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1 Le mercredi 28 janvier 2004
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est
8 l'affaire IT-01-47-T, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir
9 Kubura.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais demander à
11 l'Accusation de se présenter.
12 M. WITHOPF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Madame, Monsieur
13 les Juges, les conseils de la Défense. Je représente l'équipe de la
14 Défense, Tecla Benjamin et Ekkehard Withopf. Nous serons rejoints par notre
15 commise à l'affaire, qui est Kimberly Fleming.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie.
17 Je vais demander aux Défenseurs de se présenter.
18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
19 Monsieur les Juges. Au nom du général Enver Hadzihasanovic, Edina
20 Residovic, Stéphane Bourgon et Milan Milanovic, notre assistante juridique.
21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Me Rodney
22 Dixon, Fahrudin Ibrisimovic et notre assistant juridique, M. Mulalic.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre salue toutes les personnes présentes. Les
24 représentants de l'Accusation, les Défenseurs, les accusés et tout le
25 personnel qui assure la bonne marche de cette audience.
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1 Nous avons aujourd'hui l'audition de témoins, mais, avant de procéder à
2 l'audition de témoins, il y aurait deux petits points à régler au
3 préalable.
4 Tout d'abord, comme vous le savez, la Chambre a rendu une décision
5 concernant la modification des listes de témoins et de pièces à conviction.
6 De mémoire, dans cette décision, j'avais indiqué que la Chambre prendrait
7 une décision séparée, concernant le rapport du témoin expert, le général
8 Reinhardt. Cela concernait la pièce 108, qui était listée dans le tableau
9 de l'Accusation. La pièce 108 suivait 107 documents qui ont été remis au
10 général Reinhardt pour qu'il produise son mémoire écrit.
11 Il résidait une difficulté afin que la Chambre rende sa décision concernant
12 la pièce 108, qui concerne l'ambiguïté par rapport au contenu même du
13 rapport écrit du général Reinhardt. De mémoire, celui-ci indique que, dans
14 un paragraphe, je crois que c'est le paragraphe 2, et que, dans ce
15 paragraphe 2, il a reçu des pièces complémentaires de l'Accusation. Alors,
16 est-ce que les pièces complémentaires figuraient dans les 107 documents qui
17 lui avaient été remis ou les pièces complémentaires ne figuraient pas dans
18 les 107 documents ? J'aimerais que l'Accusation indique si toutes les
19 pièces, qui ont été remises au général Reinhardt, sont bien les 107
20 documents qui sont recensés ici dans le paragraphe concernant les documents
21 qui lui ont été remis quand il fait référence à des pièces complémentaires.
22 Ces pièces complémentaires sont bien parties intégrantes des 107 pièces.
23 Alors, peut-être que l'Accusation ne peut pas me répondre sur-le-champ,
24 mais je lui soumets cette question et j'aimerais, le plus rapidement
25 possible, qu'il y ait une réponse qui nous soit donnée sur cette question
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1 avant qu'on prend nous-même notre décision sur la pièce 108.
2 Le deuxième point concerne les documents qui sont restés en "stand-by" hier
3 et qui ont eu un numéro aux fins d'identification. Je me tourne vers
4 l'Accusation pour lui demander quelles sont les observations sur les pièces
5 qui ont été déposées hier par la Défense, qui ont eu un numéro aux fins
6 d'identification. J'aimerais savoir si l'Accusation, aujourd'hui, a des
7 objections ou pas.
8 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, après que nous ayons
9 transmis le document en question, nous avons prié la Défense de M. Kubura
10 de savoir, nous n'avons, nous-même, aucune objection à soulever.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je constate qu'il n'y a aucune objection.
12 Je vais demander, Monsieur le Greffier, de me redonner toutes les pièces,
13 qui ont été sous -- aux fins d'identification afin que nous donnions,
14 aujourd'hui, une appellation définitive.
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13 [Audience à huis clos partiel]
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4 [Audience publique]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est dommage que, dans la pièce, il n'y a pas de
6 voyant rouge et vert, vert serait audience publique et rouge, audience à
7 huis clos. Cela permettrait, plus facilement, de suivre. C'est une idée que
8 je soumis au Greffe, bien entendu. Cela figure sur l'écran, mais on est
9 obligé de regarder l'écran, l'ordinateur, les uns et les autres. Par
10 contre, il y aurait juste sous les yeux un petit voyant, cela serait plus
11 simple, comme à la radio ou à la télévision quand on est en radio, cela
12 serait plus simple.
13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur.
15 Est-ce que vous entendez la traduction de mes propos dans votre langue ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été cité à comparaître en qualité de
18 témoin par l'Accusation. Vous devez témoigner devant ce Tribunal. Pour ce
19 faire, je me dois de vous demander votre nom, et prénom.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Nenad Bogeljic.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes né à quelle date ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis né le 3 août 1963.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes né à quel endroit ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Kakanj, de la République de Bosnie-
25 Herzégovine.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre adresse actuelle ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Odranska 4, Sisak, en Croatie.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Quel est votre métier ou profession, ou activité ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis ingénieur de télécommunication et je
5 travaille pour le centre des Communications en Croatie.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Comme vous allez être entendu par ce
7 Tribunal, en qualité du témoin, vous devez prêter serment. Je vous demande
8 de lire le serment que M. l'Huissier vous présente.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.
12 LE TÉMOIN: NENAD BOGELJIC [Assermenté]
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, comme je l'ai indiqué, vous allez
15 témoigner devant ce Tribunal. Vous allez avoir à répondre à des questions
16 qui vont vous être posées par les représentants de l'Accusation, qui sont
17 situés à votre droite. Après les questions de l'Accusation, les Défenseurs
18 des accusés, qui sont situés à votre gauche, vous poseront des questions.
19 Les Juges, qui sont devant vous, pourront à tout moment, vous poser
20 également des questions aux fins de précision, d'éclaircissement sur des
21 points qui mériteraient d'être éclaircis.
22 Je vous demande de répondre, de façon complète et très précise, aux
23 questions qui vous sont posées. Si vous ne comprenez pas le sens d'une
24 question, demandez à celui, qui vous la pose, de la reformuler. Je vous
25 informe que, comme vous avez prêté serment, de dire toute la vérité. Vous
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1 ne pouvez pas bien entendu faire de faux témoignage. Si c'était le cas,
2 vous risquez d'être poursuivi pour faux témoignage. Que, par ailleurs, si
3 dans le cadre de vos déclarations vous pouvez donner des indications
4 susceptibles de vous incriminer, pour quelques délits que ce soient ou
5 crimes, à ce moment-là, vous nous l'indiquez, afin que nous puissions en
6 prendre note et vous garantir que, pour ces faits, or le cas de faux
7 témoignage, ces propos, ou vos propos, ne pourraient entre retenus à charge
8 contre vous.
9 Vous avez bien saisi tout ce que je vous ai dit ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Veuillez demander à l'Accusation de
12 procéder à son interrogatoire principal.
13 M. WITHOPF : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
14 Interrogatoire principal par M. Withopf :
15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Monsieur Bogeljic, vous
16 avez dit à la Chambre que vous étiez né à Kakanj. Pourriez-vous également
17 nous dire où vous avez été élevé, vous avez grandi ?
18 R. A Kakanj.
19 Q. Est-ce qu'un moment est venue, Monsieur Bogeljic, où vous avez rejoint
20 la JNA ? Si c'est dans l'affirmative, de quand, à quand ?
21 R. Du 6 octobre 1983 jusque au mois de septembre, octobre 1994. Je ne me
22 rappelle pas la date exacte.
23 Q. Il est écrit dans le compte rendu -- c'est en octobre 1994, dans le
24 compte rendu. Monsieur Bogeljic, est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît,
25 clarifier ce point. Est-ce que c'était 1994 ou 1984 ?
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1 R. Non, 1984 c'était une erreur.
2 Q. Je vous remercie. En 1992, où travailliez vous ?
3 R. Je vivais à Kakanj et je travaillais à Zenica.
4 Q. Depuis quand travailliez vous à Zenica ?
5 R. J'ai commencé à travailler après avoir achevé mes études et obtenu un
6 diplôme en mai ou en juin, enfin en mai. J'ai commencé à travailler le 29
7 décembre 1986 à Zenica, pour les postes.
8 Q. Etes-vous marié ?
9 R. Oui, je le suis.
10 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, informer les membres de la Chambre des
11 origines ethniques de votre épouse ?
12 R. Elle est serbe.
13 Q. Quelle est votre origine ethnique ?
14 R. Je suis croate.
15 Q. En 1992 à Zenica, comment décririez-vous la relation entre les
16 Musulmans et les Croates, en 1992 et début 1993 ?
17 R. Tout était différent de ce que c'était en 1989. Il y avait en quelque
18 sorte des confrontations qui avaient lieu. La JNA est arrivée à Zenica. Ils
19 venaient de Slovénie et de Croatie, c'est-à-dire qu'ils venaient de
20 Karlovac. Les Serbes se sont rendus aux casernes, les Musulmans et Croates
21 étaient ensemble à l'époque. Il n'y avait pas de problèmes tels qui soient.
22 En 1992, ces confrontations ont commencés et des problèmes se sont posés
23 concernant des armes. Pour autant que je puisse le dire, les différentes
24 armées se sont formées et ainsi de suite. Jusqu'à 1993, personnellement, je
25 n'ai pas eu de problèmes. Je continuais d'aller au travail comme d'habitude
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1 et ce jusqu'en mars 1993.
2 Q. Pourriez-vous vous arrêter là un instant ?
3 R. C'est à ce moment là que cela a commencé.
4 Q. Monsieur Bogeljic, vous parliez du fait qu'en 1992, ces confrontations
5 ont commencé. De quelles confrontations ou affrontements voulez-vous
6 parler ? Affrontement entre qui ?
7 R. Entre le HVO d'un côté et diverses forces. Il y avait des forces
8 bosniennes. A l'époque, l'armée de Bosnie-Herzégovine n'était pas
9 organisée. Il y avait une Défense territoriale et une sorte de Ligue
10 musulmane, qui avait été formée à Kakanj. Il y avait des Bérets verts. Il y
11 avait un certain nombre de formations différentes et, progressivement,
12 l'intolérance a augmentée entre les gens, pas seulement les gens ordinaires
13 -- pas entre les gens ordinaires. Certains ont provoqué cela, mais les
14 choses sont devenues très tendues en Bosnie. Nous disons que c'était comme
15 une cocotte-minute.
16 Q. Est-ce que le moment est venu, Monsieur Bogeljic, où vous avez remarqué
17 la présence d'étrangers dans la région de Zenica ?
18 R. Oui. Je travaillais dans le centre TK, à Zenica, comme on l'appelait à
19 l'époque, et c'est comme cela qu'on l'appelle encore aujourd'hui. C'était
20 le PTT, mais j'étais ingénieur et je travaillais dans la partie, qui avait
21 trait aux télécommunications. Je me rendais de Kakanj pour travailler à
22 Zenica quotidiennement et, à partir de 1993, peut-être même dès 1992, mais
23 certainement à partir de 1993, je voyais souvent des gens qui ne parlaient
24 pas notre langue, la langue que l'on parle en Bosnie, qui voyageaient en
25 bus ou en car, un très grand nombres d'entre eux, qui ne pouvaient même
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1 parler notre langue très bien. Mais tout le monde dans la société était
2 conscient de ce fait et les gens, qui étaient avec moi sur une base
3 quotidienne, étaient conscients du fait que ces gens venaient de pays
4 arabes.
5 Q. Ces gens des pays arabes, portaient-ils des uniformes ?
6 R. Ceux que j'ai vu parce que les bus allaient de Zenica à Visoko, et je
7 descendais à Kakanj, pas tous les jours, mais à l'occasion. Je les voyais
8 porter des blousons verts. Ce n'était pas l'uniforme traditionnel ou
9 habituel, mais je pouvais voir qu'ils parlaient différemment, qu'ils
10 avaient -- que la couleur de leur peau était différente, bien qu'il y ait
11 certaines personnes dans notre propre pays en Bosnie qui aient le teint
12 foncé, mais ils avaient les cheveux plus courts. Je n'ai pas communiqué
13 avec eux, mais je les ai souvent vu, à l'arrêt de l'autobus ou dans le bus.
14 Je n'avais aucun problème avec eux, personnellement. Pour moi, ils
15 voyageaient tout simplement par bus ou autocar, comme le reste d'entre nous
16 et ils ne causaient pas, à ce moment-là, de problèmes.
17 Q. Est-ce que les personnes, dont vous parlez, étaient-ils armés ?
18 R. Pas autant que je pouvais le voir, ils ne portaient pas d'armes ayant
19 un long canon. Je ne me rappelle pas un homme, en particulier, que j'ai vu
20 plusieurs fois, comme je l'ai dit, puisque je faisais la navette tous les
21 jours, jusqu'au mois de mars 1993. Il n'était pas grand, il était même
22 assez petit et, une fois, je l'ai vu avec un pistolet sous sa veste. Je
23 n'ai jamais vu d'armes à canon long sur eux.
24 Q. Est-ce qu'il y avait d'autres individus de ce genre de pays arabes qui
25 portaient des armes, ou avaient des armes sur eux ?
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1 R. En ville en 1993, on pouvait les rencontrer, mais j'ai vu des gens à
2 l'arrêt d'autobus. Toutefois, des amis, qui travaillaient avec moi et à qui
3 je parlais à tous les jours, ils m'ont dit qu'ils avaient un camp
4 d'entraînement, qui se trouvait quelque part près de Vjetrenice. Je ne suis
5 jamais allé là-bas. Je ne l'ai pas vu au cours du conflit. Je l'ai fait
6 avant parce que j'avais l'habitude de travailler pour les
7 télécommunications et, ensuite, je me déplaçais dans toute la Bosnie.
8 Q. Avez-vous connaissance d'un endroit plus éloigné où se trouvaient ses
9 Arabes de pays étrangers, où se trouvait à l'époque ?
10 R. J'ai entendu qu'il y avait également encore un restaurant. Mon cousin y
11 était tué.
12 Q. Monsieur Bogeljic, savez-vous si ces Arabes originaires de pays
13 étrangers étaient également basés à Zenica ?
14 R. J'ai entendu, c'est vrai que je ne l'ai pas vu, j'ai entendu qu'il y en
15 avait certains à l'école de musique, à l'époque. Je dis peut-être en
16 Zenica, mais je ne peux pas vous assurer qu'il y avait des gens. Tout ce
17 que je peux vous dire, c'est que je les ai vus dans le bus et à l'arrêt de
18 bus. Il s'agissait, assurément, de personnes originaires de pays étrangers.
19 Quant à savoir le moment exact, je ne peux pas vous le dire.
20 Q. Monsieur Bogeljic, vous souvenez-vous du moment où vous avez appris,
21 pour la première fois que ces étrangers, provenant de pays arabes, étaient
22 établis à l'école musicale de Zenica ?
23 R. Je n'en sais rien. Exactement, en tout cas, je n'en suis pas certain,
24 mais dans le courant de 1993.
25 Q. Dans le courant -- au début de 1993, vers le mi-1993 ou vers la fin
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1 1993 ?
2 R. Début 1993.
3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais émettre une objection. A la
4 suite de plusieurs questions de l'Accusation, le témoin a déclaré avoir
5 entendu par d'autres et ne pas avoir vu lui-même de telles choses. Malgré
6 cette réponse du témoin, l'Accusation continue de poser des questions au
7 sujet de ce qu'a entendu dire le témoin. Même s'il n'a pas motivé
8 l'opportunité de poser des questions visant à recueillir des phrases par
9 ouï-dire. J'émets une objection à la poursuite de cette ligne de questions.
10 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
11 Juges, je ne sais pas d'accord avec l'objection formulée par la Défense.
12 L'évidence par ouï-dire est recevable et il s'agit uniquement d'une
13 question de valeur et de poids que revêt ce mode de preuve. Le témoin a dit
14 qu'il a entendu par des amis l'existence de ces faits. J'ai établi des
15 fondements de ces questions que j'ai posées, à savoir de qui il en avait
16 entendu parler et à quel moment.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant les faits, qui sont reportés par le
18 témoin et qu'il a recueillis par ouï-dire, encore faut-il préciser de
19 quelle façon il les a recueillis, à quel moment, qui lui a dit. Comme vous
20 le savez les uns et les autres, les faits reportés par ouï-dire sont
21 admissibles à la condition qu'on sache exactement dans quel contexte et
22 d'où ils viennent. On ne peut pas faire état de faits par ouï-dire sans
23 aucun fondement.
24 Si, Monsieur, on vous a dit que ces étrangers sont arrivés à telle ou telle
25 date, il faut dire qui vous l'a dit, à quel moment et dans quelles
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1 circonstances pour qu'on apprécie la valeur de ce que vous dites.
2 Je redonne la parole à l'Accusation pour essayer de préciser ce point qui a
3 fait l'objet, de la part de la Défense, d'une objection.
4 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. C'est
5 exactement ce que j'essayais de faire avant l'objection formulée par notre
6 collègue de la Défense.
7 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous expliquer à la Chambre de première
8 instance qui vous a appris que des Arabes, originaires de pays étrangers,
9 se trouvaient à l'école de musique de Zenica ?
10 R. Comme je disais, je me rendais tous les jours au travail. A Zenica,
11 dans mon entreprise, travaillent un bon nombre de Musulmans
12 -- Bosniens, plus exactement, je me reprends. Zenica avait une majorité
13 bosnienne, mais il y avait beaucoup de Croates et de Serbes, et nous
14 travaillions ensemble. Ensuite, quelqu'un, qui vivait à proximité de
15 l'école musicale, a déclaré les avoir vus y entrer. Je ne sais plus
16 exactement, mais tout le monde le savait. Je ne sais pas exactement qui
17 c'était, mais tout le monde le savait, à Zenica.
18 Q. Vous avez dit, avant l'objection de la Défense, que vous avez entendu
19 parler d'étrangers provenant de pays arabes établis à l'école musicale,
20 vous en avez parlé en début 1993. Pourriez-vous nous dire de qui vous avez
21 obtenu cette information.
22 R. On a parlé au travail. Tout ce que je peux vous donner, ce sont les
23 noms de mes collègues de travail, mais je ne peux pas vous préciser lequel
24 de mes collègues me l'a appris. Des gens se promenaient dans Zenica,
25 habitaient dans plusieurs quartiers de Zenica, vivaient à Tetovo, où il y
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1 avait des camps et à l'école musicale, il y avait des personnes qui étaient
2 détenues. On m'a dit
3 -- enfin, des personnes m'ont dit avoir vu des personnes détenues là-bas.
4 Je n'y ai pas été moi-même, mais je peux dire qu'on en a parlé.
5 Q. Pour parler, à présent, de Kakanj, pourriez-vous décrire la situation
6 lors de la deuxième moitié de 1992 et début 1993, la situation dans cette
7 localité de Kakanj.
8 R. J'ai du mal à me souvenir de tout cela, car c'était il y a longtemps.
9 Je vais essayer de vous donner un résumé. Pour ce qui concerne la vie dans
10 la municipalité de Kakanj elle-même, je pense que le conflit n'a atteint
11 Kakanj que tardivement. Je pense que la co-existence entre nous, les
12 Croates et les Bosniens à Kakanj, était toujours pacifique. Nous n'avions
13 ni problème, ni conflit entre nous. Il y avait des Serbes, mais ils étaient
14 encore moins nombreux. Les Bosniens et les Croates représentant à peu près,
15 respectivement, la moitié de la population. Il y avait de nombreux mariages
16 mixtes à Kakanj. Ma mère est mariée à un Bosnien. Moi-même, je suis marié à
17 une Serbe. Il n'y avait pas problème avant que la politique ne s'en mêle,
18 prenne le dessus. Ensuite, il s'est passé ce que nous savons et ce n'était
19 ce dont nous avions besoin. Nous savons maintenant, le conflit a commencé
20 de la sorte, tant du côté croate que du côté bosnien. Des personnes sont
21 arrivées au pouvoir à l'armée, dans les municipalités, des personnes qui
22 n'avaient rien à faire là, à mon sens. Le conflit aurait pu facilement
23 épargner Kakanj. Du côté bosnien --
24 Q. Je voudrais vous arrêter. Je vous vais vous demander de vous arrêter
25 ici. En 1993, pourriez-vous dire quelles unités militaires ou armées
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1 étaient basées à Kakanj ?
2 R. Les Croates avaient l'Unité, qui répondait au nom du HVO. Ils avaient
3 essayé de constituer un HOS à Kakanj, sans succès. De la même façon, du
4 côté bosnien, il y avait la légion verte, ensuite les Bérets verts, et la
5 Défense territoriale, bien entendu, qui était en premier lieu. Mais nous,
6 les Croates, nous n'avions pas peur de la Défense territoriale. Un de mes
7 amis, qui a étudié avec moi, était l'un des commandants et il m'a même aidé
8 à quitter Kakanj; cependant, la 7e Musulmane est arrivée à Kakanj.
9 Je ne dis pas qu'ils sont les seuls à montrer du doigt, je pense que c'est
10 le cas de tous. C'est quelque chose qui n'aurait pas dû se produire. Voilà
11 comment c'étaient les choses.
12 Q. La 7e Brigade musulmane, quand s'est-elle rendu à Kakanj ?
13 R. Je ne suis pas en mesure de vous le dire parce que je ne le sais pas.
14 Je n'ai jamais été soldat. Je ne m'intéressais pas à la politique, mais ma
15 femme passait d'une maison près de l'hôtel, et sa famille vit à proximité
16 du motel. La plupart des Bosniens, qui vivent autour de ce motel, me
17 connaissaient, je les connais, et je sais que les Croates de la
18 municipalité n'acceptaient pas le cantonnement de cette unité dans le
19 motel. J'ai entendu cela de la bouche de personnes qui s'occupaient de
20 politique. C'était vraisemblablement au début de l'année 1993.
21 Q. Début 1993, savez-vous si une unité militaire était cantonnée dans ce
22 bâtiment qu'il était convenu d'appeler le motel Sretno ?
23 R. Oui, un Bataillon de la 7e Brigade musulmane. Cela j'en suis certain
24 parce que, personnellement, j'ai eu quelques problèmes avec eux. J'ai eu
25 quelques désagréments à cause d'eux.
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1 M. WITHOPF : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin,
2 par le biais du système informatique Sanction, la pièce à conviction numéro
3 P10.
4 Q. Monsieur Bogeljic, dites-nous ce que vous voyez sur la photo qui est
5 projeté sur l'écran se trouvant devant vous ?
6 R. C'est le motel Sretno.
7 Q. S'agit-il du même bâtiment dans lequel a été logé la 7e Brigade
8 musulmane au début de 1993 ?
9 R. Oui, oui, effectivement.
10 Q. Monsieur Bogeljic, comment avez-vous appris qu'il s'agissait de la 7e
11 Brigade musulmane ?
12 R. Tout le monde à Kakanj le savait. On les voyait, on voyait des soldats
13 qui portaient les insignes. Il y en avait plusieurs. Il y en avait, qui
14 avaient plusieurs emblèmes. Ma femme et moi-même, nous sommes rendus à la
15 gare où je me rendais. En fait, parfois je prenais surtout le bus car. Je
16 vivais dans un quartier un petit peu éloigné de la gare. Il était plus
17 difficile pour moi de m'y rendre, mais nous les voyons tous les jours. On
18 les a vus désarmer la population serbe car les Serbes détenaient les armes
19 qu'ils avaient reçues du SDS. Ils ont même proposé une arme à mon beau-
20 père, ce que j'avais trouvé difficile à comprendre.
21 Q. Vous parlez de différents insignes militaires. Pourriez-vous nous
22 décrire ces insignes ?
23 R. Tant d'années se sont écoulées, que j'ai beaucoup oublié, mais il y a
24 de choses qui restent profondément gravées dans la mémoire. J'ai vu des
25 insignes avec des caractères arabes. Il y a une sorte de sabre de l'époque
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1 turque Ottoman, des croissants, des "Allah-U-Ekber," et toutes sortes de
2 bandeaux avec des caractères arabes. Il est difficile de se souvenir de
3 tous les détails, mais il ne fait, aucun doute, qu'il y avait un bataillon
4 de la 7e Brigade musulmane qui se trouvait là.
5 Q. Monsieur Bogeljic, je vais vous montrer à présent un tableau, une image
6 sur laquelle figure plusieurs types d'insignes militaires.
7 M. WITHOPF : [interprétation] Est-ce qu'une planche photographique sur
8 laquelle figure plusieurs insignes, est-ce qu'on peut montrer cela au
9 témoin ?
10 Q. Monsieur Bogeljic, vous avez maintenant devant vous une planche
11 photographique où figurait une série d'insignes militaire. Pourriez-vous
12 décrire -- ou pourriez-vous indiquer à la Chambre de première instance
13 lesquels vous avez vus dans le contexte de 7e Brigade musulmane au motel
14 Sretno en 1993, en citant le chiffre figurant à côté de chacun de ces
15 insignes sur cette plaque?
16 R. Est-ce que je devrais me borner à vous dire ce que j'ai vu au motel de
17 Sretno, ou ce que j'ai vu dans toute ma vie ?
18 Q. Ce que vous avez vu au motel Sretno.
19 R. Je pense que j'ai vu le numéro 1. Je pense que j'ai également vu le 24,
20 ainsi que le 9 et le 12. Le 9, j'ai pu le voir, si je ne m'abuse, je pense
21 que l'insigne 9 a été apposé plus tard lorsque la 7e Brigade musulmane a
22 été intégrée à l'armée BH, et placée sous le commandement de cette
23 dernière, alors que le 12 était porté par les troupes régulières de l'armée
24 de la Bosnie-Herzégovine, alors que les membres de la 7e Brigade musulmane
25 portent également l'insigne de l'armée. Plus tard, ils sont été placés sous
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1 le commandement de l'armée. Voilà comment les choses étaient.
2 Il y avait des insignes différents. Je connais -- ou la plupart sont assez
3 habituels à l'exception du serbe, de l'insigne serbe. On pouvait le voir
4 dans nos régions, qu'on ne pouvait pas voir les Serbes. On ne pouvait pas
5 les voir dans nos régions, la plupart on pouvait les voir.
6 Q. Merci. Nous allons à présent passer à un autre sujet. Est-ce que vous
7 avez rejoint le HVO, ou est-ce que vous avez travaillé pour le HVO à une
8 quelconque occasion ?
9 R. En mars 1993, la situation était délicate. Tous les événements en
10 Bosnie centrale dans une ville, les Bosniens étaient des victimes; dans une
11 autre ville, c'étaient les Croates. La situation était difficile pour les
12 Bosniens dans les villes; la majorité croate, de la même manière, la
13 situation était difficile pour nous dans la situation inverse. Plusieurs
14 brigades ont été formées à Zenica. J'ai vu, effectivement, la revue des
15 brigades. Il y avait de nombreux soldats en ville, les gens étaient
16 victimes de représailles et nous étions, nous aussi, exposés à tels
17 dangers.
18 Q. Veuillez écouter les questions. La question était la suivante : est-ce
19 que vous avez rejoint, un jour, la JNA ou est-ce que vous avez à un
20 quelconque moment soutenu le HVO ?
21 R. J'allais vous le dire lorsque vous m'avez interrompu. En 1993, et je
22 peux vous dire même exactement quand, je me suis rendu compte que ma
23 sécurité n'était plus assurée à Zenica. C'était un sentiment partagé par
24 tous. J'ai demandé à -- ou j'ai dit à mon patron que je devais m'absenter
25 car l'un de mes collègues me disait que j'enregistrais clandestinement
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1 certaines conversations, ce qui n'était pas vrai. Mon supérieur m'a dit ne
2 pas le croire, mais je ne voulais pas rester, je voulais partir.
3 En mars, j'ai quitté mon travail et je travaillais au HVO. Je n'étais pas
4 un soldat, je ne portais pas d'arme. J'étais là, comme technicien
5 connaissant les téléphones portables et les habitants de Kakanj le savent :
6 avec l'aide d'un de mes collègues, j'ai installé
7 -- ou j'ai mis en place un mobile ou une série ou deux installations NMT.
8 C'est une technologie analogique que l'on connaît. Nous l'avons installés à
9 plusieurs endroits aux fins de communication. Ce sont des équipements qui
10 sont utilisés par tous, par tous les groupes ethniques de Kakanj, les
11 Croates, les Serbes et les Bosniens.
12 Q. Pour être bien sûr, est-ce que vous avez porté l'uniforme du HVO à
13 cette époque ?
14 R. Non.
15 Q. Est-ce qu'à un moment, Monsieur Bogeljic, vous avez été arrêté ?
16 R. Je ne sais pas très bien comment vous l'expliquer. J'ai été emmené à
17 l'écart de ma famille. J'étais privé de ma liberté physiquement. Quant à
18 savoir si c'était une arrestation. Pour moi, une arrestation, c'est lorsque
19 l'on fait l'objet d'une accusation et qu'on est emmené par la police. Si,
20 j'étais obligé sous la menace des armes. Un homme était là et il menaçait
21 de lancer une grenade sur ma belle-mère, lorsque l'on m'a emmené.
22 Q. Pourriez-vous nous dire exactement quand cela s'est produit ? A quelle
23 date exactement ?
24 R. Je m'en souviens, bien entendu. Le 18 mai 1993. Il devait être 16
25 heures 30. Des membres de l'armée de la 7e Brigade musulmane cantonnés au
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1 motel sont venus. Ils arrêtaient les personnes qui se situaient dans les
2 maisons autour de l'hôtel, dans le hameau de Povezice. J'étais là par
3 hasard. Je rendais visite à mon cousin, qui vivait dans une maison serbe.
4 Le frère de la personne, qui avait quitté la maison, il avait donné les
5 clés pour y habiter, dans les environs de la gare. Je m'y rendais pour
6 aller chercher des cigarettes, je fumais encore à l'époque. Ma belle-mère
7 m'a fait signe de m'en aller, mais je ne comprenais pas ce qu'elle voulait
8 dire. J'y suis entré, malgré tout, et j'ai vu des soldats, qui me disaient
9 avoir un mandat de perquisition. Je ne comprenais pas. J'ai dis :
10 "Pourquoi ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?" Ils m'ont dit avoir des
11 informations, selon lesquelles mon beau-père cachait des armes chez lui, et
12 de l'argent. La maison avait déjà été fouillée et tout avait été mis sens
13 dessous de dessous. Ils ne m'ont rien dit de menaçant si ce n'est que leurs
14 fusils étaient pointés en ma direction. Ensuite, ils m'ont dit ne rien
15 avoir trouvé et ils sont ensuite partis.
16 Dix minutes plus tard, je suis allé chercher ma femme pour qu'elle m'aide à
17 ranger, et ils sont revenus. Ils étaient quatre ou cinq. L'un était sur le
18 côté, et ma belle-mère ne pouvait pas se déplacer facilement. Il a pointé
19 son arme vers elle et il a dit qu'il allait tirer si elle bougeait. Je
20 pense que quelqu'un lui a envoyé un rapport apparemment. Il voulait
21 fouiller le garage et les voitures. Je ne regardais pas. L'un d'entre eux
22 est sorti et a dit avoir trouvé une botte avec des projectiles -- des
23 balles. Il m'a demandé où était le fusil. Je n'ai jamais entendu parler de
24 carabine, en fait. Je n'avais jamais été soldat, si ce n'est à la JNA.
25 Alors, on a commencé à m'insulter. L'un a insulté ma mère serbe, et j'ai
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1 dit que ma mère n'était pas serbe. Il m'a dit : "C'est encore plus grave,
2 ta mère est oustacha."
3 C'étaient des personnes que je ne connaissais, des gens qui n'étaient pas
4 du coin. Peut-être des villages d'alentour, je ne sais pas, mais je ne les
5 connaissais pas, c'est tout.
6 Q. Monsieur Bogeljic, je voudrais vous arrêter à ce stade. Lorsque vous
7 avez été arrêté par les membres de la 7e Brigade musulmane, le 18 mai 1993,
8 où vous ont-ils emmené ?
9 R. Au motel Sretno.
10 Q. Lorsque vous êtes arrivé dans le motel Sretno, à quel endroit, à
11 l'intérieur du motel ? Ou en quel lieu du motel vous a-t-on emmené ?
12 R. Je ne me souviens pas très bien aujourd'hui du motel Sretno, mais, en
13 tout cas, j'ai pénétré dans le motel dans lequel se déroulait en général
14 des événements heureux, comme des noces, par exemple. Je le connaissais
15 tout de même.
16 Alors, on m'a emmené jusqu'à la réception. Vous avez la réception. Devant,
17 en allant tout droit, vous arrivez au vestiaire. A gauche, il y a un
18 restaurant ou une salle de réception, je ne sais plus très bien. Lorsque je
19 suis arrivé à cet endroit, il s'y trouvait des soldats. Je ne sais plus
20 exactement, en tout cas, un certain chaos régnait dans cet endroit. Des
21 insultes pleuvaient de partout. On m'a bousculé. Personne ne m'a interrogé
22 au sujet des armes. Tout ce qu'ils souhaitaient, c'était que je leur donne
23 de l'argent.
24 Q. Les soldats, que vous avez vus dans la réception, quel uniforme
25 militaire portaient-ils ?
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1 R. Je pense qu'ils étaient tous membres de la 7e Brigade musulmane. Dès
2 que je suis entré là-bas, je savais ce qui m'attendait. Je ne regardais
3 plus nulle part, vous comprenez, j'essayais de me défendre. J'ai essayé de
4 leur dire que je travaillais au central de Zenica, que je faisais pas mal
5 de choses qui avaient un rapport direct et qui étaient dans l'intérêt de
6 l'armée de Bosnie-Herzégovine. A ce moment-là, il y en a un qui m'a dit :
7 "Mais, alors, tu défends les Musulmans." Enfin, je n'avais aucun moyen de
8 me défendre. Rien de ce que je disais ne semble valable.
9 Q. A partir de la réception du motel, où vous a-t-on emmené ?
10 R. On m'a fait sortir. Ils me disaient qu'ils allaient me tuer si je ne
11 disais pas où se trouvait l'argent. Je ne savais même pas de quel argent il
12 était question. D'ailleurs, j'avais un peu d'argent dans mon portefeuille,
13 et mon épouse avait parlé à ces hommes qui m'avaient emmené. En fait, je
14 lui avais remis mon portefeuille à elle, et elle le leur avait donné, mais
15 tous ceux qui avaient de la valeur, avaient été enlevés. Lorsque nous
16 sommes arrivés dans le motel, j'avais, à nouveau, mon portefeuille sur moi.
17 On me l'avait rendu et les hommes, qui se trouvaient là, me l'ont repris.
18 Je pense qu'il s'y trouvait encore 1 900 marks allemands. Nous avions
19 quelques économies et tout ce que nous possédions, nous le gardions en même
20 endroit. Bien sûr, ils ont tout pris, ils m'ont demandé si j'avais encore
21 de l'argent, j'ai dit : "Laissez-moi tranquille. J'ai un peu d'argent à
22 Catici," c'est-à-dire, l'endroit où habite mes parents. "Laissez-moi
23 partir, et je vous donnerais tout ce que j'ai." Mais, bien sûr, ils ne
24 m'ont pas laissé partir.
25 Q. On vous a fait sortir. Une fois que vous êtes sorti du motel Sretno, où
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1 vous a-t-on emmené ?
2 R. A côté de l'hôtel, et en face, il y avait la grande route qui va de
3 Kakanj à Zenica. Un peu plus loin se trouve un carrefour. Sur une des
4 façades latérales du motel, il se trouvait une porte que je n'avais jamais
5 utilisé parce que j'utilisais l'entrée principale. En général, lorsque
6 j'allais au motel, je passais par la réception, et j'allais à l'endroit où
7 nous prenions ensemble un café, et nous rencontrions des amis. Mais là, sur
8 le côté et en bas, il y avait une espèce d'entrepôt avec un certain nombre
9 de pièces. C'est un espace d'assez grande taille où ils m'ont emmené. En
10 face du motel, il y a une maison et c'étaient des Musulmans de la région
11 qui habitaient dans cette maison, qui me connaissaient. Je sais qu'une des
12 femmes, qui habitait dans cette maison, a dit : "Mais laissez ce jeune
13 homme partir, je le connais." Son fils, effectivement, était à l'école avec
14 moi à Sarajevo. Enfin, nous n'étions pas dans la même école, mais nous
15 voyagions ensemble jusqu'à Sarajevo. Un des soldats a dit : "Dégages, où je
16 vais te tuer," et ils m'ont emmené à l'intérieur.
17 Q. Monsieur Bogeljic, je vais maintenant vous montrer d'autres
18 photographies.
19 M. WITHOPF : [interprétation] Une nouvelle photographie que je demande que
20 l'on présente, grâce au système informatique Sanction. L'Accusation a
21 certains nombres de copies papiers de cette photo pour la Défense et les
22 Juges de la Chambre.
23 Q. Monsieur Bogeljic, est-ce que vous voyez la photo sur l'écran en face
24 de vous ?
25 R. Oui.
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1 Q. Que voit-on sur cette photographie ?
2 R. Si l'on parle de haut de la photographie, on voit ce conteneur, et puis
3 l'entrée du motel qui se trouve à 10 mètres sur la gauche, si je vois bien.
4 Ils m'ont emmené là, ils m'ont fait pénétré dans une pièce qui se trouve
5 tout droit. On appelle cela une espèce de vestibule. Enfin, il n'y avait
6 pas mal de pièces à cet endroit-là et je suis allé dans plusieurs d'entre
7 elles. Je m'en souviens très bien. Mais l'endroit qu'on voit sur cette
8 photographie, je m'en souviens très bien également.
9 Q. Je demanderais que l'on s'arrête ici.
10 M. WITHOPF : [interprétation] Que l'on remette au témoin un marqueur noir.
11 Q. Monsieur Bogeljic, je vous demanderais, sur la copie papier de la
12 photographie, qui vous a été remise d'inscrire une annotation à l'endroit
13 où on vous a emmené ce jour-là. Si vous pouvez inscrire cette annotation au
14 niveau de l'entrée par laquelle vous êtes passé.
15 R. Est-ce que je peux inscrire une flèche ?
16 Q. Vous pouvez inscrire un "X " ou flèche, comme vous préférez.
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Monsieur Bogeljic, pouvez-vous, je vous prie, inscrire les mots
19 suivants à côté de votre annotation, à savoir : "C'est l'endroit où on m'a
20 emmené."
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être faudrait-
23 il transférer cette image sur le rétroprojecteur car nous avons toujours
24 l'image à l'écran, mais nous ne voyons pas ce que le témoin est en train de
25 faire sur la copie papier. Il serait que nous puissions suivre également.
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1 M. WITHOPF : [interprétation] Très bien.
2 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce que vous avez écrit sur
3 cette photographie ?
4 R. "C'est l'entrée par laquelle ils m'ont fait entrer dans le bâtiment ce
5 jour-là."
6 Q. Monsieur Bogeljic, je vous demanderais maintenant de dater et de signer
7 cette photographie, en inscrivant votre nom, et la date d'aujourd'hui, à
8 savoir, le 28 janvier 2004.
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous demandez le versement ?
11 Bien, Monsieur le Greffier, donnez-moi un numéro.
12 M. WITHOPF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. L'Accusation
13 souhaite verser cette photographie au dossier.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cette photographie
15 sera la pièce P50.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : P50.
17 M. WITHOPF : [interprétation]
18 Q. Très bien. Monsieur Bogeljic, je vais maintenant vous montrer une autre
19 photographie. Nous avons, je le dis, comme je l'ai dit tout à l'heure, un
20 nombre de copies papiers suffisant de cette photographie.
21 Monsieur Bogeljic, pouvez-vous, je vous prie, dire aux Juges de cette
22 Chambre ce que vous voyez sur la photographie que vous avez sous les yeux ?
23 R. C'est l'entrée dans le bâtiment. On ne voyait pas à l'époque les
24 grillages que l'on voit sur la photographie aujourd'hui. J'ai passé à cet
25 endroit 45 minutes à peu près de torture et de passage à tabac terrible.
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1 Q. Puis-je vous interrompre, je vous prie ? Ce que l'on voit sur cette
2 photographie, est-ce l'entrée par laquelle on vous a fait pénétrer à
3 l'intérieur du motel Sretno ? Je vous prierais de répondre par oui ou par
4 non ?
5 R. Oui.
6 Q. Fort bien.
7 M. WITHOPF : [interprétation] Peut-on remettre au témoin une copie papier
8 de cette photographie. Monsieur le Témoin, je vous demande de dater et de
9 signer cette copie papier.
10 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez-moi un numéro.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la
13 pièce à conviction P51.
14 M. WITHOPF : [interprétation] Merci beaucoup.
15 Q. Monsieur Bogeljic, une fois qu'on vous a emmené dans cet espace qui se
16 trouve derrière la porte arrière du motel Sretno, que vous est-il arrivé ?
17 R. Rien de bon. Il m'est très pénible de me rappeler tout cela. Je crois
18 qu'il était 16 heures 30 quand je suis arrivé et je me souviens très bien
19 que j'ai dû pénétrer à l'intérieur à 16 heures 45. Je dis cela parce que je
20 portais une montre à l'époque, qui, ensuite, m'a été arrachée en raison des
21 coups que j'ai reçus. J'avais aussi une chaîne autour du cou, qui était un
22 souvenir, j'y tenais beaucoup, une chaîne en or. Je la porte encore
23 aujourd'hui comme un souvenir de tout cela, mais, à un certain moment, elle
24 a été brisée. Tout cela a duré de 17 heures, à peu près, jusqu'à 17 heures
25 30, à peu près une demi-heure ou 45 minutes en gros. C'étaient des coups
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1 que j'ai eu beaucoup de mal à supporter. Ils me frappaient à coups de
2 crosses de fusils, à coups de pieds, avec des planches en bois et tout ce
3 qui leur tombait sous les mains. Ils étaient quatre ou cinq, et cela a
4 duré, disons, jusqu'à peu près 17 heures 30.
5 Puis-je poursuivre ?
6 Q. Je vous en prie, continuez. Dites aux Juges de la Chambre qui vous a
7 frappé.
8 R. Les soldats qui se trouvaient à l'intérieur du motel, dans ce
9 malheureux motel.
10 Q. A quelle armée appartenaient ces soldats ?
11 R. C'étaient les mêmes que ceux qui m'avaient emmené jusqu'au motel.
12 Q. Fort bien. Pouvez-vous, je vous prie, continuer à décrire en détails
13 les passages à tabac que vous avez subis par la suite, si vous en avez
14 subis d'autres.
15 R. Comme je l'ai déjà dit, c'étaient des tortures vraiment terribles,
16 atroces. En 45 minutes, ils m'ont brisé plusieurs côtes. Je ne sais pas
17 exactement que dire. Je connais très bien les blessures que j'ai subies
18 suite à l'ensemble de ces tortures, mais jusqu'au moment où je suis sorti
19 de cette pièce, comme je l'ai dit, cet incident a duré 45 minutes, à peu
20 près, et je ne pense pas que quiconque peut même imaginer ce que ces hommes
21 ont fait. Ils m'ont piétiné, ils m'ont frappé à coups de crosses de fusils.
22 Le pire, finalement, c'est quand, l'un d'entre eux a apporté une matraque
23 de police. Ils ont commencé à me frapper à l'aide de cette matraque, sur le
24 dos. J'ai supplié qu'on ne me frappe pas au niveau du rein droit et l'un de
25 ces hommes, qui frappaient, qui portaient des coups, a dit, à ce moment-là
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1 : "Tapez uniquement sur son rein droit." Alors --
2 Q. Monsieur Bogeljic, pouvez-vous, je vous prie, dire aux Juges de cette
3 Chambre pourquoi vous avez demandé à ce soldat de ne pas vous frapper au
4 niveau de votre rein droit.
5 R. Parce que j'avais des problèmes avec ce rein droit et d'ailleurs,
6 aujourd'hui, j'en ai beaucoup plus.
7 Q. Après ce passage à tabac que vous avez subi et qui vous a été infligé à
8 l'aide de différents instruments, y a-t-il eu d'autres passages à tabac ?
9 R. Les passages à tabac n'ont pratiquement pas cessé. Ils cessaient
10 simplement quand ils se fatiguaient. Ils me frappaient pratiquement sans
11 discontinu, simplement ils me changeaient de lieu. Ils m'ont fait passer de
12 l'endroit où je me trouvais, de l'autre côté de la porte grillagée, et
13 m'ont fait asseoir sur une chaise. L'un des hommes, qui se trouvait là, m'a
14 dit qu'il allait me frapper à peu près une vingtaine de fois à l'aide d'une
15 espèce de barre en bois qu'il avait dans les mains. Je ne peux pas vous
16 décrire exactement ce que c'était parce que j'étais terrorisé d'une façon
17 absolument indescriptible. Il m'a dit que, si je criais, il allait me
18 frapper 50 fois. Alors, j'ai commencé à crier. J'ai reçu des coups
19 tellement durs que j'ai été déséquilibré. J'ai tombé de la chaise. J'ai
20 tapé de la nuque sur les marches de l'escalier, et je crois avoir perdu
21 conscience pendant quelques instants.
22 Q. Vous rappelez-vous ce qui vous est arrivé lorsque vous avez repris
23 conscience ?
24 R. J'avais très chaud au niveau du visage. Je crois que, tout simplement,
25 l'un d'entre eux avait uriné sur mon visage, mais, à ce moment-là, je
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1 n'avais pas encore totalement pris conscience, vous comprenez. Enfin, je
2 dois dire que c'est vraiment très, très pénible pour moi de me rappeler
3 tout cela.
4 Q. Après cette série de coups, y a-t-il eu d'autres passages à tabac
5 pendant cette même nuit à votre encontre ?
6 R. Cela, je l'ai déjà dit. Les coups n'ont pratiquement jamais cessé. Ils
7 ne s'interrompaient que, lorsque les hommes qui nous frappaient se
8 fatiguaient, autrement dit, quand on s'acharne sur quelqu'un en le frappant
9 avec une barre de grande taille, quelques fois la barre commence à peser
10 lourd. Si on utilise un instrument, un fusil, une crosse de fusil, même si
11 cela ne pèse que quelques kilos, on finit par se fatiguer. Dans cette autre
12 pièce, ils ont continué à me frapper. Je dirais que cela a duré à peu près,
13 comme je le dis, de 17 heures, 16 heures 45, que cela avait commencé, aux
14 environs de 17 heures, 16 heures 45.
15 Aux environs de 19 heures, j'ai pénétré dans une troisième pièce où se
16 trouvait un certain nombre de prisonniers et on m'a dit qu'on allait me
17 trancher la gorge. L'un des soldats avait plusieurs couteaux sur lui. Il
18 avait un fusil long -- un long couteau, qui ressemblait à un couteau de
19 cuisine. Mais il y en avait un autre qui avait un fusil qui ressemblait un
20 peu -- un couteau qui se ressemblait un peu à ces couteaux turcs. Il était
21 incurvé, quelque chose était écrit dessus, sur la manche de ce couteau.
22 Alors, ces hommes m'ont dit : "Tu peux choisir le couteau avec lequel nous
23 allons te trancher la gorge." J'ai dit : "Ne me tranchez pas la gorge."
24 J'ai supplié ces hommes, j'ai dit : "Abattez-moi, fusillez-moi, je n'en
25 peux plus."
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1 Q. Monsieur le Témoin -- Monsieur Bogeljic, cette menace de vous tuer à
2 l'aide d'un couteau, l'avez-vous prise au sérieux ?
3 R. Pendant tout le temps, je prenais tout cela au sérieux. Mon
4 appartenance religieuse est catholique, je vais à l'église et, à un certain
5 moment, j'ai commencé à prier Dieu parce que c'était la fin. Enfin, tout
6 simplement, c'était vraiment très, très, très pénible.
7 Q. Il y a quelques minutes, vous disiez que vous aviez été placé dans une
8 pièce où se trouvaient d'autres prisonniers. Pouvez-vous, je vous prie,
9 nous dire quel était le nombre de ces prisonniers et leur appartenance
10 ethnique, si vous le connaissez ?
11 R. Je sais. C'était le mois de mai, je dois le dire. Quand je suis entré
12 dans cette pièce, il faisait très chaud. Je portais simplement un T-shirt à
13 manches courtes, un pantalon de jogging et des "baskets" et, quand je suis
14 entré dans cette pièce, comme je venais, il faisait clair. Je suis rentré
15 dans l'obscurité. Je voyais mal les gens, mais j'ai décerné tout de même
16 qu'il y avait, derrière ces personnes, une espèce de paroi métallique.
17 Après qu'on m'a fait entré dans la première et puis dans la deuxième pièce,
18 où on m'avait frappé, je crois me rappeler qu'il y avait des toilettes dans
19 cette zone, si je me souviens bien. Je ne marchais plus debout, je rompais
20 à quatre pattes et ils me tiraient par les pieds, après tous ces coups.
21 Il était environ 19 heures du soir, parce que lorsque nous avons pénétré
22 dans la pièce, je n'avais plus ma montre, mais j'ai retrouvé ma chaîne en
23 or, qui était sur le sol, et je l'ai placée dans ma chaussette. C'est la
24 raison pour laquelle je l'ai encore sur moi aujourd'hui. Lorsque j'ai
25 pénétré dans cette pièce, sur la gauche, j'ai vu qu'il y avait des gens,
Page 2118
1 mais, comme je venais de l'extérieur où il faisait clair, alors qu'il
2 faisait sombre à l'intérieur, je n'ai pu reconnaître personne. J'ai demandé
3 quelle heure il était. Ils avaient tous très peur, personne n'a osé me
4 répondre. Ils avaient écouté les cris, et les gémissements pendant une
5 heure, une heure et demie. Ils étaient complètement terrorisés. Ils
6 n'osaient même plus répondre. Après un certain moment, j'ai reconnu des
7 gens qui avaient fait leurs études avec moi à Sarajevo. Est-ce que je peux
8 prononcer des noms ? Est-ce que c'est nécessaire ?
9 Q. Si vous ne voyez pas d'inconvénient, faites-le ?
10 R. Un peu plus tard, pendant que tout cela était passé, j'ai vu trois
11 hommes d'Ilijas, que je ne connaissais pas avant. Je pense que c'étaient
12 des gens qui venaient du village de Misoca, où l'armée de Bosnie-
13 Herzégovine avait participé à des opérations contre les troupes serbes. Ils
14 avaient été ramassés chez eux à la maison dans ces villages à Povezice, qui
15 est un village près du motel.
16 Q. Monsieur Bogeljic, puis-je vous arrêter ici ? Ma question était :
17 combien d'autres prisonniers y avait-il dans le motel Sretno là où vous les
18 avez vus ? Pouvez-vous nous le dire ?
19 R. Oui, nous étions 16 au total. Ils étaient 15 et, avec moi, cela faisait
20 16. J'ai vu une pièce quand je suis rentré, où se trouvaient 14 personnes
21 au départ. Je suis entré, cela faisait 15, et, ensuite, une seizième
22 personne est arrivée à peu près à 19 heures 30 ou 20 heures, si c'est
23 important. C'est le dernier qui est arrivé; 12 d'entre eux étaient Croates,
24 et 4 Serbes.
25 Q. Fort bien. Ces autres prisonniers étaient-ils des soldats ou des
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1 civils ?
2 R. Pour autant que je le sache, un de ces hommes, je ne sais pas comment
3 il s'appelait, a dit -- d'ailleurs il portait sur lui une carte, indiquant
4 qu'il était membre de la Défense territoriale. Il a dit : voyez-vous parce
5 qu'il pensait que cela pourrait l'aider, ou le protéger, mais cela ne lui a
6 été d'aucune utilité. Tous les autres étaient des civils, pour autant que
7 je le sache. Certains d'entre eux, je les connaissais parce que nous avions
8 fait nos études ensemble.
9 Q. Ces autres prisonniers, ont-ils également été frappés durant la nuit ?
10 R. Durant cette nuit, tout le monde a été frappé, tabassé, personne n'a
11 échappé aux coups. Avant qu'ils ne me jettent dans cette pièce, les autres
12 n'avaient encore pas été frappés, mais, quand j'ai pénétré dans la pièce,
13 ils ont demandé : "Qui était le propriétaire de la voiture rouge ?" Tout
14 d'un coup, je me suis rappelé, je ne voulais pas y aller, mais ils nous ont
15 dit que : "Si la personne ne se faisait pas connaître, cela serait pire."
16 Alors, je me suis fait connaître, et ils m'ont dit de passer la tête à
17 travers la porte -- à travers les barreaux de la porte. J'ai passé la tête
18 à travers les barreaux et ils ont commencé à me frapper sur la nuque et,
19 ensuite, a commencé le passage à tabac de tous les autres. Avant je leur
20 avais demandé s'ils avaient déjà reçu des coups, et on m'avait répondu que
21 personne n'avait été frappé.
22 Q. Ces autres prisonniers, ont-ils été frappé autant ou en tout cas dans
23 une mesure comparable à ce que vous aviez vécu, vous-même ?
24 R. Si l'on parle du nombre des coups, je suis peut-être celui qui en a reçu
25 le plus, mais il y en a d'autres qui peut-être ont reçu des coups plus
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1 durs, voyez-vous. Mais, en tout cas, tout le monde a été tabassé.
2 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que le moment
3 est opportun pour la pause.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, il est 15 heures 45. Nous allons faire une
5 pause de 25 minutes. Nous reprendrons le cours de l'audience à 16 heures
6 10.
7 --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.
8 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Withopf, poursuivez.
10 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur Bogeljic, vous avez été détenu au cours de la nuit, dans le
12 motel Sretno et, pendant ce temps-là, est-ce que quelqu'un vous a fait dire
13 ou chanter ou crier quelque chose ?
14 R. Oui.
15 Q. Que vous a-t-on demandé de dire, de chanter ou de crier ?
16 R. Après la torture que j'ai déjà d'écrite, je crois que d'autres
17 personnes sont arrivées et l'une d'entre elles, je m'en souviens très bien,
18 il avait un surnom. Il a dit que son surnom était Geler, et il a dit :
19 "Quand je dis 'Tekbir', il faut d'une seule voix que vous disiez tous :
20 'Allah-U-Ekber'." Nous n'avons pas très bien compris, et ils nous ont dit
21 qu'ils sont entrés, ils ont dit qu'ils nous battraient encore plus fort si
22 nous ne disions pas cela. Ensuite, ils nous ont battus et, ensuite, nous
23 avons répétés après eux : "Allah-U-Ekber", et cela a continué comme cela.
24 Ce surnom, que j'ai mentionné, Geler, il portait au pieds des chaussures
25 de sports Adidas, comme celle que portait la police, et il m'a dit, je cite
Page 2121
1 : "Regarde, voici Zivko Totic des -- les chaussures de Zivko Totic. Dis
2 bonjour à Dario Kordic et Tudjman et dis-leur que Geler est encore en vie."
3 Je n'avais absolument aucun rapport avec lui. Je ne sais pas ce qu'il
4 voulait dire et, ensuite, les coups ont continué. Toutes les 15 minutes,
5 ils entraient et battaient chacun d'entre nous. Après 15 minutes, ils
6 revenaient et recommençaient à nous taper dessus.
7 Q. Monsieur Bogeljic, est-ce qu'un moment est venu où les coups ont, en
8 fait, cessé ?
9 R. Oui, je crois que les coups ont cessé après 3 heures du matin parce que
10 je crois que, vers 3 heures 30 ou 4 heures du matin, je ne suis pas
11 absolument sur de l'heure, un officier est entré. Il portait un uniforme et
12 il a dit quel était son nom, mais je n'arrive pas à m'en souvenir. Il a dit
13 que tout ceci était un malentendu, que c'était une erreur, que nous soyons
14 là. Nous avons demandé si quelqu'un -- il nous a demandé si quelqu'un nous
15 avait battu. Nous ne pouvions pas nous tenir sur nos pieds, il était
16 parfaitement clair, alors ce qui c'était passé, on pouvait le voir.
17 Q. Est-ce que vos blessures, à ce moment-là, étaient visibles ?
18 R. Horriblement visibles.
19 Q. Monsieur Bogeljic, comment avez-vous appris que cette personne avait
20 été un officier, que c'était un officier ?
21 R. C'était un homme, un homme avec une intelligence quelconque qui peut
22 faire une distinction entre un soldat et un officier. Il a dit qu'il était
23 Officier et, comme je dis, je n'arrive pas à me rappeler son nom parce que
24 c'était il y a plus de dix ans. Il devait avoir à peu près 46 à 47 ans. Ils
25 ont dit -- il était une sorte de lieutenant quelque chose comme cela.
Page 2122
1 Q. Est-ce que, pour finir, vous avez été relâché ?
2 R. Oui, nous avons en été.
3 Je voudrais remarquer quelque chose : parmi les hommes qui se trouvaient
4 là, il en était un. Je l'ai appris, par la suite, qu'il était aussi un
5 soldat. Je ne sais pas son nom, mais il venait d'un village qui s'appelait
6 Trsce, proche de Kakanj. Cet homme nous a beaucoup aidé, il nous a apporté
7 de l'eau, des cigarettes et on nous a donné des dates à manger. Il nous a
8 dit pourquoi nous étions détenus là parce que je ne savais pas vraiment
9 pourquoi on nous gardait là.
10 Q. Monsieur Bogeljic, une fois que vous avez été relâché, quelle blessure
11 portiez-vous ? Est-ce que vous aviez des blessures, qui résultaient des
12 coups qui vous avaient porté dans le motel Sretno pendant cette nuit ?
13 R. Ce jour-là, avec certains de ces hommes, nous nous sommes rendus au
14 centre médical à Kakanj. Pour être honnête, j'avais peur de m'y rendre
15 parce que je crois que c'était mon frère qui vivait à Kakanj et dont la
16 femme est une bosnienne. Je pense qu'ils nous ont emmenés voir un médecin
17 et ils ont fait des clichés. J'avais six cotes cassées, mes deux reins
18 avaient été déplacés. J'avais des blessures au couteau en deux endroits. Il
19 y avait un hématome sur l'un des reins qui -- c'est à peu près quatre
20 centimètres. Trois mois plus tard, j'ai réussi à aller en Croatie. J'ai été
21 dans un hôpital, et ils ont découvert que ma colonne vertébrale avait
22 également été endommagée.
23 Q. Est-ce qu'un moment est venu où vous-même et d'autres détenus ont été
24 filmés pour que l'on puisse filmer leurs blessures ?
25 R. Oui, un jour plus tard. Je crois que nous avons quitté le motel le 19,
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1 et le 20, je suis allé au centre médical à Kakanj. Ensuite, il y en avait
2 un à Haljinici, dans un autre village qui était sous le contrôle du HVO, et
3 ils tenaient une partie de ce territoire. Il y avait un centre médical là,
4 avec deux médecins. L'un était Serbe et l'autre était Croate, et ils
5 étaient mariés à des Croates. Un homme est venu, à ce moment-là, qui avait
6 été président de la Fédération, Nikola Lozancic. C'était un inspecteur de
7 police, et il a demandé si nous permettrions que l'on prenne des
8 photographies. Les gens avaient peur. Personnellement, j'ai de la famille,
9 mais, néanmoins, j'ai dit d'accord, et c'est ainsi que des prises de vidéo
10 ont été prises.
11 Q. Pour être bien clair, est-ce que c'était le jour après que vous avez
12 été relâché?
13 R. J'ai été relâché 24 heures après avoir été emmené à cet endroit, et
14 ceci s'est passé le 20. Effectivement, c'est le jour suivant, le moment où
15 j'ai été relâché, dans l'après-midi.
16 Q. Y a-t-il eu d'autres victimes de ces blessures ? Est-ce qu'il y a eu
17 d'autres victimes qui ont également été filmées en vidéo, avec leurs
18 blessures ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que ces prises de vue ont été faites le même jour que celui où
21 on a filmé vos blessures ?
22 R. Nous nous sommes tous retrouvés dans ce centre de soins, et certains
23 d'entre -- à Haljinici, le même jour. Je pense que la plupart d'entre nous
24 ont été filmés, sauf que certains ne voulaient pas l'être -- ne voulaient
25 pas montrer leur visage.
Page 2124
1 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je vais maintenant
2 montrer une séquence vidéo. Ce sont des éléments d'information, qui ont été
3 transmis à la Défense, comme faisant partie des pièces à conviction de
4 l'Accusation, le 10 octobre de l'an dernier. Je vais montrer une séquence
5 de quatre vidéos différents, et je voudrais demander que le témoin fasse
6 des commentaires sur ces vidéos. Je vais lui montrer, par le système
7 Sanction, et il s'agit de disques CD, avec les vidéos, qui seront fournies,
8 au cours de l'audience d'aujourd'hui, au Greffe, ainsi qu'aux membres de la
9 Chambre.
10 Q. Témoin, maintenant, on va vous montrer des prises de vue vidéo, qui
11 vont apparaître à l'écran. Pourriez-vous, s'il vous plaît, les regarder
12 avec soin et, une fois que ce sera terminé, je vous poserai quelques
13 questions.
14 R. Entendu.
15 [Diffusion de cassette vidéo]
16 M. WITHOPF : [interprétation]
17 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, Monsieur Bogeljic, informer les membres
18 de la Chambre de première instance, leur dire qui on voit sur ces images
19 vidéo.
20 R. Il s'agit de la dernière personne, du dernier homme qui était arrivé au
21 motel cette nuit-là. Il est arrivé après nous. Il est d'Ilijas. Je ne sais
22 pas son nom. Il est de Misoca, un village croate. Ils ont été chassés de là
23 par les Serbes, et il est venu à Kakanj.
24 Q. Je vais maintenant vous montrer, Monsieur Bogeljic, une partie de ces
25 prises de ces prises de vue.
Page 2125
1 [Diffusion de cassette vidéo]
2 M. WITHOPF : [interprétation]
3 Q. Monsieur Bogeljic, pourriez-vous, s'il vous plaît, dire aux membres de
4 la Chambre qui on peut voir sur cette séquence vidéo.
5 R. Je pense que c'est l'homme qui a dit qu'il était membre de la Défense
6 territoriale à Misoca. En tous les cas, qu'il avait combattu du côté de
7 l'armée de Bosnie-Herzégovine, cela n'est pas un homme de Kakanj.
8 Q. Pour préciser les choses, est-ce que cette personne s'était trouvée
9 avec vous dans le motel de Sretno pendant la nuit du 18 au 19 mai 1993 ?
10 R. Oui, oui.
11 Q. Est-ce que cette personne a été battue, frappée, pendant la nuit qu'il
12 a passé au motel Sretno ?
13 R. Je l'ai déjà dit, tous ont été battus. Il est un des 16 qui se
14 trouvaient là.
15 Q. Monsieur Bogeljic, je vais maintenant vous montrer une troisième
16 séquence vidéo.
17 [Diffusion de cassette vidéo]
18 M. WITHOPF : [interprétation]
19 Q. Monsieur Bogeljic, s'il vous plaît, pourriez-vous dire aux membres de
20 la Chambre de première instance qui on voit sur cette séquence vidéo.
21 R. Cet homme était également avec moi. Je ne sais pas son nom. Je ne sais
22 pas s'il est de Kakanj, mais je crois qu'il était de Kakanj.
23 Q. Pour être précis, il était avec vous --
24 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plait.
25 M. WITHOPF : [interprétation] Excusez-moi.
Page 2126
1 Q. Pour être bien précis et clarifier les choses, il se trouvait avec
2 vous. Est-ce que ceci veut dire qu'il était avec vous au motel Sretno
3 pendant la nuit du 18 mai 1993 au 19 mai 1993 ?
4 R. Oui, il était avec moi.
5 Q. Est-ce que vous savez si cette personne a été frappée pendant la même
6 nuit ?
7 R. Oui.
8 Q. Monsieur Bogeljic, je vais maintenant vous montrer une quatrième
9 séquence vidéo.
10 [Diffusion de cassette vidéo]
11 Q. Monsieur Bogeljic, pourriez-vous, s'il vous plaît, dire aux membres de
12 la Chambre de première instance quelle est la personne qu'on aperçoit sur
13 cette séquence vidéo ?
14 R. C'était moi.
15 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
16 Juges, une fois que les CD seront prêts et disponibles, l'Accusation
17 souhaite déposer ces séquences vidéo au dossier comme élément de preuve.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Les CD seront prêts à quel moment ?
19 M. WITHOPF : [interprétation] A ma connaissance, ils seront prêts au cours
20 de l'audience d'aujourd'hui.
21 Q. Monsieur Bogeljic, les blessures que l'on peut voir sur ces séquences
22 vidéo, les blessures sur votre corps sont-elles les résultats des coups qui
23 vous ont été portés dans le motel Sretno ?
24 R. Toutes sont les résultats des coups qui ont été portés. Tout ceci s'est
25 passé au motel Sretno pendant une période -- une période d'environ 20
Page 2127
1 heures. Seulement ce que l'on voit sur cette séquence, ne ressemble
2 vraiment pas à ce qui s'était en réalité. C'était bien pire. La réalité
3 était bien pire. C'est moi, seulement à l'époque, j'avais des cheveux.
4 Q. Outre le fait de montrer vos blessures aux personnes qui ont filmé ceci.
5 Est-ce que vous avez eu l'occasion de montrer vos blessures à quelqu'un
6 d'autre ?
7 R. Oui. Le jour où je suis sorti du motel, je suis allé dans une maison
8 qui se trouvait de l'autre côté de la route à une centaine de mètres du
9 motel, où vivaient les parents de ma femme. Nous sommes rendus là parce que
10 ma femme s'y trouvait, et elle croyait que je n'étais plus au nombre des
11 vivants. Nous sommes allés chez mes parents, qui habitent un village proche
12 de Kakanj, qui s'appelle Catici. Quelques heures plus tard, je ne me
13 rappelle pas exactement, Pavo Sljivic est venu. C'était un commandant du
14 HVO à Kakanj. Je crois que c'était lui, je ne me rappelle pas exactement.
15 Il se peut qu'il y a eu un ou deux des hommes avec lui et, ensuite, il m'a
16 demandé si je veux l'accompagner pour montrer cela à un colonel parce qu'il
17 y avait une réunion, qui avait lieu entre quelqu'un de l'armée de la
18 Bosnie-Herzégovine et du HVO, pour calmer les tensions parce que les
19 conflits n'avaient pas encore véritablement démarrés. Je n'avais vraiment
20 pas envie d'y aller, mais j'y suis allé quand même. Nous sommes allés à une
21 réunion à laquelle participaient des représentants de l'armée BH et du HVO.
22 Ce colonel, que j'ai rencontré par la suite, est-ce que je dois
23 poursuivre ?
24 Q. Oui, veuillez poursuivre, s'il vous plaît.
25 R. D'un côté, il y avait trois hommes qui étaient assis, qui portaient des
Page 2128
1 uniformes de camouflages. En haut de la table, il y avait le colonel
2 français, un officier à côté de lui, et un interprète. De l'autre côté, si
3 je me rappelle bien, je ne sais pas exactement qui, mais c'étaient des
4 représentants du HVO.
5 Pavo Sljivic, qui était le commandant - cela je me le rappelle bien parce
6 que je ne connais pas les personnes qui se trouvaient là -Pavo Sljivic
7 était là il y a longtemps, mais je sais qu'il a dit : "Regardez, hier, vous
8 avez tué l'un de nos hommes et maintenant 16 hommes ont été battus presque
9 à mort." Il a mentionné un nom, tandis qu'il parlait et il a dit : "Kubura,
10 regardez ce que vos hommes sont en train de faire. Nous sommes en train de
11 négocier une trêve, et de couvrir nos tranchets." Enfin, je me rappelle
12 cela très bien. Je ne connaissais personne à l'intérieur. Voilà ce que je
13 peux dire, et je me souviens très bien de cela.
14 Q. Au cours de cette réunion, est-ce qu'on vous a demandé de faire quoi
15 que ce soit ?
16 R. Oui. Je ne me rappelle pas exactement le moment où quelqu'un a dit
17 quelque chose dont le genre : "Et bien, il va très bien. Il n'y a pas de
18 problème." Ils avaient commencé -- évidemment, on avait commencé à me
19 traiter, on m'avait mis un onguent. On s'était lavé, mais il aurait fallu
20 que j'enlève mon "T-shirt". Je me rappelle très bien qu'il y avait une
21 jeune femme de Kakanj, qui était l'interprète, et je sais que cette femme a
22 détourné la tête. Elle était tellement horrifiée de voir ce qu'elle a vu.
23 Après cela, nous nous sommes partis, ma femme m'attendait dans le couloir.
24 Q. A partir du moment où vous avez retiré votre "T-shirt", au cours de
25 cette réunion, est-ce que vos blessures restaient visibles, aussi visibles
Page 2129
1 que ce que nous venons de voir sur les séquences vidéo ?
2 R. Oui, même qu'elles étaient encore plus prononcées et visibles.
3 Q. Est-ce que cette personne à qui le commandant du HVO avait parlé, Pavo
4 Sljivic, en l'appelant Kubura, avec cette phrase : "Kubura, regarde ce que
5 font vos hommes," est-ce que cette personne a vu les blessures au cours de
6 cette réunion, à partir du moment où vous avez retiré votre "T-shirt" ?
7 R. Bien sûr, tout le monde a pu voir, ils se trouvaient tous à
8 l'intérieur.
9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me donnez un
10 instant pour vérifier quelque chose. Je vous remercie beaucoup, Monsieur le
11 Président.
12 Q. Cette personne qu'on avait appelée du nom de Kubura, était-ce un simple
13 soldat ou est-ce que c'était un officier ?
14 R. Je ne saurais dire avec certitude. Il y avait trois hommes qui étaient
15 assis là. Ils étaient en uniforme, pour savoir s'il était un officier ou
16 pas, je ne sais pas. Tous étaient assis lorsque nous sommes entrés et
17 lorsque j'ai retiré mon "T-shirt", je me rappelle que Pavo Sljivic criait
18 et qu'il a crié ce nom. C'est tout ce que je me rappelle. Mais le visage,
19 pour moi, c'est très difficile de dire qui était là.
20 Q. Monsieur le Témoin, après tous ces événements, Monsieur Bogeljic, est-
21 ce que vous êtes jamais retourné à Kakanj ?
22 R. Je vais à Kakanj tous les ans deux ou trois fois, et je m'y trouvais il
23 y a deux ou trois mois. J'ai de nombreux amis et des gens avec qui j'avais
24 l'habitude de travailler. Ils viennent me voir. On se voit au bord de la
25 mer. Nous communiquons tous les jours par téléphone.
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1 Q. Est-ce que ceci veut dire que, depuis lors, vous ne vivez plus à
2 Kakanj ?
3 R. C'est exact. En octobre 1993, j'ai quitté la Bosnie-Herzégovine. Du
4 fait que ma femme est serbe, nous sommes partis par Vares. A Vares, il y
5 avait des personnes par le truchement desquelles on pouvait partir. Même
6 mon frère est parti, sa femme est une Bosnienne. Il est également parti à
7 travers ce qu'on appelle la Républika Srpska. Je suis allé à Belgrade, via
8 Belgrade à Hongrie, à l'aéroport. Comme le passeport de mon fils, la
9 validité avait expiré, nous avons dû aller en Allemagne. J'ai une sœur et
10 un frère qui s'y trouvent. De là, nous sommes allés en Croatie.
11 Q. Monsieur Bogeljic, est-ce que vous souffrez encore des blessures qui
12 vous ont été portées dans le motel de Sretno dans la nuit du 18 mai 1993 au
13 19 mai 1993 ?
14 R. J'ai des problèmes de santé, comme j'ai déjà dit. J'ai ma colonne
15 vertébrale endommagée, j'ai un rein endommagé. A cause des sédatives, en
16 fait, ceci est très mauvais pour mon système digestif.
17 Q. Est-ce que ces problèmes sont le résultat des coups reçus au motel
18 Sretno ?
19 R. Jusqu'à 1993, jusqu'au 18 mai, je ne dirais pas que j'étais un homme en
20 parfaite santé, mais je n'avais aucune blessure, sauf le problème du rein
21 droit, qui me causait quelques problèmes. Mais je n'avais pas d'hématome ni
22 quoi que ce soit de ce genre. J'avais simplement une inflammation de ce
23 rein et c'est pour cela que cela m'a causé quelques problèmes.
24 Q. Je vous remercie beaucoup, Monsieur Bogeljic.
25 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
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1 Juges, ceci conclut l'interrogatoire principal de l'Accusation.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf.
3 Questions de la Cour :
4 M. LE JUGE ANTONETTI : J'aurais juste quelques petites questions afin de
5 faire préciser des réponses que vous avez faites. Vous avez expliqué, à un
6 moment donné, qu'une personne vous a apporté de l'eau, des cigarettes et
7 des dattes. Cette personne, quand vous étiez détenu, vous auriez indiqué la
8 raison pour laquelle vous avez été arrêté ou battu. Est-ce que vous pouvez
9 préciser votre réponse ? Qu'est-ce qu'elle vous a dit cette personne ?
10 R. On m'a dit littéralement la chose suivante : "Tu devrais te considérer
11 heureux que les tiens aient relâché l'homme", et je ne sais pas de qui il
12 parlait parce que la veille Marinko Benic avait été tué, la veille à
13 Catici. Parce que certains hommes, je ne sais plus de quelle unité, avait
14 enlevé le drapeau. Les hommes du HVO ont essayé de s'interposer, de
15 l'empêcher, et l'ont tué. Ensuite, le HVO a fait quelques prisonniers.
16 Ensuite, si j'ai bien compris, pour faire pression pour que leurs
17 prisonniers soient libérés, ils nous ont arrêtés. Mais nous étions des
18 civils.
19 C'est cela que l'homme a expliqué. Je m'excuse, j'ignore son nom -- Pardon,
20 je regrette de ne pas connaître son nom, car il nous a beaucoup aidés.
21 Lorsqu'ils ont frappé Mijo Petrovic, à l'aide d'une barre, cette personne -
22 - cet homme, s'est interposé lorsqu'il s'agissait de frapper un homme
23 inconscient à terre. Cet homme que l'on frappait qui était inconscient à
24 terre. La personne en question s'est interposée.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La seconde question est relative au moment où
Page 2132
1 on vous emmène après avoir été pris en vidéo pour vous montrer à trois
2 militaires, apparemment de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Vous avez dit il
3 y avait un colonel français. Qu'est-ce qu'il faisait là ce colonel ? Qui
4 vous dit -- qu'est-ce qui vous permet de dire qu'il était colonel, qu'il
5 était français et, apparemment il était étranger ? Comment saviez-vous
6 cela ?
7 R. Cet homme, et je sais parce que après le conflit, après la chute de
8 Kakanj ou sa libération, selon le point de vue que l'on adopte sur la
9 question, je me suis retrouvé chez mes parents. J'étais invité, et je ne
10 pouvais pas me déplacer en raison des blessures qui m'avaient été
11 infligées. Nous nous sommes rendus à Catici avec ma femme et mon fils. J'ai
12 vu un homme, qui la veille -- non, c'est inexact.
13 Du 18 au 19, j'ai vu cet homme au terrain de sport. Et nous voulions --
14 nous estimions qu'il était mieux de nous rendre à la base de la FORPRONU.
15 Il y avait beaucoup de gens là. Nous sommes entrés, et c'est comme cela que
16 j'ai pu rencontrer ce colonel personnellement. Une unité de la FORPRONU
17 était cantonnée là-bas et contrôlait les choses. En fait, il y avait une
18 réunion qui visait à réconcilier les belligérants, même si on ne pouvait
19 pas vraiment parler de guerre à l'époque. On pouvait parler d'incidents,
20 mais pas de conflit qui avait éclaté.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites que vous avez montré vos blessures
22 devant un représentant de la FORPRONU, et aussi devant trois militaires qui
23 appartenaient à la ABiH, c'est bien cela ?
24 R. Oui, effectivement. Et le HVO il y avait un interprète.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez enlevé votre -- personne n'a rien
Page 2133
1 dit ? Quand vous avez montré vos blessures, personne n'a fait aucun
2 commentaire ?
3 R. Non. Non.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez le seul à venir devant ces hommes ou il y
5 avait d'autres personnes que vous ? Vous étiez le seul ou il y avait
6 d'autres qui sont venus montrer leurs blessures aussi ?
7 R. Il n'y avait que ma femme et moi, qui étions là, à la FORPRONU. Ils
8 nous ont dit qu'il y avait une réunion. Ils ont demandé si on pouvait voir
9 ce qui s'était passé. On nous a demandé si on pouvait montrer, au colonel
10 français, ces blessures.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : On voulait que vous montriez vos blessures au
12 colonel français ou aux militaires de la ABiH ou les deux?
13 R. Je pense qu'on voulait que je montre mes blessures à tout le monde.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, je vais donner la parole au Défenseur pour le
15 contre-interrogatoire.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
17 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :
18 Q. [interprétation] Bonjour, M. Bogeljic. Je m'appelle Edina Residovic, et
19 je suis le conseil de la Défense du général Hadzihasanovic.
20 R. Bonjour.
21 Q. Je vous priais de bien vouloir répondre à quelques-unes de mes
22 questions.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais également
24 poser quelques questions d'ordre général au témoin au sujet de la
25 situation, compte tenu du fait que le témoin a résidé à Kakanj et à Zenica,
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1 et certaines de ces questions peuvent avoir un intérêt pour mon client.
2 Q. Lorsque vous répondiez aux questions du Procureur, vous avez dit qu'en
3 1986 vous aviez obtenu un diplôme de l'école supérieure --
4 R. Oui, de l'école supérieure --
5 Q. -- questions de télécommunications et que vous avez obtenu le titre
6 d'ingénieur en télécommunication, c'est bien cela ?
7 R. C'est cela.
8 Q. La même année vous avez trouvé un emploi à Zenica à la poste dans le
9 domaine de télécommunication, n'est-ce pas ?
10 R. Exact.
11 Q. Vous avez très rapidement avancé dans votre carrière de sorte qu'en
12 1991, vous avez été promu au poste de responsable du central téléphonique
13 numérique de Bosnie-Herzégovine.
14 R. Non, ce n'est pas exact. En 1993, je suis devenu responsable du central
15 téléphonique et j'ai été promu parce que mon chef serbe avait quitté
16 Zenica. Il s'appelait Kuc Harum.
17 Q. Merci. Vous avez déjà parlé des conditions qui existaient dans votre
18 région en 1992, je vous demande s'il est exact, qu'on 1992 à Zenica, il y
19 avait pas en réalité de conflits entre les Musulmans et les Croates, n'est-
20 ce pas ?
21 R. C'est bien cela.
22 Q. A cette époque, la majorité des Croates, qui étaient aptes à porter des
23 armes, ont rejoint le conseil Croate de la Défense car celui-ci, à savoir,
24 le HVO avait proclamé la lutte conjointe contre les forces serbes de même
25 que la Défense territoriale, n'est-ce pas ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. En fait, à ce moment, l'ennemi commun c'était la JNA serbe et celle-ci
3 avait attaquée la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
4 R. C'est cela.
5 Q. Est-il exact qu'en réalité ses attaques des forces serbes sur le
6 territoire de la Bosnie-Herzégovine ont débouché sur des déplacements
7 importants de population et qu'à cette époque en provenance de Krajina, en
8 particulier, un nombre très important de Musulmans et un nombre inférieure,
9 mais important également de Croates sont arrivés en qualité de réfugiés
10 dans la région de Zenica.
11 R. C'est cela.
12 Q. Un nombre important de réfugiés est arrivé également de Bosnie
13 orientale, Rogatica, en particulier, Foca Visegrad, Vlasenica également. Il
14 s'agissait des Musulmans, n'est-ce pas ?
15 R. Exact.
16 Q. Le nombre de réfugiés arrivant à Zenica, à cette époque, pouvait se
17 chiffrer non pas en milliers, mais en dizaines de milliers de personnes,
18 n'est-ce pas ?
19 R. Pour autant que je le sache, c'était le cas.
20 Q. Toutes ces personnes -- nous dirons la majorité de ces personnes sont
21 arrivées sans rien n'apporter avec elles parce qu'elles avaient été
22 chassées de chez elles sans rien pouvoir emporter, n'est-ce pas ?
23 R. Exact.
24 Q. De sorte que le nombre d'habitants de Zenica vers la fin de 1992, a
25 pratiquement doublé ?
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1 R. J'ai entendu dire. En fait, je le sais avant la guerre selon le
2 recensement, il y avait à peu près 153 000 habitants à Zenica, et mes
3 collègues disaient qu'en 1993, quand toutes ces personnes de l'extérieur
4 sont arrivées, qui étaient surtout des Musulmans de Bosnie, ce nombre
5 d'habitants a atteint 350 000. En tout cas, c'est ce que j'ai entendu dire.
6 Q. Merci --
7 R. -- je vous en prie.
8 Q. Puisque vous viviez à Kakanj et travailliez à Zenica, vous avez pu
9 remarquer à Zenica, en particulier, qu'au début de l'année 1993, un certain
10 nombre de personnes arrivées à Zenica, qui avaient été chassées également
11 de Busovaca Kiseljak, Vitez, c'est-à-dire, de zone qui auparavant était
12 sous le contrôle du HVO, n'est-ce pas ?
13 R. Exact.
14 Q. Toutes ces personnes arrivaient avec toutes sortes de frustrations et
15 racontaient toutes sortes de choses au sujet de ce qui se passait en
16 Krajina, en Bosnie orientale et de diverses régions d'où ils étaient
17 originaires -- d'où elles étaient originaires, n'est-ce pas ?
18 R. Exact.
19 Q. Vous avez dit également, que jusqu'à la guerre la vie à Zenica et à
20 Kakanj où vous habitiez, était tout à fait normal entre les uns et les
21 autres, qu'il n'y avait aucune différence faite par les habitants sur la
22 base de la religion notamment ou de l'appartenance ethnique, n'est-ce pas ?
23 R. En effet.
24 Q. Est-il exact, que vous avez déjà répondu à une question du Procureur à
25 ce sujet, qu'un certain nombre de responsables politiques ont utilisé ou
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1 plutôt abusé de ce malheur qui est survenu en tentant de dresser certain
2 habitant contre d'autres habitants ?
3 R. Cela, toute la population le sait.
4 Q. Je vais vous dire Monsieur, vous et moi, nous savons très certainement,
5 mais les Juges de cette Chambre ne le savent pas nécessairement. Il faut le
6 préciser.
7 R. En effet.
8 Q. Répondant à une question du Procureur, vous avez dit que vous aviez
9 travaillé au PTT à la poste de Zenica, jusqu'au mois de mars 1993, date à
10 laquelle vous avez décidé que vous n'étiez plus en sécurité dans votre
11 travail car un de vos collègues vous avait accusé de travailler pour le
12 HVO, c'est bien cela ?
13 R. Ce n'est pas lui qui a dit que je travaillais pour le HVO. Nous, qui
14 travaillons aux télécommunications, nous connaissons bien le système de
15 transmission. Moi-même et tous mes amis, nous écoutions ce qui se passait
16 parce que nous avions accès à certaines lignes qui nous permettaient d'en
17 savoir sur ce qui se passait au cours de la guerre. Mais quelqu'un a eu
18 intérêt à dire qu'il s'agissait de moi. Personne, en fait, n'avait mis le
19 moindre téléphone sur écoute. Je tiens à ce qu'on se comprenne bien. Un de
20 mes collègues m'a dit, un tel, je ne vais pas vous dire son nom ici, a
21 déclaré que c'était toi qui était responsable. C'est mon directeur, Kuc
22 Harun, un homme, très bien connu, qui m'a dit cela.
23 Q. Mais il n'a pas cru que c'était le cas, n'est-ce pas ?
24 R. Bien sûr, il ne l'a pas cru. Ce n'est de votre coté que vous avez --
25 lui, oui. Certains ne l'ont pas fait, mais lui il m'a défendu.
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1 Q. Mais cet incident survenu avec votre collègue a créé chez vous la
2 volonté très ferme en raison de risques pour votre sécurité de quitter
3 votre emploi. Vous en avez informé votre directeur, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, j'ai parlé avec mon directeur, je lui ai dit que j'allais partir
5 quelques temps jusqu'à ce que les choses se calme parce qu'à Zenica à
6 l'époque y avait vraiment beaucoup de provocations. Des gens pénétraient
7 dans les appartements par infraction, ceux qui étaient sur place savent
8 bien que cela a eu lieu.
9 Q. En fait, vous êtes parti pour Kankanj parce que selon votre estimation
10 de la situation était bien meilleure à Kakanj qu'à Zenica ?
11 R. Madame, à Kakanj, il n'y avait pas de guerre, il n'y avait pas de
12 réfugiés. Vous avez dit vous-même que les gens qui sont arrivés, n'avaient
13 rien sur eux, et qu'ils étaient pleins de frustration. Ils avaient perdu
14 leur foyer, voyez-vous, alors qu'à Kakanj, j'avais encore quelques voisins
15 musulmans que j'ai beaucoup aidés. Je connaissais bien les gens de Kakanj,
16 et je connaissais les gens d' Ilijas et, dans mon quartier, il y avait des
17 gens qui venaient de Busovaca également, mais, à Kakanj, il n'y avait
18 personne d'autre qui venait de l'extérieur, sauf peut-être de Vitez.
19 Q. Mais vous pouvez confirmer néanmoins que les tensions, notamment, à
20 Zenica, y compris à Kakanj, sont devenues plus importantes en raison de
21 récits qui circulaient sur les massacre d'Ahmici, et des rumeurs qui ont
22 été entendus après cet événement, n'est-ce pas ?
23 R. Oui, exactement. Geler, dont j'ai mentionné le nom tout à l'heure, à
24 même dit : "Souvenez-vous bien d'Ahmici. On a incendié des corps de bébés
25 là-bas." C'est ce qu'il a dit, alors que nous étions frappés.
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1 Q. Des questions vous ont été posées par le Procureur également et, afin
2 de mieux comprendre la situation à Kakanj, je vais également vous poser
3 quelques questions. Est-il exact que Kakanj se trouve juste à côté de la
4 grande route, qui par le passé, comme aujourd'hui, relie Zenica à Sarajevo.
5 Mais qu'à cette époque, en raison de l'occupation d'une partie du
6 territoire par les forces serbes, notamment, la région qui se trouve en
7 dessous de Visoko, il n'était pas possible d'utiliser cette route pour
8 aller à Sarajevo. Ceci est-il exact ou pas ?
9 R. C'est exactement cela.
10 Q. Mais est-ce exact que cette voie de communication était tout de même
11 importante pour relier le territoire contrôlé par l'armée de Bosnie-
12 Herzégovine depuis Visoko jusqu'à Zepce, et
13 cetera ?
14 R. Oui, c'était la seule voie utilisable, le seul chemin possible.
15 Q. Est-il exact également qu'en raison de ces ressources économiques, la
16 mine, notamment, également une usine d'électricité hydraulique, Kakanj,
17 pour cette raison, était très importante pour l'armée de Bosnie-
18 Herzégovine, et pour le HVO, ainsi que pour tout le pays ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Est-il exact que l'importance stratégique de Kakanj, en raison du fait
21 qu'il était impossible de se rendre dans le reste du territoire contrôlé
22 par l'armée de Bosnie-Herzégovine sans passer par Kakanj, mais que c'était
23 également le point de départ pour se rendre dans la région contrôlée par le
24 HVO, comme Busovaca, Kiseljak, en passant par Kakanj pour aller à Vares.
25 Cette importance était également grande pour cela ?
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1 R. Pour autant que je le sache, oui, pour aller à Vares, oui, mais à
2 Busovaca, parce que les collines environnantes étaient sous le contrôle de
3 l'armée de Bosnie-Herzégovine. Nous parlons de Busovaca, Vitez et Kiseljak
4 dans ce sens-là, pour autant que je le sache.
5 Q. Fort bien. Mais nous souhaitons, pour le moment, nous faire simplement
6 une opinion de la situation de Kakanj.
7 Alors, revenons, si vous le voulez bien, au sujet de votre déposition. Vous
8 avez dit qu'au mois de mars, lorsque vous avez arrêté de travailler à
9 Zenica, vous avez commencé à accomplir quelques tâches pour le HVO de
10 Zenica ?
11 R. Ils avaient besoin de quelqu'un qui connaissait bien les
12 télécommunications. A Kakanj, j'étais la seule personne travaillant à la
13 poste et connaissant bien les télécommunications. Pour le HVO, qui n'avait
14 personne de spécialiser vers ce domaine, j'étais la seule personne
15 disponible.
16 Q. Dites-moi, au mois de mars, avez-vous rendu des services techniques au
17 HVO de Zenica ?
18 R. Au mois de mars ?
19 Q. Oui, au mois de mars 1993.
20 R. Jusqu'au mois de mars, j'ai travaillé dans mon entreprise. J'ai
21 travaillé dans mon entreprise, mais à chaque fois qu'il fallait tirer une
22 ligne là-bas, je travaillais dans le secteur qui était sous ma
23 responsabilité, Topcic, Poljnemela [phon], Lasva, là j'allais dans de
24 différents centrales pour régler les problèmes en cas de nécessité. Vous
25 voyez, pour les uns ou pour les autres, c'était ma profession.
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1 Q. Quand vous êtes retourné, quand vous êtes rentré à Kakanj, je l'ai dit
2 pour que nous nous comprenions mieux, car je ne suis pas spécialiste de ces
3 aspects assez techniques. Vous avez en fait placé des antennes NMP, comme
4 vous les appelez ?
5 R. Oui, c'est cela.
6 Q. En augmentant de cette façon la zone de couverture des téléphones
7 mobiles utilisés par le HVO de Zenica, n'est-ce pas ?
8 R. Non, ce n'est pas exact. Le conseil croate de la Défense avait ses
9 propres téléphones en dehors de cela. Ce que je faisais c'était à
10 l'intention des gens qui habitaient là, ils utilisaient ces téléphones. Il
11 y avait un central à Kakanj, il aurait fallu qu'il mette un à Caritas. Il
12 fallait relier ces différentes zones, de façon à créer une zone de
13 couverture homogène parce que, dans tous ces villages croates, il y avait
14 des membres de familles qui habitaient en Allemagne, et à l'étranger et qui
15 téléphonaient souvent. Afin d'obtenir l'augmentation de cette zone de
16 couverture, ils se sont adressés au HVO.
17 Q. De façon à ce que je comprenne mieux, c'est important, je crois, que
18 tout le monde ici le comprenne bien. Ce réseau que vous avez crée à partir
19 du moment où il a commencé à exister, a permis d'établir des communications
20 avec la Croatie ?
21 R. Avec la Slovénie, et avec le monde entier également.
22 Q. Oui, avec la Slovénie et le monde entier également ?
23 R. C'est exact. Central de ce genre existait à Zenica et, par la suite, ce
24 système a été disponible dans les cabines. Tout le monde pouvait accéder à
25 ce système. Simplement en Slovénie, il fallait pour accéder au système, il
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1 fallait utiliser un téléphone mobile.
2 Q. Au moment où vous avez été privé de la liberté, est-ce que vous
3 travaillez ?
4 R. Non, je ne travaillais pas. C'étaient des jeunes qui avaient commencé à
5 le faire. J'ai simplement établi les bases de départ et, quand il y avait
6 une panne, j'allais réparer, mais je ne travaillais pas sur ce système tous
7 les jours.
8 Q. Non, mais je parlais de façon plus générale, ce contrôle, cet
9 élargissement de la zone. Vous aviez encore cette responsabilité en mai
10 1993, n'est-ce pas ?
11 R. En 1993, oui, oui, oui.
12 Q. Vous avez décrit en détail ce qui vous est arrivé lorsque vous avez été
13 privé de liberté, emmené de force-là où on vous a emmené. Ces hommes, qui
14 sont arrivés dans la maison de vos beaux-parents, vous ne les connaissiez
15 pas jusqu'à là, n'est-ce pas ?
16 R. Non, je ne les connaissais pas.
17 Q. Par la suite, vous n'avez pas non plus appris qui étaient ces hommes ?
18 R. A l'exception d'un d'entre eux, dont j'ai appris l'identité parce qu'il
19 s'est présenté lui-même. J'ai su qu'il s'appelait Serif, mais je n'ai pas
20 appris son nom de famille.
21 Q. Au moment où ils vous ont arrêté, ils ne sont pas présentés, en vous
22 disant à quelle unité militaire ils appartenaient, n'est-ce pas ?
23 R. Non, simplement, j'ai tiré les conclusions que je pouvais tirer moi-
24 même.
25 Q. A ce moment-là, vous n'avez pas remarqué qu'ils arboraient des insignes
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1 particuliers, ou l'avez-vous fait ?
2 R. Ce que j'ai déjà dit, je m'y tiens, j'ai dit qu'ils arboraient des
3 insignes divers. Vous savez, Madame, on était en 1993, et les gens
4 portaient toute sorte de choses sur eux, mais tous ceux qui habitaient à
5 Kakanj savaient qu'au motel était installé le Bataillon de la 7e Brigade
6 musulmane.
7 Q. Vous l'avez dit, mais je vous parlais de l'instant de votre
8 arrestation ?
9 R. Oui, oui.
10 Q. A l'instant de votre arrestation, vous ne saviez pas exactement qu'ils
11 étaient les insignes parmi ceux qu'on vous a montré du numéro 1 ou numéro
12 24, que portaient ces hommes ?
13 R. J'ai déjà dit que je croyais avoir reconnu sur eux le numéro 1, mais
14 j'ai dit aussi qu'ils portaient des emblèmes sur lesquelles on lisait
15 l'inscription : "Allah-U-Ekber". La plupart d'entre eux avaient des
16 bandeaux autour de la tête sur lesquels on lisait des mots en arabe, des
17 bandeaux de couleur rouge comme ont porté les hommes qui allaient au
18 combat.
19 Q. Je sais qu'il vous est difficile de vous rappeler tous ces détails
20 aujourd'hui, et tout ce qui s'est passé à l'hôtel Sretno, mais vous avez
21 dit à l'Accusation que, lorsque vous étiez rentré à l'endroit où se
22 trouvait la réception de l'hôtel, vous aviez constaté qu'il s'y trouvait un
23 certain nombre de soldats. Vous avez également dit qu'ils avaient peur de
24 ce qui allait -- que vous aviez peur de ce qui allait vous arriver et que
25 vous aviez commencé à vous défendre.
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1 R. C'est exact.
2 Q. Est-ce la raison, pour laquelle vous n'avez pas porté particulièrement
3 attention aux insignes arborés par les soldats qui se trouvaient là, est-ce
4 parce que vous aviez peur que vous n'avez pas prêté particulièrement
5 attention aux emblèmes qu'ils arboraient ?
6 R. Je n'ai pas eu le temps de regarder ce que les gens portaient sur leurs
7 épaules -- sur leurs épaulettes, mais j'ai vu un certain nombre de choses.
8 J'ai dit ce que j'avais vu. On a peur dans des conditions de ce genre, bien
9 entendu. Vous savez bien ce que c'est.
10 Q. Les hommes, que vous avez rencontrés devant les pièces où on vous a
11 emmené, vous ne les avez pas reconnus non plus.
12 R. Je n'en ai reconnu qu'un, mais, malheureusement, il est mort, il a été
13 tué. C'était l'Imam de la région. Il s'appelait Senad, je crois. Je n'ai vu
14 que lui. Les autres, je n'ai même pas eu le temps de les regarder.
15 Q. Pendant tout le temps où ils vous ont infligé des sévices, ils
16 réclamaient de vous que vous leur donniez de l'argent, n'est-ce pas ?
17 R. En fait, au moment même de mon arrivée, ils nous ont réclamé de
18 l'argent. Vous savez, on vous bouscule, on vous pousse, on vous menace, on
19 vous dit qu'on va vous tuer. Un peu plus tard, ce que j'ai compris,
20 finalement, c'était que le plus important pour eux, c'était de recevoir de
21 l'argent.
22 Q. Vers 19 heures, quand, finalement, on vous a fait entrer dans cette
23 troisième pièce où vous avez trouvé d'autres personnes déjà présentes sur
24 place, toutes personnes vous ont dit qu'aucune d'entre elles n'avaient
25 encore été frappées, n'est-ce pas ?
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1 R. Les gens qui se trouvaient là - et je l'ai déjà dit - je n'ai pas pu
2 les distinguer très bien, tant que mes yeux ne se sont pas habitués à
3 l'obscurité. Quant à ces personnes, elles avaient peur, elles n'osaient pas
4 dire un mot. J'ai simplement demandé quelle heure il était, et je sais que
5 quelqu'un m'a répondu, 18 heures 50.
6 Q. Oui. Mais vous étiez le premier à avoir été tabassé, n'est-ce pas ?
7 R. C'est exact. En tout cas, pour le reste, je ne sais pas.
8 Q. Ces mauvais traitements que vous avez tous subis ont commencé pendant
9 la nuit -- ont duré jusqu'à environ 3 heures du matin, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, et comme je l'ai dit, je crois que tout cela a cessé à peu près à
11 3 heures du matin ou à 3 heures 30, selon ce que quelqu'un a dit. Ne me
12 prenez pas au mot. Je ne peux pas être totalement précis.
13 Q. Le matin, vous avez tous été relâchés, n'est-ce pas ?
14 R. Pas tout à fait le matin, mais un peu après midi, je pense. J'ai dit
15 vers 13 heures, 14 heures à peu près. J'ai du mal à me rappeler. Vous
16 comprenez, c'est tout de même un choc.
17 Q. Quand vous êtes parti pour Catici, chez vos parents, des représentants
18 du HVO sont venus vous voir et, parmi eux, se trouvait également Blasko
19 Pavlovic, n'est-ce pas ?
20 R. Oui. Ce qui l'intéressé, en fait, c'était de savoir où trouver un
21 certain téléphone mobile et il ne s'intéressait pas particulièrement à moi.
22 Q. Mais ce qui l'intéressait aussi, c'était, éventuellement, de savoir si
23 vous aviez parlé du réseau de télécommunication dont disposait le HVO.
24 R. Je n'avais pas besoin d'en parler. Tous les habitants de Kakanj étaient
25 au courant. Tous ceux qui avaient aidé à la création de ce réseau étaient
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1 au courant.
2 Q. Mais ce Blasko Pavlovic vous a demandé si les hommes qui vous avaient
3 malmenés vous avaient posé des questions à ce sujet, n'est-ce pas ?
4 R. Non, non, non. Il a simplement venu me voir pour la forme. Vous voyez.
5 Tout cela, c'est du pareil au même.
6 Q. La première fois que vous avez fait une déclaration au sujet de ce que
7 vous aviez vécu dans les locaux du motel Sretno, c'est lorsque vous avez
8 parlé aux représentants du Tribunal de La Haye, n'est-ce pas ?
9 R. A Zagreb, on m'a interrogé, en me demandant si je souhaitais faire une
10 déclaration ou pas, mais je n'en avais pas vraiment envie, j'ai fini par
11 partir.
12 Q. Avant d'avoir porté plainte contre les hommes qui vous avaient malmené,
13 vous n'aviez fait aucune déclaration ni à la police civile, ni à la police
14 militaire, n'est-ce pas ?
15 R. A l'époque, il n'y avait personne vers qui je pouvais me trouver. Le
16 conflit avait déjà éclaté. Le conflit a éclaté quelques jours après, en
17 fait. La police n'existait plus. Il y avait simplement la police militaire
18 et diverses Unités de Police militaire, d'ailleurs.
19 Q. En raison de toutes ces complications, vous n'avez pas porté plainte à
20 l'époque, d'aucune façon.
21 R. Non, je suis simplement allé voir un médecin. On a fait des
22 radiographies. Je me souviens que ce sont les docteurs Marijan et le
23 docteur Spasojevic, qui m'ont examiné. Il y avait un autre médecin, qui est
24 mort de plus. Et ils ont pris des photographies.
25 Q. Je souhaite simplement revenir sur certains éléments de votre
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1 déposition des choses que vous avez dites au début de votre déposition. Au
2 début de 1993, dans la région de Zenica et de Kakanj, il y avait différents
3 groupes armés, n'est-ce pas, qui arboraient des insignes divers et variés.
4 R. Oui, au début, c'est exactement cela.
5 Q. Et à l'époque, les brigades de l'armée de Bosnie-Herzégovine ont
6 commencé à être créées, n'est-ce pas ?
7 R. Vous parlez de quelle année ?
8 Q. 1993.
9 R. Oui, c'est exact.
10 Q. Et cela s'est poursuivi jusqu'à votre départ de Kakanj.
11 R. Oui, j'ai quitté Kakanj le 11 septembre. Je pense qu'à l'époque les
12 choses étaient assez tranquilles à Kakanj. Ce qui s'était passé, s'était
13 passé, il n'y avait plus de conflit à proprement parler.
14 Q. A l'époque, vous ne pouviez plus rencontrer des groupes armés et
15 arborant des insignes divers.
16 R. A l'époque, la situation était beaucoup plus sûre pour les habitants de
17 la région également. Mes parents sont restés à Kakanj. Mais des réfugiés
18 continuaient à arriver et à créer certains problèmes. Les gens qui
19 revenaient du champ de bataille de Vares créaient également des problèmes.
20 Si vous me parlez des voisins et des autres, non, il n'y avait aucun
21 problème.
22 Q. Répondant à une question du Procureur, vous avez dit que bien que
23 vivant dans la République de la Croatie, vous vous rendiez souvent à
24 Kakanj, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, et à Zenica aussi, à la poste.
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1 Q. Merci beaucoup. C'est ce que je voulais vous demander. Je n'ai plus
2 d'autres questions. Mais vous allez souvent à Zenica, n'est-ce pas,
3 également ?
4 R. Mais, écoutez, c'est ma ville.
5 Q. Vous avez beaucoup d'amis là-bas.
6 R. Pour la plupart des Musulmans de Bosnie.
7 Q. Vous vous sentez en sécurité parmi vos amis aussi bien à Zenica qu'à
8 Kakanj. Vous n'avez aucun problème.
9 R. Il y a toujours des incidents.
10 Il y a une chose que je n'ai pas encore dite. Je vous en parle parce que
11 vous êtes de la région. Il y a des gens qui ont essayé de me protéger, et
12 cela a été dur pour eux lorsqu'ils se sont rendus compte de ce qui m'est
13 arrivé. Ils ont pleuré lorsque je suis retourné sept ans plus tard, je
14 parle de Musulmans de Bosnie.
15 Q. Aujourd'hui, vous allez à Zenica et à Kakanj sans peur, et vous êtes en
16 total sécurité, comme tout autre citoyen de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce
17 pas ?
18 R. Oui, je suis citoyen de Bosnie-Herzégovine.
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'en ai terminé. Merci beaucoup.
20 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je fais objection aux
21 dernières questions posées, qui dépassent le cadre de l'interrogatoire
22 principal.
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'ai dit, dès le début, que j'allais poser
24 des questions de nature générale. Quant aux réponses fournies par le
25 témoin, ce sont des réponses que nous présentons souvent à l'Accusation
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1 pour nous opposer à la façon, dont il dépeint la situation dans la région.
2 Et ce sont des réponses que nous obtenons très souvent. Je pense que c'est
3 utile et que ce que le témoin a dit est utile. Je remercie le témoin, et
4 j'en ai terminé de mon contre-interrogatoire. Merci.
5 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais passer la parole aux autres
7 Défenseurs.
8 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Contre-interrogatoire par M. Ibrisimovic :
10 Q. [interprétation] Monsieur Bogeljic, au nom de la Défense de M. Kubura,
11 je n'ai que quelques questions à vous poser.
12 R. Je vous en prie.
13 Q. Vous avez dit aujourd'hui, lors de l'interrogatoire principal, qu'en
14 mars vous vous rendiez presque tous les jours de Kakanj à Zenica et
15 inversement.
16 R. S'il y a un bus, oui, effectivement.
17 Q. Votre entreprise se situe à Zenica.
18 R. Oui, le PTT est établi à Zenica.
19 Q. Dans le centre de Zenica.
20 R. A côté de l'hôtel Metalurg.
21 Q. Est-il vrai que le siège de votre entreprise se trouve à peu près à 100
22 mètres de l'école de musique ?
23 R. Franchement, je ne sais pas où se situe l'école de musique à Zenica.
24 Q. Encore une question : Les soldats qui vous ont emmené au motel Sretno
25 le 18 mai ne portaient pas les insignes de la police militaire.
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1 R. La police militaire ? Non.
2 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, nous n'avons pas d'autres
3 questions.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers l'Accusation. Est-ce que
5 l'Accusation a des questions supplémentaires à poser au témoin ?
6 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
7 Juges, l'Accusation n'a pas de questions supplémentaires. Merci.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf.
9 Monsieur, vous avez répondu aux questions qui vous ont été posées tant par
10 l'Accusation que par les Défenseurs. Vous avez, par ailleurs, répondu à
11 quelques-unes de mes questions. Votre interrogatoire ou votre témoignage
12 est terminé. Nous vous remercions d'être venu, d'avoir témoigné, et nous
13 vous souhaitons un bon voyage de retour.
14 Je vais demander à M. l'Huissier de vous raccompagner à la porte de la
15 salle d'audience.
16 [Le témoin se retire]
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors nous avons un premier problème à régler, qui
18 est le versement dans la procédure des CD-ROM concernant la vidéo. Est-ce
19 que nous les avons ?
20 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, il y a 25 minutes, on
21 m'a dit que les CD-ROM seraient disponibles dans l'heure, voir avant.
22 Malheureusement, en ce moment, nous n'avons pas encore les CD. Je
23 proposerais que si --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, il y a quelque chose que je ne
25 comprends pas. Cet élément de preuve, vous l'aviez communiqué aux
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1 Défenseurs. Nous venons de constater que cet élément de preuve, c'est une
2 bande vidéo, qui a été diffusée à partir de notre système interne. Comment
3 se fait-il que, sachant à l'avance que vous alliez verser ces preuves, vous
4 n'ayez pas, au préalable, en votre possession, un double que vous alliez
5 nous remettre ? Quand on verse un document qui soit écrit, une pièce ou une
6 bande vidéo, on en a un exemplaire pour qu'il soit versé dans le folio. Or
7 là, vous nous dites, non, non, on n'est pas encore en l'état.
8 Techniquement, je n'arrive pas à comprendre la difficulté que vous aviez,
9 et que vous avez actuellement. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ce n'est
10 pas possible ?
11 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
12 Juges, je comprends bien votre préoccupation, et je présente mes excuses
13 pour remettre ces copies en retard. Mais le matériel qui a été communiqué à
14 la Défense sur CD contient plusieurs vidéo et le contenu de plusieurs
15 bandes vidéo. L'Accusation reçoit ces vidéo en format classique, en format
16 conventionnel VHS. Cela prend pas mal de temps. Le contenu des bandes vidéo
17 traditionnelles doit être transféré et gravé sur CD. Les CD communiqués à
18 la Défense ne sont pas les mêmes CD que nous essayons de verser au dossier
19 aujourd'hui. Ce que nous essayons de vous soumettre, c'est trois ou quatre
20 minutes sur une vidéo qui fait deux heures, qui doit être transféré sur ce
21 CD, être gravé. Et c'est cette opération qui, malheureusement, prend un
22 certain temps.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre a bien saisi le problème technique. Il
24 sera toujours possible de le verser, je ne sais pas, demain en début
25 d'audience. Il n'y a pas une urgence à ce que ce soit versé dans les
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1 minutes qui suivent puisque, ce document, tout le monde l'a vu. Il fait
2 l'objet du transcript. Il sera toujours temps de le verser demain.
3 Nous allons passer en audience à huis clos parce qu'il y a juste un petit
4 problème mineur à régler, mais il faut qu'il soit en audience à huis clos.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en huis clos partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
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18 [Audience publique]
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, concernant toujours les documents, je me
21 retourne vers l'Accusation. Vous aviez versé le document qui a été
22 enregistré P50, qui est une photo du motel Sretno. Il y a eu un
23 enregistrement P50. Vous avez produit également une autre photo, qui est la
24 photo de la porte d'entrée où le témoin nous avait dit qu'il était entré
25 par cette porte. Or, ce document n'a pas officiellement été versé.
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1 On va vérifier. Monsieur le Greffier, est-ce qu'on a mis un P51 ?
2 Oui. Bien. Je vérifie. Voilà, P50 et P51. L'affaire est réglée. Nous avons
3 un P51. Le sort de toutes les pièces ayant été réglé.
4 Il est 17 heures 30. Il n'y a plus de témoin. Je crois qu'il n'y avait
5 qu'un seul témoin aujourd'hui.
6 M. WITHOPF : [interprétation] Il n'y avait qu'un seul témoin pour
7 aujourd'hui, et les copies des CD viennent d'arriver. Je souhaite les
8 verser au dossier à présent.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons procéder à l'enregistrement.
10 Bien. Si je comprends bien, chaque CD correspond à un des films que nous
11 avons vus. Nous avons vu plusieurs personnes qui présentaient leurs
12 blessures. De mémoire, il me semble qu'il y en avait trois ou quatre --
13 quatre. Il me semble qu'il y en avait quatre. Je compte sous le contrôle de
14 la Défense. Il me semble qu'il y avait quatre personnes qui ont été
15 filmées. Théoriquement, il doit y avoir quatre CD.
16 Je me retourne vers l'Accusation.
17 M. WITHOPF : [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, quand vous avez présenté les
19 vidéos, il y a eu quatre personnes qui ont été filmées. S'il y en a quatre,
20 il doit y avoir quatre CD. Il me semble que là, nous en avons.
21 Alors, expliquez-nous, expliquez-nous tous les CD parce qu'il ne faudrait
22 pas qu'il y ait des confusions.
23 M. WITHOPF : [interprétation] C'est, effectivement, la raison pour laquelle
24 je voudrais demander à m'entretenir brièvement avec la substitut
25 d'audience, s'il vous plaît, Monsieur le Président, pour éviter ce genre de
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1 malentendu.
2 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
3 [La Chambre de première instance et le Greffe se concertent]
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Alors, nous écoutons.
5 J'ai entre les mains, mais la Défense a également entre ses mains, les deux
6 CD, dont déjà il y a un numéro P52, mais passons. Alors, le premier est
7 marqué V0004306 [comme interprété], "1 of 2". Le deuxième, "2 of 2". Alors,
8 expliquez-nous à quoi correspond ces deux CD.
9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
10 Juges, sur les deux CD se trouve la totalité de la séquence du vidéo, y
11 compris les quatre extraits qui ont été projetés aujourd'hui lors des
12 délibérations, lors de notre séance de travail. Nous allons fournir à la
13 Défense, au Greffe et à la Chambre de première instance un indexe, qui
14 permettra -- ou une table des matières détaillées, qui permettra
15 d'identifier les passages pertinents.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Les deux CD représentent l'ensemble des vidéos, qui
17 dure deux heures. Dans ces deux CD, on a les quatre personnes qu'on a vues.
18 C'est bien cela ? Ce que vous versez, ce n'est pas strictement limité aux
19 quatre personnes vues tout à l'heure, mais, à l'ensemble des vidéos qui ont
20 été communiquées à la Défense avant le début du procès, expliquez-nous.
21 M. WITHOPF : [interprétation] Ce que nous versons, ce sont les extraits,
22 qui ont été visionnés lors de l'audience d'aujourd'hui. La table des
23 matières, qui sera fournie aux Juges et à la Défense, indiquera quels sont
24 les passages qui ont été visionnés aujourd'hui.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je pense que, pour la sécurité juridique, il
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1 vaudrait mieux repasser ces CD, qu'on les revoit à nouveau pour qu'il n'y
2 ait pas de confusion parce que je suis dans l'incapacité de savoir à quoi
3 cela correspond.
4 Me Bourgon va certainement intervenir.
5 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Je crois que la situation n'est
6 pas si compliquée. Je crois que l'Accusation doit isoler les scènes, qui
7 ont été produites aujourd'hui, qui ont été visionnées en Chambre
8 aujourd'hui, doit isoler ces scènes et produire des éléments audio, des
9 supports sur CD qui ne contiennent que ce que la Chambre et les deux
10 parties ont vu aujourd'hui.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à fait, c'est exactement ce que je pense.
12 M. BOURGON : Monsieur le Président, si je peux ajouter un détail.
13 L'Accusation nous a mentionné, au tout début, que nous avons reçu ces
14 pièces le 10 octobre dernier. Nous ne sommes pas en mesure, à ce moment, de
15 confirmer ce fait. Nous n'avons fait aucune objection puisque nous allons
16 vérifier dans nos dossiers ce soir, et peut-être demain, faire certaines
17 représentations concernant ces pièces car, présentement aujourd'hui, nous
18 ne n'avons pas ces pièces. Nous ne nous souvenons pas d'avoir reçu ces
19 pièces, mais nous allons d'abord vérifier nos dossiers avant de nous
20 adresser à la Chambre à ce sujet.
21 Merci, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je pense que les autres Défenseurs disent la
23 même chose. Bien.
24 Monsieur Dixon.
25 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est la même
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1 chose. C'est uniquement les extraits qui ont été visionnés qui devraient
2 être versés au dossier, et ce qui a été vu par vous.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
4 Alors, je me retourne vers Monsieur Withopf. Vous avez compris le problème,
5 qui n'est pas très important, mais qui existe néanmoins ? La Défense, à
6 juste titre, et la Chambre partagent également cette opinion. On nous dit
7 qu'on ne peut verser aujourd'hui que ce que nous avons vu tout à l'heure, à
8 savoir, les vidéos représentant les quatre personnes qui ont montré leurs
9 torses. L'ambiguïté réside dans le fait qu'il y a deux CD. On ne sait pas
10 si ces deux CD contiennent uniquement les quatre personnes ou elles
11 concernent un ensemble d'autres vidéos dont la Défense nous dit,
12 qu'aujourd'hui, elle les a eus au mois d'octobre, mais elle ne peut pas
13 confirmer que cela correspond bien à ce qu'elle a vu. Elle nous demande du
14 temps pour réfléchir sur cette question.
15 Il vaudrait mieux qu'on donne une identification provisoire, quitte ensuite
16 à refaire un débat sur cette question. A moins que vous nous certifiiez que
17 les deux CD, que vous nous remettez, ne concernent uniquement que les
18 quatre personnes qu'on a visionnées. Mais, encore, la solution aurait été
19 de les repasser dans la machine et qu'on vérifie, mais peut-être que vous
20 êtes dans l'incapacité technique de le faire, à moins qu'on attende demain,
21 afin de vous permettre de réfléchir et de bien vérifier que le support
22 technique ne concerne que les quatre personnes, le témoin, plus les trois
23 autres qu'on a vus. Que pensez-vous ?
24 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
25 Juges. Ces deux CD contiennent deux arts de séquences vidéo. C'est une
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1 copie d'une bande vidéo. Il s'agit de l'intégralité d'une bande vidéo,
2 d'une vidéo classique, d'une cassette, qui était remise à l'Accusation, le
3 cadre de l'enquête, et nous demandons le versement au dossier des extraits
4 qui ont été projetés aujourd'hui. Pour que l'on puisse retrouver ces
5 séquences, qui ont été rejetées, nous allons fournir un index à la Défense
6 et aux Juges, qui indique le moment auxquels les extraits projetés
7 commencent et finissent, afin de lever toute ambiguïté
8 Si, toutefois, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, ils
9 souhaitent que l'on extraie cette portion des CD, et que l'on verse au
10 dossier, ces extraits isolément, nous pouvons le faire. Toutefois,
11 malheureusement, cela prendra un petit peu de temps.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie.
13 La Chambre, en procédant à l'interrogatoire de l'Accusation, le contre-
14 interrogatoire de l'Accusation découvre qu'en réalité, ces deux CD
15 représentent l'intégralité des vidéos concernant ce dossier. Cela dure deux
16 heures et, enfin, de résoudre la difficulté liée, le témoignage ponctuel de
17 la personne que nous avions tout à l'heure. L'Accusation nous dit : je peux
18 vous fournir à un index permettant de vous y retrouver. Je pense que la
19 Défense n'est pas du tout d'accord avec cette façon de procéder. Elle nous
20 a dit tout à l'heure qu'elle voulait qu'il ait uniquement versé que les
21 extraits concernant la déposition et l'authentification par le témoin.
22 Par ailleurs, l'Accusation nous dit qu'elle est dans la possibilité, si
23 nous le demandions de nous faire un extrait unique, que de ce que nous
24 avons vu tout à l'heure. Alors, je redonne la parole à la Défense sur cette
25 question.
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1 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Nous nous rallions à votre
2 suggestion, soit d'isoler les pièces, d'isoler les séquences, qui ont été
3 visionnés en salle d'audience aujourd'hui. Je me permets, Monsieur le
4 Président, avec votre permission, de revenir aussi sur la question de la
5 pièce, à savoir ce qui a été reçu par la Défense. Nous avons reçu les CD,
6 les supports techniques, nous les avons reçu au moment -- cours de la
7 période de mise en état. Ce à quoi je faisais allusion un peu plus tôt,
8 nous n'avons pas vérifié si ces pièces faisaient partie de la liste des
9 documents proposés par l'Accusation, à titre de pièces qui seront déposées
10 au cours du procès. Ce qu'on appelle les -- la liste des PT, et c'est la
11 vérification que nous souhaitons faire ce soir. Merci, Monsieur le
12 Président.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre, après en avoir délibérée sur cette
15 aspect technique, décide qu'au moment de suspendre le versement de ces deux
16 CD, qui concerne l'ensemble de matières, dont que nous n'avons pas examiné,
17 et nous demandons à l'Accusation d'extraire de ces deux CD uniquement les
18 vidéo que nous avons vu tout à l'heure, et que, sur le nouveau support que
19 vous nous présenterez, ce nouveau support ne comprendra uniquement que ce
20 qui a été vu et discuté tout à l'heure. Entre temps, la Défense doit
21 évidemment regarder ce qui lui a été versée en octobre et elle a bien
22 vérifiée qu'elle a eu possession des séquences qu'on a vues tout à l'heure.
23 Voilà, je remets -- je rends à l'Accusation ses CD, enfin, qui me brûle les
24 doigts, mais que je préfère qu'en face la transformation technique, il sera
25 toujours temps demain de nous donner un support, concernant uniquement ce
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1 que l'on a vu tout à l'heure. Cela ne doit pas très compliqué, mais, avec
2 les moyens importants que vous avez, je pense que vous allez le régler très
3 rapidement. Vous gardez en mémoire le CD au transcript, que cette question
4 de versement de ce que nous avons vu sera réglé dans le meilleur délai par
5 l'Accusation, qui nous donnera, sur un support unique, les quatre petits
6 films concernant les témoins et les trois autres personnes. Voilà, l'ordre
7 du jour, étant épuisé, de toute façon, il fallait faire la pause, mais là,
8 nous allons faire une pause définitive, jusqu'à demain, à moins que
9 l'Accusation est quelque chose de plus à nous dire.
10 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que l'on peut
11 passer en huis clos partiel ? Parce que je dois.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en huis clos partiel.
13 [Audience à huis clos partiel]
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17 [Audience publique]
18 M. BOURGON : Avec votre permission, conformément à l'ordonnance du Juge de
19 mise en état, en date du 9 novembre 2001, je souhaiterais m'adresser à la
20 Chambre, afin de présenter une requête orale, pour obtenir la permission de
21 déposer une réplique à la réponse produite par l'Accusation, suite à notre
22 requête conjointe de la Défense, demandant à la Chambre de prendre
23 connaissance judiciaire de faits, dans des affaires précédentes. Voyant le
24 temps qui s'écoule, je pourrais également faire cette requête orale en
25 début de séance demain après-midi, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous faites état d'une ordonnance du 9 novembre que
2 je n'ai pas sous les yeux. Que disait-elle ?
3 M. BOURGON : Monsieur le Président, cette ordonnance du Juge de mise en
4 état, indique que si une partie souhaite produire une réplique à une
5 réponse de la partie adverse, elle doit demander la permission dans un
6 délai de quatre jour ouvrable, en évoquant les motifs pour lesquels une
7 réplique serait nécessaire.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez le temps d'exposer --
9 M. BOURGON : Je pourrais le faire immédiatement, ou le faire demain en
10 début de séance.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Si on a le temps, autant régler ce problème tout de
12 suite. Je vous donne la parole.
13 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.
14 Conformément à cette ordonnance du Juge de mise en état, une partie qui
15 souhaite produire une réplique, doit demander la permission à la Chambre
16 quatre jours ouvrables, ainsi que les motifs justifiant pour lesquels la
17 réplique serait nécessaire.
18 L'Accusation a produit sa réponse à notre requête le 26 janvier, ce qui
19 nous laisse jusqu'au 30 janvier pour demander la permission de produire une
20 réplique.
21 Tel que suggéré par la Chambre, nous nous adressons aujourd'hui oralement.
22 Si toutefois, les arguments oraux ne seraient pas suffisants, nous
23 pourrions également le faire par écrit à l'intérieur du délai de quatre
24 jours, si tel était le souhait de la Chambre. S'agissant des motifs qui
25 soutiennent notre requête pour obtenir cette permission de produire une
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1 réplique, je me réfère, Monsieur le Président, à la réponse produite par
2 l'Accusation le 26 janvier.
3 Pour résumer les arguments de l'Accusation à ce sujet, l'Accusation a
4 soumis trois motifs principaux pour s'opposer à notre requête soit:
5 Tout d'abord, la pertinence des faits pour lesquels nous demandons à la
6 Chambre de prendre connaissance judiciaire; deuxièmement, les
7 considérations d'ordre publiques ou en d'autres mots les conséquences
8 négatives possibles sur la longueur du procès, si la Chambre venait à
9 prendre connaissance judiciaire des faits que nous avons proposés; le
10 troisième motif de l'Accusation, est le fait que la Défense n'aurait pas
11 selon elle, remplit le test élaboré dans l'affaire Krajisnik. Test qui est
12 repris au paragraphe 3 de sa réponse, test qui énumère les critères à
13 remplir pour qu'un fait puisse être admissible à ce que la Chambre en
14 prenne connaissance judiciaire.
15 S'agissant des deux premiers motifs de l'Accusation, soit tout d'abord la
16 pertinence des faits, je crois qu'à la fois la requête et la réponse de
17 l'Accusation, permettront à la Chambre de se prononcer sur ce sujet.
18 S'agissant de deuxième motif, c'est-à-dire les considérations d'ordre
19 public ou les conséquences sur la longueur du procès, je crois encore une
20 fois, Monsieur le Président, que les faits présentés à la fois par la
21 Défense dans sa requête, et par l'Accusation dans sa réponse, sont
22 suffisants pour permettre à la Chambre de se prononcer sur cette question.
23 Là où nous espérons avoir obtenir permission de produire une réplique,
24 c'est sur le troisième critère, soit le test élaboré dans l'affaire
25 Krajisnik, qui est en partie, l'objet de notre demande. Nous croyons que
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1 nous pourrions faciliter grandement le travail de la Chambre en expliquant
2 tel que suggéré par l'Accusation, pourquoi tous les critères du test
3 élaboré dans l'affaire Krajisnik, sont remplis pour chacun des faits pour
4 lesquels nous demandons à la Chambre de prendre connaissance judiciaire.
5 En conclusion, Monsieur le Président, la Défense demande permission de
6 produire une réplique, sur un seul des points principaux suggérés par
7 l'Accusation, soit de voir à quel point les faits que nous vous avons
8 suggérés, que nous avons suggérés à la Chambre, que ces faits remplissent
9 les critères élaborés dans l'affaire Krajisnik. Le tout respectueusement
10 soumis, Monsieur le Président. Merci.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'ai bien compris, votre intervention orale,
12 consiste à nous demander l'autorisation de produire une réplique à la suite
13 de la position prise par l'Accusation sur la pertinence, les conditions
14 d'ordre public et les questions du test.
15 Nous vous donnerons notre réponse demain, dès l'ouverture de l'audience à
16 14 heures 15.
17 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : L'ordre du jour étant épuisé, je vais lever la
19 séance d'aujourd'hui. Nous reprendrons nos travaux demain à 14 heures 15.
20 --- L'audience est levée à 17 heures 54 et reprendra le jeudi 29 janvier à
21 14 heures 15.
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