Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 4 juillet 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes

  7   présentes dans ce prétoire.

  8   Je vais demander à la Greffière de citer l'affaire.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il

 10   s'agit de l'affaire IT-04-75-T.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vais demander aux parties de se

 12   présenter.

 13   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 14   Pour le Procureur, Douglas Stringer, Sarah Clanton, notre interne juridique

 15   Marija Knezevic, et le commis à l'affaire Thomas Laugel.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La Défense.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. La Défense

 18   de Goran Hadzic, Zoran Zivanovic, Christopher Gosnell, Negosava Smiljanic,

 19   commis à l'affaire, Jolana Makraiova, notre assistante juridique. Merci. 

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 21   Vous pouvez poursuivre, Monsieur.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   LE TÉMOIN : GORAN HADZIC [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Interrogatoire principal par M. Zivanovic : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Monsieur Hadzic, bonjour.

 27   Je vais vous poser quelques questions concernant votre déposition d'hier.

 28   Il faudrait préciser davantage, mais je vais vous demander encore une fois

 


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  1   de répondre plus lentement aux questions posées.

  2   A la page 9 323, ligne 18, il est dit que vous avez vu une liste des

  3   habitants de Pacetin qui date de 1990, et c'est là qu'était écrit que

  4   Pacetin à l'époque comptait 1 100 habitants, dont 100 Roms orthodoxes et 1

  5   000 Serbes orthodoxes. Eh bien, est-ce que vous avez remarqué l'année que

  6   j'ai évoquée, parce que ça m'intéresse de savoir si l'année est bien

  7   inscrite ?

  8   R.  Bonjour à tout le monde.

  9   C'est une grande erreur. Il s'agissait du recensement de la population de

 10   1900 ou 1903.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Nous

 12   avons un problème technique, Madame la Greffière.

 13   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

 15   Hadzic.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme j'ai dit, c'est une grande erreur, peut-

 17   être que je me suis trompé, peut-être qu'il a eu une erreur

 18   d'interprétation, peut-être que j'ai parlé trop vite.

 19   Il s'agit donc d'un recensement qui a plus de 100 ans. A l'époque, la

 20   population était à 100 % orthodoxe, mais il y avait 10 % de Roms, mais

 21   comme ils ont tous été tués en 1941, aujourd'hui il n'en reste plus du

 22   tout. Mais ce qui va être intéressant pour les Juges, c'est de savoir

 23   qu'aujourd'hui, Pacetin compte 650 habitants, ça veut dire que notre

 24   population a été divisée par deux au lieu d'être multipliée, et la plupart

 25   des gens ont été tués pendant la Deuxième Guerre mondiale, tous les Roms

 26   ont été tués, et à peu près 30 % des Serbes ont été tués.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 28   Q.  Je vais vous poser une question qui fait suite à la question que


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  1   je vous ai posée hier au sujet de la poésie. C'est quelque chose qui se

  2   trouve à la cinquième ligne de la page 9534.

  3   Vous avez dit que parfois vous lisiez de la poésie avec vos copines,

  4   mais jamais avec des hommes. Et vous avez dit que vous êtes allé avec votre

  5   ami, Branko Kovacevic assister à une lecture de poésies avant la guerre.

  6   Donc de quoi s'agissait-il, pourriez-vous nous dire quel était ce lieu où

  7   vous êtes allé ?

  8   R.  Quand vous m'avez posé la première question, à savoir si

  9   j'écrivais des poèmes ou bien si je lisais des poèmes, et moi je dois dire

 10   que je n'ai jamais écrit de poème, mais comme j'ai fait l'école secondaire

 11   du type général, eh bien, j'ai bénéficié d'une éducation plus généraliste,

 12   et donc j'ai pu lire la poésie en suivant les études secondaires.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pouvez-vous ralentir, s'il vous

 14   plaît, parce que les interprètes ont vraiment du mal à suivre.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, vous pouvez

 17   poursuivre.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Vous pouvez poursuivre la réponse.

 20   R.  Je ne voudrais pas que l'on pense ici que je n'ai pas aimé la poésie.

 21   Moi, j'ai lu des poètes affirmés, Yesenin, Lorca, je ne veux pas tous les

 22   énumérer, et aussi Vujovic Matos, Kovacevic, des poètes croates affirmés,

 23   mais je n'ai jamais lu la poésie amateur, et puis je ne me suis jamais --

 24   enfin, je n'ai jamais fait cela avec un ami, comme l'avait dit un témoin.

 25   En ce qui concerne cette soirée de poésie, de lecture de poésie, je me suis

 26   rendu avec mon épouse pour assister à la promotion du livre de Branko

 27   Kovacevic, qui était un ami à moi, et c'était quelques jours avant la

 28   guerre. C'est lui qui nous a invités. Et à l'époque, je ne portais pas


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  1   encore la barbe.

  2   Q.  A la page 9 337, ligne 8, vous avez dit que le SDS a perdu les

  3   élections en Croatie. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que cela veut

  4   dire ? Est-ce que le SDS a réussi à avoir quelques sièges dans le parlement

  5   croate ou bien pas du tout ? A quoi faisiez-vous référence ?

  6   R.  J'ai voulu dire que le HDZ avait emporté les élections en assurant la

  7   majorité dans le parlement. Le SDP était le deuxième parti par sa puissance

  8   en Croatie, de sorte qu'ils avaient un petit moins de députés dans le

  9   parlement, mais le SDP avait emporté les élections dans de nombreuses

 10   municipalités, comme par exemple, à Vukovar.

 11   Q.  Maintenant, je vais vous demander d'examiner la page 9 337 et 38. C'est

 12   une question qui concerne une discussion qui a eu lieu dans la municipalité

 13   de Vukovar. Il s'agissait de la constitution, des modifications de la

 14   constitution.

 15   Est-ce qu'à l'époque vous parliez de la constitution croate qui

 16   prévoyait que le peuple serbe ne soit plus un peuple constitutionnel ou

 17   bien est-ce que vous parliez de l'autre constitution ?

 18   R.  Je palais de l'autre constitution. La constitution qui voulait que la

 19   Croatie soit un état indépendant. Nous l'appelions la constitution

 20   séparatiste parce que nous tous qui avons opté pour le SDP et qui avons été

 21   élus au niveau de la liste du SDP, eh bien, nous avons clairement dit que

 22   nous voulions que la Croatie reste au sein de la Yougoslavie. Je pense que

 23   cela s'est produit dans les années '90. Je ne sais pas dans quel mois. Mais

 24   toujours est-il que la plupart des députés croates, membres du SDP, avaient

 25   voté pour cette constitution-là.

 26   Q.  Je vais vous poser une question, parce que là, vous avez parlé de votre

 27   discussion au sein de l'assemblée municipale de Vukovar. Est-ce que vous

 28   avez débattu de cette question avant même que cette constitution


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  1   séparatiste, comme vous le dites, n'ait été adoptée ?

  2   R.  Je ne suis pas sûr. Je pense que cette constitution a été adoptée lors

  3   de sessions de travail de l'assemblée nationale et ensuite, les

  4   municipalités, les assemblées municipales devaient l'adopter, la ratifier.

  5   Et l'assemblée municipale de Vukovar avait bel et bien adopté cette

  6   constitution, mais en demandant quelques amendements qui étaient détails.

  7   Sauf que jamais dans les médias on a parlé de ces amendements.

  8   Maintenant, je ne me souviens pas si cela comportait aussi la

  9   proposition de Slavica Bajan, que les Serbes soient rayés de la

 10   constitution.

 11   Q.  Maintenant, je vais vous poser une question, même si je sais que vous

 12   n'êtes pas un juriste de formation et que vous n'êtes pas tout à fait en

 13   mesure de répondre parce que vous parlez des amendements, mais une

 14   assemblée municipale ne peut pas adopter la constitution d'un état. Est-ce

 15   que par ces amendements, est-ce qu'on n'a pas proposé qu'on modifie

 16   certaines parties de la proposition ?

 17   R.  Oui, je vous ai compris. C'était cela qui était important.

 18   M. STRINGER : [interprétation] Je vous présente mes excuses.

 19   L'INTERPRÈTE : Hors micro, Maître Stringer.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Il y a un problème.

 21   Maître Zivanovic.

 22   M. STRINGER : [interprétation] La question et la réponse sont dans le

 23   compte rendu d'audience, mais là, il s'agissait d'une question directrice.

 24   Mais vu que les deux personnes parlent la langue, M. Hadzic a répondu avant

 25   que je n'aie pu intervenir, mais je vais faire attention aux questions

 26   directrices, et je vais intervenir à chaque fois.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vais poser la question autrement.


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  1   Q.  Pourriez-vous nous dire, compte tenu de la réponse -- vous avez

  2   répondu, c'est vrai, mais quel a été l'objet des discussions lors de

  3   l'assemblée municipale de Vukovar, lors de la session des travails de

  4   l'assemblée municipale, quelle a été votre proposition et quelle a été la

  5   proposition de ceux qui voulaient que des amendements soient faits ?

  6   R.  Bien, je pense que nous avons tous été en faveur de cette constitution

  7   croate, c'était notre république, nous faisions partie de cette république.

  8   Mais moi et certains Serbes, ils n'étaient pas tous Serbes d'ailleurs, nous

  9   étions en faveur d'une modification qui devait changer dans le fond une

 10   petite partie de la constitution, qui tenait à dire que la Croatie devait

 11   rester au sein de la Yougoslavie et pas devenir un pays indépendant. Donc,

 12   nous avons voté pour la constitution avec ces modifications, ces

 13   amendements, en étant sûrs qu'on allait publier cela. Moi, j'étais contre

 14   ça, mais tous les autres Serbes étaient en faveur de cela. Mais, de toute

 15   façon, ils n'ont jamais publié cela, ils ont jamais publié ces amendements.

 16   Q.  Autrement dit, ils ne voulaient pas que l'on dise -- que dans la

 17   constitution, on dise clairement que la constitution ne ferait plus partie

 18   de la Yougoslavie ?

 19   R.  Ecoutez, vous n'avez pas compris. Les députés du HDZ prenaient la

 20   position que vous venez de dire, mais les autres, ils voulaient que l'on

 21   adopte 90 % de la constitution, avec un amendement, tel que je vous l'ai

 22   exposé.

 23   Q.  Je vais vous lire une partie du compte rendu d'audience parce que je ne

 24   suis pas sûr de vous avoir compris.

 25   C'est la page 9 343 du compte rendu d'audience, à partir de la page

 26   13. Vous avez dit cela hier; 9 343, ligne 13 :

 27   "Aussi, il y avait des messages qui concernaient des cas liés aux

 28   liquidations, et nous avons entendu dire ce qui a été dit par la TO, et


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  1   aussi par l'armement, par Spegelj, et cetera, mais tout cela c'était avant

  2   l'armement."

  3   Est-ce que vous pourriez nous dire de quoi il s'agit vraiment, parce que je

  4   ne vous ai pas très bien compris ?

  5   R.  Eh bien, j'ai remarqué cette erreur au niveau du compte rendu

  6   d'audience, mais il ne m'appartient pas de le corriger. Il faudrait écouter

  7   l'original. A la place de télévision, ils ont dit TO. Moi, j'ai parlé de la

  8   télévision, j'ai parlé de l'armement dont on a parlé à la télévision. Alors

  9   qu'ici, à la place de TV on voit TO, et évidemment cela n'a rien à voir.

 10   Et, si on change cela, la situation serait plus claire, mais si elle n'est

 11   toujours pas claire, je peux vous donner davantage d'éléments

 12   d'information.

 13   Q.  Faites-le, s'il vous plaît.

 14   R.  En ce qui concerne ces liquidations, j'en ai entendu parler

 15   officiellement la première fois en regardant la télé, et c'est Spegelj qui

 16   en parlait. Il y avait des rumeurs qu'on planifiait de telles choses. Mais

 17   la première fois, on l'a dit à la télévision.

 18   Q.  Pourriez-vous nous dire brièvement comment cela a été présenté à la

 19   télévision par Spegelj ?

 20   R.  Eh bien, nous avons tous vu cela. Tout le monde peut encore le voir,

 21   c'est un enregistrement très connu. C'est là que Spegelj donne des conseils

 22   comment se comporter avec les officiers de l'armée yougoslave, mais

 23   évidemment qu'il s'agissait de tous ceux qui étaient pour la Yougoslavie,

 24   donc comment il fallait régler les comptes avec eux. Vous sonnez à la

 25   porte, à partir du moment où on vous ouvre la porte, vous lui tirez deux

 26   balles dans la tête, et après vous partez, et vous êtes déguisé dans des

 27   uniformes de postier, et cetera. Et, en 1971, c'était exactement la même

 28   chose, on avait les mêmes projets à l'époque en Croatie, vous aviez ces


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  1   mouvements nationalistes. J'étais jeune, mais j'ai entendu dire qu'on avait

  2   distribué les armes à leurs agents, et on leur avait donné aussi des

  3   uniformes de postiers, et cetera, et il fallait juste qu'il sonne à la

  4   porte pour tuer des gens. Mais l'état fédéral a réussi à empêcher cela. Ils

  5   ont découvert ce projet, et même Tudjman a été à la prison à cause de cela.

  6   Q.  Je vais revenir sur ce point, mais à présent, je vais vous demander

  7   d'examiner le document P70.50.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] 70.50.

  9   Q.  Vous avez déjà vu ce texte. Il a été déjà montré pendant le procès, et

 10   dans ce texte on mentionne, entre autres, votre nom. Il s'agissait d'une

 11   protestation paisible à Vukovar. Et je vais vous demander de me dire si

 12   vous vous souvenez de cet événement ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Dans ce texte, on dit que vous avez lu la proclamation aux dirigeants

 15   concernant la police, et que vous avez demandé que la police arrête de vous

 16   protéger.

 17   La première question : est-ce que vous avez lu cela ?

 18   R.  J'ai fait un discours devant les gens qui étaient rassemblés, plusieurs

 19   milliers de personnes. Je me souviens de cette ambiance qui était vraiment

 20   tendue, parce que nous avons été encerclés par des forces spéciales munies

 21   des masques de gaz et des chiens, et donc la situation était tellement

 22   tendue qu'aucun autre Serbe n'était sur la tribune avec moi, j'étais tout

 23   seul. Et, d'habitude, si vous voulez, c'étaient des jeunes filles qui

 24   donnaient la parole à l'orateur, mais cette fois-ci, j'étais tout seul.

 25   Alors bon, c'était un discours, on l'a peut-être traité de proclamation, je

 26   ne me souviens pas de cela. Mais je me souviens très bien avoir dit qu'on

 27   n'avait pas besoin d'avoir autant d'officiers à Vukovar qui étaient munis

 28   de fusils à canon long, et que je ne savais pas qui ils protégeaient, et


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  1   pourquoi ils étaient venus. Mais après, il s'est avéré que ce n'est pas la

  2   police mais la future armée. Je ne pouvais pas le savoir à l'époque, et je

  3   pense qu'à ce moment-là nous avons déjà été rayés de la constitution

  4   croate.

  5   Q.  Dans ce texte on dit aussi que vous avez fait quelques commentaires par

  6   rapport à la constitution croate. C'est quelque chose qui figure dans la

  7   deuxième colonne, sur la première page; est-il exact ?

  8   R.  Oui, j'ai dit cela, et la plupart des Serbes pensaient comme cela.

  9   Q.  Pourriez-vous nous dire comment s'est déroulée la création, la

 10   fondation de la branche de Vukovar du Parti démocratique serbe ?

 11   R.  Après les élections, le deuxième tour en Croatie, quand le HDZ a

 12   emporté les élections et le SDP a perdu les élections, en ayant donc à peu

 13   près une dizaine de députés de moins dans l'assemblée, nous avons vu que

 14   personne n'était plus là pour défendre les intérêts serbes. Que les deux

 15   partis, le HDZ qui était au pouvoir et les partis de la coalition, qui

 16   étaient des partis pro-croate, "pro-croate", bon je n'utilise pas des

 17   termes péjoratifs, c'était un fait à l'époque. Le SDP qui devait

 18   normalement représenter les Serbes, et le SDP s'occupait de ses propres

 19   intérêts à l'époque, de sorte que personne ne représentait les intérêts du

 20   peuple serbe. Et à l'initiative de quatre ou cinq personnes, dont je

 21   faisais partie, nous nous sommes rendus à Knin pour rencontrer le Pr

 22   Raskovic, au mois de mai, vers la mi-mai, et nous avons proposé que l'on

 23   crée le Parti démocratique serbe dans la municipalité de Vukovar, parce que

 24   Knin et Vukovar faisaient partie de la Croatie.

 25   Il était d'accord, et nous nous sommes mis d'accord que le 10 juin, on

 26   allait procéder à une assemblée fondatrice à Vukovar, dans un endroit tout

 27   près de Vukovar, appelé Vitca [phon]. Voilà, donc, nous l'avons fait et

 28   après, bien, il y a eu tout le côté administratif, et c'est peut-être moins


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  1   intéressant. Si vous le souhaitez, je peux en parler aussi plus tard.

  2   Q.  Pourriez-vous nous dire quelles ont été les mesures suivantes que vous

  3   avez prises pour créer, donc, cette branche, après votre entretien avec le

  4   Pr Raskovic ?

  5   R.  Eh bien, j'ai sauté un moment intéressant et important. Immédiatement,

  6   dès notre retour de Knin, nous avons créé un comité d'initiative. Nous

  7   avons choisi le président de cet organe, aujourd'hui feu Tripic Slobodan,

  8   ingénieur de formation. Et donc, nous avons organisé, nous qui étions au

  9   sein de ce comité d'initiative, c'est nous qui avons organisé l'assemblée

 10   fondatrice du SDS à Vukovar, le 10 avril. Nous avons organisé la sécurité

 11   du rassemblement. Nous avons déclaré que ce rassemblement allait avoir

 12   lieu. Je suis allé, d'ailleurs, avec Tripic à la police pour le faire. Et

 13   puis, nous avons eu des contacts et des entretiens dans les communes

 14   locales en appelant la population à venir pour entendre quel était le

 15   programme du Parti démocratique serbe.

 16   Q.  Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît, ceci : à quel moment

 17   l'assemblée se tenait-elle ? Je ne pense pas que la date qui figure sur

 18   LiveNote soit exacte.

 19   R.  Je crois que l'assemblée portant création s'est tenue le 10 juin 1990.

 20   Q.  Au niveau de ce premier contact avec le Pr Raskovic, quelle impression

 21   avez-vous eue ?

 22   R.  Alors, ma première impression a été confirmée par la suite, c'était une

 23   des personnes les plus futées que j'aie jamais rencontrée. Et l'impression

 24   que j'en avais, c'était une personne raisonnable, et son travail par la

 25   suite l'a prouvé. C'était un homme calme et raisonnable, qui souhaitait

 26   promouvoir la paix, contrairement aux gens des Balkans, qui sont en général

 27   impulsifs.

 28   Q.  Lorsque vous étiez à Knin, avez-vous rencontré quelqu'un d'autre du SDS


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  1   ?

  2   R.  J'ai rencontré Marko Dobrijevic, qui était avocat à Knin. C'était un

  3   technicien, il était l'assistant du Pr Raskovic et plus tard Milan Babic,

  4   qui était le président de la municipalité de Knin. Mais je ne lui ai pas

  5   parlé.

  6   Q.  Avant ce rassemblement qui a eu lieu le 10 juin, pourriez-vous nous

  7   dire, s'il vous plaît, où ce rassemblement devait avoir lieu ?

  8   R.  Ce rassemblement devait avoir lieu, et s'est effectivement tenu à

  9   Adica, qui est un endroit où l'on peut pique-niquer dans la ville de

 10   Vukovar. C'était peut-être à 300 mètres de la maison de Boro Savic, au bout

 11   de sa rue.

 12   Q.  Qu'est-ce qui s'est passé au cours de cette réunion, veuillez nous le

 13   dire rapidement. Qui a assisté à cela, y avait-il des orateurs ?

 14   R.  Alors, le Pr Raskovic est celui qui a incessamment parlé. Il y avait

 15   d'autres orateurs de Knin, Branko Popovic, qui a peut-être assisté à des

 16   rassemblements politiques par la suite, donc, il y a peut-être une

 17   confusion dans mon esprit à son égard. Slobodan Tripic, également, qui

 18   s'est adressé aux personnes en tant que président de ce comité d'initiative

 19   et M. Milan Paroski, qui s'est également exprimé. Et il s'est présenté

 20   comme étant député de Serbie. Je ne sais pas si c'était vrai ou pas. Et

 21   moi-même, j'ai prononcé un bref discours. En réalité, je n'ai fait que

 22   remercier les personnes d'avoir voté pour moi, puisque j'étais président du

 23   conseil municipal.

 24   Q.  Merci. Et comment se fait-il que vous avez été élu président du conseil

 25   municipal ?

 26   R.  Les 15 personnes qui étaient membres avaient soutenu ma candidature

 27   devant ce comité d'initiative, ils s'étaient rencontrés cinq ou six fois

 28   avant cette assemblée constituante. En réalité, ils devaient me parler


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  1   parce que je suis devenu membre du Parti démocratique serbe, et cela ne m'a

  2   traversé l'esprit, le fait que je puisse devenir un représentant officiel à

  3   un haut niveau. Peut-être que je peux vous raconter une histoire pour vous

  4   décrire la situation.

  5   Lorsque je suis rentré chez moi après avoir été élu président, mon père,

  6   qui à ce moment-là était âgé et beaucoup plus sage que moi, lorsque tout le

  7   monde me félicitait, mon père ne m'a pas félicité. En lieu et place de

  8   cela, il me demandé : Quel sera ton salaire. Et je pensais qu'il ne savait

  9   rien au sujet de tout cela, donc, je lui ai dit : C'est un poste

 10   honorifique. Je suis simplement censé travailler. Je n'aurai pas de

 11   salaire. Et mon père m'a répondu : C'est précisément la raison pour

 12   laquelle on t'a élu. S'il s'agissait d'un bon poste, on aurait choisi

 13   quelqu'un d'autre. Ils savent que tu vas travailler gratuitement.

 14   Je m'en souviendrai toujours de ses paroles.

 15   Q.  Pourriez-vous nous dire si le Pr Raskovic exposait son point de vue de

 16   façon claire s'agissant des Serbes en Croatie et de la position des Serbes

 17   en Croatie, à savoir s'ils devaient rester au sein de la Yougoslavie ou pas

 18   ?

 19   R.  Eh bien, cella a été dit maintes et maintes fois à différents

 20   rassemblements politiques : Les Serbes vont rester en Croatie, dans la

 21   mesure où la Croatie reste au sein de la Yougoslavie. Voilà, c'était ça

 22   l'idée principale. Et dans tous ses discours, il en a toujours parlé, et il

 23   a parlé d'Ante Starcevic. Depuis ce moment-là, les Serbes avaient toujours

 24   été un perturbateur, ce qui, bien sûr, n'était pas exact. Il a expliqué

 25   pourquoi cela n'était pas exact.

 26   Q.  Je vous demande de bien vouloir ajouter quelque chose à votre réponse

 27   précédente lorsque vous dites avoir été élu président du conseil municipal.

 28   Il s'agissait de quelle municipalité ?


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  1   R.  La municipalité de Vukovar dans les limites de la municipalité de

  2   Vukovar, et ce, en vertu de la loi croate qui prévalait à l'époque ou qui

  3   s'appliquait à l'époque.

  4   Q.  Alors, vous souvenez-vous que Boro Savic a été entendu par les Juges de

  5   ce Tribunal. Vous le connaissez depuis quand ?

  6   R.  Moi, je le connaissais depuis 10 ou 12 ans avant la guerre, ce qui veut

  7   dire que je le connais depuis 1977 ou 1978 ou 1979.

  8   Q.  Et comment l'avez-vous connu ?

  9   R.  Boro est né à Sabac, en Serbie. C'était un commercial, et il voyageait,

 10   un représentant de commerce. Il avait épousé une enseignante qui était une

 11   de mes amies, et c'était ma petite amie à l'époque. Et, cette femme

 12   enseignante avait un petit studio, et Boro, lorsqu'il venait en visite,

 13   nous rendre visite, allait chez elle parce qu'il n'avait pas d'appartement.

 14   Et, plus tard, ils se sont mariés et se sont installés à Vukovar. Je veux

 15   dire que Boro est venu à Pacetin, quasiment comme une personne sans abri,

 16   sans domicile.

 17   Q.  Alors pourriez-vous me dire, s'il vous plaît, alors vous l'avez vu

 18   combien de fois, comment cela se passait-il, cette connaissance que vous

 19   aviez, est-ce que vous vous voyez en dehors du travail ou pas ?

 20   R.  Avant que ces événements ne se produisent concernant le SDS, nous ne

 21   nous voyons pas vraiment. Il était beaucoup plus âgé que moi, et son cercle

 22   d'amis était différent du mien. Peut-être -- alors bon, ça c'est assez

 23   caractéristique, peut-être assez typique, il n'était pas ami avec des gens

 24   dont il ne pouvait pas profiter, donc moi, je ne faisais pas vraiment

 25   partie de son cercle d'amis. Donc, nous avions ces relations au sein du

 26   parti pendant un an environ, à partir de la mi-mai 1990, et ce, jusqu'à la

 27   mi-mai 1991, ou plutôt la dernière fois en réalité, la dernière fois que

 28   l'ai vu, c'était vers le 1er juin 1991.


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  1   Q.  Et vous avez dit que la dernière fois que vous l'avez vu c'était vers

  2   le 1er juin 1991. Vous souvenez-vous de la situation ou des circonstances

  3   lorsque vous l'avez vu pour la dernière fois ?

  4   R.  Oui, je m'en souviens, c'était à Vukasin, à l'enterrement de Vukacanin

  5   [phon], et je crois qu'après cela, je ne l'ai vu qu'une fois avant la

  6   guerre, au cours de ces dix journées pendant le mois de juin peut-être,

  7   mais peut-être pas. Et ensuite, je ne l'ai revu qu'en 1995 ou 1996.

  8   Q.  Veuillez répéter le nom de la personne, bon vous n'êtes pas obligé en

  9   fait, l'enterrement du nom de la personne, s'il vous plaît, Soskocanin.

 10   Alors, je souhaite maintenant vous demander de bien vouloir regarder la

 11   déclaration qu'il a donnée à l'Accusation, la pièce P50. Alors cela porte

 12   sur le paragraphe 7.

 13   Voyez-vous au paragraphe 7, on peut lire que lui vous a nommé

 14   président du conseil; est-ce exact ?

 15   R.  Eh bien, cela n'est pas exact. J'ai été pressenti par le comité

 16   d'initiative. Il y avait 15 membres qui étaient là, et Boro Savic était

 17   simplement une des personnes qui étaient en faveur de cela. Donc, alors, sa

 18   participation correspond à un 1/15, donc c'est une façon particulière de

 19   présenter les choses.

 20   Q.  Et un peu plus loin il dit qu'il était secrétaire du SDS de Vukovar et

 21   qu'il souhaitait nommer des personnes sérieuses. Veuillez me dire à quel

 22   moment il a été nommé secrétaire du SDS à Vukovar, si cela est

 23   effectivement arrivé ?

 24   R.  Alors je ne sais pas s'il a été nommé le 10 juin, au moment où moi j'ai

 25   été pressenti, mais je sais qu'il n'aurait pas pu être pressenti avant

 26   cette date parce que le SDS n'existait pas avant cette date-là à Vukovar.

 27   Donc, ce qu'il dit ici me rend vraiment perplexe.

 28   Q.  Et est-ce qu'il nommait des gens, puisqu'il a nommé ces personnes ou


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  1   est-ce un organe du parti qui s'en chargeait ?

  2   R.  Eh bien, il a dit qu'il était secrétaire, et ce poste-là est

  3   suffisamment clair, le pouvoir dont il disposait est tout à fait clair à

  4   cet égard. Je vais être aussi équitable que possible, c'était un homme qui

  5   n'était pas un subalterne, mais ce n'était pas un homme qui était

  6   particulièrement dominateur non plus. Nous étions tous sur un pied

  7   d'égalité, comment puis-je vous le définir. Après Plitvice, eh bien, je ne

  8   sais pas, en fait je crois que -- je ne sais pas si c'était une forme

  9   d'égocentrisme, je ne le connaissais pas si bien que ça avant.

 10   Q.  Alors une autre question : il dit qu'à l'époque il y avait ce gros

 11   problème, à savoir le Parti socialiste de Serbie de Slobodan Milosevic, ils

 12   estimaient qu'il ne devait y avoir d'autre parti politique hormis le SPS.

 13   Avez-vous été confronté à ces difficultés à l'époque ?

 14   R.  Etant donné que nous allons parler de l'intégrité de sa déclaration, si

 15   je vous ai bien compris, écoutez, j'ai vraiment honte parce que je

 16   travaillais autrefois avec Boro. Et je dois nier tout cela et dire que tout

 17   ceci, c'est simplement de la folie. Une personne normale ne peut tout

 18   simplement pas dire ce genre de choses, c'est de la folie. Alors, une

 19   personne normale ne peut pas dire toutes ces choses. Le SPS a été créé à

 20   Knin, simplement. Et il sème la confusion ici. Il n'y a aucun ordre

 21   chronologique, aucune logique.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, une précision, s'il

 23   vous plaît, au niveau du compte rendu d'audience.

 24   A la ligne 23 de la page que nous avons sous les yeux, il est dit -- le

 25   sigle que nous voyons, c'est le SBS. Et à la ligne 5 -- la ligne 23, c'est

 26   la page précédente, et à la ligne 5 de la page actuelle, nous voyons un

 27   sigle qui n'a pas été consigné.

 28   Veuillez préciser cela, s'il vous plaît.


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  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

  2   Q.  Alors, veuillez répéter, encore une fois, s'il vous plaît, le sigle de

  3   ce parti politique. Ou plutôt, veuillez répéter ce que vous avez dit --

  4   bon, moi je vais répéter la question parce qu'en réalité, cela porte sur ma

  5   question.

  6   Donc voici ma question : alors, cela concerne en réalité le paragraphe 7 de

  7   ladite déclaration, où on peut lire qu'un problème particulier à l'époque a

  8   surgi, c'était le Parti socialiste de Serbie, et dont l'abréviation

  9   correspond à SPS, c'était le parti de Slobodan Milosevic. Parce qu'eux

 10   pensaient, comme cela a été rapporté, qu'il n'y avait que le SPS qui devait

 11   exister en SBSO ?

 12   R.  Alors, j'ai déjà dit que c'était de la folie, et que le SPS, le parti

 13   de Slobodan Milosevic, n'est pas quelque chose dont nous avions entendu

 14   parler pendant l'année 1990. C'était la Croatie à l'époque. Donc, il n'y

 15   avait aucun parti serbe ou de Serbie qui était représenté, à l'exception de

 16   certains groupes d'opposition, certains députés d'opposition de Serbie qui

 17   étaient venus, et ça, c'est quelque chose que l'on savait, mais les

 18   autorités serbes n'étaient pas représentées du tout.

 19   Q.  Alors, au paragraphe 8, il affirme que le Parti du changement

 20   démocratique d'Ivica Racan, le SDP, n'a gagné que quelques sièges. Veuillez

 21   nous dire si, oui ou non, cela est exact, à savoir que ce parti, le SDP,

 22   n'avait que quelques sièges ?

 23   R.  Cela n'est pas exact non plus. Il a dit cela de façon bête, idiote. Le

 24   SDP avait de nombreux parlementaires. Au niveau de l'assemblée municipale

 25   de Vukovar, ils étaient en majorité.

 26   Q.  Lorsque vous dites qu'ils étaient "nombreux", qu'est-ce que vous

 27   entendiez par là ?

 28   R.  Je veux parler du SDP au niveau de l'assemblée croate. Alors, je dis


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  1   cela par rapport à ce qu'il dit ici, il a parlé de plusieurs, quelques-uns.

  2   Soit vous dites 50 ou 70 ou 30, et à ce moment-là, chacun peut conclure ou

  3   dire ce qui correspond à beaucoup par rapport à 150.

  4   Q.  Alors, est-ce que nous pouvons maintenant regarder au paragraphe 11.

  5   Où on peut lire qu'une réunion s'est tenue, une réunion du Parti

  6   démocratique serbe, au mois d'août 1990 et qu'il ne pouvait pas assister et

  7   que le parti s'est donc scindé lors de cette réunion. Est-ce exact ?

  8   R.  Eh bien, cela ne correspond pas à la vérité. Il s'agit de conclusions -

  9   - eh bien, lorsque j'ai lu l'intégralité de ce paragraphe 11, je constate

 10   que ceux qui soutiennent la théorie du complot seraient jaloux de ces

 11   conclusions car il s'agit vraiment de quelque chose qui est fantasmagorique

 12   et qui correspond absolument pas à la réalité.

 13   Q.  Alors, pourquoi dites-vous que cela est fantasmagorique ? Nous sommes

 14   au mois d'août 1990, le SDS a été démantelé ou qui s'est scindé.

 15   R.  Eh bien, le SDS avait été créé le 17 février 1990. Donc entre février

 16   et août, il a six mois, et ce n'est qu'à ce moment-là qu'ils ont commencé à

 17   agir et qu'ils se sont renforcés au contraire, et il n'y avait aucune

 18   déliquescence au niveau du parti, c'était bien le contraire.

 19   Q.  Et vous voulez parlez du mois d'août 1990, cela s'est manifesté à ce

 20   moment-là ?

 21   R.  A Vukovar, nous avons commencé à organiser des conseils ou des comités

 22   locaux et des rassemblements politiques, et le Pr Raskovic est venu à

 23   certains de ces rassemblements, et donc, nous avions le vent en poupe. Et

 24   la confusion, je crois, s'est installée dans son esprit après deux ou trois

 25   ans. Et je suppose que ceci a été utilisé dans le cadre d'une autre

 26   déposition, donc il s'agit d'une compilation, mais qui n'a aucun sens. Cela

 27   n'a aucun sens que de dire tout cela. Tout cela n'a jamais existé, tous ces

 28   noms.


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  1   Q.  Quels noms ?

  2   R.  Alors, l'influence de Jovica Stanisic en 1990, son influence sur Milan

  3   Babic. Cela est tout à fait impossible.

  4   Q.  Alors, voici ce qui m'intéresse ici. Et autre chose qu'il a évoqué, à

  5   savoir que Raskovic -- ou plutôt que Raskovic l'a averti que le parti

  6   allait être démantelé, il vous a donné des missions particulières à vous et

  7   Vukcevic, Vojislav Vukcevic. Alors, veuillez nous dire si, oui ou non, cela

  8   est arrivé, vous a-t-il donné des missions, des tâches à vous ou au Pr

  9   Vukcevic ?

 10   R.  Borislav Savic était secrétaire du conseil municipal et moi j'étais

 11   président de ce conseil, et il ne m'a jamais confié quelque mission que ce

 12   soit. La Chambre de première instance peut me prendre aux mots. Je parle

 13   sous serment. Mais pour ce qui est du Pr Vukcevic, je ne souhaite pas dire

 14   aujourd'hui si Boro ou non lui a confié des missions. Mais je peux dire que

 15   le Pr Vukcevic était un professeur de droit et, pendant un certain temps,

 16   c'était le recteur de la faculté de droit d'Osijek et c'était un juge à

 17   Beli Manastir. Il a 15 ans de plus que moi et il est beaucoup plus

 18   intelligent que Boro Savic, et Boro Savic n'aurait pas pu lui confier

 19   quelque mission que ce soit.

 20   Q.  Alors, maintenant nous pouvons maintenant passer au paragraphe 22. On y

 21   dit qu'il avait travaillé avec votre père à Vupik; est-ce exact ?

 22   R.  Mon père a travaillé dans l'entreprise Vupik, et après lui, j'ai

 23   travaillé aussi. Je ne suis pas sûr que Boro ait trouvé un emploi à Vupik

 24   avant moi, mais peu importe, Boro et moi avons travaillé ensemble dans

 25   Vupik. Nous n'étions pas dans la même organisation élémentaire de travail

 26   associé, ce qui fait que nous n'avions pas eu à coopérer l'un avec l'autre

 27   au niveau du travail.

 28   Q.  Il dit que vers la mi-mai, il vous aurait contacté pour vous dire qu'on


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  1   avait créé un comité pour la Slovénie, la Baranja, et le Srem occidental.

  2   Est-ce qu'il vous a dit qu'il allait créer un comité pour la Slavonie, la

  3   Baranja et le Srem occidental ?

  4   R.  Il ne me l'a pas dit. Il ne pouvait pas me le dire à ce moment-là, ça

  5   n'existait pas à l'époque. Soit quelqu'un a rédigé ceci sans connaître Boro

  6   Savic, ou alors Boro Savic a complètement perdu la tête. Ce sont des choses

  7   les plus élémentaires qui puissent y avoir, c'est comme si vous vouliez

  8   additionner 2 et 2. Je n'ai rien à prouver ni à témoigner ici au sujet de

  9   choses qui sont évidentes, qui se sont produites et qu'on ne saurait

 10   changer. Et, si vous le permettez, je voudrais terminer ma phrase.

 11   Nous avons d'abord créé un comité municipal du SDS à Vukovar. Après nous,

 12   on a créé des comités municipaux dans la totalité des municipalités de la

 13   Slavonie de l'est; à Osijek, à Beli Manastir, et Vinkovci. En Slavonie

 14   occidentale, on a créé des comités municipaux en parallèle avec les nôtres

 15   à Podravska Slatina, un jour avant Vukovar, par exemple, et dans d'autres

 16   endroits où nous n'avons pas pris part du tout parce que c'était à plus de

 17   200 kilomètres de là où on était. Vers la fin de l'année de 1990 ou au tout

 18   début de 1991, suite à une initiative d'Ilija Sasic, Veljko Dzakula, moi-

 19   même, et Boro Savic, il y a eu création d'un comité régional pour la

 20   Slavonie, et la Baranja. La notion de "Srem occidental" n'apparaît, ne fait

 21   son apparition qu'en 1991. Donc la notion n'existait pas.

 22   Je n'ai pas pu contacter Boro. Mais depuis que je le connais, il n'était

 23   pas comme ça. Ça, ce sont des bêtises que l'on sort. On semble avoir mis

 24   l'un sur l'autre, amalgamé toutes les connaissances possibles et

 25   imaginables en 1990, alors qu'il y a des choses qui datent de 1991 ou 1992,

 26   voire plus tard.

 27   On mentionne ici un conseil exécutif. Il veut parler probablement d'un

 28   comité d'initiative. Je ne peux pas interpréter ce qu'il voulait dire, mais


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  1   ce qui est dit ici n'est pas exact.

  2   Q.  Bon. Tirons au clair cette partie-là, ce segment, puisqu'on parle de

  3   conseil exécutif, de comité régional. Est-ce que vous pouvez nous dire

  4   quels sont les instances, les organes qui avaient été créés par le Parti

  5   démocratique serbe ?

  6   R.  Le Parti démocratique serbe a été créé à Knin, le 17 février. Il y

  7   avait un comité principal, et il y avait un comité exécutif, indépendamment

  8   de Goran Hadzic et de Boro Savic. Nous n'avions même pas entendu parler de

  9   ce Parti démocratique serbe, ça me concerne, et je suis sûr que cela

 10   concerne Boro Savic aussi. On en était qu'aux premiers pas de la création

 11   d'un comité municipal. Nous avons créé un conseil ou un comité

 12   d'initiative, et jusqu'au 10 juin, il n'y a rien eu, ce n'est que le 10

 13   juin qu'on l'a créé, ce comité d'initiative, et on a commencé à mettre en

 14   place des comités au niveau local.

 15   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire, parce que vous avez mentionné un

 16   comité principal du SDS et un comité exécutif. Quel était l'organe suprême,

 17   celui qui se trouvait au sommet du parti ?

 18   R.  C'était le comité principal, le président était Jovan Raskovic. Je

 19   n'étais pas à ce moment-là membre du parti. Je ne sais pas quand est-ce que

 20   ce comité exécutif a été créé. Je ne suis même pas censé le savoir cela.

 21   Q.  Et savez-vous nous dire qui a créé ce comité exécutif, qui en a élu les

 22   membres ?

 23   R.  Conformément à la façon de procéder lorsque je me suis affilié, c'était

 24   un choix qui était fait par le comité principal. Il en va de même en

 25   matière de politiques. Pour ce qui est du pouvoir exécutif et du pouvoir

 26   législatif, vous avez une assemblée, un parlement et un organe exécutif qui

 27   est le gouvernement.

 28   Q.  Etant donné que nous sommes en train de parler d'un comité exécutif,


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  1   avez-vous été élu ou avez-vous bénéficié de certaines fonctions au niveau

  2   de ce comité principal du SDS ? Je parle de vous.

  3   R.  En vertu du statut du parti, tout président du comité municipal devient

  4   automatiquement membre du comité principal. Et, par la suite, au comité

  5   principal, on a voté pour moi afin de m'élire dans les rangs du comité

  6   exécutif.

  7   Q.  Veuillez m'indiquer ceci, on dit que vous avez été président d'un

  8   comité régional dans ce même paragraphe 22. Avez-vous été président d'un

  9   comité régional quelconque au niveau du SDS ?

 10   R.  Je n'ai jamais été président du comité régional. Le président de ce

 11   comité régional, c'était Veljko Dzakula, et il s'agit de Slavonie et la

 12   Baranja, le Srem occidental n'était pas encore apparu dans l'utilisation

 13   courante. C'est Ilija Petrovic qui a utilisé ce terme-là à un moment donné,

 14   je ne sais pas du tout pourquoi. Mais ça s'est passé plus tard.

 15   Q.  Qui étaient les membres de ce comité régional ? Est-ce qu'ils étaient

 16   élus ou est-ce que les gens venaient là de par leurs fonctions, d'office ?

 17   R.  Eh bien, c'étaient des présidents de comités municipaux de par leurs

 18   fonctions, et c'était pour la Slavonie et la Baranja. Il y avait aussi Boro

 19   Savic, en sa qualité de secrétaire. Chaque comité municipal pouvait déposer

 20   la candidature d'encore un membre en sus de son propre président.

 21   Q.  Il précise que c'est lui qui vous a poussé pour faire de vous un membre

 22   du comité exécutif du SDS; est-ce exact ?

 23   R.  Ce n'est pas exact.

 24   Q.  Je vous renvoie vers le paragraphe 23 pour que vous puissiez lire par

 25   vous-même.

 26   R.  Je dois expliquer aux Juges de cette Chambre qu'à l'époque, en

 27   République de Croatie où on se trouvait tous, il n'y avait pas eu de

 28   candidats à accepter immédiatement des fonctions dans ce type d'activités,


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  1   et il ne fallait pas pousser quelqu'un, nous donner des coups de pouce.

  2   Nous avions du mal à affilier des gens, à activer les membres. Personne

  3   n'avait envie d'accepter des fonctions. Et comme l'autre l'a dit dans

  4   l'anecdote de tout à l'heure, ce n'était pas rémunéré. On ne faisait que

  5   dépenser nos propres sous, on dépensait notre carburant à nous pour aller

  6   aux réunions, et personne ne nous compensait nos frais.

  7   Q.  Je vous renvoie maintenant vers le paragraphe 28. Il dit qu'il a créé

  8   le comité du SDS à Vukovar; est-ce exact ?

  9   R.  Ce n'est pas exact. Il parle de la date du 9 juin; il a même raté la

 10   date. Et il y a confusion dans la chronologie des événements. Il parle de

 11   Slobodan Milosevic. Mais la plupart des membres du SDS ont été contre la

 12   politique du SPS, de cette politique de gauche et de Slobodan Milosevic. On

 13   l'a dit publiquement cela. Alors, maintenant, il raconte cela avec une

 14   intelligence acquise à posteriori, pour revenir vers le début.

 15   Q.  Au paragraphe 29, il parle d'Ilija Petrovic, d'Ilija Koncarevic et de

 16   Milan Paroski. Il dit que Koncarevic et Petrovic ont fait leur apparition

 17   en tant que militants du SDS en Vojvodine, alors que ce parti, là-bas,

 18   n'avait pas encore été créé. Savez-vous nous dire si le Parti démocratique

 19   serbe avait été créé en Serbie aussi à l'époque ?

 20   R.  Oui, cela avait été créé et enregistré en tant que Parti démocratique

 21   serbe, et ça a été enregistré en Serbie. Et même Boro Savic et moi-même, on

 22   est allés à Novi Sad à une assemblée constituante en tant qu'invités, et ce

 23   qu'il raconte ici n'a rien à voir.

 24   Q.  Saviez-vous qu'Ilija Koncarevic et Ilija Petrovic étaient membres de ce

 25   parti, du Parti démocratique serbe, en Serbie ?

 26   R.  Je le savais, Boro le savait aussi, parce qu'ils ont été nos hôtes là-

 27   bas. Nous avons été leurs invités. Je me souviens que l'assemblée s'était

 28   tenue dans une salle de cinéma à Novi Sad, je pense aussi qu'il y avait eu


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  1   le Pr Raskovic de présent. Je n'en suis pas trop sûr.

  2   Q.  On mentionne ici Milan Paroski, et c'est au même paragraphe 29, au même

  3   endroit qu'on le mentionne, je le précise, en compagnie de Koncarevic et

  4   Petrovic. Alors, ce qui m'intéresse, c'est de savoir, car il parle de

  5   pressions exercées à l'égard du comité du SDS à Vukovar. Alors, dites-nous

  6   si vous savez qu'il y avait eu des pressions d'exercées par Paroski ou par

  7   Koncarevic et Petrovic à l'égard de votre comité à vous ?

  8   R.  Je ne le sais pas et cela n'avait pas été possible, dirais-je.

  9   Q.  A la page suivante, nous sommes au même paragraphe qui se poursuit, on

 10   dit -- et je crois que cela ne se rapporte qu'à Koncarevic et Petrovic ici,

 11   à savoir que ces deux-là auraient dit qu'ils étaient des représentants de

 12   la Sûreté de l'Etat de Serbie et du président Milosevic. Alors, ce qui

 13   m'intéresse, c'est de savoir si Koncarevic et Petrovic vous auraient dit

 14   chose pareille à quelque moment que ce soit ?

 15   R.  On ne me l'a jamais dit. Mais ce n'est pas vrai non plus. Boro invente

 16   de toutes pièces.

 17   Q.  Mais l'aurait-il dit à quelqu'un d'autre ? Avez-vous ouï dire de la

 18   bouche d'autrui qu'il le lui aurait dit ou leur aurait dit ?

 19   R.  Ils étaient membres du Parti démocratique serbe de Serbie, ils ne

 20   pouvaient pas être un membre d'un service concerné, parce que c'était tenu

 21   par un autre parti. En fait, eux étaient membres d'un autre parti, donc

 22   c'était impossible.

 23   Le Parti démocratique serbe en Serbie était un parti de l'opposition. Ils

 24   avaient pour objectif la prise du pouvoir et de reprendre ce pouvoir,

 25   notamment, des mains du parti qui était au pouvoir à ce moment-là.

 26   Q.  Donc, ils étaient en opposition par rapport à qui ?

 27   R.  Au parti au pouvoir, à ce SPS du président Milosevic.

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire ceci : d'après ce que vous en savez, Ilija


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  1   Koncarevic, il était quoi, il faisait quoi ? Quelle profession avait-il à

  2   l'époque ?

  3   R.  Ilija Koncarevic était un retraité. Il s'est mis à la retraite en tant

  4   que capitaine de première classe de l'armée populaire yougoslave.

  5   Alors qu'Ilija Petrovic, lui, quand j'ai fait sa connaissance pour la

  6   première fois, on me l'a présenté comme étant le directeur de la poste de

  7   Novi Sad. Quand j'ai cependant mieux fait sa connaissance, j'ai appris que

  8   c'était un tout petit directeur de niveau subalterne, il n'était pas le

  9   directeur de la poste.

 10   Q.  Passons au paragraphe 35 maintenant. Je vous renvoie vers le milieu du

 11   paragraphe, où on dit que la plupart des Serbes en Slavonie, Baranja et

 12   Srem occidental partageaient son opinion et estimaient que les Serbes

 13   devaient rester en Croatie. Est-ce que vous pouvez nous commenter ceci, si

 14   tant est que vous savez ce qu'il veut dire par là ?

 15   R.  C'est des paragraphes entiers que nous venons de -- ce qu'on vient de

 16   commenter, c'est du non-sens, c'est dénué de sens. Je ne peux pas commenter

 17   si je ne commente pas le début du paragraphe, où il dit que Raskovic était

 18   aux ordres de Milosevic. Mais tout à chacun en Serbie savait que c'était

 19   l'ami de Dobrica Cosic et que Dobrica Cosic et lui avaient des opinions

 20   complètement divergentes vis-à-vis de Slobodan Milosevic. Et il estime que

 21   Jovan Raskovic a refusé d'être vice-président du parlement.

 22   Mais il n'était même pas député au parlement croate, comment voulez-vous

 23   qu'il en soit vice-président ou qu'il ait refusé ? Ce sont des bêtises, des

 24   sornettes, qui n'ont rien à voir avec la réalité. La totalité des Serbes

 25   affiliés au Parti démocratique serbe de la Slavonie, de la Baranja et du

 26   Srem occidental avaient soutenu les positions du Pr Raskovic. Tant que la

 27   Croatie serait avec la Yougoslavie, les Serbes resteraient en Croatie. Et

 28   ça, c'est des positions qui datent de la réintégration pacifique et qui


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  1   émane du fait qu'il soit resté là-bas, en Croatie. Il est en train de

  2   raconter ici comme s'il se défendait à l'égard de quelque chose, il n'a pas

  3   été mis en accusation ni ici, ni en Croatie, tant que je sache. Il parle de

  4   la plupart des Serbes. On a eu un référendum où les Serbes, à 99,9 %,

  5   s'étaient prononcés en faveur du contraire de ce qu'il dit ici. C'est

  6   élémentaire, on peut le prouver de façon mathématique. Personne n'est censé

  7   venir témoigner à ce sujet.

  8   Maintenant, il veut plaire en Croatie parce qu'il vit là-bas et il sort des

  9   sornettes de telle taille que je trouve aberrant de commenter. Je pourrais

 10   dire il ment, mais non, ce n'est pas mentir, il raconte n'importe quoi.

 11   Quand on dit des choses comme cela, on peut peut-être essayer de démontrer

 12   des choses. Mais là, il dit des choses pour lesquelles tout un chacun sait

 13   que c'est des mensonges.

 14   Q.  Je crois que du fait de votre élocution rapide, il y a des parties de

 15   réponses qui n'ont pas été saisies par les interprètes pour être consignées

 16   au compte rendu.

 17   Quand vous avez dit que le Dr Raskovic avait refusé les fonctions de vice-

 18   président du parlement croate, alors dites-nous pourquoi cela était

 19   impossible, pourquoi il est impossible qu'il ait refusé un poste de cette

 20   nature ?

 21   R.  J'ai dit que c'était impossible -- enfin, l'explication doit être

 22   donnée par Boro Savic, c'est impossible, parce que selon lui, Raskovic

 23   aurait refusé le poste de vice-président du parlement croate sous pression

 24   de Milosevic. Je ne sais pas s'il l'a refusé, il l'a peut-être refusé pour

 25   des raisons à lui, mais ce n'est certainement pas parce que Raskovic avait

 26   été aux ordres de Milosevic, à la botte de Milosevic.

 27   Q.  Mais est-ce que Raskovic était député au parlement ?

 28   R.  Si vous vous en souvenez, j'ai quelque peu anticipé au sujet de ce que


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  1   Boro pouvait penser. J'ai un peu honte, vous savez c'était un collaborateur

  2   à moi, et j'ai honte de le voir dire des bêtises de cette taille. On peut

  3   être vice-président du parlement quand on est député élu. J'imagine qu'il a

  4   dû se référer à cinq députés élus sur la liste du SDS, mais la façon dont

  5   il a dit ceci, c'est complètement fantaisiste. Ça n'a rien à voir avec

  6   l'intelligence la plus élémentaire.

  7   Q.  Vers la fin de ce paragraphe-ci, il dit que le damier, on parle du

  8   damier qui se trouvait dans les symboles de la République socialiste de

  9   Croatie, alors est-ce que vous savez nous dire, parce qu'on a parlé à bien

 10   des reprises de ce damier pour ce qui est du mécontentement des Serbes,

 11   alors, dites-nous, est-ce bien exact, et éventuellement expliquer pourquoi

 12   cela avait-il semé le trouble ?

 13   R.  Ce que Boro dit est exact, mais il n'a pas inventé l'eau chaude ou le

 14   fil à couper le beurre. On le sait tous. Le damier se trouvait bel et bien

 15   à l'époque -- enfin dans le sigle du Royaume des Serbes, Croates et

 16   Slovènes après la Première Guerre mondiale, puis ça se trouvait dans

 17   l'emblème du Royaume de Yougoslavie, aux côtés du sigle serbe avec les

 18   quatre lettres S. Ça n'a rien de contesté ou de contestable. Les Serbes ne

 19   voulaient pas accepter le damier en tant qu'insigne distinct et pris à part

 20   pour ne faire figurer que ce symbole-là sur les képis.

 21   Q.  Pouvez-vous nous dire ceci : de quoi se compose ce damier ?

 22   R.  Il y a 25 champs, ça fait cinq par cinq, il y a des carrés rouges et

 23   des carrés blancs. Et dans le document, lorsque nous faisions partie de la

 24   République -- enfin, nous étions citoyens de la République socialiste de

 25   Croatie, le premier champ du damier était rouge et le deuxième était blanc.

 26   Pendant l'état indépendant croate de la Deuxième Guerre mondiale, le

 27   premier champ en haut, à gauche, était blanc et on avait figuré une lettre

 28   U dedans. On sait ce que ça veut dire, c'est le symbole des Oustachi. Et


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  1   les Serbes, à ce moment-là, ont refusé ce damier.

  2   En ce qui me concerne personnellement et mon opinion personnelle, Boro ne

  3   dit rien de nouveau. Je suis d'accord avec ce qu'il a dit. Le damier se

  4   trouvait sur chacun des documents, votre carnet universitaire ou scolaire,

  5   on le voyait ce symbole, mais maintenant, c'est une question tout à fait

  6   autre qui est évoquée ici.

  7   Q.  Autre point à tirer au clair au sujet de ce damier. Vous avez dit que

  8   dans vos documents, je veux dire dans les documents de la République

  9   socialiste de Croatie, le premier champ et le premier carré était rouge, et

 10   pendant la Deuxième Guerre mondiale, le premier carré était blanc.

 11   Maintenant que l'on a voulu réinstaurer ce damier, est-ce qu'on avait mis

 12   un champ rouge d'abord ou un champ blanc d'abord ?

 13   R.  Eh bien, je ne peux pas vous répondre sous serment en étant certain, je

 14   ne pense pas que ce serait une chose juste et droite de ma part.

 15   Personnellement, je pense que c'est une question technique. La question du

 16   damier ou le problème du damier n'aurait pas du générer cette guerre. Pour

 17   les Serbes, ça n'aurait pas du poser problème, et j'ai peut-être été dans

 18   l'erreur moi-même parce que j'ai pensé à peu près cela. C'est un symbole

 19   croate. Et je crois pouvoir dire en toute sincérité que les Serbes, ce qui

 20   les dérangeait, c'est qu'on ait enlevé l'étoile à cinq branches, ça les

 21   dérangeait plus que le fait de mettre le damier. Mais ça, c'est une opinion

 22   personnelle qui est peut-être une espèce d'héritage de ces idées

 23   communistes qui semblent être moins acceptées à présent. Mais je ne peux

 24   pas dire autre chose parce que je suis sous serment.

 25   Q.  Passons maintenant au paragraphe 69. Il a commenté un texte, et je

 26   crois que point n'est nécessaire de vous le montrer, vous vous en

 27   souviendrez, me semble-t-il, parfaitement bien, texte publié dans les

 28   journaux, le journal Vjesnik. On a fait un commentaire --


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, j'ai l'impression

  2   que vous abordez un paragraphe autre. Est-ce que vous ne pensez pas que le

  3   moment serait peut-être propice pour une pause ?

  4   M. ZIVANOVIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  6   Nous allons faire une pause, et nous allons revenir ici à 11 heures.

  7   L'audience est levée.

  8   --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.

  9   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

 11   Zivanovic.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Q.  Monsieur Hadzic, je vais vous demander d'examiner le paragraphe 69 de

 14   cette déclaration que nous avons déjà examinée. Monsieur Hadzic, pourriez-

 15   vous examiner le paragraphe 69 de la déclaration que nous avons déjà

 16   examinée.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Ici, M. Savic fait un commentaire au sujet d'un texte qui a été publié

 19   après l'arrestation à Plitvice, et après votre sortie de prison, et il a

 20   dit que vous avez accumulé des fonctions, que vous vouliez accumuler des

 21   fonctions au sein du SDS. Dites-moi, est-ce que cela correspond à la

 22   réalité ?

 23   R.  Non. Je n'avais qu'une seule fonction, j'étais le président du comité

 24   municipal du SDS. Et en vertu du statut du SDS, cette fonction comprenait

 25   d'autres fonctions. Je n'avais pas mon mot à dire là-dessus. J'ai été

 26   membre de l'état-major principal et de l'état-major régional du SDS. Il est

 27   intéressant que Boro Savic était membre exactement des mêmes organes que

 28   moi, c'est vraiment intéressant de remarquer cela.


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  1   Q.  J'ai encore une question à ce sujet. Il dit que ce même journaliste a

  2   écrit, et Boro Savic était d'accord avec lui, que Boro Savic était un

  3   idéologue du SDS, qu'il avait beaucoup de connaissance. Est-ce que vous

  4   partagez ce point de vue ?

  5   R.  Non, je ne partage pas ce point de vue. Boro Savic et moi-même, nous

  6   nous sommes retrouvés à Plitvice tout à fait par hasard, et c'est par

  7   hasard aussi qu'on est devenus connus. Boro n'était pas un idéologue, c'est

  8   le Pr Raskovic à Knin qui a fondé le parti. Nous avons que des petits

  9   maillons dans cette chaîne, et on est devenus connus après l'événement de

 10   Plitvice. Mais Boro Savic, comment voulez-vous que ce soit un idéologue vu

 11   que personne n'a jamais entendu ses discours. Ce journaliste devait avoir

 12   des qualités parapsychologiques pour lui lire les pensées alors, parce que

 13   jamais dans le public il ne s'est exprimé, cet homme.

 14   Q.  D'après ce que vous savez, est-ce qu'il était vraiment un idéologue du

 15   Parti démocratique serbe avec beaucoup de savoir et de connaissance ?

 16   R.  D'après ce que je savais, non. Boro était à peine éduqué. Il dit pour

 17   lui qu'il a fait des études secondaires dans l'agriculture à Sabac, et puis

 18   une espèce d'école supérieure à Vinkovci. Mais il n'avait pas l'éducation

 19   nécessaire lui permettant de devenir un idéologue ou leader idéologique.

 20   Q.  Je vais vous demander d'examiner le paragraphe 70 de sa déclaration. On

 21   parle ici du jour où vous avez été tous les deux libérés de la détention.

 22   Il dit qu'à cette occasion vous avez eu la possibilité de téléphoner, et

 23   que vous avez appelé Ilija Koncarevic, alors qu'il pensait que vous alliez

 24   appeler votre père.

 25   Vous souvenez-vous de cela, est-ce que cela s'est bien produit ?

 26   R.  Je ne me souviens pas que ces choses-là se sont produites, mais je ne

 27   vois pas pourquoi j'aurais appelé Koncarevic. Cela ne me paraît pas

 28   plausible.


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  1   Q.  Il dit qu'à partir de ce moment-là, il a arrêté les contacts avec vous.

  2   R.  Ce n'est pas exact. Au cours de sa déposition, j'ai été en mesure de

  3   lire sa déclaration, il se contredit lui-même. Il dit que je ne voulais pas

  4   lui dire bonjour, il se plaint que j'avais coupé les contacts moi-même avec

  5   lui.

  6   Q.  Pour que les choses soient bien claires, est-ce que vous vous souvenez

  7   de cette journée-là, à quelle date vous avez été libéré de la prison de

  8   Plitvice ?

  9   R.  Je pense que c'est le 3 avril.

 10   Q.  Et dans le paragraphe 74, il dit qu'il a réfléchi à la possibilité de

 11   démettre de ses fonctions Goran Hadzic, parce que vous étiez sous

 12   l'influence de Slobodan Milosevic, et que vous en êtes arrivé à être

 13   influencé par Slobodan Milosevic après les événements de Plitvice.

 14   Dites-moi, est-ce qu'après cet événement à Plitvice, vous étiez vraiment

 15   sous l'influence de Slobodan Milosevic; le connaissiez-vous, parliez-vous

 16   avec lui ?

 17   R.  Non, je n'ai jamais été sous l'influence de Slobodan Milosevic. J'ai vu

 18   Slobodan Milosevic lors d'une réunion avec les membres du SDS de toute la

 19   Croatie, et après cela, c'était après l'émission sur l'armement des

 20   Croates, là où Spegelj a parlé. Et après, je ne me suis jamais entretenu

 21   avec lui. Je faisais partie des délégations, il y avait 30 ou 50 personnes.

 22   Q.  Est-ce que vous vous souvenez à peu près du moment où cela s'est

 23   produit ?

 24   R.  Peut-être un mois avant Plitvice, peut-être davantage. Après cela,

 25   après l'émission de Spegelj, en 1991.

 26   Q.  Pourriez-vous répéter l'année ou bien vérifier si c'est bien la bonne

 27   année ?

 28   R.  C'est en 1991, au début de l'année 1991. Car les Serbes avaient peur,


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  1   ils m'ont appelé du parti à Knin pour me dire que Milosevic allait

  2   réceptionner une délégation pour nous calmer, je pense. Parce que nos

  3   positions idéologiques étaient complètement des positions idéologiques du

  4   parti au pouvoir en Serbie à l'époque, le SPS. Et j'ai été surpris de cela,

  5   d'apprendre qu'il voulait nous recevoir.

  6   Q.  Pourriez-vous nous dire en quoi différaient vos points de vue ? D'un

  7   côté, le point de vue du SDS, et de l'autre côté, le point de vue de

  8   Slobodan Milosevic et de son parti ?

  9   R.  Eh bien, le SDS était un parti anticommuniste, en grande ligne, c'était

 10   un parti clairement démocratique. Alors même que la plupart de nos membres

 11   étaient des ex-communistes. Même si par la suite je suis passé par une

 12   délusion par rapport au communiste, mais là, je vous parle de l'époque

 13   1990.

 14   Q.  Je vais vous demander d'examiner le paragraphe 78.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, peut-être que

 16   j'ai un problème ici, je ne suis pas sûr. Si j'ai bien compris votre

 17   question, vous avez demandé au témoin quelles étaient les positions, les

 18   points de vue, les positions qui étaient complètement à l'opposé, d'un côté

 19   le SDS, et de l'autre côté le parti de Slobodan Milosevic. Et le témoin a

 20   répondu au sujet du SDS, mais de l'autre côté, il a parlé du SPS. Est-ce

 21   bien le parti de Slobodan Milosevic ? Ou bien c'est une erreur au niveau du

 22   compte rendu d'audience ? Le témoin a dit à la ligne 21 de la page 32, au

 23   sujet des ex-communistes, il a parlé du communisme et des communistes qui

 24   sont restés jusqu'en 1990. Est-ce qu'il parle du parti de Milosevic ?

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il parle des différences entre le SDS et le

 26   SPS, mais je peux lui poser la question.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et le SPS -- écoutez, je ne connais

 28   pas toutes ces abréviations. Le SPS, c'est le parti de Milosevic ?


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  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci dans ce cas.

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

  4   Q.  Est-il possible d'examiner maintenant le paragraphe 78.

  5   Dans ce paragraphe, il dit qu'il vous a rencontré à nouveau après les

  6   événements de Borovo Selo, le 2 mai. Donc, il vous a rencontré le 7 ou le 8

  7   mai sur les côtés de Danube qui se trouve à Vojvodine. Est-ce que vous vous

  8   souvenez si vous vous êtes rencontrés après le 2 mai sur les côtés du

  9   Danube qui se trouve en Vojvodine ?

 10   R.  Je ne suis pas sûr à 100 %, mais c'est fort probable.

 11   Q.  Est-il vrai -- enfin on voit plus loin qu'il dit que vous étiez avec un

 12   homme, accompagné d'un homme, et que vous l'avez présenté comme étant votre

 13   garde du corps; est-ce exact ?

 14   R.  Non, ce n'est pas exact. Parce qu'après ces événements notoires du 2

 15   mai, j'étais à Vukovar. Et c'était la première fois que j'ai réussi à

 16   passer le Danube pour me sauver. Il y avait un groupe de gens que je ne

 17   connaissais pas là-bas qui attendait des réfugiés pour les conduire

 18   jusqu'en Serbie. Mon premier garde du corps, je ne l'ai eu qu'au début du

 19   mois de septembre ou la fin du mois d'octobre 1991. Donc c'est ridicule.

 20   C'est aussi ridicule quand il dit que j'avais un appartement à Novi Sad,

 21   les 7 et le 8 mai.

 22   Q.  Vous avez dit que vous avez traversé le Danube. Pourriez-vous nous

 23   expliquer ce que vous voulez dire ? Est-ce que vous l'avez rencontré à

 24   cette occasion-là ?

 25   R.  Je pense que c'était ça, c'était la seule fois où j'ai été là-bas, j'ai

 26   traversé le Danube en fuyant Vukovar.

 27   Mon épouse et ma fille, je les ai envoyées dans un hébergement de

 28   réfugiés, et moi je me suis dirigé vers Borovo Selo dans un véhicule civil,


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  1   et je suis allé chercher mon fils à Pacetin pour le transporter lui aussi

  2   puisqu'il était chez ma sœur, à Pacetin. Donc à l'époque, évidemment que je

  3   ne pouvais pas avoir un appartement à Novi Sad. A l'époque, on était encore

  4   à Pacetin. C'est encore emmêler les pinceaux, en réfléchissant aux

  5   événements bien plus tard, essayant de s'en rappeler.

  6   Q.  Pouvez-vous nous dire si c'était la seule fois où vous êtes venu

  7   au bord du Danube, ou bien est-ce que vous y êtes allé par la suite après

  8   l'incident de Boro Selo, j'entends ?

  9   R.  J'y suis allé encore une fois, sept, huit, ou dix jours plus

 10   tard.

 11   Q.  Mais pourquoi je vous pose cette question, parce que je vois que

 12   vous faites un lien avec une éventuelle rencontre avec lui avec cette venue

 13   au bord du Danube, peut-être que cela s'est produit une autre fois ?

 14   R.  Je suis allé deux ou trois fois au mois de mai, sur le bord du

 15   Danube. Je suis très étonné de voir la date qu'il évoque, le 7 ou le 8 mai;

 16   car moi, j'ai fui Vukovar justement le 7 ou le 8 mai, alors une date plus

 17   tardive serait plus plausible.

 18   Q.  Est-ce que plus tard vous aviez quelqu'un que vous auriez pu

 19   présenter comme étant votre garde du corps ?

 20   R.  Non, je n'avais pas de garde du corps. Mais la deuxième fois,

 21   c'était Lazo Sarac qui était avec moi, c'est au moment où Vukasin

 22   Soskocanin s'est noyé. Et moi, de toute façon, je n'ai traversé le Danube

 23   que deux fois ou trois fois à cette époque-là.

 24   Q.  Je voulais vous poser une question au sujet d'un tel événement, mais je

 25   vois que vous l'avez déjà mentionné. Vous avez dit que Lazo Sarac était

 26   présent la deuxième fois, que vouliez-vous dire par là, que vous avez

 27   rencontré Boro Savic une deuxième fois ou bien que vous avez fait quelque

 28   chose pour la deuxième fois ? Que voulez-vous dire par la deuxième fois ?


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  1   R.  J'ai voulu être honnête en suivant ma mémoire. Au mois de mai, je ne

  2   pouvais pas me rendre au bord du Danube souvent. A chaque fois que je

  3   traversais le Danube, il s'agissait d'un événement important dont je me

  4   souviens. La première fois que je l'ai fait, c'était en fuyant Vukovar, en

  5   sauvant ma vie, et je m'en souviens très bien, c'était donc le 7 ou le 6

  6   mai. Ensuite, le 15 mai, j'étais au bord du Danube au moment où Vukasin

  7   Soskocanin s'est noyé. Donc, si Boro Savic était présent, eh bien, c'était

  8   une des deux fois parce qu'il ne pouvait pas y avoir des fois suivantes, il

  9   ne pouvait pas y avoir de troisième fois.

 10   Mais je dois ajouter que Boro Savic n'avait aucune importance dans ma vie,

 11   de sorte que je ne me souvienne pas de nos rencontres ou des dates de nos

 12   rencontres.

 13   Q.  Pouvez-vous nous dire si Lazo Sarac, que l'on mentionne ici, s'il a été

 14   à aucun moment votre garde du corps ?

 15   R.  Non, jamais. Ceci aurait été ridicule.

 16   Q.  On va revenir là-dessus. Je voudrais que l'on voie ce qui se trouve sur

 17   la page suivante, c'est la suite du texte. Et c'est là que l'on dit qu'à

 18   partir du moment où Kertes est devenu chargé des douanes fédérales, que

 19   Simo Stupar de Celarevo était chargé de la sécurité de Goran Hadzic. Est-ce

 20   que vous savez qui est Simo Stupar ?

 21   R.  Simo Stupar, je ne le connais pas. En revanche, je connais Savo Stupar

 22   de Celarevo. Et ce n'était pas mon garde du corps. Savo Stupar est un

 23   docteur d'ingénierie. Il a dix ans de plus que moi. Il n'a jamais été armé.

 24   Comment voulez-vous qu'il soit mon garde du corps ?

 25   Q.  Savez-vous si Savo Stupar avait une profession, s'il travaillait

 26   quelque part ?

 27   R.  Il travaillait dans une usine de machines agricoles à Backa Palanka, et

 28   il avait une espèce de fonction au niveau de l'assemblée, mais je ne sais


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  1   pas laquelle.

  2   Q.  Donc, M. Savo Stupar était-il, oui ou non, votre garde du corps ?

  3   R.  Je viens de vous le dire, non.

  4   Q.  Dans le paragraphe 79, il est écrit que vous aviez des rapports

  5   particuliers avec Savic parce qu'il vous protégeait. Dites-moi, est-ce que

  6   ceci est exact ? S'il vous protégeait, il vous protégeait de qui ou de quoi

  7   ?

  8   R.  Ceci n'est pas exact. Je n'étais pas du tout menacé, il ne fallait pas

  9   me protéger, je n'avais pas besoin de protection. Mais ni politiquement, ni

 10   physiquement. Enfin, physiquement, c'est sûr que non. Cela étant dit, je ne

 11   peux pas vous dire ce qui lui traversait l'esprit.

 12   Q.  De la façon dont je comprends sa déclaration, il a dit que, par la

 13   suite, il est devenu le président du comité du SDS. Donc, je ne veux pas

 14   tirer de conclusions, mais est-ce que ceci correspond à la vérité ?

 15   R.  On a déjà parlé de cela, et j'ai déjà dit à l'époque que ce n'était pas

 16   vrai, c'est complètement incroyable.

 17   Q.  Dans le paragraphe 80, il dit qu'il a remarqué que vous lui cachiez

 18   quelque chose, il dit qu'il a remarqué que vous essayiez de vous distancer

 19   par rapport à lui. Dites-moi, est-ce qu'une distance s'est formée entre

 20   vous et lui après les événements de Plitvice ?

 21   R.  Ecoutez, j'étais en train de lire, je n'ai pas entendu la question.

 22   Pouvez-vous la répéter ?

 23   Q.  Voilà. Il dit avoir remarqué que vous lui cachiez quelque chose et que

 24   vous essayiez de mettre une distance, de vous distancer par rapport à lui.

 25   Et justement, je voulais savoir si cela est arrivé vraiment après les

 26   événements à Plitvice.

 27   R.  Non, cela n'a rien à voir avec la réalité.

 28   Q.  Dans ce même paragraphe, il évoque des pistolets, une cinquantaine de


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  1   pistolets, que vous avez reçus pour les distribuer à vos collaborateurs au

  2   mois de février 1991. Et il dit avoir appris cela de Trifun Ivkovic.

  3   Tout d'abord, dites-moi, est-ce exact que vous avez reçu des pistolets pour

  4   les distribuer à vos collaborateurs ?

  5   R.  Non, ce n'est pas exact. Pas seulement que ce n'est pas exact, c'est

  6   encore une histoire complètement dingue.

  7   Q.  Mais pourquoi vous dites que c'est complètement dingue ? Parce que vous

  8   dites que ce n'est pas vrai, ça je comprends, mais pourquoi dingue ?

  9   R.  Parce qu'au départ au début de la guerre, quand les armes étaient déjà

 10   arrivées en Slavonie et à Baranja, les pistolets se faisaient rares. Les

 11   gens échangeaient deux fusils contre un pistolet, ils étaient prêts à le

 12   faire. J'ai entendu mes amis le raconter. Donc, il n'y avait pas de

 13   pistolets. Les pistolets étaient recherchés à l'époque. Il y eu des fusils.

 14   Mais jamais on n'a distribué des pistolets.

 15   Q.  Il dit qu'un certain Trifun Ivkovic lui a dit cela. Est-ce que vous

 16   connaissez cette personne ?

 17   R.  Oui. Je connais très bien Trifun.

 18   Q.  Veuillez nous dire, s'il vous plaît, en quelques mots, ce que vous

 19   savez au sujet de cet homme.

 20   R.  Trifun Ivkovic est arrivé en Slavonie orientale et il semblait

 21   appartenir à un groupe qui s'appelait Solidarité, une organisation qui

 22   s'appelait Solidarité. J'ai entendu parler de ces gens-là. Ils ont mené

 23   certaines actions avant cette date au Kosovo et au Metohija, cette

 24   organisation Solidarité. J'entends Trifun est arrivé seul -- ou il arrivait

 25   toujours seul et s'est rendu dans deux villages serbes qui étaient là. Il

 26   n'a rien fait de particulier. D'après ce que je sais, un peu plus tard, peu

 27   de temps après, un peu plus tard, il a voulu saper notre autorité,

 28   l'autorité de nous, les Serbes, en Baranja et en Slavonie. Et je peux vous


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  1   dire comment je l'ai appris, si cela vous intéresse aussi, si ça intéresse

  2   quelqu'un.

  3   Q.  Oui, oui. Allez-y.

  4   R.  C'est la raison pour laquelle ce récit ressemble à un cliché. Segal

  5   Wood [phon] et Trivo Ivkovic se trouvaient à Backa Palanka, dans une

  6   station essence, il a vu une voiture avec des plaques d'immatriculation de

  7   Vukovar. Il a demandé au chauffeur d'où il était originaire. Il a appris

  8   que ce type venait de Borovo Selo. Et il lui a demandé : Alors, comment se

  9   passent les choses à Borovo Selo ? Et le type a répondu en disant : Bien,

 10   c'est pas mal, ça va. Et le type répond : Avez-vous de l'argent ? Et

 11   l'autre dit : Non, nous n'en avons pas. Et Trivo Ivkovic lui dit alors :

 12   Comment se fait-il que vous n'avez pas d'argent ? J'ai demandé un million

 13   de marks allemands à Goran Hadzic il y a quelques jours, il était censé

 14   distribuer cet argent entre vous, les habitants de Borovo Selo. Et dans son

 15   esprit, cet homme a insulté ma mère et il a pensé que Goran avait pris

 16   l'argent pour lui, l'argent qu'il était censé distribuer. Et cette même

 17   seconde, il s'est souvenu de demander à Trivo : Où vous vous êtes procuré

 18   ce un million de marks allemands et vous conduisez cette vieille voiture en

 19   miettes qui n'en est pas vraiment une ?

 20   Et j'ai entendu ce récit un mois après les événements, et par hasard. Et

 21   voici le message qu'a envoyé Trivo Ivkovic pour pouvoir créer des

 22   dissensions au sein de la population serbe.

 23   Q.  Lorsque vous parlez de ce nom "Solidarité", s'agissait-il d'une

 24   organisation politique ou d'une association ?

 25   R.  Je crois qu'il s'agissait d'une association, mais je ne sais pas grand-

 26   chose au sujet de celle-ci. J'ai simplement entendu dire que Trivo Ivkovic

 27   appartenait à cette organisation. Je n'ai pas rencontré d'autres membres de

 28   celle-ci.


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  1   Q.  Et le Parti démocratique serbe n'avait pas beaucoup de contact avec

  2   cette organisation, ou si ?

  3   R.  Non, nous n'avions aucun contact avec eux, que ce soit officiellement

  4   ou officieusement. Mais maintenant, je vois que Boro Savic était en contact

  5   avec eux, mais à l'époque je n'étais pas au courant de cela.

  6   Q.  Veuillez regarder le paragraphe 81, s'il vous plaît. On peut y lire que

  7   jusqu'au début de l'année 1991, tous les contacts de Slavonie, Baranja et

  8   Srem occidental, toutes les communications passaient par lui, même s'il ne

  9   souhaitait pas jouer ce rôle-là. Est-ce exact ? Et savez-vous que Savic

 10   était le seul et unique officier de liaison avec Belgrade ?

 11   R.  Je ne savais pas que quelqu'un avait un quelconque contact avec

 12   Belgrade, encore moins qu'il s'agissait de Boro Savic. Je l'apprends

 13   aujourd'hui, c'est la première fois que j'en entends parler. Toujours, je

 14   pense que ceci n'est pas exact, même si je n'en suis pas tout à fait sûr.

 15   Q.  Alors, s'il était en contact avec Belgrade, le comité du SDS de Vukovar

 16   était-il au courant de ces types de contacts ? A-t-il été informé qu'il y

 17   avait de tels contacts ?

 18   R.  Il n'en a jamais parlé lors des réunions du SDS. Et il ne m'en a jamais

 19   parlé personnellement ou en sa qualité de représentant officiel à ces

 20   réunions-là. Alors, à ce sujet, je ne comprends pas très bien en quelle

 21   qualité vous voulez parler, s'il devait prôner ou, en tout cas, promouvoir

 22   nos intérêts, cela n'aurait pas pu être un espion, il n'aurait pas pu jouer

 23   un quelconque rôle politique.

 24   Q.  Au paragraphe 82, il dit que vous avez parlé aux dirigeants politiques

 25   à Belgrade et qu'il s'en est aperçu. Et il dit qu'il devrait aller avec

 26   vous, et vous avez répondu que vous vous êtes rendu à Belgrade parce que

 27   vous étiez fasciné par Milosevic. Une telle conversation a-t-elle jamais eu

 28   lieu ?


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  1   R.  Alors, cette conversation-là n'aurait pu avoir lieu que dans

  2   l'imagination de Boro Savic. Nous n'avons jamais parlé de Milosevic.

  3   Belgrade n'était jamais abordée lors des réunions du SDS.

  4   Q.  Alors maintenant, ce qui m'intéresse, c'est le paragraphe 166. Mais

  5   avant cela, nous pourrions regarder le paragraphe 165, qui va nous donner

  6   le contexte un petit peu. Veuillez lire, je vous prie, ce paragraphe.

  7   Voici ma question : même s'il n'a jamais affirmé que vous avez assisté à

  8   cette réunion-là, mais étant donné que vous connaissiez Boro Savic et que

  9   vous connaissiez Zeljko Raznjatovic, alias Arkan, d'après votre manière de

 10   voir les choses, est-ce que ce type de conversation aurait jamais pu avoir

 11   lieu entre ces deux personnes ?

 12   R.  J'ai écouté la déposition de Boro Savic. Et il a affirmé de façon

 13   catégorique que ceci s'était déroulé le 15 mai parce qu'il s'était souvenu

 14   du fait que ce jour-là, Soskocanin s'était noyé. Donc, ceci provient d'un

 15   esprit malade. C'est tout à fait impossible.

 16   Q.  Pourquoi pensez-vous que c'est tout à fait impossible ?

 17   R.  Parce que le 15 mai, Arkan était en prison à Zagreb. Je veux dire c'est

 18   impossible physiquement parlant. Et Boro Savic n'était pas un homme

 19   politique d'une quelconque importance en SBSO. Inutile d'aborder quoique ce

 20   soit avec lui. C'est simplement des vœux pieux de sa part, ce qu'il aurait

 21   dit à certaines personnes s'il avait eu l'occasion de le faire. Donc il

 22   s'est convaincu lui-même que cela est arrivé. Après Plitvice, Boro Savic a

 23   dû être traité; il souffrait de maladie mentale. Il avait été frappé et

 24   passé à tabac à Plitvice. Et, après cela, j'aurais souhaité pouvoir parler

 25   de cela à huis clos partiel, parce que je suis gêné lorsque je dis de

 26   quelqu'un qu'il est dément.

 27   Q.  Alors, je peux vous poser une autre question maintenant. Peut-être ma

 28   question précédente n'était pas suffisamment claire. Etant donné que vous


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  1   connaissiez Boro Savic et vous connaissiez aussi Raznjatovic, et vous

  2   saviez comment les gens l'ont traité et vice versa, d'après ce que vous

  3   savez Boro Savic avait-il suffisamment de courage pour s'adresser à Zeljko

  4   Raznjatovic comme c'est écrit ici, et étant donné qu'il savait qui était

  5   Raznjatovic ?

  6   R.  Lorsque je parlais du rassemblement politique qui avait été interdit,

  7   que je me trouvais sur la scène tout seul, et que personne n'avait osé me

  8   rejoindre, Boro était parmi ces hommes qui n'osaient pas me rejoindre. Il

  9   ne s'est jamais exprimé en public. Vous vous souviendrez du fait que

 10   l'Accusation a montré des photographies d'un rassemblement politique au

 11   cours duquel le SDS a été créé à Borovo Naselje. J'ai parlé, et j'ai dit

 12   que les Croates devaient renoncer à leur héritage oustachi. Boro Savic est

 13   là, et il est au dernier rang, il se cache derrière quelqu'un, derrière le

 14   dos de quelqu'un. Il ne prenait jamais la parole en public. Cet homme

 15   n'avait pas ce courage-là, mais je suppose que la confusion s'est installée

 16   dans l'esprit de Savic. Tout cela n'était qu'illusion.

 17   Q.  Très bien.

 18   R.  Pardonnez-moi, je souhaite dire quelque chose au sujet du drapeau qui

 19   comportait un damier. Nous en avons parlé avant la pause.

 20   Boro Savic apparemment avait des idées arrêtées, bien arrêtées sur ce

 21   damier. Pourquoi n'a-t-il pas pris la parole devant 10 000 Serbes pour

 22   s'exprimer publiquement ? Ce n'est qu'après coup et avec le recul, que 20

 23   ans après il en a parlé, et cela n'était pas vraiment en public, c'était

 24   quasiment en public mais pas vraiment. Alors toutes ces tromperies, ces

 25   erreurs, eh bien, je partagerais tout cela publiquement avec tout un

 26   chacun. Je n'essaie pas de me soustraire à mes responsabilités et de dire

 27   que je me soustrais à ma responsabilité politique. Mais je partagerais tout

 28   cela avec le public.


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  1   Q.  Alors laissons M. Savic de côté, ainsi que sa déclaration.

  2   Je souhaite revenir sur la situation au sein du Parti démocratique serbe au

  3   début de l'année 1991. Veuillez nous dire si, oui ou non, il y avait des

  4   différences politiques au sein du parti ou des divergences s'agissant de la

  5   mise en œuvre de la politique du parti, à savoir comment approcher les

  6   autorités croates et comment il fallait leur parler ?

  7   R.  Il y avait des divergences importantes. Et j'avais pour habitude de

  8   plaisanter, mais cela était étayé par les faits, et je disais que si le

  9   territoire était plus pauvre, les Serbes étaient plus extrémistes, mais si

 10   c'était moins le cas, les gens étaient davantage pacifiques et disposés à

 11   parler. Les Serbes à Knin étaient des radicaux, alors que les Serbes en

 12   Slovénie orientale étaient plus pacifiques et plus calmes.

 13   Et, je souhaite vous dire qu'il y avait une personne qui au début des

 14   travaux du parti était le plus extrémiste de tous, plus extrême que Babic,

 15   au moment de son apogée. Je veux parler de Veljko Dzakula, c'était le plus

 16   extrémiste de tous. Je n'avais jamais rencontré quelqu'un comme ça avant

 17   les événements de Plitvice.

 18   Q.  Lorsque nous parlons de divergences politiques, alors veuillez nous

 19   dire si, oui ou non, il y avait différentes factions au sein du SDS ? Y

 20   avait-il une forme de polarisation ? Y avait-il une lutte interne ?

 21   R.  Alors dans les grandes lignes, même si cela ne vous donne pas une

 22   vision très claire de la situation, il n'y avait pas de division très

 23   tranchée. Il y avait Raskovic qui dirigeait une aile, et Babic l'autre. Il

 24   s'agissait là des deux orientations à une extrémité, et l'autre à l'autre.

 25   Q.  Alors la faction de Raskovic par opposition à celle de Babic, que

 26   prônait-il ?

 27   R.  Alors moi, j'appartenais à la faction de Raskovic, donc je peux parler

 28   en mon nom et au nom de ces personnes qui étaient avec moi. Nous étions en


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  1   faveur de la négociation avec les Croates, nous étions en faveur d'une

  2   cohabitation, nous souhaitions traiter des questions de façon pacifique.

  3   Babic nous taxait de traîtres, disait que nous étions des traîtres,

  4   souhaitait nous pendre et nous arrêter. Ils étaient contre nous. Voilà,

  5   l'essentiel de nos différences. Il y en avait d'autres, bien sûr, mais ce

  6   sont les plus importantes.

  7   Q.  Alors la faction de Babic reprochait quoi au Pr Raskovic ? Alors

  8   qu'est-ce qu'il avait contre lui, c'est le fait qu'il était président du

  9   parti. Pourquoi ou que reprochait Babic à Raskovic ?

 10   R.  Alors, il y a eu une escalade du conflit après la visite de Raskovic à

 11   Zagreb, lorsqu'il est allé rencontrer M. Tudjman, le président de la

 12   Croatie. Il a été attaqué par tous les députés de Knin et de ses environs,

 13   ils l'ont traité de tous les noms. C'était gênant à écouter. Moi, j'étais à

 14   Knin à ce moment-là, j'ai assisté à la réunion du comité central, et Boro

 15   Savic et moi-même, nous ne sommes pas intervenus parce qu'il s'agissait de

 16   leur conflit interne. Ils étaient amis et voisins qui s'étaient connus

 17   avant.

 18   C'est curieux de constater que toutes ces personnes qui ont -attaqué

 19   Raskovic, ou est-ce que je devrais dire quasiment toutes les personnes qui

 20   l'ont attaqué, qui prônaient la guerre et qu'il fallait combattre les

 21   Croates, eh bien, quasiment toutes ces personnes, lorsque la guerre a

 22   effectivement éclaté, se sont simplement enfuies quelque part en Europe

 23   occidentale; alors que nous, qui avions prôné la paix et les négociations,

 24   nous sommes restés au milieu de cette guerre.

 25   Q.  Vous avez dit que le Pr Raskovic avait du mal avec ses propres

 26   partisans parce qu'il avait parlé avec Tudjman. Comment cette réunion

 27   s'est-elle déroulée ? Est-ce qu'on a annoncé la convocation de cette

 28   réunion à l'avance ou est-ce que les informations n'ont été fournies


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  1   qu'après ?

  2   R.  Je ne me souviens que de tout ceci vaguement, ceci est arrivé avant la

  3   guerre et avant les événements de Plitvice. La partie croate n'était pas

  4   tout à fait juste s'agissant de cette question-ci, car les Croates ont mis

  5   des gens sur écoute, ensuite ils ont publié la transcription de ces écoutes

  6   dans les journaux, et Raskovic a été attaqué. Si la partie croate n'avait

  7   pas agi ainsi, et si Raskovic avait eu la possibilité d'expliquer cela à

  8   ses partisans lorsqu'il était revenu, les choses auraient été différentes.

  9   Je crois que l'essentiel du problème se situe là.

 10   De la même façon, ils ont essayé de me faire la même chose lors des

 11   négociations en Norvège, mais nous allons y venir.

 12   Q.  Vous avez parlé de Veljko Dzakula. Est-ce que vous pouvez nous parler

 13   de l'événement de Pakrac, s'il vous plaît ? En quelques mots, veuillez nous

 14   dire ce que vous savez au sujet de cet événement, si vous étiez bien

 15   informé ou pas à l'époque.

 16   R.  Je n'avais pas d'information de première main, mais je dispose

 17   d'informations qui, à mon avis, sont à 99 % justes.

 18   J'ai entendu parler de gens, y compris de Boro Savic, entendu parler de ce

 19   qui s'était passé parce qu'il était assez proche de ce comité de Slavonie

 20   occidentale. Tout le monde était en colère avec Veljko Dzakula parce que

 21   Veljko Dzakula s'était mis d'accord avec quelqu'un à Belgrade - en tout

 22   cas, c'est ce que l'on racontait par la suite, cela ne s'est pas avéré

 23   exact - donc, il s'est mis d'accord de lui-même qu'ils allaient attaquer la

 24   police croate quelque part à Pakrac, et qu'ensuite, lorsque la fusillade

 25   démarrerait, que l'armée allait intervenir pour s'interposer entre eux.

 26   Cependant, cela ne s'est pas passé ainsi. Les Serbes ont commencé à tirer.

 27   La police croate a riposté, les ont arrêtés, et l'armée n'est jamais venue.

 28   Donc, Veljko Dzakula a menti à ce sujet. C'est une des raisons pour


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  1   laquelle nous, la délégation du SDS du SBSO, nous, nous sommes allés

  2   rencontrer le président de la Croatie pour lui demander l'amnistie, une

  3   amnistie pour ces hommes, et après cet événement, Veljko Dzakula a inversé

  4   sa politique complètement.

  5   Q.  Avant ces événements qui se sont déroulés à Pakrac, saviez-vous que

  6   quelque chose allait arriver à cet endroit-là ? Et comment l'avez-vous

  7   appris, si vous vous en souvenez ?

  8   R.  Je m'en souviens bien. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais je

  9   me souviens du fait que nous avons eu une réunion du Comité exécutif ce

 10   jour-là dans un endroit qui s'appelait Dvor sur l'Una. Et je suis sûr que

 11   pas un seul membre du Comité exécutif, qui comprenait des représentants de

 12   différents conseils municipaux, ne savait que cela allait arriver. Parce

 13   que je sais que le représentant du parti de Podravska Slatina avait préparé

 14   une séance d'information sur la manière de promouvoir les travaux du SDS.

 15   Et ce point-là était à l'ordre du jour lorsqu'il a pris la parole. Et, à ce

 16   moment-là, j'ai entendu parler de différentes personnes qui n'étaient pas

 17   membres du Comité exécutif qui étaient debout à l'extérieur, à côté de

 18   l'hôtel où se tenait la réunion. Nous avons entendu de la bouche de ces

 19   personnes-là que la police croate avait attaqué Pakrac, ce qui nous a tous

 20   choqués. Et la réunion du Comité exécutif a été interrompue. Moi, je suis

 21   rentré en Slavonie car nous pensions que les routes allaient bientôt être

 22   bloquées. Nous ne savions pas ce qui allait arriver.

 23   Q.  Vous avez répondu il y a quelques instants en disant qu'au sujet de

 24   Pakrac, que vous avez rencontré le président de la Croatie, M. Tudjman ?

 25   R.  Oui, mais je ne savais pas que c'était au sujet de Pakrac. J'ai appris

 26   par la suite que c'était au sujet d'autres choses aussi, y compris Pakrac.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] 1D72.

 28   Q.  Il s'agit d'un document qui est en anglais, mais je crois que vous avez


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  1   eu la possibilité de le lire avant, vous avez eu la possibilité de lire la

  2   traduction.

  3   Veuillez regarder, je vous prie, le haut du document et vous verrez qu'il y

  4   a une date, qui elle celle du 17 mars 1991. Zagreb, ce que l'on voit dans

  5   le document.

  6   Se peut-il que ce rapport porte précisément sur cette réunion que vous avez

  7   eue avec Tudjman ?

  8   R.  Oui, je crois que c'est ça. La date est bonne.

  9   Q.  Au niveau du premier paragraphe, les gens qui ont assisté à cette

 10   réunion ont été énumérés ici, les membres de la délégation du Parti

 11   démocratique serbe. Vous voyez ici les cinq noms, y compris le vôtre. Ces

 12   personnes-là, étaient-elles les personnes qui ont assisté à la réunion

 13   d'après votre souvenir ?

 14   R.  Oui. C'est une erreur. On dit "Vojislav Vikcevic," alors que c'est

 15   "Vukcevic." Une erreur, ici.

 16   Q.  S'agissant de la composition de cette délégation, savez-vous nous dire

 17   qui, parmi ces gens-là, venaient de quel comité du SDS ou de quelle région,

 18   de quelle municipalité ?

 19   R.  Vojo Vukcevic vient de Beli Manastir. Moi, j'étais venu de Vukovar,

 20   comme vous le savez. Veljko Dzakula venait de Pakrac. Je pense qu'Ilija

 21   Sasic et Dusan Ecimovic venait de la Slavonie orientale, mais je ne sais

 22   pas de quel comité. Il n'était pas président desdits comités mais avait été

 23   élu au sein du comité régional du fait de leurs activités politiques

 24   respectives.

 25   Q.  Je remarque qu'ici il n'y a pas un seul représentant de la Krajina de

 26   Knin, c'est-à-dire de cette partie-là du Parti démocratique serbe. Pouvez-

 27   vous nous dire s'il y avait une raison particulière à cela ?

 28   R.  Lorsque je me suis entretenu avec Sasic et Dzakula, et si j'ai bien


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  1   compris, je ne me souviens pas très bien, mais soit ils n'osaient pas poser

  2   la question, soit ils ont tous refusé. Donc il n'y avait là qu'une

  3   délégation de la Slavonie et de la Baranja uniquement.

  4   Q.  Pouvez-vous brièvement, et de mémoire, nous raconter ce qui s'est passé

  5   à l'occasion de cette réunion ?

  6   R.  Nous avons tenu une réunion chez Tudjman. On a été reçu aussi à

  7   l'intérieur du parlement croate, notre hôte était Slavko Degoricija. Je me

  8   souviens que nous avions formulé des revendications politiques. En sus de

  9   ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est une chose que j'ai apprise à

 10   l'occasion de la réunion même, Dzakula a demandé à ce que soient amnistiés

 11   ceux qui avaient participé à l'action Pakrac. Et, je peux dire que c'est la

 12   seule chose qui a été réalisée, la finalité de la réunion c'était cela.

 13   Tout ce qui a été promis en sus n'a pas été réalisé. Je peux vous énumérer

 14   de quoi nous avons parlé, enfin les sujets dont nous avons parlé, et ce que

 15   nous avions demandé.

 16   Q.  Je vous prie de le faire. Qu'aviez-vous demandé au juste ?

 17   R.  Nous avons été là-bas pour nous plaindre. Nous avons demandé à ce que

 18   la constitution soit re-modifiée pour que les Serbes redeviennent un peuple

 19   constitutif de cette république, comme on l'a été pendant plus de 50 ans.

 20   C'était une question politique, nous étions aussi conscients du fait que

 21   c'était une demande maximaliste, et peut-être pas réalisable, mais nous

 22   avons aussi demandé des choses qui étaient réalistes et possibles. Si on

 23   avait répondu par l'affirmative, la population ne se serait pas mobilisée

 24   pour la guerre.

 25   Si on nous avait accordé une autonomie culturelle, une petite autonomie

 26   culturelle, parce que enfin "autonomie" c'est un grand mot. Les Serbes à

 27   l'époque, en début 1991 n'avait pas porté de symbole distinctif, mais il

 28   n'y avait pas un seul journal ou une publication en cyrillique. A la


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  1   télévision croate, il n'y avait rien de particulièrement destiné aux

  2   Serbes. Ce qui fait que ça se ramenait à une demi-heure d'émission

  3   télévisée pour la population serbe, et peut-être une heure par semaine

  4   d'enseignement pour les enfants pour qu'ils se distinguent en tant que

  5   Serbes. C'était moins que ce que les Serbes bénéficient actuellement en

  6   Croatie.

  7   Je me souviens d'un commentaire de Josip Boljkovac qui a dit que les Serbes

  8   avant la guerre avaient demandé bien moins qu'on était disposé à leur

  9   accorder, mais malheureusement à ce moment-là, on ne nous a pas accordé

 10   cela, pas même cela. Et le damier, on avait parlé de la constitution, on

 11   avait parlé du damier, et ce niveau des plus amoindris de l'autonomie

 12   culturelle. Je dois reconnaître - et je crois qu'il ne serait pas équitable

 13   de ne pas le dire - nous avons été bien reçus par le président croate, et

 14   par les gens du parlement croate. Ça, c'est une vérité.

 15   Q.  Puisqu'on en est à parler du damier, pouvez-vous nous dire ce que vous

 16   avez réclamé au juste à ce moment-là s'agissant du damier ?

 17   R.  Nous avons d'abord estimé c'était une opinion qui était généralement

 18   assez répandue dans la population, à savoir que ce damier était le symbole

 19   de l'état oustachi lorsque porté sur un képi de policier ou autre, et on

 20   voulait que ce soit modifié, et le fait d'avoir veillé à l'ordre des champs

 21   rouge et blanc, enfin, ce type de chose à caractère purement technique.

 22   Q.  Est-ce que vous pouvez vous souvenir de ce que le président Tudjman

 23   vous a dit en réponse à ce moment-là ?

 24   R.  Je m'en souviens très, très bien. Je me souviens de pratiquement chaque

 25   seconde de cette conversation. Et, je dois être honnête; Tudjman a été

 26   sincère à notre égard. Il a dit que ce que nous pensions au sujet des

 27   Oustachi, il pensait exactement la même chose. Et, à première vue, j'ai

 28   pensé qu'il n'était pas sincère, par la suite, j'ai compris qu'il l'était.


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  1   Il a dit pour ce qui vous concerne, les Oustachi ont peut-être tué l'un

  2   quelconque de vos ancêtres, un grand-père ou ce genre de parent. Moi, ils

  3   m'ont tué mon frère. Et il a dit que ce que nous demandions ne causerait

  4   pas de problème, mais lui, il avait un problème politique au sein de

  5   l'autorité croate avec, comme il a dit son aile droite. Il n'a nommait

  6   personne, je ne veux donc pas interpréter ce que moi je pense que lui avait

  7   à l'esprit.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je demanderais un

  9   versement au dossier de ce document, s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est versé au dossier, et annoté.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D111.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Hadzic, pouvez-vous nous dire, je vous prie, quand est-ce que

 15   vous étiez censé aller à Obrovac, et à quelle occasion ou pour quelle

 16   occasion en mars 1991 ?

 17   R.  Quand je pense maintenant à ce que nous avons évoqué au sujet de Boro

 18   Savic, lorsqu'il a parlé d'une crise au sein du parti en août 1990, je

 19   pense que ce n'est qu'en mars 1991 que nous avons connu cette crise. Je

 20   crois qu'il a déplacé ce moment-là de quelques mois en avant. Il y a eu à

 21   ce moment-là des confrontations directes au sein du Parti démocratique

 22   serbe. D'un côté, il y avait le Pr Raskovic, et le comité régional de la

 23   Slavonie et de la Baranja qui était de son côté, et un certain nombre de

 24   ses collaborateurs de Knin aussi, et puis il y avait l'aile de Babic, qui

 25   était majoritairement originaire de Knin et des municipalités avoisinantes.

 26   D'une certaine façon, j'en avais un peu assez. J'étais, dirais-je,

 27   dégoûté. J'hésitais déjà pour ce qui était de savoir s'il fallait y aller

 28   ou pas à cette réunion. Je vais vous dire pourquoi aussi.


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  1   Ma nomination ou mon élection aux fonctions de président du comité

  2   municipal, je l'ai sentie comme étant une affaire démocratique, 'ai estimé

  3   que c'était un parti démocratique, même s'il s'appelait Parti démocratique

  4   serbe. Et je me sentais tenu de faire pour le mieux. J'ai créé chaque

  5   comité local. Je me suis déplacé dans deux villages par jour, des fois pour

  6   rencontrer des gens, pour leur parler du programme d'activités du parti, et

  7   pour procéder à l'affiliation des membres.

  8   Chaque déplacement que j'ai effectué à Knin pour la réunion du comité

  9   principal, allant par la suite à Pakrac lorsqu'il y a eu création d'un

 10   comité régional pour la Slavonie et la Baranja, moi, avant cela, je

 11   convoquais le comité municipal de Vukovar, un ou deux, ou même des fois

 12   trois jours avant pour établir un planning, pour prendre position, pour

 13   voter nos décisions. Et j'y allais avec des décisions ou positions déjà

 14   prises à cette réunion régionale. Et derrière moi, j'avais tout le comité

 15   municipal. A mon retour de Knin, le lendemain ou le surlendemain, je

 16   convoquais une autre réunion du comité municipal pour présenter les

 17   conclusions adoptées par le comité régional et on en débattait. C'est ainsi

 18   que les choses se passaient à chaque fois.

 19   J'ai compris, lorsque j'ai vu comment ce comité principal fonctionnait à

 20   Knin, j'ai vu que tous les membres ou presque tous les membres - sauf moi -

 21   représentaient leur opinion personnelle. Ils s'offensaient ou s'injuriaient

 22   les uns les autres et c'était donc une réunion privée, et c'est la raison

 23   pour laquelle j'en étais dégoûté, je pensais ne pas y aller, d'ailleurs.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que

 25   l'heure est venue de faire la pause.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 27   L'audience est levée.

 28   --- L'audience est suspendue à 12 heures 14.


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  1   --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

  2   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, veuillez continuer,

  4   je vous prie.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Avant la pause, Monsieur Hadzic, vous nous avez dit que vous ne

  7   souhaitiez pas expliquer les raisons pour lesquelles vous ne souhaitiez pas

  8   aller à cette réunion du SDS à Obrovac.

  9   Pouvez-vous maintenant nous dire quelle a été la raison pour laquelle

 10   vous avez quand même décidé d'y aller ?

 11   R.  Je n'ai pas d'image au niveau du compte rendu, et je ne sais pas quand

 12   est-ce que l'interprétation est terminée. Je n'arrive pas à suivre le

 13   curseur pour savoir quand est-ce que je dois commencer à répondre.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est très intelligent de votre part,

 15   Monsieur Hadzic, que de suivre le curseur pour savoir quand est-ce qu'on a

 16   fini d'interpréter. Je vous en remercie.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, un jour ou deux avant ladite réunion,

 18   il me semble que c'était deux jours avant cette réunion d'Obrovac, j'ai été

 19   contacté et convié à la police croate de Vinkovci. C'est un ami à moi qui

 20   m'a appelé, c'était un ami de l'avant-guerre. Il travaillait pour le

 21   service de la Sûreté de l'Etat de Croatie. Il s'appelle Ivan Zalezak

 22   [phon], Ivan Zalezak, ai-je dit. C'était plutôt très décent, il y a

 23   longtemps qu'on ne s'était pas parlés. Depuis que j'avais commencé à faire

 24   de la politique, on n'avait pas eu de contacts. Il m'a demandé d'avoir

 25   l'amabilité de venir à Vinkovci pour une rencontre. J'ignorais la raison de

 26   cette invitation, mais j'ai accepté, et j'ai dit à certains de mes amis que

 27   j'ai été convoqué et donc, comme ça, j'aurais fait savoir où je serais si

 28   je ne revenais pas, comme ça ils sauraient. Je ne savais pas quelles


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  1   étaient les intentions de la police croate. J'étais déjà président de ce

  2   comité municipal du SDS pour Vukovar.

  3   Je vais vous la faire courte. Ivan m'a accueilli devant le SUP de Vinkovci,

  4   et en compagnie de son chef, qui venait d'être nommé à ses fonctions, et

  5   que je ne connaissais pas en personne mais j'avais entendu parler de lui

  6   quand même parce que j'étais bon ami avec bien des employés du service de

  7   la Sûreté de l'Etat à Vinkovci. Son chef était Vlado Pletikosic. On est

  8   allés dans un restaurant à côté de la rivière Bosut, en ville, pour un

  9   déjeuner de travail, comme ils l'ont dit. J'ai vu que le restaurant était

 10   prêt, tout était prêt. Le restaurant était vidé de tout autre convive.

 11   C'était prévu pour nous, et on devait avoir une réunion à cet endroit.

 12   Dès qu'on s'est assis pour se mettre en train, ils m'ont demandé si j'étais

 13   favorable à l'option de guerre ou l'option pacifique. J'ai bien entendu dit

 14   que j'étais favorable à une option pacifique. Et, m'a-t-on dit : Si tu es

 15   favorable à cette option pacifique, dis-nous si tu vas aller à la réunion

 16   du SDS à Obrovac ? Et j'ai dit que je n'avais pas envisagé d'y aller pour

 17   bien des raisons, et j'ai exposé certaines des raisons qui m'animaient. Je

 18   n'ai pas dit la raison que je vous ai dite à vous. Ça ne les intéressait

 19   pas.

 20   Mais ils m'ont dit qu'aux fins d'empêcher une guerre éventuellement, ils

 21   m'ont dit d'aller à Obrovac et d'apporter mon soutien à l'aile dirigée par

 22   le Pr Raskovic. Alors, pour moi, ça ne posait pas problème parce que

 23   c'était l'aile que je soutenais de toute façon. Ça n'allait pas à

 24   l'encontre de ma réflexion, j'ai donc accepté d'y aller. Et c'est la raison

 25   pour laquelle je suis allé à Obrovac. Je leur ai promis que j'irais et j'ai

 26   dit que j'apporterais mon soutien à l'option pacifique pour qu'il n'y ait

 27   pas de guerre.

 28   J'ai appelé mon collègue Savic, j'ai dit qu'on irait ensemble. Je ne lui ai


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  1   pas parlé de cet entretien, il n'y avait guerre besoin de l'évoquer.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire depuis quand est-ce que vous

  3   connaissez ce monsieur qui s'appelle Zalezak ?

  4   R.  Je l'avais connu au moins cinq ou six ou sept ans avant le début de la

  5   guerre, donc on arriverait vers la mi-1980.

  6   Dans la sécurité d'Etat de Vinkovci, il y avait trois employés originaires

  7   de Vukovar. Le siège se trouvait à Vinkovci. Et souvent, lorsqu'ils

  8   revenaient à Vukovar, ils s'arrêtaient à Pacetin chez moi et on jouait au

  9   billard ensemble dans la cafèt' de la bourgade. Et nous étions tous membres

 10   de la Ligue des Communistes à l'époque. Leur chef à eux, avant Pletikosic,

 11   c'était Stipo Brajcic - j'ai dit Stipo Brajcic - qui, lorsque moi j'étais à

 12   la tête de l'organisation de la jeunesse de Pacetin, lui il était à la tête

 13   de l'organisation de la jeunesse de Vukovar. Donc, c'est du fait des

 14   activités liées à l'organisation de la jeunesse qu'on se connaissait.

 15   Q.  Vous nous avez dit qu'il était le chef avant Pletikosic ?

 16   R.  Pletikosic Vlado, oui. J'ai dit Vlado Pletikosic. V-l-a-d-o, voilà. Je

 17   le connaissais, donc.

 18   Et j'étais bon ami avec Darko Bekic. C'est surtout lui que je connaissais.

 19   Darko Bekic. Il n'y a pas de J entre le B et le E.

 20   Q.  Alors, vous êtes allé à cette réunion d'Obrovac. Dites-nous comment ça

 21   s'est passé ? Dites-nous ce qui s'est passé là-bas ?

 22   R.  J'avais un carnet de notes et je prenais des notes. Hélas, ça a été

 23   confisqué par la police croate, je ne l'ai donc pas sur moi. Mais la

 24   réunion a abordé quatre ou cinq points à l'ordre du jour. Et, entre autres,

 25   ce Dr Vojo Vukcevic, nous devions l'élire aux fonctions de président du

 26   Comité exécutif, parce que la Slavonie et la Baranja n'avaient pas été

 27   représentées de façon adéquate au niveau de la direction du parti. Toutes

 28   les fonctions importantes se trouvaient à Knin. Eh bien, il se trouve que


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  1   c'est justement du fait de cette option du Pr Raskovic qu'il y a eu une

  2   dispute, parce que Raskovic était favorable à cette option pacifique et il

  3   y avait l'aile Babic en face.

  4   Et après la réunion, je me souviens d'un policier en civil. De nos jours

  5   encore, son nom m'échappe. Il a essayé de nous interroger, un simple

  6   policier serbe, un policier de la SAO de la Krajina. Et il a commencé à

  7   nous menacer du fait de nos positions politiques. Je pense qu'il a dû

  8   s'entretenir avec Boro Savic et Vojo Vukcevic. Je les ai contournés et j'ai

  9   évité toute conversation.

 10   Etant donné que cette réunion s'est terminée avant la tombée de la nuit, le

 11   soleil brillait encore, Obrovac c'est pas très loin de la côte et il y a là

 12   un climat presque méditerranéen, aussi Boro et moi avons-nous décidé de ne

 13   pas dormir à Obrovac mais de profiter du fait qu'il fasse jour pour faire

 14   le plus possible de kilomètres en direction de Zagreb.

 15   Q.  Oui. Avant que vous ne poursuiviez, j'aimerais vous poser une petite

 16   question. Y a-t-il eu des décisions de prises lors de cette réunion ? Vous

 17   en souvenez-vous ?

 18   R.  Je ne me souviens pas de ces décisions. Il y avait eu quelque chose au

 19   sujet du Pr Vukcevic, mais je ne me souviens franchement pas de quoi il

 20   s'agissait.

 21   Q.  Vous pouvez continuer maintenant le récit, là où je vous ai interrompu.

 22   Vous disiez que vous étiez parti d'Obrovac en direction de Zagreb.

 23   R.  Etant donné que nous avions voyagé la nuit entière, et puis comme cette

 24   nuit-là, donc, on n'a pas voyagé, on avait eu la réunion, et il fallait,

 25   nous savions -- il fallait qu'on dorme un peu avant Zagreb. On avait

 26   envisagé de passer la nuit à l'hôtel Borje, qui se trouve juste avant

 27   Titova Korenica. En arrivant là-bas, nous avons été surpris parce que

 28   c'était un hôtel assez grand mais il n'y avait pas de chambres de


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  1   disponibles. Seul le restaurant était disponible. Ils nous ont dit que

  2   l'hôtel le plus proche qui était disponible, c'était l'hôtel à Plitvice. Vu

  3   que c'est une région déjà montagneuse, il y avait de la neige, même si

  4   c'était à la fin du mois de mars. On est arrivés à Plitvice, on a dîné, on

  5   est restés dans le restaurant, et après on est allé se coucher.

  6   Et le lendemain matin, nous avons été réveillés par les tirs des armes

  7   automatique. Et puis, on a entendu sur les haut-parleurs la police qui nous

  8   disait : Ceci est un état croate. Ceci est la police régulière croate. Nous

  9   avons fait régner la paix et l'ordre. Personne n'aura de problème, et

 10   cetera. Moi, j'ai entendu ça alors que j'étais dans la chambre pendant que

 11   Boro prenait la douche. Il est vrai que ce qu'il a dit, c'est une anecdote

 12   un peu ironique. Quand je lui ai demandé mais pourquoi tu prends la douche,

 13   il m'a dit : Ecoute, si je dois mourir, je veux mourir propre.

 14   Bon, et ce jour-là c'était Pâques, mais les Pâques orthodoxes et

 15   catholiques qui tombait le même jour, et nous sommes descendus dans le

 16   restaurant, il y avait beaucoup de touristes, surtout des Italiens; deux

 17   autocars de touristes italiens. Et rien dans l'hôtel ne présageait qu'il y

 18   avait eu un incident, un événement. Tout le monde a pris son petit

 19   déjeuner, tout le monde se comportait normalement, les serveurs et les

 20   touristes.

 21   Boro est allé à la réception pour demander quelle était la situation.

 22   Et quand il est revenu, il m'a dit qu'à la réception de l'hôtel on lui

 23   avait dit que le chemin vers Zagreb était ouvert, que la Croatie avait fait

 24   régner l'ordre, de sorte qu'un car plein de touristes était déjà passé par

 25   là. Et moi, j'ai dit il vaudrait mieux rester à l'hôtel pour attendre, voir

 26   ce qui va se passer. Mais Boro m'a dit : Non, non, il vaut mieux partir, on

 27   n'a plus rien à faire ici.

 28   Dès que nous nous sommes assis dans la voiture, il faisait froid,


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  1   Boro a enlevé sa veste, c'était lui qui était au volant, c'était sa voiture

  2   à lui. Moi, j'étais toujours vêtu de mon manteau court, et ceci a vraiment

  3   sauvé ma vie, parce que Boro était en chemise, et ensuite on a continué

  4   vers un parking sur la gauche, et là, il y avait une maison et derrière la

  5   maison, se trouvait la police. Ils sont sortis munis de fusils

  6   automatiques, et on est sortis de la voiture. Bien sûr, on a placé nos

  7   mains sur la voiture. Ils sont venus nous fouiller, les autres nous

  8   menaçaient à bout portant.

  9   Et moi j'avais mon pistolet, bon j'ai toujours eu ce pistolet sur

 10   moi, j'avais un permis régulier de la police croate pour le port de cette

 11   arme. Il y en avait un d'entre eux qui a constaté que j'avais un pistolet,

 12   il l'a dit, et moi j'ai dit : Mais oui, mais j'ai aussi un permis à porter

 13   mon arme. Et, il m'a demandé à le voir, le permis. J'ai sorti mon porte-

 14   monnaie pour lui montrer le permis, mais j'avais aussi mon livret du Parti

 15   démocratique serbe, d'appartenance, la carte d'adhérant au parti, et il l'a

 16   vue. Et, après, le permis à porter les armes ne l'intéressait plus, il a

 17   tout simplement crié : Mais ce sont des Chetniks, on a attrapé des

 18   Chetniks.

 19   Je dois ajouter que c'était avant le début de la guerre, il ne faut

 20   pas oublier cela. Ce Parti démocratique serbe était un parti régulier qui

 21   avait ses sièges dans le parlement croate.

 22   Ils nous ont fait sortir sur la route. J'étais surpris de voir les

 23   véhicules de police, une 4X4, et les  policiers étaient accroupis à côté de

 24   chacune des quatre roues, donc l'action n'était pas finie, contrairement à

 25   ce qu'on nous a dit à la réception.

 26   Quand on est arrivés, ils se sont tous levés en brandissant leurs

 27   fusils pour nous asséner des coups de crosse de fusil. Moi, j'ai marché en

 28   premier, et celui qui nous accompagnait a dit : Non, non, ne le frappez


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  1   pas. Il faut qu'on vérifie, il paraît qu'ils ont séjourné à l'hôtel. Donc,

  2   celui qui voulait m'asséner un coup de crosse de fusil a baissé son fusil.

  3   Mais quand Boro est venu, eh bien, il lui a asséné un coup tout de suite

  4   sur la tempe, et il a été à moitié inconscient à cause de ce coup qu'on lui

  5   a asséné.

  6   Moi, j'ai bien vu qu'il a reçu un coup, mais seulement en arrivant au

  7   poste de police de Karlovac, j'ai vu qu'il saignait, et que c'était une

  8   blessure grave. Je ne le savais pas à l'époque encore, je ne l'ai compris

  9   que par la suite.

 10   Donc c'est là sur la route qu'on nous a attaché les mains au dos, et

 11   on nous a ordonné de nous coucher à plat ventre sur la neige, à côté de la

 12   route. Personne n'avait commencé encore à nous asséner des coups, vraiment,

 13   proprement dit, mis à part ce coup asséné à Boro. Ensuite, cet homme m'a

 14   pris le pistolet -- enfin celui qui m'a pris le pistolet est venu muni du

 15   pistolet en hurlant : Voilà, c'est son pistolet. On voit qu'il a tiré avec

 16   son pistolet. La bouche du canon n'est pas propre. Mais vous savez, moi,

 17   mon pistolet, moi, je ne l'ai pas utilisé, je le portais attaché à ma

 18   ceinture, et il se salit à cause des vêtements en laine. Je ne l'ai pas

 19   utilisé mon pistolet. Et il m'a asséné deux coups le plus fort possible, il

 20   m'a asséné un coup de pied, c'est un mouvement de karaté. Il m'a

 21   complètement brisé le rein gauche, j'ai uriné le sang pendant deux mois

 22   après cela. C'est un coup de botte qu'il m'a asséné.

 23   Ensuite, un véhicule des urgences est arrivé, et puis un véhicule de

 24   la télévision croate. Et moi, j'ai reconnu un médecin de Vukovar, et

 25   j'étais content de le voir. Je me suis dit qu'il allait leur expliquer que

 26   là, il s'agissait d'un malentendu. Cependant, il m'a regardé avec mépris,

 27   il m'a pratiquement craché dessus.

 28   La télé est venue, l'équipe de la télé, munie d'une caméra, et la


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  1   police est venue avec la clé des menottes. Ils nous ont détaché les

  2   menottes, et pour enregistrer cela devant une caméra, ils nous ont demandé

  3   de lever les mains en l'air pour nous arrêter à nouveau, et donc tout cela

  4   a été enregistré. Quand l'équipe de la télévision est partie, c'est là

  5   qu'ils nous ont à nouveau attaché les mains dans le dos, et ils ont

  6   commencé à nous asséner des coups. Là, avec des mains plutôt qu'avec des

  7   armes, des coups de pied et de poing.

  8   Je pense que cela a duré pendant une dizaine de minutes, ce passage à

  9   tabac. Donc on n'arrêtait de leur dire qu'on était des touristes, qu'on

 10   avait été à l'hôtel. Mais ils n'en avaient que faire de ce que l'on disait.

 11   Ensuite leur chef a dit : Ah, bien, donc vous avez séjourné à l'hôtel. On

 12   va vous ramener à l'hôtel. C'était une erreur. Et donc ils nous ont amenés

 13   jusqu'à un autre groupe qui se trouvait à un kilomètre ou 2 de là, un

 14   barrage routier qu'ils tenaient là, équipé d'une vingtaine ou trentaine de

 15   policiers. Alors ceux-là ne savaient même pas qu'il s'agissait là peut-être

 16   d'une erreur. Ils pensaient que nous, on était des Chetniks, mais à 100 %

 17   qu'on était coupables de quelque chose. Et donc, ils nous ont remis entre

 18   leurs mains, et là, ils ont recommencé à nous passer à tabac avec les mains

 19   liées dans le dos, en nous assénant des coups de pied, des coups de poing.

 20   Et ensuite, on nous a amenés à quelqu'un de la police, jusqu'au troisième

 21   barrage routier. Boro et moi, nous avons été assis derrière, il y en avait

 22   deux devant et deux derrière. Il y en avait un qui m'a tenu par le menton.

 23   Il a sorti son couteau et il a dit : Je vais l'égorger. Mais celui qui

 24   était à côté a dit : Mais non, ne le fait pas maintenant parce que tu vas

 25   nous tacher la voiture. Attend qu'on s'arrête.

 26   Et moi, je priais le bon Dieu pour qu'on ne s'arrête jamais parce que je me

 27   suis dit qu'ils allaient vraiment m'égorger. Et quand on s'est arrêtés,

 28   j'ai compris que nous nous sommes arrêtés au niveau du troisième barrage


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  1   routier, où il y avait encore une vingtaine de policiers. Et là, j'ai

  2   compris qu'ils n'allaient probablement pas m'égorger devant ces policiers-

  3   là. Ils nous ont à nouveau fait sortir et ils ont dit : Voici la

  4   marchandise. Vous pouvez la traiter. Et là, ils nous ont à nouveau passé à

  5   tabac avec les mains liées dans le dos.

  6   Quand tout cela s'est terminé, ils nous ont forcés, parce que c'était le

  7   troisième passage à tabac, ils nous ont forcés à entrer dans un véhicule de

  8   police, une camionnette sans sièges, il n'y avait que le sol du véhicule.

  9   Et deux policiers sont entrés. Ils ne portaient pas de vêtements de

 10   camouflage, mais un uniforme régulier de la police, avec deux énormes

 11   matraques. Je n'en ai jamais vu de comme ça. Et moi et Boro, alors qu'on

 12   était encore menottés, eh bien, chacun avait son bourreau et ils nous ont

 13   assené des coups pendant une dizaine de minutes et en allant de la tête

 14   jusqu'aux jambes. Et j'ai souffert des courbatures après cela à l'époque et

 15   encore au jour d'aujourd'hui. Et voilà, c'était la fin des mauvais

 16   traitements physiques.

 17   Ensuite, ils nous ont mis dans un autre véhicule semblable au véhicule

 18   qu'on a ici, c'était une Citroen, une camionnette qui nous a amenés dans le

 19   bois. Ils nous ont enlevé des vêtements, mais moi, j'avais ma veste. Ils

 20   ont ouvert les fenêtres. Ils ont dit : Si on commence à tirer, on va venir

 21   vous tuer, donc ne bougez pas de là. Donc, les civils qui habitaient dans

 22   le coin sont venus leur demander de les laisser nous maltraiter. Il y en

 23   avait un qui a demandé qu'on le laisse me crever les yeux pour qu'ils se

 24   baladent avec moi aveugle et pour qu'ils puissent demander de l'argent. Et

 25   c'est cette sortie-là qui m'a fait le plus peur parce que je me suis dit

 26   qu'ils allaient vraiment nous égorger. Ensuite, ils nous ont emportés au

 27   poste de police de Karlovac.

 28   Pendant qu'ils nous passaient à tabac et pendant que je pouvais encore


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  1   parler, j'ai essayé de leur expliquer : Mais écoutez, on est coupables de

  2   rien. Moi, je faisais partie de la délégation qui est allée visiter

  3   Tudjman, il y a quelques jours seulement. Et l'un d'entre eux a dit : Si

  4   Tudjman t'a reçu, eh bien, on va le passer à tabac lui aussi. J'ai trouvé

  5   cela drôle et triste à la fois.

  6   Et puis, je vais ajouter autre chose. Je n'ai jamais ressenti la douleur

  7   pendant tous ces passages à tabac parce que l'adrénaline a dû monter et je

  8   n'ai commencé à ressentir la douleur qu'à la fin de ces passages à tabac

  9   parce que c'était la première fois que j'étais passé à tabac de ma vie, que

 10   je recevais un coup et j'avais peur, j'avais tellement peur, que je ne

 11   pensais même pas à la douleur.

 12   Q.  En arrivant à Karlovac et par la suite, est-ce qu'on vous a donné une

 13   explication quelconque pour ce passage à tabac ? Est-ce que vous aviez des

 14   contacts avec des gens qui vous ont peut-être posé des questions ou

 15   expliquer pourquoi vous avez été arrêtés ?

 16   R.  Comme je l'ai déjà dit, ils ont arrêté de nous maltraiter à Karlovac.

 17   Ils nous ont reçus, l'inspecteur de la sécurité publique. Ils nous ont

 18   offert de l'eau. Moi, je ne bois pas de café, mais peut-être qu'ils ont

 19   offert un café à Boro. Ils ont dit que c'était une erreur, un malentendu.

 20   Et nous pensions qu'ils étaient sincères. Boro et moi, on était des

 21   utopiques, pour ainsi dire. Et il a dit : Eh bien, écoutez, vous pouvez

 22   peut-être nous faire revenir pour que je récupère ma voiture parce qu'à

 23   l'époque, il avait une Golf pratiquement nouvelle, qui avait beaucoup de

 24   valeur à l'époque. Et ils ont dit : Non, non, pas de problèmes. Et ils nous

 25   ont promis de nous amener là-bas. Et ensuite, ils allaient nous faire venir

 26   la voiture, la Golf.

 27   Et ensuite, nous avons parlé avec un inspecteur de la Sûreté de l'Etat. Et

 28   ils nous ont promis qu'ils allaient nous laisser partir. Mais quelque chose


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  1   s'est produit entre-temps. Une décision politique avait été prise, sans

  2   doute, et cette décision disait qu'il fallait que l'on soit tous arrêtés

  3   ensembles, avec une quinzaine de Serbes qui avaient déjà été arrêtés à

  4   Plitvice, et je n'étais pas au courant de cela. Donc, on était 15 ou 16, il

  5   n'y en avait qu'un qui avait un uniforme de la police de Krajina. Donc, il

  6   n'y en avait qu'un seul qui avait pris part aux événements. Tous les

  7   autres, c'étaient des civils, enfin, la plupart des civils. Et la plupart

  8   avaient des chaussons aux pieds alors qu'il neigeait dehors. Donc, les

  9   gens, ces gens-là, on les a arrêtés chez eux, dans leurs propres maisons,

 10   et ils avaient été tous passés à tabac.

 11   Il y en avait un qui avait ses lèvres complètement déchirées, je n'ai

 12   jamais vu quelque chose de semblable, c'était presque drôle à le regarder -

 13   - enfin, il fallait en le voyant soit vous vous mettiez à rire, soit vous

 14   vous mettiez à pleurer. Et puis après, ils nous ont gardés tous à cet

 15   endroit-là. Et puis le lendemain, ils nous ont amenés à Zagreb, tout

 16   d'abord, dans l'hôpital de la prison. On nous a examinés, moi j'étais le

 17   dernier à avoir été examiné. Tous les autres sont sortis et le médecin de

 18   garde qui nous a fait venir là-bas a -- enfin, le gardien de garde a

 19   demandé combien d'entre nous devaient rester hospitalisés et combien

 20   allaient être transportés dans la prison.

 21   Et ce n'est que là que j'ai compris quelle était la situation dans laquelle

 22   j'étais. Voici ce que le médecin lui a dit : Est-ce que tu vas bien ou quoi

 23   ? Ces gens-là, il ne faut pas les garder à l'hôpital. Il faut les envoyer

 24   au cimetière. Il faut qu'on les garde hospitalisés tous. On était 15 ou 16.

 25   Et donc, on nous a hébergés, hospitalisés dans des chambres, et nous

 26   n'étions pas ensemble. Il n'y avait personne d'entre nous qui était

 27   ensemble dans la chambre.

 28   Et le lendemain, Degoricija nous a rendu visite. Il nous a salué comme si


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  1   on se connaissait bien, il nous a même embrassés en disant que là, il

  2   s'agissait d'une erreur tragique. Mais le lendemain, alors que je me

  3   rendais aux toilettes parce que les toilettes étaient à l'extérieur, un

  4   prisonnier qui était dans une autre chambre dont le statut était un peu

  5   plus libre, il m'a donné un article de journal plié, il me l'a donné.

  6   C'était Vjesnik, un journal croate. Et voici ce que Degoricija a dit aux

  7   journalistes, il a dit : J'ai rendu visite à Hadzic à l'hôpital. Il a

  8   pleuré sur mon épaule et il a avoué avoir tiré sur des Croates et il

  9   déplorait son geste. Eh bien, quand j'ai lu ça, je me suis senti pire qu'au

 10   moment où j'ai pris des coups ou bien où j'avais peur qu'on allait

 11   m'égorger, parce que j'ai compris que c'était la fin du monde, que je ne

 12   pouvais rien expliquer à qui que ce soit, que je n'avais plus de marge de

 13   manœuvre.

 14   Le lendemain, Boljkovac et Degoricija sont arrivés. Et ils ont dit que Boro

 15   et moi, nous devions rédiger des déclarations, des déclarations distinctes,

 16   et qu'ils allaient nous relâcher. Nous étions prêts. Nous avons rassemblé

 17   nos affaires. Je me suis rendu dans la pièce où j'avais été admise, où

 18   j'avais laissé mes affaires personnelles. J'ai vu un journal sur le bureau

 19   du policier de garde et il y avait, au niveau du titre : Des hordes de

 20   Chetniks qui viennent de Serbe à Borovo Selo. Et j'en ai conclu qu'ils ne

 21   m'ont pas relâché parce qu'ils le souhaitaient, mais parce qu'il se passait

 22   quelque chose à cet endroit-là qui ne leur convenait pas. Donc, nous sommes

 23   partis à bord de deux voitures en direction de Vukovar. Boljkovac et

 24   Degoricija étaient dans la voiture qui était devant.

 25   Q.  Saviez-vous, avez-vous été averti d'une manière ou d'une autre, dans

 26   les jours qui ont suivi cette réunion qu'il y avait eu des combats aux

 27   alentours ?

 28   R.  Non, il n'y a pas eu de combats. Nous n'en avons pas entendu parler.


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  1   Nous n'avons entendu parler de rien. Si les gens en parlaient, eh bien, ils

  2   en parlaient dans l'autre camp. Nous, dans le camp de Raskovic, nous

  3   n'étions au courant de rien.

  4   Lorsque nous sommes arrivés à Plitvice, après le dîner, notre garçon de

  5   café s'est approché de nous en nous disant qu'on parlait de la police

  6   croate qui allait peut-être venir à Plitvice, mais moi je n'avais rien à me

  7   reprocher et je n'avais eu peur de rien, puisque la police croate était à

  8   Zagreb aussi. Pourquoi devaient-ils être à Plitvice ? Je n'avais aucune

  9   raison de les craindre.

 10   Mais je me souviens que le garçon de café a dit : Ils ne sont pas si fous

 11   après tout, c'est Pâques pour aux aussi. Ils ne vont pas créer de

 12   difficultés le jour de Pâques.

 13   Q.  Et qu'est-il advenu de ce pistolet que vous aviez ? Vous aviez un

 14   permis de port d'armes, d'une arme à feu, et vous aviez le document sur

 15   vous ?

 16   R.  Eh bien, tous les documents que j'avais sur moi avaient été volés. Et

 17   lorsque je dis qu'ils avaient été "volés", ils ont tout simplement pris sur

 18   moi, c'était purement et simplement un vol, car il n'y avait que la police

 19   régulière qui avait le droit de faire cela. Donc, ils ont pris tout ce que

 20   j'avais sur moi, y compris des chèques pour des dépenses que j'avais eues

 21   et pour lesquelles je souhaitais être remboursées du SDS. Et j'ai pensé que

 22   si je parvenais à Zagreb, on allait me les restituer.

 23   Q.  Encore une fois, pourriez-vous énumérer tous les documents que l'on a

 24   pris sur vous ?

 25   R.  Alors, ma carte d'identité, mon permis de conduire qui se trouvait dans

 26   mon portefeuille, ainsi que ma carte de membre du SDS - c'était un petit

 27   livret - et tous les documents que j'avais dans mon portefeuille.

 28   Q.  Alors, vous dites quelques jours plus tard qu'ils vous ont ramené. Ils


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  1   vous ont ramené à bord de leur propre véhicule.

  2   R.  Oui. C'était une voiture des services de sûreté de l'Etat croate.

  3   Q.  Savez-vous si on a restitué la Golf Volkswagen à Savic ?

  4   R.  Ils lui ont rendu plus tard, mais il y avait des traces de balles sur

  5   l'extérieur de la voiture. Ceci avait été fait à dessein. Mais ils ne lui

  6   ont versé aucun dommage et intérêt, à ce que je sache. Même si après cela,

  7   je n'ai pas cru un seul mot qui sortait de sa bouche. Et pourtant, bon, il

  8   a dit qu'il n'avait pas reçu de dommages et intérêts.

  9   Q.  Où vous ont-ils emmené exactement ?

 10   R.  Alors, ils nous ont conduits jusqu'au bâtiment de l'assemblée

 11   municipale de Vukovar. Nous ne savions pas à ce moment-là que l'assemblée

 12   tenait une séance permanente. Ils ne souhaitaient pas se séparer avant que

 13   nous y rendions nous-mêmes. Je souhaitais me lever, mais Degoricija m'a dit

 14   : C'est inutile, va te reposer. Ce qu'il ne souhaitait pas, en réalité,

 15   c'est que les gens nous voient avec des traces de passage à tabac ou de

 16   coups au visage. Et à l'hôpital, on nous a prodigué des soins, mais les

 17   traces étaient toujours visibles, les traces de coups.

 18   Ensuite, j'ai vu un groupe de personnes croates qui étaient mes

 19   anciens camarades de classe, ils étaient de l'autre côté de la rue par

 20   rapport à l'endroit où se trouvait le bâtiment de l'assemblée. Moi, j'étais

 21   heureux d'être en vie à ce moment-là. Je leur ai fait un signe de la main

 22   en guise d'accueil, mais personne n'a répondu. Et j'ai appris par la suite

 23   qu'ils étaient venus protester contre notre libération. Et je me demandais

 24   si vraiment ils pensaient que nous devions aller en prison, car en ce

 25   moment-là, nous étions tout à fait innocents, nous n'avons rien fait de

 26   mal.

 27   De toute façon, peu de temps après, j'ai appris pourquoi ils étaient

 28   là. Et j'ai appris par la suite également que ces personnes étaient membres


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  1   du HDZ, mais cela n'a pas d'importance.

  2   Q.  Après votre remise en liberté, avez-vous poursuivi vos activités

  3   politiques, vous en souvenez-vous, en tant que membre de l'assemblée de

  4   Vukovar, par exemple ?

  5   R.  J'ai poursuivi ce qui, à mes yeux, constituait des activités normales à

  6   l'époque. Je n'étais pas vraiment conscient de l'état de santé physique et

  7   mentale dans laquelle je me trouvais à ce moment-là. Lorsque j'ai vu les

  8   rapports médicaux ainsi que les conclusions d'un psychiatre avec lequel je

  9   m'étais entretenu, je me suis rendu compte que j'étais en grande

 10   difficulté. Mais le premier soir après avoir été remis en liberté, je me

 11   suis rendu à Borovo Selo. Nous avons eu une réunion à cet endroit-là, et

 12   j'ai dit que nous n'avions plus besoin de barrages routiers, étant donné

 13   que Boro et moi-même, nous avions été relâchés. C'était peut-être le

 14   lendemain, mais crois que c'était le soir même. Et dans ces autres

 15   villages, les barrages routiers ont été démontés tout de suite, et le

 16   lendemain à Borovo Selo peut-être.

 17   Q.  Pourriez-vous me dire comment vous avez appris qu'il y avait eu des

 18   barrages routiers ? Vous êtes-vous rendu à Borovo Selo ou êtes-vous allé

 19   chez vous et vous les avez appelés ?

 20   R.  Alors lorsque j'étais dans cette voiture du MUP croate, nous n'avons

 21   pas pu traverser le village de Brsadin, qui était un village serbe, mais

 22   les gens m'ont reconnu. Je leur ai dit de démonter les barricades, de les

 23   enlever.

 24   Mon village se trouve à côté d'une route secondaire, et non pas le

 25   long de la route principale, et donc j'ai vu les barrages routiers, je ne

 26   pouvais pas comprendre pourquoi cela se passait ainsi. Je pensais que tout

 27   ceci allait mener à un conflit qui n'était pas du tout nécessaire, et je

 28   croyais que ni Boro Savic, ni moi-même, nous n'avions fait quelque chose


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  1   pour lequel les gens devaient entrer en conflit, donc j'ai poursuivi mes

  2   activités normales. Je ne peux pas vous dire dans quel ordre chronologique

  3   les choses se sont passées, à savoir si c'était le premier, le deuxième ou

  4   troisième jour, mais quoi qu'il en soit, les barrages routiers ont été

  5   démontés à Borovo Selo après notre libération. Et je crois que Veljko

  6   Dzakula, Ilija Sasic étaient là à Borovo Selo également, mais je n'en suis

  7   pas tout à fait certain.

  8   Q.  Lorsque vous avez dit aux gens de Borovo Selo qu'ils devaient enlever

  9   les barricades, cette décision émanait-elle de vous, est-ce que vous étiez

 10   parvenu à cette conclusion également ou est-ce que c'est une demande qui

 11   émanait du côté croate ?

 12   R.  Alors les barrages routiers avaient été érigés à cause de moi en

 13   quelque sorte, ou quasiment. Et j'ai pensé qu'étant donné que j'étais

 14   revenu, ces barrages n'étaient plus nécessaires, mais cela était conforme à

 15   l'accord que j'avais conclu avant de me rendre à Obrovac, autrement dit,

 16   nous devions travailler dans le sens d'une normalisation des relations

 17   entre les Serbes et les Croates. Et de façon générale, j'ai toujours été

 18   contre les barrages, et ces barrages qui ont été érigés après en raison des

 19   attaques à Borovo Selo au mois d'août, c'est Degoricija qui m'avait demandé

 20   de les enlever.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne s'agit pas "d'attaques à Borovo Selo au

 22   mois d'août", il s'agit d'attaque à Borovo Selo, avec un type de mortier

 23   appelé Armbrust. A-r-m-b-r-u-s-t.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 25   Q.  Lorsque vous êtes entré en contact avec les gens de Borovo Selo après

 26   avoir été relâché, ces personnes vous ont-elles dit ce qui s'était passé

 27   lorsque vous étiez en prison ? S'il y avait eu des troubles ou quelque

 28   chose comme ça ?


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  1   R.  Alors ils m'ont tout raconté, mais je ne me souviens pas de tout

  2   aujourd'hui, parce que j'étais encore en état de choc après les passages à

  3   tabac. Je sais que Vukasin Soskocanin négociait avec la police croate, avec

  4   Zagreb, parce qu'il avait demandé notre remise en liberté.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le

  6   P1778, s'il vous plaît.

  7   Q.  Nous voyons dans cet article que le Conseil national serbe - en fait,

  8   je suis en train de traduire différemment par opposition à la traduction

  9   ici que nous avons - où il est dit "Alliance nationale serbe", mais c'est

 10   l'original qui fait foi ici - a demandé au peuple serbe de s'abstenir de

 11   toute action.

 12   Veuillez parcourir ce document, et nous en parlerons après.

 13   En anglais, il faut regarder la partie qui se trouve sous le titre : "Les

 14   Serbes dans la région de Borovo constituent une force de police." Ça se

 15   trouve tout en bas à gauche.

 16   Ma question est celle-ci : vous a-t-on dit que pendant votre absence

 17   lorsque vous étiez en prison, vous a-t-on parlé de ces 25 policiers qui ont

 18   quitté le service ?

 19   R.  J'ai entendu à ce moment-là que 25 policiers avaient quitté les forces

 20   de police, mais je ne savais pas à l'époque que cela avait un quelconque

 21   lien avec l'événement en question et notre arrestation à Plitvice.

 22   Q.  Après cela, après cet événement, je veux dire, vous a-t-on convoqué à

 23   Zagreb pour une raison quelconque ?

 24   R.  A plusieurs reprises, j'ai eu des conversations téléphoniques avec M.

 25   Degoricija, avec qui j'étais en bons termes. Il était devenu chef de la

 26   Sûreté de l'Etat. Il était le ministre adjoint de l'Intérieur chargé de la

 27   Sûreté de l'Etat en Croatie.

 28   Et je m'étais plaint, je lui ai dit que je n'avais plus de documents, j'ai


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  1   été dépossédé de mes pièces d'identité et de mon argent. Et il m'a dit en

  2   plaisantant : Mais ne te plains pas. Et j'ai dit aussi pour le pistolet. Il

  3   a dit : Que vas-tu faire d'un pistolet ? Si vraiment tu as besoin d'une

  4   arme, on te donnera un fusil. Il m'a dit cela au téléphone en plaisantant,

  5   mais moi je n'ai pas trouvé cela drôle. Et je lui ai demandé d'essayer de

  6   retrouver mon arme. Dix jours après, ou 15 jours après, il m'a rappelé, il

  7   m'a dit de venir à Zagreb pour voir ce qui pouvait être fait afin que l'on

  8   me restitue tout cela.

  9   Etant donné que je n'avais aucune pièce d'identité, je ne suis pas

 10   allé demander de nouvelles parce que je m'attendais à ce qu'on me les

 11   rende. J'ai emprunté la voiture d'un ami à Vukovar et j'ai convié mon

 12   meilleur ami ou l'un de mes meilleurs amis pour qu'il vienne à Zagreb avec

 13   moi. Lui, il avait ses pièces d'identité, c'était pour le cas où je me

 14   ferais arrêter par la police. Etant donné que j'avais fait mon service

 15   militaire de la JNA à Zagreb, je connaissais très bien la ville. On est

 16   allés au MUP, on est allés directement chez Boljkovac. Il nous a reçus tout

 17   de suite. Et Degoricija se trouvait là-bas, et on a eu une réunion amicale,

 18   un entretien amical comme si de rien n'était. Et j'ai demandé à ce qu'on me

 19   rende mon argent et mes pièces d'identité. Ils m'ont dit : Laisse tomber,

 20   ça n'a aucune importance. Vois donc si tu peux parler à Milan Babic et lui

 21   demander d'enlever les barrages sur les voies ferrées pour qu'on fasse

 22   passer les transports ferroviaires via Knin. Et bien qu'ils aient eu à

 23   connaître les relations au sein du SDS, et j'ai dit que Babic était

 24   indépendant, que c'était une option à l'opposée de la mienne, une option

 25   politique à l'opposée et qu'il refuserait, mais je n'ai pas refusé de

 26   l'appeler pour le lui dire.

 27   Alors, ils ont dit aussi qu'il n'était pas très malin de se disputer et de

 28   faire en sorte que Boro Savic et moi retirions la plainte déposée par moi-


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  1   même et Boro contre la police croate du fait des mauvais traitements subis.

  2   J'ai dit que moi, je pouvais la retirer pour moi, mais je ne pouvais pas

  3   garantir que Boro Savic allait en faire de même. Ils ont dit : Bon. Alors,

  4   va à Zrinjevac, au ministère public. Ils m'ont donné le nom d'un procureur

  5   quelconque - je l'ai oublié entre-temps - et on m'a dit que lui me

  6   restituerait mes effets.

  7   J'y suis allé et cet homme-là ne m'a rendu que six balles qui étaient dans

  8   la poche de mon blouson. C'étaient des balles que j'avais en réserve pour

  9   mon pistolet mais je n'en avais pas besoin. Et il a dit qu'il n'y avait ni

 10   pièces, ni pistolet, parce que ce qui a été saisi a été caché par ceux qui

 11   l'ont saisi et qu'ils voulaient garder ça en guise de trophée et qu'ils

 12   n'arrivaient pas à en retrouver la trace. Alors, j'ai rebroussé mon chemin

 13   et je suis rentré à Pacetin. Par la suite, Degoricija a continué à

 14   m'appeler presque tous les jours.

 15   Q.  Veuillez nous indiquer, je vous prie, quel type de plaintes vous a-t-on

 16   demandé de retirer, vous-même et Boro Savic ?

 17   R.  Boro Savic et moi, quelques jours après notre retour de Zagreb, on est

 18   allés à Belgrade. Et je suis allé à une réunion à l'ambassade américaine.

 19   Avant cela, je suis allé voir un groupe d'avocats qui avaient accepté de

 20   nous représenter pro bono dans notre plainte contre l'Etat croate. Ces

 21   avocats étaient Savo Andjelkovic et Mitar Lazovic. Lazovic, déjà, était

 22   âgé. Il était à la veille de son départ à la retraite. Tous mes documents,

 23   les constats médicaux -- enfin, pas les documents mais les papiers

 24   médicaux, je les ai remis aux avocats. Je ne les ai plus. Mais peu importe.

 25   Q.  On vous a donc convoqué à Zagreb après avoir vu ces avocats, après

 26   cette plainte qui a été déposée, j'imagine ?

 27   R.  Après le 15 avril, oui, parce qu'ils l'ont fait dès qu'ils ont appris

 28   qu'il y avait une plainte de déposée. Ils ont dit que ce n'était pas


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  1   politiquement correct, en quoi Tudjman avait-il une responsabilité quelle

  2   qu'elle soit. Nous ne savions pas encore qu'il y avait une notion de

  3   responsabilité hiérarchique, comme je l'ai appris depuis que je suis ici.

  4   Q.  Vous nous avez dit qu'après ce contact avec Boljkovac et Tudjman, il y

  5   avait eu d'autres contacts encore. Dites-nous s'il y a en a eu d'abord, et,

  6   si oui, avec qui du côté croate ?

  7   R.  Avec Degoricija, j'ai eu un contact permanent, et c'est en premier lieu

  8   avec lui que j'ai eu des contacts. Peut-être y en a-t-il eu encore mais je

  9   n'arrive pas momentanément à m'en souvenir. J'ai continué à contacter les

 10   Croates de la municipalité de Vukovar. D'une certaine façon, ça peut être

 11   peut-être difficile à comprendre, j'avais eu des relations personnelles

 12   assez bonnes avec les Croates de la municipalité de Vukovar.

 13   Q.  Est-ce vous pouvez nous dire au sujet des contacts que vous avez eus

 14   avec Degoricija, s'il vous a demandé quoi que ce soit du point de vue des

 15   activités politiques qu'il conviendrait d'entreprendre ?

 16   R.  Il n'avait pas à me le demander, j'avais défendu la même thèse, à

 17   savoir que les barrages routiers n'étaient pas nécessaires et qu'il n'y

 18   avait aucune raison de faire la guerre. A titre officiel, ils avaient

 19   demandé, et je m'en souviens, que l'on enlève les barrages routiers de

 20   Borovo Selo et ailleurs. C'est ce dont je me souviens. Il était en contact

 21   permanent avec nous et avec les membres du comité régional du SDS de la

 22   Slavonie occidentale, Sasic et Dzakula, notamment.

 23   Q.  Vous souvenez-vous si à l'époque, en avril 1991 -- parce que vous nous

 24   avez parlé de contacts que vous aviez avec les gens de l'assemblée

 25   municipale de Vukovar. Alors, vous souviendriez-vous si là aussi il y a eu

 26   des mesures de prises à des fins d'apaisement de la situation ?

 27   R.  Je ne peux pas vous ranger le puzzle de façon chronologique. La police

 28   venait souvent à Vukovar pour avoir des réunions avec nous et pour avoir


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  1   des réunions conjointes à des fins de coordination des activités de tous

  2   les partis politiques de la municipalité. Et je crois qu'à ce moment de

  3   crise, il y avait eu Boljkovac et Degoricija à une réunion de la

  4   municipalité de Vukovar, ça pouvait être en avril, cela. Et du moins, quand

  5   je m'y trouvais, c'étaient avec les Serbes qu'ils avaient fait une réunion

  6   parce qu'au préalable ils avaient eu une réunion avec les leurs.

  7   Je crois qu'il y a avait eu Rade Leskovac, et je me souviens d'une

  8   digression ou d'une espèce de parallèle qu'il avait établi. Je vais

  9   paraphraser, bien sûr : Il serait étrange de voir quelqu'un déambuler sans

 10   vêtements en ville mais il faudrait se poser la question de savoir pourquoi

 11   cela se passe. Et ça n'aurait pas été étrange si tout le monde le faisait.

 12   Il voulait s'exprimer de façon imagée, et c'est ce qu'il a dit, ou quelque

 13   chose de ce genre. Mais je me souviens de ses propos à l'occasion de cette

 14   réunion.

 15   Q.  Merci.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche à présent la

 17   pièce 1D2181.

 18   Q.  Ceci est une des conclusions de la présidence de l'assemblée municipale

 19   de Vukovar en avril 1991.

 20   Vous avez été député à l'assemblée municipale de Vukovar à l'époque, donc

 21   je vous demanderais de prendre lecture de ces conclusions et de vous dire

 22   si vous vous souvenez de la date d'adoption desdites conclusions.

 23   R.  Oui, je me souviens. Je m'en souviens. Je vois la date du 10 avril.

 24   Quoique ce soit une date assez particulière.

 25   Q.  Pouvez-vous nous dire, parce qu'ici il est écrit que la décision a été

 26   prise par la présidence de la municipalité de Vukovar. Qui composait donc

 27   cette présidence ?

 28   R.  Ça prête à confusion pour ce qui me concerne, parce que le statut de la


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  1   municipalité ne prévoyait pas une telle instance. Je n'en suis pas trop

  2   sûr, mais ça pourrait être une espèce de cellule politique à un niveau de

  3   l'assemblée municipale.

  4   Q.  Avez-vous été présent lors de la prise de ce type de décision ou avez-

  5   vous été mis au courant de l'adoption d'une telle décision ?

  6   R.  Je n'arrive pas à m'en souvenir maintenant, du moins pas avec

  7   précision. Je ne voudrais pas me perdre en conjecture. Mais je pense que

  8   c'était à l'époque où il y avait Boljkovac et Degoricija, et que cela avait

  9   été jugé acceptable que de convier les gens à préférer une option

 10   pacifique.

 11   Q.  C'est le paragraphe 2 qui est caractéristique :

 12   "On convie la totalité des citoyens, des partis politiques et des

 13   institutions du système à éviter toute activité susceptible de détériorer

 14   une situation déjà difficile."

 15   R.  Vous avez dit le paragraphe 3.

 16   Q.  Non, c'est le paragraphe 2. En substance, ma question, qu'il s'agisse

 17   de l'assemblée, de la présidence ou du président, peu importe, est-ce qu'on

 18   avait coutume d'adresser ce genre d'appel ?

 19   R.  Je ne suis pas sûr qu'il y ait eu une réunion de l'assemblée municipale

 20   en avril - à composition complète - c'est la raison pour laquelle la

 21   présidence a dû s'en charger parce que l'assemblée n'avait pas siégé vu

 22   qu'on n'avait pas prévu des séances de l'assemblée, donc celle-ci n'avait

 23   pas pu prendre ces décisions.

 24   Et cette notion de présidence, maintenant, je crois pouvoir dire que

 25   c'est la première fois que j'en entends parler parce que ça n'avait pas

 26   existé dans ces activités politiques telles que nous les avions déployées à

 27   la municipalité de Vukovar.

 28   Q.  Je vois qu'au paragraphe 4 de ce document, l'on convie la totalité des


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  1   citoyens de la municipalité de Vukovar à faire en sorte que la libération

  2   de Vukovar, le 12 avril, soit une journée fêtée de façon cérémonieuse.

  3   Est-ce que vous vous souvenez d'une cérémonie quelconque à cette date-là ?

  4   R.  C'est pour rien qu'ils ont adressé cet appel, parce que c'était la date

  5   de la libération de Vukovar de l'occupation fasciste. Et à l'époque ce

  6   n'était pas tellement une journée que l'on fêtait de façon particulière.

  7   C'était peut-être fêté davantage du vivant de Tito.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai d'autres

  9   documents à aborder maintenant, mais je suis en train de voir l'heure.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, merci, Maître Zivanovic.

 11   Nous allons faire une pause maintenant, et nous allons reprendre lundi

 12   matin à 9 heures.

 13   Monsieur Hadzic, vous connaissez les règles, j'imagine, pour ce qui est du

 14   fait de discuter de votre témoignage avec d'autres personnes, chose qui

 15   n'est pas autorisée, et vous savez également qu'il y a une décision de

 16   notre part au sujet des contacts que vous pouvez avoir avec la Défense,

 17   mais bien entendu, vous ne pouvez pas avoir de contact avec le bureau du

 18   Procureur.

 19   L'audience est levée.

 20   --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le lundi, 7 juillet

 21   2014, à 9 heures 00.

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