Page 19332
1 Le mercredi 15 mars 2006
2 [Jugement]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à M. le Greffier pour la dernière
7 fois d'appeler le numéro de cette affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
9 Bonjour à tous. Affaire numéro IT-01-47-T, le Procureur contre Enver
10 Hadzihasanovic et Amir Kubura.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à l'Accusation tout au complet de
12 bien vouloir se présenter.
13 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Madame
14 et Messieurs les Juges. Je salue toutes les personnes présentes dans ce
15 prétoire et hors prétoire. Daryl Mundis et Mme Tecla Henry-Benjamin, et
16 nous avons également notre commis à l'affaire, M. Andres Vatter, ainsi que
17 M. Matthias Neuner.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais me retourner vers le banc de la Défense en
19 demandant aux avocats de bien vouloir se présenter.
20 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Me Residovic et Me
21 Stéphane Bourgon, pour défendre les intérêts de M. Hadzihasanovic, ainsi
22 que Mme Muriel Chauvin.
23 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Rodney Dixon, moi-même ainsi que notre
24 assistant juridique, représentant les intérêts de M. Kubura.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue au nom de la Chambre toutes les personnes
26 présentes. Je salue les représentants de l'Accusation. Je salue tous les
27 avocats qui sont présents ainsi que le général Hadzihasanovic et le général
28 Kubura. Comme vous le savez, aujourd'hui, cette Chambre va rendre son
Page 19333
1 jugement dans l'affaire qui nous a occupés depuis plus de deux ans.
2 Avant de lire le résumé du jugement, je me dois tout d'abord de
3 remercier les avocats des partis, avocats de l'Accusation et de la Défense
4 pour la contribution qu'ils ont apportée aux travaux de cette Chambre. Je
5 remercie principalement M. le Greffier d'audience, qui nous a assisté
6 pendant toutes ces années, notamment dans l'enregistrement des pièces à
7 conviction. Je ne saurais oublier également de remercier M. l'Huissier, qui
8 a apporté son concours lors des différentes audiences. J'aurai également
9 une pensée pour Mme la Sténotypiste dont je lis en temps réel sa
10 transcription sur l'écran. J'ai également une pensée pour tous les
11 interprètes, interprètes du B/C/S en anglais ou en français, ou de
12 l'anglais en B/C/S et en anglais, et ainsi que de l'anglais au français ou
13 vice-versa. Les interprètes nous ont également assistés de manière efficace
14 pendant ces nombreux mois.
15 Je remercie également tout le personnel technique de cette salle
16 d'audience qui est intervenu lors des quelques incidents qui sont survenus
17 et j'espère qu'aujourd'hui, nous n'aurons aucun incident technique grâce à
18 eux.
19 Je n'oublierai pas non plus de remercier le service de sécurité qui a
20 accompagné les accusés pendant également tous ces longs mois.
21 J'aurai aussi une pensée au nom des Juges pour le service de la
22 traduction qui a été sollicité à de nombreuses reprises, et qui a pu nous
23 fournir des traductions lorsqu'elles ont été demandées.
24 Enfin, je salue également la section des Témoins qui a encadré la venue et
25 le départ de tous les témoins qui sont venus déposer au cours du procès.
26 Vous me permettrez également d'avoir une pensée tout à fait particulière
27 pour la Juriste de cette Chambre qui nous a également assisté, ainsi que
28 pour tous les assistants de la Chambre II qui ont apporté leur concours
Page 19334
1 précieux aux travaux de la Chambre. Soyez les uns et les autres assurés de
2 notre gratitude.
3 J'en viens maintenant à la lecture du jugement.
4 Cette Chambre de première instance, section B, qui est réunie ce
5 jour, va rendre son jugement dans l'affaire le Procureur contre Enver
6 Hadzihasanovic et Amir Kubura.
7 Au cours de la présente audience, la Chambre, par ma voix, exposera en
8 résumé ses constatations et conclusions. Seul fait autorité l'exposé des
9 constations, conclusions et motifs de la Chambre que l'on trouvera dans le
10 jugement écrit dont les copies ne seront mises à la disposition des parties
11 et du public que demain, pour des raisons matérielles liées principalement
12 à l'enregistrement, la reproduction et la reliure du document. Autant
13 préciser que ce document qui constitue le jugement peut constituer de plus
14 de 750 pages et mentionne près de 5 000 notes de bas de page.
15 Dans un premier temps, la Chambre fera le rappel de la procédure, puis
16 énoncera les faits reprochés à l'accusé Enver Hadzihasanovic et à l'accusé
17 Amir Kubura par l'acte d'accusation. Après avoir évoqué le parcours des
18 accusés, la Chambre rappellera les principes qui sous-tendent la
19 responsabilité du supérieur. La Chambre examinera ensuite la question du
20 commandement de fait d'Amir Kubura. Avant de procéder à l'examen de chacun
21 des chefs, la Chambre résumera l'analyse qu'elle a effectuée dans son
22 jugement sur le phénomène des Moudjahiddines, leur rôle dans les crimes
23 reprochés aux accusés, ainsi que le lien qu'ils entretenaient avec l'armée
24 de la République de Bosnie-Herzégovine, ABiH. En dernier lieu, la Chambre
25 donnera lecture du dispositif.
26 Concernant le rappel de la procédure, le procès intenté aux accusés Enver
27 Hadzihasanovic et Amir Kubura s'est ouvert le 2 décembre 2003 et s'est
28 clôturé le 15 juillet 2005. Au cours du procès, la Chambre a entendu 172
Page 19335
1 témoins et admis aux dossiers 33 déclarations écrites de témoins en
2 application de l'article 92 bis du Règlement, ainsi que trois stipulations.
3 Un total de 9 949 pièces ont été versées tout au long du procès, et nous
4 avons eu près de 20 000 pages de transcript.
5 Les faits reprochés par l'acte d'accusation. L'Accusation soutient qu'en
6 1993 et jusqu'au 18 mars 1994, l'armée de Bosnie-Herzégovine, ABiH, a été
7 engagée dans un conflit armé avec le Conseil de défense croate, HVO. En
8 Bosnie centrale, notamment dans les municipalités de Travnik, Zenica,
9 Bugojno, Kakanj et Vares. Elle allègue que des unités subordonnées au 3e
10 Corps, parmi elles la 7e Brigade commandée par l'accusé Kubura, ont attaqué
11 des villes et des villages habités majoritairement par des Croates de
12 Bosnie. A la suite de ces attaques, des civils croates de Bosnie
13 principalement, mais aussi des civils serbes de Bosnie, auraient été
14 victimes d'homicides intentionnels et de lésions graves.
15 L'Accusation allègue par ailleurs que des Croates et des Serbes de Bosnie
16 ont été emprisonnés illégalement ou détenus de toute autre manière dans des
17 lieux contrôlés par des unités subordonnées aux accusés. Lors de leur
18 détention, ils auraient été victimes de violences physiques et
19 psychologiques. Les conditions de détention se seraient caractérisées
20 notamment par le surpeuplement, le manque d'hygiène et de soins médicaux,
21 ainsi que des privations inhumaines telles que le manque de nourriture,
22 d'eau et de vêtements.
23 De surcroît, l'Accusation allègue que des unités subordonnées aux accusés
24 ont pillé et détruit des biens de Croates et de Serbes de Bosnie sans que
25 cela fut justifié par les exigences militaires. En outre, des bâtiments,
26 sites et édifices religieux appartenant à la communauté croate auraient été
27 détruits ou, de toute autre manière, endommagés ou violés.
28 L'Accusation allègue que les accusés savaient ou avaient des raisons de
Page 19336
1 savoir que leurs subordonnés s'apprêtaient à commettre des crimes ou
2 l'avaient fait et qu'ils n'ont pas pris les mesures nécessaires et
3 raisonnables pour empêcher ces actes ou en punir les auteurs.
4 Par ces omissions, les accusés seraient responsables pour meurtre et
5 traitement cruel des violations des lois ou coutumes de la guerre
6 sanctionnés par les articles 3 et 7(3) du Statut et reconnus par l'article
7 3(1)(a) des conventions de Genève; destruction sans motif de villes et de
8 villages que ne justifient pas les exigences militaires, une violation des
9 lois ou coutumes de la guerre sanctionnée par les articles 3(b) et 7(3) du
10 Statut; pillage de biens publics ou privés, une violation des lois ou
11 coutumes de la guerre sanctionnée par les articles 3(e) et 7(3) du Statut;
12 et destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la
13 religion, une violation des lois ou coutumes de la guerre sanctionnée par
14 les articles 3(d) et 7(3) du Statut.
15 Les accusés. Enver Hadzihasanovic : au début du mois d'avril 1992, après
16 avoir quitté la JNA, l'accusé Hadzihasanovic rejoint la Défense
17 territoriale, TO, de la République de Bosnie-Herzégovine. Le 1er septembre
18 1992, Sefer Halilovic, chef de l'état-major principal de l'ABiH nomme Enver
19 Hadzihasanovic chef d'état-major du 1er Corps de l'ABiH. Dans le cadre de sa
20 mission visant à consolider ou organiser à partir de Zenica les unités de
21 Bosnie centrale, Sefer Halilovic le nomme commandant du 3e Corps vers la
22 mi-novembre 1992. L'accusé Hadzihasanovic exerce cette fonction jusqu'au 1er
23 novembre 1993, date à laquelle le président de la République de Bosnie-
24 Herzégovine, Alija Izetbegovic, le nomme chef et commandant en second de
25 l'état-major principal du commandement Suprême de l'ABiH.
26 Amir Kubura : dans le courant de l'année 1992, l'accusé Kubura rejoint
27 l'ABiH après avoir quitté la JNA. Le 11 décembre 1992, il est affecté à la
28 7e Brigade musulmane de Montagne du 3e Corps de l'ABiH en qualité d'adjoint
Page 19337
1 au chef d'état-major chargé des opérations et des questions relatives à
2 l'instruction. Le 12 mars 1993, Sefer Halilovic le nomme chef d'état-major
3 et commandant en second de la 7e Brigade. Le 6 août 1993, Rasim Delic,
4 commandant de l'état-major du commandement Suprême de l'ABiH, le nomme
5 commandant de la 7e Brigade. Il exercera cette fonction jusqu'au 16 mars
6 1994, date à laquelle il est nommé commandant de la 1ère Brigade musulmane
7 de Montagne du 1er Corps de l'ABiH.
8 La responsabilité du supérieur hiérarchique. La Chambre rappelle
9 l'importance que le droit international humanitaire attache au rôle du
10 commandant dans les conflits armés. Ce rôle est reconnu comme déterminant
11 pour assurer la bonne application des conventions de Genève. Les
12 commandants sont aptes, de par l'autorité qui leur est conférée, à exercer
13 un contrôle sur les troupes et sur les armes dont elles se servent. La
14 responsabilité pénale du supérieur hiérarchique au sens de l'article 7(3)
15 du Statut du Tribunal connaît des limites. Un commandant peut être tenu
16 responsable uniquement si trois conditions sont remplies. Premièrement, il
17 doit exercer, à l'époque des faits reprochés, un contrôle effectif sur les
18 personnes présumées avoir perpétré les agissements illicites. Deuxièmement,
19 il doit avoir eu connaissance ou du moins avoir eu des raisons de savoir
20 que ses subordonnés s'apprêtaient à commettre un crime ou l'avaient fait.
21 Troisièmement, le supérieur doit avoir omis de prendre les mesures
22 nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir les crimes. Par
23 ailleurs, la Chambre rappelle que la responsabilité d'un supérieur est
24 engagée sur la base de ses capacités matérielles à prévenir ou punir les
25 agissements illicites et non sur la seule base de sa position officielle en
26 qualité de commandant.
27 Le commandement d'Amir Kubura. La Chambre constate que le 12 mars
28 1993, l'accusé Kubura a été nommé chef d'état-major et commandant en second
Page 19338
1 de la 7e Brigade, alors qu'Azim Koricic a été nommé commandant de la 7e
2 Brigade. Le 6 août 1993, Amir Kubura a succédé à Asim Koricic en tant que
3 commandant officiel de la 7e Brigade. Les Juges ont examiné la question de
4 savoir si l'accusé Kubura a agi en tant que commandant de la 7e Brigade
5 avant sa nomination officielle le 6 août 1993 à ce poste.
6 Les éléments de preuve permettent de conclure qu'Asim Koricic, nommé
7 le 12 mars 1993 en qualité de commandant officiel de la 7e Brigade, a
8 quitté la Bosnie-Herzégovine vers le 12 avril 1993 et n'exerçait plus ses
9 fonctions après cette date. Sur la base notamment de l'examen des ordres
10 émis en l'absence d'Asim Koricic, la Chambre conclut que l'accusé Kubura
11 était le commandant de fait de la 7e Brigade, et cela à partir du 12 avril
12 1993 au plus tard. Il commandait toutes les unités de la 7e Brigade, en ce
13 compris l'organe de sécurité et de la police militaire de la 7e Brigade.
14 Les Moudjahiddines. Plusieurs affaires traitées par ce Tribunal se
15 sont déroulées dans le contexte du conflit armé opposant l'ABiH et le HVO
16 en Bosnie centrale durant les années 1992 et 1993. Cependant, la présente
17 affaire est la première qui aborde la question de la présence des
18 combattants musulmans étrangers ou Moudjahiddines étrangers en Bosnie
19 centrale au cours des années 1992 et 1993 et de leurs liens de
20 subordination à l'ABiH, en particulier au 3e Corps et à la 7e Brigade durant
21 l'année 1993.
22 Comme le révèlent les éléments de preuve, les Moudjahiddines
23 étrangers sont arrivés en Bosnie centrale à partir de la deuxième moitié de
24 l'année 1992 dans le but d'aider leurs frères musulmans contre l'agresseur
25 serbe. Ils venaient surtout des pays du Maghreb, du Proche-Orient et du
26 Moyen-Orient. Les Moudjahiddines étrangers se distinguaient
27 considérablement des gens du cru, non seulement par leur apparence physique
28 et leur langue, mais également de par leurs méthodes de combat.
Page 19339
1 Initialement, les Moudjahiddines étrangers fournissaient des vivres et
2 d'autres matières de première nécessité à la population locale musulmane.
3 Une fois le conflit éclaté entre l'ABiH et le HVO, ils ont également
4 participé à des actions de combat contre le HVO, et cela aux côtés des
5 unités de l'ABiH.
6 Etant dépourvu des biens de première nécessité, la majorité de la
7 population musulmane était reconnaissante de l'aide apportée par les
8 Moudjahiddines étrangers. Les Moudjahiddines étrangers se sont, eux,
9 activement engagés dans le recrutement de jeunes hommes locaux, leur
10 offrant un entraînement militaire, des uniformes et des armes. C'est ainsi
11 que des gens du cru ont rejoint les Moudjahiddines étrangers, et par là
12 sont devenus des Moudjahiddines locaux. Ils imitaient les étrangers dans
13 leur accoutrement et leur comportement, de sorte qu'il était parfois
14 difficile de distinguer les deux groupes, et pour cette raison, dans le
15 jugement, la Chambre utilisera le terme "Moudjahiddines" pour désigner les
16 étrangers venus de pays arabes, mais également les Musulmans locaux ayant
17 rejoint les unités des Moudjahiddines.
18 Le premier camp d'entraînement des Moudjahiddines se trouvait à
19 Poljanice, à côté du village de Mehurici, situé dans la vallée de la Bila,
20 au sein de la municipalité de Travnik. Le groupe de Moudjahiddines qui
21 était établi comprenait tant des Moudjahiddines des pays arabes que des
22 locaux. Il y avait parmi les locaux bosniaques des anciens membres des
23 forces musulmanes de Travnik et des soldats appartenant de droit aux unités
24 du 3e Corps, notamment à la 7e et à la 306e Brigades.
25 Les Moudjahiddines du camp de Poljanice étaient également établis
26 dans les villes de Zenica et de Travnik, et à partir de la deuxième moitié
27 de l'année 1993, dans le village d'Orasac, situé lui aussi dans la vallée
28 de la Bila.
Page 19340
1 La Chambre a examiné si ce groupe de Moudjahiddines était subordonné
2 aux accusés. A cette fin, elle a fait une distinction entre deux périodes
3 de temps. D'une part, celle qui a précédé la création d'un détachement
4 indépendant des Moudjahiddines, dit El Moudjahid, le 13 août 1993; et
5 d'autre part, la création qui a suivi -- excusez-moi, et d'autre part, la
6 période qui a suivi la création du détachement El Moudjahid.
7 Durant les mois qui ont précédé la création du détachement El Moudjahid, la
8 Chambre conclut que les Moudjahiddines étrangers établis au camp de
9 Poljanice ne faisaient pas officiellement partis ni du 3e Corps, ni de la 7e
10 Brigade de l'ABiH. Ainsi, l'Accusation n'a pas prouvé hors de tout doute
11 raisonnable que les Moudjahiddines étrangers ont officiellement rejoint
12 l'ABiH et qu'ils étaient de droit subordonnés aux accusés Enver
13 Hadzihasanovic et Amir Kubura.
14 En revanche, pour ce qui est des Moudjahiddines locaux, la Chambre conclut
15 que certains d'entre eux appartenaient en droit aux unités du 3e Corps. Il
16 en va ainsi des membres de la 7e Brigade et de la 306e Brigade qui ont
17 quitté leurs propres unités pour rejoindre les Moudjahiddines du camp de
18 Poljanice, comme par exemple, Ramo Durmis.
19 La Chambre a analysé les rapports de fait entre les Moudjahiddines et le 3e
20 Corps dans une partie du jugement qui compte une centaine de pages. Dans ce
21 résumé, la Chambre doit se limiter à indiquer essentiellement les points de
22 cette analyse.
23 La Chambre constate qu'il y a des indices importants d'une
24 subordination des Moudjahiddines aux accusés avant le 13 août 1993. Les
25 témoignages entendus par la Chambre, et principalement les documents versés
26 au dossier, démontrent que l'ABiH a maintenu des liens étroits avec les
27 Moudjahiddines étrangers, et cela dès leur arrivée dans le courant de
28 l'année 1992 en Bosnie centrale. Les combats conjoints en sont une
Page 19341
1 illustration. A Karaula et Visoko en 1992, au mont Zmajevac vers la mi-
2 avril 1993, ou dans la vallée de la Bila en juin 1993, les Moudjahiddines
3 ont combattu aux côtés des unités de l'ABiH contre les forces serbes et
4 croates de Bosnie.
5 Toutefois, la Chambre n'a pu établir que l'accusé Hadzihasanovic ou
6 l'accusé Kubura aient adressé des ordres aux Moudjahiddines et que ces
7 ordres aient été exécutés. De plus, parmi les quelque 3 000 pièces que la
8 Chambre a analysées, il n'y a aucun rapport de combat adressé par les
9 Moudjahiddines aux accusés, ni aucun document indiquant que les
10 Moudjahiddines étaient responsables devant les accusés. En revanche, dans
11 leurs rapports de combat, les commandants des unités du 3e Corps
12 protestaient fréquemment contre le comportement indiscipliné des
13 Moudjahiddines lors des combats conjoints. La Chambre note également
14 qu'avant le 13 août 1993, les journaux de guerre du 3e Corps mentionnent à
15 peine les Moudjahiddines.
16 En ce qui concerne en particulier les liens que les Moudjahiddines
17 entretenaient avec les brigades du 3e Corps, les moyens de preuve ne
18 portent pas à croire à l'existence d'un lien étroit entre les
19 Moudjahiddines et la 306e Brigade. De plus, une analyse approfondie des
20 liens éventuels entre les Moudjahiddines et la 7e Brigade n'établit pas au-
21 delà de tout doute raisonnable que les Moudjahiddines étaient sous le
22 contrôle effectif du commandement de la 7e Brigade.
23 Par ces motifs notamment, la Chambre ne peut pas conclure au-delà de
24 tout doute raisonnable que les Moudjahiddines étaient sous le contrôle
25 effectif des accusés avant la création du détachement El Moudjahid le 13
26 août 1993.
27 En revanche, le 13 août 1993, Rasim Delic, alors commandant de
28 l'état-major Suprême de l'ABiH, a donné l'ordre de créer le détachement El
Page 19342
1 Moudjahid. Cet ordre prévoyait que le détachement El Moudjahid opèrerait
2 dans la zone de responsabilité du 3e Corps et serait composé de volontaires
3 étrangers présents sur ce territoire. Par cet ordre, les Moudjahiddines
4 établis au camp de Poljanice ont officiellement été incorporés dans les
5 rangs du 3e Corps.
6 De plus, la Chambre conclut qu'à partir du 13 août 1993, l'accusé
7 Hadzihasanovic contrôlait effectivement les Moudjahiddines. Il leur a
8 adressé des ordres de combat que les Moudjahiddines ont exécutés. Suite à
9 ces ordres, les Moudjahiddines ont participé aux opérations de combat avec
10 les unités du 3e Corps, notamment dans la région de Vitez en septembre et
11 octobre 1993.
12 De même, à partir du 13 août 1993, le détachement El Moudjahid
13 apparaît dans les journaux de guerre du 3e Corps.
14 J'en arrive maintenant aux conclusions relatives aux faits reprochés
15 et à la responsabilité pénale individuelle des accusés. Pour cela, je vais
16 examiner tour à tour les différents chefs.
17 Le premier qui est le chef 1, meurtre concernant Dusina. Je rappelle
18 que l'accusé Hadzihasanovic se voit reproché ce chef s'agissant du meurtre
19 de Zvonko Rajic.
20 En raison du conflit armé entre le HVO et l'ABiH en Bosnie centrale
21 au début de l'année 1993, le 2e Bataillon de la 7e Brigade était engagé au
22 combat à Dusina dans la vallée de la Lasva le 26 janvier 1993. Au matin,
23 vers 5 heures ou 6 heures du matin, la 7e Brigade a pris le village de
24 Dusina et a capturé la population civile croate ainsi que plusieurs membres
25 du HVO.
26 Toutefois, dans le hameau de Brdo situé à côté de Dusina, un groupe
27 de soldats du HVO commandé par Zvonko Rajic continuait à résister à
28 l'attaque de la 7e Brigade. Afin d'obtenir leur reddition, les soldats de
Page 19343
1 la 7e Brigade ont menacé d'exécuter les civils déjà faits prisonniers.
2 Suite à ces menaces, l'unité de Zvonko Radic s'est rendue. Selon les
3 éléments du dossier, Zvonko Radic a essayé de s'enfuir et a provoqué ainsi
4 des tirs des membres de la 7e Brigade. L'un des soldats de la 7e Brigade a
5 sorti son pistolet automatique et a froidement abattu Zvonko Rajic de
6 plusieurs balles alors qu'il était blessé et suppliant.
7 S'agissant du meurtre de Niko Kegelj, Stipo Kegelj, Vinko Kegelj, Pero
8 Ljubicic, Augustin Rados, et Vojislav Stanisic, au même moment, la 7e
9 Brigade détenait environ 45 prisonniers dans une maison à Dusina. Un témoin
10 a raconté la façon dont Vehid Subotic, membre de la 7e Brigade, avait
11 ordonné l'exécution de six d'entre eux. Ce jour-là à Dusina, cinq membres
12 du HVO capturés et un civil serbe ont été exécutés par rafales.
13 Par conséquent, la Chambre conclut que Zvonko Rajic, ainsi que cinq
14 autres membres du HVO et un civil serbe, qui ne prenaient pas activement
15 part aux combats, ont été exécutés à Dusina le 26 janvier 1993 par des
16 membres de la 7e Brigade. Les victimes sont Zvonko Rajic, Niko Kegelj,
17 Stipo Kegelj, Vinko Kegelj, Pero Ljubicic, Augustin Rados, et Vojislav
18 Stanisic.
19 En ce qui concerne la responsabilité individuelle de l'accusé
20 Hadzihasanovic pour ce crime, la Chambre estime que l'accusé Hadzihasanovic
21 a été informé des allégations d'un massacre le 26 janvier 1993. La Chambre
22 constate qu'à la lumière des pièces du dossier, le juge de permanence de la
23 cour militaire du district de Zenica a été saisi par le 3e Corps en
24 conformité avec l'article 41 du manuel d'emploi des services de sécurité
25 militaire dans les forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine, et
26 en vertu de l'article 156 du code de procédure pénale en vigueur à
27 l'époque, ce juge a procédé à une enquête. Par conséquent, l'accusé
28 Hadzihasanovic, ayant confié l'affaire aux autorités judiciaires
Page 19344
1 compétentes, ne peut être tenu pénalement responsable de ne pas avoir pris
2 les mesures nécessaires afin de punir les crimes commis à Dusina le 26
3 janvier 1993.
4 Miletici, meurtre. S'agissant du meurtre de Franjo Pavlovic, Tihomir
5 Pavlovic, Vlado Pavlovic et Anto Petrovic.
6 Le 24 avril 1993, un Moudjahiddine arabe a été blessé près de
7 Miletici, qui est un petit village situé dans la vallée de la Biha dans la
8 municipalité de Travnik. Suite à cela, une douzaine de Moudjahiddines
9 étrangers et entre 20 à 30 Moudjahiddines locaux ont attaqué le village de
10 Miletici. Avertis de l'arrivée de Moudjahiddines par leurs voisins
11 musulmans, les villageois croates, craignant pour leurs vies, se sont
12 réfugiés dans la maison de Stipo Pavlovic. Lorsque les Moudjahiddines ont
13 tenté de forcer l'entrée de la maison, Stipo Pavlovic a tué l'un d'entre
14 eux. En réponse, les Moudjahiddines ont lancé dans la maison une grenade
15 tuant Stipo Pavlovic, ont capturé l'ensemble des villageois croates ainsi
16 que trois Musulmans de Miletici et les ont emmenés vers le camp de
17 Poljanice. Toutefois, quatre civils croates en âge de porter les armes,
18 Franjo Pavlovic, Tihomir Pavlovic, Vlado Pavlovic et Anto Petrovic, ont été
19 contraints de rester dans le village. Ils ont été vus agenouillés, et les
20 mains ligotées dans le dos.
21 Suite aux négociations que le commandement du 1er Bataillon de la 306e
22 Brigade stationné à Mehurici a menées avec les Moudjahiddines, les
23 prisonniers ont été relâchés dans la soirée. Le lendemain, le 25 avril
24 1993, les corps de quatre hommes croates mutilés et couverts de sang ont
25 été retrouvés. Ils avaient les mains ligotées dans le dos. Les quatre
26 hommes croates avaient la gorge entaillée, et leur sang avait été recueilli
27 dans une casserole.
28 Vu le déroulement des événements, la Chambre est convaincue que les
Page 19345
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 19346
1 quatre hommes croates ont été tués par des Moudjahiddines étrangers et
2 locaux établis au camp de Poljanice. La Chambre n'a vu aucun élément de
3 preuve tendant à établir que des membres de la 306e ou de la 7e Brigade
4 étaient impliqués dans le crime. Etant donné que les Moudjahiddines basés
5 au camp de Poljanice n'étaient pas sous le contrôle effectif de l'accusé
6 Hadzihasanovic et de l'accusé Kubura en avril 1993, ceux-ci ne peuvent être
7 tenus pénalement responsables du meurtre des quatre hommes croates à
8 Miletici.
9 Toujours le chef 1, Maline, s'agissant du meurtre de 24 Croates. Le
10 nom de ces Croates figure dans le jugement. Le 8 juin 1993, le village de
11 Maline situé dans la vallée de la Bila, a été attaqué par des forces du 1er
12 Bataillon de la 306e Brigade. Après la prise du village, les civils croates
13 et les soldats du HVO faits prisonniers ont été rassemblés au centre du
14 village.
15 Vers 10 heures du matin, une unité de la police militaire de la 306e
16 Brigade est arrivée à Maline. Selon la thèse de la Défense, ces policiers
17 devaient évacuer et protéger les civils dans les villages pris par l'ABiH.
18 Alors que les blessés sont restés sur place, les policiers ont emmené
19 environ 200 personnes, parmi elles des civils et des soldats du HVO en
20 direction de Mehurici. Le commandant de la 306e Brigade a autorisé que l'on
21 installe les blessés dans un camion pour les transporter vers Mehurici.
22 Soudainement, plusieurs Moudjahiddines ont fait irruption dans le village
23 de Maline. Malgré l'interdiction du commandant de la 306e Brigade de
24 s'approcher, les Moudjahiddines ont pris le contrôle du camion et sont
25 partis en enlevant huit blessés et en montrant des signes d'égorgement.
26 Quant aux 200 villageois en route vers Mehurici sous l'escorte des
27 policiers militaires de la 306e Brigade, ils ont été interceptés à la
28 hauteur du camp des Moudjahiddines de Poljanice par des Moudjahiddines
Page 19347
1 étrangers ou locaux masqués et armés. Ils en ont extrait 20 Croates en âge
2 de porter les armes, ainsi qu'une jeune femme avec un brassard de la Croix-
3 Rouge. Les Moudjahiddines ont emmené ces prisonniers vers Bikosi, situé
4 entre Maline et Mehurici.
5 Selon les dires des témoins, les blessés à bord du camion enlevé par
6 les Moudjahiddines ont été emmenés en direction de Bikosi. Non loin de là,
7 ils ont été forcés de descendre du camion et de continuer le chemin à pied.
8 A cet endroit, ils ont été rejoints par la colonne de 20 hommes et de la
9 jeune femme. Ensemble et escortés par environ dix Moudjahiddines étrangers
10 et locaux, ils avançaient tête baissée. Soudain, l'un des prisonniers a été
11 saisi d'une crise d'épilepsie et a commencé à crier. A cet instant, les
12 Moudjahiddines ont tiré sur les prisonniers, d'abord par rafales de
13 mitraillette, ensuite par tirs individuels. Un des témoins rescapé du
14 massacre a déclaré s'être caché sous le corps d'un des prisonniers tués
15 afin d'échapper aux tirs. Il a témoigné avoir vu les Moudjahiddines achever
16 les Croates par des tirs individuels à la tête.
17 La Chambre constate que le 8 juin 1993, 23 hommes croates et une
18 jeune femme ont été exécutés à Bikosi alors qu'ils avaient été faits
19 prisonniers. Quant aux auteurs du massacre, la Chambre conclut qu'il
20 s'agissait de Moudjahiddines étrangers et locaux établis au camp de
21 Poljanice, qui n'étaient pas sous le contrôle effectif du 3e Corps et de la
22 7e Brigade, et ce, le 8 juin 1993. Par ailleurs, la Chambre n'est pas
23 convaincue que des membres de la 306e Brigade ou de la 7e Brigade aient
24 participé à ce massacre. Ainsi, la Chambre estime que les accusés ne
25 peuvent pas être tenus pour pénalement responsables des meurtres commis à
26 Maline.
27 Je reviens maintenant aux chefs 3 et 4, meurtre et mauvais
28 traitement, crimes liés à la détention.
Page 19348
1 Ecole de musique de Zenica. S'agissant des crimes commis à l'école de
2 musique de Zenica, les éléments de preuve présentés à la Chambre de
3 première instance indiquent que des hommes civils croates et serbes de
4 Bosnie et des membres du HVO ont été placés en détention à l'école de
5 musique par des membres de la 7e Brigade à trois reprises : une première
6 fois à la suite des combats de Dusina, fin janvier 93; une deuxième fois
7 après les combats dans la région de Zenica, Vitez et Busovaca, dans la
8 seconde moitié d'avril 1993; et une troisième fois suite à l'éclatement du
9 conflit à Kakanj en juin 1993.
10 La Chambre conclut que des prisonniers de l'école de musique qui ne
11 prenaient pas une part active aux hostilités ont été victimes de
12 traitements cruels infligés par des membres de la 7e Brigade du 26 janvier
13 1993 au 20 août 1993 ou 20 septembre 1993 en ce qui concerne les sévices
14 physiques et psychologiques, et du mois d'avril au mois de juin 1993 en ce
15 qui concerne les conditions de détention.
16 La Chambre prend acte que plus d'une centaine de détenus ont été
17 emprisonnés à l'école de musique durant cette période. Elle a entendu une
18 dizaine de détenus décrire les violences qu'ils ont dû subir. La Chambre,
19 dans son jugement, décrit en détail les sévices subis par les victimes.
20 Mais, sujette à des contraintes de temps, elle se limitera aujourd'hui aux
21 propos de l'un des témoins. Ce témoin a ainsi raconté que la nuit les
22 détenus étaient emmenés un par un depuis leur cellule à l'étage de l'école
23 de musique et que là, feux éteints, ils devaient passer au milieu d'une
24 colonne de soldats qui les passaient à tabac au moyen de manches de pelle
25 en bois. Le même témoin a déclaré qu'un jour, un policier militaire a
26 ordonné à un père de frapper son fils handicapé mental. Devant le refus du
27 père, un autre détenu a été contraint d'exécuter cet ordre. Il a expliqué
28 qu'à une autre occasion, il a eu les mains fracturées à force de se
Page 19349
1 protéger la tête des coups. Ce témoin a décrit que les détenus ne
2 recevaient pas suffisamment de nourriture, et qu'elle était principalement
3 composée de pain moisi. Seuls trois ou quatre planches en bois étaient
4 prévues pour leur logement.
5 D'autres témoins ont également affirmé qu'ils étaient privés d'accès
6 à des installations sanitaires adéquates et à des soins médicaux.
7 La Chambre est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que dès
8 le 8 mai 1993, l'accusé Hadzihasanovic avait à sa disposition des éléments
9 d'information alarmants sur le fait que ses subordonnés commettaient des
10 violences physiques et psychologiques à l'égard de l'école de musique de
11 Zenica, enfin, à l'égard des détenus à l'école de musique de Zenica,
12 violence constitutive de traitements cruels. En revanche, la Chambre estime
13 que l'accusé Hadzihasanovic n'avait pas connaissance des mauvaises
14 conditions de vie qui y régnaient. Il a été établi que l'accusé
15 Hadzihasanovic a manqué à l'obligation qui lui incombait en sa qualité de
16 supérieur hiérarchique de prendre les mesures nécessaires et raisonnables
17 qui s'imposaient en l'espèce pour empêcher ou punir ces crimes. En effet,
18 l'accusé Hadzihasanovic n'a pas déployé de véritables efforts pour ouvrir
19 une enquête appropriée sur les accusations de traitements cruels, alors
20 qu'une telle enquête lui aurait permis de découvrir l'identité des
21 responsables de ces sévices. Par ailleurs, il ne s'est pas acquitté de
22 l'obligation qui lui incombait de prendre toutes les mesures appropriées
23 pour mettre fin aux sévices que ses subordonnés infligeaient aux détenus.
24 Il ne s'est pas non plus acquitté de l'obligation qui était la sienne de
25 punir les soldats qui auraient été identifiés s'il avait ouvert une
26 enquête, comme étant les responsables des sévices ou de prendre des mesures
27 pour qu'ils soient punis. Enfin, en ne sanctionnant pas les auteurs des
28 crimes commis, l'accusé Hadzihasanovic ne s'est pas acquitté de son devoir
Page 19350
1 d'empêcher la commission ultérieure à l'école de musique de crimes de
2 traitements cruels à l'égard des prisonniers détenus à l'école de musique.
3 En revanche, la Chambre estime que l'Accusation n'a pas prouvé au-
4 delà de tout doute raisonnable que l'accusé Amir Kubura avait connaissance
5 des crimes commis par ses subordonnés à l'école de musique de Zenica,
6 n'ayant été aucunement informé des faits qui s'y étaient déroulés.
7 Caserne de l'ex-JNA à Travnik.
8 Selon des éléments du dossier, la Chambre a constaté que des civils
9 croates et serbes de Bosnie, ainsi que des membres du HVO, ont été placés
10 en détention au sous-sol de la caserne de l'ex-JNA à Travnik entre les mois
11 de mai et octobre de l'année 1993.
12 La Chambre conclut qu'il a été établi au-delà de tout doute
13 raisonnable que durant cette période, ces prisonniers qui prenaient pas une
14 part active aux hostilités ont été victimes de traitement cruel infligé par
15 des membres de la police militaire de la 17e Brigade. Il ressort des
16 témoignages que les gardiens de la caserne ont battu, parfois à plusieurs
17 reprises et pendant plusieurs heures, les détenus en leur assénant des
18 coups-de-poing à l'aide de divers objets, ainsi que des coups de pied. Un
19 témoin a, par exemple, évoqué, dès sa première nuit de détention, qu'il a
20 été battu avec une telle violence par trois ou quatre soldats qu'il s'est
21 évanoui. Il a connu le même sort pendant les 50 jours qui ont succédé, et
22 souffre à ce jour encore des séquelles suite aux sévices qu'il a subis
23 durant sa détention à la caserne. Un autre témoin a déclaré que de sa
24 cellule il entendait des cris et des gémissements des autres détenus ainsi
25 que les coups assénés par les gardiens.
26 La Chambre conclut que les actes perpétrés sur les détenus à la caserne de
27 l'ex-JNA sont constitutifs de traitement cruel. Toutefois, toujours à la
28 lecture des pièces du dossier, la Chambre estime que l'Accusation n'a pas
Page 19351
1 prouvé au-delà de tout doute raisonnable que l'accusé Hadzihasanovic avait
2 connaissance des traitements cruels commis par ses subordonnés à la caserne
3 de l'ex-JNA à Travnik, n'ayant pas été informé desdits faits.
4 L'école élémentaire de Mehurici et la forge de Mehurici. La Chambre
5 constate que quelque 250 civils croates de Bosnie et environ 20 à 30
6 soldats du HVO ont été placés en détention par la 306e Brigade à l'école
7 élémentaire de Mehurici et à la forge de Mehurici à deux reprises. Le 6
8 juin 1993, à la suite des combats sporadiques de Velika, Bukovica et de
9 Ricice, et le 8 juin 1993, à la suite de nouveaux éclatements du conflit
10 entre le HVO et l'ABiH à Maline, l'école élémentaire de Mehurici était
11 gardée et administrée par le 1er Bataillon de la 306e Brigade.
12 L'Accusation n'a pas prouvé au-delà de tout doute raisonnable que les
13 civils croates enfermés à l'école élémentaire de Mehurici ont été victimes
14 de sévices physiques graves et de conditions de détention constitutives de
15 traitement cruel. En revanche, les détenus enfermés dans la forge de
16 Mehurici, pour la plupart des membres du HVO, ont fait l'objet de passages
17 à tabac infligés par des membres du 1er Bataillon de la 306e Brigade.
18 Quant aux conditions de détention, un témoin a déclaré avoir partagé une
19 cellule avec dix à 15 prisonniers. Ils étaient entassés dans un espace
20 tellement exigu, de 2 mètres sur 3, qu'il leur était impossible de dormir.
21 La seule source de lumière de la cellule était obstruée de sorte que les
22 prisonniers étaient plongés dans l'obscurité. Le premier jour de leur
23 incarcération à la forge, l'eau et la nourriture n'étaient pratiquement pas
24 distribuées. Par la suite, les détenus de la forge recevaient de temps en
25 temps une boîte de conserve et un pain à partager entre eux.
26 Ils ont dû subir ces conditions de détention durant un mois environ.
27 Il a été démontré que ces privations étaient le fruit d'une décision
28 délibérée et non le produit de la nécessité. Il ne fait aucun doute pour la
Page 19352
1 Chambre que les traitements subis par les prisonniers de la forge, qui ne
2 participaient pas directement aux hostilités, sont constitutifs de
3 traitement cruel.
4 Cependant, la Chambre estime qu'il n'a pas été établi au-delà de tout doute
5 raisonnable que l'accusé Hadzihasanovic avait connaissance des traitements
6 cruels commis par ses subordonnés à la forge de Mehurici, n'ayant pas été
7 informé des faits.
8 Motel Sretno. La Chambre constate que le 18 mai 1993, alors qu'un accord de
9 cessez-le-feu venait d'être signé entre le HVO et l'ABiH, de nouveaux
10 incidents ont éclaté entre les deux forces armées à Kakanj. Suite à une
11 embuscade tendue par le HVO au cours de laquelle plusieurs policiers
12 militaires de la 7e Brigade ont été faits prisonniers, 16 civils croates et
13 serbes de Bosnie et membres du HVO ont été arrêtés par des membres de la
14 police militaire de la 7e Brigade et des soldats locaux du 3e Bataillon de
15 la 7e Brigade. Ces 16 Croates et Serbes ont été placés en détention au
16 motel Sretno, lequel abritait le 3e Bataillon de la 7e Brigade.
17 La Chambre conclut qu'il a été établi au-delà de tout doute raisonnable que
18 les 16 personnes conduites au motel Sretno le 18 mai 1993, qui ne prenaient
19 pas une part active aux hostilités, ont subi plusieurs séquences de
20 passages à tabac jusqu'au lendemain matin, le 19 mai 1993, jour de leur
21 libération. Dans une première phase, ils ont subi un interrogatoire
22 accompagné de coups de botte, de crosse de fusil et des coups-de-poing.
23 Dans une seconde phase, les détenus ont été obligés de se frapper
24 mutuellement. Dans une troisième phase, ils ont dû traverser un rang de
25 soldats qui les battaient à coup de crosse de fusil. Un témoin a raconté
26 qu'il ne s'est pas relevé et qu'il a perdu connaissance après avoir reçu
27 plus d'une dizaine de coups de matraque sur la tête. Dans une quatrième et
28 dernière phase, les détenus ont dû placer la tête entre les barreaux de
Page 19353
1 leurs cellules et se sont vus asséner des coups au moyen des morceaux de
2 bois. Les éléments de preuve démontrent qu'à la suite de ces brutalités,
3 certaines victimes ont eu plusieurs côtes cassées, les reins déplacés ou la
4 colonne vertébrale endommagée.
5 La Chambre est convaincue que parmi les auteurs de ces mauvais traitements
6 figuraient des soldats du 3e Bataillon de la 7e Brigade.
7 Il a été démontré au-delà de tout doute raisonnable qu'un Serbe de
8 Bosnie a pareillement été soumis à des sévices physiques graves entre le 18
9 et le 21 juin 1993, mais il n'est pas établi qu'ils ont été administrés par
10 des membres du 3e Bataillon de la 7e Brigade.
11 La Chambre est d'avis que l'accusé Hadzihasanovic avait connaissance
12 des mauvais traitements commis par ses subordonnés au motel Sretno le 18 et
13 19 mai 1993. Cependant, la Chambre estime que l'Accusation ne s'est pas
14 acquittée de son devoir de prouver l'omission d'agir de l'accusé
15 Hadzihasanovic par rapport aux faits accumulés au motel Sretno, et par cela
16 n'a pas prouvé l'inexistence de mesures prises par l'accusé Hadzihasanovic.
17 L'Accusation n'a pas avancé un quelconque élément de preuve ayant une
18 valeur suffisamment probante attestant de l'absence de mesures punitives
19 prises par l'accusé Hadzihasanovic à la suite des crimes commis au motel
20 Sretno.
21 Concernant l'accusé Kubura, la Chambre n'est pas convaincue au-delà de tout
22 doute raisonnable qu'il avait connaissance de crimes commis par ses
23 subordonnés au motel Sretno, n'ayant pas été informé desdits faits.
24 J'en viens maintenant aux lieux de détention à Bugojno. En juillet 1993, le
25 conflit entre le HVO et l'ABiH a éclaté à Bugojno. Le 24 juillet 1993, une
26 centaine de soldats appartenant au HVO et 150 civils environ ont été
27 capturés par des soldats de la 307e Brigade dans la ville de Bugojno. La
28 plupart d'entre eux ont été transférés dans les différents lieux de
Page 19354
1 détention identifiés par l'acte d'accusation, soit le magasin de meubles
2 Slavonija, le couvent de Bugojno, le lycée Gimnazija, l'école élémentaire
3 Vojin Paleksic, le stade du football club Iskra, et la BH Banka. La Chambre
4 observe que parmi les prisonniers civils il y avait des mineurs d'âge et
5 des familles.
6 La Chambre considère qu'à l'exception du lieu de détention dénommé BH
7 Banka, il a été établi au-delà de tout doute raisonnable que des détenus
8 emprisonnés dans chacun de ces lieux de détention, qui ne participaient pas
9 directement aux conflits, ont été victimes de traitement cruel. Des
10 éléments de preuve ont permis d'établir que les conditions de détention
11 étaient insuffisantes et inadéquates. En fonction du centre de détention
12 visé, la nourriture était insuffisante, voire parfois inexistante et
13 inadéquate. L'accès à des installations sanitaires adéquates était limité
14 sans raison valable, ou inexistant. Les conditions de logement étaient
15 pauvres ou absentes. Les locaux de détention étaient dépourvus de lumière
16 ou trop exigus par rapport au nombre de détenus. Ensuite, les éléments de
17 preuve présentés ont démontré que des prisonniers ont été soumis de manière
18 répétée à des violences physiques durant leur détention.
19 Fin juillet ou début août 1993, plusieurs détenus, dont Mario Zrno, un
20 prisonnier de guerre, ont été conduits en dehors du couvent de Bugojno et
21 ont été victimes de sévices corporels graves. Mario Zrno n'a pas survécu
22 aux coups infligés. La nuit du 5 août 1993, cinq ou six prisonniers, parmi
23 lesquels Mladen Havranek, un prisonnier de guerre, ont été sévèrement
24 passés à tabac à l'étage du magasin de meubles Slavonija. Plusieurs témoins
25 ont relaté avoir entendu, depuis la cellule du sous-sol, que Mladen
26 Havranek hurlait et suppliait d'arrêter de le frapper. A la suite des
27 passages à tabac endurés, Mladen Havranek ne pouvait plus marcher et a été
28 traîné dans les escaliers vers la cellule du sous-sol. Mladen Havranek a
Page 19355
1 succombé à ses blessures la même nuit.
2 La Chambre estime que les crimes de meurtre de Mario Zrno et Mladen
3 Havranek ont été établis au-delà de tout doute raisonnable. La Chambre
4 conclut qu'il a été démontré que le traitement cruel subi par les détenus
5 dans les lieux de détention précités était le fait des membres de la 307e
6 Brigade. Cependant, elle estime qu'il n'a pas été établi que les auteurs
7 des sévices infligés aux détenus emmenés en dehors du couvent de Bugojno et
8 du meurtre de Mario Zrno appartenaient à la 307e Brigade et que les
9 gardiens de la 307e Brigade présents sur les lieux pouvaient empêcher la
10 commission de ces crimes.
11 La Défense de l'accusé Hadzihasanovic allègue que l'ingérence de la
12 présidence de Guerre de Bugojno dans le fonctionnement des centres de
13 détention établis à Bugojno a eu pour effet de modifier le commandement
14 exercé par l'accusé Enver Hadzihasanovic sur le Groupe opérationnel Zapad
15 et la 307e Brigade.
16 La Chambre observe que le 3e Corps était de fait l'autorité qui avait le
17 pouvoir de décider de la détention, du maintien en détention et du
18 transfert des personnes incarcérées dans les centres de détention créés à
19 Bugojno. Bien qu'une coordination existait entre les autorités civiles et
20 les autorités militaires aux fins de régler certains aspects de leur
21 fonctionnement, la Chambre est d'avis que la responsabilité des prisonniers
22 incombait entièrement au 3e Corps.
23 Les éléments de preuve ont permis d'établir au-delà de tout doute
24 raisonnable que, dès le 18 août 1993, l'accusé Hadzihasanovic a eu
25 connaissance d'un rapport dénonçant les crimes de traitement cruel subi par
26 cinq ou six prisonniers de guerre ainsi que du meurtre de l'un d'entre eux,
27 Mladen Havranek, au magasin de meubles Slavonija. Les éléments
28 d'information qu'il avait à sa disposition à partir de cette date, c'est-à-
Page 19356
1 dire le 18 août 1993, ne lui permettaient cependant pas de conclure que
2 d'autres crimes de mauvais traitement avaient été commis par ses
3 subordonnés avant le 18 août 1993, ni que les conditions de détention
4 étaient insuffisantes.
5 La Chambre conclut qu'il a été établi que malgré sa connaissance des
6 traitements cruels subis par six prisonniers de guerre au magasin de
7 meubles Slavonija et du meurtre de l'un d'entre eux, l'accusé
8 Hadzihasanovic s'est contenté de mesures disciplinaires pour punir les
9 auteurs de ces crimes. En ne prenant pas les mesures appropriées qui
10 s'imposaient en l'espèce, la Chambre estime qu'il a failli à son devoir
11 d'intervenir afin de prévenir les actes de mauvais traitements commis après
12 le 18 août 1993 au magasin de meubles Slavonija, à l'école Vojin Paleksic,
13 au lycée Gimnazija et au stade du football club Iskra.
14 Camp d'Orasac. Comme il a été indiqué précédemment, le détachement El
15 Moudjahid a été incorporé dans l'ABiH au mois d'août 1993. Cette unité
16 disposait d'un camp à Orasac. Les éléments de preuve ont permis d'établir
17 qu'à la suite de la mort de plusieurs Moudjahiddines et de la détention de
18 Moudjahiddines blessés au cours de l'embuscade tendue par le HVO, des
19 membres du détachement El Moudjahid ont enlevé cinq civils croates au cœur
20 de Travnik le 15 octobre 1993 et les ont conduits au camp d'Orasac. Les
21 derniers prisonniers de cette première vague d'enlèvement ont été libérés
22 le 20 octobre 1993. Le 19 octobre 1993, des membres du détachement ont
23 enlevé cinq autres civils appartenant à la communauté croate et serbe de
24 Travnik. Ils ont libéré un premier prisonnier quelques jours plus tard,
25 deux prisonniers le 6 novembre 1993, et le dernier prisonnier, mineur d'âge
26 au moment des faits, vers le 7 décembre 1993.
27 La Chambre conclut qu'il n'a pas été établi au-delà de tout doute
28 raisonnable que les prisonniers de la première vague d'enlèvement ont fait
Page 19357
1 l'objet de traitement cruel. En revanche, les éléments de preuve présentés
2 ont permis d'établir que les prisonniers de la deuxième vague d'enlèvement
3 qui ne participaient pas directement aux hostilités ont été victimes de
4 sévices corporels graves et de sévices psychologiques infligés par des
5 membres du détachement El Moudjahid.
6 La Chambre conclut par ailleurs qu'il a été prouvé au-delà de tout doute
7 raisonnable que le 21 octobre 1993, Dragan Popovic, qui ne prenait pas une
8 part active aux hostilités, a été exécuté par des membres du détachement.
9 La Chambre note que ce meurtre a été particulièrement odieux.
10 Dragan Popovic a été amené avec trois autres prisonniers dans un pré où un
11 fossé avait été creusé. Une centaine -- enfin, une cinquantaine, voire une
12 centaine de soldats du détachement El Moudjahid se tenaient autour de la
13 fosse en criant. Dragan Popovic a été poussé jusqu'au bord de la fosse et
14 est tombé sur son flanc sous l'effet d'un croche-pied. Un soldat a ensuite
15 tenté de le décapiter au moyen d'une hachette, mais n'y parvenant pas, un
16 autre soldat a dû achever l'exécution. Les autres prisonniers ont ensuite
17 été contraints d'embrasser la tête du défunt tandis que les soldats
18 criaient en signe de célébration.
19 La Chambre conclut qu'il a été prouvé au-delà de tout doute raisonnable que
20 dès le 20 octobre 1993, l'accusé Enver Hadzihasanovic savait que cinq
21 civils croates et serbes avaient été enlevés la veille par ses subordonnés.
22 Il avait également des raisons de savoir que ceux-ci s'apprêtaient à
23 commettre des crimes de mauvais traitement et de meurtre à l'égard des
24 civils enlevés, ou l'avaient fait. Il avait connaissance des massacres de
25 civils croates perpétrés par les Moudjahiddines à Maline, Miletici, et de
26 l'enlèvement de Zivko Totic. Il savait également que les Moudjahiddines
27 n'avaient pas reçu un quelconque enseignement des règles les plus
28 fondamentales du droit international humanitaire. Les éléments de preuve
Page 19358
1 ont permis également de prouver que le 20 octobre 1993, il était informé
2 des mesures qui avaient été prises jusque-là par Mehmed Alagic, commandant
3 du Groupe opérationnel Bosanska Krajina, pour résoudre la crise en cours.
4 Il savait que Mehmed Alagic avait menacé les Moudjahiddines d'utiliser la
5 force à leur encontre s'ils ne relâchaient pas les civils enlevés et que
6 ces menaces avaient échoué.
7 Malgré le risque réel de voir ses subordonnés répéter leurs agissements
8 criminels antérieurs, l'accusé Hadzihasanovic a décidé de privilégier la
9 voie passive des négociations avec ses subordonnés pour obtenir la
10 libération des civils enlevés. Il a été établi que le 3e Corps de l'ABiH
11 n'a jamais eu l'intention d'employer les moyens militaires à l'encontre du
12 détachement El Moudjahid. La Chambre est d'avis que les circonstances
13 étaient telles, que dès le 20 octobre 1993, le 3e Corps se devait
14 d'utiliser immédiatement la force comme unique mesure nécessaire et
15 raisonnable pour prévenir les crimes commis à Orasac. La Chambre conclut
16 que l'accusé Hadzihasanovic avait la capacité matérielle d'intervenir par
17 la force contre ses subordonnés et qu'il disposait d'un délai nécessaire
18 pour mettre en œuvre des mesures concrètes et précises en vue d'obtenir la
19 libération des civils enlevés.
20 La Chambre est, en outre, d'avis que l'accusé Hadzihasanovic
21 possédait, dès l'entrée du détachement El Moudjahid dans ses rangs, des
22 éléments d'information nous permettant de conclure qu'il y avait un risque
23 réel et raisonnablement prévisible de violation de la part des membres du
24 détachement El Moudjahid. Il connaissait leur comportement violent et
25 dangereux. Il n'a pas veillé à enseigner aux membres du détachement les
26 règles les plus fondamentales du respect du droit international
27 humanitaire. En dépit de ces informations alarmantes, il a décidé de tirer
28 militairement avantage du détachement, alors que rien n'obligeait le 3e
Page 19359
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 19360
1 Corps à utiliser les Moudjahiddines dans les combats.
2 Il est clair pour la Chambre que l'accusé Enver Hadzihasanovic s'est
3 mis dans une situation où il risquait de ne pas pouvoir prendre les mesures
4 appropriées qui, éventuellement, allaient s'imposer. En revanche, il ne
5 sera pas déclaré coupable pour avoir omis de punir les auteurs de ce crime,
6 étant donné qu'il n'a eu connaissance du crime que le 6 novembre 1993, date
7 à laquelle il avait déjà quitté ses fonctions.
8 Chef 5 : destruction sans motif que ne justifient pas les exigences
9 militaires dans les municipalités de Zenica, Travnik et Vares.
10 D'après l'acte d'accusation, des destructions illicites arbitraires non
11 justifiées par des exigences militaires ont été commises à l'encontre
12 d'habitations, de bâtiments et de biens personnels civils appartenant à des
13 Croates de Bosnie et à des Serbes de Bosnie par des forces du 3e Corps à
14 Guca Gora, Maline, Susanj, Ovnak, Brajkovici, Grahovcici et Cukle, au mois
15 de juin 1993.Toutefois, en regard des éléments du dossier, la Chambre
16 constate que s'il avérait que certains bâtiments et habitations appartenant
17 à la communauté croate de Bosnie ont été détruits ou endommagés durant les
18 opérations de combat à Guca Gora, Maline, Susanj, Ovnak, Brajkovici,
19 Grahovcici et Cukle, le 8 juin 1993, l'Accusation n'a pas prouvé hors de
20 tout doute raisonnable que ces destructions ont été commises sur une grande
21 échelle et n'étaient pas justifiées par des exigences militaires.
22 Les observateurs internationaux présents sur les lieux durant les combats
23 n'ont remarqué que quelques maisons en feu ou détruites. Ils ont estimé que
24 ces dommages n'étaient pas intentionnels, mais qu'ils étaient notamment
25 causés par des éclats d'obus. La Chambre estime, eu égard à l'ensemble des
26 moyens de preuve, qu'il n'est pas établi d'une part que ces destructions
27 aient été exécutées sur une grande échelle, et d'autre part qu'elles
28 n'étaient pas justifiées par les exigences militaires. Par ailleurs, la
Page 19361
1 Chambre note que les éléments versés au dossier concernant les destructions
2 qui ont eu lieu après les opérations de combat ne permettent pas d'établir
3 l'identité des auteurs des destructions, les dates ou les circonstances
4 dans lesquelles les biens ont été détruits.
5 Par conséquent, la Chambre constate que la responsabilité de l'accusé
6 Hadzihasanovic et de l'accusé Amir Kubura ne peut être tenue pour ce chef
7 dans lesdites localités.
8 L'Accusation a également allégué que les destructions ont été
9 commises au village de Vares durant le mois de novembre 1993 par des unités
10 de la 7e Brigade.
11 Selon des éléments de preuve, au moment où les 2e et 3e Bataillons de
12 la 7e Brigade sont entrés dans la ville de Vares le 4 novembre 1993, la
13 ville était désertée par les habitants. Les forces du HVO avaient également
14 quitté les lieux.
15 D'après les dires des observateurs internationaux présents à Vares le
16 4 novembre 1993, le chaos y régnait. Les soldats de le 7e Brigade tiraient
17 en l'air pour découvrir d'éventuelles embuscades dans un premier temps,
18 puis en guise de célébration. Ils brisaient des fenêtres, cassaient des
19 portes, notamment pour s'approprier des biens se trouvant dans les maisons
20 et magasins des habitants croates de Vares. Les devantures de la quasi-
21 totalité des magasins ont été brisées.
22 La Chambre considère par conséquent que ces destructions partielles
23 ou totales des bâtiments et des maisons ont été commises sur une grande
24 échelle. Par ailleurs, les éléments de preuve permettent d'établir que ces
25 destructions n'étaient en aucune façon justifiées par des exigences
26 militaires et qu'elles ont été commises de manière délibérée par des
27 soldats de la 7e Brigade, notamment dans le but de piller des biens.
28 La Chambre estime cependant que l'Accusation n'a pas prouvé au-delà de tout
Page 19362
1 doute raisonnable que l'accusé Kubura avait connaissance des destructions
2 commises par ses subordonnés le 4 novembre 1993 à Vares, n'ayant pas été
3 informé de ces destructions.
4 J'en arrive au chef 6 : pillages des biens publics ou privés dans les
5 municipalités de Zenica, Travnik et Vares. J'aborderai après le chef 7 et
6 je serai, sous le contrôle du Greffier, contraint à interrompre la lecture
7 pour permettre la pause technique. Bien.
8 J'en arrive donc au chef 6 : pillages de biens publics ou privés dans les
9 municipalités de Zenica, Travnik et Vares.
10 L'Accusation allègue que la 7e Brigade et la 306e Brigade ont pillé
11 des habitations, des bâtiments et des biens personnels appartenant à des
12 Croates de Bosnie et à des Serbes de Bosnie à Miletici en avril 1993.
13 Des éléments de preuve indiquent que des pillages ont été commis à
14 Miletici au mois d'avril 1993. La Chambre constate cependant que ni les
15 unités de la 7e Brigade ni celles de la 306e Brigade n'étaient présentes à
16 Miletici durant l'attaque et que celles-ci n'ont pas participé aux
17 pillages.
18 L'acte d'accusation allègue que les forces du 3e Corps ont pillé des
19 habitations, des bâtiments et des biens personnels appartenant à des
20 Croates et des Serbes de Bosnie et Guca Gora, Maline, Cukle, Susanj, Ovnak,
21 Braskovici, Grahovcici en juin 1993.
22 Les éléments de preuve indiquent que des pillages ont été commis à la
23 suite des combats du mois de juin 1993 à Guca Gora et Maline par des
24 membres de la 306e Brigade; à Cukle par des membres de la 7e Brigade; et à
25 Susanj, Ovnak, Braskovici et Grahovcici par des membres de la 314e et de la
26 7e Brigade.
27 De nombreux témoins ont déclaré avoir constaté que les maisons des
28 Croates et des Serbes de la région avaient fait l'objet de fouilles et que
Page 19363
1 des soldats de l'ABiH entassaient dans des camions des biens se trouvant
2 dans les maisons. En rentrant chez eux, les habitants ont vu que leur
3 maison avait été saccagée. Des biens tels que des appareils
4 électroménagers, des meubles, des vêtements, des voitures, de la
5 nourriture, du bétail, du matériel de construction ont été dérobés à des
6 habitants de villes ou villagesvisés dans l'acte d'accusation.
7 De l'avis de la Chambre, ces pillages ont été commis de manière
8 répétée et généralisée. Par ailleurs, la Chambre estime que ces biens ont
9 été appropriés de manière illicite et délibérée.
10 La Chambre est d'avis que l'accusé Hadzihasanovic avait connaissance
11 des pillages commis par ses subordonnés au mois de juin 1993 à Guca Gora,
12 Maline, Cukle, Susanj, Ovnak, Braskovici et Grahovcici. Cependant, la
13 Chambre estime que l'Accusation n'a pas prouvé que l'accusé Hadzihasanovic
14 avait omis de prendre des mesures préventives et punitives à l'encontre des
15 auteurs de pillages. La Chambre estime, en outre, que l'accusé
16 Hadzihasanovic n'est pas resté indifférent aux problèmes auxquels il était
17 confronté au mois de juin 1993 et qu'il a fait preuve d'une volonté avérée
18 de solutionner de manière efficace cette question au vu de moyens à sa
19 disposition.
20 La Chambre est d'avis que s'agissant des pillages commis à Maline,
21 l'accusé Kubura ne peut être tenu responsable des faits reprochés à Maline,
22 l'Accusation n'ayant pas prouvé au-delà de tout doute raisonnable que la 7e
23 Brigade était présente sur les lieux.
24 En revanche, s'agissant des pillages commis dans les villes de Susanj,
25 Ovnak, Brajkovici et Grahovcici, la Chambre est d'avis que l'accusé Kubura
26 avait connaissance des pillages commis par la police militaire de la 7e
27 Brigade au mois de juin 1993 et qu'il a donné son consentement à la
28 répartition des biens pillés entre les membres de la 7e Brigade. L'accusé
Page 19364
1 Kubura a manqué à son obligation de prendre des mesures punitives à
2 l'encontre des auteurs de ces crimes.
3 L'Accusation allègue que la 7e Brigade a pillé des habitations, des
4 bâtiments et des biens personnels appartenant à des Croates ou des Serbes
5 de Bosnie à Vares au mois de novembre 1993.
6 Au regard des éléments de preuve, la Chambre constate que des pillages ont
7 été commis par des soldats de la 7e Brigade le 4 novembre 1993 à Vares. Des
8 observateurs internationaux ont tous fait état de pillages incontrôlés. Les
9 soldats de la 7e Brigade pillaient tout ce qu'ils pouvaient trouver : des
10 voitures, des vivres, des appareils électroménagers et des meubles.
11 Ainsi, il ne fait aucun doute pour la Chambre que ces pillages ont eu
12 lieu de manière extensive et répétée. Par ailleurs, la Chambre estime que
13 ces biens ont été appropriés de manière illicite et délibérée. Il ressort
14 notamment des éléments de preuve que l'appropriation de vivres constituait
15 une question logistique pour la 7e Brigade et que la collecte de biens
16 s'est faite de manière organisée par le commandement de la 7e Brigade.
17 La Chambre est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que dès le 4
18 novembre 1993, l'accusé Kubura disposait de renseignements l'informant que
19 ses subordonnés commettaient des pillages à Vares. Il a été établi que
20 l'accusé Kubura, en omettant de prendre des mesures punitives à l'encontre
21 des auteurs des pillages déjà commis au mois de juin 1993 dont il a eu
22 connaissance, a manqué à son obligation de prévenir les pillages commis à
23 Vares au mois de novembre 1993. Par ailleurs, l'accusé Kubura ne s'est pas
24 non plus acquitté de son obligation de prendre des mesures à l'encontre des
25 auteurs de ces crimes et a même organisé la distribution des biens pillés.
26 J'en arrive au dernier chef, qui est celui de la destruction ou
27 endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion dans la
28 municipalité de Travnik.
Page 19365
1 Des éléments de preuve présentés à la Chambre de première instance
2 indiquent que le monastère de Guca Gora ainsi que l'église de Saint-Jean
3 Baptiste de Travnik ont été endommagés au mois de juin 1993. En effet, les
4 membres de la police militaire de la 306e Brigade et des observateurs
5 internationaux ont pu constater qu'au monastère de Guca Gora, qui était
6 tant un lieu sacré qu'historique pour la communauté croate catholique, les
7 stèles et l'orgue étaient détruits, les fresques et les murs étaient
8 recouverts en partie d'inscriptions en arabe. A l'église de Travnik, des
9 destructions et dégradations similaires ont pu être constatées : les
10 peintures, orgues et vitres étaient détruits ou saccagés, et des statues de
11 saints décapitées.
12 Pour la Chambre, il ne fait aucun doute que ces actes d'endommagement
13 constituent des actes de profanation. Cependant, au regard des éléments du
14 dossier, les auteurs de ces actes étaient les Moudjahiddines. Comme la
15 Chambre l'a constaté, l'Accusation n'a pas pu établir qu'ils étaient, au
16 moment des faits, subordonnés au 3e Corps.
17 Il me reste le dispositif à lire, qui fait huit pages. Nous n'aurons pas le
18 temps en raison du fait qu'on est obligé de faire une pause. Alors, nous
19 allons faire une pause de quelques minutes, de deux ou trois minutes, juste
20 pour changer les bandes, et nous reviendrons dans quelques minutes. On peut
21 rester, bon. Alors, personne ne bouge, on change les bandes, et dès qu'on
22 me fait signe que les bandes ont été changées, je continuerai la lecture.
23 Bien. L'audience est donc reprise. Je vais poursuivre la lecture en
24 lisant le dispositif. Je vais demander à l'accusé Enver Hadzihasanovic de
25 bien vouloir se lever.
26 [L'accusé Hadzihasanovic se lève]
27 Par ses motifs, la Chambre, statuant à l'unanimité de ses membres, vu les
28 articles 23 et 24 du Statut et 98 ter, 101, 102 et 103 du Règlement,
Page 19366
1 siégeant en audience publique, déclare l'accusé Hadzihasanovic en tant que
2 supérieur hiérarchique en vertu des articles 3 et 7(3) du Statut.
3 Chef 1 : Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
4 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre à Dusina le 26 janvier 1993
5 de sept hommes croates et serbes de Bosnie.
6 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
7 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre à Miletici le 24 avril 1993
8 de quatre hommes croates de Bosnie.
9 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
10 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre à Maline le 8 juin 1993 de
11 23 hommes et d'une jeune fille croate de Bosnie.
12 Chef 2 : La Chambre rappelle que lors de sa décision relative aux
13 demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la Chambre avait
14 déclaré l'accusé Hadzihasanovic non coupable de ne pas avoir pris des
15 mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir les traitements
16 cruels à Dusina le 26 janvier 1993 de sept hommes croates et serbes de
17 Bosnie.
18 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
19 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à Miletici le 24
20 avril 1993 de quatre hommes croates de Bosnie.
21 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
22 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à Maline le 8
23 juin 1993 de 27 hommes et d'une jeune fille croate de Bosnie.
24 Chef 3 : La Chambre rappelle que lors de sa décision relative aux
25 demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, elle avait déclaré
26 l'accusé Hadzihasanovic non coupable de ne pas avoir pris les mesures
27 nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre d'un détenu
28 croate dans la caserne de l'ex-JNA à Travnik en mai 1993.
Page 19367
1 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
2 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre de Jozo Maracic à l'école de
3 musique de Zenica le 18 juin 1993.
4 La Chambre déclare, ce jour, l'accusé Hadzihasanovic non coupable de
5 ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher le
6 meurtre de Mladen Havranek au magasin de meubles Slavonija à Bugojno le 5
7 août 1993.
8 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
9 pour punir le meurtre de Mladen Havranek au magasin de meubles Slavonija à
10 Bugojno le 5 août 1993.
11 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
12 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre de Mario Zrno au couvent de
13 Bugojno au début du mois d'août 1993.
14 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
15 pour empêcher le meurtre de Dragan Popovic par décapitation rituelle au
16 camp d'Orasac le 21 octobre 1993.
17 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
18 raisonnables pour punir le meurtre de Dragan Popovic par décapitation
19 rituelle au camp d'Orasac le 21 octobre 1993.
20 Chef 4 : Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
21 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à l'école de
22 musique de Zenica dans la période du 26 janvier, ou vers cette date, au 31
23 octobre 1993.
24 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
25 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à la caserne de
26 l'ex-JNA à Travnik dans la période du mois de mai 1993, environ, au 31
27 octobre 1993.
28 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
Page 19368
1 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à l'école
2 élémentaire de Mehurici dans la période du 6 juin, ou vers cette date,
3 jusqu'au 24 juin 1993 au moins.
4 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
5 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à la forge de
6 Mehurici dans la période du 6 juin 1993, ou vers cette date, jusqu'au 13
7 juillet 1993 au moins.
8 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
9 pour empêcher les traitements cruels au camp d'Orasac dans la période du 15
10 octobre au 31 octobre 1993.
11 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
12 raisonnables pour punir les traitements cruels au camp d'Orasac dans la
13 période du 15 octobre, ou vers cette date, au 31 octobre 1993.
14 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
15 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels au motel Sretno
16 dans la période du 15 mai, ou vers cette date, jusqu'au 21 juin 1993 au
17 moins.
18 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
19 pour empêcher ou punir les traitements cruels au lycée Gimnazija à Bugojno
20 dans la période du 18 juillet, ou vers cette date, jusqu'au 13 octobre 1993
21 au moins.
22 Non coupable de ne pas avoir pris des mesures nécessaires et
23 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels au couvent de
24 Bugojno dans la période du 24 juillet, ou vers cette date, au début du mois
25 d'août 1993 au moins.
26 Coupable de ne pas avoir pris des mesures nécessaires et raisonnables
27 pour empêcher ou punir les traitements cruels au magasin de meubles
28 Slavonija à Bugojno dans la période du 24 juillet, ou vers cette date, au
Page 19369
1 18 août 1993 au moins.
2 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
3 pour empêcher ou punir les traitements cruels au stade FC Iskra à Bugojno
4 dans la période du 30 juillet, ou vers cette date, au 31 octobre 1993.
5 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
6 pour empêcher ou punir les traitements cruels à l'école élémentaire Vojin
7 Paleksic dans la période du 31 juillet, ou vers cette date, à septembre
8 1993 au moins.
9 Non coupable de ne pas avoir pris des mesures nécessaires et
10 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à la BH Banka à
11 Bugojno dans la période de septembre 1993, environ, jusqu'au 31 octobre
12 1993.
13 Chef 5 : La Chambre rappelle que lors de sa décision relative aux
14 demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la Chambre avait pris
15 acte du retrait de l'Accusation du chef 5 qui visait la responsabilité de
16 l'accusé Hadzihasanovic de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
17 raisonnables pour empêcher ou punir les destructions sans motif de villes
18 et de villages que ne justifiaient pas les exigences militaires à Dusina en
19 janvier 1993.
20 La Chambre avait déclaré, à cette occasion, l'accusé Hadzihasanovic non
21 coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour
22 empêcher ou punir les destructions sans motif de villes et de villages que
23 ne justifient pas les exigences militaires à Miletici en avril 1993.
24 La Chambre déclare, ce jour, pour le chef 5, non coupable de ne pas
25 avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir
26 la destruction sans motif de villes et de villages que ne justifient pas
27 les exigences militaires à Guca Gora en juin 1993.
28 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires ou raisonnables
Page 19370
1 pour empêcher ou punir les destructions sans motif de villes et de villages
2 que ne justifient pas les exigences militaires à Maline en juin 1993.
3 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
4 pour empêcher ou punir les destructions sans motif de villes et de villages
5 que ne justifient pas les exigences militaires à Cukle en juin 1993.
6 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
7 pour empêcher ou punir les destructions sans motif de villes et de villages
8 que ne justifient pas les exigences militaires aux villages de Susanj,
9 Ovnak, Brajkovici, Grahovcici en juin 1993.
10 Pour le chef 6, la Chambre rappelle que lors de sa décision relative aux
11 demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la Chambre avait pris
12 acte du retrait de l'Accusation du chef 6 qui visait la responsabilité de
13 l'accusé Hadzihasanovic de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
14 raisonnables pour empêcher ou punir les pillages à Dusina en janvier 1993.
15 La Chambre déclare, ce jour, l'accusé Hadzihasanovic, pour le chef 6, non
16 coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour
17 empêcher ou punir les pillages à Miletici en avril 1993.
18 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
19 pour empêcher ou punir les pillages commis Guca Gora en juin 1993.
20 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
21 pour empêcher ou punir les pillages à Maline en juin 1993.
22 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
23 pour empêcher ou punir les pillages à Cukle en juin 1993.
24 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
25 pour empêcher ou punir les pillages aux villages de Susanj, Ovnak,
26 Brajkovici, Grahovcici en juin 1993.
27 Enfin, pour le chef 7, non coupable de ne pas avoir pris les mesures
28 nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir la destruction ou
Page 19371
1 l'endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion à Guca Gora et
2 à Travnik en juin 1993.
3 Concernant les déclarations de culpabilité sus mentionnées, la Chambre
4 condamne l'accusé Hadzihasanovic à une peine d'emprisonnement de cinq ans à
5 compter de ce jour, sous réserve que soit déduite de cette peine,
6 conformément à l'article 101(C) du Règlement, la durée de la période que
7 l'accusé Hadzihasanovic a déjà passée en détention, soit un total de 828
8 jours.
9 Vous pouvez vous asseoir.
10 [L'accusé Hadzihasanovic s'assoit]
11 Accusé général Amir Kubura, voulez-vous vous lever.
12 [L'accusé Kubura se lève]
13 La Chambre déclare l'accusé Kubura, en tant que supérieur
14 hiérarchique en vertu des articles 3 et 7(3) du Statut, pour le chef 1 :
15 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
16 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre à Miletici le 24 avril 1993
17 de quatre hommes croates de Bosnie.
18 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
19 raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre à Maline le 8 juin 1993 de
20 23 hommes et d'une jeune fille croate de Bosnie.
21 Chef 2 : La Chambre rappelle que lors de sa décision relative aux
22 demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la Chambre avait
23 déclaré l'accusé Kubura non coupable de ne pas avoir pris les mesures
24 nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à
25 Miletici le 24 avril 1993 de quatre hommes croates de Bosnie.
26 Et non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
27 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels à Maline le 8
28 juin 1993 de 27 hommes et d'une jeune fille croate de Bosnie.
Page 19372
1 Concernant le chef 3, la Chambre rappelle que lors de sa décision
2 relative aux demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la
3 Chambre avait déclaré l'accusé Kubura non coupable de ne pas avoir pris les
4 mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir le meurtre de
5 Jozo Maracic à l'école de musique de Zenica le 18 juin 1993.
6 Concernant le chef 4, déclare ce jour, l'accusé Kubura non coupable
7 de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher
8 ou punir les traitements à l'école de musique de Zenica dans la période du
9 1er avril 1993 à janvier 1993, au moins.
10 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
11 raisonnables pour empêcher ou punir les traitements cruels au motel Sretno
12 dans la période du 15 mai, environ, au 21 juin 1993 au moins.
13 Concernant le chef 5, la Chambre rappelle que lors de sa décision
14 relative aux demandes d'acquittement rendue le 27 septembre 2004, la
15 Chambre avait déclaré l'accusé Kubura non coupable de ne pas avoir pris les
16 mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir les destructions
17 sans motif de villes et de villages que ne justifient pas les exigences
18 militaires à Miletici en avril 1993.
19 Déclaré ce jour, l'accusé Kubura non coupable de ne pas avoir pris les
20 mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou punir la destruction
21 sans motif de villes ou de villages que ne justifient pas les exigences
22 militaires à Maline en juin 1993.
23 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
24 raisonnables pour empêcher ou punir la destruction sans motif de villes et
25 de villages que ne justifie pas les exigences militaires aux villages de
26 Susan, Ovnak, Brajkovici, Grahovcici, en juin 1993.
27 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
28 raisonnables pour empêcher ou punir la destruction sans motif de villes et
Page 19373
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 19374
1 de villages que ne justifient pas les exigences militaires à Vares en
2 novembre 1993.
3 Concernant le chef 6, déclare ce jour l'accusé Kubura non coupable de
4 ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou
5 punir les pillages à Miletici en avril 1993.
6 Non coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et
7 raisonnables pour empêcher les pillages aux villages de Susanj, Ovnak,
8 Brajkovici, Grahovcici en juin 1993.
9 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables
10 pour punir les pillages aux villages de Susan, Ovnak, Brajkovici,
11 Grahovcici en juin 1993.
12 Coupable de ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables pour
13 empêcher ou punir les pillages aux villages de Vares en novembre 1993.
14 Pour les deux déclarations de culpabilité qui viennent d'être indiquées, la
15 Chambre condamne l'accusé Kubura à une peine d'emprisonnement de deux ans
16 et demi à compter de ce jour, sous réserve que soit déduite de cette peine
17 conformément à l'article 101(c) du Règlement, la durée de la période que
18 l'accusé Kubura a déjà passée en détention, soit un total de 828 jours.
19 Vous pouvez vous asseoir.
20 [Le témoin Kubura s'assoit]
21 Selon l'article 103 du Règlement, dans l'attente de la conclusion d'un
22 accord pour le transfert vers l'état où ils doivent purger leur peine, les
23 condamnés restent sous la garde du Tribunal.
24 La lecture du dispositif venant d'être faite, je lève l'audience. Je
25 vous remercie.
26 --- L'audience est levée à 16 heures 17.
27
28