Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 17 juillet 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans le

  6   prétoire et dans les pièces adjacentes.

  7   Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Messieurs les Juges. Affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les parties peuvent-elles se

 11   présenter. L'Accusation pour commencer.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 13   les Juges. Douglas Stringer avec Thomas Laugel, Matthew Olmsted et notre --

 14   c'est notre équipe pour aujourd'hui.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Maître Zivanovic.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pour la Défense de M. Goran Hadzic, Zoran

 18   Zivanovic et Christopher Gosnell. Merci.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous pouvons faire entrer le témoin

 20   dans le prétoire, s'il vous plaît.

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Jaksic. Veuillez

 23   vous asseoir.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, c'est à vous.

 26   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   LE TÉMOIN : DUSAN JAKSIC [Reprise]

 28   [Le témoin répond par l'interprète]


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  1   Contre-interrogatoire par M. Zivanovic : [Suite]

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jaksic.

  3   R.  Bonjour, Monsieur Zivanovic.

  4   Q.  Je voudrais que l'on termine de parler de la question des uniformes que

  5   nous avons amorcée hier. Vous avez vu une vidéo, et à l'image vous avez vu

  6   des femmes se plaindre à certains militaires du comportement des membres

  7   des forces croates dont la conduite n'avait pas été correcte vis-à-vis des

  8   Serbes. Alors, de quel uniforme il s'est agi ? Pourriez-vous nous dire

  9   maintenant, s'il vous plaît, quel uniforme portait ces soldats ?

 10   R.  C'est après la fin de l'audience que je me suis souvenu de cela.

 11   D'abord, vous m'avez demandé sur la Défense territoriale, donc avant 1991,

 12   donc quels étaient leurs uniformes, et vous m'avez interrogé sur les

 13   militaires d'active de la JNA et sur les réservistes. Alors, les

 14   réservistes de la JNA avaient les mêmes uniformes que l'active de la JNA.

 15   Et puis, je n'ai pas bien compris votre question sur le champ de bataille,

 16   vous m'avez demandé quels étaient les uniformes sur le champ de bataille.

 17   Q.  Oui, tout à fait, c'est là que se pose la question. Moi, ce qui

 18   m'intéresse, c'était les uniformes que l'on pouvait voir en 1991 pendant

 19   les combats et --

 20   L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent, note de l'interprète.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Messieurs, vous parlez en même temps.

 22   Cela ne peut pas continuer de cette manière-là.

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Donc c'est la deuxième moitié de l'année 1991 qui m'intéresse - je vois

 25   que c'est l'année 1992 qui figure au compte rendu d'audience - donc je ne

 26   m'intéresse pas maintenant à la période qui précède le conflit armé.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je prendre la parole ?

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes les unités de la JNA qui avaient

  2   procédé au recomplètement, donc à la mobilisation, étaient habillées au

  3   champ de bataille de manière uniforme. Pendant les opérations de combat, il

  4   y a eu des pertes, il y a eu des personnes qui d'un point de vue

  5   psychologique ou de par leur âge n'étaient pas aptes à combattre et il y a

  6   eu du recomplètement. On a vu arriver des gens de Sid qui, en uniforme de

  7   la TO, étaient intégrés aux unités de la JNA. Et on a pu en voir en

  8   uniforme SNB, donc gris-vert olive, au sein des unités de la JNA pendant

  9   les opérations de combat.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 11   Q.  Très bien. Je vous remercie. Hier, vous avez parlé d'une réunion qui a

 12   eu lieu le 20 novembre 1991 à Velepromet. Pourriez-vous nous dire si, à

 13   votre arrivée à Velepromet, vous ne saviez pas que les membres du

 14   gouvernement allaient venir sur place ? C'est uniquement quand vous avez vu

 15   Vojnovic que vous l'avez appris. Est-ce que je l'ai bien compris ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Le nom de famille Vojnovic apparaît ici associé à trois personnes. En

 18   conséquence, je dois vous dire ici de quels individus il s'agit pour savoir

 19   très précisément on parle. Donc, est-ce que vous pourriez m'écouter un

 20   instant, s'il vous plaît. Nous savons qu'un lieutenant-colonel s'appelait

 21   Vojnovic. Il a commandé la 80e Brigade, et plus tard il allait devenir le

 22   commandant de la ville de Vukovar. Ensuite, nous savons qu'il y a eu un

 23   Bogdan Vojnovic, ministre au sein du gouvernement de la Slavonie, Baranja

 24   et Srem occidental. Et ensuite, Milos Vojnovic, président du tribunal et,

 25   avant la guerre, également juge. Alors, lequel des trois Vojnovic est celui

 26   à qui vous avez eu l'occasion de parler à ce moment-là ? Je voudrais que ce

 27   soit tout à fait précis au compte rendu d'audience.

 28   R.  J'ai parlé à Milos Vojnovic, le président du tribunal.


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  1   Q.  Vous avez précisé de quoi il s'est agi pendant cet entretien avec lui.

  2   J'aimerais savoir s'il vous a dit ou s'il a dit quelque chose qui vous a

  3   permis de comprendre pourquoi il s'est adressé à vous pour vous demander

  4   d'aller voir Mrksic ?

  5   R.  Mais parce que j'étais le seul à me rendre chez Mrksic aux réunions en

  6   tant que commandant du détachement de Petrova Gora. Au sein du

  7   gouvernement, il n'y en avait pas un seul qui avait des contacts avec

  8   Mrksic. Personne.

  9   Q.  Lorsque vous dites "avec lui", vous pensez à M. Mrksic ?

 10   R.  Oui, je pense à M. Mrksic.

 11   Q.  Etait-ce éventuellement la raison pour laquelle Goran Hadzic vous a

 12   demandé plus tard d'exercer votre influence afin que des autorités civiles

 13   soient mises en place à Vukovar au plus vite ?

 14   R.  Goran ne m'a pas dit auprès de qui je devais exercer mon influence. Il

 15   m'a simplement dit qu'il fallait qu'on fasse des efforts pour que cela se

 16   passe au plus vite, mais il ne m'a pas dit sur qui je devais exercer mon

 17   influence, Mrksic ou quelqu'un d'autre. Il m'a dit qu'il fallait qu'on

 18   fasse jouer notre autorité pour que cette transition des autorités

 19   militaires vers les autorités civiles se passe au plus vite.

 20   Q.  Vous avez dit que pendant une brève période, vous avez assisté à cette

 21   réunion qui s'est tenue à Velepromet. Je voudrais vous faire examiner une

 22   photographie aérienne de ce bâtiment de Velepromet. De mémoire, est-ce que

 23   vous pourriez, s'il vous plaît, nous dire à quel endroit cette réunion

 24   s'est tenue ?

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] 65 ter 2802, s'il vous plaît.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en suis pas à 100 % sûr. A droite -- est-

 27   ce que je peux marquer ?

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation]


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  1   Q.  Si vous avez le stylet --

  2   R.  Si j'utilise le stylet, je peux ? Est-ce que c'est 

  3   autorisé ? Ça ne va pas abîmer la photo ? Donc, ici, nous avons les

  4   bureaux. C'était là qu'était situé le QG de la Défense territoriale, dans

  5   ces bureaux-là. Et je dois dire que 22 ans plus tard, je ne suis pas tout à

  6   fait sûr. Est-ce que c'est au bout du couloir qu'il y a une pièce ou bien

  7   est-ce que c'est en face que cela a eu lieu ? Mais c'était certainement à

  8   droite, ici, qu'il y avait une pièce, et je suppose même que c'était ici au

  9   bout de ce couloir à partir des bureaux qu'il y avait un couloir un peu

 10   plus grand et que c'était là qu'il y avait une pièce, une salle.

 11   Q.  Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, pour ce qui est de ce

 12   premier cercle que vous avez tracé, pour lequel vous avez dit qu'il y avait

 13   des bureaux --

 14   R.  Est-ce que je mets une lettre ? TO ?

 15   Q.  Oui. K ou TO. Inscrivez TO.

 16   R.  [Le témoin s'exécute]

 17   Q.  Et puis, le cercle qui est plus petit, vous pouvez inscrire un H pour

 18   "hall" à l'endroit de cette pièce.

 19   R.  [Le témoin s'exécute]

 20   Q.  Vous avez également vu cette photo où l'on vous voit, vous, avec Goran

 21   Hadzic et plusieurs autres personnes que vous avez reconnues. Alors, à peu

 22   près, par rapport à cette photographie, où est-ce que l'autre image a été

 23   prise ? Où étiez-vous ?

 24   R.  Cette photo a été prise dans cette cour. Alors, exactement où, je

 25   suppose que d'après l'image on serait en mesure de le déterminer, mais

 26   toujours est-il que c'était dans la cour de Velepromet.

 27   Q.  Très bien. Vous pouvez maintenant écrire un V, qui correspond à la

 28   "vidéo".


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  1   R.  [Le témoin s'exécute]

  2   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

  3   dossier, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis au dossier et

  5   reçoit une cote.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document portera la cote D88.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

  9   Q.  Tout de suite après la conversation avec Vojnovic -- et cela s'est

 10   passé dans tous les cas avant cette réunion à Velepromet ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Vous êtes parti tout de suite après voir le colonel Mrksic. Vous avez

 13   dit que vous êtes revenu. Est-ce que vous êtes allé tout de suite après

 14   dans cette pièce où la réunion s'est tenue ?

 15   R.  Je suis revenu dans la pièce, j'ai transmis à Vojnovic ce qu'avait dit

 16   Mrksic, et je me souviens que pendant que je le faisais, on a été très en

 17   colère contre l'armée. Après, je suis parti à Petrova Gora.

 18   Q.  Vous avez expliqué cela. Maintenant vous parlez d'euphorie contre

 19   l'armée, mais est-ce que vous vous souvenez exactement de quoi il s'est agi

 20   ? Que disait-on ? Enfin, à peu près ? Est-ce que vous pouvez nous dire

 21   quels étaient ces reproches, ces critiques à l'adresse de l'armée ?

 22   R.  Eh bien, dans le sens qu'ils protégeaient les criminels, que l'armée

 23   protégeait les criminels de guerre qui s'étaient livrés à des meurtres et à

 24   des massacres. C'était dans ce sens-là. C'était assez bref. Mais c'était

 25   ça, cette euphorie contre l'armée.

 26   Q.  Et au sujet de la situation qui prévalait à Vukovar, est-ce qu'il a été

 27   question des dégâts dans la ville ?

 28   R.  Non. Ça, je ne m'en souviens pas.


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  1   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, de mémoire, est-ce qu'il y avait un

  2   représentant de l'armée dans cette pièce à qui on aurait adressé ces

  3   critiques ?

  4   R.  Ecoutez, je ne sais pas pour la pièce, il y avait beaucoup de monde

  5   dedans. Mais avant cette réunion, je me souviens d'avoir vu Sljivancanin

  6   dans un coin de cette pièce avant que je ne parte pour Negoslavci. J'ai vu

  7   quelqu'un là, mais je ne sais pas s'il est resté pendant la réunion. Ils

  8   étaient tous en uniforme.

  9   Q.  Vous avez été témoin dans l'affaire Mrksic. Je parle maintenant de la

 10   date du 15 septembre 2006. Il s'agit du document 4694 de la liste 65 ter.

 11   Je vais vous donner lecture d'un paragraphe qui concerne cette situation.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait nous donner la page,

 13   s'il vous plaît, du compte rendu d'audience ?

 14   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je pense que c'est la page 9.

 15   C'est la page 57. Excusez-moi. Page 57. Je n'arrive pas vraiment à

 16   retrouver la bonne page. Je vais essayer de le faire. Non, je n'arrive pas

 17   à retrouver cette page pour vous la montrer. J'ai le texte.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Pour pouvoir suivre dans le compte rendu

 19   d'audience, j'aurais véritablement besoin que le conseil de la Défense

 20   retrouve la page. Peut-être qu'il pourrait la retrouver plus tard. Je n'ai

 21   pas besoin de la voir affichée à l'écran. Il me suffit de la référence à la

 22   page au compte rendu d'audience dans l'affaire Mrksic.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, je suis d'accord, cela semble

 24   raisonnable comme demande.

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vais faire de mon mieux pour retrouver

 26   la page. Je m'abstiens pour l'instant de poser la question au témoin là-

 27   dessus.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.


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  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

  2   Q.  Quoi qu'il en soit, vous affirmez à présent que vous n'avez pas vu

  3   Sljivancanin à cette réunion ?

  4   R.  Je ne me souviens pas de l'avoir vu. Je dois dire qu'ils étaient tous

  5   en uniforme. Il y avait beaucoup de monde. Il y avait beaucoup de

  6   conversations informelles. Donc, pendant ce temps-là, je l'ai vu dans la

  7   salle; mais pour après, je ne sais pas.

  8   Q.  Et vous avez vu Vukasinovic avec lui ?

  9   R.  Oui, ils étaient ensemble.

 10   Q.  Pendant cet échange dans la pièce en question, est-ce que vous vous

 11   souvenez s'il y avait là un officier de la JNA qui aurait affirmé autres

 12   choses qui seraient opposées à ce qui était dit ?

 13   R.  Je ne suis pas resté longtemps. Pendant que j'étais là, cependant, je

 14   n'ai rien entendu de tel. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu d'officiers

 15   de l'armée qui auraient pris la parole.

 16   Q.  Mais est-ce que vous vous souvenez de la présence d'un officier ?

 17   R.  Ecoutez, je vous ai dit qu'ils étaient tous en uniforme. Ce qui était

 18   important pour moi, c'était de voir Vojnovic, de lui transmettre le message

 19   et je suis parti par la suite. Donc je n'ai pas vraiment prêté attention

 20   aux officiers. Ils étaient tous en uniforme. Je n'ai pas vraiment cherché à

 21   savoir qui était qui.

 22   Q.  Vous dites qu'ils étaient tous en uniforme --

 23   R.  Oui, il y avait beaucoup de monde, ils étaient tous en uniforme. Et

 24   ceux qui étaient tenus d'assister à la réunion, ils étaient tous en

 25   uniforme, même ceux qui étaient en uniforme de la Défense territoriale.

 26   Q.  Mais vous pensez là également aux uniformes SNB ?

 27   R.  Oui. Mais parmi les membres de la Défense territoriale, il y en avait

 28   également qui étaient en uniforme de camouflage.


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  1   Q.  En uniforme de camouflage qui était identique ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous avez dit qu'après la réunion vous êtes parti dans le quartier de

  4   Petrova Gora et que Goran Hadzic suivait dans la voiture qui était derrière

  5   la vôtre. Le Procureur vous a demandé à quel moment la nuit tombe pendant

  6   cette période de l'année.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Justement, je vais vous montrer un document qui parle de cela. Il

  9   s'agit du document 1D480. C'est l'institut de l'astronomie qui nous a

 10   fourni ce document. Nous y avons des données précises sur le moment du

 11   coucher du soleil. Je vais juste vous inviter à examiner le document.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Donc vous pouvez voir ici que ce rapport a été fourni par

 14   l'observatoire astronomique qui concerne le lever et le coucher du soleil,

 15   à savoir le crépuscule et la nuit, pour les journées du 19, 20 et 21

 16   novembre 1991 pour la localité de Grabovo. Connaissez-vous l'emplacement de

 17   cette localité ?

 18   R.  Grabovo, si mes souvenirs sont bons, c'est en direction d'Ovcara,

 19   exact.

 20   Q.  Vous voyez dans la colonne du milieu, l'on voit la date du 20 novembre.

 21   On voit le début de l'aube, on voit le lever du soleil, le coucher de

 22   soleil à 16 heures 11 minutes, puis la fin du crépuscule à 16 heures 43

 23   minutes. Est-ce que c'est effectivement typique pour cette période-là de

 24   l'année ?

 25   R.  Eh bien, la deuxième moitié de novembre, oui, c'est un moment où les

 26   journées sont plutôt plus courtes. Alors, je ne connais pas les paramètres

 27   si précis que ce que vous me montrez ici. Oui, c'était vers 17 heures, 17

 28   heures 30, puis c'est vers 5 heures du matin que le soleil se lève. Oui,


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  1   c'est à peu près ça. Mais j'ai bien dit que c'était aux alentours de 17

  2   heures 30, et ici il est dit 17 heures. Donc c'est à peu près cela.

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je voudrais verser ce document au dossier.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Accepté, et il reçoit une cote.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D89.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Zivanovic, je suppose qu'au

  7   moment des requêtes nous entendrons ce que vous voulez que la Chambre fasse

  8   de cela, mais si je regarde cela maintenant, je me demande dans quelle

  9   mesure des choses comme la couverture nuageuse sont prises en compte et

 10   quelle est l'utilité de ce rapport des années après les fait. Mais nul

 11   doute que nous entendrons cela de votre bouche au moment approprié.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je ne pense pas qu'ils aient pris en compte

 13   la couverture nuageuse et ce genre de facteurs, mais cela a simplement

 14   donné une indication du coucher du soleil et à quel moment s'installe le

 15   crépuscule et quand tombe la nuit, et dans notre requête cela peut s'avérer

 16   extrêmement important pour la Chambre.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, l'Accusation n'adopte

 18   aucune position sur ce point. Nous voyons cette information. Nous ne nous

 19   élevons pas contre cela pour l'instant, mais nous ne sommes pas d'accord

 20   avec la conclusion de Me Zivanovic, à savoir que des facteurs comme les

 21   nuages et d'autres facteurs, puisqu'il s'agit de l'institut de l'astronomie

 22   et qu'il semblerait donc que techniquement, on sache à quel moment le

 23   soleil se couche et à quel moment commence le crépuscule, aucune mention de

 24   tous ces éléments n'est faite dans ce document.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Tout ceci figure maintenant au

 26   compte rendu d'audience.

 27   Vous pouvez poursuivre, Maître Zivanovic.

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci.


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  1   Q.  J'ai réussi à trouver la pièce et votre déposition. Il s'agit du

  2   document 4694 et de la page 31 de ce document. Pour être plus précis, il

  3   s'agit de la page 11 973 du compte rendu d'audience. A la ligne 11. Je vais

  4   vous lire cela puisque ce document est en anglais et vous pourrez entendre

  5   l'interprétation :

  6   "Question : Hier, vous avez dit que vous avez vu M. Sljivancanin à la

  7   session gouvernementale et vous avez dit que vous vous êtes trouvé là de

  8   manière très brève. 'Tell me', où est-ce que vous l'avez vu et que faisait-

  9   il à cette session du gouvernement ?

 10   "Réponse : Il était avec Vukasinovic. Il se tenait debout sur le côté

 11   lorsque je l'ai vu dans le hall, lorsque je l'y ai vu."

 12   Mon impression face à cette réponse, c'est que vous avez dit que vous avez

 13   vu Sljivancanin lors de la réunion du gouvernement.

 14   R.  J'ai parlé à M. Vojnovic avant le début de la réunion du gouvernement,

 15   même si nous étions dans la même pièce. La réunion du gouvernement n'avait

 16   pas encore commencé, et c'est à ce moment-là que je les ai vus. En fait, je

 17   l'ai vu dans cette même pièce. Et après cela, je me suis rendu à

 18   Negoslavci.

 19   Q.  Vous n'avez pas parlé à Sljivancanin ou Vukasinovic à cette occasion ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Comme vous vous êtes rendu à Vukovar par la suite, savez-vous pendant

 22   combien de temps l'administration militaire est restée en ville ?

 23   R.  Je ne m'en souviens pas parfaitement bien, mais je pense que c'était

 24   environ deux mois.

 25   Q.  Vous souvenez-vous qui était le commandant de Vukovar ?

 26   R.  Est-ce qu'il s'agissait du lieutenant-colonel ou du colonel Vojnovic ?

 27   Je pense que son prénom était Milorad, si je ne m'abuse, même si je n'en

 28   suis pas tout à fait sûr.


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  1   Q.  L'avez-vous vu ce jour-là, c'est-à-dire le 20 novembre ?

  2   R.  Je ne m'en souviens pas.

  3   Q.  Pendant les opérations liées au combat et lors de l'existence du

  4   détachement de Petrova Gora, vous souvenez-vous si des membres de ce

  5   détachement de Petrova Gora ont reçu un remboursement, disons, pour leur

  6   engagement, disons un salaire, en d'autres termes ?

  7   R.  Oui. Tous les membres de la Défense territoriale, y compris le

  8   détachement de Petrova Gora; par exemple, Luzac, qui faisait partie du

  9   groupe des opérations. Donc, tous ceux qui se trouvaient là, soit avec le

 10   Groupe opérationnel nord ou sud, ont reçu un salaire qui leur était payé

 11   par la JNA.

 12   Q.  Pouvez-vous me dire à quelle période cela s'applique, bien que vous

 13   soyez parti avant cela ?

 14   R.  Oui, je suis parti avant, mais je suis sûr que c'est une situation qui

 15   s'est prolongée pendant au moins encore un mois.

 16   Q.  Après la libération de Vukovar ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Hier, vous avez parlé de différents événements à Vukovar avant

 19   l'éclatement des conflits. Et en regardant votre déposition précédente,

 20   j'ai vu que vous avez été impliqué dans un incident une fois avec des

 21   personnes qui portaient l'insigne oustachi. Pourriez-vous nous en dire un

 22   peu plus sur cet événement ?

 23   R.  Il s'est produit au moment de la fin de mon congé annuel, lorsque je

 24   suis revenu le premier jour pour reprendre mon travail. Ce jour-là, nous

 25   avons été libérés très tôt, aux alentours de midi. Et comme il n'y avait

 26   plus de Serbes travaillant, il y avait beaucoup de tensions. Il n'y avait

 27   plus de bus se rendant à l'extérieur de Vukovar, et il n'était pas

 28   nécessaire de travailler plus longuement.


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  1   Sur la route en direction de Djergaj, il y avait un pont. C'est là

  2   qu'il y avait, donc, un point de contrôle de la police et du ZNG. On nous a

  3   mis sur le côté. Le policier nous a demandé nos documents d'identité, nos

  4   pièces d'identité. Il a ensuite demandé au membre du ZNG de nous rejoindre.

  5   Celui-ci a commencé à harceler le conducteur. Ce que j'ai vu sur la poche

  6   gauche de son uniforme, il y avait un insigne en bronze de grande taille

  7   avec un U, et en dessous il était écrit "La renaissance oustachi" ou "Le

  8   réveil oustachi".

  9   Q.  Merci. Hier, vous avez dit que Petrova Gora, ou le voisinage de Petrova

 10   Gora, était essentiellement habité par des Serbes, bien qu'il y ait eu

 11   également d'autres groupes ethniques présents. Lorsque le détachement de

 12   Petrova Gora a été mis sur pied, était-il essentiellement composé de Serbes

 13   ou y avait-il également d'autres membres appartenant à d'autres groupes

 14   ethniques ? Et nous parlons du moment où les hostilités avaient déjà éclaté

 15   et étaient clairement déclarées, au mois de septembre ou plus tard.

 16   R.  Il y avait les Ruthéniens, les Croates, il y avait des Italiens, et

 17   tous ont rallié la Défense territoriale de manière volontaire. Je sais

 18   qu'il y avait quelqu'un que l'on surnommait Medo. Je ne me souviens pas de

 19   son nom ni de son prénom maintenant. Je sais qu'il travaillait à Trpinje,

 20   dans le domaine agricole. Il est resté avec nous pendant toute la période

 21   de la guerre.

 22   Après la libération, il aurait pu rester, mais il a décidé de partir.

 23   Il avait sa famille en Croatie et il s'est rendu peut-être à Zagreb. Je ne

 24   me souviens pas très bien. Par la suite, nous avons entendu de la bouche de

 25   ses voisins, ou plutôt, de sa mère, qu'il avait été envoyé sur le champ de

 26   bataille en Bosnie et qu'il avait été tué par des Croates par derrière.

 27   Q.  Lorsque vous parliez des commandants des compagnies de la Défense

 28   territoriale, vous avez également parlé du commandant de la 4e Compagnie,


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  1   et je pense qu'il s'appelait Sinisa Fot. Dites-moi, était-il Serbe ?

  2   R.  Sinisa Fot était un Croate qui avait participé à l'ensemble des

  3   réunions, et c'était un fervent admirateur de la Yougoslavie. Après cette

  4   réunion, il a été arrêté par les Croates, torturé. Ils lui ont cassé la

  5   clavicule. Ensuite, il est revenu vers nous. Et c'était un véritable

  6   combattant.

  7   Q.  Que lui est-il arrivé après la guerre ?

  8   R.  Il a été tué le 2 octobre lorsque la Brigade des Gardes a subi une

  9   attaque près de la rue Dalze [phon], sur le côté droit de la caserne. Les

 10   rues dans le voisinage n'offraient aucun abri. Il portait une veste, mais

 11   une balle tirée par un tireur embusqué l'a frappé juste en dessous du bras.

 12   Q.  J'ai également vu quelqu'un du nom de Darko Fot. Etait-il Serbe ou pas

 13   ?

 14   R.  C'était son frère aîné. Il a également été sérieusement blessé ce jour-

 15   là. Il a été blessé à l'estomac mais a survécu, et il travaille à Novi Sad

 16   pour le bureau des douanes. Ils ont réussi à le sortir du champ de

 17   bataille.

 18   Q.  Dans le reportage sur Velepromet, vous avez également reconnu Rade

 19   Kosic.

 20   R.  Vlado Kosic. Il s'agit de Vlado Kosic, je pense.

 21   Q.  Peut-être me suis-je trompé.

 22   R.  Je pense qu'il s'agit de Vlado Kosic.

 23   Q.  Savez-vous quelle fonction il occupait ?

 24   R.  Je ne sais pas. Je sais que par la suite il est devenu directeur de la

 25   compagnie des eaux. Il travaillait rue Save Kovacevica, et j'étais avec mon

 26   frère à Vasilje Gica. Je vivais donc une rue plus loin. Et je suis resté

 27   avec mon frère jusqu'à ce que je me marie.

 28   Q.  Hier, l'Accusation a parlé de quelqu'un du nom de Bibic, et il y a


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  1   également eu deux noms de mentionnés, Rajko ou Srbobran.

  2   R.  Milos. Tout le monde l'appelait Rajko. Je ne peux pas dire que son nom

  3   n'était pas Srbobran, mais tout le monde l'appelait Rajko. Je ne l'ai

  4   jamais entendu appelé autrement. Personne ne l'appelait Srbobran.

  5   Q.  Je vous pose cette question parce qu'il y avait peut-être plusieurs

  6   Bibic. Peut-être y avait-il deux personnes portant le même nom.

  7   R.  Oui. Tous les deux travaillaient dans une collectivité agricole, Rajko

  8   en était le directeur, et Milos était un officier de réserve et travaillait

  9   dans l'administration.

 10   Q.  C'est le même document que celui qui est à l'affiche auquel je

 11   m'intéresse, mais cette fois-ci, il s'agit de la page, me semble-t-il, 14.

 12   Oui, 14.

 13   Si je vous ai bien compris, vous avez dit, entre autres, qu'à cette réunion

 14   à Velepromet il a été demandé à l'armée de mettre en place une structure

 15   d'autorité civile. Je vais essayer de trouver exactement à quel endroit

 16   dans le document. Je pense que c'est à la page suivante. Peut-être page 16.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges --

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il s'agit plutôt de la page 16.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] -- j'allais dire que c'était à la page

 20   précédente. Si le conseil de la Défense fait référence à la conversation du

 21   témoin avec M. Hadzic, cela se trouve à la page 

 22   11 955 du compte rendu d'audience.

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non. Non.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Bon.

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non. Je pense que cela a été dit dans un

 26   autre contexte. C'est à cette page, à la ligne 21.

 27   Q.  Donc je vais vous lire ce qui est dit au compte rendu d'audience :

 28   "Question : La pression exercée sur l'armée, qu'est-ce que cela signifie ?


Page 7134

  1   La tension ou la pression exercée sur l'armée, qu'est-ce que cela signifie

  2   ?

  3   "Réponse : C'était pour permettre la transformation de l'administration

  4   militaire en gouvernement civil, et cela avait en partie à voir avec les

  5   prisonniers. Je ne me souviens pas de l'ensemble des détails."

  6   Vous souvenez-vous si cela est bien la réponse que vous avez donnée à ce

  7   moment-là, concernant la pression en faveur de la mise en place d'une

  8   structure civile ?

  9   R.  Ceci était lié aux crimes de guerre qui passaient devant les tribunaux.

 10   L'autorité civile devait s'en charger. Ce n'était pas à l'armée qu'il

 11   revenait de les transférer en Serbie. Les instances civiles devaient

 12   fonctionner. C'était au judiciaire de se charger de cela. C'était donc là

 13   le contexte. C'est de cela dont il s'agissait.

 14   Q.  Mais je ne me souviens pas qui était contre cette idée lors de la

 15   réunion. Est-ce qu'il y a eu quelqu'un qui a dit, Non, nous ne pouvons pas

 16   le faire ?

 17   R.  Je ne m'en souviens pas. Il y avait beaucoup de bruit venant de tous

 18   les côtés. Je n'ai pas entendu une seule personne se lever et s'exprimer

 19   contre cela. Tout le monde parlait en même temps. Il y avait beaucoup de

 20   brouhaha.

 21   Q.  Dites-moi, vous n'êtes pas resté jusqu'à la fin de cette réunion. Vous

 22   avez dit à Vojnovic ce que Mrksic vous avait dit, puis vous êtes parti.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Lorsque vous avez parlé de votre poste après la chute de Brdo le 16 ou

 25   17 novembre, vous avez dit que Sljivancanin vous a informé de cette

 26   décision. Vous êtes-vous demandé comment cela se faisait que Sljivancanin

 27   en tant que chef de la sûreté -- qui n'était pas votre commandant, vous

 28   informait de cela ? Est-ce que vous vous êtes demandé pourquoi est-ce qu'il


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  1   vous informait d'une telle décision au lieu de Mrksic qui, en fait, était,

  2   lui, votre 

  3   supérieur ?

  4   R.  Dans la mesure où le commandement et l'instance de sécurité

  5   représentaient l'autorité dans la région et que cela faisait partie de la

  6   responsabilité de cette unité, et que Sljivancanin était responsable de la

  7   Brigade des Gardes, eh bien, ces deux personnes se connaissaient assez

  8   bien, et je pensais alors que Mrksic dirait ensuite qu'il acceptait cette

  9   décision. J'ai été là pendant un mois et demi après Mrksic, mais il est

 10   resté là pendant tout le moment où il a servi au sein de l'armée, en fait.

 11   Q.  Vous avez dit que vous n'avez jamais demandé d'explication concernant

 12   cette décision. Ce n'est que par la suite que vous êtes arrivé à ces

 13   conclusions. En d'autres termes, vous n'avez jamais demandé à Mrksic

 14   pourquoi que cela s'est produit.

 15   R.  J'ai donné les raisons la dernière fois. Ce n'était pas la seule

 16   raison. C'était également parce que ma vie était menacée. J'avais reçu des

 17   informations du service de renseignement militaire d'après lesquelles ils

 18   se préparaient à m'éliminer, et c'est la raison pour laquelle j'ai accepté

 19   cela. J'étais un obstacle. Je leur ai donc remis mes fonctions et je

 20   n'avais plus aucun rôle à jouer.

 21   Q.  A quel moment avez-vous eu ces informations selon lesquelles ils se

 22   préparaient à vous éliminer ? Je dirais, par exemple, combien de jours

 23   avant qu'ils ne se préparent à vous remplacer, par exemple ?

 24   R.  Je ne me souviens pas exactement. Mais il y avait trois camions d'aide

 25   humanitaire en partance pour Vukovar qui étaient arrivés, et lorsque je

 26   leur ai demandé pourquoi ils étaient partis et pourquoi qu'ils n'avaient

 27   pas été déchargés à Vukovar, et lorsque j'ai demandé également qui avait

 28   signé le document pertinent, ils ont commencé à me harceler, et


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  1   Sljivancanin a alors entamé la procédure d'opérations. J'ai ensuite posé

  2   des questions concernant les troupes à Sid et pourquoi elles s'y

  3   trouvaient. J'avais certaines informations. J'ai également soulevé cette

  4   question.

  5   Q.  Lorsque vous dites que vous avez soulevé la question concernant le

  6   camion --

  7   R.  C'est six camions. Six camions.

  8   Q.  Je m'excuse. Oui, les six camions remorques. Pourquoi est-ce que vous

  9   avez soulevé cette question ? Est-ce que quelqu'un vous en a parlé ? Est-ce

 10   que vous avez dit à quelqu'un que vous aviez lancé une enquête pour voir ce

 11   qui s'était produit concernant ces camions ?

 12   R.  J'ai d'abord soulevé la question à Velepromet. Je voulais comprendre

 13   qui avait signé ce faux document et qui leur avait demandé à Velepromet de

 14   repartir dans l'autre sens en Serbie. J'ai informé le commandement à haut

 15   niveau de ce fait, et après la libération j'ai entendu dire qu'ils étaient

 16   accompagnés de Dusan Spasojevic, connu également sous le nom de Siptar, qui

 17   a été éliminé ou tué à Sablja dans le cadre d'une opération. Il les avait

 18   emmenés et il leur servait de couverture. Il jouait un rôle important au

 19   sein de l'Etat. Et Sljivancanin, probablement, avait un accord avec lui, et

 20   ensuite ils ont lancé cette campagne de harcèlement à mon égard.

 21   Q.  Lorsque vous dites que vous avez soulevé cette question avec le

 22   commandement à haut niveau, est-ce que vous avez à l'esprit le Groupe

 23   opérationnel sud ?

 24   R.  Oui, tout à fait.

 25   Q.  Vous avez suivi la même procédure concernant les cigarettes pour les

 26   troupes ?

 27   R.  Oui. Les cigarettes ou la quantité exacte de cigarettes n'étaient pas

 28   arrivées. Je leur ai demandé ce qui s'était produit à partir de Sid


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  1   concernant les cigarettes. Pourquoi quelqu'un avait pu prendre les

  2   cigarettes qui étaient destinées aux troupes ? Nous savions combien il y

  3   avait de cigarettes, et nous n'avons même pas reçu 50 % de ce qui était

  4   prévu. J'ai également soulevé cette question. Et à Sid, je pense qu'à

  5   l'état-major quelqu'un a lancé une campagne contre moi. Et donc, on m'a

  6   accusé de faire du marché noir avec des voitures et on m'a dit que j'avais

  7   beaucoup d'argent dans des comptes bancaires, et c'est quelque chose qui

  8   m'a beaucoup touché. Lorsque vous savez que vous êtes honnête, cela est

  9   très dur sur le plan psychologique.

 10   Q.  Si je vous ai bien compris, dans la mesure où vous avez soulevé toutes

 11   ces questions, quelqu'un vous a mis en garde sur le fait que l'on se

 12   préparait à vous éliminer ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Ceci s'est produit --

 15   R.  A Velepromet, lorsque je me rendais à la cuisine de l'état-major. Juste

 16   devant cette cuisine, il y avait un mur, et le tir d'un tireur embusqué m'a

 17   raté de peu, pénétrant le mur. Je pensais que c'était une balle perdue.

 18   Lorsque je suis ressorti, j'ai entendu siffler une autre balle près de ma

 19   tête, et c'est là que j'ai compris. J'ai démissionné de tous mes pouvoirs.

 20   Je savais que j'étais un obstacle pour eux et je savais que je ne pouvais

 21   pas survivre là. Il y avait beaucoup de crimes et je ne voulais pas faire

 22   partie des statistiques ni faire partie de leur cercle. Cela allait à

 23   l'encontre de ce que ma conscience pouvait me permettre, donc j'ai

 24   simplement préféré me retirer pour mener une vie paisible. Je leur ai remis

 25   tous mes pouvoirs et je suis parti, et je n'étais donc plus un membre des

 26   cercles chargés de l'autorité.

 27   Q.  Je voudrais vous poser une autre question. Vous avez dit que vous avez

 28   été accusé de différents faits. Il n'est pas nécessaire de les rappeler


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  1   ici. Est-ce qu'il y a eu une procédure judiciaire à votre encontre ?

  2   R.  Non. J'aurais aimé que ce soit le cas, parce que la vérité aurait pu

  3   éclater plus tôt. J'envisageais de traduire M. Sljivancanin en justice une

  4   fois qu'il a été libéré. Donc j'envisageais de déposer plainte contre lui

  5   pour tous les problèmes que cela avait entraînés pour moi.

  6   Q.  Merci. Je n'ai pas d'autres questions pour vous, Monsieur le Témoin.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Maître Zivanovic.

  8   Monsieur Olmsted, avez-vous des questions supplémentaires ?

  9   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, très brièvement.

 10   Nouvel interrogatoire par M. Olmsted :

 11   Q.  [interprétation] Monsieur Jaksic, aujourd'hui lors de votre déposition,

 12   vous avez déclaré que, d'après vous, M. Milos Vojnovic vous avait envoyé

 13   voir le colonel Mrksic parce qu'aucun des membres du gouvernement n'était

 14   en contact avec eux. Tout d'abord, je voudrais savoir de qui vous parlez

 15   lorsque vous dites "eux" ?

 16   R.  Je n'avais pas d'informations me disant que des membres du gouvernement

 17   n'étaient pas en contact avec eux.

 18   Q.  Oui, mais c'est que j'aimerais éclaircir, Monsieur. Vous ne savez pas

 19   dans quelle mesure les membres du gouvernement étaient en contact avec des

 20   membres du Groupe opérationnel sud. N'est-ce pas --

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Désolé, mais le témoin n'a pas dit cela.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] C'est une question directrice. Le témoin

 25   n'a jamais déclaré qu'il ne savait pas quel était le niveau de contact. Il

 26   a dit qu'il ne savait pas s'il y avait des contacts du tout.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] J'aimerais reformuler les choses comme le

 28   conseil de la Défense vient de le suggérer.


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  1   Q.  Alors, est-ce que vous étiez au courant du niveau de contact entre les

  2   représentants officiels du gouvernement et le commandement du Groupe

  3   opérationnel sud, Monsieur ?

  4   R.  Non. Je ne savais pas qu'il y avait des contacts et je n'avais aucune

  5   information montrant que cela avait été le cas.

  6   Q.  Le conseil de la Défense vous a également posé des questions sur votre

  7   conversation avec M. Hadzic le 20 novembre portant sur ce passage d'une

  8   administration militaire à une administration civile. Pour que les choses

  9   soient consignées clairement au compte rendu, de quoi avez-vous parlé avec

 10   M. Hadzic lors de cette conversation ?

 11   R.  Etant donné qu'une administration militaire était déjà en place, cela

 12   voulait dire qu'à l'hôpital il y avait un médecin de l'armée qui commandait

 13   l'hôpital, j'ai dit à Goran que cela me convenait, que les autorités

 14   civiles devaient être intégrées, qu'il fallait relancer les entreprises et

 15   que cela faciliterait le relancement des entreprises Vuteks et Borovo. Les

 16   gens ne cessaient de paniquer, et de la sorte, ils pourraient gagner leur

 17   vie à nouveau. Il n'y avait plus d'activités commerciales. Plus personne ne

 18   labourait les terres non plus. Et je pensais que les autorités civiles

 19   devaient être remises sur pied le plus rapidement possible à Vukovar pour

 20   que la population puisse revivre et gagner sa vie. Nous n'avions plus de

 21   magasins à Vukovar. Tout avait été détruit. Il n'y avait plus

 22   d'infirmières, par exemple. Et vu que l'armée était là-bas, la police ne

 23   pouvait pas mener à bien les fonctions qu'elle menait normalement. C'est

 24   pour cela que, en accord avec lui, il a été convenu d'opérer une reprise

 25   des autorités civiles sur l'administration militaire dès que possible.

 26   Q.  Et que vous a suggéré M. Hadzic, pour que les choses soient totalement

 27   claires ?

 28   R.  Il a également suggéré que je devrais faire preuve d'autorité et


Page 7141

  1   utiliser mon autorité pour mettre en place une administration civile dès

  2   que possible, que je devrais travailler sur l'armée et que Rajko Bibic

  3   devrait devenir le président du conseil exécutif et que ce serait à lui de

  4   mettre en place le gouvernement. Et donc, il serait le Premier ministre

  5   désigné.

  6   Q.  Et, à votre connaissance, est-ce que Bibic est devenu président du

  7   conseil exécutif ?

  8   R.  Oui, plus tard.

  9   Q.  Aujourd'hui, vous nous avez dit qu'il y avait une administration

 10   militaire à Vukovar et qu'elle a été en place pendant deux mois environ.

 11   Pendant cette période, que faisaient les autorités civiles à Vukovar,

 12   Monsieur ?

 13   R.  Je ne m'en souviens pas exactement. Tout ce dont je me souviens, c'est

 14   que j'ai formellement pris mes fonctions au sein de l'entreprise de

 15   transport et que j'ai coopéré avec M. Crnogorac, qui était ministre des

 16   Transports à l'époque. Je ne traitais pas avec les autres. J'étais en

 17   contact avec lui parce que je devais m'assurer que l'entreprise de

 18   transport démarrait.

 19   Q.  Et quand a commencé cette coopération ?

 20   R.  Je pense que cela a eu lieu dès le début de ma prise de fonctions.

 21   L'administration militaire était toujours en place à l'époque.

 22   Q.  Pour avoir une idée du cadre temporel, quand avez-vous commencé vos

 23   fonctions au sein de cette entreprise de transport ? Quand cela a eu lieu

 24   après la chute de Vukovar ?

 25   R.  Plusieurs jours après, je pense. Les travailleurs se sont réunis et ont

 26   proposé que j'en devienne le directeur, et Cazmatrans devait devenir

 27   l'entreprise de transport de Vukovar. Alors, nous avons tout de suite

 28   commencé à chercher des véhicules, à réparer les bâtiments. Ceux qui s'y


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  1   connaissaient en mécanique ont été chercher des outils pour réparer les

  2   véhicules. J'avais des contacts qui dataient d'avant la guerre, et je leur

  3   ai demandé de faire des dons, et j'ai pu réunir 32 véhicules et remettre

  4   sur pied l'entreprise. Cela a bien marché.

  5   Q.  Merci, Monsieur Jaksic.

  6   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai plus de

  7   questions.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie. 

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Olmsted.

 10   Questions de la Cour : 

 11   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, j'ai deux petites questions pour

 12   vous. La première question, c'est au sujet des six camions à remorque dont

 13   vous avez parlé aujourd'hui. Qu'est-ce qui s'est passé avec les six camions

 14   à remorque d'aide humanitaire ?

 15   R.  Ces camions transportaient l'aide humanitaire sous la forme d'aliments

 16   et de vêtements pour la population civile de Vukovar. Et par la suite, j'ai

 17   entendu dire que ces biens avaient été vendus sur le marché noir. Donc on

 18   les a vendus aux civils et quelqu'un a généré du bénéfice de cela.

 19   M. LE JUGE MINDUA : D'accord. Et il n'y a pas eu de poursuites judiciaires

 20   au sujet de cela ?

 21   R.  Pas à l'époque. Je ne sais pas par la suite. Mais si je m'en souviens

 22   bien, il n'y a pas eu de poursuites entamées par les tribunaux, non.

 23   M. LE JUGE MINDUA : D'accord. Merci beaucoup. Alors, la deuxième question :

 24   hier -- en tout cas, au transcript d'hier, page 50, vous avez parlé de la

 25   volonté de Vojnovic de juger les Croates responsables de crimes de guerre

 26   ou de -- ou qui avaient du sang dans les mains, donc de les juger dans le

 27   district, dans le district de Slavonie, Baranja et Srem occidental.

 28   Je voudrais savoir si tout au long de ces événements ou de la guerre, y a-


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  1   t-il eu jamais un procès organisé par le district pour juger l'un de ces

  2   Croates qui seraient responsables de crimes de guerre ?

  3   R.  Non. Un procès a eu lieu en Serbie, parce que la Yougoslavie existait à

  4   l'époque. On savait très bien qui, parmi ces gens, avaient été condamnés

  5   pour une peine de longue durée et qui était ceux qui avaient participé aux

  6   massacres. Ils ont été condamnés. Lorsque Milan Panic est devenu Premier

  7   ministre, il a fait ce geste humanitaire et il les a rendus à la Serbie.

  8   Donc ils n'ont jamais purgé leurs peines en Serbie, ni en Croatie. En fait,

  9   ils n'ont jamais été tenus responsables de leurs crimes, et les Serbes qui

 10   avaient commis des crimes en Croatie ont été remis par la Croatie à la

 11   Serbie à condition qu'ils purgent leurs peines dans des prisons serbes.

 12   Lorsque ces personnes qui ont été condamnées ont été remises, c'est Glavas

 13   qui les a reçues, et il a parlé ouvertement devant les caméras de

 14   télévision et a déclaré : "Vous êtes libres d'être les Oustachi à présent."

 15   Nous savions qui étaient les Oustachi. C'étaient ceux qui avaient commis

 16   les pires atrocités, les actes de génocide pendant la Deuxième Guerre

 17   mondiale, des génocides contre les Serbes.

 18   M. LE JUGE MINDUA : D'accord. Merci beaucoup. Merci.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Jaksic, ceci met fin à votre

 20   déposition. Nous vous remercions d'être venu à La Haye pour déposer devant

 21   ce Tribunal. Vous êtes libéré de vos obligations de témoin, et nous vous

 22   souhaitons un bon retour chez vous. L'huissier va vous raccompagner.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 24   [Le témoin se retire]

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.

 26   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. On vient de

 27   m'informer que le témoin suivant, qui est une dame, est censée arriver dans

 28   le bâtiment à 11 heures. Nous avons terminé un petit peu plus tôt que


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  1   prévu. Nous sommes en train de l'accompagner pour 10 heures 30. Nous avons

  2   essayé d'organiser cela. Donc je vous propose de prendre la pause dès

  3   maintenant et de reprendre à 11 heures, qui est l'heure habituelle. Et je

  4   pense que de la sorte, notre prochain témoin sera prêt.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous allons le faire, Monsieur

  6   Stringer.

  7   L'audience est suspendue et nous reviendrons à 11 heures.

  8   --- L'audience est suspendue à 10 heures 15.

  9   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 11   M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 12   Juges. J'ai une question préliminaire à soulever avant de faire entrer le

 13   témoin suivant. Elle porte sur les pièces connexes ou annexées à la

 14   déclaration en vertu de l'article 92 ter et d'autres pièces qui pourraient

 15   être versées au cours de l'interrogatoire de l'Accusation. Un grand nombre

 16   de ces pièces n'ont pas été traduites en B/C/S. Pour la plupart, ce sont

 17   des documents concis, des rapports rédigés par le témoin ou par d'autres

 18   personnes, envoyés à d'autres personnes au sein de la FORPRONU ou au sein

 19   des Nations Unies.

 20   D'après ce que j'ai compris de la jurisprudence, une fois qu'une

 21   pièce est demandée pour versement et est admise, elle doit être traduite

 22   pour l'accusé. D'après ce que j'ai compris, l'accusé n'a pas eu l'occasion

 23   de revoir beaucoup de documents qui seront versés par le truchement de ce

 24   témoin lors de sa déposition et par sa déclaration. Donc, dans une large

 25   mesure, l'accusé souffre de préjudice et nous devrons faire avec. Mais

 26   comme voie de recours à ce stade-ci, Monsieur le Président, j'aimerais me

 27   tourner vers les Juges de la Chambre pour savoir quoi faire, et j'aimerais

 28   suggérer qu'un minimum de documents pour lesquels il n'y a pas de


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  1   traduction en B/C/S soient admis à ce stade-ci. Ils pourront être versés

  2   plus tard, y compris les références faites par le témoin. Mais pour

  3   l'instant, nous demandons qu'aucun de ces documents dont la traduction

  4   B/C/S n'existe pas ne soit admis.

  5   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, alors j'aimerais

  6   rebondir là-dessus. Je regarde mes notes et je ne trouve pas d'échange de

  7   courriel qui ait lieu entre les parties et les Juges de la Chambre en

  8   septembre dernier avant le début du procès. A ce moment-là, les Juges de la

  9   Chambre avaient instruit les parties et dit que tous les documents en B/C/S

 10   devaient être traduits en anglais et téléchargés dans le prétoire

 11   électronique. Nous avons soulevé cette question à ce moment-là, et vu les

 12   ressources à disposition pour les documents traduits, l'Accusation a

 13   demandé expressément des orientations de la part des Juges de la Chambre à

 14   ce moment-là pour savoir si l'Accusation était obligé d'obtenir des

 15   traductions de ces documents anglais. D'ici deux ou trois minutes, je

 16   pourrais retrouver peut-être un échange de courrier où la Chambre,

 17   justement, a informé les parties que cela ne devrait pas être le cas et que

 18   cela n'a jamais été remis en question. Mais la Défense vient de soulever

 19   des objections. Ces objections ne nous ont pas été communiquées s'agissant

 20   des pièces qui sont reprises dans la liste de ce témoin, et je ne crois pas

 21   que la Défense, non plus, ne nous ait notifiés de cette objection. Quoi

 22   qu'il en soit, cela, en fait, nous ramène aux jours qui ont précédé le

 23   procès, et nous n'avons pas obtenu de traduction en B/C/S des documents

 24   parce que nous ne devions pas le faire.

 25   D'après nos observations, l'accusé semble pouvoir communiquer en anglais,

 26   et avant de réfléchir à une modification des règles à ce stade avancé du

 27   procès et de la présentation des moyens à charge, si les Juges de la

 28   Chambre décident de modifier les règles, je crois qu'il convient de


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  1   déterminer tout d'abord si l'accusé est complètement incapable de recevoir

  2   les documents ou s'il peut, dans une certaine mesure, les lire en anglais.

  3   Je crois qu'il communique déjà avec son conseil en anglais. Donc c'est une

  4   question qui porte en l'essence sur les ressources. Et si les Juges de la

  5   Chambre désirent modifier les règles imposées à ce stade avancé de la

  6   procédure, je le répète, nous ne pourrons pas obtenir de traduction dans le

  7   cadre temporel qui est proposé.

  8   Deuxième question : est-ce vraiment nécessaire ? Ce n'est certainement pas

  9   une exigence. Avant le début du procès, l'Accusation avait déjà soulevé la

 10   question et -- je cherche les références --

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous cherchez le courriel, Monsieur

 12   Stringer ?

 13   M. STRINGER : [interprétation] Oui, oui. C'est un courriel que nous avons

 14   reçu le 18 septembre de la part de l'assistant des Juges de la Chambre.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je n'ai pas la date ni le courriel

 16   sous les yeux, mais, Maître Gosnell, je crois que vous en êtes au courant.

 17   M. GOSNELL : [interprétation] Oui. Pour répondre à ces commentaires,

 18   Monsieur le Président. Tout d'abord, nous avons soulevé cette question au

 19   début du procès. Nous avons dit que nous voulions que les pièces qui

 20   seraient versées soient traduites en B/C/S. Jusqu'à présent, cela n'a pas

 21   posé de problème considérable, parce que d'après ce que j'ai vu dans les

 22   pièces, la plupart d'entre elles ont été traduites en B/C/S. Et comme vous

 23   le savez, cela se fait sur base d'une tournante, ces documents sont ensuite

 24   téléchargés dans le prétoire électronique, et c'est comme cela qu'on les

 25   obtient.

 26   Mais aujourd'hui, nous traitons d'un grand nombre -- d'un très grand nombre

 27   de documents qui n'ont pas été traduits en B/C/S, et c'est là que réside la

 28   différence par rapport au passé.


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  1   Alors, s'agissant de la capacité de M. Hadzic à comprendre l'anglais, oui,

  2   il peut comprendre des documents concis, il n'a pas de problème avec cela,

  3   et je peux le consigner officiellement au compte rendu. Mais dès qu'il

  4   s'agit de documents plus longs ou plus compliqués, il ne comprend pas bien

  5   cette langue, et je ne peux pas le consulter pour ces documents plus longs,

  6   ce qui est le cas en l'espèce vu le volume de documents que nous avons

  7   reçus.

  8   Et enfin, Monsieur le Président, je vous présente cette demande sur ce

  9   témoin uniquement à ce stade-ci parce que le problème s'est posé. Il y a

 10   énormément de documents, je le répète, qui n'ont pas été traduits. D'après

 11   ce que j'ai compris dans la jurisprudence, également les traductions ne

 12   sont pas exigées pour des documents des Nations Unies, donc des rapports

 13   longs, des résolutions, et cetera, dans d'autres affaires n'ont pas

 14   nécessité une traduction. Mais lorsqu'il s'agit de correspondance interne

 15   et qu'il s'agit de rapports contemporains de faits sur le terrain, ce sont

 16   des éléments de preuve importants, et ils devraient être traduits.

 17   M. STRINGER : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous avions donné des lignes

 19   directrices le 18 septembre par courriel, Monsieur Gosnell, et je suis donc

 20   quelque peu surpris du moment où vous soulevez cette question. Si cela a

 21   vraiment posé problème au témoin, si la quantité de documents était si

 22   importante, vous auriez peut-être dû avertir le bureau du Procureur et les

 23   Juges de la Chambre de cette objection plus tôt ?

 24   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, peut-être qu'elle ne tombe pas à point

 25   nommé, cette objection, Monsieur le Président. Elle aurait dû être soulevée

 26   la semaine dernière lorsque nous avons découvert ce problème, et j'en suis

 27   désolé, et si les Juges de la Chambre désirent rejeter cette demande vu les

 28   délais très courts, nous l'accepterons.


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  1   Si vous me le permettez, Monsieur le Président, j'aimerais consulter le

  2   courriel,

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Je fais la même chose.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je le vois, et je

  5   suppose que nous sommes liés par ces instructions. Donc je retire ma

  6   demande.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Faisons entrer le témoin.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Je voudrais juste me présenter, Messieurs

  9   les Juges. Lisa Biersay, au nom de l'Accusation, et je suis assistée de

 10   notre stagiaire, Simona Onicel.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour. Bonjour. Je regardais si

 14   nous étions encore dans la matinée ou dans l'après-midi, mais c'est encore

 15   le matin.

 16   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir décliner

 18   votre identité et de nous donner votre date de naissance.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Blandina Francis Negga, et je

 20   suis née le 25 septembre 1933.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup. Merci d'être venue à

 22   La Haye pour apporter votre aide au Tribunal. Vous allez à présent

 23   prononcer la déclaration solennelle, Madame, par laquelle les témoins

 24   s'engagent à dire la vérité. Et je dois attirer votre attention sur le fait

 25   que vous vous exposez, ce faisant, au parjure en cas de faux témoignage ou

 26   de fausse information fournie au Tribunal. Je vous prie à présent de bien

 27   vouloir prononcer cette déclaration solennelle.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement de dire la vérité,


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  1   toute la vérité et rien que la vérité.

  2   LE TÉMOIN : BLANDINA FRANCIS NEGGA [Assermentée]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Madame Negga. Veuillez prendre

  5   place.

  6   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, allez-y.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Avant de commencer, j'ai consulté la Défense pour savoir si je pouvais

 10   remettre des versions papier au témoin des documents que nous allons

 11   consulter car elle a quelques problèmes de vue et ne peut pas bien lire à

 12   l'écran. Elle a été opérée des yeux.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y.

 14   Mme BIERSAY : [aucune interprétation]

 15   Interrogatoire principal par Mme Biersay : 

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Negga.

 17   R.  Bonjour.

 18   Q.  J'aimerais commencer par vous demander si vous m'entendez bien ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous êtes bien installée ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Cette chaise est une taille unique, donc n'hésitez pas à l'adapter.

 23   Madame Negga, est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre où vous

 24   êtes née ?

 25   R.  Je suis né à Barbade, dans les Antilles anglaises.

 26   Q.  Quel poste avez-vous occupé d'environ mai 1992 à août 

 27   1993 ?

 28   R.  J'étais coordinatrice chargée des affaires civiles pour la FORPRONU en


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  1   ex-Yougoslavie.

  2   Q.  Et dans quel secteur étiez-vous ?

  3   R.  Dans le secteur est.

  4   Q.  Les Juges de la Chambre ont entendu déjà des dépositions sur le secteur

  5   est, donc est-ce que vous pourriez brièvement situer géographiquement ce

  6   secteur, Madame ?

  7   R.  Le secteur est faisait partie de la Croatie qui borde le Danube et qui

  8   inclut des villes telles que Vukovar, Ilok, Beli Manastir au nord, près de

  9   la frontière hongroise, et, bien sûr, Osijek, qui est en territoire croate

 10   en dehors de la ligne de confrontation.

 11   Q.  Lorsque vous utilisez le terme "ligne de confrontation", qu'entendez-

 12   vous par là ?

 13   R.  Il y a eu des combats en ex-Yougoslavie, plus précisément en Slavonie

 14   de l'Est, et entre Osijek en Croatie et le territoire peuplé de Serbes, qui

 15   est devenu la zone protégée des Nations Unies, ou le secteur est, entre ces

 16   deux territoires, il y avait les lignes de confrontation, un territoire

 17   difficile avec des zones minées.

 18   Q.  Qu'est-ce qui a fait surtout partie de vos activités pendant que vous

 19   étiez dans le secteur est ?

 20   R.  J'étais officier politique. Je coordonnais les activités des

 21   militaires, de la police civile et de l'administration des affaires

 22   civiles. Surtout, j'étais chargée de garantir la mise en œuvre du plan

 23   Vance et de faire en sorte que toutes les unités des Nations Unies

 24   travaillent de concert, puisque nous collaborions avec le CICR, ave le HCR

 25   des Nations Unies et avec d'autres entités. Notre tâche était de réunir les

 26   Croates et les Serbes afin qu'ils puissent déterminer la manière de vivre

 27   en paix.

 28   Q.  Au jour le jour, Madame Negga, pendant que vous avez été coordinatrice


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   1   des affaires civiles dans le secteur est, qu'est-ce qui a fait surtout

  2   partie de vos activités ? Que faisiez-vous surtout ?

  3   R.  Surtout, je devais prendre en charge les plaintes émanant des minorités

  4   de la zone, ils avaient besoin d'aide, ou parfois juste la possibilité de

  5   fuir vers la partie croate du territoire.

  6   Q.  Et que fuyaient-ils ? Qu'est-ce qui faisait qu'ils avaient besoin

  7   d'aide ?

  8   R.  Les minorités, les Croates, les Slovaques, les Rom, ils étaient chassés

  9   de cette zone pour faire de la place aux réfugiés qui arrivaient d'autres

 10   territoires d'ex-Yougoslavie, surtout de Bosnie-Herzégovine et d'autres

 11   zones.

 12   Q.  Et ces réfugiés, donc ceux qui arrivaient sur place, étaient-ce des

 13   Croates, des Slovaques, des Rom ?

 14   R.  Non, non, ils était tous Serbes.

 15   Q.  Je voudrais attirer votre attention sur le mois de juin 2012. Est-ce

 16   que vous avez signé une déclaration à ce moment-là, une déclaration

 17   recueille par le bureau du Procureur ?

 18   R.  Oui.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vais demander l'affichage de l'original

 20   anglais du document 2794 de la liste 65 ter. A l'onglet 5.

 21   Q.  Et je pense qu'il se trouve dans votre jeu de documents, Madame Negga.

 22   Il porte la date du 7 juin 2012. Peut-on consulter la page 4 directement,

 23   s'il vous plaît, en B/C/S. Madame Negga, pour vous, ce sera la première

 24   page -- en fait, le chiffre 1 figure en bas. On y trouvera votre nom et la

 25   date de naissance. Page 4 également en anglais, s'il vous plaît.

 26   Madame Negga, reconnaissez-vous cette page qui s'affiche ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et, d'après vous, de quoi s'agit-il ?


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  1   R.  C'est ma déclaration de témoin.

  2   Q.  Est-ce que vous reconnaissez une quelconque des signatures qui y sont

  3   apposées ?

  4   R.  Oui, je reconnais ma propre signature, Blandina Francis Negga.

  5   Q.  Avez-vous paraphé les pages suivantes ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Au moment où vous avez donné votre déclaration, vous l'avez signée en

  8   juin 2012, est-ce que vous mentionniez certains documents dans votre

  9   déclaration ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et vous les avez revus également ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Est-ce que l'on peut nous afficher la première page du document, s'il

 14   vous plaît. Madame Negga, à partir du moment où vous avez relu et signé

 15   votre déclaration, est-ce que vous avez, à ce moment-là, rencontré un

 16   employé du Greffe ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et est-ce que ce représentant du Greffe a certifié votre déclaration ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je vais demander à présent que l'on nous montre la toute première page

 21   de cette pièce.

 22   J'appelle votre attention sur cette page, donc c'est la toute première

 23   page. Ce n'est pas la première page de votre déclaration, mais cela fait

 24   partie de la certification du Greffe. Est-ce que vous pouvez tourner la

 25   page que vous avez là.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  [aucune interprétation]

 28   R.  Donc c'est une déclaration. "Déclaration de la personne qui fournit la


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  1   déclaration."

  2   Q.  Et vous avez signé cette certification, cette attestation. Par cette

  3   signature, vous confirmez que le contenu de la déclaration est véridique ?

  4   R.  Oui, je l'ai fait.

  5   Q.  Alors, est-ce que vous avez relu votre déclaration de 2012 lorsque vous

  6   vous êtes préparée à venir déposer aujourd'hui ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous avez remarqué des choses que vous souhaiteriez modifier

  9   ?

 10   R.  Deux petites modifications qui sont mineures, mais elles portent plus

 11   sur la forme que sur les faits.

 12   Q.  Très bien. Alors, le paragraphe 113, page 25, je pense, en anglais,

 13   page 21 pour vous -- je pense que c'est le chiffre 21 que l'on trouvera

 14   dans votre exemplaire. Est-ce que vous le voyez ?

 15   R.  Oui, je l'ai.

 16   Q.  L'avant-dernière phrase de ce paragraphe.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Est-ce que vous souhaitez exclure quoi que ce soit qui figure dans

 19   cette phrase ?

 20   R.  Après l'avant-dernière ligne, "Notre fuite", je voudrais simplement

 21   mettre un point après "RSK". Donc la phrase se lit comme suit :

 22   "J'ai entendu parler de lois garantissant la citoyenneté de la RSK aux

 23   personnes d'appartenance ethnique serbe qui résidaient à l'extérieur de la

 24   RSK et que c'était proche de certaines lois discriminatoires de la RSK."

 25   Je ne connais pas les lois et je ne me souviens pas non plus d'avoir vu ce

 26   type de loi ou de règlement. Donc je souhaiterais que ce soit après la

 27   deuxième mention de l'abréviation RSK que la phrase soit terminée.

 28   Q.  Je vous remercie. Et puis, page 24 dans votre exemplaire, Madame Negga.


Page 7155

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] Page 28 pour le Greffe, paragraphe 137.

  2   Q.  Là encore, la deuxième ligne à partir de la fin du paragraphe, vous

  3   voudriez apporter une correction --

  4   L'INTERPRÈTE : Correction qui n'a pas été audible pour l'interprète.

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6   Mme BIERSAY : [interprétation]

  7   Q.  Avec ces corrections, est-ce que la déclaration est exacte et véridique

  8   ?

  9   R.  Oui.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] L'Accusation demande que le document 2794 de

 11   la liste 65 ter soit versé au dossier, ainsi que les pièces connexes, qui

 12   figurent à l'onglet 1 jusqu'à 71 de la liste des pièces.

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Excusez-moi. Je pense qu'une autre question

 14   doit être posée.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.

 16   Mme BIERSAY : [interprétation]

 17   Q.  Madame Negga, si je vous posais aujourd'hui ces mêmes questions, est-ce

 18   que vos réponses seraient les mêmes ?

 19   R.  Oui.

 20   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie. Je demande de nouveau que

 21   ce document soit versé au dossier, ainsi que les pièces connexes.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est versé au dossier, admis et

 23   reçoit une cote.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cote P2398.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Mme BIERSAY : [interprétation]

 27   Q.  Alors, au paragraphe 85 de votre déclaration, page 16, vous parlez des

 28   Tigres d'Arkan, vous dites qu'ils ont été remarqués comme étant présents


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  1   dans le secteur, armés d'armes à canon long. Et vous décrivez ces armes en

  2   disant qu'elles étaient interdites au terme du plan Vance ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Alors, prenons le document 5250, à

  5   l'intercalaire 119, document de la liste 65 ter.

  6   Q.  Il s'agit du document qui porte la date du 16 septembre 1992. C'est un

  7   document qui vient de la police civile de la FORPRONU, de leur QG du

  8   Secteur est, un rapport de Larry Moore qui s'intitule : "Compte rendu d'une

  9   réunion avec les autorités de Baranja, réunion tenue le 16 septembre 1992."

 10   Prenez, s'il vous plaît, la page 3, la dernière page du document, Madame

 11   Negga. A la fin du document, nous voyons les initiales L.W. puis le nom de

 12   famille Moore. Est-ce que cela vous est familier ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Qui était-ce ?

 15   R.  Larry Moore était l'adjoint du responsable de la police civile dans le

 16   secteur.

 17   Q.  Et pendant que vous étiez en mission sur place, est-ce que vous

 18   receviez des rapports ainsi que des informations de sa part ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  A présent, j'attire votre attention sur la première page, le deuxième

 21   paragraphe, avec la liste des personnes présentes. L'on y voit des

 22   représentants de la FORPRONU : le colonel Jockin, Mme Negga, Corwin,

 23   Maldeghem, sergent Moore. Reconnaissez-vous ces noms ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Bien entendu, l'on voit votre nom. Mais qui est le colonel Jockin ?

 26   R.  Il était à la tête du Bataillon belge qui était déployé à Beli

 27   Manastir, à la frontière hongroise.

 28   Q.  Et le sergent Moore ?


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  1   R.  Oui, c'est Larry Moore de la police civile.

  2   Q.  Le document présente également les autorités locales, à savoir MM.

  3   Zivanovic, Latas et Vranac, voyez-vous cela, ainsi que trois autres

  4   personnes ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Cette réunion du 16 septembre 1992, vous en souvenez-vous ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Qu'est-ce qui vous permet de vous rappeler cette réunion ?

  9   R.  M. Zivanovic avait la sensation que la FORPRONU avait une attitude

 10   hostile vis-à-vis des Serbes, et la réunion ne s'est pas terminée dans

 11   l'ordre.

 12   Q.  Et s'agissant de la conversation avec M. Zivanovic -- est-ce que c'est

 13   le début du dernier paragraphe où nous voyons le nom de M. Zivanovic ?

 14   C'est en première page du document, vers la fin de la page. Vous voyez le

 15   nom de M. Zivanovic ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et, plus précisément, au point 1, il est présenté ce que M. Zivanovic

 18   avait à dire. Il a dit :

 19   "La FORPRONU ne bénéficie plus de la confiance du peuple serbe ni des

 20   autorités locales parce qu'elle n'a pas opté pour mettre en œuvre son

 21   mandat humanitaire."

 22   Est-ce que c'est ce que vous aviez à l'esprit lorsque vous avez évoqué

 23   l'opinion de M. Zivanovic quant à l'attitude de la FORPRONU ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et prenant la page suivante, au point 4, le texte se lit comme suit :

 26   "Aujourd'hui, la Baranja a répondu sur la question du retour des réfugiés."

 27   Quelle a été la réponse au sujet du retour des réfugiés ?

 28   R.  Il a été estimé que ce n'était pas le bon moment.


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  1   Q.  Il s'agit du retour de quels réfugiés ?

  2   R.  De Croates qui vivaient auparavant dans cette zone et il s'agissait

  3   également d'autres minorités qui y avaient vécu.

  4   Q.  Et au point 5 : "Lui," M. Zivanovic, "nous a informés qu'il se rendrait

  5   à la radio Beli Manastir pour rendre cela public." Est-ce que vous vous

  6   souvenez que cela ait été dit à la réunion ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Alors, je n'ai pas parlé de la position de M. Zivanovic au paragraphe

  9   5, que cette réunion aurait fait partie de -- qu'il y aurait eu comme une

 10   tentative de chantage.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Comment est-ce que vous avez répondu à cette allégation ?

 13   R.  Je l'ai rejetée, puisque nous devions rassembler les parties, faire en

 14   sorte qu'ils se parlent, qu'ils tournent la page de ce qui s'est passé et

 15   qu'ils trouvent un moyen de vivre ensemble en paix.

 16   Q.  Alors, au deuxième paragraphe à partir de la fin, le texte se lit comme

 17   suit :

 18   "Et sur ce, Monsieur Zivanovic." Cela correspond à ce que vous dites dans

 19   votre déclaration au sujet de désarmement. M. Zivanovic a déclaré que la

 20   FORPRONU était tenue de respecter ses consignes, mais que lui ne pouvait

 21   pas parler de la démilitarisation jusqu'à ce qu'il ne reçoive de consignes

 22   allant dans ce sens de Knin. Vous le voyez ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et alors, comment l'avez-vous interprété ?

 25   R.  Qu'ils avaient reçu des consignes des instances plus haut placées et

 26   qu'ils n'étaient pas autonomes et devaient attendre de savoir comment

 27   réagir face à nos propositions.

 28   Q.  Vers la fin de ce rapport, ce sont plutôt des conséquences qui sont


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  1   évoquées, des conséquences compte tenu de ce qui s'est dit à cette réunion.

  2   Et je voudrais que l'on parle du point 1, à savoir :

  3   "Il y aura probablement une escalade d'activités terroristes et une

  4   réaction contre la FORPRONU, puisque cet entretien à la radio qui a été

  5   suggéré pourrait être utilisé pour inciter la population."

  6   Le voyez-vous ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et je vous invite maintenant à vous reporter au point 2, page suivante.

  9   Et là encore, pour ce qui est du processus de désarmement, le texte se lit

 10   comme suit :

 11   "Il se peut que le processus de désarmement soit bloqué de nouveau

 12   puisqu'on affirme que les consignes doivent être reçues de Knin."

 13   D'expérience, que s'est-il passé à l'issue de cette réunion pour ce qui est

 14   du processus de désarmement dans le secteur est ?

 15   R.  Excusez-moi, je n'ai pas tout à fait suivi votre question.

 16   Q.  Est-ce que le désarmement s'est poursuivi comme prévu aux termes de

 17   l'accord Vance ?

 18   R.  Non. Non.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Je demande que le document 5250 de la liste

 20   65 ter soit versé au dossier.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis au dossier et

 22   reçoit une cote.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P2399.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation]

 26   Q.  Au paragraphe 28 de votre déclaration, vous dites que rapidement vous

 27   avez dû surtout vous consacrer aux activités visant à empêcher de nouvelles

 28   actions de nettoyage ethnique dans le secteur, et vous définissez le sens


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  1   de nettoyage ethnique. Vous dites qu'il s'agit de débarrasser la zone de

  2   l'ensemble de la population de telle sorte que seul un groupe ethnique n'y

  3   reste. Et ici, les Serbes étaient censés rester comme ce groupe ethnique.

  4   Vous vous souvenez de cela dans votre déclaration ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Prenons maintenant le document 1279 de la liste 65 ter, intercalaire

  7   153, en date du 27 septembre 1992. C'est une coupure de presse qui porte le

  8   titre : "Des meurtres qui rendent la Croatie un endroit adéquat pour les

  9   Serbes." C'est un article qui vient du journal "The Independent". Et

 10   premièrement, parlons du premier paragraphe, sous le mot "Corps" du texte.

 11   Vous l'avez ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  A l'onglet 153. Normalement, les documents avancent dans l'ordre de

 14   numérotation. C'est probablement à la toute fin.

 15   R.  Non, mon dernier document est le 152.

 16   Q.  D'accord. Je passe. Vous pouvez peut-être lire à l'écran. Est-ce que

 17   cela est trop difficile, oui ou non ?

 18   R.  Est-ce que l'on pourrait agrandir un peu ?

 19   Q.  On va essayer.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Nous pourrions même procéder à un plus grand agrandissement -- très

 22   bien. Le texte se lit comme suit :

 23   "A présent, ce sont les terres du peuple serbe. Elles le resteront pour les

 24   1 000 ans à venir. Si les Croates n'apprécient pas cela, nous commencerons

 25   une nouvelle guerre."

 26   Et ces propos sont attribués à Borivoje Zivanovic, un Serbe. C'est ainsi

 27   qu'il a parlé de la Baranja. Il y a aussi mention de Zivanovic ici. Est-ce

 28   que c'est le même que celui qui figure dans le document précédemment


Page 7161

  1   examiné ?

  2   R.  Je pense que c'est le même.

  3   Q.  Je vous invite à examiner maintenant la deuxième page, en haut. Le

  4   texte se lit comme suit :

  5   "Le colonel Jean-Marie Jockin, le chef militaire des Nations Unies à

  6   Baranja, a déclaré : 'Des activités terroristes sont en cours. Cela

  7   signifie tuer des gens, les rouer de coups, les torturer, voler."

  8   Vous nous avez dit qui était M. Jockin. Est-ce que c'est effectivement ce

  9   que vous avez vu dans le secteur est, ce qu'il appelle actes terroristes ?

 10   R.  Oui.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Je dois réagir. Je dois soulever une

 13   objection, Monsieur le Président. Il me semble que les questions sont trop

 14   directrices. Elle peut répondre aux questions ici, et nous avons vu comment

 15   est composée sa déclaration au titre de 92 ter, mais lui présenter des

 16   propos reportés dans des articles de presse sans savoir quel est le

 17   fondement sur lequel se base le journaliste lorsqu'il relaye cette

 18   information, d'après moi, ce sont des questions directrices.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Le témoin vient de nous dire ce qu'elle a

 20   vécu sur place, elle nous a décrit dans le rapport ce qu'elle a vécu. Et

 21   cela n'est absolument pas directeur. De la manière dont j'ai formulé la

 22   question à laquelle on pouvait répondre par une question oui ou non.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Continuez.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation]

 25   Q.  Alors, vers le milieu de la page, un paragraphe qui commence par

 26   "Entre-temps". Un couple croate âgé, d'après le texte, a été tué, et le

 27   texte se lit comme suit :

 28   "'On avait éventré M. Andric et on avait fait sauter la tête de sa femme,'


Page 7162

  1   Blandina Negga, coordinatrice des affaires civiles des Nations Unies en

  2   Croatie de l'Est…," et cetera. Est-ce que c'est à vous qu'on attribue ces

  3   propos ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et puis, dans la suite, il est dit :

  6   "99 % des victimes sont des non-Serbes. Le schéma est celui de menaces,

  7   suivies d'explosions de grenades ou de bombes, suivies de meurtres."

  8   Là encore, est-ce qu'on a raison de penser que c'est vous qui êtes à

  9   l'origine de ces propos ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et est-ce que ce schéma existait pendant toute la durée de votre

 12   mission dans le secteur est ?

 13   R.  Oui. Cela s'est reproduit dans d'autres villages, dans d'autres zones.

 14   Q.  J'attire votre attention sur le dernier paragraphe, qui commence par

 15   "Mme Negga" :

 16   "Mme Negga a établi un lien entre l'escalade du terrorisme et l'arrivée par

 17   bus vers la Baranja, surtout [sic] de nuit, de milliers de réfugiés serbes

 18   de Bosnie et d'autres parties de Croatie."

 19   Est-ce qu'on a raison d'attribuer cet élément d'information à vous ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce exact ?

 22   R.  Oui.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] A ce stade, nous demandons le versement au

 24   dossier de l'affaire du document 1279 de la liste 65 ter.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis au dossier et reçoit une cote.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera le document P2400.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation]

 28   Q.  J'aimerais maintenant que nous passions -- voyons si cela figure dans


Page 7163

  1   votre dossier. Est-ce que vous avez l'onglet 123 dans votre dossier ?

  2   R.  Oui.

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] Et pour le greffier [comme interprété], il

  4   s'agit du document 5260 de la liste du 65 ter. En date du 28 septembre, il

  5   s'agit d'une lettre de la FORPRONU.

  6   Q.  Au paragraphe 120 de votre déclaration, vous avez dit que la vie était

  7   devenue absolument impossible pour les non-Serbes, ce qui fait qu'ils

  8   devaient partir, et j'aimerais reprendre cela dans le contexte de ce

  9   document. Si nous pouvions passer à la deuxième page d'abord, parce qu'elle

 10   est datée d'avant la deuxième page. Non, excusez-moi. Je voulais parler de

 11   la troisième page.

 12   Est-ce que vous avez la lettre qui commence par "Chère Madame Negga" ?

 13   R.  Non, je ne l'ai pas. Non. J'ai ma réponse, mais pas la lettre.

 14   Q.  Pourrions-nous vérifier simplement -- ou peut-être si vous pouviez me

 15   redonner le dossier, je pourrais peut-être essayer de retrouver ce document

 16   dans le dossier du témoin. Donc, avec l'aide de l'huissier, si vous pouviez

 17   me remettre ce dossier.

 18   Pourrions-nous agrandir la section ou le paragraphe qui commence par "Chère

 19   Madame Negga". Pourrions-nous réduire légèrement le texte, à partir de

 20   "Chère Madame Negga".

 21   C'est une lettre qui vous est envoyée à vous, Mme Blandina Francis Negga,

 22   et émane de M. Milan Ilic, qui est le président du conseil régional, et il

 23   est indiqué en haut qu'il s'agit du district serbe de la Slavonie, Baranja

 24   et Slavonie orientale [comme interprété].

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  Et vous souvenez-vous de la lettre qu'il vous a envoyée ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Maintenant, si nous pouvions descendre jusqu'au premier paragraphe, que


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  1   je vais vous lire lentement, et qui dit :

  2   "D'après les conversations que nous avons eues lors du conseil régional du

  3   21 septembre concernant le transfert de sept personnes de la localité de

  4   Svinjarevci," et je suis sûre que vous prononcerez cela mieux que moi,

  5   Madame, "je dois vous informer que j'ai envoyé une lettre immédiatement à

  6   notre bureau des affaires internes à Vukovar, en leur demandant d'émettre

  7   une autorisation pour que ces personnes concernées puissent quitter le

  8   territoire et se rendre de l'autre côté (croate)."

  9   Pourriez-vous nous resituer cela dans le contexte et nous expliquer le

 10   contexte ?

 11   R.  Dans le village de Svinjarevci, il y avait des personnes qui étaient

 12   constamment harcelées, menacées, même physiquement menacées, et qui

 13   voulaient se rendre à Osijek pour éviter ce type de traitement.

 14   Q.  Si je pouvais maintenant passer au troisième paragraphe, où M. Ilic

 15   poursuit en disant que :

 16   "Le responsable des affaires internes m'a promis que le jour même où ils

 17   recevraient la requête des personnes, ils émettraient une autorisation leur

 18   permettant de quitter le territoire et de se rendre du côté croate."

 19   Et en réponse à cela, vous avez envoyé une lettre à M. Ilic; est-ce exact ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  C'est donc la toute première page du document. Et j'ai ce document par

 22   écrit, si cela peut aider Mme Negga qui a des problèmes de vue. Merci,

 23   Monsieur l'Huissier. J'aimerais me concentrer sur le paragraphe qui

 24   commence par "Bien que".

 25   Vous avez écrit :

 26   "Bien que je puisse comprendre que dans des situations normales on doive

 27   déposer une demande auprès du bureau des affaires internes de Vukovar pour

 28   demander la permission de quitter le territoire pour assurer un retour


Page 7165

  1   sécurisé à l'avenir, votre requête, dans ce cas, semble cynique et

  2   injustifiée. Ce serait cruel de prétendre que ces personnes infortunées

  3   quittaient leurs maisons et leurs communautés volontairement.

  4   "Ce serait tout simplement un mensonge."

  5   Sur quelle base dites-vous cela ?

  6   R.  Il était courant que toute personne quittant le territoire de manière

  7   volontaire se voie confisquer ses biens immédiatement. Ceux qui

  8   souhaitaient revenir devraient ensuite prouver qu'ils n'étaient pas du côté

  9   croate et étaient restés fidèles et loyaux envers le camp serbe. A mon

 10   sens, les efforts répétés pour faire passer les gens de l'autre côté de la

 11   frontière visaient essentiellement à confisquer leurs biens et faire en

 12   sorte que ces biens soient remis aux réfugiés qui arrivaient, et je pensais

 13   qu'ils souhaitaient que la FORPRONU, d'une certaine façon, s'associe à

 14   cette entreprise. Et je ne pouvais tout simplement pas l'accepter. C'est la

 15   raison pour laquelle j'ai écrit ce paragraphe.

 16   Mme BIERSAY : [interprétation] Et -- et à ce moment-là, nous pouvons

 17   demander le versement au dossier du document de la liste du 65 ter, il

 18   s'agit du document 5260.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis et il reçoit une cote.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2400 [comme

 21   interprété].

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien.

 23   Q.  Reprenons maintenant les termes que vous avez utilisés dans votre

 24   déclaration concernant le nettoyage ethnique. Je voudrais que nous

 25   regardions maintenant le document 1272 de la liste 65 ter, qui est

 26   probablement dans votre dossier. Si l'on pouvait demander l'aide de

 27   l'huissier pour vous permettre de trouver ce document dans votre classeur.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Et, entre-temps, si nous pouvions passer au


Page 7166

  1   document 1272 de la liste 65 ter. A l'onglet 75. En date du 22 septembre

  2   1992, il s'agit d'une coupure de presse intitulée : "Des non-Serbes tués

  3   lors des nettoyages ethniques en Croatie." Et c'est un article du

  4   "Guardian" en date du 22 septembre 1992.

  5   Q.  Je souhaiterais maintenant que nous descendions jusqu'au paragraphe, il

  6   me semble que c'est le quatrième, qui commence par "Blandina Negga". Ce

  7   paragraphe dit que vous êtes la coordinatrice des affaires civiles des

  8   Nations Unies du secteur est, et :

  9   "D'après cela, il est dit que Blandina Negga a indiqué que l'échelle

 10   de l'afflux de réfugiés bosniens avait été établie et que le programme de

 11   nettoyage ethnique avait été bien planifié. Elle a admis que les forces des

 12   Nations Unies ont autorisé de gérer cette région jusqu'à la fin du mois de

 13   janvier dans le cadre du plan de paix des Nations Unies et que celles-ci

 14   n'avaient pas le pouvoir d'empêcher cette réinstallation."

 15   Est-ce que cette information est exacte et peut vous être attribuée ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et est-ce que cette information est correcte ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et sur quelle base avez-vous pu conclure que les Etats-Unis -- je

 20   voulais dire, le plan de paix des Nations Unies n'avait pas le pouvoir

 21   d'empêcher cette réinstallation ?

 22   R.  Les forces des Nations Unies avaient été envoyées pour servir de tampon

 23   entre les Croates et les Serbes. Elles n'étaient pas là pour offrir des

 24   services locaux quels qu'ils soient. Elles -- enfin, par exemple, la police

 25   civile ne pouvait se permettre d'appréhender ou d'assurer la justice. Elle

 26   était là pour aider la police locale et lui permettre d'attirer son

 27   attention sur tout ce qui ne faisait pas partie d'une situation normale et

 28   de leur donner des conseils sur la façon d'améliorer la situation. Elle ne


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  1   pouvait d'elle-même entamer d'actions pour éviter une réinstallation ou

  2   autre chose. Elle était là simplement pour donner des conseils et non pas

  3   pour agir.

  4   Q.  Et dans ce cadre-là, est-ce que la FORPRONU avait le droit de

  5   poursuivre les gens pour des crimes ?

  6   R.  Non. La FORPRONU n'était là que pour attirer l'attention de la police

  7   et du procureur sur ce qui se passait et guider leurs actions.

  8   Q.  Bien. Maintenant, en vous demandant de regarder le paragraphe suivant

  9   dans lequel vous êtes à nouveau citée, vous décrivez cela comme étant "très

 10   organisé". C'est ce que vous avez dit. Donc :

 11   "'Les autorités locales leur donnait des maisons ou on les a

 12   installait dans les maisons de non-Serbes qui finissaient, la plupart du

 13   temps, par partir. Et cela ne faisait pas partie de notre mandat d'empêcher

 14   l'arrivée des réfugiés dans cette région. Donc, pratiquement toutes les

 15   maisons abandonnées par les Croates pendant la guerre étaient maintenant

 16   habitées,' a-t-elle ajouté."

 17   Q.  Est-ce que cette information est correcte ?

 18   R.  Oui.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Et maintenant, nous allons demander le

 20   versement de ce document 1272 de la liste du 65 ter.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Accepté et il reçoit une cote.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 2402.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous allons maintenant pouvoir passer à

 24   l'onglet 36, document que, j'espère, vous avez dans votre classeur. Est-ce

 25   que nous pourrions demander l'aide de l'huissier pour permettre au témoin,

 26   à Mme Negga, de retrouver cet onglet 36 dans son classeur. Il s'agit donc

 27   du document 5241 de la liste du 65 ter. Pourrions-nous, s'il vous plaît,

 28   afficher dans le prétoire électronique le 5241.


Page 7169

  1   Q.  Madame Negga, dans votre déclaration, aux paragraphes 40, 41, 42, vous

  2   décrivez une réunion le 4 septembre en 1992, une réunion avec les autorités

  3   de Knin à laquelle assistait également Goran Hadzic; est-ce exact ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et ceci est indiqué dans votre déclaration. Et si je pouvais maintenant

  6   vous demander de regarder le document affiché à l'écran, Madame Negga. Est-

  7   ce que vous pouvez le voir ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Si vous ne pouvez pas, nous pouvons vous imprimer une copie que nous

 10   vous apporterons. Est-ce que vous êtes à même de voir ce qu'il y a à

 11   l'écran ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Il est dit que ce document, d'ailleurs, est en date du 5 septembre

 14   1992, et il s'agit donc d'un fax du secteur est de la FORPRONU, dont le

 15   sujet est un résumé d'une réunion avec les autorités de Knin. Est-ce que

 16   vous voyez cela ?

 17   R.  [aucune interprétation]

 18   Q.  Donc c'est un fax envoyé par Heather Felsinger à Cedric Thornberry. Qui

 19   est Heather Felsinger ?

 20   R.  Elle a d'abord été ma secrétaire et par la suite responsable des

 21   affaires civiles dans le secteur est.

 22   Q.  Etiez-vous présente à cette réunion ?

 23   R.  Oui, je l'étais.

 24   Q.  Et maintenant, si je vous demande de regarder la deuxième page. Mais

 25   avant de ce faire, d'une manière plus générale, quel était l'objectif de

 26   l'envoi de ce document par Heather Felsinger à Cedric Thornberry ?

 27   R.  Eh bien, c'était simplement pour garder cela dans les dossiers, garder

 28   trace de ce qui avait transpiré.


Page 7170

  1   Q.  Est-ce que l'on pourrait maintenant agrandir la partie supérieure de

  2   cette page. Il y est décrit M. Marrack Goulding, qui est le sous-secrétaire

  3   général des opérations de maintien de la paix, qui ouvre la réunion. Est-ce

  4   que vous vous souvenez de sa présence ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et au paragraphe suivant, on parle de M. Hadzic qui s'est exprimé au

  7   nom des autorités de Knin. Vous souvenez-vous que M. Hadzic était présent à

  8   cette réunion ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Et d'après ce rapport, M. Hadzic, s'exprimant au nom des autorités de

 11   Knin, a dit que l'objectif principal de leur venue à cette réunion

 12   aujourd'hui, à savoir le 4 septembre 1992, était, l'espérait-il, d'aller un

 13   peu plus loin pour permettre de mettre un terme à la guerre et d'instaurer

 14   la paix au sein de la population serbe. Vous souvenez-vous de cela ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Je voudrais maintenant que vous passiez au paragraphe suivant qui

 17   commence par "En réponse", "In reply" en anglais :

 18   "En réponse, M. Goulding a remercié M. Hadzic de ses mots, à savoir que les

 19   Nations Unies pouvaient aider à mettre un terme à cette guerre et que la

 20   Krajina ait accepté le plan Vance. Il a indiqué, néanmoins, qu'une telle

 21   déclaration ne reflétait pas la situation réelle dans le secteur est."

 22   Vous souvenez-vous de cet échange lors de la réunion ?

 23   R.  Oui, je m'en souviens.

 24   Q.  Sur la base de ce que M. Hadzic a dit, était-il -- ou comment avez-vous

 25   reçu cette déclaration, et est-ce que cette déclaration reflétait la

 26   situation réelle dans le secteur est ?

 27   R.  Excusez-moi, est-ce que vous pourriez répéter votre question ?

 28   Q.  Tout à fait, oui. M. Goulding considérait que ce que M. Hadzic avait


Page 7171

  1   dit concernant l'aide des Nations Unies qui pouvait aider à mettre un terme

  2   à la guerre, et également la déclaration selon laquelle la Krajina avait

  3   accepté le plan de Vance, M. Goldman [comme interprété] a dit que cette

  4   déclaration de M. Hadzic ne reflétait pas la situation telle qu'elle était

  5   dans le secteur est. Etiez-vous d'accord avec ce que M. Goulding a dit ou

  6   pas ?

  7   R.  J'étais d'accord avec M. Goulding.

  8   Q.  Et pourquoi étiez-vous d'accord avec lui ?

  9   R.  Eh bien, simplement parce qu'il n'y avait plus de loi ni d'ordre dans

 10   ce secteur est et que l'on ne pouvait voir comment est-ce que l'on pouvait

 11   discuter ou instaurer la paix.

 12   Q.  J'aimerais maintenant que nous passions à un autre paragraphe qui ce

 13   trouve à mi-chemin, au milieu de la page à droite, à savoir que :

 14   "Les secteurs UNPA n'avaient pas été complètement démilitarisés. Les

 15   brigades de police à objectifs multiples et les milices ayant des armes de

 16   long calibre continuaient à déambuler dans le secteur. Ces forces ne

 17   fonctionnaient pas comme des forces de police normales. Ils n'étaient pas

 18   disciplinés, se comportaient comme des terroristes et non comme des

 19   soldats."

 20   Etiez-vous d'accord ou n'étiez-vous pas d'accord avec cette description de

 21   M. Goulding ?

 22   R.  J'étais tout à fait d'accord.

 23   Q.  J'aimerais maintenant passer à la page suivante. En fait, je vous

 24   demanderais de regarder le deuxième paragraphe. Et le paragraphe commence

 25   par "M. Kadzic". Dans votre déclaration, vous avez indiqué que ce n'était

 26   pas correct et qu'il faudrait y remplacer "Kadzic" par "Hadzic", "M.

 27   Hadzic".

 28   R.  C'est exact.


Page 7172

  1   Q.  "Et M. Kadzic," ou Hadzic, "a demandé comment ses autorités locales

  2   pouvaient démilitariser le territoire alors que les populations serbes

  3   étaient sous menace constante des Croates. Il a déclaré qu'il avait honte

  4   de voir que le plan Vance n'avait pas été mis en œuvre."

  5   Et si nous descendons vers le milieu de la page dans ce même paragraphe et

  6   que l'on regarde la phrase qui commence là où l'on voit "10 000 Serbes", si

  7   l'on descend deux lignes plus bas, on voit qu'il y a une phrase qui

  8   commence par "Concernant le nettoyage ethnique". Voyez-vous cela ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Bien. "Concernant le nettoyage ethnique, il," M. Hadzic, "a dit que les

 11   Croates ont commencé cette pratique en Slavonie occidentale préalablement à

 12   toute pratique avant les Serbes."

 13   Et il a continué en disant que :

 14   "Ils ont organisé des réunions et ordonné aux Serbes de quitter la région.

 15   Pendant la guerre, ils ont tué des femmes et des enfants sans merci. Et

 16   pendant de tels événements… ils agissaient en fonction du 'œil pour œil,

 17   dent pour dent'. A l'heure actuelle, nous pourrions donc arrêter ce

 18   nettoyage ethnique et des condamnations à mort pourraient être prononcées

 19   contre ceux qui avaient transgressé ces ordres."

 20   Vous souvenez-vous de cette réunion ?

 21   R.  Oui, je m'en souviens.

 22   Q.  Donc, d'après ce qui figure dans le paragraphe suivant, M. Goulding

 23   lui-même a réitéré ce qu'il pensait, que le nettoyage ethnique s'est

 24   poursuivi et que c'était une pratique courante et que cela est bien

 25   documenté par la CIVPOL de la FORPRONU :

 26   "Il a également noté le retour de 10 000 Serbes vers la Slavonie

 27   orientale, et que cela ne pouvait en aucune circonstance précéder le retour

 28   des réfugiés de Croatie en Serbie dans leurs propres demeures."


Page 7173

  1   Vous souvenez-vous de cet échange ?

  2   R.  Oui.

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] Ceci fait partie d'un ensemble de documents

  4   relevant de la liste du 92 ter, mais l'Accusation voudrait demander le

  5   versement de ce document au dossier. Donc c'est le document 5241 de la

  6   liste du 65 ter.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je dois dire que je ne comprends pas

  8   très bien ce que vous demandez, Madame Biersay. Est-ce que cela fait partie

  9   de cet ensemble de documents ?

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, cela fait partie d'un ensemble de

 11   documents. Bien, voyez-vous c'est la pratique, d'ailleurs, qui va dans les

 12   deux sens. Quelquefois nous remettons cela à plus tard et nous lui donnons

 13   un numéro en dehors des autres, et quelquefois nous demandons à ce qu'ils

 14   soient versés pendant que nous sommes en salle d'audience. Et j'ai proposé

 15   que --

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si cela fait partie du paquet, il

 17   peut être versé au dossier --

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, nous allons procéder de cette manière.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- dans le cadre de cet ensemble de

 20   documents.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pourrions maintenant

 22   afficher le document 6463 de la liste du 65 ter. Il s'agit de l'onglet 152.

 23   Q.  Et je vois que vous avez bien cela dans votre classeur, Madame.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

 26   R.  Oui, ce sont des notes manuscrites que j'ai prises pendant la réunion.

 27   Q.  Et pourrions-nous passer à la page suivante. Est-ce que cela fait

 28   partie également des mêmes notes concernant la réunion du 4 septembre 1992


Page 7174

  1   ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Si nous pouvions passer à la page suivante encore. Et là, donc, cela

  4   continue vos notes précédentes ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Pourrions-nous passer à la dernière page, s'il vous plaît. Je ne sais

  7   pas si l'on peut remettre la page dans le bon sens. Oui.

  8   Ce document s'intitule : "Réunion avec les autorités de Knin." De quoi

  9   s'agit-il là ?

 10   R.  C'est un petit peu la configuration de la réunion.

 11   Q.  Il s'agit donc des personnes présentes à la réunion ?

 12   R.  Oui.

 13   Mme BIERSAY : [interprétation] Et nous allons demander maintenant le

 14   versement de la pièce 6463 de la liste du 65 ter.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis, et le document reçoit une

 16   cote.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P2403.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'heure,

 20   et je serais ravie de continuer, mais j'ai un autre document que je

 21   souhaiterais présenter et peut-être est-ce le bon moment de faire une pause

 22   ?

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, tout à fait, Madame Biersay.

 24   Merci beaucoup.

 25   Madame Negga, le moment est venu pour la Chambre de première instance de

 26   faire une deuxième pause. Nous allons prendre une pause d'une demi-heure et

 27   revenir à midi 45. L'huissier va vous escorter hors du prétoire. Merci.

 28   [Le témoin quitte la barre]


Page 7175

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

  2   --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.

  3   --- L'audience est reprise à 12 heures 44.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons une petite

  6   minute, est-ce que je pourrais modifier la requête que j'avais présentée

  7   précédemment, à savoir que toute pièce connexe qui est prévue par le

  8   truchement de ce témoin et que l'on souhaite verser par le truchement de ce

  9   témoin soit traduite en B/C/S. Je ne demande pas que ce soit une condition

 10   préalable à l'admission. Je demande simplement que cela soit exigé. Je me

 11   rends bien compte que des écritures seront peut-être nécessaires pour

 12   étayer notre argument.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez répondre ?

 14   M. STRINGER : [interprétation] La Défense est libre de formuler cette

 15   demande à l'adresse du CLSS.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, est-ce que cela est

 17   possible ?

 18   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, je serais heureux de le faire de la

 19   sorte. Nous allons formuler la demande, et s'il y a un gros retard, nous

 20   reviendrons vers les Juges de la Chambre sur cette question.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez continuer, Madame Biersay.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Madame Negga, j'espère que vous avez l'onglet numéro 115 devant vous à

 26   présent, il s'agit du document 5234 de la liste 65 ter. Est-ce que vous

 27   avez un intercalaire 115 ?

 28   R.  Oui.


Page 7176

  1   Q.  Très bien. Il est daté du 2 septembre 1992. J'aimerais que l'on

  2   affiche, s'il vous plaît.

  3   En attendant l'affichage, Madame Negga, j'aimerais me reporter au

  4   paragraphe 38 de votre déclaration, qui nous dit :

  5   "Je me souviens d'un épisode qui a montré le niveau de contrôle que les

  6   autorités de la RSK avait sur le terrain. Un jour, j'ai été arrêtée sur le

  7   chemin d'Osijek par la police spéciale de la RSK par une patrouille dans ce

  8   'no man's land', une région minée entre Erdut et Osijek. Ils ont demandé

  9   nos papiers. J'ai insisté en disant que je faisais partie des Nations Unies

 10   et j'ai refusé de fournir les documents demandés. Plusieurs heures se sont

 11   écoulées, et au bout du compte le général Kromchenkov, chef du Bataillon

 12   russe" -- voulez-vous que nous attendions un instant, Madame Negga ?

 13   R.  Non, non. C'est très bien. Je peux continuer. Merci.

 14   Q.  Très bien. Je continue : 

 15   "Le général Kromchenkov, le chef du Bataillon russe de la FORPRONU, a

 16   appelé Milan Milanovic qui a demandé à la police des frontières d'arrêter."

 17   Cela se retrouve dans votre déclaration. Et je voudrais regarder le

 18   document que j'ai demandé à cet égard, mais avant cela, est-ce que tout

 19   cela reflète vos propos, Madame ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   R.  [aucune interprétation]

 23   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu le témoin toussait

 24   dans le micro en même temps que Mme Biersay.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation]

 26   Q.  J'aimerais passer à la page suivante à présent. Au bas de la page, on

 27   retrouve ce nom, L.W. Moore. C'est la personne dont on a parlé tout à

 28   l'heure, n'est-ce pas ?


Page 7177

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Ce document fait référence aux personnes portées disparues dans le

  3   secteur est. Vous avez reçu des informations plus particulièrement disant

  4   qu'il y avait peut-être des camps de prisonniers dans la région; est-ce

  5   exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Justement, sur ce sujet-là, au deuxième paragraphe avant la fin, qui

  8   commence par "This office", "Ce bureau", je cite :

  9   "Ce bureau ne peut pas remettre en question qu'il y a eu des camps de

 10   prisonniers dans cette région, soit pendant ou après la guerre. Nous ne

 11   pouvons même pas affirmer avec certitude que les camps n'existent pas à

 12   présent. Il y a encore plusieurs sites contrôlés par des paramilitaires ou

 13   des groupes de police spéciale au sein des zones protégées des Nations

 14   Unies où ni la police civile, ni les observateurs militaires des Nations

 15   Unies ne peuvent accéder."

 16   Est-ce que cela concorde avec le plan Vance, à savoir que ni la police

 17   civile, ni les observateurs militaires n'aient eu accès à des sites au sein

 18   du secteur est ?

 19   R.  Non, cela n'était pas conforme.

 20   Q.  Et vous avez eu l'occasion de revoir ce document, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et il est exact d'après les informations que vous aviez reçues ?

 23   R.  Oui.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous aimerions demander le versement du

 25   document 5234 de la liste 65 ter.

 26   Q.  Est-ce que vous avez entendu cela, Madame Negga ?

 27   R.  Oui.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis. Quelle sera sa


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  1   cote ?

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document reçoit la cote P2404,

  3   Messieurs les Juges.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Pouvons-nous afficher à présent le document

  6   5210 de la liste 65 ter.

  7   Q.  Onglet 108. Vous le voyez, Madame ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Il est daté du 17 juillet 1992. Et cela porte sur les paragraphes 81 et

 10   82 de votre déclaration où vous avez discuté des auteurs. Et vous dites, je

 11   cite : "Les auteurs ont menacé que s'il ne partait pas, lui et sa famille

 12   seraient tués le lendemain." Je voudrais attirer votre attention à présent

 13   sur le document qui est à l'écran. Il émane de Kjell Johansen et est

 14   adressé à Cedric Thornberry; est-ce exact ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  La deuxième phrase nous dit :

 17   "Ce rapport donne le contexte de l'action qui a eu lieu, soit par le CAC,

 18   coordinateur chargé des affaires civiles, Mme Negga, pour le secteur est,

 19   ou par moi-même."

 20   La personne qui rédige ce rapport est M. Hansen [sic], n'est-ce pas ?

 21   R.  M. Johansen.

 22   Q.  M. Johansen. Très bien. Est-ce que vous vous souvenez de cet événement

 23   qui est décrit dans le rapport à propos de Doko Briga ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Au quatrième paragraphe, on parle de la réunion qui s'est ouverte.

 26   Johansen dit qu'il a donné une brève présentation des observations et qu'il

 27   avait rendu visite au plus âgé de ces deux hommes croates dans sa maison le

 28   8 juillet. En présence de Gerard Sexton et du sergent Larry Moore, il a


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  1   déclaré que le soir précédent, Doko Briga lui avait rendu visite chez lui

  2   et avait été roué de coups gravement : 

  3   "L'homme était couché au lit et souffrait énormément. Il m'a montré

  4   ses pieds ensanglantés, ses jambes ensanglantées, son dos. Il pouvait à

  5   peine bouger."

  6   A la ligne suivante, on nous dit, je cite : "Cet homme avait connu

  7   Doko Briga depuis des années, et il a dit qu'ils étaient amis auparavant."

  8   Est-ce que cette déclaration est cohérente avec les informations dont vous

  9   disposiez à l'époque ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Alors, on continue dans le texte et on décrit au dernier paragraphe que

 12   le chef de la police a fait une longue allocution et a déclaré qu'il n'y

 13   avait pas de cause juridique pour forcer et arrêter Doko Briga, parce qu'il

 14   s'agissait d'une querelle d'ordre privé.

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   Q.  Et il ajoute que vous auriez dit : "Si de telles lois sont

 17   d'application, vos lois sont barbares." Vous souvenez-vous de cela, Madame

 18   ?

 19   R.  Oui, je l'ai déclaré.

 20   Q.  Pourquoi avez-vous fait ce commentaire ?

 21   R.  Parce que si vous regardiez cet homme et la façon dont il avait été

 22   roué de coups, vous ne pouviez pas vous empêcher de vous demander pourquoi,

 23   et des querelles habituelles entre les gens ne finissaient pas comme cela.

 24   Q.  Vous avez revu ce document au préalable. Est-ce que cela reflète

 25   fidèlement les informations portant sur la réunion et les informations dont

 26   vous disposiez à l'époque ?

 27   R.  Oui.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] J'aimerais demander le versement du document


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  1   5210 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis. Quelle sera sa

  3   cote ?

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela devient la pièce P2405.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation]

  6   Q.  Madame Negga, est-ce que dans votre classeur vous avez un intercalaire

  7   numéroté 109 ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Dans le paragraphe 37 de votre déclaration, vous nous 

 10   dites :

 11   "Je pensais que le refus de la police locale d'enquêter ou d'empêcher des

 12   crimes contre des non-Serbes était une politique qui découlait directement

 13   du gouvernement de RSK. En fait, peu après mon arrivée dans le secteur,

 14   j'ai remarqué que la police locale participait à ces rouages de coups et à

 15   ces expulsions ou restait là, les bras croisés, pendant que ces crimes

 16   avaient lieu."

 17   J'aimerais attirer votre attention sur le document 5214 de la liste 65 ter

 18   à présent. Intercalaire 109 dans votre classeur, daté du 22 juillet 1992.

 19   Regardons la première page du document. Il émane de Mohamed Abdul Aziz,

 20   officier chargé des affaires civiles, Beli Manastir, et adressé à Cedric

 21   Thornberry. Qui était M. Abdul Aziz ?

 22   R.  C'était également un officier de la FORPRONU, et lorsque j'étais en

 23   déplacement, il me remplaçait et c'était lui, donc, l'administrateur des

 24   affaires civiles en exercice à Erdut, ou bien il était cantonné à Beli

 25   Manastir.

 26   Q.  Je vois qu'il y a quelqu'un mis en copie dans ce document, Blandina

 27   Negga.

 28   R.  Oui.


Page 7181

  1   Q.  Est-ce que vous connaissez le contenu de ce document ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Il s'agit d'un long rapport manuscrit, et j'aimerais que vous vous

  4   concentriez sur quelques aspects de ce dernier. Et ce sera le dernier

  5   document que j'aborderai avec vous, Madame.

  6   J'aimerais attirer votre attention sur la troisième page. Le point 3.

  7   Essayons d'agrandir cette partie. Voilà. A vous de choisir, Madame Negga,

  8   lire la version papier ou ce qui est affiché à l'écran. Regardons la

  9   sixième ligne. La phrase commence vers la droite "Fugitives from justice"

 10   en anglais, "Fugitifs de la justice". Vous le voyez ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  On nous dit :

 13   "Des fugitifs, ceux qui ont fui la justice, sont perçus par certains

 14   dirigeants locaux et par l'armée et les commandants de police comme des

 15   héros. Des criminels qui ont commis des crimes graves sont libérés de

 16   prison peu de jours après leur arrestation. Même, quelques fois, lorsque la

 17   police locale fait son travail de façon professionnelle, leurs efforts

 18   finissent par être frustrants, suite à des décisions irresponsables des

 19   juges qui agissent sous la pression constante des dirigeants politiques qui

 20   interviennent pour faire libérer ces terroristes."

 21   Est-ce que cela concorde avec votre expérience et les informations dont

 22   vous disposiez dans le secteur est pendant votre mandat ?

 23   R.  C'est exactement ce qui s'est passé. Il a décrit la situation

 24   clairement.

 25   Q.  Ensuite, il continue et il aborde un sujet que nous avons déjà traité,

 26   donc je ne vais pas revenir dessus. Mais très brièvement, il évoque le fait

 27   que toutes les personnes et les familles qui avaient collaboré avec

 28   l'ennemi, et cetera, n'avaient plus la permission d'être en Baranja.


Page 7182

  1   J'aimerais que vous passiez au point 5 à présent. La première phrase dit :

  2   "Le processus de nettoyage ethnique non seulement est mené en terrorisant

  3   la population et en utilisant les menaces, mais aussi en utilisant des

  4   pressions économiques."

  5   Est-ce que cette déclaration est exacte ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire brièvement aux Juges de la Chambre

  8   quelles étaient ces pressions économiques ? Quelles pressions économiques

  9   ont été exercées sur les non-Serbes ?

 10   R.  Les non-Serbes étaient renvoyés de postes qu'ils tenaient depuis des

 11   années, pour certains, 20 ans. Ils ont juste été renvoyés, et ils n'avaient

 12   pas d'autres moyens de subsistance.

 13   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous aimerions demander le versement du

 14   document 5214 de la liste 65 ter.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Avant de faire cela, Madame Biersay,

 16   à la ligne avant le point 4.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous avez lu ce verbe en disant qu'il

 19   était écrit "interfere" en anglais.

 20   Mme BIERSAY : [interprétation]

 21   Q.  Que lisez-vous, Madame Negga ?

 22   R.  Moi je lis "intervene", "intervenir", et pas "interférer".

 23   Q.  Merci.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Le document est admis. Quelle

 25   sera sa cote ?

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela devient la pièce P2406, Messieurs

 27   les Juges.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] A ce stade-ci, Messieurs les Juges, je n'ai


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  1   plus de questions.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Passons au contre-

  3   interrogatoire, Maître Gosnell.

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Désolé

  5   de ce petit retard.

  6   Contre-interrogatoire par M. Gosnell : 

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Negga.

  8   R.  Bonjour.

  9   Q.  Doit-on dire Madame Negga ou Mademoiselle Negga ?

 10   R.  Madame Negga serait préférable.

 11   Q.  Merci. Je m'appelle Christopher Gosnell et je représente M. Hadzic. Je

 12   vais vous poser quelques questions aujourd'hui et demain. Si dans mes

 13   questions je ne suis pas clair, n'hésitez pas à me demander de préciser les

 14   choses. Vous comprenez ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Pendant les 14 mois où vous étiez dans le secteur est, et d'après ce

 17   que j'ai compris, cela a eu lieu entre juin 1992 et le mois d'août 1993,

 18   est-il exact que vous avez rencontré M. Hadzic une seule fois ?

 19   R.  Je me souviens très précisément de cette réunion.

 20   Q.  C'était la seule réunion face-à-face que vous ayez eue avec lui, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  D'après mes souvenirs, oui.

 23   Q.  Et lors de cette réunion, le sous-secrétaire général, M. Goulding, et

 24   le chef des affaires civiles, Cedric Thornberry, pour la FORPRONU, étaient

 25   également présents; est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Parmi les principaux intervenants, donc les personnes qui ont échangé

 28   des mots pendant la réunion, M. Goulding se trouvait d'une part, et de


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  1   l'autre part, il y avait plusieurs ministres de RSK, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'était principalement M. Hadzic, d'après ce dont je me souviens.

  3   Q.  Vous ne vous souvenez pas de M. Martic qui a pris la parole à la

  4   réunion ?

  5   R.  Oui. D'après mes notes, oui, il a pris la parole à la réunion.

  6   Q.  Serait-il exact de dire que les réunions avec M. Hadzic en qualité de

  7   président de RSK étaient au-dessus de votre catégorie salariale ? En

  8   d'autres mots, vous ne rencontriez pas personnellement et juste à deux M.

  9   Hadzic --

 10   R.  Non.

 11   Q.  -- parce que vous étiez coordinatrice pour les affaires civiles dans le

 12   secteur est. Les réunions avec M. Hadzic avaient lieu en présence de soit

 13   M. Goulding, soit M. Thornberry.

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Vous avez parlé tout à l'heure de notes préparées par une certaine Mme

 16   Felsinger. Dans ces notes, on indique que M. Hadzic avait utilisé

 17   l'expression œil pour œil, dent pour dent. Pourriez-vous nous redonner le

 18   contexte de ces propos, et qu'avez-vous compris de ces propos ?

 19   R.  J'ai compris que quoi que les Croates aient fait contre les Serbes, la

 20   réponse serait du même type. Œil pour œil, dent pour dent. Ce sont les mots

 21   qu'il a prononcés. Vous savez, quand vous entendez ce genre de mots dans

 22   une réunion, vous les retenez.

 23   Q.  Ces propos constituaient pour vous une déclaration qui méritait d'être

 24   notée, s'ils sortaient de la bouche du président de la RSK ?

 25   R.  Qui méritait d'être notée, dans quel sens ?

 26   Q.  Eh bien, cela était important. 

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que vous avez compris qu'il défendait sa position ou est-ce que


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  1   vous avez compris qu'il décrivait ce qu'il était en train de se passer sur

  2   le terrain ?

  3   R.  La dernière proposition. J'avais l'impression qu'il était en train de

  4   dire que quoi qu'ils aient fait, nous riposterions.

  5   Q.  Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris votre réponse. Je vais vous

  6   reposer la question.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection, Monsieur le Juge. La réponse a

  8   été très claire. Peut-être que ce n'est pas celle qu'attendait le conseil,

  9   mais elle est claire.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, il y a

 11   une petite confusion, Madame Biersay. Je rejette votre objection.

 12   M. GOSNELL : [interprétation]

 13   Q.  Revenons à votre réponse. Vous avez dit la dernière proposition. La

 14   dernière proposition concerne les événements tels qu'ils étaient en train

 15   de se passer sur le terrain. Est-ce que c'est bien ce que vous vouliez dire

 16   lorsque vous avez déclaré la dernière proposition dans votre réponse ?

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, je pense qu'il serait

 18   juste de répéter la question au témoin telle qu'elle a été posée.

 19   Maintenant, que l'on parle de la dernière proposition et de la première

 20   proposition, je pense qu'en répétant la question, elle pourra nous répondre

 21   précisément.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

 23   Q.  Madame Negga, je vais vous reposer la question. La question était la

 24   suivante : est-ce que vous avez compris qu'il défendait cette position, ou

 25   plutôt, est-ce que vous avez compris qu'il décrivait ce qu'il était en

 26   train de se passer sur le terrain ?

 27   R.  Je dirais aucun des deux. J'ai eu l'impression que ce qu'il disait,

 28   c'était quoi qu'ils fassent, nous riposterions.


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  1   Q.  Est-ce que cela veut dire que vous suggérez qu'il prônait l'œil pour

  2   œil, dent pour dent ?

  3   R.  Oui. S'il dit, Si vous faites cela, nous emboîterons le pas et nous

  4   riposterons de la même manière. Donc, si pour vous cela veut dire défendre

  5   cela, c'est à vous de l'interpréter de la sorte. Mais c'est ce que j'ai

  6   compris, Si vous faites cela, nous allons riposter.

  7   Q.  Pour moi, il y a une différence possible entre défendre quelque chose,

  8   la politique de la RSK, d'une part, et décrire, d'autre part, ce qu'il est

  9   en train de se passer sur le terrain. Et ce que je vous demande --

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense, Maître Gosnell, que la

 11   question que vous avez posée a obtenu une réponse. Vous n'êtes pas d'accord

 12   ?

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Il y a eu une ébauche de réponse, mais je

 14   voulais davantage approfondir la question sans devenir trop répétitif,

 15   parce que je ne suis pas sûr que toutes les dimensions de cette question-là

 16   aient bien été comprises. Pour moi, nous devons approfondir les choses.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Madame Biersay.

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Je pense que le

 19   témoin a été très clair à ce sujet. Une question a été posée, une réponse a

 20   été donnée, et je crois que la question a été répétée trois fois, si mes

 21   calculs sont bons. Comme je l'ai dit, la réponse a été donnée et je crois

 22   que le conseil de la Défense devrait se voir demander de continuer.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous donne une dernière chance,

 24   Maître Gosnell.

 25   M. GOSNELL : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce qu'il utilisait cette expression pour expliquer à M. Goulding ce

 27   qu'il pensait qu'il était en train de se passer, pas comme politique

 28   gouvernementale, mais pour expliquer ce que les bandits, les extrémistes,


Page 7188

  1   les personnes incontrôlées, étaient en train de faire dans le secteur est ?

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay.

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est exactement une

  4   répétition des questions précédemment posées, en essayant, je pense, de

  5   faire changer sa réponse précédente au témoin, et elle a déjà répondu trois

  6   fois.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'objection est retenue.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Pouvons-nous afficher le document 06463, s'il

  9   vous plaît. Ce document vous a été présenté par l'Accusation.

 10   Mme BIERSAY : [aucune interprétation]

 11   M. GOSNELL : [interprétation] Il s'agit de l'onglet 152. Il vaudrait peut-

 12   être mieux prendre la version dactylographiée.

 13   Q.  Ai-je bien compris, Madame Negga, que vous avez relu ces notes

 14   manuscrites, et vous avez essayé de transcrire cela, de dactylographier ce

 15   que vous aviez initialement écrit de votre main ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Prenons la première page, l'avant-dernier paragraphe. Ici, vous

 18   présentez une prise de parole par M. Hadzic, et un alinéa commence par :

 19   "S'agissant du nettoyage ethnique, de nombreuses erreurs ont été commises,

 20   à commencer par la Slavonie occidentale, et ce, par des responsables du

 21   gouvernement croate. A en juger d'après les éléments d'information reçus,

 22   170 villages ont été touchés. Il a rappelé les événements de la Seconde

 23   Guerre mondiale. Il s'est vanté que la Krajina était plus forte que la

 24   Croatie, et c'était une peine de mort prononcée pour la Communauté

 25   européenne."

 26   Donc, s'agissant de cette manière de riposter, œil pour œil, dent pour

 27   dent, ici, dans vos notes, M. Hadzic ne semble pas dire que cela faisait

 28   partie de la politique de la RSK. Y a-t-il une raison pour laquelle cela


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  1   n'y figure pas ?

  2   R.  Ecoutez, 20 ans plus tard, je ne me souviens pas de raisons, s'il y en

  3   a eu, mais j'ai entendu ces propos et j'avais l'impression que c'était une

  4   manière de résumer ce qui était dit. Je n'ai pas retenu cela verbatim.

  5   Q.  Ce n'était pas une déclaration choquante à entendre, que c'était une

  6   question de politique menée par la RSK de riposter à une grande échelle --

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection.

  8   M. GOSNELL : [interprétation]

  9   Q.  -- sur ce qui s'était produit en Slavonie occidentale ?

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Ce n'est pas ce qui est dit. C'est une

 11   affirmation qui est soumise par Me Gosnell, et il s'agit là de son

 12   interprétation du texte. Je pense qu'il faudrait citer verbatim ce que le

 13   témoin a noté.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Justement. Je soumets cela au témoin.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a eu déclaration

 16   consistant à dire que c'était cela, la politique de la RSK, de se venger ?

 17   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, je --

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est ce que vous êtes en train de

 19   dire.

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Je pensais que c'était la conclusion finale

 21   qui s'imposait, que c'était ce que j'ai dit à la fin des dernières

 22   questions posées précédemment, à moins qu'on m'ait tout à fait mal compris.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Cette affirmation que Me Gosnell -- ou cette

 24   proposition que Me Gosnell soumet, quelle que soit la manière dont on

 25   l'appellera, le fait que cela ne figure pas dans ses notes, eh bien, c'est

 26   probablement parce que ça n'a jamais été dit, elle a expliqué qu'elle a

 27   résumé l'information. Donc, nulle part ne trouve-t-on que cette phrase en

 28   tant que telle ait été prononcée lors de la réunion.


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, si l'Accusation est prête à passer

  2   un accord avec la Défense sur ce point.

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Gosnell, je dois dire que je

  4   partage le souci qui a été évoqué par le Président sur la manière dont vous

  5   vous y êtes pris à formuler cette question. On semble demander au témoin

  6   d'accepter quelque chose qui est plus que quelque chose qu'elle aurait

  7   mentionné elle-même, quelque chose de plus que ce qu'elle avait, elle,

  8   noté. Donc, dans cette mesure, il me semble que la question n'est pas tout

  9   à fait juste.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Je devrais peut-être la scinder et procéder

 11   par étapes --

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, essayons de voir comment nous

 13   allons pouvoir avancer avec ça.

 14   M. GOSNELL : [interprétation]

 15   Q.  Alors, je vais formuler ma question de la manière 

 16   suivante : M. Goulding, est-ce qu'il a répondu à cette déclaration ?

 17   R.  Il me faudrait lire la réponse de M. Goulding dans le résumé qui en est

 18   donné, mais je ne me souviens pas que M. Goulding ait utilisé cette

 19   expression "Œil pour œil, dent pour dent" dans sa réponse.

 20   Q.  Non, non, ce n'est pas ce que j'avançais. Je vous ai demandé si vous

 21   vous souveniez de ce qu'a dit M. Goulding en réponse, si jamais il a

 22   répondu à l'utilisation de ces termes en particulier.

 23   R.  Comme je vous l'ai dit, je ne me souviens pas qu'il ait utilisé ces

 24   termes en particulier.

 25   Q.  Lorsque vous dites "lui" --

 26   R.  Je pense à M. Goulding.

 27   Q.  Qu'il ait utilisé ces termes-là ou d'autres termes, est-ce que vous

 28   vous souvenez s'il a répondu à l'emploi de ces termes, au fait que ces


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  1   termes aient été employés ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Aujourd'hui, est-ce que vous vous souvenez de ce que M. Goulding a dit,

  4   en effet, pendant cette réunion ? Indépendamment de ce qui figure dans vos

  5   notes.

  6   R.  Monsieur, cela fait plus de 20 ans. On me demande de revivre à chaque

  7   fois de nouveau cette période atroce de ma vie. Je souffre du PTSD, et vous

  8   me demandez de me rappeler mot pour mot quelque chose qui a été dit par

  9   quelqu'un d'autre, alors que l'on voit dans tous les rapports ces choses-là

 10   qui ont été notées au moment où les événements se sont produits. Je pense

 11   que cela n'est pas juste.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Negga, je pense que vous avez

 13   mal compris la question de Me Gosnell.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce qu'il vous demande, c'est de

 16   savoir si vous vous rappelez ces termes qui ont été employés. Si vous ne

 17   vous en souvenez pas, personne ne va vous le reprocher. Il s'agit

 18   simplement de savoir si cela est toujours dans votre mémoire.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec tous mes respects, Monsieur, j'ai répondu

 20   X fois à cette question. Il m'a demandé si le sous- secrétaire général, M.

 21   Goulding, a répondu à cette expression œil pour œil, dent pour dent, et je

 22   lui ai dit que je ne me souvenais pas qu'il l'ait dit. Alors, qu'est-ce que

 23   je peux en dire de plus ? J'ai répondu à la question.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En conséquence, est-ce que nous

 25   sommes en droit de penser que vous ne vous rappeler plus ce que M. Goulding

 26   a dit à ce moment-là ? Il ne s'agit pas concrètement s'il a répondu à

 27   l'expression œil pour œil, dent pour dent.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, pas du tout. M. Golding a réfuté que


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  1   la situation est avancée parce que la situation dans le secteur ne s'était

  2   pas améliorée, et M. Goulding a évoqué toute une liste de choses qui ne

  3   s'étaient pas améliorées et toute une liste de problèmes. Et je me souviens

  4   très bien de cela.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  6   M. GOSNELL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  7   Q.  M. Hadzic s'exprimait en serbo-croate, je suppose ?

  8   R.  Bien entendu.

  9   Q.  Vous ne parlez pas serbo-croate ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Et la réunion a été interprétée par quelqu'un.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez apprécier la qualité de l'interprétation qui a

 14   été fournie ?

 15   R.  Nous avions les meilleurs interprètes qui étaient disponibles. Mon

 16   sentiment était qu'ils faisaient du bon travail.

 17   Q.  Si je vous pose la question, c'est parce que tout le monde n'est pas

 18   d'accord sur le fait que tous les interprètes des Nations Unies étaient les

 19   meilleurs interprètes, mais tout simplement je voudrais savoir si vous

 20   aviez le sentiment qu'il y avait quoi que ce soit dans cette interprétation

 21   qui vous aurait amenée à douter de l'exactitude et de la précision de

 22   l'interprétation.

 23   R.  Non, pour autant que je m'en souvienne, et à l'époque aucune

 24   contestation n'a été entendue…

 25   Q.  Vous, vous-même, vous n'avez pas pris la parole pendant la réunion;

 26   est-ce exact ?

 27   R.  Oui, c'est ça ?

 28   Q.  Est-ce que vous avez essayé de noter de la manière la plus complète qui


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  1   soit les propos prononcés pendant la réunion ?

  2   R.  C'est ce que je m'efforce toujours de faire.

  3   Q.  Et est-ce que c'est pendant la réunion que vous avez pris ces notes ou

  4   est-ce que vous l'avez fait après la réunion ?

  5   R.  Est-ce que vous avez un exemplaire de ces notes ?

  6   Q.  Tout à fait.

  7   R.  Mais on voit clairement que c'était fait en même temps.

  8   Q.  Prenons maintenant le paragraphe 53 de votre déclaration. Vous dites

  9   ici :

 10   "Au début de l'année 1993, les autorités de la RSK étaient en contact avec

 11   le secrétaire général des Nations Unies. On m'a envoyé un exemplaire de la

 12   lettre envoyée par Hadzic au secrétaire général. Dans cette lettre, il a

 13   souligné que la RSK avait peur que les Croates ne lancent sur-le-champ une

 14   attaque. J'ai pensé que cette peur n'était pas justifiée parce que les

 15   Croates insistaient auprès de moi de faire en sorte que les Croates

 16   déplacés puissent retourner chez eux. Et je pense que c'était très peu

 17   probable que les Croates attaquent la zone à laquelle ils essayaient de

 18   faire revenir les Croates déplacés. C'était une forme de propagande de la

 19   part de Hadzic."

 20   Dans votre note de bas de page, vous citez une lettre, et il s'agit de

 21   l'intercalaire 61, 05322 de l'Accusation. Alors, Madame Negga, lorsque vous

 22   avez rédigé votre déclaration, vous aviez les documents sous la main, les

 23   documents qui sont référencés dans les notes de bas de page ?

 24   R.  Oui.

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Alors, encore une fois, le numéro est 05322

 26   de la liste 65 ter.

 27   Q.  Est-ce bien là la lettre à laquelle vous vouliez faire référence dans

 28   cette note en bas de page ?


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] Je ne sais pas s'il en existe une copie

  2   papier. Je remercie mon confrère pour cette amabilité.

  3   Q.  Il est dit là au début de cette lettre -- non, excusez-moi. Je vais

  4   d'abord vous donner la possibilité de répondre à ma question. Est-ce bien

  5   là le document auquel vous faisiez référence ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Dès le début, il est dit que :

  8   "La République de la Krajina serbe qui a été établie sur le territoire de

  9   l'ancienne Yougoslavie suite aux souhaits de sa propre population était

 10   exposée à l'agression permanente des forces armées de la République de

 11   Croatie, à dater du 21 janvier 1993 jusqu'à ce moment-là."

 12   Si nous allons maintenant à la page 2, vous voyez qu'il est dit que :

 13   "A ce moment-là, nous étions exposés au nombre important de réfugiés venant

 14   de la région de Benkovac, et il y en avait près de 

 15   10 000."

 16   Maintenant, en regardant ce nom, Benkovac, est-ce que cela vous permet de

 17   vous rappeler des événements qui ont pu se produire aux alentours de cette

 18   date ?

 19   R.  Il semblerait qu'il me manque une page, donc j'avoue que j'ai un peu de

 20   mal à vous suivre.

 21   Q.  Peut-être que l'on pourrait zoomer et agrandir. Ce devrait être, donc,

 22   la page 2.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous n'avez pas la page 2 dans les

 24   documents qui vous ont été remis ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 27   M. GOSNELL : [interprétation]

 28   Q.  Madame Negga, est-ce que c'est suffisamment grand ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  "Nous étions, à ce moment-là, exposés à un grand nombre de réfugiés

  3   venant de Benkovac, et il y en avait près de 10 000."

  4   Est-ce que cela vous rappelle les événements qui ont pu se produire

  5   autour de cette date ? Et cette lettre est en date du 31 [comme interprété]

  6   janvier 1993.

  7   R.  Ici, ce qu'il est dit, c'est que c'était dans le secteur ouest,

  8   qui était juste à côté du secteur est.

  9   Q.  Je ne suis pas encore là. Je suis juste au-dessus, Madame Negga.

 10   Est-ce que vous voyez les mots "région de Benkovac" dans cette page ?

 11   R.  Hm-hm. Oui, je vois.

 12   Q.  Est-ce que ce nom vous rappelle des événements particuliers qui

 13   auraient pu se dérouler aux alentours de cette date ?

 14   R.  Non, ce n'est pas le cas.

 15   Q.  Vous souvenez-vous si, dans le cadre de vos fonctions dans le secteur

 16   est, si vous étiez au courant des événements se déroulant dans d'autres

 17   secteurs, notamment des événements en rapport avec la sécurité ?

 18   R.  Nous recevions régulièrement des rapports de chaque secteur provenant

 19   du commandement militaire à Zagreb.

 20   Q.  Passons maintenant au paragraphe suivant que, je pense, vous avez déjà

 21   lu, et qui dit :

 22   "Malheureusement, d'après nos connaissances, les forces militaires de la

 23   République de Croatie se préparent pour lancer d'autres actions agressives

 24   vers le territoire de la Slavonie occidentale (secteur ouest) dans les

 25   quelques jours à venir."

 26   Est-ce que c'est ce que vous appelez être de la propagande, la propagande

 27   de M. Hadzic ?

 28   R.  J'ai lu que la menace était dans le secteur est. Je n'ai pas lu de


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  1   menace concernant le secteur ouest.

  2   Q.  Ce que j'essaie de comprendre, c'est que vous dites que M. Hadzic, dans

  3   cette lettre, se lance dans une propagande, et j'essaie simplement de

  4   comprendre pourquoi vous pensez qu'il s'est lancé dans une propagande. Sur

  5   la base de quoi affirmez-vous cela ?

  6   R.  Les Croates -- les Croates demandaient instamment au secteur est de

  7   prendre des dispositions pour le retour des réfugiés. Et, pour moi,

  8   suggérer qu'ils vont attaquer les Serbes alors même qu'ils attendent le

  9   retour des réfugiés semble quelque peu incongru, et c'est la raison pour

 10   laquelle j'ai utilisé le terme "propagande".

 11   Q.  Donc vous considériez que la menace d'une attaque était faible ou

 12   presque nulle parce que les Croates, ou le camp croate, souhaitaient

 13   repeupler ces zones ?

 14   R.  Oui. Dans le secteur est, oui.

 15   Q.  Et vous voyez ici que M. Hadzic parle de la menace d'une attaque, non

 16   pas sur le secteur est, mais sur le secteur ouest ?

 17   R.  Oui, je vois cela maintenant.

 18   Q.  Au vu de cela, est-ce que vous allez vous rétracter par rapport à ce

 19   que vous avez dit, à savoir qu'il se lançait dans une propagande dans cette

 20   lettre ?

 21   R.  Tant que cela ne concerne pas le secteur est, oui.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir maintenant le

 23   03170, s'il vous plaît.

 24   Q.  Peut-être même avant que ce document ne disparaisse, pendant qu'il est

 25   encore affiché à l'écran, je voudrais vous poser une question.

 26   Un peu plus bas dans le dernier paragraphe, il est dit :

 27   "Il est malheureusement évident que nous sommes forcés de protéger nos

 28   populations et nos territoires par tous les moyens militaires à moins que


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  1   l'agression croate ne s'arrête."

  2   Et juste au-dessus de cela, il dit :

  3   "… comme nous l'avons fait à plusieurs reprises dans le passé, nous vous

  4   demandons," et cette lettre est adressée au président du Conseil de

  5   sécurité, "nous voyons demandons à nouveau de prendre les mesures

  6   nécessaires pour empêcher cela."

  7   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ce qui semble être dit ici est

  8   sincère, en laissant de côté l'aspect légitime, sincère par rapport à

  9   l'idée qu'il se faisait d'une éventuelle attaque et agression à l'époque ?

 10   R.  Oui, en fait, il demande de l'aide, voyez-vous.

 11   Q.  Il demande de l'aide. Diriez-vous également qu'il est en train de dire

 12   qu'à moins d'obtenir cette aide, nous serons amenés à nous protéger ?

 13   R.  Oui, il dit cela dans cette lettre.

 14   Q.  Merci, Madame Negga. Est-ce que nous pouvons maintenant aller et voir

 15   le document 03170. Il s'agit d'un document de la Défense. C'est un document

 16   de Satish Nambiar envoyé à Goulding en date du 30 janvier 1993. Donc,

 17   Madame Negga, c'est exactement la même date que la lettre que nous venons

 18   de voir, à savoir le 30 janvier 1993. Et il est dit là, au point 1, que :

 19   "Nous avons informé le QG des évolutions dans la région depuis le 22

 20   janvier 1993, lorsque le gouvernement croate a décidé d'utiliser

 21   unilatéralement la force."

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrions agrandir un petit

 23   peu le texte en anglais.

 24   Q.  "Depuis lors", et là c'est toujours au paragraphe 1, Madame Negga,

 25   "depuis lors, la situation sur le plan militaire a été relativement --"

 26   excusez-moi, j'ai sauté phrase.

 27   "Depuis lors, en dépit des différents appels à mettre un terme à ces

 28   opérations et des assurances que nous avions pu recevoir, les opérations se


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  1   sont poursuivies jusque dans la fin de l'après-midi du 28 janvier 1993,

  2   lorsque le barrage de Peruca a été repris par l'armée croate. Depuis, la

  3   situation sur le plan militaire a été relativement calme, et je dirais que

  4   cela était clairement le cas."

  5   Est-ce que cela vous rappelle qu'à l'époque il y avait donc eu une

  6   offensive croate importante dans le secteur sud, une offensive dans la zone

  7   protégée du secteur sud ?

  8   R.  J'aurais entendu parler de cela par la suite.

  9   Q.  Eh bien, il est dit ici que l'attaque a commencé le 22. Est-ce que vous

 10   pensez que le 30 -- en fait, permettez-moi de vous demander la chose

 11   suivante : est-ce que vous vous souvenez de quelque chose à ce moment-là ou

 12   après ce moment-là ? Est-ce que vous vous souvenez qu'il y ait eu une

 13   offensive majeure dans le secteur sud --

 14   R.  Oui.

 15   Q.  [aucune interprétation]

 16   R.  On en a parlé à la radio.

 17   Q.  Si nous pouvions maintenant passer à la dernière page de ce document.

 18   C'est un rapport que l'on trouve dans les journaux et qui, semble-t-il, est

 19   à l'intention du général -- en fait, c'est un rapport du général Nambiar,

 20   qui vient de la "Reuters" et qui est en date du 30 janvier. Là encore,

 21   c'est la même date que celle qui figure sur la lettre de M. Hadzic. Il est

 22   dit :

 23   "Le président Franjo Tudjman, président croate, a dit hier lors d'une

 24   interview qui a été publiée samedi que ses troupes étaient prêtes à

 25   continuer à attaquer les force serbes, même si cela devait impliquer de

 26   mettre un terme aux négociations de paix de Genève. Il a dit qu'il retirait

 27   le mandat des troupes du maintien de la paix des Nations Unies en Slavonie

 28   orientale en mars à moins que les soldats des Nations Unies désarment les


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  1   unités serbes et rapatrient les réfugiés croates. A ce moment-là, nous

  2   pouvons agir de notre propre chef. La Croatie prendra toujours les mesures

  3   nécessaires pour protéger, et cetera, la totalité de son territoire. Les

  4   Serbes doivent accepter la défaite ou se voir confrontés à d'autres

  5   défaites encore."

  6   Et puis, un petit plus bas, il est dit :

  7   "Nous ne sommes qu'en train de libérer notre propre pays."

  8   Est-ce que vous aviez compris ou est-ce que vous saviez à l'époque que

  9   c'était là la position de la Croatie et que, si nécessaire, elle serait

 10   prête à reprendre les zones protégées par la force ?

 11   R.  Lors de mes contacts avec les responsables croates, ils avaient

 12   l'impression que la FORPRONU était là pour leur permettre de récupérer le

 13   territoire, les zones occupées, et que la menace venait essentiellement du

 14   retour des réfugiés dans les zones occupées. Mais…

 15   Q.  Est-ce que cette impression était correcte pour vous ?

 16   R.  Pardon ?

 17   Q.  Est-ce que cette partie du plan de paix de Vance, à savoir que ces

 18   territoires devaient être rendus à la Croatie, est-ce que cela faisait

 19   partie du plan de paix de Vance ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Et n'est-il pas exact que toute l'idée du plan de Vance était que les

 22   zones protégées des Nations Unies seraient déterminées dans le cadre de

 23   négociations ultérieures ?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  Je voudrais maintenant que nous passions au paragraphe 48 de votre

 26   déclaration. Je ne sais pas si vous l'avez sous les yeux, Madame Negga. Je

 27   parle de votre déclaration, paragraphe 48 ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Au paragraphe 28 [comme interprété], vous décrivez votre première

  2   rencontre avec les autorités locales de RSK le 10 juin 1992, et vous dites

  3   :

  4   "De plus, ces autorités de RSK ont déclaré clairement qu'elles ne

  5   permettraient pas aux non-Serbes de revenir dans le secteur."

  6   Et puis, vous faites référence à deux documents en note de bas de page.

  7   J'aimerais afficher ces documents. Commençons par l'onglet 12 de

  8   l'Accusation, document 05182. Onglet 12 de l'Accusation. Je ne sais pas si

  9   Mme Negga l'a dans son classeur.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Cela ne se retrouve pas dans les documents

 11   que nous avons inclus dans le classeur. Mais j'en ai une copie, et je

 12   voudrais dire à Mme Negga qu'il s'agit d'une page recto verso.

 13   M. GOSNELL : [interprétation]

 14   Q.  Il s'agit d'un des deux documents que vous citez en note de bas de

 15   page. Passons à la page 2, s'il vous plaît. Vous dites :

 16   "La réunion a été présidée par Milan Ilic, et le Dr Milorad Visic,

 17   président du conseil exécutif, était présent, ainsi que Milan Milanovic,

 18   ministre adjoint de la Défense de la soi-disant République de Krajina.

 19   "L'atmosphère était cordiale, et l'accent a été mis sur la

 20   coopération à plusieurs reprises."

 21   Est-ce que vous vous souvenez effectivement que c'était l'ambiance qui

 22   régnait à la réunion et que, à plusieurs reprises, la coopération a été

 23   évoquée ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens. C'était ma première réunion.

 25   Q.  Passons à la page suivante à présent. On nous dit :

 26   "Lors des deux réunions, des questions portant sur le désarmement de la

 27   police, de l'armée et des civils ont été soulevées. En réponse, nous avons

 28   eu un scepticisme général."


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  1   Nous reviendrons sur cette phrase dans un instant, Madame, mais j'aimerais

  2   d'abord savoir : des trois groupes, la police, l'armée et les civils,

  3   qu'entendez-vous par l'armée ?

  4   R.  Il y avait la police, et puis, au-dessus de la police, il y avait une

  5   autre force qui ressemblait plus à une force territoriale, et je pense que

  6   c'est comme cela que je décris l'armée.

  7   Q.  Et en plus de l'armée et la police, les civils étaient armés ?

  8   R.  Oui, oui. Ils avaient des armes partout.

  9   Q.  Vous dites "partout". Est-ce que vous entendez par là que vous l'avez

 10   constaté, que vous avez vu de nombreux civils portant des armes ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et par "armes", est-ce que vous entendez par là des armes à canon long,

 13   telles que des fusils ?

 14   R.  Les fusils étaient détenus principalement par la police et par les

 15   groupes, les groupes paramilitaires. Ils avaient des véhicules de transport

 16   blindés de troupes, mais aussi d'autres types d'armes.

 17   Q.  Est-ce que les civils portaient également des fusils de chasse, par

 18   exemple, des Thompson, des Kalachnikov ? Est-ce que vous savez si les

 19   civils détenaient ce genre d'armes ?

 20   R.  Je me souviens l'avoir lu dans un ou deux rapports de la police civile.

 21   J'ai lu dans ces rapports-là que les civils portaient ce genre d'armes,

 22   mais je ne l'ai pas vu.

 23   Q.  Et les participants à la réunion, sur quoi étaient-ils sceptiques et

 24   pourquoi ricanaient-ils ?

 25   R.  Nous parlions du plan Vance, qui avait pour objectif de désarmer la

 26   population, de démilitariser les forces et de mettre les armes sous double

 27   verrou - c'était le système utilisé - et ensuite, de réunir autour de la

 28   table les forces belligérantes et de négocier quant à la procédure à


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  1   suivre. Et je suppose que plusieurs n'étaient pas d'accord avec ce

  2   désarmement et qu'ils ont commencé à ricaner.

  3   Q.  Vous dites également que :

  4   "Une autre question qui avait été posée à Tenja portait sur le rôle de la

  5   FORPRONU pour le retour des réfugiés. Un certain niveau d'hostilité était

  6   présent du chef de la personne qui avait posé la question. Le message

  7   consistait à dire que ceux qui étaient partis n'auraient pas le droit de

  8   revenir."

  9   Tout d'abord, vous souvenez-vous qui a déclaré cela ? Est-ce que vous

 10   pouviez savoir quel orateur parlait lors de cette réunion ? Qui a exprimé

 11   ces mots-là ?

 12   R.  A chaud, comme cela, je ne m'en souviens pas. Cela se trouve dans mes

 13   notes, mais je ne peux pas vous dire maintenant au débotté qui a parlé.

 14   Q.  Je sais que cela fait très longtemps, Madame Negga. Avec tout le

 15   respect que je vous dois, en vous posant mes questions, en fait, je voulais

 16   juste savoir si vous vous en souveniez. Alors, est-ce que vous vous

 17   souvenez s'il a été dit que ces personnes qui étaient partis ne

 18   reviendraient plus jamais ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Ou plutôt, a-t-on dit que tant qu'il n'y avait pas d'accord dans le

 21   processus de négociation, on ne leur permettrait pas de revenir ?

 22   R.  J'ai eu l'impression qu'on ne leur permettrait jamais de revenir. Il

 23   n'y a pas de conditions ajoutées dans le processus de négociation. Il était

 24   clair que ces personnes ne pourraient plus revenir.

 25   Q.  Et par "personnes", est-ce que vous entendez toute personne

 26   d'appartenance ethnique croate ou non serbe, ou faisait-on référence à un

 27   sous-groupe; par exemple, les personnes qui avaient participé aux activités

 28   ? Est-ce qu'une distinction de la sorte a été faite lors de la réunion ?


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  1   R.  Non.

  2   Q.  Alors, si vous êtes si catégorique en affirmant que les personnes qui

  3   n'appartenaient pas au groupe ethnique serbe n'auraient pas le droit de

  4   revenir, ce sont vos mots, est-ce que vous pourriez m'expliquer pourquoi

  5   ils posaient des questions sur le rôle de la FORPRONU quant au retour des

  6   réfugiés - c'est ce que l'on dit ici - et pourquoi a-t-on posé des

  7   questions au HCR sur la méthode qu'ils proposaient pour le retour de ces

  8   personnes ?

  9   R.  Le HCR était chargé de certifier si une région était mûre pour le

 10   retour des réfugiés, si le calme et l'ordre régnaient suffisamment et si

 11   ces réfugiés pourraient faire l'objet de réinstallation. En d'autres mots,

 12   le HCR était l'agence, chef de file, pour le retour des réfugiés.

 13   Q.  Et les personnes à qui vous vous êtes adressé lors de ces réunions

 14   demandaient, n'est-ce pas, quelles étaient les conditions du HCR pour le

 15   retour des non-Serbes ?

 16   R.  Est-ce que vous pourriez reformuler votre question ou la répéter ?

 17   Q.  Oui, bien sûr. Désolé si je n'ai pas été clair. En fait, la dernière

 18   phrase de ce paragraphe semble suggérer, mais je ne sais pas si je me

 19   trompe, donc je vous demande de m'éclairer à ce sujet, semble suggérer que

 20   les gens du côté serbe, vos interlocuteurs, demandaient des précisions sur

 21   les conditions -- ou les méthodes 

 22   qui allaient être utilisées pour le retour de la population; est-ce exact ?

 23   R.  Non, le retour ne les intéressait pas du tout. Pourquoi la méthode les

 24   intéresseraient-elles ?

 25   Q.  Je suis perdu, Madame Negga. Pourquoi parle-t-on de cela, alors, dans

 26   la dernière phrase ?

 27   R.  De quelle phrase parlez-vous ?

 28   Q.  Où on dit -- et, en fait, il y a deux phrases. La première phrase


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  1   commence par "another question" en anglais, "une autre question portait sur

  2   le rôle de la FORPRONU", et puis la deuxième phrase nous parle du retour

  3   des réfugiés et des questions posées au HCR.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Si je peux intervenir. J'ai l'impression que

  5   Mme Negga essaie de retrouver le numéro de page et la phrase exacte. Est-ce

  6   que vous pourriez l'aider en lui donnant le numéro de page.

  7   M. GOSNELL : [interprétation]

  8   Q.  Regardez l'écran, Madame Negga. Cela se trouve à l'écran. C'est le

  9   paragraphe qui commence par "At both meetings" en anglais, "aux deux

 10   réunions".

 11   R.  Oui. Eh bien, je crois que les trois phrases répondent à la question.

 12   "Le message était assez clair, ceux qui étaient partis n'auraient pas le

 13   droit de revenir." Oui.

 14   Q.  Etait-ce également le point de vue de la FORPRONU en 1992, vu la

 15   situation sécuritaire, à savoir que les personnes déplacées ne

 16   reviendraient pas pour l'instant ?

 17   R.  Eh bien, la FORPRONU devait suivre les conseils donnés par le CICR et

 18   le HCR, parce que c'était ces deux instances qui étaient responsables des

 19   conditions et du retour des réfugiés. Nous n'avions pas voix au chapitre.

 20   Nous ne pouvions pas nous demander si c'était le bon moment pour le retour

 21   des réfugiés.

 22   Q.  Est-ce que vous êtes en train de dire que le HCR avait déconseillé le

 23   retour à ce moment-la ?

 24   R.  Oui. Oui.

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Maître Gosnell.

 27   Madame Negga, nous sommes arrivés à la fin de l'audience d'aujourd'hui.

 28   Nous vous reverrons demain dans le même prétoire à 9 heures. Nous


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  1   terminerons votre déposition à ce moment-là. D'ici là, vous êtes toujours

  2   liée par vos obligations de témoin, ce qui veut dire que vous n'avez le

  3   droit de parler à quiconque de votre déposition et vous ne pouvez pas non

  4   plus discuter avec les parties.

  5   M. l'Huissier va vous raccompagner. Merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  9   --- L'audience est levée à 14 heures 00 et reprendra le jeudi 18 juillet

 10   2013, à 9 heures 00.

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