Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 17 février 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Aujourd'hui,

  6   nous allons entendre la déposition du Témoin KDZ041 par vidéoconférence.

  7   M. GAYNOR : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que vous avez quelque chose à

  9   nous présenter avant que la déposition ne commence.

 10   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, deux choses. Tout d'abord, je crois

 11   comprendre que le témoin a amené avec lui des notes. Il les a avec lui, et

 12   il souhaite pouvoir les consulter lors de sa déposition. Il se peut qu'il

 13   en parle à la Chambre, mais je lui ai conseillé qu'il serait peut-être plus

 14   judicieux de placer ces notes d'un côté -- à côté de lui lors de sa

 15   déposition et d'essayer de témoigner sans les consulter.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous reviendrons là-dessus. Je vous

 17   remercie de cette information.

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Pour ce qui est de l'autre requête, je

 19   souhaiterais que nous passions à huis clos partiel. Il s'agit de la requête

 20   que nous avions déposée confidentiellement.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Huis clos partiel.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 23   partiel.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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  7   [Audience publique]

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Avant que le témoin n'arrive, justement je

  9   souhaiterais être entendu à propos d'une requête relative au contre-

 10   interrogatoire de ce témoin.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie.

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Nous aimerions demander -- nous aimerions,

 13   en fait, surseoir au contre-interrogatoire de ce témoin, car il nous a été

 14   indiqué dans une requête que nous avons reçue hier soir, fort tard, et

 15   d'ailleurs, je ne pense pas que M. Karadzic ait reçu ce renseignement, mais

 16   il nous a été communiqué que le témoin avait déjà déposé dans un tribunal

 17   en Bosnie, à propos justement des mêmes événements, et il y a d'autres

 18   détails qui nous ont été fournis ce matin par l'Accusation à propos de la

 19   déposition qui a eu lieu en 2009. Alors, nous n'avons pas de déclaration

 20   préalable pour ce témoin, ce témoin n'a pas témoigné précédemment. Ce qui

 21   fait que le compte rendu de cette déposition à laquelle je viens de faire

 22   référence sera le seul document que nous pourrons consulter pour nous

 23   préparer au contre-interrogatoire. Nous pourrons ainsi constater quelles

 24   sont les questions qui lui ont été posées par un juge, si tel est le cas.

 25   Donc nous pensons que cela est beaucoup plus important que nous ne le

 26   pensions.

 27   Le témoin n'a pas souhaité être interrogé par notre équipe de la Défense.

 28   Donc nous n'avons pas eu, nous, la possibilité d'être mis au courant de ce


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  1   fait dont le témoin a parlé lors de sa déposition précédente, et je vous

  2   l'ai déjà dit, cela nous a été communiqué hier soir fort tard.

  3   Donc nous avons, vous le savez, déposé une requête pour l'Accusation afin

  4   que des questions puissent être posées à ces témoins, et pour que nous

  5   puissions, nous, obtenir les déclarations préalables pour les témoins ou

  6   les dépositions recueillies dans d'autres procès, dans des cours ou des

  7   tribunaux en Bosnie, par exemple, que nous ne -- dont nous ne disposons

  8   pas, et nous reconnaissons, en fait, que vous n'avez pas fait droit à cette

  9   requête du 12 janvier 2011, ainsi qu'à la requête du 8 février. Donc nous

 10   avons pris en considération le fait que vous avez dit au Dr Karadzic de ne

 11   pas se battre contre des moulins à vent, et de faire en sorte de ne pas

 12   toujours essayer d'obtenir le moindre document de la moindre procédure, et

 13   vous lui avez dit de consulter un conseil de la Défense expérimenté. Je

 14   suis un conseil de la Défense expérimenté, me semble-t-il, et je vous

 15   parlerai de mon propre vécu à propos de ces déclarations préalables, et

 16   notamment à propos de dépositions importantes qui doivent être évaluées

 17   pour établir la crédibilité des témoins.

 18   Si vous prenez le jugement -- un jugement du TPIR à Arusha, vous verrez, en

 19   fait, qu'il y a eu un incident où des témoins avaient témoigné avec octroi

 20   de pseudonyme, et lorsqu'ils sont revenus au Rwanda, dans leur -- chez eux

 21   donc, avec leurs propres noms, il s'agissait de M. Rwamakuba, il faut

 22   savoir qu'à la suite de cette déposition qui -- de ces dépositions qui

 23   avaient été faites sous pseudonyme à Arusha, M. Rwamakuba a été acquitté

 24   parce que justement ces dépositions avaient laminé, et avaient sapé en

 25   quelque sorte la déposition qu'il avait fait devant le TPIR, et il avait

 26   été indiqué que ces témoignages avec octroi de pseudonyme avaient

 27   véritablement laminé la crédibilité des témoins à charge. Nous pensons que

 28   c'est une excellente raison qui explique pourquoi nous, nous devons avoir


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  1   accès aux contre-interrogatoires et aux dépositions des témoins avant nos

  2   contre-interrogatoires.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Puis-je répondre ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  5   M. GAYNOR : [interprétation] Premièrement, je vous dirais que nous ne

  6   disposons pas ce texte en question. Deuxièmement, nous l'avons découvert

  7   hier, vers 15 heures 15, nous avons découvert que le témoin avait déjà

  8   témoigné devant un tribunal de Bosnie-Herzégovine. Troisièmement, il a

  9   témoigné comme témoin protégé à ce moment-là. Alors, bien entendu,

 10   lorsqu'une personne témoigne et est protégée dans un tribunal dans son

 11   pays, il est évident que nous ne souhaitons pas enfreindre toute mesure de

 12   protection qui avait été en vigueur dans son pays. Quatrièmement, le témoin

 13   a accepté aujourd'hui que ce fait soit communiqué et que sa déposition

 14   préalable soit communiquée à la Défense de Karadzic, et nous en avons

 15   informé la Défense immédiatement, dès qu'il nous l'a indiqué. Puis, en

 16   dernier lieu, je dirais que, pour ce qui est du contre-interrogatoire, il

 17   est évident que la Défense peut commencer son contre-interrogatoire,

 18   pourra, bien entendu, obtenir le texte en question, et alors de deux choses

 19   l'une, soit il demande le versement au dossier de ce compte rendu ou de ce

 20   procès-verbal devant le tribunal en Bosnie-Herzégovine pour que cela soit

 21   versé au dossier, sans pour autant reconvoquer le témoin, ou alors il

 22   demande que le témoin soit reconvoqué pour une poursuite d'un contre-

 23   interrogatoire. Mais je pense qu'aujourd'hui, nous devrions commencer au

 24   moins le début du contre-interrogatoire.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'il s'agisse d'une violation, d'une

 26   infraction ou non, ça, c'est une autre chose. Mais pouvoir se préparer

 27   avant un contre-interrogatoire est une autre chose.

 28   Monsieur Tieger.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] J'ai eu une conversation avec M. Robinson ce

  2   matin et je vous dirais, à la suite de cette conversation, que j'ai été un

  3   tant soit peu étonné, pour dire le moins, que - comment pourrais-je

  4   m'exprimer - qu'en fait, il semblerait qu'il incombe à M. Gaynor d'indiquer

  5   ce dont M. Robinson est parfaitement au courant. En d'autres termes, nous

  6   venions de recevoir cette information. Nous sommes en train justement --

  7   nous voulons justement respecter l'accord qui a été conclu avec l'accusé

  8   pour -- lorsque lors des séances de récolement, des informations nous sont

  9   données, il n'y a pas eu de séance de récolement. Le témoin n'est pas venu

 10   ici puisqu'il est à Sarajevo. Donc M. Robinson nous a envoyé un courriel un

 11   peu plus tôt ce matin, à ce sujet. Nous en avons parlé avec lui, et il a

 12   accepté que l'Accusation ait agi de bonne foi, de façon proactive,

 13   conformément à l'accord qui avait été conclu pour obtenir tous les

 14   renseignements relatifs aux déclarations préalables. Donc je m'excuse de

 15   prendre la parole. Je ne l'aurais pas fait d'ailleurs, mais je dois dire

 16   que j'étais un peu -- je crains un peu -- après avoir entendu la façon dont

 17   M. Robinson a présenté la question, c'est pour cela que je me suis permis

 18   d'intervenir, puisque le  Tribunal ou la Chambre vient d'envisager la

 19   possibilité d'une infraction. Je pense qu'il n'est absolument pas question

 20   d'infraction ici, de violation.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Ce que j'entendais, c'était qu'en

 22   matière d'infraction relative aux obligations de communication, nous devons

 23   envisager ou voir si la Défense a bel et bien eu le temps nécessaire pour

 24   consulter les textes en question. C'est ce que je voulais dire. Mais

 25   visiblement, je n'ai pas été assez clair.

 26   Une petite minute, je vous prie.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Tieger, je dois vous dire


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  1   que je n'ai pas compris, en fait, que M. Robinson critiquait l'Accusation.

  2   D'après ce que j'ai entendu, d'après les propos qu'il a tenus,

  3   personnellement, j'en ai conclu que la conduite de l'Accusation avait été

  4   absolument sans faute. Mais peut-être, Monsieur Robinson, qu'il serait

  5   utile de commencer le contre-interrogatoire du témoin, d'entendre les

  6   réponses que ce témoin vous apportera, puis, ensuite, vous pourrez comparer

  7   ce qu'il aura dit avec le procès-verbal obtenu dans l'autre procès.

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je comprends ce que vous demandez, mais

  9   nous -- je pense, en fait, que nous allons nous lancer dans un contre-

 10   interrogatoire sans avoir obtenu aucun renseignement, ce qui pourrait, en

 11   fait, nous léser. Bon, dans d'autres cas, il s'agissait d'une déclaration

 12   supplémentaire, tel que, par exemple, avec le général Smith. Donc nous

 13   n'avions pas demandé de surseoir au début du contre-interrogatoire. Nous

 14   nous étions juste réservés le droit de convoquer à nouveau le témoin. Mais

 15   ici, je pense qu'il -- qu'en fait, il serait peut-être beaucoup plus

 16   négatif de commencer à se lancer dans un contre-interrogatoire. Je ne sais

 17   pas ensuite s'il faudra essayer de remettre les éléments du puzzle --

 18   enfin, je ne suis pas sûr.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous n'envisagions la

 20   question, j'aimerais vous poser une question, Monsieur Gaynor, est-ce que

 21   le témoin suivant est disponible ?

 22   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, oui, il se trouve à La Haye, mais je ne

 23   pense pas qu'il ait encore quitté son hôtel; donc, il n'est pas ici. Mais

 24   puis-je faire une observation à huis clos partiel, je vous prie ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons passer à huis clos

 26   partiel.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel]


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  2   [Audience publique]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous faisons droit à la

  4   requête, à la demande de déformation des traits du visage, et ce, pour les

  5   mêmes raisons pour lesquelles nous avions octroyé le pseudonyme à ce

  6   témoin.

  7    M. GAYNOR : [interprétation] Je vous en prie.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, Monsieur Gaynor, vous venez de

  9   m'indiquer que l'ordinateur du sténotypiste fonctionnait; c'est cela ?

 10   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, oui, c'est tout à fait cela, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la Chambre se rallie à la

 13   suggestion présentée par M. Gaynor, donc nous avons décidé de commencer à

 14   entendre le contre-interrogatoire de la Défense, et lorsque la Défense

 15   présentera une requête aux fins de reconvocation du témoin, nous étudierons

 16   cette requête en oubliant pas le fait qu'il y a ce texte qui vient de vous

 17   être communiqué. Donc nous traiterons cette requête favorablement.

 18   Je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin maintenant.

 19   [Le témoin déposer par vidéoconférence]

 20   M. LE GREFFIER : [via vidéoconférence] [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 22   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, prononcer

 24   la déclaration solennelle ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare que je dirai la vérités, toute la

 26   vérité et rien que la vérité.

 27   LE TÉMOIN : KDZ041 [Assermenté]

 28   [Le témoin répond par l'interprète] 


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que vous savez que, pour des

  2   raisons de sécurité, nous vous appellerons en utilisant votre pseudonyme,

  3   KDZ041, ou nous appellerons, Monsieur. Toute personne qui ne se trouve pas

  4   dans la salle d'audience ne pourra pas vous voir. Vous comprenez ? Est-ce

  5   que vous suivez mes propos, Monsieur ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends absolument rien.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous m'entendez maintenant, Monsieur ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas de traduction.

  9   M. LE GREFFIER [vidéoconférence]: [interprétation] Apparemment, Monsieur le

 10   Président, nous avons des problèmes techniques. Je suis en train demandé de

 11   l'aide.

 12   [L'interprétation en français sur le canal anglais]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, êtes-vous en mesure

 14   d'entendre ce qui se dit dans une langue que vous comprenez ?

 15   M. LE GREFFIER [vidéoconférence]: [interprétation] Monsieur le

 16   Président, apparemment le problème technique persiste, donc je vous

 17   demanderais d'avoir l'indulgence d'une certaine patience, je vais demander

 18   de l'aide.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous devrions suspendre dix

 21   minutes ? Oui, cela semble la meilleure solution. Nous allons donc

 22   suspendre dix minutes.

 23   --- La pause est prise à 9 heures 33.

 24   --- La pause est terminée à 9 heures 48.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour une nouvelle fois, Monsieur le

 26   Témoin. Etes-vous maintenant en mesure de suivre les débats dans une langue

 27   que vous comprenez ? Je vais essayer de répéter.

 28   Monsieur le Témoin, êtes-vous maintenant en mesure de suivre les débats


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  1   dans une langue que vous comprenez ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Vous le savez peut-être déjà,

  4   mais je voudrais tout de même vérifier, pour des raisons de sécurité,

  5   chacun s'adressera à vous en vous appelant simplement "Monsieur le Témoin"

  6   ou en utilisant votre pseudonyme, à savoir KDZ-041. Par ailleurs, vous vous

  7   êtes vu accorder les mesures de protection suivantes : déformation des

  8   traits du visage sur les écrans, ce qui signifie qu'en dehors des gens

  9   présents dans le prétoire, personne ne pourra voir les traits de votre

 10   visage. Vous avez compris ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Chaque fois que nous évoquerons des

 13   questions liées à votre identité, nous passerons à huis clos partiel ici

 14   même, ce qui aura pour conséquence que toute personne présente en dehors du

 15   prétoire n'aura pas la possibilité de suivre les débats et que le compte

 16   rendu d'audience ne révélera pas votre identité au public.

 17   Puis il y a un point que j'aimerais préciser avec vous : Vous souhaitez

 18   qu'une pause soit faite toutes les heures, n'est-ce pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais vous demander quelle est la

 21   durée que vous souhaitez pour ces pauses toutes les heures.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Entre 15 et 20 minutes.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous ferons donc une

 24   pause de 20 minutes toutes les heures.

 25   Monsieur Gaynor.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Je ne suis pas sûr que le témoin ait prononcé

 27   la déclaration solennelle, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il l'a fait.


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  1   M. GAYNOR : [interprétation] Ah. Dans ces conditions, tout va bien.

  2   Interrogatoire principal par M. Gaynor :

  3   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, bonjour.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Est-il exact que vous avez déjà fourni des déclarations aux autorités

  6   de Bosnie-Herzégovine ainsi que des renseignements au bureau du Procureur

  7   de ce Tribunal ?

  8   R.  Oui.

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Je demanderais l'affichage du document 65 ter

 10   numéro 90224.

 11   Q.  Dans l'immédiat, je vous demande, Monsieur le Témoin, si avec l'aide

 12   d'un témoin, vous avez relu une déclaration consolidée dans laquelle figure

 13   des éléments d'information pertinents que vous aviez déjà fournis dans un

 14   certain nombre de dépositions antérieures ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Etes-vous en possession de ce document, de cette déclaration consolidée

 17   en ce moment même ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Pouvez-vous confirmer que c'est bien votre nom qui apparaît en première

 20   page de ce document ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Si l'on vous interrogeait aujourd'hui au sujet des mêmes événements,

 23   fourniriez-vous à la Chambre de première instance les mêmes renseignements

 24   qu'à l'époque où vous avez été interrogé ?

 25   R.  Oui.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Je demande le versement de ce document, à

 27   conserver sous pli scellé, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.


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  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il devient la pièce P2310, conservée

  2   sous pli scellé, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais à présent donner lecture d'un

  4   résumé de la déposition du témoin, qui a été versée au dossier.

  5   Le témoin évoque les événements survenus dans la municipalité de Novi Grad.

  6   Momcilo Krajisnik était la personnalité la plus importante du SDS dans

  7   cette région. D'autres dirigeants militaires et politiques serbes de la

  8   région incluaient Jovan Tintor, Nikola Stanisic et Ranko Torbica. Nikola

  9   Stanisic et Ranko Torbica ont dit aux habitants musulmans --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous

 13   suivez les débats en ce moment ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Gaynor.

 16   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Nikola Stanisic et Ranko Torbica ont dit aux habitants musulmans de

 18   Ahatovici qu'ils seraient attaqués s'ils ne quittaient pas le village. Des

 19   groupes de Serbes en armes ont menacé et harcelé la population locale.

 20   En mai 1992, des familles serbes avaient quitté les environs d'Ahatovici.

 21   Des paramilitaires serbes au nombre desquels se trouvaient des hommes

 22   d'Arkan et des Aigles blancs sont arrivés dans le secteur. A la mi-mai, le

 23   téléphone et l'électricité ont été coupés. Le 27 mai 1992, des forces

 24   serbes accompagnées de chars et de blindés se sont emparés d'un certain

 25   nombre de positions aux environs de Ahatovici et ont ordonné aux habitants

 26   musulmans de se rendre. La résistance a été limitée. Une attaque plus ferme

 27   a été lancée par les forces serbes quelques jours plus tard. 15 à 20

 28   habitants musulmans ont été tués, et environ 130 maisons endommagées ou


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  1   détruites. Le témoin a essayé de fuir au sein d'un groupe comptant une

  2   trentaine d'hommes mais a été rattrapé par les force serbes. Le groupe a

  3   été divisé en deux et une quinzaine d'hommes ont été exécutés par les

  4   forces serbes. Jovan Tintor était présent peu de temps après l'exécution et

  5   a ordonné que les hommes survivants soient emmenés.

  6   Les hommes musulmans originaires d'Ahatovici ont été emmenés jusqu'à un

  7   lieu situé tout près d'un supermarché dans le voisinage de la caserne.

  8   Plusieurs hommes ont été emmenés par groupes de quatre et ont été roués de

  9   coups violemment par les soldats serbes et les habitants serbes de la

 10   région. Les hommes musulmans ont été emmenés et placés en détention dans

 11   deux camions citerne vides qui se trouvaient non loin de la caserne de

 12   Rajlovac. Pendant leur détention dans ces camions citerne, les hommes ont

 13   été sortis du camion et roués de coups. Le témoin était l'un des 55

 14   prisonniers à peu près qui a été emmené hors de cet endroit pour monter à

 15   bord d'un autobus conduit par un homme dont le nom est Zuti Tavarac [phon].

 16   Zuti Tavarac avait à ses côtés Jovan Tintor. L'autobus était escorté par

 17   quatre véhicules à bord desquels se trouvaient des hommes en armes.

 18   L'autobus s'est arrêté dans le village de Sokolina. Les hommes à bord de

 19   l'autobus ont reçu l'ordre de ne pas se lever; sinon, ils seraient abattus.

 20   Peu de temps après, les gardes et le chauffeur sont descendus de l'autobus,

 21   l'autobus a été la cible de tirs pendant une quinzaine de minutes, et

 22   pratiquement tous les hommes à bord de l'autobus ont été tués.

 23   Ceci est la fin du résumé public de la déposition du témoin.

 24   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais que nous parlions quelques instants de

 25   l'attaque qu'a subi le village d'Ahatovici, attaque au cours de laquelle 30

 26   hommes ont été arrêtés. Est-ce que vous en avez le souvenir ?

 27   R.  Oui. La moitié des gens ont été tués, et la moitié arrêtée.

 28   M. GAYNOR : [interprétation] Ceci figure en page 7. Je l'indique pour les


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  1   autres personnes présentes dans le prétoire.

  2   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez dit que la moitié des personnes avaient

  3   été tuées et j'aimerais que vous décriviez ce que vous avez vu exactement

  4   durant cet incident.

  5   R.  Lorsque nous avons essayé de nous enfuir vers la forêt la plus proche

  6   pour nous diriger vers Visoko, des tirs d'infanterie intenses ont été

  7   ouverts dans notre direction à partir de la forêt et du voisinage qui

  8   visaient un groupe qui se trouvait dans le verger. Une dizaine d'hommes ont

  9   été, soit, abattus par balle, soit, blessés. Moi, je faisais partie des

 10   blessés. J'ai été blessé à la jambe. Et comme il n'y avait aucune autre

 11   issu pour nous, les Chetniks nous ont encerclé et ceux qui pouvaient

 12   marcher ou n'étaient que légèrement blessés ont été emmenés jusqu'à un

 13   champ situé tout près. Les Chetniks nous ont dit de nous asseoir par terre

 14   et de mettre les mains sur la tête. A côté de moi se trouvait un cousin à

 15   moi qui m'a fait un signe de tête en me disant que Bato Arnautovic et

 16   Dragan Koprivica se trouvaient là. Ces deux hommes s'approchaient des

 17   cadavres et des blessés graves pour leur tirer une balle dans le corps.

 18   J'ai également remarqué que certains ont sorti leurs couteaux, ce sont

 19   emparés de Jusuf Zuljic, aka Juka, en les tenant par la tête et leur ont

 20   tranché la gorge. Ils ont fait la même chose à Nihad Tomo. L'un des soldats

 21   a crié dans notre direction : "Baissez la tête; sinon, je vais tous vous

 22   abattre." A ce moment-là, à partir de l'endroit du village de Kalkan

 23   [phon], où il y avait des maisons, un officier a fait son apparition et

 24   s'est rapproché. Un des soldats, Stevo Petricevic --

 25   Q.  Je me permets de vous interrompre ici, Monsieur le Témoin. J'aimerais

 26   vous poser quelques questions au sujet de ce que vous venez de nous

 27   décrire. Au sein du groupe d'hommes qui ont été abattus, vous avez dit que

 28   certains étaient déjà morts. Est-ce que vous pouvez nous donner une


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  1   estimation du nombre d'hommes qui ont été tués, effectivement, au cours de

  2   cet incident particulier et qui donc n'étaient pas déjà morts avant ?

  3   R.  Une quinzaine.

  4   Q.  Est-ce que l'un ou l'autre de ces 15 hommes étaient armés à ce moment-

  5   là ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  J'aimerais maintenant que nous parlions de l'arrivée de Tintor, que

  8   vous décrivez dans votre déclaration au paragraphe 27. D'abord, je vous

  9   demanderais si vous pouvez me donner le nom et prénom de Joja Tintor ?

 10   R.  Jovan Tintor, surnommé Joja.

 11   Q.  Dans votre déclaration au paragraphe 23, vous décrivez Tintor comme

 12   étant le commandant de la formation militaire ennemie, et à un autre

 13   endroit de votre déclaration, vous parlez de lui comme occupant un poste de

 14   commandement. Qu'avez-vous vu, effectivement, qui vous a conduit à penser

 15   qu'il était le commandant ?

 16   R.  Alors, dans un premier temps je vous dirais, qu'un de mes parents avait

 17   dirigé le groupe lorsqu'il est parti du village et lorsqu'ils sont allés

 18   négocier à la caserne Butile, donc il y avait Jovan Tintor, qui faisait

 19   partie de l'autre groupe, ainsi que Nikola Stanisic et des autres. C'est ce

 20   qui nous a raconté lorsqu'il est revenu de ces négociations.

 21   Puis j'aimerais également vous dire deuxièmement que lorsque nous avons été

 22   faits prisonniers, lorsque Joja Tintor s'est approché de nous, il s'est

 23   présenté dans un premier temps et il nous a demandé s'il y avait parmi nous

 24   des blessés. Ensuite il avait donc sa besace de soldat et il en a sorti

 25   quelque chose et nous l'a donné pour que nous n'ayons pas trop froid. Il

 26   portait l'uniforme d'été de la JNA. Il avait donc un pistolet au niveau de

 27   la ceinture. Il avait donc sa besace militaire, et sur la tête, il avait

 28   donc cette casquette avec l'étoile à cinq pointes.


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  1   Q.  Et que vous a relaté votre parent, lorsqu'il est revenu des

  2   négociations avec Tintor, que vous a-t-il dit de la position adoptée par

  3   Tintor ?

  4   R.  Il nous a dit qu'ils avaient négocié, qu'ils avaient donc exigé que les

  5   hommes dont l'âge étaient compris entre 15 ans et 70 ans se rendent à la

  6   caserne et qu'ils garantissaient leur sécurité. Toutefois, nos dirigeants

  7   n'ont pas accepté cela.

  8   Q.  Alors ce qui m'intéresse avant tout c'est la position de Tintor, que

  9   vous a dit ce membre de votre famille donc à propos de la position adoptée

 10   par Tintor ?

 11   R.  Tintor commandait une formation paramilitaire; bon, à mon avis, il

 12   s'agissait d'une formation militaire composée d'environ 2 000 hommes.

 13   Lorsqu'ils sont arrivés - comment pourrais-je le formuler - en fait, on

 14   avait l'impression qu'il s'agissait de fourmis.

 15   Q.  Une toute dernière question : Est-ce que Tintor vous a dit ou a fait

 16   quoi que ce soit pour que vous puissiez en déduire que c'était lui qui a

 17   suivi le commandement de cette formation paramilitaire ?

 18   R.  Nous étions assis là-bas, et tous ces soldats s'adressaient à lui en

 19   l'appelant commandant Joja. Comment pourrais-je m'exprimer ? D'ailleurs, je

 20   vous dirais que, même avant jusqu'au moment où Stevo Petricevic est arrivé

 21   - c'est un de mes voisins, hein, Stevo Petricevic - et il avait, de toute

 22   façon, un transmetteur radio sur le dos. Pour autant que je m'en souvienne,

 23   il s'agissait d'une radio militaire, une RUP 3. Donc il s'est adressé à lui

 24   en l'appelant commandant Joja. Il lui disait : Qu'est-ce qu'il faut faire,

 25   qu'est-ce que nous devons faire ? C'est comme ça qu'il lui parlait.

 26   Q.  Alors je voudrais maintenant que nous parlions de la période où vous

 27   avez été détenu à Rajlovac.

 28   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que le document 01428 de la liste 65


Page 12079

  1   ter pourrait être affiché.

  2   Q.  Alors une photographie va vous être montrée, Monsieur. Je vous serais

  3   reconnaissant de nous indiquer ce que la photographie montre.

  4   R.  Il s'agit de l'enceinte où se trouvait la compagnie pétrolière. Vous

  5   voyez les deux citernes. C'est là où nous avons été détenus ? Bon, vous

  6   avez la plus petite de ces citernes qui est une citerne à essence, il y

  7   avait environ 90 prisonniers qui s'y trouvaient, et la plus grande de ces

  8   citernes, la deuxième donc, était utilisée pour du gazole, et là il y avait

  9   d'autres prisonniers qui ont été détenus là-bas.

 10   Q.  Merci, Monsieur.

 11   M. GAYNOR : [aucune interprétation]

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais qu'il y avait environ 130 personnes

 13   qui avaient été détenues dans la deuxième citerne.

 14   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que cela pourrait un document --

 15   document public ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sera la pièce P2311.

 17   M. GAYNOR : [interprétation]

 18   Q.  Dans laquelle des deux citernes avez-vous été détenu vous-même, dans la

 19   plus petite ou la plus grande ?

 20   R.  Moi, j'étais dans la plus petite.

 21   Q.  Combien de nuits avez-vous passé dans cette citerne,

 22   si vous vous en souvenez ?

 23   R.  13 nuits.

 24   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire la surface de cette citerne ? Enfin,

 25   ce que j'entends, c'est ce qu'il y avait par terre, dans cette citerne.

 26   R.  Alors, en ce qui concerne la citerne, ils avaient fabriqué, ils avaient

 27   construit une porte, une porte qui faisait deux mètres sur deux mètres, et

 28   puis ensuite ils avaient -- ils y avaient placé une porte renforcée avec


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  1   une chaîne et un cadenas. Toutefois, ils avaient dû -- ils avaient bien dû

  2   couper l'ouverture, une ouverture pour faire la porte, et là, il y avait

  3   donc une bordure de 15 centimètres, ils n'avaient pas pu la transpercer, et

  4   en fait, c'est ce qui faisait soutènement. C'est là où l'eau s'était

  5   accumulée parce qu'il avait plu, ce qui fait que, dans la citerne, à

  6   proprement parler, il y avait toujours environ une quinzaine de centimètres

  7   d'eau. En 1985, toute cette base -- tout ce terminal pétrolier avait été

  8   abandonné --

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   R.  -- mais toutefois, l'on sentait encore les odeurs d'essence et de

 11   diesel, les odeurs qui étaient très mauvaises.

 12   Q.  Mais comment est-ce que vous avez pu dormir dans cette citerne s'il y

 13   avait 15 centimètres d'eau par terre -- enfin, sur le sol ?

 14   R.  Nous n'avons pas du tout dormi, nous n'avons pas fermé l'œil. Ceux qui

 15   le pouvaient -- il y avait certains qui essayaient de s'adosser contre le

 16   mur en métal, il y avait certains qui s'endormaient, et puis ils tombaient

 17   dans l'eau. Alors voilà, voilà comment les choses se passaient. Nous étions

 18   donc tous enfermés dans la moitié de cette citerne. On occupait la moitié

 19   de la citerne.

 20   Q.  J'aimerais vous parler d'une personne qui répond au nom de Hajro Delic.

 21   Il a bien été détenu avec vous, dans cette citerne, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous pouvez nous décrire brièvement ce qui lui est arrivé ?

 24   R.  En ce qui concerne Hajro Delic, le lendemain de notre arrivée dans la

 25   citerne, bon, il était avec son fils et son voisin; ils avaient été donc

 26   capturés tous les trois. C'est eux qui nous ont relaté les détails de leur

 27   capture. Toutefois, deux jours après environ, Nikola Stanisic est arrivé

 28   avec Sok et avec les membres de son Unité spéciale, et ils ont tout


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  1   simplement annoncé qu'ils avaient besoin de l'interroger à propos de

  2   quelque chose. Donc ils l'ont emmené quelque part ce jour-là, et ils ne

  3   l'ont ramené que le lendemain matin. Il avait été roué -- il avait été

  4   tellement roué de coups que sa langue était entièrement gonflé comme s'il

  5   s'agissait d'une balle en fait. Il était complètement contusionné, il

  6   pouvait à peine parler. Je le connaissais d'avant et je connaissais son

  7   fils également qui était là. Alors nous avons essayé de le tenir, de le

  8   soutenir, et il a juste réussi à nous dire que Nikola Stanisic lui avait

  9   demandé un million de marks pour le libérer. Puis ensuite lui et les

 10   membres de cette Unité spéciale, lui ont fait subir les pires exactions,

 11   l'ont roué de coups. Pour autant que je m'en souvienne, ils avaient eu des

 12   conflits avant la guerre.

 13   Q.  Mais est-ce qu'il a survécu à ses blessures ?

 14   R.  Voilà ce que je souhaitais venir : Au moment où il était en train de me

 15   raconter cela, une femme, qui portait une blouse blanche, est entrée dans

 16   la citerne. Elle l'a examiné et elle a -- enfin, moi, j'ai remarqué qu'il a

 17   soupiré -- il a soupiré, ce fut un long soupir, et puis il est mort. Elle

 18   l'a examinée, et puis elle lui a fait une piqûre, et puis elle s'est rendue

 19   compte qu'il était mort, donc elle a effectivement constaté le décès.

 20   Q.  Ecoutez, il va falloir que je vous pose d'autres questions maintenant.

 21   Est-ce que vous pourriez nous décrire brièvement ce qui est arrivé à Enver

 22   Celik ?

 23   R.  Mais, écoutez, je ne sais pas exactement quel jour cela s'est passé, et

 24   ce Sok, il est revenu -- il est venu, ce Mile Stojanovic, avec ces quatre

 25   membres de l'Unité spéciale. Ils avaient des bâtons en bois, et puis il y

 26   avait un homme de petite taille qui était avec eux, c'est un peu comme si -

 27   - il avait la tête d'un enfant. Puis il a montré du doigt d'Enver Celik, en

 28   disant qu'il avait -- qu'il n'avait pas bien traité sa sœur. Donc ils l'ont


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  1   fait sortir, ils l'ont conduit derrière la citerne. Toutefois, la citerne

  2   qui se trouvait à côté était positionnée de telle façon que les prisonniers

  3   qui se trouvaient à l'intérieur de cette deuxième citerne pouvaient voir ce

  4   qui se passait. Donc ils l'ont pendu -- ils l'ont pendu au niveau -- en

  5   utilisant donc la structure où -- par lequel on remplit, en fait, les

  6   citernes d'essence. Donc ils ont vu qu'ils l'avaient, dans un premier

  7   temps, pendu ou suspendu par les bras. Ils l'ont frappé deux fois avec

  8   leurs barres en métal, ils lui ont cassé la colonne vertébrale, et puis

  9   après, il ne bougeait plus.

 10   Q.  Vous avez dit, dans votre déclaration, au paragraphe 44, que vers le 10

 11   juin ou le 10 juin, Zuti est arrivé dans votre citerne et en a fait sortir

 12   dix personnes dont il a -- enfin, qu'il a appelés par leurs noms, et ces

 13   personnes n'ont plus jamais été revues.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Mais est-ce que vous avez des renseignements à propos du sort de ces

 16   dix hommes ?

 17   R.  Apparemment, ces hommes avaient été sortis pour un échange. D'après ce

 18   dont je me souviens, il avait été déclaré qu'ils avaient été conduits à

 19   Ilidza. Toutefois, pour autant que je m'en souvienne -- enfin, je n'ai plus

 20   jamais entendu parler d'eux. Moi, j'ai entendu qu'ils avaient été tués,

 21   certains ont été trouvés à Vlakovo -- enfin, trouvés au cimetière de

 22   Vlakovo.

 23   Q.  J'aimerais maintenant parler de l'incident où il est question du bus.

 24   Vous dites au paragraphe 50, dans votre déclaration, que des forces

 25   spéciales de la police serbe sont arrivées, armées jusqu'aux dents, et vous

 26   ont donné l'ordre de vous mettre en file indienne et de monter dans le bus.

 27   Pourquoi avez-vous pensé qu'il s'agissait de forces spéciales de la police

 28   serbe ?


Page 12083

  1   R.  Lorsqu'ils sont arrivés -- lorsqu'ils sont arrivés à la citerne, donc

  2   ils étaient alignés sur trois ou quatre mètres. Ils portaient des cagoules

  3   noires, des uniformes de camouflage blancs et noirs, ils avaient des armes

  4   automatiques antiterroristes, des armes automatiques ordinaires. Ils

  5   avaient autour de la taille des grenades. Enfin, c'était vraiment des

  6   combattants, des vrais guérilleros, et puis ils nous ont donné l'ordre de

  7   quitter la citerne, l'un après l'autre, avec les mains sur la tête, nous

  8   étions censés courir jusqu'à l'autobus, et puis, lorsque nous sommes montés

  9   dans le bus, nous étions -- on nous a demandé de nous allonger par terre,

 10   l'un sur l'autre, pour notre propre sécurité, nous a-t-il été dit, puis

 11   ensuite nous avons été conduits pour être échangés à Kobilja Glava.

 12   Q.  Je veux poursuivre. Vous nous avez dit que le chauffeur du bus était

 13   Zuti, et qu'il avait été le chauffeur de Tintor. Mais comment est-ce que

 14   vous saviez qu'il était le chauffeur de Tintor ?

 15   R.  Oui. Lorsqu'il est arrivé à la citerne pour venir chercher ces dix

 16   personnes qu'il avait conduites apparemment pour qu'ils soient échangés,

 17   mon voisin, Alija Kacanovic, était dans la citerne également. Il le

 18   connaissait, il a dit qu'il était -- qu'il faisait partie des forces

 19   spéciales de l'armée de Vikic, qui était partie après le début de la

 20   guerre. Moi, j'ai entendu cela lorsqu'il l'a dit et je l'ai vu également,

 21   je l'ai vu au volant du bus.

 22   Q.  Très brièvement, vous nous avez dit, Monsieur, qu'il y avait quatre

 23   voitures avec le bus. Pourriez-vous décrire très brièvement qui, d'après

 24   vous, se trouvait dans ces quatre véhicules ?

 25   R.  Dans ces véhicules, ils escortaient ceux qui étaient venus nous

 26   chercher. C'est eux, en fait, qui ont emmené ces véhicules, ainsi que le

 27   bus d'ailleurs.

 28   Q.  Oui, mais qui se trouvait dans les véhicules ?


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  1   R.  Ces membres des forces spéciales, ceux que je ne pouvais pas voir.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter quelque chose. Oui, le

  3   témoin a indiqué "probablement," ce qui n'a pas été repris dans le compte

  4   rendu d'audience.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez préciser cela ?

  6   Je me demande si le témoin a répondu à votre question précédente lorsque

  7   vous lui avez demandé pourquoi il pendait -- ou ce qui l'avait poussé à

  8   croire qu'il s'agissait de forces spéciales de la police serbe. Est-ce

  9   qu'il entendait des membres de la police de la République de Serbie ?

 10   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, oui, je vais lui poser une question à ce

 11   sujet.

 12   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 13   M. GAYNOR : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur, dans la question -- dans l'avant-dernière question, Monsieur

 15   --

 16   R.  Oui.

 17   Q.  -- je vous ai demandé qui se trouvait dans les véhicules. Est-ce que

 18   vous m'avez dit qu'il s'agissait de forces spéciales de la police ou est-ce

 19   que vous avez dit qu'il s'agissait probablement de forces spéciales de la

 20   police ?

 21   R.  Ecoutez, à en juger d'après leur tenue vestimentaire, moi, je pensais -

 22   - enfin, je considérais qu'il s'agissait de membres des forces spéciales.

 23   Q.  Une autre question : En anglais, lorsque l'on parle de "forces

 24   spéciales de la police serbe," cela peut être ambigu. Est-ce que vous

 25   pourriez préciser ? Est-ce qu'il s'agissait de membres de la police

 26   spéciale de Serbie, ou est-ce que vous entendiez qu'il s'agissait de Serbes

 27   de Bosnie ?

 28   R.  Ecoutez, moi, je ne peux pas vous dire d'où ils venaient, mais ce dont


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  1   je suis sûr c'est qu'il ne s'agissait pas de soldats classiques, de soldats

  2   ordinaires. C'est un peu comme dans un film, lorsque vous voyez les forces

  3   terroristes dans un film. Voilà de quoi ils avaient l'air. Vous savez, ils

  4   avaient ces espèces de chaussettes qui leur cachaient le visage.

  5   Q.  Très bien. Je vais poursuivre. Alors j'aimerais vous parler maintenant

  6   du moment où Zuti est sorti du bus pour mettre de l'eau dans le moteur pour

  7   faire baisser la température du moteur. Est-ce que vous pourriez décrire

  8   brièvement ce que vous avez pu voir ou entendre d'ailleurs, lorsqu'il a

  9   décidé de sortir du bus ?

 10   R.  Lorsque nous sommes arrivés à cet endroit qui s'appelait Sokolina, j'ai

 11   entendu le chauffeur, parce que dans le bus, il y avait deux hommes qui

 12   étaient des gardes et qui, d'ailleurs, lui ont demandé pourquoi il s'était

 13   arrêté. Il a dit que le moteur était en train -- était en pleine surchauffe

 14   et qu'il fallait qu'il ajoute de l'eau dans le radiateur. Donc, moi, j'ai

 15   entendu qu'il y avait un ruisseau tout près, tout près de l'endroit où le

 16   bus s'était arrêté.

 17   Q.  Est-ce que vous pourriez nous décrire les armes qui ont été utilisées ?

 18   Dans votre déclaration, vous indiquez qu'il y avait des petites armes,

 19   qu'il y avait -- ou plutôt, qu'il y avait des Zolja ainsi que des lance-

 20   roquettes. Est-ce que vous pourriez nous en dire davantage à ce sujet ?

 21   Comment est-ce que vous avez pu déterminer cela ?

 22   R.  Alors maintenant je vais vous raconter ce qui s'est passé, mais je ne

 23   vais pas être trop long. Lorsqu'ils sont sortis du bus, après 10 ou 15

 24   secondes, on a entendu une forte déflagration à l'avant et ensuite il y a

 25   eu des tirs d'armes légères qui ont été entendus, et puis il y avait

 26   également des détonations ou des déflagrations beaucoup plus importantes.

 27   Il y avait des grenades à main qui ont commencé à exploser sous le bus.

 28   Cela a duré environ un quart d'heure, et puis par la suite, tout s'est


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  1   calmé. J'ai entendu qu'un peu plus loin, il y avait des véhicules qui

  2   démarraient, j'ai entendu des gens pleurer et sangloter. Alors, j'essayais

  3   d'être logique. Je me suis dit : "Bon, essayons de garder le silence, parce

  4   que s'ils entendent que quelqu'un a survécu, ils vont tuer tout le monde."

  5   Toutefois, après cela on entendait plus rien. Il y a un homme qui était

  6   sorti du bus et qui a dit à une autre personne : "Monte dans le bus et vois

  7   s'il y a des survivants." L'autre a commencé à l'insulter. C'était des

  8   insultes qui salissaient le nom de Dieu et de l'église, et puis il lui a

  9   dit qu'il n'avait qu'à monter dans le bus lui-même et que, s'il voulait

 10   vérifier, il avait qu'à vérifier tout seul.

 11   Moi, j'étais en fait allongé sous les morts et j'étais en train de

 12   boire le sang de membres de ma famille, de mes voisins. J'étais par terre.

 13   Mon visage et ma bouche étaient par terre, mais il y avait tellement de

 14   sang que c'était absolument insupportable. Donc j'ai réussi à m'extriquer

 15   de cela avec un voisin et deux autres membres de ma famille, et nous avons

 16   réussi à sortir, nous avons réussi à sortir les deux autres également et

 17   nous sommes retrouvés à une cinquantaine de mètres de là. Bon, eux, ils

 18   sont morts, ils sont morts là sur le champ. Nous avons continué notre

 19   chemin dans la forêt.

 20   Laissez-moi vous expliquer quelque chose, car je voulais vous dire

 21   qu'avant la guerre je faisais beaucoup de randonnée dans la montagne, donc

 22   je connaissais la montagne, je connaissais ces différents lieux, je savais

 23   s'il y avait des localités ou non, et puis je savais aussi me repérer

 24   d'après les repères sur les arbres. Donc très, très heureusement, j'ai

 25   réussi à arriver dans un village musulman, et là, j'ai été reçu par la

 26   Défense territoriale, dirigée par Dzafer Heric, qui a immédiatement

 27   mobilisé des tracteurs et qui est allé avec ces deux tracteurs sortir les

 28   personnes qui avaient été massacrées.


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  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Il a trouvé des munitions de Zolja, il a trouvé également des ceintures

  3   de munitions pour mitraillettes. Puis ensuite, il y avait donc le

  4   commandant de la Garde chetnik à Srednja qui était arrivée avec ses

  5   Chetniks. Bon, ils ont essayé en fait de camoufler un peu tout cela.

  6   Toutefois, Dzafer a dit à Dragan Ikanovic qu'il y avait encore des témoins

  7   qui étaient encore en vie. Puis il a dit à Dzafer Heric qu'il n'avait rien

  8   vu, que c'était Boro Radic qui avait fait cela et Ratko Hadzic. C'est ce

  9   que Dzafer Heric m'a raconté, parce qu'il est revenu, et moi, j'ai vu les

 10   armes qui avaient été utilisées. Je savais quelles armes avaient été

 11   utilisées, et c'est pour cela que j'avance que ces armes ont été utilisées

 12   pour nous tirer dessus.

 13   Q.  Je vous remercie, Monsieur. Est-ce que vous pourriez nous préciser le

 14   nombre exact d'hommes qui ont réussi à sortir du bus après que l'on ait

 15   tiré donc sur le bus après cet incident de tir contre le bus ?

 16   R.  Nous sommes six à être sortis. Il y en a deux qui sont morts

 17   immédiatement après dès qu'ils sont sortis du bus; les autres ont été

 18   trouvés par la Défense territoriale le lendemain, lorsqu'ils sont venus

 19   sortir du bus les personnes massacrées.

 20   Q.  J'aimerais vous montrer une vidéo, Monsieur, il s'agit du document

 21   40159E de la liste 65 ter.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. GAYNOR : [interprétation] Nous pouvons faire un arrêt sur image, à 3

 24   minutes, 14 secondes de cet extrait vidéo.

 25   Q.  Monsieur, est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que vous avez vu

 26   sur cet extrait vidéo ou sur cette séquence vidéo ?

 27   R.  Je n'ai pas vu la séquence vidéo.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il faut diffuser la vidéo --


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, maintenant, je la vois.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, nous allons la montrer à nouveau.

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons vous montrer la séquence

  5   vidéo à nouveau, Monsieur.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je la vois maintenant.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons vous la montrer à nouveau.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   M. GAYNOR : [interprétation] Vous pouvez faire un arrêt sur image. Merci.

 10   Arrêt sur image à 3 minutes 7 secondes.

 11   Q.  Est-ce que vous pourriez dire, Monsieur, ce que vous avez vu sur cette

 12   séquence vidéo ?

 13   R.  Il s'agit de l'autobus, l'autobus qui nous a conduit à cet endroit et

 14   c'est à cet endroit que nous avons été massacrés. Comme vous pouvez le

 15   voir, à l'arrière de l'autobus, vous voyez une pile de corps massacrés, et

 16   d'ailleurs, vous voyez le sang qui coule sur les parois.

 17   Q.  Dans votre déclaration, au paragraphe 60, vous dites qu'Ibrahim, un

 18   photographe de Vogosca, a filmé une séquence vidéo. Est-ce que c'est à

 19   cette séquence vidéo que vous faisiez référence ?

 20   R.  Oui.

 21   M. GAYNOR : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 22   dossier de cette pièce qui sera diffusée au public.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela sera fait.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce P2312.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais en fait vous montrer maintenant une

 26   autre séquence vidéo. Document de la liste 65 ter 40159G. Je souhaiterais

 27   que l'on montre cette vidéo au témoin, je vous prie.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]


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  1   M. GAYNOR : [interprétation] Nous pouvons faire un arrêt sur image, arrêt à

  2   15 minutes deux secondes.

  3   Q.  Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre ce que vous avez vu dans la

  4   première partie de cette séquence vidéo, je vous prie ?

  5   R.  Il s'agit en fait de l'endroit près du village de Vukasevici, où les

  6   résidents ou les villageois donc ont creusé une fosse commune où les

  7   résidents ou les villageois massacrés du village d'Ahatovici ont été

  8   inhumés. Cette fosse commune elle existe toujours là-bas, il n'y a que La

  9   Haye qui avait demandé que des exhumations soient effectuées, et la

 10   séquence est que toutes ces personnes ont été identifiées pour la deuxième

 11   fois et ont été à nouveau inhumés près de la mosquée à Ahatovici.

 12   Q.  Dans la deuxième partie de la séquence vidéo, nous avons vu des corps.

 13   Que savez-vous de ces corps ?

 14   R.  Il s'agissait des corps des personnes qui ont été massacrés dans le

 15   bus. C'est des membres de la Défense territoriale qui les ont -- qui ont en

 16   fait sorti leurs corps. Avec leur aide, puisque la TO, la Défense

 17   territoriale, était dans le secteur, et était commandé par Dzafer Heric,

 18   les corps ont été amenés à cet endroit, dans les deux tracteurs, et ont été

 19   enterrés.

 20   Q.  Il y a un petit moment de cela, vous avez répondu en disant que les

 21   villageois avaient creusé une fosse commune dans laquelle les villageois

 22   d'Ahatovici ont été enterrés, est-ce que vous faisiez référence aux

 23   victimes de l'attaque contre Ahatovici ou est-ce que vous faisiez référence

 24   aux victimes du massacre dans le bus ?

 25   R.  Je faisais référence aux victimes de l'attaque dans le bus.

 26   M. GAYNOR : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 27   dossier de ce document, un document public.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez le début de la


Page 12090

  1   séquence vidéo ? Ça duré 13 minutes; c'est cela, ça commençait aux environs

  2   de 13 minutes ?

  3   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, 13 minutes 26 secondes.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, cela sera versé au dossier.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P2313.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  7   M. GAYNOR : [interprétation]

  8   Q.  En dernier lieu, Monsieur le Témoin, est-ce que vous, vous-même, avez

  9   été personnellement présent -- est-ce que vous avez assisté personnellement

 10   à l'enterrement des victimes du massacre du bus ?

 11   R.  Moi, j'étais présent avec ma famille. Les autres personnes qui étaient

 12   gravement blessés avaient été transportées à Tuzla, en passant par Olovo et

 13   Kladanj. Ils étaient censés être opérés, mais ils n'ont reçu que les

 14   premiers soins d'urgence. Donc, mon parent et moi-même avons essayé d'aider

 15   les gens à identifier les corps, nous avons essayé de déterminer leur

 16   identification, compte tenu -- enfin, en fonction de leurs tenues

 17   vestimentaires, de leurs vêtements, parce que personne n'avait de documents

 18   d'identité. Au moment où on nous a fait prisonniers, tous nos documents

 19   avaient été -- nous avaient été confisqués.

 20   M. GAYNOR : [interprétation] Je vous remercie. J'en ai terminé avec

 21   l'interrogatoire principal. Il n'y a pas de pièces associées que je

 22   souhaiterais verser au dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons faire une pause de 20

 24   minutes, et nous reprendrons à 11 heures.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, vous allez maintenant répondre

 28   aux questions qui vous seront posées par M. Karadzic. Oui, Monsieur


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  1   Karadzic.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. Alors j'aimerais, dans un premier

  5   temps, préciser certaines choses à propos de votre village, puis nous

  6   parlerons de cet incident. Quand avez-vous commencé les préparatifs pour

  7   assurer la défense de votre village ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'entends pas le témoin. Il va falloir que

  9   vous branchiez votre micro. Il y a un bouton juste devant vous.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous répéter votre réponse,

 11   Monsieur ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que je sais, nous n'avons pas eu de

 13   préparatifs. Nous ne nous sommes pas lancés dans des préparatifs pour la

 14   défense de notre village.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Mais n'avez-vous pas déjà déclaré que vous aviez commencé des

 17   préparatifs ? N'aviez-vous pas des tranchées autour de votre maison ?

 18   R.  Il ne s'agit pas de préparatifs. Ces tranchées devaient faire office --

 19   ou devaient être utilisées par les gens qui souhaitaient se protéger des

 20   obus. Les gens voulaient survivre, et pour ce qui était des femmes et des

 21   enfants, nous les avions cachés dans les caves et sous-sols de nos maisons,

 22   que nous appelions des refuges.

 23   Q.  Quand est-ce que vous avez creusé ces tranchées autour de votre village

 24   ?

 25   R.  Je dirais entre le 23 -- ou plutôt entre le 20 et le 25, au moment où

 26   les forces serbes ont commencé véritablement à prendre position sur les

 27   collines autour d'Ahatovici.

 28   Q.  Quand avez-vous créé la cellule de Crise ?


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  1   R.  Oui, ce que l'on appelait la cellule de Crise, ce n'était pas

  2   véritablement une cellule de Crise. Il s'agissait des sages du village, ou

  3   des hommes les plus âgés du village, les chefs du village qui, en fait,

  4   avaient, en quelque sorte, hérité de la caserne après le départ de la JNA,

  5   et les Serbes les avaient convoqués pour que des pourparlers soient

  6   entamés. Toutefois, la partie serbe avait demandé que tous les hommes se

  7   rendent, ce qui n'a pas été accepté. Il s'agissait des hommes qui étaient

  8   les dirigeants du village et, bien entendu, ils devaient rendre des comptes

  9   aux villageois.

 10   Q.  Merci. Mais, Monsieur --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, n'oubliez pas de

 12   marquer un temps d'arrêt entre vos questions et les réponses du témoin.

 13   N'oubliez pas que le témoin n'est pas présent dans ce prétoire.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, merci.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur, voilà ce que j'aimerais vous demander : Ne nous lançons pas

 17   dans des généralisations, voyons comment les choses se sont passées. Est-il

 18   exact qu'Alispahic était un notable du SDA, un représentant important du

 19   SDA, et qu'il -- et du MUP, d'ailleurs également, et n'était-il pas le

 20   président de votre SDA local ?

 21   R.  Ecoutez, je sais qu'il était président en ville, mais je ne sais pas --

 22   enfin, s'il a fait quoi que ce soit dans le village d'Ahatovici.

 23   Q.  Est-ce que vous savez que Bakir Alispahic, Hasan Efendic, commandant de

 24   la TO, et Jusuf Pusina, un autre officier de police supérieur, venaient --

 25   sont venus souvent à Ahatovici, pendant l'été 1991 ?

 26   R.  Ecoutez, je ne suis pas au courant de ce fait, mais ce que je sais,

 27   c'est que lorsque j'étais détenu dans le camp, que Mile Stojanovic, qui

 28   s'était présenté comme le gardien de la prison, nous a dit -- qu'il nous


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  1   avait dit qu'il était capitaine cantonné dans un autre district militaire.

  2   Je le sais parce qu'un membre de ma famille, Esma Jusufovic, qui,

  3   malheureusement, est décédé depuis, m'a relaté qu'après la guerre, ils

  4   avaient travaillé ensemble, et c'est ainsi qu'il s'était présenté. Chaque

  5   fois qu'il venait devant cette citerne où nous étions enfermés, il

  6   mentionnait Bakir Alispahic, qui apparemment, avait promis des échanges à

  7   Kobilja Glava et il avait promis en fait que les femmes et les enfants

  8   seraient échangés au niveau de la pompe de Bozica, mais en fait ce qui a

  9   été dit c'est que Bakir Alispahic n'avait personne à échanger.

 10   Q.  Je vous remercie. Mais soyons un peu précis, je vous prie. Est-il

 11   exact, oui ou non, que la cellule de Crise a été créée en 1991 ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Est-il exact que le commandant de la cellule de Crise et le commandant

 14   de la TO était Hasan Mujkic ?

 15   R.  Ecoutez, je n'en sais rien.

 16   Q.  Dans votre déclaration consolidée, au paragraphe 5, avez-vous bien dit

 17   -- et je vais vous donner -- une petite seconde, je vous prie, donc je

 18   disais qu'en mars 1992, il y a eu des négociations entre les représentants

 19   du SDA et du SDS, et lors de ces négociations les Serbes avaient décidé de

 20   demander aux Musulmans de partir du village de Ahatovici et cette demande

 21   vous a été relayée par Hasan Mujkic, représentant du village, qui a assisté

 22   à la réunion, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, mais il représentait les résidents, les villageois de Ahatovici,

 24   il n'était que représentant des villageois. Il n'était pas commandant, ce

 25   n'était pas un militaire, il n'était que représentant du village.

 26   Q.  Merci. Quarante et un électeurs serbes demandent à 1 500 Musulmans de

 27   partir du village; c'est ce que vous nous dites ?

 28   R.  Ce que je sais c'est qu'ils ont présenté cette demande, ils ont déclaré


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  1   que nous devions nous rendre à la caserne et que notre sécurité serait

  2   garantie, et en fait les personnes qui étaient visées c'étaient les hommes

  3   dont l'âge était compris entre 15 et 70 ans.

  4   Q.  Mais quand est-ce que la guerre a commencé à Sarajevo ?

  5   R.  La guerre -- la guerre des médias et toutes les autres guerres ont

  6   commencé lorsque mon village a été attaqué, en ce qui me concerne.

  7   Q.  J'aimerais vous rappeler que la guerre à Sarajevo a commencé le 6

  8   avril.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Donc comment est-ce qu'il était possible que les Serbes vous

 11   demandent en mars de vous rendre, comment se fait-il que 41 Serbes vous

 12   demandent à vous, 1 500 Musulmans, de vous rendre en mars avant que la

 13   guerre n'a éclaté ?

 14   R.  Je ne sais pas si cela s'est passé au mois de mars.

 15   Q.  Ecoutez, je vais vous montrer votre déclaration parce que c'est ce qui

 16   est indiqué au paragraphe 5 de votre déclaration, en fait il est indiqué

 17   qu'au mois de mars, des négociations ont eu lieu et que les Serbes vous ont

 18   demandé de quitter le village.

 19   R.  Ce n'est pas exact. Je sais que, certes, il y a eu des négociations

 20   mais au mois de mai, c'est là qu'Hasan Mujkic a assisté aux négociations,

 21   puis il est revenu et il nous a dit ce que voulait, ce que souhaitait

 22   l'autre camp.

 23   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Vous avez dit que les Serbes avaient érigé des barrages et qu'ils

 27   contrôlaient les personnes au niveau de ces barricades et qu'ils

 28   contrôlaient en fait leurs documents d'identité. Quand est-ce que cela


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  1   s'est passé ?

  2   R.  Ecoutez, entre le 20 et le 25, alors qu'ils préparaient une attaque

  3   contre le village de Sokolje.

  4   Q.  Mais de quel mois s'agit-il ?

  5   R.  Du mois de mai.

  6   Q.  Merci. Mais jusqu'à ce moment-là, vous pouviez vous déplacer en toute

  7   liberté sans aucun contrôle, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, les barrages autour d'Ahatovici ont été érigés un peu plus tôt, je

  9   ne me souviens plus de la date exacte, mais c'était sur le pont près de la

 10   caserne de Butile, à l'heure actuelle en fait il y a un marché au bétail à

 11   cet endroit. C'est là que se trouve le pont qui enjambe la Bosna et en fait

 12   lorsque vous vouliez passer par là, c'est là que vos documents étaient

 13   inspectés. Mais il était possible d'aller jusqu'à Visoko en passant par la

 14   forêt.

 15   Q.  Mais ce barrage, quand est-ce qu'il a été érigé et surtout combien de

 16   temps il est resté en place ?

 17   R.  Ecoutez, ce barrage il se trouvait encore là lorsque j'ai été fait

 18   prisonnier et que j'ai été emmené à Butile. Puis après, nous avons été

 19   transportés dans un bus militaire de Butile à Rajlovac, et tous ces

 20   barrages ils se trouvaient encore là. Ils avaient dû en fait enlever les

 21   structures en fer pour que les véhicules puissent passer.

 22   Q.  Mais ça c'était quasiment deux mois après le début de la guerre, n'est-

 23   ce pas ?

 24   R.  Non, pas deux mois. Pour autant que je m'en souvienne, la guerre elle a

 25   commencé le 25 mai lors de l'attaque de Sokolje.

 26   Q.  Oui, mais jusqu'à ce moment-là vous n'aviez eu aucun problème, n'est-ce

 27   pas, du fait de la guerre ?

 28   R.  Non, non. Je n'avais pas de problèmes parce que j'ai toujours essayé de


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  1   survivre. Moi, je travaillais à Blazuj et à un moment donné pendant le mois

  2   de février ou mars 1992, mon contremaître m'a dit de ne plus venir au

  3   travail.

  4   Q.  Bien. Alors nous allons parler de ces barrages. Vous nous dites que les

  5   gens étaient arrêtés au niveau des barrages, que leurs documents d'identité

  6   étaient vérifiés, et que les personnes qui étaient de faction au niveau des

  7   barrages avaient des listes. Est-ce que cela signifie qu'ils cherchaient

  8   des personnes bien précises et que si le nom de la personne ne figurait pas

  9   sur la liste, la personne pouvait poursuivre son chemin ?

 10   R.  Oui. C'est exact. Lorsque le bus est passé entre Dobrosevici et Stup,

 11   il faut savoir que c'était essentiellement des femmes qui voyageaient. Les

 12   hommes en fait n'osaient pas s'aventurer à l'extérieur, et elles nous

 13   racontaient ce qu'elles avaient vu lorsqu'elles revenaient, elles nous

 14   relataient la situation.

 15   Q.  Dans le document 90224 de la liste 65 ter, qui est une autre de votre

 16   déclaration, vous nous avez expliqué que les Serbes contrôlaient les

 17   personnes alors qu'elles se rendaient au travail.

 18   R.  Non. Ça nous l'avons entendu de la part des femmes lorsqu'elles sont

 19   revenues de la ville, parce que c'est justement ce qu'elles avaient vu.

 20   S'il y avait des hommes dans les autobus, il s'agissait probablement de

 21   Serbes.

 22   Q.  Oui, mais il y avait vos femmes également, des Musulmanes ?

 23   R.  Oui. Elles ont justement vu comment les personnes se faisaient

 24   contrôler, comment leurs papiers et documents d'identité étaient vérifiés.

 25   Elles l'ont vu, cela, et elles ont vu que cela se passait au niveau des

 26   barrages.

 27   Q.  Mais au paragraphe 7 de votre déclaration, est-ce que vous n'avez pas

 28   dit que, lorsque vous alliez au travail, vous passiez donc par ces


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  1   barrages, et que les Serbes vérifiaient l'identité des passagers en

  2   vérifiant leur liste et ils comparaient donc le nom du document d'identité

  3   aux noms qui figuraient sur la liste ? C'est cela, c'est comme ça que les

  4   choses se sont passées ?

  5   R.  Non, non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Lorsque j'allais à Blazuj, il

  6   faut savoir qu'à Blazuj près de la société où je travaillais ils avaient

  7   déjà là à ce niveau-là construit des barrages et ils vérifiaient déjà les

  8   documents d'identité des personnes.

  9   Q.  Je vais vous donner lecture du paragraphe 7. Malheureusement, je dois

 10   le faire en anglais. Il s'agit de votre déclaration consolidée, page 3, et

 11   je cite :

 12   "Etant donné que je me rendais tous les jours à Sarajevo en empruntant le

 13   bus, étant donné qu'il y avait ces barrages avec des Serbes qui se

 14   trouvaient de faction auprès des barrages, j'avais peur d'aller au travail.

 15   Les Chetniks qui étaient de faction au niveau de ces postes de contrôle

 16   avaient l'habitude d'arrêter les autobus et de les fouiller sous prétexte

 17   de chercher des armes. J'ai remarqué que, lors de ces perquisitions, les

 18   Chetniks contrôlaient les Musulmans plutôt que les Serbes, qui voyageaient,

 19   qui se trouvaient dans les bus. Ils nous demandaient toujours nos documents

 20   d'identité et les vérifiaient en les comparant à une liste de noms

 21   musulmans dont ils disposaient. Je ne sais pas comment cette liste avait

 22   été préparée. Toutefois, personne n'a jamais été arrêté en ma présence. Je

 23   n'ai pas vu cette liste mais je sais qu'elle avait été dressée en mars 1992

 24   et que sur cette liste figurait des noms de Musulmans qui étaient

 25   considérés comme des éléments perturbateurs par les Serbes."

 26   Alors est-ce que c'est bien ce que vous avez déclaré ?

 27   R.  Oui, tout cela se passait à Blazuj, auprès des barrages.

 28   Q.  Oui, mais là, il est dit que vous alliez de Ahatovici à Sarajevo,


Page 12098

  1   auquel cas vous ne passez pas par Blazuj ?

  2   R.  Certes, mais il faut savoir qu'à l'époque il n'y avait pas de barrage

  3   sur le pont à Bojnik. Donc, moi, lorsque j'arrivais à Stup puis ensuite

  4   j'allais à Ilidza, et puis d'Ilidza j'allais en autobus à Blazuj, et là, au

  5   niveau du carrefour de Mostar à Blazuj, il y avait déjà des barrages et les

  6   papiers d'identité étaient vérifiés.

  7   Q.  Mais, Monsieur, Blazuj ne se trouve pas à Sarajevo. Ahatovici est plus

  8   près de Sarajevo que Blazuj, n'est-ce pas exact ?

  9   R.  Oui, je le sais pertinemment, et je vous ai dit qu'ils effectuaient ces

 10   contrôles à Blazuj. Lorsque j'ai parlé de barrages, je n'ai pas dit qu'il y

 11   avait un barrage à Bojnik.

 12   Q.  Nous allons revenir là-dessus plus tard. Bon, vous avez indiqué que

 13   vous aviez peur d'aller au travail. Mais vous ne dites pas dans la

 14   déclaration que votre contremaître vous a démis de vos fonctions ou vous a

 15   licencié.

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  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous allons passer à huis clos

  8   partiel.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 10   partiel, je vous remercie.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 26   [Audience publique]

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Nous n'avons pas beaucoup de temps, Monsieur. Alors j'aimerais obtenir


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  1   certaines précisions. Vous pouvez en fait faire comme vous le souhaitez. En

  2   ce qui me concerne, toute réponse est bienvenue. Est-il exact de dire que

  3   vous avez obtenu et acheté des armes à Ahatovici ou à Dobrosevici avant le

  4   début de la guerre ?

  5   R.  Non. Ecoutez, il y a peut-être des gens qui l'on fait, moi, je n'en

  6   sais rien. Des gens qui avaient de l'argent, par exemple, peut-être que

  7   certains ont acheté des armes effectivement. Je sais qu'à Ahatovici, il y

  8   avait un club de chasse qui était officiel et ensuite à Dobrosevici, il y

  9   avait également un club de chasse, et ces personnes disposaient de fusils

 10   de chasse. Il y avait même certaines personnes qui avaient deux fusils de

 11   chasse. Vous savez avant la guerre les gens avaient des pistolets

 12   également. J'aimerais vous dire qu'à Ahatovici, ainsi que dans certains

 13   quartiers de Dobrosevici et dans les environs, il y avait certains

 14   policiers d'active. Il y avait également des membres de la force de

 15   réserve. On leur avait donné des armes automatiques. Cela je le sais.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que le document 22187 de la liste 65 ter

 18   pourrait être affiché ?

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Il s'agit de votre déclaration du 15 avril 1993.

 21   Et je demanderais que le document ne soit pas diffusé parce qu'il comporte

 22   des noms.

 23   Le deuxième paragraphe contient des renseignements que vous avez fournis, à

 24   propos de 150 armes légères et il s'agissait en fait de fusils automatiques

 25   et de fusils semi-automatiques. Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit

 26   ?

 27   R.  Je voulais parler d'armes automatiques et d'armes semi-automatiques, il

 28   s'agissait des armes que possédaient les forces de police de réserve ainsi


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  1   que les policiers d'active. Il n'y en avait que 15 environ. Toutes les

  2   autres armes étaient des fusils de chasse. Mais il faut savoir que les

  3   chasseurs avaient également des carabines.

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la page 17 de

  6   ce document ? Dont je vais vous donner lecture ?

  7   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Donc page 17 et vous voyez qu'il est écrit sur cette page 17. Deuxième

 10   ligne en commençant à partir du haut :

 11   "A cette fin, nous avons acheté des armes, notamment des armes

 12   d'infanterie, à savoir des pistolets, des fusils, toute la gamme jusqu'à

 13   des fusils automatiques et des fusils semi-automatiques. Pour mieux nous

 14   organiser et pour défendre le village, nous avons établi une cellule de

 15   Crise qui était présidée par Hasan Mujkic, fils de Jakub. Nous avions

 16   environ 150 armes. Outre Hasan Mujkic, au sein de la cellule de Crise, il y

 17   avait Kacanovic, Muhamed; Novalija, Meho; Sefko Mujkic, Cazim Kacanovic,

 18   Meho Novalija, Muhamed Kacanovic, Fikret Mujkic, et d'autres membres de la

 19   famille Mujkic…"

 20   Est-ce que c'est bien ce que vous avez déclaré en avril 1993 ?

 21   R.  Ecoutez. Voilà, à nouveau, vous mentionnez le terme de cellule de

 22   Crise. Il s'agissait des sages du village, des personnes qui dirigeaient le

 23   village. Bon, vous pouvez les appeler -- leur donner le nom de cellule de

 24   Crise. Mais je vous ai dit que personne ne pouvait empêcher quiconque

 25   d'acheter des armes. Toutefois, si vous regardez -- bon, il y avait -- si

 26   vous reprenez les Praga, les chars, les fusils, d'un côté, et puis il y

 27   avait un autre village qui était entouré de casernes, et même d'ailleurs à

 28   Ahatovici, si les gens avaient acheté des armes parce qu'ils avaient peur,


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  1   pourquoi pas ? Il s'agissait de défendre leurs foyers. Je ne vois pas où

  2   est le problème. Pour ce qui est d'Ahatovici, je sais qu'environ 50 hommes

  3   en âge de porter les armes se trouvaient là.

  4   Q.  Nous allons parler de cela, justement.

  5   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation] [hors micro] J'aimerais savoir si

  6   le témoin est en mesure de voir le document. Est-ce qu'il le voit par le

  7   biais du prétoire électronique ou est-ce qu'il dispose du document en

  8   version papier devant lui ? Peut-être que le représentant du greffe qui est

  9   à Sarajevo peut nous aider.

 10   M. LE GREFFIER : [vidéoconférence] [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Donc ceci s'adresse au

 12   représentant du greffe à Sarajevo. Si on mentionne un document précis,

 13   veuillez aider le témoin à trouver ce document pour qu'il puisse le lire.

 14   Nous sommes à la page 17 de cette déclaration.

 15   Monsieur Karadzic, vous pouvez poursuivre.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit du document de la liste 65 ter 22187.

 17   Il s'agit de la page 17 de ce document. C'est un document assez long.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur le Témoin, en attendant que ce document s'affiche : Ce n'est

 20   pas moi qui ai utilisé le terme de cellule de Crise, c'est vous qui l'avez

 21   utilisé. Vous nous avez dit qui dirigeait cette cellule de Crise, et vous

 22   nous avez dit qu'à la mi-mai, la population serbe avait quitté la zone,

 23   c'est-à-dire était partie de Ahatovici ainsi que de Butile et de Reljevo.

 24   R.  Ils ont quitté leurs maisons et sont partis en direction de Bojnik,

 25   c'est-à-dire les zones serbes.

 26   Q.  Qu'en est-il de Butile; est-ce que cela signifie qu'ils se sont rendus

 27   dans les casernes ?

 28   R.  Je considère qu'il s'agissait d'un territoire serbe à l'époque.


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  1   Q.  Merci. Est-ce que la caserne de Butile appartenait à l'ex-JNA ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Dans la même déclaration, vous nous avez expliqué que vous aviez monté

  4   la garde autour du village, et puis le 25 mai, vous avez reçu un ultimatum

  5   de l'ex-JNA de rendre les armes. Ceci s'est fait par le biais d'un haut-

  6   parleur.

  7   R.  Oui. En fait, un véhicule blindé a circulé dans la zone et avec un

  8   haut-parleur de l'école ils ont demandé à ce que nous rendions les armes.

  9   Q.  Ils demandaient à ce que vous rendiez les armes, n'est-ce pas ?

 10   R.  Bon, rendre les armes de manière générale, oui. Je pense qu'ils

 11   voulaient que les hommes se rendent et qu'ils rendent leurs armes aussi.

 12   Q.  Est-ce que vous pourriez revenir à votre déclaration où il est

 13   mentionné "vous devriez rendre les armes." Il n'est pas mentionné que vous

 14   deviez vous rendre ?

 15   R.  C'est ce que l'on -- c'est ce qui a été mentionné, à savoir que les

 16   hommes devaient se rendre, ceux qui avaient des armes.

 17   Q.  Est-ce que vous pourriez regarder ce paragraphe de la première page de

 18   votre déclaration ? "Le 25 mai 1992," est-ce que vous voyez ce paragraphe ?

 19   Il s'agit de la page 17 de ce document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il serait préférable que vous lisiez le

 21   numéro ERN, de façon à ce que le représentant du greffe à Sarajevo puisse

 22   savoir exactement de quelle page il s'agit.

 23   L'INTERPRÈTE : M. Karadzic donne le numéro. Le témoin dit qu'il a trouvé le

 24   passage en question.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce qu'il est mentionné que vous deviez rendre les armes ?

 27   R.  Je vais en donner lecture :

 28   "Le 20 mai 1992, nous avons reçu un ultimatum de l'ex-JNA et des groupes


Page 12104

  1   paramilitaires locaux de rendre nos armes. Cette demande émanait de gardes

  2   qui étaient dans les environs du village."

  3   Q.  Cette demande était faite par haut-parleur, n'est-ce pas ? C'est ce qui

  4   est mentionné ici ? Mais vous avez en fait oublié de lire une ligne.

  5   R.  "Cette demande, effectivement, a été faite par haut-parleur. Bien sûr,

  6   nous n'avons pas obtempéré. Nous avons continué à monter la garde autour du

  7   village."

  8   C'est exact. Mais ils avaient lancé cet ultimatum pour que nous nous

  9   rendions également.

 10   Q.  Alors pourquoi vous ne l'avez pas dit dans cette déclaration ?

 11   R.  Je n'ai pas pensé à tout.

 12   Q.  Ensuite, le 27 mai, vous expliquez que vous avez fait l'objet d'une

 13   attaque. Par quel type de forces, combien de soldats ?

 14   R.  Le 27 mai, c'est-à-dire après l'attaque contre Sokolje, le 27, ils

 15   n'étaient pas arrivés à prendre Sokolje et ils ont rendu leurs armes, parce

 16   que Ahatovic se trouvait sur la gauche. Toutes les collines autour

 17   d'Ahatovici, les Serbes ils y étaient et ils sont bien restés avec leurs

 18   armes lourdes.

 19   Je vais vous dire autre chose également. On peut voir les casernes de

 20   Butile et de Rajlovac de chez moi, ainsi que l'exploitation agricole, avec

 21   la zone où les chars étaient positionnés. Sur les collines, on voyait les

 22   Praga qui étaient positionnés. C'était environ à 100 mètres à vol d'oiseau

 23   de l'endroit où j'habitais.

 24   Q.  Merci. Est-ce que je peux vous demander de ne pas parler de manière

 25   trop générale comme ceci. Je voudrais qu'on se concentre sur les détails.

 26   Est-ce que vous avez été attaqué par des pièces d'infanterie le 27 mai ?

 27   R.  Le 27, il y a eu des bombardements sporadiques, et puis il y a eu

 28   également des tirs qui ont retenti, probablement pour faire peur à la


Page 12105

  1   population et pour témoigner de la position de force dans laquelle ils se

  2   trouvaient.

  3   Q.  Ensuite vous avez dit que vous êtes arrivé à contrer cette attaque sans

  4   pertes de votre côté. Comment arriver à contrer une attaque d'artillerie ?

  5   Est-ce que vous avez été attaqué par l'infanterie de Dobrosevici et vous

  6   êtes arrivé à contrer cette attaque ? Regardez à la même page mais au

  7   paragraphe suivant, cela vous aidera peut-être.

  8   R.  Je me dois de vous expliquer ceci. Je me trouvais dans la partie basse

  9   du village, parce que sur les hauteurs d'Ahatovici, on pouvait entendre des

 10   tirs d'infanterie. Il est possible que quelqu'un ait fait l'objet d'une

 11   attaque là-haut. Peut-être que les gardes essayaient de contrer cette

 12   attaque.

 13   Q.  Dans un autre paragraphe, vous mentionnez le 20 juin 1997 -c'est le

 14   document de la liste 65 ter 22187, nous l'avons déjà affiché il y a

 15   quelques instants. Essayons de voir la page dont nous avons besoin. Vous

 16   dites que l'attaque contre Ahatovici a eu lieu le 27 mai venant de

 17   Rajlovac, et que cela s'est produit vers 23 heures. Les villageois ont

 18   répondu par des tirs, et sont arrivés à contrer l'attaque. Pour notre

 19   défense, nous avions 50 armes de petit calibre.

 20   Donc, de combien d'armes disposiez-vous ?

 21   R.  Pour ce qui est de la totalité du village, je crois que nous avions

 22   entre 50 et 150 armes, mais ceci est une évaluation. J'ai mentionné que

 23   l'attaque de Dol, de l'autre côté de la colline. Il y a une petite rivière.

 24   Q.  Vous nous dites que vous avez été attaqués de la région de Rajlovac ?

 25   R.  Oui. C'était derrière ce cours d'eau de Rijecica, et c'est au-dessus

 26   d'Ahatovici, et cet endroit s'appelle Dol.

 27   Q.  Est-ce que vous avez essuyé des pertes le 27 mai ?

 28   R.  Autant que je sache, il y a eu des blessés effectivement.


Page 12106

  1   Q.  Dans votre déclaration que vous nous avez donné le 15 avril 1993, vous

  2   nous avez dit que vous avez contré cette attaque et que vous n'avez pas

  3   essuyé de pertes; alors que dans votre déclaration du 20 juin 1997, vous

  4   dites que deux Musulmans ont été tués et dix ont été blessés. Alors, quelle

  5   est la réalité ?

  6   R.  La réalité, c'est qu'ils étaient blessés, il y a eu des blessés. Pour

  7   ce qui est de ces deux Musulmans tués, j'ai entendu dans le village qu'ils

  8   s'étaient suicidés.

  9   Q.  Pourquoi se seraient-ils suicidés ?

 10   R.  Je pense que c'est parce qu'elles avaient peur. C'est des femmes qui se

 11   sont suicidées.

 12   Q.  Pourquoi ceci n'est pas mentionné dans votre déclaration ?

 13   R.  Tout dépend de ce dont je me souvenais à tel moment.

 14   Q.  Ah, d'accord. Je voudrais maintenant donner lecture d'une partie de la

 15   déclaration d'Edin Mujkic, qui est le document de la liste 65 ter 22184.

 16   Vous n'avez pas ce document là-bas, je vais en donner lecture. C'est lui

 17   qui a fait cette déclaration, et à la page 2 de cette déclaration, et à la

 18   page 3 également, il dit :

 19   "J'ai appris un peu plus tard que le commandant de la Défense territoriale

 20   d'Ahatovici, Mujkic, Hasan, a décidé de s'enfuir. C'est un ex-policier, et

 21   il s'est enfui avec son frère. Ils sont arrivés à la colline de Krstac."

 22   A la page 3, il est mentionné :

 23   "J'ai rappelé que les ennemis que l'on avait trouvé dans sa maison,

 24   une liste de combattants avec des armes qui leur avaient été délivrés.

 25   C'était dactylographié sur quatre pages. J'ai vu ces listes qui étaient

 26   dans les mains des officiers agresseurs. Ils ont utilisé ces listes de

 27   façon à déterminer le statut de chacun de nos soldats qui avaient été

 28   capturés, et ils ont particulièrement torturé les combattants qui avaient


Page 12107

  1   reçu des fusils d'élite ou des tirs de mortiers. Donc vous avez une liste

  2   des combattants qui couvre quatre pages, avec des informations sur les

  3   armes qui leur avaient été délivrées. Il y avait des personnes qui avaient

  4   des pièces de mortiers de sabotage, ainsi que des fusils d'élite."

  5   Est-ce que vous étiez au courant de cela ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Est-ce que vous avez construit deux abris fortifiés dans le village ?

  8   R.  Non, aucun abri n'a été construit. Il s'agissait simplement de maisons

  9   qui avaient des sous-sols très bien construits.

 10   Q.  Est-ce qu'on les avait renforcés ?

 11   R.  Non, il s'agissait simplement de sous-sols qui avaient été construits

 12   en béton.

 13   Q.  D'accord. Est-ce que vous aviez également des tranchées ? Est-ce qu'en

 14   1991, vous en aviez ?

 15   R.  Pas en 1991, mais en 1992, en mai, en fonction de l'endroit où les gens

 16   habitaient et où ils avaient des maisons, les gens, en fait, creusaient des

 17   tranchées pour pouvoir s'y cacher, à proximité de leur habitation. Je suis

 18   au regret de vous dire que je ne disposais d'aucune arme quelle qu'elle

 19   soit, et je n'avais besoin d'attaquer qui que ce soit, ni de tuer qui que

 20   ce soit.

 21   Q.  Vous avez mentionné qu'il y avait des casernes qui se trouvaient pas

 22   très loin de chez vous. Est-ce qu'il s'agissait de casernes de la JNA ?

 23   R.  Il y avait deux casernes effectivement. L'une s'appelait Oroa, et

 24   l'autre était la caserne de Butile.

 25   Q.  Merci. Est-ce que vous savez qu'à la mi-1991, il y avait eu une

 26   mobilisation des réservistes de la JNA, en raison de la guerre en Croatie ?

 27   R.  Oui, je suis au courant de cela, mais j'étais également réserviste à la

 28   caserne de Koran, qui était située à Pale, et j'ai reçu un appel en 1988.


Page 12108

  1   Si vous vous souvenez, il y avait des manœuvres ou des exercices qui

  2   étaient organisés par la JNA, et je crois que l'opération s'appelait

  3   Nevesinje 1988. Peut-être que je me trompe, et corrigez-moi, dans ce cas-

  4   là, parce qu'évidemment, ceci s'est passé il y a assez longtemps. Puis, en

  5   1990, j'ai reçu un appel pour me rendre à Lukavica. Il y avait un bataillon

  6   complet qui était principalement composé de Musulmans et de Croates qui ont

  7   été renvoyés chez eux, qui ont rendu leur matériel sans recevoir d'autre

  8   mission.

  9   Q.  Vous avez dit 1988 ?

 10   R.  Oui. Mais en fait, durant cette période -- mais je ne sais pas

 11   exactement la date. C'était il y a longtemps. Peut-être que vous êtes plus

 12   au courant que moi.

 13   Q.  Merci. Je vous prie de m'excuser auprès des interprètes.

 14   A Ahatovici, est-ce que vous avez fabriqué des armes, des munitions et des

 15   explosifs ?

 16   R.  Non, je ne sais pas.

 17   Q.  Donc, il est possible que cela se soit produit sans que vous le sachiez

 18   ?

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 12109

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3   Q.  Merci. Etant donné que nous n'avons pas beaucoup de temps, et nous ne

  4   voulons pas vous redemander de venir déposer, donc je voudrais qu'on se

  5   concentre sur les éléments les plus importants.  Vous nous avez dit que

  6   l'attaque principale contre Ahatovici a commencé le 29 mai. Ils ont utilisé

  7   des obusiers, des lance-roquettes multiples de 105 et de 155 millimètres,

  8   des pièces de mortier, des chars, et cetera. Comment est-ce que vous êtes

  9   arrivé à cette conclusion ?

 10   R.  C'était une attaque complète venant de toutes les directions, c'est-à-

 11   dire venant des casernes, venant de Tijekovac [phon], de Koprivica, de

 12   Paljevo, c'est-à-dire les collines environnantes, à savoir donc de toutes

 13   lez zones qui avaient été prises par les Serbes autour d'Ahatovici. Ils ont

 14   commencé à bombarder et ça a duré environ trois jours, autant que je me

 15   souvienne. Tout était en feu, ma maison a été détruite.

 16   Q.  Merci. Je suis désolé d'apprendre que votre maison ait été détruite.

 17   Mais revenons à ce que vous avez dit. Vous avez mentionné 4 000 obus.

 18   Comment êtes-vous arrivé à conclure que 4 000 obus étaient tombés ?

 19   R.  J'ai donné ceci comme un chiffre approximatif. Il y a énormément d'obus

 20   qui sont tombés.

 21   Q.  Merci. J'aimerais savoir combien de combattants ou de soldats serbes

 22   vous ont attaqué le 29 mai ?

 23   R.  Je ne peux pas vous donner les chiffres exacts. Mais il y en avait des

 24   milliers qui venaient de toutes les directions.

 25   Q.  Merci. Dans une partie de votre déclaration vous avez dit qu'il y en

 26   avait 1 000 et dans une autre vous avez dit qu'il y en avait 2 000. Donc il

 27   aurait pu avoir plus de 2 000 ?

 28   R.  C'est une évaluation que je vous ai donnée.


Page 12110

  1   Q.  Merci. Est-ce que vous avez mené des opérations offensives avant cela

  2   contre les villages serbes environnants ou la caserne de Butile ? Est-ce

  3   que vous avez lancé des opérations offensives contre les villages

  4   environnants ?

  5   R.  Non. Personnellement, je ne l'ai pas fait. Mais certaines personnes qui

  6   avaient des armes ont probablement riposté.

  7   Q.  Merci. Savez-vous qui était le leader de la Ligue patriotique et des

  8   Bérets verts dans votre village ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Savez-vous que la Ligue patriotique et les Bérets verts s'étaient

 11   constitués au début de l'année 1991 ?

 12   R.  Je sais qu'ils étaient constitués mais je ne sais pas s'il y en avait

 13   qui était présent à Ahatovici. Je sais qu'on a reçu les informations

 14   erronées laissant penser qu'il y avait 500 membres des Bérets verts à

 15   Ahatovici. Ceci est totalement incompréhensible, comme s'ils avaient plu

 16   des Bérets verts sur Ahatovici, nous n'avions même pas autant d'habitants.

 17   Q.  Est-ce qu'il n'y avait pas 1 500 habitants musulmans à Ahatovici ?

 18   R.  Oui. Mais beaucoup de ces habitants sont partis dans la ville et dans

 19   les villes environnantes, Visoko, Breza, et cetera.

 20   Q.  Est-ce exact que c'était principalement les femmes, les enfants et les

 21   personnes âgées qui sont parties pour aller vivre avec des parents ?

 22   R.  Les jeunes sont également partis parce que les parents ne voulaient pas

 23   qu'ils restent dans le village. Lorsque l'attaque a commencé tout le monde

 24   partait dans tous les sens parce qu'ils paniquaient. Certains se sont

 25   enfuis par la forêt. Certains ont traversé des champs de mines. Toutes

 26   sortes de choses ses sont produites.

 27   Q.  Merci. Est-ce qu'on pourrait maintenant demander l'affichage du

 28   document 1D3261. J'espère que vous avez une copie papier de ce document.


Page 12111

  1   1D3261. Est-ce qu'on pourrait afficher ce document sur le prétoire

  2   électronique, s'il vous plaît ? Malheureusement, ce n'est pas encore à

  3   l'écran mais je vais en donner lecture.

  4   Ce document vient du ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska.

  5   Il s'agit du bulletin des événements journaliers numéro 114. Il est

  6   mentionné qu'il y avait des endroits où des feux ont retenti à Dobrinja et

  7   à Vrace. Deuxième paragraphe, il est mentionné que :

  8   "Des Bérets verts ainsi que d'autres formations paramilitaires

  9   musulmanes qui, hier, le 29/5/1992, ont attaqué des parties de la commune

 10   locale de Dobrosevici, Bijelugovici, Mihaljevici et Bojnik ont été -- on

 11   battait en -- on a pu les faire battre en retraite. Ils ont été renvoyés

 12   dans le village de Dobrosevici, et dans le village de Bioce, dans la

 13   municipalité d'Ilidza, et ensuite ils ont encerclé le village d'Ahatovici.

 14   L'armée serbe a donné ou lancé un ultimatum au groupe paramilitaire dans le

 15   village d'Ahatovici pour se rendre avant le 30 mai 1992, 18 heures."

 16   Donc vous avez attaqué --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

 18   M. GAYNOR : [interprétation] Je voulais informer les Juges de la Chambre

 19   qu'il y avait une traduction en anglais et le document de la liste 65 ter

 20   00298 pour la version en anglais.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait donc afficher ceci sur

 23   le prétoire électronique avec la version serbe dont j'ai donné lecture ?

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur le Témoin.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pour ce qui est du premier paragraphe, avant la rubrique ou le titre :

 28   "CSB de Banja Luka."


Page 12112

  1   Donc, Monsieur le Témoin, les Bérets verts ont attaqué les parties

  2   serbes de la commune locale de Dobrosevici. Ils ont été repoussés vers

  3   Dobrosevici et ils ont reçu un ultimatum pour se rendre, et c'est

  4   seulement, à ce moment-là, que l'ultimatum a été lancé, n'est-ce pas ?

  5   R.  Monsieur Karadzic, ce qui est mentionné ici n'est pas vrai. Lorsque

  6   j'étais au camp à Rajlovac où lorsque j'étais emprisonné dans cette

  7   citerne, ils sont venus avec les textes qui avaient déjà été rédigés, et on

  8   a donné à ceux qui n'avaient pas de blessure visible ces textes pour qu'ils

  9   en fassent lecture, et il y avait quelqu'un qui filmait.

 10   Q.  S'il vous plaît, ne perdons pas de temps; sinon, on aura besoin de dix

 11   heures au lieu.

 12   R.  Mais ce n'est pas vrai. Est-ce que vous avez capturé un membre

 13   quelconque des Bérets verts ?

 14   Q.  Nous reviendrons à tout cela.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant demander

 16   d'afficher le document de la liste 65 ter 1D3262. Il s'agit d'un rapport de

 17   police concernant les événements du lendemain.

 18   J'espère que ce document a également été traduit. Il s'agit du

 19   bulletin des événements journaliers qui porte le numéro 115.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur

 21   Karadzic.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Il est mentionné qu'il y a eu des tirs de tireurs embusqués dans

 24   la zone de Grbavica. Dans le paragraphe suivant, on voit que, dans le

 25   village serbe de Rajlovac, les Bérets verts ont mené une attaque contre une

 26   maison serbe. L'attaque a été contrée durant la nuit du 1er juin 1992. Des

 27   terroristes musulmans ont été encerclés dans le village d'Ahatovici mais

 28   ils ont résisté, mais le village est sous le contrôle de l'armée serbe.


Page 12113

  1   Témoin, dans cette déclaration que vous avez faite le 15 janvier 1998, vous

  2   avez dit qu'ils avaient fait prisonniers tous les civils. Est-ce que vous

  3   étiez un civil ce jour-là, ou est-ce que vous étiez un combattant ?

  4   R.  Quelle date avez-vous mentionné ?

  5   Q.  Le 1er juin 1992, on vous a fait battre en retraite vers Ahatovici.

  6   R.  C'est au moment où le village d'Ahatovici a été pris.

  7   Q.  Mais vous avez dit que les femmes et les enfants avaient été séparés

  8   des hommes et qu'ils avaient été acheminés vers un centre industriel, et

  9   qu'ils avaient arrêté tous les civils. Donc, est-ce que vous étiez civil ?

 10   R.  Oui.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Nous avons une copie papier de ce document en

 12   anglais. Je peux vous fournir une traduction.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que M. Karadzic en a terminé

 14   avec le document.

 15   Est-ce que vous voulez continuer de donner lecture de ce document ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. J'en ai terminé en fait. Il n'y a que

 17   cette partie qui porte sur Ahatovici. Donc, on n'a pas besoin vraiment

 18   d'utiliser ce document. On pourra peut-être l'utiliser pour d'autres

 19   événements.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vois que c'est le moment de faire la

 21   pause. Nous allons donc faire une pause et cette fois-ci, nous ferons une

 22   pause d'une demi-heure.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais veuillez prendre en compte également que

 24   nous aurons peut-être besoin de plus de temps. Vous savez, quand on est

 25   originaire de Bosnie, on aime parler énormément. Je voudrais que l'on se

 26   concentre sur les réponses, des réponses succinctes, mais en même temps,

 27   j'aimerais que l'on ait un peu plus de temps, si possible.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons à 12 heures 30.


Page 12114

  1   --- L'audience est suspendue à 12 heures 05.

  2   --- L'audience est reprise à 12 heures 32.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur le Témoin, quelles étaient vos fonctions au sein de l'armée ?

  7   Quelle était votre spécialité ?

  8   R.  Je faisais partie des services techniques. J'ai suivi trois mois de

  9   formation, après quoi j'ai été nommé au poste d'estafette.

 10   Q.  Est-ce qu'une estafette est un expert en carte géographique ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Je vous remercie. J'aimerais maintenant que nous parlions d'un certain

 13   nombre de groupes dont vous avez parlé vous-même. Est-ce que vous qualifiez

 14   tous les Serbes de chetniks, ou est-ce que vous utilisez le terme chetnik

 15   pour désigner des groupes bien précis, en vous fondant sur les insignes et

 16   les uniformes qu'ils portent ?

 17   R.  Je parlais de groupes bien précis, que je qualifiais ainsi d'après

 18   leurs uniformes.

 19   Q.  Par conséquent, vous ne qualifiez pas tous les Serbes de chetniks ou

 20   d'extrémistes, n'est-ce pas ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Je vous remercie. Pourriez-vous nous dire quels sont les groupes bien

 23   précis que vous avez vus et identifiés ? Quels étaient les uniformes qu'ils

 24   portaient et quels étaient les insignes qu'arboraient ces hommes ?

 25   R.  Ils avaient des couvre-chefs en fourrure assortis d'une cocarde et des

 26   quatre lettres S. Ils portaient leurs armes, et en particulier une

 27   baïonnette, en bandoulière, et seuls quelques-uns portaient des fusils. La

 28   majorité était armée d'armes automatiques.


Page 12115

  1   Q.  Je vous remercie. Dans votre déclaration écrite, lorsque vous parlez

  2   des forces spéciales serbes, est-ce que vous pensiez à ces groupes-là ?

  3   R.  Non. Lorsque j'ai parlé des forces spéciales serbes, je parlais des

  4   soldats qui portaient un uniforme de camouflage et un béret rouge sur la

  5   tête. Ce sont ces hommes que j'ai vus.

  6   Q.  Vous dites que les membres des forces spéciales serbes  portaient un

  7   masque ?

  8   R.  Oui, ceux qui sont arrivés au camp où nous nous trouvions sous prétexte

  9   d'un prétendu échange.

 10   Q.  Je vous remercie. Vous avez dit que vous aviez remarqué des membres des

 11   Aigles blancs et de l'unité des hommes d'Arkan. Comment est-ce que vous

 12   faisiez la différence entre les deux ?

 13   R.  Lorsque j'ai été fait prisonnier à Bojnik, Zoran Damjanovic m'a parlé

 14   des hommes d'Arkan. En fait, lorsqu'il parlait des hommes d'Arkan, il

 15   disait : "Vous allez maintenant être roué de coups par les hommes d'Arkan."

 16   Quant aux Aigles blancs, c'était des hommes qui portaient des rubans de

 17   couleur blanche sur leurs manches et autour de la tête.

 18   Q.  Je vous remercie. Dites-moi : cet homme que vous appelez Zuti, et vous

 19   avez dit que c'était un membre de l'Unité de Police spéciale dirigée par

 20   Vikic. Lorsque vous dites "Vikic," est-ce que vous parlez de ce Vikic qui a

 21   continué à commander la police spéciale musulmane, le Vikic qui est bien

 22   connu ?

 23   R.  Oui, c'est lui.

 24   Q.  Donc l'homme, que vous appelé "Zuti," était membre des forces

 25   spéciales. Etes-vous sûr qu'un membre des forces spéciales serait consigné

 26   au simple rôle de chauffeur de M. Tintor ?

 27   R.  Je n'en sais rien. C'est Alija Gacanovic, qui m'a dit cela. Alija

 28   Gacanovic était un de mes voisins qui le connaissait, et qui a dit que cet


Page 12116

  1   homme était Zuti et qu'il était membre de l'unité de l'ancienne Unité

  2   spéciale de Vikic, et chauffeur de Jovan Tintor.

  3   Q.  Je vous remercie. Dans votre déclaration du 30 octobre -- je vous

  4   demande un instant. Donc dans votre déclaration écrite, vous dites qu'une

  5   certaine femme voulait donner des coups aux personnes emprisonnées parce

  6   que son frère avait été tué par les Musulmans, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Merci. Est-ce que quelque part, dans votre déclaration écrite, vous

  9   dites qu'un homme voulait se venger de son instituteur, de celui qui lui

 10   avait servi d'instituteur quand il était tout jeune ?

 11   R.  Je ne me rappelle pas cela.

 12   Q.  Merci. Lorsque vous avez participé à ces combats à Ahatovici, est-ce

 13   que vous aviez avec vous des combattants qui venaient d'ailleurs, qui

 14   n'étaient pas originaires d'Ahatovici ?

 15   R.  Non. En tout cas, il ne s'agissait pas de combattants. En effet, durant

 16   le mois de mai, quatre hommes ont été -- étaient amenés sur place, qui

 17   venaient de Visoko, mais ils étaient originaires de Bratunac. Ils avaient

 18   donc été faits prisonniers à Bratunac, et emprisonnés dans l'école de

 19   Bratunac, puis ils ont été échangés à Visoko, et on les a amenés à

 20   Ahatovici pour un autre échange, parce qu'ils étaient censés finir leur

 21   voyage à Sarajevo. Mais ils n'ont pas pu effectuer le voyage, et sont donc

 22   finalement restés à Ahatovici. Je me souviens que deux d'entre eux

 23   portaient le patronyme de Salkic, et les deux autres sont arrivés en même

 24   temps que les deux  Salkic. Il s'agissait de soldats d'active de l'ancienne

 25   JNA qui avaient fui Vukovar, et ont été emmenés à Ahatovici. Ils n'avaient

 26   pas d'armes sur eux. Je me rappelle que l'un d'entre eux s'appelait Ramiz

 27   Peljto.

 28   Q.  Je vous remercie. Monsieur le Témoin, si je devais vous dire que nous


Page 12117

  1   avons fait prisonniers certains hommes plusieurs fois, est-ce que vous vous

  2   rendriez compte alors que ces hommes de Bratunac étaient venus là pour se

  3   battre dès qu'ils auraient été échangés ?

  4   R.  Non. Ils voulaient simplement passer la ligne et se diriger vers

  5   Sarajevo.

  6   Q.  Je vous remercie.

  7   R.  Excusez-moi, j'ajouterais qu'ils avaient de la famille à Sarajevo.

  8   Q.  Merci. Vous dites, en page 4 de votre déclaration écrite, que Nikola

  9   Stanisic avait des problèmes personnels avec l'homme surnommé Sok, et que

 10   cela lui a donné une bonne occasion de régler ses comptes avec lui.

 11   R.  Je suis désolé, ce n'est pas Nikola Stanisic qui a eu des problèmes

 12   avec Sok. Sok était le commandant de l'unité qui nous a fait subir toutes

 13   sortes d'exactions.

 14   Q.  Oui. Vous avez raison. Je suis désolé. Vous dites, en fait, que Hajro

 15   Delic - je cite - nous a dit qu'à l'initiative de Nikola Stanisic, avec

 16   lequel il avait eu quelques problèmes avant d'être frappé par Sok, et que

 17   donc pourrait faire penser que c'est Nikola Stanisic qui avait ordonné ces

 18   coups ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.

 20   M. GAYNOR : [interprétation] J'essaie de suivre ce qui est en train d'être

 21   dit au sujet des diverses déclarations évoquées par l'accusé, mais il

 22   serait bon que chaque fois que l'accusé évoque une déclaration écrite, il

 23   nous dise quelle est exactement la déclaration sur laquelle il s'appuie. Je

 24   vous remercie.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis désolé, il s'agit de la déclaration du

 26   témoin du 15 avril 1993, et en page 3 de ce document, au bas de la page,

 27   ainsi qu'en page 4, il est écrit que Hajro Delic nous a raconté comment il

 28   avait été roué de coups et qu'ensuite, il avait ajouté que ceci s'était


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  1   fait sur l'initiative de Nikola Stanisic avec lequel il avait eu des

  2   conflits avant la guerre.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Ceci est-il exact ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je vous remercie. Puis, en page 4 de ce document, vers le bas de la

  7   page, vous dites qu'une femme dénommée Mladjenka a demandé aux gardes

  8   l'autorisation d'exécuter ces hommes parce que les Musulmans étaient censés

  9   avoir tué son frère, Mladjen, à Ahatovici, et les gardes ont finalement

 10   fait sortir cette femme et l'ont emmené avec eux ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Encore une fois, il est fait référence aux gardes, au moment où vous

 13   dites que Zuti a jeté une grenade lacrymogène -- ou en tout cas, une

 14   grenade contenant un certain gaz sur le camion-citerne, et que dès qu'il

 15   est parti, les gardes ont ouvert le camion-citerne pour vous sauver ?

 16   R.  C'est exact.

 17   Q.  Je vous remercie. En page 5, vous dites que le 14 juin, aux environs de

 18   18 heures 30, Ramiz Peljto a été emmené par ses anciens collègues, deux

 19   d'entre eux, anciens collègues à lui au sein de la JNA, qu'il avait

 20   abandonné, et que vous ne l'avez plus jamais revu et n'avez plus jamais

 21   entendu parler de lui ? Est-ce que ceci concernait une affaire entre ces

 22   trois hommes ?

 23   R.  Voyez-vous, pour autant que je le sache, les deux hommes qui sont

 24   arrivés portaient un uniforme de camouflage, et ils ont prononcé le nom de

 25   Ramiz Peljto en affirmant qu'ils étaient prétendument allés à l'école

 26   ensemble. Ils l'ont emmené à l'arrière du camion et je ne l'ai jamais vu

 27   revenir. Immédiatement après cela, des membres des forces spéciales sont

 28   arrivés et nous ont entassé à bord des autobus pour nous emmener là où ils


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  1   le souhaitaient.

  2   Q.  Je vous remercie. Savez-vous -- ou plutôt, votre village fait-il partie

  3   de la municipalité de Novi Grad ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Je vous remercie. Savez-vous que Joja Tintor était associé avec la

  6   municipalité de Vogosca ?

  7   R.  Je sais cela parfaitement bien. Joja Tintor et mon défunt père étaient

  8   amis. Mon père était né à Ahatovici, et mon grand-père -- mon défunt grand-

  9   père, alors qu'il était un homme âgé, avant de mourir, ils se

 10   connaissaient. Ils avaient des relations fraternelles, et vraiment, je ne

 11   pense pas qu'on aurait pu les séparer, ne serait-ce que par un cheveux. Je

 12   ne vois pas comment un être humain peut faire de telles choses à un autre

 13   être humain. Alors Joja Tintor avait des amis à Ahatovici, il leur rendait

 14   visite assez souvent. En tout cas, je le voyais lorsqu'il passait par là,

 15   et au jour d'aujourd'hui, je crois que c'était un homme bien. Je l'ai vu au

 16   moment où il a été fait prisonnier. Il nous a défendu au moment où les

 17   soldats nous emmenaient. Mais dès qu'il est arrivé, tout ce qui s'était

 18   passé avant a cessé. Il nous a fourni des bandages pour panser nos plaies.

 19   Je n'ai jamais plus revu Joja Tintor, mais je sais qu'il était propriétaire

 20   d'un restaurant à Vogosca. Je sais où se trouve la maison de sa famille.

 21   Ces gens-là avaient l'habitude de participer aux funérailles au cimetière

 22   orthodoxe serbe. Par exemple, les funérailles de Dusko, de Rajlovac, nous

 23   avons tous assisté à ces funérailles. Les gens se connaissaient tous. Ils

 24   ne se fréquentaient peut-être pas au quotidien, mais ils se connaissaient.

 25   Q.  Je vous remercie. Mais période l'attaque, vous n'avez pas vu Joja ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Je vous remercie. Vous l'avez vu après l'attaque. Qui vous a dit qu'il

 28   était le commandant ?


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  1   R.  C'est en ces termes que les soldats s'adressaient à lui, en l'appelant

  2   commandant Joja.

  3   Q.  Je vous remercie.

  4   R.  J'aimerais ajouter quelques mots si cela peut être utile. Sur

  5   l'uniforme de l'ex-JNA qu'il portait, il arborait trois étoiles sur chaque

  6   épaulette.

  7   Q.  Il avait une étoile à cinq branches sur son couvre-chef ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Monsieur le Témoin, je dois vous dire que la dernière personne au monde

 10   qui arborerait l'étoile à cinq branches sur son couvre-chef est bien Joja

 11   Tintor. Est-ce que peut-être vous auriez pu le confondre avec quelqu'un

 12   d'autre ?

 13   R.  Non. Lorsque nous avons été emprisonnés dans ce camp, l'homme surnommé

 14   Sok, dont je ne connais pas les nom et prénom réels, portait un drapeau sur

 15   sa chemise, le drapeau yougoslave, et un autre drapeau sur le côté droit de

 16   son couvre-chef.

 17   Q.  Si je devais vous dire qu'il n'a jamais beaucoup aimé la Yougoslavie ou

 18   l'étoile à cinq branches, que diriez-vous ?

 19   R.  Je ne sais pas, mais, moi, c'est ce que j'ai vu.

 20   Q.  Alors on vous a emmené hors de ce centre de détention pour vous faire

 21   monter à bord d'autobus le 14 juin, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Combien d'hommes sont montés à bord de cet autobus ?

 24   R.  55.

 25   Q.  Merci. Vous dites que tous ces hommes étaient allongés sur le sol de

 26   l'autobus ?

 27   R.  Essayez de vous représenter l'arrière d'un autobus des transports

 28   publics. Vous voyez à peu près l'espace qu'il y a au fond d'un autobus de


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  1   ce genre. Il y a assez de place uniquement pour se tenir debout. Or, nous,

  2   nous étions allongés face contre terre les uns sur les autres, comme des

  3   sardines dans une boîte de conserve.

  4   Q.  Je vous remercie. Vous étiez alignés en combien de rangées ? Je

  5   rappelle que vous dites que vous étiez au moins 50.

  6   R.  En deux rangées. Entre les sièges, il y avait aussi un peu de place.

  7   Q.  Est-ce que vous faisiez partie de la première rangée et est-ce que

  8   quelqu'un était allongé sur vous, ou est-ce que vous faisiez partie de la

  9   deuxième rangée, de la deuxième couche, et est-ce qu'il y avait quelqu'un

 10   de l'autre côté ?

 11   R.  Moi, je faisais partie de la première rangée. J'ai été le troisième à

 12   sortir du camion citerne, et j'étais donc allongé tout près de la porte

 13   arrière de l'autobus, juste à côté des marches.

 14   Q.  Combien d'hommes étaient couchés au dessus de vous ?

 15   R.  Tous. Il y avait peut-être cinq hommes qui étaient couchés sur moi,

 16   étant donné l'entassement dans l'autobus.

 17   Q.  Cinq rangées -- est-ce qu'il y avait cinq rangées, cinq couches de

 18   corps ou est-ce qu'il y avait cinq hommes dans deux rangées ? Combien y

 19   avait-il de rangées au dessus de vous, de couches ?

 20   R.  Une couche, mais ils étaient cinq, les uns à côté des autres.

 21   Q.  Je vous remercie. A l'intérieur, en dehors de vous-même, combien avez-

 22   vous dit que vous étiez au total dans cet autobus, 50, 55 ?

 23   R.  505. 55, entassés. Personne n'était autorisé à s'asseoir sur les

 24   sièges. A l'entrée de l'autobus, il y avait ce garde qui portait un masque

 25   noir sur le visage et il frappait les hommes dans le dos et leur disait :

 26   "Avance, avance jusqu'au fond de l'autobus, et couche-toi par terre, face

 27   contre terre."

 28   Q.  Je vous remercie. Donc il y avait deux gardes dans l'autobus avec 55


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  1   prisonniers entassés comme des sardines ?

  2   R.  Deux gardes et un chauffeur, et puis ce Zuti, bien entendu, l'homme que

  3   je connais sous le surnom de Zuti, qui est arrivé à bord d'une camionnette

  4   devant l'autobus, et Alija Gacanovic a dit qu'il était membre des forces

  5   spéciales de Dragan Vikic.

  6   Q.  Je vous remercie. Puis on vous a emmenés à Srednje, n'est-ce pas ?

  7   R.  On a démarré, on s'est dirigés vers le portail sur la droite, puis on

  8   est allé à Rajlovac en traversant la voie de chemin de fer. Vous savez bien

  9   que l'on prend à droite pour aller vers la ville et on est arrivé à Kobilja

 10   Glava, et on a pris à gauche vers Semizovac. Puis depuis Semizovac on a

 11   tourné à droite, et encore une fois, et à droite il y a Ilijas. Je vous

 12   rappelle simplement que vous avez des membres de votre famille à Gora, qui

 13   est un village situé tout près, donc vous connaissez sans doute le secteur.

 14   Q.  Oui, oui, à Gora, la population est majoritairement croate, n'est-ce

 15   pas ? Donc vous avez pris sur la droite ?

 16   R.  Oui, sur la droite à partir de Semizovac.

 17   Q.  Est-ce que vous êtes passé par Srednje ou est-ce que vous avez tourné

 18   avant Srednje ?

 19   R.  Quand on franchi le pont à Srednje, on est donc en dessous, et on a

 20   tourné, et c'est à cet endroit que se trouvait le barrage routier. J'ai

 21   entendu le chauffeur demander où on se trouvait, dans quelle localité.

 22   L'homme lui a répondu "Srednje." Le chauffeur a ensuite demandé combien il

 23   y avait encore de chemin à faire pour arriver à Sokolina.

 24   Q.  Je vous remercie. Est-il exact que sur la route menant à Gora Bozic, il

 25   y avait la ligne de séparation des forces, n'est-ce pas, c'est-à-dire la

 26   ligne de front ?

 27   R.  Ça, je ne sais pas. Je n'en sais rien.

 28   Q.  Je vous remercie. Ensuite vous avez pris à droite et vous êtes arrivé à


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  1   Sokolina, n'est-ce pas ?

  2   R.  A Srednje, on a pris à gauche, et c'est là qu'a eu lieu cette

  3   conversation entre celui qui tenait le barrage et le chauffeur, après quoi

  4   on a continué tout droit, et j'ai senti qu'on roulait sur une route

  5   goudronnée.

  6   Q.  Je vous remercie. Mais si vous avez pris à gauche, vous alliez vers

  7   Bozici. Parce que quand on va tout droit, on va vers  Vukasevici, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Oui, oui.

 10   Q.  Est-ce que Sokolina se trouve sur la route qui sépare Vukovici de

 11   Vukasevici ?

 12   R.  Oui. Il y a une scierie sur la route, une entreprise qui coupe le bois

 13   et fabrique des lattes de bois.

 14   Q.  Je vous remercie. Vous avez une bonne ouïe, n'est-ce pas, vous entendez

 15   bien ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous avez entendu qu'il y avait un véhicule qui vous escortait à

 18   l'arrière de l'autobus; c'est bien cela ?

 19   R.  Non, non. Quand on est partis de Rajlovac, j'ai vu qu'il y avait deux

 20   véhicules devant nous, et deux véhicules derrière. Ces deux véhicules nous

 21   ont suivis, parce que je les ai entendus, jusqu'au barrage routier de

 22   Srednje, et lorsqu'on a pris la route goudronnée, je ne les ai plus

 23   entendus.

 24   Q.  Merci. Est-ce qu'il exact que Vukasevici est bien un village croate en

 25   plein territoire serbe ?

 26   R.  Je ne sais pas que ce village se trouve en plein territoire serbe, mais

 27   je sais que c'est un village croate, et à côté de Vukasevici, il y a un

 28   village serbe qui porte le nom de Drazevici.


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  1   Q.  Merci. Ce village de Vukasevici avait une Défense territoriale qui vous

  2   est venue en aide, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Merci. Donc à un certain moment, vous avez dit que vous aviez entendu

  5   une forte explosion, n'est-ce pas, et ensuite des tirs de fusils

  6   automatiques; c'est bien cela ?

  7   R.  Oui, une détonation très forte, une forte explosion. Quand j'étais

  8   allongé sur le sol à l'arrière de l'autobus, j'ai entendu cette détonation

  9   dans mon dos. Il y avait vraiment énormément de gens, et tout le monde a

 10   été secoué. Les vitres ont éclaté. Nous avons entendu un bruit qui n'est

 11   pas le même que celui qu'on entend quand une balle est tirée. Donc cela ne

 12   pouvait être qu'un projectile provenant d'un lance-roquettes de 100

 13   millimètres ou d'un Zolja. La Défense territoriale, lorsqu'ils ont emporté

 14   les corps massacrés pour les emporter jusqu'à l'endroit où se trouvaient

 15   les membres de l'armée serbe dirigée par Dragan Ikanovic, parce que jusqu'à

 16   ce moment-là, il y avait des pourparlers. Vous savez où se trouve Gajici,

 17   là où il y a le foyer des chasseurs créé sous l'ancien président, le

 18   président Tito. C'est là qu'ils se sont rencontrés et qu'ils ont mené des

 19   pourparlers jusqu'au moment où le massacre a eu lieu.

 20   Q.  Je vous remercie. Donc c'était un village serbe, et ce Dragan venait de

 21   Visevice ou de Srednja ?

 22   R.  De Visevice.

 23   Q.  Vukasevici, c'est un village musulman, et ils ont conclu un accord. Je

 24   vous renvoie d'ailleurs à la poésie traditionnelle où ce village est décrit

 25   et où ont dit que, dans ce village, on ne touche pas à un cheveu de qui que

 26   ce soit.

 27   R.  C'est exact. C'est un village qui se trouve sur la route où le massacre

 28   a été commis à l'endroit de la ligne de séparation des forces, qui commence


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  1   à peu près à Visevice. C'est à partir de Visevice, qu'une route a été

  2   construite, enfin elle a été construite plus tard, elle part de la colline

  3   et c'est là que les gens du coin m'ont amené. Ils m'ont montré des camions

  4   qui partaient de Vogosca, et qui avaient à leur bord quelque chose, mais je

  5   ne sais pas quoi.

  6   Q.  Quand est-ce que l'on vous a montré cela, Monsieur le Témoin ?

  7   R.  Pendant les journées qui commencent le 16 juin et cela a duré un

  8   certain temps parce que je suis resté là avec mon oncle 11 jours à peu

  9   près, pour me remettre et récupérer.

 10   Q.  A Vukasevici ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Je vous remercie. Vous avez été blessé dans quelle condition ? Est-ce

 13   que vous étiez déjà blessé lorsque vous êtes monté dans l'autobus ?

 14   R.  Oui. Mon gros orteil du pied gauche a été emporté par une balle ainsi

 15   que ma cuisse a aussi été effleurée par une balle. Ça c'était avant le

 16   massacre. Mais pendant le massacre, j'ai été blessé au bras gauche.

 17   Q.  Je vous remercie. Tout blessé que vous étiez, vous êtes monté à bord et

 18   vous êtes parti avec vos collègues. Est-ce que l'un ou l'autre d'entre eux

 19   étaient blessés ?

 20   R.  Oui. Mon voisin, un jeune homme de 15 ans, à ce moment-là, était blessé

 21   au bras et à la jambe, et mon oncle était blessé - excusez-moi de le dire -

 22   aux parties génitales. Le membre de ma famille avait été blessé à l'aide

 23   d'une arme de gros calibre. Cela devait être du 7,9. Il a été blessé au

 24   bras, à peu près à cet endroit-là, et sa blessure s'allongeait sur le bras,

 25   et puis il a été blessé à la jambe, et avec l'aide de mon oncle, qui était

 26   un homme assez fort, nous avons réussi à nous entraider et à aider aussi

 27   les deux autres. Nous avions très peur. Mais je me suis rendu compte que

 28   les deux autres étaient vivants, enfin à peu près, Rizvanovic, Safet, et


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  1   l'autre ami, et nous les avons fait sortir par la fenêtre. C'était vraiment

  2   une situation insupportable, et nous sommes partis pour la forêt toute

  3   proche qui se trouvait à peine à 50 mètres, et ils sont morts là dans la

  4   forêt en raison des blessures graves qu'ils avaient subies.

  5   Je tiens à dire, Monsieur Karadzic, que si j'avais été un montagnard, si

  6   j'avais été un éclaireur quand j'ai fait mon service militaire dans

  7   l'armée, parce que je sais bien que, là, il y avait une ligne de

  8   transmission et j'aurais réussi à atteindre un village ou le plateau d'où

  9   j'entendais partir des tirs. Donc je ne voulais pas me diriger dans cette

 10   direction. J'ai pris l'autre direction où on n'entendait pas de tirs. La

 11   route m'a permis heureusement d'arriver jusque-là, jusqu'au village

 12   musulman.

 13   J'ajouterais encore une chose. Jusqu'à ce moment-là les pourparlers

 14   étaient en cours. Alors j'ajouterais ce qui suit : Lorsque les hommes

 15   massacrés ont été enterrés un Serbe du village de Drazevici est arrivé et a

 16   dit que sa femme était morte quand elle a entendu parler de cette affaire

 17   et que les Musulmans, qui n'avaient pas attaqué, lui ont apporté leur aide

 18   pour enterrer sa femme.

 19   Q.  Je vous remercie. Mais essayons d'expliciter ce point. Les deux hommes

 20   qui sont morts peu de temps après, comme vous l'avez dit aujourd'hui, sont

 21   donc morts à ce moment-là. Vous nous avez également dit que trois hommes

 22   sont restés dans la forêt et qu'ils sont morts plus tard et qu'ils ont été

 23   découverts massacrés. Est-ce que cela signifie --

 24   R.  Non, non, non. Les trois ne sont pas morts. Ce que j'ai dit, c'est que

 25   trois hommes ont été découverts après l'arrivée de la Défense territoriale

 26   mais qu'ils faisaient semblant d'être morts. Parce que lorsque les membres

 27   de la Défense territoriale sont arrivés, ils ne savaient pas qui ils

 28   étaient. Ils l'ont découvert uniquement après quand ils ont vu les insignes


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  1   qu'ils portaient sur les épaules.

  2   Q.  La Défense territoriale musulmane portait ses propres insignes en plein

  3   territoire sous contrôle serbe; c'est bien cela ?

  4   R.  Je ne savais pas, à ce moment-là, que le territoire était sous contrôle

  5   serbe.

  6   Q.  Mais l'autobus a été touché alors qu'il était sur le territoire

  7   contrôlé par qui ?

  8   R.  Quand la ligne de séparation existait elle traversait la route en son

  9   milieu, et c'est là que l'autobus a été intercepté.

 10   Q.  Donc sur la ligne de séparation même; c'est bien cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Je vous remercie. Tout blessé que vous étiez, il vous a fallu combien

 13   de temps pour arriver jusqu'à Vukasevici, quelle est la longueur de la

 14   route entre Sokolina et Vukasevici ?

 15   R.  Je ne sais pas exactement, mais vous savez quand on a peur on ne sait

 16   rien de bien précis. Mais quand on est sorti de l'autobus, d'ailleurs, il y

 17   a une chose que je voudrais souligner. Il a commencé à pleuvoir, il y avait

 18   de la pluie partout sur le sol. Nous portions un tee-shirt et des sous-

 19   vêtements et nous avons marché dans la forêt toute la nuit simplement vêtus

 20   de ce tee-shirt et de maillot de corps. J'ai réussi à découvrir un sentier

 21   à un certain moment où j'ai pu me glisser et ramper parce que je voulais

 22   voir s'il y avait des mines qui avaient été posées à ces endroits, et c'est

 23   seulement lorsque le jour a pointé que je suis arrivé jusqu'au village.

 24   Mais j'ai d'abord essayé de reconnaître qui habitait dans ce village; est-

 25   ce qu'il y avait des cochons ou des moutons ou quels étaient les vêtements

 26   que la population de ce village portait ? Donc il y avait ce jeune garçon

 27   de 15 ans, nous lui avons dit d'aller vers la maison et de crier : A

 28   l'aide, à l'aide, voisins. Nous lui avons dit que si tout allait bien, il


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  1   pourrait établir le contact avec nous et nous faire savoir que tout allait

  2   bien, et que, sinon, nous verrions plus tard et que nous poursuivrions

  3   notre fuite.

  4   Q.  Je vous remercie. Pouvez-vous essayer de raccourcir vos réponses autant

  5   que faire se peut de façon à ce que nous disposions de plus de temps ?

  6   Donc nous avons vu que le 16 -- ou plutôt, le 15, dans la matinée, l'homme

  7   prénommé, Ibrahim, a enregistré des images à l'aide de sa caméra. Pourquoi

  8   est-ce qu'il ne s'est pas approché davantage ? Pourquoi est-ce qu'il est

  9   resté si loin ? Est-ce que c'était parce que la ligne de séparation des

 10   forces passait par là ?

 11   R.  Non. Il était là parce que quand Dzafer Heric, le commandant de la

 12   Défense territoriale à l'époque, s'est trouvé là. Il a été suivi par

 13   l'arrivée de 30 à 35 membres de la Défense territoriale, mais lorsqu'ils

 14   sont tombés sur ce massacre, finalement, Dragan Ikanovic est arrivé

 15   accompagné de ses combattants et de deux camions pour tracter l'autobus,

 16   probablement pour dissimuler le massacre. Je ne sais pas. Je ne peux que

 17   supputer. Mais trois jours plus tard, ils sont arrivés et ils ont mis le

 18   feu à l'autobus.

 19   Q.  Ecoutez, essayons de simplifier, Monsieur le Témoin, et d'expliciter

 20   les choses. Les Serbes - donc quatre au total, deux gardes et deux

 21   chauffeurs - conduisent 55 prisonniers à bord d'un autobus et puis ils

 22   utilisent un explosif pour faire sauter leur propre autobus et cet

 23   explosion est très forte, ensuite ils tirent sur leur propre autobus pour

 24   le détruire et pour toucher les Musulmans qui se trouvent à l'intérieur de

 25   l'autobus. Ensuite ils laissent les choses en l'état et la Défense

 26   territoriale musulmane arrive et c'est à ce moment-là qu'on sort les

 27   cadavres et les blessés de l'autobus et qu'on les filme avec une caméra.

 28   Est-ce que vous pouvez m'expliquer tout cela ? Comment se fait-il que


Page 12129

  1   les Serbes ont estimé qu'il pouvait être utile, dans leur intérêt, de faire

  2   ce que vous dites et de laisser ensuite l'autobus sur place ?

  3   R.  Voyez-vous --

  4   M. GAYNOR : [interprétation] Objection.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin a commencé, une seconde.

  6   Oui, Monsieur Gaynor ?

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Voici mon objection : Il est tout à fait

  8   correct de la part de l'accusé d'essayer de résumer l'incident à

  9   l'intention du témoin, mais son résumé est inexact. Il a dit "quatre

 10   Serbes, deux plus deux;" or, dans la déposition du témoin, il est tout à

 11   fait clair qu'il y avait un autobus et quatre véhicules qui escortaient

 12   l'autobus, et qu'il y avait deux gardes à bord de l'autobus, plus le

 13   chauffeur. Ça c'est mon premier argument.

 14   Le deuxième c'est que je ne pense pas qu'il y ait eu, jusqu'à

 15   présent, la moindre preuve que la Défense territoriale musulmane ait emmené

 16   les blessés et les ait fait sortir de l'autobus. Donc, si M. Karadzic veut

 17   résumer l'incident, je propose qu'il le fasse fidèlement à la déposition du

 18   témoin.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Gaynor.

 20   Il a absolument raison, Monsieur Karadzic. Prenez soin, lorsque vous

 21   résumez la déposition d'un témoin pour lui soumettre ses propres dires, de

 22   le faire fidèlement.

 23   Monsieur le Témoin, ayant eu la possibilité d'entendre ce que M. Gaynor

 24   vient de dire, vous devriez pouvoir répondre maintenant à la question.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je apporter mon concours ?

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous avez dit dans votre déclaration écrite que le

 28   lendemain, le 15, la Défense territoriale est arrivée du village musulman


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  1   de Vukasevici pour emporter les cadavres et les blessés ?

  2   R.  Est-ce que vous pourriez répéter votre question ?

  3   Q.  Est-il vrai que vous avez déclaré précédemment -- donc je vous demande

  4   si ce que vous avez dit dans votre déclaration précédente est vrai, à

  5   savoir que dans la matinée du 15 juin, la Défense territoriale musulmane du

  6   village de Vukasevici est arrivée jusqu'à l'autobus pour emporter les

  7   cadavres et emmener les blessés ?

  8   R.  Oui, ils sont arrivés à bord de deux tracteurs.

  9   Q.  Je vous remercie. C'est à ce moment-là qu'ils ont filmé l'autobus à

 10   partir de la colline, donc à partir d'une hauteur ?

 11   R.  Oui. Ce n'était pas une colline, c'était une route, un sentier utilisé

 12   par les chevaux pour transporter des bûches, et il y avait là une étable où

 13   on gardait les chevaux. Les chevaux étaient utilisés pour tirer les bûches

 14   hors de la forêt.

 15   J'aimerais vous dire encore autre chose. Lorsque j'ai réussi à

 16   partir, quand j'ai réussi à me relever, les membres de la Défense

 17   territoriale ont quitté les lieux immédiatement. Ils avaient leurs propres

 18   éclaireurs, et leurs éclaireurs suivaient la situation au fil de son

 19   évolution.

 20   Q.  Très bien. Donc nous avons résolu cette question. La Défense

 21   territoriale musulmane est arrivée pour ramasser les cadavres et emmener

 22   les blessés. Est-ce que l'armée de la Republika Srpska a rejoint la Défense

 23   territoriale, ou peut-être est-ce une autre formation militaire régulière

 24   dirigée par ce Dragan qui est arrivée le même jour ? Est-ce qu'il y a eu

 25   une analyse de ce qui s'était passé ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Très bien. Monsieur le Témoin, moi, je vais vous soumette l'hypothèse

 28   suivante : Cet autobus a été touché par un explosif, sans doute un obus de


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  1   mortier ou un projectile de lance-roquettes, et à ce moment-là, ils ont

  2   commencé à tirer sur l'autobus, et il s'agissait d'une espèce d'embuscade

  3   et cette embuscade a tué un certain nombre d'hommes à bord de l'autobus, en

  4   laissant les autres sur place.

  5   Est-ce que vous savez exactement quelle est l'unité qui vous a attaqué et

  6   qui a fait cela ?

  7   R.  Je ne peux pas le dire, je n'ai pas vu qui a ouvert le feu. Je n'ai

  8   rien vu du tout. Tout ce que je sais c'est qu'une fois qu'ils avaient

  9   remmenés les personnes massacrées, Dzafer Heric et Dragan Ikanovic ont dit

 10   qu'ils ne savaient rien du tout et que c'était en fait Boro Radic et Ratko

 11   Hadzic qui avaient fait tout cela.

 12   Q.  Témoin --

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document de la

 14   liste 65 ter 30836, s'il vous plaît. Compte tenu de tous les bémols que

 15   nous avons concernant ces interceptions téléphoniques, quelle est la teneur

 16   de cette discussion entre Momcilo Krajisnik et son frère le 15 ? Je suis

 17   désolé, vous n'avez pas le document devant vous.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'antenne de Sarajevo ne dispose pas de

 19   ce document, Monsieur Karadzic.

 20   M. LE GREFFIER : [vidéoconférence][aucune interprétation]

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ah bon. Est-ce que vous pouvez peut-être

 22   consulter le document sur le prétoire électronique ?

 23   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux en donner lecture ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de poser la question, est-ce que

 26   vous pourriez peut-être placer ce document dans son contexte, s'il vous

 27   plaît, Monsieur Karadzic ?

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 12132

  1   Q.  Monsieur le Témoin, j'ai entre les mains un document, une version

  2   papier, et ça s'affiche également à l'écran. Il s'agit d'une interception

  3   téléphonique d'une conversation qui s'est tenue le 15 juin 1992. Il s'agit

  4   d'une conversation entre Momcilo Krajisnik et son frère, Mirko Krajisnik.

  5   Momcilo Krajisnik est à Pale à l'assemblée, et Mirko Krajisnik est à

  6   Rajlovac dans le village de Zabrdje.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons laisser de côté les deux premières

  8   pages, ou plutôt, les trois premières pages dans la version en serbe, et

  9   nous allons aller directement à la page 0736, qui correspond à la page 6 de

 10   ce document dans la version en serbe.

 11   Serait-il possible de voir quelle est la page qui correspond dans la

 12   version anglaise ?

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, je vais en donner lecture comme si on lisait un

 15   script, un scénario.

 16   Mirko dit : "Que se passe-t-il ?"

 17   Momcilo : "Eh bien, j'ai été très occupé aujourd'hui."

 18   Mirko : "J'ai entendu des Musulmans qui étaient en déroute et qui ont tué

 19   un bus complet de Serbes."

 20   Momcilo : "Ah bon ?"

 21   Mirko : "Oui, les Musulmans ont tué tous les passagers d'un bus, des

 22   passagers serbes. Mirko : "Ils allaient en direction de Pale en tant que

 23   réfugiés. Mais ils m'ont dit que ce n'était pas en fait vraiment ce qui se

 24   passait. Ils ont pris des prisonniers, ils ont fait prisonniers certaines

 25   personnes et ils voulaient en fait procéder à des échanges. Ils ont reçu un

 26   coup de fil qui venait de quelqu'un en ville."

 27   Puis la page suivante en serbe, Krajisnik dit que, d'après Alispahic, ces

 28   prisonniers avaient été tués.


Page 12133

  1   Momcilo : "Quels prisonniers ?"

  2   Mirko : "Ils ont envoyé des prisonniers à Pale."

  3   Momcilo : "Ah bon."

  4   Mirko : "Et à Srednje ils ont été interceptés par des Musulmans, qui ont

  5   tué tous ces prisonniers. Nos deux hommes ont été gravement blessés."

  6   Momcilo : "Ils pensaient que c'était des gens de chez nous ?"

  7   Mirko : "Oui."

  8   Momcilo : "Oui."

  9   Mirko : "Et ce soir, ils veulent en fait lancer une opération de

 10   représailles contre tous les Serbes dans la ville et dans la prison."

 11   Momcilo -- ou plutôt, Mirko : "Apparemment, ils vont égorger des gens et

 12   ils vont attaquer Rajlovac en groupes, et cetera, et cetera."

 13   Monsieur le Témoin, vous voyez bien que cette première explosion semble ne

 14   pas vraiment avoir beaucoup de sens; suite à cette explosion, deux Serbes

 15   ont été blessés également.

 16   R.  Je n'en sais rien. Je ne sais pas combien de temps l'attaque a durée

 17   contre le bus, et je ne sais pas ce qu'ils ont utilisé pour ouvrir le feu.

 18   Est-ce que vous pensez que deux ou trois séries de munition de mitrailleuse

 19   étaient suffisantes, ce qu'on appelle les Gorenje ? Ils ont en fait utilisé

 20   plus de 1 000 balles et nous avons vu des cartouches qui venaient de là-

 21   bas. Comment est-ce qu'ils sont arrivés là-bas ils n'ont pas débarqué du

 22   ciel ? Nous avons vu ces cartouches également ou ces -- on a vu également

 23   les traces des projectiles venant des Zolja et d'autres munitions

 24   également. Donc j'aimerais savoir si les Musulmans avaient également cela.

 25   R.  Je ne sais pas qui était doté de quoi. Tout ce que je peux vous dire

 26   c'est qu'il y a eu génocide, il y a eu un massacre et des gens ont été

 27   tués, des gens complètement sans défense qui ont été tués de manière

 28   incompréhensible.


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  1   D'ailleurs, je vais vous dire que, le 13, lorsque les hommes et les

  2   enfants et les femmes ont fait l'objet d'échange à cette station service à

  3   Bozic, ils nous ont ensuite fait monter à bord de camions réfrigérés, et

  4   ils nous ont fait emprunter la même route et ils n'ont ouvert les portes

  5   quand nous sommes arrivés à Sokolac, et certaines personnes étouffaient

  6   dans ces camions. Il fallait faire ces besoins à bord du camion. Il y en a

  7   qui ont eu des malaises. Ils nous ont amenés jusqu'à Rogatica. Vous savez,

  8   je servais là-bas en tant qu'officier de réserve de l'ex-JNA, et puis ils

  9   nous ont acheminé en direction de Pale dans le bâtiment qui est devant

 10   l'hôtel Panorama, et vous savez, moi, j'étais un scout quand j'étais jeune.

 11   J'ai rencontré quelqu'un qui s'appelait Sasa et qui était dans l'armée et

 12   qui je connaissais très bien.

 13   Q.  Ça aurait bien d'entendre tout cela si on avait du temps. Mais je

 14   voudrais revenir à ce que l'on avait abordé. Ce que vous avez décrit c'est

 15   produit bien avant les événements du bus. Maintenant, vous avez mentionné

 16   l'échange qui s'est opéré à la station service de Bozic. La station service

 17   Bozic est entre Rajlovac et la ville, et c'est là où les femmes, les

 18   enfants et les personnes âgées venant d'Ahatovici ont été échangés -- ou

 19   plutôt, qu'ils ont pu rentrer dans la ville de Sarajevo. Est-ce que c'est

 20   ça qui a fait l'objet de l'échange ?

 21   R.  Oui. Cependant, ceux qui étaient dans la plus petite citerne et qui

 22   étaient montés à bord de ces camions, Mile Stojanovic nous a dit que nous

 23   allions faire l'objet d'un échange à Kobilja Glava; cependant, ils nous ont

 24   amenés jusqu'à Rogatica, et ensuite, dans la soirée, ils nous ont ramenés

 25   vers les citernes de carburant. Il n'y avait plus ni de femme, ni d'enfant,

 26   ni de personne âgée. Je pense, qu'ils ont essayé de dissimuler tout cela de

 27   la FORPRONU de façon à ce que la FORPRONU ne nous trouve pas là-bas.

 28   Q.  Donc est-ce que cela a constitué un échange ? Est-ce que des civils


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  1   serbes ont quitté Sarajevo à ce moment-là ? Ou peut-être que ce n'était pas

  2   un échange, peut-être que tout simplement les femmes, les enfants, et les

  3   personnes âgées d'Ahatovici ont pu rentrer dans Sarajevo ?

  4   R.  Non, c'était un échange.

  5   Q.  Qui a quitté Sarajevo dans le cas de cet échange ?

  6   R.  De Sarajevo, je ne sais pas, je n'ai aucune idée.

  7   Q.  Est-ce que certains civils venaient de la partie musulmane en direction

  8   de la partie serbe de Sarajevo, ou c'est simplement les femmes, les

  9   enfants, et les personnes âgées musulmans qui ont pu enter dans Sarajevo ?

 10   R.  Je ne le sais pas non plus.

 11   Q.  Très bien. Nous en avons terminé avec cela. C'était le 15. On ne sait

 12   pas si cela a constitué un échange ou si c'était simplement les femmes, les

 13   enfants et les personnes âgées de Ahatovici qui ont eu le droit de rentrer

 14   dans Sarajevo, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Pour ce qui est maintenant des habitants -- ou plutôt, des prisonniers

 17   en âge de combattre ou aptes à combattre, ils ont été transportés le

 18   lendemain vers un endroit où les choses se sont déroulées, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. Lorsque nous sommes revenus dans la soirée, les gardes serbes qui

 20   étaient présents, ont également été très surpris que nous étions de retour,

 21   qu'on nous avait ramenés là-bas, et nous avons passé cette nuit, sans

 22   pouvoir dormir. Personne n'a pu dormir durant la nuit. Le lendemain matin,

 23   de la nourriture immangeable et de l'eau salée, j'ai mangé du pain qui

 24   était couvert de moisissure.

 25   Q.  Je vous comprends bien, mais nous devons passer à autre chose.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant passer au

 27   document de la liste 65 ter 30839, il s'agit d'une interception

 28   téléphonique des instances de la Sûreté de l'Etat musulmane. Est-ce qu'on


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  1   pourrait l'afficher sur le prétoire électronique ? Je vais vous dire de

  2   quoi il s'agit. Il s'agit d'une conversation entre Camil qui appelle Mirko

  3   Krajisnik et il dit :

  4   "Allo, Mirko, c'est Camil ici," et cetera, et cetera.

  5   Est-ce que l'on pourrait passer aux pages suivantes en serbe.

  6   Donc il dit :

  7   Camil : "Viens me voir, si on peut voir quelque chose -- trouver quelque

  8   chose d'équivalent."

  9   Camil continue en disant :

 10   "Edin Brajlovic semble être ici à la caserne de Rajlovac."

 11   Mirko dit : "Edin Brajlovic."

 12   Puis Camil répond : "Oui, d'Ahatovici. Il vient d'Ahatovici."

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous connaissez un dénommé Edin

 15   Brajlovic originaire d'Ahatovici ?

 16   R.  Zuti a fait embarquer Edin Brajlovic à bord de ce camion et on ne l'a

 17   jamais plus revu. Je connais également Zijo Brajlovic. C'était un membre de

 18   la famille.

 19   Q.  Très bien. Parfait. Merci.

 20   R.  Il y a un témoin qui était un de leur proche parent et il a dit qu'Edin

 21   Brajlovic a été tué, et qu'on l'a retrouvé dans un charnier et qu'ensuite

 22   il a été exhumé, enterré ailleurs.

 23   Q.  Merci. On voit que Camil était à la recherche d'Edin Brajlovic, et

 24   Camil dit : "Est-ce qu'il est là-bas à Rajlovac ?"

 25   L'autre répond : "Non, il n'y a pas personne là-bas."

 26   Puis Camil dit : "Donc il n'y a personne là-bas, donc cela signifie que

 27   nous n'avons pas eu la bonne info."

 28   Mirko dit : "Non, j'en suis sûr, je suis catégorique."


Page 12137

  1   Cette conversation a eu lieu le 20 juin.

  2   Camil dit : "Quelqu'un m'a dit, au téléphone que c'était le cas."

  3   Mirko : "Non, toux ceux qui étaient là ont fait l'objet d'un échange. Vous

  4   savez les 284."

  5   Camil dit : "Ah, d'accord."

  6   Mirko dit : "Je crois qu'il y a une cinquantaine qui ont été libérées et

  7   cela ne faisait pas partie de nos exigences," et cetera, et cetera. "Les

  8   Gacanovic et les Martinovic et le reste ont été envoyés à Pale, vous savez,

  9   que certains d'entre eux ont été tués," et puis ils ont continué la

 10   conversation.

 11   Il a dit : "Une partie de ces personnes sont allées en direction du centre

 12   pour les échanges" -et il a dit - "qu'en fait, ils allaient quelque part en

 13   direction de Sokolac ?"

 14   Donc le 20 juin, ils ont mentionné cet échange, 284 personnes avaient fait

 15   l'objet d'échange, 50 ont été libérées et ont pu rentrer chez eux, et les

 16   Gacanovic et les Martinovic sont mentionnés, et Mirko dit : "Et vous avez

 17   entendu parler du fait que certains ont été tués." Il est évident qu'il

 18   parle de l'incident du bus.

 19   Donc, Monsieur le Témoin, est-ce que vous, en conversation, conviendriez

 20   avec moi que, tout d'abord, il y a eu une déflagration qui a brisé toutes

 21   les fenêtres du bus ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous pensez vraiment que les Serbes détruiraient leur propre

 24   bus s'ils voulaient tuer quelqu'un ? Est-ce que ce n'est pas préférable de

 25   faire prisonniers ces personnes et les exécuter ?

 26   R.  Ecoutez, ce n'est pas un bus serbe. C'était un bus de la société de

 27   transport de la ville qui avait été confisqué ou réquisitionné. Ce n'était

 28   pas un véhicule de l'armée.


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  1   Q.  A l'époque de la Republika Srpska ?

  2   R.  Oui. C'était un bus de la ville qui avait été confisqué. On nous a

  3   demandé de monter à bord de ces bus avec pour intention de nous tuer. C'est

  4   ce qui s'est passé.

  5   Q.  Monsieur le Témoin, je vous demande un peu de patience, s'il vous

  6   plaît.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait verser cette pièce au

  8   dossier, s'il vous plaît. En fait, les deux derniers documents, avec toutes

  9   les réserves que nous avons mentionnées, et est-ce que l'on pourrait leur

 10   donner des cotes provisoires.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Gaynor.

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais que l'on demande à M. Karadzic

 13   s'il pense qu'il s'il pense qu'il s'agit vraiment d'interceptions

 14   authentiques ou pas, et s'il ne pense pas qu'il s'agisse d'interceptions

 15   authentiques, dans ce cas-là, quelle est la base pour verser cette pièce au

 16   dossier ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Effectivement, étant donné que nous

 18   avons pris une décision concernant les interceptions téléphoniques, je

 19   pense que le moment est venu d'entendre les parties. Mais avant de ce

 20   faire, est-ce que vous pouvez, Monsieur Karadzic, répondre à la question

 21   que M. Gaynor vous a posée concernant l'authenticité de ces documents ?

 22   Oui, Maître Robinson.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je voudrais

 24   répondre à la question concernant les interceptions. Pour ce qui est des

 25   interceptions, nous pensons que c'est à la charge de l'Accusation de

 26   fournir la fiabilité de ces interceptions -- de prouver la fiabilité de ces

 27   interceptions; cependant, étant donné que les Juges de la Chambre ont

 28   décidé de permettre que ceci soit utilisé, si les Juges de la Chambre


Page 12139

  1   pensent que ces procédures d'interception sont fiables, elles seront donc

  2   versées. Donc c'est sur cette base que nous venons procéder, c'est-à-dire

  3   que nous pensons que l'Accusation devra déterminer la fiabilité des

  4   interceptions de manière générale, et s'ils le font, dans ce cas-là, nos

  5   interceptions téléphoniques devraient être versées au dossier telles que

  6   les leurs; cependant, nous avons toujours la question des interceptions

  7   téléphoniques qui précèdent la période de la guerre.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous procédez donc -- vous avez les

  9   deux manières de procéder, dans ce cas-là, n'est-ce pas ?

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, puisque nous pensons que l'Accusation

 11   doit prouver que ces interceptions sont fiables, mais si vous considérez

 12   qu'elles sont fiables, nous ne voulons pas ne pas avoir la possibilité

 13   d'utiliser ces interceptions téléphoniques à notre avantage. Donc il est

 14   vrai que nous bénéficions des deux possibilités, mais nous ne pensons pas

 15   que ce soit à la Défense de déterminer la fiabilité de ces interceptions.

 16   C'est à l'Accusation.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il est préférable de ne pas

 18   consacrer trop de temps aujourd'hui là-dessus. Donc qu'en est-il d'une

 19   situation où nous déterminons que les interceptions téléphoniques de

 20   l'Accusation sont fiables mais que rien ne se passe pour celles qui sont

 21   versées par vous-même ?

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Nous pensons que toute déposition des

 23   responsables du gouvernement de Bosnie qui avaient procédé à l'interception

 24   de ces conversations devront être considérée comme pouvant être

 25   acceptables.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons donc donner des

 27   cotes provisoires à ces deux documents.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera les pièce D1088 et D1089, cotes


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  1   provisoires aux fins d'identification.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause, cette fois-

  3   ci de 15 minutes. Nous reprendrons à 13 heures 50.

  4   --- L'audience est suspendue à 13 heures 34.

  5   --- L'audience est reprise à 13 heures 53.

  6    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gaynor, pour vos questions

  7   supplémentaires, vous n'avez besoin que de cinq minutes ?

  8   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, tout à fait.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas-là, Monsieur Karadzic, je

 10   vous demande de terminer votre contre-interrogatoire à 14 heures 25. Vous

 11   avez une demi-heure.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai l'intention de terminer bien avant.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, je ne vais pas rentrer dans les détails. A la page

 15   11, vous avez dit que quelqu'un s'appelant Enver Celik avait maltraité la

 16   sœur de quelqu'un et que ces hommes l'ont fait sortir de chez lui, l'ont

 17   pendu, l'ont passé à tabac; est-ce exact ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce exact que vous n'avez jamais mentionné le fait qu'il avait été

 20   pendu et pourquoi vous n'avez pas mentionné cela ?

 21   R.  Non. Je l'ai mentionné, en fait. Je ne vois pas comment ceci n'a pas

 22   été consigné. Et d'ailleurs, j'ai un document qui a été établi après le

 23   massacre, lorsque j'ai procédé à l'identification des corps, et il est

 24   mentionné dans ce document : Hajro Delic et Enver Celik, qui ont été tués

 25   dans le camp.

 26   Q.  S'il vous plaît, j'aimerais savoir si quelqu'un pouvait régler des

 27   comptes sur ce qui s'était passé auparavant, et peut-être même aller

 28   jusqu'à tuer quelqu'un.


Page 12141

  1   R.  Vous savez, je ne peux pas vraiment vous dire. Je sais que Enver Celik

  2   et feu Ensad [phon] Celik, son frère - et je crois qu'ils avaient un

  3   troisième frère dont je ne me souviens plus du nom - je sais que les Celik

  4   - comment dire - ils aimaient bien se battre. Ils avaient des tatouages, et

  5   ils semblent avoir reconnu cet homme qui avait maltraité sa sœur en raison

  6   du tatouage qu'il portait, et c'est ainsi que ses comparses l'ont fait

  7   sortir. Cette citerne avait la capacité de 8 000 tonnes, et ils l'ont

  8   pendu, et ils l'ont roué de coups, et ils ont en fait brisé sa colonne

  9   vertébrale.

 10   Q.  Donc, si l'on prend tout ceci en considération, ces incidents, en fait,

 11   se seraient produits plus souvent, n'est-ce pas ?

 12   R.  Ecoutez, je ne vais pas donner de noms mais effectivement, il y avait

 13   un garde que je connaissais très bien parce qu'on se rencontrait, on se

 14   payait à boire l'un et l'autre, et lorsqu'il était de garde, il me donnait

 15   quelquefois du pain et un paquet de cigarettes et me disait : cachez-vous

 16   pour manger cela de façon à ce que les autres ne vous voient pas.

 17   Q.  Merci beaucoup. Je voudrais vous remercier, Monsieur le Témoin, et je

 18   voudrais vous faire part de tous mes regrets compte tenu du fait que vous

 19   êtes en mauvais termes avec vos voisins, et je voudrais également exprimer

 20   mon regret pour tout ce qui s'est passé.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.

 22   Oui, Monsieur Gaynor.

 23   M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Nouvel interrogatoire par M. Gaynor :

 25   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, tout d'abord, j'aimerais parler du

 26   village Misoca, qui a été mentionné dans l'interception téléphonique que

 27   vous avez vue. Est-ce que vous pourriez nous confirmer la composition et la

 28   répartition ethnique du village de Misoca ? Avant la guerre, il s'entend.


Page 12142

  1   R.  Avant la guerre, il n'y avait que des Musulmans qui habitaient à

  2   Ahatovici, et vous aviez les routes qui séparaient Dobrosevici d'Ahatovici

  3   et de Bioce. Donc, pour ainsi dire, c'était une ligne de séparation entre

  4   ces villages. Les Musulmans vivaient à Ahatovici, et quant à Dobrosevici,

  5   c'était principalement des Serbes qui y habitaient, même s'il y avait

  6   également des Musulmans et des Croates. Puis Bojnik était principalement

  7   serbe, et Bioce était un village musulman, Rajlovac et Rjecica également.

  8   Q.  Mais ma question portait sur le village de Misoca. Qui habitait dans ce

  9   village avant la guerre ?

 10   R.  C'était une population mélangée qui habitait à Misoca.

 11   Q.  Savez-vous ce qu'il est advenu de Misoca au début de la guerre ?

 12   R.  Je pense que les Musulmans étaient en majorité.

 13   Q.  Est-ce qu'ils sont -- est-ce qu'ils constituaient toujours une majorité

 14   jusqu'en 1992 ?

 15   R.  Oui, ils étaient toujours majoritaires.

 16   Q.  Je voudrais maintenant que l'on parle de ce qui s'est passé juste après

 17   les tirs contre ce bus. Je voudrais tout d'abord me concentrer sur une des

 18   questions concernant les véhicules qui escortaient ce bus. Dans votre

 19   déclaration, au paragraphe 52, vous expliquez que vous n'entendiez plus de

 20   véhicules qui suivaient le bus, et dans votre déclaration, au paragraphe

 21   53, vous mentionnez qu'après que les tirs aient été effectués, vous avez

 22   entendu les véhicules qui suivaient le bus qui avaient mis la clé de

 23   contact, et que, donc, les criminels avaient quitté le lieu du crime. Est-

 24   ce que vous pourriez nous préciser si les véhicules qui suivaient le bus,

 25   d'après ce que vous pouviez entendre, ont en fait suivi le bus jusqu'à

 26   l'endroit où les tirs ont eu lieu ?

 27   R.  Lorsque nous sommes arrivés à Srednje ou en direction de Sokolina, je

 28   ne pouvais plus entendre ces véhicules; cependant, lorsque nous sommes


Page 12143

  1   arrivés à Sokolina, lorsque les massacres ont eu lieu, j'ai eu l'impression

  2   qu'une fois que les tirs avaient cessé, il y avait une odeur de poudre et

  3   de sang également, et j'ai eu l'impression que certains véhicules

  4   démarraient, et il y avait des gens qui pleuraient parce qu'ils étaient

  5   blessés, mais je leur ai dit de se taire parce que si ceux qui étaient à

  6   l'extérieur les entendaient, ils reviendraient et ils nous tueraient tous.

  7   Ces véhicules, donc, sont arrivés au même niveau que le bus et vous savez

  8   ce qui s'est produit, c'est-à-dire que celui du premier véhicule a dit : Va

  9   voir et vérifie à l'intérieur du premier -- va vérifier ce qui se passe à

 10   l'intérieur, et puis l'autre a répondu en l'insultant, et ils sont tous

 11   repartis en direction de Srednje, qui était l'origine ou le point de départ

 12   du bus. Mais je pense que ces véhicules étaient partis de Srednje pour

 13   créer cette embuscade.

 14   Q.  Lorsque vous et les autres survivants sont arrivés à sortir du bus,

 15   est-ce que les véhicules qui suivaient le bus se trouvaient encore à cet

 16   endroit-là ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  J'aimerais maintenant que l'on ce concentre sur le moment où le

 19   chauffeur a dit qu'il devait descendre du bus afin de remettre de l'eau

 20   dans le radiateur. Est-ce que vous vous souvenez de ce moment précis ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Je voudrais savoir comment de temps s'est écoulé entre ce moment précis

 23   et le moment où les tirs ont commencé à retentir.

 24   R.  Je dirais entre dix et 15 secondes.

 25   M. GAYNOR : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 26   Président.

 27   Q.  Merci, Monsieur le Témoin.

 28   R.  Mais suffisamment de temps pour se cacher.


Page 12144

  1   Q.  Merci, Monsieur le Témoin.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Ceci met un

  3   terme à votre déposition. Au nom du Tribunal et des collègues de cette

  4   Chambre de première instance, je voudrais vous remercier d'être venu

  5   déposer malgré les circonstances difficiles dans lesquelles vous vous

  6   trouvez. Vous pouvez maintenant disposer.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

  8   [La déposition du témoin via vidéoconférence est conclue]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que l'on peut en terminer pour

 10   aujourd'hui.

 11   M. GAYNOR : [interprétation] Mais, en fait, nous pouvons commencer la

 12   déposition du témoin suivant. C'est comme vous le souhaitez.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi pas ? Il nous reste 25 minutes.

 14   En attendant, je viens de recevoir la liste des témoins qui devraient

 15   comparaître la semaine prochaine. Je voulais savoir si les choses pouvaient

 16   changer suite à ce qui va se passer demain.

 17   M. GAYNOR : [interprétation] Oui. Nous parlons du Dr Zecevic. S'il

 18   mentionne qu'il souhaite déposer, nous pouvons modifier l'ordre de

 19   comparution des témoins pour permettre sa déposition.

 20   M. KARADZIC : [interprétation] Vous avez parlé de demain. Je ne pensais pas

 21   qu'il y avait une audience demain.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. En fait, la comparution initiale du

 23   Dr Zecevic est prévue pour demain après-midi.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, mais ceci ne me concerne pas, n'est-ce

 25   pas ?

 26   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.


Page 12145

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demande de lire la déclaration

  2   solennelle.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  4   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   LE TÉMOIN : RAMIZ MUJKIC [Assermenté]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez prendre vos aises.

  8   Interrogatoire principal par M. Gaynor :

  9   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez décliner

 10   votre identité.

 11   R.  Je m'appelle Ramiz Mujkic.

 12   Q.  Monsieur Mujkic, je voudrais savoir si vous avez déjà comparu en tant

 13   que témoin dans le procès de Momcilo Krajisnik, et est-ce que vous avez

 14   également fourni des informations au bureau du Procureur ?

 15   R.  Oui, effectivement. J'ai déposé dans l'affaire que vous avez mentionnée

 16   en 2004.

 17   Q.  Avec l'aide d'une interprète, est-ce que vous avez parcouru votre

 18   déclaration harmonisée qui reprend les parties de vos précédentes

 19   dépositions qui sont pertinentes pour le procès de M. Karadzic ainsi que

 20   d'autres informations que vous avez fournies ?

 21   R.  Oui.

 22   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander l'affichage du

 23   document de la liste 65 ter 90819, s'il vous plaît ?

 24   Q.  Vous voyez à l'écran devant vous une version électronique de la

 25   première page de votre déclaration harmonisée.

 26   R.  Oui, effectivement.

 27   M. GAYNOR : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page 6 de

 28   cette déclaration ? Je voudrais que l'on se penche sur le paragraphe 27.


Page 12146

  1   Q.  Ce paragraphe dont je vais faire la synthèse stipule que l'on vous a

  2   présenté un document qui mentionne que :

  3   "Tesanovic a demandé l'accord du président le 30 mai 1992 afin de

  4   commencer le bombardement à 18 heures, et ceci est cohérent avec le

  5   bombardement qui s'est produit à Ahatovici le 30 mai 1992."

  6   Est-ce exact que vous souhaitez retirer ce paragraphe de votre

  7   déclaration harmonisée ?

  8   R.  Oui, j'ai fait cette demande parce que ce n'est pas exact. Le

  9   bombardement a commencé le 29. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi il

 10   aurait demandé que le bombardement commence le 30.

 11   Q.  Sous réserve du fait que ce paragraphe sera retiré de votre

 12   déclaration, est-ce que vous êtes en mesure d'adopter le reste de cette

 13   déclaration, qui deviendra donc une pièce à conviction ? Si l'on vous

 14   posait les mêmes questions aujourd'hui sur les mêmes sujets, est-ce que

 15   vous seriez en mesure de fournir les mêmes informations aux Juges de la

 16   Chambre ?

 17   R.  Etant donné que j'ai fait cette déclaration solennelle consistant à

 18   dire que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité, je

 19   souhaite que ce paragraphe soit retiré de ma déclaration, puisque la vérité

 20   c'est que les bombardements ont commencé le 29 et qu'ils ont continué

 21   durant toute la journée du 30. Par conséquent, il n'y a pas eu d'accord et

 22   il n'y a pas eu d'ultimatum qui aurait été possible à ce moment-là.

 23   Q.  Mais sous réserve de cette correction, Monsieur Mujkic, est-ce que vous

 24   pouvez adopter le reste de cette déclaration, qui sera versée au dossier ?

 25   R.  Oui.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une brève intervention de ma part. le témoin a

 27   dit que le bombardement a duré 24 heures, et ceci n'a pas été consigné au

 28   compte rendu d'audience.


Page 12147

  1   M. GAYNOR : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez dit que le bombardement

  3   d'Ahatovici avait duré 24 heures ?

  4   R.  Oui, effectivement. C'est la vérité, puisque les chars ont ouvert le

  5   feu durant la nuit dans la partie haute d'Ahatovici, à proximité des

  6   forêts, et de 4 heures du matin à 10 heures du soir, des mortiers ont été -

  7   - des tirs de mortiers ont été utilisés pour prendre à partie différentes

  8   habitations. Donc il y avait différents groupes qui avaient leurs propres

  9   zones.

 10   Q.  Je voudrais enfin déterminer cette formalité. Est-ce que vous adoptez

 11   cette déclaration ?

 12   R.  Oui.

 13   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais verser cette pièce au dossier.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cette pièce sera versée au dossier.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P2314.

 16   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais maintenant donner lecture du

 17   résumé.

 18   M. Mujkic était résident d' Ahatovici avant le conflit. La population de ce

 19   village était principalement musulmane. Un poste de contrôle serbe a été

 20   établi à proximité du village et les Musulmans ne pouvaient pas passer par

 21   cet itinéraire. La constitution de ce poste de contrôle ou de ce point de

 22   contrôle figure dans un ordre émanant de la cellule de Crise de la

 23   municipalité de Rajlovac. Plusieurs Musulmans du village étaient dotés

 24   d'armes légères.

 25   Le 9 mai 1992, le village musulman de Sokolje a fait l'objet de

 26   bombardements importants. Ahatovici a également été bombardé du 29 mai au 2

 27   juin 1992. Les lignes de communication étaient coupées. Les bombardements

 28   ont été suivis par une attaque d'infanterie serbe. M. Mujkic, qui était


Page 12148

  1   armé, a quitté Ahatovici le 31 mai 1992. Il a rencontré des soldats serbes

  2   qui venaient du village musulman de Gornja Bioce, qui était déserté. Le 3

  3   juin 1992, M. Mujkic est revenu à Ahatovici, qui avait été également

  4   déserté. Les maisons musulmanes avaient été incendiées et la mosquée avait

  5   été détruite.

  6   Une pelleteuse creusait des trous et les soldats balançaient des

  7   corps dans ces trous. Quatre ans plus tard, en 1996, des corps ont été

  8   exhumés de ces sites à Ahatovici. Un site contenait les restes de quatre

  9   femmes, y compris la sœur de M. Mujkic, ainsi que sa fille. M. Mujkic a

 10   ensuite appris que les Musulmans qui avaient survécus, les Musulmans qui

 11   étaient anciennement résidents d'Ahatovici, avaient été transportés et

 12   détenus dans trois sites à proximité des casernes de Rajlovac. Les hommes

 13   en âge de combattre étaient détenus dans deux citernes à carburant.

 14   M. Mujkic s'est caché dans la forêt pendant deux mois, jusqu'à ce

 15   qu'il soit arrêté par des soldats serbes le 6 août 1992. Il a été

 16   transporté à bord d'un camion militaire et détenu à la caserne de Rajlovac,

 17   où il a fait l'objet d'interrogatoires et de passages à tabac. Une personne

 18   qui l'a interrogé a utilisé une grenade pour fracturer le menton et la joue

 19   du témoin. Le 9 août 1992, M. Mujkic a été transporté à un hôpital, où il a

 20   ensuite été transféré par la police militaire serbe à la maison de Planjo,

 21   un établissement de détention qui était situé dans la municipalité de

 22   Vogosca.

 23   M. Mujkic a fait des commentaires sur plusieurs archives, documents

 24   d'archives de la municipalité serbe de Vogosca. Un de ces documents fait

 25   état du fait que M. Mujkic avait été détenu à la maison de Planjo. Un autre

 26   document fait état de la location de cette maison de Planjo pour l'utiliser

 27   comme un lieu de détention. Un troisième document représente une liste de

 28   143 personnes qui étaient détenues dans cette maison de Planjo. M. Mujkic a


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  1   déclaré que les détenus dans cette maison étaient musulmans et qu'il y

  2   avait également un croate. Ils ont fait l'objet de traitements humiliants à

  3   plusieurs reprises. Un des détenus musulmans devait manger des bouts de

  4   cigarette et devait également -- a dû avoir des relations -- on a forcé un

  5   des détenus musulmans à avoir des relations sexuelles orales avec un autre

  6   détenu homme. Dans un autre cas, un détenu a également dû se déshabiller

  7   complètement et plonger du balcon vers le sol qui se trouvait en contrebas.

  8   Le beau-frère de M. Mujkic ainsi que son neveu faisaient partie

  9   également des hommes musulmans d'Ahatovici qui étaient détenus dans une

 10   citerne à proximité de la caserne de Rajlovac. Les deux hommes ont été tués

 11   aux environs du 14 juin 1992 lorsqu'un groupe de musulmans sont sortis de

 12   cette citerne et ont été embarqués à bord de bus, qui ont été ensuite

 13   emmenés à un endroit où ensuite des tirs ont été effectués contre ce bus.

 14   13 membres de la famille de M. Mujkic ont été tués dans cet incident.

 15   M. Mujkic déclare qu'avant le conflit, la zone autour de son village

 16   était habitée par environ 1 000 Musulmans. Un document, produit par la

 17   Croix-Rouge serbe en octobre 1993, stipule qu'à ce moment-là, il n'y avait

 18   aucun Musulman dans la municipalité de Rajlovac.

 19   Ceci met un terme au résumé. Je vais maintenant commencer mon

 20   interrogatoire principal. Je ne sais pas quand je terminerai celui-ci.

 21   Q.  [interprétation] Monsieur Mujkic, le village d'Ahatovici se trouve dans

 22   quelle municipalité ?

 23   R.  Dans la municipalité de Novi Grad, à Sarajevo.

 24   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais maintenant demander l'affichage du

 25   document de la liste 65 ter 01660. Il s'agit d'un décret de promulgation

 26   d'une loi sur l'établissement de la municipalité de Rajlovac, avec le QG à

 27   Rajlovac. Ce document est issu de la Gazette ou du journal officiel de la

 28   Republika Srpska et reflète une décision qui a été signée le 15 mai 1992.


Page 12150

  1   Cette décision a été signée par le Dr Radovan Karadzic. Vous pouvez voir,

  2   Monsieur Mujkic, à l'article 1 de cette nouvelle loi, qu'il est mentionné

  3   que la municipalité de Rajlovac est composée du territoire de la

  4   municipalité de Novi Grad.

  5   Est-ce que vous voyez cela ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Maintenant à l'article 2, nous voyons un certain nombre de localités

  8   qui sont recensées par leurs noms. Est-ce que vous pourriez regarder les

  9   noms qui figurent sur cet article ?

 10   R.  Est-ce que l'on pourrait agrandir ceci ? Vous avez la municipalité de

 11   Sarajevo Rajlovac, qui comprend les différentes zones, Bojnik, Ahatovici,

 12   et cetera, et cetera.

 13   0Q.  Monsieur Mujkic ?

 14   R.  Oui, je connais toutes ces municipalités puisque c'est là où

 15   j'habitais.

 16   Q.  Dans le village d'Ahatovici, quel était le groupe ethnique majoritaire

 17   ?

 18   R.  Il y a un recensement qui date de 1991. Il y avait -- il y avait donc 1

 19   100 Musulmans --

 20   L'INTERPRÈTE : Si l'interprète a bien compris.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] -- 920 Serbes sur le territoire de la commune

 22   de Dobrosevici, et j'ai mentionné clairement que cela incluait les villages

 23   d'Ahatovici et Dobrosevici, Mihajlevici, et Bojnik.

 24   M. GAYNOR : [interprétation]

 25   Q.  Maintenant, pour ce qui est des zones qui sont mentionnées à l'article

 26   2, et qui se trouvaient à l'extérieur de la commune de Dobrosevici, est-ce

 27   qu'il y avait d'autres localités qui figuraient sur cet article et qui

 28   étaient peuplées de groupes musulmans ?


Page 12151

  1   R.  Bien que ce soit la municipalité de Vogosca ce n'était pas le cas pour

  2   Novi Grad. Il s'agissait là -- c'est également qu'il y avait le vieux

  3   cimetières serbe.

  4   Q.  Est-ce que vous voyez d'autres localités où il y avait des Musulmans

  5   qui habitaient dans cette liste de noms ?

  6   R.  Non. Il y a Bacici, là-bas, mais ça n'a jamais fait partie d'un

  7   territoire serbe, et puis il y a également Brijesce Brdo, Bacici,

  8   Halilovici, mais il y avait quelques Musulmans qui avaient été là-bas et ce

  9   n'est jamais tombé dans les mains des Serbes.

 10   Q.  Ma question porte sur la période avant le conflit. Dans les zones que

 11   vous avez mentionnées, est-ce qu'il y avait des groupes musulmans

 12   importants qui habitaient ?

 13   R.  Oui.

 14   M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais verser cette pièce au dossier,

 15   s'il vous plaît.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P2315.

 18   M. GAYNOR : [interprétation]

 19   Q.  Je voudrais maintenant passer à la question de la mosquée. Je voudrais

 20   savoir si vous vous rendriez régulièrement à la mosquée à Ahatovici avant

 21   le conflit ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Dans votre déclaration, vous mentionnez que la mosquée était notre

 24   symbole. Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que vous entendez par

 25   là ?

 26   R.  La mosquée disposait de tous les documents juridiques nécessaires en

 27   ex-Yougoslavie, et avait été construite dans les années '60. C'était un

 28   centre. C'était donc un symbole de la foi islamique.


Page 12152

  1   Q.  Quel rôle jouait la mosquée durant les fêtes religieuses, par exemple ?

  2   R.  Durant le Ramadan il y avait des rites religieux qui étaient effectués,

  3   des prières également se tenaient là-bas. La mosquée n'était pas utilisée

  4   tous les jours, mis à part le vendredi et durant le mois du Ramadan, et

  5   puis durant les fêtes religieuses du Ramadan. Mais il n'y avait pas des

  6   prières qui étaient réalisées tous les jours dans la mosquée.

  7   Q.  Je voudrais maintenant passer à un autre aspect de votre déposition.

  8   Lorsque vous avez été arrêté, est-ce que vous avez été ensuite transporté à

  9   la caserne de Rajlovac ? Je voudrais savoir si c'était avant ou après votre

 10   blessure à la jambe ?

 11   R.  Oui. J'ai été blessé le 6 août à la jambe droite et j'ai été transporté

 12   là-bas sur un brancard et on m'a fait monter à bord d'un camion, et je suis

 13   allé en direction de la caserne de Rajlovac.

 14   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à la caserne de Rajlovac, est-ce que vous avez

 15   été pris en charge est-ce que l'on vous soigné ?

 16   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, personne ne s'est

 17   vraiment occupé de mes blessures. En fait, on m'a brisé les dents et la

 18   mâchoire.

 19   Q.  Je voudrais maintenant passer aux événements qui se sont produits très

 20   tôt le matin du 7 août 1992. Est-ce que vous vous en souvenez ?

 21   R.  Oui. J'ai survécu à tout cela, et je m'en souviendrai tant que je serai

 22   envie.

 23   Q.  Donc on vous a cassé la jambe et on vous a également cassé la mâchoire

 24   durant le petit matin du 7 août 1992, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Vous avez reçu une visite très tôt le matin de ce jour-là, n'est-ce

 27   pas, alors que vous étiez détenu ?

 28   R.  Le commandant de la Brigade de Rajlovac est venu avec trois autres


Page 12153

  1   hommes qui appartenaient également à la police militaire. Et il m'a dit,

  2   Nous allons vous poser des questions. Je reconnais cet homme. Il s'appelait

  3   Nikola Poplasen, parce que je l'avais vu à plusieurs réunions, puisque je

  4   suivais les actualités politiques. Il faisait partie des dirigeants du

  5   Parti SDS, donc on le voyait à la télévision. Il y avait Mirko Krajisnik,

  6   je le connaissais personnellement, et le troisième homme portait un

  7   uniforme et il portait une barbe. Je pourrais le reconnaître encore

  8   aujourd'hui mais il ne s'est pas présenté et il n'a pas prononcé un mot.

  9   Q.  Depuis quand connaissiez-vous Mirko Krajisnik ?

 10   R.  Je le connaissais depuis déjà un certain temps et la dernière fois que

 11   nous nous étions adressés la parole était lors de l'enterrement d'un des

 12   membres de sa famille, vers la fin du mois d'avril 1991.

 13   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire le type d'interrogatoire que vous avez

 14   subi ?

 15   R.  Nikola Poplasen m'a posé une question. Il m'a demandé : Où était -- où

 16   était Mujkic, et où se trouvait Elvir Mujkic ? Hasan Mujkic était un

 17   officier de police avant la guerre et c'était le commandant de la TO

 18   d'Ahatovici, c'est-à-dire la Défense territoriale d'Ahatovici. Son frère,

 19   Husein, faisait partie également de la cellule de Crise, et mon fils, qui

 20   avait 20 ans, avait quitté la JNA. Ils le savaient. Ils l'auraient

 21   probablement écorché vif devant moi, et il était à la recherche de ces

 22   trois hommes.

 23   Q.  Mais vous n'étiez pas en mesure de répondre aux questions qu'on vous

 24   posait, n'est-ce pas, durant cet interrogatoire ?

 25   R.  On m'avait cassé la mâchoire et j'avais du sans sur le visage, et je ne

 26   pouvais pas parler. Poplasen a dit : Ah, c'est quelqu'un de lettré. Donnez-

 27   lui, il semble être capable de lire et d'écrire, donc donnez-lui du papier

 28   et un crayon et il pourra écrire ce qu'il doit écrire. Il m'a dit : Alors,


Page 12154

  1   écris, tu as entendu ce que Voïvodat a demandé.

  2   Q.  Mirko Krajisnik était présent durant l'interrogatoire de Poplasen

  3   durant toute la période ?

  4   R.  Oui, mais lui n'a pas prononcé quoi que ce soit non plus. Mais d'après

  5   la hiérarchie chetnik, Nikola Poplasen était le plus haut placé de ces

  6   trois hommes.

  7   M. GAYNOR : [interprétation] Je veux m'arrêter là, si vous le souhaitez,

  8   Monsieur le Président, étant donné qu'il est 14 heures 30.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur le Témoin, nous devons

 10   lever la séance pour aujourd'hui, et d'ailleurs, pour la semaine. La

 11   semaine prochaine, notre première audience aura lieu mardi, n'est-ce pas ?

 12   M. GAYNOR : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans l'après-midi.

 14   M. GAYNOR : [interprétation] Mais si le Dr Zecevic décide de déposer

 15   demain, nous serons à votre disposition.

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ne serons pas disponibles, Monsieur le

 17   Président, pour être présents dans le prétoire lundi, étant donné que nous

 18   devons faire venir notre expert.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demande une seconde. Nous étions

 20   censés avoir une audience lundi ? Ah non, apparemment pas. Il n'y a pas

 21   d'audience lundi.

 22   Sauf changement de dernière minute, nous reprendrons votre

 23   déposition, mardi, à 14 heures 15.

 24   Oui, Monsieur Tieger.

 25   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais savoir si la Défense pourrait

 26   rester en contact avec leur expert pour s'assurer, dans la mesure du

 27   possible, qu'une fois que l'on aura peut-être une date d'audience qui

 28   n'était pas prévue, son absence ne retardera pas la tenue de cette


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  1   audience.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ferons de notre mieux, Monsieur le

  3   Président. Merci.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La séance est maintenant levée.

  5   --- L'audience est levée à 14 heures 31 et reprendra le mardi 22 février

  6   2011, à 14 heures 15.

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