Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 13 décembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  6   Bonjour, Monsieur Svraka.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous avoir l'interprétation ?

  9   Commençons.

 10   Bonjour, Madame Uertz-Retzlaff.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

 12   Madame, Messieurs les Juges.

 13   LE TÉMOIN : ISMET SVRAKA [Reprise]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   Interrogatoire principal par Mme Uertz-Retzlaff : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Svraka. M'entendez-vous, Monsieur

 17   Svraka ?

 18   R.  Oui, je vous entends.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les microphones sont-ils allumés ?

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Svraka, peut-être pourriez-vous vous rapprocher un petit peu

 22   des microphones. Merci.

 23   La pièce P1450 -- ou plutôt, un extrait de cette pièce, pouvons-nous faire

 24   visionner cela ?

 25   Monsieur Svraka, en attendant, avez-vous eu l'occasion de visionner un

 26   extrait vidéo lorsque vous êtes arrivé à La Haye avant de venir déposer

 27   pendant que vous vous prépariez avant de venir déposer ?

 28   R.  Non, rien si ce n'est ce qui se voyait à Markale.

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  1   Est-ce que vous pouvez répéter le début de votre réponse, Monsieur ? Les

  2   interprètes n'ont pas entendu le début. Donc je vous ai demandé : Si vous

  3   aviez eu l'occasion de voir cet extrait vidéo ?

  4   R.  Pas chez moi, je ne l'ai vu qu'au tribunal, quand on a montré le

  5   massacre. Mais dans ma vie privée, non, je n'ai rien vu, rien regardé

  6   Q.  D'accord.

  7   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous allons regarder maintenant un

  8   extrait qui commence à 00:54 jusqu'à 1:50. Nous allons faire des pauses,

  9   Monsieur Svraka, et cela me permettrait de vous poser des questions.

 10   Est-ce que nous pouvons commencer, s'il vous plaît ?

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Svraka, que voyons-nous à l'image ? De quel endroit s'agit-il

 14   ?

 15   R.  C'est devant l'entrée du marché --

 16   Q.  Sur cette image en particulier, est-ce que vous avez à reconnaître ce

 17   que l'on y voit ? Est-ce que vous reconnaissez les personnes que l'on voit

 18   ?

 19   R.  Je ne suis pas tout à fait certain. Mais je pense que c'est moi là à

 20   côté de la blanche. Je ne vois pas bien l'image. C'est un peu comme si

 21   j'étais assis moi avec cet anorak blanc.

 22   Q.  Vous souvenez-vous ce que vous avez vu lorsque vous avez été touché par

 23   le souffle ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens.

 25   Q.  Alors est-ce que vous pourriez nous le dire, s'il vous plaît ?

 26   R.  J'étais là avec mes collègues de l'entreprise. On était en train de se

 27   fumer une cigarette, et on a entendu une explosion. Je suis tombé par

 28   terre. Premièrement --

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  1   L'INTERPRÈTE : L'interprète ne comprend pas.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, j'ai touché mon visage de mes

  3   mains, et je me suis dit, Voilà ma tête est toujours là sur les épaules.

  4   J'ai ouvert les yeux, Messieurs les Juges, peut-être que c'est incroyable,

  5   mais je ne voyais rien, rien. Alors, je me suis remis à respirer, je me

  6   suis dit, Bien, je peux respirer. J'ai voulu bouger mes jambes. Mais je

  7   n'ai pas pu les bouger.

  8   J'entendais tout, mais je ne voyais rien. Voilà tant qu'on ne m'a pas

  9   installé à travers le coffre d'une voiture à l'intérieur, j'ai attrapé le

 10   siège du chauffeur, j'ai vu le chauffeur contourner la voiture pour se

 11   mettre au volant, il m'a dit : N'aie pas peur grand-père.

 12   L'INTERPRÈTE : L'interprète ne comprend pas la dernière phrase.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis on est allé à l'hôpital, j'ai demandé au

 14   chauffeur où on allait aller. Il y avait deux hôpitaux à l'époque,

 15   l'hôpital militaire et le centre médical de Kosevo. Je dois dire que

 16   j'avais travaillé pendant dix ans à Kosevo à l'entreprise, et on m'a dit

 17   qu'on allait aller à Kosevo. Le chauffeur était là avec moi.

 18   Puis j'étais à moitié évanoui et à moitié -- j'avais retrouvé mes esprits

 19   pendant le trajet. Puis quand on arrive à Kosevo, il y a comme un passage,

 20   un tunnel, et j'y avais travaillé personnellement. J'ai vu deux infirmières

 21   avec deux bouteilles. Le sang, et puis l'autre je ne sais pas comment ça

 22   s'appelle tout ça. J'ai vu le docteur arrivé. Il y avait plein de blessés

 23   plein de morts. Il est venu les voir, et j'ai entendu le médecin parler

 24   très fort, On ne peut pas travailler comme ça. Il faut mettre de l'ordre.

 25   J'ai dit deux fois aux infirmières : J'ai froid, j'ai froid. J'ai entendu

 26   les ciseaux couper mon pantalon sur la jambe droite, mais je n'ai pas vu la

 27   personne qui faisait cela. Je me suis réveillé aux soins intensifs. A

 28   gauche et à droite, j'ai pu voir des patients, des blessés. Aucun ne

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  1   pleurait, et c'était une pièce qui avait du carrelage jusqu'au plafond, et

  2   quand il n'y avait pas de courant, ils faisaient marcher des groupes

  3   électrogènes, ils faisaient ça rapidement, c'est dont je me souviens après

  4   ma première opération, intervention chirurgicale.

  5   Q.  Très bien.

  6   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Alors est-ce que nous pouvons

  7   continuer de visionner la vidéo, s'il vous plaît ?

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 10   Q.  Très brièvement, vous souvenez-vous à bord de quelle voiture on vous a

 11   transporté ? Avez-vous gardé un souvenir quelconque de cette voiture ?

 12   R.  C'était une Golf, d'après une déclaration que j'ai donnée, mais avant

 13   d'être mis dans cette Golf, je n'avais rien vu, Je ne conduis pas

 14   d'ailleurs j'étais seul dans cette voiture et ils m'ont propulsé à

 15   l'intérieur à travers dans le coffre, et c'est de la main gauche que j'ai

 16   attrapé le siège avant et j'étais sur le côté droit. Je ne sais pas

 17   exactement de quelle voiture il s'agit.

 18   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Est-ce que nous pouvons continuer de

 19   visionner, s'il vous plaît ?

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21    Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.

 22   Q.  L'entrée que nous voyons ici, cette porte, de quoi s'agit-il ? Où est-

 23   ce que cela mène ?

 24   R.  Normalement, ça devrait être l'entrée du marché. Il y a deux entrées,

 25   deux portes, du côté de la promenade et du côté de la rue Vase Miskina,

 26   c'était son nom avant. Là, il y a les rails du tramway. Moi, je suis près

 27   de la porte, à 2 mètres de la porte. J'étais là avec mes collègues. C'était

 28   la rue principale et le marché principal. On pouvait toujours s'y procurer

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  1   quelque chose pour survivre. Il y avait toujours quelqu'un qui vendait,

  2   toujours quelqu'un qui achetait. On pouvait l'atteindre à pied. On n'avait

  3   pas besoin de transport. Si on avait un vélo, c'était encore le mieux pour

  4   s'y rendre.

  5   Q.  Lorsque vous dites que vous étiez près de la porte, sur la gauche ou à

  6   droite par rapport à la porte sur cette photographie ?

  7   R.  Sur la gauche sur cette photographie. On voit une fenêtre là, me

  8   semble-t-il.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui. Merci.

 10   Nous n'avons plus besoin de cette vidéo, qui est déjà une pièce à

 11   conviction. Nous n'avons pas besoin de nouvelle cote.

 12   Nous n'avons plus de questions dans le cadre de l'interrogatoire principal.

 13   Nous n'avons plus de pièces par le truchement de ce témoin.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Monsieur Karadzic, vous pouvez contre-interroger M. Svraka à présent.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   Bonjour à toutes et à tous.

 18   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Svraka.

 20   R.  Bonjour.

 21   Q.  Je tiens à vous dire à quel point je regrette ce que vous avez éprouvé.

 22   Je n'aurai que quelques questions à vous poser.

 23   Dites-moi : est-ce que vous aviez une obligation de travail pendant toute

 24   la guerre ou pendant quelque temps vous avez servi dans des unités

 25   militaires ?

 26   R.  L'obligation de travail a commencé peut-être un ou deux mois après le

 27   début de la guerre. Je n'ai pas passé de temps dans l'armée, pas du tout.

 28   Mais pendant toute la guerre, j'ai eu cette obligation de travail, et

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  1   après, il fallait aller creuser. Cinq personnes devaient se rendre

  2   quasiment tous les soirs -- enfin, tous ceux qui sont restés à l'entreprise

  3   devaient aller creuser des tranchées, des canaux, et cetera.

  4   Q.  Merci. J'attends l'interprétation. Donc je vais ralentir un petit peu à

  5   cause de cela -- je fais des pauses.

  6   Dites-nous, à ce moment-là, quelle était votre adresse ?

  7   R.  La rue a changé. C'était rue Ragibinda [phon] 70, Buvljakov Potok. 

  8   Maintenant c'est la municipalité de Nouvelle Sarajevo Potok [phon].

  9   Q.  Très bien. Dites-nous : où vous êtes allé creuser des tranchées ?

 10   R.  Surtout à Zuc. Puis je suis allé au mont Igman également pendant 20

 11   jours. J'avais dix jours de permission après. Là, je suis allé au marché.

 12   C'est la dernière fois que j'ai marché. Puis pour aller creuser, on

 13   creusait en haut de Grbavica, à Stup, à Zuc, je ne sais pas. Orahov Brijeg,

 14   la colline de [inaudible], c'était l'endroit le plus éloigné de chez moi où

 15   je me suis rendu.

 16   Q.  Merci. Etait-il plus facile de travailler dans le cadre de cette

 17   obligation de travail ou était-il plus facile de se rendre au front ? Que

 18   préféraient les gens ?

 19   R.  Tout de suite quand on a commencé à se battre, je suis allé à la

 20   communauté locale pour avoir une affectation, parce que si on n'était pas

 21   affecté, on n'avait pas le droit de circuler, d'aller dehors. On m'a dit :

 22   Grand-père, on n'a même pas assez de fusils pour les jeunes, et encore

 23   moins pour toi. Donc ils m'ont donné une sorte de certificat comme quoi

 24   j'étais libre de circuler et de me déplacer, car au début pendant les dix,

 25   20 premiers jours, personne ne se rendait au travail parce qu'on avait peur

 26   à cause des tirs des snipers.

 27   Puis après, il y avait des personnes plus âgées qui se rendaient à

 28   Pofalici, à l'entreprise dans la tour, on était près de Grbavica, donc tout

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  1   de suite on s'est mis à sortir l'eau des caves. Parce qu'il y avait environ

  2   500 personnes qui travaillaient là à ce moment-là. On est allé réparer les

  3   toits, puis je suis allé sur le chantier, un coursier est venu et il a dit,

  4   Cinq personnes doivent partir ce soir, choisissez parmi vous. En fait c'est

  5   dans l'ordre alphabétique qu'on a choisi cinq personnes. Mon collègue, mon

  6   premier voisin a été obligé et il a dû partir, lui, ce soir-là, mais, moi,

  7   non. Puis un autre a dit -- un autre qui travaillait à Stup chargé des

  8   camions, l'administration qui consignait les camions, il a dit : Est-ce que

  9   quelqu'un peu me remplacer, et moi, j'irai une autre fois ? Moi, j'ai dit :

 10   Je veux bien partir à ta place. Parce que, là, il y a mon voisin, et quand

 11   on va aux tranchées, il faut y aller ensemble, puis au retour, on rentre

 12   comme on peut. Donc je me suis dit : Je préfère partir avec mon voisin. Si

 13   jamais il m'arrive quelque chose, il m'aidera, puis je ferai pareil, et

 14   j'ai travaillé avec lui jusqu'au dernier jour dans le cadre de cette

 15   obligation de travail, puis il a continué. Le troisième jour, quand je me

 16   suis réveillé à l'hôpital, on a entendu une bombe exploser à Jahorinski

 17   Potok, le ruisseau de Jahorina. Je connais cet endroit parce que j'ai

 18   construit deux maisons de campagne là. J'étais maçon, donc quasiment tous

 19   les week-ends, le samedi et dimanche, j'y allais travailler pour des gens.

 20   Q.  Lorsque vous parlez de Jahorinski Potok, c'est l'OTAN qui a bombardé

 21   les positions serbes après cet obus ?

 22   R.  Oui, on l'a entendu à l'hôpital. J'ai entendu à Kosevo, et on a dit :

 23   Ils se sont mis à bombarder.

 24   Q.  Ces certificats étaient-ils utiles ? Est-ce qu'ils vous permettaient de

 25   circuler, donc ces attestations, ces certificats, est-ce qu'ils vous

 26   permettaient effectivement de circuler librement en ville ?

 27   R.  Quand on se rendait en ville, il est arrivé que des militaires

 28   t'attrapent, t'envoient au champ de bataille, et les tiens ne savent même

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  1   pas où tu es parti. Là, ils ont mis dans cette attestation que je faisais

  2   partie d'une unité de travail dans le cadre de l'entreprise Herzégovine.

  3   Donc j'avais effectivement un rôle, j'étais libre de circuler avec cela.

  4   Cela m'autorisait à me déplacer.

  5   Q.  Merci. Mais dites-nous : Est-ce que c'est la première fois que vous

  6   vous soyez rendu à Markale, ou bien est-ce que vous y alliez souvent ?

  7   R.  C'était un lieu qui était très fréquenté. Puis j'avais une sœur dans la

  8   vieille ville. En été, j'avais 200 ou 300 mètres de potager, puis en été

  9   j'allais porter des légumes à ma sœur, donc je mettais ça sur mon épaule

 10   puis j'y allais à pied. J'allais plutôt à Zuc pour couper du bois. C'est ce

 11   bois qui m'a sauvé, parce qu'il s'échangeait bien contre la farine ou

 12   l'huile, et là, je suis allé, par exemple, pour acheter du sel, mais

 13   j'essayais de me rendre le moins souvent, en ville. Cette fois-là, je suis

 14   allé parce que j'avais besoin d'envoyer une lettre à mon frère, en

 15   Allemagne. Le voisin de ma sœur normalement aurait dû y aller, il n'y est

 16   pas allé. La lettre est restée à la maison, et après, j'ai donné cette

 17   lettre à mon frère après quand il est revenu. Il a pu la lire plus tard.

 18   Q.  Très bien. Cette explosion s'est produite à quelle distance de vous.

 19   Vous vous êtes trouvé entre l'explosion et la porte; c'est cela, à peu près

 20   ? Vous étiez où ?

 21   R.  A trois ou quatre mètres, pas plus loin, c'était sur ma droite. Encore

 22   aujourd'hui, on voit la trace là, sur le sol, et je l'appelle mon obus, je

 23   le dis toujours quand je passe par là. C'est à trois quatre mètres, pas

 24   plus.

 25   Parce que mes deux collègues étaient là avec moi. Nous étions tous les

 26   trois ensemble, on fumait tous des cigarettes, ils tournaient le dos au

 27   mur, mur du marché. Moi, j'étais face à eux. Je suppose, je ne sais pas,

 28   j'ai dit que je n'ai rien vu, mais c'est probablement à cause de la

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  1   détonation, peut-être que leurs têtes ont heurté le mur, et moi, je suis

  2   tombé sur l'asphalte, sur le trottoir.

  3   Tous les ans on rediffuse cela, on répète cela dans le journal télévisé, en

  4   Bosnie et partout ailleurs.

  5   En fait, c'est alors à l'hôpital qu'ils ont été tués. Il y en avait

  6   un de ma brigade. J'avais eu quelque différend avec lui, quelque

  7   malentendu. L'armée avait cette brigade, une brigade de 10 à 15 personnes,

  8   et un commandant de brigade. En fait, c'était un simple ouvrier, et moi,

  9   j'étais un ouvrier qualifié, et tué.

 10   Q.  Vous étiez plus près de l'explosion, n'est-ce pas, que --

 11   R.  Oui, d'un demi mètre. Nous, on occupait un mètre carré, tous les

 12   trois.

 13   Q.  Très bien. Dites-nous : est-ce que vous avez entendu quoi que ce

 14   soit avant l'explosion ?

 15   R.  Non, rien, juste l'explosion. Avant cela, on était en train de se

 16   parler. Il y en avait un qui cherchait la farine, l'autre qui vendait la

 17   confiture. On a peut-être eu le temps de fumer une demi cigarette, et je

 18   n'ai rien entendu avant l'explosion, sauf notre conversation de nous trois.

 19   Q.  Merci. Il y a eu quatre obus à une distance de 200, 300 mètres de vous;

 20   est-ce que vous les avez entendus ?

 21   R.  Non, non, j'ai entendu un obus, et je suis tombé par terre. Je ne sais

 22   pas quand les autres sont arrivés. Je pense que c'était le premier, parce

 23   que généralement les gens se mettent à l'abri quand il y a une explosion.

 24   Donc, moi, je n'ai rien entendu.

 25   Q.  Dites-nous : où avez-vous été touché par les éclats d'obus ?

 26   R.  Je n'ai rien ressenti, aucune douleur tant que je sois arrivé à

 27   l'hôpital. Quand on a commencé à me panser. Quand je me suis réveillé,

 28   j'avais la jambe gauche amputée au dessus du genou. La jambe droite, ils

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  1   ont mis un mois à nettoyer ma jambe gauche -- donc ils ont amputé, pendant

  2   un mois, ils ont enlevé toujours plus. Puis la cheville droite a été

  3   blessée, deux orteils ont été amputés. Sous le pied, enfin ils ont pensé

  4   m'amputer la moitié du pied, et puis finalement ils ne l'ont pas fait.

  5   Quand je me suis réveillé, à Kosevo, quand ils m'ont demandé : Comment vas-

  6   tu, grand-père, est-ce que ça fait mal; j'ai dit : J'ai mal à l'estomac.

  7   C'était un peu drôle à entendre, enfin je n'avais plus une jambe, l'autre

  8   était pansée, et moi, j'avais à l'estomac. Il a commencé à enfler, ils

  9   m'ont un peu palpé l'estomac et ils n'avaient pas vu que j'avais un éclat

 10   d'obus sous l'aine. En fait c'est sous l'aine que l'éclat est rentré dans

 11   mon estomac. Il a commencé à enfler et ils m'on emmené pour m'opérer. Il y

 12   a eu quasiment la moitié d'un morceau de sucre, c'était cela la taille de

 13   l'éclat dans mon estomac.

 14   Donc c'est Milosevic qui m'a opéré, je ne connais pas son prénom.

 15   Puis sept jours plus tard, j'ai redit de nouveau que j'avais mal à

 16   l'estomac. Peut-être que le drain ne fonctionnait plus, il y a eu un litre

 17   de sang qui éclaboussé le médecin, et il a dit, il faut nettoyer de

 18   nouveau. Donc sept jours plus tard, de nouveau on m'a opéré.

 19   Puis ils m'ont transféré. Je sais que c'était au service de chirurgie

 20   d'abord, et puis la chirurgie abdominale, c'est comme cela que ça

 21   s'appelle. Puis donc il y avait les uns qui soignaient mon estomac, et puis

 22   ceux de l'orthopédie venaient me changer le pansement sur la jambe, les

 23   autres ne voulaient pas leur donner de pansement parce qu'ils auraient dû

 24   en apporter avec eux, de leur service, et puis j'ai été transféré de la

 25   chirurgie abdominale à la chirurgie orthopédique.

 26   Là, la médecin qui m'avait amputé est venu, Gavranka Petanovic

 27   [phon]. Il est venu plusieurs fois, et il n'arrêtait pas de dire que

 28   j'avais un joli nom. En fait, après j'ai appris qu'il s'appelait lui,

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  1   Ismet. J'ai un éclat d'obus dans la tête, ici, ils ont fait des radios, il

  2   y a quelques années, et on m'a dit : Ecoute, grand-père, ce n'est pas

  3   grave, c'est toujours là, mais ça va.

  4   Le médecin, il n'a rien caché. Il m'a dit : J'ai été obligé d'enlever

  5   la moitié de son intestin. Je ne sais pas s'il a enlevé la moitié. J'ai des

  6   problèmes avec mon estomac, j'ai toujours des problèmes. Il faudrait manger

  7   plus souvent, mais je ne sais pas, ça pèse beaucoup depuis les blessures,

  8   toutes ces blessures que j'ai.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Mes respects. Je n'ai plus de

 10   questions pour vous.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic. Je vous

 12   remercie, Monsieur Svraka.

 13   Est-ce que vous avez des questions supplémentaires, Madame Uertz-

 14   Retzlaff ?

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, merci, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Svraka, c'est ainsi que se

 17   termine votre déposition. Au nom de toute la Chambre de première instance,

 18   au nom du Tribunal, je viens à vous remercier d'être venu témoigner à La

 19   Haye. Votre déposition est terminée, et je vous souhaite un bon retour.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   Puis-je vous demander de me rappeler à la barre quand Mladic sera ici.

 22   Parce que si c'est la dernière chose que je fais dans ma vie, j'aimerais

 23   venir ici le voir traduire en justice.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je peux rentrer à la maison, c'est fini

 26   ?

 27   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation] 

 28   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

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  1   [Le témoin se retire]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui sera votre prochain témoin ?

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] M. Hamill. J'espère qu'il est déjà

  4   ici, parce que nous nous étions dit que M. Karadzic allait utiliser l'heure

  5   qui lui avait été donné. J'espère que M. Hamill est déjà ici dans le

  6   bâtiment.

  7   Nous pourrions peut-être faire une petite pause.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une pause de cinq minutes ?

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Nous allons reprendre à 10

 11   heures moins vingt.

 12   --- La pause est prise à 9 heures 32.

 13   --- La pause est terminée à 9 heures 44.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Hamill.

 16   Je vais vous demander de prononcer la déclaration solennelle.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 18   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 19   LE TÉMOIN : JOHN HAMILL [Assermenté]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

 22   Madame Edgerton, vous avez la parole.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci. Merci, Madame, Messieurs les Juges.

 24   Interrogatoire principal par Mme Edgerton:

 25   Q.  [interprétation] Je vais vous demander de décliner votre identité et de

 26   nous dire quelle est votre grade.

 27   R.  Je suis lieutenant-colonel de l'armée irlandaise, dans l'artillerie, et

 28   je m'appelle John Hamill.

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  1   Q.  Ce n'est pas la première fois, n'est-ce pas, que vous déposez en ce

  2   Tribunal ? Vous avez déjà déposé deux fois, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, dans le procès Galic et dans le procès Kordic/Cerkez.

  4   Q.  Afin de vous préparer à la déposition d'aujourd'hui, est-ce que vous

  5   avez relu le compte rendu de votre déposition dans le procès Galic, ainsi

  6   que les pièces qui ont été abordées au cours de votre déposition ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  A la suite de cet examen, est-ce que vous avez des ajouts que vous

  9   demandez, des corrections, ou des précisions que vous voulez apporter ?

 10   R.  Je ne pense pas.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous savez peut-être, Monsieur Hamill,

 12   et on vous l'a sans doute dit, vous parlez tous les deux la même langue et

 13   vous savez que chacun de vos mots, tous vos propos sont interprétés en

 14   français comme en B/C/S. Nous vous demandons d'avoir la bonté de faire une

 15   pause entre la question et la réponse. Merci d'avance.

 16   Mme EDGERTON : [interprétation]

 17   Q.  Si aujourd'hui je vous reposais les questions qui vous ont été posées

 18   dans l'affaire Galic, est-ce que vous y répondriez de la même façon ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Merci.

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] Je demande l'affichage du compte rendu de

 22   la déposition du lieutenant-colonel Hamill dans l'affaire Galic, numéro de

 23   la liste 65 ter 10 336. En fait, j'en demande le versement au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est versé au dossier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1994, Madame, Monsieur

 26   les Juges.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation]

 28   Q.  Je vais maintenant vous donner lecture du résumé de cette déposition.

Page 9677

  1   Le lieutenant-colonel John Hamill a servi à Sarajevo en tant qu'observateur

  2   militaire des Nations Unies de mai à juillet 1993. Au cours de cette

  3   période, il a été déployé dans le nord mais aussi dans le sud de la ville,

  4   et ses seules activités se sont limitées au territoire tenu par le RSK. Ses

  5   fonctions, ses attributions concernaient notamment l'observation de

  6   l'utilisation des armes, leur déploiement, ainsi que des fonctions de

  7   liaison avec le commandement du RSK.

  8   Le témoin a constaté que le RSK a utilisé son artillerie de façon non

  9   conventionnelle, au sens militaire, à savoir que les pièces n'ont presque

 10   jamais bougé. Il se souvient qu'il n'y avait pas un jour où il n'y avait

 11   pas de tirs de canons ou de fusils. Un jour, les observateurs militaires

 12   ont compté 3 610 obus qui étaient partis de positions tenues par le VRS en

 13   12 heures.

 14   Le témoin dit que l'utilisation de tirs embusqués était un

 15   instrument, un outil de terreur. A son avis, les autorités militaires et

 16   politiques avaient un contrôle suffisant que pour décider, s'ils le

 17   voulaient, d'arrêter ces tirs de tireurs embusqués.

 18   En tant qu'officier chargé de la liaison à Lukavica, il a souvent

 19   protesté auprès des responsables du RSK à propos de ces incidents de

 20   pilonnage ou de tirs qui avaient été rapportés par ses collègues

 21   observateurs militaires. Il a constaté que les officiers du RSK avaient la

 22   capacité d'arrêter ou de contacter immédiatement les chefs de brigade

 23   concernés.

 24   En février 1994, il est revenu à Sarajevo. Il était conseiller

 25   technique d'une équipe onusienne chargée de mener une enquête sur le

 26   pilonnage au marché de Markale. Il a rédigé le rapport consécutif à

 27   l'enquête et il a consolidé les pièces. Au cours de cette enquête, il a eu

 28   l'occasion de parler avec le lieutenant Cvjetkovic, qui était chargé de la

Page 9678

  1   coordination des équipes. Il a compris que c'était le chef du régiment de

  2   l'artillerie du RSK. Au cours de cet entretien, le colonel Cvjetkovic a dit

  3   que l'année précédente ils avaient tiré entre 30 et 40 000 obus sur la

  4   ville, et il a demandé au lieutenant-colonel Hamill pourquoi il faisait

  5   tant de chichis à propos d'un obus quand autant d'obus avaient été tirés.

  6   Il a compris que ce qui avait été l'explosion du 5 février 1994 était

  7   le résultat d'un obus très explosif de 100 [comme interprété] millimètres,

  8   manufacturé de façon conventionnelle et qui a explosé au contact sur le

  9   sol, qui venait de l'axe nord-nord-est. Six endroits ont été retenus comme

 10   étant des lieux éventuels d'où aurait pu venir cet obus. Deux étaient tenus

 11   par la BiH, quatre venaient du territoire tenu par la VRS.

 12   Ce témoin a examiné aussi deux cratères d'obus à Dobrinja en 2001. Il

 13   y avait notamment le terrain de football, où il y avait eu un obus le 1e

 14   juillet 1993. Partant de son enquête, il a conclu que des tirs étaient

 15   venus de Toplik, où il y avait des armes lourdes de la VRS, plus exactement

 16   du RSK. Le témoin s'était d'ailleurs trouvé en poste pendant son tour de

 17   service dans la ville.

 18   Ceci termine la lecture du résumé.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 20   Mme EDGERTON : [interprétation]

 21   Q.  Lieutenant-colonel, je n'ai que quelques questions à propos des

 22   éléments écrits versés au dossier, pour vous demander quelques précisions,

 23   je vais les aborder sans plus tarder.

 24   Tout d'abord, aux pages 6 063, 6 218, 6 230 et 6 231 de votre compte

 25   rendu d'audience, vous parlez d'une bande d'irréguliers que vous qualifiez

 26   de Chetniks qui étaient dirigés par un certain Vasilije Vidovic, Vasko.

 27   Vous dites qu'il a souvent empêché les observateurs militaires de se

 28   déplacer dans la ville, et vous ajoutez que, partant de ce que vous a dit

Page 9679

  1   votre interprète à l'époque, Vasko était contrôlé par un certain colonel

  2   Josipovic, qui lui-même commandait plusieurs brigades dans le nord de la

  3   ville.

  4   Vous avez dit, plus précisément aux pages 6 218 et 6 219, que cette

  5   bande voulait semer la terreur et empêcher qu'on entre dans certains

  6   quartiers au nord et à l'est de Sarajevo. A la page 6 219, vous ajoutez que

  7   vous estimez que cette bande servait d'outil ou d'instrument utilisé par

  8   les autorités pour mener des opérations dont elle ne voulait pas

  9   s'approprier l'initiative; c'étaient des opérations secrètes.

 10   Vous avez beaucoup d'information sur cette bande de Chetniks, vous

 11   avez reçu des informations de votre interprète, mais qu'avez-vous d'autre ?

 12   R.  Oui. Nos équipes qui se trouvaient dans le nord de la ville ont eu

 13   beaucoup de déboires avec cette bande, cette bande que j'appelle des

 14   Chetniks. Par exemple, nos observateurs n'ont pas pu entrer dans plusieurs

 15   parties à Vogosca, Radava, à Rajlovac, et plus à l'est. Surtout vers la fin

 16   juin, vers le milieu du mois de juillet 1993, à ce moment-là cet homme a

 17   empêché le déplacement de nos équipes. Ils n'étaient pas nombreux dans

 18   cette bande, mais ils avaient beaucoup de territoire qu'ils couvraient.

 19   C'étaient des territoires contrôlés par quatre ou cinq brigades de la VRS.

 20   Très souvent, ils ont empêché les observateurs militaires de se déplacer et

 21   ont ouvert le feu sur eux. J'ai compris que cet homme était contrôlé par un

 22   certain colonel Josipovic, qui apparemment était responsable des brigades

 23   se trouvant au nord de la ville. Moi, je ne l'ai jamais rencontré ce

 24   Josipovic, je ne l'ai jamais vu non plus d'ailleurs.

 25   Q.  Est-ce qu'il vous est arrivé de rencontrer ce Vasko ?

 26   R.  Je l'ai rencontré plusieurs fois. M. Vidovic avait arrêté une

 27   patrouille dans laquelle je me trouvais lorsque j'essayais d'aller dans

 28   cette partie-là de la ville, c'était le 20 juillet 1993, il a essayé de

Page 9680

  1   placer un explosif sur mon véhicule. Lorsqu'on l'en a interdit

  2   expressément, il nous a dit de déguerpir et de ne jamais revenir. Mais nous

  3   avions des choses à faire dans la zone de Poljine, donc nous sommes partis

  4   par une route différente, et M. Vidovic est arrivé avec son équipe et a

  5   ouvert le feu au moment où nous entrions dans la cour de la ferme où nous

  6   étions basés à ce moment-là.

  7   Donc effectivement, j'ai eu l'occasion de rencontrer M. Vidovic.

  8   Q.  Est-ce qu'il s'est passé quelque chose après qu'ils aient ouvert le feu

  9   ?

 10   R.  Ils nous ont placés contre un mur pour nous exécuter. Mais notre

 11   interprète, et d'ailleurs après il a été décoré pour ce qu'il avait fait,

 12   il a eu des propos très persuasifs, il a parlé à M. Vidovic, qui a décidé

 13   qu'il allait nous emmener au QG de la brigade à Vogosca pour nous exécuter

 14   devant le chef de la brigade.

 15   En route, de façon discrète, j'ai dit à notre QG ce qui était en train de

 16   se passer, et lorsque nous sommes arrivés à Vogosca, après un certain temps

 17   nous avons été relâchés par le chef de la brigade. Donc, manifestement,

 18   nous n'avons pas été exécutés.

 19   Q.  Est-ce qu'à la suite de votre libération vous avez dit à quelqu'un de

 20   la structure du RSK ce qui s'était passé ?

 21   R.  Oui, certainement. Nous avons parlé au QG de la brigade et au QG du RSK

 22   pour récupérer notre matériel, parce que, bien sûr, cet homme avait pris ce

 23   que nous avions quand il nous avait capturés. Ce fut futile, ça n'a servi à

 24   rien. Ils avaient pris notre véhicule, les gilets pare-balles, nos casques,

 25   nos pièces d'identité, et d'autres choses.

 26   Q.  Nous progressons dans le temps et nous arrivons à la page 6 138 ainsi

 27   qu'à la page 6 163 de votre compte rendu d'audience - je l'ai mentionné

 28   lorsque j'ai lu le résumé - rappelez-vous ce jour-là, 3 198 [comme

Page 9681

  1   interprété] obus sont partis du territoire tenu par les Serbes et sont

  2   tombés en 12 heures. Est-ce que ces tirs venaient du nord ou du sud; vous

  3   en souvenez-vous ?

  4   R.  Tous ces obus venaient du nord, ça s'est produit le 22 juillet 1993,

  5   deux jours après les événements que je viens de vous relater en rapport

  6   avec M. Vidovic. C'est seulement plus tard que j'ai fait le lien entre ces

  7   deux informations; il essayait d'empêcher les observateurs des Nations

  8   Unies d'aller là où se trouvaient les pièces d'artillerie, et les tirs se

  9   sont produits peu de jours après, parce qu'il a fallu manifestement

 10   beaucoup de travail pour rassembler et les pièces, et les munitions pour

 11   cette opération. Aujourd'hui avec le recul, je dirais qu'ils avaient

 12   préparé bien à l'avance cette attaque.

 13   Q.  Merci. Examinons un document dont vous avez discuté dans le procès

 14   Galic. C'est devenu ici la pièce P1441. Il compte 64 pages ce document,

 15   mais il n'a peut-être pas des pages qui sont dans l'ordre, peut-être

 16   pourrez-vous m'aider et aider la Chambre à examiner plus facilement ce

 17   document.

 18   Etant donné que toutes les pages ne sont pas dans l'ordre, si vous me le

 19   permettez, puis-je remettre une version imprimée du document ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout à fait.

 21   Je suppose que la Défense n'a pas d'objection.

 22   L'INTERPRÈTE : Signe négatif de la tête de M. Karadzic.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation]

 25   Q.  Prenez le temps d'examiner ce document en diagonale, le parcourir

 26   rapidement.

 27   Est-ce que vous avez relu ce document dans le cadre de la préparation de

 28   votre déposition d'aujourd'hui ?

Page 9682

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Le reconnaissez-vous, ce document ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Qu'est-ce que c'est ?

  5   R.  C'est un rapport complet sur l'explosion survenue au marché de Markale

  6   le 5 février 1994.

  7   Q.  Qui est l'auteur de ce rapport exhaustif ?

  8   R.  En substance c'est moi, et ceci a été confirmé par les autres membres

  9   de l'équipe. Ça c'est le rapport à proprement parler. Mais il y a des

 10   annexes dont je ne suis pas l'auteur, par exemple, il y a un rapport

 11   quotidien de la situation qui vient du secteur de Sarajevo, et une partie

 12   de l'analyse effectuée par notre adjudant chef.

 13   Q.  Colonel, on voit en haut à droite, pour chaque page, un numéro, comment

 14   faut-il les lire ? Pourriez-vous le dire, à la Chambre, comment faut-il

 15   comprendre la structure de ce document ? Un exemple, vous faites référence

 16   à la substance du rapport, au rapport proprement dit; où est-ce que je vais

 17   trouver ce rapport dans toutes ces pages ?

 18   R.  L'essentiel du rapport commence à 1024713, puis ça fait 14, 15, 16, et

 19   il y a des annexes qui commencent, manifestement, à la page 17, et ainsi de

 20   suite. On donne la liste des témoins. L'analyse technique en annexe C. La

 21   méthode de travail. Ceux qui ont effectué l'analyse et les résultats de

 22   celle-ci, ainsi que ce que ces hommes ont fait. On voit les résultats

 23   concernant les armes, l'agissement, l'angle de chute. On voit les

 24   conclusions, elles étaient en fait très peu nombreuses. Puis on a les

 25   rapports individuels de chacun des analystes qui constituaient l'équipe,

 26   dont moi-même, vous allez trouver ceci à 1024729. Dans les autres annexes

 27   vous allez trouver des croquis et des schémas montrant le lieu de

 28   l'explosion au marché de Markale, et les tables de tir utilisées pour

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  1   déterminer les portées éventuelles, et je dis que ce sont - j'insiste sur

  2   ce terme éventuel - les portées possibles pour déterminer l'origine du tir.

  3   Puis on a un résumé des témoins généraux disons plutôt que des témoins

  4   techniques. Voilà.

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   Voyons le prétoire électronique, nous allons voir à l'écran ce

  7   document que vous avez sous les yeux, en effet j'ai une question à vous

  8   poser qui porte sur ce qui se trouve à la page 9, paragraphe 4 dans le

  9   système du prétoire électronique.

 10   Q.  Voyez "R1024713," vous venez d'en parler à la page 21, ligne 9.

 11   Vous voyez ce paragraphe 4 ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous dites que :

 14   "Des officiers de liaison étaient chargés de maintenir les contacts, mais

 15   de ne pas participer avec l'équipe chargée de l'enquête."

 16   Pourquoi ? Pourquoi ne pas permettre aux représentants des parties

 17   belligérantes de participer ?

 18   R.  Pour faire simple, c'était une enquête menée par les Nations Unies. Pas

 19   par les autorités de la Republika Srpska, ou par la présidence de Bosnie-

 20   Herzégovine, et il ne convenait pas d'avoir des représentants des parties

 21   belligérantes dans l'équipe. Celles-ci avaient le droit de garder le

 22   contact pour assurer la transparence et l'ouverture, mais il n'était pas

 23   dans l'intérêt des Nations Unies de dissimuler quoi que ce soit, d'agir en

 24   catimini. Il fallait que ce soit un processus ouvert, légitime,

 25   transparent, et que tout le monde le comprenne ainsi.

 26   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 27   Autre document, numéro 10053 de la liste 65 ter, page 2. Vous n'allez

 28   pas en recevoir une version imprimée. Vous allez voir ce document à

Page 9684

  1   l'écran.

  2   Page 2 en B/C/S, s'il vous plaît. Plutôt page 3 en B/C/S. Merci.

  3   Q.  Avez-vous vu ce document dans le cadre de votre préparation ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous le reconnaissez, dès lors ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Qu'est-ce que c'est ?

  8   R.  C'est une déclaration que j'ai faite le 18 septembre 2001 à la suite

  9   d'une enquête que j'ai effectuée à la demande du Tribunal suite à

 10   l'explosion survenue à Dobrinja en mai 1993.

 11   Q.  Je n'aurai qu'une question à propos de cette déclaration, elle découle

 12   de ce qu'on trouve au paragraphe 2, dernière phrase. La boussole

 13   prismatique que j'ai utilisée pour relever les gisements a été calibrée

 14   pour faire une concordance avec la carte. Qu'est-ce que c'est d'abord

 15   qu'une boussole prismatique, comment avez-vous effectué ce calibrage ?

 16   R.  C'est une boussole utilisée par des officiers d'artillerie pour vous

 17   orienter; pour voir où sont les gisements par rapport à l'endroit où vous

 18   êtes. Car ça a été calibré parce que toutes les boussoles sont différentes.

 19   Pour faire un calibrage, il faut prendre deux lieux connus sur la carte, et

 20   vous faites une concordance, vous faites correspondre la boussole à la

 21   carte; et pas l'inverse. Donc je l'ai calibrée ainsi de façon à ce que les

 22   relèvements que je fasse soient comparables avec ce qu'on trouve sur la

 23   carte.

 24   Parce que vous savez, les boussoles sont un intrinsèquement inexactes parce

 25   que la boussole est compliquée et aussi peut-être en raison de la

 26   configuration du terrain où l'on agit. Il peut, par exemple, y avoir à

 27   proximité de l'acier, du fer qui va influer sur les relèvements. Il est

 28   donc important d'assurer le calibrage de la boussole pour être précis dans

Page 9685

  1   les relèvements.

  2   Q.  Faisons le rapport entre ceci et votre enquête de février 1994, est-ce

  3   que là aussi vous avez calibré la boussole au cours de cette enquête

  4   précédente ?

  5   R.  Oui.

  6   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le Président. Puis-je

  8   demander maintenant que les pièces associées à la déposition du lieutenant-

  9   colonel Hamill, qui n'avaient pas été versées au dossier, qu'elles

 10   deviennent des pièces à charge, je pourrais vous les énumérer ou peut-être

 11   le faire autrement.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La seule pièce versée me semble être le

 13   livre du général Rose. Ou est-ce qu'il y a autre chose ?

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] Après cela, il y a la pièce P1440, dans la

 15   notification initiale déposée il y a un certain temps, c'était le numéro

 16   09623 de la liste 65 ter.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ça avait été déjà versé ? Merci.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Puis il y a, comme je l'ai dit, la pièce

 19   P1441.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc c'est le 9630 ?

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] Exactement, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Avant d'en terminer, je demanderais que

 24   cette déclaration dont vient de parler le témoin soit versée au dossier.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1995, Monsieur le

 27   Président, Madame et Messieurs les Juges.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une dernière précision.

Page 9686

  1   Pour ce dernier point, qui est le document 19357 [comme interprété] de la

  2   liste 65 ter, c'est par courtoisie que vous avez versé ceci parce que ça

  3   avait été évoqué pendant le contre-interrogatoire. Le témoin a dit qu'il

  4   avait entendu parler de ces rumeurs, mais que le contenu est tout à fait

  5   dépourvu de sens. Alors qu'est-ce que c'est ici ? Pourquoi demandez-vous le

  6   versement ? Parce que c'est un article de presse dont le témoin a dit que

  7   son contenu était tout à fait imbécile.

  8   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Effectivement. Ça a été repris disons

  9   pour assurer la facilité de la compréhension, mais nous n'en demandons pas

 10   le versement.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas coutume de déclarer

 12   recevables des documents qui reprennent un entretien, une interview

 13   accordée par un tiers aux médias. Donc ce n'est pas versé. Vu ce qu'a dit

 14   le témoin, ce ne sera pas nécessaire non plus.

 15   Donc à l'exception de ce document, les autres pièces associées sont

 16   versées au dossier et vous aurez en temps utile une cote pour chacun

 17   d'entre eux.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci beaucoup.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez commencer votre contre-

 20   interrogatoire, Monsieur Karadzic ?

 21   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Lieutenant-Colonel.

 23   R.  Bonjour.

 24   Q.  Je tiens d'emblée à vous exprimer ma gratitude pour le fait que vous

 25   ayez accepté aimablement de rencontrer les membres de l'équipe de la

 26   Défense.

 27   Pour moi, les micros fonctionnent, les écouteurs aussi. Est-ce que

 28   vous entendez les interprètes ?

Page 9687

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Je tiens donc à vous remercier d'avoir eu l'amabilité de bien vouloir

  3   rencontrer les membres de l'équipe de la Défense, ce qui nous a permis de

  4   préciser un certain nombre de concepts, et ce travail préliminaire va

  5   permettre au contre-interrogatoire de se dérouler sans heurt.

  6   Voici une question que j'aimerais vous poser : Est-il exact que s'il se

  7   passait quelque chose, que ce soit un tir de mortier ou un tir

  8   d'artillerie, est-il exact que du côté Papa, c'est-à-dire du côté musulman,

  9   vous en étiez informés par radio et qu'à ce moment-là vous pouviez

 10   immédiatement intervenir vis-à-vis de la partie serbe ?

 11   R.  Ce n'est pas totalement exact. Les informations que nous recevions de

 12   notre quartier général, c'est-à-dire du QG des Nations Unies basé dans

 13   l'immeuble des PTT à Sarajevo, étaient générales. Donc nous n'étions pas

 14   informés par la partie musulmane de Bosnie; nous étions informés par nos

 15   supérieurs à nous.

 16   Q.  Excusez-moi. Vous avez raison. Moi, j'ai dit du côté Papa. Mais il

 17   aurait été plus clair d'expliquer ce qu'était la partie "Papa," et la

 18   partie Papa représentait vos positions du côté musulman, n'est-ce pas;

 19   c'est bien cela ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Merci. Donc une fois informés, vous étiez en mesure de contacter

 22   l'officier de liaison au sein du Corps de Sarajevo-Romanija pour demander

 23   que les tirs cessent, n'est-ce pas ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Merci. Il arrivait que les officiers de liaison obtiennent ce cessez-

 26   le-feu, en revanche il arrivait aussi que parfois ils ne l'obtiennent pas

 27   et ils expliquaient dans ces cas-là qu'ils ne faisaient que répliquer à des

 28   attaques de la partie adverse, n'est-ce pas ?

Page 9688

  1   R.  Oui, c'est exact.

  2   Q.  Merci. Cependant, si nous parlons de l'incident survenu le 1er juin

  3   1993, un incident lié à un match de football, au sujet de cet incident vous

  4   n'avez obtenu aucune demande de la part de la partie Papa pour que

  5   l'attaque de l'armée de la Republika Srpska s'interrompe, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je ne suis pas au courant de la réalité ou de la non réalité de cette

  7   attaque, car à ce moment-là j'étais à l'est de la ville dans le secteur

  8   général de Mokro, je ne pouvais donc pas être informé dans le détail de ce

  9   qui se passait à l'intérieur de la ville à Dobrinja ou dans d'autres

 10   quartiers d'ailleurs. Il est possible que des contacts aient été établis,

 11   mais il est possible également que ces contacts n'aient pas été établis. Je

 12   n'en sais rien.

 13   Q.  Merci. Au sujet de cet incident, une commission paritaire mixte

 14   destinée à enquêter au sujet de l'incident de Dobrinja n'a pas été

 15   composée, en effet c'est seulement à la suite de l'incident de Markale

 16   qu'une telle commission paritaire mixte a été constituée pour la première

 17   fois, n'est-ce pas ?

 18   R.  Il n'y a eu de commission mixte à aucune étape dans aucun cas d'après

 19   ce que je sais, il n'y en n'a pas eu davantage en rapport avec Markale I,

 20   incident survenu le 5 février 1994. Mais il y a eu des enquêtes menées par

 21   les observateurs militaires des Nations Unies ou par d'autres représentants

 22   de l'organisation des Nations Unies qui ont donc enquêté au sujet

 23   d'incidents survenus au cours des quatre années d'hostilités dans cette

 24   zone de façon générale, mais je n'ai pas connaissance de l'existence d'une

 25   quelconque commission mixte qui aurait été composée de représentants des

 26   parties belligérantes.

 27   Dans le cas de l'explosion de Markale, étant donné l'importance et le

 28   caractère spectaculaire de l'événement, une décision a été prise beaucoup

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  1   plus haut dans la hiérarchie que le poste que j'occupe, et selon cette

  2   décision des contacts et une liaison devaient être établis avec les partie

  3   belligérantes. Mais cela n'a rien à voir avec la constitution d'une

  4   commission mixte. Il s'agissait donc d'une enquête qui était diligentée par

  5   les Nations Unies.

  6   Par rapport à l'épisode de Dobrinja, cela n'a été que l'une des très

  7   nombreuses attaques contre le secteur de Sarajevo ayant entraîné la mort de

  8   civils. Aucune demande, à ma connaissance, n'aurait été faite en vue d'une

  9   enquête particulière au sujet de cet incident.

 10   Q.  Je vous remercie. Il y a un point dans ce que vous avez dit lors de

 11   votre déposition dans l'affaire Galic en date du 26 mars 2002, il y a donc

 12   un point dans cette déposition qui m'a frappé, page 6 764 du compte rendu

 13   d'audience, je cite :

 14   "D'après ce que je sais, aucune commission mixte n'a été créée à l'époque

 15   en vue d'enquêter au sujet de l'un ou l'autre de ces incidents.

 16   "La première commission de cette nature dont j'ai un souvenir précis est

 17   celle qui a été créée après le pilonnage de Markale le 5 février 1994."

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 19   les Juges, excusez-moi, mais au compte rendu que j'ai sous les yeux, compte

 20   rendu de l'affaire Galic, il n'y a pas de page 6 764. J'aimerais simplement

 21   demander au Dr Karadzic de nous redonner le numéro de la page en question.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] 6 164. Toutes mes excuses. J'ai peut-être fait

 23   un lapsus.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il peut s'agir du document 65 ter numéro 10336,

 26   page 107.

 27   D'ailleurs j'en demande l'affichage grâce au prétoire électronique,

 28   la page 7 de ce document 65 ter. La réponse que je viens d'évoquer et de

Page 9690

  1   citer commence à la ligne 9.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Vous rappelez-vous, Lieutenant-Colonel, que la partie serbe a toujours

  4   insisté pour être présente dans les enquêtes, et a toujours dit qu'elle

  5   n'accepterait pas les résultats des enquêtes si les représentants serbes ne

  6   participaient pas aux équipes d'enquêteurs ?

  7   R.  Non, je ne me rappelle pas cela.

  8    Q.  Mais conviendrez-vous qu'à Dobrinja et à Markale, dans tous les

  9   incidents qui ont fait l'objet d'une enquête de votre part, la partie

 10   musulmane a également enquêté de son côté, la partie serbe était la seule

 11   qui n'était pas impliquée et qui n'a mené aucune enquête ?

 12   R.  Je sais que, dans le cas de l'incident de Markale, la partie relevant

 13   de la présidence a mené une enquête, ça, c'est certain, mais je ne sais pas

 14   si, oui ou non, la partie serbe a enquêté.

 15   Q.  Merci. Puisque vous avez examiné deux cratères, à Dobrinja, qui vous

 16   ont été montrés par Ismet Fazlic, et en fait c'est après la guerre que vous

 17   avez examiné ces deux cratères que M. Ismet Fazlic vous a montrés. Ismet

 18   Fazlic a été un témoin, je crois qu'il était organisateur du match de

 19   football et d'ailleurs arbitre pendant ce match de football. Est-il exact

 20   que vous avez vu ces cratères après la guerre, et que c'est lui qui vous

 21   les a montrés ?

 22   R.  Oui, j'ai enquêté au sujet de ces cratères plusieurs années après les

 23   faits, puisque je l'ai fait en 2001. C'est effectivement M. Ismet Fazlic

 24   qui nous a montré l'endroit où les obus ont explosé.

 25   Q.  Merci. L'orifice du cratère était rempli d'une masse de couleur rouge

 26   qui ressemblait à du plastic. L'objet de ce remplissage était de préserver

 27   le cratère, n'est-ce pas ?

 28   R.  Pas précisément. Le cratère était rempli d'une substance rouge, enfin

Page 9691

  1   les traces étaient comblées par une substance rouge qui était plastifiée,

  2   et qui a permis de conserver presque parfaitement les cratères dans leur

  3   état initial. L'enquête que j'ai menée s'est faite sur la base des traces

  4   qui étaient donc restées intactes grâce à cette substance rouge. Cela a été

  5   le cas dans l'un des deux lieux, cela n'a pas été le cas dans le deuxième

  6   lieu. Il n'a pas été possible d'être très précis lors de l'examen du

  7   deuxième cratère, mais il y a été possible de l'être assez lors de l'examen

  8   du premier.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document 65 ter,

 11   numéro 10053, dont je demande l'affichage. 10053, page 3 après avoir vu la

 12   première page.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Dans cette page 3, nous lisons que :

 15   "Les cratères sont anciens et que tous les deux ont été remplis à des

 16   fins de préservation par une matière rouge. Mais il y a tout de même eu

 17   influence du temps sur les cratères."

 18   Je suppose qu'il n'y a pas eu d'intervention non autorisée dans les

 19   cratères, et que le complément avec cette substance rouge a été la seule

 20   ingérence.

 21   Le cratère numéro 1, situé le plus à l'est était mieux préservé que

 22   le cratère numéro 2. L'ingérence était telle qu'il a été impossible, à ce

 23   moment-là, de déterminer si les cratères étaient le fait d'un tir au canon

 24   ou au mortier. Toutefois, des indications présentes dans le cratère numéro

 25   1 montraient que c'était un canon de petit calibre."

 26   N'est-ce pas ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Je vous remercie. Donc conviendrez-vous que le comblement du cratère à

Page 9692

  1   l'aide de cette substance a affecté la fiabilité ou plutôt l'utilité des

  2   cratères dans le but de déterminer l'origine et le type d'arme utilisée.

  3   R.  Non, je n'en conviens pas. Au contraire, je dirais que le comblement

  4   des traces à l'aide de cette substance plastifiée a permis de préserver ces

  5   traces pendant huit années, et m'a permis d'accomplir un travail de qualité

  6   raisonnable s'agissant de déterminer à partir de quel endroit était venu

  7   l'obus et quel type d'arme avait été utilisée.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, là encore, j'aimerais rappeler un passage

 10   de votre déposition dans l'affaire Galic. Le document de tout à l'heure,

 11   page 59, compte rendu de l'audience du 25 mars 2002. Page 59 donc au bas de

 12   cette page 59, nous avons une question, je cite :

 13   "Question : Et bien, eu égard à l'analyse à laquelle vous avez procédé, le

 14   18 juin de l'année dernière ou plutôt --

 15   La réponse : Oui."

 16   Ensuite vient une question :

 17   "Les cratères que vous avez vus, provenaient probablement d'un tir au

 18   canon.

 19   Réponse : Oui, d'un obusier.

 20   Question. Et il était également possible qu'il soit provenu d'un mortier de

 21   calibre moyen ?

 22   Réponse. C'est une possibilité, oui."

 23   "Mais il convient de ne pas perdre de vue que les cratères avaient été

 24   comblés à l'aide de cette substance de plastic rouge. Il n'était donc pas

 25   possible de déterminer exactement --"

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La page suivante à l'écran, je vous

 27   prie.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante.

Page 9693

  1   "…donc il n'était pas possible de déterminer exactement l'état dans lequel

  2   étaient ces cratères quand ils étaient encore récents --"

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  C'est bien cela ?

  5   R.  Oui, c'est cela, oui.

  6   Q.  Merci. Donc vous ne disposiez pas des éléments nécessaires pour

  7   déterminer avec certitude si en dehors de cette masse plastifiée de couleur

  8   rouge, il y avait d'autres objets dans le cratère ou s'il y avait eu

  9   d'autres interventions sur le cratère ?

 10   R.  Lorsque j'ai examiné le secteur, il est apparu clairement que le sol

 11   environnant était resté intact depuis très, très longtemps. Il était tout à

 12   fait clair que les traces que l'on voyait au sol n'avaient pratiquement pas

 13   changé pendant toute cette période. Comme je l'ai déjà dit, la substance

 14   plastifiée rouge avait en fait préservé les cratères dans l'état où ils se

 15   trouvaient à l'origine. C'est en tout cas ce que je pense. Je n'ai trouvé

 16   aucun élément permettant de démontrer qu'un quelconque changement aurait

 17   été imposé à la surface bétonnée dans ce secteur.

 18   Q.  Merci. Mais vous n'avez eu aucun élément non plus pour démontrer qu'il

 19   n'y avait pas eu une quelconque intervention avant le comblement des

 20   cratères à l'aide de cette substance plastifiée rouge, n'est-ce pas ?

 21   R.  Non. Mais il aurait été très difficile de manipuler les preuves dans

 22   ces cratères sans que cela se voie.

 23   Q.  Savez-vous quand ils ont comblé les cratères, les deux cratères à

 24   l'aide de cette masse rouge ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Conviendrez-vous que vous nous avez dit que le meilleur moment pour

 27   enquêter au sujet d'un incident, était le moment immédiatement ultérieur à

 28   l'incident ?

Page 9694

  1   R.  Oui, c'est certain.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si cela vous

  3   convient, l'heure de la pause est arrivée.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas de problème.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 30

  6   minutes et reprendrons nos débats à 11 heures.

  7   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

  8   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Donc si nous partons du principe, n'est-ce pas que ce qui est le mieux

 13   c'est de commencer une enquête dès la survenue de l'incident, vous êtes

 14   d'accord, n'est-ce pas, qu'il est possible de modifier la scène de

 15   l'incident soit artificiellement, soit il peut se produire une

 16   transformation naturelle en raison du temps qui passe, n'est-ce pas ?

 17   R.  Il est tout à fait clair qu'une scène de crime peut être modifiée soit

 18   artificiellement, soit en raison du passage du temps, parce que évidemment

 19   dans une situation comme celle-ci, lorsqu'on est à l'air libre et donc

 20   soumis à l'action des éléments, il y a une certaine usure qui se produit.

 21   Si on tient compte du climat bosniaque qui règne où il neige, il y a de la

 22   glace, du givre, et cetera, souvent il peut se produire que les surfaces

 23   soient endommagées si elles n'ont pas été traitées. Mais comme je l'ai

 24   indiqué, le fait que cette substance plastifiée ait été relativement

 25   précocement placée sur les traces a permis de les conserver relativement

 26   bien. Par ailleurs, j'ai vu des photographies qui montrent certains

 27   cratères dans leur état original, des photographies prises presque

 28   immédiatement après l'incident et les traces ressemblent beaucoup à celles

Page 9695

  1   que l'on peut voir aujourd'hui. Je ne vois donc aucune différence en fait

  2   entre les traces anciennes et les traces actuelles.

  3   Q.  Merci. Je souhaitais simplement que nous établissions si oui ou non il

  4   aurait été important de déterminer la date exacte du placement de cette

  5   substance plastifiée dans les cratères, mais bon. Donc au vu de tout ce qui

  6   vient d'être évoqué, il a été impossible de déterminer l'origine du

  7   projectile ou la nature exacte de l'arme qui a tiré, n'est-ce pas, il a été

  8   impossible de dire si c'était un canon ou un mortier ?

  9   R.  Il n'a pas été impossible de déterminer l'origine du projectile. Il a

 10   été très, très possible de déterminer la direction d'où l'obus était arrivé

 11   jusqu'au sol. Cette origine était très claire, très évidente. Il n'y a

 12   aucune ambiguïté à ce sujet. Le projectile est arrivé, comme je l'ai

 13   indiqué dans mon rapport, d'une direction tout à fait spécifiée. Quant à

 14   savoir s'il s'agissait d'un obus de mortier ou d'un obus tiré par un canon

 15   ou par un obusier, la tâche est beaucoup plus difficile. Mon avis personnel

 16   c'est qu'il s'agissait d'un obus provenant d'une arme de calibre moyen qui

 17   aurait pu être un mortier, comme je l'ai indiqué dans mon rapport, mais ce

 18   que je crois c'est que c'est plutôt un obus de calibre 122 à 155

 19   millimètres, et je dis cela en me fondant sur les fragments que j'ai

 20   trouvés au sol. En regardant la photographie, il m'apparaît clairement à

 21   moi; sinon, à d'autres que c'est un obus qui a été tiré par un canon ou un

 22   obusier, qui en fait sont une seule et même chose.

 23   Q.  Mais vous êtes d'accord que la trajectoire d'un projectile émanant d'un

 24   canon ou d'un obusier, donc d'une pièce d'artillerie, est différente de la

 25   trajectoire d'un projectile émanant d'un mortier et que la détermination de

 26   la direction du tir et surtout de la distance à partir de laquelle le

 27   projectile a été tiré jouait un rôle essentiel dans la détermination du

 28   type d'arme utilisé.

Page 9696

  1   R.  D'abord, il est simplement impossible de déterminer la distance d'où

  2   est provenu le projectile. Ça c'est tout simplement impossible. Il est

  3   impossible de déterminer cette distance quelle que soit l'arme utilisée.

  4   Ceci, je l'affirme nonobstant ce que vous avez pu entendre.

  5   Toutefois, il est possible de déterminer, ça c'est certain, normalement il

  6   est possible de déterminer si c'est un mortier ou un canon, voire un

  7   obusier, qui a été utilisé. Il y a une différence de trajectoire entre un

  8   canon et un mortier, c'est tout à fait clair. Un mortier tire l'obus à un

  9   angle supérieur à 45 degrés, quant à un canon la trajectoire du projectile

 10   est beaucoup plus plate, le projectile peut être tiré à un angle de 10 ou

 11   peut-être 20 degrés, donc c'est un projectile qui arrive selon une

 12   trajectoire relativement aplatie. Dans le cas d'un obusier qui ressemble

 13   davantage à un canon, l'obus peut être tiré à un angle important également,

 14   autrement dit, à un angle supérieur à 45 degrés, de sorte que la

 15   trajectoire suivie par un projectile d'obusier ressemble beaucoup à la

 16   trajectoire suivie par un projectile de mortier. L'obusier peut aussi tirer

 17   selon une trajectoire plate, comme un canon, ce qui veut dire qu'un mortier

 18   ou un obusier tire des projectiles qui peuvent provenir de derrière une

 19   couverture massive, ce qui n'est pas le cas d'un canon.

 20   Q.  Je vous remercie.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce P1053 grâce

 22   au prétoire électronique.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Vous savez que les enquêteurs français ont mené une enquête qui a

 25   abouti à des conclusions qui sont celles donc des enquêteurs français,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Il m'est apparu qu'il s'agissait d'une enquête menée par les forces de

 28   police militaires canadiennes.

Page 9697

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande la page 9 de ce document. Peut-être

  2   l'original était-il en français, ce qui a peut-être créé une certaine

  3   confusion dans mon esprit.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc page 9, et je vous prie de vous concentrer sur le cratère 1 et le

  6   cratère 2. Nous pouvons lire ce qui est indiqué, donc que :

  7   "Le dessin des éclats indique un mortier de calibre minimum 81

  8   millimètres, ce qui permet d'avoir une idée de l'origine du tir, 143 degrés

  9   (2 500 miles).

 10   "Etant donné le macadam, il n'y a aucun sillon dû au détonateur, de

 11   sorte que l'angle de descente et la portée ne peuvent pas être déterminés."

 12   Pour le cratère 2, ce qui est indiqué est identique, hormis la mesure

 13   de l'angle qui dans ce cas est de 138 degrés (2 420 miles). Donc les

 14   enquêteurs de la FORPRONU ont tiré leurs conclusions selon lesquelles il

 15   s'agissait d'un calibre de mortier de calibre minimum 81 millimètres,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est ce qui est écrit, en effet.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 19   Je demande à présent que l'on affiche la page 57 de ce même document. Je

 20   conseille aux personnes participant à l'espèce de lire également les autres

 21   pages. Mais je demande l'affichage de la page 57.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Dans cette page, il est question des éléments de preuve de la FORPRONU

 24   établis sur la base d'informations fournies par Dinko Bakal, membre de

 25   l'état-major de la Brigade de Dobrinja qui a dit ce qui suit -- et je

 26   cherche à localiser le passage. Voilà, je cite :

 27   "J'étais à 60 ou 70 mètres de l'endroit où l'obus a atterri. Ceci s'est

 28   produit aux environs de 10 heures 25, 10 heures 30. J'étais dans

Page 9698

  1   l'appartement du premier étage, et à partir de là, je voyais très bien le

  2   terrain de jeu. Lorsque j'ai entendu les détonations, j'ai pensé qu'il

  3   s'agissait d'obus de mortiers de calibre 82 millimètres. Toutefois, plus

  4   tard nous avons découvert des éléments d'un obus de mortier, qui était de

  5   calibre 60 millimètres."

  6   Alors est-ce que vous êtes d'accord pour dire que tout devient de plus en

  7   plus compliqué ? Parce qu'il est indiqué ici que sur la base des fragments

  8   recueillis, il semblerait qu'il s'agisse d'un calibre de 60 millimètres

  9   pour cette [inaudible], n'est-ce pas ?

 10   R.  Non, je ne suis pas d'accord que les choses deviennent de plus en plus

 11   compliquées. Vous devez vous rappeler, Docteur Karadzic, qu'il existe des

 12   obus de mortier de tout calibre qui ont pu être tirés sur Dobrinja entre

 13   avril 1992 et mai 1993, et plus tard. Donc il est fort possible que des

 14   éléments constitutifs d'obus de mortier de 60 millimètres se soient trouvés

 15   au sol dans les environs. Encore une fois, à mon avis - et je l'ai déjà dit

 16   - à mon avis, il s'agissait en fait d'un obus de calibre de 122 millimètres

 17   sans doute provenant d'un obusier, pas d'un mortier. Je peux me tromper sur

 18   ce point, mais vous m'avez demandé mon avis professionnel, et je vous le

 19   donne.

 20   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'un obus de mortier de

 21   60 millimètres est considéré comme un obus de petit calibre; et qu'un

 22   mortier de 60 millimètres peut être transporté à dos d'homme et tiré d'un

 23   peu n'importe où ?

 24   R.  Il est impossible pour moi de considérer qu'un mortier de 60

 25   millimètres - je dis que c'est 60 et pas 63; il faut une correction au

 26   compte rendu d'audience en anglais - donc je ne considère pas possible de

 27   penser qu'un mortier de calibre 60 millimètres soit une arme légère. Les

 28   armes légères englobent les fusils, les pistolets, les fusils mitrailleurs,

Page 9699

  1   et cetera. Mais, oui, un mortier de 60 millimètres peut être porté à dos

  2   d'homme et destiné d'ailleurs à être porté par une personne et on peut

  3   tirer à partir de ce mortier même si l'on est tout seul. Cela dit, moi, je

  4   n'aimerais pas le transporter trop loin.

  5   Q.  Je vous remercie.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si au compte rendu il est indiqué "arme légère"

  7   ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. Moi, j'ai dit "Une espèce d'arme

  8   personnelle." C'est peut-être de là qu'est née la confusion.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Mais quoi qu'il en soit, un mortier de calibre 60 millimètres aurait

 11   une longueur de 50 centimètres à un mètre, à peu près, n'est-ce pas ?

 12   R.  Un tout petit peu plus.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais à présent l'affichage de la page

 15   6 de ce même document.

 16   Au point 14, s'il vous plaît, je vous renvoie au point 14, s'il vous plaît.

 17   Il est dit que :

 18   "Vers 9 heures 45, le 4 juillet 1993, un exemplaire, une copie d'une carte

 19   de Dobrinja a été reçue de la part des représentants de la FORPRONU, et cet

 20   exemplaire a été annexé en tant qu'annexe 1 à ce document. La carte nous

 21   montre que le match de foot a eu lieu à l'endroit qui entourait de trois

 22   côtés de bâtiments (à l'ouest, à l'est, et au sud)."

 23   Donc n'était ouvert que du côté nord, enfin ce terrain de jeux.

 24   "Et on explique qu'il y a eu des mortiers bosniens positionnés à

 25   l'extérieur de l'hôpital à peu près à 500 mètres du terrain de foot. Mais

 26   que pendant cette visite effectuée à Dobrinja on en n'a pas remarqué."

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que c'est bien ce que l'on lit ici ?

Page 9700

  1   R.  Je ne sais pas si cela est exact ou non. Mais ce que je peux dire c'est

  2   que cela n'a absolument pas d'importance de savoir si les bâtiments

  3   entouraient l'endroit de trois côtés, de quatre côtés, ou pas du tout,

  4   puisque lorsque nous avons un obus de mortier ou un obus d'obusier, et

  5   bien, sa trajectoire correspond à un angle de chute très élevé. Donc il

  6   peut très facilement être utilisé pour tirer derrière les bâtiments.

  7   S'agissant des mortiers bosniens, je ne sais pas où se situe l'hôpital,

  8   donc je ne sais pas si oui ou non il y avait des mortiers à cet endroit.

  9   Q.  Très bien.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] 65 ter 10053 à présent, s'il vous plaît. 10053,

 11   s'il vous plaît.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Page 3, le 18 septembre 2001, vous fournissez une information au bureau

 14   du Procureur, il est dit :

 15   "Le cratère 2 n'est pas préservé aussi bien."

 16   Le plus que l'on puisse dire, à l'examen de ce cratère, compte tenu de sa

 17   forme, et que l'obus semble être tiré de la même direction que l'obus 2 qui

 18   a créé le cratère 1; est-ce que cela est exact ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Revenons maintenant au document précédent,

 22   P1053, pour voir les mêmes paragraphes, les paragraphes qui comportent les

 23   conclusions de la FORPRONU. Page 9, s'il vous plaît.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Donc nous voyons quelles sont leurs conclusions sur le plan de la

 26   distance, et également sur le fait que l'angle de chute ne peut pas être

 27   déterminé.

 28   Voyons un peu plus loin les conclusions. Ce qui est en est du point 2 des

Page 9701

  1   conclusions.

  2   "L'angle minimum de chute pour les mortiers de 81 millimètres, de 120

  3   millimètres et de 45,71 degrés. Sous cet angle-là, la distance minimum est

  4   de 1,120 mètres pour un mortier de 81 millimètres et 1,340 pour un mortier

  5   de 120 millimètres."

  6   Autrement dit, ils arrivent à la conclusion que les trajectoires permettent

  7   de penser que les obus n'auraient pu être tirées que du compte tenu serbe.

  8   "La distance minimum correspond à 300 mètres au sud de la caserne de

  9   Lukavica."

 10   Alors pour commencer, pourriez-vous nous dire : Ce qui permet à cet

 11   enquêteur français de déterminer quel est l'angle minimum, l'angle de chute

 12   -- ou plutôt, canadien ? Vous avez parlé d'enquêteur canadien.

 13   R.  Oui, je pense qu'il s'agit d'un Canadien. La police militaire qui a

 14   mené l'enquête était une police militaire canadienne. Je ne sais pas s'il

 15   s'agit des Nations Unies ou pas.

 16   Alors ce que je pourrais dire au sujet de la manière dont on détermine les

 17   angles de chute minimum, il faudrait se pencher sur les tables de tir pour

 18   l'arme spécifique dont il s'agit. Donc en Bosnie-Herzégovine, et dans la

 19   plupart des pays de l'Europe de l'est, l'arme dont on se servait c'était

 20   une pièce de 82 millimètres, et c'était l'ex-Union soviétique qui

 21   fabriquait cela. L'armée de 81 millimètres ce serait plutôt une arme

 22   occidentale, et souvent de fabrication française. Et par analogie, les

 23   mortiers de 120 millimètres souvent sont des armes occidentales, et l'ex-

 24   équipement de l'Union soviétique de 122 millimètres. Donc il y a une

 25   différence.

 26   Puis il faudra se pencher sur les tables de tir concrètement qui concernent

 27   ces armes-là, et ça c'est un problème que nous rencontrons souvent dans le

 28   cas des enquêtes, à savoir nous n'avons pas les tables de tir correct on ne

Page 9702

  1   s'est pas servi de tables de tir correct pour calculer les différentes

  2   distances pour les incidents dont nous sommes saisis.

  3   Alors là, comme je viens de dire, je ne suis pas convaincu qu'il s'agit

  4   d'un mortier. L'angle de chute permet de penser que ça pourrait être un

  5   mortier, mais ça pourrait être un obusier également. Donc je ne l'exclus

  6   pas.

  7   S'agissant de la direction du tir, vous verrez qu'apparemment, deux

  8   distances sont évoquées dans les conclusions, donc 2 400 milles et une

  9   autre distance, ce qui nous permet de penser qu'il y a eu deux armes qui

 10   ont été utilisées et qu'elles étaient à une certaine distance l'une de

 11   l'autre.

 12   Comme je l'ai déjà dit, j'ai constaté que j'avais une distance à peu

 13   près précise pour le premier cratère, mais pour le second, c'était moins

 14   sûr, de manière générale c'était la même direction. Donc cela correspond

 15   effectivement à mes conclusions. Mais ce rapport-là je ne l'avais pas vu

 16   avant de m'occuper de mon analyse.

 17   Q.  Merci. Donc essayons de tirer cela au clair. L'angle minimum c'est ce

 18   que l'on trouve dans le rapport de ces enquêteurs. Mais l'angle maximum,

 19   qu'est-ce que ce serait s'il s'agit d'un mortier ?

 20   R.  Cela dépend du type de mortier, cela dépend grandement de cela.

 21   Egalement de la charge. Donc cela dépend de la charge additionnelle

 22   utilisée.

 23   Je vais expliquer aux Juges, un mortier n'est pas utilisé avec une

 24   charge qui serait toujours la même. Vous avez la charge de base, ça c'est

 25   la charge minimale, puis vous pouvez ajouter des charges supplémentaires,

 26   donc si l'angle est de 70 degrés, un angle large, en fait plus il y a de

 27   charge, plus l'angle sera élevé.

 28   Donc à 45 degrés, vous avez une portée maximum pour n'importe quelle

Page 9703

  1   charge. A 45 degrés et la charge maximale, vous avez la portée maximale

  2   pour tout mortier, et cela dépend énormément de la pièce que vous avez

  3   utilisée, et cela dépend du projectile qui est utilisé.

  4   Donc je ne peux pas dire exactement spécifiquement sans avoir sous la

  5   main les tables de tir et sans savoir exactement quelle a été la pièce

  6   utilisée, quelles ont été les charges, je ne peux pas vous répondre à cette

  7   question. Personne ne le pourrait.

  8   Q.  J'ai bien peur qu'il y ait eu un problème dans le compte rendu

  9   d'audience, on a dit "on ne tire pas," alors que vous, vous avez dit "on

 10   tire."

 11   Est-ce que l'on peut vérifier cela dans le compte rendu d'audience, ligne 6

 12   --

 13   R.  Ligne 8 --

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   R.  Ligne 8, est-ce que je peux modifier. On ne tire pas avec une charge

 16   qui serait toujours la même. Donc remplacez le mot "mixed" par le mot

 17   "fixed" dans la version anglaise.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Donc essayons de simplifier. Est-ce que vous êtes d'accord --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Hamill, pourriez-vous, s'il

 23   vous plaît, faire une pause avant de répondre aux questions ? Ralentissez,

 24   s'il vous plaît, pour les sténotypistes et pour les interprètes, est-ce que

 25   vous pouvez ralentir votre débit.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie.

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Juste une réaction.

Page 9704

  1   De la manière dont je l'ai compris, Lieutenant-colonel Hamill, même si nous

  2   avons deux mortiers identiques et que l'on utilise la même charge pour les

  3   deux sous un même angle, l'impact pourrait différer entre ces deux pièces,

  4   même si on tire en même temps, parce que le mélange d'explosifs n'a pas une

  5   qualité qui est toujours exactement la même, et aussi on peut avoir utilisé

  6   le premier mortier davantage que l'autre pour tirer, donc le tube peut être

  7   davantage usé et la vitesse de la sortie de l'obus peut être réduite ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison de dire

  9   cela. Mais également, on peut tirer deux projectiles du même tube à quelque

 10   distance de différence, et en fait, il va y avoir une différence quant au

 11   point d'impact entre les deux parce que le mortier n'est pas une arme très

 12   précise. Donc vous avez beaucoup de variation même si vous ne vous servez

 13   que d'une même arme. Donc vous avez la zone d'impact qui varie pour un

 14   mortier en particulier, et il s'agira d'une ellipse d'une forme

 15   longitudinale et la largeur sera bien plus courte. Donc c'est comme une

 16   forme ovale, et les obus peuvent tomber à 10, 15 ou 20 mètres de distance

 17   dans cette zone-là.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Excusez-moi, Docteur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'interprétation française n'a été

 21   terminée que là, à l'instant.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Lieutenant-colonel Hamill, donc nous avons ici, théoriquement, l'angle

 24   minimal de 45.71 degrés, ça c'est une valeur théorique. C'est à peu près de

 25   86 degrés l'angle maximal, n'est-ce pas ? Seriez-vous d'accord ?

 26   R.  En pratique, peut-être. Théoriquement, il est possible de tirer un obus

 27   de mortier sous un angle de 90 degrés, ce qui serait très dangereux.

 28   Il faut également tenir compte, Docteur Karadzic, du fait qu'un obus de

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  1   mortier, au moment où il tombe, détruit une zone assez large, donc il ne

  2   serait pas bien de tirer trop près de vos propres forces.

  3   S'agissant d'un obus de 120 millimètres, par exemple - pas le diamètre,

  4   mais le rayon - qui correspond donc à la zone dangereuse, est de 500

  5   mètres. S'agissant d'un mortier de 81 millimètres, le rayon dangereux

  6   correspond à 250 mètres.

  7   Q.  Merci. Ici l'angle de chute réel n'a pas été déterminé. C'est plutôt

  8   une valeur théorique de 45.71 degrés, ce qui correspond à la hauteur des

  9   bâtiments qui entourent le terrain de jeu et l'angle maximum serait celui

 10   de 86 degrés d'après ce rapport. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire

 11   que si l'angle de chute est plus important, si sa valeur correspond plutôt

 12   à une valeur qui se rapproche de 86 degrés, que cela nous indique la

 13   distance du tir ?

 14   R.  Je vous l'ai déjà dit, je vous ai dit que je n'étais pas d'accord sur

 15   le fait qu'il s'agissait d'un mortier. Si ça avait été un mortier,

 16   néanmoins, il a été tiré sous n'importe quel angle, cela n'a pas

 17   d'importance, parce qu'il est tout à fait clair que l'angle sous lequel il

 18   aurait été tiré, cela aurait endommagé les bâtiments de Grbavica. Donc je

 19   ne comprends pas votre question.

 20   Q.  Mais en réalité, l'angle qui a été établi, donc l'angle réel, est-ce

 21   qu'il nous indique la distance ou pas ?

 22   R.  Mais pour autant que je sache, l'angle n'a pas été déterminé. Nous

 23   avons un angle minimum de 40.5 degrés, il a été mesuré entre le cratère et

 24   le toit des bâtiments dans la direction appropriée.

 25   Q.  Mais puisqu'on n'a pas déterminé l'angle réel, pourquoi ne serait-ce 84

 26   degrés, par exemple ? D'où est-ce qu'on l'aurait tiré si l'angle de chute

 27   se monte à 84 degrés ?

 28   R.  Je ne peux pas répondre à cette question puisque je n'ai pas de table

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  1   de tir pour l'arme en question.

  2   Q.  Mais d'expérience, est-ce que vous savez si l'angle est obtus que cela

  3   augmente la probabilité que la distance soit plus grande ? Donc plus

  4   l'angle augmente, plus la distance se raccourcit; est-ce que c'est bien

  5   cela ?

  6   R.  Plus l'angle est grand, plus la distance est courte dans tous les cas,

  7   et cela concerne les mortiers et les obusiers qui sont tirés sous un angle

  8   important. Cela ne correspond pas aux canons, où c'est l'inverse qui se

  9   produit.

 10   Q.  Merci. Lorsque nous nous sommes rencontrés le 12 janvier dernier, vous

 11   avez dit que les rapports quotidiens de l'équipe Lima 5 pourraient nous

 12   renseigner sur les activités de l'équipe pour la journée concernée, et que

 13   vous n'avez pas vu les rapports correspondant à cette date-là. Donc de

 14   l'équipe Lima 5; c'est bien cela ?

 15   R.  De mémoire, oui, c'est exact.

 16   Q.  Merci. Vous ont-ils dit que les enquêteurs bosniens ont enquêté sur cet

 17   incident deux ans et demi uniquement après la survenue de l'incident, donc

 18   le 21 novembre 1995, et ce, sur demande de ce Tribunal ?

 19   R.  Personne ne me l'a dit.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite que l'on affiche la pièce 09970,

 21   s'il vous plaît; dans le prétoire électronique.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Je vous ai posé une question précédemment en attendant, Lieutenant-

 24   colonel : J'aimerais savoir à quel moment choisit-on plutôt de déterminer

 25   l'angle minimal que l'angle maximal ? Pour quelle finalité, est-ce que

 26   c'est parce qu'on a envie en fait d'agrandir la distance pour la faire

 27   correspondre aux positions serbes ?

 28   R.  De manière générale, lorsque l'on procède à une analyse de cratère, et

Page 9707

  1   en particulier s'agissant d'obus de mortiers, vous avez le tunnel de

  2   l'obus, et c'est l'endroit où l'obus se fiche dans le sol, l'explosion

  3   entraîne l'amorce de l'obus droit vers l'avant. Cela crée un tunnel dans

  4   lequel vous pouvez introduire une baguette, par exemple, puis vous pouvez

  5   mesurer l'angle de chute. Cela n'a pas été possible en l'occurrence.

  6   Q.  Très bien. Je vous remercie. Prenez la première page. Nous voyons qu'il

  7   s'agit d'un document --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

  9   Madame Edgerton.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit de la pièce P1699.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc il a été -- ou plutôt, l'on voit la page

 13   de garde.

 14   C'est la page 3, s'il vous plaît, qu'il nous faudra. Je ne sais pas

 15   si dans la version anglaise nous aurons également la page 3.

 16   C'est un procès-verbal qui reprend les informations relatives au constat

 17   qui a été dressé deux ans de demi après l'incident.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Je vous renvoie au paragraphe 4.

 20   Donc l'équipe n'a pas vu l'autre trace d'après la déclaration de

 21   l'enquêteur Sabljica [phon], parce qu'à ce moment-là il y avait quelque

 22   chose de planté à cet endroit.

 23   Est-ce que vous voyez cette partie-là ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les interprètes n'arrivent pas à trouver

 25   le passage. Est-ce que vous pouvez nous dire où cela se situe ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, on y vient.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Au moment de cette enquête menée par des enquêteurs musulmans, c'est

Page 9708

  1   Refik Sokolar qui leur a montré l'endroit. D'après la déclaration de ce

  2   témoin, et la même chose a été constatée au moment du constat, un

  3   projectile est tombé sur l'asphalte et l'autre sur la surface en terre.

  4   Est-ce que c'est la même chose que l'on vous a dite, donc est-ce qu'un obus

  5   serait tombé sur la surface asphaltée et l'autre sur la surface qui n'était

  6   pas couverte d'asphalte ?

  7   R.  Pour être tout à fait franc, je n'en suis pas tout à fait certain

  8   aujourd'hui. De mémoire je vous dirais que les deux étaient tombés sur

  9   l'asphalte, mais peut-être que je me trompe.

 10   Q.  Le paragraphe 4 se lit comme suit :

 11   "A en juger d'après la déclaration du témoin oculaire de l'événement, Refik

 12   Sokolar…"

 13   Ça c'est le paragraphe 4 en serbe. Puis dans le dernier paragraphe en

 14   serbe, il est dit qu'ils n'ont même pas examiné cette deuxième trace parce

 15   qu'une végétation a recouvert cet endroit, on avait planté quelque chose;

 16   est-ce que c'est bien ça ?

 17   En anglais, ce serait la page suivante. Non, excusez-moi. Donc c'est le

 18   dernier paragraphe, à en juger d'après le témoin, puis la page suivante en

 19   anglais, tandis qu'en serbe ce sera le dernier paragraphe.

 20   Donc cette équipe d'enquêteurs qui se rend sur les lieux en 1995 - l'équipe

 21   du MUP de Bosnie-Herzégovine - est tout à fait explicite dans ses

 22   constatations en disant que le deuxième obus n'est pas tombé sur une

 23   surface en asphalte, et que l'on n'y a pas enquêté parce que c'est

 24   recouvert de végétation.

 25   Est-ce que vous voyez ce passage ?

 26   R.  Non.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons le retrouver en anglais. En serbe,

 28   ce sera le dernier paragraphe.

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  1   Mme EDGERTON : [interprétation] Ce sera la page suivante en anglais.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le vois à présent.

  3   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

  4   Q.  Avez-vous vu ce deuxième cratère ?

  5   R.  Je ne m'en souviens pas.

  6   Q.  Mais vous parlez du deuxième cratère et vous parlez de la probabilité

  7   que la direction du tir soit la même ?

  8   R.  C'est exact. C'est ce que j'ai vu et c'est ce que j'ai pu constater.

  9   Q.  Donc vos conclusions ne se fondent que sur l'examen d'un seul cratère,

 10   mais le deuxième cratère que vous n'avez pas vu; comment est-ce que vous

 11   avez pu tirer des conclusions là-dessus ?

 12   R.  J'ai bel et bien vu deux cratères à cet endroit à ce moment-là. Je les

 13   ai examinés tous les deux. L'un était plutôt clair, et l'autre moins clair,

 14   et pour le premier, j'ai une distance claire. Pour le deuxième, j'avais la

 15   sensation, avec une certitude assez grande, que la direction était la même.

 16   Je ne peux rien ajouter à cela.

 17   Q.  Mais comment expliquez-vous qu'en 1995, on ne retrouve qu'une seule

 18   trace sur l'asphalte, et qu'en 2002, on trouve deux cratères ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on voir maintenant la page du document ?

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Je pense qu'on n'a pas répercuté au compte

 25   rendu d'audience la réponse du témoin. Il avait dit, Non.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Il n'avait pas branché son micro.

 27   Confirmez-vous que vous avez répondu par la négative, Monsieur le Témoin ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'ai dit, Non.

Page 9710

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Regardez cette photo, la photo numéro 3, permettez-moi de vous informer

  4   que c'est une photo qui fait partie du dossier d'enquête effectué par la

  5   police musulmane de Bosnie. C'était réalisé en 1995, le 21 novembre, plus

  6   précisément.

  7   Regardez le contraste qu'on voit entre la partie endommagée du revêtement

  8   et la partie qui ne l'est pas. Vous voyez on a l'impression que ça s'est

  9   passé la veille à peine. Vous êtes bien d'accord, n'est-ce pas, pour dire

 10   que le contraste entre ces deux revêtements est très net ?

 11   R.  Je peux vous dire si ça a été fait la veille ou pas. En tout cas tout

 12   ceci présente un aspect excellent. L'état de conservait est excellent.

 13   Q.  Merci. Vous souvenez-vous si on vous a montré ce cratère pendant

 14   l'enquête ?

 15   R.  Je ne saurais vous le dire, parce que quand j'ai examiné ces cratères,

 16   ils étaient remplis de cette substance rouge plastifiée pour conserver

 17   l'état général des cratères mais je n'ai pas vu tout par le menu. Mais je

 18   dirais que comme il y avait beaucoup de temps qui s'était écoulé, certains

 19   détails, du fait de l'usure, des intempéries, ou de la circulation, avait

 20   provoqué une érosion certaines, alors je ne peux pas vous dire si j'ai

 21   examiné ce cratère-ci précisément quelques années plus tard.

 22   Q.  Mais regardez la première collerette elle forme un cercle pratiquement

 23   parfait.

 24   R.  Oui, la collerette interne, le cratère interne est quasi parfait, c'est

 25   vrai.

 26   Q.  A votre avis, est-ce que ceci montre que l'angle de chute était plutôt

 27   optu [phon] ou plus aigu ?

 28   R.  A mon avis, l'angle de chute est plus élevé.

Page 9711

  1   Q.  Merci. Est-ce que vous savez qu'après l'incident, la FORPRONU a

  2   effectué elle aussi une enquête et qu'elle a dit dans son rapport que deux

  3   obus étaient tombés sur une surface un revêtement asphalté, une surface

  4   dure ?

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame.

  7   Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous avoir une référence ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, donnez-la-nous.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, c'était le document précédent. P1053.

 10   C'est là qu'on trouve ce paragraphe. Mais je ne voulais pas le répéter. On

 11   a le cratère 1, le cratère 2. Si vous voulez on peut remettre cette pièce

 12   P1053 à l'écran.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes satisfaite, Madame Edgerton,

 14   faut-il revoir le document ?

 15   Mme EDGERTON : [interprétation] Pas tout à fait, parce que j'ai du mal à

 16   trouver une référence, parce que, moi, j'avais compris que le document

 17   disait qu'il n'y avait un obus qui était tombé sur le terrain de jeux, et

 18   l'autre autour, donc ce n'est pas la même chose que de dire que les deux

 19   obus sont tombés sur un revêtement dur.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Voyons ce document, Monsieur

 21   Karadzic.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'était la page 9. C'était la pièce P1053, page

 23   9.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Faites attention, s'il vous plaît, à ce qui est dit, on dit que l'obus

 26   ou les obus sont tombés sur une surface asphaltée et qu'il n'y a pas de

 27   tunnel, qu'il n'y a pas, disais-je, de sillon causé par le détonateur;

 28   c'est bien exact ?

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  1   R.  Oui, dans mon rapport, je dis que les deux obus sont tombés sur un

  2   revêtement dur, et ceci semble contredire le document que vous avez

  3   mentionné de l'enquête effectuée par le personnel de la présidence quelque

  4   -- plus tard, en tout cas. Je vous rappelle aussi que ceci a été effectué

  5   dans les cinq semaines qui sont suivies l'événement.

  6   Q.  Exactement. Merci. D'abord, il y a cinq semaines, puis deux ans et

  7   demi, et puis votre enquête ça s'est fait il y a six ans et demi, parce que

  8   si on compte de 1993 à 2001, ça fait à peu près --

  9   R.  Exact.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document de la liste

 12   65 ter 11383. Excusez-moi, c'est la même chose, sauf que je vous ai donné

 13   le numéro de la liste 65 ter. C'est le même document. Inutile de

 14   l'afficher.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Une fois de plus, la conclusion donne 2400 mils, millièmes, et 500

 17   millièmes. Etes-vous d'accord pour dire que les enquêteurs de la FORPRONU

 18   ont déterminé un angle minimal de chute qui se base sur la hauteur de

 19   l'immeuble le plus proche dans la direction d'où est venu l'obus.

 20   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas sais le nombre donné par M.

 21   Karadzic.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez répéter ce numéro.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D2569.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, page 51, ligne 25.

 25   Je ne pense pas que nous ayons la bonne mesure ici, ce n'ai pas le nombre

 26   de millièmes adéquat.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pensais que c'était ce qu'avait dit

 28   l'interprète. Vous pouvez vérifier les millièmes ? C'est bien ce qui est au

Page 9713

  1   compte rendu ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour ce qui est d'un obus, d'après la FORPRONU

  3   c'était 2 420 millièmes, pour l'autre c'était 2 500. C'était dans le

  4   document précédent que nous avons montré, donc je vous disais 2 420 et 2

  5   500. C'est un document qui vient de la FORPRONU, c'est le document P1053.

  6   M. KARADZIC : [interprétation] 

  7   Q.  Vous connaissez cette photo, Colonel ?

  8   R.  D'abord, pour répondre à votre première question, nous avons déjà

  9   établi à quoi correspondent les millièmes, quel était l'angle de chute

 10   minimal. Ça, ça remonte à plusieurs pages.

 11   Pour ce qui est de cette photo, je crois que cette photo a été prise à

 12   Dobrinja.

 13   Q.  Vous êtes d'accord pour dire que c'est le terrain de jeu concerné, que

 14   c'est bien à la droite de ce terrain de jeu qu'on trouve le parking ? On ne

 15   le voit donc pas ici sur cette photo ?

 16   R.  Je ne suis pas d'accord, je ne suis pas en désaccord non plus.

 17   Rappelez-vous, mon enquête s'est faite il y a neuf ans, et je ne me

 18   souviens pas de ce genre de détail. Mais ce qui est certain, c'est que

 19   l'aspect général me dit que ça pourrait bien être la zone en question.

 20   Q.  Merci. Si nous montrons cette photo c'est pour montrer la hauteur des

 21   immeubles. Sur trois côtés, côté sud, est et ouest, on peut dire que les

 22   bâtiments, les immeubles avaient cette hauteur, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, tout à fait.

 24   Q.  Merci. Etes-vous d'accord pour dire que s'agissant de l'angle de chute,

 25   il est fonction, dans une certaine mesure, de la hauteur des immeubles et

 26   de la distance qu'il y a entre le point de contact au sol et ces immeubles

 27   ?

 28   R.  Pythagore l'a prouvé il y a belle lurette.

Page 9714

  1   Q.  Merci. Partant de ces deux cratères qu'on vous a montrés, vous avez

  2   établi que, en fait, la direction c'était 2 050 millièmes avec une marge de

  3   50, et ceci vous a conduit à penser qu'en fait, les obus venaient de

  4   Toplik; c'est cela ?

  5   R.  Exact.

  6   Q.  Merci. Vous dites qu'il restait des traces d'éclats d'obus qui avaient

  7   la forme d'ailettes, ce qui vous a porté à croire qu'il s'agissait non pas

  8   d'un obusier mais d'un canon qui avait tiré ?

  9   R.  Non, ce n'est pas exact. Il y avait des ailettes sur le sol à l'époque.

 10   C'est pour ça que j'ai pensé que c'était non pas un mortier mais un canon

 11   obusier.  Vous savez, en fait, un obusier et un canon utilisent, si pas les

 12   mêmes obus, le même type. Leur effet serait donc pratiquement le même au

 13   contact, alors que la construction d'un obus de mortier est tout à fait

 14   différent. Son impact -- son contact au sol sera donc très différente, et

 15   c'est très visible lorsque le cratère est frais, mais pas vraiment lorsque

 16   le cratère est ancien. Plus le temps passe et plus le temps a passé,

 17   manifestement, plus le cratère a été altéré, ce qui veut dire que les

 18   qualités qui étaient caractéristiques du cratère auront changées.

 19   Q.  Merci. C'est bien. J'ai dit exactement ce que vous avez dit, c'est-à-

 20   dire que si on modifie -- ou plutôt, que de parler d'ailerons plutôt que

 21   d'ailettes, c'est que, moi, j'ai bien parlé d'ailes ou d'ailettes. Sans

 22   doute que l'interprétation vous a donné un mot qui vous a troublé, "fine"

 23   en anglais.

 24   Voyons les conclusions tirées à propos de ces cratères. Tout d'abord,

 25   l'équipe musulmane a mené une enquête et on en voit une image, la photo

 26   numéro 3. Rappelez-vous le cercle parfaite, angle de chute supérieur, ou

 27   peut-être est-ce qu'on vous a montré un cratère différent ?

 28   R.  Moi, j'ai vu effectivement les ailettes. Vous n'êtes peut-être pas un

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  1   artificier de métier mais, moi, je le suis et j'ai pu les voir.

  2   Q.  Merci. Regardons. La FORPRONU a déterminé qu'il y avait 2 420

  3   millièmes, 2 500 aussi. D'après les Bosniens, les obus venaient du sud-est.

  4   Donc, quand on voit le gisement, c'est à 100 degrés du gisement, donc du

  5   nord. Donc ça ce serait plutôt 1 955 millièmes, non ?

  6   R.  Non. N'oubliez pas qu'un millième c'est, en construction, un concept

  7   artificiel. Ceux, qui ont été formés comme moi à la chose, utilisent 6 401

  8   millièmes pour former tout un cercle. On prend, pour faire plus facile, un

  9   quart, et ainsi ça vous donne une mesure plus facile à comprendre. Mais

 10   certains utiliseront quelquefois 6 000 ou 6 230 millièmes, ce qui est plus

 11   précis. C'est par rapport au math pi dans le calcul. C'est pour établir la

 12   distance.

 13   Donc je ne peux pas vous dire si c'était effectivement 1 955

 14   millièmes. Dans mon optique, avec ma formation, 100 degrés ça

 15   représenterait 1 788 millièmes à peu près. Mais n'oubliez pas qu'il faut

 16   aussi savoir ce qu'on entend par "gisement" ou "orientation." Moi, je

 17   prends des coordonnées, un quadrillage, nord, le nord magnétique, ou le

 18   nord véritable. Donc un utilise un quart de quadrillé pour que tout le

 19   monde ait les mêmes règles de jeu pour ainsi dire.

 20   Impossible de faire une comparaison précise sans savoir d'où venaient

 21   ces enquêteurs. Il faut savoir combien de millièmes ils mettent dans un

 22   cercle. Il faut savoir aussi s'ils utilisaient le nord magnétique ou pas,

 23   sur quel carte. Moi, j'utilisais la carte standard de la FORPRONU, qui

 24   était quadrillée par le système UTM, mais je ne sais pas quelle était la

 25   carte que ces enquêteurs utilisaient, mais sans doute était-ce pratiquement

 26   dans ces eaux-là.

 27   Q.  Merci. Ils sont écrits que c'était 110 degrés par rapport au nord, vers

 28   le sud-est. 600 degrés, ça fait 1700 millième; 110 degrés, ça devrait

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  1   faire, comme la conclusion le dit, 1955 millième. Manifestement, ils

  2   utilisaient les mêmes paramètres que vous, parce qu'on ne parle pas de 100

  3   degrés, donc ce n'est pas 1700 millièmes, c'est 110 degrés. Ce qui donne

  4   1955 millièmes. Vous, vous avez déterminé que ça pouvait aller jusqu'à 2350

  5   millièmes, alors que la FORPRONU, elle, elle a dit que c'était 2420

  6   millièmes, et 2500 millièmes respectivement. Donc il n'y a rien qui colle,

  7   rien n'est comparable à autre chose.

  8   Si vous trouvez ça plus commode, nous pourrons afficher le document

  9   de la liste 65 ter, 9970.

 10   R.  Je reviens à la ligne 20, page 55. La traduction disait 100

 11   degrés par rapport au nord, et ça donnerait 1955 millièmes. C'est vrai que,

 12   là, manifestement il y a eu un petit glissement au niveau de

 13   l'interprétation. 1955 millièmes, ça correspond plus ou moins à 110 degrés

 14   effectivement, dans mon optique à moi.

 15   Pour ce qui est de 1955 millièmes ou de 2500 millièmes, ça ne fait

 16   pas une grosse différence, vous savez. On en a l'impression, mais ce n'est

 17   pas vrai parce que quand on voit un millième à 1 000 mètres, ça représente

 18   un mètre. Donc si on a une portée de 3 500, ça fait trois mètres.

 19   Ce que j'essaie de vous dire en vous donnant ces différentes

 20   comparaisons, c'est que comme le disait le Juge Morrison, il y a quelques

 21   instants on peut utiliser avec une arme les mêmes obus, au même gisement et

 22   parce qu'il y a une composition de la charge explosive, de la température

 23   de l'air, la vitesse, la direction, ça ne veut pas dire que l'obus va

 24   chaque fois tomber au même endroit. Comme on dit, le tonnerre ne frappe pas

 25   deux fois à la même place. Donc il y a ici des écarts qui semblent grands,

 26   mais ils ne sont pas aussi grands que cela en réalité. On peut dire qu'ils

 27   se trouvent pratiquement tous dans la même zone, est, sud-est. 

 28   Q.  Merci. Mais les lignes de confrontation n'étaient-elles pas très

Page 9717

  1   rapprochées, l'une de l'autre, et par rapport à cet endroit, elles se

  2   trouvaient à quelle distance d'après les informations que vous avez ?

  3   R.  Les lignes de front étaient tout près, dans ce secteur. Je dirais que

  4   la distance qui les séparait c'était 50 à 100 mètres, parce que à Dobrinja,

  5   c'était la différence qu'il y avait entre une barre d'immeuble et l'autre.

  6   Q.  Merci. Entre le terrain et la ligne de front, est-ce qu'il n'y avait

  7   pas environ 300 mètres ?

  8   R.  Sans doute oui. Excusez-moi, je veux dire par rapport à la ligne de

  9   l'armija. Manifestement, la ligne tenue par la VRS était plus loin.

 10   Q.  Merci. Quelle est la distance minimale pour tirer un obus de mortier de

 11   80 millimètres avec une charte zéro ?

 12   Je ne sais pas si ceci peut vous aider, je peux vous montrer à

 13   l'écran un tableau de  tir, 1D2262.

 14   Etes-vous d'accord avec moi, pour dire que si la charge est zéro, la

 15   distance minimale pour tirer un obus de 82-millimètres, c'est à peu près 80

 16   mètres ?

 17   R.  Oui, c'est possible.

 18   Q.  Voici le tableau de tir, mais je suis sûr que vous le connaissiez par

 19   cœur, et vous l'avez confirmé ? Non, je ne l'ai pas fait.

 20   R.  Oui, c'est utile. Vous voyez ici charge zéro, oui. Le minimum c'est 80

 21   mètres.

 22   Q.  L'angle de chute serait d'environ 85 degrés, n'est-ce pas ?

 23   R.  L'angle de montée est sans doute, 85 degrés, mais je ne vois pas

 24   d'angle de chute.

 25   Q.  Ce n'est pas la quatrième colonne ? Pardon la colonne 9, ça, c'est

 26   l'angle de chute.

 27   R.  Oui, maintenant je vois, je vois "1421."

 28   Q.  Jetez un coup d'œil à la ligne qui montre "300 mètres," quel serait à

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  1   ce moment-là, l'angle de chute ?

  2   R.  Malheureusement la lettre ou le chiffre 0 ne le montre pas bien, le

  3   dissimule en partie. Mais apparemment ce serait, on voit les chiffres 1 et

  4   2 dans ce nombre.

  5   Q.  Merci. Quoi qu'il en soit vous êtes d'accord pour dire, n'est-ce pas,

  6   que si l'angle est d'environ 95 degrés, la répartition des traces donnerait

  7   un cercle quasi parfait.

  8   R.  Mais ces traces présenteraient malgré tout, les caractéristiques de

  9   l'explosion d'un obus de mortier, ce qui n'est pas le cas ici.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Ligne 24, page 57, j'ai entendu

 11   l'interprète dire "85 degrés" et non pas "125 degrés." Peut-être que ce

 12   n'est pas correct.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez raison, nous allions justement le

 15   dire nous-mêmes, l'angle maximal de chute est d'environ 86 degrés, c'est-à-

 16   dire le nombre maximal de degré obtenu avec un angle minimal. Plus la

 17   distance est courte, plus grand sera l'angle, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Merci. Plus l'angle s'agrandit, plus la répartition des fragments va se

 20   rapprocher d'un cercle parfait, n'est-ce pas, ce que montre la première

 21   colonne ?

 22   R.  Lorsque vous avez un obus, oui, de canon, oui. Mais si vous avez un

 23   obus de mortier, on voit qu'à l'avant du cratère, il y a une réduction très

 24   nette, et vous avez pratiquement une ligne, qui est d'ailleurs

 25   perpendiculaire à l'angle entrant. Ce que je n'ai pas vu ici sur cette

 26   photo.

 27   Q.  Vous voulez-vous qu'on la remonte, c'était la photo numéro 3 ?

 28   R.  Si vous voulez la voir, faites comme vous voulez.

Page 9719

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document de la liste

  2   65 ter, 09970.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous rappelle, Monsieur Karadzic, que

  4   le document qu'on vient de voir qui montre les tables de tir avait reçu une

  5   cote provisoire, elle restera provisoire tant que nous n'aurons pas établi

  6   de façon satisfaisante son origine.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ça vient du manuel officiel de la JNA.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous le savons. Mais c'est vous qui

  9   devez saisir ce document dans le prétoire électronique et nous en informer.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 11   Page 6, s'il vous plaît.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faudra, bien sûr, une traduction du

 13   document.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais le document que nous avons téléchargé --

 15   si vous voulez une traduction du tableau du tir, je vous en donnerai une.

 16   Ici nous voulons la photo du haut, la photo numéro 3. C'est à la page

 17   précédente.

 18   Vous voyez cette photo numéro 3.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Regardez cette première collerette, elle forme un cercle parfait ?

 21   R.  Apparemment, oui.

 22   Q.  Est-ce que ceci montre les traces d'un obus de mortier ou d'un obus

 23   d'obusier ?

 24   R.  Mais il faudrait que je voie moi-même de mes propres yeux le cratère.

 25   Mais rien qu'à en juger par la photo, ceci ne vient d'un obus d'obusier; ou

 26   d'un obus de canon obusier.

 27   Q.  Merci.

 28   R.  Puis je n'ai pas la moindre idée de l'échelle de cette photo.

Page 9720

  1   Q.  Mais regardez, vous avez un mètre pliable, ceci vous permet de prendre

  2   des mensurations et ceci montre que c'est un mètre, c'est ce dont s'est

  3   servi l'enquêteur, n'est-ce pas ?

  4   Dites-nous, est-il possible d'établir la portée de façon approximative si

  5   on sait quel est le calibre de l'obus à partir du moment où on entend le

  6   tir déclenché par le lancement de l'obus et l'explosion qu'il provoque au

  7   sol ?

  8   R.  Il y a des possibilités, grâce à des appareils de métrage du son, de

  9   déterminer l'origine d'un obus. Mais il n'y avait pas de tels appareils

 10   disponibles dans le secteur de Sarajevo à cette époque-là.

 11   Q.  Merci. Conviendrez-vous que si, par exemple, les témoins ou les

 12   personnes présentes avaient d'abord entendu le bruit de l'allumage et

 13   ensuite le bruit de l'explosion, nous aurions pu -- sur la base de ce que

 14   nous connaissons de la vitesse du son, nous aurions pu déterminer au moins

 15   approximativement la distance à partir de laquelle l'obus avait été tiré ?

 16   R.  Si des témoins oculaires étaient présents sur place, avaient vu

 17   l'explosion, et se trouvaient suffisamment près du lieu du tir et qu'ils

 18   avaient entendu le bruit du tir après avoir vu s'effectuer le tir, ils

 19   auraient pu élaborer mentalement la distance couverte par le projectile, il

 20   est certain qu'on peut effectivement élaborer mentalement cette distance,

 21   oui. Elle ne serait pas exacte, mais elle serait approximative.

 22   Q.  Donc dans ce cas-là, le temps écoulé entre le tir en tant que tel et

 23   l'explosion au point d'impact, ce temps aurait une certaine importance,

 24   n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Merci. Savez-vous que deux témoins présents sur place ont entendu le

 27   bruit du tir ?

 28   R.  Non.

Page 9721

  1   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Encore une fois, est-ce qu'on pourrait

  4   avoir une référence concernant cette affirmation ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous remettrons les déclarations de ces

  6   témoins. Mais ce qui m'intéresse en ce moment c'est l'avis du lieutenant-

  7   colonel à ce sujet parce que ce qui m'intéresse aussi c'est de savoir s'il

  8   a reçu toutes les informations absolument indispensables pour lui permettre

  9   de se prononcer. Pour notre part, nous allons présenter ses déclarations de

 10   témoin.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je décide que nous en resterons là pour

 12   le moment.

 13   Nous pouvons poursuivre.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Savez-vous que M. Richard Higgs, un expert de l'Accusation, s'est

 16   rendu sur les lieux un peu après vous, à savoir le 12 février 2002 ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Dans ce cas, vous ne connaissez pas non plus son rapport, n'est-ce pas

 19   ?

 20   R.  Certainement pas.

 21   Q.  Merci. Donc j'indique qu'il s'agit du document 65 ter numéro 10083.

 22   J'en demande l'affichage sur les écrans en page 8 de ce document.

 23   M. Higgs déclare, je cite :

 24   "A la demande du Tribunal international, je me suis rendu sur les lieux

 25   accompagné de M. Chester Stamp et j'ai examiné deux cratères. Les deux

 26   cratères sont remplis d'une substance rouge, qui rend en ce moment

 27   impossible toute analyse détaillée. Mais une grande partie d'un cratère est

 28   encore disponible et permet après examen de tirer un certain nombre de

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  1   conclusions."

  2   Est-ce que vous avez trouvé ce passage en page 8 de ce document ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on voit la page ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas sûr si dans la version anglaise

  5   c'est la page 8 ou une autre page --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit probablement de la page 7.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans la page serbe, le haut de la page commence

  8   par :

  9   "A la demande du Tribunal international." Oui, oui, en anglais c'est la

 10   page 7, effectivement :

 11   "At the request of the Tribunal, I visited…"

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur, est-ce que vous voyez dans ce document que M. Higgs a

 14   également conclu au fait qu'il s'agissait d'un obus de mortier ? Les

 15   enquêteurs de la FORPRONU, à l'examen de la pièce P1053, ont conclu qu'il

 16   s'agissait d'un obus de mortier. Les enquêteurs de la police musulmane ont

 17   conclu qu'il s'agissait d'un obus de mortier. Quant à vous, votre position

 18   consiste à estimer plus probable le fait qu'il s'agisse d'un obus de canon

 19   ou d'obusier. Est-ce que vous pouvez expliquer de telles différences ?

 20   R.  L'explication que je vous fournirai c'est qu'un laps de temps important

 21   s'est écoulé avant que je puisse procéder à mes investigations, mais

 22   nonobstant du fait qu'il s'agisse d'un canon ou d'un mortier, la direction

 23   du tir était clair.

 24   Q.  Savez-vous que, qu'on se tourne dans une direction ou dans l'autre, on

 25   trouvait les positions de l'une et l'autre des armées concernées puisque

 26   les armées se font face ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  S'agissant de déterminer la responsabilité, n'était-il pas absolument

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  1   indispensable de déterminer la distance ?

  2   R.  Cela aurait été utile.

  3   Q.  Merci. Eu égard à l'incident de Markale, vous êtes aussi arrivé un peu

  4   plus tard, n'est-ce pas, six ou sept jours après que l'incident se soit

  5   produit, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui. L'incident a eu lieu le 5 février, et j'ai vu les lieux pour la

  7   première fois le 10 février 1994.

  8   Q.  Merci. Vous rappelez-vous nous avoir dit, et vous l'aviez déjà dit dans

  9   votre déposition dans l'affaire Galic d'ailleurs, que celui qui a tiré

 10   aurait dû avoir beaucoup de chance pour atteindre du premier coup un

 11   endroit comme le marché de Markale ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez une référence, Madame

 13   Edgerton ?

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] S'il vous plaît.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens --

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pensais que le témoin pouvait confirmer cela

 17   sans faire référence au compte rendu d'audience, mais pas de problème. Nous

 18   avons le compte rendu d'un certain jour de mars 1992.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux confirmer que si leur but était

 20   de tirer sur le marché de Markale, tirer un seul obus et atteindre à l'aide

 21   d'un seul obus de mortier la cible visée, si je puis l'appeler ainsi, quand

 22   on utilise un mortier de 120 millimètres de calibre, à partir d'une

 23   certaine distance ce serait absolument étonnant, ce serait un

 24   extraordinaire coup de chance pour le canonnier, et ce serait une terrible

 25   absence de chance pour ceux qui se tenaient debout à l'endroit où l'obus

 26   devait tomber, parce que toucher une cible à l'aide d'un mortier implique

 27   pas mal d'effort, on a besoin de pas mal de renseignements préparatoires

 28   sur les caractéristiques du tir, on a besoin de tirer de façon très, très

Page 9724

  1   précise conformément aux données dont on dispose, on doit donc ajuster

  2   beaucoup le tir. Si un seul tir d'obus a eu lieu ce jour-là et c'est ce

  3   qu'on sait au sujet de ce qui s'est passé de façon générale dans la zone,

  4   pour que cet obus touche sa cible il faut des conditions tout à fait

  5   étonnantes, si Markale était bien la cible.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   J'aimerais que nous nous penchions rapidement sur le document 65 ter

  8   numéro 10336, page 161 de ce document après voir vu la première page. 10336

  9   c'est le numéro du document, et 161 c'est la page qui m'intéresse.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Nous voyons dans cette page le sujet même dont vous êtes en train de

 12   discuter. Vous avez eu des idées nouvelles qui vous sont venues s'agissant

 13   de déterminer les intentions, n'est-ce pas, vous êtes revenu sur l'idée que

 14   le tir était destiné à viser Markale; c'est bien cela ?

 15   R.  Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit; si le tireur avait l'intention

 16   de tirer sur Markale, il a eu une extraordinaire bonne chance, depuis

 17   l'endroit où il se trouvait. Mais ce que j'ai dit et ce que j'avais

 18   l'intention de dire c'est qu'il est possible que l'intention n'ait pas

 19   consisté à tirer directement sur Markale, mais de façon générale dans le

 20   secteur du centre de Sarajevo.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Veuillez me dire, si je puis me

 22   permettre d'extrapoler un peu, ce que vous dites c'est bien la chose

 23   suivante : que pour qu'un obus atterrisse là où il l'a fait, il aurait

 24   fallu, et c'est une conséquence du sens commun, il aurait fallu qu'il soit

 25   tiré dans la direction de cet endroit de façon générale, mais que le lieu

 26   tout à fait précis où l'obus a atterri dépend de la chance, étant donné

 27   qu'il n'y a eu qu'un seul obus tiré et aucun ajustement de tir effectué au

 28   préalable ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais préciser ce point.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Beaucoup de chance aussi si la volonté de viser ce point particulier,

  5   le point où l'obus est tombé, n'existait pas, n'est-ce pas ?

  6   R.  Erreur. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y avait pas volonté

  7   déterminée et précise de tirer sur le point où l'obus a atterri. Je ne sais

  8   pas quel était le point visé, mais il est certain que le secteur visé

  9   fourmillait de civils au centre de Sarajevo. L'obus a touché un secteur qui

 10   était bourré de civils. Est-ce que cela a été fait par hasard ou de façon

 11   délibérée, je ne sais pas.

 12   Q.  Je vous remercie. Vous avez été conseiller technique en l'espèce, et

 13   pendant le temps qu'a duré le mandat de l'équipe d'enquêteurs, les

 14   enquêteurs ont complété les premières investigations menées à bien par les

 15   Nations Unies, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je proposerais que l'enquête que nous avons menée prévale sur les

 17   investigations précédentes menées par les Nations Unies.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, il est temps de faire

 19   la pause.

 20   Nous nous retrouverons donc à 13 heures.

 21   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 22   --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Donc, Lieutenant-colonel, vous avez été chargé par les Nations Unies de

 27   ce travail d'enquête visant précisément la détermination d'un certain

 28   nombre de facteurs physiques qui étaient importants pour déterminer la

Page 9726

  1   responsabilité dans le cadre de cet incident, n'est-ce pas ?

  2   R.  Pour tenter de déterminer la responsabilité, oui.

  3   Q.  Merci.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais l'affichage grâce au prétoire

  5   électronique le document de tout à l'heure, c'est-à-dire le document 65 ter

  6   numéro 11036. Page 6 094.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-il exact que les fragments découverts étaient d'une taille trop

  9   petite pour être utile dans le cadre de l'analyse ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  Est-il exact que Mirza Jamakovic vous a proposé des fragments et que

 12   vous avez rejetés car rien ne prouvait qu'ils provenaient de cet endroit ?

 13   R.  Je n'ai pas conscience qu'un certain Mirza Jamakovic m'ait proposé des

 14   fragments ou nous ait proposé des fragments. Ce qui est certain c'est qu'on

 15   nous a proposé des fragments et que c'est l'officier de liaison de la

 16   présidence qu'il l'a fait et nous les avons refusés, en effet.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 37 de ce document sur les écrans, je vous

 18   prie, Document 65 ter numéro 10336, à savoir le compte rendu d'audience de

 19   l'année 2002. C'est la page 37 de ce document qui m'intéresse, qui au

 20   compte rendu d'audience représente la page 6 094 et le passage se

 21   poursuivra sur la page 6 095.

 22   Depuis la ligne 18 de cette page, vous voyez que quelqu'un pose la question

 23   de savoir s'il s'agit de Jamakovic et vous répondez : Oui, que quelqu'un a

 24   pris contact pour vous proposer des fragments, mais que votre équipe les a

 25   refusés ces fragments, n'est-ce pas ?

 26   Je demande maintenant l'affichage de la page suivante.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 9727

  1   Q.  Voilà. On voit dans la page suivante que vous n'avez obtenu aucune

  2   preuve indiquant que ces fragments provenaient de cet endroit-là. Bien.

  3   Alors, vous avez d'une certaine façon déterminé la direction d'où il était

  4   probable que venait l'obus et vous avez établi qu'il existait six lieux

  5   différents à partir desquels l'obus aurait pu être tiré en suivant la

  6   direction en question. Deux qui se trouvait à une distance moindre et qui

  7   se trouvait sur le territoire musulman et quatre qui se trouvaient à une

  8   distance plus importante sur le territoire serbe, n'est-ce pas ?

  9   Je demande l'affichage dans ce document de la page 135. Page 135 du

 10   document, qui représente la page 6 092 du compte rendu d'audience.

 11   Est-ce que vous êtes d'accord quant au fait -- donc êtes-vous d'accord que

 12   vous avez déterminé six lieux possibles à partir desquels l'obus aurait pu

 13   être tiré ?

 14   R.  Oui, bien entendu.

 15   Q.  Merci. Vous avez également établi qu'il était plus probable que l'obus

 16   soit provenu d'une position située plus près de Markale, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je n'ai pas établi cela.

 18   Q.  Mais ceci figure au bas de la page précédente, sinon, au haut de cette

 19   page-ci.

 20   Mais enfin je redemande l'affichage de la page précédente.

 21   Bien, je demande à présent l'affichage de la page suivante.

 22   Voilà, j'ai trouvé le passage, vers la fin de la page suivante, donc votre

 23   réponse commence à la page 23, je cite :

 24   "Oui, effectivement. Oui, la probabilité serait légèrement plus importante

 25   lorsque la cible est plus proche de l'arme. Mais pas beaucoup plus

 26   importante. On pense à des temps de vol à peu près égaux."

 27   Et cetera, et cetera.

 28   R.  Oui, je vois ce passage, mais vous l'avez déformé dans la façon de

Page 9728

  1   l'interpréter, je le crains. Car ceci n'a rien à voir avec la probabilité

  2   que l'obus ait été tiré à partir d'une position située plus près. Ceci

  3   concerne la probabilité qu'un tir soit réalisé avant à partir d'une

  4   position située plus près, parce que manifestement, dans ce cas-là, l'obus

  5   n'a pas une trajectoire aussi longue à couvrir, donc à moins de risque

  6   d'être détournée par le vent, et en général, l'impact au sol sera plus

  7   petit. Donc si on a un projectile rond qui manifestement provient d'une

  8   distance moins grande, les choses sont plus faciles, mais ceci n'a rien à

  9   voir avec la probabilité que le projectile ait été tiré à partir de l'une

 10   ou l'autre des six positions en question. La probabilité était sur le plan

 11   technique égal pour les six positions.

 12   Q.  Merci. Mais est-il exact que vous donnez tout de même une plus chance

 13   quant à la détermination du lieu de tir, à des positions situées plus près

 14   du point d'impact, n'est-ce pas, eu égard à l'intention de viser ce lieu

 15   particulier ? Si l'intention avait existé n'est-il pas vrai qu'il aurait

 16   été plus facile de toucher cet endroit à partir d'un lieu situé plus près

 17   de cet endroit plutôt qu'à partir d'un lieu situé plus loin ? C'est bien

 18   cela que vous avez dit, n'est-ce pas ?

 19   R.  D'une certaine façon, oui. Mais vous mettez en relation deux éléments

 20   qui n'ont aucun rapport l'un avec l'autre. Vous établissez un lien entre la

 21   précision technique du tir et l'intention or, moi, je ne fais pas cela.

 22   Q.  Merci. Mais je le fais sur la base du fait que vous avez déclaré que si

 23   l'intention existait, il aurait fallu être extraordinairement chanceux pour

 24   atteindre l'endroit visé à l'aide d'un seul projectile. Mais enfin

 25   poursuivons.

 26   Vous avez dit que les ajustements de tir ne pouvaient être utiles que

 27   pendant une période de deux heures environ, mais que dès lors que ces deux

 28   heures aient été écoulées, les mêmes paramètres ne pouvaient plus

Page 9729

  1   s'appliquer à un ajustement de tir, n'est-ce pas ?

  2   R.  Encore une fois, c'est exact, nous admettons que les cibles qui ont

  3   fait l'objet d'un ajustement de tir restent valables pendant deux heures.

  4   Bien entendu, cette durée varie en fonction des conditions spécifiques et

  5   de l'endroit spécifique où l'on se trouve. Mais nous admettons d'un point

  6   de vue technique que le laps de temps de deux heures c'est la fenêtre

  7   d'opportunité qui existe dans le cadre d'un ajustement de tir. Mais

  8   revenons à ce que vous avez dit plus tôt, au sujet de la zone touchée. Il

  9   est un fait que la zone pilonnée comme on l'appelle, autrement dit la zone

 10   où les obus de mortier atterrissent est plus petite si la distance à partir

 11   de laquelle se produit le tir est plus faible. Plus on s'éloigne, Monsieur

 12   le Président, Madame, Messieurs les Juges, manifestement plus grande est la

 13   différence entre les deux. Parce que l'obus sera affecté par davantage de

 14   paramètres, davantage de facteurs mais ceci ne signifiait rien du point de

 15   vue de l'intention, c'est simplement une question technique.

 16   Q.  Je vous remercie. Conviendrez-vous dans ces conditions que ajuster le

 17   tir des mois à l'avance, cela aurait été inutile, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, je le crois.

 19   Q.  Donc conviendrez-vous que l'ajustement de tir à partir d'un autre lieu,

 20   serait inutile pour le lieu en question, si je puis m'exprimer ainsi. Donc

 21   si une arme se trouve à un endroit, il faut que l'ajustement de tir pour

 22   cette arme se fasse au même endroit, et le faire en un autre endroit est

 23   inutile, n'est-ce pas ?

 24   R.  Il est possible d'utiliser les données d'ajustement de tir provenant

 25   d'un autre lieu, pour peu que certains paramètres soient satisfaits. Au

 26   nombre de ces paramètres, se trouve le pointage qui doit de façon générale

 27   être effectué dans la même direction, et la distance qui doit être une

 28   distance raisonnable, ainsi que le laps de temps considéré qui ne doit pas

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  1   dépasser deux heures. Mais avec des mortiers, il est plus difficile de le

  2   faire, d'utiliser des données provenant d'ajustement de tir provenant d'un

  3   autre lieu que ce n'est le cas avec des canons, en raison de l'imprécision

  4   inhérente des tubes d'un mortier, des tubes nus. Or, la plupart des

  5   mortiers présentent des tubes nus, n'est-ce pas ? Donc il est possible

  6   d'utiliser des données d'ajustement de tir provenant d'un autre endroit

  7   dans des cas très limités.

  8   Q.  Je vous remercie. Toutefois, ajuster un tir à partir de Lukavica,

  9   n'aurait pas été utile si l'arme se trouvait au nord-est, autrement dit à

 10   Mirkovci, selon ce que certains affirment, l'arme se serait trouvée a

 11   Mirkovci; eux disent que l'obus provenait de Mirkovci, alors l'ajustement

 12   de tir, à partir de Lukavica aurait été inutile dans ces conditions, n'est-

 13   ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vous remercie. Au point d'impact, il y avait un sillon et il y avait

 16   le stabilisateur, et il y avait l'ailette du stabilisateur qui sortait du

 17   sol. En fait, il est possible de déterminer la direction à l'aide d'une

 18   boussole mais c'est une méthode qui est assez imprécise, car on se situait

 19   un semaine pares l'explosion, n'est-ce pas ?

 20   R.  Je ne suis pas d'accord. La méthode était précise, parce que le sillon

 21   creusé dans le sol était encore intact. Le secteur touché par l'obus de

 22   mortier, les marques sur le sol étaient intactes. Il y avait donc

 23   continuité du point de vue des éléments de preuve pendant toute la semaine

 24   qui a séparé la date de la chute de l'obus, le 5, et le moment de notre

 25   arrivée sur les lieux et de notre analyse de cratères qui a eu lieu le 11.

 26   Donc la continuité des éléments de preuve nous a donné la possibilité de

 27   vérifier avec précision où, à partir de quel endroit l'obus avait été tiré

 28   de façon générale.

Page 9731

  1   Q.  Mais vous ne parlez pas de distance, en ce moment, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je ne parle pas de distance, je parle de direction, d'orientation.

  3   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Colonel Hamill, je sais que je vais

  4   revenir pas mal en arrière, et les choses sont peut-être évidentes, mais il

  5   me semble important que ceci soit consigné au compte rendu d'audience. L'un

  6   des éléments qui va affecter un tir de mortier, en particulier si l'obus

  7   est tiré selon une trajectoire relativement haute, plutôt que basse, c'est

  8   le vent. Je comprends, et peut-être pouvez-vous confirmer en vous fondant

  9   sur votre expérience que plus le tir de mortier se fait en hauteur, et plus

 10   longue est la trajectoire, et plus le vent qui souffle ou ne souffle pas

 11   risque d'affecter la trajectoire de l'obus ? Des vents supérieurs sont plus

 12   forts, et soufflent dans des directions différentes par rapport aux vents

 13   que l'on peut ressentir et observer au niveau du sol; est-ce que mon

 14   analyse est exacte ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exactement cela, encore une fois,

 16   Monsieur le Juge. Merci de ces précisions. Il est clair que plus on monte

 17   en altitude, plus l'obus monte en altitude, plus il va couvrir une distance

 18   importante. Par conséquent, il passe par différentes couches d'air, si je

 19   puis m'exprimer ainsi, dans lesquelles les vélocités du vent et les

 20   directions du vent ne sont pas déterminables à partir de ce que l'on peut

 21   observer au sol, sans utiliser, par exemple, des ballons, des aéronefs.

 22   Donc plus on monte en altitude, plus le vent peut changer de direction vers

 23   la gauche, vers l'avant, vers l'arrière, et il peut retarder ou avancer la

 24   traversée de l'air.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] par conséquent, la seule façon de

 26   prévoir où va tomber un obus, c'est d'observer --

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Précédemment.

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] -- d'observer les tirs d'ajustement

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  1   antérieurs même si cela ne donne qu'une estimation.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] En particulier avec des canons. C'est une

  3   estimation assez imprécise, qui dépend de la conception du canon plus

  4   imprécise qu'avec un mortier, qui est beaucoup plus précis. C'est la raison

  5   pour laquelle les canons et les mortiers sont considérés comme des armes

  6   qui détruisent pas mal le secteur visé, par rapport à des armes qui visent

  7   de façon plus précise. Ça, c'est la réalité, il faut ajuster le tir. On

  8   doit ajuster dans un espace de temps assez court, et normalement il faut

  9   trois à cinq tirs ou même davantage pour ajuster le tir selon l'endroit

 10   visé.

 11   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Un peu plus tôt, vous avez parlé des

 12   mortiers en disant qu'en général, c'étaient des armes à canon nu. Je pense

 13   que certains mortiers à canon protégé existent. Quand je dis "protégé," je

 14   parle des rainures que l'on peut voir dans le canon, qui entraînent une

 15   rotation du projectile dans l'air, afin de contrer certaines forces

 16   extérieures, et de rendre le tir plus précis sur un plan balistique. Mais

 17   il est probable que les obus en question aient été tirés à partir d'un

 18   canon non chemisé.

 19   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Remplacer nu par non chemisé.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] -- et, par conséquent, encore plus

 21   sujets aux altérations dues aux forces extérieures.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était un tir stabilisé par ailette

 23   plutôt qu'un tir stabilisé au sol. Les canons tirent des tirs stabilisés

 24   par ailette. Comme vous l'avez dit, les rainures du canon, du tube,

 25   provoquent une rotation du projectile qui lui impriment sa direction.

 26   Normalement, la rotation se fait vers la droite, avec des mortiers,

 27   avec les ailettes que possèdent ces mortiers, c'est l'ailette qui va créer

 28   la stabilité et qui va arrêter ces errements  du projectile dans l'air en

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  1   lui imprimant sa direction. Mais cela n'arrête pas totalement les errances

  2   du projectile. Comme je l'ai déjà dit, le mortier et de façon inhérente une

  3   arme très imprécise, plus imprécise qu'un canon. Il y a des mortiers plus

  4   ou moins précis que d'autres, mais selon mon expérience, il n'en existait

  5   pas à l'époque.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Alors, je vais sauter une partie, parce que cela a été expliqué,

  8   précisé très bien.

  9   Je demande maintenant l'affichage de la page 27.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Veuillez vous concentrer sur la ligne 11 de cette page, je cite :

 12   "En page 3 de ce document, paragraphe 17, on trouve une conclusion par

 13   rapport à la culpabilité. Dans les trois dernières lignes, nous lisons, je

 14   cite : 'Il n'existe pas d'élément de preuve physique suffisant à démontrer

 15   que l'une ou l'autre des parties a tiré l'obus de mortier. L'obus de

 16   mortier en question aurait pu être tiré par l'une ou par l'autre partie en

 17   présence.' Est-ce que cela était votre conclusion ?"

 18   Puis maintenant je trouve votre réponse, je cite :

 19   "Cela était notre conclusion. C'était une évaluation précise."

 20   C'est bien cela ?

 21   R.  C'est cela.

 22   Q.  Je vous remercie. Je ne voudrais plus que nous discutions d'angle,

 23   parce que ces conclusions sont assez définitives. Mais il y a les traces

 24   aussi qui indiquent que le cratère avait été manipulé entre les deux

 25   analyses et que ceci a altéré les mesures également, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je ne dirais pas que le cratère a été manipulé en tant que tel. Ce qui

 27   s'est passé, c'est qu'une équipe a retiré les ailettes, ce qui a, c'est

 28   certain, modifié légèrement l'aspect du cratère et en particulier le sillon

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  1   dans lequel le stabilisateur s'était enfoncé. Donc, ce n'est pas une

  2   manipulation, ce n'est pas une -- c'est une tentative de réaliser une

  3   analyse de cratère et de découvrir à partir d'où provenait le projectile.

  4   D'après moi, la FORPRONU avait effectivement sécurisé le marché depuis

  5   quelques minutes après la chute de l'obus et avant l'arrivée de notre

  6   équipe sur les lieux. Donc, c'est sur cette base que nous avons enquêté et

  7   que nous avons tiré nos conclusions sur la réalité, sans spéculer en aucun

  8   cas.

  9   Q.  Je vous remercie. Vous rappelez-vous que lorsque nous nous sommes

 10   rencontrés avant votre déposition, vous nous avez confirmé que vous n'aviez

 11   jamais vu le corps d'un blessé ou d'un mort à Markale en 1994 ?

 12   R.  En effet, je le confirme.

 13   Q.  Nous nous sommes convenus, n'est-ce pas, qu'un grand nombre de blessés

 14   et de tués dans un secteur géographique d'aussi petite taille vous avait

 15   semblé suspect, n'est-ce pas ?

 16   R.  Il est certain que j'ai émis quelques conjectures durant nos

 17   conversations sur ce sujet, mais ce n'est pas la même chose que formuler

 18   des faits.

 19   Q.  Je vous remercie. Puis-je vous demander, Colonel, si vous saviez quels

 20   étaient les lieux de déploiement des forces musulmanes à l'intérieur de la

 21   ville et si vous saviez où se trouvait le QG des forces musulmans et où

 22   étaient déployés leurs mortiers, leurs canons et leurs chars ?

 23   R.  Je n'ai personnellement jamais connu les lieux de déploiement de leurs

 24   mortiers, de leurs canons ou de leurs chars à quelque moment que ce soit.

 25   S'agissant du déploiement des forces de l'armija à l'intérieur de la ville,

 26   je savais de façon assez générale où se trouvaient ses positions. Je savais

 27   où se trouvait le QG de l'armija, c'est sûr. Je savais où se trouvait la

 28   caserne où étaient stationnées les forces de l'armija, mais les individus

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  1   ne restaient jamais en place très longtemps, pas plus que les différents

  2   engins, si vous voulez parler de façon précise par exemple des mortiers,

  3   des canons ou des chars.

  4   Q.  Par contraste aux Serbes, comme vous l'avez confirmé grâce à vos

  5   observations, l'armée musulmane changeait très souvent ses positions. Elle

  6   transportait des mortiers à bord de camion, où les mortiers changeaient de

  7   position eux aussi. Vous avez vu que les Serbes avaient, dans la majeure

  8   partie des cas, des armes stationnaires qui ne bougeaient pas beaucoup,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  De façon générale, l'armée de la Republika Srpska ne déplaçait pas ses

 11   armes lourdes. Elle les gardait en un seul et même lieu, ce qui lui

 12   facilitait la tâche pour les surveiller.

 13   Q.  Merci. Dans la partie sud de Sarajevo, vous avez vu des positions

 14   d'artillerie serbe qui étaient observées par les observateurs, et lorsque

 15   les Serbes voulaient tirer à l'aide de leurs mortiers ou d'autres pièces

 16   d'artillerie ils informaient de leurs intentions les observateurs en leur

 17   demandant d'être présents et d'observer les choses s'ils le souhaitaient,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  C'est effectivement ce qui s'est passé en de nombreux cas.

 20   Q.  L'armée de la Republika Srpska ne tirait pas sans que les observateurs

 21   de la FORPRONU ne soient pas mis au courant, mais parfois les observateurs

 22   n'ont pas pu constater s'il s'agissait bien de la cible qui leur avait été

 23   annoncée par les Serbes; c'est bien cela ?

 24   R.  Ce n'était pas toujours cela, à savoir que la VRS tirait uniquement

 25   après en avoir averti les observateurs. Nous n'avions pas toujours

 26   d'observateurs sur place, et ce qui est certain c'est que nous n'avions pas

 27   d'observateurs déployés à de nombreuses positions de tir qui se situaient

 28   soit au sud, soit au nord de la cité, donc position de la VRS. Parfois, on

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  1   nous demandait d'envoyer des observateurs pour pouvoir confirmer qu'il y a

  2   eu coups de feu, et normalement, cela se faisait lorsque la VRS ripostait à

  3   une attaque lancée par l'armija. Parfois, compte tenu du petit nombre

  4   d'observateurs que nous avions, il y avait des coups de feu qui étaient

  5   tirés sans que l'on en soit informés au préalable. A un moment au sud de la

  6   ville, il m'est arrivé de ne disposer que de cinq observateurs pour la

  7   ville qui avait l'attaque lancée de Sarajevo. Donc ce n'était simplement

  8   pas possible physiquement, matériellement, d'envoyer des observateurs à

  9   toutes les positions où était déployée la VRS.

 10   Q.  Très bien. Alors, vous aviez en tout combien d'observateurs du côté

 11   serbe, combien d'emplacements ?

 12   R.  Nous avions une série de positions, et je pourrais essayer de les

 13   énumérer toutes, mais disons à peu près huit en été 1993, et un minimum de

 14   deux observateurs était normalement déployé à chacune de ces positions,

 15   donc de deux à un maximum de cinq.

 16   Maintenant, la situation évoluait tous les jours, pas seulement à Sarajevo

 17   mais également dans le reste de la Bosnie et en Croatie et en Macédoine,

 18   sans parler de la Serbie. Là aussi, nous avions des observateurs qui se

 19   déplaçaient continuellement. Puis vous aviez des gens qui tombaient malade,

 20   vous aviez des permissions, donc la situation changeait tous les jours.

 21   Q.  Ai-je raison de dire que vous aviez trois à quatre fois plus

 22   d'observateurs sur le territoire serbe de Sarajevo que du côté musulman ?

 23   Vous en avez trois d'un côté, et jusqu'à 11 de l'autre côté, c'est bien

 24   cela, y compris la partie nord du champ de bataille ?

 25   R.  Cela n'est pas exact. Nous avions cinq équipes du côté Papa et, comme

 26   je l'ai dit, huit ou neuf du côté Lima. Du côté Papa, les équipes

 27   correspondaient, en leur taille, aux autres, mais il faut savoir que le

 28   territoire couvert était beaucoup plus restreint. En fait, c'était très

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  1   compact, c'était à l'intérieur de la ville et ils étaient déployés de

  2   l'ouest à l'est de la ville, donc il y avait -- le territoire était moins

  3   important qu'à l'extérieur de la ville.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 6222, s'il vous plaît, de ce même

  5   document. C'est la page qui correspond à la pagination du compte rendu

  6   d'audience, et nous verrons qu'elle est la page qui s'affiche sur le

  7   document lui-même. 165 c'est la page du document.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  J'appelle votre attention sur les lignes 15 à 17. C'est votre réponse :

 10   "Mais, bien entendu, affirmait toujours qu'il s'agissait d'une cible

 11   militaire, et il n'y avait aucun moyen de vérifier ce qui se situait de

 12   l'autre côté."

 13   Etes-vous d'accord pour dire que les Serbes qui vous avertissaient qu'ils

 14   allaient ouvrir le feu sur telle ou telle cible ne savaient pas que vous

 15   n'étiez pas en mesure de vérifier cela avec vos camarades de l'autre côté ?

 16   Q.  Excusez-moi. Vous vous référez aux observateurs militaires des Nations

 17   Unies déployés du côté de Lukavica ?

 18   Q.  Mais c'est votre réponse :

 19   "Donc ils nous disaient" - ligne 11 - "ils nous disaient sur quoi ils

 20   tiraient. Ils nous disaient éventuellement que c'était une riposte suite à

 21   une attaque lancée sur certaines positions ou villages ou zones. Toujours,

 22   ceux qui ouvraient le feu disaient à l'équipe qui les supervisait, qui

 23   était chargée de les observer, sur quoi ils tiraient, mais ils affirmaient

 24   toujours, bien entendu, que cette cible était une cible militaire et il n'y

 25   avait aucun moyen de vérifier ce qui se trouvait de l'autre côté."

 26   Alors est-ce que vous acceptez que les Serbes pensaient que vous étiez en

 27   mesure de vérifier cela avec vos collègues qui étaient déployés du côté

 28   Papa ?

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  1   R.  Je ne peux ni affirmer, ni réfuter ce fait.

  2   C'est ligne 21 que vous avez dit :

  3   "Est-ce que vous êtes d'accord que les Serbes qui étaient informés du fait

  4   qu'on allait ouvrir le feu contre telle ou telle cible…"

  5   C'est la raison pour laquelle je vous ai demandé si vous pensiez aux

  6   observateurs des Nations Unies qui travaillaient du côté de la VRS, mais je

  7   maintiens ce qui a été dit dans l'affaire précédente, lignes 11 à 17.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ligne 21, c'est une erreur d'interprétation.

  9   C'est justement ce qui figure page 77 qui est correct.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Donc les Serbes en informaient, en avertissaient, disaient qu'ils

 12   allaient ouvrir le feu contre telle ou telle cible pour telle ou telle

 13   raison, les raisons qu'ils invoquaient. Donc je suppose qu'ils ne pouvaient

 14   pas savoir que vous n'aviez aucun moyen de vérifier de quelle cible il

 15   s'agissait en réalité.

 16   Mais nous avons à présent une interprétation exacte. Merci.

 17   En juillet 1993, vous avez appris que les convois humanitaires de Hrasnica

 18   et d'Igman ont été attaqués, attaqués depuis le territoire contrôlé par

 19   l'ABiH et des victimes civiles ont été comptées à ces occasions.

 20   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Je voulais simplement vérifier s'il y a

 23   bien eu une question de posée après le premier paragraphe, lignes 21 à 24,

 24   page 77.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais on m'a répondu. M. le Lieutenant-Colonel

 26   ne peut ni affirmer, ni rejeter ce que les Serbes savaient. Ma thèse est

 27   que les Serbes ne savaient pas qu'il n'y avait pas de vérification, mais le

 28   témoin a dit qu'il ne pouvait ni accepter ni rejeter cela, qu'il ne pouvait

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  1   pas le savoir.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux

  3   ajouter quelque chose ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Juste pour vous expliquer comment on

  6   fonctionnait à l'époque, pour que ce soit plus clair pour les Juges. Les

  7   observateurs du côté Papa, du côté de la Présidence, étaient donc d'un

  8   côté, et puis nous avions des observateurs du côté Lima, du côté du QG de

  9   la VRS, la caserne de Lukavica, et nous avions deux types de rapports. Des

 10   rapports shootrep et des rapports increp. Donc, les shootrep étaient des

 11   rapports sur des tirs sortants et les autres étaient des rapports sur des

 12   tirs entrants, donc en fonction du côté qui tirait.

 13   Donc mes équipes du côté de la VRS faisaient des rapports sur les tirs

 14   sortants, et puis de l'autre côté, nous avions des équipes qui faisaient

 15   des rapports sur des tirs entrants, donc les explosions dans notre zone, et

 16   par analogie, du côté Papa, vous aviez exactement la même procédure. Donc

 17   tous les jours, on établissait la corrélation au niveau du QG du secteur

 18   Sarajevo. Donc, c'est à ce niveau-là qu'on comparait les deux, et de notre

 19   point de vue, nous étions tellement occupés de répertorier ces incidents et

 20   de faire nos patrouilles et de parler aux gens et d'essayer de mettre sur

 21   pied les cessez-le-feu que je ne peux pas savoir si cela a été fait à un

 22   niveau supérieur par rapport à nous. Mais tous les jours, il y avait des

 23   rapports sur les tirs entrants et sortants qui étaient envoyés des deux

 24   côtés au QG, et donc, tous les jours, cela faisait partie de notre rapport

 25   de situation du secteur Sarajevo, donc des deux côtés, donc qui allaient au

 26   commandement de l'ABiH et au QG de la FORPRONU. Donc, on ne pouvait pas --

 27   enfin, en fait, minute par minute, on pourrait établir cette corrélation.

 28   Mais je dois souligner que nous n'avions pas des chiffres très importants

Page 9740

  1   et que nous n'entendions pas toujours des tirs ou des pilonnages ou des

  2   tirs entrants. Nous ne le remarquions pas toujours.

  3   Je ne sais pas si cela peut être utile aux Juges de la Chambre.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  5   M. KARADZIC : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Q.  Mais quoi qu'il en soit, vous aviez des observateurs du côté serbe et

  7   vous en aviez davantage que du côté Papa, n'est-ce pas ? Vous aviez plus de

  8   postes; sinon, plus de personnel en tant que tel ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Dans votre déclaration du mois de décembre 1995, du 13 au 15

 11   décembre 1995, page 4, vous dites qu'avant  d'ouvrir le feu avec leurs

 12   pièces d'artillerie, qu'ils en avertissaient les observateurs, qu'ils les

 13   avertissaient de leurs intentions. C'est là que j'ai trouvé cette

 14   référence, et puis les autres viennent de vos témoignages devant le

 15   Tribunal. Vous vous souvenez d'avoir dit cela ?

 16   R.  Oui, tout à fait. Mais je pense que j'ai limité cela. J'ai dit que cela

 17   concernait Lima 5 et pas nécessairement toutes les positions. Du côté nord

 18   de la ville, la VRS était beaucoup plus discrète que les brigades qui

 19   étaient déployées au sud, où nous semblions avoir un meilleur rapport, si

 20   vous voulez. Dans le nord, nous avions énormément de problèmes pour obtenir

 21   des informations de la part des brigades. Puis dans le secteur nord, nous

 22   avions des problèmes relatifs à la liberté de circulation.

 23   Q.  Je vous remercie. Vos collègues sur le territoire musulman sont venus

 24   déposer ici et ils ont dit que leur liberté de mouvement était

 25   considérablement limitée; le saviez-vous ?

 26   R.  En fait, oui, parce que j'en ai parlé, mais moi-même, je n'ai pas eu ce

 27   type d'expérience.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 119, s'il vous plaît, du document

Page 9741

  1   précédent. Il y est question de cette attaque menée d'Hrasnica et de

  2   Dobrinja sur un convoi humanitaire et sur des civils. Donc, la question,

  3   ligne 7, et puis vous répondez ligne 18.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Voyez-vous cette page ? Donc, vous en avez entendu parler, de ces

  6   incidents, qu'il y a eu des coups de feu tirés depuis le côté musulman sur

  7   les convois humanitaires d'Hrasnica et de Dobrinja, et qu'il y a eu des

  8   victimes civiles à cette occasion ?

  9   R.  Il est question d'Hrasnica et d'Igman. Oui, j'en ai entendu parler,

 10   mais comme je le dis ligne 18, je ne le savais pas directement. En fait,

 11   cela se serait passé avant que je ne sois arrivé à Sarajevo.

 12   Q.  Merci. Je voudrais également savoir si dans le cadre de ce témoignage,

 13   vous avez confirmé -- ou non, c'est plutôt votre déposition du mois de

 14   décembre 1995. Vous y dites que, personnellement, vous n'avez jamais pu

 15   constater, et que l'intention était d'attaquer des cibles civiles. Donc

 16   s'agissant des groupes Lima 5 et 8. Il y a eu nombre d'activités militaires

 17   entre les deux parties, et il est arrivé que la VRS pilonne Hrasnica et

 18   Igman suite à des tirs entrant venus de ces positions de la part de l'ABiH.

 19   Donc c'est votre déclaration 13 au 15 décembre 1994, page 3.

 20   Vous souvenez-vous d'avoir déclaré cela ?

 21   R.  Oui, tout à fait. C'était vrai.

 22   Q.  Je vous remercie. Pendant que vous étiez en poste à Lukavica, vous avez

 23   pu constater des tirs entrant qui provenaient de la ville; c'est bien cela

 24   ?

 25   R.  Oui. A la fois, il y a eu des tirs d'obus de mortier et des tirs de

 26   tireurs embusqués.

 27   Q.  Je vous remercie. Vous entreteniez de bonne relation avec la population

 28   et avec l'armée de la Republika Srpska avec qui vous aviez des contacts

Page 9742

  1   dans ce secteur au sud de Sarajevo; c'est bien cela ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci. De même, vous avez pu constater que l'ABiH a utilisé ces

  4   mortiers près du QG de la FORPRONU et depuis l'hôpital de Kosevo ?

  5   R.  C'est ce qu'on m'a dit. Je ne l'ai jamais vu de mes propres yeux.

  6   Q.  Merci. Le 26 mai 1993, l'ABiH attaque depuis Hrasnica et Igman, une

  7   zone civile sur le territoire serbe, elle s'est servie de mortier de 82

  8   millimètres à 10 heures 58. 13 obus ont été tirés, et un feu d'infanterie a

  9   été ouvert, et la VRS a riposté à 11 heures 40 en tirant dix obus. Est-ce

 10   que c'est bien cela ? Nous pouvons relire cela, page 4 de cette même

 11   déclaration que vous avez faite en décembre 1995. Vous vous souvenez de

 12   cela ?

 13   R.  Je ne me souviens pas d'avoir donné cela très précisément, mais

 14   j'aurais pu le dire.

 15   Puisque ce type de situation s'est tout à fait produit à peu près à ce

 16   moment-là. Maintenant je ne peux pas vous affirmer que c'était bien le 26

 17   mai mais c'était un ou deux jours près. Donc je suppose que c'est exact.

 18   Q.  Merci. Le 19 juillet 1993, l'ABiH lance au mont Igman une grande

 19   attaque contre Ilidza et contre les Brigades d'Ilidza et d'Igman de la VRS.

 20   La VRS a riposté, le commandant Cojic de la Brigade d'Igman de la VRS a

 21   bouclé -- ou plutôt, s'est emparé d'Igman des mains de l'ABiH dans le cadre

 22   de sa contre-offensive et s'en est emparé donc et les Nations Unies ont

 23   insisté par tous les moyens pour qu'un cessez-le-feu soit imposé et ont

 24   commencé à patrouiller dans ce secteur ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Igman, l'Igman, à ce moment-là lorsque les Nations Unies se sont

 27   retirées, il a commencé à changer de main.

 28   Est-ce que vous vous souvenez d'avoir dit cela dans l'affaire Galic, page 6

Page 9743

  1   212 ?

  2   A un moment donné les Nations Unies se seraient retirées, repliées et ce

  3   qui s'est produit c'est que le mont Igman, enfin cette partie-là de la

  4   montagne, a commencé à changer de main et puis c'est l'ABiH qui s'en est

  5   emparée de nouveau.

  6   R.  Il est vrai que cela s'est produit, oui. Les forces de la FORPRONU se

  7   sont retirées de certaines positions. Il y a eu un accord de passer entre

  8   l'armija, la VRS et les Nations Unies, selon cet accord, toutes les

  9   positions étaient gelées, toutefois, il est vrai que l'armija a repris des

 10   positions qui avaient précédemment été des positions occupées par les

 11   Nations Unies. Donc en d'autres termes, ils ont avancé.

 12   Q.  Je vous remercie. Page 155 du document précédent. Du 26 mars 2002.

 13   De mémoire, est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a eu une grande crise

 14   entre la VRS et la FORPRONU ? Parce que l'ABiH est entrée sans y être

 15   autorisée sur ce territoire qui avait été remis à la FORPRONU.

 16   R.  Oui, je m'en souviens.

 17   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète qui avait été remis par les Serbes à la

 18   FORPRONU.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Le 5 décembre 1993, vous vous rendez à Kiseljak pour une conférence,

 21   vous passez du côté Papa, vous voyez l'hôpital de Kosevo, et vous avez

 22   également eu l'occasion de voir que deux infirmières et un médecin avaient

 23   été tués par un obus. Vous avez vu un trou dans un mur. Un trou d'un mètre,

 24   d'un mètre de diamètre et ce trou était quasiment un cercle idéal.

 25   Vous vous en souvenez ?

 26   R.  C'est presque exact. Je n'ai pas vu qu'il y a eu des infirmières ou de

 27   médecins qui étaient tués. C'est ce qu'on m'a dit quand je suis arrivé sur

 28   place. On m'a dit que lorsque l'obus a touché l'hôpital que c'est ce qui

Page 9744

  1   s'est passé. Mais cela faisait un moment que cela s'était produit.

  2   Effectivement, j'ai vu ce trou dans le mur, et la forme du trou était un

  3   cercle quasi parfait.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la page 128 de

  5   ce document, s'il vous plaît, pour voir votre conclusion, à savoir que

  6   d'après l'emplacement du trou et d'après l'orientation votre conclusion

  7   lignes 15 à 17 consiste à dire que c'était plutôt des tirs venus de la

  8   ville de l'ABiH que de la VRS.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  C'est bien cela ?

 11   R.  Oui, c'était ma conclusion.

 12   Q.  Merci. Lorsque nous avons eu un entretien nous nous sommes mis d'accord

 13   sur un point, à savoir que pendant vos réunions d'information on vous a mis

 14   en garde sur un point, à savoir que les forces musulmanes déployées dans la

 15   ville risquaient de déplacer des corps, des cadavres suite à tel ou tel

 16   incident. C'était une mise en garde qui a bien existé, n'est-ce pas, parmi

 17   les membres de la FORPRONU ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Merci. Il y a eu un pilonnage de l'hôpital de Kosevo, qui semblait

 20   avoir été causé par un char de la BiH situé au nord de l'hôpital; est-ce

 21   que cela est vrai ?

 22   R.  C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé, oui.

 23   Q.  Merci.

 24   R.  Mais, bien entendu, je n'ai pas parlé de "chars de l'armée musulmane."

 25   Ce n'est pas le type de formulation que j'utilisais.

 26   Q.  L'armée de BiH.

 27   R.  Ok.

 28   Q.  C'est comme ça que vous l'appelez. Mais vous savez, nous aussi nous

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  1   sommes des Bosniaques et nous n'aimons pas voir ce monopole lorsqu'on

  2   utilise cet attribut. Que ce soit les Serbes, les Croates ou les Musulmans,

  3   nous sommes tous des Bosniaques.

  4   Alors est-ce que vous vous souvenez que vous étiez d'accord sur le fait que

  5   les --

  6   R.  -- ainsi que les Monténégrins. C'est des Monténégrins.

  7   Q.  Oui, tout à fait.

  8   Est-ce que vous êtes d'accord que votre interprétation était la suivante, à

  9   savoir que la partie musulmane ou bosniaque, comme vous voulez, qu'elle

 10   tirait un profit politique de ces incidents et que, souvent, ces incidents

 11   se sont produits au moment où on allait se réunir dans le cadre des

 12   conférences internationales ?

 13   R.  Oui, tout à fait. C'était mon opinion, mais c'était mon opinion

 14   personnelle. Ce n'était pas la position adoptée par les Nations Unies.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faudra ajouter la fin de votre

 16   réponse, qui n'a pas été consignée parce que les voix se chevauchaient.

 17   Vous avez probablement répondu en B/C/S, ce qui n'a pas pu être enregistré

 18   par le sténotypiste.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai ajouté que, le cas échéant, les

 20   Monténégrins eux aussi pourraient être considérés comme Bosniaques.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais pas tous, évidemment.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Je voulais réagir juste par rapport au

 25   compte rendu d'audience.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci.

 27   Monsieur Karadzic.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

Page 9746

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Vous avez pu constater que la VRS était composée de soldats qui

  3   vivaient littéralement sur la ligne de front, ou très près, et qu'ils

  4   n'avaient pas des casernes où ils auraient été stationnés comme une armée

  5   professionnelle de métier le ferait. C'était simplement une armée populaire

  6   composée d'hommes du cru.

  7   R.  Oui, tout à fait, sans aucun doute. C'est vrai. La grande majorité des

  8   personnes que j'ai rencontrées, des membres de la VRS, c'était des hommes

  9   du cru. Ils vivaient à Vojkovici, à Gornji Kotorac et Kasindol. Un grand

 10   nombre d'entre eux étaient venus de la ville -- du centre de la ville de

 11   Skenderija, puis de Novo Sarajevo, de différents endroits. Ils sont venus

 12   comme personnes déplacées. C'était des gens du cru. Il y avait bien entendu

 13   quelques personnes qui étaient venues d'ailleurs, de Serbie, de Monténégro,

 14   mais pour la plupart, c'était des gens du coin.

 15   Q.  Merci. Vous ne connaissiez pas le positionnement précis des unités de

 16   la BiH à l'intérieur de la ville. Vous ne saviez pas exactement où étaient

 17   leurs positions de tir ni leur QG, mais vous êtes d'accord pour dire que

 18   c'était -- que ces emplacements constituaient des cibles militaires

 19   légitimes ?

 20   R.  Dans une situation de guerre, les cibles militaires légitimes existent

 21   et elles se composent d'unités et d'installations militaires.

 22   Q.  Merci. Vous connaissiez parfaitement le manque d'équilibre entre les

 23   effectifs d'un côté et de l'autre. Vous avez remarqué que la VRS utilisait

 24   de manière effective ses pièces d'artillerie pour riposter, pour détourner,

 25   pour compenser cet avantage qui était celui de la BiH, quant à l'effectif

 26   qu'ils avaient à leur disposition ?

 27   R.  Oui, c'était assez clair. Le nombre de militaires du côté de l'armija

 28   était considérablement plus important que du côté de la VRS pour ce qui est

Page 9747

  1   de l'infanterie. Donc la VRS utilisait l'artillerie pour compenser le fait

  2   qu'ils avaient beaucoup moins d'hommes.

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous vous souvenez qu'il y a eu des attaques lancées

  4   par l'infanterie de la BiH, par exemple sur la route Lukavica-Pale, et

  5   qu'il y a eu souvent des morts, 130 par rapport à 3 soldats serbes, et

  6   cetera. Vous vous souvenez de ces pertes dans les rangs de l'armée

  7   musulmane ?

  8   R.  Je me souviens par exemple qu'il y a eu une attaque de ce genre fin mai

  9   1993. C'était [inaudible]. On avait attaqué la route qui allait de Lukavica

 10   à Pale. Je me souviens que la présidence avait dit ainsi que nos

 11   observateurs militaires qui se trouvaient du côté de la présidence, que 100

 12   soldats avaient été tués et qu'en fait, ces soldats avaient été tués qui

 13   étaient opposés aux soldats de la VRS. Ils n'étaient pas du tout préparés.

 14   C'était des soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Il n'y avait aucun

 15   tir de couverture et aucun pilonnage préparatoire.

 16   Q.  Merci. Vous auriez pu voir que les Serbes, le côté serbe ne contrôlait

 17   pas tout Ilidza ni tout Vogosca. Les Serbes ne contrôlaient que les zones

 18   serbes, par exemple, Hrasnica. La partie musulmane d'Ilidza, elle était

 19   comme Hrasnica, sous contrôle musulman.

 20   R.  J'ai cru comprendre qu'à Hrasnica ou à Ilidza, avant la guerre, la

 21   population était mixte, mais ce n'est pas comme cela que je l'ai perçu moi.

 22   Il est certain qu'il y a eu de forts mouvements de population, ce qui veut

 23   dire qu'au moment où moi j'étais sur place, c'était surtout des Musulmans

 24   de Bosnie qui habitait Hrasnica, et Ilidza était divisée en deux parties.

 25   Il y avait d'un côté la population serbe, il y avait aussi la population

 26   croate et la population musulmane.

 27   Q.  Merci. Nous nous sommes rencontrés et vous avez à ce moment-là été

 28   d'accord pour dire que les lignes traversaient la ville même, que ces

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  1   lignes, au fond, ont divisé la ville pendant la guerre et qu'elles n'ont

  2   pas beaucoup changées, qu'elles ont été assez stables pendant la durée de

  3   votre mandat ?

  4   R.  Oui, elles étaient pratiquement statiques. Pendant le temps que j'ai

  5   passé en ex-Yougoslavie de mai 1993 à juillet 1994, très très peu de choses

  6   ont changé dans la ville de Sarajevo pendant cette période.

  7    Q.  Mais, Lieutenant-colonel, je tiens à vous remercier d'avoir accepté de

  8   rencontrer la Défense, et je vous remercie d'être venu témoigner.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est ainsi que je terminerais mon contre-

 10   interrogatoire.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.

 12   Madame Edgerton, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] Une seule sur -- en tout cas, un seul point

 14   qui découle de la page 85, lignes 22 et 23 du compte rendu d'audience

 15   d'aujourd'hui.

 16   Nouvel interrogatoire par Mme Edgerton :

 17   Q.  [interprétation] A cet endroit, Colonel, voici ce que vous demandait M.

 18   Karadzic :

 19   "Même si vous ne saviez pas quel était le déploiement précis de ces unités,

 20   de ces unités de l'ABiH à Sarajevo, où se trouvaient les unités, les

 21   positions de tir, le QG; vous êtes d'accord pour dire que c'étaient des

 22   cibles militaires légitimes."

 23   Voici votre réponse :

 24   "En guerre -- en temps de guerre, il existe bien des cibles militaires

 25   légitimes, à savoir des unités et des installations militaires, oui."

 26   Vous souvenez de cet échange qui s'est déroulé, il y a quelques instants ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Ceci a semé une certaine confusion dans mon esprit. En effet, j'ai

Page 9749

  1   toujours cru comprendre que la définition de cible militaire est tributaire

  2   de plusieurs facteurs; est-ce que vous parliez d'objet militaire plutôt que

  3   de cible militaire ?

  4   R.  Ce sont des objets militaires, mais je ne voulais pas étoffer trop mon

  5   propos. Des cibles militaires, ce sont des objets qui donnent l'avantage à

  6   une partie ou à l'autre. Physiquement, quand je dis avantage, c'est un

  7   avantage physique, matériel, moral ou aussi balistique. Donc une cible

  8   militaire, ça a une portée bien plus grande que le seul fait d'avoir des

  9   unités ou un QG.

 10   Q.  Merci.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 12   Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Edgerton, merci.

 14   Ceci met fin à votre déposition, Lieutenant-colonel. Merci au nom des Juges

 15   de la Chambre de première instance et du Tribunal d'être venus déposer.

 16   Vous pouvez désormais disposer.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges.

 18   [Le témoin se retire]

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement des

 20   pages, oui, je vois, je vois que le document tout entier a été versé au

 21   dossier;  inutile de demander le versement de telle ou telles pages

 22   isolées. Merci.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il est possible d'entamer

 24   l'audition du témoin suivant ou est-ce que nous allons lever l'audience

 25   pour aujourd'hui ?

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] M. Begic n'a pas pu quitter la Bosnie

 27   en raison des conditions climatiques, ce qui veut dire qu'il n'est pas

 28   disponible aujourd'hui. J'ai parlé à Me Robinson, je crois comprendre que

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  1   M. Karadzic est d'accord pour que le prochain témoin soit M. Bell. Je pense

  2   qu'il est préférable qu'il commence sa déposition demain matin, plutôt que

  3   de maintenant.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Ce sera donc tout pour

  5   aujourd'hui.

  6   Sauf que Me Robinson voulait intervenir.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Accordez-moi un instant pour exprimer

  8   une objection, en ce qui concerne la déposition de M. Bell. Me le

  9   permettez-vous ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Vous savez, nous nous sommes déjà opposés à

 12   la déposition de correspondant de guerre. J'ai reçu des réactions très

 13   négatives de la Chambre, il n'en demeure pas moins que cette question

 14   risque d'aller en appel, et nous demandons l'exclusion de la déposition de

 15   Martin Bell, parce qu'il est maintenant correspondant de guerre à la

 16   retraite. Nous pensons toujours qu'il n'est pas à même ici de présenter des

 17   éléments et qu'il ne peut pas renoncer à son état de correspondant de

 18   guerre. Donc je voulais le préciser pour que ceci soit acté au dossier.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous connaissez la position de la

 20   Chambre, n'est-ce pas, la négative même si vous avez raison ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je saisis l'occasion pour vous dire ceci

 23   : je suppose que vous êtes au courant du fait que le Règlement de procédure

 24   et de preuve a été modifié récemment, surtout en ce qui concerne le constat

 25   judiciaire, s'agissant de l'authenticité des éléments de preuve

 26   documentaires. Je ne sais pas si les parties souhaitent présenter des

 27   arguments, libre à elle de le faire.

 28   Elles disposent jusqu'à la fin de la semaine pour le faire; est-ce que

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  1   raisonnable ? Je ne sais pas s'il est possible de se prononcer sur la

  2   question avant les vacances judiciaires. Mais je vous serais reconnaissant

  3   s'il vous était possible de présenter vos écritures, en tout cas, avant le

  4   début de l'an prochain, si c'est faisable.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, pensez-vous à la

  7   requête pendante, en ce qui concerne les écoutes téléphoniques ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Vous aurez un certain délai, un

  9   délai d'une semaine pour répondre aux écritures de l'Accusation, si elle en

 10   dépose.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Merci.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons l'audience demain

 13   matin, à 9 heures 00. L'audience est suspendue.

 14   --- L'audience est levée à 14 heures 09 et reprendra le mardi 14 décembre

 15   2010, à 9 heures 00.

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