Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 20 août 2009

  2   [Conférence de mise en état]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 59.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il s'agit

  7   de l'affaire IT-95-5/18-PT, le Procureur contre Radovan Karadzic.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Bonjour à tous. Je demanderais d'abord à ce que les parties se présentent,

 10   à commencer par l'Accusation.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis Alan

 12   Tieger, accompagné de Hildegard Uertz-Retzlaff, Iain Reid du côté de

 13   l'Accusation.

 14   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 15   Monsieur Karadzic, vous assurez encore une fois votre Défense vous-même ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis seul ici aujourd'hui, mais vous savez

 17   que je reçois le concours d'un grand nombre de juristes très compétents

 18   ainsi que de stagiaires. Donc je ne suis pas vraiment seul.

 19   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais faire

 20   consigner au compte rendu d'audience le fait que lors de notre dernière

 21   conférence au titre de l'article 65 ter un peu plus tôt cette semaine, vos

 22   conseillers juridiques étaient présents et ont apporté un concours

 23   important.

 24   Première question que je voudrais aborder aujourd'hui, elle concerne les

 25   avantages que l'on peut tirer en raison de leur utilité des décisions de la

 26   Chambre de première instance concernant la prise en compte des faits déjà

 27   jugés. Un certain nombre d'entre eux ont déjà été portés à la connaissance

 28   des uns et des autres, je crois, Madame Uertz-Retzlaff, me rappeler que

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  1   vous nous avez déjà dit que les témoins au sujet desquels vous avez

  2   présenté des demandes d'audition au titre de l'article 92 bis du Règlement

  3   ne semblent pas être indispensables au vu des circonstances actuelles. Je

  4   pense que j'ai oublié de vous demander jusqu'à présent quelle était

  5   l'incidence de ces décisions sur la composition de la liste de vos témoins

  6   qui seront entendus de vive voix, ou entendu de vive voix avec

  7   accompagnement de documents écrits au titre de l'article 92 ter. Pourriez-

  8   vous me donner une indication au sujet de ce que vous prévoyez à ce sujet,

  9   de quelle façon votre liste de témoin pourrait-elle être éventuellement

 10   modifiée ?

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je peux

 12   vous dire que s'agissant des décisions au sujet des faits déjà jugés

 13   relatifs à la ville de Sarajevo, nous avons déjà établi qu'il ne sera pas

 14   nécessaire pour nous d'entendre huit des témoins 92 ter. J'ai une liste de

 15   ces témoins, ce que nous avions l'intention de faire c'était d'informer

 16   chacun dans le cadre des dépôts d'écritures relevant de l'article 73 bis du

 17   Statut. Et ce travail est déjà en cours s'agissant également de Srebrenica.

 18   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il serait exagérément

 19   optimiste de ma part de penser qu'il pourrait y avoir un grand nombre de

 20   cas de ce genre relatifs à Srebrenica ?

 21   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense

 22   pas. Nous en avons déjà discuté, le problème c'est qu'un grand nombre des

 23   témoins 92 ter qui doivent témoigner au sujet de la réalité des crimes

 24   commis à Srebrenica ont également des renseignements à fournir au sujet des

 25   connexions entre différentes personnes, et ces connexions n'apparaissent

 26   pas à la lecture des documents sur lesquels se fondent les décisions de

 27   prise en compte des faits déjà jugés. Donc nous discutons encore de ce que

 28   nous pourrons faire et des témoins que nous pouvons réellement abandonner.

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  1   Dans le cours de la préparation du procès, nous sommes en train d'établir

  2   une liste de témoins qui se divise en deux groupes. Un groupe comprend les

  3   témoins que nous sommes absolument déterminés à entendre, et l'autre

  4   groupe, un certain nombre de témoins de réserve, si je puis dire. Donc nous

  5   déplaçons les noms de ces témoins d'une liste à l'autre en fonction des

  6   faits jugés, certains témoins de la première liste se retrouvent sur la

  7   liste des témoins de réserve, c'est un processus en cours. Et lorsque nous

  8   déposerons nos écritures définitives au titre de l'article 73 bis du

  9   Règlement, nous pourrons vous donner des chiffres.

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pourriez peut-être vous montrer

 11   très ferme vis-à-vis de votre liste des témoins, s'agissant en particulier

 12   de ceux qui devraient s'exprimer sur d'autres questions. Mais la déposition

 13   par rapport à Srebrenica a déjà fait l'objet de faits qui ont été jugés. Si

 14   ce fait n'est pas contesté gravement par la Défense, vous pouvez peut-être

 15   décider de ne pas entendre un certain nombre de ces témoins. Si les choses

 16   se développent différemment, bien entendu la situation sera revue au fil du

 17   temps comme la Chambre l'a déjà indiqué.

 18   Donc j'espère que ces décisions seront la base de nouvelles décisions très

 19   fermes relatives à la liste des témoins.

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous

 21   remercie.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

 23   J'aimerais maintenant que nous examinions la requête en cours, c'est la

 24   deuxième requête de faits jugés. Où en sommes-nous sur ce point ?

 25   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, le problème

 26   n'est pas totalement réglé. Lorsque nous avons déposé notre deuxième

 27   requête, nous ne disposions pas de l'arrêt en appel de M. Krajisnik. Par

 28   conséquent, dans la deuxième requête, nous n'avons traité que d'un nombre

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  1   très limité de municipalités. Maintenant que nous avons l'arrêt en appel de

  2   Krajisnik, nous sommes prêts à déposer une quatrième requête en vue

  3   d'admission de faits jugés qui portent sur d'autres municipalités. Cela

  4   concerne environ 900 faits qui ont déjà été abordés dans d'autres jugements

  5   et qui concernent ces municipalités, et cela concerne également le contexte

  6   légal et factuel de ce qui s'est passé en Republika Srpska, ce genre de

  7   choses.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien entendu, il arrive un moment où

  9   il importe de décider que la phase préparatoire d'un procès est arrivée à

 10   son terme et que le procès peut se dérouler sur la base du travail déjà

 11   réalisé, donc sur la base des éléments qui ont déjà été indiqués dans la

 12   phase préparatoire. Vous en êtes arrivé à un stade où vous estimez pouvoir

 13   présenter encore 900 faits pour obtenir une décision d'accord sur ces faits

 14   qui ont déjà été jugés, cela donne au moins à la Chambre de première

 15   instance une idée de ce qui se passe réellement, mais cela ne nous

 16   surprendrait pas que cette façon de procéder ne soit pas considérée comme

 17   nécessairement la meilleure de la part de la Chambre de première instance.

 18   Ce n'est pas votre faute, le moment où l'arrêt Krajisnik est tombé n'était

 19   absolument pas sous votre contrôle, mais il y a un moment où il faut tirer

 20   un trait. Ce que je vous dis, je ne vous le dis qu'à titre indicatif, bien

 21   entendu.

 22   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, j'ajouterais

 23   que nous prévoyons de déposer notre quatrième requête, celle dont je viens

 24   de parler, soit à la fin de cette semaine, soit au début de la semaine

 25   prochaine.

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais le calendrier est très important

 27   également par rapport aux décisions à prendre.

 28   Monsieur Karadzic, je sais que votre opinion au sujet des requêtes

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  1   concernant les faits déjà jugés a déjà été exprimée par vous, je sais que

  2   vous avez des objections de principe sur cette façon de procéder, ainsi que

  3   des objections plus précises, et vous en avez déjà évoqué un certain nombre

  4   qui sont pertinentes, je dois dire. Tout ce que je m'efforce de vérifier,

  5   s'agissant de ces faits jugé, c'est quelle peut être leur incidence sur la

  6   composition de la liste des témoins. Mais comme toujours, les requêtes se

  7   suivent et ne se ressemblent pas, donc nous ne pouvons pas régler

  8   définitivement le problème aujourd'hui. Il faut l'examiner de façon plus

  9   détaillée, mais d'un point de vue général, y a-t-il quelque chose que vous

 10   aimeriez ajouter ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président, mais je pense que

 12   cela ne devrait pas nuire au déroulement du procès car si l'Accusation n'a

 13   plus nécessité d'apporter la preuve de la réalité des faits déjà jugés, je

 14   suis en revanche dans l'obligation de les contester. Donc cela ne réduira

 15   en rien le travail à accomplir. Mais sur le principe, je dirais que vous

 16   avez raison de dire que plus grand est le nombre de faits jugés dans

 17   d'autres procès qui sont pris en compte, faits dans lesquels je n'ai rien à

 18   voir, c'est une chose à prendre en compte, et cela montre encore une fois

 19   que l'Accusation est d'avis, étant donné le grand nombre de ces faits

 20   qu'elle prend en compte, qu'elle n'a pas beaucoup d'éléments de preuve à

 21   mon encontre.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

 23   J'aimerais maintenant nous passions au sujet suivant, qui est une requête

 24   émanant de vous, Monsieur Karadzic, demande en audition d'un témoin de

 25   l'Accusation dont le nom figure au regard du numéro 222 sur la liste des

 26   témoins à charge. La Chambre a reçu une réponse qui est arrivée le 18 août,

 27   réponse à cette requête. Donc vous n'avez pas eu beaucoup de temps pour

 28   l'examiner. Il est arrivé dans des conditions du même genre que celle-ci

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  1   que vous demandiez un délai complémentaire pour examen de tel document.

  2   Auriez-vous quelque chose à ajouter sur ce point parce que cela permettrait

  3   d'accélérer l'examen de la requête que vous avez déposée vous-même.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ceci concerne un

  5   nombre assez limité de témoins à charge qui a accepté de me rencontrer ou

  6   de rencontrer les membres de mon équipe. Le nombre de ces personnes est

  7   assez important, il y en aura un nombre limité qui me rencontrera moi pour

  8   une raison très simple, c'est que je ne suis pas sur place. Mais j'ai

  9   droit, selon les dispositions du Règlement, de les entendre et de les

 10   rencontrer.

 11   Je comprends mal pourquoi le greffe met en cause les dépenses impliquées

 12   par le voyage de ces personnes. Pour l'instant, très concrètement, il ne

 13   s'agit du voyage que d'une personne qui a demandé à venir me rencontrer,

 14   puis il y a aussi deux ou trois de mes collaborateurs qui devraient se

 15   rendre à l'endroit où se trouvent les témoins. Ce qui reviendrait beaucoup

 16   moins cher que s'ils devaient faire le voyage jusqu'à La Haye. J'en suis à

 17   la phase préparatoire de ma Défense et je ne vois vraiment pas pourquoi des

 18   frais de ce genre devraient constituer un obstacle. Je m'efforce en tout

 19   état de cause d'économiser au maximum et au cas par cas. J'ai droit à

 20   rencontrer ces témoins, j'aimerais que ceci soit compris une bonne fois

 21   pour toute et qu'une décision en bonne et due forme soit rendue sur ce

 22   point, décision qui s'appuie sur les dispositions du Règlement, ce qui me

 23   permettrait de n'avoir plus, à chaque fois que la situation se présente, à

 24   m'adresser à Chambre de première instance et à m'opposer à des obstacles

 25   indus. Il est permis de se demander si le greffe me punit une deuxième fois

 26   parce que je suis déjà en prison ou parce que je ne dispose pas d'une

 27   fortune suffisante pour financer ces frais sur mon compte.

 28   La majorité des témoins dont je suis en train de parler seront interrogés

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  1   par mes collaborateurs, mais il faut tout de même que mes collaborateurs

  2   puissent faire le voyage jusqu'à l'endroit où se trouvent ces témoins. Donc

  3   la Section de la Protection des Témoins et des Victimes se montre très

  4   raisonnable dans l'organisation de ces questions et elle demande, chaque

  5   fois que la chose est possible, que ce soit mes collaborateurs qui se

  6   déplacent pour se rendre au lieu de résidence des témoins. Je le comprends

  7   tout à fait, c'est une bonne décision, mais il nous faut attendre les

  8   témoins qui se trouvent dans une région déterminée pour pouvoir commencer à

  9   organiser les voyages et les rencontres avec eux. La plupart des ces

 10   témoins sont dans les Balkans. Il s'agit de 85 d'entre eux, des témoins à

 11   charge, 46 ont déjà été contactés, 33 ont donné leur accord pour une

 12   rencontre avec les représentants de mon équipe de Défense. Et je crois

 13   vraiment qu'il devrait être déterminé une bonne fois pour toute que je n'ai

 14   pas besoin, lorsque je me présente devant un Juge de ce Tribunal, de

 15   discuter et de revenir sans cesse sur ces points qui font l'objet

 16   d'agrément très clair dans les dispositions du Règlement.

 17   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'apprécie votre demande de décision

 18   une bonne fois pour toute de la part de la Chambre, mais la chose est assez

 19   difficile pour la Chambre. Comprenez-moi bien, je ne rejette pas votre

 20   proposition d'emblée, mais j'ajouterais simplement que ce genre de question

 21   n'est pas sous la maîtrise complète de la Chambre de première instance,

 22   étant donné la nécessité d'appliquer également la politique mise en place

 23   par le greffe du Tribunal. Je comprends bien que la situation dont vous

 24   parlez doit être examinée en se fondant sur les faits, c'est ce qui sera

 25   fait d'ailleurs, et j'ajouterais que je me félicite de constater que des

 26   dispositions ont déjà été prises avec les témoins et que les actions

 27   entreprises ont déjà porté des fruits. Donc ce travail a été très utile. Il

 28   y a cependant deux questions distinctes à prendre en compte. La première

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  1   c'est qui doit payer et qui doit payer eu égard à telle ou telle partie de

  2   la procédure ? Il ne fait aucun doute que le greffe est tenu de payer les

  3   frais relatifs à l'interrogatoire des témoins qui vont déposer. Mais il y a

  4   une autre question qui est celle-ci : si vous désirez parler

  5   personnellement à un témoin, il importe de voir dans quelle mesure la chose

  6   peut se faire, car dans tous les systèmes judiciaires du monde, lorsqu'un

  7   conseil de la Défense se présente devant un tribunal, le règlement éthique

  8   de sa profession lui interdit de parler à certains témoins. Tous les

  9   préparatifs, y compris pour les conseils de la Défense, sont mis en place

 10   par des juristes dont le rôle dans le procès est un peu différent de celui

 11   d'un conseil de la Défense. Donc ce n'est pas un droit absolu de toute

 12   personne liée à un procès que de rencontrer en tête-à-tête les témoins de

 13   la partie adverse. Toutefois, je sais ce qui s'est passé dans d'autres

 14   affaires jugées par ce Tribunal et j'aimerais que nous rentrions peut-être

 15   un peu plus dans le détail au sujet d'un point particulier. Manifestement,

 16   il ne m'appartient pas de prendre une décision sur ce point; c'est la

 17   Chambre de première instance qui doit le faire.

 18   Mais Mme Osure du greffe est avec nous aujourd'hui et j'aimerais lui

 19   demander son concours.

 20   Le greffe a déjà indiqué l'existence de certaines difficultés qui

 21   pourraient subvenir si des témoins venaient au quartier pénitentiaire de

 22   Nations Unies pour rencontrer M. Karadzic là-bas. Je me rends bien compte

 23   que par rapport à certains témoins, il peut se poser des questions de

 24   sécurité, mais les principaux témoins que nous avons à l'esprit en ce

 25   moment ne devraient pas avoir le moindre problème de sécurité à se rendre

 26   au quartier pénitentiaire et je crois même comprendre que M. Karadzic a

 27   déjà pu en rencontrer certains. Je ne sais pas si d'autres accusés ont

 28   également rencontré les témoins à charge, mais je me demandais si le greffe

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  1   pouvait nous donner une idée de la façon dont lui-même apprécie la

  2   situation en ce moment.

  3   Mme OSURE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. S'agissant du

  4   fait de savoir si des témoins à charge ont rencontré par le passé d'autres

  5   accusés au quartier pénitentiaire des Nations Unies, je vous répondrais que

  6   ceci n'est pas encore arrivé. Mais effectivement, M. Milosevic a rencontre

  7   certains témoins au quartier pénitentiaire. Et comme cela a déjà été dit,

  8   Monsieur le Président, le témoin qui pourrait le faire avec M. Karadzic ne

  9   pose pas de problème de sécurité particulier. La préoccupation principale

 10   du greffe vient d'abord du fait que nous sommes toujours en train

 11   d'élaborer une procédure d'audition des témoins dans ces conditions. Elle

 12   sera présentée à l'accusé très rapidement, mais elle n'est pas encore

 13   terminée.

 14   Entre-temps, nous nous préoccupons quelque peu du fait que nous ne

 15   sommes pas encore en mesure d'approuver les rencontres de témoins à charge

 16   avec les accusés avant que l'accusé n'ait fourni les justificatifs

 17   nécessaires au quartier pénitentiaire. Nous l'avons déjà indiqué par écrit

 18   dans nos écritures. Il y a des problèmes de sécurité qui se posent, qui ne

 19   sont pas tous les mêmes pour tous les témoins, il faut également que nous

 20   puissions loger les témoins en question. Car si cette politique devait être

 21   mise en œuvre, nous prévoyons qu'un nombre assez important de témoins

 22   pourraient venir rencontrer l'accusé. Donc nous l'invitons à utiliser tous

 23   les moyens à sa disposition, et notamment ses collaborateurs, les membres

 24   de son équipe de Défense, pour alléger ce fardeau. S'il pense qu'un contact

 25   personnel est important entre lui et le témoin dans le cadre de la

 26   préparation de sa Défense, nous l'invitons éventuellement à tenter de

 27   recourir à d'autres moyens qu'une rencontre en tête-à-tête comme, par

 28   exemple, un coup de téléphone ou l'utilisation du courriel.

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  1   Alors j'ai déjà parlé de cela à l'un de ses conseillers juridiques,

  2   M. Peter Robinson, qui a indiqué qu'il y avait pas mal d'autres témoins que

  3   l'accusé voudrait rencontrer en prison.

  4   Nous comprenons bien que l'accusé est privé de liberté et qu'il assure lui-

  5   même sa Défense - je ne parle pas uniquement des quelques témoins dont nous

  6   avons évoqué l'existence aujourd'hui - que l'accusé voudrait rencontrer, il

  7   y en a d'autres également. Donc la question dont nous parlons ne porte pas

  8   uniquement sur le problème d'une seule rencontre entre un témoin à charge

  9   et M. Karadzic. C'est un problème de politique plus global.

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.

 11   Mme OSURE : [interprétation] Merci.

 12   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez

 13   constater qu'il y a un problème concernant une décision qui pourrait

 14   s'appliquer dans toutes les circonstances. Il est clair qu'un contact

 15   direct entre vous-même et un témoin dans l'unité pénitentiaire n'est pas un

 16   droit, mais un privilège et le greffe est en train d'essayer de trouver le

 17   moyen de l'autoriser. Pour pouvoir arriver à une situation où vous

 18   considérez que le témoin à charge est tellement important que vous

 19   souhaitez le rencontrer directement et ceci peut être prévu, il faudrait,

 20   bien entendu, qu'il y ait quelques restrictions de votre côté lorsque vous

 21   déciderez quels sont les témoins que vous souhaitez rencontrer. Vous

 22   pourrez donc voir avec vos conseils juridiques ce qu'il en est pour

 23   rencontrer les autres témoins.

 24   Mais une chose que je souhaiterais établir très clairement et il s'agit de

 25   mon point de vue sur la question est la suivante : lorsque le procès sera

 26   en cours, le temps qui sera donné à l'accusé pour parler au témoin sera

 27   limité, parce que le procès va se dérouler au quotidien. C'est la raison

 28   pour laquelle, en principe, j'encourage des contacts avec les témoins

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  1   maintenant afin d'éviter des retards ultérieurement, parce que ce contact

  2   est conçu comme étant quelque chose qui doit se dérouler avant que le

  3   témoin ne dépose.

  4   Sur ce point, Madame Osure, je pense qu'il est important de réfléchir à

  5   l'avance à la situation qui pourrait en découler s'il n'y a pas de

  6   flexibilité qui permette une telle communication à l'heure actuelle. Cela

  7   est une question différente de la question du financement de ces

  8   déplacements et qui paye, mais là encore, et je n'exprime pas un point de

  9   vue, mais je ne saurais que vous encourager à vous pencher sur la question

 10   et voir s'il est possible d'être souple et s'il est possible dans un

 11   certain nombre de cas limités, lorsque cela peut apporter un avantage à

 12   ceux qui sont concernés, peut-être même un avantage sur le plan financier,

 13   d'envisager une communication assez tôt pour permettre la préparation de ce

 14   procès.

 15   Juste un dernier point avant d'en terminer avec ce point, est-ce que vous

 16   voulez dire, Madame Osure, que ce serait utile pour la Chambre de première

 17   instance de remettre sa décision à plus tard pour permettre au greffe de se

 18   pencher sur la question ? Une façon de procéder pour la Chambre est de

 19   prendre une décision spécifique, et non pas une décision concernant ce cas

 20   en particulier, et d'accorder un certain délai pour que le greffe puisse se

 21   pencher sur la question.

 22   Mme OSURE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je comprends que

 23   la Chambre souhaite prendre une décision rapidement. Le greffe ne souhaite

 24   pas que la Chambre remette à plus tard une décision sur cette question

 25   particulière, mais je souhaiterais simplement vous dire que, parce que nous

 26   sommes en train d'élaborer une politique, la décision qui sera prise par la

 27   Chambre sera importante pour nous, parce qu'elle sera prise en compte dans

 28   le cadre de l'élaboration de cette politique. Le greffe n'a pas d'autres

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  1   demandes à faire sur ce point, même si je souhaitais insister sur le fait

  2   que nous n'avons pas fermé la porte concernant ce point et la possibilité

  3   pour M. Karadzic de rencontrer des témoins au centre de Détention.

  4   Néanmoins, il faut qu'il puisse nous donner des justifications et des

  5   raisons pour lesquelles il n'a pas envisagé d'autres ressources

  6   disponibles. Donc la porte n'est pas complètement fermée, nous sommes très

  7   flexibles, mais nous prenons en compte également les problèmes de sécurité

  8   pour cette institution et le centre où il est détenu. Merci.

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci pour votre aide.

 10   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, je vous prie.

 12   Oui, Monsieur Karadzic.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis reconnaissant du privilège dont je

 14   bénéficie, mais je suppose que vous conviendrez avec moi qu'il serait

 15   préférable de ne pas associer plusieurs systèmes judiciaires et que s'il y

 16   a association de systèmes judiciaires différents, il serait préférable de

 17   ne pas appliquer les éléments les plus défavorables de chacun d'entre eux.

 18   Donc je suis d'accord avec votre décision, Monsieur le Président, et

 19   j'ajouterais simplement que ce n'est pas en tant qu'accusé que je voudrais

 20   rencontrer ces témoins, mais en tant que quelqu'un qui assure sa propre

 21   défense. Markale, c'est un point important pour la poursuite de la vie

 22   quotidienne dans la ville en question. Il est impossible qu'il y ait

 23   coexistence entre les populations qui vivent côte à côte là-bas tant que le

 24   problème de Markale ne sera pas réglé et que les responsabilités ne seront

 25   pas déterminées.

 26   Donc c'est un point tout à fait capital. Mme Osure vient de dire un certain

 27   nombre de choses que j'ai entendues. Je me rends compte désormais que les

 28   problèmes qui se posent, n'étant pas uniquement de nature technique, il va

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  1   falloir que nous nous retrouvions devant les Juges de la Chambre à de

  2   nombreuses reprises pour régler ce genre de problèmes, car je ne considère

  3   pas que ce problème d'agrément des visites de témoins soit uniquement de

  4   nature technique. C'est mon premier point. Deuxième point, je peux

  5   facilement reconnaître l'obsession pour les économies qui est celle du

  6   greffe, mais je ne comprends pas très bien pourquoi cette obsession se

  7   manifeste précisément dans le cas actuel et qu'au lieu de permettre à un

  8   témoin de venir ici, le greffe soit capable de financer le voyage de

  9   nombreuses personnes vers les lieux de résidence des témoins.

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

 11   L'autre commentaire que je souhaiterais faire, Monsieur Karadzic, est que

 12   ce n'est peut-être pas une question équitable. La Chambre de première

 13   instance doit prendre une décision et se pencher sur les arguments que vous

 14   avez soulevés. Mais comme je vous l'ai déjà dit, rencontrer

 15   individuellement les témoins n'est pas nécessairement une question d'équité

 16   dans le cadre du procès, alors qu'il y a d'autres moyens peut-être de

 17   s'entretenir avec eux. Néanmoins, cela suffit sur ce point. La Chambre va

 18   se pencher sur votre demande et tiendra compte de tout ce qui a été dit ce

 19   matin.

 20   Pouvons-nous maintenant passer à votre requête concernant les recours en

 21   relation avec la violation de vos droits dans le cadre de votre arrestation

 22   avant que vous ne soyez envoyé ici. Cette requête est basée sur le fait,

 23   d'après vous, que cette arrestation s'est faite plus tôt dans la journée

 24   que ce qui a été officiellement reconnu. J'ai simplement une question sur

 25   ce point. L'Accusation a répondu. Est-ce que vous souhaitez ajouter quelque

 26   chose en réponse à la réponse de l'Accusation ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, j'aimerais répliquer à

 28   cette réponse de l'Accusation du 18 août et je dispose d'un délai qui va

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  1   jusqu'à lundi, n'est-ce pas ? Si je souhaite le faire, je peux le faire au

  2   plus tard lundi le 24 ?

  3   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, vous pouvez le faire, mais vous

  4   n'êtes pas en mesure de répliquer ici aujourd'hui ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je préfèrerais le faire par écrit, mais je peux

  6   aussi indiquer oralement que la Défense maintient sa position. Cela étant,

  7   je préfèrerais mettre tout ça par écrit avant lundi; cela me paraît

  8   préférable.

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parfait. Donc je vous autorise à

 10   déposer une réponse le 24.

 11   L'Accusation a déposé une requête pour annuler les mesures de protection

 12   qui s'appliquent à deux témoins. Cette requête a été déposée le 27 juillet.

 13   Jusqu'ici, vous vous êtes prononcé en faveur d'un minimum de mesures de

 14   protection. Etes-vous contre cette motion concernant les témoignages de

 15   témoins placés sous des mesures de protection ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien entendu je ne suis pas contre, je demande

 17   à ce que l'on annule toutes les mesures de protection sauf pour les

 18   victimes qui en ont fait la demande explicitement. Aucun témoin n'a la

 19   moindre raison de bénéficier de mesures de protection s'il dit la vérité.

 20   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis sûr que vous comprenez que les

 21   choses ne sont pas aussi simples que cela. Néanmoins, concernant cette

 22   requête, il n'est pas nécessaire que vous déposiez une réponse écrite. Je

 23   prends note du fait que vous n'avez pas d'objection et cette requête sera

 24   examinée par la Chambre de première instance à la lumière de ces

 25   informations. Il y a un certain nombre de formalités concernant les

 26   requêtes de cette nature qui doivent être prises en compte et la décision

 27   sera prise aussi rapidement que possible.

 28   Vous avez déposé un certain nombre de requêtes concernant des ordonnances

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  1   exécutoires. Il y en a une qui concernait l'OTAN et ils ont répondu qu'ils

  2   n'avaient pas de matériel en rapport avec votre demande. Il y a eu deux

  3   autres réponses, l'une émanant de Malte et l'autre du Bangladesh. Et en

  4   dehors d'un certain nombre de ponts, les deux ont insisté sur le fait qu'il

  5   n'y a pas de matériel en rapport avec votre requête. Est-ce que vous avez

  6   déjà décidé des actions qui seront prises à la lumière de ces réponses, ou

  7   est-ce que vous les retirez, toutes ses demandes, ou est-ce que vous

  8   envisagez encore d'ajouter autre chose ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant de l'OTAN, j'ai retiré ma demande

 10   car j'ai l'intention de m'adresser aux Etats membres de l'OTAN à ce sujet.

 11   Je suis en effet convaincu que ces documents et ces renseignements que je

 12   demande existent. S'ils ne se trouvent pas au siège de l'OTAN, ils se

 13   trouvent dans d'autres Etats membres de l'OTAN. S'agissant de Malte et de

 14   Bangladesh, je préférerais ne pas retirer tout de suite mes demandes car

 15   j'attends encore la réception d'un certain nombre de documents qui me

 16   permettront de spécifier et de préciser davantage mes demandes à Malte et

 17   au Bangladesh, et qui notamment pourraient me permettre de m'adresser à

 18   Malte en ayant l'espoir d'aboutir à une bonne coopération avec ce

 19   gouvernement, ce qui pourrait faire avancer mon affaire. Et cela pourrait

 20   servir d'exemple de coopération vis-à-vis de la coopération avec d'autres

 21   Etats. Je crois avoir de bonnes chances de recevoir les documents que

 22   j'attends.

 23   Mais le problème qui se pose vis-à-vis de ces demandes adressées à des

 24   gouvernements ou à des organisations internationales repose sur le fait que

 25   les gouvernements ne répondent pas assez vite. Et pourquoi ne répondent-ils

 26   pas vite, parce que nous les déposons de façon privée, sans passer par le

 27   greffe ou une autre institution du Tribunal. Nous le faisons dans ces

 28   conditions parce que nous craignons que dans le cas contraire les

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  1   gouvernements en question ne répondent pas, mais cela nous force à tourner

  2   en rond un petit peu et nous demandons donc à la Chambre et aux Juges du

  3   Tribunal de faire preuve de patience car nous sommes dans l'obligation

  4   d'agir ainsi compte tenu de l'importance des documents demandés.

  5   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai pris note de ce que vous avez

  6   dit. Je ne sais pas s'il y a des modifications qui seraient appropriées

  7   dans ce cas. J'en doute, mais je vais bien entendu me pencher sur cette

  8   question après la réunion de ce matin.

  9   L'Accusation - et il s'agit là d'une question que je vais maintenant leur

 10   poser - l'Accusation a un certain nombre de requêtes pour l'admission de

 11   témoignages de témoins décédés à l'heure actuelle. Deux de ces requêtes

 12   portent sur les témoins 172 et 297, Milan Babic et Miroslav Deronjic

 13   respectivement. Les dépositions de ces témoins ont été admises dans

 14   d'autres affaires, mais dans ces autres affaires, la demande faite par

 15   l'Accusation était beaucoup plus ciblée que dans ce cas-ci. Et je comprends

 16   que des délais vous ont été imposés pour la soumission de ces demandes, et

 17   j'ai noté que tous, y compris ces deux qui sont venus très peu de temps

 18   après le délai ou juste avant, à la lumière de cet élargissement qui a été

 19   accordé, et je pense que ces deux sont arrivés après le délai qui avait été

 20   fixé au départ. C'est un transcript extrêmement volumineux. Dans l'affaire

 21   Babic, il y a 2 118 pages de comptes rendus d'audiences et 309 pièces, et

 22   ces pièces sont plus ou moins volumineuses, certaines sont extrêmement

 23   volumineuses. Et dans l'affaire de Deronjic, le témoignage porte sur

 24   environ 1 000 pages, et il y a des parties moins importantes de ces

 25   témoignages venant d'autres témoins qui ont été donc admis dans d'autres

 26   affaires.

 27   La Chambre veut vous inviter à vous pencher sur ces demandes afin

 28   d'identifier quelles sont les parties du témoignage sur lesquelles vous

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  1   souhaitez vous baser en gardant à l'esprit qu'une bonne partie est

  2   répétitive, et essayez de limiter cette demande à une seule occasion dans

  3   laquelle une partie importante de ce qui vous intéresse a déjà été utilisée

  4   dans le cas de l'interrogatoire des témoins.

  5   Est-ce que je peux avoir votre réaction générale sur ce point, Monsieur

  6   Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. Tout

  8   d'abord, ce que la Cour vient de dire est tout à fait exact, mais je ne

  9   considère pas que cela reflète l'absence d'un choix de la part de

 10   l'Accusation dans le cas de l'identification de parties de ces comptes

 11   rendus d'audiences que nous voulons faire admettre. J'ai pris compte du

 12   fait qu'un certain nombre de facteurs ont été utilisés dans le cadre du

 13   choix de l'Accusation. L'idée n'est pas de rejeter l'invitation de la Cour,

 14   et nous ne sommes pas à même de le faire --

 15   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il ne s'agit pas d'un choix, d'une

 16   sélection, c'est tout ?

 17   M. TIEGER : [interprétation] Non, je ne pense pas, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez m'aider ?

 19   Dans l'affaire Deronjic, il y a six comptes rendus d'audiences devant ce

 20   Tribunal.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je pense que cette affaire, et ce dont je me

 22   souviens - et je n'ai pas revu toutes les demandes dans leur totalité -

 23   mais je sais par exemple que dans l'affaire de Babic, la présentation de

 24   certains éléments venant de l'affaire Martic, par exemple, dans mon

 25   souvenir, était assez limitée, et le compte rendu d'audience a été revu et

 26   des choix ont été faits sur la base de cette relecture.

 27   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. J'ai peut-être mal compris, mais

 28   j'avais cru comprendre que la totalité du compte rendu d'audience dans les

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  1   affaires Martic, Krajisnik et Milosevic était concernée et que vous

  2   souhaitiez que ces comptes rendus soient admis.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Bien, il va falloir que je revérifie. Comme je

  4   l'ai dit, ce n'est pas ce dont je me souviens, et j'ai revu cela très

  5   rapidement hier. Mais si c'est ce que la Cour a compris, nous allons

  6   procéder sur cette base parce qu'il y a d'autres facteurs que je

  7   souhaiterais également soulevés.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, la requête pour Babic est de

  9   chercher à faire admettre le témoignage précédent et les documents associés

 10   dans Milosevic, Krajisnik et également le procès Martic, et également sa

 11   déclaration du 29 mars 2004.

 12   M. TIEGER : [interprétation] La distinction entre les deux points de vue

 13   que nous avons présentés n'est pas de savoir si ces comptes rendus sont

 14   impliqués dans la requête, mais si c'est la totalité de ces comptes rendus

 15   d'audiences qui était concernée. J'accepte parfaitement que je puisse me

 16   tromper, mais je ne peux pas dire à la Cour que les comptes rendus

 17   d'audiences ont été revus dans leur totalité avant que cette requête ne

 18   soit déposée. La question n'était pas simplement de demander l'admission de

 19   ces comptes rendus d'audiences sans se pencher sur le contenu. Et si vous

 20   le permettez, je pense que ce serait peut-être plus utile d'expliquer

 21   certaines des considérations à la base de cette demande, à savoir, Monsieur

 22   le Président, que nous considérons qu'il peut y avoir deux approches de

 23   cette demande. Tout d'abord, l'Accusation peut identifier que les éléments

 24   qu'elle souhaite réellement présenter à cette Cour, ou peut, de façon plus

 25   efficace, identifier le cœur même de la base des éléments utilisés comme

 26   éléments de preuve que nous souhaitons que la Cour prenne en considération.

 27   Et ceci est essentiellement l'équivalent d'un interrogatoire direct qui

 28   serait suivi par un contre-interrogatoire et suivi par des questions

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  1   supplémentaires avec des déclarations cohérentes et des précisions sur

  2   certains points qui seraient soulevés pendant le contre-interrogatoire.

  3   C'est simplement une série de processus qui demande du temps.

  4   Et ce que nous voulions, c'était justement de réduire ces

  5   préoccupations et d'attirer l'attention de la Cour sur toutes les

  6   informations que nous considérons utiles pour le Tribunal pour poser sa

  7   décision et donner des informations sur la cohérence, la fiabilité, des

  8   questions qui ont été soulevées par l'accusé dans des requêtes

  9   préliminaires et des commentaires, également. Et ce faisant, d'aider la

 10   Chambre et d'éviter de remplir des dossiers volumineux. Donc c'est la

 11   raison pour laquelle je dirais que cette approche adoptée permettrait de

 12   faire avancer les choses rapidement et de donner à la Cour les informations

 13   qui pourraient être utilisées de façon efficace pour évaluer la situation.

 14   Je comprends que la Cour puisse avoir un point de vue différent.

 15   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai bien peur de ne pas avoir compris

 16   vos deux approches. J'ai perdu le fil quelque part. Qu'est-ce que vous

 17   aviez dit concernant les deux façons de procéder ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] La première façon de procéder c'est de mimer

 19   finalement ce qui se passe dans un procès.  L'Accusation se contentant de

 20   poser des questions pendant les interrogatoires principaux en se

 21   concentrant sur des faits bien déterminés. Ensuite vient le contre-

 22   interrogatoire qui lui-même est suivi des questions supplémentaires. Ce que

 23   dit le Procureur dans les requêtes présentées par lui jusqu'à présent

 24   permet de couvrir l'ensemble des étapes de cette procédure. Autrement dit,

 25   ce que dit le Procureur c'est que la façon de procéder a été circonscrite

 26   au maximum pour respecter les indications fournies par la Chambre au

 27   départ. Nous n'avons pratiquement pas intégré à nos demandes le moindre

 28   contre-interrogatoire ou, si nous l'avons fait, cela concerne un nombre de

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  1   contre-interrogatoires très limité et cela réduit donc les documents

  2   relatifs au contre-interrogatoire que nous demandons.

  3   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne comprends pas tout à fait.

  4   Je pensais qu'il serait équitable pour un Procureur de prendre en compte

  5   dans ses demandes l'ensemble des étapes de la procédure, c'est-à-dire

  6   interrogatoire principal, contre-interrogatoire et questions

  7   supplémentaires. Mais moi, ce qui me préoccupe un peu plus, c'est ce qui a

  8   un lien direct avec la présente affaire. Je peux vous donner quelques

  9   exemples, d'ailleurs, du genre de choses qui suscitent des préoccupations

 10   chez moi. Mme Uertz-Retzlaff, par exemple, un jour a pris la parole pour se

 11   lancer dans une très longue explication au sujet d'une carte géographique

 12   et puis elle emmène le témoin en différents lieux de Croatie, et nous

 13   sommes amenés à nous pencher en détail sur les aspects démographiques de

 14   certaines zones de Croatie.

 15   Alors, moi, la question que je pose, c'est quelle est la pertinence de tout

 16   cela par rapport à la présente affaire ? Je sais que vous me répondrez en

 17   disant qu'à l'époque la politique consistait à construire sur la base de ce

 18   qui s'était d'abord passé en Croatie pour examiner ensuite ce qui s'est

 19   passé ultérieurement en Bosnie. Mais, Monsieur Tieger, si nous nous lançons

 20   dans l'exploration détaillée de l'historique des événements survenus en

 21   Croatie, nous n'en avons pas terminé. Donc il me semble pour le moment

 22   qu'il faudrait que vous justifiiez la demande de versement au dossier faite

 23   par vous de cette partie des dépositions qui concerne des zones

 24   géographiques discutées dans d'autres affaires. Peut-être pourrez-vous le

 25   faire, mais pour le moment, la Chambre de première instance a les plus

 26   grandes difficultés à se pencher sur ce genre de choses en éprouvant

 27   quelque confiance que ce soit par rapport à l'idée que le versement au

 28   dossier de ce genre de détails puisse avoir la moindre incidence sur

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  1   l'affaire qui intéresse la Chambre.

  2   Peut-être est-ce le cas, mais la majorité des comptes rendus d'audiences

  3   demandés par vous, enfin, il y en a un émanant de Babic qui a une

  4   pertinence, sans aucun doute, mais il faudrait tout de même que vous soyez

  5   plus précis dans vos demandes, parce que 309 comptes rendus d'audiences

  6   complets, c'est tout de même un nombre énorme de documents. Et à première

  7   vue, un grand nombre des éléments de preuve demandés par vous semblent

  8   n'avoir rien à voir avec la réalité des faits qui seront au cœur des débats

  9   dans la présente affaire. Evidemment, il y a des éléments de preuve

 10   accessoires qui s'associent à l'aspect principal et qui finalement se

 11   retrouvent sous les yeux des Juges. Mais je vous en prie, assurez-vous que

 12   la majeure partie des éléments de preuve dont vous demandez le versement ne

 13   soit pas de cette nature.

 14   Je ne crois pas d'ailleurs que nous puissions avancer beaucoup en

 15   poursuivant le débat sur ce point aujourd'hui, mais j'exprimais simplement

 16   une certaine curiosité quant à mon désir de savoir si mon idée de départ, à

 17   savoir que pour le moment vous avez jeté tout ce que vous aviez à jeter

 18   sous les yeux des Juges était erroné. Je pense que je puis dire que je ne

 19   me suis pas trompé jusqu'à présent, donc une ordonnance sera rendue

 20   demandant à l'Accusation d'agir d'une façon qui sera déterminée. Les autres

 21   requêtes 92 quater seront peut-être un peu différentes et pourront être

 22   traitées dans le cadre d'une procédure différente. Mais en tout cas, il

 23   faut que nous veillions absolument à concentrer notre façon de procéder

 24   avant le début du procès, car une fois que le procès aura commencé, il sera

 25   sans doute plus difficile de rétablir les choses. Avant le procès, il

 26   suffit d'une décision assez rapide. Je vous invite donc à bien réfléchir à

 27   ce qui a été dit aujourd'hui de façon à ce que vous puissiez aider les

 28   Juges quant à la nécessité de circonscrire un peu plus les éléments de

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  1   preuve qui seront soumis aux témoins.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président. Je

  3   comprends, je ne dirais pas qu'il est impossible de faire la différence sur

  4   le plan qualitatif entre une partie d'un élément de preuve et d'autres

  5   parties de ce même élément de preuve. S'exprimer de cette façon serait à

  6   mon avis tout à fait irréaliste. Néanmoins, nous continuons à affirmer que

  7   notre objectif est bien     d'examiner les éléments à notre disposition

  8   pour déterminer ceux qui sont les plus pertinents. Et je pense que ceci est

  9   peut-être un peu différent que de parler de précision ou de sélectivité.

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tieger, je ne peux pas vous

 11   laisser poursuivre dans le sens où vous vous engagé, car jusqu'à présent,

 12   les Juges n'ont vu aucun signe de sélectivité de la part du Procureur.

 13   C'est peut-être un point qui vous importe à vous, mais en tout cas, il

 14   n'apparaît pas au vu des demandes soumises à la Chambre. Enfin, quoi qu'il

 15   en soit, nous aurons besoin de faire préciser ce point tout à fait

 16   fondamental ultérieurement. Je vous remercie.

 17   Monsieur Karadzic, je ne sais pas si vous auriez quoi que ce soit de

 18   particulier à dire qui pourrait être d'une quelconque utilité pour la

 19   Chambre sur ce sujet. La Chambre souhaite simplement disposer de

 20   renseignements complémentaires afin de pouvoir prendre une décision plus

 21   circonstanciée au sujet du sort réservé à ces témoins. Mais si vous

 22   souhaitez vous exprimer, je vous en prie, faites-le.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, je me dois de saisir

 24   l'occasion qui m'est donnée, occasion qui est tout à fait exemplaire, eu

 25   égard à la façon dont l'Accusation entasse toutes sortes de choses pour les

 26   mettre sur les yeux des Juges. D'ailleurs, vous l'avez dit vous-même à très

 27   juste titre, vous semblez vous voir envoyer des éléments beaucoup plus

 28   nombreux que ce que vous souhaitiez. Ceci, bien entendu, crée

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  1   éventuellement des obstacles à la Défense pour se préparer. Je ne suis pas

  2   contre la réduction des déclarations préalables de témoins qui a été

  3   demandée, mais de même il importerait au plus haut point qu'il soit exigé

  4   de l'Accusation qu'elle se limite dans les demandes de versement au dossier

  5   effectuées par elle à ce qui peut être utile, également aux Juges des faits

  6   et à la Défense. Donc que l'on exige la réduction du nombre de mots des

  7   déclarations préalables de témoin ou que l'on exige des expurgations de ces

  8   déclarations, cela ne me dérange en rien.

  9   Par ailleurs, je me demande s'il est véritablement nécessaire, en

 10   dehors des 500 témoins prévus, que soient versées 40 000 pages de documents

 11   et plus de 20 500 éléments de preuve. Est-ce que donc il importe pour mes

 12   collègues d'en face - là je m'exprime en tant que conseil de la Défense -

 13   est-ce qu'il est absolument indispensable de verser au dossier les

 14   déclarations et dépositions de quatre personnes qui sont décédées depuis

 15   qu'elles se sont exprimées, qui donc ne peuvent plus venir parler ici ?

 16   Est-ce que véritablement ces quatre déclarations supplémentaires provenant

 17   de témoins qu'il est impossible de contre-interroger sont indispensables en

 18   dehors de l'amoncellement et de l'entassement d'éléments de preuve que je

 19   viens d'évoquer ?

 20   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je me permets de vous interrompre,

 21   parce que je ne crois pas que vous soyez en train d'aborder des points qui

 22   sont utiles. Le problème n'est pas de savoir si ajouter leurs dépositions

 23   est utile ou pas. Je suis sûr que vous conviendrez que leurs dépositions

 24   sont utiles. Leurs dépositions devront être versées au dossier. Dans ce

 25   cas, si les dépositions de ces témoins sont utiles, les dépositions des

 26   autres témoins le sont également. La question n'est pas de savoir s'il est

 27   utile d'employer des dépositions de témoins entendus dans d'autres

 28   affaires, mais s'il faut ou pas admettre au dossier la totalité des comptes

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  1   rendus les concernant.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est l'Accusation qui va procéder à la

  3   réduction des documents. Pour le reste, je suis dans l'obligation de tout

  4   lire pour voir ce qui peut m'être utile ou pas ou peut me nuire ou pas.

  5   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je crains de devoir dire que ceci

  6   est votre travail. Si l'Accusation accepte de réduire les éléments de

  7   preuve qu'elle soumettra, et pour le moment, sur la base des indications

  8   fournies par elle, je crains fort de devoir penser que ce ne sera pas le

  9   cas. Donc je ne vois pas ce qui peut justifier la réflexion faite par vous

 10   à l'instant dans la situation actuelle. Une ordonnance sera faite

 11   concernant le Procureur, qui sera invité à fournir des détails

 12   complémentaires à ces deux requêtes antérieures, et manifestement vous

 13   aurez la possibilité de répliquer à ce que répondra le Procureur sur ce

 14   point. Donc nous pourrons avancer plus tard, mais je crains que nous ne

 15   puissions pas le faire aujourd'hui.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, puis-je

 17   répondre rapidement sur les deux points évoqués à l'instant. Premièrement,

 18   je comprends bien que la Chambre a indiqué clairement son intention, mais

 19   si elle juge nécessaire de poser la question de la sélectivité du choix du

 20   Procureur -- bien je sais ce que j'ai dit il y a un instant, d'ailleurs je

 21   retire mes propos d'il y a une minute, car j'ai rapidement relu mes notes

 22   depuis tout à l'heure. Je retire donc ce que j'ai dit devant vous il y a

 23   quelques instants. Mais si la sélectivité du Procureur est mise en cause,

 24   si le nombre de documents demandés doit être réduit, je l'admets, mais je

 25   n'admets pas ce que l'accusé vient de dire au sujet des expurgations

 26   imposées par l'Accusation. Deuxième point, dans l'affaire Popovic, je crois

 27   savoir que toutes les dépositions de Deronjic ont été versées au dossier,

 28   mais que pour des raisons de procédure, la demande de versement avait été

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  1   faite par l'Accusation, mais ces comptes rendus n'ont pas pu, pour des

  2   raisons de procédure, être admis au dossier de l'affaire Popovic. Donc

  3   c'est un exemple de ce qui s'est passé dans la réalité.

  4   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.

  5   Monsieur Karadzic, au début de la Conférence de mise en état d'aujourd'hui,

  6   j'ai évoqué la réunion qui a eu lieu lundi, si je ne me trompe, réunion au

  7   titre de l'article 65 ter, à laquelle un de vos conseillers juridiques a

  8   participé. Cette réunion portait sur les experts en matière de défense

  9   judiciaire. Je crois savoir que des documents en nombre suffisant ont été

 10   fournis à votre conseiller juridique pour vous apporter un plein concours

 11   dans votre défense. Je sais que depuis il y a sans doute eu des évolutions,

 12   je ne les connais pas dans le détail. Un de vos experts s'est mis en

 13   relation avec l'ICMP. J'aimerais simplement savoir si vous admettez pour le

 14   moment que les choses évoluent dans la bonne direction.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Croyez-moi, Monsieur le Président, je suis

 16   convaincu que ma défense avance et je puis vous assurer que nous ne

 17   contesterons pas les points pour lesquels nous n'avons pas une nécessité

 18   absolue de les contester, par exemple, la graphologie. La Défense de l'un

 19   des accusés a, encore une fois, donné son accord pour que les signatures ne

 20   soient pas contestées sur le plan graphologique, donc nous ne les

 21   contesterons pas non plus. Mais en lisant le compte rendu d'audience de la

 22   réunion de lundi, il y a une chose qui a été mal comprise. Ce qui a été

 23   compris, c'est que nous contestions le nombre d'heures d'audition prévues

 24   pour les experts. Ce n'est pas le cas. Le professeur Donjic pense qu'il est

 25   plus rationnel pour lui d'effectuer la totalité du travail qu'il devra

 26   effectuer maintenant, sans savoir quel sera le nombre d'heures qui lui sera

 27   alloué au moment où la demande d'expertise lui sera présentée de façon tout

 28   à fait efficace. Il s'est mis en contact avec l'ICMP et j'espère que ceci

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  1   portera ses fruits.

  2   Enfin, quoi qu'il en soit, je tiens à dire que mes experts n'ont

  3   peut-être pas pu commencer leur travail avant, mais que ce n'était pas

  4   faute de bonne volonté de leur part, c'était simplement parce qu'ils

  5   n'avaient pas reçu les documents absolument indispensables à la base de

  6   leur travail d'expert. J'espère que dorénavant ceci ne sera plus un

  7   obstacle. La lettre de M. Donjic a été envoyée au service de traduction

  8   pour traduction officielle, ce qui vous apportera tous les détails

  9   complémentaires en sus de ce que je viens de vous dire.

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

 11   J'aimerais cesser quelques instants de parler de ces questions préalables

 12   qui sont de nature interlocutoire pour en arriver à des questions plus

 13   générales.

 14   Monsieur Tieger, comme vous le savez, la Chambre a rendu une

 15   ordonnance stipulant que l'Accusation devrait présenter ses demandes liées

 16   à l'application de l'article 73 bis du Règlement avant la fin de ce mois-

 17   ci, c'est-à-dire au plus tard le 31 août, de façon à ce que la Chambre

 18   puisse avoir tous les renseignements qui lui sont nécessaires avant le

 19   début de la Conférence préalable au procès. Est-ce que vous avez bien ce

 20   calendrier en tête ?

 21   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Règlement n'exige pas de la Chambre

 23   de première instance qu'elle entende la Défense durant cette conférence

 24   préalable au procès, mais je crois que sur le plan de la tradition, il est

 25   courant d'entendre tout de même la Défense, et pour ma part, je pense que

 26   la Défense a un rôle important à jouer dans le cadre de telle conférence.

 27   Monsieur Karadzic, lorsque l'ordonnance dont je parle a été rendue, il

 28   n'est pas obligatoire pour vous de soumettre des écritures au sujet de

Page 428

  1   l'application de l'article 73 bis du Règlement. Mais dans le cadre de la

  2   Conférence préalable au procès, vous aurez l'occasion de faire connaître

  3   vos positions sur ce sujet. Donc c'est à vous qu'il appartient, une fois

  4   que l'Accusation se sera exprimée au plus tard le 31 août, de dire si vous

  5   souhaitez ou pas vous exprimer par écrit ou oralement sur ce point durant

  6   la Conférence préalable au procès. Je pense que vous pourrez éventuellement

  7   trouver une certaine utilité à exprimer votre position dans le cadre de la

  8   Conférence préalable au procès avant l'ouverture du procès principal.

  9   Donc ne pensez pas que parce qu'il ne vous a pas été demandé instamment de

 10   faire connaître votre position, vous n'avez pas votre mot à dire sur ce

 11   sujet dans les conditions appropriées et aux dates appropriées.

 12   Voilà, ceci met un point final aux sujets que je souhaitais aborder dans le

 13   cadre de la présente Conférence de mise en état.

 14   Monsieur Tieger, auriez-vous un point particulier que vous souhaiteriez

 15   évoquer ?

 16   M. TIEGER : [interprétation] Deux points rapidement, Monsieur le Juge. En

 17   réponse à l'invitation de la Chambre au sujet de notre requête en

 18   application de l'article 92 quater, je demanderais à la Chambre d'avoir

 19   l'amabilité de prendre en compte la sélectivité dont l'Accusation a fait

 20   preuve dans le cadre de la présentation de ses écritures 92 bis [comme

 21   interprété] et d'étendre un peu le délai qui a été autorisé à l'Accusation

 22   eu égard aux écritures relatives à l'application de l'article 92 quater.

 23   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela semble raisonnable.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Deuxième point, il porte sur la logistique de

 25   la préparation du procès. Il faut un certain temps avant le début du procès

 26   pour mettre en place toutes les mesures de logistique. Il faut que les

 27   témoins puissent être informés sur tous les détails de ce qui se passera

 28   les concernant avant le début du procès. Selon l'expérience acquise par

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  1   moi, le délai le plus approprié est de quatre semaines environ pour ce

  2   genre de démarche logistique. Je demanderais donc que ce temps soit accordé

  3   au Procureur afin qu'il puisse s'occuper de ces questions avant le début du

  4   procès.

  5   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

  6   Monsieur Karadzic, auriez-vous quelque chose à dire ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] D'abord, je tiens à dire que j'attends avec une

  8   extrême impatience les derniers documents de l'Accusation et les derniers

  9   documents qui me permettront de poursuivre mon travail. Sur la base de la

 10   table des matières qui m'a été fournie, j'ai déjà fait quelques démarches.

 11   J'ai passé en revue un certain nombre de municipalités, mais celles-ci ne

 12   sont plus prises en compte par l'Accusation, donc c'était un travail

 13   inutile. Deuxième point, article 73 bis du Règlement, lorsque nous aurons

 14   les dernières écritures déposées par la partie adverse, nous pourrons faire

 15   connaître notre position sur ce point.

 16   Troisièmement, Monsieur le Juge, j'aimerais vous demander de transmettre

 17   aux Juges de la Chambre de première instance le fait suivant : pour les

 18   Conférences de mise en état et avant que la moindre décision n'ait été

 19   prise sur le début de la date du procès, j'aurais besoin qu'il y ait une

 20   autre Conférence de mise en état pour faire préciser un certain nombre de

 21   points et pour organiser un certain nombre de choses. En effet, s'il y a

 22   simplement une décision qui est rendue, nous aurons beaucoup de difficulté

 23   à nous adapter sur le plan du rythme de la procédure et nous aurons des

 24   difficultés à faire en sorte que le procès se déroule sans interruption.

 25   Je sais de façon assez sûre que vous êtes appelé à vous retirer de ce

 26   procès, c'est la raison pour laquelle j'ai parlé de St André la dernière

 27   fois, car si vous deviez rester dans le procès, je ne l'aurais pas fait.

 28   Donc en raison de votre départ prochain, j'ai quelques mots à prononcer.

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  1   Je ne saurais omettre d'évoquer quelques difficultés qui se posent à la

  2   Défense qui sont en particulier des difficultés techniques. Premièrement

  3   difficulté technique, je ne dispose toujours pas du serveur qui aurait dû

  4   commencer à fonctionner à la mi-juillet. Les ordinateurs dont je dispose

  5   sont d'assez mauvaise qualité. On m'a dit qu'on allait les changer, ce

  6   n'est toujours pas fait. Les logiciels, ma foi, ils sont très peu nombreux.

  7   J'ai de l'argent, bien sûr, pour m'en acheter moi-même, mais tout de même,

  8   j'ai accepté de recevoir toutes les écritures sous forme électronique, ce

  9   qui a permis au Tribunal d'économiser des sommes d'argent importantes étant

 10   donné qu'il n'est plus nécessaire d'utiliser du papier. Mais si j'ai

 11   accepté les éléments informatiques, il faut qu'on me donne le moyen de lire

 12   ce que l'écran me montre. Car les caractères sont très petits, il faut donc

 13   qu'on me donne au moins l'argent nécessaire pour avoir de bonnes lunettes

 14   de vue. Donc je constate que la volonté d'économie est très forte et j'ai

 15   quelques difficultés à la comprendre dans ces conditions. Il y a des

 16   éléments audio et vidéo qui m'ont été communiqués également. Il me faudra

 17   au moins 300 jours pour les entendre et les visionner. Ça, c'est aussi une

 18   difficulté technique. Je vous rappelle également que je ne dispose ni de

 19   faxe ni de téléphone. Chaque fois que je veux parler avec les 30 ou 40

 20   collaborateurs que j'ai sur le terrain, je dois le faire à partir du

 21   téléphone payant que tout le monde utilise à la prison. Lorsque je

 22   communique par téléphone, bien entendu, je raccourcis le temps dont dispose

 23   les autres accusés pour parler avec leurs familles. D'ailleurs, eux aussi

 24   ont besoin de communiquer avec leurs conseils juridiques.

 25   Alors les difficultés sont vraiment très importantes. Je n'aime pas

 26   beaucoup geindre et me plaindre, mais véritablement, ces difficultés sont

 27   énormes. Je ne saurais les résoudre en l'absence de compréhension de la

 28   part du greffe, et maintenant que vous êtes au courant, en l'absence d'aide

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  1   de votre part. Il serait assez bon que la communication des documents se

  2   fasse en une seule fois et de façon ordonnée, car je vois un grand désordre

  3   dans les documents qui me sont communiqués, s'agissant des numéros de

  4   référence, s'agissant de leur séquentialité [phon]. Regardez, je reçois,

  5   par exemple, une liste de tous les combattants de Bosnie-Herzégovine,

  6   ensuite on me les communique de façon fragmentée avec nombre de combattants

  7   à Mostar, nombre de combattants à Bihac, nombre de combattants à Sarajevo.

  8   Les listes sont incomplètes. Cela me rend le travail assez difficile. Par

  9   ailleurs, il serait très utile pour moi que l'Accusation me communique tout

 10   ce dont elle dispose au sujet du SDA. L'Accusation dispose de tous les

 11   procès-verbaux de réunions du Parti démocratique serbe. Il serait donc pour

 12   moi très utile également de disposer de tous les éléments dont dispose

 13   l'Accusation au sujet du Parti d'action démocratique musulman de Bosnie.

 14   Et j'aimerais également que l'on me communique les procès-verbaux des

 15   rencontres entre M. Izetbegovic et ses collaborateurs, ainsi qu'entre M.

 16   Izetbegovic et des tiers. Moi j'ai communiqué tous les PV de réunions des

 17   responsables du Parti serbe. Je m'oppose évidemment à l'utilisation des

 18   écoutes qui ont eu lieu avant la guerre. Nous étions au pouvoir et nous

 19   avons été mis sur écoute de façon illégale à ce moment-là, sans la moindre

 20   décision ou le moindre accord de la part d'un procureur quelconque.

 21   Alors si la Chambre accepte de prendre en compte ces écoutes, moi je

 22   demande que l'on me remette les écoutes de tous ceux qui n'étaient pas

 23   Serbes, à moins que tout d'un coup on vienne me dire que les seules

 24   personnes mises sur écoute étaient des Serbes, ce qui ne ferait qu'apporter

 25   la preuve de la sélection dont il a été fait preuve dans ces diverses

 26   actions. Cela montrerait que lors du remplacement du communisme par un Etat

 27   démocratique, seuls les grands et importants dirigeants serbes étaient mis

 28   sur écoute par la communauté internationale ou autre, ça je ne peux pas le

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  1   croire.

  2   Donc je demande à ce que me soit remises les écoutes d'autres personnes que

  3   les Serbes qui sont en possession indubitablement de l'Accusation.

  4   Voilà, j'ai fait le tour, je crois, des questions qui ont de l'importance

  5   pour nous, équipe de la Défense. Et puis j'aurais également besoin d'un

  6   certain nombre de précisions et d'explications exactes. Qu'est-ce qu'on

  7   entend ici quand on emploie le mot "Sarajevo." Est-ce que Sarajevo est un

  8   concept général, est une entité distincte ? Qu'est-ce qu'on entend

  9   également par les mots "les hommes et les jeunes garçons." Vous voyez qu'il

 10   y a un très grand nombre de choses qui crée un fardeau inutile pour un

 11   procès comme celui-ci, qui rend les choses opaques, qui risque d'empêcher

 12   que ce procès évolue sans encombre, sans heurt. Et beaucoup de choses qui

 13   risquent de créer un risque, un danger d'impossibilité de faire éclater la

 14   vérité.

 15   Sur tous ces points, je voudrais pouvoir disposer d'explications plus

 16   détaillées, mais pour le moment, Monsieur le Juge, je vous demande

 17   simplement de bien comprendre les énormes problèmes qui peuvent se poser si

 18   l'on souhaite ensevelir ce procès sous un amas indu de documents. Ce procès

 19   a une extrême importance pour les populations qui ont survécu et vivent

 20   toujours dans les régions dont nous parlerons.

 21   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Docteur Karadzic, ceci est, je dois

 22   dire, une surprise pour moi. C'est la première fois depuis que vous avez

 23   comparu ici que j'ai l'impression que vous n'avez pas le contrôle total de

 24   votre affaire. Vous avez clairement indiqué que vous n'utilisez pas comme

 25   il faut toutes les facilités que ce Tribunal vous a offertes, vous avez

 26   donc un officier de liaison qui fait la liaison avec le greffe et lui fait

 27   connaître vos problèmes. Vous avez également parlé d'un certain nombre de

 28   difficultés d'ordre technique que vous rencontrez. Cela ne m'avait jamais

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  1   été dit sous quelque forme que ce soit dans le passé, or il y a différentes

  2   façons pour vous de soulever ces problèmes et de les faire connaître aux

  3   différents responsables du Tribunal. Vous avez soulevé également un certain

  4   nombre de problèmes concernant les éléments de preuve dans cette affaire,

  5   et la demande que vous faites maintenant, que vous l'ayez déjà faite ou pas

  6   à l'Accusation n'est pas claire, mais c'est une demande qui doit être faite

  7   concernant les documents. Et si ces documents ne vous sont pas remis, il

  8   faut alors demander à la Chambre de première instance de vous apporter

  9   l'aide nécessaire.

 10   J'ai pris note de tout ce que vous avez dit, et dans la mesure où je

 11   considérerai cela approprié, je ferai mon enquête pour voir si je peux vous

 12   apporter une aide. Et je ne pense pas que je puisse faire quoi que ce soit

 13   concernant les documents de preuve dont vous avez parlés parce que c'est là

 14   un élément dont vous-même et vos conseillers pouvez parler avec

 15   l'Accusation, et avec la Chambre de première instance si vous considérez

 16   que cela est approprié. Mais pour les autres questions, je verrai s'il y a

 17   quelque chose que je peux faire ou que la Chambre de première instance peut

 18   faire pour vous aider.

 19   Et comme toujours, nous avons pris note de tout ce que vous avez dit.

 20   Je pense que vous avez également autre chose -- je voudrais voir si vous

 21   avez autre chose à ajouter. C'est la dernière chance qui vous est donnée

 22   puisque je dois rencontrer maintenant les journalistes.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je m'abstiens de

 24   formuler des critiques ou des remarques au sujet de ce qui se passe au

 25   quartier pénitentiaire ou de mes rapports avec le greffe car je pense que

 26   les problèmes éventuels ne sont pas dus à une mauvaise volonté quelconque,

 27   mais à l'existence de règles qui ne sont pas les bonnes. Mais étant donné

 28   que le Règlement de procédure et de preuve a été modifié un grand nombre de

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  1   fois, j'ai encore la conviction que des règles de bonne qualité peuvent

  2   être mises en place. Monsieur le Juge, je tiens maintenant à vous remercier

  3   pour la grande attention et la grande compréhension dont vous avez fait

  4   preuve durant votre travail dans mon affaire, ainsi que de l'écoute dont

  5   vous avez fait preuve qui nous a déjà été utile à plusieurs reprises et qui

  6   nous a permis de comparaître devant le Tribunal en ne disant pas les choses

  7   autrement que de la façon dont nous souhaitions les dire.

  8   Monsieur le Juge, votre présence dans cette affaire a commencé sur

  9   les mots en anglais "not guilty", non coupable, et vous ne serez sans doute

 10   pas là pour entendre les mots finaux de ce procès qui seront les mêmes, à

 11   savoir "not guilty", non coupable, mais dans l'attente, je vous souhaite

 12   plein de succès dans ce vous aurez à faire à l'avenir.

 13   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci de vos commentaires, Monsieur

 14   Karadzic. Comme vous pouvez vous y attendre, j'espère que la justice sera

 15   rendue dans la présente affaire.

 16   Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, avant de

 18   suspendre, si vous me le permettez, je m'efforce de ne pas dire trop de

 19   choses au stade actuel de cette affaire, mais étant donné que l'allusion a

 20   été faite à la chose, je tiens à me joindre à ce qui vient d'être dit, et

 21   vous dire, Monsieur le Juge, que nous avons grandement apprécié votre

 22   présence et le fait de travailler avec vous, et la façon dont vous avez

 23   présidé cette Chambre de mise en état.

 24   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très aimable à vous, Monsieur Tieger.

 25   Monsieur Tieger, Madame Uertz-Retzlaff, Monsieur Reid, Monsieur Karadzic,

 26   mon avis c'est que la présente affaire est prête pour le début du procès,

 27   c'est ce que je ferai savoir par écrit dans le rapport que je communiquerai

 28   au Président du Tribunal suite à la présente réunion de mise en état. Il y

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  1   a bien sûr un appel qui doit encore faire objet d'arrêt qui concerne la

  2   requête en vue de prise en compte de l'accord conclu avec M. Holbrooke,

  3   mais cela étant dit, et là je parle aussi bien à l'Accusation qu'à la

  4   Défense, et j'adresse mon propos plus particulièrement dans votre

  5   direction, Monsieur Karadzic, il importe au plus haut point de consacrer le

  6   temps nécessaire à la préparation du procès et à la bonne organisation des

  7   éléments de preuve portant sur les faits. Et j'invite toute personne

  8   concernée à prêter l'attention la plus grande à ce point et à

  9   l'intervention nécessaire et importante des conseils juridiques pour un bon

 10   examen des éléments de preuve.

 11   Je suspends maintenant la présente Conférence de mise en état.

 12   --- La Conférence de mise en état est levée à 11 heures 20.

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