Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 2 décembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Avant de

  7   commencer, je tiens à présenter mes excuses aux parties, en particulier à

  8   l'Accusation. Il s'était avéré depuis quelque temps que nous n'allions pas

  9   pouvoir tenir d'audience dans la semaine du 12 décembre. Ce n'est cependant

 10   qu'hier que je me suis rendu compte de la situation et que j'en ai informé

 11   les parties. Donc, bien entendu, que cela pose problème sur le plan du

 12   planning pour l'Accusation.

 13   Oui, l'Accusation.

 14   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous acceptons vos excuses.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Avant de commencer, essayons de voir ce qui en

 18   est du planning qui n'est pas encore résolu et je souhaite également

 19   avancer la solution que je propose, et j'en ai déjà parlé avec Me Robinson.

 20   Vous vous souviendrez, il y a eu quelques difficultés à obtenir la présence

 21   des interprètes néerlandais, qui travaillent du néerlandais vers l'anglais.

 22   Ce problème continue de se poser, ce qui nous donne peu de marge de

 23   manœuvres pour la semaine prochaine. Toutefois, nous avons une solution qui

 24   semble être acceptable pour les parties. Il nous faudra encore vérifier si

 25   toutes les mesures pourront être prises sur le plan de la logistique, mais

 26   nous espérons pouvoir accélérer l'entretien avec Pr Lawrence, donc le

 27   déplacer à lundi, ce qui signifie que c'est tout de suite après le témoin

 28   Reidlmayer que nous pourrions l'entendre, donc, mardi. Au fond, M.


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  1   Groenewegen et M. Patelski pourraient, tous les deux, déposer au moment où

  2   les interprètes sont disponibles, à savoir jeudi [comme interprété]. Donc,

  3   c'est une petite adaptation du planning. Le Pr Lawrence serait un petit peu

  4   avancé et M. Groenewegen décalé légèrement, donc vers une date ultérieure.

  5   Et donc, cela semble être acceptable à la Défense, nous devons juste re-

  6   vérifier encore une fois si tous les déplacements peuvent être garantis. Et

  7   je tenais à informer les Juges donc de ce planning provisoire, ce que nous

  8   avons prévu pour la semaine prochaine.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Indépendamment donc du changement au

 10   niveau du calendrier, la Chambre souhaite encore vous entendre sur la

 11   question de Jean-René Ruez. La Défense a déposé une requête demandant soit

 12   de déplacer, reporter cette déposition, donc après les vacances judiciaires

 13   de fin d'année, ou de l'entendre viva voce. La Chambre estime encore que la

 14   question n'est pas tranchée, donc est-ce que l'on l'entendrait viva voce ou

 15   non. Mais pour le moment, cela n'a pas un caractère de toute première

 16   urgence, pas dans tous les cas, autant qu'avant.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-nous, Docteur Baraybar. Est-ce

 19   que vous pouvez prononcer votre déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22   LE TÉMOIN : JOSE PABLO BARAYBAR [Assermenté]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez vous installer. Veuillez

 25   vous asseoir.

 26   Oui, Monsieur Mitchell.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Interrogatoire principal par M. Mitchell :


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  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  2   R.  Bonjour.

  3   Q.  Est-ce que vous pouvez décliner votre identité et l'épeler, s'il vous

  4   plaît.

  5   R.  Je donne mon nom et puis je l'épellerai par la suite. Jose Pablo

  6   Baraybar Do Carmo. Donc, J-o-s-e; ensuite le deuxième nom P-a-b-l-o; mon

  7   nom de famille B-a-r-a-y-b-a-r. Et dans mon pays, on utilise les deux noms

  8   de famille, donc à la fin il convient d'ajouter D-o C-a-r-m-o, plus loin.

  9   Q.  Monsieur Baraybar, quelle est votre profession ?

 10   R.  Je suis anthropologue, qui travaille au niveau de la médecine légale.

 11   Q.  Qu'est-ce que cela signifie ?

 12   R.  Je travaille sur les restes humains dans un contexte de médecine

 13   légale, dans un contexte judiciaire. Donc, à la différence des gens qui

 14   travaillent sur des sites archéologiques avec des restes très anciens, nous

 15   travaillons avec des restes plus récents.

 16   Q.  Est-ce que vous pouvez nous retracer votre parcours professionnel, très

 17   brièvement.

 18   R.  Depuis 20 ans, je travaille de par le monde, en Afrique, en Asie du

 19   sud-est, et également en Amérique latine. Je suis originaire du Pérou. J'ai

 20   travaillé pour ce Tribunal, j'ai aussi travaillé devant le tribunal

 21   américain des droits de l'homme en tant qu'expert, et j'ai également

 22   travaillé devant la cour suprême de mon pays.

 23   Q.  Vous avez travaillé pour le TPIY depuis 1996 ?

 24   R.  En fait, c'était pour le Tribunal du Rwanda que j'ai commencé en 1996.

 25   Et c'est en 1997 que j'ai signé mon premier contrat avec le TPIY, en fait

 26   j'ai été détaché par le TPIR vers le TPIY dans un premier temps.

 27   Q.  Est-ce que vous pouvez nous retracer en quelques mots ce que vous avez

 28   fait pour le TPIY ?


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  1   R.  J'ai travaillé en tant qu'anthropologue, même si en fait j'étais chef

  2   anthropologue ou chef archéologue en fonction de la période de travail sur

  3   le terrain.

  4   Q.  Et est-ce que vous avez continué avec les tâches comparables depuis que

  5   vous avez quitté le TPIY ?

  6   R.  Je suis conseiller maintenant avec l'équipe d'anthropologues de

  7   médecine légale péruvienne, et je travaille sur des questions comparables,

  8   en particulier sur la question des personnes portées disparues après les

  9   conflits.

 10   Q.  Vous avez rédigé deux rapports, un qui résulte des examens des restes

 11   humains en Bosnie orientale en 1999, et vous avez fait un rapport sur

 12   l'exhumation des charniers en Bosnie orientale, août à octobre 1999.

 13   R.  C'est exact.

 14   Q.  Donc le premier rapport comporte deux addendum.

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir déposé dans l'affaire Krstic les 29

 17   et 30 mai 2000 sur les deux rapports ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de relire ces dépositions ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire que cela reflète de manière exacte

 22   votre déposition dans cette affaire ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Si l'on vous posait ces mêmes questions aujourd'hui sur ces mêmes

 25   sujets, est-ce que vos réponses seraient les mêmes ?

 26   R.  Oui.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 28   versement de la déposition de M. Baraybar dans l'affaire Krstic; 65 ter


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  1   23514.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sera versé au dossier.

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Les pièces connexes --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P4029.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande le versement de ces deux rapports

  8   que je viens de mentionner.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avec les addendum ?

 10   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. 65 ter 2392, pour commencer.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que le premier est 2393.

 12   M. MITCHELL : [interprétation] C'est 2392, pour commencer, le rapport

 13   d'examen anthropologique, et ensuite les deux addenda, 2390 et 2391.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et 2393, qu'en est-il ?

 15   M. MITCHELL : [interprétation] C'est le deuxième rapport, l'exhumation des

 16   charniers.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Très bien. Alors, nous allons

 18   verser au dossier tout d'abord le 2392 avec les deux addenda.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4030. Ensuite,

 20   l'addendum 65 ter 2390 devient une pièce P4031. Et le 65 ter 2391 devient

 21   une pièce P4032.

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Je me propose de donner lecture du résumé de

 23   la déposition de M. Baraybar dans l'affaire Krstic.

 24   M. Baraybar a déposé dans l'affaire Krstic sur l'examen anthropologique des

 25   restes humains qui ont été exhumés des charniers de Srebrenica entre 1996

 26   et 1999. Il a décrit la méthodologie qu'il a appliquée afin d'identifier le

 27   sexe, l'âge et le nombre minimum d'individus exhumés de ces sites.

 28   Premièrement, il déterminait le sexe d'un individu donné. Si cela ne


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  1   pouvait pas se faire par l'examen d'organes génitaux externes, c'était fait

  2   grâce à l'examen du bassin, du crâne et des os longs, dans cet ordre-là.

  3   Deuxièmement, il constatait la tranche d'âge pour chaque individu en

  4   examinant les changements qui interviennent au niveau des os. Il a utilisé

  5   la méthode Suchey-Brooks et il s'est appuyé sur les normes qui sont

  6   spécifiques de la population bosnienne. Les tranches d'âges étaient 8 à 12,

  7   13 à 24 et plus de 25.

  8   Troisièmement, le nombre minium d'individus au site concerné était

  9   calculé. C'était fait par l'addition de l'ensemble des os qui

 10   apparaissaient le plus souvent pour chaque tranche d'âge. Donc on se

 11   servait uniquement d'un os unique ou de deux os pour poser ces calculs. Par

 12   exemple, s'il y avait 38 fémurs dans la tranche d'âge 13 à 24 et 48 tibias

 13   dans la tranche d'âge de plus de 25, cela donnait un nombre minimum

 14   d'individus de 86 pour ce site donné.

 15   Pour éviter d'exagérer le nombre, les restes humains des fosses

 16   d'origine et de tout charnier secondaire est examiné ensemble en se basant

 17   sur le même os pour calculer.

 18   M. Baraybar a conclu qu'entre 1996 et 1999, le nombre minimum

 19   d'individus était de 1 883, donc des individus exhumés des charniers de

 20   Srebrenica par le TPIY. Sur l'ensemble de ces individus, 1 656 étaient des

 21   hommes, un correspondait à une femme et 212 n'ont pas pu être identifiés

 22   pour ce qui est de leur appartenance sexuelle. Et 1 547 de ces individus

 23   étaient âgés de 25 ou plus au moment du décès.

 24   M. Baraybar a également déposé qu'en 1999 il a supervisé l'exhumation

 25   des charniers de Nova Kasaba, Konjevic Polje, et le site connu sous le nom

 26   de Glogova 2.

 27   Q.  Monsieur Baraybar, j'aurais quelques questions supplémentaires à vous

 28   poser.


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  1   Premièrement, est-ce que vous pourriez nous décrire la procédure que

  2   vous appliquiez à partir du moment où les parties corporelles ou les corps

  3   arrivaient à la morgue ?

  4   R.  Oui. Tous les restes arrivaient à la morgue et étaient placés dans un

  5   conteneur réfrigéré. A ce moment-là, on sortait un corps d'un

  6   réfrigérateur, dans sa housse, et on le répertoriait, on le plaçait sous

  7   une table d'autopsie, et c'est une équipe de pathologistes qui l'examinait.

  8   La housse était passée par le fluoroscope. C'est une machine qui permet de

  9   scanner avec des rayons X la housse à la recherche d'objets métalliques,

 10   tels que balles. Et dans certaines circonstances, c'était tout à fait utile

 11   parce que, pas ici spécifiquement, mais il nous est arrivé de trouver des

 12   grenades au niveau des corps et des choses de ce type-là, et cela pouvait

 13   être très dangereux.

 14   Donc, après cela, on plaçait la housse sur une table, on l'ouvrait.

 15   On prenait des photographies. On plaçait le corps à côté, puis on enlevait

 16   tous les éléments de vêtements. Tous les objets, tout effet personnel, tout

 17   cela était examiné par l'agent de la police technique, répertorié, et

 18   toutes les photographies étaient prises. Ensuite, on ouvrait le corps. Si

 19   c'était un corps squelettisé, on nettoyait les os, on les posait dans une

 20   disposition anatomique. Et, bien entendu, c'est à ce moment-là que

 21   l'anthropologue enregistrait toutes les caractéristiques pertinentes,

 22   l'âge, le sexe, et cetera.

 23   Q.  Est-ce qu'il est arrivé que vous soyez un participant à la

 24   reconstruction des os brisés ou des parties disloquées ?

 25   R.  A chaque fois que je me trouvais à la morgue, oui.

 26   Q.  Alors, quel a été le rôle que vous avez joué en tant qu'anthropologue-

 27   chef ?

 28   R.  Avant tout, il fallait que je coordonne les activités de l'équipe


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  1   d'anthropologues qui était placée sous ma direction, mais avant tout, il

  2   fallait que je veille à ce qu'on respecte la cohérence des protocoles

  3   utilisés. Donc on enregistrait dans le même ordre et les mêmes

  4   caractéristiques pour chacun des individus. Autrement, ce serait très

  5   difficile d'additionner l'ensemble des informations prélevées pour les

  6   différents individus. Alors, je discutais avec mes collègues pour savoir

  7   quelles seraient les techniques les mieux placées, par exemple, pour

  8   établir l'âge ou le sexe ou la taille d'un individu. Donc, avant tout, je

  9   veillais à assurer une cohérence au niveau de la procédure d'examen,

 10   dirais-je.

 11   Q.  Très brièvement, je voudrais vous interroger sur les deux rapports que

 12   vous avez rédigés sur les exhumations.

 13   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, s'il vous plaît,

 14   afficher dans le prétoire électronique le document 65 ter 3469.

 15   Q.  S'agit-il bien de votre rapport portant sur les exhumations de

 16   Glogova 2 ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Nous y trouvons un résumé des informations qui proviennent de votre

 19   rapport de 1996 sur Glogova, vous avez déposé à ce sujet dans Krstic, et ce

 20   rapport comporte également des éléments d'information sur trois sites

 21   supplémentaires ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Bien.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] J'en demande le versement, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la différence entre ce

 27   document et la pièce qui constitue le deuxième rapport, le 2393 sur la

 28   liste 65 ter ?


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  1   M. MITCHELL : [interprétation] Nous avons ici un résumé des activités

  2   précédentes. Et nous avons une deuxième exhumation de 2001 sur trois sites

  3   supplémentaires, les GLO 7, 8 et 9, les charniers voisins. Donc il y a des

  4   éléments d'information supplémentaires dans ce deuxième rapport.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et pour quelle raison n'avez-vous pas

  6   demandé le versement du 65 ter 2393 -- vous allez, en fait, le verser comme

  7   une pièce connexe ?

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Excusez-moi, il m'a semblé l'avoir fait.

  9   Mais c'est peut-être une omission. Oui, j'en demande le versement.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Vous avez demandé le versement de

 11   2392.

 12   M. MITCHELL : [interprétation] 2392 avec les deux addenda connexes, et puis

 13   aussi le 2393. Il s'agit du premier rapport d'exhumation de Glogova.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Greffier, cela n'a pas été

 15   versé au dossier, attribuons une cote.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P4034.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et nous allons également verser l'autre

 18   document.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la pièce 4033.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande l'affichage du document --

 22   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Excusez-moi. 3470. Ce rapport s'intitule

 25   "Rapport sur les exhumations sur le site de Zelini Jadar 6, Bosnie-

 26   Herzégovine, 2001."

 27   Q.  Vous êtes l'auteur de ce rapport, Monsieur Baraybar ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Très brièvement, quelques questions. Zelini Zadar 6, est-ce un charnier

  2   d'origine ou est-ce une fosse secondaire ?

  3   R.  C'est une fosse secondaire.

  4   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire quel est le nombre de corps entiers et

  5   de parties corporelles qui ont été exhumés à cet endroit ?

  6   R.  Oui. Un instant, s'il vous plaît. A en juger d'après le rapport, il

  7   s'agit de 38 corps, de 356 parties corporelles, et le nombre d'objets

  8   s'élève à 552.

  9   Q.  Merci.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande le versement de ce rapport, s'il

 11   vous plaît.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4035.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande l'affichage du document 2394 sur

 15   la liste 65 ter.

 16   Q.  Nous avons ici une version mise à jour du rapport sur lequel vous avez

 17   déposé dans l'affaire Krstic; exact ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que la méthodologie qui est appliquée est la même que celle de

 20   laquelle vous avez déposé dans l'affaire Krstic ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous pouvez expliquer en quelques mots ce qu'il en est des

 23   tranches d'âge que vous avez choisies pour calculer le nombre minimum

 24   d'individus. Pourquoi vous n'avez pas utilisé un nombre plus élevé ou des

 25   tranches d'âge plus précises, plus précisément identifiées ?

 26   R.  Ici, nous avions un très grand nombre d'individus concernés. Donc les

 27   calculs portaient sur un très grand nombre d'individus. Chaque jeu de

 28   restes était identifié de manière précise par rapport à son âge en se


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  1   fondant sur le nombre d'éléments accessibles pour déterminer l'âge, mais

  2   aussi pour présenter les informations de manière compréhensible, et il nous

  3   a fallu tenir compte de certaines évaluations individuelles. Par exemple,

  4   quelqu'un qui aurait 18 ans, 25 ou 27 ans, devait être intégré dans une

  5   tranche d'âge un peu plus large pour pouvoir présenter les éléments

  6   d'information de manière un peu plus simple. Ça, c'est une première partie

  7   d'explication.

  8   Deuxièmement, il y avait beaucoup de fragments. Donc, par exemple, on

  9   recevait pour un sujet une main, un pied, un morceau du torse ou de la

 10   colonne vertébrale ou de la jambe, donc ces éléments ne nous fournissaient

 11   pas suffisamment de caractéristiques pour pouvoir déterminer de manière

 12   précise l'âge de l'individu. Et lorsque je parle de "précision", cela

 13   signifie quelle est la proximité par rapport à l'âge exact -- ou combien

 14   vous différez de l'âge exact. Par exemple, vous avez 35 ans, plus ou moins

 15   2. Mais il serait plus exact de dire que vous êtes entre 20 et 50. Ou zéro

 16   à 100.

 17   Donc la tranche d'âge ne reflète que la manière de présenter les éléments

 18   d'information; ce n'est pas vraiment une manière d'identifier l'âge exact

 19   de l'individu concerné. Je ne sais pas si je suis clair.

 20   Q.  Donc, au fond, lorsque les tranches d'âge sont plus larges, vous êtes

 21   plus exact au niveau de la catégorisation de chaque individu.

 22   R.  Oui, c'est exact. Sinon, si j'essaie d'être précis alors que je n'ai

 23   pas suffisamment d'éléments pour étayer mon classement par tranches d'âge,

 24   eh bien, je peux me tromper. C'est ça, au fond, qui risque de se passer.

 25   Q.  Et quelles sont les conclusions que vous avez tirées sur le nombre

 26   minimum d'individus dans ce rapport ? Quel est le chiffre auquel vous êtes

 27   arrivé ?

 28   R.  Le dernier chiffre, et là je vais vérifier mon rapport parce que je ne


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  1   voudrais pas me tromper sur les chiffres -- vous avez mentionné le nombre

  2   minimum d'individus dans le rapport Krstic -- dans l'affaire Krstic, et ça

  3   change en fait dans le dernier rapport, dans celui de 2004 --

  4   Q.  On y viendra -- on y viendra dans un instant.

  5   R.  Excusez-moi. C'est ma faute. Je vais trouver le chiffre ici.

  6   Q.  C'est votre rapport d'examen anthropologique de l'an 2000.

  7   R.  J'ai tant de rapports ici.

  8   Q.  Je peux vous donner le chiffre et vous pouvez me confirmer si c'est

  9   exact ou non.

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  Un chiffre minimum de 2 008 [comme interprété].

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   Q.  Alors, quelle était la répartition des tranches d'âge ?

 14   R.  Si je ne me trompe pas, je crois que nous parlons de trois tranches

 15   d'âge. Mais je souhaite retrouver le rapport -- voilà, ça y est.

 16   Nous avons trois tranches d'âge, allant de 8 à 12 ans, de 13 à 24 et 24

 17   [comme interprété] et au-dessus.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il serait préférable de télécharger la

 19   page 5 du prétoire électronique. Cela nous permettra de suivre le témoin.

 20    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons enlever la page en B/C/S.

 21   C'est bien la page à laquelle vous faites référence ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 23   Alors la répartition des 2 000 individus correspond aux chiffres suivants :

 24   sept individus dans la tranche 8 à 12, 332 dans la tranche 13 à 24, 1 689

 25   dans la tranche d'âge au-delà de 25 ans.

 26   M. MITCHELL : [interprétation]

 27   Q.  Les Juges de la Chambre ont entendu des éléments de preuve sur Orahovac

 28   et Lazete. Pourriez-vous nous dire quel était le nombre d'individus qui ont


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  1   été retrouvés à Lazete ou Orahovac ?

  2   R.  Ici, nous avons opéré une fusion du site primaire, Lazete 2 avec la

  3   route Hodzici 5, parce qu'un est un site primaire et l'autre est un site

  4   secondaire. Par conséquent, les restes humains retrouvés dans le site de

  5   Hodzici proviennent de Lazete. Il s'agit plus ou moins des mêmes personnes.

  6   Cela correspond au nombre de 243. Et Lazete, qui est le deuxième site, nous

  7   avons -- de 3 et 4, nous avons retrouvé 250 personnes. C'est le nombre

  8   minimum d'individus.

  9   Q.  Merci.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que nous pourrons avoir le numéro 65

 11   ter 3471.

 12   Q.  Monsieur Baraybar, il s'agit du rapport de 2004 intitulé "Calcul des

 13   nombres minimums des individus exhumés par le TPIY entre 1996 et 2001."

 14   Vous êtes l'auteur de ce rapport, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  Et ce rapport apporte un élément nouveau, le nombre minimum d'individus

 17   exhumés par le TPIY par les experts scientifiques. Est-ce que vous pouvez

 18   nous expliquer cet acronyme, nombre minimum d'individus, ce nouveau terme

 19   MMNI ?

 20   R.  Nous avons divisé ce sigle pour éviter toute éventuelle confusion. Les

 21   Juges de la Chambre ont vu un certain nombre de rapports qui citaient un

 22   nombre minimum d'individus. Encore une fois, il fallait fusionner les

 23   chiffres, ce qui a donné lieu à certaine confusion.

 24   Il y a deux termes. Je souhaite préciser deux choses : tout d'abord,

 25   expliquer ce qui est le MNI, et ensuite j'expliquerais ce que signifie

 26   MMNI. Le nombre minimum d'individus correspond à un calcul, un calcul

 27   conservateur qui permet d'expliquer combien de personnes correspondent aux

 28   corps ou parties de corps retrouvés dans une fosse commune. Par exemple, si


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  1   nous prenons le cas d'un site qui comprend des corps complets, en entier, à

  2   ce moment-là vous comptez par têtes de corps. Mais si vous vous retrouvez

  3   avec des parties de corps, à ce moment-là il faut adopter une position

  4   différente. On ne peut pas simplement dénombrer chaque partie de corps et

  5   dire que ça correspond à un individu, parce que deux bras et deux jambes,

  6   on ne sait pas si cela correspond à une seule et même personne. On ne peut

  7   pas les compter deux fois.

  8   Ce qu'il faut faire, c'est compter soit un ossement ou une partie d'os qui

  9   est unique ou, par exemple, qui correspond à une paire, que ce soit la

 10   jambe droite ou la jambe gauche, par exemple.

 11   Et de cette façon, il est possible de déterminer combien de personnes, au

 12   minimum, se trouvent dans la fosse, et non pas au maximum. Et si vous avez,

 13   par exemple, en présence d'une autre tranche d'âge, des jambes droites qui

 14   correspondent à des adultes, de 25 adultes, et vous avez un bras qui

 15   correspond au bras d'un enfant, à ce moment-là cela représente un enfant et

 16   un individu. C'est un âge différent, donc on ne peut pas considérer qu'il

 17   faut chercher dans ce cas la jambe correspondante.

 18   Alors je vais vous parler, en fait, du minimum, du strict minimum.

 19   Au départ, nous étions en présence de sites primaires, et ces corps

 20   ont été sortis des sites primaires et inhumés dans un certain nombre de

 21   sites secondaires. Une fois qu'il a été établi par certains moyens, et je

 22   pense que l'Accusation a certainement présenté aux Juges de la Chambre un

 23   certain nombre d'études sur la question, les sites primaires étaient liés à

 24   un certain nombre de sites secondaires, et dans ce cas-là il nous faut

 25   faire la fusion des chiffres des restes humains retrouvés dans les sites

 26   primaires et les restes retrouvés dans les sites secondaires, parce qu'il

 27   s'agissait de la même chose. Alors, comment pouvons-nous estimer la

 28   totalité des corps levés par le TPIY en l'an 2000 ? Nous ne pouvions pas


Page 22364

  1   simplement ajouter les chiffres minimums correspondant à chaque site, parce

  2   qu'encore une fois ce serait une exagération. Donc il faut être encore plus

  3   conservateur dans nos calculs.

  4   Je vais vous donner un exemple. Pour le site de Glogova, nous avons

  5   utilisé la jambe droite, et pour d'autres sites nous avons utilisé la jambe

  6   gauche comme critère. Comment savons-nous qu'il s'agit de l'un et l'autre,

  7   qu'ils ne vont pas ensemble. Alors, il faut utiliser le même os dans

  8   l'analyse de tous les sites; autrement dit, même si dans d'autres sites

  9   nous avons retrouvé d'autres os, ceux-là n'ont pas été intégrés dans nos

 10   calculs. Alors, le MMNI est l'estimation la plus conservatrice que nous

 11   puissions avoir, 2 541 et non pas 2 691. Et si nous avions dénombré tous

 12   ces MNI, cela correspond à 2 691. Mais d'après notre estimation qui est

 13   très conservatrice, cela correspond à 2 541. Alors c'est vraiment le

 14   chiffre minimum qui aurait pu se trouver dans les sites, compte tenu des

 15   restes humains qui ont été exhumés par le TPIY et analysés par les experts

 16   scientifiques du TPIY.

 17   Q.  Nous allons donc essayer de comprendre. A titre d'exemple, je

 18   vais vous soumettre ceci.

 19   Prenons le cas de dix sites, par exemple, dans lesquels vous

 20   retrouvez un chiffre minimum de 50 individus. Pour les neuf premiers sites,

 21   vous utilisez le fémur gauche pour calculer le MNI, et dans le dixième site

 22   vous utilisez le fémur droit. Si vous ajoutez tous ces chiffres, le MNI

 23   correspond à 500; c'est exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Mais parce que le MMNI ne dénombre que le même os retrouvé sur tous les

 26   sites, vous ne comptez pas les fémurs droits retrouvés dans le site numéro

 27   10. Vous regardez le site numéro 10 et vous regardez s'il reste des fémurs

 28   gauches pour pouvoir les ajouter au total; c'est exact ?


Page 22365

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Alors, admettons que dans le dixième site on retrouve cinq [comme

  3   interprété] fémurs droits, mais qu'il y a également 25 fémurs gauches, dans

  4   ce cas, quel est votre calcul du MMNI sur ces dix sites ?

  5   R.  Et dans ce cas, on ne compte que les 25, on ne compte pas les 50. Donc

  6   475 et non pas 500.

  7   Q.  Alors une dernière question sur le même thème.

  8   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Que feriez-vous, Monsieur le

  9   Professeur, avec les 25 restants ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils existent, mais ils ne sont pas intégrés à

 11   vos calculs parce qu'on essaie de fournir un chiffre conservateur, c'est-à-

 12   dire que vous dites au minimum, en général -- nous disons qu'il est fort

 13   probable qu'il y ait davantage d'individus, mais compte tenu de la méthode

 14   de calcul utilisée, on ne peut pas avancer un chiffre plus élevé. Il serait

 15   plus aisé de le faire, mais ce serait moins scientifique, moins sérieux, de

 16   simplement dénombrer tout cela. Il serait très simple de compter toutes les

 17   parties de corps et dire qu'il y avait 5 000 personnes dans ces sites, mais

 18   cela n'est pas exact. Donc, il faut vraiment prendre un chiffre minimum.

 19   Et donc, pour être juste et tout à fait conservateur, je vais

 20   utiliser le même os pour toutes les études qui sont faites sur ces sites.

 21   Même si je sais que 25 personnes sont représentées dans un site donné, mais

 22   je ne les intègre pas dans mes calculs, car nous souhaitons être très

 23   transparents, et nos estimations sont très conservatrices. Parce que ce qui

 24   se passe, en général, on vous dira : Peut-être que vous avez exagéré au

 25   niveau des chiffres. Vous avez été trop généreux dans vos calculs. Donc

 26   c'est pour éviter ce type de critique que nous prenons le recul et que nos

 27   calculs sont véritablement très conservateurs.

 28   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.


Page 22366

  1   M. MITCHELL : [interprétation]

  2   Q.  Si je puis ajouter une question, Monsieur Baraybar. La raison pour

  3   laquelle le fémur droit ne peut pas être intégré dans ce scénario, c'est

  4   que cela peut correspondre à un fémur gauche; c'est exact ? Cela peut

  5   provenir de la même personne ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Une dernière question. Pourriez-vous nous dire si l'analyse

  8   anthropologique des restes humains et si les calculs anthropologiques du

  9   MNI et du MMNI est encore pertinent à la lumière des avancées faites dans

 10   les analyses d'ADN.

 11   R.  C'est une question tout à fait pertinente. L'ADN et d'autres techniques

 12   ou technologies sont des techniques complémentaires. Il faut toujours,

 13   lorsque l'on fait le calcul de ces chiffres, décider quelle technique sera

 14   utilisée. Parce que si on dispose d'un chiffre préliminaire, on peut

 15   commencer à faire des examens et des estimations pour corroborer ces

 16   chiffres-là. Mais ce qui est important, c'est que l'ADN donnera toujours

 17   une estimation plus élevée que le MNI, parce que le MNI correspond à un

 18   chiffre minimum d'individus. Avec l'ADN, par exemple, on peut avoir le

 19   gauche et le droit. Peut-être qu'il y a d'autres individus qui sont

 20   représentés par d'autres os ou ossements et qui ne font pas partie de nos

 21   calculs lorsque nous appliquons cette technique du MNI.

 22   Q.  Monsieur Baraybar, je n'ai pas d'autres questions.

 23   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je demander le

 24   versement au dossier de ce dernier rapport, s'il vous plaît, le 3471.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons versé au dossier

 26   le 2394 en premier ? Nous allons donner une cote à ces documents.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Numéro 65 ter 2349 aura la cote P4036,

 28   Madame, Messieurs les Juges.


Page 22367

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et le dernier.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] 65 ter 3417 [comme interprété] aura la

  3   cote P4037.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Merci.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, Monsieur Karadzic.

  7   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pardonnez-moi. Nous pouvons peut-être

  9   nous occuper des documents annexes pour l'instant. Une simple question.

 10   Parmi les pièces connexes, il y a le numéro 65 ter 2393, qui correspond au

 11   rapport, n'est-ce pas ?

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, ceci ne devrait pas

 13   être versé en tant que pièce connexe, mais devait être versé séparément en

 14   vertu de l'article 94.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci a déjà été versé au dossier, n'est-

 16   ce pas ?

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Tout à fait.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas d'objection de la part de la Défense

 19   ?

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

 22   Toutes les pièces connexes seront versées au dossier, à l'exception du

 23   2393.

 24   Oui, Monsieur Karadzic.

 25   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 26   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Baraybar, bonjour. Je vous remercie de bien

 28   vouloir être entendu par la Défense. J'espère que nous allons procéder de


Page 22368

  1   façon simple et efficace. Je souhaite, tout d'abord, vous poser cette

  2   question-ci.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que nous pouvons poursuivre.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Vous avez également travaillé sur le terrain et dans la morgue, n'est-

  6   ce pas ? Que faisiez-vous à la morgue et sur le terrain ? Sur quoi

  7   portaient vos travaux ?

  8   R.  Comme je vous l'ai dit auparavant, j'ai travaillé avec une équipe

  9   d'anthropologues que j'ai dirigée à la morgue. J'ai participé aux

 10   autopsies, nous avons reconstitué des parties de corps pour déterminer

 11   l'âge, le sexe et ce qui relève des analyses habituellement menées à la

 12   morgue. Et sur le terrain, comme je l'ai dit, j'ai procédé à des

 13   exhumations de certains sites, comme je l'ai dit dans mon rapport, avec des

 14   équipes d'archéologues, des techniciens de la police scientifique et des

 15   géomètres.

 16   Q.  Merci. Je vais regarder certains de vos documents simultanément et que

 17   j'ai regroupés par thèmes, parce que nous n'avons pas le temps de les

 18   aborder les uns après les autres. Dans votre rapport P4033, dans la partie

 19   intitulée résumé de vos conclusions, vous dites dans vos travaux que vous

 20   êtes spécialisé dans --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour que nous puissions suivre, veuillez

 22   télécharger cela pour que nous puissions le regarder tous ensemble.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que le numéro est clair ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela s'affiche. Monsieur Karadzic, cela

 25   ne vous gêne-t-il pas que nous suivions en anglais ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vais lire en serbe, et les gens dans la

 27   galerie du public pourront suivre.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ou cela peut être traduit en B/C/S


Page 22369

  1   également, même si vous lisez cela en anglais. Bon, reprenons. Page ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la page 3 du rapport, me semble-t-

  3   il. 194, c'est le dernier numéro ERN. C'est le résumé des conclusions.

  4   Malheureusement, cela ne correspond pas au bon chiffre. C'est le rapport de

  5   Bosnie orientale qui a ce numéro. Non, non, non. C'est le document qui est

  6   daté du 17 décembre 1999, fosses communes en Bosnie orientale. J'ai commis

  7   une erreur.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, il s'agit de son premier rapport ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. 02392. P4034.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page 3.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Oui. Sur cette page, vous avez dit qu'au cours des travaux menés par

 13   les experts dans la deuxième moitié de 1989 en Bosnie orientale, les

 14   principales localités examinées étaient Nova Kasaba, Konjevic Polje et

 15   Glogova. Dans chacun de ces sites, il y aurait prétendument des restes des

 16   victimes de la zone protégée de Srebrenica.

 17   Qui a dit qu'il s'agissait là des victimes de ces localités ?

 18   R.  Vous le savez peut-être, mais ceci fait partie des travaux que j'ai

 19   menés pour le compte du bureau du Procureur. Nous avons travaillé dans le

 20   cadre de l'enquête suite à la chute de Srebrenica. J'ai dit dans mon

 21   rapport qu'il s'agissait de victimes présumées, étant donné que c'était là

 22   les informations que nous avions reçues. Dans le premier paragraphe, je

 23   n'ai pas confirmé cela. Il s'agit d'éléments de contexte qui nous ont été

 24   fournis. Nous avons reçu des éléments de contexte pour pouvoir mener à bien

 25   cette enquête. Et en ce qui concerne cela, c'est exact.

 26   Q.  Merci, Monsieur Baraybar. C'est tout à fait juste. Donc ce n'est pas

 27   quelque chose que vous avez établi. Vous avez cité cela. Est-ce que le

 28   Procureur vous a informé du fait que cette zone constituait une ligne de


Page 22370

  1   front pendant toute la durée de la guerre civile qui a duré 42 mois, et les

  2   combats étaient incessants pendant toute cette période ?

  3   R.  A vrai dire, je ne me souviens pas que le Procureur m'ait dit cela,

  4   c'est quelque chose que j'ai lu dans la littérature que j'ai consultée à

  5   l'époque. Mais personne ne m'a informé de cela, personne ne m'a présenté un

  6   quelconque rapport officiel sur l'endroit où les personnes avaient été

  7   placées et comment la guerre avait évolué. Je ne suis pas un analyste

  8   militaire, je suis un expert scientifique. Donc cette information ne m'a

  9   pas été communiquée personnellement, ni sous une quelconque forme

 10   officielle.

 11   Q.  Merci. Est-ce que cela signifie que vous n'avez pas été informé du fait

 12   que vous alliez retrouver des corps qui provenaient de dates différentes --

 13   ou plutôt, dont l'heure du décès était différente ?

 14   R.  Eh bien, nous n'avions pas d'informations sur ce à quoi nous devions

 15   nous attendre. On nous a essentiellement soumis le problème, à savoir un

 16   nombre éventuel de sites, et il s'agissait de savoir s'il s'agissait de

 17   fosses communes ou non, nous devions en extraire le contenu à la manière

 18   dont procèdent les scientifiques et nous devions apporter des conclusions

 19   compte tenu des résultats de ces examens. Je crois qu'à aucun moment on

 20   nous a dit que nous devions trouver telle ou telle chose. Personne ne m'a

 21   jamais dit ce que j'étais censé trouver, si c'est ce que vous laissez

 22   entendre.

 23   Q.  Merci. Donc ce n'était pas une mission qui vous a été confiée dans ce

 24   sens, à savoir de faire la différence entre les victimes qui étaient

 25   tombées avant le 14 juillet 1995 et les victimes qui sont tombées cette

 26   semaine du 14 juillet. Est-ce que vous savez si ce type de mission a été

 27   confiée à quelqu'un, à savoir de faire la différence entre ceux qui sont

 28   morts avant le 13 juillet 1995 et ceux qui ont été tués au cours de cette


Page 22371

  1   semaine cruciale ?

  2   R.  Ecoutez, je ne suis pas dans le secret de ces informations-là. Mais il

  3   s'agissait d'une enquête scientifique. Dans une enquête scientifique, on ne

  4   fait pas de différence entre les victimes, on ne caractérise pas les restes

  5   humains, on ne définit pas ces victimes sous un angle ou sous un autre.

  6   Vous devez rassembler et lever les éléments qui vous sont présentés. Si

  7   vous êtes en présence d'un site qui comporte 50 personnes, vous n'allez pas

  8   faire un tri, vous savez, s'il y en a 25 d'une période et 25 relevant d'une

  9   autre période de temps. Vous êtes là pour rassembler les éléments que vous

 10   trouvez sur le site, et ensuite vous devez traiter tous ces éléments

 11   d'information.

 12   Alors, il est clair qu'après, je veux dire, les procureurs, les avocats de

 13   la défense, vont décider ou non des éléments dont ils ont besoin. Mais pour

 14   ce qui est des experts scientifiques, ils vont surtout lever les éléments

 15   qu'ils trouvent dans ces fosses et, bien sûr, les interpréter pour pouvoir

 16   donner leurs conclusions.

 17   Q.  Merci. Dans ce même résumé, vous avez également dit qu'il y avait dix

 18   fosses communes comportant au moins 208 individus qui ont été levés dans

 19   ces sites. Il a été établi que 184 étaient des hommes et qu'une était une

 20   femme, et cetera.

 21   Alors, lorsque nous parlons des 76 individus entre l'âge de 13 et 24, est-

 22   ce que vous êtes d'accord pour dire qu'à des fins juridiques il est

 23   important d'établir les faits de façon plus précise et que cette tranche

 24   entre 13 et 24 est une tranche assez large ?

 25   R.  Tout à fait. Mais comme je vous l'ai dit au départ, c'est ainsi que

 26   nous faisons le rapport d'un nombre important de cas. Cela ne signifie pas

 27   que chaque cas correspond à la même tranche d'âge. Autrement dit, si nous

 28   revenons aux rapports d'autopsie de chaque individu, vous constaterez que


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  1   l'âge a été déterminé pour chaque individu. Vous êtes en présence de

  2   quelqu'un qui est entre l'âge de 13 à 16. Ceci fera partie de la tranche

  3   d'âge de 13 à 24. Il s'agit d'une tranche d'âge, cela permet de présenter

  4   des éléments d'information.

  5   Souvenez-vous aussi du fait que lorsque vous estimez l'âge des ossements,

  6   vous ne pouvez que déterminer une tranche d'âge. Vous pouvez dire : Cela

  7   ressemble à un ossement de quelqu'un qui a 16 ans, mais très probablement

  8   cela correspond à la tranche entre 14 et 18. Vous ne pouvez pas dire que

  9   cela correspond à 16.2. Ça correspond a son âge. C'est l'âge biologique,

 10   16.2. Mais pour répondre à votre question, l'estimation de l'âge de façon

 11   précise se retrouve dans le rapport d'autopsie. C'est simplement ainsi que

 12   nous présentons les chiffres dans les rapports. Il ne faut pas confondre

 13   les deux choses.

 14   Q.  Merci. Je vous demande de faire preuve de compréhension à mon égard

 15   parce que le Procureur, en règle générale, caractérise les victimes et dit

 16   que 8 000 hommes musulmans ou jeunes garçons ont été tués. Donc la Défense

 17   doit préciser ces définitions, à quoi correspond un jeune garçon. Donc nous

 18   n'avons pas encore abordé la définition précise d'un jeune homme. Alors,

 19   dans votre rapport, ce que je souhaite savoir, c'est ceci : je constate que

 20   ce n'est pas quelque chose que vous avez fait vous-même, les examens

 21   anthropologiques des corps ont été effectués, non pas par vous, mais par

 22   d'autres personnes. Regardons les trois derniers chiffres ERN de ce

 23   document, 107. Comment se fait-il que nous avons un intervalle de 8 à 12,

 24   et ensuite de 13 à 17 et de 15 à 24, il s'agit des tranches d'âge ? Il y a

 25   ici un chevauchement. Est-ce que ceci ne signifie pas que certains restes

 26   humains sont inclus dans deux groupes à la fois ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions également voir

 28   cette page, s'il vous plaît, Monsieur Karadzic ? Veuillez nous aider


Page 22373

  1   également, Monsieur le Témoin, s'il vous plaît.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il s'agit du 4033, du numéro du

  3   document, mais je n'en suis pas tout à fait certain. Nous parlons de

  4   l'examen anthropologique, donc -- je crois que cela se trouve à la page 7,

  5   à mon avis.

  6   "Rapport sur l'examen anthropologique." La cote de ce document est P4030.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai sous les yeux. Je vous l'ai déjà

  8   dit, les restes des individus sont estimés par rapport donc à leur âge,

  9   mais il fallait aussi rentrer ces estimations dans des intervalles. Vous

 10   avez parlé de 76 sujets, je vous dis que nous avons une estimation

 11   individuelle, mais cela --

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Professeur.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous pouvez montrer au participant

 15   quelle est la page que je suis en train de discuter.

 16   C'est peut-être la page suivante.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Voilà. C'est ce tableau-là qui m'intéresse. Continuez, Professeur, mais

 19   tenez compte du fait que ce qui m'intéresse pour le moment, ce sont

 20   uniquement les catégories d'âge qui, à mon sens, ne sont pas

 21   statistiquement clairement définies par vous, donc il est possible qu'il y

 22   ait des restes qui soient en fait catégorisés dans plusieurs groupes,

 23   plusieurs tranches d'âge à la fois.

 24   R.  Oui, cela est exact. Toutefois, il y a nécessairement des

 25   chevauchements entre les groupes d'âge, surtout s'agissant de jeunes

 26   individus. Ce chevauchement, eh bien, il va se produire de manière générale

 27   lorsque nous parlons d'individus plus jeunes. Alors, pourquoi ? Ici, les

 28   indices que nous avons utilisés, ce sont ceux de croissance des os et des


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  1   dents. Parfois, vous avez des individus qui, dû à des circonstances

  2   spécifiques, par exemple, s'ils sont sous-alimentés, et cetera, eh bien,

  3   ils ne vont pas grandir autant, mais ils vont continuer de se développer.

  4   Donc, la dentition peut vous donner une estimation d'âge qui différera de

  5   l'estimation que vous baserez sur les os du même individu, parce que

  6   l'individu sera plus âgé, d'après ses dents, et plus jeune, si vous vous

  7   fondez sur les os longs. Donc, effectivement, il y a un chevauchement, mais

  8   ce n'est pas un chevauchement de dix ans, mais de six mois, voire une

  9   année. Donc, c'est dans ce sens-là. Et effectivement, ce qui est possible,

 10   c'est que l'on classe mal des individus, donc dans une catégorie d'âge à

 11   laquelle ils n'appartiennent pas si vos intervalles sont trop rigides, donc

 12   8 à 12, 13, et cetera. Donc c'est la raison pour laquelle nous avons eu

 13   cette tranche d'âge plus large de 15 à 24, donc les jeunes, les adolescents

 14   sont tous mis ensemble, on ne les a pas séparés. A chaque fois que vous

 15   avez ce phénomène de chevauchement, il est probable que ce sera plutôt vers

 16   les jeunes, enfin, vers un âge plus jeune plutôt que vers l'âge plus

 17   avancé. Donc, la mauvaise catégorisation qui va se passer, c'est que vous

 18   allez les déclarer plus âgés, alors qu'ils seront plus jeunes.

 19   Je ne sais pas si je vous ai répondu.

 20   Q.  Merci, Docteur Baraybar. Et qui a décidé d'opérer cette fusion des

 21   catégories ?

 22   R.  C'est moi. Moi, j'ai pris cette décision-là, et ce, pour la rédaction

 23   des rapports. Comme je vous ai déjà dit, c'est lorsqu'on parle d'un grand

 24   nombre de sujets. Nous n'avons pas cinq ou dix sujets. Dans ce cas-là, on

 25   aurait identifié l'âge de chacun des individus probablement, de manière

 26   précise. Mais ici, vous avez des centaines, voire plusieurs milliers de

 27   sujets, donc ce serait absurde de rentrer dans des caractéristiques

 28   spécifiques, donc d'évaluer l'âge de chaque individu. Dans ce cas-là, il


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  1   faudrait vraiment que l'on se penche au cas par cas, sur chacun des sujets.

  2   Q.  Merci. Je vois des raisons scientifiques, des raisons anthropologiques

  3   à procéder ainsi. Mais d'un point de vue de médecine légale ou des besoins

  4   judiciaires, n'êtes-vous pas d'accord pour confirmer que c'est surtout de

  5   l'intérêt de la Défense que l'on établisse de manière plus précise la

  6   présence d'individus mineurs dans ce groupe de victimes ?

  7   R.  Absolument, tout à fait. Mais alors, reprenons -- je vais vous

  8   expliquer cela, et peut-être effectivement quelque chose qui intéressera la

  9   Défense. Je ne sais pas comment vous orienter, là.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lisez le titre, s'il vous plaît.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, alors "Le calcul du nombre minimum

 12   d'individus." C'est le rapport de 2004, janvier 2004.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce à conviction P4037. Page 5.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Page 8 du rapport, s'il vous plaît.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est la bonne page ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Donc, ici, nous avons de nouveau

 17   l'ancienne catégorisation des tranches d'âge. Donc, ce sont peut-être les

 18   rapports d'autopsie de sujets qui figurent ici, qui éventuellement risquent

 19   d'être des mineurs, pourront être examinés. Donc vous avez la catégorie 8 à

 20   12, qui concerne sept sujets. Donc, vous pouvez, en fait, vous pencher sur

 21   les rapports d'autopsie précis concernant ces individus pour voir pourquoi

 22   ils ont été placés dans cette tranche d'âge, et ce que vous risquez de

 23   trouver, de constater, c'est que le niveau de développement, la dentition

 24   correspond à cet âge, ou que les os n'avaient pas encore eu cette fusion,

 25   ou que le bassin n'a pas encore atteint ce stade-là.

 26   Donc, les 157 rapports d'autopsie pour les 13 à 17, par exemple, pourront

 27   être examinés pour voir s'il s'agit de mineurs, enfin de personnes qui sont

 28   plus jeunes que 18 ans.


Page 22376

  1   Donc, au fond, je voudrais dire qu'il ne faut pas faire la confusion entre

  2   deux choses; d'un côté la méthode de rédaction du rapport, et d'autre part,

  3   le fait qu'il y a des rapports d'autopsie qui, eux, ne sont pas aussi

  4   vagues, pour utiliser ce terme, non. Dans le rapport, on simplifie la

  5   présentation lorsqu'il s'agit d'un très grand nombre de sujets. Mais vous

  6   pouvez toujours revenir vers un rapport d'autopsie précis concernant un

  7   individu et voir comment a été établi l'âge pour tel ou tel individu. Donc,

  8   vous aurez l'estimation, l'évaluation de l'âge pour l'individu concerné,

  9   qui a été finalement catégorisé comme il l'a été, mais qui aura son

 10   évaluation propre.

 11   Donc, si je pouvais vous donner un avis, ce serait d'aller revoir donc ces

 12   rapports individuels pour voir comment on est arrivés à cette conclusion.

 13   Q.  Merci. Mais ne serait-il pas raisonnable de s'attendre à ce que jusqu'à

 14   l'âge de 25 ans, sur la base de la présentation des extrémités des os, le

 15   contact entre le cartilage et l'os, est-ce que l'on ne pourrait pas être

 16   plus précis, avec une précision disons de 12 mois ou d'un an, on ne

 17   pourrait pas préciser l'âge ?

 18   R.  Plus ou moins un an. Non, rappelez-vous les 25, les 25 sont déterminés

 19   d'après la soudure complète ou partielle de l'épiphyse moyenne de la

 20   clavicule. Donc, à ce stade-là, les os longs sont déjà soudés. Donc le

 21   dernier morceau de l'os qui connaîtra la soudure, c'est la clavicule. La

 22   plupart des autres os sont déjà bien soudés, bien au-delà de cela à 17 ans,

 23   à 18 ans, et puis vous avez des variations individuelles. Et chez les

 24   femmes, ça peut être à l'âge de 16 ans déjà que le processus est terminé.

 25   Vous pouvez aussi éventuellement vous baser sur la dentition pour

 26   avoir une datation plus précise, un an plus ou moins, mais pas les os longs

 27   et pas par la soudure de l'épiphyse, non. Ça, non, jamais.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, est-ce que nous


Page 22377

  1   pourrions voir un rapport d'autopsie précis pour voir comment l'âge de

  2   l'individu a été établi ?

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Il me faudra quelques instants et je vais

  4   vous en trouver un.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On pourrait faire cela après la pause.

  6   M. MITCHELL : [interprétation] Bien sûr.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour que ce soit tout à fait clair,

  8   Monsieur Baraybar. Donc nous avons ce tableau, alors la deuxième et la

  9   troisième catégories se recoupent pour ce qui est des âges. Donc nous avons

 10   13 à 17, puis ensuite nous avons 15 à 24 ans. Donc la troisième et la

 11   quatrième colonnes -- donc 15, 16, 17 sont les âges concernés. Mais sur le

 12   plan des additions, du calcul, il ne devrait pas y avoir de recoupement,

 13   n'est-ce pas, parce que c'est basé sur des rapports individuels ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et aussi, Monsieur le Président, on

 15   compte un os très précis.

 16   Donc, à l'attention de M. Karadzic et pour les Juges de la Chambre,

 17   peut-être que je pourrais préciser une chose. Alors, comment est-ce que

 18   nous grandissons et comment est-ce que la maturation se produit, ce n'est

 19   pas toujours très harmonieux. Parce que quelqu'un qui peut avoir 18 ans

 20   peut sembler en avoir 13. Donc c'est une science exacte, mais qui n'est pas

 21   précise. Donc elle est exacte, mais elle n'est pas précise.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Merci. Reprenons le document précédent P4030, s'il vous plaît.

 24   Aujourd'hui aussi, vous avez dit que la sous-alimentation, les conditions

 25   de vie et le mode de vie peuvent entraîner certaines variations, peuvent

 26   avoir un impact sur la précision des conclusions qui portent sur l'âge ?

 27   R.  Ce que je voulais dire est la chose suivante, je vais vous donner un

 28   exemple. La sous-alimentation, des maladies, ou même une altitude très


Page 22378

  1   importante peut causer une différence entre le développement et l'âge. Donc

  2   il va y avoir un sacrifice de la croissance. Par exemple, vous avez

  3   quelqu'un de sous-alimenté, ou quelqu'un qui vit à 4 000, 5 000 mètres

  4   d'altitude comme chez moi, eh bien, il sera plus petit de taille. Il sera

  5   entièrement développé, mais il sera plus petit. Donc le corps se

  6   développera entièrement, mais au prix de la croissance. Donc il vous faudra

  7   mesurer l'os d'un enfant, et quand vous comparez à un enfant européen, vous

  8   arriverez à la conclusion que cet enfant est plus jeune. Non, il sera plus

  9   petit, mais il ne sera pas nécessairement plus jeune. Quand vous comparez,

 10   par exemple, les dents et les os, donc les deux, alors ce sera différent.

 11   Parce que si vous avez seulement l'un des deux, vous allez peut-être sous-

 12   estimer l'âge. Comme je vous ai déjà dit, ce n'est pas, cependant, une

 13   question d'une erreur qui porte sur plusieurs années, cinq ou 15, non, pas

 14   du tout. Ce n'est pas ça la marge d'erreur, de variation.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Si vous souhaitez voir un rapport d'autopsie

 17   immédiatement --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui --

 19   M. MITCHELL : [interprétation] -- pendant que l'on en parle.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- pendant que notre mémoire est encore

 21   fraîche. 

 22   M. MITCHELL : [interprétation] 65 ter 2408 correspond à un des rapports. 

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce ne serait peut-être pas plus

 24   utile d'imprimer ce rapport pour que mon conseil, Pr Dunjic, puisse

 25   examiner ça pendant la pause, et ce sera peut-être plus aisé de l'aborder

 26   après la pause. Et puis nous pourrions aussi avoir la version serbe du

 27   document.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons tout d'abord entendre M.


Page 22379

  1   Baraybar, ses explications, puis vous allez imprimer cela pendant la pause.

  2   Allons-y.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle serait la page ?

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Nous n'avons qu'une seule page qui compose

  6   ce rapport.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous voyons ici qu'il est

  8   question de 14 pages, comme quoi il comporterait 14 pages.

  9   Est-ce que vous pouvez juste avancer.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Page 2, Monsieur le Président, me semble-t-

 11   il.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Donc, ici, la tranche d'âge va de

 13   35 à 60. Est-ce que nous pouvons voir --

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Vous voulez dire un individu plus jeune ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons nous occuper de cela plus

 16   tard. Je m'en remets aux parties. Oui, Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je redemande la page 6 de la pièce P4030. Sur

 18   le chapitre âge.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Voilà, c'est ça. Mais ce que je ne trouve pas tout à fait clair. Donc

 21   je comprends lorsqu'il s'agit de sternum, de la partie de la quatrième

 22   cote, symphyse pelvienne, et cetera. Et lorsqu'on dit qu'on a modifié ces

 23   déterminations grâce à l'application des normes correspondant à la

 24   population bosnienne de 1999, donc Simmons et autres, et cetera, donc est-

 25   ce que cela veut dire que c'est d'un point de vue racial ou, si non racial,

 26   alors d'un point de vue anthropologique qu'ils ont pu identifier des

 27   caractéristiques de la population bosnienne, et est-ce que ça leur a permis

 28   de distinguer entre les Serbes, les Croates et les Musulmans ? Lorsqu'ils


Page 22380

  1   se sont appuyés sur les travaux de Simmons, comment ont-ils procédé ?

  2   Qu'ont-ils fait ?

  3   R.  D'accord. Essayons de replacer cela dans le contexte pour que tout le

  4   monde puisse le comprendre. Nous avons utilisé pour -- mais là on ne parle

  5   pas de soudure d'os, ni de dentition, et cetera. Nous parlons d'individus

  6   qui sont âgés de plus de 25 ans. Donc nous avons utilisé deux techniques

  7   qui sont très robustes, et ce sont les techniques Suchey-Brooks et Iscan-

  8   Loth, et on se penche sur la symphyse pubienne, la fin de la quatrième cote

  9   près du cartilage qui rejoint le sternum et la hanche. Là, nous avons un

 10   changement au niveau de l'os avec l'âge.

 11   Donc nous avons -- ces techniques se sont développées au fur et à mesure et

 12   elles proviennent des Etats-Unis. Suchey-Brooks se base sur un

 13   échantillonnage de Los Angeles, un échantillon de plus de 700 individus;

 14   tandis que l'autre échantillon correspond à la population caucasienne et

 15   les Afro-américains de Floride; et tandis que Simmons apporte une

 16   correction aux tranches d'âge en se fondant sur un échantillon de Tuzla,

 17   d'autopsies menées à Tuzla. Donc c'est l'échantillon le plus proche que

 18   nous avons pu trouver, le plus proche de la population balkanique. Et là je

 19   ne parle pas de distinction entre les Croates, les Serbes, et cetera. Je

 20   vous parle simplement de cette zone au sens large du terme. Donc

 21   l'échantillon utilisé par Suchey-Brooks vient de Los Angeles.

 22   Donc, là, nous avons la population bosnienne, et je parle de la

 23   population qui vit en Bosnie et qui se retrouve à la morgue de Tuzla. Donc

 24   l'appartenance du groupe ethnique n'a pas été identifiée pour chacun des

 25   corps. Mais ce sont les éléments d'information les plus proches, les

 26   données les plus proches que nous avions à l'époque, donc l'échantillon le

 27   plus proche de ce groupe de population. Parce qu'à un moment donné, on nous

 28   a dit : Ah, vous vous fondez sur des normes qui viennent de la population


Page 22381

  1   américaine. Mais une population américaine n'a rien à voir avec les

  2   Balkans. Donc il y a eu une correction, adaptation, de ces données à cet

  3   échantillon des Balkans.

  4   Et je parle de Bosnie, pas d'appartenance aux groupes ethniques. Et

  5   il s'agit de Tuzla, donc tous les individus qui ont été autopsiés à la

  6   morgue de Tuzla. Donc je dis Bosnie. Je ne dis pas appartenance ethnique.

  7   Q.  Merci. Et cette méthode -- cette norme que l'on voit chez Simmons et

  8   autres pour la population bosnienne, est-ce qu'il s'agit d'une méthode qui

  9   est vérifiée scientifiquement ou est-ce que ce sont simplement des

 10   impressions ou de premières mesurations [phon], premières moyennes ? Est-ce

 11   qu'effectivement, nous avons des caractéristiques anthropologiques en

 12   Bosnie qui diffèrent d'un autre groupe de population ?

 13   R.  Oui. En fait, je pourrais vous donner plus de données là-dessus. A

 14   l'époque, Simmons et ses collaborateurs avaient établi la seule norme qui a

 15   été utilisée, et ils n'ont pas continué à travailler là-dessus. Mais ces

 16   données ont été légèrement modifiées et perfectionnées grâce à une autre

 17   étude qui a été menée, une étude menée sur une population de Kosovo, un

 18   échantillon de Kosovo, si je ne me trompe pas, en 2008. Kimmerle et

 19   associés ont travaillé là-dessus. Donc, si vous comparez les deux, donc

 20   l'échantillon kosovar et l'autre, celui des Balkans - et là je ne parle pas

 21   d'Albanais ou de Serbes ou de Roms ou quoi que ce soit, donc je ne ventile

 22   pas - et vous prenez d'autre part l'échantillon des Etats-Unis,

 23   effectivement, vous trouvez des différences. Et en gros, quelle serait la

 24   différence au fond - et là je simplifie à outrance, mais enfin je peux vous

 25   donner les références précises si cela vous intéresse - donc les

 26   échantillons balkaniques, lorsqu'on les compare aux échantillons

 27   américains, à peu près à la quatrième décennie de l'âge, semblent être plus

 28   âgés, entre guillemets.


Page 22382

  1   Donc prenez, par exemple, la symphyse pubienne de 4. Par exemple, cela

  2   correspondrait à 40 ans d'un échantillon américain et ce serait 45 dans les

  3   Balkans. Donc, si on utilisait l'échantillon américain, on estimerait en

  4   fait l'âge en deçà de leur âge véritable. Mais je parle là encore de la

  5   tranche d'âge de 25 et plus. Pas des plus jeunes.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous nous direz, Monsieur Karadzic,

  7   quand on pourrait faire la pause.

  8   Il y a un point pratique, Monsieur Baraybar, que l'on souhaite

  9   aborder en votre absence. Donc nous allons reprendre à 11 heures. Vous

 10   pouvez disposer.

 11   Entre-temps, je demande que l'on passe à huis clos partiel, s'il vous

 12   plaît.

 13   [Le témoin quitte la barre]

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Le compte rendu d'audience ne me semble pas

 18   tout à fait clair. Page -- qui prévoit le planning de la semaine prochaine

 19   tel que le planning a été prévu. Donc il faudrait dire : MM. Groenewegen et

 20   Patelski mercredi, et pour jeudi, M. Haglund.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 22   Nous allons reprendre à 11 heures.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir une copie papier

 24   du rapport d'autopsie ? Ah, oui. Merci.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

 27   [Le témoin vient à la barre]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.


Page 22384

  1   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons trois

  2   rapports d'autopsie qui proviennent du site 12 Cancari dont vous avez vu

  3   les exhumations hier de ces sites, et chacun évoque les trois tranches

  4   d'âge évoquées par M. Baraybar, ce qui a été évoqué aujourd'hui. Ils sont

  5   pertinents eu égard à la déposition du Pr Lawrence, qui sera là la semaine

  6   prochaine. Nous pouvons en parler encore une fois, mais je ne sais pas si

  7   vous souhaitez que nous les montrions au témoin.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et ils ont été communiqués à la Défense,

  9   je suppose.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Je crois que oui, mais je vais vérifier.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, pourquoi ne remettez-vous pas

 12   une copie papier et nous en remettons à M. Karadzic, à savoir si oui ou non

 13   il veut poser la question au témoin ou pas.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous poursuivons, il y a une

 16   question que M. le Juge Baird souhaite poser.

 17   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Baraybar, une simple question

 18   sur les échantillons. Est-ce que nous pouvons supposer que l'échantillon de

 19   Tuzla et de Kosovo se concorde ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Dans les grandes lignes, oui. J'étais en

 21   train de vérifier les tranches d'âge par phase. Par exemple, à chaque

 22   technique correspond des phases et des mêmes tranches d'âge. Ils sont très

 23   proches et ressemblent aux échantillons américains.

 24   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci beaucoup.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, à vous.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Baraybar, ces critères retenus me rendent un peu perplexe. Je


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  1   regarde votre document P4030 ainsi que votre résumé, votre curriculum

  2   vitae, et, à mon sens, je ne vois nullement mention de Simmons ou de

  3   quelqu'un d'autre qui aurait tenté d'établir certains critères qui seraient

  4   applicables à cet homme musulman. Mais à la dernière page, je vois que ce

  5   travail a été à un moment donné présenté à l'Académie américaine de

  6   médecine légale. Il s'agit de l'avant-dernier paragraphe sur votre liste,

  7   Simmons, Kesetovic, et cetera, et Cihlarz. Mais le fait qu'un article a été

  8   présenté quelque part ne signifie pas pour autant que les travaux ont été

  9   acceptés et que des critères ont été établis. Etes-vous d'accord ?

 10   R.  Non. En réalité, non. Pour qu'un article soit accepté et accepté par

 11   l'académie, cela fait l'objet d'une étude par les pairs. Il faut présenter

 12   un papier, et ensuite cela est accepté systématiquement, ce n'est pas le

 13   cas. En fait, il est vrai que cet article n'a jamais été publié. Il

 14   faudrait poser la question à Simmons et à ses collaborateurs.

 15   Il est vrai, en revanche, que pour ce qui est de la nature même de

 16   l'enquête, à savoir les données brutes que Simmons nous a fournies à

 17   l'époque sont sûres. Je ne vois pas en quoi cela pourrait constituer un

 18   quelconque problème. Et comme je vous l'ai dit il y a quelques instants,

 19   les résultats de Simmons sont assez semblables, me semble-t-il, même si la

 20   technique utilisée est différente en termes de statistique. Enfin, la

 21   manière dont ils traitaient les données est différente. Et pour ce qui est

 22   de ce qu'a dit Kimmerle, un collaborateur en 2008, ces travaux-là ont été

 23   publiés dans le journal des recherches scientifiques -- ou de Journal de

 24   pathologie scientifique.

 25   Q.  Alors, avant cela, je souhaite vous citer un article de "American

 26   journal" d'anthropologie physique. N'existe-il pas de travaux plus récents

 27   que celui-ci où on évoque les Afro-américains et qu'on les appelle des

 28   Nègres ? Ne pensez-vous pas que ce terme employé est un petit peu obsolète,


Page 22386

  1   et que l'article en lui-même n'est-il pas obsolète ? N'y a-t-il pas eu

  2   d'avancée depuis 1952 dans ce domaine ? Cela fait presque 45 ans

  3   maintenant.

  4   R.  Je crois que oui, mais je ne vois pas quel rapport il y a entre l'un et

  5   l'autre. Je n'ai pas parlé de "American journal" d'anthropologie physique

  6   lorsque j'ai cité mes références, même si la technique que je cite est la

  7   technique d'Iscan et Loth et d'un échantillon d'Afro-américains et de

  8   Caucasiens ne remonte pas aux années 1950. C'est bien après cette date-là.

  9   Et je ne vois pas en quoi il y aurait un parallèle entre ces deux éléments.

 10   Q.  Et d'après ce que vous savez, la même chose a-t-elle été faite au

 11   Vietnam ? Est-ce ainsi que les comparaisons ont été faites, par exemple,

 12   entre les Afro-américains et les blancs aux Etats-Unis ? Est-ce que la même

 13   chose a été faite au Vietnam, et est-ce que des normes ont été créées ?

 14   R.  Je ne comprends pas votre question. Qu'est-ce qui a donné lieu à des

 15   normes ? Est-ce que vous voulez parler de la technique utilisée en

 16   particulier, pour ce qui est de la quatrième côte, par exemple ? Votre

 17   question porte là-dessus ?

 18   Q.  Si j'ai bien compris, les indices permettant de recalculer l'âge est

 19   quelque chose qui a fait l'objet d'une norme. Et un indice analogue a-t-il

 20   été établi pour correspondre à un homme musulman, serbe ou croate ? Est-ce

 21   que c'est quelque chose qui a été accepté par le monde scientifique, et que

 22   ceci peut être refait à chaque fois qu'il y a expérimentation scientifique

 23   pour fournir les mêmes résultats ? Est-ce que ce recalcul a fait l'objet

 24   d'une norme ?

 25   R.  Alors, je vais essayer de répondre à votre question telle que je la

 26   comprends. Nous avons cité deux techniques ici. La première consiste à

 27   parler des changements opérés au niveau de la symphyse pubienne, et l'autre

 28   au niveau de la quatrième côte. Les techniques utilisées, à savoir les


Page 22387

  1   observations faites des modifications opérées sur ces ossements et la

  2   transformation en phase est quelque chose qui a été fait aux Etats-Unis.

  3   Une étude sur un échantillon très important a été faite à Los Angeles et

  4   sur un échantillon plus petit en Floride.

  5   Alors que ces modifications au niveau des phases restent les mêmes,

  6   la composition de l'échantillonnage de la population a changé, en revanche,

  7   par exemple, dans l'échantillon de Simmons ou dans l'échantillonnage de

  8   Kimmerle ou échantillons dans d'autres parties du monde ou d'autres pays du

  9   monde. C'est ce que nous appelons des critères liés plus particulièrement à

 10   un type de population. La même technique pourrait être appliquée à la

 11   population péruvienne. A ce moment-là, j'analyserai les mêmes phases, mais

 12   je parviendrais peut-être à la conclusion que la première phase au niveau

 13   de l'échantillon américain correspond à 20 ans d'âge, et dans l'étude

 14   péruvienne, à 19 ou 22. Donc, ce que nous appelons la calibration est

 15   quelque chose qui a été effectué, par exemple, dans les Balkans par Simmons

 16   en 1999, dans cet article que vous avez cité, en 2008 par Kimmerle, cet

 17   exemple qui porte sur le Kosovo, et c'est quelque chose qui a été fait dans

 18   d'autres pays également. Un certain nombre de personnes dans le monde

 19   établissent ces normes qui sont fiables, qui ont été établies. On ne peut

 20   pas dire qu'elles sont inutiles. Ce sont des techniques que l'on peut

 21   utiliser et il faut les calibrer en fonction de la population en question.

 22   En réalité, maintenant je me souviens qu'il y a une étude qui a été

 23   faite en Serbie par Marija Djuric, qui a été publiée, je crois, dans

 24   "Forensic Science International". Marija Djuric a étudié la question, donc.

 25   C'est une pathologiste scientifique serbe. Donc, c'est une technique très

 26   utile. Par conséquent, les enquêteurs du monde entier ont tendance à

 27   calibrer - je crois que c'est le terme approprié - ces techniques pour les

 28   appliquer à la population étudiée. Donc, la réponse est oui.


Page 22388

  1   Q.  Et si nous prenons en compte les articles de Kesetovic et Cihlarz, cela

  2   signifie que l'on cite un groupe de référence ou une valeur de référence,

  3   un groupe de contrôle ?

  4   R.  Alors, je n'ai pas de tailles d'échantillon à vous citer. Je vais

  5   vérifier mes notes. Alors, si, par exemple, l'échantillon d'hommes, qui

  6   correspond à 242 individus, celui des femmes est assez petit et correspond

  7   à 52, pour ce qui est de la symphyse pubienne. Et pour les côtes, 233

  8   hommes ont été étudiés, 52 femmes. Alors, si vous comparez cela à

  9   l'échantillon de Suchey-Brooks, c'est plus petit, mais statistiquement

 10   parlant, c'est pertinent, parce que Suchey-Brooks répertorie 739 cas. Donc,

 11   cela reste un échantillon assez important.

 12   Q.  Je comprends, Monsieur Baraybar, mais pour pouvoir établir des indices

 13   de conversion pour une population donnée, comme la population musulmane de

 14   Bosnie, il doit y avoir une valeur de référence, un groupe de contrôle.

 15   Est-ce que Cihlarz et Kesetovic ont fourni des éléments de preuve pour

 16   étayer cela ? Parce que ce qui est présenté à l'académie est quelque chose

 17   qui doit être vérifiable.

 18   R.  Je vais préciser. Peut-être qu'il y a un problème de traduction. Il ne

 19   s'agit pas d'un indice de conversion, mais une calibration, en quelque

 20   sorte.

 21   Et je vais vous expliquer comment ça marche. C'est même plus simple

 22   que cela n'y paraît. Alors, imaginez la chose suivante : l'avantage qu'il y

 23   a à travailler avec un échantillon qui provient d'une salle d'autopsie,

 24   c'est que vous êtes en présence d'individus qui ont un âge chronologique,

 25   une identité. Vous connaissez l'âge de cette personne qui figure sur une

 26   carte d'identité de cette personne. Donc, ça, c'est votre groupe de

 27   contrôle. Allez-vous commencer à travailler sur ce groupe de contrôle qui

 28   se fonde, en fait, sur l'identité de cette personne et l'âge de cette


Page 22389

  1   personne, dans le cas précis. Donc c'est un groupe de contrôle en tant que

  2   tel. Vous commencez à travailler à partir des éléments connus. Alors, vous

  3   avez 242 personnes, vous avez 242 individus qui ont un âge chronologique et

  4   qui ont été identifiés, ou plutôt ils ont été identifiés et donc on peut

  5   leur donner un âge. Ça, c'est votre groupe de contrôle. Alors, vous n'êtes

  6   pas obligé d'avoir un échantillon à part qui vient d'ailleurs. C'est votre

  7   groupe de contrôle. C'est celui sur lequel vous fondez votre examen.

  8   Donc, vous dites : J'ai 242 personnes. Je divise cela par une

  9   décennie, par exemple, 20, 30, 40, et cetera. Donc vous regardez ce morceau

 10   d'ossement, indépendamment de l'âge de la personne. J'attribue ce fragment

 11   d'os à la phase deux. D'accord ? Et ensuite vous allez compter toutes vos

 12   phases deux, vous allez dire que dans la phase deux, j'ai des personnes qui

 13   ont 20, 22, 25 et 30 ans. Donc, votre tranche d'âge est entre 20 et 30.

 14   Donc, c'est une simplification de la manière dont nous procéderions. Donc,

 15   oui, c'est sûr. C'est tout à fait fiable.

 16   Q.  Oui, mais dans ces tranches d'âge que vous avez citées, cela ne peut

 17   pas être plus précis que cela ?

 18   R.  Non, certainement pas, parce qu'on tente d'être exacts plutôt que

 19   précis. Souvenez-vous du fait que lorsqu'on établit l'âge de personnes

 20   adultes qui ont plus de 25 ans, il y a tous les petits morceaux que nous

 21   retrouvons. Nous retrouvons les os et tout ceci est imprécis. C'est assez

 22   exact, mais cela n'est pas précis. Vous savez que ces individus qui ont

 23   l'air beaucoup plus âgés qu'ils ne le sont, en réalité, ou qui sont plus

 24   jeunes qu'ils n'y paraissent.

 25   Si je vous donne un exemple de vulgarisation pourquoi un joueur de

 26   football part à la retraite à 35 ans, parce que ses genoux seront

 27   complètement détruits par son activité et le fait qu'il joue au football.

 28   Si vous regardez l'os de ce type de personne et vous regardez le genou d'un


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  1   joueur de football, en fait, ses genoux sont complètement détruits, et vous

  2   pensez que cet homme est beaucoup plus âge qu'il ne l'est en réalité. Et il

  3   a 35 ans et pas 58 ans.

  4   Donc, si vous regardez les personnes plus jeunes, où la dentition

  5   n'est pas encore complètement formée, et les personnes sont jeunes et les

  6   os sont en train de se former, dans ce cas-là, donc cela n'est pas précis,

  7   mais c'est exact. Je le dirais comme ça.

  8   Q.  Merci. Alors, je suis maintenant à la page 103 de ce document, la page

  9   précédente, et là vous dites qu'il s'agit de victimes présumées de la zone

 10   de Srebrenica, la zone protégée, les victimes provenant de la zone protégée

 11   qui ont été tuées en 1995. Les photographies aériennes de terre remuée,

 12   est-ce qu'il s'agit là d'un indicateur-clé qui vous permet de commencer à

 13   creuser ?

 14   R.  Je crois que c'était plutôt quelque chose qui nous a guidé. Cela dépend

 15   des sites. Par exemple, je vais vous donner un exemple d'ordre pratique, ce

 16   que vous voyez depuis le ciel, vous voyez que la terre a été grattée. C'est

 17   ce que vous voyez d'en haut. Donc, vous ne voyez pas toujours qu'il y a une

 18   fosse. Alors, il faut, en réalité, déterminer si oui ou non cette grande

 19   tache de terre correspond à une fosse, à plusieurs fosses, et déterminer

 20   l'emplacement de la fosse. C'est juste une manière de s'orienter et ça

 21   n'est pas quelque chose de précis.

 22   Et en ce qui concerne d'autres sites, ces taches sont plus petites peut-

 23   être, et dans ce cas, vous pouvez davantage vous recentrer sur un endroit

 24   en particulier. Je pense au site de Glogova, où il y a cette tache énorme

 25   et la fosse était un petit peu partout sous cette grande tache de terre.

 26   C'est un point de référence.

 27   Q.  Merci. Alors, pourriez-vous nous aider en ceci. Alors, y a-t-il des

 28   changements quotidiens au niveau du sol, parce que entre le 5 et le 25


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  1   août, ce sont des périodes assez longues, et ceci n'est pas très précis.

  2   Nous avons un moment, une période de massacres et d'exécutions illégales,

  3   et ensuite il y a la phase d'inhumation des personnes qui ont été tuées

  4   dans les bois. Savez-vous à quoi tout ceci ressemblait aux dates du 15, 16,

  5   17 juillet, ou est-ce que vos dates de référence n'ont été que le 5 et le

  6   25 ?

  7   R.  Il est impossible pour moi de savoir à quoi ressemblait le sol à une

  8   date donnée. Votre question précédente a porté sur ce que j'ai vu à partir

  9   de photos aériennes que l'on m'a montrées, et bien évidemment, je ne sais

 10   que ce que j'ai vu sur ces photos aériennes aux dates indiquées sur ces

 11   photographies aériennes. Je n'ai aucun moyen de savoir à quoi cela

 12   ressemblait ou à quoi ressemblait le sol depuis là-haut, à ces dates-là.

 13   Mais comme je vous l'ai dit, ces photographies constituaient pour moi un

 14   point de référence.

 15   Et c'est très important de dire cela, parce que certains sites ne

 16   présentaient une correspondance parfaite entre la tache observée, par

 17   exemple, la tache serait au milieu ou sur le côté, il y aurait quelques

 18   variations par rapport à ce que vous trouvez sur le sol, et c'est des

 19   informations fournies par les photographies aériennes. La réponse est non,

 20   je ne sais pas à quoi ressemblait le sol à ces dates-là.

 21   Q.  Merci. Dans ce cas, nous allons entrer en contact avec l'Accusation

 22   pour pouvoir recueillir des photographies qui auraient été prises un jour

 23   après l'autre.

 24   Et lorsque vous dites "tués en 1995 en Bosnie-Herzégovine orientale", est-

 25   ce que vous deviez faire la différence entre ceux qui ont été tués de façon

 26   illégale et ceux qui ont été tués au combat, est-ce qu'on attendait de vous

 27   de faire cette différence, puisque les combats ont fait rage pendant ces

 28   mois-là ? Parce que ces personnes-là ont dû être inhumées également.


Page 22392

  1   R.  Je crois que ceci porte sur une question précédente que vous avez posée

  2   au début de votre contre-interrogatoire.

  3   Comme je vous l'ai dit, toutes ces références constituent simplement des

  4   références qui ont trait aux informations qui m'ont été fournies. Je ne

  5   suis pas en mesure, et je ne l'étais pas à ce moment-là non plus, de fonder

  6   mes observations là-dessus, je ne pouvais pas déterminer quel était le

  7   statut des personnes qui ont été ensevelies, qui se soient agi de

  8   combattants ou de non-combattants. Les informations présentées dans ce

  9   rapport se fondent sur l'analyse ou l'après-analyse des éléments retrouvés

 10   sur les sites, et qu'on nous a demandé de retrouver ou que nous avons

 11   précisé au moment où nous les avons trouvés. Personne nous a demandé

 12   d'aller d'exhumer telle et telle fosse parce que cette fosse contient tel

 13   et tel, ce n'est pas ce type d'information qui nous a été communiqué. Les

 14   éléments de contexte qui nous ont été fournis sont les suivants : dans

 15   cette zone, il y a des victimes ou des victimes présumées de Srebrenica. Il

 16   s'agit là simplement d'informations de contexte, nous devions commencer à

 17   travailler. C'est ce qu'on nous a donné comme information. Mais jamais

 18   d'instructions particulières ou d'informations particulières concernant la

 19   nature des victimes, ou le statut des victimes.

 20   Et bien évidemment, c'est quelque chose qui figure dans le rapport

 21   également, la plupart des déclarations dont je dispose ont été rédigées à

 22   partir d'observations directes. Par exemple, j'ai retrouvé un corps

 23   complètement habillé. Et lorsque j'ai examiné les restes humains, je

 24   pouvais constaté qu'il y avait un portefeuille, et qu'en ouvrant le

 25   portefeuille, on pouvait retrouver une carte d'identité avec un nom, et

 26   donc c'est quelque chose qu'on fait de façon succincte, et c'est très

 27   utile, en fait, pour les gens à la morgue d'ouvrir le registre des

 28   personnes portées disparues du CICR, et de retrouver le nom de telle et


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  1   telle personne, et cela correspondait au nom trouvé sur la carte

  2   d'identité, cette personne avait été vue pour la dernière fois dans

  3   l'enclave de Srebrenica en juillet 1995, et donc, cet élément d'information

  4   était consigné dans le rapport. Pas plus que cela, pas plus que qu'est-ce

  5   que vous avez vu.

  6   Q.  Merci. Sauf votre respect, Monsieur Baraybar, la première question que

  7   je vous ai posée ce matin portait sur les personnes qui avaient été tuées

  8   avant 1995. Etes-vous d'accord pour dire qu'en tenant compte de ces

  9   chiffres correspondant aux personnes qui ont été tuées en juillet 1995, aux

 10   fins des Juges de cette Chambre, il était important de faire la différence

 11   entre ceux qui avaient été tués de façon illégale et ceux qui avaient été

 12   tués au combat ? Donc avant juillet 1995, ou avant le 13 juillet 1995, cela

 13   correspond à une série d'individus, et le mois de juillet correspond à une

 14   autre série d'individus. Est-ce que votre équipe d'experts a pu faire la

 15   différence entre ces un, deux, ou trois groupes de personnes ?

 16   R.  Je crois qu'il y a deux parties lorsque je vais répondre à cette

 17   question. La première réponse est un non catégorique. Mais la deuxième

 18   partie de ma réponse, eh bien, je vais nuancer cela. Alors, si vous

 19   analysez à l'œil nu un cadavre, à savoir s'il est décomposé ou non, il

 20   n'est pas possible de dire si cette personne est décédée en 1992, 1993,

 21   1994, ou 1995, bien sûr que non. Simplement, les éléments associés ou les

 22   éléments retrouvés eu égard à ces corps nous laissent penser et déduire,

 23   par conséquent, que ces personnes ont sans doute été tuées à telle et telle

 24   date.

 25   Et ce type d'association - l'association, cela étant dit, est un principe

 26   appliqué par les archéologues dans un contexte scientifique ou non - nous

 27   permet de déduire que si, par exemple, je retrouve un corps qui est

 28   complètement habillé où les effets personnels peuvent être retrouvés sur


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  1   cet individu, y compris une carte d'identité sur laquelle figure un nom qui

  2   appartient à un homme qui a un nom qui peut être retrouvé dans le registre

  3   du CICR, une personne qui a été vue pour la dernière fois dans l'enclave de

  4   Srebrenica en 1995, eh bien, a priori et à moins que l'on ne puisse

  5   démontrer le contraire, j'en déduis logiquement qu'effectivement cette

  6   personne est décédée après juillet 1995, après la date à laquelle cette

  7   personne a été vue pour la dernière fois.

  8   Si, par exemple, je pouvais démontrer - et à ma connaissance cela n'a pas

  9   été le cas jusqu'à ce jour - si je pouvais démontrer que cette personne

 10   n'était pas la personne qui portait ou sur laquelle a été retrouvée cette

 11   carte d'identité, à ce moment-là ce serait différent, cette personne aurait

 12   pu décéder trois ans auparavant. C'est une possibilité. Mais nous sommes

 13   dans le domaine du possible, mais nous ne sommes pas dans le domaine du

 14   probable. Il s'agit de deux choses différentes; c'est 50/50, mais la

 15   probabilité est autre chose. La possibilité est à 50/50. Donc il est

 16   important d'en tenir compte.

 17   Et stricto sensu, non. La réponse est non, non mais. Et c'est le "mais", en

 18   fait, qui contredit le non, parce qu'il ne s'agit pas d'observer à l'œil nu

 19   un corps, un cadavre. Si l'on observe un cadavre de cette manière, je ne

 20   peux pas vous dire plus que cela, est-ce que cette personne est décédé en

 21   l'an un ou trois, enfin il y a un an ou trois ans, je ne peux pas vous le

 22   dire avec certitude, sans qu'il y ait des éléments associés, dont je dois

 23   disposer pour pouvoir vous le dire, et que je dois avoir dans ce cas.

 24   Q.  Vous avez mentionné des effets vestimentaires. Est-ce que vous serez

 25   d'accord pour dire qu'à Glogova et à RV, Ravnice, qu'on y a trouvé des

 26   adultes, des hommes portant des uniformes de camouflage, des pantalons de

 27   camouflage, des bottes militaires ? Et est-ce que cela a permis de tirer

 28   des conclusions ? Est-ce que l'on a remarqué cela, est-ce que l'on a relevé


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  1   qu'il s'agissait éventuellement de militaires ou de combattants ?

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne répondiez.

  3   Monsieur Mitchell.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Référence, s'il vous plaît. Est-ce que l'on

  5   peut nous référencer cela.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais cela provient des conclusions de

  7   l'ensemble de l'équipe, des travaux de l'équipe, à savoir que l'on a trouvé

  8   cela. Je pensais que le témoin se souvenait qu'on a pu constater qu'il y

  9   avait des gens en vêtements militaires. Donc, très bien, on va retrouver la

 10   référence.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Alors, Monsieur Baraybar, est-

 12   ce que vous pouvez répondre ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis en train de regarder les rapports,

 14   parce que je ne veux pas me fier uniquement à mes souvenirs. Pour ce qui

 15   est de mes souvenirs, non, personnellement, je ne m'en souviens pas, mais

 16   je ne parle qu'en mon nom personnel. Je ne me souviens pas d'avoir trouvé

 17   quelqu'un en vêtement militaire. Mais voyons ce que nous avons ici, par

 18   exemple, il s'agit de Glogova 5. Dans la fosse A, on a trouvé un pistolet

 19   Beretta qui était chargé de calibre 7.65, et puis un holster qui était

 20   associé à un des corps, 152B, mais cette personne n'était pas en vêtements

 21   militaires du tout. A Nova Kasaba aussi, sur l'un des sites, il y a eu des

 22   balles -- des munitions, donc, qui ont été retrouvées, mais pas associées à

 23   quelqu'un qui aurait été vêtu en uniforme militaire.

 24   Donc il faudrait peut-être revoir les différents cas plus précis. Je

 25   ne me fierais pas en ma mémoire seule.

 26   R.  Merci. S'agissant de l'état de préservation des restes, page 5 de votre

 27   rapport que nous sommes en train d'examiner. Rapport 4030, P4030. Vous

 28   parlez de fosses d'origine ou de fosses secondaires. Et ce qui m'intéresse


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  1   ici, c'est de savoir si ce sont vos données ou est-ce que vous vous êtes

  2   appuyé sur les conclusions du Pr Wright ?

  3   R.  En fait, c'est une combinaison des deux. Le Pr Wright a passé beaucoup

  4   de temps à exhumer les sites. Moi aussi, j'ai dirigé plusieurs exhumations,

  5   mais j'ai pris part, pour ma part, à des exhumations qui ont été menées par

  6   le Pr Wright. Donc on était tous les deux employés simultanément. Donc je

  7   cite le Pr Wright ici, son rapport, mais vous avez une combinaison des

  8   deux. Mes observations personnelles, mais je souscris à la déposition du Pr

  9   Wright là-dessus.

 10   Q.  D'accord. Alors, compte tenu du fait que c'était un champ de bataille,

 11   et ce, pendant 42 mois, l'intensité était particulièrement importante

 12   jusqu'au printemps 1993. Ce qui m'intéresse le plus, c'est l'état de

 13   préservation des restes. D'un point de vue anthropologique, ce que vous

 14   dites c'est que vous relevez le niveau de fragmentation comme étant un

 15   élément, et puis la saponification comme un autre élément. Donc

 16   squelettisation et saponification. Alors, j'aimerais savoir s'il y a eu des

 17   exemples de momification ? Est-ce qu'il s'agit uniquement de

 18   squelettisation ou est-ce qu'il y a eu également des cas de momification

 19   observés ?

 20   R.  Là, sur-le-champ, je ne me souviens pas d'exemple de momification, mais

 21   ce dont je me souviens, c'est que la préservation, avant tout, a à voir

 22   avec les conditions d'inhumation. Par exemple, si vous avez un site qui

 23   n'est pas inondé, où l'eau ne reste pas, donc si vous avez un sol rocheux

 24   poreux, avec du gravier, l'eau passera à travers, et là, en principe, vous

 25   aurez plutôt la squelettisation des corps.

 26   A titre d'exemple pour illustrer cela, le site du barrage de Brnice

 27   s'est creusé dans un des plateaux du barrage, et les corps sont

 28   squelettisés. Vous n'avez que des ossements. Tandis qu'à d'autres sites, à


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  1   titre de comparaison -- je ne sais pas, par exemple, certains sites de Nova

  2   Kasaba, où il y a la terre glaise, donc un sol très riche, avec une très

  3   grande humidité, eh bien, là vous aurez la saponification. Donc il y a

  4   saturation, et vous obtiendrez une consistance plutôt dure, quelque chose

  5   entre la cire et le beurre. Et je me souviens de certains corps momifiés

  6   dans d'autres cas, mais pas ici, vraiment pas.

  7   Q.  Donc nous sommes d'accord sur le fait qu'en fonction de l'état de

  8   préservation des restes -- en fait, que cet élément est très important pour

  9   déterminer le moment du décès; c'est bien cela ?

 10   R.  Tout à fait. Donc on ne parle pas vraiment d'intégrité, on parle de

 11   préservation, parce que "intégrité" est utilisé plutôt pour désigner un

 12   corps par opposition aux parties corporelles. Donc, lorsque je parle

 13   d'intégrité, c'est pour distinguer les corps complets des corps qui ne sont

 14   pas complets. Par exemple, il y a eu des pillages de certains sites ou on a

 15   remué certains sites, oui. Mais lorsqu'on parle de préservation,

 16   effectivement, c'est un critère d'importance cruciale.

 17   Q.  Il me semble que c'est un problème de traduction. Je ne parlais pas

 18   d'intégrité. J'ai parlé de préservation, de niveau de préservation ou de

 19   niveau de détérioration. Donc j'ai parlé de l'importance des modifications

 20   intervenues, et c'est cela qui nous indique le moment du décès; c'est bien

 21   cela ?

 22   R.  Jusqu'à un certain point, oui. Mais n'oubliez pas la chose suivante :

 23   ce sont deux choses complètement différentes de savoir combien de temps

 24   s'est passé depuis le moment de la mort au niveau d'un cadavre où il est

 25   question, par exemple, d'heures ou de jours que lorsque vous avez un

 26   cadavre qui a été inhumé pendant quelque temps et qui présente un certain

 27   niveau de préservation. Donc, lorsque vous examinez à l'œil nu un corps,

 28   est-ce que vous pouvez dire que c'est depuis deux mois et trois jours ou


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  1   depuis un an et un jour que ce corps inhumé est ici, non, bien sûr que vous

  2   ne pouvez pas parler de cela.

  3   Mais si vous avez un cadavre, vous pouvez relever la température et

  4   toute une série de modifications rigor mortis, et cetera. Donc la

  5   conservation ou la préservation des restes dépend davantage des

  6   circonstances d'inhumation, du contexte dans lequel le corps est inhumé,

  7   mais cela ne vous permet pas d'évaluer de manière précise l'intervalle qui

  8   s'est déroulé depuis la mort comme c'est le cas avec un cadavre.

  9   Par exemple, ce serait très difficile de dire : Cet individu est mort

 10   en 1995, 1994, fin 1994, et cetera. Cependant, les corps que nous examinons

 11   ne sont pas sortis du contexte. Ce sont des corps qui sont associés à un

 12   certain contexte, à certains éléments. Et donc, l'un des principes observé

 13   est que c'est le contexte qui, jusqu'à un certain point, définit votre

 14   interprétation ou guide votre interprétation. Donc vous avez des vêtements

 15   et vous pouvez avoir toutes sortes d'objets qui peuvent vous donner une

 16   estimation relative, pas une datation absolue. Ce serait C14, par exemple,

 17   une datation scientifique avec des chiffres très précis. Mais ici, ce

 18   serait relatif. Donc une pièce d'identité, un nom qui a été répertorié dans

 19   le registre des portés disparus. Vous aurez déjà donc une datation relative

 20   si quelqu'un a été porté disparu en juillet 1995.

 21   Donc, effectivement, vous avez raison en disant cela, mais

 22   malheureusement on ne peut pas sortir les choses hors de leur contexte. Il

 23   ne s'agit pas simplement d'un corps nu, sans aucune espèce d'élément trouvé

 24   dans le vide, donc sans rien qui vous permettrait de déterminer quoi que ce

 25   soit sur ce corps. Il vous faut prendre en considération beaucoup

 26   d'éléments pour arriver à une conclusion logique.

 27   Q.  Et par rapport à la datation, en termes de jours, quelle serait alors

 28   la marge d'erreur ou de précision si on parle en termes de jours ?


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  1   R.  Là encore, sur la base de l'examen à l'œil nu d'un corps nu hors

  2   contexte, eh bien, on ne pourrait absolument pas l'évaluer. Cependant, vous

  3   avez d'autres éléments, d'autres objets, qui y sont associés. Vous avez des

  4   montres. Vous avez M. Mills qui est un spécialiste des montres, et vous

  5   savez qu'il y a eu des montres automatiques qui ont été trouvées dans des

  6   fosses d'origine, fosses secondaires, attachées au poignet de quelqu'un ou

  7   dans l'espace du site ou du charnier. Pour autant que je sache, c'est en

  8   suivant l'oscillation, les mouvements du poignet, que fonctionnaient ces

  9   montres. Lorsque le mouvement s'arrête, lorsque le poignet continue de

 10   bouger, si quelqu'un est mort, par exemple, eh bien, c'est entre 32 et 35

 11   heures qui devront s'écouler avant que la montre ne s'arrête - et là je

 12   m'appuie sur d'autres rapports que le mien - et donc la montre s'arrêtera.

 13   Et puis vous aurez la combinaison du jour et de la date que vous aurez

 14   relevés sur ces montres et vous aurez toujours vendredi 15 ou samedi 15,

 15   même si en fait le samedi était un 16. Donc c'était un problème de datation

 16   sur les montres. Donc, si vous déduisez le nombre d'heures pendant

 17   lesquelles la montre a continué de fonctionner, vous arrivez au 13.

 18   Donc, là encore, c'est un élément de plus - rappelez-vous le CICR,

 19   les registres des portés disparus - donc vous essayez d'établir

 20   l'intervalle pendant lequel ces individus se sont retrouvés dans le

 21   charnier.

 22   Est-ce que c'est scientifiquement fondé ? Oui, tout à fait. Vous

 23   déduisez de manière logique de cet ensemble d'éléments. Et c'est très

 24   pratique. Donc c'est une approche qui est tout à fait pragmatique.

 25   Personnellement, je n'avais pas jamais utilisé cette méthode de montre

 26   avant que M. Mills ne la développe dans ce rapport, et je l'ai trouvée très

 27   utile et très intéressante.

 28   Q.  Merci. Dans votre rapport, vous parlez du vendredi 15, et le Pr Wright


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  1   parle du samedi 15. C'est peut-être quelque chose qui avait trait à des

  2   mois différents. Ou des années différentes. Si la date est différente, si

  3   le mois dernier -- par exemple, si samedi c'était le 15, le mois suivant,

  4   eh bien, le 15 serait le vendredi, et cetera.

  5   R.  Vous pourriez avoir raison. Le seul problème c'est que, et en ce qui me

  6   concerne, j'ai précisé cela dans mon rapport, nous avons retrouvé des

  7   montres dans la même fosse qui affichaient ces combinaisons de dates. Et

  8   donc, si on prend le contexte dans son ensemble, on peut en déduire que la

  9   montre ne fonctionnait pas correctement. Je vais préciser.

 10   Si je retrouve des corps sur lesquels on retrouve des cartes

 11   d'identité de personnes qui ont été vues pour la dernière fois à Srebrenica

 12   et qui figurent dans le registre du CICR, et que je vois des montres, et

 13   que tout ceci est pris ensemble, il y a une forte probabilité pour que le

 14   samedi 15 corresponde à une autre année n'est pas du tout probable. Il

 15   s'agit plutôt d'un mauvais fonctionnement des montres. Et qu'un corps ait

 16   été placé là, c'est peu probable. Je ne dirais pas impossible, mais c'est

 17   très peu probable dans un cas comme celui-ci.

 18   Q.  Merci. Monsieur Baraybar, je souhaite vous dire pourquoi la Défense

 19   insiste sur ce point. Prenez le cas d'une personne qui a été vue pour la

 20   dernière fois à Srebrenica, disons le 9, le 10 ou le 11 juillet, et

 21   qu'ensuite cette personne a été retrouvée dans une des fosses. Est-ce que

 22   vous pouvez établir que cette personne est décédée ou a été tuée le 12, le

 23   13, le 14 ou le 15, voire même le 16, ou après la date du 16 ? Etes-vous en

 24   mesure d'établir depuis combien de temps le corps est resté à la surface du

 25   sol avant d'être inhumé ? Par exemple, en tant qu'expert scientifique,

 26   êtes-vous en mesure de fournir à mes experts scientifiques des données sur

 27   l'état de putréfaction qui lui sembleraient logiques et avec lesquelles il

 28   pourrait être d'accord ?


Page 22401

  1   R.  Cela est très difficile. La raison en est que c'est qu'on ne parle pas

  2   de fosses individuelles. Alors, reprenons un petit peu. Les éléments

  3   essentiels qui ont été retrouvés au niveau d'un grand nombre de corps, je

  4   ne vais pas parler de tous les corps, de larves, de "cadaveri fauna", de

  5   larves. Comme vous le savez, la colonisation par des mouches sur les corps

  6   se produit très rapidement. Et si nous parlons de 1995 et de l'été, il

  7   faisait assez chaud, et les mouches prennent très peu de temps pour déposer

  8   leurs œufs sur les corps. Cela peut se placer sur des blessures ouvertes,

  9   et cetera, sur le nez, les oreilles, les narines, et cetera.

 10   Et donc, sur les corps que nous avons retrouvés, nous avons retrouvé

 11   des colonisation de mouches au niveau de larve. Et vous savez aussi que les

 12   larves peuvent se développer en se nourrissant de la chair. Cela dépend des

 13   conditions, des conditions atmosphériques, d'humidité et de chaleur. Même

 14   ensevelies, les larves continuent à faire leur travail sur le cadavre.

 15   Donc l'intervalle de temps, à savoir entre le moment où les œufs sont

 16   déposés et l'apparition de larves, correspond dans ces conditions entre

 17   sept jours et dix jours, dans ces conditions.

 18   Et comme j'ai dit, les mouches sont présentes sur les corps très

 19   rapidement. Par exemple, le corps peut être décédé, être colonisé par les

 20   mouches et être enseveli. Ensuite, si le corps est exhumé, vous retrouverez

 21   ces larves. Mais cela ne signifie pas que le corps a été exposé à la

 22   surface pendant dix jours. Donc c'est très compliqué parce que ces mouches

 23   se développent et font leur travail très rapidement sur le corps.

 24   Donc, pour ce qui est de comprendre combien de personnes dans une

 25   seule fosse, ou un seul corps, pour essayer de déterminer la conservation

 26   de ces corps de façon générale dans un même site est difficile. Donc, si

 27   nous trouvons, par exemple, qu'il y a 20 corps qui ont été complètement

 28   conservés et un qui est complètement squelettisé, cela signifie que ce


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  1   n'est pas facile à expliquer, mais que vous constateriez que toutes ces

  2   personnes qui se trouvent dans le centre sont dans un certain état, et le

  3   corps qui est retrouvé au milieu de tous ces corps a été complètement

  4   squelettisé, et qu'un des corps est plus âgé ou venait d'ailleurs, ce qui

  5   permet de déterminer l'état de conservation ou de décomposition des restes

  6   par site et voir si c'est cohérent ou non.

  7   Donc, si vous avez un état de larve, de colonisation de mouches ou de

  8   décomposition analogue ou égale, bien entendu, vous avez un certain nombre

  9   de corps que l'on retrouve dans une seule fosse et vous recréez le même

 10   environnement et vous avez tendance à comprendre quel est l'état de

 11   conservation ou de décomposition des corps au niveau de l'ensemble des

 12   corps. Enfin, je ne sais pas si je réponds à la question, en fait.

 13   Q.  Pour ce qui est de l'ensevelissement. Monsieur Baraybar, alors,

 14   maintenons-nous à la date du mois de juillet, seconde et troisième semaine

 15   du mois de juillet. Est-ce que vous pouvez nous dire si cette personne a

 16   été tuée le 10 ou 11, 12, 13, ou était-ce le 14 ou le 15 ou le 16, ou est-

 17   ce quelque chose qui s'est produit après le 16 ?

 18   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète : Ce sont des asticots qui sont

 19   retrouvés sur les corps même ensevelis.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Je vous pose la question parce que nous n'avons aucun élément de preuve

 22   sur les représailles ou exécutions qui auraient eu lieu avant le 14 et

 23   après le 16. Nous savons qu'un nombre important de personnes ont été tuées

 24   en dehors de la période qui correspond aux exécutions illégales.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que le témoin a répondu à la

 26   question. Oui, Monsieur Mitchell.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Il s'agit, en fait, d'une déclaration

 28   erronée sur ces massacres qui n'auraient pas eu lieu avant le 14 ou après


Page 22403

  1   le 16.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Mitchell.

  3   Je vais vous autoriser à poser cette question pour la dernière fois.

  4   Ne vous sentez pas tenu par l'explication fournie, à savoir les jours

  5   de l'exécution, Monsieur Baraybar.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, comme je vous l'ai dit auparavant, je

  7   vais vous dire non. Mais lorsque je vous dis non, je dis non, aux fins du

  8   compte rendu d'audience. Alors, je vais m'exprimer de cette façon : la

  9   réponse est non. En d'autres termes, est-ce que quelqu'un ou est-ce qu'à

 10   l'œil nu on peut examiner un corps et dire si oui ou non cette personne,

 11   dans les conditions que nous avons décrites, à savoir ces corps qui ont été

 12   retrouvés dans les fosses, à savoir si ces personnes ont été tuées le

 13   premier, deuxième ou troisième jour ? Non, cela n'est pas possible. Mais je

 14   crois que j'ai contesté et réfuté cet argument lorsque j'ai fourni mes

 15   réponses précédentes aux questions précédentes que vous m'avez posées.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Merci. Je souhaite attirer votre attention maintenant sur le P4034. Il

 18   s'agit là du rapport d'exhumation. Je vais maintenant vous demander si vous

 19   l'avez sous la main. Je suis à la page 3 et il s'agit du résumé, et il y

 20   est dit -- où on parle de Kasaba 4, par exemple, et vous dites que les

 21   fosses ont été creusées à l'aide d'une pelleteuse. Est-ce que vous dites

 22   que certaines fosses n'ont pas été creusées avec des pelleteuses ?

 23   R.  Certaines ont été creusées à l'aide de chargeurs avant et d'autres avec

 24   des pelles rétrocaveuses. Toutes les fois où cela était possible de le

 25   déterminer, c'est quelque chose que nous avons précisé dans notre rapport.

 26   Q.  Alors, cela est un petit peu confus dans mon esprit lorsque vous dites

 27   que deux ou trois personnes -- deux ou trois corps correspondaient aux âges

 28   moyens d'hommes de 17 ans. Est-ce que cela signifie qu'un pouvait avoir 17


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  1   ans et l'autre 18 ?

  2   R.  Encore une fois, je vais vous demander de vous reporter au rapport

  3   précis du pathologiste qui aborde la question des âges précis de ces

  4   personnes. La façon dont le rapport a été préparé, eh bien, permet une

  5   lecture aisée des éléments. C'est simplifié. Je ne suis pas en train

  6   d'éliminer certaines choses ou d'éviter de répondre à certaines questions.

  7   Alors, tout ceci figure dans le rapport du pathologiste, celui qui a été

  8   écrit. C'est simplifié, ce n'est pas trop dense et c'est facile à

  9   comprendre. Je ne l'ai pas sous les yeux, mais c'est assez facile à

 10   comprendre. On estime de façon précise l'âge de ces individus.

 11   Q.  Merci. Et est-ce que vous pourriez maintenant regarder le résumé

 12   correspondant à Kasaba 6. Vous dites que ceci a été creusé à la main et que

 13   cette fosse comprenait les restes de deux hommes, l'un correspondant à

 14   l'âge de 14 et l'autre à l'âge de 24 ans, et qu'un groupe a été retrouvé

 15   entre l'âge de 14 et 24 et un autre groupe entre l'âge de 22 et 52. Donc,

 16   il y a un chevauchement ici. Ce qui m'intéresse ici, c'est l'individu sur

 17   lequel quatre balles ont été retrouvées. Pourriez-vous me dire à quel

 18   niveau du corps, à côté de quel organe ces balles ont été retrouvées ?

 19   R.  Si je ne me trompe pas, peut-être que cela figure ici. Un instant, s'il

 20   vous plaît. Ce dont je me souviens, c'est en tout cas que dans l'un des

 21   cas, au niveau de la tête. Le numéro 1, c'était au niveau de la tête, si je

 22   ne me trompe pas, à la page 13.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la page 13.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez une image ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons la télécharger. Et je vous

 26   demande de bien vouloir nous l'indiquer.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, pour ce qui est du premier corps, on

 28   peut lire ici, d'après le rapport du pathologiste, fragmentation d'une


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  1   partie de la main gauche aurait pu être due à une blessure par balle, et

  2   une balle a été retrouvée à côté de son genou gauche dans ce cas-ci.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voyez l'écran devant

  4   vous ? Est-ce que vous pensez que vous pouvez l'indiquer sur l'image que

  5   vous avez sous les yeux ?

  6   Mme l'Huissière va venir en aide. Oui.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] On peut lire ici que le premier corps, qui est

  8   celui-ci, et ça c'est le premier corps d'après cette photographie, on peut

  9   lire qu'une balle a été tirée et a été retrouvée près de son genou gauche.

 10   Donc, il est fort probable que ceci ait été retrouvé quelque part ici, en

 11   dessous. Et d'après le rapport du pathologiste, les os de la main gauche

 12   auraient pu être fragmentés à cause d'une blessure par balle et auraient

 13   été retrouvés en dessous. On ne le voit pas très bien ici à l'image, mais

 14   on voit une partie du bras ici. Mais ce serait, en réalité, dessous. Donc,

 15   ça c'est un des éléments, une des balles.

 16   Et ensuite, pour ce qui est du deuxième corps, nous avons retrouvé

 17   quatre balles. Une sous la tête. Donc, la balle numéro -- le corps numéro 2

 18   ici. Et donc, il y a une balle qui a été retrouvée sous la tête, et une

 19   autre balle qui a été retrouvée sous la poitrine, grosso modo ici. Et deux

 20   dans la région du bassin, dans le secteur du bassin. Ici. Et il y a deux

 21   douilles d'obus qui ont été retrouvées au niveau des pieds, et on voit une

 22   des douilles ici. Donc, douille ici -- donc, douille utilisée.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] M. Baraybar, aux fins du compte rendu,

 24   l'a indiqué par une flèche.

 25   Pouvez-vous apposer votre paraphe ainsi que la date.

 26   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Merci. A quelle profondeur étaient ces balles, ces douilles ?


Page 22406

  1   R.  Eh bien, c'est entre un pouce et demi et deux pouces de profondeur que

  2   nous avons retrouvé ces éléments.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser ce document en tant

  4   que document de la Défense.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote 1976.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Mais puisque les corps étaient dans cet état, est-il exact de dire

  8   qu'il n'était pas possible pour vous de déterminer si les personnes étaient

  9   vivantes au moment où leurs corps ont été touchés par ces balles ou non ?

 10   Autrement dit, est-ce que ces blessures étaient des blessures post mortem

 11   ou ante mortem, et notamment pour les coups qui ont été tirés en visant ces

 12   hommes ?

 13   R.  Eh bien, je tente à être plutôt d'accord avec vous. Le médecin légiste

 14   aborde évidemment ce type de question lorsque l'on est en présence de

 15   telles blessures, mais je vais vous donner ce qui est ma position. Je crois

 16   qu'une des choses que nous faisons c'est de déterminer la cause la plus

 17   probable de la mort. Et il est évident que l'on ne saura jamais si la

 18   personne est décédée d'une crise cardiaque lorsqu'elle a vu l'arme et si

 19   donc une fois que le coup a été tiré il a été tiré et a touché une personne

 20   qui était déjà morte. Mais si nous nous arrêtions là, aucune enquête ne

 21   serait jamais faite. Je veux dire que lorsque vous avez un corps décomposé,

 22   vous ne pouvez pas dire grand-chose.

 23   Ici, la logique est plutôt différente. Je veux dire que ce que vous

 24   enregistriez c'est si c'était une blessure mortelle ou non. Je veux dire

 25   que si quelqu'un est touché à la tête par balle, vous déterminez s'il y a

 26   mort probable ou non. Vous déterminez la probabilité de la mort ainsi que

 27   le contexte dans lequel les corps sont retrouvés. Donc, vous déterminez la

 28   cause la plus probable de la mort parce que, de toute façon, à moins que


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  1   vous ne soyez en train d'examiner un cadavre, vous n'allez pas être en

  2   mesure de dire quoi que ce soit si vous ne procédez pas de cette façon.

  3   C'est une hypothèse scientifique assez raisonnable.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais juste

  6   obtenir quelques précisions quant à la première phrase de la ligne 7 de la

  7   page précédente. Je ne souhaite rien suggérer, mais je ne suis pas sûr que

  8   cela ait été correctement consigné.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Baraybar, est-ce que vous dites

 10   au début de votre réponse que vous avez plutôt tendance à être d'accord

 11   avec M. Karadzic ?

 12   Cela n'est plus affiché à l'écran maintenant.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pourriez me rappeler ce qui

 14   m'était demandé ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question était, je cite : "Lorsque

 16   les corps sont dans l'état que nous voyons ici, est-il exact de dire que

 17   vous n'êtes pas en mesure de déterminer si les blessures étaient des

 18   blessures pari mortem, c'est-à-dire si ces personnes on leur a tiré dessus

 19   alors qu'elles étaient encore en vie et si ces balles ont été tirées sur

 20   ces hommes en particulier, n'est-ce pas ?"

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai répondu, oui.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec la nuance que j'aie exprimée ensuite.

 24   J'ai dit "cependant".

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Alors, il y avait, par exemple, des douilles retrouvées sous la tête du

 28   corps numéro 2. A-t-on retrouvé des blessures par balle sur le corps numéro


Page 22408

  1   2 qui auraient correspondu avec ce tir ?

  2   R.  En fait, la position des balles correspondait aux blessures que j'ai

  3   décrites, par conséquent, une blessure à la tête, une blessure au thorax et

  4   une à la zone du bassin. Et il y a une correspondance avec le lieu où le

  5   corps a été retrouvé, ainsi que l'emplacement des balles et les différents

  6   emplacements sur le corps.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez voir la page

  8   suivante, Monsieur Baraybar ?

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que cela signifie que s'il y a une correspondance entre la

 11   trajectoire des balles, la position des balles et la position des

 12   blessures, est-ce que cela ne signifie donc pas que les corps étaient déjà

 13   là au moment où on a tiré ? Parce que si cela n'avait pas été le cas, il

 14   n'y aurait pas eu ce type de correspondance.

 15   R.  Je ne veux pas entrer dans tout un débat ici, mais ce que vous dites

 16   est exact. Mais il est possible d'envisager toute une série de scénarios

 17   plus complexes. Cependant, de façon générale, d'un point de vue général,

 18   c'est exact. Cela dépend, cependant, de toute une série de facteurs qui

 19   peuvent être présents, si l'on tient compte de toutes les possibilités

 20   envisageables, par exemple, quelqu'un qui tirerait d'une position en

 21   hauteur sur quelqu'un qui est debout, ce qui ferait arriver les balles dans

 22   le sol. Donc, nous avons dans ce cas-là une forme en triangle, qui nous

 23   permet de déterminer le point final de la trajectoire et ce qui étend le

 24   champ de la trajectoire des balles bien au-delà, de l'espace de la fosse

 25   elle-même. Donc, il est très probable que ces personnes, ou plutôt, que

 26   leurs corps se soient déjà trouvés à l'endroit où ils ont été retrouvés, et

 27   c'est la raison pour laquelle on retrouve les balles sous la tête, sous le

 28   bassin, sous le thorax.


Page 22409

  1   Mais dans un autre scénario, on peut trouver des explications

  2   alternatives, par exemple si la victime était en train de courir ou si elle

  3   était debout, et dans ces cas-là, il n'est pas tout à fait évident de

  4   conclure que les corps de ces personnes étaient déjà allongés dans la

  5   position où on les a retrouvées dans la fosse au moment où on a tiré sur

  6   elles.

  7   Q.  Merci. Alors puisque l'on ne peut pas déterminer si les blessures ont

  8   été infligées post mortem ou non, ni la trajectoire précise des balles qui

  9   ont été retrouvées, il n'est pas vraiment possible de conclure avec

 10   certitude que ce sont ces balles-là qui ont tué les personnes en question,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  En fait, non. Il n'est pas possible de déterminer si les blessures ont

 13   été infligées pendant que les personnes étaient encore en vie sur la base

 14   uniquement de la trajectoire des balles. La trajectoire en elle-même n'a

 15   rien à voir avec la question de savoir si la personne était encore en vie

 16   ou non. Votre question ouvre un débat quasiment philosophique, je veux

 17   dire, est-ce que le cœur ou le cerveau de la personne fonctionnait encore

 18   au moment où on lui a tiré dessus. Je vous ai déjà dit que ce n'était pas

 19   possible. Mais les inférences auxquelles on procède ne partent pas du

 20   constat de cette impossibilité. L'impossibilité vient tout simplement du

 21   fait que vous travaillez sur un cadavre et vous n'essayez pas d'établir

 22   uniquement la cause de la mort, mais également le processus de cette mort,

 23   le mécanisme, la façon dont cette personne est décédée, c'est lorsque vous

 24   avez un cadavre. Mais si vous avez juste un cadavre décomposé, un

 25   squelette, donc vous n'avez pas d'organes et vous êtes obligé de vous

 26   appuyer sur toute une série d'autres facteurs, tels que le contexte, et

 27   vous en êtes réduit à examiner des probabilités, à conclure qu'il est

 28   hautement improbable que ces personnes se soient suicidées ou qu'elles


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  1   soient décédées de mort accidentelle.

  2   Donc ce que vous essayez de déterminer, c'est la cause la plus probable de

  3   la mort.

  4   Et évidemment, c'est une supposition fondamentalement, parce que vous

  5   ne pouvez pas garantir que cette personne ne soit morte de peur au moment

  6   où elle a vu l'arme pointée sur elle. Donc ce que vous essayez de

  7   déterminer, c'est s'il est probable ou non que cette personne soit décédée

  8   du fait du coup de feu qui a été tiré sur elle. Bien entendu, vous avez des

  9   situations totalement différentes selon les cas. Si quelqu'un a été touché

 10   à la main ou à la tête, cela vous donne des situations totalement

 11   différentes.

 12   Q.  Eh bien, sauf le respect que je vous dois, cela modifie un peu les

 13   choses, Docteur Baraybar, parce que -- enfin, est-ce que vous pourriez nous

 14   dire s'il y a la moindre preuve vous permettant de dire que ces balles

 15   n'ont pas été tirées à un moment où ces personnes étaient déjà allongées et

 16   où elles étaient déjà mortes ? Est-ce que vous pouvez imaginer, par

 17   exemple, une situation dans laquelle on demande d'abord à quelqu'un de

 18   s'allonger avant de lui tirer dessus ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette question a déjà été posée et a

 20   reçu une réponse, Monsieur Karadzic.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Puis-je attirer votre attention sur la synthèse que vous avez faite

 23   pour Nova Kasaba numéro 7. On y a retrouvé le corps d'un homme adulte --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la page suivante.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Donc on a retrouvé un homme adulte dont l'âge est compris entre 31 et

 27   65 ans. Vous avez dit également que les éléments retrouvés étaient

 28   cohérents avec le fait qu'on lui avait tiré dessus pendant qu'il était déjà


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  1   dans la fosse. La présence dans la fosse d'une douille de grand calibre

  2   ainsi que le fait que c'était le seul corps que l'on avait retrouvé dans

  3   cette fosse confirmaient le fait que cette même fosse avait été utilisée

  4   dès le début, qu'on avait tiré dans la fosse. Alors, vous concluez avec une

  5   certitude absolue que ceci correspondait au cas d'un combattant tué,

  6   puisqu'il a été retrouvé dans la fosse ?

  7   R.  Eh bien, c'est le même exercice mais à l'envers, si vous voulez. On n'a

  8   retrouvé aucune partie d'équipement d'un combattant sur ce corps ou aux

  9   alentours. Enfin, je veux dire sur le corps même. Et ensuite, on a deux

 10   éléments assez différents, à savoir une douille de balle de calibre assez

 11   important, de très grand calibre, qu'on ne peut pas tirer à partir d'une

 12   arme de poing ou d'un fusil, et ensuite il y a des douilles provenant d'un

 13   pistolet de 7,65 millimètres. Donc je ne vois pas trop le rapport entre

 14   l'idée qu'on ait tiré sur quelqu'un au moyen d'un pistolet alors qu'il se

 15   trouvait dans une fosse et, d'autre part, le fait qu'on ait retrouvé trace

 16   d'usage d'une arme de plus gros calibre et qu'il n'y ait aucun équipement

 17   militaire sur le corps. En fait, ce qui se passe, c'est ce que nous en

 18   sommes réduits à des spéculations ici. La question de savoir si cette

 19   personne était un combattant ou non n'est pas vraiment pertinente. En me

 20   fondant sur les éléments qui ont été retrouvés, je ne peux pas dire si

 21   cette personne était un combattant ou non. Alors, après, la question de

 22   savoir comment on définit un combattant, c'est une autre histoire. Est-ce

 23   qu'on se base sur la façon dont la personne était vêtue ou d'autres

 24   facteurs, c'est une autre question. Mais il y avait sans doute un armement

 25   lourd, je ne sais pas s'il pouvait s'agir d'un char ou non, mais en tout

 26   cas il y avait un calibre important. Et ensuite, on se retrouve à un corps

 27   qui a été jeté dans cette fosse. Donc je pense qu'on peut être, ici, en

 28   présence de l'usage assez opportuniste d'une zone ou d'une tranchée qui


Page 22412

  1   était utilisée dans un autre but.

  2   Mais je ne voudrais pas spéculer davantage.

  3   Q.  Eh bien, est-ce que nous pouvons en convenir que ceci n'est pas une

  4   fosse commune, n'est-ce pas ? Est-ce que vous pourriez répondre par oui ou

  5   par non, parce que je crois que je n'ai plus de temps.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Très bien. Alors, est-ce que nous pouvons convenir dans ce cas-là que

  8   les douilles qui ont été retrouvées, mais notamment celles de 30

  9   millimètres, sont restées en fait à l'endroit d'où les coups ont été tirés

 10   ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dans ce cas-là, n'est-il pas plus probable que quelqu'un ait tiré à

 13   partir de la tranchée plutôt que l'inverse ?

 14   R.  Non. Si vous voulez, oui et non. Mais il y a une explication qu'il faut

 15   apporter en complément de cette réponse par oui ou par non.

 16   Fondamentalement, je vous réponds quand même non.

 17   Q.  Très bien. Mais vous auriez remarqué la trace d'un projectile de 30

 18   millimètres s'il y en avait eu une, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Donc l'hypothèse la plus probable, ce serait quand même qu'on ait tiré

 21   avec un calibre 30 millimètres à partir de cette tranchée, et non pas en

 22   visant la tranchée ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Merci. Concernant le site de Kasaba numéro 8, vous affirmez qu'il est

 25   également possible que l'on ait tiré sur les victimes dans la fosse elle-

 26   même, et vous parlez ici d'un corps dont le sexe est resté indéterminé et

 27   32 corps d'hommes, donc 33 en tout. Alors, est-ce que vous avez ici repris

 28   les conclusions de M. Clark -- est-ce que vous avez donc repris ses


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  1   conclusions à lui ou bien est-ce que vous avez fait un travail indépendant

  2   pour déterminer la cause de la mort ?

  3   R.  Je n'ai jamais fait moi-même ce travail-là. Comme je l'ai dit dans le

  4   rapport, ce que je fais toujours c'est de citer le rapport du médecin

  5   légiste.

  6   Q.  Merci. Est-ce que vous avez été présent sur les sites de Kasaba numéro

  7   6, 7 et 8, et est-ce que vous avez participé à l'exhumation, ou bien avez-

  8   vous reçu une forme ou une autre de description ?

  9   R.  Non. J'ai procédé à la récupération moi-même.

 10   Q.  Merci. Pour ces victimes, vous ne pouvez pas non plus dire si c'était

 11   la première partie du juillet, la seconde partie du mois de juillet ou fin

 12   juillet ou même si cela correspond à une période antérieure au mois de

 13   juillet ?

 14   R.  Oui, ce problème s'est présenté à plusieurs reprises dans les questions

 15   que vous posez. Et je réponds à chaque fois "oui, mais", et ma réserve

 16   reste la même à celle que j'ai exprimée en répondant à vos questions

 17   précédentes.

 18   Q.  Merci. Alors, concernant Glogova 2, il y a un feuillet à part. Mais

 19   cela apparaît également en page 197 dans la version que j'ai, on en trouve

 20   une description, donc c'est après Konjevic Polje 2. On a donc Glogova 2. A

 21   Konjevic Polje 2, on a également retrouvé un corps, n'est-ce pas ? Avec un

 22   intervalle d'âge assez important, entre 31 et 72 ans, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  A Konjevic Polje, neuf corps ont été retrouvés --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Où trouve-t-on cela ? Quel est le numéro

 26   de pièce à conviction et la page correspondante ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la page suivante après ce que nous avons

 28   à l'écran, c'est-à-dire Nova Kasaba 8.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Oui.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Donc nous avons là Konjevic Polje avec neuf corps, et on a retrouvé une

  4   montre avec la date de vendredi le 15. Ensuite, Konjevic Polje 2, on a un

  5   corps, donc ce n'est pas une fosse commune. Ensuite, nous passons à Glogova

  6   2 -- page suivante, et je vois que c'est également la page suivante dans

  7   votre version en anglais. Nous voyons ce qui a été conclu ici.

  8   Ici, vous avez conclu, n'est-ce pas, qu'il y avait des traces

  9   d'argile provenant d'un lieu différent, n'est-ce pas ? Qu'il y avait un

 10   artefact, donc ?

 11   R.  Excusez-moi, mais je ne comprends pas très bien. Qu'est-ce que l'on est

 12   en train d'examiner ? Parce que ce que je vois à l'écran semble être autre

 13   chose.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que ceci

 15   commence à la page 32 du rapport. Je n'en suis pas sûr, mais en tout cas

 16   cela semble être la même page dans le prétoire électronique.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous commencez avec

 18   les conclusions portant sur Glogova, c'est la page à laquelle vous vous

 19   référez ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela ne se présente pas comme ça chez moi. Chez

 21   moi, c'est le même type de résumé que nous avons pour Konjevic Polje 1 et

 22   2, et ensuite nous avons Glogova 2. Le découpage en paragraphes présente la

 23   même apparence.

 24   Les sous-titres ne sont pas les mêmes que ceux que j'ai dans ma version.

 25   Peut-être que c'est juste une présentation graphique différente.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Essayons d'aller un peu plus loin. Lorsque vous parlez de Glogova 5,

 28   vous parlez d'une localité avec deux fosses. Glogova 2, en fait, il


Page 22415

  1   s'agissait de tout un groupe de fosses, n'est-ce pas, Glogova 2 ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Ensuite, concernant Glogova 5, vous avez conclu que pour une partie des

  4   éléments qui ont été retrouvés c'était un site primaire, alors que pour une

  5   autre partie des restes retrouvés c'était un site secondaire ?

  6   R.  GLO 5 est un site primaire, oui, alors que GLO 2, entres autres --

  7   alors, c'est toujours un site primaire, mais où il y a eu des

  8   interventions. Le site a été modifié.

  9   Q.  Alors, je vais essayer de retrouver là où il est écrit GL0 5, où vous

 10   dites que c'était un site intact avec deux fosses --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. La pièce est P4033, page 4.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Chez moi, c'est dans le cadre de --

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Page suivante.

 15   Monsieur le Président, je crois que c'était là le rapport -- non, vous avez

 16   raison. Excusez-moi.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci commence aussi avec la mention d'un

 18   site intact. En fait, il faut revenir au document précédent.

 19   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, c'est ce que je pensais, Monsieur le

 20   Président. Donc le document précédent, page 34.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, ce que j'ai, ce sont les résumés à ce

 23   stade. Et chez moi, c'est la pièce P4034. Mais cela parle de la même chose.

 24   Donc je vais poursuivre l'interprétation de ceci. Je ne vais pas lire.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Donc on a retrouvé deux fosses proches l'une de l'autre, n'est-ce pas,

 27   et 73 corps entiers ou pratiquement entiers y ont été retrouvés ainsi que

 28   des fragments de corps ? Vous avez conclu que la plupart des corps


Page 22416

  1   présentaient des fractures osseuses multiples. Vous avez également conclu

  2   que cette argile était riche en végétation et n'était pas originaire du

  3   site, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page 41.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que cela signifie que pour une partie des corps, ce site était

  8   primaire, alors que pour une autre partie des corps il était secondaire ?

  9   R.  Pas vraiment. La fosse était primaire pour tous les corps. Ce qui varie

 10   ensuite, c'est l'état des corps eux-mêmes. Certains corps étaient entiers.

 11   D'autres corps étaient fragmentés, c'est-à-dire qu'il y a eu fragmentation

 12   avant même qu'ils n'arrivent sur le site de cette fosse primaire.

 13   Q.  Ah, très bien. Donc cela remonte au moment de la mort ?

 14   R.  Oui, très probablement.

 15   Q.  Merci.

 16   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Docteur Baraybar, la question de

 17   l'argile et de la structure de la répartition de l'argile qui était

 18   étrangère --

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] -- qu'est-ce cela signifie ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, selon le Pr Brown, si je ne me trompe

 22   pas, après l'analyse du sol et du pollen, il a été possible de conclure que

 23   ces corps ont été placés dans la fosse de Glogova 5 en même temps que de la

 24   terre y était également introduite. Il ne s'agissait pas uniquement de ces

 25   corps, mais il y a également eu un apport de terre. C'est pourquoi on a

 26   constaté un sol différent que le sol d'origine dans lequel la fosse a été

 27   pratiquée.

 28   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Mais c'était une fosse primaire ?


Page 22417

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était une fosse primaire. Pour

  2   simplifier un petit peu, l'explication de ceci pourrait consister à dire

  3   que lorsque vous avez des corps qui sont au sol et que vous soulevez ces

  4   corps au moyen d'un engin, eh bien, cet engin va également racler du sol

  5   correspondant au site où les corps étaient à l'origine, avant d'être placés

  6   dans la fosse, et il va emporter cette terre.

  7   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je relève l'heure, Monsieur Karadzic.

  9   Vous avez déjà épuisé le temps qui vous était alloué. De combien de temps

 10   pensez-vous avoir encore besoin pour conclure votre contre-interrogatoire ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'apprécierais que l'on puisse m'octroyer

 12   autant de temps que possible dans le volet d'audience suivant lorsque les

 13   calculs seront faits pour les questions supplémentaires, parce que nous

 14   n'avons pas d'autres témoins aujourd'hui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous avez passé l'essentiel de

 16   votre temps à poser des questions répétitives. En tout cas, nous allons

 17   maintenant faire une pause et reprendrons à 13 heures 30.

 18   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 30.

 19   --- L'audience est reprise à 13 heures 30.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, c'est à vous.

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Je voudrais simplement répondre à la question que vous m'avez posée il y a

 23   quelque temps au sujet des trois rapports d'autopsie qui ont été

 24   communiqués le 9 juillet 2009. Je le confirme donc et je voudrais également

 25   que soit consigné au compte rendu d'audience le fait que le rapport de M.

 26   Mills dont il a été question hier et aujourd'hui figure sur notre liste 65

 27   ter sous le numéro 2480. Je dis cela au cas où M. Karadzic souhaiterait y

 28   faire référence.


Page 22418

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Convenez-vous, Docteur Baraybar, que lorsque le décès d'un soldat

  6   survient, quel que ce soit ce soldat, aucune des parties en présence ne va

  7   enterrer cet homme avec à ses côtés son fusil et son équipement, quelle que

  8   soit l'armée concernée.

  9   R.  Ceci sort du champ de mon expertise, donc je préférerais ne pas

 10   formuler le moindre commentaire.

 11   Q.  Mais vous avez formulé un commentaire au sujet de Kasaba 7 où le corps

 12   d'un homme a été découvert au sujet duquel vous avez dit que vous étiez

 13   incapable de dire s'il s'agissait d'un soldat ou pas, car aux côtés du

 14   corps n'a été découvert aucun élément militaire, équipement militaire ou

 15   autre. Donc, ma position consiste à dire que quelle que soit l'armée

 16   concernée, un soldat, lorsqu'il meurt, ne sera jamais enterré avec à ses

 17   côtés son équipement ou son arme.

 18   R.  Je parlais tout à l'heure des éléments militaires, qu'il s'agisse de

 19   vêtements ou autres emblèmes et insignes. Et je présume qu'on n'enterre pas

 20   une personne avec son arme à ses côtés, mais ce n'est pas un avis d'expert

 21   de ma part, c'est un avis personnel. Mais je parlais tout à l'heure plus

 22   précisément de vêtements et autres signes visuels qui peuvent

 23   éventuellement permettre de distinguer entre un soldat, un combattant et un

 24   non-combattant.

 25   Q.  Conviendrez-vous que si une personne court pour s'enfuir devant une

 26   force militaire qui avance, la première chose qu'elle fera, cette personne,

 27   c'est changer de vêtements, jeter son uniforme et s'habiller en civil ?

 28   R.  Eh bien, encore une fois, ceci sort du champ de mon expertise. Je veux


Page 22419

  1   dire, mon avis ne peut avoir de valeur qu'à titre individuel. En tant

  2   qu'expert, je n'ai pas d'avis sur ce sujet.

  3   Q.  Bien oui, très bien, mais enfin, vous avez parlé de cela il y a

  4   quelques instants, c'est la raison pour laquelle je suis obligé de fouiller

  5   plus loin pour essayer de préciser les choses. Est-ce que je devrais donc

  6   laisser de côté, ignorer les commentaires que vous avez formulés ?

  7   R.  Mais de quels commentaires parlez-vous ? Je ne vois pas au compte rendu

  8   la moindre différence entre ce que j'ai pu dire il y a quelques instants et

  9   ce que je dis maintenant. Mais s'il y a une différence, veuillez me

 10   l'indiquer, je vous prie.

 11   Q.  Non, non, je suis d'accord, ceci sort du champ de votre expertise, mais

 12   on aurait dit que cela faisait partie de votre champ d'expertise tout à

 13   l'heure lorsque vous avez dit que l'homme dont il était question n'était

 14   probablement pas un soldat, car à côté de lui il n'y avait présence d'aucun

 15   artéfact, d'aucun objet ou élément susceptible d'indiquer qu'il se serait

 16   agi d'un soldat. Et moi, c'est la raison pour laquelle je dis qu'un homme,

 17   un soldat, lorsqu'il s'enfuit en courant devant l'avancée d'une armée

 18   ennemie, la première chose qu'il fera, c'est changer ses vêtements pour

 19   s'habiller en civil, n'est-ce pas ?

 20   R.  Mais vous avez formulé deux avis. D'abord, je n'ai jamais dit que cet

 21   homme était combattant ou ne l'était pas, parce que ce que j'ai dit, c'est

 22   qu'il n'y avait aucun élément, aucun artéfact à ses côtés qui permettait de

 23   se prononcer sur ce point.

 24   Mais vous ne me demandez maintenant si une personne s'enfuit en courant

 25   devant une armée ennemie, est-ce que cette personne changera de vêtements.

 26   Je n'ai pas la moindre idée sur ce point, parce que si vous souhaitez que

 27   je vous donne mon avis personnel, je vous répondrai que mon avis n'a de

 28   valeur qu'au niveau individuel dans ce cas, et je présume que si une


Page 22420

  1   personne s'enfuit en courant devant l'ennemi, il peut s'avérer assez

  2   difficile de changer de vêtements pendant que l'on court. C'est tout de

  3   même un exercice un peu difficile d'enlever un pantalon, une chemise et de

  4   les remplacer par d'autres alors qu'on est en train de courir. C'est mon

  5   avis personnel.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Docteur.

  7   Monsieur Karadzic, je considère que ceci est une perte de temps.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Mais vous avez bien conclu que dans la fosse correspondant à Glogova 5,

 11   dont nous avons parlé avant la suspension d'audience, il y avait des

 12   feuilles et de l'argile qui provenaient d'un autre endroit et qui se

 13   trouvaient tout près des cadavres. Est-il dans ces conditions raisonnable

 14   de penser que ces cadavres ont été amenés depuis un autre lieu puis

 15   enterrés dans cette fosse ? Donc, il s'agit bien d'une fosse primaire, mais

 16   ce n'est pas l'endroit où la mort, où l'exécution a eu lieu, n'est-ce pas ?

 17   R.  En effet, c'est exact.

 18   Q.  Merci. Vous connaissez certainement les obligations liées au ratissage

 19   de terrain qui se produit après des combats, ratissage du terrain qui est

 20   destiné à récupérer les restes mortels d'êtres humains ou d'animaux, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  Moi, je ne savais pas qu'il s'agissait d'une obligation. C'est peut-

 23   être une obligation, une habitude dans certains pays, mais pas dans tous

 24   les pays, pas dans le mien, en tout cas.

 25   Q.  Dans le résumé et les conclusions de votre rapport, vous dites que dans

 26   une fosse -- voyons de quelle fosse s'agit-il ? Votre rapport se termine

 27   avec Glogova 7. Il y a Glogova 2 et Glogova 7, et vous dites que dans cette

 28   fosse 19 cadavres ont été découverts et exhumés les 18 et 19 août, et que


Page 22421

  1   parmi ces 19 cadavres, la cause de la mort n'a pas pu être établie pour

  2   huit d'entre eux, alors que pour les autres, il a été déterminé qu'ils

  3   avaient été tués par balles, n'est-ce pas ?

  4   R.  Eh bien, penchons-nous sur le passage concernant Glogova 2, c'est cela

  5   ? Entre 1999 et 2001, c'est à cela que vous faites référence ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] Ceci figure dans le rapport de 2001.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, rapport de 2001 qui constitue la

  9   pièce P4033.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'ai sous les yeux la pièce P4034, qui est

 11   un résumé relatif à Nova Kasaba et à d'autres lieux. Je suis à la page 8 où

 12   on voit le titre "Exhumations en Bosnie orientale entre août et octobre".

 13   En serbe, en tout cas, il s'agit de la page 8.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Toutes mes excuses. Je suis un peu perdu

 16   maintenant. Le rapport de 1999 comporte le passage relatif à Nova Kasaba

 17   alors que Glogova 7 est évoqué dans le deuxième rapport, pas dans celui-là.

 18   Donc, maintenant, je ne sais plus de quel rapport nous parlons.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, il n'est fait que mention rapidement de

 20   Glogova 7, mais en tout cas, il s'agit de la pièce P4034, page 8 en serbe,

 21   résumé et conclusions.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Alors, je vais vous rappeler ce qui figure dans ces passages. Vous

 24   dites avoir découvert plusieurs sortes de conserves de nourriture et des

 25   vêtements, n'est-ce pas ? Et les trois personnes avaient des plaies qui

 26   avaient été bandées, n'est-ce pas ?

 27   R.  J'essaie de retrouver le passage dont vous parlez. Une seconde, je vous

 28   prie.


Page 22422

  1   Q.  8 décembre 1999, rapport d'exhumation concernant les fosses communes de

  2   Bosnie orientale. Dans mon texte en serbe, il s'agit de la page 8. Pour

  3   vous, ce sera la page 7, 8 ou 9. En tout cas, il s'agit du chapitre

  4   intitulé "Résumé et conclusions".

  5   La version anglaise est affichée à l'écran. Docteur, vous pouvez peut-être

  6   regarder ce qui est écrit à l'écran.

  7   R.  Oui, mais là, c'est Nova Kasaba 4, mais vous parliez de Glogova, n'est-

  8   ce pas ? Ou bien vous parlez de Nova Kasaba ? Je ne m'y retrouve plus très

  9   bien. De quel site parlez-vous; de Glogova ou de Nova Kasaba ?

 10   Q.  Je parle de celui qui est affiché, mais dans la page précédente, il

 11   était question de Glogova 2 et Glogova 7. C'est pourquoi j'y ai fait

 12   référence, mais voilà le texte est à l'écran.

 13   R.  Oui, oui, oui.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci figure dans le rapport de 1999.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, oui, j'y suis.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Est-il raisonnable de conclure qu'il est question de combattants qui,

 18   avant de mourir, ont été roués de coups, d'où la présence d'attelles ?

 19   R.  Serait-il juste de conclure que ces individus ont été blessés par

 20   balles avant d'être tués ? Je veux dire, est-ce qu'il s'agit de combattants

 21   ou pas, je ne sais pas. Cependant, comme indiqué précédemment, un certain

 22   nombre d'artéfacts ont été découverts qui peuvent être liés à des

 23   combattants.

 24   Q.  Mais il y a un instant, nous nous sommes bien mis d'accord, n'est-ce

 25   pas, que personne n'aurait été assez fou pour enterrer un homme avec ses

 26   armes et son équipement ? Et si vous vous en souvenez, nous n'avions même

 27   pas d'uniformes. Nos armées étaient des armées populaires. La plupart des

 28   hommes ne portaient pas d'uniformes. Même s'ils n'ont pas eu la possibilité


Page 22423

  1   de se changer, en tout cas la plupart de ces hommes ont passé toute la

  2   guerre avec des vêtements civils sur le dos. Est-ce que vous le saviez ?

  3   R.  Je ne le savais pas. Mais encore une fois, il s'agit de renseignements

  4   qui n'ont pas été portés à ma connaissance. Donc, si en tant qu'expert je

  5   dois présenter une définition, je dois m'appuyer sur des éléments

  6   vérifiables, visibles, objectifs, mesurables. Je veux dire, en l'espèce,

  7   par exemple, un cadavre portant un treillis de camouflage ou autre

  8   provenant d'une armée ou d'une police. Cela dépend évidemment du contexte,

  9   mais dans le contexte dont nous parlons, cela permettrait d'identifier cet

 10   homme comme faisant partie d'un personnel militaire ou policier, et puis il

 11   y a des hommes qui portent des vêtements civils. Mais je veux dire, dans ce

 12   cas précis, ce que j'ai dit au début et que je continue à dire maintenant,

 13   c'est qu'il n'existait aucun élément objectif permettant de se prononcer

 14   sur ce point.

 15   Je veux dire, vous, vous avez l'opinion qui est la vôtre et vous avez

 16   le droit de défendre cette opinion, mais je ne peux pas, en qualité

 17   d'expert, formuler la même opinion. En tant qu'individu, je peux vous dire

 18   ce que je pense ou ce que je ne pense pas, mais ceci n'a aucune pertinence

 19   dans le cadre de ma déposition, je suppose.

 20   Q.  Eh bien, probablement, de votre point de vue en tant

 21   qu'anthropologiste, ce n'est pas pertinent par rapport aux conclusions d'un

 22   légiste. Mais pour nous, c'est pertinent.

 23   Par ailleurs, vous mentionnez la présence de conserves alimentaires,

 24   de pièces de vêtements, et cetera. Est-ce que ceci indiquerait qu'un voyage

 25   a pu être fait ? Etant donné la présence de conserves alimentaires.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, j'ai de grandes

 27   difficultés à comprendre pourquoi vous posez ces questions au témoin. Est-

 28   ce que le témoin est apte à répondre à de telles questions ? Je pense que


Page 22424

  1   vous arrivez à la fin du temps qui vous a été imparti.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, mon objectif est de comprendre si

  3   ces hommes étaient des prisonniers de guerre ou s'il s'agissait de

  4   combattants qui essayaient d'effectuer une percée --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout cela est bel et bon, mais cela n'a

  6   aucun rapport avec les questions qui devraient être posées à ce témoin en

  7   sa qualité d'expert. Passez à autre chose, je vous prie.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'aimerais maintenant que nous nous

  9   penchions sur le rapport que nous avons reçu grâce à la courtoisie de M.

 10   Mitchell. Je parle du premier rapport que nous avons reçu, dont le numéro

 11   de référence est K3166B.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en demande l'affichage grâce au prétoire

 13   électronique.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Nous avons téléchargé les trois rapports

 16   dans le prétoire électronique. Chez moi, les numéros 65 ter sont 23550,

 17   23551 et 23552. Peut-être serait-il bon d'afficher le premier.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'ai reçu un seul rapport. Et c'est ce

 20   rapport que nous avons analysé. Enfin, que nous avons examiné.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on afficher la deuxième page. Est-

 22   ce que vous pouvez, Monsieur Karadzic, vérifier si ce texte est bien celui

 23   que vous souhaitez voir.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, on va passer au suivant.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, ce n'est pas celui-là. Le premier rapport

 27   que nous avons reçu de l'Accusation sur papier, avant les trois autres.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On essaie de retrouver la correspondance


Page 22425

  1   dans la numérotation du prétoire électronique.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le numéro ERN est X0042483.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] M. Reid me dit qu'il doit s'agir du

  5   troisième rapport --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] -- donc le 23552.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le numéro 65 ter est 2408. Donc numéro 2408 sur

 10   la liste 65 ter. Oui, c'est ça.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Alors, dans ce cas précis, vous étiez chargé du travail d'analyse

 13   anthropologique, n'est-ce pas, et c'est le Pr Clark qui s'est chargé de

 14   l'examen pathologique ?

 15   R.  Je ne sais pas si c'est moi qui l'ai fait personnellement, mais il est

 16   certain que quelqu'un l'a fait. Il faudrait que je vérifie les formulaires

 17   anthropologiques pour voir qui s'est exactement chargé de ce travail. Mais

 18   enfin, ce que vous avez dit est exact, en dehors de cela, même s'il n'est

 19   pas absolument certain que c'est moi qui ai personnellement accompli ce

 20   travail. Mais bien entendu, je me rappelle le numéro de l'affaire.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous conviendrez que les défauts physiques que l'on

 22   peut retrouver sur des cadavres qui ont subi une squelettisation, une

 23   dégradation, et cetera, que les malformations ne sont pas nécessairement

 24   indicatives de la cause de la mort ?

 25   R.  Je pense que nous avons déjà parlé de cela, et je vous ai dit que je

 26   n'étais pas d'accord avec vous. Je crois qu'avant une des pauses nous avons

 27   parlé de la cause la plus probable de la mort et de tout ce qui concernait

 28   ce domaine de réflexion. Et je crois que j'ai répondu à cette question.


Page 22426

  1   Q.  Mais regardez la cause de la mort. Est-ce que nous disposons d'une

  2   façon d'établir que telle ou telle malformation au niveau de la poitrine

  3   est aussi la cause de la mort et est-ce que, pour déterminer si c'est bien

  4   le cas, nous avons besoin d'avoir une description des modifications

  5   intervenues au cours de la décomposition du cadavre ?

  6   R.  Eh bien, j'ai dit au début que l'on parlait de cause la plus probable

  7   de la mort. Mais en dehors de cela, vous vous penchez sur le résumé du

  8   rapport d'autopsie. Donc c'est un rapport d'autopsie qui explique quels

  9   sont les éléments d'information disponibles au sujet du cadavre, quels sont

 10   les os brisés, quels sont les douilles de balles qu'on a pu retrouver ou

 11   pas, quelle est la forme des blessures d'entrée et de sortie des balles, et

 12   donc on obtient l'avis d'un pathologiste qui peut déterminer la cause la

 13   plus probable du décès. On ne parle pas de pathologie de la mort ou du fait

 14   de savoir si cette personne a eu une crise cardiaque avant d'être abattue

 15   par balle ou de quoi que ce soit de ce genre. Tout ceci est immatériel dans

 16   la discussion. Ce que nous avons maintenant à l'écran, c'est simplement un

 17   résumé.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voudriez voir le rapport

 19   ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, non, personnellement, mais si la Chambre

 21   souhaite le voir, bien entendu.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Avançons.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page suivante à

 24   l'écran. 

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Ici, il est indiqué que le sexe a été déterminé grâce à une analyse

 27   pathologique des tissus mous et qu'il n'a pas pu être déterminé grâce à ses

 28   éléments pathologiques ?


Page 22427

  1   R.  Anthropologiquement, non, le sexe n'a pas pu être déterminé. Si vous

  2   avez des restes de l'appareil génital, vous pouvez vérifier, quel que ce

  3   soit l'état de ces tissus. Mais si ces tissus ont absents, il devient très

  4   difficile de déterminer s'il s'agit du cadavre d'un homme ou d'une femme.

  5   Il faut effectuer un travail beaucoup plus invasif et pénétrer dans la

  6   cavité pelvienne pour mesurer les os longs et observer un certain nombre de

  7   caractéristiques diverses qui peuvent servir à déterminer le sexe. Mais

  8   cela implique un certain nombre d'efforts plus nombreux.

  9   Q.  Merci. Donc, sur le plan anthropologique, l'âge de ces cadavres a été

 10   déterminé comme se situant entre 35 et 60 ans. Ce qui nous laisse une marge

 11   d'erreur importante, n'est-ce pas, 7.7 ?

 12   R.  C'est exact. Mais pour être capable de déterminer, par exemple, la

 13   stature d'une personne avec un intervalle de confiance de 95 % à peu près -

 14   ça, c'est en général l'écart type que l'on accepte dans ce genre de

 15   processus - il faut des éléments de contexte qui ne sont pas toujours

 16   présents. Pour que la détermination de la stature puisse avoir valeur

 17   juridique, il faut, par exemple, retrouver une pièce d'identité personnelle

 18   où la stature est indiquée ou se rapporter à un autre rapport. Et on entre

 19   à ce moment-là dans une discussion très théorique lorsque ces éléments sont

 20   absents. On discute dans un cadre très vaste qui nous permet éventuellement

 21   de juger de la stature à plus ou moins 5 ou 7 centimètres. Ce qui est une

 22   détermination assez inexacte, bien sûr, à bien des égards.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 3 de ce

 25   rapport d'autopsie. Tout à l'heure, c'était le résumé du rapport.

 26   Maintenant nous entrons dans le rapport en tant que tel. Alors, nous lisons

 27   dans cette page -- le numéro ERN se termine par 486.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il serait équitable à


Page 22428

  1   l'égard du témoin de lui montrer la page suivante, même rapidement. Page

  2   suivante à l'écran.

  3   Très bien. Nous pouvons afficher la page qui était demandée par M.

  4   Karadzic.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une page avant celle-ci, je crois,

  6   la page de couverture du rapport d'autopsie. Voilà.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors, comme vous le voyez, on décrit le cadavre complet où on

  9   trouve un certain nombre de tissus, quelquefois même un peu de peau. On

 10   décrit la présence de vêtements. Et il est question de liens qui ont été

 11   retrouvés sur les deux mains, des liens en tissu. Est-ce qu'on trouve ici

 12   un degré de transformation dû à la putréfaction qui permettrait de

 13   déterminer le moment de la mort ?

 14   R.  Comme je l'ai dit au début, déterminer de telles conditions dans

 15   les conditions dans lesquelles nous travaillions en présence de cadavres

 16   qui avaient été enterrés n'aurait pas eu de sens. Je l'ai déjà dit au début

 17   de mon exposé, on n'était pas en présence de cadavres décédés récemment qui

 18   présentaient des signes susceptibles de nous permettre de calculer

 19   l'intervalle post mortem. Par conséquent, l'examen à l'œil nu dans ce cas

 20   du cadavre, et uniquement du cadavre, ne permettait pas de déterminer à

 21   quel moment la personne était morte et à quelle heure du jour cette

 22   personne s'était transformée en cadavre. Manifestement, il aurait été plus

 23   aisé de dire que ces personnes n'étaient pas mortes 50 ans avant, mais on

 24   ne pouvait guère aller au-delà de ça.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur Baraybar.

 26   Monsieur Karadzic, vous pouvez poser la même question par rapport à 1 000

 27   cadavres si vous le souhaitez. Moi, je trouve que ces questions sont

 28   répétitives. Arrivez à une conclusion, je vous prie.


Page 22429

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je vais maintenant passer à autre

  2   chose.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Mais si j'étais pathologiste, ma conclusion aurait été que j'aurais pu

  5   faire davantage que ce que vous avez fait. Donc je n'aurais pas pu établir

  6   l'heure de la mort; c'est bien cela ?

  7   R.  L'heure de la mort, certainement pas. Ni vous, ni personne d'autre,

  8   non. L'heure de la mort, non.

  9   Q.  Mais avec quelle précision est-il possible de l'évaluer ? Une précision

 10   de 50 ans ?

 11   R.  Non. Ce que j'ai dit, c'est que ces personnes ne venaient pas d'une

 12   époque largement révolue, ne provenaient pas d'une époque située 50 ou 100

 13   ans auparavant. Manifestement, c'étaient des restes humains qui dataient de

 14   l'époque dans laquelle on se trouvait.

 15   Et j'ai rappelé que dans les conditions où ces cadavres ont été enterrés,

 16   et étant donné que l'on a besoin de déterminer le contexte et de déterminer

 17   toute une série d'autres éléments pour procéder à ce genre de

 18   détermination, on s'appuie sur les objets que l'on trouve aux alentours du

 19   cadavre et sur toutes sortes d'autres choses qui nous permettent

 20   éventuellement de déterminer un intervalle de temps. On peut, par exemple,

 21   examiner des cartes d'identité ou ce genre de choses. Mais dès lors qu'on

 22   est en présence de cadavres dénudés qui sont dans une fosse dont on ne sait

 23   pas depuis combien de temps ils y sont, il est très difficile de déterminer

 24   à quel moment ces cadavres ont été tués ou sont morts. Ceci a été

 25   abondamment expliqué, nous ne nous fondons pas sur l'examen de tel ou tel

 26   élément séparément. Nous examinons l'ensemble des éléments disponibles dans

 27   un contexte déterminé.

 28   Et en tant qu'archéologue, lorsque je suis sur le terrain, je récupère un


Page 22430

  1   certain nombre d'objets qui ne sont pas nécessairement des parties de

  2   corps, et c'est sur la base de cet ensemble, y compris des vêtements ou des

  3   objets, des montres ou autres qui ont été jetés à côté du cadavre, que je

  4   peux éventuellement exprimer un avis d'expert au sujet de ces cadavres,

  5   avis d'expert que j'expose dans mes rapports.

  6   Q.  Merci. J'aimerais que l'on passe à la deuxième page rapidement sur les

  7   écrans, où il est dit qu'un rasoir a été retrouvé, des cigarettes, un

  8   briquet et deux clés sur ce cadavre. Page 2 du document. C'est bien cela,

  9   n'est-ce pas, qui est écrit dans le 

 10   résumé ? Moi, ce qui m'intéresse en particulier, c'est le rasoir. La

 11   présence de ce rasoir a été consignée par écrit, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, tout ce que vous voyez ici a été documenté.

 13   Q.  Merci. Donc, je ne vais pas m'appesantir là-dessus, mais vous

 14   conviendrez, n'est-ce pas, que quelqu'un qui est fait prisonnier, on ne lui

 15   permettra pas d'avoir un rasoir.

 16   R.  Est-ce que c'est une question ou une déclaration que vous faites ? Vous

 17   me demandez si, selon moi, un prisonnier à l'intérieur d'un établissement

 18   pénitentiaire n'a pas le droit d'avoir un rasoir ? Alors dans une prison,

 19   je suppose que oui. Selon moi, je ne suis pas un expert en question

 20   pénitentiaire, donc d'un point de vue général, j'aurais tendance à être

 21   d'accord pour dire que quelqu'un qui est enfermé en prison n'a pas le droit

 22   d'avoir à sa disposition des objets qui lui permettraient de s'infliger à

 23   lui-même des blessures, ou à d'autres, d'ailleurs.

 24   Q.  Merci. Vous avez parlé de chiffres minima. Est-ce que vous êtes au

 25   courant du rapport de M. Manning, qui a déterminé par analyse ADN le

 26   chiffre de 5 021, et qu'il y avait là un certain nombre de recouvrements,

 27   si bien qu'il a dû revoir à la baisse le chiffre exact pour le porter à 4

 28   017 en tout ?


Page 22431

  1   R.  Non, je n'étais pas au courant de ce rapport. Je ne l'ai pas eu. Je

  2   n'ai pas lu le rapport de M. Manning.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit le rapport de M. Manning.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Pouvons-nous avoir une référence, Monsieur

  5   le Président.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas quel est le numéro dans la liste

  7   65 ter, mais en B/C/S, c'est 0614-8656, en numéro de page ERN, jusqu'à la

  8   page 8 680, toujours en numéro ERN. Et donc, deuxième partie de cette

  9   synthèse, de ce résumé d'analyse de médecine légale remontant à 2007, M.

 10   Manning a écrit ce qui suit -- alors, si nous pouvions le voir à l'écran,

 11   ce serait encore mieux. Numéro ERN en B/C/S, je le répète, 0614 --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, M. Baraybar n'était

 13   pas au courant du rapport de M. Manning. Par conséquent, il n'y a aucun

 14   intérêt à présenter cela. Quelle est la question que vous souhaitez poser

 15   au témoin ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, peut-être que M. Baraybar n'est pas au

 17   courant de ce rapport, mais il est certainement au fait du nombre minimal,

 18   parce que c'est quelque chose qu'il a abordé et qui a été abordé par M.

 19   Manning également en 2007, après que M. Baraybar s'est penché sur cette

 20   question. Donc là, en 2007, des éléments nouveaux sont apparus. Je

 21   considère qu'il serait tout à fait approprié de présenter cela au témoin.

 22   Numéro 3936 de la liste 65 ter. C'est la deuxième page. Un instant. Je n'ai

 23   pas ceci. Voilà. C'est cela.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Alors, puisque vous avez étudié cette question du nombre minima,

 26   veuillez examiner, par exemple, le second paragraphe où il est question de

 27   responsabilité des exhumations de fosses communes et du transfert de ceci

 28   au gouvernement de Bosnie-Herzégovine par le TPIY, que la Commission


Page 22432

  1   internationale des personnes portées disparues a identifié ces corps par

  2   des analyses ADN et a procédé à une identification de 5 021 personnes.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, peut-on faire défiler vers le bas.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, c'est dans l'autre sens.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Alors, voyez-vous qu'il est écrit ici qu'ils ont retrouvé 758

  7   enregistrements d'analyse ADN individuels pour lesquels ils ignorent à qui

  8   ils correspondent, à quelle personne il faut les rattacher ? Par

  9   conséquent, il faudrait faire une soustraction, retrancher ce chiffre du

 10   total, n'est-ce pas ? Et à la page suivante, nous voyons ce qui a été fait,

 11   donc que les victimes liées à Srebrenica qui ont été identifiées au moyen

 12   d'analyses ADN et de restes retrouvés dans des fosses communes se montent à

 13   4 017.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pourriez-vous

 15   répéter. Les interprètes n'ont pas pu vous suivre.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, on le voit à l'écran. Les victimes

 17   liées à Srebrenica ont été identifiées par des analyses ADN dans les fosses

 18   communes, et leur nombre se monte à 4 017.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous conviendrez, Docteur Baraybar, qu'une analyse ADN est

 21   quelque chose d'irréprochable que lorsqu'elle est faite de façon exacte, ce

 22   n'est pas quelque chose qu'on peut remettre en question ?

 23   R.  Eh bien, toute analyse peut être remise en question, même une analyse

 24   ADN. Mais je serais d'accord avec vous, en tout cas dans le cadre de votre

 25   question, c'est quelque chose dont on ne peut pas vraiment contester le

 26   résultat.

 27   Q.  Peut-on avoir la page suivante. Nous n'avons pas besoin de nous étendre

 28   davantage sur ce sujet. Merci. Merci pour votre réponse, et j'espère que


Page 22433

  1   j'aurai l'occasion d'aborder ceci et d'obtenir des précisions auprès de

  2   l'auteur du document.

  3   Conviendrez-vous que dans la totalité de ces rapports, que ce soit par une

  4   approche anthropologique ou une approche médico-légale, en fait, nulle part

  5   la date de l'inhumation n'a pu être déterminée ?

  6   R.  Comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, oui, vous avez raison. En

  7   tout cas, pas par une pure analyse anthropologique de visu des restes

  8   humains.

  9   Q.  Merci. Je vous demande juste quelques instants.

 10   Docteur Baraybar, savez-vous qui est Dusan Janc ?

 11   R.  Son nom ne me dit rien, en tout cas.

 12   Q.  Mais je crois qu'il est l'un des enquêteurs du bureau du Procureur. En

 13   2009, ou à partir de 2009, vous n'avez absolument aucun accès aux documents

 14   nouveaux qui ont commencé à arriver à partir de cette année-là, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  Oui. Et je me rappelle avoir quitté en 2002 le TPIY.

 17   Q.  Merci.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas quel est le numéro de cote en D,

 19   mais je voudrais que l'on présente le document numéro 21024 de la liste 65

 20   ter au témoin. Alors, ce document porte la cote D1975.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Je vous prie de porter votre attention sur la partie qui est en bas de

 23   l'écran, 12 de ces individus, et cetera, on y voit -- enfin, il est

 24   question de la nécessité d'exclure un certain nombre d'individus de

 25   certains sites. Je ne vais pas en donner lecture. Je vous laisse lire vous-

 26   même.

 27   R.  Vous parlez du paragraphe numéro 3, 12 des individus ?

 28   Q.  Oui. Là où il est écrit concernant Kravica.


Page 22434

  1   R.  Oui. Très bien.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut faire défiler encore un

  3   peu vers le bas pour que vous puissiez lire le paragraphe qui commence par

  4   "Nevertheless" en anglais, "Néanmoins". "Néanmoins, au vu de…"

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Laissez le témoin lire.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai pu lire.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

  8   Karadzic ?

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que ces nouveaux éléments de 2009 ne complexifient pas encore

 11   plus les données du point de vue de la précision et de l'exactitude de ces

 12   dernières ?

 13   R.  Eh bien --

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne répondiez, Monsieur le

 15   Témoin.

 16   Monsieur Mitchell.

 17   M. MITCHELL : [interprétation] J'ai une copie de ce document sous forme

 18   papier, si cela peut aider le témoin.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais le témoin nous a dit l'avoir lu et

 20   j'ai estimé cela suffisant.

 21   Monsieur le Témoin, souhaitez-vous avoir une copie papier ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas la peine. Je ne peux pas

 23   vraiment vous donner une opinion quant à l'assertion de savoir si cela rend

 24   la situation plus complexe ou non, parce qu'on présente un rapport que je

 25   ne connais pas. Donc je vois des chiffres ici, il y a des individus

 26   originaires de Kravica, et puis une partie d'une enquête, mais je crois

 27   qu'ici on mélange des choses qui ne sont pas comparables. Il y a deux jeux

 28   de données différents. Et quels que soient les autres documents qui ont été


Page 22435

  1   utilisés pour rédiger ce document-ci, il faudrait que je puisse les

  2   comparer avec mes propres documents afin de voir si cela rend la situation

  3   plus complexe ou non. Mais là il s'agit d'un document de 2009, et pour moi,

  4   le dernier rapport remontait à 2004, donc je ne peux pas vraiment vous en

  5   dire plus.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, M. Janc va déposer,

  7   n'est-ce pas ?

  8   M. MITCHELL : [interprétation] En effet.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais je voulais demander au Dr Baraybar ce

 10   qu'il en était au vu de l'évolution que l'on observe à mesure que de

 11   nouveaux éléments nous parviennent, à partir du moment où lui-même est

 12   parvenu aux conclusions qui étaient les siennes.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Ces conclusions, Docteur, ne sont pas définitives, n'est-ce pas ?

 15   R.  Bien sûr que non. Si vous observez l'évolution de ce chiffre minimal,

 16   évidemment au fil des rapports, il change. Les rapports d'exhumation ont

 17   été transmis aux autorités locales bosniennes avant que l'on procède à

 18   certaines exhumations et aux analyses ADN, et suite à ces analyses, eh

 19   bien, on est parvenu à un nombre encore plus grand d'individus en tant que

 20   chiffre minimal. Donc je suppose que le chiffre auquel on est parvenu

 21   aujourd'hui est bien plus important que celui avec lequel nous avons

 22   travaillé. Et je n'ai jamais essayé de suggérer que les résultats figurant

 23   dans mes rapports pouvaient être considérés comme définitifs. Il s'agit

 24   d'un travail qui remonte à près de dix ans.

 25   Q.  Je vous remercie. Conviendrez-vous qu'au vu de ces résultats

 26   complémentaires du Dr Janc, nous avons une indication claire selon laquelle

 27   certaines des fosses se sont vu ajouter des corps ultérieurement ? Non

 28   seulement les sites ont été modifiés, mais il y a eu un apport ultérieur.


Page 22436

  1   Peut-être que si vous avez du mal à répondre, M. Mitchell pourrait vous

  2   remettre sa copie papier.

  3   R.  Je vais prendre le temps d'examiner cela en version papier. Mais je ne

  4   peux pas et je ne veux pas vous répondre sur une question que je ne connais

  5   pas. En tant que scientifique, je voudrais pouvoir consulter ce

  6   corrigendum, et je ne l'ai pas sur moi en ce moment. Donc, avant de pouvoir

  7   vous donner mon opinion quant aux faits, je voudrais pouvoir consulter le

  8   document original, si les Juges de la Chambre le permettent.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet. Et je vais vous demander de

 10   conclure, Monsieur Karadzic.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Eh bien, Docteur Baraybar, vous avez eu l'amabilité de bien vouloir

 13   avoir un entretien avec la Défense. Entre autres sujets que nous avons

 14   abordés, nous avons parlé de certaines conventions, certaines bonnes

 15   pratiques et même d'obligations des parties qui ont un intérêt à voir mener

 16   une enquête. Vous m'avez confirmé que le HCR avait adopté et promu des

 17   lignes directrices, ou un guide, en matière d'analyses de restes humains et

 18   que vous étiez au courant de l'existence d'une telle pratique. Donc le HCR,

 19   d'après vous-même, a fait cela en 2001, et cela a également été fait en

 20   Serbie, par la République de Serbie donc, au Kosovo. Il y a eu des échanges

 21   d'expertises entre les experts, et toutes les parties intéressées ont pu

 22   avoir accès aux analyses ou aux enquêtes concernées. Alors, est-ce que vous

 23   pourriez dire aux Juges quelle est cette pratique qui a été introduite,

 24   même si vous n'êtes pas en mesure de nous dire quel est le document qui

 25   précisait cela et qui introduisait cette pratique ?

 26   R.  Eh bien, juste pour être clair, hier nous avons parlé lors de

 27   l'entretien de deux jeux de documents. Le premier c'est le protocole de

 28   Minnesota qui a été publié par le Haut-commissaire aux droits de l'homme


Page 22437

  1   des Nations Unies. C'est un guide, et non pas une convention. C'est

  2   simplement un guide portant sur les bonnes pratiques en matière d'enquêtes

  3   sur les violations des droits de l'homme commises par des Etats contre

  4   leurs propres citoyens. Dans ce guide, on recommande l'impartialité et le

  5   recours à un organe indépendant pour les enquêtes sur ces types de crimes.

  6   Il y a une autre section concernant le traitement et l'examen des restes

  7   humains, tout comme la façon de procéder à l'exhumation de ces derniers et

  8   la façon de procéder à des autopsies lorsqu'on soupçonne qu'il y avait eu

  9   torture et mauvais traitement. Donc je crois pouvoir dire que pendant

 10   toutes ces années de notre activité, nous nous sommes conformés

 11   intégralement à ce qui est recommandé par le protocole du Minnesota.

 12   Mais puisque ce n'est pas une convention et que je ne suis pas

 13   juriste, je pense que je ne peux qu'en rester au niveau de réponse relevant

 14   du bon sens concernant l'applicabilité de ce document. Ensuite, je crois

 15   qu'il y a trois protocoles d'accord qui ont été signés entre la MINUK et le

 16   gouvernement serbe concernant les échanges d'experts et d'expertises et qui

 17   concernaient le droit d'accès aux prisons secrètes, qui concernaient le

 18   rapatriement des restes humains. Et je crois que le Pr Dunjic est bien au

 19   fait de ces protocoles d'accord parce qu'ils ont été appliqués. Je crois

 20   qu'ils l'ont -- alors, ils étaient appliqués lorsque j'étais au Kosovo afin

 21   de faciliter le rapatriement des corps au Kosovo, les corps des civils

 22   albanais, et de ces victimes civiles serbes, leur rapatriement en Serbie.

 23   Comme nous l'avons vu hier -- enfin, je sais que ces protocoles d'accord

 24   existent, mais il n'y a pas d'autres protocoles dont j'aurais connaissance

 25   qui disposeraient de tout autre type d'échanges ou qui imposeraient des

 26   dispositions particulières aux parties concernées.

 27   Q.  Mais vous avez dit qu'il était souhaitable que ce soit un organe

 28   indépendant qui procède aux enquêtes. Alors, est-ce que vous êtes d'accord


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  1   pour dire que les parties concernées ont au moins un droit, le droit

  2   d'avoir un statut d'observateur dans le cadre de ces enquêtes afin d'être

  3   en position de reconnaître ces enquêtes comme légitimes ?

  4   R.  Je voudrais juste corriger ce que vous venez de dire. J'ai dit que ce

  5   n'était pas moi, mais que c'était le protocole du Minnesota qui suggérait

  6   qu'une commission indépendante soit mise en place par tout Etat impliqué

  7   dans les meurtres de ses propres citoyens. Ce n'est pas tout à fait la même

  8   chose que ce que vous avez dit. Et je me rappelle que ce protocole du

  9   Minnesota a vu le jour principalement suite aux événements survenus en

 10   Amérique latine, je parle des meurtres et disparitions de citoyens des

 11   Etats d'Amérique latine. Manifestement, il s'agit d'une recommandation au

 12   caractère très général. Et il y a un autre protocole distinct concernant

 13   l'examen des restes humains qui a été mis en avant par le Haut-commissaire

 14   aux droits de l'homme. Et il y a un autre protocole qui porte sur le

 15   traitement de ces restes humains, qui est le fruit du travail du CICR. En

 16   tout cas, il s'agit de recommandations de bonnes pratiques. Et il n'y a pas

 17   de convention de quelque sorte que ce soit ayant un caractère contraignant.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre dernière question maintenant,

 19   Monsieur Karadzic.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Seriez-vous d'accord pour dire qu'il serait extrêmement utile et que

 23   cela faciliterait grandement la reconnaissance de ce type de rapport par la

 24   partie serbe si cette dernière, cette partie serbe, avait pu avoir accès et

 25   droit de regard sur les enquêtes conduites par le gouvernement bosnien,

 26   qu'on ne peut pas vraiment qualifier de partie désintéressée en la matière,

 27   contrairement à ce qui était le cas avec les enquêtes menées par les

 28   Nations Unies ?


Page 22439

  1   R.  Alors, je peux avoir une opinion personnelle. Mais en tout cas, en tant

  2   qu'expert, je n'ai pas d'opinion experte concernant ce qui pourrait ou non

  3   être une opinion subjective. Donc, quelle que soit mon opinion, cela n'a

  4   aucune incidence sur ma déposition.

  5   Q.  Eh bien, allez-y, livrez-nous votre opinion personnelle. Même si cela

  6   doit être la seule et unique fois où vous mettrez en avant votre opinion

  7   subjective, la Défense est tout à fait prête à l'accepter.

  8   R.  Eh bien, lorsque les résultats d'une enquête sont contestés, j'imagine

  9   qu'il convient évidemment d'obtenir toutes les précisions souhaitables et

 10   de jeter la lumière sur ces résultats. Le problème c'est que lorsque le

 11   sujet lui-même est controversé, lorsqu'on révèle les résultats d'une

 12   enquête ou qu'on communique aux parties les résultats de l'enquête, ces

 13   parties ont tendance à maintenir leur opinion initiale, quels que soient

 14   les éléments mis à jour. C'est quelque chose que, de façon assez

 15   regrettable, j'ai pu constater tout au long de ma pratique. Quel que soit

 16   l'Etat concerné, le conflit concerné. C'est mon opinion personnelle, en

 17   tout cas.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Docteur Baraybar, je vous remercie d'avoir

 19   accepté cet entretien avec la Défense et d'avoir déposé. Merci.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser,

 22   Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Je vous remercie. Alors, ceci

 24   met un terme à votre déposition, Monsieur Baraybar. Au nom de la présente

 25   Chambre de première instance ainsi que du Tribunal dans son ensemble, je

 26   souhaite vous remercier d'avoir bien voulu venir encore une fois à La Haye.

 27   Vous êtes maintenant libre de repartir. Et nous allons lever l'audience.

 28   A moins qu'il y ait d'autres sujets à porter à notre attention, nous


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  1   allons lever l'audience pour cette semaine avant de reprendre nos débats

  2   lundi prochain, à 9 heures, avec le Dr Riedlmayer.

  3   --- L'audience est levée à 14 heures 26 et reprendra le lundi 5 décembre

  4   2011, à 9 heures 00.

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