Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 1

1 Le mardi 19 avril 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pourriez-vous appeler l'affaire, Monsieur

7 le Greffier.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Affaire numéro IT-1-48-T, le Procureur

9 contre Sefer Halilovic.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous êtes prêt à commencer ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

14 LE TÉMOIN: VAHID KARAVELIC [Reprise]

15 [Le témoin répond par l'interprète]

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

17 Monsieur Re.

18 Interrogatoire principal par M. Re : [Suite]

19 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Karavelic. Je voulais revenir à ce

20 que vous aviez dit hier avant que nous ne terminions. Vous avez fini en

21 nous présentant les éléments de preuve sur vos actions supposément

22 arbitraires, les actions menées par Celo, Ramiz Delalic supposément

23 arbitraires et je voulais simplement revenir à la dernière partie de votre

24 réponse. Vous avez dit que : "La mission, qui lui a été affectée, il a dit,

25 24 heures sur 24, il ne pourrait pas le faire, il devrait laisser l'endroit

Page 2

1 en question aux hommes et laisser les hommes à ce type de choses."

2 Maintenant, quand vous dites : "Il devait veiller à l'exercice de certaines

3 de ces fonctions," quels exercices vous referiez-vous ?

4 R. Pas d'activités, en particulier, les activités qu'il devait faire, mais

5 je ne sais pas ce que vous avez en tête précisément.

6 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire qu'il n'était pas avec les

7 soldats, à ce moment-là, et il était ailleurs pour mener ces activités ?

8 R. Probablement, c'était sans doute quelque chose de cet ordre ou qui s'en

9 rapprochait.

10 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin l'ordre --

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur Re.

12 M. RE : [interprétation] Je m'excuse, en B/C/S 01850108.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera MFI 377.

14 M. RE : [interprétation]

15 Q. Le document va apparaître à l'écran devant vous, Monsieur Karavelic.

16 Vous voyez le document ?

17 R. Oui.

18 Q. C'est un ordre daté du 11 mars 1993, adressé par Sefer Halilovic, en

19 donnant le transfert de 100 soldats de la 9e Brigade motorisée au

20 détachement à des fins particulières de M. Zulfikar Alispago. Quel était

21 l'objectif de cet ordre spécifique ?

22 R. Il m'est difficile de me prononcer sur ce document, et cela, pour

23 plusieurs raisons. Tout d'abord, j'étais commandant adjoint du 1er Corps, à

24 l'époque. Cela signifie que je n'ai pas forcément été entièrement informé

25 de la nature de ce document ou des intentions réelles qui sous tendaient ce

Page 3

1 document. Comme toutes intentions qui sous tendent ce document, sans doute,

2 le général Halilovic, qui était à l'époque chef d'état-major, a coordonné

3 l'action avec le commandant du Corps, cela pour re-subordonner le nombre de

4 soldats envoyé en détachement de Zulfikar Alispago, qui devait rendre des

5 comptes directement au commandement Suprême des forces armées de la Bosnie-

6 Herzégovine. L'objectif était, sans doute, d'augmenter les effectifs de

7 cette unité en utilisant un certain nombre de soldats pour que l'unité

8 puisse s'assumer de ces fonctions, donc cette unité était directement

9 responsable devant le commandement principal.

10 Q. A cette étape, vous avez dit hier que le 4e Corps -- le 1er Corps

11 comptait 75 000 soldats ?

12 R. Tout au long de 1990, c'était le corps le plus nombreux, et je crois

13 que le chiffre que vous avez donné est exact. C'était autour de 75 000.

14 Q. Est-ce que vous avez déjà vu un ordre émanant de la personne qui

15 occupait les responsabilités les plus élevées dans l'armée qui soit

16 l'intention d'une brigade particulière, un ordre visant à transférer un

17 petit nombre de soldat de cette unité à une autre ? Est-ce que vous avez vu

18 ce type d'ordre auparavant ?

19 R. Oui, de tels ordres ont existé. Néanmoins, si vous vous référez à la

20 procédure habituelle pour résoudre des problèmes de ce type et assumer ce

21 type de fonction ou effectuer ce genre de tâche, normalement, il aurait eu

22 un ordre émanant du commandant Suprême, et cet ordre révisé sélectionnait

23 un certain nombre de soldats qui auraient pu être transférés ou

24 résubordonnés à une autre unité. Des noms n'étaient jamais mentionnés, mais

25 l'unité aurait été mentionnée. C'était la manière la plus pratique de

Page 4

1 fonctionner. Néanmoins, au responsable, un officier ou responsable avait

2 toujours la responsabilité de résoudre le problème de cette manière

3 précisément, notamment, s'il avait été consulté auparavant, comme c'est le

4 cas ici, où il y a eu consultation entre le commandant du 1er Corps, Mustafa

5 Hajrulahovic, et le général Sefer Halilovic.

6 Q. Est-ce que vous pouvez penser à une raison pour laquelle Sefer

7 Halilovic aurait voulu que, sur les 75 000 soldats qui se trouvaient sous

8 votre commandement du 1er Corps, un groupe de 100 de la 9e Brigade motorisée

9 soit détaché vers une unité opérant à des fins particulières ?

10 R. Il m'est très difficile de me prononcer, je n'ai pas les informations

11 pertinentes. A l'époque, j'étais commandant second du 1er Corps. Comme je

12 l'ai dit, cela aurait été une chose normale à faire, mais c'était toujours

13 une possibilité -- cela n'aurait pas été la chose normale à faire, mais

14 cela pouvait demeurer une possibilité. C'était quelque chose qui aurait pu

15 être écartée. Quant aux raisons, les raisons étaient certainement présentes

16 dans la conversation, et les contactes entre le général Sefer Halilovic et

17 le commandant du 1er Corps. Ils ont dû probablement avoir leurs propres

18 raisons pour prendre cette décision.

19 Q. La Chambre a entendu des éléments de preuves sur le fait qu'il y avait

20 un front au tout de Sarajevo et toute une série de tranchées du côté de

21 l'ABiH à proximité du front. Comment les tranchées étaient-elles

22 construites ?

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je me demande si ce

24 document va être versé au dossier ?

25 M. RE : [interprétation] Oui, oui, je dépose une requête pour verser le

Page 5

1 document au dossier.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas d'objection.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Donc le document est versé au dossier, et

4 il est enregistré sous le numéro.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P377.

6 M. RE : [interprétation]

7 Q. La question était : de quelle manière les tranchées ont-elles été

8 construites ? Quel a été le processus de construction ?

9 R. Vous voulez dire, de manière générale, par rapport aux lignes de

10 défense autour de Sarajevo ?

11 Q. Correct.

12 R. Tout d'abord, l'ensemble de la ville de Sarajevo était entouré, et je

13 parle ici du périmètre intérieur de notre défense. Je parle du périmètre

14 intérieur de la défense de la ville. C'était là que se trouvait la première

15 ligne de défense, c'était entre -- elle parcourait 60 et 70 kilomètres. Il

16 y avait tout un réseau de tranchées le long de ces lignes de défense dont

17 la profondeur était en moyenne de deux mètres pour pouvoir protéger les

18 hommes. Cette première ligne de tranchées avait énormément d'entrées et de

19 sorties qui menaient à beaucoup d'installations souterraines, à la fois des

20 endroits de stockages pour les hommes et les munitions ainsi que pour la

21 nourriture. Outre cette première ligne de tranchées, en fonction du terrain

22 et de la nature du terrain local, il y avait également une deuxième ligne

23 de défense. Néanmoins, cette deuxième ligne de défense n'était pas une

24 ligne continue. Cela ne constituait pas un réseau, c'est-à-dire qu'il n'y

25 avait pas forcément de connexions entre les tranchées tout autour de

Page 6

1 Sarajevo. Je parle de celles qui se trouvaient derrière la première ligne

2 de défense. Il y avait des tranchées de communication entre la seconde et

3 la première ligne de défense. Il y avait un certain nombre d'éléments

4 caractéristiques de ces tranchées qui étaient importants pour la défense de

5 la ville, pour défendre la ville des agressions des attaquants. Autour de

6 ces lignes de tranchées, une troisième ligne de défense a été construite et

7 ne constituait pas un réseau non plus. Pas dans son intégralité, mais elle

8 était connectée, à la fois, à la seconde et à la première ligne par des

9 tranchées de communication. Là encore, il y avait des entrepôts souterrains

10 utilisés par les unités de réserve pour stocker les munitions, les

11 munitions de réserve et les aliments pour les unités de réserve et pour

12 pouvoir fournir un abri en cas de tirs ennemis. Ces tranchées et les

13 tranchées de communication étaient creusées le long de la première ligne de

14 défense à 90 % ou 100 % par les soldats. Au delà de la première ligne, les

15 unités qu'on appelait unités de travail très souvent étaient utilisées pour

16 creuser les tranchées.

17 Q. Est-ce que les unités de travail étaient des unités de civils ?

18 R. C'était des unités de travail et au nom de la loi de sécurité

19 intérieure, la loi de défense, ces unités pouvaient être mobilisées de

20 manière régulière et utilisées pendant un certain temps pour des fins de

21 défense. Ces personnes étaient certainement des civils.

22 Q. Quel était le processus légal qui pouvait permettre de mobiliser des

23 civils pour aider à creuser les tranchées derrière les lignes de front ?

24 R. Je peux peut-être apporter un éclaircissement très brièvement sur la

25 manière dont les choses étaient organisées. Je vais vous en donner un

Page 7

1 exemple. Si, par exemple, une brigade appartenant à mon corps voulait avoir

2 une unité de travail solide de 30 personnes pour effectuer certaines tâches

3 pour sa brigade, son commandement utilisait son propre officier chargé de

4 la mobilisation. Cet officier devait transmettre la requête, la requête

5 émanant du commandement du corps qui précisait combien d'hommes étaient

6 nécessaires, pendant combien de temps, quelle était la nature du travail

7 que l'unité devait effectuer. Une fois que le commandant du corps recevait

8 cette requête ou plutôt ce document pour le personnel et la mobilisation

9 qui était une entité au sein du commandement du corps, alors à ce moment-là

10 le document était traité et, au nom du commandant du corps, ce document

11 serait ensuite transmis au secrétariat de la Défense nationale. Le bureau

12 local pour le terrain, maintenant, on parle de la ville de Sarajevo,

13 c'était une antenne du ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine pour

14 dire les choses en termes simples.

15 Une fois que la requête était reçue et une fois que les différents

16 postes et ordres étaient examinés, ensuite la mobilisation avait lieu et on

17 préparait l'unité de travail à la tâche qu'elle devait accomplir. Que ce

18 soit une brigade qui avait soumis la demande au départ, ou le commandement

19 du corps lui-même, cela dépendait en fait et c'était précisé dans le

20 document lui-même. De la même manière l'unité de toute façon serait

21 réaffectée de là où elle venait.

22 Q. Comment est-ce que les civils dans cette unité de travail étaient-ils

23 protégés du danger lorsqu'ils participaient à ces travaux ?

24 R. Il y avait toujours un certain nombre d'officiers avec l'unité de

25 travail. Ils étaient responsables de l'unité de travail. L'officier était

Page 8

1 aidé à partir de l'unité dont émanait l'ordre, il fallait que ce soit des

2 officiers en charge et, à n'importe quel moment, ils pouvaient être en

3 contact avec le commandant de l'unité, je veux dire le commandant de

4 l'unité qui avait demandé l'unité de travail de faire ces travaux. Il

5 devait connaître la situation d'ensemble et la manière dont la situation

6 évoluait. C'est comme cela que le travail était rythmé. Si la situation

7 militaire se détériorait, bien souvent, les tâches effectuées par l'unité

8 de travail cessaient immédiatement. C'était quelque chose, bien entendu,

9 qui faisait l'objet d'un contrôle et d'une surveillance constante.

10 Néanmoins, si le travail était effectué loin derrière les lignes, alors,

11 dans le cadre des responsabilités de la brigade, à ce moment-là, ils

12 étaient protégés au même titre que les autres civils de la ville de

13 Sarajevo.

14 Q. Décrivez la manière légale ou officielle dont les civils étaient

15 mobilisés pour participer à une unité de travail. Quels étaient les moyens

16 non officiels qui permettaient de mobiliser les civils pour creuser les

17 tranchées employées par les brigades dans le 1er Corps.

18 R. Les moyens non officiels, ce serait tout ce qui n'est pas compris dans

19 la définition que je viens de vous donner.

20 Q. Est-ce que vous avez eu conscience, à un moment ou à autre, de

21 l'utilisation de moyens non officiels pour mobiliser les civils afin de

22 creuser des tranchées en 1993 ?

23 R. Tout dépend de ce que vous entendez par : "Avez-vous pris conscience à

24 un moment donné ?" Je pourrais répondre par l'affirmative ou la négative.

25 Il y a eu, en fait, très peu de cas où j'ai été officiellement informé, et

Page 9

1 où l'on m'a présenté les arguments appropriés et les éléments de preuve.

2 L'information circulait néanmoins, elle nous parvenait, le service de

3 Sécurité a obtenu des informations sur beaucoup d'incidents de ce type; si

4 c'est à cela que vous faites référence, oui, j'ai eu conscience de cela.

5 Q. C'était effectivement, précisément ce à quoi je me réfère. Je voudrais

6 que vous vous concentriez un moment sur la brigade de Ramiz Delalic. J'y

7 reviendrai.

8 R. Pour ce qui est du commandant en second de la 9e Brigade motorisée,

9 c'est quelque chose que je dois même m'avouer à moi-même, je n'ai jamais eu

10 l'occasion d'apprendre, notamment en 1992, mais même jusqu'à l'été 1993,

11 c'est-à-dire, même jusqu'à l'opération de Trebevic qu'il était engagé dans

12 ce type d'activités. Néanmoins, vous m'avez fait examiner un document

13 aujourd'hui et un document comme celui-là, je ne l'ai jamais vu avant et je

14 n'ai jamais été informé même de l'existence d'un document de ce type. L'un

15 des assistants à la sécurité dans l'un des bataillons de la 9e Brigade

16 motorisée a soumis un rapport à son supérieur sur des affaires liées à la

17 sécurité qui s'était déroulées au sein de leur brigade. Il a dit que la

18 nuit précédente, 20 personnes environ, je ne me souviens plus exactement du

19 chiffre, avaient été emmenées par Ramiz Delalic, supposément pour effectuer

20 des tâches cette nuit-là, c'est-à-dire creuser des tranchées pour la 9e

21 Brigade motorisée. Ce n'est que par la suite que j'ai regardé certains

22 documents et des rapports émanant du service de Sécurité que je n'avais pas

23 vu à l'époque, je dois l'avouer. J'ai constaté, à ce moment-là, qu'il y

24 avait un nombre de sources qui parlaient d'activités similaires, de manière

25 similaire.

Page 10

1 Q. De quoi parlaient-elles, ces autres sources ?

2 R. Vous voulez dire le premier document dont j'ai parlé ?

3 Q. Oui.

4 R. Si je m'en souviens bien, ce document faisait état du fait que Ramiz

5 Delalic avait emmené à peu près 20 personnes cette nuit-là, je ne suis pas

6 sûr que c'était des civils, pour creuser des tranchées et qu'ils étaient

7 repartis le lendemain, et cetera, et cetera. L'adjoint à la sécurité

8 disait, effectivement, que ce n'était pas correct, et cetera.

9 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin, s'il vous

10 plaît, la pièce P211 ?

11 Q. Vous avez fait référence à des moyens officiels et non officiels de

12 mobiliser des civils pour creuser des tranchées, ou les mobiliser au sein

13 d'unités de travail. Ce document est-il un exemple de moyen officiel ou non

14 officiel de mobilisation des civils ?

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

16 ne réponde à cette question, j'ai une autre question à soulever. Le témoin

17 a dit, dans une réponse que l'interprète a traduite en disant : "Qu'on lui

18 avait montré un document à observer aujourd'hui." Il n'est plus à l'écran

19 ici, mais on peut revenir pour voir parce que je voulais simplement

20 éclaircir un point. Je voulais savoir si ce document dont on parle, c'est

21 l'un de ceux qui se trouvent sur la liste. Je me demande si l'Accusation

22 pourrait éclaircir ce point pour nous. C'est à la ligne 22, page 8, ligne

23 22. Cela ne veut peut-être rien dire, mais je veux éclaircir ce point.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Monsieur Re.

25 M. RE : [interprétation]

Page 11

1 Q. Monsieur Karavelic, vous avez dit que vous avez vu un document. La

2 traduction a dit aujourd'hui. Avez-vous reçu des documents émanant de

3 quiconque aujourd'hui ?

4 R. J'ai dit au cours des derniers jours, pas aujourd'hui.

5 Q. A quel document en particulier vous référez-vous ?

6 R. Celui que je suis en train de voir à l'écran.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci. Cela répond à la question. Merci.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] D'ailleurs, ce document n'est pas versé

9 au dossier.

10 M. RE : [interprétation] Ce n'est pas le cas ?

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document a été versé au dossier le 4

12 mars 2005, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

14 M. RE : [interprétation]

15 Q. Pour revenir au document, Monsieur Karavelic, je pense que ma question

16 était, est-ce un exemple de moyen officiel ou non officiel de mobilisation

17 des civils ?

18 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, avant que cela ne

19 trouve sa réponse, j'aimerais que le témoin puisse avoir l'occasion de dire

20 si c'est l'un des documents qu'il a vu auparavant. Bien entendu, cela

21 pourra permettre beaucoup d'autres questions, mais lorsque le document est

22 montré, je dis qu'il faut absolument éclaircir le fait que le témoin ait eu

23 l'occasion de voir ce document auparavant ou pas. Donc, objection.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Avant, vous voulez dire en 1993 ?

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Bon --

Page 12

1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pas récemment, pas avant.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas à La Haye, en tout cas. Bien entendu,

3 rien ne s'oppose à ce que l'Accusation montre des documents au témoin s'ils

4 le veulent. Je n'objecte pas sur ce point, mais je pensais simplement qu'il

5 fallait préciser si c'est ce document qu'il a regardé et à quel moment, au

6 moment de ses recherches ultérieures ? Donc, il faut éclaircir ce point.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Cela m'apparaît raisonnable.

8 M. RE : [interprétation] Oui. Mais je crois qu'il a simplement dit que le

9 document était le document qu'il avait vu pour la première fois ici. Je

10 pense qu'il a déjà répondu à la question.

11 Q. Je reviens donc à ma question. Vous nous avez dit que vous avez vu ce

12 document pour la première fois, il y a quelques jours.

13 R. C'est ce que j'ai dit.

14 Q. C'est un exemple de moyen officiel ou non officiel de mobilisation des

15 civils pour assister les militaires ou quelque chose d'autre ?

16 R. Le rapport d'un assistant à la sécurité, quelque chose émanant d'un

17 bataillon qui a été envoyé au service de Sécurité dans sa brigade, donc, à

18 son supérieur. C'est un document officiel. Néanmoins, il n'est rien précisé

19 ici. Sur la base de ce document, je ne peux pas dire si c'était une manière

20 légale ou illégale d'utiliser l'unité de travail. Sur la base de ce

21 document, je ne peux rien dire de particulier, pour cette raison

22 essentielle. Il est possible, même probable, que le commandement de la 9e

23 Brigade avait envoyé une requête qu'il a envoyée au commandement du corps

24 et que, peut-être, cette unité a été envoyée pour creuser des tranchées sur

25 la base de cette requête. Il y a un grand nombre de personnes ici. J'ai dit

Page 13

1 20, mais ici il est dit 40. C'est peut-être moi qui me suis trompé. Je ne

2 me souviens pas bien. C'est un nombre assez élevé, 40, c'est un nombre

3 vraiment élevé. Néanmoins, cet adjoint à la sécurité du bataillon est sans

4 doute dans une situation difficile et à un niveau hiérarchique très peu

5 élevé. Donc, peut-être n'en était-il pas informé. Peut-être n'était-il pas

6 au courant mais, pour respecter les procédures particulières, il envoie ce

7 rapport au service de Sécurité du commandement de la 9e Brigade motorisée.

8 Néanmoins, ce que vous dites pourrait être possible, je ne peux pas dire si

9 c'était légal ou illégal.

10 Je devrais creuser plus avant dans les archives de l'armée de la fédération

11 pour voir un petit peu vers ces dates, et essayer de voir si,

12 effectivement, c'était une requête émanant de la 9e Brigade motorisée, ou

13 du 1er Corps, pour cette unité de travail.

14 Encore une chose, désolé. Il est dit ici que toutes ces personnes sont

15 enregistrées auprès de l'officier de permanence de la 9e Brigade motorisée,

16 ce qui indique que c'est probablement légal, mais je ne suis pas en train

17 de dire que c'est cela précisément.

18 Q. Aviez-vous des informations concernant Celo, à savoir les activités

19 financières de Ramiz Delalic lorsqu'il était commandant en second de la 9e

20 Brigade motorisée ?

21 R. A Sarajevo, vous savez, surtout en 1993, c'est très difficile pour moi

22 de trouver exactement les termes qui puissent clarifier la situation.

23 Simplement, on pourrait dire que la situation était extrêmement confuse,

24 pas seulement cette aspect-là, mais tous les aspects. Il y avait énormément

25 d'information qui nous provenait de différentes sources, pas seulement

Page 14

1 concernant Ramiz Delalic, mais également concernant d'autres commandants de

2 brigade selon lesquels ils se fournissaient qu'ils essayaient d'obtenir de

3 l'alimentation, de la nourriture, des munitions, des armes et d'autres

4 choses de différentes façon. Pour Ramiz Delalic, peut-être c'était un peu

5 plus présent, on le mettrait en tête de la liste si on peut dire par

6 rapport à d'autres. Mais beaucoup d'autres personnes essayaient de se

7 procurer de ces choses-là de la même façon, elles ont essayé de le faire.

8 Je vais vous donner un exemple.

9 Je pense que c'est quelque chose qui s'est passée au cours du printemps ou

10 de l'été 1993. Je ne sais pas si Ramiz Delalic avait un accord avec le chef

11 de la municipalité du centre, ou s'il s'agissait là de quelque chose qu'il

12 a faite là tout seul, ou si c'est le chef de la municipalité du centre qui

13 l'a faite par rapport à lui. Ce ne sont qu'eux, qui pourraient le dire,

14 mais il lui a donné 20 000 marks allemands, simplement parce que le Huso

15 Kamber, en tant que dirigeant de la municipalité, considérait que la

16 brigade était d'une certaine manière sa propre brigade et non pas la

17 brigade du

18 1er Corps, c'est-à-dire, sur un pied d'égalité avec les autres brigades.

19 Lorsque j'ai entendu ces informations sur la radio, je suis parti de la

20 ligne de la défense, et je me suis rendu auprès du chef de la municipalité

21 dans son bureau et je l'ai traité assez mal. Je l'ai fait moi-même. Cette

22 querelle, une dispute que nous avons eue dans son bureau, ces informations

23 sont parvenues à Alija Izetbegovic, le président de la présidence de la

24 République de Bosnie-Herzégovine, et le jour suivant, il a formé un comité

25 qui était dirigé par le général Stjepan Siber et, sur les deux jours qui

Page 15

1 ont suivi, lui et son équipe ont eu pour tâche de mettre en place une

2 réconciliation entre nous.

3 J'étais très en colère précisément parce que j'essayais d'introduire un

4 système, et si le chef de la municipalité voulait donner 20 000 marks

5 allemands à la 9e Brigade motorisé, il n'aurait pas dû le faire directement

6 vis-à-vis de Ramiz Delalic. Il ne pouvait pas donner cet argent qu'au

7 commandant de la Brigade, et non pas à Ramiz Delalic. La procédure qu'il

8 fallait suivre, il aurait fallu que quelqu'un, qui aurait voulu donner

9 quelque chose à l'extérieur du

10 1er Corps, il fallait donner cet argent au secteur logistique du

11 1er Corps ou au secteur financier du 1er Corps. Ensuite, le 1er Corps, qui

12 aurait redistribué ces fonds selon une procédure donnée, la distribution

13 aurait été faite vis-à-vis de ces unités subordonnées en vertu de cette

14 procédure.

15 Q. Pourquoi Celo [comme interprété] a donné 20 000 marks -- à fait ce don

16 de 20 000 marks ?

17 R. C'est très difficile pour moi de vous donner une réponse exacte, je ne

18 peux que spéculer. Mais cela pourrait donner lieu à des problèmes

19 concernant une conduite défectueuse irrégulière ou non raisonnable des

20 autorités civiles vis-à-vis de l'armée.

21 Q. Arrêtez-vous.

22 R. C'est une chose.

23 Q. Tout ce que je veux savoir c'est quelles sont les informations que vous

24 avez concernant le fait qu'il ait donné cet argent. N'essayez pas de

25 spéculer. Je veux simplement vous poser un certain nombre de questions et

Page 16

1 connaître vos réponses directes vis-à-vis de cette question.

2 R. A l'époque, en 1993, lorsque beaucoup de gens réfléchissaient déjà à

3 comment sortir de Sarajevo parce que la survie de Sarajevo était en

4 question, beaucoup d'entre eux souhaitaient -- voulaient faire en sorte que

5 l'une des -- ou plusieurs brigades puissent être rattachées à eux pour

6 pouvoir les protéger et avoir l'autorité qui en découlait. C'est peut-être

7 pour cette raison que Huso Kamber s'est rapproché de Ramiz, et

8 probablement, je pense, peut-être l'acheter en quelque sorte avec ces 20

9 000 marks de façon à recevoir une certaine protection de lui, quelque chose

10 comme cela, mais, en tout cas, à non avis, ce n'est pas nécessairement la

11 bonne réponse même si elle provient de moi. C'est simplement une hypothèse

12 qu'on peut émettre là-dessus.

13 Q. Est-ce que Celo a gardé cet argent ?

14 R. L'argent est resté dans la brigade. J'ai demandé que cet argent soit

15 enregistré auprès de la section financière du commandant de cette brigade.

16 Q. Est-ce que vous savez ce que Celo a fait de cet argent ?

17 R. Il faudrait vérifier les documents. Je ne sais pas s'il a agi selon mes

18 ordres, c'est en tout cas ce qui aurait du arriver, à savoir que cet argent

19 a été utilisé par le commandement de la brigade. Document, il est difficile

20 pour moi de dire exactement à quoi était utilisé cet argent, mais, en tout

21 cas, on doit pouvoir trouver des documents.

22 Q. A part le fait d'avoir pris 20 000 deutschemarks du chef de la

23 municipalité du centre, quels étaient les autres moyens qu'utilisait Celo

24 pour financer sa brigade ?

25 R. A l'époque, une fois de plus d'après certaines informations, y compris

Page 17

1 un coup de fil que j'ai reçu du président Izetbegovic lui-même, je ne sais

2 pas exactement à quelle date, mais c'était au cours du printemps 1993,

3 demandant que moi, en tant que commandant du Corps, vérifie ce qui se

4 passait si Ramiz Delalic et ces hommes, pendant la nuit, dans une certaine

5 partie de la ville, étaient en train d'obliger les gens à donner de

6 l'argent. Cette façon de faire, ce concept du travail à Sarajevo et dans

7 d'autres endroits, ce qu'on appelle le racket, et probablement quelqu'un

8 avait ces informations, a pu se plaindre auprès du président. Une fois que

9 je suis arrivé ici à La Haye, le service de Sécurité m'a montré des

10 documents du service de Sécurité, qui alléguaient qu'il y avait des

11 activités possibles de ce type de Ramiz Delalic et un certain nombre de ces

12 hommes; cependant, à cette époque-là aucun cas de ce type n'a pu trouvé des

13 éléments de preuves à l'époque.

14 Q. Je ne sais pas ce que vous voulez dire par "être prouvé", vous venez de

15 nous dire que vous avez reçu un coup de fil du président Izetbegovic qui

16 vous a parlé de cette affaire. Qu'est-ce qu'il vous a dit concernant les

17 actes de Celo ? Pouvez-vous nous donner des détails concernant ce racket ?

18 R. C'est exactement ce que je vous ai déjà dit. C'est exactement ce dont

19 nous avons parlé, le président Izetbegovic n'a pas pu me dire quelque chose

20 de spécifique, telle ou telle adresse, tel ou tel chiffre, telle ou telle

21 personne; cependant, j'ai demandé à mes propres organes de Sécurité, que

22 s'ils étaient en possession de faits ou de détails concernant cette

23 affaire, je leur ai dit qu'il fallait porter plainte. Aucune plainte n'a

24 été déposée et, par conséquent, il n'y a pas eu de procédure légale et rien

25 n'a été prouvé. Je sais qu'après l'opération, Trebevic et l'arrestation de

Page 18

1 Ramiz Delalic, et pendant son procès après l'action de Trebevic, l'action

2 de Trebevic, je ne sais pas si quelque chose a été révélée pendant le

3 procès ou si quelque chose est mentionnée dans le jugement, la décision de

4 la cour cantonale de Sarajevo concernant ces actions mais je n'ai pas pu

5 suivre cette procédure ou lire le jugement.

6 Q. Je veux simplement clarifier ce que vous avez fait en réaction à ce que

7 vous a dit le président Izetbegovic, sa conversation avec vous, d'après

8 votre dernière réponse, s'il n'est pas tout a fait clair, quel a été votre

9 réaction lorsque le président Izetbegovic vous a dit que l'un d'entre, l'un

10 de vos commandants qui vous étaient subordonnés effectuait peut-être un

11 racket ?

12 R. L'un des commandants en second, il n'était pas commandant de brigade.

13 J'ai répondu raisonnablement, en tant que subordonné du commandement

14 Suprême : "Monsieur le Président" - j'ai dit - "je prendrai toute mesure

15 nécessaire afin d'éclaircir cette affaire et vous serez informé." J'ai

16 essayé de le faire. Le service de Sécurité a pris des mesures nombreuses

17 concernant cette affaire et, la plupart du temps, il s'avérait qu'on ne

18 pouvait compter que sur des hypothèses. Il n'y avait pas d'argument

19 spécifiques, ni de dépositions faites pas les personnes en question car les

20 personnes en question, bien qu'elles aient souffertes de ces actes, n'ont

21 pas pu faire des dépositions en ce qui les concerne. Probablement, étant

22 donné des considérations de leur propre sécurité, la situation à Sarajevo

23 en 1993 était indescriptible, une situation très confuse, difficile, plein

24 d'incertitude complexités, et cela concernait toute la ville de Sarajevo,

25 pas simplement une personne quelque soit sa position ou son groupe

Page 19

1 d'appartenance.

2 Q. Pour essayer de clarifier quelque chose que vous avez dit dans votre

3 dernière réponse, est-ce que vous êtes en train de dire que vous avez

4 demandé votre service de Sécurité de mener une enquête sur la plainte qui

5 avait été faite par le président Izetbegovic ?

6 R. Oui.

7 Q. Est-ce que vous avez ensuite fait rapport, pardon -- le service de

8 Sécurité, est-ce qu'il vous a rendu compte sur cette question, cette

9 affaire ?

10 R. Vous m'avez montré un certain nombre de documents parmi d'autres

11 provenant du service de Sécurité. Dans ces documents provenant de mon chef

12 de sécurité, on pouvait voir ce qu'il a mis dans le rapport qu'il a renvoyé

13 à son commandant hiérarchique, et qu'il a envoyé à Jusuf, en tant que

14 numéro un du service de Sécurité de l'armée de la République de Bosnie-

15 Herzégovine. Pour la première fois, j'ai appris un certain nombre de faits

16 qui y sont décrits, je les ai donc appris ici quand je me suis rendu --

17 quand j'ai lu ces documents. Probablement il y a eu une occasion à laquelle

18 j'ai effectivement informé le président Izetbegovic, mais je me souviens

19 pas quand parce qu'on recevait de nombreuses demandes de ce type et j'avais

20 des problèmes à établir le mouvement de certains mortiers autour de

21 Sarajevo, je ne pouvais rien établir pendant toute une année, j'ai épuisé

22 mes hommes pour essayer de suivre, voir où se trouvaient ces mortiers

23 portatifs.

24 Q. Monsieur Karavelic, je vais vous demander d'accélérer un peu les

25 choses, je vais vous demander de me donner des réponses extrêmement brèves.

Page 20

1 Ma question c'était, est-ce qu'ils vous ont rendu compte ? Vous voyez ce

2 que je veux dire ? Essayez de donner des réponses plus courtes. Vous venez

3 de parler d'un document.

4 Est-ce qu'on peut montrer au témoin la pièce P210 ?

5 C'est le document qui se trouve maintenant devant vous, Monsieur

6 Karavelic.

7 R. Oui.

8 Q. Bien. Il s'agit du document qui s'appelle "note officielle" datée du 1er

9 juillet 1993, s'agit-il de l'un des documents que vous avez vu pour la

10 première fois ici à La Haye ?

11 R. Oui.

12 Q. Les informations qu'il comprend dans le paragraphe qui commence le 29

13 juin 1993, c'est à peu près le 4e paragraphe. Est-ce que celui-ci est

14 cohérent avec les informations que le président Izetbegovic vous a données

15 concernant ces activités du racket.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Je voudrais intervenir, le témoin doit

17 répondre tel qu'il entend, mais je ne suis pas sûr qu'il ait donné les

18 éléments qui montrent qu'Izetbegovic lui a donné à lui M. Karavelic, les

19 informations pour autant que j'ai compris, c'est

20 M. Izetbegovic qui lui a demandé de mener une enquête, peut-être il y a

21 d'autres choses, mais c'est au témoin de le dire. Mais à ce stade-ci, je

22 pense que la proposition de M. Re n'est pas tout à fait prouvée.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Re, s'il vous plaît.

24 M. RE : [interprétation] Les éléments de preuve, page 15, le président

25 Izetbegovic l'a appelé, et lui a demandé de vérifier ce qui se passait, si,

Page 21

1 oui ou non, Ramiz Delalic pendant la nuit, avec des hommes à lui, dans

2 certaines parties de la ville étaient en train de forcer les hommes à

3 donner de l'argent de façon volontaire, bénévole, et que ce concept de

4 travail à Sarajevo comme ailleurs porte le racket probablement parce que

5 quelqu'un avait ces informations, avait pu se plaindre auprès du président.

6 Ma question, est-ce que c'est cohérent avec ce que le président vous a

7 dit ?

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je pense que c'est maintenant clair.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Dit de cette façon là, je n'ai pas

10 d'objection.

11 M. RE : [interprétation]

12 Q. Donc vous comprenez ma question que je vous ai posée il y a déjà

13 quelques instants ?

14 R. Je dois admettre que je ne suis pas tout à fait certain maintenant.

15 Pouvez-vous répéter la question ?

16 Q. Vous avez dit que tout à l'heure, tout à l'heure que le président

17 Izetbegovic vous avez demandé si oui ou non il était vrai que Ramiz Delalic

18 et ses hommes pendant la nuit étaient en train de forcer les gens à faire

19 des dons volontaires, ce qu'on appelle du racket. Lorsqu'on regarde ce

20 document au paragraphe où il est dit que Ramiz Delalic est en train de

21 faire ces activités dans un restaurant. Est-ce que ceci est cohérent avec

22 ce que vous a dit le président Izetbegovic, lors de la conversation ?

23 R. Ce document provenant du service de la Sécurité parle de nombreux faits

24 et beaucoup d'éléments. Cependant, le président Izetbegovic parlait en

25 général, il n'a pas été spécifique pendant la conversation, qu'il s'agisse

Page 22

1 des noms de personnes, de rues, de numéros de rue. Mais, il est bien

2 possible que la conversation du président Izetbegovic, qu'il a eu avec moi,

3 corresponde avec ce document. C'est possible. Je ne peux pas vous donner la

4 date exacte de cette conversation avec le président Izetbegovic. Je ne sais

5 pas si c'était avant ou après.

6 Q. Parcourons ce document, à peu près en bas de la page --

7 R. Excusez-moi, puis-je dire quelque chose ?

8 Q. Oui.

9 R. Puisqu'il s'agit-là d'un document daté du 1er juillet, j'étais encore

10 commandant en second du 1er Corps à cette époque-là, ce qui veut dire que

11 lorsque le président Izetbegovic m'a appelé, à cette époque-là, il ne

12 m'aurait pas appelé. Il aurait appelé le commandant du corps. Il ne

13 m'appelait que très peu fréquemment puisque j'étais commandant en second.

14 Il est, par conséquent, possible que cette conversation ait eu lieu après

15 que j'ai été nommé commandant du corps, ce qui voudrait dire que cette

16 conversation aurait eu lieu, au plus tôt, au milieu du mois d'août 1993.

17 Q. Il vous a appelé à titre de commandant, et non pas à titre de

18 commandant en second, n'est-ce pas ?

19 R. Je pense que c'est ainsi que les choses se sont déroulées, en effet.

20 Q. Parcourons ce document. Il y a une phrase qui dit : "Selon la source,

21 une partie de la brigade manque de respect vis-à-vis du commandant de la 9e

22 Brigade motorisée parce qu'ils sont en faveur de Ramiz, Celo, et ses hommes

23 en ont peur." Je voudrais simplement vous poser la question suivante : est-

24 ce que ceci est cohérent ou n'est pas cohérent, ou quelque chose d'autre

25 avec les informations dont vous disposiez, vous, concernant la relation

Page 23

1 entre Celo, Imsirevic et les hommes de la 9e Brigade motorisée ?

2 R. De quelle partie du document parlez-vous ?

3 Q. Le paragraphe qui commence par : "La source prétend que la plupart des

4 gens autour de Ramiz Delalic proviennent de Sandzak." A peu près au milieu

5 de la page.

6 R. Oui, je le vois maintenant.

7 Q. Pouvez-vous lire ce paragraphe et la ligne suivante : "Selon la source,

8 la partie négative de la brigade" ? Je voudrais que vous lisiez cette

9 ligne-là, qui commence par : "Selon la source, la partie négative de la

10 brigade."

11 R. Mon service de Sécurité parle de sa propre source, et c'est une source

12 confidentielle. On ne sait pas de quelle type de source il s'agit, ni de

13 laquelle. Lorsqu'il parle de ces éléments --

14 Q. Je ne vous pose pas de questions concernant cela. Je vous pose une

15 question concernant la ligne suivante, et pas le fait qu'une partie de la

16 brigade n'a pas de respect pour le commandant Imsirevic, car ils sont en

17 faveur de Celo. Ce que je vous demande, c'est de ne pas vous occuper de la

18 source, mais simplement s'il y a cohérence.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Je fais une objection à cette question. Il

20 ne faut pas devant dire au témoin de ne pas tenir compte de la source. On

21 demande au témoin si ce document est cohérent avec quelque chose qu'on lui

22 a dit. On lui a dit. A mon avis, il doit pouvoir commenter sur la source

23 également.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien sûr, car nous avons entendu un

25 certain nombre de descriptions concernant la date de ce document. Il peut y

Page 24

1 avoir un certain nombre de doutes concernant la source.

2 M. RE : [interprétation] Je crois qu'il y a un malentendu. La source veut

3 dire l'informateur, la personne qui a donné l'information à la sécurité.

4 Cela n'est pas pertinent pour cette question. M. Karavelic ne connaît pas

5 la source. C'est un document de sécurité. Ce que je veux savoir, c'est si

6 le contenu, l'information, est précise. Il ne doit pas commenter sur la

7 source.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Venons-en à la question

9 essentielle. Simplement pour vérifier l'information provenant de ce

10 document, d'après sa propre expérience, si oui ou non, il a vu ou entendu

11 quelque chose qui a été décrit dans ce document.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. L'information qui fait l'objet de ma demande, c'est la partie

14 concernant les éléments négatifs de la brigade, qui ne montrent pas de

15 respect au commandant Imsirevic, car ils sont en faveur de Ramiz, Celo. Je

16 souhaite entendre votre commentaire sur la question de savoir si ce

17 commentaire est exact, si cette information est exacte, d'après les

18 informations dont vous disposiez, à l'époque, en particulier.

19 R. Je peux vous répondre en une phrase. Je suppose, compte tenu de toutes

20 les informations dont je dispose, et compte tenu étant donné de mes

21 expériences de l'époque, je suppose que ceci est en partie vrai; cependant,

22 pour la question de savoir quel est le degré de cette véracité, il m'est

23 difficile de le dire. Il est certain que la plus grande partie des membres

24 de la brigade respectait le commandant de la brigade; cependant, je ne peux

25 pas exclure, dans une certaine mesure, que ce fait était vrai également, à

Page 25

1 savoir qu'un certain nombre de soldats étaient plus en faveur de Ramiz

2 Delalic, qui était l'adjoint du commandant de la brigade, et qu'ils le

3 préféraient au commandant lui-même.

4 Q. Nous allons examiner le paragraphe suivant, maintenant. Le soir, ceux

5 que l'on emmène creuser les tranchées sont placés dans la prison à la cave

6 de la crèche, mais ils ne font pas l'objet d'autres types de répression, et

7 les prisonniers mangent la même chose que les soldats. Les gens restent à

8 l'endroit où ils creusent les tranchées pendant bien moins longtemps que

9 ceux qui sont avec Caco. Dans le dernier groupe et je cite : "Hommes qui

10 creusent," il y avait un couple de jeunes hommes qui avaient leurs papiers

11 militaires réguliers. Par conséquent, le fait qu'ils ont dû creuser les

12 tranchées de manière forcée peut être considéré comme, je cite : "Un

13 enlèvement" d'un soldat. Même question. D'après vous, d'après vos propres

14 informations, que pouvez-vous dire par rapport à l'exactitude de la manière

15 dont les choses sont représentées ici ?

16 R. C'est ce qu'il dit dans ce document. Contrairement à ma réponse

17 précédente, par rapport à cela, je ne peux vous dire absolument rien.

18 Contrairement à ce qui concerne la 10e Brigade de Montagne et son

19 commandant, Caco.

20 Q. Quelles étaient vos informations concernant la 9e Brigade motorisée, au

21 printemps, été 1993, et à la manière dont elle s'approvisionnait en vivres

22 et en munitions ?

23 R. Le 9e Brigade motorisée, comme toutes les autres brigades, recevait

24 tout ce dont elle avait besoin pour la défense de la ville de Sarajevo à

25 travers les routes d'approvisionnement régulières du corps d'armée. En ce

Page 26

1 qui concerne la nourriture qui provenait d'autres sources, parfois c'était

2 plus souvent le cas, et parfois ceci n'était pas enregistré ou compté par

3 le commandant du 3e Corps d'armée, mais les quantités étaient vraiment très

4 modestes. Tellement modestes qu'il est difficile de comprendre pourquoi

5 c'était le cas. Par exemple, s'il fallait approvisionner la brigade en 10

6 000 ou

7 15 000 balles, le plus souvent ce qui arrivait, c'était 500 à 1 000 balles,

8 simplement car il n'y avait pas plus de balles à envoyer. En ce qui

9 concerne les uniformes, il n'y avait pas d'uniformes, c'était aussi simple

10 que cela. Pour cette raison, les soldats à Sarajevo en 1992 et en 1993,

11 dans une grande partie de 1993, portaient des jeans, des baskets, ce genre

12 de chose. Ils étaient civils. La raison en était que les gens essayaient de

13 trouver toutes sortes de manières afin de s'approvisionner. S'il le faisait

14 afin d'obtenir les vivres, les munitions et les vêtements, ceci est

15 justifié. Mais s'il le faisait pour leur propre profit, ce n'est pas

16 justifié. Tout ce qui était fait en dehors du système mis en place, n'était

17 pas enregistré, ne faisait pas l'objet de rapports et, apparemment, compte

18 tenu de cela, était illégal d'une certaine manière.

19 Q. Est-ce que Ramiz Delalic obtenait les armes et les munitions en dehors

20 de la chaîne d'apprivoisement régulière ?

21 R. Encore une fois, c'est une question à laquelle il m'est très difficile

22 de répondre. Je n'ai aucun argument ferme. Car si j'en avais, certainement

23 une procédure aurait été intentée à son encontre. Tout comme, par exemple,

24 j'avais deux officiers, l'un d'eux soi-disant trafiquait les armes, il

25 était l'adjoint chargé de la logistique de la 2e Brigade, Eso Radeljas,

Page 27

1 puis Enes Crna qui était le commandant du bataillon et qui revendaient le

2 café. En ce qui concerne ces deux officiers, au cours de l'année 1993, vers

3 la fin de l'année, je les ai placés en prison pendant 7 jours chacun et

4 j'avais entamé des enquêtes à leur encontre. Mais je disposais de données

5 concrètes et, sur la base de ces arguments et de ces données concrètes, ces

6 personnes-là ont été acquittées par le tribunal, ils ont été libérés de la

7 prison au bout d'une semaine. Au bout de quelques mois, je pense que l'un

8 d'eux a été acquitté, alors que l'autre a été condamné avec sursis. Mais

9 là, il s'agit simplement d'un exemple que je vous donne.

10 Q. Très bien, vous avez dit que vous n'aviez aucune preuve concernant

11 Celo, mais que vous disposiez de faits, d'arguments concernant deux autres

12 personnes. Est-ce que les allégations concernant Celo ont été présentées

13 devant vous, mais est-ce que vous ne receviez pas de véritables preuves ?

14 R. Le plus souvent mon adjoint chargé de la sécurité m'informait de ces

15 questions, il m'informait de ce qu'il considérait comme important pour moi.

16 Ceci concernait Celo, tout comme ces deux autres officiers, l'ensemble du

17 corps d'armée.

18 Justement, je vous ai dit que je parlais souvent avec Sacir

19 Arnautovic, mon adjoint chargé de la sécurité. En ce qui concerne ces deux

20 officiers, ces deux commandants, je leur ai demandé : "Est-ce que vous êtes

21 sûrs de vos arguments pour établir leur culpabilité." Il répondait que :

22 "Oui." Par la suite, lorsque la procédure judiciaire a été entamée, il

23 s'est avéré que tous ces arguments étaient assez faibles, sur le plan

24 juridique je veux dire. Je veux dire par là, qu'à l'époque à Sarajevo,

25 énormément de rumeurs circulaient, des rumeurs non fondées, mais je ne peux

Page 28

1 pas nier la possibilité que, parfois, ces rumeurs étaient très bien fondées

2 aussi.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, mais un

4 commentaire éventuel concernant l'interprétation. Tout d'abord, page 25,

5 ligne 20, le témoin a mentionné le nom de Sacir Arnautovic qui n'apparaît

6 pas dans le compte rendu d'audience. Je pense qu'il faudrait clarifier

7 cela, donc, ligne 20, on épelle cela de la même manière que le nom de

8 famille d'un autre témoin qui est venu déposer ici.

9 Puis, l'autre remarque est que ceux qui comprennent la langue

10 bosniaque pensent que les interprètes ont peut-être omis de dire quelque

11 chose que le témoin avait déclaré. Il a mentionné deux personnes, deux

12 personnes contre lesquelles il avait entamé une procédure judiciaire,

13 concernant le café, au moins concernant le café, et on me dit que le témoin

14 avait mentionné aussi les unités dont ces personnes provenaient, mais ceci

15 n'est pas consigné au compte rendu d'audience. Visiblement, il a parlé

16 vite. Mais je pense qu'il vaut mieux clarifier cela immédiatement car ce

17 sera trop tard. Je m'excuse d'avoir interrompu M. Re.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, merci, Monsieur Re, est-ce que

19 vous pourriez clarifier ces deux points ?

20 M. RE : [interprétation] Tout d'abord, concernant Sacir Arnautovic, ceci

21 va, bien sûr, être corrigé dans le compte rendu d'audience car la

22 sténotypiste a la liste des noms. Deuxièmement, est-ce que vous avez

23 mentionné le nom de deux unités concernant cette personne qui revendait du

24 café et celui qui revendait les armes ou qui, prétendument, le faisait.

25 R. Eso Radeljas était un commandant. Il était l'adjoint chargé de la

Page 29

1 logistique allégué d'avoir trafiqué les armes et il faisait partie de la 2e

2 Brigade motorisée de Vitez. Je pense que je l'ai dit. L'autre homme,

3 c'était le commandant Enes Crna, il était le commandant de bataillon au

4 sein de la 102e Brigade motorisée à Stup. Les services de Sécurité ont

5 intenté une procédure à son encontre en raison du prétendu délit du trafic

6 de café. J'ai approuvé cette procédure car, à l'époque à Sarajevo, un kilo

7 de café était venu pour 50 deutschemarks environ.

8 Q. Avez-vous eu des informations qui permettaient d'établir un lien entre

9 Ramiz Delalic et des activités criminelles telles que la contrebande.

10 R. Je pense que j'ai déjà répondu précédemment à cette question.

11 Absolument, de temps en temps je recevais de telles informations et j'en

12 disposais plus ou moins. Non pas seulement concernant Ramiz Delalic, mais

13 concernant d'autres personnes aussi. Cependant, peut-être j'avais plus

14 d'informations concernant Ramiz Delalic de ce genre. Par rapport à

15 certaines autres personnes et la personne concernant laquelle je recevais

16 le plus d'informations, c'était Caco certainement. Mais, le fait même

17 d'avoir reçu des informations concernant Ramiz Delalic ne veut pas dire que

18 j'avais entamé une procédure judiciaire à son encontre, ni moi, ni mon

19 service. L'explication est que, soit en raison des circonstances de guerre,

20 ou en raison d'autres circonstances que j'ignore, ils ne pouvaient pas

21 entamer une procédure judiciaire à son encontre jusqu'à l'action Trebevic.

22 Q. Pourquoi est-ce que ceci n'était pas possible avant l'action Trebevic ?

23 Pourquoi est-ce qu'il n'était pas possible d'entamer une procédure

24 judiciaire contre Ramiz Delalic avant ?

25 R. Encore une fois, je ne peux pas vous répondre de manière précise. Je

Page 30

1 suppose car il n'était pas possible de confirmer ces faits. Maintenant, on

2 peut tirer toutes sortes de conclusions sur la base de cela, mais je ne

3 souhaite pas me lancer là-dedans.

4 Q. Je veux revenir sur les informations concernant la contrebande. Vous

5 avez dit que : "De temps en temps, vous receviez des informations de ce

6 genre et qu'elles portaient surtout sur Caco, que Caco était le numéro un."

7 Celo occuperait quel poste de cette liste de contrebandiers prétendus ? Il

8 était au numéro deux, trois, quatre, cinq, plus loin ?

9 R. Caco était certainement le numéro un. Mais je ne peux pas établir

10 maintenant une liste exacte, car il n'y avait pas que Ramiz Delalic. Il y

11 avait des plaintes au sujet d'autres personnes, ces deux officiers que j'ai

12 mentionnés. Ensuite, il y avait des plaintes émanant de la 4e Brigade

13 motorisée concernant Fikret Prevljak. Il y avait des plaintes en fonction

14 de l'affaire en question. Il y avait des plaintes concernant un grand

15 nombre d'autres commandants, car la guerre a duré pendant quatre ans. Vous

16 savez toutes sortes de choses se passaient.

17 Q. Quelles étaient les plaintes concernant la contrebande de Celo ? Que

18 faisait l'objet de sa prétendue contrebande ?

19 R. Il s'agissait au fond de la contrebande en ce qui concerne les armes et

20 les munitions, de même que la nourriture et les équipements pour l'armée et

21 l'argent. Tout tournait autour de ces éléments-là.

22 Q. De quelle manière était-il censé faire la contrebande de cette

23 manière ?

24 R. Il m'est très difficile de parler de cela devant le Tribunal, car je

25 risque de dire certaines affirmations qui ne sont pas fondées. S'agissant

Page 31

1 de l'armée de Bosnie-Herzégovine dans son intégralité, le point important

2 était la manière dont ils allaient s'approvisionner en équipements, en

3 vivres, en munitions et les armes, et comment fallait-il faire cela ? De

4 toutes les manières possibles.

5 Par le biais des achats, des saisies ou captures auprès de l'ennemi,

6 par le biais des dons accordés par les sources à l'étranger, par le biais

7 des organes et des personnes à l'intérieur du pays, et cetera. Maintenant,

8 quant à la question de savoir si, dans tout cela, certaines personnes, ici

9 concrètement parlant Ramiz Delalic, ont participé à cela et de quelle

10 manière ils l'ont fait, s'ils ont tiré des bénéfices personnels, je n'ai

11 pas réussi à établir cela et je suppose que ceci ne sera jamais prouvé avec

12 certitude.

13 Q. Je souhaite que l'on revienne sur Celo. Vous avez dit que vous aviez

14 des informations concernant le fait que Celo était actif dans la

15 contrebande. Quelles étaient les informations précises ? Que faisait-il et

16 comment le faisait-il, d'après vos informations ?

17 R. Ecoutez, dans un des documents que j'ai lu récemment, j'ai lu également

18 que soit Caco, soit Caco et Celo, tous les deux, peu avant l'opération

19 Trebevic en septembre ou en août 1993, ils s'étaient procurés un grand

20 nombre de roquettes antichars appelées Tsevena Frela TF 8, la flèche rouge

21 TF 8. Maintenant, quant à la question de savoir s'ils ont vraiment obtenu

22 cela ou pas, je ne le sais pas. J'ai lu cette information, pour la première

23 fois, l'autre jour. Secondo, ceci n'a jamais été vrai, car s'ils avaient eu

24 quelque part ces projectiles flèche rouge, cela aurait du être trouvé

25 quelque part après fin de l'opération Trebevic. C'était le cas souvent de

Page 32

1 toutes sortes de rumeurs concernant toutes sortes d'équipements, de

2 munitions, et cetera.

3 Q. Le tunnel sous l'aéroport de Sarajevo était utilisé à quelles fins ?

4 R. Toutes sortes de fins.

5 Q. Y compris --

6 R. Tout.

7 Q. On vient de parler de la contrebande. Est-ce que lorsque vous dites

8 tout, vous parlez de la contrebande aussi ?

9 R. S'il y avait de la contrebande, c'est certainement inclus. Car en ce

10 qui concerne le tunnel DB, Dobrinja Butmir, donc qu'on l'appelait DB,

11 j'avais peut-être le plus de problèmes en 1993 et 1994 en relation avec ce

12 tunnel. A la fin, en raison de tous ces problèmes, le président Izetbegovic

13 m'a donné l'ordre, au milieu de l'année 1993, de céder la gestion du tunnel

14 au conseil exécutif de la ville de Sarajevo. Je l'ai fait.

15 Q. Nous allons revenir au printemps, été 1993. Est-ce que vous aviez des

16 informations selon lesquelles les soldats, au sein du

17 1er Corps d'armée, utilisaient le tunnel pour faire de la contrebande ?

18 R. A cette époque-là, le tunnel ne fonctionnait pas. A partir du 1er août

19 1993, c'est seulement à partir de cette date-là que le tunnel a commencé à

20 fonctionner, car c'est seulement à ce moment-là qu'il a été creusé.

21 Q. Excusez-moi, je souhaitais parler justement de la période à partir du

22 1er août. Peu importe le printemps. Je souhaitais parler de l'été.

23 R. Il m'est difficile de confirmer cela surtout au début car, lorsque le

24 tunnel a été creusé, au début, nous avions imposé des mesures et des

25 demandes rigoureuses en ce qui concerne sa sécurité. Cela, c'est ce que je

Page 33

1 peux dire d'un côté. Mais, d'autre part, si l'on tient compte du fait que

2 j'avais même créé une unité chargée du fonctionnement et de la sécurisation

3 du tunnel car ceci impliquait des tâches lourdes et, si l'on tient compte

4 du fait que ce premier commandant, si mes souvenirs sont bons, il

5 s'appelait Sutrovic, Almir peut-être, je ne suis pas sûr en ce qui concerne

6 le prénom. Il était le commandant du tunnel, et au bout d'une brève

7 période, il a simplement pris la fuite. Il a disparu. D'après certaines

8 informations officieuses que j'ai reçues après la guerre, il vivrait en

9 Israël. Maintenant, si je me demande pourquoi il avait pris la fuite, je me

10 dis tout est possible.

11 Q. Historiquement parlant, ceci est intéressant. Mais je souhaite vous

12 demander si vous aviez des informations selon lesquelles les soldats qui

13 faisaient partie de votre corps d'armée participaient à la contrebande.

14 R. Je n'ai pas d'arguments corroborant cela. Mais il y avait toutes sortes

15 de rumeurs allant dans ce sens, mais pas de véritables preuves.

16 Q. Qu'est-ce que vous disiez au sujet des soldats dans ce tunnel, et qui

17 étaient-ils ?

18 R. Voici un exemple, mais je pourrais vous donner des milliers d'exemples.

19 Un matin, encore une fois, le président Izetbegovic m'a appelé, et il ma

20 critiqué très fermement. Il m'a agressé, car il avait reçu l'information

21 selon laquelle, pendant la nuit, des centaines de litres d'alcool avaient

22 traversé le tunnel et sont arrivés dans la ville de Sarajevo. Puis, il m'a

23 dit : mais Karavelic, faut-il que l'alcool vienne à Sarajevo à travers le

24 tunnel, et non pas la nourriture, les munitions, les armes, et cetera ? Je

25 lui ai répondu sincèrement car il ne faut pas penser que j'étais un

Page 34

1 commandant irresponsable. Je pense que j'étais très responsable comme

2 commandant du corps d'armée. Je lui ai dit : je vais prendre toutes les

3 mesures nécessaires. J'ai impliqué la police civile, mis à part ma propre

4 police, mon propre service de Sécurité. Au bout d'un mois environ, j'ai

5 reçu l'information selon laquelle la police civile était en charge de cela,

6 que quelque chose lié à cela existait réellement, qu'Alija Izetbegovic

7 était au courant et qu'il ne fallait pas répandre ces informations de

8 manière supplémentaire. Que voulez-vous que je fasse ? Là, je vous donne

9 simplement un exemple.

10 Q. Oui, mais concrètement parlant, avez-vous reçu des informations selon

11 lesquelles Celo et Caco participaient à la contrebande en utilisant le

12 tunnel ?

13 R. Légalement, en passant par le tunnel, ils ne pouvaient pas faire grande

14 chose. Même s'ils faisaient quelque chose, ceci ne pouvait pas être de

15 grande envergure, car quelque chose de grand en termes de quantité ou

16 d'envergure n'aurait pas pu traverser le tunnel sans être enregistré. Ce

17 que les gens pouvaient porter sur eux, avec deux ou trois personnes, à

18 l'époque, il était très difficile, voire impossible, de contrôler cela.

19 M. RE : [interprétation] Est-ce que le moment est opportun pour faire une

20 pause ?

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Nous allons faire une pause, et nous

22 allons reprendre nos travaux à 11 heures.

23 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

24 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Monsieur Re. S'il vous plaît,

Page 35

1 poursuivez.

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. Bon, Monsieur Karavelic, nous allons essayer d'accélérer un petit peu

4 si nous pouvons, pour essayer de revenir à Sarajevo aussi rapidement que

5 possible. Je vais essayer de vous poser des questions extrêmement brèves,

6 et si vous pouvez nous aider, nous allons peut-être vous permettre de

7 regagner votre foyer un peu plus rapidement. Je voudrais revenir à la

8 question que je vous posais auparavant, sur l'information sur Caco ou Celo

9 et le tunnel. Je voulais savoir si vous avez eu des informations relatives

10 au fait qu'ils auraient utilisé le tunnel, l'un ou l'autre, à des fins de

11 trafic ou de contrebande. Si tel était le cas, quelle était la nature de

12 cette information ?

13 R. Cette information existait, mais je ne pourrais pas préciser la nature

14 de cette information, parce que je n'y ai pas accès et cette information

15 n'est pas disponible.

16 Q. Quel est le souvenir que vous avez de l'information que vous avez eue à

17 l'époque ?

18 R. Par exemple, Caco est passé par le tunnel hier soir. Il a créé des

19 problèmes, il a refusé de se soumettre à des contrôles à l'entrée du

20 tunnel. Il est passé avec ses cinq hommes par le tunnel, et on évaluait, ou

21 on estimait, qu'il avait fait passer ceci ou cela, et cetera.

22 Q. Qu'en est-il de Celo ?

23 R. Plus ou moins la même chose, mais peut-être dans une moindre mesure, et

24 moins fréquemment.

25 Q. Est-ce que Celo ou Caco aurait eu une raison légitime ou une autre

Page 36

1 d'utiliser le tunnel pour quitter ou entrer dans Sarajevo à l'époque ?

2 R. La plupart du temps, cela aurait été pour sortir de Sarajevo, ou y

3 entrer pour des raisons justifiées différentes, mais il y avait aussi des

4 sorties ou des entrées sans que je n'en sache rien et même sans que je

5 puisse approuver cela.

6 Q. Il fallait votre approbation pour quitter Sarajevo ou l'approbation de

7 quelqu'un du commandement du corps ?

8 R. Les commandants des brigades devaient avoir ou obtenir préalablement ma

9 permission. Néanmoins, Caco ne se conformait pas à ce Règlement.

10 Q. Quelle a été votre réaction lorsqu'on vous a informé du fait que Celo

11 et Caco avaient utilité le tunnel pendant la nuit. Qu'avez-vous fait ?

12 R. Je demandais au service de Sécurité de vérifier s'il y avait eu des

13 activités illégales qui avaient commises et je poursuivais, mon objectif

14 était le combat, la défense de Sarajevo et pas tant le traitement

15 administré à certains individus, qui qu'était cet individu.

16 Q. Quelle était la relation entre Celo et les commandants des autres

17 Unités du 1er Corps ? Ce que j'entends par là, c'est : quelle était la

18 qualité de leurs relations ?

19 R. Au cours des années 1992 et 1993 et je parle là du

20 1er Corps même si je n'en étais pas commandant à l'époque, une certaine

21 animosité régnait entre les brigades. Au centre du Novi Grad ou Novo

22 Sarajevo, des municipalités d'Ilidza également, par rapport aux brigades

23 qui étaient situés dans les municipalité de Centar et Stari Grad. Des

24 activités étaient organisées pour créer des liens, pour que les commandants

25 se rendent visite, fassent connaissance, pour créer aussi un climat plus

Page 37

1 harmonieux, pour créer un système de Défense plus intégré aussi au sein du

2 1er Corps.

3 Est-ce que cela a fonctionné ? Enfin, pour moi, c'est un peu difficile de

4 préciser la date exacte, mais cela a fonctionné à peu près jusqu'au

5 printemps de 1993. A la suite de quoi, l'animosité s'est renforcée ou

6 aggravée. Par exemple, j'ai eu des problèmes tout à fait considérables au

7 sujet de Ramiz Delalic et ses relations avec le sabotage, l'Unité de

8 Sabotage et de Reconnaissance. C'était une brigade qui était également liée

9 au commandement du 1er Corps dirigé par Boris Krstanovic, Cile. A plusieurs

10 occasions, j'ai dû traiter, personnellement, de leurs conflits personnels

11 et ce conflit interpersonnel s'est généralisé, s'est étendu aux soldats des

12 brigades elles-mêmes de part et d'autre. Un conflit similaire a éclaté

13 lorsque, moi-même et le commandant Mustafa Hajrulahovic, nous nous sommes

14 même interposés, personnellement, en essayant d'éviter (1) que du sang ne

15 soit versé d'un côté comme de l'autre. J'ai essayé, en fait, d'éviter des

16 blessures dans un conflit entre soldats.

17 Q. A quel moment cet incident particulier s'est-il produit ?

18 R. Je ne saurais vous dire la date exacte mais je crois que c'était au

19 printemps 1993.

20 Q. Est-ce que Celo participait à ce conflit6

21 R. Dans cet incident particulier auquel je me réfère, il y avait Ramiz

22 Delalic, Celo, d'un côté et de l'autre côté, il y avait le commandant de

23 cette brigade, un Boris Krstanovic, appelé Cile.

24 Q. Où cette confrontation a-t-elle eu lieu ?

25 R. Devant le commandement du corps, c'était rue Danijela Osme, numéro 7.

Page 38

1 Q. Est-ce que d'autres soldats en dehors de Celo et Boris Krstanovic ont

2 participé à ce conflit ?

3 R. Oui. La police militaire du corps, le bataillon de la Police militaire,

4 et ils étaient avec moi. Avec le commandant du corps, nous avons essayé de

5 nous interposer dans ce conflit et d'éviter qu'il n'éclate.

6 Q. Pouvez-vous informer la Chambre de ce qui s'est produit ?

7 R. Qu'a fait Celo, qu'a fait Krstanovic, et qu'avez-vous dû faire ?

8 R. Le commandement du corps était au milieu, entre comité exécutif de ces

9 deux brigades, entre l'Unité de Sabotage de Reconnaissance et la 9e Brigade

10 motorisée, mais le commandement était plus proche du commandement de la

11 Brigade de Reconnaissances et de Sabotage et, à un moment, d'un côté de la

12 rue, Ramiz Delalic est apparu et, de l'autre côté de la rue, Boris

13 Krstanovic.

14 Q. Étaient-ils armés ?

15 R. Bien sûr, c'était la guerre. Tout le monde était armé.

16 Q. Que faisaient-ils de leurs armes ?

17 R. Des menaces ont été échangées, ils se sont menacés de se tuer.

18 Pourquoi ? Bien, point d'interrogation. A l'époque, lorsqu'on a vu ce qui

19 se passait au commandement, moi-même et le commandant du corps, nous sommes

20 sortis du QG et nous nous sommes interposés entre eux et nous avons dit :

21 "Vous ne pourrez vous battre que si nous sommes morts," et au bout d'une

22 heure ou deux de cette situation chaotique, nous avons réussi à éviter des

23 blessés.

24 Q. Que faisaient les deux factions, les deux côtés, de part et d'autre,

25 avec leurs armes lorsque vous et Tlijan êtes intervenus ?

Page 39

1 R. En fait, ils s'étaient postés à chaque fenêtre, à chaque toit, ils

2 étaient sur les toits, à chaque coin de rue, à tout endroit et ils se

3 tenaient en mire avec leurs fusils, c'était vraiment un terrain de

4 bataille.

5 Q. Comment avez-vous réussi à rétablir la paix dans ce terrain de

6 bataille ?

7 R. Je suis simplement sorti dans la rue, j'ai levé les mains et j'ai dit :

8 "Levez tous les bras, je ne suis pas armé." J'ai dit que je ne suis pas

9 armé et, bien sûr, il y avait des officiers de police avec moi, mais

10 c'était un nombre relativement peu important par rapport au nombre de

11 soldats impliqués et le commandant du corps a dit la même chose. Nous nous

12 sommes d'aucun côté et celui qui va commencer se verra tenu pour

13 responsable et il faudra qu'il s'en réfère à nous. En parlant aux soldats,

14 nous avons réussi à rétablir le calme, à apaiser la situation plus ou moins

15 de la même manière qu'au moment où l'adjoint de la sécurité de Caco a voulu

16 me viser avec une mitraillette, mais cela c'était un incident différent.

17 Dans ce cas, nous avons réussi à apaiser la situation, à rétablir le calme.

18 Q. Nous allons en venir à Caco un peu plus tard. Mais combien de soldats

19 se trouvaient de part et d'autre, et se tenaient en ligne de mire ?

20 R. C'est difficile de vous donner un chiffre exact, mais il y avait plus

21 qu'une brigade, peut-être comme une compagnie. Mais c'est difficile de vous

22 donner un chiffre exact.

23 Q. Mais un chiffre approximatif ?

24 R. C'est difficile de parler du nombre de pages dans un document ou du

25 nombre de soldats. A ce moment-là, on s'attend à ce que vous vous en teniez

Page 40

1 au nombre de soldats. Mais je dirais : plus qu'une section, moins qu'une

2 compagnie. Les nombres d'une section peuvent aller de 30 et, pour une

3 compagnie, cela peut aller de 100 à 150. Cela dépend.

4 Q. D'accord. Est-ce que le colonel Imsirevic était là ?

5 R. Je n'en suis pas certain. Je ne crois pas, mais je n'en suis pas

6 certain.

7 Q. Ce conflit entre les deux côtés, est-ce que c'était considéré comme une

8 violation du code disciplinaire de l'armée de Bosnie ?

9 R. Ce serait difficile de le décrire comme autre chose qu'effectivement,

10 une infraction au code disciplinaire.

11 Q. Qui a entamé ce conflit, en particulier, Celo ou Krstanovic ?

12 R. Ramiz Delalic a dit que c'était Boris Krstanovic, et Boris Krstanovic a

13 dit que c'était Ramiz Delalic. C'est là que les choses se sont arrêtées.

14 Q. Est-ce que des mesures ont été prises en conséquence de cet incident,

15 contre l'un des deux protagonistes ?

16 R. Que voulez-vous dire par "mesures" ?

17 Q. Enquêtes, mesures disciplinaires, mesures pénales. Vous avez décrit une

18 situation où vous avez deux groupes de soldats dans votre corps, qui

19 menacent de s'entretuer à côté de votre QG. Donc, c'est une infraction

20 disciplinaire. Est-ce que des mesures ont été prises ?

21 R. Après cela, je m'en souviens bien. Le commandant du corps a appelé

22 Boris Krstanovic à son bureau. J'étais présent. La conversation a duré

23 quelques heures, une heure ou deux. Il l'a tellement critiqué et,

24 finalement, la conversation avec Boris Krstanovic s'est terminé sur une

25 déclaration de sa part, où il a dit qu'il ne ferait rien à Celo, à moins

Page 41

1 d'être attaqué, qu'il allait se calmer, qu'il ne ferait rien, si le

2 commandant du Corps ne lui en donnait pas l'autorisation, à moins qu'il ne

3 soit attaqué soudainement. Je crois que le commandant a eu une conversation

4 similaire avec Ramiz Delalic, mais je ne me souviens pas d'avoir assisté à

5 cette conversation. Je crois que Sulejman Imsirevic était là, le commandant

6 de la brigade également. En fait, l'autre côté a également fait une

7 déclaration allant dans le même sens. Mais je ne me souviens pas que des

8 mesures disciplinaires avaient été prises, que des sanctions disciplinaires

9 ont été imposées, ou si les choses se sont arrêtées à cette conversation.

10 Q. Est-ce que d'autres incidents impliquant Ramiz Delalic et son unité

11 dans les rues de Sarajevo, qui constituaient des infractions aux exigences

12 disciplinaires traditionnelles ont eu lieu ? Je veux dire des incidents

13 similaires, mais qui n'impliquaient pas la première brigade.

14 R. Il y a eu d'autres incidents. Je ne saurais vous dire les dates

15 exactes, mais ces incidents se sont produits également au cours de l'été

16 1993, au moment où, par exemple, des soldats de la

17 9e Brigade motorisée, et je crois que Ramiz Delalic était également

18 présent, un moment où le commissariat du police civile a été entouré. Il y

19 a eu un Règlement de compte avec la police civile, certains représentants

20 de la police civile.

21 Ensuite, au cours du mois de juillet, sous les ordres du général Delic,

22 Sefer Halilovic et Mustafa Hajrulahovic, j'avais quitté Sarajevo. J'étais

23 allé à Igman et, pour autant que je m'en souvienne, le commandement de

24 l'état-major principal de l'ABiH était entouré, et cetera, et cetera.

25 Q. Je suis intéressé dans "et cetera, et cetera". Vous avez parlé des

Page 42

1 Règlements de compte avec la police civile. Quel compte avait-il à régler,

2 Celo, avec la police civile ? Quelle était la source de son animosité ?

3 R. Il m'est difficile de le dire dans la mesure où je n'ai pas traité de

4 cet incident. Je n'avais pas le temps de m'en occuper, et je ne pouvais pas

5 gérer la relation d'un homme avec d'autres, alors que j'avais sur les bras

6 un corps de 75 hommes. Je peux peut-être en conclure que s'il s'agissait

7 d'un officer du commissariat de police, pourquoi effectivement prendre la

8 peine d'entourer le commissariat de police, à moins d'avoir une raison

9 particulière d'être irritée par une action ou une autre de la police

10 civile. Mais peut-être il y avait une raison à cela. Mais je ne veux pas

11 spéculer parce qu'à ce moment-là, je ne pourrais donner qu'une opinion non

12 objective.

13 Q. Est-ce que vous avez été informé du fait qu'il avait entouré le

14 commissariat, c'est-à-dire que ces hommes avaient entourés le commissariat

15 de police ?

16 R. Bien. En fait, oui, j'ai quelque chose en mémoire dans ce sens, mais ma

17 mémoire est assez floue. Je crois que j'ai lu quelque chose dans le journal

18 à ce sujet. Lorsque vous entendez parlé d'un incident à proximité d'un

19 commissariat de police, en général, c'est un incident mineur, pas vraiment

20 important. A l'époque à Sarajevo, des choses beaucoup plus graves se

21 produisaient.

22 Il y avait un autre Celo, de l'autre côté, qui lui causait des problèmes

23 peut-être plus graves. Nous avions une autre personne comme Topalovic, le

24 commandant du Bataillon de Police militaire de l'état-major général. Il y

25 avait bien d'autres qui causaient des problèmes à Sarajevo.

Page 43

1 Q. Pouvez-vous décrire les quartiers qui entouraient le commissariat de

2 police, et leur encerclement par des soldats, et d'autres incidents mineurs

3 à Sarajevo ? Vous avez également décrit la région où la zone qui entourait

4 l'état-major principal. Quels autres incidents, incidents similaires à

5 votre connaissance, ont impliqué Celo ?

6 Q. À cette période et quelle était la nature de ces incidents ?

7 R. Je ne saurais vous en dire plus sans document, à moins que vous ne me

8 rafraîchissiez ma mémoire.

9 Q. Il en avait-il plus ?

10 R. À moins que vous ne me rafraîchissiez la mémoire, peut-être.

11 Q. Vous dites qu'il en a eu plus, mais vous ne pouvez plus vous souvenir

12 de ces incidents à l'époque ?

13 R. Oui, on pourrait dire cela.

14 Q. Est-ce que vous avez parlé à Celo de ces infractions au code

15 disciplinaire, l'encerclement du commissariat de police, le blocus de

16 l'état-major, menacer de tuer le commandant de la Brigade de Reconnaissance

17 juste à proximité de votre QG ?

18 R. Oui, je l'ai fait sur cet incident devant le commandement du Corps. Ces

19 deux autres incidents impliquant la police et l'encerclement de l'état-

20 major n'ont pas fait l'objet d'une discussion avec Celo parce que je n'ai

21 pas vraiment eu l'occasion de le faire par la suite dans la mesure où les

22 événements se sont accélérés au cours du mois d'août 1993.

23 Q. Qu'avez-vous dit à Celo sur cet incident devant le QG du 1er Corps ?

24 R. La chose principale que je lui ai dite, à l'époque, et le commandant du

25 Corps m'envoyait très fréquemment participer à des négociations de toutes

Page 44

1 sortes sur des questions ayant trait aux unités du Corps parce que le

2 commandant du Corps était un homme de la marine, de la JNA de l'armée

3 populaire de Yougoslavie. Donc, il était plongeur, il ne connaissait pas

4 tellement la gestion des forces terrestres, et il m'envoyait toujours

5 régler les problèmes, c'est-à-dire, il connaissait les raisons pour

6 lesquelles il m'envoyait, bien sûr. Au cours de ma conversation avec Celo,

7 la seule chose que je lui ai demandé était de ne pas utilisé une unité

8 contre une autre au sein du 1er Corps, quelque soit l'identité de la

9 personne en question, qu'il s'agisse de Ramiz Delalic, Celo, ou d'un autre,

10 de toute façon, il n'avait pas le droit de le faire. Je lui ai dit que, la

11 prochaine fois, il serait sanctionné conformément au code disciplinaire. La

12 conversation était plutôt cordiale, c'est-à-dire que je lui ai demandé

13 poliment de ne pas monter une unité contre une autre, mais j'ai été ferme

14 aussi dans la mesure ou j'ai fait des menaces, et cetera. La plupart du

15 temps, à l'époque, Ramiz Delalic écoutait et promettait de ne pas réitérer

16 l'incident.

17 Q. Est-ce que qu'il l'a réitéré ?

18 R. À la suite de cet incident qui s'est produit devant le commandement du

19 Corps, il y a eu d'autres incidents qui se sont produits l'un avec la

20 police l'autre avec l'état-major principal, alors quelle était la nature de

21 sa participation à ces incidents, j'aurais du mal à le dire. J'ai des

22 informations indiquant qu'il était présent et qu'il a joué un rôle dans ces

23 incidents, mais je n'ai pas eu l'occasion de lui en parler par la suite ou

24 en tour cas pas pour autant que je m'en souvienne.

25 Q. Vous dites que vous lui avez dit que s'il réitérait l'incident, il

Page 45

1 serait sanctionné conformément au code. Pourquoi n'a-t-il pas été

2 sanctionné au moment où il a réitéré son comportement au moins à deux

3 reprises ?

4 R. Oui, en fait, il a été sanctionné au mois d'octobre 1993, cela était un

5 mois plus tard au cours de l'opération de Trebevic.

6 Q. Pourquoi un tel délai ? Pourquoi attendre deux ou trois mois avant de

7 prendre des mesures ?

8 R. J'ai parlé au président Izetbegovic, je l'ai demandé, effectivement,

9 les raisons pour lesquelles cette date avait été choisie et seul le

10 commandement Suprême pouvait en décider. Le président Izetbegovic et

11 l'état-major principal de l'ABiH, c'est-à-dire Razim Delic.

12 Q. Passons à la 10e Brigade et à son commandant, Musan Topalovic, Caco.

13 Hier vous avez parlé de l'étendue des responsabilités de Caco et à

14 plusieurs reprises, vous avez dit que Caco était le principal trafiquant ou

15 contrebandier et, à ce titre, que ces activités de contrebandes ou de

16 trafics étaient pires que celle de Celo. Quelle était la relation entre

17 Caco et le commandement du Corps en 1993 ?

18 R. Mes excuses, lorsque vous me dites que j'ai affirmé qu'il était le

19 contrebandier ou voleur numéro un, je ne pourrais pas le confirmer, ni sur

20 Caco, ni sur quiconque d'ailleurs. Toutes mes allégations se fondent sur un

21 certain nombre de rapports, certaines informations, ce qui a été dit

22 précisément lors du procès de la cour du district qui suivait l'opération

23 de Trebevic. Cette cour a demandé un rapport final sur le jugement qui a

24 été prononcé à l'encontre de Ramiz Delalic, et Celo, et un certain nombre

25 d'autres personnes. La cour a demandé une copie du jugement prononcé lors

Page 46

1 de cette affaire qui concernait les actions qu'il avait commises dans un

2 certain endroit et concernant son champ de responsabilité par rapport à sa

3 brigade. Il y a énormément d'information là, mais c'est ce que je vous

4 dispute, en fait. Il y a l'impression que ce que je dis, c'est que ces gens

5 sont des voleurs des criminels, mais ce n'est pas quelque chose que je

6 puisse affirmer.

7 Q. Je voulais juste que vous disiez à la cour ce que vous avez observé ou

8 entendu vous-même. Je vais me situer sous un angle un petit peu différent.

9 Quel était l'état de votre connaissance sur Caco avant qu'il ne devienne

10 commandant de Brigade ?

11 R. Pour autant que je sache, je ne me suis jamais préoccupé de cela, je

12 n'ai jamais essayé de savoir plus sur sa carrière sur sa vie. Il me semble

13 qu'avant la guerre, il était musicien, il faisait partie d'un groupe, c'est

14 une chose dont je me souviens.

15 Q. Est-ce qu'il --

16 R. Je ne suis pas sûr quels étaient ces antécédents en matière scolaire,

17 peut-être qu'il avait été jusqu'à la fin du secondaire ou peut-être pas,

18 mais, en tout cas, il est devenu commandant de brigade, non pas à cause de

19 quelque chose auquel on se serait attendu sous le plan de mobilisation,

20 mais plutôt parce qu'il était le premier à pouvoir mettre un place une

21 brigade tout seul au mois d'avril, mai et juin 1992 lorsque l'agression

22 contre la Bosnie-Herzégovine avait démarrée et le système de défense était

23 paralysé, à l'époque, c'est ainsi qu'il est devenu commandant de brigade.

24 Il n'y avait pas eu de permission, d'approbation de la part de qui que ce

25 soit.

Page 47

1 Q. Avait-il une éducation dans le domaine militaire ?

2 R. Pas pour autant que je sache.

3 Q. Quelle était son attitude vis-à-vis des anciens officiers de la JNA ?

4 R. Une attitude très moche, négative.

5 Q. Comment faisait-il preuve de cette attitude ?

6 R. Il faisait des affirmations concernant le fait qu'il était fier du fait

7 que sa brigade ne comprenait pas un seul officier de l'ancienne JNA. Il

8 disait qu'il ne faisait pas confiance à ces gens là, et des choses comme

9 cela et qu'il n'en avait pas besoin. C'est ce genre de choses qu'il disait.

10 Q. Comment les décrivait-il ?

11 R. De plusieurs façons différentes.

12 Q. S'il vous plaît

13 R. Je ne sais pas exactement ce que je devrais dire en premier. Il disait

14 des choses comme, s'il pouvait atteindre le commandant du 1er Corps, Mustafa

15 Hajrulahovic, à l'époque, ensuite, moi. S'il pouvait nous atteindre, il me

16 ferait rôtir vivant.

17 Q. Sefer Halilovic était un ancien officier de la JNA; quelle était

18 l'attitude de cette personne, vis-à-vis de Sefer Halilovic ? L'attitude de

19 Caco ?

20 R. Il disait les mêmes genres de choses concernant tous les anciens

21 officiers de la JNA. C'est très difficile de dire en quoi consistait, et

22 s'il y avait une différence de son attitude vis-à-vis de Sefer Halilovic.

23 Q. [aucune interprétation]

24 R. [aucune interprétation]

25 Q. Vous avez dit que s'il pouvait mettre la main sur vous, Mustafa

Page 48

1 Hajrulahovic, il vous aurait rôti vivant. Vous-même le commandant du 1er

2 Corps avez-vous des craintes en ce qui concerne ce personnage ?

3 R. C'est une très bonne question. D'une certaine façon oui, d'une certaine

4 façon non. C'est la vérité, c'est un fait.

5 Q. Est-ce qu'il respectait la chaîne hiérarchique en ce qui concerne -- à

6 l'intérieur du 1er Corps, la chaîne de commandement du 1er Corps ?

7 R. Après un moment, jusqu'à un certain moment, oui, mais d'après nos --

8 Q. A quel moment exact les choses ont changé approximativement ?

9 R. Il existe un document que j'ai pu lire ici, selon lequel des les mois

10 de mai et juin, pendant une période assez longue, toutes les communications

11 entre cette brigade et le commandant du Corps ont cessé d'exister. Mais,

12 globalement, je peux dire que, lorsque j'ai pris les fonctions du

13 commandant du 1er Corps, j'ai exigé à ce qu'un certain nombre de mesures

14 très radicales soient prises par mes supérieurs quant à l'établissement

15 d'une chaîne de commandement fonctionnelle à l'intérieur de ce Corps, une

16 chaîne qui soit opérationnelle. Il y a eu de sérieux problèmes en ce qui

17 concerne Caco évidemment. Plus je devenais radical, plus il devenait lui-

18 même en ce qui concernait sa résistance.

19 Q. Quelles sortes de choses il faisait qui vous montraient qu'il ne se

20 pliait pas à la chaîne de commandement ?

21 R. "Ne se pliait pas à la chaîne de commandement." Si vous utilisez ce

22 terme cela implique toutes les réponses que je puisse imaginer, mais il y

23 une chose que je dois admettre. Lorsqu'on parle de la mission fondamentale

24 de la 2e Brigade de Montagne, montagnards de la 9e Brigade, montagnards,

25 n'importe quelle autre brigade appartenant au Corps, et quand je parle de

Page 49

1 sa mission fondamentale, je parle du fait de défendre la zone de

2 responsabilité ou la ligne de défense autour de Sarajevo, de manière

3 efficace, dans leur propre zone de responsabilité. Il ne s'est jamais

4 produit aucun problème à cet égard-là, ni avec la 10e Brigade, ni avec

5 Caco, ni avec la brigade, la 9e Brigade, ni avec Celo, son commandant, ni

6 avec le commandant, ni avec Celo, le commandant en second, ni avec les

7 unités. Les brigades faisaient de leur mieux pour défendre Sarajevo

8 convenablement et, dans ce sens-là, ils n'ont jamais trahi à leur mission.

9 Les problèmes qui ont existé étaient d'une tout une autre nature et

10 prenaient des formes différentes et variées.

11 Q. C'est de ces problèmes-là que je veux que vous parliez. Vous avez parlé

12 de problèmes sérieux qui se sont produits. Quels étaient ces problèmes

13 sérieux ? Quelles étaient les choses que faisait Caco qui ne concernaient

14 pas peut-être la défense de Sarajevo, mais qui ont néanmoins causés des

15 problèmes ?

16 R. Une des actions, par exemple, dès qu'un officier du commandant du corps

17 n'était pas envoyé à la 10e Brigade montagnarde des officiers ou des gens

18 provenant du commandement de la 10e Brigade montagnarde, suite à une

19 instruction du commandent, à savoir, une instruction de Caco, ils étaient

20 obligés de revenir. Dans la plupart des cas, on les faisait revenir, ils

21 n'avaient pas le droit de rentrer par un commandement de la brigade ou même

22 dans la zone de responsable de cette brigade. On ne leur donnait pas accès,

23 quelle que soit la mission qu'on leur avait remis, quelque soit la raison

24 pour laquelle ils avaient été envoyés par le commandement du corps.

25 Ensuite, il ne faisait pas rapport, alors qu'il était obligé de faire des

Page 50

1 rapports en tant que commandant de brigade, ni les faire envoyer à travers

2 ces propres organes de la brigade en direction du commandement du corps.

3 Ou s'il y avait des rapports, s'ils étaient, en général, très

4 général, flou, et ne contenaient aucun élément qui pourrait être utile dans

5 un rapport militaire normale, un rapport qui est généralement envoyé par

6 une brigade au commandement Supérieur.

7 La plupart du temps, d'après les informations qui étaient

8 disponibles, de manière aléatoire, il immobilisait des civiles dans la

9 ville, dans sa zone de responsabilité, et il immobilisait ces personnes,

10 les emmenait pour qu'ils fassent des travaux physiques pour les besoins de

11 sa propre brigade.

12 Q. Je voudrais vous poser une question sur cette question-là. Vous avez

13 déjà décrit les moyens officiels qui étaient utilisés pour mobiliser des

14 civiles dans les unités de travail, les domaines qui étaient faites à

15 travers le ministère de la Défense et Réquisition, et cetera. Caco,

16 lorsqu'il avait besoin d'assistance pour trancher, est-ce qu'il utilisait

17 ces moyens officiels

18 R. Il me semble qu'il y a eu beaucoup de demandes faites par cette

19 brigade, surtout en 1992 et au début de 1993, au moment où ces procédures

20 ont, en effet, été utilisées, et quand il a fait effectuer ces tâches de

21 façon tout à fait légale. Mais il y a également beaucoup d'informations qui

22 indiquent qu'il faisait les choses de manière aléatoire, de façon illégale.

23 Q. Quels étaient ces moyens ? Que faisait-il ? Comment parvenait-il à

24 faire creuser ces tranchées par des civils ?

25 R. C'est une hypothèse de ma part. Je pense qu'il envoyait ses soldats,

Page 51

1 ses officiers de police militaire ou d'autres officiers, afin que ceux-ci

2 trouvent des gens, des civils, dans la zone de responsabilité de sa brigade

3 ou même plus loin dans la ville, de façon à ce qu'ils les ramènent au

4 commandement. Il leur parlait, et ensuite, il leur faisait faire ces

5 travaux. Comment en aurait-il été autrement ? Ils ne seraient pas rendus

6 tout seuls, bien entendu.

7 Q. Nous avons eu des éléments de preuve de quelqu'un d'autre, qui s'est

8 effectivement rendu à ce site de cette manière-là. Mais à votre

9 connaissance, est-ce que les gens étaient emmenés à la première ligne des

10 tranchées, ou les deuxième et troisième lignes des tranchées par les hommes

11 de Caco ?

12 R. Il y a des informations qui indiquent que tout ceci était vrai, mais il

13 serait très difficile pour moi de confirmer ces informations. Il est tout à

14 fait possible que tout ceci soit effectivement vrai.

15 Q. Le fils de Rasim Delic, est-ce qu'il y a eu un incident qui a impliqué

16 le commandant suprême Rasim Delic, son fils et Caco et ses hommes ?

17 R. Je me souviens de cet incident. Caco vaquait à ses affaires, mais son

18 fils, qui était son soldat, a été pris et emmené pour creuser les

19 tranchées. Il nous a fallu pas mal de temps, je pense plusieurs jours, pour

20 essayer parler de ces choses-là. Nous avons essayé d'exercer des pressions

21 pour qu'il soit libéré, ce qui s'est passé en fin de compte.

22 Q. Le procès-verbal dit, Caco vaquait à ses affaires entre autres. Est-ce

23 que vous voulez dire Caco ou le fils de Rasim Delic ?

24 R. Caco, Caco. Il vaquait à ses affaires, je parle de ses affaires

25 concernant ces personnes qui étaient prises.

Page 52

1 Q. Vous voulez dire qu'il a pris le fils de Rasim Delic ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous avez dit que beaucoup de pression était exercée pour sa

4 libération. De quoi s'agit-il ? Quelles étaient les négociations qui ont eu

5 lieu ? Comment cette personne fut-elle finalement libérée ?

6 R. C'est très difficile pour moi de me souvenir des menus détails. Tout ce

7 que je peux vous dire, c'est qu'il y a eu plusieurs officiers au

8 commandement de la 10e Brigade de Montagne. Je ne sais pas si je dois le

9 dire en public, mais l'un d'entre eux, je ne sais pas si je dois dire son

10 nom, mais en tout cas, il faisait rapport régulièrement au commandement du

11 corps. La plupart des informations qu'il nous donnait, étaient véridiques.

12 Il nous informait de ce qui se passait dans la brigade, surtout le jour

13 avant l'attaque contre la 10e Brigade de Montagne, et la 9e Brigade

14 motorisée. Il fut l'un des contacts qui ont été utilisés pour faire en

15 sorte que Caco libère certaines personnes. Le président Izetbegovic, ses

16 propres contacts, et cetera, et cetera.

17 Q. Est-ce que Caco savait qui il avait emmené aux tranchées, de l'identité

18 de cette personne ?

19 R. Vous me posez cette question et cela me fait penser à un autre

20 incident. Je ne me souviens pas exactement de la date. Il me semble que

21 c'était au mois août, peut-être au mois de septembre. A un certain moment,

22 j'ai eu un appel du président Izetbegovic qui me demandait la chose

23 suivante : "C'est qui qui tire sur le bâtiment de la présidence ?" Très peu

24 de temps après, après avoir parlé avec mon centre opérationnel, je me suis

25 rendu compte qu'il n'y avait aucune indication que l'ennemi à l'extérieur

Page 53

1 de la ville n'ait été impliqué dans ces tirs. D'après nos informations,

2 cela serait Caco qui avait le bâtiment de la présidence en ligne de mire.

3 Le président m'a demandé : "Est-ce que c'est possible ?" J'ai répondu :

4 "Monsieur le Président, pratiquement n'importe quoi est possible ici, si

5 vous tenez compte de la situation globale, militaire, et politique à

6 Sarajevo." C'était le type de questions que je peux vous donner. Si vous me

7 demandez s'il avait été au courant du fait qu'il avait emmené le fils de

8 Rasim Delic dans les tranchées, cela ne voudrait rien dire pour lui.

9 Q. Est-ce que Caco, en fait, tirait sur la présidence à l'époque ? Est-ce

10 que votre enquête vous a confirmé ces faits ?

11 R. Si je vous dis oui, je vais m'engager. C'était les informations que

12 j'avais à cette époque-là. Il est, en tout cas, tout à fait probable, mais

13 je ne peux pas en être à 100 % certain.

14 Q. Vous avez dit que Caco ne permettait pas à vos gens de rentrer dans sa

15 zone de responsabilité. Spécifiquement, dans quelle zone, il interdisait

16 l'accès à ces personnes ?

17 R. La zone qui se trouvait entre Bistrik et le cimetière juif.

18 Q. Quel est le nom de cette zone ?

19 R. Il y a plusieurs districts dans cette zone. Les collines de Trebevic,

20 le secteur nord de Sarajevo. Plus exactement, la plupart de la municipalité

21 centre et Stari Grad et l'ancienne ville. Le cimetière juif, Skenderija, et

22 toute la zone. Mais je ne connais pas personnellement tous les noms de ces

23 endroits, y compris Bistrik.

24 Q. Kazani ?

25 R. Kazani, c'est un petit quartier qui se trouve proche de la première

Page 54

1 ligne de Défense, en fait, qui est à cheval sur cette ligne. Ce sont des

2 rochers. Kazani. Je ne sais pas si on le retrouverait d'ailleurs sur une

3 carte, ou s'il s'agit simplement d'un nom qu'on utilise familièrement.

4 Cependant, cet endroit se trouvait à l'intérieur de la zone de

5 responsabilité.

6 Q. Pourquoi empêchait-il les gens de rentrer dans sa zone de

7 responsabilité ?

8 R. Je dois spéculer seulement là-dessus.

9 Q. Y avait-il des informations que vous avez reçu à l'époque, vous

10 indiquant pourquoi il interdisait l'accès, y compris information, y compris

11 aux personnes du commandement du 1er Corps.

12 R. Certaines personnes pensaient qu'il n'avait besoin de personne pour

13 défendre la ville, qu'il avait tout ce qui ce qu'il avait, et qu'il pouvait

14 s'en sortir tout seul. C'était un des raisonnements qu'on avait. Mais il y

15 avait également une autre théorie, selon celle-ci, c'est que le

16 commandement du corps était intégralement superflu en ce qui lui est

17 concerné, car tout ce qu'il recevait du commandement du corps était non

18 seulement insuffisant, mais quasiment nul. Je parle de ce qu'il obtenait en

19 terme d'équipement, des choses comme cela. Très souvent, il utilisait comme

20 prétexte pour aller chercher lui-même des choses, pour les besoins de sa

21 propre brigade, à partir de ce qu'il appelait lui même des sources

22 alternatives. Je continue de spéculer, d'imaginer les raisons de son

23 comportement. Je pense qu'il voulait cacher son comportement, pour aussi

24 longtemps que possible. Tous ces actes, ce dont je vous ai parlé, les

25 réquisitions en ce qui concerne les armes, la nourriture, le fait d'enlever

Page 55

1 des personnes, des civils pour creuser des tranchées, des actions

2 illégales, et cetera. En ce qui concerne l'enlèvement des personnes, c'est

3 le tribunal cantonal à Sarajevo qui s'est préoccupé de ce cas. Après la

4 guerre combien de personnes ont été tuées par ce gens en Kazani, quelle

5 personne était victime, et cetera. Je ne peux pas vous donner les détails

6 de ceci, car je n'ai pas eu l'occasion de lire les décisions prononcées par

7 la cour cantonale de Sarajevo, dans ces affaires.

8 Q. Vous venez de parler de ces réquisitions qui concernent les armes. Vous

9 avez déjà décrit les procédures officieuses, quand à ces approvisionnements

10 en munition et en armes, concernant les brigades de la 9e Brigade

11 motorisée. Caco, comment obtenait-il des armes et des munitions à

12 l'extérieur donc de la chaîne d'approvisionnement normal ?

13 R. De la chose suivante. Je vais vous décrire une des choses qui s'est

14 produite, une parmi beaucoup d'autres choses qui se sont produites. C'est

15 très difficile pour moi de vous donner des dates exactes, sans avoir des

16 documents sous les yeux. Je pense qu'il s'agissait du printemps ou de l'été

17 1993, un officier est venu me voir, un officier de la FORPRONU qui disait,

18 ils vont commencer à tire, ils vont venir aux Nations Unies, ils vont le

19 dire au QG en Europe, et cetera, qu'ils vont faire ci et ça, parce que la

20 10e Brigade montagnarde, ou plutôt Caco avait dérobé plusieurs de leurs

21 chars, de leurs véhicules blindés de transport de personnel.

22 En fait, ce qui s'est passé, c'est que Caco a envoyé un certain nombre de

23 ces soldats qui ont pris ce véhicule par la force auprès des gens de la

24 FORPRONU. Ils n'ont tué personne, ni blessé qui que ce soit pour dire la

25 vérité, mais cet homme Caco, voulait utiliser ces véhicules pour pouvoir

Page 56

1 immédiatement envoyer des personnes à la ligne, à la première ligne de

2 défense, pour défendre la ville. Voici comment il voyait ces choses,

3 pourquoi laisser ces véhicules courir en quelque sorte au centre de ville à

4 Skenderija, alors qu'il n'était pas utilisé ? Il faudrait beaucoup mieux en

5 faire usage, les amener en première ligne, et l'ennemi. La FORPRONU -- le

6 commandant de la FORPRONU s'est rendu à Sarajevo. Le président Izetbegovic

7 a été averti, et je ne me souviens pas de la date exacte, mais le chef de

8 l'armée a également été impliqué, Rasim Delic et Sefer Halilovic forcément

9 étaient impliqués, il a fallu plusieurs jours pour que ces véhicules

10 blindés de transport de personnel soit repris aux soldats, sans l'usage de

11 la force, et nous avons pu les remettre ensuite, ainsi que les munitions à

12 la FORPRONU. C'était une chose. Il y a eu un autre incident, il a envoyé

13 certains soldats, en disant qu'il n'avait pas suffisamment à manger,

14 c'était la nuit. Il s'est rendu dans les champs des gens à Skenderija pour

15 prendre les pommes de terre, les sacs de pomme de terre et d'autres stocks

16 de nourriture pour les faire utiliser, donc, j'ai été obligé d'intervenir,

17 et cetera.

18 Etait-il de son intention de les utiliser pour la défense de Sarajevo,

19 c'est-à-dire avoir des provisions pour ces hommes ou est-ce que c'était

20 peut-être sa façon à lui, d'exercer une pression sur les soldats pour

21 qu'ils suivent de manière aveugle, sans poser de questions. C'est très

22 difficile pour moi de le dire. Je pense que la meilleure réponse pour moi

23 ce serait de dire que c'était un peu les deux choses.

24 Q. À part le fait, voler les véhicules de transport de personnel de la

25 FORPRONU, quels autres moyens a-t-il utilisé pour obtenir des armes et des

Page 57

1 munitions, en dehors du système de la chaîne d'approvisionnement normale ?

2 R. Je ne sais pas de quoi vous parlez. Si vous me le rappelez, je vais

3 vous répondre. Je trouve cette question un peu trop générale et peu claire.

4 Q. Très bien. Je vous demande au sujet de ce qu'il a fait afin d'obtenir

5 les armes en dehors de la chaîne d'approvisionnement officielle. Décrivez

6 son raid sur la FORPRONU et comment il a ôté certains véhicules transport

7 des troupes et comment il les a emmenés sur le front. Quels autres

8 informations avez-vous reçues concernant les activités semblables de Caco ?

9 Comment est-ce qu'il obtenait des armes et des munitions ?

10 R. Il y a eu des informations que je ne peux pas confirmer, selon

11 lesquelles certaines personnes existent hors de Sarajevo en Herzégovine,

12 qu'ils achetaient cela de toute sorte de manière, que ceci était acheminé

13 dans la ville de Sarajevo, et ainsi de suite. Ensuite, qu'ils achetaient

14 cela auprès de l'agresseur, et cetera. Vous savez c'était des rumeurs sans

15 fin. Mais peut-être que ceci contenait beaucoup de vérité, mais, en même

16 temps, peut-être ce n'était pas le cas, peut-être ce n'était pas vrai.

17 Q. Où est-ce qu'il a obtenu le financement afin d'acheter les armes auprès

18 de l'agresseur ? Je suppose que vous pensez aux forces serbes en disant

19 cela.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Je fais objection à cette question

21 puisqu'elle contient la réponse elle-même. La question est de savoir où

22 est-ce qu'il pouvait obtenir les finances, et si le témoin peut répondre à

23 la question de savoir, où il obtenait cela, s'il connaît la réponse, il

24 peut le dire. Je n'y fais pas d'objection. Mais si la question suggère

25 cela, je pense que nous sommes en train de demander une opinion auprès du

Page 58

1 témoin. Donc, en ce qui me concerne, on peut demander au témoin de dire où

2 il trouvait les finances, mais là il faut poser la question dans une forme

3 directe.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

5 M. RE : [interprétation]

6 Q. Monsieur Karavelic, où est-ce que Caco obtenait son financement, afin

7 d'acheter les armes auprès de l'agresseur serbe ?

8 R. C'est la question la plus difficile. Je serais présent, je pense

9 qu'aucune personne en Bosnie-Herzégovine ne pourrait vous fournir une bonne

10 réponse à cette question.

11 Q. D'après les informations que vous avez, quelles étaient vos

12 informations concernant la source du financement…afin d'obtenir les armes

13 et les munitions en 1993?

14 R. Je sais que le financement auprès du commandement du corps était

15 vraiment très modeste -- trop modeste. Je sais qu'au sein du corps

16 d'armée, je ne disposais jamais au cours de l'année 1993, de plus peut-être

17 que 100 000 deutschemarks pour l'ensemble du corps d'armée constituait de

18 85 000 personnes. Vous avez ces fonds-là, ce n'est pas seulement modeste,

19 c'est totalement inexistant pratiquement. Si je donnais 5 000 marks à la

20 brigade, pour moi, c'est beaucoup d'argent, alors que, pour le commandement

21 du corps, ce n'est rien du tout. Quant à la question de financement,

22 comment l'argent arrivait en Bosnie-Herzégovine ? Qui le distribuait ?

23 Quels tuyaux existaient ? Quelles filières existaient ? Ce sont des

24 questions beaucoup trop vastes pour moi. Je ne me permettrais pas de faire

25 de commentaire à ce sujet-là.

Page 59

1 Q. Vous avez décrit une rencontre avec la FORPRONU lorsqu'ils avaient volé

2 certains véhicules des transports de troupes. Est-ce qu'il y a eu d'autres

3 rencontres entre Caco et la 10e Brigade d'un côté et la FORPRONU à Sarajevo

4 de l'autre ?

5 R. Oui. Il y en a eu d'autres et non pas seulement avec Caco, -- non pas

6 seulement avec la 10e Brigade, mais avec d'autres unités également,

7 parfois, ils arrêtaient un soldat de la FORPRONU afin de confisquer son

8 gilet par balles ou, parfois, ils confisquaient des équipements, des

9 appareils de communication dont la brigade avait besoin, par exemple, des

10 antennes, et cetera. A chaque fois, lorsque l'on recevait l'information on

11 allait à la recherche de ces articles pour les rendre. Beaucoup de choses

12 ont été rendues et, parfois, peut-être quelque chose n'a pas été rendue,

13 mais la FORPRONU pourrait faire avec et ainsi de suite. Cela, c'était la

14 réalité à Sarajevo en 1993.

15 Car en 1993, à Sarajevo, chaque personne, y compris moi-même en tant que

16 commandant du corps d'armée, personnellement, je réfléchissais au jour le

17 jour, de manière suivante. Si la ligne de la défense est percée, et si

18 l'agresseur entre dans la ville de Sarajevo, j'avais toujours une balle qui

19 me restait et une grenade à main qui me restait et qui me permettrait d'en

20 finir avec ma vie. C'est ainsi que je réfléchissais et c'est ainsi que la

21 plupart des citoyens et des soldats réfléchissaient à Sarajevo à ce moment-

22 là.

23 Q. Est-ce qu'ils ont jamais pris de la nourriture de la FORPRONU ? Je

24 parle toujours de la 10e Brigade.

25 R. Tout à l'heure, je vous ai donnée l'exemple de l'incident, lorsqu'ils

Page 60

1 sont entrés dans un entrepôt et lorsqu'ils ont pris des sacs de pommes de

2 terre et d'autres vivres.

3 Q. Qu'en est-il des vivres émanant des citoyens privés à Sarajevo ? Est-ce

4 que vous avez reçu des informations ou des rapports concernant la 10e

5 Brigade qui confisquaient des choses auprès des citoyens ordinaires ?

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection sur plusieurs bases. Tout

7 d'abord, mon éminent collègue a posé des questions directrices.

8 Deuxièmement le témoin a clairement dit quelles étaient ses sources

9 d'information. Je considère qu'à ce stade-là on ne peut pas demander au

10 témoin de spéculer, et surtout pas de manière directrice en ce qui concerne

11 la 10e Brigade. Vraiment, je dois soulever ce point, car vous avez dit,

12 Monsieur le Président, vous avez entendu des dépositions, et on a traité de

13 toute sorte de détails concernant la 10e Brigade et je pensais que

14 maintenant la partie de la déposition en ce qui concerne le contexte du

15 crime était terminé et il n'y a pas eu d'élément de preuve du tout

16 indiquant que la 10e Brigade avait quoi que ce soit avoir avec le meurtre à

17 Grabovica, rien du tout. Je n'ai pas fait objection jusqu'à présent, mais

18 maintenant vraiment je soulève une objection à ce que l'on pose des

19 questions en général concernant la 10e Brigade et, notamment, ce genre de

20 questions directrices.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que pour nous, il est trop tard

22 -- trop tôt pour dire si cette brigade n'a absolument pas participé au

23 meurtre Grabovica, car nous devons lire tous les documents à ce stade

24 ultérieur. Nous n'allons pas tirer des conclusions de manière hâtive à ce

25 sujet, et la présentation des moyens de preuve de l'Accusation n'est pas

Page 61

1 encore terminée. De temps en toute façon, en général, nous allons permettre

2 la question concernant la 10e Brigade; cependant, pour ce qui est de cette

3 question, en particulier, je pense que le Procureur pourrait poser une

4 question concernant l'entrepôt et les actions liées à la prise des sacs de

5 pommes de terre et d'autres vivres, il peut demander si ces vivres

6 appartenaient aux militaires ou aux civils. En fonction de la question, le

7 Procureur peut élaborer sur ce plan, plutôt que de parler directement des

8 avoirs des civils.

9 M. RE : [interprétation] Je pense que la déposition du témoin est clair, et

10 corrigez-moi si je me trompe, mais je pense qu'il a dit que ceci

11 appartenait à la FORPRONU. Je pense c'est qu'il a dit dans ces dernières

12 réponses.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il faudrait clarifier cela.

14 M. RE : [interprétation] Celles-là étaient des pommes de terre de la

15 FORPRONU.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, vous pourriez clarifier cela.

17 M. RE : [interprétation] Très bien.

18 Q. Est-ce qu'il s'agissait des pommes de terre de la FORPRONU ?

19 R. Oui, les pommes de terre, mais aussi bien d'autres vivres qui

20 appartenaient à la FORPRONU. Je ne sais pas quelle était la quantité

21 exacte, mais il s'agissait de plusieurs tonnes, et il s'agissait de

22 l'entrepôt de la FORPRONU qui se trouvait à Skenderija, donc, le centre de

23 sport dans le centre de la ville.

24 Q. Je souhaite que l'on arrête maintenant de parler de la FORPRONU, et que

25 l'on parle des civils. Est-ce que vous avez reçu des informations selon

Page 62

1 lesquelles ils auraient pris des choses des civils, et si oui, quel était

2 le contenu de ces informations -- de ces rapports ?

3 R. J'ai reçu très peu d'information que je ne peux pas confirmer pour ce

4 qui est des civils, des individus, des civils en tant qu'individus, en tant

5 que citoyens, je ne peux pas dire qu'ils prenaient vraiment ce qu'ils leur

6 appartenaient, leurs objets personnels. Puis il y avait un autre aspect lié

7 en fait de les emmener creuser les tranchées. Je ne sais pas si parfois ils

8 devaient donner de l'argent dans le cadre d'un chantage. Cela, je ne sais

9 pas. De nombreuses unités du corps d'armée, parfois, ils agissaient de

10 manière arbitraire et ils confisquaient des objets appartenant aux

11 entreprises, aux compagnies, aux instituts d'état, et cetera, et souvent

12 là, il s'agissait des véhicules, des carburants, et ainsi de suite.

13 Q. Lorsque vous dites de manière arbitraire, vous voulez dire qu'ils

14 agissaient conformément à la loi, ou de manière illégale ?

15 R. Ecoutez, les deux. Si, parfois, par exemple, quelqu'un est allé dans

16 une entreprise, et qu'il appartenait au commandement de la brigade, disons

17 de la 10e Brigade, et si la personne a pris, par exemple, qu'il y avait cinq

18 tonnes de carburant dans cette entreprise, alors qu'à l'époque, à Sarajevo,

19 chaque goutte de pétrole avait une valeur en or. Ensuite, ils obtenaient ce

20 pétrole. Lorsque vous envoyez les gens de votre service de Sécurité à ces

21 personnes, et lorsque vous posez la question de savoir si ceci avait été

22 pris par la force. Leur réponse était : "Non, non, non, nous leur avons

23 donné cela de manière volontaire." Maintenant, vous pouvez tirer vos

24 propres conclusions concernant la question de savoir si c'était légal ou

25 illégal.

Page 63

1 Q. Quel était le rapport de Caco avec la 1ère Brigade de Montagne ?

2 R. A un moment donné, très moche et très hostile. Par conséquent, à un

3 moment donné, il y a eu un conflit entre la

4 1ère Brigade de Montagne et la 10e Brigade de Montagne. Leurs troupes se

5 trouvaient tout près les uns des autres, à une distance de 150 à 200

6 mètres. A ce moment-là --

7 Q. Je vais vous arrêter là. Dites-nous : à quel moment cela s'est passé ?

8 R. Je pense que c'était avant ma nomination au poste du commandant du 1er

9 Corps d'armée. Je ne suis pas sûr à 100 %.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Avant de traiter des détails, nous

11 allons procéder à une pause.

12 M. RE : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, nous allons prendre une pause de 30

14 minutes et nous allons reprendre notre travail à 1 heure moins le quart.

15 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

16 --- L'audience est reprise à 12 heures 48.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, M. Re.

18 M. RE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

19 Q. Monsieur Karavelic, avant la pause, vous nous parliez d'un incident ou

20 d'un conflit entre la 10e Brigade de Montagne et la 1re Brigade de Montagne

21 en 1993, c'est-à-dire, éventuellement avant le moment où vous êtes devenu

22 commandant. Je voudrais vous faire repasser les incidents, et je voudrais

23 vous poser des questions sur l'emplacement du QG et des QG respectifs.

24 R. Les deux commandements étaient en fait à Bistrik. J'ai déjà dit qu'ils

25 étaient séparés d'une distance de 150 à 200 mètres. Le commandement de la

Page 64

1 1re Brigade de Montagne était situé dans l'ancien bâtiment du commandement

2 du 2e District militaire du général Kukanjac, et le commandement de la 10e

3 Brigade de Montagne était situé dans le bâtiment qui jouxte celui du

4 ministère de la Défense. Q. Que s'est-il passé lors de ce conflit ?

5 R. Je me souviens de cet incident. Un rapport a été fait au commandement

6 du corps sur le fait qu'un conflit armé avait éclaté pratiquement entre la

7 10e et la 1re Brigade de Montagne. C'était en fait une attaque de la 10e

8 Brigade de Montagne sur le bâtiment de commandement de la 1re Brigade. J'ai

9 couru vers le poste de commandement à proximité de cet endroit, et sur le

10 chemin à proximité de l'hôtel Evropa, sur la rive droite de la Miljacka,

11 j'ai croisé Mujo Zulic, le commandant de la 1re Brigade de Montagne. Dans

12 mes échanges avec les officiers qui se trouvaient là, j'ai dû suivre la rue

13 qui longe la Miljacka, le fleuve vers le bâtiment du ministère de la

14 Défense et le commandement de la 10e Brigade de Montagne. J'ai dû couvrir

15 une distance de 200 mètres environ. En fait, à proximité du commandement de

16 la 10e Brigade de Montagne, il y avait un canon B-1 qui était installé. Des

17 soldats avaient pris position. Des soldats étaient là, d'autres personnes

18 traînaient. L'officier de sécurité adjoint de la 10e Brigade de Montagne

19 était présent. Son nom était Hasic, Senad.

20 Q. Excusez-moi, j'aimerais faire une pause ici. Vous avez mentionné un

21 canon B-1. Quelles sont les dimensions d'un canon B-1? Pourriez-vous nous

22 le décrire ?

23 R. C'est une pièce d'artillerie de petite dimension, 76 millimètres.

24 Q. Quelle sorte de dégâts cette arme peut-elle causer ?

25 R. Des dégâts considérables. Ce type de canon est utilisé pour des cibles

Page 65

1 de taille importante, éparpillées, et lorsqu'un projectile frappe cette

2 cible, il peut causer des dégâts considérables, des victimes humaines et

3 des dégâts matériels au sens de destruction.

4 Q. Vous avez dit que les soldats avaient pris position. Pourriez-vous nous

5 décrire la manière dont ils ont procédé ?

6 R. L'équipe chargée du canon avait pris des positions de combat. Il

7 s'agissait de quatre ou cinq soldats, et il y avait d'autres soldats à

8 proximité. Donc, position de combat, le terme lui-même est explicite.

9 Q. Le canon visait quoi ?

10 R. Le canon visait le commandement de la 1re Brigade de Montagne, mais il

11 n'était nécessaire de modifier l'angle de visée du canon de peu pour le

12 tourner dans la direction dont je venais.

13 Q. Vous avez dit que certains soldats traînaient autour et que l'officier

14 de sécurité adjoint de la 10e Brigade était présent, que son nom était

15 Hasic Senad. Poursuivez, que s'est-il produit ?

16 R. J'ai essayé de mettre un terme au conflit, comme d'ailleurs dans une

17 occasion antérieure, lorsque j'avais parlé devant le commandement du corps.

18 Néanmoins, lorsque je suis arrivé à découvert dans cette rue qui menait

19 directement au canon, une fois que je suis arrivé au pont qui traversent la

20 Miljacka, on m'a enjoint en criant de m'arrêter, que sinon on allait me

21 tirer dessus. Je me suis arrêté pendant une minute. Là encore, j'ai parlé

22 avec les soldats, avec Hasic pour les persuader de ne pas tirer, en leur

23 disant que cela ne leur servirait à rien de me tuer, qu'ils n'obtiendraient

24 rien s'ils commençaient à tirer sur la brigade voisine.

25 Petit à petit, avec un grand nombre de haltes, je suis parvenu à

Page 66

1 rejoindre le canon sans qu'ils me tirent dessus. C'est là que j'ai tapoté

2 la tête des soldats, leurs épaules, parce qu'ils m'avaient écouté et qu'ils

3 n'avaient pas tiré. J'ai demandé, j'ai enjoint Hasic Senad de renvoyer les

4 soldats vers leurs activités régulières et cela, c'était pour la 1ère et 10e

5 Brigades de Montagne. C'est comme cela que j'ai réussi à éviter le conflit.

6 Q. Est-ce que le canon vous visait lorsqu'ils vous ont crié de vous

7 arrêter ?

8 R. Oui.

9 Q. Combien de temps vous a-t-il fallu pour atteindre le canon et donner

10 vos indications aux soldats et calmer les soldats ?

11 R. Cela m'a semblé durer une éternité, mais je ne saurais vous le dire.

12 Peut-être dix à 15 minutes pour couvrir ces 150 mètres. Peut-être même plus

13 longtemps, 20 minutes. C'est très difficile pour moi d'évaluer le temps

14 qu'il m'ait fallu.

15 Q. Combien de soldats de la 10e Brigade étaient présents environ ?

16 R. C'est difficile à dire, les rues sont étroites, les bâtiments sont très

17 rapprochés. Je ne sais pas combien de soldats étaient présents autour de

18 cet autre bâtiment. Je ne m'y suis pas rendu par la suite pour vérifier.

19 Mais l'équipe chargée du canon et les soldats autour du canon étaient de 20

20 ou 30 environ.

21 Q. Est-ce que Caco était présent ?

22 R. Caco n'était pas présent.

23 Q. Est-ce que vous savez la raison du conflit ?

24 R. La raison du conflit était peut-être que le 1er Corps, dans la zone du

25 centre était de la municipalité de Stari Grad, avait quatre ou cinq

Page 67

1 brigades, et tous les commandants de brigades étaient des personnes dénuées

2 d'expérience militaire. C'étaient des officiers non professionnels. Sur ces

3 quatre ou cinq brigades, seuls Suljo Ismirevic est devenu commandant de la

4 9e Brigade par la suite lorsque les 3e et 7e Brigades ont été intégrées à la

5 99e. Cela, c'est la partie ouest de Sarajevo, par opposition à la partie

6 est, où il y avait également cinq ou six brigades. Mais là, tous les

7 commandants de brigades étaient des officiers professionnels, sauf un

8 commandant de brigade à Dobrinja, Ismet Hadzic, qui n'était pas un soldat

9 professionnel.

10 Q. Ce qui m'intéresse ici, c'est la cause de ce conflit particulier qui a

11 eu lieu ce jour-là. Est-ce que vous savez ce qui les a poussés à viser avec

12 un canon le QG de la 1re Brigade de Montagne ?

13 R. J'en parle, j'en parle. Je veux dire, je pourrais vous donner une

14 réponse très brève que vous ne comprendriez pas parce que les désaccords

15 entre la 1re et la 10e Brigade, qu'est-ce que cela peut vouloir dire pour

16 vous ? Absolument rien. Parce que la réponse serait trop brève. C'est pour

17 cela que j'essaie d'éclaircir la chose.

18 Q. Est-ce que vous étiez seul lorsque vous êtes arrivé pour essayer de

19 résoudre la situation ?

20 R. J'étais en dehors de l'hôtel. En fait, il y avait un large groupe

21 d'officiers. Je ne voulais pas leur dire de rester avec moi, mais lorsque

22 la situation a empiré, je devais partir seul et je l'ai fait.

23 Q. Est-ce que ceux qui visaient ce canon vers vous avaient conscience de

24 votre identité, de vos responsabilités lorsqu'ils vous ont dit de vous

25 arrêter ?

Page 68

1 R. En fait, tant que je n'ai pas passé le coin, je ne le savais pas moi-

2 même, mais ils pouvaient me voir pendant toute la durée de mon trajet. La

3 visibilité était idéale.

4 Q. Est-ce qu'ils savaient que vous étiez le commandant du corps, c'est-à-

5 dire soit le commandant ou soit le commandant adjoint du 1er Corps ?

6 R. Hasic Senad le savait très bien. Il avait parfaitement conscience de

7 mon identité. Quant aux soldats, certains peut-être le savaient, d'autres

8 l'ignoraient sans doute.

9 Q. Quelle était la relation de Caco avec Hasic Senad ?

10 R. A l'époque, Caco avait déjà changé de position. Il ne restait pas au

11 même endroit pendant trop longtemps. Il avait peur d'être attaqué. Il

12 sentait peut-être qu'il pourrait être attaqué. Hasim Radelic [phon] était

13 son assistant, son adjoint pour la sécurité et cela semblerait indiquer,

14 comme cela a été le cas après l'opération de Trebevic, que Senad Hasic

15 avait été également arrêté. Il avait passé un temps assez long en prison,

16 donc, on peut supposer qu'il était l'autre bras droit de cet homme.

17 Q. En termes militaires, comment est-ce que l'on pourrait qualifier le

18 fait de viser avec un canon par une brigade vers le QG d'une autre brigade,

19 et ensuite, menacer le commandant du corps avec le même canon ou le

20 commandant adjoint ?

21 R. Dans des circonstances plus ordinaires, à un moment où tout l'appareil

22 de Défense de l'Etat était opérationnel, à un moment où tous les éléments

23 du système, l'Etat lui-même, fonctionnaient normalement à tous les niveaux,

24 il aurait fallu convoquer une cour martiale. Ces personnes auraient dû être

25 sanctionnées pour les actions commises. Néanmoins, pour de nombreuses

Page 69

1 raisons, en partie objectives, en partie peut-être subjectives, cet

2 incident n'a pas été considéré comme il aurait dû l'être, il n'a pas reçu

3 l'attention qu'il aurait méritée. Les gens ont décidé que dans la mesure où

4 il n'y avait pas eu de blessés, que personne n'avait été tué, on pouvait

5 s'en tenir là. Cet incident a été traité comme, finalement, juste une autre

6 infraction au code disciplinaire.

7 Q. Par cela --

8 R. Si j'avais pris des mesures supplémentaires, finalement cela n'aurait

9 abouti à rien. Cela n'aurait fait qu'empirer la situation.

10 Q. Pourquoi dites-vous cela ?

11 R. Pourquoi est-ce que je dis cela ? Il faudrait que je donne des

12 éclaircissements plus avant. Notamment, dans la mesure où vous avez

13 interrompu ma réponse.

14 J'avais commencé à expliquer quelque chose, il y a un moment. Un

15 certain nombre de brigades dans la partie ouest de Sarajevo et un certain

16 nombre de brigades dans la partie est de la ville avec des commandants mi-

17 militaires d'un côté et des commandants professionnels de l'autre. Donc,

18 cela c'était quatre brigades dans la partie ouest de la ville et nous

19 parlons ici des 1ère et 2e Brigades de Montagne, de la 10e Brigade de

20 Montagne et de la 9e Brigade motorisée.

21 Au cours de l'été 1993 et par la suite, au fil de l'année, sur le

22 plan stratégique, l'idée était d'éviter que toutes nos brigades deviennent

23 comme celles-là. L'idée était d'empêcher la 1ère et la 2e Brigades de

24 Montagne de devenir des brigades qui résistent à notre système de

25 commandement et qui échappent à notre contrôle. Si cela avait été le cas,

Page 70

1 tout un quartier aurait été entouré, ou si l'on avait eu des signaux

2 annonçant que ces brigades essayaient de faire sécession et de se séparer

3 du 1er Corps. Les raisons sont très profondes. De toute évidence, je ne

4 pourrais que me perdre en conjectures pour parler de ces raisons, mais on a

5 mis l'accent sur les commandants des 1ère et 2e Brigades et le fait de les

6 faire revenir sous notre autorité. Ces brigades étaient importantes pour

7 des raisons territoriales du fait de l'emplacement de leur terrain, mais

8 ces terrains se trouvaient à proximité, de ceux couverts par deux autres

9 brigades, la 9e Brigade de Montagne, la 10e Brigade de Montagne et la 9e

10 Brigade motorisée. Pour une large part, nous avons réussi à éviter que ces

11 brigades ne fassent sécession.

12 Q. Pour revenir à la réponse que vous avez donnée à la question précédente

13 par rapport aux mesures que vous auriez pu prendre à l'encontre la 1ère

14 Brigade de Montagne et le fait qu'elle visait le canon vers vous et vers le

15 QG de la 1ère Brigade de Montagne, vous avez dit que cela, pour vous, était

16 une question qui relevait d'une infraction à la discipline. Pourquoi est-ce

17 que l'armée n'a pas pris de mesures à l'encontre de la 10e Brigade de

18 Montagne pour cet incident dont vous avez dit que, normalement, il aurait

19 dû générer une cour martiale ?

20 R. Ce que je pensais à l'époque, c'est une chose. Ce qui doit être fait au

21 terme de la loi, cela en est une autre. En outre, il y a un troisième

22 élément dont il faut tenir compte. Que pouvais-je faire dans ces

23 circonstances ? Les circonstances dans lesquelles je me trouvais à

24 l'époque. Ce sont des situations très particulières et il y avait conflit

25 ici. Si j'avais demandé que Caco passe en cour martiale et soit condamné à

Page 71

1 mort, comment est-ce que cette proposition aurait pu être acceptée, en

2 fait ? Pourquoi est-ce que je pensais ainsi ? Mon objectif, en tant que

3 commandant du corps, était de préserver l'unité du corps et d'éviter,

4 justement, une division au sein du corps. J'avais la mission du corps à

5 l'esprit qui était celle de défendre la ville et l'Etat. C'était cela ma

6 mission principale. Tout le reste était moins important, était relégué au

7 second plan. Notre objectif important était d'éviter les blessés, les

8 victimes. En tout cas, des victimes dans nos rangs.

9 Q. Que voulez-vous dire par, "éviter les victimes" ? Comment des victimes

10 auraient-elles pu se produire ou arriver ?

11 R. Il s'agissait d'éviter des victimes dans nos rangs. Si j'avais dit aux

12 soldats de la 10e Brigade de Montagne, à l'époque, qu'il fallait tirer sur

13 la 1ère Brigade de Montagne, ils l'auraient certainement fait, mais, en tant

14 que commandant du corps, je ne voulais certainement pas faire une chose

15 pareille. Au contraire, mon objectif était d'éviter le conflit et était

16 aussi d'instaurer une plus grande harmonie pour que le corps, dans son

17 intégralité, puisse fonctionner dans la lutte contre l'agresseur et dans

18 notre lutte pour défendre la ville Sarajevo. Par conséquent, il est tout à

19 fait approprié pour un commandant de corps de parfois éviter de regarder

20 une transgression, une infraction si cela peut aboutir à une amélioration

21 générale pour l'avenir.

22 Q. Est-ce qu'effectivement, vous avez finalement négligé de sanctionner un

23 incident où effectivement un canon vous visait pour aboutir à une

24 amélioration générale ?

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît.

Page 72

1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Je ne pas sûr que le témoin soit d'accord

3 pour dire qu'il a négligé de sanctionner l'incident. Ce qu'il explique, en

4 fait, -- bon, je ne vais pas faire un discours, vous avez tous entendu ce

5 qui a été dit. "Parfois," - il a dit - "il est tout à fait approprié pour

6 un commandement de corps de négliger un incident et de ne pas le

7 sanctionner." Évidemment, je travaille à partir de la traduction en

8 anglais. Voilà, c'est comme cela que les choses ont été formulées. Donc,

9 objection.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que les faits relatifs à

11 l'incident sont extrêmement clairs. Le problème est que nous devons établir

12 le lien entre cet incident et votre client, Monsieur Halilovic. Le témoin a

13 déjà dit qu'il s'agissait d'un incident supplémentaire d'infraction au code

14 disciplinaire. Dans l'esprit du témoin, c'était un incident qui relevait

15 d'une infraction au code disciplinaire plutôt qu'un crime. Je me demande

16 s'il est vraiment nécessaire d'entrer dans le détail sur ces points.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, comme vous le

18 souhaitez.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Re.

20 M. RE : [interprétation]

21 Q. Monsieur Karavelic, cet incident a-t-il fait l'objet d'un rapport

22 auprès du commandement Suprême ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Tout le monde en a été informé.

24 M. RE : [interprétation] Tout le monde, c'est qui ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout le monde dans la chaîne de commandement,

Page 73

1 à tous les niveaux.

2 M. RE : [interprétation] Est-ce que M. Halilovic faisait partie de la

3 chaîne de commandement, à l'époque.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais le dire à l'heure actuelle parce

5 qu'il m'est très difficile de me souvenir de la date à laquelle l'incident

6 s'est produit. Mais, si cet incident s'est produit avant que je ne me sois

7 nommé, je pense qu'il a dû se produire au cours de l'été 1993. Je suppose

8 que Rasim Delic avait déjà été nommé à un poste de haute responsabilité

9 dans l'ABiH à l'époque, ce qui voudrait dire que si nous tenons compte des

10 deux commandants en dehors du chef adjoint de l'état-major général de

11 l'ABiH, c'est-à-dire, Sefer Halilovic, cela veut dire que Sefer Halilovic

12 était numéro quatre ou peut-être numéro deux, mais en termes de structure

13 de l'armée, pour autant que je puisse en juger, numéro quatre de l'armée.

14 Q. Savez-vous si M. Halilovic a été informé de cet incident soit en vertu

15 de sa position, soit par d'autres moyens ?

16 R. Je ne saurais corroborer cette affirmation. Je crois que le

17 commandement du corps a envoyé un rapport à l'état-major général, mais il

18 faudrait le vérifier.

19 Q. Qu'en est-il de la présidence ? La présidence en a-t-elle été

20 informée ?

21 R. Je pense.

22 Q. Qu'en est-il du traitement des civils par Caco ? C'est-à-dire les

23 civils qui étaient placés sous sa responsabilité. Que savez-vous sur les

24 traitements qu'il a pu infliger aux civils ?

25 R. Je l'ai dit dans une de mes réponses précédentes. D'après les

Page 74

1 informations que j'avais émanant du service de Sécurité et d'après les

2 rumeurs qui circulaient dans la ville, il a été dit qu'il emmenait les

3 civils dans sa brigade et qu'il les engageait dans le cadre de travaux

4 physiques dans la brigade. Par conséquent, plus tard au cours de l'été

5 jusqu'à l'opération Trebevic, il y a eu des informations selon lesquelles,

6 il organisait la liquidation des personnes.

7 Q. Avez-vous obtenu ces informations-là plus tard ?

8 R. Oui, certainement.

9 Q. Est-ce que vous ou votre prédécesseur en tant que commandant du corps

10 d'armée a jamais donné des ordres concernant le traitement des civils ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Un moment, Monsieur le Président. Il faut

12 d'abord clarifier avec ce témoin, à quel moment il a appris que les civils

13 se faisaient tuer. Il ne suffit pas de demander si c'était le cas plus

14 tard. Mais dans l'affaire liée à Sefer Halilovic, il poser la question de

15 savoir quand. Cela, c'est le seul point important. Il faut le clarifier.

16 M. RE : [interprétation] Je ne suis pas d'accord, car le témoin a dit

17 "après", donc après l'opération Trebevic, je peux, bien sûr, lui poser la

18 question.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, il faudrait clarifier cela pour le

20 compte rendu d'audience, Monsieur Re.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire tout d'abord -- nous allons maintenant

23 poser plus de questions au sujet des meurtres des civils.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, il ne faut pas poser d'autres

25 questions au sujet de cela. Il faut, tout d'abord et maintenant, clarifier

Page 75

1 ce point.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, il faut d'abord vérifier de quelle

3 période on est en train de parler.

4 M. RE : [interprétation]

5 Q. Quand avez-vous entendu, pour la première fois, que Caco tuait les

6 civils ?

7 R. La première fois que j'ai reçu des informations, là il s'agissait des

8 informations vraiment très peu fiables, il s'agissait de rumeurs. C'était

9 des rumeurs qui circulaient à Sarajevo. Je ne peux pas vous dire la date

10 exacte, mais c'était à un moment donné en été 1993, je ne sais pas si

11 c'était en juillet ou en juin. Il est difficile de dire cela.

12 Cependant, jamais, absolument personne n'a pu confirmer si ceci était

13 à 100% vrai, et si c'était vrai qu'est-ce qui était vrai là-dedans. Il y a

14 eu un procès devant le tribunal cantonal de Sarajevo et jamais, même pas le

15 biais de ce procès devant ce tribunal, la vérité n'a fait le jour au sujet

16 de la question de savoir combien de civils ont été tués par Caco et, si

17 c'était le cas, comment il les a tués. Du moins, je ne le sais pas. Selon

18 les rumeurs qui circulent, le tribunal aurait déterminé qu'il avait tué les

19 civils, car une enquête a suivi, puis la police civile est allée sur les

20 lieux. Ils ont exhumé la fosse, et cetera. Mais si l'on posait la question

21 dans la ville de Sarajevo à qui que ce soit, il n'y a pas une seule

22 personne qui pourrait vous donner l'information exacte.

23 Tout d'abord, il y avait des informations en 1994, 1995, 1996 après

24 la guerre selon lesquelles Caco aurait tué 10 000 Serbes à Sarajevo. Ceci a

25 été repris dans les médias. Puis après, ce chiffre est devenu celui de 5

Page 76

1 000 au fur et à mesure que le temps passait. Ensuite, cela s'est réduit à 1

2 000. Puis après, ce chiffre s'est réduit à, je ne sais pas, peut-être un à

3 deux civils ou 10 à 15. Il m'est très difficile de parler de cela ici

4 devant ce Tribunal, de faire des déclarations officielles alors qu'encore

5 aujourd'hui, je ne connais pas la vérité.

6 Q. Justement, c'est, d'une certaine manière, la raison pour laquelle je ne

7 souhaitais pas poser d'autres questions au sujet de ce sujet. Monsieur

8 Karavelic, est-ce que vous ou votre prédécesseur, est-ce que vous avez

9 jamais donné des ordres à vos unités subordonnées concernant le traitement

10 des civils ?

11 R. Je pense qu'entre autres choses, le commandant précédent, Mustafa

12 Hajrulahovic avait donné un tel ordre en mai ou en juin et, moi-même, j'ai

13 donné un tel ordre plus tard. Je pense que Sefer Halilovic a donné un tel

14 ordre lui aussi pendant qu'il était le numéro un de l'armée.

15 Q. Est-ce que vous ou votre prédécesseur, vous avez jamais donné des

16 ordres concernant les activités criminelles telles que le racket ?

17 R. Je ne peux répondre ni par oui, ni par non. Il faudrait que j'examine

18 les documents pour le savoir. Je sais que je me suis toujours adressé au

19 service de Sécurité. J'en ai parlé hier une heure ou deux. Je leur disais

20 toujours si vous trouvez des informations positives et officielles qui

21 méritent notre attention et sur la base desquelles, il est possible

22 d'entamer une procédure judiciaire, entamez-la à l'encontre de qui que ce

23 soit. Je le disais toujours à mon adjoint chargé de la sécurité, je lui ai

24 dit : si tu as des informations concernant moi-même en tant que commandant

25 du corps d'armée entame une procédure judiciaire y compris contre moi-même

Page 77

1 sans même me consulter.

2 Q. Est-ce que Caco a été blessé à un moment donné en 1993 ?

3 R. Oui, si je ne me trompe, il a été blessé. Je pense que ce n'était pas

4 au combat. Je pense qu'il maniait une arme qui n'a pas été fabriquée en

5 série, mais de manière improvisée. Il s'agissait d'une sorte de lance-

6 grenades, quelque chose comme cela. En maniant cette arme improvisée, je

7 pense qu'il a perdu une main, je ne sais pas laquelle. D'après certaines

8 informations, ceci l'a beaucoup déstabilisé psychologiquement. D'après de

9 nombreuses estimations, c'est après cela qu'il est devenu encore plus

10 difficile pour ce qui est de la coopération, ce genre de choses.

11 Q. À quel moment, est-ce que cela s'est passé ?

12 R. Certainement en 1993, plus précisément en été 1993, mais je ne peux pas

13 vous dire la date.

14 Q. Que pouvez-vous dire au sujet de son état mental en 1993 d'après vos

15 contacts avec lui et vos activités le concernant ?

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que témoin

17 a dit qu'il n'y a pas eu de contacts entre eux, car il n'était pas autorisé

18 de ce faire, car l'autre allait le rôtir. Bien sûr, le témoin peut déposer

19 au sujet de ce qu'il a vu. S'il a eu des réunions avec lui, il peut en

20 parler. Cela peut être pertinent. La question, dans sa forme actuelle, va à

21 l'encontre des réponses précédentes du témoin. Cependant, si jamais il a eu

22 des réunions avec lui et s'il a pu observer certaines choses, dans ce cas

23 là, je ne fais pas objection à cette question.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, nous devons déterminer, quels

25 étaient les contacts entre ce témoin et l'autre personne.

Page 78

1 M. RE : [interprétation]

2 Q. A combien de reprises avez-vous rencontré Caco personnellement, en

3 1993 ?

4 R. Pendant que j'étais l'adjoint du commandant du 1er Corps d'armée en 1992

5 jusqu'à la mi-1993, bien sûr, j'ai eu beaucoup de contacts avec lui. Puis,

6 j'allais le voir personnellement dans son commandement. J'avais des

7 réunions avec lui dans son bureau, dans son commandement.

8 Q. Sur la base de ces réunions, que pouvez-vous dire au sujet de son état

9 mental ?

10 R. Je ne suis pas un psychologue, je suis un soldat professionnel. Au

11 fond, ces réunions, surtout en 1992 au début de l'année 1993, c'était

12 surtout des réunions de travail qui se terminaient de manière tout à fait

13 normale. Peut-être qu'au printemps 1993, il a eu un certain nombre de

14 réunions lors desquelles, on pouvait déjà supposer certaines choses,

15 lorsque les plaintes commençaient à arriver déjà concernant son manque de

16 coopération et son manque de respect parfois du commandement du corps

17 d'armée. Parfois, j'ai eu des entretiens avec lui qui allaient dans le sens

18 où je lui disais : "Caco, tu ne peux pas faire des choses de ton propre

19 gré, toi en tant que commandant de brigade, ni ta brigade. Cela n'a aucune

20 valeur de manière individuelle, sans le reste du corps d'armée. C'est

21 seulement ensemble, par le biais d'un combat que l'on mènera ensemble, que

22 l'on pourra défendre la ville de Sarajevo." Cela, c'était l'essentiel de

23 nos entretiens. Il se plaignait souvent, il disait que, ce que le corps de

24 l'armée lui demandait de faire, c'était trop peu de choses pour lui, qu'il

25 voulait lutter, qu'il voulait défendre la ville de Sarajevo. Je lui disais

Page 79

1 : "Caco, mais moi-même, je le souhaite tout comme toi, mais ceci n'est pas

2 possible pour telle et telle raison, et cetera." Jusqu'au moment où tout

3 contact avec lui n'a cessé.

4 Il se plaignait de tout le monde, à commencer par le président

5 Izetbegovic et tous les autres, toutes les personnes qui venaient après.

6 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin le document

7 --

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Avant de voir le document, je pense que

9 le document précédent est toujours sur l'écran et j'ai une question pour ce

10 témoin, si cela ne vous dérange pas ?

11 M. RE : [interprétation] Certainement pas.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez examiner le

13 document qui est sur l'écran, je pense qu'il y ait toujours. Vers le milieu

14 de la page, il est dit : "La source dit que le groupe de personnes autour

15 de Ramiz Delalic, Celo viennent de Sandzak et ils sont surtout les membres

16 de la brigade de la police militaire, et ils portent tous des badges avec

17 l'image de Sefer Halilovic. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que

18 représentent les badges avec l'image de Sefer Halilovic ? J'ai besoin de

19 cette clarification.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois dire qu'ici à La Haye lorsque j'ai vu

21 ce document, c'était la première fois que je l'ai vu et que j'en ai entendu

22 parler, c'est-à-dire qu'il y avait ce genre de documents, ce genre de

23 traces écrites. Quelque part dans mon esprit, j'ai l'impression que

24 quelqu'un a parlé de quelques badges pendant la guerre; cependant, je n'ai

25 jamais vu genre de badges et je ne peux pas y croire. Je ne peux pas croire

Page 80

1 que la police militaire de la 9e Brigade motorisée portait ces badges sans

2 que je le sache. Cependant, c'est tout ce que je peux dire à ce sujet.

3 Quant à la question de savoir s'ils viennent tous de Sandzak, cela

4 non plus je ne peux pas le confirmer. Je ne crois pas qu'ils venaient tous

5 de Sandzak. Certainement pas. Mais quant au pourcentage des gens de Sandzak

6 dans la 9e Brigade motorisée, il faudrait que je consulte la liste du

7 personnel de cette brigade pour pouvoir établir leur nombre exact. Pour

8 terminer, je ne peux pas confirmer cela, et j'ai l'impression qu'il s'agit

9 ici plutôt d'une tentative consciente d'inventer les choses ou d'exagérer,

10 tentative effectuée par quelqu'un.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. Excusez-moi de cette interruption,

12 vous pouvez poursuivre, Monsieur Re.

13 M. RE : [interprétation] Je vous en prie.

14 Q. Monsieur Karavelic, je souhaite vous montrer un autre document.

15 M. RE : [interprétation] Veuillez montrer au témoin maintenant la pièce

16 D219.

17 Q. Avez-vous le document sous les yeux ?

18 R. Oui.

19 Q. Le document, je le dis pour le compte rendu d'audience, c'est du 3 juin

20 1993, signé par Sefer Halilovic et concerne la création d'un comité. À ce

21 moment là, vous étiez l'adjoint du commandant du corps d'armée. Est-ce que

22 vous vous souvenez avoir vu ce document, à l'époque ?

23 R. Je ne peux pas l'affirmer avec certitude. Je pense que non, mais cela

24 reste possible. Je ne peux pas être sûr. Lorsque je parlais tout à l'heure,

25 je pensais justement à ce document-là car je l'ai vu ici chez vous,

Page 81

1 récemment, le document émanant de Sefer Halilovic, concernant les mesures

2 qui doivent être prises à l'encontre des activités du commandant de la 10e

3 Brigade de Montagne.

4 Q. Dans le paragraphe 1, qui vient après le mot "ordre", il est dit qu'il

5 faut constituer un comité mixte des représentants du commandement Suprême,

6 le ministère de l'Intérieur, l'ABiH, et le commandement du 1er Corps

7 d'armée. Que savez-vous au sujet de la constitution de ce comité en juin

8 1993 ?

9 R. Voici ce que je peux dire. J'ai une vague impression d'être au courant

10 de cela, mais il y avait plusieurs exemples de ce type. En ce qui concerne

11 ce comité, en particulier, je ne peux dire rien de plus détaillé, si ce

12 n'est que le deuxième membre du comité, Enver Maslak [phon], du

13 commandement du 1er Corps d'armée. Il était en charge des affaires liées à

14 la mobilisation, et au personnel au sein du commandement du 1er Corps

15 d'armée. Donc, probablement cette commission a été créée, et je suppose

16 qu'elle a essayé d'examiner la 10e Brigade de Montagne, mais, certainement,

17 rien de spectaculaire ne s'était passé, et c'est certainement la raison

18 pour laquelle cette commission n'a atteint aucun résultat palpable, ni

19 important. C'est mon estimation. Mais je ne trouve cela pas inhabituel du

20 tout.

21 Q. Pourquoi elle ne pouvait pas atteindre grande chose ?

22 R. Je suppose car elle n'avait pas accès à la brigade, elle ne pouvait pas

23 faire le travail conformément aux ordres donnés ici par le général Sefer

24 Halilovic.

25 Q. Nous allons maintenant passer au document dont le numéro en vertu de

Page 82

1 l'Article 65 ter est 16. Il s'agit du document numéro 01858799. Nous allons

2 vous montrer donc le document au nom de Sefer Halilovic. La partie

3 pertinente concerne la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine.

4 Je vais, notamment, attirer votre attention sur la première page, où il est

5 question des opérations, des activités de combat sur le mont de Trebevic,

6 et les activités de combat de la 10e Brigade. Est-ce que vous voyez cela ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que vous pourriez lire les paragraphes sous l'intitulé "A", au

9 fond de la page ?

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce MFI 378.

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, ce témoin, bien sûr,

12 il est possible de lui présenter touts documents que le Procureur souhaite

13 lui présenter, mais il faut d'abord déterminer si le témoin l'a déjà vu ou

14 pas.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec vous.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. Avez-vous vu ce document, Monsieur Karavelic, avant de venir à La

18 Haye ?

19 R. Je pense que non.

20 Q. Poursuivez votre lecture, s'il vous plaît.

21 R. Je l'ai lu.

22 Q. Je souhaite que vous fassiez un commentaire concernant l'exactitude de

23 l'information que M. Halilovic a transmise à la présidence.

24 R. D'après toutes les informations dont je disposais, au sujet de cet

25 événement, je pense que ceci est pratiquement entièrement objectif, réel,

Page 83

1 et vrai.

2 Q. De quelle manière M. Halilovic aurait-il obtenu ces informations-là,

3 dans une chaîne de communication militaire normale ?

4 R. Tout d'abord, la manière principale de transmission d'information de ce

5 type, concernant les activités de combat, était de la part du commandement

6 du 1er Corps d'armée. Mais je suppose -- enfin, le supérieur hiérarchique a

7 le droit d'obtenir ses informations de ce manière également.

8 Q. Je viens de vous demander de faire un commentaire sur l'information en

9 date du 28 mai 1993 : "La 10e Brigade a commencé une mission de combat sur

10 sa propre initiative, sans l'approbation du commandement du Corps d'armée."

11 Donc, il n'y a aucun rapport qui est venu au commandement du corps émanant

12 de cette brigade après le 25 mai 1993. A plusieurs reprises, le

13 commandement du corps a essayé d'influencer la direction et le commandement

14 de cette brigade, par écrit, par le biais des contacts personnels et des

15 moyens de communication, mais tout cela n'a rien donné, et la présidence en

16 a été informée également."

17 Quelle a été l'impact sur le plan militaire du fait que la 10e Brigade

18 s'est engagée dans cette mission de combat sans approbation du commandement

19 du Corps d'armée ?

20 R. L'impact était justement négatif et, justement, ce rapport envoyé par

21 Sefer Halilovic porte sur le fait que le comportement arbitraire du

22 commandement de la 10e Brigade de Montagne, qui a agi sur sa propre

23 initiative, a eu pour résultat une situation dans laquelle nous avons dû

24 activer la 1ère Brigade de Montagne, afin d'enlever la pression sous

25 laquelle la 10e Brigade était soumise, et la 1ère Brigade de Montagne a dû se

Page 84

1 préparer pour les attaques de manière plus rapide, et elle a fini par

2 attaquer -- elle a fini par avoir de bons résultats. Ils ont pris la

3 position de Vidikovac, mais après cela, quelque chose d'imprévisible s'est

4 passée, c'est-à-dire, le matin, tôt le matin, il y avait le brouillard,

5 mais le vent l'a vite dissipé et les soldats ont été exposés aux tirs

6 ennemis et la conséquence de cela a été un grand nombre de perte dans notre

7 camp.

8 Q. Est-ce que la Défense fait objection à ce document ?

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Le Procureur n'a pas posé son versement au

10 dossier --

11 M. RE : [interprétation] -- si je propose le versement.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Je ne souhaite pas que l'on fasse un

13 exercice de devinette, je veux vous dire quelle est ma position si le

14 document est proposé pour le versement.

15 M. RE : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je souhaite verser au

16 dossier, ce document également.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons reporter cet

18 argumentation ? Je pense que pour le moment, le procureur devrait se

19 contenter d'une marque aux fins d'identification. Je souhaite recevoir

20 certaines instructions concernant certains points de ce document, et

21 concernant certaines parties j'ai déjà reçu des instructions -- il se peut

22 qu'il n'y aura pas d'objection, mais je souhaite me prononcer plus tard.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, bien sûr, nous pouvons reporter

24 notre décision concernant ce document.

25 Maintenant, nous allons prendre la pause pour le déjeuner, et noud

Page 85

1 reprendrons à 14 heures 30.

2 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures 47.

3 --- L'audience est reprise à 14 heures 30.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Monsieur Re.

5 M. RE : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on pourrait encore voir le

6 document à nouveau je crois que c'était MFI 36 --

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] 378, Monsieur Re, 378.

8 Q. Monsieur Karavelic, je voudrais vous demander de faire un commentaire

9 sur le format dans lequel est présenté ce document. Est-ce qu'il vous

10 semble qu'il s'agit d'un document qui émane du commandement Suprême ? En

11 1993, est-ce qu'il possède le format normal de ce type de document ?

12 R. Je n'ai pas pu voir la signature à la fin du document, mais l'en-tête

13 du document en effet semble être l'en-tête normal.

14 Q. Peut-on passer maintenant à la page 2 en ensuite à la page 3 de ce même

15 document ? Est-ce que vous pouvez maintenant voir les deuxièmes et

16 troisièmes pages ?

17 R. Je n'ai que la page 2. En fait, la dernière page avec la signature. En

18 tout, il y a deux pages.

19 Q. Il devrait y en avoir une au milieu. Pourriez-vous voir maintenant la

20 page du milieu ?

21 R. Je pense oui. Je la vois. Elle contient le paragraphe b.

22 Q. Passons maintenant à la troisième page si vous le voulez bien. Il y a

23 des mots écrits dans la marge -- sur la partie gauche de la page et, en

24 traduction anglaise, cela dit : "Deuxième évènement tragique à Dobrinja."

25 Est-ce que vous reconnaissez cette écriture ?

Page 86

1 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'étais pas au

2 courant de ceci. Est-ce qu'on va essayer de trouver des éléments de preuve

3 concernant l'écriture de M. Halilovic ou l'écriture de quelqu'un d'autre ?

4 Je ne suis pas du tout au courant de ceci, je suis franchement surpris de

5 quel type d'élément de preuve il s'agit. Il faudrait qu'on le sache…

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne sais pas non plus. Il va falloir

7 entendre la question. Est-ce que vous pouvez entendre une minute avant que

8 la question soit véritablement posée ?

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Je pensais que la question avait déjà été

10 posée. Si vous voulez, alors, bien entendu.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Continuons, Monsieur Re.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. Est-ce que vous reconnaissez cette écriture non pas en tant qu'expert

14 mais en tant que quelqu'un que vous aviez pu -- qui a pu rencontrer cette

15 écriture ou pas ?

16 R. Je ne reconnais pas cette écriture. Cela ne me dit rien.

17 Q. Maintenant que vous avez les deuxième et troisième de documents, est-ce

18 que vous pouvez, si oui ou non, cela semble être forme de communication

19 normale entre le commandement Suprême à partir du mois de juin 1993 ?

20 R. Il me semble, que oui, que ce document a le format normal. J'ai eu

21 l'occasion de voir de différents documents émanant du QG du commandement

22 Suprême, et de l'état-major visant le commandement Suprême, ou des

23 événements, ou des évaluations sont décrites aux données.

24 Q. Autre chose, 65 ter 20, 081858798.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] MFI 379.

Page 87

1 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Il me

2 semble que je n'ai pas ce document. Si je suis le seul, bien, je ne sais

3 pas.

4 M. RE : [interprétation] Bien. Cela semble avoir été communiqué.

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Je sais où se trouve le problème. Est-ce

6 que je peux demander l'indulgence de l'Accusation pendant un instant, s'il

7 vous plaît, pendant que nous remédions à cette situation concernant

8 l'écran ? Voilà.

9 M. RE : [interprétation]

10 Q. Première question, Monsieur Karavelic, comme d'habitude, avez-vous déjà

11 pu voir ce document avant de venir ici à La Haye ?

12 R. Je ne me souviens pas d'avoir vu ce document jusqu'ici.

13 Q. Regardez maintenant le format de ce document, l'entête, "République de

14 Bosnie-Herzégovine, état-major du commandement Suprême des forces armées,

15 bureau du commandant." La date est le 9 juillet 1993. Tout comme je vous ai

16 demandé de faire un commentaire sur le format du document que nous avons

17 regardé tout à l'heure. MFI378, pouvez-vous maintenant commenter sur le

18 format de celui-ci ?

19 R. Là aussi, il s'agit d'un format d'un document tout à fait normal. Je ne

20 sais pas qui l'a signé. C'est sans doute le commandant de l'état-major du

21 commandement Suprême.

22 Q. Qui était le commandant de l'état-major du commandement Suprême, du 7e,

23 je veux dire, le 9 juillet 1993 ?

24 R. Le général Rasim Delic.

25 Q. Le document dit qu'il y a une liste de personnes qui ont été légalement

Page 88

1 emprisonnées d'après les informations qui étaient à la disposition de

2 l'état-major du commandement Suprême, les personnes suivantes ont été

3 arrêtées et sont encore en détention auprès de la 10e Brigade de Montagne.

4 C'est une liste de 15 personnes. Le premier s'appelle Azir Delkic, est-ce

5 que vous connaissiez M. Amir Delkic à partir du 9 juillet 1993 ?

6 R. Je ne suis pas tout à fait certain. Il me semble que Ramiz Delic qui

7 est le premier sur cette liste était mon officier de sécurité du

8 commandement du 1er Corps, l'un de mes hommes, si je ne me trompe pas. Bien

9 que, la première fois que j'ai vu ce document, ce n'était qu'il y a deux

10 jours, et je me souviens qu'à un moment donné, il était également pris par

11 la force par des membres de la

12 10e Brigade de Montagne.

13 Q. Vous voulez dire pris par la force et ?

14 R. Je ne peux pas dire exactement les différentes mesures que nous avons

15 prises, mais il a été libéré au bout d'un certain temps, et il est revenu

16 dans le service.

17 Q. En bas de ce document. Je me reprends. Quand vous parlez de pris par la

18 force, vous êtes en train de faire référence au fait de creuser des

19 tranchées, le fait que la 10e creusait ses tranchées ?

20 R. Oui, c'est probablement cela. Je ne peux pas véritablement expliquer

21 avec précision. Je ne connais pas tous les détails, mais j'ai vaguement un

22 souvenir du fait qu'il avait un certain nombre de problèmes pendant une

23 certaine période, et qu'il avait été détenu par les membres de la 10e

24 Brigade de Montagne.

25 Q. Il y a d'autres personnes sur cette liste, 14. Est-ce que vous

Page 89

1 reconnaissez ou vous connaissez certaines de ces personnes ?

2 R. Non.

3 Q. Les informations concernant ces personnes comment ont-elles pu être

4 obtenues par l'état-major du commandement Suprême dans les procédures

5 normales de communication militaire ?

6 R. La communication pour le commandement Suprême vis-à-vis de personnes

7 appartenant au 1er Corps, en général, la communication se passait à travers

8 le commandement du 1er Corps; cependant, le commandement Suprême a le droit

9 d'obtenir des informations de différentes façons à travers ses propres

10 services, ou de manière diagonale, si on peut dire, en évitant la première

11 phase, à savoir le commandement du 1er Corps, c'était leur droit. C'était

12 quelque chose qui n'arrivait en pratique que très rarement.

13 Comment ils auraient pu obtenir de telles informations ? Bien, il y a

14 plusieurs façons. En particulier, provenant d'Amir Delkic qui a été

15 rapidement libéré peut-être c'est lui qui leur a fourni ces informations,

16 c'est la première personne qui apparaît sur la liste.

17 Q. Dans le document, sur la première ligne, on voit, ont été arrêtés et

18 continuent à être détenus.

19 R. C'est simplement une affirmation de type générique. Beaucoup de choses

20 n'étaient pas connues à l'époque. Peu importe que ces personnes venaient

21 d'être arrêtées, si elles étaient encore détenues ou, si Amir Delkic avait

22 été libéré dans les cinq minutes que le document n'ait été rédigé, on

23 aurait su que quelques jours après. De toute façon, ce sont les

24 informations générales.

25 Q. Passons maintenant au dernier paragraphe, il est dit : "Que quelques

Page 90

1 douzaines d'autres citoyens membres de l'ABiH et de la HVO avaient été

2 illégalement arrêtés détenus dans les zones de responsabilité de la 10e

3 Brigade, là où ils menaient des travaux de fortification."

4 Est-ce que vous, vous savez si des membres de l'ABiH ou de la HVO ont été

5 détenus et forcés à faire des travaux de fortification de la même manière

6 que l'avaient été les civils.

7 R. Pour autant que je le sache, la 10e Brigade de Montagne ne faisait pas

8 de différence concernant si oui ou non c'était des membres de l'armée ou

9 des civils, à condition qu'à un moment donné ou un autre, ces personnes ne

10 faisaient rien en particulier et qu'on les voyait au centre ville dans un

11 café en train de prendre un café et qu'il y avait des combats menés par la

12 10e Brigade montagnarde. Ils enlèveraient ces personnes parce que c'était

13 leur conception de la façon normale de procéder, de faire en sorte que ces

14 personnes participent aux batailles ou soient impliquées dans des travaux

15 de fortification pour les besoins de la 10e Brigade de Montagne. De la même

16 façon, on ne faisait pas de distinction en termes de nationalités, et sur

17 cette liste de quinze personnes, je pense qu'il y a 14 bosniaques,

18 musulmans et seule la personne numéro 13 est soit serbe, soit croate; je ne

19 peux pas en être sûr. Ils ne faisaient pas non plus de différence quant à

20 savoir si telle ou telle personne était le fils ou un parent de l'un ou de

21 l'autre. En termes d'ethnicités, il me semble me souvenir que certains

22 ministres ont été enlevés pour venir faire des travaux de tranchées; je ne

23 me souviens toutefois pas de quel ministre, ni quand. Mais en tout cas,

24 tout ce que je peux vous dire quant aux questions que vous pouvez me poser

25 à cet égard, émane logiquement de ce que je viens de dire.

Page 91

1 Q. Est-ce qu'on peut verser celui-ci au dossier ?

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, nous ne sommes pas

3 d'accord. On pourrait prendre la décision jusqu'à la fin, tant que je n'ai

4 pas de plus en plus d'information, mais si vous ne voulez pas, on peut

5 essayer de le faire maintenant.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Non, nous allons attendre.

7 M. RE : [interprétation] Concernant cette affaire, peut-être pour couvrir

8 cette objection, je pourrais demander au témoin d'autres informations,

9 plutôt que d'attendre la fin alors qu'il ne sera plus là.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Il y a deux réponses à cela. La première,

11 c'est que c'est à mon collègue de voir ce qu'il faut faire. La deuxième --

12 non, je pense qu'il est tout à fait normal de faire cette demande

13 d'attendre à la fin. Je pense que je vais objecter, et le témoin n'a pas

14 déjà vu ce document. Par conséquent, je pense que les choses vont procéder

15 de cette manière.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] J'ai déjà pris une décision, nous allons

17 attendre jusqu'à la fin.

18 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

19 M. RE : [interprétation] Merci.

20 Q. Concernant ce document, enfin vous m'avez donné une réponse concernant

21 l'attitude de la 10e Brigade vis-à-vis des civils, quelque soit leur

22 appartenance et leurs activités concernant le travail des tranchées.

23 Maintenant, si vous regardez le document dans son ensemble, pouvez-vous

24 nous donner votre avis concernant la précision, l'exactitude, d'après vos

25 connaissances des actions qu'ont menées la 10e à cette époque. Est-ce que

Page 92

1 vous pensez que c'est précis ou pas ?

2 M. MORRISSEY : [interprétation] C'est une spéculation. C'est une question

3 directive et j'ai une objection.

4 M. RE : [interprétation] Je continue néanmoins, le témoin a témoigné

5 concernant la 10e, et on essaie de trouver si oui ou non ces informations

6 sont précises.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, le Président, je pense

8 que le témoin a déjà répondu à la question. D'après ces précédentes

9 questions et réponses, je pense que nous avons une idée tout à fait claire.

10 M. RE : [interprétation] D'accord.

11 Q. Nous allons maintenant passer à un autre document qui est sur ma liste.

12 Il y avait un numéro MFI205, il me semble. Nous allons essayer de le verser

13 au dossier à travers M. Jasarevic.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela n'a pas été versé au dossier.

15 M. RE : [interprétation] Je vais essayer de le faire avec ce témoin. Est-ce

16 qu'on peut montrer ce document au témoin ?

17 Est-ce que vous avez besoin de l'ERN ?

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Non, Monsieur Re, je l'ai déjà.

19 M. RE : [interprétation]

20 Q. Vous voyez le document Monsieur Karavelic ?

21 R. Oui.

22 Q. Il est daté du 6 juillet 1993. Il s'agit d'un document émanant du

23 ministère de l'Intérieur, il porte le titre "Information", qui concerne

24 tout d'abord une attaque sur le commissariat le 2 juillet 1993 par les 9e

25 et 10e Brigades.

Page 93

1 Tout à l'heure vous avez parlé du fait que ce commissariat avait été

2 assiégé et qu'il y avait eu un blocus du QG au mois de juillet 1993.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Avant de poursuivre ce questionnement, il

4 faudrait rappeler la première question comme il l'a dit tout à l'heure.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien sûr.

6 M. RE : [interprétation] Je promets. Je le ferai.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Cela devrait toujours être la première

8 question, quelle que soit le nouveau document.

9 M. RE : [interprétation] Je vais essayer de me corriger.

10 Q. Avez-vous déjà vu ce document avant de vous rendre à La Haye ?

11 R. Je ne pense pas.

12 Q. Veuillez jeter un œil sur les informations contenues dans les premier

13 et second paragraphes.

14 R. Voilà, je l'ai fait.

15 Q. Plus tôt, vous avez parlé du fait que le commissariat avait été

16 entouré, et qu'il y avait eu un blocus au QG au mois de juillet 1993. A

17 partir de ce témoignage que vous avez déjà fait et votre connaissance de

18 ces deux incidents, quelle est votre évaluation de cette situation ?

19 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai une objection. Le témoin, on ne peut

20 pas lui demander d'évaluer la précision d'une information, car cela n'est

21 absolument pas pertinent à ce que va décider le Tribunal. On peut lui

22 demander s'il a vu telle ou telle chose, et qu'est-ce qu'il a à dire là-

23 dessus, mais si l'a vu le document à l'époque, ou avait d'autres

24 connaissances relatives à cette affaire, mais de lui poser la question de,

25 en quelque sorte, authentifier ce qui est mis dans ce document est une

Page 94

1 tentative d'essayer de donner une légitimité au document. J'ai une

2 objection vis-à-vis de cette tentative. Il ne s'agit pas d'authentifier le

3 document à proprement parler mais de parler de son contenu.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est juste une question de forme dans le

5 document, on va passer à des questions qu'on peut appeler normales,

6 Monsieur Re.

7 M. RE : [interprétation] Suite à la question que je viens de poser, il y a

8 eu objection alors qu'on venait de me demander de poser une question

9 concernant sa précision.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous comprends. Pour moi. il n'y a pas

11 de différence. La précision ou manque de précision, à l'époque, si oui ou

12 non ce qu'il a vu correspondait à ce qui est dit dans ce document, je pense

13 que c'est là notre but. Pour moi, il n'y a pas de différence entre les

14 deux, mais puisqu'il y a une objection de la Défense, on va adopter

15 l'approche normale en ce qui concerne les questions à poser.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. Est-ce que ce qui est écrit dans ce document correspond à vos propres

18 informations concernant ce qui s'est passé ?

19 R. En fait, j'avais très peu d'informations concernant cet événement en

20 particulier, et pourquoi ? Parce qu'il est tout à fait possible qu'à

21 l'époque ou même avant, j'avais déjà quitté la ville de Sarajevo sur les

22 ordres de mes supérieurs, et je m'étais déjà rendu à la montagne Igman, de

23 façon à ce que je n'ai que pu entendre parler de cet incident. Il est très

24 difficile pour moi de donner des détails spécifiques en ce qui concerne cet

25 événement, à la lumière de ce que j'ai déjà dit.

Page 95

1 Q. Passons maintenant au troisième paragraphe. Il est dit que : "D'après

2 les informations actuellement disponibles, l'attaque armée contre les

3 locaux de la SJB et des employés par la 10e Brigade de Montagne a été menée

4 entre autres par Musan Topalovic, qui est connu sous le nom de Caco, Senad

5 Hasic," et une liste d'autre noms. Ensuite, on parle de Ramiz Delalic,

6 appelé également Celo et Mustafa Hata, appelé Musa. [phon] D'autres noms de

7 personnes appartenant à la 9e Brigade motorisée, et enfin -- La question

8 est la même que précédemment; est-ce que cela est en accord avec les

9 informations que vous déteniez, concernant les personnes qui étaient

10 impliquées dans l'attaque du commissariat ?

11 R. Je ne peux que confirmer ce qui est dit à propos d'un certain nombre de

12 ces personnes que je connais, qui étaient sous la direction de Caco et un

13 certain nombre de ses hommes, et également des personnes de la 9e. Vous

14 avez dit 10e Brigade motorisée, à savoir Ramiz Delalic, Celo, et un certain

15 nombre d'autres personnes de cette brigade. Mais à l'époque, je n'avais pas

16 les noms de ces personnes, mais fondamentalement, ma réponse est

17 pratiquement identique à la précédente question, en ce qui concerne ce type

18 d'informations.

19 Q. Passons maintenant au document P206.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Mon collègue a indiqué qu'il allait verser

21 ce document au dossier. Je ne sais pas si c'est vrai.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous avons déjà décidé qu'on allait s'en

23 occuper en même temps que tous les documents.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien sûr, j'en suis conscient, mais je me

25 demandais si mon collègue allait présenter tous les documents pour les

Page 96

1 faire verser au dossier, et s'il faut les passer un par un en revue.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pour moi, c'est pareil. Je ne sais pas si

3 la meilleure façon de procéder, ce serait peut-être de laisser M. Re nous

4 dire ce qu'il préfère.

5 M. RE : [interprétation] Je n'allais pas persister à essayer de verser les

6 documents, étant donné les réponses qui m'avaient déjà été données.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

8 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci pour votre aide, Monsieur le

9 Président.

10 M. RE : [interprétation] P206.

11 Q. Est-ce que vous avez ensuite le suivant, qui est daté du 10 juillet

12 1993, avec comme en-tête "administration de la sécurité"? C'est une note

13 officielle. Tout d'abord, est-ce qu'il s'agit-là d'un document que vous

14 aviez déjà vu avant de venir à La Haye ?

15 R. Non. Peut-être que j'ai mal répondu. Je n'ai pas vu ce document avant

16 de me rendre cette fois-ci à La Haye.

17 Q. Reportez-vous s'il vous plaît aux faits concernant l'attaque planifiée.

18 Avez-vous eu connaissance de cela, et quand avez-vous reçu les informations

19 que nous y voyons, à quel moment ?

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Il s'agit de ces questions de l'ordre de :

21 "Avez-vous arrêté de battre votre femme ?" Cela tout simplement semble en

22 quelque sorte anticiper sur la réponse, question directrice.

23 M. RE : [interprétation] Je ne vois pas en quoi ceci pourrait être

24 directif.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être que la première partie de la

Page 97

1 question est correcte.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] D'accord.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être qu'on pourrait reformuler

4 l'autre partie de la question, voir quel est le statut de ce document.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'un

6 document qui était admis pour être versé au dossier le 4 mars de cette

7 année-ci.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.

9 M. RE : [interprétation]

10 Q. Je sais que vous avez maintenant connaissance de cette information,

11 mais au temps où l'attaque a eu lieu, est-ce que vous avez eu connaissance

12 de cette information ?

13 R. Non, pas en ce moment-là, pas non plus au temps de la guerre, et même

14 jusqu'à maintenant, tant qu'on n'a pas donné lecture de ce qui suit.

15 M. RE : [interprétation] Je voudrais que l'on présente au témoin le

16 document suivant au titre de 65 ter. Il s'agit du document 155, ERN numéro

17 02183086.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de MFI380.

19 M. RE : [interprétation] Vous l'avez le document, et ma première question -

20 -

21 Q. Le document porte la date du 28 août 1993. Il s'agit d'un document

22 émanant de Sacir Arnautovic, votre chef de sécurité, adressé à la direction

23 de la sécurité au commandement Suprême. Ma première question : avez-vous vu

24 ce document en 1993 ?

25 R. Je n'en suis pas certain, mais je pense que je ne l'ai pas vu non plus.

Page 98

1 Q. Je vous prie de lire ce document.

2 R. J'ai lu le document.

3 Q. S'agit-il du document pour lequel à prime à bord on dirait qu'il émane

4 du commandement du 1er Corps au temps où vous étiez commandant du Corps.

5 R. A en juger d'après la date qui y est apposée et à en juger d'après la

6 façon dont le document était charpenté, s'il s'agit d'un document valide,

7 il émane des cercles de sécurité du commandement du 1er Corps d'armée.

8 Q. Est-ce que vous avez sous vos yeux également la seconde page où se

9 trouve apposé une signature ?

10 R. Oui.

11 Q. A qui est-elle cette signature ?

12 R. Je ne saurais précis. Probablement Sacir Arnautovic a signé le

13 document, mais en tout cas je ne me souviens pas comment se présente sa

14 signature à lui. Autrement, je ne sais pas à qui est la signature. Si vous

15 y voyiez doute, alors là, je ne sais pas ce que cela pourrait être, de qui

16 la signature pourrait être.

17 Q. Que pouvez-vous nous dire quant à l'exactitude des informations que

18 contient ce document-ci ?

19 R. Je ne peux dire que pour la plupart du contenu que présente ce

20 document, j'en ai pris connaissance pour la première fois aujourd'hui

21 lorsque je l'ai lu le document. D'une manière générale, je crois pouvoir

22 dire que c'est la première fois pour moi d'entendre parler de cela.

23 Q. Il est une information où il dit que : "la source nous a mandé que le

24 lobby de Sandzak mène de nombreuses opérations par Celo et Caco sous forme

25 de contrebande, pillages, assauts, et cetera, pour en tirer des profits."

Page 99

1 Que pouvez-vous dire quant à l'exactitude et quant à la signification de

2 cette partie de l'information ?

3 R. Ecoutez, lorsqu'on mentionne le terme de lobby du Sandzak avant la

4 guerre en Bosnie-Herzégovine, ce terme a été utilisé tel un argot

5 appartenant à certains milieux, à certains gens de Sarajevo. Au temps de la

6 guerre, pendant la guerre, et encore aujourd'hui et surtout je diras, par

7 conséquent, il me semble que c'est un terme tellement usé. Je crois, à

8 force d'être utilisé, que ce terme ne doit absolument rien dire du tout.

9 Mais je ne peux pas pour autant non plus dire qu'il n'y en avait-il dit là

10 quelque chose. En tout cas, quant à moi, je ne peux pas confirmer quoi que

11 ce soit, lorsqu'il s'agit de ce document et de ce qui était allégué dans le

12 cas du document.

13 Q. Ce que je vous demande à moi c'est l'exactitude de l'information que

14 vous avez pu avoir à cette époque-là quant aux allégations selon lesquelles

15 Celo et Caco auraient pris part à la contrebande, revente de produits

16 déficitaires, qu'ils prenaient part également à des pillages par effraction

17 et banditisme et vols, et cetera.

18 R. Ecoutez, pour parler de leurs origines, je dirais que Ramiz Delalic et

19 Celo étaient d'origines de Sandzak. Musan Topalovic, Caco, lui, il n'était

20 pas. Par conséquent, pour être très précis et exact, on ne devrait pas dire

21 que ceci est dû au lobby de Sandzak, qu'ils l'ont fait.

22 Comme vous le dites vous, de nombreuses sources prétendent que oui, quant à

23 eux deux, ils l'ont fait. Ils s'adonnaient à cela. Mais le fait est qu'il

24 n'y a pas que des sources les concernant. Il y a d'autres sources

25 concernant d'autres officiers, d'autres chefs, officier chefs, et

Page 100

1 commandants. Mais voilà, qu'ici, devant cette Chambre de première instance,

2 je ne peux pas dire : oui, cela est exacte, ils ont fait cela. Parce qu'à

3 l'appui, je n'ai aucune preuve solide à offrir dans laquelle je peux

4 corroborer ce que vous me demandez et ce à quoi je m'en tiendrais.

5 Si on nous pose la question, à savoir, à quel moment Caco a acheté un fusil

6 ou a vendu un fusil ou a fait telle ou telle acquisition, moi, en tant que

7 commandant de corps, que voulez-vous que je vous dise là-dessus ? Je ne

8 sais ni le lieu ni la date ni à combien de reprises il l'a fait. Je ne peux

9 pas savoir à dire non plus qu'il ait fait de telles acquisitions. Or,

10 certainement les gens de sécurité ont pu obtenir des données de la part de

11 leurs sources à eux. Qui sont ces sources-là ? Ce ne sont que les chefs de

12 sécurité qui peuvent le savoir. Moi, en tant que commandant, je ne voulais

13 pas évidemment entrer dans ce domaine-là.

14 Encore que j'avais à formuler des remarques, et cela à bien des reprises à

15 ce sujet. Si vous me le permettez, permettez-moi de vous relater un

16 évènement s'y reportant, lorsqu'il s'agit de services de sécurité,

17 lorsqu'il s'agit de la façon dont ces services de sécurité fonctionnaient,

18 en effet.

19 En 1994, le président Izetbegovic a reçu une lettre me concernant dans

20 laquelle la lettre, d'après telle ou telle information, avait-on dit que

21 moi aussi, j'étais un des criminels de plus haut rang de Sarajevo, moi, en

22 tant que commandant de corps d'armée. Lorsque je puis avoir ce document,

23 sans demander une autorisation quelconque, sans demander, je suis allé voir

24 le président Izetbegovic et je puis voir qu'à ce document il y a été apposé

25 la signature du président Izetbegovic. Je lui ai dit : "Monsieur le

Page 101

1 président, pourquoi n'avez-vous pas fait une instruction pour élucider le

2 fait jusqu'au bout ? Parce que si je suis quelqu'un qui répond à ce qui a

3 été dit sur moi dans le cas de ce document, pourquoi ne m'avez-vous pas

4 démis de mes fonctions jusqu'à maintenant ? Pourquoi ne m'avez-vous pas

5 pendu près de la torche éternelle, en place, à Sarajevo ? Je crois que vous

6 devez tout simplement faire quelque chose à mon encontre ou bien à

7 l'encontre de celui qui aurait été la source de cette information." Voilà

8 tout ce qui a découlé de cette conversation. Le président Izetbegovic garde

9 son silence sans m'en dire. Voilà. Je vous parle d'une situation qui

10 prévalait dans Sarajevo en 1993, si vous voulez bien me suivre et me

11 comprendre.

12 Q. Très bien. Vous nous dites, entre autres, que Celo était d'origine de

13 Sandzak et que Caco ne l'était pas. D'où venait Sefer Halilovic ?

14 R. Croyez-moi, j'ignore son lieu de naissance. Lui habite à Sarajevo. Je

15 suppose que, pour parler de son origine, Sefer Halilovic devrait être de

16 Sandzak, lui aussi, de même que Ramiz Delalic, Celo. Alors que Musan

17 Topalovic, Celo, je ne sais pas de quelle origine il est. Je suppose qu'il

18 est sarajévien d'origine. Je ne pense pas qu'il soit de Sandzak.

19 Q. Passons au paragraphe suivant. Deuxième paragraphe, on

20 dit : "D'après les sources et les informations, un bon nombre de citoyens

21 ont fait objet de chantage, se sont vus obligés de payer d'importantes

22 sommes et montants en devise pour pouvoir bénéficier du soutient de Caco et

23 Celo pour s'occuper de leurs affaires sans problème." Je vous prie de vous

24 y reporter, de voir ce qui est écrit dans le document pour dire à la

25 Chambre de première instance si cela était conforme aux informations que

Page 102

1 vous aviez sur ces gens-là à cette époque-là quant à leurs activités ?

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, voilà que j'ai à

3 soulever une objection. Là-dessus on lui a posé une question, il a répondu,

4 et il a tout dit sur la requête. Maintenant, lui demander de faire un

5 commentaire sur un document qu'il n'a jamais vu où il a dit explicitement

6 qu'il ne pouvait pas être certain quant à l'affaire à citer de document, je

7 ne pense pas qu'il soit approprié de procéder ainsi. Nous avons une

8 objection à soulever.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Qui plus est dans le document, il était

10 dit que : "la source prétend," et cetera. Il ne s'agirait pas d'une

11 information de première main. Il ne s'agit que d'élément de preuve de

12 seconde main. Par conséquent, et puis après, nous voyons que ce témoin a

13 prouvé également tout à l'heure, il a déposé pour dire qu'il n'a jamais vu

14 ce document jusqu'à maintenant. Par conséquent, ce serait d'après les ouï-

15 dire une source de troisième main, et cetera. Par conséquent, je me demande

16 si jamais cela était pertinent et où cela nous mène, où nous pouvons y

17 aller moyennant ce document et par le truchement de ce témoin-ci.

18 M. RE : [interprétation] Je vous comprends, Monsieur le Président. Nous

19 pouvons passer à un autre sujet.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous en prie.

21 M. RE : [interprétation] Je voudrais que l'on présente le document toujours

22 au titre de l'Article 65 ter, numéro 22, ERN numéro 01805241.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit du document

24 MFI381.

25 M. RE : [interprétation]

Page 103

1 Q. Il s'agit d'un ordre émanant de Sefer Halilovic, un commandement du

2 commandant du 1er Corps d'armée en date du 30 juillet 1993, au sujet de

3 l'envoi des unités de la 5e Brigade et la 9e Brigade motorisée, de même que

4 de l'envoi d'une compagnie d'une partie de la brigade de la 9e Brigade

5 motorisée, lesquelles unités devraient faire partie des effectifs du

6 détachement à affection spéciale Zuka. Est-ce que vous vous souvenez avoir

7 reçu ce document en 1993 ?

8 R. Je ne me souviens pas l'avoir vu, l'avoir obtenu, parce qu'à cette

9 époque-là je me trouvais à Igman. C'est ce jour-là ou plutôt quelques jours

10 au préalable, et quelques jours après cette date-là, moi-même et le général

11 Delic, le général Halilovic, Mustafa Halilovic, nous ne pouvions

12 communiquer que par transmission radio Motorola. Je crois qu'il s'agit d'un

13 document rédigé par eux à ma demande, lorsque, peut-être ces jours-là,

14 puis-je me tromper d'un jour ou deux, lorsque je leur avais demandé à mes

15 supérieurs de dépêcher à mon intention d'urgence de secours, car je n'avais

16 pas suffisamment de soldats. On risquait de voir l'agresseur créer un

17 second anneau pour bloquer Sarajevo; l'agresseur avançant depuis Trnovo et

18 l'agresseur avançant de Hadzici. Les deux agresseurs, pour nous, il y avait

19 risque de se voir en jonction. Par conséquent, le document que j'ai sous

20 mes yeux ne m'a jamais été montré.

21 Q. Dans le passage où nous lisons : "Immédiatement au cours de la nuit,

22 envoyez une unité respectivement de la 101e Brigade motorisée, de la 5e

23 Brigade motorisée, et de la 9e Brigade motorisée pour arrêter la percée de

24 l'agresseur."

25 Second paragraphe : "Une compagnie de la 101e Brigade motorisée et de la 5e

Page 104

1 Brigade motorisée se présentera d'abord à faire rapport à vous, commandant

2 du 1er Corps d'armée, alors qu'une compagnie de la 9e Brigade motorisée

3 devrait être détachée pour faire partie intégrante des effectifs de

4 détachement à affectation spéciale Zuka."

5 Pour quelles raisons cette dernière devait-elle faire partie de ce

6 détachement affectation spéciale ?

7 R. Je ne saurais vous dire grand-chose là-dessus non plus. Je ne sais pas

8 tout simplement. Cela me semble illogique de voir ce document rédigé de la

9 sorte. C'est le droit discrétionnaire du commandant primo. Secondo, cette

10 compagnie n'a jamais fait partie intégrante des effectifs du détachement de

11 Zulfikar, car si je ne m'abuse pas le document a été rédigé le 30 juillet.

12 Les unités ne pouvaient pas sortir de Sarajevo via l'aéroport, car ce n'est

13 que la première route -- le matin que le tunnel a été percé. Zulfikar, sans

14 mon autorisation, de façon délibérée, était parti avec toute son unité sans

15 plus jamais regagner Igman.

16 Q. Quelles sont les raisons militaires que vous pouvez peut-être remémorer

17 vous en tant que commandant chevronné pour que, par exemple, le chef de

18 l'état-major, M. Halilovic, donne l'ordre pour portant détachement de cette

19 unité pour que celle-ci puisse être affectée par l'unité de Zuka ?

20 R. Vous m'invitez à faire des appréciations, chose que je n'aimerais pas

21 faire. Le commandant chef d'état-major est en droit de le faire. Il le fait

22 moyennant cet ordre. Voilà que cet ordre, tel que je le vois, n'a jamais

23 été exécuté, notamment, au niveau du point 2 de l'ordre, non plus, que je

24 ne pouvais pas savoir, quant à moi, étant à Igman, que ceci devait être

25 exécuté. Je n'ai jamais entendu parler qui que ce soit avant de voir ce

Page 105

1 document. Ce n'est que le

2 2 ou 3 août qu'une première compagnie de cette 5e Brigade motorisée m'a

3 rejoint, passant à travers le tunnel pour me porter secours à Igman.

4 Par la suite, je ne sais plus après combien de jours, une compagnie de la

5 9e Brigade motorisée viendra également, une autre compagnie de la 101e

6 Brigade viendra également, se trouvant sous mon contrôle. Ils ont pris

7 possession, les deux unités, à Igman pour engager le combat, riposter à

8 l'agresseur et moyennant une âpre bataille menée résistance livrée à

9 l'agresseur. Voilà, que l'agresseur n'a pas réussi à imposer à Sarajevo un

10 double anneau de siège de son blocus.

11 Q. Etait-ce une pratique militaire ordinaire lorsque nous parlons de M.

12 Halilovic, étant donné sa capacité ? C'était le numéro 2, le numéro 4 de

13 l'armée. Etait-ce une pratique ordinaire de voir détacher telles ou telles

14 parties de la brigade pour la rattacher à quelqu'un d'autre ?

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

16 je pense que ceci demande clarification. Mon honorable collègue demande

17 s'il s'agit d'une pratique militaire ordinaire lorsqu'il s'agissait de

18 parler de contexte de l'Igman, ou s'agissait-il de parler d'une pratique

19 connue par l'armée de Bosnie en général, et cetera. Je crois que ceci

20 nécessite un contexte beaucoup plus large.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que c'est une demande, une

22 question tout à fait bien fondée.

23 M. RE : [interprétation] Le témoin a dit qu'il n'avait pas de preuve quant

24 à Igman. Ma première question, évidemment, visait à savoir quelles étaient

25 les raisons, étant donné la pratique, de voir cette unité détachée pour

Page 106

1 être subordonnée dans de telles circonstances à une autre unité.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, peut-être, essayons d'élargir cela,

4 élargir mon objection. Le témoin a dit, dans la seconde partie de sa

5 réponse, que ceci n'avait rien à voir avec Igman. Le témoin a dit que tout

6 simplement, l'unité de Zulfikar n'avait rien à voir avec Igman. C'est ainsi

7 que nous pouvons peut-être mieux expliquer la chose.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Voilà, ce que nous pouvons ajouter à notre

10 objection.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ces unités de ces Brigades de Montagne,

12 au fait, devaient faire rapport au témoin lui-même, en l'espèce ?

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, cela est correct, mais c'est différent

14 tout de même parce qu'il faut voir quelles sont les raisons également de

15 mon objection.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, mais M. Re a posé la question se

17 basant sur vos documents.

18 M. RE : [interprétation]

19 Q. Monsieur le Témoin, vous rappelez-vous cette question, que je viens de

20 vous poser ?

21 R. Voulez-vous la reprendre, s'il vous plaît.

22 Q. Ma question était la suivante : l'information telle que nous la voyons

23 dans le paragraphe 2, est-elle conforme à quelque chose qui aurait dû être

24 une pratique militaire normale. Notamment, en ce qui concerne M. Halilovic

25 et sa capacité, à savoir il était le numéro deux ou numéro quatre dans

Page 107

1 l'armée. C'est-à-dire, était-ce une pratique de voir une unité quitter, par

2 exemple, la brigade pour se détacher de cette brigade, pour être rattachée

3 à un autre corps, à une autre unité ?

4 R. Ecoutez, permettez-moi un peu plus de temps. Je ne voudrais pas donner

5 de réponses très brèves qui seront ensuite mal interprétées parce que, qui

6 donne des réponses brèves risque évidemment de prendre une mauvaise

7 direction. Fin juillet et début août, la situation dans Sarajevo était la

8 plus difficile possible. Là, je peux vous donner 100 % d'informations, vous

9 n'avez guère besoin de les vérifier. La situation était si grave, que

10 c'était une question presque être ou ne plus être. D'un jour à l'autre, on

11 pouvait s'attendre à la chute de la ville de Sarajevo, à la disparition, et

12 de l'ABiH, et des citoyens dans leur ensemble.

13 C'est à ce moment-là que, pris de panique parce que resté sans

14 troupes et me trouvant en face de l'agresseur à l'assaut, j'ai demandé tout

15 simplement des unités pour essayer d'empêcher à ce qu'il y ait un second

16 anneau de siège de Sarajevo. J'ai parlé avec Mustafa Hajrulahovic, avec

17 Sefer Halilovic via Motorola, transmission radio. Je ne sais pas si j'ai

18 parlé avec Rasim Delic, on m'a dit que, lorsque nous étions en

19 communication radio, qu'ils étaient tous à Sarajevo. Or, il était tout à

20 fait normal de les voir eux, dépêcher le plus vite possible, toutes ces

21 unités là-haut. Ce n'est pas à moi de faire une appréciation pour parler de

22 Zulfikar Alispago, je ne sais pas s'il est de Sandzak d'origine ou du

23 Kosovo, je ne sais pas. En tout cas, souvent il se trouvait dans la ville

24 de Sarajevo. Que faire si Ramiz ou quelqu'un d'autre de la 9e Brigade

25 motorisée aurait souhaité, par exemple, combattre de concert et côte à côte

Page 108

1 avec cette unité. A cette époque-là, il était tout à fait normal de voir à

2 faire droit à tous les commandants et aux troupes qui voulaient faire la

3 guerre côte à côte avec un tel, un tel. L'essentiel, c'était d'avoir un bon

4 moral de combat et corroborer ce moral de combat par tous les moyens

5 disponibles pour arrêter l'agresseur. Voilà que dix ans, 15 ans plus tard,

6 vient le moment où il faut faire de l'interpétation pour expliquer dans

7 l'historicité ce qu'il a fallu faire. Pour vraiment être le plus objectif

8 possible, voilà que je suis obligé de proférer de tels termes et faire de

9 tels propos, Messieurs les Juges. J'ai bien peur que, dans le cas

10 contraire, il pourrait y avoir une mauvaise interprétation, chose que je ne

11 souhaite pas.

12 Secondo, peut-être que ceci pourrait être conditionné par d'aucun ? Par

13 qui ? Je ne sais pas.

14 Troisième chose, ce sont les généraux Delic, Sefer Halilovic et

15 Hajrulahovic Mustafa qui eux, de concert, avaient pris la décision portant

16 rédaction de cet ordre qui émanait d'eux-mêmes, de Sarajevo. Pendant ce

17 temps là, j'étais en dehors de Sarajevo. Y a-t-il eu là anguille sous

18 roche, que sais-je. Je n'aime pas faire d'hypothèses. Je ne vois pas de

19 raisons, pour qu'il doive y avoir vraiment quelque chose de mauvais dans

20 l'arrière-plan de tout cela. De cet ordre, je veux dire.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur le Témoin, j'ai bien peur que

22 vous n'ayez pas répondu à la question qui vous a été posée par le

23 Procureur. Il se peut que vous n'ayez pas tout à fait compris sa question.

24 Monsieur Re, je vous prie de reposer cette question là.

25 M. RE : [interprétation]

Page 109

1 Q. La question que j'avais posée, c'est s'il était pratique courante dans

2 l'armée, pour quelqu'un qui avait les responsabilités de M. Halilovic, son

3 grade, de donner des ordres qui avaient pour effet de détacher une unité

4 d'une certaine brigade, d'un certain corps et la rattacher à une autre

5 unité à l'extérieur de ce même corps ? Je voudrais simplement que vous vous

6 limitiez à parler de la pratique militaire courante et être très bref, car

7 nous connaissons évidemment le contexte. On a eu beaucoup d'éléments de

8 preuve allant dans ce sens nous expliquant le contexte.

9 R. Lorsque vous parlez de "pratique courante", normale, cela veut dire que

10 quelque chose est fait fréquemment et de manière continue. La chose

11 particulière à laquelle vous pensez, et bien, je ne peux pas dire que cela

12 ait été fait fréquemment ni continuellement. Mais je ne peux pas, non plus,

13 dire que cela n'a pas été fait assez fréquemment, au contraire. Très

14 brièvement, on pourrait dire que ce n'était pas la pratique la plus

15 courante, mais que le supérieur hiérarchique a le droit de le faire. Peut-

16 être qu'il s'agit plus d'une question qu'un expert militaire pourrait

17 traiter plutôt qu'un témoin.

18 Q. Mais vous avez donné des semaines entières de témoignage en tant

19 qu'expert pour l'affaire Hadzihasanovic ?

20 R. Oui.

21 Q. Vous avez énormément d'années d'expérience en tant que militaire,

22 n'est-ce pas ?

23 R. Je suis ici, à titre de témoin normal et, pour répondre à cette

24 question, il me faudrait connaître à 100% les lois régissant la défense,

25 les règles de service dans l'ABiH et connaître les compétences, les

Page 110

1 autorités des supérieurs hiérarchiques. Il faudrait que j'étudie tous les

2 documents concernant de telles questions pour pouvoir vous donner une

3 réponse. Je suis désolé, c'est mon opinion.

4 Q. Quelle est votre compréhension des instructions qui ont été données par

5 M. Halilovic, en tant que chef d'état-major, le 30 juillet 1993 ?

6 R. Si je devais interpréter ceci, c'est le chef de l'état-major qui avait

7 le droit de donner des ordres, car il était soutenu par le commandant de

8 l'état-major principal de l'ABiH, c'est très simple.

9 Q. Bien. Ce document vous semble-t-il avoir été signé et émaner de M.

10 Halilovic ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Il faudrait être clair lorsqu'on pose cette

12 question à savoir si l'Accusation est en train de demander au témoin de

13 faire un commentaire sur la signature et l'authenticité de ce document ou

14 s'il s'agit simplement de dire que cela semble provenir de ces gens-là.

15 M. RE : [interprétation] Bien entendu, c'est le dernier cas dont il s'agit.

16 Je veux dire que le témoin n'est pas ici en tant qu'expert en matière

17 d'écriture.

18 Q. Cela semble-t-il être un document -- tout comme vous avez parlé de M.

19 Halilovic au numéro 1. Est-ce que cela semble être un document qu'il a

20 signé, qui émane de lui ?

21 M. MORRISSEY : [interprétation] La même objection. Est-ce qu'il s'agit de

22 donner une opinion quant à la signature ? Sinon, c'est une question

23 complètement sans fondement.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que cela est relatif à la

25 signature, mais pas d'un point de vue d'un expert. Mais c'est une pratique

Page 111

1 courante, c'est sa pratique courante dans le passé. Je pense qu'il y a

2 beaucoup de documents qui vont et reviennent entre le 1er Corps et le chef

3 d'état-major.

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien entendu.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il y a beaucoup de documents qui portent

6 la signature de M. Halilovic.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien --

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous voulons simplement savoir si le

9 témoin connaît la signature de M. Halilovic.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Et bien, nous n'avons pas d'objection à une

11 telle question.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ce qui ne demande pas une opinion

13 d'expert.

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien, s'il le sait, bien sûr, je ne peux

15 pas aller à l'encontre de cela.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vais essayer d'abord.

17 M. RE : [interprétation]

18 Q. Connaissez-vous la signature de M. Halilovic, Monsieur Karavelic ?

19 R. Je ne peux pas dire que je ne connais pas cette signature, mais j'ai

20 beaucoup oublié évidemment. Cela semblerait être sa signature, mais je ne

21 peux pas l'affirmer avec une certitude de

22 100 %.

23 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections à ce que ce

24 document soit versé au dossier, simplement pour savoir si je dois

25 poursuivre ?

Page 112

1 M. MORRISSEY : [interprétation] Il se peut bien, cher collègue, qu'il y ait

2 une objection. Je ne peux pas vous dire pour l'instant, mais il faudrait

3 qu'il continue s'il le faut, pour démontrer.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, il semblerait maintenant que nous

5 ayons inversé notre pratique.

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je m'en remets entièrement à l'avis de la

8 partie concernant cette question. Faites pour le mieux. Nous allons vous

9 suivre. Je suis très souple quant à la façon de procéder en la matière,

10 puisque l'Accusation a demandé le versement du document, et c'est votre

11 opinion qui compte.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Je peux vous répondre maintenant. Messieurs

13 les Juges, j'ai une objection vis-à-vis le versement de ce document. Le

14 témoin ne l'a jamais vu, et là, c'est des commentaires. L'Accusation a déjà

15 tout ce qu'il lui faut en ce qui me concerne. Dans la mesure où le témoin

16 peut se souvenir de cette affaire, les éléments de preuve sont admissibles

17 et pertinents. Je n'ai pas d'objection au document à proprement parler,

18 mais il ne l'avait pas vu, il ne peut pas l'authentifier. Il ne l'a pas

19 traité. J'ai une objection.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que le témoin a témoigné qu'à sa

21 demande, ce document avait été rédigé. Cela veut dire que ce document a été

22 rédigé en fonction d'une de ses demandes. Deuxièmement, le témoin a

23 témoigné que le contenu de ce document, en particulier la partie numéro

24 deux, il a témoigné que ce qui a été dit dans la partie numéro deux n'avait

25 jamais été fait, ou du moins à l'époque. Nous pensons également que ce

Page 113

1 document est pertinent à cette affaire, et par conséquent a été accepté et

2 versé au dossier

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Comme le voudra la Chambre.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il en est ainsi décidé.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document portera le numéro P381, pièce

6 à conviction.

7 M. RE : [interprétation]

8 Q. Monsieur Karavelic, je veux maintenant vous amener ailleurs, dans un

9 nouveau domaine, à savoir l'opération Neretva. A quel moment avez-vous

10 entendu parler, pour la première fois, d'une opération portant le nom

11 d'opération Neretva ?

12 R. Je ne peux pas vous répondre avec exactitude concernant la date et le

13 moment.

14 Q. Est-ce que vous avez participé à une réunion à Zenica des commandants

15 de corps qui a eu lieu les 20 et 21 août 1993 ?

16 M. MORRISSEY : [interprétation] En fait, la date est les 21 et 22. Je n'ai

17 rien contre le fait que mon collègue soit directif à condition de ne pas se

18 tromper dans les dates, les 21 et 22.

19 M. RE : [interprétation] Vous me voyez corriger.

20 Q. C'est donc le 21 et 22 août dont il s'agit.

21 R. Oui, j'ai participé à ces consultations, à cette réunion. Il me semble

22 que la question était si on avait parlé de l'opération Neretva lors de

23 cette réunion.

24 Q. Non, pas encore. La question concernait d'abord votre participation à

25 cette réunion. Est-ce que vous avez participé ? Pendant combien de temps

Page 114

1 avez-vous participé ? Pendant un jour, deux jours, l'intégralité de la

2 réunion, certaines parties ?

3 R. Pour autant que je me souvienne, ces consultations commençaient le

4 matin à environ 9 ou 10 heures et ont duré pratiquement toute la journée.

5 Je pense que j'ai quitté Zenica en fin de soirée de ce jour-là.

6 Q. Je vous entends. Vous parlez de la première journée, ou de la deuxième

7 journée ?

8 R. La première journée, le 21 août.

9 Q. Est-ce que vous avez participé lors de la deuxième journée de la

10 réunion ?

11 R. Je ne pense pas l'avoir fait. Je ne sais pas si les consultations se

12 sont poursuivies pendant la deuxième journée. Elles avaient été prévues

13 pour deux jours, mais, en fait, elles avaient été terminées au bout de la

14 première journée. Mais je ne peux pas en être à 100 % certain.

15 Q. Est-ce que vous vous souvenez d'avoir parlé lors de cette réunion d'une

16 opération appelée l'opération Neretva ?

17 R. Je me souviens, oui. Je ne pense pas que l'opération Neretva avait été

18 mentionnée au cours de la consultation, du moins, je ne m'en souviens pas.

19 Pendant que j'y étais, je ne pense pas que cela a été mentionné.

20 Q. D'après le procès-verbal, vous dites : "Je m'en souviens." Je voudrais

21 que nous soyons clairs là-dessus. Est-ce que vous vous souvenez de cela, ou

22 pas ?

23 R. Précisément, oui.

24 Q. Vous avez ensuite dit que vous ne vous souvenez pas de la date exacte à

25 laquelle vous en avez entendu parler. Etait-ce avant ou après que les

Page 115

1 soldats soient rentrés en Herzégovine, que vous avez entendu parler de

2 cette opération ?

3 R. En fait, je pense que je n'ai entendu parler de l'opération Neretva --

4 je n'en ai pas entendu parler avant le moment où il aurait fallu que

5 j'envoie des unités là-bas pour participer à cette opération, d'après les

6 ordres du général Sefer Halilovic.

7 Q. Bien. Est-ce que vous avez participé, ou est-ce que vous êtes rendu à

8 l'IKM du commandement Suprême à Kakanj ? Désolé de ma prononciation.

9 Kakanj.

10 R. Oui, plusieurs fois.

11 Q. Etiez-vous à cet endroit-là lorsque l'opération Neretva a été

12 mentionnée et discutée à quelque moment que ce soit ?

13 R. Je ne me souviens pas. Pendant un quelconque de mes séjours à Kakanj,

14 je ne me souviens pas avoir participé à de telles discussions ou

15 conversations.

16 Q. Avez-vous joué un rôle dans la planification de l'opération Neretva ?

17 R. Non.

18 Q. Quelle était votre compréhension de ce en quoi consistait l'opération

19 Neretva ?

20 R. Je n'ai jamais véritablement essayé de comprendre de quoi il s'agissait

21 ou du moins, pas avant que le général Sefer Halilovic n'ait été l'objet

22 d'accusation. Je ne suis pas tout à fait certain du contexte dans lequel

23 vous situez la chose. Je peux vous donner ma propre opinion, mon

24 évaluation, mais peut-être que c'est plutôt une question à poser à un

25 expert.

Page 116

1 Q. Vous avez dit que vous en avez entendu parler pour la première fois

2 lorsque vous étiez supposé envoyer vos unités là-bas d'après les ordres du

3 général Halilovic. Pouvez-vous dire à la Chambre quel était votre contact

4 avec Sefer Halilovic en ce qui concerne le fait d'envoyer des troupes en

5 Herzégovine ?

6 R. A la fin du mois d'août, et tout au début du mois de septembre 1993, je

7 me souviens de cette conversation téléphonique, il me semble, peut-être

8 utiliser un appareil Motorola, je ne m'en souviens pas exactement. C'était

9 une conversation avec le chef d'état-major, le général Sefer Halilovic. A

10 ce moment-là, on m'a demandé d'envoyer mes unités pour l'opération Neretva.

11 Si oui ou non, cela a été dit que c'était pour l'opération Neretva, je ne

12 peux pas le dire, mais en tout cas, c'était pour mener des opérations de

13 combat dans la vallée de la rivière Neretva.

14 Etant donné la situation extrêmement difficile, et je le souligne,

15 qui régnait à Sarajevo, bien entendu, je pouvais bien comprendre que cela

16 voulait dire une situation extrêmement difficile partout dans la zone de

17 responsabilité de l'ABiH dont étaient responsables précisément le général

18 Sefer Halilovic et Rasim Delalic. J'ai simplement essayé de faire

19 comprendre au général, tant que je pouvais, que j'avais peur de prendre des

20 unités à l'intérieur du 1er Corps et les déployer à l'extérieur de la zone

21 de responsabilité du 1er Corps pour mener des missions de combat quelque

22 part dans les zones de responsabilité d'autres corps, et précisément, dans

23 la vallée de la rivière Neretva, précisément, parce que je craignais qu'il

24 n'y ait de nouvelles attaques visant la ville de Sarajevo. Parce qu'au mois

25 de juillet et août, il y avait eu des attaques incessantes sans relâche de

Page 117

1 la ville de Sarajevo, et pas simplement de jour en jour.

2 Q. Dans le procès-verbal, il est dit que : "l'ABiH, responsable pour

3 laquelle précisément le général Sefer Halilovic et Rasim Delalic étaient

4 responsables." Il est dit "Delalic," précisément. Vous avez dit, "Delalic."

5 C'est exact ?

6 R. J'ai dit Delic, Delic, y compris, bien entendu, les deux adjoints. Je

7 ne veux pas être subjectif. Je parle des personnes les plus hauts gradés,

8 les généraux de l'état-major qui étaient responsables de la situation

9 générale de l'ABiH. Evidemment, j'étais responsable simplement du 1er Corps.

10 Q. Où se trouvait M. Halilovic lorsque vous avez eu ce contact, vous

11 pensez, avec des appareils Motorola ?

12 R. Il me semble qu'il n'était pas à Sarajevo. Il était à l'extérieur de

13 Sarajevo. J'imagine qu'il était dans la zone de la rivière Neretva.

14 Q. Qu'est-ce qu'il a dit qu'il voulait de vous ?

15 R. Je crois que la première conversation, en principe, était la suivante.

16 Il y avait une demande du général visant à obtenir des unités. Mais pendant

17 quelques temps, si je peux le dire, j'ai essayé simplement -- je ne sais

18 pas si c'est la façon opportune de l'exprimer -- alors que le général est

19 ici, peut-être inconsciemment, j'essayais d'éviter le fait de devoir

20 envoyer mes unités pour se battre dans la vallée Neretva. Aujourd'hui, je

21 dois m'avouer à moi-même que je n'avais pas une image très complète du

22 terrain des opérations, la situation générale qui existait à l'intérieur de

23 l'ABiH, quel que soit le fait que Sarajevo soit la capitale de la

24 république et la plus importe de nos installations.

25 Q. Quelles unités voulait-il ?

Page 118

1 R. Très peu de temps après, nous avons reçu un document écrit qui

2 mentionnait très clairement quelles étaient les unités que je devais

3 envoyer pour exécuter des opérations de combat dans la zone de la vallée de

4 la rivière Neretva.

5 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin la pièce

6 P161 ?

7 Q. En attendant ce document, est-ce que vous savez si M. Halilovic,

8 pendant votre conversation, a mentionné les unités ou si celles-ci n'ont

9 été détaillées que dans l'instruction que vous avez reçue ? Est-ce qu'il

10 vous a dit qu'il voulait certaines unités, et ensuite, il vous a envoyé

11 l'ordre ou est-ce que vous n'avez pas au contraire parler des détails au

12 début ?

13 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai une objection, Monsieur le Président.

14 Il pourrait y avoir d'autres alternatives que les deux qui ont été placées

15 devant le témoin.

16 M. RE : [interprétation] Je suis sûr qu'il peut nous le dire.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Est-ce que je peux en terminer.

18 L'objection, c'est qu'il pourrait y avoir plus que deux choix de façon à ce

19 que le témoin puisse dire s'il se souvient si certaines troupes avaient été

20 désignées ou si certaines troupes avaient été discutées. C'est une question

21 ouverte. Il pourrait de cette manière répondre sans être dirigé.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, peut-être, Monsieur Re, vous

23 pourriez poser une question à la fois.

24 M. RE : [interprétation] Bien.

25 Q. Est-ce que M. Halilovic, lors de votre conversation, a précisé quelles

Page 119

1 unités il souhaitait avoir ? Répondez simplement. Si vous pouvez dire oui,

2 vous me dites, oui. Sinon, dites, non. Puis, je continuerais.

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, non.

4 M. RE : [interprétation] Mais si, il peut répondre oui ou non.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] En général, le témoin doit, s'il le peut,

6 répondre par un oui ou par un non. S'il souhaite expliquer les raisons de

7 sa réponse, il peut le faire.

8 Mais si l'Accusation souhaite avoir davantage d'informations je suis

9 sûr que l'Accusation posera des questions supplémentaires.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que c'est le

11 contraire. C'est la Défense qui voudrait davantage d'informations, et c'est

12 l'Accusation qui essaye de --

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il s'agit de l'interrogatoire principal.

14 Si vous voulez davantage d'informations, vous aurez l'occasion de le faire

15 pendant le contre-interrogatoire.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Je le ferai, Monsieur le Président. Je

17 n'aime pas que le témoin -- qu'on donne pour instruction en pratique au

18 témoin -- néanmoins votre analyse est juste.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci, Monsieur Re.

20 M. RE : [interprétation]

21 Q. Bien. Vous comprenez ?

22 R. Oui. Je vous comprends. Je ne me souviens pas que dans la conversation

23 il ait précisé.

24 Q. Passons maintenant à P161. Vous avez dit que vous avez reçu un ordre de

25 M. Halilovic. Est-ce qu'il s'agit bien de l'ordre que vous avez sous les

Page 120

1 yeux ? Est-ce que c'est de cet ordre-là qu'il s'agit provenant de M.

2 Halilovic ?

3 R. Oui, il me semble que, oui. C'est effectivement le cas.

4 Q. Au paragraphe 2, il est dit : "Si vous considérez qu'un tel

5 redéploiement pourrait mettre en péril la défense de Sarajevo, je suis prêt

6 à en prendre l'entière responsabilité." Est-ce que c'est quelque chose que

7 M. Halilovic vous a dit pendant la conversation ou est-ce que c'est une

8 chose qui apparaît pour la première fois dans cet ordre ?

9 R. Il est difficile pour moi de confirmer si cela a été dit explicitement

10 pendant la conversation téléphonique, mais je pense que le deuxième point

11 dans cet ordre, en fait, trouve son origine dans notre conversation, et que

12 ce que j'ai dit au général Halilovic, lorsque j'ai dit qu'il était très

13 difficile pour moi d'extraire mes unités, de les envoyer dans une zone qui

14 était en dehors de ma propre zone de responsabilité.

15 Q. L'ordre concerne spécifiquement la Brigade Delta, faisait partie des

16 10e et 9e Unités, le 2e Bataillon indépendant, à savoir, en tout, 300

17 soldats. Mais M. Halilovic demandait à ce que certaines unités

18 particulières soient mises à disposition. Pourquoi demandait-il ces unités-

19 là ?

20 R. Pour ce qui concerne la Brigade Delta et le 2e Bataillon indépendant,

21 c'était tout à fait logique qu'il demande qu'ils soient mis à disposition.

22 Du point de vue militaire, si j'avais été dans la même situation, j'aurais

23 sans doute agi de la sorte, car la Brigade Delta et le 2e Bataillon

24 indépendant étaient des unités de réserve, à savoir, des unités mobiles du

25 1er Corps de l'ABiH.

Page 121

1 Ceci veut dire que ce n'était pas eux qui tenaient la ligne de

2 défense. Ils n'avaient pas de zone de responsabilité.

3 Q. En ce qui concerne les deux autres, des parties de la 9e et des parties

4 de la 10e Brigade ?

5 R. Les 9e et 10e Brigades, depuis le début de la guerre jusqu'à la fin,

6 avaient leurs propres zones de responsabilité, et tenaient les lignes de

7 défense de Sarajevo. Depuis la fin du mois d'août, dès la fin du mois

8 d'août, je ne suis pas tout à fait certain s'ils étaient inclus dans mon

9 premier ordre daté du 18 août 1993. Je pense que c'était le cas. En tout

10 cas, ces brigades, en plus de leurs zones de responsabilité à Sarajevo, ils

11 tenaient également une partie de la ligne de défense du mont Igman, à

12 l'extérieur de la ville de Sarajevo, mais toujours à l'intérieur de la zone

13 de responsabilité du 1er Corps.

14 Q. Vous avez dit qu'il était tout à fait logique qu'il demande la Brigade

15 Delta et une partie de la Brigade de Solakovic. Est-ce qu'il y avait une

16 logique militaire à ce qu'il demande certaines parties de les 9e et 10e

17 Brigades à ce moment précis ?

18 R. Comme je l'ai dit jusqu'ici, du point de vue strictement militaire,

19 bien entendu, le supérieur hiérarchique a le droit de procéder de la sorte.

20 Q. D'après une logique militaire, d'après votre compréhension de la

21 situation à l'époque à Sarajevo, est-ce qu'il était logique de demander ces

22 parties-là des 9e et 10e Brigades ?

23 R. Il m'est difficile d'être clair et donner une réponse explicite. Ma

24 réponse est la suivante. Tout dépend de voir qui est le maître d'une telle

25 logique militaire. Pour une bonne part, ceci pourrait être le cas. Mais vu

Page 122

1 sous un autre angle, peut-être il y aurait, évidemment, des arguments

2 contraires.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois qu'il est bon pour marquer une

4 pause. Nous allons reprendre l'audience demain à 9 heures dans la même

5 salle d'audience.

6 --- L'audience est levée à 16 heures 01 et reprendra le mercredi 20

7 avril 2005, à 9 heures 00.

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25