Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 24 mars 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez donner le numéro de l'affaire,

7 Monsieur le Greffier.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, affaire IT-01-48-T, le Procureur

9 contre Sefer Halilovic.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.

11 Bonjour Mesdames et Messieurs.

12 Bonjour, Monsieur le Témoin. Avez-vous pu vous reposer hier ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bonjour.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Nous allons essayer de vous

15 permettre de retourner passer les fêtes de Pâques chez vous.

16 Madame Chana.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

18 LE TÉMOIN: SEFKO HODZIC [Reprise]

19 [Le témoin répond par l'interprète]

20 Mme CHANA : [interprétation] Un instant, je vous prie.

21 Interrogatoire principal par Mme. Chana :[Suite]

22 Q. [interprétation] Oui, excusez-moi. Bonjour, Monsieur Hodzic.

23 R. Bonjour.

24 Q. Hier, avant la pause, nous étions en train de parler de l'offensive qui

25 devait commencer de Bugojno pour aller à Mostar, le 13 septembre. Est-ce

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1 que cette offensive a bien commencé,

2 ce jour-là ?

3 R. Non. Pas dans toute cette zone, uniquement en partie de cette zone,

4 dans la direction de Crni Vrh et venant, également, peut-être de Bugojno

5 mais je ne suis pas sûr.

6 Q. Mais pourquoi ?

7 R. Quand nous sommes revenus à Jablanica, le 12, nous avons compris que

8 les choses n'avaient pas été préparées pour la partie centrale et sud du

9 front et que les lignes de front, les lignes téléphoniques n'étaient pas en

10 place et il n'était pas possible de faire quoi que ce soit.

11 Q. Le 13 septembre, où vous êtes-vous ensuite rendu ?

12 R. Le 13 septembre, au matin, je suis allé voir M. Sefer Halilovic dans

13 l'appartement de Zuka où il résidait et on a pris la direction de Dobro

14 Polje. D'abord, on est allé à Voljevac, ensuite, à Dobro Polje. On pensait

15 qu'il allait y avoir des combats parce qu'on avait entendu des pilonnages.

16 Jablanica était pilonné.

17 Q. Ensuite, où êtes-vous allé ? Qui avez-vous vu ?

18 R. Quand nous sommes arrivés dans la zone de Dobro Polje où se trouvaient

19 les soldats du Bataillon de Prozor, nous les avons trouvés. Ils étaient en

20 train de se reposer, alors qu'ils auraient dû être sur la ligne de front.

21 Il y avait, là, un combattant qui avait le sens de l'humour. On avait

22 beaucoup plaisanté avec lui, la veille. On lui a demandé : "Pourquoi est-ce

23 que vous ne faites rien ?" Il a répondu : "Parce qu'on attend les ordres."

24 Ensuite, on a appris que le Bataillon de Prozor n'était allé nulle part, ce

25 matin-là, alors qu'ils avaient pour mission d'aller au combat.

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1 Q. Pourquoi est-ce qu'ils ne sont pas allés au combat, ce matin-là ?

2 R. Le commandant du bataillon, Enver Buza, est arrivé assez vite et il a

3 dit : "Il y a quelqu'un qui se moque de quelqu'un, ici, parce que je suis

4 arrivé ce matin à 4 heures du matin, je n'avais que deux litres de

5 carburant. Je n'ai pas pu aller aux combats parce que je n'avais pas de

6 carburant." Donc, il ne pouvait pas emmener ses ambulances avec lui au cas

7 où il y aurait eu des blessés.

8 Q. Comment Sefer Halilovic a-t-il réagi à cette nouvelle, la nouvelle que

9 le Bataillon indépendant de Prozor n'était pas allé en opérations ?

10 R. Il était très surpris. Il ne voulait pas que les hommes de Buza

11 entendent, mais il a dit : "Qui l'a nommé commandant du bataillon ?"

12 Q. A-t-il dit quoi que ce soit d'autre ?

13 R. Je crois qu'il a dit que déjà, par le passé, à trois ou quatre

14 reprises, des situations semblables s'étaient présentées. Il n'a pas voulu

15 dire quoi que ce soit de désagréable ou provoquer des scènes devant les

16 combattants, mais il a dit : "Allons dans la direction de Voljevac." Il lui

17 a demandé de venir aussi. Ensuite, Braco Fazlic, qui était l'adjoint du

18 commandant du 6e Corps ou le chef d'état-major du 6e Corps, est venu avec

19 nous. J'ai demandé : "Qui a nommé Buza à ce poste ?" Il a répondu, "Moi.

20 C'est un homme de valeur."

21 Q. Quelle était l'attitude de Sefer Halilovic envers Enver Buza ?

22 R. D'après ce que je me souviens, il n'a pas voulu causer de problèmes

23 devant les soldats, mais il lui a demandé de descendre à Voljevac, le

24 village où nous allions.

25 Q. Est-ce qu'il y a eu d'autres réunions entre Enver Buza et Sefer

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1 Halilovic ?

2 R. Quand on est arrivé à Voljevac.

3 Q. Alors, en ce moment-là ?

4 R. On est arrivé là avant eux et il y avait, là, Bilajac. C'était une

5 maison privée qui appartenait à quelqu'un. Il y avait, là, Bilajac,

6 Suljevic et Karic et Enver Zejnilagic. Plus tard, Buza et Braco Fazlic sont

7 arrivés.

8 Q. De quoi ont-ils parlé ?

9 R. Sefer lui a dit qu'il n'avait pas rempli sa mission, qu'il fallait

10 qu'il parte en opérations, le lendemain et que Suljevic devait

11 l'accompagner.

12 Q. Pourquoi voulait-il envoyer Suljevic avec lui ?

13 R. J'imagine qu'il ne lui faisait pas entièrement confiance, s'agissant de

14 cette opération.

15 Q. Bien. Qu'avez-vous fait après cela ?

16 R. Nous avons passé toute la journée à cet endroit. On suivait les

17 opérations de combat. On est allé au centre de transmission, au sous-sol.

18 Les combats étaient en cours. Nos hommes ont pris Gvozd, le nom d'un

19 endroit.

20 Il y avait des combats. L'après-midi, nous avons appris que l'un des

21 combattants les plus connus de Neretvica était tombé. J'ai été interviewé

22 quelqu'un. On suivait les opérations de combat, puis, ensuite, on est

23 rentré.

24 Q. Avez-vous entendu parlé de ce qui s'était passé à Uzdol pendant ces

25 combats ?

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1 R. C'était avant les combats à Uzdol, avant qu'ils n'aillent à Uzdol.

2 Q. Oui, mais n'avez-vous jamais appris que des crimes avaient été commis à

3 Uzdol ?

4 R. Ce jour-là, il n'y aurait pas pu y avoir des crimes parce que personne

5 n'a quitté sa base. C'est arrivé le lendemain.

6 Q. Que s'est-il passé le lendemain ?

7 R. Le lendemain, devaient commencer les véritables combats dans la

8 véritable zone, dans la zone qui avait été prévue pour prendre la direction

9 de Mostar. Le plan de Sefer consistait à se diriger vers le sud, vers

10 Mostar, et non pas vers Prozor. Moi-même, je souhaitais me trouver à cet

11 endroit. Je souhaitais suivre ce qui était en train de se produire. Mais le

12 matin, nous n'avons rien entendu, pour ce qui était du sud, de la direction

13 de Mostar. Il n'y avait pas de combats à cet endroit.

14 Vers 10 heures, je suis allé à l'appartement de Zuka. Je suis allé voir

15 Sefer Halilovic. Il était là, en train de jouer avec son fils. Il y avait

16 son escorte. Je lui ai dit : "Mais il ne se passe rien là-bas," parce que

17 j'étais logé à Grabovica, plus au sud. J'ai dit : "Mais il y a des combats

18 à Prozor." Il a passé un coup de fil et il a dit : "Oui, c'est vrai. Il n'y

19 a rien qui se passe. Prenons la direction de Prozor."

20 Q. Etes-vous partis ?

21 R. Vers 13 heures, on est parti, on est arrivé à Dobro Polje, où se

22 trouvait la base du Bataillon de Prozor. C'était une sorte de petite

23 baraque, une petite maison qui tenait à peine deux ou trois personnes.

24 C'était le centre de transmission, le centre de liaison.

25 Je ne sais pas comment Sefer l'a appris parce que je n'étais pas là

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1 quand Sefer leur a parlé, mais j'ai entendu que les combattants du

2 Bataillon de Prozor étaient entrés à Uzdol très tôt, qu'ils avaient trouvé

3 les Oustachi endormis - c'est ce qu'ils ont dit - et ils en avaient tué pas

4 mal. Mais ensuite, le HVO avait lancé une contre-attaque. Ils avaient

5 commencé à pilonner et eux, s'étaient retirés ou étaient partis.

6 Q. Ce sont les soldats qui ont raconté cela à Sefer ?

7 R. Non, à moi. C'est ce qu'on m'a dit. Je ne sais pas ce qu'on a dit à

8 Sefer. J'imagine qu'il en a entendu parler, lui aussi.

9 Q. Mais il était là ?

10 R. Il était là, mais je n'ai pas été témoin de la conversation qu'il a eu

11 avec eux. J'imagine qu'il a entendu dire tout cela aussi parce que je suis

12 entré directement dans cette petite maison que j'ai mentionnée. Je ne suis

13 pas allé au centre de liaison, au centre de transmission. On m'a dit ce

14 qu'on m'a dit.

15 Ensuite, je suis allé au centre de transmission. Ils se tenaient à la

16 porte et ils ont dit : "Tout allait bien, mais les soldats étaient en train

17 de retirer." Sefer était avec son escorte et

18 deux ou trois femmes, des personnes âgées. On est monté dans la voiture, on

19 a pris la direction de Voljevac. L'impression, c'était que les combats

20 s'étaient bien passés, mais qu'ils avaient dû battre en retraite. Mais on

21 n'a rien dit d'autre.

22 Q. Mais le fait a été mentionné que des personnes avaient été tuées ?

23 R. Oui, qu'ils les avaient trouvées endormies en pyjamas et ils ont dit

24 qu'ils avaient trouvé leurs combattants endormis dans une école et ils ont

25 dit qu'ils les avaient surpris dans leur sommeil.

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1 Q. Avez-vous rédigé un rapport sur ce point, ce jour-là ?

2 R. Non. Je n'ai préparé aucun rapport, ce jour-là.

3 Q. Avez-vous regardé CNN, ce jour-là ?

4 R. On est descendu à Vojlevac, ensuite, on est revenu à Mostar -- je ne me

5 souviens pas vraiment. Non, ce ne pouvait pas être ce jour-là parce qu'on

6 est allé directement à Donja Jablanica, dans la soirée et moi-même, je suis

7 allé à Dreznica et là, il y avait effectivement des combats quand on est

8 revenu. Je n'y trouvais personne du bataillon de Prozorski, Sefer, Buza ou

9 qui que ce soit d'autre.

10 Je suis allé à Dreznica, je suis resté là encore une journée. Ensuite, je

11 suis rentré et ensuite, je suis allé voir une de mes cousines. Elle a dit

12 qu'elle avait vu à CNN ou sur une autre chaîne de télévision qu'il y avait

13 eu des crimes commis à Uzdol et que des civils avaient été tués. J'ai pensé

14 qu'il s'agissait de ces soldats qui étaient endormis et qui avaient été

15 tués, alors qu'ils étaient en train de dormir en pyjamas. Mais, là-bas,

16 j'ai vu un extrait d'un reportage, je ne sais plus sur quelle chaîne. C'est

17 à ce moment-là que j'ai appris qu'il s'était passé quelque chose.

18 Mais je n'étais vraiment pas sûr, même jusqu'à la fin de la guerre, on ne

19 savait pas vraiment si des crimes avaient été commis à Uzdol, s'il

20 s'agissait d'une opération mise en scène, si on avait placé des cadavres de

21 Bosniaques à cet endroit, parce qu'il y avait de la neige sur place, alors

22 qu'il n'y avait pas de neige. Pendant des années après la guerre, les

23 doutes ont subsisté quant à la véracité de ces crimes, quant au fait qu'ils

24 avaient vraiment été commis ou pas. On a beaucoup écrit là-dessus.

25 Q. Le 14, quand vous étiez dans ce centre de transmission, quand vous avez

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1 appris que des personnes avaient été tuées, à quelle heure cela s'est-il

2 passé ? Combien de temps êtes-vous resté avec Sefer, ce jour-là, si vous

3 n'avez pas passé toute la journée avec lui ?

4 R. Je suis resté avec Sefer pendant tout ce temps-là, on est allé à

5 Voljevac, ensuite, on a pris la direction de Gornji ou Donji Vakuf, je ne

6 m'en souviens pas. Ensuite, nous sommes retournés à Jablanica par Dobro

7 Polje. On est allé à Donja Jablanica tout de suite, là où se trouvait la

8 base de Zuka. On s'est séparés et j'ai pris la direction de Dreznica. On a

9 marché pendant toute la nuit avec les combattants, les hommes de Celo. Il y

10 avait des combats, voilà.

11 Q. Quand vous avez entendu parler de cela, vous n'avez pas rebroussé

12 chemin pour vous rendre où le bataillon indépendant de Prozor était au

13 combat, pour voir ce qui s'était passé ?

14 R. Non. Non. D'ailleurs, ce n'était pas possible parce qu'on nous avait

15 déjà dit que le bataillon de Prozor avait battu en retraite. Ils n'étaient

16 plus à Uzdol, ils étaient partis ailleurs. D'ailleurs, je ne sais même pas

17 vraiment où se trouve cet endroit, où se trouve Uzdol.

18 Q. Au bout de combien de jours, avez-vous vu un reportage à ce sujet, sur

19 CNN ou en avez-vous entendu parler ? Vous nous avez dit que votre cousine

20 avait vu quelque chose sur CNN.

21 R. Je ne sais pas. Il a fallu que j'enregistre toutes ces informations

22 dans mon esprit parce qu'on est allé de Voljevac à Jablanica, Donja

23 Jablanica, je suis allé à Dreznica, j'ai encore passé une nuit et une

24 journée là-bas. Le soir, je suis allé à Donja Jablanica. C'était peut-être

25 le 16, le 17 ou le 18. A peu près, pendant cette période, une de ces

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1 journées, mais je ne peux pas vous dire avec précision laquelle.

2 Q. Qu'avez-vous fait ensuite ?

3 R. Après quoi ?

4 Q. Le lendemain ?

5 R. Le lendemain, j'ai suivi les combattants en direction de Mostar jusqu'à

6 Dreznica. Il y avait un blocus à cet endroit qui a été levé parce que les

7 zones environnantes avaient été libérées; je suis allé au centre, j'ai

8 filmé un petit peu ce qui s'était passé et j'ai envoyé un reportage très

9 court depuis Dreznica.

10 Q. Est-ce qu'à un moment quelconque, vous êtes allé à Grabovica ?

11 R. J'ai traversé Grabovica, ce jour-là. Je suis parti de la base de Zuka,

12 j'ai traversé Grabovica, c'était obligé. Mais il faut se souvenir que

13 c'était la nuit, on était à l'extérieur, je ne sais plus qui il y avait

14 d'autre, je ne sais pas si c'était devant la base d'Adnan ou de Celo. J'ai

15 oublié.

16 En tout cas, je me souviens avoir vu Caco. Je lui ai parlé un petit peu, il

17 avait oublié qui j'étais. Il m'a dit : "Il faut que tu me rappelles qui tu

18 es. Je ne me souviens pas." Ensuite, on a un petit peu discuté de tout et

19 de rien, puis, deux ou trois ou quatre hommes de Celo sont venus - Malco

20 Rovcanin ainsi que Joja, un guide - on est parti jusqu'à Dreznica à pied,

21 cela nous a pris quatre heures; on est passé par les collines, les

22 montagnes, on est arrivé, à peu près, à 1 heure du matin.

23 Q. Est-ce que Sefer Halilovic était avec vous, à ce moment-là ?

24 R. Non, il est resté à Donja Jablanica.

25 Q. Est-ce que vous n'êtes jamais retourné au village de Grabovica avec

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1 Sefer Halilovic ? Est-ce que vous y êtes retourné quelques jours plus

2 tard ?

3 R. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais j'imagine que ce devait

4 être le 18 septembre. Les combats se poursuivaient au sud, nous sommes

5 allés sur une position de l'artillerie et de là, Sefer a essayé d'entrer en

6 contact avez Zuka qui était le commandant de cette ligne de front et son

7 adjoint Nihad, je ne sais pas exactement où se trouvait Nihad, mais en tous

8 cas, ils ne sont jamais parvenus à entrer en contact avec eux.

9 Il me semble que j'ai oublié quelque chose, mais j'imagine, sans en être

10 sûr -- enfin ce que je vais vous dire s'est passé, c'est sûr. On a

11 traversé Grabovica, on a emprunté un pont en fer, on est allé près d'une

12 maison, il y avait, là, Caco. Je me souviens de Caco, il y avait pas mal de

13 soldats, de combattants à cet endroit. Plus tard, ils ont commencé à jouer

14 au ballon. Ils ont fini de jouer, c'était sans doute le même jour. Je ne me

15 souviens pas être allé à Grabovica, à l'exception du 19. J'ai l'image dans

16 l'esprit de combattants en train de plonger dans la Neretva, ils étaient en

17 train de pêcher parce que chaque fois qu'ils revenaient à la surface, ils

18 avaient un poisson. Caco était là, il riait, j'ai essayé de le

19 photographier, mais on m'a regardé d'un air peu avenant. Rovcanin a pris

20 mon appareil photo, il a voulu lui prendre une photo également, mais lui

21 aussi, on l'a regardé d'un air assez mécontent; il n'a pas non plus osé

22 prendre de photo.

23 Ensuite, je suis allé à Jablanica, Donja Jablanica et voilà ce dont

24 je me souviens, de la période que j'ai passé avec Sefer, à Grabovica.

25 Q. Bien. Je souhaiterais vous demander d'écouter quelque chose.

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1 Mme CHANA : [interprétation] C'est la pièce 65 ter 177, T0000585, pièce

2 177.

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce MFI291.

4 L'INTERPRÈTE : Les interprètes s'excusent mais n'avaient pas trouvé le

5 document.

6 [Diffusion de cassette audio]

7 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

8 "Ceux de Sarajevo défendent l'Herzégovine mais le chef d'état-major

9 du commandement Suprême est là. Il est bien organisé. Il a tout cordonné,

10 commandé une opération de grande envergure. Il va nous dire ce qu'il en

11 est. Quelle est son évaluation de la participation, de la contribution des

12 combattants de Sarajevo à cette opération ?

13 "R. Considérable en tout cas, parce que trois unités ont été choisies pour

14 mener les opérations de combat, et ces unités ne sont pas prévalentes parce

15 que la guerre nous a été imposée. Les unités mènent des opérations

16 défensives. Après quelques brefs préparatifs, ils sont arrivés jusqu'en

17 Herzégovine d'urgence. Ils ont rapidement réussi à prendre des positions

18 alors que le terrain est extrêmement difficile. Il s'agit d'un front

19 homogène de l'Etat de Bosnie-Herzégovine dans lequel nous allons nous

20 déplacer, non seulement avec ces unités mais avec d'autres unités. Là où

21 sont les Chetniks et les Oustachi doivent être combattus, nous iront."

22 [Fin de la diffusion de cassette audio]

23 Mme CHANA : [interprétation]

24 Q. Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit Monsieur Hodzic ?

25 R. Il s'agit d'un enregistrement de mes conversations avec un certain

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1 nombre de combattants et de chefs : Celo, Adnan, et cetera -- pendant les

2 opérations de combat -- qui étaient revenus avec moi à Dreznica, des

3 hommes de Celo. Je crois qu'il y avait six personnes qui avaient été tuées

4 à cet endroit.

5 Enfin, on a enregistré cette conversation, on était tous très

6 enthousiastes, et si vous pouviez entendre la totalité de l'enregistrement

7 vous pourriez vous rendre compte de l'atmosphère qui y régnait. Ensuite,

8 nous avons appris que Medvjed avait été libérée, et cetera. On a eu une

9 conversation assez enthousiaste, assez euphorique, et à la fin, j'ai

10 demandé à M. Halilovic de dire quelques mots.

11 Q. C'était M. Halilovic qui vous parlait ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous souvenez-vous de la date ?

14 R. C'était le 19 septembre 1993.

15 Q. Vous nous dites, je cite : "Les gens de Sarajevo défendent

16 l'Herzégovine, le chef d'état-major est ici, le chef d'état-major du

17 commandement Suprême, c'est lui qui a organisé, conçu, et cetera."

18 Halilovic parle des troupes de Sarajevo; à quoi fait-il référence ?

19 R. Je crois que les combattants de l'unité de Sarajevo sont arrivés là; un

20 mois auparavant, ils avaient acquis une certaine renommée en barrant la

21 route aux forces, à l'offensive serbe au mont Igman. C'était les même

22 unités, ils avaient même pu reprendre Tresnjevo Brdo, notamment certaines

23 des positions.

24 Q. Soyons très clairs à ce sujet M. Hodzic. Est-ce que cette interview a

25 eu lieu après les crimes à Grabovica et Uzdol ?

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1 R. Oui, le 19.

2 Q. Est-ce qu'on a parlé à ce moment-là de ce qui s'était passé à

3 Grabovica ?

4 R. Je parlais des gens de Sarajevo qui défendaient l'Herzégovine mais

5 quand j'ai parlé à Sefer de Grabovica, on a parlé de cela et puis on a

6 parlé de ce dont on a déjà parlé hier. Il n'y avait rien d'autre.

7 Mme CHANA : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président. Je regarde la

8 question que j'ai posée quand j'ai demandé si on avait parlé de ce qui

9 s'était passé à Grabovica. Je voulais parler également d'Uzdol.

10 Q. Pourriez-vous répondre ? Est-ce que vous répondriez que c'était la

11 même chose pour Grabovica et Uzdol ?

12 R. Non, rien du tout. On a pas fait référence du tout à Uzdol ni à

13 Grabovica.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, est-ce que vous avez la

15 transcription en anglais de cet enregistrement ?

16 Mme CHANA : [interprétation] Oui, cela a été versé au dossier parce qu'elle

17 doit se trouver parmi les pièces.

18 [Le conseil de la Défense se concerte]

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

21 Mme CHANA : [interprétation]

22 Q. L'autre document que je voudrais qu'on vous montre. Il s'agit de votre

23 journal Monsieur Hodzic. Ce document présenté aux yeux de l'article 65 ter

24 du règlement, il porte le numéro 16 -- non excusez-moi, je reprend ce que

25 je viens de dire, c'est le 106 et il a un numéro ERN 01057700. [comme

Page 14

1 interprété]

2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera le numéro MFI292.

3 Mme CHANA : [interprétation]

4 Q. Monsieur Hodzic, je voudrais simplement vous montrer un petit extrait

5 de votre journal. Il va paraître à l'écran dans un instant et il est daté

6 du 1er octobre 1993, Jablanica. Est-ce que cela apparaît maintenant à votre

7 écran, "Jablanica 1er octobre 1993." Est-ce que vous l'avez à l'écran,

8 Monsieur Hodzic ?

9 R. Non.

10 Q. Ce n'est pas à l'écran ?

11 R. Non.

12 Mme CHANA : [interprétation] Est-ce que vous pourriez s'il vous plaît faire

13 défiler pour arriver au chiffre 01057848, c'est la toute dernière partie.

14 Vous descendez jusqu'à 01057849. C'est la dernière partie du journal, et

15 l'entrée, enfin ce qui est écrit concerne le 1er octobre 1993.

16 R. Oui.

17 Q. Vous voyez, cela commence par "Amela est venu et a dit à Sefer qu'au

18 moment où nous étions au camp de Zuka, 'l'un des soldats voulait te serrer

19 la main.'"

20 "Sefer lui a dit de le laisser entrer, il avait un badge avec la

21 photo de Sefer qui était épinglée sur sa poitrine, et il a dit que son nom

22 était Nasko Softic."

23 Je voudrais vous poser la question. En ce qui concerne ce type de Badge,

24 vous avez déjà vu la photo de Sefer épinglée sur la poitrine d'un soldat ?

25 R. Oui.

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1 Q. Est-ce que vous aviez vu un tel badge avant, ou est-ce que c'était la

2 première fois que vous aviez vu un tel badge ?

3 R. Je pense que c'était la première fois, peut-être que j'en avait vu de

4 ce genre avant, mais c'est ce que je me rappelle, c'est ce que j'ai écrit.

5 Q. Est-ce que vous avez entendu dire que des badges, que certains soldats

6 portaient des badges avec la photo de Sefer Halilovic dessus, enfin,

7 excusez-moi.

8 R. C'est possible que j'en aie entendu parler, mais d'autre part, peut-

9 être pas, cela ne signifie pas grand-chose pour moi, je ne peux pas

10 vraiment dire. Je pense que j'ai jeté les yeux sur ce badge-là pour la

11 première fois, et peut-être que je ne l'ai plus jamais revu. Je ne saurais

12 pas vous dire, mais peut-être que j'en ai entendu parler précédemment ou

13 non. Mais c'est à ce moment-là que je m'en suis rendu compte, que je l'ai

14 vu.

15 Q. Pourquoi se fait-il Monsieur Hodzic, que des soldats portaient des

16 badges ?

17 Mme CHANA : [interprétation] Je vois le conseil.

18 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Ma consoeur voit que le conseil de la

21 Défense objecte, et je ne voudrais pas de questions spéculatives, je ne

22 voudrais pas qu'on pose des questions spéculatives ou hypothétiques,

23 Monsieur le Président.

24 J'objecte à celle qui en particulier -- le témoin a dit clairement qu'il

25 avait vu ce soldat-là, je crois à la date indiquée dans le journal, comme

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1 étant le 1er octobre 1993, et c'est la seule fois qu'il se rappelle l'avoir

2 fait. Donc, qu'on dise : "Pourquoi est-ce des soldats porteraient un tel

3 badge ?" C'est une question qui appelle des hypothèses.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Vous pouvez poser la question à ce

5 soldat-là.

6 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président.

7 Q. Pourquoi pensiez-vous que ce soldat-là qui est entré dans la base de

8 Zuka portait un badge avec la photo de Sefer dessus ?

9 R. Je ne saurais vraiment dire, je ne sais pas. Comme beaucoup d'autres

10 combattants, il est probable qu'il aimait bien Sefer ou qu'il admirait

11 Sefer. Il y avait des nombreuses mères à l'époque qui appelaient leurs fils

12 "Sefer". Je n'étais pas au courant de ce nom en Bosnie avant cette époque-

13 là, mais la seule interprétation que je puisse donner.

14 Q. Pourquoi est-ce que les circonstances ont fait que -- quel était le but

15 de cette conversation entre ce soldat et Sefer ?

16 R. Je peux voir là, on vous l'a lu. Il dit que son nom est Nasko Softic de

17 Bijelo Polje. Il dit qu'il porte ce badge depuis le premier jour, depuis

18 que le badge a été créé. Il dit : "J'ai écouté la radio et les rapports de

19 Sefko Hodzic." Il poursuit, il dit qu'il a été employé du ministère de

20 l'Intérieur, il a écouté mes émissions et ce que j'ai rapporté à la radio.

21 Ils sont 105 qui sont volontaires pour aller en Herzégovine et combattre,

22 mais ils sont du ministère de l'Intérieur et on leur interdit d'aller au

23 feu, dans le cas où ils iront à Herzégovine. 105 d'entre eux ont néanmoins

24 décidé d'y aller, même au risque de perdre leurs emplois. Ils sont allés

25 voir leur chef et ils ont dit : "Nous sommes ici pour dire au revoir, parce

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1 que nous voulons aller là-bas et nous joindre aux combats." C'est ce qu'ils

2 ont fait éventuellement, c'est ce qu'ils ont fait pour finir.

3 C'est par la suite que j'ai appris que le MUP, le ministère de l'Intérieur,

4 avait engagé des poursuites au pénal contre ces gens. En fait, c'est celui

5 que j'ai rencontré qui m'a dit qu'ils avaient été licenciés, ils avaient

6 été mis à pied.

7 Q. Monsieur Hodzic, je voudrais vous poser une dernière question en ce qui

8 concerne cette partie de votre déposition. C'est beaucoup plus tard. Est-ce

9 que vous avez entendu parler de l'opération Trebevic ?

10 R. Bien sûr.

11 Q. Après cette opération, est-ce que vous avez eu l'occasion de rencontrer

12 M. Sefer Halilovic ?

13 R. Le 28 juillet, ou éventuellement en août, il est possible que ce soit

14 en août, j'ai reçu un appel du chef du poste de sécurité publique à

15 Sarajevo, Munir Alibabic, qui avait un ton menaçant. C'est ce qu'il m'a dit

16 : "Aujourd'hui à 11 heures, tu devras ou devrais aller parler au chef du

17 SJB. Apportez tous vos enregistrements, toutes vos prises de vue, votre

18 journal, tout ce que vous avez fait, de façon à ce qu'on n'ait pas besoin

19 d'aller vous chercher." Pourquoi a-t-il dit cela ? Il a dit : "Vous avez

20 bien parlé des personnes qui ont commis des crimes là-bas." J'ai dit :

21 "Mais ce n'était pas des criminels. C'était nos combattants." Il m'a à

22 nouveau menacé, et il a dit : "Soyez-là à 11 heures." J'ai réuni tous mes

23 enregistrements, toutes mes bandes, et tout ce que j'avais, que je vous ai

24 par la suite remis. Je n'avais plus d'enregistrements magnétiques à un

25 moment donné. J'ai dû utiliser les anciens pour enregistrer ce qui se

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1 passait lors de nouveaux combats. J'ai réuni toutes mes affaires et je m'y

2 suis présenté à 11 heures précises à l'extérieur du bâtiment du SDB.

3 A ce moment même, Sefer est passé dans la rue, est entré dans le même

4 bâtiment. C'était peut-être une coïncidence. Nous sommes entrés ensemble.

5 Je lui ai dit : "Sefer, est-ce que tu as aussi des ennuis ?" Il a dit :

6 "Oui, effectivement. Ils sont en train de faire un coup monté contre moi,"

7 quelque chose dans ce genre. C'est quelque chose dans le genre, du fait

8 qu'il y avait quelque chose derrière ces gens Caco, Celo. Caco avait déjà

9 été tué à l'époque, et il leur a dit : "J'ai créé un état pour vous. J'ai

10 créé une armée. Maintenant, vous voulez m'arrêter. Vous pouvait m'arrêter

11 si vous voulez."

12 Q. Monsieur Hodzic. Il y a une précision. Le compte rendu dit que vous

13 avez dit: "le 28 juillet ou éventuellement au mois d'août." Cela ne

14 pourrait pas être une date exacte ?

15 R. Non, Octobre.

16 Q. Oui.

17 R. Il se peut que j'aie mélangé les dates. C'était 22 ou 23 jours après

18 l'opération Trebevic.

19 Q. Alors, c'était en octobre, de sorte que cette date --

20 R. En octobre, oui, le 27, peut-être le 28 octobre 1993.

21 Q. Maintenant, un dernier document qui porte la cote provisoire MFI --

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi. Pourrais-je intervenir une

23 seconde ? Je pense que -- non, excusez-moi.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Je pense qu'il y a une erreur dans le

Page 19

1 compte rendu. Le compte rendu dit, en ce qui concerne la traduction : "Il

2 se peut que j'aie confondu les dates. C'était 22 ou 23 jours après

3 l'opération Trebevic." Mes instructions de celui qui sais le B/C/S ici,

4 c'est que le témoin a dit deux ou trois jours, non pas 22 ou 23. Pourrions-

5 nous simplement demander les éclaircissements de l'interprète sur ce

6 point ?

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Peut-être que Mme Chana pourrait

8 reposer cette question au témoin, parce que c'est important.

9 Mme CHANA : [interprétation]

10 Q. Monsieur Hodzic, pourriez-vous s'il vous plaît éclairer les choses pour

11 nous ? Etait-ce 22 ou 23 jours après, ou est-ce que c'était deux ou trois

12 jours après l'opération Trebevic ?

13 Q. Deux ou trois jours après, après que l'opération ait commencé. Le 27 ou

14 peut-être le 28 octobre 1993.

15 Q. Merci, Monsieur Hodzic.

16 Le document suivant porte la cote provisoire MFI281.

17 Il s'agit, Monsieur Hodzic, d'un livre écrit par Sefer Halilovic qui

18 comporte un chapitre où les événements sont relatés. Premièrement, avez-

19 vous lu le livre de M. Halilovic, intitulé : "Stratégie astucieuse",

20 "Stratégie rusée" ?

21 R. Oui. J'étais là lorsque le livre a été publié. Il y a eu une cérémonie

22 à laquelle a participé ou était présent le président de d'aujourd'hui de la

23 République de Croatie, Stipe Mesic, et une des personnes qui avait publié

24 le livre. C'est à ce moment-là que j'ai acheté le livre. Je l'ai lu pendant

25 les deux ou trois jours suivants.

Page 20

1 Q. Est-ce que vous avez vu le chapitre qui apparaît maintenant à votre

2 écran ?

3 R. Oui, "La vérité concernant Uzdol," c'est bien cela que je peux voir.

4 Q. Vous connaissez bien les événements sur lesquels M. Halilovic écrit. En

5 particulier ce chapitre, vous l'avez lu ?

6 R. Oui, je l'ai lu.

7 Q. Est-ce que vous diriez qu'il s'agit bien d'un récit ou d'un compte

8 rendu exact des événements tels que vous en avez vous-même été témoin

9 aussi ?

10 R. Il est intéressant de savoir qu'il y a un grand nombre de choses dont

11 je n'ai pas été témoin moi-même, certains documents que je n'ai jamais

12 obtenus, en particulier en ce qui concerne le briefing à Zenica. Ces

13 décisions - il consacre beaucoup de temps à parler à ce que de ce que les

14 commandants ont dit entre eux lors des réunions auxquelles je n'ai jamais

15 participé, auxquelles je n'étais jamais présent.

16 Lorsque j'ai lu ceci, j'ai vu deux ou trois domaines, du point de vue des

17 dates, et c'est tout ce que je peux dire à ce sujet. Je n'ai rien d'autre à

18 dire. C'est le récit ou le compte rendu de Sefer, et il n'y a rien que je

19 puisse y ajouter.

20 Q. Que voulez-vous dire par "du point de vue des dates" ?

21 R. Je ne suis pas sûr. Si on devait réexaminer tout cela, je pense qu'il

22 s'est trompé de date pour ce qui est de la date à laquelle l'offensive a

23 commencée. Il parle du 13, ou plutôt il dit le 12, et d'après mes

24 souvenirs, c'était le 13 en réalité. Pendant que nous avons été ensemble,

25 je pense qu'il parle du 2 octobre et je crois qu'il se peut que ce fût le

Page 21

1 31 août. Ensuite, nous sommes allés à Jablanica.

2 Ce ne sont pas des questions techniques, en vérité. Il n'y a rien

3 d'essentiel. Il s'est simplement trompé sur quelques dates, c'est tout.

4 Q. Je voudrais vous demander encore un éclaircissement concernant la date.

5 Le compte rendu dit que vous avez dit le 2 octobre. Vous vouliez

6 probablement dire le 2 septembre ?

7 R. Non, non. Oui, précisément, le 2 septembre. Je pense que c'est cela qui

8 est dit et si nous devions réexaminer cela. Mais je pense qu'il y a

9 quelques erreurs. C'est tout ce que j'ai remarqué.

10 Q. Oui, merci Monsieur Hodzic.

11 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, ceci conclut mon

12 interrogatoire principal. Comme je vous l'ai promis, ceci représente 40

13 minutes.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

15 Y a-t-il des questions, Maître Morrissey ?

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je voulais

17 simplement évoquer une question avant que nous ne commencions et il s'agit

18 du livre de M. Halilovic.

19 C'est une question que nous devrons réévoquer par la suite, mais c'est une

20 de ces question dont il faut qu'on parle maintenant, parce que, parfois, si

21 le conseil pose des questions dans le cadre du contre-interrogatoire pour

22 un document, ceci devient une base pour qu'on puisse, éventuellement,

23 demander le versement au dossier, pour qu'il puisse être admis comme

24 élément de preuve. Je voudrais simplement savoir où j'en suis,

25 effectivement, en ce qui concerne telle possibilité parce que, pour le

Page 22

1 moment, ce que je vais présenter pour finir, je vais le dire très

2 clairement, il n'y avait pas de base suffisamment pour que ce document

3 puisse être présenté par le biais de ce témoin, pas plus que pour le témoin

4 précédent. Je ne veux pas, ensuite, procéder à un contre-interrogatoire du

5 témoin et mettre tout le monde dans une situation où on pourrait dire,

6 "Maintenant, il y a de nouvelles raisons pour présenter ce document par le

7 biais de ce témoin," parce que j'ai posé des questions dans le cadre du

8 contre-interrogatoire, à ce sujet.

9 Je voudrais demander que l'Accusation veuille bien m'éclaircir les choses

10 parce que j'ai besoin de savoir quelles seront les conséquences, si je pose

11 des questions au contre-interrogatoire. Je voudrais savoir si l'Accusation

12 a encore l'intention d'essayer de tenter de faire déposer ce document comme

13 élément de preuve par le truchement de M. Hodzic, sur la base de ce qu'il

14 vient de dire. J'aurais besoin qu'on m'éclaire.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Madame Chana.

16 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons

17 certainement demander que l'on verse toutes les pièces dont nous avons

18 donné la liste par le truchement de ce témoin, mais je peux demander, dès

19 maintenant, que toutes les pièces présentées soient versées en tant

20 qu'éléments de preuve, y compris le livre de

21 M. Halilovic.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je suis en mesure de

24 répondre maintenant et il serait peut-être approprié de donner un certain

25 répit au témoin, pour le moment, avant que je ne commence mon contre-

Page 23

1 interrogatoire. Certainement, je pourrai répondre à la requête présentée

2 par ma consoeur, visant à déposer maintenant les documents en question.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, peut-être que nous pourrons traiter

4 de cette question de documents à un stade ultérieur, comme nous le faisons

5 à l'habitude. Nous n'avons pas le temps, mais peut-être que nous pourrions

6 avoir des décisions écrites, par la suite.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien --

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne pense pas que le contre-

9 interrogatoire ajoutera du poids pour ce qui est de l'examen par cette

10 Chambre, de ce qu'elle a déjà admis.

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que tout le monde est livre

13 puisque c'est un document qu'on peut se procurer sans difficulté en public.

14 Tout le monde est libre de faire des commentaires sur ce document et de

15 présenter une opinion concernant ce document.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

17 ces indications. Je suis prêt à poursuivre, à commencer le contre-

18 interrogatoire de M. Hodzic, maintenant.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, merci,

21 Messieurs les Juges.

22 Contre-interrogatoire par M. Morrissey :

23 Q. [interprétation] Merci beaucoup Monsieur Hodzic.

24 Je voudrais, tout d'abord, vous poser quelques questions qui découlent des

25 questions des combats qui ont lieu en Herzégovine. Vous avez appris que

Page 24

1 Sefer Halilovic avait été remplacé comme chef des forces armées de Bosnie

2 le 8 juin 1993, remplacé par Rasim Delic. Est-ce exact ?

3 R. C'est exact.

4 Q. Alors, lorsque vous avez appris ceci, à l'époque, que Sefer Halilovic

5 remplissait les fonctions de chef d'état-major de l'armée de Bosnie, bien

6 que Rasim Delic ait été le commandant de l'état-major de l'armée de Bosnie,

7 c'est cela ?

8 R. Oui.

9 Q. Très bien. Vous avez appris que - je ne vais pas rentrer dans les

10 détails, mais il y a facteur temps qui intervient - que le

11 2 juillet, peut-être la nuit du 2, au début de la matinée du

12 3 juillet, il y avait une sorte d'affrontement armé entre les membres de la

13 9e et la 10e Brigade, d'une part et les membres du MUP, certains membres de

14 la sécurité militaire, d'autre part. Est-ce que vous avez appris, d'une

15 façon générale, qu'un tel affrontement avait eu lieu à cette date ?

16 R. Oui, je l'ai appris, mais c'est beaucoup plus tard parce que je n'étais

17 pas à Sarajevo, à l'époque.

18 Q. Je ne vais certainement pas vous demander de faire de commentaires à ce

19 sujet, sur le fond en ce qui concerne ces affrontements. C'était simplement

20 la date qui m'intéressait vraiment.

21 Ceci s'est passé le 2. Maintenant, en ce qui concerne le

22 7 juillet -- non, excusez-moi -- attendez un instant.

23 Vous avez su que cinq jours après le conflit armé, ce conflit armé a eu

24 lieu, celui dont vous avez entendu parler, que l'épouse de Sefer Halilovic

25 et son beau-frère avaient été tués dans une explosion, alors qu'ils se

Page 25

1 trouvaient au balcon de l'appartement de Sefer Halilovic ? En d'autres

2 termes, le 7 juillet, que la femme de Sefer Halilovic avait été tuée par

3 une explosion.

4 R. C'est deux ou trois jours plus tard que j'ai appris cela. J'étais à

5 Igman, à ce moment-là et c'est ce qu'on m'a dit. Quelqu'un du commandement

6 m'a dit ce qui s'était passé et on avait dit qu'ils allaient exprimer leurs

7 condoléances en temps utile.

8 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi conseil. Je ne suis

9 pas sûre que nous ayons l'année. Le 7 juillet de quelle année ?

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi. Je présente mes excuses. De

11 temps en temps, on ne dit pas quelle est l'année en question.

12 Q. C'était ce 7 juillet de l'année 1993 ?

13 R. J'ai lu dans le livre de Sefer et j'ai entendu plus tard

14 qu'effectivement, c'est bien cela. Mais j'étais à Igman au moment où j'ai

15 entendu dire que la femme de Sefer avait été tuée; apparemment, c'était

16 vrai.

17 Q. Est-ce que vous avez entendu aussi, en plus du fait que l'épouse de

18 Sefer avait été tuée, que le beau-frère de Sefer avait été tué également,

19 c'était un homme aux cheveux noirs, qui était en uniforme, à l'époque.

20 Avez-vous su qu'il avait été tué par la même explosion, sur le même

21 balcon ?

22 R. C'est ce que j'ai lu dans le livre.

23 Q. Alors, est-ce que la mort de l'épouse de Sefer a suscité un certain

24 intérêt de la presse locale à l'époque où cela s'est passé ?

25 R. J'étais hors de Sarajevo entre le 24 juin et 26 juillet. Il n'y avait

Page 26

1 pas de journaux, là, sauf Oslobodjenje qui était publié à Sarajevo, mais

2 rien de l'extérieur. Il y avait des combats qui se poursuivaient et

3 j'étais, moi-même, dans les collines. Je n'ai aucune idée de ce qu'ont dit

4 les médias.

5 Q. Oui. Excusez-moi -- je pense que vous avez répondu à mes questions,

6 vous n'êtes pas revenu à Sarajevo après le 26 juillet; c'est exact ?

7 R. Non.

8 Q. Bien.

9 R. Il y avait des combats qui se poursuivaient à Igman et j'envoyais mes

10 articles ou mes comptes rendus.

11 Q. Ecoutez, dans ce cas, je ne vais pas vous poser de questions concernant

12 cette phase.

13 Alors, pour poursuivre, vous avez connu Sefer Halilovic pendant la guerre,

14 commençant en 1992 et vous avez eu la possibilité de l'observer en tant que

15 chef de l'armée, de très près, à l'époque; est-ce que c'est exact ?

16 R. Oui, c'est exact. Je l'ai rencontré le 28 mai 1995, quelques jours

17 après sa nomination et depuis lors, il était très juste à l'égard des

18 journalistes et la même chose vaut pour moi, à mon égard. Il était réticent

19 pour ce qui est de donner des interviews, mais nous avons eu une

20 coopération satisfaisante dans l'ensemble.

21 Q. Très bien. Excusez-moi. Mais le compte rendu vient de révéler, de

22 montrer que vous dites que vous l'avez rencontré le

23 28 mai 1995 et je me demande si cela ne serait pas une erreur, soit de

24 traduction, soit de --

25 R. 1992. C'était cinq jours après sa nomination, sa désignation.

Page 27

1 Q. Je vous remercie. Il fallait qu'on corrige ceci, ces erreurs, quand

2 elles surgissent, Monsieur Hodzic. Mais je vous remercie de cela.

3 Pendant cette période, ce que vous avez observé de Sefer Halilovic, c'était

4 que c'était un officier très dévoué à une Bosnie unifiée, multiethnique;

5 est-ce exact ?

6 R. C'est exact et la même chose vaut pour tous les patriotes de Bosnie, à

7 l'époque.

8 Q. Bien. Effectivement, il était clair, pour vous, que pendant la période

9 où Sefer Halilovic dirigeait l'armée, pendant la période où il était le

10 chef de l'armée, avant le 8 juin, il avait fait comprendre très clairement

11 que l'armée devait respecter le caractère multiethnique de l'état de

12 Bosnie; est-ce exact ?

13 R. C'était au même moment que la présidence a défini sa propre plateforme;

14 tout allait dans cette direction et Sefer tenait tout à fait sa place, à ce

15 moment-là.

16 Q. Oui. Je voudrais vous poser quelques autres questions précises sur ce

17 que Sefer a dit sur ce sujet, là, en Herzégovine. Je voudrais simplement

18 vraiment vous poser des questions préliminaires, maintenant, concernant ce

19 qu'il a dit précédemment.

20 Est-ce que vous avez observé Sefer mettant en œuvre diverses règles ou

21 règlements dans l'armée qui étaient destinés à faire passer l'armée de

22 Bosnie sous le contrôle et la direction d'un système vraiment organisé ?

23 R. Oui. J'ai vu les documents en ce sens et j'en ai été témoin moi-même.

24 Je sais qu'il était celui qui a mis en place le commandement et la

25 direction, le système de commandement et de direction et qui a fait de

Page 28

1 l'armée de Bosnie une organisation véritablement militaire, dans la mesure

2 où il le pouvait, parce qu'après tout, c'était une armée de volontaires,

3 pour l'essentiel.

4 Q. Oui. En particulier -- bien, alors. Je viendrai à des questions

5 précises en ce qui concerne sa position politique -- ou pardon, les

6 objectifs -- quels étaient ses objectifs, lorsque nous en viendrons aux

7 questions concernant l'Herzégovine.

8 Maintenant, d'après cela, vous avez dit que vous aviez rencontré Sefer à

9 Konjic, lorsque vous tentiez de résoudre les problèmes relatifs au voyage

10 de votre mère. Vous avez dit, à l'époque, qu'il avait dit qu'il allait

11 aussi se rendre à Mostar.

12 Est-ce qu'à ce moment-là, il vous a dit qu'il allait coordonner l'opération

13 ou les opérations de combat, devrais-je dire, est-ce qu'il vous a dit qu'il

14 allait coordonner ses actions de combat en Herzégovine et en particulier,

15 est-ce qu'il a employé le mot "koordinacija ?"

16 R. Pour autant que je m'en souvienne, il n'a pas employé ce mot, à

17 l'époque. C'est une fois que nous sommes arrivés - je n'ai pas écrit cela

18 dans mon journal - c'est seulement lorsque j'ai écrit cela dans mes

19 articles. Il se peut qu'il ait parlé "d'exercer le contrôle ou la

20 direction" -- mais il se peut que ce soit une chose un peu différente. Je

21 ne suis pas tout à fait sûr. Il n'a pas véritablement employé le terme de

22 "coordination" parce que plus tard, chaque fois que je lui ai posé des

23 questions sur ceci, "Quel est votre rôle ?" Il répondait, "coordonnateur."

24 Mais il avait utilisé une expression différente, c'est l'impression que

25 j'ai eue. C'est ce que j'ai noté, à l'époque : "Exercer le contrôle ou la

Page 29

1 direction." Mais je n'ai pas cela par écrit. Je n'ai rien enregistré à

2 l'époque de ce qu'il avait dit.

3 Q. Bien. Pour les membres de la Chambre, si vous pouvez vous en souvenir,

4 quel était le mot précis qu'il avait utilisé à Konjic ? Est-ce que vous

5 êtes en mesure de dire ce que c'était ? Si vous ne pouvez pas vous

6 souvenir, cela ira.

7 R. Je ne peux pas dire très précisément, mais c'est ce que je me rappelle.

8 Il a dit qu'il exercerait la direction, qu'il assurerait la direction. Il

9 se peut qu'il ait dit autre chose, mais c'est ce que je me rappelle. C'est

10 l'expression qu'il a utilisée.

11 Q. Très bien. Vous avez indiqué qu'en temps utile, vous aviez clarifié

12 cela, en Herzégovine, avec lui. Je me demande, est-ce que vous pourriez

13 préciser au Tribunal à quel moment ceci a eu lieu ? Si vous pouvez vous

14 souvenir de la date, ce serait utile. A quel moment est-ce qu'il a utilisé

15 ce mot, "koordinacija ?"

16 R. C'est ici dans mon journal. Je pense que vous avez un exemplaire.

17 R. Oui.

18 Q. J'étais en train de préparer un article ou un compte rendu particulier

19 et je ne parvenais pas à trouver exactement la date. J'avais du mal à

20 définir la date exacte. Je tournais les pages. Il y a encore des blancs

21 qu'il faut passer. Il se peut que ce qui a été publié, c'est quelque chose

22 qui s'est passé plus tard ou par rapport à ce qui a été enregistré dans mon

23 journal.

24 Je pense que c'était avant le commencement des opérations. C'est

25 l'impression que j'ai, mais je ne l'ai pas écrit. Il se peut que cela ait

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1 été le 12, mais c'était certainement à la veille de l'opération. C'est à ce

2 moment-là que je l'ai interviewé. J'ai dit : "Il y a une opération qui est

3 censé commencer demain." Je lui ai dit : "Qu'est-ce que vous diriez

4 concernant votre propre rôle, mon Commandant ?" Il a répondu :

5 "Coordonnateur." C'est précisément ce que j'ai écrit, à l'époque : "Sefer -

6 coordonnateur." Vous pouvez voir, c'est écrit ici.

7 Q. Bien. Alors, parce que ce journal est votre propre document, est-ce que

8 vous avez un exemplaire de ce journal devant vous, pour le moment ?

9 R. Non.

10 Q. Bien. Alors, je reviendrai peut-être à la question après la suspension.

11 Je vous donnerai la possibilité de retrouver cela. Je vous remercie bien.

12 Merci pour cela.

13 Maintenant, je voudrais faire un saut dans le temps et je voudrais vous

14 poser des questions sur ce qui s'est passé à Konjic. Je voudrais savoir ce

15 qui s'est passé en Herzégovine.

16 Ce que je pourrais également vous indiquer, Monsieur Hodzic, je ne vais pas

17 repasser sur chacune des questions qui vous ont été posées par le bureau du

18 Procureur et qui vous a évoqué toutes ces questions de façon assez

19 complète. Ce sont sur des détails précis que je vais vous poser des

20 questions.

21 Maintenant, lorsque vous êtes allé en Herzégovine, la première nuit, pour

22 autant que vous vous souveniez, Sefer a logé dans l'appartement de Zuka;

23 c'est exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Quand il était plus au nord, près du Bataillon indépendant de Prozor

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1 avec la 45e Brigade ou le groupe opérationnel Zapad, où résidait-il

2 habituellement ?

3 R. On est allé rendre visite aux commandements de ces unités. Mais à ma

4 connaissance, on n'a jamais passé la nuit sur place. On rentrait toujours.

5 Q. Nous avons entendu des témoins nous expliquer que

6 M. Halilovic avait passé une nuit, et même plusieurs nuits, dans des

7 installations qui s'appellent la RAK, à Konjic ? Est-ce que ceci vous

8 rafraîchit la mémoire ?

9 R. Cela, c'est quelque chose d'autre. C'était dans la nuit du 4 ou 5. Ce

10 n'était pas dans la direction de Prozor. C'était dans la direction de

11 Konjic. On a passé la nuit là-bas, la nuit du 4 au 5 avec Delic, Cibo,

12 Suljevic, Ranje [phon]. On a dîné, puis, on est resté là assez longtemps.

13 Q. Je vous entends bien. Vous souvenez-vous avoir rencontré un certain

14 Mitke Pirkic, au cours de cette nuit du 4 au 5 à Konjic ?

15 R. Mitke Pirkic était le commandant de la 43e Brigade de Montagne de

16 Konjic. Quand on est arrivé à Konjic le 4, avec Delic -- enfin, pas dans la

17 même voiture avec Delic, mais 10 minutes après,

18 M. Delic et M. Halilovic et les autres ont eu une réunion avec Pirkic au

19 commandement, le commandement de Konjic. Moi-même, je n'étais pas présent à

20 cette réunion, comme d'habitude.

21 Q. Il s'agissait d'une réunion à caractère militaire ?

22 R. Oui. Une réunion à caractère militaire.

23 Q. Très bien. Quand vous êtes arrivés, le 1er septembre 1993, avec Sefer,

24 vous dites qu'il vous a dit, à peu près : "Toi, tu fais ton travail et je

25 fais le mien." Pour vous, qu'est-ce que cela signifiait, quand il vous a

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1 tenu ces propos ?

2 R. Je ne sais pas exactement ce que c'était censé signifier, mais on avait

3 des bonnes relations. Peut-être que cela signifiait tout simplement que je

4 ne devais pas me formaliser, si je n'avais pas le droit de participer à ces

5 réunions. C'est de cette manière que j'ai évalué ce qu'il m'a dit. Mais je

6 ne peux pas vous dire à 100 % que c'est exactement cela qu'il voulait dire.

7 Peut-être parce que je n'assistais pas au réunion, mais c'était déjà comme

8 cela avant. Quand il y avait des combats, je ne participais jamais aux

9 réunions. En tout cas, c'est indéniablement ce qu'il a dit. Il ne s'est pas

10 mêlé de mes activités professionnelles, non plus et moi, bien entendu, je

11 ne pouvais pas me mêler de ce qu'il faisait, non plus.

12 Q. Oui. Merci. Ce qui m'intéressait, c'était de savoir s'il n'était jamais

13 venu, s'il ne s'était jamais ingéré dans vos activités professionnelles

14 pour influencer la nature de vos articles, en particulier en Herzégovine ?

15 R. Non, il ignorait ce que j'écrivais, le sujet de mes articles où

16 j'écrivais, hier j'ai déjà dit que j'écrivais mes articles au poste de

17 police parce qu'ils étaient les seuls à disposer d'une machine à écrire,

18 et ensuite j'envoyais mes articles; lui n'était absolument pas dans les

19 parages quand cela se passait.

20 Q. Vous nous avez également dit hier lors de votre déposition que vous

21 aviez parlé avec Sefer, je ne me souviens pas si c'était le 1er ou le 2

22 septembre, vous pouvez nous le dire vous-même. Vous nous avez dit que vous

23 avez eu une discussion avec lui au sujet du plan Owen-Stoltenberg, au sujet

24 de son opinion sur ce plan. Pourriez-vous donner un peu plus de détails au

25 sujet de cette discussion, et en particulier, au sujet de la position de

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1 Sefer au sujet du plan Owen-Stoltenberg. Peut-être pourriez-vous commencer

2 très brièvement par expliquer au Juge ce que c'était ce plan Owen-

3 Stoltenberg pour vous, et ce que Sefer en pensait.

4 R. Au terme du plan Owen-Stoltenberg qui avait été conclu trois mois

5 auparavant, trois mois auparavant j'avais écrit une série d'articles, une

6 série de 40 articles. J'avais étudié les documents, tous les éléments qui y

7 avaient trait, je connais très bien ce plan. C'était un plan quelque peu

8 modifié de la proposition conjointe offerte par Milosevic et Tudjman à

9 Genève le 14 juin 1993 pour que la Bosnie soit divisés en trois parties.

10 Pour Milosevic, en trois républiques, pour Tudjman en trois provinces. Le

11 président Izetbegovic était présent, mais il est parti en claquant la porte

12 de cette réunion. Dans les jours qui ont suivi, il a continué à résister,

13 il y a eu des réunions à Zagreb, on s'est fait menaçant, il a menacé

14 Izetbegovic et les autres. Il est parvenu à convaincre les autres membres

15 de la présidence ainsi que Fikret Abdic. Le président Izetbegovic, à un

16 certain moment, qui finalement a cédé sous la pression et accepté la

17 division de la Bosnie en trois républiques, à condition que l'assemblée de

18 Bosnie-Herzégovine l'approuve.

19 Q. Au moment de l'opération Neretva -- non, je reviens en arrière, jusqu'au

20 27 septembre 1993, l'assemblée de Bosnie n'avait pas encore approuvé ce

21 plan, n'est-ce pas ?

22 R. Je ne sais pas ce que j'ai écrit là-dessus, je crois que c'est jusqu'au

23 27 septembre, -- non, pas le lendemain.

24 Q. Non. Il faut que les choses soient bien claires, le Tribunal, enfin les

25 Juges de la Chambre, souhaitent avoir certains éléments de base au sujet de

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1 ce point. Au moment où ont eu lieu les meurtre de Grabovica et Uzdol,

2 l'assemblée de Bosnie n'avait pas encore donné sont aval au plan Owen-

3 Stoltenberg, n'est-ce pas ?

4 R. Je crois que le 28 ou le 29 septembre, l'assemblée devait le faire ou

5 l'a fait, en fait, il y avait pas mal de conditions prévues.

6 Q. Ce qui m'intéresse, c'est la chronologie. Je souhaiterais vous poser

7 quelques questions au sujet du plan Owen-Stoltenberg. Ce plan Owen-

8 Stoltenberg prévoyait la division de la Bosnie en cantons, en respectant

9 les délimitations des provinces, ou des cantons locaux, et en trois

10 républiques ou en trois provinces. C'était une division à caractère

11 ethnique n'est-ce pas ? Le long des lignes de divisions ethniques ?

12 R. Oui, pour une grande partie, mais pas en province, en république. La

13 proposition initiale -- pour reprendre la proposition initiale de Milosevic

14 et pas de Tudjman, c'est celle de Milosevic qui a été acceptée, pas celle

15 de Tudjman. C'était le mot clé, effectivement cela suivait une logique

16 ethnique.

17 Q. Avant que l'assemblée de Bosnie n'ait approuvé le plan ou la

18 proposition Owen-Stoltenberg, dont vous nous indiqué que M. Izetbegovic y

19 était favorable, quel était le point de vue de Sefer Halilovic au sujet de

20 cette solution politique ? Quelle opinion a-t-il manifesté à ce sujet en

21 vous parlant, en discutant avec vous ?

22 R. Sefer Halilovic le répétait au moins dix fois par jour dans divers

23 contextes. Cela le gênait beaucoup, il ne voulait pas que la Bosnie soit

24 divisée, il disait qu'il ne fallait pas permettre cela, qu'il fallait que

25 cela reste un seul est unique pays.

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1 Q. Après la réunion de Zenica à laquelle vous n'avez pas participé, est-ce

2 que Sefer Halilovic a manifesté sa satisfaction de voir que l'armée avait

3 décidé de continuer à lutter pour une Bosnie unifiée ?

4 R. C'est vrai quand je l'ai rencontré à Konjic, quand je l'ai interrogé,

5 c'était le 23 août 1993. Je lui ai dit : "Est-ce que vous êtes d'accord

6 Sefer avec ce plan ?" Il a dit : "Pas de division de la Bosnie." Il était

7 très content. La guerre devait se poursuivre jusqu'à la libération du pays.

8 Q. Quand vous êtes allé en Herzégovine, vous avez discuté avec lui, vous

9 l'avez mentionné hier en réponse aux questions du Procureur. Quand vous

10 étiez en Herzégovine, le 1er ou le 2 septembre, qu'a-t-il dit sur ce sujet

11 R. C'était sur la base de Zuka, on y est resté jusqu'à deux heures ou

12 trois heures du matin. Ensuite Cikotic est arrivé avec un groupe de gens.

13 On en a parlé assez longuement, il a dit qu'il n'était pas d'accord avec le

14 président Izetbegovic, qu'il ne fallait pas que la Bosnie soit divisée.

15 Voilà l'essentiel.

16 Q. Oublions un instant Sefer Halilovic. Saviez-vous qu'au sein de la

17 Bosnie à l'époque, se déroulait un débat très vigoureux au niveau politique

18 entre ceux qui étaient favorables à la solution Izetbegovic pour une

19 version modifiée du plan Owen-Stoltenberg, et de l'autre côté ceux qui

20 rejetaient complètement le plan Owen-Stoltenberg ?

21 R. Non, Izetbegovic était d'accord. C'est lui qui parlait en notre nom.

22 Sur le principe, il s'était montré d'accord au sujet de cette division,

23 mais il a donné un certain nombre de principe, parce qu'il était contre le

24 fait qu'on procède à la division en fonction de l'appartenance ethnique.

25 C'est connu, parce qu'il y a eu une séance de l'assemblée nationale qui a

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1 été très vive. Avec un débat au cours duquel Softic, un député, à attaqué

2 le président Izetbegovic, l'accusant du fait de son approbation de cette

3 proposition, l'accusant de vouloir la fin de la Bosnie-Herzégovine et de

4 son peuple. L'opposant le plus vigoureux, c'était Muhamed Filipovic, qui

5 était complètement opposé à la division. Izetbegovic essayait de trouver un

6 équilibre parce qu'il était contre cette division. Il n'était pas favorable

7 à cette division comme cela a été suggéré par Owen -- telle qu'elle était

8 suggérée par Owen.

9 Q. Merci pour cette explication. Parlons toujours du 1er septembre. J'ai

10 quelques questions au sujet du village de Grabovica et de votre première

11 visite dans ce village. Vous souvenez vous être allé à Grabovica avec Sefer

12 Halilovic et Vehbija Karic ainsi que d'autres personnes et vous vous êtes

13 arrêtés sur la rive gauche du village ?

14 R. Oui.

15 Q. Il me semble que vous nous avez dit qu'avant de parler aux Loups

16 d'Igman, il y a eu une discussion avec certains réfugiés qui vivaient sur

17 la rive gauche, n'est-ce pas ?

18 R. Oui. Sur la rive gauche, il y avait des espèces de cabanes où

19 habitaient les ouvriers qui travaillaient à la centrale électrique. Là, se

20 trouvaient également des personnes qui avaient été libérés de Dretelj et

21 d'autres camps du HVO. Il y avait des réfugiés, mais l'essentiel des

22 personnes, c'étaient des gens qui avaient été libérés des camps. Ils

23 étaient épuisés. On leur a parlé, j'ai pris des photographies, ils se sont

24 réunis autour de nous. On a passé quelque temps avec eux, une demi-heure,

25 mais il fallait continuer. Ensuite, on est parti.

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1 Q. Si vous avez été en mesure d'entendre les propos tenus par Sefer

2 Halilovic, à ce moment-là, qu'est-ce qu'il leur a dit à ces gens, à ces

3 gens qui s'étaient réunis autour de vous ?

4 R. Franchement, je ne m'en souviens pas. J'ai écrit cela dans un article.

5 Cela figure sans doute dans un des articles. J'ai enregistré cela,

6 également et cela faisait partie de mes reportages à la radio, mais les

7 gens se sont plaints. Il y en a un qui nous a expliqué, par exemple, que

8 depuis trois jours et trois nuits, ils n'avaient plus d'eau. Il y en a un

9 qui a expliqué qu'il avait été forcé de boire sa propre urine. Ils ont

10 expliqué qu'ils avaient été soumis à des sévices. C'était une atmosphère

11 très lourde. Ces gens étaient vraiment dans un état déplorable. Il leur a

12 donné un certain espoir. Il leur a dit qu'il fallait garder l'espoir, qu'il

13 y avait toujours de l'espoir.

14 Q. Je souhaitais vous demander d'essayer de vous souvenir, parce que

15 certaines des personnes de l'endroit -- je ne peux pas dire leurs noms,

16 certaines des personnes de la région, qui étaient croates, ont dit avoir

17 accueilli certains réfugiés chez eux. A ce sujet, une question : vous

18 souvenez-vous avoir rencontré des Croates, à cette occasion ou avoir

19 rencontré des Bosniaques qui avaient été recueillis par des Croates ?

20 R. Non. Cela, je ne m'en souviens pas. Je ne crois pas, non. Non, on n'est

21 pas allés dans ces maisons, parce qu'on était pressés. On allait très vite

22 d'un endroit à l'autre.

23 Q. Il s'agit simplement d'une espèce d'attroupement au bord de la route,

24 au moment où votre véhicule s'est arrêté à côté des cabanes des Loups

25 d'Igman ?

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1 R. C'était effectivement devant ces cabanes. Il y avait une cour très

2 grande sur la route entre Konjic et Mostar.

3 Q. Merci. Le 2 septembre -- non, peut-être que je ne vais pas parler du 2

4 septembre. Vous souvenez-vous avoir vu M. Cikotic, à un moment quelconque,

5 en Herzégovine, le premier jour où vous étiez dans cette région, à peu

6 près, à cette période ?

7 R. Oui.

8 Q. Je --

9 R. Le premier ou le deuxième jour -- la première nuit ou la deuxième

10 nuit, peut-être. C'était au début, c'est à ce moment-là que je l'ai

11 rencontré.

12 Q. Bien. J'aimerais préciser un certain nombre de choses pour nous faire

13 comprendre ce qui se passait, à l'époque, là-bas. Vous a-t-il parlé d'un

14 canon qu'on avait pris dans un musée, dont on s'était servi ?

15 R. Je ne sais pas si c'est lui qui m'a dit cela. Mais je connais cet

16 histoire, effectivement. C'était un obusier de calibre 115 millimètres de

17 la Deuxième guerre mondiale et des combattants ont été le chercher au

18 musée. Ils l'ont surnommé Nana et ils l'ont remis en état. Je crois que

19 c'est Cikotic qui me l'a dit -- si c'est à ce moment-là que cela s'est

20 passé. Mais je ne sais pas. Mais je sais qu'on a fait une petite beauté à

21 cette Nana, si je puis dire, si c'est ce à quoi vous pensez.

22 Q. J'imagine que vous avez remarqué qu'en Herzégovine, l'armée de Bosnie

23 disposait de peu d'armes d'artillerie, n'est-ce

24 pas ?

25 R. Je n'ai vu qu'une pièce, une pièce de 155 millimètres de calibre ou

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1 peut-être deux. Non, une.

2 Q. Passons à la journée suivante. Vous nous avez expliqué que vous étiez

3 parti en voiture avec Sefer Halilovic, que vous étiez allé à Diva

4 Grabovica, puis, à Kostajnica. A Diva Grabovica, vous nous dites avoir vu

5 des pancartes qui indiquaient la présence de champs de mines. Est-ce que

6 vous avez pu établir, pour vous-même, où se trouvaient ces champs de

7 mines ?

8 R. C'est la première fois et d'ailleurs, la seule fois de ma vie que

9 j'étais à cet endroit. Je crois qu'il y avait des indications au bord et

10 quelqu'un a dit : "C'est un champ de mines." On est sorti de la voiture.

11 "Est-ce qu'on peut continuer ?" "Non." Ensuite, Sefer a dit : "C'est le

12 destin," et il est parti. On l'a suivi. Ensuite, on a continué en voiture

13 vers le village, par la forêt.

14 Q. Ensuite, vous êtes allés à Kostajnica et c'est à ce moment-là que vous

15 avez parlé avec des réfugiés de la région de Capljina, n'est-ce pas ?

16 R. Oui. La plupart venaient de Capljina.

17 Q. Je ne vais pas vous demander de passer en revue les divers passages de

18 votre livre, mais il est exact, n'est-ce pas, que c'est au cours de cette

19 discussion que Sefer Halilovic a dit quelque chose que vous aviez

20 enregistré et il a tenu les propos suivants : "Nous ne sommes pas une armée

21 punitive ou qui se venge."

22 R. Oui.

23 Q. Ce qu'il a dit, ce n'était pas un discours. Mais ces observations qu'il

24 a faites, ce jour-là, c'est le genre d'observations, de propos qu'il

25 tenait, lorsqu'il se trouvait dans ce type de situations, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui, c'était assez caractéristique de la manière dont il s'exprimait.

2 J'ai déjà eu l'occasion de l'entendre et je le dis, d'ailleurs, dans mon

3 livre, souvent. Il me semble qu'il respectait la loi et le droit, même

4 trop, trop, vu les circonstances. Au début de la guerre, il y avait un

5 certain Juka Prazina qui était un combattant et en fait, c'était un

6 criminel de droit commun, tout simplement. Il était vraiment très gênant.

7 Certains avaient dit qu'il fallait le liquider, le tuer, s'en débarrasser.

8 Une fois, j'ai parlé de ces rumeurs, de ces observations avec Sefer et il a

9 dit : "Non, non, on ne peut pas faire cela. Il faut respecter la loi. Il y

10 a une loi. Ils peuvent l'arrêter, il peut être sanctionné. Si aux termes de

11 la loi, il faut le libérer, d'accord. S'il doit être pendu, il sera pendu,

12 en fonction de la loi. Mais personne ne doit prendre la justice entre ses

13 mains."

14 Q. Je voudrais, maintenant, passer à une conversation que vous avez eue

15 avec Sefer Halilovic dans la voiture menant à Dobro Polje. Vous lui avez

16 demandé ce qu'il fallait faire au sujet de l'enquête, ce dont il avait

17 parlé avec Bakir Alispahic à Konjic. Vous souvenez-vous de cette

18 conversation ?

19 R. Oui, je m'en souviens.

20 Q. Est-ce que ce qu'il a dit dans cette voiture, à cette occasion,

21 correspondait avec ce que vous venez de nous dire au sujet de Sefer

22 Halilovic et l'enquête sur des questions criminelles --

23 R. Oui.

24 Q. -- à savoir qu'il était important que tout acte criminel fasse l'objet

25 d'une enquête par les instances compétentes sans aucune interférence ?

Page 41

1 R. C'est tout à fait cela et pour moi, c'était clair. Il était clair qu'il

2 était comme cela et qu'il était content comme cela.

3 Q. Revenons un instant à cette conversation. Est-il exact qu'il vous a dit

4 qu'il avait déjà donné à Namik Dzankovic, l'officier chargé de la sécurité

5 au sein de l'équipe d'inspection. Il lui a donnée la mission de faire

6 exactement cela, c'est-à-dire, d'enquêter sur les crimes.

7 R. Il ne m'a donné aucun nom à ce moment-là, mais il a effectivement dit

8 qu'il y avait des gens qui étaient chargés d'enquêter sur les crimes et que

9 c'était leur mission.

10 Q. Dans le cadre de vos activités journalistiques, quelque temps plus

11 tard, est-ce que vous avez parlé avec Namik Dzankovic, en personne, pour

12 voir ce qu'il avait à dire à ce sujet ?

13 R. Oui, j'ai parlé à Dzankovic quand je travaillais à cette série

14 d'articles et je lui ai téléphoné, je lui ai demandé si je pouvais le

15 rencontrer, je lui ai demandé s'il avait reçu des ordres de Sefer Halilovic

16 au sujet de ces crimes. Il a répondu que oui. Il est venu avec Nedzad et

17 Brankovic, il est venu me voir. Il a dit : "Non, je ne peux pas accepter

18 cela, vous devez enquêter et voir ce qu'il faut faire."

19 Q. Quand vous dites cela, vous nous dites qu'en fait, Halilovic était en

20 train de dire à Dzankovic que, lui-même, Halilovic, ne cautionnait pas ces

21 crimes, qu'il n'y était pas associé ?

22 R. Oui, qu'il n'avait absolument rien à faire avec ces crimes. Il n'avait

23 rien à faire avec tout cela, cela n'avait aucun rapport avec lui.

24 Q. Bien. Revenons au 3 septembre, la réunion à Kostajnica. Où se trouve

25 Kostajnica ? Pouvez-vous nous indiquer quelle est l'unité militaire la plus

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1 proche de Kostajnica, à l'époque ?

2 R. Oui, à Kostajnica ou plutôt, Buturovic Polje, c'est là où se trouvait

3 la 45e brigade et la 46e brigade.

4 Q. C'est là que se trouvait le QG de Haso Hakalovic, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Merci. Certains des réfugiés de Kostajnica étaient bouleversés, ils

7 parlaient de "vengeance," au cours de leurs discussions, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, je me souviens, par exemple, qu'il y a une femme qui a dit qu'il y

9 avait 11 membres de sa famille qui avaient été tués, puis, il y avait

10 pleins d'autres choses, beaucoup plus que je n'aie été en mesure

11 d'enregistrer, si je puis dire; l'atmosphère était très menaçante.

12 Q. C'est dans ce contexte que Sefer Halilovic a prononcé les propos que

13 vous avez enregistrés et dont vous nous avez parlé à l'instant, n'est-ce

14 pas ?

15 R. Oui. J'ai rapporté ces propos de manière exacte, je n'ai changé aucun

16 mot à cette déclaration. J'ai enregistré cela sur une cassette et même

17 quand il y avait une phrase qu'il -- qu'il ne finissait pas une de ses

18 phrases, je les laissais telles quelles.

19 Q. Maintenant, je souhaiterais qu'on parle du

20 4 septembre 1993.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le moment est peut-être bien choisi pour

22 faire une pause.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons faire une pause et reprendre

25 à 11 heures.

Page 43

1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

2 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Maître Morrissey.

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, merci. Nous avons,

5 maintenant, retrouvé la page du journal dont parlait le témoin.

6 Q. Merci Monsieur Hodzic. Ce que je vais faire, c'est vous montrer cette

7 page dont vous avez parlé, puis, peut-être --

8 M. MORRISSEY : [interprétation] -- nous réussirons à retrouver la date.

9 Est-ce que cette page pourrait être montré à l'écran ? Pour le

10 journal, la cote provisoire était MFI292. La page que nous voulons vous

11 montrer porte le numéro ERN 01057811, mais parce que c'est manuscrit, c'est

12 écrit à la main, je voudrais également vous demander qu'on aide le témoin

13 afin de pouvoir avoir cet exemplaire papier.

14 Q. Ce que je vais vous demander de faire, lorsque vous l'aurez à l'écran,

15 Monsieur Hodzic, ce sera simplement de le lire dans votre propre langue, le

16 lire à haute voix afin que les interprètes puissent en donner

17 l'interprétation pour les membres de la Chambre.

18 R. Ce que j'ai écrit, ici, mais je ne vois pas la date,

19 je lis : "Sefer Halilovic coordonne les opérations militaires de Bugojno à

20 Mostar."

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas un mot

22 d'interprétation, je regrette de le dire.

23 Q. Excusez-moi, Monsieur Hodzic, c'était un problème d'écouteur, je crois.

24 Maintenant c'est réglé. Pour être complet, pour que le membre de la Chambre

25 ait une idée bien claire, je pense qu'on peut lire ce qui est au-dessus et

Page 44

1 si vous voulez simplement lire les notes qui se trouvent dans la partie

2 haute de la page, expliquer ce dont il s'agit.

3 R. Ici en haut de la page j'ai écrit : "Caco - la 10ème de Montagne. Celo

4 - le 9ème Motorisée. Adnan - le 2ème Bataillon indépendant de Sarajevo."

5 J'ai tiré une ligne en-dessous, puis il y a un tiret : "Sefer Halilovic

6 coordonne les opérations militaires entre Bugojno et Mostar." Ceci est

7 manuscrit, vous voyez c'est mon écriture. Ensuite, j'ai pris certaines

8 notes au cours de l'action, juste avant que les activités de combat ne

9 commencent, de façon à savoir plus tard dans mes articles comment j'y

10 ferais référence. Sefer m'a dit à ce moment-là: "Je suis le coordonnateur."

11 C'est la première que j'ai entendu dire cela.

12 Q. Pour ce qui est de retrouver la date précise, je comprends que vous

13 disiez que cela a été fait avant le commencement des opérations de combat.

14 Est-ce qu'il serait possible, si on vous fournissait un exemplaire de votre

15 journal, sous sa forme originale -- seriez-vous prêt à jeter un coup d'œil

16 à cette page, et les pages qui l'entourent, pour voir si vous réussissez à

17 retrouver la date précise ? Est-ce que vous pourriez faire cela de façon à

18 ce que nous puissions -- peut-être si vous voulez lors de la prochaine

19 suspension ?

20 R. Oui, mais j'ai déjà regardé cela, et je sais exactement ce qui est dit

21 là.

22 Q. Bien.

23 R. Comme je vous l'ai déjà dit, dans mon journal, je commençais simplement

24 une page, c'était une période difficile, j'avais moi-même été victime d'un

25 traumatisme. Les dates sont peut-être un peu confuses, et ici, il se peut

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1 qu'il y ait quelque chose d'antidaté ou de postdaté. D'autant que je me

2 souvienne, la page précédente parle de Dreznica, de combats à Dreznica, et

3 je ne suis pas tout à fait certain de cela, mais je pense que cela devrait

4 être après Dreznica. Un certain temps après, mais je ne peux pas être

5 absolument certain. Je pense, en fait, que c'était avant. Je me rappelle

6 que lorsque nous avons parlé, j'ai trouvé que c'était assez surprenant, et

7 même choquant, lorsqu'il ma dit ce qu'il ma dit concernant le fait qu'il

8 était coordonnateur. J'ai pensé en mon for intérieur : Il doit vouloir dire

9 commandant ou chef, mais il a dit coordonnateur, et c'est ce que j'ai à ce

10 moment-là noté.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, y a-t-il des objections à

12 fournir ? Un exemplaire papier du journal pendant la prochaine suspension

13 de façon à rafraîchir la mémoire du témoin.

14 Mme CHANA : [interprétation] Certainement pas, Monsieur le Président, elle

15 sera fournie.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Je suis reconnaissant à ma consoeur de

18 cela.

19 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi conseil. En fait, je peux aider

20 les membres de la Chambre parce que je l'ai directement sous la main.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vois, mais non, pas maintenant, peut-

22 être qu'on risquerait de perdre du temps.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Ce que j'ai à l'esprit, c'est que le témoin

24 pourra examiner cela, à ce moment-là, il aura tout le loisir de regarder le

25 texte, mais je suis reconnaissant à l'Accusation en tout état de cause et

Page 46

1 c'est cela qu'on fera.

2 Q. Très bien.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

4 je demande que cette page soit présentée comme pièce à conviction

5 distincte, compte tenu du mot qui y est employé.

6 [Le conseil de la Défense se concerte]

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Nous pensons que non -- est-ce que je

8 pourrais demander un petit peu d'aide ?

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la cote MRI293.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] 293. Merci, je vous suis reconnaissant.

11 Q. Merci Monsieur Hodzic. Avant la suspension, nous nous trouvions au 4

12 septembre. Ce jour-là, vous avez dit que vous étiez assis juste devant la

13 résidence du Dr Cibo, que vous aviez eu un télégramme urgent, en fait, qu'à

14 cette occasion, on vous a dit qu'il y avait un télégramme urgent qui est

15 arrivé de Mostar, plus particulièrement, c'était un télégramme d'Arif

16 Pasalic, qui indiquait qu'il était probable qu'il y aurait une très forte

17 offensive du HVO à un moment donné la semaine d'après.

18 R. C'est cela que j'ai dit. J'ai vu ce télégramme plus tard dans les

19 dossiers, dans les archives de Bosnie Herzégovine, et je l'ai inclut dans

20 mon livre.

21 Q. A votre connaissance à l'époque, les dirigeants du HVO avaient dit très

22 clairement et publiquement leur intentions de créer une capitale, d'un

23 nouvel état d'Herceg-Bosna, en l'occurrence, cela devait être la ligne de

24 Mostar. Est-ce que exact ?

25 R. Oui. Cela serait la capitale. C'est comme cela qu'ils l'ont appelée.

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1 Q. Je ne veux pas vous poser pour le moment de questions concernant le

2 tableau général de la situation à Mostar. Je vais simplement vous poser

3 deux questions très brèves. Si vous voulez répondre de votre mieux pour

4 autant que vous sachiez la réponse à la question. Quelle était la situation

5 du point de vue humanitaire, pour ce qui est des civils dans l'état de

6 Bosnie, dans la ville de Mostar à l'époque ?

7 R. Je n'étais pas là moi-même à ce moment-là; toutefois, sur la base de ce

8 que j'ai pu glaner comme information dans les médias et les documents que

9 j'ai eu l'occasion d'examiner en ce qui concernait une série différente que

10 j'ai publié, la situation était critique, elle était tout simplement

11 épouvantable. Le HVO ne permettait à aucun convoi humanitaire de passer,

12 c'était la situation à l'époque, c'était épouvantable, c'était horripilant.

13 Pour la première fois, je suis entré dans Mostar, je crois en septembre

14 1994, mais la ville avait été entièrement détruite. Je n'avais aucune idée

15 d'où les habitants de la partie orientale de la ville vivaient. Il n'y

16 avait plus de toit au-dessus de leurs têtes, c'était une catastrophe.

17 Q. Tenant compte du fait que vous n'avez pas vu la ville vous-même à ce

18 moment-là en septembre 1993, je ne vais pas vous poser d'autres questions à

19 ce sujet mais je voudrais savoir, il vous est apparu, au moment où vous

20 étiez avec Sefer Halilovic que, personnellement, il était très préoccupé et

21 inquiet du sort des civils à Mostar; est-ce exact ?

22 R. Oui. Je crois que cela a été une période très perturbée à Mostar aussi.

23 Autant que je le sache, il y avait passé très longtemps comme officier.

24 Deuxièmement, il avait à faire fasse à une situation dramatique. En temps

25 de guerre, il est entré à Mostar comme chef d'état major, et il y avait

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1 comme une sorte de lien imperceptible, si je peux l'appeler comme cela,

2 entre lui et les soldats.

3 Q. Je voudrais qu'on reprenne à la date du 4 septembre. A cette occasion,

4 vous avez dit qu'il y avait eu une réunion entre le commandant Delic et son

5 groupe sur la route et Sefer Halilovic et son propre groupe. Vous avez dit

6 qu'après cette réunion, il avait été convenu -- je vais reposer la question

7 autrement. Après cette réunion sur la route, il y avait eu ensuite une

8 conférence qui a eu lieu à la base de Zuka à Donja Jablanica; est-ce

9 exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Il y avait un accord qui a été fait -- enfin non, je vais recommencer.

12 Cette réunion à Donja Jablanica -- vous vous étiez mis d'accord lorsque

13 vous vous êtes séparés de Delic, lors de cette réunion au bord de la route

14 ou sur la route; est-ce exact ?

15 R. Oui. Lorsque nous étions là, pas plus tôt, mais nous avons pris des

16 directions différentes, mais nous nous étions mis d'accord concernant cette

17 réunion.

18 Q. Ensuite dans la voiture, après cette réunion sur le bord de la route,

19 mais avant d'être à la réunion de Donja Jablanica, c'est à ce moment-là que

20 Sefer a fait son commentaire au Dr Cibo concernant Delic; est-ce exact ?

21 R. Oui. Bien qu'il ait fait ce commentaire pour moi aussi.

22 Q. Le contexte de ce commentaire était que vous étiez déjà -- peut-être

23 que vous étiez déjà en train d'aller en voiture pour vous rendre à une

24 réunion avec le commandant Delic, un peu plus tard, dans la matinée; est-ce

25 exact ?

Page 49

1 R. Nous étions en route vers Neretvica, nous devions revenir de Neretvica

2 et aller à la réunion. Sur la route près de Here, nous avons cherché à voir

3 le commandant du 6e corps et d'une autre brigade, mais nous n'avons pas pu

4 les trouver.

5 Q. Selon vos observations, le commandant du 6e corps -- non, je retire ma

6 question. Je vous poserai des questions à ce sujet par la suite.

7 J'ai une question rapide sur le commentaire que Sefer Halilovic à fait au

8 Dr Cibo ainsi qu'à vous-même, concernant ce qu'il avait allégué, concernant

9 Delic. Il vous a dit que Delic avait, effectivement, limité ses compétences

10 ou ses fonctions à un rôle de gestion. Est-ce que vous êtes capable de vous

11 rappeler les termes précis qu'il a employés ? Si vous ne pouvez pas, vous

12 ne pouvez pas. Mais qu'est-ce que vous pouvez nous dire en ce qui concerne

13 les mots précis qu'il a employés ?

14 R. Je pense qu'il a dit quelque chose dans ce genre : "Delic a reçu une

15 mission qui était de m'enlever autant de pouvoir qu'il le pourrait, autant

16 de compétence qu'il le pourrait," et que lui-même --il s'agissait de

17 Halilovic - n'aurait plus sous son autorité, que quelques questions peu

18 importantes, comme un département d'administration, quelque chose de ce

19 genre. Rien d'important.

20 Q. Oui, je comprends. A cet égard, je vais passer rapidement à autre

21 chose. Vous avez mentionné qu'à Hrasnica, lorsque vous êtes revenus de

22 Sarajevo, par la suite, dans la nuit du 7 septembre, à cette occasion,

23 Sefer a eu du mal à faire en sorte que des camions puissent être

24 disponibles, il a eu du mal à convaincre Caco de venir sur ce trajet. Est-

25 ce que vous vous rappelez de cet incident ?

Page 50

1 R. Oui, oui.

2 Q. Est-il vrai que Sefer Halilovic vous a donné l'impression d'avoir à

3 convaincre des soldats de coopérer aux actions de combat ? Enfin, non, je

4 retire ma question, pas les soldats. Que Sefer Halilovic avait eu à

5 convaincre des officiers de l'aider pour des opérations de combat dans

6 lesquelles il était parti prenante en Herzégovine, à ce moment-là.

7 R. A l'évidence, oui.

8 Q. Vous avez vu, à ce moment-là, que Sefer avait à traiter avec des

9 officiers, plus tard, en essayant de les convaincre plutôt qu'en leur

10 donnant des ordres, comme un commandant le ferait normalement; est-ce

11 exact ?

12 R. C'est exact. Mais c'est ce qui était surprenant, mais ceci ne m'a pas

13 surpris, à l'époque, parce que c'était la situation jusqu'à la fin de la

14 guerre dans l'armée. Il n'y avait pas de différence notable entre un

15 commandant, d'une part et un soldat, de l'autre.

16 Q. Oui. Monsieur Hodzic, nous avons entendu des dépositions concernant la

17 théorie selon laquelle les ordres militaires sont censés être donnés par un

18 commandant et qu'ils doivent, en théorie, parvenir jusqu'à un subordonné et

19 de subordonné en subordonné et ainsi de suite. Mais dans la réalité, dans

20 ce qui était, à ce moment-là, l'armée de Bosnie, ceux qui lançaient une

21 opération devaient œuvrer en convainquant les plus jeunes qu'il fallait

22 faire ce qu'on leur demandait de faire, que ce soit d'aller au combat ou de

23 remplir d'autres fonctions de mission; est-ce exact ?

24 R. C'était souvent le cas, pas seulement dans cette situation

25 particulière. C'était le cas dans d'autres combats ou batailles, aussi. Le

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1 commandant essayait de convaincre les gens, mais les gens refusaient tout

2 simplement de faire quoi que ce soit et le commandant se retrouvait

3 absolument sans pouvoir dans de telles situations.

4 Q. Oui. Certainement dans le cas de deux personnes - je vais en parler,

5 Zuka et Celo - vous n'avez pas vu Sefer Halilovic émettre directement des

6 ordres à l'un ou à l'autre, à l'époque où vous vous trouviez en

7 Herzégovine; est-ce exact ?

8 R. J'ai toujours dit qu'ils tenaient leurs propres réunions. Je l'ai vu

9 dire à Zicro Suljevic d'aller avec Buza. C'est une chose dont j'ai été

10 personnellement témoin, mais je ne l'ai pas vu exactement donner des ordres

11 à qui que ce soit. Si cela avait été le cas, je l'aurais noté, j'aurais

12 même fait des prises de vue et je pourrais vous les montrer maintenant.

13 Mais je n'ai aucune idée de ce qui s'est passé, de ce qui se passait à huis

14 clos, à l'époque, dans les coulisses.

15 Q. Bien sûr. Je ne vous demande pas de faire des hypothèses et des

16 spéculations en ce qui concerne ces questions, mais simplement de faire vos

17 commentaires sur que vous avez vu, vous-même, de vos propres yeux.

18 Je voudrais vous poser la question suivante : est-ce que vous avez jamais

19 vu une personne donner directement un ordre à Ramiz Delalic, Celo ? Enfin,

20 je vais vous poser cette question en premier lieu, ensuite, j'ai une autre

21 question après cela.

22 R. Non, certainement, pas question.

23 Q. Simplement sur la base de ce que vous avez observé, est-ce que cela

24 aurait été des choses très réalistes, compte tenu de ce vous saviez de

25 Ramiz Delalic, Celo

Page 52

1 R. Je regrette, mais je ne comprends pas votre question. Qu'est-ce que

2 exactement vous voulez dire qu'il aurait été réaliste pour quelqu'un dans

3 les ordres de Ramiz Delalic ? Est-ce ce que vous avez à l'esprit ?

4 Q. Oui.

5 R. Je n'ai absolument aucune idée de qui cela aurait pu être. Il était

6 subordonné au 1er Corps, je l'ai rencontré ici une ou deux fois, mais il

7 venait là et je n'avais absolument aucune idée de ce qu'il faisait. De

8 façon précise, il a demandé des renforts, que des officiers soient envoyés.

9 Je suis allé à sa brigade deux ou trois fois, en ma qualité de journaliste,

10 j'ai vu des soldats qui partaient pour le front. La situation était

11 critique, mais je n'ai rien entendu de particulier concernant Celo, à

12 l'époque. Tout ce que j'ai entendu le concernant de péjoratif, par la

13 suite, c'était par rapport à un serbe qu'il avait tué au début de la guerre

14 et ceci se passait au beau milieu d'une cérémonie de mariage. Si vous

15 pouviez, s'il vous plaît, préciser ou expliquer ce que vous demandez parce

16 que je crois que je n'ai toujours pas compris votre question.

17 Q. C'était une question vraiment très impressionniste, mais je pense que

18 vous avez fait deux tentatives de bonne foi pour essayer d'y répondre. Je

19 ne vais pas insister.

20 J'aimerais vous demander -- vous avez mentionné le fait que vous avez vu

21 Sefer Halilovic donner un ordre à Zicro Suljevic d'aller avez Buza. Est-ce

22 que vous avez jamais vu l'ordre créant l'équipe d'inspection ?

23 R. Oui.

24 Q. Je vois. Quand est-ce que vous avez vu cela ? Est-ce que vous l'avez vu

25 lorsque vous étiez en Herzégovine ou par la suite ou lorsque vous

Page 53

1 effectuiez des recherches ?

2 R. Non. Je n'avais aucune idée de cet ordre. C'est par la suite que j'ai

3 obtenu un exemplaire, une copie des archives.

4 Q. Bien.

5 R. Pendant mes recherches.

6 Q. Je ne vais pas vous poser davantage de questions sur ce point, si tel

7 est bien le cas aussi.

8 Maintenant, j'avais fait un saut en avant, mais je reviens au

9 4 septembre. Vous avez dit que vous n'aviez pas participé à la réunion à

10 Donja Jablanica, mais c'est un fait, n'est-ce pas, que Delic, Sefer et un

11 certain nombre d'autres commandants ont participé à une réunion à Donja

12 Jablanica, plus tard, le 4 et qu'il sont restés pour cette réunion pendant

13 plus d'une heure à discuter différentes questions; est-ce que c'est exact ?

14 R. Je n'ai aucune idée de ce qu'ils ont discuté. Je n'ai rien entendu à ce

15 sujet. Ils se trouvaient là, ils ont parlé, ils ont tenu une réunion. Une

16 fois que cette réunion a été terminée, j'ai noté une brève déclaration de

17 Delic, puis, nous nous sommes mis en route.

18 Q. Pourrais-je vous demander si vous vous rappelez de ceci; peut-être que

19 non. Est-ce que vous avez jamais vu une carte qui était signé, à la fois,

20 par le commandant Delic et le chef d'état-major Halilovic, après cette

21 réunion ?

22 R. Non, je n'ai pas vu de carte. La première fois que je l'ai vue, c'était

23 après la guerre. Elle a été publiée dans un journal de Sarajevo. Juste

24 après le titre, ils ont montré peut-être la moitié de la carte.

25 Q. Bien. Alors, peut-être que nous allons pouvoir gagner un petit peu de

Page 54

1 temps pour plus tard. Il y a juste quelques documents. Je voudrais vous

2 demander si vous ne les avez jamais vus, à l'époque. Il se peut que ce soit

3 le cas ou non. Vous pouvez nous le dire. Est-ce que vous avez vu, pendant

4 que vous étiez encore en Herzégovine, un ordre de combat ayant pour titre

5 "Défense des droits de l'homme, Vrdi 1993," ordre de combat daté du 11

6 septembre et signé par Zulfikar Alispago ?

7 R. Je ne me souviens pas avoir lu cela. Je ne crois pas l'avoir jamais

8 obtenu à aucun stade, par la suite. Certainement, je ne l'ai pas

9 actuellement.

10 Q. Non, non, ça va bien. Je ne suis pas en train de suggérer que vous

11 devriez l'avoir eu. Mais en pratique, est-ce que c'était la pratique des

12 commandants en Herzégovine, lorsque vous étiez là-bas, de vous montrer des

13 ordres de combat ou pas ?

14 R. Personne ne m'a jamais rien montré, ni Sefer, ni personne d'autre. Je

15 ne suis pas sûr de savoir qui aurait eu le droit de me montrer quoi que ce

16 soit, y compris Karic et tous les autres. Sefer m'a montré quelque chose

17 deux ou trois fois. Mais je n'ai jamais tenu ces documents dans -- je ne

18 les ai jamais eus à la main, aucun de ces ordres.

19 Q. Par rapport à cela, vous n'avez pas vu la carte -- je pense que vous

20 avez répondu à cette question déjà -- excusez-moi.

21 Très bien. Je passe maintenant à la journée du 5 septembre.

22 Approximativement, à quelle heure est-ce que vous êtes partis pour

23 retourner à Sarajevo, après la réunion de Dobro Polje dont vous avez parlé

24 dans votre déposition ?

25 R. Je ne peux pas dire exactement quand nous sommes repartis. C'était dans

Page 55

1 la soirée. Je ne saurais vous dire quel était l'heure, mais nous sommes

2 arrivés à une fontaine près d'un village croate. Je ne suis pas sûr du nom

3 de ce village. On s'arrêtait toujours à cet endroit-là, entre Jablanica et

4 Sarajevo et également, dans le sens inverse. L'eau qui s'y trouvait était

5 excellente et fraîche. Il y avait un pommier avec des pommes qui étaient

6 mûres. A une vingtaine de mètres de là, il y avait un groupe de maisons,

7 toutes regroupées. Nous sommes arrivés de Dobro Polje, nous nous sommes

8 arrêtés là comme nous le faisions toujours. J'ai vu qu'il y avait une

9 lumière qui brillait dans l'une des maisons. C'était une lampe à huile, en

10 l'occurrence. Nous sommes partis de Dobro Polje pour Sarajevo très

11 rapidement et nous avons toujours essayé de ramener des aliments, des

12 vivres à Sarajevo parce que cela coûtait les yeux de la tête, à Sarajevo,

13 pour avoir quoi que ce soit, tandis qu'à cet endroit-là, tout était à bon

14 marché. J'ai essayé d'obtenir du fromage parce que la différence entre les

15 prix était énorme. A Sarajevo, cela pouvait coûter entre 30 et 40

16 deutschemarks, tandis que là, c'était seulement 2 deutschemarks. J'ai dit à

17 Sefer : "Est-ce que tu pourrais attendre une minute, s'il te plaît ? Je

18 vais à cette maison, là où on voit qu'il y a une lampe qui brille, je vais

19 leur demander s'ils ont un peu de fromage à vendre." Il a dit : "Mais

20 qu'est-ce qui te prend ? Il est passé 10 heures. On n'a pas le temps pour

21 cela."

22 Je portais une veste de camouflage et il a dit : "Si tu te présentes en

23 uniforme, à leur porte, comme cela et que les gens qui sont là-bas sont des

24 Croates, tu va terrifier ces malheureux et on ne parviendra absolument à

25 rien. Ils ne te donneront rien pour rien, mais je te conseille de ne pas y

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1 aller. Laisse ces gens dormir, ne les dérange pas."

2 Nous nous trouvions à ce puits, à cette fontaine, il était passé 10 heures.

3 Je ne parviens à me rappeler exactement quand nous sommes partis, mais j'ai

4 décidé de ne pas aller à cette maison et nous nous sommes hâtés en

5 direction de Sarajevo.

6 Q. Bien, je vous remercie. Je ne vais pas vous poser de questions sur ce

7 qui s'est passé à Sarajevo. Je veux simplement qu'on passe rapidement à la

8 journée du 7 septembre à Hrasnica et vous poser quelques questions,

9 quelques éclaircissements sur ce qui s'est passé là-bas.

10 La procédure était de parvenir à Hrasnica. Lorsque vous êtes venu, vous

11 avez rencontré Sefer au QG; c'est exact ?

12 R. On se rencontrait au QG à Sarajevo, puis, ensuite, on est allé à

13 Hrasnica ensemble.

14 Q. Bien.

15 R. Ensuite, on est reparti ensemble.

16 Q. Oui. J'ai dû mal vous poser la question.

17 Vous l'avez rencontré à cet endroit ? Est-ce que vous avez vu Ramiz

18 Delalic au QG ?

19 R. Oui. Je lui ai demandé s'il partait aussi. C'est là que j'ai appris que

20 lui-même et son unité partaient aussi.

21 Q. Est-ce que Ramiz Delalic est allé jusqu'au tunnel avec vous, est-ce

22 qu'il a emprunté un autre itinéraire ?

23 R. Je ne crois pas. Je ne suis pas sûr.

24 Q. En passant, bien qu'on dise beaucoup de choses au sujet de Ramiz

25 Delalic, le fait est qu'il a été un combattant très courageux dans la

Page 57

1 défense de Sarajevo. Il a défendu une partie considérable de la ligne de

2 front, n'est-ce pas ?

3 R. C'est exact. Ses hommes et lui-même aussi, se trouvaient le long d'une

4 ligne d'une très grande importance, à partir de Miljacka et en continuant

5 vers le nord, au nord-est de la ville. Je dois dire que j'ai eu l'occasion

6 de me rendre à cet endroit et de voir comment ces combattants, à une

7 période critique, au moment où cette zone se refermait, où les lignes

8 serbes et les forces serbes avançaient, il y a eu une percée dans ces

9 lignes et il a envoyé ces gens très courageux sur ce point-là. L'atmosphère

10 était très bonne. Ils ont serré les rangs et ils ont défendu cette zone.

11 Puis, il avait une très bonne relation avec ses hommes, avec ses gens. Il

12 leur parlait gentiment. Je n'ai rien vu de répréhensible le concernant.

13 Ensuite, j'ai entendu dire des choses, mais, je n'ai rien vu, moi-même, qui

14 parle contre lui.

15 Q. Une dernière question à ce sujet. Il est manifeste que Ramiz Delalic

16 s'intéressait au sort de ses soldats, de manière très concrète, très

17 pratique. Il intervenait directement, n'est-ce pas ?

18 R. Oui. Je crois que Caco était l'un des meilleurs, aussi, à ce titre. Ils

19 prenaient très soin de leurs soldats. Je ne sais pas ce qu'il en est de

20 Celo, mais pour Caco, je sais, j'avais des parents qui habitaient par là.

21 Mais il faisait cela de manière un petit peu bizarre. Mais c'est vrai que

22 cela le tenait beaucoup à cœur.

23 Q. Parlons de Hrasnica. Vous êtes allé jusqu'au tunnel, vous avez emprunté

24 le tunnel et à ce moment-là, vous étiez au poste de commandement avancé du

25 1er Corps. Vous étiez sorti de Sarajevo et vous vous trouviez dans la zone

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1 de Hrasnica.

2 Une question : Fikret Prevljak était le commandant de la brigade locale qui

3 se trouvait à l'extérieur de Sarajevo, à Hrasnica et dans les environs,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Oui, c'est exact. La 4e Brigade motorisée. Il en était le commandant.

6 Q. Je vois. Je voudrais préciser un élément, suite à une question qui vous

7 a été posée, hier, par l'Accusation. Vous nous avez dit que lorsque vous-

8 même et Sefer êtes arrivés à cet endroit, on a appris que Caco n'allait pas

9 venir ou plutôt, qu'il refusait de venir en Herzégovine.

10 R. Oui.

11 Q. Bien. A ce moment-là, Sefer Halilovic a essayé de persuader Ramiz

12 Delalic d'aller l'aider à tenter de persuader Caco de venir aussi, n'est-ce

13 pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Sefer Halilovic est parvenu à convaincre Caco et ils sont partis

16 ensemble, tous les deux ?

17 R. Oui.

18 Q. Mais ils n'ont pas eu à retourner à Sarajevo en empruntant le tunnel.

19 Ils sont simplement allés quelque part dans la zone de Hrasnica afin de

20 trouver Caco, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, oui. C'est cela.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana.

23 Mme CHANA : [interprétation] Je signale au conseil de la Défense que

24 lorsqu'il dit, dans la question précédente, le nom de "Caco," il voulait

25 parler de Celo. Il me semble que vous avez confondu les deux, ligne 20, à

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1 11 heures 34.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai peut-être un système de numérotation

3 différent.

4 Mme CHANA : [aucune interprétation]

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, effectivement

6 Madame. Je m'excuse. J'ai fait une petite erreur. Vous avez sans doute

7 compris correctement la nature de ma question, mais je vais quand même la

8 répéter, Monsieur le Témoin.

9 Vous nous avez déjà dit que Sefer avait essayé de persuader Ramiz Delalic

10 de venir l'aider à convaincre Caco de venir, et ensuite Sefer Halilovic a

11 persuadé Celo de l'aider, et ils sont partis ensemble. C'est cela, n'est-ce

12 pas ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Une fois qu'ils sont partis -- donc, nous avons Sefer et Ramiz Delalic

15 qui s'en vont et qui vont chercher Caco. A votre connaissance, ils sont

16 allés chercher dans la zone de Hrasnica, là où se trouvait déjà Caco,

17 n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Pour vous, la situation à laquelle Sefer Halilovic essayait de trouver

20 une issue était la suivante : il y avait déjà des soldats qui étaient venus

21 de Sarajevo avec Caco. Ils étaient arrivés à Hrasnica, mais à ce moment-là,

22 à la veille du départ, Caco parlait de rebrousser chemin, de retourner à

23 Sarajevo, n'est-ce pas ?

24 R. C'est ce qu'on pourrait en conclure, sur la base de ce qu'on avait

25 entendu à cet endroit.

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1 Q. Bien entendu, je sais que vous vous reposez uniquement sur ce qu'on

2 vous a dit.

3 Combien de temps a-t-il fallu à Ramiz Delalic -- mais avant, est-ce que

4 Sefer Halilovic et Ramiz Delalic sont revenus ensemble ou séparément ?

5 R. Je ne sais pas vraiment. Je ne sais pas s'ils étaient ensemble ou pas.

6 En tout cas, ils sont partis ensemble. Cela, c'est vrai.

7 Q. Pendant combien de temps se sont-ils absentés ? J'imagine que vous ne

8 serez pas en mesure de nous donner un minutage précis. Mais ils sont partis

9 -- ils étaient absents pendant 20 minutes ? Une heure ? Pouvez-nous nous

10 donner un ordre d'idée ?

11 R. Difficile à dire. Je n'y ai pas vraiment fait attention. Peut-être 20

12 minutes, 15 minutes, une demi-heure, je ne sais pas. Ce serait une pure et

13 simple conjecture de ma part. Je ne sais pas. Mais au bout d'un certain

14 temps assez court, Sefer est revenu, et ensuite Celo aussi, j'imagine.

15 Q. Merci. J'imagine que -- je sais effectivement que mes questions sont un

16 petit peu difficile, vu le niveau de détail sur lequel je vous interroge.

17 Je ne vais pas vous poser de questions maintenant au sujet du déplacement

18 jusqu'à Jablanica. Je vais passer au moment où vous avez vu Sefer

19 Halilovic, après avoir entendu ces rumeurs atroces au sujet de Grabovica.

20 Vous nous avez dit avoir vu Sefer Halilovic alors que vous étiez assis sur

21 une chaise. C'était sur la base de Zuka, me semble-t-il, n'est-ce pas ?

22 R. J'y suis arrivé avant lui. Il m'a rejoint peu après. Il s'est assis à

23 côté de moi.

24 Q. La situation était telle que vous n'avez pas été en mesure d'avoir une

25 véritable conversation avec lui sur ce point, puisque vous étiez entourés

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1 de très nombreux soldats ?

2 R. C'est exact. C'était une pièce très petite.

3 Q. D'après ce que vous avez pu voir, Sefer Halilovic paraissait vraiment

4 choqué, bouleversé par ces informations que vous veniez tous deux de

5 recevoir au sujet de Grabovica, n'est-ce pas ?

6 R. C'est un petit peu difficile à dire maintenant. Mais il était absent.

7 Comment vous dire cela ? J'ai trouvé le mot exact quand Mme Chana m'a posé

8 la question. Il était très calme, silencieux. Mais il y a encore une chose

9 que je voulais dire, une description plus précise. Il était plus que calme.

10 Il était pensif.

11 Q. Combien de temps êtes-vous resté avec lui à cette occasion ? Deux

12 minutes ? Cinq minutes ? Plus longtemps ?

13 R. Très peu de temps. Il a simplement dit qu'il était dans la direction de

14 Konjic. Puis on a parlé de ce qu'on avait entendu dire. Je l'ai interrogé à

15 voix basse. Il a répondu : "Oui." Je lui ai demandé s'il pensait que cela

16 pouvait être les réfugiés qui avaient tué ces gens. Il a répondu : "Oui." A

17 ce moment-là, les autres nous ont rejoint. C'était toujours la même chose

18 quant il venait.

19 Q. Je voudrais maintenant passer au 10 septembre au matin, au sujet de

20 l'arrivée de Ramiz Delalic ce matin-là. Si j'ai bien compris, vous nous

21 avez dit que vous cherchiez à trouver quelqu'un pour vous transporter,

22 parce que vous n'aviez pas de véhicule. Donc, vous étiez assis là, et vous

23 espériez que quelqu'un allait passer par là.

24 R. Oui.

25 Q. Quand la voiture s'est arrêtée, la voiture conduite par Ramiz Delalic,

Page 62

1 vous souvenez-vous où elle s'est garée ? Elle s'est garée devant les

2 maisons de la base de Zuka ou est-ce que la voiture s'est garée à distance,

3 un peu plus loin ?

4 R. Juste devant le bâtiment, au milieu de la route. Cela n'aurait pas gêné

5 la circulation parce qu'il y avait très peu de voitures. Une voiture toutes

6 les heures ou toutes les demi-heures. C'était juste en face de la base de

7 Zuka.

8 Q. Je sais que mes questions sont un peu difficiles, mais est-ce que vous

9 pourriez nous dire à peu près à quelle distance en mètres cette voiture

10 était garée ? A quelle distance des marches qui montaient à la base de

11 Zuka ? Essayez au mieux de vos possibilités de donner une estimation.

12 R. Je ne pense pas que c'était à plus de cinq mètres.

13 Q. Pouvez-vous nous dire de quelle type de véhicule il s'agissait ? Est-ce

14 que c'était une Audi, une jeep ?

15 R. Je ne sais pas, je n'en souviens pas. Je ne peux pas vous dire.

16 Q. Vous souvenez-vous s'il s'agissait d'un véhicule militaire ou d'un

17 véhicule civil ?

18 R. Cela non plus, je ne peux pas le dire.

19 Q. Vous avez vu Ramiz Delalic descendre du véhicule. Au moment où il a

20 descendu du véhicule, y avait-il quelqu'un d'autre là, en dehors des deux

21 jeunes garçons ? Y avait-il quelqu'un d'autre dans le véhicule, d'après ce

22 que vous avez pu voir ?

23 R. Il y avait le chauffeur, parce que ce n'était pas Celo qui était au

24 volant.

25 Q. Vous souvenez-vous du nom du chauffeur ?

Page 63

1 R. Je ne peux pas dire si c'était lui ce jour-là, mais celui qui était le

2 plus souvent son chauffeur. D'ailleurs, je le rencontre tout le temps à

3 Sarajevo, parce qu'il est chauffeur de taxi à Sarajevo en ce moment. Mais

4 je ne me souviens pas -- Arnautovic, Arnatalic -- je ne sais pas. Je le

5 connais. Je lui dis bonjour, mais je ne connais pas son nom.

6 Q. Si je vous rafraîchis la mémoire en vous donnant le nom d'Erdin

7 Arnautovic, c'est lui, n'est-ce pas ?

8 R. Je crois qu'effectivement c'était son chauffeur attitré; il avait dû

9 être là ce jour-là.

10 Q. Si on parle de cette journée-là, vous nous avez dit précédemment que

11 vous n'étiez pas sûr que c'était lui son chauffeur ce jour-là. Est-ce que

12 vous souvenez précisément que c'était lui qui était au volant ce jour-là ou

13 pas ?

14 R. Je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas. Je n'ai pas vraiment fait

15 attention à cela. Mais il y avait un chauffeur. Cela, oui.

16 Q. Pendant combien de temps les jeunes garçons sont-ils restés dans la

17 voiture avant que Ramiz ne revienne pour les chercher ?

18 R. C'est difficile à dire. Celo n'est pas revenu tout de suite. Il a parlé

19 à l'adjoint, au commandant adjoint et à Nihad Bojadzic. Ils n'ont pas parlé

20 très longtemps. Je les ai vus, ils parlaient. Je ne peux pas dire, je

21 commettrais une erreur si je vous donnais une approximation de la durée de

22 leur conversation. Je ne voudrais pas faire une erreur.

23 Q. Fort bien. Je pense que vous avez expliqué très clairement la

24 situation.

25 Je précise à l'attention des Juges, qui était Nihad Bojadzic. C'était

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1 l'adjoint du commandant de l'unité de Zulfikar Alispago, n'est-ce pas ?

2 R. Oui, c'est exact.

3 Q. C'est quelqu'un qui a joué un grand rôle dans les combats à Dreznica

4 dans la semaine qui a suivi, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, je crois qu'il était à la tête de cela, enfin qu'il était en

6 charge.

7 Q. Avez-vous pu observé l'attitude, le comportement de ces deux hommes

8 Ramiz Delalic et Nihad Bojadzic pendant cette courte conversation ?

9 R. Non, je n'ai pas eu la possibilité de le faire. J'étais assis à

10 l'extérieur sur une chaise, je regardais vers la rue. Eux, ils étaient à

11 l'intérieur. Il y avait une sorte de bar, un comptoir. J'étais pressé, je

12 cherchais Celo. Je suis entré, et j'ai vu qu'il parlait toujours. Ensuite,

13 il est sorti du bâtiment.

14 Q. Merci. Ensuite, M. Ramiz Delalic vous a transporté, mais à ce moment-

15 là, vous ignoriez qui étaient ces jeunes garçons.

16 R. Non. Je pensais que c'étaient des réfugiés, des pauvres malheureux

17 qu'ils amenaient à Jablanica.

18 Q. De l'endroit où vous vous teniez assis à l'extérieur du restaurant,

19 non, en fait, ce n'était pas un "restaurant". Je ne sais pourquoi, cela me

20 colle à l'esprit.

21 Excusez-moi. Vous étiez assis à l'extérieur. Là où vous étiez, vous n'avez

22 pas été en mesure d'entendre la conversation de Nihad Bojadzic et de

23 Delalic, n'est-ce pas ?

24 R. Non, absolument pas. Je n'ai entendu aucune parole qu'ils ont

25 prononcée.

Page 65

1 Q. Pendant qu'ils étaient à l'intérieur, le chauffeur est resté assis dans

2 le véhicule avec les deux jeunes garçons ?

3 R. Je crois qu'il est resté dans la voiture. En tout cas, il n'est pas

4 entré à l'intérieur.

5 Q. Oui.

6 R. Très franchement, je ne m'en souviens pas. Je ne crois pas qu'il soit

7 entré.

8 Q. En tout cas, il n'est pas venu s'asseoir à vos côtés vous rejoindre à

9 l'endroit où vous étiez assis ?

10 R. Non.

11 Q. Merci. Il y a un autre sujet que je souhaite aborder avec vous. C'est

12 le suivant : je vous ai déjà posé une question à ce sujet précédemment.

13 Maintenant, je voudrais qu'on parle du moment où vous étiez dans la voiture

14 en train de parler avec Sefer Halilovic de ce qu'il fallait faire au sujet

15 de cette enquête. Je vous ai déjà posé des questions à ce sujet

16 précédemment, ce sera très bref maintenant.

17 Quand vous étiez dans ce véhicule, et au moment où cette conversation a eu

18 lieu, qui d'autre y avait-il dans la voiture ? Est-ce que le Dr Cibo était

19 dans la voiture, ou est-ce qu'il y avait quelqu'un d'autre dans la voiture

20 à ce moment-là ?

21 R. Le Dr Cibo, le chauffeur Mesar. Mesar celui qui conduisait et puis

22 l'escorte.

23 Q. Oui.

24 R. Le frère de Sefer et son fils, je crois. En dehors de ces gens, Cibo et

25 moi-même.

Page 66

1 Q. On a parlé beaucoup du fils de Sefer. Peut-être pourriez-vous préciser

2 un élément à ce sujet. A votre connaissance, quand Sefer est descendu en

3 Herzégovine, est-ce qu'il a amené avec lui son fils qui s'appelle Semir ?

4 R. Oui, il l'amenait toujours avec lui, il ne s'en séparait jamais. Il

5 refusait de s'éloigner de lui. C'était un petit peu un mystère. Encore

6 aujourd'hui d'ailleurs, parce que parfois on faisait des déplacements qui

7 étaient extrêmement dangereux. On risquait notre vie. On aurait très bien

8 pu être touché par un tir ou bien sortir de la route sur ces routes de

9 montagne. Mais il amenait toujours son fils avec lui.

10 Q. Peut-être pourriez-vous maintenant, nous apporter vos observations au

11 sujet du point suivant : a votre connaissance, est-ce que vous avez appris

12 que Semir Halilovic, le fils de Sefer, se trouvait dans l'appartement au

13 moment où sa mère est morte dans l'explosion ?

14 R. Je l'ai appris en le lisant dans son livre; le livre de Sefer.

15 Q. D'après ce que vous avez vu, Sefer voulait toujours rester en contact

16 visuel avec son fils, il voulait toujours l'avoir sous les yeux.

17 R. Je n'ai jamais posé de questions à ce sujet; je dois le reconnaître.

18 Parce que cela me gênait. Je me sentais gêné à l'idée de lui poser des

19 questions à ce sujet. Cela me paraissait un petit peu mystérieux. Pourquoi

20 insistait-il pour amener avec lui ce jeune garçon de 13 ans. Pourquoi

21 insistait-il pour l'amener dans ces déplacements aussi dangereux. Il est

22 manifeste qu'il voulait rester avec son fils. Je ne pouvais pas vraiment

23 deviner ce qu'il avait à l'esprit. En tout cas, c'était surprenant. Parce

24 que je n'avais jamais rien vu de tel. Au cours de la guerre, il y avait

25 certes des commandants qui étaient accompagnés de leurs fils qui leur

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1 servaient d'escorte. Par exemple, Delic le faisait, Sefer était accompagné

2 de son frère, et Karic avait également son fils la plupart du temps à ses

3 côtés, au cours de l'opération. Quand on parle d'un jeune garçon de 12 à 13

4 ans, c'est toujours un mystère pour moi. Ce l'était, et ce l'est encore.

5 Q. Pour en rester sur le même sujet, un sujet que vous venez d'évoquer

6 d'ailleurs. Est-ce que vous avez rencontré le fils de Vehbija Karic pendant

7 la période que vous avez passée en Herzégovine ?

8 R. Oui, souvent. C'est justement à lui, le 8 novembre, que j'ai donné les

9 photographies, quand on est revenu, qu'on est allé à Donja Jablanica, qu'on

10 était devant la base, et quand Karic, Bilajac, Zicro et Sokolo [phon]

11 également était là aussi. Je leur ai donné les photographies que j'avais

12 amenées. J'ai donné ces photographies à cet homme, enfin plutôt ce jeune

13 homme. Il m'a dit que cela allait être quelque chose, qu'ils étaient en

14 train de préparer l'opération. Il était toujours en compagnie de son père.

15 Je le connaissais déjà avant du temps de Sarajevo. Je crois que je l'avais

16 rencontré en juin.

17 Q. Bien. Est-ce que vous saviez que la femme de Vehbija Karic et la mère

18 de ce jeune homme était Croates ?

19 R. J'ai appris cela de manière un petit peu étrange. Il n'est pas

20 inhabituel de voir des mariages mixtes chez nous. J'ai appris cela trois

21 semaines après mon retour, quelques jours après le début de l'opération

22 Trebevic.

23 Q. Oui.

24 R. J'étais chez Karic, si cela vous intéresse.

25 Q. Non. Enfin, je veux savoir simplement si vous le saviez ou pas. Je ne

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1 vais pas vous demander de nous raconter tout le contexte.

2 R. C'est important.

3 Q. Non. Excusez-moi, si vous pensez que -- de poursuivre cette série de

4 questions. Il faut qu'on regarde -- qu'on pense à l'heure qui tourne. Je

5 suis un petit peu -- j'ai du mal à choisir. Il faut que je continue. Enfin,

6 si vous estimez que c'est vraiment important, peut-être vaut-il mieux nous

7 le dire ?

8 R. Je suis allé chez Karic le jour même où une organisation internationale

9 a fait savoir et a diffusé l'information, selon laquelle, Sefer Halilovic

10 était placé en résidence surveillée. Je crois que cela a déjà été mentionné

11 à la radio. Le chef d'état-major disait que ce n'était pas le cas, mais

12 nous on savait que c'était le cas. Je suis allé chez Karic, et je lui ai

13 demandé : Est-il vrai que Sefer a été placé en résidence surveillée, qu'il

14 y a eu des mauvais traitements par les services de sécurité publique. Je

15 lui ai dit : Il y avait eu des problèmes, et il a répondu qu'il y avait eu

16 des problèmes. Il a dit que Jusuf Jasarevic avait demandé à faire une

17 déclaration à cause de tout cela. Enfin, je ne veux pas utiliser les termes

18 qu'il a utilisés. Je me trompe peut-être. En tout cas, il a dit que ceux

19 qui avaient tué les gens à Grabovica avaient dit que je leur avais dit :

20 Que si vous ne leur donnez pas un logement, il faudra les jeter dans la

21 Neretva." Je n'aurais jamais pu dire quoi que ce soit de ce genre. D'abord,

22 il y avait mon fils sur place. En plus, ma femme est Croate. C'est là que

23 j'ai appris qu'il était Croate. Il a continué en disant qu'il était à

24 moitié Croate, que c'était impossible qu'en face de son fils il tienne des

25 propos pareils puisque ses grands-parents étaient Croates. Donc, il

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1 n'aurait jamais pu dire ce genre de choses. Voilà comment j'ai appris cela.

2 J'imagine que -- je trouve que c'est quand même important.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, effectivement, je crois que vous avez

4 raison. Merci de cette explication. Une petite question de traduction que

5 je souhaite porter à l'attention des Juges,

6 ligne 5, dans l'interprétation. Je cite : "Il y avait des informations

7 selon le chef d'état-major qui ne l'étaient pas." Notre locuteur bosniaque

8 qui est notre collaborateur bosniaque ici, nous signale, qu'en fait, ce

9 n'était pas le chef d'état-major, mais l'état-major principal. Je souhaite

10 simplement que ceci soit précisé si possible.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous pouvez poser une question au témoin.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Le problème, c'est que parfois je parle

13 trop, et les phrases que je prononce disparaissent de l'écran.

14 Q. Monsieur le Témoin, un point de précision au sujet de votre déposition.

15 Vous nous avez dit : "Je suis arrivé chez Karic le jour même où une

16 organisation internationale a diffusé l'information selon laquelle Sefer

17 Halilovic était en résidence surveillée. Je crois que cela a également été

18 diffusé à la radio. Puis, il y avait des informations du chef d'état-major

19 selon lesquelles ce n'était pas le cas." Or, nous, a l'écran, nous avons --

20 on parle du chef d'état-major. Est-ce que vous vouliez parler

21 d'informations venant du chef d'état-major ou de l'état-major principal ?

22 R. Non, ce n'était pas le chef d'état-major; cela venait de l'armée. Ils

23 ont apporté un démenti. Ils ont dit que Sefer Halilovic n'était pas en

24 résidence surveillée. Cela nous a fait bien fait rire, parce que, bien

25 entendu, on le savait que c'était le cas. Karic lui avait parlé au

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1 téléphone le même jour.

2 Q. Si on précisait deux points à ce sujet : les gens qui accusaient Karic,

3 est-ce que Karic a dit qui ils étaient, qui l'accusaient d'avoir tenu ces

4 propos, ou bien est-ce qu'il ne vous a pas fait part de cette information ?

5 R. Non. Je dois répéter que j'utilisais sans doute les termes qu'il n'a

6 pas utilisé lui-même. Je vais paraphraser. Il m'a dit : Qu'il avait aussi

7 des problèmes, qu'il avait eu un appel du général, enfin du Jusuf

8 Jasarevic. Il n'était pas général, pour préciser un certain nombre de

9 choses, pour faire une déclaration. Ensuite, il avait appris que ceux qui

10 avaient commis les crimes de Grabovica, l'accusaient lui, de leur avoir dit

11 : Si jamais on ne vous fournit pas un hébergement, jetez ces gens à la

12 rivière. Il me l'a dit d'ailleurs qu'il n'y avait pas eu de problème

13 s'agissant de l'ébergement, que tout s'est bien passé, que tout allait

14 bien, que Bilajac était là-bas, que tout le monde était assis, que Bilajac

15 s'était procuré de l'ail auprès des Croates, que tout le monde parlait. Les

16 Croates parlaient aux soldats, et cetera, qu'il n'y a pas eu de problème.

17 Il est impossible qu'il ait tenu ces propos. Ensuite, il m'a dit : Mon fils

18 était assis juste à côté de moi. Il est à moitié Croate et à moitié

19 Bosniaque, parce que ma femme, sa mère est Croate, ses grands-parents sont

20 Croates. Comment est-ce que j'aurais pu dire quelque chose comme cela.

21 Q. Très bien, merci beaucoup de cette clarification. Je souhaite

22 maintenant vous poser quelques questions au sujet d'un document que Sefer

23 Halilovic vous a lu.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 je souhaite savoir à quel moment vous souhaitez faire une pause. Je pense

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1 que probablement j'aurais besoin d'une session supplémentaire si

2 nécessaire, et probablement je terminerai lors de cette session. Mais je

3 souhaite savoir quand vous souhaitez faire une pause.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je suis à votre disposition. Si vous

5 pensez qu'il vaut mieux prendre une pause maintenant, nous pouvons le faire

6 maintenant.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, peut-être cela me permettra de

8 m'organiser mieux.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le prétoire est déjà réservé pour cet

10 après-midi, il n'y a pas de problème s'agissant de cela. Nous allons

11 reprendre notre travail à midi trente.

12 --- L'audience est suspendue à 12 heures 01.

13 --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Monsieur Morrissey.

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

16 Q. Merci, Monsieur Hodzic. J'ai, maintenant, quelques questions concernant

17 la conversation que vous avez eue avec Sefer Halilovic, lorsqu'il vous a

18 parlé d'un télégramme qui vous a été envoyé. Il vous a lu une partie de ce

19 télégramme.

20 Tout d'abord, ma question concerne un document particulier, notamment, le

21 document que le bureau du Procureur vous a montré, vous indiquez que ce

22 document vous a été donné, à vous, dans les archives, beaucoup plus tard.

23 Je souhaite vous poser quelques questions au sujet de ce document, mais

24 peut-être on peut déjà le présenter.

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Il s'agit du document MFI259, je pense.

Page 72

1 Excusez-moi.

2 [Le conseil de la Défense se concerte]

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, finalement, cela n'a rien à voir avec

4 celui-ci, mais D157. Excusez-moi.

5 Q. Le document que je vais vous montrer est, apparemment, un ordre du

6 commandant Rasim Delic, en date du 12 septembre 1993. Veuillez nous dire

7 simplement, lorsque vous verrez le document sur l'écran, s'il vous plaît.

8 R. Je le vois.

9 Q. Avant de traiter du texte de cela, je vais vous dire honnêtement que

10 j'ai quelques questions concernant le temps qui figure au fond de ce

11 papier. Mais tout d'abord, voici ma question.

12 Pour autant que vous le sachiez, vous avez indiqué que

13 M. Halilovic a sorti un papier dans la voiture et il a lu quelques mots de

14 ce papier, mais vous n'aviez pas de lunettes et vous n'avez pas pu le lire.

15 Ai-je raison de dire cela ?

16 R. Ce n'était pas à ce moment-là. C'était devant la base de Zuka.

17 Q. Je m'excuse.

18 R. Lorsqu'on s'approchait du véhicule avant d'y entrer. Mais il vrai de

19 dire que je ne pouvais pas le lire, je n'avais pas mis mes lunettes, tout

20 simplement.

21 Q. Très bien. Ce que je vais faire, maintenant, c'est que je vais vous

22 demander, lorsque vous avez vu ce document, pour la première fois, le

23 document qui est versé au dossier ici. Je vais essayer de voir avec vous ce

24 que vous avez vu, ce jour-là, le 12.

25 Ce que vous avez vu dehors, devant la base de Zuka, c'était un papier,

Page 73

1 puis, vous avez entendu la lecture d'une partie de ce document faite par M.

2 Halilovic; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Ce qu'il vous a lu, c'était un paragraphe où il a été dit :

5 "Réexaminer la décision dans le sens d'une estimation de la liste des

6 forces et possibilités d'accomplir les tâches conformément à cela. Modifier

7 la décision pour qu'elle soit conforme aux possibilités réelles." Est-ce

8 que c'est la partie qu'il vous a lue ?

9 R. Oui, c'est la partie qu'il m'a lue, à peu près.

10 Q. Oui, je comprends cela, bien sûr.

11 R. Car je ne me souviens pas de chaque mot.

12 Q. Cependant, à ce moment-là, Sefer Halilovic n'a rien lu contenant la

13 vérification de l'exactitude des informations concernant un génocide commis

14 contre la population civile par les membres du

15 1er Corps de la 9e Brigade de Montagne. Au moment où il vous a lu ce papier,

16 Sefer Halilovic ne vous a rien dit concernant Grabovica; est-ce exact ?

17 R. Non, il n'a rien dit.

18 Q. Je comprends. Puis, je souhaite voir ce que vous avez vu d'autre, ce

19 jour-là.

20 Est-ce que vous avez revu ce papier que M. Sefer Halilovic avait ?

21 R. Non, je ne l'ai plus revu.

22 Q. Cependant, lorsque vous êtes allé à la partie au nord de la ligne du

23 front, vous avez vu Vehbija Karic et lui aussi, il l'a mentionné à Sefer

24 Halilovic qu'il avait reçu une sorte de télégramme lui aussi; est-ce

25 exact ?

Page 74

1 R. Oui, c'est exact.

2 Q. A ce moment-là, vous n'avez pas vu de papier entre les mains de Vehbija

3 Karic; est-ce exact ?

4 R. Non, il n'y avait pas de papier.

5 Q. Très bien. Puis, après la discussion entre Vehbija Karic et Sefer, à ce

6 moment-là -- je vais m'arrêter là.

7 La raison pour laquelle je vous demande cela est que simplement je

8 souhaite vous suggérer la possibilité que le document qu'on vous a montré

9 après, émanant des archives, n'était peut-être pas l'original et je

10 souhaite vous le montrer, vous donner la chance de faire un commentaire. Je

11 ne souhaite pas vous tendre un piège, mais je vais vous montrer le

12 document. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, vous pencher sur les

13 annotations, les cachets qui figurent en bas du document, concernant le

14 moment où le document était reçu, et cetera.

15 [Le conseil de la Défense se concerte]

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

17 vous pouvez voir, maintenant, dans la version en anglais, sur l'écran.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne pense pas --

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais demander qu'on présente la version

20 en langue bosniaque.

21 [Le conseil de la Défense se concerte]

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi. Je vais demander qu'on montre

23 la version bosniaque à tout le monde dans ce prétoire pour que vous

24 puissiez suivre ce que je demande.

25 Q. Je souhaite vous poser une question concernant le temps qui figure ici

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1 car le document que j'ai, moi-même, apparemment, a été envoyé à Jablanica

2 seulement beaucoup plus tard, au cours de la journée et c'est la raison

3 pour laquelle je souhaite vous demander déjà, si vous avez des

4 commentaires. Puis, est-ce que vous avez vu, à gauche, un cachet portant

5 sur le fait que ce document est arrivé le 12 septembre 1993, à 14 heures

6 14 ? Est-ce que vous voyez cela, en bas, à gauche ?

7 R. Oui, je vois.

8 Q. Très bien. D'après vos souvenirs, vous êtes parti de Jablanica avant 14

9 heures 14; est-ce exact ?

10 R. Oui, dans la matinée, peut-être à 10 heures.

11 Q. Oui, je comprends.

12 R. Peut-être, même plus tôt.

13 Q. Oui. Justement par rapport à cela, lorsque ce document vous a été

14 donné, lorsque vous êtes rentré aux archives, comment est-ce que vous

15 l'avez eu ? Est-ce que la personne chargée des archives vous l'a remis ou

16 bien est-ce que vous avez dû écrire une lettre ? Est-ce que vous pouvez

17 nous l'expliquer ?

18 R. J'ai soumis une demande par écrit et j'ai reçu les documents. J'ai

19 cherché ces documents lorsque je préparais une série d'articles. On m'a dit

20 qu'ils allaient me les accorder et le chef du cabinet de Rasim Delic m'a

21 dit que cela allait être acceptable, mais qu'il avait d'autres choses pour

22 moi. Finalement, ils ne me les ont pas donnés pour ma série d'articles.

23 C'est seulement plus tard que j'ai réussi à les convaincre de me les

24 remettre. Mais en ce qui concerne mon expérience avec les archives, ce

25 document est, apparemment, exact.

Page 76

1 Q. Très bien. Est-ce que vous vous souvenez s'il s'agissait de l'original

2 du document ? Est-ce que vous avez reçu l'original ou une copie ?

3 R. Je ne peux pas le savoir, mais je suppose que c'est une copie, cela ne

4 peut pas être l'original. Je ne pourrais pas sortir un quelconque document

5 original des archives.

6 Q. Très bien. Je vais me fier à vous et je vous crois bien par rapport à

7 tout ce que vous dites au sujet de la procédure. Je n'essaie pas de vous

8 critiquer, mais est-ce que vous avez une éventuelle explication concernant

9 la manière dont ceci a pu arriver ?

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

11 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que le

12 conseil est conscient de mon objection. Le témoin a dit clairement qu'il

13 n'a jamais vu ce document et on ne peut pas lui demander d'examiner les

14 cachets. On peut lui demander, effectivement, à quel moment il est parti,

15 c'est acceptable et ceci est reflété sur le document. Mais le témoin ne

16 peut pas répondre à ces questions-là.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, peut-être que le témoin n'est pas en

18 mesure de faire des commentaires concernant ces cachets.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Je pense, malheureusement, que mon éminente

20 collègue a raison et je pense, effectivement, que ce témoin ne peut pas

21 faire ce type de commentaire.

22 Q. Mais je vais peut-être poser une question au sujet de cela. Lorsque

23 vous avez pu inspecter ce document, lorsque vous prépariez votre livre,

24 vous ne vous êtes pas penché sur les cachets, n'est-ce

25 pas ?

Page 77

1 R. Effectivement, non. Je n'allais pas perdre mon temps sur ce genre de

2 détails. Mais effectivement, j'ai utilisé certains petits détails et

3 souvent je les comparais, mais je ne suis pas sûr en ce qui concerne la

4 copie que j'ai reçue.

5 Q. Très bien. Je comprends. Mais lorsque vous avez reçu ce document,

6 lorsque vous avez reçu cette copie, c'était la première fois que vous avez

7 vu ou entendu parler du paragraphe 2, la partie qui contient la référence à

8 Grabovica; est-ce exact ?

9 R. Je ne me souviens pas. C'était des années plus tard, mais j'ai une

10 explication concernant le malentendu. Je pense que je me suis trompé au

11 sujet de la date car j'ai écrit mon ouvrage sur la base de mes souvenirs et

12 je pense qu'il y a un écart qui s'est glissé car je pense que le lendemain,

13 Karic dit, et c'est dans mon

14 livre : "Il y a quelque chose pour vous." Probablement, Sefer m'a montré

15 cela le 13. Je vous suis reconnaissant car vous m'avez montré une erreur

16 que j'ai faite. Si mon explication est effectivement la bonne.

17 Q. Très bien. Je vous remercie de cela. Je souhaite simplement vous poser

18 une question concernant la nouvelle que vous avez reçue, les informations

19 que vous avez reçues concernant les événements d'Uzdol. Nous allons nous

20 éloigner de la date du 13. Vous avez répondu aux questions posées par le

21 Procureur.

22 Vous avez dit que les combats ont commencé le 13, dans la région et que

23 Sefer Halilovic a donné l'ordre à Suljevic d'accompagner Buza, après qu'il

24 a appris que Buza n'est pas allé dans la bonne direction.

25 Puis, vous avez dit que le 14, vous êtes allé avec Sefer au centre de

Page 78

1 communication et vous avez reçu certaines informations. Le Procureur vous a

2 posé quelques questions et je souhaite qu'on clarifie quelque chose. Au

3 moment où vous étiez au centre de communication et lorsque vous avez

4 entendu parler des combats à Uzdol, personne ne mentionnait le fait que

5 tous les civils ou les enfants ont été tués, n'est-ce pas ?

6 R. Non. Absolument, non.

7 Q. Car si de telles informations étaient arrivées, vous auriez

8 certainement lancé une enquête supplémentaire au sujet de cela.

9 R. Oui. Je suppose que oui. Personne n'a mentionné cela.

10 Q. Je comprends. Quelques jours plus tard, vous êtes devenu conscient des

11 récits apparus dans la presse - puis, vous avez décrit que vous étiez chez

12 quelqu'un lorsque les médias ont commencé à parler de cela, des crimes

13 commis à Uzdol. Voici ma question : à quel point ces récits parus dans la

14 presse, dans les médias étaient crédibles ?

15 Tout d'abord, lorsque vous avez appris ou entendu parler de ces rumeurs ou

16 de ces récits apparus dans les médias, concernant les crimes à Uzdol, est-

17 ce qu'on vous a dit que les médias croates ont montré la photographie des

18 cadavres gisant dans la neige, dans les champs recouvert par la neige ?

19 R. Je me souviens de quelque chose au sujet de cela, mais je ne me

20 souviens pas si j'ai vu la neige, moi-même, à la télévision ou si quelqu'un

21 m'en a parlé, mais je sais que quelqu'un m'en a parlé et m'a dit que -- je

22 ne sais pas comment dire. Le crime, il a eu lieu, mais certaines personnes

23 disaient que peut-être, c'était un coup monté, qu'on montrait peut-être des

24 cadavres, peut-être même des Bosniaques et des cadavres de personnes tuées,

25 auparavant.

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1 Il s'agissait d'un récit du massacre qui était tout à fait différent et au

2 moment où mon ouvrage a été publié en 1999, certaines personnes de l'armée

3 réagissaient, mais ils ne pouvaient pas vraiment dire si, effectivement, un

4 crime à Uzdol avait été commis. Ils ne donnaient pas de précisions au sujet

5 de cela. Jusqu'au moment où le livre sur le crime a été publié, je n'étais

6 pas sûr, moi-même --

7 Q. Est-ce que vous pouvez répéter la dernière partie de ce que vous avez

8 dit car les interprètes n'ont pas pu vous suivre ?

9 R. Jusqu'il y a trois, quatre ans, lorsque le livre sur le crime à Uzdol a

10 été publié avec les photographies, le public en Bosnie-Herzégovine

11 continuait à avoir des doutes par rapport à ce crime. Il n'était pas sûr si

12 le crime avait effectivement eu lieu. C'est seulement au moment où j'ai

13 publié mon livre qu'on a réalisé l'ampleur de ce crime.

14 Q. Le livre auquel vous faites référence, c'est la publication concernant

15 Uzdol avec les précisions portant sur les victimes, et cetera; est-ce

16 exact ?

17 R. Oui. Pas seulement cela.

18 Q. Je comprends.

19 Vous avez mentionné au cours de votre déposition que le fait de

20 mentionner "la neige" avait une importance.

21 Mais quel était le rôle de la neige dans le contexte de ces rumeurs ?

22 R. Soi-disant, puisqu'il s'agissait du mois de septembre, il ne

23 pouvait pas y avoir de neige. Il faisait beau au moment de ce crime.

24 C'était une journée ensoleillée et soi-disant, il y avait des photographies

25 où on voyait la neige et on disait que c'était fabriqué de toutes pièces,

Page 80

1 d'après les rumeurs. Les gens disaient qu'il n'y avait jamais eu de crime.

2 Cela, c'était le contenu de ces rumeurs.

3 Puis, je pense que Zicro Suljevic a accordé une interview et

4 justement, il confirmait cela. Il disait qu'il n'y avait pas eu de crime.

5 Q. Très bien. En tant que journaliste et quelqu'un qui a travaillé pour

6 les médias, à l'époque, pour autant que vous le sachiez, est-ce que les

7 médias de la partie d'Herceg-Bosna, pour ne pas dire, partie croate de

8 Bosnie, est-ce que parfois, ils exagéraient, même inventaient des atrocités

9 qui auraient été commises par l'armée de Bosnie-Herzégovine ou par les

10 Musulmans en général ?

11 R. Ecoutez, je ne peux pas vous le dire. Il y avait de la propagande. Je

12 ne peux pas vous en parler. Vous savez, j'étais surtout sur les lignes de

13 front. Je ne suivais pas vraiment les médias. Tout simplement, en raison du

14 fait que j'étais surtout sur le terrain et je ne pourrais vous le dire.

15 Mais bien sûr que c'était le cas, je le suppose. Mais je ne saurais pas

16 vous donner de détails car si vous me demandez si j'ai des exemples, je

17 devrais dire que non, car je ne suis pas au courant des détails.

18 Q. Je comprends. Merci d'avoir dit cela. Je ne vais plus insister

19 concernant ce sujet-là.

20 Je souhaite vous poser une autre question s'agissant de ce qui se

21 passait avant les combats à Uzdol et les combats sur ce front-là. Est-ce

22 que vous étiez présent lorsque Sefer Halilovic s'est adressé aux soldats du

23 Bataillon indépendant de Prozor avant les combats, à Uzdol ?

24 R. J'ai assisté à cela. J'étais présent lors de toutes ces interventions,

25 lorsqu'il s'est adressé aux soldats du Bataillon de Prozor, puis du

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1 Bataillon de Neretva, Neretvica. J'étais présent; à chaque fois, il a parlé

2 à ces jeunes-là, deux ou trois fois.

3 Q. Très bien. En ce qui concerne le discours qu'il a prononcé -- en

4 général, puis après, je vous demanderai concrètement. Dans ces discours,

5 est-ce que Sefer Halilovic a fait référence au fait qu'ils ne devaient pas

6 tuer de civils et qu'ils devaient faire attention aux civils et prisonniers

7 de guerre, au cours de leurs opérations ?

8 R. Oui. C'est que j'ai dit hier. Il l'a dit clairement, mais maintenant,

9 je ne me souviens pas. Il y avait beaucoup de personnes, au moins une

10 dizaine de personnes s'en souviennent et quelqu'un de ce groupe de soldats

11 l'a dit clairement. Ceci a été transmis, ce qu'il a dit à Kostajnica, en

12 septembre 1993 et il a dit : "Il ne faut pas toucher aux civils." C'était

13 le 3 septembre. Il a dit : "Nous luttons contre les Oustachi, et cetera."

14 Il a dit cela, il l'a répété. Mais malheureusement, je n'ai pas

15 d'enregistrement de cela, alors que j'ai gardé de nombreuses cassettes et

16 de nombreux enregistrements. Mais à l'époque, je n'ai pas pensé à

17 enregistrer cela.

18 Q. Oui, je comprends. Puis, lorsqu'il disait qu'il ne fallait pas toucher

19 aux civils, et cetera --

20 R. Oui, précisément.

21 Q. Vous avez parlé de sa position politique et lorsqu'il disait qu'il ne

22 fallait pas toucher aux civils, c'était une déclaration qui était

23 particulièrement conforme à l'engagement de Sefer Halilovic, selon lequel

24 il fallait absolument trouver une solution politique concernant une Bosnie

25 multiethnique, unifiée; est-ce exact ?

Page 82

1 R. Je ne sais pas si on peut placer cela dans ce contexte-là. Comme vous

2 le savez, j'ai pu examiner les archives qui contiennent de nombreux ordres

3 du général, du commandant Halilovic où il est dit qu'il faut respecter cela

4 et puis, Delic aussi. Il s'agissait d'une tendance respectée par l'ensemble

5 de l'armée de Bosnie-Herzégovine, du début à la fin.

6 Q. Oui. Je comprends ce que vous dites. Très bien. Vous avez déjà déposé,

7 de manière assez détaillée, concernant ce qui s'est passé après cette

8 période-là et je souhaite qu'on traite de cela brièvement pour qu'on puisse

9 tenir compte de la chronologie, ici.

10 Après que le Bataillon indépendant de Prozor est rentré, après Uzdol et

11 tout cela, est-ce que vous vous souvenez que vous étiez à Voljevac, après

12 ce moment-là, lorsque les soldats d'autres unités faisaient preuve d'un

13 certain ressentiment par rapport à Buza à cause du fait que le Bataillon

14 indépendant de Prozor est arrivé trop tard ? Là, je parle de l'après-midi

15 du 14.

16 R. Oui, je l'ai décrit en détail. Ils étaient vraiment en colère, furieux.

17 L'un de leur commandant préféré de leur bataillon a été tué, Seid Padalovc.

18 Ils ont tous quitté la ligne à cause de cela, ils voulaient tous assister à

19 son enterrement. Ils se sont regroupés sur un plateau. Ils exprimaient

20 tellement de colère vis-à-vis de Buza, je pense que la première question

21 qu'ils ont posée à Sefer était : Quand est-ce qu'on va être fusillé --

22 Buza, quand est-ce qu'il va être fusillé ? D'après une certaine logique, je

23 l'ai écrit d'ailleurs, on s'attendait à ce que Buza vienne à Voljevac pour

24 qu'il fasse un rapport sur ce qu'il avait fait.

25 Toutes les voitures qui y passaient, j'avais peur que cela allait

Page 83

1 être Buza. A mon avis, certainement il n'aurait pas survécu malgré Sever et

2 sa présence, et la présence de Haso. C'était mon impression, et c'est ce

3 que j'ai publié. Il n'y a rien de nouveau à ajouter à cela. C'était

4 l'impression. Heureusement, il n'est pas venu ce jour-là. Ce jour-là, nous

5 ne l'avons pas vu. Nous avons quitté Voljevac vers 3 heures, et nous sommes

6 repartis.

7 Q. Oui, je comprends. Dans le compte rendu d'audience, il le dit Haso

8 Sakovic, mais vous avez dit Haso Hakalovic; est-ce exact ?

9 R. Oui, Haso Hakalovic.

10 Q. Merci.

11 Mme CHANA : [interprétation] Il existe un autre point. Je pense qu'il a dit

12 : "done him," et non "done any more" en anglais.

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais clarifier cela.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

15 M. MORRISSEY : [interprétation]

16 Q. Excusez-moi. Vous avez fait un commentaire vers la fin par rapport à

17 Haso. Je pense que c'était Sefer -- "Haso Sakovic n'aurait pas pu le

18 sauver", "done any more right" en anglais. Est-ce que vous pouvez expliquer

19 cela ?

20 R. Ces soldats étaient tellement furieux. Hakalovic essayait de les calmer.

21 Sefer aussi les calmait. Il a réussi dans une certaine mesure. Par

22 conséquent, la situation était totalement choquante. Encore une fois, les

23 gens de Zejnilagic, de l'autre unité, sont revenus. Tout est rentré à la

24 case de départ.

25 Q. D'accord. Je vais vous poser une question concernant les questions

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1 militaires. Je vais vous poser la question, vous nous le direz si vous ne

2 le savez pas.

3 Est-ce que vous saviez si Vehbija Karic, par la suite, si Sefer Halilovic a

4 confirmé cela, donc si Vehbija Karic a donné un ordre sur lequel, à partir

5 de ce moment-là, les opérations de combat de ce jour-là devaient être

6 menées par M. Zejnilagic ?

7 R. Non. C'est la première fois que j'entends parler de cela.

8 Q. Très bien. Je ne vais pu insister à ce sujet alors.

9 Lorsque vous étiez engagé dans cette partie au nord de la zone d'opération

10 à Voljevac-Dobro, est-ce qu'à cette époque-là, vous avez remarqué que Braco

11 Fazlic était fréquemment présent, l'adjoint du

12 6e Corps d'armée ?

13 R. Oui. C'était l'adjoint, je l'ai vu là-haut. Je ne sais pas, je l'ai

14 certainement vu une fois ou deux fois, où nous étions ensemble à Voljevac

15 puis à Dobro Polje aussi. Puisque je connais très bien Braco de Sarajevo,

16 peut-être je l'ai vu encore à de nombreuses reprises, mais cela je l'ai

17 retenu, ces deux fois-là, on était ensemble.

18 Q. Je voudrais clarifier un point. Au moment où vous avez vu Fazlic, je

19 vous parle du jour où les combats ont commencé. Vous avez vu Braco Fazlic.

20 Il s'agit du 11, 12 et 13 septembre. Est-ce que vous vous rappelez si vous

21 avez vu Braco Fazlic un de ces jours, ou si vous avez vu Salko Gusic dans

22 le secteur de Voljevac, Dobro Polje, et d'une façon générale sur le front

23 de l'entrée nord?

24 R. Gusic ?

25 Q. Gusic, oui.

Page 85

1 R. Je ne me rappelle pas qu'il ait été là ce jour-là. Peut-être qu'il y

2 était, mais je n'en suis pas sûr. Je ne sais pas.

3 Q. Très bien. Je vous remercie.

4 Madame, nous allons passer, je l'ai promis, à la journée du

5 16 septembre et les jours suivants. Après ces problèmes de l'après-midi du

6 14 dont vous avez parlé, est-ce que vous avez su que des opérations de

7 combat commençaient finalement à l'extrême sud de l'opération à Vrdi,

8 Dreznica, dans ces secteurs à peu près ?

9 R. Je suis allé là-bas. J'y étais moi-même. J'ai suivi les opérations de

10 combat tout au long de la nuit. Le jour suivant, j'ai parlé aux combattants

11 qui revenaient, et j'ai fait les enregistrements en question. J'ai entendu

12 les ordres qui étaient donnés par le centre de liaison de Zuka et les

13 autres. Donc, j'ai suivi tous les événements de très près depuis Dreznica.

14 Q. Oui, je comprends. Vous avez déjà indiqué quelles étaient parties

15 pertinentes dans la déposition. Je voudrais simplement vous posez la

16 question suivante : ces activités de combat, tout au moins les activités

17 d'offensive ont cessé de façon très soudaine à la fin de la journée du 19

18 septembre, et ont été suivies par le retour -- excusez-moi, je suis en

19 train de vous poser deux questions à la fois. Peut-être que je pourrais

20 vous demander simplement la première question. Les activités de combat ont

21 cessé le 19 septembre; c'est exact ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Pour autant que vous le sachiez, immédiatement, des unités de Sarajevo

24 sont retournées à Sarajevo ?

25 R. Je ne sais pas si elles sont retournées là-bas, mais Sefer est reparti

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1 et moi aussi. Pour autant que je le sache, les choses ont peut-être

2 continué, mais je ne suis pas sûr; cela dépend des documents. Je n'en suis

3 pas certain.

4 Q. Bien. Non, mais je vous remercie.

5 Je veux juste préciser quelque chose, clarifier quelque chose. Est-ce

6 que vous savez si les unités de Sarajevo, celles qui étaient -- qui

7 constituaient les 9e, 10e, le 2e Bataillon indépendant, si c'est les

8 éléments de ces unités à Herzégovine sont retournés à Sarajevo ou non du

9 côté du 20 ? Est-ce que vous vous rappelez de cela ?

10 R. Non, je n'en sais rien au sujet du retour des unités.

11 Q. Merci. Outre le fait que Sefer Halilovic soit retourné à

12 Sarajevo, à votre connaissance, est-ce que Suljevic, Bilajac et Karic sont

13 également retournés à Sarajevo vers cette date, peut-être un jour plus

14 tôt ?

15 R. Ils étaient dans la partie septentrionale, je ne sais pas. Je ne les ai

16 pas vus là-bas; je les ai vus à Sarajevo quelques jours plus tard. Nous

17 nous sommes rencontrés. En fait, je ne sais pas exactement quand.

18 Q. Bien. La dernière fois, pour être bien au clair, que vous les avez vus,

19 ils étaient dans la partie septentrionale du front, et c'est quand vous

20 êtes allé à Dreznica; est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Bien.

23 R. C'est vrai.

24 Q. Vous êtes allé vous-même à Sarajevo à quelle date ?

25 R. Nous y sommes retournés le 19. Donc, le 20, c'était probablement après

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1 minuit lorsque nous sommes passés par le tunnel pour gagner Sarajevo. Nous

2 avons quitté donc le 19, probablement dans les petites heures dans la

3 matinée. Juste après minuit, nous y sommes parvenus.

4 Q. Je comprends. Pouvez-vous expliquer qui était avec vous lorsque vous y

5 êtes retourné ?

6 R. Nous y sommes retournés trois fois. Une fois, je suis retourné avec

7 Cibo. Il y avait foule d'une certaine manière là-bas. Puis, j'y suis allé

8 avec Sefer. De là, je ne sais pas si c'était à ce moment-là ou plus tôt,

9 c'est possible. Cibo était avec nous. J'étais un peu troublé. Enfin, c'est

10 probablement très clair en lisant le livre, mais pour le moment je ne suis

11 pas au clair.

12 Q. Cela va. Ce n'est qu'une question de détail. Je ne vais pas poursuivre.

13 Très bien. Merci.

14 Est-ce que vous avez eu l'occasion, ou est-ce qu'on vous a donné l'occasion

15 de regarder le rapport rédigé par l'équipe d'inspection, à savoir, Sefer,

16 Suljevic, Karic et Bilajac, ce qu'ils ont rédigé le 18 septembre ? Est-ce

17 qu'on vous a montré ce rapport à cette époque-là ou pas ? Je ne dis pas

18 qu'on aurait dû vous le montrer, mais je vous demande simplement si on vous

19 l'a montré.

20 R. Non, non.

21 Q. A l'époque, à ce moment-là -- excusez-moi. Donnez-moi un instant, s'il

22 vous plaît.

23 Bien. Est-ce qu'à ce moment-là, peut-être au cours des deux derniers jours

24 du moment où vous vous trouviez à Dreznica, suivant les combats, lorsque

25 vous étiez là-bas, est-ce que quelqu'un vous aurait montré un ordre de

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1 cessez-le-feu à ce moment-là, un ordre qui aurait été désigné par Stjepan

2 Siber en tant que adjoint de Rasim Delic ?

3 R. Personne ne m'a montré d'ordre ou renseignement.

4 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que l'orateur veuille bien parler un

5 peu plus fort, parce qu'on ne peut pas l'entendre.

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi. Je crois qu'il faut que je

7 parle un peu plus fort. Est-ce que le témoin pourrait également --

8 Q. Excusez-moi, Monsieur Hodzic.

9 Alors, excusez-moi un instant. Les interprètes m'ont demandé si vous

10 voudriez parler un peu plus fort, Monsieur Hodzic.

11 R. Très bien.

12 Q. Maintenant, je voudrais vous parler de quelque chose qui n'est plus au

13 moment de l'opération Trebevic -- nous nous rapprochons de l'opération

14 Trebevic. Cela s'est passé à cette occasion-là.

15 Est-ce que vous étiez là en -- où vous trouviez-vous lorsque les nouvelles

16 de l'opération Trebevic ont été portées à votre connaissance ?

17 R. Le 26, dans la matinée, je me trouvais dans un appartement, et j'en ai

18 entendu parlé dans la matinée à la radio. C'était alarmant. Peut-être que

19 je ne devrais pas dire "alarmant", mais ces renseignements, cet avis venant

20 de la présidence de Bosnie-Herzégovine que Caco et Celo avaient été

21 destitués de leurs unités, et ce qui était recommandé à la population de ne

22 même pas sortir de leurs maisons, de ne pas aller dans les rues, et qu'il

23 fallait pas qu'ils n'aillent au travail ce jour-là.

24 Je crois que mon journal m'a appelé à un moment donné, m'a demandé

25 d'essayer d'obtenir une déclaration de quelqu'un sur ce qui se passait.

Page 89

1 J'ai téléphoné à Sefer, il n'était pas disposé à faire une déclaration. Je

2 ne sais pas dans quelle situation il se trouvait. J'ai appelé Delic, et on

3 m'a dit qu'il était sur le terrain.

4 Le journal, à un moment donné, dans l'après-midi, m'a demandé d'essayer

5 encore une fois de faire quelque chose, d'aller au

6 1er Corps. Vers la fin de l'après-midi, au début de la soirée, je suis allé

7 au 1er Corps. Je pourrais dire que c'était comme d'aller rendre visite à mes

8 amis, à Karavelic, et cetera. J'ai été arrêté aux barrières. On m'a dit :

9 Attendez un instant. On va leur dire quelque chose un moment. Deux

10 policiers sont arrivés. Ils ont dit : Celo est en train de se rendre. Nous

11 devons trouver des menottes. Ils n'avaient pas de menottes. Alors,

12 quelqu'un a essayé d'apporter un bout de corde ou de ficelle. Ils ont dit :

13 Bien. Nous pourrons lui lier les mains ainsi qu'à celui-ci.

14 Caco ne s'était pas encore rendu. On m'a dit -- enfin, le garde m'a dit :

15 Personne ne veut vous voir, vous savez. Allez-vous en, s'il vous plaît.

16 J'ai eu, effectivement, des problèmes deux jours plus tard, mais peut-être

17 que ceci ne vous intéresse pas pour le moment.

18 Q. Non. Franchement, cela nous intéresse, mais pour cette question, vous

19 étiez-vous simplement en train de faire votre travail de journaliste en

20 allant au 1er Corps, comme vous l'avez dit.

21 R. [réponse inaudible]

22 Q. Après cela, vous avez été invité - j'utilise le terme "invité" entre

23 guillemets, de façon assez lâche. On vous a demandé de venir à un poste de

24 police. Est-ce que vous pourriez nous expliquer quand ceci a eu lieu, et

25 quand vous avez été interrogé vous-même ?

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1 R. Vous savez ce qui s'est passé déjà. Munir Alibabic m'a appelé, et j'ai

2 rencontré Sefer à l'entrée. On m'a dit d'entrer très rapidement. Ensuite,

3 le reste vous le savez; j'ai rencontré Sefer. Cela, vous le saviez déjà.

4 C'était tout à fait par hasard. C'était dans les bureaux de la sécurité

5 d'Etat. Il m'a dit : Ils veulent me blâmer pour -- ils veulent me faire

6 porter de la responsabilité de ce qui cette bande a fait et leurs méfaits.

7 Alors, j'ai dit : D'accord. Ils ont dit : J'ai créé pour vous cet état.

8 J'ai créé pour vous cette armée, mais maintenant vous avez toute liberté

9 pour m'arrêter.

10 Ils ont appelé Mujezinovic qui était le chef du centre SDB. Je n'arrive pas

11 à me rappeler son nom, mais je suis allé -- il a commencé à crier quelque

12 chose dans ma direction. Il disait : Qu'est-ce que c'est que Sefer et toi

13 vous avez encore fait ? Emmenez-le. Ensuite, j'ai été emmené dans une autre

14 pièce de l'autre côté du couloir. Il y avait un inspecteur qui se trouvait

15 debout à côté d'une table. Dès que je suis rentré, il a dit : Ce à quoi

16 vous avez participé, est quelque chose qui pourrait vous valoir 20 ans de

17 prison ou même la peine de mort.

18 Après cela, j'ai eu une longue conversation avec lui pendant

19 16 heures.

20 Q. Bien. Maintenant, je voudrais qu'on reprenne tout cela élément par

21 élément. Pour commencer, vous vous êtes trouvé en bas de l'escalier. Vous

22 avez vu Sefer Halilovic, vous lui avez parlé. Après cela, Sefer a été

23 emmené ailleurs; c'est exact ?

24 R. Oui. Il est allé pour avoir d'autres entretiens dans le même bâtiment.

25 Q. Est-ce que Sefer portait une arme à ce moment-là ? Est-ce que vous

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1 l'avez vu ?

2 R. Je ne pense pas. Je n'ai pas fait très attention. Je ne sais pas.

3 Q. Bien. On vous a fait monter à l'étage pour rencontrer quelqu'un.

4 Pourriez-vous tout simplement nous expliquer qui était la personne que vous

5 avez vue à l'étage ?

6 R. D'après ce que j'ai appris par la suite de certaines personnes, cet

7 inspecteur s'appelait Jasmin Sendijarevic, mais c'était Munir Alibabic et

8 il y avait ce Jasmin --

9 Q. Munir Alibabic est la personne qui a passé l'appel téléphonique -- qui

10 vous a appelé à l'origine. Maintenant, nous parlons d'Enver Mujezinovic.

11 Qu'est-ce que vous avez compris, qu'Enver --

12 R. Oui.

13 Q. Qu'est-ce que vous avez compris, qu'étaient les fonctions d'Enver

14 Mujezinovic ?

15 R. Mujezinovic était le chef du centre SDB, le service de sécurité de

16 l'Etat de la ville de Sarajevo.

17 Q. Maintenant, bien que je comprenne que vous ne soyez pas un témoin

18 expert pour ce qui est de la structure des organes de sécurité, le SDB,

19 c'était un organe du MUP, du ministère de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q Censément, il était censé l'être.

22 Q. Le ministre de l'Intérieur, à l'époque, était une personne du nom de

23 Bakir Alispahic; est-ce exact ?

24 R. C'est exact. Je le connaissais aussi.

25 Q. Oui, je comprends. Mujezinovic était une personne à propos duquel vous

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1 avez eu des discussions avec Sefer, lorsque vous vous trouviez sur la route

2 en Herzégovine; est-ce exact ?

3 R. C'est exact. C'était la première fois que je l'ai vu de ma vie.

4 Q. Oui, je comprends. Qu'est-ce que Sefer Halilovic vous a dit de ses

5 rapports avec Mujezinovic pendant la période où vous étiez en Herzégovine ?

6 R. Il a mentionné Mujezinovic plusieurs fois comme étant un homme qui

7 travaillait à ce KOS. Il a dit qu'il était arrivé là tardivement et qu'il

8 rendait compte aux forces de l'ABiH. Sa conclusion était qu'il était

9 possible qu'il puisse aller par Bijeljina et -- enfin quelque chose dans ce

10 genre. Pour la plus grande partie, il était en quelque sorte contre lui. Il

11 le considérait comme un ennemi pour ainsi dire.

12 Q. Est-ce que Sefer vous a dit que dans le passé Mujezinovic avait tenté

13 de ternir la réputation de Sefer, en fournissant des documents concernant

14 les relations de Sefer à l'époque de la JNA, ses rapports avec les services

15 secrets ?

16 R. Je ne peux pas me rappeler cela, je ne me rappelle de cela.

17 Q. En tout état de cause, sur la base de ce que Sefer vous a dit, les

18 relations entre Sefer Halilovic et Enver Muzeninovic n'étaient pas amicales

19 du tout; est-ce exact ?

20 R. Non.

21 Q. Je vais traiter de Mujezinovic maintenant. Personnellement vous n'aviez

22 eu jamais affaire avec M. Mujezinovic jusqu'alors, c'était la première fois

23 que vous le voyiez face à face. Jusqu'à ce jour-là, vous ne l'aviez jamais

24 vu. Parlez-nous de cette première rencontre que vous avez eue avec lui,

25 quelle est la conversation que vous avez eue avec lui ? Quelles ont été les

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1 menaces ou les choses désagréables qui ont été dites au cours de cet

2 entretien ?

3 R. Je vous l'ai déjà dit. En tout état de cause, c'était indépendamment du

4 fait que j'ai dû y aller et qu'il a commencé à crier contre moi -- je l'ai

5 dit. Je ne comprends vraiment pas où vous voulez en venir.

6 Q. Excusez-moi. J'ai posé la question --

7 R. J'ai écrit à ce sujet. Il a commencé à me menacer, il a dit : "Qu'est-

8 ce que vous êtes en train de préparer là ?"

9 Oui, il y avait autre chose : "Allons voir qui va crever l'estomac de

10 l'autre," ou quelque chose comme ça. Je n'avais absolument aucune idée de

11 ce qu'était censé vouloir dire. Il a dit quelque chose comme : "Bon, et

12 bien, nous allons attendre et nous allons voir qui va crever la panse de

13 l'autre," apparemment. Je n'avais absolument aucune idée des choses qu'ils

14 voulaient parler.

15 Q. C'était en fait la vraie question. C'était en quelque sorte de savoir

16 et d'essayer d'obtenir une réponse. Mais qui a fait cette remarque sur la

17 question de crever l'estomac ou crever la panse ? Est-ce que c'était M.

18 Mujezinovic ?

19 R. Oui, Mujezinovic était en train de me menacer. Il n'attendait même pas

20 mes réponses. Il a simplement dit: "Emmenez-le."

21 Q. Lorsqu'on vous a emmené, vous avez à ce moment-là été interrogé par une

22 autre personne, un inspecteur, pendant environ 16 heures; c'est exact ?

23 R. 16 heures. C'est exact.

24 Q. Pendant ce temps-là, est-ce que vous avez eu la possibilité de

25 consulter un avocat ou de vous mettre en rapport avec un membre de votre

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1 famille ?

2 R. Absolument pas. Bien sûr que non. Je pensais même que je ne reverrais

3 plus jamais mes enfants et ma femme. Un avocat, non.

4 Q. Il y a eu d'autres menaces qui vous ont été faites par cet inspecteur

5 dont vous avez parlé ?

6 R. Oui, encore une fois, une fois de plus. Je ne sais pas à quel stade de

7 l'entretien, mais la façon dont il me parlait, il disait qu'il

8 m'interrogeait pendant deux heures et puis il écrivait des choses, et puis

9 au bout de deux heures il commençait à dicter. Il dictait, puis il écrivait

10 ou il dictait des choses que j'entendais pour la première fois. J'ai essayé

11 de discuter avec lui, et avec pas mal d'énergie, plus d'une fois. Je le lui

12 ai dit de la façon dont personnellement j'appréciais la situation, à un

13 moment donné c'était que peut-être je ne saisissais pas très bien, mais

14 j'ai compris quel jeu il était en train de jouer par la suite, c'est-à-dire

15 quoi que j'ai dit de positif concernant Sefer, il n'allait pas l'écrire.

16 Même si je faisais une déclaration neutre, il la retournait en quelque

17 chose d'horrible.

18 J'ai dit: "Bien, quoi ? Est-ce que vous voulez essayer d'organiser un

19 procès contre -- à travers -- par mon truchement ? Bien, ce n'est pas

20 quelque chose que vous pourrez faire. Je suis un homme religieux et je

21 crains Dieu." Je sais que je peux être tué par les Oustachi et les Chetniks

22 et d'autres, je peux mourir de leurs mains, mais je ne veux pas mourir en

23 ayant un tel péché sur le cœur." Il s'est un peu calmé, mais il avait déjà

24 monté toute l'opération. C'était un peu tard. Il avait déjà écrit son

25 rapport, et je crois vraiment -- je me suis dit que je n'allais jamais

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1 signer ce document.

2 Ensuite, lorsque j'ai regardé le texte plus tard au cours de l'entretien,

3 de ce qu'il avait été écrit -- je ne sais pas s'il s'agissait d'un coup

4 monté complètement. Je ne me rappelle même pas exactement ce que j'ai

5 entendu. Il y avait quand même deux points précis : premièrement,

6 apparemment que Sefer Halilovic m'avait interdit d'écrire quoi que ce soit

7 concernant ces crimes, et puis il y avait une autre phrase qui disait que

8 j'avais été un témoin oculaire des deux massacres.

9 J'ai consacré pas mal de temps à réfléchir pour savoir comment j'aurais pu

10 signer de tels papiers. Pour commencer, j'ai perdu la foi. Je me suis dit,

11 bon, alors ce procès va se dérouler et je serai à ce moment-là en mesure de

12 dire la vérité. Cela n'avait plus d'importance. A un moment donné, il m'a

13 regardé et il a dit : "Ne sais-tu que nous sommes en guerre et que des gens

14 sont tués pour ce genre de chose ?"

15 Par la suite, je veux dire à un moment donné, cette personne, puis

16 quelqu'un d'autre avec qui j'avais eu un peu de sympathie, le gars qui me

17 menaçait est parti, et il a pu dire quelque chose comme, "Bon. Allez, on

18 l'oublie. C'est un imbécile. Mais il faudra que tu acceptes de reconnaître

19 tout." Qu'est-ce que je pouvais reconnaître, je me trouvais en détention,

20 je pense que j'étais en prison pendant à peu près 26 heures. J'étais

21 convaincu que -- je me suis dit, bien, si je suis envoyé en prison, cela

22 pourrait bien se passer. Si je suis envoyé en prison pour dix ans, on sera

23 peut-être très mauvais. Le gars qui était très dur, très rigide est parti.

24 J'ai commencé à lire le texte et j'ai essayé de faire quelques corrections.

25 Il a dit : "Non, ne fais pas de corrections."

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1 Ensuite, l'autre était derrière et a dit : "A quoi tu penses ? Il faut

2 signer les papiers. Ma famille m'attend -- ta famille t'attend." J'étais

3 surpris. Je savais parce que j'avais travaillé à la radio que deux minutes

4 suffisaient à parcourir une page. J'ai signé chaque page en une minute.

5 Quand j'ai eu fini, ils ont dit : "Merci beaucoup. Vous pouvez rentrer chez

6 vous." Je suis rentré chez moi et je ne savais pas quoi faire. Est-ce que

7 j'étais censé me suicider ? Je ne savais pas ce qui se passait --

8 Q. Je ne veux vous interrompre dans votre récit, c'est simplement qu'il y

9 a une question que je souhaite évoquer avec vous, et le moment est bien

10 choisi pour le faire.

11 Quand vous étiez avec ces policiers, est-ce que vous aviez déjà entendu

12 parler de ce qui était arrivé à Caco, Musan Topalovic ?

13 R. Oui. Cela avait déjà été annoncé, on avait déjà annoncé qu'il avait été

14 tué.

15 Q. Pour vous, est-ce que Musan Topalovic s'était rendu à la police,

16 s'était constitué prisonnier après un certain temps, mais qu'ensuite il

17 avait été tué. Est-ce que c'est ce que vous avez entendu dire ?

18 R. J'ai entendu dire la même chose; qu'il avait effectivement été tué.

19 Q. Après son meurtre, est-ce qu'il a été enterré dans le cimetière des

20 héros, à votre connaissance ?

21 R. Pas au début. Je sais qu'il y avait plusieurs possibilités. Je n'en

22 suis pas sûr. Au départ chez Zuc. Il a été exhumé et envoyé ailleurs, et

23 ensuite je ne sais pas exactement quand après la guerre, il a été enterré

24 dans le cimetière le plus prestigieux de Bosnie-Herzégovine, le cimetière

25 central pour les combattants tombés au combat à Kovaci. C'est le principal

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1 cimetière.

2 Q. A votre connaissance, vous avez vu Sefer Halilovic aller à la police.

3 Quand vous l'avez vu, est-ce que quand vous-même avez été interrogé, est-ce

4 qu'il vous a paru être en détention ?

5 R. Bien sûr, il faisait jour.

6 Q. A partir de ce moment-là, Sefer Halilovic n'a plus joué aucun rôle en

7 Bosnie dans l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

8 Mme CHANA : [interprétation] Je ne pense pas que le témoin soit en mesure

9 de parler du rôle de Sefer dans l'armée de Bosnie.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le témoin peut peut-être nous parler de

11 nature générale de cela. Il n'est pas membre de l'armée; il était

12 journaliste.

13 M. MORRISSEY : [interprétation]

14 Q. Veuillez nous répondre de la manière dont cela était indiqué par

15 Monsieur le Président. A votre connaissance, est-ce que Sefer Halilovic a

16 joué un rôle quel qu'il soit dans l'armée de Bosnie, après que vous l'avez

17 vu, après la période pendant laquelle vous l'avez vu en détention ?

18 R. Il était suspect et il était en détention.

19 Q. Oui.

20 R. En résidence surveillée, plutôt.

21 Q. Est-ce que vous savez qu'il a été officiellement démis de ses fonctions

22 de chef d'état-major par un ordre du 1er novembre 1993, donné par Alija

23 Izetbegovic ?

24 R. Ceci a été annoncé peu après. On a annoncé qu'il avait été démis de ses

25 fonctions et remplacé par Enver Hadzihasanovic, alias Dzedo, au poste de

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1 chef d'état-major.

2 Q. Ensuite, à votre connaissance, est-ce que Sefer Halilovic, plus tard,

3 plusieurs mois, plusieurs années plus tard, est-ce que Sefer Halilovic a

4 fondé un parti politique ?

5 R. Oui. Il m'a proposé d'en devenir le secrétaire général mais j'ai

6 refusé.

7 Q. Comment s'appelait ce parti ?

8 R. Le Parti patriote bosniaque.

9 Q. Comment s'appelle ou comment s'appelait le parti dont Alija Izetbegovic

10 et Bakir Alispahic étaient des membres éminents ?

11 R. Alija était président du Parti de l'action démocratique. Je ne sais pas

12 pour Bakir Alispahi, s'il était membre du même parti ou pas.

13 Q. Un instant -- je retire ma question -- un instant, Monsieur Hodzic.

14 [Le conseil de la Défense se concerte]

15 M. MORRISSEY : [interprétation] J'en ai terminé du contre-interrogatoire,

16 mais je souhaiterais pouvoir m'entretenir deux minutes avec mon client.

17 Inutile de faire une pause, un instant, Monsieur Hodzic.

18 M. LE JUGE LIU : Oui, s'il vous plaît.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

20 Excusez-moi, Monsieur Hodzic. Nous avons pratiquement terminé.

21 [Le conseil de la Défense et l'accusé se concertent]

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

23 Merci de m'avoir donné ces quelques minutes. Je m'excuse auprès du témoin.

24 Il y avait un point sur lequel je n'étais pas tout à fait sûr, maintenant

25 j'ai eu des instructions à ce sujet.

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1 Q. Dernier point avant que j'en termine de mon contre-interrogatoire.

2 Pendant que Sefer Halilovic ou plutôt après la fin de l'interrogatoire, une

3 fois qu'on l'a mis en résidence surveillée, est-ce que vous êtes allé le

4 voir chez lui quand il était en résidence surveillée ?

5 R. Très souvent. J'ai passé beaucoup de temps avec lui.

6 Q. Est-ce qu'il vous a dit qu'à son avis, la raison pour laquelle on

7 l'avait mis dans cette situation, c'était tout simplement son désaccord

8 avec Alija Izetbegovic, désaccord de nature politique sur la façon dont il

9 convenait d'aborder l'avenir de la Bosnie ?

10 R. Oui. Il a d'ailleurs été très explicite. C'était son impression. Pour

11 lui, c'était la raison qui expliquait le fait qu'il a été démis de ses

12 fonctions.

13 Q. Je ne vais pas poser de questions sur les détails de cet article, mais

14 vous savez qu'en 1995, dans l'Oslobodjenje est paru un article dans lequel

15 Sefer Halilovic a demandé une réouverture de l'enquête sur les crimes de

16 Grabovica, et il a lancé un appel très public dans cet article; est-ce

17 exact ?

18 R. C'est exact. Quand on en parlait, on était très surpris que personne ne

19 soit revenu sur cette question. Il y a eu une espèce de confrontation avec

20 Caco et Celo précédemment, mais personne ne semblait rien faire à ce sujet.

21 Q. Dernière question : quand cet inspecteur vous a interrogé pendant ces

22 16 heures, est-ce qu'il a montré un intérêt quelconque, montré qu'il était

23 intéressé qu'il souhaitait découvrir qui étaient les véritables meurtriers

24 de Grabovica ?

25 R. Non.

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1 Q. Merci.

2 R. Non, non.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci de votre patience, je n'ai plus de

4 questions.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

6 Questions supplémentaires ? Madame Chana ?

7 Mme CHANA : [interprétation] Très brièvement quelques questions, quelques

8 précisions.

9 Nouvel interrogatoire par Mme Chana :

10 Q. [interprétation] Monsieur Hodzic, je ne veux pas vous poser des

11 questions très longues, cela ne va pas durer très longtemps.

12 Le conseil de la défense vous a interrogé au sujet du comportement correct

13 de Halilovic qui souhaitait s'en tenir aux règles juridiques et agir dans

14 le cadre de la légalité, n'est-ce pas ?

15 R. Oui.

16 Q. S'agissant de cette réunion, de ce rassemblement au bord de la route,

17 une des choses qu'a dit Halilovic, c'est que Delic lui avait pris ses

18 pouvoirs, et qu'il voulait le cantonner à des tâches purement

19 administratives. D'après ce que vous avez pu voir vous-même, Monsieur le

20 Témoin, quand vous étiez à ses côtés pendant ces opérations de combat, est-

21 ce que Halilovic remplissait des tâches administratives ou des fonctions

22 administratives ?

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi, il faut que j'intervienne

24 parce qu'il vaudrait mieux tout de suite préciser si on interroge le témoin

25 en tant qu'expert à ce sujet. Je ne m'oppose pas, bien entendu, à ce que

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1 mon éminente consoeur demande des précisions si elle l'estime utile. Mais

2 peut-être faudrait-il préciser s'il s'agissait de fonctions administratives

3 techniques au sein de l'armée ou s'il s'agit d'une question tout à fait

4 générale. Je ne m'y oppose pas à ce moment-là.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, effectivement Madame le Procureur

6 peut-être faudrait-il préciser cette question.

7 Mme CHANA : [interprétation] Mais c'est une sorte de question générale, il

8 s'agit de ce qu'il a vu, de ses observations sur la perception qui était la

9 sienne. Sur la manière dont il voyait les fonctions qui étaient celles de

10 Halilovic sur le terrain.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, vous pouvez continuer.

12 Mme CHANA : [interprétation]

13 Q. Monsieur Hodzic, ma question est la suivante : Halilovic se plaignait

14 auprès de vous, du fait qu'on le cantonnait à des fonctions purement

15 administratives. Vous, alors que vous le suiviez comme une ombre pendant

16 toutes ces journée en Herzégovine, quelle a été votre impression sur ce

17 point ?

18 R. Ecoutez, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Je ne sais pas

19 très bien comment vous expliquer cela. Ce n'était pas un quartier général

20 ou un état-major. C'était simplement un groupe d'hommes qui était là. Il

21 n'y avait pas vraiment d'administration, ce qu'on aurait pu appeler une

22 administration. On était constamment en mouvement, on allait d'un endroit à

23 l'autre, -- les membres de cette équipe et, moi, je suivais le mouvement.

24 Il n'y avait pas véritablement d'état-major digne de ce nom, rien de tel.

25 Q. Merci, Monsieur Hodzic. Revenons au 9. C'est le moment où Halilovic est

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1 venu, vous lui avez demandé en chuchotant s'il avait entendu parler des

2 meurtres de Grabovica. Est-ce qu'il vous a jamais dit à ce moment-là :

3 "J'ai pris des dispositions pour ouvrir une sorte d'enquête" ou "J'ai dit à

4 Dzankovic d'enquêter sur cela" ? Est-ce qu'il vous a dit cela quand vous

5 avez parlé, quand vous avez discuté de cela le 9 septembre ?

6 R. Comme je l'ai déjà dit cette conversation n'a duré qu'une ou deux

7 minutes, une conversation très brève. Le lendemain, il m'a dit alors que

8 nous étions en chemin pour Dobro Polje, il m'a dit qu'il y avait des gens

9 dont la mission était d'enquêter sur ces questions. Il n'a pas parlé

10 précisément de Dzankovic, mais il a dit qu'il y avait des gens qui étaient

11 en train d'examiner la question.

12 Q. Monsieur Hodzic, j'aimerais préciser grâce à vous la date à laquelle

13 Halilovic a quitté l'Herzégovine. Vous nous aviez dit que c'était --

14 R. Le 19.

15 Q. Quand vous êtes parti vous vous êtes séparés sur la partie nord du

16 front à Dreznica. C'était à quelle date ?

17 R. C'était le 14, quand on est rentré de Dobro Polje et Prozor, on est

18 tous les deux arrivés à Donja Jablanica. J'ai demandé à ce qu'on m'emmène à

19 Dreznica parce qu'il y avait des combats là-bas. Quelqu'un devait

20 m'emmener, mais Celo a dit qu'il pourrait venir avec nous parce que ses

21 hommes y allaient. Je suis allé avec eux à Grabovica et Sefer est resté sur

22 place, c'est là qu'on s'est quitté.

23 Q. En réalité, vous ignorez la date du retour de Sefer Halilovic à

24 Sarajevo, n'est-ce pas ? Est-ce que vous le savez ?

25 R. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Je le sais. Bien sûr, que je le sais.

Page 103

1 Le 19. Le 19 septembre 1993.

2 Q. Etiez-vous en sa compagnie quand il est rentré ?

3 R. Oui, j'étais avec lui.

4 Q. Merci de cette précision.

5 Dernière question, Monsieur Hodzic : le conseil de la Défense vous a

6 interrogé au sujet de la coordination de l'opération. Vous vous souvenez de

7 cette série de questions sur ce point ? Au sujet du rôle de Halilovic ?

8 R. Oui.

9 Q. Vous nous avez dit avoir été surpris, choqué quand il a dit qu'il était

10 le coordonnateur. Pourquoi cette surprise ? Pourquoi avoir été choqué

11 ainsi ?

12 R. Tout d'abord, c'était la première fois qu'il me disait cela, qu'il me

13 disait qu'il y avait quelqu'un chargé de la coordination, parce qu'il n'y

14 avait pas de coordonnateur. En deuxième lieu, il y avait -- donc Sefer

15 était un commandant, commandant du point de vue symbolique qui soudain

16 devenait coordonnateur. Qu'est-ce que cela voulait dire ? A cette époque,

17 je ne connaissais pas l'ordre. J'ignorais ce qui se passait, j'ignorais la

18 nature, la substance de l'ordre. Ce n'est que plus tard que j'ai vu cet

19 ordre qui désignait l'équipe d'inspection qui devait être dirigée par Sefer

20 Halilovic. Plus tard, quand j'ai enquêté sur l'affaire d'Igman, un mois

21 plus tard, j'ai trouvé un autre ordre de Delic en date du 3 août 1993 qui

22 ressemblait beaucoup à l'autre ordre, mais qui avait été donné un peu plus

23 tôt. Donc Delic avait ordonné qu'une équipe soit mise sur pied, que cette

24 équipe soit envoyée à Igman pour stabiliser la situation, et cetera. Zicro

25 Suljevic était, avec Rifat Bilajac et d'autres, membre de cette équipe.

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1 Cette équipe devait être placée sous la direction de Sefer Halilovic. Je

2 crois que c'est de cela qu'il s'est inspiré quand il a écrit l'ordre

3 suivant.

4 Je constate qu'il y a un parallélisme entre ces deux ordres qui m'ont

5 semblé semblables. Si j'avais connu cet ordre le 19 septembre 1993 quand

6 j'essayais de penser aux questions et à la manière de le présenter; si

7 j'avais su tout cela, je n'aurais jamais dit qu'il était commandant de

8 cette opération. J'ai parcouru les dossiers. Il existe peut-être un

9 document dans ce sens. Pas moi, je n'ai pas de tel document, mais personne

10 ne l'a jamais "commandant".

11 Mme CHANA : [interprétation] Merci, je n'ai plus de questions à poser au

12 témoin.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

14 Est-ce qu'il y a ce stade des documents que vous souhaiteriez verser au

15 dossier par le truchement de ce témoin.

16 [Le témoin se retire]

17 Mme CHANA : [interprétation] Oui, je souhaiterais demander le versement au

18 dossier de tous les documents qui figurent sur la liste de pièces à

19 conviction que nous vous avons remis.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez avoir l'amabilité de donner

21 leurs cotes pour le comte rendu d'audience.

22 Mme CHANA : [interprétation] Oui, il s'agit de MFI161.

23 Permettez-moi de donner une explication au sujet de ce document, c'est un

24 document qui devait être versé au dossier parle truchement du témoin Gusic,

25 je l'ai utilisé dans le cadre de mes questions supplémentaires. Donc, il

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1 était un peu passé entre les mailles du filet et n'avait pas été versé au

2 dossier. Je souhaiterais maintenant qu'il soit versé au dossier.

3 Ensuite, il y a les documents 288, 289, 291, 292 et 281. [comme interprété]

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

5 Des objections ?

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, j'ai un certain nombre d'objections.

7 Je me demande s'il est nécessaire de garder le témoin dans le prétoire,

8 s'il a besoin d'écouter nos débats à ce sujet. Je regarde l'heure aussi,

9 parce qu'avec la meilleure volonté du monde, je ne pense pas pouvoir

10 répondre en cinq minutes. Je me demande si ce ne serait pas une bonne idée

11 de faire partir -- de laisser partir le témoin. Je suis tout à fait prêt à

12 revenir travailler cet après-midi. A ce moment-là je pourrais répondre.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Si --

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Je ne suis pas --

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Si on pouvait en terminer en un quart

16 d'heure, ceci nous permettrait d'éviter une séance cet après-midi. Comme

17 cela, tout le monde pourrait partir en vacances.

18 M. MORRISSEY : [interprétation] Je suis d'accord.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons avoir --

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous avez déjà exprimé vos objections au

22 sujet de ces documents.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez donc être, cette fois-ci, un peu

25 plus concis.

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1 M. MORRISSEY : [interprétation] Je peux m'exprimer en dix minutes. Si vous

2 voulez que le témoin reste, je peux parler pendant que le témoin est là.

3 C'est simplement que je vais me lancer dans une espèce d'intervention, de

4 discours alors que le témoin est là. M. Weiner a déjà signalé que c'était

5 quelque chose qui le préoccupait. Je me remets entre les mains de la

6 Chambre. C'est à elle de décider. Moi, je peux commencer tout de suite,

7 dites-le moi.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, est-ce que vous pensez que

9 nous pouvons laisser partir le témoin ?

10 Mme CHANA : [interprétation] Oui. Je pense qu'on peut laisser partir le

11 témoin à moins que vous n'estimiez que sa présence soit requise.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

13 Mme CHANA : [interprétation] Oui.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Merci beaucoup

15 d'être venu déposé à La Haye. Mme la Greffière va vous raccompagner, et bon

16 retour.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie moi aussi. Cela a été un

18 honneur pour moi que de pouvoir témoigner dans cette enceinte.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

20 [Le témoin se retire]

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Maître Morrissey.

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Je m'oppose au versement au dossier des articles de presse puis du livre

24 "Enveloppe décachetée", écrit par ce témoin, également le livre de

25 Halilovic. En ce qui concerne le journal, je n'ai rien à dire à ce sujet,

Page 107

1 compte tenu des circonstances.

2 Je vais tout d'abord traiter des articles et du livre au cours du contre-

3 interrogatoire dont on n'a jamais interrogé le témoin en ce qui concerne

4 ces documents. La Chambre peut décider de cela, mais je pense qu'il a donné

5 des éléments de preuve extrêmement détaillés. Il a dit qu'à aucun moment il

6 ne devait rafraîchir sa mémoire sur la base du journal. Il n'a jamais dit

7 qu'il avait besoin de ces détails. Il s'agissait toujours des questions

8 marginales. Je n'ai pas insisté et mon éminent collègue de l'Accusation non

9 plus.

10 Je souhaite également dire que le témoin a bien répondu de vive voix. Dans

11 ce cas-là, cela doit être sa déposition. Les documents, les livres, les

12 articles sont vraiment problématiques. Je vais vous dire de quoi il s'agit

13 tout à l'heure.

14 Même si c'était parfait, ceci correspondrait à la valeur de sa déclaration

15 préalable. Il a déposé devant ce Tribunal; personne n'a contesté sa

16 crédibilité. Le seul moment où on a posé une question au cours du contre-

17 interrogatoire concernant une controverse au sujet du document et des

18 dates, il l'a très bien clarifié. Il a dit : Oui, en fait j'ai fait une

19 erreur. Donc, je pense que ces documents ne nous sont pas du tout

20 nécessaires et serviraient à détourner notre attention.

21 Je pense qu'au moment du réquisitoire, des plaidoiries, nous aurons, par le

22 biais du logiciel Sanction, des morceaux de journal et du livre, alors que

23 ce qui est important, c'est ce que ce témoin a dit ici.

24 Cela c'est pour ce qui concerne le livre. Si ce document était parfait,

25 mais ce n'est pas le cas puisque ces ouvrages ont été rédigés des années

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1 après les événements.

2 Deuxièmement, ceci ne se fonde pas sur ses souvenirs, sa mémoire, mais cela

3 se fonde sur sa mémoire mais également sur les documents et sur ses

4 conversations avec certaines personnes; avec éventuellement l'accusé, mais

5 aussi avec Delic, Suljevic, et cetera. Nous ne critiquons pas cela. C'est

6 un bon journaliste, il a tout à fait le droit de faire cela. Cependant, le

7 livre et les articles ne sont pas du tout parfaits. Ils ne se fondent pas

8 sur ses souvenirs, mais il s'agit d'une reconstruction faite par lui, une

9 reconstruction tout à fait légitime, néanmoins, une reconstruction. En

10 raison de cela, ils ne représentent pas du tout un très bon élément de

11 preuve; loin de là.

12 J'ai déjà dit qu'il était important de savoir de quelle manière ceci peut

13 être utilisé dans le contre-interrogatoire effectivement. Le journal qui

14 correspond au temps des événements a une autre valeur. Pour ces raisons-là,

15 je considère que ces documents ne devraient pas du tout être versés au

16 dossier.

17 Puis, il y avait quelques problèmes de détail. Avec votre permission, si

18 vous êtes, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, contre ce point de

19 vue je souhaite dire que --

20 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le conseil peut ralentir.

21 M. MORRISSEY : [interprétation] On m'a averti qu'il fallait que je

22 ralentisse, donc je suis sous deux pressions opposées, mais je vais essayer

23 d'abréger ce que j'ai à dire.

24 Les documents que le Procureur souhaite verser au dossier, sont une

25 sélection de documents. Je ne dis pas que ceci ait été fait sans bonne foi,

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1 mais il s'agit cependant d'une sélection de documents, alors que dans

2 l'original, il existe d'autres documents qui nous permettraient d'avoir une

3 image plus complète. Là, il s'agit de documents qui existent dans le livre.

4 Cependant, je ne lui ai pas posé de questions concernant le livre. Je pense

5 que si nous nous penchons sur la déposition du témoin Hodzic, nous aurons

6 une image cohérente, et je pense que si le Procureur dit un jour : Je pense

7 qu'il faut se pencher sur un article en 1999, je pense que ceci n'est pas

8 du tout utile. Le seul but est de détourner notre attention et ceci portera

9 préjudice à la Défense. Nous n'allons pas maintenant perdre notre temps à

10 expliquer pourquoi certaines pages du livre reflètent des années qui ne

11 nous intéressent pas directement. Je vais vous donner quelques exemples : A

12 la page 161, une partie de la page 165 en langue bosniaque manque. Puis,

13 les pages 178 à 199 manquent, de même que 202 à 214 et de 217 à 227.

14 Nous avons également les chapitres, les noms de chapitres que nous n'avons

15 pas reçus, par exemple, "Sauvez Mostar en dix jours", puis un autre, "Qui a

16 tiré sur Haso Hakalovic", puis un autre intitulé, "Nous ne sommes pas en

17 train de venger l'armée". Tout cela a été omis.

18 Ou bien, "Nous avons également crié ensemble". C'est le quatrième chapitre

19 qui manque. Ou bien, "Pourquoi Caco est en colère". Je souhaite dire que

20 nous ne considérons pas que le Procureur n'agisse pas de bonne foi. Il

21 n'est pas du tout nécessaire que Mme Chana répondre, bien sûr. Elle aura le

22 si nécessaire, mais il faut savoir qu'il s'agit, là, d'une sélection tout à

23 fait partielle, qui provoque de nombreux problèmes.

24 Puis, nous avons les articles de presse -- j'ai déjà fait mon

25 commentaire.

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1 En ce qui concerne le livre de M. Halilovic, il a été présent. Puis,

2 il y a eu une nouvelle évolution concernant cela. Je souhaite avancer un

3 argument, compte tenu des raisons que j'ai déjà énoncées, que le Procureur

4 a effectivement présenté certains nouveaux éléments de preuve concernant

5 cela et il faut éventuellement tenir compte de cela, du fait qu'il avait

6 des connaissances plus directes que le témoin précédent. Mais cependant, je

7 m'y oppose encore car le seul lien de Hodzic à cela est le fait qu'il l'a

8 lu. Peut-être il est plus en mesure de faire des commentaires.

9 Effectivement, il les a faits. Il revient, bien sûr, à la Chambre d'évaluer

10 cela.

11 Mais je m'oppose fortement au versement au dossier du livre et des

12 articles.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. Une réponse très brève, s'il vous

14 plaît, Madame Chana.

15 Mme CHANA : [interprétation] Je souhaite simplement réitérer les arguments

16 que j'ai déjà avancés à ce sujet, préalablement, à savoir, lorsque le

17 conseil de la Défense parle d'une traduction sélective, c'est absolument

18 vrai, Monsieur le Président et nous, en tant que bureau du Procureur, nous

19 aurons pu demander une traduction de l'ensemble du livre de la part du

20 service de traduction et nous pourrons verser cela au dossier

21 ultérieurement. Ceci peut être une solution au problème. Nous avons fait un

22 tri et j'ai déjà expliqué que ceci a été fait à un stade assez avancé dans

23 le temps. Puis, je tenais compte du fait que la Chambre nous a donné des

24 instructions d'éviter d'encombrer la Chambre avec des documents qui ne sont

25 pas nécessaires.

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1 Le témoin est venu déposer ici. La Défense a pu le contre-interroger. Puis,

2 je souhaite, encore une fois, faire référence à vos instructions, Monsieur

3 le Président, s'agissant que la règle va en faveur de l'admissibilité et

4 les critères sont la valeur probante. Bien sûr, la Chambre décidera quel

5 est le poids à donner à ce document.

6 Je pense que le conseil a confondu deux concepts, encore une fois :

7 l'admissibilité et le poids à accorder au document. Dans ses arguments, il

8 dit que ces documents-là ne sont pas admissibles du tout. Mais au fond, il

9 conteste le poids donné au document.

10 Je souhaite simplement réitérer mes positions déjà exprimées et je pense

11 qu'il faudrait les verser au dossier.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Après avoir consulté mes collègues, je

15 souhaite répéter les instructions portant sur l'admission des éléments de

16 preuve donnés par cette Chambre de première instance, en vertu de l'Article

17 89 du Règlement de procédure et de preuve. Cette Chambre de première

18 instance souhaite rappeler aux parties qu'il faut faire une différence

19 entre l'admissibilité des documents et le poids des documents.

20 L'admission même d'un document, son versement au dossier ne signifie pas,

21 nécessairement, que les déclarations contenues dans ce document seront

22 considérées comme reflet exact des faits. La pratique devant ce Tribunal

23 va, par conséquent, dans le sens en faveur de l'admissibilité, en règle

24 générale.

25 En ce qui concerne les documents qui sont publiquement disponibles, en

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1 termes généraux, ces documents-là sont admissibles, s'ils sont pertinents

2 pour cette affaire et s'ils contiennent une valeur probante dans leur

3 contenu.

4 Bien sûr, le conseil de la Défense a soulevé certaines objections qui ont

5 été consignées au compte rendu d'audience et qui concerneront le poids à

6 accorder à ces éléments de preuve, admis à un stade ultérieur.

7 Cette Chambre de première instance a déjà déclaré que nous ne souhaitons

8 pas que tout un livre soit traduit en anglais et versé au dossier à ce

9 stade, si ceci n'est pas absolument nécessaire. Nous avons besoin seulement

10 des parties pertinentes de ce livre. Nous avons besoin seulement de leur

11 versement au dossier.

12 En même temps, la Défense a également la possibilité de contester la

13 traduction de ce livre ou, si nécessaire, ils peuvent également verser au

14 dossier certaines parties du livre dans le cadre de la présentation des

15 éléments de preuve de la Défense à un stade ultérieur.

16 Par conséquent, la Chambre de première instance prend la décision suivante

17 : ces documents vont être admis en tant que pièces à conviction de

18 l'Accusation. Voici notre décision.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Comme il plaira à la Cour.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, s'il vous plaît, je

22 souhaite soulever un certain nombre de points avant la pause, même si je

23 sais que nous sommes déjà à un moment avancé.

24 Mais on m'a dit que la proposition s'agissant de la semaine prochaine, il

25 est prévu de citer à la barre, les témoins Tirak, Okic et Mujezinovic. Or,

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1 nous ne sommes pas prêts pour Mujezinovic et nous demandons au Procureur de

2 s'arranger par rapport à cela. Nous ne nous sommes pas prêts pour plusieurs

3 raisons, mais je pense qu'il n'est pas nécessaire d'entrer dans ces détails

4 en ce moment. En termes généraux, je peux dire que nous sommes en train de

5 mener certaines enquêtes.

6 Je crains que la même chose vaut pour les témoins qui vont venir plus tard

7 et peut-être le Procureur pourrait prendre en considération la possibilité

8 de commencer à citer à la barre les témoins liés à Uzdol. Mais pour le

9 moment, nous ne sommes pas prêts pour traiter des témoins Mujezinovic,

10 Alispahic et Delalic car nous avons besoin de mener certaines enquêtes

11 supplémentaires. Je sais que ceci ne convient pas du tout au Procureur. Je

12 sais que ceci leur provoque un désagrément. Nous nous en excusons, mais

13 notre situation réelle est telle que je viens de décrire.

14 En ce qui concerne ces personnes, nous souhaitons soulever un autre point,

15 à savoir que par rapport à ces trois personnes, il doit y avoir des

16 document disponibles, en vertu de l'Article 68, contenu de ce qui est

17 publiquement connu par rapport à ces personnes et à leur statut actuel.

18 Nous demandons au Procureur de faire preuve de l'assiduité dans la

19 recherche des documents en vertu de l'Article 68 et de nous présenter ces

20 documents d'ici quelques jours.

21 Pour terminer - je m'excuse de prendre aussi longtemps - je souhaite

22 soulever un certain nombre d'autres points. Je pensais que nous allions

23 pouvoir le faire cet après-midi.

24 Nous souhaitons verser au dossier un document, à savoir MFI283 [comme

25 interprété], une page du journal que j'ai oublié de verser au dossier,

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1 puis, même si nous ne l'avons pas encore dit, il faut savoir que le témoin

2 Okic, qui vient la semaine prochaine, viendra peut-être avec une pièce à

3 conviction. Le Procureur souhaite clarifier, par le biais du témoin Okic et

4 lui demander de relater une déclaration qui aurait été faite par Halilovic

5 au moment où il a été interviewé par les enquêteurs de Trebevic.

6 Nous sommes contre l'admissibilité de cet entretien. Il n'est pas

7 correct de nous lancer cela à la dernière minute. S'agissant de la

8 déclaration d'Okic ou de Halilovic. Nous souhaitons annoncer le fait que

9 nous allons nous opposer au versement au dossier de ce document-là.

10 Finalement, la déposition de M. Karic est préoccupante, à notre avis.

11 Il faut soulever cette question et nous allons soulever cela, de nouveau.

12 M. Re l'a déjà souhaité et je pense qu'il faudra en traiter.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. M. Weiner, brièvement.

14 M. WEINER : [interprétation] Très brièvement. La semaine prochaine,

15 nous ne pouvons pas changer de programme ou faire venir un autre témoin au

16 lieu de M. Mujezinovic, vendredi. Cela est la première chose. Si nous

17 allons avoir seulement deux témoins, la semaine prochaine, je propose qu'on

18 ne siège pas mercredi et dans ce cas-la, nous pouvons voir le contenu de

19 cette requête. Nous allons voir le premier témoin mardi, seulement et si

20 nous n'allons pas faire venir M. Mujezinovic, il va falloir procéder à

21 certaines modifications de programme par le biais de l'unité chargée des

22 témoins et des victimes.

23 Mais nous considérons que ces témoins doivent déposer. Nous pouvons

24 éventuellement les déplacer pour la fin de la présentation des éléments de

25 preuve de l'Accusation, c'est-à-dire, en avril, mais il n'y a pas de raison

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1 pour renoncer à leur déposition.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.

3 Je pense que cette Chambre de première instance a pris sa décision

4 concernant des enquêtes supplémentaires concernant certains témoins. Je ne

5 vais entrer dans les détails de cette décision parce qu'elle a été rendue

6 ex parte et de manière confidentielle.

7 Cependant, nous considérons que la demande de la Défense concernant

8 le report de la déposition de Mujezinovic est raisonnable. Nous faisons

9 droit à la requête de la Défense.

10 En même temps, je crois que le bureau du Procureur a des obligations

11 en continu visant à divulguer tout document lié à l'Article 68, s'il y a de

12 tels documents.

13 M. WEINER : [interprétation] Oui, s'il y en a.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien sûr.

15 M. WEINER : [interprétation] Puis, nous allons continuer à ce faire.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Très bien. Mais je souhaitais vous

17 rappeler cette obligation.

18 En ce qui concerne le document versé au dossier par la Défense, je ne vois

19 pas d'objection de la part du bureau du Procureur. Il s'agit d'une question

20 de traduction.

21 Mme CHANA : [interprétation] Non, pas du tout. En ce qui concerne cela, je

22 souhaite dire également que l'ensemble du journal existe en "ringtail" et

23 nous avons besoin des deux dernières pages, également.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Très bien.

25 Mme CHANA : [interprétation] Encore une fois, pas pour être un fardeau pour

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1 la Cour.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je comprends cela. Le document est versé

3 au dossier.

4 Je pense que c'est tout ce que j'ai à dire, à ce stade. Je souhaite

5 remercier tout le monde, les interprètes, les sténotypistes, les

6 techniciens, vous avez tous travaillé un peu plus longtemps, ce matin, mais

7 au moins, nous n'aurons pas besoin de siéger cet après-midi. Je vous

8 souhaite à tous Joyeuses Pâques et l'audience est levée.

9 --- L'audience est levée à 14 heures 10 et reprendra le mercredi 30 mars

10 2005, à 14 heures 15.

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