Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 26 juin 2012

  2   [Plaidoiries]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je salue toutes les personnes dans le

  7   prétoire et à l'extérieur du prétoire. Monsieur le Greffier, veuillez citer

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit

 10   de l'affaire IT-04-84bis-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj, Idriz

 11   Balaj, et Lahi Brahimaj.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. La

 13   présentation des parties, s'il vous plaît, à commencer par l'Accusation.

 14   M. ROGERS : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Paul Rogers pour

 15   l'Accusation, M. Aditya Menon, Mme Kravetz, et notre commis à l'audience,

 16   Mme Pedersen.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. La Défense de M.

 18   Haradinaj.

 19   M. EMMERSON : [interprétation] Ben Emmerson représentant les intérêts de

 20   Ramush Haradinaj, accompagné de Rod Dixon, Andrew Strong, Kerrie Rowan, et

 21   Annie O'Reilly.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Pour M. Balaj.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Gregor Guy-

 25   Smith, accompagné de Collenn Rohan, Holly Buchanan, Gentian Zybery, et

 26   Ramon Barquero.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Et M. Brahimaj.


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  1   M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Richard Harvey,

  2   accompagné de Paul Troop, Beonisch, et Sylvie Kinabo.

  3   Messieurs les Juges, puis-je soulever une simple question avant que nous ne

  4   commencions. Je crois que vous en avez peut-être été informé. J'étais

  5   quelque peu préoccupé hier. Car la Chambre de première instance a dit

  6   qu'elle souhaitait ou qu'elle ne souhaitait pas imposer des restrictions de

  7   temps sur un quelconque des conseils lorsqu'ils présenteront leurs

  8   arguments, ce dont je leur suis gré, mais je sais que les Juges de la

  9   Chambre souhaitent en terminer aujourd'hui.

 10   Comme le dernier conseil à prendre la parole et présenter ses arguments en

 11   tant que dernier conseil, je n'ai aucune garantie de quiconque, et je ne

 12   peux pas en avoir, et je ne peux pas vous présenter de garantie non plus,

 13   au niveau du temps. Mais il se peut que nous ayons besoin, si vous pouvez

 14   accepter cela siéger un peu plus longtemps que les heures prévues

 15   aujourd'hui pour avoir une audience un peu plus longue pour m'assurer qu'au

 16   nom de M. Brahimaj, je ne suis pas empêcher de faire les arguments qui, à

 17   mon sens, convient en ce qui le concerne. Je vais essayer d'être précis. Je

 18   ne vais pas essayer de m'étendre trop, mais je souhaite faire approfondir

 19   les questions.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'entends bien. Ceci a une incidence

 21   non seulement sur vous et les Juges de la Chambre, mais nos interprètes

 22   également ainsi que d'autres membres du personnel. Je ne sais pas si ces

 23   personnes sont prêtes à faire droit à votre demande; sinon, nous allons

 24   être obligés de siéger demain.

 25   M. HARVEY : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Emmerson.

 27   M. EMMERSON : [interprétation] Lorsque nous nous sommes arrêtés hier après-

 28   midi, j'avais présenté des arguments et j'avais fait référence à la


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  1   déposition de Rrustem Tetaj dans le cadre du premier procès ainsi que du

  2   témoin protégé dans ce procès-ci eu égard à M. Skender Kuqi et

  3   l'intervention de M. Haradinaj lorsque la détention de M. Skender Kuqi a

  4   été portée à l'attention de M. Haradinaj comme ceci a été établi par la

  5   déposition de M. Rrustem Tetaj. Donc sur le voyage en direction de

  6   Jabllanice qui est difficile, il fallait donc y parvenir et faire des

  7   remontrances à la personne en question lorsqu'il est arrivé, c'est ce que

  8   nous avons entendu lorsqu'il a entendu parler du traitement infligé à M.

  9   Kuqi et il a demandé sa remise en liberté immédiate, vous vous souviendrez

 10   peut-être que le témoin protégé a dit ceci que : Ce type de choses nuit à

 11   nos tribunaux, et vous allez peut-être penser qu'il s'agit là d'un détail

 12   d'une grande importance. Comme je vous l'ai dit hier, M. Haradinaj

 13   commandait les personnes qui avaient choisi de le suivre, et sa popularité

 14   ainsi que l'appui dont il jouissait, et la cause qu'il représentait est

 15   quelque chose -- et dont il jouissait au sein de la communauté dépendait de

 16   sa réputation, et dans cette mesure, on peut penser que les mauvais

 17   traitements infligés aux personnes détenues, ou les allégations de torture

 18   et autres sévices de personnes en détention pourraient avoir l'effet tout à

 19   fait inverse, de ce que M. Haradinaj s'était mis à construire, à savoir un

 20   consensus au sein de la communauté dont il faisait part au sein de ces

 21   forces de volontaires. Donc passez la première fois qu'il apparaît de façon

 22   active au niveau des éléments de preuve, et des deux autres témoins. Il y a

 23   deux autres témoins.

 24   Le second est le Témoin numéro 3, et d'après lui, c'est quelqu'un qui s'est

 25   évadé de Jabllanice les 17 et 18 juillet. Il a dit, dans sa déposition et

 26   avec force détail, qu'il avait été replacé en détention, à la fin, par Lahi

 27   Brahimaj, verrouillé, ou, en tout cas placé dans le coffre de la voiture et

 28   M. Brahimaj l'a déposé à Glodjan où, au départ, il avait été maltraité par


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  1   un soldat en particulier à cet endroit-là, et ensuite deux jeunes garçons

  2   qui, d'après lui, semblaient être des frères ou le frère de M. Haradinaj,

  3   est entré dans la pièce, a fait en sorte que ce mauvais traitement cesse

  4   sur le champ et a commencé à le traiter de manière différente.

  5   A ce moment-là, un homme qui pensait être Ramush Haradinaj, le commandant

  6   de Glodjan c'est certain est entré dans la pièce où il s'était trouvé, et

  7   il vous a dit -- il a dit aux Juges qu'il a été interrogé par M. Haradinaj

  8   sur la manière dont il était arrivé là. On l'a ensuite proposé -- on lui a

  9   proposé de la nourriture, des cigarettes, un lit pour la nuit, on lui a dit

 10   qu'il pouvait passer la nuit à cet endroit-là s'il le souhaitait, mais

 11   qu'il devait s'écarter de la fenêtre, car il risquait d'être touché par un

 12   obus ou un tireur embusqué serbe. En d'autres termes, dès que M. Haradinaj

 13   est arrivé sur les lieux, a-t-il dit aux Juges, son traitement était tout à

 14   fait convenable, sa présence à cet endroit tout à fait volontaire et on lui

 15   a accordé son soutien ? Je vais vous lire un court extrait. Il a posé cette

 16   question :

 17   "Lorsqu'il vous est avéré manifeste que lui, M. Haradinaj, ne savait pas

 18   qui vous avait emmené là ou ce dont vous étiez accusé ?"Page du compte

 19   d'audience 1718 [comme interprété], à partir de la ligne 11 :

 20   "Réponse : A mon sens, il n'était pas au courant, parce que c'était une

 21   question de temps. Lorsque M. Lahi Brahimaj m'a emmené du magasin, il n'y a

 22   eu aucun moment pour en parler avec d'autres personnes. Je n'en suis pas

 23   tout à fait certain, mais je suis sûr que lui, M. Haradinaj, n'était pas au

 24   courant.

 25   Question : Et lui avez-vous dit que vous êtes accusé par M. Brahimaj d'une

 26   trahison en quelque sorte et que telle était l'accusation contre lui ?

 27   Réponse : Il m'a demandé quel était mon nom, d'où je venais, qui vous a

 28   amené ici et pourquoi. Je lui ai donné mon nom, je lui ai donné mon nom de


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  1   famille, le nom de mon village, et il m'a demandé : Pourquoi êtes-vous ici

  2   ? J'ai dit que c'était au sujet d'un fusil automatique qu'on me

  3   reprochait."

  4   Autrement dit, une allégation en vertu de quoi le Témoin numéro 3 aurait

  5   volé un fusil automatique qui aurait dû être remis à l'UCK. La question se

  6   poursuit :

  7   "… il a demandé si je connaissais quelqu'un chez qui je pouvais dormir à

  8   Glodjan, et j'ai dit que je ne connaissais personne.

  9   Question : Donc, si nous marquons une pause à cet endroit-là, nous allons

 10   revenir à la question de savoir où cette personne devait dormir dans

 11   quelques instants. Il venait de le dire : Je vous demande quel est votre

 12   nom, d'où venez-vous, pourquoi êtes-vous ici et qui vous a amené ici ? Donc

 13   il a répondu en disant qu'il avait donné son nom de famille, le nom de son

 14   village, pourquoi êtes-vous ici ? Et, moi, j'ai répondu qu'il a été

 15   question d'un fusil automatique. Donc je marque une pause ici. Lui avez-

 16   vous dit que c'est Lahi Brahimaj qui vous avait emmené ici ?

 17   Réponse : Oui.

 18   Question : Comment a-t-il réagi lorsque vous lui avec dit cela ?

 19   Réponse : Il a fait ce bruit, 'shh,' ce qui est consigné au compte rendu

 20   d'audience sous la forme 'sssh.' Cela lui semblait incompréhensible, me

 21   semble-t-il.

 22   Question : Quel était ce bruit ? Pourriez-vous le décrire aux fins du

 23   compte rendu d'audience ?"

 24   M. le Juge Moloto intervient en disant que ceci est décrit sous la forme de

 25   'shh,' et ensuite c'est consigné sous la forme p-o-w [comme interprété],

 26   "pwow."

 27   "… et donc il était en colère, en colère parce que c'est les mauvaises

 28   choses, c'était -- étaient arrivées.


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  1   Question : En colère contre qui pensez-vous ?

  2   Réponse : Bien sûr que Lahi, parce que Lahi m'avait emmené à cet endroit-

  3   là."

  4   Donc, encore une fois, ce témoin-là, dans sa déposition manifestement,

  5   n'étaye pas la proposition que son mauvais traitement était dû à une

  6   entreprise criminelle commune. A l'instar de Skender, Kuqi lorsque son

  7   traitement a été porté à l'attention de M. Haradinaj, sa réponse consistait

  8   à dire que rien de la sorte ne devait jamais se reproduire, car ceci

  9   nuisait à notre cause. Donc, au point 2 [comme interprété], lorsque le

 10   témoin numéro 3 informe M. Haradinaj du fait qu'il a été maltraité et

 11   détenu par Lahi Brahimaj, à la manière dont ceci a été décrit, et bien la

 12   réaction de M. Haradinaj était la suivante, il était en colère en raison

 13   des choses qui étaient arrivées et en colère contre M. Brahimaj.

 14   Ceci n'étaye en rien l'entreprise criminelle commune. Au contraire, cela

 15   prouve qu'une telle entreprise criminelle commune n'existe pas. Je le

 16   réitère, je ne reprends pas la question de la responsabilité des

 17   commandements quand bien même ceux-là auraient existé sur le terrain. Ceci

 18   ne parvient pas du tout à répondre aux critères retenus dans le cadre d'une

 19   entreprise criminelle commune, lorsqu'il y a une intervention de la part de

 20   M. Haradinaj, ceci -- l'expression même des personnes qui en ont été les

 21   témoins oculaires, au contraire ceci est le signe d'une attitude qui est

 22   contre le mauvais traitement des individus qui avaient été détenus à

 23   Jabllanice.

 24   Je vais maintenant regarder un cours extrait vidéo montré en présence du

 25   témoin numéro 3 qui nous montre comment il a réagi au traitement infligé

 26   par M. Haradinaj.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   "… ceci se fonde sur les éléments de preuve qui ont déjà été donnés, je


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  1   vais donc vous soumettre quelques courtes idées et vous demandez à y

  2   répondre, sans s'étendre là-dessus.

  3   Tout d'abord, vous avez compris qu'on allait vous donner un lit --"

  4   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  5   L'INTERPRETE : Numéro de l'intercalaire, s'il vous plaît.

  6   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  7   Est-ce que vous disposez de cela, Messieurs les Juges ?

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  9   M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que quelqu'un peu régler cette

 10   question, s'il vous plaît ?

 11   L'INTERPRETE : Les interprètes souhaitent avoir le numéro de

 12   l'intercalaire, s'il vous plaît.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Emmerson, les interprètes

 14   souhaitent avoir le numéro de l'intercalaire de ce compte rendu, s'il vous

 15   plaît.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] C'est l'intercalaire numéro 8.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   "Question : … donc vous êtes resté ici de votre -- vous pouvez rester ici

 20   de votre plein gré si vous le souhaitez ?

 21   Réponse : C'est exact, c'est exact. C'est vrai.

 22   Question : Vous avez été rassuré, on vous a indiqué que vous seriez en lieu

 23   sûr, qu'on vous emmènerait chez les membres de votre famille le lendemain

 24   matin, c'est exact ?

 25   Réponse : D'après ces deux jeunes hommes qui ont empêché un garçon blond de

 26   me frapper, j'ai commencé à me sentir rassuré.

 27   Question : On vous a donné de la nourriture, des cigarettes et un endroit

 28   relativement sûr pour passer la nuit.


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  1   Réponse : Oui, c'est exact.

  2   Question : Alors à un moment donné plus tard dans la soirée, on vous a

  3   demandé de vous rendre en bas pour aller rencontrer le commandant, c'est

  4   exact ?

  5   Réponse : Oui, c'est exact.

  6   Question : Et donc on s'attendait à ce que vous passiez la nuit là, je

  7   crois que vous avez dit vers 11 heures on vous a appelé pour vous demander

  8   de vous rendre en bas, c'est exact ?

  9   Réponse : Oui, c'est exact.

 10   Question : Et vous avez dit à M. Rogers hier, peut-être c'est tout à fait

 11   compréhensible dans le contexte de la déposition que vous avez donnée, que

 12   vous avez eu peur lorsqu'on vous a demandé de vous rendre à l'étage

 13   inférieur, mais lorsque vous y êtes arrivé, l'homme qui d'après était M.

 14   Haradinaj vous a dit : Oubliez ce qui est arrivé. Rentrez chez vous et chez

 15   les vôtres et oubliez tout. Vous êtes libre.

 16   Est-ce exact ?

 17   Réponse : C'est exact. C'est ce qu'il m'a dit. Bien sûr, si j'avais

 18   su auparavant pourquoi il m'avait demandé de me rendre en bas, je n'aurais

 19   pas eu peur. Et avant de descendre, j'avais peur. Mais lorsque je me suis

 20   rendu en bas, il m'a dit que je devais retrouver ma famille, que je n'avais

 21   rien à voir avec cela, que j'étais libre.

 22   Question : Il vous a demandé de n'avoir aucun contact avec l'UCK en

 23   général, n'est-ce pas ?

 24   Réponse : Il a dit : Oui, tenez-vous à l'écart. Tenez-vous à l'écart

 25   de ce qui est arrivé. Rentrez chez vos parents, rentrez dans votre famille.

 26   Question : Est-ce que je peux vous poser cette question-ci, témoin ?

 27   Est-ce que je vous ai bien compris ? Est-ce que vous vouliez dire ceci :

 28   Que vous alliez rentrer en toute sécurité dans votre famille et que plus


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  1   rien de mal n'allait vous arriver ?

  2   C'est bien ce que cet homme qui d'après vous était M. Haradinaj vous

  3   a dit ?

  4   Réponse : Oui. Lorsqu'il a prononcé ces paroles et lorsque j'ai vu

  5   les personnes qui sont venues me chercher, je savais que cet homme ne me

  6   ferait jamais de mal. En réalité, je n'ai jamais eu peur de M. Haradinaj.

  7   Je ne le connaissais pas. Il ne me connaissait pas, et même maintenant je

  8   n'ai pas peur de lui. Si c'est ce qu'il vous promettait à ce moment-là que

  9   plus rien de mal n'allait vous arriver, c'est bien ce qui s'est produit,

 10   n'est-ce pas, plus rien ne vous ai jamais arrivé après cela, n'est-ce pas ?

 11   Réponse : C'est exact, on ne m'a fait aucun mal, aucune menace. Je n'ai

 12   aucun contact avec eux.

 13   Question : Serait-il exact de dire qu'une fois qu'on vous avait porté à

 14   l'attention de M. Haradinaj, qu'à partir de ce moment-là, vous étiez en

 15   sécurité ?

 16   Réponse : Oui, oui, c'est effectivement ce qui est arrivé. Je n'ai jamais

 17   eu de problème."

 18   M. EMMERSON : [interprétation] Je souhaite consigner alors je n'ai pas

 19   l'intention de commenter ceci beaucoup hormis la remarque suivante : Il est

 20   tout à fait clair d'après la déposition du témoin numéro 3, que

 21   l'intervention de M. Haradinaj, en ce qui le concernait, n'est pas

 22   seulement incohérent ou ne coïncide pas avec l'existence ou plutôt la

 23   participation de M. Haradinaj à une entreprise criminelle commune dans le

 24   cadre du traitement de ce témoin, il s'agit au contraire d'une preuve

 25   officielle de la situation inverse.

 26   Alors je souhaite maintenant passer à la troisième et dernière

 27   déposition pertinente qui concerne la participation de M. Haradinaj en

 28   l'espèce, à savoir, les observateurs militaires des Nations Unies, la MOCE,


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  1   évoqué par M. Rogers. J'ai résumé hier, ce qui était arrivé par rapport à

  2   cela, et à quel moment ceci s'est passé, et j'ai indiqué que l'Accusation

  3   souhaitait se reposer sur cet échange, semble attester de la propensité

  4   [phon] et ou du fait que M. Haradinaj est enclin à la violence et que ceci

  5   est tout à fait exagéré. M. Pappas avec son interprète, Kastriot, et deux

  6   autres moniteurs des observateurs militaires des Nations Unies. Kastriot et

  7   une autre personne s'étaient rendus dans une Land Rover blanche sur la

  8   ligne des confrontations que vous avez vu hier, Messieurs les Juges, que

  9   l'on a pu voir en fait dans la séquence vidéo de la BBC, lorsque les forces

 10   serbes ont occupé Glodjan, ce qui a provoqué une destruction à grande

 11   échelle et un déplacement en masse de la population. Il y avait -- à

 12   l'origine ils ont été arrêtés par des hommes armés au moment où ils

 13   s'approchaient d'Irzniq. Ils ont été emmenés à un QG de l'UCK. Il y a eu

 14   une confrontation au cours de la quelle l'interprète a été frappé, et

 15   l'interprète a ensuite dit à M. Pappas que ces hommes armés qui n'ont pas

 16   été identifiés les soupçonnaient d'être des espions à la solde des Serbes.

 17   Comme l'a dit la déposition, ils disposaient de téléphone satellite et des

 18   cartes.

 19   Au bout de 25 minutes, il a dit que M. Haradinaj est arrivé sur les

 20   lieux, leur a posé des questions, mais comme M. Pappas a dit à la dernière

 21   Chambre de première instance, que la situation ou la manière dont il se

 22   comportait était tout à fait différente, lorsqu'il cherchait à obtenir des

 23   informations. Une fois que M. Haradinaj est arrivé, tout était beaucoup

 24   plus civilisé. Je répète, une fois que M. Haradinaj est arrivé, tout était

 25   beaucoup plus civilisé. Page du compte rendu d'audience T4132, pièce P318.

 26   Une fois que M. Pappas avait expliqué qu'il s'agissait d'un groupe de

 27   la MOCE, M. Haradinaj était tout à fait ouvert, tout à fait compris de quoi

 28   il s'agissait. On l'a laissé venir de la ligne de front pour s'occuper de


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  1   cette escapade quelque peu incontrôlée de la MOCE. Il les a raccompagnés

  2   jusqu'à leur voiture pour voir si, oui ou non, ils cachaient des armes,

  3   leur a dit qu'ils pouvaient partir et qu'ils devaient être escortés en

  4   toute sûreté pour qu'ils puissent quitter le secteur, et M. Pappas a

  5   indiqué qu'au cours de cet échange, M. Haradinaj était tout à fait calme et

  6   qu'il était aimable et poli.

  7   Je vais m'arrêter un instant là-dessus. Ce que nous avons en fait,

  8   c'est une déclaration 92 ter de M. Pappas. Mais dans le premier procès, il

  9   avait tout d'abord signé une déclaration consolidée beaucoup plus longue,

 10   dans lequel un passage expliquait le comportement de M. Haradinaj, et ce

 11   passage, malheureusement, n'a pas figuré dans la déclaration 92 ter. Il a

 12   donc été interrogé sur le passage en question qui ne figure pas dans la

 13   déclaration 92 ter dont vous disposez, Messieurs les Juges. Il s'agit

 14   d'éléments pertinents en l'espèce, à savoir que M. Haradinaj est enclin à

 15   la violence, mais ceci a échappé à l'Accusation, car si l'Accusation

 16   s'était concentrée là-dessus, il était difficile par la suite pour

 17   l'Accusation de présenter des arguments qu'ils ont présentés.

 18   Alors je souhaite que nous regardions un court extrait de cela pour

 19   voir ce que M. Pappas ou M. Haradinaj avait à dire.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 22   "Question : …la teneur de votre déclaration consolidée où vous parlez

 23   de cette question --"

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 25   M. EMMERSON : [interprétation] Intercalaire numéro 9.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 28   "Question : … et je vais vous demander de confirmer qu'il s'agit de bien de


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  1   votre déposition, parce que ceci ne figure pas dans leur déclaration écrite

  2   qui a été versée au dossier en l'espèce. Une citation, et je lis un extrait

  3   de la deuxième moitié du paragraphe 22 de la déclaration consolidée du

  4   témoin, et ensuite :

  5   'Il était tout à fait calme, et il contrôlait la situation. Et de manière

  6   aimable, il a commencé à nous interroger l'un après l'autre, il était poli.

  7   Il a commencé par Penti, qui semblait être en état de choc, qui avait peur,

  8   qui a eu peur de la manière dont les choses avaient évolué, entre

  9   parenthèses (Penti était venu rendre visite à notre équipe juste ce jour-

 10   là, et ceci lui était arrivé.) Il a vérifié ses papiers, et ensuite il y a

 11   eu une courte discussion. Je me souviens qu'il a demandé à Penti une

 12   question à propos du lac en Finlande, il s'agissait d'un différend entre

 13   lui et les Russes, et Penti lui a répondu. Après Penti, il a posé quelques

 14   questions en albanais à l'interprète, je ne suis pas au courant de la

 15   teneur de cet échange. Après Kastriot, il s'est tourné vers moi, et m'a

 16   demandé où je vivais, et ce que je faisais à la maison. Il m'a dit qu'il

 17   n'y avait aucun problème avec les Grecs même si la politique de mon pays a

 18   provoqué des sentiments hostiles chez de nombreux camarades. Il m'a dit

 19   qu'il s'était rendu en Grèce à plusieurs reprises et qu'il avait beaucoup

 20   d'amis albanais qui y vivaient, certains d'entre eux étaient venus au

 21   Kosovo se battre avec lui. Et je lui ai expliqué quelles étaient les

 22   circonstances qui ont fait que nous étions arrivés là, à savoir notre

 23   présence à Rznic. Je lui ai expliqué quels étaient notre mandat, et

 24   l'objectif de notre présence à Kosovo. Il semblait avoir compris et être

 25   convaincu de nos explications. Après il s'est entretenu en français et en

 26   anglais avec Kaufmann'.

 27   "Un peu plus loin, paragraphe 26, je suis ceci au compte rendu d'audience.

 28   'Après cela, le commandant nous a raccompagnés jusqu'à notre voiture. Il a


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  1   commencé à fouiller la voiture de fond en comble, à l'intérieur et à

  2   l'extérieur. Il nous a demandé si nous avions des fusils, nous avions

  3   répondu par la négative. Après cela, il nous a dit que nous étions libres

  4   de partir. Il nous a proposé une escorte pour quitter la région, et nous

  5   étions d'accord avec cela. Ensuite il a donné l'ordre aux trois hommes en

  6   uniforme noir, y compris Idriz Balaj, qui nous avait arrêtés avant cela, de

  7   nous escorter pour que nous puissions quitter Gllogjan'.

  8   Pour finir, deux lignes au bas du paragraphe 26 :

  9   'L'ensemble de l'incident a duré une heure et demie environ sous le

 10   pilonnage incessant de l'artillerie serbe.'

 11   Tout d'abord, je vais vous demander de confirmer qu'il s'agit là bien

 12   de votre déposition ?

 13   Réponse : Oui.

 14   Question : Et ensuite, une ou deux questions supplémentaires. D'après

 15   cette description, l'impression que vous aviez de M. Haradinaj, c'est que

 16   cet homme est resté calme pendant toute la durée de cet échange et qui

 17   s'est comporté de façon raisonnable à votre égard; est-ce exact ?

 18   Réponse : C'est exact.

 19   Question : Malgré le fait que le village de Glodjan et de Rznic

 20   étaient lourdement pilonnés et que les Serbes étaient en train de se

 21   rapprocher rapidement ?

 22   Réponse : Oui. Ces villages étaient pilonnés. Je ne sais pas quelle

 23   était -- si les Serbes étaient très proches ou pas, quelles étaient les

 24   estimations à cet égard.

 25   Question : Et d'après la vidéo que vous avez vue hier vous savez

 26   qu'ils ont occupé Glodjan ?

 27   Réponse : Oui.

 28   Question : Alors, pour qu'un commandant quitte la ligne de front, et


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  1   quitte le lieu des combats pour s'occuper d'un groupe d'observateurs qui

  2   avait décidé de traverser la ligne de front, parce qu'il s'agissait ici --

  3   pour faire créer une diversion parce qu'ils souhaitaient protéger la vie

  4   des personnes et avaient quitté la zone de conflit ?

  5   Réponse : Ah, bien, si vous voulez exprimer ainsi, oui.

  6   Question : Malgré tout, une fois qu'il ait établi sa bonne foi, non

  7   seulement il vous a rendu vos documents mais vous a assuré que vous

  8   pourriez partir en toute sécurité --"

  9   "M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 10   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 12   M. EMMERSON : [interprétation]

 13   "Question : Donc non seulement il vous a assuré et vous a rendu vos

 14   documents, on vous a dit que vous pourriez quitter en toute sécurité la

 15   région, encore une fois, de faire diversion quitter les soldats sur la

 16   ligne de front parce qu'ils voulaient garantir votre protection ?

 17   Réponse : Oui, tout à fait."

 18   M. EMMERSON : [interprétation] Alors, comment un Procureur responsable

 19   peut-il faire valoir cet incident pour prouver la participation présumée à

 20   une entreprise criminelle commune de M. Haradinaj dans le mauvais

 21   traitement des prisonniers ?

 22   Des trois incidents, l'intervention de M. Haradinaj dans le cas de Skender

 23   Kuqi, son intervention dans le cas du Témoin numéro 3, et son intervention

 24   dans le cas des observateurs militaires européens de la MOCE s'agit-il là

 25   des seuls exemples de sa participation à quelque incident que ce soit outre

 26   la confrontation -- sa confrontation avec les soldats du FARK que je vais

 27   aborder à la fin de mes arguments, alors nous allons laisser de côté la

 28   diversion des FARK et la laisser à la place qu'il leur revient, ces trois


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  1   incidents sont les seuls éléments de preuve des agissements quels qu'ils

  2   soient de M. Haradinaj, agissements pertinents, et que nous disent-ils ? Eh

  3   bien, une entreprise criminelle commune ? Je ne le pense pas.

  4   Alors, qu'en est-il de cette allégation mal ficelée disant que c'est

  5   simplement parce que c'était un commandant populaire au sein de l'UCK qu'il

  6   était nécessairement coupable ? Finalement, en tout, revient à cela. Et

  7   nous devons vous placer cela dans son propre contexte.

  8   M. Rogers a essayé d'écarter les éléments de preuve très cohérents qui ont

  9   été présentés à cette Chambre de première instance démontrant qu'il n'y

 10   avait pas de commandement vertical, pas de structure verticale, et ce, même

 11   après le 23 juin. Maintenant ce que nous --

 12   Ce à quoi nous sommes confrontés ce sont des abstractions et des

 13   généralités. Mais essayons de nous pencher sur des points concrets, et il

 14   n'y a pas de points concrets sur lesquels peut se reposer M. Rogers pour

 15   étayer sa cause, mais voyons un peu les éléments de preuve. Tout d'abord,

 16   la déposition de Skender Rexhametaj, M. Rogers s'appuie là-dessus pour

 17   faire valoir que sa relation avec M. Haradinaj était telle qu'il doit être

 18   tenu responsable de ce qui s'est passé à Jabllanice.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 21   "Question : … jusqu'au 23 juin, jusqu'à cette réunion-là, vous

 22   personnellement vous n'avez jamais reçu d'ordre de la part de Ramush

 23   Haradinaj. C'est ce que vous nous avez dit, vous étiez des commandants de

 24   sous-zones de rang identique même s'il était votre coordinateur, c'est ce

 25   que vous nous avez dit hier, vous n'avez jamais reçu d'ordre de sa part

 26   avant le 23 juin. Vous vous souvenez d'avoir dit cela hier ?

 27   Réponse : Oui. Je me souviens, et je le maintiens. Je vous ai dit que

 28   tout ce qui a été fait a été fait sur la base de …


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  1   Question : Essayez juste de vous concentrer bien sûr la question. Je

  2   vais vous soumettre que c'était le cas également après le 23 juin, à savoir

  3   que vous n'avez jamais reçu d'ordre de la part de Ramush Haradinaj vous

  4   enjoignant à faire ou à ne pas faire quoi que ce soit sur le plan militaire

  5   au sein de votre sous-zone même après la date du 23 juin.

  6   Réponse : Oui. Les sous-zones et les responsabilités des commandants

  7   de celles-ci étaient toujours en place à partir de ce moment-là. Nous avons

  8   continué de nous employer à rendre fonctionnelles les positions et les

  9   responsabilités même après le 23 juin.

 10   Question : Et en pratique, après le 23 juin la relation entre les

 11   commandants des sous-zones, pratiquement, elle était toujours une relation

 12   horizontale ?

 13   Réponse : Oui. Oui, elle est restée horizontale en réalité, cela

 14   signifie que personne ne pouvait donner d'ordre aux autres. Tout ce faisait

 15   par consensus, et la situation est restée la même."

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Donc, avant le 23 juin, nous savons de

 17   manière incontestée que Jabllanice était placée entièrement à l'extérieur

 18   des quatre sous-zones qui avait été établi le 26 mai et à partir de la date

 19   du 23 juin la relation entre les commandants, que ce soit à l'intérieur ou

 20   à l'extérieur de cette sous-zone, donc à savoir entre ceux qui

 21   constituaient la zone opérationnelle de la plaine de Dukagjin reste

 22   horizontale en réalité donc "cela signifiait que personne ne pouvait donner

 23   d'ordre à personne d'autre." Donc M. Rogers lorsqu'il établit sa

 24   comparaison avec le commandement des armées conventionnelles, il ne va pas

 25   jusqu'au bout. La conclusion logique est que ce n'était pas une armée

 26   qu'elle n'avait pas de d'hiérarchie vertical du tout précisément parce

 27   qu'elle reposait sur un principe de consensus établi enter les volontaires,

 28   des gens, vous avez entendu qu'ils fonctionnaient selon les principes de


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  1   loyauté à leurs propres villages et aux personnalités imminentes qu'ils

  2   écoutaient dans le village. Donc il était nécessaire de discuter de tout,

  3   de prendre toutes les décisions par consensus, et à aucun moment, il n'a

  4   été dit que des décisions ont été prises de placer en détention de rouer de

  5   coup, de tuer des gens à Jabllanice, ou d'y créer un centre de détention.

  6   Donc M. Rogers dit, oui, très bien, mais nous avons dans le premier

  7   procès le Témoin Zymer Hasanaj, qui nous dit que Ramus Haradinaj a nommé le

  8   commandant de Vranoc. Vous vous rappellerez, Vranoc est près de Baran, et

  9   c'est un de ces villages qui ont été attaqués pendant l'offensive du mois

 10   de mai. M. Rogers nous dit que, d'après Zymer Hasanaj, Ramus Haradinaj a

 11   nommé le chef de Vranoq, Din Krasniqi, mais cela ne correspond à

 12   l'affirmation que nous avons, à savoir que les villages élisaient leur

 13   propre commandant.

 14   M. ROGERS : [interprétation] L'autre paragraphe, s'il vous plaît, la

 15   référence.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] C'est dans votre propre mémoire, mais il me

 17   faudra un instant pour le retrouver.

 18   Donc voyez maintenant ce que M. Hasanaj a effectivement dit, la

 19   déclaration 92 ter donc.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 22   "Question : Est-ce qu'il y avait un commandant, commandant qui dirigeait

 23   les gens qui se considéraient eux-mêmes comme faisant partie de l'UCK, en

 24   avril 1998, dans votre village ?

 25   Réponse : Nous n'avions pas de commandant, à ce moment-là, nous avions

 26   quelqu'un qui avait la possibilité de contacter les gens, d'être une sorte

 27   de représentant, on pourrait dire. C'est comme cela que ça se passait.

 28   Question : Au paragraphe 4, vous dites que Ramus Haradinaj est souvent venu


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  1   à Vranoc, y compris pour annoncer la nomination de Din Krasniqi, au poste

  2   de commandant de la région de Baran, de Lugui Baran; est-ce que vous

  3   connaissez personnellement Ramus Haradinaj ?

  4   Réponse : Oui, je connais personnellement Ramus Haradinaj. Après

  5   l'offensive contre Vranoc, Ramus Haradinaj n'a pas nommé Din Krasniqi. Ce

  6   sont les gens qui l'ont élu."

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Donc pour répondre à la question de M.

  8   Rogers, au paragraphe 30 de son mémoire, donc ce passage qui a été présenté

  9   par M. Re au témoin, peut être utilisé, a été donc présenté et le témoin a

 10   contredit, donc n'a pas accepté cette proposition.

 11   Donc je voudrais à présent que l'on présente la pièce P78, c'est une carte

 12   --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez cité le paragraphe 30 de ce

 14   mémoire, 30.

 15   M. EMMERSON : [interprétation] Oui. Et vous verrez aussi la note de bas de

 16   page 102.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois la note de bas de page, mais

 18   je n'y vois pas exactement quel est le lien entre la note et le paragraphe

 19   lui-même.

 20   M. EMMERSON : [interprétation] Mais vous avez les derniers mots du

 21   paragraphe 30, où il est dit que M. Haradinaj a une influence sur

 22   l'élection des chefs, et nous avons cette note de bas de page qui constitue

 23   une référence à la déclaration de M. Hasanaj, qui a déclaré que Haradinaj

 24   était venu annoncer la nomination de Din Krasniqi en tant que commandant.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Parce qu'en fait les éléments de preuve nous

 27   disent de manière tout à fait répétée et cohérente que c'était toujours les

 28   villages qui élisaient leur représentant, leur commandant.


Page 2874

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  2   M. EMMERSON : [interprétation] Donc P78, s'il vous plaît, vous l'avez en

  3   noir et blanc. Donc nous avons les quatre sous zones et la sous zone qui se

  4   situe autour de Glodjan, qui est commandée par M. Haradinaj --

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est lequel numéro ?

  6   M. EMMERSON : [interprétation] Le numéro 1.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  8   M. EMMERSON : [interprétation] Et vous voyez que c'est un secteur vaste.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est difficile de lire à l'écran.

 10   M. EMMERSON : [interprétation] Moi, je vois plutôt bien à l'écran. Vous

 11   deviez plutôt appuyer sur le bouton qui vous montre les choses en temps

 12   réel, le "live feed".

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est beaucoup mieux. Merci.

 14   M. EMMERSON : [interprétation] Donc c'est le 26 mai, la réunion de cette

 15   date-là. La sous zone numéro 1, autour de Glodjan, donc c'est la carte de

 16   M. Tetaj; la sous zone 2, Irzniq, commandée par Rrustem Tetaj; la sous zone

 17   3, autour de Dasinovac; et puis nous avons la sous zone sous le

 18   commandement de Shemsedin Cekaj, qui a aussi déposé en l'espèce sur la

 19   structure horizontale et les liens horizontaux qui existaient. Donc

 20   Jabllanice se situe bien à l'extérieur de la structure des sous zones. Donc

 21   nous savons qu'à partir du début de la période couverte par l'acte

 22   d'accusation, et ce, jusqu'au 23 juin, même formellement Jabllanice se

 23   situe complètement hors ces tentatives d'établir une coordination entre ces

 24   zones le long de la ligne de front, et même après le 23 juin, nous le

 25   savons d'après les témoignages et les éléments de preuve que nous avons

 26   reçus. Il n'y avait pas de relation de commandement que M. Rogers essaie de

 27   nous présenter. Donc que nous disent les témoins à ce sujet, prenons

 28   l'intercalaire 13, un bref extrait de la déposition de M. Tetaj, pièce


Page 2875

  1   P521.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'INTERPRETE : [voix sur voix] 

  4   "Question : … nous allons parler du procès-verbal de la réunion qui s'est

  5   passée à Jabllanice, le 23 juin. Mais avant cela, nous voyons d'après les

  6   zones que vous avez annotées sur cette carte, qu'à la fin du mois de mai,

  7   ces sous zones ne comportaient pas de secteurs qui se situeraient à l'ouest

  8   de la route principale; est-ce que cela est exact ?"

  9   M. EMMERSON : [aucune interprétation] 

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. EMMERSON : [aucune interprétation] 

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Emmerson, en fait ce que

 14   j'entends dans l'extrait vidéo, je devais le voir dans la transcription,

 15   mais je ne le vois pas à l'intercalaire 13.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Peut-être que nous n'avons pas exactement le

 17   même endroit dans l'extrait. Donc c'est bien la transcription qui porte le

 18   numéro 3720 ?

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, tout à fait.

 20   M. EMMERSON : [interprétation] A moins que je ne me trompe, ça doit être ce

 21   passage-là.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors essayons de voir.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 25   "Question : Je vais donc revenir plus en détail au procès-verbal de

 26   la réunion qui s'est déroulée à Jabllanice, le 23 juin. Mais avant cela,

 27   nous voyons à partir des zones que vous avez indiquées sur cette carte,

 28   qu'au moment, donc à la fin du mois de mai, ces zones ne comprennent aucun


Page 2876

  1   secteur se situant à l'ouest de la route principale; est-ce que cela est

  2   exact ?

  3   Réponse : Oui.

  4   Question : Et de toute évidence Jabllanice non plus n'en fait partie ?

  5   Réponse : Jusqu'à ce que l'on crée l'état-major de Dukagjin, Jabllanice

  6   constituait une zone séparée, elle n'était pas incluse dans les autres

  7   quatre sous-zones, n'en faisait pas partie.

  8   Question : Justement, c'est ce que je voulais vous demander. Vous avez dit

  9   que jusqu'au -- la traduction nous dit 'jusqu'à ce que le premier état-

 10   major de Dukagjin soit créé.' Donc je veux que ce soit tout à fait clair.

 11   Est-ce que vous êtes en train de nous dire que jusqu'à la réunion du 23

 12   juin lorsqu'on a créé l'état-major de la plaine de Dukagjini, que jusqu'à

 13   ce moment-là, Jabllanice ne faisait pas partie de ce groupement coordonné ?

 14   Est-ce exact ?

 15   Réponse : C'est exact. C'est exact."

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Et je voudrais que l'on parcourt maintenant

 17   une série de dépositions. Prenons l'intercalaire 14.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je dois poser une petite question,

 19   s'il vous plaît. Dans l'intercalaire 11, la zone dont parle Hasanaj, de

 20   quelle sous-zone s'agit-il là ?

 21   M. EMMERSON : [interprétation] Vranoq. Donc vous voyez Baran, Baran ne fait

 22   pas partie des sous-zones, il est à l'extérieur également. Donc si vous

 23   prenez Baran, il est juste en haut à droite de la sous-zone 4. En fait

 24   Baran est à l'extérieur, mais Vranoq, si vous regardez juste en bas au sud

 25   de Vranoq, c'est au bout de cette limite de cette sous-zone 3 dans la zone

 26   de Shemsedin Cekaj.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 28   M. EMMERSON : [interprétation] Donc je voudrais parcourir ces passages


Page 2877

  1   rapidement. Intercalaire 14, c'est la déposition de Skender Rexhametaj sur

  2   les modalités de fonctionnement des relations entre les différents

  3   villages. Donc essayons de voir cela rapidement.

  4   [Diffusion de la cassette vidéo]

  5   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  6   "Question : Alors seriez-vous d'accord avec moi pour confirmer que

  7   l'une des raisons pour lesquelles un commandement d'une sous-zone en

  8   particulier ne pouvait pas imposer ses volontés à une autre sous-

  9   zone, que c'était parce que tout le monde était là parce qu'il était

 10   volontaire, que tout le monde opérait sur un principe de volontariat

 11   et tout devait en fait faire l'objet d'un consensus ?

 12   Réponse : Oui.

 13   Question : Mais hier au début de votre déposition vous nous avez

 14   parlé de manière un peu plus détaillée de quelque chose, à savoir que ces

 15   zones, que ces localités, villes et villages, où il y a eu nomination de

 16   commandants, étaient très fiers, très jaloux culturellement de leur

 17   indépendance et se voulaient indépendants l'un de l'autre. Est-ce que vous

 18   pouvez confirmer cela ?

 19   Réponse : Est-ce que vous pouvez répéter votre question ?

 20   Question : Une autre raison pour laquelle tout devait se passer par

 21   voie de consensus c'est parce que d'un point de vue culturel au Kosovo

 22   occidental - et vous nous en avez parlé hier - ces villes où il y avait une

 23   concentration de l'activité de l'UCK étaient très fières de leur

 24   indépendance et protégeaient leur indépendance les uns vis-à-vis des

 25   autres. Ils n'accepteraient pas, ils ne voudraient pas que le chef d'une

 26   autre localité vienne leur dire ce qu'il fallait faire parce que cela

 27   signifierait qu'il y avait rupture de consensus, n'est-ce pas ?

 28   Réponse : Oui, c'est exact, parce que ces gens qui ont été nommés ont


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  1   été nommés grâce au choix, à la volonté de la population locale et il y

  2   avait plusieurs tours à cela comme je l'ai mentionné. Donc, si quelqu'un

  3   d'autre venait se présenter pour commander, et bien ils trouveraient que ce

  4   n'était pas fondé, que ça n'avait pas lieu d'être. Donc je pense qu'ils ne

  5   l'acceptent pas. Je pense que les gens ne l'aimeraient pas, parce qu'ils

  6   nous faisaient confiance, je pense que nous avons bien travaillé compte

  7   tenu des circonstances réelles qui prévalaient.

  8   Question : Alors maintenant, pour conclure, dans votre déposition

  9   dans son ensemble, nous avons parlé de six sous-zones, quatre sont marquées

 10   sur la carte que je vous ai montrée, la carte de Rrustem Tetaj, vous nous

 11   avez parlé de la partie ouest de la route autour de Voksh, sous-zone 5, et

 12   la zone autour de Jabllanice, on en parle parfois en disant Dushkaja.

 13   Réponse : Oui.

 14   Question : Et après le 23 juin jusqu'à la fin du mois de septembre,

 15   il était impossible, n'est-ce pas, pour un quelconque commandant de ces

 16   zones de rentrer dans une autre zone et de dire aux gens ce qu'il fallait

 17   qu'ils fassent et de leur donner un ordre pour qu'ils fassent quelque chose

 18   ?

 19   Réponse : A moins qu'on l'ait demandé, autrement ce n'était pas

 20   possible.

 21   Question : Et telle était la situation en dépit de ce désir que nous

 22   voyons à l'écran, en dépit de ce projet qui devait être réalisé, qui était

 23   souhaité, et que vous avez à l'écran ?

 24   Réponse : Oui."

 25   M. EMMERSON : [interprétation] Donc ces aspirations, ce projet, se trouvent

 26   dans le procès-verbal de la réunion du 23 juin. Alors prenons maintenant

 27   l'intercalaire 15, 15 et 16, c'est M. Zyrapi. 15 et 16. Donc M. Zyrapi

 28   montrera clairement quels sont les éléments culturels sur lesquels repose


Page 2879

  1   cette indépendance.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  4   "Question : Donc excusez-moi pour cette distraction, Monsieur Zyrapi,

  5   nous allons essayer de voir ce qu'il en est des relations entre les bases

  6   de pouvoir militaire qui ont été associées aux principales familles du

  7   Kosovo occidental. Et vous nous avez dit qu'il serait absurde de faire

  8   valoir que soit la famille Brahimaj, soit la famille Haradinaj pouvaient

  9   imposer à Jashari ce qu'il fallait faire dans leur enceinte et vous nous

 10   avez dit qu'il serait absurde, n'est-ce pas, de faire valoir que les

 11   Brahimaj pouvaient dire aux Haradinaj ce qu'il fallait faire ou ne pas

 12   faire ?

 13   M. MENON : Mais c'est toujours le même problème. Il n'y a pas de

 14   fondement pour poser cette question à ce témoin en particulier. Il n'est

 15   pas clair comment il peut commenter sur cette famille en particulier, enfin

 16   sur leur lien, lien entre les Haradinaj et les Brahimaj.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 18   M. EMMERSON :

 19   "Question : Il serait absurde, n'est-ce pas, Monsieur Zyrapi, de faire

 20   valoir qu'en mars 1998 la famille Haradinaj pouvait imposer sa volonté ou

 21   sa discipline sur ce qui se faisait ou ne se faisait pas par les Brahimaj à

 22   Jabllanice ?

 23   Réponse : Non."

 24   M. EMMERSON : [interprétation] Donc ce "non" que nous avons dans le compte

 25   rendu d'audience pourrait éventuellement être mal interprété ou être ambigu

 26   vu qu'il y a eu cette interruption par M. Menon, et donc la question est de

 27   savoir : Serait-il absurde de faire valoir ? Et en fait le témoin confirme

 28   qu'il serait absurde de faire valoir cela. Et donc voyons maintenant la


Page 2880

  1   suite.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  4   "Question : Monsieur Zyrapi, donc je vais vous soumettre que en mars

  5   1998 aucune de ces trois familles n'avait l'autorité, la possibilité

  6   d'imposer leur volonté sur une autre famille. Cela est exact, n'est-ce pas

  7   ?

  8   Réponse : Je n'étais pas là pendant cette période-là pour pouvoir

  9   vous en parler, mais d'expérience je vous dirais qu'effectivement, c'est

 10   correct.

 11   Question : Je vous remercie."

 12   M. EMMERSON : [interprétation] Fin de visionnage. Donc prenons maintenant

 13   ce qui vous a été cité hier par M. Rogers à l'appui de certains éléments de

 14   preuve relatif au commandement. Donc M. Krasniqi, qui a déposé pendant le

 15   premier procès, je voudrais prendre ici deux passages qui sont très brefs.

 16   Tous les deux au fond. Il dit, dans sa déposition, que ces commandements

 17   sont séparés, distincts pas seulement après le 23 juin mais jusqu'à la fin

 18   du mois de juillet; donc jusqu'à peu avant l'offensive d'août. Alors le

 19   premier intercalaire sera l'intercalaire 17, pièce P514.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 22   "Question : Lorsque vous avez répondu aux questions sur ces relations

 23   entre les différents centres de pouvoir pendant la période après le 11

 24   juillet hier, vous en avez parlé, vous avez dit qu'ils n'était pas liés

 25   entre eux. Vous avez dit : 'A Glodjan, il y avait Ramush. A Prapaqan, il y

 26   avait Tahir. Les deux agissaient de manière indépendante, ce qui veut dire

 27   que nous n'avions pas les moyens et les possibilités de communiquer les uns

 28   avec les autres.' Et vous avez dit ensuite : 'Toutefois, s'il y avait un


Page 2881

  1   problème, si nous voulions envoyer des informations, on envoyait un

  2   coursier, une estafette, afin de demander de l'aide.' Et puis vous avez dit

  3   : 'Lorsque j'étais à Baran, si j'avais des problèmes, j'envoyais un soldat

  4   avec un véhicule afin de demander de l'aide. J'envoyais à Ramush, à Lahi,

  5   ou à Tahir, à celui qui était le plus proche.'

  6   Et je voulais comprendre --" "-- En fait, je voulais comprendre cette

  7   réponse un peu mieux. Est-ce que vous êtes en train de dire à la Chambre de

  8   première instance qu'à partir de l'endroit où vous étiez à Vranoq, l'un

  9   quelconque de ces trois commandants en fait de votre point de vue étaient

 10   en train d'opérer complètement de manière autonome et vous pouvez les

 11   contacter directement, vous adressez à eux directement ?

 12   Réponse : Oui. Ce n'était pas important à l'époque. Si un village

 13   était attaqué, tous les villages se portaient volontaires pour l'aider.

 14   Donc, par exemple, lorsque l'attaque a commencé sur Jabllanice, je

 15   demandais à d'autres villages de venir en aide, parce que Ramush ne pouvait

 16   pas venir de Glodjan là où je me trouvais. Donc les villages qui pouvaient

 17   aider envoyaient des volontaires pour aider.

 18   Question : Vous semblez nous décrire une structure qui est plutôt

 19   horizontale, elle n'est pas verticale, cette structure de commandement.

 20   Est-ce que vous accepteriez cette description que je vous fais ?

 21   Réponse : Oui, c'est vrai. C'était comme ça. C'est effectivement

 22   comme ça que les choses se présentaient. C'est le village qui était le plus

 23   proche de l'attaque qui venait en aide."

 24   M. EMMERSON : [interprétation] Maintenant l'intercalaire 18.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRETE : [voix sur voix]   

 27   "Question : Alors pour que tout soit clair, il y avait eu une offensive

 28   serbe extrêmement importante, une grande bataille qui a eu lieu à Loxha à


Page 2882

  1   la fin de la première semaine de juillet. Est-ce bien exact ?

  2   Réponse : Non, non pas lors de la dernière semaine du mois de juillet, cela

  3   s'est passé plus tôt.

  4   Question : Non, non, il se peut qu'il y ait eu un problème de traduction.

  5   Moi, je vous parlais de la fin de la première semaine du mois de juillet

  6   c'est ce que je vous ai dit.

  7   Réponse : Oui, à la fin de la première semaine.

  8   Question : [aucune interprétation]

  9   Réponse : Je pense que vous avez raison. Cela s'est passé vers le 5 ou 6.

 10   Question : Il y a eu une autre grande offensive serbe dans cette région à

 11   une semaine environ de la cérémonie de prestation de serment, n'est-ce pas

 12   ?

 13   Réponse : Oui. Oui, oui, effectivement.

 14   Question : … il est tout simplement important de bien comprendre la

 15   chronologie des événements. Alors, regardez cette carte vous nous avez dit

 16   qu'elle nous permettait de comprendre les lieux importants après le 10 ou

 17   12 juillet, et nous pouvons voir que vous avez décrit Jabllanice comme

 18   étant le QG de l'état-major, et Glodjan, pour ce qui est de Glodjan vous

 19   dites qu'il s'agit d'un QG de l'état-major. Alors, j'aimerais bien

 20   comprendre votre point de vue vous étiez officier sur le terrain à Baran,

 21   et est-ce que c'est ainsi que vous les considériez ils étaient donc

 22   indépendants l'un de l'autre ces deux QG, mais ils étaient égaux, il n'y en

 23   avait pas un qui était plus important que l'autre ?

 24   Réponse : Oui. A ce moment-là, c'est ainsi que les choses fonctionnaient.

 25   Ils étaient indépendants. Et il en avait de même pour nous. De toute façon

 26   nous n'avions pas de moyen et nous opérions chacun de façon indépendante."

 27   M. EMMERSON : [interprétation] Donc cela est extrêmement important parce

 28   qu'il nous dit que même après la fin de la bataille le 12 juillet, ils ont


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  1   conservé leur indépendance. Donc cela c'est trois semaines, trois semaines

  2   après le procès-verbal de la réunion du 23 juin, et il décrit que cette

  3   situation persiste après le 12 juillet. Alors, bien entendu, il s'agit de

  4   la période où Pal Krasniqi, Skender Kuqi, le Témoin 3 et le Témoin 6, ont

  5   été détenus à Jabllanice donc quelques jours après la tentative d'évasion

  6   dont vous avez entendu parler.

  7   Donc voilà nous nous trouvons dans cette situation, l'Accusation n'a

  8   absolument aucun élément sur lequel elle peut s'appuyer, et en fait elle

  9   utilise des éléments de preuve, en fait, c'est une zone assez dangereuse,

 10   Cela a fait déraper l'Accusation parce que cela ne se fonde sur absolument

 11   rien. Alors vous aviez donc la réputation, l'horrible réputation de M.

 12   Balaj avec la peur qu'il provoquait chez les gens, et c'est cela qui est

 13   utilisé. Alors que dans le cas de M. Haradinaj, c'est tout à fait le

 14   contraire qui est dit. Il avait une excellente réputation M. Haradinaj, il

 15   était extrêmement [inaudible] de la population et, par conséquent, donc il

 16   doit être coupable. Voilà le grand risque de ce genre de dérapage de

 17   raisonnement, mais voyons pour être très juste ce que M. Rogers vous

 18   indique. Il essaie d'utiliser le témoignage de personnes de l'ouest du

 19   Kosovo qui estimaient, qui pensaient que Ramush Haradinaj était un héro de

 20   guerre qui les avait protégés, un homme en fait qui n'avait pas l'habitude

 21   de brutaliser les gens, un combattant digne de ce nom, et l'Accusation en

 22   fait essaie d'utiliser cela comme élément de preuve pour vous inviter à

 23   conclure qu'il y a bel et bien eu entreprise criminelle commune.

 24   Alors j'aimerais maintenant que nous nous intéressions à l'intercalaire 19.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 27   "Question : Est-ce que Ramush est venu vous trouver -- trouver votre

 28   brigade à une ou deux reprises, et est-ce qu'il était accompagné de Sali


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  1   Veseli et Idriz Balaj ?

  2   Réponse : Ramush est venu, certes, mais Balaj n'était pas à ses

  3   côtés. En tout cas, je ne l'ai pas vu. Il n'était pas présent. Sali lui est

  4   venu seul et Ramush d'ailleurs est également venu seul.

  5   Question : Quel était l'objectif, le but de cette cérémonie de

  6   prestation de serment en juillet 1998 ?

  7   Réponse : Le but de la visite, en fait, il est venu parce que nous

  8   lui avions demandé quelque chose. Nous avions un grand nombre de soldats

  9   qui voulaient se rallier à l'armée de Libération du Kosovo, l'ALK, et nous

 10   voulions en fait qu'ils prouvent leur allégeance et nous voulions qu'il

 11   soit présent lors de cette cérémonie pour qu'il puisse constater lui-même

 12   ce que faisaient ces jeunes hommes et pourquoi est-ce qu'ils voulaient

 13   véritablement se rallier à l'ALK.

 14   Question : Mais lorsque vous dites 'i' vous faites référence à Ramush

 15   Haradinaj ?

 16   Réponse : Oui, bien sûr, à Ramush. Nous l'avons invité et nous

 17   voulions qu'il fasse partie de cette cérémonie solennelle, qu'il fasse

 18   partie, qu'il participe à cette cérémonie de prestation de serment pour les

 19   nouveaux membres de la brigade.

 20   Question : Mais pourquoi est-ce qu'il était si important que Ramush

 21   participe à cela ? Pourquoi est-ce que cela avait son importance pour vous

 22   ?

 23   Réponse : C'était important parce que les gens l'aimaient. Les gens

 24   voulaient le voir, les gens voulaient être proches de lui apprendre à le

 25   connaître, parce que pour eux, Ramush c'était véritablement une idole,

 26   d'ailleurs c'est toujours le cas.

 27   Question : Mais est-ce qu'ils voyaient, est-ce qu'ils le percevaient

 28   comme un commandant puissant, un commandant fort ?


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  1   "M. EMMERSON : [interprétation] J'aimerais en fait que M. Re n'intervienne

  2   pas comme il le souhaitait, et n'essaie pas de faire dire au témoin

  3   certaines choses, en lui posant des questions directrices. Ce n'est pas la

  4   façon de procéder, qu'il pose ses questions de façon non directrice, et

  5   voyons quelles sont les réponses qu'il obtiendra.

  6   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, pouvez-vous reformuler

  7   cette question, poser une autre question au témoin ?

  8   M. RE :

  9   Question : Vous avez dit il y a un moment que les gens considéraient Ramush

 10   comme un véritable idole. Pourquoi est-ce qu'ils le considéraient comme

 11   cela ?

 12   Réponse : Ecoutez, je n'en sais rien, c'est ce que pensaient les gens, ils

 13   avaient véritablement confiance en Ramush. Ils pensaient que c'était

 14   quelqu'un qui avait sacrifié sa propre famille pour protéger l'ensemble de

 15   la population. C'est pour cela qu'ils lui avaient donné quasiment ce statut

 16   d'idole. Mais il n'était pas prêt seulement à se sacrifier lui-même, mais à

 17   sacrifier toute sa famille.

 18   Question : Et que disaient ces personnes à propos du style de commandement

 19   de Ramush ?

 20   Réponse : Ramush n'avait pas le temps de commander partout. Les dirigeants

 21   lui faisaient confiance. Ils pensaient que si Ramush allait là-bas, il y

 22   n'aurait eu aucun problème, les gens. Vous savez les gens. Vous savez c'est

 23   quelque chose, c'est un phénomène qui s'est développé parmi la population,

 24   c'est ainsi, c'est comme cela que les gens l'aimaient."

 25   M. EMMERSON : [interprétation] M. Rogers vous a donné lecture d'un extrait

 26   de la déposition de Skender Rexhametaj, à propos de la question donc de

 27   l'autorité de M. Haradinaj. Il vous a donné lecture d'un extrait, et je

 28   vais vous en donner lecture de deux, parce qu'il faut que cela soit placé


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  1   dans le juste contexte. Alors, premièrement, intercalaire 20, voilà ce que

  2   M. Rogers vous a lu lors de son intervention.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  5   "Question : Monsieur, alors je vais vous répéter la question. Est-ce

  6   que les soldats de l'ALK, dans la zone de Dukagjin, respectaient l'autorité

  7   de Ramus Haradinaj, et en fait, je fais référence à la période précédent le

  8   23 mai 1998 et après le 23 mai."

  9   Excusez-moi, je pense que j'ai fait une erreur. Je vous avais dit

 10   qu'il s'agissait de l'intervention 20, en fait, il s'agit donc du compte

 11   rendu d'audience de la déposition de M. Rexhametaj, lors du procès. Il

 12   s'agit de la page 1097.

 13   Je vais vous donner lecture de ce compte rendu d'audience. Il s'agit

 14   de M. Menon, qui pose une question à propos donc du compte rendu d'audience

 15   pour M. Rexhametaj, et voilà ce qu'il dit :

 16   "La quatrième phrase et la version albanaise de ma déclaration

 17   devraient correspondre à la version anglaise, qui est comme suit : 'Avant

 18   le 23 juin, il avait déjà une autorité de facto dans la zone de Dukagjin'.

 19   Et je ne pense pas en fait qu'il y ait quelque litige à propos de qui

 20   représente -- est représenté par cet 'il' il s'agit bien de Ramus

 21   Haradinaj. Mais est-ce que vous pourriez me dire ce que vous entendez par

 22   ce terme 'autorité' ?

 23   Réponse : Ce que j'entends c'est qu'il faut prendre en considération

 24   la résistance, la résistance qu'il a opposée avec sa famille. Cet incident

 25   en fait s'est propagé dans tout le pays, et a eu énormément d'écho. Et à la

 26   suite de cela, Ramus a été respecté pour cette résistance, résistance qu'il

 27   a opposée pour protéger sa famille et son village, et au fil du temps, en

 28   fait il a véritablement acquis une grande notoriété. Tout le monde, la


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  1   plupart des gens le connaissaient, avaient énormément de respect pour lui,

  2   parce que comme je l'ai déjà dit, il avait opposé cette résistance et

  3   protégé sa famille et son village. Voilà, voilà ce que j'entends par cela.

  4   Question : … poursuivez.

  5   Réponse : Ce que je viens de dire c'est que de ce fait, les gens le

  6   respectaient, et si vous êtes respecté, vous bénéficiez d'une certaine

  7   autorité. Je n'entends pas une autorité de droit, mais j'entends par cela

  8   l'autorité d'une personne qui avait su protéger sa famille, son village, et

  9   son peuple. Voilà comment je pense."

 10   M. EMMERSON : [interprétation] Donc le terme "autorité" n'a pas été

 11   utilisé à bon escient par l'Accusation dans son réquisitoire. Ce n'est pas

 12   l'autorité, c'est tout à fait une forme d'autorité en fait à laquelle il

 13   faisait référence, les gens respectaient M. Haradinaj pour ce qu'il avait

 14   fait. Regardez ce qui est dit à l'intercalaire 21, page 1099.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 17   "Question : Je vais répéter la question. Est-ce que vous pourriez nous dire

 18   si les soldats de l'ALK dans la zone de Dukagjin respectaient l'autorité

 19   qui émanait de Ramus Haradinaj ? Et je fais référence à cette période qui

 20   précède le 23 mai 1998, ainsi qu'après le 23 mai 1998, ou plutôt, non,

 21   excusez-moi, après le 23 juin 1998, devrait-on voir.

 22   Réponse : La population le respectait toujours. Vous savez, la population

 23   souffrait, le peuple souffrait, et il les a défendus, et il les défendait,

 24   c'est pour cela qu'ils le respectaient.

 25   Question : Oui, mais je vous avais posé une question à propos des soldats

 26   de l'ALK, Monsieur.

 27   Réponse : Toute la population --

 28   Question : Merci.


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  1   Réponse : Toute la population voulait être défendue, et c'est ce qui a été

  2   fait. Ils l'ont tenu cette défense.

  3   Question : Merci. Est-ce que vous pourriez nous indiquer, Monsieur,

  4   pourquoi M. Haradinaj a été nommé commandant de la zone de Dukagjin ?

  5   Pourquoi est-ce qu'il a été nommé commandant officiellement le 23 juin 1998

  6   ? Pourquoi est-ce qu'il a été choisi ?

  7   Réponse : Parce que nous avons proposé son nom.

  8   Question : Pourquoi est-ce que vous avez proposé son nom ?

  9   Réponse : Peut-être que nous n'étions pas sûrs que nous, les autres,

 10   pouvions en fait peut-être assumer cette responsabilité. C'est pour cela

 11   que nous avons proposé son nom, car il avait prouvé et démontré ce qu'il

 12   pouvait faire. Et donc nous avons proposé son nom. Ramush aurait pu

 13   refuser, mais il a assumé cette responsabilité en acceptant notre

 14   proposition et en montrant son respect pour nous. Donc de son plein gré, il

 15   a accepté cette tâche, il aurait pu la refuser.

 16   Question : Monsieur, lorsque vous dites 'il avait prouvé ou montré ce qu'il

 17   pouvait faire, est-ce que vous pourriez préciser ce que vous entendez par

 18   cela, Monsieur ?

 19   Réponse : Je l'ai déjà dit plus tôt, il avait démontré qu'il était un bon

 20   soldat, un bon dirigeant, un bon chef, et une personne qui rassemblait, qui

 21   pouvait rassembler la population autour de lui. Et c'est la raison pour

 22   laquelle nous avons décidé que Ramush devrait être un coordinateur pour les

 23   sous zones un peu plus tôt. C'est la même logique qui a été utilisée par la

 24   suite. Il y avait cinq officiers de métier, et nous aurions tous pu assumer

 25   cette responsabilité mais nous avons proposé son nom et il n'a pas hésité.

 26   Il a accepté et respecté notre volonté et notre proposition qui consistait

 27   à le nommer chef.

 28   Question : Lorsque vous dites que Ramus Haradinaj était quelqu'un qui


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  1   pouvait rassembler les gens autour de lui, qu'entendez-vous par cela,

  2   Monsieur ?

  3   Réponse : Ce que j'entends c'est qu'ils savaient comment respecter les

  4   autres. C'était un excellent communicateur. Il était raisonnable. Donc

  5   c'était une personne qui rassemblait, voilà ce que j'entendais. Il était

  6   tout à fait à même de parler des problèmes que les gens avaient avec ces

  7   personnes. Il était à l'écoute de leurs préoccupations et c'est pour cela

  8   qu'il avait cette réputation."

  9   M. EMMERSON : [interprétation] Et puis un tout dernier passage que

 10   j'aimerais --

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais est-ce que vous ne pensez

 12   pas que le moment serait venu de faire la pause ?

 13   M. EMMERSON : [interprétation] C'est juste que j'arrive à la fin de ce

 14   thème donc je peux tout à fait, effectivement, faire la pause maintenant ou

 15   en terminer avec cela. Alors vous voyez --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est bien, allez-y.

 17   M. EMMERSON : [interprétation] Regardez ce dernier passage où il est dit

 18   que M. Haradinaj rassemblait les gens autour de lui parce qu'il était

 19   raisonnable, il savait comment les respecter et il était à l'écoute de

 20   leurs préoccupations.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, nous l'avons entendu, vous venez

 22   de le dire. Donc qu'est-ce que vous voulez présenter avant la pause ?

 23   M. EMMERSON : [interprétation] Intercalaire 22. Il s'agit du premier procès

 24   de M. Hasanaj.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 27   "Question : Paragraphe 5, vous avez fait référence à une expression :

 28   'Dieu au paradis et Ramush sur la terre,' entendant qu'il jouissait d'une


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  1   très grande autorité. Puis ensuite vous avez dit : 'Il n'y avait personne

  2   qui lui était supérieur.'

  3   Et je souhaiterais que vous indiquiez à la Chambre de première instance,

  4   aux Juges, ce que vous entendez lorsque vous avez dit que 'personne n'était

  5   supérieur' à Ramush.

  6   Réponse : Je l'ai dit -- j'ai dit ceci parce que -- parce que chaque fois

  7   qu'il y avait une attaque serbe jusqu'au moment ou l'ALK s'est engagée dans

  8   la guerre, lorsque ce nom est devenu connu, ce nom -- le nom de Ramush

  9   Haradinaj, en fait c'est moi qui ai parlé de cette expression, 'Dieu au

 10   paradis et Ramush sur la terre.'

 11   Question : Mais qu'entendez-vous lorsque vous dites que personne ne lui

 12   était supérieur ?

 13   Réponse : Je pensais que -- en fait je me demandais comment est-ce que nous

 14   pourrions opposer une résistance à l'ennemi. Moi, je ne savais pas qu'il

 15   était difficile de résister. En fait, il y a eu très peu de résistance.

 16   Question : Ecoutez, je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre votre

 17   réponse. Je vous ai demandé pourquoi est-ce que vous pensiez que personne

 18   ne lui était supérieur. Qu'entendez-vous par 'supérieur à' Ramush ?

 19   Réponse : Après qu'il a commencé à être connu, je ne sais d'ailleurs pas

 20   comment cela a été traduit, mais le fait est que c'est moi qui ai fait

 21   cette description. C'était mon point de vue personnel.

 22   Question : Oui, mais qu'entendez-vous par cela ? C'est tout ce que je

 23   souhaite savoir : Qu'entendez-vous lorsque vous dites que 'personne ne lui

 24   était supérieur', 'personne n'était au-dessus de lui' ?

 25   Réponse : Parce que c'était un homme bon et il est bon -- enfin ce que je

 26   veux dire c'est que le peuple, la population l'aime. La population

 27   albanaise le tient en très haute estime."

 28   M. EMMERSON : [interprétation] Je vous remercie. Et nous pouvons


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  1   effectivement faire la pause.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons faire la pause et nous

  3   reviendrons à 10 heures 45.

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 22.

  5   --- L'audience est reprise à 10 heures 46.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Emmerson.

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Je souhaiterais maintenant aborder les

  8   éléments de preuve que vous avez entendu et qui portent sur les personnes

  9   qui ont été détenues à Jabllanice et j'aimerais que nous nous intéressions

 10   à ce qu'elles ont dit à propos du fait d'avoir vu ou de ne pas avoir

 11   d'ailleurs Ramush Haradinaj à cet endroit et j'aimerais également en venir

 12   à ce qui a été déduit de cela.

 13   Alors, dans un premier temps, vous avez entendu les dépositions des Témoins

 14   75 et 76 qui s'exprimaient à propos de la détention de membres de leurs

 15   familles qui ont-ils avancé ont été détenus à plusieurs reprises, ils ont

 16   été détenus pendant une période assez longue jusqu'à la fin du mois de mai

 17   et ils se sont rendus donc à cet endroit à plusieurs reprises et ont vu

 18   différents membres de l'état-major, et ils ont tous les deux indiqué qu'ils

 19   n'avaient jamais vu M. Haradinaj à Jabllanice pendant leurs visites. Page 1

 20   845 du compte rendu d'audience et vous avez la pièce P304, il s'agit du

 21   Témoin 76, paragraphe 13 de la déclaration 92 ter.

 22   Le Témoin 75 a déclaré que c'était Lahi Brahimaj qui était le responsable à

 23   Jabllanice pendant la période où il se trouvait là et il a précisé en fait

 24   que M. Haradinaj n'était pas à ce moment-là encore commandant de la zone de

 25   Dukagjin.

 26   Vous avez la déposition de Shefqet Kabashi qui a été versée au dossier,

 27   déposition dans l'affaire Limaj. Il avait indiqué qu'il avait été basé à

 28   Jabllanice en tant que soldat de l'ALK, et ce, tout le temps à partir du


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  1   mois d'avril jusqu'au mois de septembre 1998, et lors de sa déposition, il

  2   indique, pendant toute cette période, Lahi Brahimaj était la personne qui

  3   avait le statut, la position la plus élevée, personne n'était au-dessus de

  4   lui pour commander Jabllanice, et il n'indique jamais que pendant cette

  5   période il aurait vu M. Haradinaj il ne l'a jamais vu à Jabllanice.

  6   Alors nous savons en fait qu'il a assisté à deux réunions officielles. Nous

  7   savons qu'il est intervenu au nom de Skender Kuqi, et nous savons, en fait,

  8   d'après le Témoin 80, qu'il s'est rendu au moins une fois alors que -- et

  9   c'est à ce moment-là qu'il a été entouré d'autres personnes et qu'il y

 10   avait des villageois présents à l'état-major. Mais Kabashi ne l'a jamais

 11   vu.

 12   Alors M. Rogers essaie de nous faire croire que M. Haradinaj se rendait

 13   régulièrement, mais si nous en tenions à la déposition de ces témoins, ce

 14   n'est pas quelque chose que l'on peut en déduire.

 15   Qu'en est-il du Témoin 3 ? Le Témoin 3, qui nous a indiqué qu'il a été bel

 16   et bien détenu à Jabllanice pendant une longue période, qu'il s'est

 17   échappé, qu'il a été rattrapé et reconduit là-bas. Bien entendu, il a

 18   rencontré Ramush Haradinaj pour la première fois lorsqu'il est arrivé à

 19   Glodjan, et après cela, comme nous pouvons le constater, rie ne lui ait

 20   arrivé. En d'autres termes, il n'avait pas vu M. Haradinaj à Jabllanice.

 21   Qu'en est-il du Témoin 6 ? Le Témoin 6, d'ailleurs, qui a son importance

 22   parce que comme vous le savez, il a été détenu pendant six semaines du 13

 23   juin, qu'à partir du 13 juin, et sa déposition a été versée au dossier. Il

 24   indique qu'une journée après l'évasion du 18 ou du 19 juillet, il avait la

 25   possibilité de circuler librement à l'intérieur de cette base ou de cette

 26   propriété. En d'autres termes, il travaillait dans la cuisine, et il avait

 27   toute la latitude pour se déplacer dans cette propriété, bien qu'il ait

 28   toujours été détenu. Donc ce n'est pas qu'il était incarcéré, enfermé dans


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  1   une pièce dont il n'aurait pas pu sortir et n'aurait surtout vu personne.

  2   Donc il pouvait voir tous ceux qui arrivaient et qui sortaient à cet

  3   endroit. Je vais vous lire la page 5 391. Il s'agit de sa déposition dans

  4   le premier procès. On lui demande quand que Skender Kuqi est allé à

  5   l'hôpital, et il dit :

  6   "Réponse : Je n'en sais rien. Je ne l'ai pas vu. Mais lorsque j'ai amené du

  7   pain à Pal Krasniqi, Skender Kuqi n'était plus là.

  8   Question : Est-ce que cela aurait se passer après une ou deux journées de

  9   cette tentative d'évasion que vous décrivez ?"

 10   Il dit :

 11   "Peut-être une journée après.

 12   Question : Et à partir de ce moment-là, il n'y avait qu'une personne, à

 13   savoir Pal Krasniqi; est-ce bien exact ?

 14   Réponse : Oui.

 15   Question : Vous ne pouviez toujours pas partir et quitter cet endroit, mais

 16   vous pouviez donc déambuler dans la cour et laver, faire la plonge, n'est-

 17   ce pas ? Est-ce bien exact ?

 18   Réponse : Oui, c'est exact."

 19   Et puis un peu plus loin :

 20   "Question : Une toute dernière question à propos de la chronologie des

 21   événements. Est-ce que vous savez combien de temps après que vous avez pu

 22   bénéficier de cette liberté relative combien de temps après que cet homme

 23   de Zahaq est arrivé ?

 24   Réponse : Un ou deux jours après, mais je ne peux pas être plus précis.

 25   Question : Merci. Alors, j'aimerais vous présenter un ou deux extraits,

 26   Témoin 6, il s'agit de la déclaration de témoin que vous avez fournie en

 27   février et en mars 2004. Il s'agit de la déclaration que vous avez faite,

 28   on vous a montré plusieurs rangées de photographies, on vous a -- et parmi


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  1   toutes les photographies se trouvait une photographie de Ramush Haradinaj.

  2   Donc je ne vais pas l'afficher à l'écran mais je vais vous donner lecture

  3   de l'extrait de la déclaration de témoin que vous avez signée et je vous

  4   demanderais de certifier que cela est exact. On vous a montré cette

  5   photographie qui se trouvait parmi toute une rangée de photographies et il

  6   y avait donc la photographie de M. Haradinaj et voilà ce que vous avez dit,

  7   et je cite votre déclaration au paragraphe 3, voilà ce que vous dites :

  8   'Je peux reconnaître Ramush Haradinaj. Je dois dire qu'après la guerre il y

  9   avait eu plusieurs émissions de télévision, des articles de presse et donc

 10   je connaissais son visage à ce moment-là, mais à cette époque-là je ne le

 11   connaissais pas, pendant la guerre je ne le connaissais pas, et je ne me

 12   souviens pas l'avoir vu à Jabllanice à la prison de l'ALK.'

 13   Question : J'aimerais vous demander de confirmer que c'est bien ce que vous

 14   avez déclaré dans votre déclaration.

 15   Réponse : Oui."

 16   Donc le Témoin 6 et non pas le Témoin 3. Là, je dis 3 maintenant. Le Témoin

 17   6, disais-je, pouvait se déplacer en toute liberté dans cet endroit donc

 18   qui était protégé de murs à partir 18 juillet, il dit qu'il n'a jamais vu

 19   Ramush Haradinaj. Donc tout ce que nous avons c'est la théorie de M. Rogers

 20   qui se livre à des conjectures c'est le seul élément de preuve que

 21   l'Accusation peut indiquer comme pour donner un lien avec Ramush Haradinaj

 22   et la théorie est comme suit : Alors, vous avez entendu la déposition du

 23   témoin protégé et d'après cette déposition les trois garçons ont été

 24   arrêtés et ont été conduit à Jabllanice avant les attaques menées par les

 25   forces serbes à Grabanice, et vous pouvez être sûrs et certains que lorsque

 26   le témoin protégé a vu Ramush Haradinaj entouré par un groupe d'hommes à

 27   l'intérieur du QG de l'état-major vous pouvez être sûrs que cela s'est

 28   passé après l'attaque menée contre Grabanica, probablement une semaine


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  1   après. Ce qui signifie qu'ils ont certainement dû être détenus pendant

  2   toute cette période à Jabllanice, alors que même le témoin protégé n'a

  3   jamais dit les avoir vus ce jour-là à cet endroit, mais l'Accusation nous

  4   dit mais M. Haradinaj devait savoir qu'ils étaient présents là-bas, et

  5   l'Accusation ensuite veut nous faire croire, de ce fait, a participé à

  6   l'entreprise criminelle commune.

  7   Enfin c'est ce que je crois comprendre de la façon dont M. Rogers nous a

  8   présenté ses moyens à charge.

  9   Alors, au moment [inaudible] commençons, voilà, ce que l'on peut répondre :

 10   Certes d'aucuns peuvent véritablement admiré cette intelligence juridique

 11   et le fait qu'il a fait preuve d'un grand esprit d'invention pour essayer

 12   d'élaborer toute cette thèse à partir de déductions qui vous invitent

 13   d'ailleurs à dégager vous-même, mais il faut -- il n'empêche que cela c'est

 14   un véritable château de sable.

 15   Premièrement, encore faudrait-il que vous compariez, lisiez la déposition

 16   du témoin protégé avec beaucoup de circonspection, parce qu'il y a de

 17   nombreuses incohérences pour ce qui est des dates, et des événements. Au

 18   paragraphe 211, par exemple, où il est indiqué :

 19   "Il est absolument sûr et certain que et je pense au chef numéro 1 que les

 20   victimes ont été exécutées après la visite de Haradinaj."

 21   Alors simplement tout cela est déduit de façon que l'on voulait faire

 22   passer comme rationnel à partir de la lecture de la déposition d'un témoin

 23   protégé. Il indique de façon très catégorique que lorsqu'on lui a posé une

 24   question directe à propos du moment où ces deux incidents se sont produits

 25   il s'agit des incidents où vous aviez donc les 20 ou 30 villageois cela

 26   s'est passé donc avant que l'incident au cours duquel l'oreille a été

 27   tranchée. Page 2 414. Il insiste et met cela en exergue pour indiquer de

 28   façon très, très claire que cet incident avec les villageois a eu lieu


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  1   après l'attaque serbe contre Grabanice mais que l'incident au cours duquel

  2   les garçons, les jeunes gens ont été arrêtés et détenus s'est passé avant

  3   cela.

  4   Alors, voilà, je peux faire valoir et classe mythe en posant toute une

  5   question : Nous avons les éléments de preuve, nous avons ces éléments de

  6   preuve à propos du moment où les garçons ont été emmenés à Jabllanice; est-

  7   ce que vous le savez quand est-ce que cela s'est passé ? La question est

  8   posée au témoin et il dit non. Et non, c'est un point, c'est tout.

  9   Nous en avons terminé avec cette histoire, parce qu'à moins que

 10   l'Accusation ne puisse prouver au-delà de tout doute raisonnable quelle est

 11   la date à laquelle les jeunes gens ont été conduits à Jabllanice, s'ils ne

 12   peuvent pas obtenir cela, ils ne peuvent pas commencer à vous demander de

 13   tirer une conclusion suivant laquelle ils étaient très probablement là le

 14   jour où M. Haradinaj était présent avec les 20 à 30 villageois. Mais en

 15   fait, de toute façon, le témoin protégé ne les a pas vus à cet endroit, les

 16   jeunes hommes, alors pourquoi est-ce que M. Haradinaj aurait lui dû les

 17   voir ? Parce que le témoin protégé et M. Haradinaj se trouvaient dans le

 18   même bâtiment, le bâtiment de l'état-major, dans un autre endroit à

 19   Jabllanice. Comment est-ce que M. Rogers peut ne serait-ce que suggérer que

 20   M. Haradinaj devait savoir qu'ils étaient présents alors que le témoin

 21   protégé ne le sait pas ? Donc il s'agit d'une théorie qui ne se fonde sur

 22   rien de concret, parce qu'ils ne savaient pas qu'ils étaient présents à ce

 23   moment-là.

 24   Je vais vous inviter, Messieurs les Juges, à examiner tout cela avec

 25   beaucoup de soin, de bien voir à chaque fois que le témoin essaie de

 26   préciser des dates, des occasions. Vous verrez qu'il y a toute une série

 27   d'incohérences. Par exemple, il y a une référence qui est faite à un

 28   village qui s'appelle Bucan dans cette zone -- en fait je souhaiterais

 


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  1   passer à huis clos partiel pour ce faire.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel,

  3   s'il vous plaît ?

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  5   [Audience à huis clos partiel]

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 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier

 23   d'audience.

 24   Maître Emmerson, les Juges de la Chambre ont dit qu'ils n'imposeraient pas

 25   en fait de limite de temps.

 26   M. EMMERSON : [interprétation] J'en arrive à ma conclusion.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait savoir en

 28   fait combien de temps vous allez encore utiliser ?

 


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  1   M. EMMERSON : [interprétation] Environ une vingtaine de minutes.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vingt minutes.

  3   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous savez que nous devons

  5   partager de manière équitable les prises de parole.

  6   M. EMMERSON : [interprétation] Nous devrions réfléchir à avoir une séance

  7   demain.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais ma préférence serait que l'on

  9   termine aujourd'hui.

 10   M. EMMERSON : [interprétation] Alors je vais essayer de procéder

 11   rapidement.

 12   Je voudrais parler donc de la déposition de Zoran Stijovic parce que M.

 13   Rogers a dit que les documents qui avaient été fournis par M. Stijovic ont

 14   été donnés aux Juges de la Chambre "pour ce qu'ils valaient." Il a dû en

 15   fait concéder cela parce qu'au cours du temps, M. Stijovic a reconnu, d'une

 16   manière ou d'une autre, mais il a vraiment fallu lui tirer les verres du

 17   nez que les documents qu'il fournissait étaient souvent des documents

 18   anonymes et que les méthodes qui lui avaient permis d'obtenir ces documents

 19   semblaient en fait être synonyme de chantage et que la possibilité réelle

 20   en fait de la méthode utilisée ne pouvait pas exclure la torture.

 21   Mais M. Rogers a cité la déposition de M. Stijovic pour laisser penser

 22   qu'il y avait une association très étroite entre les activités de M.

 23   Haradinaj et de M. Balaj. Donc je voudrais en fait vous citer quelques

 24   brefs passages de la déposition vidéo de M. Stijovic dans le premier procès

 25   et ensuite dans ce deuxième procès, parce que vous verrez que dans ce

 26   nouveau procès sa déposition a changé.

 27   Tout d'abord à l'onglet numéro 23, il s'agit donc d'une déposition prise

 28   dans le premier procès où il commence donc à expliquer quelle était la


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  1   méthodologie de ces services secrets donc de la RDB et comment ils avaient

  2   pu glaner les documents qui ont ensuite été utilisés par l'Accusation comme

  3   élément de preuve et pour étayer leur thèse.

  4   [Diffusion de la cassette vidéo]

  5   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  6   "Réponse : … je vais donc utiliser le terme 'une source humaine,'

  7   cela signifie qu'il s'agit d'un être humain qui fournissait des

  8   informations. Je pense que ceci évitera toute autre confusion et tout autre

  9   malentendu à l'avenir.

 10   Question : Vous avez mentionné 200 personnes au sein de l'UCK

 11   auparavant, est-ce qu'il s'agissait de sources humaines, comme vous les

 12   appelez ?

 13   Réponse : Oui.

 14   Question : Et ce type de personne était récompensé de quelle manière

 15   par la Sûreté de l'Etat ?

 16   Réponse : La motivation qui était celle de ces personnes lorsqu'elles

 17   travaillaient dans le cadre des services de sûreté était diverse, comme

 18   partout ailleurs. La motivation principale était l'argent. Mais souvent une

 19   autre motivation était d'ordre politique, ils n'étaient pas d'accord avec

 20   certaines activités qui étaient menées. Troisième raison ou motivation,

 21   c'était en fait d'identifier quelqu'un qui pouvait être compromis de cette

 22   manière. Si nous avions des informations compromettantes, nous pouvions

 23   utiliser donc le chantage. Et j'utilise ce terme parce qu'en fait c'est

 24   ainsi que l'on définit ce genre de pratique partout dans le monde, et là,

 25   il s'agissait évidemment principalement d'informations qui n'avaient pas

 26   été pleinement vérifiées, et de personnes qui faisaient usage d'un

 27   pseudonyme. On ne les mentionnait que par ce pseudonyme dans les différents

 28   rapports. Si vous le souhaitez, je peux vous expliquer notre méthodologie


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  1   et vous expliquez comment nous entrions en contact avec ce type de

  2   personnes.

  3   Question. Si cela peut aider les Juges de la Chambre.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en remets à vous, Monsieur Re.

  5   M. RE : [interprétation] Je suppose que la Défense, de toute façon, doit

  6   poser cette question, donc je vais prendre les devants.

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Effectivement, je préférais entendre ce que

  8   le témoin à dire en ce qui concerne le chantage, et ceci dans le cadre d'un

  9   interrogatoire principal.

 10   M. LE JUGE ORIE: [interprétation] D'accord.

 11   M. EMMERSON : [interprétation] En live maintenant.

 12   Vous voyez que M. Stijovic utilisait le terme de chantage, et vous voyez

 13   qu'il s'agissait d'un outil très puissant, c'était un chantage très

 14   efficace, et voyons comment il explique toujours dans ce premier procès.

 15   Donc il s'agit maintenant de l'international numéro 26.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 18   "Question : … avec les informations j'aimerais savoir si ceci a eu

 19   des conséquences sur la fiabilité des informations que vous avez reçues par

 20   le biais de ces personnes qui avait une moralité douteuse.

 21   Réponse : La qualité de ces informations dans une atmosphère où vous

 22   aviez des principes patriarcaux qui prédominaient, lorsqu'on trouvait par

 23   exemple un cas d'adultère entre membres d'une même famille, ceci pouvait

 24   être compromettant pas uniquement pour la personne concernée mais pour la

 25   totalité de la famille, et ceci pouvait en fait avoir des conséquences

 26   telles que des revanches ancestrales qui sont très usitées au Kosovo-

 27   Metohija. Et c'était donc un très bon moyen de recrutement d'une personne,

 28   et plus on pouvait contrôler cette personne et plus cette personne était


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  1   donc utile."

  2   M. EMMERSON : [interprétation] Quelque chose semble s'être passé entre le

  3   premier procès et le nouveau procès, parce que M. Stijovic ne semble pas

  4   vraiment aider ce terme de chantage durant le nouveau procès. On peut

  5   maintenant revenir à l'onglet numéro 25.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

  8   "M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voulais vous demander, Monsieur

  9   Stijovic, dans cet exemple d'A et de B, donc tout ce que vous nous avez

 10   expliqué ici, cette situation, en un mot comment résumez-vous cela, comment

 11   définissez-vous cette pratique ?

 12   LE TEMOIN : [interprétation] J'appelle cela un choix, une possibilité soit

 13   vous travaillez pour nous, soit nous publierons toutes ces pratiques

 14   immorales auprès de vos amis.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 16   L'INTERPRETE : Correction de l'interprète : Les relations immorales entre

 17   la femme A et celle de B.

 18   LE TEMOIN : [interprétation] On peut appeler ceci du chantage. Ca vient de

 19   me revenir à l'esprit. J'essaie de trouver un autre terme approprié en

 20   serbe, mais je ne suis pas en mesure de le faire.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vous demande pas comment moi, je

 22   définirais cela. Je vous demande comment vous, vous le définiriez en un

 23   seul mot.

 24   LE TEMOIN : [interprétation] Chantage.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci."

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Donc il s'agit de soudoyer des gens ou de

 27   les assujettir à du chantage. Mais M. Rogers semble également se fier à des

 28   éléments qui pourraient être de la torture. En fait, dans le contre-


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  1   interrogatoire de M. Stijovic, dans le premier procès lorsqu'il avait en

  2   fait versé au dossier des dépositions de deux témoins, Bekim et Naser

  3   Kalamashi, en ce qui concerne des crimes qui semblaient être rapprochés à

  4   l'UCK dans la région de Dukagjin, ces deux témoins avaient été interrogés

  5   par le bureau du Procureur, et avaient fait des déclarations au bureau du

  6   Procureur en disant qu'ils avaient été torturés dans les locaux de poste de

  7   police de Gjakove, pour faire cette déclaration qui ensuite avait été

  8   fournie par l'Accusation, par M. Stijovic.

  9   C'était dans le nouveau procès, non, non c'était dans le premier procès. En

 10   fait je crois que c'est dans le premier procès. Nous verrons ceci dans un

 11   instant de toute façon. Donc peut-être que c'était dans un autre procès.

 12   Tout d'abord, je voudrais présenter assez long d'une allégation de torture,

 13   et voyez comment il répond, parce qu'il faut se souvenir, il y a très

 14   longtemps qu'il a fait ces déclarations comme étant des déclarations

 15   fiables qui avaient été obtenues par le service de Renseignements serbe, et

 16   l'Accusation les a également présentées en plus de ce témoin en considérant

 17   qu'il s'agissait d'éléments de preuve fiables. Donc je voudrais maintenant

 18   que l'on passe à l'onglet numéro 26.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRETE : [voix sur voix]

 21   "M. EMMERSON : [interprétation] Peut-être que l'on pourrait revenir à la

 22   déclaration, s'il vous plaît, et je vous demande que l'on se concentre sur

 23   le paragraphe 15, qui est en bas de la page, une fois que les hommes ont

 24   été déshabillés et passés à tabac :

 25   Question : Nous devions monter à bord de camion et à mi-chemin en direction

 26   de Gjakove, la police est arrivée, elle nous a demandé en fait de monter à

 27   bord des jeeps de la police, et on était emmené à Djakovica. Ensuite ils

 28   nous ont cantonné dans le sous-sol des locaux du SUP pour les trois jours à


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  1   venir, et la police venait dans le sous-sol et nous interrogeait. Les

  2   entretiens ont eu lieu dans un bureau, au quatrième ou cinquième étage.

  3   J'ai été arrêté là-bas, et j'ai été cantonné là-bas avec 11 autres

  4   villageois.

  5   'Lorsque je vais interviewer par --'

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous allez lire la totalité ?

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Oui, parce que ceci a été traduit pour le

  8   témoin.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 10   M. EMMERSON : [interprétation]

 11   'Question : … lorsque je faisais l'objet d'interrogatoire, en langue serbe,

 12   on nous disait pourquoi est-ce que vous nous avez menti en nous disant que

 13   vous n'étiez pas membre de l'UCK ? Est-ce que vous aviez une arme ? Nique

 14   ta mère. Ensuite les questions étaient seulement en langue serbe, et la

 15   personne qui interrogeait était toujours la même personne mais ne prenait

 16   pas de notes écrites.

 17   Et durant ces interrogatoires, mis à part la personne qui

 18   interrogeait, il y avait toujours également deux autres civils qui me

 19   frappaient à l'aide de bâte de base-ball, et ceci sur tout le corps. Le 6

 20   septembre, c'est-à-dire le jour qui a suivi la déclaration mentionnée, je

 21   me souviens qu'un homme, moi, je ne me souviens pas s'il était en uniforme

 22   ou en habit civil, mais il est venu au sous-sol et nous a demandé de -- il

 23   nous a ordonné de signer un document. Nous lui avons demandé s'il y avait

 24   un traducteur qui pouvait nous lire ce que nous devions signer, et l'homme

 25   a répondu : vous verrez un traducteur. Ensuite, on a été à nouveau roué de

 26   coups, et on a été forcé de signer un document sans pour autant pouvoir en

 27   connaître le contenu.

 28   'En octobre 2006, le TPY m'a lu une déclaration qui figurait dans les


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  1   archives du TPY. Et comme j'ai déjà dit, et comme j'ai déjà dit c'est peut-

  2   être la même déclaration que celle que j'ai signée dans les locaux du SUP à

  3   Djakovica, parce que je n'ai jamais signé d'autre document, mis à part

  4   celui-ci. Mais je voudrais en fait avoir une objection en ce qui concerne

  5   le fait que je n'ai signé qu'une seule page. Mais la déclaration avec le

  6   contenu que j'ai relu aujourd'hui était composée de quatre pages. Je dirais

  7   qu'il n'y a rien de vrai, je n'ai pas mentionné quoi que ce soit qui est

  8   mentionné dans la déclaration ci-dessous …'

  9   Maintenant, si je vous ai bien compris, Monsieur Stijovic, vous

 10   n'avez aucune connaissance des circonstances qui entouraient la détention

 11   de cette personne, n'est-ce pas ?

 12   Réponse : Tout d'abord, je ne sais pas s'ils avaient été détenus ou

 13   pas, je n'ai pas d'information à ce sujet.

 14   Question : Mais comme je l'ai dit, il y a une déposition d'un

 15   officier haut gradé du SUP de Djakovica, faisant état du fait qu'ils

 16   étaient détenus ainsi que la déclaration que je vous ai lue. Mais la

 17   question que je pose c'est si ces informations sont puisées dans la

 18   déclaration sur laquelle vous vous êtes fié, vous ne savez pas s'ils ont en

 19   fait été torturés ou pas, n'est-ce pas ?

 20   Réponse : Je ne [inaudible] pas. Mais si vous me le permettez,

 21   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je voudrais dire quelques mots.

 22   Question : Mais est-ce qu'il s'agit d'une réponse à ma question ? Je

 23   pensais que vous aviez répondu à ma question. Vous avez dit que vous

 24   n'étiez pas au courant; est-ce exact ? Enfin, il y a un instant vous nous

 25   avez dit que vous ne saviez pas si ces personnes étaient détenues, Monsieur

 26   Stijovic. Est-ce que vous le saviez ou que vous ne le saviez pas ?

 27   Réponse : Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il s'agit d'une

 28   question complexe. Je ne peux pas répondre par oui ou par non à cette


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  1   question, Si vous me le permettez je souhaiterais dire quelques mots, peut-

  2   être que tout cela sera plus clair, avec tout le respect que je dois,

  3   Maître Emmerson.

  4   Question : Mais avant de faire, Monsieur Stijovic, il s'agit d'une question

  5   très simple ce n'est pas une question complexe, une question qui nécessite

  6   un oui ou un non. Est-ce que vous savez comment ces personnes étaient

  7   détenues ces 11 hommes y compris Naser Kalamashi entre le 3 et le 6

  8   septembre 1998 ? Est-ce que vous savez comment ces personnes ont été

  9   traitées durant ces trois jours, oui ou non ?

 10   Réponse : Non.

 11   Question : Merci. Donc lorsque vous avez résumé le contenu de cette

 12   déclaration et vous avez déclaré que son contenu était fiable, en fait,

 13   vous ne savez pas si ses propos étaient fiables ou pas, n'est-ce pas ?

 14   Réponse : Non.

 15   Question : Merci."

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suppose que ceci constitue la fin

 17   de votre contre-interrogatoire ?

 18   M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 20   M. EMMERSON : [interprétation] Vous serez ravi, Monsieur le Président,

 21   Messieurs les Juges, de savoir que c'est la dernière vidéo que je vais

 22   présenter avant de mes propos de clôture, mais ceci en fait est la base des

 23   documents que M. Rogers a choisi de vous présenter. Au début du procès,

 24   ceci vous a été présenté pour que cela vaille, et à la fin du procès, ce

 25   soit cité dans le réquisitoire et dans les mémoires en clôture.

 26   Encore une fois, lorsque l'on est Procureur dans des affaires très graves,

 27   on doit également prendre ses responsabilités.

 28   M. Rogers m'a également cité dans son réquisitoire en disant qu'il faisait


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  1   référence à un document qui n'avait pas été versé au dossier. Et je vais

  2   vous dire en fait de quel document il s'agit et pourquoi en fait ce n'est

  3   pas un point qui pourrait constituer une objection parce qu'en fait il

  4   s'agit d'une des allégations que M. Stijovic a avancé et qui est utilisée

  5   par M. Rogers.

  6   Nous avons vu qu'il a été mentionné qu'il y avait une liste noire de l'UCK,

  7   mais nous [inaudible] qu'il s'agissait en fait déjà pas d'une liste noire

  8   et pas une liste de l'UCK, mais des FARK, il s'agit d'une liste des

  9   personnes manquantes ou portées disparues et des personnes qui étaient

 10   ciblées. Donc la première liste, qui a été présentée par l'Accusation, est

 11   une liste qui avait été trouvée par la police serbe lorsqu'ils ont fait une

 12   descente sur la maison familiale de M. Haradinaj le 24 mars, et il se base

 13   là-dessus. Mais d'où obtient-il cette liste ? Il obtient ceci de la

 14   déclaration du Témoin Stijovic, et M. Stijovic, dans sa déclaration, en

 15   tant que témoin, mentionne le fait que dans la maison en question. Il a

 16   trouvé une liste d'Albanais qui étaient soupçonnés de coopération avec les

 17   forces serbes. Page du compte rendu d'audience 570, ligne 13. Ceci est basé

 18   sur sa déclaration au titre de l'article 92 portant sur la perquisition de

 19   la propriété familiale d'Haradinaj le 24 mars qui est décrite dans ce

 20   document. Il s'agit de la pièce P121, paragraphe 42.

 21   Alors la décision de la précédente Chambre de première instance était que

 22   tout aspect de la déclaration 92 ter de M. Stijovic qui n'est pas étayée

 23   par des éléments de preuve documentaires et devait simplement être ignorée.

 24   Nous allons ensuite passer en revue un grand nombre de documents, et je

 25   pense que ces documents n'ont qu'un endroit idéal, c'est la corbeille à

 26   papier. N'est sur la base de ces documents qu'on a posé des questions au

 27   témoin, mais ce rapport n'a pas été versé au dossier dans le premier procès

 28   et l'Accusation n'a pas souhaité verser au dossier de ce nouveau procès.


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  1   Donc cela signifie que ces allégations ne sont pas fondées. Elles restent

  2   infondées, et il n'y a pas d'éléments qui ont une valeur probante. Mais ce

  3   qui est encore plus important, c'est que le rapport à proprement parler et

  4   la raison pour laquelle ce rapport n'a pas été accepté au versement dans le

  5   premier procès mentionne qu'il y a une liste de noms d'Albanais, mais le

  6   MUP, d'ailleurs, les forces de police qui l'ont trouvé ne savaient pas s'il

  7   s'agissait d'une liste de membres de l'UCK ou de cibles de l'UCK.

  8   Alors, si ceci n'est pas une des preuves à charge mais qui induise en

  9   erreur, je ne sais pas ce qui en serait. On avance qu'il s'agissait d'une

 10   liste noire.

 11   Quant aux communiqués de l'UCK maintenant. L'Accusation se base sur les

 12   communiqués de l'UCK. Nous abordons ceci dans les paragraphes 174 à 176 de

 13   notre mémoire pour résumer. L'homme, qui l'a rédigé, Jakup Krasniqi, il a

 14   déposé dans le premier procès, et sa déposition a été versée au dossier. Il

 15   a dit qu'il ne disposait pas d'information et qu'il n'avait pas eu de

 16   conversation à quelque moment que ce soit avec Ramush Haradinaj et que ça

 17   ne reflète pas la politique adoptée par Ramush Haradinaj. Ca a été en fait

 18   rédigé par l'état-major général et on vous a expliqué qu'il s'agissait, en

 19   fait, cette instance qui était à proximité dans la frontière albanaise mais

 20   qui ne s'est pas vraiment réunie. Il s'agissait d'outils de propagande qui

 21   avaient pas mal de mensonges à l'intérieur, et de plus, rien ne mentionnait

 22   M. Haradinaj. Rien n'a été vu par M. Haradinaj, avant qu'il soit diffusé,

 23   et aucun de ces documents n'a été signé par M. Haradinaj, n'étaient basés

 24   sur des informations émanant de M. Haradinaj. De toute façon, ça couvre une

 25   période qui n'est pas couverte par l'acte d'accusation et aucun de ces

 26   documents n'émane de M. Haradinaj et ne peuvent pas refléter une politique

 27   qu'il aurait adoptée ou qu'il aurait encouragée. Ces documents n'ont aucune

 28   valeur, et c'est la raison pour laquelle la précédente Chambre de première


Page 2911

  1   instance les a considérés comme tels.

  2   Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ceci m'amène à aborder

  3   trois points en conclusion.

  4   Tout d'abord, il y a deux domaines restant qui n'ont aucune raison d'être

  5   dans cette affaire et auxquels se sont fiés l'Accusation. Il s'agit

  6   d'allégations qui n'ont même pas été mentionnées dans la première affaire

  7   parce qu'elle -- en fait, elle n'avait aucune pertinence en ce qui concerne

  8   les allégations concernant Jabllanice. Tout d'abord, il y a cette

  9   allégation consistant à dire que les FARK avaient été activement exclus par

 10   M. Haradinaj et qu'il y avait eu cette confrontation qui avait eu lieu

 11   brièvement après leur arrivée. Nous en avons parlé par le menu dans notre

 12   mémoire. Mais en quelques mots, ceci n'avait absolument rien à voir avec

 13   Jabllanice. Il s'agissait d'une confrontation entre deux forces qui étaient

 14   encore en conflit l'une avec l'autre ou une contre l'autre, et les forces

 15   en question étaient en fait sortis de leur zone de responsabilité et se

 16   retrouvaient face à face avec les forces avec lesquelles elles étaient en

 17   confrontation. Le témoin lui-même a accepté compte tenu des règles

 18   d'engagement, ils auraient pu être tués sur place, mais c'était un conflit,

 19   même si c'était regrettable, qui a été résolu très rapidement par la suite

 20   lorsque les deux forces ont accepté une répartition des fonctions, et vous

 21   vous souviendrez des dépositions dans le contre-interrogatoire des témoins

 22   en question. Ceci n'a absolument rien à voir avec le fait que l'on aurait

 23   maltraité des détenus à Jabllanice ou que l'on aurait maltraité ou torturé,

 24   ou tué des civils. Il s'agit d'un conflit entre de groupes de soldats. Ceci

 25   est à des milliers d'années lumières de ce qui figure dans  l'acte

 26   d'accusation et ça ne figure pas dans le jugement du premier procès parce

 27   que c'était considéré comme non pertinent.

 28   Pour ce qui est maintenant de ce qu'avance M. Stojanovic, encore une fois,


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  1   très rapidement, avant le début d'un conflit armé, vous avez des réponses

  2   spontanées des villageois de Glodjan, ensuite à cette rude attaque du 24

  3   mars, et le fait qu'ils avaient compris que la maison de M. Stojanovic

  4   était utilisée comme un point militaire par les forces serbes à partir

  5   duquel ils avaient lancé les attaques. Il n'y a aucun élément de preuve qui

  6   laisse penser que M. Haradinaj était présent et les éléments de preuve

  7   présentés dans le premier procès ont été considérés comme non fiables, et

  8   il n'y a aucun élément de preuve qui laisserait penser que M. Haradinaj

  9   aurait participé ou aurait encouragé cela. Quelle que soit la position à

 10   l'époque, il s'agissait d'un acte de revanche spontanée par une communauté

 11   qui avait été ravagée par une attaque terrible quelques jours auparavant.

 12   Il ne faut pas oublier qu'il s'agissait d'un autre Prekaz, c'est-à-dire des

 13   enfants, qui avaient été tirés à bout portant, et en réponse à une famille

 14   serbe, avaient utilisé -- avaient accepté que l'on utilise leurs maisons

 15   pour lancer une attaque à partir de là. Donc ceci n'a rien à voir en

 16   réalité avec Jabllanice.

 17   Deux derniers commentaires, si vous me le permettez, Monsieur le Président,

 18   Messieurs les Juges. Tout d'abord, je vous ai dit un peu plus tôt que vos

 19   juristes vont devoir se pencher sur toutes les notes en bas de page du

 20   mémoire en clôture de l'Accusation parce que, malheureusement, je dois vous

 21   dire que dans la grande majorité des cas, les notes n'étayent pas les

 22   citations. Et d'ailleurs, dans de nombreux cas, cela contredit ce qu'avance

 23   l'Accusation. Je ne vais pas passer en revue tout cela parce que cela

 24   prendrait trop de temps, mais nous avons préparé une liste des exemples les

 25   plus flagrants lorsque vous passerez en revue ces notes en bas de page.

 26   Enfin, si vous me le permettez, j'ai commencé ma plaidoirie en

 27   parlant de Ramush Haradinaj en tant que soldat, en tant qu'homme politique.

 28   En tant que soldat, il a lutté dans une guerre honorable, et c'est la


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  1   raison pour laquelle il jouit de la popularité dont il jouit. En tant

  2   qu'homme politique, il est arrivé à une situation de consensus. Il a

  3   encouragé un gouvernement de coalition avec la LDK et il était connu pour

  4   le fait qu'il visait à protéger toutes les minorités, y compris les Serbes

  5   qui étaient restés sur le territoire ainsi que d'autres minorités

  6   nationales. Il s'agissait d'un gouvernement d'unité nationale. Ce qui est

  7   très important, c'est que cela constitue sa politique et cela a toujours

  8   constitué sa politique, c'est-à-dire la protection des civils, et les

  9   éléments de preuve sont très clairs en la matière. Ce qui est très triste

 10   dans cette accusation et qui dure depuis sept ans, ce n'est pas uniquement

 11   triste à titre personnel pour M. Haradinaj et pour sa famille, c'est

 12   également très triste pour le Kosovo, parce que le Kosovo n'a pas un

 13   dirigeant qui aurait pu mener à bas la corruption et qui aurait pu

 14   permettre d'incorporer le Kosovo dans la communauté internationale, et ils

 15   n'ont pas pu bénéficier de cela lorsque Carla Del Ponte a essayé de

 16   continuer à mener ces enquêtes, même si on avait dit qu'il n'Y avait pas en

 17   fait vraiment quoi que ce soit dans le dossier. M. Rogers utilise des

 18   éléments de preuve qui sont fournis Zoran Stijovic et qui sont utilisés, et

 19   il m'a en fait critiqué après pour essayer de redresser le tir.

 20   Je voudrais conclure, si vous me le permettez, en vous rappelant,

 21   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, qu'à la fin du mémoire vous

 22   avez les déclarations, tout d'abord du représentant spécial du secrétaire

 23   général de la MINUK, qui était celui qui dirigeait le Kosovo durant la

 24   période où Ramush Haradinaj était premier ministre, et il s'agit donc de

 25   qui a travaillé pour les Nations Unies pendant 30 ans et qui était tout

 26   d'abord basé à Sarajevo, puis ensuite en Macédoine et ensuite qui a été

 27   représentant spécial du secrétaire général au Kosovo de 2004 à 2006, et il

 28   a décrit M. Haradinaj en ces termes :


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  1   "J'ai été impressionné par sa performance en tant que premier ministre.

  2   C'était un vrai leader. Il a travaillé dur, il entretenait de bonnes

  3   relations avec tous les citoyens et les partis politiques du Kosovo, ainsi

  4   que la communauté internationale et la MINUK. Il a été particulièrement

  5   effectif lorsqu'il s'agissait de suivre le progrès sur la mise en œuvre des

  6   critères appliqués en matière de répartition multiethnique et pour

  7   poursuivre la démocratie et faire respecter la loi au Kosovo, ce qui avait

  8   été établi par la communauté internationale, parce que c'était important

  9   lorsqu'il s'agissait de diriger le Kosovo et de le faire venir à la table

 10   des négociations pour déterminer le statut du Kosovo. A cet égard, la

 11   situation et le traitement des minorités étaient très importants pour les

 12   Serbes au Kosovo et revêtaient une importance toute particulière. En tant

 13   que premier ministre, M. Haradinaj a pris plusieurs initiations pour

 14   communiquer avec les Serbes du Kosovo par le biais d'actions qu'il avait

 15   prises personnellement ou en enjoignant les membres du gouvernement et les

 16   citoyens du Kosovo à faire de même."

 17   M. Haradinaj a également consenti aux visites du président Tadic et

 18   du premier ministre en Serbie au moment où il était premier ministre. Il a

 19   dit qu'il était disposé à les voir. Je --

 20   M. ROGERS : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps, mais ces

 21   déclarations n'ont pas été versées au dossier. Elles figurent en annexe.

 22   Pardonnez-moi, en même temps, que la déclaration, qui a été présentée lors

 23   de nos plaidoiries, aucune objection n'a été soulevée à cet égard. Un

 24   instant, s'il vous plaît. Je veux savoir s'ils ont été versés au dossier ou

 25   pas.

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Ceci est extrêmement injuste. Je vous

 27   demande de bien vouloir rendre une décision là-dessus.

 28   L'INTERPRETE : Poursuite de l'intervention de Me Emmerson.


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  1   M. EMMERSON : [interprétation] -- demandant aux membres du gouvernement et

  2   des citoyens de faire de même. Il a décrit la résignation de M. Haradinaj

  3   comme quelque chose de volontaire. Il était prêt à se rendre à La Haye,

  4   décision qui a été prise par M. Haradinaj car il reconnaissait que si le

  5   Kosovo souhaitait être traité comme un état et accueilli dans la famille

  6   des nations, son premier ministre devait se comporter comme un chef d'état

  7   et donner l'exemple et venir ici et assister à son procès. Malheureusement,

  8   les poursuites ont été inéquitables.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les Juges de la Chambre admettent

 11   cette déclaration.

 12   M. EMMERSON : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 14   M. EMMERSON : [interprétation] "La même après-midi où il a reçu l'acte

 15   d'accusation, M. Haradinaj a informé à toutes les personnes concernées

 16   qu'il allait démissionner. Il s'est organisé pour la reddition des deux

 17   autres personnes mises en accusation. Il a appelé au calme au Kosovo et,

 18   dans ma déclaration, j'ai fait de même. Tout en regrettant le départ de ce

 19   premier ministre capable, je l'ai tari d'éloges en raison de sa coopération

 20   avec ce Tribunal. J'ai été -- j'ai trouvé regrettable de ne plus pouvoir

 21   travailler avec cet ami. Pourquoi de gens ont paru surpris parce qu'un ami

 22   est quelqu'un auquel je peux faire confiance et --"

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'allais vous assurer, Messieurs, que

 24   nous avons lu le passage suivant.

 25   M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que vous me permettez de faire

 26   figurer au compte rendu d'audience un court passage ? Un général Klaus

 27   Reinhardt, de la défense des armées allemandes, commandait la KFOR, la

 28   force d'intervention des Nations Unies au Kosovo au moment où Haradinaj


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  1   était premier ministre, et il dit ceci :

  2   "M. Haradinaj est un homme très intelligent et fort honnête auquel je

  3   faisais pleinement conscience [comme interprété]. Je recherchais ses

  4   conseils. Il ne m'a jamais déçu, il n'a jamais usurpé ma confiance. J'ai

  5   apprécié sa personnalité convaincante. Cet homme charismatique est un homme

  6   extrêmement fiable, ainsi que son humour. C'est un très bon leader qui

  7   s'est donné pour tâche de changer les mauvaises conditions de vie au Kosovo

  8   et de mettre un terme aux combats ethniques parmi les peuples du Kosovo.

  9   C'était un homme qui avait une vision, il souhaitait avoir un meilleur

 10   avenir pour les différents groupes ethniques au Kosovo, et en particulier

 11   c'était le seul dirigeant kosovar albanais qui a toujours insisté sur

 12   l'importance de la réconciliation entre les Serbes et les autres minorités

 13   pour permettre à tous les réfugiés de se réinstaller au Kosovo. Il n'a pas

 14   dit cela pour me plaire, mais parce qu'il était tout à fait convaincu que

 15   les luttes internes ne se termineraient jamais au Kosovo si cela ne se

 16   produisait pas car il souhaitait que pays ait la chance d'avoir un meilleur

 17   avenir et un avenir pacifique."

 18   C'est ce sur quoi s'est fondé la thèse de l'Accusation du début à la fin et

 19   qui ne tient absolument pas la route parce que ceci aurait privé le Kosovo

 20   de [inaudible]. Nous vous demandons, Monsieur Rogers du bureau du Procureur

 21   -- nous vous demandons que vous montriez la porte à M. Rogers et au bureau

 22   du Procureur.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Emmerson.

 24   Monsieur Guy-Smith.

 25   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] 

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je puis demander à Me Emmerson de donner

 28   le pupitre, s'il vous plaît.

 


Page 2917

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Emmerson.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Comme vous le savez, il s'agit d'un procès

  3   à nouveau que le terrain sur lequel nous nous engageons n'est pas un

  4   terrain vierge; les condamnations et les acquittements ont eu lieu à propos

  5   de ces hommes en se fondant sur les dépositions de témoins qui, jusqu'à

  6   présent, nous espérons, vous permettront de vous pencher dessus, c'est dans

  7   le détail. Donc, il y a peu de doute pour qu'un examen approfondie du

  8   premier procès et nous pensons qu'il faudra que vous regardiez peut-être

  9   les véritables dépositions qui auront été entendues dans le cadre de ce

 10   premier procès.

 11   Il est important de se souvenir de quelque chose, et c'est quelque chose

 12   qui a été oublié à propos du premier procès après lequel un acquittement

 13   complet a été accordé à M. Balaj, cet homme qui avait une réputation

 14   épouvantable. Aucune preuve concrète n'a pu être présentée à son encontre,

 15   car l'Accusation n'a pas pu prouver sa thèse contre lui. Dans ce procès-ci,

 16   encore une fois, dès le départ, nous devons être très clairs, l'Accusation

 17   n'a pas prouvé sa thèse contre lui au-delà de tout doute raisonnable.

 18   Encore une fois, il est en droit de se voir accorder un acquittement. Vous

 19   pouvez utiliser ce que vous voulez, M. le Procureur, parler de sa

 20   réputation au civil soit telle, cela ne change rien au fait que les

 21   éléments de preuve qui ont été présentés font défaut dans le premier procès

 22   ainsi que dans le deuxième procès, et pour finir au moment des conclusions.

 23   J'ai beaucoup réfléchi à une partie de mes arguments, et à un moment donné

 24   j'ai pensé que c'était quelque chose qu'il valait peut-être mieux éviter.

 25   Après avoir entendu les remarques d'hier et après avoir encore une fois

 26   réexaminer les dépositions de certains témoins, en particulier aujourd'hui,

 27   j'estime avoir le devoir de rappeler à tout un chacun qu'il ne s'agit pas

 28   d'un match de boxe; il s'agit d'un tribunal, et dans un tribunal il y a un


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  1   certain nombre d'obligations qui reviennent aux parties et, en particulier,

  2   à l'Accusation. Devoirs et obligations. Car l'Accusation ne représente pas

  3   une partie ordinaire lorsqu'il y a un différend. Lorsqu'il s'agit de

  4   poursuites pénales, il ne s'agit pas pour l'Accusation de gagner son

  5   procès; ce qui est important, c'est que la justice soit rendue, donc le

  6   Procureur est un servant de la loi.

  7   Il y a deux possibilités, soit une déclaration de culpabilité, soit qu'un

  8   innocent souffre si le contraire est prononcé, il peut poursuivre en toute

  9   équité et avec vigueur. Mais s'il assène des coups violents, il n'est pas

 10   en droit d'asséner des coups malveillants, il doit donc s'abstenir

 11   d'utiliser des méthodes erronées qui pourraient conduire à une condamnation

 12   erronée. Je vais répéter cela. Il lui revient autant de s'abstenir

 13   d'utiliser des méthodes erronées qui sont calculées pour conduire à une

 14   condamnation erronée, et autant qu'il ait utilisé des moyens légitimes pour

 15   voir aboutir une décision juste.

 16   Il s'agit d'une citation d'une affaire aux Etats-Unis rendue par la Cour

 17   suprême qui s'appelle Burger contre les Etats-Unis. Une citation qui met en

 18   lumière les devoirs d'un Procureur et, en particulier, dans un procès

 19   pénal. Ce critère est peut-être trop élevé; c'est possible. Il a, en tout

 20   cas, mis en avant dans ce Tribunal, Tribunal pénal de l'ex-Yougoslavie,

 21   Règlement du Procureur depuis 1999, les codes de conduite professionnels ou

 22   de codes déontologiques pour les personnes exerçant la charge de Procureur,

 23   paragraphe 2, alinéa E :

 24   "Dans le cours des enquêtes et de la conduite du procès, de l'affaire

 25   préalable au procès et du procès, ainsi que des procès en appel, le

 26   Procureur adoptera les critères les plus élevés de conduite

 27   professionnelle. Un Procureur doit toujours se conformer à l'esprit du

 28   Statut et de Règlements de procédure et de preuve qui sont pertinents :


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  1   "(E) faire preuve de respect et de franchise devant le Tribunal, mais pas à

  2   faire des déclarations erronées à propos d'éléments factuels devant le

  3   Tribunal ou proposer des éléments de preuve dont le Procureur sait

  4   sciemment qu'ils sont faux ou inexacts.

  5   "Dans le cas où le Procureur apprend qu'une déclaration présentée au

  6   Tribunal est incorrecte, que des éléments de preuve qui ont été présentés

  7   sont erronés, le Procureur en question devra prendre les mesures

  8   nécessaires pour en informer le Procureur dès que possible."

  9   Il a été admis que, lorsque les éléments de preuve sont présentés de façon

 10   incorrecte ou lorsqu'on induit en erreur les Juges à propos de

 11   déclarations, ceci mène à des élections qui ne sont pas acceptables, et

 12   ceci est très important dans l'affaire qui nous intéresse, parce que de

 13   telles déductions ont été faites à partir d'un comportement donné. Alors

 14   comment choisit, décide-t-on, de faire ce choix ? Il est important de

 15   décider de quelle manière il faut lire ou entendre les éléments de preuve

 16   qui vous ont été présentés. Jusqu'à présent, on vous a présenté des

 17   éléments de preuve. L'Accusation vous a présenté des éléments de preuve par

 18   le biais de chantage, de corruption, ou de tentative de corruption, de

 19   torture, et il y a eu de fausses déclarations ou des déclarations erronées,

 20   et je vais commencer par cela, par les déclarations erronées, et plus

 21   particulièrement à propos de la personne d'Idriz Balaj.

 22   Paragraphe 18 de leur mémoire, je cite :

 23   "C'était comme un secret, un secret de polichinelle, tout ce qui est arrivé

 24   à Dukagjin n'a pas été prouvé. On a dit que ceci avait été fait par Togeri

 25   (c'est ce que nous avons entendu dire et c'est ainsi que cela est arrivé).

 26   Tout ce qui était mal, qui était arrivé, avait été attribué à Togeri."

 27   En réalité, c'est ce qu'avait dit cet homme, et c'était tout de même

 28   une déclaration qui pose problème. Mais ceci ne représente pas l'ensemble


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  1   de la citation, parce que nous avons ce qui [inaudible] contenus entre

  2   parenthèses n'ont pas été cités. C'était comme un secret, un secret de

  3   polichinelle. Tout ce qui était arrivé à Dukagjin, si ceci n'a pas été

  4   prouvé, tout le monde a dit que ceci avait été fait par Togeri; cependant,

  5   il ne s'agit là que de ouï-dire, et rien n'a été confirmé. C'est ce que

  6   nous avons appris, et c'est ainsi que cela s'est passé. Tout ce qui est

  7   arrivé de mal avait été attribué ou a été attribué à Togeri. Là, nous avons

  8   des déclarations fort différentes.

  9   Il y a autre chose qui a été dit dans le même contexte ou dans le même

 10   cadre. Je souhaite dire autre chose que Togeri n'était pas quelqu'un que la

 11   population connaissait. Il est venu apporter son concours pendant la

 12   guerre. Certaines personnes ont cité son nom en raison de cela.

 13   Dans les remarques qui ont été faites hier, et qui ont également été citées

 14   dans le mémoire, au paragraphe 46, note en bas de page 156, ceci concerne

 15   la déposition de John Crosland. Ceci est utilisé en tant que citation pour

 16   établir le fait que l'UCK a été impliqué dans le meurtre de six Albanais

 17   considérés comme étant réputés -- considérés comme étant des sympathisants

 18   serbes.

 19   M. John Crosland en réalité n'a pas dit cela mais il a dit la chose

 20   suivante : Il s'agit d'un autre exemple encore et les exemples sont

 21   multiples de ce genre de chose. L'élément suivant, P9, page 1822, une

 22   question est posée, encore une fois, il s'agit de la même question.

 23   Avez-vous vu les corps vous-même ?

 24   Réponse: Nous avons vu le corps mais il n'y a pas eu de preuve concluante

 25   sur la manière dont ces corps étaient arrivés là, qui les avait tirés

 26   dessus et qui avait tiré sur qui. Cela faisait partie de la situation

 27   plutôt fluide, à ce moment-là, en 1998 et 1999.

 28   Pour ce qui est de la déposition qui a été reçue dans ce procès, eh bien,


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  1   cette déposition indiquait ou le témoin indiquait qu'il ne savait pas

  2   comment les corps étaient arrivés là, qui leur avait tiré dessus. Pensez-

  3   vous que ceci induisait en erreur, qu'on met on vous suggère cette idée que

  4   cette déposition là permettait d'étayer ce point-là, à savoir, que l'UCK

  5   avait tué des gens parce qu'il s'agissait de sympathisants serbes, parce

  6   que c'est ce qu'on vous demande de déduire. Il s'agit d'une déduction fort

  7   importante ici pour l'Accusation. Mais c'est encore pire que ça en réalité.

  8   Penchez-vous un instant dessus, si nous voulons parler de la question des

  9   sympathisants serbes, et surtout si nous voulons parler d'Idriz Balaj qui,

 10   comme il est allégué a pris pour cible des collaborateurs et des

 11   sympathisants.

 12   P53. Cufe Krasniqi, qui évoque plus particulièrement la question d'un

 13   collaborateur.

 14   "Question : Il a reçu l'autorisation de Ramush Haradinaj, et de

 15   Togeri; est-ce exact ?"

 16   A commencer par la page 5840 :

 17   "Réponse. Eh bien, nous parlons de Sali Shkreli, qui était un

 18   collaborateur des Serbes, en même temps que sa famille. Il a été interrogé

 19   après que la police se soit retirée du poste de police de Gallapek.

 20   Gallapek a indiqué qu'il souhaitait faire partie de l'UCK pour pouvoir

 21   protéger son village. Il est venu nous voir pour nous dire cela. Ramush,

 22   Togeri et quelle qu'étaient les autres personnes qui l'accompagnaient, lui

 23   ont dit qu'il était libre de se déplacer dans la région. Je n'ai pas vu ce

 24   document-là, il m'a dit qu'il était libre de se déplacer dans la région.

 25   Des soldats lui ont également dit qu'il était libre de ses mouvements. Qui

 26   lui a donné cette autorisation-là, je ne le sais pas.

 27   "Question : Mais les informations que vous nous avez données

 28   consistaient à dire qu'il pouvait se déplacer librement dans la région, et


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  1   que c'était Ramus Haradinaj, Togeri qui lui avaient dit, n'est-ce pas ?

  2   Réponse. Oui, c'est exact."

  3   Ensuite il poursuit.

  4   Ce n'est pas l'image qui a été brossée d'Idriz Balaj. Il ne s'agit pas non

  5   plus des éléments de preuve présentés par l'Accusation, à propos de Togeri,

  6   un homme qui est un collaborateur disposait des connaissances nécessaires,

  7   et aux yeux de M. Togeri, mérite d'être condamné à la peine capitale, l'a

  8   autorisé à se déplacer dans la région et à être libre.

  9   Que peut-on donc en déduire ? S'il y a une quelconque déduction qu'il

 10   faille déduire puisque nous parlons de preuve indirecte, je crois que nous

 11   avons tous la réponse. La conclusion qu'il faut tirer à partir de preuves

 12   indirectes est une conclusion qui, s'il s'agit de déterminer la

 13   culpabilité, et bien, la seule conclusion possible est la suivante : Nous

 14   disposons de preuves concrètes et irréfutables qui proposent une analyse

 15   complètement différente de ce qui a été proposé. J'ai toujours estimé qu'il

 16   était bon de douter avant que de prendre une décision pour éviter de

 17   m'exposer au malheur de commettre une erreur si je n'avais pas douté

 18   auparavant. Une citation qui parle de la raison pour laquelle il est bon de

 19   douter --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous interromps, parce que je crois

 21   que vous allez aborder un nouveau sujet.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais m'arrêter maintenant, Monsieur le

 23   Président.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Nous allons lever

 25   l'audience et faire une pause d'une demi-heure.

 26   --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

 27   --- L'audience est reprise à 12 heures 30.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.


Page 2924

  1   M. EMMERSON : [interprétation] Juste avant que Me Guy-Smith

  2   n'intervienne, M. Haradinaj l'a accepté, à savoir je dois m'absenter pour

  3   le reste de l'audience d'aujourd'hui. Je suis pris ailleurs. Je ne voudrais

  4   pas vous manquer de respect en aucune manière, mais je suis pris ailleurs.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je vous remercie. Vous en avez

  6   parlé brièvement avant de commencer votre plaidoirie.

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Je vous remercie.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bon voyage, Maître Emmerson.

 10   Nous étions en train de parler de la question de doute, de doute

 11   raisonnable, et je pense qu'il est important de s'y pencher vu la nature et

 12   la qualité des éléments de preuve qui ont été soumis à la Chambre pendant

 13   dans ce procès. Bien entendu, je sais que MM.les Juges connaissent non

 14   seulement parfaitement la mission elle-même mais également l'importance de

 15   cette notion dans un procès pénal, donc je ne vais pas m'étendre dessus. Ce

 16   serait tout à fait inutile.

 17   Il a été dit - et je pense que c'est à juste titre - que la nature de ce

 18   doute est telle que des hommes ou des femmes raisonnables incités par ce

 19   doute éviteraient à agir s'ils doutent donc de cette manière sur des

 20   questions importantes, des questions qui portent à conséquence. C'est un

 21   doute qui est raisonnable à la lumière des éléments de preuve présentés

 22   après avoir comparé de manière attentive et examiné l'ensemble des éléments

 23   qui ont été présentés à la Chambre. Au-delà de toute doute raisonnable,

 24   c'est une exigence qui repose sur les épaules de l'Accusation, à savoir

 25   elle doit présenter des preuves qui empêchent toute hypothèse raisonnable

 26   autre que celle de la culpabilité, toute hypothèse qui serait contraire à

 27   une autre conclusion raisonnable ou raisonnée.

 28   C'est à l'Accusation d'assumer son obligation, de démontrer les choses au-


Page 2925

  1   delà de tout doute raisonnable, et c'est cette obligation qui est la sienne

  2   depuis le début jusqu'à la fin du procès. Il n'y a jamais d'inversion de la

  3   charge de la preuve, et cela est important parce que je tiens à souligner

  4   qu'à aucun moment il ne devrait y avoir cette inversion de la charge de la

  5   preuve. Il ne nous appartient pas de démontrer que nous ne sommes pas

  6   coupables.

  7   Et ce qui va de pair avec la notion de doute raisonnable, c'est une autre

  8   chose importante, à savoir l'égalité des armes et l'équité. C'est le

  9   principe qui existe dans tous les systèmes judiciaires, à savoir non

 10   seulement la justice doit-elle être rendue, mais l'on doit s'apercevoir que

 11   la justice est rendue, et cela est tout particulièrement important en

 12   l'espèce dans le contexte dans lequel nous agissons aujourd'hui, et il en a

 13   déjà été question. Nous partageons le point de vue qui est celui de

 14   considérer que la Chambre a fait l'impossible pour répondre à toutes les

 15   requêtes et toutes les demandes de l'Accusation pour garantir un procès

 16   équitable. La Chambre a remué ciel et terre pour pouvoir entendre tous les

 17   éléments de preuve.

 18   Alors, maintenant, en fonction de votre système judiciaire d'origine, l'on

 19   pourrait se demander si c'est quelque chose que l'Accusation a le droit de

 20   faire ou non, mais ce serait plutôt un débat théorique, et nous n'allons

 21   pas nous lancer dans ce type de débat aujourd'hui. Mais s'agissant de la

 22   question qui est de savoir si l'on a bien vu que la justice était rendue,

 23   je pense que c'est un élément très important en l'espèce, et je pense que

 24   c'est un des points majeurs. J'entame maintenant dans le contexte du doute

 25   raisonnable, dans le contexte de la charge de la preuve. Donc, en termes de

 26   fiabilité, en termes de fiabilité d'éléments de preuve sur lesquels vous

 27   devez vous pencher, sur la base desquels vous allez rendre votre jugement.

 28   Alors, voyons maintenant ce qui en est du critère de la preuve.


Page 2926

  1   Alors, comment nous allons définir le critère de la preuve au-delà de tout

  2   doute raisonnable, nous ne devons jamais le perdre de vue, parce que, pour

  3   que l'on puisse invalider un verdict, cela dépendra de la fiabilité des

  4   documents ou des éléments de preuve sur lesquels vous avez jugé, donc il

  5   vous faut rendre votre jugement sur des bases saines parce que s'il y a une

  6   incertitude sur les bases sur lesquelles vous allez vous reposer, en fait,

  7   dans ce cas-là, un aspect fondamental du procès pénal n'a pas été respecté.

  8   Donc, je parle là de la fiabilité des éléments de preuve. Vous êtes

  9   les Juges du fait. Quel est notre degré de tolérance pour le risque d'un

 10   jugement erroné. Un jugement ne sera pas rendu de manière saine s'il est

 11   fondé sur quelque chose qui n'est pas fiable. Je voudrais prendre un

 12   instant, parce que je vais maintenant vous parler de la déposition d'un

 13   témoin que nous avons appelé le Témoin X depuis quelque temps. Je vais en

 14   revenir à cela plus tard, mais il a été dit qu'un témoin qui manque de

 15   scrupules ne peut être que celui qui défend la cause de l'Accusation.

 16   Je ne voudrais pas qu'il y ait un doute quelconque sur le Témoin X,

 17   nous affirmons que soit il s'agit d'un menteur soit de quelqu'un qui n'est

 18   en la possession de ses capacités psychiques, et sa déposition, d'après

 19   nous, n'est pas fiable.

 20   Alors vous avez demandé à quel moment sont-ils arrivés à Jabllanice,

 21   lorsque vous avez interrogé sur les allégations qui sont contenues dans le

 22   chef d'accusation numéro 1. Permettez-moi de vous poser cette question à

 23   mon tour. Ma question serait la suivante : ce sont-ils jamais en réalité

 24   trouvés à Jabllanice ? Je reviendrai à cela plus tard. Je voudrais

 25   m'intéresser plus en détail à cette question.

 26   Mais à présent c'est la notion qui m'intéresse, et je vais vous donner

 27   lecture d'un extrait du jugement qui a été rendu pendant le premier procès,

 28   et je vous assure que j'agirai par précaution. Le paragraphe 14.


Page 2927

  1   "Plusieurs fois, seul un témoin a déposé au sujet d'un incident

  2   reproché aux accusés. La Chambre d'arrêt a estimé que la déposition d'un

  3   seul témoin sur un fait substantiel, en principe, n'exige pas de

  4   corroboration."

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, vous lisez le paragraphe

  6   14 de quel texte ?

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Du jugement du premier procès.

  8   "En ces occasions, la Chambre de première instance fait preuve de

  9   précautions particulières en prenant en considération l'ensemble des

 10   circonstances pertinentes à la déposition du témoin, y compris tout motif

 11   qui oriente la déposition du témoin ainsi que d'autres facteurs

 12   mentionnés."

 13   Nous trouvons une autre précaution au paragraphe 121.

 14   "La Chambre de première instance a entendu beaucoup d'éléments de

 15   preuve sur la situation qui prévalait au Kosovo, à savoir des tensions qui

 16   existaient, et ce, bien avant la période couverte par l'acte d'accusation,

 17   à savoir les autorités serbes et la minorité serbe du Kosovo se situaient

 18   d'un côté et puis les Albanais kosovars de l'autre côté, opposés en tant

 19   qu'adversaires. Cette situation était telle que nous devons faire preuve de

 20   précautions lorsque nous allons déterminer ceux qui étaient à l'origine des

 21   actes de violence contre les victimes de tel ou tel groupe ethnique ou

 22   affiliation. Si nous n'avons pas d'éléments de preuve pour démontrer le

 23   contraire, la Chambre de première instance admet la possibilité qu'il y

 24   avait une animosité entre les groupes opposés qui aurait pu causer les

 25   individus appartenant à l'un ou l'autre groupe à se rendre ou à se livrer à

 26   des agissements violents par courroux personnel ou motivation personnelle,

 27   plutôt que dans le cadre de structures organisées."

 28   Bien entendu, je réagis là par rapport à la position adoptée par


Page 2928

  1   l'Accusation en disant qu'une structure a existé sur place, une structure

  2   organisée, et que c'est dans le cadre du fonctionnement de cette structure

  3   que ces crimes ont été commis.

  4   Alors, maintenant, je voudrais revenir un instant aux affirmations

  5   qui ont été faites par l'Accusation dans leur mémoire. Et je prends le

  6   paragraphe 18, la note de bas de page 58.

  7   "Tetaj a entendu que des membres des Aigles noirs de Balaj qui

  8   voulaient quitter l'unité ou qui ont été chassés de l'unité ont été

  9   exécutés pour les empêcher de parler des activités criminelles auxquelles

 10   se livrait l'unité."

 11   Alors Tetaj, effectivement, a entendu dire cela, mais il donne plus

 12   d'explications dans sa déposition. Ce qu'il dit c'est que la personne qui

 13   lui en a parlé, à savoir un homme appelé Berisha --

 14   L'INTERPRETE : Prénom inaudible pour l'interprète.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] –- a essayé de justifier le fait qu'il ait

 16   quitté la zone de guerre, le fait qu'il soit parti, et qu'en fait, cela a

 17   incité le témoin à se demander si l'affirmation était vraie ou non, vu donc

 18   par qui cela a été dit.

 19   Alors un autre sujet qui revient dans le mémoire et qui occupe une place

 20   importante et qui a occupé une place importante dans le réquisitoire de M.

 21   Rogers hier concerne cette réputation de quelqu'un qui inspirait la peur,

 22   et comme quoi cela aurait été la réputation d'Idriz Balaj et des Aigles

 23   noirs. Et là encore, nous avons le paragraphe 18 qui en parle. Tetaj a dit

 24   dans sa déposition que les Aigles noirs de Balaj étaient réputés d'être

 25   brutaux.

 26   Nous devrons nous attarder un petit peu là-dessus, mais nous avons la

 27   version intégrale de cette conversation qui commence page 3 676. Il s'agit

 28   de la pièce P75. Voici une réponse :


Page 2929

  1   "Ecoutez, il faut que j'explique autre chose. Avant Togeri, il y a eu un

  2   autre homme, Uka, et c'était avant Togeri, et lui il est parti. Togeri est

  3   venu un peu plus tard, et lorsque vous m'avez demandé qui m'a interrogé, il

  4   y avait un autre homme qui s'appelait Uka, et il a pris part à beaucoup de

  5   choses qui sont aujourd'hui imputées à Togeri."

  6   Alors, nous savons qui est Uka; c'est Pjeter Shala, l'homme qui est

  7   vêtu en noir et qui porte une épée :

  8   "Question : Toger et ces hommes, est-ce qu'ils étaient considérés comme

  9   étant brutaux ?

 10   "Réponse : Il était plus dynamique. A l'époque, c'est comme ça qu'on

 11   présentait Togeri. Tout ce qui se passait, les pires choses qui se

 12   passaient là-bas, on les attribuait à Togeri, même si peut-être il ne

 13   s'était pas trouvé sur les lieux. Donc il n'y a rien de particulier que

 14   j'aurais vu de mes propres yeux. Donc je vous demande à vous, Messieurs les

 15   Juges, et aussi à l'Accusation, de me demander de parler des choses que

 16   j'ai vues de mes propres yeux.

 17   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire qui

 18   présentait Togeri de cette manière-là ? Est-ce que vous pouvez nous dire de

 19   qui ça venait ?

 20   "LE TEMOIN : [interprétation] Il y a eu des rumeurs dans tous les villages

 21   qui se propageaient disant que Togeri était à l'origine de tout cela. Mais

 22   je ne peux rien confirmer parce que je n'ai rien vu, rien de ce genre-là.

 23   On a fait des observations allant dans ce sens. Mais quant à la réalité des

 24   choses à ce qui s'est passé vraiment, je ne sais pas. Il est vrai qu'il

 25   était plus dynamique et il était plus sérieux dans sa manière de parler.

 26   C'est probablement à cause de cela que les gens sont arrivés à cette

 27   conclusion. Il y a eu beaucoup de rumeurs qui couraient, comme quoi il

 28   aurait fait ceci et comme quoi il aurait fait cela. Mais je n'ai rien vu,


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  1   rien de la sorte. Donc je ne peux pas le confirmer.

  2   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit qu'il était plus

  3   dynamique. Alors, est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous entendez par

  4   là plus précisément ?

  5   "LE TEMOIN : [interprétation] Il était plus enthousiaste. Il était cool,

  6   mais il était comme cela, simplement, naturellement. Et cette image dont

  7   parlaient les gens, c'était quelque chose qu'ils s'étaient créés, eux, dans

  8   leur esprit. Et je ne sais pas comment.

  9   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et je voudrais vous interroger au sujet

 10   d'Astrit Berisha. C'est une dernière chose que je vais vous demander. Je

 11   vous en ai parlé il y a un instant. Vous avez confirmé en répondant à M. Re

 12   que vous avez parlé à un homme, un 'Tirana', qui s'appelait Astrit Berisha.

 13   "LE TEMOIN : [interprétation] Oui, j'ai mentionné cela hier.

 14   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez demandé pourquoi

 15   Berisha n'était pas au Kosovo.

 16   "LE TEMOIN : [interprétation] Oui.

 17   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez confirmé que Berisha

 18   vous a dit que Toger avait tué tous les membres de sa famille [comme

 19   interprété] qui souhaitaient partir. C'est ce que Astrit Berisha vous a

 20   dit.

 21   "LE TEMOIN : [interprétation] Oui. Pour ce qui est du retrait de la

 22   FARK du Kosovo, oui, comment cela s'est produit, ça affaiblit

 23   considérablement les unités qui sont restées dans la plaine de Dukagjin, et

 24   puis ça a affecté le moral, le moral des hommes. Donc les gens qui sont

 25   partis, ils peuvent confirmer qu'il a essayé de justifier pourquoi ils sont

 26   partis, pourquoi ils se sont retirés. Et je ne pense pas que ce qu'il a dit

 27   était vrai. Parce que si quelqu'un vient pour m'aider, si quelqu'un vient

 28   pour m'apporter son soutien, je vais essayer de ne rien faire pour être sûr


Page 2931

  1   que tout le monde devient membre des Aigles noirs. Donc ils ne pourraient

  2   pas tuer tout le monde. Ca ne fait pas de sens. Donc il dirait, j'étais un

  3   officier. J'avais participé. Il m'a parlé simplement parce qu'il était

  4   faible.

  5   "M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous avez parlé à l'enquêteur

  6   du bureau du Procureur de ce que vous avez dit à Astrit Berisha, est-ce que

  7   vous avez expliqué à l'époque qu'il a essayé de justifier les raisons pour

  8   lesquelles il a fui le conflit ?

  9   "LE TEMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Et ils n'ont pas

 10   insisté sur ces questions. Ils m'ont simplement demandé ce que j'avais

 11   entendu et avec qui j'étais en contact. Et puis, au fur et à mesure, qu'ils

 12   me posaient des questions on en est venu à cela à ce que j'ai dit."

 13   Ligne 75. Page 3 813.

 14   Alors, hier, on nous a dit qu'il ne fallait pas faire confiance à

 15   Ylber Haskaj, parce que Ylber Haskaj était un ami d'Idriz Balaj. Il lui

 16   était loyal. Il l'a appelé par téléphone à La Haye. Mais je voudrais que

 17   l'Accusation me réponde à une question ou je voudrais que vous vous

 18   penchiez sur cette question : en quoi est-ce que Haskaj n'ait pas digne de

 19   foi ?

 20   Pièce P40. Ylber Haskaj. Sa déposition qui a été versée par

 21   l'Accusation. Paragraphe 8 de celle-là.

 22   "A l'été 1998, j'étais membre des Aigles noirs et Shemsedin Cekaj

 23   arrivé dans mon village, Irzniq. Je ne suis pas sûr de la date exacte. Je

 24   ne suis pas sûr de ses fonctions non plus."

 25   Au point 9.

 26   "Je suis venu rejoindre les rangs des Aigles noirs parce que j'ai

 27   entendu parler d'un groupe d'élite qui était en train de se constituer. Je

 28   voulais vraiment rejoindre cette unité."


Page 2932

  1   Point 10.

  2   "C'est le jour de la création des Aigles noirs que j'ai rejoint ce

  3   groupe. Si ma mémoire est bonne, les Aigles noirs ont été constitués le 14

  4   mai 1998. Un rassemblement a été organisé à Irzniq, on a invité les gens à

  5   rejoindre les rangs de cette Unité spéciale. Et beaucoup de gens sont venus

  6   suite à cet appel. A peu près 500 personnes étaient présentes pendant la

  7   première réunion ou rassemblement qui s'est tenu dans un champ près de ma

  8   maison au centre d'Irzniq. Comme il faisait noir, je n'ai pas pu voir ni

  9   reconnaître la personne qui a présidé ce rassemblement, donc je ne sais pas

 10   exactement qui c'était. Mais sur les 500 personnes qui se sont présentées à

 11   ce moment-là, environ 120 sont devenus effectivement membres des Aigles

 12   noirs. Je suis moi-même resté membre de cette unité à partir de la date de

 13   sa création, donc le 14 mai jusqu'à peu près la fin du mois de juillet. Le

 14   nombre des Aigles noirs a décru après les premiers quelques jours, et puis

 15   à partir de ce moment-là on était à peu près 35. Il n'y avait pas de

 16   commandant adjoint ou de commandant d'unité. Si mes souvenirs sont bons, le

 17   seul commandant de l'unité était Balaj, à partir du tout début, c'était

 18   lui, le commandant des Aigles noirs, or est-ce que c'est ça que vous ne

 19   devriez pas prendre pour la vérité; est-ce que ça que vous devriez rejet ou

 20   est-ce que c'est plutôt le paragraphe 12 ? L'objectif de la création de

 21   cette unité était d'avoir une force de réaction rapide qui serait aussi

 22   bien entraînée que possible, elle serait prête à réagir en toute occasion

 23   soit pour mener à bien les activités de combat ou pour venir en aide à la

 24   population civile. Et même si c'était basé à Glodjan, même si nous étions

 25   basés à Glodjan, l'unité en fait devait être appelée à agir partout dans la

 26   zone opérationnelle de Dukagjin, et pratiquement nous avons surtout été

 27   actifs dans la zone, la municipalité de Becan [phon], et dans le environs.

 28   Et puis peut-être le paragraphe 14, c'est cela que vous devriez


Page 2933

  1   rejeter. Comme je l'ai noté déjà, comme je l'ai déjà dit, on a les Aigles

  2   noirs ont été bien entraînés, enfin devaient suivre un entraînement assez

  3   dur. Donc il y avait beaucoup de gens qui ont laissé tomber. Moi, j'étais

  4   physiquement en forme, j'étais très actif en plusieurs sports quand j'étais

  5   jeune, et j'étais un bon karaté.

  6   Et ou peut-être le paragraphe 15. C'est Idriz Balaj qui nous donnait,

  7   qui nous confiait nos missions. A chaque fois qu'il y avait ne serait-ce

  8   qu'une arme qui ouvrait le feu dans la municipalité de Becan, vous pouvez

  9   l'entendre. Par conséquent, si l'on entendait que les forces serbes

 10   attaquaient un village, on y allait pour essayer de le défendre.

 11   Ou le 19, encore nous n'avions pas les mêmes uniformes que le reste

 12   de l'UCK. C'était un uniforme noir. J'ai reçu un uniforme spécial, une

 13   arme, au QG des Aigles noirs, quelque chose après avoir rejoint l'unité, et

 14   c'était un fusil avec un viseur télescopique, comme les armes des tireurs

 15   d'élite. J'étais formé à utiliser cette arme, et aussi parfois on me

 16   donnait une arme automatique ou un 22. Et lorsque j'ai quitté les Aigles

 17   noirs, à la fin du mois de juillet, en fait j'étais très démoralisé. Notre

 18   unité avait été pendant quelque temps dans le village de Voksh, dans la

 19   zone 5, de l'autre côté de la carte que vous avez vue aujourd'hui, "Slup et

 20   Drenovc." 

 21   Et puis, le témoin continue, et il parle de la mort d'un de ses

 22   camarades. Il a été blessé - c'est ce qu'il dit au paragraphe 23 :

 23   "Après ma blessure, je me suis remis et les Aigles noirs étaient

 24   revenus du champ de bataille dans la Région de Voksh. J'ai dit au

 25   commandant Balaj que je voulais quitter l'unité. Il a accepté ma décision.

 26   Donc il n'a pas tué Ylber Haskaj, n'est-ce pas ? Un jeune homme

 27   blessé, démoralisé, à la suite de la perte des membres de sa famille va

 28   trouver son commandant, dans des circonstances très difficiles. C'est une


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  1   Unité spéciale, c'est une petite unité, c'est une unité extrêmement bien

  2   entraînée. C'est une unité qui est nécessaire, et il demande l'autorisation

  3   de pouvoir partir, et cette autorisation lui est donnée. Est-ce que c'est

  4   ce que nous sommes censés croire ou ne pas croire ? Ou peut-être que nous

  5   ne sommes pas censés croire l'affirmation importante qui a été avancée

  6   suivant laquelle Balaj a exécuté tous les membres des Aigles noirs, comme

  7   cela est indiqué au paragraphe 36 ?

  8   L'enquêteur a lu la liste des anciens Aigles noirs, et on m'a demandé

  9   de faire des observations à propos de ce que je connaissais. Alors je ne

 10   vais pas vous donner lecture de tous les noms, cela commence bien entendu

 11   par la lettre A et cette liste se termine avec la lettre P.

 12   Dans le mémoire, nous trouvons une affirmation, une affirmation

 13   relative à la brutalité de M. Balaj et à sa réputation d'homme redoutable.

 14   Cette affirmation est dans le meilleur des cas sujette à caution. Au vu des

 15   éléments de preuve qui vous ont été présentés par l'Accusation, par

 16   l'équipe de l'Accusation et dans les pièces de l'Accusation, lors de

 17   l'interrogatoire principal de M. Ylber Haskaj, la question suivante lui a

 18   été posée, il a répondu de la façon suivante, il s'agit de la page 10336.

 19   "Question : Monsieur Haskaj, vous avez passé une période assez courte

 20   lors de votre entraînement, avant d'aller vous battre à Voksh, n'est-ce pas

 21   ?

 22   Réponse : Oui.

 23   Question : Donc il n'y a que quelques jours qui se sont écoulés avant ces

 24   attaques, et vous et les membres des Aigles noirs, et notamment M. Balaj,

 25   vous êtes allé à Voc dans le cadre d'une intervention pour exécuter en fait

 26   vos tâches en tant qu'Unité spéciale d'Intervention; est-ce exact ?

 27   Réponse : Oui.

 28   Question : Lorsque vous allez à Voc, et lorsque je parle de Voksh, je parle


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  1   également de Drenovc et Slup, parce que ce sont dans ces villages, n'est-ce

  2   pas, que les combats ont eu lieu, et vous deviez y aller pour vous y

  3   battre, n'est-ce pas ?

  4   Réponse : Oui.

  5   Question : Mais vous ne vous êtes pas battu dans la zone d'Irzniq, et je

  6   vous rappelle le document P78, que nous avons vu un peu plus tôt. Il ne

  7   faut pas oublier que Irzniq est proche de Glodjan, qui est la sous zone

  8   numéro 1, alors que Drenovc est de l'autre côté. Quelque temps après en

  9   juillet, vous avez été blessé, n'est-ce pas ?

 10   Réponse : Je ne suis allé qu'une fois là-bas.

 11   Question : Lorsque vous avez combattu à Voc, Drenovc et Slup, en juin ainsi

 12   que pendant le mois de juillet à l'exception du moment où vous avez dit

 13   vous-même que vous étiez revenu, votre commandant, Idriz Balaj, combattait

 14   à vos côtés, n'est-ce pas ?

 15   Réponse : Oui.

 16   Question : Et lorsque vous avez cessé de combattre avec les Aigles noirs,

 17   page 10338, vous êtes rentré dans le village pour y travailler, et pour

 18   monter la garde, à Irzniq, n'est-ce pas ?

 19   Réponse : Oui.

 20   Question : Et vous étiez placé sous le commandement de Tetaj ?

 21   Réponse : Oui, je sais qu'il était revenu dans le village un peu plus tôt.

 22   Question : Les Aigles noirs étaient toujours là après votre retour.

 23   Ils étaient là sur le terrain lorsqu'ils ne livraient pas bataille; est-ce

 24   que cela est vrai ?

 25   Réponse : Oui.

 26   Question : Et en fait, en tant qu'unité, les Aigles noirs quittaient et

 27   revenaient dans cette zone, à partir du moment où vous, vous êtes revenu en

 28   juillet, en fonction des besoins et en fonction des batailles qui ont été


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  1   livrées de juillet et jusqu'à l'offensive du mois de septembre, n'est-ce

  2   pas ?

  3   Réponse : Oui.

  4   Question : Vous avez indiqué dans votre déclaration qu'il n'y avait pas de

  5   commandant adjoint ou de sous commandant, c'est ce que nous avons lu un peu

  6   plus tôt. Et en fait, vous avez dit que c'était Toger qui dirigeait

  7   l'unité, n'est-ce pas ?

  8   Réponse : Oui.

  9   Question : En fait, c'était toujours le premier présent dans la bataille et

 10   le dernier a quitté le champ de bataille. C'est quelqu'un qui ne restait à

 11   côté, aux côtés de ses soldats et qui n'hésitait pas les responsabilités ou

 12   ces responsabilités de combattants, n'est-ce pas ?

 13   "Réponse : Oui, c'est vrai."

 14   Alors, que devez-vous ne pas croire dans cette déclaration, parce qu'en

 15   fait, cela se fonde ou repose ou s'appuie sur le film que vous avez vu

 16   hier, le film de la bataille. Mais il faut dire qu'il n'est pas le seul,

 17   qu'il n'est pas le seul, disais-je, à avoir reconnu les Aigles noirs,

 18   Toger, Idriz Balaj.

 19   Là, je me fonde sur la déposition de Rrustrem Tetaj, et cela commence

 20   à la page 3 807.

 21   "Question : …vous nous avez dit que Toger était le chef des Aigles noirs,

 22   qui était un groupe de jeunes hommes dont l'âge était compris entre 25 et

 23   30 ans ?

 24   "Réponse : Oui.

 25   "Question : Et vous nous avez dit, en fait, que vous savez qu'il avait

 26   participé à des actions, et ce que j'entends par 'actions', c'était en fait

 27   qu'il s'agissait de combats avec les Serbes dans un certain nombre de

 28   villages différents ?


Page 2938

  1   "Réponse : Oui. Je suis d'accord avec les chiffres que vous mentionnez. Il

  2   s'agissait de volontaires, de jeunes hommes extrêmement audacieux, et

  3   c'étaient des volontaires qui se reliaient à Togeri pour accomplir cette

  4   tâche.

  5   Ils portaient des vêtements noirs, et eux portaient des vêtements

  6   noirs pour qu'on puisse faire la différence entre eux et les autres. Il

  7   avait des insignes de l'ALK sur ces vêtements.

  8   "Question : Est-ce que vous pourriez nous dire, à propos des endroits que

  9   je vais mentionner, là où les Aigles noirs ont participé aux combats de

 10   Voksh ?

 11   "Réponse : Oui.

 12   "Question : Baballoq ?

 13   "Réponse : Oui.

 14   "Question : Prilep ?

 15   "Réponse : Oui.

 16   "Question : Shaptej ?

 17   "Réponse : Shaptej ?

 18   "En fait, je n'en suis pas sûr.

 19   "Question : Rastacive ?

 20   "Réponse : …oui.

 21   "Question : Junik ?

 22   "Réponse : Oui.

 23   "Question : Carrabreg ?

 24   "Réponse : Oui.

 25   "Question : Sllup ?

 26   "Réponse : Savez, Sllup, Lloqan, Voksh, ils sont très proches les uns des

 27   autres.

 28   "Question : Glodjan ?


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  1   "Réponse : …ils ne pouvaient pas.

  2   "Il y avait d'autres forces qui se trouvaient là, et ils n'avaient

  3   pas besoin d'eux. Ils n'avaient pas renforts à Glodjan.

  4   "Question : Loxha ?

  5   "Réponse : Vous voulez dire Loxhe, oui.

  6   "Question : Vous avez indiqué un peu plus tôt que les Aigles noirs

  7   correspondait à un groupe de jeunes hommes très, très audacieux…

  8   "Réponse : …c'était une petite unité comparée à la région, et un tout

  9   petit groupe qui était engagé dans des actions, ce n'était pas l'ensemble

 10   du groupe. C'étaient des personnes volontaires, des volontaires, des

 11   personnes particulièrement audacieuses et téméraires, et qui ont participé

 12   à cela. Ils ne voulaient pas porter les uniformes noirs.

 13   "Question : La responsabilité des Aigles noirs consistait, entre

 14   autres, à assurer le renfort dans les villages lorsque les Serbes

 15   arrivaient, n'est-ce pas ?

 16   "Réponse : Oui. C'était leur responsabilité en cas d'actes ou

 17   d'attaques de la part des Serbes. Ils étaient présents. C'était, en fait,

 18   une cause de fierté pour la population de voir que l'unité était présente.

 19   Donc le groupe donnait son soutien lorsqu'il y a eu, par exemple, cette

 20   attaque contre un village, tel que Carrabreg, Laushe, Prilep. Les gens

 21   voulaient avoir le soutien des Aigles noirs. En fait, c'était plus qu'un

 22   soutien moral; il s'agissait également de cette unité qui leur apportait ce

 23   soutien moral.

 24   "Question : Mais outre ce soutien moral, cela correspondait à un

 25   véritable appui militaire, parce que ces jeunes hommes, l'unité de Toger

 26   disposait d'armes, avait été formée pour pouvoir combattre de façon

 27   efficace et effectif contre les forces serbes ?

 28   "Réponse : Je ne nie pas cela, c'est tout à fait véridique."


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  1   Je vous ai parlé un peu plus tôt, assez brièvement, d'un autre fait.

  2   Je vous ai dit, en fait, qu'Idriz n'est pas originaire de cette zone. Donc,

  3   il est le chef de l'unité spéciale, de cette unité spéciale, cette unité

  4   qui participait à des combats très, très lourds, et c'était un étranger, en

  5   quelque sorte, et potentiellement, il y avait certaines difficultés.

  6   Alors, la question qui est posée est comme suit :

  7   "Idriz Balaj n'est pas originaire de cette zone, n'est-ce pas ?

  8   "Réponse : Eh bien, je dirais ouvertement que j'ai eu des contacts

  9   avec Idriz. Mais, en fait, je le connaissais sous le nom de Toger. Vous

 10   savez que c'était quelqu'un qui n'était pas originaire de cette région, les

 11   gens ne le connaissaient pas dans la région. Et d'ailleurs, il ne

 12   connaissait pas les gens des villages avoisinants.

 13   "Question : Fort bien. Alors, un homme qui répondait au nom de Toger,

 14   qui n'était pas originaire de cette région, ne pensez-vous pas, en fait,

 15   que cela pouvait être un couteau à double tranchant pour lui en quelque

 16   sorte ? Ce que j'entends, c'est qu'il faisait du bon travail, comme vous

 17   nous l'avez dit. Son unité aidait la population, leur apportait un soutien,

 18   comme vous nous l'avez dit, mais c'était un étranger dans la région, dans

 19   une région où il y avait très peu d'étrangers, n'est-ce pas ?

 20   "Réponse : Oui, c'est vrai. C'est vrai qu'il vit là-bas, il est

 21   arrivé pour défendre les villages, ainsi que les villageois, et je le

 22   remercie d'avoir fait cela. Et je dois dire qu'il a apporté énormément de

 23   soutien à la population. En fait, c'est l'espoir qui a fait vivre en

 24   quelque sorte l'unité de Toger et qui a fait en sorte que les gens n'aient

 25   pas abandonné la partie. Les gens se sentaient beaucoup plus en sécurité,

 26   même lorsque les forces serbes les ont attaqués.

 27   "Question : Mais une partie de la réalité était toutefois, en fait,

 28   que s'il y avait eu une défense véritable ils auraient dû faire face à une


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  1   réaction beaucoup plus importantes de la part de l'armée serbe, qui serait

  2   arrivée avec plus de canons, de soldats, et de chars ?

  3   "Réponse : Oui, oui, tout à fait. Nous, nos forces, notre effectif

  4   grandissait. Il y en avait de plus en plus, mais les effectifs des forces

  5   serbes grandissaient également.

  6   "Donc, en réalité, lorsque Toger et les Aigles noirs étaient

  7   présents, il y avait des combats, il y a eu des pertes également."

  8   Donc, en fait, la réponse qu'il a donnée était que :

  9   "Les forces serbes auraient moins été présentes, étaient moins

 10   présentes lorsqu'il y avait les unités des Aigles noirs. Il faut savoir que

 11   même s'il y a eu des décès et des victimes, personne n'aurait pu

 12   véritablement deviner ce qui allait se passer.

 13   "Il a participé à des actions, non seulement Toger, mais il y a

 14   d'autres soldats qui ont participé. Personne ne pensait qu'il reviendrait

 15   de ces combats sain et sauf. Voilà, voilà ce que je pourrais dire."

 16   Alors, vous voyez en fait que cela vous donne un autre descriptif de

 17   la situation. Parce qu'il s'agit d'éléments de preuve qui, de façon très

 18   adroite et très habile, ont été omis lors de la présentation des moyens à

 19   charge, parce que, bien entendu, cela ne correspond pas à la théorie qu'ils

 20   avancent.

 21   Au paragraphe 49, note en bas de page 171, l'Accusation avance que

 22   les victimes de l'ALK comprenait des Serbes ainsi que des Monténégrins de

 23   souche qui, comme les Serbes, étaient considérés comme des ennemis de

 24   l'ALK. Alors il y a une première pièce qui est citée où il est question

 25   d'extrémistes siptar, et non pas de l'ALK, est la pièce P149. Puis une

 26   deuxième pièce est citée, il s'agit de la pièce P442. C'est le journal

 27   d'une personne. A la page 6, il n'est absolument pas question de l'ALK, il

 28   décrit comment la population s'enfuyait des villages, notamment il y avait


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  1   des Albanais qui s'enfuyaient également. Ensuite vous avez une autre pièce,

  2   P135, qui ne corrobore absolument pas l'idée sur laquelle il s'agissait

  3   d'ennemis de l'ALK, comme cela avait été avancé. Et puis vous avez

  4   également la déclaration de Zoran Stijovic, dernière pièce, document P121,

  5   au paragraphe 22, et qui est en fait -- qui se trouve dans l'annexe 24, qui

  6   d'ailleurs n'a pas été présentée comme élément de preuve en l'espèce.

  7   Si vous pensez ou si vous croyez, comme l'a indiqué M. Rogers, que le

  8   Témoin X dit la vérité, ce qui est le cas d'après M. Rogers, alors vous

  9   auriez condamné -- vous condamnerez Idriz Balaj, vous le considéreriez

 10   coupable du chef numéro 1 et du chef numéro 6. Mais avant de nous demander

 11   et de nous interroger pour savoir s'il dit la vérité ou non, posons-nous

 12   plutôt une question et demandons-nous s'il s'est présenté comme un témoin

 13   fiable, un témoin digne de foi. Est-ce qu'il est le genre de témoin sur

 14   lequel vous vous appuierez pour ce qui est du plus important pour vous dans

 15   cette affaire ? Et pour le moment faisons abstraction des accusations

 16   dressées contre M. Balaj et voyons cela de façon tout à fait différente.

 17   Car il y a une déposition suivant laquelle il a rencontré le président du

 18   Kosovo à l'époque et qu'il le rencontrait tous les vendredis, et d'ailleurs

 19   il le rencontrait même plus souvent que tous les vendredis. Il venait de

 20   chez lui, son foyer se trouvant à 80 kilomètres environ, il devait passer

 21   par toute une série de postes de contrôle pour rencontrer le président

 22   Rugova, vous croyez cela vous ? Est-ce que c'est une information qui vous

 23   semble crédible ? Parce que si vous deviez en l'espèce trancher à propos de

 24   ce témoignage, si vous deviez vous prononcer à propos de ce témoignage,

 25   est-ce que vous le croiriez ce témoignage ? Je ne le pense pas. Il a

 26   témoigné et dit, et je vais utiliser l'art de la litote, mais il a dit en

 27   fait qu'il avait des problèmes, pour reprendre cet euphémisme avec

 28   [inaudible], parce qu'il voulait en fait constituer une armée beaucoup plus

 


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  1   puissante. C'est étrange comme notion. Est-ce que vous la croyiez ? Est-ce

  2   que vous considérez qu'il est fiable ? M. Rogers, quant à lui, adopte un

  3   point de vue, il nous dit que nous ne devrions pas tenir compte du fait

  4   qu'il est assez imprécis, que nous devrions lui pardonner ses descriptions

  5   plutôt embrouillées du moment où les choses se sont passées, de la façon

  6   dont les choses se sont passées, parce que, nous dit M. Rogers, beaucoup de

  7   temps s'est écoulé depuis. Il nous dit qu'il y a véritablement beaucoup de

  8   temps qui s'est écoulé depuis, beaucoup de temps, 14 ans si je ne me

  9   trompe.

 10   C'est un document qui a été versé sous pli scellé et qui porte sur des

 11   informations données en 2002. Donc je suppose en fait que nous devrions

 12   passer à huis clos partiel pour l'examiner.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, nous allons passer à huis clos

 14   partiel.

 15   Une seconde, Maître Guy-Smith.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 17   partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 2944 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  9   [Audience publique]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   Oui, Maître Guy-Smith, continuez.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce qui est important ici, c'est qu'en 2002,

 13   il y avait des discussions concernant ces différents éléments. C'est ce qui

 14   est important 2002.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors que je vous comprenne bien. Vous

 16   n'êtes pas en train de dire que ce que vous venez de lire est exact. Vous

 17   nous dites que ceci a été consigné en 2002 et c'est différent de ce qui a

 18   été consigné comme élément de preuve.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, c'est justement ce que je dis. En tant

 20   que Juge de fait, cette Chambre de première instance va devoir déterminer

 21   si la déposition de cette personne est fiable. C'est quelque chose que vous

 22   devez donc envisager. Cela va totalement à l'encontre de l'argument faisant

 23   état du fait qu'énormément de temps s'est écoulé et que, par conséquent,

 24   ceci n'est pas exact. Mais ce n'était pas plus important, mais je pourrais

 25   rajouter que vous vous souviendrez quand M. Rogers a accepté ou a concédé,

 26   qu'en 2006, en ce qui concerne les trois hommes en question, il a donc eu

 27   vent qu'ils avaient été enlevés. Donc ce n'est pas lui qui en avait été

 28   témoin. Il n'avait pas participé à cet enlèvement. Il ne l'avait pas vécu.

 


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  1   Il en avait simplement entendu parler. Ceci est très différent d'une

  2   déposition qu'il avait faite six ans auparavant, et d'avoir eu vent de

  3   quelque chose et d'en avoir été témoin oculaire constitue deux événements

  4   totalement différents. Parce que lorsque durant sa déposition il a prétendu

  5   avoir été témoin oculaire, il s'est donc impliqué dans cet incident. Par

  6   conséquent, on peut également dire qu'il a reproduit ce comportement à

  7   plusieurs reprises. Par conséquent, je vous invite à deux conclusions.

  8   Soit, ce monsieur est un menteur, soit, il a des problèmes psychologiques.

  9   Car personne ne peut corroborer ces dires, c'est-à-dire ce qu'il a appelé

 10   cet enlèvement ou ce kidnapping.

 11   Les éléments de preuve que nous avançons à ce sujet, c'est que le 19 mai,

 12   ces trois personnes ont quitté leur village, puisque nous l'avons vu, ou du

 13   moins des gens l'on vu, on les a vus donc dans ce village où cet enlèvement

 14   s'est soi-disant produit, et personne d'autre n'a vu cela mis à part ce

 15   qu'a avancé ce Témoin X. Personne d'autre. Personne n'a corroboré ces

 16   dires, à savoir qu'il avance que ces personnes ont été enlevées. Et de

 17   plus, ce qui est encore plus important, il y a également cet incident à

 18   Jabllanice où on avance qu'Idriz Balaj a tranché l'oreille de quelqu'un, et

 19   cela ne s'est jamais produit. Il faut croire les dires du Témoin 3 et

 20   seulement ses dires, il faut que ce soit un témoin fiable pour que l'on

 21   considère ces dires comme tenant la route.

 22   Compte tenu des rumeurs - pardon, j'ai parlé du Témoin 3 et je parlais du

 23   Témoin X - je vous prie, de m'excuser. Je disais donc compte tenu des

 24   rumeurs qui avaient cours et compte tenu de cet incident marquant, est-ce

 25   que cela ne vous paraît étrange que personne mis à part M. X avance avoir

 26   eu vent de cette information. Personne -- enfin, je vous prie, de

 27   m'excuser. En fait, un autre témoin en a parlé. Je suis désolé. Je ne

 28   voudrais pas faire des déramer [inaudible] en même temps. On connaît la


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  1   qualité de la déposition de ce témoin et nous savons également quelle est

  2   la position de M. Rogers, et ce témoin vous demande en fait de ne pas

  3   prendre en compte quoi que ce soit des dires de l'autre personne. Il est

  4   facile d'accuser quelqu'un, et lorsqu'il s'agit d'un crime absolument

  5   épouvantable et que vous saupoudrez ceci d'une mauvaise réputation, ce

  6   n'est pas vraiment très difficile d'en arriver à des conclusions, à savoir

  7   de se lancer dans des conjectures en disant que cette personne doit être

  8   coupable étant donné que de toute façon ce n'est pas quelqu'un de

  9   recommandable, et c'est ce que l'on vous dit ici.

 10   De cette manière, nous évitons complètement les incohérences qui figurent

 11   dans sa déposition.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant d'oublier --

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Désolé, un instant.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant d'oublier parce qu'il semble que

 15   vous passiez à autre chose. Je voudrais vous poser une question. A la page

 16   86, ligne 18, vous -- vous avait dit mais ce n'est pas non seulement très

 17   important. De plus, vous vous souviendrez que M. Rogers a concédé ce qui

 18   avait été dit en 2006, en ce qui concerne la question de ces trois hommes;

 19   est-ce que vous êtes en mesure de nous aider une référence à ce sujet, s'il

 20   vous plaît ?

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Une référence.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais savoir où on retrouve ceci

 23   dans le compte rendu d'audience. Quand ou comment M. Rogers a accepté ou a

 24   concédé ceci.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Alors il y a deux aspects, d'abord quand le

 26   témoin a déposé, et donc je vous donnerais la référence du compte rendu

 27   d'audience, et puis le deuxième point, M. Rogers l'a en fait concédé, hier.

 28   Mais si vous le souhaitez, je pourrais vous donner le compte rendu


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  1   d'audience.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je vois qu'il semble que même M.

  3   Rogers semble être d'accord avec vous également, à savoir qu'il a concédé

  4   ce point, hier. Il a fait un signe affirmatif de la tête ou est-ce que je

  5   me trompe, Monsieur Rogers ?

  6   M. ROGERS : [interprétation] Non, effectivement durant mes propos

  7   liminaires, non pardon, mon réquisitoire que le témoin avait dit qu'il

  8   avait entendu que ces personnes avaient été envoyées à partir de ce moulin

  9   vers un autre endroit, et qu'il les avait observés à cet endroit-là, et il

 10   l'a dit durant sa déposition.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que vous voulez des références.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous les avez, s'il vous plaît,

 14   oui.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous obtiendrai les références.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith. Vous pouvez

 17   continuer, je ne veux pas retarder la fin de votre plaidoirie.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci. C'est la page 2597, page du compte

 19   rendu d'audience donc.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   L'INTERPRETE : Note de l'interprète, le compte rendu d'audience -- pas de

 22   note de l'interprète.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait la page 2598 est encore plus

 25   précise ou plus claire parce que c'est une question qui a été posée par M.

 26   le Juge Moloto, qui demande : est-ce que vous avez prononcé ces mots, et la

 27   réponse est affirmative, puisqu'il dit, oui, effectivement.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.


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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous en prie. Nous allons nous arrêter

  2   dans quelques minutes, n'est-ce pas ?

  3   L'INTERPRETE : Le Président fait un signe affirmatif de la tête.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Hier, je crois que M. Rogers n'a pas bien

  5   saisi un argument que nous avions avancé au nom de M. Balaj, à savoir une

  6   conspiration entre les témoins 3 et X ou une connivence entre ces deux

  7   témoins. En ce qui nous concerne, il n'y a pas de connivence entre ces deux

  8   témoins ou ces deux personnes. En fait ce qui s'est passé, c'est que le

  9   témoin X a usurpé ce qu'a vécu le Témoin 3, il a fait sien les propos du

 10   Témoin 3, pour se donner plus d'importance. En fait, il est passé d'un

 11   témoin d'ouï-dire à un témoin direct, et j'en reparlerais donc demain.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Guy-Smith. Ceci

 13   met un terme à notre audience d'aujourd'hui. Nous n'avons visiblement pas

 14   terminé, alors qu'on prévoyait terminer aujourd'hui. Je suppose que l'on ne

 15   peut faire que reporter la fin de cette audience, demain matin, à 9 heures

 16   dans cette même salle d'audience, et nous nous assurons que la section CSMF

 17   [phon] prenne les dispositions nécessaires pour que nous puissions siéger

 18   demain, dans cette même salle d'audience.

 19   --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mercredi 27 juin

 20   2012, à 9 heures 00.

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