International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi 28 mai 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 20.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, je vous demande de bien

6 vouloir appeler le numéro de l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

8 Monsieur les Juges, affaire IT-01-47-T, le Procureur contre Enver

9 Hadzihasanovic et Amir Kubura.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vais demander à l'Accusation de bien

11 vouloir se présenter.

12 M. MUNDIS : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Je salue

13 la Défense et toutes les personnes présentes dans ce prétoire. M. Matthias

14 Neuner, Daryl Mundis et notre commis aux audiences, Andres Vatter, pour

15 l'Accusation. Merci.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les avocats pour demander de bien

17 vouloir se présenter.

18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

19 Madame, Monsieur les Juges. Nous défendons les intérêts du général

20 Hadzihasanovic : Edina Residovic, avocate avec co-conseil, Stéphane Bourgon

21 et M. Demirdjian, qui est notre assistant. Merci.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

23 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

24 Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic et notre assistant, Nermin Mulalic. Nous

25 défendons les intérêts de M. Kubura.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Après ce retard qui est imputable, encore,

2 aux causes techniques, la Chambre va entamer cette audience, en saluant

3 toutes les personnes présentes, les représentants de l'Accusation, les

4 avocats, les accusés, ainsi que tout le personnel de cette salle

5 d'audience.

6 Avant d'introduire le témoin, je vais demander à M. le Greffier de passer à

7 huis clos car la Chambre va rendre une décision orale.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

9 le Président.

10 [Audience à huis clos partiel]

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23 [Audience publique]

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant l'audition de ce témoin, je rappelle que,

25 lors de l'interrogatoire principal, l'Accusation avait utilisé 87 minutes,

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1 le contre-interrogatoire pour les défenseurs est de 2 heures 15 minutes. En

2 théorie, nous aurons le temps de procéder pour la Défense au contre-

3 interrogatoire et, dans le reste du temps, les Juges pourront, le cas

4 échéant, poser des questions.

5 En évitant de perdre du temps, je vais demander à Mme l'Huissière d'aller

6 chercher notre témoin qui attend. Je donnerai tout de suite la parole à Me

7 Bourgon qui est déjà prêt.

8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour. Je vais d'abord vérifier que vous entendez

10 les propos dans vos écouteurs.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'entends, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.

13 Comme vous le savez l'interrogatoire principal vous concernant a déjà eu

14 lieu. Nous avions interrompu cette audience afin de permettre à la Défense

15 de prendre connaissance de certaines pièces, de dossiers et des documents

16 afin qu'elle puisse procéder au contre-interrogatoire. La Défense est en

17 mesure de procéder au contre-interrogatoire. Sans perdre de temps, je vais

18 lui donner la parole.

19 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

20 LE TÉMOIN: MARTIN GARROD [Reprise]

21 [Le témoin répond par l'interprète]

22 Contre-interrogatoire par M. Bourgon :

23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

24 R. Bonjour.

25 Q. Permettez-moi de commencer, en disant que nous avons eu l'occasion de

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1 nous rencontrer, la première fois, vous êtes trouvé ici en avril. Je

2 voudrais saisir cette occasion pour vous remercier de nous avoir consacré

3 ce temps d'entretien avec des avocats de M. Hadzihasanovic. Je ne me suis

4 pas présenté la dernière fois, mais, aux fins du compte rendu d'audience,

5 je vais vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui. Il y a

6 Me Edina Residovic et M. Alexis Demirdjian, je m'appelle Stéphane Bourgon,

7 et nous sommes l'équipe qui représente les intérêts de M. Hadzihasanovic.

8 Une fois de plus, je m'excuse du fait que vous avez dû revenir deux fois,

9 mais je suppose que vous comprenez la question que suscitent ces documents

10 que nous recherchions. Je reconnais, par cette même occasion, que votre

11 intervention personnelle, nous a permis d'obtenir ces documents et je tiens

12 à vous remercier.

13 Avant de commencer j'aimerais répéter ce que je vous ai dit lors de notre

14 première rencontre au mois d'avril. Je vous avais dit alors qu'en tant

15 qu'avocat du général Hadzihasanovic en ce procès, nous pensions que ce

16 procès se concentrait sur l'exercice du commandement, sur la responsabilité

17 du supérieur hiérarchique. C'est là que nous voudrions puiser dans votre

18 expérience considérable, dans vos connaissances qui le sont tout autant,

19 afin que tous ceux qui sont présents dans ce prétoire, comprennent mieux la

20 carrière militaire.

21 Lors de votre première audition devant la Chambre de première instance le 6

22 avril, votre bagage militaire et votre expérience militaire ont été mis en

23 lumière grâce aux questions posées par l'Accusation. Je n'ai pas

24 l'intention de répéter moi-même ces questions.

25 Il n'en demeure pas moins qu'il y a un sujet que j'aimerais aborder avec

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1 vous ce matin, sur la marine royale, la marine du royaume britannique.

2 Trente-sept ans de service militaire, je comprends que vous ayez été un

3 général de 3 étoiles.

4 R. C'est exact.

5 Q. Exact. Beaucoup de gens, qui sont ici ou à l'extérieur de ce prétoire,

6 ont déjà entendu parler de la marine royale, mais peu de gens savent, en

7 fait, ce qu'elle représente. Pourriez-vous dire aux Juges de cette Chambre

8 en quelques mots ce que c'est que la marine royale, et quels sont les défis

9 que vous avez dû relever en tant que commandant de la marine royale ?

10 R. Pour être aussi concis que possible, la marine royale, c'est disons

11 l'infanterie de la marine. Nous faisons partie du service naval et pas de

12 l'armée de terre. Notre rôle primordial, c'est la projection de pouvoir

13 terrestre, de partir de la mer à la terre dans un environnement qui est en

14 puissance hostile, surtout lorsqu'il n'y a pas d'accès au littoral, à des

15 plages, à des ports ou à des aérodromes.

16 Je pense qu'un des meilleurs exemples tout récemment, cela été celui de

17 l'opération destinée à reprendre les îles des Malouines.

18 Q. Vous avez participé à cette opération ?

19 R. Malheureusement, non, je n'ai pas fais la guerre des Malouines parce

20 que j'étais au ministère de la Défense. Il se fait que j'ai pris le

21 commandement de la brigade quelques mois plus tard. Ce qui veut dire que

22 j'ai été le seul de toute la brigade à ne pas m'être trouvé dans les

23 Malouines. Cela a été vraiment un problème qui a perduré pour moi, et dont

24 je souffre encore.

25 Q. Quand on parle de la marine royale, on parle d'une organisation

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1 d'effectifs de quel type ?

2 R. 7 000, hommes et femmes.

3 Q. Serait-il exact de dire qu'on dit que la marine royale ce sont les

4 forces d'élite de la Grande Bretagne, du Royaume-Uni ?

5 R. C'est ce que nous aimons penser de nous-même, mais il y a d'autres

6 forces qui pensent aussi d'elles-mêmes que ce sont des forces d'élite. En

7 tout cas, c'est le cas pour nous.

8 Q. Serait-il exact de dire que s'il y a des missions importantes, des

9 missions d'assaut que doit réaliser le Royaume-Uni, la première unité à

10 laquelle on pense, c'est celle de la marine royale ?

11 R. Oui, je pense que oui.

12 Q. Si on parle d'un officier de commandement, lorsqu'on voit votre

13 formation à différents échelons, c'est ce qu'on appelle en anglais les

14 Royal Marines, je suppose que vous avez dû relever beaucoup de défis

15 redoutables ?

16 R. Oui.

17 Q. Vous seriez d'accord pour dire qu'étant commandant d'une force

18 opérationnelle dans une situation opérationnelle, c'est une vocation. Outre

19 cela, c'est aussi une des professions les plus dures qu'il est possible

20 d'exercer ?

21 R. Je pense que je serai d'accord avec vous.

22 Q. Seriez-vous d'accord pour dire qu'à titre illustratif, on peut dire

23 ceci : si vous commandez des forces opérationnelles, une des gageures qu'il

24 vous faut relever, c'est de lancer par des ordres vos hommes dans la

25 bataille sachant qu'ils risquent d'y perdre leur peau ?

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1 R. Oui, mais ce n'est pas très fréquent.

2 Q. A cet égard, seriez-vous d'accord pour dire que pour que quelqu'un

3 évalue bien le travail que fait un officier chargé de commandement en

4 situation opérationnelle, ceci ne peut se faire qu'en faisant le bilan des

5 circonstances qui prévalent à ce moment donné en essayant, même si cela est

6 quelque chose de très difficile, de se mettre à la place de ce commandant

7 dans cette situation donnée ?

8 R. Oui, je suis enclin à être d'accord avec vous.

9 Q. Parlons maintenant de la mission qui vous avez été confiée en Bosnie de

10 façon plus précise. Bien sûr, vous n'étiez pas là en qualité de général.

11 Vers la mi-juin 1993, si j'ai bien compris vous êtes passé par Zagreb pour

12 aller en Bosnie pour la première fois ?

13 R. Exact.

14 Q. Vous êtes arrivé à Zenica. Vous y êtes resté de 10 à

15 14 jours. Pendant cette période, vous avez reçu une formation, et vous avez

16 eu l'occasion de vous familiariser avec la mission qui vous avait été

17 confiée.

18 R. Exact.

19 Q. Vous avez eu l'occasion de mieux apprendre quelles étaient les parties

20 en présence sur le terrain, les parties belligérantes ?

21 R. Oui.

22 Q. Serait-il exact de dire qu'au cours de cette période, vous avez eu de

23 façon régulière des contacts avec M. l'Ambassadeur Thébault, qui était le

24 chef du centre régional de Zenica ?

25 R. Exact.

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1 Q. Serait-il aussi exact de dire que vous avez eu l'occasion d'entendre

2 l'avis qu'il avait de la situation ?

3 R. Oui, mais je tiens à préciser que je n'étais qu'une personne sur 10 ou

4 15. Il y avait 10 ou 15 observateurs qui étaient arrivés en Bosnie, et on

5 nous avait pris en groupe. Par conséquent, Jean-Pierre Thébault n'avait pas

6 d'entretien rien qu'avec moi. Il s'adressait à la totalité de cette

7 nouvelle équipe qui, plus tard, allait être dispersée, envoyée dans

8 diverses régions de Bosnie.

9 Q. Merci de cette précision. Vous dites qu'il y avait un groupe. Malgré

10 tout, peut-on dire que vous avez été le seul de ce groupe à aller en tant

11 que chef d'un centre de coordination, en l'occurrence celui de Mostar ?

12 R. Oui, mais je ne l'ai pas su jusqu'à la fin de ces 10 ou

13 14 jours. Personne ne savait, parmi nous, qui allait aller où. Nous ne

14 l'avons su que dans les deux ou trois derniers jours.

15 Q. Vous êtes parti à Mostar. Après vous êtes devenu le chef du centre de

16 coordination. Cela s'est passé vers la fin du mois de juin ?

17 R. Début du mois de juillet, je dirais.

18 Q. Pendant que vous avez été chef du centre de coordination à Mostar, je

19 suppose que vous avez gardé le contact avec

20 M. l'Ambassadeur Thébault?

21 R. Oui.

22 Q. Que vous avez pu consulter les rapports du centre régional de Zenica,

23 et que vous-même vous avez transmis vos rapports à ce même centre

24 régional ?

25 R. Exact.

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1 Q. J'ai vu certains documents qui me permettent de croire que M.

2 l'Ambassadeur Thébault vous a rendu visite à Mostar plus qu'une seule

3 fois ?

4 R. Oui.

5 Q. Parlons maintenant du conflit dans lequel vous vous êtes trouvé à

6 Mostar, où vous n'étiez pas partie prenante directement, mais il y avait un

7 conflit qui se poursuivait. Il y avait une situation à Mostar. Est-ce qu'on

8 pourrait dire de cette situation ou de ce conflit qu'il opposait d'un côté

9 le HVO à l'ABiH de l'autre ?

10 R. Oui, avec un facteur supplémentaire. C'est que Mostar était pilonné de

11 façon régulière, mais de façon aléatoire, à l'aveuglette par les Serbes,

12 par les Serbes de Bosnie et leur armée qui se trouvait de l'autre côté de

13 la montagne à l'est.

14 Q. Est-ce qu'on peut dire que la situation qui prévalait à Mostar

15 présentait une certaine analogie avec la situation qu'il y avait en Bosnie

16 centrale, là où vous alliez devenir chef du centre régional ?

17 R. Oui.

18 Q. Au mois d'octobre, vous avez été nommé à ce poste de chef du centre

19 régional. Grâce à l'entretien que nous avons eu, j'ai compris que là il y a

20 eu une réunion très détaillée de transmission de pouvoir avec M.

21 l'Ambassadeur Thébault ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous avez eu l'occasion de discuter de l'avis qu'il avait de lui ?

24 R. Oui.

25 Q. Je vais vous montrer un document qui met en lumière l'avis de M.

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1 Thébault, pour voir quelques-uns de points et pour voir si certains de ces

2 points vous ont été communiqués. Je parle des points qui sont repris dans

3 ce document ?

4 M. BOURGON : J'aimerais remettre à toutes les personnes dans la salle

5 d'audience une série de documents qui ont été préparés en liasse de façon à

6 faciliter le processus.

7 L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, votre interprète précise que les

8 "Royal Marines", c'est un des quatre groupes constituant la "Royal Navy",

9 donc, ce sont les mariniers comme on a un peu ce même genre de force dans

10 l'armée américaine.

11 M. BOURGON : [interprétation]

12 Q. Il y a une erreur. Je voulais vous montrer un document, mais il ne se

13 trouve pas dans ce lot de documents qui vient d'être remis. Je me propose

14 d'utiliser le rétroprojecteur que vous avez à votre droite pour que vous

15 puissiez lire le document pendant que toutes les personnes présentes dans

16 ce prétoire puissent le voir aussi. Il porte la date du 4 août 1993. Il a

17 pour sujet la situation en matière des droits de l'homme en Bosnie-

18 Herzégovine, situation d'urgence, document qui est préparé par M.

19 l'Ambassadeur Jean-Pierre Thébault.

20 M. BOURGON : [interprétation] Puis-je demander l'aide de Mme l'Huissière

21 pour que ce document soit placé sur le rétroprojecteur, de cette façon que

22 toutes les personnes présentes pourront le voir ? Ce document parle de la

23 situation qui se présente le 4 août 1993.

24 Les parties en jaune sur le document, les parties qui sont surlignés ont

25 été surlignées par moi-même en préparation pour l'audience, mais,

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1 malheureusement, je n'ai pas les copies.

2 Madame l'Huissière, veuillez ajuster le document parce que je voudrais que

3 l'on voit --

4 Q. D'abord, dans la partie supérieure du document, on parle

5 de : "Cette vague de plusieurs milliers de citoyens qui a pris toute la

6 frontière, qui a submergé la frontière avec la Croatie." On dit plus tard

7 que ces mouvements avaient été grandement préparés par les effets de la

8 propagande d'un Croate qui est irrationnel et passionné, qui avait depuis

9 des mois dit de tous les Musulmans que c'étaient des intégristes, des

10 fondamentalistes et des Moudjahiddines qui égorgeaient les femmes et les

11 enfants tout en encouragés par la décision des hommes politiques locaux du

12 HVO.

13 Aujourd'hui, nous avons devant nous une situation humanitaire tragique. Je

14 reprends un autre paragraphe : "Les accusations du HVO, selon lesquelles

15 les Musulmans se livreraient à des actes de boucherie, sont tout à fait

16 sans justification. Malheureusement, c'est vrai, il y a nettoyage ethnique

17 dans ces derniers combats. Il faut reconnaître que l'ABiH a toujours

18 protégé la population croate qui restait avant, pendant et après les

19 combats. Mais la méfiance est trop élevée et les rumeurs trop fortes."

20 On parle ici de la propagande croate et du nettoyage ethnique qui

21 s'ensuivit, des problèmes que pose cette situation. Est-ce que vous avez eu

22 l'occasion d'en discuter avec M. l'Ambassadeur Thébault avant de devenir

23 chef du centre régional ?

24 R. Je suppose que nous aurions sûrement parlé de ceci, de façon générale,

25 sans aborder ce rapport-ci parce qu'il a été rédigé à peu près un mois

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1 après mon arrivée à Mostar.

2 Q. La situation en maintien de propagande croate, est-ce que vous êtes en

3 mesure de commenter la situation ?

4 R. Forcément. Toutes les parties en Bosnie se sont livrées à cette

5 propagande. C'est vrai, sans aucun doute, dans la région de Mostar, les

6 dirigeants ont dit que les Musulmans, c'étaient des fondamentalistes, des

7 intégristes. Ils s'inquiétaient de ce que nous, les Européens, nous ne

8 savions pas qu'il y allait, d'une façon éminente, avoir un état intégriste

9 musulman. C'était vraiment un défi d'Ariane.

10 Q. Merci, Monsieur.

11 M. BOURGON : Monsieur le Président, j'aimerais déposer ce document. Il

12 s'agit d'un document qui a été préparé par le prédécesseur du témoin. Le

13 témoin ne peut pas reconnaître le document, puisqu'il a été préparé avant,

14 mais c'est un document officiel. Je demanderais à ce qu'il soit déposé au

15 dossier.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, sur ce document rédigé par

17 l'ambassadeur --

18 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, la seule partie de ce

19 document que j'ai vue, c'est celle que j'ai vue sur le rétroprojecteur.

20 J'aimerais peut-être voir la totalité du document avant de me prononcer.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

22 M. BOURGON : Je suis tout à fait d'accord, Monsieur le Président. Peut-être

23 nous pouvons mettre la deuxième page du document sur le rétroprojecteur

24 afin que tout le monde puisse voir la deuxième page. J'aurai immédiatement

25 après la pause, des copies pour tout le monde. Peut-être même, nous

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1 pourrions attendre le dépôt après la pause.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Poursuivez.

3 M. BOURGON : [interprétation]

4 Q. Je reviens à certaines des responsabilités que vous aviez en tant que

5 chef du centre régional. Lors de votre déposition, en avril, à trois

6 reprises vous avez dit que les responsabilités de la MCCE étaient d'ordre

7 politique d'abord, d'ordre militaire et, en troisième lieu, d'ordre

8 humanitaire.

9 R. Exact.

10 Q. Est-ce qu'il y a une raison particulière à cet ordre ? Cela vous

11 semblait important, puisque vous l'avez répété trois fois. Vous avez dit

12 d'abord politique, militaire et, enfin, humanitaire.

13 R. Je pense que tout le monde a reconnu que la seule solution durable à

14 cette situation en Bosnie ou ailleurs, d'ailleurs, en ex-Yougoslavie devait

15 être politique. C'était le versant politique qui était prioritaire. On

16 était en plein milieu d'une guerre. Par conséquent, le volant militaire

17 était aussi important, était crucial. Je pense avoir dit la dernière fois,

18 qu'en Bosnie, le politique et le militaire étaient très étroitement liés.

19 Je pouvais parler à des dirigeants militaires de choses politiques et à des

20 dirigeants politiques de choses militaires. Pourquoi avoir repris, si vous

21 voulez, cette hiérarchie politique, militaire et humanitaire, c'est parce

22 qu'on estimait que l'aspect politique était le plus important des trois.

23 Q. Serait-il exact de dire que vu cet ordre de priorité, la mission de la

24 MCCE, au fond, était là en Bosnie pour avoir une idée générale, une vue

25 d'ensemble. C'était surtout destiné au ministère des Affaires étrangères

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1 respectif ?

2 R. Nous avions pour objectif, de façon collective, de fournir à toutes nos

3 nations en Europe une image la plus précise possible de la situation qui se

4 présentait sur le terrain.

5 Q. J'aimerais vous montrer un autre document. Nous allons voir si vous

6 pensez que ce document montre le mandat qui avait été confié à la MCCE,

7 document préparé par l'officier de liaison de la Communauté européenne,

8 OCLE, au commandement de la Bosnie-Herzégovine à Kiseljak.

9 Vous voyez qu'ici dans ce document, on parle surtout du rôle, du point sur

10 lequel il faut se concentrer et des modalités d'action. Ce document a été

11 préparé au moment où vous étiez chef du centre régional de Zenica.

12 Convenez-vous avec moi, si vous regardez la deuxième page, qu'au fond,

13 c'est de cette façon-là qu'a fonctionné la MCCE en Bosnie ? Page 3, on voit

14 comment vous êtes organisé au centre régional de Zenica.

15 R. Permettez-moi de préciser que la date est celle du 7 juillet. A ce

16 moment-là, je n'étais pas chef du centre régional de Zenica; je me trouvais

17 à Mostar. Si je regarde la troisième page, je crois qu'il y a une méprise,

18 une légère méprise. 7 juillet ?

19 Q. Excusez-moi.

20 R. Oui, je vois. D'accord.

21 Q. Oui. Vous avez l'accord de Brioni qui donne lieu à cette création de la

22 Mission européenne.

23 R. Exact. Troisième page, oui. On explique comment est organisé le centre

24 régional de Zenica.

25 Q. Merci, Monsieur.

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1 M. BOURGON : Monsieur le Président, je vais demander une cote pour ce

2 document à la fin de mon contre-interrogatoire.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon, à ce stade, concernant ce document,

4 sur la première page, 7 juillet 1991, il doit y avoir une erreur. Cela doit

5 être 7 juillet 1993. Ce que j'observe, c'est que les pages 2 et 3 ne

6 proviennent pas de la même frappe que le document de la page 1. C'est

7 certainement une compilation de deux sources, un document qui a été rédigé

8 à une autre période que les pages 2 et 3.

9 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Tout d'abord, si je regarde la

10 date du 7 juillet 1991, Monsieur le Président, il s'agit de la date d'un

11 accord qui a été signé, qui permettait la création de la mission. Mais

12 cette mission, avant même d'opérer en Bosnie-Herzégovine, a d'ailleurs

13 commencé à opérer en Slovénie. La date du 7 juillet 1991 est une date

14 exacte. Quant aux observations de la Chambre sur le moyen de reproduction

15 employé, je note que, tout simplement, Monsieur le Président, que ce

16 document a été trouvé sur le site de divulgation électronique du Procureur,

17 dans son entièreté, et si nous regardons les chiffres au bas, les trois

18 chiffres se suivent, c'est-à-dire, les pages 7 249, 7 250 et 7 251.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que je voulais dire, c'est que la page 3, qui

20 fait état de la présence du témoin, en 1993, ne peut pas avoir été rédigé

21 le 7 juillet 1991. Le document, que vous nous donnez, est une compilation

22 de plusieurs sources.

23 M. BOURGON : Juste un dernier commentaire, c'est que, si nous regardons

24 sous le titre de la première page, le document de trois pages est un

25 exposé, un "brief" qui a été préparé par l'officier de liaison. Il tenait à

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1 exposer les sources et la situation, à ce moment-là, mais ce n'est

2 qu'encore une fois, pour faciliter le travail de la Chambre. Je n'ai pas de

3 problème si jamais la Chambre refusait le document, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation, sur ce document, qui est reconnu par

5 le témoin concernant au moins la page 3 ?

6 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, pour venir appuyer ce

7 que vient de dire notre confrère de la Défense, il s'agit ici d'un document

8 qui fait référence aux accords de Brioni. L'Accusation ne fait pas

9 objection à l'admission de ce document aux pièces du dossier. Il semble

10 qu'il s'agit d'un document de briefing préparé par l'officier de liaison de

11 la Communauté européenne à Kiseljak. Il s'agit, de façon évidente, d'un

12 moment en 1993 et c'est ce que le témoin a déclaré dans sa déposition. Il

13 fait référence à la première page qui vous parle de cet accord de la MCCE.

14 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous nous donner un

16 numéro définitif ?

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il sera de la pièce DH188.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

19 Poursuivez.

20 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

21 Q. [interprétation] Monsieur, j'aimerais que vous vous penchiez sur ce

22 numéro 1 de la série de documents qui vous a été confiée. J'aimerais que

23 vous nous confirmiez qu'il s'agit de cette série de documents qui fait

24 partie de l'organisation de base du centre régional de Zenica.

25 R. Oui. Oui, c'est tout à fait exact.

Page 8253

1 Q. J'aimerais passer maintenant au premier des sujets dont je voulais

2 m'entretenir avec vous. Bien entendu, cela s'enchaîne sur l'interrogatoire

3 principal qui a eu lieu, en date du 6 avril. Dans votre témoignage, en

4 répondant à l'une des questions de notre confrère, vous avez mentionné les

5 faits que vous étiez intéressé par cette question de Moudjahiddines.

6 R. En effet.

7 Q. Ensuite de cela, vous avez déclaré que c'était pour cela que vous avez

8 demandé quelle était la situation au sujet des Moudjahiddines ?

9 R. J'ai régulièrement posé ce type de questions à bon nombre de

10 rencontres, au sujet des Moudjahiddines, j'entends.

11 Q. En répondant à l'une des questions posées, vous avez indiqué que

12 lorsque vous étiez entretenu de cela avec le général Hadzihasanovic, ainsi

13 qu'avec le général Alagic, il apparaissait clairement que les deux, le

14 général Hadzihasanovic, ainsi que son successeur Mehmed Alagic, ne les

15 aimaient pas ces Moudjahiddines.

16 R. C'est certainement l'impression que je me suis faite.

17 Q. Ils avaient l'habitude de dire qu'il y avait un certain nombre

18 d'étrangers qui se battaient très bien pour les Bosniens, mais qu'il y en

19 avait d'autres qu'ils aimeraient faire partir, faire quitter leurs zones à

20 eux.

21 R. C'est exact.

22 Q. Il semble que votre impression a été qu'ils avaient l'intention de vous

23 impressionner, en disant qu'ils avaient ces Moudjahiddines sous leur

24 contrôle.

25 R. Oui. Je crois qu'il était plutôt difficile à tout commandant d'admettre

Page 8254

1 que certaines troupes n'étaient pas placées sous son contrôle à lui. Mais,

2 comme je l'ai déjà dit, je n'ai jamais été complètement convaincu du fait

3 que le général Hadzihasanovic ainsi que le général Alagic avaient gardé

4 tous ces Moudjahiddines sous leur plein contrôle.

5 Q. Merci beaucoup. Vous avez même répondu à la question que j'allais vous

6 poser à l'instant. Tout simplement, lorsque nous avons deux généraux d'haut

7 rang, qui se respectent l'un l'autre dans une telle situation, il est

8 plutôt habituel de présenter les choses comme si les forces étaient placées

9 sous leur territoire à eux. N'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Parce que, bien entendu, les généraux veulent montrer qu'ils exercent

12 un contrôle à l'égard de leurs troupes.

13 R. C'est exact.

14 Q. Comme vous l'avez mentionné dans votre réponse, vous étiez convaincu,

15 ou plutôt vous n'avez jamais été convaincu que la situation était

16 véritablement celle-là.

17 R. Oui. Je pense qu'il y a eu un ou deux incidents vers la fin de ce mois

18 de janvier, notamment, un incident terrible qui a montré qu'ils n'étaient

19 pas placés sous le commandement du chef du 3e Corps.

20 Q. Bien. Vous avez eu une conversation avec le général Hadzihasanovic, une

21 conversation à laquelle s'est référée notre collègue de l'Accusation. Je

22 tiens à vous demander de vous référer à l'intercalaire 14 dans cette liasse

23 de documents que vous avez obtenue. En page 8 du même document, je vous

24 demande de vous pencher sur le paragraphe 10. Pendant cette conversation,

25 Monsieur, je suppose que le général Hadzihasanovic vous a relaté le fait

Page 8255

1 qu'il y avait plusieurs types de Moudjahiddines. Une première partie de

2 Moudjahiddines, qui avaient été des étrangers, et c'était là le problème

3 qu'il s'efforçait de résoudre. Il a entrevu deux solutions, soit les faire

4 revenir vers les pays d'origine, soit les intégrer. Est-ce là une

5 représentation équitable de ce que le général Hadzihasanovic vous a dit ?

6 R. Oui, c'est ce que j'ai cru comprendre, c'est exact.

7 Q. Le général Hadzihasanovic s'est également référé à un deuxième type de

8 Moudjahiddines, qui avaient été, en fait, des criminels, qui s'efforçaient

9 de se désigner eux mêmes en tant que Moudjahiddines parce qu'il était plus

10 facile de commettre des crimes de la sorte.

11 R. En effet.

12 Q. Vers la fin du paragraphe, il a également indiqué qu'il n'avait pas

13 d'organisation particulière de Moudjahiddines, et que la plupart étaient

14 des criminels qui étaient recherchés par la loi, ou par la police dans leur

15 propre pays.

16 R. C'est ce qu'il a dit, oui.

17 Q. Le contexte de cette conversation, et là je vous demande de vous

18 référer au paragraphe juste au-dessus, paragraphe 9 vers la fin, le

19 contexte de la conversation avait été celui de la discipline; est-ce

20 exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Le général Hadzihasanovic, à cette occasion-là, a indiqué qu'il n'avait

23 pas de problèmes avec les soldats, mais qu'il avait des problèmes avec des

24 gens portant armes qui ne faisaient pas partie de l'armée. Vous souvenez-

25 vous du fait que le général Hadzihasanovic avait dit cela ?

Page 8256

1 R. Oui tout à fait.

2 Q. Paragraphe 9, vers la fin.

3 R. Oui, oui, absolument.

4 Q. Le général Hadzihasanovic, partant de cette conversation, s'efforçait

5 de résoudre ce qu'il considérait être un problème ?

6 R. Oui. Il apparaissait clairement à mes yeux que les Moudjahiddines

7 constituaient, effectivement, un problème, tant à l'égard d'Hadzihasanovic

8 que plus tard à l'égard d'Alagic. Je sais qu'ils voulaient résoudre le

9 problème, mais je n'ai pas du tout compris pourquoi ces gens-là avaient été

10 autorisés à venir dans le pays.

11 Q. Mais je crois que le fait est que le général Hadzihasanovic vous a

12 mentionné le fait qu'il était contre l'intégrisme. Avez-vous reconnu cette

13 attitude ?

14 R. Oui, parce qu'il aimait pas mal consommer son verre de slivovitz.

15 Q. Vous saviez ou vous ne saviez quelles étaient les mesures entreprises

16 par le général Hadzihasanovic pour maîtriser le problème ?

17 R. Non, je ne le savais pas.

18 Q. Je voudrais que vous vous référiez maintenant à l'intercalaire 5 de la

19 liasse de documents qu'on a mis à votre disposition. J'aimerais que vous

20 preniez quelques minutes de temps pour lire.

21 M. BOURGON : Monsieur le Président, il est déjà au dossier sous la cote

22 DH165 pour identification.

23 Q. [interprétation] Monsieur, si vous vous penchez sur cette lettre, et je

24 comprends bien que je vous dépêche peut-être un peu, j'aimerais que vous

25 vous penchiez sur la quatrième ligne du document, premier paragraphe, là où

Page 8257

1 le général Hadzihasanovic est en train de se référer aux Arabes et Turques,

2 qui n'ont pas fait partie des rangs de l'armée, en dépit du fait qu'on les

3 ait conviés à le faire, et qu'ils étaient encore en train d'examiner les

4 propositions présentées par le chef d'état-major de l'armée.

5 Seriez-vous d'accord avec moi, Général, pour dire que ceci nous démontre le

6 fait que ces Arabes et Turques n'avaient pas été placés sous le contrôle du

7 3e Corps, mais que quelque chose se passait entre quelqu'un à un niveau

8 plus élevé et les Moudjahiddines ?

9 R. Oui. Bien entendu, je n'ai jamais vu ce document si intéressant, mais

10 c'est exactement ce à quoi se réfère ce courrier.

11 Q. Si je vous demande de vous pencher sur le premier paragraphe, et la

12 troisième ligne à compter du bas, il est question du fait que ces gens ne

13 voulaient communiquer qu'avec les officiels au sommet de l'état-major de

14 l'ABiH et non pas avec le commandant du 3e Corps d'armée. Est-ce que cela

15 signifie à vos yeux, Général, ou plutôt le fait que le général

16 Hadzihasanovic avait été mis de côté ?

17 R. C'est exactement ce que cette lettre signifie.

18 Q. Au troisième paragraphe, vers la troisième ligne, il est indiqué,

19 lorsqu'il est question des méthodes de combat, le fait que le général

20 Hadzihasanovic a pris position pour dire qu'où leurs façons de combattre

21 étaient préjudiciables à l'état de Bosnie-Herzégovine et, notamment, à

22 l'armée de cette Bosnie-Herzégovine. Est-ce que cela coïncide avec les

23 opinions que le général Hadzihasanovic vous aurait exprimées, par la

24 suite ?

25 R. Tout à fait. Je ne me souviens pas qu'il ait dit de façon concrète,

Page 8258

1 mais en termes généraux cela serait conforme avec la suspicion dont il

2 faisait preuve à l'égard des Moudjahiddines.

3 Q. Je voudrais que vous vous référiez maintenant à la dernière phrase,

4 dernier paragraphe, là où le général Hadzihasanovic demande vos positions

5 et vos opinions pour ce qui est de la solution de ce problème parce qu'il

6 ne voulait pas en assumer la responsabilité. Est-il raisonnable de voir un

7 commandant qui fait face à un problème qui échappe à son contrôle de le

8 voir s'adresser à son QG, ses supérieurs pour leur demander de l'aide ?

9 R. Je puis absolument comprendre l'insistance qui est contenue dans ce

10 dernier paragraphe, en effet.

11 Q. Général, nous voyons dans ce dernier paragraphe quatre mots écrits en

12 lettre capitale, à savoir, "vos positions et vos opinions." Bien sûr, ici

13 il s'agit d'une traduction, peut-être ces termes-là peuvent paraître

14 étranges. Est-il habituel de voir dans un document militaire, un général en

15 position de commandement rédiger des termes en lettres capitales de cette

16 façon ? A votre avis, est-ce qu'il est en train de souligner une question

17 de la plus haute importance ?

18 R. Oui. Je serais d'accord avec vous pour le dire, et il serait plutôt

19 inhabituel de voir un commandant mettre certaines choses en lettre capitale

20 lorsqu'il s'adresse à ses supérieurs.

21 Q. Je voudrais que vous vous penchiez maintenant sur le document qui

22 figure à l'intercalaire 6. Je voudrais passer tout de suite à l'ordre qui

23 figure au premier alinéa. Il s'agit d'un ordre daté du 16 juin. Cela se

24 passe trois jours après la première lettre adressée par le général

25 Hadzihasanovic. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que cet ordre-ci

Page 8259

1 enjoint au général Hadzihasanovic d'envoyer ces hommes, à savoir, les

2 Arabes et les Turques vers Igman pour qu'ils fassent partie du SVK, à

3 savoir, d'une compagnie indépendante du SVK dans l'unité ou le détachement

4 de Zuka. Dans le cas contraire, ils leur refusaient toute l'hospitalité et

5 éventuellement procédaient à leur désarmement. Seriez-vous d'accord avec

6 moi pour dire que ceci est pratiquement la solution proposée par le

7 commandement supérieur, soit les envoyer vers des unités indépendantes du

8 SVK, et ou cas où ils le refuseraient, ne plus faire preuve d'hospitalité

9 et procéder à leur désarmement ?

10 R. En effet, parce que quand on dit "en bout de compte" cela ne donne pas

11 un cadre temporel, mais c'est ce que cela signifie en terme clair.

12 Q. Mais étant donné qu'il s'agit ici d'un ordre, cela laisse une marge de

13 manœuvre au commandant pour que celui-ci puisse voir si cela constitue une

14 solution appropriée ?

15 R. Je pense que la solution est donnée sous forme d'instruction claire. Ce

16 qu'on a omis de préciser, c'était le délai.

17 Q. Avant que de passer au document suivant, j'aimerais que vous me

18 confirmiez la chose suivante. Quand on parle d'un détachement autonome du

19 QG du commandement suprême, nous comprenons qu'il s'agit là d'une unité qui

20 ne fait pas partie du 3e Corps, n'est-ce pas ?

21 R. C'est exact.

22 Q. J'aimerais que nous passions maintenant à l'intercalaire 7. Ce que je

23 souhaite vous montrer, c'est, en fait, ici une transcription d'une

24 conversation téléphonique entre le général Halilovic, qui à l'époque, était

25 chef d'état-major de l'ABiH. J'aimerais vous référer à la page 2, à la

Page 8260

1 ligne 15. Il s'agit d'une conversation entre Halilovic et le général

2 Hadzihasanovic. C'est une conversation initiée par le général Halilovic. Je

3 vais vous donner lecture des lignes 15 à 30 où il semblerait que le général

4 Hadzihasanovic parle et qui dit : "Concernant les informations que nous

5 avons reçues au sujet de ces étrangers, la chose ne peut pas être fait de

6 cette façon."

7 Le général Halilovic dit : "Vraiment ?"

8 L'autre répond : "Non, aucune chance. Cela constituerait un troisième

9 front."

10 "Non, non, mais essayez. Cela a été donné comme ordre, il y en a deux qui

11 l'ont signé. Vous comprenez ?"

12 "Essayez de nous envoyer l'ordre sans la deuxième partie, l'ordre disant de

13 les envoyer là-bas."

14 "Oui."

15 "Je crois qu'ils ont reçu cette lettre."

16 "Bien, vous pouvez le faxer."

17 Q. Pouvez-vous être d'accord avec moi pour dire qu'à la lecture de cette

18 conversation, le général Hadzihasanovic est en train de faire savoir que

19 l'ordre, qu'il avait reçu le même jour, le 16 juin, ne pouvait pas être

20 réalisé de cette façon ? Il s'opposait à l'usage de la force pour la

21 solution du problème parce qu'il estimait que cela constituerait

22 l'ouverture d'un troisième front ?

23 R. Oui. Je suppose que vous vous référez, notamment, à la deuxième phrase

24 du premier paragraphe de la lettre de Delic.

25 Q. Quand nous parlons du troisième front, partant de la connaissance des

Page 8261

1 circonstances en Bosnie-Herzégovine qui est la vôtre, pourriez-vous dire ce

2 que le général Hadzihasanovic avait à l'esprit en parlant d'un "troisième

3 front" ?

4 R. Je ne puis que supposer que non seulement ils étaient en train de se

5 battre contre des Croates et des Serbes, mais que cela signifierait

6 également des combats possible contre des Moudjahiddines.

7 Q. Par cette lettre aussi, le général Hadzihasanovic est en train

8 d'exprimer une opinion disant que cela ne serait pas sage que de le faire,

9 du moins à ce moment-là ?

10 R. En effet. C'est la façon dont je comprends la chose. Bien sûr, je n'ai

11 pas vu cela auparavant, mais je crois comprendre qu'il hésite à la

12 désarmer, parce que cela pourrait conduire à des combats.

13 Q. Merci, Monsieur.

14 Je vous demande maintenant de vous pencher sur le document qui figure sur

15 l'intercalaire 8. Il s'agit d'un document envoyé directement à M. Sakib

16 Mahmuljin en date du 23 juillet. Dans ce document-ci, M. Mahmuljin est

17 autorisé à procéder au nom du QG du commandement suprême à des négociations

18 et arrangements avec les représentants ou commandants des unités de

19 Moudjahiddines concernant les questions suivantes : premièrement,

20 l'intégration des Moudjahiddines aux Unités de l'ABiH, l'usage de cette

21 unité dans les combats contre les Chetniks et les modalités de leur

22 resubordination au commandement du 3e Corps. Cette autorisation est limitée

23 à la solution de ces deux problèmes concrets. Sauriez-vous d'accord avec

24 moi pour dire que cette autorisation est en train de nous dire que le QG du

25 commandement suprême a décidé de négocier directement avec les

Page 8262

1 Moudjahiddines, et cela fait de ce M. Mahmuljin, la personne autorisée de

2 le faire non pas au nom du 3e Corps, mais au nom de l'ABiH ?

3 R. En effet.

4 Q. Vous savez certainement qui est M. Mahmuljin, n'est-ce pas, parce que

5 vous l'avez rencontré plus tard, n'est-ce pas ?

6 R. Oui. C'est lui qui a repris les fonctions du général Alagic au

7 commandement du 3e Corps.

8 Q. Merci, Monsieur.

9 J'aimerais que nous passions maintenant au document suivant qui figure à

10 l'intercalaire numéro 9 où nous avons, à présent, une proposition de

11 formulée. Je vous demande de vous référer, notamment, au premier

12 paragraphe. Il s'agit d'un document qui émane du commandement du 3e Corps

13 et qui est destiné au commandement de l'armée avec une proposition de faire

14 des volontaires étrangers un détachement et de les mobiliser, ou plutôt de

15 les rassembler à un point de rassemblement au village de Mejoric, de leur

16 attribuer un nom et de le faire aussi vite que possible.

17 Seriez-vous d'accord avec moi pour dire, Monsieur, qu'avec cette

18 proposition, quelqu'un au niveau du 3e Corps, vient proposer la création

19 d'une formation, d'un détachement ? Je vous demande de vous pencher sur ce

20 qui est indiqué à la main, "urgent," à savoir, affaire liée à

21 l'organisation et à la mobilisation. On dit : "Je suis d'accord de prendre

22 en considération."

23 Maintenant, si vous vous penchez sur la page deux, en original, vous voyez

24 les notes manuscrites rajoutées. Seriez-vous d'accord pour dire que ceci

25 vient s'enchaîner à l'égard de l'autorisation qui a déjà été donnée ? Parce

Page 8263

1 qu'on y dit : "Partant de l'autorisation numéro 1/297 datée du 23 juillet."

2 Ce qui fait que cette lettre suit directement l'autorisation concrète qui a

3 été envoyée à

4 M. Mahmuljin ?

5 R. En effet.

6 Q. M. Mahmuljin est en train de proposer l'organisation de ce

7 détachement ?

8 R. Oui, c'est la façon dont je comprends cette lettre, en effet.

9 Q. Je vous demande à présent, de vous penchez sur la page 2 de l'original.

10 Vous y verrez qu'il est question d'un emplacement pour la signature du

11 signataire. On dit : "Commandant Enver Hadzihasanovic," mais il n'y a pas

12 de signature. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'il y a bon nombre

13 de raisons qui pourrait faire que ce document ne porte pas de signature et

14 soit disponible dans le QG de l'armée ?

15 R. Oui. Ce serait plutôt inhabituel, parce que si le général n'est pas là,

16 c'est son adjoint qui signe. Mais il n'est pas inhabituel de trouver un

17 document envoyé sans signature.

18 Q. Seriez-vous plus d'accord avec moi pour dire, Monsieur, partant de

19 votre expérience et de l'exercice professionnel que vous avez effectué dans

20 les QG et les états-majors, vous pourrez dire que les documents peuvent

21 autoriser une personne autre que le commandant pour ce qui est de signer en

22 indiquant qu'il s'agit du commandant ? Il y a trois scénarios avec

23 différentes implications.

24 R. Je serais d'accord avec vous pour le dire, mais cela peut être

25 simplifié en disant "pour le commandant." Quelqu'un vient signer pour le

Page 8264

1 commandant, et on sait que cela s'est fait en l'absence de l'homme numéro

2 un.

3 Q. Merci. Je voudrais maintenant que nous passions au document qui figure

4 à l'intercalaire 10. Il s'agit d'un ordre qui provient de l'état-major de

5 l'armée, qui est daté du 13 août. On demande au 3e Corps de recevoir dans

6 sa zone de responsabilité ce détachement de Moudjahiddines. Il y a un

7 numéro de code, un plan de mobilisation pour ce qui est de l'administration

8 au niveau du 3e Corps d'armée. Vous serez d'accord avec nous pour dire que

9 l'état-major de l'armée donne l'ordre au 3e Corps de prendre officiellement

10 les Moudjahiddines sous son contrôle ?

11 R. C'est ce que dit cette lettre.

12 Q. Si nous nous penchons maintenant sur la page 2 du même document, au

13 paragraphe 1, il est dit : "Entamé immédiatement et achevé au plus tard le

14 31 août." Cela signifierait que le commandant a un certain délai à sa

15 disposition pour réaliser cette tâche.

16 R. Oui.

17 Q. J'aimerais que vous vous penchiez maintenant sur le document suivant

18 qui figure à l'intercalaire 11. Il s'agit d'un document portant la date du

19 28 août 1993. Il s'agit ici d'un ordre émanant du commandant du 3e Corps

20 adressé au Groupe opérationnel de Bosanska Krajina et à la 306e Brigade

21 motorisée. Je vous demande de vous penchez sur cette deuxième page du

22 document où il est question de ce Détachement indépendant appelé El Mujahed

23 placé sous l'autorité de la 306e Brigade. Le commandant de l'Unité El

24 Mujahed devait répondre de ses faits et gestes au commandant de la 306e

25 Brigade. Je vous demande maintenant de vous penchez sur la signature, où il

Page 8265

1 est dit que l'ordre n'a pas été réalisé. Veuillez vous pencher, je vous

2 prie, sur l'original. Vous voyez qu'il y a une signature et qu'il y a une

3 inscription : "N'est pas réalisé, n'est pas exécuté." Seriez-vous d'accord

4 avec moi pour dire, Monsieur, qu'en date du 28 août, près du délai final

5 accordé au 3e Corps pour résoudre le problème, il dit que l'ordre n'a pas

6 été réalisé et qu'ils étaient en train d'œuvrer pour résoudre le problème ?

7 R. Oui. Il est dommage qu'il n'y a pas d'indication au sujet des raisons

8 pour lesquelles cela n'a pas été réalisé, mais cela est exact.

9 Q. A la lumière des documents que l'on vient de vous montrer, que vous

10 n'avez pas vu jusqu'à présent, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que

11 le général Hadzihasanovic s'était efforcé de résoudre le problème dès à

12 partir du mois de juin 1993 ?

13 R. Oui. Je trouve ces documents extrêmement intéressants, parce que cela

14 est tout à fait conforme à l'impression que je me suis faite concernant les

15 suspicions qu'il avait nourries à l'égard des Moudjahiddines, et le fait

16 qu'il s'était efforcé de résoudre le problème.

17 Q. Est-ce que ce document vient confirmer le fait que le général

18 Hadzihasanovic n'aimait pas particulièrement les Moudjahiddines, à savoir

19 qu'il était contre eux, et qu'il estimait que l'usage de la force pour

20 exercer un contrôle à leur égard ne pourrait pas constituer une solution

21 adéquate ?

22 R. Exact.

23 Q. Dans le courant de l'interrogatoire principal, mon éminent confrère

24 vous a demandé de vous référer à une conversation avec un monsieur

25 répondant au nom de Fazlic. Je vous demande maintenant de vous pencher sur

Page 8266

1 le document figurant à l'intercalaire 17 de la liasse de documents. Il y a

2 trois thèmes que j'aimerais aborder à propos de ce M. Fazlic. J'aimerais

3 dans un premier temps vous demander de prendre ce qui est la 3e page du

4 document, à savoir, la page 0131064. Vous avez le paragraphe 4 qui porte

5 sur une réunion que vous avez eue avec M. Fazlic. Dans un premier temps,

6 j'aimerais confirmer qu'il s'agissait d'une réunion où vous étiez censé

7 parler de questions relatives à la police civile et que, fondamentalement,

8 M. Fazlic a fait état de tous les succès qu'il avait obtenus pour ce qui

9 est de s'être débarrassé de tous les gangs militaires, qu'il avait eu un

10 taux de succès de 62 %, et qu'il n'y avait qu'un seul homicide qui n'avait

11 pas été résolu à ce moment-là.

12 Si je vous demande de prendre le paragraphe suivant, il est question de

13 l'intimidation des minorités croates. Il y a également un autre sujet

14 mentionné. Il s'agit du cas du mari et de la femme Botic à Travnik. Je

15 suppose d'après ce document, qu'au départ, vous étiez à un tant soit peu

16 sceptique à propos de ce qui était avancé, mais qu'ensuite, vous vous êtes

17 peut-être rallié à cette idée, et que vous avez eu des indications sur

18 lesquelles il s'agissait d'un suicide assez classique ?

19 R. C'est exact. Je ne me souviens pas d'ailleurs des indications qui ont

20 été données, mais c'est ainsi que j'ai compris la situation à l'époque.

21 Q. A la suite de ce paragraphe, où il est question du président du HDZ de

22 Zenica, qui a utilisé ces décès comme prétexte pour accuser l'ABiH du

23 meurtre et pour les accuser d'essayer de procéder à un nettoyage ethnique

24 en persuadant les Croates de quitter Travnik. Compte tenu de la

25 conversation que vous avez avec M. Fazlic, compte tenu de ce que vous

Page 8267

1 compreniez de la situation à l'époque, êtes-vous d'accord avec moi pour

2 dire que M. Fazlic a immédiatement pris des mesures lorsqu'il a entendu

3 parler de la situation à Travnik ?

4 R. Oui. C'est en tout cas ce qu'il a promis de faire. J'essaie tout

5 simplement de me souvenir si j'ai obtenu des indications concernant un

6 suivi positif sur le terrain.

7 Q. Monsieur, vous avez eu cette conversation avec M. Fazlic. Est-ce que

8 cela vous a permis de comprendre que les autorités civiles continuent à

9 être opérationnelles pendant la période où vous avez été responsable du

10 centre régional de Zenica ?

11 R. Oui.

12 Q. Il y avait une situation de guerre, mais l'ABiH représentait les forces

13 gouvernementales, défendait en quelque sorte le territoire national, et

14 était la seule armée légitime qui le faisait contre deux agresseurs, à

15 savoir, le HVO et les Serbes ?

16 R. Peut-être que j'exprimerais cette idée d'une façon légèrement

17 différente, car au départ les Serbes étaient les agresseurs. Ensuite, cela

18 s'est développé en une lutte entre les Croates et les Bosniens qui, tous

19 les deux, défendaient leur territoire.

20 Q. Plus tard, nous allons aborder la question du partage des

21 responsabilités. Pour ce qui est de M. Fazlic, il a parlé des

22 Moudjahiddines. La première chose qu'il ait dite était qu'il avait

23 récemment incarcéré trois Moudjahiddines. Il avait dit qu'auparavant la

24 police avait autorisé les Moudjahiddines alors que maintenant, ils étaient

25 incarcérés ou arrêtés en tout cas d'abord, s'ils commettaient des crimes.

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1 Est-ce que cela indique un changement de politique ?

2 R. Oui. Bien sûr, je ne le sais pas, parce que cela s'est passé quelques

3 mois après la correspondance que nous consultions. Je ne sais pas quelles

4 furent les solutions adoptées à propos des Moudjahiddines. Il est

5 absolument clair qu'il a déclaré qu'ils seraient arrêtés s'ils étaient

6 responsables de crimes.

7 Q. Je suppose que de ce fait, il reconnaissait que la responsabilité pour

8 ce qui était de la gestion des crimes commis par les Moudjahiddines à

9 Zenica, était une responsabilité civile. C'était sa responsabilité en tant

10 que chef de la police civile ?

11 R. Oui, mais cela ne correspond pas tout à fait à ce qu'il a dit ensuite,

12 puisqu'il a dit qu'ils étaient placés sous le commandement du 3e Corps.

13 Q. A propos de cela, je vais maintenant vous demander de prendre la page

14 suivante, vous mentionnez en haut de la page que vous avez été plutôt

15 impressionné par M. Fazlic, que vous considérez comme un chef de police

16 dynamique.

17 R. Oui, il est évident qu'il m'a impressionné.

18 Q. Cela vous a posé un problème, parce que d'un côté vous pensiez que M.

19 Fazlic était une personne sincère, mais ce qu'il disait n'était pas la même

20 chose que ce que disait le commandant du 3e Corps à l'époque en janvier

21 1994, à savoir, cela ne correspondait pas à ce que disait Mehmet Alagic.

22 Vous aviez deux points de vue du même problème.

23 R. Non. Je pense qu'à l'époque, Alagic était extrêmement critique vis-à-

24 vis des Moudjahiddines. Il a indiqué qu'il les avait sous son contrôle,

25 qu'il savait les maîtriser bien qu'il eut souhaité les voir partir de sa

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1 zone, de son secteur.

2 Q. Nous allons passer au document portant sur M. Alagic. Si nous comparons

3 les déclarations qui vous ont été faites par le général Hadzihasanovic et

4 par le général Alagic, qui étaient les personnes qui traitaient avec les

5 Moudjahiddines, si vous comparez cela avec ce que vous a dit le chef de la

6 police civile, convenez-vous avec moi que vous auriez accordé plus de poids

7 sur ce qui vous a été dit par les commandants militaires en question ?

8 R. Oui, de toute évidence.

9 Q. Les commentaires, les observations qui ont été faites par M. Fazlic,

10 ont été faites en janvier 94. Il ne vous a pas indiqué depuis quand ces

11 personnes étaient sous son contrôle, si tel était le cas.

12 R. C'est tout à fait exact.

13 Q. Il ne vous a pas dit que cela signifiait que le problème était réglé.

14 Nous ne le savons pas,

15 R. Oui.

16 Q. Il vous a bien dit qu'il venait d'incarcérer des criminels qui étaient

17 des Moudjahiddines ?

18 R. Oui.

19 Q. A partir de ces documents, toute autre conclusion représenterait une

20 spéculation ?

21 R. C'est exact.

22 Q. Ma dernière question avant la pause. Il y a eu un enlèvement vers la

23 mi-octobre, et quatre ou cinq Croates ont été enlevés à Travnik. Vous en

24 souvenez ?

25 R. Oui.

Page 8270

1 Q. En réponse à une question posée par mon confère, vous avez indiqué que

2 vous n'aviez absolument pas participé à ce type d'activités, en tout cas

3 pas au début ?

4 R. C'est exact, pas au début.

5 Q. J'aimerais vous demander de prendre l'intercalaire numéro 12. Il s'agit

6 du paragraphe 5, qui se trouve à la première page de cet intercalaire 12.

7 Il est dit que : "Le HVO avait détenu un Moudjahiddine blessé dans une

8 prison de Busovaca. En réaction, les Moudjahiddines de Travnik ont pris

9 cinq civils comme otages dont un a été libéré récemment."

10 J'aimerais maintenant vous demander de prendre le paragraphe 7. Dans ce

11 paragraphe, il s'agit, en fait, d'une conversation, et vous voyez qu'il est

12 dit : "Qu'après que l'on ait demandé à M. Beba, qui était le chef de la

13 sécurité à Travnik, nous lui avons demandé ses conseils à propos de la

14 libération des otages croates. Sa réponse a été qu'il ne pouvait rien faire

15 pour le moment. Il a parlé, ensuite, du manque de contrôle dont faisait

16 preuve les Moudjahiddines. Cela n'a pas été consigné, mais voilà ce qu'il a

17 dit. Il a dit dans un premier temps que les Moudjahiddines ne faisaient

18 qu'apporter de l'eau au moulin de la propagande des Croates. Deuxièmement,

19 il a indiqué que le commandant Alagic, du Groupe opérationnel, parce qu'il

20 s'agit du mois d'octobre maintenant, avait d'autres préoccupations mais que

21 lorsque les circonstances seraient bonnes il demanderait le contrôle. Au

22 paragraphe (C), il est indiqué que, si les Moudjahiddines n'acceptent pas

23 de travailler sous le contrôle de l'armée, cela pourrait déboucher sur un

24 conflit armé.

25 Au vu de cette information, est-ce que vous pensez que, compte tenu des

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1 documents que nous avons consultés au préalable et compte tenu de la

2 situation qui prévalait en janvier, je vous rappelle qu'il s'agit

3 maintenant de la fin du mois d'octobre, et les Moudjahiddines ne sont

4 toujours pas passés sous contrôle. Etes-vous d'accord pour dire qu'il

5 reconnaît qu'il existe un problème ?

6 R. Oui. C'est exactement ce que je comprenais de la situation.

7 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre l'intercalaire 13. Il

8 s'agit du général Alagic. J'aimerais vous demander de prendre la deuxième

9 page de ce document, et le milieu de cette page, vous voyez qu'il est

10 indiqué : "V1, réunion V1 avec le comité international de la Croix rouge à

11 propos des allégations suivant lesquelles les Moudjahiddines prennent comme

12 otages des Croates." J'aimerais vous demander de consulter le milieu du

13 paragraphe où il est dit : "Le commandant Alagic va essayer d'exercer des

14 pressions sur les Moudjahiddines pour qu'ils libèrent les otages. Alagic a

15 indiqué que ses efforts déployés par le passé ont permis la libération d'un

16 otage, mais que quatre personnes sont encore otages. Il a indiqué que les

17 Moudjahiddines n'étaient pas placés sous son contrôle." Si vous prenez la

18 première page de ce document, vous voyez qu'il s'agit d'un document en date

19 du 29 octobre 1993. C'est un document préparé par l'équipe V1, attachée au

20 centre de coordination de Travnik ?

21 R. Oui.

22 Q. Convenez-vous avec moi qu'Alagic dit ou que l'on dit qu'Alagic indique

23 qu'il va essayer d'exercer des pressions. Un commandant, qui a le contrôle,

24 dirait : "Je vais faire quelque chose," alors qu'un commandant, qui n'a pas

25 le contrôle, dit : "Je vais essayer de faire quelque chose."

Page 8272

1 R. Oui, c'est exactement ainsi que je comprenais la situation relative aux

2 Moudjahiddines. Ils ne respectaient que leurs propres lois.

3 Q. J'aimerais vous demander de prendre l'intercalaire 15 qui est composé

4 de trois documents. Le premier document porte la date du 26 novembre. C'est

5 un document qui a été préparé par l'officier de liaison de Travnik, un

6 document qui est adressé à l'officier chargé du commandement du Bataillon

7 britannique, qui était à l'époque, le lieutenant-colonel Williams. Au

8 paragraphe 2 de cette lettre, il est indiqué que : "Le Groupe opérationnel

9 de Travnik n'a aucun pouvoir sur les Moudjahiddines et qu'il semblerait que

10 des efforts considérables étaient déployés par les commandants pour éviter

11 qu'ils ne soient accusés." Il est également dit que : "Beba Salko, à

12 savoir, l'homme auquel j'ai fait allusion tout à l'heure, avait eu des

13 problèmes avec Alagic à ce sujet et que tout le monde, non seulement ils

14 étaient très gênés du fait de cette situation, mais qu'en plus, ils avaient

15 plutôt perdu la face parce que les Moudjahiddines n'étaient absolument pas

16 placé sous contrôle."

17 Est-ce que vous êtes d'accord pour indiquer que cela correspond à la

18 situation qui prévalait à l'époque, à savoir, en novembre 1993 ?

19 R. Oui.

20 Q. Au paragraphe 3 de cette lettre, il est indiqué que deux des otages,

21 qui ont été libérés, se trouvent en détention protégée, et que le capitaine

22 Guinness, qui est allé voir ces personnes, a indiqué que ces personnes

23 semblaient être assez satisfaites. Au paragraphe 4 de ce document, il est

24 indiqué qu'il y a encore deux personnes qui sont détenues et que d'après

25 eux, seul Alagic pourrait être la personne qui pourrait avoir une certaine

Page 8273

1 autorité sur les Moudjahiddines.

2 Si nous établissions le lien entre ce paragraphe et le document qui portait

3 sur ce que disait Beba Salko, à savoir, l'autre lettre, il est évident

4 qu'Alagic aurait dû faire quelque chose à ce sujet. Cela correspond à la

5 situation qui prévalait à l'époque ?

6 R. Oui. Il est évident qu'ils disent qu'Alagic semblait la seule personne

7 qui pouvait avoir une certaine autorité. C'était leur point de vue.

8 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre la page suivante de ce

9 document. Il s'agit d'une lettre écrite par le colonel Williams, adressée

10 au général de brigade Ramsey, qui est chef d'état- major du commandement de

11 la Bosnie-Herzégovine pour la FORPRONU. Il s'agit d'une lettre du 5

12 décembre. Si vous prenez les trois dernières lignes du premier paragraphe,

13 vous verrez qu'il y est

14 écrit : "La libération des deux autres otages ne dépendra peut-être même

15 pas du contrôle de Mehmet Alagic, commandant du 3e Corps de l'armée de la

16 Bosnie, parce que nous ne savons même pas si même lui est en mesure de

17 contrôler les unités des Moudjahiddines."

18 C'est ainsi ce que pensait le colonel Williams, le colonel Williams pensait

19 que les Moudjahiddines n'étaient placés sous aucun contrôle ?

20 R. Oui.

21 Q. J'aimerais que vous preniez le document suivant qui se trouve toujours

22 dans le même jeu de documents. Il s'agit d'une synthèse de renseignements

23 militaires d'un milinfosum, en date du 3 novembre. En fait, j'aimerais que

24 vous consultiez le paragraphe 6. Il y est dit, au milieu du paragraphe 6,

25 il s'agit de Beba Salko : "Et lorsqu'on lui a posé des questions à propos

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1 des deux personnes qui sont détenues, il a indiqué qu'il faudrait que cela

2 soit réglé par une personne supérieure dans la hiérarchie Alagic, ce qui

3 semblerait indiquer qu'Alagic n'a pas le contrôle absolu contrairement à ce

4 que nous avions vu auparavant, et que les Moudjahiddines semblaient être

5 une unité indépendantes au niveau de l'armée."

6 Est-ce que cela indique, Monsieur, que le milinfosum indique soit que les

7 Moudjahiddines représentent une unité qui n'a pas été intégrée ou alors

8 qu'il s'agit véritablement d'un atout de l'armée qu'il n'a rien à voir avec

9 le 3e Corps ?

10 R. Je ne sais pas quelle était la situation de jure. Je ne sais pas quelle

11 était la situation à l'époque pour ce qui est des Moudjahiddines. Mais,

12 manifestement, l'opinion exprimée dans ce document est qu' Alagic ne serait

13 pas ou n'est pas en mesure de faire en sorte que soient libérés les otages

14 et qu'il faudrait passer à un grade supérieur.

15 Q. Merci beaucoup, Monsieur. Nous allons nous arrêter ici.

16 M. BOURGON : Monsieur le Président, je crois que le moment est propice à

17 prendre une pause.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. On va interrompre l'audience parce que c'est la

19 pause et nous reprendrons l'audience à 11 heures 10,

20 11 heures 15.

21 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 58.

23 --- L'audience est reprise à 11 heures 24.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous redonne la parole.

25 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

Page 8275

1 Q. [interprétation] Juste avant la pause, je vous avais demandé si vous

2 étiez en mesure de confirmer que les informations que nous avons consultées

3 ce matin correspondaient à votre point de vue, et je parle des

4 Moudjahiddines. En fait, vous nous avez dit que quelle que soit la

5 situation de jure à propos des Moudjahiddines, la situation de facto était

6 que personne n'exerçait de contrôle ou qu'ils n'exerçaient pas de contrôle

7 sur les Moudjahiddines.

8 R. Cela est tout à fait mon point de vue.

9 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre l'intercalaire 18 dans

10 la liasse de documents que je vous ai montrée. Pour ce qui est de cet

11 intercalaire 18, j'aimerais attirer votre attention sur le dernier

12 paragraphe de ce document. Il s'agit du paragraphe 6, à la page 3 du

13 document. Il est mentionné que V1 a rencontré le commandant Alagic, qui l'a

14 informé qu'il allait bientôt devenir le commandant du 3e Corps et qu'il

15 essayera d'aider pour ce qui est de trouver une solution aux problèmes des

16 otages pris par les Moudjahiddines.

17 J'aimerais également vous demander de prendre l'intercalaire 16, avant que

18 je ne vous pose ma question. L'intercalaire 16 correspond à une lettre que

19 vous avez rédigée et que vous avez adressée à Mme Popovic, et vous dites :

20 le 1er janvier, en fait, il s'agit du milieu du paragraphe, vous avez eu

21 deux réunions avec le général Alagic pour parler du problème de son mari et

22 que le général Alagic m'a assuré, je cite : "Qu'il faisait tout ce qui

23 était en son pouvoir pour essayer de trouver ce qui s'était passé et qu'il

24 vous transmettrait les informations."

25 Pouvez-vous confirmer, sur la base de ces deux documents, que bien que les

Page 8276

1 Moudjahiddines ne soient pas placés de facto sous contrôle, le général

2 Alagic vous a dit de façon très sincère qu'il allait faire de son mieux

3 pour essayer de savoir ce qui se passait afin de trouver une solution à ce

4 problème ?

5 R. Oui. Il me l'a assuré à plus d'une reprise. Je dois dire que j'avais

6 entièrement confiance et que je pensais qu'il était sincère dans ce qu'il

7 avançait.

8 Q. Pour ce qui est de cette situation, il faut savoir que votre lettre

9 porte la date du 1er janvier, et le premier document est un rapport de

10 l'équipe V1 du centre de coordination de Travnik, qui est une lettre qui

11 remonte au mois de novembre. Si la situation relative aux Moudjahiddines

12 était imprécise en novembre et décembre 1993, et janvier 1994, seriez-vous

13 d'accord pour dire que la situation était encore moins claire et, encore,

14 plus imprécise, en octobre, lorsque le général Hadzihasanovic commandait le

15 3e Corps ?

16 R. Oui. Il est évident, il est manifeste que bien que ce problème se soit

17 posé pendant plusieurs mois, aucun progrès n'avait été effectué sur la

18 question.

19 Q. J'aimerais maintenant passer à un autre thème. Il s'agit de la

20 situation de Vares qui a été abordée pendant votre interrogatoire

21 principal. Je ne veux pas parler des événements à proprement parler, étant

22 donné que le général Hadzihasanovic n'a pas, dans ces chefs d'accusation

23 contre lui, ces événements. J'aimerais vous demander de prendre

24 l'intercalaire numéro 2 afin que nous puissions parler de l'importance

25 stratégique de Vares. Ma première question sera la suivante : êtes-vous

Page 8277

1 d'accord pour dire que Vares était extrêmement ou avait une importance

2 stratégique pour le 3e Corps et pour l'ABiH ?

3 R. Oui, c'était extrêmement important parce qu'il s'agissait d'une enclave

4 croate du HVO. Une fois que Vares a passé dans les mains de l'ABiH, l'ABiH

5 pouvait passer du nord et il s'agissait du 2e Corps, 3e Corps, du 6e Corps,

6 du 4e Corps, et ils pouvaient aller jusqu'à Gornji Vakuf, sans pour autant

7 être obligés de passer par les autres territoires de la Bosnie.

8 Q. Je vous remercie. J'aimerais vous demander de prendre le deuxième

9 document, qui est un rapport qui a été rédigé avant que vous n'arriviez,

10 d'ailleurs, en Bosnie le 2 juin. Au deuxième paragraphe, il est dit que :

11 "les actions de l'armée serbe de la Bosnie semblent suggérer qu'il y a un

12 effort qui va être mené à bien pour prendre Maglaj et la péninsule de

13 Maglaj afin de former une autre enclave musulmane." Au paragraphe (B), il

14 est indiqué que le territoire serbe de Doboj pourra être repoussé vers

15 l'est afin d'établir le lien des Serbes de Bosnie vers l'est, et que si

16 cela se passait, deux choses en résulterait, à savoir, la constitution

17 d'une autre enclave, l'enclave de Tuzla, et la constitution d'un couloir

18 entre l'est et l'ouest pour les zones serbes, cela serait plus acceptable

19 pour les Croates. L'incidence de cela, et c'est indiqué au paragraphe 6,

20 serait qu'il y aurait une arrivée massive de réfugiés semblable à ce qui

21 s'est passé lorsque Jajce est tombée et que Zenica allait être complètement

22 submergée de réfugiés, ce qui pourrait déstabiliser et affaiblir les

23 positions ou la position de la Bosnie-Herzégovine à Zenica, et cela

24 pourrait renforcer la population croate sur la ligne Travnik-Kiseljak.

25 Pour ce qui est de la situation opérationnelle, telle qu'elle est décrite,

Page 8278

1 est-ce que vous êtes d'accord avec cette description ?

2 R. Oui, bien sûr. Car cette péninsule de Maglaj est devenue,

3 effectivement, elle est devenue l'enclave de Maglaj. Je dois vous dire que

4 pour ce qui est de la deuxième entreprise, à savoir, la BSA, n'a pas réussi

5 puisqu'elle n'a jamais pu établir le lien entre Doboj et l'est. Elle n'a

6 jamais pu créer l'enclave de Tuzla.

7 Q. Vous êtes d'accord avec le fait que l'ABiH a perdu à Zepce et que la

8 péninsule de Maglaj est devenue, en fait, une enclave.

9 R. C'est exact.

10 Q. Bien entendu, cela a été un signe très, très dangereux pour l'ABiH ?

11 R. Oui.

12 Q. A ce sujet, l'opération menée à bien à Vares, plus tard, consistait non

13 seulement à créer cette route vers le nord, mais ils voulaient également

14 empêcher que les Serbes établissent le lien entre l'est et l'ouest ?

15 R. Oui.

16 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre l'intercalaire 4 de ce

17 jeu de documents. Il s'agit d'un rapport en date du 21 août 1993. C'est un

18 rapport adressé par le général Hadzihasanovic. Cela, vous pouvez le voir à

19 la page 27. Il s'agit, en fait, d'un rapport de situation qui fait état de

20 la situation où se trouvait le 3e Corps à la date du 21 août 1993.

21 Je suppose que ce genre de documents vous aurait été extrêmement utile en

22 1993 ?

23 R. Oui. Il m'aurait été extrêmement utile.

24 Q. Si je vous demande de consulter le milieu de la page 5 du même

25 document, vous verrez qu'au paragraphe intitulé "conclusion", il existe des

Page 8279

1 observations. Il est mentionné au milieu, je cite : "Nous pensons que nous

2 devrions accorder toute notre attention à ceci tout en engageant nos forces

3 et en dirigeant nos actions pour empêcher que les forces de l'agresseur

4 pénètre dans ladite zone pour éviter la répétition de ce qui s'est passé à

5 Zepce." Je sais que c'est un petit paragraphe d'un document très

6 volumineux, mais convenez-vous avec moi que dans ce paragraphe, le général

7 Hadzihasanovic évalue les plans opérationnels et évalue la façon dont les

8 forces doivent être déployées pour éviter de perdre d'autres territoires en

9 Bosnie-Herzégovine et, notamment, en l'occurrence, pour éviter que ne se

10 répète le scénario de Zepce ?

11 R. C'est ainsi que je comprends ce paragraphe.

12 Q. Etes-vous d'accord avec moi pour dire que ce type de rapport, qui

13 présente une évaluation de la situation, il s'agit de l'évaluation des

14 forces ennemies. Il s'agit également d'une évaluation exhaustive des forces

15 alliées ou de leurs propres forces. Il s'agit également d'une évaluation

16 des problèmes et des défis. Etes-vous d'accord, disais-je, pour dire que ce

17 type d'évaluation et le type d'évaluation qui est effectué par un

18 commandant tout à fait judicieux, et que ce document ne devrait pas

19 contenir d'informations erronées, car un commandant souhaite que son QG

20 soit toujours informé de la situation dans laquelle il se trouve.

21 R. Oui. Je suis d'accord. Ce genre de rapport écrit par un commandant

22 militaire doit être aussi véridique et aussi proche de la vérité que

23 possible, sinon, le document n'a aucune valeur.

24 Q. J'aimerais, maintenant, vous demander de prendre, à nouveau,

25 l'intercalaire 18 du document. Je vous demanderais de prendre la page 2

Page 8280

1 dudit document. Vous voyez qu'il s'agit d'une conversation que vous avez

2 eue avec un homme qui répond au nom de Zubaka et qui était, en fait, le

3 commandant de l'opération qui a abouti à la prise de Vares par l'ABiH. Je

4 vous demanderais de consulter le paragraphe qui se trouve au haut de la

5 page et qui commence par : "Les autorités de la Bosnie-Herzégovine

6 encouragent les Croates à rester à Vares, invitent les réfugiés à revenir

7 et indiquent qu'ils ne vont pas essayer de prendre revanche."

8 Vous rappelez-vous une telle conversation ou le contenu d'une telle

9 conversation ?

10 R. Je m'excuse. Pourriez-vous me donner le temps nécessaire pour que je

11 prenne connaissance de ce paragraphe ?

12 Q. Je m'excuse. Oui, un petit moment.

13 R. Oui. Je me souviens de cela, effectivement.

14 Q. J'aimerais vous demander de poursuivre votre lecture et de prendre le

15 paragraphe qui commence par une question, la question étant : "Quel est

16 l'avenir des Croates à Vares ?"

17 La réponse était : "Ils sont les bienvenus ici, parce qu'il faut savoir que

18 du point de vue historique et que pendant toute l'histoire, les Musulmans

19 et les Croates se sont toujours bien entendus à Vares. La Bosnie-

20 Herzégovine souhaitait une solution politique, mais cela n'est pas possible

21 avec le HVO." Est-ce que cela représente bien la situation de l'ABiH ?

22 R. C'est en tout cas ce que m'a dit Zubaca, à l'époque.

23 Q. En dernier lieu, si nous passons à trois paragraphes après, où il est

24 dit que : "Que, maintenant, l'ABiH a une route sécurisée vers Tuzla." La

25 réponse était : "Oui, les 4e, 6e, 2e et 3e Corps de l'ABiH sont maintenant

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1 reliés, et Vares est le lien essentiel. La nouvelle route vers le nord

2 n'est plus aussi importante." Est-ce que cela indique, d'après vous, que

3 Vares représentait une opération pour plusieurs corps. Ce qui signifiait

4 que cette opération a dû être extrêmement bien planifiée, et que cela était

5 vrai au niveau opérationnel et au niveau stratégique ?

6 R. Oui, puisqu'il est question des 2e et des 3e Corps.

7 Q. J'aimerais maintenant vous demander de consulter un nouveau document

8 que je vais vous transmettre. Il s'agit d'un document en date du 4 novembre

9 1993. Il s'agit d'un rapport du centre régional de Zenica. J'aimerais

10 attirer votre attention sur la page 3 de ce document, où il est dit :

11 "Evaluation HRS pour le mois de novembre 1993." Reconnaissez-vous qu'il

12 s'agit de votre propre évaluation et d'un type d'évaluation que vous

13 faisiez toutes les semaines ? Il s'agissait de faire le rapport de la

14 situation à l'époque.

15 R. Oui, tout à fait. C'est ce genre de rapport.

16 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre la page suivante, le 3e

17 paragraphe, qui est comme suit. Je cite : "Il est manifeste que la prise de

18 Vares a donné à l'ABiH un avantage stratégique considérable, et que

19 maintenant ils peuvent établir le lien entre les 2e, 3e, 4e, et 6e Corps de

20 l'ABiH qui leur permet d'avoir un front depuis Mostar jusqu'au sud à Tuzla,

21 et au-delà vers le nord. Est-ce que cela correspond à votre évaluation de

22 la situation à propos de l'opération de Vares ?

23 R. Oui.

24 Q. J'aimerais maintenant vous poser une question à propos de l'opération

25 de Vares. Est-ce que ce type de planification et ce type d'opération, est-

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1 ce que ce type d'activité quotidienne correspond au travail qui incombe à

2 un commandant de Corps ?

3 R. Oui. Un commandant de corps doit procéder à l'évaluation de ses

4 priorités stratégiques, doit présenter des recommandations à ses supérieurs

5 à propos de ce qui doit être fait, ensuite.

6 Q. Il a été dit qu'un commandant de corps, qui travaille au niveau

7 opérationnel, doit toujours avoir quatre jours d'avance, doit toujours

8 réfléchir quatre jours à l'avance. Est-ce que cela correspond à la

9 réalité ?

10 R. Oui.

11 Q. J'aimerais maintenant aborder le thème de la discipline. Etes-vous

12 d'accord avec moi pour dire que la question de la discipline est absolument

13 essentielle pour toute armée car la discipline est ce qui explique la

14 victoire ou la défaite d'une armée. Etes-vous d'accord avec cela ?

15 R. Oui.

16 Q. Lorsque nous parlons de discipline, cela signifie qu'un commandant doit

17 faire en sorte que les règles de l'armée doivent être respectées. Etes-vous

18 d'accord ?

19 R. Oui.

20 Q. En temps de guerre, toute infraction qui pourrait être secondaire en

21 temps de paix, peut avoir des conséquences considérables en temps de

22 guerre. Je vais vous donner un exemple. Par exemple, si vous quittez votre

23 poste de garde, par exemple, en temps de paix cela ne pourrait pas avoir de

24 conséquences très graves, alors qu'en temps de guerre les conséquences

25 peuvent être tout à fait désastreuses ?

Page 8283

1 R. Je suis d'accord.

2 Q. La discipline consiste également a faire en sorte que la loi est

3 respectée.

4 R. Je suis d'accord.

5 Q. Cela consiste également à faire en sorte que le droit international

6 soit respecté, que les lois de type droit commun doivent être respectées,

7 et que si les soldats commettent des délits, des mesures doivent être

8 prises ?

9 R. Oui.

10 Q. Pour ce qui est de la discipline, il s'agit de faire en sorte que votre

11 propre force soit opérationnelle et efficace. Etes-vous d'accord avec moi

12 pour dire qu'un commandant doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour

13 essayer de prévenir des infractions, pour essayer de les juguler et de

14 prendre des mesures pour assurer que les infractions ou violations seront

15 sanctionnées ?

16 R. Je suis d'accord.

17 Q. Parfois, et cela dépend du niveau du commandement, le commandant peut

18 prendre des mesures lui-même ou il peut également transférer la question à

19 des autorités judiciaires.

20 R. Oui.

21 Q. Lorsqu'une question a été réglée, lorsque des mesures ont été prises

22 soit par le commandant, soit par un commandant à un niveau subordonné, ou

23 par une institution juridique quelle qu'elle soit d'ailleurs, convenez-vous

24 avec moi que dans ce cas d'espèce le commandant s'est acquitté de ses

25 responsabilités ?

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1 R. Oui. S'il s'agit de demander un conseil aux autorités judiciaires et

2 qu'il obtient ce conseil, je suppose qu'ensuite, il prendra des mesures.

3 Q. Il est absolument essentiel que le commandant sache pertinemment quels

4 sont ses devoirs. S'il y a, comme c'est le cas, des autorités civiles qui

5 sont encore opérationnelles, il est important que ledit commandant

6 comprenne son rôle vis-à-vis de la loi, et comprenne le rôle des autorités

7 civiles ?

8 R. Je suis d'accord.

9 Q. Nous avons évoqué deux exemples. Le premier exemple correspondait au

10 travail de M. Fazlic, qui était le chef de la police civile. Il devait

11 s'occuper des délits et infractions de type droit commun ?

12 R. Oui.

13 Q. Dans votre interrogatoire principal, il a été question de la situation

14 d'un prêtre qui répond au nom de Stipan Radic. Vous pensiez que cet homme

15 était une personne honorable qui se trouvait dans une situation

16 particulièrement difficile, qui a parlé de certains problèmes relatifs à

17 l'armée. Votre réponse à la question, je cite la page 18 du compte rendu

18 d'audience, page 67, je cite : "Je pense que cela a été vrai, parce qu'il y

19 a eu un suivi assuré par les commandants bosniens. Ils ont accepté qu'il y

20 avait un problème, et invariablement, il y avait une amélioration de la

21 situation." Pouvez-vous confirmer que cela correspondait à votre point de

22 vue à l'époque, et que lorsque M. Radic a attiré l'attention des autorités

23 sur des problèmes, qu'il s'agisse d'autorités civiles ou militaires, des

24 mesures ont été prises pour essayer d'améliorer la situation ?

25 R. Oui.

Page 8285

1 Q. J'aimerais maintenant passer à la question de la situation militaire

2 telle qu'elle se présentait sur le terrain. Je suis déjà presque au bout du

3 temps qui m'est réservé, je dois accélérer le débit. J'aimerais obtenir de

4 vous une confirmation. Vous avez déjà parlé de la situation dans laquelle

5 se trouvaient le HVO et les Serbes. Je voudrais vous présenter sous forme

6 d'hypothèse quelques points qui ont eu une incidence sur l'exercice du

7 commandement par le général d'un corps d'armée. Par exemple, le fait que le

8 commandant avait une ligne de front serbe de plus de 300 kilomètres. Est-ce

9 que c'est là un facteur qui aurait une incidence énorme sur la

10 planification du commandant ?

11 R. Oui.

12 Q. Il y a la question des routes qui étaient soit barrées, bloquées, qui

13 n'étaient pas accessibles que ce soit vers Sarajevo ou au nord vers Tuzla.

14 Est-ce que c'était quelque chose qui devait préoccuper le commandant ?

15 R. Tout à fait.

16 Q. La question des réfugiés, c'était aussi un gros problème que celui-là.

17 Vous le dites au moment de l'interrogatoire principal. Vous dites qu'il y

18 avait plus de 50 000 réfugiés, ne serait-ce qu'à Zenica ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce que c'est là quelque chose qui forcément a une incidence sur le

21 travail du commandant ?

22 R. Inévitablement, c'est une grosse préoccupation pour lui.

23 Q. Il y avait un embargo sur les armes, nous en avons parlé. Est-ce que

24 cela aussi est quelque chose qui aura un effet sur la planification ? Car

25 le commandant doit toujours prévoir, anticiper. Il sait qu'il aura moins

Page 8286

1 d'armes. Il doit se demander comment répartir ses effectifs face à un

2 armement plus lourd de la partie adverse ?

3 R. Je suis d'accord.

4 Q. Si vous avez une nouvelle armée, vous avez dit que ceci vous met un peu

5 mal à l'aise lorsqu'on a une nouvelle armée qui a moins d'un an

6 d'existence. Est-ce que cela est quelque chose qui peut rendre la situation

7 encore plus difficile ?

8 R. Oui, tout à fait. Les deux parties, même s'il y avait des officiers

9 généraux qui avaient servi auparavant dans la JNA, il est inévitable que

10 les officiers plus inférieurs avaient été recrutés récemment, qu'on ne

11 connaissait pas bien leur statut, leur connaissance, ils n'étaient pas

12 aussi fiables.

13 Q. Intercalaire 4 des documents. Nous avons là une fois de plus ce rapport

14 dont j'ai déjà parlé. Page 22. A cette page, on parle du nombre de tués et

15 de blessés depuis le début de la guerre jusqu'au 21 juillet 1993. Page 23,

16 on a le total. On parle de 1 570 personnes, de soldats tués et de 6 478

17 soldats blessés. Est-ce que c'est là un facteur qui risque d'avoir une

18 incidence très lourde sur la capacité de planification d'un commandant et

19 des priorités qu'il aurait à poser ?

20 R. Oui. Lorsque vous avez des pertes aussi lourdes, c'est inévitablement

21 un facteur important au niveau de la planification.

22 Q. Revenons à une partie antérieure de ce même rapport, à la page 14 plus

23 exactement. Deuxième paragraphe, il est dit ceci : "Le commandant du corps

24 lui-même se trouvait à un niveau organique de composition des forces de 66

25 %." Est-ce que ceci rend la vie d'un commandant beaucoup plus difficile ?

Page 8287

1 R. Oui, forcément.

2 Q. Un peu plus loin sur cette page, le nombre des effectifs de ce corps se

3 trouvait à un pourcentage de 63,34 % de composition organique. Est-ce que

4 cela rend là aussi la situation d'un commandant plus difficile ?

5 R. Oui.

6 Q. S'agissant des effectifs, vous avez répondu à quelques questions au

7 moment de l'interrogatoire principal. Vous avez dit qu'il y avait beaucoup

8 plus de gens en âge de combattre du côté des Bosniens.

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que même s'il y a plus

11 d'hommes, si vous n'avez pas d'armes à leur donner, ces hommes ne sont pas

12 très utiles, et tant qu'ils ne sont pas formés, instruits, cela représente

13 un fardeau pour le commandant ?

14 R. Tout à fait. La force des Serbes, c'était au niveau de l'armement alors

15 que la force des Musulmans, c'étaient les hommes.

16 Q. En Bosnie centrale, saviez-vous que les Serbes et le HVO établissaient

17 une jonction entre eux pour lutter contre l'ABiH ?

18 R. Ce qui est certain, c'est qu'à certains endroits, c'est se qui se

19 passait, effectivement. Un exemple, lorsque les Croates sont sortis de

20 Vares vers le nord, il est clair qu'ils sont passés en Bosnie occupée par

21 des Serbes, et sont redescendus vers Kiseljak.

22 Q. Merci. Etiez-vous au courant de certains incidents où la ligne face aux

23 Serbes qui avait d'abord été occupée conjointement, ABiH plus HVO, qu'il y

24 avait eu retrait du HVO de cette ligne ce qui avait, dès lors, provoqué un

25 gros problème au niveau de la force numérique sur les lignes de front pour

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1 le commandant du 3e Corps ?

2 R. Je ne me souviens pas d'incident spécifique, mais cela a dû être le cas

3 au moment où il y a eu séparation de ces deux armées.

4 Q. Toujours à ce même document, intercalaire 4. Examinons la page 10.

5 J'aurais voulu avoir le temps de parcourir par le menu davantage de ces

6 documents, mais voyons le premier paragraphe, "problème de commandement et

7 de contrôle". Ici, le commandant Hadzihasanovic met en exergue trois

8 facteurs importants dont il a à découdre; la compétence de ses effectifs,

9 du personnel militaire, les transmissions communications et la motivation.

10 Est-ce que ce sont là trois facteurs qui rendent sa vie et l'exercice du

11 commandement plus difficile ?

12 R. Oui, ce sont trois facteurs-clés.

13 Q. Je n'ai pas le temps de me renvoyer à ces points précis. Le fait qu'il

14 soumette ces questions à son état-major supérieur, est-ce que c'est là une

15 indication du fait que pour lui ces problèmes sont des problèmes sérieux ?

16 R. Oui. Lorsqu'on parle de la compétence du personnel militaire, cela

17 cadre bien avec ce commentaire que je vous ai fourni il y a quelques

18 instants.

19 Q. Vous convenez du fait que la présence de ressortissants étrangers en

20 Bosnie centrale rend l'exercice du commandement plus difficile alors qu'en

21 moyenne, on sait que chaque jour, le général Hadzihasanovic pourrait

22 recevoir la visite de dix personnes différentes qui voulaient toutes voir

23 le commandant du corps, et qu'il devait leur répondre favorablement ?

24 R. Oui.

25 Q. Savez-vous aussi que Zenica où se trouvait cantonné l'état-major, le QG

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1 du 3e Corps était pilonné régulièrement ?

2 R. Oui.

3 Q. Intercalaire 14, je le parcours rapidement. Une question a été mise en

4 exergue par le général Hadzihasanovic, à savoir, le fait que deux

5 hélicoptères avaient été détournés par le HVO, et que pendant très

6 longtemps, ces deux hélicoptères n'étaient pas disponibles pour évacuer les

7 blessés. Est-ce que cela aussi est un facteur significatif qui intervient

8 dans la planification et les priorités établies pour le commandant ?

9 R. Oui, cela a été un coup très dur porté à l'ABiH. Nous avons essayé

10 pendant plusieurs mois d'obtenir ces deux hélicoptères.

11 Q. Dernière question soulevée par le général; c'est celle-ci : Lorsque les

12 forces adverses commettent des délits, des crimes, un général qui commande

13 ses effectifs a d'autant plus de peine à contrôler ses effectifs, parce que

14 ceux-ci cherchent à se venger ?

15 R. Oui.

16 Q. Tous ces facteurs, vous en conviendrez, ne changent rien à la

17 responsabilité du commandant ?

18 R. Effectivement.

19 Q. Néanmoins, lorsqu'il doit déterminer ses priorités et déterminer ce

20 qu'il va faire, à quel moment il va le faire, tous ces facteurs pèsent

21 lourdement dans ses décisions ?

22 R. Oui. Il faudrait supposer ces facteurs de façon très minutieuse.

23 Q. Parlons maintenant de l'exercice du commandement. Si je vous dis,

24 notamment, que le général Hadzihasanovic, comme il pensait qu'il avait 300

25 kilomètres de ligne de front, a pris l'initiative de convoquer une réunion

Page 8290

1 de tous les généraux de corps d'armée, pour proposer la création d'un corps

2 supplémentaire. Ce qui reviendrait à séparer ses zones de responsabilité en

3 deux. Est-ce que c'est le signe là d'un général responsable ?

4 R. Oui.

5 Q. Il doit commander, organiser 19 brigades. Il prend lui-même

6 l'initiative de créer des groupes opérationnels qui correspondent plus au

7 moins à des divisions afin de faciliter le contrôle qu'il voulait avoir sur

8 ses effectifs. Est-ce que c'est là un signe qui indique que c'est un

9 commandant qui essaie du mieux qu'il peut de contrôler ses effectifs ?

10 R. C'est là une démarche raisonnable.

11 Q. Si le général Hadzihasanovic a mis en place un système de carte

12 d'identité afin qu'il sache à tout moment qui se trouvait dans les rangs de

13 l'ABiH. Est-ce que cela est une bonne mesure à prendre pour contrôler ses

14 effectifs ?

15 R. Je ne savais que cela a été passé, mais je pense que c'est sans nul

16 doute une démarche raisonnable.

17 Q. Si je vous dis que le général Hadzihasanovic a mis en place un système

18 d'immatriculation des véhicules pour veiller à ce que les véhicules

19 utilisés par l'armée soient reconnaissables en tant que -- est-ce que c'est

20 là, aussi, une très bonne mesure qui est prise pour contrôler les forces

21 dont il a le commandement ?

22 R. Oui.

23 Q. Si je vous dis que le général Hadzihasanovic a délivré de nombreux

24 ordres que vous n'avez jamais vus, sans doute, car vous ne pouviez pas les

25 consulter. Dans ces ordres, il disait à ses commandants à tous les échelons

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1 de respecter la loi. Est-ce que ces là aussi une indication qui montre que

2 c'était un commandant raisonnable ?

3 R. Oui, ce serait là exercer raisonnablement son autorité.

4 Q. Si ce même général prend plusieurs mesures pour veiller à ce que les

5 commandants qui lui sont subordonnés prennent des mesures afin d'empêcher

6 de juguler les violences et des exactions, s'il prend des mesures

7 disciplinaires pour prévenir de tels actes répréhensibles, est-ce que c'est

8 le signe, là qu'on a un commandant responsable ?

9 R. Oui.

10 Q. Si je vous soumets l'hypothèse suivante, à savoir que le général

11 Hadzihasanovic a veillé au bon fonctionnement du système judiciaire en

12 autorisant ses commandants à établir des tribunaux militaires spéciaux, en

13 leur donnant même le pouvoir de décréter la mort en cas d'infractions de

14 tel ou tel effectif, est-ce que ceci montre que c'est un commandant qui

15 veille au respect de la loi ?

16 R. Oui, c'est ce que je dirais.

17 Q. Si le général Hadzihasanovic pensait que le système judiciaire ne

18 fonctionnait pas suffisamment bien, ce qui lui posait des problèmes au plan

19 opérationnel, s'il s'en est plaint à ses supérieurs, il a demandé à son

20 état-major supérieur : "De faire quelque chose à propos du système

21 judiciaire parce que cela lui créait des problèmes sur le terrain." Est-ce

22 que c'est là le signe qu'on a affaire à un commandant raisonnable ?

23 R. Oui, c'est tout à fait raisonnable. Cela fait sens.

24 Q. Si le général, en dépit de toutes ces conditions dont nous avons

25 parlées depuis le début de mon contre-interrogatoire, si disais-je, un

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1 général avait réussi à remplir, à accomplir sa mission, s'il avait pris un

2 corps en main qui n'était pas existant, s'il l'avait établi, si vous voyez

3 la différence entre juin et novembre au moment où vous étiez là, si on voit

4 l'amélioration qui est intervenue dans cette intervalle, si on voit la

5 discipline qui a été établie dans ce corps, est-ce que c'est là la marque

6 du succès d'un bon commandant ?

7 R. Oui.

8 Q. Si, dans une telle situation, le commandant a pris les mesures mêmes

9 pour essayer d'instruire, de former ses effectifs, de créer un centre

10 d'instruction, en dépit des conditions de guerre pour veiller à ce que ses

11 effectifs soient formés, est-ce que cela montre que ce commandant se

12 préoccupe non seulement de la discipline, mais du bon accomplissement de sa

13 mission ?

14 R. Vu ce dont nous avons déjà parlé, je pense que c'est là, effectivement,

15 quelque chose de très important et de tout à fait correct.

16 Q. Hier, j'ai vu un document dans lequel vous, en personne, vous avez

17 envoyé, je ne l'ai pas sur moi ce document, mais je suis sûr que vous vous

18 en souvenez. Vous avez envoyé ce document en suivant la voie hiérarchique

19 du Royaume-Uni. Vous dites que ce document : "Ne s'applique pas à moi parce

20 que je suis un général à la retraite, mais il y a beaucoup d'officiers

21 militaires qui viennent sur ce théâtre d'opérations s'attendant à une

22 promotion, à une récompense spéciale s'il s'en tirent bien." Vous mettiez

23 ceci en lumière. Vous le disiez à votre ex-voie hiérarchique pour dire :

24 "Ecoutez, nous avons des gens sur le terrain. Il faut les récompenser, et

25 il faut qu'ils soient vraiment récompensés par des rapports s'ils

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1 s'occupent bien de leurs charges."

2 R. Oui, je me souviens avoir écrit un rapport de ce goût-là.

3 Q. Si je vous dis, Général, que, dans ce rapport, ce rapport que nous

4 avons vu, le général Hadzihasanovic demandait de meilleures soldes pour ses

5 soldats, de meilleures conditions, de meilleures récompenses en dépit des

6 conditions de guerre, est-ce cela montre que c'est un commandant qui

7 s'occupe et se préoccupe de ses soldats ?

8 R. Je pense que c'est une facette du commandement qui est tout à fait

9 importante.

10 Q. Un peu plus avant, nous l'avons vu, une des options auxquelles il

11 pouvait avoir recours face aux Moudjahiddines, c'était le recours à la

12 force. Apparemment, il a décidé de ne pas le faire.

13 R. Oui.

14 Q. Seriez-vous d'accord pour dire que si nous voulions contester la

15 décision d'alors qu'il a prise aujourd'hui, celui qui voudrait contester

16 une telle décision devra avoir des renseignements sur les moyens dont il

17 disposait ?

18 R. Oui.

19 Q. Des renseignements sur la question de savoir qui étaient les

20 Moudjahiddines, combien ils étaient, où ils se trouvaient, les armes qu'ils

21 avaient, les moyens qu'ils avaient, les techniques qu'ils

22 utilisaient. C'étaient là des éléments importants à avoir, de recourir à la

23 force contre des forces hostiles ?

24 R. Oui, parce qu'en puissance, ils étaient dangereux.

25 Q. Il serait aussi important de bien appréhender toute la situation

Page 8294

1 opérationnelle. Je veux dire par là, savoir exactement que, s'il retire une

2 compagnie de la ligne de front, pour régler ce problème-là, si une

3 compagnie suffit pour le faire, il doit savoir les conséquences que ceci

4 aura, parce qu'on pourra peut-être faire une percée sur cette ligne et il

5 pourrait perdre du territoire ? Si on contestait aujourd'hui sa décision,

6 est-ce qu'il faudrait avoir ce type de renseignement ?

7 R. Oui. Il faudrait savoir clairement à qui on a affaire, en face.

8 Q. Est-ce qu'il ne serait pas nécessaire si on veut contester une telle

9 décision de comprendre s'il avait l'aval, l'autorisation de son QG

10 supérieur avant d'ouvrir un troisième front ?

11 R. Oui. Au départ, on a l'impression que ses supérieurs recommandaient ce

12 genre d'action. S'il avait décidé d'exécuter cette idée-là, il devait

13 demander un retour à son QG supérieur s'il était d'accord.

14 Q. Examinons maintenant l'intercalaire 3. On y trouve un document du 7

15 octobre, époque où vous n'étiez pas encore chef du centre régional, mais

16 vous aviez déjà été nommé à ce poste de chef de mission. Vous avez

17 rencontré le général Hadzihasanovic et M. Merdan. Rapport de trois pages

18 qui évoque toute sorte de questions, questions que vous avez abordées avec

19 le général Hadzihasanovic. Est-ce que vous vous souvenez de cette réunion ?

20 R. Oui.

21 Q. Paragraphe 10, voici ce qui est dit : "Hadzihasanovic est manifestement

22 un homme intelligent, aux manières calmes, très clair, poli, mais tout à

23 fait convaincu de ce qu'il croit. Il indique clairement que les éléments de

24 l'ABiH avaient la volonté et la capacité de poursuivre le combat pour

25 arriver à ses objectifs. L'argent n'est pas un problème, apparemment,

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1 puisqu'il reçoit des dons de l'étranger," dites-vous. Nous revenons au

2 début du document, là, où il dit que cet argent ne vient pas seulement de

3 sources islamiques, que s'il reflète l'avis de M. Izetbegovic, il se peut

4 bien que la paix ne soit pas au détour du chemin.

5 Est-ce là une évaluation, une appréciation que vous maintenez ? C'était un

6 homme dur mais tout à fait professionnel. Il était très clair, très direct

7 dans ses entretiens avec vous ? C'est ce que vous avez dit au moment de

8 l'interrogatoire principal.

9 R. C'est ce que je pensais à l'époque. Depuis, rien ne s'est pas passé qui

10 me pousse à changer d'avis.

11 Q. Vous dites qu'il était clair qu'il disposait de l'autorité. Je suppose

12 que vous voulez dire par là qu'il avait le commandement de la maîtrise du

13 corps d'armée, et qu'il faisait l'impossible pour que ce corps fonctionne ?

14 R. C'est bien ce que je pensais.

15 Q. Vous avez dû avoir l'impression qu'il était tout à fait au courant de

16 ce qui se passait dans sa zone. Qu'est-ce que cela veut dire, "être bien au

17 courant de ce qui se passe", qu'il sait dans quel type de guerre, de

18 scénario il se trouve, et il sait quelle sera sa prochaine action, décision

19 ?

20 R. Oui.

21 Q. Cela ne veut pas dire nécessairement qu'il était au courant de tel ou

22 tel incident susceptible de se passer ?

23 R. C'est exact.

24 Q. Si nous poursuivons, nous voyons que vous dites qu'il était très clair

25 et direct. Le fait qu'il a donné des réponses très directes, qu'est-ce que

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1 cela veut dire ? Est-ce qu'on peut comprendre cela comme ceci ? Quand il

2 vous donnait une réponse, vous saviez qu'il ne vous donnait pas des

3 informations erronées et vous saviez qu'il vous disait la vérité ?

4 R. J'ai, en tout cas, cru ce qu'il me disait, effectivement.

5 Q. Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que même si vous

6 n'aviez pas vérifié ce qu'il faisait au fil des événements, il s'est

7 toujours avéré que, ce qu'il vous avait dit, était bien ce qui s'était

8 passé ?

9 R. Oui.

10 Q. J'essaie de voir comment vous avez rencontré cet homme, le général

11 Hadzihasanovic, sur le terrain en 1993. Je vous ai parlé des mesures

12 prises, en matière de discipline et aussi en matière d'instruction de

13 communication, d'information de ses supérieurs, d'information des

14 représentants internationaux avec qui il avait affaire. Vu tout ceci, je

15 vais vous demander votre avis sur la personnalité, le caractère du général

16 Hadzihasanovic. Vu ce dont nous avons parlé aujourd'hui, et vu ce que vous

17 savez, ce que vous avez vu de cet homme en 1993, est-ce un commandant qui

18 ne prendrait pas de mesures pour sanctionner quelqu'un si ces mesures lui

19 sont possibles ?

20 R. Ce qui est certain c'est qu'à mes yeux, c'était un bon général, ce qui

21 forcément implique tout ce que vous venez de dire.

22 Q. Merci beaucoup. Je voudrais saisir cette l'occasion pour rappeler que

23 demain vous allez avoir 69 ans, et je vous souhaite un bon anniversaire. Je

24 l'ai vu grâce à l'examen des documents.

25 R. Merci.

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1 M. BOURGON : Ceci met fin au contre-interrogatoire de la part du général

2 Hadzihasanovic, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les autres Défenseurs.

4 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Contre-interrogatoire par M. Dixon :

6 Q. [interprétation] Quelques questions seulement au nom de M. Kubura. Au

7 moment de l'interrogatoire principal, vous avez dit que vous étiez allé à

8 Vares le 4 novembre 1993 en compagnie de M. William Stutt ?

9 R. Oui.

10 Q. A votre arrivée à Vares, vous avez vu que l'ABiH contrôlait la ville de

11 Vares, le HVO s'étant retiré sans résistance ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous avez ajouté que vous aviez constaté qu'il y avait des dégâts

14 provoqués en ville, des fenêtres brisées, des portes brisées elles aussi,

15 mais vous n'avez pas été à même de dire si ces dommages, ces dégâts avaient

16 été provoqués par l'ABiH qui se trouvait là, ou par les forces du HVO qui

17 s'étaient retirées ?

18 R. Exact.

19 Q. Dans votre déposition vous avez dit avoir reconnu la 7e Brigade au

20 moment où vous vous approchiez de Vares. Il y avait des effectifs de la 7e

21 Brigade aux abords, avez-vous dit de Vares ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous avez dit les avoir reconnus sans doute parce qu'ils abhorraient

24 des insignes à l'épaule qui étaient propres à la 7e Brigade ?

25 R. Je ne sais plus trop comment nous les avons identifiés, mais nous les

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1 avons reconnu comme étant des membres de la 7e Brigade.

2 Q. Peut-être à cause des insignes qu'ils portaient --

3 R. Sans doute. C'est fort probable.

4 Q. Vous êtes entré dans la ville de Vares, vous avez dit à ce moment-là

5 que vous n'aviez pas été en mesure de reconnaître et d'identifier les

6 Unités de l'ABiH qui étaient dans la ville même ?

7 R. Exact.

8 Q. Vous avez vu plusieurs soldats en ville, sans pour autant reconnaître

9 leur appartenance ?

10 R. Non, il y avait beaucoup de tirs, il n'était pas possible de s'arrêter

11 et d'essayer de reconnaître.

12 Q. Vous saviez que c'était une opération impliquant plusieurs corps, qu'il

13 y avait plusieurs unités de plusieurs corps qui participaient à cette

14 opération, qui est visée à s'emparer de Vares ?

15 R. Oui.

16 Q. Vous avez vu des soldats au centre-ville, est-ce qu'on pourrait dire,

17 sans se tromper, qu'ils venaient sans doute de plusieurs de ces unités qui

18 avaient participé à l'opération visant à contrôler Vares ?

19 R. Je n'aurais pas pu dire à quelles unités ces soldats appartenaient.

20 Q. Il est possible pensez-vous qu'ils appartenaient aux différentes unités

21 qui avaient participé à cette opération ?

22 R. Oui, c'est tout à fait possible.

23 M. DIXON : [interprétation] Merci. Je n'ai pas d'autres questions à vous

24 poser.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

Page 8299

1 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous avons à

2 peine quelques questions à poser au témoin.

3 Nouvel interrogatoire par M. Mundis :

4 Q. [interprétation] Aux fins du dossier, je tiens à préciser que nous ne

5 nous sommes jamais rencontrés. Je m'appelle Daryl Mundis. Je suis un des

6 substituts commis à ce procès. En fait, M. Withopf part aujourd'hui, c'est

7 le dernier jour de travail pour lui à ce Tribunal. C'est lui que vous avez

8 rencontré.

9 Je n'aurais que quelques questions à vous poser. L'avocat de M.

10 Hadzihasanovic vous a posé quelques questions, et en réponse vous avez dit

11 qu'à votre avis le 3e Corps n'avait pas un contrôle de facto des

12 Moudjahiddines.

13 R. C'était mon avis, effectivement.

14 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je demander l'aide

15 de Mme l'Huissière peut-être pour déplacer le rétroprojecteur car j'ai du

16 mal à voir le témoin ?

17 Q. A combien de reprises avez-vous, effectivement, observé des

18 Moudjahiddines ou des combattants étrangers en Bosnie centrale ?

19 R. J'en ai vu très peu à Zenica même. De temps à autre, nous en avons vu

20 l'un ou l'autre quand on se déplaçait surtout dans la région montagneuse.

21 Ce que je n'ai pas souvent fait sur la route de montagne allant à Novi

22 Travnik. Ils n'étaient pas très visibles.

23 Q. Est-ce que vous aviez des renseignements sur d'éventuelles actions

24 militaires où il y aurait eu intervention conjointe du 3e Corps et des

25 Moudjahiddines.

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1 R. Très peu de renseignements. C'est pour cela que je ne cessais de

2 demander des renseignements à propos des Moudjahiddines. On ne savait que

3 très peu de choses à leur propos, et à propos de leurs activités.

4 Q. Est-ce que vous seriez du tout surpris s'il y avait d'autres personnes

5 qui étaient venues dire ici que les Moudjahiddines étaient le fer de lance

6 des opérations menées par les Unités du 3e Corps ?

7 R. Cela m'intéresserait fortement. Il m'est impossible de penser à un seul

8 exemple, même si bien sûr Vares pourrait en être un, en tout cas ils

9 étaient aux abords de Vares, effectivement.

10 Q. En votre qualité d'ex commandant des "Royal Marines", de cette

11 infanterie de la marine britannique, pouvez-vous nous expliquer quelque peu

12 la nécessité de commander, de contrôler et ce, s'agissant de la première

13 des unités devant sortir sur le terrain, à servir de fer de lance dans

14 l'opération ?

15 R. Le commandement et le contrôle sont d'une importance absolument

16 fondamentale, plus l'opération est compliquée, plus il est important

17 d'avoir un bon commandement et un contrôle, ainsi que des communications

18 appropriées.

19 Q. Pour être concret, Monsieur, au sujet du premier soldat ou des premiers

20 soldats à avoir cette Unité de Reconnaissance, qui est envoyée vers

21 quelques villages, quelle est l'importance, dans ce cas-là, de faire en

22 sorte que le commandement exerce un certain degré de contrôle à l'égard de

23 ces soldats ?

24 R. L'importance est cruciale parce qu'il doit avoir des importations

25 [comme interprété] en retour pour ce qui est du déroulement de l'opération

Page 8301

1 en cours.

2 Q. Passons maintenant à autre chose, à savoir, la question de discipline.

3 Pouvez-vous nous dire quelque chose au sujet de la relation qui existe

4 entre la discipline et l'importance du rôle du commandant pour ce qui est

5 de la prévention de crime ou voir au cas où ces crimes auraient été commis

6 et où il aurait eu vent de ces derniers, du sanctionnement de ceux-ci, et

7 pouvez-vous nous dire quelle est la relation ?

8 R. Je crois qu'il y a une interconnexion certaine. Le commandant doit

9 avoir la certitude que ses officiers se comportent de façon correcte, et ne

10 font aucune des choses qui ne sont pas permises. Au cas où il découvrirait

11 le contraire, il importe clairement qu'il exerce ses fonctions

12 disciplinaires, de la façon la plus efficace possible.

13 Q. Partant de cette réponse, Monsieur, cela revient à dire que le maintien

14 de l'ordre et de la discipline constitue une composante très importante

15 pour ce qui est d'un commandant militaire et des responsabilités qui sont

16 les siennes ?

17 R. Cela est d'une importance fondamentale, en effet.

18 Q. En réalité, partant de mon expérience personnelle dans l'armée, nous

19 nous sommes référés à l'ordre et à la discipline en parlant GOD, cela veut

20 dire Dieu en anglais. Est-ce que vous le saviez ?

21 R. C'est intéressant, mais je n'étais pas au courant.

22 Q. Mes collègues, au niveau de la Défense, ont formulé plusieurs scénarios

23 différents concernant les facteurs qui pouvaient caractériser la situation

24 à laquelle devait faire face le général Hadzihasanovic, y compris la

25 longueur de la ligne de front, les difficultés avec les réfugiés, les

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1 difficultés dues au blocages des routes, et cetera. Partant de vos

2 réponses, il s'avérait qu'il s'était trouvé dans une situation plutôt

3 difficile, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, oui.

5 Q. Quelle est l'influence de ces facteurs, pour ce qui est de ses

6 responsabilités et de l'exercice de ses fonctions, au niveau de la

7 prévention des crimes ou du sanctionnement [sic] des crimes éventuellement

8 punis ?

9 R. De façon très éclairée, il s'agissait d'une période des plus pénibles

10 pour lui. En aucun cas, cela ne l'a entravé pour ce qui est de l'exercice

11 de ses fonctions de commandement, notamment, du point de vue de la

12 discipline.

13 Q. Monsieur, on vous a montré toute une série de documents aujourd'hui,

14 ainsi que la transcription d'une conversation téléphonique interceptée. Je

15 suppose qu'en vertu de réponses que vous avez apportées, la teneur de ces

16 documents est une nouveauté pour vous ?

17 R. Oui. J'aurais préféré les avoir, il y a une dizaine d'années.

18 Q. Compte tenu de cette réponse, est-ce le général Hadzihasanovic, à un

19 moment donné des conversations, vous aurait oui ou non communiqué quelles

20 étaient les mesures qu'il entreprenait au niveau des contacts avec les

21 commandements supérieurs et au sujet des informations contenues dans ces

22 documents ?

23 R. Non.

24 Q. Il vous a été montré un document où il y a le bloc signature général

25 Hadzihasanovic, mais sans sa signature. Vous en souvenez-vous ?

Page 8303

1 R. Oui.

2 Q. Partant de votre connaissance et de vos expériences, savez-vous nous

3 dire quoi que ce soit au sujet d'une situation quelconque où des unités

4 militaires se serviraient de moyens de transmission sans qu'il y ait

5 signature dessus ?

6 R. Je ne suis pas du tout familiarisé avec ce segment, à moins

7 qu'aujourd'hui on puisse mettre la signature sur un e-mail, mais une lettre

8 normale doit certainement porter une signature d'apposée.

9 Q. Il doit y avoir des types de documents militaires qui ne disposeraient

10 pas de signatures, à savoir, les documents transmis électroniquement ?

11 R. Oui, en effet.

12 Q. Par exemple, les documents de la MCCE, les rapports que vous envoyez,

13 ces rapports ne portaient pas de signatures ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Une fois de plus, partant des nécessités militaires, à savoir, des

16 systèmes de communication militaire, il ait des systèmes où les signatures

17 n'apparaissent pas, n'est-ce pas ?

18 R. En effet.

19 Q. Je pense, Sir Martin, que vous avez répondu à toutes les questions que

20 j'avais à poser. Je vous remercie.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Sir Martin, j'aurais quelques questions à vous

22 poser.

23 Questions de la Cour :

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous voulez, je vais vous poser une question sur

25 le thème du contrôle. An plusieurs reprises vous avez, répondant à des

Page 8304

1 questions, évoqué la question des Moudjahiddines qui étaient sous le

2 contrôle ou hors contrôle. En tant que militaire et officier de très haut

3 rang pour -- vous pouvez-vous définir "le contrôle" lorsqu'on exerce un

4 commandement dans une zone géographique, ce contrôle comment vous le

5 définiriez ?

6 R. Je dirais que les éléments des forces dans votre secteur en train de

7 réaliser des ordres de votre part, et que vous êtes la personne qui est

8 censée savoir exactement ce qu'ils font, à savoir qu'ils ne font rien

9 d'inacceptable à vos yeux.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Selon un militaire, le contrôle dans une zone

11 géographique, oui, dans une période où l'état de guerre a été déclaré, est-

12 ce que ce contrôle s'effectue également sur des entités civiles,

13 militaires, paramilitaires et jusqu'où, pour vous, ce contrôle peut

14 aller et ce contrôle s'exerce ?

15 R. Je pense que, dans une situation de guerre, il est inévitable de voir

16 certains changements de la réglementation. Les commandants militaires,

17 partant des pouvoirs qui leur sont attribués, peuvent déterminer ce que

18 doivent et ne doivent pas faire les civils, bien sûr, dans le cadre de

19 certains paramètres définis.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense a produit un document sur la mission que

21 vous aviez missionnée [sic] par la Communauté européenne. Cette mission,

22 qui est définie au document DH188, envisage trois rôles : la recherche

23 d'une solution de paix à long terme, le respect des droits de l'homme et la

24 règle de droit.

25 Est-ce que vous souscrivez à cette mission qui avait trois axes, l'axe

Page 8305

1 politique, droit de l'homme et la règle de droit. Est-ce que c'est bien la

2 mission qui vous était impartie sur le terrain ?

3 R. Oui, Monsieur le Président. Exception faite, enfin j'entends que ce

4 sont des principes fondamentaux en vertu desquels nous étions appelés à

5 opérer. A notre niveau à nous, nous étions plus censés prendre en

6 considération des pas pratiques qu'il fallait faire sur le terrain, mais

7 c'était certainement les principes fondamentaux.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans les cas pratiques, vous en avez eu un

9 individuel à traiter, qui était l'enlèvement de M. Popovic puisque nous

10 avons d'ailleurs, dans les pièces communiquées par la Défense, la lettre

11 que vous avez envoyée à Mme Popovic, où vous dites que le général Alagic

12 vous a donné toute assurance qu'il ferait le nécessaire.

13 Est-ce que selon vous, l'enlèvement d'un civil entre dans le champ de la

14 mission que vous aviez, qui était celle du respect des droits de l'homme ?

15 R. Oui. Cela ferait certainement partie de ce qui constituait nos

16 responsabilités.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la mesure où vous saviez que quelqu'un avait

18 été enlevé par un groupe inconnu ou connu et que vous étiez saisi par une

19 victime, est-ce que vous vous êtes préoccupé par la suite du sort de Sir

20 Popovic ? Est-ce que vous en étiez saisi ? Est-ce que le fait de dire que

21 le général Alagic s'en occupait, est-ce que moralement cela vous

22 déchargeait de votre mission ?

23 R. Non, Monsieur le Président, mais c'est une chose où j'ai, notamment,

24 insisté sur une réponse jusqu'au dernier moment, jusqu'à mon départ de

25 Zenica pour Mostar en avril. Mais, malheureusement, je n'ai jamais obtenu

Page 8306

1 la réponse. Je n'ai fait qu'apprendre par la suite ce qui était arrivé au

2 dénommé Popovic.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez quitté pour Mostar, voyant que rien

4 n'avançait, qu'il n'y avait pas de solution. N'y avait-il pas dans l'armée,

5 l'armée hiérarchisée, il y au-dessus du général Haladic, il y avait une

6 autre autorité ? Est-ce que n'importait pas votre mission à ce moment-là

7 d'évoquer cette situation au plus haut niveau, voir au niveau politique,

8 car vous semblez nous indiquer que la personne était sous le contrôle d'une

9 entité qu'on ne contrôlait pas ? Est-ce qu'à ce moment-là il ne fallait pas

10 aller beaucoup plus loin pour essayer de trouver une solution pour cette

11 famille dont un membre a été enlevé ?

12 R. Oui, Monsieur le Président. Bien entendu, la situation en Bosnie

13 centrale avait été telle qu'il n'y avait pas d'autorité politique bosnienne

14 à disposer des mêmes autorités ou des mêmes attributions que cela est le

15 cas des autorités militaires. J'espère que j'ai été clair en répondant.

16 Pour ce qui est des personnalité-clés en Bosnie centrale, du côté des

17 Bosniens, il y avait, notamment, ces commandants bosniens. S'ils ne

18 pouvaient aboutir à ce que je leur demandais de faire, transférer cela vers

19 le segment politique en Bosnie centrale, à savoir, vers le président du SDA

20 de Zenica, à mon avis, cela ne nous amènerait à aucun résultat.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous semblez nous dire que l'autorité compétente

22 n'était pas tant l'autorité politique que les commandants locaux qui

23 devaient disposer des pleins pouvoirs. C'est le sens de votre réponse ?

24 R. Oui, Monsieur le Président. Comme je l'ai déjà dit, en Bosnie, l'armée

25 et les hommes politiques étaient inextricablement liés les uns aux autres,

Page 8307

1 enchevêtrés. En Bosnie centrale, il était clair que les commandants

2 militaires du côté bosnien étaient, en principe, les jeunes gens qui

3 avaient le mot principal à dire.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez perçu que le général Alagic faisait

5 ce qu'il pouvait, que manifestement cela ne relevait pas de son niveau,

6 pourquoi n'avez-vous pas éprouvé le besoin d'aller évoquer ce problème soit

7 auprès du commandant du 3e Corps, soit via M. l'Ambassadeur Thébault auprès

8 du commandement suprême ?

9 R. Certes, M. l'Ambassadeur Thébault, à l'époque, était déjà parti, parce

10 que c'était moi qui me trouvais à la tête du centre régional. J'ai investi

11 mes espoirs en la personne du commandant du

12 3e Corps, en espérant qu'il aboutirait au relâchement de Popovic parce

13 qu'il n'y avait personne d'autre que j'avais estimé capable de le faire.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Au moment où vous quittez pour aller à Mostar, qui

15 était le commandant du 3e Corps, à votre connaissance ?

16 R. Avant que je quitte Mostar, le commandant du 3e Corps était devenu le

17 général Mahmoud, dont le nom a fait surface un peu plus tôt dans le courant

18 du contre-interrogatoire.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez eu aucun contact avec le général

20 Mahmuljin ?

21 R. Je l'ai rencontré avant mon départ. Une fois revenu à Mostar, j'étais

22 censé travailler dans l'administration de l'Union européenne pour Mostar.

23 Ce qui fait que j'ai été complètement coupé de la Mission d'observation de

24 la Communauté européenne. C'est pourquoi j'ai confié à mon successeur les

25 questions en suspens et les mesures pour apporter les solutions à celles-

Page 8308

1 ci.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie.

3 Est-ce que les Défenseurs, les Juges, ils n'ont plus de questions à poser ?

4 Est-ce qu'il y a des questions supplémentaires ?

5 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Quelques questions rapides.

6 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Bourgon :

7 Q. [interprétation] Monsieur, le président de la Chambre vous a posé des

8 questions concernant ces attributions et les attributions du commandant

9 militaire. Je voudrais présenter ce qui suit : au cas où le commandant dans

10 sa zone, zone où il exerce le contrôle, dans un cas où vous vous trouvez

11 dans une zone occupée, le commandant n'est pas seulement responsable des

12 militaires placés sous ses ordres, mais aussi de tous les aspects de la vie

13 civile, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Par exemple, si nous nous penchons sur ce qui se passe en Irak de nos

16 jours, certaines personnes ont dit quoique cela a été remis en question, il

17 a été dit que les Etats-Unis d'Amérique sont en train d'occuper l'Irak.

18 Est-ce que cela correspond à votre opinion ?

19 R. C'est l'opinion qui est exposée, en effet.

20 Q. Dans ce cas-là, le commandant militaire a des autorités qui vont au-

21 delà des forces militaires, et cela englobe également le maintien de

22 l'ordre civil ?

23 R. Oui. Si nous sommes en train de parler de Bosnie, je pense que nous

24 parlons encore de Bosnie, c'est le cas.

25 Q. Non, non. Nous sommes en train de parler de l'Irak. Si l'Irak est en

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1 situation d'occupation militaire comme certaines personnes l'affirment,

2 l'autorité du commandant militaire va au-delà de la responsabilité qu'il a

3 à l'égard de ses effectifs militaires ?

4 R. Oui, c'est la situation de fait.

5 Q. Dans la situation qui avait prévalu en Bosnie, les autorités civiles

6 étaient en train de fonctionner. La police civile était encore en train de

7 fonctionner.

8 R. Oui.

9 Q. Pouvez-vous nous confirmer que les services civils chargés des urgences

10 étaient encore au niveau opérationnel, étaient encore en état de

11 fonctionnement ?

12 R. Vous parlez des urgences civiles ?

13 Q. Oui, la protection civile.

14 R. C'est la défense civile.

15 Q. La protection civile était également en état de fonctionnement.

16 R. Il y avait certainement des éléments de l'infrastructure civile qui

17 fonctionnait encore dans une mesure plus ou moins grande.

18 Q. Le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine était encore un gouvernement

19 qui exerçait légitimement ses fonctions ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que vous comprenez le fait que l'ABiH était en train de se

22 battre sur son propre territoire ? Est-ce c'est exact ?

23 R. Oui.

24 Q. Ils n'étaient pas dans une situation d'occupation d'un territoire à

25 autrui ?

Page 8310

1 R. Non.

2 Q. Dans un scénario de ce type, si le commandant n'est pas en situation

3 d'occupation, il n'est pas la force d'occupation, qu'est-ce qui définit ses

4 autorités ? Est-ce que c'est placé en fonction de la loi ?

5 R. Oui.

6 Q. Si nous nous penchons sur les aspects de droit, est-ce qu'il a des

7 autorités ou une autorité qui va au-delà des effectifs militaires ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Passons à la situation que vous aviez, par exemple, l'observateur de la

10 MCCE. Le nom de votre mission était Mission d'observation de la Communauté

11 européenne. Partant de ce nom, pouvons-nous tirer la conclusion au terme de

12 laquelle les objectifs généraux de celle-ci, outre la promotion de son

13 action, étaient ceux, notamment, de suivre la situation et d'en rapporter à

14 Zagreb ?

15 R. Absolument. Nous étions là pour observer et pour présenter des

16 rapports.

17 Q. Vous n'étiez pas là-bas pour conduire des investigations ou des

18 activités de police dans le secteur ?

19 R. Non.

20 Q. Etiez-vous là-bas pour résoudre les problèmes ?

21 R. Là où nous pouvions le faire, oui, nous le faisions, notamment, sur le

22 plan humanitaire. Nous n'avions pas autorité en nous rendant possible les

23 arrestations de personnes. Nous pouvions exercer des pressions pour essayer

24 d'aboutir à des résultats, notamment, dans le secteur humanitaire.

25 Q. Pour ce qui est des affaires du type Popovic, qui me semble constituer

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1 un cas tout à fait à part, toujours est-il qu'il y a eu bon nombre

2 d'incidents dont vous avez eu vent de la part de vos équipes et où il y a

3 eu différentes violations enfreintes à la loi, et cela a été rapporté à

4 vous au quotidien. Est-ce que cela est exact ?

5 R. Oui. Il y a un très grand nombre d'incidents qui nous ont été

6 rapportés, en effet.

7 Q. Dans certains cas, il était plus facile pour vous de vous servir de vos

8 bons offices ou de pressions de votre part pour aboutir à une solution,

9 mais cela n'était pas votre rôle premier.

10 R. C'est tout à fait exact.

11 Q. Lorsque vous rédigiez des rapports au sujet d'incidents tel que celui

12 de M. Popovic et lorsque vous rédigiez des rapports en direction de Zagreb,

13 le reste du monde venait à connaître ce qui se passait ?

14 R. Exact.

15 Q. Si les hommes politiques voulaient, souhaitaient accomplir quelque

16 chose encore, en sus du mandat qui avait été le vôtre. Il y avait bon

17 nombre de choses que l'on pouvait encore faire.

18 R. Oui. Peut-être pourrais-je être plus clair et étoffer mon propos. Si

19 vous dites que tous les hommes politiques étaient au courant du cas

20 Popovic, nous n'étions pas en position de dire au QG de Zagreb ce qu'eux

21 allaient mettre dans leur rapport qui était dirigé vers les capitales de

22 l'Europe. Nous n'étions jamais au courant des rapports finaux qui sortaient

23 de Zagreb.

24 Q. Merci, Monsieur. Une fois le rapport arrivé à Zagreb, la mission qui a

25 découlé de la volonté conjointe de différents états, a fait que ces états

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1 ont envoyé des personnes pour accomplir des accords, des missions ou des

2 opérations de la MCEE. Ils venaient à être au courant de la situation. Dans

3 leur rapport, ils pouvaient recommander des actions ou ne pas le faire ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Une dernière question concernant le volet contrôle. Vous avez répondu à

6 l'une des questions posées par le Juge qui préside les travaux de la

7 Chambre. Vous avez dit que le contrôle consistait à donner des ordres, ceux

8 qui exerçaient le contrôle pouvaient donner des ordres. Vous savez que vos

9 ordres allaient être exécutés.

10 R. Oui.

11 Q. Sans vouloir rentrer dans trop de détails techniques, seriez-vous

12 d'accord avec moi pour dire que le commandant d'une zone de responsabilité,

13 où il y a des effectifs qui ne sont pas placés sous son contrôle, est une

14 chose qui peut survenir ?

15 R. Oui.

16 Q. Si je vous donne exemple. Vous êtes commandant de brigade, et vous avez

17 une zone de responsabilité, il se peut que dans votre secteur, le

18 commandant du corps déploie des effectifs d'artillerie. Vous avez toutes

19 les chances d'être informé parce que vous souhaitez certainement savoir qui

20 se trouve sur votre terrain, mais vous n'allez certainement pas exercer de

21 contrôle à l'égard de cette Division d'artillerie qui est déployée dans

22 votre zone de responsabilité.

23 R. Non. En votre qualité de commandant, vous pouvez insister pour obtenir

24 des informations au sujet des autres effectifs déployés dans votre zone de

25 responsabilité, et sur ce que font ces effectifs.

Page 8313

1 Q. Si ces forces sont, par exemple, installées dans un secteur où vous

2 n'avez pas de contrôle, où il y a d'autres scénarios où vous n'auriez pas

3 de contrôle sur les effectifs qui se trouvent dans votre zone de

4 responsabilité ?

5 R. Oui, cela peut arriver. Vous devez savoir ce qui se passe, sinon, vous

6 ne pouvez pas exercer de fonctions de commandement à l'égard de la zone de

7 responsabilité qui vous est confiée.

8 Q. Merci.

9 M. BOURGON : Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le Président. Merci.

10 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous n'avons pas

11 de questions complémentaires.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Juste quelques

14 questions suite à celles qui ont été posées par les Juges.

15 Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Mundis :

16 Q. [interprétation] Lorsque vous nous avez dit que, partant de votre

17 expérience, les autorités militaires ont exercé le pouvoir en Bosnie

18 centrale et non pas les autorités politique. Est-ce que vous parliez là

19 d'une situation de jure ou de facto ?

20 R. Je me référais, notamment, à une situation de facto.

21 Q. Qu'est-ce qui vous a fait arriver à cette conclusion ?

22 R. Par exemple, du côté croate, si je voulais contacter l'homme numéro 1,

23 le leader politique, je n'allais pas voir le leader militaire, j'allais

24 voir le leader politique, j'allais voir Dario Kordic. C'était un fait. Du

25 côté bosnien, dans le même cas, dans la même situation, j'allais voir le

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1 commandant du 3e Corps, parce que l'on savait, très peu de temps après, qui

2 était le patron.

3 Q. Merci beaucoup, Monsieur.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Sir Martin, votre audition vient de se terminer.

5 Nous vous remercions d'être venu à plusieurs reprises pour témoigner dans

6 la mesure où vous aviez été appelé comme un témoin de l'Accusation. La

7 Chambre vous remercie de la contribution que vous avez apportée à la

8 manifestation de la vérité. Nous vous souhaitons un bon retour dans votre

9 pays, et une bonne continuation dans vos activités dont la Chambre espère

10 qu'elles sont nombreuses, variées et divertissantes. Je vous remercie. Je

11 vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner à la

12 porte de la salle d'audience.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Grand merci, Monsieur le Président.

14 [Le témoin se retire]

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, pouvez-vous nous présenter la

16 semaine à venir qui débutera mardi.

17 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons donné à la

18 Chambre ainsi qu'à la Défense une lettre avec l'ordre de comparution des

19 témoins. Mardi à 14 heures 15, nous aurons

20 M. Junhov, qui sera suivi des deux témoins pour lesquels la Chambre a

21 indiqué que leur témoignage se fera par liaison satellite. Permettez-moi

22 d'ajouter, Monsieur le Président, que, comme je vous l'ai dit hier,

23 l'Accusation est tout à fait disposée à lire ce qui a été consigné dans le

24 compte rendu d'audience, ou je peux présenter des écritures à propos de

25 l'ordonnance orale de la Chambre de première instance rendue le 17 mai

Page 8315

1 2004. Il y a eu également la réunion qui a été tenue entre le juriste de la

2 Chambre et le premier substitut du Procureur, M. Withopf. Je pense que cela

3 devrait prendre entre 15 à 20 minutes, ou je peux me limiter à présenter

4 des écritures et fournir cela à la Chambre et à la Défense au plus tard

5 mardi matin ou mardi vers midi. Il vous appartient de décider de quel

6 scénario vous préférez ?

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez la possibilité de présenter des

8 observations orales, vous êtes ouverte. Vous pouvez oralement, pendant 15

9 minutes, aujourd'hui intervenir.

10 M. MUNDIS : [interprétation] Oui tout à fait, Monsieur le Président, je

11 vois le temps qu'il est. Je pourrais tout à fait le faire après la pause.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Le mieux, c'est, on va faire la pause. Il est une

13 heure moins quart. Nous reprendrons vers une heure 10. On aura largement le

14 temps d'aborder. Nous reprendrons à une heure 10.

15 --- L'audience est suspendue à 12 heures 46.

16 --- L'audience est reprise à 13 heures 16.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, je vous donne la parole.

18 M. DIXON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, avant que

19 M. Mundis n'intervienne, j'aimerais parler de quelque chose qui a à voir

20 avec le programme de la semaine prochaine. J'ai l'impression que le compte

21 rendu d'audience ne fonctionne pas. En tout cas, il ne marche pas sur mon

22 écran; je ne le vois pas apparaître. Je suppose que je devrais attendre. On

23 nous dit que cela fonctionne maintenant.

24 Ce n'est peut-être pas la peine d'aller à huis clos partiel. Il s'agit de

25 l'ordonnance que vous avez rendue ce matin à propos des mesures de

Page 8316

1 protection pour un témoin particulier. Il s'agit d'une décision très, très

2 claire que vous nous avez transmise. La Défense est d'avis que la seule

3 mesure que nous pouvons prendre pour pouvoir varier les mesures de

4 protection est de présenter une requête à la Chambre d'appel de Blaskic

5 pour que la question puisse être reconsidérée par la Chambre qui est saisie

6 de cette question. Il ne s'agit pas d'une Chambre de première instance,

7 mais il s'agit en l'occurrence de la Chambre d'appel. Ce n'est pas un appel

8 interjeté par rapport à votre décision, mais c'est une requête que nous

9 pouvons tout à fait présenter conformément à l'Article 75. Les deux

10 parties, quelle qu'elles soient, il s'agit de l'Accusation et de la

11 Défense, qui peuvent demander à ce que soient modifiées les mesures de

12 protection. Nous allons présenter cette requête immédiatement, et nous

13 serons ainsi en mesure de présenter et de verser au dossier cette requête

14 mardi matin après la pause de lundi, le jour férié de lundi.

15 Car nous comprenons que cela aura une incidence sur le programme prévu pour

16 la semaine prochaine, car le témoin ne pourra être entendu tant que la

17 Chambre d'appel de Blaskic n'aura pas pris de décision à propos de notre

18 requête. Vous savez qu'une liaison satellite a été prévue pour un autre

19 témoin la semaine prochaine. Il est évident que nous pourrons tout à fait

20 faire usage de cette liaison satellite pour un témoin seulement, et non pas

21 pour l'autre, car il faudra attendre que la décision soit prise.

22 Nous pensons que cette question devra être réglée avant que le témoin ne

23 vienne témoigner car vous vous souviendrez peut-être que ce témoin avait

24 indiqué qu'il ne sera pas en mesure de témoigner s'il n'a pas de mesures de

25 protection du fait de la fonction qu'il a dans son église. Nous pensons que

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1 cette question devrait être réglée avant qu'il ne vienne témoigner pour

2 qu'il sache exactement quelles sont les mesures qui seront prévues pour

3 lui.

4 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, nous pensons plutôt que

5 cette requête va avoir des incidences sur le programme de la semaine

6 prochaine. Car ce programme devra peut-être être modifié pour ce qui est de

7 l'un des témoins, car l'un des témoins ne pourra pas témoigner par liaison

8 satellite tant que la Chambre d'appel Blaskic n'aura pas statué.

9 A la suite de cette décision, qui, je l'espère, pourra être prise lorsque

10 l'Accusation aura encore à présenter des moyens à charge, il faudra prévoir

11 une autre date pour ce témoin. Je crois comprendre, d'après ce que M.

12 Mundis va nous dire, que la présentation des moyens à charge va durer

13 jusqu'à la fin de ce mois, et va également durer pendant le mois de juin.

14 Nous aurons la possibilité, une fois que la décision aura été rendue par la

15 Chambre d'appel, de faire comparaître le témoin. Cela sera tributaire de la

16 décision qui sera rendue. Je vous remercie Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon.

18 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Simplement pour indiquer à la

19 Chambre qu'il s'agira d'une requête conjointe. Merci, Monsieur le

20 Président.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur la question du témoin, je vais d'abord passer à

22 huis clos, Monsieur le Greffier.

23 [Audience à huis clos partiel]

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10 (Expurgé)

11 [Audience publique]

12 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pour ce qui est

13 des cassettes vidéo, je pourrai peut-être revenir sur cette question dans

14 un petit moment. J'aimerais vous dire d'ores et déjà, que nous ne sommes

15 pas en mesure de citer d'autres témoins hormis le témoin qui a été prévu

16 mardi prochain. Pour ce qui est du témoin qui était prévu pour mercredi

17 matin, il s'agit du premier témoin qui va témoigner par vidéoconférence.

18 Monsieur le Président, vous saurez certainement que cela représente des

19 frais importants, lorsque l'on envisage une vidéoconférence et un

20 témoignage par vidéoconférence. S'il n'y a qu'un seul témoin, ce n'est

21 peut-être pas la façon d'utiliser à bon escient les ressources du

22 Tribunal, bien qu'il vous appartiendra d'en décider. Nous pourrons toujours

23 demander au témoin de témoigner la semaine prochaine ou dans quelques

24 semaines en attendant que soit réglé la question à propos du deuxième

25 témoin.

Page 8320

1 Pour ce qui est justement de ce deuxième témoin, Monsieur le Président, il

2 existe une autre solution. Il pourrait être autorisé à témoigner, compte

3 tenu de l'ordonnance qui a été rendue par la Chambre ce matin. Au cas où la

4 Chambre d'appel modifierait cette ordonnance, nous pourrions faire en sorte

5 que ce témoignage soit rendu public. Une fois de plus, il vous appartient

6 d'en décider. Pour ce qui est du facteur temps, de la durée du témoignage

7 et des conditions médicales, je me permettrai d'invoquer l'Article 89(D).

8 Nous ferons en sorte qu'il affirme sa déclaration, et nous ferons en sorte

9 qu'il soit disponible pour un contre-interrogatoire. Cela pourrait se faire

10 à raison de 30 minutes par jour, pendant une durée de trois jours. Il vous

11 appartient une fois de plus d'en décider. Nous aimerions que tous les

12 témoins puissent venir témoigner avant la fin de la présentation des moyens

13 à charge. Les témoins pourraient être appelés à une date ultérieure. Mais

14 du fait de l'ordonnance rendue par la Chambre, il appartient maintenant à

15 la Chambre d'en décider pour ce qui est des deux témoins dont les

16 dépositions seront entendues par vidéoconférence.

17 J'aimerais maintenant, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges --

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Un instant, s'il vous plaît. Je vais vous donner la

19 parole par la suite.

20 L'Accusation suggère la procédure suivante. Evidemment, la Chambre, avant

21 de décider, devra recueillir les observations de la Défense et

22 l'Accusation, à juste titre, avec les témoignages par vidéoconférence, ils

23 génèrent des coûts importants. S'il y a qu'un seul témoin, ce n'est pas la

24 peine de mettre en œuvre toute la procédure, et que le témoin, qui lui

25 était disponible, témoignera un autre jour. La solution qui est suggérée

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1 serait qu'on procède néanmoins nonobstant la requête saisissant la Chambre

2 à l'audition à huis clos. Si la Chambre d'appel décidait qu'il y avait lieu

3 à des mesures de protection, à ce moment-là, l'audition ipso facto serait

4 rendue publique.

5 La Chambre aimerait connaître la réaction par M. Dixon, et Me Bourgon

6 après. Si vous avez bien compris le mécanisme qui est très subtile, mais

7 qui a été exposé par l'Accusation.

8 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Pour le moment,

9 nous ne souhaitons pas accepter ce mécanisme et ce, pour deux raisons. Dans

10 un premier temps, comme je vous l'ai déjà indiqué, lorsque ce témoin est

11 venu, il a indiqué de façon très, très claire que s'il ne se voyait pas

12 accorder de mesures de protection, il ne serait pas en mesure de témoigner.

13 Je ne sais s'il a le droit de dire cela ou non, je ne sais pas quelles sont

14 les conséquences de cela, mais c'est une autre chose. Toujours est-il qu'il

15 nous a dit qu'il a dit qu'il ne serait pas en mesure de le faire du fait de

16 sa fonction au sein de son clergé et du fait des instructions qui lui

17 avaient été données par son église. C'est la raison pour laquelle je

18 continue de maintenir que cela doit être réglé avant qu'il ne vienne

19 témoigner.

20 Deuxièmement, Monsieur le Président, il y a le droit à avoir une audience

21 publique, ce qui fait que le public doit pouvoir avoir accès à ce

22 témoignage, au moment où le témoignage est donné, qu'il s'agisse d'Internet

23 ou qu'il s'agisse du prétoire par opposition à la lecture d'un compte rendu

24 d'audience qui se fera plus tard. Il est évident que l'impact d'un tel

25 témoignage en sera diminué.

Page 8322

1 Je pense et je persiste à penser que cette question doit être réglée avant

2 qu'il ne vienne témoigner parce qu'il est évident que son témoignage pourra

3 devenir peut-être public, par la suite. Je pense que nous devons résoudre

4 ce problème, le problème des mesures de protection dans un premier temps.

5 Bien entendu, par souci d'économie, pour ne pas trop dépenser d'argent,

6 nous pourrions, effectivement, faire en sorte que les deux témoins

7 témoignent plus tard en juin. Il semblerait que ce serait une démarche

8 très, très prudente. Monsieur le Président, nous ne voulons pas avoir un

9 témoin par vidéoconférence maintenant, mais les deux en même temps.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

11 Monsieur Bourgon.

12 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

13 Simplement pour indiquer à la Chambre que nous soutenons les arguments

14 présentés par la Défense de M. Kubura. Il y a, évidemment, un facteur

15 additionnel, soit le fait que le témoin est présentement dans une

16 condition, il ne peut témoigner plus de 30 minutes par jour. Le fait

17 d'attendre pourra peut-être nous permettre, d'ici une semaine ou deux de

18 l'entendre dans une seule audience. Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, vous avez la parole pour la suite.

20 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 J'aimerais maintenant aborder la question que je voulais vous présenter. A

22 la suite de l'ordonnance orale de la Chambre de première instance du 17 mai

23 2004, l'Accusation s'est vue demander de fournir un certain nombre de

24 documents à la Chambre de première instance. Comme vous le saurez

25 certainement, en début de semaine, afin de préciser cette question et afin

Page 8323

1 de fournir un rapport d'état d'avancement des travaux à la Chambre de

2 première instance, la juriste de la Chambre, Mme Godart a rencontré M.

3 Withopf, ainsi, d'après ce que je crois comprendre, un analyste de l'équipe

4 de l'Accusation et un responsable des équipes d'enquêtes, qui était

5 également présent à la réunion.

6 Au début de cette semaine, avant son départ, Mme Godart m'a convoqué et m'a

7 informé de ce qui s'était passé dans cette réunion et m'a également indiqué

8 quels étaient les efforts déployés par l'Accusation pour s'acquitter de ce

9 qui avait été demandé par la Chambre de première instance par l'entremise

10 de cette ordonnance.

11 J'ai également, Monsieur le Président, les renseignements qui m'ont été

12 fournis par M. Withopf, ainsi que par un certain nombre de membres de

13 l'équipe qui ont dû s'acquitter de plusieurs tâches. Je vais procéder à cet

14 examen, catégorie par catégorie. Je reprendrai l'ordre qui avait été retenu

15 dans l'ordonnance orale du 17 mai.

16 Catégorie A : premièrement, il s'agit des informations afférentes aux

17 documents fournis par les gouvernements, soit suivant leur propre

18 initiative, soit en réponse à une requête qui leur a été présentée par le

19 bureau du Procureur.

20 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il ne me semble pas

21 possible d'établir des liens entre tous les documents et des demandes

22 d'aide qui ont été envoyées au gouvernement en question. Nombreux sont les

23 documents pour lesquels nous pouvons établir le lien avec la demande

24 d'aide. Comme vous le saurez peut-être, les demandes d'aide sont envoyées

25 par un certain nombre d'équipes de l'Accusation et ce, portant sur un

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1 certain nombre d'enquêtes et sur un certain nombre d'affaires. Ce qui fait

2 que certaines demandes d'aide sont telles qu'une information arrive au

3 bureau du Procureur, il y a une recherche électronique qui est effectuée et

4 nous pouvons, parfois, nous rendre compte que l'information a été fournie à

5 une équipe différente à la suite d'une requête différente, mais nous ne

6 sommes pas toujours en mesure de retrouver ces traces.

7 Nous avons un système de traçage interne que nous appelons le formulaire de

8 sommaire d'information, qui est un formulaire qui est rempli au moment où

9 nous recevons tous les documents. Il s'agit d'un même formulaire qui est

10 rempli à chaque fois que le bureau du Procureur reçoit un document.

11 Certains de ces formulaires de sommaire ou de résumé d'information ne

12 fournissent pas suffisamment ou ne donnent pas suffisamment de

13 renseignements, et ne nous permettent pas de remonter la filière et de

14 trouver quelle demande d'aide a généré quel document.

15 Il faut également savoir que pour la plupart des documents, nous sommes

16 tout à fait en mesure de remonter la filière et de voir exactement quelle

17 demande d'aide a fait que tel ou tel document est arrivé. J'ai également le

18 chef d'équipe qui est en train de travailler sur la question, et comme je

19 vous l'ai indiqué, nous vous demanderons la permission de l'ajouter à notre

20 liste de témoins pendant le mois de juin pour qu'il puisse, justement, vous

21 expliquer cette procédure.

22 Toujours dans la même catégorie A, nous avons un deuxième élément, à

23 savoir, la Chambre de première instance avait demandé que l'Accusation

24 fasse comparaître tous les archivistes comme témoin, archivistes qui sont

25 responsables des archives de Sarajevo et de Zenica. Comme je vous l'avais

Page 8325

1 indiqué, Mme Benjamin sera à Sarajevo et à Zenica la semaine prochaine et

2 va s'entretenir avec lesdits archivistes, mais j'aimerais toutefois

3 indiquer deux choses.

4 Dans un premier temps, il est évident que nous sommes tributaires, dans une

5 certaine mesure, du gouvernement de la Bosnie afin qu'il puisse nous

6 permettre d'identifier lesdits archivistes. J'aimerais également vous dire

7 que les archivistes avec lesquels elle va prendre contact ne seront pas

8 forcément les mêmes archivistes dont les noms apparaissent sur certains des

9 récépissés pour les documents qui ont été saisis ou pris dans les archives.

10 La raison en est très simple, Monsieur le Président. Lorsque les enquêteurs

11 sont allés prendre des documents dans les archives, ils ont très souvent

12 été accompagnés, non pas par l'archiviste lui-même, mais par des personnes

13 qui avaient été nommées par les archivistes ou par l'officier de liaison

14 bosnien qui nous aide et qui aide les enquêteurs dans le cadre de la

15 poursuite des enquêtes. Ce qui fait que les archivistes peuvent ou ne

16 peuvent pas être les personnes dont les noms apparaissent sur les

17 récépissés, par exemple. Il est évident que nous prendrons cela en

18 considération lors du témoignage de ces archivistes.

19 Monsieur le Président, bien que j'aie indiqué au préalable que nous

20 pourrions peut-être évoquer l'Article 92 bis, ce n'est pas ce que nous

21 allons faire. Nous avons maintenant choisir de faire comparaître ces

22 archivistes, ici, à La Haye pour qu'ils puissent témoigner à propos des

23 archives.

24 Comme je vous l'ai indiqué, hier, il est peu probable que ces témoins

25 soient disponibles pendant la semaine du 7 juin, ce qui fait que nous

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1 allons certainement avoir des trous pendant ladite semaine.

2 À propos du troisième volet de la catégorie A, il s'agit des informations

3 relatives aux documents qui se trouvent en possession de l'Accusation et la

4 preuve suivant laquelle les documents ont été envoyés et reçus. Comme je

5 l'ai expliqué à Mme Godart, dans la plupart des cas, il est indiqué dans le

6 document par le biais d'un sceau ou d'un tampon sur le document, que le

7 document a été envoyé ou reçu. De surcroît, il y a également une analyse

8 séquentielle qui pourra être extrêmement utile en la matière. C'est

9 justement ce que nous sommes en train de faire et nous fournirons les

10 renseignements à la Chambre de première instance aussi rapidement que

11 possible. Etant donné qu'il s'agit d'un nombre assez important de

12 documents, et étant donné que c'est le même groupe de personnes qui doit

13 s'acquitter de cette tâche et qu'il s'agit du groupe de personnes qui

14 connaît très bien les documents, il se peut que cette information ne soit

15 pas mise à la disposition de la Chambre de première instance avant

16 plusieurs semaines.

17 Pour ce qui est du quatrième élément de la catégorie A, à savoir, il s'agit

18 de faire comparaître un témoin qui serait un militaire à grade élevé de

19 l'ABiH afin qu'il puisse témoigner sur la rédaction et la formulation des

20 ordonnances, par exemple. Le bureau du Procureur est en train d'identifier

21 ces personnes qui pourraient venir fournir à la Chambre de première

22 instance cette information. Conformément au protocole en vigueur, si ces

23 personnes sont encore membres de l'ABiH, nous devons, bien entendu, prendre

24 certaines mesures et ces mesures doivent être également prises par le

25 gouvernement de la Bosnie pour que nous puissions prendre contact avec ces

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1 personnes. Une fois de plus, cela pourrait ne pas se faire avant plusieurs

2 semaines, car il faut que nous obtenions l'aval et la permission nécessaire

3 de la part du gouvernement de la Bosnie afin, dans un premier temps, de

4 pouvoir localiser lesdits témoins et afin de pouvoir les interroger et de

5 fournir les informations.

6 Pour ce qui est des échantillons des signatures des accusés, nous allons

7 fournir à la Chambre de première instance deux jeux de documents ou

8 d'information avec des documents qui ont été signés par les accusés. Au cas

9 où la Chambre de première instance nécessite la présence d'un témoin expert

10 pour procéder à l'analyse de leurs écritures, nous nous efforcerons de vous

11 aider afin de trouver cette personne qui pourra établir les comparaisons

12 nécessaires.

13 Pour ce qui est de l'origine des documents, je crois comprendre que M.

14 Withopf a expliqué à Mme Godart quelle était la règle générale, car en

15 règle générale, lorsque nous saisissons des documents au gouvernement, il

16 n'y a pas d'indication claire de la part des gouvernements sur la façon

17 dont ils ont obtenu ces documents. En d'autres termes, lorsque nous prenons

18 des exemplaires de documents dans les archives de Sarajevo, ces archives ne

19 nous indiquent pas, de façon précise, l'origine de ces documents. Une fois

20 de plus, il se peut que les archivistes puissent jeter un peu plus de

21 lumière sur cette question, et ce, dans l'intérêt de la Chambre de première

22 instance.

23 Pour ce qui est des comptes rendus opérationnels et des journaux de guerre

24 puisque cela fait l'objet de plusieurs discussions, je vous dirais que nous

25 avons, pour ces comptes rendus opérationnels et ces journaux de guerre, un

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1 total de 1 369 pages. Cinquante pour cent, la moitié environ, a déjà été

2 traduite. Il s'agit d'une première traduction qui a été effectuée en

3 anglais. Nous avons demandé que le reste des pages puissent être traduites

4 en anglais. Nous avons également demandé que soient révisées les pages

5 d'ores et déjà traduites. De toute évidence, cela va également exiger un

6 certain temps avant que nous ne puissions vous donner une version traduite

7 de 1 369 pages. J'hésite à ajouter que ceci pourrait encore être compliqué

8 par le fait que tout ceci est manuscrit et que beaucoup de rubriques de ces

9 pages ne sont pas lisibles.

10 S'agissant de la catégorie B et du premier sujet qui est mentionné, nous

11 avons reçu l'ordre de fournir une liste de témoins susceptibles

12 d'identifier tous ces documents. Nous avons discuté avec les membres de

13 l'équipe d'enquête et d'analyse, et nous pouvons, au mieux, vous fournir

14 d'ici au vendredi, 11 juin, ces éléments, cette liste. Notre équipe œuvre à

15 ces documents, un par un. Nous avons trois employés qui s'y consacrent à

16 temps plein. Mais je le répète, nous ne prévoyons pas avoir toutes ces

17 informations avant le 11 juin, un vendredi.

18 S'agissant de la traduction et des traductions manquantes, le deuxième

19 point -- la deuxième catégorie, catégorie B : le juriste de la Chambre a

20 fourni un mémo portant sur les documents manquants. Je peux vous dire qu'il

21 y avait 52 projets de traduction énumérés dans ce mémo. Vingt-six de ces

22 documents ont fait l'objet d'une demande de traduction définitive. Pour ce

23 qui est de l'autre moitié, apparemment, la traduction définitive est prête.

24 Nous essayons de voir si ceci a déjà été repris dans ces classeurs ou dans

25 d'autres documents qui vous auraient déjà été remis.

Page 8329

1 Pour ce qui est de savoir exactement quels sont les documents manquants,

2 c'est une tâche que nous avons entreprise. Je relève également qu'une

3 partie de cette ordonnance portait sur des annexes à des documents.

4 Plusieurs de ces annexes ne sont pas en notre possession. Nous avons un

5 document qui renvoie à des annexes, mais dans bien des cas, nous n'avons

6 tout simplement pas cette annexe qui est évoquée dans le document original.

7 Les cassettes vidéo, je dirais en quelques mots, que si on nous demande de

8 voir des cassettes vidéo la semaine prochaine, nous allons compiler un

9 échantillon de chacune de ces cassettes. Bien sûr, nous allons essayer de

10 limiter au maximum le nombre de documents. Mais, nous pourrons la semaine

11 prochaine, aussi, si c'est ce que vous souhaitez vous montrer un

12 échantillon, une compilation au cas où nous n'aurions pas assez de témoin.

13 Pour ce qui est des conversations téléphoniques interceptées, vers le

14 milieu de la semaine prochaine, puisque nous avons congé lundi, vers le

15 milieu de la semaine prochaine, je pourrai tout vous dire sur ces

16 conversations interceptées, d'où ces documents viennent, ce genre de

17 choses.

18 Catégorie C : j'en ai pratiquement terminé. Nous avons été enjoints de

19 présenter le témoin Mika Tauro qui ne travaille plus au bureau du

20 Procureur, mais qui est à disposition pendant tout le mois de juin. Une

21 fois de plus, nous le citerons à la barre au moment où nous aurons assez de

22 témoins pour avoir une masse critique, si vous voulez de témoins. Il ne

23 devrait pas être auditionné pendant très longtemps puisqu'il va parler des

24 tableaux et des diagrammes qu'il a dressés.

25 S'agissant de l'ordonnance écrite portant sur un autre témoin, vous avez

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1 demandé la production de documents. Ils seront déposés d'ici au mercredi de

2 la semaine prochaine. C'était le 15e jour compris dans le délai qui nous

3 était imparti pour le dépôt de ces documents. Troisième point, catégorie C,

4 il y a huit classeurs de documents non contestés et de documents manquants.

5 Là, aussi, nous y travaillons et nous espérons terminer le plus vite

6 possible. Nous avons demandé une traduction intégrale en anglais des

7 documents qui n'étaient pas repris dans les autres. Voilà comment je

8 comprends la réunion que nous avons eue au début de la semaine. Voici les

9 mesures que nous avons prises afin de nous acquitter des obligations

10 comprises dans l'ordonnance. Je regrette que ceci n'ait pas pu être réglé

11 plus rapidement, mais je peux vous dire que nous faisons vraiment

12 l'impossible pour respecter les délais afin de terminer la présentation de

13 nos moyens à charge le plus vite possible.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Nous allons nous retirer pendant quelques

15 minutes. Ne bougez pas, parce qu'il faut qu'on rende notre décision sur la

16 question de la vidéoconférence. Car, lundi, comme vous le savez, c'est

17 férié. Il risque d'y avoir des problèmes d'intendance, de billets d'avion,

18 et cetera. Nous allons tout de suite en délibéré. Cela ne va pas être long.

19 Nous revenons.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 --- La pause est prise à 13 heures 49.

22 --- La pause est terminée à 13 heures 51.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Sur la question de la

24 vidéoconférence, la Chambre qui a pris note des observations de

25 l'Accusation et des observations de la Défense, décide qu'il convient de

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1 renvoyer à une autre date l'audition de ces deux témoins. La Chambre

2 indiquera en temps utile, certainement la semaine prochaine, la date que

3 nous fixerons. Cela entraîne comme conséquence l'annulation des

4 vidéoconférences prévues pour les journées de mercredi, jeudi et vendredi.

5 En revanche, il conviendra pour l'Accusation de remplacer ces audiences

6 annulées par, comme on l'a indiqué tout à l'heure, les diffusions des

7 vidéoconférences. Voilà le sens de la décision. Ce qui va permettre à M. le

8 Greffier de prendre toute disposition pour annuler ce qui était prévu à

9 compter de mercredi.

10 Concernant les autres points qui ont été évoqués par l'Accusation, sur les

11 points A, B et C' est-ce qu'à ce stade, la Défense a quelque chose à nous

12 indiquer, une observation quelconque ou pas ? L'Accusation a fait un

13 rapport d'étape sur tous les travaux en cours afin de se conformer à la

14 décision orale qui avait été rendue il y a quelque temps, soit le 17 mai

15 2004. Les travaux continuent. Ils sont en cours, l'Accusation s'efforçant

16 de satisfaire pleinement à l'ordonnance qui avait été prise, tout en

17 signalant certaines difficultés. Est-ce que la Défense veut nous faire part

18 de quelques observations ? Vous avez la parole.

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons

20 attentivement écouté les informations présentées par le Procureur. Ce

21 dernier déploie des mesures assez lourdes pour ce qui est de

22 l'accomplissement de l'ordonnance de la Chambre. Nous n'avons pas

23 d'objections à formuler en sus. Ce que nous demanderions, c'est que la

24 Défense soit informée en temps utile de la convocation des différents

25 témoins afin que nous puissions être prêts pour les différents contre-

Page 8332

1 interrogatoires. Merci.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres Défenseurs ?

3 M. DIXON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, pas d'observation,

4 à ce stade. Merci.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

6 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je verrai, sans

7 aucun doute, à ce que les témoins soient prêts, ceux qui sont prévus et

8 d'autres déclarations de témoins qui viendraient des archivistes ou

9 d'autres témoins, le plus vite possible. Je vous demanderais une précision

10 s'agissant des cassettes vidéo. Je le répète, Monsieur le Président, la

11 situation qui se présente est manifestement celle-ci : je voulais m'assurer

12 d'avoir bien compris ce que vous aviez dit. La semaine prochaine, nous

13 serons prêts à vous présenter environ 12 heures d'enregistrement vidéo sur

14 trois jours. Est-ce bien là ce que veut la Chambre ? Pour ce qui est des

15 parties où il y a aussi une bande audio, nous allons fournir la

16 transcription de ces bandes audio, des bandes de son, mais nous n'aurons le

17 temps, sur trois jours, que de voir à peu près moins que la moitié. Nous

18 allons, si vous le permettez, faire une sélection pour ce qui est de ce que

19 nous allons vous montrer. Je voulais que tout soit clair à cet égard. A

20 moins que vous ne me disiez le contraire, je pourrais vous montrer environ

21 seulement 12 heures d'enregistrement avec des transcriptions, sauf

22 ordonnance contraire de votre part.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : C'était bien dans ce sens que nous avions pris notre

24 décision. Nous pensons qu'il convient de diffuser les bandes vidéo. Le cas

25 échéant, à l'issue de la diffusion, les parties feront valoir leur point de

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1 vue. Accusation, Défense, et nous en tirerons toutes les conclusions à en

2 tirer. Vous nous dites qu'il y aurait 12 heures de diffusion sur les trois

3 jours. Cela ferait

4 quatre heures de diffusion. On n'a que trois heures 45 d'audience. C'est ce

5 qui peut être fait.

6 M. MUNDIS : [interprétation] Une fois de plus, Monsieur le Président, je

7 peux vous présenter six heures, huit heures ou dix heures d'extraits, de

8 séquences. C'est sans doute pour cela que je demandais des instructions de

9 votre part. Je peux vous présenter ce que vous me demanderez. Si vous me

10 dites il vous faut six heures de diffusion, je ferai une sélection des

11 extraits les plus significatifs pour remplir six heures par rapport à ces

12 26 heures d'enregistrement. C'est selon votre décision. A moins que vous ne

13 souhaitiez voir la totalité des enregistrements vidéo, ce qui n'est pas de

14 toute façon possible la semaine prochaine, je vous mettrais à votre

15 disposition le plus grand nombre de séquences possibles, en tout cas, le

16 nombre que vous souhaitez voir la semaine prochaine.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur la question des vidéos, à ce stade, est-ce que

18 la Défense avait un point de vue ? Puisque, évidemment, la Défense ne va

19 pas contre-interroger la vidéo puisque, par définition, il n'y a personne

20 derrière la vidéo. Quel est le point de vue de la Défense ?

21 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Notre question, à ce stade,

22 Monsieur le Président, serait de savoir. Nous avons bien compris que la

23 procédure suggérée par la Chambre serait de visionner la vidéo et, ensuite,

24 de procéder à la phase des arguments. Nous avons déjà, Monsieur le

25 Président, présenté une argumentation que les vidéos nécessitaient la

Page 8334

1 présence d'un témoin afin de pouvoir authentifier qu'est-ce qu'il y a sur

2 la vidéo, qu'est-ce que la vidéo dit et représenter, et surtout s'il y a

3 une bande qui parle qui a écrit le texte, et qu'est-ce que le texte

4 représente. Or, en l'absence d'un témoin, Monsieur le Président, nous

5 croyons qu'il sera très difficile de prendre une décision concernant

6 l'admissibilité d'une vidéo, et que même si les images présentées étaient

7 d'une force probante très élevée, il n'en demeure pas moins que la

8 fiabilité serait toujours contestée puisque nous ne saurions jamais à quel

9 moment la vidéo a été tournée, par qui, dans quelle condition, s'il s'agit

10 d'un collage, s'il s'agit d'un texte écrit, s'il s'agit d'une entrevue.

11 Toutes ces questions resteraient ouvertes, Monsieur le Président, après

12 avoir visionné la vidéo. Evidemment, si le visionnement fait partie d'une

13 procédure qui mènera à une autre étape où nous aurons des renseignements

14 par voie d'une déclaration au 92 bis ou autre sur l'auteur de la vidéo,

15 peut-être qu'à ce moment-là, cela pourrait changer les circonstances. Mais

16 en l'espèce de visionner la vidéo sans autre soutien nous pensons qu'il

17 sera très difficile pour la Chambre de se prononcer sur l'admissibilité de

18 ces pièces. Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

20 Monsieur Dixon.

21 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Voici comment

22 nous comprenons ce processus. Il faut visionner ces vidéos pour que nous

23 nous fassions une idée de la fiabilité, de l'authenticité, de la valeur

24 probante qu'il faut leur accorder à ces enregistrements vidéo. Vous avez

25 besoin de l'occasion de le faire, et il faut le faire en l'audience

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1 publique. Par la suite, les parties auront l'occasion de présenter leurs

2 arguments, pour savoir s'il faut, effectivement, verser ou pas ces

3 enregistrements vidéo. Vous l'avez indiqué que vous saisirez de l'occasion

4 -- en tout cas, nous aurons l'occasion de vous présenter nos arguments pour

5 faire comprendre pourquoi il ne faut pas verser au dossier ces

6 enregistrements vidéo. Comme le disait Me Bourgon, tout d'abord, il faudra

7 un témoin, mais, même à l'absence de ce requis -- de ce pré requis, de

8 notre avis, la teneur de ces vidéos ne suffit, mais, effectivement, vous

9 avez ordonné que ce processus se fasse en audience publique, ce qui veut

10 dire qu'à la fin de la semaine prochaine, vous pourrez déterminer s'il faut

11 verser ou pas ces vidéos en tout ou en partie. En tout cas, vous

12 déterminerez le poids qu'il faut leur accorder.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : À ce stade, nous allons délibérer entre nous, mais,

14 pour le moment, nous partons de l'idée que, la semaine prochaine, il aura

15 la diffusion des bandes vidéo. Si d'ici mardi nous avons pris une décision

16 aux fins de clarification, nous vous l'indiquerons mardi.

17 Je vous remercie je m'excuse auprès des interprètes d'avoir prolongé

18 l'audience, je vous invite à revenir mardi à 14 heures 15.

19 --- L'audience est levée à 14 heures 02 et reprendra le mardi 1er juin

20 2004, à 14 heures 15.

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