Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 3 septembre 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes ici réunis

  7   dans ce prétoire et à l'extérieur de celui-ci.

  8   Madame la Greffière, veuillez introduire le numéro de l'affaire.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] IT-04-75-T, le Procureur contre Goran

 10   Hadzic.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   Les parties peuvent-elles se présenter, à commencer par le Procureur.

 13   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour. Douglas Stringer; Lisa Biersay; Mme

 14   Clanton; Marina Marcikic, en tant que stagiaire; et notre commis à

 15   l'affaire, Thomas Laugel.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 17   Pour la Défense.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 19   les Juges. Pour la Défense de Goran Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher

 20   Gosnell, avec notre stagiaire, Sunna Aevarsdottir.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 22   Monsieur Hadzic, je vous rappelle que vous déposez toujours sous serment.

 23   Maître Zivanovic, veuillez poursuivre.

 24   LE TÉMOIN : GORAN HADZIC [Reprise]

 25   [Le témoin répond par l'interprète]

 26   Nouvel interrogatoire par M. Zivanovic : [Suite]

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Hadzic.

 28   R.  Bonjour.

 


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  1   Q.  J'aimerais vous poser une question sur un thème qui a été abordé au

  2   cours du contre-interrogatoire, il s'agit d'Osijek. Je précise aux fins du

  3   compte rendu que c'était le 22 juillet, la page 10 113; le 23 juillet,

  4   pages 10 200 et 10 221; le 24 juillet, pages 10 240 à 10 310 [comme

  5   interprété]. On a donc beaucoup parlé d'Osijek ici, et vous avez déposé sur

  6   ce point de manière prolongée.

  7   Alors, voici la question que je souhaitais vous poser : le gouvernement de

  8   l'entité SBSO avait-il prévu de prendre le contrôle militaire de cette

  9   ville ? A-t-il participé à l'élaboration des plans consistant à prendre la

 10   ville ?

 11   R.  Non, le gouvernement n'en était pas informé. Personne n'a évoqué la

 12   question avec le gouvernement. Ni auprès des autorités militaires ni des

 13   autorités civiles. Ça n'a jamais été un sujet de discussion.

 14   Q.  [hors micro]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Votre micro, Maître Zivanovic.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 17   Q.  Lorsque vous étiez président de la République de la Krajina serbe,

 18   c'est-à-dire 1992 et 1993, à votre connaissance, les forces armées de la

 19   République de la Krajina serbe avaient-elles envisagé d'attaquer la ville ?

 20   R.  Non. Je peux l'affirmer avec une certitude absolue. Et je peux affirmer

 21   également avec une certitude absolue qu'au cours de mon mandat de président

 22   de la RSK, en tout cas à ma connaissance, d'après les informations dont je

 23   disposais, pas le moindre obus n'a été tiré sur Osijek. En tout cas, pas

 24   par les forces régulières d'alors.

 25   Q.  Monsieur Hadzic, pendant le contre-interrogatoire du représentant du

 26   bureau du Procureur, vous avez apporté de nombreuses réponses, mais

 27   j'aimerais vous poser une autre question encore. Restait-il quoi que ce

 28   soit que vous vouliez dire pendant le contre-interrogatoire et que vous


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  1   n'avez pas pu préciser, parce que vous avez été interrompu par le

  2   Procureur, par moi-même, ou en raison d'autres facteurs encore ?

  3   R.  Peut-être deux choses. J'ai oublié de dire quelque chose avant-hier

  4   lorsque j'ai répondu à une de vos questions, et puis j'aimerais tirer

  5   quelque chose d'autre au clair.

  6   En réponse à la question posée par le Procureur sur la visite de Mme

  7   Albright à Borovo Naselje, peut-être me suis-je trompé, mais j'ai

  8   l'impression qu'il avait le sentiment que j'avais invité Milan Ilic, même

  9   si ça n'a guère d'importance. Cela étant, il importe que la vérité soit

 10   connue. L'ambassade américaine de Zagreb était convenue de rendre visite

 11   aux Serbes locaux, et ils s'étaient mis d'accord directement avec Milan

 12   Ilic que c'est lui qui allait les recevoir et je ne suis intervenu que par

 13   la suite pour résoudre le problème. Il est donc important que la Chambre de

 14   première instance sache, si cela les intéresse pour une raison ou une

 15   autre, qu'ils sachent donc que cette rencontre avait été convenue sans la

 16   moindre intervention de ma part. Par ailleurs, en réponse à la question que

 17   vous m'avez posée il y a deux jours -- bon, je ne me souvenais plus de

 18   quelque chose. Je pensais que vous me demandiez ce qui avait été discuté à

 19   M. Simovic et je ne me souvenais plus. J'ai dit qu'il m'avait invité, mais

 20   en fait, il faisait partie de nos personnes de contact lorsque nous

 21   rencontrions M. Wijnaendts dans le cadre de ces préparatifs à Belgrade en

 22   vue des réunions de La Haye et de Paris. C'est donc dans le bureau de

 23   Simovic que ces consultations se sont déroulées plutôt que dans le bureau

 24   du gouvernement. Et Jovic était là aussi. Je crois que j'étais là une fois

 25   avec lui, et l'autre fois, j'y étais avec Babic et Dzakula. Ils nous ont

 26   présenté l'idée des Casques bleus et nous avons parlé de Paris et de La

 27   Haye, c'est la raison pour laquelle je me trouvais là. Voilà. C'est à peu

 28   près tout, si je me souviens bien.


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  1   Q.  Merci, Monsieur Hadzic. Je n'ai plus de questions. Merci.

  2   R.  Merci également

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.

  4   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, le bureau du

  5   Procureur allait vous demander dix à 15 minutes pour traiter de deux

  6   questions. L'une d'entre elle a été résolue au travers d'un accord avec la

  7   Défense, la question que nous avions soulevée à votre intention lundi.

  8   Donc, cette question étant réglée, nous aimerions disposer de dix à 15

  9   minutes avec M. Hadzic pour lui poser quelques questions supplémentaires

 10   sur deux sujets. J'aimerais également demander le versement d'un certain

 11   nombre de documents dont le versement n'a pas été demandé au cours du

 12   contre-interrogatoire. La question a été soulevée auprès du Juge Hall

 13   lundi. Il nous a proposé de nous concerter avec la Défense, ce que nous

 14   avons fait, et nous sommes parvenus à un accord sur tous les documents à

 15   l'exception d'un seul. Mon intention serait donc simplement de demander le

 16   versement au dossier de ces données, et je pense que dix à 15 minutes

 17   suffiront.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Permettez-moi de rectifier une chose de ce

 20   que vient de dire M. Stringer. Nous sommes parvenus à un accord sur tous

 21   les documents à l'exception de deux, et non pas d'un seul.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Nous verrons.

 23   Monsieur Stringer, allez-y.

 24   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Stringer : 

 26   Q.  [interprétation] Monsieur Hadzic, j'aimerais revenir sur quelques

 27   éléments de réponse que vous avez apportés hier dans le cadre des questions

 28   supplémentaires qui vous ont été posées. L'une d'entre elles a porté sur

 


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  1   une partie précédente de votre déposition au cours de laquelle le Juge Hall

  2   vous avait demandé quand vous avez appris qu'Arkan était un criminel et

  3   qu'il était recherché par Interpol. Vous en avez parlé hier et vous avez

  4   dit, comme vous l'aviez fait auparavant, que la question était en rapport

  5   avec l'époque à laquelle Arkan est devenu une star des médias.

  6   Et vous avez dit ceci au Juge Hall à la page 10 157 du compte rendu

  7   d'audience : "Je ne sais plus exactement quand c'était, mais la chose a été

  8   connue lorsque Arkan est devenu une star des médias auprès des journalistes

  9   étrangers, au moment de la visite du consul australien également."

 10   Et je sais que depuis nous avons corrigé le titre de cet Australien

 11   qui n'était pas consul mais député. Alors, est-ce ainsi que vous avez

 12   souhaité établir un lien entre le moment où vous avez appris le statut de

 13   criminel d'Arkan et ces événements ?

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, j'aimerais que l'on tire au

 16   clair la signification du verbe "apprendre" en l'occurrence. S'agit-il de

 17   "avoir entendu dire que" ou s'agit-il du moment où il a "appris" ? Je crois

 18   que ce n'est pas la même chose.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.

 20   M. STRINGER : [interprétation]

 21   Q.  La question du Juge Hall était celle-ci : "Quand avez-vous appris

 22   qu'Arkan était un criminel recherché par Interpol ?"

 23   Ma question, Monsieur Hadzic, est donc celle-ci : établissez-vous un

 24   rapport entre le moment où vous l'avez appris et la visite du premier

 25   ministre australien ?

 26   R.  Il n'est jamais venu, le premier ministre australien. C'est en tout cas

 27   l'interprétation qui m'a été donnée de votre question. Je suppose que

 28   c'était un lapsus.


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  1   Il y a deux choses à préciser ici. Tout d'abord, je pense avoir bien

  2   compris la question du Juge Hall. Nous avons d'abord eu ce différend entre

  3   vous-même et moi-même sur la visite de M. Dzuro en 2002 et le Juge Hall a

  4   eu une intervention très adroite, me semble-t-il, afin de mettre un terme à

  5   ce malentendu. Ensuite, j'ai dit oui à la question de savoir si je savais

  6   en 2002 qu'Arkan était un criminel. Pour le reste, eh bien, la question

  7   prête à débat. Qu'entend-on par avoir connaissance ou apprendre ? A ce

  8   jour, je n'ai toujours pas reçu de document officiel d'une quelque instance

  9   que ce soit indiquant qu'Arkan était un criminel reconnu, sauf lorsque je

 10   suis arrivé au quartier pénitentiaire et que j'ai appris toutes les

 11   sentences qui le concernaient. Mais je parle la période au cours de

 12   laquelle j'étais en liberté. Je l'ai appris des médias croates et je n'en

 13   étais même pas certain.

 14   Q.  Le Juge Hall vous a dit, et je le cite : "Mais, Monsieur Hadzic, je

 15   suppose, votre déposition semble indiquer qu'en 1991, vous ne saviez pas

 16   qu'Arkan était recherché par Interpol," et cetera, et cetera, "au moment de

 17   l'entretien avec M. Dzuro, le saviez-vous ?"

 18   Et il dit ensuite : "Ma question est de savoir quand vous avez appris

 19   qu'Arkan était un criminel recherché d'Interpol ?"

 20   Et, Monsieur Hadzic, vous avez répondu au Juge Hall, et je vous cite :

 21   "Vous m'avez très bien compris. En 2002, j'ai dit à M. Dzuro -- je savais

 22   qu'en lui parlant -- je le savais quand je lui parlais. En ce qui concerne

 23   le moment où je l'ai appris, je ne le sais plus exactement, mais en tout

 24   cas la chose est devenue connue lorsque Arkan est devenu une personnalité

 25   dans les médias, lorsque des journalistes étrangers ainsi que le consul

 26   australien sont venus lui rendre visite."

 27   Monsieur Hadzic, donc, vous établissez un lien entre le moment où

 28   vous avez appris quel était le statut d'Arkan et la visite de cette


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  1   personnalité australienne et - permettez-moi de finir ma question - je veux

  2   juste essayer de circonscrire précisément l'époque à laquelle vous l'avez

  3   appris. Je vous dis qu'il s'agit de janvier 1992.

  4   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je fais objection à cette question. Tout

  5   d'abord, cette partie de compte rendu a été lue à deux reprises au témoin,

  6   M. Hadzic, par M. Stringer, et il me semble que M. Hadzic a déjà répondu à

  7   la question.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Je ne suis pas d'accord, Monsieur le

  9   Président. Je ne crois pas que M. Hadzic ait répondu du tout.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Objection rejetée.

 11   M. STRINGER : [interprétation]

 12   Q.  Je reformule, Monsieur Hadzic. En réponse à la question du Juge Hall,

 13   vous avez parlé des médias et de la visite de ce représentant australien.

 14   Vous conviendrez, n'est-ce pas, que cette visite remonte à janvier 1992, la

 15   visite du représentant australien, nous l'avons vue sur la vidéo ?

 16   R.  Nous sommes d'accord. Mais je dois vous expliquer quelque chose. Je

 17   pensais que l'on m'avait bien compris, mais vraisemblablement ça n'est pas

 18   le cas. Je n'ai pas établi un lien direct entre le moment où j'ai appris

 19   qu'Arkan était un criminel et cette visite. J'ai simplement dit que cette

 20   visite avait semé davantage de confusion encore dans mon esprit. Lorsque

 21   j'ai vu un haut représentant d'un membre des Nations Unies venir le voir et

 22   que je savais par ailleurs au travers des informations que j'avais obtenues

 23   de la part des médias croates qu'Arkan était un criminel, je pensais que

 24   cette visite était donc tout à fait inappropriée. Je pensais qu'il n'était

 25   pas criminel parce que ce député australien venait le voir, mais il

 26   semblait, en réalité, que c'était l'inverse. Si ce représentant australien

 27   venait le voir, cela devait vouloir dire que ce n'est pas un criminel. Mais

 28   je n'ai jamais reçu d'information concrète de qui que ce soit faisant état


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  1   d'une quelconque activité criminelle perpétrée par lui et je ne savais même

  2   pas qu'il avait purgé une peine de prison. Il était venu avec la police de

  3   Serbie et je pensais que la Serbie, en tant que membre des Nations Unies,

  4   se devait d'arrêter les criminels.

  5   Q.  Mais vous conviendrez qu'en janvier 1992, Arkan, M. Raznjatovic, était

  6   une figure bien connue dans les médias ?

  7   R.  Eh bien, oui, on le voyait dans les médias fréquemment. Je ne suivais

  8   pas tout, parce qu'il n'y avait pas toujours d'électricité, mais il était

  9   effectivement assez bien connu.

 10   Q.  J'aimerais maintenant vous poser une question sur la déposition que

 11   vous avez faite à propos d'un extrait vidéo que l'on vous a demandé de

 12   commenter. C'est dans cet extrait vidéo que la question vous est posée, et

 13   vous répondez : "Pas dans l'esprit de fraternité et de l'unité qui a été

 14   créé il y a 50 ans."

 15   Mon éminent contradicteur vous a posé des questions à propos de cet extrait

 16   vidéo et j'aimerais, moi aussi, vous en adresser certaines. En réponse à

 17   une question du conseil hier, vous avez dit ceci -- page 10 808 [comme

 18   interprété]. Le conseil vous a demandé ceci : "Dans le cadre de cet

 19   entretien, et plus généralement à l'époque, y avait-il une distinction

 20   faite entre les Croates du fait de leur origine, par exemple ?"

 21   Et vous avez répondu : "Non, jamais."

 22   Le conseil vous a ensuite demandé, Me Zivanovic : "C'était un mois ou deux

 23   après vos entretiens, les entretiens que je vous ai montrés; par

 24   conséquent, la guerre faisait déjà rage, pourrait-on dire. Avez-vous fait

 25   cette déclaration à propos des Croates venant de l'Herzégovine ou d'autres

 26   régions ?"

 27   Et vous avez répondu : "Pas du tout. Personne n'a jamais essayé, par

 28   ailleurs, de l'établir sur le terrain. Mes déclarations étaient


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  1   relativement incisives en septembre. Je n'avais même pas de téléphone à

  2   l'époque. Et je l'ai dit parce que Stipe Mesic et son camp nous montraient

  3   du doigt."

  4   Vous souvenez-vous d'avoir dit cela ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  J'aimerais revenir sur ce point car votre réponse peut donner à croire

  7   que vous usiez d'un langage incisif au moment où, par ailleurs, les

  8   rapports avec les Croates étaient plutôt tendus, dans un climat de conflit

  9   ou de guerre. Est-ce ce que vous essayiez de dire hier ?

 10   R.  Non. J'ai parlé de Stipe Mesic, je m'en suis servi en tant qu'exemple,

 11   mais il y avait d'autres hommes politiques à l'époque qui s'exprimaient

 12   contre les Serbes. Je ne faisais que riposter. A l'époque, Mesic a dit que

 13   les Serbes n'étaient bons que pour manier la pelle, qu'ils ne pouvaient

 14   plus occuper des postes de direction, qu'ils n'étaient bons que pour les

 15   travaux publics. D'autres ont dit qu'ils étaient contents que leurs épouses

 16   ne soient pas Serbes ni Juives. A mon avis, ces déclarations étaient

 17   profascistes, et je me suis contenté d'y répondre.

 18   M. STRINGER : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche à l'écran la

 19   pièce 84.50, il s'agit de l'onglet 701.

 20   Q.  Monsieur Hadzic, j'aimerais vous montrer quelque chose que vous avez

 21   dit un peu plus tard, en juillet 1993. C'est un extrait d'un entretien, une

 22   interview que vous avez donnée à "Borba" les 24 et 25 juillet 1993,

 23   intitulé : interview de Goran Hadzic, dirigeant des Serbes de Krajina, par

 24   Branislav Gulan à Erdut et à Dalj.

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je fais objection à l'utilisation de ce

 28   document. Je ne l'ai pas utilisé dans le cadre de mes questions


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  1   supplémentaires, il n'a pas non plus été examiné dans le cadre du contre-

  2   interrogatoire de M. Hadzic. Ce document n'a donc pas lieu d'être cité.

  3   M. STRINGER : [interprétation] La partie de la déposition de M. Hadzic à

  4   laquelle je fais référence semble indiquer qu'il s'exprimait déjà de

  5   manière incisive en septembre à propos des Croates de l'Herzégovine. Je

  6   souhaite montrer au témoin ce document pour montrer que ces propos incisifs

  7   n'ont pas seulement été prononcés dans le cadre de ce qui se passait à

  8   l'automne 1991, au plus fort du conflit, que ces propos ont continué d'être

  9   tenus pendant un certain temps par la suite.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Le Procureur aurait pu le démontrer au

 11   cours du contre-interrogatoire et utiliser ce document s'il avait souhaité

 12   montrer quoi que ce soit sur les actions et la conduite de l'accusé. Je

 13   fais donc objection à l'utilisation à ce stade de ce document ainsi qu'à

 14   l'ensemble des questions que pourrait poser au témoin l'Accusation.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Objection retenue.

 17   M. STRINGER : [interprétation] Bien. Il me reste donc, Monsieur le

 18   Président, à demander le versement au dossier d'un certain nombre de

 19   documents. Le premier est le document -- nous demandons le versement au

 20   dossier du document 65 ter 1D03021.1, et c'est une version expurgée que

 21   nous avons préparée de ce qui se trouve d'ores et déjà dans la pièce D134.

 22   Le conseil de la Défense et moi-même nous sommes consultés sur la question,

 23   et la Défense convient de cette proposition de versement du document

 24   3021.1.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Une cote lui sera attribuée.

 26   M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant est en --

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Oui.


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  1   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, 1D03021.1

  3   devient la pièce D134.1.

  4   M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant est un extrait de

  5   l'entretien de M. Hadzic en tant que suspect, document utilisé par les deux

  6   parties dans leurs interventions respectives. Il s'agit d'un extrait de

  7   sept pages de la retranscription de l'entretien de M. Hadzic en qualité de

  8   suspect et qui reprend la déclaration de M. Hadzic faite à M. Dzuro par

  9   rapport aux personnes de Klisa qui ont été acheminées vers le centre

 10   d'entraînement et à propos de l'enquête, des recherches qui les ont

 11   concernées. Nous avons demandé le versement au dossier de ce document

 12   lundi, et sur ce document également le Juge Hall a suggéré que nous

 13   consultions la Défense. Les parties se sont mises d'accord. Nous demandons

 14   donc le versement de ce document 65 ter 4974.08J, cet extrait, donc, de

 15   sept pages qui reprend les propos de M. Hadzic sur la question des victimes

 16   de Klisa.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est versé au dossier.

 18   Qu'on lui attribue une cote.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 04974.08J sera la pièce P3239.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Il faut également que cette pièce soit

 22   versée au dossier sous pli scellé --

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Elle le sera.

 24   M. STRINGER : [interprétation] Les documents suivants sont des documents

 25   1D033606 [comme interprété]. Nous nous sommes mis d'accord également sur

 26   son versement.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ce sera fait.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Sous pli scellé.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Sous pli scellé.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 1D03606 deviendra la pièce P3240, sous

  3   pli scellé.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  5   M. STRINGER : [interprétation] Nous passons ensuite au document numéro 65

  6   ter 6521.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Versé. Qu'on lui attribue une cote.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Sous pli scellé.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Sous pli scellé.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 6521 devient la pièce P3241, sous pli

 11   scellé.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 13   M. STRINGER : [interprétation] Et 65 ter 6561.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est versé au dossier.

 15   Qu'on lui attribue une cote.

 16   M. STRINGER : [interprétation] C'est un document public.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 65 ter 6561 devient la pièce P3242.

 18   M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant n'a pas fait l'objet

 19   d'un accord avec la Défense. Il s'agit de deux extraits complémentaires

 20   très brefs de l'entretien de M. Hadzic en qualité de suspect et concerne

 21   sur un autre incident. La famille Sinasi, la famille Pap, paragraphe 27. Ce

 22   document a été utilisé au cours du contre-interrogatoire de M. Hadzic.

 23   4974.09B et 4974.08F, nous demandons donc le versement au dossier de ces

 24   deux extraits à des fins de récusation. La Chambre aura ainsi l'intégralité

 25   des documents qui concernent cet incident.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Nous objectons au versement au dossier de

 28   ces deux documents. Tout d'abord, 4974.09B, nous n'en voyons pas la


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  1   pertinence en l'occurrence. Nous ne voyons pas pourquoi il serait pertinent

  2   de verser au dossier cette partie précise de son entretien.

  3   Et en ce qui concerne 4974.09F [comme interprété], d'après ce que nous

  4   constatons, cette partie se trouve déjà dans la pièce 4974.08J. Et on peut

  5   voir que ce serait un doublon que de procéder au versement de ces parties-

  6   là de l'interview.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que c'est déjà une pièce à

  8   conviction que vous êtes en train de mentionner, Maître Zivanovic ? Le 4974

  9   --

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, pour 4974.08F. Il s'agit d'une partie

 11   du 4974.08J. En d'autres termes, la pièce à conviction qui comporte un J

 12   englobe déjà le F.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais c'est déjà une pièce à

 14   conviction ou pas ? C'est déjà versé au dossier comme une pièce à

 15   conviction, non ?

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, ça n'a pas été versé au dossier. Le J,

 17   oui, le J a été versé au dossier.

 18   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Stringer.

 20   M. STRINGER : [interprétation] Le conseil de la Défense a raison. Le 08F,

 21   en partie, se trouve être repris par le 08J, qui vient d'être versé au

 22   dossier. Il y a eu chevauchement dans cette partie-là de l'interview de

 23   l'accusé en qualité de suspect, parce que c'est de la sorte que M. Dzuro

 24   avait organisé sa question. Mais nous avions estimé que M. Hadzic

 25   trouverait peut-être plus clair le fait de voir le 08J être consacré à

 26   l'incident de Klisa, bien que cela comporte d'autres parties encore

 27   pertinentes pour d'autres affaires. Mais nous voudrions faire verser au

 28   dossier, avec tout le respect qui est dû à tout un chacun, les deux


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  1   extraits pour que ceux-là soient liés à l'événement cité au paragraphe 27.

  2   S'agissant de la première objection évoquée par le conseil au sujet de la

  3   pertinence du .09B, nous ne sommes pas d'accord du tout; nous pensons que

  4   la pertinence est très évidente dans cette partie. Parce que M. Dzuro donne

  5   lecture d'un fragment de déclaration de M. Hadzic où l'on reprend le

  6   passage à tabac de l'une des victimes citées à l'avenant de l'Accusation,

  7   et ça se poursuit avec une évocation où l'on dit -- enfin, en d'autres

  8   termes, ce que nous voulons dire, c'est que toute cette partie-là de la

  9   déposition présentée par M. Dzuro à M. Hadzic à l'époque comporte une

 10   grande partie des éléments de preuve qui sont liés à l'évènement en tant

 11   que tel. Et c'est la raison pour laquelle, aux fins de compléter ce qui a

 12   été indiqué à M. Hadzic, l'on devrait consigner ceci, et il s'agirait du

 13   4974.09B.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Zivanovic.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je crois que tout a été englobé par la

 16   pièce à conviction B, qui a déjà été montrée à M. Hadzic à l'occasion du

 17   contre-interrogatoire et qui se trouve déjà versée au dossier, et, de ce

 18   fait, je ne pense pas que ce soit pertinent que de demander un versement à

 19   part de cette partie des éléments de preuve.

 20   S'agissant maintenant de la pièce F, je voudrais dire la chose suivante :

 21   la seule différence entre le F et le J, c'est le fait de voir, dans la

 22   pièce à conviction J, M. Hadzic tenir l'acte d'accusation relatif à M.

 23   Milosevic lorsqu'il répondait aux questions posées par M. Dzuro. Et au F  -

 24   et ça a été élaboré en long et en large au contre-interrogatoire - il

 25   n'avait pas cette partie-là -- eh bien, dans cette partie de la vidéo on ne

 26   le voit pas, M. Hadzic, tenir l'acte d'accusation Milosevic en main

 27   lorsqu'il a répondu aux questions qui lui ont été posées.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Je vais être très bref, Monsieur le


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  1   Président. Pour ce qui est 09B, nous n'avons pas donné lecture de la

  2   totalité à M. Hadzic; nous avons donné lecture des éléments que nous avons

  3   trouvés -- considérés être les plus importants. Et au fur et à mesure que

  4   les choses ont évolué, nous avons estimé qu'il était préférable pour les

  5   Juges de la Chambre d'avoir la totalité des éléments liés à l'événement

  6   pour pouvoir tirer ses conclusions pour ce qui est du fait de savoir dans

  7   quelle mesure M. Hadzic avait été à même de présenter des commentaires à ce

  8   sujet.

  9   S'agissant maintenant de la pièce 4974.08F, il serait peut-être plus facile

 10   si l'on se penchait sur la page 13, une fois affichée sur nos écrans, et

 11   les Juges de la Chambre pourront voir de quoi moi-même et le conseil de la

 12   Défense avons parlé. Parce que le conseil vient de faire une référence à

 13   cet acte d'accusation Milosevic.

 14   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 15   M. STRINGER : [interprétation] En page 13 de la version anglaise --

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Juste un instant, Monsieur Stringer.

 17   [La Chambre de première instance se concerte] 

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, vous ai-je

 19   bien entendu ? N'avez-vous pas dit au tout début de ce long débat que les

 20   deux documents en question, vous souhaitez les verser à des fins de

 21   récusation du témoin ?

 22   M. STRINGER : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Juge. C'était

 23   le fondement même de leur versement au dossier lundi. Le point auquel je

 24   veux en arriver, c'est que nous considérons que les Juges de la Chambre

 25   seront le mieux à même de se faire une image de tout ceci s'ils disposent

 26   des deux documents et si, au sujet de ces incidents, nous voyons ce qu'il a

 27   dit dans son témoignage et ce qu'il a dit en répondant aux questions posées

 28   par M. Dzuro pour tirer des conclusions appropriées; en fait, voir si ce


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  1   que M. Hadzic a dit à ce sujet était vrai ou pas aujourd'hui.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, donc, la réponse

  3   simple et courte était : c'était aux fins de discréditer le témoin, n'est-

  4   ce pas ?

  5   M. STRINGER : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Est-ce que vous voulez ajouter

  7   quelque chose, Maître Zivanovic ?

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Je me propose de

  9   répondre au tout dernier échange et tout dernier propos tenu par M.

 10   Stringer.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, répondez à ce qui a fait l'objet

 12   de sa réponse oui seulement.

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, non. Je ne voulais pas faire de

 14   commentaire.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je voulais présenter un argument pour ce

 17   qui est de la finalité poursuivie en matière de récusation telle que

 18   mentionnée par M. Stringer quand il a parlé de la pièce à conviction B. Il

 19   a dit, en fait, que certaines parties de ce document n'avaient pas été lues

 20   à l'intention de M. Hadzic. Si tant est que cela est pertinent pour une

 21   récusation, je pense qu'il faudrait le montrer au témoin et il faudrait que

 22   cela soit abordé comme sujet auprès de M. Hadzic.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, avez-vous quoi que

 25   ce soit à dire en guise de réponse aux dernières remarques faites par Me

 26   Zivanovic ? Pour ce qui est du fait de savoir si cela avait été montré au

 27   témoin ?

 28   M. STRINGER : [interprétation] On n'a pas donné lecture des sept pages pour

 


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  1   le compte rendu d'audience, Monsieur le Président. Cela est vrai. Nous

  2   avons présenté les parties que nous avions considérées comme étant les plus

  3   importantes. Nous n'avons pas donné lecture de la totalité du texte.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, est-ce que vous

  6   souhaitez que cela soit lu au témoin pendant qu'il est encore assis au

  7   pupitre destiné au témoin ?

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je crois que

  9   l'Accusation a dû le faire à l'occasion de son contre-interrogatoire. S'ils

 10   ne l'ont pas fait, et ils ne l'ont pas fait, à ce moment-là -- alors, on ne

 11   peut tenter de discréditer le témoin que par les éléments qui lui ont été

 12   lus.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, veuillez donner

 15   lecture au témoin des parties qui ne lui ont pas été montrées.

 16   M. STRINGER : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr de me

 17   souvenir exactement des parties que j'ai lues et des parties que je n'ai

 18   pas lues au moment présent, Monsieur le Juge, mais je vais faire de mon

 19   mieux. Je crois que nous devrons passer à huis clos partiel pour cet

 20   exercice, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 23   Messieurs les Juges.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, avant de revenir en

 15   audience publique, j'aurais dû vous demander si cela vous convient.

 16   L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vais poser quelques questions au témoin.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, oui, bien sûr.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]

 21   Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Zivanovic :

 22   Q.  [interprétation] Monsieur Hadzic, question de suivi par rapport aux

 23   questions posées par le Procureur au sujet du député australien, ou de

 24   l'ambassadeur, comme il nous a été présenté, ou plutôt, un consul. Je ne

 25   vais pas lire vos propos et je ne vais pas non plus vous lire les passages

 26   que vous a lus le Procureur non plus, mais veuillez écouter attentivement

 27   la question et la réponse que vous avez donnée hier à mes questions. Vous

 28   trouverez cela à la page 10 780, ligne 24. Alors, veuillez écouter

 


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  1   attentivement, s'il vous plaît, parce que je souhaite que vous répondiez à

  2   mes questions après.

  3   "… alors, il nous faut préciser quelque chose. Je crois que votre réponse,

  4   telle qu'elle est consignée au compte rendu d'audience, eh bien, vous

  5   l'avez déjà dit, à savoir qu'il ne s'agit pas de la visite d'un consul

  6   australien, mais qu'il s'agit en réalité d'un membre du parlement

  7   australien, d'un député. Et donc, lorsqu'on vous a posé la question au

  8   sujet du consul australien, nous n'avons pas de réponse correcte --"

  9   L'INTERPRÈTE : Veuillez ralentir, s'il vous plaît.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] "… donc, nous n'avons pas le contexte dans

 11   lequel vous avez parlé. Cette visite du consul australien, à la lumière de

 12   la question qui vous a été posée, à savoir ceci était-il placé dans le

 13   contexte suivant, Arkan était devenu une star des médias, ou dans le

 14   contexte de votre connaissance de cet homme en tant que criminel ? En

 15   d'autres termes, à l'époque de la visite de ce visiteur australien, de ce

 16   consul ou de ce député australien, à cette époque, aviez-vous appris

 17   qu'Arkan était un criminel, ou est-ce quelque chose que vous n'avez appris

 18   que plus tard ?

 19   "Réponse : Je ne peux pas être très précis, mais je vais vous dire comment

 20   je comprenais la chose. J'ai dit que c'était un sujet très controversé et

 21   que quelqu'un d'Australie était venu lui rendre visite, même si l'Australie

 22   ne fait pas partie de l'Occident. A mes yeux, oui, même si ce n'est pas le

 23   cas. Et donc, j'ai pensé que ce n'était pas un criminel. Je ne disposais

 24   d'aucun document me permettant de corroborer les récits qui circulaient. Il

 25   y avait des journalistes, des journalistes de la presse internationale, et

 26   il y avait des journalistes de la presse prospère, si je puis m'exprimer

 27   ainsi, de la presse internationale. Et il s'est entretenu avec ces

 28   journalistes, et moi, je pensais que si ce que les gens disaient était


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  1   véridique, ces journalistes ne seraient pas en train de lui parler. Je

  2   n'avais rien à voir avec Arkan. J'avais mes propres problèmes à gérer. Et

  3   en 1991, je n'aurais rien pu savoir à son sujet, à savoir si c'était un

  4   criminel ou non, ou plutôt, les actions qu'il menait, et je ne savais pas

  5   qu'il avait été jeté en prison en Occident en raison de ses crimes. Ce que

  6   je veux dire, c'est que s'il purge sa peine, à ce moment-là, après avoir

  7   purgé sa peine, il devient innocent. Et si c'est l'hôte d'un député

  8   australien et s'il est lui-même l'hôte du maire de Belgrade, si on dit que

  9   c'est un colonel des services de Sûreté de la RSFY, eh bien, moi-même, je

 10   ne pouvais pas faire le distinguo entre ce qui correspondait à la vérité et

 11   ce qui ne correspondait pas à la vérité.

 12   "Question : Bien. Alors, lorsque vous avez répondu à la question, quand

 13   avez-vous appris qu'Arkan était un criminel et qu'il était recherché par

 14   Interpol, à votre avis, qu'est-ce que cela signifiait ? Qu'avez-vous

 15   'appris', et qu'entendez-vous par ce terme de 'appris' ?

 16   "Réponse : Alors, dans les médias, pour être plus précis, j'ai lu ceci dans

 17   la presse croate, mais ceci n'était pas forcément exact, car les médias

 18   croates disaient que tout le monde était criminel. Toute personne de

 19   l'autre côté, en fait, de notre côté, était un criminel. Donc, je ne

 20   pouvais pas croire cela.

 21   "Question : Cela signifie-t-il que votre source d'information à ce sujet, à

 22   savoir qu'Arkan était un criminel, est, en réalité, quelque chose dont vous

 23   avez pris connaissance pour la première fois dans les médias croates, et

 24   ensuite vous vous êtes rendu compte du fait que c'était un homme recherché

 25   par Interpol ?

 26   "Réponse : Oui."

 27   Je ne vais pas lire une série de questions posées par le Procureur et les

 28   Juges de la Chambre. Je reprends à la page 10 783, ligne 23 :


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  1   "Question : Je souhaite revenir à la question que je vous ai posée au tout

  2   début. Cela concernait votre réponse lorsque vous avez parlé de la visite

  3   du député australien. Avez-vous évoqué cela dans le contexte suivant, Arkan

  4   était devenu une star des médias, ou parce que vous saviez que c'était un

  5   criminel à l'époque, ou plutôt, que c'était un homme recherché par Interpol

  6   ?

  7   "Réponse : Non, non. Je ne savais pas alors qu'il était recherché par

  8   Interpol en raison de cette visite. Cet ambassadeur, ou plutôt, ce député

  9   est venu lui rendre visite comme s'il s'agissait d'une star des médias, et

 10   cela m'a rendu perplexe. Et lorsque j'ai appris que j'ai appris qu'il

 11   s'agissait d'un criminel, j'ai commencé à me poser la question : Comment un

 12   représentant d'un pays sérieux peut-il venir rendre visite à un criminel ?

 13   Et j'ai dit cela dans ce contexte-là.

 14   "Question : Peut-être que ma question n'était pas claire. Peut-être que

 15   vous m'avez mal compris ou peut-être que cette question n'a pas été

 16   interprétée correctement" --

 17   M. STRINGER : [interprétation] Alors, pardonnez-moi, d'autant que, Monsieur

 18   le Président, je ne vois pas quel est l'intérêt de lire à nouveau la

 19   déposition d'hier de M. Hadzic pour qu'elle soit consignée au compte rendu

 20   d'audience.

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je souhaitais rappeler à M. Hadzic quelle

 22   était la teneur de sa déposition et lui poser une question sur les

 23   questions posées aujourd'hui par le Procureur s'agissant de sa connaissance

 24   d'Arkan, que c'était un criminel et qu'il était recherché par Interpol. Et

 25   je souhaite simplement le lui rappeler et lui rappeler exactement ce qui a

 26   été dit.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je crois, Maître Zivanovic, que M.

 28   Hadzic a une très bonne mémoire, il se souvient de ce qu'il a dit hier.


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  1   Qu'est-ce que vous souhaitez encore lire dans le compte rendu d'audience ?

  2   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je souhaite simplement en terminer avec

  3   cette page, et j'ai encore deux lignes.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] A contrecœur, Maître Zivanovic.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous en prie, regardez l'heure.

  7   Nous n'allons pas vous entendre au cours du volet d'audience suivant.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] D'accord.

  9   "Question : Alors, peut-être que ma question n'était pas claire. Peut-être

 10   que vous m'avez mal compris ou peut-être que la question n'a pas été

 11   interprétée correctement. Et vous dites, et je regarde la ligne 21 que je

 12   suis en train -- et il était recherché par Interpol à cause de cette

 13   visite. Ceci a été interprété. Je ne vous ai pas demandé si c'était un

 14   homme recherché par Interpol en raison de ladite visite, mais à l'époque de

 15   la visite, étiez-vous au courant ?

 16   "Réponse : Je crois que j'ai donné une réponse correcte et que ceci n'a pas

 17   été interprété correctement. J'ai dit au moment de la visite en question

 18   qu'il s'agissait d'un homme recherché par Interpol et j'étais

 19   particulièrement perplexe lorsque j'ai entendu parler de cela. Je pensais

 20   simplement qu'il s'agissait de rumeurs et qu'un homme, un homme sérieux

 21   représentant la communauté internationale, ne viendrait pas rendre visite à

 22   cet homme. Car la Serbie et la Yougoslavie étaient membres d'Interpol, ils

 23   devaient donc arrêter quiconque qui était recherché par Interpol.

 24   "Question : Pouvez-vous nous dire, donc, à quel moment vous -- ou plutôt,

 25   alors, en tenant compte de cette visite de l'ambassadeur croate --

 26   pardonnez-moi, de l'ambassadeur australien ?

 27   "Réponse : Non, ce n'était pas un ambassadeur. C'était un député.

 28   "Question : Bien, alors, député.


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  1   "Réponse : Je ne sais pas. C'était en 1992, je ne peux pas être précis."

  2   Voilà. C'est tout.

  3   Q.  Alors, question de suivi par rapport à une question qui vous a été

  4   posée par le Procureur aujourd'hui. Veuillez nous dire encore une fois ceci

  5   : pendant la visite du député australien, saviez-vous qu'Arkan était un

  6   criminel recherché par Interpol, comme le dit le texte ici ?

  7   R.  Non. A l'époque, je ne savais pas qu'il était recherché par Interpol.

  8   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Hadzic, ceci met un terme à

 10   votre déposition, et maintenant on vous relâche en qualité de témoin.

 11   Nous allons lever l'audience un peu plus tôt -- un instant, s'il vous

 12   plaît.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Avant d'avoir la pause, Monsieur

 15   Stringer, votre demande portant sur le versement au dossier de ces

 16   documents est quelque chose qui est toujours d'actualité. Ces documents

 17   seront versés au dossier et recevront une cote aux fins précitées.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, le document

 19   04974.09B recevra la cote P3243.

 20   Et le document 04974.08F recevra la cote P3244.

 21   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, ces documents

 23   sont-ils sous pli scellé ou non ?

 24   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les deux documents ?

 26   M. STRINGER : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les deux documents sous pli scellé,

 28   s'il vous plaît.

 


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  1   Nous allons avoir -- Maître Zivanovic, oui.

  2   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite informer

  3   les Juges de la Chambre d'une difficulté que nous avons rencontrée pour ce

  4   qui est de l'ordre de comparution des témoins dans la semaine du 8

  5   septembre et du 15 septembre. Je ne sais pas si c'est le moment opportun

  6   d'aborder cette question.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si, si, tout à fait, Maître

  8   Zivanovic. Allez-y.

  9   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons prévu

 10   pour la semaine du 15 septembre, nous avons prévu de citer à la barre DGH-

 11   046, et d'après nous, nous l'entendrons pendant toute la semaine. Mais le

 12   26 août, nous avons été informés que le témoin avait été envoyé pour aller

 13   purger sa peine dans un autre pays. Nous avons tenté de le remplacer par

 14   DGH-009 et nous vous présentons donc cette demande. Le 2 septembre, nous

 15   avons informé la Section chargée des Victimes et des Témoins de cela et

 16   nous avons demandé à ladite section de bien vouloir organiser son voyage à

 17   la date du 10 septembre.

 18   En outre, nous vous présentons une autre demande, s'agissant des

 19   Témoins DGH-099 et DGH-034, que l'on puisse organiser leur voyage pour le 7

 20   ou 8 septembre, et ladite demande a été déposée le 28 août.

 21   Pour ces témoins, nous demandons un sauf-conduit. Et hier, la Section

 22   chargée des Victimes et des Témoins nous a informés que quand bien même

 23   nous obtiendrons le sauf-conduit pour ces trois témoins, ils ne pourront

 24   pas organiser leur venue ici comme cela a été prévu.

 25   Nous avons donc essayé de combler ce fossé, en tout cas s'agissant de

 26   la semaine du 8 septembre. Nous avons deux ou trois témoins que nous

 27   pourrons entendre cette semaine-là, mais nous ne savons pas si nous serons

 28   en mesure d'avoir -- d'entendre des témoins qui n'ont pas demandé à avoir


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  1   un sauf-conduit ou que leur déposition soit entendue par une liaison

  2   satellite.

  3   Je souhaitais simplement en informer les Juges de la Chambre.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Dois-je comprendre que la semaine

  5   prochaine vous avez trois témoins pour lesquels aucune mesure particulière

  6   n'a été demandée, ou n'avez-vous pas de témoins du tout la semaine

  7   prochaine ?

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non. Nous espérons avoir les témoins pour

  9   les semaines prochaines. Nous avons un témoin viva voce. Nous avons un

 10   témoin pour lequel des mesures de protection et un sauf-conduit ont été

 11   accordés par les Juges de la Chambre. Il semblerait qu'un des témoins qui

 12   avaient été prévus pour cette semaine-là sera entendu la semaine prochaine

 13   également.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, si je puis dire, pour la

 15   semaine prochaine, vous êtes couverts; c'est exact ?

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, je l'espère.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Le problème qui se pose c'est pour la

 19   semaine d'après.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Merci.

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, je souhaite simplement

 22   corriger le compte rendu d'audience, car il semblerait que j'ai par erreur

 23   évoqué le Témoin DGH-034. On devrait lire DGH-035.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Ceci me rappelle la demande de l'Accusation concernant les mesures de

 26   protection et une décision qui doit être rendue à cet effet. Cette décision

 27   est une priorité et sera rendue incessamment sous peu.

 28   Pause de 30 minutes maintenant.

 


Page 10889

  1   [Le témoin se retire]

  2   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

  3   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, vous souhaitiez

  5   soulever une autre question.

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] En effet.

  7   Je souhaitais répondre à la demande présentée par le Procureur hier -

  8   -

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais oui, bien sûr.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] -- concernant la divulgation de l'identité

 11   de deux témoins à décharge.

 12   Nous allons communiquer l'identité de DGH-047 à l'Accusation par le

 13   biais d'une notification confidentielle écrite. En ce qui concerne DGH-105,

 14   nous ne sommes pas encore disposés à communiquer son identité et ce, tant

 15   que nous n'aurons pas obtenu l'autorisation des autorités compétentes de la

 16   Serbie d'entendre ce témoin.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 18   Monsieur Stringer.

 19   M. STRINGER : [interprétation] Nous comprenons les arguments de la Défense.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, un instant, s'il

 21   vous plaît.

 22   Monsieur Hadzic, vous avez un problème ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] En effet, je n'entends pas l'interprétation.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, nous allons résoudre le

 25   problème.

 26   Entendez-vous les interprètes à présent ?

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent ne pas entendre M. Hadzic.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, ça y est. Merci.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Entendez-vous, Monsieur Hadzic ? Et

  2   les interprètes entendent-ils M. Hadzic ?

  3   L'INTERPRÈTE : En effet. Il a répondu : Oui, ça va. En anglais.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'entends aussi l'interprétation.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Alors, maintenant, tout

  6   est réglé.

  7   Monsieur Stringer, voulez-vous bien répéter votre intervention.

  8   M. STRINGER : [interprétation] J'allais juste remercier le conseil de la

  9   Défense de la communication de l'identité imminente du Témoin DGH-047.

 10   Pour ce qui est du DGH-105, effectivement, il semblerait que le

 11   conseil est habilité à invoquer l'article 70 où certaines circonstances

 12   semblent l'empêcher de communiquer l'identité de ce témoin-ci. A ce stade,

 13   nous l'acceptons. Si c'est bien le cas. Et nous espérons en tout cas que le

 14   moment de la communication fera l'objet de la décision à venir sur les

 15   mesures de protection. Nous souhaitons simplement disposer du temps

 16   nécessaire pour nous préparer.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous en tiendrons compte, Monsieur

 18   Stringer. Merci.

 19   Le témoin suivant peut être introduit dans le prétoire.

 20   Monsieur Gosnell.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je souhaitais

 22   simplement indiquer pour le compte rendu que nous allons citer Mme Amanda

 23   Celar à la barre.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Et pendant que l'on fait entrer le témoin,

 26   j'aimerais aborder une question d'intendance s'agissant de la déclaration

 27   de ce témoin.

 28   A ce stade, le document qui a été chargé dans le système sous le


Page 10891

  1   numéro 65 ter - je parle ici de la déclaration présentée au titre de

  2   l'article 92 ter - que cette déclaration, donc, contient les annexes à la

  3   déclaration --

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   M. GOSNELL : [interprétation] -- outre la déclaration proprement dite, et

  6   certaines de ces annexes ont été d'ores et déjà versées au dossier, au

  7   moins à titre provisoire, et d'autres pas. Alors, il serait bon de scinder,

  8   me semble-t-il, l'ensemble des annexes d'une part, et la déclaration de

  9   l'autre. Et nous proposons donc que la pièce qui figure dans le système

 10   sous le numéro qui lui a été attribué ne contienne que les 30 pages de la

 11   déclaration et non plus les annexes.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Merci.

 13   Bonjour, Madame le Témoin. Merci d'être venue à La Haye pour prêter

 14   assistance à la Chambre de première instance. Si je ne m'abuse, vous êtes

 15   anglophone, n'est-ce pas ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire, s'il vous

 18   plaît, quel est votre nom et votre date de naissance.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Amanda Celar, et je suis née le 7 mars

 20   1944.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Vous êtes sur le

 22   point de donner lecture de la déclaration solennelle au travers de laquelle

 23   vous vous engagerez à dire la vérité. Je dois vous indiquer que la

 24   déclaration solennelle que vous êtes sur le point de prononcer vous expose

 25   à une peine de faux témoignage au cas où vous présenteriez des informations

 26   ne représentant pas la vérité à la Chambre de première instance. Veuillez

 27   donner lecture de cette déclaration solennelle.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 


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  1   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  2   LE TÉMOIN : AMANDA CELAR [Assermentée]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

  5   asseoir.

  6   Maître Gosnell, c'est vous, je suppose, qui allez interroger le témoin.

  7   M. GOSNELL : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Je vous

  8   remercie.

  9    Interrogatoire principal par M. Gosnell : 

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Celar.

 11   R.  Bonjour.

 12   M. GOSNELL : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on affiche à

 13   l'écran 1D3607.

 14   Q.  Madame Celar, reconnaissez-vous le document que vous voyez à droite de

 15   l'écran qui se trouve devant vous ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce votre signature en bas à droite de la page ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Examinons la page 30.

 20   Est-ce là aussi votre signature ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et vous reconnaissez ces deux pages comme étant la première et la

 23   dernière pages d'une déclaration que vous avez faite ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Passons à la page 26, s'il vous plaît, de ce document.

 26   Au tout début du paragraphe 81, souhaitez-vous apporter une correction ?

 27   R.  Oui. La première phrase doit être modifiée. Il faudrait lire "Il est

 28   important de comprendre," plutôt que "Ils doivent comprendre", "important


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  1   de comprendre l'atmosphère générale et la situation qui régnaient à

  2   l'époque."

  3   Q.  Maintenant que cette rectification a été faite, cette déclaration est-

  4   elle véridique, d'après votre mémoire ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et reflète-t-elle, en substance, ce que vous diriez aujourd'hui si les

  7   mêmes questions vous étaient posées ?

  8   R.  Oui.

  9   M. GOSNELL : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier, à ce

 10   stade, Monsieur le Président, du document 1D3607, et je précise encore, les

 11   30 premières pages de ce document, à l'exclusion donc des annexes qui y

 12   sont rattachées. Mais nous demanderons également le versement au dossier

 13   sous une cote distincte des six documents qui ont été versés à titre

 14   provisoire au dossier par le truchement de la décision de la Chambre de

 15   première instance du 28 août 2014. Et, si nécessaire, je peux donner

 16   lecture des numéros correspondants pour veiller à ce que le compte rendu

 17   d'audience soit tout à fait complet.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame la Greffière, souhaitez-vous

 19   que l'on vous donne lecture de ces numéros ?

 20   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y, Maître Gosnell.

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Les six numéros sont : 1D3365, 1D3366,

 23   1D3367, 1D3368, 1D3608 et 1D3609.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 26   les Juges. Bonjour.

 27   Je suis debout parce que je souhaitais vous faire savoir que nous objectons

 28   au versement du document 1D3608. Je sais que la Chambre de première


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  1   instance a rendu sa décision indiquant que le document présentait une

  2   certaine pertinence et qu'il était pourvu d'une valeur probante. Nous

  3   pensons, toutefois, que la lettre devrait être expurgée afin de ne

  4   converser que les parties dont le témoin fait mention dans sa déclaration.

  5   Nous objectons donc au versement de 1D03608, intercalaire 9. En revanche,

  6   nous ne nous opposerions pas au versement d'une version expurgée qui ne

  7   conserve que les parties évoquées dans la déclaration du témoin.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, pourriez-vous

  9   l'envisager ?

 10   M. GOSNELL : [interprétation] C'est la première fois que j'entends parler

 11   de cette objection, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, doit-on attribuer un numéro

 13   MFI pour l'instant, en attendant qu'un accord soit trouvé entre les parties

 14   ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Sur le principe, je demanderais néanmoins le

 16   versement au dossier de tout ce document puisque la Chambre de première

 17   instance a déjà rendu une décision sur la recevabilité de ce document et

 18   que les parties ont déjà pu présenter les arguments qui étaient les leurs.

 19   S'il y a désormais une objection, eh bien, il faudra se repencher à nouveau

 20   sur la question et la Chambre de première instance pourra éventuellement

 21   rendre une décision demandant modification de la pièce. Mais il me semble

 22   qu'à ce stade la pièce doit être versée en application de la décision

 23   rendue par la Chambre.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] Je comprends tout à fait l'argument, il est

 26   justifié. Toutefois, dans notre réponse 92 ter, nous avions jugé que cette

 27   pièce ne devrait pas être versée. La Chambre a estimé qu'il s'agissait

 28   d'une partie intégrante du document et qu'il était pertinent et qu'il avait


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  1   une valeur probante. Sur la base de cette décision qui a été rendue il y a

  2   peu, nous pensons que l'intégralité du document ne devrait pas être versée,

  3   car c'est une pièce associée qui "vient préciser le récit donné par DG-083

  4   des événements à Osijek et fait des références ouvertes à la lettre, en

  5   tout cas elle le fait dans sa déclaration écrite."

  6   La Chambre de première instance a signalé ce qui était évoqué précisément

  7   dans la déclaration du témoin et que c'était là la base de sa décision

  8   quant à la pertinence et à la valeur probante du document en question. Nous

  9   demandons donc à ce que la version qui soit versée au dossier reflète

 10   exclusivement les parties jugées comme étant intéressantes par la Chambre

 11   de première instance.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, votre objection en

 14   tant que telle est rejetée.

 15   Comme le dit Me Gosnell, vous pourriez par la suite déposer une requête aux

 16   fins de réexamen, mais nous avons rendu notre décision et, par conséquent,

 17   l'objection est rejetée à ce stade.

 18   Les documents ont donc été versés au dossier. Qu'on leur attribue des

 19   cotes.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [hors micro]

 21   L'INTERPRÈTE : Avec un micro, s'il vous plaît. Les interprètes n'entendent

 22   pas la greffière d'audience.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Recommencez.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] M'entendez-vous ? Bien.

 25   Alors, je répète, le document 1D3607 recevra la cote D173.

 26   Et nous demanderons au conseil de la Défense de bien vouloir charger à

 27   nouveau dans le système les 30 pages correspondant à sa demande.

 28   Le document suivant, 1D3365, se voit attribuer la cote D174.173.


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  1   Le document 1D3366 devient la pièce D175.173.

  2   Le document 1D3367 devient la pièce D176.173.

  3   Le document 1D3368 devient la pièce D177.173.

  4   Le document 1D3608 devient la pièce D178.173.

  5   Et le document 1D3609 deviendra la pièce D179.173.

  6   Je vous remercie.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je dispose d'un

  9   exemplaire de la déclaration du témoin qui vient d'être versée au dossier.

 10   Puisque je vais faire référence à un certain nombre de documents pendant

 11   mon interrogatoire, je propose que l'on affiche un certain nombre de

 12   documents. Puisque sa déclaration ne figurera plus, en conséquence, à

 13   l'écran, je propose qu'on lui remette une copie papier de sa déclaration,

 14   puisque je lui demanderai de bien vouloir y faire référence. Et je dispose

 15   également d'exemplaires de cette déclaration à votre intention.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, effectivement, si

 17   vous avez ces exemplaires à portée de main, eh bien, ils seront toujours

 18   utiles.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Examinons la page 18, s'il vous plaît, du

 20   document.

 21   Q.  Votre déclaration, donc, Madame Celar.

 22   Trois lignes à partir du haut, la suite du paragraphe 52, vous dites :

 23   "J'ai parlé à nombre de ces réfugiés puisque j'ai participé à la

 24   distribution de l'aide humanitaire en Baranja."

 25   Et pour resituer les choses dans leur contexte, nous parlons ici de la

 26   période qui a suivi janvier 1992.

 27   R.  [hors micro]

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos activités quotidiennes en


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  1   1992, activités ayant trait à l'aide humanitaire. Que faisiez-vous

  2   exactement ?

  3   R.  [hors micro]

  4   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'entendent pas le témoin.

  5   [problème technique]

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Madame

  7   Celar, nous avons un problème de micro.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre réponse,

 10   s'il vous plaît.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Parfois, pas tous les jours mais parfois, nous

 12   allions voir des amis ou des personnes que nous connaissions pour voir

 13   s'ils pouvaient se défaire de certains objets tels que des tasses, des

 14   assiettes, des couteaux ou des fourchettes, de façon à ce que chaque

 15   nouveau réfugié puisse recevoir certains articles essentiels à leur vie

 16   quotidienne qu'ils n'avaient pas avec eux. Nous allions également à leur

 17   rencontre avec un café parfois; tout simplement, nous n'avions pas grand-

 18   chose à leur donner. Parfois, nous essayions de leur donner de la farine.

 19   C'était au tout début, la Croix-Rouge n'était pas très bien organisée en

 20   termes d'approvisionnements et de fourniture de vivres. Nous rassemblions

 21   et nous leur donnions tout ce que nous pouvions trouver, donc.

 22   M. GOSNELL : [interprétation]

 23   Q.  Et en 1992, depuis combien de temps aviez-vous vécu déjà en Croatie ?

 24   R.  A Osijek, voulez-vous dire, ou en Baranja ?

 25   Q.  En Croatie en général.

 26   R.  Je vivais en Croatie depuis 1987.

 27   Q.  Et vous êtes anglophone, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Quel était votre niveau de maîtrise ou d'absence de maîtrise du serbe

  2   en janvier 1992 ?

  3   R.  Eh bien, je dirais que mon niveau de serbe était raisonnable. Je

  4   comprenais des conversations simples. Et parfois certaines personnes

  5   s'exprimaient en anglais, donc nous mélangions les deux.

  6   Q.  Bien, vous avez anticipé sur la question que j'allais vous poser.

  7   Comment communiquiez-vous avec les réfugiés que vous aidiez ? Utilisiez-

  8   vous de manière générale le serbe, ou parlaient-ils anglais, ou disposiez-

  9   vous de traducteurs ?

 10   R.  Je ne peux pas vous répondre précisément parce que je n'en ai plus

 11   tellement le souvenir, mais c'était un mélange. Parfois, je les comprenais.

 12   Je comprenais les gens en détresse, c'est certain. Généralement, j'étais

 13   accompagnée de quelqu'un qui parlait, et l'anglais, et le serbe, car

 14   j'avais des amis proches qui parlaient les deux. Parfois on me traduisait

 15   ce que les gens disaient, parfois je n'en avais pas besoin.

 16   Q.  Et à quelle fréquence aviez-vous des contacts avec des réfugiés, disons

 17   au cours de l'année 1992 dans l'ensemble ?

 18   R.  J'avais des contacts très fréquents. Au début de l'année 1992, avant

 19   l'attaque, c'était au quotidien que je leur parlais. Et par la suite sans

 20   doute moins, mais je les voyais fréquemment car nous sommes devenus amis

 21   proches avec un grand nombre d'entre eux, mais ceux qui étaient à Beli

 22   Manastir, pas ceux des villages environnants.

 23   Q.  Et lorsque vous parlez d'attaques, de quelles attaques s'agit-il ? Au

 24   cours de quelle période ?

 25   R.  Je parle notamment du 3 avril.

 26   Q.  Examinons maintenant le paragraphe 53 de votre déclaration. Vous y

 27   dites que : "La plupart des réfugiés vous avaient dit qu'ils étaient venus

 28   d'autres parties de la Croatie, plus précisément des zones adjacentes à la


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  1   Baranja, au secteur de Knin, la Slavonie occidentale, et le secteur de

  2   Vukovar… les réfugiés présents à Baranja de Knin et de Slavonie occidentale

  3   devaient avoir traversé la Bosnie et la Serbie."

  4   R.  Oui.

  5   Q.  J'aimerais vous demander une précision sur ce passage. Les réfugiés

  6   vous ont-ils expliqué s'ils étaient venus directement de Knin ou de

  7   Slavonie occidentale, ou s'ils s'étaient arrêtés et s'ils avaient séjourné

  8   pendant un certain temps en Serbie avant d'arriver en Baranja ?

  9   R.  Non, je me souviens pas avoir eu une quelconque conversation à ce

 10   sujet. Je n'en ai en tout cas pas le souvenir.

 11   Q.  L'un ou l'autre de ces réfugiés a-t-il dit s'il s'était arrêté pour

 12   quelque durée que ce soit en Serbie avant d'arriver en Baranja ?

 13   R.  Non. Mon impression était que puisqu'ils arrivaient tout à fait

 14   démunis, avec quelques sacs mais sans plus, je suppose qu'ils sont arrivés

 15   directement, mais je ne peux pas le dire avec certitude.

 16   Q.  Et les réfugiés vous ont-ils dit combien de temps ils envisageaient de

 17   rester en Baranja ?

 18   R.  Non. Généralement, j'ai eu le sentiment qu'ils étaient heureux de se

 19   retrouver en lieu sûr, mais ils étaient sous le choc. Il était difficile

 20   d'avoir une conversation normale au début. Ce n'est que plus tard, après un

 21   certain temps passé sur place, qu'ils étaient prêts à parler de l'endroit

 22   où ils souhaitaient se rendre, s'ils voulaient se rendre quelque part.

 23   Q.  Et où voulaient-ils aller ?

 24   R.  Ils voulaient rentrer chez eux.

 25   Q.  Et chez eux, pour eux, c'étaient bien les lieux d'où ils étaient

 26   arrivés, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Poursuivons en examinant le paragraphe 53 toujours, où il est dit :


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  1   "Leur souhait de venir en Baranja et non en Serbie pouvait être la

  2   conséquence de liens familiaux ou le souhait de demeurer le plus près

  3   possible des endroits qu'ils avaient fuis. Ils étaient de Croatie, après

  4   tout, et il aurait été normal de vouloir rester en Croatie - comme Ilija et

  5   moi-même l'avons fait."

  6   Et ensuite, au paragraphe 55, toujours sur le même point : "Je n'ai jamais

  7   ouï dire que ces réfugiés ont été mis à bord de bus en tant que partie

  8   intégrante d'une politique de déplacement de Croates."

  9   Alors, il semblerait qu'au paragraphe 55, pages 18 à 19, vous avez dit que

 10   : "Certains réfugiés étaient venus pour un mois ou deux et qu'ils

 11   quitteraient dès qu'ils pourraient trouver où aller en Serbie."

 12   Alors, d'après vous, où ces gens-là pouvaient-ils "trouver à être reçus en

 13   Serbie" ?

 14   R.  Non, ils ne voulaient pas partir vers un camp de réfugiés en Serbie.

 15   Ils essayaient de trouver du travail quelque part en cherchant à être logés

 16   quelque part ou alors être reçus chez des membres de leur famille qui

 17   étaient à même de les recevoir. Mais la situation en Serbie était très

 18   difficile du fait, je pense, de l'embargo qui avait rendu la situation

 19   économique plutôt désastreuse. Et c'est ce qu'ils étaient en train de

 20   rechercher, un endroit où ils pourraient rester à titre permanent. Je ne

 21   pense pas que la Baranja, de leur point de vue, ait été un endroit où ils

 22   pourraient rester de façon permanente parce que le climat était terrible.

 23   Enfin, l'ambiance était terrible.

 24   Q.  Mais est-ce que vous avez estimé qu'ils étaient les bienvenus en Serbie

 25   ?

 26   R.  Non, ils ne se sont pas sentis comme étant des bienvenus en Serbie.

 27   Q.  Est-ce qu'on vous a parlé des campements ? Ou est-ce qu'on vous a

 28   décrit les conditions qui prévalaient dans ce type de camps que vous avez


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  1   mentionnés tout à l'heure ?

  2   R.  Non. J'ai juste entendu parler qu'il y avait en Serbie des camps de

  3   dressés à l'intention des personnes déplacées et que ce n'était pas très

  4   confortable. Mais je n'en savais rien du tout, exception faite des rumeurs

  5   dont j'ai eu vent.

  6   Q.  Donc, votre impression était celle-ci : les réfugiés qui parlaient de

  7   ces camps avaient considéré que les conditions y étaient moins favorables

  8   que ce qu'ils avaient trouvé dans la Baranja ?

  9   R.  Oui.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce P2400,

 11   qui est la pièce de la Défense se trouvant à l'onglet numéro 16.

 12   Q.  Madame Celar, à plusieurs endroits de votre déclaration vous parlez de

 13   médias partiaux qui avaient rapporté ce qui s'était passé en Croatie. En

 14   particulier, vous avez parlé --

 15   R.  Oui.

 16   Q.  -- en particulier lorsque vous avez parlé des sources occidentales.

 17   Alors, j'aimerais que nous nous penchions avec vous sur un exemple de

 18   médias occidentaux rapportant des événements dans la Baranja, en

 19   particulier --

 20   R.  Excusez-moi, mais je n'arrive pas à lire. C'est très éloigné de moi.

 21   Est-ce qu'on peut zoomer ?

 22   M. GOSNELL : [interprétation] Est-ce qu'on peut zoomer la version en

 23   anglais, je vous prie.

 24   Q.  Est-ce que ça va mieux maintenant ?

 25   R.  Oui. Merci.

 26   Q.  Je voudrais que nous parcourions certaines parties de cet article. Ça

 27   vient du journal "Independent". La date est celle du 27 septembre 1992.

 28   D'abord, dites-nous si vous vous trouviez dans la Baranja à ce moment-là ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Paragraphe 2, cela semble faire référence à une conversation avec

  3   Borivoje Zivanovic, au sujet de qui on dit que c'est le maire autoproclamé

  4   de Beli Manastir, et d'après ce qu'il semble dire ici, "il prévoirait un

  5   règne de 1 000 an de la part des Serbes dans la Baranja pour créer quelque

  6   chose qui ressemblerait à un Etat hermétiquement fermé face à ces regards

  7   impuissants des gardiens de la paix des Nations Unies."

  8   Alors, en haut de la page 3, paragraphe 1, on dit : "Les Serbes importés ne

  9   sont pas autorisés à quitter la Baranja, pas même à des fins de visite de

 10   Serbie, pour ne pas s'évader. Il n'y a que les Croates et les Hongrois qui

 11   sont autorisés à sortir de cette enclave."

 12   Alors, dites-nous d'abord si les Serbes n'avaient pas l'autorisation de

 13   quitter la Baranja ?

 14   R.  Ce n'est absolument pas vrai.

 15   Q.  Alors, quelle était la procédure pour s'en aller si vous étiez Serbe ?

 16   R.  Je crois que la même procédure était valable pour tout un chacun, moi

 17   comprise. Il fallait aller à l'opstina, c'est-à-dire au siège de la

 18   municipalité, pour obtenir un document relatif au départ. On mettrait un

 19   cachet. Je montrais cela à Batina et je pouvais m'en aller. Au retour, il

 20   fallait se réenregistrer au niveau du siège de la municipalité, et on

 21   mettait un nouveau cachet sur mes pièces d'identité pour que je puisse y

 22   rester. Mais tout le monde était censé le faire.

 23   Q.  Et ces permissions avaient-elles été accordées, d'habitude --

 24   R.  Oui.

 25   Q.  -- dans la pratique usuelle ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Je voudrais que nous revenions à la page 1, je vous prie. On fait

 28   référence ici à une formulation au terme de laquelle il prévoirait un Reich


Page 10904

  1   millénaire serbe dans la Baranja. Est-ce que vous pensez que M. Zivanovic

  2   aurait utilisé ce type de formulation ?

  3   R.  Je ne pense pas du tout.

  4   Q.  Et pourquoi pas ?

  5   R.  Mais parce que ce n'était pas ce type de personne. C'est quelqu'un que

  6   je connaissais, et je le connaissais, il essayait de rétablir l'ordre et

  7   une vie normale pour les gens de Beli Manastir. En fait, je ne me trouvais

  8   à l'époque qu'à Beli Manastir, je n'en sais pas long au sujet des villages.

  9   Q.  Quand on parle d'un "Reich", est-ce que c'est une chose normalement

 10   utilisée dans le langage des Serbes --

 11   R.  … je ne pense pas qu'il ait jamais dit chose pareille.

 12   Q.  Si on se penche maintenant sur le paragraphe 4 de cette page, on dit

 13   que : "Plus de 50 Hongrois et Croates avaient été tués au fil des quelques

 14   semaines écoulées."

 15   Alors, le document est daté du 27 septembre. Je voudrais vous demander si

 16   vous avez ouï dire qu'il y avait eu des meurtres en quantité telle. Parce

 17   qu'on parle de 50 Hongrois et Croates. Est-ce qu'il y a eu des exécutions à

 18   cette échelle-là à l'époque ?

 19   R.  Je n'ai rien entendu dire de ce genre.

 20   Et je dirais que M. Zivanovic avait utilisé les services de mon époux en

 21   tant qu'interprète, parce qu'il était l'un des rares à pouvoir parler le

 22   serbe et l'anglais, et il a toujours traduit les propos à son intention.

 23   Donc, quand on revient vers les conversations avec M. Zivanovic, je suis

 24   certaine du fait qu'il aurait convié mon mari à des fins d'interprétation

 25   parce que nous n'avions pas de reporters à l'époque. Il n'y avait qu'un

 26   reporter qui était venu à l'époque.

 27   Q.  Et l'article enchaîne pour dire que : "Presque chaque église croate

 28   avait été plastiquée dans la région."


Page 10905

  1   Est-ce vrai, d'après vous ?

  2   R.  Non, ce n'est pas vrai. Jack Klein a été présent lors d'une messe au

  3   village de Suza et dans d'autres villages hongrois vers la fin de 1994 et

  4   en 1995. D'autres membres des effectifs des Nations Unies ont été présents.

  5   C'étaient des services au niveau de l'Eglise calviniste ou catholique. Ce

  6   n'étaient pas des églises serbes, et les messes se sont tenues à l'époque

  7   où il y avait des prêtres catholiques ou calvinistes, et mon époux se

  8   trouvait là-bas et il a fait office de traducteur à cette occasion. Il y a

  9   deux églises qui ont été, non pas plastiquées, mais incendiées. Il y en a

 10   une qui se trouvait à Celinac, et l'autre à Beli Manastir. Surtout celle de

 11   Beli Manastir. Quand celle-ci a été mise à feu, il y a eu des alarmes qui

 12   se sont mises en marche et tout le monde est sorti, y compris mon mari. Il

 13   a réussi à en sortir la Bible et les vêtements de cérémonie du prêtre et

 14   autres objets qui se trouvaient au niveau de l'autel, et il a tout rapporté

 15   à la maison. Et bien que je sois Protestante et non pas Catholique, j'ai

 16   gardé cela jusqu'en 1996, jusqu'au moment où nous avons quitté cet endroit,

 17   et j'ai remis le tout à une famille Rakajic [phon], afin qu'ils restituent

 18   tous ces bien à l'église.

 19   Q.  Dans ce document ou dans cet article, il est dit qu'il n'y avait aucune

 20   tolérance à l'égard des prêtres catholiques.

 21   Est-ce vrai ?

 22   R.  Non. Ils sont partis. Et les prêtres serbes sont tous venus de Croatie.

 23   Pour autant que je le sache, les prêtres catholiques sont retournés. Mais

 24   personne n'a jamais dit qu'on ne tolèrerait pas leur présence. De fait,

 25   quand mon père est décédé en juin 1991, je suis allée chez un prêtre

 26   catholique à Celinac pour lui demander si je pouvais lui parler de la mort

 27   de mon père, mais il ne m'a pas conviée à entrer, alors j'ai fini par me

 28   rendre chez un prêtre orthodoxe. Parce que j'avais ressenti la nécessité de


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  1   m'entretenir avec un prêtre à ce moment-là. Je parle du mois de juin 1991,

  2   c'est là que mon père est décédé.

  3   Q.  Je voudrais vous renvoyer vers la page 2 de cet article, paragraphe 3,

  4   qui se trouve vers le milieu de la page. Ici, on attribue une citation à

  5   quelqu'un qui s'appellerait Blandina Negga : "Mme Negga a décrit le niveau

  6   de la terreur dans les zones UN qui est très élevée, il paraît, et elle a

  7   dit que 99 % des victimes étaient des non-Serbes."

  8   Alors, je ne sais pas ce qu'elle entendait par "terrorisation" [phon], mais

  9   est-il vrai de dire que 90 % [comme interprété] des victimes des crimes

 10   étaient des non-Serbes ?

 11   R.  Non, je crois qu'on se sert d'un terme erroné. Il y a eu un haut niveau

 12   de criminalité, oui. J'ai été victime moi aussi. On m'a dépossédée de mon

 13   appareil photo, qui se trouvait dans un atelier de réparation. Il y a eu un

 14   cambriolage et on a tout emporté. Mais à un niveau moindre, lorsque les

 15   femmes étaient seules la nuit, et les maris étaient sur les lignes de

 16   front, nous fermions à clé, et une fois, on m'a volé tout mon bétail. Mais

 17   c'est arrivé à d'autres personnes aussi que de se faire voler le bétail.

 18   Q.  Dans l'article, "Mme Negga établit un lien entre cette croissance de la

 19   terreur avec l'arrivée de milliers de réfugiés serbes de Bosnie et d'autres

 20   parties de la Croatie en général dans le courant de la nuit à bord

 21   d'autocars. Et l'importation des Serbes de Bosnie à la demande des

 22   autorités serbes était," d'après elle, "une chose que les Nations Unies ne

 23   pouvaient pas faire cesser."

 24   Alors, avez-vous connaissance du fait que l'un quelconque des réfugiés avec

 25   qui vous avez eu des contacts auraient été des Serbes de Bosnie plutôt que

 26   d'autres parties de la Croatie ?

 27   R.  Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui m'aurait dit être un réfugié de

 28   Bosnie. Les seuls autocars dont j'ai eu à connaître, c'étaient des autocars


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  1   qui amenaient des femmes et des enfants de la région de Baranja. Ça se

  2   passe au mois de mai 1991. Ils ont pris tous ces femmes et enfants qui

  3   voulaient être évacués vers la Serbie et ils les ont emmenés à Prigrevica,

  4   me semble-t-il. Et après septembre 1991, une fois que l'on a rétabli

  5   l'ordre, on les a ramenés. Ils étaient des centaines et centaines, ces

  6   femmes et enfants qui ont été ramenés, mais c'étaient des gens qui vivaient

  7   là-bas et qui rentraient chez eux parce que les combats avaient cessé.

  8   Q.  Et ces autocars venaient-ils dans la Baranja pendant la nuit ?

  9   R.  Personne ne pouvait venir dans la Baranja pendant la nuit parce qu'on

 10   avait fermé le pont. Il y avait un couvre-feu. C'était extrêmement

 11   dangereux de se déplacer du pont de Batina par Knezevi Vinogradi en

 12   direction de Beli Manastir. Et une fois lorsque j'ai été à bord d'un

 13   véhicule des Nations Unies, à son bord, on m'a dit de me coucher sur le

 14   siège arrière, et on était dans l'après-midi, en raison des tireurs

 15   embusqués le long de la route. C'était dangereux. Et la nuit, l'obscurité

 16   était totale. Personne ne sortait. C'était très calme, comme vous pouvez

 17   l'imaginer.

 18   Q.  Mais pourquoi les gens ne sortaient-ils pas ?

 19   R.  Ils avaient peur. Il y a eu des incursions. Il y a eu de la peur qui

 20   s'était instillée parce que les hommes étaient absents la nuit. Ils étaient

 21   sur les lignes de front. Les femmes restaient chez elles, et elles avaient

 22   peur de sortir de chez elles. Et même les vieillards avaient organisé des

 23   sortes de petits groupes qui sortaient pour assurer la garde des

 24   installations de l'approvisionnement en eau à côté des champs où on vivait

 25   pour les protéger. Et le soir, on pouvait entendre des pilonnages

 26   commencer. Et s'il n'y avait pas de pilonnages, on restait à l'intérieur et

 27   on ouvrait les fenêtres pour pouvoir nous entretenir d'une rue à l'autre ou

 28   d'une fenêtre à l'autre. Et s'il y avait des pilonnages, on courait vers le


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  1   sous-sol -- et si on n'avait pas de sous-sol, on allait dans le sous-sol du

  2   voisin.

  3   M. GOSNELL : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce

  4   1D3367, intercalaire de la Défense numéro 6.

  5   Q.  Afin que nous puissions nous y retrouver au niveau de votre

  6   déclaration, vous avez décrit l'arrivée de la FORPRONU à compter du

  7   paragraphe 70 et au-delà. Et j'aimerais attirer votre attention sur le

  8   paragraphe 74, qui se trouve être pertinent pour ce qui est du document que

  9   nous abordons. Il s'agit ici d'un télégramme codé envoyé par Goulding à

 10   Nambiar le 23 mars 1992. Et on peut y lire :

 11   "Veuillez trouver ci-joint un télégramme reçu par le QG de la part de Mme

 12   Amanda Brook, une Anglaise qui a épousé un Serbe et résidant à Beli

 13   Manastir et qui nous a déjà écrit de par le passé. Alors, je voudrais vous

 14   demander si ceci coïncide avec les informations que vous avez obtenues

 15   vous-même pour ce qui est des violations du cessez-le-feu dans la région."

 16   Et avant que de se pencher sur la teneur de ce courrier, je voudrais vous

 17   demander si vous savez nous dire à quoi se rapporte cette partie du

 18   courrier où on dit que vous leur avez déjà écrit ?

 19   R.  Je n'ai pas de souvenir personnel pour ce qui est d'avoir eu des

 20   échanges de courrier avec eux. Je suppose que cela provient de certains

 21   rapports que j'avais envoyés à une organisation qui s'appelle Ian Greer à

 22   Londres. Mais je n'ai pas de souvenir pour ce qui est d'échanges que

 23   j'aurais eus avec les Nations Unies avant ce moment-là.

 24   Q.  J'aimerais que vous vous penchiez sur la page 2, je vous prie.

 25   Madame Celar, je ne vais pas essayer de donner lecture du texte verbatim,

 26   parce qu'il y a pas mal d'erreurs de frappe, mais je crois que tout un

 27   chacun comprendra sans que l'on ait à en donner lecture à voix haute.

 28   Ce que je vais vous demander, c'est de nous dire quelles sont les


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  1   circonstances qui vous ont amenée à envoyer ce télégramme.

  2   R.  A l'époque, il y avait eu une très grande peur qui s'était installée

  3   partout parce que les pilonnages s'étaient intensifiés dans la ville, et

  4   mon époux, parmi d'autres qui avaient patrouillé le long des rives de la

  5   Drava, il est rentré pour nous dire qu'il y avait des effectifs croates qui

  6   s'amassaient là-bas en grands nombres et qu'il y avait pas mal de canots

  7   avec lesquels ils s'apprêtaient à traverser la Drava. Et on s'attendait à

  8   une attaque complète, totale. Il y a eu jusque-là des incursions

  9   d'importance moindre où certains soldats sur la ligne de front ont été

 10   tués. Et il m'a dit, Je te prie d'essayer de faire quelque chose. Ils

 11   s'attendaient à ce que soit mis en œuvre quelque chose de prévu par les

 12   Nations Unies. Je ne me souviens plus de la référence, je crois que c'était

 13   le 743. Mais on s'était dit que s'il y avait mise en œuvre de cela par les

 14   Nations Unies, les effectifs des Nations Unies pourraient se déplacer pour

 15   ne plus être derrière les barricades de Beli Manastir. Et nous avions très

 16   peur, nous autres, qu'il y ait une très grande attaque.

 17   Q.  Alors, ces forces des Nations Unies auxquelles vous faites référence,

 18   tout à l'heure vous avez implicitement répondu à ma question, mais vous

 19   venez de nous dire qu'il y avait déjà des effectifs des Nations Unies de

 20   présents ?

 21   R.  Oui. Pour autant que je m'en souvienne, ils se trouvaient là-bas depuis

 22   le 16 août, mais personne ne savait au juste ce qu'ils étaient en train de

 23   faire là-bas. Je crois qu'ils ont pris en charge une caserne de l'armée

 24   yougoslave et ils ont édifié pas mal d'obstacles avec des sacs de sable. Il

 25   y avait pas mal de bâtiments, c'était un complexe de bâtiments, et ils

 26   étaient là, assis, là-bas. Les gens ont commencé à les regarder d'abord

 27   avec curiosité, puis on les a ignorés, et personne ne savait ce qu'ils

 28   faisaient là-bas. Nous supposions qu'ils attendaient là-bas à ce que leur


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  1   mandat entre en vigueur, et la population avait eu des suspicions et avait

  2   pensé qu'ils étaient à attendre que les Croates lancent une attaque. Parce

  3   qu'il était évident pour tout un chacun qu'on s'attendait à ce que quelque

  4   chose se passe, et ils étaient là à attendre pour voir si les Croates

  5   allaient réussir dans leur entreprise avant que d'intervenir. C'était le

  6   point de vue qui était fermement répandu au niveau des gens avec qui je me

  7   suis entretenue.

  8   Q.  Mais est-ce qu'il y avait eu un centre d'entraînement destiné au

  9   dressage de chiens, auquel vous auriez fait référence, non loin de votre

 10   maison ?

 11   R.  C'était peut-être à 2 kilomètres. C'était à l'entrée de Beli Manastir.

 12   Je ne suis pas très forte en matière de distances. Disons que c'était peut-

 13   être à 2 kilomètres.

 14   Q.  Est-ce qu'on peut essayer de déterminer dans le temps, de façon plus

 15   précise, combien de temps avant votre envoi de ce télégramme y a-t-il eu

 16   présence des Nations Unies là-bas ?

 17   R.  Oui. Je vous ai dit que ces gens étaient là-bas --

 18   Q.  Oui, Madame, je sais qu'ils étaient là, mais pouvez-vous nous dire

 19   depuis combien de temps se trouvaient-ils là-bas avant que vous n'envoyiez

 20   votre télégramme ?

 21   R.  Ils étaient là-bas à compter du 16 --

 22   Q.  Vous voulez parler du 16 mars ?

 23   R.  Oui. C'est là qu'on les a remarqués, nous autres. Je ne sais pas s'il y

 24   en avait eu à venir avant pour organiser leur arrivée.

 25   Q.  Mais plutôt que d'avoir envoyé ce télégramme, pourquoi n'êtes-vous pas

 26   tout simplement allée jusqu'à leur base pour leur dire ?

 27   R.  Eh bien, je ne pensais pas -- enfin, nous avions, en fait, conclu de

 28   l'absence de support et nous avions le sentiment qu'ils étaient plutôt du


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  1   côté des Croates et que nous ne les intéressions pas. Mais c'était

  2   l'impression que s'étaient faites toutes les personnes qui étaient là-bas,

  3   attendre de voir ce qui allait se passer.

  4   Q.  Au paragraphe 76 de votre déclaration, vous décrivez une réunion avec

  5   certains représentants du Bataillon belge, qui apparemment, d'après vous,

  6   avaient été envoyés en guise de réponse à ce télégramme que vous aviez

  7   envoyé. Et vous indiquez : "Je leur ai dit que la seule façon d'ignorer les

  8   combats était celle de ne pas organiser de patrouilles du tout."

  9   Alors, ce n'est pas mentionné dans vos déclarations, mais j'aimerais que

 10   vous nous indiquiez si l'un quelconque des membres de ce groupe, M.

 11   Malherbe ou quelqu'un d'autre, vous aurait dit qu'ils allaient organiser

 12   des patrouilles en réponse à votre plainte ?

 13   R.  Ecoutez, la conversation s'est passée à peu près comme ceci. Il a

 14   demandé, Pourquoi avez-vous envoyé ce télégramme ? Et j'ai dit, Parce que

 15   tout le monde redoutait une attaque imminente et il y a des incursions qui

 16   se produisent déjà. Et puis, il a dit alors, Nous n'avons aucune incursion

 17   ou combat de consigné. Alors, je leur ai dit, Vous n'en avez pas parce que

 18   vous n'êtes pas présents sur la ligne de front et vous ne vérifiez pas ce

 19   qui s'y passe. Vous ne pouvez rien voir si vous êtes recroquevillés dans

 20   vos bunkers à Beli Manastir. Et alors, il a expliqué que leur mandant ne

 21   disait pas qu'il fallait qu'ils patrouillent. Ils n'avaient pas

 22   l'autorisation de patrouiller. Alors, je leur ai dit, Si vous n'allez pas

 23   patrouiller, vous n'allez certainement pas voir de combats. Vous ne faites

 24   rien du tout à proximité de la Drava et de la ville.

 25   Q.  Au paragraphe 78 [comme interprété] de votre déclaration, et j'imagine

 26   que maintenant on pourra voir ceci d'affiché sur les écrans. Je précise

 27   qu'il s'agit de la pièce 1D173, page 24. Vous décrivez là une attaque

 28   d'infanterie qui s'est produite le 3 avril 1992, et vous dites :


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  1   "L'infanterie a traversé la Drava, et les chars ont traversé la frontière

  2   hongroise dans le secteur de l'attaque." Alors, savez-vous me dire si les

  3   effectifs des Nations Unies qui se trouvaient là-bas auraient fait quoi que

  4   ce soit en réponse à cette attaque ?

  5   R.  Non. Non. Nous -- enfin, on nous a contactés vers 4 heures de l'après-

  6   midi pour regarder et voir des camions revenir de la ligne de front et

  7   aller voir si c'était l'époux ou le fils de quelqu'un, parce qu'ils étaient

  8   en train de transporter des blessés pour les ramener, et c'était quelque

  9   chose en corrélation avec les effectifs serbes. Je n'ai pas vu de membres

 10   de FORPRONU.

 11   Q.  Et avez-vous ouï dire qu'ils auraient entrepris quelque chose en

 12   réponse --

 13   R.  Non.

 14   Q.  Avez-vous appris quelle était l'appartenance ethnique de ceux qui

 15   travaillaient pour les forces des Nations Unies basées à Beli Manastir ?

 16   R.  Les gens qui travaillaient dans le complexe du Bataillon belge étaient

 17   tous des Croates venus de Croatie. La plupart des Serbes qui avaient

 18   travaillé comme interprètes et comme personnel, y compris mon mari, une

 19   fois que le mandat a été mis en œuvre, avaient travaillé pour la CIVPOL, la

 20   police civile, en guise de traducteurs et de personnel. Mais c'était la

 21   CIVPOL, la police civile, et non pas le Bataillon belge.

 22   Q.  Penchons-nous sur le milieu du paragraphe 77, où vous décrivez une

 23   rencontre avec des officiers belges qui faisaient partie du Bataillon belge

 24   et un commandant de la JNA dans le secteur, un dénommé Krstic. Et vous

 25   dites ici que M. Malherbe a dit : "Vous ne comprenez pas, Amanda, ces

 26   personnes ne sont pas civilisées comme nous. Ils ne se comportent pas comme

 27   nous."

 28   Veuillez nous dire, s'il vous plaît, à des fins de précision ce que vous


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  1   entendiez par là, lorsqu'il parlait de "ces personnes" ? A qui faisait-il

  2   référence ?

  3   R.  Il parlait des Serbes qui se trouvaient dans le secteur où ils

  4   intervenaient. L'impression que j'ai eue c'était un petit peu comme si

  5   c'étaient des coloniaux qui devaient traiter avec la population locale. On

  6   était méprisant à leur égard. Et je me suis mise en colère et j'ai dit que

  7   j'étais scandalisé, et je lui ai même dit, Je suis surprise que l'on puisse

  8   nommer quelqu'un comme vous, et vous ne savez pas que la culture serbe est

  9   une culture très ancienne. Et de façon un peu infantile, je lui ai répondu,

 10   Alors que la Belgique n'existe que depuis 200 ans, comment pouvez-vous

 11   faire un tel commentaire ? C'est pure ignorance. J'étais en colère parce

 12   qu'il supposait que personne d'autre ne comprenait l'anglais dans la pièce

 13   alors que cela n'était pas vrai, même si ces personnes n'ont pas décidé de

 14   parler anglais. Moi, j'étais gênée que l'on puisse entendre ce type de

 15   conversation.

 16   Q.  Et comment pourriez-vous caractériser de façon générale les relations

 17   entre le BelBat, le Bataillon belge, et la population locale de Beli

 18   Manastir ?

 19   R.  Alors, ces relations étaient mauvaises. Elles n'étaient pas amicales.

 20   Je n'ai pas entendu parler de personnes -- j'ai entendu des personnes qui

 21   se sentaient insultées. Ils avaient tendance à fanfaronner. C'était

 22   d'autant plus facile à remarquer que le Bataillon pakistanais et plus tard

 23   à CIVPOL s'entendait bien avec la population et ils avaient des relations

 24   amicales.

 25   Q.  Savez-vous si la population locale avait un sentiment à l'égard du

 26   Bataillon belge et si elle souhaitait que ce contingent soit remplacé par

 27   une autre nationalité ?

 28   R.  Oui. Ils pensaient que le Bataillon belge était du côté des Croates.

 


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  1   C'était l'impression qu'avait la population locale.

  2   Q.  Pensez-vous que c'était justifié qu'il fallait remplacer ce contingent-

  3   là par un contingent d'une autre nationalité ?

  4   R.  Alors, si cela aurait facilité la situation, oui, c'eût été bien mieux.

  5   Car il y a toujours de la paranoïa dans ce genre de situation. Il est clair

  6   que cela ne donnait pas l'impression de garantir une certaine sécurité.

  7   Q.  Merci.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce

  9   stade.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Gosnell.

 11   Madame Biersay.

 12   Mme BIERSAY : [interprétation] Veuillez m'accorder quelques instants, s'il

 13   vous plaît, pour que je puisse m'organiser.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien sûr.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Je regarde l'heure --

 16   Contre-interrogatoire par Mme Biersay : 

 17   Q.  [interprétation] Et je souhaite vous dire bonjour, Madame Celar.

 18   R.  Bonjour, à vous.

 19   Q.  Je m'appelle Lisa Biersay. J'ai trois heures pour vous poser des

 20   questions. Cela sera peut-être moins long. Cela dépend de la manière

 21   efficace ou non dont vous répondez aux questions.

 22   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : Veuillez

 23   marquer une pause entre les questions et les réponses, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Avez-vous entendu cela, Madame Celar

 25   ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardon.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non, il y a aucun problème. C'est

  2   simplement pour que vous sachiez que vous parlez la même langue, que ce que

  3   vous dites doit être traduit, interprété, et que les interprètes ont besoin

  4   de temps pour le faire. Donc, si nous pouvons éviter un quelconque

  5   chevauchement entre les questions et les réponses, ce serait très bien.

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Ceci s'applique à moi également.

  7   Q.  Alors, à la lecture de différents documents et lorsque je vous ai

  8   écoutée, vous parlez beaucoup de votre mari, Ilija Celar.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  J'ai le sentiment que vous et Ilija Celar, vous étiez très proches.

 11   R.  Oui, nous étions très heureux lorsque nous étions mariés.

 12   Q.  Et vous vous êtes mariés quand ?

 13   R.  Nous avons été mariés 27 ans au total.

 14    Q.  Et d'après ce que j'ai compris d'après les documents, vous êtes tombés

 15   amoureux et c'était un coup de foudre, n'est-ce pas, et cela a duré tout ce

 16   temps ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et donc, les Pays-Bas représentent quelque chose de particulier pour

 19   vous ?

 20   R.  [aucune interprétation]

 21   Q.  Parce que c'est là que vous vous êtes rencontrés, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce qu'il vous a accompagné maintenant aujourd'hui ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Et pourquoi pas ? Pourquoi n'est-il pas venu ?

 26   R.  Nous avons une ferme, et il n'y a personne pour s'occuper de la ferme.

 27   Nous avons du bétail et nous avons des chiens qui sauvent les personnes, et

 28   c'est à titre volontaire. Nous devons nous occuper de sept chiens.


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26  

27  

28  


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  1   Q.  En 1987, donc, vous êtes tombée amoureuse d'Ilija Celar et vous avez

  2   décidé de vous installer dans un nouveau pays; c'est exact ?

  3   R.  Nous en avons parlé. Nous souhaitions changer de vie. En réalité, je

  4   [comme interprété] souhaitais aller en Afrique du Sud, et moi, je ne

  5   souhaitais pas aller en Afrique du Sud. Et nous souhaitions vivre en

  6   Angleterre, mais bon, lui, ne le souhaitait pas. Donc, nous avons pensé à

  7   Amsterdam, mais c'était trop cher. Et donc, la Yougoslavie d'avant était un

  8   endroit merveilleux pour y vivre.

  9   Q.  Et donc, étant donné que vous aviez une relation aussi proche, vous

 10   avez décidé d'apprendre la langue.

 11   R.  Egalement parce que j'y enseignais l'anglais.

 12   Q.  Donc, vous vous êtes familiarisée avec une nouvelle culture.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et vous avez dû apprendre, en fait, toute l'histoire qui est complexe

 15   et longue de la région et du peuple qui y vit.

 16   R.  Non, je n'avais pas l'obligation de le faire. Lorsque je me suis

 17   installée pour la première fois, c'était la Yougoslavie et je n'étais pas

 18   consciente, en fait, de la différence des groupes ethniques. Je n'avais pas

 19   conscience de cela parce qu'il y avait beaucoup de mariages mixtes. Mon

 20   beau-frère était Croate et sa femme était Serbe.

 21   Q.  Lorsque vous dites que lorsque vous vous y êtes installée, vous n'étiez

 22   pas au courant de la différence entre ces groupes ethniques, comment avez-

 23   vous appris cela ?

 24   R.  Alors, si vous entendez les gens parler, vous les écoutez, et certaines

 25   personnes souhaitaient me parler parce que j'étais Anglaise et qu'il n'y

 26   avait pas beaucoup d'Anglais qui vivaient là. Je ne sais même pas s'il y en

 27   avait. Et ces personnes souhaitaient me parler de leur passé, de leur

 28   histoire, et en général cela portait sur l'histoire de la Yougoslavie et de


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  1   Tito, parce que le Communisme était toujours de mise à l'époque, mais

  2   c'était un Communisme souple.

  3   Q.  Est-il exact que vous avez appris la langue, la culture, l'histoire du

  4   pays, surtout en raison de vos rapports avec Ilija Celar ?

  5   R.  Non, pas au niveau de la langue, parce qu'Ilija souhaitait parler

  6   anglais, parce qu'il souhaitait améliorer et perfectionner son anglais.

  7   Q.  Donc, à la maison, vous parliez anglais ?

  8   R.  Moi, j'étais un petit peu paresseuse. Et tout le monde souhaitait

  9   parler anglais pour pouvoir améliorer son anglais, donc pendant longtemps

 10   je n'ai pas appris autant que je l'aurais souhaité. Mais ce sont des amis,

 11   des femmes qui ne parlaient pas l'anglais ou des voisins avec lesquels je

 12   prenais un café. C'est une société où il y a beaucoup d'échanges en

 13   société. Donc, c'est d'eux que j'ai appris la langue. 

 14   Q.  Et donc, ce que vous avez appris au niveau de la culture, de la langue,

 15   et cetera, vous l'avez appris d'Ilija Celar ?

 16   R.  Eh bien, j'ai lu aussi. Cela dépend des personnes aussi. Ilija parlait

 17   de ce qui s'est passé au Kosovo et ce genre de chose, mais il n'insistait

 18   par particulièrement là-dessus. Il m'a appris des choses, surtout si je

 19   posais des questions, mais je ne lui ai pas simplement posé des questions à

 20   lui. J'ai posé des questions aux personnes autour de moi.

 21   Q.  Je regarde l'heure. Je crois que nous aurons suffisamment de temps pour

 22   commencer le sujet que je vais aborder maintenant. Je souhaite comprendre

 23   la chronologie des événements et où vous habitiez en ex-Yougoslavie.

 24   Lorsque vous êtes arrivée pour la première fois en 1987, vous viviez avez

 25   la maison [comme interprété] d'Ilija Celar à Jagodnjak; c'est exact ?

 26   R.  Oui. Et en même temps, nous avons séjourné chez sa sœur à Ceminac. Nous

 27   avons habité aux deux endroits à un moment donné.

 28   Q.  Et aviez-vous une maison à Jagodnjak qui était stable ou est-ce que


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  1   vous habitiez entre ces deux endroits ?

  2   R.  Alors, nous avons habité entre ces deux endroits, parce qu'ils avaient

  3   une famille et ils n'avaient pas vraiment de très grandes maisons. Et nous

  4   sommes restés à cet endroit-là jusqu'à ce que nous ayons pu trouver une

  5   propriété à Osijek, et c'est là que nous sommes allés habiter.

  6   Q.  Et quand vous êtes-vous installés à Osijek ?

  7   R.  Je crois que c'était au début de l'année 1988. Après la Noël serbe, qui

  8   est au mois de janvier. Donc, je crois que -- bon, c'était peut-être au

  9   mois de février. Je ne peux pas vous donner le moment très exact.

 10   Q.  Je crois que Jagodnjak et Osijek sont des endroits bien différents; le

 11   premier est assez grand par rapport au second ?

 12   R.  Alors, Osijek, c'est une ville, et une ville importante régionale, qui

 13   surplombe la rivière, et Jagodnjak et Ceminac sont dans la Baranja et sont

 14   des villages.

 15   Q.  Est-ce que vous avez appris à connaître les gens de Jagodnjak à

 16   l'époque ?

 17   R.  Non, pas à ce moment-là. Plus tard.

 18   Q.  Lorsque vous dites plus tard, c'était quand ?

 19   R.  Après notre départ d'Osijek en 1991.

 20   Q.  Donc, si je vous ai bien compris, c'était après votre départ d'Osijek

 21   que vous avez vraiment appris à connaître les habitants de la ville de

 22   Jagodnjak et de Ceminac ?

 23   R.  Oui, parce que nous avions un appartement à Jagodnjak qui appartenait

 24   au frère d'Ilija qui était médecin en Allemagne et qui n'y habitait pas,

 25   donc il nous a permis d'utiliser cet appartement.

 26   Q.  Où se trouvait cet appartement à Jagodnjak ?

 27   R.  Près du centre médical.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Je regarde l'heure, Messieurs les Juges.


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  1   Serait-ce le bon moment de faire la pause ?

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, tout à fait, Madame Biersay.

  3   Merci.

  4   Maître Gosnell.

  5   M. GOSNELL : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, si je

  6   soulève cette question. Je n'ai pas de liste de pièces de l'Accusation.

  7   Peut-être que l'Accusation n'a pas l'intention d'utiliser de documents.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, cela aurait dû être communiqué il y a

  9   dix minutes environ. Je vais vérifier. Mais nous allons nous en occuper

 10   pendant la pause. Je vous remercie d'avoir évoqué ce problème.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   L'audience est levée.

 13   [Le témoin quitte la barre]

 14   --- L'audience est suspendue à 12 heures 14.

 15   --- L'audience est reprise à 12 heures 47.

 16   [Le témoin vient à la barre]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, c'est à vous.

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Alors, je souhaite revenir sur la conversation que nous avons eue au

 20   sujet de Jagodnjak. Vous avez dit que vous habitiez dans un appartement qui

 21   était à côté du centre médical. S'agissait-il d'un appartement ou d'une

 22   maison ? Qu'est-ce que c'était ?

 23   R.  [hors micro]

 24   Q.  Veuillez vous rapprocher du microphone, s'il vous plaît. On a du mal à

 25   vous entendre.

 26   R.  Alors, c'était l'appartement qui faisait partie du centre médical. Le

 27   frère d'Ilija était le médecin qui avait été nommé dans ce centre médical,

 28   même si --


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  1   Q.  Pardonnez-moi --

  2   R.  -- il était en Allemagne.

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  Alors, il s'agissait d'un bâtiment qui avait un étage. Il y avait le

  5   centre médical qui se trouvait à gauche et l'appartement sur la droite.

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   R.  Un seul étage, et divisé en deux.

  8   Q.  Après vous être installés à Osijek, vous êtes toujours retournés à

  9   Jagodnjak pour aller rendre visite, je suppose, à la famille d'Ilija Celar

 10   ?

 11   R.  Alors, je me souviens, il y avait une autre petite ville aussi --

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, nous devons vous rappeler de

 13   faire en sorte que vos voix ne se chevauchent pas, s'il vous plaît.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation]

 15   Q.  Alors, ce trajet entre Osijek et Jagodnjak, vous le faisiez combien de

 16   fois par semaine, par exemple ?

 17   R.  Eh bien, cela dépendait des événements. Une période de deux ou trois

 18   ans. Cela dépendait s'il y avait une fête patronale, une Slava, une fête ou

 19   un mariage, ou simplement si on allait leur rendre visite. Je crois que

 20   nous y allions en général le dimanche, pour aller déjeuner chez eux le

 21   dimanche, et ils travaillaient pendant la semaine. Donc, c'était sans doute

 22   le week-end, à moins qu'il y ait des vacances ou une fête ou quelque chose.

 23   Q.  Combien de temps avez-vous vécu à Osijek au total ?

 24   R.  Alors, depuis le début de 1988 jusqu'au moment où nous sommes partis au

 25   mois d'avril, je crois que c'était au mois d'avril, 1991.

 26   Q.  Et après que vous et Ilija Celar vous ayez quitté Osijek, où êtes-vous

 27   allés ?

 28   R.  Nous nous sommes installés dans cet appartement à Jagodnjak.


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  1   Q.  Vous êtes restés combien de temps dans cet appartement ?

  2   R.  J'y suis restée jusqu'au mois de juin, 17 juin. Et ensuite, mon père

  3   est décédé, et un ou deux jours après je me suis rendue en Angleterre. Et

  4   je n'ai pas revu cet appartement avant sans doute l'année suivante car je

  5   devais aller chercher certaines choses qui m'appartenaient. Parce que

  6   c'était sûr à ce moment-là d'y aller, mais nous ne nous y sommes pas

  7   installés. Nous n'y avons pas vécu après.

  8   Q.  Vous voulez parler de quoi là, de Jagodnjak ?

  9   R.  Oui, Jagodnjak.

 10   Q.  Quand vous êtes-vous installés à Beli Manastir ?

 11   R.  A mon retour d'Angleterre. C'était au mois d'octobre, en 1991.

 12   Q.  Comment avez-vous trouvé la maison ou l'endroit où vous habitiez à Beli

 13   Manastir ?

 14   R.  Alors, moi, j'avais été escortée depuis le pont à Batina. J'avais reçu

 15   un coup de fil -- j'avais reçu un coup de fil d'un journaliste qui me

 16   disait qu'Ilija avait été blessé et Blisa [phon] lui avait remis un message

 17   pour qu'il me transmette ce message. Et donc, ce journaliste m'a téléphoné

 18   chez moi en Angleterre, et c'est la raison pour laquelle, je crois, je suis

 19   rentrée au mois d'octobre. Je suis arrivée jusqu'au pont, mais je n'avais

 20   aucun papier, et donc je suis allée du pont de Batina jusqu'au poste de

 21   police. Ils m'y ont emmenée et je suis allée au poste de police de Beli

 22   Manastir. Et lorsqu'ils ont vu qui j'étais, il y a une des personnes qui

 23   faisaient partie du groupe d'Ilija, et une de ces femmes m'a emmenée chez

 24   elle, dans sa maison, pendant quelques jours, et ensuite ils ont dit qu'il

 25   y avait une autre maison. Eh bien, les combattants des forces spéciales se

 26   trouvaient dans un quartier de Beli Manastir, donc si jamais il y avait une

 27   alerte, parce qu'ils n'étaient pas très nombreux, dans ce cas on pouvait

 28   les trouver et on pouvait réagir par rapport à l'alerte. Je ne savais pas


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  1   où j'allais habiter et je n'ai pas vécu à cet endroit avant le mois de

  2   janvier 1992.

  3   Q.  Donc, où avez-vous vécu entre le mois d'octobre 1991 et le mois de

  4   janvier 1992 ?

  5   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise : Veuillez marquer une

  6   pause entre les questions et les réponses, s'il vous plaît.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie de ce rappel. Je vais faire

  8   dorénavant plus attention.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, je vivais chez le neveu et la nièce

 10   d'Ilija qui habitaient dans la maison de leur tante à Beli Manastir. Leur

 11   tante était Croate et était partie en Croatie, et c'est le cas dont je vous

 12   ai parlé de la mère qui est Serbe et du père qui est Croate. Donc, ils sont

 13   restés en Serbie. Donc, ils vivaient dans la maison de leur tante. Moi,

 14   j'ai vécu chez eux jusqu'à ce qu'Ilija quitte l'hôpital.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation]

 16   Q.  Alors, je souhaite revenir un petit peu en arrière. Entre le mois

 17   d'octobre 1991 et le mois de janvier 1992, vous avez habité avec des

 18   membres de votre famille.

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   Q.  Où à Beli Manastir cela se trouvait-il ?

 21   R.  Hélas, je ne me souviens pas du nom de la rue. C'était à l'endroit où

 22   il y avait l'autre maison dans laquelle nous nous sommes installés lorsque

 23   Ilija est sorti de l'hôpital.

 24   Q.  Donc, au mois de janvier 1992, vous vous êtes installés dans une maison

 25   à Beli Manastir où vous êtes restés pendant un certain temps.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et cette maison, comment l'avez-vous trouvée --

 28   R.  Ce n'est pas moi qui l'ai trouvée. Je m'y suis simplement installée. Je


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  1   n'avais aucune idée.

  2   Q.  Je n'ai pas terminé ma question. Je crois que nous allons nous aider

  3   l'une l'autre, et ce serait plus facile pour les interprètes également.

  4   Comment vous et Ilija Celar êtes-vous venus habiter à cet endroit dans

  5   lequel vous vous êtes installés au mois de janvier 1992 ?

  6   R.  Alors, je savais seulement -- eh bien, on nous a dit que c'est là que

  7   nous allions habiter, car toute la rue était occupée par cinq ou six autres

  8   personnes qui faisaient partie des forces spéciales et qui habitaient là

  9   aussi, y compris -- c'était à côté de la maison dans laquelle habitaient le

 10   neveu et la nièce d'Ilija.

 11   Q.  Vous souvenez-vous du nom de cette rue ?

 12   R.  A vrai dire, non.

 13   Q.  Je vais vous poser une autre question en attendant. Est-il exact de

 14   dire que lorsque vous étiez en ex-Yougoslavie entre 1987 et 1993, que vous

 15   habitiez à Jagodnjak, parfois à Ceminac, Osijek ou Beli Manastir ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  A quelle époque Ilija Celar était-il à l'hôpital ? Vous avez dit que

 18   c'est lorsqu'il est sorti de l'hôpital que vous vous êtes installés dans

 19   cette adresse qui est devenue une adresse plus permanente après le mois de

 20   janvier 1992.

 21   R.  Non, je pense qu'il est revenu au mois d'octobre parce que je suis

 22   repartie en Grande-Bretagne. Pardonnez-moi, il y a une certaine confusion

 23   dans mon esprit. C'est au mois d'octobre que nous nous sommes installés à

 24   cet endroit. Je suis restée chez -- alors, je suis restée là jusqu'à ce

 25   qu'il sorte de l'hôpital, et il est sorti de l'hôpital quelque temps avant

 26   que je ne reparte en Grande-Bretagne. Je crois que c'était au mois de

 27   novembre. Je n'en suis pas sûre à 100 % en tout cas de cette période-là,

 28   parce que c'était très traumatisant. Mon père venait de mourir, Ilija avait


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  1   été blessé et le trajet entre l'aéroport était épouvantable. Et nous nous

  2   sommes installés au mois de novembre.

  3   Q.  Ce que vous évoquez, c'est un moment très traumatisant entre le mois de

  4   juin et la fin de l'année 1991.

  5   R.  Oui. Ensuite, je suis repartie en Grande-Bretagne, car c'était devenu

  6   tellement dangereux, il y avait des bombardements tellement importants, et

  7   Ilija ne souhaitait pas que je reste là.

  8   Q.  Est-ce qu'à un moment vous et Ilija Celar vous êtes engagés sur un plan

  9   politique ?

 10   R.  Non, nous n'avons jamais été engagés politiquement.

 11   Q.  Vous et Ilija Celar, est-ce que vous souteniez le SDS, qui était très

 12   populaire à Jagodnjak en 1991 ?

 13   R.  Je ne sais pas si Ilija soutenait le parti, mais moi, je n'ai jamais

 14   rien eu à voir avec la politique. Je me considère toujours comme un invité

 15   dans ce pays, et je n'ai jamais participé à la vie politique.

 16   Q.  Alors, vous dites que vous estimez être invitée dans ce pays et --

 17   cependant, il y a un passage où vous dites quelque part que vous êtes

 18   serbophile.

 19   R.  Oui, je me sens Serbe et j'aime les Serbes. J'aime les Serbes, mais je

 20   resterai toujours Anglaise.

 21   Q.  Donc, vous dites que vous ne savez pas si Ilija Celar soutenait le SDS

 22   ?

 23   R.  Alors, je suppose que oui. Il n'a jamais voté. Ce n'est pas vraiment un

 24   homme politique à proprement parler. Je dirais que c'est un nationaliste,

 25   si cela signifie qu'il était membre de ce parti-là. Il n'a pas une très

 26   bonne opinion des hommes politiques.

 27   Q.  Donc, vous diriez que c'est un nationaliste ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Rapidement, alors, s'agissant de ces combattants des forces spéciales

  2   qui habitaient dans le quartier où se trouvait votre maison à la fin de

  3   l'année 1991 à l'année 1992. Alors, qui étaient ces combattants des forces

  4   spéciales dont vous parlez ?

  5   R.  Les combats ont commencé le 19 août à Beli Manastir, et un groupe de 19

  6   s'est réuni pour voir comment ils allaient pouvoir se défendre parce qu'ils

  7   se sentaient attaqués. Et lorsque l'attaque de la police croate a eu lieu,

  8   eh bien, les combats à Beli Manastir ont commencé et d'autres sont venus

  9   les rejoindre. Je crois qu'au total ils étaient 46. Quelques-uns ont été

 10   tués. Donc, ils étaient très peu nombreux. Et ensuite, comme je le dis, les

 11   Croates pensaient qu'ils étaient beaucoup plus nombreux que cela.

 12   Q.  Merci.

 13   R.  Voilà. Donc, tout est là. Il s'agissait d'un groupe défensif et non pas

 14   d'un groupe à caractère politique. Un groupe défensif.

 15   Q.  Je comprends. Et Ilija Celar faisait partie de ces forces spéciales.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Au paragraphe 3 de votre déclaration, vous dites avoir entendu le

 18   slogan "La Croatie aux Croates" au cours de la campagne électorale de 1990;

 19   c'est bien exact ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et en réponse à quelques-unes des questions posées par Me Gosnell, vous

 22   avez expliqué qu'à la fin de 1992, votre serbe était raisonnable, en termes

 23   de niveau de maîtrise ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Je me demandais où vous avez entendu ce slogan ? A la télévision ?

 26   R.  Nous regardions toujours la télévision croate parce que les émissions y

 27   étaient bien meilleures que la télévision serbe. Et je voyais les

 28   informations ou j'y trouvais des choses que je n'appréciais guère. Bon, je


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  1   sais que je ne réponds pas directement à votre question, mais lorsqu'une

  2   messe était organisée, je voyais des drapeaux croates entourant les

  3   bougies, ce que je n'appréciais guère. Donc, il y avait plusieurs choses

  4   dont je ne parlais pas avec d'autres mais qui ne me plaisaient pas. Je

  5   regardais ce qui se passait.

  6   Q.  Très bien. Alors, essayons de suivre de près mes questions et vos

  7   réponses de façon à ce que nous soyons plus concises, vous et moi.

  8   R.  Concises. Bien.

  9   Q.  Merci. Ma question était de savoir, donc, étant donné le manque de

 10   maîtrise de la langue, où vous entendiez ces slogans ?

 11   R.  Ce n'était pas un slogan difficile à comprendre. Je savais ce qu'il

 12   voulait dire.

 13   Q.  J'ai une autre --

 14   R.  Nous avions des amis qui -- lorsque nous sommes arrivés sur place, tout

 15   le monde parlait de la Yougoslavie. Personne ne parlait d'appartenance

 16   ethnique. Le processus s'est déroulé progressivement et pas d'un coup. Mais

 17   les choses se sont dégradées de manière insidieuse, dirais-je.

 18   Q.  Et quelles étaient vos autres sources d'information sur l'actualité ?

 19   La télévision croate seulement ?

 20   R.  Des amis également. Nous avions beaucoup d'amis qui nous rendaient

 21   visite. Beaucoup d'entre eux parlaient anglais.

 22   Q.  Et ils vous disaient ce qui se passait ?

 23   R.  Bien, cela dépendait de leurs positions respectives. Nous avions non

 24   seulement des amis serbes mais également des amis croates. Il y avait

 25   énormément de mariages mixtes, serbes et croates. L'un de mes amis est

 26   Musulman. Les sources étaient donc multiples.

 27   Q.  Donc, nous parlons des médias, de vos amis, de votre partenaire, Ilija

 28   Celar ?


Page 10928

  1   R.  Oui. Oui, enfin, je connaissais son avis sur la situation, bien

  2   entendu.

  3   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez de toute la rhétorique concernant

  4   le passé fasciste de la Croatie qui a suscité une grande peur chez les

  5   Serbes vivant en Croatie.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Si je vous ai bien comprise, vous dites que les Serbes ont pris peur en

  8   entendant ce que les politiciens croates disaient ?

  9   R.  Cela allait au-delà de cela. C'était le drapeau. C'étaient les

 10   uniformes. Et c'était cette nouvelle règle selon laquelle ils devaient

 11   adhérer afin de garder leur emploi, leur contrat.

 12   Q.  Et d'où venaient vos informations sur l'Etat indépendant de Croatie ?

 13   R.  Parce que j'ai étudié l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. J'ai

 14   également rencontré Michael Lees, qui travaillait avec les Chetniks.

 15   Q.  Qu'entendez-vous par là --

 16   R.  Oui, pendant la Seconde Guerre mondiale, il était aux côtés des

 17   Chetniks. Bon, je n'étais pas d'accord avec lui nécessairement parce que

 18   c'était un royaliste et qu'il n'avait rien de bon à dire à propos de Tito,

 19   contrairement à d'autres. L'idée que je me faisais du pays n'avait rien à

 20   voir avec la situation que j'ai trouvée en arrivant sur place.

 21   Q.  Bien. L'un des événements qui ont suscité davantage de peur encore pour

 22   les Serbes était les discussions concernant le passé fasciste de la

 23   Croatie.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous avez également dit que la discussion sur le génocide passé contre

 26   les peuples serbe suscitait aussi une certaine peur chez eux.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Ilija Celar a-t-il eu peur lui aussi ?


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  1   R.  Je ne dirais pas qu'il avait peur. Il était profondément attristé.

  2   Ilija se sentait Yougoslave, c'est ainsi qu'il se définissait lorsque nous

  3   nous sommes rencontrés, et beaucoup de nos amis étaient tout à fait

  4   satisfaits du statu quo.

  5   Q.  Permettez-moi de revenir légèrement en arrière, Madame Celar.

  6   Vous avez dit, Je ne dirais pas que c'était de la peur. Il était

  7   profondément attristé. C'est bien ce que vous avez dit ?

  8   R.  [aucune interprétation]

  9   Q.  Bien. Sur ce point, puis-je vous demander pourquoi vous ne qualifieriez

 10   pas son sentiment de peur ?

 11   R.  Ce n'est pas ainsi que je décrierais son sentiment parce que personne

 12   ne pensait qu'il y aurait des combats. Tout le monde disait, Ah, ce ne sont

 13   que ces dirigeants et leur rhétorique, mais les gens ne se battront pas.

 14   Nous sommes tous liés. Nous sommes membres d'une même famille. Des Croates

 15   venaient chez nous. Ils n'y venaient pas en tant que Croates; ils y

 16   venaient en tant qu'amis. Ils avaient une opinion concernant l'indépendance

 17   de la Croatie, nous avions la nôtre, mais nous parlions les uns avec les

 18   autres même lorsque nous n'étions pas d'accord. Nous avions cette femme qui

 19   avait été réfugiée pendant la Seconde Guerre mondiale, qui était Croate, et

 20   qui venait chez nous.

 21   Q.  Bien.

 22   R.  Vous savez, c'est une situation complexe. La situation n'a rien de

 23   simpliste.

 24   Q.  Oui, ça n'a rien de simpliste.

 25   R.  Non.

 26   Q.  D'où ma demande consistant à ce que vous écoutiez bien mes questions,

 27   et je suis désolée, je vais devoir vous rappeler à l'ordre à nouveau si

 28   vous vous éloignez de ma question.


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  1   R.  Bien.

  2   Q.  Vous venez de nous parler du drapeau --

  3   R.  Oui, cela m'a été expliqué --

  4   Q.  Veuillez patienter, je souhaite terminer ma question.

  5   R.  Excusez-moi.

  6   Q.  Vous avez parlé du drapeau qui était un facteur qui suscitait le

  7   malaise chez les Serbes.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Vous parlez dans votre déclaration du drapeau croate en 1990-1991, qui

 10   était le même que celui qui avait été utilisé par les Fascistes dans les

 11   années 1940 --

 12   R.  C'est ce que l'on m'a dit.

 13   Q.  Et j'allais vous demander : qui vous l'a dit ?

 14   R.  Je crois que le sujet est venu sur la table pendant nos discussions. Je

 15   ne me souviens pas de quelqu'un en particulier. La discussion sur le

 16   drapeau a commencé lorsque l'on a vu ces chemises noires à Osijek pendant

 17   que je faisais les courses.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   R.  Et c'est ce qui a abouti à ces discussions avec les gens, avec Ilija,

 20   au moment où nous nous demandions ce qu'il était en train de se passer. Et

 21   pendant ces discussions --

 22   Q.  Madame Celar, un instant, s'il vous plaît. Ma question est celle-ci :

 23   d'où avez-vous obtenu l'information selon laquelle les drapeaux étaient les

 24   mêmes ? Et je crois que vous y avez répondu. Vous avez dit que des gens

 25   vous l'avez dit. Ilija Celar faisait-il partie de ces gens ?

 26   R.  Peut-être. Je ne peux pas vous dire de manière catégorique qui

 27   précisément à l'époque m'a communiqué ce type d'information.

 28   Q.  Avez-vous vu, vous-même, les drapeaux ?


Page 10931

  1   R.  Non.

  2   Q.  Donc, vous ne savez pas absolument s'il s'agissait des mêmes drapeaux ?

  3   R.  Non. Seulement dans ce que j'ai lu et d'après ce que j'ai entendu, mais

  4   je ne l'avais pas vu.

  5   Q.  Vous parlez également de la déclaration d'allégeance comme source de

  6   peur.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et vous dites que c'était très exactement la même que celle qui avait

  9   été utilisée au moment de l'Etat indépendant de Croatie. Sur quelle base --

 10   R.  C'est la même chose. Dans les discussions, il a été dit qu'il y avait

 11   le drapeau, les insignes sur les uniformes et le document qu'il fallait

 12   signer pour prêter allégeance à la Croatie. Et tout ceci était identique à

 13   ce qui avait été utilisé par ce gouvernement.

 14   Q.  Et c'est Ilija Celar et d'autres de vos amis qui vous l'ont dit ?

 15   R.  Lorsque nous avons abordé la question.

 16   Q.  Bien. Madame Celar, dans votre déclaration, vous dites que vous n'avez

 17   pas entendu de rhétorique serbe sur la création d'une Grande-Serbie. Vous

 18   dites que c'est venu plus tard et que ça n'a pas pris véritablement. Vous

 19   souvenez-vous de ces déclarations ?

 20   R.  Je n'ai jamais entendu qui que ce soit parler de Grande-Serbie.

 21   Q.  Donc, la réponse à ma question est oui --

 22   R.  Je ne l'ai jamais entendu.

 23   Q.  Pour vous, que signifie "Grande-Serbie" ?

 24   R.  Eh bien, une Serbie qui élargirait ses frontières et qui conquerrait

 25   d'autres territoires.

 26   Q.  Donc, l'élargissement des frontières ?

 27   R.  Oui, c'est ce qui me vient à l'esprit, littéralement.

 28   Q.  Quand avez-vous entendu ce type de rhétorique pour la première fois ?


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  1   R.  Je ne l'ai jamais entendu. Je vous dis simplement ce que je comprends

  2   lorsque j'entends "Grande-Serbie".

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  A l'époque, j'entendais Yougoslavie. A l'époque, c'était le mot

  5   prononcé, Yougoslavie.

  6   Q.  Donc, en 1991, en 1992, vous n'entendiez pas de Serbes parler de

  7   l'ajustement des frontières ?

  8   R.  On m'a dit que d'autres raisons -- oui, j'ai entendu parler de

  9   l'ajustement des frontières. A savoir que la Baranja n'avait jamais

 10   appartenu à la Croatie et qu'elle n'aurait jamais dû devenir territoire

 11   croate, et que Tito avait tracé les frontières qu'il voulait et que

 12   personne ne s'y était opposé. C'est ce que j'ai entendu.

 13   Q.  Je vois.

 14   R.  Je sais que ces frontières avaient été tracées ainsi. Et j'ai entendu

 15   des gens en discuter et s'en plaindre.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 17   M. GOSNELL : [interprétation] Excusez l'interruption, mais ce qui vient

 18   d'être demandé par la représentante du bureau du Procureur, page 78, ligne

 19   1, est ceci : "Dans votre déclaration, vous dites que vous n'avez pas

 20   entendu de rhétorique de la part des Serbes concernant l'établissement

 21   d'une Grande-Serbie."

 22   Ce n'est pas très exactement ce qui figure dans la déclaration de Mme

 23   Celar.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation] Je serais ravie d'en donner lecture.

 25   M. GOSNELL : [interprétation] Et je m'excuse du temps qu'il m'a fallu pour

 26   m'en rendre compte.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation]

 28   Q.  Paragraphe 5 : "J'ajouterais que, ni à ce moment-là, ni par la suite,


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  1   je n'ai entendu de rhétorique équivalente des Serbes concernant une Grande-

  2   Serbie."

  3   Voilà ce qu'elle dit dans sa déclaration. Et Mme Celar a répondu à ma

  4   question. J'aimerais maintenant, Madame, vous posez une autre question --

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Vous avez parlé de l'élargissement des frontières dont vous avez

  7   entendu parler. Dans quel contexte cette discussion a-t-elle eu lieu, à

  8   savoir la discussion sur le fait que la Baranja n'aurait jamais dû faire

  9   partie du territoire croate ?

 10   R.  C'était après. Une fois que les combats ont commencé et que nous sommes

 11   allés vivre en Baranja, j'ai entendu mon mari et d'autres dire qu'ils

 12   aimeraient une région autonome. Qui ne soit rattachée ni à la Serbie ni à

 13   la Croatie, si elle ne pouvait être yougoslave. Ils envisageaient donc la

 14   création d'une région autonome, comme le Luxembourg.

 15   Q.  Vous l'avez entendu dire d'Ilija Celar ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Avez-vous entendu parler de Vojislav Seselj ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  J'aimerais que l'on vous présente l'intercalaire 16, qui se trouve être

 20   la pièce 1726.

 21   Les informations dont je dispose sont que cette conversation remonte

 22   à la date d'avril 1991 et qu'il s'agit de Seselj qui se trouve à Plitvice.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Attendons une minute avant de passer cet

 24   extrait. Je crois que nous avons un nouveau protocole, il faut vérifier

 25   auprès des interprètes s'ils ont ce compte rendu sous les yeux ?

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est un protocole, par ailleurs,

 27   très utile.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Effectivement, un protocole qui s'est avéré


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  1   très utile.

  2   J'attends donc que les interprètes me confirment qu'ils disposent de

  3   la pièce P1726.

  4   L'INTERPRÈTE : La cabine française confirme, ainsi que la cabine anglaise.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Je demande donc à ce que l'on passe cette

  6   vidéo.

  7   [Diffusion de la cassette vidéo]

  8   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  9   "Ceci est une terre serbe et ça restera toujours serbe. Etant donné qu'il a

 10   parlé maintenant de la création d'une région serbe, Seselj a dit : Frères

 11   serbes et sœurs serbes vous êtes dans les premières lignes de la défense de

 12   la serbitude. Des frontières nationales serbes. C'est vous qui êtes les

 13   plus exposés et vous êtes la fierté de toute la serbitude.

 14   Journaliste : Il a promis qu'il ne resterait pas seul et que les

 15   Serbes n'avaient qu'un seul parti, le Parti démocratique serbe.

 16   Seselj : Vous avez ici une direction courageuse qui est dirigée par

 17   un héros national, Milan Babic. Il a traité de traîtres ceux qui divisaient

 18   le peuple serbe. Seulement les mercenaires d'Ante Markovic et des services

 19   de renseignements serbes estiment qu'il y a des problèmes prioritaires par

 20   rapport à votre protection et à votre sécurité. Ils vous proposent à

 21   Tudjman. Ils vous vendraient volontiers. Vous n'allez pas être vendus et

 22   vous n'allez pas être trahis.

 23   Journaliste : Au lieu de calmer et apaiser le peuple, Seselj a dit au

 24   peuple rassemblé : Nous disons aux dirigeants croates il y a des têtes qui

 25   ont roulé de la main d'Oustachi dans la Krajina serbe. Il y a dans le Srem

 26   occidental et en Slavonie des têtes serbes qui ont roulé. Nous allons

 27   venger le sang serbe versé."

 28   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]


Page 10936

  1   Mme BIERSAY : [interprétation]

  2   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ce rassemblement à

  3   Plitvice a été plutôt bien fréquenté ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous avez également entendu Seselj en train de parler de la défense des

  6   frontières serbes et de la serbitude ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler de ce grand rassemblement et du

  9   discours tenu à Plitvice ?

 10   R.  Non, je n'ai pas été au courant.

 11   Q.  En avril --

 12   R.  Je l'ai peut-être vu, mais ça ne me concernait pas trop, vraiment.

 13   C'était un homme politique. Il n'avait rien à voir avec moi.

 14   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler de ce rassemblement ?

 15   R.  Je pense que non. Il se peut qu'à l'époque, oui, mais je n'ai pas gardé

 16   cela en mémoire comme étant quelque chose d'important.

 17   Q.  Saviez-vous que Seselj a également tenu un discours à Jagodnjak ?

 18   R.  Oui, j'ai ouï dire qu'il avait été là-bas et qu'Ilija était allé

 19   l'écouter, mais je n'y suis pas allée, moi.

 20   Q.  Est-ce qu'Ilija Celar vous a dit ce qui s'était dit à l'occasion de ce

 21   rassemblement ?

 22   R.  Non, pas vraiment. Il a dit qu'il y a eu un rassemblement de Serbes.

 23   Q.  Je vais vous passer le document qui se trouve à l'intercalaire 6, il

 24   s'agit de la pièce à conviction 240.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 28   Q.  Nous sommes en train de vérifier. Et pendant la recherche des numéros


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  1   d'intercalaire, je vous demanderais si vous avez entendu, à quelque moment

  2   que ce soit, parler du concept de la distinction à faire entre les Croates

  3   qui étaient nés dans la Baranja par rapport à ceux qui étaient venus là

  4   après la guerre ?

  5   R.  De quelle guerre parlez-vous ?

  6   Q.  De la Deuxième Guerre mondiale.

  7   R.  Après la Deuxième Guerre mondiale, la famille de mon époux était venue

  8   là de Bosnie. Ils ont été installés là-bas en 1948. C'est cela qu'on m'a

  9   dit.

 10   Q.  Pour ce qui est des Croates, avez-vous ouï dire qu'une différence avait

 11   été faite pour ce qui est des Croates qui avaient été emmenés là après la

 12   Deuxième Guerre mondiale ?

 13   R.  Oui, parce que les Allemands étaient partis à ce moment-là.

 14   Q.  Bien --

 15   R.  Mais personne ne faisait de différence entre le nombre de Croates qui

 16   étaient venus et le nombre de Serbes qui étaient venus.

 17   Q.  Bon. Intercalaire 7, pièce à conviction 240, est-ce que j'ai une

 18   confirmation de la part de la cabine.

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes disent oui.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 22   "Milan Paroski : C'est une belle occasion, je vais profiter de cette

 23   opportunité pour attirer votre attention sur un fait historique. Vous

 24   rencontrez ici des Croates qui sont venus sur vos champs, qui sont venus

 25   dans vos maisons, qui ont été colonisés par là par Pavelic parce que

 26   c'étaient des bons égorgeurs. Et ils vivent là. Vous rencontrez des

 27   Hongrois qui ne veulent pas être des Hongrois à Backa parce qu'ils

 28   préfèrent servir à Tudjman, et ils ne veulent pas servir à leur nation. Or,


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  1   ceci est un territoire serbe, et ils doivent comprendre que c'est eux qui

  2   sont les nouveaux arrivés. Et s'ils ne veulent pas vivre avec vous, ils

  3   devront faire leurs paquets et s'en aller. Alors, ils nous minent, ils

  4   sabotent nos frontières, ils détruisent nos cimetières. Les Hongrois ne

  5   doivent pas…"

  6   Mme BIERSAY : [interprétation]

  7   Q.  J'ai fait arrêter le défilement parce qu'on dit "on détruit nos

  8   frontières et nos cimetières." Est-ce que vous reconnaissez l'un quelconque

  9   des personnages qui se trouvent sur la tribune ?

 10   R.  J'ai vu quelque part l'homme qui se trouve tout à fait à droite, mais

 11   j'ignore son nom.

 12   Q.  En haut à droite ? En gris avec une chemise blanche ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  La personne qui n'a pas de cravate ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous le reconnaissez, mais vous ne connaissez pas son nom, n'est-ce pas

 17   ?

 18   R.  Oui, et je vois Seselj ici. Mais je ne sais pas qui est la personne qui

 19   a parlé.

 20   Q.  Il s'agit de Milan Paroski.

 21   R.  Je ne sais pas du tout qui c'est.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Continuons.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 25   "… et alors, ils peuvent faire des recherches archéologiques, mais

 26   ils ne trouveront que des Serbes. Et c'est là qu'ils ont interrompu. Alors,

 27   qu'ils viennent ici, qu'ils disent que c'est leurs frontières, c'est des

 28   usurpateurs. Ils sont venus là pour conquérir vos territoires. Vous avez le


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  1   droit de les abattre comme des chiens à côté d'une clôture, parce qu'ils

  2   sont venus sur le bien d'autrui."

  3   Mme BIERSAY : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce que M. Ilija Celar vous aurait dit que quelqu'un à cette

  5   assemblée aurait affirmé que ceux qui réclameraient ces terres c'étaient

  6   des usurpateurs et que vous aviez le droit de les abattre comme des chiens

  7   ?

  8   R.  Non, il ne me l'a pas dit.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] Bon, continuons.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 12   "Seselj : Les Croates, ils peuvent quitter la Yougoslavie si ça leur

 13   chante, quand ils voudront, mais nous leur faisons savoir qu'ils ne

 14   sortiront aucun pouce du territoire serbe, pas un seul bout de terre où se

 15   trouvent les villages serbes, les églises serbes détruites, les fosses

 16   communes serbes, les endroits où ils ont fait l'objet de massacre, les

 17   camps de détention serbes, les Jasenovac serbes. Si nous leur permettons

 18   cela, nous serions des fils indignes de nos ancêtres et nous devrions avoir

 19   honte devant nos ancêtres. Les Croates peuvent créer un nouvel Etat, mais

 20   seulement à l'ouest de la ligne Karlobag-Ogulin-Karlovac-Virovitica. Tout

 21   ce qui se trouve à l'est de cette ligne appartient aux Serbes, et nous

 22   n'allons permettre à aucun Croate de manipuler avec les Serbes de Bunjevci

 23   et les Serbes de Sokci. Ce sont des Serbes catholiques, et nous espérons

 24   qu'eux aussi, ils verront clair et qu'ils comprendront quel est le rôle qui

 25   leur a été destiné par le Vatican et la direction suprême oustachi contre

 26   le peuple serbe."

 27   Mme BIERSAY : [interprétation]

 28   Q.  Vous venez d'entendre Seselj dire que les Croates sont libres d'avoir


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  1   leur Etat, mais à l'ouest de la ligne Karlobag-Ogulin-Karlovac et

  2   Virovitica.

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  Est-ce que vous en aviez entendu parler précédemment ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  C'est la première fois que vous en entendez parler aujourd'hui.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Ilija Celar ne vous a jamais dit cela.

  9   R.  Non.

 10   Q.  Il ne vous a pas dit qu'il en avait été question à ce rassemblement où

 11   il avait été présent.

 12   R.  Non. Il y a eu beaucoup de rassemblements, il y a eu beaucoup de choses

 13   qui ont été dites avant la guerre. Avant le début de la guerre, il y a eu

 14   beaucoup de réunions où ils se rendaient. Nous n'en avons pas véritablement

 15   parlé.

 16   Q.  Donc, lorsque Ilija Celar se rendait à ces réunions, rencontres --

 17   R.  Ecoutez, de toute manière, je ne sais pas où c'est, cette ligne. Je

 18   sais où se trouve Vinkovci. Pour le reste, je n'en sais rien.

 19   Q.  Je vais vous apporter demain une carte géographique pour voir que c'est

 20   à l'ouest de la Baranja.

 21   R.  Fort bien.

 22   Q.  A quelle fréquence Ilija se rendait-il à ces réunions ? Parce que, si

 23   je vous ai bien comprise, il y allait tout le temps, n'est-ce pas ?

 24   R.  Bien, je n'ai probablement pas été présente lorsque cela s'est passé.

 25   La date de la réunion avec Seselj c'était quand ?

 26   Q.  Avril 1991.

 27   R.  Ah oui, là, j'étais là-bas.

 28   Q.  Vous avez dit également qu'il vous en avait parlé.


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  1   R.  Oui, ça se passe en 1991. Je sais qu'il y a eu un rassemblement à

  2   Jagodnjak et je sais que Seselj y était présent. Mais je suis partie vers

  3   le 19 juin. J'ai pris mon avion à Zagreb pour aller à l'enterrement de mon

  4   père et je ne suis pas revenue avant le mois d'octobre. Si tant est qu'il y

  5   a eu des rassemblements entre, ce que je sais c'est que quand est-ce qu'il

  6   y a eu un début des combats, mais je ne sais pas combien de réunions ou

  7   rassemblements il y a eus et à combien de ces rassemblements Ilija était

  8   allé pendant cette période.

  9   Q.  Alors, je vous renvoie vers la pièce P70.50, qui décrit une réunion de

 10   Beli Manastir en février 1991. Avez-vous gardé ceci en mémoire ? Vous avez

 11   été là-bas.

 12   R.  Non, en 1991, nous étions à Osijek.

 13   Q.  Mais vous étiez dans le pays.

 14   R.  Oui, mais nous étions à Osijek.

 15   Q.  J'aimerais qu'on se penche sur l'intercalaire 3, pièce à conviction

 16   P70.50. D'après les renseignements dont je dispose, il s'agit d'un article

 17   datant de février 1991. Certainement en 1991. Vous allez probablement avoir

 18   des difficultés, mais vers le milieu de la page, je vous renvoie donc vers

 19   ce milieu de page où il est dit : "Une heure après le rassemblement."

 20   Le voyez-vous, ceci ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  "Une heure après ce rassemblement, il y a eu un autre rassemblement,

 23   des protestations qui se sont déroulées à Beli Manastir aussi. L'un des

 24   intervenants a dit que la Baranja n'avait jamais été croate et qu'elle ne

 25   le sera plus, et la population locale a été d'accord."

 26   R.  Oui, c'était le sentiment qui l'emportait d'un point de vue général.

 27   Q.  Savez-vous que Goran Hadzic a également procédé à une distinction entre

 28   les Croates au sujet desquels il a affirmé qu'ils ont été amenés là dans la


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  1   Baranja par Pavelic ?

  2   R.  Non. J'ai eu l'impression, et d'après ce qu'Ilija m'a raconté, c'est

  3   que la Baranja avait été hongroise pendant la Deuxième Guerre mondiale et

  4   que ça ne faisait pas partie intégrante de la République de Croatie, et que

  5   c'est partant de là qu'il a affirmé que ça n'avait jamais été la Croatie et

  6   qu'il y avait très peu de Croates à y résider d'après les différents

  7   recensements. Et il n'y avait que très peu de Croates dans la Baranja. Il y

  8   avait pour l'essentiel des Serbes, des Allemands, des Hongrois et des

  9   Juifs. Donc, non, je n'ai pas eu à connaître le fait que M. Hadzic en ait

 10   parlé. Je n'en ai jamais entendu parler.

 11   Q.  Vous n'avez pas entendu parler de M. Hadzic --

 12   R.  Non.

 13   Q.  Mais dans votre déclaration, vous avez dit que vous aviez entendu dire

 14   que c'était un brave homme. De la bouche de qui avez-vous entendu parler de

 15   cela ?

 16   R.  Eh bien, j'ai entendu des gens parler. Des femmes en ont parlé et bon

 17   nombre de personnes avaient évoqué les personnes qui étaient au pouvoir.

 18   Ils en discutaient. Moi, je n'en savais pas grand-chose. Les personnes

 19   formulaient différentes opinions. Et une fois, Arkan est venu rendre visite

 20   à la Baranja après le début de la guerre. On m'a demandé si je voulais

 21   aller le voir, et j'ai formulé mon opinion à son sujet. Mais leur opinion

 22   était différente. Ils le trouvaient bien bâti, ayant bonne mine. Enfin, un

 23   peu comme si c'était une star. Moi, j'ai trouvé que c'était un criminel.

 24   Mais on a parlé et formulé des opinions au sujet de pas mal de gens. La

 25   seule exception c'est Boro Zivanovic, c'est quelqu'un que j'ai rencontré à

 26   plusieurs reprises. Il avait été à une Slava en notre compagnie.

 27   Q.  Et il a travaillé beaucoup de fois avec Ilija Celar ?

 28   R.  Il ne répondait [comme interprété] avec Ilija. Lui, il lui a servi


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  1   d'interprète, et l'autre lui faisait appel lorsqu'il avait besoin de

  2   quelqu'un à qui il pouvait prêter foi. Il connaissait la langue et il ne

  3   faisait pas semblant de le parler.

  4   Q.  Mais une fois que la guerre a commencé, vous avez dit qu'Arkan était

  5   venu une fois. Et vous souvenez-vous du moment, c'était en 1991 ou 1992 ?

  6   R.  Ecoutez, les combats avaient commencé. Je me souviens d'une des femmes

  7   qui avait été très perturbée parce qu'elle a affirmé qu'Arkan avait mis en

  8   œuvre une nouvelle loi pour ce qui est de la ligne de front, et au bout de

  9   dix jours leurs époux n'avaient que huit heures à passer à la maison, pour

 10   se changer, pour couper du bois pour leurs femmes, et cetera. Et Arkan

 11   avait introduit des sanctions pour chaque minute de retard. Et son mari

 12   aurait passé 30 jours en prison parce qu'il a été en retard de 30 minutes

 13   au retour. C'est tout ce que j'ai ouï dire à son sujet.

 14   Q.  Et ça se passait où ?

 15   R.  Il était dans Beli Manastir ou à proximité. Je sais pas exactement où

 16   parce que je n'y suis pas allée.

 17   Q.  Nous allons revenir vers la pièce P144, intercalaire numéro 4.

 18   Page 2 en anglais, s'il vous plaît, au haut de la page.

 19   Il s'agit d'un entretien avec Goran Hadzic. J'aimerais qu'on se penche sur

 20   la partie qui commence par les mots :

 21   "Les Croates du cru, c'est ceux qu'on appelle les Sokci, sont passifs

 22   eux aussi. Les Croates originaires de l'Herzégovine et de la Dalmatie et de

 23   Zagorje sont des gens qui sont venus après 1941. Ceux-là sont fort

 24   dangereux car ils savent que l'un de nos objectifs une fois qu'on aura pris

 25   le contrôle c'est de renvoyer tous ceux qui avaient été les volontaires de

 26   Pavelic."

 27   Est-ce que vous avez eu l'occasion d'entendre parler de cette idée au terme

 28   de laquelle les Croates que l'on considérait comme ayant été des


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  1   volontaires à Pavelic devaient être renvoyés chez eux ?

  2   R.  Je n'ai pas eu à connaître ce genre de distinction. Mon époux et moi

  3   avons eu un rôle important pour faire en sorte que les Croates qui

  4   voulaient rester puissent rester, sans qu'il y ait intimidation quelle

  5   qu'elle soit, et nous nous sommes efforcés d'y mettre un terme.

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   R.  Et il n'y avait rien de politique à cela. Je ne savais pas de quoi ils

  8   étaient en train de parler. Je ne prêtais pas une grande attention aux

  9   propos de Milosevic non plus. Je n'ai pas été une personne ayant prêté

 10   oreille aux discours des politiques. Ça ne m'intéressait pas et ça ne m'a

 11   jamais intéressé.

 12   Q.  Je me propose de vous montrer un autre document. Intercalaire 66, pièce

 13   à conviction P2955.2913.

 14   Il s'agit d'un article, et je crois que cet article est daté du mois de

 15   septembre 1991. Je souhaite vous demander de bien vouloir regarder le bas

 16   de la première page.

 17   R.  Je n'étais pas là à ce moment-là. J'étais en Angleterre.

 18   Q.  J'entends bien. Je souhaite vous lire ce passage : "Les gens

 19   d'Herzégovine, dans la région d'Imotska et de Zagorje, qui avaient été

 20   colonisés dans nos régions par Pavelic pendant la guerre, recevront des

 21   billets pour rentrer, a dit Hadzic. Ensuite, pour répondre à la question,

 22   Avez-vous des problèmes avec les Serbes qui ont été colonisés et qui sont

 23   des extrémistes, Hadzic a répondu : Non, nous n'avons pas de problème."

 24   La question du retour et du billet de retour correspond à ce que je

 25   viens de vous montrer avant ce document-ci ?

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Je ne pense pas qu'il s'agit d'une

 28   question équitable. C'est un ensemble de conjectures, spéculations et


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  1   déductions logiques, et je ne pense pas qu'il s'agisse de quelque chose

  2   dont le témoin a connaissance ou qu'elle a appris.

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] C'est exactement là où je veux en venir.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation]

  6   Q.  Vous étiez en quelque sorte quelqu'un qui faisait sensation dans les

  7   médias lorsque vous êtes rentrée en Baranja en raison de votre déposition

  8   devant le parlement en 1991, et vous avez également accordé des entretiens

  9   ?

 10   R.  Oui, j'étais sur Sky News, et je décrivais la situation telle qu'elle

 11   existait dans la Baranja.

 12   Q.  Et je veux dire, localement parlant. Vous vous êtes adressée à des

 13   journalistes locaux ?

 14   R.  Dans la Baranja ?

 15   Q.  Des journalistes venaient d'ailleurs ?

 16   R.  Les journalistes ne venaient pas à cet endroit-là. Il n'y avait pas de

 17   journal local. Et moi, je n'ai pas fait sensation dans la Baranja. Les

 18   seules personnes qui sont venues me voir, c'était une équipe de la

 19   télévision. Il y avait un anglais qui était venu justement parce qu'il

 20   souhaitait réaliser un documentaire sur ma vie là-bas.

 21   Q.  D'accord. Alors, je crois qu'il s'agit de l'intercalaire numéro 90,

 22   numéro 65 ter 6568. Je souhaitais, au compteur, visionner de 1 heure, 26

 23   minutes, 33 secondes, à 1 heure 27 minutes, 11 secondes.

 24   [Le conseil de l'Accusation]

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] En réalité, je vais commencer à 1 heure, 24

 26   minutes, 31 secondes, pour pouvoir placer ceci dans son contexte.

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise précisent qu'elles

 28   disposent de la transcription.


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  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  3   "Même si elle a vécu un certain temps à Beli Manastir, cette femme

  4   anglaise qui va être citée dans notre prochain reportage est plus populaire

  5   dans les médias de Royaume-Uni que dans nos propres médias. Pourquoi est-ce

  6   le cas ? Et que pense-t-elle de l'armée croate qui menace de prendre

  7   d'assaut la Baranja ? Vesna Jugovic va maintenant vous présenter ce

  8   reportage.

  9   Nous sommes venus de Baranja jusqu'à Beli Manastir pour rencontrer Amanda

 10   Brook qui est plus populaire en Grande-Bretagne qu'ici. Là-bas, elle fait

 11   des discours au parlement, elle parle aux télévisions et aux journaux car

 12   elle souhaite décrire ce qui se passe du côté serbe pendant la guerre. Elle

 13   est tombée amoureuse à Osijek, et c'est pour ça qu'elle est venue de

 14   Coventry, Angleterre, il y a cinq ans -- à une réunion d'affaires à

 15   Amsterdam, et depuis ils ne se sont pas quittés. Elle s'est trouvée par

 16   hasard à Beli Manastir dans un sous-sol lorsque la ville a été libérée.

 17   Elle a été choquée par le fait que…"

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Alors, je vais arrêter ici.

 19   Q.  Tout d'abord, l'entretien, c'est le documentaire dont vous avez parlé ?

 20   R.  Non, il s'agit ici de la télévision serbe. Je ne me souviens pas de

 21   cela du tout. Mais l'homme qui m'a accueilli à la porte était un Anglais,

 22   qui était à la fois Serbe et Anglais. Il est arrivé avec son équipe de

 23   télévision pour filmer.

 24   Q.  Et comment s'appelait-il ?

 25   R.  Michael Stojslavic [phon].

 26   Q.  La journaliste dit que vous étiez là par hasard à Beli Manastir dans un

 27   sous-sol lorsque la ville a été libérée.

 28   R.  Ceci n'est pas exact. Je n'étais pas là. J'étais en Angleterre. Elle a


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  1   également dit que j'ai parlé dans plusieurs émissions télévisées, ce qui

  2   n'est pas vrai. J'étais personne. Personne ne me connaissait. Simplement,

  3   j'ai été interviewée par Sky News --

  4   Q.  Et alors, ils avaient obtenu cette information comment, sur le sous-sol

  5   de Manastir --

  6   R.  Je n'ai aucune idée.

  7   Mme BIERSAY : [aucune interprétation]

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 10   "… par le fait que les fermes serbes étaient disposées à se suicider

 11   en groupe plutôt que d'être capturées par les Oustachi. J'ai rejoint le

 12   lobby serbe, parce que j'avais honte, j'avais honte du parti pris par les

 13   médias britanniques. Je sais que je ne vivrais pas parmi les Serbes s'ils

 14   étaient de capables de commettre les atrocités dont on les accuse. Ceci a

 15   été diffusé à la télévision et dans les journaux. Maintenant que je veux

 16   parler des Belges, il n'y a aucun journaliste étranger qui est là pour que

 17   je puisse lui parler. J'ai parlé avec le commandant de la FORPRONU, un

 18   Belge, qui est ouvertement anti-Serbe, par opposition aux Suédois qui sont

 19   neutres. Nous venons de démocratie ancienne, Amanda, m'a dit le Belge. Et

 20   moi, je lui ai dit que la Belgique existait depuis 250 ans, alors que le

 21   peuple serbe avait des traditions qui remontaient à plusieurs siècles. La

 22   dernière tentative par Amanda Brook d'informer le public britannique au

 23   sujet de la tragédie qui s'est déroulée en Croatie était le cas de Franjo

 24   Sretkovic. Franjo est un Croate qui avait été enlevé à Zagreb simplement

 25   parce qu'il était Yougoslave, un Communiste, et qu'il avait épousé une

 26   femme serbe. Ils l'ont frappé à Osijek de la même façon qu'ils avaient

 27   frappé les Serbes. Nous avons demandé à ce qu'ils soient échangés.

 28   Remettez-le-nous pour 6 000 marks allemands. Franjo et moi, nous avons


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  1   écrit au journal 'Times' et à Sky News. Franjo a signé et était prêt à

  2   déposer. Personne en Grande-Bretagne ne s'en souciait. Je craignais

  3   l'arrivée des réfugiés croates, parce que je pensais que Tudjman était

  4   capable de sacrifier ses propres réfugiés, ce qui aurait pu lui servir de

  5   prétexte et lui aurait permis de nous attaquer. Je sais qu'il est difficile

  6   pour vous de quitter vos maisons, mais il y a de nombreux des Croates

  7   locaux qui vivaient dans des maisons qui habitées ou dont les Allemands

  8   étaient propriétaires parce que c'étaient des bons Communistes. Ces maisons

  9   sont actuellement habitées par des réfugiés serbes. Si l'armée du nouvel

 10   Etat démocratique croate devait voir le jour, ce serait difficile. Je

 11   quitterais la Baranja en même temps que les autres femmes serbes. A

 12   Belgrade ? Je n'aime pas les villes. En Serbie ou au Monténégro."

 13   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 14   Mme BIERSAY : [interprétation]

 15   Q.  Vous parlez de ces personnes, de ces Croates locaux qui habitaient dans

 16   des maisons dons les Allemands étaient propriétaires parce que c'étaient

 17   des bons Communistes.

 18   R.  Alors, je ne sais pas ce que j'ai dit, mais j'essayais de faire passer

 19   le message que la presse britannique -- en tout cas, je répondais à ce que

 20   disaient les médias britanniques. Il est difficile de juger lorsqu'on ne

 21   voit pas ce qui se passe. J'avais écrit de nombreuses lettres qui n'étaient

 22   pas publiées dans la presse anglaise, et l'une de ces lettes était en guise

 23   de réponse à ce que disait la presse sur les Croates qui avaient contraints

 24   de quitter la Baranja et qui avaient perdu leurs maisons alors que cela

 25   faisait des siècles qu'ils habitaient là. En tout cas, je répondais à cela.

 26   Et la Baranja était une région très spéciale. Il y avait eu beaucoup de

 27   personnes qui avaient transité par là. Il y avait certaines personnes que

 28   l'on avait installées là ces cinq dernières années, au nord-est en tout


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  1   cas.

  2   Q.  Alors, pourquoi voulez-vous insister sur le fait que les Croates ne

  3   devaient pas y vivre, ils n'appartenaient pas à cette région ?

  4   R.  Ecoutez, je n'ai pas dis cela. Je n'ai pas dit qu'ils n'appartenaient

  5   pas à cette région. Les Croates s'étaient emparés des maisons d'autres

  6   personnes, et donc quelqu'un prenait maintenant leurs maisons. C'est cela

  7   dont je parlais. Et c'était à une époque où il y avait beaucoup de stress,

  8   énormément de stress. Et j'étais très fatigué. Ce que je vois ici au niveau

  9   de ces images, eh bien, les combats faisaient rage. Et ceci s'est déroulé,

 10   me semble-t-il, peu de temps après -- alors, je me souviens pas de la date.

 11   Mais c'était certainement à un moment avant le début du mandat, lorsqu'il y

 12   avait les combats.

 13   Q.  Alors, d'après les informations dont je dispose, ceci s'est passé

 14   environ au moment où on parlait du fait que des réfugiés croates revenaient

 15   dans la région de la Baranja. Donc, cela, c'était vers le mois de septembre

 16   1992.

 17   R.  Eh bien, il y avait toujours ces bombardements. C'était un moment où

 18   les gens étaient très émotifs. Et ces émotions étaient très fortes.

 19   Q.  Je remarque -- vous avez donc donné cet entretien vers la fin de

 20   l'année 1992 en l'anglais.

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et vous vous adressiez à un interlocuteur serbo-croate.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Alors, pourquoi à l'époque -- c'était cinq ans après. Pourquoi ne

 25   parliez-vous pas le serbo-croate ?

 26   R.  Je ne le parlais pas, parce que c'était très différent. C'est une chose

 27   que de comprendre le serbe et de parler le serbe. Mais il est très

 28   difficile de donner son avis en serbe et je ne maîtrisais pas entièrement


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  1   la langue, l'essentiel de la langue. Et surtout lorsqu'il s'agit d'exprimer

  2   tout ce qui relève des émotions. Je n'avais qu'une connaissance de base. Je

  3   comprenais bien. Mais le fait de s'exprimer, c'était autre chose.

  4   Q.  A l'époque où vous êtes partie -- je souhaite, en fait, revenir un

  5   petit peu en arrière et parler de votre départ d'Osijek en 1991, avril 1991

  6   --

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Alors, vous dites que vous avez quitté Osijek au paragraphe 18, je

  9   crois, de votre déclaration. D'après ce que j'ai compris, c'était Ilija

 10   Celar qui vous a dit que vous et lui deviez partir, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et c'est lui qui vous a dit que la police ou le HOS vous avait pris

 13   pour cible et qu'on considérait que c'était un radical serbe, n'est-ce pas

 14   ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et que -- d'après votre déclaration, ce n'est pas très clair, en fait.

 17   Il pensait qu'il avait été pris pour cible et qu'on allait l'arrêter ou le

 18   tuer. Donc, c'est un peu confus, cette information.

 19   R.  Alors, si vous y étiez pris pour cible en Croatie à cette époque-là, on

 20   ne faisait pas la distinction entre être arrêté ou être tué. Donc, le

 21   simple fait d'être pris pour cible faisait peur.

 22   Q.  Et qui lui a livré cette information ?

 23   R.  En réalité, c'était un policier croate qui travaillait au sein des

 24   forces de police, et nous étions amis.

 25   Q.  Quel était le nom de cette personne ?

 26   R.  Je ne connais pas son nom.

 27   Q.  Vous ne savez pas --

 28   R.  [aucune interprétation]


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  1   Q.  Vous n'avez jamais su son nom ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Et comment savez-vous que c'était lui ?

  4   R.  Ilija me l'a dit.

  5   Q.  Ilija Celar a dit que c'était un policier croate --

  6   R.  Il m'a appelée et me l'a dit. Ensuite, mon voisin, par la suite, qui

  7   vit aux Etats-Unis. Elle devait venir nourrir mon chat, et le lendemain

  8   elle a dit qu'elle ne pouvait pas parce que ma maison avait été

  9   complètement encerclée par des hommes en chemises noires.

 10   Q.  Parce que vous deviez quitter Osijek pour organiser votre départ à bord

 11   d'un camion ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  De quel genre de camion s'agissait-il ?

 14   R.  Il y avait -- c'était un gros camion avec une bâche qui n'était pas

 15   attachée à l'arrière.

 16   Q.  Et vous avez pu charger tous vos effets personnels à bord de ce camion

 17   ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et vous et Ilija Celar, est-ce que vous estimez que vous avez quitté

 20   Osijek de votre plein gré en avril 1991 ?

 21   R.  Je dirais que nous sommes partis parce que nous avions peur.

 22    Q.  Merci.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser au

 24   témoin pour aujourd'hui.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 26   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu du type de

 27   question qui a été posé, je me demande si je peux demander à ce que M. le

 28   Président donne des instructions particulièrement claires à ce témoin


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  1   s'agissant de ses contacts avec d'autres personnes. Simplement pour

  2   m'assurer qu'on ne transgresse pas les conditions qui sont celles de la

  3   prestation de serment.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Gosnell.

  5   Madame Celar, les Juges de la Chambre lèvent l'audience pour aujourd'hui.

  6   Nous allons poursuivre votre interrogatoire demain, à 9 heures. Et ce que

  7   je dois vous dire, ce sur quoi M. Gosnell m'a demandé d'insister, c'est que

  8   vous êtes toujours un témoin même si vous n'êtes pas dans le prétoire, tant

  9   que vous êtes à la barre du témoin. Ce qui signifie que vous ne pouvez

 10   aborder la question de votre déposition avec personne, et vous ne pouvez

 11   pas non plus être en contact avec l'une ou l'autre des parties.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce clair ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   --- L'audience est levée à 13 heures 59 et reprendra le jeudi 4 septembre

 18   2014, à 9 heures 00.

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