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1 Le mercredi 18 août 2010
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin vient à la barre]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
7 Et bonjour, Colonel Mole.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, poursuivez, je vous
10 en prie.
11 LE TÉMOIN : RICHARD MOLE [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
14 Bonjour à tout le monde. Bonjour, Colonel.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
16 Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]
17 Q. [interprétation] Hier nous avons confirmé que vous n'étiez pas d'accord
18 avec ce qu'indiquait la presse, et j'aimerais vous rappeler à ce sujet
19 qu'un officier pour lequel vous aviez beaucoup d'estime et que vous aviez
20 proposé pour qu'il soit promu, j'aimerais vous rappeler donc que dans son
21 journal de bord, ce dont vous avez convenu d'ailleurs, il se trouve de
22 nombreux exemples de son propre désaccord à propos de ce qu'indiquaient les
23 médias ?
24 R. Vous faites référence à un journal de bord que vous avez mis à ma
25 disposition au début de la semaine. C'est la première fois que j'avais eu
26 la possibilité de me pencher sur ce journal de bord, et donc je comprends
27 très bien à quoi vous faites référence, exactement.
28 Q. Mais est-ce que vous conviendrez que vos observations ainsi que les
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1 observations du général Morillon et de M. Henneberry étaient avancées pour
2 essayer d'obtenir un juste équilibre dans les relations, parce que cette
3 façon de présenter la situation de façon très partielle représentait un
4 obstacle, une entrave à la paix ?
5 R. Ces avis dont vous parlez, qui étaient les points de vue de la presse,
6 nous compliquaient la tâche en quelque sorte. C'est ainsi que nous
7 percevions la situation. Cela nous compliquait la tâche. Je pense que vous
8 êtes informé des détails en question et, en fait, cela compliquait la tâche
9 des factions belligérantes également lorsque leurs intentions - et là je
10 parle du camp serbe - lorsque les intentions du camp serbe semblaient faire
11 l'objet en quelque sorte de commentaires retors de la part de la presse,
12 cela leur compliquait la situation.
13 Q. Merci. Hier vous nous avez dit que vous n'aviez pas reçu d'information
14 ou de renseignement de la part des journalistes qui étaient venus visiter
15 notre camp et que vous, vous-même, craigniez d'être considéré comme un
16 espion. Alors, est-ce que cela signifie que l'espionnage en quelque sorte
17 aurait permis d'obtenir des renseignements à propos des Serbes, et les
18 renseignements auraient pu être relayés à quelqu'un d'autre ?
19 R. Oui, ce que vous dites est tout à fait exact, car je dois dire que nous
20 étions particulièrement conscients. Car l'une des conséquences de ces
21 préoccupations a été que le groupe des observateurs militaires a œuvré pour
22 garantir que si vous vous trouviez du côté de la présidence à Sarajevo,
23 vous n'étiez jamais déployé du côté Lima, et vice-versa. Et la seule
24 personne qui transitait entre les factions belligérantes à Sarajevo,
25 c'était moi-même, et je dois dire que j'ai toujours fait en sorte
26 d'expliquer à toutes les personnes que lorsque je leur demandais des
27 renseignements, je leur demandais ces renseignements pour pouvoir
28 m'acquitter de ma mission, mission que j'expliquais aux personnes avec qui
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1 je m'entretenais, car je souhaitais pouvoir établir une relation de
2 confiance pour qu'elles puissent me parler dans le contexte bien précis de
3 la mission dont je devais m'acquitter. Moi, je n'étais pas présent sur ces
4 lieux pour prendre le parti d'un camp ou de l'autre. Il y avait la
5 dimension humanitaire de ma mission qui était au cœur de mes
6 préoccupations.
7 Q. Merci. Donc je dois dire que vous avez pu communiquer avec le camp
8 serbe, que vous avez obtenu certains résultats positifs, donc vous avez
9 toujours pu obtenir tout ce que vous avez souhaité au niveau le plus élevé
10 et la plupart de ce que vous avez demandé d'ailleurs, même en ce qui
11 concernait les niveaux les plus subalternes. Et nous voyons le journal de
12 bord de M. Hennebery. Nous voyons, en fait, qu'il y a quand même eu une
13 relation de confiance, une bonne relation qui avait été établie entre la
14 FORPRONU et les Serbes. Vous avez également confirmé que vous ne receviez
15 absolument pas de renseignement de la part des journalistes étrangers qui
16 revenaient du territoire serbe. S'ils vous avaient donné à vous, par
17 exemple, ou à d'autres des renseignements qu'ils auraient obtenus dans le
18 camp serbe, est-ce que ça aurait été perçu comme une activité d'espionnage,
19 donc au sens que nous lui avons donné un peu plus tôt ?
20 R. Je pense qu'il faut préciser et nuancer le type de renseignement qui
21 aurait pu m'être donné par des agences de presse avant justement de décider
22 si ces informations étaient utiles par rapport aux activités auxquelles
23 vous avez fait référence. Moi, je n'ai jamais considéré que les agences de
24 presse disposaient de meilleurs renseignements que moi. Je disposais d'un
25 réseau. Ce réseau me permettait de me faire une idée beaucoup plus générale
26 des événements dans toute la Bosnie, et plus précisément à Sarajevo.
27 Et je dois également vous expliquer qu'avant mon arrivée à Sarajevo,
28 j'étais l'officier chef des opérations pour tout le groupe des observateurs
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1 militaires des Nations Unies, ce qui signifie que j'assumais une
2 responsabilité dans toute la région, région qui incluait la Serbie, la
3 Croatie ainsi que la Bosnie. Par conséquent, je dois dire que je disposais
4 de nombreux renseignements, d'éléments d'information. Je ne veux pas pécher
5 par excès d'arrogance, mais je pourrais m'avancer quand même à dire que la
6 presse aurait obtenu beaucoup plus d'informations de ma part que le
7 contraire lors d'une discussion entre la presse et moi-même. Par
8 conséquent, vous me présentez une suggestion, vous m'avez indiqué donc que
9 la presse aurait pu me donner des renseignements qui auraient été utiles
10 dans le cadre d'une activité d'espionnage, et je ne pense pas que ce soit
11 particulièrement pertinent, parce que je pense que je disposais de ces
12 renseignements et que les renseignements dont je disposais étaient
13 meilleurs.
14 Q. Merci. Non, non, je ne suis pas en train de remettre en question le
15 comportement des officiers des Nations Unies. Je parlais plutôt en
16 considérant la perspective des Serbes, et je pense au comportement des
17 parties pendant la guerre. Parce que si des correspondants de notre camp
18 avaient obtenu, par exemple, de façon fortuite, des informations et les
19 avaient relayées à quelqu'un de façon confidentielle plutôt que de les
20 publier, est-ce que cela aurait fait en sorte que les Serbes soient
21 préoccupés et soient en quelque sorte inquiétés par ces personnes ? Je ne
22 vous parle pas du personnel des Nations Unies, mais là je vous parle des
23 représentants de la presse, si un représentant de la presse venait à
24 transmettre de façon secrète les renseignements qu'il avait obtenu à
25 quelqu'un. Est-ce que vous pourriez peut-être me répondre juste par oui ou
26 par non.
27 R. [aucune interprétation]
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur. J'étais en train
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1 d'hésiter moi-même.
2 Monsieur Hayden.
3 M. HAYDEN : [interprétation] M. Karadzic a posé une question au témoin,
4 mais il demande au témoin de se livrer à des conjectures en nous expliquant
5 quels auraient été le point de vue ou les sentiments du camp serbe, et je
6 ne pense pas que le témoin soit à même de le faire.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis d'accord. Je ne pense pas qu'il
8 faille demander au témoin de se livrer à des conjectures. Quelle est la
9 véritable question que vous voulez poser ? Posez-la au témoin.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire que j'admire le point de vue du
11 colonel Mole et de ses collaborateurs qui ont toujours essayé de ne pas
12 être perçus comme des espions. C'est un point de vue tout à fait justifié,
13 mais je m'interroge. Je me demande tout simplement si les autres avaient le
14 même point de vue. Est-ce que cela constitue -- c'est la question que je
15 posais.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, au lieu de nous
17 présenter des points de vue, j'aimerais que vous nous posiez la question.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Donc si vous, vous aviez appris quelque chose lors de vos contacts avec
20 nous, non pas seulement vous, mais quelqu'un d'autre, et si cette
21 information avait été relayée à une partie tierce, est-ce que vous pensez
22 que cela aurait été une façon de respecter les règles du jeu ?
23 R. Ecoutez, je m'excuse, mais je dois vous dire que je ne comprends pas
24 votre question. Vous me demandez "si c'est une façon de respecter les
25 règles du jeu." Je ne comprends pas.
26 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Colonel Mole, il est évident que
27 vous relayiez des informations à vos supérieurs hiérarchiques.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
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1 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Donc les informations que vous
2 obteniez étaient transmises à une partie tierce. Et je pense que le Dr
3 Karadzic vous demande si cela faisait partie, en fait, de votre mandat, le
4 fait de transmettre des informations à l'autre camp dans le contexte d'un
5 conflit militaire. Vous nous avez dit que vous, vous ne le faisiez pas et
6 vous ne vouliez surtout pas être perçu comme une personne ayant ce
7 comportement; c'est cela ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je peux répondre maintenant.
9 Je vous dirais que lorsque je recevais des renseignements, quelle que fût
10 la source de ces renseignements, j'ai toujours essayé de faire en sorte de
11 forger une relation de confiance avec les personnes. Je souhaitais que les
12 personnes me fassent confiance, et moi, personnellement, j'utilisais
13 lesdites informations pour ma gouverne personnelle et pour la gouverne
14 personnelle de mes officiers dans le cadre de ma mission. Mais je dois dire
15 que j'ai été très sélectif lorsqu'il s'agissait de transmettre ces
16 informations ou ces renseignements. J'ai appris beaucoup de choses que les
17 autres observateurs militaires n'ont pas appris. J'ai également beaucoup
18 obtenu de renseignements que je n'ai jamais relayés à mes supérieurs
19 hiérarchiques, parce que c'étaient des renseignements que j'utilisais
20 localement dans le contexte local pour mes propres objectifs, qui étaient
21 les objectifs d'un observateur militaire des Nations Unies, d'où mon
22 hésitation et mes difficultés à répondre à la question d'ailleurs, parce
23 que ce n'était pas ainsi que j'utilisais lesdits renseignements. Alors
24 peut-être que c'est la réponse que j'apporterais à cette question.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Merci. Une question de suivi à la suite de la question très utile posée
27 par M. le Juge Morrison. Vous, vous ne vous êtes pas livré à ce type
28 d'activité. Mais si quelqu'un d'autre l'avait fait, est-ce que cela aurait
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1 été considéré comme une activité
2 d'espionnage ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il n'appartient pas au témoin de se
4 livrer à des conjectures. Posez des questions précises, Monsieur Karadzic.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Conviendrez-vous que les Musulmans, en fait, ciblaient leurs propres
8 quartiers dans la ville, qu'il y avait des obus qui étaient dirigés et
9 pointés contre leurs propres quartiers, leur propre population, dans le but
10 de faire en sorte qu'ils soient considérés comme des victimes, ce qui donc
11 était une façon d'engendrer un sentiment de compassion internationale,
12 ainsi que, bien entendu, l'intervention militaire à laquelle vous avez fait
13 référence ?
14 R. Je dois dire que c'est une excellente question, quoique très polémique.
15 Car j'ai déjà expliqué, ou j'ai déjà en tout cas essayé d'expliquer lors de
16 ma déposition que lorsque des incidents font l'objet d'enquêtes, il ne faut
17 pas oublier que nous ne nous trouvions pas dans une situation de cessez-le-
18 feu, il ne faut pas oublier que la guerre continuait à faire rage et que,
19 de ce fait, une analyse exhaustive légale et scientifique de tous les
20 incidents tels que ce que nous avons pu voir dans les rapports d'incidents
21 qui ont été examinés hier, du fait de l'état de guerre ce type d'analyse
22 était impossible, ce type d'évaluation. Et de surcroît, des suggestions ont
23 été présentées. Il y avait suffisamment d'incertitudes qui planaient pour
24 que les membres de la FORPRONU puissent être assez sûrs que ce que vous
25 avez avancé était véridique. Mais du fait de ce que je viens de dire, je ne
26 suis pas en mesure de vous parler d'incidents bien précis parce que dans
27 l'environnement dans lequel nous nous trouvions, je mets au défi quiconque
28 de pouvoir mener à bien une analyse et une enquête scientifiques dignes de
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1 ce nom afin de prouver que votre suggestion est véridique ou ne l'est pas,
2 d'ailleurs. Donc tout ce que je peux vous suggérer c'est que nous en tant
3 qu'observateurs militaires des Nations Unies avions un certain sentiment de
4 malaise, parce que nous envisagions que ce que vous venez d'avancer aurait
5 pu être vrai. Mais il faut savoir qu'il y a de nombreuses nuances qu'il
6 faut apporter à ce que je viens de dire. Cela ne pouvait pas être établi et
7 déterminé comme un fait, mais il y avait quand même des soupçons assez
8 lourds qui pesaient.
9 Q. Merci. Dans votre déclaration harmonisée, paragraphe 121, vous nous
10 livrez cette réflexion; vous faites état d'incidents à propos desquels vous
11 avez posé des questions et vous indiquez que cela a engendré en vous
12 certains soupçons à propos de l'origine des tirs. Et dans votre déclaration
13 de l'année 1997, à la page 12, vous dites que les Musulmans avaient utilisé
14 Sarajevo afin en quelque sorte de faire perdurer leur statut de victimes.
15 Alors que dans l'affaire Galic, M. Henneberry indique que des enquêtes ont
16 été menées à bien à propos de certains incidents, que ces enquêtes avaient
17 été effectuées par les Nations Unies et que ces enquêtes l'avaient poussé à
18 croire que pour des raisons politiques il n'avait pas été indiqué de façon
19 catégorique que les Musulmans avaient bombardé leur propre population, mais
20 que lui, lui-même, disposait de ce type d'information qui avait été
21 collectée, entre autres, par les observateurs militaires, et que tout
22 convergeait pour indiquer que les Musulmans étaient à l'origine de ces tirs
23 et qu'à certaines occasions ils avaient même bombardé leur propre
24 population. Il l'a dit dans l'affaire Galic lorsqu'il a présenté sa
25 déposition du 22 mai 2002, à la page 80 734 et 80 735. Donc j'aimerais
26 savoir si cette information qu'il nous donne correspond à la vôtre, ou en
27 tout cas est compatible avec ce que vous pensez ?
28 R. Vous venez de me donner lecture d'un extrait, et je connaissais
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1 l'officier en question et je dirais que ce qu'il a dit reprend un point de
2 vue assez semblable de celui que je viens de vous décrire.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais demander l'affichage du
4 document 1D2226, je vous prie, pages 8 734 et 8 735, juste pour que nous le
5 parcourions très rapidement. Il s'agit du passage en question, passage qui
6 a été confirmé par le colonel Mole. Alors, je donne lecture :
7 "A propos des funérailles, je ne m'en souviens pas. Il y a d'autres
8 incidents qui ont fait l'objet d'enquêtes. Je pense que pour des raisons
9 politiques, aucune déclaration publique catégorique n'a été faite indiquant
10 que les Musulmans bombardaient leur propre population. Toutefois, si je
11 peux me permettre d'utiliser le terme que cela était de 'notoriété
12 publique,' à savoir que les enquêtes convergeaient vers le fait que les
13 forces musulmanes ont parfois bombardé leurs civils."
14 Est-ce que cela pourrait être versé au dossier ? Nous pourrions également
15 d'ailleurs examiner la page suivante.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avant que nous ne le fassions,
17 Monsieur Hayden, je vous en prie.
18 M. HAYDEN : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit judicieux de verser
19 au dossier un extrait d'une déclaration d'un autre témoin. Car il y a des
20 dispositions dans le Règlement qui permet d'envisager le versement au
21 dossier de dépositions écrites de témoins. Parce qu'il faut savoir que
22 maintenant l'extrait en question a été lu.
23 M. TIEGER : [interprétation] Et j'aimerais rappeler à la Chambre de
24 première instance que nous avions déjà abordé cette question, et la Chambre
25 avait déterminé à l'époque qu'elle autoriserait l'accusé à faire référence
26 à la déclaration d'un autre témoin, pour que l'accusé puisse poser sa
27 question, mais la Chambre avait décidé de ne pas verser au dossier la
28 déposition à proprement parler.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que le Colonel Mole a confirmé figure
4 déjà au dossier. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de verser au dossier
5 cela de façon séparée. Nous sommes d'accord avec les observations de M.
6 Tieger et de M. Hayden.
7 Poursuivez, je vous prie.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je suis également d'accord avec cela.
9 Parce que le compte rendu d'audience représente également ou constitue
10 également des preuves, n'est-ce pas ?
11 Est-ce que la page suivante -- ou plutôt, non, la page précédente pourrait
12 être affichée. Attendez un petit moment. En fait, il s'agit, d'après moi,
13 de la page précédente.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je dois préciser quelque chose. Cette
15 page du compte rendu d'audience ne constitue pas des éléments de preuve en
16 l'espèce. Il y a une procédure séparée qu'il faut suivre pour que cela soit
17 versé au dossier.
18 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je pense que ce que vous entendiez,
19 Monsieur, c'est que le compte rendu de cette affaire constitue des éléments
20 de preuve. C'est bien cela que vous vouliez dire, n'est-ce pas ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Tout à fait. Ce qui
22 figure au compte rendu d'audience, et qui a été confirmé par le témoin.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, bien sûr. Poursuivons.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça se trouve à cette page-ci, aussi, je pense,
25 mais il nous faut trouver le passage précis. C'est à la page qui se termine
26 par les chiffres 34. Donc je crois qu'il nous faut la suivante.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Regardez ici à cette page :
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1 "Les zones où il y avait des objectifs communs là où les gens faisaient la
2 queue pour avoir des rations des Nations Unies, ou acheter le peu qu'il y
3 avait sur les marchés. C'était les zones communes."
4 Puis il ajoute ceci :
5 "Comme ça, à brûle-pourpoint, je me souviens de quatre personnes qui ont
6 déclaré que les obus avaient été tirés par les Musulmans de Bosnie et que
7 les Musulmans avaient tiré sur les leurs, ce faisant."
8 Puis la dernière réponse de cette page :
9 "Ici je parle de la ville à l'intérieur des confins de Sarajevo et bien à
10 l'intérieur de ce qu'on appelle la ligne de confrontation à l'intérieur de
11 la partie musulmane. Je ne peux pas vous donner d'adresse pour le moment.
12 C'est tout simplement parce que j'ai oublié ce détail."
13 C'est ce que M. Henneberry disait, et ceci est bien conforme à vos
14 connaissances, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Merci.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de ce document.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Conviendrez-vous que certaines enquêtes menées, enquêtes militaires
20 s'entend, ne correspondaient pas tout à fait aux critères qui exigent une
21 enquête judiciaire ?
22 R. Pourriez-vous poser une question plus précise ? Parce que vous parlez
23 de "certains avis, de certaines enquêtes menées, sur le plan militaire."
24 Pourriez-vous expliciter votre propos ? Vous parlez de quelles armées, de
25 quelles enquêtes, avant que je ne puisse vous dire si ce type d'enquêtes
26 ont répondu à tous les critères ou pas ?
27 Q. Je vais le faire.
28 Hier, nous avons vu que les observateurs avaient pour tâche au fond de
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1 consigner le nombre d'explosions qu'il y avait eu. Il était impossible de
2 déterminer qui avait tiré et où était tombé l'obus. Nous avons également vu
3 que se sont présentés certains cas, un bon nombre d'entre eux pour
4 lesquels, lorsqu'il y a eu constat sur les lieux, on a compris qu'il était
5 impossible de déterminer l'origine des tirs. C'est cela que je voulais
6 dire. Je parle de la façon dont les enquêtes militaires ont été menées.
7 Est-ce qu'elles répondaient à certains critères, ou est-ce que c'étaient
8 des critères différents ? C'est de cela que je veux parler.
9 R. Vous soulevez plusieurs questions. J'ai déjà essayé de donner une
10 explication sur certaines de ces questions. Peut-être n'ai-je pas été
11 suffisamment clair.
12 La Mission des observateurs ne consistait pas à recenser le nombre d'obus
13 tirés. Les observateurs militaires étaient sur place pour procéder à une
14 évaluation de la situation, pour fournir un soutien militaire, entre autres
15 tâches que j'ai déjà mentionnées. Nous avions notamment pour tâche de voir
16 comment évoluait le conflit. Le groupe des observateurs militaires n'avait
17 pas pour mandat de mener des enquêtes pour tous les obus qui sont tombés,
18 de voir où ils sont tombés. Il n'avait pas non plus pour tâche de
19 déterminer ce qui était juste ou injuste sur les conflits ou le conflit se
20 déroulant sur la ligne de front.¸
21 Vous supposez, je pense, vous partez du postulat selon lequel les
22 observateurs militaires et/ou la FORPRONU étaient compétents pour mener une
23 enquête sur chacun des incidents survenus. Non, nous n'avions pas ce
24 pouvoir. Si les gens avaient vécu dans la ville, comme moi je l'ai fait --
25 excusez-moi.
26 Q. Merci. Je pense que ceci suffira. Puis-je vous demander ceci : êtes-
27 vous d'accord pour dire qu'il y a eu, effectivement, des cas, des
28 situations d'abus infligées par les Musulmans à des prisonniers serbes pour
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1 obtenir les corps de Musulmans qui avaient été tués ? Vous en avez parlé à
2 la page 17 de votre déclaration de 1997. Inutile d'en parler de façon
3 détaillée. Mais pourriez-vous confirmer ce que vous avez qualifié à
4 l'époque de comportement criminel, je parle de sévices infligés à des
5 prisonniers à ces fins ?
6 R. Lorsqu'on procédait à un échange de corps, le camp de la présidence a
7 dû procéder à l'échange de deux corps. Et je pense que c'est à ceci que
8 vous pensez, s'il s'agit de personnes qui avaient déjà été inhumées. On a
9 emmené leurs corps au bâtiment de la poste, au PTT, où moi j'ai supervisé
10 l'échange des corps. Et c'est au cours de cet échange que des prisonniers
11 ont été utilisés pour déplacer les corps restitués au camp serbe. J'ai été
12 présent. J'ai formulé des observations et des objections à ceux qui
13 représentaient le camp de la présidence lors de cet échange.
14 Q. Merci. Vous avez parlé de ceci dans votre déclaration de synthèse, au
15 paragraphe 122, puis au paragraphe 128, et aussi lorsque vous avez déposé
16 le 3 juillet 2002 dans le procès Galic, page 11 109 du compte rendu
17 d'audience Galic. Ceci étant, êtes-vous d'accord pour dire que l'armée
18 musulmane a souvent utilisé à des fins abusives des lieux civils pour y
19 placer leurs pièces d'artillerie ? C'est vrai, par exemple, pour l'hôpital
20 Kosevo. C'est ce que vous dites au paragraphe 123 de votre déclaration de
21 synthèse, et vous le dites à la page 12 de la déclaration de 1997 aussi.
22 Pourquoi le faisaient-ils, c'était pour attirer les tirs des Serbes, et de
23 cette façon, on pouvait accuser les Serbes. Dans vos rapports d'octobre et
24 de décembre 1992, vous confirmez que vos observateurs se sont rendus sur
25 les lieux pour constater les dégâts. Ils sont donc allés dans deux
26 hôpitaux. Vous avez déclaré que vous n'étiez pas satisfait de ce genre de
27 comportement, lorsque des pièces d'artillerie, des véhicules blindés sont
28 placés dans le périmètre d'un hôpital. Vous avez dit que c'est quelque
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1 chose que vous n'acceptiez pas, mais qui s'était effectivement passé,
2 n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Merci.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que c'est déjà une pièce déposée par
6 l'Accusation en tant que pièce relevant d'une autre déclaration. Il s'agit
7 du numéro 65 ter 10864. On pourrait voir aussi la suivante, 10865.
8 Est-ce que ces documents ont déjà été versés en tant que pièces à charge
9 d'ailleurs ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Puisque ceci a été confirmé, inutile de
12 présenter ces documents.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Mais vous en êtes d'accord ? Etes-vous d'accord pour dire que dans
15 votre déclaration de synthèse, paragraphes 125 et 126, vous apportez la
16 confirmation du fait que souvent l'hôpital a été touché par, disons, des
17 tirs de riposte ?
18 Et là, j'aimerais que nous tirions une chose au clair vous et moi :
19 "…réponse militaire, parce que le mortier qui était plus mobile, plus
20 aisément déplaçable, était déplacé peu de temps après avoir tiré."
21 Etes-vous d'accord pour dire qu'ici la partie qui riposte, à savoir le camp
22 serbe, ne doit pas nécessairement savoir que le mortier a déjà été déplacé;
23 ce qui veut dire que ça aurait pu être qualifié de réponse militaire
24 davantage que de tir de représailles ?
25 R. Imaginons que nous sommes dans un conflit. Si une des parties au
26 conflit a l'impression qu'elle doit répondre à une action militaire, par
27 exemple, l'utilisation de mortiers qui sont placés dans un endroit précis.
28 Si, en réponse à une telle action, vous avez recours à la force mais que
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1 cette force est tout à fait disproportionnée par rapport à la force qu'il
2 faudrait employer pour détruire cet objectif, si les tirs sont tels qu'ils
3 sont à ce point dispersés et généralisés, ce qui veut dire que vous n'avez
4 pas vraiment tenu compte de la source initiale du tir, à ce moment-là, je
5 dirais que c'est pour ces raisons qu'on a souvent pensé que c'était une
6 réaction excessive, et que le temps qui s'est écoulé entre le premier
7 contact et la réponse, ce temps était tel qu'il était peu probable que la
8 pièce qui avait tiré se trouve encore sur place.
9 Puisque j'étais commandant, j'essayerais de nuancer ma réponse pour
10 plusieurs raisons : peut-être qu'on essayait d'économiser des munitions et
11 que ce faisant, on provoquait des dégâts collatéraux excessifs. Parce que
12 si on essaye d'anéantir l'ennemi, il est vraiment inutile, ça ne sert à
13 rien de répondre par des tirs. Et c'est ce que nous avons observé. Nous
14 avons observé, si vous voulez, ces espèces de mauvais équilibres entre
15 action et réponse, et c'est après ces observations, que nous nous sommes
16 prononcés sous forme d'évaluations.
17 Q. Merci. Si l'on fait un usage abusif du lieu civil à ces fins, est-ce
18 que c'est, à votre avis, constitutif d'infraction ?
19 R. Je pense que cette tactique précise a effectivement été utilisée à
20 l'intérieur de Sarajevo.
21 Q. Merci. Dans votre déclaration de synthèse, mais aussi dans les rapports
22 de novembre et de décembre, qui ont d'ailleurs déjà été versés au dossier
23 en tant que pièces à charge, vous admettez et vous confirmez que l'armée
24 musulmane a fait un usage abusif des lieux qui se trouvaient à proximité de
25 la FORPRONU pour lancer des attaques contre les Serbes et pour provoquer
26 une réponse des Serbes, là je parle des installations des Nations Unies.
27 Vous avez aussi confirmé, au paragraphe 68 de votre déclaration de
28 synthèse, qu'il arrivait qu'ils prennent délibérément pour cible un
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1 bâtiment à l'aide de chars, et il n'y avait que les Musulmans qui avaient
2 des chars dans la zone.
3 Etes-vous d'accord pour dire que souvent vous et les autres représentants,
4 les représentants de la FORPRONU, avez demandé aux Musulmans de déplacer
5 d'au moins 500 mètres leurs pièces d'artillerie pour les éloigner davantage
6 des installations occupées par les Nations Unies ?
7 R. J'ai connu personnellement cette situation que vous venez de décrire,
8 et à de nombreuses reprises, je le précise, nous avons demandé ceci à la
9 présidence, nous avons dit que si la présidence voulait procéder à un
10 engagement contre les Serbes, qu'elle le fasse plus loin par rapport aux
11 installations occupées par les Nations Unies. Donc c'est un vécu personnel
12 que je vous relate ici.
13 Q. Merci. Dans le journal de M. Henneberry, page 1 060 853, voici ce qu'il
14 dit :
15 "Les tirs sur le bâtiment des PTT venaient de la position Papa 4."
16 Etes-vous d'accord avec cette conclusion qui se trouve dans la déclaration
17 de -- ou dans le journal de M. Henneberry ? Et dans le rapport de décembre
18 1992, rapport versé par le parquet, il est dit que le 18 décembre 1992 on a
19 ouvert le feu sur un véhicule des observateurs, ce fut des tirs de
20 mortiers, ce qui a occasionné un accident de circulation dans lequel un
21 chauffeur serbe avait été touché. Vous vous en souvenez ?
22 R. Oui, je me souviens de cet incident, mais je dois apporter certaines
23 corrections significatives.
24 Regardez sur la carte où se trouve Papa 4. Je pense que la position
25 est telle qu'il est impossible de voir de là le bâtiment des PTT ni la zone
26 qui l'entoure. Vous citez quelqu'un qui se trouvait du côté Lima. Donc il
27 était du côté serbe, à l'extérieur de la ville. Et je ne sais pas d'où il
28 tient ces informations que vous venez de me transmettre. Mais si je me
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1 souviens bien, il n'y a aucune trace où que ce soit de quelque chose
2 qu'aurait dit la position Papa 4, ou cette position devait avoir
3 connaissance des tirs sortants, trace qui dirait que des tirs avaient été
4 dirigés sur le bâtiment des PTT ou sur la zone l'entourant. Là, je ne peux
5 pas accepter ce que dit ce monsieur dans son journal comme étant quelque
6 chose qui reflète la vérité.
7 Q. Mais voyons ce qu'il y a dans vos rapports de décembre 1992, et ça se
8 retrouve dans le journal de M. Henneberry, page
9 01 062 856, s'agissant du fait que fut pris pour cible le véhicule des
10 observateurs, ce qui a provoqué un accident de la circulation avec un
11 véhicule serbe. Vous l'avez confirmé, n'est-ce pas ?
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Hayden.
13 M. HAYDEN : [interprétation] Précisons une chose pour le compte rendu. Je
14 pense que nous parlons de deux incidents différents. Le témoin répondait au
15 premier, et maintenant M. Karadzic pose une question sur le second. Est-ce
16 qu'on peut rendre cette différence plus claire.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
18 Avec cette réserve étant exprimée, êtes-vous maintenant en mesure de
19 répondre à la question, Colonel ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
21 Je pense que j'ai déjà répondu à la question concernant les tirs
22 apparemment venus de la position Papa 4.
23 S'il y a un accident de la circulation parce qu'il y a une collision
24 entre deux véhicules, je dirais que personne ne saura d'où venaient les
25 tirs de départ. Si vous êtes dans le véhicule, je ne pense pas que vous
26 serez particulièrement intéressé par la question. Ça voudrait dire que pour
27 savoir ce qu'il en est, quelqu'un aurait prêté une attention toute
28 particulière à ce qui se passait dans son ensemble. J'essayais d'expliquer
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1 quelles étaient les activités militaires quotidiennes, et je vous ai dit
2 que pour s'intéresser à un incident précis comme celui-ci, pour essayer de
3 déterminer l'origine d'un tir précis, essayez d'imaginer la vie telle
4 qu'elle se passait à ce moment-là. Je vous dirais qu'essayer de déterminer
5 un seul cas, c'était quelque chose d'impossible et quelque chose qui
6 n'avait pas vraiment d'importance.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. N'empêche que ce véhicule des observateurs se trouvait du côté serbe, à
9 Nedzarici, me semble-t-il. Et dans votre rapport de décembre 1990, vous
10 laissez entendre que le tir venait du côté musulman car les Serbes n'ont
11 pas tiré sur des quartiers serbes, n'est-ce pas ?
12 R. Je maintiens ce que je viens de dire.
13 Q. Merci.
14 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Pourriez-vous apporter une précision
15 à mon intention, à l'intention du Tribunal.
16 Vous avez parlé de mortiers utilisés par la présidence, des mobiles
17 embarqués. Mais est-ce qu'il y avait des bases embarquées, mais fixes, ou
18 plus exactement des bases fixes d'où on utilisait toujours certains
19 mortiers ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] En général, ce n'était pas le cas. Permettez-
21 moi de revenir à l'accord concernant l'aéroport. Si on utilisait des
22 mortiers sur des positions fixes, en fonction, bien sûr, de la taille de
23 ces positions, mais si on parle de positions fixes, il s'agissait de
24 mortiers de plus gros calibre, et manifestement ces mortiers de plus gros
25 calibre auraient été englobés par l'accord portant sur l'aéroport et
26 auraient été surveillés. Pour répondre à votre question, je dirais que moi,
27 je n'ai aucun souvenir personnel de ce genre de situation que vous venez
28 d'évoquer. Les attaques au mortier que j'ai vues ou dont j'ai le souvenir,
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1 c'étaient des mortiers plus mobiles et de plus petit calibre.
2 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Une question supplémentaire : est-ce
3 que vous avez observé des armes d'artillerie à long tube ? Je ne parle pas
4 de chars. Je parle de canons à propulsion autonome.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai une connaissance personnelle d'armes
6 antiaériennes utilisées dans des tirs directs. Il y avait des armes
7 lourdes, et elles étaient surveillées, par exemple, du côté serbe, mais
8 même si elles étaient surveillées, ça n'empêchait pas qu'elles pouvaient
9 être utilisées. Nous savions tout simplement où elles se trouvaient. Elles
10 auraient dû rester dans un périmètre bien déterminé. Mais ce n'est pas tout
11 à fait comme ça que ça s'est passé, parce que finalement, nous,
12 observateurs, trouvions plus commode de voir comment évoluait la guerre en
13 voyant où se trouvaient ces points de regroupement des armes. C'était plus
14 facile pour les observateurs, mais ça ne voulait pas dire que ces armes
15 n'étaient plus utilisées.
16 Je pense qu'il y a ici une perception erronée des choses. On pensait que
17 parce que ces armes étaient surveillées, elles n'étaient pas utilisées.
18 Non. Elles ont été utilisées. C'était vrai pour le camp serbe, mais c'était
19 tout à fait la même chose pour le camp de la présidence.
20 Est-ce que je réponds assez à votre question, Monsieur le
21 Juge ?
22 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, je vous remercie.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Merci.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie vivement de ces précisions que
25 vous venez d'apporter.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Dans votre déclaration, vous dites que vous avez fait des observations
28 pour le mont Igman : un véhicule blindé transporteur de troupes, deux
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1 obusiers, deux obusiers 122, quatre canons de
2 105-millimètres, et ceci, à la page 11 et à la page 12 de votre déclaration
3 de 1997. Vous avez observé aussi la présence de six mortiers de 120-
4 millimètres. Tout ce matériel a bien été utilisé depuis le mont Igman et
5 chacune des parties tenues par les Serbes à Sarajevo, voyez-vous, pouvait
6 subir des tirs depuis le mont Igman, n'est-ce pas ?
7 R. Permettez-moi de répondre par la fin. Oui, effectivement, les armes se
8 trouvant sur le mont Igman pouvaient avoir un effet direct sur toute unité
9 se trouvant autour de Sarajevo. Quant à savoir la composition précise des
10 forces de la présidence sur le mont Igman, ça n'a jamais été qu'une
11 évaluation à quelque époque que ce soit. Nous avions des officiers
12 d'artillerie chevronnés parmi les observateurs militaires des Nations
13 Unies, et ceux-ci ont pu procéder à des évaluations. Mais on ne saurait,
14 sans se tromper, dire précisément combien exactement il y avait d'armes sur
15 le mont Igman.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il vous reste 15 minutes pour procéder à
17 la fin du contre-interrogatoire.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Avec l'aide du colonel Mole, et pour peu
19 que je parvienne à formuler mes questions de façon à ce qu'il puisse y être
20 répondu par un oui ou par un non, je réussirai peut-être à en terminer en
21 15 minutes. Mais il serait regrettable que ce témoin parte d'ici sans nous
22 avoir donné une idée complète de la situation.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Vous avez dit, Colonel, dans votre déclaration amalgamée que les
25 Musulmans possédaient deux chars T-54, et qu'ils avaient également des
26 armes antiaériennes qu'ils utilisaient comme s'il s'agissait d'armes de tir
27 direct, et encore une fois dans l'affaire Galic, le 3 juillet 2002, en page
28 11 097 du compte rendu d'audience, vous avez également dit dans votre
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1 déposition que les Musulmans pilonnaient l'aéroport à partir de Butmir.
2 Est-ce que vous le confirmez ici aujourd'hui ?
3 R. Je n'ai pas cette déclaration sous les yeux actuellement. Mais si c'est
4 ce qui est écrit dans cette déclaration, je le maintiens.
5 Q. Je vous remercie. Puis dans votre déclaration amalgamée, au paragraphe
6 104, vous confirmez que vous avez déclaré le 26 novembre 1992 que les
7 Musulmans avaient pilonné aux mortiers le poste de transformation
8 électrique de Blazuj, ce qui a entraîné une coupure de l'adduction d'eau,
9 coupure qui a été leur réplique par rapport au fait que les Serbes avaient
10 coupé l'eau à Hrasnica. Conviendrez-vous que le poste de transformation
11 électrique et la possibilité de disposer de courant électrique était
12 crucial vis-à-vis de la fourniture d'eau à Sarajevo ?
13 R. Lorsque nous organisions des missions de service public - excusez-moi,
14 mais je ne suis pas électricien - et donc j'ai considéré, sur la base de
15 mes lectures, que les missions de service public étaient destinées à être
16 réalisées par les ingénieurs de la FORPRONU à partir du quartier général.
17 Donc je ne saurais commenter ce que fait un poste de transformation
18 électrique vis-à-vis de la fourniture d'eau.
19 Q. Mais ceci figure dans votre déclaration amalgamée, paragraphe 104.
20 Rappelez-vous, Bacevo était la principale source d'eau du côté serbe, et
21 elle recevait l'électricité à partir du poste de transformation. Alors si
22 les Musulmans touchaient ce poste de transformation particulier,
23 l'adduction d'eau en était automatiquement interrompue. Est-ce que vous
24 vous rappelez cela ?
25 R. Si c'est écrit dans ma déclaration, alors je m'en tiens à cela et je
26 réponds oui.
27 Q. Merci. Dans votre déclaration consolidée, aux paragraphes 131 et 132,
28 nous lisons que les Musulmans ont tiré profit de la situation qui prévalait
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1 à Sarajevo pour attirer la sympathie, et que c'est à cette fin qu'ils
2 faisaient obstacle à la circulation des civils dans la ville et qu'ils
3 gardaient la population de Sarajevo à l'intérieur de la ville. Voilà ce qui
4 est écrit dans ces deux paragraphes de votre déclaration consolidée. Est-ce
5 que vous êtes d'accord avec cela ?
6 R. Oui, j'ai ces deux paragraphes sous les yeux.
7 Q. Merci. Conviendrez-vous que pendant la période où vous vous êtes trouvé
8 là-bas, il se trouvait à Sarajevo environ 60 000 Serbes qui étaient dans
9 les quartiers contrôlés par les Musulmans dans la ville, et que par le
10 truchement du général Morillon, ainsi que par la voie d'appels publics,
11 nous, et moi personnellement, nous sommes efforcés de veiller à ce que la
12 liberté de déplacement des civils soit garantie et que les civils aient le
13 droit de partir pour une partie du territoire où ils s'estimaient davantage
14 en sécurité ?
15 R. A l'intérieur de Sarajevo, il y avait une population très mélangée sur
16 le plan ethnique. Je n'ai pas les chiffres exacts en tête, même si j'ai
17 peut-être pu les citer dans des interventions précédentes. Mais oui, il y
18 avait un nombre important de Serbes à l'intérieur de Sarajevo.
19 Q. Merci. Dans certains passages de votre déclaration, vous avez confirmé
20 que le 1er Corps était stationné à Sarajevo, et que sur 70 000 membres de ce
21 1er Corps la moitié environ se trouvait dans Sarajevo intra muros. Vous avez
22 confirmé également avoir entendu dire que Juka Prazina et d'autres
23 criminels avaient leurs propres brigades, n'est-ce pas ?
24 R. C'est exact.
25 Q. Conviendrez-vous que tout cela ne pouvait que constituer une
26 provocation de la part de la partie adverse, que cela créait une pression
27 médiatique sur les Serbes, et j'évoquerai également l'attitude partiale des
28 journalistes, y compris de certains responsables politiques dont vous avez
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1 parlé hier qui, effectivement, avaient une attitude anti-serbe. Alors
2 conviendrez-vous que tous ces éléments nous éloignaient toujours davantage
3 de la paix ? Pourriez-vous citer le nom d'un seul politicien dont
4 l'attitude et les positions sont arrivées jusqu'à vos oreilles ?
5 R. En ma qualité de soldat et y compris de soldat à la retraite, je ne me
6 sens pas très à l'aise pour répondre à cette question.
7 Q. Dans ce cas, nous vous épargnerons la peine de prononcer ces noms. Mais
8 ce qui importe c'est l'idée et le concept que vous avez remarqué, concept
9 qui était effectivement présent tout comme tous les autres concepts que
10 vous avez remarqués et observés personnellement.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document
12 1D2227.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Vous avez dit qu'il existait des indications très claires, comme on
15 peut le lire dans cette déclaration, que, je cite :
16 "Encore une fois, ceci indique clairement qu'il n'existait pas de structure
17 de commandement unifié ou bien coordonné d'un côté ou de l'autre."
18 Ça c'est ce qu'on lit dans le document 1D2227. Nous en avons dit quelques
19 mots hier.
20 Conviendrez-vous que le Corps de Sarajevo-Romanija a hérité ce qui
21 existait déjà dans le cadre de l'armée présente jusqu'à ce moment-là dans
22 ce territoire, y compris au niveau municipal, et que tous les responsables
23 depuis le général Sipcic jusqu'au général Milosevic, ont éprouvé de graves
24 problèmes à mettre en place une structure de commandement unifié
25 susceptible de diriger ces unités locales ?
26 R. Ceci a sans aucun doute représenté une difficulté significative que
27 j'ai constatée des deux côtés. Ce n'est pas une réalité qui n'existait que
28 du côté serbe. Donc je comprends ce que vous dites. Et j'éprouvais pas mal
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1 de compassion par rapport à cette situation, et je suis d'accord avec
2 l'appréciation que vous venez de faire.
3 Q. Merci.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
5 document.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A moins qu'il n'ait déjà été admis,
7 bien, nous admettons ce document.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Qui devient la pièce D540, Monsieur le
9 Président, Madame, Messieurs les Juges.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du document 65
11 ter numéro 11575.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Ce document date de l'époque du général Sipcic -- non, non, non, du
14 général Galic. Et c'est le colonel Marcetic qui écrit ce document dans
15 lequel il indique que des dirigeants locaux et leurs partisans sont devenus
16 incontrôlables dans certaines zones, et que ces difficultés se retrouvent à
17 tout moment, à commencer par Sipcic qui les éprouve et qui a été confronté
18 à la pire situation dans les premiers jours, après la création de la VRS.
19 Mais que, y compris au mois de novembre, le commandement de corps est
20 confronté au même problème. Est-ce que ceci correspond à ce que vous ave
21 confirmé il y a quelques instants ?
22 R. Je vous remercie. Je n'ai pas vu ce document, évidemment, mais il
23 concorde tout à fait à ce que nous avons pu constater nous-mêmes dans cette
24 situation. Donc oui, je comprends votre position.
25 Q. Je vous remercie.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document peut être versé au
27 dossier.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi nous n'avons qu'une traduction
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1 partielle de ce document ?
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une traduction qui date de l'affaire
3 Galic. Nous n'avons pas de moyen suffisant pour faire traduire nous-mêmes
4 l'intégralité de ce document, mais nous n'avons rien contre qu'une
5 traduction complète soit réalisée.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Hayden, si cette traduction
7 vous suffit, nous admettrons le document en l'état. Dans le cas contraire,
8 nous l'enregistrerons aux fins d'identification.
9 M. HAYDEN : [interprétation] S'il pouvait être enregistré aux fins
10 d'identification. Nous en reparlerons plus tard avec vous, Monsieur le
11 Président.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Bien, nous l'enregistrerons aux
13 fins d'identification dans l'attente d'une traduction complète.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D541,
15 enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président, Madame,
16 Messieurs les Juges.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Donc dans ces conditions, alors que la partie serbe subissait une
20 pression importante de tous les côtés, pourrait-on dire, et en l'absence
21 d'une structure de commandement unifié, est-ce qu'il est permis de penser
22 que les salves d'obus ou les tirs ne signifiaient pas nécessairement que
23 les autorités serbes, à commencer par les commandants supérieurs, auraient
24 ordonné ou ourdi certains incidents ? Est-ce que vous conviendrez qu'il
25 serait tout à fait déraisonnable, et même incompréhensible, voire tout à
26 fait impossible à imaginer que la partie serbe, qui avait un nombre
27 important d'officiers entraînés, se mettent tout d'un coup à se tirer des
28 balles dans le pied jour après jour ?
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1 R. Ceci est sans aucun doute une question à laquelle il est impossible de
2 répondre par un oui ou par un non. Vous déclarez que la partie serbe
3 souffrait d'une absence totale de commandement unifié Rien ne serait être
4 plus éloigné de la vérité. Toute formation militaire capable de lancer une
5 mission de tir sur un secteur aussi concentré qu'Otes, en s'appuyant sur un
6 groupe disparate qui est géographiquement avec une répartition géographique
7 des armes lourdes, un peu partout dans une ville ne saurait illustrer
8 l'expression absence de commandement unifié. Par conséquent, si l'on
9 supprime cette partie de votre commentaire, de votre dernier commentaire de
10 cette déclaration, bien, je pourrais me dire d'accord avec le reste.
11 Q. Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne les opérations, mais
12 peut-être n'ai-je pas été assez clair tout à l'heure dans ma question. Ce
13 que j'avais à l'esprit c'était les incidents. Par exemple, vous êtes
14 intervenu par rapport à un certain nombre d'incidents, et le commandement
15 Suprême a immédiatement rétabli les choses. Je parlais d'incidents lorsque
16 j'ai parlé de coups de feu. Est-ce que vous êtes d'accord que lorsque nous
17 nous sommes rencontrés nous nous sommes mis d'accord sur le fait qu'il y
18 avait trop d'armes en Bosnie-Herzégovine, qu'il était trop facile de s'en
19 procurer par voie d'acquisition ? Et que je pense que vous vous en
20 souviendrez, lorsque nous nous sommes rencontrés nous avons parlé du fait
21 qu'il y avait trop de vols d'armement également à Sarajevo ? Lorsque je
22 parle de vols d'armes ou d'armement, je parle de vols d'armes qui étaient
23 la propriété de particuliers, donc je parle d'un mauvais contrôle exercé
24 par les unités locales, étant donné le grand nombre d'incidents, et je ne
25 pensais pas à des opérations militaires bien planifiées. Alors,
26 conviendrez-vous qu'il existe une distinction entre les deux ?
27 R. Je diviserais ma réponse en deux parties.
28 Une guerre faisait rage. Et la guerre c'est quelque chose de continu. Les
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1 incidents se rejoignaient les uns les autres. Ils n'étaient pas divisibles,
2 on ne pouvait pas déclarer que tel ou tel incident avait été provoqué par
3 une série bien déterminée d'événements. Les choses sont loin d'être simples
4 dans une guerre. Je ne saurais vous expliquer cela, puisque vous n'êtes pas
5 soldat et que vous n'avez pas été engagé dans des activités de cette
6 nature, plus clairement que ce que j'essaie de faire maintenant, à savoir
7 que la situation n'était pas une situation maîtrisée; il s'agissait d'une
8 guerre en pleine évolution. Donc chaque incident succédait à un incident
9 précédent et l'ensemble de ces incidents constituait un tout indivisible.
10 On ne pouvait pas plus reprocher tel incident à telle personne que
11 reprocher l'incident suivant à telle autre personne, et les Nations Unies
12 n'avaient pas la possibilité d'expliquer, comme vous vous êtes efforcé de
13 le faire à l'instant, les difficultés que vivaient les combattants.
14 Quant à votre commentaire au sujet des armes qui étaient propriété de
15 particuliers, oui, bien sûr, il y en avait, mais soyons tout à fait clairs
16 sur ce point. Les armes lourdes n'étaient pas la propriété de particuliers.
17 Toutes les armes lourdes qui se trouvaient dans les environs de Sarajevo
18 que nous avons vues ou contrôlées étaient dans des mains autres que celles
19 de particuliers. C'était une partie de la structure des forces dont
20 disposaient les Serbes dans les environs de Sarajevo.
21 Mais ce que vous avez dit au sujet de la difficulté d'exercer le
22 commandement et le contrôle par rapport aux tentatives qui ont pu être
23 faites pour renforcer ce commandement et ce contrôle, ce commentaire est
24 tout à fait juste. Il y avait des difficultés au niveau géographique. Il y
25 avait des difficultés structurelles. Il y avait des difficultés
26 interpersonnelles. Il y avait l'histoire à laquelle vous avez fait allusion
27 en laissant entendre que certaines zones avaient été défendues par leur
28 population locale qui avait été absorbée par la structure militaire serbe.
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1 J'espère avoir expliqué les éléments que j'ai pu expliquer dans ces
2 domaines de la façon dont vous auriez souhaité que je l'explique.
3 Donc nous étions tout à fait conscients des difficultés et de la
4 nature de la structure existante, mais je dois vous corriger sur les points
5 qui ont fait l'objet du début de ma réponse s'agissant du commandement et
6 du contrôle d'armes entre les mains de particuliers.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera votre dernière question,
8 Monsieur Karadzic.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ne serait-il pas possible d'en poser deux,
10 Excellences ? Voilà ce que je voulais encore demander au colonel :
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Est-ce que vous avez pu consulter le manuel militaire britannique,
13 Colonel, et est-ce que vous conviendrez que c'est un manuel qui existe dans
14 toutes les armées du monde et que toutes les armées sont censées respecter
15 ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur
17 Karadzic ?
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Lorsque nous avons rencontré le colonel, nous
19 lui avons fourni quelques extraits tirés d'un manuel militaire de l'armée
20 britannique, que nous utiliserons un peu plus tard durant la présente
21 procédure, et dans ce manuel on voit que des experts expliquent le sens à
22 donner aux expressions; cibles militaires, tirs de tireurs embusqués,
23 cibles légitimes, et cetera, et cetera. Je voulais simplement demander au
24 colonel s'il connaît ce manuel et s'il est au courant du fait que ce manuel
25 présente les règles fondamentales qui régissent le comportement de l'armée
26 britannique. Après quoi, je lui poserai ma question suivante.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais j'aimerais mieux comprendre de quel
28 document vous parlez exactement. Est-ce qu'il s'agit des règles de conflit
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1 ou bien du manuel sur la Loi militaire, de quoi parlez-vous exactement ?
2 J'ai lu pas mal de livres dans ma carrière militaire.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. C'est le chapitre 5 du manuel militaire britannique que nous vous avons
5 remis, si vous vous en souvenez. Nous vous avons remis des extraits de
6 l'ouvrage intitulé, Manuel militaire britannique. Est-ce que vous êtes
7 d'accord quant au fait qu'il s'agit d'un manuel qui présente les règles que
8 l'armée est tenue de respecter, donc les règles de base de l'armée ?
9 R. Merci. Oui, maintenant je comprends de quel ouvrage vous parlez. Oui,
10 oui, celui dont nous avons discuté, je m'en souviens, oui.
11 Q. En page 25, ligne 5 -- ou plutôt, page 24, ligne 5 du compte rendu
12 d'aujourd'hui en anglais. Il semblerait que vous auriez dit : "Je ne
13 pourrais être d'accord," alors que vous avez dit, en réalité : "Je peux
14 être d'accord."
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais qu'une correction soit apportée
16 au compte rendu.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Puis j'en arrive à ma dernière question --
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que le colonel Mole
20 puisse faire dérouler le compte rendu sur les écrans à l'envers. Mais j'ai
21 écouté attentivement, et je crois pouvoir dire que le colonel a déclaré :
22 "Je ne saurais être d'accord." Parce que c'est une réponse qu'il vous a
23 faite en vous disant : "Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité," eu
24 égard à l'absence totale de commandement unifié. A la fin de votre réponse,
25 il a dit :
26 "Par conséquent, si vous retirez cette partie de commentaire de votre
27 déclaration, je ne saurais être d'accord avec le reste de ce que vous avez
28 dit."
Page 5912
1 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que je voulais dire, Monsieur, je
2 vous remercie.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est ce qu'il a dit.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je croyais avoir compris que si l'on retirait
5 cette partie du commentaire, vous étiez d'accord avec le reste. Mais il
6 doit s'agir ici d'une barrière linguistique entre nous.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Alors, dans votre déclaration de 1997, page 14, vous avez déclaré que
9 vous n'aviez jamais eu le sentiment que Karadzic ou Mladic avait une
10 implication directe dans :
11 "…les événements de Sarajevo au jour le jour."
12 Autrement dit, que nous n'avons jamais eu une intervention directe dans les
13 événements de Sarajevo au quotidien, étant donné le travail que nous
14 avions, les contacts avec les étrangers, nos voyages, et cetera. Est-ce
15 bien ce que vous avez déclaré dans votre déclaration ?
16 R. Oui, et ceci est tout à fait compréhensible. C'est la raison pour
17 laquelle le général Galic commandait le corps d'armée, et c'est la raison
18 pour laquelle vous faisiez le travail que vous faisiez. Bien entendu, ce
19 qui venait de l'extérieur et à quoi le général Galic réagissait c'étaient
20 des pressions politiques, et pour le général Mladic, il est permis de
21 penser qu'il s'agissait de pressions militaires ou de directives qui lui
22 étaient données par des gens situés plus haut que lui. Mais c'est tout à
23 fait juste, au quotidien, tout ceci était la mission du Corps de Sarajevo-
24 Romanija [comme interprété].
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Colonel.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Hayden, je pense que vous
28 pouvez poursuivre.
Page 5913
1 M. HAYDEN : [interprétation] Nous avons encore un peu de temps avant la
2 pause, Monsieur le Président ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui --
4 M. HAYDEN : [interprétation] Je n'en aurai que pour cinq minutes, en tout
5 cas moins de dix.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez procéder, et nous ferons la
7 pause ensuite.
8 M. HAYDEN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
9 Nouvel interrogatoire par M. Hayden :
10 Q. [interprétation] Colonel Mole, ce matin, nous parlions des observations
11 faites par le capitaine Patrick Henneberry durant sa déposition. Vous avez
12 fait remarquer en page 15 du compte rendu de l'audience d'aujourd'hui que,
13 le 8 septembre en tout cas, il travaillait du côté Lima, c'est-à-dire du
14 côté des Bosno-Serbes. Pendant votre tournée, est-ce qu'il a jamais
15 travaillé du côté Papa ?
16 R. Non.
17 Q. Et pourquoi cela ? Pourquoi pouvez-vous dire avec certitude que s'il
18 travaillait du côté Lima le 8 décembre, il n'aurait pas pu travailler du
19 côté Papa ?
20 R. Comme je l'ai déjà expliqué, lorsque vous étiez observateur des Nations
21 Unies et que vous étiez envoyé à Sarajevo, la dernière fois que vous voyiez
22 les gens avec lesquels vous arriviez à Sarajevo, si eux se trouvaient de
23 l'autre côté, c'est au moment de quitter la réunion d'information dans
24 l'immeuble des PTT. Puis une fois que vous alliez du côté Lima ou une fois
25 que vous restiez à l'intérieur de la ville, vous poursuiviez jusqu'à son
26 terme votre tournée d'inspection.
27 Q. Est-ce que le capitaine Henneberry ou des officiers qui se trouvaient
28 du côté Lima participaient aux enquêtes menées du côté Papa par les
Page 5914
1 observateurs militaires des Nations Unies ?
2 R. Absolument pas. Non, Monsieur.
3 Q. Est-ce qu'ils connaissaient les communications officielles qui venaient
4 du côté Papa ?
5 R. Il peut y avoir une nuance à ma réponse, parce qu'il existait tout de
6 même des postes de radio qui fonctionnaient, donc tout le monde pouvait
7 entendre ce qui se passait d'un côté et de l'autre à la radio. Mais
8 n'oublions pas que le réseau radiophonique était un système physique qui
9 était utilisé au quotidien dans un certain nombre d'activités et qu'il
10 n'avait rien à voir avec des décisions politiques ou autres.
11 Est-ce que ceci répond à votre question ?
12 Q. Merci. Si un poste d'observation -- par exemple, d'observation des tirs
13 musulmans sur l'immeuble des PTT en ville avait existé, est-ce que ceci
14 aurait été enregistré dans les rapports de situation quotidiens dont vous
15 étiez l'auteur ?
16 R. Oui, Monsieur, oui.
17 Q. Colonel, en page 39 de votre déclaration consolidée, vous discutez des
18 armes que vous avez vues en possession de la présidence du côté Papa. Hier
19 vous avez décrit la forte dispersion des bombardements de la ville. A votre
20 connaissance, est-ce que les armes décrites au paragraphe 39 de votre
21 déclaration pouvaient être responsables de cette très importante dispersion
22 des attaques sur la ville de Sarajevo ?
23 R. Non, les seuls équipements qui étaient à portée de la ville et qui
24 pouvaient être responsables de ce genre de tirs et d'autres fortes
25 explosions qui se sont produites dans la ville appartenaient à ceux qui
26 étaient à l'extérieur de la ville.
27 M. HAYDEN : [interprétation] Je demanderais l'affichage de la pièce D537,
28 Monsieur le Greffier.
Page 5915
1 Q. Colonel Mole, c'est la carte que vous avez annotée hier au cours du
2 contre-interrogatoire à la demande du Dr Karadzic. Vous vous rappelez avoir
3 inscrit le chiffre "3" à l'endroit où se trouve Ilidza, ou en tout cas la
4 partie serbe d'Ilidza, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, Monsieur, oui.
6 Q. Hier, page 5 833 du compte rendu d'audience, le Dr Karadzic a appelé
7 votre attention sur le paragraphe 84 de votre déclaration, où vous discutez
8 de l'attaque d'Otes, et vous déclarez que :
9 "En dehors de l'attaque d'Otes, des obus sont tombés un peu partout
10 ailleurs dans la ville."
11 Puis à partir de la page 5 835 du compte rendu d'audience, sur deux pages,
12 le Dr Karadzic discute du contenu d'un article de journal transmis par
13 l'agence France Presse, qui a été versé au dossier et constitue désormais
14 la pièce D535. J'aimerais rafraîchir votre mémoire sur une partie de
15 l'article qu'il a soumise à votre attention et qui se lit comme suit :
16 "Les combats menés mardi autour de l'aéroport ont commencé lorsque les
17 unités d'infanterie bosniennes ont attaqué les forces serbes stationnées
18 dans la ville d'Ilidza, qui est limitrophe de l'aéroport. Les Serbes ont
19 réagi par des tirs d'artillerie intenses qui ont secoué tout le secteur. Le
20 commandant Barry Frewer, un porte-parole des troupes des Nations Unies à
21 Sarajevo, a déclaré cela mercredi."
22 Le Dr Karadzic vous a demandé si vous connaissiez le commandant Frewer et
23 vous a dit ensuite :
24 "Conviendrez-vous que parallèlement aux combats pour Otes et Zuc, il y
25 avait des combats qui se menaient dans d'autres parties de la ville
26 également ?"
27 Et vous avez répondu que vous n'aviez remarqué aucune différence par
28 rapport à ce que vous considériez comme des actions normales sur les autres
Page 5916
1 parties du front.
2 Alors, Colonel Mole, en admettant que ce qui est dit dans l'article du
3 journal est exact, à savoir qu'il y avait des combats à Ilidza qui avaient
4 commencé par une offensive des Musulmans de Bosnie, est-ce que ceci
5 permettrait d'expliquer les obus dont vous dites dans votre déclaration
6 qu'ils, je cite, "tombaient un peu partout dans la ville" ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre objection, Monsieur
9 Karadzic ?
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, il s'agit ici de conjectures. La question
11 est une question directrice qui, par ailleurs, demande au témoin des
12 conjectures. Le témoin ne peut pas spéculer sur les intentions et les
13 origines d'un tir, et il ne saurait établir un lien entre tel ou tel tir et
14 tel ou tel autre événement, même si le colonel Mole a bien dit qu'une
15 guerre était un tout indivisible. Donc nous ne parlons pas de Sarajevo,
16 mais de toute la Bosnie-Herzégovine. Et je pense que cette question n'est
17 pas acceptable.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord avec vous,
19 Monsieur Karadzic. C'est une question qui découle de votre question et qui
20 ne demande pas au colonel Mole de spéculer.
21 Est-ce que vous avez terminé votre question, ou est-ce que vous pouvez
22 répondre maintenant, Monsieur Mole ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur, je pense que je peux répondre.
24 J'aimerais revenir à la carte. Pourrait-on l'afficher à nouveau sur les
25 écrans ?
26 M. HAYDEN : [interprétation] Il s'agit de la pièce D537.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je la vois qui apparaît.
28 Si selon les observateurs une menace importante existait dans le secteur
Page 5917
1 d'Otes, qui était donc la cible des forces serbes -- est-ce que je peux
2 annoter la carte ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, vous pouvez l'annoter, mais
4 séparément. Il faudrait que cela constitue un document distinct.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez une minute, je vous prie.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons donc utiliser la couleur
9 bleue.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis daltonien, alors…
11 Je vais annoter la carte ici [Le témoin s'exécute]. D'après ce que je
12 savais, les intentions nourries par les Serbes consistaient à chasser la
13 présidence du secteur correspond au numéro "2," à savoir de l'enclave qui
14 se trouve ici jusqu'à la ligne qui se trouve là, ce qui leur aurait permis,
15 comme on peut le voir à l'examen de cette carte, de tracer une ligne
16 géographique à partir de l'aéroport ou d'Ilidza ou du numéro "3" sur la
17 carte jusqu'à la route que j'ai annotée en bleu - et donc je continuerai la
18 ligne bleue - jusqu'ici [Le témoin s'exécute]. En dehors du problème perçu
19 par les Serbes par rapport à Ilidza qu'ils considéraient comme dû à Otes,
20 il y avait là aussi une espèce d'objectif tactique.
21 Donc je reviens à votre question. Il importe, je pense, que toute action
22 qui survienne dans le secteur numéro "2" ait immédiatement des
23 répercussions dans la zone toute proche, donc toute attaque provenant de
24 Butmir ou d'Ilidza, disons, ou de n'importe où ailleurs à Ilidza, aurait
25 provoqué une réaction compréhensible par rapport à ce qui s'est passé dans
26 le secteur d'Otes.
27 Ce dont je suis en train de parler ici c'est ma réponse à la question du Dr
28 Karadzic quant au niveau d'activité qui existait dans les autres quartiers
Page 5918
1 de la ville, et je crois que vous m'avez demandé de parler également des
2 zones situées plus à l'est dans les secteurs que j'ai annotés ici. Par
3 conséquent, le front encerclait complètement Sarajevo, et il y avait sur ce
4 front une tension légèrement accrue, bien entendu, mais également des
5 explosifs qui tombaient en beaucoup plus grand nombre à partir de
6 l'extérieur de la ville et pour lesquels nous ne voyions aucun rapport avec
7 les événements que je viens d'essayer de décrire.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Colonel.
9 Pourriez-vous apposer votre signature et inscrire la date
10 d'aujourd'hui au bas de ce document.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. [Le témoin s'exécute]
12 M. HAYDEN : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous admettons une nouvelle fois cette
14 carte qui constituera désormais une nouvelle pièce à conviction.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P1436, Monsieur le
16 Président.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
18 Le Juge Morrison a quelques questions supplémentaires à vous poser.
19 Questions de la Cour :
20 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Une seule, Colonel Mole.
21 Le réseau radiophonique qui était partagé par les positions Papa et Lima,
22 était-il crypté ou public ?
23 R. Il était public, Monsieur, donc chacun pouvait y avoir accès. En fait,
24 tellement ouvert que nous fournissions des postes de radio qui avaient la
25 même fréquence pour les officiers de liaison serbes qui travaillaient avec
26 nous dans l'immeuble des PTT et les officiers de liaison de la présidence
27 qui travaillaient avec nous également, notre intention étant de montrer que
28 nos activités étaient tout à fait ouvertes.
Page 5919
1 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Votre déposition est arrivée à
3 son terme. Merci d'être venu à La Haye pour témoigner.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez maintenant vous retirer.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
7 [Le témoin se retire]
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20
9 minutes et reprendrons à 11 heures. Un peu plus de 20 minutes.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 40.
11 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à vous, Messieurs Gaynor et
13 Subotic.
14 Je suppose que le témoin suivant sera M. Higgs, n'est-ce pas ?
15 M. GAYNOR : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ce qui est de la durée du contre-
17 interrogatoire, la Chambre de première instance avait indiqué aux parties
18 hier que M. Karadzic disposera de trois heures pour son contre-
19 interrogatoire de M. Higgs. La Chambre estime que trois heures est une
20 durée raisonnable pour le contre-interrogatoire de M. Higgs, et c'est une
21 décision que nous avons prise compte tenu des critères que nous avions
22 énoncés précédemment, et notamment au vu du fait que les éléments de preuve
23 qui vont être présentés par M. Higgs sont quand même assez limités.
24 Puisqu'il n'a pas mené à bien l'enquête de départ à propos des différents
25 incidents de bombardement dont il est question dans son rapport d'expert,
26 il fournit plutôt une analyse et il dégage ses propres conclusions compte
27 tenu de l'examen qu'il a fait de ses rapports et en vertu de ses
28 observations à propos des incidents en question. Donc la Chambre estime que
Page 5920
1 trois heures suffiront amplement pour contre-interroger ce témoin à propos
2 de sa méthodologie, une méthodologie qu'il a utilisée pour dégager ses
3 propres conclusions, et trois heures suffiront amplement donc pour lui
4 poser des questions et pour contester ses propres conclusions.
5 Toutefois, comme nous l'avions déjà indiqué précédemment, si au cours du
6 contre-interrogatoire l'accusé venait à démontrer qu'il a besoin d'un temps
7 supplémentaire, et que surtout ce temps supplémentaire est justifié, la
8 Chambre se penchera à nouveau sur cette question.
9 A moins qu'il n'y ait d'autres questions de procédure, je pense que nous
10 pouvons faire entrer le témoin.
11 Monsieur Gaynor.
12 M. GAYNOR : [interprétation] Oui, une question de procédure, la Défense et
13 l'Accusation sont parvenues à un accord à ce sujet, il s'agit justement du
14 rapport de M. Higgs, l'incident intitulé, Incident G-16, qui figure à la
15 page 12 et qui se poursuit --
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, à la page 13 à 17; c'est cela ?
17 M. GAYNOR : [interprétation] Oui.
18 La Défense allait présenter une requête aux fins d'exclusion de cette
19 partie du rapport. Nous, nous acceptons que cette partie du rapport ne soit
20 pas versée au dossier et ne soit pas retenue comme élément de preuve par
21 rapport à l'ensemble des éléments de preuve qui vont être présentés par M.
22 Higgs.
23 Toutefois, nous réservons la position que nous avions établie dans notre
24 requête du 31 août 2009, et que nous avons répétée d'ailleurs dans la
25 notification qui a accompagné l'acte d'accusation modifié en l'espèce. Nous
26 estimons qu'il va dans l'intérêt de la justice que dans certains cas, la
27 Chambre de première instance entende des éléments de preuve à propos
28 d'incidents qui ne font plus partie de l'acte d'accusation conformément à
Page 5921
1 l'article 73 bis. Et entre autres, nous allons nous appuyer sur la décision
2 de la Chambre d'appel dans l'affaire Seselj, décision du 9 janvier 2008.
3 Donc je n'ai peux pas en dire davantage pour le moment, mais nous nous
4 réservons le droit d'intervenir à ce sujet.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
6 Quoiqu'il en soit, ces extraits, ces parties qui ne seront pas
7 versées au dossier, est-ce qu'elles vont faire l'objet
8 d'expurgation ?
9 M. GAYNOR : [interprétation] Non. Nous n'avons pas encore pris cette
10 mesure, mais --
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous allez la prendre cette mesure,
12 n'est-ce pas ?
13 M. GAYNOR : [interprétation] Oui, tout à fait.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je vous remercie pour nous avoir
15 présenté cet accord, et je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin.
16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Higgs.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Auriez-vous l'amabilité de prononcer la
20 déclaration solennelle.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN : RICHARD HIGGS [Assermenté]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, et je vous demanderais
26 de bien vouloir prendre place.
27 Monsieur Gaynor.
28 M. GAYNOR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
Page 5922
1 Interrogatoire principal par M. Gaynor:
2 Q. [interprétation] Est-ce que vous pourriez décliner votre identité aux
3 fins du compte rendu d'audience ?
4 R. M. Richard James Higgs.
5 Q. Est-ce que vous êtes de nationalité britannique ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous avez fait partie de l'armée britannique pendant 22 ans, entre
8 l'année 1980 jusqu'à l'année 2002 ?
9 R. C'est exact.
10 Q. En fait, entre 1987 et 2002, est-ce que vous pourriez indiquer à la
11 Chambre de première instance quelle était la nature de vos fonctions
12 pendant cette période ?
13 R. A partir de l'année 1987, j'ai travaillé dans le domaine des mortiers
14 précisément. J'ai commencé par enseigner au sein d'une institution de
15 formation. Donc il s'agit d'enseignement de mortiers à différents niveaux
16 de compétence. Il s'agit de soldats de l'armée britannique auxquels j'ai
17 enseigné. Il y avait également des étudiants internationaux. Je leur
18 enseignais le déploiement opérationnel. Je leur fournissais des
19 informations techniques ainsi que tactiques et leur transmettait les
20 connaissances balistiques de l'époque.
21 Puis j'ai eu un rôle de conseiller auprès de nos forces cantonnées en
22 Allemagne et j'étais responsable de toute la formation, et là encore il
23 s'agissait de fournir un enseignement tactique, technique et balistique. Je
24 les aidais au cas où il y aurait eu des incidents de sécurité auxquels il y
25 aurait eu une enquête à propos de mortiers. C'était moi qui me chargeais de
26 cela en leur nom. Je leur fournissais des conseils en bonne et due forme
27 pour garantir que tout était fait correctement et pour mener l'enquête s'il
28 y a eu un incident pour savoir quelle avait été la cause de l'incident, par
Page 5923
1 exemple.
2 Puis j'ai eu un rôle assez semblable, mais cette fois-ci je
3 travaillais de façon beaucoup plus générale, car je ne conseillais pas
4 seulement l'armée britannique mais également des armées étrangères à
5 propos, une fois de plus, de l'utilisation opérationnelle des mortiers et
6 de leur capacité balistique et technique. Puis je me suis également
7 intéressé à la mise au point de mortiers. Puis mon dernier rôle en tant
8 qu'instructeur et formateur de l'armée britannique, je suis devenu l'expert
9 du domaine des mortiers, de la division des mortiers. Donc je suis devenu
10 l'expert technique, s'il en fût, des mortiers, et en tant que tel, j'ai
11 fourni des conseils à l'armée britannique une fois de plus dans le domaine
12 de la formation. Il s'agissait également de conseils à propos de critères
13 tactiques et opérationnels. Mais j'ai dirigé et j'ai enseigné également
14 dans le domaine de la sécurité balistique. Ma spécialité, en fait, ou mes
15 responsabilités consistaient à m'assurer que tous les tirs étaient
16 effectués en toute sécurité en suivant la méthodologie et la bonne
17 procédure. J'ai également fourni des conseils pendant cette période à
18 plusieurs pays étrangers et toujours à propos des mêmes domaines de
19 compétence.
20 Q. Alors, je suppose que vous avez assisté à un grand nombre d'exercices
21 de tir pendant votre carrière. Est-ce que vous pourriez indiquer le nombre
22 d'exercices de tir auxquels vous avez participé ?
23 R. Il m'est difficile de fournir un chiffre exact. Mais lorsque j'étais
24 formateur, je dirais, que pendant des semaines, de longues semaines, nous
25 avions des exercices de tir, trois ou quatre fois par semaine. Lorsque je
26 me trouvais en Allemagne, je visitais à raison de trois à quatre jours des
27 sites où se produisaient des exercices de tir. Donc cela représente non pas
28 des centaines mais des milliers de tirs pour chaque journée d'exercice de
Page 5924
1 tir.
2 Q. Est-ce que vous pourriez indiquer le nombre d'analyses de cratère que
3 vous avez effectuées lors de votre carrière ?
4 R. Pendant la partie formation de mes activités, je dirais, que nous
5 enseignions l'identification de la direction de ce que nous appelions une
6 batterie hostile. Il s'agit de savoir quelle est la provenance des tirs. A
7 ce sujet, à cet égard, j'ai étudié des centaines de cratères parce que cela
8 faisait partie de la formation. Pour ce qui est des enquêtes à proprement
9 parler, lorsqu'il y avait eu incident - une fois de plus, je vous dirais
10 qu'il m'est difficile de vous fournir un chiffre exact - mais je dirais que
11 j'ai participé à des dizaines, pour ne pas dire à des centaines d'enquêtes.
12 Q. Dans votre rapport, vous faites référence à un certain nombre de cas où
13 il y a des cibles prérépertoriées [phon]. J'aimerais que vous nous
14 indiquiez brièvement ce que cela signifie. Comment est-ce que fonctionne en
15 quelque sorte une cible prérépertoriée dans le contexte d'une ville
16 assiégée ?
17 R. Pour que les tirs de mortiers soient plus exacts pour éviter une perte
18 de temps ainsi qu'une perte de munitions, d'ailleurs, il faut essayer
19 d'ajuster, de pointer les tirs vers les cibles. Cela représente un gain de
20 temps. Et si la cible est prérépertoriée, cela représente un énorme gain de
21 temps. Pour cela, on peut opérer de différentes façons. Mais en
22 prérépertoriant une cible, les personnes qui se trouvent sur la position du
23 mortier connaîtront l'orientation exacte, l'élévation et les informations
24 nécessaires qui permettront de toucher la cible de façon beaucoup plus
25 exacte dès le premier tir. Donc plus vous vous trouvez longtemps sur une
26 position, donc si vous avez un mortier qui se trouve sur une position
27 pendant une longue période de temps, plus vous pouvez établir une liste de
28 cibles prérépertoriées sur une zone assez importante, ce qui signifie que
Page 5925
1 s'ils doivent cibler une cible dans cette zone, ils auront beaucoup plus de
2 probabilité de toucher la cible sans pour autant devoir l'ajuster
3 auparavant.
4 Q. Vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal dans l'affaire contre
5 Stanislav Galic ainsi que dans l'affaire contre Dragomir Milosevic.
6 R. C'est exact.
7 Q. Et vous avez préparé un rapport harmonisé dans lequel se trouvent des
8 renseignements pertinents à des incidents qui nous occupent dans cette
9 affaire; est-ce exact ?
10 R. Oui, tout à fait.
11 M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander l'affichage du
12 document 11 144 de la liste 65 ter.
13 Q. Vous voyez ce document sur votre écran. Est-ce qu'il s'agit du rapport
14 que vous avez présenté ?
15 R. Oui, tout à fait.
16 Q. Vous avez eu la possibilité de vous pencher sur ce rapport au cours des
17 derniers jours ?
18 R. Oui, tout à fait.
19 Q. Est-ce que vous souhaitez y apporter des corrections ?
20 R. Non.
21 Q. Est-ce que vous considérez que ce rapport peut faire partie des
22 éléments de preuve que vous présentez en l'espèce ?
23 R. Oui, tout à fait.
24 M. GAYNOR : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au
25 dossier de ce rapport sans oublier, bien entendu, l'expurgation de la
26 partie du rapport portant sur le G-16, l'incident G-16.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1437.
Page 5926
1 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, je vous propose de
2 présenter 12 documents au témoin ainsi qu'un extrait vidéo, et seuls
3 certains de ces documents font l'objet de référence dans le rapport. Je
4 souhaiterais que le document de la liste 65 ter 18178 soit affiché à
5 l'écran, je vous prie.
6 Q. Monsieur Higgs -- nous allons passer au document suivant.
7 M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage du document
8 11378, je vous prie.
9 Q. Voyez le document qui se trouve sur la gauche de votre écran, vous
10 voyez qu'il s'agit d'un document qui est adressé au QG de la FORPRONU à
11 Zagreb. Est-ce que vous pourriez confirmer qu'il s'agit du document auquel
12 vous faites référence dans votre rapport lorsque vous évoquez un incident
13 qui a eu lieu le 12 juillet 1993 ?
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Est-ce que nous pourrions examiner la troisième page de ce document.
16 Comme vous pouvez le voir, dans le dernier paragraphe qui se trouve sur la
17 gauche de votre écran, vous voyez qu'il est indiqué, je cite :
18 "Cet obus aurait pu être tiré à partir du couloir entre Nedzarici et le
19 nord d'Ilidza."
20 R. Oui, tout à fait.
21 Q. Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet ?
22 R. A propos de cet incident, d'après les informations dont je disposais
23 dans les différents rapports, notamment dans ce rapport, l'obus a atterri
24 de telle façon que l'on n'a pas pu déterminer la portée et on n'a pas pu
25 confirmer non plus la direction. Ce qui fait que dans les deux rapports ils
26 font état des meilleures informations dont ils disposaient, mais ils
27 utilisaient les informations obtenues sur les lieux et estiment donc -- ou
28 font état d'une direction approximative dont est provenu l'obus, et c'est
Page 5927
1 ce qui est indiqué dans ce rapport pour ce qui est de la zone.
2 Q. Je vous remercie.
3 M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que le document 11394 soit affiché.
4 On me dit qu'il y a une autre cote pour le document que nous avions essayé
5 d'afficher il y a un petit moment. Donc je vais vous donner cette autre
6 cote. En fait, ce document va être affiché par la suite -- non, je
7 m'excuse. Troisième page de ce document, je vous prie, pour la version
8 anglaise.
9 Q. Vous voyez la référence. Est-ce que vous pourriez confirmer qu'il
10 s'agit d'un document que vous avez utilisé pour préparer votre rapport ?
11 R. Oui, tout à fait.
12 Q. Je sais qu'il est assez difficile de déchiffrer tout cela, mais vous
13 verrez au bas du document qu'il est indiqué :
14 "L'expert en balistique a trouvé des restes d'un obus d'artillerie,
15 probablement un obus de mortier de 82-millimètres, qui a été très
16 probablement tiré à partir de Nedzarici."
17 Avez-vous quoi que ce soit à nous dire à ce sujet ?
18 R. Je dirais une fois de plus, qu'étant donné qu'il y avait peu de données
19 sur les lieux - parce qu'en fait il faut savoir que l'obus avait touché une
20 personne - donc ils n'ont pu que confirmer le calibre de l'arme et la
21 direction de la provenance. Il s'agissait d'un calibre de 80-millimètres.
22 Et nous voyons que la provenance, la direction est la même que celle que
23 nous avions vue dans le document précédent, à savoir la zone de Nedzarici.
24 Q. Bien.
25 M. GAYNOR : [interprétation] Bien. J'aimerais passer au document suivant,
26 le document 15051. Il s'agit d'un document qui porte sur l'incident G-6.
27 Q. Dans votre rapport à propos de l'incident G-6, vous faites référence,
28 Monsieur Higgs, à certaines différences à propos de cet indicent justement,
Page 5928
1 et j'aimerais que nous examinions ces différences dans le rapport.
2 M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que la deuxième page de la traduction
3 anglaise du document pourrait être affichée.
4 Q. Vous voyez qu'il s'agit d'une compilation d'un certain nombre de
5 documents; est-ce exact ?
6 R. Oui, tout à fait.
7 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante de ce document.
8 Q. Dans l'avant-dernier paragraphe, vers la fin du paragraphe, nous voyons
9 qu'il est indiqué :
10 "Le type de destruction du site d'explosion indique qu'il s'agissait d'un
11 obus de mortier de 82-millimètres tiré à partir de la position ouest où se
12 trouvait la position de l'ennemi au niveau de l'institut pour les aveugles
13 à Nedzarici. Ensuite il est indiqué : le stabilisateur de l'obus n'a pas
14 été retrouvé sur le site de l'explosion."
15 Page suivante, je vous prie, troisième paragraphe, vous voyez qu'il est
16 indiqué - une fois de plus, il s'agit d'une référence au type de
17 destruction puisqu'il est indiqué :
18 "Le type de destruction sur les lieux de l'explosion indique que l'obus
19 était un obus de mortier de 82-millimètres tiré à partir de l'ouest, où se
20 trouvait la position d'ennemi au niveau de l'institut pour les aveugles à
21 Nedzarici. Un stabilisateur d'obus de 120-millimètres a été trouvé près du
22 site de l'explosion."
23 Avez-vous quoi que ce soit à nous dire à ce sujet ?
24 R. Il y a eu une première enquête qui a été menée à bien sur les lieux de
25 l'explosion et c'est là où s'est rendue la première équipe. Ils ont évalué
26 les dégâts, les dégâts matériels et ils ont donc trouvé cet obus de 82-
27 millimètres. Et il faut savoir qu'en l'occurrence, les obus étaient tombés
28 sur la rue et il y avait l'empennage qui, d'après leur examen, n'avait rien
Page 5929
1 à voir avec ces deux obus qui étaient tombés. Donc c'est un empennage qui
2 remontait à une période précédente. Puis dans le rapport, il est indiqué
3 qu'ils ont également trouvé un obus de 120-millimètres qui était tombé dans
4 un lieu différent, qui n'avait provoqué d'ailleurs aucune victime.
5 M. GAYNOR : [interprétation] Document suivant, je vous prie, il s'agit du
6 document 19725.
7 Vous avez les premières pages d'un document dont l'original est en
8 français, et pour ce qui est de la traduction en anglais, c'est à la page
9 5.
10 Peut-on passer à la page 5 du document. Page suivante, s'il vous plaît.
11 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur Higgs ?
12 R. Oui.
13 Q. Et qu'est-ce qu'il représente ?
14 R. C'est un rapport de synthèse établi par l'officier français le
15 lendemain de l'incident. M. Verdy, c'était le nom de l'officier français.
16 Q. On peut voir ici :
17 "D'après mon estimation, les coups viennent sans doute d'une zone
18 contrôlée par les Serbes de Bosnie," est-il dit.
19 Est-ce que vous avez quelque chose à dire à propos de cette phrase ?
20 R. Pour parvenir à cette conclusion partant des rapports, on a tenu compte
21 de la direction qu'on estimait être la bonne, l'est [comme interprété], à
22 savoir que ceci situait l'origine dans la zone de Nedzarici contrôlée par
23 les Serbes de Bosnie. C'est de cela que vient cette estimation.
24 Q. Est-ce que vous avez des raisons de croire le contraire ?
25 R. D'après ce que j'ai vu dans les deux rapports, non.
26 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.
27 Q. Point E, on précise :
28 "Type de munition," et l'on dit : "Mortier, 120-millimètres de calibre."
Page 5930
1 Au D, on dit qu'il y a eu trois coups, trois obus de tirés. Avez-vous
2 quelque chose à dire à ce propos ?
3 R. Comme je le dis dans mon rapport à moi, c'est là qu'il y a une
4 différence entre le premier examen scientifique, qui avait conclu
5 l'existence d'un obus de 120-millimètres et de deux de
6 82-millimètres. Quel est le problème qu'a rencontré le capitaine Verdy,
7 c'est qu'il a mené son enquête le lendemain de l'incident et n'a pas pu
8 disposer de tous les éléments qu'avait l'équipe qui avait effectué le
9 constat la veille. C'est pour ça qu'il suppose que c'étaient tous des obus
10 de 120-millimètres.
11 Q. A votre avis, quel est le rapport sur les deux qui est le plus exact ?
12 R. Je serais enclin à croire que celui qui a été fait le jour même c'est
13 vraiment la meilleure façon d'effectuer le constat, parce que plus tôt on
14 s'y prend, mieux c'est.
15 M. GAYNOR : [interprétation] 09623, c'est le document dont je demande
16 l'affichage maintenant. Nous parlons ici d'un autre incident.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourriez répéter le numéro du
18 document ?
19 M. GAYNOR : [interprétation] Je le répète volontiers. Il s'agit du document
20 09623.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
22 M. GAYNOR : [interprétation]
23 Q. Ceci concerne le pilonnage de la place du marché de Markale survenu le
24 5 février 1994. On le désigne parfois comme étant l'incident de "Markale
25 I."
26 Est-ce que vous vous êtes servi de ce document pour préparer votre rapport
27 ?
28 R. Oui.
Page 5931
1 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.
2 Q. Au troisième paragraphe, on nous montre, Monsieur Higgs -- plutôt, le
3 dernier paragraphe de la page, il y est fait référence à "l'axe transversal
4 de l'ellipse qui était en direction nord-nord-est." Qu'est-ce que ça veut
5 dire exactement ?
6 R. Quand on a examiné la forme du cratère formé dans le sol, on a vu qu'il
7 désignait une direction nord-nord-est. Plus loin dans le rapport, on a, en
8 fait, procédé à des mesures et on a pu déterminer l'angle.
9 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante.
10 Q. Fin du premier paragraphe de la page, on lit ceci :
11 "Il s'agissait d'un angle de 18 degrés nord vers est, avec un écart
12 possible de cinq degrés qu'on peut ajouter à la valeur différentielle de
13 l'angle."
14 Une explication, s'il vous plaît ?
15 R. Après avoir examiné la forme du cratère dans le sol, l'équipe a procédé
16 à un examen et à des mesures. Il fut ainsi calculé que la direction à
17 partir du point d'impact au sol, de l'origine, c'était un gisement de 18
18 degrés, un angle de 18 degrés à cinq degrés près dans un sens ou dans un
19 autre.
20 Q. Et de quel genre de projectile s'agissait-il ?
21 R. C'était un projectile de 120-millimètres, et ça pu être prouvé ici,
22 parce que l'empennage se trouvait toujours dans le cratère et a pu servir
23 aux fins de l'enquête.
24 Q. Est-ce que ce rapport tire des conclusions quant à la portée, quant à
25 la distance parcourue par le projectile ?
26 R. Non.
27 M. GAYNOR : [interprétation] Document suivant, 09630.
28 Q. Dans votre rapport d'expert, vous dites ceci : le rapport de la
Page 5932
1 FORPRONU mentionné au point B confirme ce rapport présenté au point A avec
2 les mêmes conclusions. Il y a une seule divergence au niveau des
3 conclusions - c'est ce que dit notamment M. le Capitaine Verdy - mais ceci
4 est rectifié un peu plus loin dans le rapport.
5 Et j'ai quelques questions à vous poser à ce propos. Qu'est-ce que vous
6 voyez sur cette page que vous avez sous les yeux ?
7 R. Vous avez une partie du rapport établi par le capitaine Verdy.
8 M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on afficher la page 8.
9 Q. Vous avez ici la première page d'une télécopie. Et à la page suivante,
10 vous voyez le document qui s'intitule : Rapport d'enquête de la FORPRONU
11 après une explosion survenue le 5 février 1994 au marché de Sarajevo. Est-
12 ce que vous avez examiné ce document dans le cadre de la préparation de
13 votre propre rapport ?
14 R. Oui.
15 Q. Sautons une page pour passer à la page d'après. Paragraphe 17, fin de
16 paragraphe :
17 "Il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve concrets pour prouver
18 quelle est la partie qui a tiré cet obus de mortier."
19 Un commentaire ?
20 R. Lorsqu'il fut procédé à l'analyse du cratère, on a pu calculer
21 l'orientation de l'obus et on a pu déterminer un angle approximatif, angle
22 auquel l'obus a touché le sol. Le problème que posent les mortiers, c'est
23 qu'ils ont un système de charge numérique, et vous aurez le même angle pour
24 toutes les charges propulsives au moment de toucher le sol. Ce qui veut
25 dire qu'on aurait un grand paramètre si la distance est courte et on aurait
26 effectivement une portée maximale pour indiquer d'où aurait pu être tiré
27 l'obus. C'est la raison pour laquelle on l'a écrit ici, ce qui pouvait être
28 confirmé à l'époque.
Page 5933
1 M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais qu'on passe à un endroit du
2 rapport qui se trouve neuf pages plus loin.
3 Q. On y voit des conclusions au point C. Il est question de :
4 "…une orientation située entre 0330 et 0420 mils."
5 Avez-vous une explication ?
6 R. Beaucoup d'équipes se sont penchées sur ces lieux. Je pense qu'il y a
7 eu au moins dix équipes qui ont établi un rapport. L'équipe médicolégale
8 utilise des degrés, nous l'avons déjà dit, et ils nous ont donné, ces
9 experts scientifiques, un angle de 18 degrés. Dix-huit degrés, ça fait
10 environ 320 mils, donc c'est tout à fait conforme à beaucoup d'autres
11 rapports qui parlent d'un angle allant de 0320 à 0420.
12 M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on voir le tableau qui se trouve cinq
13 pages avant celle-ci.
14 Q. Regardez le point 2. Il est dit qu'en tout dix analyses de cratère ont
15 été effectuées.
16 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante.
17 Q. Regardez le paragraphe intitulé "Orientation" ou "Jugement." Il dit
18 dans sa partie ultime ceci, s'agissant du capitaine Verdy :
19 "Mais il semble avoir commis une erreur mathématique, ce qui a entraîné une
20 erreur au niveau des calculs définitifs. Même si sa méthode était correcte,
21 en raison des chiffres utilisés, les résultats ne le sont pas."
22 Une explication ?
23 R. Dix enquêtes ont été effectuées, mais je ne sais pas pourquoi le
24 capitaine Verdy a donné des résultats différents. Ceci a été examiné et on
25 a conclu qu'il a dû faire une erreur mathématique quelque part, ce qui fait
26 qu'il a donné des informations tout à fait différentes de celles qu'on
27 trouve dans les huit autres rapports.
28 M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on voir la page suivante, s'il vous
Page 5934
1 plaît.
2 Q. Pourriez-vous en quelques mots expliquer aux Juges comment vous
3 analysez ce tableau que nous voyons à l'écran.
4 R. Vous avez ici l'énumération des dix jeux d'information obtenus grâce
5 aux enquêtes menées. Les deux premiers rapports sont mis en cause. Vous
6 avez le capitaine Verdy qui donne des informations différentes dans son
7 rapport. Quant aux huit autres rapports, à partir de celui établi par le
8 commandant Russell jusqu'au dernier, vous voyez que les résultats qui y
9 sont rapportés sont très similaires, et ces résultats concordent avec le
10 calcul de 18 degrés qui fut un des résultats déterminés par l'enquête de
11 CSB.
12 Q. Mais qu'est-ce que ça veut dire 18 degrés par rapport aux millièmes ?
13 R. Bien, 18 degrés, ça fait à peu près 320 millièmes.
14 Q. Ce qui veut dire que le rapport établi par les autorités de Bosnie est
15 tout à fait en concordance avec les huit rapports que nous voyons ici
16 énumérés ?
17 R. Oui.
18 M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on maintenant examiner le document 11333.
19 Nous passons à un autre incident. Celui qu'on a appelé l'incident de
20 Markale II.
21 Q. Au regard de l'incident G-19, vous invoquez un bon nombre de documents
22 pour établir cette analyse que vous faites de l'incident. Etes-vous en
23 mesure de confirmer les documents au fur et à mesure qu'ils seront affichés
24 pour confirmer que vous vous en êtes servi.
25 Manifestement, ici, nous avons un rapport de situation quotidien établi par
26 les observateurs militaires.
27 M. GAYNOR : [interprétation] Page 20, s'il vous plaît.
28 Q. En fin de document - nous le voyons - est décrit un incident survenu
Page 5935
1 sur la place du marché, et on dit :
2 "Un projectile a été tiré à partir d'un chargeur de 170 et il a été
3 confirmé qu'une personne avait été tuée."
4 Un commentaire, s'il vous plaît ?
5 R. Ceci concerne l'obus trouvé dans le sol, et ceci confirme, d'après
6 l'orientation établie ce jour-là, que l'angle de la trajectoire d'où venait
7 cet obus était 170 degrés.
8 Q. Haut de la page suivante, deuxième paragraphe, je le lis :
9 "Deux des quatre impacts demeurant ont provoqué des blessures chez cette
10 personne (ça n'a pas été confirmé). Ces quatre obus ont été tirés à des
11 angles différents (220 à 240 mag deg) et les impacts se trouvent plus au
12 sud à 300 mètres de distance par rapport au projectile différent."
13 Je vous demande une explication.
14 R. Ce jour-là, le jour même de l'incident précédent dont nous avons parlé,
15 nous avons eu quatre impacts supplémentaires de mortiers de 120-
16 millimètres, c'est dit ici, et ces obus sont tombés à une distance de 300
17 mètres par rapport au premier, et la direction, ceci a été déterminé, était
18 de 220 à 240. On estimait alors qu'il s'agissait d'incidents distincts.
19 Cependant, au fil de l'enquête, beaucoup de suppositions ont été établies
20 pour dire que ceci faisait partie de la même action de tir, ce qui a
21 entraîné une certaine confusion ou certaines suppositions qui se sont
22 retrouvées dans des informations fournies plus tard.
23 Q. Et est-il exact de dire que la personne qui a été tuée au cours de cet
24 incident a été tuée par un obus qui est venu à un angle de 170 degrés ?
25 R. Oui, c'est exact.
26 M. GAYNOR : [interprétation] Peut-on maintenant passer au document 09917.
27 Q. A gauche, vous le voyez au premier paragraphe, c'est une page de garde
28 qui précède le rapport complet et définitif concernant l'incident au
Page 5936
1 mortier survenu à Sarajevo le 28 août 1995.
2 M. GAYNOR : [interprétation] Nous allons voir la page suivante.
3 Q. On parle d'"élément de preuve essentiel," "key evidence," et ce
4 paragraphe se poursuit à la page suivante. On précise de façon sommaire ces
5 éléments de preuve essentiels.
6 Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce qu'il en est et leur
7 fournir davantage de détails s'agissant des critères pris en compte pour
8 savoir d'où venait le tir qui a causé la mort de ces personnes. Commençons
9 par la première partie, si vous le voulez bien.
10 R. Paragraphe 3, on parle de l'analyse de l'impact. Et on confirme ici
11 qu'il y a eu une enquête quant au point de tir. Les enquêteurs français
12 parlaient de 220 à 240 millièmes. Ça fait à peu près 170 en degrés. Et dans
13 le rapport des observateurs, on parlait aussi de 170 degrés. On confirme
14 aussi que les quatre autres impacts, on a une orientation de 220 à 240
15 degrés. Puis on commence à établir des suppositions dès la phrase suivante,
16 et on dit :
17 "L'enquête a cherché à faire la lumière sur cette différence apparente."
18 On croyait à ce moment-là qu'il y avait un lien entre ces différents
19 tirs, même s'ils sont tombés à une distance de 300 mètres. Pour des
20 mortiers, c'est une sacrée différence qu'une distance de 300 mètres. Ce
21 postulat a eu une incidence certaine, vous allez le voir plus tard, sur le
22 reste du rapport.
23 Q. Je vous arrête un instant pour vous demander une explication. Pourquoi,
24 à votre avis, n'est-il pas possible que les quatre obus qui sont tombés
25 plus loin viennent du même endroit que celui qui a causé la mort ?
26 R. Lorsqu'un mortier engage une cible, on a une trajectoire qui va du
27 point de départ jusqu'au point de chute, et il est possible de déterminer
28 cette trajectoire. Mais du fait que les autres obus sont tombés 300 mètres
Page 5937
1 plus loin, si on garde la même orientation et si on essaie de déterminer la
2 trajectoire, bien, vous aurez une distance d'une différence de 300 mètres
3 par rapport au premier obus. Pour que ce soit le même mortier qui ait été
4 utilisé pour tirer un ou quatre coups, il aurait fallu le faire très vite.
5 Tirer vite, puis remballer le mortier, le déplacer de 300 mètres pour tirer
6 les autres coups pour avoir la même orientation par rapport à la position
7 qu'occupait le mortier.
8 Il y a un problème qui est mentionné dans ce paragraphe. Dans la
9 phrase suivante, il est dit qu'on a utilisé le sillon de la fusée pour
10 calculer l'orientation. Si on utilise les bonnes méthodologies, on ne se
11 sert pas de ce critère pour calculer l'orientation parce qu'ils sont
12 susceptibles d'erreur. Un enquêteur chevronné ne se servirait pas de ce
13 critère, à moins que le sillon ne soit d'excellente qualité. Et je pense
14 l'avoir précisé au paragraphe 10 de mon rapport.
15 Q. Ecartez-vous la possibilité d'un tir par ricochet, je parle du
16 projectile ayant causé la mort. Ceci, en effet, est mentionné comme
17 hypothèse dans la dernière phrase du paragraphe.
18 R. Rien dans les éléments que j'ai examinés ne confirme que l'obus
19 aurait d'abord touché un bâtiment. Parce que si ça avait été le cas, il
20 aurait pu exploser au contact. Et si on a pensé que l'obus avait d'abord
21 touché un bâtiment pour se déplacer ensuite, pour être désorienté par
22 rapport à son point d'origine, on ne comprend pas pourquoi à ce moment-là
23 on se servirait du sillon de la fusée dans le cratère pour établir
24 l'orientation, si on pense que l'obus a d'abord touché un bâtiment. Donc je
25 ne pense pas qu'il y ait eu d'abord impact sur un bâtiment avant de tomber
26 ailleurs. Rien ne le prouve.
27 Q. Est-ce que vous connaissez le système de radar Cymbeline ?
28 R. Oui.
Page 5938
1 Q. Expliquez-le.
2 R. C'est-à-dire qu'on a un radar qui détermine la position des
3 mortiers. Il va projeter un rayon dans le ciel et il va déterminer ainsi
4 l'origine du tir de l'obus de mortier.
5 Q. Et si le projectile qui a causé la mort était parti à une distance de
6 500 [comme interprété] mètres ou moins, qu'est-ce qui se serait passé ?
7 R. Le rapport concernant ce radar le montre, si le tir était parti d'une
8 distance proche du lieu de l'incident, étant donné qu'il faut une
9 trajectoire élevée, ce radar l'aurait détectée.
10 Q. Au paragraphe 5 à la page que vous avez sous les yeux, il est fait
11 référence aux postes d'observation des Nations Unies. Pourriez-vous dire
12 aux Juges de la Chambre pourquoi l'aspect acoustique est important ?
13 R. Après avoir lu ce rapport comme les autres, on ne fait nulle part état
14 de bruit de déflagration aux postes d'observation. Mais on a bien vu l'obus
15 tomber, ce qui veut dire que d'où que vienne l'obus, et ceci, pour une
16 raison quelle qu'elle soit, peut-être parce qu'il y avait une colline entre
17 l'obus et le poste ou il y avait un bâtiment entre eux, on n'a pas entendu
18 le bruit causé par le tir.
19 Q. Page 23 [comme interprété] de votre rapport, vous mentionnez quatre
20 portées de tir possibles pour déterminer d'où aurait pu venir le projectile
21 compte tenu d'un angle de 70 degrés. On a d'abord : la charge 1, 900
22 mètres; charge 2, 1 600 mètre; charge 3, 2 400 mètres; charge 4, 3 000
23 mètres. S'agissant du projectile qui a causé la mort sur la place du
24 marché, à votre avis, quelle est la portée la plus probable, et sur quoi
25 vous fondez-vous pour le dire ?
26 R. Sur la base des éléments reçus et sur la base de l'examen du cratère,
27 eu égard à l'angle de l'obus qui est tombé, autrement dit, comme je le dis
28 toujours, cela nous donne les portées éventuelles que l'on peut trouver
Page 5939
1 dans les tableaux de portées, à cette distance courte de 900, le mortier
2 serait parti de la ligne de front et aurait été à distance d'audition des
3 observateurs des Nations Unies situés le plus près. A 1 600 mètres de
4 distance, le mortier se trouve situé très près de la ligne de front et
5 également à distance d'audition des observateurs des Nations Unies. Quand
6 vous pensez aux charges 3 et 4, alors le mortier se situe au-delà de la
7 ligne de front, dans les collines où dans la campagne environnante qui
8 surplombe Sarajevo.
9 Etant donné que nous n'avons entendu aucun bruit et que pour les raisons
10 indiquées dans le rapport le radar Cymbeline n'a pas saisi l'angle de la
11 trajectoire du mortier, ceci semblerait indiquer que la portée de 900
12 mètres n'est pas l'option la plus vraisemblable. Encore une fois, je le
13 répète, à une distance de 1 600 mètres, le fait ne pas entendre de bruit et
14 étant donné le mauvais déploiement tactique, puisque le mortier se trouvait
15 directement sur la ligne de front, ça permettrait d'exclure le fait que le
16 mortier ait pu être tiré à une distance de 1 600 mètres. Encore une fois,
17 étant donné ce qui s'est passé avec le radar Cymbeline, qui permet de
18 penser que la charge était une charge moyenne, les portées 3 et 4, le fait
19 que le tir n'ait pas été entendu, que le tir a eu lieu sous le radar
20 permettent de penser que le mortier se trouvait, en réalité, dans les
21 collines surplombant Sarajevo, ce qui permettrait de penser aux charges 3
22 et 4, qui placent donc le mortier au-delà de la ligne de front, dans le
23 territoire contrôlé par les Serbes.
24 Q. A ce stade, est-ce que vous pourriez expliquer ce concept de charge 1,
25 charge 2, charge 3, charge 4, eu égard à l'utilisation d'un mortier ?
26 R. La poudre d'un mortier peut être retirée de façon à produire une portée
27 différente. Il y a des éléments plastiques qu'on appelle des fromages, si
28 je puis me permettre, qui situent différemment l'ailette d'un mortier, et
Page 5940
1 la plupart des mortiers ont six ailettes au moins. Donc si vous voulez
2 tirer à une distance plus courte, vous rajoutez un ou deux de ces éléments.
3 Et si vous souhaitez tirer à une distance plus longue, vous enlevez un
4 certain nombre jusqu'à six. Mais normalement, avec les mortiers, vous tirez
5 avec une charge minimale qui vous permet de toucher la cible, parce qu'il
6 est d'usage d'employer la charge minimale afin que la trajectoire soit
7 moins importante, que le voyage soit moins long et qu'il y ait moins de
8 risques que des éléments de l'équipement, tel que le radar Cymbeline,
9 détectent l'origine du tir.
10 M. GAYNOR : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons être obligé de
11 passer à autre chose, je le crains.
12 Q. J'aimerais que l'on affiche un document qui est un rapport de situation
13 quotidienne des observateurs militaires des Nations Unies dont vous faites
14 état dans votre déclaration écrite. Et j'aimerais que vous confirmiez qu'il
15 s'agit bien de ce document; c'est bien cela ?
16 R. Oui.
17 M. GAYNOR : [interprétation] Page suivante du document à l'écran, je vous
18 prie, page 15 060.
19 Q. Ce document est un document émanant du Groupe numéro 2 du commandement
20 de la FORPRONU en date du 8 septembre 1995, et il concerne l'incident
21 Markale II et décrit de façon détaillée le système Cymbeline.
22 M. GAYNOR : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante,
23 paragraphe C.
24 Q. Qui se lit comme suit :
25 "Un mortier tiré à moyenne ou longue portée aurait une trajectoire plus
26 basse et correspondrait à une position de tir située sur le territoire
27 contrôlé par les Serbes de Bosnie. Une trajectoire plus basse aurait permis
28 de passer sous le faisceau du radar Cymbeline."
Page 5941
1 Est-ce que vous êtes également d'accord avec cette analyse ?
2 R. Oui.
3 Q. J'aimerais maintenant vous montrer la page 15 061, où l'on voit une
4 série de photographies prises à l'issue de l'incident Markale II par le
5 radar Cymbeline.
6 M. GAYNOR : [interprétation] Et je demande que l'on fasse défiler les pages
7 à l'écran jusqu'à la page 10. Page suivante maintenant, je vous prie.
8 Q. Que voyez-vous là, Monsieur Higgs ?
9 R. Cette photo a été prise d'une position qui surplombe le cratère formé
10 par le mortier.
11 Q. Pourriez-vous commenter l'origine du tir, pour commencer ?
12 R. A voir ce cratère avec un œil expérimenté, on constate que la majorité
13 des marques formées par les éclats d'obus sur le tarmac se situent entre le
14 point d'explosion sur le sol et le trottoir, donc ceci semblerait indiquer
15 que le projectile est venu d'un bâtiment et que la direction du tir se
16 situe approximativement à partir de l'endroit où on voit le cratère sur le
17 sol dans la direction du bâtiment.
18 Q. Mais comment est-ce que l'on calcule l'angle d'impact du projectile ?
19 R. Dans ce cas précis, aucun des membres de l'équipe d'enquête qui était
20 présente le premier jour sur place n'a trouvé le moindre sillon provoqué
21 par un détonateur, à savoir le trou que l'on voit au centre du cratère --
22 donc n'a estimé qu'aucun sillon de cette nature ne suffisait pour calculer
23 cet angle. Par conséquent, les membres de l'équipe ont procédé à un calcul
24 mathématique à l'aide des mesures mesurées à partir du cratère jusqu'au
25 bâtiment et sur la base de la hauteur du bâtiment pour déterminer quelle
26 était l'élévation minimum qui pouvait être prise en cause. Et par ailleurs,
27 les membres de l'équipe d'enquête bosnienne ont procédé à des calculs
28 balistiques sur l'explosion qui leur ont fourni un angle approximatif de
Page 5942
1 descente.
2 Q. Qu'est-ce qu'un angle de descente ?
3 R. A partir du calcul balistique, ils ont déterminé un angle de 70 degrés,
4 et le calcul mathématique jusqu'au toit de l'immeuble leur a donné un angle
5 minimum de 67 degrés.
6 M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais vous soumettre le document suivant,
7 qui est le document 15062, à présent. Ce document est un rapport officiel
8 du poste de sécurité publique de Sarajevo en date du 29 août 1995.
9 11404, excusez-moi.
10 Q. Le document qui arrive à l'écran, Monsieur Higgs, est, si je ne me
11 trompe, ce rapport du poste de sécurité publique de Sarajevo dont vous avez
12 parlé --
13 M. GAYNOR : [interprétation] Non, ce n'est pas le bon document. Le document
14 dont je demande l'affichage est le document 11404. Bon, je vais parler
15 maintenant d'un autre document.
16 Q. Monsieur Higgs, j'aimerais maintenant vous soumettre le document 15062
17 dont je demande l'affichage. Toutes mes excuses. Pour le document
18 précédent, on vient de m'informer que le bon numéro est le numéro 14404.
19 M. GAYNOR : [aucune interprétation]
20 Q. Monsieur Higgs, comme vous le voyez il s'agit d'un rapport émanant du
21 poste de sécurité publique de Sarajevo et qui date du 28 août 1995, n'est-
22 ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Un peu plus bas, il est question de l'application d'un certain
25 capitaine Higgs de Grande-Bretagne. Mais il ne s'agit pas de vous à cet
26 endroit du texte, n'est-ce pas ?
27 R. Non, ce n'est pas moi.
28 Q. Alors page suivante maintenant sur les écrans, je vous prie, nous y
Page 5943
1 voyons une référence à un obus de 120-millimètres,
2 KB 9307 et MK 974. Est-ce que vous convenez qu'il est possible d'obtenir ce
3 genre de données d'un stabilisateur ?
4 R. Oui, ces données ont été déterminées à partir des ailettes ou du
5 stabilisateur du projectile et peuvent être vues sur certaines des
6 photographies prises par les membres de l'équipe d'enquête.
7 Q. Alors au paragraphe 2, nous lisons, je cite :
8 "L'obus a été tiré à partir du sud à un azimut de 170 degrés, plus ou moins
9 5 degrés, ce qui correspond à un secteur déterminé."
10 Alors sans savoir quelles sont les positions en question, avez-vous un
11 commentaire à faire au sujet de cet angle de 170 degrés ?
12 R. C'est une lecture qu'ils ont faite à l'issue de leur examen visuel, et
13 je n'ai aucune raison de ne pas leur faire confiance.
14 M. GAYNOR : [interprétation] Ensuite il y a quelques schémas qui se
15 trouvent à la fin du document, quatre pages avant la fin. J'aimerais que
16 ces schémas soient affichés à l'écran.
17 Passons à un autre document pour le moment.
18 Je demanderais la diffusion de la vidéo 40221, je vous prie.
19 [Diffusion de la cassette vidéo]
20 M. GAYNOR : [interprétation] On peut faire un arrêt sur image.
21 Q. Alors en vous fondant sur ce que vous savez des systèmes de mortiers de
22 120-millimètres, est-ce que les dommages que nous venons de voir peuvent
23 correspondre aux effets d'un seul projectile de ce genre ?
24 R. Oui.
25 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion de la vidéo, je vous
26 prie.
27 Ce commentaire a été fait au point horaire 1 minute et
28 25 secondes.
Page 5944
1 [Diffusion de cassette vidéo]
2 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie, 1 minute 53
3 secondes.
4 Q. Quel est le lieu que l'on voit sur les images de cette vidéo ?
5 R. La vidéo montre un quartier qui est juste devant un bâtiment dont j'ai
6 été informé qu'il abritait un marché.
7 Q. Ces images se situent à quelle distance de ce marché
8 ouvert ?
9 R. C'est à très courte distance de la route. Je n'ai pas mesuré cette
10 distance précisément, mais je dirais, entre 50 et 100 mètres.
11 Q. Et le marché ouvert se trouve à l'endroit où ce projectile a explosé,
12 n'est-ce pas ? C'est-à-dire c'est bien le marché de Markale I, n'est-ce pas
13 ?
14 R. C'est exact.
15 Q. Et ceci est également le lieu où l'incident Markale II a eu lieu,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Exact.
18 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la vidéo.
19 [Diffusion de cassette vidéo]
20 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie. A
21 3 minutes 43 secondes.
22 Q. Que voyez-vous sur la présente image, Monsieur Higgs ?
23 R. Sur la vidéo on voit maintenant l'arrivée des membres de l'équipe
24 d'enquête française.
25 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.
26 [Diffusion de cassette vidéo]
27 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie.
28 4 minutes 37 secondes.
Page 5945
1 Q. Qu'est-ce que nous voyons sur l'image actuelle ?
2 R. L'équipe est en train de procéder à des mesures dans le cratère créé
3 par l'obus au bord de l'immeuble. Ces mesures seront utilisées au moment du
4 calcul de la hauteur du bâtiment pour calculer l'angle minimum relatif à ce
5 projectile.
6 Q. Pour préciser votre réponse, ils sont en train de mesurer la distance
7 entre le cratère et le bord du bâtiment, puis ils auront besoin de quelles
8 autres mesures pour faire quoi ?
9 R. Ils vont ensuite mesurer la hauteur du bâtiment et utiliser une formule
10 mathématique pour calculer l'angle.
11 Q. Je vous remercie.
12 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion.
13 [Diffusion de la cassette vidéo]
14 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image. A 5 minutes
15 32 secondes.
16 Q. Qu'est-ce qui est en train de se passer à ce stade de la vidéo ?
17 R. A partir de la forme des marques créées par les éclats d'obus sur le
18 tarmac, on voit que ce soldat est en train de déterminer la direction à
19 partir de laquelle a pu venir le projectile et qu'il fait le point avec une
20 boussole.
21 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous conviendrez que ceci n'est pas un
22 film montrant l'intégralité du processus d'enquête, qui ne se limite pas,
23 bien sûr, à faire le point ou à mesurer des hauteurs ?
24 R. Il ne me semble pas que les images de cette vidéo montrent, en effet,
25 toutes les étapes de l'enquête.
26 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.
27 [Diffusion de la cassette vidéo]
28 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image. 6 minutes 28 secondes.
Page 5946
1 Q. Que se passe-t-il sur cette image ?
2 R. On voit les premières étapes de l'enquête sur les ailettes du
3 projectile. C'est là que les membres de l'équipe d'enquête peuvent trouver
4 un certain nombre de renseignements. Sur ces images de la vidéo, on voit la
5 marque et le numéro de lot qui sont imprimés à l'arrière du projectile. On
6 utilise donc du papier collant pour mesurer la distance entre les ailettes
7 afin de confirmer le calibre de cet obus.
8 Q. Je vous remercie.
9 M. GAYNOR : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.
10 [Diffusion de la cassette vidéo]
11 M. GAYNOR : [interprétation] Arrêt sur image, je vous prie.
12 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
13 M. HAYDEN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
14 questions à poser dans le cadre de l'interrogatoire principal.
15 Mais je m'apprête à demander le versement au dossier des documents que j'ai
16 utilisés ainsi que de la séquence vidéo, à moins que je ne doive le faire à
17 la fin de la déposition de ce témoin, comme vous le préférerez, Monsieur le
18 Président.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.
20 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
21 Nous n'avons pas d'objection par rapport à l'admission de documents
22 sources, en vertu de la décision de la Chambre de première instance suite à
23 la présentation de l'Accusation sur la pertinence de certains documents
24 relatifs à la déposition de Richard Philipps le 9 juillet 2010. Mais comme
25 vous l'avez remarqué au paragraphe 11, ces documents sur le fond ne
26 devraient pas être pris en compte par la Chambre, c'est uniquement leur
27 rôle d'aide à la Chambre qui peut être accepté eu égard à l'évaluation de
28 la valeur probante de la déposition de ce témoin expert.
Page 5947
1 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons le
2 versement au dossier de ces documents à toutes fins utiles, conformément
3 aux directives qui ont été établies dans le cadre de la décision que vient
4 d'évoquer Me Robinson. Ce ne sont pas simplement des documents sources qui
5 sont admissibles. Le témoin a eu la possibilité de commenter certains de
6 ces documents, d'expliquer leur pertinence à la Chambre. Et d'une certaine
7 façon comme vous-mêmes, Mesdames, Messieurs les Juges, l'avez déjà dit au
8 moment du témoignage du Témoin Donia, certains documents ont été admis à
9 toutes fins utiles, donc nous en demandons le versement à toutes fins
10 utiles des documents en question.
11 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, le problème qui me
12 vient à l'esprit, sur le principe, c'est que l'on peut comprendre que ces
13 documents soient admis à toutes fins utiles si nous avons la possibilité de
14 procéder à un contre-interrogatoire solide sur tous ces incidents. Mais
15 compte tenu du temps que la Chambre a alloué au contre-interrogatoire,
16 l'admission de ces documents de fond relatifs à l'enquête sans qu'il y ait
17 possibilité d'interroger les personnes qui ont procédé à cette enquête
18 créerait un réel préjudice pour la Défense étant donné le peu de temps qui
19 lui est accordé. Par conséquent, si nous avons assez de temps pour un
20 solide contre-interrogatoire de chacun de ces incidents, nous n'aurons pas
21 d'objection au versement de ces documents. Mais compte tenu de la
22 philosophie de la Chambre eu égard à la déposition de ce témoin que l'on
23 voit illustrée dans le temps qui a été alloué au contre-interrogatoire,
24 nous ne pensons pas qu'il serait juste que ces documents soient admis.
25 Je vous remercie.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
27 Nous allons faire une pause d'une demi-heure, après quoi nous rendrons
28 notre décision.
Page 5948
1 --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.
2 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais vous rendre compte de notre
4 décision :
5 La Chambre a pris en considération les arguments présentés par M.
6 Robinson, qui nous a expliqué pourquoi les rapports d'enquête et les autres
7 documents analysés par M. Higgs, documents qui lui ont permis de parvenir à
8 ses conclusions et qui lui ont permis de préparer son rapport, devraient
9 être versés au dossier en tant que documents sources plutôt qu'à d'autres
10 fins, tel que l'Accusation le souhaite. Toutefois, étant donné que ces
11 documents auxquels a fait référence le témoin lors de sa déposition
12 l'indiquent, la situation est différente de celle de M. Philipps et des
13 documents sources auxquels il avait été fait référence dans son rapport
14 d'expert, mais qui n'avaient pas fait l'objet de discussion dans le
15 prétoire avec lui.
16 Compte tenu de ce que nous venons de dire, tel que nous l'avions
17 indiqué pour la décision que nous avions prise à propos de la durée du
18 contre-interrogatoire de M. Higgs, la Chambre est d'avis que les éléments
19 de preuve présentés par M. Higgs ont une nature limitée étant donné qu'il
20 ne peut, compte tenu de sa compétence, que nous fournir des informations
21 sur des enquêtes menées à bien par d'autres et sur des conclusions
22 auxquelles d'autres sont parvenus. Ce qui, d'ailleurs, a une incidence sur
23 le poids qui sera accordé par la Chambre à ces rapports qui ont été
24 utilisés pour la préparation de son rapport ainsi qu'aux autres documents,
25 et nous aurions évidemment besoin d'autres éléments de preuve pour étayer
26 cela pour que la Chambre puisse parvenir à des conclusions sur la base des
27 documents de M. Higgs.
28 Etant donné que ce n'est pas lui qui a rédigé ces rapports qu'il a
Page 5949
1 utilisés, si nous accordions un temps supplémentaire pour le contre-
2 interrogatoire de ce témoin, cela aurait un objectif très limité, et la
3 Chambre continue a été d'avis que trois heures suffisent.
4 La Chambre donc versera au dossier les documents qui ont été
5 présentés au témoin et à propos desquels le témoin a fait des observations
6 pendant sa déposition, documents qu'il a utilisés pour écrire son rapport
7 d'expert.
8 Voilà notre décision, et je sais que M. Gaynor et M. Tieger
9 souhaiteraient intervenir.
10 M. TIEGER : [interprétation] Je voulais soulever une question de calendrier
11 dont j'ai eu la possibilité de parler avec la Défense.
12 La Chambre saura que nous avions prévu trois témoins pour cette
13 semaine. Si nous prenons en considération la durée prévue pour le contre-
14 interrogatoire, la durée du contre-interrogatoire qui a déjà eu lieu, tout
15 porte à croire que nous pourrions terminer les dépositions de ces trois
16 témoins avant la fin de cette semaine-ci. Les parties préfèrent, d'après ce
17 que j'ai compris lors de nos discussions pendant les vacances judiciaires,
18 conserver le calendrier qui avait été prévu pour cette semaine, pour ces
19 trois témoins, et nous pourrions ainsi commencer la déposition du Témoin
20 KDZ-088 lundi.
21 Alors, je pense que la Chambre serait peut-être d'accord avec ceci,
22 mais je voulais alerter la Chambre de première instance pour que les Juges
23 puissent être informés des circonstances et pour qu'ils puissent nous
24 indiquer ce qu'ils en pensent le plus rapidement possible.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous
26 demanderais une petite minute, Monsieur Tieger.
27 [La Chambre de première instance se concerte]
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger. Merci
Page 5950
1 de nous avoir transmis ces renseignements.
2 Voilà ce que je voulais vous dire : ne prenons pas de dispositions
3 définitives pour convoquer le Témoin KDZ-088 lundi. Les raisons pour ce que
4 je dis deviendront évidentes aujourd'hui.
5 M. TIEGER : [interprétation] Je comprends tout à fait.
6 Et j'aimerais saisir cette occasion pour soulever une autre question,
7 à savoir je souhaiterais encourager la Chambre de première instance, dans
8 la mesure du possible, de fournir aux parties autant de préavis que faire
9 se peut pour ce qui est de la durée des contre-interrogatoires. Dans la
10 mesure du possible. Les raisons, en fait, en sont évidentes. Je comprends
11 très bien que cela peut représenter un fardeau pour vous, mais je pense que
12 cela serait extrêmement utile pour les parties.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
14 Je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin dans le prétoire.
15 Oui, Monsieur Karadzic.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien que la Chambre de première instance ait
17 conclu que les éléments de preuve apportés par M. Higgs doivent faire
18 l'objet d'autres questions, je dirais que par sa déposition, les rapports
19 dont il est question ont quand même reçu un certain sceau de légitimité.
20 Donc j'aimerais vous demander d'examiner à nouveau cette demande de temps
21 supplémentaire que j'ai présentée avant l'arrivée du Témoin KDZ-088. Car en
22 fait, j'aimerais pouvoir étudier 80 incidents dont a parlé M. Higgs, il
23 s'agit d'incidents importants. Nous n'aurons pas d'autre possibilité pour
24 préciser la question.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre vous a donné sa décision, et
26 nous ne souhaitons pas nous repencher là-dessus. Lisez à nouveau, je vous
27 prie, la décision et essayez de la respecter autant que faire se peut.
28 [Le témoin vient à la barre]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demanderais de bien
2 vouloir commencer votre contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic.
3 L'ACCUSÉ : Merci.
4 Contre-interrogatoire par M. Karadzic:
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Higgs. J'aimerais vous remercier
6 d'avoir eu l'amabilité de rencontrer l'équipe de la Défense et j'aimerais
7 également vous remercier, car vous nous aviez promis de nous fournir une
8 liste de vos dépositions précédentes et de la contribution que vous avez
9 apportée dans des affaires pénales au Royaume-Uni ainsi que dans d'autres
10 pays d'ailleurs. Donc nous demanderons de temps à autre de pouvoir faire
11 référence à ces affaires pour pouvoir comprendre votre méthodologie.
12 Convenez-vous dans un premier temps que ce que vous faites, en fait, votre
13 domaine de compétence, consiste à étudier le travail effectué par d'autres
14 équipes d'enquête, à la suite de quoi vous dressez des rapports; vous
15 n'effectuez pas des enquêtes vous-même à propos de ces incidents ?
16 R. Dans ces cas, oui, mes rapports se sont fondés sur des enquêtes qui
17 avaient été effectivement effectuées par d'autres.
18 Q. Merci. Mais lors de notre entretien, vous nous avez dit, je cite : "Je
19 dois croire que les rapports sur lesquels je base mes rapports sont
20 exacts."
21 R. Oui, bien sûr, je dois accorder foi à ce qui est écrit dans ces
22 enquêtes et je dois croire que les enquêtes ont été effectuées en bonne et
23 due forme au moment où elles ont été effectuées.
24 Q. Par conséquent, vous conviendrez que si nous souhaitons vérifier la
25 véracité de vos conclusions, conclusions qui vous permettent d'apporter une
26 crédibilité à leurs conclusions, nous n'avons qu'une seule option, à savoir
27 il s'agit d'essayer de comprendre ces incidents avec, bien entendu, votre
28 aide, n'est-ce
Page 5952
1 pas ?
2 R. Oui. Je peux vous donner mon opinion à propos de ces différents cas, et
3 ce, afin de vous permettre d'élucider ces questions.
4 Q. Merci.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que la vidéo de la liste 65 ter
6 40221 soit présentée.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous devons passer au système
8 Sanction à nouveau ?
9 [Diffusion de la cassette vidéo]
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais avoir l'arrêt sur image à 1 minute
11 25. Non, il va falloir repartir en arrière un peu, je vous prie. A 1 minute
12 25. 1 minute 25. Voilà, c'est cela. Est-ce que vous pouvez faire un arrêt
13 sur image maintenant.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Monsieur Higgs, est-ce que vous convenez qu'un organisme humain
16 comporte plus de deux tiers de liquide; je pense au système lymphatique, au
17 sang, et cetera ?
18 R. Ecoutez, je ne suis pas médecin. Donc oui, c'est ce que je suis porté à
19 croire, mais évidemment, je ne peux pas vous donner une réponse absolument
20 définitive et catégorique à ce sujet.
21 Q. Bien.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, est-ce que nous pourrions revoir cette
23 image ? Où est-ce que cette image a disparu ?
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment ce corps s'est retrouvé
26 là et est-ce que vous pouvez nous expliquer comment les blessures que nous
27 voyons ont été infligées à ce corps ?
28 R. Ecoutez, il est difficile de confirmer comment ce corps s'est retrouvé
Page 5953
1 là. Moi, je ne peux voir que l'image que vous voyez vous-même. J'ai
2 l'impression que cette personne avait été touchée par les éclats d'obus,
3 par le souffle de l'obus, ce qui a provoqué les blessures, ensuite le
4 souffle a poussé la personne par-dessus la barrière.
5 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer où se trouvent alors tous ces
6 fluides de l'organisme qui avaient quand même dû s'écouler de ce corps
7 lorsque vous voyez ce type de blessures ? Où se trouve tout ce fluide ?
8 R. Ecoutez, je peux voir ce que vous voyez. Vous voyez la tache de sang à
9 côté du corps.
10 Q. Le goudron qui se trouve sous le corps, il est sec; vous l'acceptez,
11 cela.
12 R. Ecoutez, l'image est d'une qualité qui est telle que je ne peux pas
13 véritablement le discerner, mais bon, je ne peux pas exclure non plus qu'il
14 y ait du sang. Je ne peux pas voir de grandes quantités de sang, ceci étant
15 dit.
16 Q. Est-ce que vous remarquez l'ombre faite par le corps ?
17 R. Oui, je peux voir cette ombre.
18 Q. Merci.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant voir cette vidéo à partir du
20 point horaire 3:43. On y voit l'arrivée de l'équipe française.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Est-ce que c'est bien cette équipe française que l'on voit à l'écran ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que c'est l'équipe qui a été la première à se présenter sur les
25 lieux ?
26 R. Je ne sais pas si ce fut la première. Enfin, la séquence vidéo ne le
27 précise pas.
28 Q. Au cours de notre entretien, vous avez confirmé le fait que le meilleur
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1 moment qui existe pour procéder à une enquête, à un constat sur les lieux,
2 c'est lorsqu'il est immédiatement consécutif à l'événement.
3 R. Oui.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant voir la séquence vidéo à
5 partir du point horaire 4:37.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Est-ce qu'on voit ici des membres du Bataillon français qui procèdent à
8 des mesures pour mesurer le cratère ?
9 R. Non, ils ne sont pas en train de mesurer le cratère. Ils mesurent la
10 distance qu'il y a entre le cratère et le bâtiment.
11 R. Oui, oui, c'est ça. Ils voient où se trouve ce cratère par rapport au
12 bâtiment ?
13 R. Exact.
14 Q. Est-ce qu'on voit clairement ce cratère à l'image ?
15 R. Non, pas ici. On ne le voit pas clairement.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut revenir en arrière de
17 quelques secondes. Vous pouvez rediffuser cette partie.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Est-ce qu'on voit mieux ici ce cratère ?
21 R. Oui, mais on ne le voit pas beaucoup mieux. On n'en voit pas les
22 détails.
23 Q. Est-ce qu'on voit ici que les traces du cratère sont indiquées à la
24 craie ?
25 R. L'image ne montre pas clairement si on utilise de la craie ou si ce
26 qu'on voit c'est simplement le pourtour en blanc des traces de l'explosion
27 qu'on voit dans l'asphalte.
28 Q. Très bien.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Poursuivons la diffusion.
2 [Diffusion de la cassette vidéo]
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutons minutieusement ce que dit cet homme
4 qui utilise la boussole. Est-ce qu'on peut visionner une fois de plus ces
5 images.
6 [Diffusion de la cassette vidéo]
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Arrêt sur image, s'il vous plaît. Est-ce
8 que l'officier français n'a pas dit "2 800 millièmes" ?
9 Est-ce que les interprètes de la cabine française pourraient nous aider ?
10 Est-ce que l'officier a dit "2 100 millièmes" ?
11 L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine française croient avoir entendu
12 2 800 millièmes.
13 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La cabine française indique qu'à son
15 avis, elle a entendu "2 800 millièmes".
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut écouter une fois de plus pour
17 savoir exactement ce qui s'est dit ?
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et je demanderais aux interprètes
19 français d'interpréter ce qu'ils entendent en français.
20 [Diffusion de la cassette vidéo]
21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
22 "Azimut, tu notes -- tu notes 2 800 millièmes."
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
24 Pouvons-nous passer maintenant au point horaire 6:28. Oui, là, nous
25 sommes au bon endroit.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Monsieur Higgs, convenez-vous qu'ici sur ce stabilisateur, on ne voit
28 aucune amorce, au détonateur ?
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1 R. Le moyen utilisé pour allumer ce genre d'engin, vous le voyez à
2 l'image. Ça se trouve au centre. C'est un percuteur qui se trouve au centre
3 de l'empennage, et il va entraîner l'amorce de l'engin. Quand on parle de
4 la fusée ou de l'amorce, ça se trouve de l'autre côté de l'obus, à l'autre
5 bout de l'obus, et il va détoner, lui, sur impact.
6 Q. Mais si vous regardez l'endroit où on devrait trouver ce capuchon en
7 cuivre, celui qui va actionner le moteur, la charge propulsive, pas l'obus,
8 et c'est en cuivre en général, en tout cas il a la couleur du cuivre ou du
9 laiton, c'est un matériau assez mou, ce n'est pas un matériau très dur ?
10 R. Ce percuteur n'est pas toujours en cuivre. Quelquefois, vous avez un
11 alliage de couleur argentée. Ça dépend du type, du lot de munitions. Il
12 arrive aussi que ce percuteur soit enlevé, se déplace une fois le tir
13 lancé.
14 Q. Nous acceptons, n'est-ce pas, l'idée qu'en fait ici on ne le voit pas ?
15 Il manque à l'image. En fait, il avait été relâché auparavant ou on ne le
16 trouve pas, ce percuteur. Mais les détonateurs, les percuteurs -- ou les
17 détonateurs, plutôt, de marque yougoslave, de fabrication yougoslave,
18 savez-vous de quel matériau ils étaient composés et de quelle couleur était
19 ce métal ?
20 R. Vous posez deux questions. Vous me demandez d'abord s'il est manquant :
21 Je ne peux pas dire, il se pourrait qu'il soit encore là. La photo n'est
22 pas suffisamment précise pour le déterminer.
23 Pour ce qui est de la teinte, du coloris de ce type de
24 munition : Là, je ne sais pas. Je ne dispose pas de ce genre d'information.
25 Q. Merci.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Continuons, s'il vous plaît.
27 [Diffusion de la cassette vidéo]
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est bon là. Arrêt sur image.
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1 Je pense que la définition était meilleure pour voir le corps même du
2 stabilisateur. Est-ce qu'on peut revenir un peu en arrière. Excellent.
3 C'est bon.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Que dites-vous du corps de ce stabilisateur ? Est-ce qu'on voit ici des
6 traces d'explosion ?
7 R. Il montre les dégâts subis en raison du mode de lancement. Vous voyez,
8 la partie du stabilisateur qui se trouve le plus à droite a été en partie
9 endommagée à cause du tir. Et l'empennage a dû avoir touché quelque chose
10 après l'explosion, ce qui veut dire qu'il y a des dégâts supplémentaires
11 occasionnés aux ailettes.
12 Q. Merci. Est-ce que vous voyez que là où on loge normalement le
13 détonateur, il n'y est plus ?
14 R. L'image n'est pas assez claire pour le déterminer, parce que lorsque le
15 tir a lieu, il y a compression du fait de l'amorce, et donc ce n'est pas
16 assez clair, je ne peux pas dire oui ni non.
17 Q. Merci.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que ça déjà été versé au dossier,
19 n'est-ce pas, cette vidéo ? Est-ce que l'Accusation n'en a pas demandé le
20 versement ?
21 M. GAYNOR : [interprétation] Effectivement, nous croyons que ça a déjà été
22 admis.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, pourquoi a-t-on des cotes
24 différentes ?
25 M. GAYNOR : [interprétation] La vidéo a été versée au dossier. Mais pour ce
26 qui est du stabilisateur --
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est le numéro 40310 pour la cote
28 ou le numéro de la vidéo, alors qu'ici on a 40221.
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1 M. GAYNOR : [interprétation] Je crois que c'est un doublon, simplement, et
2 que ce numéro-ci est le bon.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lequel ?
4 M. GAYNOR : [interprétation] 40221.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
6 M. GAYNOR : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette vidéo a déjà été versée au
8 dossier, et le greffier d'audience va lui donner une cote en temps utile.
9 Ce sera sans doute la cote P1450.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. 1D2253. C'est le document dont je
11 demande l'affichage.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourrait-on passer du système Sanction
13 au prétoire électronique.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Donc voici la photographie que je
15 souhaitais vous montrer. J'aimerais que sa qualité soit améliorée à
16 l'écran, si possible.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Conviendrez, Monsieur, que l'on voit ici une photo qui montre le marché
19 de Markale ? C'est un cliché que nous avons tiré d'une émission de
20 télévision d'avant la guerre. Donc admettez-vous qu'il s'agit bien ici du
21 marché de Markale et que ce marché est couvert par des plaques de toit qui
22 sont jointives les unes par rapport aux autres ?
23 R. Au vu de cette photographie, il semblerait qu'il s'agit du marché, même
24 si je ne saurais le confirmer de façon définitive sans avoir vu une photo
25 de plus grande taille. Mais oui, oui, oui, apparemment, c'est le marché de
26 Markale.
27 Q. Vous voyez les rails vers le bas, et cetera. Mais lorsque vous voyez
28 ces plaques jointives qui constituent un toit, est-ce que vous maintenez
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1 votre conclusion qui reposait sur des rapports d'enquête antérieure selon
2 laquelle il est possible, grâce à un seul tir sur ce marché, de voir l'obus
3 atterrir sur le sol sans avoir endommagé les plaques qui constituent le
4 toit ?
5 R. Oui, c'est possible, parce que le jour du tir, bien entendu, nous ne
6 connaissions pas la position de ces plaques qui constituent le toit, et
7 l'obus aurait facilement pu passer par un interstice entre deux de ces
8 plaques. Mais manifestement, je ne dispose d'aucun élément de preuve ou
9 d'information à ce sujet.
10 Q. Mais comme vous avez pu le constater, sans doute, au vu des documents
11 qui vous ont été fournis par la partie musulmane, le lieu concerné est bien
12 le même. L'aspect du marché était identique, et on le voit dans un certain
13 nombre de photographies de Markale. On voit qu'il est recouvert. Est-ce que
14 vous avez vu ces documents ? Est-ce qu'on vous a fourni tous les éléments
15 documentaires nécessaires pour vous permettre de conclure ?
16 R. Les conclusions, bien entendu, reposent sur les rapports qui, bien
17 entendu, constituaient des éléments de preuve préalables. A aucun moment je
18 n'ai vu un quelconque rapport laissant entendre qu'un obus aurait traversé
19 ou serait passé entre deux de ces éléments de couverture du toit. Il n'en a
20 été fait mention nulle part. Si je ne me trompe, je crois avoir vu une
21 mention du fait qu'un étal aurait été traversé, mais je n'ai pas d'élément
22 de preuve relatif à ces couvertures du toit.
23 Q. Mais pour que les choses soient tout à fait claires pour ceux qui
24 participent à la présente procédure, nous ne parlons pas de Markale I ici,
25 n'est-ce pas ?
26 R. En effet.
27 Q. Est-ce qu'un obus qui aurait touché ces éléments de couverture du toit
28 pourrait avoir été activé ?
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1 R. Selon le matériau qui constitue ces éléments de couverture du toit,
2 selon leur épaisseur, on peut dire, oui, c'est possible.
3 Q. Vous avez dit - et nous l'avons vu écrit dans un rapport des Nations
4 Unies - que l'obus avait frappé un étal. Est-ce qu'il a été activé au
5 moment du choc, de l'impact avec cet étal ?
6 R. Cela dépend, bien sûr, des conditions dans lesquelles l'étal a été
7 frappé, touché, et quelle est la partie de l'étal qui a été touchée. Mais
8 un étal peut permettre l'explosion d'un obus avec une force suffisante.
9 Q. Je vous remercie.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage sur les
11 écrans du document 65 ter numéro 10083.
12 Et je demande au préalable le versement au dossier de la photographie
13 dont nous venons de parler.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document sera admis, à moins qu'il ne
15 fasse l'objet d'une objection.
16 Monsieur Gaynor.
17 M. GAYNOR : [interprétation] Sous réserve de l'observation suivante, à
18 savoir que nous n'avons aucune information quant au moment où cette
19 photographie --
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Elle a été prise avant l'incident.
21 M. GAYNOR : [interprétation] Exact. Mais en dehors de cela, nous n'avons
22 pas de désignation d'année quant au moment où cette photographie a pu être
23 prise.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous aider sur ce point,
25 Monsieur Karadzic ?
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai vécu 50 ans dans cette ville et je la
27 connais très bien. Donc ce qu'on voit ici, c'est l'aspect permanent du
28 marché de Markale pendant une très longue période avant le début de la
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1 guerre, et même avant. Donc ici, nous avons un cliché qui a été tiré d'une
2 émission de télévision.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste avant la guerre.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est tout ce que vous pouvez nous en
6 dire?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc avec cette nuance, nous admettons
9 la photographie en tant qu'élément de preuve.
10 M. GAYNOR : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce D542,
12 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande donc l'affichage du document 65 ter
14 numéro 10083.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. C'est une partie de votre rapport dans laquelle vous évoquez votre
17 visite à Mrkovici, Mrkovici étant un village qui se trouve au-delà de la
18 ligne de confrontation du côté serbe. C'est bien cela, n'est-ce pas ?
19 La fin de ma question n'a pas été consignée en anglais au compte rendu
20 d'audience.
21 Je vous ai demandé : "C'est bien cela, n'est-ce pas ?"
22 R. A quelle partie du rapport faites-vous référence ?
23 Q. Bien, il s'agit de la dernière page. Je cite : "Je me suis rendu dans
24 le secteur de Mrkovici…" numéro ERN 0303-7515. En anglais, le passage
25 commence par les mots "I have visited…"
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Qu'entendiez-vous par l'affirmation venant de vous selon laquelle à
28 Mrkovici, il y avait pas mal de sites qui auraient permis l'emplacement
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1 d'un site de mortier et qu'il existait des routes permettant de transporter
2 ces mortiers jusqu'à Mrkovici ?
3 R. J'essayais de déterminer quels étaient tous les lieux possibles où le
4 projectile aurait pu se trouver, d'où il aurait pu être tiré. Avec un
5 mortier de 120-millimètres, nous sommes en présence d'une pièce lourde,
6 d'une pièce importante, et certains lieux peuvent ne pas permettre de
7 placer une telle pièce à cet endroit et de tirer à partir de cet endroit.
8 Donc je me suis rendu dans différents sites pour voir quelle était la
9 possibilité qu'un tel mortier s'y soit trouvé.
10 Q. Mais pendant la rencontre que nous avons eue vous et moi, vous avez dit
11 qu'un mortier de 120-millimètres pouvait être démonté, n'est-ce pas, et
12 expédié à un autre endroit pour y être remonté; c'est bien cela ?
13 R. Oui, c'est exact.
14 Q. Je vous remercie. Est-ce qu'à Mrkovici, vous avez trouvé un quelconque
15 lieu où un mortier aussi important de taille, donc un mortier de 120-
16 millimètres aurait pu être enterré ?
17 R. Non, non. Aucun des sites où il aurait pu être enterré.
18 Q. Je vous remercie. Est-ce que votre tournée de tous ces sites se situait
19 entre Mrkovici et Markale ? Est-ce que vous vous êtes rendus également à
20 d'autres endroits pour voir s'ils auraient pu constituer des sites
21 appropriés pour un mortier ?
22 R. Nous avons examiné tout le secteur le long de la ligne constituant la
23 trajectoire et nous y avons déterminé quels étaient les endroits
24 appropriés, oui.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions quelques
26 instants sur la carte 02 du classeur des cartes. Est-ce qu'elle a été
27 versée au dossier, la carte numéro 02, tirée du classeur des cartes de
28 Sarajevo.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne me rappelle pas le numéro 65 ter
2 de cette photographie aérienne.
3 M. GAYNOR : [interprétation] Nous allons le retrouver sous peu, Monsieur le
4 Président.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. C'est bien une photographie aérienne.
6 M. GAYNOR : [interprétation] On m'informe qu'il s'agit du numéro 11790,
7 Monsieur le Président.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est bien celle-ci.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Pourriez-vous, Monsieur, nous montrer où se trouve Mrkovici sur cette
11 image ?
12 R. Bien sûr, cela fait pas mal de temps que je ne suis pas retourné sur
13 place, donc je n'ai plus un souvenir très précis du nom des différentes
14 localités. Et au vu de cette image, il serait tout à fait improbable que je
15 puisse déterminer exactement où se trouve le lieu en question sur cette
16 photographie aérienne.
17 Q. En vous centrant sur la partie inférieure de la ville, la chose serait
18 peut-être plus facile. Est-ce que vous pouvez nous montre sur cette image
19 où se trouve Markale ?
20 R. La partie inférieure de la ville, bien sûr, nous montre l'emplacement
21 de l'aéroport, et Markale est à l'autre bout de la ville.
22 Q. Donc du côté est de la ville, dans la partie la plus étroite, vous
23 voyez cette rue qui commence là et qui se poursuit vers la partie ancienne
24 de la ville ?
25 R. Pas clairement sur cette photographie, non, je ne le vois pas très
26 bien.
27 Q. Conviendrez-vous que Markale se situe bien dans la partie la plus
28 ancienne de la ville ?
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1 R. Oui, oui, dans la vieille ville.
2 Q. Et conviendrez-vous qu'en partant de la vieille ville, pour vous
3 diriger vers la montagne, Mrkovici se trouve de l'autre côté de la ligne de
4 front, donc au nord de la ligne de confrontation, n'est-ce pas ?
5 R. Sans vérification complémentaire sur une carte où figurent les
6 dénominations de localités, je ne peux pas vous montrer cela sur la
7 photographie que nous avons sous les yeux.
8 Q. Bon, nous allons vous montrer une carte aussi. Mais conviendrez-vous
9 que les lignes de front dans cette partie bien précise sont très proches
10 l'une de l'autre ?
11 R. Oui, l'image nous montre que les lignes de confrontation sont très
12 proches l'une de l'autre.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous nous arrêterons
14 là pour aujourd'hui.
15 Donc nous suspendons l'audience et la reprendrons demain à 9 heures du
16 matin.
17 Monsieur Higgs, vous le savez sans doute parfaitement bien mais pendant
18 toute la durée de votre déposition, vous n'êtes censé discuter de ce
19 témoignage avec personne.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous nous reverrons demain
22 matin.
23 [Le témoin quitte la barre]
24 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 19 août 2010,
25 à 9 heures 00.
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