Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 9 décembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes présentes

  7   dans le prétoire et à l'extérieur du prétoire.

  8   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, je vous prie.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 10   Monsieur les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre

 11   Ante Gotovina et consorts.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 13   Avant que nous ne reprenions, Monsieur Moric, j'aimerais vous rappelez

 14   comme d'habitude que vous êtes toujours tenu de respecter la déclaration

 15   solennelle que vous avez prononcée au début de votre déposition.

 16   Maître Mikulicic, êtes-vous prêt à reprendre vos questions supplémentaires

 17   ?

 18   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   LE TÉMOIN : JOSKO MORIC [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   Nouvel interrogatoire par M. Mikulicic : [Suite] 

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Moric, et bonjour à toutes les

 23   personnes du prétoire.

 24   R.  Bonjour, Maître. Bonjour à tout le monde.

 25   Q.  J'ai plusieurs questions à vous poser avant que nous ne terminions les

 26   questions supplémentaires.

 27   Monsieur Moric, alors très brièvement, nous allons aborder la question de

 28   la coopération avec la police civile des Nations Unies. L'accord signé par

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  1   M. Sarinic et M. Akashi vous a été montré. Dans cet accord, il est question

  2   des pouvoirs de la police civile des Nations Unies pour ce qui était des

  3   contacts avec la police.

  4   J'aimerais savoir si au niveau ministériel, vous avez reçu de la part

  5   de la police civile des Nations Unies des rapports ou des griefs, ou des

  6   documents, d'ailleurs, qui auraient porté sur la coopération à laquelle je

  7   viens de faire référence ?

  8   R.  Maître, au tout début, lors des opérations de maintien de la paix, les

  9   contacts avec la police civile des Nations Unies portaient sur la

 10   coopération et sur des mesures prises pour mettre en œuvre, justement, ce

 11   type de coopération. Alors, il y a eu à cette fin, justement, un échange de

 12   correspondances.

 13   Si vous me demandez si nous avons reçu des rapports relatifs à

 14   certains incidents qui auraient perturbé la sécurité, je vous dirais que

 15   non, nous ne les avons pas reçus au niveau du ministère. Mais au niveau

 16   inférieur, au niveau des postes de police, certes.

 17   M. MIKULICIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le

 18   document 2D180331.

 19   Q.  Monsieur Moric, en ce qui concerne le règlement qui régit les activités

 20   conjointes de la police et de la police civile - il s'agit en fait de la

 21   pièce D53 - M. Elleby qui était le commandant de la POLCIV a envoyé un

 22   mémorandum aux membres de la POLCIV pour leur indiquer quelle était la

 23   procédure qu'ils devraient suivre lors de leurs contacts avec la police

 24   dans les territoires qui venaient d'être libérés.

 25   Et ce que nous voyons sur notre écran n'est pas le document. Et mon commis

 26   aux affaires vient juste de me dire que le document que j'ai demandé avait

 27   déjà été versé au dossier et qu'il s'agit du document D1751. En fait, c'est

 28   la page suivante. Maintenant, il y a un document qui est apparu à l'écran,

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  1   et je souhaiterais demander l'affichage de la page suivante.

  2   Alors, vous voyez un document du 30 août émanant du ministère de

  3   l'Intérieur, signé par le chef du secteur de la police, M. Franjo Djurica.

  4   Et dans ce document, il envoie le règlement régissant le travail conjoint

  5   de la POLCIV et du ministère de l'Intérieur, du MUP donc, et ce, afin de

  6   s'assurer qu'il y ait uniformité de mesures.

  7   M. MIKULICIC : [interprétation] Et j'aimerais demander la page suivante,

  8   maintenant. Voilà. Le document est maintenant affiché sur la gauche de

  9   l'écran.

 10   Q.  Et vous voyez qu'au paragraphe numéro 1, il est indiqué que dans les

 11   anciens secteurs nord et sud, la POLCIV va superviser le travail de la

 12   police, mais seulement en ce qui concerne la protection des droits de

 13   l'homme.

 14   Et un peu plus bas, au numéro 7, il est indiqué que les membres de la

 15   POLCIV peuvent observer le travail de la police --

 16   R.  Je m'excuse, parce que je ne vois plus le paragraphe 7.

 17   Q.  Voilà, c'est la page suivante pour la version croate. Je disais donc

 18   que les membres de la POLCIV peuvent observer le travail du MUP, peuvent

 19   noter ce qu'ils ont constaté, mais ils ne peuvent pas filmer ou

 20   enregistrer. Ils ne peuvent pas prendre de photographies non plus,

 21   d'ailleurs.

 22   Donc, Monsieur Moric, est-ce que vous vous souvenez, ou est-ce que vous

 23   vous souviendriez de problèmes précis ? Et je pense au travail de la

 24   police, je pense à des enquêtes sur site, par exemple. Avez-vous jamais

 25   entendu parler de problèmes à cet égard, lors de l'examen, par exemple, de

 26   lieux de crimes et dans le cadre de la coopération avec la POLCIV ?

 27   R.  Non, je ne dispose pas d'information à ce sujet.

 28   Q.  Merci. Alors, au niveau du ministère, avez-vous reçu des rapports de

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  1   l'équipe d'action des droits de l'homme, l'équipe du HRAT des Nations Unies

  2   ?

  3   R.  Ecoutez, Maître, non, je ne me souviens pas les avoir reçus moi-même.

  4   Q.  Merci. Alors, maintenant que nous avons le document à l'écran, il

  5   s'agit du document qui a été envoyé par le chef Djurica le 30 août,

  6   j'aimerais maintenant que nous passions à un autre sujet, à savoir le sujet

  7   des coordinateurs et de leur roulement sur le terrain.

  8   M. MIKULICIC : [interprétation] A cette fin, pourrions-nous passer à huis

  9   clos partiel, pour un petit moment. Et j'aimerais demander l'affichage de

 10   la pièce P487.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 13   partiel, Monsieur le Président.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 25924 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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 14   [Audience publique]

 15   M. MIKULICIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Moric --

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience

 18   publique.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 21   M. MIKULICIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Moric, vous avez, dans le cadre de vos fonctions, assisté et

 23   participé à de nombreuses réunions au niveau du ministère. Vous aviez des

 24   contacts avec l'administration de la police militaire. J'aimerais savoir si

 25   vous avez jamais été informé lors de ces réunions d'un problème juridique

 26   impliquant la sécurité, problème juridique pour ce qui était de la police

 27   spéciale ? En d'autres termes, est-ce que l'on vous a jamais relaté que

 28   leurs comportements auraient pu être associés à l'un ou l'autre des crimes

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  1   qui se sont déroulés dans le sillage de l'opération Tempête ?

  2   R.  Non, non, je ne me souviens pas avoir été informé de ce genre de chose.

  3   Q.  Mais vous, vous-même, au ministère ou dans votre bureau, est-ce que

  4   vous avez reçu un rapport ou des récriminations ou des griefs à propos du

  5   comportement de la police spéciale ?

  6   R.  Ni moi-même, ni mon personnel, n'avons jamais reçu ce type de rapport

  7   ou de plainte.

  8   Q.  Est-ce que vous savez qu'à ce moment-là, ou immédiatement après l'année

  9   1995, est-ce que vous savez si les membres de la police spéciale ont fait

 10   l'objet de rapports d'enquête judiciaire, ou ont été accusés de crimes qui

 11   auraient été commis dans les zones nouvellement libérées ?

 12   R.  Je me souviens que ce type de problème s'est posé, mais seulement pour

 13   ce qui était de la police en uniforme qui, d'ailleurs, m'a énormément déçu.

 14   Mais je ne me souviens absolument pas de ce dont vous m'avez demandé.

 15   Q.  Je vous remercie, Monsieur.

 16   M. MIKULICIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions à vous poser.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mikulicic.

 18   Maître Kehoe, vous êtes prêt ?

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et d'ailleurs, cela

 20   va être très, très bref.

 21   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Kehoe : 

 22   Q.  [interprétation] Monsieur Moric, hier, lors de votre interrogatoire, on

 23   vous a demandé de faire une remarque ou une observation à propos de votre

 24   ordre du 18, qui fait l'objet de la pièce D49. Donc, il s'agit de votre

 25   ordre du 18.

 26   M. KEHOE : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage à l'écran de ce

 27   document.

 28   Q.  Il s'agit de ce que vous faisiez à propos des postes de contrôle, et

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  1   pour ce qui est donc de prendre de l'avant dans le cadre d'enquêtes.

  2   M. KEHOE : [interprétation] Une fois de plus, j'aimerais demander

  3   l'affichage de la page 2 pour la version anglaise, puisque c'est le

  4   paragraphe numéro 2 qui m'intéresse.

  5   Q.  Monsieur Moric, donc des questions vous ont été posées sur la légalité

  6   ou l'illégalité de cet ordre, et on vous avait demandé de faire des

  7   observations, et j'aimerais maintenant vous demander donc de nous faire

  8   d'autres observations à ce sujet.

  9   R.  Maître, l'ordre est tout à fait conforme aux dispositions de la Loi

 10   relative aux affaires intérieures. Cette loi qui, me semble-t-il, a été

 11   versée au dossier par Me Mikulicic, indique de façon très catégorique et de

 12   façon absolument non ambiguë à l'article 10, si je ne m'abuse, quelles sont

 13   les compétences et les responsabilités du ministère de l'Intérieur. En

 14   d'autres termes, il s'agit de ce que l'Etat doit faire eu égard aux

 15   questions relatives à la sécurité dans l'Etat.

 16   Il est également indiqué que l'Etat supervise la situation ainsi que les

 17   événements, les événements qui ont une incidence sur la sécurité, et prend

 18   des mesures pour pouvoir mettre en œuvre la législation. Et par conséquent,

 19   la responsabilité qui est conférée par la loi a également été prévue pour

 20   l'administration de la police et pour les postes de police en utilisant

 21   quasiment les mêmes termes, ce qui fait que de cette façon, la compétence

 22   et les responsabilités de chaque maillon de la structure de la police dans

 23   le pays a été défini par la loi.

 24   Donc, vous avez d'un côté ceci qui permet la stabilité du système de

 25   sécurité, et puis, par ailleurs, il y est également question d'une

 26   obligation d'agir de façon proactive et de façon rétroactive également, à

 27   tous les niveaux, aux trois niveaux. Ce qui signifie, dans la pratique, que

 28   si à un niveau supérieur, une évaluation a été faite de façon assez

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  1   certaine et qu'au niveau inférieur on n'a pas été capable de superviser

  2   l'évolution de la situation ou de prendre des mesures, ou si au niveau

  3   inférieur, les mesures suffisantes n'ont pas été prises pour pouvoir

  4   assurer de faire respecter le droit, au niveau supérieur, on doit réagir

  5   soit de façon proactive ou soit on doit réagir.

  6   Ce système précise de façon très claire la définition des responsabilités

  7   pour ce qui est de l'application de la législation. Moi, en tant que

  8   ministre assistant de l'Intérieur responsable de la police en uniforme, je

  9   dois dire que j'étais également représentant de l'Etat. J'étais un

 10   fonctionnaire qui s'acquittait de ses fonctions au troisième niveau, tel

 11   que cela était prévu par la Loi relative aux affaires intérieures. Et je

 12   dois dire que la loi indiquait ce qu'il fallait faire, et moi, je

 13   supervisais l'évolution de la situation. Et sur la base des rapports, je

 14   prenais des décisions relatives aux mesures qui devaient être prises pour

 15   pouvoir faire respecter la loi et pour faire en sorte que la loi puisse

 16   être mise en œuvre. Et cela, d'ailleurs, ne portait pas seulement sur les

 17   territoires qui avaient été libérés par l'opération Tempête, mais cela

 18   était valable pour l'ensemble du pays.

 19   Pour ce qui était de mes activités proactives, je dois dire que cela

 20   portait sur la préparation de 3 000 policiers qui ont été détachés. Je

 21   m'excuse, j'avais fait référence au chiffre de 3 500 policiers. Donc, ce

 22   n'est pas ce qui a été consigné au compte rendu d'audience. Je disais donc

 23   qu'ils avaient été détachés auprès de l'administration de la police dans

 24   les zones libérées. Et ce faisant, je dois dire que pour ce qui était des

 25   frontières de l'Etat et de l'infrastructure pénale, je l'ai exposée en

 26   quelques sortes à des risques, à des risques importants, parce qu'il faut

 27   savoir que malheureusement, l'infrastructure avait été fréquemment la cible

 28   d'attaques ou d'activités terroristes par la suite. Etant donnée que des

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  1   terroristes avaient franchi la frontière de l'Etat avec de grandes

  2   quantités d'explosifs, et ils avaient ciblé lors de leurs attaques

  3   terroristes les autoroutes, les lignes ferroviaires et ce type

  4   d'infrastructures. Et cela s'est passé à 160 kilomètres de la zone la plus

  5   proche qui avait été touchée par l'opération Tempête.

  6   Donc ce faisant, j'ai exposé à de très hauts risques quelques quatre

  7   millions d'habitants dans le pays, parce qu'il y a eu une augmentation du

  8   taux de la criminalité à leurs dépends. Alors, je ne vais pas entrer dans

  9   tous les détails pour vous expliquer tous les risques auxquels nous nous

 10   sommes exposés en affectant ainsi 3 500 policiers, en les déployant. Je

 11   souhaiterais me concentrer plutôt sur le territoire nouvellement libéré.

 12   Sur ce territoire, je suivais également la situation et son évolution.

 13   Sur la foi des rapports pour lesquels j'ai insisté, lorsque je

 14   n'étais pas satisfait par le niveau de précision fourni par le rapport,

 15   comme on a pu le voir d'ailleurs dans les documents, lorsque je n'étais pas

 16   satisfait, je demandais que le rapport soit rédigé à nouveau. Et donc, sur

 17   la foi de ces rapports, j'ai compris que les postes de police se trouvant

 18   dans ce territoire étaient en train de suivre l'évolution de la situation

 19   sur place et les événements qui s'y produisaient, mais qu'ils ne prenaient

 20   pas suffisamment de mesures visant à l'application de la loi. J'ai

 21   également compris que les directions de la police, elles aussi, suivaient

 22   l'évolution de la situation et les événements, mais qu'elles ne prenaient

 23   pas, elles non plus, des mesures suffisantes pour que la loi soit

 24   appliquée. J'ai consulté des experts au sein de mon équipe. J'ai consulté

 25   les directeurs des directions de la police, j'ai attiré leur attention sur

 26   le fait qu'ils disposaient de plus de 5 000 [comme interprété] policiers,

 27   qui étaient leurs effectifs propres, auxquels s'ajoutaient 3 500 policiers

 28   supplémentaires. J'ai attiré leur attention sur le fait qu'ils disposaient

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  1   de 4 000 policiers sur un total de 11 000 dans l'ensemble de l'Etat.

  2   J'ai également adressé des avertissements à la police militaire, à

  3   mon propre ministre de tutelle, pour attirer leur attention sur de nombreux

  4   faits et de nombreuses difficultés qui constituaient pour la police des

  5   entraves dans la tâche qui était la sienne, à savoir, la prise et la mise

  6   en œuvre de mesures idoines. J'ai demandé que l'on réinstalle les tribunaux

  7   dans ce territoire, à ce moment-là, il n'y avait aucun tribunal pour juger

  8   les crimes et les délits. Et j'ai déjà décrit la situation qui prévalait

  9   dans ce territoire, juste après le conflit. C'était une situation typique

 10   des situations qu'on trouve juste après un conflit, marquée par une grande

 11   confusion et un grand désordre. Et j'ai compris qu'il ne fallait surtout

 12   pas que nous nous exposions à de nouveaux risques, que ce soit sur le reste

 13   du territoire de la Croatie ou sur les territoires nouvellement libérés

 14   dans le cadre de l'opération Tempête.

 15   Je me suis retrouvé alors dans une situation délicate. Qu'était-il possible

 16   de faire de plus du point de vue d'un ajustement de la tactique utilisée

 17   par les services de la police afin d'obtenir de meilleurs résultats ? Je me

 18   suis posé cette question et j'ai pris des décisions. J'ai consulté mes

 19   collaborateurs et mon ministre, et je les ai informés de cette décision que

 20   j'avais prise, à savoir l'application de ce qui était considéré comme

 21   prioritaire conformément à la loi.

 22   Dans l'article 2 de la Loi sur les affaires intérieures, on trouve

 23   une énumération des tâches incombant à la police. Dans l'ordre, l'on trouve

 24   la première tâche, c'est la protection des personnes, par ordre de priorité

 25   donc. La seconde tâche est la protection des biens de tous, de toutes les

 26   personnes, c'est-à-dire qu'on a affaire ici à une catégorie universelle. La

 27   troisième mission est la prévention des infractions au pénal. La quatrième

 28   consiste à découvrir les auteurs d'infractions au pénal et de crimes.

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  1   Ensuite, on trouve une énumération d'autres tâches encore, mais qui sont

  2   moins importantes pour les sujets qui nous intéressent ici.

  3   Cette succession de priorités dans l'accomplissement des tâches qui

  4   incombent à la police n'a pas été établie au hasard. Il s'agit d'un ordre

  5   qui est tout à fait typique et propre à la nature même du travail de la

  6   police. Même en temps de paix, la police a affaire simultanément à toutes

  7   ces différentes missions qui ont été énumérées, et cela indépendamment de

  8   l'ordre dans lequel on les considère. Cependant, de par l'organisation même

  9   de tous les services de police au monde, il est tout à fait clair que la

 10   protection des personnes, la protection des biens et la prévention de la

 11   criminalité constituent les missions les plus importantes. C'est pourquoi

 12   dans l'organisation de tous les services de police au monde, on trouve un

 13   effectif pour les services de police de base qui est plusieurs fois plus

 14   nombreux que celui des autres services de police qui peuvent être rattachés

 15   au ministère de l'Intérieur.

 16   Alors, face à la véritable avalanche d'attaques visant les personnes

 17   et les biens des citoyens, et notamment les biens qui avaient été

 18   abandonnés, face à cette avalanche d'événements à laquelle nous avons été

 19   confrontés, j'ai compris que nous ne pouvions pas faire face à la situation

 20   d'une façon qui nous aurait permis d'obtenir des résultats simultanément

 21   sur tous les fronts, d'obtenir des résultats optimaux, et c'est la raison

 22   pour laquelle j'ai envoyé des instructions et des ordres pour que la police

 23   focalise son attention et ses activités, et consacre tous ses effectifs à

 24   l'accomplissement des trois premières missions qui lui incombent en

 25   application de la loi. Et pour rappel, il s'agit de la protection des

 26   personnes, la protection des biens et de la prévention de la criminalité.

 27   Après cela, nous trouvons également la quatrième priorité, qui est la

 28   découverte des auteurs de crimes.

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  1   C'était donc la raison fondamentale pour laquelle j'ai pris cette

  2   décision. Il s'agissait de protéger les personnes qui étaient sur place, de

  3   protéger les vies de ceux qui étaient restés dans ce territoire. Il

  4   s'agissait en second lieu de protéger d'innombrables biens qui avaient été

  5   abandonnés, et il s'agissait pour nous tous de nous concentrer sur cette

  6   tâche-là. Et c'est intentionnellement et tout à fait consciemment que j'ai

  7   pris un risque, le risque d'avoir à apporter des explications tôt ou tard

  8   concernant une façon de procéder qui était simplement fondée sur les

  9   dispositions applicables de la loi. Mais fort heureusement, il s'est agit

 10   d'une tentative couronnée de succès visant à ajuster la tactique qui

 11   présidait aux activités des services de police afin que ces derniers

 12   puissent être dirigés avec une précision quasiment chirurgicale, si vous me

 13   permettez cette image, pour qu'ils puissent être amenés à intervenir avec

 14   une grand précision dans les domaines qui étaient considérées comme

 15   prioritaires.

 16   Je pense que je me suis déjà peut-être étendu un peu trop. Mais il me

 17   semble qu'hier, Mme le Procureur a cité des passages de la déposition de M.

 18   Cetina. Mme le Procureur m'a alors dit que M. Cetina avait des doutes quant

 19   à la légalité de cette décision qui était la mienne et de ce document qui

 20   émanait de moi. Elle m'a demandé si j'en étais surpris. J'ai répondu que

 21   j'étais surpris, mais c'est le moins que je puisse dire, à vrai dire.

 22   En effet, M. Cetina était à la tête de la direction de la police de

 23   Zadar-Knin. A l'époque où il a reçu ce document, et conformément au

 24   règlement applicable à l'époque qui disposait des interactions au sein des

 25   services de la police, des interactions entre agents et employés de la

 26   police, il aurait eu l'obligation de m'informer qu'il avait des doutes

 27   quant à la légalité de ce document qui émanait de moi. Or, il ne l'a pas

 28   fait.

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  1   Par ailleurs, dans son rapport qu'il m'a remis le 23 ou le 24, et si

  2   je me souviens bien, ce document a été versé par Me Kehoe la semaine

  3   dernière, M. Cetina m'informe justement que la mise en application, la mise

  4   en œuvre de mon ordre du 18 août, il est écrit dans son rapport de façon

  5   très précise, noir sur blanc, L'exécution de votre ordre du 18 août a

  6   permis une diminution très importante du nombre d'atteintes portées aux

  7   biens qui avaient été abandonnés.

  8   Pour finir, mis à part le fait que ce document est fondé sur les

  9   obligations du ministère de l'Intérieur, obligations de suivre l'évolution

 10   de la situation et les événements, et de prendre des mesures aux fins de

 11   l'application de la loi, ce même document qui émane de moi et qui est daté

 12   du 18 août contient également des éléments de critique tout à fait clairs,

 13   et une évaluation tout à fait critique du travail des directions de la

 14   police. En effet, il y est dit que ces dernières ont bien suivi l'évolution

 15   de la situation et les événements sur le terrain, mais qu'elles ne l'ont

 16   pas fait suffisamment parce qu'elles n'ont pas pris les mesures nécessaires

 17   à l'application de la loi. Elles n'ont pas fait appel au troisième niveau

 18   qui est le niveau le plus élevé, l'État, afin que ce dernier intervienne

 19   pour sauvegarder la sécurité dans la zone. Dans leurs rapports, ces

 20   directions de la police ont ensuite reconnu que le changement de tactique

 21   qui avait été opéré dans le travail de la police a porté ses fruits et a

 22   permis des améliorations significatives. Ils ont donc reconnu que c'était

 23   quelque chose de pertinent et de justifié. Il n'y absolument aucune

 24   indication dans ce document du 18 août qui permettrait de conclure que la

 25   police n'était plus jamais censée se pencher sur les crimes commis avant la

 26   date du 18 août. Au contraire, il ressort du contexte même de ce document

 27   que la police avait l'obligation de diligenter des poursuites et de se

 28   pencher sur ce même crime.

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  1   Et enfin, lorsqu'on a affaire à des milliers et des milliers de plaintes

  2   qui sont déposées, il est tout à fait clair qu'on trouve parmi ces plaintes

  3   également des plaintes déposées pour des crimes commis avant la date du 18

  4   août, ne serait-ce que parce que les dépôts de plaintes ont eu lieu après

  5   la date du 18 août, bien après la date où les crimes avaient été commis.

  6   Aujourd'hui encore, je suis convaincu que nous avons bien agi et bien

  7   travaillé, en nous fondant sur les articles 10 et l'article 2 ou l'article

  8   3 de la Loi sur les affaires intérieures.

  9   Q.  Merci, Monsieur Moric.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 11   questions pour le témoin.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 13   Maître Mikulicic.

 14   M. MIKULICIC : [interprétation] Juste pour rappel pour la Chambre, Monsieur

 15   le Président, le document est le D1077. Il s'agit de la loi sur les

 16   affaires intérieures. M. Moric se référait à l'article 1, paragraphe 2.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Moric, le Juge Kinis a quelques

 20   questions à vous poser.

 21   Questions de la Cour :  

 22   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Monsieur Moric, je souhaiterais vous

 23   poser plusieurs questions sur différents sujets. Voici la première : la

 24   Chambre a été saisi d'éléments de preuve indiquant que M. Cermak avait émis

 25   plusieurs ordres adressés aux directions de la police, concernant la

 26   limitation de la liberté de circulation, les vols de véhicules de l'ONURC,

 27   la sécurisation des entrées du camp de l'ONU et les enquêtes à mener sur

 28   différents crimes.

Page 25935

  1   Alors, est-ce qu'en tant qu'assistant du ministre, vous avez jamais reçu

  2   des instructions verbales ou écrites concernant la façon dont la police

  3   était censée coopérer avec M. Cermak ?

  4   Et avez-vous jamais fourni des instructions verbalement ou par écrit

  5   aux directions de la police leur indiquant qu'elles étaient censées

  6   coopérer avec M. Cermak et répondre également devant M. Cermak ou lui

  7   envoyer des rapports ?

  8   R.  Monsieur le Juge, indépendamment de la confusion qui régnait à l'époque

  9   et qui faisait qu'on assistait à un certain nombre de comportements dans le

 10   monde politique, je n'ai jamais reçu le moindre ordre écrit, ni du bureau

 11   du président de la République de Croatie ni de mon gouvernement ni de mon

 12   propre ministre de tutelle indiquant que le général Cermak aurait eu la

 13   moindre attribution en matière de police civile.

 14   Lorsque Mme le Procureur m'a interrogé hier et m'a présenté ce

 15   laissez-passer pour lequel M. Cermak avait conçu le dessein de pouvoir

 16   l'émettre lui-même ou que son propre personnel aurait pu peut-être émettre

 17   de tels laissez-passer, j'ai répondu, j'ai dit la colère qui avait été la

 18   mienne lorsque j'ai vu ce laissez-passer. Mais j'ai également dit que je

 19   n'avais pas vu le document qui était lié au témoin protégé et qui était

 20   relié à cette question de laissez-passer. Parce que si j'avais pu voir ce

 21   document, si j'en avais eu connaissance, cette personne, ce témoin protégé

 22   aurait été poursuivi en vertu de sa responsabilité disciplinaire dans le

 23   cadre du système dans lequel il intervenait.

 24   Donc en application de la Loi sur les affaires intérieures, et en se

 25   fondant sur la façon dont fonctionnaient nos services et dont nous

 26   collaborions et la façon dont les services de police étaient dirigés, je

 27   peux dire que M. Cermak n'avait pas accès à ce système.

 28   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Mais comment expliquez-vous alors que

Page 25936

  1   la police ait obéi à ses ordres et se soit comporté en conformité avec eux,

  2   par exemple, en procédant à la sécurisation de certaines entrées ou

  3   certains postes. Il y avait également une question concernant les laissez-

  4   passer et ce à quoi s'attendait M. Cipci. Il y avait d'autres cas

  5   également.

  6   R.  Madame et Messieurs les Juges, la police reçoit des informations

  7   concernant les problèmes de sécurité qui se présentent dans un territoire

  8   donné, et ce, de façon différente en provenance de toutes les catégories

  9   possibles de citoyens. Je pense personnellement que ces documents qui

 10   étaient envoyées par M. Cermak à la police ont été interprétés comme suit :

 11   ils ont été considérés comme des sources d'information portant sur certains

 12   problèmes précis. En revanche, lorsqu'on parle de la sécurisation de

 13   certaines installations ou de certains lieux, sécurisation qui était

 14   demandée par M. Cermak et à laquelle il a été procédé par la police,

 15   manifestement dans ce cas-là, il existait de bonnes raisons pour sécuriser

 16   ces installations; parce que dans la situation que je vous ai décrite

 17   précédemment, il aurait été insensé de la part du commandant de la police à

 18   l'échelon local de "gaspiller" ces effectifs, ces ressources humaines en

 19   les affectant à la résolution de problèmes secondaires ou sans importance.

 20   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Vous voulez dire que le fait de

 21   sécuriser un cimetière constitue une tâche très importante dans le cadre du

 22   travail de la police, le fait de restreindre ou d'empêcher l'accès

 23   d'observateurs internationaux à un tel cimetière ?

 24   R.  S'il existe pour cela des raisons ayant trait à la sécurité, oui. Moi,

 25   je ne m'en souviens pas et je ne suis pas au courant, mais s'il existe des

 26   raisons ayant trait à la sécurité comme, par exemple, le déminage d'une

 27   zone dans le cimetière ou autour du cimetière, ou s'il existe d'autres

 28   raisons également liées à la sécurité, oui, c'est tout à fait pertinent.

Page 25937

  1   Dans le cas contraire, ça ne l'est pas.

  2   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Mais cela ne concerne que l'inhumation

  3   de corps. Il ne s'agit pas simplement de retrouver des engins explosifs.

  4   S'agit-il donc d'une tâche importante pour la police, suffisamment

  5   importante pour qu'elle ait à se conformer à de telles instructions ?

  6   R.  S'il s'agit d'une inhumation ordinaire qui n'a aucune connotation en

  7   terme de sécurité, ni aucune conséquence, dans ce cas-là, la police ne

  8   devrait pas intervenir.

  9   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Mais pourtant, la Chambre a été saisie

 10   d'éléments de preuve indiquant que de telles interventions de la police ont

 11   bien eu lieu. Je parle de la sécurisation des cimetières de Gracac et de

 12   Knin.

 13   R.  Monsieur le Juge, à partir de ma position, celle d'une personne qui

 14   dirigeait les services de police dans tout le pays, j'ai dit de façon très

 15   claire quand, selon moi, les services de police auraient dû intervenir dans

 16   un tel contexte et quand ils n'auraient pas dû le faire.

 17   Si des raisons ayant trait à la sécurité étaient bien en jeu, je

 18   comprends que c'est la raison pour laquelle la police a été présente. Et si

 19   ces raisons n'étaient pas là, alors, il n'y a pas de raison permettant

 20   d'expliquer la présence de la police, s'il n'y avait pas de risque en terme

 21   de sécurité.

 22   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Ma dernière question se rapporte au

 23   très petit nombre de crimes commis dans la zone de Knin qui ont été

 24   signalés à la police judiciaire de Zadar-Knin, bien que d'autres éléments

 25   de preuve indiquent que de nombreux observateurs internationaux aient

 26   signalé et transmis des informations concernant les infractions et les

 27   crimes commis à la police pratiquement quotidiennement.

 28   La Chambre a également été saisie d'éléments de preuve indiquant que

Page 25938

  1   juste après l'opération Tempête, des équipes chargées du ratissage, y

  2   compris des éléments de la police judiciaire, avaient collecté des restes

  3   humains mais les avaient ensuite placés dans des housses en plastique et

  4   chargés à bord de camions et qui ont ensuite été emportés. Le registre de

  5   la police de Knin dans lequel ces corps ont été enregistrés --

  6   Alors, en se fondant sur ce qui vient d'être rappelé, il y a des

  7   éléments indiquant que certains éléments ont pu ne pas être signalés à la

  8   police judiciaire, des éléments d'information qui concernaient des

  9   incidents qui se sont produits juste après l'opération Tempête. Je

 10   m'intéresse à cela, parce que, conformément à votre ordre du 18 août, ce

 11   qu'on trouve aux paragraphes 2 et 4 notamment, il y a des indications, des

 12   instructions qui sont fournies quant aux actions qui étaient censées être

 13   entreprises après.

 14   Alors, avez-vous une explication par rapport à cela ?

 15   R.  Monsieur le Juge, pour autant que je sache, les équipes qui se sont

 16   occupées de l'assainissement du terrain du territoire en question ont été

 17   organisées d'après des normes du droit international se trouvant dans des

 18   conventions internationales.

 19   Et au sein de ces équipes, il y avait des techniciens de la police

 20   judiciaire dont les tâches étaient de procéder sur les lieux de crimes à

 21   l'analyse des causes des décès des victimes, et ensuite, de lancer la

 22   procédure au sein de la police, ou lancer la procédure pour ce qui est de

 23   s'occuper des dépouilles, des cadavres.

 24   Dans des cas que vous venez de décrire, pour autant que je sache, les

 25   techniciens de la police judiciaire ont procédé à l'identification des

 26   victimes aussi. Et si l'identification n'a pas été possible, les

 27   techniciens de la police judiciaire prélevaient des indices pour pouvoir

 28   procéder à l'identification des victimes ultérieurement. Comme vous le

Page 25939

  1   voyez, je ne suis pas initié à ces activités en détail, parce que la police

  2   judiciaire ne faisait pas partie des forces de police opérationnelles.

  3   Pour ce qui est de votre question pour savoir si mon document du 18

  4   août aurait pu être interprété ou compris de cette façon, Monsieur le Juge,

  5   je pense que quand on se penche sur le document, on peut voir, on peut

  6   conclure qu'aucunement ce document n'a pu concerner ces cas, parce que dans

  7   ce document, les attaques et les atteintes à la vie humaines n'ont pas du

  8   tout été mentionnées. L'atteinte à la vie, à savoir la protection de la vie

  9   humaine, d'après la loi, est la priorité première pour ce qui est des

 10   activités de la police. Et dans mon document, il n'y a pas de référence à

 11   l'atteinte ou à la protection de la vie humaine.

 12   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Est-ce que qui que ce soit a

 13   donné l'ordre pour que de telles informations soient seulement transmises

 14   aux équipes de l'assainissement, et non pas de procéder aux enquêtes ?

 15   Comment la police, si elle n'a pas mené des enquêtes sur les lieux du

 16   crime, a pu distinguer des victimes du conflit militaire, des victimes qui

 17   sont mortes parce qu'elles ont été victimes des activités criminelles ?

 18   Est-ce qu'il y a eu des critères selon lesquels on a pu procéder à une

 19   telle distinction sur les lieux du crime ? Est-ce qu'il y a eu suffisamment

 20   d'informations transmises aux équipes de l'assainissement du terrain ?

 21   R.  Pour ce qui est de ces critères de ce type, cela n'existe pas dans la

 22   pratique des activités de la police.

 23   Je pense que, malheureusement, cela se base sur des évaluations des

 24   experts policiers, indépendamment du fait s'ils travaillent dans un secteur

 25   de la police ou dans un autre.

 26   Et dans ces cas, je pense que les opinions du technicien de la police

 27   judiciaire ont été déterminantes, qui a été formé pour le faire et qui

 28   aurait dû, sur la base des indices sur les lieux de crimes et sur la base

Page 25940

  1   des liens établis sur place, conclure s'il s'agissait des victimes

  2   d'infractions pénales graves ou de victimes dont la mort a été causée par

  3   d'autres activités.

  4   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Seriez-vous d'accord avec moi pour dire

  5   qu'une telle méthode aurait pu être utilisée comme étant la méthode pour

  6   dissimuler certaines choses ?

  7   R.  Dans des cas isolés, je suppose que cela aurait pu être le cas. Mais je

  8   n'admets pas que dans le contexte qui était le nôtre, et avec de telles

  9   intentions qui étaient les nôtres sur place, je n'admets pas que cela

 10   aurait pu être fait de façon organisée, que quelqu'un aurait pu décider

 11   dans quel cas cela aurait dû être dissimulé ou pas.

 12   Et malheureusement, dans la police, même en temps de paix, il peut

 13   arriver qu'il y ait des évaluations erronées, et on ne peut pas exclure que

 14   quelqu'un aurait pu abuser de cela.

 15   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] J'ai une dernière question pour vous.

 16   La Chambre a également reçu des moyens de preuve disant que la police

 17   parfois confisquait des biens mobiliers possédés par certains civils pour

 18   les placer sous le contrôle de la police.

 19   Pourtant, la Chambre a reçu des moyens de preuve également indiquant que

 20   cela n'a pas toujours mené à une procédure au pénal.

 21   Savez-vous ce qui s'est passé pour ce qui est de ces objets qui ont

 22   été saisis ou confisqués, s'il n'y avait pas eu de procédure au pénal ?

 23   Est-ce que la police a rendu ces objets à des gens ?

 24   R.  Dans le système de police dans mon pays, les objets saisis doivent être

 25   enregistrés en appliquant une procédure particulière, et il a fallu les

 26   utiliser à un stade ultérieur en tant que moyens de preuve. C'était une

 27   procédure habituelle pour ce qui est de ces objets saisis.

 28   La semaine dernière, on a pu voir qu'il y avait des situations où la

Page 25941

  1   police s'est débrouillée difficilement, et cela dépendait des types

  2   d'objets saisis et de leur quantité. Lorsqu'on n'a pas pu identifier le

  3   propriétaire de ces objets, lorsque dans la police il y a eu des quantités

  4   d'objets variés, et lorsque ces objets n'ont pas pu être utilisés dans des

  5   procédures au pénal, ou lorsqu'on n'a pas pu identifier les propriétaires

  6   de ces objets, et cela arrive aujourd'hui également, donc alors, à l'époque

  7   on appliquait la procédure suivante. On procédait aux enchères publiques

  8   pour vendre ces objets, et l'argent perçu de cette façon a été versé au

  9   budget d'Etat.

 10   Mais tout cela était public. Tout le monde a pu savoir quels objets

 11   et à quels endroits ils allaient être vendus.

 12   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Avez-vous eu des instructions

 13   particulières concernant la procédure pour ce qui est des objets

 14   provisoirement confisqués ? Est-ce que vous avez eu des instructions eu

 15   égard à l'enregistrement de ces objets eu égard aux enchères, pour les

 16   vendre ou pour les rendre à des propriétaires auxquels ils ont été pris ?

 17   R.  Monsieur le Juge, je crois qu'il y a eu des instructions particulières,

 18   mais ces instructions ne faisaient pas partie des instructions selon

 19   lesquelles procédait la police en uniforme. C'est pour cela que je ne

 20   connais pas cela en détail, et je ne suis pas en mesure de répondre

 21   précisément à vos questions.

 22   Ce sont des instructions qui ont été reçues par les membres du

 23   secteur de la police s'occupant de la logistique et des affaires

 24   juridiques.

 25   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Par exemple, il y a eu de telles

 26   situations avant le départ de Knin -- avant le départ du train de Knin

 27   allant à Split. La police a pris aux passagers un grand nombre d'objets

 28   divers, et jusqu'ici, personne ne nous a expliqué ce qui s'était passé pour

Page 25942

  1   ce qui est de ces objets, parce qu'il est difficile de comprendre une telle

  2   situation. Si on a permis à des gens de revenir chez eux à Split, et si

  3   quelqu'un a pu ouvrir une enquête.

  4   Si j'ai bien compris, tous ces objets et ont été rassemblés en un

  5   endroit, et j'aimerais savoir ce qui s'est passé par la suite pour ce qui

  6   est de ces objets saisis ?

  7   R.  Monsieur le Juge, si vous parlez des objets qui auraient dû être

  8   présentés en tant que moyens de preuve pour ce qui est des infractions au

  9   pénal qui ont été commises ou allaient être commises, parce que c'est le

 10   seul cas où la police ait pu saisir des objets. Donc si c'était le cas, ces

 11   objets auraient dû être enregistrés selon la procédure habituelle en

 12   remplissant une sorte de plainte au pénal contre la personne à laquelle ces

 13   objets ont été pris.

 14   C'était la procédure habituelle, mais je n'exclus pas malheureusement

 15   que peut-être quelqu'un parmi les policiers ait pu abuser de cette

 16   situation.

 17   Lors de mon témoignage ici, vous avez pu voir que j'ai dû être confronté à

 18   des situations qui étaient pour moi des situations où j'étais déçu, quand

 19   M. Cetina m'a informé qu'un certain nombre de policiers ont été appréhendés

 20   parce qu'ils ont commis des infractions pénales. Mais nous avons pu

 21   également voir dans les documents qui m'ont été présentés pendant mon

 22   témoignage, que j'ai suivi la situation ainsi que les phénomènes qui

 23   apparaissaient dans ce territoire selon les dispositions de la loi, et que

 24   j'ai donné l'ordre spécial, les instructions spéciales concernant le

 25   système de roulement des effectifs de la police, et qu'il a fallu prêter

 26   une attention particulière à des essais éventuels des personnes qui

 27   retournaient de ce territoire à des endroits où ils travaillaient

 28   habituellement, qu'ils n'essaient pas de prendre avec eux des objets

Page 25943

  1   d'autrui, et qu'il a fallu, dans de telles situations, ouvrir une procédure

  2   disciplinaire et procéder à une suspension de telles personnes.

  3   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Si j'ai bien compris votre réponse,

  4   toutes les activités qui ont suivi pour ce qui est des objets pris à des

  5   différentes personnes, tout cela relevait de la compétence du département

  6   logistique ou des affaires juridiques que vous avez mentionné, et non pas

  7   de la compétence de la police de base.

  8   Ai-je bien compris votre réponse ?

  9   R.  Monsieur le Juge, j'ai peur que je n'ai pas bien compris votre question

 10   non plus. Je pense qu'on a parlé de deux choses distinctes.

 11   La première chose, c'est la procédure appliquée dans des situations où des

 12   objets ont été saisis pour servir dans une procédure au pénal en tant que

 13   moyen de preuve. La deuxième chose, c'est la procédure appliquée pour ce

 14   qui est des objets qui ont été saisis à la personne qui n'est pas le

 15   propriétaire des objets, et si on a des indices qui --

 16   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Je parle de ce deuxième type de cas où

 17   il y a des allégations selon lesquelles - ce sont des situations où les

 18   personnes ne peuvent pas prouver que des objets leur appartiennent et que

 19   la police les saisit. Qu'est-ce qui se passe par la suite ? Quelle est la

 20   procédure à être appliquée dans de tels cas ?

 21   R.  Dans ce deuxième type de cas, lorsqu'il n'est pas possible de trouver

 22   le propriétaire des objets, on attend une certaine période de temps pour

 23   voir si le propriétaire ne vienne pour demander ses objets. Je pense que

 24   cette période de temps est prévue par la loi, mais je ne me souviens pas de

 25   tous ces délais.

 26   Une fois le délai expiré, et si le propriétaire n'apparaît pas, on

 27   procède à des enchères en public, ce dont j'ai déjà parlé, donc des

 28   enchères en public. Donc on annonce les enchères en public en temps utile

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  1   pour que toutes les personnes intéressées puissent se présenter aux

  2   enchères. Si je me souviens bien de cette procédure ou des principes

  3   régissant cette procédure, le propriétaire des objets, le propriétaire

  4   légitime a pu se présenter avant les enchères ou durant les enchère

  5   publiques. Pourtant, cela relevait de la compétence des services

  6   logistiques et des affaires juridiques, et non pas de la compétence de la

  7   police de base, la police en uniforme.

  8   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Merci, Monsieur Moric, de vos réponses.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Moric, dans votre déclaration,

 10   vous avez dit, et je vais lire cette partie de votre déclaration, vous avez

 11   dit :

 12   "Les commandants militaires n'avaient pas d'autorité ni de compétences pour

 13   ce qui est de la police civile. Des tentatives isolées des militaires pour

 14   le faire n'ont eu aucun effet juridique sur les actions de la police."

 15   Donnez-nous des exemples de ces cas isolés ou de ces tentatives isolées,

 16   parce que vous avez fait référence à ces "tentatives isolées".

 17   R.  Monsieur le Président, j'ai parlé des situations où le personnel de la

 18   police civile a reçu des demandes orales des commandants militaires se

 19   trouvant au sein de compagnies, de régiments, qui, de temps en temps, ont

 20   demandé à des chefs de la police civile d'exécuter un acte opérationnel, de

 21   faire quelque chose concernant le contrôle de la circulation routière.

 22   Et dans ces cas, ils ont utilisé leur autorité militaire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'est pas tout à fait clair ce que

 24   vous avez dit dans la dernière partie de votre réponse.

 25   Est-ce que vous dites que dans de telles circonstances, la police

 26   aurait agit ou n'aurait pas agit après avoir reçu des ordres des

 27   commandants militaires ?

 28   R.  Bien sûr, il s'agit toujours des évaluations faites par la police. Et

Page 25945

  1   je ne crois pas que la police aurait dû faire cela parce qu'un commandant

  2   militaire a demandé que cela soit fait. Mais je n'exclus pas que dans

  3   certains cas, certains membres du personnel de la police, en respectant

  4   l'autorité des commandants militaires, auraient fait quelque chose qui lui

  5   a paru, à ce moment-là, comme quelque chose qui a été une action ayant une

  6   fin ou un sens.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cela aurait été en conformité avec

  8   les demandes de commandants militaires, ou avec leurs ordres ?

  9   R.  Probablement, si la police civile a également estimé que cette action

 10   allait être une action appropriée ayant un sens.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous citer un exemple d'une telle

 12   situation qui s'est réellement passé ?

 13   R.  Je ne peux pas vous donner d'exemple concret, Monsieur le Président,

 14   mais je peux vous décrire une situation réelle en essayant de donner à

 15   titre d'illustration un exemple.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans votre réponse, vous n'avez pas

 17   voulu faire référence à des ordres donnés par M. Cermak, qui, et cela, au

 18   moins de façon formelle, représentait l'autorité militaire, donc vous

 19   n'avez pas eu l'intention de faire référence à des ordres que lui a donnés

 20   à la police.

 21   R.  Monsieur le Président, vu que j'ai vu ces documents lors de la séance

 22   de récolement pour mon témoignage, je peux vous parler de ces documents en

 23   tant qu'exemples de ces situations.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, vous considérez que ce sont

 25   des exemples de ces situations auxquelles vous avez fait référence ?

 26   R.  Oui. Cela pourrait être un exemple, lorsque j'ai répondu à votre

 27   question il y a quelques instants pour ce qui est de la demande de M.

 28   Cermak pour assurer la sécurité de certains bâtiments. Par conséquent, si

Page 25946

  1   la police civile a considéré qu'assurer la sécurité de certains bâtiments

  2   était nécessaire et approprié, cela aurait pu se passer. Et seulement dans

  3   des cas où moi-même et mon personnel n'avons pas été informés de cela. Mais

  4   dans d'autres cas où nous avons été informés de cela, dans la plupart des

  5   cas, cela ne se serait pas passé.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit que ce qui a été

  7   demandé, ordonné, proposé, pour utiliser d'autres termes pour décrire de

  8   telles situations, lorsqu'on a demandé à la police de faire quelque chose,

  9   la police a analysé ces demandes, ces désirs ou ces ordres pour voir s'il

 10   allait être utile de procéder ainsi. Et si vous avez été informé là-dessus,

 11   cela ne s'est pas passé.

 12   R.  Je m'excuse. J'ai été maladroit en expliquant cela. Cela ne concerne

 13   pas la forme du document où on voit le mot "j'ordonne" parce qu'à l'époque,

 14   j'étais informé du fait que la police recevait des documents où on voyait

 15   l'expression "j'ordonne." Si j'avais été informé de tels documents,

 16   j'aurais demandé à la police de considérer ces documents comme étant des

 17   informations reçues par des citoyens. Et d'autre part, j'aurais informé M.

 18   Cermak du fait que de tels documents auraient dû être traités comme étant

 19   des informations fournies par des citoyens.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien que le résultat ait pu être le

 21   même, les actions ont été exécutées d'après des demandes. Je veux dire que

 22   pour ce qui est de l'ordre pour lequel vous avez dit qu'il ne s'agissait

 23   pas d'un ordre, dans de telles situations, la police aurait agi d'après le

 24   contenu de ce document, si la police a considéré que cela allait être

 25   approprié comme action.

 26   R.  Je suis d'accord avec vous. Si la police civile considère que de telles

 27   actions ont un sens et sont appropriées, oui, mais seulement si cela est en

 28   conformité avec des attributions et des compétences de la police prévues

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  1   par la loi. Sinon, dans le cas contraire, cela ne peut pas être fait.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Les chefs de la police ou ceux qui

  3   commandent les activités de la police, est-ce que ces personnes auraient pu

  4   être au courant du fait qu'ils n'ont pas été censés suivre les ordres de M.

  5   Cermak parce que lui, il n'a pas été autorisé à donner des ordres à la

  6   police vu sa position ?

  7   R.  Monsieur le Président, selon la loi qui prévoit les compétences, les

  8   attributions et pour ce qui est de l'organisation du ministère de

  9   l'Intérieur d'un côté, et du ministère de la Défense, à savoir de l'armée

 10   croate de l'autre côté, tous les officiers de la police civile, ont compris

 11   que les attributions et les compétences sont différentes. Et pour ce qui

 12   est de l'incompatibilité de certaines fonctions ou de certaines

 13   attributions, cela n'a pas pu être fait parce que la loi disposait que cela

 14   n'a pas été possible, à savoir qu'il n'a pas pu y avoir de chevauchement de

 15   compétences, d'interférence de compétences entre deux entités.

 16   Monsieur le Président, moi-même, à une ou deux occasions, pour ce qui est

 17   d'autres tâches, d'autres activités - je cite cela à titre d'exemple pour

 18   vous dire dans quelles conditions on a travaillé - donc à une ou deux

 19   occasions, j'ai vu des documents militaires concernant des activités

 20   exécutées sur le territoire lors de l'opération Eclair, et personne ne m'a

 21   informé de ces documents.

 22   Par contre, il y avait des maladresses pour ce qui est de l'exécution

 23   de certaines tâches sur la base de ces documents. Et parfois, il y avait

 24   donc des situations où on a procédé de façon maladroite, pas habile, et

 25   c'est pour cela qu'à tous les échelons de la hiérarchie, il a fallu prendre

 26   des mesures conformément à la loi.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais poser une question de

 28   suivi à la suite d'une des questions de M. le Juge Kinis. Il s'agissait, en

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  1   fait, du cimetière et de ne pas autoriser l'accès aux membres des

  2   organisations internationales, alors qu'il y avait une demande qui avait

  3   été faite ou un ordre qui avait été donné ou une consigne qui avait été

  4   donnée pour assurer en quelque sorte la sécurité du cimetière. Mais dans le

  5   cadre des services de la police, si ce type de demande avait été mis en

  6   œuvre, est-ce que vous n'auriez pas eu quelques problèmes à comprendre

  7   l'objectif de l'exercice ? Donc, est-ce que vous pourriez nous aider et

  8   nous permettre de comprendre pourquoi alors cette mesure a été prise ?

  9   Donc là, je vous parle d'une situation où il y a une demande ou un

 10   ordre, quelque soit d'ailleurs le terme que vous souhaitez utiliser, mais

 11   un ordre ou une demande a été donné par l'autorité militaire tel que par

 12   exemple représenté par M. Cermak. Et s'il est véritablement difficile de

 13   comprendre quel est l'objectif de la police, donc par conséquent, c'est un

 14   peu ce que vous avez dit auparavant; vous aviez dit qu'il était difficile

 15   de comprendre qu'il serait logique d'agir de la sorte.

 16   Est-ce que vous pourriez nous permettre de comprendre pourquoi

 17   toutefois dans ces circonstances bien précises, la police avait agi

 18   conformément à cette demande, ordre - quelque soit le terme que vous

 19   retenez - qui avait été donné par l'autorité militaire ?

 20   R.  Monsieur le Président, si quelqu'un de la police civile doit s'occuper

 21   d'une zone donnée, et si cette personne estime qu'il existe des risques de

 22   sécurité, quels qu'ils soient d'ailleurs, ou si la personne fournit les

 23   raisons --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien. Non, mais là maintenant, je

 25   vous parle d'une situation qui est telle que l'on connaît les circonstances

 26   et que l'information qui a été donnée est telle que personne ne peut, en

 27   quelque sorte, identifier s'il y a véritablement des risques pour la

 28   sécurité, ou si la personne ne peut pas véritablement déterminer la raison

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  1   qui sous-tend l'ordre qui a été donné. Je vous parle de ce type de

  2   situation. Si toutefois, dans ces circonstances, la police a agi

  3   conformément à ce qui avait été demandé, est-ce que vous pourriez nous

  4   permettre de comprendre pourquoi alors la police aurait agi de la sorte ?

  5   R.  Monsieur le Président, je regrette car je ne peux pas véritablement

  6   vous être très utile. Moi, je n'aurais pas agi dans la situation que vous

  7   décrivez. Mais la réponse à cette question ne pourra vous être apportée que

  8   par une personne qui s'occupe d'une force de police dans une zone bien

  9   précise.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de vos réponses.

 11   J'aimerais savoir, Madame Mahindaratne, si vous souhaitez poser d'autres

 12   questions.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, qu'en est-il ?

 15   M. MIKULICIC : [interprétation] Non, je n'ai pas de questions.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay.

 17   M. KAY : [interprétation] J'ai une ou deux questions à poser à la suite des

 18   questions que vous avez posées, que les Juges ont posées. Je pense que le

 19   mieux serait peut-être que je les pose après la pause.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Mais vous avez besoin de combien

 21   de temps, Maître ?

 22   M. KAY : [interprétation] J'ai besoin de moins de dix minutes.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'interroge. Alors, si c'est moins de

 24   dix minutes, peut-être que nous pourrions faire la pause plus tard, et

 25   ainsi M. Moric pourrait disposer.

 26   Je me tourne également vers les cabines d'interprètes.

 27   Pas de réaction. Donc je vous accorde cinq minutes supplémentaires, Maître.

 28   Poursuivez.

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  1   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Kay : 

  3   Q.  [interprétation] Monsieur Moric, j'aimerais juste vous demander une

  4   petite précision à propos du cimetière. Et une supposition a été avancée.

  5   Il a été dit qu'il ne pouvait pas y avoir de raison considérée comme

  6   raisonnable qui expliquerait pourquoi il fallait mettre un périmètre de

  7   sécurité autour du cimetière. Et vous-même, vous avez dit d'ailleurs : "Je

  8   n'en connais pas la raison." Vous avez fait référence à des mines, vous

  9   avez dit qu'il s'agissait peut-être d'un problème de sécurité, vous nous

 10   avez dit qu'il fallait peut-être poser la question aux policiers qui

 11   avaient participé à cette opération.

 12   Alors, j'aimerais maintenant vous présenter un scénario, un scénario

 13   d'ailleurs qui vous permettrait peut-être de comprendre les raisons, les

 14   raisons évoquées pour la sécurité.

 15   Alors, à l'époque du conflit, il y a conflit, il y a ce conflit qui

 16   oppose les Serbes et les Croates à l'époque, et j'aimerais savoir si

 17   pendant ce conflit il y a eu des exemples d'églises ou de sites religieux

 18   ou de monuments religieux qui correspondaient à la confession de l'autre

 19   groupe ethnique. Est-ce que donc ces monuments ou ces églises religieux

 20   étaient susceptibles d'être attaqués ou endommagés ?

 21   R.  Je m'excuse, je m'excuse, Maître, je n'avais pas compris que vous

 22   aviez terminé votre question. Oui, oui, bien sûr, bien sûr qu'il y a eu des

 23   cas d'attaques contre des églises, et malheureusement contre des cimetières

 24   également et lors d'obsèques également, lors de cérémonies d'enterrement.

 25   Mais toutefois, Maître, la Chambre de première instance m'avait posé

 26   cette question. Elle m'avait dit qu'il n'y avait pas de raison. C'est la

 27   raison pour laquelle j'avais indiqué qu'il serait plus judicieux de poser

 28   la question à la personne qui dirigeait la police à l'époque, dans le

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  1   secteur en question.

  2   Q.  Oui, je comprends tout à fait la réponse que vous avez apportée,

  3   puisqu'on vous a dit qu'il n'y avait pas de raison.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, Maître Kay, vous avez dit

  5   que cela a été suggéré.

  6   M. KAY : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas eu de suggestion qui a été

  8   faite et on n'a pas suggéré qu'il n'y avait pas de problème de sécurité en

  9   cas d'enterrement d'ailleurs. Cela n'a absolument pas été un élément

 10   imprécis dans ma question.

 11   Voilà. Maintenant que cela a été précisé, est-ce que vous avez une autre

 12   question à poser ?

 13   M. KAY : [interprétation] Ecoutez, je me contentais de lire le compte rendu

 14   d'audience, Monsieur le Président.

 15   Q.  Alors, j'aimerais vous poser -- ou revenir sur une ou deux questions de

 16   M. le Juge Kinis parce que je pense que vous avez répondu seulement

 17   partiellement à sa question, parce qu'il vous avait demandé quelque chose

 18   de précis.

 19   Il vous avait demandé si vous avez jamais reçu de la part du

 20   président du gouvernement des instructions verbales sur la façon dont la

 21   police devait coopérer avec M. Cermak.

 22   Vous avez répondu en disant que vous n'aviez jamais reçu

 23   d'instructions écrites. Soit. Mais est-ce que vous avez reçu des

 24   instructions verbales alors de la part du gouvernement ou du président ?

 25   Est-ce qu'elles vous ont été relayées oralement, ces instructions ?

 26   R.  Maître, non, je n'ai reçu ni d'instructions écrites ni d'instructions

 27   orales à propos d'une coopération éventuelle avec M. Cermak. Pour ce qui

 28   est de la sécurité interne, vous savez, ce n'était pas un protagoniste très

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  1   important en matière de sécurité dans la zone.

  2   Q.  Je vous remercie. Et puis autre chose, une autre question qui vous a

  3   été posée par M. le Juge Kinis. Et là encore, la question était à double

  4   volets puisqu'il vous a demandé si vous avez jamais fourni des instructions

  5   écrites ou orales aux administrations de la police pour qu'elles coopèrent

  6   avec M. Cermak, et pour que la police soit considérée comme redevable vis-

  7   à-vis de M. Cermak et qu'elle doive présenter des rapports à M. Cermak.

  8   Donc M. le Juge Kinis était intéressé par cela. Il voulait savoir si

  9   vous aviez donné des instructions écrites ou orales à ce sujet.

 10   R.  Maître, il n'y avait aucune raison précisée par la loi. Il n'y avait

 11   aucune raison qui m'aurait poussé à le faire. Il n'y avait pas de raison

 12   professionnelle non plus d'ailleurs. Alors, ça n'avait absolument rien à

 13   voir avec la police et leurs tâches.

 14   M. Cermak, ce n'était pas quelqu'un qui faisait partie de la police.

 15   Il n'était pas en mesure d'effectuer ces tâches, il n'avait pas de

 16   l'autorité pour le faire.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je pense que Me Kay vous a

 18   demandé si lorsque vous avez répondu à la question qui vous avait été posée

 19   à propos des instructions ou des consignes écrites, il voulait savoir

 20   également si vous avez donné des instructions orales. C'est cela en fait

 21   qu'il vous a posé.

 22   N'est-ce pas, Maître Kay ?

 23   M. KAY : [interprétation] Tout à fait, mais d'après la réponse du témoin,

 24   je comprends qu'il a répondu également à la question que j'avais posée.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non seulement vous n'avez pas donné

 26   d'instructions écrites, mais vous n'en avez pas non plus donné verbalement;

 27   c'est ça ? A ce sujet ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

Page 25953

  1   M. KAY : [interprétation] Voilà. Je n'ai plus de questions à poser,

  2   Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Kay.

  4   Monsieur Moric, vous êtes arrivé au terme de votre déposition. Vous avez

  5   passé plusieurs jours en notre compagnie. Je vous remercie d'être venu à La

  6   Haye. Je vous remercie d'avoir répondu à toutes les questions qui vous ont

  7   été posées par les parties et par les Juges. Je vous souhaite un bon retour

  8   chez vous.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais remercier

 10   les parties, vous-même, le personnel du Tribunal qui s'est occupé de moi.

 11   Je suis venu ici parce que j'étais obligé de venir. Je dois dire que je

 12   suis venu avec certains préjugés, mais je suis heureux de vous dire que je

 13   pars sans plus aucun préjugé, grâce à vous, Monsieur le Président, et grâce

 14   à la Chambre de première instance et la façon dont vous travaillez.

 15   Merci beaucoup.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 17   Nous allons lever l'audience et nous allons avoir notre pause de 25

 18   minutes, pause traditionnelle. Donc nous allons reprendre l'audience à 11

 19   heures 15.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 47.

 21   --- L'audience est reprise à 11 heures 23.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay.

 23   M. KAY : [interprétation] Je m'excuse. Je m'excuse, mais j'ai été informé

 24   par l'un des juristes de la Chambre que pour ce qui est des versements

 25   directs lors de mon contre-interrogatoire de M. Moric, j'avais demandé le

 26   versement direct de documents, documents qui portent sur l'année 1995 et

 27   sur Knin. Donc cela a été fait. Je l'ai montré aux parties d'ailleurs, et

 28   il n'y a pas eu de problème. Et ce que je suggère, c'est qu'en fait -- bon,

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  1   il s'agit de six documents qui ont été compilés en un tableau, et avec

  2   l'autorisation de la Chambre, nous pourrions le déposer maintenant avec, au

  3   lieu des cotes 2D, les cotes des pièces à conviction.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu. Nous prendrons une

  5   décision au moment où nous nous serons penchés sur ce document et nous

  6   verrons si les documents en question peuvent tout à fait être versés au

  7   dossier.

  8   M. KAY : [interprétation] Oui, bien entendu. Je n'ai pas d'objection, mais

  9   il n'y a pas eu d'objection.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, je le sais. Mais nous n'avons

 11   pas vu le tableau d'explication, et ce que nous avons reçu, c'est un

 12   tableau où il est dit : Voilà ce qui a été dit par telle partie, voilà ce

 13   qui a été dit par telle autre partie. Je ne vous dis pas que je suis

 14   sceptique, il n'y a pas de doute. Mais pour ce qui est du versement au

 15   dossier, nous ne pouvons pas véritablement le faire avant d'avoir vu de

 16   visu le tableau en question.

 17   M. KAY : [interprétation] Alors, est-ce qu'on pourrait les enregistrer aux

 18   fins d'identification ? Parce qu'en fait, nous voulons que soit établi le

 19   lien avec le témoin.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je regarde. Je regarde l'écran, je

 21   vois qu'il y a une liste de six documents, Monsieur le Greffier.

 22   Monsieur le Greffier, est-ce que vous auriez l'amabilité d'identifier

 23   les documents et de les enregistrer aux fins d'identification, ce qui fait

 24   qu'ainsi, nous statuerons à ce moment-là lorsque nous aurons les cotes.

 25   M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, le document

 27   2D00498 de la liste 65 ter se verra octroyer la cote D1877, enregistré aux

 28   fins d'identification.

Page 25955

  1   Le document 2D18-1197 se verra octroyer la cote D1878, enregistré aux fins

  2   d'identification.

  3   Le document de la liste 65 ter 2D00679 se verra octroyer la cote D1879,

  4   enregistré aux fins d'identification.

  5   Le document de la liste 65 ter 2D00298 se verra octroyer la cote D1880,

  6   enregistré aux fins d'identification.

  7   Le document de la liste 65 ter 2D0092 se verra octroyer la cote D1881,

  8   enregistré aux fins d'identification.

  9   Et le document de la liste 65 ter 2D00395 se verra octroyer la cote D1882,

 10   enregistré aux fins d'identification.

 11   Je vous remercie, Monsieur le Président.

 12   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie également, Monsieur le Greffier.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Et nous attendrons donc votre

 14   dépôt officiel.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre, mais j'allais

 16   justement demander à répéter la procédure utilisée par Me Kay pour ce qui

 17   est des documents versés directement dont j'ai parlé avec mon confrère du

 18   bureau du Procureur.

 19   Il s'agit du document 1D3035 jusqu'au document 1D3044, documents de

 20   la liste 65 ter. Et je demanderais que nous retenions la même procédure, à

 21   savoir les enregistrer aux fins d'identification. Il s'agit de dix

 22   écritures donc, et je souhaiterais demander leur enregistrement aux fins

 23   d'identification. Merci.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il s'agit -- Monsieur le Greffier,

 25   je pense que nous avons les -- est-ce qu'il s'agit bien de numéros de la

 26   liste 65 ter qui se suivent; c'est cela ?

 27   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que ce n'était pas le cas pour Me

Page 25956

  1   Kay. Il ne s'agissait pas de documents dont les numéros se suivaient en

  2   série.

  3   Monsieur le Greffier, les documents 1D3035 jusqu'au document 1D3044

  4   vont être enregistrés aux fins d'identification sous quelles cotes.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Alors il s'agit des cotes suivantes qui

  6   seront attribuées à ces documents, de la cote D1883 à la cote D1892, tous

  7   ces documents seront enregistrés aux fins d'identification.

  8   Je vous remercie.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Voilà, ce sont neufs cote qui

 10   viennent d'être octroyées. Est-ce qu'il s'agit de cotes qui avaient déjà

 11   été présentées directement ?

 12   M. KEHOE : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je viens juste

 13   d'obtenir la confirmation de mon confrère du bureau du Procureur.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors, vous pouvez y faire

 15   référence en utilisant ces cotes, et ce sont des documents qui sont

 16   enregistrés aux fins d'identification.

 17   Avant que nous ne fassions entrer le témoin suivant, Maître Mikulicic, lors

 18   des contre-interrogatoires récents, notre attention a été attirée sur le

 19   fait que la personne qui interroge le témoin, lorsqu'il s'agit d'une

 20   déclaration 92 ter dont on demandait le versement au dossier, était M.

 21   Djurica Franjo. Maintenant, nous allons avoir un nouveau témoin, nous

 22   voyons que c'est la même personne qui interroge l'un des témoins. Est-ce

 23   qu'il s'agit du même Djurica Franjo, chef de la police ?

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, oui, c'est exactement la même

 25   personne.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je vous dirais qu'une suggestion

 27   a été avancée -- enfin, c'est ainsi que la Chambre a compris ce qui avait

 28   été dit. La suggestion étant de savoir s'il était opportun, ou non

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  1   d'ailleurs, de demander à des personnes de prendre des déclarations -- je

  2   ne vous parle pas de personnes qui vous aident à faire une recherche, mais

  3   je parle de personnes qui se concentrent essentiellement sur la prise de

  4   déclarations. Et lorsque ces personnes ont pu jouer un rôle lors des

  5   événements de l'époque, la Chambre aimerais savoir ce qu'il en est et

  6   aimerait que les parties indiquent s'il y a des raisons qui expliquent cela

  7   ou si vous vous êtes quand même demandé si la personne en question pouvait

  8   être la personne idoine pour prendre la déclaration en question.

  9   Je dois dire que la question qui vous est posée par la Chambre émane plus

 10   ou moins du contre-interrogatoire. Et nous avons laissé libre cours à nos

 11   pensées sur la question. Nous nous sommes interrogés, mais la Chambre,

 12   quand même, aimerait entendre ce dont il est question à ce sujet.

 13   Maître Mikulicic.

 14   M. MIKULICIC : [interprétation] Nous pouvons tout à fait répondre si notre

 15   confrère du bureau du Procureur a une suggestion à faire à ce sujet. Et

 16   d'après leurs suggestions et d'après leurs remarques, nous répondrons.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, la Chambre va se demander si

 18   c'est la bonne approche à retenir en l'occurrence.

 19   Donc ce que vous nous suggérez, c'est de laisser l'Accusation nous

 20   donner son point de vue, et en fonction de leur réponse, vous nous donnerez

 21   une réponse.

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, puisque c'est eux qui ont soulevé la

 23   question.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Misetic s'était levé, il a demandé

 25   d'intervenir avant vous, Monsieur Waespi.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Oui, oui tout à fait.

 27   Je voulais intervenir sur quelque chose qui est assez semblable, donc je

 28   vais présenter quelque chose d'assez général à ce sujet.

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  1   Parce que je dirais qu'une situation assez semblable s'est posée avec

  2   le bureau du Procureur. Il y a un enquêteur important, un enquêteur

  3   principal qui répond au nom de M. Robertsson, qui a été actif entre

  4   septembre 1995 et 1998. M. Robertsson était un membre de l'ONURC à Zagreb

  5   avant, pendant et après l'opération Tempête. Il y était en sa capacité de

  6   personne chargée du renseignement. C'est ainsi que les Nations Unies

  7   appellent les personnes qui ont ce genre de rôle. Et puis le 1er septembre

  8   ou aux environs du 1er septembre, à savoir trois semaines après l'opération

  9   Tempête, il est devenu l'enquêteur principal du bureau du Procureur en

 10   l'espèce, alors qu'il arrivait tout droit de Zagreb pour assumer ce rôle au

 11   bureau du Procureur.

 12   La Chambre se rappellera du contre-interrogatoire du général Forand,

 13   pièce D339. Il s'agissait de la comparaison qui était établie entre une

 14   déclaration faite auprès de M. Robertsson en 1996, qui était très, très

 15   semblable au rapport préparé par l'armée canadienne par M. Forand. Et je

 16   dois dire que nous avions à l'époque soulevé les préoccupations que nous

 17   avions à propos de M. Forand. Et la même chose est valable pour M.

 18   Robertsson, du fait de son rôle préalable pour l'ONURC à Zagreb. Donc je

 19   pense qu'il faudrait, lorsque nous parlerons de M. Robertsson, il faudra

 20   peut-être se demander quelle est la fonction exacte d'un enquêteur qui a

 21   participé en quelque sorte aux événements.

 22   Je vous remercie.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je dois vous avouer que je n'ai

 24   pas tous les détails à ce sujet. En tout cas, je ne m'en souviens pas.

 25   J'aimerais savoir si M. Robertsson a pris des déclarations qui ont

 26   été versées au dossier conformément à l'article 92 ter ?

 27   M. MISETIC : [interprétation] Quasiment toutes les déclarations prises par

 28   le bureau du Procureur entre l'année 1995 et 1998 comportent la signature

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  1   de M. Robertsson. Et vous vous souviendrez - d'ailleurs je ne me souviens

  2   pas de quel témoin il s'agissait exactement - mais vous vous souviendrez

  3   peut-être qu'il y a eu un questionnaire qui a été préparé par M. Robertsson

  4   pendant l'automne de l'année 1995, qu'il a distribué à tout témoin

  5   potentiel en l'espèce. Donc oui, son nom figure sur de nombreuses

  6   déclarations qui ont été versées au dossier. Bien entendu, nous pourrions

  7   essayer de dresser une liste de ces déclarations. Mais la déclaration du

  8   général Forand est celle qui m'est venue à l'esprit immédiatement, et il

  9   s'agit de la comparaison qui avait été établie, et c'est la pièce D339.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   Monsieur Waespi.

 12   M. WAESPI : [interprétation] J'aimerais me pencher sur cette question

 13   puisqu'il a été question de M. Robertsson. Je vous dirais que je me

 14   souviens que M. Robertsson faisait partie de la liste des témoins de la

 15   Défense. Il n'a jamais fait partie de notre liste de témoins, d'ailleurs.

 16   Alors est-ce qu'il a été enquêteur qui prenait des déclarations à l'époque,

 17   il va falloir que je vérifie cela.

 18   Mais je me souviens avoir vu un mémorandum de M. Robertsson qui était

 19   adressé, il me semble, à Me Kehoe, au début de cette affaire à propos

 20   justement de cette question.

 21   Donc je peux tout à fait retrouver cela et vérifier.

 22   Pour ce qui est de M. Franjo, puisque je pense que Franjo est son nom

 23   de famille, et pour ce qui est également de M. Soljic, qui ont tous les

 24   deux joué un rôle, puisqu'ils ont pris des déclarations de témoins lors de

 25   l'opération Tempête, je pense qu'il est important d'indiquer lors du

 26   contre-interrogatoire qu'il faut absolument être transparent. Ces deux

 27   hommes ont interrogé un témoin qui effectivement avait joué un rôle, et ils

 28   ont rencontré le témoin. Mais étant donné qu'aucun autre membre de la

Page 25960

  1   Défense n'était présent lors des entrevues en question, cela figure sur la

  2   page de garde, je pense qu'il y a probablement eu un élément de fiabilité

  3   pour ce qui est des déclarations de témoin.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il me semble, Monsieur Waespi, que

  5   vous êtes déjà en train de nous présenter votre argumentaire. Mais d'après

  6   ce que j'ai entendu jusqu'à présent, apparemment, M. Waespi considère qu'il

  7   est peut-être pertinent de se demander si les personnes qui ont participé

  8   ou qui étaient présentes pendant les événements - et je le dis de façon

  9   très neutre - est-ce que ces personnes étaient seules pendant les entrevues

 10   en question ou est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui n'avaient joué

 11   aucun rôle ou qui n'avaient pas été présentes pendant les événements ?

 12   Alors, ça c'est une première question.

 13   Puis il y a autre chose qui a d'ailleurs peut-être sa pertinence à ce

 14   sujet. Il faudrait savoir dans quelle mesure les sujets abordés pendant les

 15   entrevues avaient quoi que ce soit à voir avec le rôle joué par la personne

 16   qui a pris la déposition en question. Donc, ça c'est une autre question.

 17   La Chambre n'a pas encore réfléchi à toutes ces questions et ne souhaite

 18   pas le faire d'ailleurs. Mais étant donné que cela a été soulevé de façon

 19   implicite pendant un contre-interrogatoire, la Chambre a estimé qu'il

 20   serait peut-être judicieux de donner la parole, dans un premier temps, aux

 21   parties pour qu'elles puissent en parler avant justement de réfléchir à la

 22   question.

 23   Et je vois maintenant que je dois choisir. Maître Misetic, oui.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Pour répondre à la suite de M. Waespi.

 25   Je dirais qu'effectivement M. Robertsson faisait partie de notre

 26   liste de témoins et nous avons voulu lui poser quelques questions à ce

 27   sujet, mais comme M. Waespi le sait pertinemment, nous n'avons pas pu

 28   prendre contact avec M. Robertsson. Et nous avons demandé à M. Waespi

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  1   d'obtenir les numéros de M. Robertsson, ce que le Procureur a refusé de

  2   faire sur demande de M. Robertsson. Mais je suis sûr que j'ai un courriel

  3   indiquant que M. Robertsson avait dit à l'Accusation qu'il ne voulait pas

  4   que nous prenions contact avec lui.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai dit une minute de cela à M. Waespi

  6   que j'avais l'impression qu'il commençait à nous présenter son

  7   argumentaire. Je lui ai dit de ne pas le faire à ce moment-là, et je vois

  8   toutefois qu'en réponse à cela, vous vous engouffrez dans la brèche, et je

  9   vous encouragerais à ne pas le faire.

 10   Nous pouvons nous pencher sur la question. Vous pourrez exprimer toutes les

 11   pensées à ce sujet et peut-être que vous pourrez également nous parler des

 12   circonstances factuelles, par exemple, si quelqu'un était présent et si

 13   cette personne a été recrutée par quelqu'un d'autre, est-ce que cette

 14   personne pourrait être protégée par des parties tierces ? Je ne sais pas.

 15   Vous pourrez présenter votre thèse comme vous le souhaiterez.

 16   M. MISETIC : [interprétation] C'est pour cela que je me suis levé. Je

 17   voulais vous dire que nous souhaitons soulever la question de M.

 18   Robertsson.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pourrez le faire comme cela

 20   vous semblera pertinent, mais je peux imaginer que cette invitation de la

 21   Chambre vous incite à vous exprimer sur la question.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Oui, tout à fait.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce que la Chambre souhaite obtenir

 24   avant tout, c'est une situation transparente. Nous ne voulons pas que l'on

 25   réfléchisse à la question. En fait, il y a quand même une attention

 26   implicite qui doit être prise en considération, et ce que je voulais vous

 27   dire, c'est qu'on ne peut pas dire que nous ne l'avons pas entendu, nous ne

 28   l'avons pas oublié.

Page 25962

  1   Maître Kuzmanovic.

  2   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Ecoutez, il faut que je réagisse. Parce

  3   que si nous parlons de transparence, justement l'Accusation a M. Solic sur

  4   sa liste de témoins et ils n'ont absolument pas le moindre élément de

  5   preuve indiquant que ce que nous avons fait n'était pas fait en bonne et

  6   due forme. S'ils ont ne serait-ce qu'un élément de preuve, ils l'auraient

  7   présenté de façon écrite d'ailleurs. Et je pense que lorsqu'on demande --

  8   ils nous parlent maintenant de la présence de M. Djurica sur la liste des

  9   témoins de la Défense, alors que M. Soljic fait partie de leur liste de

 10   témoins. Là, je pense que c'est tout à fait inapproprié comme situation.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, ce que je voulais éviter, c'est que

 12   nous entendions maintenant les thèses des participants. C'est pour cela que

 13   la Chambre a invité les parties à réfléchir à ce qu'ils pourraient dire. Et

 14   j'ai remarqué que manifestement c'est quelque chose à laquelle les deux

 15   parties pensaient, et je vois qu'il y a quand même un certain impact que je

 16   qualifierais, peut-être pas d'affectif, mais d'émotionnel. 

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre invite les parties à déposer

 19   des écritures tout à fait librement. Et s'il y a le moindre besoin pour une

 20   partie de répondre aux écritures d'une autre partie, la Chambre se penchera

 21   sur la question de savoir s'il est approprié ou non d'avoir un deuxième

 22   tour, en quelque sorte, des dépôts d'écritures.

 23   Alors, quels seraient les délais dans lesquels vous seriez en mesure

 24   les uns et les autres de déposer ces écritures ?

 25   Je vous invite à vous prononcer sur ce sujet. A la fin de cette

 26   semaine ? Ou aurez-vous besoin peut-être du week-end ?

 27   M. WAESPI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que je

 28   pourrais en finir d'ici à mardi prochain.

Page 25963

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mardi.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Je suppose que vous attendez des écritures,

  3   n'est-ce pas, et non pas seulement des demandes orales.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet, ce sont des écritures que je

  5   vous invite à déposer.

  6   Est-ce que les autres parties sont d'accord avec ce délai ? Je suis tout à

  7   fait conscient qu'il y a de nombreuses contraintes de temps et beaucoup de

  8   pression.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il faut peut-être

 10   que nous en discutions, parce que nous avons une audience importante

 11   mercredi pour laquelle nous devons nous préparer. Donc je pense que nous

 12   devrions être en mesure d'avoir fini pour mardi également.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'une des parties a dit d'ici à mardi,

 16   et je comprends que ça veut dire lundi soir au plus tard, alors que les

 17   autres parties incluent le mardi.

 18   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'autre partie

 19   avance que cela est, selon eux, inadéquat. Mais je ne sais pas ce que je

 20   suis censé répondre à cela. Si un enquêteur a commis quelque chose

 21   d'inadéquat, je ne vois vraiment pas comment je suis censé répondre à cela.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit, dans un premier temps,

 23   d'aborder la question de façon générale, et non pas de se pencher sur la

 24   caractère approprié ou inapproprié des agissements de quelqu'un, mais la

 25   question plus générale de savoir s'il est approprié pour quelqu'un de

 26   recueillir une déclaration concernant des événements auxquels il a lui-même

 27   pris part de près ou de loin. C'est ce qui intéresse pour le moment la

 28   Chambre. Contentez-vous, dans un premier temps, d'aborder la question sous

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  1   un angle général. C'est cela qui nous intéresse, et non pas de vous avancer

  2   sur le terrain qui consisterait à qualifier comme étant approprié ou

  3   inapproprié ce qu'a fait une personne particulière. Efforcez-vous d'éviter

  4   cela ou tout autre qualification de la même nature que vous pourriez être

  5   tenté d'avancer.

  6   Alors, il est clair pour les parties que nous avons des règles

  7   s'appliquant au conseil de la Défense. Si vos propres intérêts sont en jeu,

  8   à un moment donné, vous devez vous abstenir d'intervenir.

  9   C'est une règle en tout cas qui s'applique au conseil de la Défense,

 10   et c'est une règle qui peut faire l'objet d'une discussion très générale,

 11   en des termes très généraux. Donc il ne s'agit pas de dire que si j'ai un

 12   intérêt dans une certaine affaire, mon comportement ou mon implication

 13   serait inapproprié. Il s'agit plutôt de s'exprimer en des termes généraux,

 14   à un niveau général, quant aux risques en jeu dans une telle configuration,

 15   et ce qu'il conviendrait éventuellement d'éviter. C'est ce que la Chambre

 16   invite les parties à faire, et c'est sur cette base ensuite qu'il sera

 17   possible éventuellement de voir s'il y a lieu ou non de s'intéresser à des

 18   questions très spécifiques. Je pense que c'était la teneur de ma réponse à

 19   Me Misetic. S'il s'avère qu'il y a effectivement lieu de se pencher sur

 20   certaines situations bien particulières, la Chambre ne l'en empêchera

 21   évidemment pas. Vous n'en serez pas empêché.

 22   Est-ce bien clair ?

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la Défense Markac est-elle prête à

 25   appeler son témoin suivant à la barre ?

 26   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de mesures de protection dans ce cas

 28   ?

Page 25965

  1   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le témoin Drazen Vitez, n'est-ce

  3   pas ?

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  6   Madame l'Huissière, peut-on faire entrer le témoin dans le prétoire, s'il

  7   vous plaît ?

  8   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  9   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Vitez.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, les règles

 13   nous imposent de vous faire lire une déclaration solennelle.

 14   Monsieur le Témoin, veuillez lire le texte qui vous est remis.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 16   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   LE TÉMOIN : DRAZEN VITEZ [Assermenté]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 20   Veuillez vous asseoir, Monsieur Vitez.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, on m'a informé qu'il

 23   y a peut-être un problème avec votre micro. Alors, veuillez vous assurer

 24   que rien n'est omis dans la réception que nous avons de vos propos.

 25   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Très bien. Merci.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Vitez, c'est Me Kuzmanovic,

 27   conseil de la Défense pour M. Markac, qui va d'abord vous poser des

 28   questions.

Page 25966

  1   Allez-y.

  2   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

  3   Je vais changer de place juste pour éviter les problèmes que vous venez

  4   d'évoquer.

  5   Est-ce mieux ? Très bien.

  6   Alors, avant de commencer, j'ai un classeur qui a été préparé pour

  7   faciliter les choses au témoin. Peut-être Mme l'Huissière peut-elle le

  8   remettre au témoin. Merci.

  9   Interrogatoire principal par M. Kuzmanovic : 

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Vitez.

 11   R.  Bonjour.

 12   Q.  Pouvez-vous décliner votre identité ?

 13   R.  Je suis Drazen Vitez.

 14   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle est votre profession actuelle ?

 15   R.  Je travaille toujours au sein du ministère de l'Intérieur. Je suis

 16   adjoint du directeur en chef au sein de la direction de la police.

 17   Q.  Monsieur Vitez, nous avons des interprètes qui traduisent nos propos.

 18   Nous avons un sténotypiste qui les consigne. Donc je vais essayer de faire

 19   de mon mieux pour parler lentement afin que l'interprétation se passe bien

 20   et pour attendre également que votre réponse se termine avant de passer à

 21   la question suivante.

 22   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous avoir

 23   le document 3D00888 à l'écran, s'il vous plaît. C'est le document 3D888 de

 24   notre liste 65 ter.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, votre déclaration va bientôt s'afficher à l'écran.

 26   Vous rappelez-vous avoir donné une déclaration à l'équipe de la Défense de

 27   M. Markac, Monsieur Vitez ?

 28   R.  Oui. J'ai fourni une déclaration aux personnes ici citées. J'ai été

Page 25967

  1   appelé par MM. Anto Soljic et Djurica Franjo, qui se sont présentés comme

  2   étant membres de l'équipe de la Défense du général Markac, que je savais.

  3   Ils m'ont demandé si j'étais disposé à être témoin dans cette affaire. Je

  4   leur ai confirmé que c'était bien le cas, et ils m'ont ensuite demandé

  5   quand je serais disponible, et nous avons convenu une date.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Vitez, je note que vous avez

  7   une légère tendance à fournir des réponses qui vont au-delà de la question

  8   qui vous est posée. La seule chose qui vous a été demandée, c'était si vous

  9   vous souveniez avoir donné cette déclaration. Vous nous avez fourni

 10   beaucoup de détails. Alors, si jamais Me Kuzmanovic souhaite obtenir ce

 11   genre de détails de vous, il vous les demandera.

 12   Autrement, contentez-vous de répondre simplement par oui ou par non à

 13   une question comme celle qui vient de vous être posée.

 14   Veuillez poursuivre.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Monsieur le Greffier, pouvons-nous passer à la dernière page de ce

 17   document dans les deux versions, s'il vous plaît.

 18   Monsieur Vitez, vous voyez la dernière page de votre déclaration. Est-ce

 19   bien là votre signature ?

 20   R.  Oui, c'est ma signature.

 21   Q.  Il s'agit ici d'un entretien qui a été conduit le 12 mai 2009. Vous

 22   avez à cette même date signé cette déclaration; est-ce bien exact ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Avez-vous eu l'occasion de relire cette déclaration avant de venir dans

 25   ce prétoire aujourd'hui ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et en dehors d'une correction particulière sur laquelle nous allons

 28   nous pencher, est-ce que cette déclaration que nous avons sous les yeux

Page 25968

  1   reflète fidèlement les propos que vous avez tenus face aux membres de la

  2   Défense Markac ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  A l'époque où vous avez donné cette déclaration, est-ce que vous l'avez

  5   fournie conformément à la vérité et au meilleur de ce dont vous étiez

  6   capable de vous souvenir ?

  7   R.  Oui, je l'ai fournie sur la foi de mes souvenirs et j'ai dit la vérité.

  8   Q.  Si je vous posais aujourd'hui dans ce prétoire les mêmes questions que

  9   celles qui vous ont été posées avant que vous n'apposiez cette signature à

 10   la fin de cette déclaration, est-ce que vous fourniriez les mêmes réponses

 11   que celles que vous avez données aux questions qui vous ont été posées lors

 12   de cet entretien qui a donné lieu à cette déclaration, à la réserve près du

 13   changement que vous avez opéré pour le paragraphe 7 ?

 14   R.  Oui.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Très bien. Alors, je vais avancer et je

 16   souhaiterais que le document puisse être versé au dossier. Et je vais me

 17   pencher à part sur la déclaration additionnelle.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il faut les déposer

 19   séparément, ou c'est juste une question de corrections apportées ?

 20   M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est juste une correction apportée à la

 21   déclaration. Je voulais la présenter à part, et c'est pour cela que je

 22   voulais demander le versement et ensuite me pencher sur la correction.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais si c'est juste un changement,

 24   est-ce qu'il faut attribuer une cote différente ? Pourrions-nous nous

 25   pencher sur ces corrections, s'il s'agit d'un simple détail ?

 26   M. KUZMANOVIC : [interprétation] En effet, c'est juste un détail.

 27   Q.  Alors, penchons-nous sur le paragraphe numéro 7 de votre déclaration,

 28   Monsieur Vitez.

Page 25969

  1   C'est la dernière phrase de ce paragraphe, où il est dit que : "Le 9

  2   août 1995, nous avons opéré une passation de nos positions, que nous avons

  3   remises aux membres de la HV…"

  4   La correction porte sur la date. Il faudrait lire "le 8 août".

  5   Est-ce exact ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que vous hochez de la tête. Est-

  7   ce que vous pourriez donner une réponse verbale.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je voulais modifier cela parce qu'il

  9   s'agit d'une erreur. Mon unité a quitté Gracac le 8, dans la nuit, en fait,

 10   du 8 au 9. Ou plutôt, il ne s'agissait pas de la zone de Gracac, mais de la

 11   zone de Lapac.

 12   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

 13   Monsieur le Président, pouvons-nous verser ce document ?

 14   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection pour ce document, mais je

 15   relève simplement que j'ai probablement une version plus ancienne de la

 16   déclaration, notamment de la traduction en anglais. Il y a juste deux ou

 17   trois choses qui se présentent d'une façon différente, mais je suppose que

 18   la teneur de la déclaration elle-même n'a pas particulièrement changée.

 19   Donc, ce sur quoi je travaille, c'est la page 2D04-1872. Je voudrais juste

 20   m'assurer que j'ai une copie à jour pour mon contre-interrogatoire.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Nous avons fourni une traduction

 22   officielle, celle que nous avons reçue du CLSS, au bureau du Procureur en

 23   septembre. Et je puis vous dire qu'il n'y a pas de changements importants à

 24   cette déclaration depuis cette date.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La référence qu'a donnée M. Waespi, est-

 26   elle celle que nous avons à l'écran ou est-ce une autre version ?

 27   M. KUZMANOVIC : [interprétation] La version qui s'affiche est la version

 28   officielle, ce n'est pas celle qu'a M. Waespi.

Page 25970

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, je présume que vous avez

  2   chargé la dernière, la version la plus récente de la traduction, qui est la

  3   version officielle.

  4   Monsieur Waespi, pouvez-vous vérifier cela. S'il n'y a pas d'objection,

  5   Monsieur le Greffier.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, le

  7   document reçoit la cote D1883 [comme interprété].

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il est versé au dossier.

  9   Veuillez poursuivre.

 10   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je crois que

 11   c'est un bon moment pour donner lecture d'un résumé de la déclaration du

 12   témoin.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. Vous avez expliqué au témoin

 14   la finalité de l'exercice ?

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

 16   Pendant l'opération Tempête, M. Vitez était l'adjoint du commandant d'une

 17   unité de la police spéciale de la direction de la police de Varazdin. Peu

 18   avant l'opération Tempête, M. Vitez, ou plutôt, son unité, a reçu l'ordre

 19   de prendre des positions sur le mont Velebit. Au titre des préparatifs de

 20   l'opération offensive, lui-même et d'autres commandants d'unités ont

 21   participé à une réunion qui s'est tenue le 3 août à Stari Grade, au cours

 22   de laquelle ils se sont vus confier des tâches spécifiques dans le cadre de

 23   l'opération, et ont également reçu l'ordre de se conformer aux dispositions

 24   du droit international de la guerre ainsi qu'aux dispositions applicables

 25   aux traitement correct des personnes et des biens, des personnes civiles et

 26   de leurs propriétés.

 27   Le 4 août, lorsque l'opération Tempête a commencé, M. Vitez et son unité

 28   ont opéré une percée à travers les premières lignes dans la zone de Mali

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  1   Alan, dans les montagnes de Velebit, où ils ont eu à faire face à la

  2   résistance des forces de l'ARSK, résistance opiniâtre. Ils ont poursuivi

  3   leur avancée en direction de Gracac.

  4   Le 5 août, l'unité a atteint les prémisses de Gracac, où elle est restée

  5   près de Stikada jusqu'au 6 août, sans qu'aucun incident ne soit enregistré.

  6   Le 7 août, son unité a reçu l'ordre de continuer jusqu'à Bruvno, à

  7   partir d'où ils ont avancé en direction de Donji Lapac. Son unité n'est pas

  8   entrée en contact avec des forces de l'ARSK sur ce trajet de Bruvno à Donji

  9   Lapac. Son unité est restée à Donji Lapac et dans les environs jusqu'à

 10   l'après-midi, moment où l'armée croate est arrivée sur place.

 11   Le 8 août, son unité a reçu l'ordre d'avancer jusqu'à Gorni Vakuf

 12   [comme interprété], et ce même jour, son unité est retournée dans son

 13   cantonnement, dans sa base, à Varazdin en Croatie.

 14   C'est, en substance, la déclaration, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître. Veuillez

 16   poursuivre.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Alors, pourriez-vous donner quelques éléments à la Chambre,

 19   Monsieur le Témoin, concernant votre parcours, votre formation, notamment.

 20   R.  J'ai une maîtrise d'économie spécialisée en management, et avant

 21   cela, j'avais terminé la haute académie de la police. J'ai achevé mes

 22   études de police judiciaire en criminologie.

 23   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre ce que vous faisiez au sein des

 24   services de la police lorsque vous avez commencé à travailler, et jusqu'à

 25   l'opération Tempête.

 26   R.  Je suis arrivé au sein de la police en 1980. C'est alors que j'ai

 27   commencé un cours à l'école des officiers de police, que j'ai achevé en

 28   1984. J'ai travaillé au sein d'une patrouille. Avant le début de la guerre

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  1   en Croatie, j'ai demandé à être transféré sur le territoire de la direction

  2   de la police de Varazdin.

  3   Et peu de temps après, je suis devenu membre de l'unité spéciale de

  4   la police de la direction de la police de Varazdin. Je suis donc devenu

  5   policier des forces spéciales. Peu de temps après, je suis devenu chef de

  6   groupe, puis instructeur, formateur. Et après, en 1997, après les

  7   événements de la guerre, mon commandant, mon supérieur est parti à la

  8   retraite, et moi, j'ai repris l'unité à ma charge. J'ai pris la direction

  9   de l'unité. Cela n'a pas duré très longtemps parce que j'ai ensuite été

 10   transféré par le ministère en tant que chef de la police judiciaire de la

 11   direction de la police de Varazdin. J'y suis resté deux ans, et ensuite,

 12   j'ai été nommé directeur de la direction de la police de Varazdin, en 2000,

 13   fonction que j'ai occupée jusqu'en 2008. Car en 2008, le ministre m'a

 14   transféré au poste d'adjoint du directeur principal de la police au

 15   ministère de l'Intérieur. Et c'est le poste que j'occupe aujourd'hui

 16   encore.

 17   Q.  Monsieur Vitez, avant de nous pencher plus en détail sur les activités

 18   qui ont précédé l'opération Tempête et sur vos activités pendant cette

 19   dernière, pouvez-vous nous expliquer ce que recouvre votre fonction

 20   actuelle ? Vous en avez donné le titre à la Chambre, mais pourriez-vous

 21   expliquer ce que vous faites à ce poste ?

 22   R.  Le directeur principal de la police est à la tête de ce service, il a

 23   deux adjoints. Je suis l'un de ces deux adjoints, et je couvre trois lignes

 24   professionnelles, qui sont la police de base, la police des frontières, les

 25   services de police d'intervention, l'académie de police, ainsi que les

 26   services opérationnels et le centre de communication du ministère de

 27   l'Intérieur.

 28   Q.  Merci.

Page 25973

  1   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pouvons-nous afficher le document D540,

  2   s'il vous plaît.

  3   Q.  Je voudrais attirer votre attention, Monsieur le Témoin, sur un

  4   document qui est déjà une pièce à conviction. C'est un document qui est

  5   adressé au directeur de la direction de police de

  6   Varazdin, et daté du 22 juillet 1995.

  7   Alors, connaissez-vous déjà cet ordre, Monsieur le Témoin ? Il est signé

  8   par M. Markac.

  9   R.  Oui, je connais cet ordre.

 10   Q.  Il s'agit ici d'un ordre qui demande à la police spécial de Varazdin de

 11   se rendre au directeur de la direction de police de Zadar-Knin, ou plutôt

 12   de se faire connaître auprès de lui aux fins d'une coopération avec la

 13   police spéciale; est-ce exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Avez-vous fait partie de cette unité qui s'est rendue à Sepurine à la

 16   direction de la police de Zadar-Knin ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Alors, lorsque vous êtes arrivé dans la zone de Sepurine, que s'est-il

 19   passé du point de vue de votre unité, entre votre arrivée et cette réunion

 20   tenue à Stari Grad que nous avons déjà évoquée et sur laquelle je

 21   reviendrai ?

 22   R.  Lorsque nous sommes arrivés sur le territoire de la direction de la

 23   police de Zadar-Knin, nous sommes entrés en relation avec nos membres de la

 24   police spéciale qui nous ont transféré, nous tous, l'unité complète, c'est-

 25   à-dire 140 hommes, vers le camp militaire de Sepurine.

 26   Nous y avons été présents en compagnie de quelques autres unités. Et à

 27   l'occasion de la première réunion que nous avons eue avec le général

 28   Markac, on nous a informés qu'il y avait des indications que les forces

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  1   ennemies pourraient s'efforcer de couper l'axe de circulation s'étendant du

  2   pont de Maslenica, qui était le seul lien physique entre la Croatie du nord

  3   et la Croatie du sud, et jusqu'à Biograd. Donc, il y avait des indications

  4   indiquant qu'ils pourraient essayer de couper cet axe de communication. Il

  5   y avait là une ligne de démarcation le long de laquelle on estimait que

  6   l'ennemi pourrait bien se livrer à une tentative de percée afin de couper

  7   la Croatie du nord de la Croatie du sud.

  8   Nous avions là-bas nos observateurs, des équipes dotées d'armes

  9   antichars. Nous avions nos différents points de déploiement, et nous sommes

 10   restés pendant plusieurs jours jusqu'à ce que nous recevions l'information

 11   que le danger était maintenant passé. Nous nous sommes alors mis en route

 12   vers Stari Grad, où nous avons participé à ce briefing, à cette réunion,

 13   juste avant l'opération Tempête.

 14   Q.  Où étiez-vous stationné avant la réunion qui s'est tenue à Stari

 15   Grad ?

 16   R.  A Sepurine, à la base de Sepurine.

 17   Q.  Lorsque vous vous vous êtes rendus à Stari Grad - vous en parlez aux

 18   paragraphes 2 et 3 de votre déclaration - pouvez-vous nous expliquer ce qui

 19   s'est passé lorsque vous êtes arrivé à Stari Grad ?

 20   R.  Je suis parti à Stari Grad avec mon propre commandant pour participer à

 21   cette réunion convoquée par le général Markac, au cours de laquelle tous

 22   les commandants des unités spéciales devraient se trouver réunis. Nous y

 23   avons été informés des tâches concrètes qui allaient être les nôtres de

 24   façon imminente. Donc, on nous a donné les axes précis de nos

 25   interventions.

 26   On nous a précisé quels étaient les axes principaux d'attaque,

 27   quelles étaient les forces qui s'y trouvaient. Donc, il s'agissait de mon

 28   unité de la direction de la police de Varazdin. A notre droite se trouvait

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  1   une unité de la direction de la police de Split-Dalmatia, et tout à fait à

  2   droite de nous se trouvait une unité de la police spéciale de la direction

  3   de police de Zadar-Knin.

  4   Donc, on nous a montré tous ces axes sur une carte, suite à quoi le général

  5   Markac s'est adressé à nous en nous informant des données qui avaient été

  6   collectées par nos groupes opérationnels de renseignements pour nous

  7   indiquer ce à quoi il convenait de nous attendre le long de ces axes,

  8   quelles étaient les forces dont disposait l'ennemi, les armes dont il

  9   disposait également, quelle était la situation dans laquelle il était. Et

 10   l'accent a tout particulièrement été mis lors de cette réunion, comme dans

 11   toutes les réunions que nous avons eues avec le général préalablement à nos

 12   opérations, comme toujours, sur le comportement des hommes de la police

 13   spéciale pour ce qui était des prisonniers de guerre et de la population

 14   civile; donc le comportement qu'il convenait d'adopter. Alors, il y avait

 15   encore un cas particulier dans ce cas précis, puisque le territoire sur

 16   lequel nous étions supposés entrer était un territoire sur lequel se

 17   trouvaient également des représentants des Nations Unies, ou plutôt les

 18   forces de la FORPRONU. Elles y étaient déployées et on a particulièrement

 19   attiré notre attention sur le fait que nous n'étions pas du tout censés

 20   porter atteinte à leur base. Il ne fallait pas ouvrir le feu sur eux. Nous

 21   devions plutôt prendre contact avec eux pour leur expliquer qui nous

 22   étions. Nous devions leur dire que nous étions l'armée croate, et que nous

 23   étions disposés à leur fournir toute l'assistance dont ils pouvaient avoir

 24   besoin, et qu'ils devaient être tout à fait certains que nous ne

 25   représentions aucun risque ni danger pour eux.

 26   Ensuite, nous sommes revenus chacun vers notre unité pendant la nuit du 3

 27   au 4. Nous étions au niveau de la mer. Nous n'étions pas en hauteur, et

 28   pendant l'après-midi, pendant la nuit, c'est là où notre unité se trouvait.

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  1   Avant 19 ou 20 heures de la soirée, mon unité de la police spéciale a

  2   réussi à atteindre une cote de 1 400 mètres au-dessus du niveau de la mer,

  3   et c'est là que nous devions nous préparer aux opérations offensives. Nous

  4   avons encore eu une autre réunion avec l'unité au complet. On nous a

  5   informés de ce qu'on attendait de nous et de la façon dont il convenait de

  6   s'engager dans les opérations de combat, également du comportement qui

  7   était attendu de nous. Tout cela nous a été communiqué par le général

  8   Markac, qui nous a informés du comportement à adopter concernant la

  9   population civile, leurs biens, la FORPRONU, et ainsi de suite.

 10   Après cela donc, nous avons été à bord d'un véhicule en attendant le début

 11   de l'opération.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Vitez, c'est seulement en ce

 13   moment que la cabine française en a fini avec l'interprétation. Donc, je

 14   vous prie de ralentir un peu votre débit.

 15   Et j'ai vu que Me Misetic est debout. Donc, il s'est levé il y a

 16   quelques instants.

 17   Oui, Maître Misetic.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   Pour ce qui est du compte rendu à la page 53, la ligne 17, j'ai une

 20   remarque à faire. Le témoin a mentionné le nom d'une ville dans la partie

 21   au sud de la Croatie, et je crois que --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut d'abord qu'on retrouve cette

 23   partie du compte rendu.

 24   Vous avez parlé du fait qu'il a fallu couper la voie de communication

 25   partant du pont à Maslenica. Il s'agissait du seul lien ou voie de

 26   communication entre la partie nord et le sud de Croatie. Vous avez

 27   mentionné un toponyme ou un endroit.

 28   Pouvez-vous répéter cela.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit à partir du pont à Malsenica qui

  2   reliait la partie septentrionale et méridionale de la Croatie jusqu'à

  3   Biograd-sur-mer. Il s'agissait du pont flottant à Maslenica.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, c'est Biograd avec une lettre "I"

  5   ?

  6   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est ça, Monsieur Waespi.

  8   M. WAESPI : [interprétation] Juste une suggestion, parce qu'il ne m'est pas

  9   clair, je n'ai pas compris quelle était la fonction de ce témoin. Je sais

 10   qu'il était adjoint du commandant de la police spéciale à Varazdin, mais

 11   dans le document D540, on voit que le destinataire est le commandant.

 12   Est-ce que M. Vitez était le commandant de cette unité ? Est-ce qu'il

 13   est toujours adjoint du commandant ? J'aimerais savoir cela.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, je vais tirer cela au clair,

 16   Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En même temps, je pense que ce

 18   matin on a eu un record, c'est-à-dire sept pages pour une réponse dans le

 19   compte rendu. Les questions peuvent donc provoquer de très longues

 20   réponses. S'il vous plaît, concentrez-vous à ce que vous voudriez savoir

 21   précisément.

 22   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, bien sûr, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne veux pas qu'on pose des questions

 24   directrices au témoin. J'aimerais justement qu'on lui explique des choses,

 25   et laissez-le expliquer des choses en utilisant ses propres mots. Donc,

 26   essayez de vous concentrer à des choses qui sont les plus pertinentes.

 27   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et encore, Monsieur Vitez, ralentissez

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  1   votre débit, sinon, si vous continuez à parler à cette vitesse, certains

  2   mots peuvent être omis dans le compte rendu.

  3   Continuez, Maître Kuzmanovic.

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Vitez, vous avez entendu le commentaire de mon éminent

  6   collègue, M. Waespi pour ce qui est de D540.

  7   D'abord, est-ce que vous avez vu le document D540 à l'époque où vous

  8   aviez cette fonction, la version croate du document D540 ?

  9   R.  Oui, j'ai vu cette version du document. C'est le commandant de mon

 10   unité qui m'a montré cette version.

 11   Q.  A l'époque où cet ordre est arrivé à Varazdin, quelle était votre

 12   fonction ?

 13   R.  J'étais l'adjoint du commandant de l'unité de la police spéciale.

 14   Q.  Merci.

 15   Monsieur Vitez, je vais essayer de vous poser des questions plus courtes

 16   pour que vous puissiez donner des réponses plus courtes.

 17   Donc, nous nous sommes arrêtés à la réunion qui a eu lieu à Stari

 18   Grad. Ensuite, vous avez escaladé le mont de Velebit. Pouvez-vous nous

 19   expliquer --

 20   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Mais avant, j'aimerais qu'on affiche

 21   P1237.

 22   Q.  Il s'agit de la page de couverture du document, Monsieur Vitez, et vous

 23   l'avez signé, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher la

 26   deuxième page du même document.

 27   Q.  Vous nous avez déjà dit, vous avez décrit au deuxième paragraphe où se

 28   trouvaient les positions de votre unité, le 3 août, à Velebit.

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  1   Ensuite, il y a un autre paragraphe où il est dit :

  2   "Nous avons reçu quelques messages et je vais en mentionner seulement

  3   deux."

  4   Il est question de comportements lors de l'opération conformément à

  5   la convention internationale.

  6   Et le deuxième message parle des renforts que vous avez reçus. Vous avez

  7   mentionné deux de ces messages.

  8   Est-ce que vous vous souvenez ce qui a été dit dans le deuxième

  9   message ?

 10   R.  Dans ce deuxième message, il était question des combattants qui étaient

 11   arrivés sur ce terrain.

 12   Q.  "Au cours de la nuit, nous avons reçu plusieurs messages et nous allons

 13   mentionner seulement deux de ces messages."

 14   Est-ce qu'il y avait d'autres messages pager ?

 15   R.  Je ne me souviens pas d'autres messages sur pager. Je sais que ces deux

 16   messages sont arrivés pendant la nuit. Le premier message concernait le

 17   respect des dispositions du droit international de la guerre ainsi que le

 18   comportement envers des civils et pour ce qui est des biens. Et le deuxième

 19   message est arrivé une heure avant nos activités, disant qu'il y avait 120

 20   soldats ennemis qui étaient arrivés sur ce territoire, en renfort.

 21   Q.  Au compte rendu, à la page 59, ligne 4, on voit que le deuxième est

 22   arrivé. Pouvez-vous nous dire quand ce message est-il arrivé, avant le

 23   début de vos activités ?

 24   R.  Après minuit. Il parlait des comportements. Et le deuxième qui parlait

 25   des renforts des forces ennemies est arrivé une heure à peu près avant le

 26   début de nos activités, vers 4 heures du matin.

 27   Q.  Merci, Monsieur Vitez. Au compte rendu, il a été consigné une année

 28   avant le début de nos activités. C'est pour cela que j'ai voulu tirer ce

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  1   point au clair.

  2   Monsieur Vitez, vous avez parlé du fait que vous receviez des

  3   renseignements. Pouvez-vous me dire de qui la police spéciale recevait des

  4   renseignements, des rapports de renseignements concernant l'ennemi, les

  5   forces ennemies, et cetera.

  6   R.  Ce que nous recevions, nous le recevions la plupart du temps des

  7   membres du secteur de contrôle interne dont la tâche était de rassembler

  8   des renseignements opérationnels concernant l'ennemi qui nous attendait,

  9   des forces ennemies, de leurs armes dont ils disposaient, de leurs points

 10   faibles, des positions qui étaient les plus faibles sur la ligne de front

 11   et, bien sûr, qu'ils coordonnaient avec les services militaires ainsi

 12   qu'avec les services qui étaient en charge de la protection de l'ordre

 13   constitutionnel.

 14   Q.  Monsieur Vitez, vu votre expérience en tant que chef de

 15   l'administration de la police à Varazdin, et puisque vous avez longuement

 16   travaillé en tant que membre des unités de la police spéciale, pouvez-vous

 17   dire à la Chambre ce que représentait ce secteur de contrôle interne pour

 18   ce qui est de la discipline ?

 19   R.  Vous pensez au contrôle interne au sein du secteur de la police

 20   spéciale ou au contrôle interne, ou bureau du contrôle interne près du

 21   cabinet du ministre ?

 22   Q.  Pourquoi ne nous expliquez-vous pas quel était le rôle du contrôle

 23   interne, et ensuite le rôle de cet autre bureau du contrôle interne.

 24   R.  Je vais essayer d'être bref.

 25   Le bureau qui était en charge du contrôle interne au sein du cabinet

 26   du ministre avait pour tâche de suivre les activités de tous les employés

 27   du ministère de l'Intérieur. Il s'agissait du personnel ou des personnes

 28   autorisées à exécuter certaines activités ainsi que des personnes qui n'ont

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  1   pas été autorisées à exécuter toutes les activités de la police. Donc, ils

  2   ont suivi les activités, le travail de tous les employés du ministère de

  3   l'Intérieur. Ils se penchaient sur des plaintes déposées par des citoyens

  4   anonymes concernant les abus du personnel, des ministères ou des chefs de

  5   secteur, et ils analysaient tous les cas pour arriver à des conclusions

  6   selon lesquelles il s'agissait de la responsabilité disciplinaire ou de la

  7   responsabilité criminelle.

  8   Le contrôle interne dans le secteur de --

  9   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît. Les

 10   interprètes n'ont pas réussi à entendre une partie de votre réponse.

 11   Monsieur Vitez, pourriez-vous vous rapprocher du microphone.

 12   A la page 60, la ligne 13 du compte rendu, vous avez dit qu'ils ont

 13   agi sur la base des plaintes anonymes reçues de citoyens, il pouvait s'agir

 14   d'abus de pouvoir fait par du personnel du ministère, ou…" Pouvez-vous

 15   réitérer cette partie de votre réponse ?

 16   R.  Ou par des chefs de secteurs ou du département du ministère de

 17   l'Intérieur.

 18   Q.  Merci. Vous étiez en train de nous expliquer le rôle du contrôle

 19   interne dans le secteur de la police spéciale. Continuez, s'il vous plaît.

 20   R.  Le rôle du contrôle interne du secteur de la police spéciale, pour

 21   autant que je sache, était le rôle qui consistait à préparer des

 22   renseignements opérationnels avant toute action. Et non seulement avant

 23   toute action, mais partout où nous tenions des positions, ils étaient

 24   devant nous, comme c'était le cas au mont Velebit, où ces personnes, ces

 25   employés, procédaient à un rassemblement des renseignements concernant

 26   l'armée ennemie, concernant leurs effectifs, le nombre de leurs effectifs,

 27   concernant leur équipement, leurs moyens techniques. Ils ont préparé toutes

 28   les cartes topographiques avant toute action, mais non seulement ils

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  1   procédaient à des préparations en temps de guerre, avant toute action en

  2   temps de guerre, mais aussi on a les situations où la police spéciale a été

  3   appelée par l'administration de la police à participer à des préparations

  4   concernant l'arrestation de certaines groupes criminels, ou des individus

  5   auteurs de crimes qui faisaient de la contrebande de stupéfiants, qui

  6   faisaient le trafic des êtres humains et des armes. Donc eux, ils

  7   rassemblaient des renseignements pour ce qui est des auteurs de ces

  8   infractions, pour dire qu'il s'agissait de personnes dangereuses, armées,

  9   pour prévoir si ces personnes pouvaient présenter une résistance lors de

 10   leur arrestation, pour que la police spéciale puisse se préparer de façon

 11   adéquate, se munir de l'équipement adéquat pour éviter des pertes.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, je regarde l'heure,

 13   et je pense que…

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'ai encore une question à ce sujet et

 15   après, on pourrait faire la pause.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Vitez, nous allons faire la pause dans quelques instants, mais

 19   avant, j'aimerais qu'on en finisse avec ce témoin.

 20   Vous nous avez décrit le rôle de ces deux types de contrôle interne, vous

 21   nous avez décrit le mécanisme, vous avez décrit comment cela fonctionnait.

 22   Pouvez-vous dire à la Chambre quel était le rôle de contrôle interne de la

 23   police spéciale, si ce contrôle a joué un rôle quelconque pour ce qui est

 24   des procédures disciplinaires, des enquêtes menées pour ce qui est des

 25   infractions à la discipline dans le cadre de la police spéciale ?

 26   R.  Le contrôle interne n'a rien eu à voir avec cela. Pour ce qui est de la

 27   discipline des unités, c'était toujours le commandant de l'unité qui en

 28   était responsable. 

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  1   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pense qu'il est venu le moment propice

  2   à faire la pause.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Kuzmanovic, je pense que

  4   vous avez dit que vous auriez besoin d'un ou deux volets d'audience. Est-ce

  5   qu'on peut supposer que votre interrogatoire principal --

  6   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pense que j'aurai besoin de moins de

  7   deux volets d'audience, jusqu'à la fin de l'audience aujourd'hui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Essayez de faire ainsi.

  9   Et nous allons faire maintenant la pause.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.

 11   --- L'audience est reprise à 12 heures 55.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, poursuivez. Mais

 13   j'aimerais informer les parties que la Chambre souhaiterait recevoir les

 14   arguments dont nous avons parlé un peu plus tôt au plus tard à midi mardi,

 15   ce qui nous permettra de les lire mardi après-midi.

 16   Poursuivez.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   Q.  Monsieur Vitez, nous nous sommes interrompus au moment où vous parliez

 19   de Mali Alan, que vous décrivez au paragraphe 4 de votre déclaration.

 20   Alors, dans le document P1237, qui est toujours affiché à l'écran, vous

 21   parlez de votre tâche essentielle qui consistait à délivrer ou à libérer la

 22   route entre Mali Alan et Sveti Rok. Est-ce que vous pourriez décrire à la

 23   Chambre de première instance le type d'opérations de combat auxquelles vous

 24   avez participé, et fondamentalement, en fait, ce qui s'est passé pendant le

 25   premier jour de combat, mais j'aimerais vraiment que vous vous concentriez

 26   sur le premier jour de combat, et ensuite j'aurai d'autres questions à vous

 27   poser.

 28   R.  Le premier jour, lorsque nous avons reçu l'ordre suivant lequel il

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  1   fallait que nous passions à l'attaque, le groupe opérationnel de

  2   reconnaissance ou chargé de la reconnaissance, qui, comme d'habitude, était

  3   à l'avant de l'unité avec six éclaireurs ainsi que son commandant et son

  4   moniteur, ainsi que deux spécialistes des explosifs, ont eu accès à la

  5   zone. On nettoyait la zone en question de toutes mines et de mines

  6   antipersonnel d'ailleurs également, ce qui fait que -- enfin, cela

  7   permettait au reste de l'unité d'arriver dans ce même secteur sans aucun

  8   problème.

  9   Alors, vers 7 heures du matin, le premier engagement, le premier

 10   combat, a eu lieu dans la zone de Vrcina. Donc, l'ennemi nous a attaqués

 11   avec des tirs d'infanterie, suivi de tirs de mitrailleuses. Notre unité se

 12   trouvait donc juste au bas de cette colline, et en fait, eux, ils nous

 13   dominaient parce qu'ils se trouvaient tout en haut de la colline. Ils

 14   étaient dans des casemates, des casemates qui étaient fabriqués avec des

 15   bûches ou des troncs d'arbres, comme nous avons pu le constater par la

 16   suite. Donc, c'était des troncs d'arbres sur lequel ils avaient empilé des

 17   pierres.

 18   Alors, notre unité de reconnaissance a demandé un soutien

 19   d'artillerie. Il s'agissait des éclaireurs qui avaient vu l'ennemi, les

 20   éclaireurs qui avaient vu l'ennemi qui avaient vu où ils se trouvaient ont

 21   guidé nos tirs, et ce, pour pouvoir avoir autant de frappes précises que

 22   possible. Etant donné que nous nous trouvions à une distance de 200 ou 300

 23   mètres, à savoir c'était la distance entre nous et l'ennemi, nous voulions

 24   nous assurer que nos propres tirs d'artillerie ne deviennent pas des tirs

 25   contre nous-mêmes.

 26   L'ennemi a ouvert le feu et a commencé par des tirs d'artillerie, mais je

 27   veux dire que cela ne s'est pas soldé par des victimes parmi nos rangs.

 28   Toutefois, l'unité qui se trouvait juste à côté de nous, l'unité adjacente,

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  1   elle a eu des victimes.

  2   Q.  Avant que vous ne poursuiviez, Monsieur Vitez, au bas de la pièce qui

  3   est affichée à l'écran, la pièce P1237, vous dites :

  4   "L'unité s'est pratiquement battu pour obtenir ou pour gagner ou capturer

  5   le moindre rocher, ou tous les rochers qui se trouvaient au niveau du col

  6   de Mali Alan."

  7   Alors, est-ce que vous pourriez nous décrire le type de terrain sur lequel

  8   vous vous trouviez ?

  9   R.  C'est un terrain très déchiqueté en fait, très, très, accidenté, avec

 10   des rochers. Ce n'était pas véritablement un terrain où l'on pouvait passer

 11   très facilement. Nous, nous étions dans un espace qui était dégagé, qui

 12   était très ouvert, ce qui fait qu'il nous était très difficile d'atteindre

 13   les positions ennemies.

 14   Deux de nos policiers des forces spéciales ont été fait prisonniers. Il y

 15   en avait un qui avait reçu une balle au niveau de la jambe inférieure.

 16   Donc, il y avait le trou par lequel était ressortie la balle, et ça,

 17   c'était Mario Sestak, et l'autre, il avait été blessé, il avait été blessé

 18   au niveau des bras et du visage. Ça, c'était Goran Balon [phon]. Lui, il

 19   avait été légèrement blessé.

 20   Donc, je dirais qu'il y avait deux types de risque. Si un obus ne vous

 21   tuait pas, les fragments de rochers le faisaient.

 22   Donc, il aurait été très difficile d'avancer, parce que nous devions

 23   quitter cet abri rocheux et il fallait nous diriger vers cette zone

 24   ouverte.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, vous avez posé une

 26   question à propos du terrain. Maintenant, nous avons moult détails avec les

 27   entrées et les sorties des balles qui ont blessé certains soldats. Je ne

 28   pense que ce n'était pas visiblement ce que vous souhaitez obtenir comme

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  1   renseignement.

  2   Poursuivez.

  3   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

  4   Q.  Monsieur Vitez, à la page 64, ligne 16, vous avez dit que deux de vos

  5   policiers spéciaux ont été fait prisonniers, c'est ce qu'on a entendu. Mais

  6   vous vouliez dire qu'ils avaient été blessés plutôt, non ?

  7   R.  Oui, oui, ils ont été blessés.

  8   Q.  Monsieur Vitez, à la page suivante du document P1237, donc page

  9   suivante, je vous prie. Après le fait d'avoir capturé, après la capture du

 10   col de Mali Alan, il y a eu une attaque aérienne contre vos positions. Est-

 11   ce que vous pourriez nous la décrire cette attaque, je vous prie ?

 12   R.  Alors pour ce qui est de l'avion, écoutez, je vous dirais que je ne me

 13   souviens pas de grand-chose. Ce que je sais, c'est qu'un avion de la force

 14   aérienne croate avait pilonné la position le matin. Je ne sais pas, la

 15   personne qui a rédigé le rapport a commis une erreur, parce que je ne pense

 16   pas que nos forces aient essuyé une attaque aérienne. En tout cas, je ne

 17   m'en souviens pas.

 18   Q.  Bien. Monsieur Vitez, alors vous poursuivez ensuite, et vous parlez de

 19   Gracac le matin. C'est là que vous vous rendez. Et puis je remarque qu'il y

 20   a ce BPP. C'est un village; c'est cela ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Waespi.

 22   M. WAESPI : [interprétation] Une petite précision.

 23   Donc, Me Kuzmanovic dit au témoin "dans votre rapport", et le témoin a dit

 24   : La personne qui a rédigé le rapport a fait une erreur. Alors, il faudrait

 25   peut-être demander qui est l'auteur du rapport. Je sais qu'il a signé la

 26   page de garde, mais je n'ai toujours pas compris qui avait rédigé le

 27   rapport.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez obtenir une

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  1   précision, Maître Kuzmanovic.

  2   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait.

  3   Q.  Monsieur, est-ce que vous connaissez la teneur du document P1237, ce

  4   rapport qui accompagnait la lettre que vous avez signée ?

  5   R.  Oui, oui, je le connais. Je le connais. J'ai signé le mémorandum, étant

  6   donné qu'à l'époque j'étais chef de l'administration de la police de

  7   Varazdin. Donc, je devais envoyer le mémorandum en question, et le rapport

  8   a été écrit par le commandant de mon unité de la police spéciale.

  9   Q.  Pour ce qui est du rapport, vous connaissez les questions qui sont

 10   décrites dans ce rapport, n'est-ce pas, vous les connaissez du fait de

 11   votre participation à l'opération Tempête, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, bien sûr.

 13   Q.  Est-ce que nous pourrions, je vous prie, revenir sur cette partie du

 14   rapport où vous indiquez que vous entrez dans les faubourgs de Gracac, et

 15   puis il est question donc de BPP.

 16   Est-ce que vous pourriez indiquer à la Chambre ce que signifie ce

 17   BPP.

 18   R.  BPP, en fait cela signifie poste de contrôle de combat. Voilà, ce sont

 19   les initiales, et c'est ce qui a été fait par la police spéciale ou plutôt

 20   cela a été monté par la police spéciale pour qu'ils se protègent d'attaques

 21   éventuelles.

 22   Q.  Et nous avons entendu des témoignages en l'espèce qui faisaient état de

 23   postes de contrôle qui se trouvaient sur la route où se trouvaient deux

 24   factions, la police civile ou militaire. Est-ce que vous pourriez décrire à

 25   la Chambre si la police spéciale avait été placées de faction sur ces

 26   postes de contrôle, puisque là il s'agissait en fait de postes de contrôle

 27   relatifs ou permettant de superviser la circulation routière ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Lorsque vous êtes arrivé dans la zone de Gracac, vous étiez près de

  2   Stikada, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui. Stikada, en fait c'était le nom de toute cette zone, et le nom de

  4   la localité c'était Loncari.

  5   Q.  Alors, avant d'entrer dans les détails à propos de Gracac justement,

  6   j'aimerais vous poser une question puisque vous avez fait référence au

  7   groupe opérationnel de reconnaissance.

  8   Est-ce que vous pourriez nous décrire ce groupe, je vous prie, ainsi

  9   que leurs fonctions ou ainsi que sa fonction ?

 10   R.  Chaque unité de police disposait de son groupe opérationnel de

 11   reconnaissance, et ce groupe faisait de la reconnaissance justement dans le

 12   contexte des actions offensives de la police spéciale. Ce qui fait que

 13   chaque membre du groupe opérationnel de reconnaissance avait reçu un

 14   entraînement conforme à ce qu'il devait faire et leur but était de compiler

 15   le plus grand nombre de renseignements et d'informations à propos de

 16   l'ennemi, donc positions de l'ennemi, forces de l'ennemi, matériel et

 17   équipement de l'ennemi, et cetera, et cetera.

 18   Q.  Dans ces groupes, est-ce qu'il y avait des personnes qui s'occupaient

 19   de guider les tirs d'artillerie dans ces groupes ?

 20   R.  Oui, bien sûr. Il y avait des éclaireurs qui faisaient partie du groupe

 21   qui dirigeaient les tirs d'artillerie justement. Il y avait également des

 22   spécialistes des explosifs qui dégageaient les mines.

 23   Q.  Alors, nous allons maintenant passer à Gracac. Vous, vous êtes passé

 24   par Gracac alors que vous étiez en chemin vers Bruvno; c'est cela ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous étiez présent lorsque M. le ministère Jarnjak est venu

 27   à Gracac ?

 28   R.  Oui. Oui, j'étais présent. J'y étais présent avec mon commandant

Page 25989

  1   d'ailleurs.

  2   Q.  Lorsque vous êtes allé à Bruvno, pourquoi est-ce que votre unité a reçu

  3   l'ordre d'aller à Bruvno ?

  4   R.  La raison de notre séjour à Bruvno, c'est parce qu'ils envisageaient

  5   une contre-attaque de la part de l'armée serbe. Et on nous a donné l'ordre

  6   d'y aller, de nous déployer dans ce secteur pour contrecarrer leur plan

  7   d'attaque.

  8   Q.  Lorsque vous êtes passé par Gracac, qu'avez-vous pu y observer ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Waespi.

 10   M. WAESPI : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait avoir une période. Parce

 11   que nous étions à Bruvno, c'était le 8 août. Maintenant nous repartons au 5

 12   août, parce que c'est le 5 août qu'ils sont entrés dans Gracac pour la

 13   première fois, donc qu'en est-il ?

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Non, le 5, c'était la première journée où

 15   il était à Mali Alan. Le 6 -- mais en fait, je vais demander au témoin de

 16   nous le dire.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc, Monsieur, j'ai fait référence à votre déclaration, vous l'avez

 20   devant vous.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est question du deuxième jour

 22   lorsqu'il est question de Gracac.

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui.

 24   Q.  Le deuxième jour, lorsque vous êtes arrivé à Gracac, au paragraphe 4,

 25   vous voyez ce qui est écrit, vous dites que vous êtes arrivé à Gracac. Puis

 26   ensuite le 6, vous vous êtes préparé aux activités. Le 7 août, vous êtes

 27   allé à Bruvno.

 28   Alors, vous êtes passé par Gracac en partant de Stikada pour aller à

Page 25990

  1   Bruvno, est-ce que vous avez pu ou qu'avez-vous pu observer ou constater à

  2   Gracac, et je pense aux dégâts que vous auriez pu constater ?

  3   R.  Mais je me souviens qu'il y avait des dégâts. J'ai vu plusieurs

  4   immeubles qui avaient été détruits. Mais pour autant que je m'en souvienne,

  5   ils avaient été détruits bien longtemps avant, puisqu'il y avait de la

  6   végétation qui repoussait sur ces ruines, et je ne me souviens pas d'autres

  7   dégâts.

  8   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à Bruvno, à Bruvno le 7, qu'elle a été votre

  9   tâche une fois que vous êtes arrivé à Bruvno ?

 10   R.  Lorsque nous sommes arrivés à Bruvno, une tâche nous a été confiée, et

 11   avec les unités de Primorsko Gorinska, avec l'Unité antiterroriste de

 12   Lucko, et l'Unité de Gospic, nous étions censés passer par Bruvno et Mazin

 13   et nous rendre jusqu'à Donji Lapac.

 14   Q.  Bien. Vous avez dit un peu plus tôt que vous étiez allé à Bruvno pour

 15   essayer de prévenir une contre-attaque. Lorsque vous êtes arrivé à Bruvno,

 16   est-ce que cette contre-attaque a eu lieu ?

 17   R.  Non. Non, non, il n'y avait personne là-bas. Et il n'y a pas eu de

 18   contre-attaque.

 19   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à Mazin, est-ce que vous avez pu voir s'il y

 20   avait des gens dans un premier temps à Mazin, est-ce qu'il y a eu une

 21   résistance qui vous a été opposée à Mazin ?

 22   R.  Non, il n'y a pas eu de résistance à Mazin. J'ai vu devant des maisons

 23   quelques personnes âgées, hommes et femmes âgées, qui se trouvaient devant

 24   leurs maisons et à qui nos policiers ont expliqué qu'ils devaient y rester

 25   et que quelqu'un viendrait pour les récupérer, certainement des policiers

 26   de la police de base, et nous, nous avons donc continué à nous déplacer en

 27   vue de nous acquitter de nos tâches.

 28   Q.  Le même jour, vous êtes arrivé à Donji Lapac, n'est-ce pas ?

Page 25991

  1   R.  Oui. Le même jour, nous sommes arrivés à Donji Lapac.

  2   Q.  Nous avons entendu le témoignage d'un témoin qui se déplaçait le long

  3   de la route goudronnée menant à Donji Lapac. Votre unité n'a pas pris cette

  4   route, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non. Nous avons pris la direction au-dessus de Mazin, une fois montés

  6   dans la forêt nous avons emprunté une route qui n'a pas été goudronnée, une

  7   sorte de sentier battu.

  8   Q.  Pouvez-vous expliquer à la Chambre comment vous êtes arrivé à cette

  9   zone de Donji Lapac en partant de Bruvno ? Quels moyens de transport avez-

 10   vous utilisé ?

 11   R.  Pendant notre avance, nous nous sommes déplacés à pied, nous avons

 12   marché. Et il y avait un véhicule de blindés de combat qui se trouvait

 13   également dans notre groupe et c'est comme cela que nous sommes arrivés aux

 14   abords de Lapac, près des premières maisons de Donji Lapac, où nous avons

 15   été exposés aux tirs de canon, aux tirs d'artillerie. Bien sûr, nous ne

 16   savions pas s'il s'agissait des tirs des nôtres ou des leurs, au début, et

 17   nous n'avons pas demandé d'appui d'artillerie du tout.

 18   Mais nous avons eu un problème de communication avec l'état-major de

 19   notre police, parce que nous nous trouvions entre deux sommets de montagne,

 20   et les communications ne passaient pas.

 21   Q.  Pendant combien de temps cette attaque d'artillerie a-t-elle duré, qui

 22   a été dirigée contre vous ?

 23   R.  Une demi-heure à peu près.

 24   Q.  Après la fin de cette attaque d'artillerie, vous avez continué à

 25   marcher vers Donji Lapac, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous avez décrit, paragraphe 7 de votre déclaration, ce qui s'est passé

 28   lorsque vous êtes arrivé à Donji Lapac.

Page 25992

  1   Dites à la Chambre ce qui s'est passé au moment où vous avez

  2   rencontré les membres de la FORPRONU à Donji Lapac ? Et soyez bref.

  3   R.  Une fois arrivé à Donji Lapac, le général Markac a rejoint nos

  4   commandants. Et lui, il a essayé d'abord d'entrer ensemble avec nous avec

  5   leur camp. Pourtant, ils sont apparus le long de la ligne où se trouvaient

  6   leurs positions, à l'intérieur de leurs casemates ou bunkers, parce qu'ils

  7   ne savaient pas qui nous étions.

  8   Lorsque nous nous sommes présentés à eux, en disant que nous étions membres

  9   des forces croates, l'un de leurs officiers a transmis cette information à

 10   tout le monde qui se trouvait dans cette base. Tous les soldats des Nations

 11   Unies sont sortis de ces bunkers. Ils étaient joyeux. Ils ont commencé à

 12   s'embrasser, et c'est comme cela que nous sommes entrés tous ensemble dans

 13   l'un des bâtiments dans cette base pour prendre une tasse de thé.

 14   Q.  Lorsque vous êtes entrés à la base des Nations Unies à Donji Lapac,

 15   dites-nous ce que vous avez pu remarquer pour ce qui est de la ville même;

 16   est-ce qu'il y a eu des dommages causés à des bâtiments ?

 17   R.  Deux ou trois bâtiments au centre-ville ont été en flammes et presque

 18   complètement incendiés.

 19   Q.  Pendant combien de temps le général Markac est-il resté avec vous à

 20   Donji Lapac ?

 21   R.  Le général Markac est resté avec nous dans la base. Le général Markac

 22   leur a expliqué que nous étions membres des forces croates, que l'opération

 23   était en cours et qu'il y aurait d'autres activités de nos membres dans la

 24   zone où se trouvent les frontières avec la Bosnie-Herzégovine. Il leur a

 25   expliqué qu'ils étaient en sécurité et que s'il y avait des problèmes

 26   quelconques, ils pouvaient s'adresser à nous. Après quoi, le général

 27   Markac, il est parti de cette zone parce que déjà un groupe de la police

 28   spéciale était prêt pour partir de Boricevac vers la frontière avec la

Page 25993

  1   Bosnie-Herzégovine.

  2   Q.  Monsieur Vitez, vous êtes resté à Donji Lapac ou aux environs de Donji

  3   Lapac dans la soirée, ensemble avec votre unité, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pouvez-vous dire à la Chambre de première instance s'il y a eu des

  6   membres de la police spéciale qui auraient été impliqués à des incendies

  7   provoqués à Donji Lapac ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Le lendemain, votre unité est partie dans la direction de Boricevac-

 10   Kulen-Vakuf. Que s'est-il passé là-bas ?

 11   R.  Notre unité y est arrivée. Nous n'avons pas mené l'attaque. Nous étions

 12   une force de réserve pour ce qui est des forces qui étaient déjà parties

 13   vers la frontière avec la Bosnie-Herzégovine.

 14   Pendant toute la journée, nous attendions le moment où nous allions

 15   participer à l'action. Pourtant cela ne s'est pas passé.

 16   Q.  Finalement, vous avez reçu l'ordre de rebrousser chemin, de retourner à

 17   Varazdin ?

 18   R.  Oui. La réunion avec M. Sacic, chef du département de la police

 19   spéciale a eu lieu. Lors de cette réunion, les unités qui se trouvaient

 20   dans la zone depuis le premier jour des activités de combat dans cette zone

 21   ont pu retourner chez elles.

 22   Q.  Votre unité est rentrée à Varazdin. Pendant votre retour à Varazdin,

 23   êtes-vous passé par Gracac ?

 24   R.  Non, par Udbina.

 25   Q.  Après l'opération Tempête, votre unité a-t-elle pris part à des

 26   opérations du ratissage du terrain. Je pense à l'unité de la police

 27   spéciale de Varazdin ?

 28   R.  Non, nous n'avons pas pris part à cette opération.

Page 25994

  1   Q.  J'aimerais maintenant qu'on affiche le document 2D00282.

  2   Monsieur Vitez, c'est le numéro 65 ter. Excusez-moi.

  3   Le document qui va être affiché sur l'écran dans quelques instants

  4   est le document qui a été envoyé de l'administration de la police de

  5   Varazdin. Connaissez-vous M. Ivan Zitnjak ?

  6   R.  Oui, je connais M. Ivan Zitnjak.

  7   Q.  La date de ce document est le 6 août 1995. Monsieur Vitez, il est

  8   évident que vous n'étiez pas à Varazdin à cette date. Mais est-ce que vous

  9   connaissez le contenu de cette lettre, et pouvez-vous nous dire quel était

 10   l'objectif de cette lettre ?

 11   R.  Pour ce qui est du contenu de cette lettre, on peut voir qu'il est

 12   écrit que l'administration de la police de Varazdin doit envoyer des

 13   renforts à Zadar, ce qui a été tout à fait normal, après l'opération

 14   Tempête.

 15   A savoir que les administrations de la police qui n'ont pas été

 16   directement touchées par les activités de guerre, ont assisté les

 17   administrations de la police, en fournissant du personnel pour ce qui est

 18   de la protection civile, la plupart du temps. Et ici, on voit qu'ils ont

 19   demandé des techniciens de la police judiciaire qui devaient se rendre sur

 20   les lieux de crime pour procéder à des enquêtes sur les lieux de crime.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que ce

 22   document soit versé au dossier, et qu'une cote lui soit accordée.

 23   M. WAESPI : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document sera versé au dossier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera D1894.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est versé au dossier.

 27   Continuez.

 28   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'ai voulu qu'on tire un point au clair

Page 25995

  1   concernant une question que je vous ai déjà posée.

  2   A la page 71, ligne 24, la question que je vous ai posée était comme suit :

  3   "Pouvez-vous dire à la Chambre de façon non ambiguë s'il y avait des

  4   membres de la police spéciale qui auraient été impliqués à des incendies à

  5   Donji Lapac ?"

  6   Votre réponse était : "Non."

  7   Est-ce que cela veut dire que, non, ils n'ont pas été impliqués à des

  8   incendies à Donji Lapac ?

  9   R.  Oui. Cela veut dire qu'ils n'ont pas été impliqués dans des incendies à

 10   Donji Lapac.

 11   Q.  Merci. Une dernière question.

 12   Monsieur Vitez, puisque vous avez travaillé avec le général Markac

 13   pendant des années dans la police spéciale, pouvez-vous nous dire qui était

 14   le général Markac, de votre point de vue, en tant que personne. Pouvez-vous

 15   parler de son caractère ?

 16   R.  Oui. Puisque je connais le général Markac depuis l'année 1987 ou 1988,

 17   où il était moniteur ou enseignant, éducateur, pour l'éducation physique et

 18   l'autodéfense, je sais qu'il était quelqu'un qui était persévérant, et rien

 19   ne lui était impossible. En tant que général et en tant que chef, ou

 20   plutôt, directeur, il a été très apprécié, non seulement dans la police,

 21   mais aussi ailleurs.

 22   Q.  Merci, Monsieur Vitez.

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser à M.

 24   Vitez.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kuzmanovic.

 26   Est-ce qu'il y aura d'autres contre-interrogatoires du témoin ?

 27   M. MISETIC : [interprétation] Non.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous, Maître Kay ?

Page 25996

  1   M. KAY : [interprétation] Non.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de vous donner la parole, Monsieur

  3   Waespi, pour procéder au contre-interrogatoire, j'aimerais obtenir une

  4   clarification du témoin sur un sujet.

  5   Monsieur Vitez, vous avez dit au début que lorsque vous avez dû percer les

  6   premières lignes de front, vous avez demandé l'appui d'artillerie. Qui vous

  7   a fourni cet appui ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] L'appui d'artillerie a été fourni par nos

  9   effectifs de la police spéciale.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que votre propre unité

 11   d'artillerie a été rattachée à la police spéciale ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Cette unité d'artillerie fournissait de

 13   l'appui à toutes les unités, et il s'agissait d'une unité indépendante.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'était une unité d'artillerie

 15   pourtant. Elle était composée d'hommes qui appartenaient à quelle entité ?

 16   A la police spéciale ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ils fournissaient un soutien en

 19   artillerie, d'après vous, à tous. Que doit-on comprendre par ce "tous" ?

 20   C'est-à-dire pas uniquement à votre unité de la police spéciale, mais

 21   également à d'autres unités de la police spéciales, ou bien avez-vous voulu

 22   dire qu'ils soutenaient également des unités qui n'étaient pas des unités

 23   de la police spéciale ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ne fournissaient un soutien d'artillerie

 25   qu'à la police spéciale, par uniquement à mon unité, mais également à

 26   d'autres unités. Cela dépendait de l'axe sur lequel ils se trouvaient et de

 27   l'unité qui leur avait adressé une demande de soutien.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que la police

Page 25997

  1   spéciale, pendant ce mouvement sur le mont Velebit et à Donji Lapac, a eu

  2   recours à un soutien en artillerie ? Est-ce qu'elle s'est reposé sur le

  3   soutien en artillerie d'un autre groupe qui se serait trouvé en dehors des

  4   effectifs de la police spéciale ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce que j'en sais, pour ma propre unité et

  6   l'axe sur lequel je me suis trouvé, la réponse est certainement non. Alors,

  7   est-ce que par ailleurs, il a pu y avoir une aide de quelqu'un d'autre

  8   ailleurs, je l'ignore.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Mais vous nous avez dit qu'à

 10   votre arrivée à Donji Lapac, il y avait des tirs d'artillerie, mais vous ne

 11   saviez pas si c'étaient des tirs amicaux ou hostiles. Et vous avez rajouté

 12   que vous n'aviez pas demandé de soutien en artillerie à ce moment-là.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet. Mais lorsque nous sommes arrivés à

 14   l'entrée de ce hameau, nous avons été la cible de tirs d'artillerie. Nous

 15   avons été contraints de nous arrêter, d'attendre, et nous sommes entrés en

 16   communication radio afin d'essayer de déterminer qui était en train de

 17   tirer.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'était à Donji Lapac ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous avez dit sur l'axe sur

 21   lequel vous vous trouviez que vous n'aviez demandé aucun soutien en

 22   artillerie ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Nous n'avons eu aucun contact avec

 24   l'ennemi. Nous ne l'avons trouvé nulle part, et nous étions en territoire

 25   couvert de forêts. C'était une région karstique et il n'y avait pas de

 26   besoin du tout de recourir à un soutien en artillerie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et la même chose s'appliquerait

 28   également aux différentes localités, villages et villes que vous avez

Page 25998

  1   traversés ? Vous avez dit être arrivé à Stikada et qu'il n'y avait besoin

  2   alors de demander un soutien en artillerie. C'est ce que vous voulez dire ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon unité, sur l'axe sur lequel elle est

  4   intervenue après Mali Alan, n'a plus demandé aucun soutien en artillerie

  5   jusqu'à la fin de l'opération, y compris Donji Lapac.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cela comprend également Gracac,

  7   n'est-ce pas ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, évidemment.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous connaissance des conséquences

 10   éventuelles des tirs d'artillerie à Gracac au cours des premiers jours du

 11   mois d'août ? Vous nous avez déjà dit avoir vu des bâtiments endommagés,

 12   couverts de végétation, mais avez-vous connaissance d'impacts de tirs

 13   d'artillerie à Gracac pendant les jours où vous avez été présent dans la

 14   zone ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je n'en ai pas vu, ni n'ai été témoin de

 16   tels tirs d'artillerie.

 17   Lorsque je suis entré à Gracac, je n'ai vu nulle part d'impacts de

 18   tirs d'artillerie.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et c'est votre unité qui a libéré la

 20   zone de Gracac, ou bien y a-t-il eu également des unités qui n'étaient pas

 21   des unités de la police spéciale qui ont participé à cette libération en

 22   avançant vers Bruvno ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai constaté, pendant toute la durée de

 24   cela, la présence de personne d'autre que les hommes de la force spéciale

 25   de la police, ni à Bruvno, ni à Gracac. Ce n'est qu'à Donji Lapac que j'ai

 26   vu pour la première fois des membres de la HV.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous nous dites - excusez-moi, je

 28   vais juste vérifier une chose.

Page 25999

  1   Vous avez dit précédemment que votre unité n'était pas revenue à

  2   Gracac, qu'elle était repartie après l'achèvement de votre mission de

  3   combat. J'essaie de retrouver ce passage.

  4   Vous pourriez répéter ce que vous avez dit à ce moment-là, s'il vous plaît.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque nous avons achevé notre mission, notre

  6   unité a été renvoyée sur le territoire de la direction de la police de

  7   Varazdin.

  8   L'opération suivante à laquelle nous avons participé a été de servir

  9   d'effectifs de réserve dans l'opération de ratissage du terrain à Petrova

 10   Gora.

 11   Ensuite, l'unité s'est rendue sur le territoire du comitat de Dubrovnik et

 12   Neretva, où nous devions tenir les positions faisant face au Monténégro. A

 13   peine étions-nous arrivés sur ce territoire quelque part au mois d'octobre.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous nous avez dit que votre unité

 15   était repartie non pas en traversant Gracac, mais Udbina. Mais qui a choisi

 16   l'itinéraire de retour ? Avez-vous la moindre indication quant à ce qui a

 17   pu présider au choix de cet itinéraire passant par Udbina ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le commandant de l'unité qui a choisi

 19   l'itinéraire de retour. Quant au choix de passer par Udbina, c'était pour

 20   une raison purement pratique, parce que cela nous a permis de raccourcir le

 21   trajet de presque une centaine de kilomètres.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci pour ces réponses.

 23   Monsieur Waespi, si vous avez des questions, nous avons encore quelques

 24   minutes. Vous pouvez commencer.

 25   M. WAESPI : [interprétation] Oui, je suis prêt à commencer.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous allez

 27   maintenant être contre-interrogé par le représentant de l'Accusation, M.

 28   Waespi.

Page 26000

  1   Veuillez procéder, Monsieur le Procureur.

  2   M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Contre-interrogatoire par M. Waespi : 

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  5   Si j'ai bien compris, vous étiez l'adjoint du commandant de cette unité de

  6   la police spéciale de Varazdin. Vous vous êtes référé à ce commandant

  7   plusieurs fois, mais quel était le nom du commandant de cette unité de la

  8   police spéciale à Varazdin ?

  9   R.  Monsieur le Procureur, le commandant de l'unité spéciale de la police à

 10   Varazdin était M. Ivica Mindek.

 11   Q.  Pourriez-vous épeler pour nous, s'il vous plaît, son nom de famille ?

 12   R.  M-i-n-d-e-k, Mindek.

 13   Q.  Merci. Pendant combien de temps a-t-il exercé cette fonction de

 14   commandement de l'unité de la police spéciale à

 15   Varazdin ?

 16   R.  Il a été, donc Ivica Mindek, commandant à partir de 1993 environ et

 17   jusqu'en 1997.

 18   Q.  Merci, Monsieur Vitez. Alors, je présume que c'est alors M. Mindek qui

 19   était l'auteur de ce rapport que vous avez lu en partie et qui concernait

 20   les activités de cette unité de Varazdin.

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci. A présent, je voudrais vous demander ce qu'était exactement

 23   votre fonction ? Est-ce que vous agissez en qualité d'adjoint, c'est-à-dire

 24   de substitut de votre commandant lorsqu'il était absent ? Est-ce que vous

 25   alliez à des réunions lorsque M. Mindek ne pouvait pas s'y rendre ? Est-ce

 26   que vous pourriez expliquer un peu plus en détail le rapport entre votre

 27   commandant et vous, en votre qualité d'adjoint de ce commandant, pendant

 28   l'opération

Page 26001

  1   Tempête ?

  2   R.  Notre unité avait deux adjoints du commandant, et j'étais l'un d'eux.

  3   L'autre, c'était M. Horinec. Mes obligations en tant qu'adjoint du

  4   commandant étaient de travailler avec les instructeurs, de planifier et de

  5   concevoir les activités pour l'unité dans son ensemble, de mettre en œuvre

  6   le plan d'instruction des hommes, ainsi que les activités tactiques et

  7   d'autres activités dans lesquelles nous étions impliquées. L'autre adjoint

  8   avait lui aussi affaire à certaines de ces tâches. Cependant, il était plus

  9   spécifiquement chargé aussi de l'effectif de réserve.

 10   Q.  Et votre rôle particulier pendant l'opération Tempête, quel était-il ?

 11   Je suppose que vous n'aviez pas alors de contacts avec les instructeurs,

 12   mais est-ce que vous aviez un rôle de commandement ou de consultation

 13   particulier ? Est-ce que vous pourriez éclairer ma lanterne à ce sujet.

 14   R.  Dans cette opération, notre groupe opérationnel de renseignement

 15   intervenait toujours à l'avant de l'unité. Derrière elle, avançait le

 16   commandant avec ses deux assistants afin de pouvoir contrôler l'évolution

 17   de la situation et de pouvoir également conduire l'unité dans une opération

 18   offensive. A cet égard, c'était la même chose que dans les autres

 19   opérations.

 20   Q.  Et quand vous parlez des assistants, c'étaient donc vous-même et votre

 21   collègue, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Donc vous suiviez, en fait, votre commandant pendant l'opération

 24   Tempête; c'est cela ?

 25   R.  Nous ne nous contentions pas de le suivre. Nous étions toujours

 26   présents aux côtés de l'unité dans son ensemble, aux côtés des hommes qui

 27   participaient en première ligne aux combats, qui perçaient les lignes de

 28   front. Nous nous considérions comme endossant la plus grande responsabilité

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  1   au sein de l'unité et nous ne nous permettions jamais d'arriver après nos

  2   hommes lorsqu'ils opéraient une percée ou lorsqu'ils se lançaient dans une

  3   attaque.

  4   Q.  Sur la base des documents, je comprends que l'unité comptait entre 120

  5   et 140 policiers des forces spéciales, je parle de votre unité qui est

  6   venue de Varazdin. Est-ce bien le cas ?

  7   R.  Oui. Il s'agissait d'environ 100 policiers d'active, et il y avait

  8   également des policiers de réserve, une cinquantaine d'entre eux, et outre

  9   cela, il y en a eu d'autres à nos côtés qui ont été mobilisés.

 10   Q.  Merci.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic.

 12   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Il y a peut-être une erreur dans la

 13   question qui suggère que l'unité serait venue de Varazdin à Knin --

 14   M. WAESPI : [interprétation] En effet, elle est venue de Varazdin sur le

 15   territoire de la direction de la police de Zadar-Knin. C'est à cette

 16   première date du 22 juillet 1995.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Oui, c'était en se préparant

 18   à gravir la région des monts Velebit.

 19   Alors, une question pour finir, Monsieur Vitez. Varazdin, c'est au

 20   nord de Zagreb ou…

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Varazdin est l'une des villes les

 22   plus septentrionales de Croatie. A notre gauche, se trouve la République de

 23   Slovénie, et à droite, la Hongrie.

 24   M. WAESPI : [interprétation] C'est une belle ville, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est à prendre en considération

 26   peut-être pour après la retraite.

 27   Nous allons lever l'audience pour aujourd'hui. Monsieur Vitez, nous vous

 28   attendons demain, non pas demain matin, mais demain après-midi, puisque

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  1   nous levons l'audience pour reprendre nos débats demain --

  2   Avant cela, il faut que je vous fournisse quelques instructions

  3   spécifiques. Vous ne devez vous entretenir avec personne au sujet de votre

  4   déposition, qu'il s'agisse de celle que vous avez donnée aujourd'hui ou de

  5   celle que vous vous apprêtez à donner demain.

  6   Est-ce suffisamment clair ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'audience est levée et nos débats

  9   reprendront demain, 10 décembre, à 14 heures 15.

 10   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vient de me confirmer que je ne me

 12   suis pas trompé.

 13   En fait, puisque nous reprendrons donc demain, 10 décembre, à 14

 14   heures 15, nos débats dans l'après-midi, dans la salle d'audience numéro

 15   III.

 16   --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le jeudi 10 décembre

 17   2009, à 14 heures 15.

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