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1 Le jeudi 24 novembre 2011
2 [Audience publique]
3 [Le témoin vient à la barre]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.
7 Monsieur Nicholls.
8 M. NICHOLLS : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, pourrions-
9 nous passer quelques instants à huis clos partiel. Il n'est pas nécessaire
10 de faire sortir le témoin. Je souhaite simplement porter à votre attention
11 une question qui n'a rien à voir avec le présent témoin.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous passer brièvement à huis
13 clos partiel.
14 [Audience à huis clos partiel]
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 [Audience publique]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Brown.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellence.
3 Bonjour à tous.
4 LE TÉMOIN : EWAN BROWN [Reprise]
5 [Le témoin répond par l'interprète]
6 Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]
7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Brown.
8 R. Bonjour, Monsieur Karadzic.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je souhaiterais simplement
10 m'adresser à vous pour commencer très brièvement. Pour commencer, je compte
11 sur votre compréhension, même pour un professionnel, interroger trois
12 témoins en une seule journée ce serait beaucoup a fortiori pour un amateur.
13 Donc je demande à ne pas avoir à interroger un troisième témoin
14 aujourd'hui. Si bien que cela nous permettrait peut-être d'économiser un
15 peu de temps. Et je souhaiterais que l'on puisse réallouer ce temps au
16 témoin qui est maintenant dans le prétoire. Deuxièmement, concernant ce
17 rapport il comporte 500 paragraphes, moi, on m'a accordé 480 minutes. Donc
18 même si M. Brown avait répondu par oui ou par non, je n'aurais pas eu la
19 possibilité de couvrir l'ensemble de ce contenu. C'est pourquoi je vais
20 devoir passer très rapidement sur tous ces chapitres et ces paragraphes en
21 extrayant de façon assez parcimonieuse un exemple ou un sujet par-ci, par-
22 là parce que je n'ai pas d'autre choix. Je vous remercie.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste pour être très clair, quel est le
24 troisième témoin dont vous parlez ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, je pense qu'un troisième témoin est
26 prévu si jamais nous en finissons avec le Témoin KDZ039.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre en
28 considération votre demande.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Monsieur Brown, je vais maintenant vous poser des questions qui se
4 limiteront à celles pour lesquelles --
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger…
8 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre a décidé de faire droit à la
10 demande de l'accusé, qui semble plutôt justifiée. Donc, si vous retenez le
11 dernier témoin prévu pour aujourd'hui, en fait, vous pourriez le libérer.
12 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
14 Nous allons siéger également cinq jours la semaine prochaine.
15 Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur Brown, je vais vous interroger concernant ce sur quoi vous
18 vous êtes fondé dans votre travail, et vous pourriez toujours répondre par
19 oui ou par non. Alors, au paragraphe 2.73, vous avez abordé les similitudes
20 et le modèle de comportement du 1er Corps de Krajina dans les municipalités
21 de la Krajina. Avez-vous déterminé dans quelles municipalités de Krajina il
22 ne s'est rien passé et dans quelles municipalités de Krajina il ne s'est
23 rien produit qui soit comparable avec le modèle que vous évoquez ?
24 R. Eh bien, concernant les opérations de désarmement que nous avons
25 examinées au cours de ces derniers jours, j'ai certainement observé des
26 similitudes entre les municipalités de Prijedor, Sanski Most, Novi, Kljuc,
27 Kotor Varos, même si les événements s'y sont produits un peu plus tard dans
28 cette dernière municipalité. Il y avait des mouvements sortants, c'est ce
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1 que j'observe à partir des documents, et ce, à Banja Luka, bien qu'il y ait
2 pas eu le type d'attaques que j'ai pu relever dans d'autres municipalités.
3 Une des complications possibles était que la zone de responsabilité du 1er
4 Corps de Krajina s'étendait --
5 Q. Excusez-moi, mais ce que je vous demande, c'est simplement de me dire
6 si vous avez pu relever dans combien de municipalités il ne s'est rien
7 produit et dans combien de municipalités il ne s'est produit rien de
8 significatif, en tout cas, ce qui s'est produit était plus anodin, disons.
9 Et troisièmement, dans combien de municipalités le modèle que vous mettez
10 en avant était applicable. Ou bien l'avez-vous appliqué à toutes les
11 municipalités ?
12 R. Eh bien, je vous disais que l'une des difficultés que rencontrait le 1er
13 Corps était que sa zone de responsabilité s'étendait à l'été 1992. Donc, la
14 situation des municipalités situées dans le corridor était quelque peu
15 différente de celle que je viens juste d'évoquer. Et pour revenir au
16 rapport d'analyse sur le degré de préparation au combat, il y était indiqué
17 qu'en substance il y avait deux phases : une première phase au cours de
18 laquelle le contrôle des municipalités a été consolidé, sécurisé, et une
19 seconde phase au cours de laquelle des opérations de plus grande envergure
20 avaient lieu. Il y avait des documents émanant de certaines municipalités
21 dans lesquelles ce schéma ne s'appliquait pas nécessairement.
22 Q. Je vous remercie. Alors, que penserez-vous si je vous dis qu'ici même
23 un témoin appartenant au groupe ethnique musulman a déclaré il y a quelques
24 jours que là où ils étaient moins de 50 % de la population, il n'y avait
25 aucun problème, alors que là où ils étaient environ 50 %, c'est-à-dire
26 Kljuc, Sanski Most, Prijedor, il y avait des problèmes ? Qu'en pensez-vous
27 ? Il a énuméré les municipalités dans lesquelles il n'y avait eu aucun
28 problème.
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1 R. Et de quelles municipalités ce témoin parlait-il, Monsieur Karadzic ?
2 Q. Monsieur, si vous êtes d'accord, dans la Krajina de Banja Luka, il y
3 avait 17 municipalités. Si l'on y ajoute les municipalités du corridor,
4 Derventa, Doboj, et cetera, nous obtenons un chiffre de plus de 20
5 municipalités. Mais dans le premier groupe, celui des 17 municipalités,
6 avant l'extension de la zone de responsabilité du 1er Corps de Krajina,
7 votre modèle était-il applicable à l'ensemble de ces 17 municipalités, est-
8 ce que vous avez calculé dans combien de municipalités il n'y avait
9 absolument aucun problème et dans combien de municipalités on a constaté
10 des problèmes d'une gravité moindre, et cetera ?
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
12 M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre. Ce n'est pas une
13 objection. Mais pourrions-nous avoir une citation pour le témoin, citation
14 de la page à laquelle se réfère notamment M. Karadzic. Enfin, la référence,
15 plutôt, que fait M. Karadzic à la page précédente, ligne 20 du compte
16 rendu. Cela pourra nous être communiqué plus tard, mais je pensais au
17 témoin.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
19 Monsieur Brown.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas sûr quant à la question de
21 savoir si l'ensemble de ces 17 municipalités étaient comprises dans la zone
22 du 1er Corps de la Krajina. Je devrai vérifier cela. J'ai procédé à un
23 échantillonnage dans cette zone de responsabilité du 1er Corps de la
24 Krajina. Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous voulez dire lorsque
25 vous parlez d'événements de gravité moindre ou d'un modèle atténué. Ce que
26 je sais, c'est que dans les municipalités que j'ai étudiées, on a une
27 correspondance certaine avec le modèle, celui des opérations de désarmement
28 et de prise de contrôle. Il est possible que dans certaines des autres
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1 municipalités où les Serbes représentaient une majorité importante, il n'y
2 avait pas de besoin d'appliquer ce schéma précis, en tout cas pas de façon
3 stricte, mais même dans les municipalités comme Celinac, par exemple, où je
4 crois que les Musulmans étaient peu nombreux, peut-être 10 % ou un peu
5 moins de 20 %, on trouve des références dans la documentation du 1er Corps
6 de la Krajina à des opérations et des attaques, et nous en avons parlé.
7 Donc, il est bien possible qu'il y ait eu des différences dans certaines
8 municipalités à cause de la composition ethnique, mais il y avait le même
9 désir de contrôle de ces territoires et municipalités dans la zone couverte
10 par la RAK.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Merci. Mais je vais vous rappeler qu'à Celinac, il n'y avait pas
13 d'opérations. Il y avait des incidents, dans le village de Bastasi. Est-ce
14 que vous conviendrez qu'il n'y a eu d'opérations que dans les municipalités
15 où il y avait les forces armées musulmanes, là où elles avaient commencé en
16 tuant des Serbes, et ce, en profondeur sur le territoire couvert par les
17 forces serbes; oui ou non ?
18 R. Non. Je ne conviens pas de cette caractérisation.
19 Q. Je vous remercie. Si je vous dis que nous avons 17 municipalités plus
20 quatre ou cinq dans le corridor et qu'on arrive à 22 ou 23 municipalités en
21 tout qui se trouvent dans la zone couverte par le Corps de la Krajina alors
22 que vous, par ailleurs, vous n'êtes capable d'énumérer que quatre ou cinq
23 municipalités qui correspondent à votre modèle dans la vallée de la Sava,
24 que diriez-vous ? Il s'agit de Kljuc, Sanski Most, Prijedor et Novi, qui
25 étaient dans la vallée de la Sana, objectifs stratégiques du 5e Corps
26 musulman de Bihac. Ça nous a été confirmé par un témoin musulman. Alors,
27 est-ce que vous reconnaissez cela ou bien continuez-vous à affirmer que
28 quelle que soit la concentration de la population musulmane, quelle que
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1 soit la municipalité, ce sont les Serbes qui ont attaqué ?
2 R. Monsieur Karadzic, je ne défendrai pas cette position sur la base des
3 documents que j'ai étudiés. Ce n'était pas un rapport chargé d'examiner
4 chaque municipalité individuelle et chaque localité peuplée de Serbes dans
5 cette zone. Ce que je peux dire certainement, c'est qu'au mois de mai et au
6 mois de juin, les municipalités que j'ai étudiées et pour lesquelles j'ai
7 disposé d'un grand nombre de documents du 1er Corps de Krajina sont des
8 municipalités dans lesquelles on a assisté à ce type d'attaques, et on a vu
9 également un très grand nombre de personnes quitter ces municipalités au
10 cours des semaines et des mois suivants. Le corridor représente une
11 situation légèrement différente parce que -- je crois que les Croates
12 avaient pris le contrôle de certaines des municipalités du corridor à
13 partir de la fin mars, et ensuite également. Cependant, après les
14 opérations du 1er Corps de la Krajina de l'été 1992, je crois que le
15 contrôle a été repris et qu'un grand nombre de Croates de ces municipalités
16 a fui. La situation dans les municipalités du corridor est donc légèrement
17 différente, mais il me semble que le résultat est semblablement le même.
18 Q. Mais saviez-vous que les Serbes étaient la majorité, qu'elle soit
19 relative ou absolue, et à Derventa, et à Doboj, et à Modrica, alors qu'ils
20 n'étaient pas majoritaires à Odzak et à Orasje, est-ce que vous savez que
21 nous avons réintégré Odzak pacifiquement après la guerre ?
22 R. Je sais que certaines municipalités du corridor étaient des
23 municipalités où les Croates ou en tout cas des non-Serbes étaient
24 majoritaires, alors que dans d'autres municipalités les Serbes étaient
25 majoritaires. Par exemple Doboj, les Serbes n'y étaient pas majoritaires,
26 et c'était le cas également dans toute une série d'autres municipalités.
27 Alors ce n'est pas une zone dans laquelle j'ai étudié la composition
28 ethnique de la population -- enfin, en tout cas, je ne l'ai pas fait pour
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1 Doboj, et ce n'était pas une zone couverte en particulier par le rapport.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que vous ayez répondu
3 à la question, Monsieur Brown. La question était la suivante, je cite :
4 "Est-ce que vous saviez que nous avions réussi à réintégrer pacifiquement
5 Odzak après la guerre ?"
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas sûr de bien comprendre ce que
7 M. Karadzic entend par pacifiquement. S'agissait-il d'un volet des accords
8 de Dayton, Odzak était-il donc censé être restitué sous contrôle de la
9 Republika Srpska et dans le cadre du territoire de cette dernière. Cela a
10 très bien pu être le cas, parce qu'il s'agissait d'une majorité serbe dans
11 cette municipalité. Ou alors, peut-être était-ce au titre des accords de
12 Dayton.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Alors peut-être y a-t-il eu problème de traduction ou c'est moi qui me
15 suis mal exprimé. Nous contrôlions Odzak, les Croates y étaient
16 majoritaires, et après la guerre nous l'avons restitué aux Croates.
17 R. Eh bien, Monsieur Karadzic, cela a peut-être été le cas. Mais je sais
18 que les forces de la VRS et le 1er Corps de la Krajina ont pris le contrôle
19 du territoire pendant l'été, et ceci a très bien pu faire partie des
20 dispositions de l'accord de Dayton, ce retour d'une localité sous contrôle
21 croate, ou en tout cas hors du contrôle des Serbes. J'aurais plutôt
22 tendance à imaginer que cela faisait partie des accords de Dayton.
23 Q. Je vous remercie. Mais en fait, en tant que soldat vous conviendrez
24 qu'on ne restitue pas un territoire avant la conclusion d'un accord de
25 paix, n'est-ce pas ?
26 R. Je crois que c'est une question assez générale, et je ne suis pas sûr
27 de pouvoir répondre, que ce soit dans un sens ou dans l'autre. Un
28 territoire peut être restitué pour des raisons militaires, mais il est
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1 évident qu'un territoire peut également être transféré ou restitué en tant
2 que disposition d'un accord négocié. Il peut faire partie d'une zone tampon
3 ou être placé sous le contrôle de forces de maintien de la paix. Donc, je
4 ne suis pas tout à fait sûr de bien être en mesure de vous répondre de
5 façon simple.
6 Q. Merci. Je voudrais que vous examiniez maintenant vos paragraphes 2.88
7 et 2.89. Vous dites au 2.89 que manifestement le général Talic n'avait pas
8 fait grand-chose en dehors du rapport qu'il a soumis -- ou plutôt, des deux
9 rapports de combat qu'il a soumis au sujet dans le cadre desquels il
10 parlait d'un incident. Moi je ne parlerais pas d'incident, mais plutôt du
11 crime et de la tragédie de Vlasic. Et vous, maintenant, vous écrivez dans
12 ce paragraphe, n'est-ce pas, que d'après vous Talic aurait dû en faire
13 plus, n'est-ce pas ? Paragraphe numéro 2.89.
14 R. Oui, je crois que, enfin potentiellement, il aurait dû en faire plus.
15 Je ne dis pas qu'il n'a rien fait parce qu'il a soumis des rapports le long
16 de la chaîne d'envoi d'information, mais il me semblait qu'il mettait en
17 avant le fait qu'aucun soldat n'avait été impliqué. En fait, je crois qu'il
18 y avait beaucoup plus que le général Talic aurait pu faire. Mais je ne dis
19 pas qu'il n'a rien fait parce qu'il est évident que dans ces événements il
20 y a eu un certain nombre d'auteurs identifiés par les documents du Corps de
21 la Krajina, et la police a été identifiée comme étant -- des membres de la
22 police étaient certains des auteurs, en fait. Donc, je conviens avec vous
23 de cette caractérisation de tragédie, c'en était une, c'était manifestement
24 un incident très significatif avec un grand nombre de victimes tuées sur le
25 mont Vlasic et précipitées dans cette fosse. Mais compte tenu de la gravité
26 de cet incident, je me serais attendu à ce que le général Talic en fasse
27 plus que juste envoyer un rapport.
28 Q. Mais êtes-vous d'accord pour dire que le général Talic, tout comme le
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1 colonel Peulic, ont enquêté pour vérifier si l'armée était mêlée à cela et
2 qu'ils ont constaté que ce n'était pas le cas, n'est-ce pas ?
3 R. A partir de la déclaration aux médias, on peut voir qu'il a déclaré que
4 l'armée avait procédé à une enquête pour vérifier si certains de ces
5 membres avaient ou non été impliqués et il affirme que cela n'était pas le
6 cas.
7 Q. Merci. Est-ce que vous savez que l'armée n'exerce aucune compétence à
8 l'égard de la police civile et qu'il ne pouvait rien faire d'autre que
9 d'informer ces supérieurs hiérarchiques ?
10 R. Eh bien, en tant qu'ancien soldat je ne peux dire la chose suivante à
11 partir des documents que j'ai pu lire, oui, il a envoyé des informations
12 sous forme de rapports. Mais j'affirme qu'il aurait pu faire davantage --
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Brown, à votre avis, qu'aurait-
14 il dû faire de plus ou qu'aurait-il pu faire de plus, à part l'envoi de
15 rapports ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, il aurait pu sécuriser le site. Il
17 aurait pu mener lui-même une enquête approfondie afin de déterminer qui
18 avait commis cela et dans quelles circonstances. Il aurait très bien pu
19 avoir recours aux ressources de la police militaire en matière d'enquête,
20 ressources qui étaient les siennes, afin de mener une enquête extrêmement
21 approfondie, avant de passer la main aux autorités civiles pour que ceci
22 fasse l'objet d'une enquête plus large.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais après avoir constaté que les
24 auteurs étaient des policiers, il aurait, selon vous, eu les compétences
25 nécessaires pour enquêteur sur des membres de la police, c'est ce que vous
26 nous dites ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas nécessairement au fait de la
28 législation applicable, mais manifestement il a appris très rapidement qui
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1 étaient les auteurs --
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais --
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Et le colonel Peulic était le commandant de
4 cette zone qui, en substance, était une zone militaire. Et je crois
5 également que le convoi traversait la zone du commandant du groupe
6 opérationnel. Par conséquent, je ne pense pas qu'il était possible
7 d'exclure complètement l'armée. En revanche, quant à la question de savoir
8 si on a identifié clairement les auteurs comme étant des policiers, je
9 crois que ceci n'est pas absolument clair. Et je ne suis pas entièrement au
10 fait des conditions -- du contexte juridique dans lequel le général Talic
11 aurait été contraint d'agir pour ce qui est de poursuivre des policiers.
12 Alors compte tenu du groupe nombre de personnes impliquées dans ces
13 événements, et de la connaissance quasiment instantanée qui a été celle du
14 général Talic quant à la survenue de ces événements, je pense que, et c'est
15 ce que j'ai mis dans mon rapport, il s'est contenté de faire le minimum.
16 Mais je pense qu'il aurait pu faire plus.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
18 Monsieur Karadzic.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur Brown, paragraphe 2.88, nous voyons ce que Peulic a proposé.
21 Est-ce que vous savez que Peulic a sécurisé les lieux et que l'ensemble de
22 la police civile, c'est-à-dire le CSB ainsi que la police civile ont
23 immédiatement dépêché des enquêteurs, ils se sont immédiatement joints à
24 l'enquête, et que Talic n'avait rien à faire là-bas ? Le saviez-vous ?
25 R. Eh bien, non.
26 Q. Merci. Alors au paragraphe 2.140, vous dites, par exemple -- vous
27 parlez, par exemple, de politique d'expulsion, de politique de transfert de
28 population. Alors est-ce que vous avez également retrouvé mon fax, le
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1 message que j'ai envoyé dans lequel j'interdisais le déplacement de civils
2 ?
3 R. A partir des documents que j'ai pu examiner, j'ai considéré que ceci
4 n'était pas évident. Si vous voulez bien me présenter cela, je suis sûr que
5 j'aurai la possibilité de le consulter utilement.
6 Q. Je peux vous en présenter un de ces documents.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche le document de la
8 liste 65 ter numéro 1397. Document numéro 13937 de la liste 65 ter. Ce
9 n'est pas celui-là. C'est bien celui-ci.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Je vais vous en donner lecture tant que la traduction ne se sera pas
12 affichée. Voici ce qui est dit, je cite : "Département de la RDB de
13 Mrkonjic Grad". Je cite :
14 "Nous vous faisons suivre intégralement la dépêche du département --"
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez reprendre.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
17 Donc, en titre, nous lisons : "Département du RDB de Mrkonjic Grad".
18 Je cite le texte :
19 "Nous vous faisons suivre dans son intégralité la dépêche du RDB de
20 Sarajevo III, Direction numéro," et cetera, et cetera, "qui concerne les
21 déplacements de la population civile à partir du territoire de la
22 municipalité de Srbobran." C'est le nom que nous donnions à Donji Vakuf. Et
23 ils font suivre, en fait, mon télégramme. Je cite :
24 "Nous vous transmettons son intégralité, l'information concernant le
25 déplacement des populations civiles du territoire de la municipalité de
26 Srbobran, qui a été envoyée au président de la Republika Srpska, M. Radovan
27 Karadzic, par le président Nedeljko Ninkovic, ce résident de la
28 municipalité de Srbobran, et le député de l'assemblée nationale de la
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1 Republika Srpska, Nikola Kisin."
2 Dont le contenu est le suivant :
3 "Monsieur le Président, nous vous avons déjà informé précédemment des
4 déplacements de population à partir du territoire de cette municipalité.
5 Ensuite, nous avons reçu un ordre sous la référence" telle et telle
6 "concernant une interdiction de déplacer la population à partir de notre
7 municipalité, ordre auquel nous nous conformons strictement. Nous vous
8 avons fait savoir oralement (député) que le chef du SJB de Srbobran avait
9 persuadé la population de quitter le territoire et nous avons fait savoir
10 quelles en étaient les modalités et qui l'avait reconnu, cela.
11 "Nous avons averti le commandant de la 30e Division, le colonel Zec,
12 des déplacements et de ceux qui en étaient responsables."
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pourriez-vous
14 reprendre. Pourriez-vous reprendre à partir de la partie que les
15 interprètes n'ont pas saisie.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] "Nous avons informé le commandant Zec de la 30e
17 Division de ce déplacement et qui en était à l'origine. Depuis cette date,
18 les choses ne se sont pas améliorées. En somme, toute la région de Turbet
19 et Golos ont été vidées. Il y a encore quelques cas particuliers de
20 personnes qui quittent la région de Srbobran et certains laissez-passer ont
21 été délivrés par le commandant de la 19e Brigade d'infanterie légère et le
22 lieutenant-colonel Ljubomir Jekic. Nous disposons d'informations indiquant
23 que ces permis ou ces laissez-passer ont été délivrés par le SJB de
24 Srbobran, mais ils n'ont pas été immatriculés à cet endroit. Il y a des
25 postes de contrôle mixtes, tenus à la fois par la police civile et par
26 l'armée, et en deux ans et demi, un nombre important de personnes sont
27 revenues avec leurs effets personnels, mais en traînant les pieds. Nous
28 avons essayé de les avertir, mais ceci n'a servi à rien. Il est donc
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1 important que ces éléments d'information vous soient transmis, et veuillez
2 les transmettre le plus rapidement possible à cette direction."
3 Donc, ici, nous parlons de Srbobran, de Mrkonjic Grad, et ceci a été
4 transmis à Banja Luka et à Sarajevo, et ceci m'est enfin parvenu.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Voyez-vous ce document ? Pendant deux ans et demi, il y a eu des
7 tentatives de faites dans ce sens. On demandait aux gens de partir, ils
8 demandaient à avoir des laissez-passer pour pouvoir partir, alors que nous
9 tentions de les empêcher de les recevoir.
10 R. Ecoutez, je ne peux que me fier à la traduction. Ceci n'est pas très
11 clair à mes yeux, de savoir si on parle des Serbes qui sont à Srbobran ou
12 qui souhaitent fuir la zone de conflit. Je crois que Srbobran et Donji
13 Vakuf se trouvaient juste à l'endroit où il y avait le front. Il se peut
14 que ces personnes dont nous parlons sont des Serbes qui souhaitaient partir
15 et quitter cet endroit, peut-être qu'il s'agit de non-Serbes. Je ne sais
16 pas. Et je ne connais pas, en 1994, la composition ethnique de Srbobran, de
17 cette municipalité. Mais pour l'essentiel, à mon sens, cette région était
18 composée essentiellement de Serbes, et dans la municipalité au sens large
19 de Donji Vakuf, c'était le cas également avant le conflit. Donc, il
20 faudrait que je relise ce document, et il se peut que ce que dit ce texte,
21 eh bien, c'est que nous ne souhaitons pas que les Serbes quittent cette
22 région, et ils souhaitaient partir, peut-être, en raison du conflit qui s'y
23 déroulait, parce que cela devient, dans ce cas, un territoire qui n'est pas
24 peuplé. Peut-être qu'ils parlaient des dernières personnes ou des derniers
25 non-Serbes qui vivaient encore à Srbobran et qui souhaitaient quitter la
26 région, mais je ne sais pas qui souhaitaient se rendre en Bosnie. Je crois
27 que vous parlez de 1994. C'est peut-être une question qui porte plus
28 particulièrement sur cette région-ci. Mais deux ans après 1992, et mon
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1 rapport concerne cette date-là, où un nombre important de non-Serbes
2 avaient quitté de nombreuses municipalités de la Krajina.
3 Q. Mais voyez-vous, l'appartenance ethnique de ces personnes n'est pas
4 mentionnée. On parle simplement de civils, et on parle d'une période de
5 deux ans et demi, ce qui comprend l'année 1992. Dans votre paragraphe 148,
6 vous dites qu'au sein du 1er Corps de la Krajina, il a été rapporté que dans
7 la zone de responsabilité de ce corps, un problème particulier a été
8 signalé, à savoir des Musulmans et des Croates qui demandent à avoir
9 l'autorisation de pouvoir quitter la région dans laquelle ils vivent et
10 s'installer dans les territoires tenus par les forces de la zone de Beretke
11 et du HVO. Et ensuite, on parle de la Croix-Rouge de Mrkonjic Grad, qui
12 négocie avec le HVO de Jajce et des autorités des municipalités voisines
13 qui tentent de conclure un accord.
14 Voyez-vous qu'il s'agit là de Musulmans de Donji Vakuf, qui est une
15 situation analogue à celle de Srbobran, à savoir que les municipalités de
16 part et d'autre de la ligne de conflit, eh bien, que dans ces municipalités
17 de part et d'autre, des efforts avaient été faits pour permettre à la
18 population de traverser la ligne.
19 R. Vous semblez qualifier ce mouvement, ce déplacement en 1992, de
20 déplacement volontaire. Et d'après les documents que j'ai mis en exergue,
21 et d'après certaines citations de mon rapport, ce n'est pas quelque chose
22 que j'ai remarqué. Veuillez vous reporter aux décisions prises par la RAK,
23 à ce que dit le 1er Corps de Krajina : Nous devons œuvrer pour une
24 séparation complète. Regardez les références qui sont faites par le 1er
25 Corps de Krajina : Les personnes ne doivent pas être autorisées à revenir.
26 Regardons les documents, par exemple, de Novi. Un nombre important de
27 personnes qui quittent cette région, à mon sens, et il ne s'agit pas d'un
28 déplacement de la population volontaire et de plein gré. Il s'agissait d'un
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1 nombre important de personnes en un très court laps de temps, d'après les
2 documents que j'ai pu parcourir, et de personnes qui partaient et que l'on
3 contraignait à quitter les territoires que les autorités de la RAK
4 souhaitaient contrôler.
5 Q. Nous allons y venir.
6 L'INTERPRÈTE : Que les autorités de la Republika Srpska souhaitaient
7 contrôler.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
9 document, s'il vous plaît.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ce document a fait l'objet
11 d'une notification au bureau du Procureur ? Je n'ai pas vu ce document sur
12 la liste.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que oui.
14 M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'en suis pas certain, mais il n'y a pas
15 d'objection de notre part, en attendant la traduction, en ce qui me
16 concerne.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons donc marquer ce
18 document aux fins d'identification.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le numéro MFI D1939, Madame,
20 Messieurs les Juges.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, veuillez tenir
22 compte du fait que pendant la guerre, Donji Vakuf s'appelait Srbobran. Donc
23 il s'agit d'un seul et même endroit.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Monsieur Brown, alors regardez le paragraphe 1.41, là aussi un document
26 qui parle du HVO de Jajce qui négocie avec la Croix-Rouge de Mrkonjic Grad
27 pour le compte des Serbes de Jajce pour qu'ils puissent être emmenés de
28 l'autre côté et que les Croates et les Musulmans de Mrkonjic Grad puissent
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1 être emmenés de l'autre côté. Et il est dit que sur ce principe-là, les
2 personnes qui décident de partir de leur plein gré s'installent là où ils
3 souhaitent habiter, et si ceci est couronné de succès, cela sera suivi d'un
4 échange de prisonniers de guerre. C'est ce que vous déclarez ici, n'est-ce
5 pas ? C'est vous qui citez ce document.
6 R. De quelle note en bas de page s'agit-il ?
7 Q. 538, le rapport de combat régulier du 1er Corps de Krajina daté du 13
8 août 1992.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Pour répondre à votre question, le dernier
10 document n'a pas fait l'objet d'une notification.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et n'a pas été traduit non plus.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Des informations supplémentaires. Je crois que
13 ceci a été transmis. Il faudrait vérifier le message électronique.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Il semblerait que c'est bien ce que dit le
15 document. Des mentions ont été faites de ces accords conclus par la Croix-
16 Rouge qui ont effectivement eu lieu. A savoir si ces personnes se déplacent
17 de leur plein gré ou non, eh bien, ça c'est une autre question. Et
18 simplement pour précision, je ne pense pas que Srbobran couvrait tout le
19 territoire de Donji Vakuf. A mon sens, Srbobran représentait qu'une partie
20 de la municipalité de Donji Vakuf. Il ne s'agissait pas de l'ensemble de la
21 municipalité. A mon sens, il ne s'agissait que d'une partie contrôlée par
22 la Republika Srpska.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Pour votre information, l'ensemble de Srbobran faisait partie de Donji
25 Vakuf, et les Serbes contrôlaient l'ensemble de Srbobran jusqu'à l'automne
26 1995, mais cela n'a pas d'importance.
27 Monsieur Brown, vous vous êtes livré à des conjectures dans un sens ou dans
28 un autre. Vous avez fait analyser la situation en vous fondant sur les
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1 documents. Ce document parle des souhaits des deux parties et des
2 négociations qui se sont déroulées pour permettre aux personnes de quitter
3 la zone et se rendre dans une zone qu'ils jugeaient plus sûre. Maintenant,
4 lorsque vous dites que vous ne savez pas si c'était de leur plein gré, ça
5 c'est une autre question. La question que je vous pose est : est-ce que
6 vous n'êtes pas en train de confondre un déplacement volontaire et le
7 déplacement de personnes dû à la peur, que l'on contraignait à partir ?
8 Qu'entendez-vous par cela ? Le fait de fuir en présence de la police ou
9 d'autres forces ou le fait de chasser des personnes parce qu'il régnait un
10 climat de peur ? Est-ce que vous faites une différence ici ?
11 M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection, Madame, Messieurs les
12 Juges. Nous parlons de la note en bas de page 538, 05204 le numéro 65 ter,
13 si M. Karadzic souhaite afficher ce document.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et je remarque que ce point figurait
15 dans le message électronique.
16 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Brown.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je ne pense pas que je suis en train
19 de confondre les deux liens. Bon nombre de raisons pour lesquelles les
20 personnes souhaitent partir, et une des raisons peut être que dans les
21 zones de combat, ces personnes ont peur. Je n'en doute pas un seul instant.
22 Il y a bon nombre d'autres raisons à cela aussi. Par exemple, dans un des
23 rapports de combat du 30 ou du 31 mai, je crois, après les opérations qui
24 se sont déroulées à Kljuc, Kozarac et Sanski Most, on fait état du fait que
25 les conscrits d'appartenance ethnique musulmane demandent à quitter le
26 Corps de Krajina, et la raison pour laquelle ils demandent cela, c'est
27 qu'ils ne sont pas heureux au vu de la destruction massive de leurs villes
28 dans ces régions. Et cela figure dans le rapport de combat du corps. Donc
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1 ce sont les destructions qui sont la résultante de ces attaques et qui ont
2 conduit à ce climat de peur non négligeable. Mais je reviens à cette
3 question de la cellule de Crise qui donnait des instructions qui étaient
4 interprétées par l'armée, à savoir que les personnes allaient quitter la
5 région en grand nombre et qu'elles ne reviendraient pas. Et que ces
6 personnes qui partaient, eh bien, cela signifie qu'ils pensaient que
7 d'autres Serbes viendraient en territoire serbe et sur le territoire de la
8 Republika Srpska. Il est vrai, cela ne fait pas l'ombre d'un doute, que bon
9 nombre de personnes avaient peur, qu'elles se sont enfuies et qu'elles
10 souhaitaient partir. Mais cette question de transfert forcé est tout à fait
11 manifeste au vu du document, et il semble que l'armée et le 1er Corps de
12 Krajina en particulier étaient au courant de ce transfert forcé des
13 individus, et que les personnes qui partaient n'allaient pas revenir.Et
14 pour ce qui est des documents de la police, il y avait des documents qui
15 attestent de personnes qui sont retirées des registres, documents qu'ils
16 ont signés, et à la lecture de ces documents, un nombre important de
17 personnes ne sont pas parties de leur plein gré mais sont parties parce
18 qu'elles n'allaient pas rentrer chez elles, que leurs maisons existent ou
19 qu'elles n'existent plus.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Monsieur Brown, je n'ai pas le temps de préciser cette question-là.
22 Moi, je vous soumets que les forces organisées, à savoir la police, ont
23 demandé à personne de partir de façon forcée. Je vais tenter de prouver ça
24 en d'autres termes. Ne pensez-vous pas qu'une décision prise par la
25 municipalité, à savoir que quelqu'un n'allait pas revenir était tout à fait
26 valable ? Et la partie négociatrice, la Republika Srpska, pour ce qui est
27 de la question du retour de ces personnes, eh bien, il n'y avait que la RS
28 qui avait son mot à dire et il n'y avait que sa décision qui était valable
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1 ?
2 R. Est-ce que vous êtes en train de dire que quelqu'un ne peut rester que
3 si elle reçoit l'autorisation de la Republika Srpska; c'est cela ? C'est là
4 où vous voulez en venir, Monsieur Karadzic ?
5 Q. Monsieur, je veux parler du droit des réfugiés à rentrer. Avez-vous vu
6 les documents dans lesquels je dis que les réfugiés qui ont abandonné leurs
7 biens correspondent à une situation provisoire et chacun doit avoir le
8 droit de rentrer après la guerre ? N'avez-vous jamais lu un document de ce
9 type émanant de moi qui interdit qu'une décision émanant de quelqu'un
10 puisse contraindre ou non quelqu'un à partir ?
11 R. Les documents que j'ai examinés, les documents du Corps de Krajina et
12 les documents ayant trait à la RAK, je n'ai pas vu mention de cela du tout
13 dans ces documents-là. Tout ce que je puis dire d'après les documents que
14 j'ai vus, certains documents militaires semblaient indiquer qu'il y avait
15 un accord du type que les individus qui partaient n'allaient pas revenir, à
16 savoir que les Serbes qui étaient dans d'autres territoires devaient venir
17 en Republika Srpska. Ce souhait-là était exprimé. En tout cas, c'est une
18 politique qui a été menée par la RAK.
19 Q. Et avez-vous vu ou lu que la personne qui a rédigé ces balivernes a
20 également dit que les Serbes aussi qui ne souhaitaient pas participer aux
21 combats quittaient également la Republika Srpska et que ces personnes-là ne
22 seraient pas autorisées à rentrer chez elles non plus ?
23 R. Il se peut que ce document ait évoqué cela. Il faudrait que je le
24 revoie. Cela ne me surprend pas beaucoup. Je crois qu'il y a des personnes
25 qui ne souhaitaient pas participer à cela ou ne souhaitaient pas rejoindre
26 l'armée de la Republika Srpska et qui ont peut-être fui quelque part. Ils
27 se sont rendus en Serbie. C'étaient des traîtres, des personnes qui ne
28 souhaitaient pas adhérer à cette cause. Et peut-être c'est ce dont se fait
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1 l'écho ces documents. Il se peut qu'un nombre important de Serbes en
2 Republika Srpska n'était pas d'accord avec cette politique, ce qui serait
3 une des raisons de leur départ. Mais cela ne me surprend pas que ce type de
4 commentaire se soit glissé dans les documents militaires du Corps de la
5 Krajina.
6 Q. Eh bien, vous n'avez pas seulement parcouru des documents militaires
7 mais ceux de la cellule de Crise également de la RAK, qui déclaraient qu'il
8 y avait des Serbes, et non seulement des Musulmans, qui quittaient la
9 Republika Srpska et qui seraient privés de leurs droits. Vous avez peut-
10 être lu dans certains documents que les Serbes et les Musulmans qui
11 quittaient la Republika Srpska perdraient leurs droits ?
12 R. C'est tout à fait possible.
13 Q. Merci. Est-ce que vous savez que le 19 août, j'ai annulé tous les
14 certificats portant sur la remise des biens ? Etes-vous au courant de cela
15 ?
16 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.
17 Q. Merci.
18 M. NICHOLLS : [interprétation] Aux fins du compte rendu d'audience, est-ce
19 que nous pouvons avoir une date, s'il vous plaît ?
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] 1992. Par le truchement du Témoin Doyle, nous
21 avons versé ce document au dossier. Il m'a informé à la date du 16 août à
22 Londres de ceci, et dès mon retour à Pale le 19 août, j'ai ordonné que tout
23 ceci soit déclaré nul et non avenu, et il m'a dit chapeau. Il ne savait
24 même pas que j'avais fait cela. Je ne sais pas sous quel numéro ce document
25 a été versé au dossier.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Savez-vous qu'à partir du 22 avril 1992, j'ai prôné, entre autres, le
28 droit des réfugiés à rentrer, et ceci figure dans de nombreux documents, et
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1 j'ai déclaré qu'il s'agissait là d'un droit inaliénable, soit le retour des
2 réfugiés ou il y aurait réparation pour ces personnes pour les biens qu'ils
3 auraient perdus ou qui auraient été détruits pendant la guerre ?
4 D1754 est le document qui correspond à la date du 19 août 1992.
5 R. Eh bien, Monsieur Karadzic, je ne suis pas au courant de ces
6 instructions données le 22 avril. Tout ce que je puis dire, quelles que
7 soient les instructions que vous ayez données ce jour-là, ceci ne semble
8 avoir eu aucune incidence sur le Corps de Krajina dans les mois qui ont
9 suivi, si, effectivement, il s'agissait là d'une véritable tentative dans
10 ce sens.
11 Q. Eh bien, Monsieur Brown, je ne m'attends pas à ce qu'un témoin ait
12 tellement d'a priori qu'il mette en doute les documents qui ont été
13 délivrés par le président de la république, documents qui ont été publiés.
14 Bon, vous pouvez laisser le soin de faire ceci à l'Accusation. Avez-vous vu
15 des documents qui évoquaient les actions menées par les dirigeants de
16 l'Etat ? C'est ce qui m'intéresse. Bon, maintenant je sais que vous n'avez
17 pas vu de tels documents. Paragraphe 2.134 ou 234 : Même si des milliers de
18 non-Serbes ont fini par être placés dans les centres de détention avant
19 d'être déplacés dans la région de Krajina, il est manifeste qu'un nombre
20 très important de Musulmans et de Croates ont fui ou ont été contraints ou
21 chassés de chez eux et étaient suffisamment désespérés qu'ils ont décidé de
22 partir. Pour quelle raison les Juges de cette Chambre établiraient-ils une
23 différence entre ces raisons-là, à savoir qui a fui, qui a été chassé, et
24 combien de personnes étaient tellement désespérées qu'elles ont décidé de
25 partir ? Il s'agit là d'un point important. Il s'agit d'un procès pénal. Il
26 est important de faire la différence entre ces trois éléments.
27 R. Monsieur Karadzic, je ne pense pas que je sois en mesure d'expliquer ou
28 de conseiller quoi que ce soit aux Juges de la Chambre en la matière, à
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1 savoir sur l'importance de la mission qui est la leur.
2 Q. Et est-ce que vous pensez que tout ceci revient au même, que tout ceci
3 a le même poids, je parle de toutes ces raisons, ou que les différences
4 sont notables et qu'il faut le signaler ?
5 R. Ecoutez, moi, je ne suis pas avocat, Monsieur Karadzic, et je ne
6 présente pas tous ces éléments de façon juridique. L'analyse que j'ai faite
7 m'a permis de conclure, comme je l'ai déjà dit, qu'il y avait le souhait de
8 délimiter le territoire de la Republika Srpska comme cela a été dit à la
9 16e Séance de l'assemblée, et pas seulement à cette assemblée-là, qu'il
10 s'agissait de tracer un territoire que vous et les dirigeants de la
11 Republika Srpska souhaitiez contrôler et qui sous-entendait le déplacement
12 d'un nombre important de personnes qui, à vos yeux, étaient des personnes
13 qui étaient contre l'Etat de la Republika Srpska. A savoir si toutes ces
14 personnes ont été chassées effectivement, ou si elles avaient suffisamment
15 peur qu'elles sont parties, ou qu'elles ont accepté les offres de la Croix-
16 Rouge ou d'autres organisations militaires pour partir, ou si leurs biens
17 ont été détruits de façon massive et donc étaient suffisamment désespérées,
18 n'ayant plus de maisons, pour partir, eh bien, tout ceci fait partie de la
19 même question. Mon analyse des documents que j'ai vus m'a permis de
20 conclure qu'il y avait le désir de délimiter ce territoire de la Republika
21 Srpska et qu'à l'intérieur de ce territoire de la Republika Srpska, il n'y
22 aurait pas un nombre important de personnes qui étaient perçues comme étant
23 des ennemis de cet Etat-là. Et voilà -- et comment ces personnes sont
24 parties, cela ne fait pas partie de mon analyse.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, la pièce qu'a citée
26 M. Karadzic, qui est un ordre aux fins de se conformer aux conventions de
27 Genève, c'est le D1754, eh bien, ce document est toujours sous pli scellé.
28 Est-ce pour la même raison que celle que vous avez évoquée hier, à savoir
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1 que ceci doit encore être examiné ?
2 M. NICHOLLS : [interprétation] Cela se peut. Comme je l'ai dit, nous avons
3 déposé ce tableau, et d'après mon souvenir, il s'agit de tous les documents
4 de M. Karadzic, de ses ordres aux fins de se conformer aux conventions de
5 Genève, tout ce genre de choses, et nous ne les avons pas placés sous pli
6 scellé, en tout cas pas sur notre tableau.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Brown, c'est une chose que de délimiter les frontières de la
10 Republika Srpska, et moi je vous soumets l'idée suivante : les trois
11 parties étaient d'accord avec ces frontières, ainsi que la quatrième partie
12 prenante qui était la Communauté européenne. Si vous n'êtes pas d'accord,
13 dites-le. Mais c'est ainsi que les choses se sont passées. Savez-vous que
14 les frontières qui existent ont été acceptées par les quatre parties en
15 présence ?
16 R. Comme je vous l'ai déjà dit, je ne pense pas que les débats sur les
17 frontières dans le cadre des discussions sur le plan Cutileiro
18 correspondent exactement aux frontières définies par la Republika Srpska, à
19 savoir celles qu'elles souhaitaient avoir dans les discussions avant et à
20 la date de la 16e Séance de l'assemblée. Je crois qu'il y a des différences
21 au niveau de ces frontières. Si vous voulez parler des frontières qui
22 existent aujourd'hui et des frontières qui ont été définies par les accords
23 de Dayton, il y a des différences entre Dayton et les frontières telles
24 qu'elles existent aujourd'hui et ce qui a été défini en 1992. Mais il ne
25 s'agit pas de quelque chose que j'ai abordé dans le détail dans mon
26 rapport. Les frontières sont bien sûr importantes, mais les différences au
27 niveau de ces différentes négociations, non.
28 Q. Merci. Dans ce cas, je ne vais pas vous demander si, oui ou non, dans
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1 une négociation, on commence avec le prix le plus fort ou le prix le plus
2 bas avant de négocier. Mais d'où avez-vous tiré les informations que nous
3 souhaitions nous séparer des Musulmans alors que des Musulmans sont restés
4 en Republika Srpska, lorsqu'on parle de la séparation des deux autres Etats
5 qui appartenaient aux deux autres peuples ? Est-ce que c'est quelque chose
6 que vous avez tiré de l'acte d'accusation ? Est-ce que l'acte d'accusation
7 a été rédigé d'après votre analyse ? Et comment ceci coïncide-t-il avec la
8 thèse, à savoir que dans certaines municipalités la population n'a pas été
9 déplacée, qu'il y avait certains villages, tels que Janja, Bijeljina et
10 d'autres villages, où personne n'est parti ?
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
12 M. NICHOLLS : [interprétation] J'ai essayé de m'abstenir de faire des
13 objections, mais nous avons ici une question particulièrement complexe, et
14 M. Karadzic -- enfin, c'est M. Karadzic qui décide, mais une grande partie
15 de ces sujets ont déjà été traités pendant la première journée. C'est à lui
16 de décider s'il veut revenir là-dessus ou pas.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez reformuler,
18 s'il vous plaît, de façon plus simple.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Savez-vous, Monsieur Brown, qu'il n'y a pas une seule localité en
21 Republika Srpska pour laquelle on puisse dire qu'aucun Musulman n'est resté
22 jusqu'à la fin de la guerre, à l'exception peut-être de Drvar, mais là-bas
23 il n'y avait pas de Musulmans même avant la guerre ? Donc il n'y a pas une
24 seule localité où il n'y ait pas eu un nombre significatif de Musulmans qui
25 soient restés jusqu'à après la guerre. C'est une question simple.
26 R. Il est possible qu'un certain nombre de Musulmans soient restés dans
27 toute une série de localités. Je ne dis pas dans mon rapport que chaque
28 Musulman présent sur le territoire de la Republika Srpska devait être
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1 chassé. Je crois que dans vos propres termes lors de la 16e Session de
2 l'assemblée vous avez indiqué : Nous ne voulons pas avoir des effectifs
3 importants, une population importante. Donc je ne suis pas en train de dire
4 qu'il n'y avait pas eu peut-être des poches où les non-Serbes avaient pu
5 rester sur le territoire de la Republika Srpska, peut-être même pendant
6 toute la durée de la guerre. Mais je maintiens mon affirmation selon
7 laquelle à partir des documents que j'ai pu examiner, on s'attendait à ce
8 que de grands nombres de non-Serbes ne restent pas sur le territoire de la
9 Republika Srpska. Et je crois que vous-même, à l'occasion de l'une réunion
10 du Club des députés en février, vous avez indiqué que 90 % des Serbes
11 soient à l'intérieur des frontières de votre république, ce qui signifie
12 que 10 % seulement seraient à l'extérieur, mais qu'il fallait faire de la
13 place pour eux et que cela serait fait si nécessaire. Donc je ne conteste
14 pas qu'à la 16e Séance de l'assemblée vous ayez parlé pour la première fois
15 de séparation, mais je n'affirme pas non plus que chaque Musulman
16 individuel fût censé quitter le territoire de la Republika Srpska.
17 Mais j'affirme que dans la mise en place de la Republika Srpska, on
18 s'attendait à ce que de très nombreux non-Serbes quittent le territoire.
19 Q. Merci. Mais tout d'abord, votre calcul de 90 % des Serbes à l'intérieur
20 de la Republika Srpska ne signifie pas qu'il en resterait 10 % ailleurs,
21 mais qu'il s'agirait en fait de 90 % des Serbes de Bosnie-Herzégovine sur
22 leurs territoires qui rejoindraient la Republika Srpska. En fait, nous ne
23 revendiquions pas des territoires qui n'étaient pas les nôtres. Et vous
24 avez pu le voir, nous nous opposions à la mégalomanie territoriale. Et
25 vous, vous continuez à affirmer que j'avais à l'esprit les personnes qui
26 étaient restées en Republika Srpska et que, deuxièmement, 90 % de
27 l'ensemble de la population de la Republika Srpska devait être serbe. Mais
28 vous comprenez ceci complètement de travers. Et avec M. Izetbegovic, nous
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1 nous sommes mis d'accord pour que --
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous n'êtes pas ici
3 pour débattre avec le témoin. Vous êtes censé poser une question.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Ma question est la suivante : vous venez de dire -- alors est-ce que
6 nous avons dit que nous voulions que 90 % de la population de la Republika
7 Srpska soit des Serbes ou bien nous efforcions-nous d'obtenir que 90 % des
8 Serbes de Bosnie-Herzégovine se trouvent à l'intérieur de la Republika
9 Srpska; est-ce l'un ou l'autre ?
10 R. Pour cela, il me faudrait examiner le procès-verbal de la réunion du
11 Club des députés, mais dans la compréhension qui est la mienne, vous avez
12 indiqué que 90 % des Serbes de Bosnie-Herzégovine devraient se trouver sur
13 le territoire de la Republika Srpska. En même temps que d'autres références
14 lors d'autres séances, notamment la 16e Séance de l'assemblée, qui toutes,
15 de façon conjointe, me conduisent à la conclusion que le territoire de la
16 Republika Srpska allait être peuplé de façon prédominante par des Serbes et
17 que de grands nombres de non-Serbes ne seraient plus les bienvenus en
18 Republika Srpska. Les événements qui ont suivi cette 16e Séance de
19 l'assemblée au cours des jours ou des semaines suivantes le montrent,
20 c'est-à-dire qu'en très grand nombre, ces populations ne sont pas restées
21 et ont été transférées de force hors de ce territoire, ce qui s'était déjà
22 produit dans certaines municipalités avant cette 16e Séance.
23 Q. Mais avez-vous consulté mon discours du 25 janvier 1992 à l'assemblée
24 conjointe de Bosnie-Herzégovine lorsque j'ai dit que : Si vous proclamez
25 l'indépendance et que vous organisez un référendum avant la
26 régionalisation, il y aura une guerre qui va éclater, chacun revendiquera
27 sa part, chacun fuira dans ses parties du territoire, nous nous
28 organiserons et à la fin nous serons quand même forcés de nous mettre
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1 d'accord malgré tout ? Est-ce que vous avez vu ce discours ? Est-ce que
2 vous en avez tenu compte ?
3 R. Je n'ai pas vu ce discours, Monsieur Karadzic. Peut-être avez-vous
4 déclaré ceci. Mais dans l'ensemble des documents de la JNA, on voit qu'il y
5 avait un armement, qu'on se préparait en s'armant à l'éventuel échec des
6 négociations afin que le territoire puisse être pris, et on voit bien que
7 ce territoire devait être constitué de façon prédominante de municipalités
8 sous contrôle serbe et qu'un grand nombre de non-Serbes de ces
9 municipalités allaient être déplacés. Alors, certainement, dans certaines
10 municipalités de la RAK, c'est ce qui s'est produit, et c'est ce que j'ai
11 vu.
12 Q. Monsieur, je rejette ceci avec la dernière énergie et j'affirme que
13 vous n'avez aucun fondement pour dire cela.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Veuillez vous reporter au document 2.135.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Vous savez que le 24 avril, le corps, en même temps que les organes de
17 l'Etat, conjointement avec eux, a essayé d'empêcher les attaques et le
18 déplacement forcé de population, et je vais lire en anglais : "En
19 coopération avec les organes gouvernementaux afin d'empêcher les attaques
20 et le transfert forcé de personnes indépendamment de leur appartenance
21 ethnique ou religieuse."Donc l'armée en coopération avec --
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, de quoi sommes-nous en train
23 de parler ? Est-ce que vous pouvez redonner la référence.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] 2.135, paragraphe numéro 2.135 du rapport de M.
25 Brown.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Alors, est-ce que vous voulez nous dire que c'était le corps lui-même
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1 qui s'élevait contre ses propres agissements, ou bien n'est-il pas clair
2 que le gouvernement tant que le 1er Corps de Krajina sont contre ceci ?
3 R. Eh bien, j'ai dit dans le rapport qu'à certaines périodes des mois de
4 mars et avril, certainement la JNA a fait suivre certaines instructions
5 dans lesquelles il était indiqué que la JNA souhaitait réduire les tensions
6 interethniques et empêcher et prévenir les attaques dans ces territoires.
7 Je crois que c'était probablement pour essayer de maintenir la Bosnie au
8 sein de la Yougoslavie. Probablement --
9 Q. Vous interprétez les choses et vous nous livrez vos réflexions,
10 Monsieur. Moi, ce que je vous demande, c'est est-ce qu'il n'est pas clair
11 ici que les autorités et l'armée sont contre ce type de phénomène ? Ce que
12 je vous demande, c'est ce que vous avez véritablement constaté. Est-ce que
13 vous avez écrit dans votre rapport qu'au mois d'avril il était tout à fait
14 clair que les autorités et le gouvernement s'opposaient à ce type de
15 comportements et essayaient de les prévenir ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez ne pas interrompre le témoin au
17 milieu de sa réponse.
18 Veuillez poursuivre, Monsieur Brown.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que ceci fait partie de cette double
20 politique. La JNA s'efforçait de maintenir autant que possible la cohésion
21 de la Yougoslavie. Elle a fait circuler des instructions dans lesquelles il
22 était indiqué qu'elle souhaitait réduire les tensions interethniques, et je
23 crois que nous avons ici une référence à cela. Mais en même temps, il y a
24 également des références claires nous montrant que la JNA a pris fait et
25 cause avec la position qui était celle des Serbes et qu'elle distribuait et
26 disséminait des armes. Et même avant cette date, elle avait apporté son
27 assistance dans un certain nombre de municipalités dans lesquelles des
28 organes serbes prenaient le contrôle de la municipalité. Donc, oui, il y a
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1 un certain nombre de références à cela, au fait que la JNA s'est efforcée
2 de maintenir une certaine harmonie. Mais ceci s'est fait conjointement, de
3 façon parallèle, à l'autre partie du processus où la JNA apportait son
4 assistance. Par exemple, à Zvornik, les opérations de Zvornik, cela a
5 résulté en la prise des municipalités, et parmi elles, celle de Krupa.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Est-ce que Zvornik faisait partie de votre travail ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cessez d'interrompre le témoin, Monsieur
9 Karadzic. Laissez-le répondre.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Excellence, je ne peux pas accepter que
11 le témoin me livre sa propre version de son rapport.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez laisser le témoin répondre.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, j'espère avoir été clair, Monsieur le
14 Président. Je crois qu'il y avait une politique qui était double, qui avait
15 deux faces. Je ne conteste pas qu'il y ait eu cette politique de la JNA. En
16 fait, je cite certains documents où l'on voit le désir de la JNA de réduire
17 les tensions interethniques, y compris les moments où la JNA elle-même ne
18 savait pas exactement quel était le sort qui l'attendait.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Eh bien, voyez dans la suite du paragraphe que la population est
21 effrayée, qu'elle est frappée de panique et qu'elle quitte déjà certains
22 territoires. Et ensuite, vous dites dans la suite, je cite :
23 "Le 1er Corps de la Krajina fait savoir que la population est effrayée et
24 que la pression à laquelle elle est soumise pour quitter ces territoires
25 augmente."
26 Alors, est-ce que vous avez réussi à déterminer d'où venaient ces pressions
27 ?
28 R. Non. C'était une référence au 1er Corps de la Krajina. Peut-être était-
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1 ce la déclaration que vous aviez faite auparavant -- peut-être était-ce
2 l'une d'entre elles -- l'une de ce type de déclarations qui ne faisaient
3 qu'exacerber les pressions. Mais je suis sûr qu'il y avait de nombreux
4 propos et de nombreuses déclarations qui circulaient qui n'ont fait
5 qu'augmenter les tensions, à la fois à l'échelon local et globalement. Je
6 n'ai pas examiné les détails. Tout ce que j'ai fait, c'est faire état de ce
7 que le 1er Corps de Krajina a fait figurer dans ces rapports quotidiens de
8 combat; la tension augmentait, les gens étaient effrayés, et il était clair
9 qu'ils avaient peur de ce qui s'était peut-être passé dans d'autres
10 municipalités en d'autres lieux, et donc ils redoutaient ce qui pouvait se
11 passer.
12 Q. Merci. Alors, voyez la note en bas de page numéro 520. Vous vous
13 appuyez sur un document numéro 9417, examinons-le. Voyons sa page 3 dans le
14 système e-court. En fait, c'est la page 2 du document à proprement parler.
15 Numéro 9417 dans la liste 65 ter. Pendant que nous en attendons
16 l'affichage, Monsieur Brown, ce que j'affirme à votre attention, c'est que
17 ce dont ils font état -- les rapports qu'ils font indiquent que les
18 pressions exercées pour que les gens quittent ces territoires viennent de
19 personnes qui, en réalité, souhaitent partir et souhaitent modifier leur
20 lieu de résidence. Est-ce que vous comprenez cela ? Ce n'est pas quelqu'un
21 qui exerce des pressions sur eux pour qu'ils partent; eux-mêmes veulent
22 partir, comme on l'a vu dans ce télégramme il y a quelques instants.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, page 2, s'il vous plaît. Et dans la
24 pagination du système e-court, c'est la page 3. Page 2 -- en fait, numéro 3
25 dans le système e-court.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Est-ce que vous pouvez me répondre ? Avez-vous remarqué que les
28 pressions pour partir, pour quitter le territoire, venaient de ceux-là
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1 mêmes qui voulaient partir ?
2 R. Ce n'est pas la façon dont je lis ceci, Monsieur Karadzic. Les gens
3 partaient parce qu'ils avaient peur. Pour que quelqu'un quitte son domicile
4 et envisage même cette possibilité, il faut qu'il ait subi des menaces
5 significatives. Il faut qu'il se sente menacé. Ceci s'est produit après la
6 prise de certaines municipalités. Par exemple, Prijedor, le 30 avril, ceci
7 intervient une semaine plus tard. Et quelques jours après le déplacement de
8 pièces d'artillerie dans Prijedor. Des incidents se produisaient, et ce
9 qu'ils redoutaient quant aux événements auxquels on pouvait s'attendre dans
10 cette zone leur a fait envisager la possibilité de partir et les a fait
11 partir. Et ils ont très bien pu être au fait de ce qui s'était passé à
12 Krupa et dans d'autres parties de la Bosnie-Herzégovine --
13 Q. Ce n'est pas à vous qu'il revient de dire cela, de dire peut-être,
14 Monsieur Brown. Votre rapport est plein de peut-être. Est-ce que vous voyez
15 qu'ici il est dit : La population a peur, et la panique règne parmi la
16 population. De nombreuses personnes quittent le territoire pour d'autres
17 parties du pays, et je crois que ceci n'a pas été bien traduit. Il est dit
18 : Nombreux sont ceux qui fuient. L'original dit qu'il y a une immigration
19 importante à l'intérieur du pays, indépendamment des aspects politiques ou
20 du moral. Alors, il y a ici une distinction que je me dois de faire devant
21 cette Chambre de première instance entre la situation où quelqu'un va voir
22 les gens pour les convaincre de partir et celle où eux-mêmes partent par
23 peur. Est-ce que, du point de vue de la Défense, cette distinction est
24 nécessaire.
25 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous passez
26 beaucoup de temps à faire des commentaires. Si vous avez besoin de faire
27 cette distinction, veuillez l'exprimer sous la forme d'une question
28 appropriée.
Page 21895
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.
2 M. NICHOLLS : [interprétation] Brièvement, Monsieur le Président. Je
3 m'oppose à la façon dont M. Karadzic crie sur le témoin et au ton avec
4 lequel il s'exprime en disant :
5 "Monsieur, Monsieur, ce n'est pas à vous de dire peut-être…"
6 Le témoin s'efforce de répondre aux questions qui lui sont posées. Il fait
7 de son mieux, et il n'est pas juste de l'interrompre de la sorte. Et M.
8 Karadzic ne devrait pas se permettre de dire au témoin quels sont les
9 propos qu'il est autorisé à utiliser dans ses réponses.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
11 Alors, quelle est votre question ? Et je crois que vous touchez à la fin,
12 Monsieur Karadzic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ce document ? J'en ai presque
14 terminé. Je voudrais simplement dire qu'il n'y a pas eu de contre-
15 interrogatoire digne de ce nom parce que je n'ai pu couvrir qu'un seul de
16 12 sujets. Alors, peut-on verser ceci ?
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D1940.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je voudrais demander aux Juges de la
20 Chambre si tous les documents auxquels se réfère le témoin dans son rapport
21 peuvent faire l'objet d'une demande de versement direct à l'audience, ceux
22 qui n'ont pas été déjà versés par l'Accusation ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.
24 M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai pas d'objection à cela, Monsieur le
25 Président. Ceci pourra vous être utile dans votre examen du rapport. Comme
26 je l'ai déjà dit, j'ai essayé de discuter de ceci avec Me Robinson. En
27 fait, je voulais le faire, mais nous n'avons pas encore eu le temps de le
28 faire. Nous avons un tableau avec des liens hypertextes vers toutes les
Page 21896
1 notes en bas de page, avec également les numéros dans la liste 65 ter.
2 Mais, en fait, cela permettrait que vous ayez le rapport sous les yeux, et
3 au moyen d'un ordinateur, vous auriez la possibilité de cliquer sur une
4 note de bas de page et d'en lire le contenu.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
6 M. NICHOLLS : [interprétation] Et je m'apprêtais à dire que cela prendra
7 peut-être un certain temps, mais c'est possible, parce que cela a déjà été
8 fait dans le passé.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, quel est votre point de
10 vue concernant la demande de versement direct à l'audience ?
11 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, pour nous conformer
12 aux critères que vous avez indiqués pour une demande de versement direct à
13 l'audience, nous sommes censés apporter la démonstration de la pertinence
14 de chacun des documents, et notamment de sa pertinence concernant notre
15 thèse. Et je dois dire qu'en tant que conseil de la Défense, je
16 m'interroge, je suis plus que dubitatif quant à la pertinence qu'il y
17 aurait à demander en bloc le versement de l'ensemble des éléments
18 concernant ce témoin. Je crois comprendre pourquoi l'Accusation est
19 favorable à le faire, mais je ne vois pas pourquoi ceci serait intéressant
20 du point de vue de la Défense. En tout cas, c'est quelque chose que nous
21 pourrions discuter, M. Karadzic et moi-même, et si c'est approprié, nous le
22 ferons par écrit.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
24 Monsieur Karadzic, pourriez-vous conclure votre contre-interrogatoire.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, j'aurais besoin d'encore au moins deux
26 jours. Si au moins je pouvais avoir encore une heure pour donner au moins
27 un exemple par sujet, parce qu'ici, nous avons de nombreux sujets qui sont
28 couverts, dix ou 12 au moins, et je n'ai eu le temps d'aborder pratiquement
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1 aucun d'entre eux. Je n'ai pas eu assez de temps. Quant aux documents, je
2 ne veux pas demander le versement de tous les documents. Je souhaite
3 demander le versement des documents que le témoin a évoqués, ceux sur
4 lesquels il s'est appuyé et que le bureau du Procureur n'a pas versés au
5 dossier. Donc, c'est une sélection qu'il y aurait à faire parmi les
6 documents.
7 [La Chambre de première instance se concerte]
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause
9 de 25 minutes, et après la pause, vous aurez une demi-heure pour finir,
10 Monsieur Karadzic.
11 Nous reprendrons donc à 16 heures 05.
12 --- L'audience est suspendue à 15 heures 38.
13 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur Brown, vous venez de me citer comme quelqu'un qui serait
18 l'auteur d'un certain nombre d'idées criminelles. Cela porte sur ce
19 déplacement de personnes. En réalité, il faut que je trouve autre chose
20 maintenant, le lien entre le centre de la Republika Srpska à Pale et la RAK
21 de Krajina. Au paragraphe 1.113 à la page 50, avez-vous cité toutes vos
22 références qui vous ont permis de rédiger ce paragraphe 185, 186, 187 ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poser une question à la fois,
24 s'il vous plaît.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Eh bien, j'ai introduit le sujet et maintenant je pose une question au
27 sujet du paragraphe. Est-ce que vous avez rédigé ce paragraphe en vous
28 fondant sur les documents qui sont cités dans ces trois notes en bas de
Page 21898
1 page, ou existe-t-il quelque chose dont vous n'avez pas fait mention ?
2 R. J'ai rédigé ce rapport il y a longtemps, Monsieur Karadzic, et je ne
3 sais pas s'il y avait d'autres références, mais il s'agit des références
4 que j'ai citées.
5 Q. Merci. Et vous avez estimé qu'il suffisait de citer des articles de
6 journaux, comme le journal "Kozarski Vjesnik", et le rapport du 1er Corps;
7 est-ce exact ?
8 R. Eh bien, les documents sont cités dans le rapport, Monsieur Karadzic.
9 Q. Merci. Et au paragraphe 1.114, vous parlez de la cellule de Crise
10 également et vous citez deux sources, 188 et 189, ce sont les numéros de
11 notes en bas de page, n'est-ce pas ?
12 R. C'est exact, Monsieur Karadzic.
13 Q. Est-ce que vous avez jugé que cela vous permettait d'avoir une vue
14 d'ensemble et de l'intérieur des travaux de la cellule de Crise et des
15 liens qui existaient entre cette cellule et l'armée ?
16 R. Le rapport n'a pas été écrit pour avoir une vue de l'intérieur des
17 travaux de la cellule de Crise de la RAK. Ce paragraphe faisait partie d'un
18 passage plus important, parce que je pensais que la RAK, au niveau
19 municipal, avait des rapports étroits -- il y avait des rapports étroits
20 entre l'armée et les autorités civiles dans la Krajina et que la police y
21 était représentée également.
22 Q. Veuillez regarder le paragraphe suivant maintenant, 1.115. Voici ce que
23 vous dites :
24 "C'était un effort concerté de la part du 1er Corps de Krajina. Il
25 s'agissait d'établir et de maintenir des liens avec les autorités civiles à
26 tous les niveaux. A la date du 7 mai 1992, quelques semaines avant
27 certaines attaques militaires dans les municipalités de la Krajina, une
28 réunion a été convoquée à propos du statut à venir de la JNA, auquel ont
Page 21899
1 participé les commandants militaires du corps et les autorités civiles."
2 Donc vous estimez que c'est quelque chose qui n'est pas souhaitable ou
3 quelque chose qui semble prouver un crime, à savoir que l'armée et les
4 autorités civiles étaient en contact l'une avec l'autre ?
5 R. Je n'affirme pas cela non plus. La raison pour laquelle j'ai ajouté
6 cela - il y a bon nombre d'autres documents qui sont cités - eh bien, il me
7 semblait que l'armée et les autorités civiles travaillaient étroitement
8 ensemble, et ceci est arrivé aux échelons supérieurs au niveau du général
9 Talic, et de manière importante également au niveau de ses brigades et de
10 ses brigades subordonnées. Un certain nombre de documents ont permis
11 d'étayer cela.
12 Q. Merci. Regardons maintenant le 1.105 et de 118 à 119, où vous parlez
13 des relations entre le gouvernement -- ou plutôt, le premier ministre
14 Djeric et les inspections sur les travaux qui doivent être menées par la
15 cellule de Crise du peuple serbe dans les municipalités. Inutile de lire
16 ceci à voix haute, donc ce que vous citez ici, ce sont les trois premiers
17 paragraphes. Et ensuite, au paragraphe 1.107, vous y dites :
18 "Un facteur important dans la mise en œuvre des politiques générales du SDS
19 et du fonctionnement des organes serbes de Bosnie autoproclamés sur le
20 terrain."
21 Et vous établissez entre cela un lien avec un objectif commun, et cetera.
22 Et donc, vous estimez que les cellules de Crise illustrent la façon dont le
23 SDS appliquait sa politique et que les instructions de Branko Djeric
24 étaient un exemple particulièrement significatif à cet égard, n'est-ce pas
25 ? Le numéro du document est le P3439, par ailleurs.
26 R. Oui, tout à fait, j'estime que les cellules de Crise ont constitué un
27 organe important, qu'elles permettaient à l'armée et à la police et aux
28 organes civils d'être réunis au niveau civil. Je crois qu'il y a des
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1 documents qui étayent cela ou qui le mettent en exergue.
2 Q. Merci. Cependant, au vu de ce paragraphe, vous affirmez qu'ils étaient
3 censés mettre en œuvre des instructions qui venaient des échelons centraux
4 du gouvernement. C'est bien l'objectif de ces instructions ?
5 R. Je pense qu'il y a suffisamment de documents qui permettent de montrer
6 que les cellules de Crise devaient répondre aux échelons qui se trouvaient
7 au-dessus des municipalités. Prenez le cas, par exemple, d'une des
8 municipalités comme Sanski Most, pour laquelle les documents sont assez
9 volumineux. Il est aisé de constater que les documents sont transmis aux
10 cellules de Crise, les décisions sont prises au niveau des cellules de
11 Crise, certainement en ce qui concerne les opérations de désarmement,
12 ensuite ces décisions sont transmises, par exemple, à Sanski Most, lorsque
13 les colonels Andzic et Basara doivent mener à bien les opérations. Nous
14 avons vu le document en question hier, ou avant cette date --
15 Q. Merci. Moi, je vous demande simplement de vous en tenir au document, le
16 document de Djeric que vous avez cité. Vous parlez de ce document et vous
17 dites que c'est un document qui illustre le lien entre les organes centraux
18 ou centralisés et les municipalités.
19 R. Oui. Je crois que ça n'est pas le seul, et l'instruction Subotic est un
20 autre exemple. Je ne dis pas qu'il s'agit des seuls mécanismes. Mais en
21 tout cas, au moment de la création de l'armée, il semblerait qu'il y ait eu
22 des réunions à un niveau élevé et des directives qui aient été données. Et
23 je crois que le rapport d'aptitude au combat fait particulièrement
24 référence à cela, à savoir l'importance des cellules de Crise. Je ne dis
25 pas que c'est le seul document.
26 Q. Pourquoi, dans ce cas, avez-vous omis les paragraphes 9, 10 et 13 ?
27 Pourquoi n'avez-vous pas attiré les Juges de la Chambre sur ces
28 paragraphes-là ? P34359, nous n'avons pas beaucoup de temps, mais affichons
Page 21901
1 ce document et regardons le 9, 10 et 13. Les autorités municipales ont
2 l'obligation de faire certaines choses que vous avez omis de mentionner aux
3 Juges de la Chambre. Est-ce parce que vous avez travaillé pour le bureau du
4 Procureur ? Est-ce juste envers la Défense et les Juges de la Chambre ?
5 R. Est-ce que je peux voir ces paragraphes 9, 10 et 13, voir à quoi ils
6 correspondent ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons les télécharger.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vers le bas, au point 9 de l'anglais et en
9 serbe également, semble-t-il. L'original déclare que la cellule de Crise a
10 l'obligation de créer les conditions nécessaires aux organisations chargées
11 de faire appliquer la paix internationale et d'apporter de l'aide et
12 garantir un transport sans entrave des convois à leur destination. Peut-
13 être qu'il y a un problème de traduction et que cela porte à confusion.
14 Est-ce que nous pouvons avoir la page suivante en anglais, s'il vous plaît,
15 de façon à pouvoir voir le point 10.
16 "La population non combattante et les blessés doivent être traités de la
17 façon la plus humaine possible conformément au CICR. Les prisonniers de
18 guerre doivent également être traités humainement, et ce, conformément aux
19 lois de la République serbe de Bosnie-Herzégovine."
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Avez-vous peut-être oublié d'attirer l'attention des Juges de la
22 Chambre sur ce passage lorsque vous avez abordé ce document ?
23 R. Je crois que dans le rapport en tant que tel, j'ai dit que ce -- il ne
24 s'agissait pas -- que mon rapport ne constituait pas une étude exhaustive
25 de toutes les composantes et des actions menées par la cellule de Crise, et
26 que la citation que j'ai faite par rapport à l'instruction de Djeric était
27 une citation d'ordre général, à savoir que les cellules de Crise existaient
28 et que cela impliquait que l'armée travaillait en coopération avec les
Page 21902
1 autorités civiles. Cela, je ne l'ai pas omis, et je l'ai même -- et je l'ai
2 même, en y réfléchissant, inclus ceci au point 10. J'en ai peut-être même
3 parlé dans un paragraphe, je l'ai même cité, je l'ai peut-être inclus un
4 peu plus tard dans mon rapport, puisque nous parlons de ces questions ayant
5 trait aux prisonniers de guerre. Par exemple, le général Talic qui a donné
6 ses propres instructions à propos des prisonniers de guerre. Peut-être
7 qu'il s'agit d'une omission de ma part, mais je ne pense pas que -- je n'ai
8 pas utilisé le document comme le ferait un expert médico-légal et analysé
9 chaque aspect de l'opération menée par les cellules de Crise. Il s'agit de
10 déclarations plus générales que je faisais. Il y en avait d'autres que j'ai
11 regardés qui portaient sur les cellules de Crise, et dans ce cas-là, il y
12 avait plus de détails. Ces documents parlaient plus dans le détail des
13 cellules de Crise que moi j'en ai parlé. Je m'en suis servi lorsqu'il
14 s'agissait d'analyser les relations entre les cellules de Crise qui
15 existaient, l'armée qui en était une composante, et en fait, j'argue, je
16 dirais qu'il s'agissait d'une caractéristique significative, en tout cas
17 dans cette première partie, lorsque le rapport évoque la question de
18 l'aptitude au combat.
19 Q. Quoi qu'il en soit, le paragraphe 1.105 contient une partie de ce
20 document et les paragraphes cités ne sont pas mentionnés ou il n'y a pas de
21 commentaires, n'est-ce pas ?
22 R. Les références font partie du document, oui, tout à fait.
23 Q. Merci. Alors, au point suivant, vous concluez en disant que c'était la
24 politique des hauts dirigeants de transmettre ceci aux échelons inférieurs.
25 Regardez le point 1.108 de votre rapport. A ce paragraphe-là, vous semblez
26 laisser entendre le contraire. 1.108 :
27 "Dans la Krajina de Bosnie, les dirigeants, lorsqu'ils font des
28 déclarations publiques et au niveau de leurs actions concrètes sur le plan
Page 21903
1 politique, maintiennent et conservent une attitude indépendante vis-à-vis
2 du gouvernement serbe de Bosnie-Herzégovine, et il y a même des tentatives
3 d'ingérence au niveau du commandement des corps et de certaines structures
4 de ce dernier."
5 Ce document porte la date du 14 juin, n'est-ce pas, et c'est quelque
6 chose que vous avez noté, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, tout à fait.
8 Q. Au paragraphe 1.09, vous évoquez un combat politique entre Banja Luka
9 et le gouvernement à Pale qui était manifeste pendant les mois d'été de
10 l'année 1992. Et le texte se poursuit en disant que :
11 " … ceci était illustré dans certains rapports militaires à
12 l'époque."
13 N'est-ce pas ?
14 R. Oui, il y a un petit nombre de références qui portent sur le sujet. Je
15 pensais que ces références étaient suffisamment importantes pour pouvoir
16 les inclure dans mon analyse. Il y avait de nombreux exemples de références
17 à des réunions auxquelles a participé le général Talic pour essayer de
18 tenter d'éliminer certaines de ces différences. Et donc, moi, je les ai
19 signalées dans mon rapport et j'ai indiqué que cette question se posait.
20 Mais je ne vois pas, cependant, qu'il s'agisse là d'une question tellement
21 sérieuse que le Corps de Krajina ne pouvait pas fonctionner ou que le Corps
22 de Krajina n'a pas pu mener à bien les tâches qui étaient les siennes. Mais
23 le rapport évoque le fait qu'il semblait y avoir des tensions de temps en
24 temps.
25 Q. Merci. De toute façon, vous avez noté que la Krajina était assez isolée
26 jusqu'au mois de septembre 1992 et que le corridor n'était pas un lieu sûr,
27 que ce n'est pas avant le mois de juillet que la sécurité a été assurée
28 dans le corridor, et que le réseau téléphonique ne fonctionnait que très
Page 21904
1 mal; c'est exact ?
2 R. Peut-être que le dernier point est exact. Je ne sais pas. Lorsque vous
3 parlez que le réseau téléphonique ne fonctionnait que très mal, je ne sais
4 pas si ceci est arrivé. En tout cas, l'analyse du rapport de combat n'en
5 parle pas. Il est vrai que le téléphone était une ressource souvent
6 utilisée lorsque les autres moyens militaires ne fonctionnaient pas. Donc
7 je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point. Je ne dirais pas que le
8 Krajina était forcément isolée jusqu'au mois de septembre 1992, et ce, pas
9 du tout. D'après moi, le corridor a été pris, ou en tout cas certaines
10 municipalités ont été prises au mois de mars, à la fin du mois de mars me
11 semble-t-il, ce qui signifie que cette route qui traversait la Krajina en
12 direction de Semberija et en direction de la Serbie a été coupée, mais que
13 la situation a été rétablie à la mi-juillet 1992, après que l'opération
14 Corridor 92 ait été couronnée de succès. Et il y avait également un pont
15 qui permettait aux gens de se rendre à Banja Luka. Je suppose que si les
16 gens n'avaient pas pu parvenir à Banja Luka, la 16e Séance de l'assemblée
17 n'aurait pas pu se dérouler à cet endroit-là. Je crois qu'il y avait des
18 hélicoptères aussi qui pouvaient entrer et sortir. L'aéroport fonctionnait
19 toujours, était ouvert, et je crois qu'il y avait des vols, des avions qui
20 pouvaient atterrir et quitter Banja Luka. Mais j'entends bien ce que vous
21 dites. Pour ce qui est de la route qui traversait la Krajina, cette route a
22 été coupée pendant un certain temps, mais après l'opération Corridor, la
23 route a été rouverte à nouveau. Et ensuite, entre la fin du mois de juillet
24 jusqu'au mois de septembre ou octobre à peu près, cette route a été
25 élargie.
26 Q. Merci.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder le numéro 65
28 ter 428.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. C'est un document que l'Accusation avait l'intention de verser au
3 dossier en même temps que votre rapport. Le numéro 65 ter 428, à la page 3.
4 A la page 3, au point 2, s'il vous plaît, "éléments provenant du contre-
5 renseignement." Cela doit se trouver dans le prétoire électronique. Page 3.
6 Le titre est "contre-renseignement." C'est vers la fin de la page.
7 "Certains représentants officiels de la RAK travaillent d'arrache-pied à la
8 création d'un soi-disant Etat de Krajina" -- les interprètes m'ont demandé
9 de ralentir. Eléments provenant du contre-renseignement :
10 "Certains représentants officiels de la RAK travaillent d'arrache-pied sur
11 la création d'un soi-disant Etat de Krajina, ce qui pourrait avoir des
12 conséquences négatives sur l'unité du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine et
13 de la lutte qui a été la leur."
14 Est-ce que vous disposiez de ce document lorsque vous avez rédigé votre
15 rapport, étant donné que ce document figure sur la liste du bureau du
16 Procureur ?
17 R. Je ne me souviens pas d'avoir vu ce document, Monsieur Karadzic. Il se
18 peut que ce document soit devenu disponible après que j'aie rédigé mon
19 rapport.
20 Q. Merci.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux en demander le versement au
22 dossier, s'il vous plaît ? Numéro 65 ter 432, c'est un autre document du
23 bureau du Procureur qu'ils souhaitent verser par le truchement de votre
24 déposition.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne suis pas en train de soulever une
27 objection. Je ne sais pas exactement ce que M. Karadzic entend lorsqu'il
28 parle que le numéro 65 ter 428 est quelque chose que nous souhaitions
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1 verser au dossier en même temps que le rapport. Je ne sais pas très bien ce
2 qu'il entendait par-là. Et moi j'ai versé au dossier ce que j'avais
3 l'intention de verser au dossier.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
5 Qu'est-ce que vous entendiez par-là, Monsieur Karadzic, lorsque vous
6 avez dit que c'était le document que le Procureur souhaitait verser au
7 dossier, qu'est-ce que vous entendiez par-là ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ils ont inclus ce document en tant que
9 référence -- ou par rapport à ce témoin. La liste d'origine devait
10 certainement être plus exhaustive, mais en tout cas c'est un document qui
11 figure sur la liste 65 ter, sous le numéro 428. Mais c'est un document
12 qu'il est important de signaler.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, poursuivons. Je ne vois pas ces
14 éléments-là sur la liste des documents qui sont utilisés pendant
15 l'interrogatoire principal. Nous allons le verser au dossier, ce numéro 65
16 ter 428.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1941, Madame, Messieurs
18 les Juges.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Alors, veuillez regarder ce document, s'il vous plaît. Est-ce que nous
21 pouvons avoir la page 3, le point 3, s'il vous plaît. On évoque la
22 situation sur le territoire, et il est dit que : Il y avait une lutte de
23 pouvoir au sein des différents organes de la SR BH qui a une incidence sur
24 les structures militaires. Il y a également des ministères parallèles dans
25 la République serbe de Bosnie-Herzégovine ainsi que dans la Région autonome
26 de Krajina. Est-ce quelque chose dont vous avez pris bonne note ?
27 R. Je n'en suis pas certain. Il faudrait que je me reporte aux notes de
28 mon rapport. Mais comme je vous l'ai dit, j'ai cité le fait qu'il y avait
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1 des tensions, des difficultés. La RAK, en tout cas, par exemple, souhaitait
2 qu'il y ait une unité -- qu'elle soit unifiée à d'autres territoires ou
3 d'autres régions serbes en Croatie, et d'autres questions sur lesquelles
4 elle n'était pas tout à fait d'accord. J'ai clairement indiqué dans mon
5 rapport que ces tensions existaient et qu'il s'agissait très souvent de
6 tensions internes parce qu'ils cherchaient à avoir ou exercer une influence
7 sur les uns ou sur les autres. Mais à mon sens, ceci n'a eu aucune
8 incidence sur ce que faisait le Corps de Krajina en tant que tel. En
9 réalité, le général Talic tentait de résoudre ces différends en organisant
10 des réunions, et qui sont citées dans certains de ces documents.
11 Q. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au
13 dossier de ce document, s'il vous plaît ?
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. C'est la pièce D1942.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Veuillez regarder, s'il vous plaît, le paragraphe 1.1.4, où vous dites
17 que vous saviez que les autorités locales dans certaines municipalités
18 avaient pour ambition d'asseoir leur pouvoir en contrôlant certaines
19 instances militaires, ou organes militaires, de la municipalité. Il
20 semblerait qu'on ait demandé à Talic d'exercer son influence par
21 l'intermédiaire du gouvernement de la RAK pour exclure certains éléments
22 extrémistes. Kljuc est citée en particulier, et on constate ici que les
23 structures militaires de Kljuc demandent à ce que ces dernières influencent
24 les hommes politiques de la région par le truchement du gouvernement de la
25 RAK de façon à ce qu'elles ne contrôlent pas leurs unités militaires
26 régionales; est-ce exact ?
27 R. Ecoutez, il me faudrait un certain temps pour parcourir les documents
28 et mon rapport, mais d'après moi, ce qui s'est passé, c'est qu'il y avait
Page 21908
1 des tensions à Kljuc, et je crois qu'il y a des Musulmans qui ont été tués
2 -- ou un Musulman a été tué. Une demande a été faite à Talic -- ou Talic a
3 envoyé une demande à la RAK pour leur demander en substance d'user de leur
4 influence ou de leur autorité pour, d'une manière ou d'une autre, éviter un
5 quelconque malentendu avec la JNA dans le secteur. Je crois que Talic a
6 clairement indiqué par le biais de cette demande qu'il s'adressait à la RAK
7 et que ceci revêtait une certaine importance. Il leur a demandé de l'aider.
8 Je crois qu'une pression a été exercée également de se servir de l'unité de
9 la JNA à Kljuc. Il a tenté de résoudre cette question-là en se tournant
10 vers les organes investis de l'autorité à l'époque. Je crois que cette même
11 unité était là au début du mois de mai, c'était la même unité qui avait
12 participé à la prise de contrôle -- ou plutôt, aux opérations de
13 désarmement du mois de mai. Donc c'était la même unité, la même unité dont
14 il parlait au début du mois de mai, et finalement l'unité qui a mené les
15 opérations à la fin du mois. Mais pour être très précis, il faudrait que je
16 regarde mes notes. Mais le général Talic estimait que pour pouvoir résoudre
17 ces tensions et ces pressions, la RAK était l'organe vers lequel il devait
18 se tourner.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez terminer en
20 trois minutes, s'il vous plaît.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Monsieur, ceci portait sur ma question où j'ai dit que vous étiez, bien
24 évidemment, au courant du fait qu'il y avait des velléités d'indépendance
25 au niveau des municipalités, que chaque unité administrative souhaitait
26 avoir sa propre armée. De toute façon, vous avez développé la question.
27 Regardez le point 2.24, à la page 69 de votre rapport, où vous avez écrit
28 que jusqu'à la création de la VRS, les unités assuraient leur propre
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1 organisation, étaient auto-organisées.
2 Et vous citez cela : "Entre le 1er avril et le 15 juin, les unités
3 régionales et municipales s'étaient auto-organisées au nom de la Défense
4 territoriale…" et cetera, et cetera.
5 R. Oui. Sous l'influence patriotique du SDS, c'est bien ce que dit le
6 texte.
7 Q. Oui. Saviez-vous que selon la doctrine de Tito, à savoir dans une
8 population armée, les municipalités étaient souveraines en ce qui concerne
9 les questions de défense et que le président municipal était le commandant
10 suprême des forces sur son territoire ? Il y avait des unités municipales
11 au sein desquelles chacun avait le devoir de se battre, que le membre de
12 cette unité ait reçu ou non des ordres à cet effet ?
13 R. Je connais la Loi sur la Défense populaire généralisée. Je sais qu'en
14 temps de crise, les personnes pouvaient être mobilisées au sein de la
15 Défense territoriale, et il relevait de la responsabilité de chaque citoyen
16 de contribuer à la défense de l'Etat. Mais je ne pense pas que ceci avait
17 une quelconque incidence sur la situation que j'ai vue dans la Krajina en
18 1992.
19 Q. Merci. Est-ce que vous saviez que la RAK, à l'automne de l'année 1992,
20 a été abolie et que toutes les régions autonomes ont cessé d'exister étant
21 donné qu'il avait été dit et conclu que les instances de l'Etat, les
22 organes centraux, n'exerçaient pas suffisamment d'influence sur ces
23 dernières régions et sur leur fonctionnement ?
24 R. Ecoutez, je sais qu'à la fin de l'année 1992, la RAK a cessé de
25 fonctionner. Comment cela s'est passé et quelles négociations étaient à
26 l'origine de cela, eh bien, ce n'est pas quelque chose que j'ai inclus dans
27 mon rapport.
28 Q. Eh bien, c'est parce qu'il y a eu une modification de la constitution,
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1 Monsieur Brown, peut-être que vous vous en souvenez ? Avez-vous parcouru
2 les documents qui vous ont été fournis ? Il s'agit en réalité de
3 corrections qui ont été apportées à certains documents. Et est-ce que vous
4 avez inclus ces corrections sur la feuille d'errata qui a été présentée aux
5 Juges de cette Chambre ? En particulier parce que certains points vous ont
6 été signalés dans d'autres affaires, les paragraphes 1.114, 2.18, 2.31,
7 2.24, 2.76, 1.105, 2.5 et 2.80 ?
8 R. Oui, Monsieur Karadzic. Oui, je crois que c'était le travail à la
9 maison que m'a donné M. Robinson pendant le week-end. J'ai regardé les huit
10 paragraphes qui m'ont été remis. Et au point 1, qui était le paragraphe
11 1.114, à mon sens, il n'était pas nécessaire de modifier ce paragraphe-là,
12 il n'était pas nécessaire de corriger le rapport. Le paragraphe 2.18, à mon
13 sens, rien n'exigeait la modification du rapport, sauf qu'un numéro ERN a
14 été mal répertorié, ce qui n'a pas été signalé dans les deux feuilles sur
15 lesquelles ces errata ont été signalées, je suis disposé à vous présenter
16 un troisième feuillet erratum. Le troisième paragraphe, le paragraphe 2.24,
17 avait déjà été modifié dans la fiche d'errata numéro 2. Le paragraphe 2.76
18 est une référence qui concerne l'absence d'attaque sur Celinac qui, je
19 crois, a été évoquée par Me Ackerman. Pour ma part, je ne suis pas d'accord
20 avec cette position de Me Ackerman, mais vous constaterez à la lecture de
21 ce que j'ai écrit à ce sujet dans mon document que je ne vois absolument
22 pas le moindre problème à modifier ces mots pour qu'ils se lisent
23 "opérations militaires", au pluriel, plutôt que "attaque". Il y a deux
24 références dans mon rapport qui indiquent qu'il y a eu des opérations
25 menées à Celinac. Et donc, je pense que mon propos tient toujours. Je ne
26 pense pas que Me Ackerman ait raison de dire qu'il n'y a pas eu
27 d'opérations à Celinac. Je crois qu'il y en a eu, et deux références
28 figurent à ce sujet dans mon rapport. Mais je ne vois pas de problème à
Page 21911
1 apporter une légère modification aux mots utilisés dans l'une des phrases
2 qui figurent dans ce rapport. Alors, le sixième paragraphe concerné, le
3 paragraphe 1.105, Me Loukas a indiqué, ou en tout cas déclaré, qu'elle
4 pensait qu'il s'agissait de ma part d'une omission délibérée au paragraphe
5 10 du document de la cellule de Crise concernant la question des
6 prisonniers de guerre. J'ai indiqué pour ma part que je n'avais utilisé que
7 des éléments sélectionnés par rapport aux aspects militaires de la cellule
8 de Crise, mais je ne vois aucun problème à inclure le paragraphe 10 sur une
9 fiche d'errata. Cela étant, je ne pense pas que ceci modifie
10 substantiellement ma position par rapport aux cellules de Crise.
11 Le septième paragraphe, à savoir le paragraphe 2.5, l'endroit où j'ai
12 placé ma note en bas de page a fait discussion. J'ai placé la référence de
13 note en bas de page à la fin de la phrase, et il a été dit pendant le débat
14 que cette référence ne rendait compte que d'une chose, c'est que la
15 sécurité avait été assurée pour les installations les plus importantes, et
16 je crois qu'il était même question d'assurer la sécurité de territoires,
17 d'installations-clés, et d'autres aspects. Je pense que le Juge a dit à
18 l'époque qu'il serait peut-être préférable de placer la note en bas de page
19 au milieu de la phrase, là où il est question d'assurer la sécurité des
20 installations-clés, puisque c'est à ces installations que la note se
21 référait. Encore une fois, je ne vois pas en quoi cela change
22 substantiellement le commentaire que j'ai fait, mais je suis tout à fait
23 prêt de modifier l'emplacement de la note en bas de page pour la placer
24 dans la partie de la phrase qui convient, et même de donner davantage de
25 détails dans cette note pour qu'elle soit plus claire. Je ne pense pas que
26 ceci modifie quoi que ce soit de façon substantielle dans mon rapport, et
27 je crois qu'il s'agit plutôt d'un problème administratif. Le huitième
28 paragraphe, le paragraphe 2.80, a déjà été modifié par la fiche d'errata
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1 que j'ai remise le 11 novembre. Donc, ces modifications se trouvent déjà
2 sur cette fiche d'errata.
3 Sur le fond, par conséquent, j'ai examiné les documents. Dans deux
4 d'entre eux, il y avait déjà des modifications signalées dans une fiche
5 d'errata antérieure. L'un de ces documents n'avait besoin d'aucune
6 modification, à mon avis, et les cinq autres, à mon avis, sont de nature
7 mineure qui ne nécessite pas des transformations substantielles d'une
8 quelconque analyse, mais je ne vois aucun problème, et je l'ai déjà fait, à
9 mettre tout cela par -- à rédiger une troisième note d'errata en plaçant
10 toutes ces modifications sur cette note.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A ce stade, nous devrons admettre au
12 dossier votre fiche, Maître Robinson.
13 M. ROBINSON : [interprétation] Oui --
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'elle a été communiquée par
15 l'Accusation.
16 M. NICHOLLS : [interprétation] En effet, Monsieur le Président, et
17 l'Accusation n'a pas d'objection.
18 M. ROBINSON : [interprétation] Nous allons la télécharger dans le prétoire
19 électronique.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un numéro de pièce, je vous prie.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Excusez-moi. Qu'en est-il du paragraphe 131, il n'a pas été évoqué.
23 Est-ce que vous avez apporté une modification à ce paragraphe ?
24 R. Ah, oui. C'est une modification de nature tout à fait mineure que je ne
25 vois aucun problème à inclure dans une troisième fiche d'errata. Le
26 problème avec ce paragraphe 1.31, c'est qu'il existait une note de bas de
27 page de référence. C'était une longue citation, et donc, une note de
28 référence en bas de page, mais cette citation provenait de deux documents.
Page 21913
1 Et au compte rendu d'audience, on évoque un document supplémentaire mais
2 pas au bon endroit. Donc, il s'agit d'un problème administratif, et ce que
3 j'ai fait sur la nouvelle fiche d'errata, c'est de préciser tout cela pour
4 qu'il n'y ait plus d'ambiguïté. Le paragraphe 1.31 doit donc comporter deux
5 notes de référence en bas de page au lieu d'une, dans lesquelles il est
6 indiqué dans l'une d'entre elles qu'elle a un rapport avec le compte rendu
7 d'audience, mais que la deuxième n'avait pas été définie de façon
8 suffisamment claire. Donc, ce n'est pas une modification de la citation sur
9 le fond, mais simplement une précision quant au fait que cette citation
10 provient de deux documents plutôt que d'un seul.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Un numéro de pièce.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce D1943.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Deux questions brèves encore, Monsieur Brown,
14 et je souhaite informer les Juges de la Chambre que je n'ai pas eu le temps
15 de traiter de la crédibilité ou des qualifications, ainsi que d'autres
16 questions liées à l'organisation --
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, c'est un commentaire
18 inacceptable. Veuillez poursuivre avec vos deux dernières questions.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Première question : est-ce que vous convenez, en tant qu'officier et en
21 tant qu'analyste, qu'un officier de haut rang est tenu de notifier, et ce,
22 par écrit, ou de rendre compte des erreurs commises par un subordonné ?
23 R. En tant qu'ancien soldat, je réponds oui.
24 Q. Merci. Ma deuxième question est la suivante : votre analyse comporte
25 environ 500 paragraphes et un grand nombre de notes en bas de page. Est-ce
26 que dans cette analyse on trouve tout ce que vous avez pu apprendre et
27 mettre par écrit sous forme de notes rédigées, tout ce que vous avez pu
28 trouver s'agissant d'actes répréhensifs de la part des Serbes, à la lecture
Page 21914
1 des documents du 1er Corps de la Krajina ?
2 R. Je pense que j'ai mis l'accent sur cela par le passé, Monsieur
3 Karadzic. Les documents que j'ai utilisés étaient, dans leur grande
4 majorité, des documents de l'époque, provenant du 1er Corps de la Krajina et
5 rédigés à l'époque des faits; il y avait aussi un certain nombre de
6 documents de police rédigés à l'époque des faits également; et un nombre
7 assez limité d'articles de presse de l'époque également; ainsi qu'une ou
8 deux vidéos. Mais la majorité écrasante des documents que j'ai utilisés
9 pour rédiger mon rapport provenait des archives du 1er Corps de la Krajina.
10 Q. Merci.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.
12 Est-ce que vous avez des questions supplémentaires, Monsieur Nicholls ?
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, ceci met donc un point final à
15 votre déposition, Monsieur Brown. Merci d'être venu à La Haye pour
16 témoigner.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci de votre patience, Monsieur le
18 Président, Madame, Messieurs les Juges.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous souhaite un
20 bon voyage de retour chez vous.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur.
22 [Le témoin se retire]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, est-ce que vous
24 proposez que nous fassions une courte pause ou est-ce que cela ne pose
25 problème que nous continuions immédiatement ?
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne vois aucun problème à poursuivre dans
27 l'immédiat, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, vous pouvez faire entrer
Page 21915
1 votre témoin suivant.
2 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, tant que le témoin
3 n'est pas encore dans le prétoire, je voudrais informer la Chambre de
4 première instance qu'hier la Chambre d'appel a rendu un arrêt au sujet de
5 la communication retardée concernant le Témoin KDZ-320 et qu'elle a renvoyé
6 la question vers la Chambre de première instance, et je voulais --
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous sommes au
8 courant.
9 M. ROBINSON : [interprétation] Je pensais que vous l'étiez. Mais je voulais
10 vous faire savoir que nous ne déposerons aucune écriture supplémentaire
11 désormais, mais que nous vous demandons de prendre en compte les écritures
12 déjà déposées devant la Chambre d'appel.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demande de prononcer la
18 déclaration solennelle, Monsieur.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 LE TÉMOIN : KDZ039 [Assermenté]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir
24 confortablement, Monsieur, je vous prie.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous ne commencions à entendre
27 votre déposition, Monsieur, j'aimerais m'occuper d'une question
28 administrative. Et à cette fin, je demande que nous passions rapidement à
Page 21916
1 huis clos partiel.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
3 le Président, Madame, Messieurs les Juges.
4 [Audience à huis clos partiel]
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13 [Audience publique]
14 Interrogatoire principal par M. Nicholls :
15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
16 R. Bonjour.
17 Q. Vous m'entendez bien ?
18 R. Je vous entends parfaitement bien.
19 Q. Il y a un point que j'aimerais vous rappeler avant que nous ne
20 commencions, à savoir qu'il faut absolument que vous évitiez de prononcer
21 votre propre nom, Monsieur.
22 R. Très bien.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme je vous l'ai déjà dit, Monsieur le
24 Témoin, lorsque nous nous adresserons à vous, nous vous appellerons M. le
25 Témoin ou Témoin 39.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.
27 M. NICHOLLS : [interprétation]
28 Q. Et l'autre point sur lequel je souhaitais appeler votre attention,
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1 Monsieur, c'est que je sais que vous avez subi une blessure à la jambe par
2 le passé et qu'il arrive parfois que votre jambe vous provoque d'intenses
3 douleurs si vous êtes assis pendant longtemps. Donc, n'ayez absolument
4 aucun amour propre, si vous commencez à ressentir une douleur à la jambe et
5 que vous avez besoin de vous lever et de marcher un peu, n'hésitez pas à me
6 le faire savoir.
7 R. Très bien, Monsieur.
8 M. NICHOLLS : [interprétation] La première chose que je voudrais faire,
9 c'est demander l'affichage du document 65 ter numéro 90301, qui est une
10 fiche de pseudonyme et qui ne doit pas être diffusée à l'extérieur.
11 Q. Monsieur, vous allez voir apparaître à l'écran dans quelques instants
12 une feuille de papier avec votre nom sur cette feuille de papier. Ne lisez
13 pas ce qui est écrit sur la feuille à haute voix. Contentez-vous de
14 regarder ce qui est écrit et de me dire si c'est bien votre nom que l'on
15 voit sur cette feuille.
16 R. Oui. Oui, je vois mon nom à l'écran.
17 Q. Merci.
18 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
19 document avec conservation sous pli scellé.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce P3938, à
22 conserver sous pli scellé, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les
23 Juges.
24 M. NICHOLLS : [interprétation]
25 Q. Monsieur, comme je vous l'ai expliqué, puisqu'un certain nombre de
26 questions vous ont déjà été posées auparavant, nous n'allons pas vous
27 reposer les mêmes questions qui portent sur ce que vous avez vécu
28 personnellement. Ce que nous allons faire maintenant, c'est vous soumettre
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1 la déposition que vous avez faite dans l'affaire Popovic. Donc je vais
2 maintenant vous poser quelques questions. Première question : est-ce que
3 vous vous rappelez avoir témoigné dans l'affaire Popovic en 2007 ?
4 R. Je ne me rappelle pas, mais il est certain que oui.
5 Q. D'accord. Vous avez relu votre déposition dans cette affaire Popovic.
6 Est-ce que vous vous rappelez --
7 R. Oui.
8 Q. Quand vous avez écouté votre déposition, celle que vous avez faite dans
9 l'affaire Popovic, est-ce que vous pouvez confirmer aujourd'hui que lorsque
10 vous l'avez réécoutée, vous n'y avez trouvé aucune erreur, que le compte
11 rendu correspondait donc à la réalité ?
12 R. Oui, il était exact.
13 Q. Merci. Et pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre, Monsieur, je vous
14 prie, si l'on devait aujourd'hui vous poser les mêmes questions qu'à
15 l'époque, est-ce que vos réponses seraient les mêmes qu'à l'époque ?
16 R. Je donnerais les mêmes réponses aux mêmes questions.
17 Q. Merci.
18 M. NICHOLLS : [interprétation] Eh bien, sur ces mots, Monsieur le
19 Président, je demande le versement au dossier du document 22402A avec
20 conservation sous pli scellé. Il s'agit de la déposition faite par ce
21 témoin dans l'affaire Popovic les 1er et 2 novembre 2007. Et je demande
22 également le versement au dossier du document 22402B, qui est la version
23 publique de ce même compte rendu d'audience.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux versions sont admises en tant
25 que pièces à conviction.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 22402A devient la pièce
28 P3939, à conserver sous pli scellé; et le document 22402B devient la pièce
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1 P3940.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
3 M. NICHOLLS : [interprétation]
4 Q. Monsieur, avant de vous poser des questions, je vais donner lecture
5 d'un bref résumé de votre déposition, après quoi je vous poserai mes
6 questions.
7 R. Très bien.
8 M. NICHOLLS : [interprétation] Le témoin est né dans un petit hameau de la
9 municipalité de Srebrenica. Il a grandi dans la municipalité de Srebrenica,
10 a élevé une famille à cet endroit et y a résidé jusqu'au 11 juillet 1995.
11 Aux environs de 17 heures ce jour-là, il rentrait du travail, il avait
12 ramassé du foin, et il a entendu dire que Srebrenica était tombée. Il a
13 entendu cela de la bouche d'un voisin qui lui a dit qu'un membre de la
14 protection civile avait déclaré que les personnes âgées et les infirmes
15 devaient se rendre à la base des Nations Unies de Potocari et que les
16 jeunes gens en âge militaire, en revanche, devaient essayer de sauver leur
17 vie en passant par la forêt.
18 Il s'est donc mis en chemin vers la base de la FORPRONU en compagnie
19 de son épouse, de sa fille, de sa belle-fille et de sa petite-fille. Il a
20 fait ce voyage à dos de cheval en raison de la mauvaise blessure qu'il a
21 reçue à la jambe qui lui rend la marche difficile. Ils sont tous arrivés à
22 Potocari alors que la nuit était déjà tombée et qu'il se trouvait là déjà
23 un grand nombre d'autres personnes. Ils ont passé la nuit du 11 au 12
24 juillet sur le parking de l'usine Sacmara, non loin de la base de la
25 FORPRONU. Le parking était bondé, de nombreuses personnes s'y trouvaient.
26 Le matin du 12 juillet, il a entendu dire qu'un transport avait été
27 organisé à destination de Tuzla. Alors qu'il attendait, il a vu des soldats
28 serbes qui se dirigeaient vers les usines situées non loin de la base de la
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1 FORPRONU en mettant le feu aux meules de foin pendant leur avancée. Aux
2 environs de 14 heures, les premiers autobus et les premiers camions sont
3 arrivés. Lui s'est dirigé vers la grand-route, où il a vu des barrages. Sur
4 le sentier étroit qui conduisait à l'endroit où les autobus et les camions
5 attendaient, il a vu des soldats de la FORPRONU qui étaient alignés. Un peu
6 plus bas, il a vu des soldats serbes portant l'uniforme de camouflage,
7 alignés non loin des autobus et des camions.
8 Le témoin a déclaré dans sa déposition qu'il n'a même pas pu réussir
9 à s'approcher des autobus. Alors qu'il s'approchait de ces autobus avec sa
10 famille, un soldat serbe l'a pris par l'épaule et lui a ordonné : "Va vers
11 la gauche." Il a donc été séparé de sa famille à ce moment-là. On l'a mis
12 de côté et on lui a donné l'ordre de rejoindre un groupe d'autres hommes
13 âgés qui avaient déjà été séparés des autres. Il a vu d'autres hommes qui
14 continuaient à se faire séparer de leurs familles. Il a été détenu avec
15 environ une vingtaine d'autres hommes d'âgés. Ils étaient gardés par cinq
16 ou six soldats serbes en uniforme de camouflage et armés de fusils
17 automatiques.
18 Les soldats ont escorté les hommes qui avaient été séparés de leurs
19 familles jusqu'à une maison dont la construction était inachevée qui se
20 trouvait non loin de la grand-route. Alors qu'un nombre de plus en plus
21 important de prisonniers arrivait, ils remplissaient la pièce dans laquelle
22 il se trouvait, et certains ont été contraints de rester à l'extérieur. A
23 un certain moment, le général Mladic a parlé aux prisonniers en leur disant
24 qu'il avait besoin de 180 hommes pour un échange. Tous les prisonniers qui
25 avaient été amenés dans la maison étaient des personnes âgées ou
26 handicapées, tout comme le témoin. Certaines de ces personnes avaient même
27 des cannes. Pendant les heures de leur détention dans cette maison, les
28 prisonniers n'ont reçu aucuns vivres et aucune eau.
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1 Alors que la nuit tombait, les hommes ont été placés à bord de deux
2 autobus qu'on a remplis complètement. Les autobus étaient bondés, il n'y
3 avait pas suffisamment de place pour que tous les prisonniers puissent
4 s'asseoir. Ils ont été conduits à Bratunac, et là ils ont rencontré dix ou
5 15 soldats devant un entrepôt abandonné, non loin d'une école. Le témoin a
6 appris par la suite que l'école s'appelait l'école Vuk Karadzic. Les
7 prisonniers ont été emmenés à l'intérieur de l'entrepôt et on les a
8 contraints de s'asseoir alors que les soldats gardaient l'entrée de
9 l'entrepôt. Les hommes ont continué à être amenés à l'intérieur de
10 l'entrepôt jusqu'aux environs de minuit, et à cette heure-là l'entrepôt
11 était plein. Le témoin estime qu'il y a eu à peu près 400 prisonniers
12 détenus dans cet entrepôt, qui étaient tous des hommes âgés et/ou infirmes.
13 Ils ont été maintenus dans une chaleur suffocante, et l'entrepôt était
14 bondé, sans recevoir d'eau ou de quoi manger. On répondait à leurs plaintes
15 par des menaces et de la violence.
16 Toute la nuit du 12 juillet, les soldats serbes ont emmené environ 40
17 prisonniers hors de l'entrepôt. Le témoin a entendu des coups, des plaintes
18 et des cris. Certains hommes sont rentrés dans la pièce avec du sang sur
19 eux. Cinq hommes sont morts pendant la nuit. Le témoin se rappelle deux
20 prisonniers en particulier qu'on a fait sortir de l'entrepôt. Le premier,
21 Ibran Mustafic, n'est pas revenu. Le témoin a pensé qu'Ibran Mustafic avait
22 été assassiné; mais quelque temps après avoir fui pour se diriger vers le
23 territoire sous contrôle musulman, il a appris que M. Mustafic n'avait pas
24 été tué. Le deuxième homme, Hamed Efendic, a été emmené hors de l'entrepôt,
25 et le témoin a entendu des coups de feu, et à ce moment-là il a entendu des
26 soldats qui disaient : "Vous pouvez l'emporter. Il est fini. Il est mort."
27 Le lendemain matin, le matin du 13 juillet, les prisonniers ont reçu
28 de l'eau. Ils ont été autorisés à déplacer les corps des hommes qui étaient
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1 morts dans l'entrepôt. Le témoin n'a pas participé à l'enlèvement des
2 cadavres, mais ceux qui l'ont fait, lorsqu'ils sont revenus, ont décrit une
3 pile de cadavres qu'ils ont vus derrière l'entrepôt. Ce matin-là également,
4 des soldats serbes ont exigé que les prisonniers rendent leurs objets de
5 valeur et autres objets personnels, y compris leur carte d'identité.
6 Pendant la journée, les soldats ont continué à appeler des prisonniers pour
7 qu'ils sortent de l'entrepôt et ils ont continué à les tuer. Le témoin a
8 personnellement vu un homme qui se faisait tuer par des soldats. Le
9 prisonnier a été touché par un soldat à l'aide d'une barre métallique,
10 après quoi un autre soldat a frappé le prisonnier dans le dos avec une
11 hache. Le témoin estime que pendant toute la journée du 13 juillet, 40
12 hommes à peu près ont encore été tués.
13 Dans la soirée du 13 juillet, le général Mladic est arrivé dans
14 l'entrepôt et a dit aux prisonniers qu'ils seraient échangés. A ce moment-
15 là, 296 prisonniers ont été dénombrés. Peu après, six autobus sont arrivés,
16 et les prisonniers ont reçu l'ordre de monter à bord de ces autobus. La
17 sécurité était assurée dans chacun de ces autobus par un soldat serbe armé
18 d'un fusil automatique. Il faisait jour lorsque les prisonniers sont montés
19 à bord des autobus. Ils y sont restés un certain temps jusqu'à ce que les
20 lumières s'allument à Bratunac. Le convoi d'autobus est parti de Bratunac
21 aux environs de 20 heures ou 21 heures dans la soirée du 13 juillet, alors
22 que la nuit était en train de tomber. Il s'est arrêté à Drinjaca, en
23 chemin, avant de poursuivre sa route vers le nord en traversant Zvornik en
24 direction de Karakaj. Le convoi a ensuite pris un virage à gauche pour se
25 diriger vers l'ouest, vers une école. Le témoin estime que les prisonniers
26 sont arrivés à l'école peu après minuit, aux environs de 2 heures du matin,
27 dans les premières heures de la matinée du 14 juillet. Dix ou 15 soldats
28 serbes ont rencontré les prisonniers. Lui-même et les autres prisonniers
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1 sont descendus des autobus et ont pénétré dans la salle de sport de
2 l'école. Les prisonniers n'ont pas reçu d'eau ou de vivres, et alors que
3 leur nombre s'accroissait à l'intérieur de la salle de sport, les
4 conditions de vie y sont devenues pires. Certains hommes étaient contraints
5 de rester assis sur les genoux d'autres hommes, et l'atmosphère est devenue
6 suffocante. Les soldats serbes ont ordonné aux prisonniers de continuer à
7 se presser les uns contre les autres pour que davantage de prisonniers
8 puissent entrer dans la salle. Les soldats ont menacé de tirer des coups de
9 feu sur les prisonniers et en ont tirés au dessus de leur tête. Un
10 prisonnier qui se plaignait des conditions en vigueur a été emmené par un
11 soldat, le témoin a entendu des coups de feu et le prisonnier en question
12 n'est jamais revenu. Selon ce que se rappelle le témoin, le dernier des
13 prisonniers est arrivé aux environs de 10 heures du matin le 14 juillet. Le
14 témoin estime qu'à ce moment-là près de 2 500 prisonniers se trouvaient
15 dans l'école. Le témoin se rappelle qu'à un certain moment le général
16 Mladic est arrivé dans l'école et a dit aux prisonniers que certains
17 d'entre eux seraient emmenés vers Fikret Abdic, et d'autres à Bijeljina.
18 Un peu plus tard, les prisonniers se sont vus placer des bandeaux sur
19 les yeux et on les a fait sortir de la salle de sport pour les entasser à
20 bord d'une petite camionnette TAM. Chaque prisonnier a reçu une gorgée
21 d'eau au moment où on lui plaçait le bandeau sur les yeux, avant de monter
22 à bord de la camionnette. Quand son tour est arrivé, le témoin est monté à
23 bord de la camionnette, qui a emprunté une route sur une courte distance
24 avant de prendre un virage pour entrer dans une clairière. Il a relevé son
25 bandeau. Le camion était suivi par un soldat armé à bord d'une voiture. Le
26 témoin a vu de nombreux cadavres alors que la camionnette poursuivait son
27 chemin et à un certain moment il a vu un autre groupe de corps. A cet
28 endroit, la camionnette s'est arrêtée et deux soldats ont ouvert le hayon
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1 arrière. Les hommes sont descendus, on leur a dit où ils devaient se tenir
2 et on leur a ordonné de rester tranquille. Le témoin se rappelle que le
3 général Mladic était présent sur le site d'exécution à côté d'une voiture.
4 Dès que la camionnette est repartie, les soldats ont ouvert le feu.
5 Le témoin n'a pas été touché. Il est tombé au sol comme d'autres
6 prisonniers qui avaient reçu une balle tout autour de lui. Alors qu'il
7 restait sans bouger, il a vu la camionnette qui revenait avec à son bord un
8 autre groupe de prisonniers. On les a fait sortir, on les a alignés en
9 quatre rangées avant de tirer sur ceux. Le témoin a vu cela se répéter à
10 plusieurs reprises. Alors que la nuit tombait, les prisonniers continuaient
11 à arriver sur le site à bord de camionnettes TAM, et les exécutions se sont
12 poursuivies à la lumière des phares de deux excavatrices qui avaient été
13 amenées sur le site pour creuser des tombes.
14 Le témoin a continué à rester tranquille sur le sol jusqu'à ce que la
15 camionnette TAM s'en aille puis revienne et que toutes les personnes qui se
16 trouvaient auparavant dans la salle de sport aient apparemment été tuées.
17 Il a appelé à haute voix pour vérifier si d'autres prisonniers avaient
18 survécu. Une seule personne a répondu et ils se sont enfuis ensemble. Dans
19 la matinée ils ont été rejoints par un troisième survivant de cette
20 exécution. Les trois hommes sont arrivés en territoire sûr le 19 juillet
21 1995, ou à peu près à cette date. Voilà, ceci met un point final au résumé
22 de votre déposition.
23 Q. Monsieur, j'aurais maintenant quelques questions à vous poser. D'accord
24 ?
25 R. D'accord.
26 Q. Vous avez entendu le résumé que je viens de faire. Sans prononcer le
27 nom du village, je vous demande s'il est exact que vous êtes né et avez
28 grandi dans la municipalité de Srebrenica ?
Page 21926
1 R. Oui, j'y suis né.
2 Q. Attendez que ma question soit terminée pour que le compte rendu soit
3 tout à fait clair. D'accord ?
4 R. [aucune interprétation]
5 Q. Est-ce que vous êtes marié et est-ce que vous aviez des enfants à
6 Srebrenica ?
7 R. Oui.
8 Q. Veuillez dire aux Juges de la Chambre pourquoi vous avez quitté
9 Srebrenica en juillet 1995 ? Qu'est-ce qui vous a poussé à partir de
10 l'endroit où vous êtes né et où vous avez passé toute votre vie ?
11 R. Eh bien, parce que notre communauté locale a été pilonnée toute une
12 journée et que la mosquée a été complètement démolie. Enfin, elle n'a pas
13 été totalement détruite, mais le minaret a été démoli. Il y avait tellement
14 d'obus que les gens se sont même cachés dans la rivière. Et quand tout cela
15 s'est arrêté dans l'après-midi, je suis allé chercher du foin. On
16 n'entendait plus de coups de feu. Et quand la nouvelle est arrivée que
17 Srebrenica était tombée et qu'il fallait que nous allions vers la base de
18 la FORPRONU, on nous a dit que Srebrenica serait prise par les soldats
19 serbes et que ces soldats serbes allaient tuer tout ce qui restait dans le
20 village. C'est pour cela que nous sommes partis. Nous avons été forcés de
21 partir, autrement nous aurions été tués. Un certain nombre de personnes
22 âgées sont restées dans le village parce qu'il n'y avait personne pour les
23 aider à partir, et ils ont tous été tués. On ne les a jamais vues à Tuzla.
24 Q. Merci, Monsieur. J'ai encore quelques questions, et nous allons parler
25 d'un autre témoignage. Alors je voudrais que nous passions à une partie
26 ultérieure de votre témoignage lorsque vous avez été gardé dans une école,
27 une fois emmené depuis Bratunac.
28 M. NICHOLLS : [interprétation] Et à cet effet, je voudrais que l'on nous
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1 montre le 65 ter 03199 sur nos écrans. Il s'agit de la page 140 au prétoire
2 électronique. Ça a été distribué, Madame, Messieurs les Juges, en copie
3 papier, les livres.
4 Q. Bien. Monsieur, je vous prie de vous pencher sur la photo que vous avez
5 sous les yeux, et dites-nous d'abord si vous y voyez clairement.
6 R. Oui, c'est clair.
7 Q. Bon. Est-ce que vous reconnaissez ce que vous pouvez voir ?
8 R. Je vois l'école et je vois une salle dans laquelle j'ai été gardé.
9 Q. Pouvez-vous nous indiquer sur cette photo l'endroit où étaient garés
10 ces camions ou camionnettes TAM.
11 R. Ici. C'est par ici qu'on est entré dans la salle. Ici il y a une porte
12 d'accès.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demanderais à ce que quelqu'un s'occupe
14 d'aider le témoin à nous marquer sur la photo les différents emplacements.
15 Q. Monsieur -- attendez un peu. Attendez un peu, s'il vous plaît. Attendez
16 d'abord ma question.
17 Veuillez mettre un cercle au niveau de l'endroit où les camions ont été
18 garés, au meilleur de votre souvenir, lorsqu'on est venus vous emmener
19 depuis l'école.
20 R. Ici.
21 Q. Bon. Ils étaient donc garés à proximité de la porte d'entrée ?
22 R. On avait placé une plateforme au niveau du sol du camion. Nous n'avions
23 pas à monter. Je n'ai pas vu les marches qu'on voit ici. Ils avaient
24 égalisé pour arriver au niveau du béton. Ils avaient mis des planches et
25 nous allions tout droit pour monter à bord de ces petits camions.
26 Q. Et est-ce qu'on pouvait voir ce qu'il y avait à l'intérieur des camions
27 en regardant depuis la porte ?
28 R. Mais on voyait des gens dans les camions, et que les camions arrivaient
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1 vides et on faisait monter les gens et s'asseyaient dedans. Ce qui fait
2 qu'une fois la camionnette pleine, on cessait de faire monter les gens, la
3 camionnette s'en allait et il y avait une voiture rouge qui les escortait.
4 Et il y avait une porte ouverte et il passait un fusil automatique par la
5 porte en disant : "Ne parlez pas, sinon je vous abattrai." Il y avait une
6 bâche sur le camion, mais derrière il n'y avait pas de bâche, on avait
7 relevé la bâche, ce qui fait que nous on pouvait voir la voiture qui nous
8 accompagnait.
9 Q. Fort bien. Je vous remercie.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais demander un versement au dossier.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais peut-être demander au témoin
12 d'ajouter une date et de mettre une signature avec un numéro qui est le
13 sien, le 39.
14 Patientez un peu.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bon.
16 M. NICHOLLS : [interprétation]
17 Q. Alors, Monsieur, je vous prie de mettre le 24.11.11, et mettre 39 en
18 guise de signature.
19 R. C'est quoi aujourd'hui ? Quelle heure il est ?
20 Q. Non, non, non, vous n'avez pas à mettre l'heure. Vous mettez 11 pour le
21 mois, 11 pour l'année.
22 R. [Le témoin s'exécute]
23 Q. Je crois que c'est bon. Et maintenant mettez un numéro 39 qui est le
24 vôtre.
25 R. [Le témoin s'exécute]
26 Q. Merci.
27 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demande un versement au dossier.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sera versé au dossier.
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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3941, Madame, Messieurs
2 les Juges.
3 M. NICHOLLS : [interprétation] En réalité, nous allons demander plus tard
4 le versement au dossier du livre entier, enfin je ne sais pas comment
5 procéder au mieux. Mais étant donné que ça vient d'être annoté par le
6 témoin, on en fera une pièce distincte. Merci.
7 Q. Monsieur, je voudrais vous montrer maintenant une autre photo, page 160
8 de la même pièce à conviction. C'est bon. Monsieur, je vais vous demander
9 de procéder au même exercice. Voyons d'abord si vous voyez clairement la
10 photo qui vous est montrée.
11 R. Oui, je vois clairement.
12 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous voyez ?
13 R. Je vois le passage par lequel on nous a fait passer. C'est un passage à
14 niveau et on est passés en dessous et on a traversé le pré et on était à
15 peu près ici. C'est là qu'on nous a fait descendre et c'est là qu'il y a eu
16 les exécutions, par ici. C'était juste devant la forêt. La forêt était dans
17 notre dos.
18 Q. Fort bien. Merci, Monsieur. Avec un stylet, j'aimerais que vous
19 indiquiez avec un cercle ou une figure ovale, au meilleur de vos
20 connaissances, l'endroit où vous étiez debout lors de ces exécutions.
21 R. Eh bien, c'était par ici.
22 Q. Merci. Une fois de plus, j'aimerais que vous mettiez la date 24.11 en
23 bas, et le numéro 39 pour vous identifier.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demande si le témoin pourrait
25 indiquer la route par laquelle ils sont passés pour arriver.
26 Est-ce que vous pouvez vous en occuper, Monsieur le Témoin ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux le faire, mais on est partis
28 d'ici. C'est, donc, sur la droite de la photo. On est passés par les prés.
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1 Là, on ne pouvait pas passer par la montée. C'était une montée ici. Alors
2 j'ai demandé une pente plus petite pour remonter. C'est donc -- j'ai suivi
3 le pré et ensuite je suis monté. Il y avait plus de forêts là, et là, il y
4 avait trop -- enfin des arbustes très petits. Ça gênait quand on marchait.
5 M. NICHOLLS : [interprétation]
6 Q. Bien --
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin nous a dit que la voie ferrée
8 était en haut et on est passés en dessous et on a traversé les prés, alors
9 j'aimerais que l'on tire au clair les choses.
10 Vous êtes passés sous la voie ferrée, n'est-ce pas ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.
13 Je reviens à vous, Monsieur Nicholls.
14 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
15 Je demande un versement au dossier de cette pièce, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, veuillez mettre un 39 aussi,
19 en bas.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici ?
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier. Ce sera la
22 pièce P3942.
23 M. NICHOLLS : [interprétation]
24 Q. Monsieur, dans votre déclaration du 21 juillet 1995, donc quelques
25 jours après être arrivé sur le territoire contrôlé par les Bosniens, vous
26 avez été à même de nommer six hommes qui ont été à bord du même petit
27 camion TAM avec vous sur le site d'exécution. Vous souvenez-vous des noms
28 de ces six hommes, et que vous connaissiez, et j'aimerais que vous les
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1 indiquiez maintenant aux Juges de la Chambre ?
2 R. Il y avait Jakub Karic [phon], et Ljubovic Suljo, Mehmedovic Ismet --
3 non, Izet, Izet, Hasanovic Hasib, il y avait Gabelic Sefko, et il y avait
4 Tursunovic Adil. Il y en avait encore, mais ça, c'étaient des gens, des
5 proches, des gens qui étaient avec moi.
6 Q. Et savez-vous nous dire si l'un quelconque de ces individus que vous
7 aviez connus aurait survécu aux exécutions ?
8 R. Il n'y en a pas un seul à survivre. Il y a Ibrahim Mustafic à avoir
9 survécu. Il a été le seul parmi des milliers.
10 Q. Merci, Monsieur. Je n'ai plus de questions pour vous à présent.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, nous allons faire une pause de
12 25 minutes.
13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après quoi, vous serez contre-interrogé
15 par M. Radovan Karadzic. Mais avant que de faire ceci, je voudrais dire
16 qu'il devrait y avoir plusieurs pièces auxiliaires demandant un versement.
17 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous des objections, Monsieur
19 Robinson ?
20 M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ce sera versé et on leur donnera
22 une cote en temps utile.
23 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 25
25 minutes et nous allons reprendre à 18 heures.
26 --- L'audience est suspendue à 17 heures 34.
27 --- L'audience est reprise à 18 heures 01.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous ne commencions, Monsieur
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1 le Témoin, lorsque vous répondez aux questions de M. Karadzic, je vous
2 demande de faire une petite pause avant que de commencer à répondre, parce
3 que vous parlez tous les deux la même langue.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Certes.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Afin que vos réponses soient
6 correctement interprétées, veuillez patienter un peu avant de répondre.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Fort bien.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
10 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
11 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
12 R. Bonjour.
13 Q. Bon, ça, c'est un bon exemple de la façon dont il ne faut pas procéder.
14 Vous devez patienter un peu.
15 R. [aucune interprétation]
16 Q. Est-il exact de dire que deux jours après votre sortie sur le
17 territoire tenu par l'ABiH, vous avez fait une déclaration, et quatre jours
18 plus tard, une deuxième déclaration encore, à Zivinice ainsi qu'à Tuzla ?
19 R. Je ne m'en souviens pas. J'ai donné des déclarations. Où et quand, je
20 ne m'en souviens plus.
21 Q. Bon. Moi, je patiente que pour que vous soyez interprété, que vos
22 propos soient interprétés. C'est pour cela que je fais une pause, et
23 j'espère que vous comprenez pourquoi.
24 Alors, lorsque vous avez fait ces déclarations, vous les avez
25 signées, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Avez-vous été un soldat de l'ABiH ?
28 R. Oui.
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1 Q. Cependant, la première déclaration du 21 juillet, vous aviez dit que
2 vous étiez un civil et que vous n'aviez pas eu d'engagement militaire et
3 que vous n'aviez pas disposé d'arme; c'est bien ce que vous avez dit ?
4 R. Je n'avais pas d'arme. Je n'avais pas de vêtements, si ce n'est les
5 miens, et je travaillais dans la cuisine.
6 Q. Merci. Mais à Tuzla, quatre jours plus tard, c'est-à-dire le 22
7 juillet, vous avez fait une déclaration pour dire que vous aviez été membre
8 de l'ABiH jusqu'à la démilitarisation de Srebrenica, et c'est là que vous
9 aviez restitué vos armes; c'est bien cela ?
10 R. Je ne sais pas ce qui a été écrit. Alors, quand on a restitué les armes
11 et quand il a eu une démilitarisation, mais jusque-là j'étais attribué à la
12 cuisine. La cuisine a été démantelée, donc je n'en faisais plus partie
13 puisqu'il n'y avait plus eu de cuisine.
14 Q. Auprès de quelle unité vous trouviez-vous s'agissant de cette cuisine ?
15 Et si vous pensez que ça risque de vous identifier, nous pouvons passer à
16 huis clos partiel. Est-ce que vous voulez que nous passions à huis clos
17 partiel ou est-ce que vous pouvez nous dire dans quelle unité vous aviez
18 été intégré à la cuisine ?
19 R. Ecoutez, je ne sais pas comment ça s'appelait, cette unité. C'était
20 l'unité qui se trouvait à Suceska, et j'étais rattaché à cette unité-là.
21 Q. Merci. Etait-ce la 283e ou la 284e ?
22 R. Je ne saurais pas vous le dire. Si ça a été le cas, moi je veux bien
23 tomber d'accord.
24 Q. Merci. Est-ce que le commandant de l'unité était Zulfo Tursunovic ?
25 R. Ah oui. Oui, Zulfo Tursunovic.
26 Q. Est-ce exact de dire que Zulfo Tursunovic avait quatre années d'école
27 primaire ?
28 R. Ça, je ne sais pas. Je ne pourrais pas te le dire. Combien d'années de
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1 classe il avait fait, ça, je ne le sais vraiment pas.
2 Q. Est-ce que quelqu'un dans votre famille avait servi comme soldat dans
3 son unité ?
4 R. Oui, pendant un certain temps, son fils, puis il est passé enseigner à
5 l'école. Lorsqu'on avait commencé à créer des écoles, il est devenu
6 enseignant dans une école.
7 Q. Merci. Où avez-vous eu des activités de combat, vous, cette unité ?
8 R. On s'est défendu seulement à Suceska. Je ne sais pas s'il y a eu des
9 activités de combat du tout.
10 Q. Merci. Ne mentionnez pas le nom de votre hameau, parce que Suceska
11 c'est une communauté locale, n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. A quelle distance se trouve Suceska de la ville, de la bourgade de
14 Srebrenica ?
15 R. Ça se trouve à 14 ou 15 kilomètres.
16 Q. Merci. Mais ça c'est par la route, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, oui, par la route.
18 Q. Et cette route, elle continue quelque part, n'est-ce pas ?
19 R. Elle continue vers Derventa et Milici.
20 Q. Merci. Est-ce que c'est là que l'on avait établi une ligne de
21 démarcation ? Est-ce que c'est là que la ligne de conflit se trouvait ?
22 R. Oui.
23 Q. Et quelle était la brigade du côté serbe qui se trouvait en face de
24 vous ?
25 R. Ça, je ne le sais pas. Mais c'est vous qui le savez, cela.
26 Q. Etait-ce peut-être la Brigade de Milici ?
27 R. Milici, c'est ce qu'il y avait de plus près. Mais comment ils
28 s'appelaient au juste, je l'ignore.
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1 Q. Et cette ligne était gardée, maintenue, jusqu'à mars ou avril 1993,
2 n'est-ce pas ?
3 R. Est-ce qu'elle a été gardée ou maintenue, je ne le sais pas, mais je
4 sais qu'il y a eu une démilitarisation après.
5 Q. Merci. Mais même après cela, il y a eu une ligne de démarcation vis-à-
6 vis des Serbes, n'est-ce pas ?
7 R. Une ligne où l'on n'a fait qu'observer.
8 Q. Observer la Brigade de Milici, mais la Brigade de Milici aurait pu
9 passer à côté de ces observateurs de façon aisée ?
10 R. Ah, c'était la FORPRONU, là. La FORPRONU nous a protégés.
11 Q. Merci. Est-il exact de dire que Zulfo Tursunovic, en 1995, était
12 l'adjoint de Naser Oric, et Naser Oric, lui, était le commandant de la 28e
13 Division ?
14 R. Etait-ce un suppléant, je ne le sais pas. Mais Naser Oric était, en
15 effet, le commandant.
16 Q. Merci. Et cette division, combien comptait-elle de -- cinq brigades et
17 un bataillon autonome, n'est-ce pas ?
18 R. Ça, je l'ignore, parce que moi je ne suis pas allé là-bas et je ne sais
19 pas ce qui s'y trouvait.
20 Q. Merci. Et Zulfo Tursunovic était un homme comment de par sa nature ? Il
21 était comment à l'égard des Serbes ?
22 R. Allez à Milici, demandez à ceux qui ont été capturés et emprisonnés, et
23 vous le savez fort bien. Vous savez comment les nôtres qui ont été capturés
24 ont été exécutés, et les autres, comme des messieurs, ils mangeaient de la
25 viande et ils buvaient avec eux toute la nuit et ils injuriaient vos
26 soldats : "Qu'avez-vous fait de vos voisins ?" Et on nous a affirmé que :
27 "On a passé la nuit chez Zulfo comme des seigneurs."
28 Q. Merci. Vous mentionnez une démilitarisation. Est-ce que ça s'est
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1 produit lorsque Srebrenica est devenue une zone protégée, et est-ce que ça
2 a été véritablement démilitarisé ?
3 R. On dit que oui. Moi, je ne suis pas allé démilitariser et je n'avais
4 pas à m'en préoccuper, vous savez. Ça, c'est une question qu'il faut poser
5 à quelqu'un d'autre.
6 Q. Merci. C'est ce qu'on fera. A l'époque de la démilitarisation, ça a été
7 un groupe, 8e Groupe opérationnel, et après la démilitarisation c'est
8 devenu la 28e Division; exact ?
9 R. Mais je l'ignore aussi, ça.
10 Q. Bon. Maintenant nous arrivons aux événements critiques. Vous avez dit -
11 et vous avez répété aujourd'hui à l'occasion de l'interrogatoire principal
12 - que quelqu'un était venu pour vous dire que Srebrenica était tombée ou
13 qu'elle allait tomber et que ceux qui n'étaient pas des combattants
14 devaient aller à Potocari ?
15 R. C'est exact. On nous a dit que Srebrenica était tombée.
16 Q. Merci. Mais est-ce que vous pouviez aller à Potocari sans avoir à
17 passer par Srebrenica ?
18 R. Oui. J'ai pris une autre route. Je suis passé par les collines. Je ne
19 suis pas allé le long de la route.
20 Q. Etait-ce plus long comme route ?
21 R. Non, c'était plus près.
22 Q. Merci. Et à quelle distance se trouvait la ligne de démarcation de
23 votre village et de votre hameau ?
24 R. Il y avait un ruisseau qui nous séparait, mais je n'ai pas mesuré la
25 distance.
26 Q. Merci. Mais est-ce que vous pouviez voir des soldats serbes de l'autre
27 côté du ruisseau ?
28 R. Mais de l'autre côté, à la colline, j'en voyais autant que vous
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1 vouliez. Ils avaient trois chars, un obusier et quelques mortiers. Et on a
2 pu voir cela.
3 Q. Alors, nous ne sommes pas en train de parler du mois de juillet, mais
4 vous les avez vus entre la démilitarisation et l'année 1995 ?
5 R. Après, je ne sais pas combien ils étaient, où est-ce qu'ils étaient. Je
6 n'ai plus demandé s'il y avait eu quelqu'un là-bas ou pas.
7 Q. Merci. Lorsque vous êtes allé là-bas, vous avez vu des meules de foin
8 en train de brûler.
9 R. C'était des meules de foin appartenant à des Musulmans.
10 Q. Merci. Mais ça a été utilisé pour quoi faire ?
11 R. Eh bien, moi je voudrais vous le demander. Je ne sais pas.
12 Q. Non, non, Monsieur le Témoin. Je ne veux pas vous demander pourquoi on
13 a mis le feu, mais à quoi ça servait, ces meules de
14 foin ?
15 R. Mais pour le bétail. Mais moi je m'étais dit que vous me demandiez
16 pourquoi on y avait mis le feu. Je croyais que c'était ça la question.
17 Q. Merci. Mais là-bas, la population est une population agricole ?
18 R. Oui.
19 Q. Aviez-vous eu du bétail ?
20 R. Oui.
21 Q. Qu'avez-vous eu comme bétail ?
22 R. Est-ce qu'il faut que je vous le raconte ?
23 Q. Oui, j'aimerais bien.
24 R. J'avais deux vaches, une vingtaine de moutons et un cheval.
25 Q. Et dans les autres hameaux, les autres, ils avaient quoi ?
26 R. Certains avaient un peu plus de bétail, d'autres en avaient un peu
27 moins.
28 Q. Mais aucune famille villageoise n'était là-bas sans
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1 bétail ?
2 R. Non.
3 Q. Bon. Alors, on a mis le feu avant d'avoir coupé le foin; c'était le
4 foin de l'année passée, n'est-ce pas ?
5 R. Non, non, c'était le foin nouveau qui a été incendié. Parce qu'on a
6 coupé les foins et on avait aussi récolté le blé déjà.
7 Q. Merci. Ah, il y avait du blé. Mais qu'est-ce qui pousse encore dans
8 votre région ?
9 R. Du maïs, du blé, on a des fruits et on a du tabac.
10 Q. Le tabac pousse aussi ?
11 R. Oui, oui, ça pousse.
12 Q. Bon. Ça, c'est ce qui vous concerne. Est-ce que vous vendiez vos
13 excédents ?
14 R. Des excédents de foin ou de quoi ?
15 Q. Non. Des produits tels que fromage, lait, viande, blé et maïs ?
16 R. Non, je ne vendais pas. C'était pour moi et ma famille.
17 Q. Merci. Mais y avait-il des gens qui produisaient plus; et si oui, que
18 faisaient-ils avec ?
19 R. Tous les réfugiés de Vlasenica et de Han Pijesak, on les nourrissait.
20 Ils ont tout mangé. On n'a rien vendu. Et il y avait des réfugiés venus de
21 cinq municipalités, y compris celle de Bratunac.
22 Q. Merci. Alors, vous nous dites que vous avez vu beaucoup de gens à
23 Potocari. Et vous, c'est ce que vous avez confirmé aujourd'hui et même
24 avant, on vous a emmené vers un immeuble avec 40 ou 50 autres hommes,
25 n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Et c'est le 12 ou le 11 au soir que vous êtes arrivé, au fait ?
28 R. Le 11 au soir.
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1 Q. Merci. Et ce mercredi 12, le général Mladic a rendu visite à cet
2 immeuble, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Donc il est entré en se promenant, avez-vous dit dans une déclaration,
5 il a dit : Bonjour les voisins, vous savez qui je suis, n'est-ce pas ? Et
6 il vous a demandé ce que vous faisiez avec Alija. Et il vous a proposé de
7 rejoindre les rangs des unités à Fikret Abdic, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce que vous pouvez expliquer aux Juges de la Chambre qui était
10 Fikret Abdic, surnommé Babo ?
11 R. Fikret Abdic était à Velika Kladusa. Je ne sais pas trop ce qu'il avait
12 comme fonction. Il était directeur d'Agrokomerc. Après, je ne sais plus ce
13 qu'il a été.
14 Q. Je vais vous aider. Etait-ce un notable Musulman ? Est-ce qu'il a fait
15 partie de la présidence et avait eu le plus de votes ?
16 R. Oui, et il s'est désisté de son pouvoir pour le rétrocéder à Alija.
17 C'est lui qui avait gagné aux élections.
18 Q. Bon. Alors, vous avez conclu du fait que Mladic était favorable à vous
19 voir rejoindre les rangs d'Abdic, et non pas d'Izetbegovic; c'est bien cela
20 ?
21 R. Oui.
22 Q. Merci. Et vous avez dit qu'il a été fort agréable en s'adressant à
23 vous, qu'il a été assez gentil et qu'on pouvait lui faire confiance ?
24 R. On lui a demandé pourquoi on nous mettait de côté, alors il a dit qu'il
25 y avait 180 Serbes d'emprisonnés à Tuzla et il ne pouvait pas les sortir de
26 là-bas, donc il fallait qu'il emprisonne lui aussi des gens pour pouvoir
27 les échanger.
28 Q. Merci. Et il était vêtu comment ?
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1 R. Il avait un uniforme de camouflage, il y avait des macarons de grade
2 dessus, mais il n'avait pas de couvre-chef.
3 Q. Et les grades, ils étaient où ?
4 R. Sur les manches. Je ne sais pas s'il y avait des macarons au niveau des
5 épaules. Je ne sais pas trop. Je sais qu'il y avait eu des macarons de
6 grade.
7 Q. A quelle heure, le 12 juillet, le général Mladic est-il entré dans
8 cette maison-là ?
9 R. Je ne peux pas être trop certain. Je pense qu'il devait être 6 heures
10 ou 7 heures. Bon, il restait peut-être encore deux heures de jour avant que
11 la nuit ne tombe.
12 Q. Et il n'est pas resté longtemps ?
13 R. Non. Il a repris le même chemin pour retourner vers la route.
14 Q. Merci. Maintenant, disons ceci : on vous a emmené de là à Bratunac. Ce
15 qui m'a prêté à confusion dans l'interprétation de M. Nicholls, c'est que
16 vous auriez dit qu'on vous avait transférés à bord de deux camionnettes et
17 que ces deux camionnettes étaient surchargées. Alors, combien étiez-vous et
18 combien pouvait-on faire monter de gens sur ces camions ?
19 R. Ah, non, on n'était pas dans des camions. On était dans des autocars.
20 Q. Et ils étaient comment ?
21 R. Je ne les ai pas mesurés. C'étaient des autocars normaux. Nous étions
22 certainement 70 à bord d'un autocar. C'était plein à craquer.
23 Q. Ah, ce n'est pas les 40 ou 50 qui étaient dans la maison; il y avait
24 d'autres individus ?
25 R. Mais autour de la maison, il y en avait encore. On a mis au rez-de-
26 chaussée autant qu'on pouvait en mettre, mais il y en avait à côté de la
27 maison et le long de la maison. On les faisait descendre à côté de la
28 maison.
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1 Q. Ils étaient assis, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Ils étaient assis autour de la maison. Je crois que les interprètes
4 n'ont peut-être compris le terme local de "sidjali [phon]" pour "être
5 assis".
6 R. Oui, oui, ils étaient assis.
7 Q. Alors, ils vous ont amenés à Bratunac. Où, au juste ?
8 R. Avant la gare routière de Bratunac, quand on montait par la route, ils
9 ont d'abord tourné vers Kravica. Et avant la gare routière, ils ont pris à
10 droite. On est passé à côté d'une école et à côté d'un entrepôt.
11 Q. Est-ce que vous avez été installé dans cet entrepôt alors ?
12 R. Oui, oui.
13 Q. Ce n'était pas une école, n'est-ce pas ?
14 R. Non, non.
15 Q. Serait-il exact de dire qu'on vous a expliqué à Tuzla ce que c'était
16 que cet immeuble, cet édifice ?
17 R. Oui. Des gens de Bratunac que j'ai retrouvés à Tuzla, ils me l'ont
18 expliqué.
19 Q. Alors, ils vous ont expliqué à Tuzla autre chose, à savoir où se
20 trouvaient les lieux d'exécution, et ils vous ont décrit la clôture et ce
21 passage de voie ferrée ?
22 R. Oui. Il y a une salle de sport où certains jouaient au basket-ball.
23 Q. Qui est-ce qui vous a décrit tout cela ?
24 R. Je n'arrive pas à me souvenir des individus, c'étaient des Bosniens y
25 demeurant.
26 Q. Est-ce qu'eux aussi on les avait emmenés là-bas, aussi savaient-ils où
27 vous aviez été emmené ?
28 R. Non. Ils m'ont dit qu'en temps de paix, ils allaient là-bas pour jouer
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1 au basket.
2 Q. Est-ce qu'ils vous l'ont décrit avant vous ne fassiez votre déclaration
3 du 21 juillet ou est-ce que ça vous a été décrit après ?
4 R. Ça, je ne le sais pas vous le dire au juste.
5 Q. Alors, cet entrepôt, le premier où vous avez été enfermé, quelle était
6 sa taille ?
7 R. A Bratunac, vous voulez dire ?
8 Q. Oui.
9 R. Mais je ne peux pas vous donner les dimensions. Mais je dirais que nous
10 étions 400 environ à avoir été entassés dedans.
11 Q. Mais quelle était la taille de l'entrepôt si vous avez pu être 400
12 dedans ?
13 R. Je ne sais pas vous le dire maintenant. Si vous ne le savez pas, je ne
14 sais pas non plus. Il se peut qu'à l'époque je le savais, mais maintenant
15 je ne sais pas vous le dire.
16 Q. Bien. Mais je suis un peu dans la confusion. On vous avait dit que
17 c'était un entrepôt appartenant à une coopérative, mais qu'est-ce que vient
18 faire l'école de Vuk Karadzic ici ?
19 R. L'école, c'est dissocié. Ce n'est pas tout près. Je vous l'ai dit, on
20 est passé à côté de l'école. On m'a demandé par où vous êtes passé, alors
21 j'ai dit qu'on est passé à côté d'une école, puis ensuite il y avait un
22 entrepôt. L'entrepôt n'était pas à côté de l'école.
23 Q. Vous, à Tuzla, on vous a indiqué que c'était un entrepôt appartenant à
24 une coopérative ?
25 R. Oui. Puis il y avait un entrepôt de la coopérative à Kravica, et là
26 aussi il y en a eu beaucoup de tués. Et puis cet entrepôt, on l'a quitté,
27 celui de Bratunac.
28 Q. Donc vous n'avez pas été détenu dans l'école Vuk Karadzic; c'est bien
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1 cela ?
2 R. Non, je n'y étais pas.
3 Q. Vous nous dites que dans l'entrepôt vous étiez 400 et que vous avez été
4 gardés par deux soldats ?
5 R. Non, pas deux soldats. Il y avait un soir où il y avait quelqu'un qui
6 avait donné des ordres : "Vous 12, vous devez exécuter les ordres. Est-ce
7 que c'est bien compris ?" Et tous ont dit : "Compris." Et puis ils ont
8 commencé à faire sortir des gens et à les abattre.
9 Q. Attendez, on y viendra. On y viendra.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi, mais à partir de
11 maintenant, je vais demander à ce que l'on donne des citations, "vous avez
12 dit" ou "dans votre déclaration", enfin qu'on nous le dise. Merci.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Mais si j'ai bien compris, M. Nicholls a dit dans son résumé que le
15 témoin avait été détenu dans l'école de Vuk Karadzic. Alors, quelle est la
16 ligne, je peux vous dire que ça se trouve entre la ligne 58 et 68 -- non,
17 non, excusez-moi, pas la ligne. La page 58 et la page 68.
18 Alors, quelle était la hauteur des murs de cet entrepôt ?
19 R. Peut-être 4 mètres. Je n'en suis pas trop sûr.
20 Q. Merci. Vous avez bien dit, n'est-ce pas, qu'au niveau du mur, il y
21 avait une fenêtre avec une vitre avec un grillage métallique dedans ?
22 R. Oui, là-haut.
23 Q. Alors, on ne pouvait pas voir par cette fenêtre; elle était trop haut
24 placée ?
25 R. Non, on n'y voyait rien. Rien.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour que tout soit clair, je ne crois
27 pas que M. Nicholls ait dit que le témoin avait été détenu dans l'école
28 Karadzic, n'est-ce pas ?
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1 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est exactement ce que je souhaitais dire,
2 Monsieur le Président. Si vous regardez ce qui est écrit dans le texte que
3 j'ai lu, il est écrit que :
4 "…dix à 15 soldats serbes les ont rencontrés devant un entrepôt
5 abandonné non loin d'une école…," et que le témoin a par la suite appris
6 que l'école portait le nom de Vuk Karadzic.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, non loin d'une école de Bratunac
8 qui portait le nom de Vuk Karadzic.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Désolé. Voilà, j'ai dit en ligne 13, je cite
10 :
11 "Les hommes ont continué à être amenés dans l'entrepôt jusqu'aux
12 environs de minuit, heure à laquelle l'entrepôt était bondé."
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais quoi qu'il en
14 soit --
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes mes excuses. Apparemment, j'ai prêté
16 davantage attention à la référence à cette école de Vuk Karadzic parce
17 qu'elle m'a parue importante, et je n'ai pas fait attention au fait que le
18 témoin avait dit ne pas avoir été détenu dans cette école.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur, est-ce que vous avez été comptés dans l'entrepôt et à combien
21 de reprises ?
22 R. Une seule fois.
23 Q. A quel moment ?
24 R. Le lendemain, dans la soirée.
25 Q. Et ils ont dénombré environ 400 personnes, n'est-ce pas ?
26 R. Eh bien, 296 personnes qui étaient vivantes à ce moment-là.
27 M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai pas l'intention d'élever une
28 objection, mais M. Karadzic doit être équitable lorsqu'il pose des
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1 questions au témoin. Je ne sais pas d'où il tire que le témoin aurait dit
2 que 400 personnes auraient été dénombrées le lendemain. Or, la façon dont
3 la question est formulée permet de penser que le témoin aurait dit ce genre
4 de chose, à savoir que 400 personnes ont été dénombrées le lendemain.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Me Robinson pourra peut-être prendre la parole.
6 Je crois que c'était une page avant que le témoin ait déclaré qu'ils
7 étaient environ 400.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur, est-ce que vous n'avez pas dit il y a un instant que quelque
10 400 personnes ont été emmenées à Bratunac ?
11 R. Oui, quand j'ai dit que je pensais que c'était ça le total. Mais en une
12 nuit, il y a eu pas mal de tués - je pense que 14 personnes ont été tuées -
13 et puis, le lendemain, une dizaine de personnes ont été emmenées pour
14 charger les cadavres, et ils ne sont pas rentrés. Et les choses se sont
15 poursuivies. D'après mon évaluation, une quarantaine de personnes ont été
16 tuées de cette façon. Le lendemain, juste avant la tombée de la nuit, dix
17 autres personnes ont été emmenées à l'extérieur pour s'occuper du
18 chargement des cadavres, et ils ne sont pas revenus. Et c'est à ce moment-
19 là que j'ai dit qu'il restait dans l'entrepôt 296 personnes, mais je crois
20 qu'au départ il devait s'y trouver environ 400 personnes.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.Monsieur Nicholls, c'est la
22 façon dont vous avez résumé les choses. Selon l'estimation du témoin, il y
23 avait 400 hommes à peu près qui se trouvaient là, page 5, ligne 15 --
24 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Mais le
25 lendemain lorsqu'ils ont été dénombrés, le total est différent de celui que
26 vient de préciser le témoin. Donc le témoin estimait qu'ils étaient 400
27 environ lorsqu'ils sont arrivés à cet endroit, et ensuite, lorsqu'on les a
28 fait monter à bord d'autobus pour être emmenés ailleurs, ils étaient 296,
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1 si je me rappelle exactement le nombre cité par le témoin.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que dans le résumé vous avez
3 parlé de 269 [comme interprété] personnes.
4 Mais enfin, poursuivons, Monsieur Karadzic.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Quels meurtres avez-vous vus ? Vous avez vu une personne se faire tuer
8 dans la salle de sport, n'est-ce pas ?
9 R. Quelle salle de sport ? A Karakaj ?
10 Q. J'ai compris que quelqu'un s'était fait tuer avec une barre de fer et
11 ensuite une hache dans la salle de sport.
12 R. Oui, j'ai vu ça. Dans la matinée, ils nous ont autorisés à nous servir
13 des toilettes, qui se trouvaient dans une pièce non loin de là. Il y avait
14 un hall puis une petite pièce sur la gauche. Et lorsque nous sommes allés
15 aux toilettes, eux, ils nous mettaient une main sur l'épaule, et plus tard
16 cette personne se faisait tuer. On n'avait pas le droit de regarder. Et
17 alors que je revenais des toilettes, j'ai vu un homme qui s'est fait
18 arrêter de cette façon et on lui a dit : "Viens de ce côté." Il est allé de
19 leur côté. Il y avait trois hommes d'un côté et trois hommes de l'autre. Il
20 y en avait un autre qui tenait un fusil automatique en face de l'homme qui
21 s'approchait de lui, et il l'appelait en lui disant : "Viens par ici, viens
22 vers moi." L'homme en question a fait ce qu'on lui disait de faire, et à ce
23 moment-là il y en a un qui était sur la gauche qui l'a frappé sur le dos
24 avec une barre de fer, ou même peut-être sur la tête. Et l'homme est tombé.
25 Un autre homme qui se trouvait sur la droite avait une hache à la main, et
26 cette hache portait sans arrêt du sang sur la lame. Il la brandissait pour
27 nous montrer ce qu'il était en train de faire. Il a frappé l'homme avec la
28 hache sur le dos. Je suis parti, et la dernière chose que j'ai vue, c'est
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1 qu'il s'accrochait encore à sa hache. Il ne voulait pas retirer la hache ou
2 bien il ne pouvait plus la retirer. Quoi qu'il en soit, je suis rentré dans
3 l'entrepôt.
4 Q. Merci. Donc, ça c'est le meurtre auquel vous avez assisté. Est-ce que
5 vous en avez vu d'autres ?
6 R. J'ai entendu, j'ai entendu des gens qui disaient : "Il est mort,
7 emporte-le." Voilà ce que j'ai entendu. Et j'ai entendu aussi quand ils
8 tranchaient la gorge de certains hommes, on entendait un son de
9 gargouillis, et on entendait qu'un corps se faisait traîner sur le sol en
10 béton. C'est à ce moment-là que nous savions que quelqu'un s'était fait
11 tuer. Je n'ai pas vu cela, mais j'ai entendu les coups et les bruits.
12 Q. Hm-hm. Et vous avez aussi entendu quand Ibro Mustafic a été emmené et
13 vous en avez conclu qu'il était mort, n'est-ce pas ?
14 R. Mustafic, voilà ce que j'ai dit, quand on l'a emmené, on a entendu du
15 bruit. Il y avait quelqu'un avec nous. Ils ont commencé à crier, ensuite il
16 y a eu du silence. Et ensuite, ils ont demandé : "Qu'est-ce que tu penses
17 qu'il est arrivé à Mustafic ?" Et ce qu'il est arrivé aux autres est sans
18 doute arrivé à Mustafic également. Il doit avoir été frappé avec un objet
19 contondant, peut-être que nous n'avons pas pu entendre ce qui se passait.
20 Q. Mais vous vous rappelez, n'est-ce pas, que les Musulmans avaient essayé
21 à deux reprises d'attenter à la vie de Mustafic un mois et demi avant les
22 combats autour de Srebrenica ?
23 R. Je ne sais rien de tout cela. Posez la question à Ibrahim à ce sujet.
24 Q. Ibran a été emmené aussi, mais Ibran a survécu, et après cela il a
25 écrit le livre intitulé "Un chaos planifié", qui concerne les événements de
26 Srebrenica, n'est-ce pas ?
27 R. Je ne sais pas.
28 Q. Mais jusqu'au moment où ils vous ont dit qu'il était vivant, vous étiez
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1 certain qu'il avait été pris et qu'il s'était fait tuer, n'est-ce pas ?
2 R. Eh bien, oui, c'est ce que j'ai dit parce que je savais ce qu'il était
3 advenu à tous les autres à Bratunac.
4 Q. Merci. J'aimerais savoir pourquoi vous dites dans votre déclaration que
5 vous avez faite à Zivinice, deux jours après votre libération, qui
6 constitue le document 65 ter numéro 22369, en page 2, ainsi que dans la
7 déclaration que vous avez faite quatre jours plus tard, le document 65 ter
8 numéro 22398, dans aucune de ces déclarations vous ne mentionnez cette
9 hache, qui, pourtant, est un détail très parlant.
10 R. Je pense que j'en ai parlé dans mes deux déclarations. Je ne me
11 rappelle pas que je n'en aie pas parlé. Chaque fois qu'on me demandait si
12 j'avais été témoin d'un meurtre - et vous, vous me l'avez demandé aussi -
13 j'en ai toujours parlé. Donc, quelle que soit la personne qui me demandait
14 si j'avais vu un meurtre se produire, j'ai toujours répondu : "Oui, ça
15 c'est le meurtre que j'ai vu." Et j'ai dit que j'ai entendu que quelqu'un
16 se faisait tuer avec une arme à feu, mais que je ne l'ai entendu qu'une
17 seule fois car il n'y a eu qu'un coup de feu.
18 Q. Mais est-ce que vous avez vu quelqu'un se faire frapper au moment où le
19 coup de feu a éclaté ?
20 R. Non, je n'ai pas vu, mais j'ai entendu le coup de feu et je les ai
21 entendus dire : "Il est mort. Emporte-le jusqu'au monticule."
22 Q. Eh bien, nous vérifierons si la hache a été mentionnée dans ces deux
23 déclarations. Mais dites-moi, pourquoi est-ce que cet homme s'est fait
24 frapper avec la barre de fer ?
25 R. Quand nous sommes arrivés, il y avait l'un d'entre eux qui tenait cette
26 barre de fer à la main. La barre avait une section carrée, et cet homme
27 tenait la barre de fer à la main et nous menaçait en disant : "Voilà avec
28 quoi vous allez vous faire tuer cette nuit." Et un autre homme tenait la
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1 hache et nous menaçait lui aussi. Il avait aussi un couteau et il disait :
2 "Voilà ce dont je vais me servir pour vous trancher la gorge."
3 Q. Oui, mais pourquoi est-ce qu'il a été frappé ?
4 R. Posez la question à celui qui l'a frappé, demandez-lui pourquoi. Parce
5 que c'était un Musulman de Bosnie, c'est la seule raison pour laquelle il a
6 été frappé.
7 Q. Mais n'avez-vous pas dit dans votre déclaration à Tuzla qu'ils avaient
8 trouvé sur lui un couteau et que le soldat l'a frappé, comme vous dites,
9 avec une barre de fer, en le tuant instantanément, mais vous n'avez jamais
10 parlé d'un autre soldat ou d'une hache à ce moment-là. Donc, est-ce que ce
11 que vous avez déclaré est vrai, à savoir qu'ils avaient trouvé sur cet
12 homme un couteau qu'il cachait sur lui ?
13 R. Ils ont demandé à un homme : "Qu'est-ce que tu as sur
14 toi ?" Et ils l'ont immédiatement frappé sur place, et il est mort. Vous
15 voulez que j'entre dans les détails ? Quand ils ont découvert qu'il avait
16 un couteau sur lui -- ils l'ont découvert, et c'est à ce moment-là que ça
17 s'est passé. Mais je n'ai pas vu ce qui s'est passé parce que j'étais aux
18 toilettes, mais j'ai vu quand on l'a fait sortir dans la cour et qu'il
19 s'est fait tuer.
20 Q. Mais vous avez déclaré qu'ils avaient trouvé sur lui un couteau et que
21 c'est la raison pour laquelle il avait été frappé par une barre de fer ?
22 R. Non, ce n'est pas ça. Je n'ai pas vu de qui il s'agissait ou ce qui lui
23 est arrivé, mais ils l'ont emmené en le tirant par l'épaule et ils l'ont
24 mis de côté, à l'écart. Et un autre homme qui se tenait près de la porte a
25 dit : "Qu'est-ce que tu as dans le dos ? Enlève-le." Et ils ont découvert
26 un couteau dans le sac que portait cet homme, mais ils l'ont immédiatement
27 tiré de côté et tué à l'extérieur.
28 Q. Bon, lundi, si nous avons le temps, nous vérifierons les pages
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1 pertinentes, mais vous avez dit qu'il n'y avait pas eu de coups avant 22
2 heures, n'est-ce pas ?
3 R. Jusqu'à 22 heures, on amenait encore des gens dans l'entrepôt.
4 Q. Mais qui est-ce qui est resté avec vous après 22 heures ? Il y a des
5 soldats et des officiers qui étaient déjà partis et il y en a qui sont
6 restés.
7 R. Je ne sais pas qui étaient ces hommes. C'étaient des hommes qui se
8 trouvaient à l'endroit où il y avait la lampe électrique. Ils étaient cinq
9 ou six.
10 Q. Donc, après 10 heures du soir, il y a des hommes qui portaient des
11 lampes électriques qui sont arrivés. Est-il vrai qu'ils cherchaient des
12 personnes en particulier ?
13 R. Ils ont simplement demandé qui venait d'où. Ils demandaient s'il y
14 avait là des gens qui venaient de tel ou tel village, et cetera, et
15 personne ne répondait. Et à ce moment-là, ils brandissaient leurs torches
16 électriques sur une personne et cette personne devait sortir. Et ils ont
17 cessé de poser des questions.
18 Q. Quels étaient les villages qui les intéressaient et au sujet desquels
19 ils ont posé des questions ?
20 R. Glogova, Hranca et Voljavica.
21 Q. Hm-hm. Est-ce que vous savez pourquoi ils ont posé ces questions de
22 cette façon ? Est-ce que peut-être ils avaient des suspicions ou est-ce
23 qu'il y avait des combats dans ces villages et que les habitants de ces
24 villages étaient allés dans des villages serbes, Kravica et autres, pour
25 tuer les habitants de ces villages serbes peut-être ?
26 R. Ce n'est pas vrai. Glogova et Hranca ont été les premiers à tomber. Les
27 soldats serbes ont pris Glogova et Hranca en premier, et les habitants ont
28 fui vers la forêt et ont regardé brûler leur village. Et à Bratunac il ne
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1 se passait encore rien à ce moment-là.
2 Q. Est-ce que vous vous rappelez que le jour de Noël, selon le calendrier
3 orthodoxe, une attaque a eu lieu et 50 civils ont été tués, une attaque des
4 Musulmans ?
5 R. Mais pourquoi est-ce que vous interdisiez à l'aide humanitaire de
6 passer ? Dans ce cas, personne n'aurait attaqué Kravica. Les gens avaient
7 faim, leurs enfants mourraient de faim, et c'est à ce moment-là qu'ils sont
8 allés attaquer ces endroits, parce qu'ils ne voulaient pas regarder leurs
9 enfants mourir de faim sous leurs yeux. Les gens disaient : "Cela ne me
10 fait rien si je me fais tuer. Je ne peux pas continuer à regarder mon
11 enfant mourir de faim." Et vous, vous interdisiez le passage de l'aide
12 humanitaire. C'est vous qui êtes coupable pour Kravica.
13 Q. Ça ne fait rien. Nous préciserons tout cela pour les Juges de la
14 Chambre de première instance, mais combien de Musulmans ont été tués à
15 Kravica le jour de Noël 1993 ?
16 R. Je ne sais pas.
17 Q. Pas un seul, Monsieur. Trente quatre civils serbes ont été tués.
18 R. Ça non plus, je ne le sais pas.
19 Q. Très bien. Mais en tout cas, eux, ils cherchaient des gens en
20 particulier qui venaient de villages bien particuliers, et ils les
21 faisaient sortir, n'est-ce pas ?
22 R. Non, au début ils recherchaient des personnes bien particulières, mais
23 personne n'a répondu. Et par la suite, ils n'ont plus cité de noms ou
24 demandé des gens correspondant à certains éléments détaillés. Ils n'ont
25 plus demandé : "D'où est-ce que tu viens ?" Mais au lieu de cela, ils
26 brandissaient leurs torches électriques sur le visage de quelqu'un, et
27 cette personne devait immédiatement sortir.
28 Q. Ah, maintenant je comprends. Donc ils se servaient de leurs torches
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1 électriques et chaque fois que la torche se pointait sur un visage, cette
2 personne devait sortir ?
3 R. Oui.
4 Q. Vous dites que le 13 juillet, aux environs de 18 heures, Mladic est
5 revenu, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Comment était-il habillé ?
8 R. De la même façon que la veille.
9 Q. Avec les mêmes insignes de grade ?
10 R. Oui, tout était pareil.
11 Q. Est-ce que les insignes de grade se trouvaient sur son épaule ou sur sa
12 manche ?
13 R. Je ne sais pas.
14 Q. Est-ce que vous avez dit à qui que ce soit ce qu'on vous avait fait la
15 veille dans la nuit ?
16 R. Bien sûr que nous l'avons dit. Nous avons dit : "Pourquoi est-ce que
17 vous nous avez fait tout ça ?" Il y a tant de personnes qui ont été tuées.
18 Nous étions pratiquement en train de suffoquer. Mais personne ne voulait
19 nous entendre. Et à ce moment-là, ils ont dit : "Maintenant, on vous emmène
20 à Kalesija pour être échangés."
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
22 M. NICHOLLS : [interprétation] Ce n'est pas une objection. Simplement, ce
23 qui m'inquiète c'est le compte rendu d'audience, parce que l'interprète
24 parle très vite. J'entends que les réponses arrivent alors que l'interprète
25 est encore en train d'interpréter les questions.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, tous les deux,
27 ralentir un petit peu.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. D'accord, d'accord. Je vais ralentir.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
2 Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Monsieur le Témoin, si vous voulez vous pouvez regarder ce qui est
5 écrit sur l'écran devant vous, et quand ce qui s'écrit s'arrête, à ce
6 moment-là vous pouvez commencer à répondre à la question.
7 R. Bon, bon, j'ai compris.
8 Q. Est-ce que vous savez qui sont ces personnes qui sont venues là où vous
9 vous trouviez cette nuit-là ?
10 R. Des soldats serbes, n'est-ce pas; c'est ça ? Ou bien vous parlez de
11 ceux qu'on a continué à amener ?
12 Q. Ceux qui se renseignaient, qui utilisaient leurs torches électriques,
13 qui faisaient sortir les gens, qui frappaient les gens, est-ce qu'ils se
14 sont présentés ? Est-ce que vous avez appris qui ils étaient ?
15 R. Non, je ne savais pas qui ils étaient.
16 Q. Mais pourtant, dans une de vos déclarations, le document 1D4875, dont
17 je demande l'affichage sans diffusion vers l'extérieur, vous dites qu'il
18 s'agissait de ce que vous avez appelé des Loups noirs, n'est-ce pas ?
19 R. J'ai peut-être dit ça. Si je l'ai dit, c'était ce qu'ils étaient. Mais
20 aujourd'hui, je ne m'en souviens pas.
21 Q. Ce détail figure en page 2 du document qui est affiché actuellement à
22 l'écran.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande donc l'affichage de la page 2, sans
24 aucune diffusion vers l'extérieur.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. C'est dans le paragraphe du milieu. Je vais lire à haute voix et vous
27 entendrez les interprètes. Vous auriez dit, je cite :
28 "D'autres Serbes sont arrivés avec des torches électriques. Ils ont demandé
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1 : 'Qui vient de Glogova ? Qui vient de Bratunac ? Qui vient de Valjevo (en
2 Serbie) ? Qui vient de Loznica ? Qui vient de Sabac ?' Les gens de Glogova
3 ont levé la main. Ensuite, les gens de Bratunac ont levé la main, et
4 cetera. Les Serbes ont dit, à ce moment-là, qu'ils étaient les 'Loups
5 noirs' (… une unité militaire spéciale serbe). Il est possible qu'ils aient
6 dit qu'ils étaient les 'Loups de la Drina' (une autre unité spéciale
7 serbe). Je ne me rappelle pas s'ils ont dit 'Loups noirs' ou 'Loups de la
8 Drina.' Mais ce qui est certain c'est qu'ils étaient soit l'un soit
9 l'autre."
10 Donc ce sont des hommes qui n'étaient pas là jusqu'à présent, ce ne sont
11 pas les hommes qui vous ont amenés à bord des autobus. Ils n'étaient pas là
12 pendant la journée et ils sont arrivés à ce moment-là; c'est bien ça ?
13 R. J'ai dit, à Potocari, comment se présentaient les hommes qui étaient
14 avec nous dans la maison. Ils se sont présentés en disant que certains
15 venaient d'Uzice, d'autres de Valjevo et d'autres de Novi Sad. Et à
16 Bratunac, je ne me rappelle pas comment ils se sont présentés.
17 Q. Merci. Dans les deux ou trois lignes précédentes du document, vous
18 dites, je cite, et moi je lis toujours en anglais mais vous entendrez les
19 interprètes, donc vous dites, je cite :
20 "Pendant la nuit, deux Serbes seulement sont restés dans l'entrepôt…"
21 Donc, alors que vous, vous étiez 300 ou 350, il n'y a que deux hommes qui
22 sont restés avec vous dans l'entrepôt; c'est bien cela ?
23 R. Ça, ce n'est pas ma déclaration. Ce n'est pas moi qui ai dit que deux
24 soldats sont restés uniquement dans l'entrepôt. Je ne sais pas combien ils
25 étaient exactement, mais il y en avait au moins six qui étaient près de la
26 porte et que nous pouvions voir de nos yeux. Mais combien ils étaient au
27 total là-bas, je ne sais pas. En tout cas, ils étaient, pendant toute la
28 nuit, au minimum, six.
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1 Q. Merci. Est-ce que vous avez remarqué une quelconque différence entre
2 les hommes qui vous ont amenés pendant la journée sur place et les hommes
3 qui ont fait leur apparition pendant la nuit ? Et si oui, quelle était
4 cette différence ? Une différence d'uniforme, une différence de
5 comportement ?
6 R. Il n'y avait qu'un seul homme qui nous a amenés dans l'autobus. Il
7 était assis à côté du chauffeur et il portait un fusil automatique, et je
8 crois qu'il portait un uniforme de camouflage, si je ne me trompe. Et c'est
9 lui qui nous a amenés. Personne d'autre n'était dans l'autobus quand on
10 nous a amenés.
11 Q. Merci. Et à bord de cet autobus il y avait à peu près 70 Musulmans et
12 un Serbe, donc; c'est ça ?
13 R. Exact.
14 Q. Avez-vous déclaré que personne n'avait eu le courage de se plaindre
15 auprès de Mladic des coups qui avaient été distribués ?
16 R. Ce n'est pas seulement un homme qui s'est plaint. Nous avons tous
17 commencé à hurler en disant : "Mais pourquoi est-ce que vous êtes en train
18 de nous étouffer ici ? Pourquoi est-ce que vous nous tuez ? Pourquoi est-ce
19 que vous nous emmenez ailleurs ?" Mais lui ne voulait pas en parler. Il a
20 simplement dit : "Vous allez être emmenés à Kalesija pour être échangés."
21 Q. Bon. Nous allons rechercher votre déclaration pour voir exactement ce
22 que vous y avez dit.
23 Bon. Alors, Mladic vous parle de certains Serbes qui auraient été
24 faits prisonniers à Tuzla, n'est-ce pas, et il vous dit qu'il faut qu'un
25 échange soit effectué ?
26 R. Oui.
27 Q. Merci. Et dans votre déclaration que vous avez faite au bureau du
28 Procureur, le document 22397, en page 7, au paragraphe 22, vous dites qu'il
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1 n'y avait là que deux soldats. Comment étaient habillés ces soldats ?
2 R. Tu me demandes pour Bratunac ou bien pour quel endroit ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 22397.
4 C'est le numéro 65 ter du document. Page 5, paragraphe 4 à l'écran, je vous
5 prie, sans diffusion à l'extérieur.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur, est-ce que c'est bien votre déclaration écrite que l'on voit
8 à l'écran ?
9 R. Oui, c'est ma signature.
10 Q. Merci. Page 5, quatrième paragraphe à l'écran, je vous prie. Monsieur,
11 vous pouvez prendre connaissance de ce passage. C'est l'endroit où vous
12 parlez de Mladic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande qu'on agrandisse le texte.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. "Aux environs de 18 heures, les gardes qui se trouvaient à côté de la
16 porte nous ont dit : Eh bien, voilà, le général Mladic arrive…". Un peu
17 plus loin, vous dites Mladic est arrivé peu de temps après. Vous dites
18 comment il est habillé et vous dites qu'il est resté à côté des gardes à la
19 porte. Vous dites nous avons demandé pourquoi on nous retenait là. Personne
20 ne s'est plaint des coups ou des meurtres.
21 Donc Mladic n'a pas été informé de cela, n'est-ce pas ?
22 R. Eh bien, ce n'est pas qu'une personne serait allée se plaindre. C'est
23 nous en tant que groupe qui avons dit : "Pourquoi est-ce qu'on nous tue ici
24 ? Pourquoi est-ce qu'on ne nous donne pas d'eau ? Pourquoi est-ce qu'on ne
25 nous donne rien ?" Et lui a répondu : "Si l'échange avait pu se faire plus
26 tôt, tout cela ne serait pas arrivé. Vous pouvez compter combien vous êtes
27 ici." Il n'a pas voulu entendre ce que nous étions en train de lui dire. Et
28 il a ajouté : "Maintenant, je vais vous dire ce qui va se passer. Vous
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1 allez être transportés à Kalesija, vous tous."
2 Q. Très bien. Quelque chose de semblable est écrit ici également, mais
3 vous dites que vous avez demandé pourquoi vous étiez retenus, et ensuite il
4 y a une phrase qui se lit comme suit, je cite :
5 "Personne n'a eu le courage de se plaindre au sujet des meurtres et des
6 coups."
7 R. Pas individuellement, parce que si un individu avait protesté, il
8 aurait été tué.
9 Q. Merci. Et puis ensuite vous dites que pendant qu'on vous transportait,
10 un véhicule de couleur rouge escortait les autobus et que Mladic était à
11 bord de ce véhicule de couleur rouge, n'est-ce pas ?
12 R. Devant l'usine de piles électriques, quand on va de Potocari à
13 Bratunac, Mladic s'est avancé vers le premier autobus. Moi, j'étais à bord
14 du premier autobus. J'étais tout près du chauffeur parce que j'avais été le
15 dernier à monter à bord. Et il a dit : "Suivez la voiture rouge, donc
16 roulez derrière la voiture." Un soldat serbe est arrivé, il s'est tenu
17 debout à côté du chauffeur. Il avait un fusil automatique. Il a fermé la
18 portière. Mladic est resté sur la route, et nous avons vu cette voiture
19 rouge devant nous. La voiture rouge a démarré, nous avons suivi la voiture
20 rouge. Nous avons demandé au chauffeur : "Où est-ce que nous allons ?" Et
21 il a répondu : "Est-ce que vous avez entendu ce que Mladic vient de dire,
22 que je dois suivre la voiture rouge. Si vous, vous savez où nous allons,
23 moi, je le sais aussi. Je n'ai pas la moindre idée de l'endroit où nous
24 allons. Je ne fais que suivre la voiture rouge." Et la voiture rouge, elle,
25 s'est dirigée vers Bratunac, elle a tourné à gauche vers Kravica, et puis
26 elle a tourné à droite avant d'arriver à la gare routière, et ensuite il y
27 a eu cette école dont nous avons parlé et puis on est arrivé devant
28 l'entrepôt de la coopérative. La voiture s'est arrêtée. Les autobus se sont
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1 arrêtés. Il y avait là des soldats serbes. Ils étaient un certain nombre,
2 peut-être une quinzaine, et ils nous ont dit : "Descendez." Ils ont ouvert
3 la portière. Ils ont dit : "Descendez, entrez dans l'entrepôt," et c'est
4 comme ça qu'on est descendus des autobus et qu'on est entrés dans
5 l'entrepôt.
6 Q. Vous parlez du moment où vous êtes arrivé à Bratunac. Moi, je vous
7 interroge au sujet du moment où vous avez quitté Bratunac.
8 R. Au moment où j'ai quitté Bratunac, ou plutôt, à Bratunac, je suis monté
9 à bord d'un autobus. Sur la gauche, il y avait Mladic qui était debout, et
10 un groupe d'une quinzaine de soldats. Et moi, je suis en train de regarder
11 l'autobus. Lui, il faisait ce geste de la main en leur parlant. Eux le
12 regardaient, et il leur a dit quelque chose et ensuite il est parti. Et
13 puis nous avons demandé au chauffeur : "Qu'est-ce qu'on attend ? Pourquoi
14 est-ce qu'on ne part pas ?" Et il a répondu : "Je ne sais pas non plus. Je
15 regarde l'autobus devant moi, et quand l'autobus partira, je démarrai
16 aussi." Et donc, on a attendu que les lumières s'allument à Bratunac, et
17 quand les lumières se sont allumées, les autobus ont démarré et c'est dans
18 ces conditions qu'on est arrivés à Drinjaca. On s'est arrêtés à Drinjaca et
19 ensuite le voyage s'est poursuivi.
20 Q. Merci. Donc vous êtes arrivés à l'école aux environs de 9 heures 30 du
21 soir; c'est ça ?
22 R. Je pense qu'il était 2 heures du matin. Enfin, je n'en suis pas sûr.
23 Peut-être était-ce une autre heure, mais en tout cas c'était après minuit.
24 Il faisait nuit.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je pense que vous
26 avez encore des questions, donc il va nous falloir poursuivre lundi.
27 Il est l'heure de lever la séance, Monsieur le Témoin.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous le savez peut-être déjà, mais en
2 tout cas vous n'êtes pas censé discuter de votre déposition avec qui que ce
3 soit jusqu'à lundi. Vous comprenez cela, Monsieur ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends. Je comprends.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passez un bon week-end, je vous prie.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vous souhaite
7 aussi un bon week-end à vous.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
9 Bien. Nous reprendrons nos débats lundi à 14 heures 15.
10 --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le lundi 28 novembre
11 2011, à 14 heures 15.
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