Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 26 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 26.

5 M. LE JUGE ORIE : Madame la Greffière, voulez-vous s'il vous plaît appeler

6 la cause.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

8 Messieurs les Juges. C'est l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre Ramush

9 Haradinaj et consorts.

10 M. LE JUGE ORIE : Je vous remercie, Madame la Greffière.

11 Monsieur Stojanovic, je tiens à vous rappeler que vous êtes encore tenu par

12 la déclaration solennelle que vous avez faite au début de votre déposition.

13 Monsieur Re, êtes-vous prêt à poursuivre l'interrogatoire principal

14 de ce témoin ?

15 M. RE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous pouvez y aller, c'est à

17 vous.

18 LE TÉMOIN: DRAGOSLAV STOJANOVIC [Reprise]

19 [Le témoin répond par l'interprète]

20 Interrogatoire principal par M. Re : [Suite]

21 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Stojanovic.

22 R. Bonjour.

23 Q. Avant que --

24 R. Excusez-moi un instant, s'il vous plaît, je dois présenter mes excuses,

25 mais ce que je reçois c'est le canal albanais.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Huissier, pourriez-vous s'il

27 vous plaît aider le témoin ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà c'est réglé maintenant.

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1 M. RE : [interprétation]

2 Q. Avant de poursuivre, je voudrais simplement vous demander d'éclaircir

3 quelques points à partir de ce qui a été dit vendredi après-midi. L'un

4 d'entre eux était le fait que vous avez mentionné que - ceci est à la page

5 84 du compte rendu - ce jour où il y a eu des combats à la maison de Ramush

6 Haradinaj le 24 mars 1998, il y a eu un chef commandant de la police qui

7 vous a dit qu'il n'était pas bon au point de vue sécurité de rester là,

8 parce que Ramush Haradinaj et son groupe était armé et que n'importe quoi

9 pouvait arriver.

10 Je voudrais vous demander de quel type de forces de police appartenait ce

11 chef ou commandant de la police ?

12 R. Je ne saurais le dire. Il y avait beaucoup de policiers aux alentours;

13 par conséquent, personnellement, je ne connaissais pas ce policier-là. Tout

14 ce que j'ai vu c'est qu'il avait des insignes de grade sur les épaulettes.

15 Q. Autre point sur lequel je souhaite un éclaircissement, vous avez dit

16 l'autre vendredi aux Juges --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, d'après la réponse, je

18 comprends qu'il a mal compris la question. Il dit : "Je ne connaissais pas

19 ce policier-là." Alors que je ne crois pas que c'était cela que vous lui

20 demandiez. Je ne crois pas que vous lui demandiez quelle était l'identité

21 du policier mais à quelle force ou organisation de police il appartenait.

22 M. RE : [interprétation] Si les choses ne sont pas claires pour vous

23 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je vais éclaircir ce point.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. RE : [interprétation]

26 Q. Monsieur Stojanovic, est-ce que vous êtes en train de dire que vous ne

27 saviez pas à quelle force ou organisation de police appartenait ce

28 commandant ou que vous ne le connaissiez pas personnellement ou les deux ?

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1 R. Ni l'un ni l'autre.

2 Q. Vendredi, vous avez également dit dans votre déposition qu'il y avait

3 eu un incident qui s'était passé sur la route conduisant à Gllogjan avant

4 le combat du 24 mars à la maison de Haradinaj lorsque certains hommes armés

5 vous ont arrêté sur la route. Je voudrais simplement que vous éclaircissiez

6 ce point : comment étaient-ils vêtus ?

7 R. Ils portaient des uniformes de camouflage et des cagoules noires avec

8 juste une fente pour les yeux et la bouche.

9 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire de façon un peu plus complète ce

10 que vous entendez par "camouflage" ?

11 R. Camouflage, c'est-à-dire toute sorte de couleurs.

12 Q. Vous voulez dire uniforme de camouflage ?

13 R. Oui, oui.

14 Q. Vendredi - ceci est à la page 83 du compte rendu - vous avez mentionné

15 le fait qu'il y avait Haxhija Haradinaj. Qui est Haxhija Haradinaj ?

16 R. C'est l'oncle, maintenant décédé de Ramush Haradinaj. Il possédait la

17 maison qui était juste à côté de la sienne, c'était à un jet de pierres de

18 la sienne, c'était une maison toute neuve, alors que l'autre avait une

19 vingtaine ou une trentaine d'années et jouxtait mon propre terrain.

20 Q. Vous avez aussi parlé d'une personne appelée Kamil Haradinaj. Qui est

21 Kamil Haradinaj ?

22 R. Qamil Haradinaj. C'était son cousin, le fils de Haxhija.

23 Q. Vendredi, lorsque nous nous sommes arrêtés à la suspension de

24 l'audience en soirée, vous disiez à la Chambre de première instance que

25 vous aviez été amené à ce que vous avez décrit comme étant le quartier

26 général de l'UCK, et que là Besnik Haradinaj vous avait interrogé dans une

27 pièce qui se trouvait à l'étage. L'une des choses que vous avez dites qu'il

28 vous avait dit lui-même c'est : "Il me harcelait, il essayait de me

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1 pousser, il essayait de m'insulter. Combien de policiers y avait-il à

2 Decani, combien y en a-t-il dans le village ? C'est le genre de questions.

3 C'est cela qu'il posait."

4 Lorsque vous avez dit : "Pourquoi étais-je dans le village," quelle est la

5 question que vous pensez qu'il vous posait, de quel village pensez-vous

6 qu'il avait à l'esprit ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous avez dit que --

9 R. Le village, je parlais de Dubrava, mon village, ma maison. Il demandait

10 pourquoi je n'avais pas demandé de permis pour y aller. Cela c'est une

11 autre chose. Pourquoi est-ce que nous ne les avions pas rejoint, c'est cela

12 qu'il avait dit. Il y avait toutes sortes de questions qu'il me posait avec

13 le but explicite de me tourmenter.

14 Q. Qu'est-ce que vous avez compris qu'il voulait dire lorsqu'il vous a

15 demandé pourquoi vous n'aviez pas demandé de permis pour pouvoir y aller --

16 qu'ils puissent y aller ?

17 R. Ils pensaient qu'eux représentaient l'autorité dans le secteur. A

18 partir du jour où il y a eu ce meurtre, pour autant que je sache, la police

19 n'était plus autorisée à entrer dans le secteur.

20 Q. De quel meurtre est-ce que vous voulez parler ici ?

21 R. Le meurtre d'Otovic, Miodrag Otovic, lorsqu'il a été tué.

22 Q. Comment savez-vous que la police n'était plus autorisée à entrer dans

23 ce secteur à partir de ce jour-là ?

24 R. Parce que j'ai entendu des gens qui parlaient de ceci, près de Decani

25 où je vivais.

26 Q. Que disaient ces gens ?

27 R. Ils disaient que c'était dangereux, qu'il était dangereux d'y aller,

28 qu'il était difficile d'aller à Rznic où se trouvait la station, ce type de

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1 chose.

2 Q. Quelle sorte de gens disait cela ?

3 R. Les gens qui disaient cela c'était les gens du cru, les résidents.

4 Q. Les Serbes ou les Albanais ?

5 R. Pour la plupart des Serbes.

6 Q. Pourriez-vous également éclairer certaines choses concernant

7 l'interrogatoire que vous avez subi dans la maison de Smajl Haradinaj le 18

8 avril 1998. Vous avez dit à ce sujet à la Chambre de première instance

9 vendredi que Besnik Haradinaj vous avait interrogé dans une pièce qui se

10 trouvait à l'étage. Est-ce quelqu'un d'autre était présent lorsqu'il

11 procédait à votre interrogatoire, indépendamment de lui-même et de vous ?

12 R. Au tout début lorsqu'ils nous ont amenés là, le frère de Ramush était

13 là ainsi que Zecir Nimonaj. Après un instant, pas très longtemps, ils ont

14 descendu l'escalier et ils m'ont demandé si j'avais envie d'avoir du café.

15 J'ai dit que oui. Il a envoyé quelqu'un en bas pour en chercher, et je suis

16 resté avec lui dans cette petite pièce, qui faisait environ 2 mètres par 3

17 mètres, ou 3 mètres par 3 mètres. En tous les cas, c'était une petite

18 pièce.

19 Q. Vous avez dit vendredi que vous aviez bu du café. Vous avez dit : "J'ai

20 commencé à m'étouffer, et je lui ai demandé de bien vouloir ouvrir la

21 fenêtre. Il a ouvert la porte, et je ne pouvais plus me retenir. Ils m'ont

22 jeté hors de la pièce. J'ai perdu conscience, et je continue à étouffer

23 tout le temps."

24 Il se peut que -- enfin, ce n'était pas très clair, à savoir d'abord

25 qui c'était, "eux" et "ils." De qui s'agissait-il ? Qui sont ceux qui vous

26 ont jeté hors de la pièce ?

27 R. Lui, lui, c'est lui. Juste un instant. Ce n'est pas que j'étouffais,

28 c'est que j'avais un problème de respiration. Mais ce n'était pas à cause

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1 du café.

2 Q. Et alors, qu'est-ce que c'était ?

3 R. J'avais commencé à suffoquer en tous les sens du terme. Je suis resté

4 sans oxygène du tout.

5 Q. Et comment cela ? Qu'est-ce qui s'est passé qui a causé cela ?

6 R. Nous étions en train de boire du café, et après avoir absorbé deux ou

7 trois gorgées, ma respiration s'est stoppée. Pendant un moment j'ai pensé

8 qu'ils m'avaient empoisonné. Je lui ai demandé d'ouvrir la fenêtre, parce

9 qu'il n'y avait pas d'air et je ne pouvais pas respirer. Je lui ai demandé

10 d'ouvrir la porte, et c'est ce qu'il a fait. Il m'a emmené à l'extérieur

11 dans le couloir, où finalement je suis tombé dans ce couloir étroit qui

12 était juste à l'extérieur de la porte.

13 Q. Est-ce que vous aviez des documents sur vous lorsque vous êtes allé

14 chez Smajl Haradinaj ?

15 R. J'en avais chez moi. C'était dans mon jardin, dans mon jardin du

16 devant. C'est de là qu'ils ont pris mes documents, lorsqu'ils nous ont

17 emmené à l'intérieur de la maison et qu'ils nous ont passé à tabac. Ils

18 avaient pris nos pièces d'identité alors qu'ils savaient très bien qui nous

19 étions. Ils ont pris mon permis de conduire, le permis de conduire qui

20 allait avec ma voiture Mazda, mon livret militaire, mon livret médical,

21 d'assurance médical, et ainsi que deux jeux de clés, ceux de ma voiture et

22 ceux du bâtiment de l'école, puisque c'est moi qui les gardais. Je les

23 gardais ensemble, les clés de la voiture et les clés de l'école. Je les

24 gardais sur le même trousseau, sur le même anneau. Les clés pour le

25 bâtiment de l'école m'ont été rendues par eux dans l'après-midi, mais ils

26 ont gardé tout le reste.

27 Q. Juste pour être bien au clair, est-ce que c'était avant --

28 R. Les clés du bâtiment de l'école sont celles qu'ils ont fini par me

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1 rendre, ce jeu-là.

2 Q. Pour être bien au clair, ceci s'est passé lorsque vous êtes allé à la

3 maison de Smajl Haradinaj ou après ?

4 R. Oui, oui, oui. C'était dans mon jardin de devant.

5 Q. Mais est-ce que c'était avant ou après que vous êtes allé chez Smajl

6 Haradinaj ?

7 R. Avant, avant, avant, dans mon jardin du devant. C'est à ce moment-là

8 qu'ils m'ont emmené à la maison de Smajl Haradinaj.

9 Q. Lorsque vous étiez interrogé dans cette pièce à l'étage, y avait-il

10 Veselin et Mijat ?

11 R. C'était un couloir étroit. Ils étaient gardés par leurs propres soldats

12 en quelque sorte.

13 Q. Comment savez-vous où ils se trouvaient ?

14 R. Lorsque la porte a été ouverte, je les ai vus qui se tenaient-là, et

15 c'était ceux qui nous avaient emmené en groupe jusqu'à ce couloir.

16 Q. Est-ce que ce couloir se trouve au dernier étage ou est-ce qu'il se

17 trouve au rez-de-chaussée ?

18 R. Tout en haut à l'étage, juste à côté de la pièce. Voilà, il y a un

19 couloir, puis il y a la pièce, puis il y a une autre pièce et ce couloir,

20 une porte dans ce couloir qui conduit à cette petite pièce.

21 Q. Est-ce que vous les avez entendus, Veselin et Mijat, lorsque vous vous

22 trouviez dans la pièce qu'on vous interrogeait ?

23 R. Non.

24 Q. Est-ce que vous pouviez entendre si quelque chose leur arrivait, s'il

25 se passait quelque chose les concernant ?

26 R. Non, non, pas aussi longtemps que j'étais interrogé. Plus tard, c'est

27 différent. A ce moment-là, je les ai entendus.

28 Q. Bon. Alors, revenons-en à là où vous étiez. Excusez-moi un instant.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Pendant que nous attendons, est-ce

2 que vous pourriez expliquer un petit peu ce que vous voulez dire par "plus

3 tard" ? Vous avez dit : "C'est différent, à ce moment-là, oui, j'ai

4 entendu." Qu'est-ce que vous avez à ce moment-là vu ou entendu ? Est-ce que

5 vous vous rappelez cette question ? Il était question de Veselin et Mijat.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je les ai entendus les passer à tabac.

7 D'abord, ils ont emmené Veselin à l'intérieur, et je les ai entendus le

8 battre. Je l'ai entendu gémir et appeler au secours.

9 C'est une chose que j'avais oublié de vous dire. Lorsque je suis entré, il

10 y avait un gourdin sur la table, en l'occurrence, il était en forme de

11 triangle, et il avait un manche en cuir et une sorte de ressort, et tout au

12 bout une sorte de boule à la fin qui était évidemment utilisé pour battre

13 les gens. D'abord, c'était Veselin, ensuite Mijat.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie.

15 Monsieur Re.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. Revenons un moment à ce qui vous est arrivé lorsque vous avez perdu

18 conscience.

19 R. Je ne me rappelle pas exactement à quel moment j'ai perdu connaissance,

20 mais lorsque je suis revenu à moi, là encore Veselin et Mijat étaient

21 encore à côté de moi. Je les ai entendus et je me suis rendu compte qu'ils

22 me massaient, et je suis revenu à moi. Ils ont essayé du bouche-à-bouche,

23 et ils ont essayé différentes choses de ce genre. Je dois dire que j'ai

24 perdu connaissance plusieurs fois, pas seulement une fois, mais que cela a

25 eu lieu plusieurs fois.

26 Q. Quand avez-vous perdu connaissance pour ce qui est de l'incident que

27 vous venez de décrire au Juge Hoepfel, à savoir quand vous avez entendu

28 qu'ils étaient en train de passer à tabac Veselin et Mijat ?

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1 R. Après avoir repris connaissance, la première fois que j'ai perdu

2 connaissance, c'était eux qui m'ont massé et m'ont ramené à la vie par une

3 respiration bouche-à-bouche, et j'ai à nouveau perdu connaissance, puis

4 ensuite je suis revenu à moi sans l'aide de personne, et c'est à ce moment-

5 là que je les ai entendus plus tard, parce qu'il n'y a plus personne là

6 pour m'aider. Donc, je suis revenu à moi naturellement, pourriez-vous dire.

7 Q. Quels étaient les soldats qui se trouvaient-là à ce moment-là ?

8 R. A l'intérieur, il y avait Zecir; il était celui qui criait le plus, qui

9 faisait le plus de bruit; et Daut; et Besnik. Je ne suis pas sûr si son nom

10 était Besnik. Je sais qu'il était le fils de Rasim, oncle et frère de

11 l'accusé Ramush.

12 Q. Vous venez tout juste de mentionner Ramush. Est-ce que vous l'avez vu

13 là du tout ?

14 R. Oui, mais pas dans cette pièce. Ramush est venu plus tard dans la

15 journée avec cinq ou six autres soldats qui l'accompagnaient. J'étais

16 allongé sur le sol dans ce couloir puisque je ne pouvais pas bouger. Je

17 n'étais pas d'ailleurs autorisé à bouger. Il est venu avec cinq ou six de

18 ses soldats qui constituaient son escorte, je suppose, je ne sais pas. Il

19 est entré, il m'a poussé avec sa jambe, et il a dit : Bonjour, voisin, tu

20 ne me reconnais pas ? J'ai dit : Non, je ne te reconnais pas. A ce moment-

21 là, il m'a donné un coup de pied dans le dos en disant que je finirai bien

22 par apprendre qui il était.

23 Q. Avec quelle force vous a-t-il donné des coups de pied ?

24 R. Cela me semblait très fort à ce moment-là, parce u'il portait ses

25 brodequins militaires.

26 Q. Que portait-il d'autre ?

27 R. Il portait un pantalon de camouflage et une sorte de tricot par-dessus.

28 Dans sa main droite, il avait à la main droite un fusil automatique court.

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1 Q. Qui étaient les cinq ou six soldats qui l'accompagnaient ? Est-ce que

2 vous en avez reconnu un ?

3 R. Non. Il était presque impossible de pouvoir bien voir quoi que ce soit.

4 Plus je regardais, plus je souffrais.

5 Q. Est-ce que vous avez subi une blessure du fait de ces coups de pied que

6 vous avez reçus dans le dos ?

7 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas. Plus tard, lorsque j'ai eu une

8 opération chirurgicale, je ne sais pas ce que les médecins ont trouvé.

9 Q. Comment est-ce que les autres soldats qui étaient présents ont réagi

10 lorsque Ramush Haradinaj est entré ?

11 R. Ils l'ont salué, ceux qui me gardaient. Parfois il y en avait quatre ou

12 cinq, parfois davantage. Parfois il y en avait plus qu'un ou deux qui

13 restaient. Cela dépendait.

14 Q. Comment est-ce qu'ils réagissaient ou comment est-ce qu'ils se

15 comportaient à son égard, en sa présence ?

16 R. Quand il venait, ils le saluaient; c'est tout.

17 Q. Est-ce que vous vous rappelez s'ils l'appelaient d'une manière ou d'une

18 autre, par un nom ou un autre ?

19 R. Non, pas en ce moment-là. Ils le saluaient en montrant le poing, vous

20 savez, ce type de salut. Il est venu parce que par rapport à ce couloir il

21 y avait une porte qui donnait sur ce salon, cette pièce pour les invités

22 dont je vous ai parlé. Ce couloir n'a pas plus de 2 mètres de long. C'est

23 très petit.

24 Q. Est-ce que quelqu'un semblait être en charge ou responsable des soldats

25 qui se trouvaient là ?

26 R. C'est lui qui semblait être celui qui était en charge ou le

27 responsable.

28 Q. Qu'est-ce qui vous a donné l'impression que Ramush Haradinaj était en

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1 charge ?

2 R. Je les ai vus le saluer, et depuis le début ils disaient qu'il était le

3 commandant. Donc, c'était bien suffisant pour ce qui était de me convaincre

4 que c'était bien le cas en l'espèce.

5 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire "depuis le début ils disaient qu'il

6 était le commandant" ? Ils disaient, au pluriel, qu'il était le commandant,

7 au singulier.

8 R. Depuis le moment où cette histoire a commencé à être diffusée selon

9 laquelle il était le commandant -- je ne peux pas dire exactement parce que

10 je ne l'avais pas vu pendant assez longtemps ou avant ce jour-là ou jusqu'à

11 ce jour-là. Mais, depuis ces déclarations qu'ils avaient faites à la

12 police, selon lesquelles il était armé, il était le commandant, ce soir-là,

13 ce que j'ai entendu lorsqu'Otovic a été attaqué et tué, dans la soirée du

14 lendemain on a montré cela à la télévision, les armes qui avaient été

15 saisies, des uniformes et ce genre de chose. Ceci m'a frappé comme étant

16 une sorte de confirmation de ce qu'ils disaient depuis tout le temps, ce

17 qu'ils disaient tout le temps.

18 Q. Il y a un moment, vous avez dit à la Chambre de première instance qu'il

19 était entré, qu'il vous avait poussé du pied et qu'il avait dit : Salut

20 voisin, tu ne me reconnais pas ? Ensuite vous avez dit : Non. Et, il vous a

21 donné des coups de pied dans le dos. Est-ce qu'en fait vous l'avez reconnu

22 lorsqu'il est entré ?

23 R. Oui, oui, je le connaissais bien.

24 Q. Pourquoi avez-vous dit : Non, je ne vous reconnais pas, lorsqu'il vous

25 a demandé s'il vous reconnaissait ?

26 R. Parce que nous étions les premiers pratiquement à avoir été arrêtés ou

27 capturés dans le secteur. C'était par crainte de dire que je le

28 connaissais, par crainte d'être tué; sinon, l'un d'entre nous aurait pu

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1 plus tard se rendre à la police et leur dire quelque chose à ce sujet. Il y

2 a une chose que je dois dire; c'est qu'il n'est pas le seul qui m'ait posé

3 cette question à l'époque. Son frère, ses cousins sont venus, Padram

4 [phon], le fils de Smajl, qui portait des lunettes et qui portait des

5 vêtements civils, des petites lunettes avec une monture carrée. Il est venu

6 me demander : Voisin, tu me reconnais ? Je n'en ai reconnu aucun. Le fils

7 de Naim, Smajl, avait des lunettes à monture ronde, et il m'a posé la même

8 question : Voisin, tu me connais, non ? J'ai dit non à chacun d'entre eux

9 et à tous.

10 Il y a eu le fils de Mustafa, qui avait été à l'étranger pendant

11 assez longtemps, et il est venu là ce jour-là et il m'a posé la même

12 question, et j'ai fait la même réponse à chacun : Non, non, je ne te

13 connais pas. Non, non, je ne vous connais pas.

14 Q. Vous dites que c'était par peur de dire que vous le connaissiez, que

15 vous aviez peur d'être tué. Pourquoi pensiez-vous que si vous disiez que

16 vous ne le connaissiez pas vous seriez épargné; c'est cela ?

17 R. Oui.

18 Q. Mais pourquoi ?

19 R. C'est tout simplement comme cela. C'est ce à quoi on pouvait

20 s'attendre, vous savez, lorsque vous ne connaissez pas quelqu'un. En

21 quelque sorte, j'espérais qu'ils nous laisseraient savoir.

22 Q. Quel était votre état psychologique lorsque Ramush Haradinaj vous a

23 repoussé du pied et vous a donné des coups de pied dans le dos ? Comment

24 vous sentiez-vous ?

25 R. Pour ce qui est de bouger, je n'étais pas capable de bouger.

26 Mentalement, ce n'était pas si mal que cela, après tout. Puisque je suis

27 encore capable de me rappeler tout le moindre détail, ceci veut dire

28 qu'après tout je n'allais pas si mal que cela.

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1 Q. Qu'en est-il de vos blessures physiques à ce stade, lorsqu'il vous a

2 donné des coups de pied ? Qu'est-ce que vous avez eu comme blessures ?

3 R. En plus d'avoir le visage en sang à cause des coups, je n'avais pas de

4 blessures ouvertes. Quant à des blessures internes, mon pancréas a éclaté,

5 mon estomac, le colon, les parois de l'estomac ont été écrasés. Vous

6 pourriez parler de blessures internes très importantes avec beaucoup de

7 souffrance, d'énormes douleurs et ce sentiment de suffoquer.

8 Q. Est-ce que vous aviez déjà subi ces blessures au moment où Ramush

9 Haradinaj vous a donné les coups de pied, ou est-ce que vous avez subi ces

10 blessures après, ou est-ce que vous ne seriez le dire ?

11 R. Je pense que c'était avant. Cela doit être avant.

12 Q. Où se trouvait Veselin et Mijat lorsque Ramush Haradinaj vous a donné

13 des coups de pied dans le dos ?

14 R. Dans la pièce, on leur portait des coups dans la petite pièce.

15 Q. Est-ce que c'était dans la même pièce que celle où vous vous trouviez ?

16 R. Non, non, la petite pièce. C'est différent. J'étais allongé, je gisais

17 sur le sol du couloir à ce moment-là pendant toute la journée jusqu'à ce

18 qu'on nous ait relâchés. Ils étaient battus et maltraités dans cette petite

19 pièce.

20 Q. Comment saviez-vous qu'on était en train de les battre et de les

21 maltraiter dans cette petite pièce ?

22 R. Parce que l'endroit où je gisais se trouvait juste à côté de cette

23 porte. C'est une simple porte en bois et je pouvais entendre leurs cris. Je

24 pouvais entendre Zecir et Daut, qui leur criaient des choses, tous les

25 trois, et qui les insultaient. Je connaissais ces trois gars. Nous étions

26 ensemble jour et nuit et je connaissais très bien leurs voix.

27 Q. Que s'est-il passé après que Ramush Haradinaj vous a donné des coups de

28 pied dans le dos et vous a demandé si vous le reconnaissiez et que vous

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1 ayez dit que vous ne le reconnaissiez pas ? Que s'est-il passé, alors ?

2 R. Il est allé dans la petite pièce, le petit salon. Vous voulez dire que

3 m'est-il arrivé, à moi ? C'est cela que vous voulez dire ?

4 Q. Que s'est-il passé dans cette maison que vous ayez vue, à la fois vous

5 et votre frère et votre cousin ? Pourriez-vous simplement dire aux membres

6 de la Chambre ce que vous avez vu et ce que vous avez entendu ?

7 R. Pourriez-vous, s'il vous plaît, préciser ou clarifier votre question.

8 Q. Vous avez dit : "Ramush Haradinaj est entré dans la petite pièce du

9 salon." C'était cette pièce dans laquelle se trouvaient votre frère et

10 votre cousin ?

11 R. Oui.

12 Q. Pourriez-vous voir ce qui --

13 R. Non, non. C'était une autre pièce, cette petite pièce. Pardon, la pièce

14 pour les invités, le salon, était la grande. Ils étaient gardés dans la

15 petite pièce.

16 Q. Que s'est-il passé après votre rencontre avec Ramush Haradinaj ?

17 R. J'ai continué à être allongé sur le sol jusqu'à ce qu'à un moment

18 donné, un moment plus tard, quelqu'un d'autre est venu. Il l'appelait le

19 Russe, peut-être parce qu'il était blond. Je ne le connaissais pas. Il a

20 parcouru le couloir et il m'a donné plusieurs coups de pied très, très

21 forts. Il tenait un tuyau à la main, un tuyau de décharge ou quelque chose

22 de ce genre, et il m'en a porté des coups sur les épaules et sur le front.

23 J'avais la tête en sang. Il m'insultait et il me disait : Tu sais, ce que

24 nous te faisons maintenant ce n'est rien par rapport à ce que la police

25 fait à nos gars. Il m'a battu comme plâtre et il est parti.

26 Q. Est-ce que vous pourriez décrire ce que vous voulez dire de façon en

27 détail lorsque vous dites qu'il vous a battu comme plâtre. Qu'est-ce qu'il

28 vous a fait ?

Page 1892

1 R. Il m'a donné des coups de pied, il m'a frappé avec ce tuyau, cette

2 sorte de tuyau de décharge qui était de métal et qui devait avoir près d'un

3 mètre de long. J'étais sur le sol. Je gisais sur le sol tout le temps parce

4 que j'étais incapable de me lever. Il m'a frappé à l'estomac et partout là

5 où il pouvait frapper.

6 Q. Vous avez dit avant cela que vous aviez perdu connaissance plusieurs

7 fois. Est-ce que vous avez perdu connaissance à la suite des mauvais

8 traitements que vous infligeait ce Russe ?

9 R. C'était après cela.

10 Q. Quoi d'autre avez-vous vu se passer, si vous avez vu quelque chose.

11 R. Un instant, s'il vous plaît, je voudrais ajouter quelque chose. J'étais

12 juste sur le point de vomir ou j'étais déjà en train de vomir lorsqu'il est

13 arrivé. C'est cela que je dis. J'étais sur le sol et j'avais commencé à

14 vomir. Il y a eu un de ses soldats qui avait une sorte de seau, et il m'a

15 dit de vomir dedans.

16 Dans le couloir, à côté de mon visage, il y avait trois ou quatre

17 caisses de munitions qui étaient ouvertes --

18 Q. Qu'est-ce qu'est arrivé après cela ?

19 R. [aucune interprétation]

20 Q. [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai entendu en français que vous

24 parliez de l'homme qui était en train de vous frapper. Est-ce que vous avez

25 dit que c'est lui qui était parti, ou qu'est-ce que vous avez dit à ce

26 moment-là ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est parti.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

Page 1893

1 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. Qu'avez-vous dit aux Juges de la Chambre ? Que s'est-il passé après que

4 vous ayez vomi du sang ? Qu'est-ce qui s'est passé juste après ?

5 R. Après cela, il y a une chose dont je me souviens très bien. C'est qu'un

6 des soldats qui s'appelait Dervishaj -- attendez, j'essaie de me rappeler

7 son nom de famille, ou plutôt, j'essaie de me rappeler de son prénom. Je

8 sais que son nom de famille était Dervishja, mais à l'instant je ne me

9 rappelle pas son prénom. Il était là. Il était chargé de la sécurité et il

10 m'a dit qu'on allait nous libérer. Ensuite, on a fait sortir Mijat et

11 Vesko, Veselin. Je continuais à perdre conscience; tout cela, sans arrêt.

12 Je perdais conscience, puis je reprenais conscience, puis je reperdais

13 conscience. A un moment, je reprends conscience et cet homme me dit qu'on a

14 amené Mijat chercher une voiture pour organiser notre libération, qu'on

15 était aller chercher sa Lada.

16 Q. Où êtes-vous allés ?

17 R. On nous a amenés devant la maison là en bas pour faire notre toilette.

18 Devant la maison il y avait une pompe à eau. On nous a dit de nous nettoyer

19 le visage, de laver le sang que l'on avait sur le visage, sur les oreilles,

20 partout.

21 Q. Vous-même, lorsque vous dites "nous", s'agit-il de vous-même, de votre

22 frère et de Veselin Stijovic, votre cousin ?

23 R. Oui, oui, parce qu'entre-temps Mijat était revenu et il avait dit que

24 la Lada était en panne et qu'il n'était pas parvenu à la faire fonctionner.

25 Si je ne me trompe pas, il était allé là-bas en compagnie de Nasim

26 Haradinaj.

27 Q. Vous avez lavé votre visage en enlevant le sang que vous aviez sur le

28 visage, sur les oreilles, et cetera. Que s'est-il passé, ensuite ?

Page 1894

1 R. Nous sommes allés dans le salon dont j'ai parlé tout à l'heure. On m'a

2 transporté jusqu'à ce salon dans lequel se trouvait le père de Ramush,

3 Hilmija. Il avait apporté un Coca-Cola et un Fanta, et il m'en a proposé

4 pour que je boive. Je gisais toujours sur le sol, sur le tapis de ce salon.

5 Il m'a proposé un Coca ou un peu de Fanta. Je ne me souviens plus très

6 bien, mais en tout cas, cela n'avait pas d'importance parce je ne pouvais

7 pas boire et je n'ai pas bu.

8 Q. Où se trouvait Veselin et Mijat quand tout cela se passait ?

9 R. Ils étaient là aussi.

10 Q. Combien de temps êtes-vous resté dans cette maison après que l'on vous

11 ait proposé à boire ?

12 R. Cela n'a pas duré longtemps, une vingtaine de minutes, peut-être une

13 demi-heure. Je ne sais pas exactement. Ce n'était pas très long.

14 Q. Où êtes-vous allés ensuite ?

15 R. Après cela, Nasim m'a dit -- parce que quand nous étions dans la cour

16 il y avait un figuier. Comme chez nous les hivers sont très froids, ma mère

17 avait entouré le figuier de paille pour le protéger du froid. Nasim

18 craignait que ce soit un endroit qui était utilisé pour cacher des armes.

19 Nous lui avons dit que ce n'était pas le cas, mais Nasim nous a forcé à

20 nous diriger vers notre maison en compagnie d'un autre soldat pour enlever

21 la paille autour du figuier de façon à ce qu'ils puissent vérifier qu'il

22 n'y avait pas d'armes cachées dans la paille. C'est ce qui s'est passé. Il

23 n'y avait que le figuier.

24 Q. Combien de temps êtes-vous restés dans votre maison ?

25 R. Pour l'instant je n'ai pas encore dit comment nous étions arrivés

26 jusqu'à notre maison. Nous avons commencé à marché vers notre maison

27 d'abord, en direction de Xhemajl Mushak [phon], de sa maison, puis à ce

28 moment-là un autre homme est arrivé à bord d'un tracteur. Je ne connais pas

Page 1895

1 son nom, mais je connais cet homme. Je ne pouvais pas marcher, donc Mijat

2 et Veselin devaient me porter. Il y en avait un à ma gauche et l'autre à ma

3 droite. Ils ont arrêté cet homme à bord de son tracteur pour me charger à

4 bord et m'emmener jusqu'à ma maison. Une fois que j'étais à bord du

5 tracteur, ils ont marché derrière nous.

6 Q. Combien de temps êtes-vous resté dans votre maison ?

7 R. Pas longtemps, peut-être une vingtaine de minutes. Il a fallu enlever

8 la paille autour de cet arbre pour lui montrer qu'il n'y avait pas d'armes.

9 Ensuite, ils ont pénétré dans la maison. Ils ont déchiré des morceaux de

10 rideaux pour nous bander les yeux. Kika Mijat a dû leur venir en aide.

11 J'étais dans la cour avec Veselin, et pendant que nous étions à la porte

12 une voiture Ascona est arrivée. Ils l'ont forcée à s'arrêter. Je ne sais

13 pas si c'est Nasim ou un autre qui a arrêté la voiture. Cela, je ne m'en

14 souviens pas. L'autre homme que je ne connaissais pas était là aussi. Ils

15 ont arrêté la voiture. Il y avait des soldats à bord de cette voiture

16 Ascona. Ils lui ont tendu les clés et ils ont continué à pied jusqu'à

17 Glodjane. On ne m'a pas attaché les mains. Mais nous avions tous des

18 bandeaux sur les yeux. Ils ont seulement attaché les mains de Mijat et de

19 Veselin. Ils nous ont fait monter dans cette Ascona, et tous les deux se

20 sont assis à l'avant de la voiture, et nous trois derrière.

21 Q. Où êtes-vous allés à bord de cette voiture ?

22 R. Nous nous sommes dirigés vers Gramocina [phon], et en chemin nous nous

23 sommes arrêtés à plusieurs reprises. Ils ont échangé quelques mots avec des

24 jeunes qui étaient là sur la route. Ils leur disaient : Alors les jeunes,

25 comment ça va ? Quelle est la situation ? Est-ce qu'il y a des problèmes ?

26 Est-ce que la police par hasard ne serait pas venue ? Les jeunes ont

27 répondu : Non. A un moment, l'un d'entre eux leur a demandé : Mais pourquoi

28 est-ce que vous les libérez ? Nasim a répondu : Ils sont bien, ces gars-là.

Page 1896

1 A ce moment-là, nous avons poursuivi notre chemin jusqu'à Babaloc, en

2 passant par une autre route, la nouvelle route qui va de Dubrava à Babaloc.

3 On est arrivé non loin du camp où étaient logés les réfugiés serbes

4 d'Albanie. Les autorités avaient construit un camp à cet endroit, des

5 maisons toutes neuves. Quand nous nous sommes approchés de cet endroit,

6 Nasim s'est retourné vers nous dans la voiture et nous a dit ne regarder

7 pas dehors. Ne vous retournez pas. Il a dit que si on se retournait, il

8 allait nous tirer dessus. Les deux frères m'ont porté. Après quoi ils ont

9 rebroussé chemin et sont repartis en arrière. Mon frère m'a laissé auprès

10 de Veselin, et s'est mis à courir pour demander de l'aide aux réfugiés.

11 L'un d'entre eux est arrivé dans la voiture et on m'a fait monter dans la

12 voiture pour m'emmener au centre de santé de Decani.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, vous avez dit à un

14 certain moment que Kika Mijat avait dû les aider à déchirer les rideaux.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était son surnom. C'est le surnom que lui

16 donnait sa famille. On l'appelait Kika.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, c'est clair maintenant. Merci.

18 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

19 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] J'aurais également une question à

20 vous poser. Vous avez parlé d'une Ascona. Qu'est-ce que c'était cette

21 voiture ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une Ascona.

23 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Mais alors, c'est une voiture de

24 marque Opel, n'est-ce pas ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Opel.

26 M. RE : [interprétation]

27 Q. Comment est-ce que vous avez pu voir la marque de la voiture, puisque

28 vous avez dit que vous aviez les yeux bandés ?

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1 R. Non. Ils ont arrêté l'Ascona avant qu'on nous bande les yeux. Je les ai

2 vus arrêter la voiture devant le portail de chez moi. La voiture s'est

3 arrêtée. Ils ont remis les clés à l'homme à qui ils ont remis les clés.

4 Ensuite ils sont venus nous bander les yeux. Les soldats sont allés à pied

5 à Glodjane.

6 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

7 M. RE : [interprétation] Qui est-ce qui contrôlait Babaloc à l'époque ?

8 R. Les Siptars.

9 Q. Vous voulez dire les Albanais ?

10 R. Les Albanais, oui.

11 Q. Vous avez dit un peu plus tôt dans votre déposition que Ramush

12 Haradinaj était venu dans la maison de Smajl Haradinaj. Combien de temps y

13 a-t-il resté ?

14 R. Il est entré dans le salon, et je ne l'ai plus vu sortir en passant à

15 côté de moi. Mais ce salon avait une autre sortie vers la route. Il y avait

16 un escalier qui menait directement à la route.

17 Q. Savez-vous combien de temps il est resté dans la maison ?

18 R. Non.

19 Q. Vous avez dit il y a un instant qu'on vous avait emmené à Decani au

20 centre de santé. J'aimerais que vous disiez aux Juges de la Chambre à quel

21 endroit vous êtes allés exactement, et quel a été le traitement médical

22 qu'on vous a donné dans ce centre médical de Decani.

23 R. A Decani, J'ai été reçu par un médecin. On m'a fait une piqûre - je ne

24 sais pas de quoi - et le médecin a dit immédiatement qu'il fallait

25 m'emmener à Pec. Alors, c'était toujours une voiture civile. Je ne sais pas

26 quelle voiture. Ce centre de santé était tout petit. C'était un

27 dispensaire. On m'a fait monter dans une voiture civile, et on m'a emmené à

28 l'hôpital de Pec. A l'hôpital de Pec, on m'a fait des radios tout de suite.

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1 J'ai été ensuite transporté d'urgence à l'hôpital de Pristina.

2 Q. Avez-vous été transféré à l'hôpital de Pristina le même jour ?

3 R. Le même jour. Tout cela s'est passé en deux ou trois heures.

4 Q. Dans quelle condition êtes-vous arrivé à l'hôpital de Pristina ?

5 R. A bord de l'ambulance de Pec. On m'a emmené à bord d'un véhicule de

6 l'hôpital de Pec à Pristina.

7 Q. Quel traitement vous a-t-on dispensé à l'hôpital de Pristina ?

8 R. J'y ai été opéré. Je suis resté hospitalisé 28 jours. Ma famille me

9 manquait. J'ai demandé au médecin qui m'avait opéré de me laisser retourner

10 voir ma famille. C'était un vendredi. Il m'a permis de sortir ce jour-là,

11 le vendredi. Je suis arrivé à Decani dans les baraques où nous étions logés

12 à ce moment-là.

13 J'étais censé retourner à l'hôpital le lundi, et le lundi ma famille

14 a demandé si la route de Pec à Pristina était sûre, et la police a répondu

15 que la route était coupée, qu'il était impossible d'aller à Pristina. C'est

16 ma famille qui a posé la question, parce que j'étais immobilisé.

17 Q. D'accord, Monsieur Stojanovic.

18 M. RE : [interprétation] J'aimerais que l'on soumette au témoin le document

19 863 des documents 65 ter, que l'on soumette la version serbe au témoin.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle est la cote de ce

21 document ?

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

23 pièce P33, enregistrée aux fins d'identification.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

25 M. RE : [interprétation]

26 Q. Ce document est un document de sortie de l'hôpital de Pristina datant

27 du 6 octobre 2005, qui dit que vous avez été hospitalisé à partir du 18

28 avril --

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1 R. Un instant. Je n'ai jamais eu ce document de sortie. Je ne crois pas

2 l'avoir en ma possession.

3 Q. Attendez un instant, et vous l'aurez devant vous à l'écran. Il est

4 question de votre hospitalisation qui aurait commencée le 18 avril 1998 et

5 aurait duré jusqu'au 15 mai 1998.

6 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait agrandir le texte à

7 l'écran ?

8 Q. Est-ce que dans ce texte on trouve la description des blessures que

9 vous avez subies et de l'intervention que vous avez subie également ?

10 R. Oui, mais je ne peux pas lire le texte jusqu'au bout, car il n'est pas

11 présenté à l'écran. D'ailleurs, je ne connais pas grand-chose à la

12 médecine…

13 Q. Mais c'est bien de vous qu'il est question dans ce document, n'est-ce

14 pas ?

15 R. Oui.

16 Q. Quand vous êtes arrivé à l'hôpital, est-ce que les médecins vous ont

17 interrogé pour savoir ce qui s'était passé ?

18 R. Oui.

19 Q. On lit dans ce document : "Le patient a été attaqué sur le seuil de sa

20 maison à Metohija par des terroristes. Ils l'ont frappé avec une crosse de

21 fusil et lui ont donné des coups de pied. Il a passé 12 heures en prison et

22 a été amené à l'hôpital de Pec."

23 Vous rappelez-vous si c'est vous qui avez dit au personnel hospitalier ce

24 qui est écrit ici ou si c'est quelqu'un d'autre qui l'a dit ?

25 R. Oui, c'est moi qui l'ai dit.

26 Q. Combien de temps avez-vous passé aux mains de ces hommes à partir de 8

27 à 9 heures du matin jusqu'au moment où on vous a libéré avec un bandeau sur

28 les yeux ?

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1 R. A partir de 8 ou 9 heures du matin jusqu'à 16 ou 17 heures. Je pense

2 que c'est à ce moment-là que cela s'est terminé.

3 Q. Dans ce rapport médical, il est question de convalescence post-

4 opératoire difficile. Nous lisons : "La plaie a cicatrisé mais qu'elle

5 s'est largement infectée et que le duodénum s'est suturé, que le patient a

6 récupéré."

7 Je vous demande si vous avez subi des blessures durables suite à ce qui

8 vous est arrivé ce jour-là ?

9 R. Qu'est-ce que je pourrais vous dire ? Tous les médecins que j'ai

10 rencontrés m'ont toujours demandé de leur présenter ce document de Pristina

11 alors que je ne pouvais pas le fournir. J'ai essayé d'obtenir ce document

12 en m'adressant à plusieurs organisations humanitaires quand on nous a

13 transférés, mais je ne l'ai pas reçu. Les examens ne révélaient jamais

14 rien. Je ne possède pas ce document et je ne suis pas expert en médecine,

15 donc je ne pouvais pas expliquer la situation aux médecins que je

16 rencontrais. Je ne pouvais pas leur dire quel type de blessures j'avais

17 subies. Mais les conséquences de ces blessures, je les vis encore

18 aujourd'hui Je peux vous montrer quel est l'aspect de mon abdomen. Je pense

19 que vous le verriez de vos yeux.

20 Q. Ce que je voudrais que vous disiez aux Juges de la Chambre, c'est quel

21 est le traitement médical que vous avez reçu à partir de ce moment-là. Est-

22 ce que vous avez subi des conséquences durables de ces blessures; et si

23 oui, pendant combien de temps ? Mais, commencez par dire aux Juges quel a

24 été le traitement que les médecins vous ont dispensé à votre sortie de

25 l'hôpital ?

26 R. J'ai dû aller à Decani pendant six mois, trois fois par jour me faire

27 soigner, me faire panser parce que la plaie ne cessait de suinter. Ce

28 n'était pas quelque chose d'anodin, trois fois par jour. Je rencontrais en

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1 général deux ou trois infirmières et un médecin qui n'était absolument pas

2 spécialiste de ce genre de plaies, mais j'étais obligé d'y aller et de me

3 soigner dans ces conditions parce que c'était la guerre.

4 Q. Après ces six mois, que s'est-il passé ?

5 R. La plaie a arrêté de suinter, et voilà, j'ai continué comme cela. Il y

6 a des conséquences. J'ai des cauchemars la nuit, des crises de sudation

7 intenses dans la nuit. Cela je le vis encore aujourd'hui.

8 Q. Est-ce que vous avez eu un arrêt de travail après ces blessures ?

9 R. Oui.

10 Q. Combien de temps d'arrêt de travail ?

11 R. Je ne travaille toujours pas aujourd'hui parce que le Dr Andrija

12 Tomanovic m'a dit à ce moment-là qu'il fallait que j'oublie à quoi

13 ressemblait un poids de cinq kilos pour toute ma vie. Autrement dit, je

14 n'avais plus le droit de soulever un poids supérieur à cinq kilos.

15 Q. Est-ce qu'aujourd'hui vous pourriez soulever un poids de plus de cinq

16 kilos ?

17 R. Peut-être que je pourrais, mais je n'ai pas le droit. Je n'ose pas le

18 faire parce que ce n'est pas moi l'expert, c'est lui.

19 Q. Les blessures qui vous ont été infligées le 18 avril 1998 sont-elles la

20 raison pour laquelle vous ne travaillez plus depuis ce jour-là ?

21 R. Oui.

22 Q. J'aimerais que vous regardiez une séquence vidéo qui constitue la pièce

23 à conviction 37.

24 M. RE : [interprétation] Je demande la diffusion de cette vidéo grâce au

25 système Sanction.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des paroles prononcées dans

27 cette vidéo et en quelle langue ?

28 M. RE : [interprétation] En anglais, c'est numérisé en serbe et en anglais.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. RE : [interprétation] La transcription constitue les documents 37 et 38

3 des documents 65 ter, en albanais, anglais et serbe.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrons lire l'anglais à l'écran.

5 C'est bien ce que je dois comprendre ?

6 M. RE : [interprétation] Oui.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Rien ne sera lu à haute voix parce que

8 sinon il faudrait que cela soit interprété en français. Nous devrions

9 traiter cela comme une pièce à conviction. Par conséquent, nous allons

10 regarder les images sans traduction.

11 M. RE : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, ce sera le

13 document… ?

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

15 pièce P34 enregistrée aux fins d'identification.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

17 M. RE : [interprétation] Je suppose que la pièce P33 existe et qu'il y a

18 quelque part un original disponible pour le témoin.

19 M. RE : [interprétation] Certainement.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. On peut diffuser la vidéo.

21 [Diffusion de la cassette vidéo]

22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

23 "Il est question d'une attaque dont trois Serbes ont été victimes,

24 notamment M. Stojanovic, Dragoslav Stojanovic, qui a rencontré un médecin

25 et a subi une intervention chirurgicale à l'estomac, selon les médecins.

26 Après l'intervention chirurgicale, la situation de M. Stojanovic était

27 stable. Il a été transféré à l'hôpital de Pec. Selon Mibosaj Ivajovic

28 [phon], directeur de l'hôpital de Pec. Mijat Stojanovic, Veselin Stojanovic

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1 ne sont plus en danger de mort."

2 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

3 M. RE : [interprétation]

4 Q. Ce M. Stojanovic, c'était bien vous ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous rappelez-vous de l'entrée des caméras, est-ce que vous étiez

7 conscient à ce moment-là ?

8 R. Oui.

9 Q. Avez-vous parlé à un journaliste à ce moment-là ?

10 R. Au début, oui, après j'ai refusé parce que je ne pouvais plus.

11 Q. Dans quel état étiez-vous lorsque les journalistes sont arrivés dans

12 l'hôpital avec des caméras ?

13 R. Je ne m'en souviens pas.

14 Q. Est-ce que vous veniez de subir une intervention chirurgicale ?

15 R. Oui, c'est ce qu'on voit sur ces images. J'étais dans la salle de

16 réanimation.

17 Q. Dans votre déposition aujourd'hui, comme d'ailleurs vendredi dernier,

18 vous avez dit avoir été amené dans ce que vous avez appelé le quartier

19 général de l'UCK. Pourquoi avez-vous pensé que la maison de Smajl Haradinaj

20 était le QG de l'UCK ?

21 R. Parce que je les ai entendus le dire. Je l'ai d'ailleurs indiqué

22 l'autre jour. Je les ai entendus parler les uns avec les autres, et ils ont

23 dit : On va l'amener au QG. Sinon, je ne savais rien de tout cela.

24 Q. La maison, la propriété que vous avez décrite vendredi comme se

25 trouvant à côté de la propriété de la famille de Ramush Haradinaj, qui

26 était propriétaire de cette propriété voisine ? Je veux dire de votre

27 maison ?

28 R. Quelle maison ? Ma propriété, c'est ma mère Ljubica Stojanovic qui en

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1 est la propriétaire. Il y a de la terre, il y a une propriété qui

2 appartient à notre famille. Nous l'avons héritée de notre famille.

3 Q. Depuis combien de temps cette propriété appartient-elle à votre

4 famille ?

5 R. Depuis mon grand-père qui l'a transmise à mon père, et cetera. Nous

6 avons tous les documents démontrant que cette propriété nous appartient.

7 Nous avons les actes d'acquisition originaux. Quand nous avons fui ce

8 secteur, j'ai remis ces documents à l'administration locale et j'ai reçu un

9 reçu de leur part où il était écrit que c'était notre terre, notre

10 propriété et que personne ne pouvait nous la prendre.

11 Q. Pourquoi est-ce que vous avez fui cette région ?

12 R. Parce que nous n'étions pas en sécurité. Si j'étais resté, j'aurais été

13 tué comme la majorité des autres.

14 Q. Qui vous aurait tué d'après vous ?

15 R. Les mêmes que ceux qui m'ont arrêté et m'ont imposé toutes ces

16 exactions, qui m'ont passé à tabac.

17 Q. Est-ce que vous parlez des membres de l'UCK et de Ramush Haradinaj et

18 de ses compagnons ?

19 R. Oui, parce que ceux qui ont été arrêtés après moi, comme par exemple,

20 Mirko Vlahovic, Miro Vlahovic, Dana, une femme avec sa fille, la femme je

21 crois qu'elle s'appelait Dara; sa fille je ne m'en souviens pas; les

22 Radunovic, le mari et la femme. Ils ont été arrêtés après moi, à peu près

23 une semaine plus tard, on ne les a plus jamais revus.

24 Q. Quand est-ce que vous avez fui la région ?

25 R. Le 12 avril 1999 aux environs de cette date-là.

26 Q. Vous avez dit vendredi que la dernière fois que vous étiez dans votre

27 maison c'était le 24 mars 1998.

28 R. Le vendredi ? Ma maison ? Vous me parlez de ma maison ? C'est à ce

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1 propos que vous me posez la question précédente ? Me parlez-vous la maison

2 ou de la région de Decani ?

3 Q. Je vous parle de votre maison qui se trouve tout à côté de l'ensemble

4 des maisons de la famille Haradinaj.

5 R. Le 24 mars 1998.

6 Q. Où vivez-vous maintenant ?

7 R. En Serbie.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je n'ai pas bien compris le

9 but de la dernière question. Le témoin a témoigné qu'il a quitté la région

10 le 12 avril 1999, et vous avez dit le vendredi, la dernière fois que vous

11 avez quitté votre maison c'était le 24 mars 1998, ensuite le témoin a

12 confirmé cela. Quel était donc l'objectif de votre question ? Je n'ai pas

13 bien compris. Etait-ce simplement pour juxtaposer les deux dates, pour

14 savoir s'il a quitté sa maison le 28 mars 1998, ensuite quitté la région le

15 12 avril ?

16 M. RE : [interprétation] Oui, c'est exact.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

18 M. RE : [interprétation]

19 Q. Pour terminer, j'aimerais vous montrer deux photographies Monsieur

20 Stojanovic. Tout d'abord, il y a une photographie aérienne qui porte le

21 numéro 1210.

22 M. RE : [interprétation] Peut-on afficher cela sur e-court ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame la Greffière, ceci serait le

24 numéro… ?

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ceci serait la

26 pièce P35 aux fins d'identification.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

28 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

Page 1907

1 M. RE : [interprétation]

2 Q. En regardant cette photographie, Monsieur Stojanovic, il y a Gllogjan

3 et les environs qui sont inscrits. Pouvez-vous reconnaître ceci comme étant

4 une photographie aérienne du village de Gllogjan et Rznic ?

5 R. [inaudible]

6 Q. Pouvez-vous répéter votre réponse s'il vous plaît ?

7 R. Une photographie aérienne, oui. Je le reconnais en effet c'est une

8 photographie aérienne.

9 Q. Pouvez-vous voir où se trouve votre propriété sur cette carte ?

10 R. Non.

11 Q. Pouvez-vous voir où se trouve l'ensemble des maisons de la famille

12 Haradinaj sur cette carte ?

13 R. Non.

14 M. RE : [interprétation] Peut-être si l'on pouvait agrandir la partie en

15 bas de la photographie où il est inscrit "Gllogjan".

16 Q. Est-ce que cela vous aide ? Est-ce que l'agrandissement vous aide à

17 reconnaître ?

18 R. Je vois, mais je ne peux pas vous dire avec précision. On ne peut pas

19 reconnaître les maisons l'une de l'autre sur cette photographie.

20 M. RE : [interprétation] Voulez-vous afficher la pièce à la liste 65 ter

21 1106.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce portera le numéro combien ?

23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce

24 P36 aux fins d'identification.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

26 M. RE : [interprétation]

27 Q. Sur la photographie, il y a une maison avec une vache devant, pouvez-

28 vous reconnaître cette maison ?

Page 1908

1 R. Ceci est une maison à Glodjane.

2 Q. Pouvez-vous nous dire à qui appartient cette maison ?

3 R. Je crois qu'il pourrait s'agir de la maison de Zeqir Xheladin.

4 Q. Où se situe-t-elle par rapport à votre maison, votre propriété ?

5 R. Elle se trouve dans le village devant la maison de Smajl. Ce n'est pas

6 très près de ma maison sauf si quelque chose a changé. Cela ressemble

7 beaucoup à ceci, du moins lorsque je me trouvais encore dans la zone.

8 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas compris la dernière partie de la

9 réponse du témoin.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Cela pourrait aider le témoin d'enlever son

12 casque un instant.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

14 Monsieur Stojanovic, voudriez-vous retirer votre casque un instant, s'il

15 vous plaît.

16 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur, le Président, il ne fait aucun

17 doute qu'il s'agit d'un groupe de maisons qui appartiennent à la famille

18 Haradinaj sur cette photographie.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

20 Monsieur Re, veuillez poursuivre.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Combien de temps cela fait-il ou depuis combien de temps n'êtes-vous

23 pas retourné à votre maison à Gllogjan ?

24 R. Neuf ans.

25 Q. Ma maison, ma propriété se trouve à Dubrava, et non pas à Glodjane. En

26 fait, il y a une limite entre les deux.

27 Q. Je veux simplement préciser quelque chose. Pour terminer, je voudrais

28 simplement savoir, vous avez dit que vous avez fui la région, et je

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1 voudrais essayer de comprendre la raison pour laquelle vous avez quitté

2 votre maison dans le village de Gllogjan.

3 R. Ma propriété fait partie du territoire de Dubrava, c'est la dernière

4 propriété sur le territoire de Dubrava, la plus excentrée si vous voulez.

5 Après c'est Glodjane. Pourquoi ai-je fui ? Pour des raisons de sécurité si

6 l'on peut dire.

7 Q. Mais vous avez dit auparavant que vous aviez peur pour votre vie,

8 parliez-vous de quitter votre propriété ou de quitter ou de fuir la région

9 de Decani ? Je voulais simplement clarifier cela.

10 R. Je faisais référence à un départ provisoire, tout du moins c'est ce que

11 je pensais à l'époque. Je pensais que bientôt les choses reprendraient leur

12 cours normal et que nous pourrions continuer à vivre comme toujours.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Re.

14 Monsieur le Témoin, une partie de votre réponse précédente a été perdue.

15 Auriez-vous l'obligeance d'examiner cette photographie et dire si vous

16 arrivez à reconnaître cette maison et à qui elle appartient.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette maison aurait pu être ajoutée entre

18 temps, il y aurait pu y avoir une annexe construite. Elle ressemble à la

19 maison de Hilmi, mais elle n'était pas telle que sur la photographie à

20 l'époque où j'y étais. S'il s'agit de la même maison, des annexes y ont été

21 ajoutées. Toute cette partie à coté de l'arbre ici ne s'y trouvaient pas

22 lorsque j'étais dans la région la dernière fois. Sa maison était ancienne.

23 Une maison à un étage, mais ce n'était pas une maison dont la construction

24 était entièrement terminée.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

26 M. RE : [interprétation]

27 Q. Y avait-il un mur qui entourait les maisons qui appartenaient à la

28 famille Haradinaj quand vous avez quitté la région le 24 mars 1998 ? Il

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1 s'agit donc des maisons de Ramush Haradinaj.

2 R. Non, pas qui entourait les maisons, mais un mur qui entourait la cour.

3 Il y avait ce que nous appelons une clôture, une clôture en bois, et à

4 l'intérieur de ladite clôture, un nouveau mur avait été construit.

5 Q. Quand a été construit ce nouveau mur ?

6 R. Avant le 24 mars, c'était probablement un de ces jours-là, quelques

7 jours avant.

8 Q. Savez-vous pourquoi il a été construit ?

9 R. Non.

10 M. RE : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions. Ceci conclut

11 l'interrogatoire principal.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

13 Monsieur Emmerson, tout d'abord je crois qu'il est temps de prendre une

14 pause. J'ai bien compris qu'il ne semble pas y avoir de désaccord quant à

15 qui appartient ladite maison. J'ai posé des questions sur la maison pour

16 d'autres fins, pas aux fins d'identifier la maison. Mais j'aimerais être

17 informé d'éventuels changements importants depuis 1998 sur cette maison

18 pour d'autres buts.

19 Ensuite Monsieur Re, hier il y avait un soupçon d'espoir quand vous avez

20 dit que vous arriviez à terminer avec ce témoin en une heure et demie. En

21 fait, c'était deux heures et demi, le temps que nous avons pris.

22 Nous allons prendre une pause. Monsieur Stojanovic, vous avez déjà été

23 interrogé par les avocats de la Défense, je vais demander à l'Huissier de

24 vous escorter en dehors du prétoire, nous allons traiter d'une ou l'autre

25 petite chose.

26 Si vous voulez bien, Monsieur l'Huissier, escorter le témoin en dehors du

27 prétoire, nous allons reprendre à 16 heures 15.

28 [Le témoin quitte la barre]

Page 1911

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson, j'aimerais savoir le

2 temps que vous aurez besoin pour le contre-interrogatoire. Peut-être que

3 vous allez avoir besoin de quelque temps.

4 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que je vais avoir besoin de plus de

5 temps avec ce témoin qu'avec le témoin suivant qui va couvrir pas mal les

6 mêmes points.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Si je prends plus de temps avec ce témoin-

9 ci, cela compensera le temps dont j'aurais besoin pour le contre-

10 interrogatoire du témoin suivant.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De combien de temps pensez-vous donc

12 avoir besoin ?

13 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que je peux terminer en deux

14 heures. J'espère une heure et demie, mais deux heures seraient le maximum.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai ensuite une autre question. Il y

16 avait une requête partiellement confidentielle je crois, vendredi, qui

17 avait à voir avec une vidéoconférence. Est-ce que la Défense sait lorsqu'il

18 y aura une réponse parce que ce serait une réponse orale.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Puis-je vous répondre à cette question

20 immédiatement après la pause ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est parfait.

22 M. EMMERSON : [interprétation] Merci beaucoup.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, nous aurons la réponse à cette

24 question. Nous aurons cette information immédiatement après la pause. Si la

25 Chambre veut bien accepter une réponse orale si cela fait l'objet d'un

26 accord -- sinon la question est relativement urgent, parce que la

27 préparation d'une vidéoconférence prend une semaine et au vu du calendrier,

28 nous aimerions recevoir votre réponse dès que possible.

Page 1912

1 Nous allons prendre une pause et reprendre à 16 heures 15.

2 --- L'audience est suspendue à 15 heures 48.

3 --- L'audience est reprise à 16 heures 18.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Voulez-vous Monsieur le Président que je

6 traite de ces deux sujets maintenant ?

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela peut être fait rapidement.

8 Veuillez poursuivre.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Pour ce qui est de la vidéoconférence, notre

10 point de vue est le suivant. Alors que nous ne voudrions jamais empêcher

11 une demande formulée pour des raisons médicales, le seul problème avec le

12 document, c'est qu'il n'essaie pas d'expliquer pourquoi, en fait, la femme

13 ne peut pas être prise en charge pour la profession médicale.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Donc si l'on peut explorer ce point-là, nous

16 aimerions y revenir demain matin.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après ce que j'ai bien compris, c'est

18 le seul problème.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Pour ce qui est de l'équipe de la Défense de

20 Haradinaj.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde Me Guy-Smith.

22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, c'est le point dont nous avons discuté

23 tous ensemble.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. EMMERSON : [interprétation] L'autre point dont nous avons discuté

26 pendant que le témoin n'avait pas son casque, c'était la question de la

27 photographie.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, voudriez-vous

Page 1913

1 enlever votre casque s'il vous plaît ?

2 Merci.

3 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez la

4 photographie, sinon à l'écran du moins à l'esprit.

5 Vous souvenez-vous qu'il y avait un arbre qui figurait sur la

6 photographie, et tout ce qui était à droite de l'arbre était un bâtiment

7 qui se trouvait exactement dans la position du bâtiment qui se trouvait sur

8 le même site à l'époque. Le bâtiment original a été détruit par du

9 pilonnage serbe en 1998, ou en très grande partie, et il a ensuite été

10 reconstruit.

11 Tout ce qui se trouve à gauche de l'arbre est une construction, en

12 fait, une annexe depuis lors. Donc de cette manière, en fait, le témoin

13 reconnaît judicieusement le bâtiment. Tout ce qui est à gauche a été ajouté

14 à l'immeuble après le pilonnage.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est pour permettre à la Chambre

16 d'avoir une meilleure évaluation des questions de fiabilité. Bien. Ceci est

17 clair. Je crois que nous pouvons poursuivre.

18 Monsieur le Témoin, pourriez-vous remettre votre casque, s'il vous plaît ?

19 Oui.

20 Monsieur Stojanovic, vous allez maintenant faire l'objet d'un contre-

21 interrogatoire par Me Emmerson, qui est conseil pour la Défense de M.

22 Haradinaj.

23 Monsieur Emmerson, veuillez poursuivre.

24 Contre-interrogatoire par M. Emmerson :

25 Q. [interprétation] Monsieur Stojanovic, alors que je ne commence à vous

26 poser des questions, j'aimerais vous expliquer à l'avance l'ensemble des

27 questions que je vais vous poser pour que vous compreniez ce sur quoi je

28 vous interroge. Si vous ne comprenez pas une question ou que vous souhaitez

Page 1914

1 que je vous explique pourquoi je vous la pose, veuillez le dire. Je ne vais

2 pas vous poser de questions sur vos blessures, puis je vous dis très

3 clairement dès le départ que je ne remets pas en question le fait que vous

4 avez été roué de coups le 18 avril 1998 par des villageois albanais de

5 Gllogjan.

6 Les questions que je vais vous poser sont destinées à explorer le contexte

7 général de cet incident, du pourquoi et de comment il s'est produit. Je

8 vais également vous suggérer que vous auriez pu vous tromper dans votre

9 identification de Ramush Haradinaj comme étant une personne qui était

10 présente dans la maison de Smajl Haradinaj alors que vous étiez détenu là-

11 dedans. Donc de manière générale, voici les sujets sur lesquels je vais

12 vous interroger.

13 Tout d'abord, je voudrais traiter de ce deuxième point, c'est-à-dire

14 de ce qui vous est arrivé à l'intérieur de la maison de Smajl Haradinaj à

15 Gllogjan, et en particulier de l'incident au cours duquel vous décrivez un

16 homme comme étant Ramush Haradinaj, qui montait les escaliers et vous

17 donnait des coups de pied dans le dos, et tout en vous demandant : Vous me

18 connaissez-vous, mon voisin ? C'est au sujet de cet incident que je vais

19 vous poser des questions. En êtes-vous d'accord ?

20 R. Oui, tout à fait.

21 Q. Maintenant, vous m'avez dit que vous êtes allé à l'école avec Ramush

22 Haradinaj; est-ce exact ?

23 R. Oui. La même école, mais pas dans la même classe. Nous n'étions pas

24 compagnons de classe.

25 Q. Ramush Haradinaj a quitté le Kosovo en 1991, et n'est pas revenu y

26 vivre avant la fin du mois de février 1998; est-ce exact ? Puis-je vous

27 demander s'il vous plaît, dites-vous que vous l'avez aperçu entre 1991 et

28 la date en avril, parce que vous avez dit l'apercevoir à l'intérieur de la

Page 1915

1 maison de Smajl Haradinaj ?

2 R. Je ne l'avais pas vu depuis une dizaine d'années, mais je l'ai revu

3 dans la maison de Smajl Haradinaj.

4 Q. Bien. C'était là la première fois que vous l'avez revu après dix

5 ans, si ce que vous dites est exact ?

6 R. Oui, c'est bien cela.

7 Q. Pour établir les choses très clairement, cet homme que vous identifié

8 comme étant Ramush Haradinaj, vous ne l'avez pas vu avant le 18 avril,

9 avant que vous avez dit que vous l'avez vu grimper les escaliers à

10 l'intérieur de la maison; est-ce exact ?

11 R. Je ne l'avais pas vu auparavant. Vous m'avez bien compris.

12 Q. Merci. Donc vous, par exemple, ne l'avez jamais vu à l'extérieur de

13 votre maison lorsque vous-même, votre cousin ou votre frère avaient été

14 emmenés ou à aucun moment sur la route qui descend vers le village ?

15 R. Non. Je ne l'ai pas vu.

16 Q. Je crois -- suis-je en droit de dire plutôt - et je me base sur une

17 déclaration préalable que vous avez faite au bureau du Procureur - qu'après

18 cet incident le 18 avril, vous ne l'avez plus jamais revu; est-ce exact ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Donc maintenant, nous pouvons nous concentrer sur le moment où cet

21 homme est monté dans la cage d'escalier. Je veux m'assurer que j'ai bien

22 compris votre récit de cette partie de l'incident. Donc, vous nous avez dit

23 que cet homme montait l'escalier, et qu'à ce moment-là vous aviez déjà été

24 frappé ou qu'on vous avait déjà brièvement blessé ?

25 R. C'est exact.

26 Q. Je crois que vous nous aviez dit que toutes les blessures qu'on vous

27 avait infligées vous avaient déjà été infligées avant cela; est-ce exact ?

28 R. Il est difficile d'être très précis. On m'avait déjà frappé. J'avais

Page 1916

1 déjà commencé à étouffer avant cet incident, c'est-à-dire quand lui

2 finalement est arrivé.

3 Q. Vous aviez déjà perdu conscience à l'une ou l'autre reprise; est-ce

4 exact ?

5 R. Oui, c'est vrai.

6 Q. Encore une fois, pour être sûr de l'enchaînement des événements,

7 d'après la déposition que vous avez faite jusqu'à présent vous avez parlé

8 de trois espaces qui constituent le premier étage de la maison. Vous avez

9 parlé du couloir, une petite pièce et ainsi qu'un [inaudible]; est-ce

10 exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Pour que les Juges de la Chambre comprennent clairement ce qu'on

13 appelle le salon en albanais, c'est ce qu'on appelle "oda", est-ce bien

14 cela ?

15 R. C'est ce qu'on appelle "bujrum" en serbe. C'est une pièce assez grande.

16 Q. Donc en serbe c'est une grande pièce ?

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne suis pas si ici pour communiquer -

18 -.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Haradinaj opine du bonnet pour ce qui

21 est de la réponse. Donc, c'est pas à moi de le faire, mais veuillez

22 poursuivre, s'il vous plaît.

23 M. EMMERSON : [interprétation]

24 Q. Donc il s'agit généralement d'une pièce assez grande, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

26 Q. Vous nous parliez du moment au cours duquel on vous posait des

27 questions, et vous avez dit que c'était Besnik Haradinaj qui vous posait

28 des questions à l'intérieur de ce bâtiment; est-ce exact ?

Page 1917

1 R. Ce que j'ai dit, c'est que je pense qu'il s'appelait Besnik. Ce que je

2 sais de source sûre, c'est qu'il s'agissait de la maison de Rasim

3 Haradinaj. Rasim Haradinaj est l'oncle de l'accusé.

4 Q. Vous dites que cela s'est produit à la maison de Rasim Haradinaj. Est-

5 ce que vous ne nous avez pas dit auparavant qu'il s'agissait de la maison

6 de Smajl Haradinaj ?

7 R. Non, pas dans la maison de Rasim. C'était le fils de Rasim Haradinaj

8 qui m'interrogeait dans la maison de Smajl Haradinaj.

9 Q. C'est bien cela que j'avais compris. Cet interrogatoire est celui au

10 cours duquel vous lui avez demandé d'ouvrir la fenêtre, qu'il vous a donné

11 une tasse de café, que vous avez eu le sentiment d'étouffer, ensuite qu'il

12 a ouvert la porte, et cetera. Il s'agit bien là de l'interrogatoire dont

13 parlons, n'est-ce pas ?

14 R. J'ai bu le café à moitié, c'est cet interrogatoire, dans cette pièce-

15 là. Le reste, je n'ai pas vu.

16 Q. C'était là que je voulais tirer un point au clair. Dans laquelle des

17 trois pièces suivantes : le grand salon, la petite pièce ou le couloir, a

18 eu lieu l'interrogatoire ?

19 R. Dans la petite pièce.

20 Q. Vous nous avez dit que lorsque la porte s'est ouverte vous êtes sorti

21 dans le couloir, à ce moment-là, Mijat, votre frère et votre cousin Veselin

22 étaient dans le couloir. C'est bien cela ?

23 R. Nous avons été amenés dans ce couloir tous ensemble. Depuis ma maison

24 nous avons tous été amenés ensemble dans ce couloir. Après quoi, on m'a

25 fait entrer dans la petite pièce pour interrogatoire.

26 Q. Oui. Je comprends bien que je vous pose des questions très détaillées.

27 Mais la question que je vous pose est la suivante : quand vous êtes sorti

28 de la petite pièce après l'interrogatoire, une fois que la porte s'est

Page 1918

1 ouverte, Mijat et Veselin étaient déjà dans le couloir selon ce que vous

2 avez dit, n'est-ce pas ? Ils étaient toujours là ?

3 R. Mijat, Veselin et les soldats qui les gardaient.

4 Q. Oui. Mais pour que tout soit clair, Mijat et Veselin étaient dans le

5 couloir ?

6 R. Oui.

7 Q. Vous nous avez dit, si je ne m'abuse, que vous avez une nouvelle fois

8 perdu conscience dans le couloir et que cela s'est d'ailleurs reproduit à

9 plusieurs reprises; c'est bien cela ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous nous avez parlé d'un moment où vous avez entendu Mijat et Veselin

12 qui étaient en train de crier parce qu'ils subissaient des exactions dans

13 une autre pièce; c'est bien cela ?

14 R. Oui. Quand je reprenais conscience j'entendais cela, cela ne s'est pas

15 passé pendant un instant, cela a duré pas mal de temps, ces coups.

16 Q. Oui. Alors, deux questions si je peux me permettre. Vous étiez dans le

17 couloir quand vous les avez entendus crier, est-ce que les cris venaient du

18 grand salon ou de la petite pièce ?

19 R. De la petite pièce, j'étais à côté de la porte de la petite pièce et le

20 couloir est très étroit et très court. Je suis sûr cela venait de la petite

21 pièce dans laquelle ils étaient.

22 Q. C'est ce que je voulais savoir avec précision. Ces deux hommes qui

23 étaient avec vous, vous dites qu'ils ont été maltraités dans la petite

24 pièce, pas dans le salon, n'est-ce pas ?

25 R. Dans la petite pièce.

26 Q. Merci. Maintenant pouvez-vous nous dire avec précision s'ils étaient

27 dans cette pièce ensemble ou si on les y a fait entrer l'un après l'autre

28 au cas où vous vous en souviendriez ?

Page 1919

1 R. Si je me souviens bien, ils ont d'abord fait entrer Veselin, et plus

2 tard Mijat.

3 Q. Quand ils ont fait entrer Mijat, est-ce que Veselin est sorti ou est-ce

4 qu'il est resté à l'intérieur; autrement dit, est-ce que tous les deux ont

5 été ensemble dans la pièce en même temps ou est-ce qu'ils s'y sont trouvés

6 séparément, l'un après l'autre ?

7 R. Tous les deux en même temps.

8 Q. Il y a eu un moment où vous vous êtes retrouvé seul dans le couloir, à

9 savoir qu'aucun des deux autres hommes n'était avec vous à ce moment-là ?

10 R. Oui.

11 Q. Je crois vous avoir entendu nous dire cet après-midi que c'était

12 pendant que vous vous êtes retrouvé seul dans le couloir que l'homme dont

13 vous dites qu'il s'agissait de Ramush Haradinaj est arrivé, il vous a donné

14 un coup de pied dans le dos, c'est bien cela ?

15 R. D'abord il m'a poussé du pied pour que je me retourne vers lui, il m'a

16 à ce moment-là demandé : Voisin, est-ce que tu me connais ? J'ai répondu :

17 Non. A ce moment-là, il m'a frappé du pied dans le dos, c'est ce que

18 j'affirme et il a rétorqué à ce que je venais de dire : Bien, tu feras très

19 bien ma connaissance.

20 Q. Ma question, Monsieur Stojanovic, consistait simplement à vous demander

21 la chose suivante : quand l'incident a eu lieu, les deux autres hommes se

22 trouvaient dans la petite pièce - c'est ce que vous nous avez déjà dit - et

23 vous étiez seul dans le couloir en l'absence des deux autres, n'est-ce pas

24 ?

25 R. Dans le couloir, oui.

26 Q. Pour que ceci soit absolument clair car vous ne répondez pas

27 entièrement à ma question. Quand l'incident est survenu, l'incident

28 impliquant cet homme dont vous dites qu'il s'agissait de Ramush Haradinaj,

Page 1920

1 est-ce que Mijat ou Veselin se trouvait en votre compagnie dans le couloir

2 à ce moment-là, oui ou non ?

3 R. Eux n'y étaient pas, j'y étais.

4 Q. Merci. Je crois vous avoir déjà entendu nous dire cet après-midi que

5 personne n'a prononcé le mot "commandant", ou ne s'est adressé à l'homme

6 dont vous pensiez qu'il s'agissait de M. Haradinaj en l'appelant

7 "commandant" en votre présence, n'est-ce pas ? C'est bien ce que vous nous

8 avez dit cet après-midi ?

9 R. En ma présence, non. Simplement, ils se levaient et le saluaient.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Pourriez-vous répéter en quels mots

11 ils l'ont salué ? Vous l'avez déjà dit au cours de l'interrogatoire

12 principal, mais vous avez fait un geste de la main.

13 L'INTERPRÈTE : Le témoin refait le geste.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Donc le point serré à côté de la

15 tempe, c'est bien cela ? Merci.

16 M. RE : [interprétation] Est-ce que le compte rendu d'audience pourrait

17 rendre compte du fait que le témoin a levé son poing droit et son coude

18 jusqu'à son front.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Emmerson.

20 M. EMMERSON : [interprétation]

21 Q. Vous nous avez dit qu'au moins trois autres hommes vous ont dit la même

22 chose, à savoir : est-ce que tu me reconnais voisin, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que ce sont trois autres hommes qui vous ont dit cela ou il y en

25 a-t-il eu plus ?

26 R. D'après mon souvenir, il s'agit de trois hommes : Agron; Nasim; et

27 Mustafa Zeq, le fils d'Islam. Non, non, pas Nasim. Agron, Naim, pas Nasim

28 et le fils aîné de Smajl.

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1 Q. La pièce dans laquelle selon vous se trouvait l'homme que vous appelez

2 Ramush Haradinaj, c'était le salon, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Il n'a pas pénétré dans la petite pièce où les deux autres hommes

5 étaient détenus à ce moment-là ?

6 R. A ce moment-là, je ne l'ai pas vu.

7 Q. Vous ne l'avez vu à aucun moment pénétrer dans la petite pièce, n'est-

8 ce pas ?

9 R. Dans la petite, non.

10 Q. Vous nous avez dit qu'une fois qu'il a pénétré dans la grande pièce,

11 vous ne l'avez plus revu par la suite au cours de l'après-midi, n'est-ce

12 pas ?

13 R. Non.

14 Q. Si vous deviez essayer de donner aux Juges une estimation du temps

15 qu'il a fallu à cet homme pour descendre du haut des escaliers et arriver à

16 l'endroit où vous vous trouviez et avoir cette affrontement avec vous, vous

17 nous en avez parlé, vous nous avez dit qu'il vous avait donné des coups de

18 pied, et cetera, ensuite pénétrer dans le salon ? Combien de temps, selon

19 vous, lui a-t-il fallu pour faire tout cela, combien de secondes ?

20 R. Il ne s'agit pas de secondes. Il s'agit d'au moins cinq à six minutes

21 parce qu'il s'est arrêté à côté de moi. Il ne s'est pas contenté de passer

22 à côté de moi; il s'est arrêté.

23 Q. La conversation dont vous avez parlé, est-ce que c'est la seule qui a

24 eu lieu pendant ces cinq minutes, cette conversation pendant laquelle il

25 vous a dit : Tu me reconnais, voisin ?

26 R. Oui, oui. Il a parlé avec ses soldats. Il les a salués. Je ne sais ce

27 qu'il leur a dit d'autre, mais avec moi, c'est la seule chose qu'il a dite.

28 Q. Avez-vous entendu le sujet de la conversation qu'il avait avec ses

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1 soldats ?

2 R. Non. Pour moi, ce n'était pas important de quoi ils parlaient. J'étais

3 en train de réfléchir à ce qui me concernait moi, comment je pourrais

4 sortir de là.

5 Q. Je comprends cela tout à fait. Monsieur Stojanovic, pensez-vous

6 qu'étant blessé si grièvement et ne cessant de perdre conscience pour

7 ensuite retrouver la conscience, ne pensez-vous pas que peut-être dans cet

8 état difficile, vous auriez pu avoir quelque confusion à l'esprit quant à

9 la séquence des événements ?

10 R. Non.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Je souhaite que l'on soumettre au témoin la

12 déclaration préalable qu'il a faite le 2 novembre 2001. Il en existe une

13 version anglaise et une version albanaise. Il s'agit de la pièce de la

14 Défense 1D020426 et une version en B/C/S qui constitue le document 1211 des

15 documents 65 ter.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous aimeriez soumettre ce document au

17 témoin ?

18 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la

21 pièce D22, enregistrée pour identification.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

23 M. EMMERSON : [interprétation] Bien. Penchons-nous sur la version en B/C/S.

24 Q. Monsieur Stojanovic, il s'agit de la traduction en serbe de la

25 déclaration que vous avez signée le 2 novembre 2001 -- c'est la version

26 albanaise qui est à l'écran.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Je demande l'affichage à l'écran du document

28 1211, document 65 ter, qui est la déclaration préalable en B/C/S. Je crois

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1 savoir que l'Accusation possède des versions papier de la déclaration en

2 B/C/S. Je demanderais que l'on remette au témoin, une version papier de sa

3 déclaration préalable en serbe. Quant à la version anglaise, je demanderais

4 --

5 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, vous allez demander le

7 versement au dossier de quelle version ?

8 M. EMMERSON : [interprétation] Je demanderai le versement au dossier des

9 versions anglaise et albanaise. Nous y associerons la version en B/C/S en

10 temps utile de façon à ce que les trois versions ne constituent qu'une

11 seule et même pièce à conviction.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, les trois versions anglaise,

13 albanaise et B/C/S constitueront une seule pièce à conviction avec la même

14 cote ?

15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon.

17 M. EMMERSON : [interprétation] En effet.

18 Q. Monsieur Stojanovic, je pense que vous avez eu sous les yeux votre

19 déclaration préalable avant de déposer vendredi dernier, n'est-ce pas ?

20 R. Je l'ai eue sous les yeux et j'y ai trouvé pas mal de problèmes de

21 traduction, pas mal d'erreurs et pas mal de choses que j'ai dites et qui

22 n'étaient pas consignées par écrit.

23 Q. Nous pouvons nous pencher sur le problème de traduction plus tard,

24 Monsieur Stojanovic. Pour l'instant, j'aimerais que nous vérifiions ce que

25 vous avez dit et qui a été enregistré par écrit. D'abord, vous avez lu

26 cette déclaration préalable d'un bout à l'autre -- permettez-moi de finir.

27 Vous avez bien lu votre déclaration préalable d'un bout à l'autre avant de

28 déposer vendredi dernier, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. Je vous demanderais de vous pencher sur le document depuis le premier

3 paragraphe. Les paragraphes ne sont pas numérotés. Veuillez essayer de

4 retrouver le septième paragraphe du texte.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Je demanderais qu'on affiche à l'écran la

6 version anglaise, 0426, le numéro ERN que nous avons se termine par 24692,

7 c'est la troisième page de la version anglaise.

8 [Le conseil de la Défense se concerte]

9 M. EMMERSON : [interprétation] Le 0426 c'est le numéro d'identification du

10 document en anglais normalement.

11 Q. Vous trouvez le passage ?

12 R. Non, non.

13 Q. Ne vous inquiétez pas pour ce que vous voyez à l'écran, mais penchez-

14 vous sur le texte en B/C/S, la copie papier qui vient de vous être remise.

15 Est-ce que vous pourriez lire pour en prendre connaissance le paragraphe

16 numéro 7, sans le lire à haute voix.

17 R. Vous pourriez m'expliquer sur quelle page se trouve le paragraphe 7 ?

18 Q. Ce qui est difficile c'est que les numérotations ne correspondent pas

19 dans les différentes versions. Je vous demanderais de compter à partir du

20 début, les paragraphes pour arriver au septième.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, peut-être pourriez-vous

22 lire les premiers mots de ce paragraphe en anglais qui seront interprétés

23 au témoin de façon à ce qu'il s'y retrouve.

24 M. EMMERSON : [interprétation]

25 Q. C'est un paragraphe qui commence par les mots suivants, Monsieur

26 Stojanovic, je cite : "Ils portaient tous un uniforme vert de type uniforme

27 de guérilla…"

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est un paragraphe court.

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1 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que les Juges de la Chambre voient la

2 version anglaise sur leurs écrans ?

3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est un paragraphe court qui suit un

4 paragraphe long où on trouve plusieurs noms propres. La dernière phrase du

5 paragraphe long commence par les mots, je cite : "Les trois autres étaient

6 mes voisins, je les connaissais."

7 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, excusez-moi. Nous avons un problème

8 parce que c'est la version albanaise qui est sur les écrans en ce moment.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez retrouver le paragraphe

11 qui commence par les mots, je cite : "Ils portaient tous des uniformes de

12 type uniforme de guérilla de couleur verte et des bérets noirs" ?

13 Est-ce que vous retrouvez un paragraphe qui commence par ces mots ?

14 M. EMMERSON : [interprétation] Cela devrait être en page 2 ou 3.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pourrait-on placer le texte

16 sur le rétroprojecteur et nous pourrions aider le témoin à retrouver le

17 passage.

18 Monsieur l'Huissier, vous pouvez nous aider ?

19 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je

20 pourrais énumérer les paragraphes et retrouver dans son texte le paragraphe

21 qui nous intéresse.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

23 M. EMMERSON : [interprétation] Je peux essayer cette solution d'abord ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. EMMERSON : [interprétation] Je demande qu'on me remette la déclaration

26 en B/C/S sur papier.

27 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce que vous disposez de plusieurs

28 exemplaires de ce document ?

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1 M. EMMERSON : [interprétation] Le paragraphe se trouve au milieu de la

2 page, en page 4.

3 Q. Monsieur Stojanovic, j'ai inscrit une croix au début du paragraphe que

4 je vous demande d'examiner. Nous allons vous laisser un instant pour que

5 vous preniez connaissance de la teneur de ce paragraphe. Vous pouvez lire

6 jusqu'au passage où vous parlez de Ramush Haradinaj.

7 Vous avez lu tout ce passage ?

8 R. Je l'ai trouvé. Oui.

9 Q. Merci. Dans le paragraphe qui commence par les mots : "Ils portaient

10 tous un uniforme de type guérilla de couleur verte…", vous décrivez

11 l'interrogatoire qui a été mené par l'homme que vous appelez Besnik

12 Haradinaj dans la pièce dont vous avez parlé, n'est-ce pas ? C'est bien ce

13 que vous décrivez dans ce paragraphe, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Ensuite, nous voyons là un paragraphe qui commence par les mots

16 suivants: "J'ai été grièvement blessé quand j'étais dans notre maison

17 précédemment. J'ai commencé à perdre conscience, à m'évanouir. J'ai

18 commencé à étouffer, et ils m'ont tiré hors de la pièce. Ils ne m'ont pas

19 frappé du tout pendant cette période, parce que j'étais déjà grièvement

20 blessé. J'avais du sang sur tout le visage et sur la tête. J'ai perdu

21 conscience une nouvelle fois. Je gisais dans le couloir, sur le sol en

22 béton où je suis resté un moment. Quelquefois je reprenais conscience et

23 j'entendais Mijat et Veselin qui criaient, et leurs cris venaient de

24 l'intérieur de la pièce où je m'étais trouvé auparavant. Je ne les ai pas

25 vus à l'intérieur de cette pièce."

26 D'abord, je vous demande si le passage que je viens de lire correspond à ce

27 qui est écrit, Monsieur Stojanovic ?

28 R. Quand ils les ont fait pénétrer dans la pièce, oui. J'étais…

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1 Q. Je ne sais pas si vous avez terminé votre réponse.

2 R. Veuillez me poser une question précise de façon à ce que je comprenne

3 ce que vous me demandez.

4 Q. Bien sûr. Au départ je vous demandais simplement, Monsieur Stojanovic,

5 si le passage que je venais de vous lire correspondait bien à ce qui était

6 écrit. Est-ce qu'il correspond à ce qui est écrit ?

7 R. Oui.

8 Q. Il s'ensuit que vous ne cessiez de perdre conscience et de revenir à la

9 conscience pendant que vous étiez dans le couloir, et vous n'avez pas vu

10 quand on a fait entrer Mijat et Veselin dans la petite pièce. C'est bien

11 cela ? Vous étiez inconscient au moment où Mijat et Veselin ont été emmenés

12 dans la petite pièce, n'est-ce pas ?

13 R. Veselin, oui. Mais Mijat a été emmené dans la petite pièce plus tard.

14 Q. Est-ce que vous avez vu quand ils l'ont fait entrer dans la petite

15 pièce ? Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

16 R. Qui cela ? Mijat ?

17 Q. Oui.

18 R. Oui.

19 Q. Parce que vous voyez que dans votre déclaration préalable ce qui est

20 enregistré comme étant ce que vous avez dit, se lit comme suit: "Je n'ai

21 pas vu quand on les a fait pénétrer dans la pièce."

22 R. Le premier, non; le deuxième, oui.

23 Q. D'accord. Lisons les lignes qui suivent dans lesquelles vous donnez des

24 noms d'un certain nombre de personnes que vous décrivez. A la fin du

25 paragraphe, vous nous parlez de quelqu'un qui s'appelle Isuf Verizaj, et

26 vous dites que cet homme vous a dit --

27 R. Un instant. Il ne s'agit pas d'Isuf Verizaj, mais de Jusuf Dervishaj.

28 Vous voyez, cela prouve qu'il y a des erreurs de traduction.

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1 Q. Très bien. L'homme dont vous parlez comme étant Jusuf Dervishaj,

2 d'après ce que vous dites dans votre déclaration préalable, cela se lit

3 comme suit: "Ne t'inquiète pas, on va te laisser partir." Et vous dites :

4 "Cet homme était mon voisin. Je l'ai reconnu d'après son aspect physique et

5 aussi d'après sa voix. J'ai perdu conscience une nouvelle fois."

6 Est-ce que ceci est exact ? Est-ce que vous avez perdu une nouvelle fois

7 conscience après que cet homme vous a parlé ?

8 R. Je me suis évanoui à de nombreuses reprises. Donc, je pense que c'est

9 sans doute exact, mais puisque neuf ans se sont écoulés depuis, je crains

10 de ne pas pouvoir me rappeler tous les détails.

11 Q. Je comprends tout à fait cela, Monsieur Stojanovic, et c'est la raison

12 pour laquelle il y a un instant je vous ai dit que compte tenu de l'état

13 dans lequel vous vous trouviez, vous pourriez peut-être avoir quelque mal à

14 vous rappeler avec précision la séquence exacte des événements, parce que

15 c'est sans doute un peu difficile pour vous, cela a pu créer une certaine

16 confusion dans votre esprit.

17 Mais si je puis me permettre, j'aimerais que maintenant vous vous

18 penchiez sur le paragraphe suivant, parce qu'après avoir décrit Mijat et

19 Veselin qui sont emmenés dans la pièce, et après avoir dit que vous aviez

20 entendu leurs cris, vous ajoutez:

21 "Après quelques instants, j'ai repris conscience. J'ai vu Ramush

22 Haradinaj qui montait les escaliers en compagnie de plusieurs soldats.

23 Ramush est arrivé à côté de moi et m'a donné un coup de pied dans le dos.

24 Il m'a demandé à ce moment-là : Est-ce que tu me reconnais, voisin ? Et

25 quand j'ai répondu non, il a dit : Si tu ne me connais pas maintenant, tu

26 va bientôt me connaître très bien. J'ai vu Veselin et Mijat gisant sur le

27 sol dans le couloir. Ils étaient à côté de moi."

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Excusez-moi un instant, je suis un

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1 peu perdu.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi.

3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce que vous poursuivez la lecture

4 avec le paragraphe suivant ?

5 M. EMMERSON : [interprétation] C'est un paragraphe qui commence par les

6 mots: "Après quelques instants…" Vous l'avez trouvé ?

7 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Non.

8 M. EMMERSON : [interprétation] C'est le paragraphe suivant de la même page.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] De la même page en anglais ?

10 M. EMMERSON : [interprétation] En anglais. Oui, Monsieur le Juge.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la version anglaise, c'est le même

12 paragraphe.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] "Après quelques temps" --

14 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, c'est cela. Est-ce que vous l'avez

15 trouvé ?

16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Après la phrase "Je me suis une

17 nouvelle fois évanoui…" ?

18 M. EMMERSON : [interprétation] Exactement. C'est après la description du

19 moment où Veselin et Mijat --

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Nous pourrions reprendre ce paragraphe --

22 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est après le long paragraphe dont

23 nous avons parlé il y a quelques instants. Je dis cela pour que le témoin

24 situe exactement le paragraphe dont nous sommes en train de parler.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin l'a trouvé dans sa langue en

26 page 5, si je ne m'abuse. C'est un nouveau paragraphe qui commence à peu

27 près à sept lignes à partir du début de la page.

28 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense que j'ai vu le témoin tourner la

Page 1931

1 page. Bien, alors je cite.

2 Q. "Après quelques instants, j'ai repris conscience et j'ai vu Ramush

3 Haradinaj en train de monter les escaliers en compagnie de plusieurs

4 soldats."

5 Ensuite, vous parlez de l'incident dont vous nous avez déjà parlé, et vous

6 affirmez qu'il vous a dit : "Si je tu me connais pas maintenant, tu va très

7 bien me connaître plus tard."

8 R. Oui.

9 Q. Je cite : "J'ai vu Veselin et Mijat gisant sur le sol dans le couloir,

10 et ils étaient à côté de moi. Ils étaient conscients. Je me suis à nouveau

11 évanoui, et j'ai repris conscience. Veselin était là, mais Mijat n'était

12 plus là."

13 Alors, ce qui est enregistré dans votre déclaration préalable, Monsieur

14 Stojanovic, c'est qu'au moment où l'homme dont vous parlez comme étant

15 Ramush Haradinaj a été vu par vous montant les escaliers, Veselin et Mijat

16 étaient conscients dans le couloir à côté de vous, et qu'ils avaient déjà

17 été emmenés dans la pièce où ils avaient été frappés à ce moment-là. Voilà

18 ce qui est écrit dans la déclaration préalable que vous avez faite. Pouvez-

19 vous nous aider sur ce point ?

20 R. Oui, je le peux. Dans la déclaration écrite, on a l'impression que tout

21 cela s'est passé en une minute à peine, mais si vous lisez bien cette

22 déclaration, il faut que vous intégriez des pauses parce que ce qui s'est

23 passé avec Ramush s'est passé en premier. Ensuite, il s'est passé un petit

24 laps de temps; après ce petit laps de temps, il est possible que je me sois

25 à nouveau évanoui, j'ai repris conscience et j'ai vu Mijat et Veselin à

26 côté de moi. Je vous en prie, n'essayez pas de contester ce que je dis ici

27 parce que je sais très bien ce qui s'est passé et ce qu'il m'a dit.

28 Q. En dehors du problème de temps, Monsieur Stojanovic, veuillez examiner

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1 la séquence des événements décrits dans cette déclaration préalable qui est

2 écrite sur papier. On y lit que ce que vous avez dit, c'est que Mijat et

3 Veselin ont été emmenés dans la petite pièce et ont été roués de coups

4 avant que cet homme que vous décrivez comme étant Haradinaj monte les

5 escaliers, et qu'au moment où il a monté les escaliers ils étaient sortis

6 de la petite pièce et étaient de retour dans le couloir.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, un instant, je vous prie --

8 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez moi --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a expliqué ce que veut dire la

10 déclaration si je ne me trompe. Je cite : "J'ai vu Veselin et Mijat gisant

11 sur le sol dans le couloir." Est-ce que, Monsieur le Témoin, vous dites que

12 cela s'est passé au moment où vous avez vu M. Haradinaj monter les

13 escaliers ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. D'abord il m'a donné un coup de

15 pied, après un certain laps de temps un peu plus tard, je me suis à nouveau

16 évanoui. C'est quand j'ai repris conscience que je les ai vus dans le

17 couloir.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître

19 Emmerson.

20 M. EMMERSON : [interprétation]

21 Q. Monsieur Stojanovic, vous nous avez dit cet après-midi qu'au moment où

22 cet incident a eu lieu vous n'avez pas reconnu les autres soldats parce que

23 vous gisiez sur le sol sur le ventre et que vous ne pouviez pas regarder

24 bien ce qui se passait autour de vous. C'est ce que vous avez dit dans

25 votre déposition cet après-midi. Est-ce que cela décrit bien la position

26 dans laquelle vous étiez sur le sol quand l'homme, dont vous dites qu'il

27 s'agissait de M. Haradinaj, a monté les escaliers ?

28 R. Je n'ai pas dit que j'étais allongé sur le sol, sur le ventre; j'ai

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1 simplement dit que je gisais sur le côté droit ou gauche sur le sol et que

2 j'ai à peine réussi à me retourner parce qu'il m'était très difficile de

3 bouger.

4 Q. Donc c'est moi qui étais dans l'erreur parce que la note que j'ai prise

5 c'est sur le ventre quand vous avez dit cela dans votre déposition, ce qui

6 voudrait dire le visage contre terre. Peut-être que c'est une erreur de ma

7 part liée à la traduction. En tout cas vous nous avez dit, n'est-ce pas,

8 que vous aviez à peine la possibilité de voir ce qui se passait autour de

9 vous et que plus vous essayiez de regarder ce qui se passait autour de

10 vous, plus vous vous sentiez mal ?

11 R. C'est vrai que je me sentais mal, mais c'était une petite pièce, elle

12 faisait à peine 2 mètres sur 2, toute petite. J'ai déjà expliqué que dans

13 un coin de cette pièce il y avait des caisses de munitions. J'étais là sur

14 le sol, il y avait les soldats, il était impossible que quelqu'un passe

15 dans cette pièce sans que je le remarque, à condition d'être conscient,

16 bien entendu.

17 Q. Evidemment, évidemment. C'est une chose des choses sur lesquelles

18 j'avais l'intention de vous interroger parce que vous ne cessiez de perdre

19 conscience et de reprendre conscience pendant tous ces instants, vous étiez

20 là sur le sol, vous nous avez dit que -reprendre les termes que vous avez

21 utilisés - vous aviez à peine la possibilité de bien voir ce qui se passait

22 et qui étaient les autres soldats qui se trouvaient là. J'essaie d'explorer

23 le point suivant avec vous. Combien de temps avez-vous été conscient,

24 d'après votre souvenir, pendant toute cette période, et pendant combien de

25 temps avez-vous été inconscient selon vous ?

26 R. Il m'est difficile de le dire. Quand on est inconscient, il est

27 très difficile de dire combien de temps on a été inconscient. C'est la

28 raison pour laquelle il y a beaucoup de détails qui m'ont échappés, les

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1 deux autres témoins pourraient vous dire qui se trouvaient là, pourraient

2 vous donner des détails à ce sujet dont je n'ai pas le souvenir.

3 Q. Je vais vous lire un passage, Monsieur Stojanovic, ce qui nous

4 évitera de faire afficher le texte à l'écran, ce qui prend pas mal de

5 temps. Je vais donc vous lire ce passage de votre déclaration préalable du

6 26 mai 2002, déclaration que vous avez faite devant les représentant du

7 bureau du Procureur. Je vais lire lentement pour que cela vous soit

8 interprété. C'est un autre document que celui que vous avez actuellement

9 sous les yeux, il s'agit de votre deuxième déclaration préalable dans

10 laquelle vous dites à un certain moment, je cite :

11 "Je me souviens qu'après avoir été roué de coups au quartier général,

12 Ramush est venu me demander si je le connaissais, ensuite il a dit que

13 j'allais à nouveau être frappé dans le dos et ils sont entrés dans la pièce

14 où mon frère et mon cousin s'étaient trouvés quelques instants auparavant."

15 R. Non, non. Pas mon frère, pas mon cousin. Le salon, c'est peut-être une

16 erreur de traduction. Je vous dis que ce qui est juste c'est ce que je vous

17 ai dit.

18 Q. Mais on peut vérifier la traduction, Monsieur Stojanovic, mais ce qui a

19 été consigné par écrit, sur la base de ce que vous avez dit, c'est que cet

20 homme a pénétré dans la pièce où se trouvaient votre frère et votre cousin

21 quelques instants auparavant. Ce n'est pas exact, n'est-ce pas, d'après ce

22 que vous dites maintenant ?

23 R. Non, pas la petite pièce, le grand salon ou la grande pièce.

24 Q. Ce qui a aussi été consigné par écrit sur la base de vos propos est la

25 chose suivante, je cite : "Il ne s'est pas présenté à moi comme étant le

26 commandant, mais j'ai entendu les soldats de l'UCK s'adresser à lui en ces

27 termes." Encore une fois, on peut partir du principe que vous n'avez pas

28 entendu les soldats de l'UCK s'adresser à lui en l'appelant "commandant",

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1 puisque c'est ce que vous avez dit cet après-midi, n'est-ce pas ?

2 R. Pas en tant que tel, mais ils l'ont salué, ce genre de chose.

3 Q. Après cet incident, vous nous avez dit que vous avez vu Hilmi Haradinaj

4 à un certain moment, n'est-ce pas ?

5 R. J'ai vu Hilmi au fond de la pièce, c'est lui qui nous a donné du Coca

6 et du Fanta.

7 Q. Est-ce qu'il y a eu un moment où vous vous êtes trouvé hors de la

8 maison, dans la cour, en compagnie de Veselin et de Mijat dans la cour de

9 la maison de Smajl Haradinaj ?

10 R. Dans la cour de la maison de Smajl Haradinaj ?

11 Q. Oui.

12 R. Non, à aucun moment.

13 Q. Donc, il n'y a jamais eu un instant où vous-même et votre frère Mijat

14 ainsi que Veselin, vous vous êtes trouvés dans la cour en même temps, la

15 cour de la maison de Smajl Haradinaj ?

16 R. Smajl Haradinaj, oui. Je pensais que vous m'interrogiez au sujet de la

17 cour de Hilmi parce que vous m'aviez posé des questions au sujet de Hilmi.

18 Q. Non, non. Ne vous inquiétez pas, nous allons reprendre très clairement

19 cette question.

20 Est-ce qu'il y a eu le moindre moment où vous-même et votre frère, ainsi

21 que votre cousin, vous vous êtes trouvés sous bonne garde dans la cour de

22 la maison de Smajl Haradinaj ?

23 R. Oui, mais seulement quand ils ont fait sortir pour qu'on fasse notre

24 toilette. Il y avait la pompe à eau qui se trouvait là et ils nous ont

25 ordonné d'utiliser chacun à notre tour cette pompe à eau pour nettoyer

26 notre visage. Hilmi, pas Smajl, mais Hilmi était juste sous les escaliers

27 dans l'espace qu'il y a sous les marches d'escaliers. Ensuite, il est

28 revenu dans la pièce avec nous. Je n'ai pas pensé que c'était important

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1 mais il est revenu dans la pièce avec nous et il nous a donné ce jus de

2 fruits, enfin cette boisson.

3 Q. Vous n'avez jamais vu Ramush Haradinaj à aucun moment à l'extérieur

4 dans la cour à l'extérieur de la maison de Smajl Haradinaj, n'est-ce pas ?

5 R. Non, non, pas là.

6 Q. Je voudrais maintenant passer à d'autres sujets. Vous nous avez dit,

7 Monsieur Stojanovic - ici je veux simplement explorer quelques questions

8 générales pendant un instant - vous nous avez dit que le 18 avril vous avez

9 reconnu l'une des personnes qui sont venues à la maison, vous avez reconnu

10 un fusil mitrailleur chinois. M. Re vous a demandé comment vous avez pu le

11 reconnaître, vous avez répondu, je cite : "J'ai fait le cours des officiers

12 de réserve, et je connaissais les armes dont je me servais" --

13 R. Lors de mon service militaire."

14 Q. Oui. Je voudrais que ceci soit clair : combien de temps avant cet

15 incident qui s'est produit le 18 avril avez-vous été formé ou suivi des

16 cours d'officier de réserve dans l'armée ?

17 R. C'était en 1986 et en 1987.

18 Q. Environ 11 ans auparavant, n'est-ce pas ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Puis-je vous poser une autre question au sujet de vos frères ? A part

21 vous-même, ai-je bien compris qu'il y avait quatre autres frères qui

22 étaient là; est-ce exact ?

23 R. Oui.

24 Q. Il y avait Mijat, et vous nous avez dit que son surnom était Kika ?

25 R. Oui.

26 Q. Lui a toujours quelques années de plus que vous, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, deux ans de plus.

28 Q. Merci. Ensuite, il y a Predrag ?

Page 1937

1 R. L'aîné.

2 Q. Combien d'années de plus que vous a Predrag ?

3 R. Je ne suis pas trop sûr de quand exactement il est né, mais c'était le

4 frère aîné.

5 Q. Ensuite, il y avait Vladimir ou Vlado. Est-ce que son surnom est bien

6 Vlado ?

7 R. Oui, oui.

8 Q. Est-il plus âgé ou plus jeune que vous ?

9 R. Plus âgé.

10 Q. Voulez-vous bien nous dire où il se situe. Est-ce qu'il est plus jeune

11 que Predrag et plus âgé que Mijat ?

12 R. Oui, c'est bien cela.

13 Q. Ensuite, qui est le quatrième frère, quel est son nom ou son prénom ?

14 R. Veselin.

15 Q. Il s'agit de Veselin Stojanovic.

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. Est-ce que son surnom est Vesko ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Par rapport à vous, quel est l'âge de Veselin Stojanovic ?

20 R. Il est plus âgé, je suis le plus jeune.

21 Q. Pour qu'il n'y ait pas de confusion, Veselin Stojanovic n'est

22 évidemment pas la même personne que Veselin Stijovic auquel vous avez fait

23 référence vendredi à un moment donné comme étant votre cousin ?

24 R. C'est bien cela, ce n'est pas la même personne. Stijovic est un parent.

25 Q. J'ai bien compris, vous avez donc un frère qui s'appelle Veselin; est-

26 ce bien cela ?

27 R. Oui, c'est bien cela.

28 Q. Predrag votre frère aîné était un officier de police; est-ce exact ?

Page 1938

1 R. Oui, c'est exact.

2 Q. Quand a-t-il rejoint les forces de police ?

3 R. Je ne me souviens plus de l'année au cours de laquelle il a rejoint les

4 forces de police, mais il a travaillé avec les Siptar dans la force de

5 police.

6 Q. Il a été officier de police pendant quelques années avant 1998; est-ce

7 exact ?

8 R. Oui.

9 Q. L'avez-vous vu en uniforme de police à une occasion ou à une autre ?

10 R. Oui.

11 Q. Avez-vous jamais su quel type d'arme ou armes il portait en tant

12 qu'officier de police ?

13 R. Non.

14 Q. Monsieur Stojanovic, --

15 R. Excusez-moi, excusez-moi un instant, s'il vous plaît. Je n'ai pas vu

16 ces armes et la raison à cela est qu'il habitait à Djakovica. Il venait de

17 temps en temps nous donner un coup de main sur la ferme, mais

18 habituellement il résidait et travaillait à Djakovica.

19 Q. Monsieur Stojanovic, nous avons vu des comptes rendus officiels qui

20 font état du fait qu'en mars 1999, il était membre des forces de police

21 paramilitaires. Saviez-vous cela ?

22 R. Les forces de police paramilitaires, non, non ce n'est pas vrai. Non,

23 ce n'est pas que je ne sais pas cela, c'est que ce n'est pas vrai.

24 Q. Pour que les choses soient claires, vous avez bien entendu parler de la

25 PJP n'est-ce pas ? La PJP, vous savez ce que veut dire cet acronyme, n'est-

26 ce pas ?

27 R. Quoi exactement.

28 Q. La PJP, la police paramilitaire.

Page 1939

1 R. Pouvez-vous essayer d'expliquer plus en détail pour que je puisse

2 comprendre.

3 Q. Oui, je peux vous donner le nom au complet en Serbe, si cela peut vous

4 aider.

5 R. Oui, oui, c'est ce que j'aimerais, je vous remercie.

6 Q. Si vous voulez attendre un instant je vais l'épeler pour les

7 interprètes. Il s'agit de Posebne Jedinice Policije; P-o-s-e-b-n-e J-e-d-i-

8 n-i-c-e P-o-l-i-c-i-j-e.

9 R. Je n'ai jamais vu cela.

10 Q. Quand vous dites de manière catégorique que votre frère n'était pas

11 membre de la police militaire, vous ne pouvez pas nous dire de façon sûre

12 qu'il était membre ou non de cette organisation, n'est-ce pas ?

13 R. Ce que je peux vous dire c'est qu'il était garde. C'était un officier

14 de police qui passait la plupart de son temps de garde.

15 Q. Je vais revenir à ce qu'il faisait dans un instant, s'il vous plaît.

16 Pour ce qui est de Veselin, pour autant que vous en sachiez, a-t-il jamais

17 rejoint les forces de police à un moment ou à un autre, ou les forces de

18 police de réserve ?

19 R. Ni l'une ni l'autre; ni la police, ni les officiers de police de

20 réserve, ni les militaires.

21 Q. Connaissez-vous qui que ce soit d'autre qui s'appelle Veselin

22 Stojanovic ?

23 R. Non, pas à Dubrava, pas où nous habitons.

24 Q. Je vois.

25 R. Pas du tout.

26 Q. Puis-je en déduire que ni vous ni aucun de vos frères, Mijat ou

27 Vladimir, n'étaient membres des officiers de police de réserve; est-ce

28 exact ?

Page 1940

1 R. Vous avez toute liberté de déduire cela.

2 Q. Pouvez-vous nous dire entre janvier et mars 1998 qui habitait dans

3 votre maison ? Qui y habitait ?

4 R. Entre janvier et mars, j'y étais, ma mère y habitait, ma sœur y

5 habitait. Je travaillais à Decani, à l'école que j'ai mentionnée. Ma sœur

6 allait à Djakovica, elle y travaillait dans un magasin, et ma mère était

7 retraitée. Mijat venait de temps en temps. Il avait habité pendant

8 longtemps à Belgrade. Au cours des dernières années, il était là, il

9 vendait de la teinture, un type de teinture oxydante, une teinture

10 industrielle. Donc il allait du magasin à son ancienne maison et passait la

11 nuit chez nous. En fait, il résidait à Belgrade.

12 Q. Puis-je vous demander si soit vous ou soit quelqu'autre membre de votre

13 famille gardait des armes à la maison au cours de la période qui allait de

14 janvier au 24 mars 1998 ?

15 R. Oui.

16 Q. Quelles armes gardiez-vous dans la maison ?

17 R. Ma mère avait un pistolet ainsi qu'un fusil de chasse que mon père

18 avait laissés.

19 Q. Portiez-vous le pistolet sur vous, vous-même, Monsieur Stojanovic ?

20 R. Le pistolet de ma mère ? Vous voulez dire le pistolet de ma mère ? Le

21 pistolet de ma mère, je n'avais pas de pistolet. Le pistolet appartenait à

22 ma mère.

23 Q. Portiez-vous le pistolet avec vous quand vous quittiez la maison ?

24 R. Non, je ne le portais pas.

25 Q. Puis-je vous poser une question au sujet de l'incident lorsque vous

26 avez été arrêté par quatre hommes masqués à Gllogjan ? Vous nous avez dit

27 qu'ils vous ont posé des questions --

28 R. Oui, certainement. Interrogez-moi.

Page 1941

1 Q. Vous nous avez dit qu'ils vous ont posé des questions et vous ont

2 fouillé; est-ce exact ?

3 R. Ils m'ont fouillé ainsi que la voiture.

4 Q. Vous ont-ils dit ce qu'ils cherchaient ?

5 R. Non, ils ne m'ont pas expliqué ce qu'ils cherchaient, mais ils m'ont

6 fouillé ainsi que la voiture.

7 Q. Est-ce qu'ils ont trouvé un fusil ?

8 R. Sur moi, non.

9 Q. Dans votre voiture ?

10 R. Non, non pas dans ma voiture non plus.

11 Q. Avez-vous dû signer un papier disant qu'ils vous avaient rendu votre

12 fusil ?

13 R. Qui a dit qu'ils m'avaient rendu quoi que ce soit ? Ils n'avaient pas

14 trouvé quoi que ce soit. Si j'ai signé une déclaration, oui, oui, j'ai

15 signé une déclaration disant qu'ils ne m'avaient pas maltraité. C'est ce

16 que j'ai fait. Ils m'ont dicté ce que j'ai dû écrire. J'ai écrit qu'il ne

17 m'avait pas maltraité, qu'il ne m'avait pas roué de coups, ce qui était

18 vrai. En tout cas, c'était vrai pour ce soir-là en particulier.

19 Q. Monsieur Stojanovic, vous m'avez posé une question. C'est une de ces

20 occasions exceptionnelles où je me permets d'y répondre. C'est votre mère

21 qui a dit qu'on avait trouvé un fusil sur vous. Elle a fait une déclaration

22 à l'effet qu'on avait trouvé un fusil sur vous et qu'on vous avait demandé

23 de signer --

24 R. Ma mère est une femme âgée. J'ai signé la déclaration moi-même. C'est

25 moi qui a été fouillé. Comment est-ce que ma mère aurait pu savoir, ou qui

26 que ce soit d'autre d'ailleurs, ce qui s'était passé ? Ce n'était pas la

27 seule fois qu'ils m'ont fouillé quand ils m'ont arrêté. Ils m'ont fouillé

28 environ cinq fois.

Page 1942

1 Q. Vous avez probablement discuté de cet incident avec votre mère,

2 Monsieur Stojanovic ?

3 R. J'ai raconté cet incident à la police. J'ai fait un rapport à la

4 police, comme tout citoyen devrait le faire.

5 M. EMMERSON : [interprétation]

6 Q. Pourrions-nous voir, s'il vous plaît, la pièce à la 65 ter qui porte le

7 numéro 1161 ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, ceci serait donc la

9 pièce numéro -- ?

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

11 Juges, ceci serait la pièce D23, aux fins d'identification.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Madame la Greffière.

13 M. EMMERSON : [interprétation]

14 Q. Maintenant, Monsieur Stojanovic, je vais devoir vous donner lecture de

15 ce passage parce que nous ne l'avons pas en serbe, Mais nous avons entendu

16 la déposition de la personne qui a rédigé ce rapport et qui, après avoir eu

17 un entretien avec votre mère, a écrit mot pour mot ce que votre mère a

18 déclaré. Cette entrevue a été menée, comme nous pouvons le voir -- ou

19 plutôt d'après ce que dit le rapport, le 9 avril.

20 On peut voir en bas de page, le compte rendu fait état du fait que

21 l'entrevue a été menée le 9 avril à un centre de jeunesse à Decani.

22 M. EMMERSON : [interprétation] Si nous pouvions simplement passer à la

23 seconde page, s'il vous plaît, au premier paragraphe de celle-là. Si l'on

24 pouvait agrandir le premier paragraphe, s'il vous plaît ? Seulement le

25 premier paragraphe. C'est tout ce dont nous avons besoin pour le moment.

26 Q. A la troisième ligne du premier paragraphe, et je vais en donner

27 lecture lentement pour la traduction :

28 "Ils ont attrapé mon fils Dragoslav à la fin du mois de février. Ils

Page 1943

1 l'ont arrêté, ont pris son pistolet, ensuite le lui ont rendu. Il

2 s'agissait de quatre hommes masqués en armes qui l'ont arrêté, lui ont

3 demandé où il habitait et d'autres questions de la sorte. Ils l'ont

4 fouillé, ont trouvé le pistolet, le lui ont rendu, mais lui ont fait signer

5 une déclaration disant qu'ils avaient rendu le fusil et ne lui ont pas de

6 mal. Cela s'est passé à Gllogjan."

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Emmerson, vous dites que vous

8 nous donnez lecture lentement, mais -- veuillez poursuivre s'il vous plaît.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Je vais laisser les interprètes me

10 rattraper.

11 Q. "Cela s'est passé à Gllogjan à environ 11 heures et demi de la nuit.

12 Ils parlaient albanais, pas en siptar comme dans certains endroits. Nous

13 parlons tous le siptar, mais ils parlaient comme ils le font en Albanie.

14 Ils ont demandé au chef : 'Devons-nous lui rendre son fusil ?' Le chef

15 était dans le noir et il portait un masque. Ils ont donné à mon fils le

16 fusil ainsi que les munitions, une cigarette à allumer, et ils lui ont

17 souhaité bonne chance. Ensuite il a signé. Il devait écrire tout cela en

18 albanais et signer."

19 C'est ce que votre mère a dit lors d'une déclaration qu'elle a donné le 9

20 avril 1998, Monsieur Stojanovic, lorsqu'on l'a interrogé ? Je crois que

21 vous serez d'accord --

22 R. J'ai déjà fait une déclaration à la police sur cet incident. Je n'ai

23 jamais parlé de cet incident aux journalistes. Pour ce qui est de ce que ma

24 mère a dit, il vaudrait peut-être mieux que vous l'interrogiez. Ce que j'ai

25 dit ici est identique en tous points à la déclaration que j'ai faite à la

26 police. Ce que je dis, c'est qu'ils ne m'ont jamais maltraité. Ils m'ont

27 fait écrire ceci. L'un d'entre eux a dicté la déclaration, et le point

28 essentiel, c'est qu'ils ne m'ont pas maltraité à cette occasion en

Page 1944

1 particulier. Ils n'ont pas trouvé d'arme sur moi pour la toute simple

2 raison que je n'en avais pas.

3 Q. Avez-vous parlé de ce qui s'est produit avec votre mère ?

4 R. Non, je ne l'ai pas fait. Ma mère était souvent seule. Je ne voulais

5 pas qu'elle soit plus effrayée que nécessaire.

6 Q. Savez-vous d'où elle aurait pu obtenir tous les détails de cet

7 incident, c'est-à-dire les hommes masqués qui vous ont offert un paquet de

8 cigarettes et qui vous ont demandé de signer un papier, vous demandant

9 d'écrire en albanais, et cetera ? Est-ce que vous savez d'où elle aurait pu

10 obtenir tous ces éléments d'information, si ce n'est de vous ?

11 R. Je ne sais pas. Je suppose que je devrais lui demander, mais je ne

12 savais pas tout cela.

13 Q. Pouvez-vous nous aider sur ce point ? Pourquoi est-ce que votre mère

14 aurait pu imaginer que vous aviez une arme dans votre voiture, si vous nous

15 dites qu'il s'agissait de son arme, et que cette arme était toujours à la

16 maison ?

17 R. Monsieur, le seul fusil qui se trouvait dans cette maison lui

18 appartenait. A deux occasions différentes, j'ai obtenu le permis de port

19 d'armes, mais je n'ai pas acheté d'arme. C'était une époque paisible. Je ne

20 pensais pas avoir besoin d'une arme.

21 Q. Non, mais ma question, Monsieur Stojanovic, est la suivante. Puisqu'il

22 s'agissait de votre arme et que vous ne l'avez jamais emportée avec vous

23 hors de la maison, pouvez-vous imaginer une seule raison qui permettrait à

24 votre mère d'avoir l'impression que vous auriez pu avoir une arme dans

25 votre voiture lorsque vous avez été arrêté ?

26 R. Comme je l'ai dit, c'est probablement une question que vous devriez lui

27 poser. Je n'en ai jamais parlé avec elle, pas plus que je savais ceci.

28 C'est la première fois que j'en entends parler.

Page 1945

1 Q. Vous nous avez dit que votre mère gardait également un fusil à la

2 maison; est-ce exact ?

3 R. Oui, c'est exact, un fusil de chasse.

4 Q. Aviez-vous des munitions pour le pistolet dans la maison ? Votre mère

5 parle de munitions dans son rapport. Aviez-vous des munitions pour le

6 pistolet dans la maison ?

7 R. Je suis sûr que nous en avions, mais pas sûr à 100 %. A vrai dire, cela

8 ne m'intéressait pas énormément. J'étais en très bons termes avec tous ceux

9 qui m'ont puni par la suite. Je n'avais aucun besoin de porter des armes ou

10 d'avoir des munitions avec moi.

11 Q. Poursuivons, Monsieur Stojanovic, et passons à un autre sujet. Dans la

12 déclaration que vous avez faite au bureau du Procureur au mois de mai 2002,

13 vous avez dit que durant les mois de janvier et février 1998, vous-même

14 ainsi que votre famille avaient remarqué les allers et venues de camions

15 qui entraient et sortaient de l'ensemble des maisons de la famille

16 Haradinaj. Je vais vous poser la question suivante. Aviez-vous relaté ces

17 informations à la police au sujet d'allers et venues de camions vers la

18 maison de votre voisin ?

19 R. Non. Pourquoi ferais-je une chose de la sorte ?

20 Q. Pour ce qui est de votre frère Predrag, l'officier de police, lui avez-

21 vous jamais parlé de cela ?

22 R. Mon frère Predrag ne travaillait pas dans la région. Je ne crois pas

23 qu'il aurait pu être partie de cet incident.

24 Q. Vous n'avez jamais parlé avec lui du fait qu'il y avait un ensemble de

25 camions qui faisaient des allers et retours vers la maison de vos voisins,

26 les Haradinaj ?

27 R. Pourquoi donc le ferais-je ? Je ne savais pas ce qu'il y avait à

28 l'intérieur des camions.

Page 1946

1 Q. Je vois. Pouvons-nous revenir à ceci dans un instant.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous afficher la pièce 020733.

3 Q. Monsieur Stojanovic, ceci est une photographie aérienne qui est prise

4 directement au-dessus de votre maison et de l'ensemble des maisons de la

5 famille Haradinaj pour que vous puissiez voir exactement quel est le

6 rapport entre les deux.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, ceci serait le

8 numéro ?

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

10 Juges, cette pièce prendra le numéro D24, aux fins d'identification.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

12 M. EMMERSON : [interprétation]

13 Q. Ceci est une photographie relativement récente. Si l'on examine le coin

14 en bas à gauche, voyez-vous le bâtiment en ruine, Monsieur Stojanovic ?

15 R. Auquel faites-vous référence; le plus grand ou celui-ci ?

16 Q. Laissez-moi vous orienter. Vous voyez la route qui suit une ligne

17 verticale à partir du côté gauche de la photographie du haut vers le bas.

18 Voyez-vous cette route ?

19 R. Oui.

20 Q. Voyez-vous la route qui part vers la droite ?

21 R. Oui.

22 Q. Au bout de cette route, je vous suggère qu'il s'agit de l'ensemble des

23 maisons de la famille Haradinaj, bien que vous nous avez dit plutôt cet

24 après-midi qu'une partie a été reconstruite depuis que vous y habitiez.

25 Maintenant vous nous avez parlé de deux autres bâtiments qui faisaient

26 partie du même ensemble des maisons de la famille Haradinaj ?

27 R. J'ai dit "si". Je répète, j'ai dit "s'il" s'agit de la maison, alors il

28 y a dû y avoir une construction ultérieure parce qu'elle n'était pas aussi

Page 1947

1 grande que ceci. Elle avait un étage, mais elle n'était pas aussi rutilante

2 qu'elle m'apparaît sur la photographie.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, vous avez raison,

4 vous avez dit "si", mais les Juges de la Chambre ont appris des parties,

5 qu'en fait la maison a été agrandie. Donc M. Emmerson vous suggère ceci

6 parce que c'est une information qu'ont obtenue les Juges de la Chambre.

7 Veuillez poursuivre, Monsieur Emmerson.

8 M. EMMERSON : [interprétation]

9 Q. Juste pour être clair, pouvez-vous vous rappeler, Monsieur Stojanovic,

10 vous voyez ici un grand bâtiment, environ à la moitié, tout ce qui est au-

11 dessus de cette ligne a été construit après le moment où vous y habitiez,

12 mais tout ce qui est en dessous de la ligne, environ la moitié du bâtiment,

13 la partie basse, la moitié inférieure telle qu'elle apparaît sur la

14 photographie, existait à l'époque où vous y habitiez. Seriez-vous d'accord

15 pour dire cela ?

16 R. Sur la photographie précédente, je pourrais vous dire avec précision ce

17 qui s'y trouvait, ce qui ne s'y trouvait pas; mais sur celle que nous

18 voyons aujourd'hui, je n'arrive pas à vous dire exactement ce qui s'y

19 trouvait.

20 Q. Je serais ravi que nous examinions cette photographie dans un instant.

21 Mais je voulais simplement obtenir vos indications pour cette question. Les

22 deux autres bâtiments qui apparaissent de l'autre part de la route qui

23 serpente - vous saviez qu'il y avait deux autres bâtiments qui

24 appartiennent à la famille Haradinaj, un qui a été construit il y a 20 ou

25 30 ans, et un autre qui avait été construit plus récemment. Le plus bas des

26 deux, je suppose est celui qui avait été construit il y a 20 ou 30 ans et

27 qui se trouvait plus près de votre maison; est-ce exact ?

28 R. Un instant, s'il vous plaît. Et le troisième, le troisième étable

Page 1948

1 aussi. Il y avait trois bâtiments qui existaient sur la propriété de Haxhi

2 Haradinaj.

3 Q. Je comprends cela, Monsieur Stojanovic, et je ne vous contredis pas. Le

4 plus petit bâtiment en haut de la photographie s'y trouvait aussi à

5 l'époque, n'est-ce pas ?

6 R. C'est la maison de qui celle-là ? Je vous le demande parce que je ne

7 vois pas très bien ce que montre cette photo.

8 Q. Très bien. Ce n'est pas à moi de témoigner à ce sujet, Monsieur

9 Stojanovic. Vers le bas de la photographie, Monsieur Stojanovic, au bas de

10 la photographie, vous voyez, n'est-ce pas, sur la gauche un bâtiment ou

11 plus précisément les ruines d'un bâtiment à côté de la route. Vous voyez

12 cela, n'est-ce pas, dans la moitié inférieure gauche de la photographie ?

13 R. Oui. Je vois les ruines.

14 Q. Ce que je soutiens, c'est que c'est là que se trouvait votre maison de

15 famille en 1998 ?

16 R. C'est possible compte tenu de l'état dans lequel elle se trouve parce

17 que je suis convaincu que votre client a protégé cette propriété.

18 Q. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'échanger des remarques de ce

19 genre, Monsieur Stojanovic. Tous les bâtiments de la région ont été

20 détruits durant la guerre. Peut-être pourriez-vous vous en tenir aux

21 réponses que vous avez à faire à mes questions.

22 R. Oui, mais elle n'était pas comme cela à l'époque, et maintenant quand

23 je vois ce qu'il est advenu de ma maison, je dois dire des choses comme

24 celles que je viens de dire.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, je comprends ce qui

26 vous pousse à prononcer de telles remarques, mais la Chambre aimerait que

27 vous répondiez aux questions qui vous sont posées par Me Emmerson. Essayez

28 de vous limiter à cela.

Page 1949

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le ferai.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, à vous.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le ferai.

4 M. EMMERSON : [interprétation]

5 Q. Ces buissons que l'on voit dans le bas, Monsieur Stojanovic, qui font

6 un angle et qui vont vers le coin inférieur droit de la photographie, c'est

7 bien la limite de votre propriété, n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Pour que nous puissions nous y retrouver, du point de vue des

10 distances, votre propriété s'étendait jusqu'à l'endroit au bord de la

11 photographie où on voit ces buissons, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Pendant cette période, la police venait dans votre maison deux fois par

14 semaine, n'est-ce pas ?

15 R. La police ne venait pas dans ma maison, elle passait sur la route. Les

16 renseignements dont vous disposez ne sont pas exacts. La police passait par

17 là, nous étions la seule maison serbe dans le secteur. La police

18 s'arrêtait, échangeait quelques mots avec nous, nous demandait si tout

19 allait bien, si quelqu'un nous avait posé des problèmes et ce genre de

20 chose. Comme j'étais le chef de famille, l'homme de la maison, j'avais pour

21 devoir, compte tenu des coutumes qui sont les nôtres, d'inviter ces

22 policiers à l'intérieur de la maison pour leur proposer un café, et

23 j'aurais fait la même chose avec des voisins albanais. C'est une chose que

24 je faisais tous les jours.

25 Q. Est-ce que ces policiers ne vous ont à aucun moment demandé de leur

26 rendre compte de quelque chose que vous auriez trouvé suspect, puisque vous

27 étiez si près de la maison de la famille Haradinaj ?

28 R. Monsieur, s'ils nous avaient demandé de rapporter ce genre de chose et

Page 1950

1 que nous l'ayons fait à temps, rien de ce qui s'est passé ne se serait

2 passé par la suite. Personne ne m'a demandé de rapporter quoi que ce soit.

3 Q. Vous avez dit un peu plus tôt dans votre déposition que quelqu'un qui

4 s'appelait Miloica Vlahovic était une femme que vous connaissiez, n'est-ce

5 pas ?

6 R. Milovan Vlahovic, je ne me souviens pas de quelqu'un qui se serait

7 appelée Miloika.

8 Q. L'erreur est de mon fait. Est-ce que vous connaissez un certain Miloika

9 Vlahovic ? C'était un enseignant, le fils de Milovan Vlahovic ?

10 R. Je connais Milovan, je ne connais pas de Miloica. Je connais un homme

11 décédé qui se prénommait Milovan, je suis allé à son enterrement.

12 Q. Je vais essayer de bien prononcer. Est-ce que vous connaissez un fils

13 de cette famille ?

14 R. Oui.

15 Q. Quels sont les fils Vlahovic que vous connaissez ?

16 R. Je les connais tous.

17 Q. C'est peut-être un problème de prononciation de ma part. Est-ce que

18 vous connaissez un certain Miloica Vlahovic, un fils de la famille

19 Vlahovic ?

20 R. Oui, je connais Miloica.

21 Q. Il était bien enseignant ?

22 R. Oui.

23 Q. Il a dit dans sa déposition devant ce Tribunal, Monsieur Stojanovic,

24 que votre mère, Ljubica, a été la première personne qui a découvert

25 l'existence d'entraînement de l'UCK dans le secteur, et notamment

26 d'entraînement au maniement des armes à Gllogjan ? Vous souriez. Je vous

27 donne une indication, Monsieur Stojanovic, d'une déposition qui a été faite

28 sous serment par Miloica Vlahovic. Ce que je voudrais apprendre de vous

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1 c'est si, oui ou non, votre mère a discuté de ce sujet avec vous à quelque

2 moment que ce soit, comme apparemment quelqu'un en a discuté avec elle

3 puisqu'elle a découvert le fait qu'un entraînement de l'UCK avait lieu à

4 Gllogjan.

5 R. Je ne sais vraiment pas ce qu'a dit Miloica, et ma mère est une femme

6 âgée. A l'époque, elle avait 60, 65 ans. Elle travaillait la terre. Elle

7 n'avait pratiquement aucune éducation digne de ce nom. Elle aurait été la

8 dernière personne sur terre capable de découvrir ce genre de choses et de

9 savoir ce qui se passait dans ce domaine, ou ce qui ne se passait pas. Je

10 ne sais vraiment pas quoi vous dire sur ce sujet.

11 Q. Je vais vous poser la question suivante : il a également dit dans sa

12 déposition qu'à une distance assez importante, il était possible d'entendre

13 le bruit de coups de feu à partir du mois de janvier qui arrivaient par

14 intermittence de Gllogjan. Vous étiez tout près vous, Monsieur Stojanovic,

15 est-ce que vous avez entendu des coups de feu en provenance de Gllogjan

16 entre le mois de janvier et le 24 mars ?

17 R. Oui, des coups de feu, j'en ai entendus, mais il y a eu des attaques.

18 Je vous dirais d'emblée que je ne voyais rien la nuit. Il y a eu des

19 attaques contre le poste de police à 8 ou 9 heures. On entendait des coups

20 de feu parce que le poste de police était en haut de la colline à Rznic, on

21 entendait les coups de feu qui d'en haut se répandaient dans la nuit à une

22 distance assez importante. Je ne pourrais vraiment pas vous dire ce que

23 j'ai vu ou ce que j'ai entendu, parce qu'en général, on l'apprenait par la

24 presse le lendemain. On entendait parler dans la presse d'attaques contre

25 le poste de police ou de choses de ce genre. Je peux confirmer qu'il y a eu

26 des coups de feu. Nous avons entendu des coups de feu.

27 Q. Ces coups de feu provenaient du secteur situé dans les environs de la

28 maison Haradinaj à quelque moment que ce soit ?

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1 R. Le poste de police n'était pas proche de la maison des Haradinaj ou de

2 la mienne. Il se trouvait à 4 ou 5 kilomètres de ma maison, c'est de là que

3 provenaient les coups de feu, les bruits des coups de feu. Je ne vous dirai

4 pas que c'était tout près. Cela a duré jusqu'au 18 mars. Jusqu'au 18 mars,

5 je n'ai pas entendu de coups de feu provenant de la maison des Haradinaj,

6 par conséquent.

7 Q. Monsieur Stojanovic, est-ce que vous avez un téléphone chez vous à la

8 maison ?

9 R. Oui.

10 Q. C'était quel genre de téléphone, si je puis vous demander, à l'époque ?

11 R. C'était un téléphone sans fil. Comment est-ce qu'on appelle cela ? Dans

12 le village, il n'y avait pas de lignes. C'était un téléphone sans fil, un

13 portable. La plupart de mes voisins en avaient aussi, je n'étais pas le

14 seul en à avoir un. La plupart des voisins en avaient aussi.

15 Q. Vous rappelez-vous quand vous avez acheté pour la première fois un

16 téléphone portable pour votre maison ?

17 R. Ce n'était pas un portable, c'était un sans fil. Il y a une différence

18 entre les deux.

19 Q. Dans ce cas-là il serait peut-être bon que --

20 R. C'est un téléphone que j'avais déjà depuis cinq ou six ans, avant le 18

21 mars ou le 24 mars. Je l'avais déjà depuis quatre ou cinq ans, je ne me

22 souviens plus depuis quand exactement.

23 Q. Excusez-moi de vous poser des questions aussi précises, cela semble

24 anodin, mais j'aimerais comprendre. Vous dites que ce n'était pas un

25 portable, mais un téléphone sans fil. Que voulez-vous dire par là

26 exactement ?

27 R. C'est un téléphone qui est raccordé au réseau dans le village, c'est là

28 que se trouve le raccordement principal, au standard téléphonique du

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1 village. Le récepteur vous l'emportez dans un village où il n'y a pas de

2 téléphone, où il n'y a pas de lignes. Cela ressemble pratiquement à un

3 téléphone normal. Il y avait beaucoup de téléphones de ce genre au Kosovo à

4 l'époque.

5 Q. Pour que tout soit clair, où est-ce qu'était connecté votre téléphone ?

6 R. A Djakovica.

7 Q. A quel endroit à Djakovica ?

8 R. Dans la maison d'un de mes amis, Bulatovic, c'est chez lui que j'avais

9 mon numéro de téléphone.

10 Q. Ce téléphone avait une portée suffisante pour permettre la

11 communication depuis Djakovica jusqu'à Gllogjan, c'est cela, jusqu'à

12 Dubrava ?

13 R. Oui.

14 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Emmerson. Il serait bon pour

16 les Juges de la Chambre, Maître Emmerson, quand vous faites référence à la

17 déposition d'un témoin déjà entendu par le passé que vous donniez les

18 références nécessaires pour identifier cette déposition.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, oui, je le ferai. Je donnerai aux Juges

20 une lise des passages pertinents cet après-midi.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous allons faire une

22 pause de 20 minutes nous reprenons à 18 heures 05.

23 [Le témoin quitte la barre]

24 --- L'audience est suspendue à 17 heures 45.

25 --- L'audience est reprise à 18 heures 10.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux questions de procédure avant de

27 poursuivre l'audition du témoin. D'abord, la Défense doit être informée que

28 la Chambre aurait tendance à faire droit à la requête partiellement

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1 confidentielle demandant une audition par visioconférence. Oui, je pense

2 c'est peut-être précaution exagérée, mais je pense que nous devrions passer

3 à huis clos partiel pour discuter de cette question. Cela ne prendra pas

4 très longtemps.

5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

6 Juges, nous sommes à huis clos partiel.

7 [Audience à huis clos partiel]

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28 [Audience publique]

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

2 Une question encore un suspens concerne les jours où nous ne siégeons pas.

3 Je comprends bien que chacun ici souhaite être au clair sur ce point. Bien

4 entendu, il y a des suspensions dans toutes les affaires, et il y a le fait

5 également que tous les Juges ne peuvent être disponibles tous les jours de

6 la semaine.

7 J'aimerais vous dire ce que nous avons décidé avec certitude. Les

8 deux premières dates, 29 et 30 mars, à ce sujet la Chambre a décidé que le

9 29, c'est-à-dire jeudi, bien entendu nous n'allons pas commencer l'audition

10 d'un témoin une demi-heure avant la fin de l'audience de mercredi, mais si

11 un témoin est disponible dont l'audition prendra une heure, une heure et

12 demie, c'est-à-dire la première partie d'une matinée, relativement peu de

13 temps, nous l'entendrons jeudi. Nous ne sommes pas censés siéger jeudi,

14 mais si nous avons un témoin disponible dont l'audition ne prendra pas plus

15 d'une heure ou une heure et demie, voilà. Par conséquent, pour le 29 tout

16 dépendra de la situation concrète.

17 Le 30, nous ne siégeons pas. Le 6 et le 9 avril sont des congés des

18 Nations Unies. Les 10, 11, 12 et 13 avril nous ne siégerons pas.

19 Le 30 avril est un congé des Nations unies, et les 1er, 2, 3 et 4 mai nous

20 ne siégerons pas.

21 Le 25 mai est un vendredi, là encore la situation dépendra du fait de

22 savoir si un témoin est disponible ou pas. Même chose pour le 8 juin. Il

23 est possible que ces jours-là nous ne siégerons pas, mais s'il y a une

24 bonne raison de siéger pour qu'un témoin n'ait pas à passer le week-end ici

25 alors qu'il ne reste qu'une heure ou moins d'une heure d'audition à

26 entendre par la Chambre, nous siégerons. Donc nous pourrions siéger tout de

27 même le 25 mai et le 8 juin.

28 Puis la semaine du 23 au 27 juillet, la dernière semaine avant les vacances

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1 judiciaires, nous ne siégerons pas.

2 Ce qui reste incertain c'est la situation du 29 mars, le jeudi dont

3 j'ai parlé; la situation du 25 mai; la situation du 8 juin, tous ces jours-

4 là je les appellerais des jours flexibles. Si nous siégeons ces jours-là,

5 la Chambre ne siégera pas dans sa composition normale, elle se composera de

6 deux Juges et non de trois. Voilà.

7 Est-ce que tout est clair pour tout le monde ? On peut faire entrer

8 le témoin dans le prétoire ?

9 M. EMMERSON : [interprétation] Aucun problème, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de problème.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Je vous remercie de ces éclaircissements.

12 Monsieur le Président, vous m'avez demandé avant la pause une référence de

13 compte rendu d'audience, il s'agit de la déposition de Miloica Vlahovic,

14 page 1 571, lignes 19 à 22. On lui demande de donner précisément l'exemple

15 de certaine personnes qui auraient dit qu'il existait un centre

16 d'entraînement militaire à Gllogjan et il répond, je cite : "Par exemple,

17 Ljubica Stojanovic de Dubrava a été la première à découvrir l'existence de

18 ce terrain d'entraînement. Dubrava et Gllogjan sont deux villages mitoyens,

19 ils sont l'un à côté de l'autre."

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Voilà, c'était la citation demandée par

22 vous, Monsieur le Président.

23 [Le témoin vient à la barre]

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en remercie.

25 Vous pouvez poursuivre l'audition du témoin, Maître Emmerson.

26 M. EMMERSON : [interprétation]

27 Q. Monsieur Stojanovic, j'aimerais revenir un instant sur cette question

28 du fusil appartenant à votre mère. Vous avez dit qu'il s'agissait d'un

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1 fusil de chasse. Voilà ce que j'aimerais vous demander, quand vous avez

2 fait votre déclaration écrite le 26 mai 2006, vous avez parlé d'un article

3 traitant de votre situation, article paru dans "Illustrojana Politika" un

4 magazine serbe, article paru le 24 avril, quelques jours après l'incident

5 du 18 avril. Je suppose que vous avez lu cet article ?

6 R. J'aurais parlé d'un article ? Mon frère peut-être, mais pas moi.

7 Q. Mais il y a une référence dans votre déclaration écrite préalable --

8 R. Oui.

9 Q. -- où on lit ce qui suit, je cite : "J'ai remis à M. Matti Raatikainen

10 un magazine serbe 'Illustrojana Politika' datant d'avril 1998 et traitant

11 de notre affaire." En d'autres termes, ce qui a été consigné par écrit dans

12 votre déclaration préalable c'est que vous auriez donné cet article à

13 l'enquêteur. Vous vous rappelez cela ?

14 R. Donnez-moi un instant. Mon frère avait les journaux, il a fait sa

15 déclaration le premier jour, puis le deuxième et le troisième jour --

16 enfin, cela n'a pas d'importance. En tout cas, nous n'avons pas fait nos

17 déclarations respectives le même jour. C'est lui qui a remis les journaux à

18 l'enquêteur, pas moi.

19 Q. Très bien. Il est possible que la personne concernée ait commis une

20 erreur sur ce point, mais regardez -- je vous demanderais de jeter un coup

21 d'œil à cet article que je vous fais remettre par M. l'Huissier.

22 M. EMMERSON : [interprétation] Il figure dans le système du prétoire

23 électronique, donc il peut être remis sur copie papier au témoin. Pour le

24 système du prétoire électronique, il s'agit de la pièce numéro 21 dans les

25 documents 65 ter, en anglais et en serbe.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière, une cote.

27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

28 pièce à conviction numéro D25, enregistrée aux fins d'identification.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

2 M. EMMERSON : [interprétation]

3 Q. Monsieur Stojanovic, j'ai surligné un passage à votre intention qu'on

4 pourrait peut-être voir sur les écrans et dont nous avons la traduction.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Il serait bon que les deux versions soient

6 visibles en même temps.

7 Est-ce qu'on pourrait afficher à l'écran également la traduction anglaise ?

8 Les Juges ont-ils la traduction anglaise sur leurs écrans ?

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je crois voir 25 avril 1998 --

10 M. EMMERSON : [interprétation] Exact.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- et le titre "Metohija quand on les

12 emmenés."

13 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pourriez passer à la

14 deuxième page ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, il faut que je manipule un peu

16 mon écran.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez trouver le

18 paragraphe qui commence par les mots : "Ils pouvaient être bons amis…"

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Deuxième paragraphe entier, les cinq

21 dernières lignes de ce paragraphe.

22 La phrase qui commence par les mots : "Il y a eu un moment" --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

24 M. EMMERSON : [interprétation]

25 Q. Monsieur Stojanovic, cet article comporte deux entretiens, deux

26 interviews assez longues qui sont des citations exactes d'entretiens avec

27 votre mère et votre frère Mijat. Le passage que j'ai marqué à votre

28 intention dans l'original serbe commence par les suivants que je vous

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1 demande de retrouver, je cite :

2 "Je sais qu'il y a eu un moment où je gardais un fusil fixé à mon

3 épaule et je dormais dans cette position en surveillant mes enfants. Il y

4 avait un endroit près de la fenêtre où je pouvais m'installer pour viser

5 quand ils me menaçaient en m'appelant par mon nom. S'ils me faisaient cela,

6 je leur aurait fait ce que je voulais leur faire."

7 C'est une citation attribuée à votre mère. Est-ce que vous avez ce

8 passage dans l'original du texte ?

9 R. De toute façon ce n'est pas un problème. Veuillez le lire.

10 Q. Je vais vous le lire une nouvelle fois, je cite :

11 "Il y a eu un moment où je gardais un fusil fixé à mon épaule et je

12 dormais dans cette position pour surveiller et défendre mes enfants. Il y

13 avait un endroit non loin de la fenêtre où je pouvais prendre position pour

14 viser s'ils m'appelaient par mon nom pour me menacer. S'ils faisaient cela

15 contre moi, j'aurais fait ce que je voulais faire contre eux."

16 Vous rappelez-vous que votre mère ait utilisé un fusil à un endroit

17 quelconque de la maison pour viser sur quelqu'un ?

18 R. Non.

19 Q. Vous nous avez dit que c'était simplement un fusil de chasse. Est-ce

20 que vous voudriez revenir sur ce que vous avez dit ?

21 R. Un simple fusil de chasse.

22 Q. Est-ce que vous avez à quelque moment que ce soit vu quelqu'un qui

23 aurait visé quelqu'un d'autre ?

24 R. Non.

25 Q. Dans ce cas, je vous demanderais de revenir sur ce qui s'est passé le

26 24 mars. Vous nous avez dit que votre mère vous avait appelé à la maison à

27 partir de son lieu de travail ce jour-là. Est-ce que vous pourriez nous

28 dire, je vous prie, quand vous êtes arrivé à votre domicile, quels étaient

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1 les membres de votre famille qui s'y trouvaient déjà ?

2 R. Je l'ai déjà dit, mais je vais répéter. Ma mère, l'enfant en bas âge de

3 mon frère, ma sœur, et moi-même, nous sommes arrivés un peu plus tard dans

4 la journée, Mijat est arrivée aussi. C'était pendant la journée. Je ne sais

5 pas exactement à quelle heure parce qu'il était parti pour vendre sa

6 peinture.

7 Q. C'était peut-être une erreur due à moi. Je ne me souviens pas avoir

8 entendu dire que Mijat --

9 R. Un instant je vous prie. Il est possible que j'aie oublié de le dire,

10 mais quand je suis arrivé, il n'était pas là. Il est sans doute arrivé plus

11 tard. Quant à l'article que vous venez de citer, j'étais à l'hôpital quand

12 cet article est paru, je ne sais pas grand-chose à ce sujet. Pour autant

13 que je m'en souvienne, j'étais à l'hôpital à ce moment-là.

14 Q. Vous dites que Mijat est arrivé plus tard le 24 mars.

15 R. Oui, pendant la journée.

16 Q. Vous rappelez-vous combien de temps après votre arrivée, Mijat est

17 arrivé ?

18 R. Je pense que c'était dans l'après-midi. Je ne sais pas exactement. Je

19 ne sais pas exactement à quel moment il est parti.

20 Q. Votre jeune neveu, était-ce le fils de votre frère Vladimir ?

21 R. Oui.

22 Q. Avez-vous vu Vladimir dans la maison ce jour-là ?

23 R. Il est arrivé de Decani dans la maison, parce qu'un peu plus tard ma

24 mère l'a appelé. Le petit pleurait. Elle l'a appelé et il est revenu en

25 voiture à Decani où il habitait pour prendre son fils.

26 Q. Combien de temps votre frère Vladimir a-t-il passé dans la maison le 24

27 mars à peu près ?

28 R. Vladimir n'est même pas resté une demi-heure.

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1 Q. Je vois bien. Pour tout soit parfaitement clair, est-ce que vous êtes

2 en train de dire que Vladimir n'était pas là lorsque vous êtes retourné à

3 la maison ?

4 R. Que voulez-vous dire lorsque je suis revenu ?

5 Q. Lorsque vous êtes retourné à la maison, en rentrant du travail, est-ce

6 que vous n'avez pas dit que Vladimir n'était pas là à ce moment-là ?

7 R. Vladimir est venu après que je n'arrive. Il avait conduit le bébé à

8 Decani. Ce n'était pas avant moi qu'il était arrivé, c'est après moi.

9 J'étais à la maison lorsque ma mère l'a appelé et lui a demandé de venir

10 prendre le bébé.

11 Q. Pourriez-vous nous donner une heure approximative de cela, Monsieur

12 Stojanovic ?

13 R. C'est difficile de vous donner une réponse, de m'en souvenir

14 exactement. Je dirais que c'est du côté de midi.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous regarder, s'il vous plaît, la

16 pièce à conviction 1162 de la liste 65 ter.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière ceci portera le

18 numéro ?

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ceci sera la

20 pièce à conviction numéro D26, marquée aux fins d'identification.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

22 M. EMMERSON : [interprétation]

23 Q. Pendant qu'on est en train de faire apparaître à l'écran ce document,

24 Monsieur Stojanovic, j'aimerais vous poser une ou deux autres questions. Ne

25 vous préoccupez pas, c'est juste pour un moment.

26 M. Re vous a demandé vendredi ce qui c'était passé ce jour-là, et à

27 un moment donné, vous avez dit qu'il y avait eu lutte ou combat. M. Re vous

28 a demandé entre qui avait eu lieu cet affrontement, vous nous avez dit

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1 qu'il y avait eu des coups de feu provenant de la maison Haradinaj. On vous

2 a demandé à nouveau de qui il s'agissait et vous avez dit, étant un civil,

3 il vous était interdit d'aller à l'extérieur.

4 Maintenant, je voudrais être bien au clair. Pour les besoins de la

5 cause, il s'agit du compte rendu page 83, ligne 20, pourrions-nous être

6 bien au clair sur cela, Monsieur Stojanovic ?

7 R. Un instant, je n'ai pas dit que c'était entre civils.

8 Q. [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître --

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est vrai. En tant que civil, il

11 était impossible de sortir. Quant à la police et les Haradinaj, qui

12 exactement était impliqué, c'est quelque chose que je ne peux pas dire. Je

13 suis certain que c'était des civils pourtant.

14 M. EMMERSON : [interprétation]

15 Q. Oui --

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, nous pouvons consulter

17 le système, mais c'est seulement pour ce qui est de la pagination continue,

18 mais pas 83 --

19 M. EMMERSON : [interprétation] Très bien.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- c'est ce jour-là, mais enfin, je vais

21 le retrouver --

22 M. EMMERSON : [interprétation] Si je peux préciser les choses pour le

23 témoin, pour lui lire ce qu'il a dit dans sa déposition, cela pourrait

24 peut-être permettre de résoudre le problème. Je pense que vous pourriez --

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble que les Juges se servent d'un

26 système différent. Très bien.

27 M. EMMERSON : [interprétation]

28 Q. Il se peut, Monsieur Stojanovic, qu'il y ait eu un problème pour ce qui

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1 est de vous traduire les questions il y a un moment. Je n'étais pas en

2 train de vous suggérer qu'il n'y avait jamais eu de combats entre des

3 civils. Ce que j'étais en train de vous suggérer, c'est que vous nous avez

4 dit que, étant un civil, vous étiez empêché de vous rendre à l'extérieur.

5 C'est bien cela que vous nous avez dit, n'est-ce pas ?

6 R. C'est exact. Tout au moins dans ma cour, où il y avait le bétail, à

7 l'extérieur, là autour de la maison, juste là, mais pas plus loin.

8 Q. Arrêtez-vous un instant. Soyons bien au clair. Vous saviez, n'est-ce

9 pas, que pendant la journée il y avait des combats qui se déroulaient entre

10 des personnes dans l'enceinte Haradinaj d'une part, et la police de

11 l'autre, et que c'était cette police qui était engagée dans cet échange de

12 coups de feu. Cela vous le saviez, n'est-ce pas ?

13 R. Je l'ai vu cela.

14 Q. Vous saviez que la police se trouvait sur votre propriété et tirait des

15 roquettes et des coups de feu vers l'enceinte de la famille Haradinaj à

16 partir de votre terrain n'est-ce pas ?

17 R. Oui, mais ce n'était pas des roquettes. Cela c'est l'interprétation que

18 je viens d'entendre. Des roquettes ont été tirées contre ma maison, sur ma

19 maison, à partir de la maisonnée Haradinaj. Quant aux coups de feu, c'était

20 des deux côtés.

21 Q. Vous nous avez dit il y a un moment que vous ne pouviez pas voir ce qui

22 se passait de l'extérieur. Vous nous dites maintenant que vous savez que la

23 police n'avait pas tiré de roquettes vers la maison des Haradinaj, comment

24 le sauriez-vous ?

25 R. De ce côté-là, on peut voir. Essayez de vous imaginer ma terrasse, ma

26 maison qui était à l'endroit d'où je pouvais regarder à l'extérieur. Il y a

27 une vue dégagée des deux maisons Haradinaj. Plus tard, après que la police

28 soit partie, je ne pouvais plus rien voir. Mais aussi longtemps qu'ils se

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1 trouvaient tout près dans le jardin, dans la cour et dans le secteur, j'ai

2 vu des choses effectivement.

3 Q. Je vois. Maintenant, vous êtes en train de nous dire, n'est-ce pas, que

4 vous avez pu voir ce que faisait la police à partir de votre jardin ou

5 votre cour de façon détaillée, tout le temps, c'est bien cela votre

6 déposition ?

7 R. Un instant, non pas tout le temps et pas de façon détaillée. Voilà ma

8 terrasse, on ne peut voir que jusque-là, jusqu'à un certain point. Plus

9 tard, la police les a ramenés en voiture au-delà de leur maison, vers le

10 village. Le village est assez éloigné. Il y a beaucoup de buissons ou de

11 taillis dans le secteur. La photographie montre clairement cela. Il y a

12 même des endroits où l'on ne peut rien voir. La seule chose que vous pouvez

13 entendre, c'est le son ou le bruit des coups de feu et des tirs.

14 Q. Bien. Concentrons-nous sur ce que vous pouviez voir Monsieur

15 Stojanovic. Vous savez --

16 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi la remarque du témoin.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît,

18 répéter ce que vous venez de dire, Monsieur Stojanovic.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis simplement en train de vous dire

20 que j'étais en mesure de voir depuis ma terrasse ce qu'il y avait devant.

21 M. EMMERSON : [interprétation]

22 Q. Soyons vraiment clair. Vous saviez qu'il y avait un grand nombre de

23 policiers à l'intérieur de votre propriété, qui tiraient à partir de votre

24 propriété en direction de la propriété Haradinaj, n'est-ce pas ?

25 R. Il y avait des policiers sur ma propriété, mais pas seulement sur ma

26 propriété. Il y en avait également le long de la route aussi et sur toutes

27 les propriétés voisines contiguës, dont le pré de Maljoka [phon]. Lorsque

28 je suis allé là-bas en voiture, j'ai vu la police et pas simplement dans ma

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1 propriété.

2 Q. Votre propriété, toutefois, était la propriété ou le terrain le plus

3 proche de chez les Haradinaj, Monsieur Stojanovic ?

4 R. Oui.

5 Q. Est-ce que n'est pas à cet endroit-là qu'il y avait la plus grande

6 concentration de policiers qui ont pris position pour attaquer ce périmètre

7 ?

8 R. Non. La plus grande concentration n'était pas -- ou plutôt, c'étaient

9 des policiers, mais la concentration la plus importante, sûrement -- pas

10 sûrement, je suis en train de vous dire ce que j'ai vu. Il y en avait sur

11 le bord de la route, dans les fossés, le long de la route. C'est là qu'ils

12 se sont mis à couvert ou la façon dont ils voulaient l'appeler.

13 Q. Combien d'entre eux qui se trouvaient sur votre propriété avez-vous

14 vu ?

15 R. Je ne les ai pas vraiment comptés, je dirais qu'il y en avait entre 10

16 et 15 environ. Je ne peux pas dire.

17 Q. Je voudrais vous poser cette question : est-ce que vous continuez de

18 dire que vous êtes sûr que les policiers qui se trouvaient sur votre

19 propriété n'ont pas tiré de roquettes à partir de votre propriété en

20 direction de l'enceinte des Haradinaj ?

21 R. Ceux qui se trouvaient devant, ceux-là je ne pouvais pas les voir. Mais

22 ils ne le faisaient pas --

23 Q. Est-ce qu'il y avait là d'autres soldats, paramilitaires ou des

24 policiers sur votre propriété que vous ne pouviez pas voir ?

25 R. Je n'en ai remarqué aucun ce jour-là. Tous étaient dans des uniformes

26 bleus de sorte que --

27 Q. Est-ce que vous étiez en mesure de les voir tous de l'endroit où vous

28 vous trouviez ?

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1 R. Pas vraiment tous.

2 Q. Ceci est bien clair, vous avez dit que deux roquettes avaient été

3 tirées vers votre propriété à partir de l'enceinte Haradinaj et une de ces

4 roquettes étaient tombées un peu court et l'autre avait manqué son but.

5 Est-ce que nous pourrions être bien clair sur ce point ? Ces roquettes ont

6 été tirées après que la police ait commencé à tirer en direction de

7 l'enceinte des Haradinaj, à partir de votre propriété, n'est-ce pas ?

8 R. Je n'étais pas à la maison lorsque la police a ouvert le feu. Une fois

9 que je suis arrivé là, les coups de feu étaient déjà nourris et les tirs

10 étaient déjà en cours. Mais au moment où je suis arrivé, la police était

11 là.

12 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu la dernière partie de la

13 réponse.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est au moment de mon arrivée que les deux

15 obus ont été tirés. Un obus a touché le prunier. Il y avait un verger avec

16 des pruniers qui se trouvait à côté de notre jardin. Il y en a un qui est

17 passé en sifflant et qui a explosé entre ces deux bâtiments, dans l'espace

18 qu'il y avait entre les deux bâtiments, ou plutôt, il n'a pas explosé.

19 M. EMMERSON : [interprétation]

20 Q. Ma question, Monsieur Stojanovic, si vous voulez bien vous concentrer

21 sur la question que je vous pose maintenant, c'est qu'au moment où ces

22 roquettes ont été tirées en direction de votre propriété, les policiers qui

23 se trouvaient sur votre propriété étaient, dis-je, en train de tirer en

24 direction de la propriété de Haradinaj, n'est-ce pas ?

25 R. Ils tiraient, il y avait des coups de feu, oui.

26 Q. Pourriez-vous regarder, s'il vous plaît, la deuxième page de cette

27 déclaration faite par votre frère Vladimir Stojanovic. Je vais vous en lire

28 les passages pertinents. Je voudrais simplement voir si ceci vous

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1 rafraîchit la mémoire en ce qui concerne qui était là, le premier jour.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Si on pouvait simplement agrandir un peu

3 pour le texte anglais.

4 Q. Je vais vous lire ceci. C'est une déclaration à des questions

5 auxquelles votre frère a répondu le 9 avril, juste deux semaines après cet

6 événement.

7 Il dit : "Ceci a eu lieu le mardi 24 mars de cette année. Mon frère et ma

8 mère se trouvaient à Dubrava, et j'ai amené là-bas mon fils qui avait 4

9 ans. J'ai sorti le tracteur pour labourer, mais le travail ne marchait pas

10 très bien et je suis retourné dans la maison. Tout brusquement, j'ai

11 entendu des coups de feu et j'ai dit à ma mère et aux autres de rentrer

12 dans la maison."

13 Je m'arrête là. Est-ce que vous pensez qu'il est exact, en fait --

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, j'ai un texte

15 différent, "entrez immédiatement", lit-on là.

16 M. EMMERSON : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, c'est moi qui ait

17 mal lu.

18 Q. Je repose la question : "J'ai dit à ma mère et aux autres de rentrer

19 immédiatement dans la maison."

20 Est-ce qu'on pourrait tirer au clair, peut-être que cela pourrait vous

21 aider à trouver la mémoire, est-ce que c'était en fait votre frère Vladimir

22 qui se trouvait là en ce moment-là lorsque les coups de feu ont commencé ?

23 R. Je ne crois pas. Excusez-moi, qui a fait cette déclaration et où,

24 quand ?

25 Q. Votre frère l'a faite. Excusez-moi --

26 R. A qui et où ?

27 Q. Vous êtes en train d'inverser les rôles un peu, mais je vais vous

28 répondre à votre question de toute façon. Votre frère a donné ses réponses

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1 à Marijana Andjelkovic qui a consigné ceci par écrit, mot à mot, lors d'un

2 interrogatoire qui a eu lieu, comme vous pouvez le voir des comptes rendus,

3 à Decani.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mot à mot, verbatim --

5 M. EMMERSON : [interprétation] Il n'y a pas de preuve que Marijana

6 Andjelkovic ait noté ceci mot pour mot.

7 M. RE : [interprétation] Si mon confrère pouvait nous désigner exactement

8 la référence pour le compte rendu.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une déclaration qui a été

10 recueillie par cette dame, oui.

11 Veuillez poursuivre.

12 M. EMMERSON : [interprétation]

13 Q. Si nous allons un peu plus loin en suivant le paragraphe qui commence

14 par ceci :

15 "Nous avons appelé Decani sur le radio téléphone que nous avions à la

16 maison, mais ils avaient déjà été informés de ce qui se passait. Il était

17 exactement 10 heures 30 du matin."

18 Est-ce que vous voyez cela ?

19 R. Oui, je le vois, bien que pour dire la vérité, je ne peux pas lire

20 l'anglais.

21 Q. "Ceux qui se trouvaient dans la maison de notre voisin ont tiré cinq ou

22 six roquettes et des lanceurs à main vers la maison et ont commencé à

23 mitrailler avec des mitrailleuses. Les tirs ont duré pendant environ 15

24 minutes. Puis, la police est arrivée, est entrée dans notre cour, dans

25 notre jardin d'où ils avaient ouvert le feu vers la maison Haradinaj, dans

26 laquelle se trouvaient les soldats de l'UCK. Lorsque la police a commencé

27 dans notre jardin, dans notre cour, à tirer, ils ont tiré deux fois avec

28 des lanceurs à main vers notre maison; un projectile l'a manquée et l'autre

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1 est arrivé dans des branches et a éclaté."

2 Voyez-vous cela ? Est-ce que vous comprenez le passage dont je veux --

3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je pense qu'il n'a pas de texte en

4 serbe --

5 M. EMMERSON : [interprétation] Non, je vois que le témoin essaie de --

6 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Il essaie de comprendre.

7 M. EMMERSON : [interprétation]

8 Q. Pourrions-nous être bien au clair, Monsieur Stojanovic, est-ce que vous

9 recevez l'interprétation ? Est-ce que vous comprenez ce que je suis en

10 train de vous dire ?

11 R. Oui. J'étais simplement en train de regarder la déclaration.

12 Q. Est-ce que vous pouvez lire l'anglais ?

13 R. Non. J'étais simplement en train de regarder, là il est question de

14 Decani parce que c'est cela que je voulais savoir.

15 Q. Le fait est que votre frère, d'après ce qui est écrit ici, a dit que

16 c'est quand la police a commencé à tirer que des roquettes ont été tirées

17 en direction de votre propriété, que l'une a manqué son but et que l'autre

18 est arrivée dans des branches et a éclaté. Est-ce que ceci correspond à vos

19 souvenirs ?

20 R. Je ne pense pas avoir jamais dit qu'une roquette ait été tirée avant.

21 Ce que j'ai dit, c'est qu'à partir du moment où je suis arrivé sur place,

22 il y avait des tirs entre les deux côtés et qu'une roquette est arrivée à

23 ce moment-là. Il y avait tout le temps des coups de feu, c'est cela que je

24 disais. Quand je suis arrivé, cette roquette a été tirée après que je sois

25 arrivé, mais je n'étais pas là tout le temps, je suis arrivé plus tard.

26 J'avais été au travail à Decani.

27 Q. Cette nuit que vous avez passée, nous dites-vous, chez votre frère

28 Predrag dans l'appartement, est-ce que c'est exact ?

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1 R. Non. Vous voulez dire lorsque nous avons quitté le village ?

2 Q. Cette nuit-là. Vous nous avez dit que vous étiez parti le 24 mars.

3 R. Oui, lorsque nous sommes partis.

4 Q. Et des jours qui ont suivi, avez-vous appris davantage concernant ce

5 qui était passé le 24 mars dans le village de Gllogjan proprement dit et

6 dans le village voisin d'Irzniq ?

7 R. Le jour suivant, je suis arrivé chez moi à ma maison, ma propre maison.

8 C'est cela que j'ai dit. Je suis arrivé chez moi tout seul dans mon jardin.

9 Q. Je voudrais vous poser des questions très précises et vous demander d'y

10 répondre. Avez-vous découvert, au cours des jours qui ont suivi, que

11 l'opération de police dans le village de Gllogjan, ce jour-là, avait eu

12 pour résultat la mort de trois adolescents civils, ou de trois Albanais

13 adolescents ? Je vous pose la question comme cela. Est-ce que vous avez

14 appris cela ?

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce que vous avez appris que la police dans le village de Gllogjan

17 avait lancé des attaques au mortier sur certaines des propriétés civiles

18 dans le village ?

19 R. Non.

20 Q. Est-ce que vous avez vu les dommages vous-même à Gllogjan à un moment

21 quelconque, Monsieur Stojanovic, parce qu'il y a eu des dommages, n'est-ce

22 pas ?

23 R. Je n'étais pas allé au village moi-même, donc je n'ai pas regardé, mais

24 le lendemain, lorsque je suis revenu et que je me suis trouvé dans mon

25 jardin, j'ai vu les journalistes arriver, ils ont filmé ma maison et la

26 maison de Ramush notamment, entre autres. Mais ma maison, la maison de

27 Ramush ou la maison de Haxhija n'étaient pas endommagées. C'étaient celles

28 que je pouvais voir. Quand au reste du village, vraiment je ne pourrais pas

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1 dire.

2 Q. Bien. Maintenant, je vous suggère que la maison Haradinaj était

3 endommagée. Je vous dis que la maison Haradinaj était endommagée, elle

4 avait été endommagée par un tir de roquette qui avait été lancée à partir

5 de votre propriété.

6 R. Je suis absolument sûr que ce n'était pas le cas, et il y a des

7 séquences vidéo pour le montrer. Je ne suis pas sûr que cela ait été le

8 lendemain soir ou le jour suivant dans la soirée, il y avait des nouvelles

9 à RTS, il y avait des séquences de film montrant la maison de Ramush et les

10 armes qui avaient été trouvées à l'intérieur de la maison ainsi que des

11 uniformes. J'ai personnellement vu cela sur la chaîne RTS le deuxième soir,

12 lorsqu'il y avait le programme des nouvelles ce soir-là. La maison était

13 intacte. Tout ce que je pouvais voir, c'était une maison qui était intacte,

14 ceci concernant sa maison, ma maison et la maison de Haxhija. Toutes ces

15 maisons-là étaient intactes. Pour ce qui est des autres maisons du village,

16 maintenant c'est quelque chose que je ne peux pas dire.

17 Q. Vous nous avez dit hier -- excusez-moi, vous nous avez dit vendredi, je

18 pense que des personnes de la famille de Haradinaj montraient des choses à

19 ces journalistes et leur montraient les maisons, et que quelqu'un qui,

20 selon vous, était peintre de son état, était là pour prendre des

21 photographies ?

22 R. Non, non, non, non. Le décorateur. Lorsque nous disons décorateur, je

23 veux dire que c'était un photographe -- un photographe. Bon, c'était un

24 peintre, un photographe. C'était le mot que je cherchais pour cacaj de

25 Decani, oui, je le connaissais en quelque sorte.

26 Q. Donc c'était un photographe, et des personnes de la famille Haradinaj,

27 vous dites, bien que ce n'ait pas été Ramush qui montrait leurs bâtiments à

28 ce photographe. C'est bien cela ?

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1 R. Non. Je n'ai pas vu Ramush, mais il y avait beaucoup d'autres personnes

2 aussi. C'était très bien organisé.

3 Q. D'après ce que vous pouviez voir, est-ce que cela concernait les

4 bâtiments des propriétés Haradinaj, sur lesquels ils appelaient l'attention

5 du photographe ?

6 R. Après que les photographies aient été prises, j'ai lu l'article et j'ai

7 appris que, comme vous le suggérez, ces deux ou trois hommes avaient été

8 tués. C'était dans "Rilindija" et dans tous ces journaux. Il y avait ces

9 articles.

10 Q. Monsieur Stojanovic, l'une des déclarations faites par votre mère parle

11 des articles de journaux qu'elle a lus, dans lesquels elle dit que ces

12 journaux avaient écrit qu'elle informait la police des mouvements qui

13 avaient lieu sur les propriétés Haradinaj. Elle est citée comme ayant dit

14 qu'elle avait lu cela dans les journaux, Monsieur Stojanovic.

15 Alors pour être bien au clair à ce sujet, est-ce que vous savez et est-ce

16 que vous avez su qu'il y avait une impression, une perception à Gllogjan

17 que vous-même et votre famille étiez responsables d'avoir fourni des

18 renseignements qui avaient eu pour résultat l'attaque contre le village ce

19 jour-là ? Savez-vous qu'il y avait eu la perception de cela au village ?

20 R. Pour commencer, avant tout ceci n'est pas vrai du tout. Ma mère n'a

21 jamais été l'informatrice de qui que ce soit. Je le souligne, jamais. Tout

22 le monde peut continuer de penser ce qu'ils veulent. Ce n'est qu'une simple

23 femme de la campagne qui voulait protéger sa propre maisonnée et sa

24 propriété.

25 En plus de cela, c'est une femme qui n'avait aucune idée de ce que

26 faisaient les hommes, indépendamment de savoir si nous parlons de Dubrava

27 ou d'un autre village. C'était en quelque sorte comme une loi non écrite.

28 Les hommes et les femmes jamais ou pratiquement jamais ne se trouvaient à

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1 la même heure au même endroit.

2 Q. Maintenant, Monsieur Stojanovic, je souhaiterais que vous écoutiez bien

3 ma question parce que je ne vous ai pas demandé si c'était vrai. Je vous ai

4 lu un passage d'une déclaration de votre mère dans laquelle elle parle

5 d'allégations qui étaient faites dans un journal, la question que je vous

6 ai posée était de savoir si vous saviez, quand vous, par exemple, êtes

7 retourné à Gllogjan, que la population du village pensait que votre famille

8 était responsable de l'attaque qui avait été lancée à Gllogjan le 24 mars;

9 si vous saviez quand vous êtes allé au village qu'il y avait cette

10 impression ou cette perception que les villageois avaient concernant votre

11 famille ?

12 R. Je ne le savais pas.

13 Q. Je vous remercie. Maintenant, vous nous avez dit, je crois hier, que

14 vous saviez que des hélicoptères --

15 M. EMMERSON : [interprétation] Je vois l'heure, Monsieur le Président,

16 Messieurs les Juges. J'ai presque fini.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre.

18 M. EMMERSON : [interprétation]

19 Q. Vous nous avez dit hier que vous aviez vu des hélicoptères; est-ce

20 exact ?

21 R. Oui, deux.

22 Q. Est-ce que plus tard vous avez entendu dire que ces hélicoptères

23 avaient été utilisés pour arroser de balles des civils dans le secteur

24 d'Irzniq et Gllogjan ?

25 R. Une fois qu'ils ont eu infiltré ce policier, les hélicoptères sont

26 partis; ils les ont ramenés à Pristina. Un hélicoptère n'est pas

27 suffisamment silencieux pour qu'on ne l'entende pas lorsqu'il vole tout

28 près.

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1 Q. Avez-vous entendu des allégations à un moment quelconque selon lesquels

2 ces hélicoptères avaient été utilisés pour tirer sur des civils ?

3 M. RE : [interprétation] Avant que le témoin ne réponde, peut-être que Me

4 Emmerson pourrait préciser exactement de quel moment il veut parler ?

5 M. EMMERSON : [interprétation] J'ai dit : "A un moment quelconque."

6 M. RE : [interprétation] La question tout à l'heure, c'était : "Est-ce que

7 plus tard, vous avez entendu dire que ces hélicoptères avaient tiré des

8 balles sur des civils ?" Il est très important de savoir cela pour la

9 progression de cette thèse du procès.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez jamais entendu quoi

11 que ce soit dans le sens que ces hélicoptères auraient été utilisés pour

12 tirer sur les civils ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'ai entendu cela ? Non, je n'ai

14 pas entendu cela. Est-ce que je l'ai vu ? Non, je ne l'ai pas vu non plus.

15 Peut-être qu'ils l'ont fait pour autant que je le sache, mais en fait je ne

16 les ai pas vus.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la question était de savoir si vous

18 avez jamais entendu parler de cela ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Emmerson.

21 M. EMMERSON : [interprétation]

22 Q. Est-ce que vous avez entendu alléguer, Monsieur Stojanovic, que des

23 professeurs, des enseignants et des enfants dans l'école avaient été

24 détenus, ensuite été utilisés comme boucliers humains par la police, ces

25 enfants qui se trouvaient dans l'école ? Est-ce que vous avez entendu

26 alléguer cela ?

27 R. Non.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que peut-être il pourrait y

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1 avoir une erreur sur le compte rendu. Je crois que le témoin a répondu à ma

2 question de façon négative, tandis qu'il apparaît comme étant "oui" à

3 l'écran.

4 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, je crois qu'assurément cela est exact.

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] A la ligne 20.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

7 M. EMMERSON : [interprétation]

8 Q. En ce qui concerne l'école, Monsieur Stojanovic, je vais vous lire un

9 passage d'un compte rendu d'une audition de votre mère par la même personne

10 que celle qui l'avait interviewée le 9 avril et dans lequel il est consigné

11 qu'elle dit que son fils Predrag avait pris part à l'action à Gllogjan et

12 qu'il était entré dans l'école.

13 Alors, je vous pose la question maintenant, est-ce que vous savez si

14 Predrag a pris part à l'action de la police à Gllogjan ?

15 R. Non, je ne l'ai pas vu ce jour-là.

16 Q. Mais vous l'avez vu cette nuit-là, n'est-ce pas ? Vous avez passé la

17 nuit avec lui ?

18 R. C'est exact, mais ce n'était pas le genre de choses dont Predrag

19 m'aurait vraisemblablement parlé. Il ne parlait pas de son travail de

20 policier avec moi, d'ailleurs je ne lui ai jamais posé de questions à ce

21 sujet.

22 Q. Vous avez passé la nuit du 24 mars avec votre frère Predrag après que

23 ces événements aient eu lieu à votre domicile. Est-ce que votre déposition

24 c'est que vous n'avez pas parlé de ce qui s'était passé ce jour-là avec

25 lui ?

26 R. Un instant, s'il vous plaît. Ce n'était pas cette nuit-là. Je suis

27 arrivé vers 12 heures ou 1 heure. Ils nous avaient retenus, ils voulaient

28 qu'on fasse des déclarations sur ce qui s'était passé et ce n'est pas avant

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1 que nous ayons terminé de faire ces déclarations qu'ils nous ont permis de

2 partir, je veux dire le SUP. J'ai passé la nuit à la maison de sa femme et

3 de ses enfants, il est arrivé plus tard de sorte que --

4 M. EMMERSON : [interprétation] Je n'ai que deux autres questions à poser.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez finir en deux

6 ou trois minutes ?

7 M. EMMERSON : [interprétation] Certainement.

8 Q. Avez-vous jamais parlé avec Predrag des événements de cette journée ou

9 de la journée qui a suivi, des événements du 24 mars ?

10 R. Je n'avais pas vu Predrag depuis longtemps, puis la guerre avait

11 éclaté. J'étais à l'hôpital, ensuite après que j'ai quitté l'hôpital, il a

12 passé longtemps éloigné de Decani; par conséquent, nous ne nous parlions

13 pas. Pour être franc, à vrai dire je n'avais pas envie de le savoir.

14 Q. Pour être bien au clair, est-ce que votre déposition c'est qu'entre le

15 24 mars et le 18 avril, lorsque vous avez été blessé, vous n'avez jamais

16 parlé avec Predrag de ce qui s'est passé le 24 mars ?

17 R. C'est exact. En fait, nous ne nous voyions pas souvent en tous les cas.

18 Après cette soirée, après cette nuit, nous ne nous sommes pas vus du tout

19 en fait.

20 Q. Est-ce que vous savez maintenant s'il a pris part à l'action de la

21 police à Gllogjan ?

22 R. Je sais qu'il était policier, cela c'est quelque chose que j'ai déjà

23 dit, pas seulement maintenant. Je ne veux pas dire - enfin je ne veux pas

24 dire simplement maintenant, il était policier comme un grand nombre de nos

25 voisins de Glodjane l'étaient. Lorsque les Siptars faisaient encore partie

26 de la même force de police, tous travaillaient ensemble.

27 Q. Oui, je vous remercie.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Emmerson.

Page 1980

1 Pourrais-je juste avoir une idée du temps que les autres conseils

2 souhaitent avoir ?

3 Maître Guy-Smith.

4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Rien du tout.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 Maître Harvey.

7 M. HARVEY : [interprétation] Pas plus que Me Guy-Smith.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, pas plus non plus.

9 Il y avait quelque chose d'assez important lorsque M. Re a évoqué

10 concernant le compte rendu mot pour mot. Ce que le témoin a dit concernant

11 l'audition ou l'interrogatoire, il a dit que ceci concernait le tir de

12 roquettes, il dit : "Mais je ne me rappelle pas ceci parce que je l'aurais

13 certainement noté. La plupart des choses, je dois le dire encore, je les

14 notais mot pour mot." Cela ne dit pas que ce qui était consigné sur le

15 papier était mot pour mot, le fait de prendre des notes. Donc ce point est

16 éclairci. Vous trouverez cela à la page 648, ligne 5.

17 Avant que nous ne levions la séance, Monsieur Stojanovic, je vais vous

18 donner pour instructions de ne parler à personne de votre déposition. Nous

19 voulons vous revoir --

20 Monsieur Re, à moins qu'il ne soit pas nécessaire de poser des

21 questions supplémentaires, parce que je vois bien qu'il n'y aura pas de

22 contre-interrogatoire --

23 M. RE : [interprétation] Oui, j'ai quelques questions supplémentaires à

24 poser.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

26 Oui, demain. Très probablement cela ne prendra pas très longtemps demain,

27 mais nous voulons vous revoir demain matin à 9 heures dans la même salle

28 d'audience. Encore une fois, vous avez pour instructions de ne parler à

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1 personne de votre déposition tant la déposition que vous avez déjà faite

2 que celle que vous allez faire.

3 Je lève séance jusqu'à demain matin 9 heures.

4 --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le mardi 27 mars 2007,

5 à 9 heures 00.

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