant qu'il y a des

  3   éléments des unités qui commettent des crimes, et lorsque des efforts sont

  4   faits pour essayer d'empêcher cela, ils réagissent par les armes. Il y a

  5   également un officier de la police militaire qui a indiqué lors de cette

  6   réunion que des membres du MPU incendient Donji Lapac. Et vous aussi, vous

  7   avez conclu la réunion en disant que tout le monde, y compris des membres

  8   de la police militaire et de la police civile est en train de piller.

  9   Dans ce contexte bien précis, pourquoi est-ce que vous décidez de retirer

 10   vos forces de police des zones libérées alors que vous aviez déjà indiqué

 11   lors de votre déposition que l'un de vos gros problèmes était posé par le

 12   manque de personnel, justement ? Comment est-ce que vous arrivez à

 13   réconcilier ces deux positions, ces deux points de vue ?

 14   R.  Madame le Procureur, lors de la réunion qui a eu lieu le 15 septembre à

 15   Plitvice, une partie de la direction de la police militaire et civile a

 16   analysé les événements qui s'étaient déroulés jusqu'à cette date-là. En

 17   d'autres termes, des personnes ont présenté des rapports sur certains

 18   événements, sur les problèmes qui se posaient de plus en plus et sur les

 19   réactions à ces problèmes.

 20   A ce moment-là, nous étions en train de stabiliser progressivement la

 21   situation, même si nous n'avions pas un contrôle absolu de la situation.

 22   Par ailleurs, il y avait également d'autres risques relatifs à la sécurité

 23   dont il fallait s'occuper. Je pense aux risques dont nous avons parlé la

 24   semaine dernière, tels que, par exemple, la sécurité des frontières qui

 25   étaient très longues qu'il fallait assurer, les attaques terroristes qui,

 26   malheureusement, ciblaient des infrastructures, ou une infrastructure qui

 27   était absolument vitale. Il ne faut pas non plus oublier la population. La

 28   population dans les zones qui venaient d'être libérées, justement, était

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  1   une population qui était très vulnérable. Je pense aux dégâts à la

  2   propriété, et cetera, et cetera.

  3   Donc il a fallu progressivement faire en sorte que les postes de

  4   police dans la zone des territoires libérées soient -- que dans ces postes

  5   de police, il fallait encore envisager une réduction du personnel de 15 %

  6   par mois. C'est une procédure que nous avons suivie pendant les six mois à

  7   venir.

  8   Q.  Monsieur Moric, vous nous avez dit que lors de cette réunion, la

  9   situation avait été analysée, et vous venez juste de dire qu'à ce moment-là

 10   vous étiez en train de stabiliser progressivement la situation.

 11   Mais ce n'est pas ce que je vois dans cette réunion, parce que vous, vous

 12   dites en guise de conclusion à la fin de la réunion que "tout le monde se

 13   livre au pillage." C'est ainsi que vous concluez. 

 14   Vous avez témoigné à plusieurs reprises, vous l'avez dit vraiment à

 15   plusieurs reprises, vous nous avez dit que l'un de vos gros problèmes était

 16   le fait que vous ne disposiez pas de suffisamment de personnel pour faire

 17   en sorte qu'il y ait moins de crimes dans la zone libérée. C'est ce que

 18   vous avez dit d'une part. Mais par ailleurs, hier nous l'avons vu, vous

 19   avez retiré M. Buhin, qui était un spécialiste de la prévention des crimes,

 20   et vous l'avez remplacé par un expert en circulation routière. En plus de

 21   tout cela, vous avez diminué les forces de police, ce qui, pour moi,

 22   signifie que les mesures que vous avez prises à ce moment-là n'étaient

 23   absolument pas conformes aux mesures qui auraient dû être prises par une

 24   personne qui souhaitait véritablement prévenir les crimes.

 25   Comment est-ce que vous répondez à cette question ?

 26   R.  Madame le Procureur, vous vous ciblez sur un problème, un problème,

 27   d'ailleurs, qui m'a pris quasiment l'essentiel de mon temps. Il s'agissait

 28   de la sécurité qui devait prévaloir dans toute la zone. La prévention du

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  1   crime, ou des crimes, dans l'ensemble du pays était également ma

  2   prérogative.

  3   Mais par ailleurs, comme je l'ai dit il y a quelques minutes, nous

  4   voulions - et c'était notre intention - nous voulions progressivement

  5   diminuer le nombre de policiers sur une période de six mois, et ce, tout en

  6   faisant en sorte qu'il y ait suffisamment de personnels dans les structures

  7   de police des zones qui venaient d'être libérées.

  8   Q.  Oui, mais ce que nous voyons dans cet ordre --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors j'aimerais, dans un premier temps,

 10   essayer de comprendre exactement de quoi nous parlons. Là, le retrait de ce

 11   nombre déterminé d'officiers, est-ce qu'il s'agissait d'officiers qui

 12   venaient d'ailleurs qui avaient été appelés pour aider pendant les

 13   premières heures de la libération des territoires ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait exact, Monsieur le

 15   Président. C'est bien de cela qu'il s'agit.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez renvoyé ceux qui étaient

 17   venus d'autres régions et qui vous ont aidé pendant la première phase. Et

 18   par ailleurs, vous recrutez des officiers de police; c'est bien cela ? Vous

 19   recrutez des officiers de police pour renforcer la structure ou les

 20   structures de la police localement, à savoir, vous vouliez renforcer les

 21   forces de police dans cette zone.

 22   C'est bien de cela dont il s'agit ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela, Monsieur le

 24   Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Madame Mahindaratne.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Monsieur Moric, si, comme vous nous le dites, vous étiez en train

 28   d'affecter dans les postes de police de la zone libérée des nouvelles

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  1   recrues, ce dont vous parlez, c'est que vous avez fait partir des policiers

  2   expérimentés et que vous les avez remplacés par de nouvelles recrues qui

  3   n'avaient pas d'expérience. C'est ainsi donc que vous avez placé des hommes

  4   dans des postes de police dans les zones où il y avait de nombreux crimes.

  5   Vous avez donc affecté ces nouvelles recrues à ces services-là.

  6   R.  Non, non, non, non, Madame le Procureur. Non, c'est pas ainsi que les

  7   choses se sont passées. Ce n'était pas notre intention. Cela ne s'est pas

  8   passé d'ailleurs dans la pratique.

  9   Q.  Pouvez-vous nous expliquer comment alors vous avez remplacé ces agents

 10   de police qui ont été retirés ? Nous voyons quel est le nombre de policiers

 11   qui ont été retirés. Comment les avez-vous remplacés ? Par quels autres

 12   membres de policiers ? Avez-vous des documents pour corroborer cette

 13   information ? Pouvez-vous nous le dire ?

 14   R.  Il y a des documents au ministère de l'Intérieur qui émanent de cette

 15   époque, et il y a la décision du ministre de l'Intérieur aussi; et par

 16   cette décision, les assistants du ministre chargés des questions du

 17   personnel, des finances, ainsi que d'autres assistants, ont pour obligation

 18   d'appuyer ce processus.

 19   Et j'aimerais attirer votre attention sur un fait, à savoir le

 20   territoire sur lequel ces policiers sont retournés. Ils sont retournés à

 21   Zagreb, à Krapina, à Rijeka, à Split, à Karlovac, donc sur les territoires

 22   où ils vivaient et travaillaient. Et d'après la Loi sur le travail, et

 23   d'après d'autres lois qui étaient en vigueur à l'époque, ils exécutaient

 24   leurs droits sur ces territoires, et il n'était pas possible de les retenir

 25   dans d'autres territoires en permanence. Il était tout à fait raisonnable

 26   de planifier le processus progressif de remplacement de ces policiers, des

 27   autres policiers qui allaient vivre et travailler en permanence dans ces

 28   territoires.

Page 25877

  1   Q.  Puis-je vous poser une question se fondant sur votre réponse, Monsieur

  2   Moric.

  3   Nous voyons que dans cet ordre, par exemple, dans la première entrée,

  4   l'administration de la police de Krapina et Zagorje doit retirer 61 agents

  5   ou policiers de Knin. Est-ce que ces policiers ont été remplacés

  6   immédiatement, ou plutôt de façon progressive, comme vous l'avez déjà dit ?

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, essayons de

  8   comprendre ce qui figure dans ce document. Le 15 septembre, il faut

  9   procéder au retrait des unités de la police, ensuite il y a des nombres de

 10   policiers. A la page suivante, dans le document, il est dit :

 11   "Après le retrait du nombre indiqué de policiers, le nombre de policiers

 12   qui sont restés pour apporter leur aide, leur nombre doit continuer à être

 13   réduit par 15 %, et il faut les remplacer par d'autres policiers."

 14   Dans le document, tout est parfaitement clair. Il faut retirer ces 60

 15   policiers, regarder quel est le nombre de policiers qui sont restés,

 16   ensuite il faut faire retirer d'autres policiers de façon progressive.

 17   Je ne vois pas comment peut-on comprendre cela de façon différente.

 18   La réponse à votre question pour savoir si cela a été fait de façon

 19   graduelle ou progressive, la réponse se trouve dans le document même. Donc,

 20   le système a été bien expliqué dans ce document de façon claire. Et savoir

 21   si cela a été fait de façon graduelle ou progressive prête à confusion,

 22   plutôt.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je me suis

 24   concentrée à ce chiffre, ce nombre précis de 60 hommes, et non pas au

 25   pourcentage de 15 %.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il est dit ici qu'à partir du 15

 27   septembre, il faut retirer 60 hommes, et après ce retrait, il faut réduire

 28   les effectifs de façon progressive; 65 à un endroit et un autre nombre de

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  1   policiers à un autre, et cetera. Et les effectifs qui restent, il faut

  2   réduire leur nombre en retirant 15 % graduellement. Je ne peux pas

  3   comprendre comment vous, vous ne pouvez pas comprendre ce document et

  4   pourquoi vous demandez la clarification.

  5   Je vais poser la question à M. Moric de me dire que -- moi, mon

  6   interprétation du document est juste de confirmer cela. Est-ce que j'ai

  7   bien compris la teneur du document ? Je ne cherche pas à savoir si c'était

  8   approprié ou adéquat ou pas.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez compris ce qui figure dans le

 10   document, l'essentiel du document.

 11   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Madame Mahindaratne.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Moric, maintenant je vais passer à un autre sujet tout à fait

 15   différent. D'après votre témoignage --

 16   R.  Je m'excuse. Est-ce qu'on peut revenir à ce compte rendu de la réunion

 17   pour quelques minutes ?

 18   Q.  Nous allons faire cela plus tard, Monsieur Moric. Mon temps est limité.

 19   Je vais donc revenir à ce sujet avant la fin de mon interrogatoire.

 20   A ce stade, j'aimerais parler de votre témoignage pour ce qui est du

 21   général Cermak.

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est pour cela que j'aimerais qu'on

 23   affiche la pièce D494.

 24   Q.  Le document va s'afficher sur l'écran sous peu. Vous l'avez peut-être

 25   vu, peut-être pas, mais j'aimerais savoir si vous avez vu des ordres écrits

 26   donnés par le général Cermak à la police de Knin.

 27   R.  Madame le Procureur, j'ai vu certains de ces documents plus tard.

 28   Q.  Lorsque vous dites que vous avez vu certains de ces documents plus

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  1   tard, est-ce que cela était pendant la séance de récolement avant votre

  2   témoignage ici, ou les avez-vous vus à un autre endroit, à une autre époque

  3   ?

  4   R.  Non, non, non. C'était lors de la séance de récolement. Je ne me

  5   souviens pas de les avoir vus avant cette séance de récolement.

  6   Q.  Donc la première fois que vous avez vu des ordres écrits donnés par le

  7   général Cermak à la police était pendant la séance de récolement où la

  8   Défense vous a montré ces documents ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que le témoin vient de dire. Il

 10   a dit qu'il ne les a jamais vus avant cette séance de récolement.

 11   Essayez d'utiliser votre temps de façon efficace, le plus efficace

 12   possible.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président.

 14   Q.  Est-ce que les membres de la police de Knin, à un moment donné, vous

 15   ont informé qu'ils avaient reçu des ordres du général Cermak ?

 16   R.  Je ne me souviens pas de ça.

 17   Q.  Bien. Connaissez-vous le document qui est affiché sur l'écran

 18   maintenant ?

 19   R.  Il ne s'agit pas d'un ordre. Je connais ce document.

 20   Q.  Monsieur Moric, je n'ai pas fait référence à ce document comme un

 21   ordre.

 22   Monsieur Moric, il y a un texte manuscrit en bas de la page. S'agit-il de

 23   votre écriture ?

 24   R.  Non, ce n'est pas mon écriture.

 25   Q.  Où avez-vous vu ce document ? Vous avez dit que vous le connaissez.

 26   Avez-vous reçu ce document ? Ce document était envoyé à l'état-major pour

 27   l'opération Povratak. Est-ce que vous avez reçu ce document ?

 28   R.  Je pense que l'un de mes collaborateurs me l'a montré.

Page 25880

  1   Q.  Et lorsque le document vous a été montré, cette lettre dans laquelle on

  2   vous demande de répondre et de confirmer par écrit la validité des laissez-

  3   passer pour les civils par rapport auxquels il y avait des enquêtes, et M.

  4   Ivo Cipci a signé; il était chef de l'administration de la police de Split-

  5   Dalmatie.

  6   Etiez-vous la personne qui devait s'occuper de la validité de ces laissez-

  7   passer, ou est-ce que c'était votre collègue ? Pouvez-vous expliquer cela à

  8   la Chambre de première instance ?

  9   R.  Excusez-moi. Si je me souviens bien, j'ai ordonné à mon collaborateur,

 10   à mon assistant, de se pencher sur ce document pour voir de quoi il

 11   s'agissait. Et lorsque j'ai vu ce document, j'étais en colère. C'est un

 12   euphémisme pour vous décrire la situation dans laquelle je me trouvais.

 13   Q.  Pourquoi est-ce que vous êtes mis en colère ?

 14   R.  C'est parce que la restriction de la liberté du déplacement des gens ne

 15   pouvait aucunement relever de la compétence de l'armée et du ministère de

 16   la Défense, à l'exception faite du territoire où il y avait des combats.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Moric, j'ai déjà dit à Mme

 18   Mahindaratne que vous avez répondu à cette question, mais lorsqu'on regarde

 19   le document et lorsqu'on parle du fait que vous avez vu ce document, et

 20   c'est ce que vous avez dit, que vous avez vu ce document lors de la séance

 21   de récolement, et que vous avez dit que vous ne les avez pas vus avant --

 22   Une demi-page plus loin, vous avez dit dans le compte rendu que -- vous

 23   avez aussi : "Je crois que l'un de mes assistants m'a montré ce document."

 24   Ensuite, vous dites quels étaient les ordres que vous avez donnés pour

 25   diligenter une enquête là-dessus, et cetera. Il n'est pas facile de

 26   concilier ces réponses, parce que d'un côté vous dites que vous les avez

 27   vus lors de la séance de récolement, et de l'autre côté vous avez dit que

 28   cela vous a été montré par l'un de vos assistants.

Page 25881

  1   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'à la page

  2   48, à la ligne 17, si on revient à la question posée --

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 48, 17.

  4   M. KEHOE : [interprétation] 18 et 19 peut. Cela peut prêter à confusion,

  5   parce que cela était envoyé au général Cermak.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je peux imaginer que cela s'est passé

  9   ainsi.

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord

 11   avec Me Kehoe pour dire que ma question a été posée par rapport à un type

 12   particulier de documents.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que j'allais dire, Madame

 14   Mahindaratne. Je ne vous aurais pas dit que le témoin a déjà répondu à

 15   cette question, mais à présent je ne veux donner aucun commentaire.

 16   Oui. Je pense qu'il aurait été clair à la page 49, ligne 11, si vous aviez

 17   dit, nous allons passer à un autre type de document, un type différent de

 18   document, parce qu'il n'y a pas eu de distinction claire par rapport au

 19   sujet que vous avez abordé avant.

 20   Mais maintenant cela m'est clair, et je pense que si j'avais lu cela plus

 21   attentivement, cela m'aurait empêché de proférer ma dernière remarque ou ma

 22   remarque antérieure.

 23   Continuez.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Je m'excuse, Monsieur Moric. On va revenir un peu en arrière. Vous avez

 26   dit que vous avez été fâché. Permettez-moi de voir. Vous avez dit :

 27   "Parce que les restrictions de la liberté de circulation des gens ne

 28   relevaient pas de la compétence de l'armée ni du ministère de la Défense, à

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  1   l'exception faite des zones où il y avait des combats."

  2   Donc, Monsieur Moric, contre qui vous vous êtes fâché ?

  3   R.  J'étais en colère, parce que qui que ce soit aurait eu l'idée de

  4   s'occuper des activités qui ne relevaient pas de ses compétences, cela

  5   aurait pu être n'importe qui, qui aurait eu cette idée d'exercer ces

  6   activités.

  7   Q.  Maintenant, on voit qu'il y a eu des contrôles effectués par la police

  8   de Knin, et le général Cermak - c'est ce qui figure dans les notes - donc

  9   il faut procéder à des vérifications.

 10   "Par l'intermédiaire de la police de Knin, le général Cermak donne

 11   l'ordre pour invalider ces laissez-passer pour les civils et cela est

 12   arrivé du ministère de la Défense de la République de Croatie."

 13   Qui a mené l'enquête pour ce qui est de la police de Knin par rapport à ce

 14   sujet ? Vous-même ou l'un de vos assistants ?

 15    R.  L'un de mes assistants.

 16   Q.  Et qui c'était ?

 17   R.  M. Tomurad, qui était chef du département pour ce qui est des services

 18   de permanence. Et nous nous sommes occupés de cela en organisant des

 19   permanences, ce qui était une chose tout à fait habituelle lorsqu'on avait

 20   un problème à résoudre.

 21   Q.  Savez-vous qu'on a demandé au général Cermak d'invalider, annuler ces

 22   laissez-passer ? Pouvez-vous dire à la Chambre ce qui s'est passé

 23   réellement pour qu'il y ait eu une telle issue de cette affaire ?

 24   R.  Je ne peux pas vous dire ce que mon assistant a fait, tout ce qu'il a

 25   fait, mais je peux vous parler du résultat de ses efforts.

 26   Q.  Non. Non. Indépendamment de cette question, est-ce que par rapport à

 27   l'état-major de l'opération Povratak, au retour, est-ce qu'il y a eu des

 28   demandes de l'état-major pour ce qui est d'autres aspects des laissez-

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  1   passer du général Cermak pour savoir si cela a été valide. Est-ce que le

  2   ministère de l'Intérieur a voulu savoir qui pouvait délivrer ces laissez-

  3   passer et à qui ?

  4   R.  J'essaye de me souvenir de cela. Avec certitude, je peux dire qu'à

  5   l'époque, au ministère de l'Intérieur, nous avons compris que les officiers

  6   les plus hauts placés de l'armée croate pouvaient demander qu'un type de

  7   laissez-passer soit délivré, un type de laissez-passer qui allait autoriser

  8   les soldats ou les civils travaillant dans l'armée à se déplacer dans des

  9   zones et dans des installations ou bâtiments utilisés par l'armée ou le

 10   ministère de la Défense.

 11   A ce moment-là, c'est ce que nous avons compris par rapport à la portée de

 12   cette disposition, à savoir que cela s'appliquait uniquement à de telles

 13   situations.

 14   Q.  Permettez-moi de vous montrer un autre document, Monsieur Moric.

 15   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, est-ce

 16   qu'on peut avoir affiché le document. Mais avant cela, est-ce qu'on peut

 17   d'abord passer à la page suivante du document affiché sur l'écran.

 18   Q.  Monsieur Moric, connaissez-vous ce document, ce laissez-passer ? Avez-

 19   vous vu ce type de laissez-passer avant l'arrivée de la lettre du 15 août ?

 20   R.  Non, je ne me souviens pas de l'avoir vu avant cela. Je pense que ce

 21   type de laissez-passer, cette forme de laissez-passer, mais je ne suis pas

 22   tout à fait certain s'il s'agissait de ce document, donc ce type de

 23   laissez-passer a été joint à la lettre en question.

 24   Q.  Permettez-moi de demander l'affichage d'un autre document, Monsieur

 25   Moric.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Il s'agit de D496.

 27   Excusez-moi. C'est D495.

 28   Q.  Monsieur Moric, pouvez-vous dire à la Chambre qui a écrit cette entrée

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  1   qui se trouve en bas du laissez-passer de cette mention, en bas de la page

  2   ?

  3   R.  Vous voulez que j'identifie la personne qui a noté cela en m'appuyant

  4   sur l'écriture qui y figure ?

  5   Q.  Je vous demande si vous savez qui a écrit cette mention, cette note. Si

  6   vous ne savez pas, vous pouvez le dire.

  7   R.  Je suis désolé, mais je ne le sais pas.

  8   Q.  Merci.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher

 10   le document D496.

 11   Q.  Ce document représente la demande faite par la même administration de

 12   la police, qui a envoyé la lettre au ministère, la lettre qu'on a déjà vue,

 13   et c'est D494. On écrit ici :

 14   "Les citoyens et les personnes déplacées font la pression sur nous pour

 15   pouvoir aller dans des zones libérées à Knin et à Drnis. Nous avons été

 16   informés que la ligne régulière de chemin de fer vers Split a été rétablie

 17   et les citoyens sont informés qu'ils peuvent voyager sur cette ligne de

 18   façon gratuite dans les dix jours à suivre. Et c'est pour cela qu'il y a

 19   une grande pression des citoyens sur les points de contrôle, et les

 20   citoyens considèrent qu'ils peuvent voyager sans aucun problème à bord de

 21   ce train.

 22   S'il vous plaît, envoyez-nous des instructions urgentes pour savoir comment

 23   procéder dans de telles situations nouvellement créées."

 24   Et il y a des notes manuscrites où on lit :

 25   "Il faut appeler l'administration de la police Split-Dalmatie et dire que

 26   Cermak va annuler les laissez-passer au cours de la journée."

 27   N'est-il pas vrai, Monsieur Moric, que le document qu'on a vu précédemment

 28   où la note figurait en bas de la page disant qu'il a été vérifié à

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  1   l'administration de la police de Knin que le général Cermak allait annuler

  2   les laissez-passer, et cela est relié à cette demande envoyée par

  3   l'administration de la police de Split-Dalmatie, qui a été envoyée le même

  4   jour.

  5   R.  Non, je ne pense pas qu'il s'agit de la requête qui provient de

  6   l'administration de la police. Le document parle de déplacement à bord de

  7   ce train, déplacement habituel.

  8   Q.  Monsieur Moric, vous avez vu deux documents, les deux documents ont été

  9   envoyés par la même administration de la police, à l'état-major de

 10   l'opération Povratak, au retour le même jour, à savoir, le 15 août, à

 11   propos du même sujet. Et dans le premier document, il est question du

 12   besoin de pouvoir permettre aux citoyens d'avoir accès à des zones

 13   libérées, aux civils qui doivent avoir l'accès illimité. Et l'autre

 14   document parle de la demande à propos de l'enquête qu'il faut mener pour

 15   savoir si ces laissez-passer délivrés pas le général Cermak sont valides.

 16   Ces deux documents concernent donc le même sujet.

 17   Vous dites que ces deux demandes ne sont pas reliées. C'est ce que vous

 18   dites ?

 19   R.  Oui, Madame le Procureur, c'est ce que je dépose.

 20   Q.  Très bien.

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Maintenant, est-ce qu'on peut afficher

 22   le document P509.

 23   Q.  Avez-vous déjà vu cet ordre, Monsieur Moric, avant votre séance de

 24   récolement pour ce témoignage ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Le même jour, à savoir le 15 août 1995, le général Cermak a donné

 27   l'ordre à l'administration, à la police de Knin, où il est

 28   dit :

Page 25886

  1   "A partir du 15 août, dans tous les contrôles de police civile et

  2   militaire, il faut assurer que les civils passent librement dans la ville

  3   de Knin, dans tous les points de contrôle routiers. Il faut permettre aux

  4   civils d'entrer dans la ville de Knin sans laissez-passer et procéder à des

  5   contrôles de routine, d'après les règles qui ont été établies avant."

  6   Tout à l'heure, vous avez dit que vous avez été en colère, parce que les

  7   restrictions de liberté de mouvement ont été décrétées de façon incorrecte

  8   et une façon qui n'a pas été la façon autorisée. Est-ce que cela a eu un

  9   lien avec le général Cermak ?

 10   R.  Non, Madame le Procureur. J'ai compris que c'était seulement une idée,

 11   une intention. Mais en fin de compte, cela ne s'est pas passé. Cette

 12   intention, cette idée, n'a pas abouti. Nous n'avons que discuté de ce

 13   sujet.

 14   Q.  Je n'ai pas bien compris votre réponse, Monsieur Moric.

 15   Permettez-moi de vous poser la question suivante : êtes-vous d'accord avec

 16   moi pour dire que l'ordre du général Cermak est relié aux deux documents

 17   que nous avons vus avant, les documents qui ont été envoyés à l'état-major

 18   de l'action Povratak au retour de l'administration de police de Split-

 19   Dalmatie ? Et n'est-ce pas vrai qu'après ces deux demandes, le général

 20   Cermak a donné cet ordre ?

 21   R.  Pour autant que je me souviens, ces documents portent la même date. Je

 22   ne sais pas quel était l'ordre d'envoi de ces documents. Je ne peux

 23   qu'émettre des hypothèses pour ce qui est de l'ordre d'envoi de ces deux

 24   documents. Je ne sais pas.

 25   Q.  Je ne veux pas que vous vous lanciez à des conjectures.

 26   Monsieur Moric, j'aimerais vous montrer un autre document concernant ce

 27   sujet.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche le document

Page 25887

  1   P510.

  2   Q.  Vous allez voir à l'écran s'afficher un document qui porte la date du

  3   16 août. Il s'agit d'un ordre émis par le général Cermak et qui émane de la

  4   police de Knin. C'est-à-dire c'est un jour après l'émission de l'ordre par

  5   le général Cermak.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel

  7   pour quelques instants, Madame le Procureur.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

  9   le Président.

 10   [Audience à huis clos partiel]

 11  (expurgé)

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 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)

Page 25888

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

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  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11   [Audience publique]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Madame le Procureur.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Moric, est-ce que vous étiez au courant de cet enchaînement

 15   d'événements, c'est-à-dire après que le général Cermak a émis son ordre le

 16   15 août, la police de Knin, à son tour, émet un ordre visant la mise en

 17   œuvre de ces dispositions. Etiez-vous au fait de cet enchaînement

 18   d'événements ?

 19   R.  Non, je ne l'étais pas.

 20   Q.  Conviendrez-vous alors avec moi, Monsieur Moric, pour dire que vous

 21   n'avez pas été tout à fait au courant, que vous n'avez pas entièrement

 22   perçu la nature des relations, des interactions qui existaient entre le

 23   général Cermak et la police de Knin ?

 24   R.  En principe, j'étais bien au fait de cela. Mais sur cet aspect

 25   particulier, non. Nous avons un commandant de la police civile qui a rédigé

 26   cette lettre dans ce cas précis, et ici je n'ai pas mesuré cela.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

Page 25889

  1   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que nous avons un problème avec

  2   l'interprétation, page 59, ligne 1, avec le compte rendu. En fait, c'est en

  3   page 58, ligne 25 de la version "Live" du compte rendu.

  4   Je voudrais demander une précision, parce que je crois qu'il y a une

  5   inversion logique par rapport à ce que le témoin a dit.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vous a demandé, Monsieur Moric, si

  7   vous étiez d'accord pour dire que vous n'aviez pas pris la pleine mesure

  8   des interactions existant entre le général Cermak et la police de Knin. Et

  9   votre réponse commence au compte rendu par "yes," "oui." Mais pourriez-vous

 10   répéter ce que vous avez ajouté à cette réponse de principe.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] En principe, j'étais au courant de tout cela,

 12   de cette interaction, mais sur cet aspect particulier que constitue cette

 13   lettre, je ne l'étais pas.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc sur ce détail précis --

 15   M. MISETIC : [interprétation] Oui, sa réponse est qu'en principe, il était

 16   au courant de la relation qui existait entre la police de Knin et le

 17   général Cermak, mais qu'il n'était pas informé des détails.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste pour être sûr, vous avez confirmé

 21   qu'en termes généraux, vous étiez au fait de l'interaction qui existait

 22   entre le général Cermak et la police de Knin, mais que vous n'étiez pas au

 23   courant des détails, n'est-ce

 24   pas ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été encore plus précis, Monsieur le

 26   Président. J'ai dit que je n'étais pas au courant de ce détail précis.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 28   Veuillez poursuivre.

Page 25890

  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Monsieur Moric, passons à un autre aspect. Me Kehoe vous a interrogé

  3   concernant les attributions qui étaient celles de la police civile, pour ce

  4   qui était de ses rapports avec les membres de l'armée.

  5   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Alors je voudrais, s'il vous plaît,

  6   Monsieur le Greffier, que l'on affiche le document numéro D214.

  7   Q.  Je suppose que -- je ne sais pas en fait si vous aviez déjà vu ce

  8   document par le passé ou non.

  9   Nous avons ici le procès-verbal d'une réunion à huis clos du

 10   gouvernement, en présence du premier ministre et de plusieurs ministres du

 11   gouvernement, dont M. Jarnjak. Je voulais d'abord vous montrer donc cette

 12   page de garde afin que vous puissiez voir qui était présent à cette

 13   réunion.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Maintenant, Monsieur le Greffier,

 15   pouvons-nous avoir le document D215, s'il vous plaît.

 16   Q.  Je vais vous présenter, Monsieur Moric, un extrait de ce procès-verbal

 17   de la même réunion.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page 2 de la

 19   version anglaise, page 38 de la version en croate.

 20   Q.  Je voudrais juste vous rappeler, au cas où vous ne l'auriez pas

 21   remarqué, qu'il s'agit là d'une réunion tenue le 15 octobre 1995. C'est le

 22   deuxième paragraphe qui m'intéresse en anglais, à partir des trois

 23   dernières lignes. Le ministre dit, je cite :

 24   "…ici en réunion à huis clos, je me dois de dire que je m'efforcerai de me

 25   mettre en relation avec le ministre de la Défense aujourd'hui afin de

 26   vérifier s'il y a un manque d'effectifs de la police militaire dans cette

 27   zone."

 28   R.  Excusez-moi.

Page 25891

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Mais en croate, ce n'est pas le bon texte qui s'affiche. Je ne vois pas

  3   ce que vous êtes en train de dire.

  4   Q.  Excusez-moi. Je pense que maintenant vous allez l'avoir devant vous,

  5   Monsieur Moric.

  6   Est-ce le cas ? Je voudrais juste vous indiquer la ligne exacte. C'est la

  7   troisième ligne à partir du bas de la page.

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Si vous pouviez, Monsieur le Greffier,

  9   faire défiler vers le bas de la page.

 10   Q.  Donc je cite :

 11   "…ici à huis clos partiel, je dois dire que je vais véritablement

 12   m'efforcer de me mettre en relation avec le ministre de la Défense

 13   aujourd'hui afin de voir si dans la zone la police militaire se trouve

 14   présente en nombre insuffisant ou non, puisqu'il y a sur place un grand

 15   nombre de soldats, ou du moins des personnes qui portent l'uniforme et qui

 16   refusent de présenter leurs matricules à la police civile."

 17   R.  Excusez-moi, mais je n'ai pas la suite du texte. La partie qui

 18   s'affiche sur mon écran s'est achevée.

 19   Q.  Voilà. Vous l'avez. Je poursuis.

 20   R.  Merci.

 21   Q.  Je cite :

 22   "La police civile n'a aucune attribution sur le personnel militaire.

 23   Ce dernier ne souhaite pas coopérer et nous rencontrons des problèmes,

 24   parce qu'il n'y a pas un nombre suffisant de ces effectifs dans la zone et,

 25   par conséquent, nous devrions demander que cela soit corrigé."

 26   Alors, Me Kehoe vous a interrogé sur ce sujet. Pourriez-vous dire aux Juges

 27   de la Chambre très exactement ce que la police civile était en mesure de

 28   faire après avoir constaté la commission d'un crime par un membre des

Page 25892

  1   forces armées ?

  2   R.  Elle était en mesure d'interpeller la personne et de procéder à son

  3   identification, de vérifier s'il s'agissait bien d'un soldat ou s'il

  4   s'agissait à l'inverse d'un civil qui portait abusivement l'uniforme.

  5   Alors, à supposer, bien entendu, que la personne concernée coopère et

  6   n'oppose pas de résistance à la tentative de la police civile de procéder à

  7   cela, dans le cas où il y avait une résistance qui était opposée aux

  8   officiers de police, c'était à ces derniers, à ces officiers de la police

  9   civile qu'il revenait d'évaluer la situation, et notamment de décider s'il

 10   convenait ou non d'employer les différents moyens de contrainte qu'ils

 11   avaient l'autorisation d'utiliser. Dans cette éventualité donc, s'ils

 12   utilisaient ces moyens de contrainte et si cela leur permettait de

 13   constater qu'ils avaient bien à faire à un membre des forces armées,

 14   l'affaire en question devait être transférée à la police militaire.

 15   Q.  Alors, Me Kehoe vous a demandé la chose suivante, ou plutôt, il vous a

 16   posé une question et voici votre réponse. En page 25 724 du compte rendu,

 17   je cite :

 18   "A l'époque dont nous parlons cependant, et compte tenu des problèmes de

 19   cette époque, la situation à laquelle nous faisions face était le plus

 20   souvent telle que dès le début, il était parfaitement clair que nous avions

 21   affaire à des soldats. Par conséquent, nous n'avions pas besoin de laisser

 22   courir la procédure d'enquête criminelle pour établir qu'il s'agissait de

 23   soldats. Dans ce contexte-là, je dois dire qu'il était tout à fait clair

 24   dès le début que c'était la police militaire qui devait être en charge de

 25   la procédure dès le début."

 26   Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous avez voulu dire

 27   exactement lorsque vous avez affirmé qu'il était clair dès le début que

 28   vous aviez affaire à des soldats ? Quels étaient les critères qui vous

Page 25893

  1   permettaient de vous rendre compte aussi clairement qu'il s'agissait de

  2   soldats lorsque vous constatiez que des crimes venaient d'être commis ?

  3   R.  Je pensais à des situations dans lesquelles les policiers civils

  4   étaient confrontés à des individus portant l'uniforme de l'armée croate, ce

  5   qui pouvait entraîner une certaine confusion. Alors, cela peut donc

  6   entraîner une certaine confusion, mais dans certaines situations il peut

  7   aussi être tout à fait clair et incontestable qu'on a bien à faire à un

  8   soldat.

  9   Q.  Pouvez-vous être un peu plus précis, Monsieur Moric, parce que je ne

 10   pense pas que vous ayez vraiment répondu.

 11   Vous dites que vous pensiez à la situation dans laquelle un policier

 12   faisait face à un individu portant l'uniforme de l'armée ou qui semblait

 13   appartenir à l'armée.

 14   Moi, ce que je vous ai demandé, c'est ce que vous avez voulu dire

 15   lorsque vous avez affirmé qu'il était clair dès le début que la plupart de

 16   ces auteurs de crimes étaient bien des soldats, des membres de la HV. Je

 17   vous demande d'apporter des précisions quant à cela.

 18   R.  Je viens d'essayer de vous répondre, Madame le Procureur.

 19   Si un policier estimait qu'il avait, de façon indubitable affaire à un

 20   soldat - et nous parlons ici de son évaluation à lui, de policier, non pas

 21   de mon évaluation à moi - c'est lui qui est confronté à cette situation

 22   concrète. Et cette évaluation qui est la sienne, elle repose sur différents

 23   critères en présence desquels nous ne sommes pas aujourd'hui, notamment

 24   l'apparence visuelle de la personne qui se trouve face à lui, l'équipement

 25   dont cette personne dispose et ainsi de suite.

 26   Q.  Puisque nous en sommes à ce document, je voudrais également attirer

 27   votre attention sur un autre passage, les propos du ministre qui se

 28   trouvent, en fait, à la même page. Vous pouvez les suivre à la page 40 de

Page 25894

  1   la version en croate.

  2   Le ministre dit, je cite :

  3   "Par conséquent, ce dont nous avons parlé au tout début, à savoir que

  4   l'incendie volontaire, l'usage d'explosifs et la confiscation de biens

  5   peuvent s'expliquer dans une certaine mesure par le folklore, et c'était de

  6   cela qu'il s'agissait. Il s'agissait d'emporter des biens, d'une certaine

  7   façon. Et une fois encore ici à huis clos, je dois dire qu'un point de vue

  8   juridique, tout cela, à commencer par le fait d'emporter un butin de

  9   guerre, des biens volés, a donné lieu à l'émission de toutes sortes de

 10   récépissés de la part des préfets, de leurs adjoints de différents bureaux,

 11   d'associations, de présidents de municipalités. Ils ont tous signé des

 12   récépissés quant à qui avait le droit ou n'avait pas le droit d'emporter

 13   des biens. On en est arrivé à une situation dans laquelle les gens ont eu

 14   l'impression qu'ils pouvaient emporter ce que bon leur semblait; ce qui

 15   signifie qu'il ne s'agissait pas uniquement des maisons qui avaient

 16   appartenu à des Serbes qui ont donc été cibles de pillage, mais des maisons

 17   qui étaient la propriété de Croates sont également en première ligne

 18   maintenant, et c'est un problème très grave.

 19   Par conséquent, ce n'est plus du tout une question de folklore. C'est

 20   maintenant une question grave de crimes organisés qui doit être résolue."

 21   Alors, si j'ai bien compris la déclaration du ministre ici, il est

 22   préoccupé de voir que la criminalité s'étend maintenant également à des

 23   maisons de Croates qui sont l'objet de pillages, et il considère ça comme

 24   un problème grave.

 25   Alors, est-ce que cela est cohérent avec vos propres remarques

 26   concernant les différentes tendances que vous observiez sur le terrain ?

 27   R.  C'est tout à fait connu des services de police que la criminalité ne

 28   s'arrête pas aux limites d'appartenance ethnique. Nous savions cela dès le

Page 25895

  1   début lorsqu'il s'agissait de pillages de domiciles ou de maisons

  2   abandonnées, de maisons vides, le critère principal n'était pas celui

  3   d'appartenance ethnique.

  4   Q.  Monsieur Moric, ma question est la suivante : le ministre dit que dans

  5   une phase précédente, les crimes, les infractions visaient une certaine

  6   catégorie de propriétés et maintenant, il dit que cela échappe à tout

  7   contrôle et que cela concerne aussi bien les propriétés de Serbes que de

  8   Croates et il dit que c'est un problème grave. Alors, ma question --

  9   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais ce qui est au compte rendu

 10   n'est pas ce que Mme le Procureur lit.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous vérifier, Madame le

 12   Procureur.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 14   Q.  Je vais vous relire la chose. Je cite :

 15   "On en est venu à une situation dans laquelle les gens ont l'impression

 16   qu'ils ont la possibilité d'emporter ce qu'ils veulent, ce qui signifie

 17   qu'il n'y a plus que les maisons des Serbes qui sont pillées, des maisons

 18   appartenant aux Croates aussi sont maintenant prises pour cibles et c'est

 19   un problème grave."

 20   Est-ce que cela est cohérent avec ce que vous avez observé en termes de

 21   tendance, à savoir qu'au début, seules les maisons des Serbes auraient été

 22   prises pour cibles, ensuite cette vague de criminalité aurait pris de

 23   l'ampleur et se serait élargie pour concerner également des biens

 24   appartenant à des Croates ? Est-ce là la façon dont vous avez constaté

 25   l'évolution des choses, vous-même ?

 26   R.  Excusez-moi, Madame le Procureur, mais il me semble que tout à l'heure

 27   j'ai répondu précisément à cette question. Au début, nous n'avons pas

 28   relevé cela parce qu'en fait, dès le début, nous avons constaté que la

Page 25896

  1   criminalité ne se limitait pas à une seule catégorie de biens appartenant à

  2   un seul groupe ethnique. Mais bien entendu, compte tenu du nombre

  3   d'infractions et d'incidents qui se produisaient et du nombre de biens

  4   concernés, malheureusement, la plupart des crimes commis l'ont été au

  5   détriment de propriétaires qui étaient des membres du groupe ethnique

  6   serbe, mais pas exclusivement de ce groupe-là.

  7   Q.  Je voudrais vous poser juste une dernière question, Monsieur Moric.

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce que, Monsieur le Greffier, vous

  9   pourriez afficher la pièce P494 à l'écran.

 10   Q.  Nous allons passer à un autre sujet, Monsieur Moric. Il s'agit des

 11   centres d'accueil et de rassemblement.    

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]  Excusez-moi, c'est la pièce P494.

 13   Q.  Alors, ce document a été présenté par Me Mikulicic; vous l'avez

 14   commenté avec lui. Et voici ce que vous avez dit au sujet des centres de

 15   rassemblement. C'est en page 2 554 du compte rendu. Je cite.

 16   "L'idée sous-jacente à ces centres de rassemblement était de recevoir

 17   toutes sortes de catégories de personnes et de leur fournir les conditions

 18   minimales qui leur étaient nécessaires, nécessaires à la satisfaction de

 19   leurs besoins. L'intention était également de procéder à des entretiens

 20   avec toutes ces personnes et conformément aux possibilités, de répondre aux

 21   souhaits qu'elles pouvaient exprimer."

 22   Alors, est-il exact ici de comprendre que ces centres de rassemblement et

 23   d'hébergement, quel que soit le nom qu'on leur donne, étaient censés

 24   accueillir aussi bien des prisonniers de guerre que des civils ? Est-il

 25   correct de dire que ces deux catégories différentes personnes étaient

 26   censées se retrouver dans les mêmes lieux ?

 27   R.  Je ne peux pas vous le confirmer avec certitude, et je ne peux pas non

 28   plus exclure cette possibilité.

Page 25897

  1   Q.  Monsieur Moric, vous êtes la personne qui a mis en place ce système.

  2   Vous en avez l'ordre devant vous. Si vous, vous ne savez pas comment le

  3   système fonctionne, qui est censé le savoir ?

  4   R.  Madame le Procureur, dans ce cas-là, il faudrait que je puisse lire

  5   l'ensemble du document afin de voir ce qu'il y est dit au sujet des

  6   prisonniers de guerre.

  7   Q.  Faites dans ce cas-là. C'est un ordre qui émane de vous, mais prenez le

  8   temps dans ce cas-là pour en prendre lecture.

  9   R.  Puis-je voir la suite du texte ?

 10   Puis-je avoir la suite.

 11   Je voudrais voir la suite, s'il vous plaît.

 12   Voilà, j'ai fini de le lire.

 13   Q.  Pouvez-vous maintenant répondre à ma question ?

 14   Je vais la répéter. Ma question était la suivante : Est-il exact de dire

 15   qu'aussi bien des civils que des prisonniers de guerre, ces deux catégories

 16   étaient présentes dans les centres d'hébergement, que ces deux catégories

 17   étaient présentes sur les mêmes lieux ? Est-ce exact de dire cela ?

 18   R.  C'est exact. Dans le document, il est demandé que les prisonniers de

 19   guerre soient séparés des autres.

 20   Q.  Où voyez-vous dans ce document qu'il est indiqué que les prisonniers de

 21   guerre doivent être séparés des autres ?

 22   R.  Est-ce que la deuxième page pourrait être affichée et peut-être ensuite

 23   la troisième page.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que vous

 25   pourriez afficher la page numéro 2.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] La page suivante, je vous prie.

 27   En haut de la page, le paragraphe 3.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

Page 25898

  1   Q.  Vous faites référence au paragraphe qui commence par les mots suivants

  2   :

  3   "S'il est déterminé qu'une personne ne réside pas sur le territoire…" C'est

  4   cela ? "…sur le territoire de la République de Croatie, la personne sera

  5   confinée dans un endroit spécial du centre de collecte avec les autres

  6   personnes jouissant du même statut. Ces personnes devront faire l'objet

  7   d'un enregistrement séparé."

  8   C'est à cela que vous faites référence ?

  9   R.  Oui.

 10   M. MIKULICIC : [interprétation] Je vais essayer de vous aider.

 11   Je vois d'où vient la confusion. En fait, la confusion vient du fait

 12   qu'un mot qui est mentionné avant le substantif personne n'a pas été

 13   traduit en version anglaise, d'où la confusion.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous --

 16   M. MIKULICIC : [interprétation] En langue croate, voilà ce qui est dit :

 17   "S'il est déterminé qu'une personne capturée ou qu'une personne qui a été

 18   faite prisonnière…"

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si tel est le cas --

 20   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Moric, est-ce que vous pourriez nous donner lecture du

 22   paragraphe 3 en question, est-ce que vous pourriez le  lire ?

 23   R.  "S'il est déterminé qu'une personne qui a été faite prisonnière ne

 24   réside pas sur le territoire de la République de Croatie, cette personne

 25   sera placée dans un endroit séparé du centre de collecte avec d'autres

 26   personnes ayant le même statut."

 27   Q.  Monsieur Moric, voilà comment je comprends la différence. Vous demandez

 28   à ce que les personnes qui ne résident pas en Croatie soient placées dans

Page 25899

  1   un endroit séparé. En fait, vous l'avez expliqué lors de votre déposition.

  2   Je peux vous en donner lecture. Il s'agissait de la page 25 554. Voilà ce

  3   que vous avez dit. Je vais vous le citer, je cite :

  4   "Compte tenu de ce fait, les personnes qui voulaient rester en République

  5   de Croatie se voyaient délivrer les documents appropriés et se voyaient

  6   logées dans des endroits où leur sécurité pouvait être garantie. En même

  7   temps, par ailleurs, dans ces endroits, il fallait recevoir les anciens

  8   membres des forces paramilitaires et des forces parapolices qui avaient

  9   accepté l'offre et il fallait que leurs uniformes de paramilitaires et que

 10   leurs insignes soient enlevés de leurs vêtements pour que change ainsi leur

 11   identité. Ça, c'était de notoriété publique.

 12   "Il y avait également des personnes qui n'étaient pas des ressortissants ou

 13   des citoyens de la République de Croatie, qui n'avaient jamais été citoyens

 14   de la République de Croatie et qui n'avaient jamais eu l'ambition de

 15   devenir citoyens de la Croatie. A l'époque, le droit pénal prévoyait des

 16   sanctions pour la participation à la rébellion armée. Et parmi les tâches

 17   de la police, il y avait, entre autres, la collecte d'information relative

 18   à toute personne qui avait commis ce type de crime. L'idée qui sous-tendait

 19   les centres de collecte ou les centres de réception était de recevoir

 20   toutes les catégories de personnes et de leur fournir les conditions de

 21   base minimales pour des êtres humains. L'intention était également

 22   d'interroger toutes ces personnes et de faire en sorte de respecter leurs

 23   possibilités, leurs souhaits pour leur permettre d'obtenir leur objectif."

 24   Alors le paragraphe auquel vous faites référence vise votre consigne qui

 25   consistait à séparer les prisonniers de guerre des civils, mais ce n'est

 26   pas exactement ce qui est indiqué, Monsieur Moric. En fait, il s'agit

 27   plutôt des personnes qui ne sont pas résidentes ou, comme l'a précisé Me

 28   Mikulicic, qui n'avaient été ressortissants ou citoyens de Croatie, n'est-

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  1   ce pas exact, Monsieur Moric ?

  2   R.  Madame le Procureur, malheureusement, je ne suis plus sûr de bien

  3   comprendre votre question. Parce que vous aviez ces centres de réception

  4   qui étaient censés recevoir toute personne ayant besoin d'un soutien, et

  5   quasiment tout le monde avait besoin de soutien à l'époque. 

  6   Q.  Monsieur Moric --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, ce n'est pas la

  8   première fois que nous entendons parler maintenant de centres de réception.

  9   La question qui vous a été posée par Mme Mahindaratne portait sur ces

 10   centres de collecte ou de rassemblement. Alors nous allons, dans un premier

 11   temps, vérifier s'il y a une différence entre le centre de réception dont

 12   vous parliez et le Sabirni centar.

 13   Maître Kehoe --

 14   M. KEHOE : [interprétation] Avant que le témoin ne réponde, j'aimerais

 15   indiquer de façon tout à fait indépendante à la Chambre une pièce.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je sais qu'il y a différents libellés

 17   qui sont utilisés dans le document, d'où mon souci --

 18   M. KEHOE : [interprétation] Mais c'est un peu plus précis que cela. C'est

 19   un peu plus pointu --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je vous suis reconnaissant de

 21   votre aide, mais j'aimerais, dans un premier temps, entendre la réponse du

 22   témoin.

 23   Donc on vous a demandé de lire un document. Il y a un thème qui a été

 24   traduit par "centre de collecte," alors que dans le texte original, il

 25   s'agit de "Sabirni centar." Est-ce que vous pensez que cela est différent

 26   des centres que vous venez de mentionner, à savoir ces centres où l'on

 27   était censé s'occuper des gens qui venaient de façon adéquate ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, il n'y avait pas

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  1   de différence.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Moric, Mme Mahindaratne a

  3   commencé par vous poser une question assez simple. Elle vous a demandé si à

  4   la fois les civils et les prisonniers de guerre étaient justement

  5   accueillis dans ces centres de rassemblement, dans ces "Sabirni centar."

  6   Vous avez dit oui. Vous avez dit qu'ils étaient séparés. Et je lis l'alinéa

  7   B du paragraphe 3. Apparemment, il y a eu une traduction incomplète à

  8   propos des personnes. Est-ce que nous pourrions peut-être revenir au nœud

  9   du problème, à savoir vous avez ce paragraphe B, 3, qui est affiché sur

 10   votre écran. J'aimerais savoir comment l'on peut comprendre à partir de ce

 11   paragraphe qu'une différence, une séparation était établie entre les

 12   prisonniers et les civils, parce que cela fait maintenant un long moment

 13   que nous parlons de personnes qui, apparemment, résident sur le territoire

 14   ou ne résident pas sur le territoire. Cela fait un certain temps qu'on en

 15   parle maintenant. Et je suppose que cela est tout à fait différent de la

 16   différence qui est établie entre les civils et les prisonniers.

 17   Donc est-ce que vous pourriez, dans un premier temps, je vous prie, nous

 18   expliquer comment il se fait qu'au paragraphe B, 3, nous pouvons lire que

 19   les civils et les prisonniers étaient séparés.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le texte dispose que

 21   premièrement il faut déterminer que la personne a été faite prisonnière,

 22   ensuite il faut déterminer si la personne a ou non un lieu de résidence en

 23   Croatie. Ensuite, la personne doit être placée dans une partie séparée du

 24   centre avec des personnes ayant le même statut.

 25   Donc premièrement, la personne doit avoir été faite prisonnière --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais cela signifie que des

 27   prisonniers qui ne résident pas sur le territoire de la République de

 28   Croatie doivent être séparés, doivent faire l'objet d'un enregistrement

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  1   séparé et doivent être placés dans un endroit séparé avec des personnes qui

  2   ont le même statut, à savoir des personnes qui n'ont pas de lieu de

  3   résidence en République de Croatie. Mais cela n'est pas une différence

  4   établie entre des civils et des prisonniers. Il s'agit tout simplement de

  5   deux catégories de prisonniers. Il y a les personnes qui ont été faites

  6   prisonnières et qui n'ont pas de lieu de résidence en Croatie, et ces

  7   personnes doivent être placées à part. Enfin, c'est ainsi en tout cas que

  8   je comprends le paragraphe en question, mais j'aimerais que vous nous

  9   indiquiez ce qui dans ce texte permet de déterminer de façon claire que les

 10   prisonniers devaient être séparés des civils.

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, de vous

 12   interrompre. Mais comme très souvent par le passé, je pense que nous nous

 13   heurtons à un problème de traduction.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, si tel est le cas, le témoin

 15   dispose du texte original. Il répondra à ma question, à moins que ma

 16   question n'ait mal été traduite, bien entendu. Si ma question a mal été

 17   traduite ou si vous êtes d'avis que ma question n'a pas été bien traduite,

 18   j'aimerais vous donner la parole.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, votre

 20   question n'a pas été bien traduite, mais ce n'est pas votre faute.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne suis pas en train de parler

 22   d'erreur.

 23   M. MIKULICIC : [interprétation] Voilà ce que je vous propose. Pour pouvoir

 24   déterminer la bonne traduction du mot croate "zarobljenik," qui a été

 25   traduit comme "prisonnier," je pense que cela n'est pas une bonne

 26   traduction.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, vous avez déjà dépassé ce que

 28   vous étiez censé faire. Vous auriez pu dire, Il faut vérifier ce mot, ça

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  1   aurait été une chose. Mais dire maintenant que la traduction n'a pas été

  2   bonne, vous êtes allé un peu trop loin.

  3   Ceci étant, je vais reformuler ma question.

  4   Monsieur Moric, j'aimerais savoir où dans le texte du paragraphe 3

  5   croate, j'aimerais que vous m'indiquiez où vous voyez qu'il est indiqué de

  6   façon très claire qu'il y a une différence très claire qui est établie

  7   entre les prisonniers et les civils. Où est-ce que cela se trouve ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce que nous voyons,

  9   c'est qu'on devait leur accorder un traitement égal dans ce centre.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ce n'est pas une réponse à ma

 11   question, parce que si vous devez être traités de la même façon, ce n'est

 12   pas la question que je vous ai posée. Si tel est le cas, qui doit alors

 13   recevoir ce traitement égal ?

 14   Et d'après ce que j'ai vu jusqu'à présent, et je ne parle même pas de

 15   problèmes de traduction, il est question de critères qui sont utilisés pour

 16   séparer certaines personnes. Alors ces critères étaient le lieu de

 17   résidence sur le territoire. C'était cela le critère, oui ou non ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 20   Madame Mahindaratne, je regarde l'horloge. Nous avons largement

 21   dépassé l'heure de la pause. Et je vous avais invitée à en terminer pendant

 22   ces deux séances.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser au

 24   témoin.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez plus de questions ?

 26   Qu'en est-il des autres parties ?

 27    M. MIKULICIC : [interprétation] Je pense que je pourrais terminer mes

 28   questions supplémentaires lors de la prochaine séance, disons, en une demi-

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  1   heure.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, une demi-heure, c'est la prochaine

  3   séance, effectivement.

  4   M. KAY : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de questions pour la Défense de M.

  6   Cermak.

  7   Maître Kehoe.

  8   M. KEHOE : [interprétation] Si mon estimé confrère a besoin d'une demi-

  9   heure, j'aurais besoin de poser quelques questions

 10   de précision à propos de documents. Donc ça me donne une demi-heure, 45

 11   minutes. Mais je pense que nous pourrions terminer aujourd'hui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui signifie que nous n'allons pas

 13   pouvoir terminer aujourd'hui.

 14   M. KEHOE : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous supposez que les Juges n'auront pas

 16   de questions, d'ailleurs. Si nous reprenons à 13 heures 05, deux fois une

 17   demi-heure, ça nous donne 60 minutes; ça nous donne 14 heures 05. C'est une

 18   question de simple arithmétique --

 19   M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse. J'avais perdu la notion du temps.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pardon ?

 21   M. KEHOE : [interprétation] J'avais perdu la notion du temps. Je ne me

 22   rendais pas compte qu'il est quasiment 13 heures.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela semble être un problème général et

 24   collectif dans ce prétoire. Je ne m'adresse à personne en particulier.

 25   Nous allons faire une pause et nous reprendrons à 13 heures 05.

 26   --- L'audience est suspendue à 12 heures 49.

 27   --- L'audience est reprise à 13 heures 12.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble que les parties soient

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  1   arrivées à un accord selon lequel il serait préférable d'entendre le témoin

  2   Bagic après la pause, et j'aimerais que vous déposiez des écritures

  3   conjointes dans un message électronique informel pour dire, non seulement

  4   pourquoi il est préférable d'entendre le témoignage de ce témoin après les

  5   vacances judiciaires, mais aussi en indiquant les raisons pour lesquelles

  6   il ne faut pas l'entendre avant les vacances judiciaires parce que -- c'est

  7   parce que cela résulterait à la perte de quelques jours dans le prétoire.

  8   Bien sûr, on peut peut-être entendre, avant les vacances judiciaires, une

  9   partie de son témoignage et le témoin peut être contre-interrogé après les

 10   vacances judiciaires.

 11   La Chambre verra si cet accord sera adopté, l'accord conclu entre les

 12   parties.

 13   Monsieur Moric, j'ai un autre message pour vous. Nous ne serons pas en

 14   mesure d'en finir avec votre témoignage aujourd'hui. Cela sera demain. Et

 15   je pense que cela ne vous cause pas de problèmes majeurs.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, êtes-vous prêt à poser

 18   des questions à M. Moric ?

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 21   Nouvel interrogatoire par M. Mikulicic : 

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Moric.

 23   R.  Bonjour.

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25    M. MIKULICIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche le document P494,

 26   pour ce qui est de la confusion créée à propos de la terminologie pour ce

 27   qui est des termes centres de réception et centres de rassemblement. C'est

 28   le document que Mme le Procureur vous a montré au moment où elle vous a

Page 25906

  1   posé des questions.

  2   Q.  Il s'agit du document que vous avez pu examiner dans son intégralité.

  3   Le document porte la date du 4 août. Dans ce document, il est dit qu'il

  4   faut procéder à des activités pour réaliser l'opération Retour ou Povratak,

  5   et à cette fin il faut former les centres de rassemblement.

  6   M. MIKULICIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la deuxième page

  7   du document, s'il vous plaît.

  8   Q.  A la deuxième page du document, il est dit qu'il faut nommer le chef ou

  9   le commandant, ensuite il est dit qu'il faut assurer la sécurité de ces

 10   établissements, et à cette fin il faut engager les membres de la police

 11   militaire. Ensuite, il est dit que les conditions dans ces centres de

 12   rassemblement devraient être en conformité avec les dispositions des

 13   conventions de Genève et au paragraphe 1B, en fin de la page, il est dit

 14   qu'aux centres de rassemblement, seront accueillies les personnes capturées

 15   et cela, exclusivement, il faut faire une liste de personnes capturées.

 16   Monsieur Moric, vous parlez croate, c'est votre langue maternelle. Et selon

 17   vous, ce que signifie le terme personne capturée, selon vous, quelle est la

 18   définition de ce terme personne capturée ?

 19   R.  La personne capturée, c'est la personne qui était trouvée sur le

 20   territoire occupé et en temps de guerre, cette personne s'est rendue ou

 21   cette personne a été capturée en procédant à d'autres moyens par ceux qui

 22   l'ont capturée, à savoir elle a été capturée contre son gré.

 23   M. MIKULICIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut regarder le document qui

 24   porte la date du 5 août P1045, le document qui a été rédigé le lendemain.

 25   Q.  Monsieur Moric, ce document également est le document du ministère de

 26   l'Intérieur. Pourtant, l'adjoint du ministre de l'Intérieur, dans ce

 27   document, ce n'est pas vous parce qu'en bas du document, on voit que le

 28   document a été signé par Zdravko Zidovec, adjoint du ministre de

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  1   l'Intérieur.

  2   Vous souvenez-vous quel était le secteur de Zdravko Zidovec au ministère de

  3   l'Intérieur, à l'époque ?

  4   R.  D'après le décret portant sur l'organisation interne et le

  5   fonctionnement du ministère, M. Zidovec était responsable du secteur des

  6   affaires administratives et logistiques, ensemble avec la protection civile

  7   et avec les pompiers.

  8   Q.  Donc M. Zidovec dit dans ce document, il s'adresse également aux postes

  9   de police, aux administrations de la police, et il dit que les

 10   administrations de la police sont obligées d'organiser illico les centres

 11   d'accueil de la population civile.

 12   Il les appelle centres d'accueil par rapport aux centres de

 13   rassemblement, qui faisaient l'objet du document du 4 août et M. Zidovec a

 14   dit comme suit, je cite : "Les centres doivent" --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, ici, on voit un

 17   élément directeur dans cette question parce qu'il appelle ces centres --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Mikulicic, il ne faut pas

 19   que vous posiez de telles questions directrices.

 20   M. MIKULICIC : [interprétation] Je vais le faire, mais je ne peux pas voir

 21   pourquoi ma question a été directrice.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais selon des règles, vous ne devez pas

 23   poser des questions directrices.

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Bien sûr. Je vais respecter ces règles.

 25   Q.  Monsieur Moric, dans ce document, il est dit qu'il faut organiser les

 26   centres d'accueil et il est dit que ces centres doivent être organisés de

 27   façon à ce que les conditions prévues dans les conventions de Genève soient

 28   respectées et avec la coopération des centres de travail social et des

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  1   centres pour ce qui est des personnes expulsées.

  2   Au deuxième paragraphe, il est dit :

  3   "Lorsque les personnes sont trouvées dans les zones d'activités de combat

  4   ou dans les zones libérées et pour ce qui est de la réception de ces

  5   personnes dans des centres d'accueil ou de réception, il faut procéder

  6   obligatoirement à la séparation des civils pour les transférer aux centres

  7   chargés de l'accueil des civils, de la protection des civils."

  8   Monsieur Moric, par rapport au document précédent, quels sont vos

  9   commentaires à propos de ce document ? S'agit-il des mêmes établissements

 10   ou des établissements qui sont différents par rapport aux établissements

 11   mentionnés dans le document précédent ?

 12   R.  Il s'agit des établissements différents parce que les établissements

 13   précédents, les centres précédents pour ce qui est des personnes capturées,

 14   c'était pour l'accueil des personnes capturées et ces centres sont les

 15   centres destinés aux civils, c'est-à-dire destinés aux personnes qui n'ont

 16   rien à voir avec les activités de guerre.

 17   Q.  Regardons le document P914.

 18   C'est le document du 8 août, à savoir ce document était rédigé trois jours

 19   après le document affiché, à savoir quatre jours après le -- votre document

 20   du 4 août, que vous avez vu en premier.

 21   Ce document, au nom du ministère de l'Intérieur, secteur de la police

 22   judiciaire, a été rédigé par Ivan Nadj, chef du secteur, le 8 août et qui a

 23   été envoyé, encore une fois, à toutes les administrations de la police de

 24   cette région. L'objet du document est les centres de rassemblement et il a

 25   fait référence au document du 4 août qu'on a déjà vu au début, lorsque je

 26   vous ai posé les premières questions, Monsieur Moric. Il est dit ici, je

 27   cite :

 28   "On vous informe qu'à l'avenir, à la place du terme centre de rassemblement

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  1   pour les prisonniers de guerre, lors de la rédaction de rapports, utilisez

  2   le terme centre de rassemblement -- d'accueil pour les prisonniers de

  3   guerre."

  4   A la place du terme centre d'accueil, utilisez le terme centre

  5   d'accueil pour les civils.

  6   Monsieur Moric, il est évident qu'à l'époque, pendant les quelques premiers

  7   jours, il y avait des maladresses pour ce qui est de l'utilisation des

  8   termes pour définir les établissements d'accueil des personnes capturées,

  9   des prisonniers de guerre et des civils ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame Mahindaratne.

 11   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président --

 12   M. MIKULICIC : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 14   M. MIKULICIC : [interprétation] Je vais répéter cela. Ce n'était qu'un

 15   commentaire, mais je vais m'abstenir de faire des commentaires.

 16   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 17   M. MIKULICIC : [interprétation]

 18   Q.  Pour ce qui est de ces termes, centres de rassemblement ou centres

 19   d'accueil pour les personnes -- pour les prisonniers de guerre, pouvez-vous

 20   nous donner vos commentaires pour ce qui est de ces trois documents et de

 21   ces termes utilisés ?

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on

 23   peut d'abord jeter les bases pour ce qui est des connaissances du témoin de

 24   ces documents; et deuxièmement, le témoin a déjà déposé à ce sujet en

 25   répondant à des questions de la Chambre.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Mikulicic procède à la vérification

 27   de tout ce que le témoin a dit.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, oui, mais peut-

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  1   être qu'on pourrait quand même jeter des bases pour savoir ce qu'il en

  2   sait.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Me Mikulicic, il s'est concentré

  4   aux termes utilisés dans les documents, bien qu'on trouve ces termes dans

  5   ces documents; donc je pense qu'il fait cela à titre d'illustration.

  6   Pouvez-vous maintenant donner vos commentaires par rapport à ces

  7   termes, Monsieur Moric ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges,

  9   manifestement, dans la phase initiale concernant cette question des

 10   différents centres d'accueil, des expressions, ou plutôt, des termes

 11   erronés, voire inacceptables, ont été utilisés, si bien qu'il a été procédé

 12   à une correction dans une phase ultérieure.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, pourrions-nous

 14   demander au témoin pourquoi ces termes étaient erronés, selon lui ?

 15   M. MIKULICIC : [interprétation]

 16   Q.  Pouvez-vous répondre à la question de M. le Président ? Pourquoi

 17   estimez-vous que la terminologie initiale était erronée ? Et peut-être une

 18   question subsidiaire.

 19   Nous avons vu votre ordre, Monsieur Moric, votre ordre du 4 août. A

 20   aucun endroit dans cet ordre vous ne vous référez à "des civils." Vous ne

 21   parlez que "des prisonniers de guerre," alors que dans l'ordre daté du 5

 22   août de M. Zidovec, on parle de civils. Est-ce que cela aussi pointe peut-

 23   être une différence de terminologie ?

 24   R.  Madame et Messieurs les Juges, je pense que cette correction, ce

 25   changement et ces corrections sont intervenus dans la terminologie pour la

 26   raison suivante : il y a une différence également de contenu et la réalité

 27   que recouvre ces termes n'est pas la même parce que dans un type de centre

 28   ou d'institution, on rassemble des prisonniers de guerre et on prend soin

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  1   d'eux, alors que dans l'autre type d'infrastructure, on accueille des

  2   civils qui, eux, sont les victimes des événements de la guerre.

  3   M. MIKULICIC : [interprétation] Si la Chambre n'a pas de question sur ce

  4   sujet, je voudrais, Monsieur le Président, passer à un autre sujet.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Entendu. Mais j'ai quand même une

  6   question.

  7   Apparemment, la terminologie qui a été utilisée au début était celle

  8   de "Sabirni centar," centre de rassemblement, au lieu de centre d'accueil

  9   ou de centre de réception des prisonniers de guerre, alors que l'autre

 10   version, l'autre catégorie d'institution ou de centre d'accueil était

 11   "prihvatni centar," centre d'accueil ou de réception ou d'hébergement.

 12   S'il n'y avait pas eu ce changement dans la terminologie, est-ce

 13   qu'il n'y aurait pas, malgré tout, eu une distinction tout à fait claire

 14   entre les deux termes utilisés et les deux types de centres ? Parce qu'on

 15   voit que vous avez procédé au changement d'un terme qui vous amène ensuite

 16   également à changer l'autre, alors que la distinction terminologique

 17   initiale semblait tout à fait claire. L'un des termes se réfère aux

 18   prisonniers de guerre et l'autre n'a absolument aucune connotation liée aux

 19   prisonniers de guerre.

 20   Donc l'explication pour ce qui est de savoir pourquoi la terminologie

 21   initiale n'était pas adéquate, j'avoue que j'ai du mal à la voir. Où était

 22   le problème avec cette terminologie initiale ? Pourquoi n'y avait-il pas

 23   une distinction considérée comme suffisante dans la terminologie initiale ?

 24   Je serais intéressé pour ce qui est de connaître la raison qui a pu motiver

 25   le remplacement d'une distinction terminologique tout à fait claire par une

 26   autre, qui est tout aussi claire en termes de distinction entre les deux

 27   catégories.

 28   Est-ce que ma question est claire ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Votre question est claire, Monsieur le

  2   Président.

  3   Dans ma langue, le terme de "sabirni," l'adjectif "sabirni," donc

  4   centre de rassemblement, a des implications qui peuvent suggérer que

  5   certains services de l'Etat en l'espèce, les services de la police ou les

  6   forces armées procèdent à une recherche active avec une intention

  7   particulière, de certaines personnes dans le but de les rassembler à un

  8   endroit et de les mettre en isolement.

  9   Alors que le terme ou l'adjectif de "prihvatni," en croate, implique

 10   l'idée d'un accueil, d'une prise en charge de personnes qui ont en commun

 11   le fait d'avoir un certain problème ou des besoins particuliers.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soit. Dans ce cas-là, si on se penche

 13   sur les termes en croate, lorsqu'il est question de "sabirni centar" pour

 14   les prisonniers de guerre, c'est cet endroit où on rassemble des personnes,

 15   n'est-ce pas, "sabirni centar" et cela est remplacé par la notion d'un

 16   endroit où les prisonniers de guerre se trouveraient placés parce qu'ils

 17   présenteraient certains besoins ?

 18   J'essaie de suivre la justification linguistique que vous donnez.

 19   Vous avez dit qu'il y a eu un changement, parce que vous ne souhaitiez pas

 20   rechercher et rassembler ces prisonniers de guerre, mais plutôt disposer

 21   d'un endroit où leurs besoins pourraient être satisfaits.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que j'ai été

 23   un peu maladroit et peut-être m'avez-vous mal compris à cause de cela.

 24   Je voulais dire que la modification de la terminologie est intervenue

 25   de façon manifeste dans le but de définir de façon plus précise les

 26   conditions dans lesquelles oeuvraient ces centres d'accueil et de réception

 27   afin de souligner que rien dans ces centres n'était en infraction avec les

 28   dispositions du droit international et des conventions applicables.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je prends acte de votre

  2   explication.

  3   Veuillez poursuivre, Maître Mikulicic.

  4   M. MIKULICIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Moric, au début de votre contre-interrogatoire par Mme le

  6   Procureur, il a été question du contrôle interne au sein du ministère de

  7   l'Intérieur. Je voudrais qu'on affiche le document D527, s'il vous plaît.

  8   Nous allons revenir sur le décret portant organisation interne du ministère

  9   de l'Intérieur et nous allons revenir également sur la façon de fonctionner

 10   de ce ministère.

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Je voudrais qu'on affiche l'article 3 de ce

 12   décret qui figure en page 2 des versions tant croate qu'anglaise.

 13   Q.  Dans le premier échange que nous avons eu, nous avons vu ensemble,

 14   Monsieur Moric, que le ministère se subdivisait en secteurs. Nous avons vu

 15   qu'au sein du secteur de la police spéciale avait été constitué un

 16   département, non pas un bureau, mais un département du contrôle interne. Y

 17   a-t-il eu d'autres secteurs du ministère de l'Intérieur où un département

 18   du contrôle interne ait été créé, en dehors du secteur de la police

 19   spéciale, à votre connaissance ?

 20   R.  Maître, non, je n'ai pas connaissance qu'un autre secteur ait compris

 21   un tel département ou une telle section chargée du contrôle interne.

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] Je voudrais maintenant qu'on passe à

 23   l'article 8 qui définit le fonctionnement et les tâches du département --

 24   ou plutôt, du bureau du contrôle interne, bureau qui fait partie intégrante

 25   du cabinet du ministre. Article 8 donc.

 26   Q.  Et je vais me référer uniquement à cette partie de l'article 8 qui

 27   m'intéresse, qui est importante pour moi.

 28   Dans cet article, on trouve la description des activités de ce bureau

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  1   du contrôle interne. Et il y est dit, c'est à la fin de la troisième ligne

  2   en version croate, je cite :

  3   "Le bureau du contrôle interne initie le travail des secteurs opérationnels

  4   dans le but de parvenir à une solution dans des cas concrets, et il suit

  5   les procédures qui ont été diligentées jusqu'à leur achèvement."

  6   Bien entendu, cela concerne différentes catégories de comportements

  7   illégaux ou d'infractions commises par des agents du ministère.

  8   Voyons maintenant l'article 28 qui décrit le fonctionnement, le

  9   travail du département du contrôle intérieur au sein de secteur de la

 10   police spéciale.

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Article 28 donc.

 12   Q.  On peut y voir que ce département du contrôle interne de la

 13   police spéciale est censé s'acquitter de tâches qui ont pour but la

 14   collecte, le traitement et l'exploitation d'informations ayant trait à la

 15   structure et à l'ordre interne des forces de police spéciales, et cetera,

 16   et cetera.

 17   Donc ici, on ne trouve aucune mention d'activités qui ont pour but de

 18   parvenir à la résolution d'un cas précis. Il ne s'agit en rien de tâches

 19   opérationnelles ayant pour but la résolution d'une affaire concrète.

 20   Alors, Monsieur Moric, le bureau du contrôle interne qui était rattaché au

 21   bureau du ministre, avait-il compétence pour la structure dans son

 22   ensemble, pour l'ensemble du ministère de l'Intérieur ? Je veux dire donc

 23   pour tous les secteurs de ce ministère.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et la compétence en question, les attributions en question, c'était de

 26   maintenir et de préserver la légalité, le respect de la discipline parmi

 27   les agents du ministère, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, en effet.

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  1   Q.  Si nous nous penchons sur les tâches qui sont prévues par ce décret

  2   comme incombant au département du contrôle interne de la police spéciale,

  3   nous voyons qu'il s'agit ici d'œuvrer à la protection en termes de

  4   sécurité, protection de la police spéciale, qu'il s'agit de coopérer avec

  5   le service de maintien et de protection de l'ordre constitutionnel de la

  6   République de Croatie avec les autres services chargés de la sécurité en

  7   République de Croatie.

  8   Alors, une telle définition juridique des attributions du département

  9   du contrôle interne, indique-t-elle, Monsieur Moric, l'existence de

 10   compétences ou d'attributions identiques à celles qui sont propres au

 11   bureau du contrôle interne rattaché au cabinet du ministre, au bureau du

 12   ministre ?

 13   R.  Non, cela ne signifie pas que leurs compétences ou leurs

 14   attributions sont les mêmes, et je peux vous indiquer quelle est la

 15   différence si vous le souhaitez.

 16   Q.  Nous allons précisément y venir, mais je voudrais à titre

 17   d'illustration que l'on affiche le document D1092.

 18   Nous allons voir un document qui a été rédigé par le contrôle interne

 19   de la police spéciale en date du 29 juillet 1995. Le sujet en est un

 20   rapport collectif concernant les travaux ou les activités des groupes

 21   opérationnelles de reconnaissance dans la région du Velebit. On fait état

 22   ici que le département du contrôle interne du secteur de la police

 23   spéciale, juste avant l'opération Tempête, s'est livré à une reconnaissance

 24   du terrain sur lequel la police spéciale était chargée d'intervenir.

 25   Alors, Monsieur Moric, selon vous, quelle est la nature de ce rapport ?

 26   J'essaie d'éviter de vous poser une question directrice. J'essaie de faire

 27   attention.

 28   R.  D'après son contenu, ce rapport parle des renseignements, des

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  1   informations et des données qui relèvent du renseignement et qui ont été

  2   collectés concernant la situation sur le terrain, la situation dans le

  3   territoire dont on suppose que c'est celui où la police spéciale va se voir

  4   confier des missions. Donc il s'agit d'un rapport qui appartient au domaine

  5   du renseignement.

  6   M. MIKULICIC: [interprétation] Passons maintenant au document D1093, s'il

  7   vous plaît.

  8   Q.  Il est rédigé à la date du 1er août 1995 et il émane du bureau du

  9   contrôle interne de la police spéciale.

 10   M. MIKULICIC: [interprétation] Pouvons-nous voir le haut de la page. Nous y

 11   voyons qu'il s'agit de la date du 1er août 1995, que cela est adressé au

 12   chef d'état-major de l'ensemble des forces de la police spéciale, et il est

 13   question de la zone de responsabilité de la 9e Brigade motorisée de Gracac.

 14   L'information qui est ici fournie concerne la brigade de l'ennemi qui se

 15   trouve déployée juste en face de la zone de déploiement de la police

 16   spéciale.

 17   Pourriez-vous nous dire quelle est la nature de ce document, Monsieur Moric

 18   ?

 19   R.  Très brièvement, il s'agit d'un rapport du renseignement concernant la

 20   situation dans une zone où la police spéciale pouvait s'attendre à se voir

 21   chargée de missions.

 22   Q.  Pouvons-nous voir maintenant le document D529, s'il vous plaît.

 23   Nous allons maintenant voir un document qui émane du contrôle interne,

 24   rédigé donc par ce dernier le 11 janvier 1996. Il y est question d'un

 25   rapport annuel du contrôle interne pour l'année 1995. C'est donc le secteur

 26   de la police spéciale et son département propre du contrôle interne.

 27   Il y est dit que :

 28   "Au cours de l'année 1995, le bureau s'est acquitté de façon systématique

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  1   et ininterrompue des tâches qui lui incombent," qui se rangent en quatre

  2   catégories, les catégories suivantes : premièrement, les préparatifs

  3   opérationnels et les préparatifs en termes de renseignements concernant les

  4   opérations dans lesquelles les agents de la police spéciale ont dû

  5   intervenir.

  6   Deuxièmement, la protection en termes de sécurité des unités de la

  7   police spéciale.

  8   Troisièmement, le travail à la formation spécifique des agents du

  9   département du contrôle interne, ainsi que du commandant des groupes de

 10   reconnaissance et opérationnels auprès des unités de la police spéciale.

 11   Et quatrièmement, le suivi permanent de la situation en termes de

 12   discipline et des relations entre les hommes, les agents; des relations au

 13   sein de la structure hiérarchique, et le fait d'attirer également

 14   l'attention sur les problèmes spécifiques posés par les agents de la police

 15   spéciale.

 16   Alors, Monsieur Moric, dans ce point numéro 4 qui traiterait de la

 17   discipline, vous nous avez déjà dit à plusieurs reprises dans votre

 18   déposition, que vous vous étiez efforcé de suivre les tendances à l'échelon

 19   qui était le vôtre, celui du ministère. Quelle est votre interprétation de

 20   ce point numéro 4 où il est question de

 21   discipline ?

 22   R.  Il découle très clairement de ce document que le département s'occupait

 23   de renseignements et de contre-renseignement, de la protection des unités

 24   de la police spéciale, notamment de superviser la situation en matière de

 25   discipline. Donc ils allaient jusqu'à prendre en considération les liens

 26   entre les personnes, parce que c'est justement le genre de chose qui est

 27   important lorsque l'on pense à la discipline. Les tendances de la

 28   discipline faisaient l'objet d'un contrôle pour ce qui était d'une

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  1   amélioration ou d'une détérioration de la discipline afin de juguler les

  2   tendances négatives et renforcer les positives.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, nous nous attendions à

  4   ce que vous finissiez en une demi-heure. C'est ce que je pensais. Je

  5   pensais que vous alliez terminer deux ou trois minutes après 13 heures 45.

  6   Mais visiblement, cela n'est pas le cas.

  7   Par conséquent, je pense qu'il serait peut-être plus judicieux de

  8   lever l'audience. Mais est-ce que vous pourriez nous dire de combien de

  9   temps vous aurez encore besoin ?

 10   M. MIKULICIC : [interprétation] Ce ne sera pas plus long que 15 minutes,

 11   Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 13   M. MIKULICIC : [interprétation] Mais avec votre permission, j'aimerais

 14   poser une toute dernière question au témoin. Ça va durer deux ou trois

 15   secondes.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question, pas plus, Maître

 18   Mikulicic.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 20   Q.  Donc j'aimerais vous poser ma dernière question pour aujourd'hui,

 21   Monsieur Moric. Est-ce que le bureau du contrôle interne qui était attaché

 22   au bureau du ministre de l'Intérieur s'occupait de travail tel que le

 23   renseignement et le contre-renseignement, comme le faisait le département

 24   du contrôle interne de la police spéciale ?

 25   R.  Non, pas du tout.

 26   Q.  Je vous remercie de votre réponse.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mikulicic.

 28   Monsieur Moric, j'espère que c'est la toute dernière fois que je vous

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  1   exhorte de ne parler à personne de votre déposition. Je vous parle

  2   d'ailleurs de la déposition que vous avez faite et de celle que vous ferez

  3   demain. Je ne vous parle pas d'après-demain, parce que je pense que nous en

  4   aurons terminé.

  5   Donc nous allons lever l'audience et nous reprendrons demain, mercredi 9

  6   décembre à 9 heures, dans ce même prétoire.

  7   --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le mercredi 9 décembre

  8   2009, à 9 heures.

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