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1 Le jeudi 4 octobre 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 53.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience,
6 pourriez-vous, s'il vous plaît, appeler la cause.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
8 les Juges, bonjour à tous. C'est l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre
9 Ramush Haradinaj et consorts.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
11 Avant que j'invite l'Accusation à appeler son prochain témoin, la Chambre
12 souhaite expliquer aux parties qu'elle a fait de son mieux pour voir si
13 elle pourrait obtenir quelque moyen de donner des directives aux parties et
14 de voir s'ils seraient un peu mieux au fait de ce que nous envisagerions de
15 verser au dossier, en ce qui concerne les déclarations 92 ter ou de ce
16 qu'on n'y verserait pas.
17 Nous avons également commencé à examiner toutes les annexes. Nous n'avons
18 pas pu en terminer, parce que les Juges ont aussi bien d'autres choses
19 encore à faire, ainsi que des choses qui sont urgentes tant hier
20 qu'aujourd'hui. Mais à titre de directive, telles que les choses se
21 présentent maintenant, l'Accusation est maintenant informée et je me centre
22 plus particulièrement sur la déclaration 92 ter pour le témoin à venir -
23 Monsieur Re, je comprends qu'il n'y a pas de mesures de protection
24 demandées - M. Stijovic, il y aurait les paragraphes 21; 39; 40 les cinq
25 dernières lignes; 59, les six dernières lignes; maintenant je reviens un
26 peu en arrière, paragraphes 11 jusqu'à 16 y compris; paragraphe 17; et le
27 paragraphe 26 qui ne conviennent pas aux fins d'admission en tant que prévu
28 par l'article 92 ter du Règlement.
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1 Il y a également une deuxième catégorie pour laquelle la Chambre indique
2 qu'elle ne voit aucune raison pour le moment à refuser le versement au
3 dossier de ces paragraphes, mais avise l'Accusation du fait que le niveau
4 des sources est tel que, afin d'être en mesure d'utiliser ces documents
5 comme éléments de preuve, comme il est vraisemblable que vous souhaitiez
6 le faire, Monsieur Re, il est certainement nécessaire de donner des
7 explications supplémentaires, bien entendu, on pourra poser des questions
8 au témoin lorsqu'il fera sa déposition.
9 Il s'agit plus particulièrement des paragraphe 20; 23; 24; 25, les neuf
10 premières lignes; le 27, le 32, les neuf premières lignes; 36; 37, les six
11 premières lignes; 41, les 15 premières lignes; le paragraphe 50, lignes 9 à
12 11; le 54; et le 58, dans les quatre premières lignes pour le 58.
13 Bien sûr, dans ces paragraphes il est souvent fait mention d'annexes, et la
14 Chambre indique à ce sujet que des explications ou des développements
15 supplémentaires pourront être nécessaires. Ceci peut avoir des conséquences
16 sur la possibilité d'admettre des annexes qui sont mentionnées dans ces
17 paragraphes. Parfois lorsque le témoin pour l'essentiel répète ce que l'on
18 trouve dans ces annexes où il fait référence, il peut être clair que le
19 sort en ce qui concerne une décision d'admettre les annexes pourrait être
20 lié aux explications qui auront été données à ce sujet.
21 La Chambre continuera d'examiner cette question. Il ne serait pas réaliste
22 de s'attendre à ce que la déposition de ce témoin puisse s'achever
23 aujourd'hui. Par conséquent, demain et au cours du week-end nous aurons
24 probablement davantage de temps pour pouvoir donner des directives plus
25 précises aux parties.
26 Je pense qu'il serait sage de commencer par cela. Y a-t-il d'autres
27 questions de procédure que vous souhaitiez évoquer pour le moment ?
28 Monsieur Re.
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1 M. RE : [interprétation] Des éclaircissements, s'il vous plaît, sur la
2 décision relative au paragraphe 20. Le paragraphe 20 commence à la page 11
3 dans le texte anglais et va jusqu'à la page 17. Il est partagé en sous-
4 paragraphes de (a) à (t).
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, le paragraphe 20 -- bien sûr, si
6 vous regardez le texte -- il y a certaines annexes qui n'ont pas fait
7 l'objet d'objection de la part de la Défense, mais dans un sens limité en
8 ce sens que la Défense dit qu'il soit authentique ou non, nous ne nous
9 opposons pas à ce qu'il soit admis à des fins très limitées. Par
10 conséquent, je pense -- mais laissez-moi vérifier.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'aurais dû discuter de cette
13 question précédemment. C'est essentiellement une indication que des
14 développements supplémentaires seront nécessaires, plus particulièrement
15 ceci s'applique au premier paragraphe, lorsque le témoin présente ses
16 propres statistiques, et où je crois que la Défense a soutenu que ceci
17 était simplement une copie d'autres sources, plutôt que des connaissances
18 personnelles du témoin.
19 Par conséquent, la question des sources des documents pourrait nécessiter
20 davantage d'attention.
21 Lorsque je veux parler du reste de cela, c'est-à-dire la longue liste
22 d'événements qu'ils ont décrits et qui sont en dehors des limites
23 temporelles de l'acte d'accusation, là la Défense, bien que ce soit à des
24 fins limitées, n'élève pas d'objection à l'admission de ces annexes.
25 Bien sûr, la pertinence de ces documents est limitée.
26 Monsieur Re, avez-vous d'autres questions à poser ?
27 M. RE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, mais si vous voulez
28 bien m'accorder un instant pour que je puisse surligner avec des couleurs
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1 différentes les résultats de votre décision --
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
3 M. RE : [interprétation] -- de façon à ce que je puisse poser comme il faut
4 les questions au témoin -- 16R7BG89.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. De combien de temps avez-vous
6 besoin pour que --
7 M. RE : [interprétation] Quelques minutes. Est-ce que je pourrais
8 simplement --
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que nous pouvons demander à
10 Mme l'Huissière de faire entrer le témoin. Ça prend d'habitude un peu de
11 temps.
12 Madame l'huissière, pourriez-vous, s'il vous plaît, faire entrer le témoin
13 dans la salle d'audience.
14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
15 M. RE : [interprétation] S'agit-il des neuf premières lignes du paragraphe
16 25 ou les neuf premières lignes du 27 ? Est-ce que je peux vous poser la
17 question, puis on dit ensuite neuf lignes après ça. Je suis un petit peu
18 dans le doute sur les lignes qu'il s'agit pour celui-là.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au paragraphe 25, les neuf premières
20 lignes. Puis le paragraphe 27 dans son intégralité. Puis le 32, là encore
21 les neuf premières lignes.
22 M. RE : [interprétation] Merci.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Stijovic. Excusez-nous
24 de ne pas nous occuper suffisamment de vous au moment où vous êtes entré
25 dans la salle d'audience.
26 Monsieur Stijovic, avant que vous ne commenciez votre déposition, le
27 Règlement de procédure et de preuve exige que vous fassiez une déclaration
28 solennelle selon laquelle vous direz la vérité, toute la vérité, rien que
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1 la vérité. Le texte va maintenant vous être présenté par Mme l'Huissière.
2 Je vais vous demander, si vous voulez, de faire cette déclaration
3 solennelle.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
6 LE TÉMOIN: ZORAN STIJOVIC [Assermenté]
7 [Le témoin répond par l'interprète]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
9 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stijovic, vous allez d'abord
11 être interrogé par M. Re qui est le conseil substitut pour l'Accusation.
12 Mais il a besoin d'un moment pour écrire quelque chose.
13 Monsieur Re, si vous le permettez, peut-être que je pourrais commencer.
14 Monsieur le Témoin, est-ce que votre nom est bien Zoran Stijovic ?
15 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que votre date de naissance est
17 bien le 13 novembre 1962 ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas reçu de réponse à la
20 première question. Votre date de naissance est le 13 novembre 1962 ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où êtes-vous -- j'ai bien mentionné
23 votre nom exact ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est exact.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes bien né à Podgorica au
26 Monténégro ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
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1 Monsieur Re.
2 M. RE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 Interrogatoire principal par M. Re :
4 Q. [interprétation] Monsieur Stijovic, je vais maintenant vous montrer une
5 déclaration qui est datée du 26 septembre 2007. Je souhaite vous la montrer
6 sur copie papier. Il s'agit de la pièce 2066 de la liste 65 ter, 2066.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que --
8 M. RE : [interprétation] Peut-être que l'on pourrait montrer ceci au témoin
9 en copie papier complète, ce serait plus rapide.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je n'entends pas d'objection de la
11 part de la Défense, de sorte que --
12 Monsieur le Greffier,
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ça deviendra la
14 pièce P931.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre pour le moment s'abstient de
16 décider sur la question de savoir si cette déclaration doit être versée au
17 dossier ou non.
18 Monsieur Re.
19 M. RE : [interprétation]
20 Q. Pour commencer, j'ai plusieurs questions à vous poser en ce qui
21 concerne cette déclaration. Premièrement, est-ce qu'elle est exacte ? Est-
22 ce que c'est bien votre déclaration ? Est-ce que ça correspond bien à ce
23 que vous déclarez ? C'est-à-dire ces 37 pages en serbe qui sont devant
24 vous.
25 R. Oui, effectivement.
26 Q. Et deuxièmement, si moi-même ou les Juges, ou la Défense allaient vous
27 poser des questions sur ce qui est évoqué là-dedans, est-ce que c'est bien
28 ce que vous diriez dans votre déposition si on vous posait ces questions ?
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1 R. Oui.
2 M. RE : [interprétation] Je note qu'on lui a déjà attribué un numéro de
3 pièce, mais sur cette base, est-ce que je peux demander versement comme
4 élément de preuve sous réserve de --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sous réserve d'une décision ultérieure
6 concernant sa présentation, oui.
7 Monsieur Re --
8 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous poser une
10 question ? Vous avez parlé de déclaration du 26 septembre, je crois que
11 c'est ça que vous avez dit. Oui. Maintenant je vois que le témoin a donné
12 son assentiment en anglais du fait que c'est daté le 26; toutefois,
13 l'original semble porter la date du 27.
14 M. RE : [interprétation] Il semble que cela ait été signé le 27. C'est mon
15 erreur. C'est moi qui me suis trompé.
16 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder la dernière page, Monsieur
17 Stijovic --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il est important que ceci
19 figure au compte rendu d'audience. Si je n'entends rien de la part de la
20 Défense, je considérerai qu'il s'agit bien de la même déclaration et qui ne
21 peut pas y avoir de confusion en ce qui concerne la date.
22 Veuillez poursuivre.
23 M. RE : [interprétation] J'ai remis au témoin un exemplaire des 35 ou 75
24 annexes en serbe ou en albanais que j'avais l'intention de lui montrer au
25 cours de sa déposition. Je n'ai pas un jeu complet.
26 Q. Monsieur Stijovic, avant que vous n'entriez dans la salle d'audience,
27 certaines décisions ont été prises par la Chambre en ce qui concerne des
28 passages particuliers de votre déclaration qui ne seront pas admis comme
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1 éléments de preuve. Je voudrais vous poser certaines questions concernant
2 certains points, sur d'autres je ne le ferai pas. Je n'ai pas eu la
3 possibilité de surligner ceux qui sont conservés et ceux qui ne le sont
4 pas. Il faudra que je vous remette un exemplaire plus tard au cours de
5 l'une des suspensions d'audience où j'aurai en fait surligné les parties
6 qui ne seront pas admises comme éléments de preuve.
7 Vous comprenez cela ?
8 R. Oui.
9 Q. Maintenant, dans votre déclaration au paragraphe 2, vous parlez de
10 travailler à la Sûreté d'Etat de l'Etat serbe et étant le chef du service
11 d'analyse à Pristina à partir de 1995. Je vous demande quel était le grade
12 ou l'importance de ce poste au sein de la Sûreté d'Etat serbe à ce moment-
13 là ?
14 R. Dans la hiérarchie, c'était un poste très important, étant donné que
15 toutes les données internes étaient à la disposition de la Sûreté d'Etat
16 donc étaient également à ma disposition, ceci à cause de ma position, mon
17 poste, mes fonctions professionnelles et ceci me donnait dans l'ensemble un
18 tableau assez exact qui me permettait de suivre les événements qui se
19 développaient et qui évoluaient au Kosovo en particulier en ce qui concerne
20 l'UCK, l'Armée de libération du Kosovo.
21 En termes de hiérarchie, le service d'analyse est un service distinct qui
22 reçoit toutes les données et tous les renseignements que reçoit la Sûreté
23 d'Etat dans ses opérations.
24 Q. Est-ce que vous pourriez dire plus ou moins où vous vous situiez dans
25 la hiérarchie ? Vous étiez numéro un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept,
26 huit, où cela ?
27 R. J'étais la quatrième ou la cinquième personne dans la hiérarchie.
28 Q. Quel était votre niveau ou votre classement au point de vue sécurité ?
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1 Comment est-ce que c'était formulé ?
2 R. Je vais essayer d'expliquer. Le service de Sécurité d'Etat en Serbie
3 organise ses propres opérations du point de vue du territoire et de
4 répartition professionnelle. Dans ce système, le département chargé
5 d'analyse est un organe distinct qui reprend et traite toutes les données
6 qui lui sont envoyées par les autres unités opérationnelles. Tout ce qui
7 est effectué conformément aux répartitions territoriales et
8 professionnelles, tout ceci est reçu par le service et c'est seulement
9 cette partie du service de la Sûreté de l'Etat où l'on peut retrouver tous
10 les renseignements relatifs au fonctionnement du service de la Sûreté
11 d'Etat.
12 Q. Est-ce que nous pourrions considérer que vous aviez accès à absolument
13 tout ce qui passait par votre service, votre bureau, ou est-ce qu'il y
14 avait des choses qui étaient trop secrètes pour que vous-même puissiez les
15 voir ?
16 R. Je suis absolument persuadé que tout ce qui arrivait dans les éléments
17 à analyser relevait des compétences qui me correspondent. Il est possible
18 que de temps en temps au niveau opérationnel certains éléments aient été
19 conservés quelques instants, mais ensuite par application du règlement, ils
20 étaient replacés dans leur contexte approprié, c'est-à-dire au niveau de
21 l'aspect opérationnel pour être analysés à ce niveau.
22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Une précision pour le compte rendu
23 d'audience, Monsieur le Président, je vous prie. J'aimerais que des
24 questions soient posées au sujet du sens exact à donner au terme
25 "opérationnel" de façon à ce que nous le sachions.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je vous laisse libre de
27 décider à quel moment vous demanderez cette précision.
28 M. RE : [interprétation] Pas de problème, Monsieur le Président. Je peux
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1 demander au témoin de préciser.
2 Q. Me Guy-Smith voudrait savoir ce que signifie exactement les "éléments
3 opérationnels" ou "le niveau opérationnel". Peut-être pourriez-vous vous
4 expliquer sur ce point ?
5 R. Une situation opérationnelle est une situation concrète dans laquelle
6 le service de Sûreté de l'Etat agit dans la recherche d'un objectif
7 particulier. Un exemple : s'il s'agit du Kosovo, il s'agit de décider de
8 priver de liberté ou d'émettre un certain nombre de décisions vis-à-vis de
9 l'Armée de libération du Kosovo, l'UCK en raison d'un certain nombre de ses
10 actes.
11 Q. Ce que je cherchais à obtenir dans ma dernière question c'était de
12 déterminer quel était le niveau d'accès aux informations secrètes dont vous
13 jouissiez étant donné l'importance hiérarchique de votre poste, le degré
14 d'habilitation qui était le vôtre exactement. Pourriez-vous peut-être le
15 préciser, car dans vos réponses précédentes la chose n'a pas apparu d'une
16 façon tout à fait claire.
17 R. Je faisais partie du premier cercle, c'est-à-dire du cercle le plus
18 restreint de personnes disposant d'informations. Les gens comme moi
19 disposaient de renseignements qui étaient y compris plus confidentiels que
20 les agents opérationnels.
21 Q. Comment peut-on comparer votre niveau d'habilitation à celui du
22 ministre de l'Intérieur, par exemple, ou du chef du renseignement militaire
23 ou du président de la république ?
24 R. Très concrètement s'agissant des activités du service de Sûreté de
25 l'Etat au Kosovo-Metohija, sur la base des renseignements émanant de ce
26 service, dans le cadre de la hiérarchie unique de la Sûreté de l'Etat, la
27 direction de l'Etat, donc très concrètement le président de la république
28 et le ministre de l'Intérieur était informé. Nous agissions dans le domaine
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1 de l'information externe du premier cercle de la direction du pays dans le
2 respect des règlements en vigueur.
3 Q. Quelle était l'importance numérique de la Sûreté de l'Etat au Kosovo en
4 1998, combien de personnes employait ce service à cette époque-là au Kosovo
5 ?
6 R. Je ne sais pas si je peux m'exprimer concrètement étant donné les
7 contraintes qui pèsent sur ce que je peux dire de la méthodologie du
8 service. Mais en tout cas, s'agissant des agents actifs, je dirais que leur
9 nombre était supérieur à 300.
10 Q. Des agents opérationnels du service, il y en avait combien ?
11 R. Il s'agit effectivement d'agents opérationnels du service de Sûreté de
12 l'Etat, quant aux personnes qui s'occupaient d'autres questions comme de
13 l'analyse, par exemple, ou de la maintenance temporaire des machines, ça je
14 ne vais pas en parler dans le détail. Ce dont je parle, ce sont des
15 employés, des agents opérationnels actifs de la Sûreté de l'Etat.
16 Q. Qu'en est-il des gens qui fournissaient des renseignements au service
17 de la Sûreté de l'Etat ? Combien étaient-ils à peu près au Kosovo en 1998 ?
18 R. Je crois que là encore, je ne suis pas libre de répondre complètement à
19 cette question. Mais si l'on se fonde sur le fait que les informations qui
20 nous sont parvenues durant l'année 1998 le service de Sûreté de l'Etat a
21 identifié plus de 200 sources ou lieux d'origine de tels renseignements qui
22 provenaient de milieu dans lesquels circulaient les Albanais de souche
23 extrémistes, donc il y avait plusieurs centaines de personnes qui
24 fournissaient au Kosovo des renseignements au service de la Sûreté de
25 l'Etat à l'époque.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je me permets de vous
27 interrompre un instant.
28 Pourriez-vous, et je fais la même observation à la Défense, vous pencher
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1 sur la page 9, lignes 3, 4 et 5 du compte rendu d'audience où l'on ne voit
2 pas l'expression exacte de ce que le témoin a dit au compte rendu
3 d'audience. Je peux imaginer que les questions de suivi ont permis de faire
4 préciser les choses de façon satisfaisante.
5 Je demande aux parties si elles préféreraient que le témoin répète
6 cette partie de sa réponse qui n'a pas été consignée au compte rendu ou si
7 nous pouvons poursuivre et considérer que ce qui manque a suffisamment été
8 compensé par les questions suivantes.
9 M. EMMERSON : [interprétation] Ma façon de comprendre les réponses qui
10 précèdent et les questions de suivi qui ont permis de compenser le passage
11 manquant, c'est que le témoin a dit dans sa déposition que tous les
12 renseignements passaient par le département chargé des analyses à un moment
13 ou à un autre. En d'autres termes tous les renseignements disponibles au
14 niveau du service de la Sûreté de l'Etat de la république, depuis le niveau
15 opérationnel jusqu'à d'autres niveaux hiérarchiques, passaient de toute
16 façon par le département chargé des analyses. C'est ainsi que j'ai compris
17 la déposition du témoin. Si cela est erroné, alors manifestement une
18 correction s'impose.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.
20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Peut-être le témoin pourrait-il confirmer
21 que ce qui vient d'être dit en paraphrasant ses réponses correspondait
22 effectivement à la réalité.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stijovic, vous n'avez peut-être
24 pas remarqué qu'une petite partie de votre réponse n'a pas été consignée au
25 compte rendu d'audience et nécessite donc des explications complémentaires.
26 Me Emmerson vient d'expliquer à l'instant la façon dont il a interprété
27 votre réponse. Si vous êtes d'accord avec cette interprétation, veuillez le
28 dire en prononçant à haute voix le mot "oui" ou "non" dans le cas
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1 contraire, car un hochement de tête ne suffit pas pour être consigné au
2 compte rendu d'audience. Vous êtes d'accord avec cette interprétation ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument, oui.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors il n'est pas nécessaire de
5 demander au témoin de répéter ses réponses.
6 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me posais également des questions par
8 rapport à la réponse fournie précédemment par le témoin dans laquelle il a
9 indiqué qu'il était soumis à quelques contraintes dans sa liberté de
10 s'exprimer. Je ne sais pas si des directives ont été définies ou s'il
11 s'agit simplement d'une défaillance de sa mémoire eu égard à un certain
12 nombre de renseignements. Je ne sais pas ce qu'il voulait dire exactement.
13 Peut-être M. Re pourrait-il interroger le témoin à ce sujet, de façon à ne
14 pas rompre la continuité du récit.
15 M. RE : [interprétation] Je peux le faire.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si M. Re est satisfait des réponses du
17 témoin, il peut s'enquérir auprès de lui sur ce point. Je pense qu'il va
18 d'ailleurs le faire.
19 La prochaine fois, Monsieur Re, si une réponse vous satisfait, mais
20 uniquement si elle vous a satisfait et qu'elle n'a absolument pas été
21 comprise par d'autres, ce qui pourrait nuire à une bonne compréhension de
22 la déposition globale du témoin, la Défense peut demander un
23 éclaircissement. Dans le cas contraire, gardez vos demandes
24 d'éclaircissement pour le contre-interrogatoire, je vous prie, du côté de
25 la Défense.
26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me rends bien compte de cela.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
28 M. GUY-SMITH : [interprétation] La réponse faisait suite à une question
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1 relative au nombre de personnes qui fournissaient des renseignements au
2 service de la Sûreté de l'Etat de la république. Donc je suppose qu'il peut
3 être utile de poursuivre.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
5 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
6 M. RE : [interprétation]
7 Q. Monsieur Stijovic, y a-t-il quelque chose dans ce que vous avez dit il
8 y a un instant : "Je crois que je suis soumis à un certain nombre de
9 contraintes." Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que cela veut dire
10 exactement ?
11 R. Ce n'est pas très important, je suppose, mais cela peut le devenir
12 toutefois. Il peut être utile de savoir que j'ai liberté de parler des
13 secrets d'Etat et des secrets du point de la Sûreté s'ils ont un rapport
14 avec les crimes commis au Kosovo-Metohija. Quant à parler de l'organisation
15 et des méthodes utilisées par le service de Sûreté de l'Etat, je ne suis
16 pas libre d'en parler dans le détail.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stijovic, compte tenu de ce que
18 vous venez dire, cela peut impliquer que vos réponses se situeront dans
19 l'expression de la vérité, mais pas nécessairement dans l'expression de
20 toute la vérité. Pouvez-vous nous dire, je vous prie, si en ce moment vous
21 ne donnez pas tous les détails car vous ne sentez pas la liberté de le
22 faire.
23 Dans ce cas la Chambre va faire autre chose, mais en tout cas nous
24 sommes au courant du fait que votre réponse n'est pas totalement complète,
25 en tout cas moins qu'elle ne pourrait l'être si les limites dont vous
26 faites l'objet étaient levées.
27 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. Je souhaite qu'il soit tout à
28 fait clair pour le contre-interrogatoire à venir que c'est un domaine que
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1 je vais explorer plus en détail. En d'autres termes, je veux parler de la
2 méthode utilisée par le service de Sûreté de l'Etat et les services
3 associés.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends, nous y viendrons
5 plus tard. M. Stijovic nous dira où se situent les éléments qui lui posent
6 quelque problème pour répondre de façon complète. Et nous verrons comment
7 poursuivre.
8 Monsieur Re, à vous.
9 M. RE : [interprétation]
10 Q. Monsieur Stijovic, bien sûr dans votre déclaration écrite vous avez
11 déjà évoqué ce que je peux qualifier de méthodologie utilisée par les
12 services de Sûreté de l'Etat, et sans perdre cela de vue, j'aimerais vous
13 ramener à votre dernière réponse avant le débat qui vient d'avoir lieu, qui
14 était je vous le rappelle la suivante, je cite : "Compte tenu des
15 renseignements que nous recevions durant l'année 1998, nous avons identifié
16 plus de 20 personnes connaissant de façon intime les structures dans
17 lesquelles les Albanais de souche."
18 J'aimerais vous demander de définir la source dont vous parlez lorsque vous
19 dites les cercles, les milieux dans lesquels se mouvaient les Albanais
20 extrémistes. Est-ce que vous parlez de l'UCK ou d'autres organisations ?
21 R. J'ai déjà fourni une déclaration écrite au sujet des activités de l'UCK
22 et des extrémistes albanais, c'est à cela que je pensais, à cette structure
23 et à ses activités.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je vous demanderais de
27 ralentir un peu vos questions et vos réponses, car les interprètes ont du
28 mal à vous suivre. Veuillez maintenant poursuivre.
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1 M. RE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.
2 Q. Vous disposiez de 200 personnes qui faisaient partie de l'UCK et qui
3 informaient le service de Sûreté de l'Etat en 1998; c'est bien ce que vous
4 avez voulu dire, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, on peut le dire dans ces termes.
6 Q. A quel niveau de l'UCK ces personnes opéraient-elles -- au niveau
7 hiérarchique entre le haut et le bas de la pyramide ?
8 R. C'est une question à laquelle je pourrais répondre dans les termes
9 suivants : si nous parlons de la zone qui existait au niveau du Kosovo-
10 Metohija à l'état-major, nous avions un de nos hommes qui travaillait pour
11 le service de la Sûreté de l'Etat et nous en avions aussi à d'autres
12 niveaux. Nous avions des personnes infiltrées qui nous renseignaient dans
13 le détail sur les activités de l'UCK à différents niveaux de la hiérarchie.
14 Q. Vous en aviez au quartier général ?
15 R. Oui.
16 Q. Parlez-vous du Grand état-major ? Ou parlez-vous d'états-majors
17 régionaux ou locaux ? J'aimerais que ce soit tout à fait clair de façon à
18 ce que nous sachions exactement où se situaient vos indicateurs, à quels
19 niveaux hiérarchiques de l'UCK ?
20 R. Au plus haut niveau. Quand je dis le plus haut niveau, je pense que
21 c'est inutile de dire que nous étions parfaitement bien informés quant aux
22 activités de l'UCK sur les diverses parties du territoire contrôlées par
23 ces divers niveaux hiérarchiques.
24 Q. Pourquoi dites-vous ce que vous venez de dire ?
25 R. Parce que je le sais. Parce que c'est entre mes mains que passait ce
26 qu'il était convenu d'appeler les rapports des collaborateurs. Ces
27 collaborateurs, et ça je suis autorisé à le dire, qui étaient des personnes
28 organisées dans le secret et qui travaillaient secrètement pour le service
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1 de la Sûreté de l'Etat. Grâce aux rapports que je recevais et à toutes les
2 informations que je possédais déjà, il était très facile de constater et de
3 voir qu'il s'agissait de personnes qui occupaient des positions importantes
4 et qui œuvraient uniquement aux niveaux les plus élevés de cette
5 organisation.
6 Q. Comment étiez-vous en mesure d'apprécier la fiabilité des
7 renseignements fournis par ces personnes au service de la Sûreté de l'Etat
8 serbe ?
9 R. Au sein du service de la Sûreté de l'Etat serbe, comme dans tous les
10 services de ce genre, il existe une méthodologie qui permet d'apprécier la
11 fiabilité des renseignements venant de l'extérieur selon une grille
12 progressive, autrement dit aucun renseignement qui est reçu n'est considéré
13 au départ comme totalement fiable. Tous les renseignements reçus sont
14 vérifiés par confrontation à plusieurs autres sources qui doivent être au
15 minimum au nombre de deux. C'est donc une méthodologie qui repose sur
16 l'utilisation y compris d'un certain nombre de techniques.
17 Q. Pourriez-vous donner davantage de détails au sujet de la méthodologie
18 de la Sûreté de l'Etat lorsqu'elle voulait procéder à ce genre de
19 vérification croisée ?
20 R. S'agissant des activités de l'UCK, très précisément, je suis autorisé à
21 répondre. Dans le cadre du service de la Sûreté de l'Etat du Kosovo-
22 Metohija, je parle de la période où ce genre d'activités a commencé à être
23 constaté, l'UCK s'est lancée dans une action opérationnelle particulière.
24 Nous avons également mis en œuvre une opération particulière, mise en œuvre
25 par le service de la Sûreté de l'Etat, qui s'appuyait sur des plans rédigés
26 en bonne et due forme et définissant les conditions dans lesquelles le
27 service s'apprêtait à pénétrer cette organisation pour obtenir des
28 renseignements sur son activité.
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1 Dans ce cadre, les missions ont été réparties entre les différents centres
2 régionaux et sous-régionaux et les agents opérationnels ont reçu des
3 missions sur le terrain dans tous les secteurs où l'UCK était active.
4 Q. Qu'avez-vous fait pour corroborer ou vérifier ces renseignements et en
5 apprécier la fiabilité, qu'a fait votre service sur le plan physique ?
6 R. Très concrètement, lorsqu'un événement se produisait, on ne partait
7 jamais du principe que le premier rapport de collaborateurs. J'utilise
8 cette expression, rapport de collaborateurs, si vous m'y autorisez, car
9 c'est le nom technique de ce genre de documents que nous recevions de nos
10 collaborateurs. J'ai déjà dit que nos collaborateurs étaient des personnes
11 organisées dans le secret et travaillaient secrètement pour le service de
12 la Sûreté de l'Etat. Sur la base du rapport que nous recevions, nous
13 évaluions sa fiabilité, autrement dit par l'intervention d'un certain
14 nombre de méthodes, les renseignements contenus dans ce rapport étaient
15 confrontés à des rapports émanant d'autres sources, et dès lors que la
16 fiabilité avait été considérée comme suffisante, d'autres agents
17 opérationnels recevaient la mission de vérifier des détails de ces rapports
18 dans le cas où certains éléments n'étaient pas encore jugés suffisamment
19 fiables.
20 Ceci impliquait l'intervention d'un certain nombre de moyens techniques,
21 cela impliquait l'intervention de filatures, d'écoutes téléphoniques et de
22 photographies à l'insu de personnes photographiées, et d'enregistrements
23 audio.
24 Q. Dans votre déclaration écrite ainsi que dans ses annexes, vous parlez
25 de communiqués de l'UCK. Utilisiez-vous ces documents dans le cadre de
26 votre méthodologie destinée à vérifier la fiabilité des renseignements que
27 vous obteniez de vos informateurs ?
28 R. Absolument. La base de notre travail dans cette période au Kosovo-
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1 Metohija était les moyens humains, les sources humaines, les moyens
2 techniques, donc l'utilisation d'un certain nombre de machines, et les
3 moyens albanais, notamment les médias albanais. Cela nous permettait d'être
4 informés du climat général de l'opinion parmi les Albanais de souche
5 notamment.
6 Compte tenu du fait que parmi nous nous étions très peu nombreux à
7 parler la langue albanaise, nous nous sommes rendu compte que nous pouvions
8 tirer profit de l'analyse systématique des médias albanais et notamment
9 d'un journal paru dans la diaspora, c'est-à-dire Zerico Sovest [phon], une
10 publication albanaise qui paraissait en Suisse. Nous recevions ce journal
11 un jour ou deux après sa parution. C'était le temps nécessaire pour que le
12 journal nous parvienne physiquement jusqu'au département chargé des
13 analyses où nous en entamions la lecture et la vérification par
14 confrontation de son contenu avec d'autres sources d'information.
15 En dehors de cela, nous recevions également des renseignements du
16 service de la Sécurité publique, du service de renseignements militaires et
17 du ministère des Affaires étrangères. Nous échangions nos renseignements
18 avec les services de renseignements militaires étrangers.
19 Q. Qu'en est-il du système d'appréciation gradué de la fiabilité des
20 renseignements -- je veux dire de la valeur relative de certains éléments
21 d'information par opposition à leur valeur absolue ? Quel était le système
22 utilisé et quelle était la gradation que vous appliquiez ?
23 R. S'agissant de graduer la fiabilité des sources, nous nous appuyions sur
24 l'existence de trois catégories : une source fiable, une source
25 partiellement fiable, et une source non fiable, telle était notre
26 classification.
27 Nous avions le même genre de graduation pour les éléments
28 d'information qui nous parvenaient. Nous considérions que certains éléments
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1 d'information étaient fiables, d'autres partiellement fiables et d'autres
2 non fiables, selon le degré de vérification réalisé par nous.
3 Q. Qu'en est-il des sources que vous considériez comme "fiables" ou
4 "partiellement fiables" ? De quelles sources de renseignements s'agissait-
5 il ? Quels étaient vos critères pour appliquer cette graduation ?
6 R. Puisque je viens de parler du rapport des collaborateurs, c'était l'un
7 des éléments-clés utilisés par nous pour apprécier la fiabilité des
8 renseignements. On partait toujours du point de départ.
9 C'est-à-dire de l'appréciation particulière que l'on faisait de la
10 personne qui était notre collaborateur, de la qualité de cette personne dès
11 lors qu'elle se portait volontaire pour collaborer avec le service de la
12 Sûreté de l'Etat.
13 Il faut que vous sachiez que notre service, comme tous les services
14 de renseignements, finalement ne font jamais totalement confiance à
15 quelqu'un. Tous les éléments obtenus, même si la source fonctionne depuis
16 longtemps et que depuis longtemps cette source est notre collaborateur - je
17 ne vais plus utiliser le terme "source" à partir de maintenant,
18 j'utiliserai le terme de "collaborateur" - ce collaborateur est toujours
19 surveillé et ce qu'il fournit est fourni est toujours vérifié par
20 confrontation avec d'autres sources.
21 Il y avait des sources auxquelles nous faisions plus confiance que
22 d'autres, mais ça c'est inhérent à ce genre de travail.
23 Q. Comment les sources ou les informateurs étaient-ils récompensés par le
24 service de la Sûreté de l'Etat ?
25 R. Vous parlez de motivation ?
26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, Monsieur le
27 Président.
28 Un nouveau concept vient d'être introduit, grâce à l'utilisation du mot
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1 "informateurs". Jusqu'à présent, on parlait de collaborateurs. Nous
2 aimerions savoir s'il s'agit d'une seule et même chose. Peut-être pourrait-
3 on le demander au témoin ?
4 M. RE : [interprétation] Si cela peut être utile.
5 Q. Y a-t-il une différence entre sources, informateurs et collaborateurs ?
6 Si oui, pouvez-vous nous dire en quoi résidait cette différence ? Et quoi
7 qu'il en soit, veuillez nous dire, je vous prie, comment ces trois entités
8 étaient récompensées.
9 R. J'ai commencé mon exposé en parlant de collaborateurs, de rapports de
10 collaborateurs. Evidemment le terme utilisé dépend des objectifs
11 poursuivis. Lorsque nous avions des contacts directs avec la personne
12 concernée, nous l'appelions "collaborateur", il s'agissait de personnes qui
13 travaillaient directement pour le service de Sûreté de l'Etat.
14 Il y avait un autre terme, une autre expression qui était "contact
15 opérationnel". Les contacts opérationnels étaient des personnes qui
16 travaillaient pour le service de la Sûreté de l'Etat, mais pas encore à un
17 niveau suffisant pour pouvoir être qualifiées de collaborateurs. C'était
18 des personnes qui étaient accompagnées et qui étaient formées pour
19 atteindre le niveau du collaborateur.
20 Quant au terme "source", l'emploi du terme "source" est un emploi très
21 courant. Certains parlaient de "sources", d'autres parlaient
22 "d'informateurs", d'autres parlaient "d'initiés", d'autres parlaient de
23 personnes infiltrées, tout dépendait de la façon dont on parvenait aux
24 renseignements grâce à cette source humaine.
25 Pour qu'il n'y ait pas de confusion, Monsieur le Président, si vous êtes
26 d'accord, je pourrais me limiter à l'emploi de l'expression, "source
27 humaine" ce qui signifie que c'est un être humain, quelqu'un de vivant qui
28 a dit ce dont je vais parler. Cela peut-être éviterait tout malentendu.
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1 Excusez-moi, d'avoir utilisé d'autres termes jusqu'à présent, peut-être que
2 l'emploi d'un seul terme, d'une seule expression permettra d'éviter le
3 moindre risque de malentendu à l'avenir vis-à-vis des explications que je
4 vais fournir.
5 Q. Vous avez parlé il y a quelques instants de 200 personnes, membres de
6 l'UCK, qui vous informaient, s'agissait-il de sources vivantes ?
7 R. Oui.
8 Q. Comment ces personnes étaient-elles récompensées par le service de la
9 Sécurité de l'Etat dans la catégorie dont elle faisait partie ?
10 R. Pour le service de la Sûreté de l'Etat, il y avait des motivations
11 différentes selon la catégorie dont relevaient ces personnes. Première
12 motivation, c'était l'argent. Il y avait une deuxième motivation qui était
13 les opinions politiques, c'est-à-dire que certaines personnes étaient
14 opposées à ce qui se passait sur le plan politique. Et troisième
15 motivation, la compromission, c'est-à-dire que si une personne était
16 comprise d'une façon ou d'une autre et que le service de la Sûreté de
17 l'Etat le savait, le service pouvait recourir, par exemple, au chantage -
18 ça c'est quelque chose que font tous les services de sûreté d'Etat un peu
19 partout - et faire pression par le chantage sur cette personne pour en
20 faire une source d'information. J'utilise cette expression, mais ce sont
21 des expressions qui sont couramment utilisées dans tous les services
22 équivalents du monde. Dans cette catégorie, nous pensons principalement à
23 des personnes qui fournissaient des informations partiellement vérifiées,
24 et qui travaillaient sous pseudonyme. On s'adressait à ces personnes par
25 leur pseudonyme et elles utilisaient leur pseudonyme dans leurs rapports
26 également.
27 Si vous souhaitez, je peux vous donner d'autres détails sur notre
28 méthodologie et vous dire comment nous établissions des contacts avec ces
Page 8887
1 personnes.
2 Q. Si la Chambre insiste.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous laisse libre d'en décider,
4 Monsieur Re.
5 M. RE : [interprétation] Je suppose que la Défense va poser cette question,
6 donc je pourrais la poser moi-même d'abord.
7 M. EMMERSON : [interprétation] J'aimerais très certainement en savoir un
8 peu plus au sujet du chantage, si possible, au cours de l'interrogatoire
9 principal.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
11 M. RE : [interprétation] Il l'a dit de la façon la plus innocente qu'il
12 soit.
13 Q. Monsieur Stijovic, pourriez-vous expliquer la méthodologie que vous
14 mettiez en œuvre après le premier contact avec de telles personnes ?
15 R. S'agissant de la compromission, les personnes qui avaient un contact
16 avec l'UCK et qui avaient un rapport avec l'action secrète en faveur du
17 service de la Sûreté de l'Etat, le service se renseignait sur la
18 participation directe de ces personnes au préalable avec l'UCK dans le
19 cadre d'un certain nombre d'actions pénalement répréhensibles, par exemple.
20 Il arrivait parfois que des personnes dans cette catégorie se situent à un
21 tel niveau hiérarchique de l'UCK qu'elle soit considérée comme utile par
22 notre service s'agissant de nous fournir des renseignements, auquel cas
23 nous prenions la décision de les lier à notre service. Donc on appréciait
24 leur situation, on évaluait leur rôle, on obtenait des éléments fiables au
25 sujet de leur niveau de compromission dans le cadre d'actions menées par
26 l'UCK auxquelles ces personnes avaient participé, et on établissait un
27 contact avec ces personnes en leur promettant qu'elles ne seraient pas
28 poursuivies en justice, et cetera, et dès lors, ces personnes commençaient
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1 à travailler pour le service de la Sûreté de l'Etat, tout en étant bien sûr
2 suivies de très près.
3 Q. D'après votre expérience professionnelle, comment est-ce que cela a pu
4 avoir une influence sur la fiabilité ou la vérification de la fiabilité des
5 renseignements que vous aviez reçus ?
6 M. EMMERSON : [interprétation] Ce n'est pas une objection. Dans les lignes
7 23 à 25, le témoin a parlé du fait qu'on demandait aux individus de faire
8 certaines choses sous la surveillance et le contrôle de la Sûreté de
9 l'Etat, ce qui n'est pas du tout la même chose que la fourniture de
10 certains renseignements. Je me demande ce qu'on leur demandait de faire.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. S'agit-il de quelque chose de
12 différent ? Il s'agit toujours de fournir des informations, des
13 renseignements ?
14 Lorsque vous dites que vous leur demandiez de faire quelque chose en
15 échange de ne pas être poursuivis et qu'ils faisaient ces choses, qu'est-ce
16 que vous avez en tête quand vous parlez de ces choses-là ? De quoi
17 s'agissait-il ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Conformément à nos instructions, les personnes
19 récoltaient des informations concernant les activités de l'UCK et
20 obtenaient aussi pour nous des documents, nous informaient également des
21 réunions et rencontres qui étaient prévues, des contacts qu'avaient les
22 membres de l'UCK, nous donnaient par exemple des comptes rendus de leurs
23 réunions.
24 Lorsque j'utilise le terme "choses", les choses que faisaient ces
25 personnes, ce que je voulais dire était la récolte d'informations
26 concernant les activités de l'UCK.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous parlez de faire quelque
28 chose, est-ce que cela veut dire aussi modifier la réalité, par exemple, la
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1 contrefaçon de documents, placer des preuves là où elles n'avaient pas lieu
2 d'être, l'obtention de documents, ou est-ce qu'il s'agissait tout
3 simplement d'obtenir des documents et des informations qui existaient ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces personnes obtenaient des renseignements,
5 des informations et rien d'autre. Et si je le dis, je le dis sur la base de
6 tout ce que j'ai vu.
7 Il n'y avait pas de contrefaçon, pas de modification. Rien de tel n'a
8 été fait en ce qui concerne leur travail et coopération avec la Sûreté de
9 l'Etat. Ces personnes travaillaient sous le contrôle de la Sûreté de l'Etat
10 et tout ce qu'elles faisaient était d'obtenir des informations des
11 documents.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une question. Vous avez dit tout
13 à l'heure que vous aviez dans certains cas découvert des activités
14 compromettantes de la part de ces personnes. Alors si vous aviez quelqu'un
15 par exemple qui était membre actif de l'UCK, est-ce que pour vous c'était
16 une activité, une situation compromettante aux yeux de votre organisation
17 ou aux yeux de la police qui aurait pu être utilisée par la suite pour que
18 la personne ne soit pas poursuivie ?
19 Est-ce que vous, par exemple, vous auriez pu créer des situations
20 compromettantes et ensuite procéder à un chantage concernant la personne
21 sur la base de telles informations ?
22 Par exemple, si la personne avait une relation en dehors du mariage
23 avec quelqu'un d'autre, vous utilisiez cette situation pour faire chanter
24 la personne ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez
26 mentionné un détail. J'espère que vous n'avez pas d'objection à ce que je
27 revienne là-dessus. C'est un détail qui est utilisé par tous les services
28 de Renseignement. Un comportement immoral est utilisé comme moyen de faire
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1 chantage sur quelqu'un en confrontant la personne aux preuves de son
2 comportement, et ensuite obliger la personne à se conformer à vos souhaits,
3 c'est-à-dire à faire ce que vous lui demandez de faire.
4 Quand on parle des Albanais, il faut savoir que les familles sont des
5 -- il s'agit de patriarche. Le chef de famille est très haut placé et cela
6 veut dire que tous les comportements immoraux, l'adultère, l'abus d'alcool
7 par exemple, de telles choses donnent une possibilité pour rentrer en
8 conversation avec la personne, pour essayer de convaincre cette personne de
9 commencer à travailler avec le service.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer de me concentrer
11 mieux sur ma question, peut-être que je n'ai pas été suffisamment clair :
12 certaines personnes ont un comportement immoral sans y être encouragées par
13 d'autres. D'autres personnes ont besoin d'un peu d'encouragement. Disons
14 que j'aimerais savoir si cet encouragement fait partie des instruments, des
15 outils que vous utilisez ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument pas. Des informations, des
17 connaissances d'un comportement immoral de la part d'un individu, si nous
18 avions de telles informations, c'est uniquement ces informations que nous
19 utilisions. Nous n'avons jamais poussé quelqu'un à agir de façon immorale
20 pour pouvoir ensuite l'utiliser contre lui.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
22 M. RE : [interprétation]
23 Q. Nous avons maintenant cette clarification. Donc je vais revenir à la
24 question que j'étais en train de vous poser tout à l'heure en ce qui
25 concerne ces informations concernant le comportement immoral. J'aimerais
26 savoir est-ce que cela a eu un impact en ce qui concerne votre évaluation
27 de la fiabilité des informations obtenues de la part de ces personnes
28 immorales ?
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1 R. En ce qui concerne la qualité de ces informations dans un tel contexte,
2 je vous ai parlé des principes du patriarcat. Disons que lorsqu'on constate
3 que dans une famille qu'il y a un cas d'adultère, lorsque l'on constate
4 qu'il y a une situation qui pourrait être compromettante, même pour toute
5 la famille, pas seulement pour les personnes qui sont directement
6 intéressées, mais il pourrait y avoir des conséquences, par exemple, de
7 vendetta, cela existe au Kosovo-Metohija. Donc voilà un très bon outil pour
8 pouvoir recruter un individu. Plus la personne était haut placée au sein du
9 patriarcat, plus il y avait des possibilités d'exercer un contrôle sur la
10 personne.
11 S'il y avait quelqu'un qui était saoul et qui avait eu un problème de
12 voiture sur la route à cause de son ébriété, nous proposions à cette
13 personne de ne pas aller en prison pendant 30 jours en échange de certaines
14 choses. Bon, il y avait eu des problèmes de confiance. Lorsque vous
15 receviez des informations de la part d'une telle personne, il fallait
16 toujours regarder plutôt deux fois qu'une, de telles informations.
17 S'il y avait quelqu'un qui jouait par exemple et s'il y avait des
18 conséquences qui en découlaient, bien sûr qu'il y avait d'autres
19 possibilités-là.
20 S'il y avait quelqu'un qui consommait des drogues -- ou plutôt, si
21 quelqu'un était trafiquant de drogues, à ce moment-là, les informations
22 obtenues de la part d'une telle personne, disons que l'on regardait ces
23 informations avec beaucoup de prudence. On savait très bien qu'on ne
24 pouvait pas tout accepter comme vérité absolue. Il fallait absolument
25 procéder à une vérification croisée en utilisant d'autres sources pour être
26 sûrs que ce qui était raconté par la personne était véridique, sincère et
27 qu'on pouvait utiliser les renseignements fournis par cette personne comme
28 renseignements, non seulement pertinents mais fiables, pour pouvoir
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1 analyser les activités de cette personne des activités d'autres personnes
2 ou d'autres personnes d'une organisation. Il fallait pondérer absolument
3 tout.
4 Q. De quelle catégorie de sources vivantes est-ce que vous obteniez les
5 informations les plus fiables ?
6 R. Ce qu'on appelle un associé, un collaborateur. C'était le plus haut
7 niveau en ce qui concerne l'obtention de renseignements fournis par une
8 source vivante à la Sûreté de l'Etat. Ensuite vous aviez un autre niveau,
9 une connexion opérationnelle, un agent opérationnel. Ensuite, la récolte
10 des renseignements de la part des citoyens. Conformément à la loi
11 concernant la procédure pénale de mon pays, et en application de l'article
12 151, paragraphe 2, la police est autorisée à entendre une personne et ainsi
13 d'obtenir de cette personne des informations qui sont importantes.
14 Cette catégorie de source a souvent été utilisée et nous recevions beaucoup
15 d'informations de la part de personnes dans cette catégorie, mais de toute
16 façon dans tout état de cause, l'on procédait à une vérification croisée en
17 utilisant d'autres sources.
18 Si, par exemple, il y avait huit terroristes qui franchissaient la
19 frontière de façon illégale et faisaient de la contrebande d'armes, tous
20 les huit étaient entendus en ce qui concerne ce qui s'était produit et on
21 obtenait des informations de la part des huit. On évaluait de telles
22 informations. On avait donc une idée de ce qui se passait, quelle était
23 l'origine de l'activité et ce qui s'est passé par la suite.
24 On utilisait cette catégorie de sources vivantes assez souvent. Et sur la
25 base des enquêtes et des entretiens, un document officiel, une note
26 officielle a été rédigée en ce qui concerne les informations obtenues lors
27 de l'entretien. C'est ainsi que l'on appelait ce document.
28 Q. J'aimerais revenir à ce que vous avez appelé la catégorie de
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1 collaborateurs. Est-ce que vous pouvez nous dire exactement ce que faisait
2 quelqu'un de cette catégorie au sein du service, est-ce qu'il y avait
3 rémunération de telles activités et quel était le niveau de la rémunération
4 ?
5 R. Je pense que je vous ai déjà dit qu'un collaborateur était une personne
6 qui de façon organisée et systématique récoltait des informations et des
7 renseignements pour la Sûreté de l'Etat.
8 Q. Est-ce que ces personnes étaient employées par la Sûreté de l'Etat ?
9 Est-ce que ces personnes étaient rémunérées ou est-ce que vous les
10 récompensiez d'une autre façon ?
11 R. Non. Ce n'était pas des salariés de la Sûreté de l'Etat. C'étaient des
12 personnes qui étaient à l'extérieur, et qui de l'extérieur travaillaient
13 avec nous en tant que collaborateurs. Ces personnes ont été récompensées.
14 Je pense que c'est le terme idoine "récompensées" donc pour leur travail en
15 fonction de l'importance des renseignements et du type de renseignements.
16 Parfois il s'agissait d'une récompense mensuelle, donc de façon régulière,
17 mais dans d'autres c'était un échange d'un élément d'information, d'un
18 renseignement particulier qui était donné.
19 M. EMMERSON : [interprétation] A des fins de préciser pour le compte rendu
20 d'audience.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, Maître Emmerson.
22 M. EMMERSON : [interprétation] Le témoin a expliqué un certain nombre de
23 raisons et de motivations pour un individu pour qu'il puisse et pour qu'il
24 ait envie de donner des informations, c'est-à-dire : le chantage ou une
25 récompense pécuniaire. J'ai compris d'après ce qu'il dit que cela couvre
26 les collaborateurs et d'autres niveaux moins élevés. Si j'ai mal compris,
27 je pense qu'il faudrait apporter une précision.
28 Deuxièmement, en ce qui concerne la dernière réponse qui a été donnée
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1 par le témoin, c'est-à-dire le niveau de la récompense en fonction de
2 l'importance de l'information, il serait extrêmement utile encore une fois
3 si on peut en savoir plus en ce qui concerne le rapport entre la valeur des
4 informations et le montant de rémunération.
5 Je sais très bien que lors du contre-interrogatoire on pourrait poser
6 ces questions, mais je pense qu'il serait utile d'avoir une réponse dès ce
7 stade, donc pendant l'interrogatoire principal.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
9 Monsieur Re, nous allons posé la question immédiatement au témoin : lorsque
10 vous parlez des personnes qui travaillent avec vous, c'est-à-dire les
11 collaborateurs et le niveau immédiatement en dessous, est-ce que vous
12 parlez spécifiquement de ces catégories-là ou d'autres ? Vous ne parlez pas
13 de vos salariés, n'est-ce pas ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. C'est une autre catégorie. Les
15 collaborateurs sont des personnes qui ne sont pas salariées par la Sûreté
16 de l'Etat, donc qui ne touchent pas de salaires de la part de la Sûreté de
17 l'Etat.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis il y avait une autre question. Vous
19 leur donnez de l'argent en échange d'informations qui vous sont données,
20 est-ce que le niveau de rémunération est proportionnel à l'importance des
21 informations, c'est-à-dire est-ce que vous leur donniez plus si les
22 informations et leurs éléments sont considérés comme étant essentiels ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez raison, Monsieur le Président. Il
24 s'agit d'un échange ou de commerce, disons que si la personne est haut
25 placée, si les informations sont très utiles, la récompense pécuniaire doit
26 refléter la valeur, c'est bien sûr à la commission d'en déterminer le
27 montant. Cela peut s'élever à plusieurs milliers de deutsche marks ou même
28 d'euros, et tout cela en fonction de l'importance des renseignements, et
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1 cela dépend aussi du niveau de la personne concernée.
2 S'il s'agit de quelqu'un qui se trouve membre du cercle intérieur, et si
3 cette personne obtient et transmet des renseignements, par exemple, une
4 fois revenu de l'étranger, à ce moment-là il faut rembourser les frais et
5 aussi proposer une récompense. Donc cela dépend du niveau d'infiltration et
6 de la valeur des informations.
7 Il y avait des personnes qui recevaient en plus de leur remboursement de
8 frais, des paiements mensuels réguliers.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
10 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai un problème de compréhension. Le
11 témoin a dit que c'était à la commission de déterminer le montant exact. Je
12 présume qu'il existe une enceinte qui évalue le montant à payer à
13 l'individu qui fournit des renseignements ?
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que Me Guy-Smith a bien compris
15 de quoi il s'agissait, Monsieur Stijovic ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je me suis mal exprimé. Une proposition
17 de récompense vient d'un agent opérationnel avec qui le collaborateur
18 coopère et la décision ultime est prise par le chef, le responsable du
19 service de la Sûreté de l'Etat. L'agent opérationnel en question avait le
20 droit d'octroyer une récompense jusqu'à un certain montant, mais au-delà de
21 ce montant on avait besoin de formuler une demande par écrit, ensuite une
22 décision était prise.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
24 Pendant que vous réfléchissez, Monsieur Re, à la prochaine question, je
25 réfléchis moi-même à la possibilité de faire une pause, surtout que ceux
26 qui nous aident étaient présents avant que nous ne commencions l'audience.
27 Donc nous allons faire une pause jusqu'à 16 heures 30.
28 --- L'audience est suspendue à 16 heures 03.
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1 --- L'audience est reprise à 16 heures 35.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, Monsieur
3 Re, la Chambre a été informée du fait que la Défense n'objectera pas à la
4 demande de modification de l'acte d'accusation.
5 Alors de façon à accélérer les choses, je comprends bien que vous ne
6 présentez pas de requête pour ajouter des témoins à la liste des témoins ou
7 est-ce que vous ne savez pas encore si la modification de l'acte
8 d'accusation se fera. Néanmoins, la Chambre ne sera pas opposée à l'idée à
9 ce que vous fassiez une demande provisoire pour ajouter -- je crois qu'on a
10 mentionné trois témoins dans la demande de permission de modifier l'acte
11 d'accusation. Si vous voulez bien informer la Défense du temps qu'il vous
12 faut pour cela et si la Défense peut répondre.
13 Même s'il y a une telle demande, les choses sont assez évidentes, si
14 vous pouviez donner un peu plus de précisions pour savoir s'il faut
15 davantage de temps, notamment pour la déposition. Si vous faites une
16 demande provisoire, la Chambre ne verra pas de problème. Ce serait donc au
17 compte rendu. Si la Défense pouvait répondre à une demande provisoire de ce
18 genre, c'est-à-dire dans le cas de la modification, la permission de
19 modifier l'acte d'accusation sera accordée, à ce moment-là, l'Accusation
20 pourrait vouloir ajouter à la liste des témoins, les témoins A, B, C et si
21 la Défense pouvait bien répondre à cela ou dire à la Chambre si elle
22 s'oppose à une toute demande, ceci pourrait accélérer les choses.
23 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre.
24 Monsieur Stijovic, ceci n'a rien à voir avec vous, c'était simplement une
25 petite question de procédure qui se posait et que je devais évoquer. Nous
26 allons maintenant nous centrer à nouveau sur votre déposition, et nous
27 allons l'écouter avec soin.
28 Monsieur Re, c'est à vous.
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1 M. RE : [interprétation]
2 Q. Avant la suspension d'audience, nous étions en train de parler des
3 catégories de personnes qui fournissent des renseignements à la Sûreté de
4 l'Etat. Ce que j'aimerais savoir c'est : y avait-il une méthode qui
5 permettait de tirer des documents, y compris ceux qui sont annexés à votre
6 déclaration, quelle était la catégorie de personnes qui vous donnaient les
7 renseignements contenus dans ces documents ? Qu'il s'agisse de
8 collaborateurs, ou d'aides, ou de sources opérationnelles, ou quoi que ce
9 soit.
10 R. Oui.
11 Q. De quoi s'agit-il ?
12 R. Pour pouvoir apprécier la valeur d'un document qu'on aurait reçu d'une
13 source personnelle ou disons sur --
14 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Sur la base des documents reçus
15 par les sources personnelles.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Et sur la base des rapports dont j'ai parlé
17 qui sont annexés au dossier.
18 M. RE : [interprétation]
19 Q. Plus particulièrement, y a-t-il quelque chose dans la présentation du
20 document qui pourrait nous dire de façon immédiate quelle est la catégorie
21 des sources de ce document, c'est-à-dire s'il s'agit d'un collaborateur,
22 d'un contact opérationnel, ou quoi ?
23 R. Il y a une telle indication qui figure au début du document, et on peut
24 également le comprendre d'après ce type de document.
25 Q. Qu'est-ce qui indique au début du document de quel type de source il
26 s'agit, quelle est la source du document ?
27 R. Lorsque nous parlons de renseignements reçus de collaborateurs, le
28 format, la présentation des renseignements en question est présenté de la
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1 façon précisée dans ce document sous le titre "Rapport de collaborateur."
2 En ce qui concerne les opérateurs, les contacts, et les personnes que le
3 service avait entendu sur la base de l'article 151, sous-paragraphe 2 de la
4 loi sur la procédure pénale, ce document appelé "Note de service pour
5 conversation informative, note officielle."
6 Là, c'est un format ou un type de document qui contient des données
7 relatives à la source, et c'est clairement précisé. On dit précisément quel
8 type de source c'est et quel est le degré de fiabilité.
9 Q. Il y a dans le classeur qui se trouve devant vous 78 documents. Est-ce
10 que vous seriez en mesure de retrouver relativement facilement quelque
11 chose comme exemple de la catégorie, par exemple des rapports établis par
12 un collaborateur ? Et si vous le pouvez, juste préciser à quelle annexe de
13 document vous faites allusion, et nous reprendrons les choses à ce stade.
14 R. Ce n'est pas un problème. Toutefois il se peut que j'aie quelque
15 difficulté à le retrouver dans le classeur. Je vais peut-être trouver
16 effectivement un rapport présenté par un collaborateur.
17 Voilà. Il s'agit dans le classeur -- un instant s'il vous plaît --
18 l'intercalaire 48.
19 Q. Il s'agit de la pièce 2034 de la liste 65 ter, 2034. Si c'est un
20 document --
21 M. RE : [interprétation] Est-ce que ce document pourrait demeuré sous pli
22 scellé pour le moment comme il contient, je crois, le nom d'une source
23 vivante comme on l'appelle.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.
25 M. EMMERSON : [interprétation] Il se peut que je me trompe --
26 M. RE : [interprétation]
27 Q. Est-ce que ce document qui est daté du 16 avril 1998, en anglais on lit
28 : "Rapport d'un collaborateur." C'est bien cela ?
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Maître Emmerson, je ne vois pas
2 cela. Je ne crois pas que ce soit anonyme. Je vois à la première ligne
3 quelque chose, un numéro et un nom qui est peut-être un surnom.
4 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, bien.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même là, je voudrais être très prudent,
6 même avec les surnoms. Parfois les surnoms ont un rapport d'une façon ou
7 d'une autre avec le nom véritable.
8 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons voir un
9 très grand nombre de ces rapports qui semblent contenir des noms codes.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien -- restons prudents pour le
11 moment. Donc le document demeurera sous pli scellé.
12 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
13 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que l'on pourrait obtenir une
14 cote avant de poursuivre ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P932.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
18 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
19 M. RE : [interprétation]
20 Q. Maintenant, sans mentionner le nom de la personne qui est décrite comme
21 étant un collaborateur --
22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi. Avant qu'on aille plus loin,
23 puisqu'il s'agit d'une annexe, nous avons une objection permanente en ce
24 qui concerne toutes les annexes. Je ne sais pas si la Chambre souhaite
25 traiter de la question à ce stade.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense, en fait, que nous n'allons pas
27 trancher la question pour le moment.
28 M. GUY-SMITH : [interprétation] Donc la cote est provisoire aux fins
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1 d'identification.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il nous faut davantage de temps pour
3 décider.
4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Indépendamment de cela, je ne sais pas
6 pour le moment de quel type de document il s'agira. Et comme la Défense a,
7 à plusieurs reprises, évoqué ces motifs en ce qui concerne le versement au
8 dossier. Quant à la Chambre, ce qu'elle va faire, c'est une autre question.
9 Attendons de voir. Mais il est en tous les cas inscrit au compte rendu
10 d'audience que vous vous êtes opposé à cette admission.
11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Justement à cette fin et pour obtenir
12 quelques directives, est-ce que la Chambre pourrait également chaque fois
13 dire si nous traitons d'une annexe de façon à ce que nous puissions élever
14 une objection particulière ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si maintenant vous objectez à toutes les
16 annexes, à ce moment-là ceci est inscrit au compte rendu.
17 Maître Emmerson.
18 M. EMMERSON : [interprétation] Juste une nuance à ce sujet. A l'évidence,
19 c'est une objection à ces annexes lorsqu'il y a objection à la requête
20 elle-même. Il y a certaines annexes qui n'entrent pas dans cette catégorie.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc la réponse -- non, la requête
22 -- bien, la requête. Les annexes à la requête où vous avez énoncé de façon
23 très claire ceci au paragraphe tant et tant.
24 M. GUY-SMITH : [interprétation] Précisément.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que vous-même, Maître
26 Harvey --
27 M. HARVEY : [interprétation] Juste pour le compte rendu, je souhaiterais
28 qu'il soit bien clair --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous expliquez clairement dans
2 votre requête --
3 M. HARVEY : [interprétation] Elle est complémentaire.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends.
5 M. HARVEY : [interprétation] Donc je rejoins Me Emmerson et Me Guy-Smith.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a d'objection que si c'est
7 contredit par la présence ou l'absence d'une non objection, ou l'absence
8 d'une objection à vos requêtes; c'est bien cela ?
9 C'est au compte rendu.
10 M. HARVEY : [interprétation] Je vous remercie.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
12 M. RE : [interprétation]
13 Q. Sans mentionner le nom du collaborateur en question, est-ce que c'est
14 un surnom ou un nom qui a été donné à cette personne par le service aux
15 fins d'identifier ces personnes ?
16 R. Dans la première partie, il y a des données relatives à la source
17 d'information et on voit là qu'il s'agit du "collaborateur Jaglic". Jaglic
18 était un pseudonyme qui était utilisé de façon interne. Nous utilisions des
19 correspondances internes au sein de la Sûreté de l'Etat.
20 Et à côté du numéro -- à côté du pseudonyme, il y a un numéro.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, Monsieur Re. Juste pour être
22 vraiment prudent, j'ai dit que ce serait sous pli scellé parce qu'on avait
23 mentionné un pseudonyme. Quelle est votre position ?
24 M. RE : [interprétation] Peut-être que le témoin pourrait nous le dire si
25 c'est sans inconvénient, si ça ne peut pas faire de mal et c'est une
26 question interne qui ne permet pas d'identifier la personne, alors à ce
27 moment-là ça me convient. Mais si c'est un nom qui permettrait d'identifier
28 la personne --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que vous avez des préoccupations
2 concernant cette personne ? Non. Vous dites qu'il n'y a pas de risque. Donc
3 nous pourrions utiliser ce nom sans qu'il y ait de nécessité d'envisager et
4 de protéger davantage cette personne. C'est une préoccupation qui pourrait
5 permettre d'identifier la personne.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire ceci : même la personne
7 concernée ne connaît pas son propre pseudonyme. Ceci n'a rien à voir avec
8 son nom. C'est un nom de code qui est attribué à la personne par l'agent
9 qui l'a contactée, lui ou elle, et c'est simplement un nom de code qui est
10 utilisé à l'usage interne. Je ne peux pas vous dire si ceci peut mettre une
11 personne en danger. Je peux simplement vous dire qu'il ne peut pas y avoir
12 de liens établis. Le pseudonyme n'a rien à voir avec le nom.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agissait du nom.
14 Maintenant, en ce qui concerne la teneur du rapport, est-ce que ceci
15 pourrait être de nature à permettre d'identifier la personne qui l'a fait.
16 Je ne le sais pas. Je ne l'ai pas encore lu. Si vous avez des
17 préoccupations à ce sujet, à ce moment-là on maintient ce document sous pli
18 scellé. Je laisse à M. Re le soin de définir quel sera le moment qui
19 convient pour aller en audience à huis clos partiel.
20 Maître Emmerson.
21 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous établir, s'il vous plaît, par
22 un "oui" ou par un "non" tout simplement, et non pas avec une réponse
23 développée, si le témoin lui-même connaît l'identité de la personne qui est
24 mentionnée par ce pseudonyme ?
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Demandons au témoin.
26 Vous venez de nommer cette personne par son pseudonyme, est-ce que
27 personnellement vous connaissez cette personne pour laquelle un pseudonyme
28 a été employé ici ? Est-ce que vous l'avez rencontrée ? Est-ce que vous
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1 savez qui c'est ? Je ne vous demande pas qui sait, mais je vous demande si
2 vous savez qui c'est ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le sais.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
5 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
6 M. RE : [interprétation]
7 Q. Est-ce que le fait de publier les renseignements qui figurent dans ce
8 rapport à votre avis pourrait donner lieu au danger de trouver l'identité
9 de la personne ? Si la teneur de ce rapport était connue, est-ce que
10 l'identité de cette personne risquerait d'être révélée ?
11 R. Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors peut-être que par précaution, nous
13 devrions aller en audience à huis clos partiel dès que vous commencez à
14 poser des questions qui ont un caractère touchant à la teneur.
15 M. RE : [interprétation]
16 Q. La seule chose qui m'intéresse, c'est la forme du document, à savoir un
17 document qui peut nous permettre d'identifier comme étant fourni par un
18 contact opérationnel. Qu'y a-t-il dans ce document qui vous permet à même
19 de dire à la Chambre de première instance que tel renseignement a été
20 fourni -- je crois que vous avez dit par "un associé." Veuillez me
21 corriger, si je me trompe.
22 R. C'est exact.
23 Dans toute analyse sérieuse ou après avoir procédé à une telle analyse, on
24 pourrait se rendre compte de qui est cette personne. Au point 2, nous avons
25 des données concernant les activités de l'ennemi, ça veut dire que cette
26 personne parle de la structure, de la position, et de l'endroit de
27 différentes personnes.
28 Q. Peut-être que je ne suis pas tout à fait clair. Ce que je voulais
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1 savoir, c'était simplement ceci : en regardant ce document, qu'est-ce qui
2 vous permet de déduire, d'après ce qui est écrit tout en haut du document,
3 le nom du collaborateur, le numéro, ce qui est écrit dans ce document, et
4 cetera ? Qu'est-ce qui vous permet de dire, qu'est-ce qui vous dit qu'il
5 s'agit d'un rapport qui a été établi par un collaborateur et non pas un
6 type différent de source vivante ?
7 La question est simplement basée sur la façon dont le document se présente
8 et ce qu'il contient.
9 R. Très bien. Ici c'est un document authentique de la Sûreté de l'Etat. Il
10 a été rédigé par agent opérationnel de la Sûreté qui était en contact avec
11 un collaborateur.
12 L'authenticité peut être facilement vérifiée si l'on regarde dans le
13 coin en haut à gauche, où il est dit très clairement de qui émane ce
14 document : "République de Serbie, ministère de l'Intérieur, service de la
15 Sûreté de l'Etat, extrémisme albanais et terrorisme. Centre de Prizren de
16 la Sûreté de l'Etat, bureau de Pec de la Sûreté de l'Etat."
17 En dessous de ça il y a un code et le numéro de l'agent. En dessous
18 de ça, il y a la date de la rédaction et dans le coin droit, on peut lire
19 que les données transmises par le collaborateur ont trait à l'action Krug,
20 "cercle," et qu'elle concerne différentes personnes sur lesquelles la
21 Sûreté de l'Etat a procédé à des enquêtes. Je veux dire cela par les
22 acronymes "OO" et "PO" qui veulent dire cela.
23 Q. Votre déposition précédemment c'était que les renseignements les plus
24 fiables provenaient des collaborateurs, ceci par comparaison avec d'autres
25 catégories moins importantes que vous avez décrites comme étant des
26 contacts opérationnels -- d'agents -- excusez-moi -- des collaborateurs ?
27 Quel est le code ou la présentation ou la clé qui permet de voir qu'il
28 s'agit d'un rapport d'un collaborateur ?
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1 R. La première partie d'un rapport d'un collaborateur se présente comme
2 ceci. Le premier point contient les données sur la source d'information.
3 C'est ça que nous employons lorsqu'on établit un rapport.
4 En dessous, nous avons une description de l'objet. Ici il est dit très
5 clairement : "Collaborateur Jaglic."
6 C'est la forme, la forme standard, et toutes les données qui sont
7 mentionnées ici ce sont des données qui doivent se trouver ici dans ce type
8 de document, et ça doit également décrire ce que ce rapport du
9 collaborateur contient, et également décrire quel est l'objet et également
10 le moment où le rapport a été établi par ce collaborateur.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, il se pourrait qu'il y ait
12 un problème de traduction. Le mot utilisé traduit en anglais comme
13 "collaborator" ou collaborateur, l'original étant "saradnika" nous
14 souhaiterions savoir de nos interprètes si le mot "saradnika" est
15 collaborateur ou devrait être également traduit ou est aussi traduit comme
16 un associé. Je serais heureux si on pouvait me préciser les choses en
17 anglais maintenant.
18 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise : Ces mots sont
19 analogues. Toutefois au début de l'audience d'aujourd'hui, nous avons
20 utilisé le mot "associate" en anglais, donc nous avons continué à utiliser
21 le même mot de façon à essayer d'éviter toute confusion.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le mot utilisé par le témoin au
23 début lorsqu'il a parlé d'un "associate", c'est le même mot que nous
24 trouvons maintenant, c'est-à-dire "saradnika".
25 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise : Oui.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Ce point est donc
27 éclairci.
28 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, mais est-ce que je pourrais
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1 profiter de cette interruption pour demander à M. Re s'il pourrait préciser
2 auprès du témoin par un oui ou par un non, plutôt que par une réponse
3 développée, si dans ce rapport et dans des rapports analogues, le témoin
4 lui-même sait ce que veut dire le code 0389 du contact opérationnel,
5 qu'est-ce que ça indique dans ce cas ? En d'autres termes, s'il sait quelle
6 est l'identité de l'agent, de l'opérateur.
7 M. RE : [interprétation] Il a dit que c'était le cas. Il a dit qu'il
8 connaissait la personne.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Monsieur Re, je crois que c'est moi
10 qui ai posé la question de savoir s'il connaissait personnellement la
11 personne à qui on avait attribué un pseudonyme dans ce rapport. Et je pense
12 que Me Emmerson est maintenant en train de poser la question concernant le
13 numéro de cette agence, à savoir 04845 juste à côté du "Détachement de Pec
14 de la Sûreté de l'Etat." Je pense qu'en regardant ce numéro, je ne vous
15 demande pas de qui il s'agit, je ne vous demande pas qui c'est. Mais cette
16 personne de par son numéro 04845, est-ce que vous pourriez savoir qui c'est
17 ? Est-ce que vous savez qui c'est ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne cette personne-là, dans le
19 cas présent, ce rapport de l'associé collaborateur, la réponse est "oui".
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je comprends bien votre
21 réponse comme voulant dire que peut-être que je ne saurais pas pour
22 d'autres, mais celui-ci, oui, je sais ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez parfaitement raison. Vous avez
24 parfaitement compris. C'était l'un des plus importants et c'était une
25 source de qualité pour la surface. Par conséquent, nous appréciions à leur
26 juste valeur ses rapports. Et en vertu de mes fonctions, je sais qui est
27 cette personne.
28 Si vous le permettez, Monsieur le Président, je ne comprends pas pour
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1 l'anglais, mais ce que je peux voir à l'écran c'est "collaborateur" et je
2 pense que c'est un problème de traduction. Un associé est un associé. Un
3 collaborateur dans notre terminologie a une connotation différente, en
4 serbe tout au moins.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends cela, donc le mot
6 "collaboration" a une connotation négative; tandis que vous, vous vouliez -
7 -
8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Ceci soulève un --
9 M. EMMERSON : [interprétation] Il n'est pas absolument sûr que cette
10 question ait été éclaircie. Je pense qu'avec cette réponse du témoin,
11 d'après comme je l'ai comprise, il répète la réponse qu'il a déjà faite sur
12 le fait que personnellement il savait qui était Jaglic.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça j'ai compris. Je lui ai donné le
14 numéro.
15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. Et moi --
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le numéro qui se trouvait tout en haut.
17 M. EMMERSON : [interprétation] Je m'en rends bien compte. Mais la réponse a
18 trait à la source, plutôt qu'à l'agent.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais revenir un petit peu en
20 arrière sur ce qu'a dit le témoin en ce qui concerne ce numéro. Une
21 seconde, s'il vous plaît.
22 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine française, le mot
23 collaborateur est utilisé en français car la signification de saranik est
24 la personne qui coopère et le mot coopérateur n'existe pas en français.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais un peu plus bas, Maître Emmerson,
26 je vous renvoie à la page 38 du compte rendu d'audience, non plutôt, la
27 page 39, ligne 25. Le témoin a expliqué dans les lignes qui précèdent de
28 quel document il s'agissait, il a cité les mots, République de Serbie,
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1 ministère de l'Intérieur, service de Sûreté de l'Etat, extrémiste albanais
2 et terrorisme, centre de la Sûreté de l'Etat de la République de Prizren,
3 bureau de la Sûreté de l'Etat de la République de Pec.
4 Ensuite on voit un code.
5 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le code qui désigne l'agent
7 opérationnel.
8 En tout cas c'est ce que j'ai compris.
9 M. EMMERSON : [interprétation] Il y a deux numéros à ce niveau-là.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrions peut-être demander une
11 précision quant à la signification de l'agent opérationnel, ce n'est pas le
12 collaborateur, c'est la personne qui est l'auteur de ce rapport. Est-ce que
13 c'est bien cela ? Qui a donc rédigé ce rapport après avoir reçu des
14 renseignements de quelqu'un dont le pseudonyme apparaît un peu plus bas
15 dans le texte ? Est-ce que la chose a bien été comprise ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est absolument exact.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous connaissez l'identité de
18 l'agent opérationnel en question, et pas seulement de la personne qui est
19 mentionnée dans ce texte sous un pseudonyme ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas précis, s'agissant de ce rapport
21 du collaborateur Jaglic, la réponse est "oui".
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur Re.
23 M. RE : [interprétation]
24 Q. Vous avez dit il y a quelques instants que : "Il s'agissait d'une
25 source de qualité importante pour le service et que, par conséquent, vous
26 avez accordé une certaine valeur à son rapport." Est-ce que vous parliez de
27 l'agent opérationnel ou de Jaglic ?
28 R. Je parlais du collaborateur, je parlais de Jaglic, je ne parlais pas de
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1 l'agent opérationnel, mais de notre collaborateur Jaglic.
2 Q. Qu'est-ce qui, dans les rapports de Jaglic, permettait de leur accorder
3 une telle valeur et de les considérer comme d'une telle qualité ?
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je ne sais pas ce que sera
5 la réponse, mais ne pensez-vous pas qu'il serait bon de passer à huis clos
6 partiel en ce moment ?
7 M. RE : [interprétation]
8 Q. Est-ce que dans votre réponse vous prononcerez des mots qui
9 risqueraient de mettre en cause le secret de l'identité de M. Jaglic ? Dans
10 ce cas, nous devrons passer à huis clos partiel.
11 R. De mon côté, non, je ne pense pas que je vais commettre la moindre
12 omission ou commettre la moindre erreur dans ce domaine.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
14 M. RE : [interprétation]
15 Q. En tout cas je vous invite à répondre avec la plus grande prudence,
16 Monsieur.
17 R. La personne dont il est question, dont le pseudonyme est "Jaglic",
18 était une personne qui renseignait le service de Sûreté de l'Etat depuis un
19 temps relativement long, il l'informait au sujet des activités terroristes
20 de l'UCK dans le pays mais également au sujet d'activités qui avaient lieu
21 dans la diaspora et qui contribuaient à promouvoir l'UCK. Je parle de la
22 diaspora albanaise, bien entendu.
23 Q. Mais qu'est-ce qui vous a permis d'apprécier la nature de ses
24 renseignements comme étant des renseignements de qualité ?
25 R. Parce que les informations fournies par lui dans les premières étapes
26 nous ont beaucoup aidé à établir qui était l'inspirateur et l'organisateur
27 de l'UCK dans ses débuts et qui participaient à ses activités. D'abord à
28 l'étranger dans les premiers temps puis également à l'intérieur du pays.
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1 Q. Cette personne était-elle membre de l'UCK ?
2 R. Oui.
3 Q. Comment les renseignements fournis par cette personne ont-ils été
4 vérifiés ?
5 R. Nous les avons vérifiés en nous adressant à certains de nos autres
6 collaborateurs. En les confrontant avec des renseignements qui nous
7 provenaient de Services secrets étrangers. Et par voie de filature d'un
8 certain nombre de personnes dont Jaglic nous avait parlé et pour lesquelles
9 nous avions les possibilités concrètes de procéder à ces filatures dans le
10 secret.
11 Q. En disant cela, est-ce que vous parlez d'éléments que vous connaissiez
12 en rapport avec Jaglic sur la base de votre vécu personnel, ou est-ce que
13 vous parlez en général de la façon dont votre service procédait à des
14 vérifications de cette nature ?
15 R. Puisqu'à l'instant nous étions en train de parler de Jaglic, ce que je
16 dis repose sur mon expérience personnelle ainsi que sur l'expérience
17 acquise par le service de Sûreté de l'Etat dans ses contacts avec lui. Par
18 ailleurs, nous procédions également à des vérifications croisées en
19 comparant les renseignements émanant de lui, à des renseignements qui
20 venaient d'autres personnes qui étaient également des collaborateurs du
21 service et à des renseignements provenant d'autres sources, mais cela
22 c'était une méthode de vérification qui s'appliquait à toutes les
23 informations reçues quelles quel soient, et pas seulement à celles
24 provenant de Jaglic.
25 Q. Pour revenir au format de ce document. Vous nous avez dit que le numéro
26 04845 était le code d'un agent opérationnel. On voit dans ce document la
27 mention "0389" qui est manuscrite et on voit également le numéro "02021" un
28 peu à droite du texte. A quoi cela correspond-il ?
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1 R. Le premier chiffre signifie le numéro d'enregistrement dans le registre
2 qui était tenu par le service responsable du service de Sûreté de l'Etat.
3 Donc c'est sous ce numéro que ce document a été enregistré.
4 Le deuxième numéro, le 02021, est le numéro qui indique quel était le
5 numéro d'enregistrement de ce document au centre régional de Prizren de la
6 Sûreté de l'Etat. Donc le premier numéro correspond au centre de la
7 république; et le deuxième au centre de Prizren.
8 Q. Dans votre déclaration écrite vous parlez du sens à donner à la mention
9 "OA Krug" j'y viendrai dans un instant.
10 Mais en dessous on voit les lettres "OO" et en dessous les lettres
11 "PO". A quoi correspondent-elles ?
12 R. Le sigle "OA", ou le sigle "OO", ou le sigle "PO" sont des sigles qui
13 indiquent la nature de la tâche opérationnelle menée dans cette période par
14 le service de Sûreté de l'Etat. Car nos opérations sont des éléments assez
15 complexes qui peuvent être subdivisées en plusieurs éléments et chacune est
16 évoquée par un de ces sigles, en rapport avec une personne déterminée ou un
17 événement déterminé qui nous a permis de lancer cette opération. Chacune
18 des opérations est associée à une date limite d'achèvement de l'action
19 prévue.
20 Quant au sigle "OO" il signifie pré-opérationnel, c'est-à-dire un niveau
21 inférieur au niveau d'une action opérationnelle. Cela signifie que des
22 personnes sont en train de mettre en œuvre des mesures qui précèderont
23 l'action opérationnelle. Voilà ce que cela signifie.
24 Ceci donc concerne des mesures qui s'appliquent par rapport à une
25 personne déterminée, des mesures diverses sur le plan du travail concret à
26 réaliser et du rapport entretenu par notre service avec la personne chargée
27 de ce travail.
28 Et j'ajouterai ceci : ceci signifie également que les renseignements
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1 fournis par la personne concernée concernent des personnes qui sont
2 évoquées dans des rapports antérieurs. Donc des personnes qui ont eu à voir
3 avec des mesures opérationnelles réalisées antérieurement. Des personnes
4 qui ont un rapport avec des actions opérationnelles menées antérieurement.
5 Donc voilà les différents types de mesures qui concernent les différentes
6 natures de mission.
7 Q. Divisons les choses en deux. Premier sigle "OO". Est-ce que vous
8 pourriez lentement nous dire ce que signifient les mots qui sont désignés
9 par les initiales "OO".
10 R. "OO" signifie réalisation opérationnelle.
11 M. RE : [interprétation] Est-ce que les interprètes pourraient nous dire le
12 sens de ces termes, cela n'a pas été entendu.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment le compte rendu d'audience
14 ne reprend pas les termes prononcés par le témoin. Donc M. Re demande aux
15 interprètes de dire ce que signifie le mot "obrada".
16 L'INTERPRÈTE : Obrada signifie réalisation ou traitement opérationnel.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
18 M. RE : [interprétation]
19 Q. Et OP, est-ce que vous pouvez nous dire ce que signifie le sigle "PO" ?
20 R. "PO" cela signifie traitement pré-opérationnel, c'est-à-dire la
21 première mesure qui est appliquée à un document.
22 Je vais vous en donner un exemple. Le service de Sûreté de l'Etat
23 apprend par exemple qu'une action hostile a lieu dans un secteur déterminé.
24 C'est le premier élément d'information reçu par le service. Cela signifie
25 que quelqu'un va s'intéresser à cette action au sein du service.
26 Si le service reçoit plusieurs éléments d'information dans une
27 période brève qui tous indiquent qu'une personne déterminée ou un groupe
28 déterminé participe à une activité déterminée, alors la personne ou le
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1 groupe concerné sont évoqués avec l'adjonction du sigle "PO" ce qui
2 signifie application de traitement pré-opérationnel. C'est le genre de
3 mesures qui s'appliquent à la personne ou au groupe dont je viens de
4 parler.
5 Au fil du temps, lorsque les renseignements relatifs aux activités de
6 cette personne ou de son groupe deviennent plus intenses ou plus pertinents
7 pour le service ou plus nombreux, alors les premières mesures sont
8 remplacées par des mesures d'une autre catégorie qui s'appellent mesures
9 opérationnelles, donc traitement opérationnel.
10 Quant aux actions opérationnelles, elles sont donc à un niveau
11 supérieur au traitement pré-opérationnel et impliquent un travail plus
12 complexe à l'égard de la personne ou du groupe qui a initialement été
13 soumis au traitement pré-opérationnel.
14 Q. Dans ce document, dans le titre du document sur la gauche, ligne 4, on
15 lit, "III/AET." Que signifie "III", je vous prie, et que signifie "AET" ?
16 Mais répondez lentement.
17 R. Le service de Sûreté de l'Etat organisait son travail sur le principe
18 d'une hiérarchie territoriale. Les trois "III" majuscules sont un trois en
19 caractère romain qui se réfère à cette hiérarchie territoriale et
20 professionnelle.
21 Dans la catégorie III, on trouvait les missions relevant d'une catégorie
22 particulière, c'est-à-dire l'antiterrorisme, la lutte contre les
23 extrémistes albanais ou la lutte contre les terroristes et les extrémistes
24 serbes ainsi que la lutte contre les extrémistes et les terroristes
25 musulmans.
26 Pour ne pas m'étendre, je dirais que c'était une catégorie de missions qui
27 concernaient la sûreté intérieure.
28 Nous avions également une catégorie de travail correspondant au grand I et
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1 au grand II, si cela vous intéresse je peux vous donner des détails à ce
2 sujet, mais je ne vais pas le faire immédiatement. Je suppose que
3 maintenant je n'ai pas plus besoin de répondre au AET.
4 Q. Veuillez nous dire ce que signifie le sigle "AET" ?
5 R. C'est un sigle qui signifie "extrémisme et terrorisme albanais."
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, nous voyons à la page 39,
7 ligne 24 du compte rendu d'audience qu'il est demandé au témoin de
8 s'expliquer sur l'en-tête de ce document.
9 Veuillez poursuivre.
10 M. RE : [interprétation]
11 Q. Donc le code de "04845", est-ce que c'était un code applicable à un
12 agent opérationnel qui correspondait à ce numéro en cinq chiffres ?
13 R. Moi personnellement mon code avait cinq chiffres. Mais ça c'est un
14 problème lié à l'utilisation de l'ordinateur et à des questions
15 d'intervention de machine pour comprimer les renseignements et protéger les
16 agents opérationnels. Je pense que tous les agents opérationnels habilités
17 avaient un code en cinq chiffres qui représentaient leur nom et un certain
18 nombre d'autres éléments d'information les concernant.
19 Q. Est-ce qu'il y avait une liste quelque part où on voyait tous les codes
20 et les noms des personnes correspondant au regard de ces codes ?
21 R. Absolument, oui.
22 Q. Un certain nombre de codes sont visibles ici qui sont composés de cinq
23 chiffres. Est-ce que de mémoire vous vous rappelez l'identité de certaines
24 personnes dont le code aurait été un numéro à cinq chiffres ?
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a déjà répondu à cette
26 question en fait.
27 Je lui ai demandé s'il reconnaîtrait telle et telle personne correspondant
28 à tel code, il a dit "oui". Ensuite à une question plus précise lui
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1 demandant s'il reconnaîtrait toutes les personnes correspondant à tous les
2 codes, il a dit : "Pas forcément de mémoire mais cette personne-là, je la
3 reconnais."
4 M. RE : [interprétation] Je ne parle pas de tous les représentants du
5 service. Je fais référence aux documents qui sont annexés à sa déclaration
6 écrite en lui demandant s'il connaît l'identité des personnes correspondant
7 aux codes évoqués dans sa déclaration écrite. Je pense que vous-même,
8 Monsieur le Président, lui aviez posé une question plus générale, à moins
9 que je ne me sois trompé.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, donc vous parlez maintenant de tous
11 les codes en cinq chiffres que l'on trouve dans les documents annexés à sa
12 déclaration écrite. Je n'avais pas bien compris.
13 M. RE : [interprétation] D'accord.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si telle est bien votre question, alors
15 elle n'a pas encore reçue réponse. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
16 J'avais compris votre question de façon différente.
17 Veuillez procéder.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que vous pourriez répéter
19 votre question, je l'ai oubliée.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, est-ce que je pourrais vous
21 demander de le faire -- non, je vais le faire moi-même.
22 Vous avez vu les annexes à votre déclaration écrite. Dans ces annexes on
23 trouve un certain nombre de rapports d'agents opérationnels qui sont tous
24 désignés par des codes à cinq chiffres. Parmi les personnes correspondant à
25 ces codes, est-ce que vous pouvez dire si vous les connaissez toutes ces
26 personnes, tous ces agents ? Est-ce que vous les reconnaissez sur la base
27 de ce code à cinq chiffres ou est-ce que vous n'en connaissez que certains
28 d'entre eux ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument. La plupart des documents qui
2 m'ont été soumis concernent des agents opérationnels que je connaissais
3 personnellement. En tant que chef du département chargé des analyses,
4 j'étais fréquemment en contact oral avec ces agents pour évaluer la
5 véracité ou la fiabilité des renseignements fournis par eux et les préparer
6 à leurs activités à venir.
7 M. RE : [interprétation]
8 Q. J'aimerais maintenant vous soumettre le paragraphe 7 de votre
9 déclaration écrite dont je demande l'affichage sur les écrans grâce au
10 système électronique Sanction.
11 Il est question d'une opération baptisée Krug, qui signifie cercle,
12 opération qui a eu lieu dans les années 1990 et dont vous dites qu'elle
13 s'est appuyée sur les sources de renseignements décrites précédemment,
14 c'est-à-dire des sources humaines, ainsi que des sources de surveillance
15 électronique et des articles de presse.
16 Quel était l'objet de cette opération Krug, et qui l'a autorisée ?
17 R. Très concrètement, j'aurais beaucoup de choses à dire à ce sujet, ne
18 perdons pas de vue avant tout que c'est moi qui ai personnellement proposé
19 la mise en œuvre de cette opération Krug, et déterminé son objectif final,
20 ainsi que les diverses missions qui ont finalement été retenues par le
21 service de la Sûreté de l'Etat.
22 La nécessité de cette action a été démontrée par le début de l'escalade de
23 l'activité terroriste et extrémiste de la part des Albanais au Kosovo-
24 Metohija vers la fin de l'année 1996. Sur la base des renseignements que
25 nous avons reçus pendant cette période d'escalade, nous nous sommes rendu
26 compte après vérification que c'était l'action organisée d'une organisation
27 illégale qui était à l'origine de ces activités, et que cette organisation
28 était l'UCK. Sur la base de tous ces renseignements, j'ai proposé
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1 personnellement que l'on agisse afin de définir, de circonscrire, et de
2 faire cesser cette activité. Ceci a impliqué l'action des centres régionaux
3 ainsi que du centre au plus haut niveau.
4 Les renseignements reçus étaient transmis à Belgrade, c'est le
5 ministre de l'Intérieur de Serbie qui a donné son accord pour que cette
6 opération se mène de façon active sur proposition du chef du service de la
7 Sûreté de l'Etat, et la mise en œuvre de cette opération a impliqué un
8 travail destiné à mettre un terme à l'activité de l'UCK, ainsi qu'à mettre
9 un terme à l'action du mouvement populaire du Kosovo, le LPK.
10 Q. Qui était responsable de cette opération au Kosovo ?
11 R. Cette opération relevait directement du service de la Sûreté de l'Etat
12 du Kosovo-Metohija. A cette époque-là, le chef du service de la Sûreté de
13 l'Etat du Kosovo-Metohija était David Gajic. A la fin de l'année 1998,
14 c'est Milosav Vilotic qui lui a succédé. Le chef opérationnel qui se
15 situait entre eux et moi sur le plan hiérarchique était Milan Lakovic, chef
16 du centre de la Sûreté de l'Etat de Pristina.
17 Q. Passons au paragraphe 10 de votre déclaration écrite, dont je demande
18 également l'affichage sur les écrans grâce au système Sanction. Vous dites
19 que pratiquement tous les rapports, tous les documents écrits relatifs à
20 l'activité terroriste de l'UCK dans la région de Dukagjin en 1998
21 comportent des références à Ramush Haradinaj ou à un membre de sa famille.
22 Les renseignements dont il est question à ce niveau du texte ont-ils le
23 moindre rapport avec l'opération Krug ? Oui ? Non ? Peut-être ?
24 R. Je n'ai rien entendu. Les interprètes ont dit en anglais qu'ils
25 n'avaient pas entendu le Procureur.
26 Q. Paragraphe 10 de votre déclaration écrite. Est-ce que vous pourriez
27 lire les premières lignes de ce paragraphe ?
28 R. Le paragraphe 10 --
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1 Q. Non, pas à haute voix. Prenez connaissance simplement de ce que
2 comporte ce paragraphe.
3 Est-ce que les renseignements dont il est question dans ce paragraphe ont
4 été recueillis par votre service dans le cadre de l'opération Krug ?
5 R. Oui.
6 Q. Un peu plus loin dans ce même paragraphe, vous parlez de conversations
7 téléphoniques enregistrées, donc d'écoute téléphonique et de surveillance
8 électronique de Ramush Haradinaj, Lahi Brahimaj et de leurs associés les
9 plus proches.
10 Où se trouvent les enregistrements physiques de ces conversations, les
11 cassettes ou bandes magnétiques ?
12 R. Je ne saurais vous répondre exactement à cette question. Je sais que
13 ces conversations ont été enregistrées et transcrites sur le papier, que
14 des enregistrements audio et des transcriptions papier existent, mais je ne
15 sais pas exactement où se trouvent ces documents. Vous pourriez peut-être
16 interroger mes supérieurs à Belgrade pour leur demander où se trouvent ces
17 documents aujourd'hui.
18 Q. Pensez-vous que ces documents existent encore ?
19 R. Je suis convaincu qu'une bonne partie de ces documents existent
20 toujours. Car je sais personnellement qu'à la veille des bombardements une
21 partie importante de cette documentation a été retirée du territoire du
22 Kosovo-Metohija et installée dans des lieux plus sûrs sur le territoire de
23 la République de Serbie.
24 Q. J'aimerais maintenant que nous passions au paragraphe 18 de votre
25 déclaration écrite, où il est question d'une anthologie de documents de
26 l'UCK et d'un livre publié par Gafurr Elsani.
27 Vous dites que l'introduction à ce livre a été écrite par un certain Emrush
28 Dzemailji, qui a écrit que l'UCK avait participé au projet du LPK. Qui
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1 était ce Emrush Dzemailji ?
2 R. Emrush Dzemailji à ce moment-là présidait le Mouvement populaire pour
3 la République du Kosovo. C'était l'un des membres dirigeants de cette
4 organisation illégale qui agissait dans le début des années 1980 au Kosovo-
5 Metohija.
6 Après sa dernière rencontre en mars à Tirana, après la dernière réunion à
7 laquelle il a participé avec des représentants de la diaspora albanaise
8 pour promouvoir l'UCK, il s'est rendu au Kosovo-Metohija et à partir de ce
9 moment-là jusqu'à la fin des événements, il a fait partie de l'état-major
10 de Ramush Haradinaj à Glodjane. Il avait un pseudonyme destiné à protéger
11 son identité et il avait également des hommes qui assuraient sa protection
12 rapprochée. Encore aujourd'hui, c'est un responsable de haut niveau de
13 cette organisation, le Mouvement populaire pour le Kosovo.
14 Q. Selon vous, en quoi était-il particulièrement qualifié pour renseigner
15 au sujet des documents publiés dans ce livre ?
16 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense que la question dans sa
17 formulation actuelle appelle le témoin à émettre des conjectures et sort du
18 champ de ce que sait le témoin.
19 M. RE : [interprétation] J'insiste pour poser cette question. J'interroge
20 le témoin quant aux renseignements dont il dispose au sujet de M.
21 Dzemailji, qui font que cet homme était considéré comme quelqu'un de
22 valable sur la base de ce que sait le témoin.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que dans cette formulation,
24 votre question est plus directement liée à des faits qu'elle ne l'était
25 dans la formulation précédente.
26 Veuillez poursuivre en utilisant cette deuxième formulation.
27 M. RE : [interprétation]
28 Q. Monsieur Stijovic, vous pouvez répondre à la question.
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1 R. Cela n'a rien à voir avec des conjectures. Ce livre a été publié par le
2 Mouvement populaire pour le Kosovo en Suisse au mois de mars 1998.
3 Dans cet ouvrage, on voit une chronologie de la documentation élaborée par
4 l'UCK et par le Mouvement populaire pour le Kosovo, qui illustre bien
5 l'évolution de cette organisation et de l'UCK terroriste.
6 Cet homme était le président du Mouvement populaire pour le Kosovo.
7 Il était le membre le plus influent de ce parti et l'UCK, c'est l'aile
8 militaire ou l'aile armée de ce parti, de ce mouvement. Cet homme est
9 arrivé à Glodjane en provenance de Tirana, où il avait assisté à une
10 réunion destinée à promouvoir l'UCK.
11 Dès son arrivée à Glodjane, il a passé pas mal de temps au sein de
12 l'état-major de Ramush Haradinaj sous un pseudonyme à Glodjane. Et il
13 n'était pas seul à cet endroit. Il y avait bien d'autres membres de son
14 organisation qui étaient là également. Par exemple, Abazi, un des membres
15 les plus importants du NPOK, qui avait également un pseudonyme qu'il a
16 utilisé pendant tout son séjour dans le voisinage de Djakovica.
17 Quant à Dzemailji, depuis le début de son séjour à Glodjane, il avait
18 une grande influence auprès de Haradinaj et a permis à Haradinaj de
19 demeurer dans ce secteur et de conserver la situation dans laquelle il se
20 trouvait.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que j'aimerais savoir sur
22 quoi se fonde le témoin --
23 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense, si je puis me permettre de
24 le dire, qu'il est extrêmement important de maintenir une distinction tout
25 à fait claire entre les renseignements factuels et les parties de la
26 déposition du témoin qui concernent son opération personnelle. Il est
27 inévitable, nous le voyons dans la déclaration 92 ter du témoin, dans les
28 passages que la Chambre de première instance a déjà indiqués comme n'étant
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1 pas admis en tant que pièce à conviction, mais en tout cas c'est inévitable
2 que certaines questions soient posées. Nous passons très souvent nous-mêmes
3 des faits à des opinions.
4 Mais sur ce point particulier, l'important c'est que la distinction
5 soit bien montrée au témoin et on ne peut passer directement de l'un à
6 l'autre sans transition.
7 Je ne sais pas si M. Re pourrait revenir sur les questions qu'il a
8 posées pour réapprécier les choses de ce point de vue depuis le début.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Emmerson.
10 M. EMMERSON : [interprétation] Mais si nous devons éviter toute expression
11 d'opinion par le témoin, il faut que des questions plus simples lui soient
12 posées qui aient un rapport direct avec les faits.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, afin d'éviter toute
14 objection dans l'avenir, il serait peut-être utile que vous fassiez avancer
15 le témoin pas à pas et que vous lui demandiez de se concentrer au maximum
16 sur les faits pour commencer.
17 Veuillez procéder.
18 M. RE : [interprétation]
19 Q. Quels sont les renseignements dont vous disposiez au sujet de
20 l'influence exercée par M. Dzemailji au sein du LPK et de l'UCK ?
21 R. Ce qui est un fait, c'est que Emrush Dzemailji présidait le Mouvement
22 populaire pour le Kosovo qui était l'organisation qui a été à l'origine de
23 la création de l'UCK. Ce qui est un fait, c'est qu'après la réunion de
24 Tirana présidée par lui personnellement, il s'est installé sur le
25 territoire du Kosovo.
26 Ce qui est un fait c'est qu'Emrush Dzemailji --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends ce que vous dites dans
28 votre réponse et que vous le faites de cette façon parce qu'il vous a été
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1 demandé d'établir un lien avec des faits. Mais commencer toutes vos phrases
2 par "ce qui est un fait" ne sera pas très utile.
3 Je dirais pour commencer qu'il importe que vous répondiez en vous
4 fondant sur des observations qui ont été faites par vous personnellement,
5 sur quelque chose que vous avez vécue personnellement. Je suppose que ce
6 n'est pas le cas s'agissant de l'arrivée de la personne dont vous parlez en
7 provenance de Tirana.
8 Donc nous aimerions d'abord savoir quelle est la source du renseignement
9 qui est à la base de ce que vous venez de dire ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, voulez-vous que je ne
11 mentionne que la période pendant laquelle Emrush Dzemailji était au QG de
12 Glodjane, c'est-à-dire vers la fin du mois de mars 1998, ou souhaitez-vous
13 que je parle de la genèse du mouvement et du rôle de Dzemailji pendant
14 toute cette période ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas ce que je souhaite savoir.
16 Je fais référence à votre réponse.
17 Vous avez dit : "C'est un fait qu'Emrush Dzemailji était président du
18 Mouvement populaire du Kosovo." Comment l'avez-vous su ? Est-ce que vous
19 avez vu des documents qu'il aurait signés ? Est-ce qu'il est apparu en tant
20 que tel à la télévision ? Comment le savez-vous ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous le savions parce que nous avions en notre
22 possession certains documents qui provenaient des réunions qui avaient été
23 organisées par l'organisation pendant la période précédente.
24 Nous avions aussi des sources vivantes en Suisse et en Allemagne qui
25 étaient en proche contact avec lui. Et nous le savions grâce à des
26 déclarations publiques d'Emrush Dzemailji. Il y avait aussi les documents
27 qui avaient été publiés dans la presse albanaise, que ce soit au Kosovo ou
28 à l'étranger.
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1 Et lorsqu'on parle des médias, de la presse, il faut dire qu'il n'y a
2 jamais eu de récusation de ces rapports, que ce soit de la part d'Emrush
3 Dzemailji ou d'autres personnes, que ce soit à l'époque ou même maintenant.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
5 Monsieur Re, je vous demande de faire la même chose pour le fait suivant
6 qui a été présenté par le témoin. Il s'est déplacé sur le territoire du
7 Kosovo après avoir présidé une réunion à Tirana.
8 Comment l'avez-vous su ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ?
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu une émission à la télévision
12 albanaise à Tirana le soir même de ce jour-là, une émission qui parlait de
13 la réunion qui a eu lieu à Tirana en présence d'Emrush Dzemailji où il
14 s'est adressé aux participants.
15 Il y avait d'autres membres d'ailleurs de la présidence qui y étaient, y
16 compris, Radji Iber Demaj [phon] ou quelqu'un qui venait de la région de
17 Pec.
18 A cette réunion-là, ils ont parlé de la situation au Kosovo-Metohija et du
19 rôle que devait jouer le NPK dans la période suivante.
20 Nous avons appris grâce à une personne présente à la conférence de presse
21 qu'une section importante des dirigeants de l'organisation vers la fin du
22 mois de mars début avril de façon illégale avait traversé le Kosovo-
23 Metohija et avait participé aux activités sur le terrain aux activités de
24 l'UCK.
25 J'ai déjà parlé d'Emrush Dzemailji, et j'ai également metnionné Hajdin
26 Abazi. La personne qui était une des personnes du NPK qui utilisait un
27 pseudonyme. Le public, le grand public sait déjà certaines choses sur cette
28 personne portant ce pseudonyme et qui aurait accueilli une délégation à
Page 8924
1 haut niveau des Etats-Unis, y compris M. Holbrooke, et cetera.
2 Puis, il y avait d'autres personnes qui se rendaient sur le territoire du
3 Kosovo --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous arrêter là. J'ai voulu tout
5 simplement savoir quelle était la source de vos informations en ce qui
6 concerne cette personne qui aurait présidé une réunion à Tirana, ensuite
7 qu'il se serait rendu au Kosovo, plutôt que de vous demander de rentrer
8 dans plus de détails.
9 Maître Emmerson.
10 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, de vous interrompre, encore une
11 fois. Je le fais souvent - si je regarde les dernières questions et
12 réponses - je vois que le témoin fait référence aux informations provenant
13 de sources vivantes.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
15 M. EMMERSON : [interprétation] Je pars du principe lorsqu'il utilise une
16 expression de la sorte qu'il s'agit d'une source dont il ne peut pas
17 révéler le nom, et je ne propose pas à chaque fois de me lever et de
18 rechercher et demander des informations en ce qui concerne l'identification
19 de la source, parce qu'il est évident qu'il s'agit d'une source anonyme, et
20 ce fait, cette question aura un rôle important à jouer en ce qui concerne
21 l'évaluation par vous, Monsieur le Juge, en ce qui concerne la valeur qu'on
22 peut attacher aux informations données.
23 Mais je voudrais tout simplement dire que sauf bien sûr si le témoin donne
24 ou veut bien donner le nom de sa source, nous partons du principe que c'est
25 une source dont il ne veut pas donner le nom devant ce Tribunal.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Nous allons poser la question
27 au témoin.
28 Lorsque vous dites que vous avez appris quelque chose d'une source dont
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1 vous ne voulez pas donner le nom, est-ce que c'est parce que vous n'êtes
2 pas disposé à donner ce nom ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis d'accord avec vous. Cela a à voir avec
4 le journaliste qui était présent. Mais même avant cela, Monsieur le
5 Président, j'avais dit que les informations étaient diffusées à la
6 télévision.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais à partir de maintenant, si
8 vous ne relevez pas le nom de la source de la personne qui aurait donné les
9 renseignements, je vous demande de façon spontanée de nous donner le nom de
10 la personne ou, dans le cas contraire, nous partons du principe que vous
11 avez vos propres raisons de préférer ne pas révéler le nom. C'est ainsi que
12 nous allons comprendre vos réponses.
13 Veuillez poursuivre.
14 Tout d'abord, je regarde l'horloge. Je pense que le moment est venu de
15 suspendre l'audience.
16 Je souhaite demander aux parties, enfin je comprends bien que les
17 interventions jusqu'à maintenant étaient justifiées. Néanmoins, je vous
18 demande de les limiter car, après tout, cela interrompt le flux du
19 témoignage et surtout en ce qui concerne les questions posées par M. Re.
20 Et je vais essayer de faire de mon mieux également, Monsieur Re.
21 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président, avant de suspendre
22 l'audience.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 M. RE : [interprétation] En ce qui concerne les pièces jointes à la
25 déclaration.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
27 M. RE : [interprétation] Est-ce que le greffe peut donner des cotes à
28 chacune de celles-ci ? Dans tous les cas il s'agit de cotes sur la liste 65
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1 ter. Je ne peux pas bien sûr demander au témoin de les regarder une après
2 l'autre, il y a certaines questions en ce qui concerne la possibilité de
3 les verser au dossier. Il y a un risque d'objection dans certains cas.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suggère que pour l'instant nous
5 travaillions sur la base des annexes telles quelles sont présentées ici.
6 Nous arriverons probablement rapidement à un point où vous allez dire que
7 toutes les annexes sont des pièces qui peuvent être versées au dossier et
8 ça ne sera pas forcément la position de la Défense. Et à ce moment-là nous
9 allons trancher. Si la Défense devait dire : "Non, non, M. Re, nous
10 acceptons tous les documents." Bon. Souhait. Mais la Défense a déjà dit que
11 ce n'est pas le cas. Il y a aussi la possibilité qu'il y a un changement
12 d'avis. A ce moment-là nous allons donner -- nous allons faire une
13 sélection des documents, nous allons voir quelles sont les possibilités en
14 ce qui concerne l'attribution de cotes individuelles à des documents
15 individuels.
16 Pour l'instant, je souhaite travailler sur la base de ce que nous avons
17 déjà comme numérotation, cela nous permettra plus facilement de les
18 trouver.
19 M. RE : [interprétation] Non, non, je comprends, mais la difficulté que
20 j'ai déjà fait référence à l'une de ces annexes, je pense qu'on a donné une
21 cote P932 ou quelque chose de ce genre-là. ET déjà on a un problème
22 d'ordre. Il n'y a plus d'ordre.
23 Il y en a une vingtaine, une trentaine donc je vais parler
24 individuellement. Donc on va voir si on peut suivre l'ordre ou pas.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, d'accord. Je comprends qu'il
26 est important pour vous que l'ordre soit respecté.
27 Monsieur le Greffier, nous allons voir à chaque fois que M. Re parle de
28 marquer un document à des fins d'identification, est-ce que vous pourriez
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1 peut-être lui donner une cote et on va voir par la suite si c'est admis au
2 dossier.
3 M. RE : [interprétation] Ce que je vous demande c'est qu'il y est un numéro
4 donné, peut-être pendant la suspension d'audience, pour permettre de
5 respecter l'ordre et nous allons ensuite parler de la question de la
6 recevabilité par la suite.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tous les documents ?
8 M. RE : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Toutes les séries des documents ?
10 M. RE : [interprétation] Oui, oui, un, deux, trois, cinq, et puis nous
11 allons faire en sorte que tous les documents -- de la même façon, certains
12 ont déjà des cotes et d'autres n'ont pas.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que vous
14 pourriez peut-être le faire ?
15 Le Greffier le fera et vous donnera les cotes, quel que soit le sort de ces
16 documents.
17 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens compte de ce
18 que vous avez dit en ce qui concerne les interruptions, je ne sais quelle
19 est l'intention de M. Re en ce qui concerne les documents sur lesquels il
20 veut attirer l'attention du témoin, mais il y en a beaucoup.
21 Bien sûr, c'est à vous de trancher, mais nous avons une objection, comme
22 vous le savez, non seulement en ce qui concerne les annexes mais aussi en
23 ce qui concerne le résumé fait par le témoin en ce qui concerne le contenu
24 des annexes.
25 Je ne souhaite pas à chaque fois que M. Re demande qu'un certain document
26 soit présenté, je ne vais pas intervenir à chaque fois, mais en ce qui
27 concerne le contenu de documents, il faut prendre en considération tout ce
28 qui a été dit jusqu'à maintenant en ce qui concerne la déclaration 92 ter
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1 et le témoignage oral, l'idée de tout regrouper, tout prendre ensemble et
2 de résumer les contenus des annexes et de se pencher sur la question de la
3 recevabilité ce qui n'a pas encore été tranché, je pense qu'on ferait peut-
4 être mieux de passer du temps sur d'autres questions.
5 En fait, ce que je souhaite éviter est une situation où je n'arrête pas de
6 m'asseoir et de me relever à chaque fois pour objecter de soulever une
7 objection.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, cela dépendra de la façon dont
9 on pose les questions.
10 M. EMMERSON : [interprétation] Tout à fait.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un résumé de document pourrait commencer
12 de la façon suivante : avez-vous vu ce document ? Avez-vous rédigé ce
13 document ? Avez-vous signé ce document ? Connaissez-vous l'auteur du
14 document ? Ce qui rajoute déjà pas mal aux annexes, il pourrait modifier la
15 situation.
16 Je pense que M. Re est tout à fait au courant de ce qu'il peut faire pour
17 éviter tout cela --
18 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- sur la base de ce que vient de nous
20 dire Me Emmerson.
21 M. EMMERSON : [interprétation] Vous avez très bien compris, Monsieur le
22 Président, nous avons compris aussi votre souhait de garder un minimum les
23 objections, mais bien sûr cela dépendra de la façon dont les questions
24 seront posées pendant l'interrogatoire principal.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, je crois que M. Re le sait.
26 Maître Guy-Smith.
27 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis sûr que M. Re est au courant de la
28 question procédurale en ce qui concerne la recevabilité de ces documents
Page 8929
1 conformément au 65 ter --
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
3 M. GUY-SMITH : [interprétation] M. Re -- donc il ne faudrait pas qu'on
4 perde de vue la question procédurale. Puisque j'ai la parole, je vais être
5 très rapide, je ne sais pas s'il accepterait de le faire, mais on pourrait
6 peut-être obtenir une copie de la proposition de mettre en place le
7 mouvement Krug, ce serait utile.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, s'il l'a encore.
9 Pensez-vous que vous avez encore en votre possession la proposition
10 formelle de créer l'opération Krug ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela se trouve dans les archives de la
12 Sûreté d'Etat. Néanmoins, je pense que vous pourrez obtenir assez
13 facilement des autorités la proposition et la décision qui a été prise,
14 donc la proposition qui a été rédigée par moi-même et la décision qui a été
15 signée à Belgrade et qui a été envoyée au Kosovo par la suite et qui a
16 autorisé la poursuite des activités concernant l'opération Krug. Donc la
17 proposition ainsi que la décision, je pense que c'est ainsi qu'on nomme ces
18 documents.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Re, je ne sais pas si cela
20 se trouve déjà en quelque part dans vos documents; oui ou non ?
21 M. RE : [interprétation] Non.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons bien sûr un problème pratique
23 en ce qui concerne le fait que le témoin est censé ne pas discuter d'autres
24 questions avec vous ni avec qui que ce soit d'autre, en même temps si les
25 parties pourraient trouver une proposition en ce qui concerne la façon
26 d'obtenir ce document d'une façon qui serait acceptable aux deux parties,
27 je pense qu'à ce moment-là la Chambre pourrait envisager d'accepter une
28 telle suggestion.
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1 Nous allons maintenant suspendre l'audience et nous allons revenir à 6
2 heures 10.
3 --- L'audience est suspendue à 17 heures 48.
4 --- L'audience est reprise à 18 heures 12.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
6 Tout d'abord, j'aimerais savoir s'il y a des suggestions que vous
7 souhaiteriez faire en ce qui concerne la façon dont on pourrait obtenir la
8 proposition et la décision. Nous n'en n'avons pas parlé. Vous n'en n'avez
9 pas parlé peut-être ?
10 M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, non, mais nous allons essayer de
11 trouver une solution.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Sinon, nous pourrons peut-
13 être faire transmettre un petit message bref écrit par le Service de
14 Protection des Victimes et des Témoins. Ce serait peut-être un moyen de
15 résoudre le problème.
16 M. RE : [interprétation] Je pense qu'une demande formelle à la République
17 de Serbie serait peut-être le seul moyen et on va voir si on obtient le
18 document en moins d'une semaine.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je voulais savoir s'il y avait un
20 moyen informel de le faire. Donc on va voir ce que vous trouvez comme
21 suggestion.
22 Veuillez poursuivre.
23 M. RE : [interprétation]
24 Q. Si vous regardez le paragraphe 18 de votre déclaration, vous
25 allez voir qu'il y a quelqu'un d'autre dont il s'agit, à savoir Gafurr
26 Elsani. Savez-vous qui est Gafurr Elsani ?
27 R. Oui.
28 Q. Il s'agit de qui ?
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1 R. Gafurr Elsani est membre du Mouvement populaire du Kosovo. C'était
2 l'éditeur de Zeri i Kosoves, c'est publié en Suisse. C'était un bulletin du
3 Mouvement populaire du Kosovo dont le sigle est NPOK.
4 Q. Quel rôle a-t-il joué dans la publication des communiqués de l'UCK qui
5 figurent dans le livre ? Et dans votre réponse, voulez-vous bien dire au
6 Président et aux parties comment vous le savez ?
7 R. Je ne puis pas dire que je sais qu'il a participé à la rédaction du
8 contenu des communiqués. Ce que je sais par contre est que les communiqués
9 émis par l'UCK ont été imprimés dans le journal dont il était rédacteur en
10 chef.
11 Q. Vous parlez de la publication de ces documents dans un livre, ce livre
12 étant publié en 1998. Dans le paragraphe 18, on parle de ce livre publié en
13 mars 2003, d'ailleurs c'est en pièce jointe à votre déclaration. Est-ce que
14 ce livre c'est le même livre, c'est une nouvelle publication, une nouvelle
15 version du même livre ?
16 R. C'est le même livre, mais c'est la deuxième fois que le livre est
17 sorti. La première fois le livre a été publié en mars 1998 en Suisse, à
18 Arau en Suisse, par le Mouvement populaire du Kosovo et ça été imprimé
19 aussi dans le Zeri i Kosoves.
20 Par la suite, il y a eu d'autres republications et ici il s'agit de celle
21 de 2003. Je pense qu'il y avait à peu près 2 000 exemplaires qui ont été
22 imprimés en France en 1999.
23 La première publication est sortie en Suisse et il y avait 3 000
24 exemplaires.
25 Q. Est-ce que vous avez lu le livre d'origine en 1998 ?
26 R. Peut-être pas en mars, mais au début du mois d'avril, oui tout à fait.
27 Dès la publication du livre, nous l'avons reçu, le livre nous a été envoyé
28 depuis l'étranger. Et je sais lire l'Albanais, donc je l'ai lu. Après un
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1 certain temps, on l'a fait traduire, on a fait traduire tout le livre.
2 M. RE : [interprétation] J'espère qu'il y a une cote maintenant à donner à
3 cette annexe.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit de
6 01988 sur la liste 65 ter et numéro de pièce P934.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
8 M. RE : [interprétation] Merci. Nous allons regarder cela à l'écran grâce
9 au système Sanction, la partie sur la deuxième page.
10 Q. Si vous voulez bien regarder la page qui a "7" qui figure en bas de la
11 page, Monsieur Stijovic, cela fait référence aux zones de l'UCK.
12 R. Oui.
13 Q. Regardez le paragraphe où l'on dit : "Il a été prévu que l'UCK fasse
14 partie intégrante ou soit présente dans les territoires occupés." Ensuite
15 il y a une référence spécifique aux communiqués 40 et 41 qui dit : "L'UCK
16 opérait dans plusieurs zones, quelles étaient les zones…" Ensuite, on a une
17 indication des zones : une, deux, trois, quatre, cinq.
18 D'ailleurs cela figure dans l'avant-propos au livre de M. Dzemailji qui a
19 été présenté en tant que président du LPK.
20 Ma question est la suivante : les communiqués dont vous parlez dans le
21 contexte des informations que votre service détenait en 1998 ou même avant,
22 en ce qui concerne ces cinq zones territoriales de l'UCK, quel est le lien
23 si vous voulez entre les informations qui figurent dans l'avant-propos et
24 les informations dans les communiqués ?
25 R. Il y a quelque chose que je voulais expliquer tout à l'heure en réponse
26 à votre question. Je pense que c'est important du point de vue historique.
27 Q. Cela dépend de la pertinence de votre explication par rapport à la
28 question. Est-ce que l'explication est longue ?
Page 8933
1 R. J'essaierai d'être bref en me limitant à la question que vous m'avez
2 posée.
3 En 1993, nous avons arrêté un groupe assez grand de membres du NPK,
4 puis si l'on regarde l'enquête qui a été menée, cela nous a permis
5 d'obtenir des renseignements en ce qui concerne les activités et les
6 projets du Mouvement populaire du Kosovo. Par la suite, grâce au compte
7 rendu d'un certain nombre de réunions, nous avons appris que le Mouvement
8 populaire du Kosovo qui proclamait toujours comme but politique d'avoir des
9 objectif extrémistes, c'est-à-dire la réunification de tous les
10 territoires albanais dans la région des Balkans. Ensuite nous avons appris
11 qu'il y aurait une division en cinq zones.
12 Au Kosovo, en Macédoine, ça ce sont les deux premières. Ensuite, le
13 troisième en Serbie, Serbie du sud Presevo, Bujanovac, Medvedja. Quatrième
14 zone au Monténégro et cinquième zone, cela devait être sur le territoire de
15 la Serbie pour certaines activités.
16 Q. Pour vous aider, ce qui m'intéressait de savoir c'est quel était le
17 niveau de précision des communiqués de l'UCK dans ce livre et ce que vous
18 saviez indépendamment du contenu de ces communiqués. Je souhaite savoir
19 quel a été le degré de précision des informations données par M. Dzemailji
20 dans son avant-propos et comment il était au courant comme il a pu être au
21 courant de tout ce qui concernait les cinq zones.
22 Est-ce que cela vous aide ?
23 R. Oui.
24 Q. Bien. Maintenant sur la base de ce que je viens de vous dire, avec
25 quelle précision, si vous pouvez répondre à cela, ou comment M. Dzemailji
26 a-t-il écrit au sujet des zones qui correspondraient aux renseignements que
27 vous aviez ?
28 R. Ça correspond pleinement. Ça correspond pleinement avec ce que nous
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1 savions à ce moment-là en ce qui concerne le niveau d'organisation et des
2 plans de développement du NPK et de l'UCK, périodes qui allaient suivent.
3 Q. Le paragraphe suivant est le paragraphe 19, où vous dites que la
4 première revendication de responsabilité de l'UCK pour une activité de
5 terrorisme dans un communiqué dont une partie a été publiée le 29 novembre
6 1994. Annexe 3, en l'occurrence. Ce que je voudrais vous demander à ce
7 sujet c'est est-ce que vous avez vu cela à l'époque ?
8 R. Oui.
9 M. RE : [interprétation] Avant que je ne poursuive, serait-il possible
10 également d'attribuer le numéro suivant quel qu'il soit ?
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit du
13 numéro 01989 de la liste 65 ter. Je crois qu'il a reçu une cote aux fins
14 d'identification en tant que P935.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
16 M. RE : [interprétation]
17 Q. Est-ce que vous étiez au courant de ce que vous avez appelé une attaque
18 terroriste contre un officier de la Sûreté de l'Etat du nom de Lutfi Ajazi
19 à l'époque ?
20 R. Oui.
21 Q. Sur la base de vos renseignements, est-ce que ce qui est consigné dans
22 cette publication dont nous parlons, c'est-à-dire en ce qui concerne le 29
23 novembre 1994, est-ce que c'est exact ou inexact ?
24 R. C'est exact.
25 Q. Pourriez-vous maintenant passer, s'il vous plaît, au paragraphe 20 de
26 votre déclaration, dans laquelle vous parlez de -- attendez, je vais
27 revenir à cette autre question. Il est question de Lutfi Ajazi, comment
28 étiez-vous au courant -- est-ce que vous connaissez cette personne, comment
Page 8935
1 avez-vous appris qu'il y a eu cette attaque ?
2 R. Lutfi Ajazi était un de mes collègues, un agent de la Sûreté de l'Etat
3 qui vivait à Glogovac et qui travaillait au centre de Pristina. Nous étions
4 ensemble toute la journée. Et dans les heures de la soirée, nous rentrions
5 chez nous et après avoir passé un certain temps dans un bar à Glogovac,
6 alors qu'il retournait chez lui tard dans la soirée, à quelque 100 à 150
7 mètres de chez lui trois personnes non identifiées l'ont attaqué, en le
8 blessant grièvement. Deux balles l'ont atteint dans le dos et une au genou.
9 J'ai appris cette attaque cinq minutes après parce que son frère a
10 téléphoné. Il m'a appelé sur le mobile et m'a informé du fait qu'une
11 attaque avait eu lieu et que des membres de sa famille avaient riposté. Ce
12 qui veut dire en l'occurrence, son frère et son père ont ouvert le feu avec
13 des fusils. La police est venue. Une ambulance l'a emmené, emmené Lutfi à
14 l'hôpital à Pristina. Ses parents m'ont informé de cela. Ils voulaient me
15 rencontrer avec Lutfi à l'hôpital pour voir quel traitement pourrait lui
16 être donné, et c'est ce que j'ai fait.
17 Après qu'il ait été admis --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous arrête là. Je pense que M. Re
19 voulait pour l'essentiel savoir quelle était la source qui vous avait
20 permis de savoir personnellement ce qui s'était passé et non pas des
21 détails supplémentaires, parce que je vois qu'il y a un grand nombre
22 d'autres événements.
23 Si nous voulions entrer dans tous les détails -- je veux dire c'est
24 essentiellement le fait que M. Re essaie d'établir ici, ce n'est pas
25 simplement parce qu'on lit quelque chose mais vous aviez une connaissance à
26 titre personnel qui correspond bien à ce qui est dit dans ce document.
27 C'est ça qu'il voulait savoir pour l'essentiel.
28 Veuillez poursuivre, Monsieur Re. Vous êtes invité à expliquer ces
Page 8936
1 choses au témoin et à poursuivre, à progresser.
2 M. RE : [interprétation]
3 Q. Passons maintenant au trois années suivantes, 1995, 1996 et 1997, dont
4 vous parlez au paragraphe 20 de votre déclaration et que l'on vous présente
5 avec le système Sanction, ici vous parlez de : "Une augmentation
6 spectaculaire des attaques terroristes contre la police et contre les
7 Albanais…"
8 Alors vous dites que vous avez pu remonter à la source de cette attaque
9 contre les forces de sécurité et la population civile au Kosovo depuis 1992
10 jusqu'à 1998, et vous avez par la suite reconstruit la situation et avez pu
11 mettre au point les chiffres. Les chiffres que vous avez là parlent de huit
12 attaques en 1992; 75 attaques en 1997; et 1 486 attaques en 1998.
13 Et au troisième paragraphe de votre déclaration, vous parlez aussi de --
14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur Re, est-ce que vous êtes en
15 train de dire qu'en novembre --
16 M. RE : [interprétation] Pour que les choses soient bien claires, 1 486
17 attaques en novembre.
18 Q. Au paragraphe 62, vous parlez également d'un tableau qui indique ces
19 attaques précises.
20 Maintenant, la Chambre de première instance est intéressée à savoir
21 comment vous avez fait ces calculs, comment vous avez obtenu ces chiffres
22 en ce qui concerne les renseignements que vous aviez et comment vous avez
23 procédé.
24 Si vous voulez bien me regardez parce qu'il se peut que je vous
25 arrête lorsque vous allez commencer à répondre.
26 R. Ça, ce sont des renseignements de caractère interne qui sont à la
27 disposition de la Sûreté de l'Etat. Nous, en tant que service des analyses,
28 nous analysons les événements qui ont lieu sur le terrain. Et l'un des
Page 8937
1 éléments que nous avons suivi avait trait aux événements de terrorisme. Il
2 était clairement consigné qu'il y a eu une escalade qui a commencé vers la
3 fin de 1995, et qu'ils se militarisaient et qu'il y avait de plus en plus
4 d'activités terroristes, et on peut voir ça dans les chiffres.
5 C'est les renseignements que nous avons obtenus dans nos bureaux ou à
6 la Sûreté d'Etat. Ça été consigné, ça été enregistré par le ministère de
7 l'Intérieur, le service de la Sûreté publique et de la Sécurité, et ça été
8 également rapporté par les médias.
9 Par la suite, après 1999, j'ai procédé à une reconstruction de tout
10 cela et trouvé des chiffres sur la base de certains documents.
11 Premièrement, la publication du ministère de l'Intérieur de la Serbie
12 appelée "Bezbednost", qui veut dire "sécurité", qui a publié ces chiffres,
13 et ces chiffres correspondaient avec ce qui se passait.
14 Q. Qu'est-ce que vous définissez lorsque vous compilez ces chiffres comme
15 étant, vous les indiquez comme étant une attaque ? Je veux dire qu'est-ce
16 qui constituait une attaque pour mériter de figurer dans ce tableau ?
17 R. Il y a plusieurs théories qui permettraient d'expliquer ce qui est une
18 attaque terroriste. Une attaque terroriste telle que définie par tous les
19 services du monde --
20 Q. Non, ce qui m'intéresse vraiment ce serait de savoir : est-ce que l'on
21 parle vraiment d'attaques ? D'enlèvements ? De meurtres ? De grenades ? De
22 lettres de menace ? Quoi que ce soit. Pouvez-vous simplement nous dire
23 quelles sont les catégories telles qu'elles étaient définies par vous
24 lorsque vous avez arrêté ces chiffres ?
25 R. Des attaques avec des armes à feu, des grenades à main, autres
26 explosifs, des attaques contre des citoyens, contre des Albanais, des
27 Serbes, des membres du MUP et des membres de la VJ.
28 Q. Sur la base de rapports de police ou quoi d'autre ?
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1 R. Sur la base de rapports de police, de plaintes, de rapports dans les
2 médias, parce que ces événements étaient couverts par les médias à la fois
3 en Serbie et en Albanie. On peut établir ceci facilement en regardant les
4 articles des médias à l'époque, durant cette période.
5 Q. Je voudrais que vous expliquiez aux membres de la Chambre du point de
6 vue de la gravité, que vous expliquiez aux membres de la Chambre ce qui
7 était le moins grave et vous auriez compris comme étant une attaque --
8 qu'est-ce qui était le type d'événements particulièrement graves, les plus
9 graves qui étaient inclus dans ce tableau ?
10 R. Les attaques les plus graves étaient celles qui étaient lancées avec
11 des armes à feu, des grenades à main, en mettant des explosifs. Ça
12 c'étaient les attaques les plus graves, ce qui pouvait aboutir à des
13 meurtres ou des blessures très graves.
14 Mais il y avait également ce qui était lancé contre la police, les citoyens
15 mais sans conséquences, contre l'armée aussi. Personnellement, je ne
16 m'occupais pas des conséquences de ces attaques, mais les attaques les plus
17 graves étaient celles où on avait utilisé des armes à feu, des grenades,
18 des explosifs.
19 Q. Mais quel était le seuil qui faisait qu'il s'agissait d'une attaque ?
20 R. Le terrorisme.
21 Q. Dans votre tableau, quel était le niveau de gravité qui vous permettait
22 de classer cela comme attaque terroriste ?
23 R. L'utilisation active d'armes à feu, de grenades, d'explosifs, d'engins
24 explosifs, quelles qu'aient été les conséquences qui en découlaient, des
25 attaques contre les catégories que j'ai mentionnées plus tôt : les
26 citoyens, les habitants, des membres du MUP et des membres de l'armée.
27 Q. Bien. Donc d'après ce tableau on peut exclure des choses comme les
28 lettres de menace, ou les coups de téléphone de menace, ou les attaques à
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1 mains nues, à coup-de-poing, des activités de ce genre.
2 R. Oui, absolument.
3 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, je voulais bien ne pas
4 interrompre, mais le témoin parle de reconstruction des chiffres sur la
5 base d'une étude statistique qui a été faite dans un magazine. Alors je me
6 demande si on pourrait avoir quelques éclaircissements sur ce que
7 représente ce processus, sur ce que ça signifie. Ceci est à la page 73,
8 ligne 5. On trouve cela également dans les deux paragraphes de la
9 déclaration de témoin.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, compte tenu des
11 explications et de la demande concernant ce point, pourriez-vous essayer
12 d'éclaircir la situation.
13 M. RE : [interprétation]
14 Q. Expliquez le processus et ce que vous voulez dire par "reconstruction."
15 R. "Reconstruction" ça veut dire les explications données par la suite, en
16 l'occurrence une reconstitution de ces -- une analyse de ces événements.
17 Les attaques ont eu lieu et ont été enregistrées et consignées par écrit
18 séparément en dehors des archives centrales, si je peux les appeler ainsi.
19 Elles étaient enregistrées par la police, par l'armée qui avait été
20 attaquée et également par les médias.
21 Donc sur la base de ces trois catégories de données qui étaient
22 disponibles et que j'ai réussi à réunir et à recueillir, et également sur
23 la base de ce magazine, qui est un périodique du ministère de l'Intérieur,
24 j'ai fait une étude de ces attaques qui avaient été lancées au cours de
25 cette période parce que nous voulions établir quand ces activités avaient
26 commencé à avoir une escalade et à s'intensifier, de plus en plus intenses.
27 Pour l'essentiel, il n'y avait pas de grande différence, et si vous
28 deviez comparer les données publiées par les médias - et je veux me référer
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1 là à la fois aux médias serbes - vous verriez qu'il n'y a guère de
2 différences entre elles et ce qui a été également recueilli par les
3 militaires. Les militaires se centraient sur les attaques et les
4 franchissements d'illégaux de la frontière. La police se centrait
5 essentiellement sur les attaques contre les citoyens, les habitants et
6 autres types d'attaques, et les médias se centraient sur l'ensemble de ces
7 événements. En comparant cela et en procédant à une analyse, on voyait que
8 ces renseignements étaient exacts.
9 Q. Vous avez mentionné trois sources : la police, l'armée et les médias.
10 Voyons-les une par une; la police, veuillez nous dire brièvement quelle
11 était votre source d'information au sein de la police ? Je veux dire, est-
12 ce que c'était des plaintes au pénal ? Des attaques ? Des rapports ?
13 Qu'est-ce que c'était ? Puis je passerai aux deux autres catégories.
14 R. Le ministère de l'Intérieur a la sécurité publique et la sûreté de
15 l'Etat. La sécurité publique s'occupe de l'ordre public et publie des
16 rapports quotidiens des événements au Kosovo-Metohija.
17 Nous recevions de la police sur une base quotidienne ce rapport des
18 événements quotidiens dans le territoire.
19 En plus de cela, au sein du service de la Sûreté de l'Etat, nos agents
20 rendaient compte également des événements, et fournissaient des
21 renseignements concernant les auteurs éventuels de ces actes. Ça c'est ce
22 qui concerne la police.
23 Pour l'armée --
24 Q. Est-ce que des statistiques étaient conservées au sein du MUP pour ces
25 attaques terroristes dont vous venez de parler ?
26 R. Absolument, oui. En analysant ces données, on pouvait tirer des
27 conclusions importantes.
28 Q. Est-ce que c'étaient des statistiques qui étaient établies sur une base
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1 annuelle, hebdomadaire, mensuelle ? Sur quelle base est-ce qu'elles étaient
2 établies ?
3 R. Il y avait plusieurs types de méthodes différentes pour établir ces
4 statistiques. Au niveau régional, sur la base des lieux où avaient lieu les
5 attaques, on a procédé à des analyses à la fois du point de vue territorial
6 et du point de vue du cadre temporel d'une période. Les statistiques
7 identifiaient aussi le type d'armes et de munition utilisé le plus
8 fréquemment dans ces attaques. Et ces données statistiques désignaient très
9 clairement qu'elles étaient les foyers d'activités de l'UCK, les lieux où
10 leurs activités étaient particulièrement importantes.
11 Q. Est-ce que ces statistiques étaient publiées régulièrement ?
12 R. Absolument.
13 Q. Qui les recueillait ?
14 R. Elles étaient recueillies par le secteur de la sécurité public du
15 ministère de l'Intérieur de la Serbie. Elles utilisaient des méthodes
16 statistiques, tel que des graphiques, pour illustrer très clairement les
17 événements en question et les attaques en question, et en plus de cela, ils
18 fournissaient également des descriptions où ils donnaient la chronologie de
19 ce qui s'était passé, où, et quelles avaient été les conséquences. Ceci
20 était publié de façon périodique certainement tous les trois mois, tous les
21 six mois, et annuellement.
22 Q. Est-ce que c'était à la fois pour les secteurs publics et de sécurité
23 ou est-ce que c'était fait séparément pour la sûreté ou quoi ?
24 R. Nous travaillions de façon séparée. La sécurité publique, c'était un
25 secteur qui s'intéressait essentiellement à des données à ce sujet, tandis
26 que nous utilisions les données du service de sécurité, c'est-à-dire leurs
27 analyses et leurs rapports de façon à pouvoir donner une explication
28 descriptive d'un événement, ce qui visait à identifier les personnes qui
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1 étaient les auteurs de l'attaque ou de l'événement. Ceci se voit avec une
2 répartition qui est faite concernant les différents types d'informations
3 annoncées dans des différentes conférences de presse du MUP. Vous pouvez
4 voir aussi qu'il y a eu des analyses nombreuses qui ont été effectuées en
5 1998 et en 1999, et tout allait dans le sens d'un accroissement du danger
6 qui était posé par l'UCK.
7 Q. Comment est-ce que vous faisiez des distinctions entre ces attaques
8 terroristes et des attaques non terroristes dans lesquelles il y avait
9 violence ou extrême violence ? En disant cela, je veux dire en rédigeant
10 votre rapport ou vos statistiques.
11 R. Le message que voulaient envoyer les attaques terroristes, c'était un
12 message politique. L'objectif de ces attaques était clair. Ils voulaient
13 répandre la terreur et l'insécurité dans le public.
14 De plus, ce qui est également important c'était les méthodes utilisées dans
15 ces actes de terrorismes. Quel était l'élément-clé ici ? C'était que ces
16 attaques étaient effectuées de façon occulte, par embuscade, tout près des
17 domiciles ou des maisons des personnes, utilisant les armes à feu, des
18 grenades, des engins explosifs.
19 En plus de cela, ce qui était un trait particulier de ces attaques
20 terroristes au cours de cette période, c'était qu'elles n'avaient pas un
21 caractère sélectif pour ce qui était des objectifs de ces attaques. Ils
22 attaquaient non seulement la police et l'armée, mais également les
23 habitants, les civils, et ils attaquaient de la même manière, de façon
24 occulte, par embuscade, et ainsi de suite.
25 Q. Ce qui m'intéresse c'est de savoir -- ce que je cherche à savoir, c'est
26 comment vous-même ou le département de la police ou du MUP faisait une
27 distinction entre ces attaques terroristes et les autres meurtres ou actes
28 de violence aux fins d'établir ces statistiques ? Ce que je veux dire, est-
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1 ce que des statistiques étaient établies de façon distincte, séparée, par
2 rapport aux attaques terroristes ? Et dans l'affirmative, comment faisait-
3 on la distinction entre une attaque de terroristes et un autre type de
4 meurtre ?
5 R. Oui, absolument. Après ces attaques initiales de 1994 et 1995, une
6 attaque sur deux était suivie d'un communiqué de l'UCK, qui revendiquait la
7 responsabilité de l'attaque. Ceci se faisait pour chaque attaque. Ces
8 données sont fiables.
9 Q. Pourquoi était-ce faible ? Est-ce qu'une comparaison était effectuée
10 entre ce que disait l'UCK et les renseignements dont disposait la police ?
11 Pouvez-vous dire à la Chambre de première instance pourquoi c'était fiable
12 ?
13 R. Je considère que ces renseignements étaient fiables car ils étaient
14 tout à fait conformes aux événements qui se déroulaient sur le terrain.
15 Quant à la source de ces renseignements, en grande partie c'étaient les
16 sources d'information dans les médias en langue albanaise. Des communiqués
17 de presse ou des communiqués qui revendiquaient la responsabilité pour des
18 événements survenus précédemment sur le terrain; donc des meurtres, des
19 attaques, des explosifs, ou des grenades.
20 Et cela était publié dans tous les médias en langue albanaise, mais
21 évidemment aussi dans les médias dans d'autres langues, en langue albanaise
22 c'étaient des événements qui étaient suivis de près. Peu de temps après ces
23 attaques, l'agence de presse de l'UCK publiait ces communiqués de
24 revendication de responsabilité. Ce qui était un fait, c'est que quelqu'un
25 avait été tué.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me permets de vous interrompre un
27 instant, Monsieur Re.
28 Je remarque dans la requête de la Défense qu'eu égard à ces communiqués, il
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1 est souvent indiqué que la Défense ne fait pas objection à l'admission de
2 ces communiqués, mais je suppose qu'elle a des réserves par rapport à
3 l'authenticité ou par rapport au contenu.
4 S'il y a contestation précise de l'authenticité de ces documents, quelle
5 qu'en soit la nature, bien entendu, la Chambre apprécierait d'entendre ces
6 objections dans le détail.
7 M. EMMERSON : [interprétation] Oui --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne prévois pas quelle sera notre
9 décision, mais ce qui m'a frappé, c'est la répétition de ces événements
10 dans vos écritures.
11 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est-à-dire des objections par rapport
13 à l'authenticité. S'il y a des préoccupations liées à l'authenticité, dans
14 ce cas la Chambre aimerait vous entendre et le savoir.
15 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président se souviendra que ceci
16 est le deuxième témoin qui témoigne au sujet des communiqués de l'UCK et --
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. En ce moment, je ne vous demande un
18 argument détaillé sur le sujet. Je dis simplement que s'il y a contestation
19 précise de l'authenticité, nous aimerions le savoir à un moment déterminé.
20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour que tout soit clair, est-ce qu'il est
21 question d'authenticité dans un document ou d'authenticité du renseignement
22 compris dans ce document ?
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une distinction claire à faire
24 dans la requête déposée par Me Emmerson entre l'authenticité du document et
25 le fait de savoir si les événements décrits dans ce document ont réellement
26 eu lieu. Je pense que j'utilise les mêmes mots que l'on trouve dans le
27 document et rien de plus pour le moment.
28 M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais il y a aussi je pense une autre
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1 question corollaire qui est celle du fait que le document dans lequel le
2 communiqué est publié est souvent --
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Donc ceci nous amène à un pas plus loin --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous contestez le fait que ceci
6 ait été publié dans un journal ou pas, ou la nature du communiqué, de toute
7 façon tout ceci a rapport direct avec l'authenticité --
8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Exact.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- quel que soit le support dans lequel
10 la chose a été publiée. Parfois on lit, "nous avons reçu ceci, nous le
11 publions maintenant." Mais s'il y a d'autres préoccupations plus précises,
12 la Chambre aimerait savoir quelle est la nature exacte de la préoccupation
13 plutôt que de voir une contestation générale --
14 M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est compris.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- tout cela en rapport avec
16 l'authenticité.
17 Veuillez poursuivre. Nous parlons maintenant, Monsieur Re, de ce genre de
18 document…
19 M. RE : [interprétation]
20 Q. Vous avez parlé de la police, votre deuxième source était l'armée. Le
21 plus rapidement possible, est-ce que vous pourriez dire quelles étaient vos
22 sources au sein de l'armée, du point de vue des catégories ou des
23 statistiques ou de quelque autre point de vue que ce soit ?
24 R. S'agissant de l'armée au Kosovo-Metohija, nous avions des
25 renseignements relatifs aux événements, d'abord dans la zone frontalière
26 avec l'Albanie qui concernaient des attaques et des introductions en
27 contrebande d'armes et de divers matériel. Ces renseignements nous étaient
28 transmis sous forme écrite ainsi que sous forme de statistiques.
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1 Par ailleurs, il y avait également quelques attaques peu nombreuses contre
2 des membres de l'armée et les installations de l'armée sur le territoire du
3 Kosovo. Nous utilisions ces renseignements avant tout pour vérifier les
4 renseignements que nous avions au sujet de l'arrivée de terroristes et
5 d'armes dans le secteur.
6 Q. Comment ces renseignements étaient-il recueillis ? Je veux dire sous
7 quelle forme étaient-ils recueillis par l'armée ? Est-ce que c'était sous
8 la forme de rapports ou de statistiques ou comment ?
9 R. Cela dépendait des circonstances de la période. S'agissant du moment où
10 leurs activités se sont intensifiées, l'armée en général organisait des
11 conférences de presse par le truchement de ses responsables à la presse et
12 rendaient publics les événements survenus à la frontière. Puis les organes
13 de l'Etat les suivaient de près et engageaient des activités diplomatiques
14 pour faire connaître ces événements à la frontière à la communauté
15 internationale.
16 Q. Est-ce que l'armée tenait des statistiques de ce que vous appelez "les
17 attaques terroristes" dans la période que vous décrivez 1992 à 1998 ? Oui
18 ou non ?
19 R. Oui.
20 Q. Merci. Est-ce que vous aviez accès à ces statistiques ?
21 R. Oui.
22 Q. Est-ce que vous utilisiez ces statistiques dans l'établissement du
23 rapport dont vous avez parlé au paragraphe 20 de votre déclaration écrite ?
24 R. Oui.
25 Q. D'accord. Question suivante : quel était le secteur de l'armée qui
26 était chargé d'établir ces statistiques ?
27 R. C'étaient les brigades territoriales qui couvraient une zone de
28 responsabilités déterminées qui se chargeaient de ce travail. Ces
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1 statistiques étaient transmises aux services compétents au niveau du corps
2 d'armée ou des services de sécurité militaire qui s'occupaient de leur
3 utilisation sur le plan professionnel.
4 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire que la sécurité militaire avait
5 un lieu de réception central de ces éléments d'information ?
6 R. Oui, absolument.
7 Q. D'accord. Est-ce que c'est de ce lieu central que vous receviez vos
8 renseignements ?
9 R. Nous étions renseignés avant tout au sujet des événements de la zone
10 frontalière et des événements survenus sur le territoire du Kosovo qui
11 avaient un rapport avec l'armée et avec ses installations.
12 Q. Excusez-moi, cela signifie que vous répondez par l'affirmatif ?
13 R. Oui.
14 Q. Merci beaucoup. La troisième catégorie, c'était les médias. Avant que
15 vous ne répondiez, je vous demande si vous pourriez nous dire quoi que ce
16 soit au sujet des sources médiatiques que vous avez utilisées pour établir
17 le rapport auquel vous faites référence au paragraphe 20 de votre
18 déclaration écrite ?
19 M. EMMERSON : [interprétation] Avant la réponse du témoin, Monsieur le
20 Président, M. Re vient à plusieurs reprises d'évoquer le rapport établi par
21 le témoin et auquel il fait référence au paragraphe 20 de sa déclaration
22 écrite.
23 Quand je me suis levé tout à l'heure pour demander des consignes
24 précises au sujet du sens à donner au mot "reconstitution", je l'ai fait
25 parce qu'au paragraphe 20 de sa déclaration écrite le témoin affirme qu'il
26 a reconstitué les chiffres sur la base d'un article de presse paru dans un
27 magazine du MUP. Et parce qu'au paragraphe 62 de sa déclaration écrite, il
28 déclare : "La synthèse statistique se fonde sur des renseignements parus
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1 dans le journal officiel du MUP."
2 Alors il est possible qu'il existe un autre rapport que celui qui a
3 été produit par le témoin, mais nous n'avons jamais eu ce rapport sous les
4 yeux et il n'en est pas fait mention comme M. Re vient de le dire au
5 paragraphe 20 ou au paragraphe 62 de la déclaration écrite du témoin.
6 Donc un éclaircissement est demandé par moi quant au fait de savoir
7 si les statistiques qui sont présentées ici sont des statistiques
8 reconstituées par le témoin, et dans ce cas, ce que cela signifie à partir
9 d'un article paru dans le journal officiel du renseignement militaire.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, c'est à vous.
11 M. RE : [interprétation] Peut-être, me suis-je mal exprimé.
12 Q. Lorsque j'ai parlé de rapport, je vais maintenant vous poser une
13 question. Est-ce que vous avez établi un rapport ou est-ce que vous vous
14 êtes contenté d'une reconstitution quel qu'en soit l'objectif ?
15 R. A l'endroit où je me trouvais au poste que j'occupais, c'est-à-dire
16 chef du département chargé des analyses, nous travaillions de façon très
17 détaillée, très ordonnée en nous servant des méthodes statistiques pour
18 suivre l'évolution numérique des attaques terroristes. Ici je réponds à
19 votre question précise, ce qui est dit, j'ai présenté un certain nombre de
20 chiffres qui sont tirés de du journal publié par le service de sécurité du
21 ministère de l'Intérieur, car c'est dans cette publication que l'on
22 trouvait toutes les informations chiffrées les plus précises et les plus
23 fiables, nous les considérions comme fiables.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je veux essayer de mieux comprendre. Ces
25 statistiques que vous indiquez dans votre déclaration écrite, sont-elles
26 toutes tirées du journal du MUP ou est-ce que vous avez travaillé sur les
27 chiffres pour obtenir vos propres statistiques et que finalement vous avez
28 été surpris de voir que les chiffres obtenus par vous correspondaient
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1 exactement ou presque exactement aux statistiques du MUP ?
2 Ma question est donc relativement simple. Je veux dire combien y a-t-
3 il eu de travail intellectuel de votre part dans tout cela ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous nous sommes servis de chiffres qui
5 avaient déjà été publiés, qui existaient, qui étaient sûrement beaucoup
6 plus précis que si c'est moi qui avais fait le travail. Je me suis fondé
7 dans mes écritures sur ces statistiques-là.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous retranscriviez ces chiffres,
9 mais cela n'est pas identique à parler de reconstitution parce que
10 lorsqu'on recopie, on regarde quelque chose et on retranscrit. Mais est-ce
11 que vous recopiez ce que vous aviez sous les yeux ou est-ce que vous
12 faisiez subir un traitement supplémentaire à ces chiffres que vous aviez
13 recopiés pour commencer en ajoutant des renseignements dont vous disposiez
14 ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comparais ces chiffres avec les chiffres
16 que je trouvais dans les médias de l'armée ou autres. C'est de cette façon
17 que je suis arrivé à la conclusion que ce chiffre correspondait pour
18 décrire de façon précise et de façon fidèle à la réalité les événements qui
19 survenaient sur le terrain. Donc c'était une manière pour nous de suivre de
20 près les événements.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parlez de "chiffres qui ne
22 contredisaient pas ou qui étaient pratiquement identiques." Alors je vous
23 demande : est-ce qu'ils étaient identiques, pratiquement identiques,
24 exactement identiques. Je vais vous donner deux possibilités : exactement
25 identiques ou presque identiques.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, exactement identiques,
27 parce que si nous parlons de ces attaques, un grand nombre d'attaques qui
28 ont eu lieu dans la zone frontalière n'avaient pas été rendues publiques,
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1 c'est-à-dire que dans la classification des attaques, on réagissait à ces
2 attaques d'une façon différente de la réaction qu'on avait par rapport à
3 d'autres attaques. Donc si la totalité de ces attaques dans la zone
4 frontalière avait été prise en compte, les statistiques auraient été bien
5 supérieures sur le plan numérique. Mais j'ai essayé de me limiter un peu,
6 de me circonscrire dans ma réponse, donc je dirais qu'il n'y avait pas une
7 grande différence. Je pensais qu'il était pertinent de s'exprimer de façon
8 précise.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Beaucoup de mots ont été prononcés, mais
10 ma question est simple : si nous disposions des chiffres publiés dans ce
11 journal du MUP, est-ce que ces chiffres seraient exactement identiques aux
12 vôtres ou presque identiques ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Presque identiques -- exactement identiques.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Presque identiques.
15 M. EMMERSON : [interprétation] Je vois l'heure. Il est possible que j'aie
16 mal compris mais j'ai cru comprendre que les chiffres que nous avons dans
17 la déclaration écrite 92 ter sont issus de ce journal du MUP, à moins que
18 je me trompe.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, c'est clair.
20 M. EMMERSON : [interprétation] D'accord.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je veux dire dans votre requête vous
22 utilisez l'expression "simplement retranscrit à partir de".
23 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par conséquent, Monsieur Re venons-en au
25 cœur du problème. Est-ce que nous trouvons un grand degré de coïncidence
26 dans le résultat du travail intellectuel réalisé par deux entités
27 différentes qui aboutissent à exactement le même chiffre, 1486, ou est-ce
28 qu'il y a une autre explication ?
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1 M. HARVEY : [interprétation] Monsieur le Président, la seule raison pour
2 laquelle je me suis levé c'est que j'ai remarqué que le témoin lorsqu'il
3 est entré dans le prétoire portait avec lui une belle sacoche bien remplie
4 et il pourrait être utile de lui demander s'il a ces articles de presse sur
5 lui, ce qui pourrait permettre de résoudre le problème dans un sens ou dans
6 un autre.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lui poser la question.
8 Nous avons beaucoup parlé de cette publication statistique dans un journal
9 du MUP. Est-ce que par hasard vous disposeriez d'un exemplaire de ce
10 journal avec vous ici même en ce moment ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'ai pas apporté avec moi. Je pense
12 qu'il est à mon hôtel. J'ai un autre exemplaire de ce journal. Vous pourrez
13 y trouver quelque chose d'assez semblable qui porte sur la façon dont les
14 renseignements sont publiés par le ministère de l'Intérieur.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous seriez prêt à la
16 poursuite de votre interrogatoire la semaine prochaine ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.
19 Je regarde l'horloge, Monsieur Re, je vois que nous devons lever l'audience
20 pas seulement pour la journée d'aujourd'hui, mais pour la semaine.
21 Monsieur Stijovic, nous n'en n'avons pas encore terminé. Vous l'avez sans
22 doute remarqué. Nous allons suspendre jusqu'à lundi, 8 octobre, 14 heures
23 15. La séance reprendra dans la salle d'audience numéro II qui est un autre
24 prétoire. Mais avant que je ne vous laisse partir, je suis dans
25 l'obligation de vous indiquer que vous ne devez parler à personne du
26 contenu de votre déposition, qu'il s'agisse de ce que vous avez déjà dit ou
27 de ce que vous allez dire. Il y a peut-être une seule petite exception dans
28 le cas où vous recevriez un message écrit, et je dis bien dans le cas "où".
Page 8952
1 Je ne sais pas si vous allez le recevoir ce message écrit qui vous posera
2 des questions au sujet de l'existence de cette proposition ou de cette
3 décision relative à l'opération - je ne sais plus si c'était une décision
4 ou une proposition, je veux dire l'opération Krug. Dans ce cas-là bien sûr
5 vous avez liberté de répondre. Mais hormis ce point très, très circonscrit,
6 vous ne devez parler à personne de votre déposition. Et la sollicitation
7 n'est pas encore sûre.
8 Mes excuses aux interprètes et aux techniciens, nous suspendons jusqu'au 8
9 octobre, 14 heures 15.
10 --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le lundi 8 octobre
11 2007, à 14 heures 15.
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