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1 Le lundi 22 août 2011
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. Y a-t-il une question
6 que vous souhaitez soulever avant que nous n'entendions la déposition ?
7 Oui, Maître Robinson.
8 M. ROBINSON : [interprétation] Bon, après-midi à vous. Ceci concerne le
9 témoin suivant et les mesures de protection qui ont été accordées au
10 témoin, je souhaite faire mes observations en audience publique et ce
11 seront les observations d'ordre général qui ne permettront pas de révéler
12 l'identité du témoin.
13 Nous souhaitons réitérer le fait que nous nous opposons à la déposition du
14 témoin à huis clos, à moins que cela ne soit absolument nécessaire. Ce
15 témoin a déjà témoigné devant ce tribunal et cela n'était pas à huis clos.
16 Nous estimons, donc, qu'on devrait au moins lui poser la question de savoir
17 si oui ou non, la demande ultérieure de huis clos concernait l'affaire en
18 particulier dans laquelle il a déposé et s'il est nécessaire que nous
19 entendions sa déposition à huis clos dans cette affaire-ci. Il n'y a
20 évidemment -- il n'y a jamais eu de difficulté à cet égard et par rapport
21 aux témoins qui ont témoigné dans cette affaire et je crois que la Chambre
22 de première instance devrait déployer tous les efforts nécessaire et faire
23 en sorte que sa déposition soit entendue en audience publique.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Maître Robinson. Vous savez
25 depuis le début que ce témoin serait entendu à huis clos. Cela fait un
26 moment déjà.
27 M. ROBINSON : [interprétation] Oui.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a quelque chose -- est-ce
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1 que vous estimez que c'est quelque chose sur lequel nous devrions nous
2 pencher, nous, les Juges de la Chambre, quelque chose qui a déjà été
3 présenté par écrit ?
4 M. ROBINSON : [interprétation] A chaque fois que j'ai soulevé quelque chose
5 par écrit, vous avez refusé de répondre à ma demande, vous ne vous êtes pas
6 enquis du fait de savoir si, oui ou non, le témoin devait venir témoigner à
7 huis clos. Nous avons donc déposer une requête en réponse à la décision
8 écrite, parce que, par le passé et même récemment la semaine dernière, vous
9 n'avez pas -- vous ne vous êtes pas renseigné sur le fait de savoir si le
10 témoin avait oui ou non des mesures de protection et s'il fallait
11 poursuivre ces mesures de protection, en fait. Je fais référence à votre
12 décision sur les mesures de protection concernant les Témoins KDZ-601 et
13 605. Je crois que ceci a été -- cette décision a été rendue le 18 août,
14 donc nous avons estimé que cela n'était pas une bonne idée, en fait, de
15 présenter cette requête par écrit. Néanmoins, je m'excuse d'avoir pris de
16 votre temps. Je crois qu'il s'agit d'un principe important que nous
17 souhaitons à chaque fois réitérer cela, car -- à chaque fois qu'un témoin
18 vient à la barre.
19 Je souhaite également indiquer aux Juges de la Chambre que si vous
20 "googlez" le nom de ce témoin, vous trouverez des articles de presse sur
21 exactement les mêmes thèmes sur lesquels il va témoigner aujourd'hui. Donc,
22 il me semble que les mesures de protection ne soient pas nécessaires.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Elliott, vous souhaitez répondre
24 ?
25 Mme ELLIOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme l'ont
26 remarqué les Juges de la Chambre, les détails concernant les mesures de
27 protection de ce témoin se trouvent dans la notification qui est datée du 4
28 juillet. A moins que les Juges de la Chambre ne le souhaitent, je ne vais
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1 pas, en fait, revenir sur les circonstances qui ont mené à ces mesures de
2 protection. Les Juges de la Chambre ont toujours eu cet avis sur la
3 question et plus particulièrement le 14 décembre 2010, décision qui n'était
4 pas nécessaire pour un témoin de tenir compte d'une demande particulière
5 aux fins de modifier ou d'annuler des mesures de protection existantes,
6 quelque soit les circonstances et c'est le cas ici. Donc, je fais valoir
7 qu'il est inutile, en fait, de réitérer ceci, concernant ce témoin et son
8 statut de témoin protégé.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre ne voient --
11 constatent qu'il n'y a aucune raison pour que les mesures de protection
12 soient modifiées, mesures de protection qui ont été accordées par la
13 Chambre précédente.
14 Madame Elliott, souhaitez-vous passer à huis clos partiel avant de faire
15 entrer le témoin ?
16 Mme ELLIOTT : [interprétation] Une question, Monsieur le Président. Cela
17 porte sur la pièce D1585. Une traduction revue et corrigée a été demandée
18 en ce qui concerne cette pièce, à la date du 19 juillet 2011, et ceci a été
19 admis et ceci a été téléchargé dans le prétoire électronique.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. A moins -- s'il n'y a pas
21 d'autres questions, nous allons passer à huis clos partiel -- pardonnez-
22 moi, à huis clos.
23 [Audience à huis clos]
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27 [Audience publique]
28 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur.
2 Je vous demande de bien vouloir lire le texte de la déclaration solennelle.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] déclare solennellement que je dirai la vérité,
4 toute la vérité et rien que la vérité.
5 LE TÉMOIN : MUSAN TALOVIC [Assermenté]
6 [Le témoin répond par l'interprète]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Mettez-vous à l'aise.
8 Madame Edgerton, avant que vous ne commenciez, je souhaitais vous dire que
9 nous allons faire une autre pause, la dernière pause de la journée à 6
10 heures moins dix, et ce, pendant 20 minutes.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. A vous, Madame Edgerton.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
14 Interrogatoire principal par Mme Edgerton :
15 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous m'entendez dans
16 une langue que vous comprenez ?
17 R. Oui.
18 Q. Dans ce cas, veuillez nous donner vos noms et prénoms, s'il vous plaît.
19 R. Musan Talovic.
20 Q. Merci. Monsieur Talovic, veuillez me regarder, s'il vous plaît. Merci.
21 Monsieur Talovic, vous souvenez-vous qu'il y a 11 ans, au mois de juin de
22 l'année 2000, et ensuite en l'an 2000, vous avez donné des déclarations aux
23 enquêteurs du bureau du Procureur de ce Tribunal ?
24 R. Oui, je m'en souviens.
25 Q. Ces déclarations portaient sur ce qui vous est arrivé à Glogova en mai
26 1992, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Ensuite vous souvenez-vous qu'en 2004 vous ayez donné une déclaration
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1 au bureau du procureur du canton de Tuzla à propos de la même chose ?
2 R. Oui.
3 Q. Au mois de juillet de cette année, à savoir l'an 2011, à Sarajevo, vous
4 souvenez-vous d'avoir signé une autre déclaration qui rassemblait toutes
5 ces mêmes déclarations en un seul et même document ?
6 R. Oui.
7 Q. Avez-vous regardé cette déclaration-là, celle de 2011 avant de venir
8 témoigner ici aujourd'hui ?
9 R. Oui.
10 Q. Vous avez remarqué qu'il y avait un problème au niveau de la date
11 manuscrite sur la première page où on peut lire "2001," n'est-ce pas ?
12 R. Oui. J'aurais dû ajouter un autre "1" à cet endroit-là, oui, moi,
13 personnellement.
14 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande au témoin de bien
15 vouloir parler dans le microphone, s'il vous plaît.
16 Mme EDGERTON : [interprétation]
17 Q. Merci. Monsieur Talovic, lorsque vous répondez à ma question ou celle
18 du Dr Karadzic un peu plus tard, vous avez devoir vous rapprocher des
19 microphones qui ont des lumières rouges qui sont devant vous, d'accord ?
20 Merci.
21 Monsieur Talovic, outre cette petite correction, estimez-vous que la
22 déclaration que vous avez signée en 2011 est exacte d'après vos souvenirs ?
23 R. Oui, tout à fait, c'est exact.
24 Q. Si on devait vous poser les mêmes questions que celles que l'on vous a
25 posées en l'an 2000, en 2002, en 2004, et en juillet de cette année,
26 fourniriez-vous les mêmes réponses ?
27 R. La même chose, complètement la même chose.
28 Mme EDGERTON : [interprétation] Dans ce cas, Madame, Messieurs les Juges,
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1 je demande le versement au dossier de la déclaration consolidée de M.
2 Talovic, numéro 65 ter 90261, c'est la pièce suivante de l'Accusation, s'il
3 vous plaît.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ceci sera versé au dossier.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P3188, Madame, Messieurs les Juges.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais maintenant lire un résumé de cette
7 déclaration.
8 Jusqu'au mois de mai 1992, Musan Talovic avait vécu toute sa vie dans le
9 village de Glogova dans la municipalité de Bratunac. En avril 1992, les
10 tensions ont commencé à surgir. Le témoin se souvient du fait que la police
11 a été divisée en parties Serbe et Musulman.
12 Le 1er avril, la police Serbe a patrouillé dans la région, en demandant aux
13 personnes de rendre leurs armes au bâtiment de la municipalité de Bratunac.
14 Le 3 avril, des véhicules voisins de Hranca les gens se sont enfuis à
15 Glogova en rapportant que des Chetniks locaux incendiaient des maisons et
16 tuaient des personnes.
17 Aux premières heures du 9 mai, M. Talovic s'est réveillé en constatant
18 qu'il y avait des bottes de foin qui brûlaient et que des soldats venaient
19 vers lui. Les hommes Musulmans se sont rassemblés dans sa maison pour
20 essayer de se cacher près d'une crique qui se trouvait à proximité. Ils ont
21 été retrouvés par des soldats armés en uniforme, le soldat a reconnu l'un
22 d'entre eux. Les personnes qu'ils avaient fait prisonniers les ont dirigés
23 vers le supermarché au centre du village sous la menace d'un fusil. Le
24 témoin a vu un certain nombre de soldats Serbes qui étaient rassemblés non
25 loin de cela, et pour finir, Najdan Mladenovic est arrivé. C'est lui qui a
26 intimé à trois prisonniers musulmans d'entrer dans sa voiture. Le témoin a
27 ensuite entendu Mladjenovic donner des ordres de faire le travail et de
28 tuer les autres hommes. Quatre soldats sont ensuite arrivés munis de fusils
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1 automatiques. Ils ont emmené les 20 hommes qui restaient, y compris le
2 témoin, jusqu'à la rive du la rivière où on l'a demandé de se mettre en
3 rang face à la rivière. Les soldats ont ouvert le feu sur le groupe. Le
4 témoin a touché l'eau et a perdu connaissance. Il s'est réveillé quelques
5 heures plus tard dix mètres en aval sous un arbre et il était accompagné de
6 deux cadavres. Il a reconnu les cadavres. Il s'agissait de ses voisins, et
7 il n'a retrouvé qu'un seul survivant qui avait été blessé et qui tentait de
8 s'enfuir. Les autres prisonniers ont été tués. Dans le village, M. Talovic
9 a vu des maisons incendiées et a découvert des cadavres d'autres voisins
10 qui avaient également tué ce jour-là. Ensemble, cela représentait quelque
11 68 victimes dues à l'attaque serbe.
12 Ce soir-là, le témoin ainsi que d'autres survivants de l'attaque ont décidé
13 de quitter le village de Glogova. Un groupe s'est dirigé vers Konjevic
14 Polje, l'autre vers Srebrenica.
15 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise qu'elle ne disposait pas du texte du
16 résumé.
17 Mme EDGERTON : [interprétation]
18 Q. Monsieur Talovic, j'ai quelques précisions à vous donner eu égard à la
19 déposition écrite dont je viens de lire un résumé. En premier lieu, dans
20 cette déposition écrite au paragraphe 8, vous dites que Miroslav Deronjic
21 était la personne principale qui faisait partie de la cellule de Crise
22 Serbe. Comment le saviez-vous ?
23 R. Parce que Selim Delic et Nesib Besevic sont allés négocier à Bratunac
24 et ils sont rentrés en disant que Momir Nikolic et Miroslav Deronjic
25 étaient surtout les hommes les plus importants qui faisaient partie de
26 cette cellule de Crise du SDS de la République serbe de Bratunac.
27 Q. Merci. Bien, Monsieur Talovic, le 9 mai, avez-vous vu des véhicules
28 militaires à Glogova ?
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1 R. J'ai vu un véhicule blindé de transport de troupes et un char dans le
2 centre de Glogova lorsqu'on nous y a emmené.
3 Q. Y avait-il des hommes qui tenaient ces -- ou qui se trouvaient dans cet
4 équipement militaire ?
5 R. Il y avait trois ou quatre hommes qui étaient à bord des blindés. Ils
6 étaient équipés d'un PAM, et d'un fusil mitrailleur - et vous savez à quoi
7 ressemble un char - et il y avait d'autres soldats qui les accompagnaient.
8 Q. Comment étaient-ils habillés ?
9 R. Ils étaient en uniformes militaires, vert olive et gris.
10 Q. Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par PAM ?
11 R. C'est ce qui est installé sur un véhicule blindé, cela pivote, et je
12 crois que ceux-ci un peu tiraient des balles importantes. Ils ne cessaient
13 de pivoter, de faire pivoter cela, ils nous faisaient peur.
14 Q. Avez-vous vu des inscriptions sur ce véhicule blindé transport de
15 troupes ou sur le char ?
16 R. La JNA.
17 Q. Alors nous allons poursuivre et passer au paragraphe 31 de votre
18 déclaration, où vous parlez de la façon dont Mustafa Golic a sauvé Sejid
19 Ibisevic et Almaz Talovic qui ont été emmenés dans la voiture. Mais plus
20 loin, Najdan Mladjenovic, mais plus tard au paragraphe 30, vous décrivez
21 comment vous avez retrouvé Golovic à nouveau et ce qu'il vous a dit. Donc
22 je souhaite savoir ceci, après qu'on les ait emmenés, n'avez-vous jamais vu
23 Ibisevic et Talovic à nouveau; ne les avez-vous jamais revus ?
24 R. Talovic est mon cousin, et Sejid est un voisin. Ils ont été tués le
25 soir même, et Golic est encore en vie. Il a réussi à s'enfuir. Je ne sais
26 pas comment il l'a fait, lui seul le sait. De l'école de Vuk Karadzic,
27 j'entends.
28 Q. Comment savez-vous que Sejid Ibisevic et Almaz Talovic ont été tués le
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1 même soir, la même nuit ?
2 R. Parce que ces voisins que nous avons rencontrés plus tard ont dit
3 qu'ils sont enterrés à Voljevica. Les tombes se trouvent à cet endroit-là,
4 ils savent qu'ils les ont retrouvés, qu'ils les ont enterrés là, et il
5 s'agit de mon cousin. Et donc j'ai posé des questions au sujet de celui-ci.
6 Q. Merci. Alors nous allons poursuivre au paragraphe 35 de votre
7 déclaration, vous énumérez un certain nombre de noms. Votre nom figure
8 également là-dessus, vous dites qu'il y a des hommes que l'on a placés en
9 rang le long de la rivière. Alors, mis à part vous-même ainsi que les trois
10 hommes dont vous dites qu'ils ont été emportés à bord de voiture, et dont
11 les noms d'ailleurs figurent également dans cette liste, ainsi que Seco
12 Delic dont vous faites mention plus tard, est-ce que vous savez si parmi
13 les personnes dont nous trouvons la liste des noms au paragraphe 35 de
14 votre déclaration, l'un quelconque d'entre eux ou l'une quelconque d'entre
15 eux a survécu à ces fusillades ?
16 R. Non, personne à part moi-même, et Seco Delic qui a été tué ensuite par
17 un obus.
18 Q. Pourriez-vous juste répéter la fin de la réponse que vous venez de
19 donner. Vous avez dit que Seco Delic a ensuite été tué par un obus, mais
20 l'interprète ne vous a pas entendu jusqu'au bout.
21 R. Seco a été tué plus tard, cinq ou six mois plus tard. Mais il avait
22 survécu en même temps que moi.
23 Q. Parmi les victimes ou plutôt au sein du groupe qui était avec vous sur
24 le bord de la rivière où a eu lieu cette fusillade, y avait il un ou
25 plusieurs enfants ?
26 R. Hajrem [phon] Ibisevic avait 11 ans, et Mujo Ibisevic, âgé de 13 ans,
27 tous les autres étaient de jeunes hommes de 18, 20 ans.
28 Q. A votre connaissance, jusqu'à cette date du 9 mai, l'une quelconque de
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1 ces victimes avait-elle participé de quelle façon que ce soit à des
2 activités militaires ?
3 R. Aucun d'entre eu n'avait jamais participé à des activités militaires.
4 Il n'y a quoi que ce soit de cette sorte, il n'en avait d'ailleurs pas
5 besoin.
6 Q. Plus tard, au paragraphe 38 dans votre déclaration, vous donnez une
7 autre liste de noms. Lorsque vous décrivez qu'après la fusillade, vous avez
8 vu les corps d'habitants de votre village qui avaient été empilés à deux
9 endroits; 24 noms sont ici énumérés, au paragraphe 38.
10 Est-ce que vous pourriez nous apporter quelque précision, parce que dans
11 votre déclaration, les choses ne sont pas absolument claires. Est-ce que
12 ces 24 noms sont ceux de certains des villageois dont vous avez vu qu'ils
13 ont été tués et dont les corps ont été entassés ?
14 R. Ce sont tous des voisins, à moi.
15 Q. Etaient-ce tous des hommes, ces 24 personnes que vous avez vues ?
16 R. Tous, à l'exception de Banovka et Adem Junuzovic -- à l'exception de
17 Banovka Junuzovic, qui était l'épouse de Adem Junuzovic.
18 Q. Est-ce que vous pourriez répéter ce que vous venez de dire. Vous avez
19 dit Banovka Junuzovic et Adem --
20 R. Junuzovic.
21 Q. Qui était Adem Junuzovic ?
22 R. C'était l'époux de Banovka.
23 Q. Je voudrais revenir, page 63 du compte rendu, ligne 1. Je voudrais
24 corriger ce que j'ai dit, parce que en fait vous avez vu bien plus que 24
25 corps, n'est-ce pas ?
26 R. C'est exact.
27 Q. Alors, encore une fois, une question concernant ces listes des
28 paragraphes 35 et 38, le nom de Selmo Omerovic apparaît dans les deux
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1 listes, Selmo Omerovic; comment est-ce possible ?
2 R. Selmo Hakije Omerovic, et Selmo Adem Omerovic, il s'agit de deux
3 personnes différentes dont on se rend compte de la différence qu'en
4 ajoutant le nom du père, le prénom du père.
5 Q. Dans la liste apparaissant au paragraphe 38, je vois le nom de Talovic.
6 R. Ce sont les enfants d'un de mes oncles du côté paternel.
7 Q. Bien que de nombreuses années se soient écoulées, cette expérience qui
8 a été la vôtre d'avoir été la cible d'une fusillade, d'être tombé à terre,
9 et d'avoir ensuite survécu, comment vous a-t-elle affecté ?
10 R. Mes voisins et ma famille savent le mieux à quel point c'est quelque
11 chose que je ne souhaiterais à personne, que de survivre à de tels
12 événements. C'est très, très difficile.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Madame,
14 Messieurs les Juges.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Edgerton. Je présume qu'il
16 n'y a pas de pièces associées pour ce témoin.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] En effet.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
19 Monsieur Talovic, vous allez maintenant être interrogé par M. Karadzic, au
20 titre du contre-interrogatoire.
21 A vous, Monsieur Karadzic.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
23 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
24 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Talovic.
25 R. Bonjour.
26 Q. Vous avez été président de la communauté locale de Glogova. A quel
27 moment ?
28 R. En 1998, 1999, en fait pendant quatre ans, de la date de 1988, j'ai été
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1 président.
2 Q. A partir de quelle année, 1988 ?
3 R. Non, je parle de 1990 et 1991.
4 Q. Donc, en 1991, étiez-vous président de la communauté locale ?
5 R. Oui.
6 Q. Ne m'en veuillez pas mais vous-même, vous et moi devons tous les deux
7 attendre chacun notre tour que l'interprétation se termine; sinon, les
8 interprètes ne nous entendront pas.
9 Vous dites -- dans votre déclaration de 2001 [phon], cote 1D4078, en page
10 numéro 2, vous dites donc qu'au début de l'année 1992, on a assisté à une
11 recrudescence des tentions entre les groupes ethniques. Vous dites vous
12 rappeler que lorsque la Bosnie a fait sécession de la Yougoslavie, la vie a
13 changé; est-ce exact ?
14 R. Non.
15 Q. Je vais donner lecture en anglais, vous entendrez la traduction :
16 "Au début de 1992, nous avons pu percevoir des changements et des tensions
17 entre les groupes ethniques. Je me rappelle que lorsque la Bosnie s'est
18 séparée de la Yougoslavie, la vie a changé."
19 Est-ce que vous voulez dire là que la recrudescence des tensions était liée
20 à la sécession de la Yougoslavie ?
21 R. Je n'ai pas dit --
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Nous n'avons pas entendu
23 l'interprétation de ce que vous avez dit après avoir cité les propos du
24 témoin tels que consignés dans sa déclaration.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est pourquoi je demande au témoin d'attendre
26 la fin de l'interprétation.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Monsieur le Témoin, vous verrez si vous suivez le déroulement du compte
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1 rendu que lorsque ce dernier s'arrête l'interprétation est terminée. J'ai
2 demandé --
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si, vous-même, vous
4 passez du B/C/S à l'anglais ou vice versa, vous devriez vous-même attendre
5 quelques instants supplémentaires.
6 Alors, est-ce que vous pourriez répéter la fin de votre question ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en conviens.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Ma question était la suivante : Est-ce qu'en liant ces tensions d'une
10 part et d'autre part la sécession de la Bosnie -- enfin, est-ce que vous
11 établissez un lien entre l'augmentation de ces tensions interethniques et
12 la sécession ? Est-ce que vous estimez qu'il en serait allé autrement et
13 qu'il n'y aurait peut-être pas eu de telles tensions s'il n'y avait pas eu
14 sécession ?
15 R. Je n'ai participé à rien en matière de sécession, donc je ne sais pas.
16 Q. Oui, mais vous avez bien déclaré ceci, n'est-ce pas ?
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y. Maintenant vous pouvez
18 répondre.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je n'ai rien séparé du tout, ni la Bosnie
20 ni la Yougoslavie, ni rien du tout.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, je ne vous attaque en rien. J'essaie simplement
23 d'établir ce que vous avez dit. Vous avez dit qu'au début 1992, des
24 tensions sont apparues, et moi, ce que je vous demande, c'est si ces
25 tensions sont apparues en raison de cette sécession ou bien s'il y avait
26 d'autre raison.
27 R. C'est vous qui connaissez le mieux la réponse à cette question.
28 Q. Très bien. Vous décrivez la chose suivante : Vous dites qu'en avril,
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1 l'armée est arrivée à Bratunac et qu'elle s'y était forcée de dresser une
2 liste des conscrits. Elle a essayé de saisir cette liste dans le bâtiment
3 de la municipalité, dans la Section chargée des Affaires militaires.
4 Ensuite la population s'est rassemblée vous étiez devant le bâtiment de la
5 municipalité, et en fait, il a été fait obstacle à l'armée qu'on a empêché
6 de se saisir de cette liste des conscrits militaires; est-ce exact ?
7 R. Oui.
8 Q. L'armée a-t-elle essayé de commettre un acte illégal, ou bien
9 s'agissait-il là de son droit et de son devoir constitutionnel que d'avoir
10 à sa disposition les données concernant les conscrits ?
11 R. Je l'ignore.
12 Q. Mais ceci ne s'est pas passé en avril. Mais le 30 août 1991, n'est-ce
13 pas ?
14 R. Je ne sais pas.
15 Q. Je vais maintenant vous présenter la façon dont les choses se sont
16 déroulées. Une unité militaire arrive le 31 août 1991, afin d'avoir accès à
17 ce fichier pour pouvoir appeler les conscrits. Les Musulmans se rassemblent
18 pour empêcher l'armée de se saisir de ces documents, mais la police
19 intervient et empêche qu'il y ait le moindre affrontement; vous
20 conviendrez-vous ?
21 R. Non.
22 Q. Alors, comment les choses se sont-elles passées ?
23 R. Ils voulaient prendre l'ensemble des dossiers, des fichiers, et les
24 officiers Musulmans étaient minoritaires. Ils auraient pu utiliser ces
25 fichiers plus tard pour les tuer.
26 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire que le 30 août, la JNA voulait se
27 saisir de ces fichiers de conscrits afin de tuer des Musulmans en vue ?
28 R. Je ne dis rien de tel. C'est ce que j'ai vécu.
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1 Q. Un groupe important de Musulmans, à la même occasion, s'est rassemblé
2 devant le bâtiment municipal et a fait obstacle à l'armée, alors qu'un
3 groupe d'extrémistes s'est livré à de la casse en ville, a tiré sur le
4 poste de police, a également tabassé ces gens; est-ce exact ?
5 R. Je ne sais rien de tout cela.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Talovic, je dois vous rappeler
7 une fois encore que dans l'intérêt des Juges de la Chambre et de tous ceux
8 qui suivent l'interprétation il est important que vous ménagiez une pause
9 avant de commencer à répondre.
10 Monsieur Karadzic, de quels événements parlons-nous ? De quelle occasion,
11 avril ou août ?
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces événements se sont produits le 30 août,
13 deux ou trois jours après que M. Izetbegovic a retiré son soutien d'un
14 accord historique.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais, Monsieur Karadzic, c'est une
16 déclaration consolidée que nous avons ici, et au paragraphe 12 on fait
17 référence explicitement au début de 1992, ou avril 1992. C'est à vous qu'il
18 incombe d'examiner avec le témoin dans un premier temps si c'est bien
19 d'avril ou d'août qu'il s'agit. Vous ne pouvez pas considérer comme un fait
20 acquis que ces événements se sont produits au mois d'août.
21 Madame Edgerton.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'apprêtais à justement à dire que cette
23 version selon laquelle ces événements seraient survenus au mois d'août ne
24 repose que sur ce qu'a avancé M. Karadzic, lui-même, et non pas le témoin.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
26 Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je sais exactement quand ceci s'est produit, et
28 nous aurons l'occasion de présenter des documents tout à fait irréfutables
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1 à ce sujet; cependant, je souhaiterais entendre de la bouche du témoin ce
2 qu'il a à dire à ce sujet, je lui présente donc la théorie qui est celle de
3 la Défense.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur le Témoin, est-ce qu'au mois de septembre 1991, on assiste
6 bien à Bratunac à des événements où des drapeaux sont brûlés de façon
7 ostentatoire ?
8 R. Je n'en sais rien.
9 Q. Au même mois de septembre, à Kravica, les Serbes font l'objet de
10 menaces, menaces selon lesquelles leurs maisons allaient être brûlées; est-
11 ce que vous vous en souvenez ?
12 R. Non, je ne m'en souviens pas.
13 Q. Merci. A l'automne 1991, les Musulmans armés installent des barrages
14 dans votre village de Glogova ainsi qu'à Sandici; est-ce que vous vous en
15 souvenez ?
16 R. Je me souviens de barrages routiers mis en place par des Serbes.
17 Q. Vous ne vous rappelez pas les barrages routiers des Musulmans ?
18 R. Non. Il s'agissait certainement de barrages routiers Serbes placés à la
19 sortie de Kravica en direction de Sandici ainsi qu'à la sortie de Bratunac
20 en direction d'une localité --
21 L'INTERPRÈTE : Dont l'interprète n'a pas entendu le nom.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Pouvons-nous maintenant avoir le document 30180 ? Pendant qu'il
24 s'affiche, vous rappelez-vous que jusqu'à la fin août, des pourparlers
25 étaient en cours à propos de cet accord historique serbe-musulman au terme
26 duquel la Bosnie était censée rester dans le cadre de la Yougoslavie, et
27 les Serbes étaient censés renoncer à une régionalisation ou Régions
28 autonomes serbes, et cetera ?
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1 R. Moi, je me préoccupais de la façon d'assurer ma subsistance j'allais
2 chercher du bois. Je ne me rappelle rien de cela.
3 Q. Très bien. Je vous demande de consulter ceci. Il s'agit des
4 négociations entre moi-même et le futur vice-président de la Republika, à
5 l'époque. Il était membre de la présidence de Bosnie-Herzégovine. Je parle
6 du Pr Koljevic. Il s'agit du 2 septembre 1991, trois ou quatre jours après
7 le moment où Izetbegovic a retiré son soutien à cet accord, y a renoncé.
8 Mais puisque vous ignorez tout de cela, nous n'allons pas insister. Je
9 voudrais que nous affichions la page suivante.
10 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : Le nom de localité manquant
11 dans la réponse précédente du témoin, était Repovac. La sortie de Bratunac
12 en direction de Repovac.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Je vais donc donner lecture de ceci en serbe. Koljevic et moi-même
15 avons eu cette discussion, et il s'agit des barrages routiers. Koljevic me
16 demande, je cite :
17 "Dis-moi, qu'est-ce qui s'est passé à Ham Pijesak ? Est-ce que ces gens-là
18 sont vivants ?
19 Karadzic : Oui, ils sont vivants. L'un a été blessé à la main, ou au bras,
20 l'autre à la jambe. Ils ont été blessés près de Bratunac, à un barrage
21 routier.
22 Koljevic : Ah, près de Bratunac.
23 Karadzic : Oui. Ensuite les nôtres ont posé un barrage routier à Ham
24 Pijesak, et ont entraîné la formation d'une énorme colonne, d'une colonne
25 très longue.
26 Koljevic : Oui.
27 Karadzic : Ensuite, moi, je n'ai pas pu m'y rendre, mais j'ai essayé de
28 trouver une solution. J'ai trouvé une solution qui a été la suivante : Ils
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1 ont rédigé un tract et ils ont dit que le barrage routier était un
2 avertissement adressé aux autorités de Bosnie-Herzégovine en raison de
3 l'illégalité tolérée, et cetera, et cetera. L'idée c'était de donner ce
4 tract à chaque conducteur passant par le barrage routier, c'était une
5 condition même pour pouvoir passer afin que ce soit considéré comme un
6 avertissement, tu comprends.
7 Koljevic : Oui, oui.
8 Karadzic : Et aujourd'hui, nous allons tirer cela au clair avec eux, nous
9 devons dire à Izetbegovic que les Musulmans ont déjà levé la main sur les
10 Serbes à plusieurs endroits."
11 Alors vous, vous pensez qu'il n'y avait pas de barrages routiers musulman,
12 alors que cette conversation montre clairement que les Musulmans tiraient,
13 et que les Serbes à Ham Pijesak ont dressé en réponse à cela justement un
14 contre barrage routier, en quelque sorte.
15 R. Tout cela est nouveau pour moi.
16 Q. Merci.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ceci aux fins d'identification
18 comme nous le faisons habituellement ?
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis un peu perplexe quant au fondement
21 sur la base duquel ce document pouvait être versé aux fins
22 d'identification. Est-ce que M. Karadzic présente ceci en tant que document
23 authentique, et cela ne l'est pas, parce que le témoin n'a absolument rien
24 confirmé, pas le moindre élément de cette conversation.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être y a-t-il une pertinence
26 contextuelle, du fait de cette référence qui a été faite à des barrages
27 routiers.
28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je ne suis pas absolument persuadée, Madame
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1 et Messieurs les Juges, que cela soit suffisant.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Souhaitez-vous répondre, Monsieur
3 Karadzic ou Maître Robinson ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, je souhaiterais effectivement apporter
5 une réponse sur les faits, peut-être que Me Robinson souhaiterait-il
6 apporter des précisions procédurales.
7 Sur le plan de faits, les tensions ne sont pas apparues au mois d'avril
8 1992. Ce qui s'est passé c'est que la majorité musulmane a terrorisé les
9 Serbes dès septembre 1991. Et cette conversation montre que nous, nous
10 sommes prêts à dire à Izetbegovic que ces comportements illégaux dont les
11 Serbes sont victimes doivent s'arrêter. Donc tout ceci a commencé bien plus
12 tôt. Dans la mesure où l'on propose ceci aux fins d'identification, en
13 fait, je le propose parce que c'est la position que moi j'aie par rapport à
14 ces conversations interceptées. Mais peut-être que Me Robinson souhaitera
15 ajouter quelque chose.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, j'ajouterais volontiers à ce stade que
17 le Dr Karadzic a apporté suffisamment de précision quant au contexte, donc
18 je retire les réserves que je viens juste d'exprimer.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Marquons donc ce document aux
21 fins d'identification.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Sous la cote D1642, Madame et Messieurs
23 les Juges, aux fins d'identification.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on affiche le
26 document 3189, dont la date est plus tardive, il date de deux jours plus
27 tard. 30189.
28 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : La cote précédente était 1642.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Alors ici Momcilo Krajisnik s'entretient avec un certain Trifko, qui
3 est de permanence au parti. Il le demande dans la deuxième moitié, s'il
4 connaît -- si Krajisnik est au courant en tant que président de l'assemblée
5 des problèmes à Bratunac.
6 Krajisnik demande : Quels sont ces problèmes ?"
7 Et il lui répond que : Il y a déjà eu deux morts, qu'il y a eu deux
8 blessés, que des barrages routiers ont été érigés au village de Kravica --"
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Karadzic, où est le
10 passage que vous êtes en train de lire ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le quatrième paragraphe à partir du
12 début.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous reprendre, à partir du
14 début.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. "Et c'est la guerre. Deux Musulmans sont déjà morts. Les gens sont
17 venus aux mains, deux ont été tués, deux ont été blessés. Des barrages ont
18 été érigés au village de Kravica. Ceux-là, ils se sont mis en route, ils
19 ont commencé, et c'est ça le conflit, là où je suis à B, Bratunac."
20 Ensuite Krajisnik lui demande : "Comment cela s'est passé ?"
21 Ensuite il y a des explications. Alors veuillez examiner ceci. Il est dit à
22 un moment donné qu'un Musulman a été interrogé puis libéré.
23 Puis il set question d'une tentative d'assassinat du président
24 Djukanovic, un Serbe, du président du comité. Est-ce que vous vous rappelez
25 cela ?
26 R. Non.
27 Q. L'assassin a été arrêté et immédiatement libéré, et Trifko confirme
28 cela en disant oui, oui, n'est-ce pas, est-ce que vous vous en souvenez ?
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1 Est-ce que vous vous rappelez les moindres tentatives d'assassinat ?
2 R. Tout ça est nouveau pour moi.
3 Q. Ensuite un groupe de Musulmans ont pris le chemin de Kravica, et puis à
4 Kravica, on a érigé un barrage routier; est-ce exact ?
5 R. Non.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Peut-on verser ceci sur la même base
7 ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, avez-vous quelque chose
9 à opposer à ceci.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Non, pas pour ce document-ci, Madame et
11 Messieurs les Juges. Il n'y a pas de contexte. Je comprends le principe
12 selon lequel ceci aurait pu être présenté ou versé en tant que document
13 mettant en question la crédibilité du témoin, mais M. Karadzic n'a rien
14 fait de tout cela. Il s'est contenté de poser des questions au témoin lui
15 demandant de confirmer tel et tel élément, alors que le témoin n'a
16 absolument aucun élément pertinent par rapport à ce document. Donc je crois
17 en fait que nous ne pouvons pas cette fois-ci accepter le versement même
18 aux fins d'identification.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous estimons qu'il
20 n'y a pas de fondement même pour en verser aux fins d'identification.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en conviens, Monsieur le Président. Alors je
22 voudrais maintenant que nous affichions le document 30186, de la liste 65
23 ter.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. C'est une conversation du 4 septembre entre Zvonko Bajgic de Vlasenica
26 et moi-même. Voilà, cinq ou sixième ligne en partant du haut.
27 "Karadzic : Je sais que qu'ils ont tiré sur le président du comité
28 exécutif et puis ils ont arrêté cet individu et l'ont relâché.
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1 Bajgic : Oui.
2 Karadzic : Ensuite les Musulmans ont pris le chemin du village de Kravica.
3 Est-ce qu'ils se sont mis en route pour lancer une attaque ou quoi ?"
4 Peut-on avoir la page suivante ?
5 Reprise de la situation à partir de la quatrième ligne à partir du haut en
6 serbe.
7 "Bajgic : Après vendredi, le SUP a déployé, dans ces différents villages la
8 milicija. Si bien que seuls les Serbes sont arrivés à Kravica.
9 Karadzic : Oui.
10 Bajgic, Parce que c'est qu'ils demandaient, c'est ce qu'ils
11 exigeaient même. Alors qu'à Konjevic Polje, et puis il a là-bas à Lolici il
12 avait et des Serbes et des Musulmans dans les patrouilles.
13 Karadzic : Ah. Très bien.
14 Bajgic : --"
15 Alors fin de citation.
16 S'il est question de tirs sur le président :
17 "Bajgic dit : Deux ont été blessés. Et il y a eu ce barrage érigé à
18 Han Pijesak. C'était la raison de cela. Ils vous en ont informés.
19 Karadzic, Oui, deux ont été blessés, soit.
20 Ensuite Bajgic dit : Après que ces gens aient été blessés il y a eu
21 cette tentative d'attentat du président du comité exécutif. Des Serbes ont
22 de nouveau été blessés.
23 Et Bajgic : --
24 Alors Karadzic : Est-ce que des Serbes ont été blessés ?
25 Bajgic répond : Ecoutez, juste pour vous tenir au courant, il y a une
26 tentative d'assassinat de le tuer mais ils ne l'ont pas tué."
27 Alors, je n'ai pas la température de citer toute la conversation,
28 mais on voit ici que des effectifs ont été déployés dans ces différents
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1 foyers de tension que le MUP patrouillait, qu'il y avait une situation de
2 crise considérable, et vous, vous ne saviez rien de tout cela ?
3 R. Non.
4 Q. Très bien .
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas comment il faut traiter le cas
6 de ce document. Moi, je pense qu'il faudrait le verser au dossier, parce
7 qu'il y avait dit directement que les tensions ont démarré plus tôt, et
8 qu'en fait il ne s'agissait pas seulement de tensions, mais que c'était une
9 guerre à échelle réduite qui avait déjà démarré à l'échelon local.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous dire de
11 quelle façon ceci est lié à la déposition du présent témoin ?
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce qui est arrivé à ce témoin, c'est produit le
13 9 ou le 10 mai, mais les tensions n'ont pas commencé en avril. Elles ont
14 commencé en septembre. Avec les tirs, et les barrages, et il fallait
15 essayer d'apaiser tout cela. C'était là des préparatifs pour tout ce qui
16 s'est passé après. C'était le cours local des événements qui n'avaient en
17 rien été ordonnés depuis les structures centrales, et c'est ce que
18 j'avance.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, quelle est votre
20 position ?
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Il n'est pas exclus qu'il y ait une
22 certaine pertinence relativement aux événements de Bratunac d'un point de
23 vue général et également en ce qui concerne les forces de police sur
24 certains aspects, donc si c'est là le fondement je n'aurais pas
25 d'objection. Parce qu'on peut considérer que cela présente une certaine
26 pertinence du point de vue du contexte, mais à mon avis cela n'est
27 certainement pas pertinent par rapport à la déposition de ce témoin.
28 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre ont décidé de
2 verser ce document.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D1643 aux fins
4 d'identification, Madame et Messieurs les Juges.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause
6 de 20 minutes, et nous reprendrons à 18 heures 12.
7 --- L'audience est suspendue à 17 heures 53.
8 --- L'audience est reprise à 18 heures 11.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur Talovic, est-ce qu'avant la guerre votre village de Glogova
13 était armé ?
14 R. Non, jamais.
15 Q. Dans votre déclaration de l'année 2000, page 2 du document 1D4078, vous
16 avez dit, et je dois lire ce passage en anglais, de façon à assurer une
17 interprétation exacte, je cite :
18 "A partir du 1er avril 1992, la police serbe circulait dans les environs de
19 Bratunac et des villages entourant Bratunac, et notamment dans Glogova. Ils
20 étaient équipés de haut-parleurs, et demandaient aux gens de rendre leurs
21 armes. Ils promettaient également que si nous restituions nos armes, rien
22 de mauvais ne nous arriverait."
23 Donc, est-ce que la police serbe demandait à ce que les armes soient
24 restituées, et qu'est-ce qui a été restitué à Glogova ?
25 R. Oui. La police serbe demandait à ce que les hommes qui en avaient
26 remettent leurs fusils de chasse, et ils avaient ces fusils avec des
27 permis.
28 Q. Bien. Donc, il n'y avait pas d'armes, de fusils automatiques qui ont
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1 été distribués par le SDA et d'autres activistes ?
2 R. Non, je ne sais pas. Ça, c'est une information donnée par vous. Cela ne
3 s'est jamais passé à Glogova.
4 Q. Bien. Page 2 de la même déclaration, et je vais donner lecture en
5 anglais, encore une fois, pour assurer une bonne interprétation :
6 "J'avais un fusil de chasse que j'ai remis dans les locaux de la mairie.
7 J'avais également mon pistolet, mais ils n'ont pas demandé à me le prendre.
8 Ils m'ont donné un reçu contre mon fusil."
9 R. C'est exact.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je
11 remarque que ce paragraphe est identique au paragraphe 13 de la déclaration
12 consolidée du témoin.
13 Ah, Monsieur le Témoin, vous avez déjà répondu.
14 Donc, Monsieur Karadzic, je vous donne la parole.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes mes excuses aux Juges de la Chambre et
16 au bureau du Procureur. En effet, en ce moment, nous auditionnons des
17 témoins dont la durée d'audition est moins longue que d'autres. Donc toutes
18 mes excuses, j'ai confondu ce témoin avec le précédent au sujet des propos
19 tenus par un témoin au sujet d'un pistolet. Donc, ma remarque à l'instant
20 au sujet d'un pistolet ne concerne pas ce témoin.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, il y avait donc des gardes dans les villages
23 musulmans, mais est-ce que les gardes des villages musulmans étaient
24 Musulmans, et est-ce que les gardes serbes étaient tous Serbes pendant les
25 patrouilles de nuit ?
26 R. Non.
27 Q. Il n'y avait pas de gardes dans les villages ?
28 R. La police serbe garantissait notre sécurité si nous acceptions de
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1 remettre nos armes, comme je l'ai déjà expliqué, les armes que nous
2 possédions avec des permis de port d'armes, donc nous n'avons pas eu besoin
3 d'organiser des patrouilles de nuit.
4 Q. En page 2 de votre déclaration consolidée, vous dites également, je
5 cite :
6 "Je sais que le SDA a emporté la majorité des sièges à Bratunac. Je sais
7 également qu'un certain Nijaz du SDA est devenu président de la
8 municipalité. Le président du SDS, c'était Miroslav Deronjic.
9 "Un autre homme répondant au nom de Sreten Radic était membre du SDS.
10 C'était un homme très actif, qui détenait une position élevée au sein du
11 SDS.
12 "Je ne sais pas qui était le chef de la police, mais je sais que la police
13 était divisée en une section serbe et une section musulmane. Tout ceci a
14 commencé au mois d'avril. Nous n'avions pas de poste de police à Glogova,
15 donc tout ceci s'est passé à Bratunac."
16 Est-ce que vous conviendrez que les Serbes et les Musulmans étaient
17 ensemble au sein de la police jusqu'au mois d'avril et que le chef du poste
18 de la police était un Musulman, le Serbe ayant été nommé à ce poste pas mal
19 de temps plus tard, et que tous ces changements se sont accompagnés de pas
20 mal de querelles ?
21 R. Vous savez comment cela se passe. Je n'étais pas u responsable
22 politique. Les responsables politiques ont quitté Bratunac. Ils n'étaient
23 pas du tout présents au poste.
24 Q. Conviendrez-vous que même lorsque la division entre Serbes et Musulmans
25 a eu lieu au sein de la police, les Serbes et les Musulmans sont restés
26 dans le même bâtiment mais à des étages différents, et qu'ils avaient
27 conclu un accord, à savoir que les Serbes travailleraient dans les villages
28 Serbes et les Musulmans dans les villages Musulmans, mais que leur siège
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1 resterait dans le même immeuble ?
2 R. Je n'ai pas la moindre idée au sujet de la police.
3 Q. Mais dans cette déclaration consolidée, vous dites que la police a été
4 divisée en deux. Je demande l'affichage du document 65 ter numéro 603, page
5 17 en anglais, et 13 en serbe.
6 Il me semble que la page anglaise affichée à l'écran est la bonne.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Il serait bon de remettre la page serbe à
8 l'endroit sous l'écran.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Mais là nous sommes au 23 décembre 1991, alors que pour le texte serbe
11 il nous faudrait le 9 avril 1992. Le document que je recherche se trouve
12 dans la même série de procès-verbaux, d'où la confusion et la difficulté à
13 le retrouver. Page 17 en serbe.
14 Monsieur le Témoin, après agrandissement du texte, est-ce que vous voyez
15 qu'à l'ordre du jour on lit :
16 "Analyse des accords conclus avec les Musulmans en rapport avec la
17 répartition du pouvoir dans la municipalité de Bratunac, durée du processus
18 et création de la police serbe."
19 Est-ce que vous vous rappelez qu'un accord avait été conclu portant sur la
20 création de deux municipalités à Bratunac, l'une Musulmane et l'autre
21 Serbe, et qu'il y a eu même échanges de congratulations, Mme Subic,
22 présidente du Parti socialiste, ayant ensuite attaque verbalement M.
23 Izetbegovic pour être revenu sur cet accord ? Vous ignorez qu'un accord a
24 été conclu à Bratunac ?
25 R. Je ne suis pas au courant, non.
26 Q. Très bien. Dans ce cas, apparemment je n'ai pas besoin de demander le
27 versement de ce document au dossier, mais si un accord a été conclu,
28 conviendrez-vous que c'était un bon point de départ pour résoudre la crise
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1 de façon pacifique, à savoir signature d'un document prévoyant la division
2 en deux, avec les Musulmans s'occupant de leurs communautés et les Serbes
3 s'occupant de la leur, en partageant le même bâtiment.
4 R. Mais pourquoi est-ce que j'ai été battu dans ces conditions ?
5 Q. Je ne peux que regretter ce qui vous est arrivé, Monsieur le Témoin,
6 mais on voit que depuis le mois d'août pas mal de sang a été versé entre
7 vous, ceci n'a rien à voir avec moi.
8 Je me demandais si la municipalité avait été divisée en deux municipalités,
9 dans ce cas, est-ce que cela aurait résolu un problème ?
10 R. Le problème n'aurait pas été résolu d'une façon ou d'une autre, parce
11 que les gens n'avaient pas d'arme, et c'est vous, Monsieur Karadzic, qui
12 avait fait entrer les armes.
13 Q. Voyons ce que vous avez dit dans votre déclaration de 2000 également,
14 page 3, du document 4078 :
15 "Lorsque cet homme a appelé le nom de Milutin, en disant qu'ils allaient
16 récupérer les armes dans le village voisin il a mentionné le village de
17 Gornji Magasici, et plus tard, nous avons constaté que ceci n'avait pas été
18 fait."
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Paragraphe 14 de la déclaration amalgamée
20 du témoin, pièce P1388 [comme interprété].
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai aucunement
22 l'intention de m'opposer au propos de ma consoeur, Mme Edgerton, mais la
23 vérité c'est que nous recevons les déclarations amalgamées avec signature
24 très, très tard, et que nous recevons les textes temporaires plus tôt.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Alors, comment savez-vous que les Serbes n'ont pas été désarmés,
27 comment savez-vous que les événements ne sont pas allés plus vite que ce
28 qu'ils avaient l'intention de réaliser ?
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1 R. Je ne comprends pas votre question.
2 Q. Vous avez dit que Magasici n'avait pas été désarmée. Comment le savez-
3 vous ?
4 R. Parce qu'ils tiraient sur nous.
5 Q. Un peu plus loin dans la même page, vous dites :
6 "Ils ont déclaré aux villageois qui poursuivaient leurs actions
7 quotidiennes sans la moindre crainte que nous avions déjà restitué nos
8 armes."
9 Ceci est exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Merci. Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez que le 20 avril, Naser
12 Oric a tendu une embuscade à des réservistes Serbes et que ce jour-là 20
13 volontaires ont été tués, volontaires dont les cadavres ont été jetés dans
14 la rivière. Est-ce que vous vous en souvenez ?
15 R. Je ne suis pas au courant.
16 Q. Vous rappelez-vous un autre incident survenu à Hranca est mentionné en
17 page 3 de cette même déclaration, qui constitue le document 1D4078, mais
18 enfin c'est peut-être par inadvertance que vous avez cité une date inexacte
19 en parlant du 3 avril plutôt que du 3 mai. Est-ce que vous êtes d'accord
20 que tout cela a pu se passer le 3 mai ?
21 R. Oui. J'ai dit dans ma déclaration que les événements dont nous sommes
22 en train de parler ce sont passés le 3 mai, et le 6 avril -- ou plutôt,
23 excusez-moi, le 6 mai, Hranca était totalement nettoyé.
24 Q. Mais, Monsieur Talovic, je ne m'y retrouve plus très bien. Le 3 avril,
25 la Bosnie-Herzégovine existait encore. Il existait une présidence
26 collective et des pouvoirs. Alors, comment se fait-il que personne n'ait
27 été informé au sujet de l'attaque dont vous parlez le 3 avril à Hranca ?
28 Peut-être cette attaque a-t-elle tout de même eu lieu le 3 mai ?
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1 R. Je ne sais pas tout ce que je sais c'est que Hranca a été totalement
2 nettoyé le 6 et Glogova le 9.
3 Q. Avril ou mai ?
4 R. Le 9 mai.
5 Q. Merci. Conviendrez-vous que le 9 avril il n'y avait pas de combat à
6 Glogova, et que c'était plutôt le 9 mai, vous l'avez d'ailleurs corrigé
7 dans votre déclaration de 2000 ?
8 R. Je n'ai rien corrigé. La vérité c'est que ces événements se sont
9 produits le 9 mai.
10 Q. Très bien. Voyons maintenant une séquence vidéo, document 1D4079.
11 Est-ce qu'à Hranca --
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on diffuse les images de la
13 vidéo. 1D4079.
14 [Diffusion de la cassette vidéo]
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Est-ce qu'on voit ici le village de Hranca ?
17 R. Oui, oui.
18 Q. Est-ce que ce jour-là, une attaque a eu lieu contre une colonne de la
19 JNA qui était en train de se retirer de Sarajevo et est-ce qu'à cette
20 occasion, 12 hommes ont été tués ?
21 R. Je ne suis pas du tout au courant de tout cela.
22 Q. Savez-vous que certains habitants de Hranca ont fui ? Vous dites que
23 vous le savez, mais vous dites que vous ne savez pas pourquoi ils se sont
24 enfuis. Vous dites que vous ne savez pas que 12 personnes ont été tuées
25 dans une colonne qui était en train de battre en retraite; est-ce que vous
26 me dites vraiment que vous ne savez rien de tous ces événements et que les
27 autres personnes qui sont venues s'exprimer ici n'en savaient rien non plus
28 ?
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1 R. Il n'est pas vrai que qui que ce soit ait été tué par les Musulmans de
2 Hranca. Il n'est pas vrai que quelque représentant d'une quelconque
3 communauté ethnique aurait été tué par les Musulmans à Hranca.
4 Q. J'aimerais que nous voyions maintenant une autre séquence vidéo.
5 Document 1D4080. Est-ce qu'il y avait des Serbes à Hranca ?
6 [Diffusion de la cassette vidéo]
7 LE TÉMOIN : [interprétation] La partie serbe de Hranca est adjacente de
8 Glogova, presque mitoyenne de Glogova. Elle est à deux kilomètres à peine.
9 Ensuite, on trouve la partie musulmane de Hranca.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Voyons les images des maisons serbes de Hranca. Ces maisons serbes ont-
12 elles été détruites par la JNA ou par les Musulmans locaux ?
13 R. Les Musulmans n'ont pas détruit Hranca.
14 Q. Merci. Connaissiez-vous les Serbes de Hranca qui ne sont qu'à deux
15 kilomètres de chez vous ?
16 R. Oui, je suis allé à l'école avec certains d'entre eux.
17 Q. Avez-vous oublié ou peut-être que vous ne le savez pas du tout, alors
18 je vais formuler ma question ainsi : connaissiez-vous le juge Goran Zekic ?
19 R. Oui, officiellement.
20 Q. Etait-il natif de Bratunac, c'était un député qui représentait
21 Bratunac, il était juge à Srebrenica.
22 R. Je ne sais pas ce qu'il a fait et où il était juge. C'est la première
23 fois que j'entends parler de cela.
24 Q. Vous avez oublié, vous avez oublié de façon intentionnelle, ou peut-
25 être que vous avez oublié que le 8 mai, le juge Goran Zekic a été tué dans
26 une embuscade, alors qu'il tentait de trouver une solution pour que les
27 Serbes et les Musulmans se réconcilient.
28 R. Alors, écoutez, c'est la première fois que je n'entends parler, parce
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1 que je ne pouvais pas écouter les informations, le 9 mai.
2 Q. Mais ceci a été couvert par tous les médias. Il a été tué ce jour-là,
3 et vous ne le saviez pas.
4 R. Non, je ne le savais pas.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces deux
6 séquences vidéo au dossier, s'il vous plaît.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que ces images ont été
8 filmées récemment par l'équipe de la Défense.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors je parle en mon propre nom. Il y a
11 un fondement suffisant pour verser au dossier la première séquence. Mais
12 qu'en est-il de la seconde, quel est l'intérêt. Le témoin n'a rien confirmé
13 au sujet de cette séquence vidéo là.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous voyons les maisons serbes dévastées et il
15 prétend que ceci n'est pas l'œuvre des Musulmans. En ce moment, ce village
16 est en cours de reconstruction. Je suis sûr que ce n'est ni la JNA ni les
17 Serbes qui ont brûlé ce village, et le témoin a dit que certains Musulmans
18 de Hranca ont fui pour s'installer dans son village; c'est exact, n'est-ce
19 pas ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Cet incident ne s'est pas déroulé comme cela est dit dans sa
23 déposition. La colonne a plutôt été attaquée, et des maisons serbes ont été
24 détruites.
25 R. Ceci n'est pas exact.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous confirmer, Monsieur Talovic,
27 que les maisons, maisons qui ont été détruites étaient des maisons serbes ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas confirmer cela, Madame et
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1 Messieurs les Juges.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Je vais vous poser cette question-ci, Monsieur le Témoin : Des maisons
4 qui ont deux toits appartiennent en général aux Serbes, et les maisons qui
5 ont quatre toits appartiennent en général aux Musulmans ?
6 R. Je n'ai jamais prêté attention à cela.
7 Q. La maison que nous avons vue était une maison serbe à Hranca ?
8 R. Il aurait pu s'agir d'une maison musulmane également.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Je ne vois pas quel est le fondement qui
11 pourrait être invoqué eu égard à la deuxième séquence vidéo. Le seul
12 élément dont nous disposons indique -- ce que ce film est censé
13 représenter, est quelque chose qui émane de la bouche du Dr Karadzic.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'allons admettre que la première
16 séquence vidéo.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce D1644, Madame, Messieurs
18 les Juges.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Pouvons-nous convenir que votre village, le village de Glogova se
22 trouve sur la route Bratunac-Konjevic Polje, et à droite de la route ?
23 R. Il y a une route goudronnée qui traverse Glogova, à 3 ou 4 kilomètres.
24 Glogova se trouve de part et d'autre de la route.
25 Q. L'essentiel du village se trouve à droite.
26 R. Eh bien, je dirais que le rapport est de 60 à 40, mais tout ceci fait
27 partie de la communauté locale de Glogova.
28 Q. Merci. Pouvons-nous maintenant afficher le 1D4081 ? Malheureusement,
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1 nous ne disposons pas de traduction correspondante encore, mais le témoin
2 comprend notre langue. 1D4081, oui.
3 Il s'agit d'une note officielle qui date de 3003, dans laquelle il est y
4 est dit qu'un homme est arrivé, qu'il s'est présenté, le nom est
5 confidentiel. Et il a dit que pendant la guerre, il faisait partie de
6 l'unité de Naser Oric, dans le secteur de Srebrenica, et il sait comment un
7 certain nombre de Serbes avaient été tués dans ce secteur. Il poursuit en
8 disant, tout d'abord au début de la guerre, en 1992, une embuscade a été
9 posée sur la route de Srebrenica à Zalazje, et Goran Zekic, le député, a
10 été tué. Ceci a été mené par le fils de Redzo Salihovic, de Bratunac, sur
11 ordre de Naser Oric. Il parle de Zulfo Tursunovic,¸
12 Et ensuite vers le bas, il dit qu'en 1992 j'étais dans le village de
13 Sandici, dans la municipalité de Bratunac, où nos forces tenaient les
14 barrages le long de la route de Bratunac, Konjevic Polje. Nos forces
15 signifient nos forces musulmanes, parce qu'il est Musulman. En mai et juin,
16 est-ce que nous pourrons avoir la page suivante, s'il vous plaît, lorsqu'un
17 véhicule est tombé dans une embuscade, et certaines personnes se trouvaient
18 à l'intérieur du véhicule. Milutin Milosevic du poste de police de Bratunac
19 a été fait prisonnier. Naser Oric a été blessé à cet endroit, et en
20 conséquence, Naser Oric a torturé Milutin qui était blessé. Il a dit qu'il
21 a donné des coups de pied à Milutin et que pour finir, il l'a tué à bout
22 portant. Mais avant d'être tué, il a été emmené à Konjevic Polje, où il a
23 été torturé, qu'on l'a découpé à coups de couteau.
24 Connaissez-vous le policier Milutin Milosevic du poste de police de
25 Bratunac ?
26 R. Je ne connaissais que quelques policiers.
27 Q. Avez-vous entendu parler de cette capture et du meurtre de cet officier
28 de police -- de cet assassinat ?
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1 R. C'est la première fois que j'en entends parler.
2 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant afficher deux pages plus loin, s'il
3 vous plaît, et je souhaite savoir si vous avez entendu parler de cela.
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je me demande, en réalité, pourquoi
5 d'emprunter cette voie-là avec ce type de document. C'est quelque chose
6 dont nous avons parlé à maintes, et maintes, et maintes reprises. Nous ne
7 connaissons pas la source de ce document. Ce qui est dactylographié sur la
8 première page semble indiquer que cela émane du MUP de Bratunac, mais si
9 vous regardez de près, on a l'impression que ceci a été photocopié et qu'il
10 s'agit d'un livre.
11 Alors, la question qui se pose, si s'agit-il vraiment de la déposition du
12 témoin ou d'éléments de témoignage, soit. Mais je me demande simplement si
13 cela est pertinent, si ce n'est pas le cas.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord, Madame
15 Edgerton.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux répondre en quelques mots ?
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'avez pas donné de date eu égard à
18 ces incidents lorsque vous avez posé la question au témoin, et nous avons
19 une déposition du témoin qui indique qu'il a survécu à une scène de
20 massacre. Quelle est la pertinence eu égard à sa déposition, pour autant
21 qu'il y en ait une, Monsieur Karadzic ? Alors, avant que nous poursuivions,
22 nous parlons de quelle date, ici ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce témoin, un Musulman, est venu à Bratunac
24 pour remettre une déclaration -- faire une déclaration à la police, et nous
25 pouvons découvrir quel est son nom, et il évoque des événements qui se sont
26 déroulés le 8 mai, et l'incident qui a eu une incidence forte sur ce témoin
27 est un incident qui s'est déroulé le 9 mai. Nous voyons comment les
28 différents événements ont évolué et les rapports entre les Serbes et les
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1 Musulmans locaux, et personne de l'extérieur de ce secteur n'a eu une
2 quelconque influence sur ce qui se passait dans cette région. Ils se sont
3 entre-tués, et tout a commencé avec le fait qu'ils aient commencé à ériger
4 des barricades, à tendre des pièges, et avec le meurtre d'un juge serbe le
5 jour précédent.
6 Tout ceci s'est passé dans un endroit qui était relativement petit, et les
7 Juges de la Chambre doivent être au courant de ceci, parce qu'il s'agit
8 d'événements qui sont fort connus, puisqu'ils ont fait la couverture dans
9 les médias.
10 Si le témoin refuse de dire quoi que ce soit à ce sujet, cela est
11 également évocateur, parce que cela indique quelque chose.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je ne sais rien à ce sujet, et je
13 n'en ai jamais entendu parler. Je n'ai jamais -- je n'avais pas entendu
14 parler de cela du tout.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez moins de
16 dix minutes pour conclure votre contre-interrogatoire.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Vous avez évoqué un voïvode, à savoir que ces Serbes locaux qui vous
19 ont fait prisonnier -- et bien, tout d'abord, veuillez me dire, Monsieur le
20 Témoin, à quel moment avez-vous creusé les tranchées à Glogova ?
21 R. Il ne s'agissait pas d'une tranchée. Il s'agissait d'une crique dans
22 laquelle nous nous sommes réfugiés.
23 Q. N'avez-vous pas dit que vous vous étiez cachés dans un endroit
24 souterrain ?
25 R. Alors, ceci se trouvait sous mon champ, la prairie, à 150 mètres de là,
26 et il y avait des arbres à cet endroit, et il y avait des sous-bois, et
27 nous nous sommes cachés à cet endroit -- nous avons rampé jusque-là.
28 Q. Dans votre déclaration de l'an 2000, vous évoquez un certain nombre de
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1 personnes qui ont participé à ces événements le jour J. Vous avez évoqué
2 des Serbes comme Dragan Stevic, Najdan Mladjenovic, et Momir Nikolic; est-
3 ce exact ?
4 R. Oui.
5 Q. Dans votre première déclaration, vous n'avez même jamais évoqué le nom
6 de Momir Nikolic, n'est-ce pas ?
7 R. Ecoutez, je ne sais pas si c'était utile de citer son nom, car lorsque
8 nous avons été emmenés au supermarché, Momir Nikolic était là.
9 Q. Vous vous êtes souvenu de ceci après-coup, en l'an 2000, lorsque
10 l'Accusation vous a posé une question dessus ?
11 R. Ecoutez, je ne sais pas. Je l'ai sans doute évoqué, peut-être que ceci
12 n'a pas été consigné, mais il est clair que Momir Nikolic était là. Cela ne
13 fait pas l'ombre d'un doute.
14 Q. Mais qui des deux était plus important, le voïvodat Mladjenovic, ou
15 Nikolic ? Nikolic n'était-il pas suffisamment important pour que vous ne
16 puissiez pas vous rappeler qu'il était là ?
17 R. C'était Nikolic.
18 Q. Mais comment se fait-il que vous vous êtes souvenu du voïvode mais pas
19 de Nikolic ?
20 R. Parce que Mladjenovic est arrivé de Kravica. Il s'est mis en contact
21 avec Nikolic, et il nous a mis de côté -- ou plutôt, il nous a pris à part,
22 quatre ou cinq d'entre nous, et puisqu'il ne pouvait pas nous faire monter
23 tous à bord du véhicule, Mustafa Olic et moi-même --
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Talovic, les interprètes n'ont
25 pas saisi les noms que vous venez d'évoquer. Est-ce que vous pourriez
26 reprendre votre réponse ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'il nous a été donné l'ordre de nous
28 asseoir à bord du véhicule, Mustafa Golic, Sejid Ibisevic, et Almaz Talovic
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1 se sont assis alors que moi et une autre personne, nous ne pouvions puis
2 entrer dans le véhicule. Il n'y avait plus assez de place. Nous sommes
3 restés debout à côté de la voiture.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. C'est quelqu'un qui les a choisis, n'est-ce pas ?
6 R. Oui. C'était M. Mladjenovic. Il est venu et il a simplement dit : "Toi,
7 toi, Toi." Il ne donnait pas de noms. Nous étions cinq, et il nous a tous
8 indiqués.
9 Q. Est-ce que ce Golic était quelqu'un d'important, à l'époque, et est-ce
10 qu'il l'a été ultérieurement au sein des forces armées ?
11 R. Non.
12 Q. Vous ne vous êtes pas souvenu, à ce moment-là, ou peut-être n'avez-vous
13 pas vu M. Deronjic à cette occasion.
14 R. Etait-il là, m'en suis-je souvenu ou non, à vrai dire, à 20 mètres de
15 nous - c'était la distance qui nous séparait de la route - il y avait
16 quelque 500 Serbes, l'ensemble de ceux qui nous avaient encerclés -- nous
17 avaient fait monter à bord du véhicule ce jour-là.
18 Q. Vous avez dit que vous ne l'avez pas vu ce jour-là, n'est-ce pas ?
19 R. Je ne sais pas. Je sais simplement que Momir était là et que Deronjic
20 était certainement le plus important. Il était à un niveau supérieur.
21 Q. Oui, mais vous dites dans le document numéro 22268 de la liste 65 ter,
22 au paragraphe 3, que vous ne l'avez pas vu sur place, n'est-ce pas ?
23 R. Si c'est ce que j'ai indiqué, c'est comme ça que ça s'est passé. Je
24 maintiens ce que j'ai dit dans ma déclaration.
25 Q. Je vous remercie. Alors, est-ce que vous savez combien de Serbes de
26 Bratunac ont été tués dans cette guerre ?
27 R. Pour moi, cette question n'a aucun sens.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons examiner rapidement le
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1 document 2135.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Juste pour le compte rendu d'audience, le
3 témoin a dit au paragraphe 8 de la pièce P3188 ne pas avoir vu Deronjic à
4 la date du 9 mai.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Pouvons-nous donc afficher le document
6 2135 ?
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Savez-vous, Monsieur Talovic, que 90 % des combattants serbes de la
9 Brigade de Bratunac a péri dans les villages serbes en assurant leur
10 défense ?
11 R. C'est quelque chose de nouveau pour moi.
12 Q. Voyez cette liste qui commence à partir du numéro 152, ce document se
13 termine avec un numéro 487 dans cette même liste. Un numéro supérieur,
14 même, parce qu'à la main, on a rajouté des lignes. Donc, vous voyez, à
15 chaque fois, il est indiqué "odbrana [phon], odbrana," donc, "défense,
16 défense, défense" entre parenthèses. Vous voyez le nombre de Serbes qui ont
17 été tués dans les villages serbes; comment expliquez-vous cela ?
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, c'est une totale
19 perte de temps que de procéder ainsi après avoir entendu de la bouche du
20 témoin qu'il n'avait aucun élément sur ce point. Quel est l'intérêt que de
21 poursuivre cette série de questions ?
22 Il est temps pour vous de conclure.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Monsieur le Témoin, qui était présent sur place ce jour-là ? Parmi les
26 Serbes, qui était présent à Glogova ?
27 R. Tous étaient présents, tous les Serbes de la municipalité de Bratunac
28 qui étaient là. Tous étaient là.
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1 Q. Les Serbes du cru -- les Serbes locaux ?
2 R. J'ai dit que l'armée était là, la JNA, évidemment, et l'armée de la
3 Republika Srpska.
4 Q. Est-ce que vous savez que le 9 mai, l'armée de la Republika Srpska
5 n'existait pas ?
6 R. Je ne sais pas, mais je sais qui m'a pourchassé et m'a arrêté pour me
7 tuer.
8 Q. Quand vous avez été arrêté, on a retrouvé sur vous ce pistolet que vous
9 aviez, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Lorsque vous avez été arrêté, on vous l'a confisqué ?
12 R. Oui.
13 Q. Quelle était l'unité de la JNA alors présente à Glogova ?
14 R. Il n'y a que dans les médias --
15 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Messieurs
16 les Juges, est-ce que l'on pourrait demander à M. Karadzic de laisser la
17 possibilité aux interprètes de finir l'interprétation avant d'enchaîner sur
18 la question suivante ?
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous étiez en train de répondre,
20 Monsieur le Témoin, à la question portant sur l'identité de l'unité
21 présente à Glogova à ce moment-là.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai entendu simplement à la radio qu'il
23 s'agissait du Corps de Novi Sad. Je ne sais rien d'autre.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Sur quelle station de radio ?
26 R. Radio Loznica.
27 Q. Monsieur le Témoin, c'était le mois d'août là-bas, à l'échelon local,
28 que vous avez porté la main les uns sur les autres et versé le sang, et
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1 tout ceci a été commis par des gens du cru, n'est-ce pas, les uns contre
2 les autres ?
3 R. Moi, jusqu'au 9 mai, je m'occupais simplement de mes affaires et nous
4 nous occupions simplement de nos affaires. Moi, je semais du blé, je me
5 rappelle, le 8 mai, je semais -- j'étais dans les semis.
6 Donc, pour ce qui est de savoir qui a commis des meurtres, vous,
7 Karadzic, vous devriez savoir ceci bien mieux.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois exprimer ici tout le regret que j'ai,
9 Madame et Messieurs les Juges, de ne pas avoir reçu le temps qui aurait été
10 nécessaire pour jeter davantage de lumière sur ces événements et sur leurs
11 causes. J'estime que ceci compromet la qualité du témoin ainsi que
12 l'intégrité de l'ensemble de la procédure.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est là une question dont seule la
14 Chambre peut être saisie.
15 Madame Edgerton, avez-vous des questions supplémentaires ?
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Non, Madame et Messieurs les Juges.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci met un terme à votre déposition,
20 Monsieur Talovic. Je vous remercie vivement de vous être déplacé pour vous
21 êtes rendre à La Haye et déposer devant ce Tribunal. Vous êtes à présent
22 libre de repartir, et nous vous souhaitons bon voyage de retour.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lever l'audience. Il n'est
25 pas judicieux de poursuivre pour les cinq minutes qui nous restent.
26 Donc, demain, nous poursuivrons à 14 heures 15.
27 [Le témoin se retire]
28 --- L'audience est levée à 18 heures 55 et reprendra le mardi 23 août 2011,
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1 à 14 heures 15.
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