Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 5666

1 Le jeudi 14 juin 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.

6 Monsieur le Greffier, voudriez-vous, s'il vous plaît, appeler la cause.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour Monsieur le Président. Ceci,

8 c'est l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj et

9 consorts.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

11 Maître Emmerson, je vois que vous demandez la parole. J'ai quelques

12 questions de procédures d'abord à régler, si vous le permettez. Je voudrais

13 d'abord dire que la Chambre vous doit encore, ainsi qu'au public, l'exposé

14 des raisons pour lesquelles les mesures de protection ont été accordées au

15 Témoin 62.

16 Le 12 juin, la Chambre a accordé des mesures de protection pour un témoin

17 qui avait reçu comme pseudonyme Témoin 62 et des motifs devaient être

18 donnés. Voici les motifs de la décision de la Chambre de première instance.

19 Le 8 juin 2007, l'Accusation a demandé des mesures de protection au

20 titre du procès en donnant un pseudonyme et déformation des traits du

21 visage à l'écran et la déformation de la voix pour le Témoin 62. Le témoin

22 et sa famille vivent au Kosovo. Ce témoin a exprimé les craintes pour sa

23 sécurité et pour la sécurité de sa famille étendue, si le public devait

24 apprendre qu'il avait déposé pour l'Accusation. Le 12 juin 2007, la Chambre

25 a pris acte du fait que la Défense ne s'opposait pas à cette requête.

26 La partie qui demande des mesures de protection pour un témoin doit

27 démontrer qu'il y a un risque objectivement fondé pour la sécurité ou le

28 bien-être du témoin ou la famille du témoin pour le cas où on devait

Page 5667

1 apprendre que le témoin a fait une déposition devant le Tribunal. Ce

2 critère peut être rempli en démontrant qu'il y a combinaison des trois

3 facteurs suivants : la déposition du témoin pourrait gêner des personnes

4 qui résident dans un territoire particulier; deux, le témoin ou sa famille

5 travaillent ou vivent dans ce territoire et ont des biens dans ce

6 territoire ou ont des plans concrets visant à retourner vivre dans ce

7 territoire; et troisièmement, il existe une situation instable du point de

8 vue de la sécurité dans ce territoire, instabilité telle qu'elle est

9 particulièrement défavorable aux témoins qui comparaissent et déposent

10 devant le Tribunal. D'un commun accord en l'espèce, le dernier de ces trois

11 facteurs n'est pas contesté.

12 Etant donné la nature de la déposition de ce témoin, la Chambre est

13 convaincue que ceci peut créer de l'hostilité chez les personnes qui

14 résident dans la communauté du Témoin 62. La Chambre note que le témoin et

15 sa famille étendue vivent dans un village au Kosovo, et que le témoin a le

16 sentiment que si l'on devait apprendre qu'il a déposé devant le Tribunal,

17 sa famille risquerait des représailles. Par conséquent, la Chambre est

18 convaincue que les conditions nécessaires pour accorder les mesures de

19 protection sont réunies, et la Chambre fait droit à la requête présentée

20 par l'Accusation aux fins d'attribuer un pseudonyme et la déformation des

21 traits du visage à l'écran, ainsi que la déformation de la voix.

22 Ceci conclut les motifs de la Chambre pour avoir accordé des mesures

23 de protection au Témoin 62.

24 Je voudrais également donner les motifs qui sous-tendent la décision

25 prise sur la requête présentée par la Défense qui demandait que l'on

26 reporte une injonction à comparaître sous astreinte pour le Témoin 30.

27 Le 12 juin, j'ai annoncé que la Chambre n'avait pas été convaincue par les

28 arguments de la Défense à l'appui d'un report de cette décision d'une

Page 5668

1 injonction à comparaître sous astreinte pour le Témoin 30. Donc, cette

2 injonction a été émise le même jour et la Chambre souhaiterait maintenant

3 expliquer brièvement les motifs de sa décision.

4 Dans nos arguments et dans les écritures du 6 et du 7 juin 2007, la Défense

5 a fait valoir que la crédibilité et la fiabilité du Témoin 30, dans la

6 déposition que l'on attendait, était telle que ceci pouvait mettre en

7 question la valeur probante et la justesse de la déposition de ce témoin.

8 Il s'en est suivi que dans les arguments de la Défense, cette décision

9 concernant une injonction à comparaître pour le témoin devait attendre une

10 décision de la Chambre pour savoir si elle autoriserait l'Accusation à

11 faire déposer ce témoin. La Défense se fondait sur l'article 89(D) du

12 Règlement, qui indique qu'une déposition peut être exclue si sa valeur

13 probante est contrebalancée par la nécessité d'assurer un procès équitable.

14 La Défense a évoqué deux questions de communication qui avaient trait au

15 Témoin 30. Il n'y est pas nécessaire d'en résumer les détails ici. Qu'il

16 suffise de dire que la Chambre s'attend à ce que les parties résolvent ces

17 problèmes, et espère qu'elle n'aura pas à intervenir par la suite.

18 L'Accusation est vivement incitée à répondre aux demandes de la Défense dès

19 que possible, si elle ne l'a déjà fait. Néanmoins, le fait que ces

20 problèmes de communication existent n'est pas un motif pour les membres de

21 la Chambre de reporter une décision sur l'injonction de comparaître qui est

22 demandée. Nous ne savons pas à ce stade quelle est la valeur probante de la

23 déposition que fera le témoin, et de savoir si la nécessité d'assurer un

24 procès équitable va vraiment à l'encontre de cette déposition. La Défense

25 fait valoir qu'il y a une possibilité qu'on pourrait se rendre compte au

26 moment de la communication de ces renseignements que la Défense en fait

27 cherche à obtenir cela de l'Accusation; toutefois, à ce stade, ce n'est

28 qu'une hypothèse.

Page 5669

1 Il devrait ressortir clairement des remarques que je viens de faire que

2 notre décision n'empêche pas la Défense de s'adresser à nouveau à la

3 Chambre avec une nouvelle requête au titre de l'article 89(D) concernant le

4 Témoin 30. Le fait que ce témoin dans l'intervalle ait reçu une injonction

5 à comparaître n'est pas un obstacle à cela.

6 Ceci conclut les motifs de la décision de la Chambre.

7 La question suivante que je voudrais maintenant régler, c'est celle des

8 deux vidéos présentées par l'Accusation, qui étaient jointes à des rapports

9 médico-légaux, et donc certaines parties ont été présentées à la Chambre.

10 Je comprends que le greffe préfère leur attribuer deux cotes distinctes,

11 ainsi elles pourront être prises en considération aux fins de leur

12 versement au dossier.

13 Monsieur Di Fazio.

14 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, je comprends la situation. Je demande

15 que ces vidéos soient admises comme pièces à conviction. Apparemment, la

16 séquence vidéo qui montre la voiture retournée dans l'eau, c'est la pièce

17 1385 de la liste 65 ter, et la séquence vidéo qui montre la voiture dans le

18 bon sens dans l'eau, où on peut voir qu'elle est de couleur rouge, c'est la

19 pièce 1386 de la liste 65 ter. J'aurais souhaité qu'on leur attribue des

20 numéros de pièce différents, distincts.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous vous référez à ces numéros

22 de la liste 65 ter, est-ce que ceci veut dire que la séquence qui a été

23 présentée constitue l'ensemble de ce document 1385 de la liste 65 ter, et

24 que --

25 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- pas plus, mais pas moins que la

27 séquence présentée.

28 M. DI FAZIO : [interprétation] Non. Purement et simplement la séquence en

Page 5670

1 question. C'est exact.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

3 Y a-t-il des objections contre l'admission de ces deux pièces à conviction

4 qui n'ont pas encore reçu une cote d'après ce que je comprends, Monsieur le

5 Greffier ?

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, le numéro 1385 de

7 la liste 65 ter devient la pièce P349, et le numéro 1386 de la liste 65 ter

8 deviendra la pièce P350.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 Je n'entends pas d'objection, donc la P349 et la P350 sont versées au

11 dossier comme élément de preuve.

12 D'autre part, sur ma liste de questions, la seule question qui reste pour

13 le moment est quelque chose qui peut-être ne devrait pas être évoquée

14 maintenant par moi, mais la Chambre est au courant du fait qu'il y a eu des

15 discussions en ce qui concerne, d'après ce que j'ai compris, l'intention du

16 Procureur pour le prochain témoin d'essayer d'obtenir l'admission, en vertu

17 des dispositions de l'article 92 ter du Règlement, de la déclaration qui a

18 été recueillie en janvier de cette année. Si ceci est évoqué devant nous,

19 nous allons l'examiner.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Ceci fait partie des questions que je

21 voudrais évoquer avec vous à ce stade.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, alors Maître Emmerson, vous pouvez

23 y aller.

24 M. EMMERSON : [interprétation] Je voudrais replacer les choses dans leur

25 contexte.

26 Monsieur le Président, je crois, vous avez reçu une requête de

27 l'Accusation qui a été déposée hier visant à modifier l'acte d'accusation

28 en y ajoutant dans les chefs d'accusation 21 et 22, notamment -- il y avait

Page 5671

1 deux modifications principales proposées, et il y en a une qui me préoccupe

2 pour le moment. C'est une proposition de modifier les chefs d'accusation 21

3 et 22 en ajoutant certains détails concernant un individu qui, jusqu'à

4 présent, on a dit à son sujet qu'il n'avait pas été identifié, il y a des

5 restes humains qui sont non-identifiées, mais à l'égard de qui, comme

6 l'explique cette requête, la Commission internationale pour les personnes

7 portées disparues à la fin du mois de mai a produit des documents, et bien

8 entendu que la Défense n'a pas eu la possibilité de vérifier, identifiant

9 l'un ou l'autre de ces groupes de restes humains, il y a une femme qui est

10 appelée Sanije Balaj.

11 Maintenant, Monsieur le Président, vous vous rappelez peut-être le nom qui

12 a été évoqué dans la déposition de Rrustem Tetaj et la déclaration de

13 témoin de Gani Gjukaj, et en ce qui concerne Rrustem Tetaj, essentiellement

14 ceci confirmait une déclaration de témoin et le témoin -- il y avait eu une

15 enquête concernant la mort de cette femme, qui semble avoir été d'une

16 certaine façon ou d'une autre liée à un homme appelé Mete Krasniqi à

17 Barane.

18 Jusqu'à présent, la situation était basée sur ce compte rendu, et cet

19 incident ne figurait pas dans les chefs d'accusation mais faisait partie

20 d'un contexte général de l'affaire, et par conséquent, ne constituait

21 nullement un point central des enquêtes de la Défense. Cette modification

22 dont on comprend bien entendu qu'elle découlerait des découvertes qui ont

23 été faites au cours du procès, notamment en ce qui concerne des éléments

24 ADN de médecine médico-légale, place à ce moment-là l'Accusation dans une

25 position certes différente en ce qui concerne cet ensemble de restes

26 humains, mais l'amendement proposé présente un exposé détaillé de la façon

27 dont l'Accusation soutient que cette femme a trouvé la mort. Une partie de

28 cette séquence des événements implique le témoin suivant, parce que comme

Page 5672

1 il est maintenant nommé dans le chef d'accusation modifié de l'acte

2 d'accusation, il a pris part, comme il l'a reconnu lui-même dans sa

3 déclaration de témoin, à l'interrogation de cette femme aux motifs d'une

4 collaboration qui était suspectée avant de la relâcher et de lui permettre

5 d'être emmenée par les autres individus qui ont été nommés, et dont

6 l'Accusation allègue qu'ils sont partis en auto à un autre endroit et

7 qu'ils l'ont assassinée.

8 La position est que quand l'Accusation a connu les résultats de la

9 Commission pour les personnes portées disparues - et je n'ai aucun doute

10 que M. Re sera en mesure de nous aider dans un moment à ce sujet - la

11 planification des moyens à charge et des arguments de l'Accusation pour la

12 présentation de la déposition de ce témoin à ce moment place la Défense

13 dans une situation vraiment très difficile.

14 Juste pour récapituler, si je peux brièvement, au cours du mois de mai, le

15 deuxième partie du mois de mai, l'Accusation a remis à la Défense le 25, en

16 fait, deux déclarations de témoins de cousins de la victime qui avaient

17 trait à certaines questions concernant les circonstances que l'on supposait

18 être celles de sa mort. Le 8 juin, l'Accusation a ensuite communiqué à la

19 Défense une nouvelle déclaration de témoin, du témoin suivant, datée du 15

20 mai 2007. Puis hier, avec la requête demandant la possibilité de modifier

21 l'acte d'accusation, l'Accusation a remis trois déclarations, trois

22 nouvelles déclarations de témoin, des comptes rendus d'audition de deux

23 témoins qui ont déposé au cours des procédures qui ont actuellement lieu au

24 Kosovo. Il s'agit de poursuites contre une personne dont on dit qu'elle

25 aurait été l'auteur.

26 Alors, franchement, n'ayant pas eu la possibilité jusqu'à présent

27 d'assimiler ou de bien connaître cette documentation, en partie parce que

28 l'Accusation a indiqué jusqu'à présent qu'un autre témoin était censé

Page 5673

1 déposer en premier, il y a un problème qui pourrait être surmonté s'il y

2 avait un intervalle suffisant entre l'interrogatoire principal et le

3 contre-interrogatoire.

4 Mais il y a un problème plus fondamental qui se pose à ce stade.

5 Comme je l'ai indiqué, une personne du nom d'Idriz Gashi qui fait

6 actuellement l'objet de poursuites au Kosovo. Le contre-interrogatoire ne

7 s'est pas terminé par un verdict. Des éléments de preuve ont été réunis.

8 Nous comprenons d'après les renseignements que nous avons réussi à obtenir,

9 que depuis qu'on a reçu cette requête visant à modifier l'acte d'accusation

10 - en d'autres termes au cours des dernières 24 heures - l'affaire doit

11 reprendre le 22 juin pour les conclusions, mais que ces conclusions ont été

12 reportées dans le passé plus d'une fois. Nous n'avons pas accès à ces

13 éléments de preuve qui ont été compilés au cours du procès. Il n'y a qu'une

14 ou deux déclarations qui ont été choisies par l'Accusation et jointes à sa

15 requête visant à modifier l'acte d'accusation, et que, bien entendu, nous

16 n'avons pas encore déposé de réponse. Au milieu de tout cela, l'Accusation

17 a choisi de présenter ce témoin, de le présenter à la barre pour qu'il

18 puisse déposer concernant les circonstances qui ont trait à la disparition,

19 à la mort de cette femme, pour lesquelles il est lui-même un suspect.

20 Donc, il est clair, à notre avis, que la Défense ne devrait pas en toute

21 équité être placée devant la situation de devoir contre-examiner ce témoin

22 vu le caractère particulier de cette déposition jusqu'à ce que nous soyons

23 à même d'assimiler les documents qui ont été communiqués et que nous ayons

24 pu obtenir les documents qui auraient dû être communiqués avant qu'on

25 puisse correctement présenter cette demande visant à modifier l'acte

26 d'accusation certainement avant que nous soyons en position de faire un

27 contre-interrogatoire.

28 J'ai eu l'occasion de discuter de cette question avec M. Re avant que

Page 5674

1 vous n'entriez à l'audience. Sa suggestion était qu'on pourrait peut-être

2 dissocier les éléments de la déposition de ce témoin, en d'autres termes,

3 qui pourrait d'abord subir un interrogatoire principal sur toutes les

4 questions, mais que pour le contre-interrogatoire sur les questions autres

5 que la mort de Sanije Balaj pourrait revenir, peut-être à un stade

6 ultérieur pour un contre-interrogatoire à ce sujet. Ce n'est pas une

7 solution que je puisse considérer comme satisfaisante à cause de sa

8 relation, à cause de ses rapports avec l'enquête et sa collaboration dans

9 les enquêtes. Les enquêtes concernant Sanije Balaj qui sont inhérentes au

10 compte rendu qu'il donne de l'organisation, des institutions disciplinaires

11 au quartier général de Barane. En d'autres termes, tout ceci est lié de

12 façon inexplicable avec la déposition générale qu'il fait. Je suis sûr

13 qu'il y a certains aspects de ce qu'il dit qui pourraient être présentés de

14 façon inverse, en ce sens qu'ils ne seraient pas liés de façon inexplicable

15 avec cette partie de sa déposition, mais à notre avis, c'est une suggestion

16 pas du tout satisfaisante vu qu'elle se présente si tard sans avoir prévenu

17 avec suffisamment d'avance la Défense à un moment où la liste de témoins

18 est en train d'être compilée sur cette situation. Nous allons nous trouver

19 dans une situation [inaudible].

20 Bien entendu, comme je l'ai indiqué, cette requête visant à modifier

21 l'acte d'accusation a été indiquée que l'identification a eu lieu. Nous

22 avons appris le 6 juin qu'il y aurait cette requête visant à modifier

23 l'acte d'accusation, mais les documents à l'appui, comme je l'ai dit, sont

24 arrivés hier, et nous n'avons rien des documents du procès autres que ceux

25 qui nous ont été fournis.

26 Du point de vue pratique, je suggérerais ceci : que M. Re fasse

27 déposer ce témoin pour un interrogatoire principal, puis que l'on reporte

28 le reste de la déposition de ce témoin. Je serai, à ce moment-là, je crois,

Page 5675

1 en mesure d'ici la fin de la journée de demain, de savoir si d'autres

2 enquêtes au Kosovo sont en cours. Il pourrait être essentiel avant de

3 procéder au contre-interrogatoire de ce témoin sur cet aspect. En d'autres

4 termes, ça peut prendre donc ce temps-là pour obtenir les documents. Ça

5 dépendra du temps qu'il faut pour obtenir ces documents en ce qui concerne

6 les poursuites qui sont en cours pour Idriz Gashi pour avoir perpétré cette

7 infraction particulière. Mais ce serait une situation tout à fait peu

8 satisfaisante et étrange de faire déposer une personne qui est suspectée

9 d'être l'auteur et qui donne un compte rendu qui, évidemment, s'exonère à

10 un moment où un procès a lieu au Kosovo, et si on n'a pas reçu les

11 documents nécessaires pour ce contre-interrogatoire.

12 Donc, tout cela je le dis, je ne veux pas me répéter, que c'est

13 uniquement parce que l'Accusation a choisi l'ordre des témoins que je peux

14 dire je suis extrêmement peu satisfait de la situation.

15 En plus, vous avez fait référence à certaines correspondances ce

16 matin concernant la possibilité d'une déclaration au titre de l'article 92

17 ter. Nous avons reçu de M. Re hier après-midi un courriel --

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais vous interrompre ici.

19 D'après ce que j'ai compris, ce qui était proposé : c'était de présenter

20 des documents au titre de l'article 92 ter, qui n'avaient pas trait à la

21 disparition de Sanije Balaj ?

22 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne peux pas répondre à cette question

23 pour ce motif.

24 M. RE : [interprétation] La réponse est non et je l'ai retirée, elle n'y

25 est pas.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, la réponse est --

27 M. RE : [interprétation] La réponse est non.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, ce n'est pas là.

Page 5676

1 C'était ça la question ?

2 M. RE : [interprétation] Nous n'avons pas l'intention de poser des

3 questions ni de présenter nos éléments de preuve sous la forme

4 92 ter en ce qui concerne Sanije Balaj.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

6 M. EMMERSON : [interprétation] Si je pouvais expliquer, j'ai reçu hier un

7 courriel, hier soir, de M. Re indiquant l'intention de l'Accusation

8 d'essayer de se fonder sur l'ensemble de la déclaration faite en janvier

9 2007 conformément aux dispositions de

10 l'article 92 ter. Ceci inclut une référence à Sanije Balaj.

11 J'ai répondu ce matin par un courriel indiquant qu'il y avait

12 certains passages de cette déclaration auxquels j'avais des objections en

13 termes d'admissibilité, que la déposition soit faite par la voie 92 ter ou

14 verbalement. Je n'ai pas encore reçu de réponse.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai sur ma liste, pour la Défense

16 jusqu'à maintenant, il y a donc eu un certain nombre de courriels qui nous

17 ont été envoyés, en ce qui concerne les paragraphes 29, 42, 80 et 81, tout

18 au moins --

19 M. EMMERSON : [interprétation] Exactement. Les passages particuliers, ces

20 premiers paragraphes que vous avez mentionnés, Monsieur le Président, il y

21 a donc une opposition seulement sur la base dans la mesure où ils

22 contiennent des expressions d'opinion sur des points qui sont des points de

23 droit. Mais je n'ai pas reçu de réponse directe et je ne suis pas conscient

24 d'avoir une réponse directe à ce sujet. Mais bientôt je sais, d'après ce

25 que j'ai compris, il y aura une nouvelle déclaration 92 ter qui sera

26 différente de celle que j'ai reçue. Je n'ai pas eu la possibilité de lire

27 ou assimiler ceci, et je comprends que M. Re souhaite maintenant présenter

28 une demande au titre de l'article 92 ter à cet égard.

Page 5677

1 Je vois des notes qui sont placées devant moi. Ça a été envoyé à 2

2 heures 20 cet après-midi. Je ne suis pas en mesure de répondre.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que je vous donne l'occasion,

4 Monsieur Re, de répondre à ce qui vient d'être évoqué par Me Emmerson,

5 peut-être que je voudrais inviter l'autre conseil, c'est-à-dire vous, par

6 exemple, Me Guy-Smith et Me Troop, à ajouter ce que vous souhaiteriez dire

7 à ce que vient de dire Me Emmerson de façon à ce que nous puissions avoir

8 une réponse globale.

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je suis pleinement d'accord avec les

10 remarques qui ont été faites par Me Emmerson.

11 J'ai toute une liste de points précis concernant les informations que

12 nous n'avons pas encore reçues, et je ne vais pas en donner lecture pour le

13 compte rendu à ce stade, mais ce serait probablement pas utile de le faire,

14 mais nous avons toute une série de points sur lesquels nous ne voyons pas

15 la nécessité d'un réexamen de la requête visant à modifier l'actuel acte

16 d'accusation.

17 En plus, comme vous le savez, pendant un certain temps nous avons tenté

18 d'obtenir des renseignements de la MINUK et d'autres renseignements

19 concernant un certain nombre d'enquêtes qui étaient en cours au Kosovo,

20 plus particulièrement une enquête concernant les circonstances entourant la

21 mort de Sanije Balaj. Nous avons été informés aujourd'hui par des

22 conversations à la MINUK des renseignements qu'ils auraient ne pourraient

23 pas nous parvenir avant le 20 juin. Ils nous donneront une réponse

24 provisoire à notre demande avant cela.

25 Cette demande particulière est restée sans réponse depuis l'audience

26 du 10 mai, donc ceci demeure une situation vraiment problématique. Je ne

27 suis pas à même, en aucune manière, de faire quelque lumière à ce sujet, et

28 je voudrais savoir comment l'Accusation a choisi -- dans quelle mesure elle

Page 5678

1 veut tenter justement de modifier cet acte d'accusation. Je ne suis pas en

2 mesure pour le moment d'examiner, d'assimiler et de représenter de façon

3 appropriée mon client du point de vue du contre-interrogatoire à ce stade.

4 En fait, ce serait irresponsable de ma part d'essayer de le faire.

5 Je suis très troublé par l'ordre de citation des témoins, plus

6 particulièrement le fait que ce témoin particulier a été cité à ce moment-

7 ci, parce qu'il est un témoin essentiel pour des questions qui sont

8 devenues très importantes dans ce procès, à savoir la collaboration, sa

9 participation personnelle, et nous n'avons même pas eu pour le moment la

10 possibilité faire intégrer au compte rendu un très grand nombre de faits

11 qui pourraient jeter un certain jour sur les circonstances concernant

12 l'ensemble de la question.

13 En plus, aux fins d'être bien clair, je crois que le paragraphe -- non

14 entendu -- la déclaration 92 ter, je vais y passer dans un instant,

15 mentionne le nom de Sanije Balaj.

16 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, j'ai induit la Chambre en erreur.

17 C'est pour ça que je demande la parole pour rapidement remédier à la

18 question. Au paragraphe 24, il y a une brève référence, mais elle est tout

19 à fait innocente, une référence vague. En 85, qui je pensais qui devait

20 être retiré là où il est dit : "Dans le cas de Sanije Balaj il y a eu." Je

21 ne voudrais pas revenir à la déclaration 92 ter; donc ceci serait retiré.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voudriez que les deux références

23 soient retirées ?

24 M. RE : [interprétation] Bien, la première qui est au paragraphe 24 dit

25 simplement : "Qu'il y avait un ancien inspecteur Hasan Gashi qui est devenu

26 leur commandant. Il avait été stationné avec ses troupes dans l'école où

27 elle a été amenée."

28 De notre point de vue, en fait, c'est une allusion qui est tout à

Page 5679

1 fait innocente et cela ne concerne pas les questions de culpabilité.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que je pourrais --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le critère n'est pas de savoir si cela

4 ne risque pas de mal, mais si cela avait une valeur probante.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrais-je dire ceci.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Emmerson.

7 M. EMMERSON : [interprétation] Pour le moment, je ne comprends pas que M.

8 Re suggère -- enfin, peut-être qu'il pourrait clarifier les choses. Il n'a

9 pas l'intention de poser des questions concernant Sanije Balaj. A ce que

10 j'ai compris, l'intention de l'Accusation lors de l'interrogatoire

11 principal en ce qui concerne Sanije Balaj, c'est la question de savoir si

12 ça figure ou non dans la déclaration 92 ter. Mais en fait, c'est

13 secondaire. Par conséquent, la Défense n'est pas encore en position

14 d'enquêter.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

16 Monsieur Re, j'essaie de trouver le passage que vous dites être comme à

17 aucun risque. Est-ce qu'il s'agit d'une interview du 7 et du 9 janvier de

18 cette année ?

19 M. RE : [interprétation] Paragraphe 24 du document 92 ter, de la

20 déclaration 92 ter. J'ai des copies papier.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez envoyé --

22 M. RE : [interprétation] -- était inclus dans celui que j'ai envoyé hier

23 soir et les textes révisés que nous avons, je crois, envoyés aujourd'hui à

24 une heure moins le quart.

25 J'ai des copies papier de l'exemplaire signé aujourd'hui en albanais

26 et en anglais.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je pense qu'il serait bon de

28 pouvoir les recevoir en même temps. C'était sur la base des interviews ou

Page 5680

1 des auditions récentes ou est-ce que c'était un rerédaction [phon] du texte

2 antérieur ? Parce que nous avons l'impression qu'il y a quelque chose ici

3 qui serait peut-être une partie de l'interview du 15 mai et une interview

4 du, je crois,

5 3 février, une partie d'interview du 5 mars 2006. Donc trois pour cette

6 année : janvier, février, 15 mai, mars 2006.

7 M. RE : [interprétation] Le 92 ter --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 M. RE : [interprétation] Hier soir j'ai informé les Chambres et la Défense

10 que j'avais l'intention d'utiliser l'une des déclarations de janvier --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. RE : [interprétation] -- 2007. Réflexion faite --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit - et je pense qu'il

14 s'agissait du 9 janvier, mais j'ai trouvé une déclaration combinée du 7 et

15 du 9 janvier --

16 M. RE : [interprétation] C'est la date --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est la bonne ou est-ce que

18 c'est la mauvaise ?

19 M. RE : [interprétation] C'est la date de signature qui a eu lieu le 9

20 janvier.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 M. RE : [interprétation] Réflexion faite ce matin, le témoin étant arrivé,

23 j'ai pu lui parler. Nous avons combiné les parties pertinentes de chacune

24 de ces déclarations en une seule, comme proposé pour la déclaration 92 ter.

25 Donc il n'y a vraiment rien, absolument rien qui a été ajouté aux trois

26 déclarations qui existent déjà, et qu'a la Chambre de première instance et

27 la Défense. Je me rends bien compte que cela a été présenté bien tard, une

28 heure moins quart, mais j'ai les copies papier. Je les ai envoyées par

Page 5681

1 courrier électronique à tout un chacun à une heure moins quart. J'ai des

2 copies papier en anglais et en albanais pour tous ceux qui le souhaitent

3 dans la salle d'audience.

4 Et pour calmer toutes les craintes qu'il pourrait y avoir, il s'agit

5 simplement de trois déclarations qui ont été mises dans l'ordre

6 chronologique.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends cela. Mais il semble

8 que vous avez combiné les déclarations antérieures. La dernière était du 15

9 mai, il y a un mois. S'il y a quelque chose, ce n'est pas basé sur des

10 nouvelles informations. C'est simplement un remaniement de cette rédaction,

11 pour les anciennes déclarations ou toutes les déclarations c'est plutôt

12 tard.

13 En tous les cas, nous allons les recevoir et nous allons voir où nous

14 en sommes. Ceci risque également d'avoir causer quelques confusions en ce

15 qui concerne Sanije Balaj non pas pour la déclaration 92, parce qu'on pense

16 encore qu'il s'agit de la déclaration de janvier qui serait --

17 M. EMMERSON : [interprétation] Je l'ai pensé aujourd'hui lorsque je suis

18 venu à l'audience.

19 M. GUY-SMITH : [interprétation] La nouvelle déclaration soulève le problème

20 du paragraphe 85, une fois que vous l'aurez reçue, parce qu'il est question

21 spécifiquement d'elle.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

23 M. RE : [interprétation] C'est ce que j'ai dit, donc je ne poserai pas de

24 questions concernant ces dernières lignes. Etant entendu que ceci a été

25 fait tardivement, j'ai demandé à ce moment-là que ceci soit enlevé, mais

26 malheureusement c'est resté.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que je pourrais faire une observation

28 ?

Page 5682

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Dans l'e-mail de transmission qui a été

3 envoyé à la Chambre et à la Défense, il a été suggéré que puisque ce

4 document a été communiqué tard et avait un lien avec l'arrivée tardive du

5 témoin, cette suggestion que M. Re vient de répéter, avec tout le respect

6 que je lui dois, je ne peux pas voir comment l'arrivée tardive du témoin

7 pourrait expliquer la communication tardive et la présentation tardive de

8 ce qui est une déclaration non signée du témoin. Peut-être que la version

9 signée qui est, je crois, maintenant communiquée, maintenant que nous

10 sommes à l'audience, n'a pas pu être fournie mais c'est simplement --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, je dois vous

12 interrompre. Je pense que ce dont je parlais, c'était du copier-coller dont

13 la dernière partie a été reprise du texte du

14 15 mai, c'était suffisamment clair à cet égard.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Je vous remercie.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, Monsieur Re, avant que je vous

17 donne la possibilité de répondre sur ce qui a été dit par les conseils de

18 la Défense, je voudrais regarder vers vous, Monsieur Troop, pour savoir si

19 vous avez quelque chose, Maître Troop, a ajouté à ce qui a été dit --

20 M. TROOP : [interprétation] Je n'ai rien à ajouter, Monsieur le Président,

21 mais j'adopte les positions de Me Emmerson et Me Guy-Smith et je les appuie

22 pleinement dans leurs conclusions.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

24 Monsieur Re, il n'est pas totalement clair pour moi que ce procès qui

25 est en cours au Kosovo, est-ce que vous étiez au courant de cela avant - je

26 ne me rappelle pas en avoir entendu parler par l'Accusation - étiez-vous au

27 courant de cela ?

28 M. RE : [interprétation] Bien sûr, ce sont des procédures qui sont dans le

Page 5683

1 domaine public très connues. L'une de ces procédures concernant quelques

2 crimes de guerre qui, en fait, ont eu lieu au Kosovo contre l'UCK.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, il y a une autre question qui se

4 pose. Je comprends qu'un corps a été identifié récemment grâce à l'ADN.

5 Est-ce que j'ai bien compris ?

6 M. RE : [interprétation] Ce rapport est daté du 28 mai --

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 M. RE : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, j'essaie de comprendre.

10 Jusqu'à ce moment-là il n'y avait pas de restes humains qui aient été

11 identifiés comme étant les restes de Sanije Balaj ?

12 M. RE : [interprétation] Je ne peux pas répondre à cette question de façon

13 détaillée. Tout ce que je peux répondre c'est que le résultat ADN a

14 confirmé l'identité d'un corps qui a été retrouvé --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

16 M. RE : [interprétation] -- en septembre 1998 comme étant le corps de cette

17 dame.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce que je suis en train de me

19 demander, je ne sais pas si vous pourriez nous donner des détails. Si on

20 poursuit quelqu'un pour un meurtre, par exemple, d'habitude on ne s'engage

21 pas dans ce type de voie à moins qu'il y ait des éléments prouvant que

22 cette personne est morte. Donc, par conséquent, je me pose la question de

23 savoir dans quelle mesure le fait que Sanije Balaj soit décédée était déjà

24 connu plus tôt, parce que cela n'est pas clair pour moi. Je ne vois pas

25 comment on peut commencer un procès pour cela sans avoir eu la preuve

26 qu'elle était morte, indépendamment des résultats ADN. Est-ce qu'il y a eu

27 d'autres références ?

28 M. RE : [interprétation] Oui, tout à fait. Il y a d'autres éléments. M.

Page 5684

1 Dutertre est en bien meilleure position que moi pour expliquer cela.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, parce qu'on a l'impression -- je

3 n'ai pas vraiment étudié la chose en détail, cette requête aux fins

4 d'amender l'acte d'accusation, mais si j'ai bien compris, l'identification

5 des restes comme étant ceux de Sanije Balaj pourraient justifier, parce que

6 jusqu'à présent on a encore une victime qui n'est pas nommée, qui est

7 visiblement morte, mais quant à savoir que si c'est bien la personne qui

8 est morte dont il s'agit là on n'en est pas encore sûr.

9 M. RE : [interprétation] Je ne peux exactement vous dire ce qui est

10 présenté au tribunal au Kosovo pour ce qui est du sort arrivé au corps de

11 cette personne. Mais je sais qu'il y a des preuves directes comme quoi

12 cette personne aurait été abattue dans une forêt par des gens de l'UCK,

13 ensuite son corps aurait été enfui. C'est ce corps-là qu'on a trouvé -- M.

14 Dutertre qui est beaucoup plus au courant, qui connaît les détails médico-

15 légaux -- mais ce que l'on sait maintenant, c'est qu'on a une

16 identification par ADN certaine de ces restes comme étant l'un des corps

17 nommés dans l'acte d'accusation, et trouvés près du lac Radonjic en

18 septembre 1998. C'est la pièce manquante de cet acte d'accusation jusqu'à

19 présent. Il y a un petit chevauchement puisqu'il y a quand même la

20 poursuite au Kosovo, devant les tribunaux du Kosovo, mais nous on compte

21 aussi sur les preuves ADN pour prouver l'identité de ces quelque 40 ou 50

22 corps. Mais pour ce qui est de cette personne-là, en tout cas, c'est le

23 corps qui est sujet de l'affaire au Kosovo à propos d'un meurtre et qu'il y

24 a quand même des preuves directes comme quoi cette personne aurait été

25 abattue dans la forêt.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

27 Maintenant, je voudrais donne la possibilité de répondre à Me

28 Emmerson et Me Guy-Smith à propos de l'un des problèmes qui est absolument

Page 5685

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15 versions anglaise et française

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 5686

1 essentiel pour la Chambre. Si j'ai bien compris, vous avez fait une

2 suggestion, mais Me Emmerson s'y oppose, et Me Emmerson a fait une contre-

3 proposition. Alors, qu'avez-vous à dire ?

4 M. RE : [interprétation] La déclaration de M. Krasniqi, le témoin suivant,

5 a été donnée, il s'agit de la déclaration de mars 2006 qui contient des

6 éléments portant sur Sanije Balaj et sa mort. La Défense l'a reçue, je

7 crois, en mai 2006. Ça fait vraiment un bon moment, et d'ailleurs Me

8 Emmerson l'a remarqué lui-même, que tout ceci faisait partie quand même de

9 la présentation des moyens à charge, puisque nous voulions absolument

10 savoir ce qui arrivait aux personnes qui étaient soupçonnées d'être des

11 collaborateurs de l'UCK.

12 Avant de recevoir le rapport ADN de la commission médico-légale en

13 date du 28 mai -- avant de pouvoir informer la Chambre et la Défense de

14 notre intention de modifier l'acte d'accusation, nous devions d'abord quand

15 même avertir les familles de toutes ces personnes, et faire quelques

16 enquêtes aussi au Kosovo. Donc, nous n'avons pas pu avertir la Défense et

17 la Chambre avant le 6 juin. Nous avons procédé le plus rapidement possible.

18 M. Cufe Krasniqi est sur notre liste de témoins depuis janvier. Ses

19 déclarations préalables contiennent des informations à propos de Sanije

20 Balaj et nous avons toujours eu l'intention de lui poser des questions à ce

21 propos. Et d'ailleurs, lors de la déposition de M. Rrustem Tetaj, certains

22 faits ont été évoqués à ce propos, même en contre-interrogatoire par Me

23 Emmerson, pour ce qui est du sort de Mme Balaj. Le fait qu'elle avait été

24 accusée d'être collaborateur des Serbes, et vous savez que la thèse de

25 l'Accusation était de prouver ce qui se passait et ce qui arrivait aux

26 collaborateurs serbes ou aux personnes soupçonnées d'être des

27 collaborateurs des Serbes comme partie intégrante de l'entreprise

28 criminelle commune, et nous voulions absolument savoir ce qui arrivait

Page 5687

1 aussi aux collaborateurs de l'UCK, mais jusqu'à présent nous n'avions pas

2 l'identification positive du corps afin de pouvoir inclure cela dans l'acte

3 d'accusation pour le rendre plus identifiable.

4 La Défense est au courant que nous allions suivre ce cap dans la

5 modification de l'amendement, et ce, depuis le 6 juin d'ailleurs, en

6 nommant la victime, qui n'avait pas de nom jusqu'à présent, comme bel et

7 bien maintenant Sanije Balaj. Et c'est pour cela que nous voulions appeler

8 M. Cufe Krasniqi.

9 Alors, pourquoi le citer maintenant ? C'est simple. La Cour a lancé

10 14 injonctions de comparaître jusqu'à présent pour ce qui de notre témoin.

11 Vous savez que le Procureur, lorsqu'elle a ouvert le procès, vous a bien

12 prévenu qu'il y avait des difficultés de faire venir des témoins ici pour

13 différentes raisons. Vous avez bien vu que vous avez dû jusqu'à présent

14 lancer 14 injonctions de comparaître. Vous voyez dans chaque demande que

15 nous faisons, nous allons vous en faire une autre demain d'ailleurs, nous

16 motivons nos demandes et nous vous donnons les explications qui ont été

17 données aux enquêteurs par les témoins à propos de leur réticente à

18 témoigner ici.

19 M. Cufe Krasniqi n'était pas censé être le témoin qui allait témoigner

20 aujourd'hui. Il y en avait un autre qui avait été sous l'effet d'une

21 injonction, il était censé revenir aujourd'hui, et il n'est toujours pas

22 là, et bien sûr, nous avons essayé de le faire venir le plus rapidement

23 possible. Mais jusqu'à présent nous avons énormément de mal à faire venir

24 les témoins dans le prétoire et il est vraiment très difficile pour nous de

25 savoir dans quel ordre les nommer.

26 Ce témoin, par exemple, M. Cufe Krasniqi, est un officier de police

27 d'active et il est très disponible à témoigner, il a un visa, il peut

28 voyager, et c'est vraiment la personne idoine qui pouvait venir

Page 5688

1 aujourd'hui. Il y avait un autre témoin qui devait être cité la semaine

2 dernière. Il n'est pas arrivé parce que l'injonction n'avait pas encore été

3 donnée. On a aussi le témoin de la semaine dernière, M. Kabashi, qui a

4 décidé de disparaître après qu'il ait été cité pour outrage --

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certes, je vais vous interrompre

6 parce que, jusqu'à présent, j'ai entendu de la part de la Défense quelques

7 remarques à propos du planning de l'ordre des témoins, mais sinon, je n'ai

8 rien entendu qui pourrait me faire comprendre -- il n'y avait pas grand

9 chose de nouveau, vous m'avez parlé du problème que vous avez à faire venir

10 les témoins, le fait qu'ils ne répondent pas aux injonctions de

11 comparaître, certes, mais le problème de la Défense n'est pas celui-là. Ils

12 voudraient savoir comment interroger le témoin et contre-interroger le

13 témoin dans les circonstances actuelles qui n'a pas grand-chose à voir,

14 finalement, avec le fait que les autres témoins que vous aviez prévus ne

15 sont pas à la barre. On pourrait peut-être vous critiquer d'avoir décidé de

16 programmer ce témoin aujourd'hui, mais il est vrai que vous avez des

17 difficultés. Ce n'est pas ce qu'on vous reproche. Ce qu'on vous demande,

18 c'est de savoir comment on peut interroger le témoin et contre-interroger

19 le témoin prévu tout en permettant à la Défense d'assimiler toutes les

20 informations nécessaires à son propos, y compris les considérations quant à

21 savoir s'il faut procéder à de nouvelles enquêtes, oui ou non. Voilà le

22 problème, on vous demande comment nous y prendre.

23 M. RE : [interprétation] Me Emmerson a dit que la déclaration préalable du

24 15 mai porte sur Sanije Balaj. Absolument pas, c'est faux. Tout est dans la

25 déclaration de mars de l'an dernier. A notre avis, on peut tout à fait

26 morceler les éléments de preuve lors du contre-interrogatoire, pour ce qui

27 est de Sanije Balaj. Nous, l'Accusation, nous avons toujours eu l'intention

28 de poser des questions à ce propos, et le fait qu'il y ait une demande de

Page 5689

1 modification de l'acte d'accusation ne change absolument rien en notre

2 approche. Nous allions demander des questions à propos de Sanije Balaj. Le

3 problème, visiblement, c'est l'avertissement tardif et le contre-

4 interrogatoire.

5 Me Emmerson cherche à obtenir un dossier de la MINUK tout à fait complet --

6 l'Accusation n'a pas le dossier judicaire complet puisque le procès est

7 encore en cours et n'est pas terminé. Les plaidoiries et la réquisition se

8 feront la semaine prochaine ou la semaine d'après.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous n'avez pas le

10 dossier complet de l'affaire ?

11 M. RE : [interprétation] Nous avons le dossier d'enquête et un petit

12 morceau du dossier judicaire, et nous avons demandé à la MINUK de nous

13 donner un petit peu ce qui nous manque, et jusqu'à présent ils nous ont

14 donné les dossiers d'enquête de l'an dernier et le dossier judiciaire. Mais

15 nous n'avons pas la totalité du dossier judiciaire. Certes, on a le compte

16 rendu, il est public, donc on en a une certaine partie.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ils ont bien un compte rendu des

18 audiences, n'est-ce pas ?

19 M. RE : [interprétation] Oui, mais nous ne l'avons pas en entier, en plus,

20 l'affaire est encore en cours.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends. Certes. Jusqu'à présent,

22 voilà où nous en sommes, si j'ai bien compris.

23 M. RE : [interprétation] Oui, nous avons demandé à obtenir le dossier

24 complet, mais pour l'instant on ne l'a pas.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous avez des éléments, certes,

26 mais est-ce que vous avez au moins tout communiqué à la Défense ?

27 J'aimerais le savoir, même si c'est incomplet.

28 M. RE : [interprétation] Je ne peux pas vous répondre.

Page 5690

1 M. EMMERSON : [interprétation] Moi, je peux. Nous ne l'avons pas reçu

2 jusqu'à présent. C'est la première fois que j'en entends parler. Pour ce

3 qui est du fait que l'on dise que la Défense soit en possession de tous ces

4 éléments depuis un moment, c'est absolument faux. Le 25 mai, c'est-à-dire

5 avant que les résultats de l'ADN soient connus, l'Accusation a communiqué à

6 la Défense les déclarations à propos des cousins de Sanije Balaj, l'une est

7 datée de 2002, l'autre de mars 2006. Ça fait quand même un bon moment

8 qu'ils l'avaient. Evidemment, ils avaient choisi de ne pas nous le

9 communiquer.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous poser une question. Cela ne

11 vous a pas été communiqué du tout, même au titre de l'article 68 du

12 Règlement, élément de contexte, et cetera ?

13 Monsieur Guy-Smith, qu'avez-vous à dire ?

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] Absolument pas, on n'a rien reçu. Pour

15 essayer d'éclaircir un peu les choses, je vais vous dire la chose suivante,

16 pour ce qui est de la déclaration de Hazir Balaj, qui est ajouté en pièce

17 jointe à la demande de modification de l'acte d'accusation au paragraphe 3,

18 il est dit ce qui suit : "J'ai fait deux déclarations aux Nations Unies au

19 Kosovo, à la MINUK, le 21 octobre 2002 et le 26 avril 2005 à propos de la

20 disparition de Sanije Balaj. La déclaration de 2002 est manuscrite, mais je

21 tiens à dire que ce n'est pas mon écriture. Ça a été écrit par l'enquêteur.

22 Le 9 mai 2007, j'ai témoigné au procès de la MINUK d'Idriz Gashi, qui est

23 accusé d'avoir tué cette femme. J'ai montré les déclarations, ainsi que la

24 déclaration que j'avais faite au bureau du Procureur en 2006."

25 Ces trois documents auxquels il fait référence, celui du 21 octobre

26 2002, celui du 26 avril 2005, et le témoignage du 9 mai 2007, ne nous sont

27 pas encore été donnés. J'en ai appris l'existence hier lorsque j'ai reçu

28 cette requête. J'ai une immense liste à ce propos d'ailleurs, mais je ne

Page 5691

1 voulais pas être fastidieux.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. Si je puis dire, il est évident, pour

3 ce qui est des déclarations qui nous ont été données le 25 mai et qui

4 datent de 2002 et de 2006, pour nous, que l'Accusation, bien avant de

5 savoir les résultats de l'enquête ADN le 28 mai, savait parfaitement qu'ils

6 voulaient procéder de la sorte. Ils le savaient à l'avance, ça s'est déjà

7 fait d'ailleurs. Ils savaient parfaitement quel allait être le résultat.

8 Si je puis me résumer, jusqu'à présent ils ont toujours eu la

9 démarche de communiquer à la Défense certaines déclarations, mais pas

10 toutes. Comme M. Guy-Smith vient de le dire, hier nous avons reçu une série

11 de documents qui étaient joints à la demande de modification de l'acte

12 d'accusation de l'Accusation, qui nous ont rendu les choses extrêmement

13 claires. Tout d'abord, on s'est rendu compte, comme l'a dit M. Re il y a un

14 minute, que l'Accusation à l'heure actuelle possède des documents qu'elle

15 n'a toujours pas communiqués à la Défense, et deuxièmement, qu'il y a sans

16 doute un grand nombre d'éléments supplémentaires que l'Accusation n'a peut-

17 être pas sous la main, mais qui est disponible au Kosovo quand même.

18 En fin de compte, M. Re ici va nous dire ce que l'on sait depuis très

19 longtemps que le témoin suivant va venir, il va dire : j'ai interviewé ce

20 témoin pour ces allégations -- je l'ai libérée et je suis tout à fait

21 innocent de toute allégation qui aurait pu intervenir par la suite. Mais en

22 réalité, il y a des éléments qui doivent absolument être explorés lors du

23 contre-interrogatoire, et jusqu'à présent l'Accusation conserve ces

24 éléments, elle ne veut pas les communiquer à la Défense, d'abord les

25 éléments du 25 mai, les éléments hier aussi, donc on voit bien que jusqu'à

26 présent l'Accusation ne fait que violer cette obligation au titre de la

27 communication.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, on vous reproche des choses

Page 5692

1 qui sont extrêmement graves. J'aimerais savoir deux choses. Tout d'abord,

2 cette communication supplémentaire, il semblerait - c'est ce qui est

3 allégué par la partie adverse - que vous aviez ces documents sous la main

4 depuis un moment. Cette communication supplémentaire s'est faite juste

5 avant l'identification ADN et la Défense en a pris mouche.

6 Ensuite, deuxièmement, la Défense se demande s'il n'y a pas encore des

7 éléments en votre possession qui pourraient être extrêmement pertinents, et

8 qui portent sur les circonstances du décès de Sanije Balaj et qui n'est

9 toujours pas communiqué à la Défense.

10 M. RE : [interprétation] Pour ce qui est du premier reproche qui m'est

11 fait, donc du rapport médico-légal, pas de l'ICMP, je ne comprends pas très

12 bien quand vous dites que "la Défense en a pris mouche."

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelques jours avant que les rapports

14 ADN ne soient disponibles, vous avez visiblement envoyé tout un dossier à

15 la Défense. Et la Défense semble dire, qu'en fait, vous les aviez sous le

16 coude depuis un moment et vous aviez décidé de ne pas les communiquer,

17 alors qu'eux voulaient les avoir, parce qu'ils les trouvaient pertinents,

18 et juste avant que le rapport ADN ne soit disponible et que

19 l'identification ne soit faite, vous avez changé d'avis, et vous avez

20 communiqué les documents à la Défense. La suggestion, c'est que vous n'avez

21 pas respecté vos obligations de communication en toute franchise.

22 M. RE : [interprétation] Mais c'est absolument inconcevable.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah bon.

24 M. RE : [interprétation] Oui, c'est inconcevable. Le rapport de l'ADN date

25 du 28 mai --

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, justement, vous avez communiqué

27 tout un dossier juste avant cette date-là.

28 M. RE : [interprétation] Oui, parce qu'on s'est rendu compte à ce moment-là

Page 5693

1 que l'identification serait très certainement positive, et là je parle de

2 jours quand même, pas de semaines. Alors je ne peux pas vous dire combien,

3 mais on s'est rendu compte tout d'un coup, n'essayez pas de me parler de la

4 théorie du complot. Si on avait eu cette information, alors bien entendu

5 qu'on l'aurait communiquée enfin.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, Monsieur Re, c'est peut-

7 être moi qui ai mal compris la Défense, je ne sais pas. Mais j'ai cru

8 comprendre que le problème de la Défense, c'est – bon – que peut-être que

9 vous avez appris quelques jours avant le 28 mai que les éléments

10 d'identification par ADN seraient disponibles, seraient rendues publiques,

11 et c'est visiblement à ce moment-là, le 25 mai, que vous avez commencé à

12 communiquer à la Défense toutes sortes d'éléments qui étaient déjà

13 pertinents pourtant en l'espèce, quels que soient les résultats de

14 l'identification ADN, éléments que vous aviez sous le coude et que vous

15 n'aviez pas communiqués. La Défense ici, vous reproche de ne pas avoir

16 respecté vos obligations au titre de la communication des éléments à

17 l'autre partie.

18 M. RE : [interprétation] Mais je ne comprends pas.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'est un leurre, une coïncidence si

20 une communication supplémentaire a été faite en date du 25 mai ?

21 M. RE : [interprétation] Bien sûr, tout cela a un rapport direct avec

22 l'ADN. Comme je l'ai déjà dit, nous étions en possession de certains

23 renseignements indiquant que l'identification ADN positive avait été faite.

24 Je ne peux pas vous dire quand exactement, mais c'était à peu près à cette

25 date que nous avons communiqué les documents, quelques jours à peine

26 d'intervalle.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que j'ai cru comprendre c'est que la

28 Défense que les déclarations ont été recueillies avant cette année-là,

Page 5694

1 avant que l'on connaisse la pertinence de cet élément, nonobstant le fait

2 de savoir s'il y avait identification d'ADN en mai 2207, et que par

3 conséquent, ces déclarations auraient dû être communiquées déjà depuis des

4 années ou en tout cas depuis plusieurs mois et que vous n'auriez pas dû

5 attendre jusqu'à l'obtention du rapport ADN. Voilà l'accusation qui est

6 portée contre vous.

7 M. RE : [interprétation] Nous avons de très nombreuses déclarations de

8 témoins que nous ne communiquons pas pour des raisons tout à fait claires.

9 S'il n'y a pas quelque chose de très précis dans l'acte d'accusation qui

10 nous y incite, normalement nous ne les communiquons pas. Bien sûr, au titre

11 de l'article 66(B) du Règlement, c'est discutable, mais je ne suis pas

12 d'accord quant à l'interprétation des actes d'accusation faites par la

13 Défense.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'appuie également sur l'article

15 68(ii) du Règlement, selon lequel le Procureur met à la disposition de la

16 Défense pas seulement les documents à décharge mais également les documents

17 qui peuvent être pertinents sous forme électronique.

18 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi de prendre la parole. M. Re a

19 fondé son intervention devant vous aujourd'hui sur le fait que cela fait

20 déjà partie des éléments de preuve de l'Accusation sur l'entreprise

21 criminelle commune. Or, il est possible qu'une victime n'ait pas été nommée

22 dans l'acte d'accusation, mais cela a toujours été un élément de preuve de

23 l'Accusation, l'incident lié à Sanije Balaj. Dans la communication du lot

24 120, le 25 mai, une déclaration de son frère datant du 15 octobre 2002 a

25 été communiquée, ainsi qu'une déclaration de cousin datant du 3 mars 2006.

26 Hier, d'autres déclarations de témoins ont été communiquées qui émanent de

27 son frère en date du 25 avril 2006, ainsi qu'une déclaration d'un autre

28 cousin.

Page 5695

1 Alors le fait que l'Accusation ait eu ces documents en sa possession

2 depuis plusieurs années, en tout cas, depuis très longtemps, c'est cela qui

3 importe. M. Re maintient que l'incident lié à Sanije Balaj a toujours fait

4 partie des éléments de preuve de l'Accusation au sujet de l'entreprise

5 criminelle commune, mais il est en train de s'écarter du sujet qui est

6 documents pertinents, La pertinence des documents à communiquer, qui n'ont

7 aucun rapport avec l'acte d'accusation, et nous ne considérons pas que

8 l'Accusation a rempli ses obligations en la matière.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith.

10 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour être tout à fait clair, un individu

11 que nous avons entendu témoigner dans le procès au Kosovo était considéré

12 comme suspect de la mort de Sanije Balaj et il y a des dépositions qui

13 viennent d'Avni Krasniqi en août 2005, dans lesquelles il est mentionné,

14 ainsi que dans la requête de septembre 2000 et de décembre 2002.

15 L'Accusation est donc en possession d'autres déclarations préalables

16 relatives à un homme dont le nom est Ahmet Ukaj qui date de juin 2005 et de

17 février 2006. La raison pour laquelle nous sommes au courant c'est que ces

18 éléments ont été évoqués dans le témoignage d'un certain nombre d'individus

19 mais également dans la requête de l'Accusation.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends maintenant que ce que

21 dit M. Re c'est que ces déclarations préalables n'étaient pas

22 particulièrement pertinentes en l'espèce parce que cela aurait fait double

23 emploi par rapport à toutes les autres déclarations préalables qui évoquent

24 des assassinats et des disparitions de personnes et que c'est seulement

25 depuis l'identification ADN que ces éléments particuliers sont devenus

26 pertinents. Est-ce que j'ai bien compris votre position ?

27 M. RE : [interprétation] Puisque la victime a acquis un nom, nous avons pu

28 définir quels étaient les éléments à l'appui de cette déclaration qui

Page 5696

1 étaient pertinents. Cette femme faisait partie d'une série d'autres

2 dépositions, -- enfin sa déposition faisait partie d'une série d'autres

3 dépositions, et en tant que victime dont le nom n'avait pas été cité dans

4 l'acte d'accusation, il semble que ce nom ait été communiqué dans les

5 derniers éléments.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense, oui --

7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Monsieur le Président --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- la Défense attire l'attention de la

9 Chambre sur une contradiction.

10 Maître Guy-Smith, vous avez la parole.

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense que ce que vient de dire M. Re est

12 pour le mieux sans rapport avec le sujet. Toute la déclaration préalable de

13 Sanije Balaj et les déclarations préalables liées à celle-ci sont

14 préoccupantes, et ce, à plusieurs titres, car il est certain que c'est déjà

15 l'année dernière quand j'ai écrit une lettre demandant les dossiers de la

16 MINUK que nous avons évoqué le sujet et donc, nous avons établi un lien

17 avec l'acte d'accusation. Le problème date de cette époque au moins. Cette

18 question n'est pas un problème, mais je veux dire que l'incident lié à

19 Sanije Balaj n'est pas un problème qu'il fallait éluder ou éviter et ne pas

20 prendre au sérieux. L'Accusation devait tenir compte de tous les

21 renseignements disponibles pour fournir des renseignements exhaustifs à la

22 Défense dans le cadre de la communication, notamment sur cet incident

23 particulier, ce qui n'a pas été fait, puisque le nom lié à cet incident n'a

24 pas été communiqué.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Un autre sujet, excusez-moi --

27 c'est que certains des individus étaient témoins liés à ces allégations

28 s'agissant de ce décès ou de qui arrivé au cadavre de Sanije Balaj, ont été

Page 5697

1 témoins entendus par la Chambre, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre va réfléchir encore aux

5 problèmes qui viennent d'être évoqués. Elle va se poser la question de

6 savoir comment résoudre le problème. Elle souhaite donc que la pause se

7 fasse plus tôt que prévu. Nous reprendrons nos débats à 15 heures 50.

8 --- L'audience est suspendue à 15 heures 25.

9 --- L'audience est reprise à 16 heures 00.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre ayant étudié la situation qui

11 se présente à elle, certes, nous n'avons pas encore étudié dans les détails

12 la demande demandant à être autorisé à modifier l'acte d'accusation, ainsi

13 que ses annexes et ses pièces jointes, la Chambre ne tient pas à entendre

14 le témoin qui va apparaître, enfin, qui va être cité aujourd'hui à propos

15 de l'affaire Sanije Balaj. Tout d'abord, nous aimerions aussi, nous tenons

16 d'abord à voir les éléments et les examiner. Nous voulons aussi demander à

17 la Défense la possibilité de voir tous ces éléments. Donc, il faudra -- ça

18 signifie donc que lors de l'interrogatoire principal du témoin, nous ne

19 voulons pas qu'on lui parle de la disparition et du meurtre de Sanije

20 Balaj. Peut-être nous pourrons le rappeler plus tard, mais pour l'instant

21 nous ne voulons pas entendre parler de l'affaire Sanije Balaj.

22 Ensuite, avant que le témoin ne rentre dans le prétoire, la Chambre

23 aimerait savoir exactement quels sont les passages incriminés dans la

24 déclaration préalable. Tout d'abord, les passages qui portent sur Sanije

25 Balaj, puisque la Chambre ne veut pour l'instant pas en connaître, mais

26 j'ai cru comprendre que l'Accusation est tout à fait d'accord avec cela

27 pour l'instant. Je pense que cela se trouve au paragraphe 34, Monsieur Re,

28 c'est bien cela ?

Page 5698

1 M. RE : [interprétation] Tout à fait, paragraphe 34.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela commence où exactement au

3 paragraphe 34 ?

4 M. RE : [interprétation] Page 8.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle ligne, s'il vous plaît ?

6 M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est justement le paragraphe 25.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois donc. Cela commence donc : J'ai

8 vu Hasan Gashi avec ses troupes dans l'école rouge où avait été emmené

9 Sanije Balaj. C'est la première fois qu'elle est mentionnée ?

10 M. RE : [interprétation] Mais c'est quand même important le fait que cette

11 école soit rouge. A notre avis, c'est quand même une référence tout à fait

12 innocente.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais y a-t-il un problème avec ces cinq

14 mots : L'école rouge où Sanije Balaj a été emmenée ?

15 M. EMMERSON : [interprétation] Ecoutez, je suis entre vos mains, Monsieur

16 le Président.

17 Nous verrons peut-être lors du contre-interrogatoire, et je vous

18 demanderais quelle est votre position --

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en fait, ça ne paraît pas être un

20 grand problème. Donc, nous laissons ces cinq mots. Mais alors, où est-ce

21 qu'on voit à nouveau le nom de Sanije Balaj ?

22 M. RE : [interprétation] C'est au paragraphe 85, la dernière ligne où il

23 est écrit : "Pour ce qui est de Sanije Balaj, il y a eu une exécution fort

24 malheureuse sans procès équitable. De telles choses ne devraient pas

25 arriver."

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois. Donc, c'est la dernière phrase

27 du paragraphe 85. Il faudrait que cela soit enlevé.

28 Maintenant, pour ce qui est de la Défense, y a-t-il d'autres passages

Page 5699

1 pour lesquels une objection a été soulevée ? Parce que je n'ai pas encore

2 comparé avec les paragraphes 2 [comme interprété], 42, 80 et 81. Je ne vois

3 pas très bien -- je n'arrive pas à me retrouver dans la nouvelle

4 déclaration 92 ter. Je ne l'ai pas lue. Pouvez-vous me donner les portions,

5 les passages du moins pour lesquels vous avez soulevé une objection ?

6 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que M. Re a enlevé les

7 portions, les passages incriminés justement dans la dernière mouture du

8 document 92 ter.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, c'est celui que nous avons

10 sous les yeux en ce moment, c'est-à-dire dont les numéros ERN se terminent

11 par le 1114 jusqu'au 1167 et comprenant donc le 1167.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ça c'est l'anglais, pour ce qui est

14 de l'anglais, ça va jusqu'au 1139.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. J'ai fait des comparaisons parce que

16 les paragraphes maintenant ne correspondent plus, maintenant que le

17 document a été rerédigé. Mais si j'ai compris le e-mail, le courriel qui

18 accompagnait le document quand il nous a été donné, je crois qu'il a bel et

19 bien fait ce qu'il avait dit qu'il allait faire.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, ce témoin va donc déposer, et

21 il dépose au titre de l'article 92 ter, ça c'est clair, n'est-ce pas ?

22 Donc, s'il y a tout d'un coup des opinions qu'il proférerait -- Nous ne

23 sommes pas un jury, nous sommes des juges professionnels, donc nous ne le

24 prendrons pas en compte. Ne vous inquiétiez pas. Par exemple, le fait que

25 le conflit armé ait commencé le 3 novembre, bien, la Chambre sait

26 parfaitement quelle est les lignes de conduite à adopter par rapport à ce

27 type de moyen de preuve apporté par le témoin.

28 M. EMMERSON : [aucune interprétation]

Page 5700

1 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

2 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, oui, mais parfois cela pourra devenir

3 quand même un point sensible.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais de toute façon nous ferons

5 très attention. Maintenant, je vais demander à l'Accusation si vous êtes

6 prêt à citer votre prochain témoin.

7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Oui, j'avais quand même soulevé une

8 objection par rapport à des paragraphes, mais je ne me souviens plus très

9 bien lesquels.

10 M. RE : [interprétation] C'est le 85 et le 86.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la nouvelle version ?

12 M. RE : [interprétation] Tout à fait.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc dans la nouvelle version, les

14 paragraphe 85 et 86.

15 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. J'avais soulevé une objection par

16 avant aux paragraphes 85, 86 et 87. M. Re nous avait dit qu'il avait reçu

17 mon courriel en retard, et donc il allait poser des questions à propos de

18 cette information.

19 M. RE : [interprétation] Non, j'ai dit que je ne l'avais pas enlevée, parce

20 que j'avais reçu le courriel un peu trop tard. Enfin, je pense que cette

21 objection quand même est un peu excessive. On peut quand même poser des

22 questions à ce propos.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Guy-Smith, 85, donc ce qu'il y

24 a au paragraphe 85 soit une opinion ou pas, c'est savoir quelle est la

25 pénalité que l'on a si on a un collaborateur c'est la prison à vie, qu'il

26 n'y a pas de prison. Enfin c'est tout de même une opinion, puisqu'il --

27 mais la Chambre sera parfaitement comment -- la Chambre va savoir dire ce

28 qu'il en est, par exemple, s'il y avait eu des peines de prison à vie, mais

Page 5701

1 s'il y a pas de prisons, s'il y a pas eu de tribunaux, on se concentrerait

2 plutôt sur les faits de savoir s'il y a ou non présence de la police

3 militaire. Enfin, de toute façon, la dernière ligne de paragraphe 85,

4 dernière phrase du paragraphe 85 ne doit pas faire l'objet d'interrogatoire

5 aujourd'hui.

6 Maintenant, êtes-vous prêt à appeler M. Krasniqi ?

7 M. RE : [interprétation] Tout à fait.

8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Pendant que nous attendons le témoin,

9 j'aimerais savoir quelle est la date de la déclaration préalable, c'est

10 bien le 14 juin --

11 M. RE : [interprétation] Tout à fait.

12 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Oui, puisque c'est ce qui est

13 mentionné à la page 25 de la version en anglais, n'est-ce pas ?

14 M. RE : [interprétation] Tout à fait.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je profite de cette attente pour dire

16 que la Chambre, bien sûr, va étudier en détail non seulement la demande de

17 modification de l'acte d'accusation, ainsi que ses pièces jointes. Et si

18 nous devions changer d'avis en ce qui concerne le cap à suivre, nous

19 verrons en temps et heure. Pour l'instant, nous sommes un peu dans le flou.

20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Krasniqi.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, les

24 Règlements de procédure et de preuve de ce Tribunal exigent que vous

25 fassiez une déclaration solennelle comme quoi vous allez dire la vérité,

26 toute la vérité et rien que la vérité. Le texte va vous être montré par Mme

27 l'Huissière. S'il vous plaît, veuillez le lire.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

Page 5702

1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

2 LE TÉMOIN: CUFE KRASNIQI [Assermenté]

3 [Le témoin répond par l'interprète]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Krasniqi. Vous pouvez

5 vous asseoir.

6 M. Re va commencer à vous interroger. M. Re représente l'Accusation.

7 Interrogatoire principal par M. Re :

8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Krasniqi.

9 R. Bonjour.

10 Q. Pourriez-vous donner votre nom et prénom à la Chambre.

11 R. Je m'appelle Cufe Krasniqi.

12 Q. Ça se prononce Cufe; c'est ça ?

13 R. Oui, Cufe.

14 Q. Vous êtes né le 24 mars 1959 à Vranoc, à municipalité de Peje ?

15 R. Oui.

16 Q. A l'heure actuelle, vous êtes officier de police et vous travaillez au

17 centre de formation du KPS à Kosovo ?

18 R. Oui, je suis instructeur dans la police.

19 Q. Très bien. Je vais maintenant vous montrer la déclaration dont vous

20 avez un exemplaire sous les yeux. Est-ce bien le document que vous avez

21 signé il y a quelques heures ?

22 R. Oui.

23 Q. L'avez-vous bel et bien sous les yeux ou faudra-t-il que l'on vous en

24 donne un exemplaire ?

25 R. Je l'ai sous les yeux.

26 Q. Il s'agit bien de la pièce 65 ter 1384. C'est pour être sur que nous

27 avons tous le même document sous les yeux. Donc vous avez signé la version

28 en anglais et la version en albanais, et ce, à chaque page, et c'est un

Page 5703

1 document daté du jour d'aujourd'hui, c'est-à-dire du 14 juin 2007; c'est

2 bien cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Cette déclaration représente-t-elle les éléments de preuve que vous

5 nous apporteriez si je vous posais des questions à propos de ce qui est

6 consigné dans cette déclaration ?

7 R. Oui.

8 Q. Donc cette déclaration reflète la vérité ?

9 R. Oui, je considère qu'elle reflète la vérité.

10 M. RE : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît, verser cette pièce

11 au dossier ?

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, donnez-nous une

13 cote.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P351.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. J'imagine que suite aux

16 discussions que nous avons eues avant la pause, la Défense ne soulève

17 aucune objection au versement au dossier de cette pièce du moment que l'on

18 y omet la dernière phrase du paragraphe 85. Donc le document est admis au

19 dossier sans sa dernière phrase au paragraphe 85.

20 Monsieur Re, vous pouvez y aller.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Très bien. J'ai quelques questions à vous poser. D'abord à propos de

23 vous-même, j'aimerais savoir si vous avez effectué votre service national

24 en Croatie dans le cadre de la JNA dans une unité d'artillerie antiaérienne

25 avant de rejoindre les rangs de la police; c'est bien cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Avez-vous entendu parler de Ramush Haradinaj pour la première fois en

28 1997, une fois que son frère Luan a été tué non loin de la frontière

Page 5704

1 albanaise ?

2 R. Oui. J'ai entendu parler de lui après que son frère a été tué en 1997.

3 Q. L'avez-vous rencontré pour la première fois en 1998 ?

4 R. Oui, je l'ai rencontré à ce moment-là.

5 Q. Avez-vous d'abord rencontré Lahi Brahimaj en 1997 lors des funérailles

6 de son cousin Adrian Krasniqi, qui avait été tué également ?

7 R. Oui, c'est là que je l'ai rencontré.

8 Q. Quand êtes-vous entré par la première fois au QG de l'UCK à Gllogjan ?

9 R. La première fois, c'était en 1998.

10 Q. Quand y êtes-vous allé pour la première fois ?

11 R. J'y suis allé pour la première fois après l'attaque contre le village

12 de Gllogjan en mars. Donc j'y suis allé dans les bâtiments de l'école.

13 Q. Où se trouvait à peu près le QG de l'UCK à Gllogjan ?

14 R. A cette époque-là, le QG n'avait pas encore de lieu précis, mais par la

15 suite il a été abrité dans une maison. Au moment où j'y suis allé, il

16 n'avait pas encore de lieu précis.

17 Q. Quand le QG a été logé dans une maison, cette maison appartenait à qui,

18 à quelle famille ?

19 R. Le commandement de l'UCK était abrité dans la maison d'un membre de la

20 famille Haradinaj, qui était un cousin de Ramush.

21 Q. A combien de reprises êtes-vous allé là-bas en 1998 ?

22 R. J'y suis allé deux ou trois fois.

23 Q. Quand y êtes-vous allé par la deuxième fois ?

24 R. Je suis allé pour la deuxième fois après le mois de mai, je crois.

25 Q. Vous y êtes allé en compagnie de qui ?

26 R. J'y suis allé seul avec des amis.

27 Q. Vous rappelez-vous y être allé en compagnie de Rrustem Tetaj ?

28 R. Non, je n'étais pas avec Rrustem. J'étais avec d'autres personnes, mais

Page 5705

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15 versions anglaise et française

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 5706

1 Rrustem n'était pas avec moi.

2 Q. Ramush Haradinaj était-il là-bas au QG quand vous y êtes allé ?

3 R. Oui, il était là. Il se reposait. J'ai dit aux gens de ne pas le

4 réveiller, et je suis reparti sans avoir discuté avec lui ce jour-là.

5 Q. Rrustem Tetaj était-il présent ce jour-là ?

6 R. Je ne l'ai pas rencontré là-bas.

7 Q. Combien de personnes se trouvaient dans ce bâtiment lorsque vous y êtes

8 allé ?

9 R. Il y avait une cour. Les portes du bâtiment étaient ouvertes. J'ai vu

10 des jeunes gens. Je dirais qu'il se trouvait là entre 70 et 100 hommes.

11 Q. Que faisaient-ils ?

12 R. Certains étaient assis, d'autres se reposaient, d'autres faisaient

13 quelque chose. Il y en avait qui faisaient du ménage.

14 Q. Etaient-ce des civils ou des soldats ?

15 R. La majorité d'entre eux portaient des vêtements de civils.

16 Q. L'une ou l'autre de ces personnes s'entraînait-elle sur le plan

17 militaire ?

18 R. J'ai vu des hommes qui portaient un fusil. Il y en avait qui

19 expliquaient le maniement du fusil à d'autres, et il y en avait qui

20 discutaient de fusils entre eux.

21 Q. De quel genre de fusils s'agissait-il ?

22 R. En majorité, il s'agissait de Kalachnikovs, A-47.

23 Q. Pourriez-vous nous donner un pourcentage quant au nombre d'hommes qui

24 étaient en uniforme comparé au nombre d'hommes qui étaient en civil ?

25 R. Il m'est assez difficile de le dire parce que je ne m'y intéressais pas

26 particulièrement. Nous avions tous le désir de porter ce genre d'uniforme,

27 mais il n'y en avait pas assez. Donc nous n'en avions pas tous.

28 Q. Est-ce que les 70 à 80 hommes qui se trouvaient là, à votre

Page 5707

1 connaissance, étaient membres de l'UCK -- ou plutôt, excusez-moi. J'aurais

2 dû dire les 70 à 100 hommes qui se trouvaient là.

3 R. Oui, ils étaient tous là pour devenir membres de l'UCK. Mais

4 malheureusement il n'y avait suffisamment d'uniformes pour tous. Certains

5 portaient un uniforme et d'autres n'en portaient pas. Voilà quelle était la

6 situation à l'époque.

7 Q. Qu'en était-il des emblèmes de l'UCK, les 70 à 100 hommes qui se

8 trouvaient là, portaient-ils, arboraient-ils l'emblème de l'UCK ?

9 R. Non, ils n'avaient pas tous cet emblème.

10 Q. Pourquoi êtes-vous allé là-bas ce jour-là ?

11 R. J'y suis allé parce que nous cherchions à décider de ce que nous

12 pouvions faire pour défendre le village.

13 Q. Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails ? Qu'entendez-vous

14 exactement par les mots "défendre le village," le défendre contre qui ? Et

15 pourquoi êtes-vous allé à cet endroit précis pour chercher à défendre le

16 village ?

17 R. C'est très simple. Les forces policières serbes et l'armée serbe

18 attaquaient les villageois qui n'avaient pas de protection. Elles

19 attaquaient les villages. Il s'agissait d'une répression qui n'avait pas

20 commencé cette année-là mais qui avait commencé déjà du début des années

21 1990, et même, je dirais, dès 1989, date à laquelle la constitution a été

22 amendée. Donc, à cette époque-là, il était très pénible de vivre dans cette

23 région où régnait la terreur, la violence, où les écoles étaient fermées,

24 d'où les jeunes partaient à cause de la répression parce qu'on les

25 recherchait pour avoir participé à des manifestations pacifiques en les

26 accusant de terrorisme. Donc voilà quelle était la situation au quotidien

27 sous le règne serbe à cette époque-là.

28 Q. Quelle protection essayiez-vous de trouver en vous rendant au QG de

Page 5708

1 l'UCK à Gllogjan ? Que recherchiez-vous ?

2 R. Nous souhaitions déterminer comment nous pouvions défendre les

3 villages. Nous voulions qu'on nous dise quelles étaient les voies

4 d'obtention d'armes. Chacun avait le désir de tenir une arme dans la main,

5 de mourir en combattant, en n'étant pas soumis, mais en opposant une

6 résistance.

7 Q. Y avait-il quelqu'un à qui vous vouliez parler en particulier quand

8 vous êtes allé à Gllogjan la deuxième fois ?

9 R. J'avais pour objectif de discuter de la création d'un groupe d'hommes

10 qui pourraient se rendre en Albanie afin d'obtenir des armes et de les

11 rapporter, en portant chacun le plus grand nombre possible d'armes.

12 Q. Quand êtes-vous allé au QG de l'UCK à Gllogjan pour la troisième fois ?

13 R. Je suis allé pour la troisième fois au moment le plus dur de cette

14 période, au moment où Gllogjan était victime d'une attaque, ce qui a

15 vraiment été un désastre. Le village a été bombardé de tous les côtés et

16 les autres villages vivaient le même sort. Les pilonnages se faisaient avec

17 des canons lourds. Je peux dire sans risque de me tromper que lorsque nous

18 sommes allés là-bas, nous avons vu des maisons détruites ou endommagées par

19 les obus. Il y avait des victimes au sein de la population civile.

20 Q. Cela se passait-il en août 1998 ?

21 R. Oui, cela se passait en août 1998. Toute la région a été pilonnée. Les

22 Serbes pilonnaient à partir de leurs positions sur les collines. Au QG j'ai

23 rencontré Ramush devant la porte du quartier général, je lui ai dit quelle

24 était la situation sur le terrain. Je lui ai demandé quel était le point le

25 plus faible du front, de façon à pouvoir apporter des renforts, grâce à mes

26 soldats.

27 Il m'a expliqué qu'il avait des problèmes dans le village de

28 Gramaqel, de Suka e Baballoq, où se trouvaient des positions serbes, où les

Page 5709

1 Serbes avaient positionné des unités de chars, ainsi que des systèmes de

2 missiles. Les forces de l'UCK n'étaient pas dans le village de Gramaqel.

3 Elles avaient été battues. Ce secteur se situant dans une plaine, les

4 Serbes avaient pu sans difficulté pénétrer dans le village de Dubrave, et

5 ils risquaient en très peu de temps de parvenir jusqu'au village de

6 Gllogjan.

7 Q. Quand vous étiez à cet endroit, est-ce que vous aviez des hommes à

8 vous, vos subordonnés, des soldats qui vous accompagnaient ?

9 R. Oui, j'étais accompagné de mes soldats. J'y suis allé à bord d'un

10 camion, et j'étais accompagné de plusieurs soldats qui étaient très bien

11 préparés.

12 Q. Je pensais avoir lu dans l'une de vos déclarations écrites que vous

13 avez fait en mai de cette année que vous étiez accompagné de 27 soldats.

14 Est-ce le bon chiffre ?

15 R. Oui, la date est exacte. En fait, j'étais accompagné de 25 soldats et

16 de deux chauffeurs chargés de ramener le camion en toute sécurité. Nous

17 n'avions pas de véhicules de bonne qualité à cette époque-là, de sorte qu'à

18 la fin de la réunion, j'ai reçu pour instructions de me rendre à un autre

19 endroit -- on m'a dit où. C'est ainsi que je suis allé au village de

20 Gramaqel avec mes soldats. On m'a dit d'établir mes positions sur le pont,

21 non loin du cours d'eau qui continue sa route vers Baballoq.

22 Q. Quand vous avez rencontré Ramush dans la rue, était-il armé et portait-

23 il un uniforme ?

24 R. Oui, Ramush portait un uniforme. Il ne portait pas de fusil, mais un

25 revolver. Il était tout près du quartier général. Il attendait d'être

26 informé de la situation sur le terrain, car des attaques étaient en cours,

27 des attaques qui avaient démarré à Decan, Baballoq, Crnobreg, Gramaqel,

28 Shaptej. Les attaques se développaient dans toutes ces directions. Il ne

Page 5710

1 savait pas où aller et il attendait de l'aide.

2 Q. Avait-il des soldats avec lui ?

3 R. A ce moment-là lorsque je l'ai rencontré, il était seul. Plus tard, une

4 personne est venue. Il lui a parlée. Cette personne, je lui ai à ce moment-

5 là demandé où nous devrions aller afin que nous puissions attaquer les

6 forces serbes.

7 Q. Savez-vous où se trouvaient ses soldats lorsque vous l'avez vu dans la

8 rue ?

9 R. C'étaient les soldats du village de Gramaqel, mais malheureusement

10 lorsque je suis allé là-bas, je n'ai rencontré personne. Je n'ai vu que

11 cinq ou six personnes qui étaient sur la route. Il y avait de forts tirs

12 d'artillerie et les Serbes tenaient les collines et pouvaient nous voir.

13 Q. Combien de temps est-ce que vous-même et vos soldats êtes restés à

14 Gllogjan pendant la journée que vous avez décrite lorsque l'attaque avait

15 lieu ?

16 R. Nous y sommes restés deux jours et deux nuits. Le premier jour, nous

17 n'avons pas pris de positions, nous n'avons pas pris non plus de tours de

18 garde. Puis, nous avons fait une petite percée dans le village de Dubrave.

19 Les maisons en question se trouvaient près de la ligne de front, et vers 2

20 heures du matin, j'ai ordonné aux soldats de creuser des tranchées parce

21 que le lendemain allait être un jour de combat très intense. Donc, nous

22 avons travaillé toute la nuit. Nous avons creusé une tranchée d'environ 200

23 mètres près du pont de Dubrave, près du pont de Gramaqel.

24 Q. Vos hommes, quelles armes avaient-ils ? Quel type d'armes aviez-vous ?

25 R. Mes hommes, ceux qui se trouvaient avec moi, comprenaient deux tireurs

26 d'élite. Ils avaient des armes de calibre M-48. J'avais cinq lanceurs

27 portables. J'avais deux mitrailleuses de fabrication française. J'avais des

28 Kalachnikovs, des armes russes, puis des armes de production chinoise.

Page 5711

1 Q. Où vous étiez-vous procurés ou où aviez-vous acheté les mitrailleuses

2 et les lanceurs portables ? Je suppose qu'il s'agit de lance-grenades ?

3 R. Nous avions pris ces armes dans trois régions différentes. Certaines

4 nous les avons reçues d'Albanie, d'autres du Monténégro et d'autres de

5 Serbie.

6 Q. Dans votre déclaration de mai 2007, vous dites que vous avez acheté des

7 mitrailleuses et des mitraillettes et des RPG au marché noir, grâce à un

8 contact de l'armée yougoslave. Pourriez-vous expliquer cela aux membres de

9 la Chambre ?

10 R. Nous avons acheté des armes yougoslaves du type Zolja, il s'agissait

11 d'armes antichars. On ne pouvait s'en servir qu'une fois.

12 Q. Vous les avez donc achetées à l'armée populaire yougoslave ?

13 R. Nous les avons achetées à des officiers de l'armée yougoslave. Il

14 s'agissait d'armes qui avaient été confisquées en Croatie et en Bosnie, et

15 ils nous vendaient ces armes.

16 Q. Et où trouviez-vous l'argent pour acheter ces armes, les acheter à

17 l'ennemi ?

18 R. L'argent nous venait des fermiers. Ils nous donnaient volontairement

19 cet argent sans y être obligés. L'argent était mis en commun. Nous avions

20 également des parents à l'étranger. Tout le monde était prêt à aider les

21 familles et à donner de l'argent pour obtenir des armes afin que les gens

22 puissent se protéger eux-mêmes et leurs familles.

23 Q. Est-ce que vous vous rappelez combien il fallait payer aux contacts au

24 sein de l'armée populaire yougoslave pour obtenir des mitrailleuses ou des

25 mitraillettes, ou des armes antichars ?

26 R. Oui. Les armes pour les tireurs d'élite que nous avions obtenues de

27 l'armée yougoslave étaient en bon état, et c'était de cela que nous avions

28 besoin. On a payé de 1 000 à 1 500 deutschemarks pour chacune de ces deux

Page 5712

1 armes.

2 Q. Est-ce que vous vous rappelez combien vous avez payé au total pour les

3 armes que vous avez acquises ce jour-là auprès de l'armée populaire

4 yougoslave ?

5 R. Non, je ne me rappelle pas. Les cahiers dans lesquels nous avions noté

6 ces chiffres ont été détruits pendant la guerre. Donc, je ne peux pas vous

7 donner de chiffres exacts.

8 Q. Bien, quelles armes aviez-vous personnellement pendant la journée ou

9 pendant tout ce temps-là ?

10 R. J'avais une arme de tireur de précision. J'avais un Zolja, un Zolja

11 yougoslave de l'armée.

12 Q. Est-ce que vous-même et vos hommes portiez des uniformes ?

13 R. Non, nous n'avions pas tous des uniformes. Certains d'entre eux avaient

14 des insignes, et je n'avais qu'un gilet pare-balles bleu et des pantalons

15 de l'armée yougoslave.

16 Q. Pas de casque ? Est-ce que vous aviez un casque ?

17 R. Oui, j'avais un casque. Un casque vert porté dans l'armée yougoslave.

18 J'étais le seul à avoir un casque de ce genre.

19 Q. Pourquoi est-ce que vous portiez un casque de l'armée yougoslave ?

20 R. Il n'y avait pas de lien entre les unes et les autres. Nous avions des

21 armes de l'armée yougoslave, nous en avions de l'armée chinoise. Il

22 s'agissait de toutes les armes qu'on avait pu se procurer.

23 Q. Il y a un moment, on a noté que vous disiez : "Nous n'avions pas tous

24 d'uniformes. Certains avaient des insignes." Par "insignes", est-ce que

25 vous voulez dire des insignes en tissu ou quelque chose de ce genre ?

26 R. Si vous n'aviez pas d'uniforme, on voulait avoir quelque chose qui

27 disait que c'était l'emblème de l'UCK.

28 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire que certains soldats avaient des

Page 5713

1 uniformes et d'autres n'avaient pas d'uniformes, mais que tous avaient des

2 insignes en tissu ?

3 R. Non. Comme je l'ai dit, c'était une armée de volontaires. Nous avons

4 essayé de nous organiser de notre mieux, mais nous n'avions pas une usine,

5 ni même un fournisseur qui pourrait fournir des vêtements, des uniformes ou

6 des armes pour nous. Donc, on prenait ce que l'on trouvait. Et même s'ils

7 n'avaient pas d'uniformes, on essayait de fournir à ces gens une sorte de

8 signe de reconnaissance en tissu, de façon à ce que l'on puisse les

9 identifier.

10 Q. Je vais vous poser des questions concernant la police militaire. Mete

11 Krasniqi, Avni Krasniqi, Iber Krasniqi, et Vesel Dizdari étaient-ils des

12 membres des unités de police militaire ?

13 R. C'étaient des membres de la police locale dans le village de Vranoc.

14 Plus tard, la police militaire du village de Vranoc, après que la 3e

15 Brigade de Dukagjini a été formée, ils sont allés à Barane et ont participé

16 à l'action sur place aussi.

17 Q. Etaient-ils alors considérés comme étant des membres de la police

18 militaire ou est-ce qu'ils opéraient en tant que policiers militaires ?

19 R. Ils étaient considérés comme des policiers militaires, simplement des

20 policiers militaires, mais je ne sais pas ce qu'ils disaient lorsqu'ils

21 allaient à certains endroits, comment ils se présentaient. Mais d'après ce

22 que nous savions, c'étaient des membres de la police militaire et ils

23 s'acquittaient des missions qui leur étaient confiées.

24 Q. Hasan Gashi, était-il sous le commandement de Naser Ramabaja ?

25 R. Après que la police ait été transférée du village à l'école primaire à

26 Barane, nous avons décidé de choisir les meilleurs jeunes gens de

27 l'ensemble des villages pour qu'ils deviennent membres de la police

28 militaire. Donc, nous avons essayé d'avoir deux individus de chaque village

Page 5714

1 pour devenir membres de la police militaire afin qu'il n'y ait pas de

2 malentendus entre la police et l'armée.

3 Q. Quel était le rôle de Hasan Gashi dans tout cela ?

4 R. Hasan Gashi, du fait qu'il a travaillé dans la police yougoslave par le

5 passé, était quelqu'un qui savait quelles étaient ses missions et qui était

6 membre de la police militaire à Barane.

7 Q. Etait-il placé sous le commandement de Nazif Ramabaja ?

8 R. Nous avions essayé d'avoir un commandant de brigade qui pourrait donner

9 des instructions claires et qui serait quelqu'un qui savait vraiment ce qui

10 se passait.

11 Q. Bien. Se trouvait-il sous le commandement de Nazif ?

12 R. Il était bien sous le commandement de Nazif. Mais dans quelle mesure il

13 exécutait les ordres qu'il recevait, ça je ne le sais pas.

14 Q. Je voudrais que l'on parle maintenant de la formation que vous avez

15 donnée à de jeunes soldats. Vous avez été un policier de métier. Est-ce que

16 vous les avez entraînés à l'utilisation d'armes, y compris des lance-

17 roquettes ou des canons antiaériens ?

18 R. Oui.

19 Q. Combien de jeunes soldats aviez-vous en formation ?

20 R. Le chiffre a varié. Ça n'a jamais été le même. Quand j'ai commencé, il

21 y en avait 21. Mais ce chiffre s'est accru jusqu'à 700 et même 800, ou

22 presque 1 000.

23 Q. Vous avez dit qu'il y avait un manque d'uniformes. Qu'en est-il pour

24 les armes ? Y avait-il suffisamment d'armes pour ces 700, 800 ou même 1 000

25 soldats que vous entraîniez ?

26 R. Non, nous n'avions pas suffisamment d'armes.

27 Q. Seriez-vous en mesure de dire maintenant quel pourcentage de soldats

28 avait des armes et quel pourcentage n'en avait pas ? Dix, 20, 30, 50, 80,

Page 5715

1 peu importe ?

2 R. Et bien, là où j'étais et de là je pouvais voir à l'intérieur de

3 l'école primaire à Barane, ça pouvait être 50/50, et nous avons essayé de

4 partager ces armes. Si nous entendions parler d'une attaque quelque part,

5 nous devions utiliser ces mêmes armes pour aller là-bas sur place et porter

6 secours pour aider.

7 Q. Est-ce que vous dites que vous partagiez les armes ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Juste sur la question des uniformes, les Aigles noirs avaient-ils un

10 uniforme différent des autres soldats de l'UCK ?

11 R. J'ai entendu parler des Aigles noirs plus tard. Mais au début nous

12 avons entendu parler de la police militaire, et la police militaire, dès

13 qu'elle pouvait mettre la main sur un uniforme, ils avaient des uniformes,

14 c'étaient des uniformes noirs. Ceux qui, en fait, avaient des vêtements

15 civils, pour la plupart, c'était une tentative pour nous d'essayer d'avoir

16 une unité et de travailler avec cette unité.

17 Q. Je vous ai posé déjà des questions concernant Ramush Haradinaj et le

18 fait que vous lui ayez rendu visite à Gllogjan. Je voudrais maintenant vous

19 demander en ce qui concerne sa visite à votre brigade à Barane, si vous

20 vous rappelez qu'il est venu à la cérémonie de prestation de serment le 20

21 juillet 1998 ? Etiez-vous là alors ?

22 R. Oui, j'étais là. Ce jour-là, c'était le 20 juillet 1998, et c'était la

23 cérémonie de prestation de serment des nouveaux soldats. C'était un

24 événement solennel pour cette unité. Ramush est venu. Nous étions également

25 présents. Tahir Zemaj se trouvait là. Nous étions tous là ensemble.

26 Q. Est-ce que Ramush a rendu visite à votre brigade une ou deux fois sur

27 place, accompagné par Sali Veseli et Idriz Balaj ?

28 R. Ramush est venu mais Balaj n'était pas avec lui. Je ne l'ai pas vu, il

Page 5716

1 n'était pas là. Sali est venu seul et Ramush est venu seul.

2 Q. Quel était l'objet de cette cérémonie de prestation de serment en

3 juillet 1998 ?

4 R. Le but de la visite était parce que nous avions présenté une demande.

5 Il y avait un grand nombre de soldats qui souhaitaient rejoindre l'UCK, et

6 nous voulions qu'ils s'engagent, qu'ils engagent leur allégeance, et nous

7 voulions qu'il soit présent à cette cérémonie de façon à ce qu'il puisse

8 voir de près qui étaient ces jeunes gens, ce qu'ils faisaient et qu'ils

9 tenaient beaucoup à rejoindre l'UCK.

10 Q. De qui voulez-vous parler lorsque vous dites "il" ou

11 "lui" ? Est-ce que vous référez à Ramush Haradinaj là ?

12 R. Oui, bien sûr, Ramush. Nous l'avons invité. Nous voulions qu'il fasse

13 partie de cette cérémonie solennelle dans cette cérémonie de prestation de

14 serment des nouveaux membres de la brigade.

15 Q. Pourquoi est-ce que c'était si important pour vous que Ramush participe

16 à cela ?

17 R. C'était important parce que les gens l'aimaient. Les gens voulaient le

18 voir, voulaient le connaître, voulaient le connaître de près, le voir de

19 près, parce que Ramush était une sorte d'idole et il l'est encore.

20 Q. Est-ce qu'ils le voyaient comme un commandant fort et puissant ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

22 M. EMMERSON : [interprétation] Je me rends compte que M. Re ne reçoit peut-

23 être pas les réponses qu'il voudrait pour pouvoir poser des questions et

24 faire en sorte que le témoin réponde comme il le veut en répondant aux

25 questions qui sont formulées comme des questions directrices. A notre avis,

26 ce n'est pas une bonne voie. Laissons-le poser des questions d'une façon

27 qui ne soit pas directrice et il aura les réponses qui lui sont faites.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, pourriez-vous reformuler la

Page 5717

1 question ou poser une autre question au témoin ?

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. Vous avez dit il y a un moment que Ramush était une idole pour la

4 population. Pourquoi est-ce qu'ils le considéraient comme une idole ?

5 R. Je ne sais pas. C'est ce que les gens pensaient. Ils avaient confiance

6 en Ramush et ils pensaient que c'était une personne qui avait sacrifié sa

7 propre famille pour protéger toute la population, et c'est pour ça qu'il

8 était considéré comme une idole. Il n'était pas prêt à sacrifier ni lui-

9 même ni toute sa famille.

10 Q. Quelles étaient les réponses que vous obteniez ou les réactions que

11 vous obteniez de ces personnes en ce qui concernait la manière de commander

12 de Ramush ?

13 R. Ramush n'avait pas le temps de commander partout, mais les gens avaient

14 confiance en lui. Ils pensaient que si Ramush était là, il n'y aurait pas

15 de problème pour eux, pour la population. C'est quelque chose qui avait

16 lieu dans le peuple. C'est comme ça que les gens l'aimaient.

17 Q. Qu'en est-il de la FARK et de l'UCK, que voyez-vous là, de votre

18 perspective de ce qui se passait entre la FARK et l'UCK à l'époque où

19 Ramush et Tahir Zemaj se trouvaient à cette prestation de serment ?

20 R. C'est une question très importante, parce qu'à l'époque nous étions en

21 train de faire des visites à tous les officiers, les anciens officiers,

22 pour leur demander de nous rejoindre de façon à ce qu'ils puissent

23 entraîner et former les soldats et les préparer. Au Kosovo à l'époque, il

24 n'y avait aucune présence d'autres forces autre que l'UCK. Plus tard nous

25 avons entendu dire qu'il y avait une force appelée la FARK, mais sur le

26 terrain nous ne connaissions qu'une seule force, et c'était l'UCK.

27 Q. Quel était le rôle de Tahir Zemaj ? Qui pensez-vous qu'il était ?

28 R. Tahir Zemaj était un professionnel, soldat de métier. Il était diplômé

Page 5718

1 de l'école militaire. Il avait été officier supérieur de l'armée yougoslave

2 et avait quitté l'armée yougoslave et était venu pour aider son propre

3 peuple, tout comme tout autre officier. Il était venu apporter sa propre

4 contribution et personne l'en a empêché, ne l'a arrêté. Je me rappelle

5 quelque chose que Ramush lui a dit : Tu est le bienvenu, ceci est ton pays.

6 Combats pour ton propre pays et pour toi-même.

7 Q. Est-ce que vous étiez au courant des divergences existant entre Tahir

8 Zemaj et Ramush Haradinaj ?

9 R. Différences, divergences, -- bien, il y en avait entre nous parce que

10 Tahir avait un grade plus élevé. Ramush était beaucoup plus jeune que lui,

11 et moi-même j'étais aussi plus jeune. Donc c'était un officier supérieur;

12 nous ne l'étions pas.

13 Q. Je vous parle d'un antagonisme et non pas d'une différence d'âge ou une

14 différence physique.

15 R. Apparence physique, non, nous ne faisions pas attention à ce genre de

16 choses. Je me rappelle que Ramush est d'abord venu en premier, puis que

17 Tahir est venu plus tard. Nous étions tous ensemble. Vous avez un

18 enregistrement vidéo de cela. Nous étions tous ensemble. Nous n'étions pas

19 dans des camps différents. Nous étions tous membres de l'Armée de

20 libération du Kosovo, sans aucune distinction, parce que si nous avions eu

21 des divergences ou des désaccords, nous n'aurions pas été ensemble.

22 Q. Ce que je vous demande, c'est si vous avez eu connaissance - et si ce

23 n'est pas le cas, dites simplement non - d'un antagonisme personnel ou de

24 difficultés ou de rivalité entre Ramush et Tahir ?

25 R. Non, je n'ai pas connaissance de quoi que ce soit de ce genre. Il

26 pourrait y avoir des rivalités partout. Les gens peuvent avoir des opinions

27 différentes, mais je ne pense pas qu'il y avait de tels problèmes dans ce

28 cas. Bien sûr, tous, tout un chacun a sa propre opinion. Et en démocratie

Page 5719

1 on peut avoir une opinion différente des uns des autres, mais il n'y a pas

2 d'affrontements. Donc si je n'étais pas d'accord avec quelque chose que

3 Tahir avait dit ou que Ramush avait dit, j'aurais pu le leur dire, et ils

4 pouvaient avoir fait la même chose l'un avec l'autre.

5 Q. Je ne pense pas que vous êtes en train de suggérer ici qu'il y avait

6 une démocratie au Kosovo en 1998. Ce que je vous demande c'est sur le point

7 de savoir s'il y aurait des luttes ou des affrontements entre les deux ?

8 R. Il n'y avait pas d'affrontements ou de combats. Il n'y avait pas de

9 différend entre eux. Tout au moins, je n'en ai pas connaissance. Je ne suis

10 conscient de rien de cela.

11 Q. Est-ce que vous saviez s'il y avait des frictions militaires ou des

12 combats entre les membres de la FARK et les membres de l'UCK ?

13 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

16 M. EMMERSON : [interprétation] C'est une question qui comporte plusieurs

17 questions et qui crée pas mal de confusion, la question d'affrontements

18 militaires ou de combats. Je ne sais pas si M. Re a à l'esprit n'importe

19 quel type d'engagement militaire; mais si c'est le cas, aucun de nous, dans

20 ce cas, n'est au courant d'une différence qui pourrait suggérer une chose

21 de ce genre. Donc peut-être –-

22 M. RE : [interprétation] Je vais reformuler la question.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez le faire, Monsieur Re.

24 M. RE : [interprétation]

25 Q. Est-ce que vous aviez connaissance de combats physiques impliquant des

26 armes entre les membres de l'UCK et la FARK ?

27 R. Pour autant que je sache, à partir du moment où je me suis trouvé là,

28 je n'ai jamais entendu quoi que ce soit de ce genre. J'ai appris des choses

Page 5720

1 après la guerre, mais je ne crois pas qu'elles aient grand poids. A ce

2 moment-là, je savais que nous étions tous ensemble. S'il y avait eu des

3 combats entre eux, à ce moment-là, Ramush avec Tahir à Prapaqan. Je n'ai

4 rien vu de la sorte. Ramush est venu en premier, comme je l'ai dit; Tahir

5 un peu plus tard et il n'y a pas eu de différend. Je n'ai jamais entendu

6 parler ni vu quoi que ce soit de ce genre qui ait pu ressemblé à une lutte.

7 Q. Il y a un petit moment vous venez de nous dire que pour les gens Ramush

8 était une idole et qu'il l'est toujours d'ailleurs. Quant à vous, avez-vous

9 la même opinion de Ramush ?

10 R. Oui, bien sûr. 90 % des gens le voient comme ça, alors moi aussi.

11 Q. En tant que commandant de soldats, avez-vous instruit vos subordonnés

12 aux règles de la guerre, par exemple, les règles gouvernant le traitement

13 des prisonniers de guerre ?

14 R. Oui, oui. Je les ai instruits. Je leur ai parlé tous les jours. Il y

15 avait une heure d'instructions tous les matins. Je leur parlais ou je leur

16 disais que la guerre n'allait pas durer éternellement, qu'un jour il y

17 aurait la paix et que tout un chacun serait à ce moment-là tenu responsable

18 des actions et de ses agissements. Et que c'était pour cela qu'il fallait

19 se comporter correctement, faire très attention, ne pas maltraiter les

20 civils qui étaient très nombreux. C'est parce qu'il y avait beaucoup de

21 civils sans abri, parce que les villages avaient été incendiés. Donc il y

22 avait parfois des concentrations importantes de personnes dans différents

23 endroits. Je leur disais bien que si quelqu'un se rendait, en levant les

24 mains, ou s'ils avaient un prisonnier de guerre il ne fallait surtout pas

25 maltraiter cette personne. Il fallait traiter cette personne correctement,

26 assurer sa sécurité, lui donner de l'eau, de la nourriture, ensuite il

27 fallait que ce soit des professionnels qui s'occupent de ces personnes.

28 Q. Mais c'était de la théorie ou c'était la réalité ?

Page 5721

1 R. Mais c'est la théorie, je leur enseignais la théorie tous les jours. De

2 toute façon, nous n'étions pas suffisamment forts pour attraper qui que ce

3 soit.

4 Q. Qu'en est-il des collaborateurs ou des personnes soupçonnées de

5 collaborer; comment étaient-ils traités ?

6 R. Ils étaient traités comme les autres. S'ils étaient soupçonnés de

7 collaborer, il fallait leur parler. Et au cours de ces entretiens –- enfin,

8 il y avait très peu de personnes qui étaient soupçonnées d'être

9 collaborateurs. Donc on essayait d'enquêter. C'était très difficile pour

10 nous de procéder à ces enquêtes. On essayait juste d'isoler cette personne,

11 ensuite les yeux dans les yeux, lui dire ce qu'il faisait, lui demander ce

12 qu'il faisait, puis après on les libérait.

13 Q. Très bien. J'aimerais vous poser des questions à propos d'une personne

14 qui s'appelait Skender Kuci. Est-ce que vous le connaissiez en 1998 ?

15 R. Non, je ne le connaissais pas personnellement.

16 Q. Connaissiez-vous son frère, Adem ? Avez-vous travaillé avec lui à

17 Pristina avant la guerre en tant qu'officier de police ?

18 R. Oui, oui, je connais son frère. C'est un officier de police. Il

19 travaillait à Pristina et j'étais plutôt sur Prizren, mais on y est encore.

20 Q. Un jour alors que vous étiez à Barane, est-ce qu'Adem ne vous a-t-il

21 pas été amené ?

22 R. Oui, oui.

23 Q. Il vous a été amené par des soldats de l'UCK ?

24 R. Oui, ce sont mes soldats qui l'ont amené. Ce jour-là, on avait vu Adem

25 avec des forces de police serbes dans le village de Kliqine où se trouvait

26 le poste de police. Vers 10 heures du matin. Donc il a quitté le poste de

27 police, il a monté dans sa voiture et il était parti vers Barane en

28 voiture, enfin vers Qallapek. A ce moment-là, les Serbes ne permettaient

Page 5722

1 même pas aux malades d'aller à l'hôpital pour se faire soigner alors qu'ils

2 les laissaient passer partout, librement. Donc on m'a averti que cette

3 personne avait quitté notre zone vers 10 heures, après avoir quitté la zone

4 serbe. Je pensais que c'était un gros problème, parce que je trouvais ça

5 étrange quand même qu'un Serbe le laisse se promener librement dans cette

6 zone. Donc il est venu me voir, enfin, et nous avons parlé de ce problème.

7 Q. Enfin, il est venu vous voir ou est-ce que les soldats vous l'ont

8 amené ?

9 R. Non, les soldats me l'ont amené, mais il n'a pas été maltraité, en

10 aucun cas.

11 Q. Il était sous leur garde ou alors il était juste en train de les

12 accompagner ?

13 R. Il les accompagnait. Il l'avait repéré dans le coin et il l'avait vu en

14 train de parler avec la police serbe, et ils sont venus me voir en me

15 disant : C'est un suspect, il est bizarre. J'ai répondu en disant : on ne

16 peut pas faire des jugements comme ça à l'emporte-pièce. Il faut d'abord

17 lui parler.

18 Q. Que vous a-t-il dit à propos de son frère, ce qui était arrivé à son

19 frère Skender ?

20 R. Quand il est arrivé, il était un peu inquiet et il ne m'a pas bien

21 reconnu, mais je l'ai reconnu. J'ai essayé de le rassurer. Je lui ai dit :

22 Rassure-toi, repose-toi. Ensuite je lui ai dit : C'est quoi ton problème ?

23 Pourquoi est-ce que tu parlais à la police serbe ? La police serbe aurait

24 pu te tuer parce que tu transitais par leur zone. Et il m'a répondu en

25 disant : C'est justement mon problème. Mon frère a été pris. Il doit être

26 dans ta zone. J'ai répondu, je n'en sais rien. Je n'ai pas entendu parler

27 de ça. Il m'a répondu à nouveau en disant, je sais que mon frère a été pris

28 et qu'il est dans cette zone. Je lui ai répondu que je ne savais absolument

Page 5723

1 rien à propos de tout cela, mais je lui ai dit : Ce n'est pas une raison

2 pour aller voir les Serbes et leur parler. Tu aurais pu te faire tuer. Les

3 gens sont armés en ce moment.

4 Q. Dans votre déclaration du 15 mai, que vous avez signé à la fois en

5 albanais et en anglais, vous dites : "Adem m'a dit que son frère avait été

6 capturé par l'UCK et qu'il le recherchait." C'est bien ce qu'il vous a dit

7 ?

8 R. Oui, c'est ça.

9 Q. Vous lui avez conseillé d'aller se renseigner auprès de qui ?

10 R. Il m'a dit que sa sœur habitait à Qallapek et que deux fils de cette

11 famille étaient des soldats dans ma zone. Je lui ai dit : Etant donné que

12 ta sœur habite dans le coin, va chez elle, reste chez elle. Voilà quelques

13 hommes, va avec eux et recherche ton frère avec ces hommes. Je ne sais pas

14 absolument rien à propos de tout cela, et si les soldats peuvent t'aider,

15 ils t'aideront.

16 Q. Alors où a-t-il finalement appris que son frère avait été emmené ?

17 R. Je n'en sais rien. Je l'ai laissé partir et il n'est pas revenu. Je ne

18 sais pas du tout ce qui lui est arrivé. Je n'ai pas d'information à ce

19 propos.

20 Q. Mais dans cette déclaration que j'ai citée, vous dites qu'environ deux

21 semaines après vous avez appris que Skender avait trouvé la mort. Alors,

22 qu'avez-vous appris exactement ou comment avez-vous appris que Skender

23 était mort ?

24 R. Je n'ai pas dit que j'avais appris qu'il était mort. Quelqu'un m'a dit

25 que Skender était mort. Je n'ai pas posé de questions. Je n'ai pas fait

26 d'enquêtes. J'ai demandé à quelqu'un à Qallapek ce qui était arrivé, s'il

27 avait finalement trouvé son frère, il m'a répondu : Oui, il a trouvé son

28 frère, mais il était mort. En fait, c'étaient deux semaines après que je le

Page 5724

1 rencontre.

2 Q. Vous avez appris qu'il était mort après avoir été détenu par l'UCK --

3 M. TROOP : [interprétation] Cette question est beaucoup trop directrice, il

4 faudrait la reformuler de façon ouverte.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes.

6 M. RE : [interprétation] Oui, je vais poser la question sous cette forme.

7 Cela a trait à sa crédibilité.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Certes. Mais nous retenons

9 cette objection. Néanmoins, Monsieur Re, je comprends que vous ayez des

10 raisons de poser la question de la sorte, ce qui ne signifie pas pour

11 autant que ce soit une façon correcte de poser des questions. Donc, soyez

12 extrêmement court. Pour ce qui est de la Défense, je vais demander à la

13 Défense d'être très courte dans ses objections --

14 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, parce que c'est vrai que la question de

15 M. Re était un peu directrice, mais M. Re du coup nous a donné ses

16 explications.

17 Je comprends cela, certes. Il nous a juste donné son raisonnement, il

18 explique pourquoi il a posé cette question directrice. Mais d'après ce que

19 je comprends, il essaie quand même de récuser son propre témoin.

20 M. RE : [interprétation] Absolument pas.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Très bien. Si c'est un problème de

22 crédibilité, peut-être peut-il nous expliquer exactement où il en veut en

23 venir.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'a qu'à reformuler sa question et la

25 poser d'une autre façon, et nous verrons bien.

26 Monsieur Re, allez-y.

27 M. RE : [interprétation]

28 Q. Avez-vous appris qu'il avait été détenu par l'UCK ?

Page 5725

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15 versions anglaise et française

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 5726

1 M. TROOP : [interprétation] S'il vous plaît --

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. L'avez-vous appris de quelqu'un d'autre ?

4 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

5 M. RE : [interprétation] Ceci n'est pas une question directrice. Il peut

6 répondre comme il veut. Il peut dire, oui, il peut dire non, il peut dire

7 je ne sais pas.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, qu'est-ce qu'une question

9 directrice ? Une question directrice, c'est une question où il y a une

10 hypothèse incluse portant sur un fait qui n'a pas encore été établi; ou

11 alors une question directrice, c'est une question qui ne peut avoir qu'une

12 seule réponse, si je puis dire. Alors, reformulez votre question. Je vais

13 vous aider.

14 Avez-vous appris, Monsieur le Témoin, quoi que ce soit à propos de la façon

15 dont Skender Kuci a trouvé la mort ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je n'ai pas appris comment il avait

17 trouvé la mort. J'ai juste appris qu'il était mort. Je ne sais pas comment

18 il a trouvé la mort.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous entendu ou su quoi que ce soit

20 à propos de l'endroit où il serait mort ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, poursuivez.

23 M. RE : [interprétation]

24 Q. Au paragraphe 88 de votre déclaration, qui se trouve à l'écran, vous

25 faites référence : "Un petit moment avant septembre 1998 -- de l'enlèvement

26 du couple de Nurija et Istref Krasniqi. Tahir Zemaj m'a appelé à Prapaqan

27 et m'a demandé ce qui était arrivé à ce couple."

28 J'aimerais avoir un peu d'information à ce propos. Aviez-vous entendu dire

Page 5727

1 que ces personnes étaient soupçonnées de collaboration ou peut-être le

2 saviez-vous ?

3 R. Oui, ce qui est dans le paragraphe est tout à fait vrai. J'ai été

4 appelé par Tahir, puisque ces personnes se trouvaient dans ma zone, la zone

5 que je commandais. Tahir a décidé de me poser des questions à ce propos,

6 parce qu'il pensait que c'était moi le plus informé. Je suis allé le voir.

7 Je lui ai dit que je ne savais absolument rien à propos de tout cela. Je

8 savais qu'un des fils avait été blessé. Nous l'avons aidé. Nous l'avons

9 emmené à l'hôpital pour qu'il soit soigné -- sur la route il y avait des

10 forces serbes. Plus tard, j'ai appris que leurs corps avaient été ramenés

11 de Serbie. Il n'y a pas très longtemps que leurs corps ont été ramenés de

12 Serbie.

13 Q. Paragraphe 89, vous dites : "J'ai entendu plusieurs rumeurs à propos de

14 leurs meurtres. Des rumeurs comme quoi ils collaboraient avec les Serbes."

15 Pouvez-vous nous dire exactement ce que vous avez entendu et de qui vous

16 l'avez entendu ? Expliquez un petit peu la teneur de ces rumeurs ?

17 R. La rumeur c'est la rumeur. Et la rumeur court partout. Il y a des

18 rumeurs partout. Tant qu'on n'a pas vu quelque chose de ses propres yeux,

19 on ne peut pas le prouver. Il y avait des variantes. Certains ont dit

20 qu'ils avaient été tués, d'autres ont dit d'autres choses. Chacun avait sa

21 propre opinion. Il y avait beaucoup d'hypothèses, de suppositions, mais ça

22 ne m'intéressait pas. Je ne voulais pas savoir qui mentait, qui racontait

23 n'importe quoi. Il s'agissait de rumeurs uniquement.

24 Q. Je vais maintenant vous montrer des photos et des cartes. Vous avez

25 annoté un certain nombre de cartes qui étaient jointes à votre déclaration.

26 La première est la pièce 1027 de la liste 65 ter. Il s'agit d'un croquis

27 manuscrit sur lequel vous avez noté l'emplacement de l'état-major de Ramush

28 à Gllogjan. Cela va être affiché bientôt.

Page 5728

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourriez-vous nous

2 donner la cote ?

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P352.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

5 M. RE : [interprétation]

6 Q. Vous voyez ce document ? Il est sous vos yeux maintenant ?

7 R. Oui, je le vois très bien.

8 Q. J'aimerais que vous disiez à propos de ce croquis, dans la déclaration,

9 ce croquis est légendé comme étant un croquis rapide des trois brigades,

10 avec leur emplacement par rapport au QG de l'état-major à Gllogjan et vous

11 l'avez utilisé pour montrer où se trouvait le QG de Ramush, d'où il

12 commandait la zone opérationnelle de Dukagjini, avec les trois brigades

13 Barane, Prapaqan et d'un autre endroit. Vous l'avez signé d'ailleurs -- ce

14 sont les paragraphes 9 et 10 de la déclaration du 5 mai [comme interprété]

15 2006.

16 M. EMMERSON : [interprétation] S'il vous plaît, pouvez-vous nous donner le

17 temps de retrouver ces paragraphes dans la déclaration.

18 M. RE : [interprétation] C'est juste en dessous de la rubrique appelée

19 "notes de l'enquêteur" --

20 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, je sais. C'est un commentaire fait par

21 l'enquêteur. J'ai bien compris. Ce n'est pas par le témoin. J'ai très bien

22 compris tout cela. Ce sont les mots de l'enquêteur.

23 M. RE : [interprétation] Je n'ai pas dit ça. J'ai dit : "Dans la

24 déclaration, ça se trouve au niveau de la rubrique --

25 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, ce n'est pas écrit par le témoin.

26 M. RE : [interprétation] J'étais en train de terminer ma question. Cela

27 dit, je suis très reconnaissant à Me Emmerson de parler à ma place.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soyons brefs. Quand vous êtes en train

Page 5729

1 de citer une déclaration, faites en sorte que l'on sache bien qui a dit

2 quoi dans la déclaration. Ici, ce n'est pas du tout clair. Donc Monsieur

3 Re, si vous êtes en train de dire au témoin quelque chose, il ne faut pas

4 être ambigu. Dites exactement ce que vous citez.

5 M. RE : [interprétation] Oui, mais je disais que j'étais en train de lire

6 ce qui était entre les paragraphes 9 et 10, et que c'était juste sous le

7 titre "notes de l'enquêteur."

8 Je l'ai juste lu.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, vous n'avez qu'à dire que

10 vous êtes en train de lire ce qui est écrit entre les paragraphes 9 et 10

11 de la déclaration du 5 mai, et pour être encore plus clair, vous nous dites

12 que cela se trouve entre le paragraphe 9 et 10 et qu'il s'agit des notes de

13 l'enquêteur au cas où le témoin a oublié quelque chose.

14 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre.

15 M. RE : [interprétation]

16 Q. C'est la rubrique qui se trouve intitulée "notes de l'enquêteur." Il

17 est écrit que vous avez fait un croquis rapide des trois brigades, avec

18 leur emplacement par rapport au QG de Gllogjan, et sur ce croquis, vous

19 avez montré que Ramush avait son QG à Gllogjan, et que de là il commandait

20 la zone opérationnelle de Dukagjini, tout particulièrement les trois

21 brigades de Barane, Prapaqan et Bardhaniq et c'est signé par le témoin.

22 Voici ma question : est-ce qu'il s'agit bien d'une description de ce

23 croquis ?

24 R. Oui. Je suis un bon dessinateur. J'ai essayé de bien montrer où se

25 trouvait l'emplacement des trois brigades dans la mesure du possible, parce

26 que c'est quand même pas très facile de dessiner une carte à main levée,

27 mais j'ai fait de mon mieux et on voit plus ou moins bien les emplacements.

28 Vous voyez aussi les villages. La carte est assez précise.

Page 5730

1 Q. Peut-on dire que c'est un croquis qui montre où Ramush avait --

2 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis désolé, mais M. Re est en train de

3 diriger le témoin à nouveau. Il veut qu'il soit d'accord avec la note de

4 l'enquêteur, qui contient elle-même une suggestion selon laquelle M.

5 Haradinaj commandait depuis Gllogjan les trois brigades. C'est le but de sa

6 question si directrice. Il est en train d'essayer de le faire commenter les

7 notes de l'enquêteur.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, il ne faut pas que vous

9 dirigiez le témoin de la sorte. J'aimerais quand même aussi que vous nous

10 clarifiiez quelque chose. Je veux comprendre vos propos exacts. Je ne

11 trouve pas -- vous avez dit que cette question n'est pas directrice parce

12 que le témoin pourrait y répondre par oui, par non, ou par je ne sais pas.

13 Mais si je pose une question à quelqu'un en lui demandant si pour déjeuner

14 il a pris des raviolis avec une soupe de pois cassés, le témoin évidemment

15 peut dire oui, non, ou je ne sais pas. Mais la question est quand même

16 extrêmement directrice, puisque je suggère au témoin qu'il a bel et bien eu

17 des raviolis et de la soupe de pois cassés pour déjeuner.

18 Donc, je ne suis pas du tout convaincu par votre explication quant à votre

19 première question, en nous disant qu'elle n'était pas directrice, parce que

20 l'on pourrait y répondre par oui, non, ou je ne sais pas. Souvenez-vous de

21 cela. Bien sûr, les Juges de la Chambre ont vu cette carte et avaient

22 quelques difficultés avec la géographie et la topographie. Essayez

23 d'obtenir des informations qui vont nous aider, et de façon correcte.

24 M. RE : [interprétation] Mais sachez que je sais plus ou moins ce qui est

25 une question directrice. Peut-être que jusqu'à présent vous n'avez pas été

26 convaincu de mes connaissances à ce propos, mais --

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que dans un autre forum on

28 pourra discuter de ces points techniques et de ces points de procédure,

Page 5731

1 mais poursuivez pour l'instant.

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. Monsieur Krasniqi, vous avez une carte que vous avez faite, et vous

4 avez écrit sous Gllogjan, Ramush, QG de l'état-major; en dessous Jablanica

5 vous avez mis Lahi Brahimaj, QG d'état-major; ensuite, à Prapaqan, vous

6 avez mis Brigade Tahir, et il y a la brigade Barane, brigade de Nazif.

7 Pourquoi avez-vous décrit Gllogjan comme étant le QG de l'état-major et

8 Jablanica comme étant un autre QG d'état-major, alors que les autres ne

9 sont que des brigades ?

10 R. Mais c'est l'enquêteur qui m'a demandé de procéder de la sorte. Il m'a

11 demandé où étaient les emplacements. Il m'a demandé si je pouvais faire un

12 dessin. On avait une carte; mais il m'a demandé de faire un croquis à main

13 levée, donc j'ai essayé de le faire et voilà ce que j'ai pu dessiner. J'ai

14 montré les emplacements qu'on occupait à l'époque. On travaillait

15 indépendamment les uns des autres parce qu'il n'y avait pas de moyens de

16 communication pour nous relier. Nous n'avions pas de radio pour communiquer

17 entre nous. Il n'y avait pas de téléphones dans les villages.

18 Q. Pourquoi décriviez-vous Gllogjan comme le QG de l'état-major de Ramush

19 sur cette carte ?

20 R. Il m'a demandé de faire cette carte, et je me suis exécuté. J'ai écrit

21 ce que je savais. Le QG était en effet à Gllogjan. Ensuite, il m'a demandé

22 où se trouvait la 1ère Brigade, de Tahir, donc je l'ai ajoutée sur la carte.

23 A Bardhaniq il y avait Musa, donc j'ai aussi indiqué cela. Puis j'ai montré

24 les chemins. Je n'ai pas montré tous les villages, mais j'ai aussi montré

25 la 3e Brigade à Barane, puis Jabllanice où il y avait Lahi.

26 Q. Au paragraphe 31 de votre déclaration 92 ter, vous parlez de

27 l'instruction des soldats de l'UCK --

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur --

Page 5732

1 M. RE : [interprétation] Excusez-moi.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, j'ai quelques questions à

3 poser au témoin. Non, j'ai quelques questions à vous poser à vous. Tout

4 d'abord, je pense que vous voulez que cette pièce annexe A soit versée au

5 dossier ?

6 M. RE : [interprétation] S'il vous plaît.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais la légende n'a pas été

8 traduite, donc ce n'est pas très clair. Puis pour ce qui est de la

9 géographie, ce n'est pas simple non plus. On trouve Jabllanice et Gllogjan

10 à la même distance d'une route, une route qui est très certainement la

11 route qui relie Decane à Djakovica, alors que ce qu'on voit sur une carte

12 ce n'est pas du tout comme cela que tout est disposé. C'est vrai que l'on

13 peut être un peu créatif, mais arrivez à plus ou moins comprendre les

14 intentions du témoin en dessinant cette carte. Mais je pense qu'il serait

15 bon de poser quelques questions supplémentaires pour en savoir plus.

16 Monsieur le Témoin, sur cette carte, je vois deux endroits bien précis qui

17 sont annotés QG de l'état-major. Il y a Gllogjan, ça c'est QG état-major

18 Ramush, puis il y a Jabllanice et c'est QG de l'état-major Lahi Brahimaj.

19 Pouvez-vous nous dire, QG de l'état-major de quoi exactement ? Pouvez-vous

20 nous donner une explication ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces endroits sont les lieux où se trouvaient

22 les commandements locaux. La zone striée ce sont les rivières, donc c'est

23 peut-être cela qui a créé la confusion. Vous voyez, par exemple, ici, la

24 rivière Decane, cette zone rayée, puis il y a aussi la rivière Peje. Decane

25 c'est une municipalité. Jabllanice se trouve dans la municipalité de

26 Gjakove. Il est possible que ce dessin ne soit pas tout à fait clair, parce

27 qu'en particulier nous n'avons pas pu utiliser des stylos de couleur. C'est

28 la raison pour laquelle j'ai dessiné cette zone hachurée pour représenter

Page 5733

1 la rivière. L'endroit où il y a des pointillés, c'est la route qui mène à

2 Prilep, à Irzniq, à Gllogjan. Donc voilà le symbole que j'ai utilisé pour

3 indiquer les routes, ces traits interrompus avec des petits points. Les

4 tracés plus foncés sont les rivières.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous dites qu'il s'agit des QG

6 locaux Gllogjan, même chose pour Jablanica, si j'ai bien compris. Nous

7 voyons trois numéros qui correspondent aux brigades, je pense. Je vois le

8 numéro 1 Bardhaniq; le numéro 1 Prapaqan, Tahir; et numéro 1 Barane, Nazif.

9 Est-ce que ces numéros correspondent ou sont liés d'une façon ou d'une

10 autre à ce que vous venez d'appeler des QG locaux; je veux parler de

11 Jablanica, de Gllogjan ou d'un autre QG ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu l'interprète, je vous prie

13 de m'excuser.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vous repose ma question. Les

15 brigades que l'on voit indiquées sur ce dessin, la brigade de Tahir, la

16 brigade de Nazif et la brigade de Musa, ont-elles le moindre rapport ou

17 sont-elles liées d'une façon ou d'une autre à ce que vous venez d'appeler

18 des quartiers généraux locaux ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela était fait pour élever le moral des

20 troupes. Nous avons créé trois brigades, comme dans une armée régulière.

21 Nous n'avions pas le matériel nécessaire, nous n'avions pas les moyens

22 matériels, les uniformes. Mais ceci a été fait pour des raisons de

23 propagande, pour montrer aux gens que nous avions trois groupes armés forts

24 qui se trouvaient dans trois lieux différents. Je pense que c'était bien

25 cela le but, car il n'y avait pas assez d'hommes dans ces brigades. Mais

26 c'était fait simplement pour élever le moral des troupes et leur montrer

27 qu'il y avait trois brigades qui existaient séparément.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais tout n'est pas encore clair

Page 5734

1 pour moi. Par exemple, prenons un exemple, Prapaqan, la brigade de Tahir,

2 comme on le voit écrit sur la carte. Est-ce que celle-ci était liée d'une

3 façon ou d'une autre au QG de Gllogjan ou de Jabllanice ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il n'y avait pas de lien. A Gllogjan

5 c'était Ramush et à Prapaqan c'était Tahir. Chacun opérait indépendamment,

6 ce qui signifiait que nous n'avions ni la possibilité ni les moyens de

7 communiquer les uns avec les autres, mais si un problème se posait, si nous

8 voulions transmettre un renseignement à quelqu'un, nous utilisions une

9 estafette pour demander de l'aide, par exemple. Quand j'étais à Barane, si

10 j'avais des problèmes, j'envoyais un soldat à bord d'un véhicule pour

11 demander de l'aide. J'envoyais ce soldat chez Ramush ou chez Lahi ou chez

12 Tahir selon celui des trois qui était le plus près de l'endroit où je me

13 trouvais.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, vous venez de décrire

15 apparemment ce que vous appelez des brigades d'une part et ce que vous

16 appelez les quartiers généraux locaux d'autre part. Est-ce que vous

17 pourriez expliquer la différence exacte que vous voyez entre ces deux

18 termes aux Juges de la Chambre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] De nouveau pas d'interprétation.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais réessayer.

21 Dans la façon dont vous avez décrit les choses, vous avez distingué

22 entre ce que vous avez appelé les brigades d'une part et ce que vous avez

23 appelé les QG locaux d'autre part. Pourriez-vous dire aux Juges de la

24 Chambre en quoi réside exactement cette différence ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] La différence c'est que dans les brigades il y

26 avait des officiers. L'objectif était d'avoir le plus grand nombre possible

27 d'officiers. Il y avait aussi des officiers auprès de Ramush. C'est ce que

28 nous avions décidé à l'époque et c'est ce que nous avons fait dans la

Page 5735

1 pratique. Ceci a été fait pour attirer le plus grand nombre possible

2 d'officiers. La même chose a été faite avec d'autres brigades dans d'autres

3 régions du Kosovo.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cela n'explique toujours pas

5 pourquoi de temps en temps vous utilisez l'expression "QG local" et à

6 d'autres moments vous utilisez le terme de "brigade."

7 LE TÉMOIN : [interprétation] La signification du mot "brigade" n'est pas la

8 même que celle de l'expression "QG". En fait, nous n'avions pas une armée

9 régulière. Nous n'avions pas des unités en bonne et due forme, et ce, pour

10 toutes sortes de raisons, logistiques en particulier, et cetera. Je sais

11 bien ce qu'est une armée régulière. Une armée régulière doit avoir un

12 secteur chargé de la logistique, des officiers, des équipements militaires

13 et tout ce dont elle a besoin. Nous avons essayé de créer une brigade. En

14 fait, nous avons brigade quelque chose qui n'était pas réellement une

15 brigade. Parce qu'une vraie brigade doit avoir trois bataillons. Elle doit

16 avoir des effectifs équivalant à un millier d'hommes. Il est tout à fait

17 clair qu'une brigade doit compter au moins 3 000 hommes dans ses rangs.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous décrivez en ce moment une brigade

20 comme étant une unité d'une certaine dimension. Mais vous avez dit il y a

21 quelques instants qu'une brigade n'était pas la même chose qu'un QG ou

22 qu'un état-major. Alors, qu'est-ce que vous entendez par quartier général

23 ou état-major ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] En temps de guerre un état-major c'est une

25 structure qui dirige, la structure qui dirige les brigades. Donc nous avons

26 créé un état-major dans chaque village pour élever le moral des villageois,

27 de la population. Il y avait un quartier général dans chaque village, un QG

28 de l'armée. Les jeunes villageois de chaque village s'engageaient dans ce

Page 5736

1 QG pour participer à la défense de leur village. C'est cela que j'appelle

2 un quartier général local. Il y avait plusieurs personnes au sein du

3 quartier général qui dirigeaient les soldats.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais s'agissant de Prapaqan, de

5 Barane et de Bardhaniq, vous parlez de "brigade," vous ne parlez pas de

6 "QG." Alors, pourquoi est-ce que vous utilisez le terme de QG pour Gllogjan

7 et pourquoi est-ce que vous ne parlez pour Gllogjan de "brigade" ou de quoi

8 que ce soit d'autre, "d'unité" par exemple ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous l'ai dit, un quartier général ou

10 un état-major c'est une structure qui dirige. Elle a un but, c'est son

11 rôle. A Gllogjan il y avait des soldats, sans doute en nombre plus

12 important que les soldats que l'on trouvait dans les brigades de Prapaqan

13 et de Barane. Voilà ce que je dirais. Parce que ce qui se passe c'est qu'à

14 l'époque nous n'utilisions pas les bonnes dénominations. Les gens

15 rejoignaient des unités très diverses et les brigades ont été créées sous

16 des noms différents, comme par exemple, la Brigade Jusuf Gervalla et

17 d'autres.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais à Gllodjan et à Jabllanice vous

19 avez dit qu'il existait "des structures qui dirigeaient." Est-ce que le

20 rôle de ces structures qui dirigeaient, structures que vous appelez des

21 "quartiers généraux," ou des "états-majors," est-ce que celles-ci se

22 limitaient à Gllogjan et à Jabllanice en tant que tels ou est-ce qu'elles

23 s'étendaient au-delà de ces villages ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Chaque village avait son propre quartier

25 général. Les brigades avaient également leurs états-majors, leurs

26 structures de direction. La structure de direction existait dans chaque

27 brigade. A Gllogjan il y avait beaucoup de soldats. Il y avait aussi

28 beaucoup de soldats à Jabllanice. Voilà quelle était la situation.

Page 5737

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je crois comprendre qu'en dépit

2 d'une différence dans les dénominations, la fonction de la structure de

3 direction se limitait à Gllogjan en tant que tel et ne s'étendait pas aux

4 villages environnants; c'est bien cela ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, Gllogjan avait sa propre

6 direction armée, son propre état-major. C'était la même chose pour

7 Prapaqan, la même chose pour Bardhaniq, la même chose pour Jabllanice, pour

8 Barane, pour d'autres villages. Je ne vous ai donné le nom que de quelques

9 villages à titre d'information. En réalité, chaque village avait son

10 commandement propre et ses propres dirigeants qui donnaient des ordres.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quelle période parlons-nous

12 exactement ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous parlons de la période où ce qui existait

14 sur le terrain c'étaient des brigades, c'est-à-dire 1998, juin, juillet

15 1998.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. le Juge Hoepfel a maintenant une

17 question à vous poser.

18 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, j'aimerais vous

19 poser une question, puisque nous voyons ce croquis que vous avez dessiné en

20 mars 2006 affiché sur l'écran.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question courte si vous voulez bien

23 car il va nous falloir faire la pause.

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Oui. C'est simplement pour mieux

25 comprendre votre description, Monsieur le Témoin. En haut à gauche de ce

26 croquis on voit trois lignes manuscrites. Quel est le sens à donner à ces

27 trois lignes ? Pouvez-vous l'expliquer, je vous prie.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Les dernières questions portaient sur l'état-

Page 5738

1 major de Gllogjan et uniquement sur l'état-major de Gllogjan, pas sur les

2 autres états-majors. Et la question qui m'a été posée à ce moment-là était

3 qui commandait l'état-major de Gllogjan, et j'ai répondu, Ramush. Le

4 commandant opérationnel était Sali Veseli et il y avait Rrustem Tetaj

5 également. Ces trois hommes étaient les numéros 1, 2 et 3 de l'état-major

6 de Gllogjan. S'agissant maintenant des fonctions précises que chacun

7 d'entre eux avait au sein de cette direction, je ne sais pas. Notamment, je

8 l'ignore s'agissant de Rrustem. Mais je sais qu'ils étaient présents.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Un mot si vous me le permettez. Je ne suis

12 pas sûr du temps que M. Re va encore utiliser pour contre-interroger le

13 témoin.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne le sais pas non plus.

15 Monsieur Re, j'aimerais que la pause se fasse rapidement car nous avons

16 déjà largement dépassé l'heure. De combien de temps aurez-vous encore

17 besoin ?

18 M. RE : [interprétation] Du temps qu'il me faudra pour soumettre au témoin

19 encore six photographies.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les cartes.

21 M. RE : [interprétation] C'est tout.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les cartes et les photographies.

23 M. RE : [interprétation] Tout ce que je vous demande, Monsieur le

24 Président, c'est de m'autoriser à commencer mon contre-interrogatoire

25 demain plutôt que cet après-midi.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner une indication

27 du temps qu'il vous faudra pour ce contre-interrogatoire ? Et je m'adresse

28 maintenant aux trois conseils de la Défense.

Page 5739

1 M. EMMERSON : [interprétation] Je prévois environ une heure, une heure et

2 demie.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il n'y aura pas d'autres témoins,

4 Monsieur Re.

5 Nous pourrions en terminer demain.

6 Je ne sais pas, Maître Guy-Smith, Maître Troop, si nous terminerons

7 facilement l'audition de ce témoin.

8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous la terminerons.

9 M. TROOP : [interprétation] Je suis d'accord.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause avec mes

11 excuses aux interprètes et traducteurs, un peu plus longue, par conséquent,

12 jusqu'à 18 heures 10.

13 --- L'audience est suspendue à 17 heures 44.

14 --- L'audience est reprise à 18 heures 14.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Re,

16 j'aimerais poser quelques questions encore au témoin.

17 Monsieur Krasniqi, je me permettrai de vous soumettre certaines parties de

18 votre déclaration écrite qui ont été versées au dossier, à commencer par le

19 paragraphe 33. Au paragraphe 33 de votre déclaration écrite - et vous

20 pouvez suivre ce texte dans votre langue si vous le souhaitez, bien sûr,

21 car je crois simplement que vous en avez un exemplaire sous les yeux - donc

22 nous lisons dans ce paragraphe 33, je cite :

23 "Le bureau de Din Krasniqi se trouvait dans sa maison dans le village

24 de Vranoc. Il avait également un centre médical privé en cet endroit. En

25 février 1998, rares étaient ceux qui possédaient un uniforme. La majorité

26 s'entraînait en vêtements civils. En

27 février 1998, il était de notoriété publique qu'une armée existait à

28 Jablanica sous le commandement de Lahi Brahimaj. Din Krasniqi s'était rendu

Page 5740

1 à Jablanica, et étant quelqu'un qui méritait la confiance, il fut autorisé

2 à se présenter sous la dénomination de commandant de la vallée de Barane."

3 Alors, qui a autorisé Din Krasniqi à se désigner lui-même comme commandant

4 de la vallée de Barane ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, selon les interprètes que j'ai entendus,

6 votre question est dépourvue de sens.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande de répondre à cette

8 question, mais s'il y a un problème d'interprétation, voici ce que je vous

9 demandais : je vous demandais simplement à quel moment -- je vous

10 demandais, puisque nous lisons dans le texte que lorsque Din Krasniqi s'est

11 rendu à Jabllanice, il a été autorisé à se désigner sous le nom de

12 commandant de la vallée de Barane. Donc ma question, et je serai très

13 précis et la suivante : qui à Jabllanice l'a autorisé à se désigner sous le

14 nom de commandant de la vallée de Barane ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, maintenant je comprends bien votre

16 question. Din était un homme éduqué, très apprécié par la population de la

17 région. C'était un médecin - et j'indique pour qu'il n'y ait pas le moindre

18 malentendu - qu'il n'y avait pas d'armée dans la vallée de Barane.

19 Cependant, Din était quelqu'un de très connu dans la région. Il avait

20 soigné et guéri pas mal d'enfants, pas mal de personnes âgées, et cetera,

21 et cetera. Donc parce que les Serbes --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous arrête ici. Je ne vous

23 demandais pas pourquoi il a été autorisé à le faire, mais qui l'a autorisé

24 à le faire.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, moi-même, j'ai dit qu'il pouvait être

26 commandant de la région, parce qu'il était très apprécié par la population,

27 qu'il était quelqu'un d'éduqué, et personne ne s'est opposé à cette idée,

28 ni Lahi ni personne d'autre. C'est moi qui l'ai proposé pour être

Page 5741

1 commandant.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit ni Lahi ni personne

3 d'autre. Est-ce que Lahi a été interrogé à ce sujet ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Din avait pour sa part insister pour que je

5 sois nommé commandant. Lahi et les autres n'avaient rien contre moi.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je vous en prie, veuillez

7 écouter attentivement ma question et y répondre.

8 Ma dernière question était la suivante : est-ce que Lahi a été interrogé

9 quant au fait que Din Krasniqi pouvait se désigner sous le nom de

10 commandant de la vallée de Barane ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous en avons discuté tous ensemble. Oui, bien

12 sûr. Il a été interrogé.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etiez-vous présent lorsqu'il est allé à

14 Jabllanice ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous y sommes allés ensemble.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous y êtes allés ensemble. Pourquoi ? A

17 quelle fin y êtes-vous allés ensemble ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait des combats dans le secteur de Suka

19 e Cermjanit, et des soldats avaient été blessés. Donc nous sommes allés là-

20 bas pour que Din puisse intervenir en soignant ces soldats, et c'est à ce

21 moment-là que nous avons discuté de la question.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maintenant, j'aimerais que nous

23 voyions ensemble le paragraphe 41 qui, à ma grande surprise, M. Re, semble

24 être pratiquement la reprise mot pour mot du

25 paragraphe 65. Quoi qu'il en soit, le paragraphe 41 de votre déclaration

26 écrite où vous expliquez qui commandait la 3e Brigade de Barane, qui

27 commandait la 1re Brigade de Prapaqan et qui commandait la 2e Brigade de

28 Bardhaniq. Puis à un certain moment dans ce paragraphe, vous dites : "Les

Page 5742

1 trois brigades étaient en principe sous le commandement de Ramush

2 Haradinaj, qui était le commandant suprême, mais elles avaient également

3 une certaine forme d'indépendance, parce qu'ils n'existaient pas au

4 quotidien un système régulier s'agissant de la façon de rendre compte. Mais

5 en cas de nécessité ou en cas de trouble, le commandant de zone devait être

6 contacté."

7 Dans vos réponses précédentes, vous m'avez donné l'impression, - et en

8 fait, c'est un peu ce que vous avez représenté graphiquement sur la carte -

9 qu'il n'y avait pratiquement pas de différence entre les brigades et les QG

10 locaux, alors que dans ce paragraphe de votre déclaration écrite vous

11 expliquez très clairement que même si les brigades recevaient l'ordre de se

12 conduire convenablement et qu'elles jouissaient d'une certaine forme

13 d'indépendance, elles étaient tout de même une structure placée sous les

14 ordres de Ramush Haradinaj. Est-ce que vous pourriez vous expliquer plus

15 avant sur cette légère différence entre la déclaration écrite signée par

16 vous et la déposition orale que vous avez faite jusqu'à récemment, avant la

17 pause ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je puisse le constater il n'y

19 a pas de différence. Sur le plan des principes, la déclaration est

20 identique. Mais j'aimerais m'expliquer encore sur ce terme de "brigade," et

21 la raison pour laquelle ces structures utilisaient le terme de "brigade."

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le moment ce que je crois

23 comprendre c'est mon impression, l'impression que j'avais, que votre

24 déposition orale s'écartait de votre déclaration écrite est une fausse

25 impression. Donc si l'une ou l'autre des parties souhaite que le témoin

26 s'exprime plus avant au sujet des brigades elles peuvent lui demander de le

27 faire. C'est certain. Mais si à la fin de votre déposition personne ne vous

28 a demandé de le faire et que vous jugez utile d'ajouter quelques mots de

Page 5743

1 votre propre chef, vous aurez toute liberté de le faire.

2 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre.

3 M. RE : [interprétation] Je demande si la pièce P352 est toujours affichée

4 sur les écrans. J'aimerais en tout cas qu'elle le soit afin de rebondir sur

5 la question qu'a posée il y a quelques instant M. le Juge M. Hoepfel au

6 témoin au sujet des trois lignes manuscrites en haut à gauche de ce

7 document.

8 Q. Ce que je vous demanderais maintenant, Monsieur Krasniqi, c'est

9 simplement de lire ces trois lignes.

10 R. Ces trois lignes, comme je l'ai déjà dit, indiquent que le commandant

11 d'état-major est Ramush Haradinaj, que son adjoint, ou plutôt le

12 responsable opérationnel est Sali Veseli, et que Rrustem Tetaj est avec

13 eux. Ceci a été fait en juin, si je ne me trompe et nous essayions --

14 Q. Non, je vous avais simplement demandé de prendre connaissance de ces

15 lignes. Enfin, d'accord.

16 R. J'en ai pris connaissance. Donc il y avait Ramush, commandant d'état-

17 major, chef d'état-major; Sali Veseli commandant chargé des opérations; et

18 Rrustem Tetaj, adjoint.

19 Q. Est-ce que ces trois lignes constituent la légende du croquis que vous

20 avez dessiné ?

21 R. Oui, c'est ça.

22 Q. Est-ce que ces trois lignes correspondent au contenu de la déclaration

23 que vous avez signée aujourd'hui, paragraphe 41, notamment le passage que

24 M. le Juge Orie vient de mettre en exergue à votre intention. Je cite : "Le

25 commandant suprême de la zone opérationnelle de Dukagjini était Ramush

26 Haradinaj qui avait son quartier général dans le village de Gllogjan. Sali

27 Veseli était le commandant chargé des opérations pour la zone

28 opérationnelle de Dukagjini, alors que Rrustem Tetaj était le commandant

Page 5744

1 adjoint."

2 Alors, tout ce que je vous demande c'est si la légende associée au croquis

3 correspond à la teneur du paragraphe 41 de votre déclaration écrite.

4 R. Oui, elle y correspond.

5 Q. J'aimerais maintenant que vous vous penchiez sur le paragraphe 31 de la

6 déclaration écrite que vous avez devant vous, à savoir la déclaration 92

7 ter que vous avez signée aujourd'hui. Vous avez fait référence à une carte

8 géographique qui est annexée en tant qu'annexe A à votre déclaration écrite

9 du 5 mars 2006.

10 M. RE : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche sur les écrans le

11 document 1028 de la liasse 65 ter.

12 Q. Pendant que nous attendons cet affichage, j'aimerais lire ce

13 passage de façon à ce que vous sachiez où nous allons : "A partir de ce

14 jour-là, j'ai commencé à entraîner les soldats de l'UCK, d'abord à Vranoc,

15 près de la rivière. A ce moment-là, le Dr Din Krasniqi était commandant de

16 l'UCK pour Vranoc et plus tard pour la vallée de Barane. Il y avait 17

17 villages dans la vallée. Je leur ai montré ces villages sur la carte qui

18 est enregistrée en tant qu'annexe A à ma déclaration écrite."

19 Maintenant que la carte est en train de s'afficher sur les écrans, je

20 voudrais vous demandez d'identifier si c'est bien la zone en bleu qui

21 englobe les 17 villages dont vous aviez parlé dans votre déclaration

22 écrite ?

23 R. Oui, c'est bien cela.

24 M. RE : [interprétation] Je demande une cote pour ce document.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P353.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des objections à l'admission de ce

28 document ? Non. Bien, il est versé au dossier.

Page 5745

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15 versions anglaise et française

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 5746

1 M. RE : [interprétation]

2 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions du document 1029 de la

3 liasse 65 ter, et que nous nous penchions sur le paragraphe 49 de votre

4 déclaration écrite, je vous prie Monsieur Krasniqi, déclaration que vous

5 avez signé aujourd'hui, ainsi que son paragraphe 58 [comme interprété].

6 Pour vous situer le contexte, je vous dirai simplement que vous faisiez

7 référence aux villages de Peje, Decane, Klina comme étant sous le contrôle

8 de l'UCK et que vous disiez que le MUP était en train de battre en retraite

9 pour se reloger dans le poste de police de d'Irzniq. Ensuite, vous parlez

10 de combats aux canons, éclatant régulièrement entre les forces serbes et

11 les forces de l'UCK. Au paragraphe 59 [comme interprété], je lis ce qui

12 suit : "J'ai indiqué en rouge les positions des forces serbes, et les

13 villages serbes qui ont été mentionnés figurent sur la carte qui constitue

14 l'annexe B."

15 J'aimerais que vous jetiez un coup d'œil à la carte qui constitue l'annexe

16 B de votre déclaration écrite du 5 mars 2006, je vous demande si ce croquis

17 représente bien les positions telles qu'elles étaient en mars 1998, je veux

18 parler des positions serbes et des positions de l'UCK ?

19 R. Les forces serbes se trouvaient aussi en d'autres endroits qui ne sont

20 pas indiqués sur cette carte.

21 Q. Avant d'aller plus loin, je vous demanderai simplement de décrire ce

22 que montre cette carte --

23 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, mais juste avant que le témoin

24 ne réponde à cette question.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

26 M. EMMERSON : [interprétation] Il y a quelque chose qui n'est pas tout à

27 fait clair pour moi à la suite de cette question que M. Re vient juste de

28 poser en résumant la déclaration. Est-ce qu'il s'agit d'une description

Page 5747

1 exacte de ce qui se trouve dans cette déclaration ? Aux paragraphes 46 et

2 48, il y a une description de certains événements, puis au paragraphe 49,

3 il est fait référence à cette carte. A la question de M. Re à la page 79

4 ligne 8, se lit comme suit : "Je voudrais que vous jetiez un coup d'œil à

5 la carte." A ce moment-là, il vous dit de regarder votre déclaration du 5

6 mars, je cite : "Est-ce que ceci est un croquis des positions serbes en

7 1998 ainsi que des forces serbes et de l'UCK."

8 Pour moi, il n'est pas clair que c'était --

9 M. RE : [interprétation] Cela aurait dû être les forces serbes.

10 M. EMMERSON : [interprétation] Non. Ce qui me préoccupe, c'est la date

11 aussi. Je ne comprends pas d'où M. Re tire cette date de cela.

12 M. RE : [interprétation] C'est écrit sur la carte.

13 M. EMMERSON : [interprétation] Je peux bien voir que ces mots figurent sur

14 la carte, mais cela ne figure pas dans le contexte de la déclaration de ce

15 qui était présenté, de ce qui était décrit. Peut-être, je ne sais pas.

16 M. RE : [interprétation] Je suis sûr que le témoin peut l'expliquer. Il a

17 la carte et c'est sa carte.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci n'a pas été écrit par moi, les mots "mars

19 1998". Mais la route principale Peje-Decan-Gjakove, était contrôlée par les

20 forces serbes. De sorte que les points bleus représentent les villages où

21 se trouvait un petit nombre de membres de l'UCK. Puis, les autres marques

22 correspondent aux villages serbes et aux forces serbes, tant les militaires

23 que les forces spéciales. Depuis le mois de février de cette année, ils ont

24 commencé à contrôler la route principale Peje-Gjakove, ainsi que les zones

25 avoisinante proche de Peje, il y a Gorazhdec, où un très grand nombre de

26 Serbes vivaient, et Kerstec, il y avait des Albanais qui vivaient à Kerstec

27 aussi, mais la plupart d'entre eux étaient des Serbes, et Vragoc. Ce sont

28 là des villages qui ont un cercle autour. Tandis qu'à Gremnik il y avait là

Page 5748

1 des forces serbes. Des forces serbes se trouvaient à Vuljak aussi, dans

2 l'usine de béton, et l'unité d'Arkan se trouvait là à Vuljak.

3 Q. Bien, pourriez-vous s'il vous plaît préciser lorsque vous dites les

4 autres marques. Répondez simplement à la question suivante. Voulez-vous

5 dire les marques rouges, quand vous dites les autres marques. C'est tout ce

6 que je voudrais savoir ?

7 R. Oui.

8 Q. Bien.

9 R. Ces marques sont les lieux où elles étaient stationnées.

10 Q. Bien. Pouvez-vous voir les endroits auxquels vous avez fait allusion

11 sur cette carte, les autres places.

12 R. Oui, je peux les voir toutes.

13 Q. Je vais vous demander d'apposer sur la carte des marques, mais avant

14 cela, cette carte correspond à quelle période ?

15 R. Cette carte correspond à la période pendant laquelle -- la question qui

16 m'avait été posée était la suivante : où vivait la population serbe ?

17 Q. Bien, je vous demande maintenant, si vous voulez bien vous concentrer

18 sur ce point, à quelle période correspond cette carte ?

19 R. Cette carte couvre la période qui va jusqu'à la fin du mois de mars.

20 Elle présente les secteurs où étaient stationnées les forces serbes.

21 Q. Mars 1998 ?

22 R. Oui, mars 1998.

23 Q. Les autres villages dont vous avez parlé, je ne peux pas lire cela

24 parce qu'ils ne sont pas correctement transcrits, cela se fera peut-être

25 plus tard. Pourriez-vous marquer sur la carte, ou pourrait-on utiliser une

26 autre couleur ? Peut-être le vert -- non, il y a déjà du bleu. Pourrions-

27 nous utiliser une autre couleur.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons déjà le rouge et le bleu, par

Page 5749

1 conséquent -- si c'était du noir, cela pourrait aller, mais, bien sûr, nous

2 ne savons pas à ce moment-là, si on écrit en noir, ce qui est l'original

3 qui est imprimé. Est-ce que nous avons d'autres couleurs que le bleu et le

4 rouge ?

5 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous aurions besoin de noir.

7 M. RE : [interprétation] Mais on pourrait utiliser un bleu différent.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on aurait un bleu différent,

9 Monsieur le Greffier ? Est-ce qu'il y un bleu plus foncé ?

10 Bleu foncé pourrait convenir maintenant parce que les marques qui figurent

11 déjà sont en bleu pale.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. La même chose. On a marqué en rouge. Sur l'écran, dessinez simplement

14 en bleu les endroits où il y avait d'autres positions serbes.

15 R. Ici à Gllogjan, avec la couleur bleu, se trouvaient les membres de

16 l'Armée de libération du Kosovo. A Irzniq, la même chose. Prilep, je ne

17 suis pas sûr que je sache ce que vous regardez.

18 Q. Non. J'étais seulement intéressé par les positions serbes. Vous avez

19 dit qu'il y avait des positions serbes additionnelles que vous n'aviez pas

20 marquées sur la carte. C'est tout ce qui m'intéresse pour le moment.

21 R. Rakovine, Rakovic, Ruluc [phon] qui conduit à Klina et Gjakove. Il y a

22 ce secteur de Klina ici.

23 Q. Pourriez-vous apposer les marques de façon à ce que nous puissions

24 suivre ?

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'une après l'autre, s'il vous plaît,

26 afin que nous puissions voir où cela se trouve. Je vois maintenant qu'il y

27 a une marque près de Rakovine, et où serait la prochaine ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a aussi la route, mais elle n'est pas

Page 5750

1 indiquée ici, la route qui conduite à Ponovik et Kramovik aussi. Il y a une

2 flèche noire. Donc, Rakovine et Kramovik sont ici aussi.

3 M. RE : [interprétation]

4 Q. Est-ce que c'est cela ?

5 R. Il y avait deux secteurs. Puis aussi, il y a le secteur près de Gogov,

6 Kadol, qui se trouvait également ici. Il s'agit du secteur qui couvre la

7 distance entre Gjakove et Klina. Jabllanice, Krstovski est un village dans

8 lequel il y avait une population; et Decan. De l'autre côté de Decan, il y

9 a Pishtan; Jabllanice. Puis Babiq, c'est un village dont la population est

10 mixte. Puis il y a Doberdol. Puis Gaboc, il y en avait quelques-uns qui

11 étaient là.

12 Q. C'est tout ?

13 R. Il y a aussi d'autres endroits; Zagerme, Bellopoje, Strellc, Lybeniq,

14 Libushe, ceci après mars. C'est la grand-route qui conduit à Decan. C'est

15 la même chose pour Carrabreg, puis si vous continuez vers Prilep --

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maintenant, tout ceci est déjà

17 marqué par des raies rouges qui, à ce que j'ai compris, représentent la

18 présence de forces serbes. De sorte que je ne pense pas qu'il soit

19 nécessaire d'apposer des marques supplémentaires en bleu foncé, parce que

20 nous trouvons déjà les marques en rouge.

21 Peut-être que je pourrais demander quand même quelques éclaircissements sur

22 un point. Vous venez juste de marquer Jablanica. Est-ce que ce Jablanica

23 est différent, d'après ce que je comprends, du Jablanica où se trouvait le

24 quartier général, comme vous l'avez dit plus tôt, Jablanica où était situé

25 Lahi Brahimaj, ce qui se trouve à être plus au sud ? Est-ce que c'est --

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils sont différents.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit là de deux choses différentes. Il y

Page 5751

1 a plusieurs Jabllanice dans le secteur de Peje, il y a trois Jabllanice.

2 Celui-ci est dans Gjakove.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais juste m'assurer qu'il n'y

4 aura pas de confusion à cet égard.

5 Monsieur Re, veuillez poursuivre.

6 M. RE : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement de cette

7 pièce au dossier ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 Monsieur le Greffier, il s'agira de quelle pièce ?

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P354, Monsieur le

11 Président.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je n'entends pas d'objection, et je

13 n'en entends pas, P354 est versé au dossier. Veuillez poursuivre, Monsieur

14 Re.

15 M. RE : [interprétation] La pièce suivante est la pièce 1030 de la liste 65

16 ter.

17 Q. Je vais vous demander de regarder le paragraphe 79 de votre déclaration

18 que vous avez là et que vous avez signé aujourd'hui - en attendant que ça

19 apparaisse à l'écran - il s'agit du paragraphe 74 dans votre déclaration du

20 5 mars de l'an dernier, et ceci dit : "Un mois plus tard, en juillet, les

21 Serbes sont entrés à Loxha et l'ont détruit complètement. J'ai indiqué sur

22 la carte les positions serbes en rouge, et les positions albanaises en

23 bleu, en ce qui concerne la première bataille de Loxha. Elle est annexée en

24 tant qu'annexe E."

25 Il s'agit de la pièce 1030, et je voulais simplement vous demander si c'est

26 une carte des positions serbes en rouge et des positions albanaises en

27 bleu, de la première bataille de Loxha en juillet 1998.

28 R. Oui. En bleu, c'est notre zone libre, la zone dans laquelle nous

Page 5752

1 pouvions nous déplacer. A l'intérieur des lignes rouges, on pouvait voir

2 les zones dans lesquelles les forces serbes étaient déployées. Suka e

3 Bitesh -- A Diga Radoniq, près du lac Radoniq, il y avait des forces

4 serbes et aussi --

5 Q. Quand vous dites "bleu c’est notre zone libre", est-ce que l'UCK

6 contrôlait ce secteur militairement ?

7 R. C'est la façon dont nous considérions les choses à l'époque. Nous

8 considérions que c'était une zone libre. Elles aussi, les forces serbes,

9 pouvaient entrer dans ce secteur parfois, parce qu'ils avaient des hommes

10 et des véhicules. Nous nous déplacions autour de ces secteurs. Eux, les

11 Serbes, pouvaient aussi entrer dans ces secteurs, s'ils le voulaient.

12 Q. Est-ce que c'était à cause de leur puissance militaire qui était plus

13 grande qu'ils pouvaient entrer et sortir quand ils le voulaient ?

14 R. Oui, c'est exact. Nous n'avions pas de matériel. Nous avions des jeunes

15 volontaires sans expérience. Nous n'avions pas d'armée au sens de l'armée

16 régulière, et aucune structure véritable de commandement.

17 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait verser ceci au dossier

18 comme élément de preuve ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, il s'agira de quel

20 numéro ?

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du numéro P355, Monsieur le

22 Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Y a-t-il des objections ?

24 M. EMMERSON : [interprétation] Pas d'objection à ce que cette carte soit

25 reçue comme élément de preuve. Mais ce qui me préoccupe quelque peu en ce

26 qui concerne ce point, c'est que le témoin vient d'indiquer ces deux

27 endroits en ce qui concerne la carte précédente pour laquelle il a dit que

28 sa déposition aurait dû être insérée --

Page 5753

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. EMMERSON : [interprétation] -- sur la carte précédente --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, Donji Bites n'est pas loin

4 de --

5 M. EMMERSON : [interprétation] Bien qu'indiquant deux lieux différents --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être au cours du contre-

7 interrogatoire --

8 M. EMMERSON : [interprétation] Je serais heureux de pouvoir reprendre la

9 question en contre-interrogatoire, mais nous venons juste d'admettre la

10 carte et de la verser au dossier. C'est une carte du témoin dont le témoin

11 dit que sa ne reflète pas ses souvenirs.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il parlait de l'une des cartes

13 précédentes.

14 M. EMMERSON : [interprétation] Je suis entre vos mains, Monsieur le

15 Président, et je traiterai de cette question lors du contre-interrogatoire.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais certainement nous avons maintenant

17 au compte rendu que l'ancienne carte ne reflète pas totalement les

18 positions serbes, et que deux ont été ajoutées maintenant par le témoin.

19 S'il n'y a pas d'objection, alors la P355 sera admise et versée au dossier

20 comme élément de preuve.

21 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

22 M. RE : [interprétation] Est-ce que celle-ci pourrait rester à l'écran.

23 Q. Je voulais simplement que vous jetiez un coup d'œil à cette carte et

24 vous demander de voir au paragraphe 44 de votre déclaration signée

25 aujourd'hui l'endroit où vous dites : "Il y avait 40 à 50 villages dans la

26 zone de Dukagjini sous le contrôle de l'UCK en

27 mars 1998."

28 Est-ce que ces 40 ou 50 villages apparaissent ou figurent dans la zone

Page 5754

1 bleue sur la carte P355 ?

2 R. Oui, c'est bien la carte des villages. Il s'agit des villages.

3 Toutefois, nous ne pouvions pas les avoir tous sous un contrôle total. Nous

4 ne pouvions pas empêcher tout un chacun d'entrer dans ces secteurs.

5 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer, s'il vous plaît,

6 au témoin la pièce 1380 de la liste 65 ter.

7 Q. Déclaration du 17 mai où vous décrivez -- non, excusez-moi -- a été

8 signée le 21 mai de cette année. Vous décrivez cette photographie comme

9 représentant une maison de Lahi Brahimaj à Jablanica. Vous avez dit : "Je

10 suis passé devant en voiture, mais je ne suis jamais allé à l'intérieur. Je

11 ne savais pas à quoi elle servait en 1998."

12 Pourriez-vous mettre un cercle sur cette carte sur la photographie de la

13 maison de Lahi Brahimaj ?

14 R. Oui, cette maison ici. Vous voulez que je mette un cercle ?

15 Q. Oui, s'il vous plaît. Un grand cercle.

16 R. [Le témoin s'exécute]

17 Q. Merci.

18 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait recevoir cette carte et

19 la verser au dossier comme élément de preuve.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci sera la pièce P356, Monsieur le

22 Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objections. Je n'entends pas. Donc

24 P356 est admise comme élément de preuve au dossier.

25 Poursuivez, Monsieur Re.

26 Q. Egalement, lorsque vous étiez à Jablanica, pourriez-vous, s'il vous

27 plaît, -- on va vous montrer la pièce 1357 de la

28 liste 65 ter qui est une photographie. Au paragraphe 21 de votre

Page 5755

1 déclaration du 21 mai, cette année, vous avez décrit ceci comme étant un

2 bâtiment de l'état-major de l'UCK à Jablanica en 1998, et vous avez dit que

3 vous aviez été à ce bâtiment. Je voudrais juste que vous identifiiez s'il

4 s'agit bien du bâtiment dont vous parliez.

5 R. Oui, c'est bien l'endroit où j'étais.

6 M. RE : [interprétation] Est-ce que nous pouvons également la verser au

7 dossier comme élément de preuve ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demande si ce n'est pas déjà versé

9 au dossier comme élément de preuve. En fait, il me semble la reconnaître.

10 Je crois que --

11 M. RE : [interprétation] Je pense que ça pourra être le cas.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien, vous pourrez dire pour que la

13 Chambre on va essayer de retrouver si c'est déjà le cas.

14 M. RE : [interprétation] Ecoutez, je vous présente mes excuses pour ça.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense que nous avons avoir introduit

16 cette carte au cours de la déposition du Témoin 6.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourriez-vous,

18 s'il vous plaît, attribuer un numéro à cette carte, mais il se peut que ce

19 numéro finalement soit libéré à un stade ultérieur.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais la marquer

21 pour identification comme étant la P357.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

23 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant, s'il vous

24 plaît, montrer au témoin la pièce 1379 de la liste 65 ter.

25 Q. Dans votre déclaration du paragraphe 21 du mois de

26 mai 2007 vous décrivez ceci comme montrant un bâtiment de l'enceinte de

27 l'état-major de l'UCK à Jablanica, et à votre connaissance c'était utilisé

28 comme une cuisine. Vous avez vu des cuisiniers avec des vivres pour l'UCK

Page 5756

1 avec des soldats qui entraient et sortaient de ce bâtiment. Citation : "Je

2 ne suis jamais entré dans ce bâtiment et je ne sais pas si des personnes y

3 ont été détenues." Mais vous avez entendu "soldats, que des soldats y

4 étaient détenus."

5 S'agit-il du bâtiment dont vous vouliez parler ?

6 R. Oui, oui, il s'agit bien du bâtiment. Lorsque je suis allé, j'ai vu le

7 cuisinier qui donnait du pain à des soldats. C'était quelque chose de

8 normal.

9 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait alors verser cette pièce

10 comme élément de preuve aussi ?

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, donc on s'est bien assuré que --

12 M. RE : [interprétation] J'ai été informé par mon commis à l'affaire

13 qu'elle n'a pas reçu le numéro de pièce à conviction, donc je me fie à

14 cela.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En même temps, je me rappelle qu'il

16 y avait une personne qui regardait dans une cave où nous avons entendu pas

17 mal d'éléments, de déposition, sur le fait qu'il y avait de l'eau dans la

18 cave. Donc à moins qu'à deux moments différents des photos différentes

19 aient été prises de cette même maison, il n'y a aucun doute concernant cela

20 avec une personne qui se trouve dans un costume léger, presque à genou,

21 exactement au même endroit. A ce moment-là il faudrait vérifier d'abord.

22 M. TROOP : [interprétation] Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

24 M. TROOP : [interprétation] Avant que M. Re n'aille plus loin, pourrais-je

25 appeler l'attention de la Chambre au paragraphe 21. Je pense que M. Re a

26 dit que la déclaration se lisait comme suit : que les soldats avaient été

27 détenus là. En fait, la déclaration telle qu'elle est écrite énonce : "J'ai

28 entendu de mes soldats que des soldats de l'UCK qui avaient vendu des armes

Page 5757

1 de l'UCK ont été interrogés ici."

2 M. RE : [interprétation] Si j'ai dit cela, je me suis trompé.

3 M. TROOP : [interprétation] Ça fait une différence très importante.

4 M. RE : [interprétation] J'ai dit : "J'ai entendu de mes soldats --"

5 M. TROOP : [interprétation] Je vous suis reconnaissant.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà. Maintenant c'est corrigé pour le

7 compte rendu.

8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce que vous vous référiez à la

9 déclaration du 15 mai ?

10 M. RE : [interprétation] Oui, du 15 mai 2007.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que nous avons constamment à

12 choisir entre les 4 déclarations pour le moment pour savoir où nous en

13 sommes. Bien. Il s'agit du 15 mai. Ça été corrigé.

14 Veuillez poursuivre.

15 M. RE : [interprétation] Nous n'arrivons pas à retrouver le numéro de pièce

16 pour ceci, mais je vais poursuivre.

17 Q. Monsieur Krasniqi, la photo D35, peut-on la montrer au témoin s'il vous

18 plaît. C'est une photographie prise au-dessus du village de Gllogjan, et je

19 voudrais vous demander de regarder au paragraphe 20 de la déclaration de

20 mai de cette année, pour laquelle vous dites qu'il y a une photographie du

21 village de Gllogjan, les maisons de la famille Haradinaj. Il y a donc cette

22 grande maison du côté droit de la route lorsqu'on vient de Dubrava. C'est

23 la maison dans laquelle je suis entré trois fois en 1998 et où j'ai

24 rencontré Ramush Haradinaj. Annexée la photographie à votre déclaration,

25 pourriez-vous, s'il vous plaît, lorsque vous la verrez apparaître, mettre

26 un cercle autour de cette photographie ?

27 R. Tout à fait.

28 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, faire un cercle autour de la maison à

Page 5758

1 laquelle vous faites référence ?

2 R. Pas de problème. Pourtant je n'ai jamais vu ce village sous cet angle,

3 mais je vais essayer de m'y retrouver. Je suis venu de part ici. Je l'ai

4 rencontré ici. C'est cette maison-là qui servait de QG. Vous avez la cour

5 derrière.

6 M. RE : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, verser cela

7 au dossier.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cette photographie annotée devrait

9 être versée au dossier.

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle recevra la cote P538 [comme

11 interprété].

12 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Nous avons déjà une pièce P538 [comme

13 interprété].

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme j'ai déjà dit, je n'ai jamais vu le

15 village sous cet angle.

16 M. RE : [interprétation] D'accord.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous éclaircir un point pour ce

18 qui est de la dernière phrase de ce paragraphe. Je veux que le témoin

19 explique exactement ce qu'il en est, parce qu'il semble qu'il y a une

20 contradiction quand même entre le passage que M. Re nous a lu et la

21 dernière phrase, parce que ça ne paraît pas être extrêmement cohérent.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait qu'au début du

24 paragraphe 20 il y a une contradiction entre le début du

25 paragraphe 20 et la fin de ce paragraphe. Puisqu'il dit : "C'est la maison

26 où je me suis rendu trois fois en 1998." Donc il décrit, il dit avoir été

27 trois fois au QG de Gllogjan en 1998. A la fin, il

28 dit : "La configuration du village a changé depuis 1998 et je ne reconnais

Page 5759

1 plus la maison qui était occupée par l'UCK en 1998 dans cette

2 photographie."

3 M. RE : [interprétation]

4 Q. Monsieur Krasniqi, essayons de s'y retrouver. Est-ce que vous pensez

5 que c'est bien cette maison où vous avez rencontré

6 M. Haradinaj trois fois ou c'est autre chose ?

7 R. Si je pouvais la revoir sous l'angle où je l'ai vu la première fois, ce

8 serait plus simple. La configuration du village a changé, en plus l'angle

9 était un peu différent dans cette photo aérienne. Je pense que je me suis

10 peut-être trompé.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de perdre du temps là-dessus, y a-

12 t-il contestation à propos de ce point ? Nous avons déjà vu cette maison.

13 Elle nous a déjà été décrite comme étant l'endroit où les gens se rendaient

14 quand ils disaient qu'ils allaient au QG. Y a-t-il contestation ?

15 M. EMMERSON : [interprétation] A notre avis, ce n'est pas aussi clair que

16 cela.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il y a contestation à propos de ce

18 point.

19 M. RE : [interprétation] Je pourrais peut-être lui poser des questions à ce

20 propos. Je ne sais pas très bien si cela va être très utile.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais poser des questions moi-même.

22 Enfin, c'est pourtant à vous de le faire.

23 Mais je vous demanderais, Monsieur le Témoin, vous avez encerclé une

24 maison. Vous vous êtes basé sur quoi pour l'encercler avec votre crayon ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une grande maison. La maison où je me

26 suis rendu était très grande. Il me semble que les portes étaient plus

27 grandes. D'ailleurs je ne vois pas les portes ici, sur cette photo. Il y

28 avait une cour. Enfin, ça c'est une vue aérienne et je ne l'ai jamais vue,

Page 5760

1 vue d'avion. Puis le village aussi n'avait pas cet aspect-là à l'époque.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Vous nous avez dit que cette photographie

3 vous avait déjà été montrée, Monsieur le Président. Mais je pense que nous

4 avons vu deux photographies, enfin, deux --

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Maître Emmerson.

6 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que cette photographie, en fait,

7 n'est pas celle qui a été utilisée pour trouver l'emplacement du QG de

8 l'UCK à Gllogjan. C'était au tout début du procès, je m'en souviens. Mais

9 c'était une photo terrestre. Ce n'était pas une photo aérienne. Je pense

10 que vous avez une copie papier de cette photo.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Peut-être qu'on pourrait s'en

12 servir, la regarder. Nous le regarderons à tête reposée. Ça nous aidera

13 sans doute à mieux comprendre ce témoin et ce qu'il a à nous dire.

14 Monsieur Re, avez-vous des questions supplémentaires ?

15 M. RE : [interprétation] Non, pas de questions supplémentaires. J'aimerais

16 que cette pièce soit marquée pour identification, mais après j'en aurais

17 terminé avec mon interrogatoire.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que j'avais déjà demandé une

19 cote.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. Nous lui avons donné la cote

21 P358.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

23 Pas d'objection ? Le 358 est maintenant versé au dossier.

24 Monsieur Re, j'ai fait une erreur pour ce qui est de la personne qui était

25 près de la cave. Maintenant pourrions-nous avoir à l'écran la pièce P332,

26 s'il vous plaît. Nous verrons l'affichage de cette pièce, la P332. Voici la

27 P332. Là on voit cet homme qui est à peu près dans la même position. C'est

28 peut-être un extrait de l'autre photo, mais ce n'est pas la même, en effet.

Page 5761

1 J'ai fait une erreur. Peut-être pourrions-nous voir si l'autre photo, enfin

2 à laquelle je pensais, est versée au dossier. M. Re regardez un peu. Ça

3 doit être un numéro qui est très proche du 332.

4 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne voulais pas perdre de temps. J'allais

5 vous donner trois exemplaires de la déclaration de témoin qui avait été

6 communiquée par l'Accusation dans le

7 dossier 130 le 12 juin. Donc l'importance de ces déclarations est ce qui

8 suit : il s'agit de déclaration de témoin de l'Accusation, déclaration

9 faite par la victime d'un crime qui décrit avoir vu de ses yeux

10 l'organisation de viols, de nombreux viols et de mutilation de femmes

11 albanaises en mars 1999 par un groupe de paramilitaires serbes.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Mais est-ce que ceci doit nous

13 être expliqué devant le témoin ?

14 M. EMMERSON : [interprétation] C'est totalement immatériel. Le témoin n'a

15 qu'à enlever ses écouteurs.

16 Je ne veux pas vous faire perdre votre temps, Monsieur le Président, mais

17 ça n'a absolument pas trait à ce que nous raconte ce témoin-ci.

18 L'allégation dans cette déclaration est la suivante : il y aurait eu un

19 groupe de policiers paramilitaires serbes qui avait participé à l'attaque

20 parmi lesquels un homme appelé Momcilo Antic ou Momo Antic, venant du

21 village de Lloqan qui avait d'ailleurs perdu une jambe l'année précédente.

22 Vous vous souvenez peut-être qu'il s'agit sans doute de l'individu qui a

23 déjà témoigné en l'espèce.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes.

25 M. EMMERSON : [interprétation] Donc ce qui m'inquiète et j'attire votre

26 attention sur ce fait, c'est qu'en communiquant la déclaration comme ceci,

27 qui a été en possession de l'Accusation depuis 1999, après que le témoin

28 ait témoigné, montre de plus en plus que l'Accusation ne respecte

Page 5762

1 absolument pas ses obligations de communication.

2 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

3 M. RE : [interprétation] Je m'insurge, je m'insurge, parce que dans ces

4 allégations qui me sont jetées comme ça, en pâture, sans aucun préavis, je

5 ne sais absolument pas de quelle déclaration

6 Me Emmerson parle. Il n'en a même pas parlé avant. Il n'a même pas eu la

7 courtoisie de m'en parler pendant la pause. C'est une tactique, à mon avis.

8 Il essaie juste de dire tout le mal qu'il peut de moi en espérant que vous

9 allez croire ses allégations. Mais s'il a des allégations il faut quand

10 même qu'il le fasse correctement. Ce n'est pas du tout correct.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Il est tard. Il est tard. Il est plus de 7

13 heures. Mais je suis absolument outré de ce qu'a dit

14 M. Re. Il y a en effet un problème important quand même en ce qui concerne

15 la communication des pièces.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est beaucoup trop tard. Si vous aviez

17 besoin de cinq minutes, vous aviez qu'à me prévenir et je vous aurais les

18 cinq minutes à 7 heures moins cinq, parce que maintenant il est beaucoup

19 trop tard pour en parler.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Je voulais juste savoir que vous avez cette

21 déclaration afin que vous puissiez la lire pendant la nuit. C'était cela la

22 pertinence.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous auriez pu me le dire. Vous auriez

24 pu vous limiter à dire que cela avait été communiqué et que cela portait

25 sur un témoignage qui avait déjà été entendu, et j'aimerais donc que vous

26 le lisiez, et tout. Vous aurez pu le faire. M. Re a quand même raison de ce

27 qu'il dit. Il est évident que vous vous plaigniez de -- il est évident que

28 vous n'êtes pas content de la façon dont M. Re gère les problèmes de

Page 5763

1 communication des pièces. Certes. Mais là il n'a pas du tout le temps de

2 répondre. Vous vous y prenez au dernier moment.

3 M. EMMERSON : [interprétation] De toute façon, je ne vais pas rentrer dans

4 une polémique à moins que vous ne le vouliez. Je voulais juste vous dire

5 pourquoi je vous communiquais cette déclaration afin que vous sachiez le

6 but de ce que je faisais.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais enfin, vous auriez faire le

8 façon beaucoup plus neutre, en étant beaucoup moins agressif.

9 Monsieur Krasniqi, cela dit, il faudra que vous reveniez dans ce prétoire à

10 deux heures et quart. Enfin, ce n'est pas dans ce prétoire, c'est dans le

11 prétoire III. Vous ne devez parler à personne dans l'intervalle de la

12 déposition que vous allez faire et que vous avez faite et que vous ferez.

13 Maintenant nous levons la séance jusqu'à demain deux heures et quart en

14 salle III.

15 --- L'audience est levée à 19 heures 08 et reprendra le vendredi 15 juin

16 2007, à 14 heures 15.

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28