Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 4 mars 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est absent]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes au

  6   prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, voulez-vous citer l'affaire ?

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il s'agit

  9   de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les présentations, je vous prie, en

 11   commençant par le Procureur.

 12   Mme BIERSAY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je me

 13   présente, Mme Biersay au nom du Procureur, et à mes côtés, commis aux

 14   affaires Mme Indah Susanti, et notre stagiaire Kay Hong Leung. Et je suis

 15   désolé, cette colonne vient entre nous, et je ne saurais vous voir, donc.

 16   C'est un peu difficile, bien sûr.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] C'est là le prix que l'on paie  quand on a

 18   un grand prétoire. Donc, bonjour.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, pour la Défense.

 20   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je me

 21   présente pour la Défense. Maître Zivanovic, M. Gosnell et notre commis aux

 22   affaires.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell, on me dit qu'il y a

 24   eu un problème. 

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Oui. Bonjour, Monsieur le Président.

 26   Samedi, c'est-à-dire avant-hier, nous avons reçu un courrier électronique

 27   avec une note de récolement, ce qui est ordinaire. Ce qu'il l'est  moins,

 28   c'est que nous avions une longue liste de rectifications quant à la


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  1   déclaration du témoin, réalisée par le témoin lui-même et envoyée au

  2   Procureur le 24 janvier 2013, c'est-à-dire il y a plus d'un mois. Et en

  3   particulier, il se trouve une nouvelle rencontre entre le témoin et des

  4   membres de ce qu'il estime être le SBWS le 20 avril 1992, qui est cité dans

  5   les documents.

  6   Nous en avons communication et il se trouvait sur la liste du

  7   Procureur. Ça, c'est certain. Ce que nous n'avions pas toutefois avant

  8   samedi, c'était le renseignement que ce témoin allait l'aborder, et encore

  9   moins qu'il allait ajouter une observation assez négative concernant cette

 10   rencontre. Donc, ceci est une nouveauté. C'est ce que nous affirmons. Le

 11   courriel était communicable à la Défense au titre de l'article 66(A)(ii).

 12   Nous ne l'avons pas obtenu. Donc, il s'agit là d'une enfreinte à la

 13   communication.

 14   Quant au recours que l'on pourrait adopter, c'est là la question,

 15   ceci nous met dans une position très difficile. Je ne suis pas sûr que ce

 16   serait une situation idoine pour parler du retrait, ou de ne pas permettre

 17   le versement de ces documents, mais je n'ai pas eu la possibilité d'en

 18   parler avec mon client, et il peut ne pas en être informé. Mais n'ayant pas

 19   eu la possibilité de soulever la question, je présume que le recours que je

 20   demanderais, c'est que si je ne me sers pas de l'intégralité de la chose

 21   pour le contre-interrogatoire qui ne semble pas probable aujourd'hui, nous

 22   allons retenir le témoin jusqu'à demain matin, et j'aurai la possibilité

 23   donc de consulter M. Hadzic, et de lui poser toute question supplémentaire.

 24   Merci, Monsieur le Président.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] Je suis d'accord avec le récapitulatif de M.

 26   Gosnell. En revanche, ce sur quoi je ne saurais m'accorder, c'est

 27   l'évaluation de cette rencontre qui est décrite dans une pièce qui a été

 28   versée. Le courriel, en fait, nous avons envoyé des documents au témoin en


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  1   préalable, car il y avait nombreux de pièces possibles à son égard. Après

  2   les avoir consultés, il a transmis ce courriel pour ajouts à débattre. Ceci

  3   aurait dû être communiqué, j'entends bien. Même si j'en conviens, les

  4   informations qui se trouvent dans le courriel sont dans le droit-fil des

  5   documents communiqués auparavant qui étaient identifiés, où le témoin était

  6   cité comme présent lors de cette rencontre. Donc, je n'ai pas d'objection

  7   quant au témoin qui soit retenu si Me Gosnell estime que ceci est approprié

  8   à cet égard.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Très bien, nous procéderons

 10   ainsi.

 11   Autre chose ? Bien. Faisons entrer le témoin.

 12   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, M. Hadzic n'est pas

 15   là aujourd'hui.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, il sera absent et nous avons déposé la

 17   requête.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien, merci.

 19   Bonjour, Monsieur le Témoin. Merci d'être venu à La Haye pour épauler la

 20   Chambre. Pourriez-vous énoncer votre prénom, votre nom de famille, votre

 21   date de naissance et votre nationalité.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je me nomme James Lubin, L-u-b-i-n. Date

 23   de naissance : 26 mars 1936, et je suis ressortissant britannique.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Lubin, vous allez prononcer

 25   la déclaration solennelle par laquelle les témoins s'engagent à déclarer la

 26   vérité. Je dois souligner, à votre effet, que vous vous exposez à un

 27   éventuel faux témoignage si vous présentez des éléments qui ne sont ni

 28   exacts ni authentiques au Tribunal. Je vous prie de prononcer la

 


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  1   déclaration solennelle.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  3   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   LE TÉMOIN : JAMES LUBIN [Assermenté]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Assoyez-vous je vous prie.

  7   Madame Biersay, le témoin est à vous.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Interrogatoire principal par Mme Biersay : 

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Lubin. Si j'ai bien compris, vous

 11   m'entendez ?

 12   R.  Oui, je vous entends très bien.

 13   Q.  M'entendez-vous de ce micro également ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Etes-vous confortablement installé ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Monsieur Lubin, pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre le poste

 18   qui était le vôtre de mars environ à juin 1992 ?

 19   R.  Oui, à cette époque j'ai été affecté à la force de protection de l'ONU

 20   en Yougoslavie qui se nomme la FORPRONU. J'ai été affecté à un secteur qui

 21   est la Slavonie orientale, un des quatre secteurs des secteurs protégés de

 22   l'ONU en ex-Yougoslavie, en fait, sur le territoire croate.

 23   Q.  A cet égard, avez-vous remis une déclaration écrite en juillet 2012

 24   concernant votre mandat à titre de coordonnateur des affaires civiles ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et, avant que de passer à votre déclaration plus spécifiquement,

 27   pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre quelles étaient vos activités

 28   à ce poste, ce poste que vous venez de décrire ?


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  1   R.  Oui. Mes activités au principal étaient le mouvement de population

  2   forcé, des populations locales. Quand je dis "forcé", "mouvement forcé des

  3   populations locales", cela signifie qu'elle n'était pas prévu par la

  4   population. Les populations ont été amenées à se déplacer.

  5   Q.  Et ces mouvements se sont tenus à partir de votre secteur ?

  6   R.  Oui, à partir du secteur vers la Croatie elle-même.

  7   Q.  Alors, en attirant votre attention maintenant à votre déclaration du 20

  8   juillet 2012, l'avez-vous signée?

  9   R.  Oui.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai un classeur que

 11   j'ai présenté au conseil de la Défense. Il est convenu que je le présente

 12   au témoin. Donc, si nous pouvions remettre ce classeur qui contient

 13   certains des documents dont nous allons nous servir pendant

 14   l'interrogatoire du témoin, si on pouvait le lui remettre. Merci. Et, nous

 15   allons aborder les onglets 1 et 4, et ce, aux fins du greffier.

 16   Q.  Si vous pouviez, Monsieur Lubin, passer à l'onglet 1 qui est la

 17   déclaration que vous avez devant les yeux. Pourrais-je demander au greffier

 18   d'afficher à l'écran pour les Juges de la Chambre l'original anglais 65 ter

 19   5964.1.

 20   Et vous pouvez soit lire le document, donc imprimé, que vous avez devant

 21   vous ou celui qui est sur l'écran, selon ce qui vous convient. J'attire

 22   votre attention à la première page. Reconnaissez-vous ce document ?

 23   R.  Oui, il s'agit des informations de témoin, et donc la déposition que

 24   j'ai signée.

 25   Q.  Reconnaissez-vous la signature sur cette page ?

 26    R.  Oui.

 27   Q.  Passons à la page suivante, je vous prie. Reconnaissez-vous les

 28   initiales qui sont portées en bas de la page ?


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  1   R.  Oui, je reconnais mes initiales.

  2   Q.  Et avez-vous apposé vos initiales sur chacune des pages de cette

  3   déclaration au moment où vous l'avez signée ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Passons à l'avant-dernière page. Après le paragraphe 91 [comme

  6   interprété], reconnaissez-vous l'initiale portée sur cette page ?

  7   R.  Oui, c'est les miennes.

  8   Q.  Quand vous avez préparé et signé votre déclaration en juillet 2012,

  9   certains documents étaient joints à cette déclaration à l'époque; est-ce

 10   exact?

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  L'on vous a indiqué que seules les 19 premières pages de votre

 13   déclaration, celles qui sont de vos propos, seraient seules versées et que

 14   l'on exclurait les pièces jointes. Vous l'avez compris ainsi ?

 15   R.  Oui, c'est ce que j'ai compris.

 16   Q.  En revanche, l'on vous a demandé de fournir un ajout à cette

 17   déclaration de juillet 2012 qui était corrélée quant aux numéros des pièces

 18   jointes mentionnées dans votre déclaration dans le système, l'énumération

 19   interne du Procureur. Vous en souvenez-vous?

 20   R.  Oui, je m'en souviens.

 21   Q.  Et vous souvenez-vous d'avoir préparé cet ajout et de l'avoir signé ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et quand avez-vous signé ce supplément, vous en souvenez-vous ?

 24   R.  Je l'ai signé, oui.

 25   Q.  Vous souvenez-vous si c'était cette année ou l'an dernier ?

 26   R.  C'était cette année.

 27   Q.  En préparation de votre déposition aujourd'hui, avez-vous la

 28   possibilité de lire et de passer en revue la déclaration de 2012 et le


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  1   supplément de 2013 ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Quand vous avez passé en revue votre déclaration de juillet 2012, avez-

  4   vous trouvé quoi que ce soit qui, vous l'estimiez, était inexact ?

  5   R.  En dehors de quelques coquilles, il n'y avait rien de la teneur qui

  6   aurait pu modifier ces déclarations en quoi que ce soit.

  7   Q.  Si je pouvais attirer votre attention à la page 6, paragraphe 27.

  8   R.  Oui, un instant, je vous prie. Oui.

  9   Q.  A la première ligne, on voit :

 10   "Alors que j'étais dans le secteur, j'ai mené et pris part à des

 11   réunions régulières avec le RSK et les autorités serbes locales…"

 12   J'attire votre attention sur le terme "régulières", "réunions

 13   régulières". Avez-vous quelques modifications à apporter à ce terme ?

 14   R.  Oui, je crois qu'il vaudrait mieux biffer le terme "régulier",

 15   car ceci donne l'impression que c'était à certaines dates, à certains

 16   moments ou à des moments certains. Parfois, c'était au pied levé, sans

 17   préavis, lorsqu'il y avait des urgences. Donc, il conviendrait de biffer le

 18   terme "régulier".

 19   Q.  J'attire votre attention maintenant à la page 9, paragraphe 43. Au-

 20   dessus de ce paragraphe, il y a un titre :

 21   "Expulsions dont on a été témoin de Dalj et d'Aljmas."

 22   Y a-t-il des modifications que vous souhaiteriez apporter à ce titre ?

 23   R.  Oui, je crois que le terme "dont on a été témoin" devrait être biffé et

 24   que le nom du village d'Erdut devrait être ajouté.

 25   Q.  J'attire maintenant votre attention au paragraphe 70, qui se trouve à

 26   la page 14. Ce paragraphe, on y détaille une lettre que vous avez envoyée

 27   au vice-président du gouvernement de la région serbe de Slavonie, Baranja

 28   et Srem occidental en protestation, en numéro 1, de la modification des


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  1   noms de certains villages du secteur est à l'encontre du paragraphe 17(b)

  2   du plan de la mission de FORPRONU de l'ONU…"

  3   Avez-vous des modifications à apporter à apporter à ce paragraphe au terme

  4   de "paragraphe 17(b)" ?

  5   R.  Oui, je pense qu'il conviendrait que ce soit le "paragraphe 17", ceci

  6   éluciderait ce que je souhaitais dire dans ce paragraphe.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Passons maintenant à l'onglet 4. J'aimerais

  8   demander au greffier d'afficher le document 6390 de la liste 65 ter.

  9   Q.  Et ce document se trouvera à l'écran, Monsieur Lubin.

 10   R.  Bien.

 11   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et de quoi s'agit-il ?

 14   R.  Je vois qu'il s'agit d'un ajout à ma déclaration d'origine.

 15   Q.  Reconnaissez-vous cette signature sur cette page ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et à la page suivante, reconnaissez-vous votre paraphe sur cette page

 18   également ?

 19   R.  Oui. Je reconnais cette signature.

 20   Q.  Et en dessous du paragraphe 2, il y a un tableau qui relie les pièces

 21   jointes de votre déclaration à des numéros d'identification sur le document

 22   ainsi que ceux fournis par le bureau du Procureur; est-ce exact ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Si nous pouvions passer à la page suivante. Reconnaissez-vous la

 25   signature à cette page ?

 26   R.  C'est ma signature.

 27   Q.  Et vous avez déclaré que vous avez été en mesure de relire ce document

 28   pour confirmer que les corrélations sont exactes ?


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  1   R.  Oui, elles sont exactes.

  2   Q.  Si l'on vous posait des questions sur les documents qui se trouvent

  3   dans votre déclaration de 2012 et votre ajout de 2013, fourniriez-vous en

  4   teneur les mêmes informations ?

  5   R.  Oui, tout à fait.

  6   Q.  Avec les rectifications antérieures apportées, est-ce que ces deux

  7   déclarations sont exactes et authentiques ?

  8   R.  Tout à fait.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, le bureau du

 10   Procureur verse le document 5964.1 de la liste 65 ter sous pli scellé. Il y

 11   a une liste expurgée qui porte la cote 5964.3 et une version également --

 12   l'ajout, le supplément, qui est au numéro 6390 de la liste 65 ter. Donc,

 13   trois pièces, deux étant les mêmes, l'une sous pli scellé, l'autre expurgée

 14   et publique, et le supplément à ces deux documents.

 15   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, la version expurgée

 17   publique, est-ce .3 ?

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] .2.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien, .2. Pourquoi sous pli

 20   scellé ?

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Il y a certaines expurgations qui ont été

 22   nécessaires en raison des conditions de l'article 70 auxquelles se réfère

 23   ce document.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Nous versons ces trois

 25   documents en les admettant.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 5964.1, cote P1351 versé sous

 27   pli scellé. Et la version publique expurgée du 5964.2 de la liste 65 ter

 28   reçoit la cote 1351.1. Le document 6360 [comme interprété] de la liste 65


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  1   ter recevra la cote P1352 et est versé sous pli scellé.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le dernier, sous pli scellé, Madame

  3   Biersay ?

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Non, il n'est pas nécessaire sous pli scellé

  5   pour la bonne raison qu'il n'y a pas de référence à l'article 70.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Le dernier n'est donc pas

  7   sous pli scellé. Merci, Monsieur le Greffier.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Passons maintenant à l'onglet 48. Pourrais-

  9   je demander au greffier de nous afficher la pièce L2.

 10   Q.  Et ceci sera en couleur à l'écran, Monsieur Lubin.

 11   Mme BIERSAY : [interprétation] Avant que de passer à cet onglet, pourrions-

 12   nous voir ce que je crois être une pièce déjà admise, 233.140.

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Un onglet, je vous prie.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation] 40.

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Merci.

 16   Mme BIERSAY : [interprétation] Pourrions-nous faire un gros plan à la

 17   droite du témoin, et ce, pour le témoin. Très bien, cela suffit.

 18   Q.  Monsieur Lubin, il s'agit d'une carte. Connaissez-vous la région qui se

 19   trouve sur cette care ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et quelle est la région ?

 22   R.  Il s'agit là de la moitié inférieure du secteur est.

 23   Q.  Et dans cette partie du secteur est, connaissez-vous les noms des

 24   villages que l'on y voit ?

 25   R.  Oui, je les connais très bien.

 26   Q.  Pourriez-vous décrire, le cas échant, les déplacements ?

 27   R.  Pourriez-vous répéter la question ?

 28   Q.  Pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre si vous vous été déplacé


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  1   dans tout ce secteur ?

  2   R.  Oui, tous les jours je traversais le secteur, différentes parties du

  3   secteur, cela dépendait des urgences qui se produisaient de la soirée ou

  4   matin, et parfois je me déplaçais tout simplement pour une réunion

  5   régulière avec les responsables locaux, de villes par exemple tels qu'Ilok

  6   et quelques autres.

  7   Des villages, devrais-je dire.

  8   Q.  Et quel était votre quartier général ? Où était-il ?

  9   R.  Notre quartier général était à Erdut, vers le haut de la carte que l'on

 10   ne voit pas.

 11   Mme BIERSAY : [interprétation] Si nous pouvions --

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Erdut se trouve dans l'ex-croissance que

 13   l'on voit ici, qui passe sur le Danube.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous pourriez prendre le stylet et tout simplement indiquer

 16   où se trouve Erdut, que vous avez identifié ?

 17   R.  Oui. Voici Erdut.

 18   Q.  Et vous pouvez également l'indiquer de façon plus importante.

 19   R.  Nous avons deux Erdut, mais voilà.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  Au paragraphe 8 de votre déclaration, vous parlez de la mission de la

 23   FORPRONU, et j'aimerais maintenant passer à l'onglet 48 qui, je l'espère,

 24   sera le document L2 qui a été versé antérieurement.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] La carte que nous venons de voir a déjà été

 26   versée au dossier. Il s'agit de la pièce P233.140. Il n'y a pas lieu de

 27   sauvegarder les annotations faites par le témoin.

 28   Q.  Monsieur Lubin, comme vous pouvez le voir, le document porte la date du


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  1   11 décembre 1991. Vous verrez que le document prétend être un rapport du

  2   secrétaire général en application de la Résolution 721 du Conseil de

  3   sécurité. Le voyez-vous ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pouvons-nous passer à la page 10, s'il vous plaît, page dans le système

  6   électronique ? Monsieur Lubin, en règle générale, est-ce que vous

  7   connaissez ce document ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  J'appelle votre attention à la page 10.

 10   R.  Page 15.

 11   Q.  Oui. Sur la version papier c'est la page 15, mais dans le système

 12   électronique cela correspondra à une autre pagination, donc ce sera la page

 13   10.

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   Q.  Vous avez sous les yeux l'annexe 3. C'est le projet de l'opération de

 16   maintien de la paix des Nations Unies en Yougoslavie.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et plus précisément, ce sera la page 11, la page suivante qu'il nous

 19   faudra. Dans la version papier du document, ce sera la "page 16". Donc, ce

 20   qui précède immédiatement le paragraphe 8 se lit comme suit, ou plutôt, les

 21   -- donc, ce qui précède :

 22   "Les zones protégées des Nations Unies."

 23   Alors, le paragraphe 9, si vous voulez bien. Je pense que ce sera page 3 en

 24   B/C/S.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Alors, au paragraphe 9, le texte se lit comme suit :

 27   "Il y aura trois zones protégées des Nations Unies : la Slavonie

 28   orientale, la Slavonie occidentale, et la Krajina…". Donc, c'est ce qui a


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  1   été rédigé en novembre/décembre 1991.

  2   Etait-ce la situation qui se présentait au moment où vous avez été affecté

  3   au secteur est ?

  4   R.  Oui. La Slavonie orientale était la zone où j'ai travaillé, mais une

  5   autre zone protégée, la Krajina, a été ultérieurement divisée pour en faire

  6   deux parties, le nord et le sud, et cela a donné un total de quatre zones

  7   protégées des Nations Unies.

  8   Q.  Alors, ici nous avons les frontières de la zone protégée de la Slavonie

  9   orientale. Est-ce que vous pourriez le lire et nous dire si cela correspond

 10   à la zone que vous avez trouvée sur place lorsque vous y avez été déployé ?

 11   R.  Oui. Cela correspond à la situation qui se présentait sur le terrain

 12   lorsque que j'y suis arrivé.

 13   Q.  Donc, Beli Manastir en faisait partie ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et les parties d'Osijek qui se trouvent à l'est de la ville d'Osijek ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vukovar ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et les villages dans la partie orientale, une partie de Vinkovci ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  J'attire votre attention à présent sur la page 13, paragraphe 15, et

 22   sur la version papier, ce sera l'onglet 48. Cela vous aidera à vous repérer

 23   plus facilement, peut-être.

 24   R.  Je vous remercie.

 25   Q.  Donc, ce sera page "18" dans la version imprimée, où on verra figurer

 26   le 18. En bas de cette page, nous trouvons le titre "Démilitarisation des

 27   zones protégées des Nations Unies." Donc, il est dit qu'un calendrier sera

 28   prévu, et qu'il va y avoir une démilitarisation des zones protégées. C'est


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  1   le paragraphe 15(a) qui m'intéresse maintenant. Il se lit comme suit :

  2   "Toutes les unités et l'ensemble du personnel de l'armée populaire

  3   yougoslave, la JNA, et de la Garde nationale croate, ainsi que toutes

  4   unités de la Défense territoriale et tout personnel n'étant pas basé dans

  5   les zones protégées des Nations Unies, seront retirées du territoire de

  6   celle-là.".

  7   Alors, ma question est la suivante : quelle a été le statut du  retrait de

  8   la JNA et des unités de la Défense territoriale lorsque vous êtes arrivé

  9   dans ce secteur en mars 1992 ?

 10   R.  Ils étaient sur place. On ne les a pas retirées.

 11   Q.  Et est-ce qu'il y a eu un retrait pendant la durée de votre présence

 12   dans le secteur ?

 13   R.  Oui, vers la fin de ma mission, fin mai je pense, c'est à ce moment-là

 14   qu'un retrait de unités de l'armée populaire yougoslave a commencé.

 15   Q.  Vous dites "a commencé" --

 16   R.  Oui. Ils ont effectivement mené à bien ce retrait.

 17   Q.  Alors, j'attire votre attention sur le 15(b) :

 18   "L'ensemble des unités du personnel de la Défense territoriale

 19   stationné dans les zones protégées des Nations Unies sera démantelé et

 20   démobilisé…"

 21   Etait-ce la situation lorsque vous êtes arrivé dans ce secteur ?

 22   R.  Non, non, non, c'était loin de là.

 23   Q.  Et pourquoi dites-vous cela ?

 24   R.  Parce que ces soi-disant unités de la Défense territoriale ainsi que

 25   les paramilitaires semblaient s'armer de plus en plus de jour en jour.

 26   Q.  J'attire votre attention sur la page 19 du document qui est devant

 27   vous, et pour nous, ce sera la page 14. J'attire votre attention sur (d).

 28   Pour vous, Monsieur Lubin, ce sera la page 19. Vous verrez le 19 en haut de


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  1   la page.

  2   Est-ce que vous voyez l'alinéa (d) ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Je vais en donner lecture.

  5   "L'ensemble des unités ou du personnel paramilitaire irrégulier ou

  6   volontaire seront soit retirés des zones protégées des Nations Unies, soit,

  7   s'ils y résident, seront démantelés et démobilisés."

  8   Est-ce que c'était le cas ?

  9   R.  Non, cela n'est pas le cas. Ils n'ont jamais été démobilisés pendant la

 10   durée de ma mission. Ils n'ont jamais été retirés non plus. En fait, c'est

 11   plutôt le contraire; il y a eu une augmentation très importante du nombre

 12   de ces forces irrégulières.

 13   Q.  Et juste dans la suite, j'attire votre attention sur le paragraphe 16,

 14   qui se lit comme suit :

 15   "Chaque unité a la responsabilité, avant son retrait ou avant son

 16   démantèlement, d'enlever toutes les mines qui ont été posées pendant

 17   qu'elle était déployée dans la zone protégée des Nations Unies."

 18   Comment est-ce que cela correspond à la réalité que vous avez trouvée sur

 19   place lorsqu'on vous a déployé dans le secteur est ?

 20   R.  On a commencé à superviser ce déminage, mais c'était un processus très

 21   long et il n'a absolument pas été terminé avant que je ne parte, à savoir

 22   le 1er juin.

 23   Q.  Et cette même page, le paragraphe 19, sous le titre "Forces de police

 24   locale", la première phrase du paragraphe 19 se lit comme suit :

 25   "La question du maintien de l'ordre public dans les zones protégées des

 26   Nations Unies relèvera de la responsabilité des forces de police locale,

 27   qui ne seront armées que d'armes de poing…"

 28   Alors, ma question est la suivante : est-ce que cela reflète la situation


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  1   dans le secteur est pendant la durée de votre mandat ?

  2   R.  Non. J'imaginerais que "l'arme de poing" signifierait quelque chose

  3   comme un pistolet ou une arme de petit calibre de ce genre. Mais, en fait,

  4   ceux qui s'appelaient la police ou qui se sont autoproclamés police - je ne

  5   sais pas si c'était véritablement des policiers - eh bien, ils avaient des

  6   kalachnikov, ils avaient des armes plus lourdes qui, en fait, ne

  7   correspondent pas aux termes de cet accord.

  8   Q.  Pourquoi vous nous dites que vous n'êtes "pas sûr qu'ils étaient

  9   véritablement des policiers" ?

 10   R.  Nous avions notre police civile des Nations Unies, et par le truchement

 11   de celle-ci, j'ai eu des contacts avec eux. J'ai eu ces contacts sans

 12   arrêt, et ils me disaient toujours qu'un tel ou un tel n'était pas un

 13   policier, parce qu'il n'avait absolument aucune idée des procédures ou des

 14   protocoles de la police habituelle. Et j'ai eu la sensation que c'était

 15   soit des ex-militaires soit une espèce de garde transformée, mais d'une

 16   manière tout à fait inacceptable dans ce qu'ils se sont permis d'appeler

 17   des policiers.  

 18   Q.  Est-ce que parmi ces policiers que vous avez fini par bien connaître

 19   dans le cadre de vos contacts professionnels, est-ce que pour certains

 20   d'entre eux vous avez pu savoir effectivement que c'étaient des policiers ?

 21   R.  Est-ce que vous pouvez répéter votre question ?

 22   Q.  Alors, est-ce que vous avez eu des contacts avec des gens pour lesquels

 23   vous saviez que c'était en effet des policiers ? Est-ce que dans le cadre

 24   de votre mandat vous avez rencontré ces gens-là ?

 25   R.  Oui, oui, il y en a eu quelques-uns. J'ai vu que certains policiers

 26   avaient une attitude très professionnelle, à la différence d'autres.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Passons à huis clos partiel, s'il vous

 28   plaît, pour que je puisse interroger sur plusieurs documents qui relèvent

 


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  1   de l'article 70; documents sur notre liste.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  4   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 3194-3199 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 10   [Audience publique]

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   Mme BIERSAY : [interprétation]

 13   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez des événements qui portent sur le

 14   village de Miklusevci. Le document que vous avez dans votre classeur

 15   correspond à l'intercalaire 100, 5945 qui est le numéro sur la liste 65

 16   ter, à l'intercalaire 100. Connaissez-vous ce document ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et d'après vous, cela correspond à quoi ?

 19   R.  D'après moi, il s'agit d'information que j'ai transmise à mon supérieur

 20   hiérarchique, Cedric Thornberry.

 21   Q.  "Veuillez être informé du fait que le maire de Vinkovci vient de vous

 22   appeler au téléphone pour vous informer du fait qu'environ 180 Ruthéniens

 23   de Miklusevci ont été chassés."

 24   Est-ce que ce terme est censé correspondre à "Ruthéniens", "Ruthenians" en

 25   anglais ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre à quelle fréquence vous

 28   receviez de tels appels téléphoniques du maire de Vinkovci ?

 


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  1   R.  Cela n'arrivait pas trop souvent. C'était plutôt rare. J'ai été informé

  2   -- alors, je vais revenir en arrière. La nouvelle des expulsions me

  3   parvenait de différentes façons, soit des observateurs militaires, de notre

  4   police, et quelquefois les autorités locales se présentaient sur le seuil

  5   de ma porte pour me dire qu'il y avait eu une évacuation ou quelque chose

  6   de la sorte dans un secteur ou dans un autre et que je pouvais en être le

  7   témoin si je le souhaitais.

  8   Q.  La dernière phrase :

  9   "Avons besoin de conseils pour savoir comment gérer le retour des personnes

 10   chassées dans leurs maisons déjà occupées".

 11   Cela fait référence à quoi ?

 12   Il s'agit de la toute dernière phrase.

 13   "Besoin de conseils pour savoir comment gérer le retour des personnes

 14   chassées dans leurs maisons déjà occupées".

 15   R.  Nous ne savions pas comment gérer cela, car dans de très rares cas où

 16   les gens souhaitaient rester, eh bien, leurs maisons étaient déjà occupées.

 17   La conséquence normale serait leur expulsion également parce qu'il n'y

 18   avait pas d'endroit pour eux où habiter.

 19   Q.  Et ces maisons étaient occupées par qui, si vous le savez ?

 20   R.  Les maisons étaient occupées par des réfugiées serbes qui avaient été

 21   chassées de Croatie, d'après ce qu'on nous avait dit.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier du

 23   numéro 65 ter 5945 à ce stade.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ceci est versé au dossier et reçoit

 25   une cote.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document recevra la cote P1355.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Pouvons-nous maintenant passer à

 28   l'intercalaire 53, s'il vous plaît, qui a le numéro 5170 sur la liste 65


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  1   ter.

  2   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez d'expulsions s'agissant de

  3   Tovarnik.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Je vais vous demander de regarder ce document qui se lit comme suit :

  6   "Tentative d'expulsion, Tovarnik". Reconnaissez-vous ce document ?

  7   R.  Oui, tout à fait.

  8   Il s'agit d'un rapport de situation. Ces rapports étaient habituellement

  9   envoyés au moins une fois par jour, et voir quelques fois six fois par

 10   jour, en fonction du nombre d'incidents qui se produisaient dans le

 11   secteur. Les rapports de situation étaient envoyés à mon supérieur

 12   hiérarchique, Cedric Thornberry, à Belgrade.

 13   Q.  Je vais vous demander de regarder la deuxième page de cette pièce :

 14   "Soyez informé du fait que des Croates qui voyagent dans un minibus

 15   de Tovarnik ont été interceptés…"

 16   S'agit-il là de l'expulsion dont vous faites état au paragraphe 86 de votre

 17   déclaration au sujet de Tovarnik ?

 18   R.  Oui, tout à fait.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] A ce stade, nous demandons le versement au

 20   dossier du numéro 65 ter 5170, s'il vous plaît.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier et

 22   reçoit une cote.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document reçoit la cote P1356.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation] Parfois, j'attends trop longtemps et parfois

 25   je n'attends pas assez longtemps. Pardonnez-moi.

 26   Est-ce que nous pouvons passer à l'intercalaire 101, s'il vous plaît.

 27   Oui, intercalaire 101 qui est sur la liste 65 ter au numéro 5946.

 28   Q.  Monsieur Lubin, reconnaissez-vous ce document ?


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  1   R.  Oui, tout à fait.

  2   Q.  Et d'après vous, que représente ce document ?

  3   R.  Je reconnais ce document. Il s'agit d'un rapport de situation bref

  4   émanant de moi et envoyé à mon supérieur hiérarchique, Thornberry.

  5   Q.  Alors, pour ce qui est du sujet de l'"Expulsion à Tovarnik". On peut

  6   lire :

  7   "Nous avons confirmé que quelque 40 personnes ont été chassées de Tovarnik

  8   … hier, 24 mai, dans la matinée.

  9   "Ces personnes chassées ont été chassées et ont dû monter à bord de

 10   tracteurs. Deux à trois fois, ils ont traversé les champs évitant ainsi les

 11   barrages routiers du Bataillon russe".

 12   Tout d'abord, que signifie le Bataillon russe ?

 13   R.  RussBat était le Bataillon russe qui avait pour mission de protéger la

 14   partie sud, la deuxième partie, la partie sud du secteur et de la

 15   patrouiller. BelBat correspondait au Bataillon belge qui avait pour mission

 16   de garder et de patrouiller la partie nord du secteur.

 17   Q.  Dans votre déclaration, il est fait état de 22 personnes qui ont été

 18   chassées de Tovarnik, qui étaient à bord d'autobus, et que l'on a chassées

 19   de ce secteur à bord d'autobus. Ce document parle de 40 personnes qui ont

 20   été chassées à bord de tracteurs. Pourriez-vous faire la lumière dessus,

 21   nous dire si nous parlons des mêmes expulsions ou de deux expulsions

 22   différentes ?

 23   R.  Nous parlons du même village mais de deux expulsions différentes. Je

 24   souhaite attirer votre attention sur le fait que ces personnes chassées ont

 25   été chassées à bord de tracteurs, ont dû traverser les champs et, en

 26   réalité, éviter ainsi les barrages routiers qui avaient été créés justement

 27   pour empêcher cela. Ces 22 personnes chassées dont il est fait état au

 28   paragraphe 87 se trouvaient à bord d'un minibus lorsque nous les avons

 


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  1   interceptées.

  2   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous demandons à ce stade le versement au

  3   dossier du numéro 65 ter 5946.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier et

  5   reçoit une cote.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document reçoit la cote P1357. Merci.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Messieurs les Juges, à ce stade, pourrions-

  8   nous retourner en audience publique [comme interprété] pour aborder

  9   quelques autres documents qui relèvent de l'article 70.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Huis clos partiel, Messieurs les Juges.

 12   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Monsieur Lubin, je vais vous demander de regarder la page 8, le

 12   paragraphe 56 [comme interprété] de votre déclaration, s'il vous plaît.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous dites que le processus des expulsions était fort bien organisé.

 15   Sur quoi vous êtes-vous fondé pour conclure cela ?

 16   R.  Oui, ils étaient très bien organisés parce qu'au début ils ont utilisé

 17   des autocars. C'étaient des autocars utilisés pour le transport localement.

 18   Il y avait de nombreuses personnes qui étaient là, certaines avaient des

 19   pancartes avec des listes de personnes qui devaient être chassées. Bien

 20   évidemment, il ne s'agissait pas de quelque chose de spontané.

 21   Q.  A cet égard, lorsque vous décrivez ces expulsions, pourriez-vous

 22   décrire aux Juges de la Chambre quel climat régnait au moment de ces

 23   expulsions dans le secteur est ?

 24   R.  C'était un climat de terreur qui régnait à ce moment-là pour ceux qui

 25   étaient chassés. A une ou deux reprises, je suis moi-même monté à bord de

 26   véhicules pour essayer de parler à certaines de ces personnes chassées et

 27   pour leur demander si elles partaient de leur plein gré. Elles ont toutes

 28   dit oui et ces personnes ne disaient bien évidemment pas la vérité. La

 


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  1   plupart des femmes étaient des femmes âgées, elles pleuraient. Il y avait

  2   quelques enfants qui montraient des signes de traitements brutaux, qui

  3   comportaient des ecchymoses et des bandages. Et on nous demandait toujours

  4   d'assister à ces réunions, et si nous étions appelés ou informés au sujet

  5   de cela, cela était toujours trop tard. Nous demandions aux personnes si

  6   elles souhaitaient rentrer chez elles. Nous souhaitions les protéger. Je ne

  7   me souviens pas d'une seule personne qui souhaitait rentrer chez elle. Ces

  8   personnes étaient terrorisées. C'était extrêmement frustrant pour nous.

  9   Q.  Merci, Monsieur Lubin.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Je regarde l'horloge et il serait peut-être

 11   opportun de faire la pause.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Madame Biersay. Merci.

 13   Monsieur Lubin, nous allons avoir notre première pause, et nous reviendrons

 14   à 11 heures, et vous serez raccompagné par l'huissier.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 19   --- L'audience est reprise à 10 heures 59.

 20   [Le témoin vient à la barre]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Madame Biersay.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Je me lève pour informer les Juges de

 23   la Chambre que le Procureur n'a pas d'autres questions pour le témoin et

 24   que nous allons verser maintenant les pièces connexes qui sont attachées à

 25   la demande de versement de sa déclaration, et ce, au titre de l'article 92

 26   ter.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Une note de service

 28   sera diffusée par le greffier. Et ces documents sont admis, bien sûr.

 


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  1   Maître Gosnell.

  2   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

  3   Messieurs les Juges.

  4   Contre-interrogatoire par M. Gosnell : 

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Lubin.

  6   R.  Bonjour.

  7   Q.  Je me présente, Chris Gosnell, je représente M. Hadzic. J'aimerais tout

  8   d'abord vous remercier de votre longue carrière avec distinction pour les

  9   Nations Unies, à l'évidence dans certains lieux extrêmement difficiles.

 10   J'aimerais revenir à ce que vous avez déclaré ce matin, il s'agit de la

 11   chose suivante, vous parliez des agents de police :

 12   "Je n'étais pas sûr qu'ils étaient véritablement des agents de police".

 13   Est-ce que dans vos fonctions dans le secteur est, avez-vous vu qu'il y

 14   avait des personnes qui se disaient avoir certains titres, certaines

 15   positions, certains postes alors qu'ils ne disposaient absolument pas de

 16   compétence en la matière ?

 17   R.  Oui, ce n'était pas seulement mon opinion mais celle d'agents de police

 18   de métier qui étaient affectés à la FORPRONU, en l'occurrence, notre

 19   Bataillon de police suédois.

 20   Q.  Et avez-vous vu en particulier qu'il y avait des personnes qui,

 21   auparavant, faisaient partie d'activités de combat, soit à titre de ce

 22   qu'on appelle des volontaires ou des paramilitaires, qui alors souhaitaient

 23   se décrire comme étant de la police ?

 24   R.  Personnellement, je n'en ai pas été conscient -- pourriez-vous me

 25   répéter votre question ou la reformuler ?

 26   Q.  Je vais peut-être vous la faire plus courte : alors que vous êtes rendu

 27   dans certaines des municipalités loin d'Erdut, par exemple, est-ce que vous

 28   avez vu que des personnes faisaient acte de police même si personne ne les

 


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  1   avait nommées à ce poste ?

  2   R.  Il y avait des agents de police dans l'active. Je ne saurais dire si

  3   quelqu'un les avait nommés à ce poste ou pas, non, je ne saurais le dire.

  4   Q.  Eh bien, voyons le document pour se donner un contexte.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] L'onglet 67 du Procureur, il s'agit de la

  6   pièce P1353 qui ne devrait pas être diffusée. Peut-être que nous devrions

  7   passer à huis clos partiel pour regarder la teneur de ce document et cette

  8   partie du document.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] D'ordinaire, j'en conviendrais, mais la

 10   disposition étant que ce document sera débattu à huis clos, et donc, c'est

 11   la condition relevant de l'article 70.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, si c'est là la condition, c'est

 13   ainsi que nous procéderons.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous sommes donc à huis clos partiel.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel. Merci.

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  8   [Audience publique]

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Il s'agit de l'onglet 21 du Procureur, si

 10   j'arrive à le trouver dans mon propre classeur.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit du document 5163 de la liste 65

 12   ter. Merci.

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, merci. La page 7, je vous prie.

 14   Q.  Cela semble être un document émanant de M. Johansen adressé à M.

 15   Thornberry en date du 22 février 1992, et je crois qu'il s'agit du même

 16   incident dont nous parlons maintenant, à Tovarnik, les expulsions

 17   alléguées. Et le paragraphe qui m'intéresse est le troisième ou le

 18   quatrième à partir du bas :

 19   "Concernant l'expulsion le 18 mai 1992 - lorsque l'autocar est arrivé au

 20   poste de contrôle - la situation était arrivée à ce que j'appellerais être

 21   le point de non-retour."

 22   R.  Désolé, ce n'est pas la même expulsion. C'est celle du 18 mai. Celle de

 23   Tovarnik, celle dont vous parlez était le 24 mai.

 24   Q.  Oui, c'est exact. Quoi qu'il en soit, c'était un autre événement, et

 25   vous voyez sa description "la situation est arrivée à ce que j'appellerais

 26   être un point de non- retour" ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce là une bonne description de la situation à l'époque ?

 


Page 3223

  1   R.  Je crois que c'est tout à fait juste comme description, oui.

  2   Q.  Et le paragraphe suivant indique :

  3   "Pour le moins, pour essayer de prévenir tout autre expulsion des

  4   particuliers, il est nécessaire de démontrer une présence massive fondée

  5   sur les informations de la CIVPOL dans le secteur - les ressources du

  6   secteur est - RussBat qui sont donc libérés à cet effet."

  7   Vous souvenez-vous et, en fait, nonobstant ce que vous avez déclaré tout à

  8   l'heure en ce qui concerne la persuasion morale ou les motivations morales

  9   sur lesquelles s'appuyait l'ONU, que ce nonobstant, une présence armée

 10   importante serait exigée afin de réprimer le type de violence qui

 11   encourageait les particuliers à partir ?

 12   R.  Oui, ce serait mon opinion personnelle, mais dans ce paragraphe il

 13   s'agit de la présence massive dont il parle, c'est tout simplement une

 14   visibilité massive. Malheureusement, nous avions un problème quant aux

 15   patrouilles dans la partie australe du secteur. A mon sens, le Bataillon

 16   russe ne patrouillait pas comme il se doit le secteur. En ce qui concerne

 17   ce document que vous venez d'afficher à l'écran, il s'agit d'une visite que

 18   nous avons effectuée, moi-même et le chef de la police des Nations Unies,

 19   auprès du Bataillon russe pour prôner davantage de patrouilles de leur

 20   part. Nous n'étions pas convaincus qu'ils faisaient suffisamment ni que

 21   leur présence, en tout cas, était suffisamment visible pour empêcher ce

 22   type de situation.

 23   Q.  Est-ce parce que les personnes qui créaient les conditions

 24   d'instabilité, ces personnes-là étaient armées jusqu'aux dents ?

 25   R.  Je ne comprends pas votre question.

 26   Q.  Ce n'est pas parce que les personnes qui menaçaient les civils les

 27   amenaient à partir, la raison d'une présence qui serait nécessaire, ce

 28   n'est pas parce que c'étaient des personnes qui jetaient des cailloux, du


Page 3224

  1   gravier ou autre, mais l'on parle bien de personnes qui étaient armées, et

  2   armées d'armes à feu; c'est exact ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et ce type d'opposition ne va pas être surmonté aisément ?

  5   R.  Oui, mais notre tâche était toujours la négociation et non pas

  6   l'affrontement.

  7   M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que je peux verser ce document, je

  8   vous prie ?

  9   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose ?

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant.

 12   Le Greffier me dit que ce document a déjà été versé au titre de la liste 92

 13   ter.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Merci de votre amabilité. Je l'ignorais.

 15   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Lubin.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   J'aimerais préciser qu'il s'agissait d'une mission de maintien de la

 19   paix de l'ONU. Il ne s'agissait pas d'une mission d'établissement de la

 20   paix des Nations Unies. Au cours de mes quelque 25 ans d'état de service

 21   auprès des Nations Unies, il y a rarement eu une mission d'établissement de

 22   la paix. Je ne me souviens que d'une et il s'agissait de la Somalie.

 23   D'ordinaire, les conditions doivent exister dans un secteur où la paix est

 24   à maintenir. Malheureusement, les événements ont démontré que dans ce

 25   secteur il n'y avait pas de paix à maintenir.

 26   Q.  Je vous remercie.

 27   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande l'onglet 27, s'il vous plaît, de

 28   l'Accusation. Il s'agit du document 05924.


Page 3225

  1   Q.  Monsieur, le document qui s'affichera à l'écran devant vous est un

  2   rapport de situation que vous avez envoyé à M. Thornberry. Il porte sur les

  3   événements de Beli Manastir à la date du 17 avril, et vous décrivez cet

  4   événement dans votre déclaration. Je ne vais pas vous demander de reprendre

  5   tous les éléments de détail. Mais dans cette déclaration, au point 3, vous

  6   dites :

  7   "Deux familles hongroises, qui s'étaient plaintes auprès de la police

  8   civile de Beli Manastir, s'étaient plaintes de faire l'objet de menaces et

  9   de gestes de violences contre elles de la part de locaux, ont été escortées

 10   et on les a aidées à traverser le pont de Batina, puisqu'elles ont déclaré

 11   qu'elles souhaitaient revenir en Hongrie. La CICR a également apporté son

 12   assistance au cours de ce processus."

 13   Est-ce que vous nous diriez que cela correspond à une de ces situations où

 14   l'appréciation que vous aviez faite, c'était que de manière générale les

 15   gens voulaient partir ?

 16   R.  Oui, c'est un autre responsable des affaires civiles qui est arrivé à

 17   cette conclusion --

 18   L'INTERPRÈTE : Nom inaudible pour l'interprète.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est arrivé dans cette zone, il est devenu

 20   responsable de la partie sud de notre secteur et il m'a informé de cette

 21   famille et je suis parti avec eux, je les ai raccompagnés avec le CICR.

 22   J'ai pris part à ce processus, et nous avons été très émus par la situation

 23   de cette famille. Ils avaient des enfants en bas âge. C'était un cas

 24   typique d'expulsion. La voiture était lourdement chargée, ils y avaient mis

 25   leurs objets personnels. En fait, je ne suis pas allé, en réalité, jusqu'à

 26   la frontière hongroise. Je les ai raccompagnés vers la sortie du secteur

 27   jusqu'au pont de Batina, où le CICR les a repris en main, et les enfants

 28   dans la voiture, avant qu'on ne se sépare, nous ont donné des jonquilles


Page 3226

  1   qu'ils avaient cueillies dans leur jardin. Je m'en souviens très bien.

  2   M. GOSNELL : [interprétation]

  3   Q.  Est-ce qu'on a forcé ces familles à partir sans la plus grande partie

  4   de leurs biens ?

  5   R.  Oui, c'est vrai.

  6   Q.  En fait, n'avaient-ils pas juste des baluchons ?

  7   R.  Oui, c'est exact, dans la voiture. C'était dans leur propre voiture

  8   qu'ils sont partis.

  9   Q.  Mais le fait qu'ils n'avaient pas toutes leurs possessions, cela n'a

 10   pas signifié que vous ne deviez pas les accompagner dans ce processus. Le

 11   fait qu'ils prennent la fuite en n'ayant rien d'autre que les vêtements

 12   qu'ils avaient sur eux, n'était-ce pas une indication de l'urgence de la

 13   situation; c'est cela ?

 14   R.  Oui, ce n'était pas un départ rapide. Ils avaient dit à M. Abd-Elrazek

 15   quelques jours avant cela qu'ils voulaient partir, donc ils avaient

 16   quelques biens personnels que normalement ils n'auraient pas eu cela s'ils

 17   n'avaient pas su au préalable qu'ils allaient partir.

 18   Q.  Dans ce rapport, il est dit que cela ne s'est pas passé sans incident,

 19   mais que les deux familles avaient des voitures qui étaient lourdement

 20   chargées et que le CICR les a raccompagnées jusqu'à la frontière. Est-ce

 21   que quelqu'un a essayé de les empêcher de partir ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Qui ?

 24   R.  Des paramilitaires, et même l'armée yougoslave. Je pense qu'il y a eu

 25   deux situations distinctes où j'ai dû intervenir.

 26   Q.  Ils cherchaient à empêcher leur départ parce qu'ils avaient peur qu'on

 27   les accuse d'expulser des civils ?

 28   R.  Il faudrait leur poser la question à eux.


Page 3227

  1   Q.  Vous l'on-t-il dit ?

  2   R.  Je n'en ai pas parlé avec eux.

  3   Q.  M. Abd-Elrazek, en a-t-il parlé avec eux ? Vous l'a-t-il dit ?

  4   R.  Nous n'avons pas parlé. Nous avons simplement dit que nous voulions

  5   demander qu'ils puissent partir.

  6   Q.  Et il n'y a pas eu d'indication de la raison pour laquelle ils

  7   essaieraient de vous arrêter, de vous empêcher ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Est-ce que vous avez jamais entendu dire de la part des individus

 10   auxquels vous avez apporté votre assistance qu'ils attendaient l'arrivée de

 11   la FORPRONU pour qu'ils puissent quitter le secteur parce qu'avant on les

 12   avait empêchés de partir, que ce soit la JNA ou quelqu'un d'autre.

 13   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela.

 14   Q.  Est-ce qu'il y a eu une liste qui a été dressée, liste des noms des

 15   personnes se trouvant dans ces trois voitures. Est-ce que vous ou M. Abd-

 16   Elrazek avez dressé cette liste ?

 17   R.  Normalement, c'aurait été la police civile qui l'aurait fait. Il y

 18   avait une coordination qui était toujours en place avec la police civile.

 19   Q.  Vous vous souvenez de qui que ce soit dans ce convoi pour le pont de

 20   Batina qui aurait été armé, ou bien était-ce uniquement des membres de la

 21   police civile des Nations Unies qui n'étaient pas armés, pour autant que

 22   vous le sachiez ?

 23   R.  Ici, en l'occurrence, c'était M. Abd-Elrazek et moi-même, et c'était

 24   tout, personne d'autre. Je pense en fait que nous avions un agent de la

 25   police civile avec nous. Je ne me souviens pas de son nom.

 26   M. GOSNELL : [interprétation] J'en ai terminé avec ce document. Je ne sais

 27   pas s'il s'agit d'une pièce connexe ou non. Sinon, j'en demanderais le

 28   versement. C'est une pièce connexe. Très bien. Alors, j'en ai terminé.


Page 3228

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] Excusez-moi, si je puis contribuer.

  2   L'ensemble des onglets, de 1 à 39, en somme, fait partie des pièces

  3   connexes. Je ne sais pas si cela vous est utile.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Enormément. Je vous remercie.

  5   Q.  Dans votre déclaration, vous dites que le nombre de réfugiés serbes

  6   dans le secteur est se montait à 33 000 et que c'était des gens qui avaient

  7   eux, précédemment, été expulsés, ou qui du moins avaient pris la fuite et

  8   étaient arrivés d'autres parties de la Croatie; est-ce exact ?

  9   R.  Oui. Je ne peux pas vous garantir que le chiffre est tout à fait exact.

 10   C'est un chiffre approximatif.

 11   Q.  Et d'après ce que vous avez pu observer, est-ce que ces gens étaient en

 12   colère à cause de ce qui leur est arrivé ?

 13   R.  Il m'était difficile de savoir faire la distinction entre un réfugié

 14   serbe et un Serbe du cru. Il y a eu plusieurs réunions d'information

 15   publique, et à l'occasion de ces réunions, les Serbes me racontaient ce qui

 16   leur est arrivé. Ils me décrivaient leur situation, me disaient qu'on les

 17   avait expulsés de Croatie. En réalité, c'était cela, et il y a eu des

 18   histoires qui étaient vraiment très émouvantes, très touchantes. Dans

 19   certaines situations, effectivement, cela a suscité la colère, en effet.

 20   C'est ce que j'ai pu remarquer.

 21   Q.  Est-ce que vous diriez que le fait qu'il y ait un nombre aussi élevé de

 22   réfugiés ou de personnes déplacées est quelque chose qui a créé des

 23   tensions, qu'à cause de cela la situation était explosive dans la zone ?

 24   R.  Oui, c'est ce que je dirais.

 25   Q.  Dans le cadre de votre déposition aujourd'hui, à un moment vous avez

 26   dit que "certains chefs de la police avaient adopté une attitude très

 27   professionnelle et que d'autres ne montraient pas le même type de

 28   comportement."

 


Page 3229

  1   Est-ce que vous pouvez vous rappeler ceux qui avaient fait preuve

  2   d'attitude professionnelle ?

  3   R.  Oui, c'était une toute petite minorité. Je me souviens en particulier

  4   d'un individu qui était le chef de la police d'Ilok. C'était quelqu'un qui

  5   était très ouvert, et à mon sens il était honnête. Mais c'était un cas

  6   unique. Je pense que c'est un Croate qui avait épousé une Serbe.

  7   Q.  Prenons l'onglet 82, si vous voulez bien, de l'Accusation. Il s'agit du

  8   document 05903. Je vous soumets, Monsieur, qu'il y a eu peut-être d'autres

  9   chefs de la police qui faisaient au mieux pour faire face à une situation

 10   difficile à ce moment-là, et je voulais que l'on examine la page 3.

 11   M. GOSNELL : [interprétation] A huis clos, s'il vous plaît.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 3230-3231 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  1   (expurgé)

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  5   (expurgé)

  6   (expurgé)

  7   [Audience publique]

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais vous demander de nous afficher la

  9   page 3.

 10   Q.  C'est votre rapport, vous l'envoyez à M. Thornberry, et cela concerne

 11   votre déplacement pour Beli Manastir le 22 avril, et ici vous confirmez

 12   aussi que :

 13   "Les responsables de Beli Manastir ont demandé de manière tout à fait

 14   claire une présence de la police civile permanente dans la région de

 15   Baranja, et qu'ils espéraient tenir des réunions comparables pour aborder

 16   des questions relatives aux affaires civiles. La police locale a reconnu

 17   que les extrémistes étaient responsables, et cela s'est produit lors d'une

 18   réunion du groupe de travail chargé des affaires civiles."

 19   Vous vous souvenez de cette réunion particulière ?

 20   R.  Oui, je me souviens de la réunion, mais je ne peux pas vous dire ce qui

 21   a fait l'objet de la réunion très précisément.

 22   Q.  "Les autorités civiles ont déclaré que l'ordre d'expulsion était un

 23   faux, la coopération a été promise, le problème qui revient : Les ordres ne

 24   sont pas appliqués à des échelons inférieurs…"

 25   R.  Excusez-moi.

 26   Q.  En bas de la page 3 --

 27   R.  Est-ce que vous pouvez répéter ?

 28   Q.  "La police locale a reconnu que les extrémistes étaient responsables,

 


Page 3233

  1   et cela a eu lieu lors de la réunion du groupe de travail chargé des

  2   affaires civiles. Les autorités civiles ont déclaré que l'ordre d'expulsion

  3   était un faux…"

  4   Alors, vous dites dans votre déclaration qu'il y a eu un soi-disant ordre

  5   d'expulsion, et ici, apparemment, les autorités civiles avancent un

  6   démenti.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  "Coopération promise encore. Problème qui revient : Ordres qui ne sont

  9   pas exécutés aux échelons inférieurs."

 10   R.  Là, je ne le retrouve pas.

 11   Q.  Dernière ligne de la page --

 12   R.  Oui. Je pense que je fais référence ici aux ordres qui sont donnés par

 13   la police et qui ne sont pas exécutés à l'échelon inférieur.

 14   Q.  Mais qu'entendez-vous par les termes "police" et "échelon inférieur" ?

 15   R.  J'entends la police.

 16   Q.  Mais plus concrètement, dans ce contexte-là de quelle police parlez-

 17   vous ?

 18   R.  J'imagine que j'ai à l'esprit la police locale.

 19   Q.  Et lorsque vous dites que quelqu'un n'exécute pas ces ordres, c'est qui

 20   ?

 21   R.  La police locale.

 22   Q.  En résumé, est-ce que vous êtes en train de dire que le chef de la

 23   police locale essaie de donner des ordres et que des policiers, à titre

 24   individuel, n'exécutent pas ces ordres; est-ce que c'est la teneur de ce

 25   que vous voulez dire ?

 26   R.  Cela semble être effectivement la teneur de mon propos.

 27   Q.  Maintenant, vous avez ce chef de la police qui essaie d'avoir sur son

 28   territoire une présence de la police civile des Nations Unies. Ouvertement,


Page 3234

  1   il reconnaît qu'il y a des actes de violence qui se produisent, il

  2   reconnaît que des extrémistes en sont les auteurs. Est-ce qu'il n'agit pas

  3   au mieux de ses capacités, d'après ce que l'on voit ici, pour résoudre ces

  4   problèmes ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Pourquoi est-ce que vous dites qu'il n'est pas honnête, ici ?

  7   R.  Quelle est la date de cette réunion ?

  8   Q.  Vous avez rédigé votre rapport le 22 avril --

  9   R.  Vous voulez dire -- et le rapport de situation ?

 10   Q.  Cela pourrait être le même jour. Quoi qu'il en soit, c'est vers le 22

 11   avril, puisque maintenant vous parlez des événements qui se sont produits

 12   précédemment dans votre document ?

 13   R.  Oui, tout à fait. Si je pense qu'il n'est pas honnête, c'est parce

 14   qu'il y a des choses que j'ai apprises au cours de mon mandat, à savoir que

 15   tout ce que me disaient des employés de la police, il fallait que je le

 16   prenne avec une certaine réserve.

 17   Q.  Mais dans ce contexte - et vous savez bien que la région n'était pas

 18   stable - pourquoi est-ce que vous excluez la possibilité que cet homme

 19   était honnête, qu'il voulait véritablement que la police civile soit

 20   présente, qu'il voulait qu'on l'aide et qu'il vous disait de manière tout à

 21   fait franche qu'il y avait des actes de violence qui étaient en cours et

 22   qu'il ne pouvait pas les empêcher ?

 23   R.  Dans ce secteur, les choses n'étaient jamais ce qu'elles semblaient

 24   être. Il y avait toujours des mensonges et des contre-mensonges. Certes,

 25   peut-être qu'il disait la vérité, mais à ce stade, au niveau de mon mandat,

 26   je ne faisais plus confiance à personne. J'étais très sceptique.

 27   Franchement, je ne me souviens pas de manière très précise de cette

 28   conversation ni de cette réunion. Cela s'est passé il y a 21 ans.


Page 3235

  1   Q.  Je voudrais que l'on passe maintenant à la question du plan Vance,

  2   document L2, l'onglet 48 de l'Accusation. Parce que j'aimerais que l'on

  3   essaie d'examiner les responsabilités au secteur est pendant cette période

  4   très importante. Prenons le paragraphe 7 de l'annexe, si vous voulez bien,

  5   page 16, d'après ce qu'on lit sur la page même. Dans le système du prétoire

  6   électronique, ce sera la page 11, je crois. Donc, ce que nous avons ici,

  7   c'est le projet de base qui est exposé. Et le texte se lit comme suit :

  8   "Les unités et les observateurs de la police des Nations Unies seront

  9   déployés dans certaines zones de la Croatie qui sont appelées des 'zones

 10   protégées des Nations Unies'. Ces zones seront démilitarisées; toutes les

 11   forces armées présentes dans ces zones seront soit retirées, soit

 12   démantelées. Le rôle joué par les forces des Nations Unies serait de faire

 13   en sorte que les zones restent démilitarisées et que toutes les personnes

 14   qui y résident soient protégées de telle sorte qu'ils n'aient pas peur

 15   d'une attaque armée…"

 16   Vous serez d'accord avec moi pour dire que cela semble être une obligation

 17   tout à fait claire pour la FORPRONU d'empêcher une nouvelle militarisation

 18   de la zone à partir du moment où elle a été démobilisée; exact ?

 19   R.  Le texte ne le dit pas, n'est-ce pas ?

 20   Q.  "Le rôle joué par les forces des Nations Unies serait de faire en sorte

 21   que ces zones restent démilitarisées…"

 22   R.  D'accord.

 23   Q.  Donc, c'est exact ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Alors, vous serez d'accord pour dire que le paragraphe ne dit pas qui a

 26   la responsabilité d'imposer une démilitarisation; est-ce exact ?

 27   R.  Là encore, c'est une opération de maintien de la paix et non pas

 28   d'établissement de la paix, donc ce n'est pas contraignant.


Page 3236

  1   Q.  Mis à part le fait que la FORPRONU est responsable, d'après ce qu'on

  2   lit ici, de "faire en sorte que ces zones restent démilitarisées".

  3   R.  Oui, mais la FORPRONU n'était pas autorisée à avoir recours à la force

  4   à cet égard.

  5   Q.  Donc, ils ont l'obligation que, d'après ce que vous nous dites, ils ne

  6   seraient peut-être pas en mesure de mener à bien ? Je retire ma question.

  7   Prenez la page 15, s'il vous plaît, dans le prétoire électronique. Ce sera

  8   le paragraphe 15 de l'annexe. Vers le bas de la page, nous avons un

  9   paragraphe qui commence par "démilitarisation des zones protégées des

 10   Nations Unies". Voilà comment se lit le texte :

 11   "Sur la base du calendrier qui a fait l'objet d'un accord, la

 12   démilitarisation des zones protégées de l'ONU serait mise en œuvre aussi

 13   rapidement que possible de la manière suivante…"

 14   Et puis, premièrement, il est dit que :

 15   "Toutes les unités et tout le personnel de l'armée populaire yougoslave, la

 16   JNA … et de la Garde nationale croate, ainsi que les unités et les

 17   effectifs de la Défense territoriale non basés dans les zones protégées de

 18   l'ONU seraient retirés de ces zones.

 19   "L'ensemble des unités et des effectifs de la Défense territoriale basés

 20   dans les zones protégées de l'ONU seraient démantelés et démobilisés. Le

 21   démantèlement comprendrait une dissolution provisoire des structures de

 22   commandement de ces unités."

 23   (c), et je vous soumets qu'il s'agit de la partie la plus importante :

 24   "Les armes des unités de la Défense territoriale et les effectifs de la

 25   Défense territoriale basés dans les zones protégées de l'ONU seraient remis

 26   entre les mains des unités de la JNA ou de la Garde nationale croate avant

 27   que ces unités ne se retirent des zones protégées de l'ONU…"

 28   Est-ce que cela semble entraîner une obligation pour la JNA de mettre en


Page 3237

  1   œuvre, si cela est nécessaire, la démobilisation, et je pense que c'est dit

  2   très clairement pour ce qui est des unités de la Défense territoriale et

  3   des effectifs de la Défense territoriale ?

  4   R.  Oui. Si je peux ajouter, c'est que ce sont mes collègues militaires de

  5   l'ONU qui se sont occupés de cela surtout.

  6   Q.  Mis à part le fait que vous aviez des rencontres avec le général

  7   Biorcevic, le commandant du 12e Corps, vous l'avez rencontré plutôt

  8   fréquemment; exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pourquoi ?

 11   R.  Parce qu'il voulait que l'on se voie, c'était lui qui prenait

 12   l'initiative de ces rencontres, et il était le seul représentant légal des

 13   autorités, pour autant que je le sache. Parce que cette administration

 14   locale autoproclamée n'était pas reconnue officiellement par les Nations

 15   Unies, mais bien entendu, d'autre part, il fallait bien qu'on traite avec

 16   eux parce que de fait --

 17   Q.  De fait quoi ?

 18   R.  Parce que de fait, ils constituaient le pouvoir local, les autorités

 19   locales.

 20   Q.  Mais lorsque vous parlez d'autorités de fait, est-ce que vous êtes en

 21   train de dire que la JNA était la seule à avoir la capacité, en réalité, de

 22   garantir la sécurité dans ce secteur, dans le secteur est, et là, je veux

 23   dire avant que la FORPRONU n'y soit déployée ?

 24   R.  Oui. Oui, c'est ce que je pourrais affirmer.

 25   Q.  Et pendant la période transitoire, le Bataillon russe était en train de

 26   se constituer pleinement, donc à ce moment-là il n'y avait que la JNA sur

 27   place; exact ?

 28   R.  Oui, c'est exact.


Page 3238

  1   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez de la Croatie non occupée, et donc

  2   on pourrait utiliser le terme du "territoire occupé de la Croatie" aussi.

  3   Mais vous, vous utilisez l'autre, le terme de la Croatie non occupée.

  4   Alors, est-ce que vous estimiez que le secteur est, du moins les zones où

  5   la JNA était présente, était occupé par la JNA ?

  6   R.  Oui.

  7   M. GOSNELL : [interprétation] Document 05929 à l'onglet 29, s'il vous

  8   plaît.

  9   Q.  Avant d'examiner ce document, de manière générale, quelle a été la

 10   fréquence de vos rencontres, soit avec le général Biorcevic, soit avec

 11   d'autres officiers de la JNA ?

 12   R.  De manière générale, lorsque je suis arrivé, dans un premier temps, je

 13   l'ai vu assez souvent parce que je me déplaçais beaucoup depuis le secteur

 14   vers la partie croate. Et à partir du moment où j'avais reçu des

 15   commentaires faits par la partie croate, je venais les rapporter au général

 16   Biorcevic et vice versa. Je communiquais et je transmettais les opinions

 17   différentes sur différentes questions. Donc je l'ai rencontré assez souvent

 18   au début de mon mandat. Et puis au fur et à mesure que le temps passait, je

 19   l'ai vu moins souvent. Après cela, j'ai surtout rencontré des représentants

 20   de la Krajina.

 21   Q.  Cela étant dit, avez-vous jamais rencontré le chef de la police

 22   militaire du 12e Corps ?

 23   R.  Rappelez-moi son nom ?

 24   [Le conseil de la Défense se concerte]

 25   M. GOSNELL : [interprétation]

 26   Q.  Kosutic, mais je ne connais pas son grade.

 27   R.  Il a sans doute assisté à mes réunions portant sur la reconnaissance.

 28   Moi, j'ai eu deux missions de reconnaissance, la première au début du mois


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  1   de mars lorsqu'il y avait un grand nombre de militaires qui était là sur le

  2   bateau du général Biorcevic, qui était amarré sur le Danube. Peut-être que

  3   c'était un de ces officiers, je ne me souviens pas l'avoir rencontré, en

  4   tout cas pas de façon régulière après ces premières réunions.

  5   Q.  Pouvons-nous regarder la page 3 du document ici, qui est à l'écran,

  6   s'il vous plaît.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Il est dit ici qu'il s'agit du 19 avril - et ceci fait référence, comme

  9   vous le dites au paragraphe 1 - "des dernières expulsions pendant la nuit à

 10   Dalj."

 11   Et ensuite, vous allez au paragraphe 3, et c'est cela qui --

 12   R.  Je suis à la page 2.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document ne comporte que deux pages.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Pardonnez-moi, première page, paragraphe 3.

 15   Q.  Il s'agit du paragraphe 3. C'est le paragraphe qui m'intéresse, où on

 16   peut lire, je cite :

 17   "Etant donné que nous ne pouvions pas rencontrer les représentants

 18   officiels haut gradés de la JNA, les officiers de liaison de la JNA ont été

 19   informés. Ils ont également été informés du pillage de 30 [comme

 20   interprété] maisons croates à" cela pourrait être Torjanci, je ne suis pas

 21   sûr, "par des soldats de la JNA (a rapporté la police civile des Nations

 22   Unies). La position de la FORPRONU concernant le manque de contrôle par la

 23   JNA de ses échelons supérieurs et inférieurs devenait donc manifeste."

 24   Si nous pouvons passer à la page 2, s'il vous plaît, au paragraphe 6.

 25   "D'après les éléments susmentionnés, vous constaterez encore une fois que

 26   la JNA perd le contrôle non seulement de ses propres soldats mais d'autres

 27   unités paramilitaires. Les preuves fournies lors de l'incident de Dalj

 28   démontrent que de tels paramilitaires étaient impliqués."


Page 3240

  1   Moi, ce qui m'intéresse au paragraphe 6, c'est la formulation que vous avez

  2   employée :

  3   "D'après les éléments susmentionnés, encore une fois, vous constaterez que

  4   la JNA perd le contrôle non seulement de ses propres soldats, mais des

  5   autres unités paramilitaires…"

  6   D'après vous, les unités paramilitaires à cette date, à savoir le 19 avril,

  7   date de ce rapport, étaient placées de facto sous le contrôle de la JNA ?

  8   R.  Je ne le qualifierais pas comme cela, mais ils exerçaient certainement

  9   une influence sur eux.

 10   Q.  Et d'après vous, ils auraient dû contrôler ces unités paramilitaires ?

 11   R.  Je ne pense pas que je dois vous fournir un avis sur la question. Ce

 12   que je peux vous dire, c'est qu'il y avait des personnes qui faisaient

 13   partie de ces opérations lancées par les paramilitaires et qui ont assisté

 14   à ces premières réunions que j'ai abordées, au début du mois de mars. Il y

 15   avait un nombre très important de soldats qui portaient des uniformes de

 16   l'armée irrégulière. Certains d'entre eux avaient même des grenades à main

 17   qui pendaient de leurs bretelles, et je ne pense pas qu'il s'agisse là d'un

 18   uniforme d'un soldat de l'armée régulière.

 19   Q.  Etait-ce lors de la réunion sur ce bateau sur le Danube, et ces

 20   paramilitaires étaient là ?

 21   R.  Oui, je crois que oui. Je crois que oui, parce que les uniformes

 22   n'étaient pas ceux d'une armée régulière.

 23   Q.  La raison pour laquelle je vous pose ces questions, vous dites que ce

 24   n'est pas à vous d'en parler, nous parlons du Plan Vance, et moi j'essaie

 25   de comprendre qui est responsable de quoi dans le cadre du Plan Vance.

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Et pardonnez-moi, au paragraphe 16 -- non, paragraphe 15(c), ce que

 28   nous voyons, c'est une déclaration indiquant que "les armes des unités de


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  1   la TO et des effectifs basés dans les zones protégées des Nations Unies" et

  2   moi, lorsque je parle de -- il s'agit d'un euphémisme lorsque vous faites

  3   référence aux effectifs basés dans les zones protégées des Nations Unies,

  4   c'est un langage diplomatique pour qualifier les paramilitaires --

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président.

  6   L'interprétation est celle de M. Gosnell. Monsieur le Témoin n'est pas dans

  7   l'obligation d'être d'accord. Si Me Gosnell souhaite demander au témoin

  8   s'il est d'accord, ce serait une autre question, mais je m'oppose à ce que

  9   ceci fasse partie de sa question formulée de cette manière.

 10   M. GOSNELL : [interprétation]

 11   Q.  Dans ce cas, retournons à L2. Gardez ceci à l'esprit, Monsieur, ce que

 12   vous venez de lire au paragraphe 6 de votre rapport, et retournons au L2.

 13   Regardons le Plan Vance, page 19 de l'annexe.

 14   Je vais vous la lire. Cela va s'afficher dans quelques instants sur l'écran

 15   qui est devant vous.

 16   "Les armes des unités de la Défense territoriale et les effectifs basés

 17   dans les zones protégées des Nations Unies seraient remises à la JNA…"

 18   D'après vous, que signifie cette référence aux "effectifs basés dans les

 19   zones protégées des Nations Unies" ?

 20   R.  Veuillez répéter votre question, s'il vous plaît.

 21   Q.  Bien sûr. On peut lire ici au début de la phrase, il s'agit de savoir

 22   ici à qui seront remises les armes suite à la démilitarisation. Et il est

 23   clairement indiqué ici au paragraphe 15(c), que les armes de la Défense

 24   territoriale seront remises à la JNA. Ensuite, il y a un deuxième groupe

 25   qui est identifié ici. Et on peut lire que :

 26   "…les effectifs basés dans les zones protégées des Nations Unies…"

 27   R.  Bien, je pense qu'il s'agirait là des paramilitaires.

 28   Q.  Merci. Et vous dites au paragraphe 6 - nous pouvons maintenant revenir


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  1   au 05929, s'il vous plaît, page 2. Pardonnez-moi si je vais d'un document à

  2   l'autre.

  3   "D'après les éléments susmentionnés, vous constaterez encore une fois

  4   que la JNA perd le contrôle, non seulement de ses propres soldats mais des

  5   autres unités paramilitaires…"

  6   Donc, ici on parle d'un rôle qu'aurait apparemment la JNA dans la

  7   démobilisation de ces unités paramilitaires. Nous sommes en présence ici

  8   des unités paramilitaires d'après vous, et ces unités étaient là sur le

  9   bateau de la JNA sur le Danube. Est-ce que vous dites dans ce paragraphe

 10   qu'à cette date vous estimiez que la JNA avait soit le contrôle de facto ou

 11   que la JNA n'avait pas le contrôle et aurait dû avoir le contrôle ? Est-ce

 12   là le point de vue de la FORPRONU ?

 13   R.  Veuillez répéter votre question, s'il vous plaît. Ou plutôt, permettez-

 14   moi de relire la question. Officiellement la JNA avait le contrôle.

 15   Q.  Officiellement et en substance aussi ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et d'après le plan Vance, c'est eux, la JNA qui devait avoir le

 18   contrôle sur la démobilisation de ces groupes, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, mais vous savez qu'il y a eu un autre mémorandum outre le plan

 20   Vance, qui détaille les modalités de cette démilitarisation de ces unités,

 21   et je crois que dans cet autre document rien n'est dit au sujet du fait que

 22   les armes seraient remises à la JNA. Je crois que vous constaterez que ces

 23   armes étaient censées être placées sous le contrôle des deux, à savoir de

 24   notre armée et des autorités locales. Il devait y avoir une remise de clés.

 25   Ceci devait être verrouillé, et nous avions un jeu de clés. Lorsque je dis

 26   "nous", je parle de notre armée et les autorités locales également. Donc,

 27   ce document précédent a été remplacé par un autre document.

 28   Q.  Nous allons y venir. Nous allons venir à ce changement.


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  1   Mais avant cela, je n'ai pas l'intention de revenir ou de parler de ce

  2   document maintenant.

  3   Mais puisque nous parlons de cela, si vous dites qu'il y avait un système

  4   de double verrouillage et que les autorités locales devaient détenir une de

  5   ces clés, vous vous souvenez que ce n'était pas la RSK ou le SBSO qui était

  6   censé détenir une de ces clés ? C'était l'"opstina", la municipalité locale

  7   qui était censée détenir une de ces clés ?

  8   R.  Il se peut que vous ayez raison. Mais là, c'est un aspect militaire de

  9   la mission. Je ne m'occupais absolument pas des aspects militaires de la

 10   mission, et je m'appuyais uniquement nos commandants militaires qui étaient

 11   là.

 12   Q.  Alors, revenons sur le L2, et écartons-nous un petit peu ou éloignons-

 13   nous un petit peu des questions militaires.

 14   R.  Permettez-moi --

 15   Q.  La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que je souhaite

 16   cadrer les questions liées à la police dans un cadre plus large et établir

 17   un lien avec les questions militaires, et je crois qu'il est impossible de

 18   parler de l'un sans parler de l'autre.

 19   R.  Oui.

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Pourrions-nous voir la page 12 de ce

 21   document, s'il vous plaît.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je vous fournir une explication

 23   complémentaire sur ce document du Conseil de sécurité de l'ONU ?

 24   M. GOSNELL : [interprétation]

 25   Q.  Je vous en prie.

 26   R.  Moi, je n'agissais pas sur les instructions de ce document parce que ce

 27   document a été modifié par la suite et amendé par d'autres documents qui

 28   précisaient les obligations, à la fois du personnel civil et du personnel


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  1   militaire, ou de la police civile. Ceci est expliqué de façon beaucoup plus

  2   claire dans cet autre document. Nous avons ce document. Je ne me souviens

  3   pas de son numéro. Je ne sais pas exactement quel numéro il porte. Et ce

  4   document que vous m'indiquez est en fait une fausse piste.

  5   Q.  Très bien. A cet égard, je ne pense pas qu'il s'agit d'une fausse

  6   piste, mais de toute façon nous allons parler des amendements ultérieurs au

  7   plan. Veuillez regarder le paragraphe 10, et nous allons parler de la

  8   question de la police. On peut lire :

  9   "La fonction qui revient aux Nations Unies de protéger les habitants dans

 10   les zones protégées sera partagé entre les forces des Nations Unies, les

 11   unités d'infanterie des forces des Nations Unies, et les observateurs de la

 12   police civile. L'infanterie s'assurerait ou garantirait que les zones

 13   protégées restent démilitarisées."

 14   Nous avons abordé cette question un peu plus tôt. Ensuite on peut lire :

 15   "Les observateurs de la police garantiraient que la police locale

 16   accomplirait ses obligations sans discrimination en termes de nationalité

 17   et dans le plein respect des droits humains des autres résidents…"

 18   Ensuite au paragraphe 12, on dit que les observateurs de la police civile

 19   ne seraient pas armés. Ensuite, page 14, paragraphe 19.

 20   Ensuite la partie essentielle :

 21   "Le maintien de l'ordre public dans les zones protégées consiste à dire que

 22   les forces de la police locale qui seraient responsables dans ce secteur ne

 23   porteraient que des armes de poing…"

 24   Est-ce exact qu'au plan légal ils n'étaient pas autorisés à porter

 25   plus que des armes de poing ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Et cela ne suffirait-t-il pas pour contrôler les paramilitaires qui

 28   avaient pour intention de déstabiliser la situation, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Ecoutez, je ne pense pas que je sois qualifié pour commenter cela.

  2   Q.  Eh bien, où étiez-vous ?

  3   R.  J'étais là.

  4   Q.  Alors, vous dites que vous avez vu quel type de personnes commettaient

  5   ces actes, des groupes de paramilitaires avec des fusils. Diriez-vous que

  6   la police portait des armes de poing et serait en mesure de les empêcher ?

  7   R.  Eh bien, quelques-uns de leurs propres policiers étaient impliqués dans

  8   ces expulsions, donc il s'agirait de leurs propres hommes.

  9   Q.  Il y avait certaines personnes dont vous avez parlé plus tôt, et vous

 10   avez dit que ces personnes prétendaient faire partie de la police, mais il

 11   se peut que ces personnes n'en aient pas fait partie ?

 12   R.  C'est exact.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, je vois l'heure.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Lubin, nous allons avoir

 16   notre deuxième pause, et nous allons revenir à 12 heures 45. Vous allez

 17   être raccompagné par M. l'Huissier. Merci beaucoup.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 19   [Le témoin quitte la barre]

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. L'audience est levée.

 21   --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

 22   --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, à la page 66 du

 24   compte rendu d'audience, on parle de la démobilisation des armes des unités

 25   de la Défense territoriale et les effectifs basés dans les zones protégées

 26   des Nations Unies seraient remises aux unités de la JNA. Et vous avez

 27   demandé au témoin si cette référence aux effectifs ou au personnel basés

 28   dans les zones protégées des Nations Unies correspond à quoi ? Et ensuite,


Page 3247

  1   vous dites qu'il est dit au début de la phrase : "Cela concerne la question

  2   de savoir à qui seront remises les armes issues de la démobilisation, et

  3   ensuite 15(c) il est dit très clairement que les armes de la Défense

  4   territoriale sont remises à la JNA, et ensuite il y a un deuxième groupe

  5   qui est identifié." Et on peut lire : "Personnel des Nations Unies." Et

  6   ensuite, vous avez la réponse que vous souhaitiez entendre, je suppose.

  7   Pouvons-nous maintenant passer au L2 -- voyons -- et ceci se trouvait à la

  8   page -- pourriez-vous m'aider, peut-être. Où cela se trouve-t-il ?

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président. Sur la

 10   page, on peut lire, page 19 de l'annexe.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Sur la page, il est dit 19.

 12   Voilà. Pourrions-nous passer à la page 18, s'il vous plaît, sous (a) et

 13   (b), où on peut lire toutes les unités et effectifs de l'armée nationale

 14   yougoslave, et au point (b), toutes les unités de la Défense territoriale

 15   et les effectifs basés dans les zones protégées des Nations Unies, n'est-ce

 16   pas ?

 17   M. GOSNELL : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous comprenez que chaque

 19   fois où on utilise le terme "effectifs" cela fait référence aux

 20   paramilitaires ?

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Je crois que oui. Je crois que cela dépend

 22   des éléments de preuve. A la manière dont je lis le cas, c'est

 23   effectivement le cas.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Cela me pose un problème, Maître

 25   Gosnell, dans la mesure où vous laissez entendre au témoin qu'il s'agit

 26   d'une catégorie distincte. N'auriez-vous pas dû lui poser la question au

 27   préalable pour savoir s'il estime qu'il s'agit là d'une catégorie

 28   distincte, et ensuite vous auriez pu lui permettre de lire la fin du texte,


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  1   car je pense qu'en lisant simplement ce texte, il s'agit des unités de la

  2   TO et ses effectifs.

  3   M. GOSNELL : [interprétation] Effectivement, je ne l'avais pas compris

  4   comme ça lorsque j'ai soumis la question au témoin, mais je veux bien être

  5   équitable envers le témoin et lui permettre de dire autre chose. Je n'ai

  6   pas voulu le contraindre à répondre de la sorte et --

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je suis très heureux d'entendre cela,

  8   parce que j'avais l'impression que ceci aurait pu être perçu comme des

  9   compétences en matière de contre-interrogatoire au regard de la common law,

 10   ce qui serait beaucoup moins apprécié par un juge venant du système romano-

 11   germanique. Je suis heureux d'entendre votre réponse.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Je n'avais pas l'intention de procéder ainsi.

 13   Honnêtement, moi j'ai compris ceci comme deux catégories distinctes.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Mais j'entends bien ce que vous comprenez

 16   également.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 18   Faites entrer le témoin, s'il vous plaît.

 19   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : veuillez corriger "et on y lit

 20   : et le personnel des Nations Unies" par "et on y lit : et les effectifs".

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Pour gagner du temps, peut-être pourrions-

 23   nous afficher le L2 -- ah, il est déjà à l'écran.

 24   Q.  Monsieur Lubin, si vous me le permettez, je souhaite revenir sur un

 25   sujet que nous avons déjà abordé et je souhaite vous permettre de réfléchir

 26   à la question de savoir si je vous ai peut-être imposé une réponse. Cela

 27   concerne -- si nous passons à la page suivante de ce document que vous avez

 28   maintenant sous les yeux, encore une fois je vais revenir sur la manière


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  1   dont ceci a été formulé, "les armes des unités de la Défense territoriale

  2   et les effectifs basés dans les zones protégées des Nations Unies…" je

  3   rechigne beaucoup à insister là-dessus, mais il se peut que ce qu'il est

  4   dit ici est le suivant : il s'agit des unités et du personnel ou les

  5   effectifs de la Défense territoriale dont les armes sont remises à la JNA.

  6   On peut lire le texte de cette manière ?

  7   R.  Vous me posez la question ?

  8   Q.  Pardonnez-moi, en fait, j'ai commis une erreur en insistant trop, donc

  9   je vous permets de fournir une autre réponse.

 10   R.  Le libellé de ce document a été remplacé par un autre document qui a

 11   précisé le rôle de chaque membre de la mission. C'était beaucoup plus

 12   simple, donc ce paragraphe n'est pas pertinent. Et je serais très heureux

 13   de répondre à des questions portant sur la version mise à jour du plan, la

 14   version que nous avons utilisée et qui nous servait de Bible dans le

 15   secteur.

 16   Q.  Je vais vous poser une question supplémentaire et faire appel à votre

 17   patience, car il s'agit du document qui a précédé celui dont vous parlez.

 18   Au paragraphe (d), on peut lire que "tous les paramilitaires, membres de

 19   l'armée régulière ou unités de volontaires ou des effectifs seront soit

 20   retirés des zones protégées des Nations Unies ou, si ces personnes résident

 21   dans ces zones, seront démantelés et démobilisés."

 22   R.  Encore une fois, je ne sais pas de quelle version il s'agit, parce que

 23   je ne l'ai pas sous les yeux.

 24   Q.  Passons maintenant à l'onglet de l'Accusation numéro 26, s'il vous

 25   plaît. Il s'agit là du 05919. Pourrions-nous regarder l'alinéa (b) à la

 26   page 5. Ceci semble être le communiqué de presse donné par M. Eckard vers

 27   le 14 avril. Est-ce que vous pensez que ceci illustre fidèlement le plan

 28   Vance tel qu'il a été mis en oeuvre ? Monsieur, je ne vous demande pas


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  1   d'analyser chaque disposition l'une après l'autre; il s'agit d'une question

  2   générale que je vous ai posée. Ceci reflète le plan Vance-Owen ?

  3   R.  Oui, tout à fait.

  4   Q.  Alors, si nous regardons simplement les paragraphes (a) et (b), encore

  5   une fois, il est fait mention ici du retrait de la JNA et des unités de la

  6   Défense territoriale ou de ses effectifs.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et ensuite :

  9   "Toutes les unités de la Défense territoriale et ses effectifs basés dans

 10   les zones protégées des Nations Unies signifient qu'ils doivent être

 11   démantelés et démobilisés … démobilisés signifie que le personnel en cause

 12   cesserait de porter un quelconque uniforme ou de porter des armes même

 13   s'ils continuent à être rémunérés par les autorités locales."

 14   Je suppose que vous n'accepteriez pas, Monsieur, qu'il y avait des groupes

 15   de paramilitaires ou d'individus armés qui pouvaient échapper à ces

 16   dispositions, qui ne sont pas censés être couverts par ces dispositions,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Non, ces dispositions ne pouvaient pas couvrir tout le monde.

 19   Q.  Si nous pouvons passer au haut de la page 6, je souhaite vous poser une

 20   question au sujet de la police -- ou peut-être, pardonnez-moi, restons sur

 21   la page 5, dernière question que nous avons abordée avant la pause, vous

 22   avez indiqué qu'il y avait eu un changement sur à qui devaient être remises

 23   les armes. Au paragraphe (c) :

 24   "Les armes … doivent être placées dans un système de double verrouillage,

 25   dans un entrepôt sécurisé avec une serrure contrôlée par la FORPRONU et

 26   l'autre par le président du conseil de 'l'opstina'."

 27   Pensez-vous qu'une meilleure traduction de "opstina" c'est

 28   "municipalité" ?


Page 3251

  1   R.  Je crois que oui, c'est la traduction.

  2   Q.  Savez-vous pourquoi cette clé devait être détenue par le président du

  3   conseil municipal ou du conseil de la municipalité par opposition à un

  4   quelconque membre du gouvernement régional du SBSO ?

  5   R.  Non. Il s'agit là d'une question militaire. Je n'ai pas de

  6   connaissances approfondies des raisons de cela.

  7   Q.  Alors, regardons s'il s'agit d'une question liée à la police. Regardons

  8   cela et tournons la page. Encore une fois, nous voyons la même disposition.

  9   En réalité, ceci ressemble, matériellement parlant, exactement aux

 10   dispositions du plan Vance qui se trouve au paragraphe 19 du plan Vance.

 11   Etant donné que vous avez ce document sous les yeux, lequel préférez-vous

 12   que nous utilisions, celui-ci ?

 13   R.  Ce n'est pas une question à savoir ce que je préfère ou pas. Il s'agit

 14   de savoir quelles sont les instructions en vertu desquelles nous

 15   intervenions. Je n'avais pas de choix en la matière.

 16   Q.  Alors, le premier paragraphe complet où on peut lire :

 17   "Les forces de la police locale étaient responsables de 'l'opstina'

 18   ou de la municipalité, des conseils municipaux existant dans les zones

 19   protégées des Nations Unies. Des structures policières régionales

 20   pouvaient-elles toujours exister dans la mesure où elles répondaient à ce

 21   principe décrit au-dessus au sujet de la composition nationale ou ethnique

 22   des forces de police locale".

 23   Comprenez-vous, avez-vous une quelconque connaissance de la question

 24   de savoir pourquoi les forces de la police locale devaient rendre compte

 25   aux conseils municipaux plutôt, par exemple, qu'aux structures régionales ?

 26   R.  Non, je n'en ai aucune idée.  

 27   Q.  Vous souvenez-vous de ces structures policières régionales ?

 28   R.  Non, pas du tout. C'était la police civile qui traitait des questions


Page 3252

  1   militaires. Moi, j'avais suffisamment à faire avec les questions civiles.

  2   Q.  Aviez-vous un laissez-passer de la JNA pour vous déplacer dans le

  3   secteur est ?

  4   R.  Non. On m'avait promis la liberté de circulation.

  5   Q.  Y avait-il d'autres représentants officiels des Nations Unis qui

  6   devaient avoir un laissez-passer de la JNA --

  7   R.  Non.

  8   Q.  -- pour se déplacer ?

  9   R.  Non.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Pourrions-nous voir l'onglet 21 du Procureur,

 11   c'est-à-dire 05163.

 12   Q.  Donc, pour suivre ma dernière question : est-ce que vous avez traversé

 13   les points de contrôle de la JNA lorsque vous vous êtes déplacé dans le

 14   secteur est ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Pourriez-vous décrire la fréquence de votre traversée de ces points de

 17   la JNA, des points de contrôle de la JNA ? A quel intervalle étaient-ils

 18   placés le long des routes, s'ils se trouvaient sur les routes ?

 19   R.  Très difficile de m'en souvenir, Monsieur Gosnell. Désolé.

 20   Q.  Alors, disons les choses ainsi. En périphérie, par exemple, d'Erdut où

 21   vous résidiez à l'époque, est-ce que vous avez traversé des postes de

 22   contrôle de la JNA dans toutes les directions ou une seule direction; vous

 23   en souvenez-vous?

 24   R.  Là encore, je ne saurais vous le dire à 100 % puisque nous n'étions

 25   jamais arrêtés, on nous avait donné toute liberté de circulation, c'est

 26   quelque chose que je n'aurais pu repérer. C'est un principe général dans

 27   toutes les opérations de maintien de la paix de l'ONU que la partie

 28   essentielle de notre tâche consiste à avoir liberté de circulation


Page 3253

  1   intégrale.

  2   Q.  Si nous pouvions aller à la page 3, vers le bas de la page, et cette

  3   partie-là du document est votre rapport où, tout du moins, vous êtes

  4   l'auteur de la première mouture et il semblerait que ce soit du 22 mai

  5   1992. En bas, au point 4, on y voit -- et ceci concerne l'expulsion

  6   Miklusevci qui a été réalisée le 13 mai [comme interprété], et tout

  7   simplement pour nous donner un contexte, vous dites que ceci a été commis

  8   par des personnes de la Défense territoriale, la police locale en civil, et

  9   d'autres personnes armées à la suite d'une nuit de terreur de ces maisons

 10   en lançant des grenades et par des tirs d'armes à feu. Vous en souvenez-

 11   vous ?

 12   R.  Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il y avait tant d'expulsions, je

 13   ne me souviens pas de celle-ci particulièrement. Mais peut-être que je

 14   pourrais jeter une certaine lumière sur la chose pour vous aider. Et de

 15   fait, j'ai bien été l'auteur du projet, mais le seul chargé de la diffusion

 16   était le commandant du secteur, le colonel Khromchenkov, Russe. Il

 17   s'agissait sans doute de son sentiment ou de ses informations qui ont été

 18   insérées dans mes propos pour la bonne raison que son anglais n'était pas

 19   suffisant. Donc, je ne me souviens pas de ce document-ci. Si vous me donnez

 20   une seconde, je vais essayer de vous apporter mon aide.

 21   Q.  Ce qui m'intéresse, ce n'est pas tellement -- c'est d'essayer de trier,

 22   de faire le distinguo entre ces groupes armés, ce qui m'intéresse, c'est au

 23   point 4, la rubrique 4, et ce que vous y dites, peut-être sur les

 24   instructions de Khromchenkov, vous déclarez :

 25   "Jusqu'à un désarmement total de la Défense territoriale et, je répète,

 26   toutes les personnes armées, jusqu'à cela se produise, il sera impossible

 27   de protéger les personnes qui reviennent individuellement sans un présence

 28   massive de l'ONU".


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  1   Donc, est-ce que je peux comprendre qu'à l'époque tout du moins, il n'y

  2   avait pas eu de désarmement comme prévu dans le plan Vance ?

  3   R.  Pourriez-vous me donner la date ?

  4   Q.  Le 22 mai 1992.

  5   R.  Il n'y a pas eu de désarmement complet qui s'est produit intégralement

  6   jusqu'à ce que mon mandat vienne à son terme le 1er juin.

  7   Q.  Et si, de fait, nous parlons du fait de terroriser par des personnes

  8   armées, il est peu probable, n'est-ce pas, que la police locale armée

  9   d'armes de poing soit en mesure de réprimer la violence, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je présume que oui, je peux en convenir.

 11   M. GOSNELL : [interprétation] Pourrions-nous voir le document de l'onglet

 12   23 du Procureur, 05162 [comme interprété].

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais ajouter quelque chose, j'ai une

 14   autre observation.

 15   M. GOSNELL : [interprétation]

 16   Q.  Oui, allez-y.

 17   R.  Le problème massif qui était le nôtre c'était que la police avait le

 18   rôle de Dr Jekyll et M. Hyde. D'un côté, c'était la police locale par

 19   intervalle, la minute suivante, c'étaient des paramilitaires ou, tout du

 20   moins, des personnes en uniformes différents, vêtues de façon différente et

 21   qui portaient des armes, mais ils étaient identifiés, très souvent, comme

 22   étant des agents de police qui étaient censés protéger les personnes mêmes

 23   qu'ils expulsaient.

 24   Q.  Et puisque les autorités de "l'opstina" avaient autorité par rapport à

 25   la police locale, il pourrait être difficile d'empêcher, par exemple, la

 26   Défense territoriale locale de devenir, tout d'un coup, une police locale ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Pourrions-nous voir le document du Procureur à l'onglet 23, il s'agit


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  1   de la pièce 05172. Page 3. Il s'agit d'un câble codé de Nambiar à Goulding.

  2   Expédié 25 mai, à peu près à la même période. Et au milieu de la page, on y

  3   voit :

  4   "La démobilisation des irréguliers et de la Défense territoriale, et

  5   la tâche suivante urgente…"

  6   Là encore, une indication claire, n'est-ce pas, qu'il n'y avait pas

  7   eu de démobilisation des forces telles que prévues dans le plan Vance,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Il y a une observation à la page 4 -- désolé, à la page 2, paragraphe

 11   4, que vous citez dans votre déclaration. Et dans votre déclaration, cela

 12   se trouve au paragraphe 89.

 13   "Notre propre rapport indique un climat d'intimidation et d'hostilité

 14   par les éléments serbes les plus sauvages envers les différentes minorités

 15   nationales, tout particulièrement dans le secteur est … nous avons

 16   l'impression claire que les actions dans le secteur est ne sont pas

 17   intégralement locales…"

 18   Comprenez-vous ce que Nambiar voulait dire lorsqu'il dit que les

 19   actions du secteur est ne sont pas intégralement faites maison ?

 20   R.  Non, je ne sais pas ce qu'il essaie d'indiquer.

 21   Q.  Vous nous avez parlé quelque peu de vos contacts avec la JNA. Pourriez-

 22   vous nous dire quelle était la fréquence de ces contacts avec les autorités

 23   de l'"opstina" ?

 24   R.  Les autorités de l'"opstina" étaient parfois très difficiles à trouver.

 25   Nous n'avions pas de réunions régulières. Je pouvais mettre sur pied des

 26   réunions de groupe de temps à autre. Quelle était la fréquence de mes

 27   rencontres avec ces autorités ? Une fois toutes les deux semaines, dix

 28   jours, par là.


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  1   Q.  Vous décrivez dans nombre de vos rapports, par exemple, le fait de vous

  2   rendre à Beli Manastir ou de vous rendre sur d'autres sites, et ces

  3   rapports sont fréquents. Pourrait-on dire que la première personne que vous

  4   alliez chercher quand vous vous rendiez ces sites était de fait les

  5   autorités locales de l'"opstina" ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et qui serait-ce d'ordinaire ? Le maire ? Le chef de la police ?

  8   R.  Les deux. Parfois ou d'ordre général, le maire, mais parfois le chef de

  9   la police serait présent.

 10   Q.  Peut-on également dire que lorsque vous vous déplaciez -- non, pas

 11   toujours, mais si vous arriviez dans un secteur, votre objectif était de

 12   rencontrer ces autorités locales, n'est-ce pas ?

 13   R.  Mon objectif serait de rencontrer quelqu'un, oui, ou d'assister à une

 14   expulsion ou des résultats d'expulsion.

 15   Q.  Avez-vous des éléments de preuve que ces "opstina" étaient un

 16   commandement central solide ou est-ce que c'était tout simplement des

 17   autorités qui avaient leur propre compétence ?

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Pourrions-

 19   nous ventiler la chose en deux questions. Il me semble que cette nature

 20   cumulée sème quelque peu le trouble. Enfin, c'est ce qu'il me semble.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Je pense que c'est clair.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A mes yeux également.

 23   Voudriez-vous répondre à la question, Monsieur Lubin ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 25   J'ai vu des éléments de preuve ces "opstina" étaient sous un commandement

 26   central très solide car à plusieurs reprises lorsque je leur apportais une

 27   solution au maire local ou tout autre représentant local, ils me

 28   répondaient : Il nous faudrait nous adresser à Knin avant de pouvoir vous


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  1   donner une réponse en la matière. Et je crois que ceci est relevé dans l'un

  2   des documents joints à mon rapport, ou à ma déclaration elle-même.

  3   M. GOSNELL : [interprétation]

  4   Q.  Cela est une réponse très surprenante parce que j'ai lu nombre de vos

  5   rapports. J'ai lu votre déclaration et j'ai lu nombre de documents qui ne

  6   se trouvent pas dans votre rapport.

  7   R.  Qu'est-ce qui est surprenant ?

  8   Q.  Pourriez-vous nous situer, vous souvenir des circonstances dans

  9   lesquelles quelqu'un aura dit : Je veux prendre contact avec Knin et je

 10   reviendrai vers vous ?

 11   R.  Oui. Je me souviens de ces termes exacts, qui ont été empruntés

 12   plusieurs fois.

 13   Q.  Et s'il tel était le cas, pourquoi ne pas tout simplement demander à

 14   Knin d'émettre ou d'exercer des pressions sur Knin pour donner des

 15   instructions générales à ces autorités ?

 16   R.  C'était la tâche de mon superviseur. Je n'avais pas moi le contrôle de

 17   tout autre secteur.

 18   Q.  Et quel est l'objectif de rencontrer - quand les gens vous disaient :

 19   Nous allons prendre contact avec Knin - pourquoi avez-vous rencontré M.

 20   Hadzic, Mladen Hadzic ?"

 21   R.  Ma tâche était coordinateur civil. Il me fallait coordonner avec les

 22   autorités locales. Qu'ils m'aient écouté, eh bien, cela leur revenait.

 23   Q.  Considérez-vous, Monsieur, le Dr Mladen Hadzic être une autorité locale

 24   ou régionale ?

 25   R.  Je considérais qu'il était une autorité locale.

 26   Q.  Quel était son poste ?

 27   R.  Je ne suis pas sûr du titre qu'il portait. Ce n'était pas le maire.

 28   C'était un poste supérieur, président ou quelque soit le terme qu'on


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  1   empruntait pour l'"opstina". Je crois que nous avons son poste.

  2   Q.  Avez-vous un concept des limites géographiques de l'"opstina" selon

  3   laquelle il était le chef selon vous ?

  4   R.  Oui, je ne saurais vous l'indiquer, mais je crois que cela est cerné

  5   sur les cartes que nous avons, les "opstina" veux-je dire. Cela se serait

  6   trouvé dans la région de Dalj, Erdut-Dalj, ç'aurait été là son "opstina".

  7   Vous voudriez bien m'excuser d'écorcher ce nom.

  8   Q.  J'aimerais maintenant revenir sur les incidents individuels des

  9   expulsions dont vous avez parlé dans votre déclaration. Le premier - nous

 10   pouvons maintenant passer un autre document sur l'écran - le premier que

 11   vous décrivez -- enfin, pas forcément le premier, mais l'un de ces

 12   événements est écrit au paragraphe 47 de votre déclaration, et vous y

 13   décrivez des autocars qui arrivent qui étaient peints en bleu-gris. Des

 14   hommes armés habillés d'uniformes de camouflage, mais sans aucune autre

 15   caractéristique distincte, faisaient montrer les gens à bord.

 16   Comment décririez-vous l'identité de ces personnes, ou le pouvez-vous ?

 17   Pouvez-vous décrire de quelle que façon que ce soit situer leur affiliation

 18   au-delà de ce que vous déclarez dans votre déclaration ?

 19   R.  C'était là la première expulsion à laquelle j'ai assisté en personne.

 20   Si vous revenez aux paragraphes antérieurs, vous y verrez que je viens

 21   d'arriver dans le secteur. Et je crois que c'était en fin de journée. Et

 22   j'ai reçu un message émanant du CICR -- oui, je me souviens. On m'a demandé

 23   de m'y rendre et d'aller immédiatement sur les lieux. La scène est celle

 24   que je décris. Quelle était votre question, Maître ?

 25   Q.  Je vais vous poser une question précise.

 26   Avez-vous vu que les hommes qui étaient armés se servaient de ces armes

 27   pour menacer les personnes pour qu'elles montent dans l'autocar ou pas ?

 28   R.  Oui. Les personnes étaient déjà dans l'autocar.


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  1   Q.  Donc, vous n'avez pas vu ?

  2   R.  Ce n'est pas ce que j'ai vu, je n'ai pas vu le début de l'expulsion.

  3   J'ai vu les autocars alors qu'ils allaient partir, et je suis monté et je

  4   me suis adressé aux personnes.

  5   Q.  Donc vous ne pouvez pas dire si les personnes armées se trouvaient en

  6   ce lieu à ce moment-là pour forcer les gens à monter dans l'autocar plutôt

  7   que des personnes aient été intimidées, contraintes, menacées auparavant,

  8   ce qui les a amenés à monter dans l'autocar ?

  9   R.  A cette occasion particulière, je n'ai pas vu qui les a contraints à

 10   monter dans les autocars.

 11   Q.  Mais vous voyez la distinction que j'essaie d'obtenir --

 12   R.  Je comprends --

 13   Q.  [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell, Monsieur Lubin,

 15   avez-vous entendu l'intervention des interprètes ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu la question.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les interprètes vous demandent de ne

 18   pas chevaucher les interventions.

 19   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Je présente mes excuses aux interprètes.

 21   Q.  Donc, la question est la suivante : à cette occasion - nous parlons de

 22   cet événement-là - était-il vrai qu'ils avaient été menacés antérieurement,

 23   ce qui les a amenés à monter dans les autocars dans un certain sens de

 24   façon volontaire ou encore ces personnes avaient été contraintes à monter

 25   dans l'autocar par les personnes qui étaient armées et qui se trouvaient

 26   sur place ?

 27   R.  Je peux indiquer de façon catégorique qu'ils ne sont pas montés dans

 28   l'autocar de façon volontaire. Et la deuxième partie de la question est de


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  1   savoir s'ils avaient été contraints de monter dans ces autocars par ces

  2   personnes-là; je l'ignore, car je suis arrivé plus tard sur les lieux.

  3   C'était le premier mouvement de population auquel j'ai assisté

  4   personnellement. Après cela, immédiatement, j'ai contacté le bureau de

  5   Hadzic, je parle du Hadzic autochtone, pour mettre en place une procédure

  6   par laquelle ce type de chose ne se produirait pas à nouveau.

  7   S'il y avait un mouvement soi-disant volontaire des populations, que son

  8   bureau devait nous donner un préavis de 24 heures au minimum nous

  9   permettant de converser librement avec les expulsés pour voir si ce

 10   mouvement était volontaire, et peut-être de saisir pourquoi ils avaient

 11   remis toutes leurs possessions dont ils étaient propriétaires au

 12   gouvernement local, y compris du matériel agricole onéreux et tous leurs

 13   effets personnels.

 14   Q.  Au titre de notre Règlement, je suis tenu de vous dire que nous

 15   n'allons pas accepter votre affirmation, mais je ne vais pas vous

 16   l'expliciter ici. Ce que je voudrais maintenant parcourir avec vous, c'est

 17   la teneur de votre déclaration pour essayer de la comprendre. Ici, vous

 18   dites que les personnes expulsées étaient terrifiées, qu'il s'agissait

 19   surtout de personnes âgées, de femmes, d'enfants, que les enfants

 20   pleuraient.

 21   "J'ai demandé s'ils partaient de leur plein gré, mais ils avaient trop peur

 22   de répondre. C'était clair à toutes les personnes présentes que ces gens-là

 23   ne partaient pas volontairement. Ils n'avaient que quelques petits

 24   baluchons de vêtements ou des bagages à main et ils partaient après avoir

 25   tout laissé, toutes leurs possessions, leurs foyers, leurs meubles, leur

 26   bétail, leurs engins agricoles, enfin, tout ce qu'ils avaient."

 27   Comment est-ce que cela correspond à ce que vous avez vu par rapport aux

 28   réfugiés hongrois de Baranja ?


Page 3262

  1   R.  Comme je l'ai déjà dit, c'était une exception à la règle. Ces gens-là

  2   avaient été informés deux jours auparavant, ils s'étaient préparés à partir

  3   et ils voulaient partir parce qu'ils étaient menacés. Et je dois ajouter

  4   quelque chose ici. Il y a tant de formes de violence. Torture

  5   psychologique, des menaces implicites, être privé de sommeil à cause de ces

  6   menaces, l'ensemble de cette ambiance dans la région est quelque chose que

  7   je devrais vous décrire comme étant toxique. On pouvait sentir la haine

  8   omniprésente. C'était vraiment un moment très difficile à passer là-bas, et

  9   si je me rappelle maintenant cette expulsion en particulier sur laquelle

 10   vous m'interrogez, ma première confrontation à cette sauvagerie, très

 11   franchement, je dois vous dire que j'ai été choqué. Je ne pensais pas que

 12   l'homme civilisé pouvait encore déployer ce type de comportement. Je

 13   pensais que cela appartenait au passé et que c'était mort avec le régime

 14   nazi de la Seconde Guerre mondiale, mais apparemment ce n'était pas le cas.

 15   Q.  Je ne voudrais pas polémiquer avec vous, mais nous parlons ici de

 16   responsabilité individuelle. C'est de cela qu'il s'agit en l'espèce. Et ce

 17   que j'essaie de faire préciser ici, c'est un tout petit point, mais c'est

 18   un point important dans le contexte dans lequel nous nous situons -- mais

 19   je vous entends entièrement dans ce que vous avez dit. Dans ce contexte,

 20   les circonstances dans lesquelles se sont trouvés ces individus, d'après

 21   vous, étaient-elles différentes de ce que vous avez vu par rapport aux

 22   individus auxquels vous avez prêté votre assistance pour qu'ils quittent la

 23   Baranja ?

 24   R.  Dites-moi à quoi vous pensez lorsque vous dites "conditions".

 25   Q.  Le fait que ces expulsés étaient terrifiés, qu'ils pleuraient, qu'ils

 26   avaient peur, qu'ils ne partaient pas volontairement même s'ils voulaient

 27   partir pour des raisons de sécurité, qu'ils n'avaient que des petits

 28   baluchons de vêtements ou des bagages à main et qu'ils avaient abandonné


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  1   tout ce qu'ils avaient, est-ce que cela s'applique également aux individus

  2   de Baranja ?

  3   R.  De manière générale, oui, mis à part les baluchons de vêtements. Les

  4   réfugiés hongrois avaient plus de leurs biens personnels sur eux; ils

  5   avaient leurs valises, et cetera. Ils avaient eu un peu de temps pour faire

  6   leurs valises. Mais l'ambiance dans laquelle se déroulent ces expulsions,

  7   leur sentiment, c'était la même chose. Ces gens étaient dans une situation

  8   de détresse. Il faut savoir que ces gens-là avaient passé là leur vie

  9   entière. C'était leur chez eux, leur foyer. On les appelait Hongrois, mais

 10   ils étaient en fait expulsés vers un pays qu'ils ne connaissaient pas. La

 11   Hongrie, c'était un pays qu'ils ne connaissaient pas.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande l'affichage du 1D230, à savoir

 13   l'onglet 1 de la Défense.

 14   Q.  Nous avons maintenant une déclaration d'un individu qui a quitté Dalj à

 15   peu près au même moment. Je vais demander que l'on affiche la page 2, s'il

 16   vous plaît.

 17   R.  Excusez-moi, quelle est la date de ce document ?

 18   Q.  C'est une déclaration qui a été donnée plusieurs années après les

 19   événements.

 20   R.  Excusez-moi --

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Puis-je avoir plus d'information de la part

 22   de M. Gosnell sur ce document.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Cela vient des communications qui ont été

 24   faites par l'Accusation -- en fait, je ne suis pas tout à fait certain

 25   qu'il s'agisse bien de quelque chose qui nous a été communiqué par le

 26   bureau du Procureur, peut-être que cela vient des autorités croates

 27   directement.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Dans la mesure où une déclaration de témoin


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  1   a pu être recueillie dans le cadre d'une enquête locale, nous nous opposons

  2   à ce que ce soit présenté à ce témoin. Je pense que nous avions des règles

  3   en vigueur sur les citations faites à partir de documents et sur le fait

  4   que nous n'allions pas montrer les documents au témoin. Peut-être que je me

  5   trompe.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est une déclaration du témoin

  7   devant ce tribunal-ci ?

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  9   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, avons-nous raison de

 11   penser que vous allez montrer un extrait de ce document au témoin et que

 12   vous allez lui poser une question par la suite ?

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est à vous.

 15   M. GOSNELL : [interprétation]

 16   Q.  Ce témoin ---

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non, justement, Maître Gosnell, vous

 18   le montrez au témoin, cet extrait qui vous intéresse; vous n'en donnez pas

 19   lecture au compte rendu d'audience, et puis ensuite, vous posez votre

 20   question.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, je comprends, Monsieur le Président.

 22   Q.  Vous avez entendu la consigne du Président, c'est ce premier paragraphe

 23   qui m'intéresse, Monsieur. Il semblerait que cette personne déclare qu'on

 24   lui avait interdit avant cela de partir, que quelqu'un du côté serbe lui a

 25   interdit de partir et qu'il attendait l'arrivée de la FORPRONU exactement

 26   pour pouvoir partir. Seriez-vous d'accord -- en fait, je ne pense pas qu'il

 27   y ait un désaccord entre nous, Monsieur. Est-ce que vous accepteriez que

 28   dans certaines circonstances, l'ambiance serait telle que des individus de


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  1   Dalj, d'Erdut ou d'Aljmas auraient effectivement envie de quitter l'endroit

  2   où il se trouvait ?

  3   R.  Attendez, je vais reprendre votre premier point, Maître Gosnell. Vous

  4   dites que cette personne attendait notre arrivée avant de partir, mais il

  5   me semble que votre interprétation est erronée.

  6   Q.  Vous avez tout à fait le droit de dire cela. Je ne peux pas dire qu'il

  7   déclare qu'ils étaient en train d'attendre --

  8   R.  L'arrivée de quelqu'un.

  9   Q.  Ce que le texte nous dit, c'est qu'il y a une concordance au niveau du

 10   temps, n'est-ce pas ?

 11   R.  Non, il nous donne simplement la date, je pense. Il nous dit "je ne

 12   suis parti que lorsque la FORPRONU est arrivée", donc il nous précise le

 13   moment où cela se passe. Peut-être que vous l'interprétez différemment,

 14   mais moi, je ne vois pas ce que vous dites. Je ne vous trouve pas dans le

 15   texte.

 16   Mme BIERSAY : [interprétation] Je manque peut-être de patience, mais est-ce

 17   que le conseil de la Défense a l'intention de montrer au témoin également

 18   la troisième phrase ? Parce que je pense qu'il me semble que l'on comprend

 19   mal l'information contenue dans ce document.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense que le témoin devrait

 21   prendre connaissance de l'ensemble de ce paragraphe, pas seulement de la

 22   première, de la deuxième ou de la troisième phrase.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Cela me convient parfaitement, Monsieur le

 24   Président. Et ensuite, je m'apprêterai à lui poser une question, mais ma

 25   question, en effet, se fonde sur la teneur de ce paragraphe.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pas de problème.

 27   M. GOSNELL : [interprétation] Et je pense que j'ai le droit de décrire cela

 28   sans le représenter de manière erronée.


Page 3266

  1   Q.  Monsieur, la question est de savoir si vous voyez ici que le témoin

  2   semble affirmer qu'il n'était pas dans la possibilité de partir avant

  3   l'arrivée de la FORPRONU, qu'il avait envie de partir cependant, et qu'à

  4   partir du moment où la FORPRONU est arrivée, il a été en mesure de partir;

  5   exact ?

  6   R.  Là encore, Maître Gosnell, avec tous mes respects, c'est une femme qui

  7   parle de cela et elle parle de son "mari". Mais effectivement, vous avez

  8   relaté son propos correctement, me semble-t-il.

  9   Q.  Et, dans le cas de cet individu, il ne s'agirait pas d'avoir besoin de

 10   la force, d'avoir recours à la force pour les faire monter à bord d'un

 11   autocar sous la menace d'un fusil; exact ?

 12   R.  A en juger d'après ce qui s'était passé précédemment, en particulier ce

 13   qui est arrivé à son mari, je peux complètement et parfaitement comprendre

 14   qu'elle se soit portée volontaire de partir.

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

 16   dossier.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] L'Accusation s'opposera au versement de ce

 18   document. Il s'agit d'une déclaration. Nous devons appliquer certaines

 19   procédures pour verser au dossier des déclarations, et je ne pense pas que

 20   ces procédures aient été respectées ici. La Défense a montré un paragraphe

 21   au témoin, lui a demandé de formuler des commentaires sur une

 22   interprétation formulée par le conseil, au fond, sur la première phrase de

 23   se paragraphe, et je pense qu'il ne serait pas approprié de verser au

 24   dossier ce document.

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Très brièvement, je souhaite répondre,

 26   Monsieur le Président. Compte tenu de la nature des pièces à conviction qui

 27   ont été reçues au dossier par le truchement de ce témoin, y compris une

 28   très grande quantité de déclarations qui non seulement n'avait pas été


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  1   recueillie par une instance judiciaire, qui était recueillie par Dieu sait

  2   qui, il me semble que cela va un peu trop loin. Et je tiens à souligner que

  3   de nombreuses déclarations figurent à l'annexe de la déposition de ce

  4   témoin. Je pense qu'il n'est pas inapproprié de verser cela au dossier pour

  5   des raisons de récusation.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je ne voudrais pas qu'on soit acculé.

  7   Nous allons revenir à cela demain ou même éventuellement, nous allons

  8   l'aborder dans une déclaration écrite.

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Je vous remercie.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous allons accorder une cote MFI.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote D33 MFI.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] 05928, s'il vous plaît, l'onglet 28.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux préciser quelque chose ?

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Maître Gosnell, vous venez de dire, compte

 16   tenu de la nature des pièces à conviction qui ont été versées au dossier

 17   par le truchement de ce témoin, y compris la grande majorité de ces

 18   déclarations qui non seulement n'ont pas été recueillies par une instance

 19   judiciaire -- permettez-moi de préciser que dans leur ensemble, ces

 20   déclarations à la police qui figurent en pièces jointes à ma déclaration

 21   ont été recueillies par des autorités de police locale. Et à cet égard, à

 22   un moment en juin 1992 j'ai reçu une lettre qui m'a été adressée par le

 23   chef de la police de la FORPRONU en personne disant que quelque 650

 24   dossiers avaient été relayés aux autorités de la police locale et qu'à

 25   l'époque il n'y a eu d'enquête portant sur aucun de ces dossiers. Je vous

 26   remercie.

 27   M. GOSNELL : [interprétation] A moins que cela ne soit dans la déclaration,

 28   je demanderais que l'on expurge cette réponse.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Elle figure bien dans ma déclaration.

  2   M. GOSNELL : [interprétation]

  3   Q.  J'accepte. A ce moment-là, abordons le document que nous avons sous les

  4   yeux. La date est celle du 19 avril 1992. Cela concerne une expulsion qui

  5   se serait produite prétendument vers Nemetin, en passant par Sarvas. Et il

  6   semblerait que l'expulsion a eu lieu la nuit, donc la nuit précédente,

  7   d'après ce qu'il me semble. Et vous dites :

  8   "Compte tenu des circonstances, la situation ne pouvait pas être contrôlée

  9   par la FORPRONU puisque les expulsions se produisaient pendant la nuit…"

 10   Alors, est-ce que vous vous pouvez nous préciser quelle est la différence

 11   sur le plan sécuritaire entre la nuit et le jour dans cette zone ?

 12   R.  Non, je ne peux pas parce que la JNA avait imposé un couvre-feu et nous

 13   n'étions pas autorisés à patrouiller après la tombée de la nuit. Puis-je

 14   vous poser une autre question à propos de ce que vous affirmez, Monsieur

 15   Gosnell ? Puis-je vous demander pourquoi vous parlez d'"expulsions

 16   présumées" ? Parce que ces expulsions ont vraiment eu lieu. Il ne s'agit

 17   pas de quelque chose qui relève de nos imaginations.

 18   Q.  Quand le couvre-feu de la JNA est-il entré en vigueur, d'après votre

 19   souvenir ?

 20   R.  Le couvre-feu de la JNA est entré en vigueur -- la plupart du temps,

 21   pour l'essentiel, quand j'étais là. Je pense qu'il n'y en a plus eu après

 22   lors de la mission, et je crois que ceci figure également dans ma

 23   déclaration.

 24   Q.  Et avez-vous remarqué qu'ils contrôlaient les déplacements, qu'il y

 25   avait un contrôle des déplacements pendant le couvre-feu ?

 26   R.  Ecoutez, je ne me suis livré à aucune observation étant donné que je

 27   n'étais pas autorisé à sortir la nuit.

 28   Q.  On peut lire ici :


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  1   "La JNA ne contrôlait pas la situation et la police locale n'effectuait pas

  2   de patrouilles la nuit."

  3   Vous êtes-vous jamais renseigné sur la question de savoir si oui ou non la

  4   police était autorisée à patrouiller la nuit conformément au couvre-feu de

  5   la JNA ?

  6   R.  Non, du tout.

  7   Q.  Avez-vous jamais entendu parler de cela ?

  8   R.  Alors, quand vous dites "police", vous parlez de quelle police ?

  9   Q.  Quelle que soit la police qui était en ville, celle que l'on trouve en

 10   bas de la page de votre rapport.

 11   R.  Pourriez-vous m'indiquer à quel endroit cela se trouve, Maître Gosnell

 12   ?

 13   Q.  A la toute dernière phrase ici, si nous pouvons faire défiler le texte

 14   vers le bas, s'il vous plaît.

 15   "La JNA ne contrôle pas la situation et la police locale n'effectue pas le

 16   contrôle la nuit."

 17   R.  Si j'ai dit cela, c'est que ça doit être exact.

 18   Q.  D'après ce que je comprends, ceci est exact et je ne suis pas en

 19   désaccord avec cela. La question que je vous pose c'est de savoir si vous

 20   avez jamais entendu dire que la police n'était pas autorisée à patrouiller

 21   la nuit conformément à ce couvre-feu ?

 22   R.  Non, je n'ai pas entendu parler de cela. Mais ceci n'aurait aucun sens,

 23   cela faisait partie d'un seul et même organe. Il s'agissait de deux

 24   autorités yougoslaves.

 25   Q.  Donc, d'après vous, il ne peut pas y avoir de différence entre la JNA

 26   et la police en termes de contrôle, de capacité, de prise de décision ou de

 27   capacité à réprimer la violence ?

 28   R.  Non, je n'ai pas dit cela, me semble-t-il.

 


Page 3270

  1   Q.  Alors, la question qui vous a été posée est celle-ci - alors revenons à

  2   la question, peut-être que vous pourriez simplement répondre à la question

  3   et nous passerons ensuite à la question suivante - avez-vous jamais entendu

  4   dire que la police était autorisée, d'après les termes du couvre-feu, de

  5   patrouiller la nuit ?

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] J'avance que cette question a obtenu une

  7   réponse à la ligne 16 de la page 93 :

  8   "Non, je n'ai pas entendu parler de cela."

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Bien. Merci. Pourrions-nous afficher le

 10   05929, onglet 29 de l'Accusation, s'il vous plaît.

 11   Q.  Nous avons déjà regardé ce document et nous le regardons une nouvelle

 12   fois. Encore une fois, ceci concerne les expulsions ou les expulsions

 13   présumées de Dalj les 18 et 19 avril. D'après votre rapport, il semble ici

 14   que la première personne du côté serbe à laquelle vous souhaitez parler de

 15   cette situation est la JNA, n'est-ce pas ?

 16   R.  La JNA était omniprésente dans notre camp. Il y avait toujours un

 17   officier, un officier de liaison, dans un bureau à proximité. Donc, c'était

 18   la personne que je contactais.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Pourrions-nous afficher maintenant le P191,

 20   onglet de l'Accusation 78. Ceci ne devrait pas être diffusé à l'extérieur.

 21   Je crois qu'il faut passer à huis clos partiel.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 24   Messieurs les Juges. Merci.

 25   [Audience à huis clos partiel]

 26   (expurgé)

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 28   (expurgé)


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 13  Pages 3271-3274 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  1   (expurgé)

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 17   [Audience publique]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Lubin, nous en avons terminé

 19   pour aujourd'hui. Nous reviendrons dans le prétoire demain matin à 9

 20   heures. Je dois vous rappeler que vous êtes toujours sous serment, ce qui

 21   signifie que vous ne pouvez aborder votre déposition avec quiconque, et que

 22   vous ne pouvez pas parler avec les parties. M. L'Huissier va vous

 23   raccompagner. Merci beaucoup.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   [Le témoin quitte la barre]

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] S'il n'y a pas d'autres questions que

 27   nous puissions aborder dans les deux minutes qui suivent, nous levons

 28   l'audience.

 


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  1   --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le mardi, 5 mars

  2   2013, à 9 heures 00.

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