Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 28 mai 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. J'ai lu la note de

  7   l'Accusation en ce qui concerne les témoins de la semaine prochaine. Donc

  8   M. van Lynden va revenir lundi, si j'ai bien compris, et les parties ont

  9   convenu que vous alliez terminer votre contre-interrogatoire de ce témoin-

 10   ci, Monsieur Karadzic, aujourd'hui; c'est bien cela ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je l'espère, Excellences.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de temps avez-vous besoin,

 13   Madame le Procureur, pour vos questions   supplémentaires ?

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Pas plus de dix minutes.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a certains points à traiter, en

 16   tout cas, la Chambre de première instance a certains points à aborder en

 17   fin d'audience aujourd'hui. Donc, Monsieur Karadzic, vous devez terminer

 18   votre contre-interrogatoire 40 minutes avant la fin de l'audience. Gardez

 19   cela en tête, s'il vous plaît.

 20   Maintenant, vous avez la parole.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour à toutes les personnes présentes

 22   dans le prétoire.

 23   LE TÉMOIN : COLM DOYLE [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, hier nous avons présenté les

 27   obligations que nous avons accepté de faire nôtres à la conférence de

 28   Londres, ainsi que la réaction qui était la nôtre, et je constate avec

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  1   plaisir que vous avez reconnu le fait que j'ai, pour ma part, bien fait ce

  2   que j'avais dit que je ferais trois jours après notre rencontre.

  3   Je voudrais maintenant que l'on affiche numéro 01559 de la liste 65 ter de

  4   l'Accusation afin de voir ce que notre armée a fait au regard des

  5   obligations qui nous incombaient suite à la conférence. C'est donc un

  6   document du 6 juin suite à la conférence de Lisbonne où nous nous sommes

  7   rendus ensemble. Voilà l'une de ces instructions du général Mladic qui a eu

  8   particulièrement mauvaise presse, cette instruction. Voyons ce qu'il a

  9   ordonné et quelle était sa compréhension des choses.

 10   Donc instruction pour la suite des opérations du 6 juin 1992.

 11   Au point numéro 1, il est dit :

 12   "L'ennemi s'est lancé dans une offensive généralisée contre Sarajevo."

 13   Dernière phrase de ce paragraphe :

 14   "Il a l'intention d'effectuer une opération au cours des cinq ou six jours

 15   suivants afin de créer des conditions favorables lors de négociations

 16   éventuelles portant sur la délimitation de frontières dans la zone de

 17   Sarajevo au sens large."

 18   Point 2 :

 19   "L'armée de la République de Bosnie-Herzégovine a reçu pour mission de se

 20   lancer dans des opérations offensives à objectif limité consistant à

 21   améliorer les positions tactiques dans la région de Sarajevo au sens

 22   large…"

 23   Ensuite, paragraphe numéro 4, première phrase :

 24   "J'ai décidé, par une défense acharnée et active sur les positions

 25   atteintes, de défendre ces dernières."

 26   Ensuite, on a :

 27   "Objectif : sécuriser les portions de Sarajevo peuplées d'une

 28   majorité de Serbes, nettoyer…"

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  1   Il faut tourner la page en serbe :

  2   "…nettoyer la zone au sens large de l'aéroport de Sarajevo et

  3   nettoyer la zone au sens large, la même, des groupes ennemis, et de cette

  4   façon, assurer la sécurité nécessaire au vol afin de permettre

  5   l'atterrissage des vols humanitaires et de permettre l'approvisionnement

  6   normal de la population en vivres et en médicaments.

  7   Ensuite, on a au C :

  8   "Ouvrir les axes de communication : Sarajevo, Trnovo, Kalinovik aux

  9   fins d'un afflux normal d'aide humanitaire."

 10   Si vous vous rappelez bien, nous avons également ouvert une voie via

 11   Metkovic, n'est-ce pas, une voie humanitaire, un corridor ?

 12   R.  Je ne m'en souviens pas.

 13   Q.  Très bien. Nous avons cela dans les documents. Mais nous avons, en tout

 14   cas, accepté d'ouvrir également la route passant par Metkovic à travers

 15   l'Herzégovine orientale, et Mladic donne l'ordre de sécuriser cela, en

 16   fait.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante en serbe et page 4 en anglais. Il

 18   est question du :

 19   "Corps de Sarajevo-Romanija…"

 20   Dernière phrase :

 21   "Sécuriser la zone de l'aéroport au sens large afin de permettre

 22   l'atterrissage des vols humanitaires en toute sécurité."

 23   Point numéro 6, paragraphe 2, en anglais c'est à la page suivante :

 24   "J'interdis de la façon la plus stricte les mauvais traitements

 25   infligés à la population civile non armée. Quant aux prisonniers, il

 26   convient de les traiter dans l'esprit de la convention de Genève."

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que ceci est conforme aux accords que nous avons passés fin mai

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  1   à Lisbonne, Colonel ? Si vous vous rappelez bien, j'ai signé une

  2   déclaration à Lisbonne que nous pouvons présenter aussi, déclaration d'où

  3   il ressort ce que Mladic fait ici.

  4   R.  Je ne me souviens pas des détails exacts tels qu'ils sont relatés dans

  5   cette lettre. Ça, je n'en sais rien. Moi, j'avais compris que la réussite

  6   principale obtenue à Lisbonne était suite à l'attaque de mortier sur les

  7   gens qui faisaient la queue pour avoir du pain à Sarajevo, et nous avons

  8   réussi à obtenir un accord général qui permettait de rendre à l'aéroport

  9   aux Nations Unies. C'était, à mon avis, la principale réussite de Lisbonne.

 10   Donc il y a des détails dans cette lettre qui a été envoyée par le général.

 11   Mais ça ne signifie pas grand-chose, en tout cas c'est tout ce que je peux

 12   vous dire. J'aimerais savoir exactement ce qui allait être mis en œuvre,

 13   plutôt que de savoir ce qui était écrit dans la lettre.

 14   De plus, je ne connais pas cette lettre.

 15   Q.  Mais vous pouvez faire des commentaires sur tout ce que vous voulez

 16   lorsque c'est la thèse de l'Accusation, mais en revanche, lorsque la

 17   Défense vous montre une évidence, vous ne dites plus rien. Donc que pensez-

 18   vous de ce que je vous dis ? Je vous trouve de parti pris. Il ne s'agit pas

 19   d'une lettre ici. Il s'agit d'un ordre, un ordre direct, ça ne doit pas

 20   être pris au sens d'une lettre. C'est un ordre qui doit être exécuté. Quand

 21   on connaît Mladic, on sait qu'il faut que ce soit exécuté. Donc le fait que

 22   j'ai été obligé de le faire à cause d'un obus, c'est une interprétation de

 23   parti pris et subjective. Vous vous souvenez quand même de la directive du

 24   12  avril ? Pourquoi est-ce que vous êtes autant de parti pris ? Expliquez-

 25   moi pourquoi, tout d'un coup, vous n'êtes plus du tout objectif ?

 26   R.  Ecoutez, tout ce que je dis, Monsieur Karadzic, c'est que vous avez

 27   donné un grand nombre de documents qui, selon vous, sont des directives.

 28   Or, moi, ce que je vous dis c'est que je ne sais absolument pas si ces

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  1   directives ont été mises en œuvre et mises en pratique. De plus, je n'ai

  2   pas vu ces documents au préalable.

  3   Q.  Ce n'est pas ce que je vous ai posé comme question. Je vous ai demandé

  4   si la teneur de cette directive est en accord avec ce que j'ai déclaré et

  5   signé à Lisbonne.

  6   R.  Je ne sais pas exactement ce qui a été signé à Lisbonne. Si vous me

  7   donnez le document de Lisbonne où on voit exactement ce qui a été signé à

  8   Lisbonne et toutes les dispositions, dans ce cas-là, je pourrais peut-être

  9   commenter. Mais moi, je n'en connais pas les détails exacts. Je ne me

 10   souviens que du passage qui demande que l'on rende l'aéroport aux Nations

 11   Unies afin de permettre l'approvisionnement en aide humanitaire.

 12   Q.  Comment pouvez-vous dire que j'ai été obligé de le faire du fait d'un

 13   obus, alors que c'est quelque chose que j'avais proposé bien avant la

 14   conférence, et vous avez connaissance de mon programme du 12 avril ? Nous

 15   avons écouté votre déposition qui est vraiment d'un parti pris, puisque

 16   depuis trois jours, vous dites : Oui, mais les Serbes ont fait quelque

 17   chose à Zvornik, et cetera. Alors, vous ne savez pas vraiment ce qui s'est

 18   passé à Zvornik. Et sachez que la Défense vous prend pour un témoin de

 19   parti pris qui se défense. Or, je ne vous attaque pas. Je vous demande ce

 20   que vous saviez à l'époque, les conclusions que vous avez tirées de ce que

 21   vous saviez, car vous étiez sur le terrain à l'époque. Donc dites-nous

 22   quelle est votre opinion. Mais moi, je trouve que vous contournez les

 23   réponses et que vous ne voulez pas répondre, en fait.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au lieu de faire des discours, Monsieur

 25   Karadzic, posez vos questions l'une après l'autre, s'il vous plaît.

 26   Monsieur Doyle, pouvez-vous répondre.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que je dis c'est que mes souvenirs des

 28   discussions de Lisbonne sont les suivantes : je pense qu'on a réussi à

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  1   obtenir quelque chose uniquement après l'attaque au mortier sur cette queue

  2   à la boulangerie. C'est uniquement après cette attaque que nous avons

  3   réussi à avoir des résultats. Donc le président des pourparlers de paix, M.

  4   Cutileiro, a pu persuadé M. Karadzic qu'il fallait qu'il donne quelque

  5   chose, que ça permettrait de faire avancer sa cause. En ce qui concerne les

  6   détails de la lettre, je n'ai jamais vu cette lettre précédemment.

  7   [La Chambre de première instance se concerte]

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Mais le 17 mai c'est quand même avant le 27 mai, ça vous êtes d'accord

 10   avec moi.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, j'aimerais demander le versement de

 12   ce document, s'il vous plaît, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, à moins qu'il y ait une objection,

 14   ce document sera versé au dossier.

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D232.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, passons au document 1D891.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Pendant qu'on attend l'affichage, sachez qu'il s'agit d'une lettre que

 20   j'ai écrite à l'ambassadeur Cutileiro le 17 mai, et vous allez voir que le

 21   camp des Serbes est toujours en train de prendre l'initiative. Or, vous me

 22   dites que je n'ai décidé de faire quelque chose que suite à un obus que

 23   nous aurions tiré, et je peux vous prouver que de toute façon nous y sommes

 24   pour rien dans cet obus.

 25   Voici la lettre. Je voudrais vous tenir informé de la situation surtout à

 26   Sarajevo. La guerre empire et devient un désastre. Nous avons fait un grand

 27   nombre de propositions de paix directement aux Musulmans et à la FORPRONU,

 28   mais nous n'avons eu aucune réponse à part des tirs. "En fin de compte,

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  1   notre assemblée a déclaré un cessez-le-feu unilatéral qui expirera demain,

  2   le 18 mai. Notre cessez-le-feu unilatéral a été pris comme une faiblesse de

  3   notre part et nous avons été attaqués encore plus sauvagement de ce fait.

  4   Malgré les pourparlers, or à l'époque des négociations, M. Izetbegovic a

  5   fait deux déclarations en deux jours en disant qu'ils allaient être

  6   vainqueurs et qu'ils allaient nettoyer la Bosnie de tous ces terroristes.

  7   Quand il parlait de terroristes, il voulait dire les Serbes. Sa déclaration

  8   ressemblait à un appel au Djihad. Aujourd'hui, les voisins du quartier

  9   serbe de Pofalici ont tué au moins 50 Serbes."

 10   Et là, j'apporte une correction en dehors de ce texte. C'est 250 Serbes qui

 11   ont été tués à Pofalici à l'époque, et on pensait à l'époque que c'était le

 12   seul hameau serbe que nous ne contrôlions pas. L'estimation, en fait, est

 13   d'au moins 200.

 14   "Chaque jour, les Musulmans attaquent de façon sauvage les municipalités

 15   serbes, surtout Ilidza, or les Serbes n'ont jamais attaqué de municipalités

 16   musulmanes. En ce qui concerne le côté croate, Kupres est tranquille. La

 17   situation dans la vallée de la Neretva s'améliore mais n'est toujours pas

 18   bonne. A Bosanski Brod, les forces régulières sont venues en renfort des

 19   forces armées et ont chassé les Serbes de la municipalité."

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir la dernière

 21   page, s'il vous plaît, de ce document. Non, on peut rester sur cette page.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  "Nous sommes certains que M. Izetbegovic ne veut plus de la conférence.

 24   Il demande de l'aide militaire extérieure de la part des pays islamiques.

 25   Nous avons des preuves selon lesquelles la Libye est impliquée et c'est le

 26   seul pays qui a un consulat à Sarajevo. La Turquie, l'Egypte, le Maroc et

 27   d'autres pays islamiques sont intéressés aux résultats de la crise en

 28   Bosnie. Si la conférence de ne poursuit pas, la guerre va empirer et ne

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  1   s'arrêtera pas avant la défaite totale d'un des camps. Comme vous le savez,

  2   toutes mes prédictions se sont avérées, et je n'en suis pas heureux. Nous

  3   demandons que la conférence reprenne sans condition. S'il faut comme

  4   condition à ce qu'elle recommence un cessez-le-feu, cela signifie que M.

  5   Izetbegovic aura un nouveau moyen de bloquer les négociations et de les

  6   saboter autant qu'il le veut."

  7   Donc je vous rappelle quel était le programme du 22 avril, souvenez-vous-en

  8   quand même. Avez-vous en main des déclarations de notre part qui

  9   montreraient que nous étions belligérants, que nous voulions la guerre et

 10   que nous voulions que ce conflit se résolve par les armes et uniquement par

 11   les armes ?

 12   R.  Non, je n'ai pas de documents allant dans ce sens, et de toute façon, à

 13   ce moment-là, j'étais au Royaume-Uni. Je ne me trouvais pas en Bosnie. Donc

 14   je ne peux pas commenter sur cette lettre car je n'en ai aucune

 15   connaissance.

 16   Q.  Oui, certes, vous n'étiez pas à Sarajevo le 27 avril, vous étiez à

 17   Lisbonne. Mais vous savez quand même que, soi-disant, j'aurais été

 18   influencé par un obus, une attaque au mortier. Donc vous êtes de parti

 19   pris, ça se voit, c'est évident. Le 22 mai, on avait déjà fait ces

 20   propositions, et l'obus est tombé le 27 mai. Et cette lettre est du 17.

 21   C'était cinq jours après que vous soyez arrivé. Mais vous saviez exactement

 22   ce qui se passait même si vous vous trouviez à Lisbonne ?

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] L'accusé ne pose plus de question au

 24   témoin. Il est en train de polémiquer avec lui.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est plus ou moins vrai, en effet.

 26   Monsieur Doyle, pouvez-vous répondre à la question quand même.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que je tiens à dire c'est que si cette

 28   lettre a été écrite le 17 mai, je ne me trouvais pas en Bosnie ce jour-là.

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  1   J'ai été évacué le 12 mai de Sarajevo et j'ai rentré chez moi le 1er

  2   octobre. Mais sachez qu'entre le 12 mai et le 1er octobre, j'ai été en

  3   Bosnie que trois fois. J'étais avec M. Cutileiro pour les pourparlers à

  4   Lisbonne, c'est vrai. Je me souviens du principe qui a été obtenu dans le

  5   cadre des négociations de Lisbonne. Mais en ce qui concerne cette lettre,

  6   je n'ai aucune connaissance de cette lettre, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Mais avez-vous la moindre idée de la

  8   teneur de ce document ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, absolument pas.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Vous dites n'avoir aucune connaissance de tout cela. Très bien. Dans ce

 15   cas, pourquoi ne retirez-vous pas vos allégations que vous avez faites dans

 16   les réponses à des questions que je ne vous ai pas posées ? Vous dites que

 17   vous ne savez rien à propos de tout cela, vous n'étiez pas informé, alors

 18   que vous étiez quand même le représentant de Lord Carrington dans la

 19   conférence et vous n'étiez au courant de rien. Mais pourquoi est-ce que

 20   vous me dites dans ce cas-là que c'est du fait de cette attaque au mortier

 21   que j'ai dû changer ma conduite et devenir plus humain ?

 22   R.  Parce que je vous ai déjà expliqué quelles étaient les conséquences de

 23   cette attaque au mortier sur les pourparlers de paix à Lisbonne. Vous vous

 24   souvenez peut-être. Dès que ceci a eu lieu, M. Silajdzic est entré dans la

 25   salle de conférence et a informé M. Cutileiro qu'à cause de cette attaque

 26   que tout le monde avait vue dans les médias internationaux, il considérait

 27   qu'il était inutile de poursuivre les pourparlers. Il a dit qu'il allait

 28   quitter immédiatement la conférence. Et vous êtes rentré dans la salle de

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  1   conférence peu de temps après pour nous dire à tous que des Serbes

  2   n'étaient pas responsables de cette attaque au mortier sur la file à la

  3   boulangerie.

  4   L'opinion de M. Cutileiro était la suivante : si les pourparlers

  5   s'arrêtaient sans qu'aucun avancement n'ait été obtenu, ceci n'aurait pas

  6   été bonne presse. Donc il vous a dit qu'il serait bien de faire un geste et

  7   de donner des assurances sous réserve de certaines conditions, bien sûr,

  8   que l'aéroport de Sarajevo serait donné aux Nations Unies, et que ceci au

  9   moins serait vu par le monde entier comme une réussite, comme un progrès,

 10   comme une avancée.

 11   Personne n'a dit qui était responsable pour cette attaque sur la

 12   boulangerie. Je l'ai dit hier d'ailleurs. Je ne vous accuse pas. Je ne sais

 13   pas. J'ai dit que les Nations Unies peut-être, qui avaient beaucoup de

 14   troupes dans la ville et qui ont fait une analyse de cratère serait bien

 15   plus à même de trouver des conclusions. Mais moi, je n'en sais rien. Je

 16   n'ai pas de réponse. Tout ce que je veux dire, c'est que suite à cette

 17   attaque de mortier on vous a demandé de faire un geste pour que la

 18   conférence ne s'arrête pas dans une impasse. Ce geste était de rendre

 19   l'aéroport pour que l'aide humanitaire puisse arriver dans Sarajevo.

 20   Q.  Mais savez-vous que j'avais proposé ça bien avant, nous étions toujours

 21   en faveur de l'approvisionnement en aide humanitaire de la ville ?

 22   R.  Non, Monsieur Karadzic, ça, je n'en ai aucune connaissance.

 23   Q.  Bien. Merci. Mais je vais retrouver cette déclaration que j'ai faite à

 24   Lisbonne et que j'ai faite de façon unilatérale. En ce qui concerne la

 25   directive du général Mladic, celle qui date du mois de juin, qui a déjà été

 26   versée au dossier.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant avoir la pièce 1600 à

 28   l'écran, s'il vous plaît. Je crois que le document précédent a déjà été

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  1   admis, n'est-ce pas, cette directive, enfin, cette lettre directive ?

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'en suis pas sûr. Je vais vérifier.

  3   Oui, mais il sera versé au dossier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D233, Madame,

  5   Messieurs les Juges.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   Pourrions-nous maintenant avoir la pièce 1600 de la liste 65 ter de

  8   l'Accusation à l'écran.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Il s'agit toujours d'une directive de Mladic sur les actions à

 11   entreprendre en date du 8 août, et s'y reflète parfaitement la pérennité

 12   même de ses efforts. Il veut absolument que l'aide humanitaire puisse

 13   passer.

 14   Donc, vous me dites que Silajdzic est arrivé et qu'il a utilisé

 15   l'attaque au mortier pour demander que les pourparlers s'arrêtent. Nous

 16   considérons que tout ceci a été instrumentalisé pour que l'on arrête la

 17   conférence, pour que la conférence tombe à l'eau, parce qu'ainsi ils

 18   obtiendraient toute la Bosnie. Qu'avez-vous à dire ?

 19   R.  Ça c'est votre idée, votre opinion. Vous avez droit à votre propre

 20   opinion, après tout, mais ce n'est pas la mienne. Je suis d'accord avec

 21   vous lorsque vous dites que la raison pour laquelle la conférence s'est

 22   arrêtée, c'est à cause de cette attaque qui a eu lieu à Sarajevo. Là, je

 23   suis parfaitement d'accord avec vous sur ce point.

 24   Q.  Mais êtes-vous d'accord avec moi lorsque je vous dis que les Serbes ne

 25   voulaient pas que la conférence s'arrête, alors que les Musulmans, eux,

 26   voulaient l'arrêt de la conférence ? Et vous n'avez jamais eu à supplier

 27   les Serbes de venir et de participer à la conférence. Or, vous avez dû

 28   convaincre les Musulmans ?

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  1   R.  Je ne me souviens pas d'une seule occasion où j'ai dû persuader les

  2   Musulmans de venir à la conférence.

  3   Q.  Oui. Enfin, c'est quand même dans votre agenda. Vous avez dû persuader

  4   le HDZ et le SDA de venir à la conférence. On l'a vu hier.

  5   R.  Ecoutez, je vous l'ai expliqué hier. J'ai dû persuader le président,

  6   parce que lui avait peur pour sa sécurité en se rendant à l'aéroport. Il

  7   avait peur d'être tué en route pour l'aéroport. C'est pour ça qu'il ne

  8   voulait pas y aller parce qu'il avait peur pour sa vie. Rien de plus.

  9   Q.  Pouvons-nous maintenant avoir la directive à l'écran. Je vois qu'elle

 10   est à l'écran. Donc c'est une directive du général Mladic, 8 août.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez. Vous poser trop de questions à

 12   l'accusé dans une seule question. Prenons les choses une à une. Etes-vous

 13   d'accord avec l'accusé lorsqu'il dit que selon lui les Serbes ne voulaient

 14   pas que la conférence s'arrête, alors que les Musulmans, eux, voulaient

 15   l'arrêt de la conférence. Qu'en

 16   pensez-vous ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que je peux vous dire, c'est que je ne

 18   sais pas si un camp ou l'autre voulait que la conférence s'arrête. Je ne

 19   sais pas. Je ne sais pas si un camp ou l'autre a fait en sorte de mettre un

 20   terme à la conférence. Je ne sais pas. Là, je ne peux pas vous répondre.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Pouvons-nous afficher un autre document, puis nous reviendrons au 1600.

 25   Je voudrais le 05875, s'il vous plaît.

 26   Ce document est daté du 5 juin, c'est la lettre que j'ai adressée à

 27   l'ambassadeur Cutileiro. Nous avons ici la première page. Pouvons-nous

 28   avoir la deuxième. Voilà. Nous l'avons en serbe. Il nous faut la seconde

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  1   page en anglais. Voilà.

  2   "Cher Monsieur Cutileiro.

  3   "Ce soir, le 5 juin, M. Izetbegovic a donné une réponse négative à la

  4   lettre de Lord Carrington concernant la conférence sur la Bosnie. Lors des

  5   informations, lors du journal télévisé, il a dit explicitement, je cite,

  6   que : "A présent, la situation est complètement différente et qu'il ne

  7   souhaitait aucune conférence portant sur des unités constitutives."

  8   "Malgré la bonne volonté dont nous avons fait preuve en indiquant que nous

  9   étions prêts à permettre une réouverture sans condition de l'aéroport, ils

 10   ont essayé de nous faire du chantage en menaçant les vies des familles des

 11   membres de la JNA afin de nous obliger à laisser les armes lourdes dans la

 12   caserne du maréchal Tito. Ce même soir, la partie musulmane a commencé à

 13   pilonner les localités serbes à Sarajevo.

 14   "Nous espérons que vous avez encore la possibilité de jouer un rôle

 15   d'intermédiaire et de ramener les Musulmans à la table des négociations à

 16   la conférence. Cependant, nous devons savoir la vérité, parce que le peuple

 17   serbe se sent trahi et menacé dans ses intérêts. Donc si vous pouvez pas

 18   tenir vos promesses, nous, nous avons l'obligation de protéger le peuple

 19   serbe sur ses territoires."

 20   Donc cela doit être envoyé à Lord Carrington.

 21   Est-ce que vous savez qu'Izetbegovic, lors du journal télévisé, s'est

 22   exprimé ainsi, et tout d'abord, savez-vous qu'il s'est exprimé ainsi ?

 23   R.  Non, je n'ai pas d'indication qu'il ait dit cela, Monsieur Karadzic. Je

 24   vous assure M. Cutileiro c'est certainement dans une meilleure position

 25   pour vous répondre parce que cette lettre lui était adressée.

 26   Q.  J'ai un problème, Colonel, ici avec les témoins en général et pas

 27   seulement avec vous. Il serait préférable que vos supérieurs viennent

 28   témoigner. Parce que vous ne savez rien d'une conférence à laquelle vous

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  1   avez été présent. Il s'agit ici d'une déclaration significative, lettre

  2   aussi a une importance tout à fait significative. Vous y avez été présent ?

  3   Vous avez été témoin de cet événement ? Vous y avez participé ? Comment se

  4   fait-il que vous n'en sachiez rien ? Est-ce que vous avez suivi cette

  5   conférence ? Est-ce que vous avez bien participé à ces pourparlers ? Est-ce

  6   que vous avez été un collaborateur de Lord Carrington; oui ou non ?

  7   R.  J'ai apporté mon concours à la conférence de paix sur la Yougoslavie en

  8   me fondant sur l'expérience qui était la mienne en ma qualité de chef de la

  9   mission des observateurs et dans la limite des compétences qui étaient les

 10   miennes je me suis efforcé. Si vous estimez que cela n'était pas suffisant,

 11   Monsieur Karadzic, c'est votre point de vue. Mais j'essaie de vous fournir

 12   aussi exact que possible de ce que j'ai fait, de ce que je n'ai pas fait,

 13   de ce que j'ai vu, et de ce que je n'ai pas vu, et je ne peux rien dire au-

 14   delà de cela.

 15   Q.  Est-ce que vous avez vu Zvornik et Foca ?

 16   R.  Non. Je vous répète que j'ai reçu un rapport d'observateur, un rapport

 17   oral de la mission des observateurs qui s'étaient efforcés d'atteindre

 18   Foca. Ils avaient essayé de s'y rendre. On m'a relayé le contenu de ce

 19   rapport oral qui m'a été transmis par M. Martin Bell de la BBC par rapport

 20   à Zvornik, et je pense que c'est ce que j'ai déjà indiqué.

 21   Q.  Colonel, vous avez été présent à Sarajevo, vous y étiez déjà depuis le

 22   10 avril. Savez-vous ce qui se passait dans les hôtels à Sarajevo, y

 23   compris avec les Serbes qui y travaillaient ? Nous avons entendu ce que

 24   vous avez dit au sujet de l'hôtel à Ilidza, qu'ils avaient été escortés au

 25   centre-ville pour leur propre sécurité. Mais savez-vous ce qui s'est passé

 26   avec les hôtels à Sarajevo ?

 27   R.  Je sais qu'il y a eu des combats à l'extérieur de l'hôtel Bristol,

 28   qu'il y avait des barricades érigées, je sais également ce qui s'est passé

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  1   dans les environs de l'hôtel où je me trouvais. Ce sont les deux incidents

  2   dont je suis au courant, enfin, dont j'ai été personnellement témoin.

  3   Q.  Savez-vous que les Bérets verts ont pris le contrôle de tous les hôtels

  4   et en ont expulsé par la force les directeurs et tout le personnel serbe ?

  5   Nous avons pu examiner ce document ici avec un autre témoin.

  6   Est-ce que vous savez que c'est précisément au moment où vous étiez sur

  7   place que ces événements ont eu lieu ?

  8   R.  Non, Monsieur Karadzic, je l'ignore.

  9   Q.  Mais est-ce que certains de vos hommes étaient seulement en ville ?

 10   Vous aviez une cinquantaine, un soixantaine d'hommes, n'est-ce pas, en

 11   ville ?

 12   R.  J'avais 56 ou environ 56 hommes dans le cadre de la mission des

 13   observateurs. Lorsque j'étais chef de la mission des observateurs, j'avais

 14   56 hommes. Et quand je suis revenu à Sarajevo le 10 avril, j'étais seul.

 15   Q.  Mais votre agenda nous montre que vous étiez en ville souvent et que

 16   vous participiez à des réunions souvent. Comment se fait-il que vous n'ayez

 17   pas été au courant de ce qui se passait en ville, alors que vous sachiez ce

 18   qui se passait à Zvornik ou Foca ?

 19   R.  Monsieur Karadzic, je ne souhaite pas vous donner la possibilité de

 20   vous livrer à des accusations contre moi ou de déformer la réalité. Par

 21   conséquent, je m'en tiendrai strictement à la vérité, et je ne dirai que ce

 22   que j'ai fait et où je me suis trouvé. Et c'est ce que je fais d'ailleurs.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 25   document. C'est ma lettre adressée à M. Cutileiro, il n'y a pas le moindre

 26   doute à ce sujet. Ensuite, je voudrais qu'on affiche le document numéro

 27   1600.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection.

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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, pas d'objection.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, le

  3   document 05875 reçoit la cote D234.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Je voudrais maintenant attirer votre attention sur ce document qui date

  7   du mois d'août 1992, c'était avant la conférence de Londres, au moment où

  8   vous êtes encore le collaborateur de Lord Carrington. Voilà ce qu'écrit le

  9   général Mladic. C'est l'une de ses instructions.

 10   Ici l'instruction numéro 3. Premièrement.

 11   "Avant l'expiration du cessez-le-feu convenu pour deux semaines, l'ennemi a

 12   commencé à violé ce cessez-le-feu, et notamment, par des actions

 13   offensives, après qu'un accord entre Tudjman et Izetbegovic a été conclu.

 14   D'ailleurs à cette occasion des opérations conjointes entre eux ont été

 15   convenues aux fins de briser l'armée de la République serbe de Bosnie-

 16   Herzégovine et de la soumission de l'extermination du peuple serbe."

 17   Je ne vais pas tout lire, je reprends la citation :

 18   "Le but de toutes ces opérations est de concentrer l'action des

 19   effectifs sur certains axes afin de bloquer Sarajevo."

 20   Début du paragraphe suivant :

 21   "L'ennemi règle ses comptes de façon impitoyable avec le peuple serbe

 22   et les membres de la VRS faits prisonniers qui sont liquidés après avoir

 23   été torturés d'une façon aussi bestiale qu'aucun précédent n'en existe dans

 24   l'histoire."

 25   Colonel, est-ce que vous saviez que le 3 juin, les forces musulmanes dans

 26   le village de Cemer se sont livrées à un massacre de civils, à une

 27   véritable boucherie où ils ont mutilé des Serbes, des civils serbes. Est-ce

 28   que vous êtes au courant de cet événement ?

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  1   R.  Non.

  2   Q.  Nous poursuivons. Je cite :

  3   "Certains Etats européens instrumentalisent leur influence au sein du

  4   Conseil de sécurité et de la Communauté européenne pour faire tout ce qui

  5   est en leur pouvoir afin d'armer les Musulmans et les Croates en Bosnie-

  6   Herzégovine et d'empêcher l'application de l'adoption et l'application de

  7   sanctions des Nations Unies contre la Croatie pour agression contre la

  8   Bosnie-Herzégovine."

  9   Est-ce que vous saviez que les unités régulières de l'armée croate avaient

 10   été présentes de façon permanente dans certaines parties de la Bosnie-

 11   Herzégovine ?

 12   R.  J'étais au courant du fait que certains Croates portant des uniformes

 13   de l'armée croate ont été présents de façon régulière sur le territoire de

 14   l'Herzégovine occidentale, et j'ai déjà indiqué cela dans mon témoignage.

 15   Au-delà de ceci, je n'ai aucune connaissance par rapport à cette

 16   instruction.

 17   Q.  Mais soyons précis, Colonel. Est-ce qu'il s'agissait simplement

 18   d'éléments isolés ou de brigades entières ? Par exemple, la 108e Brigade de

 19   l'armée croate, la Brigade de la Garde, et d'autres brigades - nous

 20   présenterons des éléments de preuve - mais est-ce qu'on doit considérer

 21   cela comme des éléments, ou alors comme étant l'armée au sens propre ?

 22   R.  Je n'en ai pas la moindre idée.

 23   Q.  Vous n'avez pas la moindre idée quant à la question de savoir s'il

 24   s'agit d'éléments. Parce que quand vous parlez "d'éléments," on peut penser

 25   à des touristes qui viendraient faire la guerre le week-end en Bosnie. Moi,

 26   ce dont je vous parle c'est d'unités entières, plusieurs dizaines de

 27   milliers de soldats croates, jusqu'à 50 000 présents en Bosnie. Est-ce que

 28   vous étiez au courant de cela ?

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  1   R.  Non, je n'ai aucune connaissance du nombre de soldats croates présents

  2   sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Je sais qu'il y en a eu à

  3   certains endroits. Mais je ne sais pas combien.

  4   Q.  Avez-vous entrepris quelque chose à ce sujet ou la conférence a-t-il

  5   pris une initiative ? Est-ce qu'on a essayé d'empêcher la Croatie d'agir

  6   ainsi par des sanctions ? Est-ce qu'on a essayé d'imposer quelque chose par

  7   des bombardements, par exemple, le genre de mesures qui auraient été prises

  8   si jamais l'armée de la Serbie avait été présentes en Bosnie ?

  9   R.  Je ne suis certainement pas en mesure de commenter ceci, Monsieur

 10   Karadzic. L'un des documents dont vous disposez est un rapport que j'ai

 11   fait au sujet de la présence de soldats croates en Bosnie. Mais au-delà de

 12   ceci, je n'ai rien à dire.

 13   Q.  Merci. Très bien. Revenons à cette instruction. Dernier paragraphe :

 14   "Certains de ces Etats, l'Allemagne, la Hongrie et l'Autriche, tout comme -

 15   -" en anglais c'est la page 3. Non, c'est toujours la même page.

 16   "Certains de ces Etats tout comme certains Etats islamiques qui financent

 17   le Djihad musulman ont pour but d'équiper et d'armer les unités musulmanes

 18   afin que la situation en termes de rapport de force numérique leur permette

 19   de régler leurs comptes avec la VRS."

 20   Maintenant, nous pouvons passer à la page 3 et à la page 2 de la version

 21   serbe. Je cite :

 22   "La communauté internationale n'a pas impliqué des mesures qui auraient été

 23   les mêmes pour toutes les parties au conflit. Elle continue à soutenir le

 24   blocus de RFY, à accuser le peuple serbe d'agression, à le menacer d'une

 25   intervention armée, alors que les Croates et les Musulmans sont déclarés

 26   victimes de l'agression, et on légalise de facto le processus de leur

 27   armement par l'intermédiaire de l'Allemagne, de l'Autriche et de la

 28   Hongrie."

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  1   Je voudrais que l'on revienne à la page 2 de la version anglaise afin que

  2   tout un chacun puisse suivre. Deuxième paragraphe :

  3   "La communauté internationale n'a pris aucune mesure concrète. La soi-

  4   disant conférence de Paix à Londres sur la Bosnie-Herzégovine dirigée par

  5   Lord Carrington n'a pas donné les résultats voulus. On peut conclure que

  6   l'objectif de cette conférence était de gagner du temps afin de permettre

  7   aux forces croates et musulmanes de se consolider et de régler leurs

  8   comptes grecs le peuple serbe."

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez ralentir, Monsieur Karadzic.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Ensuite --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, plutôt que de lire le

 13   document dans son intégralité, veuillez poser votre question.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, dans ce cas, je vais devoir demander la

 15   page numéro 5 afin de présenter ce que Mladic a ordonné.

 16   Est-ce qu'on peut avoir la page 5 en serbe et la même page 5 en

 17   anglais.

 18   Juste avant, nous avons, J'ai décidé ce que chacun doit faire, et voilà ce

 19   qu'il dit sur le Corps de Sarajevo-Romanija :

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  "Par une défense déterminée et active --"

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons la page 3 à l'écran. C'est la page 5

 23   qu'il nous faut.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  C'est la bonne page qui s'affiche en anglais, mais en serbe nous ne

 26   l'avons pas. Ce n'est pas grave.

 27   Donc point 5.4 :

 28   "Le Corps de Sarajevo-Romanija, par une défense active est déterminée à

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  1   maintenir les positions atteintes à Sarajevo et dans la région au sens

  2   large, et une partie des effectifs doit coopérer avec le Corps

  3   d'Herzegovine afin d'ouvrir l'axe Sarajevo-Trnovo-Kalinovik et Visegrad-

  4   Ustipraca-Gorazde."

  5   Ensuite :

  6   "Dans la suite de ces efforts de défense déterminée, empêcher la

  7   percée en direction de Sarajevo et resserrer progressivement l'étau autour

  8   de Sarajevo."

  9   Donc il s'agit d'un encerclement ou d'un étau, mais certainement pas

 10   d'un "siège." Cela a été mal traduit ici. Colonel, est-ce que vous voyez

 11   qu'à ce point 5.4, Mladic continue à insister pour qu'une voie soit ouverte

 12   à travers l'Herzégovine ? Et nous avons vu dans l'instruction précédente

 13   que l'objectif de tout cela était de permettre le passage de l'aide

 14   humanitaire ?

 15   R.  C'est ce qui est dit dans le document.

 16   Q.  Très bien. Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser cette instruction numéro 3.

 18   C'est une référence de l'Accusation. Je ne sais pas si cela a peut-être été

 19   déjà versé.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame le Procureur, êtes-vous d'accord

 21   avec la remarque faite par l'accusé selon laquelle il y aurait une

 22   traduction erronée parlant de "siège" de Sarajevo, là où on aurait dû

 23   traduire par "encerclement" ? Y a-t-il un moyen de préciser ceci.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je crains, Monsieur le Président,

 25   qu'il ne revienne au CLSS de décider ce qu'il en est. Ce document n'a pas

 26   été versé pour le moment, mais nous ne souhaitons pas soulever d'objection.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, il sera donc versé.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote D235.

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  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Colonel, si j'ai bien compris, vous

  2   vous contentez de confirmer ce qui est écrit dans le document. Vous ne

  3   dites pas que vous aviez des éléments de connaissance personnels ou que

  4   vous êtes au courant des objectifs ou des points de vue qui étaient ceux du

  5   général Mladic, n'est-ce pas ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Juge.

  7   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation]

  9   Q.  Colonel, nous devons maintenant revenir au compte rendu d'audience

 10   correspondant à votre interrogatoire principal, parce que je crains que

 11   certaines phrases aient été prononcées un peu à la légère et de façon

 12   imprécise et qu'il soit possible ensuite qu'elles aient des conséquences

 13   préjudiciables à la Défense.

 14   Alors, je ne suis pas en train de suggérer que vous ayez prononcé ces

 15   paroles intentionnellement, mais je voudrais que nous ayons une occasion

 16   d'apporter des précisions.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que nous ayons la page 67 du compte

 18   rendu d'audience du 21 mai.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Vous n'avez pas ce document. Je vais en donner lecture. Donc Mme Uertz-

 21   Retzlaff dit :

 22   "Il se rappelle que de nombreux Serbes -- de nombreux dirigeants serbes se

 23   référaient à des événements historiques et des atrocités de la Seconde

 24   Guerre mondiale et qu'ils exprimaient leur crainte de voir ces faits se

 25   répéter."

 26   Colonel, est-ce que vous estimiez que nous n'avions pas de raison

 27   particulière de nous rappeler ce qui avait été notre sort pendant la

 28   Seconde Guerre mondiale, que nous n'aurions pas dû penser à tout cela ?

Page 2918

  1   R.  Ce que j'avais à l'esprit ici, Monsieur Karadzic, c'est que lors de

  2   très nombreuses réunions auxquelles j'ai pris part avec différents partis

  3   politiques, il y avait cette tendance à mettre l'accent sur toutes les

  4   atrocités commises pendant la Seconde Guerre mondiale. Cela était le fait

  5   de toutes les parties. Je ne suis pas en train d'accuser uniquement la

  6   partie serbe de s'être comportée ainsi.

  7   J'ai estimé que cela n'était pas constructif que d'utiliser une

  8   partie considérable du temps disponible à se référer sans cesse aux

  9   événements de la Seconde Guerre mondiale. Donc j'ai fini par prendre

 10   l'habitude de demander aux parties de ne pas me donner une leçon d'histoire

 11   à chaque fois que nous nous apprêtions à entrer en négociations, parce que

 12   j'estimais que cela ne contribuait absolument pas à mieux comprendre la

 13   situation. J'estimais qu'il était plus important de se pencher sur les

 14   préoccupations et les points de vue des différentes parties au moment où je

 15   me trouvais sur place.

 16   Donc je me suis contenté d'indiquer à chaque fois à toutes les

 17   parties, Veuillez vous abstenir de me donner des leçons d'histoire, parce

 18   que j'avais constaté cette pratique qui était la leur consistant à se

 19   référer continuellement aux événements du passé.

 20   Q.  Merci. Je voudrais apporter une précision. Vous n'avez pas dit que

 21   c'étaient les Serbes qui parlaient continuellement de cela, mais les

 22   parties ont parlé continuellement de cela. Cependant, le compte rendu

 23   d'audience ici parle des Serbes. Dans le compte rendu d'audience, ce sont

 24   les Serbes qui se référaient continuellement avec le passé, n'est-ce pas ?

 25   R.  Bien, oui, je reconnaîtrais cela. C'était surtout le fait des Serbes,

 26   mais les Croates s'y livraient également.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Excusez-moi.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame le Procureur.

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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, nous parlons

  2   de la page 2 646 ici, et nous pouvons y voir que le témoin n'a pas dit que

  3   "seuls les Serbes" adoptaient cette ligne-là. Il s'est référé aux Serbes, à

  4   ce que ces derniers lui ont dit, mais il n'a pas dit "seuls les Serbes."

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Colonel, est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'aucune

  8   guerre ne s'est déroulée en Yougoslavie sur le territoire de la Bosnie-

  9   Herzégovine qui n'ait eu une forte composante de guerre civile et

 10   fratricide ? Est-ce que vous êtes d'accord pour dire cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous convenez que nous avions de bonnes raisons

 13   d'être inquiets, parce que M. Izetbegovic avait porté l'uniforme nazi

 14   pendant la Seconde Guerre mondiale et il avait été l'ami de l'imam al-

 15   Husseini, le mufti de Jérusalem, qui était un ami d'Hitler, et il l'avait

 16   reçu à Sarajevo ?

 17   R.  Non, je n'avais aucune connaissance de cela.

 18   Q.  Et si moi je vous apprenais, Colonel, que M. Izetbegovic est une

 19   personnalité qui, de façon très continue, a nourri cette même ligne de

 20   pensée visant à l'établissement d'une société musulmane à partir de 1939

 21   jusque dans les années 1990, est-ce que vous auriez toujours tendance à

 22   considérer qu'il s'agit là du type de passé dont il convient de ne pas en

 23   tenir compte ?

 24   De 1939 jusque dans les années 1990 et 1994 -- je crois que c'est mal entré

 25   au compte rendu d'audience - à partir de 1939, Izetbegovic était membre de

 26   l'organisation des jeunes musulmans, et jamais il n'a varié d'un iota pour

 27   ce qui est de sa ligne politique depuis.

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, quelle est votre

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  1   question ? Vous venez de faire une déclaration quant à ce que vous

  2   considérez être les faits, la situation réelle. Or ici, il convient pour

  3   vous de poser des questions afin d'obtenir des éléments de preuve du

  4   témoin. Je ne crois pas que le colonel Doyle soit un expert concernant le

  5   président Izetbegovic et je ne crois pas non plus qu'il soit compétent pour

  6   faire des commentaires sur l'Islam.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Juge. Je suis conscient

  8   du fait qu'il y a des différences et des principes qui séparent MM.

  9   Karadzic et Izetbegovic puisqu'ils appartiennent à des groupes ethniques

 10   différents. C'est compréhensible. Mais au-delà de ce fait, je n'ai aucune

 11   connaissance quant à la ligne qu'a pu suivre le président Izetbegovic.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi. Il y avait une question, mais elle

 13   n'a pas été consignée. Ma question était la suivante :

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que, pour nous ceci doit représenter un passé lointain auquel il

 16   convient de ne pas se référer, alors même qu'est arrivé au pouvoir un homme

 17   qui avait porté l'uniforme nazi pendant la Seconde Guerre mondiale et avait

 18   fréquenté un des amis d'Hitler les plus proches au Moyen-Orient ? Est-ce

 19   que c'est quelque chose dont nous aurions dû faire abstraction de notre

 20   point de vue serbe, ou alors c'était quelque chose qui était en train de

 21   redevenir une partie de notre présent ?

 22   R.  Bien, l'histoire a toujours tendance à avoir des échos dans le présent,

 23   Monsieur Karadzic, mais je n'étais pas au fait de ces allégations à

 24   l'encontre de M. Izetbegovic. J'étais au courant du contexte général, mais

 25   je n'avais aucune indication permettant de considérer qu'il y avait là une

 26   influence majeure sur sa réflexion du moment. Cela va au-delà de ce que

 27   j'ai pu voir.

 28   Q.  Colonel, est-ce que vous vous rappelez que j'ai adressé une invitation

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  1   publique à M. Izetbegovic à Sarajevo à l'automne 1991 afin qu'il renie son

  2   ralliement à la déclaration islamique afin d'apaiser les tensions ? Est-ce

  3   que vous vous rappelez cela ?

  4   R.  Non, Monsieur Karadzic, je ne m'en souviens pas.

  5   Q.  Est-ce que vous connaissez ce programme politique intitulé Déclaration

  6   islamique ?

  7   R.  J'ai entendu un certain nombre de références à cela, mais je n'ai

  8   aucune connaissance précise.

  9   Q.  Est-ce que vous savez que M. Izetbegovic a été jugé en 1947 pour

 10   activités illicites dans le cadre des jeunes musulmans, et qu'en 1983 il a

 11   été jugé également en raison de cette Déclaration islamique considérée

 12   comme un programme visant à renverser le régime en place en Bosnie-

 13   Herzégovine et en Yougoslavie ?

 14   R.  Je sais qu'il avait été jugé en 1983, mais je ne savais rien sur 1947.

 15   Q.  Merci. Revenons maintenant à ces différences que vous avez évoquées

 16   entre moi et M. Izetbegovic, vous avez dit qu'elles venaient de ce que nous

 17   appartenions à deux communautés ethniques différentes. Mais savez-vous que

 18   M. Zulfikarpasic, ainsi que M. Filipovic, appartiennent eux aussi à la

 19   communauté musulmane et qu'ils sont des Musulmans très en vue d'ailleurs au

 20   sein de leur communauté ? Est-ce que vous le savez, cela ?

 21   R.  Non, Monsieur Karadzic. Je ne connais pas ces personnes.

 22   Q.  Il s'agit de dirigeants d'un parti minoritaire, l'Organisation

 23   bosniaque musulmane, et est-ce que vous savez que --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si le témoin indique

 25   qu'il ne connaît pas ces deux personnes, cela est sans objet pour vous que

 26   de poursuivre avec cette question.

 27   Quelle est votre question suivante ?

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 2922

  1   Q.  Connaissez-vous Fikret Abdic ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Savez-vous que nous nous sommes entendus avec Abdic et que nous avons

  4   signé un accord de fin des hostilités avec lui en 1993 déjà ?

  5   R.  Non. Je n'étais pas en Bosnie en 1993.

  6   Q.  Savez-vous que M. Abdic a reçu le nombre maximum de voix du peuple

  7   musulman et qu'il n'est pas désigné comme fondamentaliste, et que c'est un

  8   honneur pour la communauté musulmane de n'avoir pas voté pour un

  9   intégriste.

 10   R.  Non, je ne suis pas au courant de cela.

 11   Q.  Admettez-vous à présent, Colonel, étant donné que dorénavant vous êtes

 12   informé puisque je viens de vous en informer, que nous avons signé un

 13   accord de paix avec un membre du SDA, M. Abdic, car il était opposé à la

 14   guerre et que nous avons donc conclu cet accord historique serbo-musulman

 15   avec Abdic ? Est-ce que vous saviez qu'Izetbegovic n'était pas seulement un

 16   simple musulman affilié à une organisation musulmane, mais qu'il était

 17   beaucoup plus que cela par rapport aux Serbes ?

 18   R.  Si vous le dites, Monsieur Karadzic, je n'ai aucun problème à

 19   l'admettre. Ce que je vous dis c'est que je ne suis pas au courant de tous

 20   ces éléments que vous êtes en train d'évoquer, et par conséquent, je ne

 21   souhaite pas les commenter.

 22   Q.  Mais vous vous comportez comme si vous aviez des connaissances à ce

 23   sujet. Vous dites que la différence émane du fait que lui est Musulman et

 24   que je suis Serbe, alors que je suis en train de vous dire qu'il s'agissait

 25   de divers partis musulmans avec lesquels nous avons discuté et qu'il y en

 26   avait avec lesquels nous nous entendions bien. Et je dis que c'est parce

 27   que  M. Izetbegovic était intégriste, que le problème se posait, alors

 28   qu'il n'y en avait pas avec les autres Musulmans. Est-ce que vous admettez

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  1   cela ?

  2   R.  J'admets ce que vous dites. Le problème que j'avais dans la plupart des

  3   cas avec tous les partis politiques de Bosnie c'est qu'ils ont été créés

  4   selon des lignes d'appartenance ethnique et religieuse. Ce qui créait des

  5   difficultés pour aboutir à des accords avec eux. La différence entre

  6   différents types de Musulmans n'était pas quelque chose qui me préoccupait

  7   particulièrement. Je traitais avec des membres de la présidence. Et pour ce

  8   qui me concerne, il y avait deux membres qui étaient Serbes, il y en avait

  9   deux qui étaient Musulmans, il y en avait deux qui étaient Croates, et je

 10   crois qu'il y en avait un qui représentait les autres groupes ethniques.

 11   Donc pour moi, je ne me concentrais en aucune façon sur le degré

 12   d'intégrisme musulman ou de non-intégrisme musulman que j'avais en face de

 13   moi ou sur le fait de savoir s'il y avait des types de Musulmans

 14   différents. Non, non.

 15   Q.  Merci. Malheureusement, nous avons dû nous occuper de ce genre de

 16   chose, et la troisième personne en cause était Ejup Ganic, également

 17   extrémiste musulman. Est-ce que vous êtes d'accord là-dessus ?

 18   R.  Si vous dites qu'il était un extrémiste, pas de problème. Je ne pense

 19   pas que c'était un extrémiste, mais ce n'est que mon opinion personnelle.

 20   Q.  Mais il représentait les autres groupes ethniques, à savoir les Juifs,

 21   les Tchèques qui vivaient en Bosnie-Herzégovine. C'est lui qui les

 22   représentait, n'est-ce pas ?

 23   R.  Bien, il n'était pas strictement membre du SDS du SDA ou du HDZ, et

 24   d'après ce que j'ai pu comprendre il était ce que l'on désigne sous le nom

 25   de Bosnien. En d'autres termes, c'était quelqu'un qui n'avait pas

 26   d'adhésion stricte à une partie ou à une autre, et ça je l'admets.

 27   Si vous dites qu'il représentait les Juifs et les autres personnes

 28   qui n'étaient pas membres d'un parti, je ne saurais commenter ce point.

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  1   Q.  Je vous remercie. Colonel, il ne pouvait pas être Bosnien car il

  2   représentait, en fait, les minorités. Mais la distinction entre lui et les

  3   autres ne se faisait pas sur la base du parti auquel il appartenait. Le SDA

  4   a voulu créer un camouflage autour de Ganic pour faire de lui un Yougoslave

  5   et disposer ainsi de trois membres au sein de la présidence.

  6   Est-ce que vous connaissez ce fait, cette désignation ne se faisait

  7   pas selon le parti auquel la personne appartenait car en aucun cas il ne

  8   pouvait être Serbe, Croate, ou Bosnien ? Mais on a essayé de le présenter

  9   sous un jour erroné pour tromper les interlocuteurs ?

 10   R.  Monsieur Karadzic, je n'ai aucune idée sur ce point. Si vous dites que

 11   c'était une tromperie, c'est votre avis. Ce n'est pas le mien. Voilà où

 12   nous en sommes vous et moi.

 13   Q.  Très bien, Colonel. Mais je dois contrecarrer pas mal de déclarations

 14   faites par vous au passage et qui ne sont pas précises.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on voir sur les écrans la pièce 09446 de

 16   l'Accusation sur la liste 65 ter.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Et nous allons passer en revue les comptes rendus d'audience pour voir

 19   quelle est la portée exacte de ce document par rapport aux autres.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, pour le compte

 21   rendu d'audience, j'indique que ce document 65 ter est déjà une pièce à

 22   conviction et porte le numéro 925.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Avec ce document, nous sommes à la date du 10 avril 1992, époque où la

 25   JNA existait toujours, commandement de la 2e Région militaire, équipe

 26   opérationnelle, et cetera, et cetera. Alors voyons ce qui est dit au sujet

 27   de l'ennemi. Deuxième phrase :

 28   "Sous prétexte de démobiliser les unités de l'armée de Croatie, des membres

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  1   de l'armée de Croatie originaires de Bosnie-Herzégovine sont envoyés en

  2   Bosnie-Herzégovine de façon organisée et des conscrits sont mobilisés en

  3   Croatie pour prendre leur place."

  4   Et un peu plus loin.

  5   "En Croatie, dans le secteur de Bosanski Brod et de l'Herzégovine

  6   occidentale, on fait venir de façon intensive des armes."

  7   Et un peu plus loin.

  8   "Le but est d'en arriver le plus rapidement possible à un affrontement armé

  9   à grande échelle. C'est le but que poursuit la direction croate par rapport

 10   à la situation en Bosnie-Herzégovine. Les forces ennemies dans le secteur

 11   de Kupres ont été battus à Kupres Ka Vrata," et cetera, et cetera.

 12   Alors est-ce que vous connaissiez ces efforts déployés à très grande

 13   échelle ?

 14   R.  Je suis au courant de l'action menée à Kupres qui a impliqué des

 15   membres de l'armée de Croatie. Mais sa portée, son amplitude exacte, je ne

 16   la connais pas. Je me demandais simplement, Monsieur Karadzic, à qui il est

 17   fait référence quand on lit les mots "l'ennemi," dans ce document ?

 18   Q.  Bien, l'armée populaire yougoslave fait référence à l'armée de Croatie

 19   comme étant l'ennemi, et un peu plus loin vous verrez qu'il y avait aussi

 20   des paramilitaire. Voilà qui étaient les ennemis.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on passer à la page 2 de la version

 22   anglais de ce document. Je crois que c'est également à la page 2 de la

 23   version serbe.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  C'est moi qui vais donner lecture du texte. Je cite :

 26   "Situation sur le territoire. La situation dans la 2e Région militaire

 27   devient de plus en plus troublée et atteint un point d'ébullition. La

 28   situation se dégrade dans plusieurs lieux particulièrement affectés, en

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  1   particulier à Visegrad, Zvornik, Jajce, et Sarajevo."

  2   Ensuite, quelques phrases que je vais sauter. Et nous voyons un peu plus

  3   loin.

  4   "La haine manifestée par les populations musulmanes et croates contre la

  5   JNA devient de plus en plus grande. Le président de la Bosnie-Herzégovine

  6   affirme que la JNA est la seule force capable d'agir pour sauver la

  7   population musulmane dans le secteur de Zvornik mais n'est pas prête à le

  8   faire, ce qui ne fera qu'augmenter l'hostilité de la population musulmane

  9   vis-à-vis de la JNA."

 10   Puis page suivante. Je cite :

 11   "Le conflit armé qui oppose le Corps de Romanjia-Sarajevo aux Bérets verts

 12   et au MUP dépendant du ministère de l'Intérieur se poursuit toute la

 13   journée avec des interruptions occasionnelles. Il se mène à l'aide d'armes

 14   d'infanterie et de mortiers. Les tirs de mortier ont visé aujourd'hui la

 15   ville de Sarajevo. Les formations armées des Bérets verts, des citoyens

 16   armés et des membres du MUP contrôlent tous les déplacements dans la ville

 17   de Sarajevo et sur les routes environnant la ville."

 18   Donc ici nous voyons un officier du renseignement qui informe son

 19   interlocuteur en lui disant que la partie musulmane du MUP, à savoir les

 20   Bérets verts et les civils armés ont pris le contrôle de la ville de

 21   Sarajevo. Est-ce que vous le saviez cela ?

 22   R.  Les informations que j'avais reçues à ce moment-là m'indiquaient que

 23   certains secteurs de la ville étaient sous contrôle, mais que ce contrôle

 24   était exercé par diverses parties et que des actions de harcèlement et des

 25   attaques se menaient continuellement. Je n'ai pas eu connaissance du détail

 26   de ce qui était en train de se passer, je ne le sais pas. Ceci fait

 27   référence à un rapport du 10 avril.

 28   Le 10 avril c'est le jour où je suis rentré en Bosnie après une

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  1   absence de plusieurs semaines que j'ai passées en Irlande, mais je sais de

  2   façon générale qu'il y avait un conflit assez intensif qui était en cours.

  3   Les déplacements dans la ville étaient très difficiles, donc je n'étais pas

  4   en mesure à cette époque-là d'obtenir des informations détaillées quant à

  5   l'identité de ceux qui faisaient ceci ou cela.

  6   Et j'ai rencontré le commandant du deuxième groupe, mais il est certain

  7   qu'il ne m'a pas donné le détail de ces événements, détail que l'on trouve

  8   dans ce document. Il ne me l'a pas donné lorsque je l'ai rencontré.

  9   Q.  Je vous remercie. A présent, sous l'intitulé "5e Corps," troisième

 10   phrase, nous lisons :

 11   "Les formations paramilitaires sont en train d'être légalisées sous

 12   le déguisement de la Défense territoriale nouvellement créée."

 13   "Dans la caserne de Banja Luka, des actes de sabotage sont commis en

 14   ville, et les attaques ont lieu contre des lieux de culte islamiques et

 15   catholiques. Ces attaques augmentent et risquent d'entraîner une escalade

 16   de la situation."

 17   Voyez-vous, Colonel, que cet officier du renseignement de l'armée

 18   yougoslave est en train de dépeindre la situation telle qu'elle est dans la

 19   réalité ? Il affirme qu'il y a des éléments incontrôlables qui sont

 20   responsables de tout ce qui est écrit dans ce document.

 21   R.  Il est certain que s'agissant de son rapport au sujet de Banja Luka et

 22   des attaques contre les lieux de culte islamiques et catholiques, ces

 23   attaques étaient en train d'augmenter, et donc il dépeint fidèlement la

 24   situation eu égard à toutes les parties concernées. Les actes de sabotage

 25   dans la ville et toutes les attaques évoquées ici, je n'ai pas eu

 26   connaissance du fait qu'ils avaient visé des lieux de culte. Donc

 27   j'aimerais vous demander si vous avez une question précise à me donner.

 28   Q.  Colonel, je voudrais vous demander si vous voyez que l'armée populaire

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  1   yougoslave est en train d'observer la situation sans s'en mêler, et que son

  2   appréciation consiste à dire qu'il importe d'éviter toute éruption par

  3   rapport à la situation existante. Lisons le texte un peu plus loin. Le

  4   titre du paragraphe est, Conclusions et prévisions. Lorsque j'aurai fini ma

  5   lecture, je vous ferai connaître ma question. Avant-dernière page du

  6   document. Il y a également un autre titre, Activités de la MOCE dans cette

  7   même page. L'ACCUSÉ : [interprétation] Le numéro de la page en anglais

  8   c'est L006-8139. Je demande l'affichage de la page anglaise concernée, qui

  9   porte le numéro 7 sur la page mais qui représente la page dont le numéro

 10   ERN se termine par 30.

 11   M. KARADZIC : [interprétation] 

 12   Q.  Donc, on trouve une information au sujet de l'arrivée de Cutileiro. Je

 13   cite :

 14   "Aux environs de 15 heures le 20 avril 1992, l'ambassadeur portugais,

 15   M. Cutileiro, est arrivé à Sarajevo."

 16   Et un peu plus loin, nous voyons le titre d'un paragraphe,

 17   Conclusions et prévisions. Je cite :

 18   "Une éruption incontrôlée des combats en Bosnie-Herzégovine peut être

 19   attendue dans la situation présente marquée par une anarchie très

 20   importante et l'absence de toute légalité. Les unités de la 2e Région

 21   militaire vont probablement être plongées dans cette situation. Des

 22   provocations à grande échelle et des attaques contre les unités de la JNA,

 23   les installations militaires, les bureaux et les membres des familles de la

 24   JNA peuvent être attendus."

 25   Colonel, est-ce que vous constatez que l'armée adopte une position

 26   objective et neutre par rapport à la situation qu'elle est en train

 27   d'observer ?

 28   R.  A ce moment-là, à Sarajevo, j'étais très satisfait de constater que la

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  1   JNA ne s'impliquait pas activement dans les diverses attaques en cours dans

  2   la ville de Sarajevo. Je ne dispose d'aucun élément ou d'aucun

  3   renseignement qui m'indique ce qui pouvait être fait à ce moment-là dans

  4   les autres régions de Bosnie.

  5   Q.  Je vous remercie.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document a déjà été versé au dossier, n'est-

  7   ce pas ? Bien, je vous remercie.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Page 68 du compte rendu d'audience sur les écrans, je vous prie, où

 10   nous voyons Mme Uertz-Retzlaff en train d'interpréter vos positions encore

 11   une fois. Je vais vous donner lecture de ce passage.

 12   "Le 2 mars 1992, le lendemain de l'annonce des résultats du référendum, des

 13   tirs ont commencé à Sarajevo et des barricades ont été érigées par les

 14   Serbes."

 15   Et à la fin de cette page, nous lisons, je cite :

 16   "Le colonel Doyle a été informé à cette époque par la personne responsable

 17   du fait que les barricades ne seraient démantelées que sur instruction

 18   précise du Dr Karadzic."

 19   Convenez-vous que ce n'est pas cela qui est écrit dans votre journal

 20   personnel, et convenez-vous que les barricades ont été démantelées

 21   uniquement après l'obtention d'un accord entre Dukic et la présidence ?

 22   R.  Excusez-moi. J'ai besoin de vérifier ce qui est écrit dans mon journal.

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, pour préciser

 24   les choses, nous sommes en train de parler de la

 25   page 2 647 du compte rendu d'audience.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Ce document vous a déjà été montré, vous en avez déjà parlé. Vous vous

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  1   rappelez, c'est le document rédigé à l'issue de la réunion de la présidence

  2   du 2 mars.

  3   R.  C'est le document dans lequel figuraient des revendications. C'est bien

  4   de cela que nous parlons ? D'accord. Oui, oui.

  5   Q.  Merci. Voyons ce qui est écrit plus loin. Je cite :

  6   "Le 10 avril 1992, Martin Bell, représentant de la BBC, a informé le

  7   colonel Doyle du fait que 25 000 réfugiés environ étaient en train de faire

  8   mouvement à partir de Zvornik," et cetera, et cetera.

  9   Alors, vous dites que vous avez été informé au sujet du nettoyage ethnique.

 10   Qui vous a informé au sujet du nettoyage

 11   ethnique ? Quel était le libellé exact du renseignement que vous avez reçu,

 12   s'il était par écrit ?

 13   R.  Ce renseignement m'a été fourni par des membres de la MOCE. Donc voilà

 14   comment j'ai été informé. Maintenant, comment ce renseignement a été obtenu

 15   par la MOCE, je n'en sais rien. Je n'en étais pas membre.

 16   Q.  Etait-il dit que des actes de nettoyage ethnique étaient en train de se

 17   commettre ?

 18   R.  Si je me souviens bien, oui. Il était dit que des personnes étaient

 19   contraintes de quitter les endroits où elles vivaient.

 20   Q.  Ce qui m'intéresse, c'est le libellé exact, les mots utilisés. Est-ce

 21   qu'on vous a dit que du nettoyage ethnique était en train de se commettre ?

 22   R.  Oui, nous avons compris cela comme étant du nettoyage ethnique.

 23   Q.  Si je devais vous dire que l'expression "nettoyage ethnique" a été

 24   connue du public beaucoup plus tard, que me répondriez-vous ?

 25   R.  Je n'ai pas de commentaire à faire sur ce point. Il me faut dire

 26   aujourd'hui que 18 ans plus tard, mes souvenirs ne sont pas aussi bons

 27   qu'ils l'étaient à l'époque. Mais nous avons été convaincus qu'il y avait

 28   de très importants déplacements de population à partir des localités en

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  1   général situées à l'est du pays dans des lieux tels que Bijeljina et

  2   Zvornik.

  3   Q.  Avez-vous connaissance du départ d'un très grand nombre de Serbes de

  4   Livno même avant la guerre à la fin du mois de mars, début du mois d'avril

  5   ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Savez-vous ce qui était en train de se passer à Zvornik, en fait ?

  8   R.  Je n'ai pas eu d'information détaillée au sujet de ce qui se passait à

  9   Zvornik, mais M. Bell de la BBC m'a transmis des informations. Et vous

 10   constaterez, ici que je reprends simplement ces informations, à savoir que

 11   25 000 réfugiés sont en train de se déplacer et quittent donc la zone de

 12   Zvornik. Mais je ne savais pas où ils se dirigeaient. Voilà le

 13   renseignement que j'ai transmis. Vous m'avez demandé où j'ai obtenu ce

 14   renseignement, je vous ai dit qu'il m'avait été fourni par Martin Bell de

 15   la BBC, et vous dites que vous ne le croyez pas.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une pause

 17   d'une demi-heure aujourd'hui.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 22.

 19   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Colonel, vous avez noté les propos tenus par M. Vojo Kupresanin, vous

 24   les avez mis par écrit, pour certains, dans votre journal, les propos tenus

 25   par lui devant l'assemblée. D'abord, je vous demande si vous savez que Vojo

 26   Kupresanin était président d'un petit parti qui avait formé une coalition

 27   avec le nôtre, le Front [phon] de la patrie, et qu'il n'était pas membre du

 28   SDS ?

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  1   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela. Je ne connais pas ce monsieur.

  2   Q.  En page 75, je vous lis un passage qui se trouve dans cette page, je

  3   cite -- juste pour dire qu'on peut voir cela dans les deux pages

  4   précédentes, et il dit :

  5   " --," et cetera, et cetera.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche le document 65

  7   ter numéro 39.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Je n'ai aucune intention de désavouer Kupresanin, mais j'aimerais

 10   simplement que vous en sachiez un peu plus à son sujet. Il n'était pas

 11   membre du Parti radical. Or vous avez dit qu'il était membre du Parti

 12   radical.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le document P921. C'est déjà une pièce à

 14   conviction. Pièce de l'Accusation, P921, page 53. En anglais, c'est la page

 15   77. Donc dans la version serbe, page 53, et dans la version anglaise, page

 16   77 de la pièce P921. Le texte anglais qui est sur l'écran en ce moment

 17   n'est pas le bon, mais pour le serbe, c'est le bon.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Dans le paragraphe du milieu, la phrase qui commence par :

 20   "Les généraux et l'armée serbe --" je lirai en serbe, car les traductions

 21   ne sont pas bonnes et je le ferai savoir. Je cite :

 22   "Les généraux et l'armée serbe n'avaient pas de dirigeants serbes

 23   convenables."

 24   Je vous cite ce que l'Accusation n'a pas cité car elle a fait une citation

 25   trompée. Je poursuis la phrase :

 26   "Personne n'a dit à ces messieurs, les officiers serbes : Messieurs, votre

 27   mission est celle-ci et celle-là. Après tout, le Parti démocratique serbe

 28   n'était pas en train de préparer le peuple serbe à la guerre. Nous nous

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  1   rappelons que nos dirigeants - et je ne suis pas en train d'émettre des

  2   critiques ici, j'essaie simplement de mettre le doigt sur des erreurs qui

  3   ont été commises - nous nous rappelons que nos dirigeants nous ont dit

  4   qu'il n'y aurait pas de guerre en Bosnie-Herzégovine, et que nous allions

  5   régler les problèmes par la voie politique. C'est exactement ce qui est en

  6   train de se passer à Genève où ils nous font marcher depuis des années.

  7   Nous voyons ici le dirigeant, le chef d'un petit parti qui avait conclu une

  8   coalition avec nous, qui met en exergue le fait que le Parti démocratique

  9   serbe n'était pas bien préparé et n'avait pas bien préparé la population à

 10   la guerre."

 11   Maintenant, le paragraphe suivant, ligne 12 de la page 77, je cite :

 12   "Revenons sur un point. Nous avions de l'aviation, des obusiers, des

 13   chars, des canons, mais ce que les Musulmans avaient, c'était un canon ici

 14   et là, une mitrailleuse qu'ils avaient prise aux Serbes," et cetera, et

 15   cetera.

 16   D'abord, Colonel, je tiens à signaler qu'il y a une erreur de

 17   traduction ici, car en anglais nous avons les mots "we have," et dans

 18   l'original, il est écrit "nous avions," donc, Colonel, je crois que cette

 19   différence est importante.

 20   Puis en deuxième lieu, M. Kupresanin parle de la Yougoslavie et de

 21   l'armée qui n'avait pas reçu une définition très détaillée de sa mission,

 22   mais il ne parle pas de la Republika Srpska.

 23   Est-ce que vous voyez la référence dans ce texte maintenant, dans ces

 24   deux paragraphes ?

 25   R.  Bien, Monsieur Karadzic, vous semblez assez sélectif dans les citations

 26   du document que vous faites. J'ai vu la phrase qui évoque la possession

 27   d'avions et d'obusiers, de chars --

 28   Q.  Ce n'est pas ce que je vous demande, Colonel. Je vous ai posé une

Page 2935

  1   question, donc veuillez répondre à la question et ne sortez pas du champ de

  2   ce qui vous est demandé. Ne travaillez pas pour l'Accusation.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ce commentaire n'est

  4   pas acceptable de votre part. N'interrompez pas le témoin lorsqu'il répond

  5   à votre question.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, il ne répond pas à ma question. Et

  7   ce qu'il est en train de dire peut être utilisé de façon très favorable par

  8   l'Accusation, mais peut également faire l'objet de questions

  9   supplémentaires. Je vois le témoin qui parle d'une façon tout à fait

 10   partiale depuis plusieurs jours. Nous avions le plus grand respect pour lui

 11   à l'époque. Il répond aux questions que je ne lui ai pas posées.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre intervention est inacceptable --

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] -- dans le but de montrer les Serbes sous un

 14   jour négatif.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Doyle.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je demanderais à M. Karadzic de me reposer la

 17   question qu'il souhaite me poser car il m'en a posé tant dans la dernière

 18   période que je n'en ai pas un souvenir tout à fait précis.

 19   Donc veuillez répéter votre question, Monsieur Karadzic.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je vous ai déjà

 21   dit il y a quelque temps que si vous posez des questions très générales,

 22   vous obtenez des réponses générales. Si vous permettez au témoin de se

 23   concentrer sur une question bien précise, vous avez plus de chances

 24   d'obtenir une réponse concise et précise.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Ma question repose sur le fait que l'Accusation n'a traduit que le

 28   dernier paragraphe à notre intention. Mais dans le paragraphe précédent, il

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  1   est question du fait que le Parti démocratique serbe n'avait pas préparé la

  2   population convenablement à la guerre, et c'est le chef d'un autre parti

  3   qui dit cela et qui le regrette.

  4   Est-ce que vous voyez ce passage, je vous prie ?

  5   R.  Bien, je lis ce qui est écrit dans ce document, et il est écrit que les

  6   généraux et l'armée serbe n'avaient pas des dirigeants serbes convenables.

  7   Donc je ne comprends pas exactement ce qui est dit ici.

  8   Q.  Mais poursuivez la lecture :

  9   "Pour finir, le Parti démocratique serbe n'a pas préparé la population

 10   serbe à la guerre."

 11   Vous voyez ce qui est écrit là ?

 12   R.  Oui, je le vois, Monsieur Karadzic, mais j'essaie de comprendre

 13   exactement ce que tout cela est censé signifier. Le Parti démocratique

 14   serbe n'avait pas pour rôle de préparer la population serbe à la guerre.

 15   J'aimerais qu'on me donne le contexte dans lequel ce document a été rédigé.

 16   Q.  Le contexte, Colonel, c'est le suivant : dans le compte rendu

 17   d'audience, ce qui est dit permet de penser que M. Kupresanin est en train

 18   d'affirmer qu'à ce moment-là nous possédions des avions, des obusiers, des

 19   chars, des canons, et cetera, et cetera. Mais ce que je vous dis à présent

 20   c'est que cette réalité était une réalité du passé, qu'il s'agit du fait

 21   que nous avions eu, on pense à la Yougoslavie, la Yougoslavie qui aurait dû

 22   être préservée.

 23   Je vous ai soumis deux paragraphes plutôt qu'un seul, alors que

 24   l'Accusation ne vous en a soumis qu'un seul. Est-ce que vous voyez que dans

 25   le paragraphe précédent, la chose est mieux expliquée que dans le

 26   paragraphe suivant qui est cité au compte rendu d'audience ?

 27   R.  Bien, ce que je tire de cela, Monsieur Karadzic, c'est que vous n'êtes

 28   pas satisfait de la traduction tout à fait exacte du document qui passe de

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  1   votre langue à la langue anglaise. Donc je ne suis pas tout à fait sûr de

  2   ce sur quoi je devrais m'appuyer. Est-ce que je dois m'appuyer sur ce que

  3   vous croyez que la traduction anglaise devrait être ou est-ce que je

  4   devrais m'appuyer sur la traduction actuelle de ce document en anglais ?

  5   C'est cela mon hésitation en ce moment.

  6   Q.  Colonel, ce que j'essaye de souligner à votre intention c'est qu'avec

  7   le paragraphe précédent, ce paragraphe-ci est bien traduit, "nous avions de

  8   l'aviation," mais son incidence est différente de celle que l'on peut tirer

  9   de la lecture du compte rendu d'audience si l'on ajoute le paragraphe

 10   précédent.

 11   R.  Mais je ne lis pas le serbo-croate, donc qu'est-ce que vous souhaitez

 12   que je vous dise ? Le seul document que je comprends c'est le document

 13   rédigé en langue anglaise que j'ai sous les yeux, et alors est-ce que vous

 14   êtes en train de dire que ce n'est pas une bonne traduction du document

 15   original ? Je regrette, je pense qu'il va falloir que vous m'en expliquiez

 16   un peu plus, car vraiment je ne comprends pas quel est votre objectif.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, la traduction que

 18   nous avons sous les yeux indique, "Nous avions de l'aviation," donc à

 19   l'imparfait.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais dans le compte rendu d'audience la

 21   citation n'est pas faite correctement par Mme Uertz-Retzlaff. Car dans le

 22   compte rendu d'audience nous lisons "nous avons de l'aviation".

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Colonel, est-ce que vous êtes d'accord qu'il y a une grande différence

 25   entre les deux libellés ? A ce moment-là, nous sommes en janvier 1993, il y

 26   a une différence entre "nous avons" et "nous avions." Est-ce que c'est une

 27   différence importante ou pas ?

 28   R.  S'il y a deux documents différents avec deux traductions différentes

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  1   qui sont différentes, bien entendu, ces différences existent. Mais moi, je

  2   me penche sur le document que j'ai sous les yeux et qui indique simplement

  3   "nous avions de l'aviation, des obusiers, des chars et des canons." Alors,

  4   si vous me dites qu'il existe un autre document où il est écrit "nous avons

  5   de l'aviation, des obusiers, des chars et des canons," c'est différent.

  6   Mais je ne sais pas laquelle des deux est la traduction officielle en ce

  7   moment, parce que si vous dites que la traduction n'est pas bonne, je ne

  8   suis pas sûr du document que je devrais utiliser comme base de mes

  9   réponses.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je lis le compte rendu d'audience du 21

 11   mai, dernière ligne, ligne 25 de la page 2 654. Mme Uertz-Retzlaff parle et

 12   ses propos sont correctement consignés comme étant : 

 13   "Nous avions de l'aviation, des obusiers et des chars."

 14   Si vous avez un compte rendu dans lequel il est indiqué "nous avons", c'est

 15   une faute de frappe. Je ne sais pas comment il se fait que vous soyez en

 16   possession de cette traduction. La bonne traduction c'est celle du document

 17   qui a été téléchargé au prétoire électronique, qui est notre pièce à

 18   conviction, et qui est également notre compte rendu d'audience.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai un compte rendu d'audience où il est

 20   indiqué en page 75, ligne 12, "Nous avons de l'aviation, des obusiers, des

 21   chars," et cetera. Voilà la traduction dont je dispose -- le compte rendu

 22   d'audience que je possède.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme vous nous l'avez déjà dit, le

 24   compte rendu d'audience est corrigé par le sténotypiste après la fin de

 25   l'audience, on corrige toutes les fautes de frappe, et cetera, donc il faut

 26   vérifier quel est le compte rendu d'audience officiel si vous voulez en

 27   tenir compte.

 28   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je suppose que

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  1   le Dr Karadzic a eu sous les yeux le compte rendu temporaire, mais dans le

  2   compte rendu temporaire, bien sûr, il reste pas mal d'erreurs. C'est

  3   seulement quelques heures après la fin de l'audience que nous obtenons la

  4   version définitive et corrigée.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Moi, j'ai la version temporaire

  6   ultérieurement corrigée.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Bien, le problème est résolu.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Colonel, est-ce que le chef d'un petit parti est en train, ici, de

 10   critiquer le Parti démocratique serbe pour avoir opté pour une solution

 11   politique et pour n'avoir pas préparé la population à la guerre ?

 12   R.  Il semble que c'est ce qui ressort de la lecture de ce document, oui.

 13   Q.  Alors, ce qui est dit ici c'est que "nous avions de l'aviation," et

 14   vous n'excluez pas la possibilité que M. Kupresanin, chef et fondateur du

 15   parti qui portait pour nom le Front de la patrie, parle de la Yougoslavie,

 16   qui possédait tout ce dont elle avait besoin pour préserver l'intégrité du

 17   pays, et qu'il n'est pas en train de parler de la Republika Srpska ?

 18   R.  Bien, je ne sais pas. Je ne sais tout simplement pas, Monsieur

 19   Karadzic. J'ai l'esprit un peu confus ici, parce que nous avons sous les

 20   yeux un document, vous nous indiquez que ce n'est pas la traduction qui

 21   convient, que ce n'est pas le document officiel. Donc je ne sais pas. Ce

 22   qui est écrit ici c'est que les généraux de l'armée serbe n'avaient pas des

 23   dirigeants serbes de qualité suffisante. Ça c'est un point. Puis il est

 24   question du parti qui n'a pas préparé l'armée serbe à la guerre. Ça c'est

 25   le deuxième point. Puis le troisième point concerne les munitions, les

 26   chars, et cetera.

 27   Alors, vous dites que si le document officiel que nous devons admettre

 28   indique "nous avions de l'aviation," cela signifie que nous parlons du

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  1   passé et pas du présent, que nous parlons de quelque chose qui était en

  2   possession dans le passé, mais pas actuellement. Mais ça c'est peut-être

  3   une interprétation, c'est peut-être quelque chose qui est l'avis personnel

  4   de quelqu'un. Je ne sais simplement pas. Et si tel est le cas, alors le

  5   compte rendu officiel de l'assemblée de la Republika Srpska est peut-être

  6   plus précis et pourrait apporter une explication plus définitive quant au

  7   sens à donner à ce document. Mais ici, nous parlons peut-être d'avis

  8   personnels. Je ne souhaite pas entrer dans ce débat car si je vous donne

  9   mon avis personnel, je pourrais être accusé d'être partial, et je ne

 10   souhaite pas que ce soit le cas.

 11   Q.  Je vous remercie, mais l'Accusation a utilisé ce document dans son

 12   interprétation de votre rencontre avec M. Kupresanin que vous considériez

 13   comme plus radical. Donc l'Accusation a utilisé ceci pour corroborer votre

 14   impression au sujet de M. Kupresanin. M. Kupresanin est concerné. Il a le

 15   droit de dire ce qu'il veut et il ne peut pas être tenu responsable de ce

 16   que fait le gouvernement, car le gouvernement est responsable des documents

 17   qu'il émet. Les résolutions, les conclusions, décisions, et cetera, et

 18   cetera. Donc quoi qu'il en soit, nous en avons terminé de ce débat.

 19   Mais non seulement il dit ce que vous venez de rappeler, mais il dit

 20   une chose supplémentaire : Personne n'a dit aux officiers serbes quelle

 21   était exactement leur mission. C'est ce qu'il dit, et c'est l'objection qui

 22   est soulevée par tous les Yougoslaves, le fait que l'armée yougoslave ne

 23   s'était pas vu défini ses affectations et ses missions destinées à assurer

 24   la protection de la Yougoslavie conformément à sa mission

 25   constitutionnelle.

 26   Est-ce que vous êtes d'accord sur ce point ?

 27   R.  Non, je ne suis pas d'accord, parce que je ne sais simplement pas

 28   quelles instructions ont été données à l'armée fédérale yougoslave. Je veux

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  1   dire, comment est-ce que je pourrais le savoir ? Je suppose que l'armée

  2   populaire yougoslave, la JNA, était l'armée de toutes les républiques,

  3   c'était une armée fédérale, et je suppose qu'elle remplissait les missions

  4   qui étaient les siennes. Mais exactement quelles étaient ces missions, je

  5   ne sais tout simplement pas.

  6   Q.  Merci.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant nous

  8   pencher sur la page 82 du compte rendu d'audience.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Où vous êtes cité comme ayant dit que "le président de la Bosnie-

 11   Herzégovine affirme que la JNA est la seule force capable d'agir pour

 12   sauver la population musulmane dans le secteur de Zvornik, mais qu'elle

 13   n'est pas prête à le faire et que cela ne fait que renforcer l'hostilité de

 14   la population musulmane à l'égard de la JNA."

 15   Alors, je vous pose une question rapide : jusqu'à Zvornik, est-ce

 16   qu'Izetbegovic et l'élite politique musulmane avaient des relations

 17   amicales avec la JNA ou est-ce qu'ils faisaient preuve d'hostilité depuis

 18   le début vis-à-vis de la partie serbe et de la

 19   JNA ? Pour simplifier, quand est-ce que, à votre avis, a commencé le

 20   désaccord entre la direction musulmane et la JNA ? Est-ce que vous convenez

 21   que c'est au moment où ils ont refusé d'envoyer des recrues et des

 22   réservistes dans les rangs de la JNA ?

 23   R.  Oui, je dirais que c'est l'un des facteurs qui ont contribué à cela.

 24   L'autre, bien sûr - et j'en ai déjà parlé dans ma déposition - c'est

 25   lorsque j'ai eu la réunion avec le premier ministre et où il a parlé de la

 26   JNA comme étant une armée d'occupation, une armée qui prenait ses armes

 27   auprès d'une autre république de façon clandestine, si je puis dire. Donc

 28   ça c'était le doute qui régnait à l'époque.

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  1   Il faut savoir aussi que j'avais recommandé au premier ministre, en

  2   tant que chef de la Mission d'observation, qu'il devait absolument y avoir

  3   un dialogue entre le gouvernement de la Bosnie et l'armée fédérale

  4   puisqu'il s'agissait d'une force importante présente sur le territoire.

  5   C'était ma recommandation. Je suis d'accord donc avec ce que vous venez de

  6   dire.

  7   Q.  Merci. Je tiens juste à ajouter que M. Pelivan défendait les intérêts

  8   de la Croatie, il était Croate, et il ne défendait pas les intérêts de la

  9   Bosnie-Herzégovine. Ce n'était pas une décision officielle du gouvernement

 10   de la Bosnie-Herzégovine. C'était l'opinion de M. Pelivan, parce que vous

 11   l'avez rencontré.

 12   R.  Oui, je pense que je me suis déjà expliqué là-dessus hier, et je ne

 13   vais pas me répéter aujourd'hui.

 14   Q.  Très bien.

 15   Mais la question n'est pas au compte rendu. Je vous ai demandé si

 16   c'était bien le cas.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce compte rendu a-t-il été versé dans sa

 18   totalité, ce compte rendu de cette séance de l'assemblée nationale de la

 19   Republika Srpska ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Maintenant, pouvons-nous avoir à

 22   l'écran la pièce 1D01260, s'il vous plaît.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  En attendant l'affichage, sachez qu'il s'agit d'un rapport du général

 25   Kukanjac daté du 5 mai, donc après les événements.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le même document que la pièce 3721 de la

 27   liste 65 ter de l'Accusation. Il y a une version en anglais d'ailleurs qui

 28   serait peut-être celle que nous devrions étudier. Donc la pièce 3721.

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  1   Il s'agit d'un document qui date du 7 mai, après le massacre de la rue de

  2   Dobrovoljacka, et voici ce qu'il écrit- -- le commandement du 4e Corps

  3   envoie ceci directement au commandant en mains propres donc, c'est un

  4   document tout à fait intéressant.

  5   Pourrions-nous avoir la page 2 en serbe, qui correspond à la page 8A en

  6   anglais. Non, je me reprends. Page 2, paragraphe 8. Je pense que les pages

  7   correspondent en anglais et en B/C/S. Donc pourrions-nous avoir les pages

  8   2.

  9   Voilà.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Il est écrit au (A) :

 12   "D'après l'expérience obtenue en Slovénie, Croatie et Macédoine, le

 13   commandement de la région a fait une évaluation en temps et heure selon

 14   laquelle les soldats de l'armée sont dans une situation difficile et il

 15   faut commencer l'évacuation vers des zones sûres. De ce fait, ce qui suit a

 16   été réalisé :

 17   "Pendant des mois, des armes, des munitions et des mines et explosifs,

 18   ainsi que d'autres équipements, ont été envoyés dans des endroits sûrs qui

 19   resteront sûrs pendant un moment important."

 20   Donc vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il est normal que l'armée ne

 21   reste pas dans une position où elle serait encerclée par l'ennemi ?

 22   R.  Ecoutez, si ceci est basé sur l'attaque du convoi du 2 mars, je

 23   comprends très bien quel est le commentaire fait par ce commandant

 24   militaire lorsqu'il écrit cela. Je comprends parfaitement ce qu'il veut

 25   dire.

 26   Q.  Très bien. J'aimerais attirer votre attention maintenant sur l'endroit

 27   où ces équipements sont envoyés.

 28   "…envoyés dans des zones qui seront sûres à long terme pour l'armée."

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  1   Donc est-ce qu'ils réinstallent ces armes pour les Serbes sur un territoire

  2   serbe ou pour eux-mêmes ?

  3   R.  D'après ce rapport, ils déplacent ces armes, ces mines, ces explosifs

  4   et ces munitions vers des zones sûres afin de pouvoir les utiliser

  5   ultérieurement. C'est comme ça afin que l'armée puisse les utiliser

  6   ultérieurement. Donc c'est mon interprétation.

  7   Q.  Très bien.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc il s'agit d'un document qui est déjà versé

  9   au dossier, je le crois ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas admis ce document suite

 11   aux accords conclus avec l'Accusation, mais vu que le témoin a maintenant

 12   répondu à la question, je pense que nous pourrions l'admettre.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D236.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Maintenant, à la page 84, Mme le Procureur vous a posé une question.

 17   Elle vous a dit :

 18   "Colonel, vous avez déposé selon lequel vous avez parlé d'information à

 19   propos du nettoyage ethnique à Foca avec M. Koljevic en avril 1992. Que

 20   compreniez-vous par le terme nettoyage ethnique ?"

 21   Et vous avez donné votre réponse à propos de ce que vous pensiez que ce

 22   terme voulait dire, ensuite j'ai dit que ce terme de nettoyage ethnique

 23   avait été employé bien plus tard. D'abord, quelle était la référence que

 24   vous avez faite à Foca ?

 25   R.  Je faisais référence à Foca, parce que la mission des observateurs

 26   essayait de se rendre sur Foca parce qu'ils avaient reçu des informations,

 27   mais je ne sais pas quelles informations. Tout ce que je sais c'est qu'ils

 28   sont revenus sans avoir été à Foca, et je leur ai dit : Pourquoi n'êtes-

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  1   vous pas arrivés jusqu'à Foca ? Et ils m'ont répondu qu'ils avaient été

  2   arrêtés par la JNA qui leur a dit qu'elle ne pouvait assurer leur sécurité.

  3   J'ai eu une discussion de principe avec M. Koljevic qui m'a contacté pour

  4   en parler et qui m'a dit regretter que mes observateurs n'aient pas pu s'y

  5   rendre et qu'il allait voir s'il pouvait organiser un passage de cette

  6   mission jusqu'à Foca, ce qui n'a pas eu lieu d'ailleurs.

  7   Voilà tout ce que j'ai à dire à propos de Foca.

  8   Q.  Je me souviens de cela, et je sais que M. Jeremy --

  9   L'INTERPRÈTE : Nom de famille inaudible.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  -- était avec Koljevic et qu'il y avait encore de la neige d'ailleurs,

 12   et M. Koljevic était menacé par les membres de la Défense territoriale

 13   locale, parce qu'il n'a pas réussi à protéger son propre peuple. On l'a

 14   menacé de le tuer d'ailleurs. Il vous en a informé ?

 15   R.  Non, il ne m'en a pas informé. Je n'en ai pas été informé par M. Brade,

 16   enfin, je ne me souviens pas. Essayez de rafraîchir ma mémoire peut-être.

 17   Non, non, je ne me souviens pas du tout de ce que M. Brade aurait pu me

 18   dire.

 19   Q.  Et en avril, il y a eu une tentative de percée par Koljevic et Brade,

 20   et ils m'ont informé tous les deux que les gens étaient furieux là-bas,

 21   parce qu'ils avaient été laissés sans protection et ils avaient menacé la

 22   vie de Koljevic, bien qu'ils l'aimaient bien, parce que c'était lui le

 23   responsable, et donc ils l'avaient menacé. Mais maintenant vous dites que

 24   vous ne vous en souvenez pas, tant pis.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir la pièce

 26   suivante, la 1D77. Non, en fait, il s'agit de la 00077.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  En attendant l'affichage de cette pièce, je vais vous montrer un

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  1   document venant des services de Renseignements musulmans et portant sur la

  2   situation à Foca. Donc j'aimerais savoir si vous saviez qu'Halid Cengic, le

  3   père d'Hasan Cengic, avait créé la première formation paramilitaire

  4   musulmane pendant l'ère communiste, avant les élections de 1990 à Foca ?

  5   R.  Non, ça, je n'en savais rien.

  6   Q.  Très bien. Donc nous allons nous pencher sur ce document qui vient des

  7   services de Renseignements musulmans. Vous avez la page de garde à l'écran.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant avoir la deuxième page,

  9   s'il vous plaît.

 10   Q.  Vers la fin, paragraphe numéro 2 :

 11   "En fait, après les élections démographiques, Taib Lojo, ingénieur en

 12   électronique, citoyen très respectable et vice-président du SDA, a été

 13   nommé président de la SO à Foca. Cela dit, dès le départ, Senad Sahinpasic,

 14   connu aussi sous le nom de Saja, et Halid Cengic, qui étaient parents, ont

 15   eu énormément d'influence politique au sein du SDA grâce au soutien de

 16   parents et d'amis influents à Sarajevo, principalement Muhamed Cengic, qui

 17   était alors le

 18   vice-premier ministre de la RBH…"

 19   Donc connaissez-vous un colonel appelé "Voks" qui aurait travaillé

 20   pour ce Senad Sahinpasic et qui était membre de  l'assemblée ?

 21   R.  Non, je ne sais pas.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il semble qu'il y ait une erreur au compte

 23   rendu. En fait, c'était un journal qui s'appelait "Voks." Donc connaissez-

 24   vous un journal, un magazine appelé "Voks" détenu par cet homme, Senad

 25   Sahinpasic, qui était membre de l'assemblée.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Bien, poursuivons.

 28   Sahinpasic est un entrepreneur de Foca et il est membre du parlement

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  1   des citoyens de BiH. Cengic lui est comptable, et cetera.

  2   "A partir du moment où ils sont arrivés au pouvoir, après avoir

  3   rassemblé autour d'eux leur famille et leurs amis, ils ont commencé à se

  4   lancer dans toutes sortes de fraudes et en contrebande, ont fait entrer

  5   énormément d'argent. La situation extrêmement complexe qui s'est détériorée

  6   et les relations interethniques se détériorant en 1991 n'ont fait qu'aider

  7   leur jeu étant donné que la contrebande d'armes était florissante et qu'ils

  8   ne faisaient rien pour calmer la situation, mais au contraire, ça les

  9   aidait dans leurs agissements et dans leurs activités politiques.

 10   "Ceux-ci comprenaient aussi Aziz Sljivo et un grand nombre d'hommes

 11   qui étaient fidèles à ces personnes dans le cadre de leur activité de

 12   contrebande d'armes pour que les Musulmans de cette région, de peur d'une

 13   menace chetnik éventuelle, étaient près à leur donner leur dernier sou à

 14   ceux qu'il avaient élus pour pouvoir protéger leur intérêt puisqu'ils leur

 15   fournissaient des armes. Donc ils étaient prêts à payer les fusils que

 16   Sahinpasic et Cengic leur vendaient pour 1 200 à 1 500 deutsche marks.

 17   D'après les renseignements, 5 200 fusils sont arrivés à Foca par le biais

 18   du SDA, fusils qui avaient été vendus par Sahinpasic et Cengic."

 19   Est ce que vous saviez que le SDA de Foca avait été armé de cette façon

 20   avant que le conflit n'éclate à Foca ?

 21   R.  Non, je ne sais pas. Ceci est un document qui date de juillet 1993.

 22   Bien que ça fasse référence à l'année 1992, sachez que je n'ai jamais vu ce

 23   document. Et c'est un document qui a été rédigé après mon départ de Bosnie.

 24   Je ne suis pas du tout au courant de ce qui est écrit dans ce document.

 25   Q.  Bien. Voici ce que j'ai à dire : nous le savions, et les Serbes de Foca

 26   aussi le savait, et le conflit a éclaté parce que le SDA avait ces 5 200

 27   fusils ainsi que des unités, alors que les Serbes attendaient sa protection

 28   de la part de a JNA. C'est pour cela qu'ils ont menacé le Pr Koljevic,

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  1   parce que la JNA n'est pas arrivée à temps à Foca pour les défendre et les

  2   protéger. Est-ce que vous savez que la JNA est arrivée trop tard à Foca ?

  3   R.  Non. Je n'en ai aucune connaissance. Je n'en sais rien. Si la JNA avait

  4   donné une escorte à mes observateurs qui devaient aller voir sur place ce

  5   qui s'y passait, peut-être que le cours des choses aurait été différent.

  6   Mais cela dit, ils n'ont pas donné d'escorte, et de ce fait, nous n'avions

  7   aucune information à ce propos.

  8   Q.  Mais voyez-vous maintenant pourquoi la JNA n'arrivait pas à assurer la

  9   sécurité de vos observateurs ? A cause de ces 5 200 fusils, la JNA n'était

 10   pas sûre d'assurer sa propre sécurité, et certainement pas la sécurité

 11   d'une délégation étrangère ?

 12   R.  Ecoutez, si ce qui est dans ce rapport est vrai, c'est peut-être le

 13   cas. Mais je n'en sais rien. Il s'agit juste d'un document. Quant à la

 14   véracité de ce document, je ne peux pas faire de commentaire.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant avoir la dernière page

 16   du document à l'écran. Vous verrez que c'est un document qui est signé par

 17   le chef de l'administration chargée de la sécurité militaire, le général

 18   Fikret Muslimovic, un Musulman. Il est absolument certain qu'il informe son

 19   commandement de la situation à Foca, situation qui a couru depuis la

 20   période précédent la guerre jusqu'au jour du document, c'est-à-dire

 21   jusqu'en 1993.

 22   Donc nous avons quand même le tampon original et la signature de

 23   Fikret Muslimovic. Il est vrai que c'est un document qui date de 1993, donc

 24   je ne vais pas vraiment m'acharner sur le sujet, mais il décrit ce qui

 25   s'est passé en 1991 et 1992.

 26   Puis-je verser ce document.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, puisque le témoin n'a rien pu

 28   conformer à propos de ce document. Et vous savez que nous avons pris une

Page 2950

  1   décision à ce sujet, donc ce document ne pourra pas être admis.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas-là, je dois demander au témoin s'il

  3   maintient ce qu'il a dit précédemment à propos de ce qui s'est passé à

  4   Foca.

  5   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je ne me souviens pas que le colonel

  6   ait fait des déclarations à propos des événements de Foca.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas non plus de quels événements --

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 84. J'en ai donné lecture. A la page 84 du

  9   compte rendu d'audience, la question était la   suivante : 

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Vous avez déposé à propos de l'information que vous aviez sur le

 12   nettoyage ethnique à Foca avec Koljevic en 1992. Et votre réponse est la

 13   suivante :

 14   "Mon interprétation du nettoyage ethnique est ceci…" et cetera, et cetera."

 15   Donc tout ceci a à voir avec Foca. C'est lié à Foca et cela fait référence

 16   à Foca.

 17   R.  Monsieur Karadzic, j'ai déjà dit à plusieurs reprises que la seule

 18   référence à Foca faite à l'époque était les informations que j'avais reçues

 19   de la mission des observateurs. Quant à savoir ce qui s'est passé

 20   exactement, je n'en sais rien. Ils ont fait référence au terme nettoyage

 21   ethnique, je le pensais en tout cas, ou en tout cas à un déplacement

 22   contraint de la population. La mission des observateurs n'a pas pu aller à

 23   Foca pour vérifier ce qui s'y passait parce qu'ils ont été arrêtés par la

 24   JNA. Voilà, c'est tout ce que je peux vous dire.

 25   Q.  Mais la JNA les a-t-ils arrêtés, ou alors elle ne pouvait pas assurer

 26   leur sécurité ?

 27   R.  La JNA les a arrêtés, les a empêchés physiquement de se rendre à Foca,

 28   et ils ont utilisé comme excuse le fait qu'ils ne pouvaient pas garantir

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  1   leur sécurité.

  2   Q.  Mais comment le savez-vous qu'il s'agissait d'une excuse ?

  3   R.  Je vous dis exactement ce que m'ont raconté les observateurs de la

  4   mission, cette équipe qui avait été envoyée sur place. Je ne vois pas

  5   pourquoi je ne les aurais pas crus.

  6   Q.  Mais M. Brade m'a donné une version bien différente de la situation.

  7   Vous continuez à dire, Monsieur le Témoin, qu'à Foca il n'y avait pas de

  8   combats violents avant que les Serbes ne partent dans un quartier de Foca

  9   et que les Musulmans n'en occupent un   autre ? Donc tout ceci est arrivé

 10   sans aucun combat ou à cause du combat ou après le combat ?

 11   R.  Ça, je n'en sais absolument rien. Je vous dis que ma mission n'est même

 12   pas arrivée à Foca, donc je ne peux pas commenter. Je me lancerais dans des

 13   conjectures sinon, et je n'ai pas l'intention de le faire. Quant à savoir

 14   ce qu'a dit M. Brade à M. Koljevic, je ne sais pas ce qu'il lui a dit. Je

 15   n'en ai aucune idée.

 16   Q.  Donc vous n'avez pas d'informations fiables selon lesquelles il y avait

 17   des nettoyages ethniques à Foca ?

 18   R.  Je n'ai jamais dit que je n'avais pas d'informations fiables. Je vous

 19   ai juste rapporté les propos des observateurs de la mission. Rien de plus.

 20   Q.  Très bien. A la page 85, vous dites vous ne vous souvenez pas -- enfin,

 21   non, je vous ai posé une question, et vous dites ne pas vous rappeler de la

 22   lettre qui vous avait été envoyée par le premier ministre Djeric, et vous

 23   avez dit que vous conserviez les lettres, mais pas celle-là. Donc pouvons-

 24   nous vous demander de nous donner toute la correspondance que vous avez à

 25   propos de la guerre et tout ce qui a trait à la Bosnie ?

 26   R.  Je ne vois pas très bien où vous voulez en venir, Monsieur Karadzic.

 27   J'ai donné tous mes documents au Tribunal lorsque j'ai fait ma déclaration

 28   de témoin en 1995 ou 1996 - je ne me souviens pas très bien de la date.

Page 2952

  1   Donc au-delà, je ne vois pas très bien à quoi vous faites allusion --

  2   qu'est-ce que vous voulez que je donne ? Je n'ai aucun souvenir d'avoir

  3   reçu une lettre de ce M. Djerkic [phon]. Je ne connais même pas ce nom.

  4   Et hier je vous ai dit que si cette lettre avait été envoyée en

  5   anglais, j'aurais très certainement réagi au vu de la teneur de la lettre,

  6   parce que le contenu de cette lettre est totalement contraire à ce que

  7   j'avais appris et la façon dont j'avais interprété les événements de Pale.

  8   Donc je n'ai aucun souvenir d'avoir reçu cette lettre. J'ai, certes, fait

  9   des commentaires sur le contenu de la lettre en disant d'ailleurs que

 10   j'étais parfaitement en désaccord avec la teneur de cette lettre.

 11   Q.  Mais vous dites que vous avez conservé toutes les lettres, mais pas

 12   celle-là.

 13   R.  Vous avez peut-être mal interprété mes propos. Je ne suis pas en

 14   possession d'aucune lettre de ce type que je n'aurais pas donné au

 15   Tribunal. Je me suis peut-être mal exprimé. Si c'est le cas, je m'en

 16   excuse. Mais je n'ai aucune lettre qui traite de mon séjour dans l'ex-

 17   Yougoslavie et que je n'aurais pas donnée au Tribunal.

 18   Q.  Bon, vous avez peut-être dit "souvenir," "recollection" en anglais, et

 19   moi, j'ai entendu "collection," c'est-à-dire "recueil," et j'ai peut-être

 20   fait une erreur.

 21   Passons à autre chose. Page 86, Mme Uertz-Retzlaff dit -- nous allons

 22   maintenant passer au paragraphe 5, et je vais vous donner lecture. Donc il

 23   s'agit d'un rapport de M. Goulding :

 24   "Tous les observateurs nationaux sont d'accord pour dire qu'il s'agit d'un

 25   effort concerté des Serbes de Bosnie-Herzégovine avec l'accord ou au moins

 26   le soutien de la JNA pour créer des régions ethniquement pures dans le

 27   cadre des négociations sur la cantonisation de la république, négociations

 28   qui ont lieu à la Conférence des Nations Unies sur la Bosnie-Herzégovine

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  1   dirigée par l'ambassadeur Cutileiro. Les techniques utilisées sont la

  2   capture du territoire par la force militaire," et cetera, et cetera.

  3   Qui a donné ces informations à M. Goulding ?

  4   R.  Je n'en sais rien. J'imagine que ce sont les forces des Nations Unies

  5   qui avaient été déployées opérationnellement en Bosnie, et sans doute

  6   certains observateurs des Nations Unies qui étaient déployés un peu partout

  7   en Bosnie.

  8   Q.  Pouvez-vous nous dire quels étaient les territoires que les Serbes ont

  9   capturés et occupés qui ne leur appartenaient pas auparavant ?

 10   R.  Ça, je ne peux pas le dire, mais à l'époque, je savais que les Serbes

 11   déclaraient qu'ils étaient les occupants originels de certains territoires,

 12   et c'est pour cela qu'ils voulaient les occuper, qu'ils les occupaient et

 13   qu'ils les capturaient. Enfin, je n'ai pas de détails très précis à ce

 14   propos. Mais l'opinion générale était que les personnes de toutes races et

 15   de toutes appartenances ethniques étaient chassées de certains territoires.

 16   Q.  Mais comment l'avez-vous appris ?

 17   R.  Par le fait des informations que j'ai reçues et qui me venaient de mes

 18   observateurs, parce que j'étais chef de la mission.

 19   Q.  Il s'agit d'informations venant de la présidence de Bosnie-Herzégovine.

 20   Vous le dites à un endroit d'ailleurs ?

 21   R.  Mais j'obtenais évidemment énormément d'informations de la part de la

 22   présidence de Bosnie-Herzégovine parce que je rencontrais souvent cette

 23   entité.

 24   Q.  Vous ne pensez pas que ces informations auraient dû être vérifiées, que

 25   c'étaient peut-être des informations subjectives ?

 26   R.  Elles auraient certainement pu être vérifiées si on avait pu avoir une

 27   liberté de mouvement qui était quand même dans notre mandat. La mission des

 28   observateurs était un groupe d'observateurs non armés déployés sur le

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  1   territoire avec l'accord des camps en présence. Et ils étaient censés être

  2   déployés en bénéficiant de liberté de mouvement, de sûreté et du fait que

  3   leur sécurité serait assurée.

  4   La mission des observateurs a quitté le territoire le 11 mai, juste la

  5   veille de mon départ, parce que ces garanties, ces conditions n'étaient

  6   plus garanties, liberté de déplacement et sécurité. Donc la mission se

  7   demandait pourquoi ces garanties ne pouvaient plus leur être assurées, et

  8   on se demandait s'il ne se passait pas des choses dans différents endroits

  9   qui ne devaient pas nous être montrées. Enfin c'est ce que j'ai pensé, en

 10   tout cas.

 11   Les Nations Unies, cela dit, sont restées en Bosnie, elles ont continué à

 12   être déployées en Bosnie. Donc elles sont sans doute mieux placées que moi

 13   pour parler de tout cela. Comme je l'ai déjà dit, d'ailleurs, la FORPRONU

 14   disposait d'observateurs qui avaient été déployés dès le départ dans

 15   différentes parties de la république. Donc je pense que ces personnes sont

 16   sans doute mieux à même de répondre à vos questions que moi.

 17   Q.  Bien. Savez-vous que nous voulions avoir plus d'éléments asiatiques et

 18   africains sur place, parce que nous considérions qu'ils étaient plus

 19   impartiaux, et nous n'avions pas confiance dans les représentants de

 20   l'Occident, surtout ceux venant des pays de l'OTAN, c'est pour cela que

 21   nous avions demandé à ce qu'un contingent d'observateurs et un contingent

 22   de troupes asiatiques et africaines  auraient dû être déployés ? Vous le

 23   saviez ?

 24   R.  Non. De toute façon, je n'étais pas partie prenante dans le déploiement

 25   et la sélection des observateurs des Nations Unies puisque je n'étais même

 26   pas membre des Nations Unies. Je sais qu'au départ les observateurs

 27   déployés en Bosnie étaient des volontaires qui avaient travaillé dans

 28   d'autres missions des Nations Unies. Les premiers à aller en Bosnie étaient

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  1   des officiers qui avaient déjà travaillé dans le cadre d'autres missions

  2   dans le monde entier.

  3   Mais quant à ce que vous venez de dire à propos d'une présence d'Asiatiques

  4   et d'Africains plus importante, ça je n'étais pas du tout au courant.

  5   Q.  La Mission de la Communauté européenne négligeait totalement les

  6   Serbes, dans une certaine mesure, en tout cas. Ils ne voulaient jamais être

  7   photographiés avec les Serbes, parce qu'ils avaient peur que ceci soit

  8   interprété comme une espèce de reconnaissance, bien qu'on ne demande

  9   absolument rien d'ailleurs. Donc nous considérions que les représentants

 10   des pays occidentaux avaient un parti pris par rapport aux Serbes ? Pas

 11   vous personnellement, non. Vous étiez assez impartial, mais les

 12   représentants des pays européens, en tout cas.

 13   R.  Ecoutez, je n'ai jamais -- je ne savais pas -- enfin, je n'ai pas eu

 14   d'occasion où les membres de la Communauté européenne voulaient négliger

 15   les Serbes ou ne pas être pris en photo avec eux. Non. D'ailleurs, j'avais

 16   donné une directive en tant que chef de la mission pour que ça ne se fasse

 17   pas. Je suis un peu étonné par ce que vous me dites quand vous faites

 18   référence aux pays occidentaux.

 19   Comme je vous l'ai dit, la Mission de la Commission européenne dont je

 20   faisais partie a été accueillie par tous les camps en présence, Serbes,

 21   Croates et Musulmans, par tous les partis politiques, et nous avons essayé

 22   de faire notre travail d'une façon impartiale, et à aucun moment on ne nous

 23   a refusé accès à une réunion, et ce, de la part d'un camp ou d'un autre. Ce

 24   n'est que quand la situation militaire a empiré qu'on a commencé à empêcher

 25   les observateurs de se rendre dans certains secteurs, et c'est la JNA qui

 26   les a empêchés, parce qu'au départ il fallait assurer que ces observateurs

 27   aient une liberté de mouvement et que leur sécurité soit assurée. Or ça

 28   devenait de plus en plus difficile au vu de la situation militaire qui

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  1   empirait, et pour une raison que je ne connais pas vraiment, je n'étais pas

  2   avec ces observateurs lorsqu'ils ont été évacués de Sarajevo.

  3   Q.  Merci. J'attends l'interprétation.

  4   Je voudrais que nous voyions la pièce D217 afin de vérifier ce qu'en dit le

  5   général MacKenzie, le général MacKenzie qui s'est trouvé sur place au même

  6   moment. Alors, je voudrais juste vous rappeler une chose, Colonel, vous

  7   avez refusé de participer à un dîner à Ilidza pour ne pas être pris en

  8   photo avec les Serbes, tout comme à Pale, afin qu'on ne comprenne pas ça

  9   comme une reconnaissance de la Republika Srpska. Nous demandions que vous

 10   reconnaissiez la Republika Srpska, mais nous étions un parti reconnu aussi

 11   bien dans le conflit que dans les négociations. Donc vous ne pouviez pas

 12   être surpris. Vous avez fait preuve d'une grande réserve par rapport à la

 13   partie serbe, mais vous croyez la présidence sur parole, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je voudrais juste vous corriger, Monsieur Karadzic. Je n'ai

 15   certainement pas refusé de participer à un dîner à Ilidza. C'est pendant ce

 16   dîner que j'ai entendu un certain nombre de commentaires, et je ne suis

 17   certainement pas d'accord sur le fait de dire que j'aurais quitté ce dîner.

 18   Première correction.

 19   Ensuite, les conditions dans lesquelles je me suis rendu à Pale, j'en ai

 20   déjà parlé, il y avait un accord qui n'avait pas été respecté par les

 21   Serbes à Pale.

 22   Q.  Merci. Mais savez-vous que j'ai dit officiellement aux négociateurs que

 23   nous préférerions voir arriver un contingent de troupes asiatiques et

 24   africaines, parce que nous considérions qu'elles seraient plus impartiales,

 25   n'ayant aucun intérêt sur place ?

 26   R.  Vous me demandez si je savais que vous aviez officiellement demandé la

 27   venue d'un tel contingent ? La réponse est non.

 28   Q.  Merci.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page 182 de cet ouvrage,

  2   du livre écrit par le général MacKenzie.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Le 11 mai, vous êtes encore sur place. Et je vais en donner lecture.

  5   Nous allons l'avoir à l'écran. Je cite :

  6   "La Communauté européenne avait mené des pourparlers marathons, des

  7   négociations de paix interminables au cours des jours précédents."

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 182, et non pas 183. Oui, c'est bien ça.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  "La Communauté européenne a continué à exclure les Serbes de Bosnie des

 11   délibérations. Suite à cela, son image auprès d'eux n'a cessé de se

 12   dégrader."

 13   Alors, ne voyez-vous pas que le général MacKenzie a bien évalué la

 14   situation et qu'il partageait mon opinion ?

 15   R.  Je vois que le général MacKenzie a une évaluation différente, pas

 16   nécessairement la même que la vôtre, d'ailleurs. J'ai déjà expliqué que

 17   nous n'avions pas les Serbes de Bosnie présents à ces pourparlers, et j'ai

 18   expliqué pourquoi.

 19   Les Serbes de Bosnie étaient invités, mais ils ne voulaient pas

 20   venir, parce qu'ils avaient plus ou moins quitté la ville. Ils s'étaient

 21   installés à Pale, ils avaient installé leur quartier général là-bas. Mais

 22   le simple fait qu'ils n'aient pas été présents à ces pourparlers ne

 23   signifie pas qu'ils n'aient pas été invités. Ils avaient été invités.

 24   Deuxièmement, dans la plupart des pourparlers, on s'est concentré sur le

 25   retrait de l'armée fédérale, de la JNA, du territoire de la Bosnie, ils

 26   sont venus à ces pourparlers.

 27   Et troisièmement, le général MacKenzie est un officier de l'armée des

 28   Nations Unies. J'étais, quant à moi, observateur de la Communauté

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  1   européenne, chargé d'une mission complètement différente. Donc il est tout

  2   à fait en droit d'avoir son opinion. Quant à moi, j'ai la mienne.

  3   Q.  Je suis d'accord pour cette distinction concernant les opinions des uns

  4   et des autres, mais nous sommes dans une affaire au pénal ici, il faut s'en

  5   tenir aux faits. Et les faits disent que nous avons toujours été à la

  6   disposition de tous pour tous les pourparlers, aussi bien à Lukavica qu'à

  7   Pale, qu'à l'étranger, à Bruxelles, à Londres, à Lisbonne, et ainsi de

  8   suite. Est-ce que vous vous souvenez d'une seule conférence à laquelle nous

  9   ayons refusé de nous rendre ou que nous aurions quitté de façon prématurée

 10   ?

 11   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 12   Q.  Merci. Alors, voyez maintenant le 28 février. Vous étiez avec Hebib,

 13   haut fonctionnaire de la police. Je parle toujours de votre journal.

 14   C'est la pièce D217. On n'a pas besoin de l'afficher plus longtemps.

 15   Est-ce qu'elle a déjà été versée ?

 16   Mais en tout cas, à la date du 28 février, vous êtes en compagnie de

 17   Hebib. Ensuite, vous vous êtes rendu à la présidence, les 2 et 3 mars.

 18   Le 28, vous n'avez rencontré aucun Serbe. Vous avez vu, en revanche,

 19   Hebib. Les 2 et 3 mars, vous avez rencontré la présidence. Le 5 mars, vous

 20   avez rencontré la présidence et M. Ganic. Mais à aucun moment, on ne trouve

 21   mention des Serbes de Bosnie. Le 6, vous avez été à la présidence, vous

 22   avez vu Hebib, même s'il n'est pas membre de la présidence. Le 7, vous avez

 23   dîné avec Kukanjac et d'autres, mais il ne s'agissait pas de Serbes de

 24   Bosnie. Il y avait Aksentijevic aussi. Le 10, la présidence. Le 9, les

 25   contingents espagnols. Le 20, vous avez rencontré Prlic. Le 11, c'était

 26   encore la présidence. Le 13, il n'y a rien. Le 14, vous avez encore

 27   rencontré Hebib.

 28   Voyez tout simplement ce qui figure dans votre journal. Pendant 15

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  1   jours, vous n'avez absolument aucun contact avec les Serbes de Bosnie,

  2   alors qu'une conférence de paix est en cours, et que nous sommes en train

  3   de nous préparer à accepter, le 18 mars, l'accord de Lisbonne. L'entrée qui

  4   correspond au 16, vous êtes à la présidence. Le 17, vous voyez le Dr Hadzic

  5   qui est également un Musulman. Le 18, vous donnez un entretien à la

  6   télévision, et le 19, Ganic et la présidence.

  7   Donc presque un mois s'est écoulé sans que vous ayez le moindre contact

  8   avec les Serbes de Bosnie. Donc le général MacKenzie n'a-t-il pas raison

  9   dans ce qu'il avance ?

 10   R.  Non, il n'a pas raison. J'étais disponible, j'ai pris toutes les

 11   dispositions nécessaires pour être à la disposition de toutes les parties,

 12   toutes les communautés qui souhaitaient venir me parler, toutes religions,

 13   groupes ethniques confondus. Certains étaient plus disponibles que

 14   d'autres. Tous les jours où je me suis rendu à la présidence, j'ai été en

 15   mesure de parler aux membres de cette dernière; Serbes, Croates et

 16   Musulmans. J'étais disponible.

 17   Si, Monsieur Karadzic, vous êtes en train d'essayer de suggérer que j'ai

 18   négligé de quelque façon que ce soit les Serbes par rapport aux autres

 19   groupes ethniques et que j'aurais essayé de les rencontrer moins souvent,

 20   je m'inscris radicalement en faux contre cela, parce que je ne permettrai

 21   pas que mon intégrité soit ainsi remise en question. Je considère cela

 22   comme une insulte à titre personnel. Vous pouvez consulter l'ensemble de

 23   mon journal, si vous voulez. Les gens venaient me voir. Je venais voir

 24   certaines personnes et j'étais toujours à la disposition des autres. Il n'a

 25   jamais eu la moindre accusation portée contre moi ou contre les membres de

 26   la mission des observateurs de la nature de celle que vous venez d'avancer.

 27   Donc je m'inscris absolument en faux contre ceci.

 28   Q.  Colonel, ne m'en veuillez pas. J'aborde les choses sous l'angle

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  1   officiel, et non pas personnel. C'est pratiquement un mois qui s'est écoulé

  2   sans que vous ayez des contacts avec les Serbes de Bosnie. Est-ce que Mme

  3   Plavsic ou le Pr Koljevic aurait dû demander un entretien auprès de vous,

  4   ou bien, n'était-ce pas à vous qu'il revenait de demander à les rencontrer

  5   dans ce contexte ? Alors, si j'ai tort, qu'en est-il de ce journal, est-ce

  6   que ce qui figure dans le journal est faux, à savoir que pendant un mois il

  7   n'y a pas de contacts avec les Serbes ? Et le général MacKenzie, a-t-il

  8   tort de dire que vous nous excluez, et que pour cette raison, votre

  9   popularité, ou plutôt, l'image de marque de la Communauté européenne auprès

 10   des Serbes souffre ?

 11   R.  Monsieur Karadzic, j'ai déjà dit tout ce que j'avais à dire à ce sujet.

 12   Je n'ai rien à ajouter et je n'ai pas l'intention de me répéter.

 13   Q.  Merci.

 14   Est-ce que nous pourrions verser ce journal ainsi présenté au sujet duquel

 15   j'affirme que pendant tout le mois de mars la Mission d'observation de la

 16   Communauté européenne n'a absolument aucune vue des initiatives et des

 17   positions politiques de la direction serbe ? Nous étions pendant cette

 18   période-là à Pale. Il était très facile de venir nous voir.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame le Procureur.

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Bien entendu, je soulève une

 21   objection contre les remarques qui viennent juste d'être faites. En

 22   revanche, je ne m'oppose pas au versement de ce document.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro 65 ter de ce journal

 24   ?

 25   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il faut verser ce document

 27   sous pli scellé ? Je comprends que vous avez remis de votre propre gré ces

 28   documents avec des portions qui ont été expurgées, n'est-ce pas, certains

Page 2962

  1   noms ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Le document sera, donc, versé

  4   --

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce numéro D238.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir maintenant le document

  7   numéro 11086 de la liste 65 ter ?

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Je vais vous demander, très brièvement, Colonel, s'il s'agit bien ici

 10   de la déclaration que j'ai signée le 27 mai 1992 à Lisbonne. Est-ce que

 11   vous vous rappelez que c'est moi qui ai demandé à ce que notre police

 12   escorte les convois, alors qu'on ne m'avait pas demandé cela; vous ne

 13   m'aviez pas demandé cela ?

 14   R.  Excusez-moi, vous venez de me poser une question concernant une

 15   déclaration. J'aurai besoin de quelques instants.

 16   Oui, c'est bien de ce document qu'il s'agit, qui a été signé.

 17   Q.  Est-ce qu'il est bien dit, au paragraphe 2, que la police serbe est

 18   prête - et cela ne nous avait pas été demandé - est prête donc à fournir sa

 19   pleine coopération pour assurer l'escorte, et ce, sur une base régulière

 20   des convois d'aide humanitaire à travers les territoires contrôlés par les

 21   Serbes, et ceci, à des destinations de toute localité et des membres de

 22   toute autre communauté ? Est-ce que vous vous rappelez cette proposition

 23   émanant de nous ?

 24   R.  Je ne me rappelle pas que cette proposition ait été avancée par vous,

 25   mais je n'ai aucune raison de contester ce qui figure ici. Je reconnais que

 26   c'est ce qui figure dans ce document et qui a été signé. Alors, quant à la

 27   question de savoir si cela a été mis en pratique, c'est autre chose.

 28   Q.  Merci.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous verser ce document.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a déjà été versé en tant que pièce

  3   P949.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] 949, en effet.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, de combien de temps

  6   pensez-vous avoir encore besoin pour conclure votre contre-interrogatoire ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pensais avoir toute la journée à ma

  8   disposition, toute la journée d'audience. Mais si c'est nécessaire, je vais

  9   accélérer et poser des questions plus brèves. Si je peux obtenir également

 10   des réponses plus brèves, je pense que je serai en mesure de laisser

 11   disponible ces 40 minutes de temps en fin d'audience.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause …

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Quinze minutes ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons fait une première pause de 30

 15   minutes. Nous allons maintenant interrompre nos débats pendant 20 minutes.

 16   --- L'audience est suspendue à 12 heures 02.

 17   --- L'audience est reprise à 12 heures 24.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, juste une

 20   précision concernant le compte rendu d'audience. Le journal reçoit la cote

 21   D237. Merci.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'aimerais juste

 24   aussi apporter la précision suivante : les portions du journal admises

 25   s'étendent à partir de la date du 1er mars au 11 mai.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous répéter la date.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Du 1er mars au 11 mai.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

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  1   Madame le Procureur, vous n'avez pas d'objection à cela, je présume ?

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voudrais maintenant demander

  5   l'affichage de la pièce P927.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Pendant que ce document s'affiche, Colonel, je souhaiterais attirer

  8   votre attention sur la page 100 correspondant au 21 mai, compte rendu

  9   d'audience du 21 mai. Le Procureur vous a demandé, je cite :

 10   "Ma dernière question : Le Dr Karadzic exerçait un contrôle sur ces

 11   éléments paramilitaires des serbes de Bosnie."

 12   Votre réponse :

 13   "Bien, j'ai toujours supposé qu'il exerçait ce contrôle parce qu'à mesure

 14   que le conflit s'aggravait, il se présentait toujours en présence d'hommes

 15   en armes qui étaient à ses côtés. Certains d'entre eux portaient des

 16   uniformes de la JNA, d'autres, non. Parfois ils les portaient, d'autres

 17   fois, non. Donc c'était mon interprétation, ma compréhension de la chose

 18   que de dire que le dirigeant, le leader des Serbes de Bosnie dirigeaient ou

 19   auraient dû contrôler les Serbes de Bosnie, tous les aspects de leur

 20   organisation, y compris les forces armées."

 21   Juste pour apporter une précision. L'escorte dont je bénéficiais était une

 22   escorte de police attribuée par le MUP, ensuite approuvé également par le

 23   MUP conjoint. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que lorsque je me

 24   rendais en visite à certaines institutions, par exemple, à Belgrade, ces

 25   hommes devaient être en civil ?

 26   R.  Je ne suis pas au fait des détails de l'organisation en matière de

 27   sécurité lorsque vous étiez censé vous rendre à des réunions, donc je ne

 28   sais pas.

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  1   Q.  Je reviens simplement sur votre remarque consistant à dire que certains

  2   d'entre eux ne portaient pas d'uniforme. Mais bon. Alors, est-ce que vous

  3   pourriez nous dire maintenant --

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais avant cela je voudrais qu'on affiche le

  5   document P927, page 3.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire -- non, ce n'est pas le bon document.

  8   Quels sont ces groupes paramilitaires que j'aurais pu contrôler avant la

  9   date du 20 mai ?

 10   R.  Je parlais d'hommes en armes qui étaient des Serbes de Bosnie. Est-ce

 11   qu'ils étaient ou non des forces armées au sens officiel, je l'ignore,

 12   parce que la plupart du temps ils n'étaient pas en uniforme, donc c'était

 13   une supposition de ma part.

 14   Mais compte tenu du conflit en cours, des tirs et des combats en

 15   cours à Sarajevo, il aurait été naïf de ma part de croire que seuls les

 16   Musulmans attaquaient les Serbes et qu'il n'y avait pas de riposte de leur

 17   part.

 18   Donc je crois avoir déjà indiqué ceci hier, Monsieur Karadzic, au

 19   sujet de ces hommes qui assuraient votre protection. Quant à savoir s'ils

 20   constituaient une unité en tant que telle ou si simplement ils étaient des

 21   hommes armés qui assuraient votre protection, je l'ignore.

 22   Q.  Merci. Il s'agissait de huit à 12 hommes qui m'avaient été accordés par

 23   la police. Ça c'est pour vous informer. Mais je disais que nous avons

 24   convenu que chaque municipalité avait sa propre défense territoriale et que

 25   le président de la municipalité commandait la défense territoriale. Vous

 26   avez admis cela, vous avez dit que ceci était conforme à la loi yougoslave

 27   et à la doctrine de la défense populaire généralisée développée par Tito.

 28   Alors, considérez-vous que je pouvais exercer un quelconque contrôle

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  1   sur la défense territoriale jusqu'au 12 mai dans les municipalités qui

  2   avaient un système de voies de communications et un pouvoir nécessaire, une

  3   autorité officielle ? Est-ce que j'avais ce pouvoir et cette autorité pour

  4   être responsable de ces personnes ?

  5   R.  Non. Ce que je dis c'est qu'en tant que dirigeant des Serbes de Bosnie,

  6   je supposais que dans votre qualité de chef, vous aviez ou auriez dû avoir

  7   un certain contrôle sur tous les éléments armés et non armés de Bosnie qui

  8   vous entouraient. Je me trouvais dans un endroit où vous étiez fréquemment

  9   présent, donc c'est cela que je disais, qu'une partie du pouvoir relevant

 10   de la position de direction que vous occupiez permettait de penser que vous

 11   exerciez un contrôle sur ces éléments qui était sous votre influence qu'il

 12   s'agisse de militaires ou pas, car pour moi c'était la même chose.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 15   numéro 11591, puis nous nous pencherons sur la page 3 de ce document. C'est

 16   un rapport du secrétaire général du 12 mai. Alors c'est seulement le 12 mai

 17   que j'ai été élu à un certain poste au sein d'un organe d'état à savoir la

 18   présidence.

 19   Apparemment tout n'a pas été consigné au compte rendu. Conviendrez-

 20   vous avez moi que jusqu'au 12 mai 1992, je n'étais qu'un dirigeant

 21   politique, que je n'avais pas de fonction étatique, de fonction publique,

 22   et que c'est seulement le 12 mai que j'ai été élu au sein de la présidence

 23   en tant que président de la présidence lors de la réunion de l'assemblée

 24   qui s'est tenue le 12 mai à Banja Luka ?

 25   R.  Oui, s'agissant de votre position au sein de l'Etat c'est peut-être le

 26   cas, mais je n'ai aucun doute que vous exerciez une influence énorme sur

 27   tout les Serbes de Bosnie armés et sur les actes qui étaient les leurs dans

 28   la ville de Sarajevo. Nous pouvons parler de ce moment où des tirs

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  1   provenaient de l'hôtel Holiday Inn, et ceci s'est produit à plusieurs

  2   reprises. Donc je n'admets pas que vous n'aviez aucune influence sur les

  3   Serbes portant les armes dans la ville de Sarajevo.

  4   Q.  Qui a tiré à partir de l'Holiday Inn et quand ?

  5   R.  Nous parlons d'une période qui était ultérieure à la publication des

  6   résultats du référendum.

  7   Q.  Mais savez-vous, Colonel, que les tirs provenaient de la tour Unis et

  8   que les Serbes n'auraient pas osé prendre le risque d'avoir 50 000

  9   Musulmans en train de manifester dans les rues ? Si Juka Prazina avait

 10   tiré, cela aurait créé un véritable chaos. Est-ce que vous maintenez que

 11   c'étaient des Serbes qui ont tiré depuis l'Holiday Inn ? Est-ce que vous

 12   avez un élément qui prouve vos   dires ?

 13   R.  Non, je n'ai pas d'élément prouvant mes dires. Mais c'est un point qui

 14   a été généralement admis, et j'essaie de vous le transmettre ici, à savoir

 15   que vous étiez le chef des Serbes de Bosnie. Vous aviez une influence

 16   énorme dans la ville. Et par conséquent, je pense que vous exerciez une

 17   influence sur les éléments armés parmi les Serbes qui étaient dans cette

 18   ville. C'est ce que je suis en train de dire.

 19   Q.  C'est votre opinion personnelle et votre conviction, mais moi, je vous

 20   interroge au sujet de ce que vous savez.

 21   Passons à la page 3 de ce document, qui est déjà une pièce à

 22   conviction. J'aimerais que nous nous concentrions sur la fin du paragraphe

 23   5, où nous lisons :

 24   "M. Goulding avait informé le secrétaire général que des

 25   préoccupations supplémentaires étaient provoquées par la décision des

 26   autorités de Belgrade de se retirer de Bosnie-Herzégovine avant le 18 et

 27   d'en retirer tout le personnel de la JNA qui n'était pas des ressortissants

 28   de cette république. Ceci laissera la Bosnie-Herzégovine sans aucun

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  1   contrôle politique effectif, puisqu'il est question de 50 000 soldats

  2   serbes et de leurs armes. Il est probable que ces armes seront reprises par

  3   la partie serbe."

  4   Voilà ce qui a été rapporté le 12 mai. Et il s'ensuit très clairement

  5   que jusqu'à ce moment-là, la partie serbe n'avait pas de contrôle politique

  6   sur l'armée et qu'à ce moment-là elle ne pouvait pas en avoir. Et j'affirme

  7   que cette décision de créer une armée a été prise le 12 mai et est devenue

  8   effective le 20 mai.

  9   Est-ce que c'est cela ou pas ?

 10   R.  Je ne sais pas. Je sais, en revanche, que vous avez prononcé une

 11   déclaration dans ce sens, à savoir qu'une armée était en train de se créer.

 12   Nous ne parlons pas ici d'une armée. Nous parlons des Serbes de Bosnie qui

 13   portaient les armes - c'est mon point de vue - et qui étaient sous votre

 14   contrôle et sous votre influence. C'est ce dont je suis en train de parler

 15   pour ma part.

 16   Q.  Est-ce que vous avez une preuve de cela, Colonel ?

 17   R.  Non, mais j'ai la durée de ma mission en République de Bosnie, et

 18   je suis très désireux ici de donner mon opinion au sujet d'un certain

 19   nombre de choses parce que vous demandez toujours des faits. Mais lorsque

 20   vous obtenez de ma part l'expression d'une position en toute

 21   responsabilité, vous entreprenez certaines actions et vous me demandez un

 22   résumé, et vous me demandez en particulier de résumer vos positions, vos

 23   conclusions, vos décisions, ce que j'ai toujours essayé de faire. Si vous

 24   n'admettez pas cela comme étant mes conclusions, alors vous en avez le

 25   droit.

 26   Q.  Mais, Colonel, est-ce que vous faites une différence entre une

 27   fonction publique et une fonction au sein d'un parti, autrement dit une

 28   fonction au sein d'un parti et une fonction au sein de

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  1   l'Etat ? Est-ce que, pour vous, il y a une différence entre être le chef

  2   d'un parti politique et le chef d'une structure d'Etat   officiel ?

  3   R.  Oui, il y a une différence. Je répète encore une fois, qu'à mon

  4   avis, vous aviez une influence sur les Serbes de Bosnie et les actions qui

  5   étaient les leurs dans la ville de Sarajevo, et je parle des Serbes qui

  6   portaient les armes. C'est ma conclusion, vous pouvez l'admettre ou pas,

  7   comme vous voulez.

  8   Q.  Mais se prononcer sur une conclusion c'est une chose, mais avoir une

  9   conviction en est une autre. Alors, quels sont les fils que j'aurais dû

 10   tirer pour organiser le peuple de façon autonome au sein d'une communauté

 11   locale et de la Défense territoriale ? Comment est-ce que j'aurais pu

 12   exercer un commandement sur toutes ces personnes ? Qui pouvait les

 13   commander ? Comment est-ce que j'aurais pu mettre tout cela en pratique

 14   étant donné que j'étais dans une salle du Holiday Inn en train de négocier

 15   avec vous, avec Izetbegovic, avec Kukanjac ? Comment est-ce que j'aurais pu

 16   avoir la capacité d'exercer un tel commandement ?

 17   R.  Je ne sais pas. Je n'ai pas d'éléments qui me prouvent cela, mais je

 18   suppose que tel était le cas et que vous aviez des gens qui auraient pu le

 19   faire à votre place.

 20   Q.  Bien. Laissons vos suppositions de côté. Nous boirons ensemble un verre

 21   après la fin de la présente procédure et nous pourrons à ce moment-là

 22   émettre toutes les suppositions que vous voudrez. Mais concentrons-nous

 23   pour le moment sur le paragraphe 7 de ce rapport du secrétaire général. Qui

 24   a tué ce représentant de votre mission ?

 25   R.  Excusez-moi, de quoi parlez-vous ?

 26   Q.  Paragraphe 7.

 27   R.  D'accord, je vais le lire.

 28   Q.  Oui.

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  1   R.  J'ai été informé du fait qu'un membre de la Mission d'observation a été

  2   tué non loin de Mostar. Il venait de Belgique, je crois. Mais je n'ai pas

  3   eu les détails des conditions dans lesquelles la chose s'est produite et je

  4   n'ai pas été informé de l'identité de l'auteur de cet acte."

  5   Est-ce que c'est cela que vous me demandiez ?

  6   Q.  Merci. Nous en avons terminé avec ce document.

  7   Colonel, la chose suivante que je voudrais aborder ce qui relève d'un

  8   document qui n'est pas dans le prétoire électronique, mais je vais vous

  9   lire le passage qui m'intéresse. Ce document date de 1994. Il s'agit de la

 10   définition des effectifs de l'ABiH : officiers, 18 803; soldats, 228 000;

 11   sous-officiers, 24 000; ce qui nous donne un total de 271 000 hommes. Bon,

 12   on me demande de parler plus lentement.

 13   Quoi qu'il en soit, Colonel, est-ce que vous pouvez me dire où ces 18

 14   803 officiers ont été entraînés et éduqués, et où les 24 000 sous-officiers

 15   ont pu être formés ? Est-ce qu'ils étaient sous-officiers d'abord dans

 16   l'ex-JNA ?

 17   R.  Je n'en ai pas la moindre idée.

 18   Q.  A quelle autre armée aurait-ils pu appartenir auparavant ?

 19   R.  Je n'ai pas la moindre idée d'une autre armée à laquelle ils auraient

 20   pu appartenir. Je suppose que la plupart d'entre eux venaient de la JNA.

 21   Mais si vous parlez de la situation numérique des effectifs de l'armée

 22   serbe de Bosnie -- ou plutôt, non, l'armée des Serbes de Bosnie et de

 23   l'ABiH -- au sein de l'ABiH, les éléments qui la composaient n'étaient pas

 24   serbes. Il y avait 18 800 officiers,

 25   228 000 hommes et 24 sous-officiers, ce qui me semble des chiffres très

 26   importants. Je ne sais pas. Vraiment, je ne sais pas.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Le Dr Karadzic a lu un passage d'un

  2   document que nous n'avons pas. Personne d'autre n'est en possession de ce

  3   document. Donc je me demande quelle peut être la valeur de cette citation

  4   émanant d'une source inconnue.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je suis d'accord.

  6   Lorsque vous utilisez un document, vous devriez présenter le

  7   fondement qui vous autorise à l'utiliser. Je suppose que vous allez le

  8   faire. Et si vous pouviez nous dire d'où vient ce document et de quoi il

  9   traite, ce serait bien.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit d'un document musulman qui examine

 11   les effectifs numériques de l'ABiH en date du 1er novembre 1994. Je vais en

 12   demander le versement au dossier à une autre occasion, parce que le colonel

 13   n'était pas présent à l'époque où ce document a été rédigé, sur les lieux.

 14   J'aimerais simplement lui montrer ce document et lui montrer qu'à cette

 15   date-là ils disposaient de près de 300 000 soldats dont la plupart étaient

 16   officiers de l'armée yougoslave et dont les soldats étaient des réservistes

 17   de la JNA.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc je vous dis, Colonel, et je vous soumets une question que je

 20   vous ai déjà posée il y a quelques instants : est-ce que vous admettez le

 21   fait que l'armée populaire yougoslave était la mère de toutes les armées

 22   des républiques qui ont vu le jour après la désintégration de la

 23   Yougoslavie ?

 24   R.  Oui, je suis d'accord que la JNA était l'armée fédérale qui

 25   représentait toutes les républiques. L'ABiH, à l'époque, si nous parlons

 26   des effectifs, avec un tel nombre d'officiers, de sous-officiers et

 27   d'hommes, ça, je n'en avais pas la moindre idée. Je ne sais pas combien il

 28   y avait d'hommes dans les différents corps de cette armée lorsqu'elle s'est

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  1   créée. Je ne sais pas où elle s'est créée, comment les hommes ont été

  2   entraînés ou quel pourcentage provenait de l'armée fédérale. Je ne le sais

  3   pas tout simplement.

  4   Q.  Je vous remercie. J'aimerais maintenant demander l'affichage d'un autre

  5   document sur le rétroprojecteur. Je ne vais pas en demander le versement au

  6   dossier aujourd'hui. Je vais simplement vous le soumettre, Colonel, pour

  7   que vous l'examiniez, et j'aimerais que vous nous disiez objectivement

  8   quelles étaient les forces à la disposition de l'ABiH. Et d'ailleurs, je

  9   tiens à dire que la partie musulmane avait plus de deux fois et demie le

 10   nombre de soldats dont disposaient les Serbes à ce moment-là, et ce, depuis

 11   le début. Les Musulmans étaient prêts pour la guerre, ils étaient bien

 12   armés, notamment après le départ des soldats des casernes de la JNA.

 13   Et maintenant, comme je le dis, je vais vous soumettre ce document

 14   affiché sur le rétroprojecteur pour que vous l'examiniez, mais je ne vais

 15   pas en demander le versement au dossier aujourd'hui. Cela vous donne

 16   simplement une idée des actions lancées par le 2e Corps de l'ABiH dans la

 17   période où vous vous trouviez sur place, c'est-à-dire jusqu'au 12 mai.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais avant que vous ne soumettiez ce

 19   document au témoin, dites-nous, quelle est la nature de ce document, ce

 20   dont il traite.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, le numéro du document se trouve en haut,

 22   0203-1418, c'est un document qui vient du bureau du Procureur, et son

 23   intitulé, on peut le lire en haut de la page, c'est une liste -- oui,

 24   merci, une liste des opérations de combat menées dans la zone de

 25   responsabilité du 2e Corps entre 1992 et 1995.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  C'est bien le Corps de Tuzla, n'est-ce pas ? C'est bien cela, Colonel ?

 28   R.  Excusez-moi, je ne sais pas.

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  1   Q.  Vous ne saviez pas que Tuzla abritait le 2e Corps de la JNA -- ou

  2   plutôt, de l'ABiH ?

  3   R.  Oui, je sais qu'un corps était basé à Tuzla. Mais je ne comprends pas

  4   quel est l'intitulé de ce document.

  5   Q.  Vous voyez le numéro ERN en haut, c'est un document que nous avons reçu

  6   de l'Accusation.

  7   R.  Non, mais je parle du document. Je ne parle pas du numéro. Que veut

  8   dire le titre de ce document ?

  9   Q.  Le titre est le suivant : "Liste des combats menés dans la zone de

 10   responsabilité du 2e Corps entre 1992 et 1995." J'ai surligné en rouge les

 11   éléments qui concernent la période où vous étiez présent sur ce territoire.

 12   Regardez, numéro 5, l'attaque de Cer, par exemple, elle a eu lieu le 26

 13   avril. Pour le reste, nous avons des actions défensives. La défense de

 14   Becirevic, la défense de Potocari, l'attaque de Snagovo et l'attaque de

 15   Cer.

 16   Puis au numéro 8, nous voyons attaque de Setici, et il est écrit de

 17   Setici serbe, puis de Zvornik, parce qu'il y a eu une attaque de Setici le

 18   1er mai.

 19   Ensuite, on a le numéro 13, action de diversion contre la partie

 20   serbe de Nezuk. Parce que vous aviez un village musulman et un village

 21   serbe qui portaient le même nom. Les Musulmans se sont débarrassés de la

 22   partie serbe du village. Mais tout ça c'est dans la municipalité de

 23   Zvornik. Puis il y a l'attaque du village de Sapna.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, quelle est votre

 25   question ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ma question c'est que pendant la durée du

 27   séjour sur place du colonel, le 2e Corps de l'ABiH était totalement prêt et

 28   très bien préparé à lancer un certain nombre d'opérations armées, dont

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  1   nombre d'entre elles étaient de nature offensive, et je souhaiterais

  2   soumettre au colonel le fait que les Musulmans n'étaient pas impuissants et

  3   n'étaient pas les agressés. Ils avaient leur propre armée et ils ont lancé

  4   des combats.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Et ici, nous avons la liste de toutes les actions entreprises par le 2e

  7   Corps, Colonel, pendant la durée de votre séjour en Bosnie.

  8   R.  J'aimerais vous demander, Monsieur Karadzic, si ce document a été

  9   établi par la JNA en sa capacité officielle ou si ce document a été établi

 10   par ce que vous venez d'appeler l'ABiH ?

 11   Q.  Ce document a été établi par ce que j'appelle l'ABiH et dont je parle

 12   également comme étant l'armée musulmane, parce qu'il s'y trouvait un nombre

 13   vraiment négligeable de Serbes et de Croates. Ceci c'est donc l'état

 14   numérique des effectifs de ce qu'il était convenu d'appeler l'ABiH qui,

 15   depuis le premier jour, a mené des actions de combat offensives. Et M.

 16   Martin Bell vous a informé du départ des civils de Zvornik, et vous voyez

 17   qu'à Zvornik et dans les environs de Zvornik des combats féroces ont été

 18   menés et que le Corps de Tuzla y a participé.

 19   Ma question est la suivante : saviez-vous que le Corps musulman de

 20   Tuzla était prêt, à partir du 4 avril, à intervenir dans des actions armées

 21   ?

 22   R.  Non, je n'en étais pas conscient.

 23   Q.  Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation] Je demande que l'on fasse défiler la page

 25   jusqu'au numéro 12 pour que nous voyions les nombreuses actions offensives

 26   menées par ce corps d'armée.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais quelle est l'utilité d'interroger

 28   le témoin sur ce sujet puisqu'il n'a aucune connaissance de cela ?

Page 2976

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, il devrait avoir des connaissances.

  2   Le colonel était le chef de la mission des observateurs, il est allé en

  3   Krajina, il est allé à Derventa aussi. Si j'avais suffisamment de temps, je

  4   lui soumettrais les actions qui ont été commises contre la population serbe

  5   de Derventa, il y en a eu. Il devrait savoir que l'armée musulmane était

  6   bien préparée et qu'elle avait des effectifs nombreux, puisque dès le 4

  7   avril, elle était capable de mener des combats très intenses. Et s'il le

  8   sait, il s'agit évidemment de renseignements tout à fait significatifs.

  9   S'il ne le sait pas, de son propre aveu, il devrait nous dire qu'il n'était

 10   pas à un poste suffisamment important pour être informé de ce genre de

 11   choses. Mais à ce moment-là, nous devrions demander à son supérieur d'être

 12   entendu par ce Tribunal. Nous avons ici une mention du fait qu'il était à

 13   Zvornik, et Zvornik faisait partie de la zone de responsabilité du 2e Corps

 14   d'armée.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au lieu de lire le document, veuillez

 16   poser une question précise au témoin.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai posé une question et je souhaitais obtenir

 18   une réponse.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  La thèse que je défends consiste à dire que l'armée musulmane avait

 21   suffisamment d'effectifs humains et suffisamment d'armes pour, à partir du

 22   premier jour, c'est-à-dire à partir du 4 avril 1992, se mettre à lancer des

 23   actions offensives, et c'est ce que démontre ce document. Est-ce que vous

 24   le saviez ? Vous avez répondu en disant vous ne le saviez pas.

 25   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je possède une traduction du document

 28   dont nous sommes en train de parler, et ce que nous entendons de la bouche

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  1   de M. Karadzic en ce moment est une interprétation déformée du contenu du

  2   document. Bien sûr, je me penche sur la version anglaise, mais en tout cas,

  3   pour ma part, je dirais qu'il est surtout question de la défense d'un

  4   certain nombre de villages dans ce document. Il n'est pas question de ce

  5   que nous venons d'entendre, à savoir d'actions offensives.

  6   Alors, si nous devions continuer à utiliser ce document, je pense que

  7   nous devrions disposer également de sa version anglaise, car il est certain

  8   qu'elle donne une idée différente de la situation, en tout cas pour les

  9   actions armées qui ont été menées.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Très utile de votre

 11   part. Mais je pense que nous sommes pratiquement arrivés à la fin du débat

 12   sur ce sujet. Aimeriez-vous faire afficher la traduction anglaise et

 13   continuer vos questions ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons plus besoin d'insister sur ce

 15   document. Je souhaitais simplement dire que j'avais surligné les actions

 16   offensives. Bien entendu, il y a eu des actions défensives également, mais

 17   comme vous le verrez plus tard, je me suis limité dans tout ce document à

 18   ce qui concerne la période allant jusqu'au 12 mai. Mais le document dans

 19   son intégralité indique qu'il y a eu plus d'actions offensives que

 20   d'actions défensives. Je dis ce qui est exact, à savoir que les Musulmans

 21   étaient organisés et armés, parce que le 4 avril ce corps d'armée a

 22   commencé immédiatement à lancer des actions.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Ma deuxième question, Colonel, est la suivante : savez-vous que M.

 25   Izetbegovic a déclaré une mobilisation générale le 4 avril ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Je vous remercie. Admettez-vous que vous n'avez pas reçu les

 28   informations complètes de la part de M. Bell au sujet des événements

Page 2978

  1   survenus à Zvornik ?

  2   R.  Bien, je ne sais pas si mes informations étaient complètes ou pas. Il

  3   est venu me voir au sujet d'un incident en particulier, et c'est tout.

  4   S'agissant du document que nous avons sous les yeux en ce moment,

  5   j'ai passé en revue tous les plus importants commandants hauts gradés de la

  6   JNA en Bosnie, et aucune de ces questions ne m'a été soumise lorsque j'ai

  7   rencontré ces commandants. C'étaient des questions générales. L'armée qui

  8   s'appelait la JNA et ses commandants se préoccupaient de l'avenir, de la

  9   stabilité dans la république, mais lorsque je me suis mis à la disposition

 10   de l'ensemble de ces commandants, j'ai rencontré chacun, et je pense que le

 11   nom du commandant était le général Jankovic à Tuzla, dans ce secteur. Mais

 12   aucune de ces questions n'a jamais été soumise à mon attention durant cette

 13   réunion. Donc je ne nie pas que ces événements ont eu lieu. Je dis

 14   simplement que je n'en ai pas eu connaissance et que je n'ai pas eu de

 15   rapport à ce sujet.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Colonel, s'agissant de la mobilisation

 17   générale, nous parlons de 1992.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. C'est une erreur. Je pensais que

 19   nous parlions de la décision du président.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le président Izetbegovic a décrété la

 23   mobilisation générale. Vous avez répondu oui à la question de savoir si

 24   cela s'était bien passé le 4 avril.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. En fait, je ne suis pas au courant.

 26   Excusez-moi, je pensais que M. Karadzic parlait de la déclaration de la

 27   bouche du président selon laquelle il ne devait pas y avoir mobilisation de

 28   la JNA. C'est une erreur de ma part. Toutes mes excuses.

Page 2979

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

  3   Q.  Saviez-vous qu'Izetbegovic avait décrété la mobilisation générale en

  4   Bosnie-Herzégovine pour la Défense territoriale, la police, et tous les

  5   éléments concernés le 4 dans la soirée ?

  6   R.  Je me souviens qu'il a lancé un appel à la mobilisation, mais je ne me

  7   rappelle pas quand.

  8   Q.  Merci. Pour votre information personnelle, les représentants serbes de

  9   la présidence, Mme Plavsic et M. Koljevic, se sont opposés à cela, et il ne

 10   pouvait pas y avoir appel à la mobilisation sans leur assentiment.

 11   Je demande maintenant l'affichage d'un rapport dont vous êtes

 12   l'auteur qui date du 7 mai, et dans ce rapport vous informez M.

 13   l'Ambassadeur Cutileiro au sujet des événements de Mostar. Il y avait deux

 14   membres de la FORPRONU à Mostar qui ont été blessés à l'époque. D'ailleurs,

 15   l'un d'entre eux était blessé grièvement. Et vous poursuivez. Il s'agit

 16   d'un de vos associés Boban HDZ.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir à l'écran la pièce

 18   1D01281.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Bien. Vous informez le fait que Boban et Karadzic ont conclu un accord

 21   lors d'une réunion concernant la résolution de toutes les différences

 22   existant entre les deux nations par le biais de la conciliation, y compris

 23   la délimitation des territoires sous l'égide de la Communauté européenne.

 24   Ils ont fermement confirmé l'accord de principe défini dans le cadre de la

 25   conférence de Lisbonne. Il n'y a aucune raison que les conflits armées

 26   entre les Serbes et les Croates se poursuivent. La délimitation

 27   territoriale entre nations sera effectuée jusqu'au 15 mai. Le cessez-le-feu

 28   sera donc décrété à partir d'aujourd'hui, 24 heures."

Page 2980

  1   Vous souvenez-vous des événements qui sont relevés dans ce rapport ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Sur la route du retour de Lisbonne, M. Boban et moi-même, nous sommes

  4   rencontrés à Graz, et nous avons conclu, suite à la conférence et à l'appel

  5   de M. Carrington, que nous devions accepter cette carte qui servait de

  6   carte de travail et qu'il ne servait à rien de se battre pour un petit

  7   nombre de territoires encore disputés entre les parties. Donc vous ne vous

  8   en souvenez pas, mais vous étiez quand même là-bas. Ce document a été

  9   envoyé alors que vous étiez encore sur place, n'est-ce pas ?

 10   R.  Ecoutez, il s'agit d'une mission des observateurs de la Communauté

 11   européenne dont j'étais le chef. Le chef de mission est basé à Zagreb. Là,

 12   on parle de l'ambassadeur Salguero, mais en fait, je n'ai aucune

 13   connaissance de ce document.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Ce document peut-il être versé ?

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je soulève une objection.

 16   [La Chambre de première instance se concerte] 

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que ce document vient de

 18   l'organisation à laquelle appartient le témoin, donc il n'y a aucun doute

 19   sur son authenticité, nous allons l'admettre.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D238.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Pourrions-nous avoir à l'écran la

 22   pièce 1D01247.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Donc ce général Jankovic dont vous avez parlé donne des informations le

 25   3 avril sur tous les événements qui se sont déroulés jusqu'au 3 avril, y

 26   compris le 3 avril. Je vous disais ça en attendant l'affichage du document.

 27   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 2981

  1    Q.  Donc c'est un document qui n'est pas traduit, mais je vais vous en

  2   donner lecture. Ici, au paragraphe 3, il est écrit que les formations

  3   paramilitaires venant du village de Koraci [phon] ont ouvert le feu sur les

  4   unités de la JNA situées dans plusieurs villages. Paragraphe suivant, il

  5   est écrit que l'un de nos soldats a été tué dans le cadre du conflit. Donc

  6   la guerre vient de commencer officiellement. Dernier paragraphe de la

  7   première page :

  8   "Le 3 avril 1992, une réunion à Tuzla, réunion du Conseil de la

  9   Défense nationale."

 10   On vous a donné les PV de la réunion. A 17 heures, il y a aussi une

 11   réunion de l'assemblée municipale de Tuzla sur la situation politique et

 12   sur la situation de sécurité des territoires du SO de Tuzla, et notre

 13   représentant n'y a pas été invité. Le 3 avril, il y a eu aussi une réunion

 14   portant sur la sécurité politique dans la municipalité de Doboj, à laquelle

 15   a participé le commandant de la 6e Brigade militarisée sur le territoire,

 16   et cetera, et cetera.

 17   Au territoire de la municipalité de Brcko, les forces de réserve de la

 18   police ont été appelées et les commissariats et différentes stations de

 19   police sont établis dans certains hameaux. Les dirigeants des partis

 20   internationaux se préparent à de nouveaux conflits. Les armes sont

 21   distribuées de façon publique aux membres du SDA, et ce, dans différents

 22   endroits publics. A 15 heures, le 3 avril, les armes ont été distribuées

 23   aux membres du SDA de plusieurs villages dans une municipalité --

 24   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le nom.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Donc tous ces hommes sont censés maintenant se rendre vers Bijeljina

 27   les 3 et 4 avril 1992.

 28   Vous avez parlé du général qui n'avait pas beaucoup de sympathie pour

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  1   notre cause. Mais c'est un général assez vieux jeu qui était contre tous

  2   les partis nationaux de toute façon, et contre le système multipartite.

  3   Mais ici, ses soldats sont en train de se faire tuer dès le début de la

  4   guerre, et il en informe son commandement. Je comprends, je sais que nous

  5   autres, les Serbes, ne savions pas très bien nous vendre, et c'est vrai.

  6   Mais vous acceptez quand même qu'il y avait des tensions, tout ce qui se

  7   passait autour de Tuzla était -- la situation autour de Tuzla était

  8   extrêmement tendue, n'est-ce pas, bien que ce soit d'anciens communistes

  9   qui étaient encore au pouvoir du côté de Tuzla à l'époque ?

 10   R.  Ecoutez, je ne vois pas pourquoi je n'accepterais pas le contenu de ce

 11   rapport rédigé par ce général. Je ne sais pas grand-chose. Je ne sais rien

 12   d'ailleurs sur les incidents auxquels il fait référence, mais je n'ai

 13   aucune raison de m'y opposer.

 14   Q.  Bien.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander le versement de ce document

 16   sous cote MFI.

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous avons eu la traduction de ce

 18   document, car il s'agit du duplicata, en fait, d'une pièce que l'Accusation

 19   souhaitait utiliser aussi, le 07089. C'est un document qui est traduit, et

 20   sous cette cote vous devriez trouver la traduction dans le système

 21   électronique. Et bien sûr, nous ne soulevons aucune objection à son

 22   versement.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ce document sera versé au

 25   dossier.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce 07089 recevra la cote D239.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, venez-en à la

 28   conclusion, s'il vous plaît. Vous devez terminer votre contre-

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  1   interrogatoire.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] De combien de temps est-ce que je dispose ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cinq minutes.

  4   [Le conseil de la Défense se concerte]

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce D225 à l'écran,

  6   s'il vous plaît.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous souvenez de l'apparence de la

  9   ligne de front lorsque vous étiez là, ligne de confrontation lorsque vous

 10   étiez sur place ?

 11   R.  Soyez plus précis, s'il vous plaît. Vous me parlez de quelle époque

 12   exactement ? J'ai quand même passé un bon moment sur place.

 13   Q.  Le conflit a démarré le 6 avril en ce qui nous concerne, mais il a

 14   commencé avant peut-être. Disons, du 6 avril au 12 mai, dites-nous à quoi

 15   ressemblait la ligne de confrontation, la ligne de démarcation, si vous

 16   vous en souvenez ?

 17   R.  Je ne m'en souviens pas, du tout.

 18   Q.  Voyez-vous ces zones bleues qui représentent les régions à majorité

 19   serbe ?

 20   R.  Oui, je le vois sur la carte.

 21   Q.  Vous vous souvenez que la ligne de démarcation suivait dans les grandes

 22   lignes ces régions bleues.

 23   R.  Oui, dans les détails, je pense que oui, en effet, mais sachez que la

 24   Mission d'observation ne s'occupait pas de la délimitation détaillée des

 25   territoires selon la composition ethnique des différentes régions. Nous ne

 26   voulions pas être impliqués dans ce genre de choses. Comme je vous l'ai

 27   déjà dit, nous n'avons pas voulu nous occuper des frontières internes dans

 28   les municipalités, et cetera, et cetera.

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  1   On était plutôt là pour parler aux gens et parler aux partis

  2   politiques, aux groupes politiques. On s'occupait très peu de cartes, voire

  3   pas du tout.

  4   Q.  Conviendrez-vous avec moi que ce dont on parlait pendant la guerre

  5   comme étant la Republika Srpska est une région qui est, en fait limitée, à

  6   ces régions qu'on voit en bleu sur cette carte ?

  7   R.  Oui, de façon générale, oui.

  8   Q.  Bien.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant avoir à l'écran la

 10   pièce 1D01275.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Il s'agit d'un document émanant de l'ABiH en date du 29 avril.

 13   Voyez-vous cette conversation -- en anglais, la date est le 28 août

 14   1992, mais je pense qu'il s'agit du mois d'avril au vu du contenu. Quand je

 15   lis le contenu, je pense que ceci s'est passé en avril. Donc le général

 16   Siber parle à Hosen. Hosen est sans doute un officier de la FORPRONU. Il

 17   est écrit, ici : Trois soldats français ont été grièvement blessés à

 18   Nedzarici. L'un d'entre eux a perdu un œil, et l'autre est sérieusement

 19   blessé. Donc --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Karadzic, vous lisez

 21   trop vite, et vous n'avez même pas dit aux interprètes quel est le passage

 22   que vous êtes en train de lire.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je lis -- non, je reprends.

 24   "Sachez que ce n'est pas un jeu. Je suis très ouvert. Je suis venu

 25   ici pour vous aider. La volonté des Nations Unies qui souhaitent établir la

 26   paix doit être réalisée. Il faut faire taire les armes. Il faut pouvoir

 27   entendre la paix." Et cetera, et cetera.

 28   Ensuite, un peu plus tard, il est écrit :

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  1   "Trois soldats français ont été blessés sérieusement à Nedzarici

  2   aujourd'hui."

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce que vous savez que Nedzarici est un quartier serbe qui se trouve

  5   près de Dobrinja ?

  6   R.  Non, je ne connais pas cet endroit.

  7   Q.  Ensuite, il est écrit --

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si on pouvait voir le bas de la page en

  9   anglais. Il est écrit à environ "500 mètres." Il faudrait que nous voyions

 10   mieux le document en anglais.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  "En ce qui concerne la distance de 500 mètres allant jusqu'à nos

 13   installations, sachez que ce n'est pas respecté.

 14   Ensuite :

 15   "Il y a trois jours, ces mortiers ont été activés près du bâtiment

 16   des PTT. Les Serbes ont riposté et ont frappé notre bâtiment. Fort

 17   heureusement, il n'y a pas eu de victimes. Je vous demande votre

 18   coopération et votre compréhension. Ordonnez qu'une distance de 500 mètres

 19   de nos installations soit respectée."

 20   Et Siber répond en disant :

 21   "Nous avons déjà donné cet ordre."

 22   Ensuite, Hosen répond :

 23   "Nous avons --

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir la page suivante en

 25   anglais, s'il vous plaît.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Hosen dit donc :

 28   "A Londres, nous avons obtenu des garanties des Serbes aussi que dans les

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  1   96 heures ils permettraient à la FORPRONU d'avoir accès à tous les

  2   emplacements où se trouvent des armes lourdes autour de Sarajevo. Et

  3   j'imagine que vous nous donnerez la même chose."

  4   Donc vous avez parlé du bâtiment des PTT, et je vous affirme que

  5   c'était ce qui se passait absolument tout le temps. Les mortiers

  6   d'artillerie des Musulmans s'approchaient des installations des Nations

  7   Unies, ensuite tiraient. Et lorsqu'ils tiraient sur ces installations,

  8   ensuite lorsque nous ripostions, ils nous accusaient et nous faisaient

  9   endosser la faute.

 10   Dans le paragraphe suivant, il est écrit qu'à Nedzarici les Nations Unies

 11   étaient occupées à réparer les installations, comme le gaz, et cetera, des

 12   installations dont tout le monde avaient besoin, et qu'un Musulman a tiré

 13   sur ce quartier et a blessé trois soldats français, donc.

 14   Saviez-vous que c'est ainsi que fonctionnait l'armée

 15   musulmane ? Ils apportaient leurs armes près des installations des Nations

 16   Unies, ensuite ouvraient le tir. Et cette personne, M. Hosen, est en train

 17   d'exiger que la distance de sécurité de 500 mètres soit respectée.

 18   R.  De toute façon, je sais, en tant que militaire de carrière, que les

 19   parties en présence utilisent souvent, dans le cadre d'un conflit, les

 20   installations des Nations Unies pour s'en approcher et pour tirer sur

 21   l'ennemi, parce qu'ainsi ils savent que l'ennemi ne voudra pas riposter,

 22   car il risque de frapper les installations des Nations Unies. C'est une

 23   tactique qui est employée partout, en tout cas dans les pays où j'ai servi

 24   sous l'égide des Nations Unies. C'est un document que j'ai déjà vu, mais je

 25   ne connais pas ce Hosen. C'est sans doute un général des Nations Unies. En

 26   tout cas, il s'agit d'une personne qui a servi au sein des Nations Unies et

 27   de la FORPRONU. Mais je ne connais pas bien le --

 28   Q.  Mais je parle, en fait, de cette tactique utilisée, dont vous dites que

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  1   toutes les parties employaient cette tactique. Moi, je dis que le camp

  2   serbe n'utilisait pas cette tactique, et ça, je l'affirme.

  3   Maintenant, voyons ce que la police serbe a à dire. Il nous faut donc

  4   afficher un autre document.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais tout d'abord, j'aimerais demander le

  6   versement de celui-ci.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin n'a pas fait de commentaire à

  8   propos de ce document.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si, il a dit précédemment que les Serbes

 10   avaient tiré sur le bâtiment des PTT pour une mauvaise raison. Il l'a dit

 11   il y a un bon moment. Mais moi, je dis qu'il y avait raison de le faire, en

 12   fait.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aurez une autre occasion pour

 14   présenter ces éléments de preuve.

 15   Dernière question maintenant.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais montrer le document de la police

 17   serbe à propos de ce même événement pour bien montrer qu'il y a

 18   correspondance entre les deux versions.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, mais le témoin n'a pas pu répondre

 20   à aucune question à propos de cet incident, donc ça ne sert à rien.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Donc dernière question. Je parle ici d'un schéma tactique. Non pas

 24   d'incident individuel, mais d'un schéma tactique. Donc est-ce que vous

 25   excluez toute possibilité que le camp musulman ait utilisé ce schéma

 26   tactique, surtout en ce qui concerne le bâtiment des PTT, mais aussi en ce

 27   qui concerne d'autres installations des Nations Unies ?

 28   R.  Lorsque je me trouvais dans le bâtiment des PTT, qui était le QG de

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  1   l'opération de la FORPRONU et des Nations Unies, et je pense que ce sont

  2   ces personnes qui sont plus à même de répondre à votre question que moi,

  3   mais je sais qu'il y a eu des obus de mortier qui ont été lancés sur ce

  4   bâtiment alors que j'étais en train d'essayer de négocier un cessez-le-feu.

  5   Quant à savoir qui avait tiré, je n'en sais rien. L'impression était que

  6   cela venait de points élevés aux alentours de Sarajevo, ce qui donne à

  7   penser que c'était sans doute des obus émanant de positions des Serbes de

  8   Bosnie. Mais cela dit, nous n'avons aucune preuve. C'était juste une

  9   impression, et rien d'autre.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Donc le Juge Baird a des

 12   questions à poser avant que Mme le Procureur ne pose ses questions

 13   supplémentaires.

 14   Questions de la Cour :

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] J'ai besoin de votre aide, Monsieur le

 16   Témoin, et surtout votre déposition d'hier.

 17   En réponse à une question du Dr Karadzic, lorsqu'il vous a demandé :

 18   "Est-ce que, d'après vous, il y avait des discriminations au niveau

 19   des loyers avec un prix pour les Musulmans et un autre prix pour les Serbes

 20   ?"

 21   Vous avez répondu :

 22   "Oui, c'est ce que j'ai compris dans le cadre de cette réunion."

 23   Vous le maintenez ?

 24   R.  Oui.

 25   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Ensuite, il vous a

 26   demandé :

 27   "Avez-vous vérifié la chose auprès des Serbes ? Avez-vous posé la

 28   question au maire pour vérifier ?"

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  1   Et vous avez dit :

  2   "Je n'en ai pas parlé au maire et je ne l'ai pas vérifié.

  3   R.  Oui, c'est ce dont je me souviens.

  4   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Voici ma question : y a-t-il une raison

  5   pour laquelle vous n'avez pas vérifié cet état des choses ?

  6   R.  Un grand nombre des points qui étaient soulevés dans le cadre de nos

  7   réunions étaient des points que nous essayions de faire monter au niveau

  8   supérieur au niveau de la hiérarchique. Donc je ne me souviens pas vraiment

  9   si j'en ai parlé avec le maire. C'était quand même il y a longtemps, il y a

 10   18 ans. Peut-être je l'ai fait, peut-être non. Il y avait un grand nombre

 11   de problèmes, de toute façon, qui étaient évoqués lors de ces réunions.

 12   Nous essayions d'attirer l'attention des autorités sur les problèmes

 13   qui étaient portés à notre attention afin de savoir s'il pouvait y avoir

 14   une solution. En fait, ma réponse est que je ne peux pas vraiment vous

 15   répondre, parce que je ne me souviens pas.

 16   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est à vous, Madame le Procureur.

 18   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Puis-je avoir la pièce 07868 à

 19   l'écran.

 20   Nouvel interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :

 21   Q.  [interprétation] Vous avez parlé d'une lettre avec le Dr

 22   Karadzic, lettre que Karadzic aurait envoyée à Cutileiro le 5 juin 1992.

 23   Dans votre réponse, vous dites que vous ne vous en souvenez pas et que vous

 24   n'avez aucune connaissance de cette lettre.

 25   Voici la réponse qui est -- non, voici la lettre telle qu'elle est

 26   maintenant :

 27   "Merci de votre lettre du 5 juin."

 28   Il s'agit de la réponse de Cutileiro en date du 12 juin, et au

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  1   premier paragraphe, il est fait référence à Lord Carrington et à son

  2   opinion, où il dit :

  3   "Je crois fermement que la seule façon de faire la paix en Bosnie-

  4   Herzégovine c'est par le biais des négociations."

  5   Il poursuit en disant :

  6   "Les demandes territoriales qui ont été obtenues par le biais de la

  7   force sont inacceptables."

  8   Etait-ce bien le point de vue de Lord Carrington à l'époque ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Dernier paragraphe. Cutileiro dit :

 11   "Il y a une chose. En ce qui concerne le dernier paragraphe de votre

 12   lettre, l'Union européenne ne vous a fait aucune promesse. Ce qui est

 13   arrivé, et vous le savez bien, c'est que les négociations sur les

 14   dispositions constitutionnelles à venir de Bosnie-Herzégovine parmi les

 15   trois partis politiques (musulmans, serbes et croates) sous ma présidence

 16   ont été mis en place par Lord Carrington au début du mois de février. Le 18

 17   mars, nous avons conclu un accord sur certains principes. La validité de

 18   cet accord, néanmoins, ne peut être maintenue que si les frontières et les

 19   compétences des unités constituantes sont définies et négociées par le

 20   biais d'un consensus, et non par la force, et uniquement si les territoires

 21   qui ont subi un nettoyage ethnique sont restaurés dans leur composition

 22   ethnique d'avant le guerre. Je pense que vous comprenez bien qu'il est dans

 23   l'intérêt de votre camp de faire tout pour que nous réussissions à

 24   atteindre ces résultats."

 25   Avez-vous des commentaires à faire là-dessus ?

 26   R.  Non. Comme je l'ai déjà dit, je savais bien qu'il devait y avoir des

 27   éléments d'accord en date du 18 mars. En revanche, j'ai bien dit que je ne

 28   connaissais pas le contenu même de ces dispositions, ce qui renforce

Page 2992

  1   exactement ce que disait M. Cutileiro, que je n'ai aucune raison d'ailleurs

  2   de contester. Mais je tiens à vous dire que personnellement, je n'ai pas

  3   été impliqué dans ces négociations, et donc il m'est impossible d'avoir la

  4   moindre opinion à ce propos.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Très bien. Nous aimerions demander le

  6   versement de cette pièce, s'il vous plaît, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle recevra la cote P952.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Pourrait-on maintenant avoir à

 10   l'écran 12051 de la liste 65 ter, première page en anglais et en B/C/S,

 11   s'il vous plaît.

 12   Q.  Hier le Dr Karadzic, à plusieurs reprises, a parlé avec vous de

 13   l'existence ou la non-existence d'une armée des Serbes de Bosnie avant la

 14   création officielle de la VRS et avant le retrait de la JNA, en mai 1992.

 15   Et voici ce qu'il vous a affirmé - ici, je fais référence à la page 2 890

 16   du compte rendu d'audience - il vous a dit ce qui suit :

 17   "Etes-vous d'accord pour dire que jusqu'au 20 mai les Serbes de Bosnie

 18   étaient sous le commandement de la JNA ou de leur propre organisation

 19   territoriale, alors qu'à cette même époque les Musulmans avaient déjà leurs

 20   propres formations armées."

 21   Regardez la page que nous avons à l'écran ici. Il s'agit d'un article de

 22   presse d'"Oslobodjenje" écrit "Joyeux anniversaire, République," et c'est

 23   une interview de Radovan Karadzic en date du 6 avril 1995.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Pourrions-nous avoir la page 3 en

 25   anglais, mais la page 1 en B/C/S.

 26   Q.  Au premier paragraphe -- je vais juste vérifier.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Page 3 en anglais ?

 28   Q.  Dans le premier paragraphe, on cite le Dr Karadzic qui

Page 2993

  1   dit :

  2   "Bien entendu, la Republika Srpska est une réalité, tout comme la

  3   République de la Krajina serbe est une réalité, et nous considérons qu'il

  4   ne s'agit là que d'étapes conduisant à la création d'un Etat serbe unique."

  5   Colonel, cette idée d'un Etat serbe unique représente-t-elle quelque chose

  6   que vous avez entendu évoquer pendant des réunions ou dans des conférences

  7   ?

  8   R.  Oui, le sentiment général lors de ces conférences était que l'objectif

  9   général des Serbes était de permettre le rattachement des territoires

 10   contrôlés par les Serbes en Bosnie aux territoires de la Bosnie afin de

 11   créer une Grande-Serbie. C'était la compréhension générale qu'on avait de

 12   cela.

 13   Q.  Et plus loin dans la même page - et c'est en page 2 du B/C/S - il est

 14   indiqué -- en anglais, c'est toujours le Dr Karadzic qu'on cite :

 15   "Nous avons une liste des actions et des étapes à suivre, mais nous avons

 16   toujours attendu que les Musulmans fassent une erreur, et à chaque fois

 17   qu'ils en auront commis une, nous procéderons à une union des municipalités

 18   et des Régions autonomes serbes, suivies des régions, et éventuellement la

 19   constitution de notre propre assemblée et d'une république. Chaque fois que

 20   les Musulmans et les Croates, par l'intermédiaire de leurs représentants,

 21   nous ont dit que nous nous séparerions de l'ancienne Bosnie-Herzégovine,

 22   nous répondions que nos actions n'intervenaient qu'en réponse à leurs

 23   propres erreurs et à leur agression conduite contre nos droits politiques."

 24   Colonel, est-ce que cela est cohérent avec l'information dont vous

 25   disposiez pendant votre présence sur le terrain ?

 26   R.  Oui.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Passons maintenant à la page 4 de

 28   l'anglais et c'est la page 2 en B/C/S, toujours.

Page 2994

  1   Q.  Je lis maintenant un autre extrait des propos tenus par M. Karadzic :

  2   "Le SDS s'est également illustré dans les affrontements armés. C'était la

  3   première fois que le peuple savait ce qui l'attendait. Avec une défense

  4   aussi bien organisée, la majorité de notre population a été sauvée et des

  5   lignes faisant face à l'ennemi ont été mises en place. Nous devrions

  6   toujours nous rappeler que le peuple lui-même et le SDS ont combattu et ont

  7   conquis les lignes en question en l'espace de 45 jours, du 5 avril au 20

  8   mai, alors que notre armée était toujours en cours de constitution.

  9   Finalement, bien entendu, cette armée est devenue une armée non partisane,

 10   mais nous n'avons pas voulu en tout cas y nommer le moindre commissaire

 11   issu des rangs du SDS parce que nous comptions sur le patriotisme de chacun

 12   des officiers et des soldats."

 13   Colonel, est-ce que cela est cohérent avec ce que vous avez observé sur

 14   place, ce à quoi vous vous êtes également référé et dont vous avez fait

 15   état pendant que vous étiez en mission ?

 16   R.  Oui.

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Juste encore un autre point. Excusez-

 18   moi.

 19   Pouvons-nous avoir la pièce 11591, s'il vous plaît. Oh, excusez-moi.

 20   J'ai oublié de demander le versement du document précédent.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote P953.

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci. Encore une fois, je voudrais

 24   le document numéro 11591 de la liste 65 ter, qui a déjà été versé. Il

 25   s'agit d'un rapport de suivi -- non, ce n'est pas le bon document. Il

 26   devrait s'agir du rapport du suivi du secrétaire général daté du 12 mai

 27   1992. Numéro 11591 de la liste 65 ter. A moins que -- en fait, c'est la

 28   pièce P937, excusez-moi. Je voudrais que l'on affiche la page 3.

Page 2995

  1   Q.  Et le paragraphe numéro 5 est celui que vous avez commenté avec

  2   l'accusé.

  3   Je voudrais que nous nous penchions sur ce paragraphe, je   cite :

  4   "Des préoccupations supplémentaires ont résulté de cette décision des

  5   autorités de Belgrade de procéder à un retrait de Bosnie-Herzégovine de

  6   tout le personnel de la JNA qui est constitué de membres non citoyens de

  7   cette république au plus tard le 18 mai."

  8   Puis :

  9   "Ceci laissera la Bosnie-Herzégovine dépourvue de tout contrôle

 10   politique efficace et avec au moins 150 000 soldats armés…"

 11   Est-ce que cela concerne les anciens soldats de la JNA ?

 12   R.  Je suppose que cela concerne les membres de la JNA qui étaient Serbes

 13   et originaires de Bosnie.

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, ceci conclut

 15   mes questions supplémentaires.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Juste une question, Colonel, pour

 18   satisfaire ma curiosité. Etiez-vous un officier d'infanterie ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci. Je pensais que c'était le

 21   cas.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci conclut votre déposition, Colonel.

 23   Je vous remercie d'avoir bien voulu revenir à ce Tribunal.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges. 

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes à présent libre de vaquer à

 26   vos occupations.

 27   [Le témoin se retire]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr de la

Page 2996

  1   question de savoir si le greffier peut procéder à ceci sans l'assistance de

  2   Mme l'Huissière. Est-ce qu'il est possible d'avoir la pièce numéro D324 ?

  3   Plutôt, la pièce D235.

  4   Où nous trouvons cette formulation de "siège," là où la traduction

  5   correcte aurait dû parler d'"encerclement", selon les dires de l'accusé ?

  6   Je crois que c'était en page 5.

  7   Donc au milieu de page, nous pouvons voir l'expression "siège de

  8   Sarajevo."

  9   Pouvons-nous revenir en arrière, au troisième paragraphe. Nous avons Mladic

 10   qui dit :

 11   "Maintenir le blocus de Sarajevo avec détermination."

 12   Donc peut-être que M. le Greffier pourrait contacter le CLSS pour voir

 13   quels sont les termes utilisés par rapport à cette traduction de "siège" et

 14   de "blocus" et effectuer une comparaison avec le document du 19 mai et

 15   également celui du 27 mai, les traductions correspondantes dans lesquelles

 16   M. Karadzic a essayé d'expliquer la différence entre "encerclement" et

 17   "siège," et j'aimerais savoir quels étaient les termes correspondants

 18   utilisés en B/C/S pour ces notions. Donc il convient de demander au CLSS de

 19   produire un mémorandum à cet effet. Il sera déposé officiellement.

 20   Il y a plusieurs sujets maintenant à l'ordre du jour. Je vais

 21   commencer par les moins importants.

 22   Il y a une requête émanant de l'Accusation demandant l'ajout du

 23   Témoin Amir Begic à sa liste de témoin. Alors, je prends acte du fait qu'il

 24   n'y ait pas d'opposition de la part de la Défense, à ceci près que la

 25   Défense ait demandé à l'Accusation de ne pas citer le témoin à comparaître

 26   avant la fin des vacances judiciaires d'été.

 27   Avez-vous la moindre observation ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que nous pouvons nous y adapter,

Page 2997

  1   Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit. Par conséquent, il est fait droit

  3   à la requête.

  4   Il y a deux autres requêtes sur lesquelles nous devons statuer. Il y

  5   a une demande d'autorisation à répliquer, l'une concernant une déposition

  6   par vidéoconférence et une autre requête concernant des mesures de

  7   protection. Il a été décidé de faire droit à ces demandes.

  8   Ensuite, la demande de l'accusé portant sur un ajournement et une

  9   prorogation de délai de réponse : Monsieur Karadzic, la requête [comme

 10   interprété] a reçu cette requête de votre part demandant une prorogation de

 11   délai avant de répondre à la demande de l'Accusation et une demande

 12   d'ajournement. Donc réponse à la requête de l'Accusation portant sur une

 13   seconde requête de l'Accusation portant sur une autorisation à modifier sa

 14   liste 65 ter concernant le carnet de Mladic. Nous avons également pris en

 15   compte la réponse de l'Accusation à la requête déposée aujourd'hui.

 16   La Chambre estime qu'une certaine prorogation de délai est appropriée

 17   pour vous permette de répondre à cette requête et la Chambre estime que

 18   deux semaines suffisent à cet effet. Par conséquent, il vous est demandé de

 19   répondre au plus tard le 14 juin 2010.

 20   Vous avez demandé à la Chambre de procéder un ajournement du procès

 21   pour une période de 30 jours afin de vous permettre d'étudier les carnets

 22   de Mladic, ces derniers n'ayant été divulgués que le 12 avril 2010, et ceci

 23   vous permettrait de déterminer leur influence sur le contre-interrogatoire

 24   auquel vous procéderez avec les témoins suivants de l'Accusation.

 25   L'Accusation a fait état de son opposition à votre requête.

 26   Ayant pris en compte les requêtes des parties, la Chambre estime

 27   qu'il n'est pas nécessaire ni dans l'intérêt de la justice d'ajourner le

 28   procès à cette étape. Comme nous l'avons indiqué précédemment, vous avez

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  1   disposé de suffisamment de temps pour vous préparer au contre-

  2   interrogatoire des témoins de l'Accusation et vous avez également été

  3   prévenu en temps idoine des témoins qui allaient être cités à comparaître

  4   dans la phase initiale du procès, vous en avez été au courant depuis de

  5   nombreux mois à présent.

  6   Si après avoir examiné les carnets de Mladic qui vous ont été

  7   communiqués ou tout autre document qui aurait été récemment été communiqué

  8   par l'Accusation, vous avez à la conclusion qu'il y d'autres questions que

  9   vous souhaitez soulever en présence d'un témoin en particulier au titre du

 10   contre-interrogatoire, vous serez en mesure de soumettre à la Chambre la

 11   requête appropriée en ce sens.

 12   Par rapport à la plupart des témoins qui seront cités à comparaître,

 13   la Chambre estime que cette mesure serait tout à fait suffisante. Par

 14   conséquence, nous ne faisons pas droit à votre demande d'ajournement.

 15   Ceci dit, la Chambre souhaiterait encourager l'Accusation a revoir

 16   l'ordre dans lequel elle compte citer à comparaître les témoins, notamment

 17   la Chambre considère qu'il serait approprié de reporter la déposition du

 18   Témoin KDZ88 à plus tard afin que l'accusé dispose d'un peu plus de temps

 19   pour procéder à l'analyse des carnets qui lui ont été communiqués le 12

 20   avril. Compte tenu de la teneur des éléments de preuve liés au témoin

 21   KDZ88, la Chambre a estimé qu'un tel report serait plus prudent.

 22   Dernière question à l'ordre du jour, il s'agit de la façon, Monsieur

 23   Karadzic, dont vous menez le contre-interrogatoire. Sur ce point, je

 24   souhaiterais faire un certain nombre de commentaires au nom de la Chambre.

 25   Avant votre contre-interrogatoire du tout premier témoin, je vous ai

 26   déjà indiqué que du point de vue de la Chambre, l'estimation de temps que

 27   vous avez fournie pour ce contre-interrogatoire n'était pas réaliste ni

 28   raisonnable. La Chambre vous a néanmoins fourni une grande marge de

Page 2999

  1   manœuvre dans la conduite de vos contre-interrogatoires, vous a laissé

  2   toute liberté de procéder à ces derniers de la façon dont vous estimez

  3   qu'il était appropriée de le faire et vous a fourni beaucoup de temps à cet

  4   effet. La raison en est partiellement à rechercher dans le fait que nous

  5   reconnaissons le fait que vous n'êtes pas juriste de formation et que le

  6   fait de conduire un contre-interrogatoire de façon efficace peut s'avérer

  7   un exercice délicat.

  8   Le fait de poser des questions ouvertes ou des questions multiples au

  9   titre du contre-interrogatoire est non seulement le signe d'un manque de

 10   technique dans cet exercice, mais est également une façon de procéder

 11   particulièrement peu efficace la plupart du temps. Des questions fermées,

 12   directes posées une par une sont susceptibles d'être beaucoup plus

 13   efficaces de façon générale et d'entraîner des réponses également plus

 14   précises.

 15   Vous devriez également prendre acte du fait que seules les réponses

 16   données par le témoin à vos questions qui peuvent être considérées comme

 17   des éléments de preuve relatifs ainsi que les documents ou les parties de

 18   documents qui sont reconnus par le témoin peuvent être versés au dossier.

 19   La lecture du compte rendu d'audience dans son intégralité est une façon de

 20   procéder qui demande énormément de temps, et en aucun cas on ne peut

 21   s'attendre à ce que des portions entières du compte rendu d'audience soient

 22   versées au dossier en définitive. Il est, en revanche, de loin préférable

 23   de formuler des questions claires à partir des documents, questions qui s'y

 24   rapportent et qui, éventuellement, peuvent contredire la réponse apportée

 25   par le témoin.

 26   Vous avez reçu à de nombreuses reprises le conseil consistant à vous

 27   demander de procéder de façon plus efficace dans votre contre-

 28   interrogatoire. Nous vous avons également averti de ne pas faire de

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  1   commentaires ou de déclarations, de ne pas donner lecture de longs passages

  2   des documents, mais plutôt de présenter au témoin des documents pertinents,

  3   ensuite de lui poser des questions qui permettent de discerner un lien

  4   direct avec le témoin, et non pas sur des points dont le témoin n'a pas

  5   connaissance.

  6   En dépit des efforts que nous avons consentis pour vous fournir des

  7   instructions, - et j'espère que les conseils vous auraient également guidé

  8   à cet effet - la Chambre exprime sa préoccupation par rapport au manque

  9   d'efficacité dont vous avez fait preuve dans l'utilisation du temps qui

 10   vous a été alloué au titre du contre-interrogatoire. Nous sommes également

 11   préoccupés par les estimations du temps nécessaire dont vous nous avez fait

 12   part récemment.

 13   Par conséquent, la Chambre envisage la possibilité d'imposer une

 14   limite de temps à votre contre-interrogatoire de chacun des témoins

 15   suivants, limite de temps qui sera déterminée témoin par témoin et que vous

 16   serez tenue de respecter à moins que vous ne soyez en mesure de démontrer

 17   qu'un temps supplémentaire est absolument nécessaire.

 18   Si jamais, au cours du contre-interrogatoire, vous n'êtes pas en mesure

 19   d'apporter la preuve que vous prenez nos conseils au sérieux et que vous

 20   vous efforcez de les appliquer, la Chambre se trouvera contrainte de vous

 21   imposer de telles limites de temps. Ceci dit, compte tenu du temps que vous

 22   avez déjà utilisé au titre du contre-interrogatoire, notamment le contre-

 23   interrogatoire de M. van Lynden, la Chambre est d'avis, notamment au vu

 24   d'ailleurs de la teneur et de la nature de la déposition de M. van Lynden,

 25   que vous devriez être en mesure d'en finir avec votre contre-interrogatoire

 26   en deux heures au maximum.

 27   La préoccupation principale de la Chambre et son devoir est de garantir un

 28   procès équitable, mais cette notion d'équité concerne toutes les parties et

Page 3001

  1   toutes les personnes considérées.

  2   Par conséquent, nous levons l'audience pour aujourd'hui et nous

  3   reprendrons nos débats lundi après-midi à 14 heures 15.

  4   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le lundi 31 mai

  5   2010, à 14 heures 15.

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