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1 Le vendredi 21 août 2015
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est absent]
4 --- L'audience est ouverte à 15 heures 29.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire et
6 dans les environs du prétoire.
7 Madame la Greffière, veuillez citer le numéro de l'audience, je vous prie,
8 le numéro de l'affaire.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
10 Monsieur le Juge. Il s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre
11 Goran Hadzic.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
13 Les présentations, en commençant par l'Accusation, je vous prie.
14 M. OLMSTED : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur le
15 Juge. Je m'appelle Matthew Olmsted. Je suis accompagné d'Elizabeth Spelman
16 du côté de l'Accusation, avec notre assistant d'audience, Thomas Laugel.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
18 Maître Zivanovic, pour la Défense.
19 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur le
20 Juge. Du côté de la Défense de Goran Hadzic, vous avez devant vous Zoran
21 Zivanovic et Christopher Gosnell, accompagnés de Corey Stevens, assistant
22 juridique, et de Carlos Correa, stagiaire.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
24 Je demande que soit consigné au compte rendu d'audience le fait que M.
25 Hadzic a renoncé à son droit d'être présent en fournissant la documentation
26 nécessaire. Je demande également que soit consigné au compte rendu
27 d'audience le fait que la Chambre de première instance siège en vertu de
28 l'article 15 bis du Règlement, le Juge Mindua étant absent.
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1 L'audience d'aujourd'hui est le fruit d'une ordonnance proprio motu de la
2 Chambre de première instance, qui a ordonné la nomination d'experts
3 indépendants dont la tâche consisterait à aider le Tribunal à déterminer si
4 M. Hadzic peut supporter de participer à son procès. L'objet de la présente
5 audience consiste à entendre l'expert indépendant, le Dr Specenier, qui
6 répondra aux questions de l'Accusation, de la Défense, et éventuellement
7 des Juges, afin d'expliquer plus en détail et d'apporter des
8 éclaircissements à son rapport d'expert déposé le 15 juillet 2015.
9 L'audience commencera par 45 minutes d'auditions liées à l'interrogatoire
10 de l'Accusation, suivi de 45 minutes de questions de la Défense et se
11 conclura par les questions des Juges de la Chambre, si tant est qu'il y en
12 a.
13 Lorsque l'audition de l'expert, le Dr Martell a eu lieu, les parties ont
14 choisi de travailler en audience publique avec une restriction
15 particulière, toutefois, qui a été demandée par la Défense. A moins que la
16 position des parties ait changé, je proposerai que nous opérions de la même
17 façon aujourd'hui.
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Notre position n'a pas changé, Monsieur le
19 Président.
20 M. OLMSTED : [interprétation] Pas d'objection du côté de l'Accusation,
21 Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, nous resterons en audience
23 publique.
24 Je demande que l'on fasse entrer le témoin dans la salle, je vous prie.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Docteur Specenier. Dans
27 l'intérêt du compte rendu d'audience, je vous prierais de bien vouloir
28 décliner vos nom et prénom, dates de naissance et profession.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Pol Specenier. Je suis né le 31
2 janvier 1955, et je suis oncologiste dans le corps médical belge.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vais maintenant vous demander de
4 donner lecture de la déclaration solennelle pour laquelle les témoins
5 s'engagent à dire la vérité tout en s'exposant aux pénalités liées à un
6 faux témoignage s'ils fournissent des informations contraires à la vérité à
7 ce Tribunal.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
10 LE TÉMOIN : POL SPECENIER [Assermenté]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez vous
13 asseoir.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, vous pouvez
16 procéder.
17 M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Interrogatoire principal par M. Olmsted :
19 Q. [interprétation] Bonjour, Docteur.
20 R. Bonjour.
21 Q. Je devrais peut-être commencer par vous demander si vous préférez que
22 l'on s'adresse à vous en vous appelant docteur ou professeur.
23 R. Docteur sera très bien.
24 Q. Merci beaucoup. Je m'appelle Matthew Olmsted et je m'apprête à vous
25 poser une série de questions concernant le rapport que vous avez élaboré
26 pour la présente audience en l'espèce. Vous avez apporté un exemplaire de
27 ce rapport avec vous, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Très bien. Vous avez procédé à l'examen de M. Hadzic le 27 juin de
2 cette année, n'est-ce pas ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Et cet examen s'est divisé en interrogatoire ainsi qu'en examen
5 physique, n'est-ce pas ?
6 R. C'est exact.
7 Q. Je crois que nous avons des interprètes aujourd'hui, donc je vous
8 annonce la nécessité de ménager une brève pause entre mes questions et vos
9 réponses de façon à leur permettre de bien faire leur travail.
10 S'agissant de l'examen physique, en dehors d'une démarche mal assurée et
11 d'un léger tremblement, les résultats de votre examen ont été normaux, si
12 j'ai bien compris, n'est-ce pas ?
13 R. Je vérifie, si vous le permettez.
14 M. GOSNELL : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Je ne sais
15 pas ce que l'on entend par l'utilisation du mot "normal". Je ne suis pas
16 sûr que le témoin est en mesure de comprendre la signification exacte du
17 mot "normal".
18 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, je
19 fais référence à la page 10 du rapport du témoin en bas de page, où nous
20 pouvons lire que l'examen neurologique a été normal en dehors d'une
21 démarche mal assurée.
22 Q. C'est bien cela, Docteur ?
23 R. C'est exact. Mais je dois également faire mention de son indice
24 fonctionnel qui a été de 2.
25 Q. J'y viendrai dans un instant, Docteur.
26 Mais concentrons-nous pour le moment sur les résultats de votre examen
27 physique dont vous faites état dans votre rapport selon lequel le pouls de
28 M. Hadzic au début de l'examen était de 68 pulsations minutes et à la fin
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1 de l'examen, de 80 pulsations minute. Ce sont des valeurs qui se situent
2 dans la normalité, n'est-ce pas, pour un cœur adulte ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Comme vous l'avez dit, vous avez évalué l'indice fonctionnel ECoG de M.
5 Hadzic comme étant d'une valeur de deux sur un total de cinq, si je ne me
6 trompe. Ce chiffre mesure le niveau d'autonomie d'un patient dans le cadre
7 de ses capacités à se livrer à ses activités quotidiennes, n'est-ce pas ?
8 R. C'est exact.
9 Q. Et selon les tableaux que vous avez fournis dont il est fait état en
10 note de bas de page 6 de votre rapport, ECoG, une valeur de 2 dans l'ECoG,
11 signifie que M. Hadzic est capable de s'occuper de lui-même et de le faire
12 pendant la plus grande partie de la journée, mais incapable d'accomplir un
13 quelconque travail, n'est-ce pas ?
14 R. C'est exact.
15 Q. Pourriez-vous nous dire sur quelles informations repose cette
16 appréciation ECoG ?
17 R. Eh bien, elle repose sur les réponses aux questions fournies par la
18 personne interrogée quant à ses activités et sur ce qu'il fait pendant la
19 journée.
20 Q. Donc, ce résultat reposait sur des renseignements fournis par M. Hadzic
21 à vous, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Pouvez-vous nous expliquer ce que l'on entend par "incapable
24 d'accomplir un quelconque travail" dans le cadre d'une note de 2 à l'ECoG ?
25 Que signifie ce terme, "un quelconque travail" ?
26 R. Eh bien, cela signifie qu'on est incapable d'accomplir une quelconque
27 activité professionnelle.
28 Q. Ce genre de travail que vous aviez à l'esprit, était-ce celui auquel
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1 vous pensiez en procédant à votre évaluation ?
2 R. Travailler sur un ordinateur, lire pendant une période prolongée, en
3 effet.
4 Q. Et lorsque vous parlez de "période prolongée", cela signifie combien de
5 temps ?
6 R. Plus d'une heure, par exemple.
7 Q. Sur la base de vos informations, M. Hadzic est-il capable de participer
8 à une conversation prolongée et à répondre précisément à des questions qui
9 lui seraient posées ? A-t-il pu le faire, s'agissant des questions que vous
10 lui avez posées ? Je fais référence à la page 11 de votre rapport.
11 R. C'est une question difficile. Au moment où l'examen s'est produit, ce
12 jour particulier, il a été capable de mener une conversation avec moi
13 pendant 80 minutes, dans une situation de rapport entre deux personnes, en
14 face-à-face, sans ingérence de quelque autre personne que ce soit. Il a pu
15 le faire. Je pense que c'est une question différente s'il était placé dans
16 une situation où un nombre plus important de personnes s'adresseraient à
17 lui, ou bien où il subirait un certain stress car, bien entendu, avec moi
18 il était détendu. Il était dans une situation de détente à l'époque et au
19 moment où nous avons eu notre conversation.
20 Q. Je reviendrai sur cette question de multiplicité de personnes lui
21 parlant en même temps --
22 R. Hm-hm.
23 Q. -- comme vous l'écrivez plus loin dans votre rapport.
24 Etiez-vous conscient qu'une autre partie de son examen neuropsychologique
25 serait réalisée quelques semaines après l'examen auquel vous avez procédé
26 sur M. Hadzic, et que dans cette deuxième partie, il a répondu à 567
27 questions écrites pendant trois heures environ ?
28 R. Je l'ai lu dans le rapport. J'ai ce rapport avec moi.
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1 Q. Est-ce que le fait de répondre à 567 questions mérite une note de 2
2 dans le cadre du test ECoG ?
3 R. Oui. Mais cela peut être qualifié comme un travail.
4 Q. Alors, si l'on revient sur ce que vous avez dit dans votre réponse
5 précédente, je vois dans votre rapport en page 11 que vous indiquez que M.
6 Hadzic ne serait pas totalement capable de subir un contre-interrogatoire
7 ou une situation où un nombre plus important de personnes s'adresseraient à
8 lui. Est-ce que votre entretien avec lui a bien duré 80 minutes ?
9 R. Hm-hm.
10 Q. Je suppose qu'étant donné les observations faites par lui, vous
11 comprenez bien quel genre d'activités M. Hadzic devrait avoir à accomplir
12 s'il participait à son procès.
13 R. J'ai pensé à cela, oui.
14 Q. Avant d'être contacté par le Tribunal, est-ce que vous avez suivi
15 l'ensemble de l'espèce ?
16 R. Non.
17 Q. Pendant votre entretien avec M. Hadzic, est-ce qu'il a parlé avec vous
18 d'un quelconque aspect lié à l'espèce ?
19 R. Non, ou de façon tout à fait vague, il a évoqué sa responsabilité, son
20 activité de l'époque, mais sans aborder de détails liés à l'espèce.
21 Q. Je suppose que vous ne saviez pas qu'il y a un an, M. Hadzic a témoigné
22 et que vous ne savez pas qu'il a été soumis à un contre-interrogatoire ou à
23 des questions --
24 R. Non --
25 Q. -- en l'espèce.
26 R. Non.
27 Q. Saviez-vous que M. Hadzic est représenté dans le prétoire par une
28 équipe de juristes, dont deux conseils de Défense, et que, par conséquent,
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1 il n'est pas contraint d'interroger des témoins ou de présenter oralement
2 des arguments ou de présenter des arguments écrits en l'espèce ?
3 R. Non, je ne suis pas au courant.
4 Q. Savez-vous que la Chambre de première instance considère que les
5 propositions destinées à ce que ce procès se termine rapidement
6 permettraient de raccourcir la durée du procès afin d'augmenter le nombre
7 de pauses permettant à M. Hadzic de disposer d'un temps nécessaire pour
8 récupérer et se reposer ?
9 R. Non, je ne suis pas au courant des modalités concrètes de ce procès.
10 Q. Vous n'êtes pas non plus au courant du fait que l'une des propositions
11 consiste à permettre à M. Hadzic de rester en Serbie et de suivre son
12 procès par visioconférence s'il le souhaite.
13 R. Non.
14 Q. Conviendriez-vous que ces considérations sont pertinentes s'agissant
15 d'apprécier la capacité de M. Hadzic à opérer efficacement dans le cadre de
16 son procès ?
17 R. Ce sont des éléments pertinents, mais je reviens à la déclaration que
18 j'ai déjà faite le jour où je l'ai rencontré, je suppose que la situation a
19 évolué d'un moment à un autre, qu'elle n'a pas toujours été identique. Son
20 état a évolué, comme il le fait de jour en jour. On peut s'attendre à ce
21 que son état s'aggrave rapidement. Donc, un jour, une heure, ne représente
22 pas l'intégralité de la période qui constituera sa vie.
23 Q. Je comprends cela. Mais je crois que vous avez pris en considération
24 les possibilités pour lui d'avoir à affronter un contre-interrogatoire ou
25 de se soumettre à de longues séances judiciaires, et que ces considérations
26 sont pertinentes pour déterminer s'il peut opérer dans ces conditions ?
27 R. Un raccourcissement des périodes pourrait lui faciliter un peu la
28 tâche, en effet.
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1 Q. En page 8 de votre rapport, vous dites que le 12 mai 2015, un examen
2 IRM a montré que la lésion du lobe temporal droit de son cerveau avait
3 augmenté en taille et qu'elle était accompagnée d'une autre lésion dans le
4 corps calleux ?
5 R. Hm-hm.
6 Q. Cela concernait bien des parties du cerveau de M. Hadzic à l'époque ?
7 R. L'œdème du cerveau avait augmenté de taille et la ligne médiane du
8 cerveau en avait été déplacée, ce qui a un impact sur le fonctionnement de
9 son cerveau.
10 Q. Est-ce qu'il existe quoi que ce soit qui indiquerait que son cancer
11 s'est étendu dans des parties importantes du cerveau ?
12 R. Non.
13 Q. Qu'est-ce que cela signifie du point de vue de ses fonctions
14 cognitives ?
15 R. Ses fonctions cognitives vont décliner.
16 Q. Mais ma question portait sur le fait de savoir si le cancer ne
17 concernait pas une partie du cerveau responsable de l'élocution, qu'est-ce
18 que signifie le fait qu'une lésion ait augmenté de taille dans le cerveau ?
19 R. Eh bien, il y a interférence avec les capacités d'élocution, mais pas
20 avec les fonctions cognitives.
21 Q. Pas avec les fonctions cognitives.
22 R. Non, non, pas d'interférence avec les fonctions cognitives.
23 Q. Pour que tout soit clair, parce que je n'arrête pas d'aller de l'avant
24 vers l'arrière. Nous parlons bien des fonctions d'élocution. Seraient-elles
25 affectées ?
26 R. Non.
27 Q. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'est la partie responsable de
28 l'élocution du cerveau ?
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1 R. Je crois comprendre que vous parlez de communication verbale.
2 Q. Et quelle est la partie du cerveau qui est responsable des fonctions
3 d'exécution ?
4 R. Tout le cerveau est responsable des fonctions d'exécution.
5 Q. Et la partie du cerveau responsable de la mémoire ?
6 R. Eh bien, il y a plusieurs parties du cerveau qui ont un rôle dans la
7 mémoire, pas un point en particulier.
8 Q. Donc, sur la base de ces résultats de l'IRM, vous êtes parvenu à la
9 conclusion que M. Hadzic était un patient souffrant de glioblastome
10 récurrent, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Dans votre rapport, aux pages 11 et 12, vous apportez des éléments
13 statistiques relatifs à la probabilité de survie de patients souffrant de
14 glioblastome récurrent, et ce, sur la base de deux essais cliniques de
15 phase trois impliquant trois patients souffrant de cancer et recevant un
16 certain nombre de traitements médicamenteux. Je crois que vous apportez
17 également des détails à ce sujet en notes en bas de page 7 et 8 de votre
18 rapport, n'est-ce pas ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Ces essais cliniques reposaient sur deux points de fin de vie
21 différents s'agissant de déterminer globalement la survie et la survie sans
22 aggravation de la maladie, n'est-ce pas ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Les deux points de démarrage pris en compte dans le test ont été
25 choisis de façon aléatoire. Pouvez-vous nous expliquer quelle est cette
26 date aléatoire s'agissant de l'espèce ?
27 R. Eh bien, c'est le moment où le traitement a été déterminé. Les patients
28 entrent dans un protocole dans lequel ils ont le choix du démarrage de
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1 l'essai à un moment déterminé.
2 Q. Est-ce que les données aléatoires permettent un diagnostic plus rapide
3 ou moins rapide d'un glioblastome récurrent ?
4 R. La chose peut être concomitante avec le diagnostic de récurrence. M.
5 Hadzic correspond, disons, au mois d'avril ou de mai.
6 Q. L'IRM a-t-il montré une aggravation de la maladie et, par conséquent,
7 un point de récurrence ?
8 R. Le point de récurrence, c'est le moment où on peut comparer les deux
9 types d'essais aléatoires et s'en tenir à une marge d'un mois pour le
10 démarrage d'un nouveau traitement.
11 M. OLMSTED : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel, je
12 vous prie.
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
15 [Audience à huis clos partiel]
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12 [Audience publique]
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
14 M. OLMSTED : [interprétation]
15 Q. Parlons maintenant de la survie sans aggravation de la maladie, à
16 savoir le deuxième point de départ de ces études. On parle d'aggravation
17 lorsque le glioblastome s'aggrave ou lorsque le patient meurt, n'est-ce
18 pas ?
19 R. Exact.
20 Q. Autrement dit, le point final pour les patients concernés n'est pas
21 nécessairement la mort dans cette étude ?
22 R. Non, c'est l'aggravation de la maladie.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, nous parlons trop
24 rapidement pour les interprètes. Veuillez ménager une pause entre vos
25 questions et les réponses du témoin.
26 M. OLMSTED : [interprétation] Je ne l'oublierai pas, Monsieur le Président.
27 Je vois que c'est inscrit à l'écran.
28 Je demande l'affichage du document 65 ter numéro 6818.
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1 Q. Docteur, je me suis rendu sur internet et j'ai consulté d'abord cette
2 première étude par Wick et collègues concernant l'essai clinique dont nous
3 venons de parler. Je demande l'affichage de la page 3 de cette étude avec
4 agrandissement du tableau qui se trouve en bas, à gauche de la page. Nous
5 voyons dans ce tableau que si un grand nombre de patients ont subi une
6 aggravation de la maladie durant cette étude, 15 seulement de ces patients
7 sont morts. Est-ce de ma part une bonne lecture du tableau en question ?
8 R. Je pense que cette lecture n'est pas totalement correcte. Le patient
9 parvient à un point final, qui est soit un point où l'aggravation se
10 produit, soit un point où la mort se produit. Mais dès que le point en
11 question est atteint, le patient entre dans une autre catégorie. Et il est
12 probable que parmi ces patients, il y en ait qui soient morts aussi.
13 Q. Alors, je vais répéter pour voir si j'ai bien compris. Le point final
14 pour la grande majorité de ces patients était une aggravation de la
15 maladie, et pour une poignée d'entre eux, c'était la mort.
16 R. Le premier point final était une aggravation de la maladie pour la
17 majorité d'entre eux, et le premier point final était la mort. Mais pour le
18 deuxième point final, il ne dépend pas des proportions de point final
19 observées pour le premier.
20 Q. Et la mort n'est pas un résultat dû nécessairement à cette maladie.
21 Elle peut être produite par une autre cause.
22 R. Elle peut être produite par une autre cause, mais dans ce type de
23 tumeurs, globalement la grande majorité des morts est due au cancer.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous entendez
25 l'avertissement des interprètes ?
26 Non, non, mais je parle aussi au Dr Specenier. Les interprètes vous
27 demandent de vous rapprocher du micro. Peut-être que M. l'Huissier pourrait
28 réorienter le micro légèrement. Bien. Nous allons voir.
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1 Veuillez procéder, Monsieur Olmsted.
2 M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Je demanderais que l'on agrandisse sur l'écran le résumé que l'on trouve au
4 troisième paragraphe dans cette page. Nous voyons que cinq patients sont
5 décédés pour des raisons qui n'avaient pas de lien direct avec le cancer :
6 quatre d'entre eux en raison d'événements négatifs, et le cinquième, parce
7 que c'était un toxicomane.
8 R. C'est exact.
9 Q. Docteur, pouvez-vous nous dire si une aggravation d'une tumeur
10 cérébrale peut être asymptomatique, c'est-à-dire détectable uniquement à
11 l'aide d'IRM ou d'autres tests médicaux ?
12 R. C'est exact.
13 Q. Donc l'aggravation n'a pas nécessairement une incidence sur les
14 capacités fonctionnelles d'un patient.
15 R. Pas immédiatement, pas nécessairement dans l'immédiat.
16 Q. En dehors de la survie globale et de la survie en l'absence
17 d'aggravation de la maladie, il y a d'autres éléments qui peuvent être liés
18 à l'aggravation ?
19 R. Oui.
20 Q. La durée de l'aggravation, et cetera.
21 R. Oui.
22 Q. Et la raison pour laquelle des points finaux différents sont utilisés
23 dans des études cliniques différentes, c'est que les différents patients
24 subissent des limitations de leurs capacités qui sont différentes.
25 R. C'est exact.
26 Q. L'une d'entre elle étant un point final qui inclut un décès qui n'est
27 pas lié au cancer.
28 R. C'est exact.
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1 Q. Et l'un des éléments liés à une survie sans aggravation de la maladie,
2 c'est qu'il peut y avoir un biais de l'étude, un biais de recherche.
3 R. C'est exact. Mais la plupart du temps, les images sont envoyées à une
4 tierce partie qui va les évaluer, mais fondamentalement, vous avez raison
5 de dire que la survie, la survie globale est également un élément important
6 à prendre en compte par rapport à l'éventualité d'un décès. Et c'est un
7 élément important pour le glioblastome également, qui n'est pas une partie
8 importante des patients concernés par cette étude. Disons que dans un
9 cancer du sein ou d'autres types de tumeur, il peut y avoir des
10 conséquences plus importantes pour les patients. Mais dans le gliobastome,
11 la survie globale est liée de très près à l'aggravation, car la grande
12 majorité des aggravations est due au glioblastome en tant que tel.
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Micro, je vous prie.
14 M. OLMSTED : [interprétation] Je vais me répéter.
15 Q. Au sujet des limitations, mais également au fait que les patients, dans
16 leur diversité, démontrent des résultats différents dans ces types d'essais
17 cliniques qui peuvent donner une idée approximative quant au moment où un
18 patient particulier souffrant de glioblastome va voir sa maladie s'aggraver
19 ou va décéder; c'est bien exact ?
20 R. Les essais cliniques sont statistiques. On ne peut pas parler de
21 patients individuellement. En effet, quand on commence l'étude avec une
22 centaine de patients, on suit la progression de ces patients. Mais bien
23 entendu, comme vous l'avez déjà dit, il y a 10 à 15 % de patients qui
24 vivront plus longtemps que 14 mois. On ne sait jamais qui va faire partie
25 de ces 15 %. On est là face à la chance.
26 Q. [aucune interprétation]
27 R. C'est ce que l'on entend par le terme de données statistiques. Je dois
28 dire qu'on peut avoir une idée, bien sûr, car il peut y avoir des rechutes
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1 après un an après la fin d'un traitement -- fait l'objet d'un meilleur
2 pronostic qu'une aggravation lors du traitement. Donc, c'est quelque chose
3 dont il faut tenir compte. Il faut tenir compte des spécificités de la
4 maladie.
5 M. Hadzic a vu sa maladie s'aggraver après le traitement d'adjuvant, ce qui
6 est une situation pire qu'une aggravation de la maladie, après un an ou
7 davantage. Donc, il s'agit de spécificités de la maladie dont il faut tenir
8 compte aussi. Il faut aussi tenir compte du fait qu'il n'y a pas eu
9 résection de la tumeur, qu'il n'y a eu qu'une biopsie. Donc, il s'agit de
10 spécificités qui ne sont pas favorables s'agissant de sa maladie. Il n'y a
11 pas eu de méthylation MGMT, donc la tumeur a moins répondu à la
12 chimiothérapie. Donc, il faut mettre dans la balance différentes
13 spécificités de la maladie.
14 Est-ce que je peux l'exprimer différemment ? Pardon si je vous interromps.
15 Cela me surprendrait énormément s'il se trouvait en fait à l'extrémité de
16 la courbe. Cela me surprendrait énormément.
17 Q. Alors, d'autres spécificités de la maladie qui peuvent être prises en
18 compte, l'âge du patient comme l'emplacement de la tumeur --
19 R. Bien sûr.
20 Q. -- et d'autres facteurs également.
21 R. Bien sûr.
22 Q. Je crois que j'ai vu une étude, on peut tenir compte de 50 à 60
23 facteurs ou variables, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, tout à fait.
25 M. OLMSTED : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le
26 Président.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
28 Maître Gosnell, quand vous serez prêt.
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1 M. GOSNELL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur le
2 Juge.
3 Interrogatoire principal par M. Gosnell :
4 Q. [interprétation] Bonjour, Docteur Specenier. Est-ce que je prononce
5 votre nom correctement ?
6 R. Specenier.
7 Q. Je m'appelle Christopher Gosnell. Je représente les intérêts de M.
8 Hadzic. J'ai quelques questions à vous poser aujourd'hui. Si mes questions,
9 étant donné qu'elles émanent d'un néophyte, si elles ne sont pas très
10 claires, n'hésitez pas à me demander des précisions, s'il vous plaît.
11 A la page 11 de votre rapport, on a la réponse à la question numéro 2, vous
12 dites que : "Le glioblastome n'a pas répondu" - et vous avez souligné en
13 caractère gras ce terme-là, "n'a pas bien répondu au traitement. En
14 réalité, la maladie a progressé", ce qui signifie que la maladie a empiré,
15 "malgré le traitement. Cette estimation se fonde sur une analyse des images
16 IRM qui ont été effectuées au MCH en mai 2015, qui montrent que le diamètre
17 de la lésion la plus importante a augmenté, et qu'il y a une nouvelle
18 lésion et qu'il y a un œdème avec un déplacement de la ligne médiane."
19 Et à la page 8 de votre rapport, vous donnez une description sur la manière
20 dont la lésion visible a augmenté en taille. Vous dites que la lésion est
21 passée à 2,9 par 2,6, c'était l'IRM qui a été effectuée au mois de novembre
22 --
23 R. Oui, au niveau de la ligne médiane.
24 Q. Et ceci est passé à 4,1 par 4,8 centimètres. Donc, cela signifie que,
25 si mes calculs sont à peu près corrects, nous sommes passés de 7,5
26 centimètres carrés à 20 centimètres carrés en taille ?
27 R. C'est exact. Nous ne calculons pas en termes de centimètres carrés
28 parce qu'une tumeur est sphérique, et une tumeur a une forme irrégulière.
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1 Q. Est-ce que l'on pourrait dire que cela a triplé en taille,
2 approximativement ?
3 R. C'est exact. En tout cas, oui, au moins.
4 Q. Donc, cela signifie qu'aujourd'hui - compte tenu du fait que cette
5 tumeur est d'une forme irrégulière - cela correspond à peu près à la taille
6 d'une balle de tennis.
7 R. C'est exact.
8 Q. Et indépendamment des données statistiques sur la progression des
9 lignes médianes en tant que telles, ceci constitue une aggravation, n'est-
10 ce pas ?
11 R. Il s'agit d'une aggravation.
12 Q. Et en réalité -- maintenant, j'utilise le terme utilisé par un des
13 médecins du quartier pénitentiaire des Nations Unies dans son rapport du 17
14 juin, ceci est une aggravation dramatique, n'est-ce pas ?
15 R. Encore une fois, ça peut être qualifié de dramatique.
16 Q. Et vous dites dans votre rapport, encore une fois à la page 11, qu'il y
17 a une nouvelle lésion. Pourriez-vous nous parler de la taille de cette
18 nouvelle lésion ?
19 R. Malheureusement, je ne dispose pas de cela. Je ne l'ai pas sur moi.
20 Q. Alors, pourriez-vous me donner la taille de cette lésion par rapport à
21 l'autre --
22 R. Je crois que cela fait moins d'un centimètre.
23 Q. Et vous dites qu'il y a un œdème avec un déplacement de la ligne
24 médiane. Ce déplacement de la ligne médiane, en termes de millimètres, est
25 de combien ?
26 R. Encore une fois, 5 millimètres -- encore une fois, je n'ai pas les
27 éléments avec moi.
28 Q. Est-ce que c'est un déplacement important, 5 millimètres ?
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1 R. C'est important.
2 Q. Lorsqu'il y a un déplacement de la ligne médiane, on parle ici d'un
3 phénomène qui signale une pression intracrânienne importante ?
4 R. Oui.
5 Q. Et une pression au niveau du crâne à ce niveau de la ligne médiane dans
6 le cerveau peut être fatale ?
7 R. Cela peut être fatal à court terme.
8 Q. "Court terme", est-ce que cela signifie que cela peut provoquer une
9 mort soudaine ?
10 R. Non, je ne m'attends pas à une mort soudaine.
11 Q. Qu'est-ce que vous entendez par "à court terme", "assez rapidement" --
12 R. A ce moment-là, on s'attend à un déclin progressif de ses fonctions
13 neurologiques et de son état de conscience. Je ne m'attends pas à une mort
14 subite.
15 Q. Est-ce que nous parlons de symptômes qui se manifestent de semaine en
16 semaine et qui peuvent provoquer la mort ?
17 R. Effectivement, on peut voir évoluer les symptômes d'une semaine à
18 l'autre.
19 M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, il faut passer
20 maintenant à huis clos partiel pour d'autres questions.
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
23 Monsieur le Président.
24 [Audience à huis clos partiel]
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6 [Audience publique]
7 M. GOSNELL : [interprétation]
8 Q. Monsieur Specenier, je souhaite maintenant m'éloigner de la question de
9 la mortalité, nous n'allons pas parler de la mortalité, mais nous allons
10 parler de lacunes ou de déficits. Page 12 de votre rapport.
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15 Et quand vous parlez de déficits ou de lacunes, est-ce que vous parlez de
16 déficits cognitifs ?
17 R. Oui.
18 Q. Et vous avez dit un peu plus tôt qu'après l'aggravation de la maladie,
19 vous avez dit que les conditions d'un patient peut -- les conditions
20 peuvent empirer rapidement. A quelle vitesse, d'après vous ? Est-ce que
21 nous parlons d'une semaine à l'autre ? Est-ce que le déclin peut se
22 produire en si peu de temps ?
23 R. Il peut y avoir une aggravation d'une semaine à l'autre.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.
25 M. GOSNELL : [interprétation]
26 Q. Et compte tenu de l'aggravation des lésions -- de la lésion primaire de
27 M. Hadzic observée entre le mois de décembre et le mois de mai,
28 conviendrez-vous qu'il est tout à fait possible que sa condition ait empiré
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1 de semaine en semaine ?
2 R. C'est tout à fait plausible.
3 Q. Et cela aurait pu se produire même en l'espace des deux semaines et
4 demie entre l'examen que vous avez pratiqué sur M. Hadzic et celui du
5 neuropsychologue; c'est exact ?
6 R. C'est tout à fait exact. Il y a une différence entre les deux types
7 d'examens. Mon examen n'a consisté qu'à avoir un entretien; son examen
8 était un examen assez approfondi. Et ça, c'est une explication. Il est tout
9 à fait possible que dans cet intervalle, sa condition a décliné.
10 Q. Et vous-même, vous n'avez fait aucun essai cognitif sur M. Hadzic ?
11 R. Non.
12 Q. Vous n'avez pas effectué d'essais ou de tests sur M. Hadzic par le
13 truchement d'un interprète ?
14 R. Non.
15 Q. Dans sa langue ?
16 R. Non.
17 Q. Vous n'avez pas procédé à des essais non verbaux cognitifs en utilisant
18 des diagrammes ou des images ?
19 R. Non, non.
20 Q. C'est la raison pour laquelle, à la page 11 de votre rapport, vous
21 dites très précisément qu'un examen neuropsychologique plus approfondi est
22 justifié; c'est exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Et vous conviendrez avec moi, compte tenu de tous ces facteurs, que le
25 Dr Martell est mieux à même, en fait, de donner une estimation de ses
26 fonctions cognitives que vous ?
27 R. Tout à fait. Et également, un examen plus approfondi avait été prévu à
28 l'époque où, moi-même, j'ai vu le patient, donc je savais que je ne devais
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1 pas moi-même pratiquer cet examen parce que cet examen avait déjà été
2 prévu.
3 Q. Encore une fois, est-ce que nous pouvons revoir ce rapport du médecin
4 du quartier pénitentiaire qui est daté du 8 juin, à la fin du paragraphe 4,
5 on peut lire : "Avec un nouveau traitement de cette tumeur, ce pronostic
6 pourrait prolonger la vie du patient de plusieurs mois."
7 Je ne vais pas parler du nombre de mois, Monsieur Specenier, car je ne
8 souhaite pas que ce chiffre soit particulièrement rendu public.
9 Mais : "Bien évidemment, on ne peut pas prévoir dans quelle mesure le
10 traitement peut aboutir et quels seraient les effets secondaires au niveau
11 du patient."
12 Au paragraphe 5 : "Et l'assistant du médecin a conclu dans son rapport du
13 22 que M. Hadzic avait décidé de ne pas avoir encore un traitement de
14 chimiothérapie pour des raisons que je comprends tout à fait -- d'après
15 moi, pour des raisons évidentes et tout à fait compréhensibles."
16 Pourriez-vous nous donner les raisons pour lesquelles vous estimez
17 que c'est évident et compréhensif, pourquoi il ne souhaite pas avoir un
18 autre traitement chimiothérapique ?
19 R. Parce qu'en fait, il a peu de chances d'améliorer son pronostic. Et
20 parce que je crois que dans ce cas-ci, la déclaration qui est faite par M.
21 Taphoorn est un peu optimiste, car il n'y a pas de données qui permettent
22 de montrer qu'un deuxième traitement permettrait d'améliorer la survie du
23 patient. C'est la raison pour laquelle ces deux publications ont été
24 ajoutées, parce qu'il est très difficile de trouver un quelconque
25 traitement qui permet d'augmenter le pronostic même de quelques semaines,
26 de rallonger de quelques semaines la vie du patient. Bon, même si ce n'est
27 pas un certain nombre de mois, je crois que le traitement n'a que très peu
28 d'incidence ou ne fera pas une très grande différence.
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1 Q. Et compte rendu de la réaction de M. Hadzic à la chimiothérapie
2 d'adjuvant, pensez-vous qu'il peut y avoir un danger pour lui, autrement
3 dit, au niveau des effets secondaires et de la chimiothérapie, le
4 traitement de deuxième intention ?
5 R. Alors, moi, si j'étais dans son cas et si j'avais ce type de
6 diagnostic, je n'accepterais pas moi-même un traitement de deuxième
7 intention, si j'étais à sa place.
8 Q. Docteur, je souhaite vous demander de bien vouloir regarder le
9 paragraphe 3 de ce rapport médical, qui est daté du 18 juin 2015, de
10 l'assistant du médecin du quartier pénitentiaire, qui a été en contact avec
11 le Dr Taphoorn, et il dit : "J'ai demandé au Dr Taphoorn si une
12 conversation téléphonique hebdomadaire avec le médecin en chef serait trop
13 difficile pour M. Hadzic. Il pensait que cela n'était pas le cas.
14 Cependant, il a estimé que des essais au niveau de ses fonctions cognitives
15 seraient trop difficiles et fatigants pour M. Hadzic, compte tenu de l'état
16 d'évolution de sa maladie. Egalement, d'un point de vue médical, il a
17 estimé que cela n'était pas indiqué."
18 Alors, je souhaite me concentrer sur le point suivant -- à titre
19 préliminaire, je souhaite comprendre ce que signifie "compte tenu de l'état
20 d'avancement de la maladie", parce que vous, vous l'utilisez à la page 12
21 de votre rapport également. Et, en réalité, cela se trouve à la dernière
22 phrase de votre rapport, où vous dites : "Cependant, la situation n'est pas
23 telle que ce choix aura un effet négatif sur sa survie étant donné que
24 l'avantage du traitement est minime à ce stade de la maladie."
25 A quel stade de la maladie pensiez-vous lorsque vous avez dit cela ?
26 R. Alors, je pense à un glioblastome récurrent. Ça, c'est le stade de sa
27 maladie.
28 Q. Est-ce que cela englobe la notion d'une aggravation après cela ?
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1 R. Oui.
2 Q. Et ensuite, le Dr Taphoorn dit que d'un point de vue médical, il a
3 estimé que ceci n'était pas indiqué.
4 En termes médicaux, lorsqu'un médecin dit qu'une façon de procéder ou de
5 traiter le patient n'est pas indiquée --
6 R. Alors, je suppose, je ne suis pas moi-même à la place du Dr Taphoorn,
7 je suppose qu'il ne le fera pas. Et moi, je ne le ferais pas non plus.
8 Q. Pourquoi ne le feriez-vous pas non plus ?
9 R. Comme je l'ai dit, son indice ECoG était de 2, et donc, il a dû faire
10 l'objet de tests pendant deux heures, et cela est long.
11 Q. Et vous pensez que c'est particulièrement fatigant pour lui ?
12 R. Oui, oui, c'est tout à fait fatigant.
13 Q. Ce ne serait pas utile sur un plan purement médical ?
14 R. Non, cela ne permettra pas d'améliorer sa condition.
15 Q. Alors, s'il devait faire ça un jour après l'autre, est-ce que cela
16 pourrait avoir une conséquence négative sur sa condition ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 M. GOSNELL : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser,
19 Monsieur le Juge.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Docteur Specenier, la présente
22 audience en arrive à son terme --
23 Oui, Monsieur Olmsted.
24 M. OLMSTED : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président, je ne me
25 rendais pas compte qu'il n'y aurait pas de questions de la part des Juges.
26 Me permettriez-vous de poser quelques questions supplémentaires après
27 l'interrogatoire de la Défense ?
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez procéder.
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1 M. OLMSTED : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
2 Nouvel interrogatoire par M. Olmsted :
3 Q. [interprétation] Alors, tout d'abord, pour poursuivre sur les dernières
4 questions auxquelles vous venez de répondre, je sais qu'il ne vous
5 appartient pas d'interpréter les propos tenus par le Dr Taphoorn, mais
6 lorsqu'il dit que "ce ne serait pas indiqué", est-ce que cela peut vouloir
7 dire également que ce n'est pas nécessaire ?
8 R. C'est possible.
9 Q. Dans votre rapport, vous n'avez découvert aucun signe d'altération de
10 la mémoire, qu'il s'agisse de la mémoire à long terme ou à court terme,
11 n'est-ce pas ?
12 R. C'est exact.
13 Q. Durant vos plus de 25 ans d'expérience en qualité d'oncologiste, vous
14 avez eu la possibilité d'observer un très grand nombre de patients
15 souffrant de cancer, n'est-ce pas ?
16 M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je vais opposer une
17 objection car je n'entends rien dans ce qui vient d'être dit qui concerne
18 les questions que j'ai posées au Dr Specenier.
19 M. OLMSTED : [interprétation] Cela vient, Monsieur le Président, si vous me
20 le permettez. Je ne faisais qu'établir les fondements.
21 Q. Alors, Docteur, sur la base de vos 25 ans d'expérience en qualité
22 d'oncologiste, quels sont les signes que vous vous attendriez à voir
23 apparaître chez un patient qui souffrirait d'une mémoire à court terme
24 diminuée de façon importante ?
25 R. Je ne le ferais pas --
26 M. GOSNELL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais je
27 maintiens mon objection car ceci n'a aucun rapport avec aucune des
28 questions que j'ai posées.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Objection retenue.
2 M. OLMSTED : [interprétation]
3 Q. Eh bien, j'aimerais dans ce cas aborder la série de questions qui a été
4 posée au sujet de l'écart que l'on constate entre les conclusions de
5 l'examen auquel le docteur a procédé sur M. Hadzic et celles de l'examen
6 conduit par le Dr Martell, car s'agissant des capacités cognitives, il y a
7 un certain écart entre des moments différents qui ont été pris en compte.
8 Ma question, Docteur, est la suivante : en faisant appel à votre expérience
9 professionnelle, est-ce que vous vous attendriez à ce que des signes d'une
10 diminution de la mémoire à court terme soient remarqués, soient
11 observables, chez un patient dont la mémoire à court terme se situe dans
12 les 1 % du bas de la courbe pour la population concernée ?
13 M. GOSNELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président, écoutez, encore
14 une fois, je suis désolé, mais ceci n'a rien à voir avec les questions que
15 j'ai posées au témoin, et la façon dont la dernière question a été posée
16 est inacceptable, dirais-je.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'en conviens, Monsieur Olmsted.
18 M. OLMSTED : [interprétation] Très bien. Je n'ai pas d'autres questions à
19 poser à ce témoin.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, Docteur Specenier, ceci met
21 un point final à votre audition. Nous vous remercions d'être venu au
22 Tribunal pour lui apporter votre concours. Vous pouvez maintenant quitter
23 la salle. M. l'Huissier va vous escorter hors du prétoire, et nous vous
24 souhaitons un bon retour à votre domicile en ce vendredi soir où la
25 circulation automobile est très importante entre La Haye et Antwerp.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
27 [Le témoin se retire]
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les parties sont bien conscientes du
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1 fait que leurs écritures sont attendues d'ici à mardi, si je ne me trompe ?
2 Donc, si nous n'avons plus rien à débattre, je déclare close l'audience
3 d'aujourd'hui.
4 --- L'audience est levée à 16 heures 35, sine die.
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